Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 14 février 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Audience de Règle 98 bis]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière, bonjour à

  7   tous. Veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin Popovic et

 10   consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame.

 12   Pour les besoins du compte rendu, tous les accusés sont là, et je

 13   pense que des équipes de la Défense sont au complet. L'Accusation, c'est M.

 14   McCloskey.

 15   Aujourd'hui, nous avons prévu de commencer par les arguments

 16   présentés dans le cadre du 98 bis, à commencer par la Défense évidemment.

 17   Compte tenu de l'ordonnance portant calendrier qui vous a été remise,

 18   on vous a fixé des délais, et on vous demande de ne pas dépasser ces

 19   délais, s'il vous plaît.

 20   Qui va commencer ?

 21   Maître Meek ?

 22   M. MEEK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 23   Nous allons répartir nos arguments. Je vais commencer et Me Ostojic va

 24   prendre la deuxième partie.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, certainement.

 26   Madame la Greffière, si vous pouviez commencer à mettre en place le

 27   compteur.

 28   Avant de commencer --

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  1   Monsieur McCloskey, y a-t-il des éléments de l'acte d'accusation qui,

  2   d'après vous, n'ont pas fait l'objet de preuve ou pour lesquels on n'a pas

  3   apporté des éléments de preuve, que vous souhaitez retirer ? Je vous pose

  4   cette question parce que dans cette éventualité évidemment nous pourrions

  5   faire accélérer la procédure.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous n'avons pas l'intention de

  7   retirer de chefs d'accusation, mais je pense que c'est quelque chose qui a

  8   déjà été évoqué -- un des paragraphes portant sur neuf corps à Potocari,

  9   nous n'avons pas apporté la preuve de cet élément-là, c'est ce dont je me

 10   souviens pour l'essentiel pour l'instant.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien.

 12   Maître Meek, vous allez commencer à 9 heures et huit minutes.

 13   M. MEEK : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges.

 14   Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.

 16   M. MEEK : [interprétation] Je salue mes collègues de l'Accusation, toutes

 17   les équipes de la Défense, tous les accusés. Je les salue.

 18   Je souhaite tout d'abord dire que j'ai eu l'honneur et le privilège de

 19   représenter les intérêts de Ljubisa Beara. Ceci sera peut-être la dernière

 20   fois que je vais m'adresser aux Juges de cette Chambre, et j'espère que ce

 21   que je dirai aujourd'hui vous permettra de mieux délibérer à la fin de ce

 22   procès.

 23   Maintenant, Madame, Messieurs les Juges, je souhaite évoquer un petit peu

 24   ce qui s'est passé dans ce prétoire et ce qui en est ressorti au fil des 20

 25   derniers mois, et d'après nous, nous estimons qu'il n'y a pas lieu de

 26   répondre des chefs d'accusation pour ce qui est de Ljubisa Beara.

 27   W.K. Clifford a dit un jour : "Il est toujours erroné partout ou pour

 28   quiconque de croire quelque chose sur la base d'éléments de preuve

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  1   insuffisants."

  2   Alors que les éléments de preuve présentés jusqu'à présent dans ce procès

  3   doivent être analysés à la lumière qui favorise le bureau du Procureur,

  4   avec tout le respect, nous avançons que tout juge de fait, de façon

  5   raisonnable, neutre et détachée, après avoir délibéré et analysé les

  6   éléments de preuve, peut en toute confiance constater que notre client,

  7   également connu sous le nom de Coquille Vide, que les éléments de preuve

  8   ont rempli cette coquille. En d'autres termes, pourquoi il n'y a pas

  9   d'éléments de preuve susceptibles de justifier une condamnation.

 10   Nous savons, d'après le compte rendu, que cela fait des mois et des

 11   années déjà que Ljubisa Beara était une coquille vide. Nous avons constaté

 12   cela après que les deux parties dans l'affaire Blagojevic en 2004 -- M.

 13   Peter McCloskey, qui était premier substitut du Procureur, comme nous le

 14   savons tous, a été impliqué de très près dans les affaires de Srebrenica,

 15   Krstic et Blagojevic, a déclaré devant cette Chambre le 29 septembre 2004

 16   lors de son réquisitoire aux pages 12 377 à 12 378 :

 17   "Beara est une coquille vide. Jusqu'au moment où Mladic lui donne des

 18   ordres, il n'a pas le droit de commander des troupes et il n'a pas d'hommes

 19   placés sous ses ordres."

 20   Et 29 mois plus tard dans le cadre de ce procès, le 28 février 2007,

 21   à la page 7 927, lignes 24 et 25, le même Procureur a dit devant cette

 22   Chambre, devant vous, que Beara est une coquille vide, tout à fait, à moins

 23   qu'il ne reçoive les ordres de son commandant, le général Mladic.

 24   Madame, Messieurs les Juges, nous estimons que, de façon explicite et

 25   implicite, une promesse a été faite par l'Accusation, ils nous ont dit

 26   qu'ils allaient présenter des éléments de preuve qui démontreraient que

 27   cette coquille vide, Ljubisa Beara, cette coquille vide serait remplie par

 28   des éléments de preuve du côté de l'Accusation et qui justifieraient

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  1   d'ordres directs donnés par le général Ratko Mladic. Madame, Messieurs les

  2   Juges, tels sont les propos du Procureur, et nous estimons qu'ils admettent

  3   que la thèse de l'Accusation en ce qui concerne Ljubisa Beara repose sur

  4   des ordres qui auraient été donnés, ordres mystérieux du reste. Nous

  5   demandons quand, comment, pourquoi, devant quels témoins, et quelles pièces

  6   ont été présentées à cet effet, et comment cette promesse a été honorée. Et

  7   nous disons que ceci ne figure à aucun moment du compte rendu.

  8   Donc nous arguons du fait que jusqu'à présent le compte rendu ne fait

  9   figurer aucun ordre de ce type de Ratko Mladic à Ljubisa Beara, que ce soit

 10   de façon directe, de façon substantielle ou autre.

 11   Ljubisa Beara est accusé devant ce Tribunal de huit chefs d'acte

 12   d'accusation conformément à l'acte d'accusation modifié et consolidé. Le

 13   conseil principal, Me Ostojic, va aborder dans quelques instants les chefs

 14   d'accusation tels qu'ils figurent dans cet acte d'accusation. Le simple

 15   fait que nous n'allons pas plaider chaque chef d'accusation ne signifie

 16   nullement, d'une manière ou d'une autre, que nous pensons que le bureau du

 17   Procureur est exact ou, en tout cas, a répondu à la charge de la preuve qui

 18   s'inscrit dans les Règlements de procédure et de preuve. En tant que Juges

 19   professionnels, nous savons que vous êtes tout à fait au courant de cette

 20   position-là.

 21   La première chose qui est tout à fait claire d'après tous les éléments de

 22   preuve présentés par l'Accusation jusqu'à présent, c'est que le compte

 23   rendu ne présente aucun élément de preuve en vertu de quoi Ljubisa Beara

 24   était, d'une manière ou d'une autre, dans la région de Srebrenica ou à

 25   Srebrenica entre le 1er juillet et le 12 juillet 1995, hormis la déposition

 26   du témoin Zlatan Celanovic. Sa déposition, Madame, Messieurs les Juges, n'a

 27   pas été corroborée par tout autre élément de preuve, y compris les éléments

 28   de preuve présentés par l'analyste présenté par le bureau du Procureur,

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  1   Richard Butler qui, le 23 janvier 2008, dans cette Chambre, aux lignes 17 à

  2   24, a déclaré en résumé que d'après lui il n'y avait aucun élément de

  3   preuve pour étayer la présence de Ljubisa Beara à ces dates-là à cet

  4   endroit-là, page 2 230 [comme interprété] du compte rendu d'audience.

  5   De surcroît, Madame, Messieurs les Juges, ce témoin, M. Celanovic, n'était

  6   même pas sûr de pouvoir confirmer la présence de l'accusé à ces dates-là et

  7   à cet endroit-là. A supposer que le témoin Celanovic n'était pas un de ces

  8   menteurs éhontés que nous a décrits M. McCloskey, j'avance et nous

  9   avançons, Madame, Messieurs les Juges, que la simple présence de Ljubisa

 10   Beara à un endroit donné ne constitue en rien un élément de preuve portant

 11   sur une inconduite ou de sa culpabilité, de sa complicité et encore moins

 12   de culpabilité de tout comportement criminel.

 13   De surcroît, Madame, Messieurs les Juges, aucun élément de preuve n'a été

 14   apporté devant cette Chambre qui indiquerait que Ljubisa Beara s'est trouvé

 15   dans les environs ou à Potocari entre le 11 et le 13 juillet 1995. Madame,

 16   Messieurs les Juges, pas un seul élément de preuve n'a été présenté qui

 17   indiquerait que Ljubisa Beara se trouvait à Bratunac à l'hôtel Fontana

 18   pendant ces réunions essentielles entre Mladic et le Bataillon néerlandais

 19   et, plus tard, entre Mladic et les officiers de haut rang de la VRS, y

 20   compris le général Krstic, le général Zivanovic, le colonel Jankovic, des

 21   dirigeants des autorités civiles, les officiers du MUP, y compris Vasic,

 22   des dirigeants civils, Deronjic, les représentants du Bataillon néerlandais

 23   et les représentants de la communauté musulmane. Madame, Messieurs les

 24   Juges, suite à ces réunions, il y a eu l'évacuation des civils et c'est ce

 25   qui a fait l'objet d'un accord. L'accord a été conclu entre les

 26   représentants des parties sur ces réunions qui négociaient à l'hôtel

 27   Fontana, les 11 et 12 juillet 1995.

 28   Je dois dire que nous avons passé beaucoup d'heures à en débattre et

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  1   beaucoup de remue-méninges avant de parvenir à cette décision et de vous

  2   adresser en ces termes dans le cadre du 98 bis. Nous nous sommes convenus

  3   que nous devions présenter cet argument dans le cadre de cet article. Après

  4   avoir examiné la jurisprudence de ce Tribunal, nous avons tout à fait

  5   compris que notre avantage se présentait à nous dans le cadre de cet

  6   article 98 bis et permettait en outre à l'Accusation de comprendre la thèse

  7   de la Défense et de comprendre en fait les défaillances dans la

  8   présentation de leurs propres éléments de preuve. Donc nous arguons du

  9   fait, avec tout le respect que nous devons aux Juges de la Chambre, que

 10   tout ceci mis ensemble va aider le bureau du Procureur ou pourrait aider le

 11   bureau du Procureur à présenter ses éléments en réplique, bien que je peux

 12   dire qu'ils auraient pu citer à la barre les mêmes témoins que dans la

 13   phase de l'interrogatoire principal. Ayant pris la décision de présenter

 14   cet argument --

 15   Pendant la présentation des moyens à charge, il y a un certain nombre

 16   d'éléments sur lesquels je me suis penché, non seulement les éléments ayant

 17   trait à mon client, mais aux autres accusés. Nous nous demandons pourquoi

 18   le bureau du Procureur et le Procureur de ce Tribunal, qui a été impliqué

 19   dans les deux affaires à Srebrenica, comment en toute bonne foi, on peut

 20   modifier la thèse de l'Accusation pour davantage répondre à ses besoins. De

 21   surcroît, nous nous demandons pourquoi le bureau du Procureur est autorisé

 22   à le faire. Et ce qui est encore plus important, nous nous demandons

 23   comment les Juges de la Chambre peuvent déterminer quelle thèse

 24   l'Accusation fait valoir en toute honnêteté.

 25   Au cours des deux premiers procès, la thèse de la Défense consistait à

 26   dire, d'après ce que j'ai compris, que la sécurité était séparée, et donc

 27   il y avait une chaîne de commandement séparée et c'est en fait l'élément

 28   coupable. Néanmoins, comme je l'ai compris, l'Accusation dans ces cas-là a

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  1   adopté une position opposée en indiquant que très simplement les défenses

  2   dans Krstic et Blagojevic était erronées. Les Juges de la Chambre et les

  3   Chambres d'appel sont tombés d'accord avec cela dans ces cas-là.

  4   De surcroît, nous nous demandons vraiment, Madame, Messieurs les Juges,

  5   pourquoi un éminent confrère comme M. McCloskey a, depuis  le début de ce

  6   procès, voire même avant ce procès lors de la conférence 65 ter le 13

  7   juillet 2006, à la page 316, lignes 5 à 7, déclaré au compte rendu comment

  8   il avait présenté cet argument. M. McCloskey :

  9   "Je préfèrerais qu'elle vienne me voir avant de faire de telles

 10   déclarations, des déclarations qui portent sur mon intégrité."

 11   Un commentaire innocent fait par le conseil Julie Condon et la réponse de

 12   M. McCloskey.

 13   Je me demande comment il se fait que le Procureur, tout en indiquant

 14   l'intégrité et rejetant la notion de remise en cause du caractère éthique,

 15   de la véracité, de son honnêteté et de son caractère proprement juridique,

 16   comment on peut arguer du fait que mon client, Ljubisa Beara, alias

 17   Coquille Vide, constitue un acteur majeur dans les événements qui ont été

 18   jugés dans l'affaire Krstic et  Blagojevic. Madame, Messieurs les Juges,

 19   par rapport à cette question-là, nous avons beaucoup réfléchi et j'espère

 20   que les Juges de la Chambre feront de même. D'après nous, Monsieur le

 21   Président, l'idée que l'Accusation change sa thèse d'une affaire à une

 22   autre, lorsque les faits exacts sous-jacents sont les mêmes, nous estimons

 23   que ceci est impropre et nous est tout à fait étranger.

 24   Madame, Messieurs les Juges, tout au cours de ce procès, nous nous sommes

 25   demandés pourquoi le bureau du Procureur n'a jamais utilisé l'expert

 26   graphologique dont il dispose dans ce Tribunal, n'a jamais examiné le

 27   journal de bord des officiers de Zvornik, pièce 377, qui comportait des

 28   annotations du style : "Colonel Beara, veuillez transmettre le message,"

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  1   page 127 de cette pièce, et je cite : "Le colonel Beara va venir," page

  2   129, dans la version anglaise. "Beara qui doit être appelé 155, page 136

  3   [comme interprété], version anglaise. Et encore une fois : "Beara va

  4   venir," page 137.

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé) Et on se

 19   demande, Madame, Messieurs les Juges, comment il se fait que personne au

 20   bureau du Procureur, avec tous les éléments dont ils disposent, toutes les

 21   ressources dont ils disposent, analystes et autres, pourquoi ils n'ont pas

 22   pris la peine de faire analyser l'écriture et pourquoi ils n'y ont pas

 23   pensé.

 24   Madame, Messieurs les Juges, nous nous demandons pourquoi le bureau du

 25   Procureur n'a jamais présenté des témoins ou des témoins suspects de

 26   planches photographiques, à l'exception d'un seul témoin, lorsqu'il s'est

 27   agi de notre client. Le colonel Beara n'a pas non plus fait de présentation

 28   de suspects à témoin, et nous estimons qu'un incident au cours duquel une

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  1   photographie a été montrée à un témoin, Me Ostojic va évoquer ceci plus en

  2   détail, que ceci n'a aucune valeur juridique.

  3   Nous nous demandons pourquoi les témoins du bureau du Procureur qui

  4   prétendent avoir vu Ljubisa Beara donnent tous la même description vague,

  5   une description, Madame, Messieurs les Juges, qui pourrait correspondre à

  6   bon nombre d'officiers de la VRS à l'époque. Un simple examen du film de

  7   Zivanovic peut tout à fait confirmer cela, cette soirée qui fêtait la

  8   retraite.

  9   Nous nous demandons pourquoi à certaines auditions de témoin le statut du

 10   témoin a été modifié. Ce dernier passe du statut de témoin à celui de

 11   suspect. Ensuite, après que le témoin ait donné des éléments incriminants à

 12   propos de Ljubisa Beara, son statut est repassé à celui de témoin.

 13   Madame, Messieurs les Juges, nous nous demandons de surcroît pourquoi il y

 14   avait des conversations qui n'ont pas été consignées au compte rendu avec

 15   les témoins suspects qui ont certainement modifié leur récit, et nous

 16   pensons qu'ils ont modifié leurs récits pour que ceux-ci concordent mieux

 17   avec cette nouvelle théorie ou thèse de l'Accusation.

 18   Toutes ces auditions que je viens d'évoquer, nous pensons, et nous n'avons

 19   pas pu le plaider avec succès, sont une violation de l'article 43 des

 20   éléments de preuve du Règlement de procédure et de preuve.

 21   Si Ljubisa Beara est l'homme qui prétend être un planificateur, quelqu'un

 22   qui était proche d'eux ou qui faisait partie du cercle d'initiés de Mladic,

 23   comment se fait-il que Ljubisa Beara n'est vu sur aucune vidéo, aucune

 24   séquence vidéo, aucune photographie en présence de Mladic, Krstic,

 25   Zivanovic, Vasic et les autres ? -- Pourquoi ceci est-il le cas ? C'est la

 26   question que nous nous posons. Madame, Messieurs les Juges, si Ljubisa

 27   Beara est l'homme qu'ils prétendent, pourquoi Ljubisa Beara n'a-t-il pas

 28   assisté à la fête de la retraite du général Zivanovic en compagnie de

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  1   Mladic et des autres officiers de haut rang de la VRS.

  2   Madame, Messieurs les Juges, nous nous demandons pourquoi les enquêteurs du

  3   bureau du Procureur ont jeté ou détruit les notes qu'ils ont prises sur le

  4   terrain, en particulier les notes d'un entretien qui a duré quatre jours

  5   avec le Témoin PW-168, le témoin phare de l'Accusation, à une époque où il

  6   était toujours suspect. Cet enquêteur a gardé ces notes pendant deux ans

  7   environ, comme l'indique le compte rendu, jusqu'au moment du départ de ce

  8   Tribunal, moment auquel il a jugé bon de les détruire.

  9   Le bureau du Procureur vous dira que le Témoin PW-168 est un témoin

 10   crédible. Nous considérons, avec tout le respect que nous vous devons, que

 11   le Témoin PW-168 est un témoin menteur. Il n'y a aucun doute de cela. Il ne

 12   faut pas se leurrer, comme l'Accusation l'a fait, par ses mensonges et

 13   déceptions.

 14   Heureusement ou malheureusement, j'ai grandi entouré par des juristes, des

 15   juges et des hommes politiques. C'est certainement une mauvaise

 16   combinaison, mais ainsi, dès un âge très précoce, j'ai appris ce qu'est la

 17   loi. Dans ce processus, j'ai toujours pensé qu'il existe ce qui est juste

 18   et ce qui est injuste, et qu'il était injuste de supposer que la personne

 19   accusée de crimes est coupable, qu'il était injuste de ne pas permettre à

 20   l'accusé le droit à avoir un procès équitable et public et l'aide effective

 21   d'un conseil. Mon père m'a appris aussi de ne pas croire quoi que ce soit,

 22   mis à part ce que j'ai vu, ou lu, ou entendu moi-même.

 23   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, on m'a appris aussi que

 24   les faits mauvais constituent l'application de la loi mauvaise. Cette

 25   réalité, je ne l'ai pas tout à fait comprise jusqu'au début de ma pratique

 26   d'avocat qui a commencé en 1979. Personne qui a suivi ce procès, le procès

 27   Blagojevic, ou Krstic aussi, ou qui a même lu l'acte d'accusation ici ne

 28   peut contester qu'il y a eu des faits mauvais dans cette affaire.

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  1   Tout au long de ce procès, à plusieurs reprises, on m'a rappelé qu'il faut

  2   rester optimiste, que l'espoir est éternel, et je prie que ce qui découle

  3   des faits mauvais dans cette affaire ne sera pas une mauvaise application

  4   de la loi.

  5   Je dois avouer, en disant la vérité avec tout le respect que je vous dois,

  6   que je suis déçu de la manière dont ces procès ont été menés devant ce

  7   Tribunal. Je crois que l'histoire jugera nous tous dans ces procédures, et

  8   je crois qu'à la fin, la question ne sera pas de savoir si les accusés ont

  9   été déclarés coupables ou pas coupables, ni si les peines rendues étaient

 10   les peines les condamnant, mais la question est de savoir si ces accusés,

 11   en tant qu'êtres humains, comme nous tous, ont reçu un procès équitable

 12   avant leur condamnation à passer la vie derrière les barreaux pendant des

 13   années. La liberté est notre bien le plus précieux et je vous demande qui

 14   ne n'échangerait un an de salaire pour avoir de la liberté pendant cette

 15   même période. Je vous propose de réfléchir à cela lors de l'analyse de la

 16   déposition des témoins de l'Accusation afin de déterminer si ceci peut

 17   corroborer une condamnation. A notre avis, tel n'est pas le cas.

 18   Mon éminent collègue, Peter McCloskey, vous a dit, le 24 août 2006,

 19   dans ce même prétoire, qu'au cours des dépositions, dix ans après les

 20   événements, ils ont pu constater qu'il y a plus de gens qui sont prêts à

 21   parler, plus de personnes qui vont directement mettre en cause l'un ou

 22   l'autre des accusés. Il a également dit qu'à la fin de la liste des témoins

 23   du bureau du Procureur se trouve une longue liste des membres de la VRS et

 24   du MUP. Mais il faut tenir attention à ce qu'il a dit ici : "Beaucoup de

 25   témoins ne vous diront pas toute la vérité. Beaucoup d'entre eux vont aller

 26   dans les deux sens, alternativement." Il a dit, cependant, qu'il était

 27   certain que vous alliez être en mesure d'entrevoir la vérité, grâce à ces

 28   témoins. Et vous a dit : "…et en réalité, même dans les mensonges, vous

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  1   pouvez trouver la vérité."

  2   A notre avis, même une demie vérité est un mensonge.

  3   Puis, mon éminent collègue M. McCloskey vous a dit : "Je pense que

  4   nous pouvons retenir quelque chose de ce témoin, même si c'est un menteur

  5   absolu, je pense que nous pouvons entrevoir quelque chose à travers son

  6   mensonge."

  7   Nous, nous entrevoyons quelque chose de différent à travers les

  8   mensonges dont parlait M. McCloskey dans ses propos liminaires. Nous

  9   entrevoyons que ces menteurs ne sont pas des témoins crédibles et que ce

 10   serait une violation de la justice internationale de fonder une

 11   condamnation sur ces dépositions menteuses.

 12   Ces témoins du bureau du Procureur, beaucoup d'entre eux ne sont pas

 13   venus ici afin de déposer, mais afin de tester un mensonge. Nous

 14   considérons qu'ils l'ont certainement fait. Maintenant, nous demandons à la

 15   Chambre, lors de son analyse des dépositions des témoins du bureau du

 16   Procureur, de tenir compte du fait que le bureau du Procureur a proposé des

 17   témoins qui allaient mentir et l'Accusation le savait. Cette pratique,

 18   encore une fois, n'est pas celle que connaît mon co-conseil et moi-même.

 19   Nous considérons que dans la plus grande partie des systèmes juridiques

 20   ceci est totalement interdit.

 21   Le bureau du Procureur a fait venir des témoins avec lesquels ils ont

 22   négocié une condamnation moins grave, ils ont négocié de leur donner de la

 23   liberté. Il faut pas oublier le fait que lorsque vous mangez un plat si

 24   vous tombez sur quelque chose de pourri, vous n'allez pas juste jeter la

 25   partie pourrie et continuer à manger le reste. Si vous réfléchissez de

 26   manière rationnelle, vous allez jeter l'ensemble du plat. Or, l'Accusation

 27   souhaite que vous rejetiez juste la partie pourrie, les mensonges pourris

 28   contenus dans les dépositions de leurs témoins et continuer à écouter dans

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  1   l'espoir d'arriver à la vérité. Je crois que ceci est illogique, absurde et

  2   non fondé.

  3   Lors de l'analyse des éléments de preuve proposés par les témoins de

  4   l'Accusation, même les témoins les plus favorables pour la thèse de

  5   l'Accusation, il faut tenir compte du fait que beaucoup d'entre eux n'ont

  6   pas dit tout à fait où menaient et aboutissaient ces mensonges. Nous

  7   considérons que ceci correspond à la catégorie dont a parlé M. McCloskey

  8   dans ses propos liminaires. Par exemple, entre autres, PW-168, PW-102, le

  9   Témoin Celanovic, PW-161, 162, Bircakovic, Babic, Peric, ce sont que

 10   quelques exemples.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez. Pour le compte rendu

 12   d'audience, est-ce qu'on peut épeler de manière exacte le nom "Celanovic" ?

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, certainement. Il ne faudrait

 14   pas l'écrire avec "S" mais un "C".

 15   M. MEEK : [interprétation] Il ne s'agit là que de quelques exemples. A

 16   notre avis et d'après notre analyse, ces témoins n'étaient ni plus ni moins

 17   que des éléments permettant de fabriquer une thèse erronée. Nous vous

 18   demandons simplement, lors de vos délibérés et de vos analyses, de prendre

 19   en considération ces arguments. Au moment où vous allez prendre en

 20   considération les dépositions de témoins et les analyser, ne pas oublier

 21   qu'il existe une tendance de montrer les gens du doigt bien souvent.

 22   Dans l'histoire, les tribunaux ont toujours eu tendance à faire preuve de

 23   la précaution en prenant compte la déposition des complices. Dans une

 24   affaire qui a eu lieu en Angleterre en 1680, le juge compétent a dit :

 25   "L'accusé nous dit d'écouter les leçons de l'histoire pour comprendre

 26   qu'une négociation corrompue peut aboutir à une déposition fausse.

 27   Vraiment, il est difficile d'enlever la vie d'une personne sur la base de

 28   la déposition d'un témoin qui est en train de sauver sa propre vie."

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  1   Ça, c'était en 1680.

  2   Nous considérons que les criminels qui vont faire et dire n'importe

  3   quoi pour obtenir ce qu'ils veulent, ils vont le faire, surtout s'ils

  4   veulent éviter les problèmes pour eux. Et cette volonté de faire n'importe

  5   quoi inclut aussi le fait de raconter des choses au sujet de leurs amis et

  6   de leurs parents, mais aussi de mentir, de procéder aux faux témoignages,

  7   de fabriquer des éléments de preuve de toutes pièces, de demander aux

  8   autres de corroborer leurs mensonges avec d'autres mensonges. Nous avons vu

  9   cela à de nombreuses reprises dans cette affaire. Ils trichaient tous ceux

 10   avec qui ils étaient en contact, y compris et surtout l'Accusation.

 11   La pratique judiciaire de toute nation civilisée veut qu'un procès

 12   serve à rechercher la vérité, mais il ne s'agit pas d'une vérité achetée,

 13   d'une vérité négociée, mais d'une vérité sans faille. Peut-être parfois

 14   nous devons vivre avec les plaidoyers de culpabilité négociés, mais il ne

 15   faut pas donner un cachet disant : "Vous allez être payés pour votre

 16   déposition" ou "Vous allez être payés conformément au degré dans lequel

 17   vous arriverez à convaincre, même si à première vue il s'agira là de

 18   mensonges."

 19   Nous croyons que la véracité est la base de toute société civilisée

 20   et nous considérons qu'il est temps que ce Tribunal international annonce

 21   fermement et courageusement qu'il cherche la vérité, et que ceci ne peut

 22   pas se réconcilier avec l'achat virtuel de fausses dépositions.

 23   Avec tout le respect, nous considérons que ces témoins qui ont menti

 24   peuvent servir seulement si la Chambre de première instance ignore

 25   totalement la simple vérité, c'est-à-dire que dans la vie il est possible

 26   de négocier presque tout. Vous pouvez négocier afin d'acheter des maisons,

 27   des villas, des œuvres d'art, afin de faire beaucoup de choses, mais il y a

 28   des choses que vous ne pouvez pas négocier, ni acheter. Vous ne pouvez pas

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  1   acheter ni négocier la sagesse. Vous ne pouvez pas acheter ni négocier la

  2   justice, car sinon c'est l'injustice que vous obtenez. Vous ne pouvez pas

  3   acheter ni négocier l'amour, car sinon ce n'est pas l'amour que vous aurez.

  4   Vous ne pouvez pas négocier ni acheter la vérité, car sinon, ce n'est pas

  5   la vérité que vous obtenez. Ces dépositions sont entourées d'un nuage de

  6   soupçon. Vous ne pouvez pas acheter ni négocier une déposition, et c'est ce

  7   que l'Accusation, à notre avis, a fait dans cette affaire, notamment avec

  8   leur témoin vedette PW-168, et c'est la raison pour laquelle leur thèse est

  9   aussi faible qu'elle l'est à ce stade.

 10   Dans un prétoire en Angleterre, nous pouvons lire les mots suivants : "Dans

 11   ce lieu de justice, la Couronne ne perd jamais, car lorsque la liberté d'un

 12   Anglais est préservée contre les faux témoins, c'est la Couronne qui

 13   gagne."

 14   J'ai appris il y a bien des années que l'Accusation ne perd jamais. Mon

 15   père m'a expliqué cela car si la personne est condamnée, l'Accusation

 16   gagne. Mais si la personne est acquittée, elle gagne aussi car la justice

 17   est rendue. Donc les Procureurs ne gagnent jamais, car ils gagnent toujours

 18   de toute façon.

 19   En août 2006, le 21 août, Carla Del Ponte a dit lors de ses propos

 20   liminaires :

 21   "Les victimes qui ont survécu aux crimes de Srebrenica demandent la

 22   justice, non pas la vengeance."

 23   Nous disons que nous sommes d'accord avec ce sentiment, que les victimes

 24   qui ont survécu demandent la justice et non pas la vengeance, et nous

 25   considérons qu'une condamnation pour la culpabilité n'est pas

 26   nécessairement la fin de tout, et n'est pas ce que l'Accusation devrait

 27   chercher à obtenir. Les victimes, à notre avis, ne souhaitent pas voir un

 28   innocent condamné, car ceci serait aussi une injustice aux victimes.

Page 21239

  1   Encore une fois, condamner un homme innocent ne rendrait pas service aux

  2   victimes de Srebrenica et, de toute façon, comme Mme Del Ponte nous a dit,

  3   ceci ne serait pas un pas important vers la cause, la cause de l'espoir. Et

  4   nous considérons que ceci ne ferait que contribuer aux souffrances des

  5   victimes qui ont survécu.

  6   Si l'on passe en revue le nombre de condamnations erronées à travers le

  7   monde, nous pouvons constater que les victimes de ces condamnations

  8   erronées étaient victimes des problèmes suivants : des identifications de

  9   témoins oculaires peu précises, des dénonciateurs non fiables, des

 10   omissions de la part de la police ou de l'Accusation de communiquer les

 11   éléments à charge. Nous avons vu également certaines expertises médico-

 12   légales erronées dans le cadre de nos contre-interrogatoires, et nous

 13   croyons que ceci pourra prouver non pas seulement les mathématiques

 14   appliquées de manière erronée mais aussi les arguments portant sur les

 15   analyses ADN erronées.

 16   S'agissant des condamnations erronées, à Faculté de la Loi à Chicago,

 17   Illinois, lorsqu'il a été question des fausses dépositions fournies par des

 18   dénonciateurs ou par de faux témoins; on parle des identifications de

 19   témoins incorrectes; des identifications fausses lorsqu'on essaie de

 20   pointer quelqu'un du doigt; on parle également des éléments de preuve

 21   médico-légale peu fiables.

 22   Je souhaite dire, pour terminer, qu'il a été un honneur et un privilège

 23   pour moi de représenter Ljubisa Beara.

 24   Et avant de terminer, je souhaite partager avec vous quelques propos du

 25   juge Jackson, qui était juge du tribunal des Etats-Unis, l'un des

 26   architectes de Nuremberg, peut-être que vous avez déjà entendu cela, mais

 27   je vais le redire :

 28   "Si on essaie d'avoir des procès tenus en bonne foi, c'est une autre chose.

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  1   Toutes nos expériences nous disent qu'il existe des choses qui ne peuvent

  2   pas être établies par le biais d'un procès judiciaire. Les tribunaux jugent

  3   les affaires, mais les affaires jugent les tribunaux aussi. Il ne faut

  4   jamais traîner un homme devant un tribunal avant que ce qui s'appelle un

  5   tribunal crée une procédure judiciaire, si vous n'êtes pas prêt à le

  6   libérer si sa culpabilité n'est pas prouvée."

  7   Pour terminer, je souhaite remercier tous les membres du personnel du

  8   Greffe, des services de sécurité de l'ONU, des cabines techniques, et

  9   notamment les interprètes pour avoir toléré mon accent et mon débit, pour

 10   m'avoir toléré, et merci de votre patience. Je souhaite également remercier

 11   mon conseil principal, John Ostojic, pour ses instructions, sa direction et

 12   ses conseils. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble, deux ans, en

 13   train de réfléchir et de débattre, c'était un voyage intéressant, long et

 14   étrange.

 15   Je souhaite simplement pour terminer citer les propos d'un grand américain,

 16   Martin Luther King, qui a dit :

 17   "Injustice où que ce soit est une menace à la justice partout. Nous sommes

 18   attrapés dans un réseau de mutualité, et nous sommes simplement liés à

 19   notre destin. Et ce qui affecte l'un, nous affecte tous."

 20   Il a écrit cela dans une lettre de la prison de Birmingham le 16 avril

 21   1963.

 22   Merci beaucoup, c'était un véritable plaisir d'être ici.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que je dois conclure que vous

 24   partez, Maître Meek ?

 25   M. MEEK : [interprétation] Pardon ?

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que vous voulez dire que vous

 27   allez partir ?

 28   M. MEEK : [interprétation] Tout est possible, mais nous pouvons parler de

Page 21241

  1   cela à un stade ultérieur, merci.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  3   Maître Ostojic. Vous commencez à 9 heures 51.

  4   L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquent qu'ils n'ont pas reçu de texte

  5   écrit.

  6   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci. Monsieur le Président, nous souhaitons

  7   soumettre que, malgré les règles rigides de l'article 98 bis, sur la base

  8   des éléments de preuve présentés, ce Tribunal devrait acquitter notre

  9   client notamment pour ce qui est des chefs d'accusation 7 et 8 du deuxième

 10   acte d'accusation modifié et consolidé. Je vais vous dire pourquoi.

 11   En guise de contexte, je peux dire que nous avons vu des allégations,

 12   entendu des promesses, et nous avons vu et entendu des éléments de preuve,

 13   et maintenant nous savons et considérons avec tout le respect que les

 14   promesses n'ont pas été tenues et les allégations n'ont pas corroborées.

 15   L'allégation selon laquelle M. Beara avait planifié, organisé, aidé,

 16   surveillé ou facilité ou aidé de quelque autre manière que ce soit à la

 17   transportation des civils que ce soit à Srebrenica ou à Zepa, n'a pas été

 18   prouvée. Ljubisa Beara n'est pas responsable criminellement, donc il est

 19   nécessaire de l'acquitter.

 20   J'espère que je pourrai traiter de certains éléments de preuve avec vous.

 21   Tout d'abord, je souhaite que l'on traite de Zepa et des allégations

 22   contenues à la fois dans le chef 7 portant sur le transfert forcé et le

 23   chef 8, déportation.

 24   Au fond, je pense que dix témoins nous ont parlé du déplacement de la

 25   population à Zepa. Les questions principales que l'on doit se poser en

 26   déterminant si M. Beara y a participé : tout d'abord, à quel moment ce

 27   transfert a eu lieu ? Au paragraphe 71 de l'acte d'accusation, on suggère

 28   que ce déplacement, ce transfert des gens de Zepa a commencé le 25 juillet

Page 21242

  1   1995. Le bureau du Procureur, son analyste, M. Butler, indique que c'était

  2   le 26, et il a admis qu'il l'a dit d'après ses souvenirs.

  3   La question critique suivante concernant Zepa est de savoir combien de

  4   temps ce déplacement de civils a duré. Ceci a duré, comme Butler l'a

  5   suggéré, un jour, deux jours au maximum, autrement dit ça devait se

  6   terminer le 28 ou le 29 juillet. Lorsque vous passez en revue les éléments

  7   de preuve, vous constaterez qu'il n'y a pas d'éléments de preuve portant

  8   sur l'implication de Ljubisa Beara, ni d'après des documents, des ordres,

  9   des conversations interceptées, des registres ou des journaux personnels,

 10   suggérant qu'il était près de Zepa ou dans la zone de Zepa au moment du

 11   début du déplacement de la population civile. Les seuls éléments de preuve

 12   que même M. Butler pouvait trouver et qui suggéraient de façon lointaine

 13   une implication de M. Beara par rapport à Zepa, étaient trois conversations

 14  interceptées qui auraient capturées avec sa voix, deux, le 1er août, et une,

 15   le 2 août 1995. Nous allons traiter de cela tout à l'heure, mais s'agissant

 16   de la planification du déplacement de la population, M. Butler, le 23

 17   janvier 2008, de manière précise à la page 20 217, lignes 13 à 20, a dit :

 18   "Je n'ai pas d'éléments de preuve indiquant que lui, M. Beara, a participé

 19   à cela."

 20   S'agissant de l'organisation d'aide, surveillance ou le fait de faciliter

 21   le déplacement de ces civils de Zepa, encore une fois nous nous tournons

 22   vers M. Butler, et à la même page, 20 217, lignes 21 à 24, le 23 janvier

 23   2008, il a dit :

 24   "Je vous donne la même réponse. Je n'ai pas eu d'information. Par

 25   conséquent, vous savez, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a eu

 26   un manque d'information."

 27   Butler est d'accord pour dire qu'il n'y a pas eu d'éléments de preuve du

 28   tout indiquant que Ljubisa Beara aurait participé au transfert forcé ou

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  1   déportation de la population civile à Zepa. En réalité, je pense que ceci

  2   n'est pas contesté. Il n'y a aucun élément de preuve indiquant ou

  3   déterminant que Ljubisa Beara aurait participé aux événements de Zepa.

  4   Butler lui-même à la page 20 213 dit :

  5   "Je ne crois pas que nous avons des conversations interceptées ou d'autres

  6   informations concernant Ljubisa Beara et où il était pendant cette période,

  7   notamment du 16 juillet jusqu'au 31 juillet 1995." Ce sont les lignes 9 à

  8   10.

  9   Nous n'avons pas eu besoin de demander à M. Butler ce qu'il voulait dire

 10   par "tout autre information", mais logiquement nous pouvons comprendre

 11   qu'il voulait dire pas de conversations interceptées, pas de documents, pas

 12   d'ordres, pas de registres, pas de journaux personnels, pas de témoins

 13   bosniaques ou musulmans, même pas de menteurs que l'Accusation faisait

 14   venir de temps en temps, pas d'éléments de preuve. Pas d'éléments de

 15   preuve, à notre avis, ça veut dire qu'il est nécessaire d'acquitter notre

 16   client sur ce point.

 17   A travers leurs témoins, l'Accusation a effectivement admis qu'il n'y a pas

 18   eu d'éléments de preuve portant sur Ljubisa Beara s'agissant de ces deux

 19   éléments de preuve [comme interprété]. Si le transfert forcé ou la

 20   déportation de la population de Zepa a commencé le 25 ou le 26 juillet et

 21   s'est terminé le 28 ou le 29, il est clair que l'Accusation par le biais de

 22   ses témoins a admis qu'il n'y a pas eu d'éléments de preuve contre M.

 23   Beara, s'agissant de ces deux chefs d'accusation liés à Zepa. Par

 24   conséquent, la loi, même si elle est rigide et pas souple, demande que

 25   Ljubisa Beara soit acquitté s'agissant de ces deux chefs d'accusation.

 26   La Chambre a demandé une question au cours des contre-

 27   interrogatoires, vous vous êtes posés des questions concernant l'entreprise

 28   criminelle conjointe. Puisqu'il n'y a pas eu d'éléments de preuve, de

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  1   documents, de conversations interceptées ou de témoins qui établiraient

  2   même un lien lointain entre Ljubisa Beara et sa participation au

  3   déplacement des civils de Zepa du début à la fin, cette discussion à notre

  4   avis n'est pas pertinente, n'est pas nécessaire et n'est pas bienvenue.

  5   Qu'en est-il des conversations interceptées ? Les trois conversations

  6   interceptées, nous les avons identifiées, datent du 1er août et du 2 août

  7   1995. S'agissant de ces deux conversations -- ou plutôt trois conversations

  8   interceptées, il est clair qu'elles ont été enregistrées longtemps après

  9   que le transfert forcé ou la déportation avait été planifié, organisé,

 10   achevé et facilité. Vous ne sauriez et ne devriez, avec tout le respect que

 11   je vous dois, les prendre en considération en ce qui concerne les chefs

 12   d'accusation 7 et 8 de l'acte d'accusation modifié et consolidé.

 13   Toutefois, ne sachant pas ce que fera la Chambre de première

 14   instance, si nous supposons que la Chambre de première instance accepte ces

 15   conversations enregistrées comme ayant un lien quelconque avec le mouvement

 16   et le transport de la population civile, nous estimons qu'un examen très

 17   soigneux de ces conversations enregistrées ne révèle pas ou ne traduit un

 18   comportement criminel, et en fait appuie le fait que M. Beara, s'il était

 19   l'un de ceux qui parlaient dans ces conversations interceptées, s'est

 20   comporté de façon tout à fait légale, licite et professionnelle en

 21   discutant de la question des prisonniers de guerre et en essayant de

 22   s'assurer qu'ils avaient été enregistrées par la Croix-Rouge internationale

 23   ainsi que d'autres organisations.

 24   En résumé, en ce qui concerne Zepa, il y a seulement trois

 25   conversations enregistrées qui pourraient même être prises en

 26   considération. Je suggère qu'elles ne devraient pas l'être, mais que si

 27   elles sont prises en considération, en fait elles sont à décharge et ne

 28   prouvent pas que Ljubisa Beara à aucun moment ait participé au mouvement ou

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  1   au transfert de la population civile de Zepa, et par conséquent une fois

  2   encore nous demandons respectueusement que le chef d'accusation 7,

  3   transfert forcé, et le chef d'accusation 8, déportation, en ce qui concerne

  4   Zepa, soient rejetés.

  5   Dans l'intérêt de gagner du temps, je voudrais maintenant passer au

  6   déplacement de population de Srebrenica. L'allégation est faite au chef

  7   d'accusation numéro 7, transfert forcé. Selon nous, les paragraphes clés

  8   que vous devriez examiner, notamment, sont plus particulièrement les

  9   paragraphes 61 à 64. Je pense que les mêmes questions que nous avons posées

 10   concernant Zepa sont également pertinentes pour Srebrenica. Quand est-ce

 11   que le transport ou le mouvement de population a commencé ? Le mouvement de

 12   la population civile de Srebrenica a commencé le 12 juillet et a pris fin

 13   le 13 juillet 1995. C'est incontesté, et nous pouvons nous référer aux

 14   faits admis en vertu d'un jugement, plus particulièrement le 203 et le 219.

 15   La question essentielle que nous avons posée de temps à autre par le

 16   truchement de témoins était de savoir s'il s'agissait bien de transfert

 17   forcé ou d'une évacuation. Nous soutenons qu'il s'agissait d'une évacuation

 18   étant donné la présence, l'aide et la participation du Bataillon

 19   néerlandais notamment, et non pas d'un transfert forcé. Nous ne nous

 20   fondons pas seulement sur la présence, l'aide et la participation du

 21   Bataillon néerlandais. Nous pensons qu'il y a d'autres facteurs qui

 22   pourraient aider encore la Chambre de première instance à parvenir à la

 23   conclusion juste qu'il ne s'agissait pas d'un transfert forcé, mais plutôt

 24   d'une évacuation.

 25   Si nous examinons les positions de M. Kingori, qui était récemment avec

 26   nous, il est venu du Kenya, et plus particulièrement si on regarde la pièce

 27   à conviction P00493, il est dit clairement que les habitants de Zepa -- je

 28   veux dire, pardon, de Srebrenica, 80 à 85 % étaient eux-mêmes des réfugiés,

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  1   prenant en considération un autre facteur selon lequel des hommes, des

  2   Musulmans de Bosnie, tant militaires que non-militaires ont volontairement

  3   abandonné les civils et ont formé une longue colonne cherchant à traverser

  4   une sombre forêt pendant une journée avant que l'évacuation n'ait commencé.

  5   L'analyse est de savoir s'il s'agissait d'évacuation ou de transfert forcé.

  6   Nous suggérons que le mouvement des civils de Srebrenica était une

  7   évacuation, non pas un transfert forcé, et que nous devons la replacer dans

  8   son contexte, dans un tableau complet pour ce qui est de ce que désiraient

  9   ou ont décidé les civils de Srebrenica à l'époque. Etant donné que plus de

 10   80 % ou davantage même de la population de Srebrenica, en juillet 1995,

 11   était des réfugiés ou des personnes déplacées, ils n'ont jamais considéré

 12   que Srebrenica était leur ville, leur chez eux, mais plutôt un lieu

 13   temporaire et intermittent de résidence. Etant donné que les militaires

 14   musulmans de Bosnie et les hommes non-militaires, pour une raison ou pour

 15   une autre, ont abandonné volontairement l'enclave, et que les civils ne

 16   pouvaient et n'auraient pas pu décider autre chose que de partir pour

 17   permettre cette évacuation afin qu'elle puisse commencer avec le Bataillon

 18   néerlandais.

 19   D'une façon générale, c'est ce mouvement de population civile à Srebrenica.

 20   Pour établir un lien de façon précise avec Ljubisa Beara, indépendamment de

 21   ce que vous pourriez décider, même si vous décidez qu'il y avait

 22   suffisamment d'éléments de preuve pour conclure à un transfert forcé, à ce

 23   stade de la procédure, nous suggérons respectueusement néanmoins que vous

 24   devez acquitter Ljubisa Beara de ce chef d'accusation. Pourquoi ? Les

 25   éléments de preuve qui ont été portés et présentés, à la fois du point de

 26   vue des vidéos, des documents, des comptes rendus des témoins eux-mêmes,

 27   donc nous avons vu où étaient les participants, nous avons vu où ils se

 28   sont réunis, et nous savons, d'après les témoins, ce qui a été dit lors de

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  1   ces réunions, avant l'évacuation proprement dite, ou le transfert, ou le

  2   mouvement de population de Srebrenica.

  3   Où se trouvait Mladic en ce qui concerne les événements qui ont conduit au

  4   mouvement de population de Srebrenica ? Nous avons vu Mladic à Bratunac, à

  5   l'hôtel Fontana, à trois reprises au moins. Nous avons vu Mladic à

  6   Srebrenica. Nous avons vu Mladic à Potocari et nous avons vu Mladic à

  7   Sandici. A aucun moment Mladic ne s'est trouvé près ou même en présence de

  8   Ljubisa Beara à l'un quelconque de ces endroits et à ces moments-là -- en

  9   ces lieux et à ces heures-là.

 10   Nous faisons valoir que ce sont là des faits concrets que la Chambre devra

 11   prendre en considération lorsqu'elle aura à apprécier la question de la

 12   culpabilité de M. Beara en ce qui concerne ce chef d'accusation qui porte

 13   sur le mouvement de population à Srebrenica. Jamais, au grand jamais, n'y

 14   a-t-il eu d'éléments de preuve de quelque sorte que ce soit qui puisse

 15   permettre de donner à penser, ou de déduire, ou d'établir que Ljubisa Beara

 16   ait été prêt, proche, ou présent des lieux où les décisions qui auraient

 17   été prises d'évacuer ou de transférer de force la population ont été

 18   prises.

 19   Butler a lui-même montré ce que valait sa déposition sur cette question

 20   lorsque nous lui avons demandé très précisément : "Avez-vous un élément de

 21   preuve quelconque selon lequel M. Beara aurait été à Bratunac et à l'hôtel

 22   Fontana ?" C'est un exemple classique, à mon avis, de la façon dont

 23   l'Accusation et son ancien employé analyste a pu faire des allégations non

 24   fondées, des interprétations déformées, des conclusions erronées. Lorsque

 25   j'ai demandé à M. Butler, le 23 janvier 2008, de confirmer en fait qu'il

 26   n'y avait aucun élément de preuve qui situait M. Beara à l'hôtel Fontana à

 27   Bratunac lors d'une quelconque de ces trois réunions du 11 ou du 12 juillet

 28   1995, M. Butler aurait pu être honnête. Au lieu de cela, il a décidé

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  1   d'inventer les choses au fur et à mesure qu'il déposait. Pour commencer, il

  2   a dit, à la page 20 232, lignes 6 à 14 :

  3   "Je crois qu'il y a certains éléments qui le placent lui, M. Beara, à

  4   l'hôtel Fontana, à savoir qu'il y avait une chambre pendant la période

  5   pertinente, mais il n'est pas inscrit comme étant l'un des participants à

  6   l'une quelconque des réunions."

  7   M. Butler est allé jusqu'au point de dire non seulement qu'il croyait que

  8   Ljubisa Beara se trouvait à l'hôtel Fontana, mais il a suggéré et déclaré

  9   de façon explicite qu'il avait une chambre dans cet hôtel. Alors, en posant

 10   des questions supplémentaires, il a semblé que M. Butler, apparemment, se

 11   rendait compte de son erreur, et pour la deuxième fois, au lieu d'être tout

 12   simplement honnête, il a choisi de rester dans le vague. Il a dit, à la

 13   page 20 232, lignes 20 jusqu'à 21 :

 14   "Je ne me rappelle pas si le colonel Beara était ou non l'un des officiers

 15   qui ont été énumérés dans cette liste. Je veux dire, nous avons ces comptes

 16   rendus, et je ne me rappelle simplement pas pour le moment s'il était l'un

 17   des officiers qui avaient une chambre ou non à cet endroit-là."

 18   On voulait dire l'hôtel Fontana.

 19   Effectivement, comme nous le savons, sur la base de la conversation que

 20   j'ai eue avec mon confrère après cette déposition et sur la base d'un

 21   examen du compte rendu et des documents de l'hôtel Fontana, M. Beara ne

 22   figurait pas sur la liste des participants à cette réunion et M. Beara n'a

 23   jamais eu de chambre pendant tout ce mois, à un moment quelconque, à

 24   l'hôtel Fontana à Bratunac.

 25   Celles de ces réunions qui étaient essentielles, à notre avis, comme le

 26   suggère l'Accusation, c'était lorsque la planification et l'organisation

 27   ont été faites pour procéder au transport de la population civile depuis

 28   Srebrenica. Sans aucune équivoque, Ljubisa Beara, je le suggère, n'était

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  1   pas présent à l'une quelconque de ces réunions. Il n'était pas présent ni

  2   même dans le secteur lorsque ces décisions ont été prises ou misent en

  3   œuvre.

  4   Lorsque nous regardons les allégations qui sont faites dans l'acte

  5   d'accusation, je n'ai aucun doute, et je suis sûr que le bureau du

  6   Procureur reconnaîtra que Ljubisa Beara n'a participé en aucune manière à

  7   un déplacement forcé de la population civile de Srebrenica. Ljubisa Beara

  8   n'est même pas mentionné,il n'y est fait aucune référence aux paragraphes

  9   61, 62 ou 64 du chef d'accusation numéro 7 qui vise le transfert forcé dans

 10   la deuxième acte d'accusation consolidé et modifié. Il y a ces quatre

 11   paragraphes, j'en ai mentionné trois. En ce qui concerne le paragraphe 63,

 12   il y est question de M. Beara. Le paragraphe 63, à mon avis, ne relève pas

 13   du chef d'accusation numéro 7 de ce document. Il ne traite pas des civils,

 14   il traite des militaires musulmans de Bosnie, et d'hommes non-militaires de

 15   la colonne. Les Musulmans de Bosnie de la colonne qui sont partis, qui sont

 16   partis de leur propre gré, et qui n'étaient pas, ni théoriquement, ni en

 17   pratique, déplacés de force.

 18   Si la Chambre de première instance devait conclure, je dirais

 19   respectueusement, à tort que les hommes de Bosnie de la colonne avaient été

 20   effectivement transférés de force hors de Srebrenica, néanmoins, à notre

 21   avis, la Chambre devrait acquitter M. Beara des allégations du chef

 22   d'accusation 7 de l'acte d'accusation. La question demeure : est-ce que le

 23   bureau du Procureur, est-ce que l'Accusation a prouvé, par les témoins tels

 24   que ceux qu'elle a produits, comme Egbers, que Ljubisa Beara se trouvait à

 25   Bratunac, comme cela est allégé ? Pourquoi n'ont-ils pas fait déposer

 26   [inaudible] qui se trouvait également là, et qu'ils avaient entendu

 27   interroger et de qui ils ont pu recueillir les déclarations ? Pourquoi

 28   n'ont-ils pas appelé à déposer d'autres membres du 65e Régiment de

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  1   protection motorisée ? Pourquoi n'ont-ils pas appelé d'autres témoins du

  2   Bataillon néerlandais qui se trouvaient avec M. [inaudible] lors des dates

  3   où il soutient avoir vu M. Beara à Nova Kasaba ?

  4   Outre le fait de ne pas avoir réussi à prouver ou à présenter des éléments

  5   de preuve pour corroborer la prétendue présence de M. Beara à Nova Kasaba,

  6   la déposition d'Egbers n'est rien de plus qu'une spéculation, des

  7   hypothèses, des conjectures et des erreurs d'identification. La description

  8   était erronée, la période trop courte pour qu'il puisse apprécier

  9   suffisamment. Egbers lui-même n'a jamais confirmé ni même laissé entendre

 10   que Ljubisa Beara avait participé à un transport forcé qui aurait eu lieu

 11   des hommes Musulmans de Bosnie capturés à Nova Kasaba le 14 juillet 1995.

 12   Point n'est besoin de dire si nous examinons tous les éléments de preuve

 13   présentés par l'Accusation sur ce point, qu'il faut encore réexaminer trois

 14   autres témoins, trois autres dépositions. L'un, Milorad Bircakovic; le

 15   deuxième, (expurgé); et le troisième là encore, Egbers. Si nous constations

 16   un cadre temporel entre ces trois témoins, la Chambre verra qu'on ne peut

 17   pas accepter leurs dépositions parce que ces dépositions se contredisent.

 18   Chacun soutient avoir vu M. Beara et prétend avoir une réunion avec lui le

 19   14 juillet 1995. Bircakovic soutient que c'est approximativement à 8 heures

 20   30 à Zvornik. (expurgé) soutient que c'était approximativement vers

 21   9 heures ou 9 heures 30 à Bratunac. Egbers soutient que c'était à 9 heures

 22   30 ou 10 heures à Nova Kasaba. Ceci est impossible.

 23   La Chambre devrait et effectivement doit rejeter la déposition de ces trois

 24   témoins sur la base du fait qu'ils ne sont pas crédibles et qu'on ne peut

 25   pas les croire.

 26   En dépit de ce que je crois être ici des carences patentes, des

 27   insuffisances évidentes, la Chambre de première instance pourrait à ce

 28   stade considérer néanmoins que la déposition peut être crédible. Je

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  1   voudrais néanmoins respectueusement -- elle devrait à mon avis néanmoins

  2   acquitter M. Beara parce que le déplacement de la population civile des

  3   Musulmans de Bosnie de Potocari et de Srebrenica a été achevé dans la

  4   soirée du 13 juillet vers 20 heures en 1995.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Faites très attention lorsque vous

  6   mentionnez des noms. Pas seulement vous, Maître Ostojic, mais également

  7   tous les autres, s'il vous plaît, assurez-vous que vous ne citez pas des

  8   noms de témoins protégés, que vous ne donnez pas leur nom.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, je me suis donné beaucoup de mal pour

 10   essayer de l'éviter, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En fait ça devrait être facile

 12   maintenant. Vous devriez avoir une liste à portée de la main. En tous les

 13   cas, poursuivons. Nous allons procéder à une expurgation du compte rendu.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Nous pensons que les témoignages, les dépositions de ces  témoins, qu'il

 16   s'agisse de Bircakovic, du Témoin PW-162 et d'Egbers n'ont pas été

 17   corroborées par les dépositions d'autres témoins. Tout ceci s'est passé le

 18   jour qui avait suivi l'achèvement des mouvements de population civile de

 19   Srebrenica. Ces trois personnes, nous pensons, il est impossible de

 20   suggérer qu'ils aient seulement vu M. Beara au moment en question. Il n'y a

 21   eu absolument personne d'autre qui a vu M. Beara que ces trois personnes.

 22   Est-il possible qu'il ait pu se déplacer d'un point au point suivant et au

 23   troisième endroit dans un délai aussi bref, et néanmoins rencontrer ces

 24   personnes pendant qui dirait, je ne sais pas, dix minutes jusqu'à 30

 25   minutes ? Je suggère que si nous regardons tout simplement une carte, vous

 26   verrez que c'est tout à fait impossible.

 27   Aucun des paragraphes qui concernent le chef d'accusation 7, transfert

 28   forcé, paragraphes 61, 62, 63 et 64 ont été démontrés et, par conséquent,

Page 21252

  1   l'acquittement devrait être prononcé et est justifié dans le cas de M.

  2   Beara.

  3   Votre Chambre a été priée de temps à autre, en ce qui concerne l'entreprise

  4   criminelle commune, d'examiner la question, et l'Accusation, comme cela

  5   figure dans l'acte d'accusation, a choisi de plaider selon la troisième

  6   forme, à savoir l'entreprise criminelle commune élargie. Nous pensons que

  7   les dépositions et les éléments de preuve lorsque vous les aurez à les

  8   apprécier, non pas maintenant mais lorsque vous examinerez les éléments de

  9   preuve à ce stade dans la mesure où il s'agit de M. Beara, ce qu'ils ont

 10   prouvé c'est peut-être une culpabilité collective, mais ils n'ont pas

 11   prouvé qu'il y a eu une entreprise criminelle commune ou participation

 12   quelconque à cette entreprise criminelle commune en ce qui concerne M.

 13   Beara.

 14   Nous avons essayé d'établir, en posant un certain nombre de questions, la

 15   chronologie des faits et gestes de M. Beara. Personne, comme nous l'avons

 16   entendu, ne l'a remarqué y compris leur analyste qui pourtant semble avoir

 17   examiné à fond les éléments de preuve pour essayer de voir s'il y avait une

 18   culpabilité de l'accusé, on n'a pu trouver aucun élément de preuve du 1er

 19   jusqu'au 12 juillet 1995. Il n'a pu trouver aucun élément de preuve en ce

 20   qui concerne M. Beara, du 17 au 31 juillet 1995.

 21   Lorsque nous avons discuté de ce troisième aspect de l'entreprise

 22   criminelle commune élargie, nous savons de quoi nous parlons si nous

 23   regardons toutes les conversations écoutées et interceptées pour déterminer

 24   si, en l'occurrence, M. Beara savait ou aurait dû savoir à l'époque, vous

 25   pouvez voir qu'il n'y a que deux possibilités pour nous en fait à examiner.

 26   Si vous acceptez ou si vous croyez l'appréciation du bureau du Procureur,

 27   l'analyste et l'interprétation en ce qui concerne les conversations

 28   interceptées concernant M. Beara, les deux possibilités logiques sont les

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  1   suivantes : premièrement, que M. Beara n'avait aucune connaissance des

  2   événements qui se déroulaient à l'époque. Si nous prenons, par exemple, la

  3   conversation 1177 de la liste 65 ter qui est censée être une conversation

  4   avec Zivanovic ou que Beara serait en train d'appeler Zivanovic le 15

  5   juillet 1995, la question que M. McCloskey aurait dû posée était : pourquoi

  6   est-ce que Ljubisa Beara, s'il savait ce qui se passait à ce moment-là

  7   aurait-il appelé le général Zivanovic ? M. Beara aurait dû savoir, comme

  8   tout un chacun, qu'au moment où il y avait un remplacement au commandement

  9   du Corps de la Drina du général Zivanovic par le généralement Krstic. Si

 10   c'était bien Beara qui était l'un des correspondants comme ils le

 11   soutiennent, M. Beara n'en avait aucune connaissance. Et si ce n'était pas

 12   M. Beara, alors pourquoi est-ce que nous devrions utiliser cette

 13   conversation enregistrée du tout pour déterminer s'il avait participé ou

 14   non ou s'il avait une connaissance quelconque d'une entreprise criminelle

 15   commune ou de la participation à un comportement criminel sur cette base.

 16   Nous avons examiné la question et nous avons également constaté qu'il y

 17   avait un autre élément qui avait trait à l'exception 155. Or, M. Butler,

 18   dans une tentative pour essayer d'être sincère et précis avec nous, a dit

 19   qu'il s'agissait "d'une petite anomalie", lorsque nous lui avons demandé

 20   comment M. Beara, si effectivement comme il l'allègue, dépendait de l'état-

 21   major général et si c'était bien M. Beara qui appelait dans cette

 22   conversation, comment pouvait-il ne pas savoir ce qui est dit au point 155

 23   de l'état-major général ? Butler appelle ça une petite anomalie, mais en

 24   fait c'est du langage de l'Accusation pour dire qu'il y a un doute

 25   raisonnable, et ça il ne pouvait pas nous le dire.

 26   Si M. Beara n'était pas l'un des correspondants de la conversation

 27   interceptée à ce moment-là, vous ne devez pas prendre en considération ces

 28   conversations enregistrées contre lui, comme le liant à une entreprise

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  1   criminelle commune et par rapport à la troisième variante.

  2   Un autre exemple, bien que nous en ayons de nombreux à présenter, c'était

  3   encore le document 1178 de la liste 65 ter. Ce que personne ne voulait

  4   discuter dans cet interrogatoire c'était que M. Beara aurait été avec un

  5   homme du nom de Lukic. L'Accusation soutient que c'était un homme du nom de

  6   Milan Lukic de Visegrad qui n'était pas un commandant et non pas un

  7   commandant adjoint, mais simplement un simple soldat d'un bataillon ou

  8   d'une brigade. Et si nous regardons un peu plus près la conversation

  9   enregistrée, vous constaterez que la personne qui a été enregistrée dans

 10   cette conversation, qui dit que c'est M. Beara, dit : "Lukic est ici avec

 11   le conducteur, le chauffeur." Je dois dire qu'il y a là deux éléments que

 12   nous devrions examiner ici : un, il est impossible qu'un soldat tel que

 13   Milan Lukic, de 23 ans à l'époque, voire même plus jeune, ait été son

 14   propre conducteur. Il n'était ni commandant, ni commandant adjoint, chargé

 15   de quoi que ce soit, ni même d'un groupe de soldats. Donc, l'Accusation

 16   présente ces suggestions, mais ne réussit pas à les expliquer de façon

 17   développée.

 18   Dans le peu de temps qu'il nous reste, je vais essayer de vous parler de M.

 19   Celanovic qui, je crois, était un témoin non protégé. M. Celanovic a déposé

 20   ici et a soutenu qu'il avait vu M. Beara à Bratunac ou près de Bratunac.

 21   Cette déposition, selon nous, n'est pas fiable. D'après ce que je comprends

 22   au titre de l'article 98 du Règlement, vous devez déterminer si vous devez

 23   le croire et voir s'il y a lieu d'examiner les choses sous le jour le plus

 24   favorable à l'Accusation. Il n'y a aucun élément de preuve qui puisse

 25   corroborer ceci en ce qui concerne M. Celanovic, et si vous lisez sa

 26   déposition il suggère que fondamentalement il avait eu une rencontre avec

 27   M. Beara, et qu'en fait il a fait une promenade et qu'à un moment donné il

 28   n'y avait pas d'assistants, pas de collègues, pas d'autres soldats ou

Page 21255

  1   membres de la Brigade de Bratunac. M. Celanovic était en principe en train

  2   de se promener dans la ville. Il aurait inspecté apparemment des

  3   prisonniers de guerre, ils étaient en train, paraît-il, de prévoir où les

  4   prisonniers de guerre iraient ensuite. Il n'y a rien qui corrobore que M.

  5   Beara ait été là au moment suggéré par M. Celanovic.

  6   Est-ce que la ville était vide ? Je suis désolé d'utiliser un tel terme,

  7   parce que je sais que mon confrère est très sensible à cela. Est-ce que la

  8   ville était vide ou sans habitant, désolée ? Non, bien sûr que non. Il nous

  9   suggère qu'il y avait des cars, des bus, qu'il y avait là un grand nombre

 10   de soldats, de sous-officiers. Ceci nous pouvons d'ailleurs vérifier

 11   d'après différents témoins. Donc personne autre que Celanovic n'aurait vu

 12   M. Beara comme étant là.

 13   Même si votre Chambre accepte et croit M. Celanovic, indépendamment du fait

 14   que sa déposition était vague et, à mon avis, illogique et en fait

 15   véritablement peu crédible, compte tenu des circonstances qu'il a décrites,

 16   nous pensons que cette rencontre de toute façon n'implique pas une

 17   culpabilité criminelle en ce qui concerne M. Beara. Voici la raison de cela

 18   : si nous nous rappelons sa déposition, il a dit que la conversation a été

 19   brève et précise. Cette conversation, à tous égards, concernait la

 20   sélection et l'interrogation de prisonniers de guerre. Il n'y a pas eu de

 21   conversation sur la question de faire autre chose que ce qui était

 22   légalement prescrit à la fois d'après les lois de l'ex-Yougoslavie et de la

 23   VRS, ainsi que ce qui est indiqué dans les conventions de Genève pour le

 24   traitement des prisonniers de guerre.

 25   Donc, dans un sens comme dans un autre, si nous acceptons la

 26   déposition de M. Celanovic, bien que je ne pense pas parce que nous pensons

 27   que M. Beara n'était pas là au moment où il le prétend, néanmoins, ceci ne

 28   donne pas le moindre élément de preuve pour l'un quelconque des chefs

Page 21256

  1   d'accusation ou allégations de mon confrère qu'il a affirmés contre M.

  2   Beara. Nous nous centrons effectivement sur le chef d'accusation numéro 7

  3   avec cette déposition, et nous pensons que même si vous acceptez ce que dit

  4   Celanovic, vous devez néanmoins encore acquitter Ljubisa Beara pour ce chef

  5   d'accusation.

  6   Il y a encore deux brefs aspects que je souhaiterais exposer. Il y a

  7   eu très peu d'identifications, d'identifications véritables faites

  8   correctement par le bureau du Procureur. L'une de celles dont nous avons

  9   connaissance, auxquelles ils ont procédé, et ceci était avec le témoin dont

 10   je comprends que c'était en audience publique, Drazen Erdemovic. En ce qui

 11   concerne Drazen Erdemovic, mon confrère et moi-même avons été en mesure de

 12   parvenir --

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allez-y.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Il y a eu quelques confusions avec d'autres

 15   dépositions, d'autres témoins à cet égard.

 16   En ce qui concerne Drazen Erdemovic, vraiment nous nous concentrons sur la

 17   ferme militaire de Branjevo et Pilici. Mon confrère et moi-même sommes

 18   parvenus à un accord à cet égard, et nous l'avons fait le 7 mai 2007. Si on

 19   regarde l'accord qui a été fait, la Chambre constatera que Drazen Erdemovic

 20   ne se rappelle pas avoir identifié ou avoir vu M. Beara, alors que d'autres

 21   soutiennent qu'il aurait pu être là. Mais ce qui est important de noter

 22   c'est l'énergie déployée par l'Accusation pour essayer de confirmer la

 23   présence de M. Beara. Ils ont entendu de M. Erdemovic qu'il avait vu cette

 24   personne, lieutenant-colonel ou un colonel sur la télévision de la BBC

 25   alors qu'il était en prison. Immédiatement, on a envoyé quelqu'un là-bas,

 26   on a obtenu un exemplaire de l'enregistrement, des copies supplémentaires

 27   de cet enregistrement, qui lui ont été montrées, et il n'a pas confirmé

 28   qu'il s'agissait de M. Beara.

Page 21257

  1   Par la suite, pour la première fois, on lui a montré une photo de M. Beara,

  2   qui était annexée à une pièce ou qui était annexée à nos écritures du 7 mai

  3   2007, et M. Erdemovic a confirmé à ce moment-là que cette personne qui

  4   était sur cette photo était bien M. Beara et n'était pas la personne qu'il

  5   avait vue à un moment quelconque, que ce soit à Branjevo à la ferme

  6   militaire ou à Pilici.

  7   Nous avons choisi --

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Juste pour confirmer et que les choses

  9   soient bien claires, je crois qu'il est important que M. Erdemovic n'a

 10   jamais dit qu'il s'agissait d'un colonel. Il a toujours dit "lieutenant-

 11   colonel."

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez.

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui.

 14   La Chambre a entendu la déposition d'autres témoins de l'Accusation qui ont

 15   dit qu'ils ne savaient pas si c'était un lieutenant-colonel ou un colonel

 16   par rapport à ce qu'ils ont vu. Quant à savoir si Erdemovic avait dit que

 17   c'était un colonel ou un lieutenant-colonel, je pense que l'Accusation a

 18   cherché à impliquer M. Beara en montrant qu'il était présent à cet endroit,

 19   mais qu'ils n'auraient pas montré cette photo de M. Beara s'ils n'avaient

 20   pas tout au moins pensé ou voulu penser ou souhaité penser qu'il s'agissait

 21   de M. Beara. Ils ne lui ont pas montré cette photo. M. Erdemovic l'a

 22   rejetée. Ils ne l'ont pas fait pour l'un quelconque des autres témoins qui

 23   ont été présentés à la Chambre et pour lesquels on soutient qu'ils auraient

 24   rencontré M. Beara.

 25   Nous avons choisi, Monsieur le Président, d'isoler de façon sélective en ce

 26   qui concerne les chefs d'accusation 7 et 8 de nos plaidoiries, mais nous ne

 27   suggérons aucunement qu'ils aient été prouvés ou qu'ils répondent à la

 28   charge de la preuve en ce qui concerne les six autres chefs d'accusation.

Page 21258

  1   Nous demandons que vous utilisiez votre pouvoir discrétionnaire pour

  2   décider si les autres chefs d'accusation peuvent être également rejetés, et

  3   nous pensons que tel est le cas.

  4   Nous pensons très fermement que si votre Chambre constate bien quelles

  5   étaient les chronologies à la fois de l'évacuation et du mouvement de

  6   population à Zepa, ainsi que l'évacuation et le mouvement de la population

  7   civile de Srebrenica, vous constaterez que Ljubisa Beara, non seulement

  8   n'était même jamais près de ces secteurs ni n'a participé à aucune des

  9   réunions visant à planifier ou organiser une telle évacuation, un transfert

 10   forcé ou une déportation.

 11   Je vous remercie de nous avoir écouté, de nous avoir donné la possibilité

 12   de plaider devant vous, et nous pensons que les éléments de preuve se

 13   passeront de commentaires et que pour ces deux chefs d'accusation ils

 14   seront rejetés dans la mesure où il s'agit de M. Beara.

 15   Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur Ostojic.

 17   Nous allons maintenant suspendre la séance. J'ai permis qu'on dépasse un

 18   petit peu l'horaire.

 19   Qui plaidera ensuite ? Oui. Monsieur Bourgon ?

 20   M. BOURGON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Alors, suspension de séance

 22   pendant 25 minutes à commencer de maintenant.

 23   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 24   --- L'audience est reprise à 11 heures 04.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Maître Bourgon. Vous commencez à

 26   11 heures 02.

 27   M. BOURGON : [interprétation] Plaise à la Cour. Bonjour, Monsieur le

 28   Président. Bonjour Madame, Messieurs les Juges. Bonjour chers confrères et

Page 21259

  1   consoeurs.

  2   En général, mes collègues de l'Accusation sont difficiles à suivre.

  3   Néanmoins, je vais tenter de faire en sorte que mes arguments soient tout

  4   autant intéressants et brefs.

  5   Monsieur le Président, l'Accusation a terminé la présentation de ses moyens

  6   le 6 février, et j'ai l'honneur de m'adresser aux Juges de la Chambre

  7   aujourd'hui, conformément à l'ordonnance qui a été rendue le 29 novembre

  8   2007. Je vais en venir droit au fait : mon but aujourd'hui est de demander,

  9   avec tout le respect que je vous dois, que Drago Nikolic, que je représente

 10   ici dans cette affaire, qu'il soit acquitté aux titres des chefs 7 et 8,

 11   ainsi que du chef 2, conformément à l'article 98 bis. Mes arguments

 12   aujourd'hui ne seront pas présentés pour une durée plus longue de 90

 13   minutes, comme ceci a été autorisé par les Juges de la Chambre.

 14   Conformément au droit applicable en vertu de l'article 98 bis, une

 15   procédure inconnue dans la plupart des pays où le système romano-germanique

 16   prévaut, je n'ai pas l'intention de consacrer beaucoup de temps. Cela dit,

 17   le critère applicable aux arguments dans le cadre du 98 bis, c'est quelque

 18   chose qui a été bien établi par ce Tribunal. Je souhaite vous reporter à la

 19   décision qui a été rendue dans l'affaire le Procureur contre Milutinovic,

 20   dans le cadre de l'article 98 bis. Dans cette affaire-là, Monsieur le

 21   Président, les Juges de la Chambre ont estimé que le critère qui doit être

 22   appliqué est de savoir si, oui ou non, il y a des éléments de preuve qui

 23   permettent, pour autant qu'ils soient acceptés, qu'un tribunal juge de fait

 24   puisse être satisfait au-delà de tout doute raisonnable de la culpabilité

 25   d'un accusé à propos des chefs en question. La Chambre a de surcroît

 26   indiqué que :

 27   "Lorsqu'il n'y a pas d'éléments de preuve à l'appui d'un chef d'accusation,

 28   on fera droit à la requête."

Page 21260

  1   De surcroît, dans le cas où il y a quelques éléments de preuve, mais que

  2   ces éléments sont tels que si on applique le critère le plus élevé la

  3   Chambre ne peut pas rendre sa décision et condamner l'accusé, on fera

  4   également droit à la requête.

  5   Je ne veux pas consacrer trop de temps au droit applicable mais je souhaite

  6   insister sur l'importance de la procédure 98 bis qui a un lien très étroit,

  7   d'après nous, avec la présomption d'innocence.

  8   S'il n'y pas en fait d'éléments à charge contre l'Accusation à la fin des

  9   éléments de preuve à charge, il serait contraire à la conception de

 10   présomption d'innocence et injuste de demander à un accusé de présenter sa

 11   défense. C'est la raison, Monsieur le Président, pour laquelle le libellé

 12   de l'article 98 bis fait référence au futur "devra" pour tout chef

 13   d'accusation pour lesquels à la fin de la présentation des moyens à charge,

 14   la Chambre de première instance rendra un acquittement.

 15   Par conséquent, bien que mes arguments aujourd'hui ne traiteront que des

 16   chefs 7, 8 et 2, nous comprenons que c'est le devoir des Juges de la

 17   Chambre s'ils constatent qu'il n'y a pas d'éléments de preuve de justifier

 18   des autres chefs d'accusation que l'accusé devra être également acquitté au

 19   titre de ces autres chefs d'accusation.

 20   Je vais passer directement au chef d'accusation numéro 7, le transfert

 21   forcé. Les éléments de contexte sont comme suit :

 22   Dans notre réponse à la requête de l'Accusation aux fins d'amender l'acte

 23   d'accusation et de le modifier le 21 juillet 2005, ainsi que dans notre

 24   requête qui allègue des défauts ou vices dans l'acte d'accusation modifié

 25   et consolidé du 29 décembre 2005, nous alléguons que l'entreprise

 26   criminelle commune aux fins de déplacer par la force la population

 27   musulmane de l'enclave de Srebrenica et celle de déplacer par la force la

 28   population de l'enclave de Zepa étaient distinctes l'une de l'autre. Nous

Page 21261

  1   arguons du fait que l'Accusation n'aurait pas dû être autorisée à ajouter

  2   le chef d'accusation de transfert forcé portant sur l'enclave de Zepa, et

  3   qui sont les charges qui sont reprochés à Drago Nikolic à ce moment-là.

  4   D'après nous, Monsieur le Président, ceci repose sur un fait qui est celui-

  5   ci : Drago Nikolic n'a jamais mis les pieds dans Zepa et n'a jamais

  6   participé d'une manière ou d'une autre aux événements qui ont conduit au

  7   transfert forcé de la population de Zepa. Je souhaite ajouter, pour être

  8   plus précis, le transfert forcé allégué de la population de Zepa. A ce

  9   moment-là, la Chambre de première instance a statué que les preuves portant

 10   sur une allégation et l'existence d'une entreprise criminelle commune en

 11   vue de déplacer par la force la population musulmane de Bosnie à la fois de

 12   Srebrenica et dans l'enclave de Zepa était quelque chose dont on devait

 13   apporter la preuve pendant le procès.

 14   Nous voici à ce stade de la procédure. Nous avons entendu les éléments de

 15   preuve de l'Accusation. Pour nous, la conclusion reste la même.

 16   Dans la décision que j'ai évoquée, la Chambre d'accusation a rendu une

 17   décision sur l'acte d'accusation le 31 mai 2006, au paragraphe 54. Dans

 18   cette même décision, la Chambre de première instance a estimé au paragraphe

 19   52 que dans l'acte d'accusation, l'Accusation avait plaidé dans

 20   suffisamment de détails la période en question où l'existence des deux

 21   entreprises criminelles communes avaient été établies. Tout d'abord, la

 22   première qui consistait à déplacer par la force la population musulmane des

 23   enclaves de Zepa et de Srebrenica, et la deuxième entreprise criminelle

 24   commune aux fins de tuer les hommes valides ou en âge de porter les armes

 25   de Srebrenica.

 26   Donc il s'ensuit des éléments susmentionnés qu'il faut faire la distinction

 27   entre les deux entreprises criminelles communes alléguées dans l'acte

 28   d'accusation. Je souhaite ici évoquer les pièces en annexe aux paragraphes

Page 21262

  1   96 et 97. Encore une fois, je répète : la première entreprise criminelle

  2   commune est celle qui porte sur le transfert forcé ou l'expulsion de la

  3   population musulmane de Srebrenica et Zepa, et la deuxième entreprise

  4   criminelle commune qui fait référence au meurtre des hommes en âge de

  5   porter des armes de Srebrenica. La distinction entre les deux est mise en

  6   exergue dans différents paragraphes de l'acte d'accusation, y compris,

  7   entre autres, le paragraphe 34 qui porte sur le chef d'accusation numéro 2,

  8   entente en vue de commettre le génocide.

  9   La deuxième considération à prendre en compte à la lumière de l'acte

 10   d'accusation c'est que l'entreprise criminelle commune qui porte sur le

 11   transfert forcé, ainsi que la décision de la Chambre de première instance à

 12   l'égard de l'acte d'accusation, tout ceci confirme que le but était de

 13   déplacer la population de Srebrenica et de Zepa, de ces deux enclaves. Ces

 14   deux éléments, Monsieur le Président, d'après nous, sont extrêmement

 15   pertinents lorsque les Juges de la Chambre prononceront leur jugement, et

 16   ce, en application de l'article 98 bis.

 17   Je veux maintenant passer au libellé exact du chef d'accusation numéro 7,

 18   au paragraphe 49 de l'acte d'accusation. Conformément à ce paragraphe,

 19   Drago Nikolic est accusé, ainsi que d'autres personnes, d'avoir appartenu

 20   et sciemment participé à une entreprise criminelle commune dont le but

 21   commun était de chasser la population musulmane des enclaves de Srebrenica

 22   et de Zepa, vers des régions non contrôlées par la RS à partir du 8 mars

 23   1995 environ, et ce, jusqu'à la fin du mois d'août 1995. Pour que les Juges

 24   de la Chambre déclarent coupable Drago Nikolic au titre du chef numéro 7,

 25   le transfert forcé, nous estimons que l'Accusation doit prouver au-delà de

 26   tout doute raisonnable les éléments suivants de ce délit.

 27   Puis-je présenter les éléments de la pièce de la Défense 3D304, la première

 28   page.

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  1   D'après nous, Monsieur le Président, les éléments suivants doivent être

  2   prouvés --

  3   L'INTERPRÈTE : Précision de l'interprète à l'article 98 bis, lorsque le

  4   futur, en anglais : "Shall" a été prononcé, il faut lire en français : la

  5   Chambre de première instance "doit." 

  6   M. BOURGON : [interprétation] Nous avons donc appliqué les éléments

  7   suivants aux faits de cette affaire, de façon à pouvoir mieux présenter nos

  8   arguments, portant plus précisément sur Drago Nikolic.

  9   A partir du 8 mars environ, jusqu'à la fin du mois d'août 1995, la

 10   population musulmane de Bosnie a été contrainte par la force et de façon

 11   illégale à quitter les enclaves de Srebrenica et Zepa. Point 2, un tel

 12   transfert forcé a été commis délibérément, à savoir avec l'intention de

 13   déplacer la population de façon permanente, ce qui implique qu'il y a

 14   l'intention de ne pas leur permettre de retourner à cet endroit-là une fois

 15   que la situation se serait normalisée dans la région.

 16   Pour ce qui est du caractère permanent du déplacement de la population,

 17   nous souhaitons attirer l'attention des Juges de la Chambre sur le

 18   commentaire qui se trouve dans la convention des conventions de Genève

 19   numéro 4, pour être plus précis, à la page 280, à savoir que contrairement

 20   à la déportation et au transfert forcé, l'évacuation constitue une mesure

 21   provisoire. Donc, ce qu'il faut prouver, c'est que la mesure ici en

 22   l'espèce était permanente, il ne s'agit donc pas dans le cas présent

 23   d'évacuation. Il faut absolument établir une distinction entre le transfert

 24   forcé et l'évacuation. Comme nous le constaterons plus tard, il s'agit là

 25   d'une autre considération importante.

 26   Le troisième élément étant le transfert forcé au cours d'un conflit armé,

 27   et le transfert forcé par rapport au quatrième élément dans le contexte

 28   d'une attaque généralisée et systématique contre toute population civile.

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  1   Eu égard à ces quatre éléments essentiels, la Défense insiste sur

  2   l'importance du groupe des victimes étant donné qu'il s'agit là d'une

  3   population civile.

  4   Nous demandons aux Juges de la Chambre de se reporter au jugement dans

  5   l'affaire Sljivancanin -- le Procureur contre Sljivancanin, à cet effet.

  6   Le cinquième élément, Monsieur le Président, je ne sais pas si nous l'avons

  7   à l'écran -- nous l'avons, il y a un lien entre le transfert forcé et

  8   l'attaque contre la population civile. Pour finir, bien sûr, l'accusé est

  9   accusé au niveau de la responsabilité pénale et individuelle conformément à

 10   l'article 7(1) pour avoir commis, planifié, incité à commettre, aidé et

 11   encouragé, donné l'ordre à la planification, la préparation et l'exécution

 12   du transfert forcé.

 13   Pour ce qui est de ce dernier élément, Monsieur le Président, la Défense

 14   souhaite rappeler la thèse de l'Accusation dans cette affaire, à savoir que

 15   Drago Nikolic était un membre de l'entreprise criminelle commune qui,

 16   d'après l'Accusation, est une façon de commettre le transfert forcé.

 17   D'après nous, Monsieur le Président, nous avançons que dans l'état actuel

 18   des choses aucun élément ne figure au compte rendu d'audience, Drago

 19   Nikolic n'a ni participé et n'a absolument pas pris part au transfert forcé

 20   allégué que ce soit dans l'enclave de Zepa ou celle de Srebrenica. Nous

 21   arguons également qu'il n'y pas d'élément de preuve qui permettrait

 22   d'indique que Drago Nikolic disposait du mens rea ou de l'élément moral

 23   nécessaire, à savoir qu'il avait l'intention de déplacer de façon

 24   permanente la population musulmane des enclaves de Srebrenica et Zepa. En

 25   réalité, Monsieur le Président, nous faisons valoir le fait qu'aucun

 26   élément de preuve ne figure au compte rendu d'audience qui permettrait à un

 27   juge de fait raisonnable de conclure à ce stade de la procédure que Drago

 28   Nikolic était un membre d'une entreprise criminelle commune aux fins de

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  1   contraindre par la force la population musulmane de quitter les deux

  2   enclaves.

  3   De surcroît, quand bien même l'acte d'accusation ne comporte aucune

  4   allégation précise à cet égard, nous estimons qu'il n'y a aucun élément de

  5   preuve au compte rendu qui permettrait à un juge de fait raisonnable de

  6   conclure que Drago Nikolic a aidé et encouragé d'une manière ou d'une autre

  7   le transfert forcé de la population musulmane de Bosnie des deux enclaves.

  8   Je vais maintenant vous expliquer pourquoi c'est le cas, et je vais

  9   commencer par le transfert forcé allégué de la population musulmane de

 10   Srebrenica.

 11   Pour comprendre le chef d'accusation qui porte sur le transfert forcé, il

 12   est nécessaire, d'après nous, de tenir compte des personnes qui vivaient

 13   dans l'enclave de Srebrenica à l'époque, il y avait trois groupes

 14   distincts; tout d'abord, il y avait les femmes, les enfants et les

 15   personnes âgées dont il est allégué qu'elles se sont rendues de Srebrenica

 16   à Potocari avant d'être transportées par autocar à Kladanj; deuxièmement,

 17   les hommes en âge de porter les armes qui ont été séparés du groupe qui se

 18   dirigeait de Srebrenica à Potocari avant d'être transportés, comme il est

 19   allégué, et détenus à Bratunac; troisièmement, les membres de la 28e

 20   Division musulmane, les hommes en âge de porter les armes et toutes autres

 21   personnes qui les accompagnaient qui avaient décidé de quitter l'enclave de

 22   Srebrenica parce qu'ils espéraient parvenir au territoire placé sous le

 23   contrôle du 2e Corps de l'armée musulmane de Tuzla.

 24   Nous faisons valoir, Monsieur le Président, que le chef d'accusation numéro

 25   7, le transfert forcé, ne s'applique qu'au premier groupes susmentionnés, à

 26   savoir les femmes, les enfants et les personnes âgées qui, comme il est

 27   allégué, se sont rendus de Srebrenica à Potocari avant d'être transportés à

 28   bord d'autocar jusqu'à Kladanj. Cet argument, d'après nous, est confirmé

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  1   par le fait que d'un côté les hommes en âge de porter les armes, comme il

  2   est allégué, qui ont été séparés à Potocari et, bien sûr, les soldats et

  3   hommes en âge de porter les armes qui avaient l'intention d'arriver

  4   jusqu'au territoire musulman sont ceux qui sont l'objet de l'entreprise

  5   criminelle commune alléguée, à savoir de tuer les hommes en âge de porter

  6   les armes de Srebrenica qui ont été capturés ou qui se sont rendus après la

  7   chute de Srebrenica le 11 juillet 1995. Ces hommes en âge de porter les

  8   armes ne font pas partie de cette population musulmane de Bosnie qui, comme

  9   il est allégué, a transféré de façon forcée ces personnes de Srebrenica.

 10   D'après nous, cet argument est également confirmé par le fait que ces

 11   hommes ont été séparés et détenus à Bratunac, en fait, ceci ne

 12   correspondait pas à un transfert forcé, mais plutôt à une détention, et

 13   ceci a peut-être un lien avec l'entreprise criminelle commune qui avait

 14   pour but de tuer les hommes en âge de porter les armes de Srebrenica.

 15   D'après nous, il n'y avait pas l'intention de transférer les hommes en âge

 16   de porter les armes qui avaient été séparés à Potocari dans une région qui

 17   n'était plus sous le contrôle de la Republika Srpska.

 18   Pour ce qui est du troisième groupe, la première considération à prendre en

 19   compte est celle-ci, leur départ de Srebrenica ne constitue pas un

 20   transfert forcé, étant donné que ces personnes avaient un véritable choix,

 21   ils avaient la possibilité de rester à Srebrenica. La plupart d'entre eux

 22   étaient armés et pouvaient rester à Srebrenica pour se battre. Ils ont

 23   décidé de partir pour atteindre le territoire placé sous le contrôle du 2e

 24   Corps de l'armée musulmane.

 25   De surcroît, Monsieur le Président, alors que ce groupe de personnes se

 26   dirigeait vers Tuzla, ceci constitue une menace pour la VRS et la

 27   population serbe de la région. Ceci a été confirmé par les éléments de

 28   preuve et c'est ce qui fait qu'on a fait usage de la force et que la VRS et

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  1   la police tout d'abord devaient arrêter leur progression en direction de

  2   Tuzla et devaient les détenir comme prisonniers de guerre. Encore une fois,

  3   Monsieur le Président, la capture et la reddition des membres de la colonne

  4   ne correspondaient pas à un transfert forcé. C'était plutôt une action

  5   militaire légitime avec un lien, peut-être, à l'entreprise criminelle

  6   commune visant à tuer les hommes en âge de porter les armes de Srebrenica.

  7   Encore une fois, il n'y avait certainement pas une intention ici de

  8   transférer les hommes en âge de porter les armes de la colonne dans une

  9   région qui n'était plus placée sous le contrôle de la Republika Srpska,

 10   c'est ce qu'allègue cette entreprise criminelle commune.

 11   Quoi qu'il en soit, Monsieur le Président, comme nous le constaterons

 12   plus tard, quand bien même on estime que le chef numéro 7, à savoir le

 13   transfert forcé, s'applique aux hommes en âge de porter les armes qui ont

 14   été séparés à Potocari et aux soldats et hommes en âge de porter les armes

 15   de la colonne, nous avançons que la conclusion consisterait à dire que

 16   compte tenu des éléments consignés au compte rendu d'audience à la fin de

 17   la présentation des moyens à charge de l'Accusation, il n'y a pas d'élément

 18   de preuve qui permettrait à un juge de fait raisonnable de conclure que

 19   Drago Nikolic était membre d'une entreprise criminelle commune dont le but

 20   aurait été de transférer par la force ces hommes en âge de porter les armes

 21   vers une région en dehors du contrôle de la Republika Srpska.

 22   Je vais maintenant rapidement passer aux allégations factuelles qui sont

 23   contenues dans l'acte d'accusation par rapport au chef numéro 7, le

 24   transfert forcé. Ces allégations sont divisées en deux catégories. Tout

 25   d'abord, aux paragraphes 50 à 60, qui portent sur le transfert forcé de la

 26   population musulmane de Bosnie à la fois de Srebrenica et de Zepa, de ces

 27   deux enclaves; et deuxièmement, les paragraphes 61 et 64 qui traitent plus

 28   précisément de ce qui suit : le transfert forcé allégué de la population

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  1   musulmane de Bosnie, de Srebrenica; la séparation alléguée des hommes en

  2   âge de porter les armes du groupe qui était rassemblé à Potocari; et

  3   troisièmement, la capture et/ou la reddition des soldats et hommes en âge

  4   de porter les armes de la colonne après la chute de Srebrenica le 11

  5   juillet.

  6   Ayant passé en revue l'ensemble des éléments de preuve qui figurent au

  7   compte rendu d'audience, y compris les dépositions de témoins et les

  8   preuves documentaires, et après nous être concentrés plus précisément sur

  9   les écoutes téléphoniques ainsi que tous les journaux qui ont été admis au

 10   dossier, les quatre journaux qui ont été admis, ceux des officiers de

 11   permanence, le journal de l'officier de permanence dans la caserne, le

 12   poste de commandement avancé de la Brigade de Zvornik, le journal de bord

 13   de l'officier, ainsi que le journal de guerre, et après avoir examiné tous

 14   ces éléments de preuve en retenant le critère le plus élevé conformément à

 15   l'article 98 bis, nous avançons, premièrement, qu'il se peut qu'il y ait

 16   des éléments de preuve au compte rendu qui permettraient à un juge de fait

 17   raisonnable de conclure au-delà de tout doute raisonnable que la population

 18   musulmane de Bosnie et de Srebrenica a été transférée à Kladanj, une région

 19   non contrôlée par la Republika Srpska. Mais ce qui est encore plus

 20   important, Monsieur le Président, c'est qu'il n'y a pas d'élément de preuve

 21   au compte rendu qui permettrait à un juge de fait raisonnable de conclure

 22   au-delà de tout doute raisonnable que Drago Nikolic soit, premièrement, a

 23   participé d'une façon ou d'une autre aux événements ou aux activités

 24   décrites dans ces paragraphes, ou deuxièmement, qu'il était membre d'une

 25   entreprise criminelle commune, dont le but était de transférer par la force

 26   la population musulmane de Bosnie et de l'enclave de Srebrenica.

 27   Pour ce qui est du premier groupe, le groupe qui d'après nous a fait

 28   l'objet de la première entreprise criminelle commune, à savoir les femmes,

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  1   les enfants et les personnes âgées qui auraient été transférés comme il est

  2   allégué de manière forcée à Kladanj, il n'y a pas eu de participation de la

  3   Brigade de Zvornik, Monsieur le Président, dans ce transfert forcé, ce qui

  4   permet de conclure que Drago Nikolic n'y a pas participé non plus. Ce qui a

  5   été confirmé par l'expert militaire de l'Accusation, Richard Butler, pages

  6   20 388 et 20 389. Je souhaite maintenant aborder cette question-là et ce

  7   qui nous permet d'étayer cette conclusion.

  8  Tout d'abord, pour ce qui est du 1er Bataillon, qui a été constitué à partir

  9   de différentes unités de la Brigade de Zvornik, je fais allusion ici à la

 10   99e qui s'appelait l'opération Krivaja-95  placée sous le commandement de

 11   Vinko Pandurevic, ce groupe a peut-être participé au transfert forcé de la

 12   population musulmane de Bosnie, mais le bataillon à l'époque était sous le

 13   commandement et le contrôle du commandant du Corps de la Drina, le général

 14   Zivanovic, et plus sous le contrôle et commandement de la Brigade de

 15   Zvornik en tant que tel, comme cela a été étayé par les éléments de preuve.

 16   Quoi qu'il en soit, aucun élément de preuve au dossier ne permettrait de

 17   conclure que Drago Nikolic était soit membre de ce bataillon ou qu'il ait

 18   participé d'une manière ou d'une autre à la planification et/ou à la

 19   préparation qui a conduit au déploiement de ce bataillon afin qu'il

 20   participe à l'opération Krivaja-95. De surcroît, il découle des éléments de

 21   preuve au dossier et de la déposition du Témoin PW-168 que la Brigade de

 22   Zvornik n'a été informée nullement dans le détail des activités de ce

 23   bataillon alors qu'elle était déployée dans le cadre de cette opération

 24   Krivaja-95.

 25   Une autre question qui pourrait intéresser les Juges de la Chambre porte

 26   sur les bus qui auraient été fournis par la Brigade de Zvornik. Il y a

 27   quelques éléments de preuve au dossier selon lesquels le Corps de la Drina

 28   a demandé à la Brigade de Zvornik de fournir des autocars et des minibus

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  1   pour son utilisation le 12 juillet 1995, et que la Brigade de Zvornik

  2   aurait fourni deux cars et quatre camions en réponse à cette demande, nous

  3   faisons valoir qu'il n'y a aucun élément de preuve au dossier qui pourrait

  4   permettre à un juge de fait raisonnable de conclure que la Brigade de

  5   Zvornik était ainsi en connaissance de cause impliquée dans le transfert

  6   forcé de la population musulmane de Bosnie, de Srebrenica ou de toute autre

  7   activité criminelle. Cette conclusion découle de ce qui suit :

  8   Premièrement, le Témoin PW-168 a dit dans sa déposition qu'il savait

  9   que ces véhicules étaient nécessaires pour l'évacuation, je souligne

 10   "l'évacuation", des résidents de Srebrenica à la suite d'un accord qui

 11   avait été conclu et que c'était leur vœu d'être transférés à Kladanj.

 12   Deuxièmement, la demande émanant du Corps de la Drina, et je me

 13   réfère à la pièce à conviction 110, faisait référence à l'évacuation de

 14   l'enclave de Srebrenica suivant un but légitime, conformément aux

 15   dispositions des conventions de Genève.

 16   Troisièmement, la demande émanant du Corps de la Drina était

 17   considérée comme légitime, d'un point de vue militaire, par l'expert

 18   militaire de l'Accusation, Richard Butler, ceci figure à la page 20 389 du

 19   compte rendu.

 20   Ensuite, les conducteurs de ces véhicules, une fois qu'ils ont eu quitté la

 21   Brigade de Zvornik, se trouvaient sous le commandement et la direction de

 22   la partie qui les avaient demandés, à savoir le commandant du Corps de la

 23   Drina, ceci est confirmé par Richard Butler, à la page 20 398.

 24   Ensuite, une fois que la Brigade de Zvornik a été informée du fait que

 25   Srebrenica était tombée, il n'y a aucun élément de preuve au dossier selon

 26   lequel une personne quelconque de la Brigade de Zvornik était consciente du

 27   fait qu'un transfert forcé de la population musulmane de Srebrenica était

 28   en cours.

Page 21272

  1   En tout état de cause, ce jour-là, le 12 juillet 1995, les éléments de

  2   preuve font apparaître que Drago Nikolic n'était pas présent. Ceci a été

  3   confirmé par le Témoin PW-168 et le témoin expert, Richard Butler, aux

  4   pages 20 338 et 20 339 du compte rendu, ainsi que par la pièce 3DP311. Les

  5   éléments de preuve font également constater que Drago Nikolic n'a pas

  6   participé à l'envoi des véhicules au Corps de la Drina; on peut se référer

  7   au témoignage de Butler, aux pages 20 398 et 20 399.

  8   Autre aspect de la question qui pourrait présenter un intérêt pour la

  9   Chambre de première instance, c'est qu'il y a au dossier un certain nombre

 10   d'éléments qui prouvent que le Corps de la Drina a demandé à la Brigade de

 11   Zvornik de fournir une escouade de policiers militaires pour s'occuper du

 12   contrôle de la circulation à l'intersection de Konjevic Polje. Pièce 157.

 13   En réponse à cette demande, on a des éléments selon lesquels la Brigade de

 14   Zvornik a envoyé quatre ou cinq policiers militaires à Konjevic Polje pour

 15   s'occuper de la circulation. Il n'y aucune élément de preuve au dossier qui

 16   permette à un juge de fait raisonnable de conclure que, de cette manière,

 17   la Brigade de Zvornik, en envoyant quatre ou cinq policiers militaires pour

 18   réguler la circulation, ait participé en connaissance de cause à un

 19   transfert forcé de la population musulmane de Bosnie, de Srebrenica ni à

 20   aucune autre activité criminelle connexe. Cette conclusion découle de ceci

 21   :

 22   Premièrement, le Témoin PW-168 a dit dans sa déposition qu'il se trouvait à

 23   Memici au moment où l'ordre a été reçu et que les policiers militaires ont

 24   été envoyés. Il n'a pas parlé à Drago Nikolic de cette question; ceci

 25   figure à la page 17 049 du compte rendu. Ce témoin ne sait pas qui a envoyé

 26   ces policiers militaires. L'escouade se trouvait soit sous le commandement

 27   et la direction du Corps de la Drina, soit sous celle du régiment de

 28   protection; voir la page 15 823. Le Témoin PW-168 sait que Drago Nikolic

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  1   était en journée de congé le 12 juillet.

  2   Richard Butler dans sa déposition a dit que l'ordre pour envoyer des

  3   policiers militaires était, d'après ce qu'il a dit lui-même, un ordre

  4   régulier et qu'il n'y avait rien de mauvais à ce sujet, page 20 392; et que

  5   Drago Nikolic n'a pas participé à l'envoi de ces policiers militaires, ceci

  6   aux pages 19 807 à 19 809. En tout état de cause, ce jour-là, encore le 12

  7   juillet 1995, les éléments de preuve font apparaître que Drago Nikolic

  8   n'était pas présent. Là encore, ceci a été confirmé par le Témoin PW-168,

  9   par Richard Butler et par la pièce 3DP311.

 10   Monsieur le Président, il découle de ce qui précède qu'il n'y a au dossier

 11   aucun élément de preuve sur la base duquel un juge raisonnable de fait

 12   pourrait conclure, et je me réfère spécifiquement ici au premier groupe, à

 13   savoir les femmes, les enfants et les vieillards, que quelqu'un de la

 14   Brigade de Zvornik, y compris Drago Nikolic, ait participé en connaissance

 15   de cause au transfert forcé de la population musulmane de Srebrenica. En

 16   outre, il n'y a aucun élément de preuve sur la base duquel un juge

 17   raisonnable de fait pourrait conclure que Drago Nikolic ait en quoi que ce

 18   soit participé au transfert forcé de la population musulmane de Bosnie, le

 19   groupe 1, depuis l'enclave de Srebrenica.

 20   Alors, quelle est la situation en ce qui concerne les deux autres groupes,

 21   les hommes en âge de porter les armes qui ont été séparés des autres à

 22   Potocari et les soldats, et les hommes en âge de porter les armes qui

 23   appartenaient à la colonne ? Est-ce que la Chambre de première instance

 24   devrait conclure que ce chef d'accusation numéro 7, transfert forcé,

 25   s'applique également à eux. Comme on l'a dit plus tôt, notre argument c'est

 26   que la conclusion doit demeurer la même, à savoir qu'il n'y a toujours

 27   aucune preuve au dossier sur la base de laquelle un juge raisonnable de

 28   fait pourrait conclure que Drago Nikolic était membre d'une entreprise

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  1   criminelle commune visant à transférer de force la population musulmane de

  2   Bosnie depuis l'enclave de Srebrenica jusqu'à une zone qui n'était plus

  3   sous le contrôle de la RS. Cette conclusion découle de ceci :

  4   Premièrement, il n'y a eu aucune participation de la Brigade de Zvornik. Le

  5  1er Bataillon déployé lors de l'opération Krivaja-95, dont a parlé plus tôt,

  6   n'a ni participé à combattre la colonne, ni à capturer ou à participer à la

  7   reddition de ses membres. En fait, il n'y a, sur la base d'éléments de

  8   preuve au dossier, aucun élément selon lequel des membres de la Brigade de

  9   Zvornik aient participé à la capture, à la reddition, ou à la détention de

 10   ces personnes, c'est-à-dire à la fois pour ce qui est de Bratunac et

 11   d'autres sites le long de la route Bratunac-Konjevic Polje pour ce qui est

 12   des hommes valides et aptes à porter les armes de la colonne. De plus, si

 13   l'on regarde les renseignements disponibles pour la Brigade de Zvornik

 14   concernant la capture, la reddition et la détention de soldats et d'hommes

 15   en âge de porter les armes, il y a quelques éléments de preuve à cet égard

 16   en ce qui concerne le registre de l'officier d'opération. Néanmoins, il n'y

 17   a aucun élément de preuve au dossier sur la base duquel un juge raisonnable

 18   de fait pourrait conclure que la Brigade de Zvornik ait su quoi que ce soit

 19   outre le fait que des activités militaires légitimes étaient en cours en ce

 20   qui concerne la colonne. De plus, il n'y a aucun élément de preuve au

 21   dossier sur la base duquel un juge raisonnable de fait pourrait conclure

 22   que Drago Nikolic ait su ou participé en aucune manière à la capture, à la

 23   reddition et à la détention d'hommes en état de porter les armes

 24   appartenant à la colonne.

 25   Maintenant, Monsieur le Président, je passe à la question des transferts

 26   forcés de l'enclave de Zepa. Je commence par les allégations de faits qui

 27   figurent dans l'acte d'accusation que l'on trouve aux paragraphes 65 à 71

 28   de cet acte d'accusation. Ces paragraphes traitent précisément du transfert

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  1   forcé allégué de la population musulmane de Bosnie, depuis Zepa.

  2   Là encore, Monsieur le Président, ayant examiné la totalité des éléments de

  3   preuve au dossier, comme on l'a déjà dit, et en se centrant sur les

  4   conversations enregistrées et les registres, les dépositions de témoins et

  5   les documents, et après avoir examiné et apprécié ces éléments de preuve

  6   pour leur valeur, à notre avis, respectueusement, il se peut qu'il y ait

  7   quelques éléments de preuve au dossier qui pourraient permettre à un juge

  8   raisonnable de fait de conclure, au-delà d'un doute raisonnable, qu'à ce

  9   stade, la population musulmane de Bosnie de Zepa ait été transférée de

 10   force à un secteur qui n'était plus sous le contrôle de la VRS. Mais ce qui

 11   est plus important encore, il n'y aucun élément de preuve au dossier qui

 12   permettrait à un juge raisonnable de fait de conclure, au-delà d'un doute

 13   raisonnable, que Drago Nikolic ait soit eu en quoi que ce soit une

 14   participation aux événements et aux activités qui sont décrits dans ces

 15   paragraphes ou qu'il ait été membre d'une entreprise criminelle commune

 16   dont le but était de transférer la population musulmane de Bosnie à partir

 17   de l'enclave de Zepa. D'après nous, cette conclusion découle de ceci :

 18   Alors qu'il se peut qu'il y ait quelques éléments de preuve selon

 19   lesquels le 1er Bataillon de la Brigade de Zvornik -- je vous prie de

 20   m'excuser, le 1er Bataillon assemblé à partir de membres pris de ces unités

 21   de la Brigade de Zvornik peuvent avoir participé à des préparatifs qui ont

 22   mené à des attaques sur l'enclave de Zepa. Les éléments de preuve révèlent

 23   que ce bataillon a été retiré du secteur de Zepa et qu'il a été remis dans

 24   le secteur de Zvornik avant que la force ou la menace de la force n'ait été

 25   appliquée à Zepa en ayant pour but de transférer de force la population

 26   musulmane de Bosnie à partir de cette enclave.

 27   En outre, comme on l'a dit plus tôt, Drago Nikolic n'était pas membre de ce

 28   bataillon et il n'a pas participé à la planification ou aux préparatifs qui

Page 21276

  1   ont conduit au déploiement de ce bataillon.

  2   En tout état de cause, jusqu'au moment où ce bataillon est reparti de Zepa,

  3   il se trouvait sous le commandement et la direction du commandant du Corps

  4   de la Drina, le général Zivanovic.

  5   En outre, il n'y a aucun élément de preuve au dossier selon lequel Drago

  6   Nikolic ait jamais participé aux événements qui ont eu lieu à Zepa ou ait

  7   jamais été informé des événements qui ont eu lieu à Zepa. C'était notre

  8   conclusion avant le début même du procès, et il n'y a aucun élément de

  9   preuve maintenant selon lequel l'Accusation aurait présenté jusqu'au bout

 10   ses arguments, ce qui nous permettrait de parvenir à une conclusion

 11   différente.

 12   Il s'ensuit de ce qui précède, Monsieur le Président, qu'il n'y a aucun

 13   élément de preuve au dossier sur la base duquel un juge raisonnable de fait

 14   pourrait conclure que quiconque au sein de la Brigade de Zvornik, y compris

 15   Drago Nikolic, ait participé, en connaissance de cause, au transfert forcé

 16   de la population musulmane de Zepa, et il n'y a pas non plus aucun élément

 17   de preuve au dossier sur la base duquel un juge raisonnable de fait

 18   pourrait conclure que Drago Nikolic ait en quoi que ce soit participé au

 19   transfert forcé de la population musulmane de Bosnie depuis l'enclave de

 20   Zepa.

 21   A notre avis, Monsieur le Président, cette démonstration suffirait à

 22   justifier qu'un verdict d'acquittement soit rendu à ce stade pour ce qui

 23   est du chef d'accusation numéro 7, à savoir transfert forcé. Il reste

 24   encore un domaine que nous devons examiner, à savoir le paragraphe 80 de

 25   l'acte d'accusation, qui englobe le rôle et les actions allégués de Drago

 26   Nikolic pour mettre en œuvre l'entreprise criminelle commune et appliquer

 27   un transfert forcé de la population musulmane de Srebrenica et de Zepa.

 28   Pour commencer, en vertu du paragraphe 80, alinéas (a)(i) et (ii), il

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  1   est allégué que Drago Nikolic contrôlait les mouvements de la population

  2   musulmane en dehors de l'enclave du 13 au 16 juillet, premièrement en

  3   aidant aux opérations de planification, d'organisation et de surveillance

  4   du transport d'hommes musulmans depuis Bratunac; et deuxièmement, de

  5   surveiller, faciliter et vérifier le transport d'homme musulmans depuis

  6   Bratunac jusqu'au site de détention dans le secteur de Zvornik, toujours

  7   concernant la période du 13 au 16 juillet.

  8   Maintenant que l'Accusation a fini de faire valoir ses moyens à

  9   charge, notre conclusion respectueuse, c'est qu'il n'y a aucun élément de

 10   preuve au dossier sur la base duquel un juge raisonnable de fait pourrait

 11   conclure que Drago Nikolic avait participé au contrôle de transport des

 12   hommes musulmans depuis Bratunac à un moment quelconque. De plus, si la

 13   Chambre de première instance devait conclure que Drago Nikolic ait d'une

 14   façon quelconque participé et qu'il y a quelques éléments de preuve qui

 15   pourraient conduire à une telle conclusion, que Drago Nikolic peut avoir

 16   été impliqué dans le transport de prisonniers au cours de la période allant

 17   du 13 au 16 juillet 1995, notre thèse, c'est que toute participation de ce

 18   genre de Drago Nikolic qui a trait à l'entreprise criminelle commune visant

 19   à tuer les hommes en état de porter des armes de Srebrenica, ceux qui ont

 20   été capturés ou qui se sont rendus après la chute de Srebrenica le 11

 21   juillet 1995, toute participation de ce genre n'est rattachée en aucune

 22   manière à l'entreprise criminelle commune et le transfert forcé de la

 23   population musulmane depuis Srebrenica et Zepa.

 24   Deuxièmement, en vertu du paragraphe 80 et du paragraphe 80 alinéa

 25   (a)(iii), il est également allégué qu'en conséquence du fait que

 26   l'entreprise criminelle commune avait procédé au transfert forcé de la

 27   population musulmane de Srebrenica et Zepa, Drago Nikolic ait commis les

 28   crimes aux paragraphes 30.6 à 30.12, 30.14, 30.15, 31.4, 32, et 34 à 37. Il

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  1   est également allégué que Drago Nikolic n'a pas fait en sorte de garantir

  2   la sécurité et le bien-être des prisonniers, ce qui aurait été son devoir.

  3   Mais nous ne savons pas quel est le secteur couvert par ce paragraphe, bien

  4   qu'il semble qu'il s'agisse du secteur de Zvornik.

  5   Si la Chambre de première instance conclurait à ce stade qu'il existe

  6   quelque élément de preuve selon lequel on peut conclure que Drago Nikolic

  7   pourrait avoir été impliqué dans l'un quelconque de ces actes ou omissions,

  8   notre thèse, c'est que toute participation de ce genre de Drago Nikolic est

  9   encore une fois liée à la prétendue entreprise criminelle commune pour ce

 10   qui est de tuer les hommes de Srebrenica en état de porter les armes, ceux

 11   qui ont été faits prisonniers ou qui se sont rendus après la chute de

 12   Srebrenica le 11 juillet 1995 et, par conséquent, que toute participation

 13   de ce genre de Drago Nikolic n'est en aucune manière liée à l'entreprise

 14   criminelle commune visant à transférer de force les populations musulmanes

 15   de Srebrenica et Zepa.

 16   Ces actes, Monsieur le Président, ont été commis ou bien après le 13

 17   juillet à un moment où le transfert forcé de la population musulmane de

 18   Srebrenica aurait été achevé et avant le transfert forcé allégué d'une

 19   population musulmane de Zepa avant que ce transfert ait eu lieu.

 20   Comme on l'a dit au début, la théorie de l'Accusation en l'espèce est

 21   basée sur l'existence de deux entreprises criminelles communes, et il est

 22   essentiel de ne pas mélanger les deux, pour se montrer juste à l'égard de

 23   l'accusé. A cet égard, notre thèse est que l'analyse à laquelle il y a lieu

 24   de procéder au bureau de la Chambre de première instance, de façon à se

 25   prononcer sur notre requête présentée en vertu de l'article 98 du

 26   Règlement, est d'apprécier s'il existe un élément de preuve quelconque au

 27   dossier sur la base duquel elle pourrait conclure au-delà d'un doute

 28   raisonnable que Drago Nikolic était membre de l'entreprise criminelle

Page 21279

  1   commune visant au transfert de force de la population musulmane de

  2   Srebrenica, des enclaves de Srebrenica et de Zepa.

  3   Conformément à la jurisprudence du Tribunal international, le fait

  4   d'être membre d'une entreprise criminelle commune dépend des conditions

  5   préalables suivantes.

  6   Pourrais-je voir au prétoire électronique e-court, s'il vous plaît,

  7   la pièce 3D304, page 3.

  8   Monsieur le Président, je saisis cette occasion pour signaler une

  9   erreur dans le compte rendu à la page 53, ligne 16, il y a une erreur. A ce

 10   que je comprends, d'après ce que l'on me dit, il est dit qu'aux lignes 13 à

 11   16, donc je dis bien, non pas 15 mais 13 à 16.

 12   Les conditions préalables suivantes doivent être réunies pour que

 13   quelqu'un puisse être considéré comme étant membre d'une entreprise

 14   criminelle commune : premièrement, il faut une pluralité de personnes qui

 15   se soient occupées du transfert de population de Srebrenica et Zepa, depuis

 16   les enclaves de Srebrenica et Zepa; deuxièmement, il faut qu'il y ait

 17   l'existence d'un plan commun, d'un dessein ou d'un but commun de transférer

 18   de force la population musulmane de Bosnie depuis les enclaves de

 19   Srebrenica et Zepa; troisièmement, que les accusés aient participé au plan

 20   commun, au dessein commun ou à l'objectif commun dont le but était de

 21   transférer de force la population musulmane de Bosnie depuis les enclaves

 22   de Srebrenica et Zepa; par conséquent, l'accusé partageait l'objectif de ce

 23   qu'on appelle l'entreprise criminelle commune alléguée, à savoir que

 24   l'accusé avait l'intention de participer au transfert forcé de la

 25   population musulmane de Bosnie depuis les enclaves de Srebrenica et Zepa.

 26   En appliquant ces éléments aux dépositions et éléments de preuve au

 27   dossier à ce stade, notre thèse est qu'il n'y a aucune preuve directe au

 28   dossier selon laquelle Drago Nikolic aurait eu le même objectif de

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  1   transfert forcé, d'entreprise criminelle commune, et qu'il ait eu

  2   l'intention de transférer de force la population musulmane de Bosnie depuis

  3   les enclaves de Srebrenica et Zepa dans un secteur extérieur à la Republika

  4   Srpska. De plus, même si la Chambre de première instance devait conclure

  5   qu'à ce stade il existe quelques éléments de preuve qui pourraient

  6   autoriser la Chambre de première instance à conclure que Drago Nikolic peut

  7   avoir été membre de l'entreprise criminelle commune visant à tuer les

  8   hommes valides de Srebrenica, ceux qui ont été capturés ou ceux qui se sont

  9   rendus après la chute de Srebrenica, conclusion bien sûr que nous

 10   contestons, nous sommes confiants qu'il ne sera pas démontré au-delà d'un

 11   doute raisonnable à la fin du procès, et ceci ne permettrait pas de

 12   conclure ou de déduire, que ce soit d'après des preuves directes ou des

 13   preuves indirectes, que Drago Nikolic ait eu l'intention de transférer de

 14   force la population musulmane de Bosnie depuis Srebrenica, depuis les

 15   enclaves de Srebrenica et Zepa.

 16   Puis, si l'on examine la composante de "l'entreprise criminelle

 17   commune" portant sur la participation, c'est-à-dire catégorie 1, il est

 18   nécessaire de prouver au-delà de tout doute raisonnable la constatation que

 19   l'accusé a participé à l'entreprise criminelle commune visant à transférer

 20   de manière forcée la population musulmane de Srebrenica et Zepa, de ces

 21   deux enclaves-là. Et même si l'accusé, personnellement, avait commis le

 22   transfert forcé en tant qu'auteur de crimes principal, il n'y a absolument

 23   pas d'éléments de preuve corroborant cela qui ont été versés au dossier.

 24   Soit l'accusé a assisté ou encouragé l'auteur principal dans ce transfert

 25   forcé, mais il n'y a pas d'éléments de preuve corroborant cela non plus.

 26   Soit, troisièmement, l'accusé aurait agi conformément à un plan commun

 27   visant à transférer de manière forcée la population, et ce, en fonction de

 28   sa position d'autorité ou de ses fonctions, connaissant la nature du

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  1   système, de ce système de transfert forcé et avec l'intention de

  2   l'exécuter.

  3   A notre avis, il n'y a pas d'éléments de preuve versés au dossier à

  4   ce stade sur la base desquels un juge raisonnable de fait pourrait conclure

  5   que Drago Nikolic avait rencontré ces trois formes de participation à

  6   l'entreprise criminelle commune visant à transférer de manière forcée la

  7   population musulmane de Srebrenica et Zepa. Par conséquent, Monsieur le

  8   Président, si la participation de Drago Nikolic dans l'entreprise

  9   criminelle commune visant à transférer de manière forcée la population

 10   musulmane des enclaves de Srebrenica et Zepa n'est pas une conclusion

 11   possible à ce stade, la question définitive qui se pose est la suivante :

 12   est-ce qu'un juge de fait raisonnable pourrait conclure sur la base des

 13   éléments de preuve versés au dossier que Drago Nikolic a aidé et encouragé

 14   à transférer de manière forcée la population musulmane bosniaque des

 15   enclaves de Srebrenica et Zepa ? A notre avis, la réponse à cette question

 16   est "non".

 17   Peut-on montrer la pièce 3D304, page 4, s'il vous plaît. Peut-on

 18   l'afficher dans le prétoire électronique, s'il vous plaît.

 19   Voici les éléments du fait d'aider et encourager, c'est une pratique

 20   très bien établie devant ce Tribunal. Mais je montre cela afin de souligner

 21   le fait que tout acte commis par un accusé doit s'élever à une aide

 22   pratique qui a un effet substantiel sur le transfert forcé de la population

 23   musulmane de Bosnie. D'après les éléments de preuve à ce dossier, nous

 24   considérons qu'il n'y a pas eu d'élément de preuve indiquant que Drago

 25   Nikolic aurait commis un quelconque acte ayant un effet substantiel sur le

 26   transfert forcé de la population musulmane de Bosnie des enclaves de

 27   Srebrenica et Zepa.

 28   A cet égard, il est important de noter que ni Dragan Obrenovic, le chef

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  1   d'état-major de la Brigade de Zvornik, ni Dragan Djukic, le chef du génie

  2   militaire de cette même brigade a été mis en accusation pour le transfert

  3   forcé de la population musulmane des enclaves de Zepa et Srebrenica.

  4   La décision de l'Accusation de mettre en accusation ou ne pas mettre en

  5   accusation ces personnes pour le transfert forcé de la population musulmane

  6   de Bosnie des enclaves de Srebrenica et Zepa, bien sûr cette décision

  7   relève de leur droit discrétionnaire, mais le fait que ces personnes-là

  8   n'ont pas été accusées du transfert forcé indique de manière puissante

  9   toutefois que Drago Nikolic n'a pas participé de quelque manière que ce

 10   soit à ces activités.

 11   Et pour finir, Monsieur le Président. A l'époque, l'idée d'un transfert

 12   forcé est apparu pour la première fois à Potocari tôt dans le mois de

 13   juillet, Drago Nikolic -- ou plutôt les éléments de preuve versés au

 14   dossier ne disent rien, ni sur la présence, ni sur les activités de Drago

 15   Nikolic à cette époque-là. Ce prétendu plan ou but commun, s'il a été

 16   élaboré à ce moment-là, Drago Nikolic à ce moment-là n'a pas participé à

 17   quelque événement que ce soit. Simplement, Monsieur le Président, je vous

 18   soumets cela pour que vous puissiez prendre cet élément en considération de

 19   manière supplémentaire.

 20   Maintenant, Monsieur le Président, je passe au chef d'accusation numéro 8,

 21   à savoir déportation de la population musulmane de Zepa. Je vais rapidement

 22   traiter de cela, compte tenu des arguments présentés au sujet du chef

 23   d'accusation 7, portant sur le transfert forcé. A notre avis, il n'existe

 24   pas en ce moment d'éléments de preuve versés au dossier indiquant que Drago

 25   Nikolic aurait soit participé ou aurait été impliqué de quelque manière que

 26   ce soit dans la déportation alléguée de Zepa, il n'y a pas d'éléments de

 27   preuve indiquant que Drago Nikolic avait l'intention délictueuse

 28   nécessaire, autrement dit, l'intention de déporter la population musulmane

Page 21283

  1   de Bosnie, de Zepa. En réalité, nous considérons qu'il n'y a pas d'éléments

  2   de preuve versés au dossier sur la base desquels un juge de fait

  3   raisonnable pourrait conclure à ce stade que Drago Nikolic était membre

  4   d'une entreprise criminelle commune visant à déporter la population

  5   musulmane bosniaque de Zepa.

  6   Qui plus est, nous considérons que, même si l'acte d'accusation ne comporte

  7   pas de chefs d'accusation spécifiques à cet effet, il n'existe pas

  8   d'éléments de preuve versés au dossier sur la base desquels un juge de fait

  9   raisonnable pourrait conclure que Drago Nikolic a aidé et encouragé de

 10   quelque manière que ce soit la déportation de la population musulmane

 11   bosniaque de Zepa.

 12   Monsieur le Président, pour ce qui est de la déportation, d'après la

 13   manière dont je comprends les choses, les conseils représentant les autres

 14   accusés dans cette affaire présenteront des éléments juridiques indiquant

 15   que le chef d'accusation portant sur la déportation ne tient tout

 16   simplement pas. Et sans entrer dans ces arguments, nous souhaitons dire

 17   simplement que nous nous rallions aux arguments qui vont être présentés par

 18   les autres conseils à cet effet.

 19   Pour conclure, Monsieur le Président, au sujet des chefs d'accusation 7,

 20   transfert forcé de Srebrenica et Zepa dans les zones à l'extérieur du

 21   contrôle de la RS, et chef d'accusation 8, expulsion de la population

 22   musulmane de l'enclave de Zepa, nous considérons, Monsieur le Président,

 23   qu'aucune preuve n'a été présentée s'agissant de Drago Nikolic et que, par

 24   conséquent, il doit être acquitté à ce stade-là s'agissant de ces deux

 25   chefs d'accusation, et ce de manière totale.

 26   Je vais passer maintenant rapidement au chef d'accusation numéro 2, complot

 27   visant à commettre un génocide, allégué dans les paragraphes 34 et 35 de

 28   l'acte d'accusation.

Page 21284

  1   Conformément à l'article 34, Drago Nikolic serait responsable pour avoir

  2   passé un accord avec plusieurs autres personnes, tout d'abord, afin de tuer

  3   les hommes aptes à combattre de Srebrenica qui ont été capturés ou qui se

  4   sont rendus suite à la chute de Srebrenica le 11 juillet 1995, et

  5   deuxièmement, afin de déplacer le reste de la population musulmane de

  6   Srebrenica et Zepa de la Republika Srpska, et dans l'intention de détruire

  7   ces musulmans, c'est le troisième point.

  8   S'agissant du contexte entourant ce chef d'accusation, je vais dire comme

  9   suit :

 10   Dans la requête de l'Accusation demandant une modification de l'acte

 11   d'accusation en date du 28 juin 2005, l'Accusation a demandé d'enlever le

 12   chef d'accusation portant sur la complicité dans le génocide et d'ajouter

 13   un nouveau chef d'accusation, entente en vue de commettre le génocide.

 14   L'Accusation a justifié ce nouveau chef d'accusation d'entente en vue de

 15   commettre le génocide sur la base des développements juridiques au sujet de

 16   l'entente et sur la base du fait que la loi portant sur l'entreprise

 17   criminelle commune à l'époque, de toute façon, était assez floue. L'entente

 18   en vue de commettre le génocide était le premier chef d'accusation de ce

 19   type devant ce Tribunal international.

 20   Qui plus est, même si l'Accusation cite plusieurs affaires dans le mémoire

 21   préalable au procès où l'entente en vue de commettre le génocide a été

 22   présentée devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda, dans la

 23   plupart de ces affaires, et ici je fais référence à la note de bas de page

 24   585 du mémoire préalable au procès de l'Accusation, la charge de l'entente

 25   en vue de commettre le génocide avait été enlevée de l'acte d'accusation et

 26   donc n'a pas fait l'objet de discussion dans toutes ces décisions.

 27   Ce qui est frappant, c'est que parlant du chef d'accusation de l'entente

 28   visant à commettre le génocide, l'Accusation omet dans cette note de bas de

Page 21285

  1   page et dans les arguments portant sur les deux affaires dans lesquelles

  2   l'accusé a été acquitté de la charge d'entente en vue de commettre le

  3   génocide au stade de l'article 98 bis, même si par la suite les accusés ont

  4   été condamnés pour génocide. Nous avons l'affaire ICTR 99-54, Alpha-Trial

  5   au Rwanda; ensuite, la deuxième affaire ICTR 99-46, procès contre Samuel

  6   Imanishimwe. A notre avis, ces deux affaires sont particulièrement

  7   pertinentes pour cette affaire et la situation de Drago Nikolic.

  8   Nous renvoyons également la Chambre de première instance aux trois affaires

  9   suivantes dans lesquelles les accusés ont été acquittés de l'entente en vue

 10   de commettre le génocide, et cette fois-ci dans les jugements définitifs.

 11   Il s'agit de l'affaire Procureur contre Alfred -- Procureur contre

 12   [inaudible] -- Procureur contre [inaudible]. Pour que la Chambre de

 13   première instance puisse prononcer un jugement de culpabilité contre Drago

 14   Nikolic pour le chef d'accusation numéro 2, à savoir entente en vue de

 15   commettre le génocide, l'Accusation doit prouver au-delà de tout doute

 16   raisonnable chacun des éléments suivants du délit.

 17   Peut-on montrer la page 5 de la pièce 3D304 sous forme électronique, s'il

 18   vous plaît.

 19   Le premier élément : l'accusé avait passé un accord avec d'autres afin de

 20   tuer les hommes aptes à combattre à Srebrenica, qui ont été tués [comme

 21   interprété] après la chute de Srebrenica en juillet 1995, et afin de

 22   transférer le reste de la population de Zepa et Srebrenica de la Republika

 23   Srpska. Le deuxième élément : l'accusé avait l'élément mental requis pour

 24   le génocide.

 25   En tant que considération préliminaire, Monsieur le Président, je

 26   souhaite indiquer pour le compte rendu d'audience que nos arguments

 27   relatifs au chef d'accusation 2 à ce stade ne portent pas sur le chef

 28   d'accusation de génocide, ni sur les éléments essentiels du génocide qui

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  1   doivent être prouvés au-delà de tout doute raisonnable pour qu'un accusé

  2   puisse être condamné de cela. A ce stade, conformément à l'article 98 bis,

  3   nous ne traitons pas de la question du génocide. Mais nos arguments portent

  4   seulement l'entente en vue de commettre le génocide, et compte tenu de

  5   l'élément essentiel de ce chef d'accusation, c'est-à-dire entente en vue de

  6   commettre le génocide, comme je l'ai déjà dit, ayant examiné l'ensemble des

  7   éléments de preuve versés au dossier, y compris les dépositions de témoins

  8   et les éléments de preuve documentaires, et ayant pris en considération ces

  9   éléments de preuve, nous considérons, avec tout le respect que nous vous

 10   devons, qu'il n'y a absolument aucun élément de preuve versé au dossier sur

 11   la base duquel un juge de fait raisonnable pourrait conclure que Drago

 12   Nikolic avait passé un accord avec d'autres afin de commettre un génocide.

 13   Notre argument repose sur les éléments suivants :

 14   Il existe certains éléments de preuve versés au dossier concernant

 15   les infractions ou les infractions prétendues commises par Drago Nikolic.

 16   Nous disons simplement que nous examinons tous les éléments de preuve avec

 17   leur valeur la plus élevée. Et même ce faisant, nous ne pouvons tout

 18   simplement pas conclure que Drago Nikolic avait passé un accord visant à

 19   commettre un génocide, un accord passé avec d'autres.

 20   Si nous examinons les deux affaires qui ont eu lieu devant le

 21   Tribunal pénal international pour le Rwanda, dans lesquelles les accusés

 22   ont été acquittés de l'entente en vue de commettre le génocide au stade de

 23   l'affaire conforme à l'article 98 bis, et nous invitons la Chambre de

 24   première instance à examiner la participation concrète de ces deux accusés,

 25   et les conclusions de la Chambre de première instance concernant leur

 26   participation, lorsqu'ils ont par la suite été déclarés coupables pour le

 27   génocide, nous pouvons ici examiner les éléments de preuve versés au

 28   dossier au stade de l'article 98 bis, et voir que ces Chambres de première

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  1   instance n'ont pas pu conclure, sur la base des éléments de preuve liés à

  2   une telle participation de ces deux accusés, qu'ils avaient passé un accord

  3   avec d'autres visant à commettre un génocide. Par conséquent, à notre avis,

  4   il n'a pas été possible de constater l'actus reus d'entente visant à

  5   commettre le génocide, notamment pour ce qui est de la partie liée à

  6   l'accord. Si nous comparons les éléments de preuve versés au dossier

  7   concernant les infractions prétendues de Drago Nikolic avec le type de

  8   participation pris en considération par les Chambres de première instance

  9   du Tribunal pénal international pour le Rwanda, Chambres qui n'ont pas pu

 10   constater qu'il y avait un accord, ou que ces accusés avaient passé un

 11   accord, notre argument est tout simplement comme suit : il ne peut tout

 12   simplement pas être conclu, sur la base de ces prétendues infractions

 13   commises par Drago Nikolic, qu'il avait passé un accord visant à commettre

 14   un génocide, et nous nous concentrons ici sur l'actus reus de l'entente en

 15   vue de commettre le génocide.

 16   Pour conclure, Monsieur le Président, nous considérons qu'il n'y a

 17   aucun élément de preuve corroborant le chef d'accusation d'entente visant à

 18   commettre le génocide pour ce qui est notamment de Drago Nikolic. Il existe

 19   beaucoup d'éléments de preuve qui peuvent être pris en considération pour

 20   justifier cette conclusion, comme le niveau de l'accusé, qui était officier

 21   inférieur et lieutenant en second, tels que les connaissances de l'accusé,

 22   qu'il s'agisse de la directive 7 ou de la directive 7-1, donc non seulement

 23   s'agissant de ce qu'il aurait peut-être commis comme infraction, mais aussi

 24   concernant le contexte prétendu de cette affaire, et nous considérons que

 25   vous ne pouvez tout simplement pas conclure qu'il avait passé cet accord,

 26   et que par conséquent il doit être acquitté de cela devant cette Chambre.

 27   Pour conclure, Monsieur le Président, nous vous invitons à prendre en

 28   considération, à la fin de la procédure 98 bis, le verdict d'acquittement

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  1   pour les chefs d'accusation 2, 7 et 8, et nous considérons que le procès

  2   peut continuer sur la base des chefs 1, 3, 4, 5 et 6.

  3   Je profite de l'occasion pour mentionner que nous sommes sûrs qu'à la

  4   fin de ce procès, il ne sera pas possible pour la Chambre de première

  5   instance de conclure au-delà de tout doute raisonnable que l'accusé est

  6   coupable de ce chef d'accusation, ni des autres.

  7   Merci, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  9   Monsieur Lazarevic, vous avez besoin de combien de temps ?

 10   M. LAZAREVIC : [interprétation] A mon avis, 40 à 45 minutes, peut-être nous

 11   pouvons prendre la pause maintenant.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons prendre la pause

 13   maintenant.

 14   Pause de 25 minutes. Il est midi 21.

 15   --- L'audience est suspendue à 12 heures 21.

 16   --- L'audience est reprise à 12 heures 50.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous commencez à midi 50, Maître

 18   Lazarevic.

 19   M. LAZAREVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, dans cette intervention

 21   verbale conformément à l'article 98 bis, la Défense de M. Borovcanin va

 22   respecter les normes établies dans la pratique de ce Tribunal en évitant de

 23   répéter les arguments déjà présentés par Me Bourgon concernant la pratique

 24   judiciaire devant ce Tribunal pour ce qui est de l'article 98 bis.

 25   Compte tenu de l'analyse limitée, conformément à cet article et

 26   compte tenu aussi de l'impossibilité de présenter des arguments détaillés

 27   au sujet de chaque chef d'accusation dans le temps imparti à la Défense, la

 28   Défense Borovcanin va se concentrer seulement sur les chefs d'accusation 2

Page 21289

  1   et 8.

  2   La Défense de M. Borovcanin souhaite souligner qu'il n'existe pas

  3   d'éléments de preuve directs indiquant que, premièrement, M. Borovcanin

  4   aurait passé un quelconque accord avec qui que ce soit concernant le fait

  5   de commettre des crimes et délits; deuxièmement, qu'il aurait donné un

  6   ordre à qui que ce soit pour commettre un crime ou délit; et troisièmement,

  7   pour montrer qu'il aurait commis un crime ou délit personnellement ni qu'il

  8   aurait aidé, encouragé, incité ou de quelque autre manière aidé et

  9   encouragé à la planification, préparation et commission des crimes dont il

 10   est accusé.

 11   L'entente en vue de commettre le génocide constitue un accord passé

 12   par deux ou plusieurs personnes dans le but le commettre le crime de

 13   génocide. Cette définition est reprise de la décision dans l'affaire

 14   Niyitegeka et autres, décision de la Chambre d'appel dans l'affaire ICTR-

 15   99-46A, en date du 7 juillet 2006, paragraphe 92.

 16   L'actus reus de ce crime est l'entrée en accord lui-même. S'agissant

 17   de l'intention délictueuse pour ce crime, c'est l'intention de passer un

 18   tel accord. Et ceci est contenu dans la décision d'appel dans l'affaire

 19   Nahimana et autres, affaire numéro ICTR-99-52-A du 28 novembre 2007,

 20   paragraphe 894 et dans l'affaire Bagosora et autres, affaire numéro ICTR-

 21   98-41-T, décision en vertu de l'article 98 bis, paragraphe 12 du 2 février

 22   2005.

 23   Dans le chef d'accusation numéro 2, et ceci est expliqué de manière

 24   supplémentaire dans les paragraphes 34 à 37, l'on accuse Ljubomir

 25   Borovcanin de l'entente en vue de commettre le génocide, sanctionné par

 26   l'article 4(3)(b) du Statut de ce Tribunal. Au paragraphe 34 de l'acte

 27   d'accusation, il est stipulé que M. Borovcanin aurait passé un accord avec

 28   plusieurs personnes, y compris Radovan Karadzic, Milenko Zivanovic,

Page 21290

  1   Radislav Krstic, Zdravko Tolimir et d'autres accusés dans cette affaire

  2   dans les noms figurent dans l'annexe A de l'acte d'accusation visant à tuer

  3   les Musulmans aptes à combattre de Srebrenica qui ont été capturés ou qui

  4   se sont rendus après la chute de Srebrenica le 11 juillet 1995, et visant à

  5   déplacer le reste de la population musulmane de Srebrenica et Zepa de la

  6   Republika Srpska afin de les détruire.

  7   Il est ensuite dit dans ce même paragraphe que les faits qui constituent la

  8   base de ce chef d'accusation sont identiques aux faits qui sont énoncés

  9   dans l'acte d'accusation s'agissant de l'entreprise criminelle commune.

 10   Alors que dans le paragraphe suivant, paragraphe 35, il est écrit que

 11   l'accord avait été passé afin de détruire en partie les Musulmans de Bosnie

 12   en tant que groupe national, ethnique, racial ou religieux, en tant que

 13   tels.

 14   Dans le paragraphe 36 de l'acte d'accusation, il est écrit que Ljubomir

 15   Borovcanin avec d'autres officiers et d'autres unités de la VRS et du MUP,

 16   énumérés dans l'annexe A de l'acte d'accusation, a mis en œuvre l'acte

 17   d'entente et de l'entreprise criminelle commune et qu'il était un

 18   participant conscient de l'entreprise dont le but était d'exécuter de façon

 19   sommaire et d'enterrer des milliers d'hommes et de jeunes hommes musulmans

 20   de Bosnie capturés. Il est dit également que le plan initial prévoyait

 21   d'exécuter de façon sommaire plus de 1 000 hommes musulmans âgés d'entre 16

 22   et 60 ans qui ont été sélectionnés à Potocari les 12 et 13 juillet, pour

 23   que le 12 ou le 13 juillet ce plan englobe aussi une exécution sommaire de

 24   plus de 6 000 hommes et jeunes hommes musulmans capturés dans la colonne

 25   pendant qu'ils fuyaient l'enclave de Srebrenica au cours de la période

 26   entre le 12 juillet et approximativement le 1er novembre 1995.

 27   Ensuite, au paragraphe 37, il est écrit que M. Borovcanin, comme

 28   d'autres participants de l'entreprise, pouvait prévoir que, pendant et

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  1   après l'entreprise criminelle commune, les forces de la VRS et du MUP

  2   allaient commettre des crimes individuels et opportunistes et des actes

  3   d'expulsions décrits dans les paragraphes 31 à 48 de l'acte d'accusation.

  4   Dans l'acte d'accusation, il est indiqué que le prétendu plan de

  5   meurtre des centaines de Musulmans à Potocari avait été élaboré par Mladic

  6   et d'autres dans la soirée du 11 juillet et la matinée du 12 juillet 1995,

  7   et comme il a été déjà dit, ce plan aurait prétendument élargi ou modifié

  8   afin d'impliquer aussi un grand nombre d'hommes musulmans qui avaient

  9   commencé à se rendre aux forces serbes aux autres endroits le 12 juillet.

 10   Je cite ici les paragraphes 27 à 29 de l'acte d'accusation.

 11   La Défense souhaite faire remarquer qu'il n'y a pas d'élément précis

 12   dans l'acte d'accusation portant sur l'endroit, et plus précisément avec

 13   quelles autres personnes cet accord a été conclu, et rien n'est dit sur le

 14   fait s'il s'agissait là d'un accord tacite, explicite ou implicite. Dans

 15   les mémoires préalables au procès présentés par l'Accusation, nous

 16   constatons qu'il n'y a aucun détail sur cette question.

 17   La Défense souhaite déclarer ce qui suit dans la présentation de ses

 18   moyens, l'Accusation n'a fourni aucun élément de preuve qui permettrait de

 19   démontrer où et quand M. Borovcanin aurait prétendument conclu cet accord.

 20   Même si l'Accusation pense que certains éléments de preuve indirects

 21   pourraient être avancés, la Défense de M. Borovcanin souhaite présenter le

 22   critère de la preuve aux Juges de cette Chambre, ainsi que la jurisprudence

 23   de ce Tribunal et du tribunal du Rwanda, qui repose sur des éléments de

 24   preuve indirects, Nihimana et consorts, arrêt ce qui a été appelé

 25   "l'affaire des médias", le numéro de l'affaire ICTR-99-52-A, le 28

 26   novembre. La Chambre d'appel a statué comme suit sur les preuves indirectes

 27   qui permettent de prouver l'entente en vue de commettre de génocide :

 28   [en français] "Pour la Chambre d'appel est de savoir si à supposer

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  1   que cette coordination institutionnelle ait été établie. Un juge de fait

  2   raisonnable pouvait en conclure que la seule déduction raisonnable possible

  3   était que cette coordination institutionnelle résultait d'une résolution

  4   d'agir concrètement en vue de commettre le génocide. Or, ceci ne fait aucun

  5   doute que l'ensemble de ces conclusions factuelles sont compatibles avec

  6   l'existence d'un programme commun visant la commission du génocide. Il ne

  7   s'agit pas là de la seule déduction raisonnable possible." Paragraphe 910.

  8   [interprétation] Ce critère appliqué -- la décision rendue par la

  9   Chambre d'appel est le critère identique à celui qui devrait être appliqué

 10   dans le cadre de cette procédure et de l'article 98 bis qui se lit comme

 11   suit :

 12   "Si un juge raisonnable de fait serait en mesure de condamner sur la

 13   base des éléments présentés ?"

 14   En réexaminant les conclusions de la Chambre de première instance à

 15   propos de la thèse de la conspiration dans Nahimana et la, dans cette

 16   affaire la Chambre d'appel a insisté sur ce qui suit :

 17   [en français] "…considère que même si ces éléments peuvent être

 18   compatibles avec l'existence des ententes entre les appelants en vue de

 19   commettre le génocide, il ne suffit pas à eux seuls à établir l'existence

 20   d'une telle entente au-delà de tout doute raisonnable." Paragraphe 906.

 21   [interprétation] La conspiration ou l'entente exige l'existence d'un

 22   véritable accord entre plusieurs personnes, et cet accord doit être un

 23   accord véritable et l'objectif doit en être la commission d'un crime. Ce

 24   critère est important dans la mesure où le crime a été commis par le fait

 25   même de conclure un accord. A l'inverse de l'entreprise criminelle dans

 26   cette affaire, les auteurs n'ont pas besoin de commettre le crime sous-

 27   jacent pour que leur culpabilité soit établie, la culpabilité, dans le

 28   cadre de l'entente en vue de commettre. Ici, je fais référence au

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  1   paragraphe 844, Nahimana et consorts, l'arrêt du jugement en appel 894,

  2   arrêt rendu en 2007, Bagosora et consorts, le 2 février 2005, dans le cas

  3   de l'affaire du Tribunal du Rwanda, ICTR-99-50-T, décision rendue dans le

  4   cadre du 98 bis, le 22 novembre 2005, paragraphe 23; l'affaire Niyitegeka,

  5   le numéro est le ICTR-96-14, la date est celle du 16 mai 2003, le

  6   paragraphe est le paragraphe 423.

  7   En résumé, l'accord en soi constitue un crime. La Défense de M. Borovcanin

  8   fait valoir qu'aucun juge de fait raisonnable ne peut conclure, sur la base

  9   des éléments de preuve indirects présentés devant la Chambre, que M.

 10   Borovcanin a conclu un quelconque accord en vue de commettre le génocide

 11   avec quiconque. Cette allégation que j'évoque, je veux parler de

 12   l'allégation qui précise qu'il a conclu un accord, est tout à fait

 13   incroyable, pour les raisons suivantes :

 14   Si ce plan présumé en vue de tuer les hommes musulmans en âge de porter des

 15   armes de Srebrenica est le résultat d'un accord, d'après les dires de

 16   l'Accusation, la Défense de M. Borovcanin souhaite insister sur le fait

 17   qu'au cours de la présentation des moyens à charge de l'Accusation, aucun

 18   élément de preuve n'a été apporté dans ce sens, élément qui aurait permis

 19   de corroborer cette allégation, à savoir que M. Borovcanin avait en réalité

 20   conclu un tel accord. A l'appui de cet argument, la Défense souhaite

 21   invoquer le fait que pendant la présentation de ses moyens, l'Accusation a

 22   omis de prouver que M. Borovcanin avait assisté à aucune des réunions

 23   mentionnées, citées, au cours desquelles un tel accord aurait pu être

 24   conclu. Et l'Accusation, de même, n'a pas pu présenter des éléments qui

 25   auraient permis de prouver que quand bien même cela aurait été le cas, M.

 26   Borovcanin était, de toute façon, au courant de cela.

 27   La Défense, sur la base des éléments présentés par le témoin de

 28   l'Accusation, Zoran Petrovic, un journaliste qui travaillait pour la

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  1   télévision indépendante Studio B, qui pendant son séjour dans la région de

  2   Srebrenica et Bratunac au mois de juillet 1995, a accompagné M. Borovcanin

  3   quasiment à tout moment. Si la position adoptée par le Procureur, et telle

  4   qu'elle est exprimée dans l'acte d'accusation, est exacte, à savoir

  5   qu'entre la nuit du 11 et du 12 juillet 1995, M. Borovcanin a conclu un

  6   accord avec d'autres participants en vue de commettre le génocide, cet

  7   accord allégué a été étendu ou élargi plus tard, le 13 juillet. Donc la

  8   question logique qui se pose est celle-ci : si M. Borovcanin était au

  9   courant d'un tel accord, et s'il avait accepté cet accord, pourquoi aurait-

 10   il permis à un journaliste d'une chaîne de télévision indépendante de venir

 11   dans la région pour filmer tout ce qu'il jugeait intéressant ? Le simple

 12   fait que ce journaliste et reporter, M. Petrovic, était présent, est venu

 13   dans la région lorsque les 13 et 14 juillet il y avait encore des combats,

 14   et il a filmé cela, les Juges de la Chambre ont eu l'occasion de voir ceci

 15   pendant la présentation de moyens à charge de l'Accusation à plusieurs

 16   reprises, et le fait que les séquences vidéo tournées par M. Petrovic ont

 17   été diffusées par Studio B, la chaîne de télévision belgradoise, M.

 18   Borovcanin ne savait pas et n'aurait pas pu être au courant de ce qui se

 19   passait à ce moment-là. Tout ceci confirme que M. Borovcanin n'a conclu

 20   aucun accord en vue de commettre le crime du génocide, comme cela est

 21   allégué dans l'acte d'accusation.

 22   A cet égard, la Défense souhaite citer de courts extraits du compte rendu

 23   de la déposition de M. Petrovic qui illustrent au mieux cette allégation.

 24   M. Borovcanin ne savait absolument pas ce qui allait se passer pendant ces

 25   journées-là.

 26   Pendant l'interrogatoire principal, lorsqu'il a répondu aux questions de

 27   l'Accusation, le témoin Petrovic a déclaré, à la page 18 811 du compte

 28   rendu, le 5 décembre 2007, il a dit ce que je cite :

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  1   "D'après ce que je sais, il était en bonne santé, physiquement et

  2   mentalement. Sinon, il n'y aurait qu'un fou qui travaillerait contre ses

  3   propres intérêts et filmerait quelque chose, si on sait que vos gens se

  4   préparent à tuer quelqu'un ou à faire quelque chose d'inconvenant. Il est

  5   important et il convient que j'en parle. C'est rare d'imaginer qu'on serait

  6   autorisé à faire quelque chose comme cela, même dans l'armée américaine."

  7   De surcroît, pendant l'interrogatoire principal, le 5 décembre 2007, le

  8   même témoin a dit, à la page 18 804 du compte rendu, ce qui suit, et je

  9   cite :

 10   "Bien, est-ce que M. Borovcanin a jamais tenté de censurer ce que vous avez

 11   vu, est-ce qu'il vous a dit de filmer ceci et ne de pas filmer cela ou est-

 12   ce que vous étiez complètement indépendant et vous pouviez librement filmer

 13   ce que vous aviez envie de filmer ?"

 14   Réponse : "Bien. Alors, maintenant, on en vient à la question que je

 15   voulais poser : est-ce que vous pensez que quelqu'un, quelqu'un qui aurait

 16   tous ses esprits, autoriserait un journaliste à filmer des crimes de guerre

 17   et à le laisser en vie ? Est-ce que vous pensez que c'est normal que je

 18   sois ici aujourd'hui, comme je suis assis aujourd'hui, si ceci était arrivé

 19   comme je viens de le décrire ? Avez-vous jamais vu, et ici, nous allons

 20   faire une référence à la guerre récente en Irak, avez-vous jamais vu

 21   quelqu'un filmer quelque chose à partir de l'année 2003, quelque chose de

 22   ce genre ? Avez-vous jamais vu un journaliste, en particulier celui qui

 23   fait partie d'une unité de l'armée, filmer quelque chose de la sorte ?

 24   Donc, pourquoi cette armée devrait-elle réagir différemment ? Toutes les

 25   règles au sein de toutes les armées sont les mêmes. Il m'a permis de faire

 26   de mon travail, et je n'avais aucune raison de ne pas dire la vérité, et

 27   c'était une raison suffisante, et c'est la raison pour laquelle cette

 28   personne m'a permis de filmer ceci. Peut-être que quelqu'un d'autre ne lui

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  1   aurait autorisé. C'était une question de respect mutuel."

  2   Et pour finir, la Défense de M. Borovcanin souhaite citer une autre partie

  3   de la déposition de ce témoin pendant le contre-interrogatoire qui s'est

  4   déroulé le 6 décembre 2007. A la page 18 858 et 18 859 :

  5   "Ce qui m'intéressait, c'est votre estimation et vos impressions, et cela

  6   me suffit pour l'instant. Et maintenant, une dernière question eu égard au

  7   champ de Sandici. Est-ce que vous étiez libre de filmer ce que vous vouliez

  8   ? M. Borovcanin ne vous a jamais dit de ne pas filmer les gens qui étaient

  9   dans le pré, il ne vous a jamais dit : 'Ne filmer pas ce qui se passe, ne

 10   filmer les gens qui sont dans ce pré', rien de ce genre. Pouvez-vous

 11   confirmer cela ? Etait-ce ainsi ?"

 12   Réponse : "Bien sûr que non. Je souhaite vous rappeler, comme je l'ai dit à

 13   M. Nicholls un peu plus tôt, j'ai à deux reprises fait partie de cette

 14   unité pendant la guerre, et je me suis conduit de façon professionnelle.

 15   J'ai fait mon travail comme un professionnel, donc il était inutile que

 16   quiconque me surveille d'une manière ou d'une autre, cela a été tout à fait

 17   inutile, inutile qu'on me surveille ou qu'on vérifie ce que je filme

 18   puisqu'il m'avait déjà autorisé à filmer."

 19   Donc, compte tenu des critères retenus, la Défense de M. Borovcanin fait

 20   valoir que l'éventualité d'un accord qu'aurait conclu M. Borovcanin en vue

 21   de commettre le crime de génocide, ce critère ne peut pas être retenu, et

 22   M. Borovcanin non plus, qu'il avait connaissance à l'existence de ce type

 23   d'accord en vue de commettre ce crime. La Défense de M. Borovcanin, par

 24   conséquent, suggère aux Juges de la Chambre d'acquitter M. Borovcanin au

 25   titre du chef 2 de l'Accusation, conformément à l'article 98 bis.

 26   Je vais maintenant passer à la deuxième partie de notre présentation qui

 27   porte sur le chef 8 de l'acte d'accusation.

 28   Le chef 8 de l'acte d'accusation accuse M. Borovcanin du crime d'expulsion

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  1   en tant que crime contre l'humanité, punissable en vertu de l'article 5(d)

  2   du Statut du Tribunal, à savoir l'expulsion est un déplacement forcé de

  3   civils à partir d'une région dans laquelle ils vivent de façon tout à fait

  4   légale et, dans ce cas, il n'y a pas lieu de sanctionner conformément au

  5   droit international. Et compte tenu de ce qui est retenu par le droit

  6   international, la convention de Genève numéro 4 au protocole 2, indique que

  7   le crime d'expulsion est un crime qui diffère du transfert forcé, étant

  8   donné que dans le cas de l'expulsion, il est nécessaire de prouver que la

  9   population est déplacée en dehors du territoire dans lequel elle réside,

 10   alors que lorsqu'il s'agit d'un transfert, cet élément n'est pas retenu.

 11   Dans tous les autres cas, les deux crimes sont identiques.

 12   Le crime d'expulsion tel qu'il est inscrit dans l'article 5(d) du Statut du

 13   Tribunal et d'après l'arrêt rendu par la Chambre d'appel dans l'affaire

 14   Stakic, IT-97-24-A du 22 mars 2006, au paragraphe 278, il déclare :

 15   "L'élément moral, actus reus, d'expulsion consiste à déplacer par la force

 16   les personnes, à les chasser ou utiliser tout autre moyen pour les chasser

 17   d'une région dans laquelle ils vivent d'une façon tout à fait légale, de

 18   les obliger à passer la frontière de facto, que rien ne justifie en vertu

 19   de droit international. La Chambre d'appel pense qu'il n'est pas

 20   nécessaire, par conséquent, de disposer de l'élément nécessaire, le mens

 21   rea, que l'auteur a l'intention de déplacer de façon permanente ces

 22   personnes et de les faire passer la frontière. Le transfert forcé peut être

 23   considéré comme un acte sous-jacent par rapport à d'autres actes inhumains,

 24   à l'article 5(a) on parle de transfert forcé de personnes qui peuvent se

 25   dérouler à l'intérieur de frontières nationales, dans l'affaire Stakic,

 26   l'arrêt rendu par la Chambre d'appel Naletilic, le jugement rendu dans la

 27   Chambre d'appel, il s'agit de l'affaire IT-98-34-A du 3 mai 2006, au

 28   paragraphe 154.

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  1    L'INTERPRÈTE : Les habitants qui résident dans un territoire considéré

  2   comme de jure.

  3   M. LAZAREVIC : [interprétation] Donc, je vais ici, reprendre l'intitulé du

  4   paragraphe 50 de l'acte d'accusation, le paragraphe 71, en fait, on conclut

  5   que l'Accusation estime que l'entreprise qui consiste à déplacer par la

  6   force la population musulmane de l'enclave de Srebrenica est une entreprise

  7   criminelle conjointe. Aucun élément n'a été présenté à cet effet dans cette

  8   affaire. C'est tout à fait l'inverse. Et la Défense avance que pendant la

  9   présentation des moyens à charge, il a été clairement établi que la

 10   décision qui consistait à mettre en œuvre une offensive militaire contre

 11   l'enclave de Zepa, cette décision n'a été pas prise qu'après que les forces

 12   de la VRS aient pris le contrôle de l'enclave de Srebrenica, et jusqu'à ce

 13   moment-là, le seul but de l'opération de la VRS, c'était de séparer

 14   physiquement les deux enclaves et d'empêcher toute forme de communication

 15   entre ces deux enclaves, ce qui était parfaitement justifié au plan

 16   militaire.

 17   Au paragraphe 84 de l'acte d'accusation, on évoque que la position de

 18   l'Accusation, à savoir que M. Borovcanin, ainsi que l'accusé Popovic,

 19   Beara, Nikolic, Miletic, Gvero et Pandurevic ont, comme il est allégué,

 20   commis le crime d'expulsion de la manière suivante en utilisant les moyens

 21   suivants : en déplaçant des hommes par la force, des hommes musulmans, en

 22   les faisant sortir de Zepa, et en leur faisant traverser la Drina, et

 23   compte tenu des circonstances insupportables dans l'enclave parce qu'il n'y

 24   avait pas suffisamment d'aide et en intimidant et terrorisant la population

 25   en pilonnant la région et en menant à bien des attaques contre l'enclave,

 26   comme ceci est décrit au paragraphe 71 de l'acte d'accusation.

 27   La Défense de M. Borovcanin va analyser cette hypothèse de l'Accusation au

 28   paragraphe 84(a) de l'acte d'accusation et analysera chacun des moyens

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  1   allégués utilisés pour commettre le crime d'expulsion et se concentrera

  2   plus précisément sur Borovcanin et les unités qu'il commandait.

  3   Le premier moyen utilisé pour commettre le crime d'expulsion en tant que

  4   crime contre l'humanité, l'acte d'accusation déclare que des conditions de

  5   vie insupportables ont été créées dans l'enclave de Zepa en limitant

  6   l'approvisionnement en aide dans l'enclave. Il n'y a pas eu un seul élément

  7   de preuve présenté par la présentation des moyens à charge de l'Accusation

  8   qui indique que soit M. Borovcanin ou ses unités subordonnées, que ni l'un

  9   ni l'autre n'avait une influence directe ou indirecte sur la distribution

 10   d'aide à l'enclave et, par conséquent, n'avait aucun moyen de le

 11   restreindre.

 12   Lorsque l'on parle de faire parvenir l'aide dans l'enclave de Zepa, ceci ne

 13   peut être pris en considération qu'au cours de la période qui précède

 14   l'opération militaire, période pendant laquelle ni M. Borovcanin ni aucun

 15   de ses subordonnés ne se trouvait dans le secteur de Srebrenica et Zepa.

 16   Ce qui n'est pas contesté dès le début de ce procès entre la Défense de M.

 17   Borovcanin et l'Accusation est le fait que le 11 juillet 1995 il est arrivé

 18   dans le territoire de la municipalité de Bratunac, et que ce n'est qu'après

 19   son arrivée que les unités qu'il commandait ont commencé à arriver dans le

 20   territoire. Il est par conséquent clair que M. Borovcanin n'avait aucun

 21   moyen d'influencer en quoi que ce soit les questions qui avaient trait à

 22   faire parvenir l'aide dans l'enclave.

 23   Comme autre façon de commettre le crime d'expulsion des Musulmans de Bosnie

 24   de Zepa, c'était l'intimidation et le fait de terroriser la population en

 25   faisant pleuvoir des obus sur les quartiers civils et en effectuant des

 26   attaques contre l'enclave, comme cela est décrit au paragraphe 71 de l'acte

 27   d'accusation. Au cours de la présentation des moyens à charge, pas le

 28   moindre élément de preuve n'a été présenté qui permette d'étayer le fait

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  1   que soit M. Borovcanin ou l'une quelconque des unités qui lui étaient

  2   subordonnées aient participé au bombardement d'une partie quelconque de

  3   l'enclave de Zepa, y compris bien entendu les quartiers civils de cette

  4   enclave, ou qu'ils aient participé à aucune attaque contre l'enclave.

  5   En ce qui concerne les allégations susmentionnées qui figurent dans l'acte

  6   d'accusation, à savoir le transfert forcé de la population musulmane des

  7   enclaves de Srebrenica et de Zepa en tant qu'entreprise criminelle commune,

  8   la Défense de M. Borovcanin souhaite appeler l'attention sur la pièce à

  9   conviction P00181 qui est un ordre de l'état-major général de la VRS daté

 10   du 10 juillet 1995 et adressé au commandement du Corps de la Drina, ainsi

 11   qu'au commandement du 60e Régiment de protection motorisé. Au point 4 de

 12   cet ordre, il est indiqué que les opérations de combat contre l'enclave de

 13   Zepa doivent commencer le 12 juillet 1995. Il est évident que la décision

 14   concernant ces opérations offensives, qui pouvaient potentiellement

 15   conduire à l'occupation militaire de l'enclave de Zepa, n'a été prise

 16   qu'après que les forces de la VRS aient réussi à prendre l'enclave de

 17   Srebrenica, et jusqu'à ce moment-là, ou plutôt, avant cela il ne pouvait

 18   pas y avoir de plan qui existait visant à l'occupation de l'enclave de

 19   Zepa.

 20   A partir du même document, nous pouvons voir également qu'aucune des

 21   unités commandées par M. Borovcanin n'était visée par cet ordre. Cet ordre

 22   n'a pas été envoyé à M. Borovcanin, même à titre d'information. En

 23   particulier, la Défense de M. Borovcanin souhaite faire remarquer qu'au

 24   cours de la présentation des moyens à charge, il n'y a pas eu de

 25   contestation entre l'Accusation et la Défense concernant certaines des

 26   unités que commandait M. Borovcanin pour ce qui est d'une participation au

 27   combat qui a eu lieu à Baljkovica, ce qui se trouve dans une autre

 28   direction par rapport à l'enclave de Zepa, à quelque 100 kilomètres de là.

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  1   Par conséquent, au cours de la présentation des moyens à charge, pas un

  2   seul élément de preuve n'a été présenté qui pourrait étayer le fait selon

  3   lequel M. Borovcanin aurait en quoi que ce soit participé à la

  4   planification éventuelle d'attaques contre l'enclave de Zepa. Egalement,

  5   aucun élément de preuve n'a été présenté qui indiquerait que M. Borovcanin

  6   en avait été informé ou aurait été consulté par qui que ce soit au sein de

  7   la VRS.

  8   Enfin, la Défense de M. Borovcanin souhaite invoquer les positions du

  9   témoin expert militaire de l'Accusation, M. Richard Butler, tel qu'il s'est

 10   exprimé le 25 janvier 2008, à la page 20 500, et je le cite en anglais :

 11   "Lorsque vous analysiez les documents et tandis que vous prépariez

 12   vos rapports d'expert relatifs à l'opération de Zepa, vous n'avez trouvé

 13   aucune preuve concernant la participation de l'une quelconque des unités

 14   qui se trouvaient sous le commandant de M. Borovcanin ni de sa

 15   participation à l'opération de Zepa, c'est bien cela ?"

 16   Réponse : "Oui, Maître, je n'ai aucune information qui aurait trait

 17   au rôle de M. Borovcanin dans ce que nous pouvons appeler l'opération de

 18   Zepa."

 19   Par conséquent, la Défense affirme que, s'agissant de M. Borovcanin,

 20   l'Accusation n'a présenté aucun élément de preuve allant en faveur du chef

 21   d'accusation numéro 8, à savoir le délit d'expulsion en tant que crime

 22   contre l'humanité. C'est la raison pour laquelle la Défense propose que M.

 23   Borovcanin, conformément à l'article 98 bis, soit acquitté pour ce qui est

 24   de cet acte d'accusation.

 25   A la fin de son intervention, la Défense souhaite très brièvement

 26   traiter du paragraphe 31.1 de l'acte d'accusation. La raison en est le

 27   mémoire de l'Accusation lié au paragraphe 31.1(b) de l'acte d'accusation

 28   soumis le 25 octobre 2006; en effet, au paragraphe 31.1 de l'acte

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  1   d'accusation, sous (a) et (b), l'on traite du meurtre de neuf Musulmans de

  2   Bosnie. Mais dans la partie (a), il est dit que leurs cadavres ont été

  3   trouvés dans une forêt près de la base de l'ONU près de la route principale

  4   sur laquelle se trouve Budak, alors que dans la partie (b) il est écrit que

  5   les cadavres ont été trouvés dans le ruisseau derrière la "maison blanche"

  6   à environ 700 mètres de la base de l'ONU.

  7   Comme il vient d'être mentionné, l'Accusation, dans son mémoire

  8   intitulé requête de l'Accusation au sujet du paragraphe 31.1(b) de l'acte

  9   d'accusation en date du 25 octobre 2006, a indiqué que d'après eux il

 10   s'agissait d'un même événement et qu'ils allaient être d'accord avec la

 11   requête demandant acquittement s'agissant du sous-paragraphe 31.1(b), ce

 12   qui ressort de la page 2 de leur requête.

 13   Mis à part cela, au paragraphe 31.1(c) l'on dit que dans la matinée

 14   du 13 juillet les cadavres de six femmes musulmanes et de cinq hommes

 15   musulmans ont été trouvés dans le ruisseau, à proximité de la base de l'ONU

 16   de Potocari. S'agissant de ces actes d'accusation, aucun élément de preuve

 17   n'a été présenté pendant la présentation des éléments à charge. C'est la

 18   raison pour laquelle la Défense de M. Borovcanin, s'agissant des

 19   paragraphes 31.1(b) et 31.1(c) proposent que la Chambre de première

 20   instance acquitte notre client conformément à l'article 98 bis.

 21   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, même si la

 22   Défense de M. Borovcanin a décidé d'intervenir seulement s'agissant des

 23   chefs d'accusation susmentionnés, ceci ne veut nullement dire que la

 24   Défense considère que l'Accusation a présenté suffisamment de preuves sur

 25   la base desquelles un juge raisonnable de fait pourrait déterminer la

 26   culpabilité de M. Borovcanin pour un quelconque des crimes et délits dont

 27   il est accusé. C'est la raison pour laquelle la Défense fait appel à cette

 28   Chambre de première instance pour que celle-ci utilise ses pouvoirs

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  1   discrétionnaires et décide si elle peut acquitter notre client conformément

  2   à l'article 98 bis et s'agissant des autres chefs d'accusation également. 

  3   Merci.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur Lazarevic.

  5   Nous allons essayer de comprendre combien de temps encore il nous faudra

  6   pour les autres arguments.

  7   Maître Zivanovic, est-ce que vous allez présenter vos arguments ?

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, nous n'allons pas présenter

  9   d'arguments en vertu de l'article 98 bis.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Fauveau, et vous ?

 11   Mme FAUVEAU : Encore une heure vingt minutes.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez répéter, Maître Fauveau, s'il

 13   vous plaît. Il n'y a pas eu de traduction, mais vous avez dit une heure,

 14   une heure et quart.

 15   Maître Josse, Maître Krgovic.

 16   M. JOSSE : [interprétation] Nous allons présenter nos arguments. Je suppose

 17   que la Chambre rejette notre demande d'avoir le droit de réplique.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous devez partir de la base selon

 19   laquelle nous n'allons pas accorder cette demande.

 20   M. JOSSE : [interprétation] J'essaie d'utiliser exactement mes 90 minutes,

 21   compte tenu des circonstances je ne peux pas dire plus.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 23   Et ça laisse vous, Maître Haynes.

 24   M. HAYNES : [interprétation] S'agissant de mes arguments, ils vont

 25   ressembler de manière substantielle à ceux présentés par Me Bourgon. Donc

 26   il va falloir vingt minutes pour les présenter.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc nous allons probablement terminer

 28   demain, car si l'on additionne le temps de Mme Fauveau et de Me Josse, ça

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  1   veut dire trois heures au maximum, ça nous laisse encore 35 -- plutôt 45

  2   minutes pour Me Haynes. Ça veut dire que vous pouvez commencer avec votre

  3   réponse à partir de lundi.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Et si quelqu'un décide de changer de stratégie, est-ce qu'on peut

  6   simplement avoir une garantie pour être sûrs que l'on va commencer lundi,

  7   pour pouvoir être sûrs que l'on pourra se préparer pendant le week-end.

  8   Mais nous n'allons pas utiliser tout notre temps, c'est sûr.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 10   Nous pouvons lever l'audience jusqu'à demain matin.

 11   Pardon, Maître Bourgon --

 12   M. BOURGON : [interprétation] Je souhaite simplement profiter de l'occasion

 13   afin de demander permission à la Chambre, conformément à l'article 126,

 14   afin de répliquer à la réponse qui a été déposée par l'Accusation, réponse

 15   à la requête conjointe de la Défense contestant la recevabilité du rapport

 16   de Richard Butler.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. C'est accordé.

 18   M. BOURGON : [interprétation] Merci.

 19   --- L'audience est levée à 13 heures 39 et reprendra le vendredi 15 février

 20   2008, à 9 heures 00.

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