Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 24788

  1   Le jeudi 28 août 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière

  7   d'audience, je vous demanderais de bien vouloir citer l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  9   Messieurs les Juges, affaire IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin

 10   Popovic et consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Bonjour à tous. Du côté de

 12   l'Accusation, M. McCloskey et M. Mitchell. Je note simplement l'absence de

 13   M. Haynes du côté de l'équipe de la Défense.

 14   Bonjour, Madame.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, j'ai

 18   simplement quelques questions encore à poser.

 19   LE TÉMOIN: SVETLANA GAVRILOVIC [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   Contre-interrogatoire par M.McCloskey : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Gavrilovic.

 23   R.  Bonjour.

 24   Q.  Juste quelques questions de plus à vous poser et je pense pouvoir

 25   terminer assez rapidement. Je souhaitais simplement vous poser quelques

 26   questions, Madame. Après vous être entretenue avec les enquêteurs au mois

 27   de mars et au mois d'avril, me semble-t-il, les enquêteurs pour M. Beara,

 28   s'agissait-il de M. Stanic, c'est bien son nom ?

Page 24789

  1   R.  Oui, effectivement. M. Stanic.

  2   Q.  Après son départ, qu'avez-vous dit à Mira Cekic à propos du sujet de

  3   vos entretiens avec M. Stanic ?

  4   R.  Je lui ai dit qu'il m'avait demandé si je me souvenais du 14 juillet

  5   1995, et c'est là le soir où elle m'a téléphoné me disant que Ljubisa Beara

  6   serait sur place et Nada également. Il m'a demandé si je souhaitais moi et

  7   mon mari les voir. Et j'étais censée me souvenir de ce dont nous avions

  8   parlé ce soir-là.

  9   Q.  Après le départ de M. Stanic, combien de temps après vous être

 10   entretenue avec M. Stanic ce jour-là, au bout de combien de temps avez-vous

 11   parlé de cela à Mira ?

 12   R.  Le lendemain. Je lui ai passé un coup de fil, parce que je ne la

 13   trouvais pas ce soir-là, donc je lui ai téléphoné le lendemain. Je lui ai

 14   dit que M. Stanic était venu me trouver et m'avais demandé si je souhaitais

 15   donner ma version de ce qui s'est passé ce jour-là, donc au courant de la

 16   matinée du lendemain je l'ai appelée.

 17   Q.  Très bien. Et vous avez dit à Mira, vous avez décrit le souvenir que

 18   vous aviez gardé de cette fête d'anniversaire. Vous lui avez dit tout ce

 19   dont vous vous souveniez de cette journée-là, n'est-ce pas ?

 20   R.  Voyez-vous, ça n'était pas nécessaire puisqu'elle était présente elle-

 21   même ce jour-là. C'était chez eux, à leur résidence, même si effectivement

 22   elle n'était pas présente tout le temps. Vous savez, elle était l'hôtesse,

 23   donc il fallait qu'elle fasse des allers et retours du côté de la cuisine

 24   pour apporter à boire ou à manger, et cetera. En fait, elle savait de quoi

 25   nous parlions.

 26   Q.  Comme vous l'avez dit, vous avez dit, "Je lui ai dit qu'il m'avait

 27   demandé si je me souvenais du 14 juillet 1995, c'est le soir où elle

 28   m'avait invitée, enfin, elle m'avait téléphoné pour me dire que Ljubisa et

Page 24790

  1   Nada seraient chez elle, elle m'a demandé si mon mari et moi-même

  2   souhaitions les voir. Et nous étions censés -- enfin, j'étais censée me

  3   souvenir de ce dont nous avions parlé." Grosso modo, vous en avez parlé de

  4   cela avec Mira ?

  5   R.  Oui, en principe, oui, effectivement. Ceci dit ça n'était pas

  6   nécessaire puisque nous étions tous ensemble là ce jour-là.

  7   Q.  Oui, mais c'était il y a longtemps, et en en parlant avec Mira, est-ce

  8   que vous avez peut-être pu l'aidée à se souvenir de ceci ou cela ?

  9   R.  Non. Elle s'en souvenait parce que Toma, son époux, plaisantait à

 10   propos de notre voyage à bord de l'Orient Express qui n'avait jamais eu

 11   lieu, en disant qu'il y avait un nouveau resto qui avait ouvert ses portes

 12   chez nous en ville et qui s'appelait justement Orient Express et qui était

 13   décoré comme un wagon de l'Orient Express, et nous a dit en plaisantant d'y

 14   aller en disant, bien voilà, vous n'avez qu'à imaginer que vous êtes sur le

 15   train. Donc ça, cette plaisanterie, elle s'en souvenait très bien, donc

 16   elle s'en souvenait.

 17   Q.  Soit. Très bien. A quel moment avez-vous eu l'occasion de la voir de

 18   visu après cet entretien téléphonique que vous avez eu avec elle et au

 19   cours duquel vous avez parlé de l'entretien que vous aviez eu avec M.

 20   Stanic ?

 21   R.  Je ne sais pas vraiment quand j'ai eu l'occasion de la voir face à

 22   face, deux semaines, trois semaines après ce coup de fil. On ne se voyait

 23   pas tous les jours. Vous savez, on se rencontrait de temps en temps.

 24   Q.  Donc vous nous dites, ici, qu'en fait vous ne vous souvenez pas très

 25   bien à quel moment vous avez eu l'occasion de la voir de visu. Vous pouvez

 26   me donner une vague idée au moins, ou est-ce que vous me dites que vraiment

 27   vous vous n'en souvenez pas; c'est exact ?

 28   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire exactement; vous voulez dire à quelle

Page 24791

  1   occasion nous nous sommes réunies toutes les deux, c'est à cela vous faites

  2   allusion ?

  3   Q.  Non. J'essaie simplement de savoir plus ou moins à quel moment vous

  4   avez eu l'occasion d'avoir un contact de visu avec Mira.

  5   R.  Après l'entretien que j'ai eu avec M. Stanic.

  6   Q.  Oui, mais combien de temps après ?

  7   R.  Je vous l'ai dit. Je dirais, à peu près deux ou trois semaines plus

  8   tard.

  9   Q.  Et à quel endroit ?

 10   R.  Chez moi. Elle est passée me voir, parce que comme je vous le disais,

 11   je suis esthéticienne. Elle, elle avait des petits problèmes au niveau de

 12   son visage, donc elle est venue me trouver pour un petit traitement, et

 13   c'est à cette occasion, que je l'ai vue.

 14   Q.  Excusez-moi, mais je suis en train de voir quelque chose, comme ça dans

 15   mon esprit, mais je vous imagine dans un salon de beauté, vous êtes en

 16   train de lui parler tout en lui apportant les soins nécessaires. C'est un

 17   truc de ce genre comme ce qu'on voit dans les films ?

 18   R.  Oui, effectivement.

 19   Q.  Ensuite, vous en avez discuté de cette question avec elle à ce moment-

 20   là ?

 21   R.  Oui. Vous savez, nous nous entretenons toujours avec mes clients, on

 22   parle de chose et d'autre, comme vous probablement. On parle de nos

 23   familles, on parle des problèmes qu'on a, des problèmes que j'avais avec

 24   mon fils qui était à l'université, qui ne s'en sort pas très bien. On a

 25   également parlé de Nada. On a dit qu'elle nous faisait de la peine, qu'on

 26   était désolées de voir tout ce qui leur aurait été arrivé, qu'en fait

 27   c'était des gens bien, et voilà, et cetera.

 28   Q.  Donc vous avez parlé de Nada Beara, de Nada et de son mari, des

Page 24792

  1   problèmes qu'ils connaissaient, des choses dont vous avez parlé hier et

  2   aujourd'hui. Avec Mira vous en avez parlé, n'est-ce pas ?

  3   R.  En fait, on a surtout parlé de Nada et de leurs enfants, c'est-à-dire

  4   ceux qui sont encore chez nous, dans notre ville. On allait leur rendre

  5   visite. Donc on a parlé de Nada et de ses problèmes personnels.

  6   Q.  Non, ça je ne m'y intéresse pas particulièrement. Ce qui m'intéresse,

  7   en revanche, c'est le groupe de personnes présent à la fête de 1995 et le

  8   sujet qui a été évoqué, en fait, que M. Stanic lors de votre entretien.

  9   Vous avez parlé à Nada de ceci au salon de beauté, j'imagine ?

 10   R.  Vous voulez dire Mira.

 11   Q.  Oui, oui, je voulais dire Mira. Désolé.

 12   R.  Oui, bien entendu, on en a discuté avec Mira. On se posait la question

 13   justement, on se demandait si on allait devoir aller à La Haye pour en

 14   parler. Donc grosso modo, c'est de cela que nous avons parlé. On s'est posé

 15   la question de savoir si ce serait agréable, désagréable comme expérience

 16   pour nous et s'il faut le faire, bien, on s'exécutera et on dira ce que

 17   nous savons et nous dirons la vérité.

 18   Q.  Donc vous, vous savez probablement que Mira est présente, également,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, bien sûr, que je le sais, oui, oui.

 21   Q.  Donc vous avez eu l'occasion de vous entretenir avec elle à nouveau

 22   avant de venir toutes les deux, ici, à La Haye, n'est-ce pas, de ce sujet

 23   évoqué avec M. Stanic, n'est-ce pas ?

 24   R.   Oui. Nous n'avions aucune raison d'en parler, ceci dit, parce que là

 25   ce que je vous dis maintenant c'est la vérité, vraiment. Et ce qu'elle va

 26   vous dire ce sera la vérité aussi, et tout ce dont nous avons discuté,

 27   c'est forcément la vérité.

 28   Q.  Oui, bien entendu. Mais vous savez, c'est normal pour des témoins qui

Page 24793

  1   viennent déposer ici qu'ils discutent les uns avec les autres de ce dont

  2   ils vont parler, surtout s'il s'agit des mêmes sujets. Ça c'est tout à fait

  3   normal. Simplement, je vous pose la question. A quel moment avant de venir

  4   à La Haye, vous êtes-vous entretenue pour la dernière fois avec Mira de ce

  5   sujet-là, le sujet donc que vous avez abordé avec M. Stanic ?

  6   R.  Bien, nous en avons discuté, pas tellement du sujet en question. On a

  7   discuté de la façon dont nous ferions le déplacement, comment nous allions

  8   nous préparer pour ce voyage. Vous savez, il n'y avait besoin de discuter

  9   du sujet, nous étions chez elle ce soir-là, tout s'est passé chez elle.

 10   Q.  Donc vous n'avez pas parlé de cette soirée du tout avant de venir à

 11   Belgrade -- pardon, avant de venir à La Haye depuis

 12   Belgrade ?

 13   R.  Croyez-moi, non.

 14   Q.  Mais alors, où avez-vous parlé de votre voyage, c'était chez vous, chez

 15   elle, par téléphone ?

 16   R.  Non, on s'est parlé au téléphone avant notre départ.

 17   Q.  Oui, mais quel jour ?

 18   R.  Bien, nous sommes arrivées ici le 24, donc, quoi, deux jours avant

 19   probablement. On a dû avoir cet entretien le 21 ou le 22, je ne suis pas

 20   certaine. Mais vous savez, nous n'avions discuté que des vêtements qu'il

 21   allait falloir qu'on amène avec nous, est-ce qu'il allait faire froid là-

 22   bas, est-ce qu'il allait faire chaud, ce genre de choses.

 23   Q.  Je vais vous poser le même genre de questions à propos de Nada Beara.

 24   Je sais bien que je prends un peu d'avance sur ce que je prévoyais de

 25   faire, mais après avoir parlé à M. Stanic en mars ou en avril pour la

 26   première fois, est-ce que vous avez contacté Nada Beara suite à cet

 27   entretien ?

 28   R.  Non, non, pas à propos de cette question-là.

Page 24794

  1   Q.  Après vous être entretenue avec M. Stanic, quel a été la première fois

  2   que vous vous êtes entretenue avec Nada à propos de cette question, celle

  3   de la fête d'anniversaire ?

  4   R.  Je n'ai jamais discuté de cette date d'anniversaire avec Nada. Nada

  5   avait appris que j'allais venir témoigner ici à La Haye cinq jours avant

  6   notre départ, à peu près, probablement. Nous ne voulions pas l'ennuyer.

  7   Elle était déjà très stressée. Elle avait déjà assez de problèmes comme ça.

  8   Elle aurait probablement été très inquiète, pourquoi fallait-il que nous

  9   ayons à déposer devant un tribunal, chose désagréable s'il en est. Donc

 10   nous ne voulions pas être une source supplémentaire d'angoisse pour elle.

 11   En fait, elle ne savait pas que j'avais été appelée à témoigner ici.

 12   Q.  Donc vous n'avez jamais parlé à Nada de cette fête d'anniversaire ?

 13   R.  Jamais, jamais.

 14   Q.  Mais ça va, ce n'est pas trop éprouvant pour vous ici jusque-là ?

 15   R.  Non, ça va.

 16   Q.  Merci beaucoup.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

 18   questions.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur McCloskey. Des

 21   questions supplémentaires, Maître Nikolic ?

 22   M. NIKOLIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je n'ai pas

 23   d'autres questions.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 25   Madame Gavrilovic, comme je vous l'avais promis hier, nous en avons fini de

 26   votre déposition. Au nom des Juges de la Chambre, je vous remercie d'être

 27   venue jusqu'ici pour déposer et je vous souhaite au nom de chacun d'entre

 28   nous un bon retour chez vous.

Page 24795

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous.

  2   [Le témoin se retire] 

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il n'y a pas de demande de versement au

  4   dossier de quelque document que ce soit, j'imagine ?

  5   M. NIKOLIC : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Cela vaut pour les deux parties ?

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, nous n'avons rien à verser au dossier

  8   non plus.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Voilà qui conclut la

 10   déposition de Mme Gavrilovic. Nous avions dit avant de commencer cette

 11   audience, Maître Ostojic, que vous souhaitiez vous entretenir avec les

 12   Juges après la conclusion de la déposition de ce témoin, Maître Ostojic.

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 14   Monsieur les Juges, deux questions d'intendance que je souhaitais évoquer.

 15   Hier, nous avons demandé le versement au dossier de la pièce 2DIC, 210,

 16   211, et 212, ces documents ont été identifiés au préalable et déposés sous

 17   pli scellé. Nous demanderions, par conséquent, à la Chambre pour les termes

 18   2DIC, 210, 211 et 212 à être placés sous pli scellé également, parce que je

 19   crois qu'il y apparaît les noms pour certaines des écoutes téléphoniques.

 20   Voilà pour cette première question d'intendance.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Ce sera fait.

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Lorsque j'ai eu

 23   l'occasion de m'entretenir avec les membres de l'équipe de l'Accusation

 24   pour les questions de calendrier, et cetera, nous nous sommes mis d'accord

 25   pour dire ceci à la Chambre, nous avons des témoins qui sont sur place.

 26   Nous sommes prêts à poursuivre dès demain, nous ne savons pas combien de

 27   temps il faudra pour entendre ce témoin. Il se peut que nous ayons un

 28   témoin et après avoir parlé à l'Accusation, nous pensions que nous nous

Page 24796

  1   étions mis d'accord, mais lorsque je suis arrivé chez moi j'ai eu

  2   l'occasion de m'entretenir avec certains témoins.

  3   Il va falloir que je réorganise le calendrier des dépositions et

  4   l'Accusation a fait la même demande, pour un témoin en tout cas. Ils ont

  5   souhaité que le témoin qu'on devait entendre la semaine prochaine soit

  6   entendu le 8, à savoir lundi de la semaine prochaine, parce que le conseil

  7   tâchera d'être présent soit par lien vidéo, soit en personne. Nous allons

  8   essayer de veiller à ce que tout cela soit fait pour des raisons nombreuses

  9   dont des raisons personnelles, nous souhaiterions revoir un petit peu le

 10   calendrier des dépositions.

 11   Quoi qu'il en soit, je pense qu'avec M. Alaica, ça ne devrait pas poser de

 12   problème aujourd'hui, Mme Cekic non plus, et M. Milan Kerkez pour

 13   aujourd'hui, mais en principe cela devrait être tout pour aujourd'hui.

 14   Demain nous verrons, parce qu'il va falloir que je voie avec mon expert qui

 15   était censé déposer demain si nous allons pouvoir l'entendre demain ou pas.

 16   Ceci était dit, j'ai indiqué à mon éminent confrère que nous sommes prêts à

 17   poursuivre avec M. Subotic dès demain. Le Pr Wagenaar souhaiterait déposer

 18   demain.

 19   Quoi qu'il en soit, il faudra que je vous dise exactement ce qu'il en est,

 20   mais une fois que les trois témoins d'aujourd'hui et de demain auront été

 21   entendus, je tenais simplement à en aviser tant la Chambre que mes éminents

 22   confrères.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci pour ces informations. Mais en

 24   intervalle, sachez qu'un certain nombre de questions d'intendance doivent

 25   être réglées de notre côté également. La première étant la suivante, Maître

 26   Ostojic : le 1er juillet, il y a de cela pas mal de temps maintenant, vous

 27   aviez introduit une requête afin que le témoin Osman Dizdanovic [comme

 28   interprété] soit entendu par vidéoconférence et certains arguments oraux

Page 24797

  1   avaient été présentés le lendemain, le 2 juillet ayant trait à ceci, suite

  2   à quoi nous avons pris note du fait, et ça le 17 juillet, que vous aviez

  3   introduit une nouvelle liste de témoins 65 ter, le nom de M. Dizdanovic

  4   [comme interprété] avait été retiré de cette liste en tant que témoin. Est-

  5   ce que vous le confirmez ? Parce que si vous le confirmez, peut-on

  6   poursuivre et déclarer votre requête nulle et non avenue ?

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, absolument. Vous pouvez la considérez

  8   comme tel.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Donc cette requête du 1er

 10   juillet qui a trait au témoignage de M. Dostajevic [comme interprété] est

 11   déclarée nulle et non avenue.

 12   Monsieur Bourgon et Madame Nikolic et Monsieur McCloskey, le 29 juillet,

 13   une requête a été introduite au nom de l'accusé Nikolic demandant des

 14   mesures de protection et une divulgation différée de l'identité d'un témoin

 15   spécifique, annexes C [comme interprété] et B. Le 31 juillet, le bureau du

 16   Procureur - c'est en tout cas ce que montre nos fichiers - a indiqué qu'il

 17   ne formulait aucune objection à ce que soient mises en place des mesures de

 18   protection, c'est-à-dire déformation des traits du visage et de la voix.

 19   Nous sommes convenus avec la Défense que l'identité du témoin ne serait

 20   divulguée que la semaine du 18 août. J'ajoute ceci à titre personnel, une

 21   fois que nous avons reçu la confirmation selon laquelle l'identité du

 22   témoin était divulguée, les mesures de protection seraient accordées.

 23   Par conséquent, nous souhaiterions que vous, Monsieur McCloskey notamment,

 24   nous disiez si l'identité de ce témoin vous a été communiquée, oui ou non

 25   avant le 18 août ?

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Y a-t-il accord, par

 28   conséquent, peut-on octroyer ces mesures de protection ? Voilà, les mesures

Page 24798

  1   de protection sont octroyées, déformation des traits du visage et de la

  2   voix. Les détails vous seront communiqués le moment venu.

  3   Maître Ostojic et Monsieur McCloskey à nouveau, c'est à vous que je

  4   m'adresse, très récemment - et je dois dire que tout cela est arrivé assez

  5   tard - l'équipe de la Défense de M. Beara a introduit une nouvelle requête

  6   visant à entendre Seymour Jovanovic, disons, parce que ce témoin serait

  7   entendu par vidéoconférence. Il y a plusieurs détails ensuite et les

  8   raisons pour lesquelles le témoin ne pouvait pas se rendre par avion à La

  9   Haye compte tenu de son état de santé.

 10   Conformément à notre calendrier actuel dont j'ai compris qu'il risquait de

 11   devoir être ajusté de-ci de-là, Maître Ostojic, vous allez nous le dire,

 12   cet individu, Seymour Jovanovic, est le troisième témoin, donc il devait

 13   déposer la semaine prochaine, n'est-ce pas, fin de la semaine commençant le

 14   1er septembre. C'est en tout cas ce qui figure dans le dossier que vous avez

 15   présenté au mois d'août, le 15 août.

 16   Nous n'avons pas encore entendu la réponse du bureau du Procureur et, par

 17   conséquent, pour l'instant ce que nous souhaiterions essentiellement, c'est

 18   de savoir dans quelle mesure le bureau du Procureur est à même de nous dire

 19   quelle est leur position sur cette question et ce qu'ils pensent de cette

 20   requête.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai compris qu'il

 22   s'agit d'un problème de nature médicale et nous avons reçu des informations

 23   là-dessus en serbe, et nous sommes en train de voir de quel type de

 24   problème médical il s'agit. Nous ne savons pas encore de quoi il s'agit

 25   mais nous le saurons bientôt. Je pense que nous pourrons vérifier cela

 26   aujourd'hui. Mme Soljan n'est pas avec nous cette semaine et c'est pour

 27   cela que les choses sont en retard, mais nous allons résoudre cela bientôt.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Ostojic, pourriez-vous nous

Page 24799

  1   dire à peu près quand ce témoin pourrait témoigner.

  2   M. OSTOJIC : [interprétation] Nous venons d'apprendre ce problème, à savoir

  3   notre requête a été déposée et c'est donc notre réponse pour ce qui est de

  4   la remarque de la Chambre à propos de notre retard. Je pense qu'une partie

  5   de ces informations sont en anglais pour ce qui est du fichier médical.

  6   Je pense que nous allons convoquer ce témoin le 9 ou le 10 si cela

  7   convient à la Chambre et à l'Accusation. Selon notre programme initial, il

  8   devrait témoigner la semaine prochaine, mais nous pouvons le convoquer

  9   n'importe quand, cela dépend du programme de travail.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Supposons qu'il s'agit d'un

 11   problème médical et c'est pour cela que l'autre partie ne s'opposerait pas

 12   à ce que cette requête soit adoptée. Nous pourrons donc, au moment où nous

 13   commencerons à considérer tous les détails concernant ces problèmes, nous

 14   allons essayer de convoquer ce témoin le plus tôt possible.

 15   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vais le faire.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense qu'il faut en informer une

 17   semaine ou dix jours avant.

 18   M. OSTOJIC : [interprétation] C'est pour cela que nous avons proposé le 9

 19   ou le 10 à peu près. Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Hier, il y a eu un incident infortuné.

 21   Nous l'appelons "infortuné" parce que nous considérons que cela n'aurait

 22   pas dû arriver. Le 31 juillet, avant les vacances judiciaires, nous avons

 23   eu quelques échanges d'information entre Me Ostojic et l'Accusation, nous

 24   aurions aimé savoir quel serait le premier témoin des dix témoins à

 25   témoigner après les vacances judiciaires. Nous voudrions savoir s'il y a

 26   des problèmes qui ne sont pas résolus par rapport à ces témoins pour

 27   pouvoir les résoudre.

 28   Nous avons appris que l'équipe du conseil de la Défense de M. Beara,

Page 24800

  1   pendant les vacances judiciaires, a déposé les résumés révisés du témoin 65

  2   ter, pendant les vacances judiciaires, le 18 août, cette même équipe a

  3   déposé une autre requête informant que les résumés complémentaires 65 ter

  4   seraient déposés le plus tôt possible.

  5   Nous aimerions savoir - parce que vous avez dit que vous aviez une réunion

  6   hier soir - nous aimerions savoir s'il y a des informations complémentaires

  7   pour ce qui est du témoin suivant, Milan Alaica, parce que nous devons

  8   autoriser à ce qu'il soit ajouté à la liste de témoins 65 ter.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que

 10   pour ce qui est du témoin suivant, il n'y a pas de problèmes. Je pense que

 11   pour ce qui est des témoins Kerkez et Cekic, nous avons déposé des résumés

 12   supplémentaires 65 ter après les avoir rencontrés à Belgrade, il y a une

 13   semaine ou deux semaines, juste avant le commencement du procès après les

 14   vacances judiciaires.

 15   J'ai compris que pour ce qui est de Milan Alaica, toutes les informations

 16   65 ter ont été déposées. Nous n'avions pas parlé de cela hier lors de notre

 17   réunion, parce que ces questions n'ont pas été soulevées, il y avait

 18   d'autres questions qui ont été soulevées concernant d'autres témoins.

 19   Nous avons déposé un projet d'un affidavit au Procureur, parce qu'il a

 20   demandé cela et d'ici la fin de la semaine, nous allons communiquer le

 21   document.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je me souviens de Milan Alaica en

 23   particulier, parce qu'il était parmi les témoins dont les résumés des

 24   dépositions ont été considérés comme pas suffisants avec les autres quatre

 25   témoins : le Témoin 2DW55, c'est l'un de ces témoins, ensuite le Témoin

 26   2DPW16, ensuite 2DW21, 2DWPW20. Ce sont les témoins qui devraient venir

 27   témoigner. Est-ce qu'ils vont rester sur la liste ou pas, c'est à Me

 28   Ostojic à voir et à réviser cette liste.

Page 24801

  1   Ensuite, le 2DW50; Milos Tomovic. Maintenant, je parle de deux autres

  2   témoins. Le Témoin 2DW77 ainsi le Dr Srdja Trifkovic.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey, c'est à vous de

  5   confirmer si cela vous convient pour ce qui est de ces résumés des

  6   dépositions de ces témoins. Pour ce qui est d'autres témoins, nous

  7   considérons que les résumés de leurs dépositions sont suffisants.

  8   Monsieur McCloskey.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est du

 10   témoin suivant, nous avons reçu le résumé supplémentaire, nous pensons que

 11   cela suffit pour le moment et nous continuons nos discussions avec l'équipe

 12   du conseil de la Défense de Beara, parce que nous avons d'autres requêtes

 13   pour ce qui est de plus de détails par rapport à ces résumés. Nous

 14   communiquons tout le temps pour pouvoir vous donner des informations

 15   précises, pour ce qui est d'autres témoins, je devrai vérifier cela avec M.

 16   Thayer davantage là-dessus.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pour ce qui est du témoin suivant qui,

 18   strictement parlant, n'est pas encore ajouté à la liste 65 ter, le

 19   Procureur a soulevé des objections, parce qu'il a été dit que sa déposition

 20   serait cumulative par rapport à d'autres témoignages concernant la moralité

 21   de M. Beara, à savoir l'absence de l'intention discriminatoire. Cela a été

 22   présenté dans l'une des requêtes déposées avant et nous pouvons remarquer

 23   que huit témoins déposeront sur la moralité de M. Beara et l'absence de

 24   l'intention discriminatoire par rapport à ces huit personnes, deux

 25   personnes ont été retirées de la liste, et deux ont déjà témoigné.

 26   Est-ce que vous maintenez votre position, Monsieur McCloskey, pour ce qui

 27   est d'autres témoins qui doivent venir témoigner, ou bien vous voulez

 28   retirer ce que vous avez dit par rapport à d'autres témoins qui devront

Page 24802

  1   venir témoigner ?

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais en

  3   discuter avec M. Thayer, parce qu'il a préparé les informations concernant

  4   d'autres témoins que vous venez de mentionner. Pouvez-vous m'accorder

  5   quelques secondes pour que je puisse en parler avec M. Thayer.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Entre-temps, Monsieur McCloskey, est-ce

  7   qu'on peut faire droit à la requête concernant le témoin suivant, Milan

  8   Alaica ?

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je ne vois pas quelque raison pour ne pas

 10   faire droit à cette requête.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc pour ce qui est du témoin Milan

 12   Alaica, on n'a fait droit à la requête concernant ce témoin.

 13   Madame l'Huissière, vous pouvez faire entrer le témoin dans le prétoire.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer.

 15   M. THAYER : [interprétation] Bonjour.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je n'ai pas du tout vu que vous étiez

 17   présent dans le prétoire parce que la colonne m'obstruait la vue.

 18   M. THAYER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

 20   M. THAYER : [interprétation] J'aimerais dire quelque chose pour ce qui est

 21   du Témoin 2DW55, il a un pseudonyme temporaire 2DPW16 et il s'agit de la

 22   même personne. Nous avons reçu la note de la séance de récolement par

 23   rapport à ce témoin et je pense qu'on discutera là-dessus ici et Me Ostojic

 24   a fait mention de cette personne en parlant du calendrier et de la date du

 25   8 septembre où ce témoin pourrait témoigner.

 26   Pour ce qui est de 2DW21, je pense que ce témoin a déjà témoigné si le

 27   chiffre -- si ce numéro est exact, il s'agit de Milan Vojinovic. Il est

 28   possible que j'aie fait le contre-interrogatoire de ce témoin. Je pense,

Page 24803

  1   pour ce qui est de 2DWPW20, nous n'avons pas d'information pour ce qui est

  2   de ce témoin et nous ne savons pas si on peut prononcer son nom dans le

  3   prétoire, mais ce nom n'a pas été prononcé jusqu'ici.

  4   M. OSTOJIC : [interprétation] Pourrais-je aider ? Il s'agit de Perica

  5   Vasovic, il a déjà témoigné.

  6   M. THAYER : [interprétation] Il s'agit de ce témoin qui porte ce numéro

  7   2DW20, il a déjà témoigné. Donc quant aux résumés, je pense que tout va

  8   bien. J'ai envoyé un message électronique à mes collègues où nous avons

  9   parlé de cela. Et il y a d'autres requêtes pendantes pour ce qui est du

 10   témoin à venir : ce sont 2DW5, M. Mitrovic; 2DW50; et par rapport au témoin

 11   2DW77, plusieurs requêtes ont été déposées par rapport à cela et il y aura

 12   d'autres informations par rapport à cela. 2DW50, M. Tomovic.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons revenir là-dessus après vos

 15   consultations.

 16   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais tirer un

 17   point au clair. Si vous regardez la liste de témoins pour le mois de

 18   septembre - et cette liste a été communiquée le 14 ou le 15 août, où figure

 19   les noms des témoins pour la cinquième et sixième semaine, nous avons parlé

 20   de cela hier soir - je pense qu'il y a deux témoins sur cette liste et je

 21   pense que ces deux témoins ont été retirés de cette liste, ce sont 2DW58 a

 22   été accepté en tant que témoin 92 bis concernant l'ordonnance de la Chambre

 23   du 10 juillet. Donc je pense qu'il ne viendra pas.

 24   Ensuite 2DW61 que mon collègue a retiré dans sa requête du 16 juillet, donc

 25   ce témoin ne viendra pas témoigner. Il y a trois autres témoins que mon

 26   éminent collègue a retirés, ce sont 2DW30, 54 et 53.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Maintenant nous pouvons

 28   commencer le témoignage du nouveau témoin.

Page 24804

  1   Bonjour, Monsieur. Monsieur, pouvez-vous m'entendre ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous entends.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour et bienvenu au Tribunal.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous allez commencer à déposer, mais

  6   avant de le faire, vous devrez prononcer la déclaration solennelle. Le

  7   texte de la déclaration solennelle se trouve sur la feuille de papier que

  8   Mme l'Huissière va vous remettre. Veuillez vous lever, s'il vous plaît, et

  9   prononcer la déclaration solennelle.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 11   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 12   LE TÉMOIN: MILAN ALAICA [Assermenté]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci. Veuillez vous

 15   asseoir.

 16   Me Nikolic de l'équipe du conseil de la Défense de M. Beara va vous poser

 17   des questions. Maître Nikolic, vous avez la parole.

 18   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Interrogatoire principal par M. Nikolic : 

 20   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Alaica.

 21   R.  Bonjour.

 22   Q.  Je vais me présenter. Je m'appelle Predrag Nikolic, je suis avocat qui

 23   fait partie de l'équipe de la Défense de M. Beara. Au nom de cette équipe,

 24   du conseil de la Défense de M. Ljubisa Beara, je vais vous poser les

 25   questions. Puis-je commencer ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pouvez-vous vous présenter, Monsieur Alaica pour que cela soit

 28   consigné au compte rendu.

Page 24805

  1   R.  Je m'appelle Alaica Milan, du père Dragan et de ma mère Mila, né en

  2   1954 au village de Pescenica [phon], municipalité de Vrgin Most, République

  3   de Croatie.

  4   Q.  Pouvez-vous nous dire quel diplôme vous avez ?

  5   R.  J'ai le diplôme de l'école du ministère de l'Intérieur, ensuite j'ai

  6   suivi la formation pour être chauffeur et technicien de la police technique

  7   et scientifique.

  8   Q.  Où avez-vous travaillé, Monsieur Alaica ?

  9   R.  J'ai travaillé à Split au ministère de l'Intérieur de la République de

 10   Croatie jusqu'au début de la guerre.

 11   Q.  Quelles étaient vos tâches précises au sein du ministère ?

 12   R.  J'ai commencé à travailler en tant que policier en travaillant dans les

 13   patrouilles. Ensuite, après avoir fini la formation pour devenir chauffeur,

 14   j'ai travaillé dans les chiffres à  Split.

 15   Q.  Tout à l'heure, vous avez répondu que vous travailliez à Split jusqu'au

 16   début de la guerre. Avez-vous cessé de travailler au début de la guerre ?

 17   R.  Oui. J'ai cessé de travailler en 1991 au moment où les événements bien

 18   connus ont commencé à se produire en Croatie. Pour nous qui étions

 19   d'appartenance ethnique serbe, il n'y avait pas de poste de travail au sein

 20   des services d'Etat de la République de Croatie. J'ai été licencié et

 21   pendant une certaine période, j'ai -- enfin, j'ai été dégradé, et pendant

 22   une certaine période de temps je suis retourné travailler en tant que

 23   policier au sein des patrouilles.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic, nous allons faire une

 25   pause de 10 ou 15 minutes.

 26   --- La pause est prise à 9 heures 51.

 27   --- La pause est terminée à 10 heures 07.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic, vous avez la parole.

Page 24806

  1   M. NIKOLIC : [interprétation] Monsieur le Président, pendant la pause, le

  2   greffe m'a fait parvenir une note, ils ont demandé l'orthographe exacte du

  3   nom du témoin. Au compte rendu d'audience, on voit "Alaica." Il est

  4   possible que j'ai mal prononcé, donc précisions la chose immédiatement.

  5   Q.  Monsieur Alaica, veuillez, je vous prie, nous dire quel est exactement

  6   votre nom de famille, veuillez le faire lentement pour cela puisse être

  7   consigné au compte rendu d'audience ?

  8   R.  A-l-a-i-c-a, il n'y a pas de J.

  9   Q.  Je pense que nous pouvons maintenant continuer votre interrogatoire. 

 10   Nous nous sommes interrompus au moment où vous avez parlé des

 11   difficultés que vous rencontriez sur votre lieu de travail. Comment avez-

 12   vous réagi ? Est-ce que finalement vous êtes resté au sein du ministère de

 13   l'Intérieur ?

 14   R.  Non. C'était sans issue, il était impossible de quitter Split parce que

 15   la ville faisait l'objet d'un blocus. Ma famille a été en butte à des

 16   mauvais traitements. Comme je connaissais M. Beara, je le connaissais déjà

 17   avant la guerre, je le connaissais depuis 1988, quand il avait emménagé

 18   dans l'appartement se trouvant à côté de celui de mon frère Bosko. Bosko

 19   servait dans les rangs de la JNA. Mon frère Bosko m'a conseillé de parler à

 20   M. Beara afin de voir quelles étaient les possibilités de permettre mon

 21   transfert au sein de la police militaire.

 22   Q.  De quelle année, de quel mois parlez-vous exactement ?

 23   R.  Je suis en train de vous parler d'une période qui va de mai 1991 au 1er

 24   novembre 1991, parce que c'est à cette date-là qu'officiellement j'ai été

 25   admis au sein du bataillon de la police militaire.

 26   Q.  Quelles étaient vos fonctions au sein du bataillon de la police

 27   militaire ?

 28   R.  J'avais des fonctions administratives, j'étais chargé de combattre la

Page 24807

  1   criminalité et mes fonctions recouvraient celles qui généralement

  2   reviennent à police militaire.

  3   Q.  Où se trouvait cantonné à l'époque le Bataillon de la Police militaire

  4   ?

  5   R.  Le commandement du bataillon se trouvait dans la caserne de Dracevac.

  6   Ses unités, quant à elles, étaient affectées à un certain nombre de

  7   casernes et d'installations importantes dont elles devaient assurer la

  8   sécurité à Split et dans les environs.

  9   Q.  Vous avez dit que cela se passait en 1991 ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Quelle était la composition ethnique du Bataillon de la Police

 12   militaire à cette époque-là ?

 13   R.  On peut dire que c'était une Yougoslavie en réduction.

 14   Q.  Qu'entendez-vous par là ?

 15   R.  Il y avait des Musulmans, des Serbes, des Croates, des Serbes qui

 16   venaient de tous les coins de la Yougoslavie, il y avait des Macédoniens,

 17   des Slovènes, des Siptar.

 18   Q.  Au cours de cette période, est-ce que le Bataillon de la Police

 19   militaire pouvait opérer normalement et se déplacer librement en ville ?

 20   R.  Non. Parce qu'on a eu généralement pas mal de difficultés, la caserne

 21   était bouclée, les formations paramilitaires en bloquaient l'accès, les

 22   formations du gouvernement croate. Ces formations paramilitaires

 23   empêchaient tout déplacement aussi bien de la police militaire que des

 24   autres unités de la JNA.

 25   Q.  Vous souvenez-vous de l'identité du chef du Bataillon de la Police

 26   militaire à l'époque ?

 27   R.  Je ne me souviens pas avec précision. Mais quoi qu'il en soit, Bajat

 28   Velimir était son adjoint, plus tard, il est devenu chef.

Page 24808

  1   Q.  Comment, à l'époque, le chef du Bataillon de la Police militaire

  2   pouvait réguler le fonctionnement du bataillon et de ses différents

  3   services ?

  4   R.  C'était très difficile. Grâce à l'assistance du commandement supérieur

  5   et du service chargé de la sécurité dirigés par M. Beara qui coordonnait

  6   les activités du bataillon avec le commandement de la marine, et pour ce

  7   qui était des observateurs de la Communauté européenne. Ils étaient chargés

  8   de la coordination et pouvaient dans une certaine mesure, dans une mesure

  9   limitée, permettre au bataillon de faire son travail.

 10   Q.  Est-ce que vous avez pu voir M. Beara en action, est-ce que vous avez

 11   pu le voir travailler, voir ce qu'il faisait pour essayer de résoudre les

 12   problèmes ?

 13   R.  Oui. Parce que quand je suis devenu membre du Bataillon de la Police

 14   militaire, en tant que policier chevronné j'ai été affecté au commandement

 15   de la marine et M. Beara s'y trouvait. J'étais donc sur place, j'ai

 16   participé à certaines missions relevant de la sécurité au cours des

 17   négociations et tout ça.

 18   Q.  Pouvez-vous me parler de certaines des mesures qu'il a prises, plus

 19   particulièrement. Essayez de me dire ce qu'il a fait pour essayer de

 20   résoudre les difficultés auxquelles était confronté le Bataillon de la

 21   police Militaire ?

 22   R.  A l'époque, les familles des membres du Bataillon de la Police

 23   militaire étaient en danger, donc il a passé l'essentiel de son temps à

 24   essayer de sauver les femmes et les enfants des policiers militaires et les

 25   femmes et les enfants des officiers appartenant à d'autres unités. Si bien

 26   que tout au long de ces négociations, de ces pourparlers, il s'est efforcé

 27   d'obtenir des autorisations pour ces personnes, des espèces de laissez-

 28   passer sans doute parce que ces personnes étaient bloquées chez elle, ne

Page 24809

  1   pouvaient pas sortir de chez elle, donc il a essayé de faire en sorte qu'on

  2   leur permette d'aller habiter dans les casernes pour se trouver à côté du

  3   père de famille ou du mari.

  4   Q.  Mais comment est-ce que vous êtes parvenu à continuer à travailler

  5   normalement et correctement avec cet afflux de civils dans les casernes ?

  6   R.  On s'est organisé en affectant un certain nombre de pièces aux civils.

  7   On en a enlevé tout l'équipement militaire qui s'y trouvait et c'est là

  8   qu'on a logé les femmes et les enfants.

  9   Q.  Vous êtes en train de nous parler du commandement du Bataillon de la

 10   Police militaire, mais vous avez expliqué qu'il y avait des membres ou des

 11   unités de la police militaire un peu partout en ville, qui assuraient la

 12   sécurité d'un certain nombre d'installations ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Quelle était la situation de ces policiers militaires-là ?

 15   R.  La principale difficulté, elle se manifestait à Zrnovnica. C'était une

 16   installation qui était gardée par une de nos compagnies sous le

 17   commandement du lieutenant Senad Burzic. Senad Burzic, Rajko Milovanovic

 18   était son adjoint. Cette unité comptait des policiers d'appartenance

 19   ethnique diverse, mais en tout cas c'était tous des professionnels, c'était

 20   tous des militaires de carrière.

 21   Q.  Avant de passer à ma question suivante, une petite chose : pourriez-

 22   vous, s'il vous plaît, nous répéter le nom de l'installation que vous venez

 23   de nommer. Veuillez, s'il vous plaît, parler bien distinctement avant qu'on

 24   puisse consigner la chose au compte rendu d'audience.

 25   R.  Zrnovnica, Z-r-n-o-v-n-i-c-a.

 26   Q.  Vous avez dit que le problème le plus criant, c'était celui qui se

 27   manifestait à cet endroit-là. Quelle en était la nature

 28   exacte ?

Page 24810

  1   R.  Il s'agissait d'un lieu, d'une installation qui était d'une importance

  2   cruciale pour la sécurité ou pour la défense de la ville de Split et de la

  3   partie centrale de la côte Adriatique, parce qu'il s'y trouvaient des

  4   lance-roquettes ainsi que d'autres pièces d'artillerie en dedans de la zone

  5   côtière.

  6   Q.  Est-ce que cette installation a fait l'objet d'attaques ?

  7   R.  Dès le début, dès le premier jour du conflit, cette installation, ce

  8   lieu a été encerclé, assiégé par des unités paramilitaires de la République

  9   de Croatie, et chaque jour, chaque nuit, l'endroit était attaqué et

 10   essuyait des tirs d'armes légères et des tirs de mortier.

 11   Q.  Est-ce qu'on enregistrait des pertes parmi les membres du bataillon

 12   suite à ces attaques ?

 13   R.  Oui. Au cours d'une des attaques les plus graves, Senad Burzic, le

 14   commandant de la compagnie, a été blessé, Rajko Milovanovic, son adjoint,

 15   lui aussi a été blessé ainsi que deux ou trois autres soldats mais je ne me

 16   souviens pas de leurs noms.

 17   Q.  Qu'est-il advenu de Burzic et de son adjoint ? Où les a-t-on emmenés

 18   une fois qu'ils ont été blessés ?

 19   R.  D'abord, pendant toute la journée, les unités paramilitaires ont

 20   empêché qu'on leur prodigue quelque soin médical que ce soit. Puis, M.

 21   Beara a insisté pour que les observateurs de la Communauté européenne

 22   viennent au commandement de la marine. Il voulait qu'on parvienne à un

 23   accord pour que ces hommes soient emmenés à l'hôpital. Ils sont arrivés

 24   dans l'après-midi, il y a eu des discussions, et à la suite de ces

 25   discussions ils ont accepté qu'une ambulance vienne évacuer les blessés

 26   vers l'hôpital.

 27   Ils ont été emmenés dans un hôpital civil de Split. Il y avait, certes, à

 28   Split un hôpital militaire, mais on les a, malgré tout, emmenés à l'hôpital

Page 24811

  1   civil.

  2   Q.  Vous souvenez-vous -- ou plutôt, savez-vous quelle était la nature des

  3   blessures de Burzic ?

  4   R.  Senad Burzic a été gravement blessé. On a dû lui amputer la jambe, et

  5   quant à Rajko Milovanovic, il a été blessé à la tête. Les soldats, eux, ont

  6   été blessés moins grièvement.

  7   Q.  Comment le problème concernant Senad Burzic et Rajko Milovanovic a-t-il

  8   été résolu ? Où finalement ont-ils reçu des soins médicaux ?

  9   R.  Le commandement de la marine a reçu des informations, c'est-à-dire que

 10   M. Beara a reçu des informations indiquant que les blessés n'étaient pas

 11   soignés comme ils se devaient, si bien que c'est lui à ce moment-là qui a

 12   insisté pour que les observateurs de la Communauté européenne fassent en

 13   sorte que les blessés puissent être transférés de l'hôpital de Split vers

 14   l'hôpital militaire de Belgrade. C'est finalement ce qui est arrivé au bout

 15   d'un certain temps, puisqu'ils ont été transportés en hélicoptère vers

 16   l'académie militaire médicale de Belgrade où ils ont reçu les soins

 17   appropriés.

 18   Q.  Est-ce que vous connaissiez Senad Burzic ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Avez-vous reçu des informations supplémentaires sur ce qu'il est advenu

 21   de lui après son transfert à l'hôpital militaire de Belgrade ?

 22   R.  Après le déplacement de l'unité qui est partie de Split pour aller

 23   s'installer à Kumbor au Monténégro, nous avons appris que Senad Burzic

 24   avait pu quitter l'hôpital militaire et qu'il était allé voir ses parents

 25   dans un village se trouvant en Bosnie à proximité de Sanski Most.

 26   Q.  L'unité, où se trouvait-elle hébergée à l'époque, puis de quelle époque

 27   justement sommes-nous en train de parler ?

 28   R.  Le 5 février, la totalité de l'unité s'est réunie à Kumbor au

Page 24812

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6   

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 24813

  1   Monténégro.

  2   Q.  Est-ce que vous êtes resté en contact avec les blessés du Bataillon de

  3   la Police militaire, Burzic et les autres ? Qu'est-il advenu d'eux ensuite

  4   ?

  5   R.  Oui, oui, je suis resté en contact avec eux. Des possibilités d'avoir

  6   des contacts avec eux, des possibilités techniques, disponibilités de

  7   lignes téléphoniques et autres, effectivement nous restions en contact

  8   permanent avec les membres de notre unité où qu'ils se trouvent.

  9   Q.  Ljubisa Beara, comment a-t-il agi, comment s'est-il comporté en tant

 10   que chef du service de la sécurité après le déplacement de l'unité ? Est-ce

 11   qu'il a paru se préoccuper de ses hommes, sachant qu'il existait des

 12   contacts toujours entre le Bataillon de la Police militaire et le service

 13   de la sécurité ?

 14   R.  Oui. Il s'est occupé de chacun des membres du bataillon, sans

 15   exception, et en mai on a appris que Senad Burzic avait des problèmes dans

 16   la ville où il rendait visite à ses parents.

 17   Q.  De quel type de problèmes s'agit-il, le savez-vous ?

 18   R.  D'après ce qu'on a compris, il y avait aux alentours de Sanski Most des

 19   opérations de combat, et Senad Burzic, sa femme et ses enfants ont essayé

 20   de sortir de la zone des combats avec l'aide de soldats de la JNA -- ou

 21   plutôt, d'un membre de la JNA qu'il connaissait ou qu'il avait connu au

 22   moment où il avait suivi les cours de l'académie -- au moment où il avait

 23   été transféré à Belgrade.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause

 25   et nous avons décidé que cette pause serait de 20 minutes seulement. Merci.

 26   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 27   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic.

Page 24814

  1   M. NIKOLIC : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Alaica, vous nous avez dit que le commandement, dans son

  3   intégralité, était passé à un autre endroit à Kumbor. Qu'en est-il du

  4   Bataillon de la Police militaire et des autres unités, est-ce que ces

  5   derniers ont maintenu ce panaché ethnique tel qu'il existait à Split ?

  6   R.  Oui, ils l'ont maintenu. La composition ethnique du bataillon est

  7   demeurée identique à ce qu'elle était à Split.

  8   Q.  Nouvel endroit, nouvelle organisation des modes de travail. Qu'en est-

  9   il du comportement de M. Beara à l'égard de représentants d'autres ethnies

 10   que la sienne ?

 11   R.  Beara était un officier d'exception, en ceci qu'il respectait chacun

 12   des membres dont il avait le commandement indépendamment de leur

 13   appartenance ethnique ou autre. C'est son chef de la sécurité, Nermin

 14   Jusic, qui en est la meilleure illustration, il était lui-même Musulman et

 15   des représentants d'autres groupes ethniques.

 16   Q.  Pourriez-vous nous répéter le nom de la personne que vous avez évoquée,

 17   qui était chef de la sécurité ? Jusic, mais son prénom n'est pas apparu à

 18   l'écran.

 19   R.  Le commandant de son unité, l'unité de la sécurité et de l'escorte

 20   était Nermin Jusic, sergent première classe, Nermin Jusic.

 21   Q.  Pourriez-vous nous donner un exemple de ce comportement juste de la

 22   part de M. Beara à l'égard des membres de d'autres groupes ethniques ?

 23   R.  Senad Burzic, revenons-y, nous en avons parlé. Lorsque nous avons

 24   appris qu'il connaissait certains problèmes en Bosnie, qu'il y avait des

 25   combats entre des groupes paramilitaires serbes et formations

 26   paramilitaires musulmanes, Beara a intimé à notre commandant l'ordre

 27   d'acheminer un véhicule à Belgrade et de transférer la famille de Burzic de

 28   Belgrade à Kumbor de manière à ce que nous puissions être plus proches de

Page 24815

  1   lui et de manière à pouvoir lui porter assistance au cours de cette période

  2   difficile.

  3   Pour ce qui est des autres groupes ethniques, tous ceux qui

  4   souhaitaient quitter la Croatie pour aller s'installer en Bosnie, en

  5   Serbie, au Monténégro, et ce, indépendamment de leur appartenance ethnique,

  6   avaient bénéficié, tous sans exception, de l'aide de Ljubisa. Il assurait

  7   l'acheminement et le transport des familles et de leurs biens.

  8   Q.  [hors micro]

  9   M. NIKOLIC : [interprétation] Toutes mes excuses.

 10   Q.  Senad Burzic, vous en avez parlé, les événements que vous venez de

 11   décrire, à quel moment ont-ils eu lieu ?

 12   R.  Aux environs du printemps 1992. Je ne me souviens pas très exactement

 13   des dates. Après son arrivée, je crois que c'était au mois d'avril, son

 14   arrivée à Kumbor, il nous a dit ce qu'il avait vécu et comment il s'en

 15   était sorti. Il nous a dit qu'il avait utilisé la prothèse de sa jambe. Il

 16   nous a dit que sans sa prothèse, il avait beaucoup de mal à marcher dans

 17   les bois. Et au cours d'une réunion, suite à une proposition faite par

 18   Beara, il a été décidé que nous contribuerions tous, à la hauteur d'un per

 19   diem, et ce, afin de lui acheter une nouvelle prothèse laquelle fut achetée

 20   en Allemagne.

 21   Q.  Monsieur Alaica, vous nous avez dit que le commandant de l'unité de

 22   police militaire était Nermin Jusic. Pouvez-vous nous faire part de votre

 23   avis, Beara estimait-il que les membres d'autres appartenances ethniques

 24   étaient dignes de sa confiance, ou est-ce qu'au contraire il faisait

 25   semblant afin de maintenir une espèce de semblant --

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Objection, il s'agit là d'une conjecture.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]

Page 24816

  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation]Monsieur Alaica, nous ne voulons pas que

  2   vous vous livriez à quelque conjecture que ce soit. Nous voulons que vous

  3   nous disiez, si vous le pouvez, si vous êtes parvenu à vous forger une

  4   opinion en vous fondant sur ce que vous avez vous-même observé. Est-ce

  5   qu'il vous est possible de faire une évaluation sans vous livrer à quelque

  6   conjecture que ce soit ? Si vous avez des doutes, je vous demanderais de ne

  7   pas vous prononcer.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon avis est le suivant : s'agissant du

  9   comportement de Ljubisa à l'égard des membres de d'autres groupes

 10   ethniques, son comportement était très positif. A aucun moment on ne

 11   pouvait avoir le sentiment qu'il faisait quelque distinction que ce soit

 12   entre nous, membres de bataillons, membres de différents groupes ethniques.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez.

 14   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Pourriez-vous nous donner un autre exemple afin de corroborer davantage

 16   l'opinion que vous vous êtes faite ?

 17   R.  Au début du mois de mai 1992, Nermin Jusic s'est plaint indiquant que

 18   sa famille était en danger à Bratunac. Il a demandé si on pouvait l'aider.

 19   Il est allé voir Ljubisa. Ljubisa a intimé à notre commandant l'ordre

 20   suivant, je devais aller faire rapport à son bureau. Lorsque je suis arrivé

 21   à son bureau, il m'a proposé de m'asseoir, de prendre un café, comme il

 22   avait coutume de le faire avec tous les officiers qui venaient lui rendre

 23   visite. Il a présenté les problèmes tels qu'ils se présentaient. Il a

 24   indiqué que la famille d'un de nos officiers était en danger à Bratunac, et

 25   qu'il serait bon que nous puissions les mettre hors danger et les faire

 26   passer de cette zone-là à une zone libre.

 27   A un moment donné, le sergent Jusic a été invité à pénétrer dans le bureau,

 28   et Ljubisa m'a dit à nouveau ceci : "Si tu estimes que ceci risque de

Page 24817

  1   mettre ta vie en danger, alors je ne te donnerai pas l'ordre de le faire,

  2   militairement parlant, en revanche, je te demanderai de l'aider, à titre

  3   personnel, de l'aider lui et sa famille." Dans la mesure où c'était moi qui

  4   avait le plus d'expérience au sein du bataillon, les autres étaient mes

  5   inférieurs hiérarchiques, j'ai accepté de m'atteler à cette tâche, et j'ai

  6   dit que je ferais ce que je pouvais faire.

  7   Q.  A quel moment cela s'est-il passé, quel mois, quelle année, et où vous

  8   trouviez-vous à ce moment-là ?

  9   R.  C'était au cours de la première moitié du mois de mai 1992 et nous

 10   étions à Kumbor, au Monténégro.

 11   Q.  Avez-vous accédé à cette demande de M. Beara et, bien entendu, à cette

 12   demande de M. Jusic ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pourriez-vous nous dire brièvement comment vous vous y êtes pris ? Est-

 15   ce que vous êtes parvenu jusqu'à Bratunac ?

 16   M. MITCHELL : [interprétation] Objection, il s'agit d'une question

 17   directrice.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Toutes mes excuses aux interprètes.

 20   Nous estimons qu'il ne s'agit pas d'une question directrice. Je demanderais

 21   donc au témoin de bien vouloir répondre à la question.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Nous nous sommes organisés de façon à ce

 23   que je puisse, avec le sergent Jusic et un autre soldat chauffeur, nous

 24   rendre sur place avec notre véhicule de la police militaire. C'était un

 25   véhicule tout-terrain, une jeep. Nous sommes partis le même jour, l'après-

 26   midi même, et nous sommes arrivés aux environs de 21 heures dans la soirée

 27   à Uzice. Nous nous y sommes reposés, nous avons dîné, nous avons fait le

 28   plein de carburant, nous avons recueilli des informations quant à la

Page 24818

  1   meilleure façon de procéder par la suite et les chemins qu'il allait

  2   falloir emprunter. Ce sont les membres de nos organes internes d'Uzice qui

  3   nous ont fourni ces informations. A Uzice, ensuite, on nous a dit qu'il

  4   était préférable de ne pas se rendre dans cette zone puisque c'était une

  5   zone de combat. Or j'ai insisté. Disons, que je tenais à y aller et que peu

  6   m'importait quelle était la nature des combats.

  7   Le lendemain matin, tôt avec le chauffeur Jusic, nous sommes partis et nous

  8   sommes arrivés jusqu'à Ljubovija. Une fois là, sur l'autre rive de la

  9   Drina, nous entendions venant du côté de Bratunac des coups de feu et des

 10   explosions et nous sommes, par conséquent, partis du principe qu'il

 11   continuait d'y avoir des combats.

 12   Q.  Un petit instant, je me permets de vous interrompre pendant quelques

 13   instants. Ljubovija, où cela se trouve-t-il, dans quelle république ?

 14   R.  Dans la République de Serbie, c'est sur l'autre rive de la Drina que

 15   Bratunac. Bratunac est d'un côté de la Drina, Ljubovija de l'autre.

 16   Q.  Comment avez-vous traversé la Drina, la rivière pour parvenir à

 17   Bratunac ?

 18   R.  Une fois arrivés à Ljubovija, nous sommes allés contacter l'état-major

 19   de crise et nous avions souhaité nous enquérir quant aux possibilités qui

 20   existaient afin de parvenir à la rivière et j'ai demandé quelles étaient

 21   les accréditations qu'il me fallait pour pouvoir pénétrer sur le territoire

 22   de la Bosnie. Ceci dit, ils ont refusé de nous délivrer quelque sauf-

 23   conduit que ce soit. Ils nous ont simplement dit que si j'y allais c'était

 24   à mes propres périls, que c'était une zone de combat et ils m'ont conseillé

 25   de ne pas y aller.

 26   Dans l'intervalle, je négociais avec les membres de l'état-major de crise,

 27   Nermin Jusic a reconnu certains des individus qui étaient à l'extérieur du

 28   bâtiment, dans la rue. Une de ces personnes lui a dit que sa mère, son

Page 24819

  1   frère, sa sœur étaient à Ljubovija et qu'ils étaient logés chez un ami de

  2   famille de leur père, un ami de Jusic, le père de Jusic, et on dit que

  3   c'était là qu'il allait falloir aller les chercher.

  4   Lorsque je suis sorti du bâtiment, Jusic m'a dit qu'il fallait que nous

  5   nous rendions dans une maison à proximité puisque son frère, sa sœur et sa

  6   mère étaient censés y être. Une fois que nous sommes arrivés dans cette

  7   maison, nous avons effectivement trouvé sa mère, son frère, sa sœur dans

  8   cette maison. Sa mère a commencé à pleurer. Elle s'est agenouillée et elle

  9   s'est mise à embrasser mes bottes et je lui ai dit qu'il fallait qu'elle se

 10   remette debout. Je lui ai dit que ce n'était jamais que mon devoir, qu'il

 11   ne fallait pas qu'elle fasse cela et que je n'avais fait qu'accéder à la

 12   demande de M. Beara et à celle de son fils Nermin qui était à l'origine de

 13   l'ensemble de cette opération.

 14   Puis j'ai continué de discuter avec sa mère et j'ai appris qu'à

 15   Bratunac restait encore la grand-mère de Nermin du côté de son père et j'ai

 16   appris qu'ils n'avaient aucune information la concernant. Ceci étant dit,

 17   ils sont arrivés à Ljubovija sans aucun article, sans vêtements, sans

 18   aucune pièce d'identité et j'ai décidé qu'il fallait que nous nous rendions

 19   à Bratunac indépendamment des circonstances.

 20   La mère de Nermin m'a demandé d'essayer de trouver des documents

 21   personnels si j'en trouvais et d'apporter des vêtements. Elle m'a demandé

 22   d'aller dans une cave sous les escaliers de la maison et elle m'a dit qu'il

 23   y avait un sac plastique sous un fût dans cette cave dans lequel se

 24   trouvait des objets de valeur, de l'or, de l'argent, vous savez, le genre

 25   de choses que l'on trouve dans n'importe quelle maison, des bijoux de

 26   famille. Elle m'a demandé de les ramener si jamais je les retrouvais. Suite

 27   à quoi nous, c'est-à-dire moi-même, Nermin et le chauffeur, sommes partis.

 28   Q.  Vous êtes arrivés à leur maison ?

Page 24820

  1   R.  Lorsque nous sommes arrivés au pont enjambant la Drina, la police de la

  2   République de Serbie assurait la sécurité du côté serbe et nous ont dit

  3   qu'ils ne pouvaient pas nous laisser passer parce qu'il y avait des combats

  4   qui y avaient lieu. J'ai expliqué brièvement que j'étais en mission, que ce

  5   n'était pas leur problème mais le mien et que par conséquent il fallait

  6   qu'il me laisse passer et c'est précisément ce qu'ils ont fait.

  7   Lorsque nous sommes passés de l'autre côté, lorsque nous sommes entrés dans

  8   la municipalité de Bratunac, sur le pont, des civils armés sont venus à

  9   notre rencontre, civils armés qui n'avaient ni uniforme ni insigne. Leurs

 10   armes étaient des armes remontant à la Deuxième Guerre mondiale

 11   complètement démodées. Ils étaient un peu hagards. Ils nous ont menacés,

 12   ils nous ont dit qu'ils n'avaient aucune intention de nous laisser aller

 13   jusqu'à Bratunac. Après des échanges vifs et après quelques querelles, nous

 14   sommes parvenus à les convaincre qu'il fallait qu'ils nous laissent passer

 15   et nous sommes arrivés à Bratunac.

 16   Lorsque nous sommes arrivés au centre de la ville, Nermin m'a dit en route

 17   que le mieux serait de nous arrêter à l'hôtel de ville parce que c'est là

 18   qu'avait son QG l'état-major de crise et qu'il était préférable de leur

 19   demander leur aide à eux, de manière à ce que nous puissions avoir

 20   davantage de liberté de mouvement à Bratunac même.

 21   Q.  Excusez-moi. Je me permets de vous interrompre. Est-ce que vous portiez

 22   l'uniforme de la police militaire à ce moment-là ?

 23   R.  Oui, oui. Nous portions de vrais uniformes. Nous avions des armes de

 24   petit calibre et nos véhicules portaient la marque de la police militaire,

 25   les autocollants, les gyrophares, et cetera.

 26   Q.  Donc portant vos uniformes et au volant d'un tel véhicule, vous avez

 27   traversé la rivière, vous êtes passés à Bratunac, vous avez été accostés

 28   par ces unités paramilitaires, n'est-ce pas ?

Page 24821

  1   R.  Lorsque nous sommes arrivés face à l'hôtel  de ville, il y avait un

  2   attroupement de gens qui portaient des tenues différentes. On entendait des

  3   coups de feu provenant du côté de l'hôtel. Tout le monde était nerveux,

  4   anxieux. Ils sont venus à notre rencontre et ont essayé de nous désarmer.

  5   Ils ont essayé de confisquer notre véhicule. Moi, je leur ai tenu tête en

  6   leur disant que j'étais en mission et que j'allais me rendre auprès du

  7   président de l'état-major de crise.

  8   Nous sommes parvenus à pénétrer dans le bâtiment de l'hôtel de ville. Dans

  9   le hall du bâtiment, il y avait un civil barbu, armé d'une mitraillette

 10   montant à la Deuxième Guerre mondiale. Il nous a bloqué le passage, disant

 11   que nous ne pouvions pas pénétrer dans le bâtiment et aller voir le

 12   président. Nous avons commencé à nous disputer avec lui.

 13   A un moment donné, un civil est apparu. Je me souviens qu'il y avait

 14   une casquette en cuir sur la tête. Il sortait d'un des bureaux et nous a

 15   demandé : Mais qu'est-ce que passe-t-il ? Pourquoi vous disputez-vous, nous

 16   a-t-il demandé. Nermin, à ce moment-là, s'est adressé à lui et lui a dit,

 17   enfin, l'a appelé "Professeur." Cet homme s'est tourné vers Nermin en

 18   disant : "Nermin, c'est toi ?" Nermin a répondu : "Oui, c'est moi." Ils

 19   sont tombés dans les bras de l'un et de l'autre et nous lui avons expliqué

 20   pourquoi nous étions venus.

 21   Suite à quoi, il nous a conduits au bureau du président de l'état-major de

 22   Crise. Lorsque nous sommes entrés dans le bureau, le président de l'état-

 23   major de Crise était assez sec. Il était pressé. Il était en permanence en

 24   train de répondre soit au téléphone, soit les communications radio, il

 25   recevait des informations, il procédait des échanges d'information, parce

 26   qu'apparemment il y avait des combats en cours à proximité du motel et dans

 27   un village, d'après ce que j'ai réussi à comprendre.

 28   Q.  Monsieur Alaica, est-ce que vous avez fini par arriver à la maison de

Page 24822

  1   Nermin ?

  2   R.  Lorsque nous lui avons expliqué que nous avions l'intention de nous

  3   rendre à sa maison afin d'aller récupérer les documents de la famille et

  4   les objets de valeur de la famille et que nous voulions voir ce qui en

  5   était de la grand-mère, il nous a dit qu'il n'y voyait aucun inconvénient,

  6   mais qu'il estimait qu'il serait préférable que nous n'y allions pas en

  7   raison, précisément, des combats qui faisaient rage dans cette ville. Nous

  8   lui avons dit que nous, nous étions déterminés et que nous entendions bien

  9   y aller, peu nous importait les combats, et nous lui avons demandé s'il

 10   pouvait mettre à notre disposition un homme afin de nous accompagner afin

 11   d'assurer notre sécurité et pour nous permettre de mieux pouvoir nous

 12   déplacer dans la ville.

 13   Le professeur nous a alors proposé de nous accompagner lui-même. Nous avons

 14   tous pris place à bord de la voiture et nous sommes allés vers la maison.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic, nous avons fait preuve

 16   d'énormément de patience, mais il arrive à un moment, voyez-vous, où il

 17   faut mettre de l'ordre dans tout cela. Aucune de ces informations

 18   n'apparaisse dans les résumés que vous avez livrés. Vous passez en revue

 19   des questions de détail qui n'ont strictement aucune pertinence. Je vous

 20   demanderais, par conséquent, de bien vouloir vous en tenir aux raisons pour

 21   lesquelles vous avez convoqué ce témoin, et vous l'avez appelé à

 22   comparaître. Tout cela est sans intérêt, n'a aucune pertinence. Je ne vois

 23   franchement pas pourquoi nous perdrions votre temps et le nôtre.

 24   M. NIKOLIC : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.

 25   Vous avez tout à fait raison. J'étais sur le point justement de demander au

 26   témoin de bien vouloir conclure son histoire. Si vous me permettez de

 27   poursuivre, je devrais finir très rapidement.

 28   Q.  Monsieur Bosko -- pardon, M. Milan, vous souhaitiez trouver l'endroit

Page 24823

  1   où se trouvait la famille, puis vous êtes arrivé à la maison. Est-ce que

  2   vous avez fini par trouver la grand-mère de M. Jusic, et est-ce que vous

  3   êtes parvenu à vos fins ?

  4   R.  Oui. Nous avons trouvé les documents et tout ce qu'avait demandé sa

  5   mère, puis nous nous sommes rendus à la maison de sa grand-mère, au centre-

  6   ville. Une fois sur place, Nermin est descendu de la voiture et il est

  7   entré dans la maison, mais il n'a pas trouvé sa grand-mère dans cette

  8   maison. Il est sorti et il est venu nous rejoindre dans la rue, le

  9   professeur et moi, et c'est à ce moment-là que les tirs ont cessé ou se

 10   sont calmés.

 11   Une femme est sortie d'une des maisons voisines en nous demandant qui nous

 12   cherchions. Nermin l'a reconnue tout de suite et lui a dit qu'il cherchait

 13   sa grand-mère. Elle lui a dit qu'elle était dans sa cave. Nermin est donc

 14   allé chez elle, est allé récupérer la grand-mère que nous avons mise dans

 15   la voiture et nous nous sommes rendus à Ljubovija.

 16   Q.  Vous avez réussi, vous êtes parvenus à arriver à

 17   Ljubovija ?

 18   R.  Dès qu'on est arrivé au pont enjambant la Drina, nous avons eu à faire

 19   face aux mêmes problèmes qu'à l'aller avec les mêmes hommes, mais qu'ils

 20   étaient beaucoup plus nombreux cette fois-ci. Puis je me suis aperçu que

 21   nous avions été suivis par une voiture --

 22   Q.  Monsieur Alaica, désolé, je dois vous interrompre. Ce voyage, ce

 23   périple, vous l'avez entrepris pour sauver les membres de la famille de M.

 24   Jusic. Est-ce que vous êtes parvenus à réunir les membres de la famille de

 25   M. Jusic et aller les mettre hors danger ?

 26   R.  Oui, nous y sommes parvenus. Nous les avons tous réunis et les avons

 27   emmenés à Kumbor au Monténégro où ils sont restés jusqu'à leur départ.

 28   Q.  Vous avez fait état de ces faits à Ljubisa Beara ?

Page 24824

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Dites-nous comment il a réagi ?

  3   R.  Il était ravi du tour qu'avaient pris les choses, la façon dont nous

  4   nous étions acquittés de la mission. Il était heureux de voir la famille

  5   réunie en un même endroit. Il nous a dit qu'il était heureux que les

  6   membres allaient pouvoir s'aider les uns les autres pendant le reste de

  7   leur existence.

  8   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas

  9   d'autres questions.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 11   Maître Zivanovic, vous nous avez demandé -- est-ce que vous avez des

 12   questions ?

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pas de questions supplémentaires.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Nikolic ?

 15   Mme NIKOLIC : [interprétation] Pas d'autres questions.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Lazarevic, avez-vous des

 17   questions ?

 18   M. LAZAREVIC : [interprétation] Pas d'autres questions.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Fauveau, avez-vous des questions

 20   ?

 21   Mme FAUVEAU : [hors micro]

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 23   Monsieur Krkvic, vous n'avez pas d'autres questions, je confirme ?

 24   M. KRKVIC : [interprétation] Je confirme.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Sarapa, vous aviez demandé 15

 26   minutes, mais vous n'en demandez plus une seule.

 27   M. SARAPA : [interprétation] Pas de questions.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

Page 24825

  1   Monsieur Mitchell.

  2   M. MITCHELL : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

  3   Président.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  5   Nous n'avons pas d'autres questions à vous poser, Monsieur le Témoin.

  6   Voilà qui met fin à votre déposition. Au nom des Juges de la Chambre, je

  7   vous remercie d'être venu déposer ici. Au nom de toutes les personnes

  8   présentes, je vous souhaite un bon retour chez vous, Monsieur.

  9   [Le témoin se retire]

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avons fini avec ce témoin.

 11   Nous pouvons faire entrer le témoin suivant dans le prétoire. Est-ce qu'il

 12   s'agit de Mme Cekic ? Ai-je raison ?

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, vous avez raison.

 14   Mais il y a deux choses concernant ce témoin. Durant la pause, j'ai eu la

 15   possibilité de lui parler brièvement, et je peux dire qu'il y a une erreur

 16   typographique -- il y a deux erreurs typographiques pour ce qui est du

 17   résumé de sa déposition 65 ter. L'année 1985 est mentionnée, mais je pense

 18   ce n'est pas l'année; c'est le numéro qui est mentionné. Je pense que c'est

 19   une erreur, mais elle va nous dire cela durant sa déposition.

 20   Durant son témoignage, j'aimerais qu'on passe à huis clos partiel

 21   pour quelques instants parce qu'elle va parler d'un sujet délicat. C'est

 22   pour cela que j'ai voulu vous informer là-dessus avant qu'elle n'entre dans

 23   le prétoire.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] J'ai voulu expliquer cela maintenant.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 27   [Audience à huis clos partiel]

 28   (expurgé)

Page 24826

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22   [Audience publique]

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je prie Mme l'Huissière de faire entrer

 24   le témoin dans le prétoire.

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bienvenue au Tribunal. Dans cette

Page 24827

  1   affaire, vous allez témoigner en tant que témoin de la Défense pour

  2   l'accusé Beara. Avant de commencer votre témoignage, selon notre Règlement,

  3   vous devriez prononcer la déclaration solennelle. Mme l'Huissière, qui est

  4   à côté de vous, va vous remettre le texte de la déclaration solennelle. Je

  5   vous prie de la lire à voix haute.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN: MIROSLAVA CEKIC [Assermentée]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame. Vous pouvez vous

 11   asseoir.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Juste un instant, Maître Ostojic.

 14   Maître Zivanovic, vous avez la parole.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je m'excuse, mais il y a une erreur au

 16   compte rendu. C'est à la page 37 [comme interprété], la ligne 7.

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Je pense que le prénom Miroslav y est

 18   consigné, donc c'est Miroslava.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le mot "Zivanovic" doit disparaître.

 20   Nous ne voulons pas vous compliquer la vie, Maître Zivanovic.

 21   Oui, Maître Ostojic.

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Interrogatoire principal par M. Ostojic : 

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Cekic. Comme vous le savez, je

 25   m'appelle John Ostojic. Je suis l'un des avocats de M. Ljubisa Beara, et je

 26   vais vous poser quelques questions aujourd'hui. Je vais vous poser des

 27   questions, et essayez de parler doucement pour que cela soit interprété. De

 28   mon côté, j'essaierai de parler lentement également.

Page 24828

  1   Mais aux fins du compte rendu, pouvez-vous vous présenter ?

  2   R.  Je m'appelle Cekic Miroslava.

  3   Q.  Pouvez-vous nous dire votre date de naissance - il n'est pas nécessaire

  4   d'indiquer l'année - et le lieu de naissance ?

  5   R.  Je suis née le 16 mai 1949 à Curug.

  6   Q.  Pour nous qui ne savons pas où se trouve Curug, pouvez-vous nous dire

  7   dans quel pays cela se trouve ?

  8   R.  En Serbie, et cela se trouve sur le territoire de la ville de Novi Sad.

  9   Q.  Madame Cekic, j'aimerais poser des questions pour ce qui est de votre

 10   biographie. Pouvez-vous nous dire quelle est votre formation et quels sont

 11   les diplômes que vous avez obtenus ?

 12   R.  J'ai le diplôme de l'école de la poste. J'ai fini cette école en 1974,

 13   et commencé à travailler au PTT de Yougoslavie. C'est comme cela que ça

 14   s'appelait à l'époque. Aujourd'hui, je travaille dans Telecom de Serbie.

 15   Q.  Pouvez-vous nous décrire brièvement quelles sont vos tâches en tant

 16   qu'employée du PTT de Serbie, ou Telecom Serbie.

 17   R.  J'ai travaillé dans le secteur de maintenance des appareils du PTT

 18   pendant deux ans et demi; il s'agit des appareils anciens. Dans le cadre du

 19   système de l'U5 [phon], comme nous l'appelons, cela a été retiré et de

 20   nouveaux appareils ont été introduits, appareils techniques, après quoi

 21   j'ai été transférée au syndicat de Telecom de Serbie.

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on peut

 23   passer à huis clos partiel pour que je puisse poser quelques questions au

 24   témoin.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

 26   Nous sommes maintenant à huis clos partiel, Maître Ostojic.

 27   [Audience à huis clos partiel]

 28   (expurgé)

Page 24829

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18   [Audience publique]

 19   M. OSTOJIC : [interprétation]

 20   Q.  Pouvez-vous nous dire ce que votre feu mari faisait ?

 21   R.  Mon feu mari a travaillé à Split-Jadro. Un chargement de fleurs

 22   arrivait tous les matins en avion de Split à Belgrade, et c'est là où il

 23   distribuait les fleurs à des fleuristes qui les vendaient.

 24   Q.  Connaissez-vous Nada Beara ?

 25   R.  Oui. Nada Beara était chef de mon feu mari. Elle travaillait à Split

 26   Jadro, à Split. Ils communiquaient et ils se fréquentaient lorsque Nada

 27   était à Belgrade.

 28   Q.  Avez-vous eu la possibilité de rencontrer et de connaître M. Ljubisa

Page 24830

  1   Beara ?

  2   R.  Oui, je l'ai rencontré. J'ai rencontré Ljubisa Beara plus tard, quand

  3   il venait à Belgrade avec Nada, lorsque Nada organisait des événements liés

  4   à ses affaires dans ce domaine, c'est-à-dire l'horticulture.

  5   Q.  Pouvez-vous me dire quand cette relation d'affaires et amicale entre

  6   Mme Nada Beara et votre feu mari, Tomo, a commencé ?

  7   R.  Cela a commencé en 1985. C'est là où j'ai rencontré Nada Beara. Je

  8   suppose qu'ils se sont rencontrés plus tôt, mais je ne sais pas quand ils

  9   se sont rencontrés. Je suppose que c'était au moment où tout cela a

 10   commencé, quand les fleurs ont commencé à être acheminées de Split à

 11   Belgrade. C'était après 1985, nous nous rencontrions de temps à autre

 12   lorsque Nada venait à Belgrade pour ses affaires.

 13   Q.  Pouvez-vous nous dire quand vous avez commencé à fréquenter la famille

 14   Beara, vous et votre feu mari ?

 15   R.  Nous avons commencé à nous fréquenter en 1991 lorsque Nada, avec son

 16   cadet Branco, est arrivée à Belgrade de Split, et ils sont restés vivre à

 17   Belgrade.

 18   Q.  Pouvez-vous nous dire à quelle fréquence vous fréquentiez la famille

 19   Beara à partir de 1991 ?

 20   R.  C'était lorsque nous étions libres, nous nous téléphonions pendant les

 21   week-ends. Dans la soirée, parfois, nous les fréquentions chez eux dans

 22   leur maison, ou chez nous dans notre maison.

 23   Q.  Merci. Je pense que j'ai compris cela. Mais est-ce que vous pouvez me

 24   dire si c'était une fois par mois, par semaine, ou plusieurs fois par mois,

 25   souvent ou rarement ? Pouvez-vous nous dire si c'était le vendredi ou le

 26   samedi, pouvez-vous nous donner une idée de la fréquence de vos rencontres

 27   avec la famille Beara ?

 28   R.  Nous nous fréquentions dépendamment de nos obligations, les obligations

Page 24831

  1   de mon feu mari et de moi-même. Mais une ou deux fois par semaine, nous

  2   nous téléphonions.

  3   Q.  Merci. Vous souvenez-vous si, pendant la période -- avez-vous toujours

  4   eu une relation amicale avec Nada Beara ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je sais que vous ne fréquentiez pas M. Ljubisa Beara pendant quelques

  7   années, mais pouvez-vous nous dire si vous avez continué à voir Mme Nada

  8   Beara et M. Ljubisa Beara jusqu'à l'année 2004 ?

  9   R.  Oui, nous nous fréquentions, nous nous voyions. En 2000, mon mari est

 10   mort et ils ont assisté à son enterrement, Nada et Ljubisa. Mais avant

 11   2000, nous nous fréquentions en amis, nous nous fréquentions mutuellement

 12   pour boire une tasse de café ou pour organiser des dîners ou des déjeuners.

 13   En 2001, lorsqu'on a célébré l'anniversaire de mort de mon mari, M. Ljubisa

 14   est apparu à la célébration de l'anniversaire de la mort de mon mari dans

 15   l'église, Nada ne pouvait pas y assister.

 16   Q.  Merci. Connaissez-vous le nom d'une personne qui s'appelle Milan Stanic

 17   ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire qui est cette personne ?

 20   R.  Milan Stanic est avocat et fait partie de l'équipe de la Défense de M.

 21   Ljubisa Beara. Je l'ai rencontré cette année, vers la fin du mois de

 22   février lorsqu'il est revenu du Tribunal.

 23   Q.  Nous allons arriver à ce détail un peu plus tard. Merci.

 24   Avant le mois de février 2008, avez-vous jamais rencontré Milan Stanic, le

 25   connaissiez-vous ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Pour que ce soit clair aux fins du compte rendu, pouvez-vous me dire

 28   quand vous m'avez rencontré pour la première fois, Madame ?

Page 24832

  1   R.  Je vous ai vu durant l'été, plus précisément vers la mi-août.

  2   Q.  Avec moi, avez-vous rencontré pour la première fois M. Peter Nikolic,

  3   qui fait partie de l'équipe de la Défense de M. Beara et qui est à ma

  4   gauche ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Revenons à Milan Stanic, vous avez commencé à parler des circonstances

  7   de votre première rencontre en février 2008. Pouvez-vous me dire où vous

  8   l'avez rencontré ?

  9   R.  J'étais chez Nada, je lui rendais visite, après peu, M. Stanic est

 10   arrivé. C'est comme ça que nous nous sommes rencontrés.

 11   Q.  Excusez-moi de vous avoir interrompue, mais j'aimerais qu'on soit le

 12   plus concret possible par rapport à ces détails.

 13   Où est-ce que vous vous êtes rendue pour visiter Nada ?

 14   R.  Dans sa maison.

 15   Q.  Vous avez commencé à nous parler que M. Stanic est arrivé dans la

 16   maison ou dans l'appartement de la famille Beara, est-ce qu'il y avait

 17   d'autres personnes présentes à l'époque dans cet appartement ?

 18   R.  Non. Il y avait Nada, moi-même et M. Stanic.

 19   Q.  Avez-vous engagé une conversation en février 2008 avec M. Stanic dans

 20   l'appartement de la famille Beara ?

 21   R.  Oui. Puisqu'il a dit qu'il était chez Ljubisa, je lui ai demandé

 22   comment Ljubisa se portait, s'il se portait bien. Il m'a répondu que

 23   Ljubisa se portait bien, c'est comme cela qu'on a commencé à parler de

 24   différents sujets, des différents événements dans le pays et à Belgrade.

 25   Q.  Pouvez-vous me dire pendant combien de temps vous avez parlé avec M.

 26   Stanic approximativement ?

 27   R.  J'y suis resté entre une heure et demie, ou deux heures.

 28   Q.  A un moment donné, et aussi pendant cette rencontre en février 2008,

Page 24833

  1   avez-vous parlé à M. Stanic de la possibilité de témoigner pour la Défense

  2   de M. Ljubisa Beara ?

  3   R.  Il m'a demandé depuis combien de temps je connaissais Ljubisa, de lui

  4   dire quelle était sa personnalité et si nous étions amis. Il m'a demandé si

  5   nous nous voyions quand Ljubisa venait, parce que je savais que Ljubisa

  6   était en Republika Srpska et je lui ai dit que nous nous voyions et qu'il

  7   me téléphonait pour que nous organisions nos rencontres.

  8   Q.  Avez-vous parlé d'autres détails avec M. Stanic en particulier pour ce

  9   qui est des événements survenus en 1995 ?

 10   R.  M. Stanic m'a demandé si je me souvenais de certains détails ou de

 11   rencontres ou d'autres choses en 1995.

 12   Q.  Quelle a été votre réponse à cette question ?

 13   R.  Je lui ai dit qu'il y avait des détails dont je me souvenais. Cela

 14   s'est passé il y a longtemps, il y a pas mal d'années mais je me souviens

 15   de certains détails que je ne peux pas oublier.

 16   Q.  Pouvez-vous nous dire de quels détails vous vous souvenez pour ce qui

 17   est de 1995 et dont vous avez parlé à M. Stanic ?

 18   R.  En 1995, je me souviens que notre niveau de vie a empiré. Vous savez

 19   que déjà en 1991, 1992, les fleurs n'arrivaient plus à Belgrade de Split.

 20   Cette entreprise a commencé à s'occuper d'autres affaires s'appelant Beo-

 21   Jadro. Mon feu mari a continué à y travailler et des fleurs arrivaient de

 22   la région qui était près de la Serbie.

 23   Je me souviens de certaines réunions où on a organisé nos vacances. En 1994

 24   et 1995, il n'y avait plus d'argent. On vivait mal et je me souviens qu'au

 25   mois de mai - mon anniversaire c'est au mois de mai - je me souviens de

 26   cela pour cela, Ljubisa était à Belgrade, et je l'ai invité à mon

 27   anniversaire mais c'était plutôt pour se voir, pour se parler, donc je les

 28   ai invités lui-même et son épouse, Nada. Il était une personne gaie et il

Page 24834

  1   m'a fait un cadeau. Il s'agissait d'un pendentif. Il s'agissait d'une

  2   petite ancre.

  3   Donc nous nous parlions. C'est comme cela qu'on a passé cette soirée. Après

  4   le mois de mai, nous nous voyions à quelques reprises. Nous nous

  5   téléphonions également. A une occasion au mois de juillet, Toma a parlé

  6   avec Ljubisa et Ljubisa est venu.

  7   Q.  Je m'excuse, Madame. Pouvez-vous nous dire en quelle année c'était ?

  8   R.  En 1995.

  9   Q.  Je m'excuse. Continuez.

 10   R.  Ljubisa est venu et mon feu mari lui a parlé au téléphone. Ils se sont

 11   mis d'accord pour qu'on se voie ce soir-là pour se rendre dans un

 12   restaurant qui était dans notre quartier, près de notre appartement.

 13   J'habitais dans la rue Sumatovacka, cela fait partie du marché de Kalenovic

 14   à Belgrade. Il hésitait à venir mais puisque mon feu mari a insisté,

 15   Ljubisa et Nada sont arrivés à un moment donné dans la soirée et nous nous

 16   sommes rendus dans ce restaurant. Mon feu mari et Ljubisa ont bu un verre

 17   de whiskey. Moi j'avais une bouteille de whiskey dans ma maison, donc je

 18   l'ai prise avec moi. Nous parlions lors du dîner, nous sommes restés

 19   jusqu'à 23 heures ou jusqu'à minuit dans ce restaurant.

 20   Nada m'a dit à un moment donné, "Sais-tu ce qu'est demain ?" J'ai dit,

 21   "Non." Après elle m'a dit, "C'est l'anniversaire de mon mari et il devait

 22   voir la famille." Je les ai invités à venir chez moi parce que j'ai dit que

 23   j'allais inviter d'autres amis.

 24   Q.  Merci. Je vais essayer de résumer tout cela. Pouvez-vous me dire quel

 25   est le nom de famille de ces autres amis ?

 26   R.  Svetlana et Djordje Gavrilovic.

 27   Q.  Pendant combien de temps connaissiez-vous M. et Mme Gavrilovic ?

 28   R.  Nous nous connaissions assez longtemps. Je connais Svetlana de ma

Page 24835

  1   jeunesse parce que nos parents sont nés à Curug.

  2   Q.  Je vais revenir à la fête d'anniversaire, ainsi qu'à la soirée que vous

  3   avez passée avec votre mari, ainsi qu'à la soirée du lendemain que vous

  4   avez passée avec la famille Gavrilovic et Beara. Mais avant cela,

  5   concentrons-nous sur M. Beara et à sa famille.

  6   Pendant cette période pendant laquelle vous vous fréquentiez - il s'agit de

  7   la période qui commence à l'année 1985 - pouvez-vous nous dire quelle était

  8   la relation entre M. Ljubisa et son épouse ?R.  Oui.

  9   Q.  Pouvez-vous nous dire quelle était cette relation ?

 10   R.  Nada et Ljubisa vivaient normalement dans leur maison. Il s'agissait

 11   d'un mariage, d'un ménage tout à fait normal.

 12   Q.  Je pense que parfois dans l'interprétation il y a des mots qui sonnent

 13   un peu bizarre. Pouvez-vous nous décrire quel était M. Beara en tant que

 14   mari. Pouvez-vous nous dire s'il était gentil ou impulsif, et cetera ?

 15   R.  Ljubisa était bien élevé, un vrai gentleman et il était très avenant.

 16   Il faisait des cadeaux à son épouse. Leur communication était tout à fait

 17   normale.

 18   Q.  Est-ce que vous avez pu être témoin de ses relations avec son fils le

 19   plus jeune, parce qu'on sait qu'il y a une différence d'âge entre ces deux

 20   fils. Est-ce que vous avez pu le voir, avec son fils le plus jeune, voir

 21   quelle était la nature de leur rapport ?

 22   R.  Très normal. Ce qu'il y a plus normal, celle dont on peut s'attendre

 23   entre un père et un jeune garçon de cet âge qui avait 16, 18 ans, qu'il

 24   avait un comportement tout à fait correct, comme celui de son père

 25   d'ailleurs.

 26   Q.  Est-ce que c'est un homme strict qui insistait sur le respect de la

 27   discipline ?

 28   R.  Non, non, non, il n'était pas sévère.

Page 24836

  1   Q.  Revenons à ce mois de juillet 1995. Vous nous avez dit que vous aviez

  2   rencontré Nada et Ljubisa un soir, vous étiez allés dîner ensemble, et

  3   c'est à ce moment-là que Nada vous a raconté que le lendemain, c'était

  4   l'anniversaire de son mari.

  5   Est-ce que, au bout du compte, le lendemain, vous avez retrouvé les

  6   Beara et les Gavrilovic ? Pour que nous puissions bien suivre vos propos,

  7   nous allons appeler cette soirée que vous avez passée avec les Beara, à la

  8   veille de l'anniversaire de M. Beara, la première soirée. Le lendemain,

  9   nous allons l'appeler le deuxième dîner. Enfin, premier dîner, deuxième

 10   dîner. Le deuxième étant celui que vous avez partagé avec les Beara et

 11   Gavrilovic, ceci afin d'éviter toute confusion.

 12   En juillet 1995, est-ce que vous êtes retrouvés pour un deuxième dîner ?

 13   R.  Oui, chez nous, avec les Gavrilovic et les Beara. Ljubisa et Nada sont

 14   arrivés vers 20 heures. M. Gavrilovic a suivi peu après, et Svetlana, quant

 15   à elle, elle est arrivée un petit peu en retard. Elle avait des choses à

 16   faire et elle est arrivée avec un peu de retard.

 17   Q.  Combien de temps a duré ce dîner ?

 18   R.  Trois heures à trois heures 30. On n'a pas regardé l'heure, mais

 19   disons, que cela a duré trois à trois heures 30.

 20   Q.  Je sais que tout cela s'est déroulé il y a bien longtemps, Madame

 21   Cekic, mais essayez de nous faire comprendre comment il se fait que vous

 22   vous souveniez de l'année en question ? Il me semble que vous avez commencé

 23   à nous expliquer qu'à l'époque la situation était bien particulière en

 24   Yougoslavie. Vous avez parlé de l'année, vous avez parlé des problèmes

 25   financiers qui étaient les vôtres, mais ma question est simplement

 26   finalement.

 27   Comment vous souvenez-vous qu'il s'agissait de l'année 1995 ?

 28   R.  Je m'en souviens, parce que cette année-là nous n'avions pas d'argent

Page 24837

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 24838

  1   pour partir en vacances ou pour nous faire quelque cadeau que ce soit.

  2   Parce qu'à ce moment-là Toma avait perdu son entreprise, il n'avait plus de

  3   travail, il était au chômage. Moi, j'étais la seule à amener de l'argent à

  4   la maison. C'était dur la vie en Serbie à l'époque.

  5   Q.  Madame Cekic, est-ce que vous avez le moindre doute quant à l'année en

  6   question ? Est-ce que c'est vraiment pendant cette année-là, pendant le

  7   mois de juillet de cette année-là que vous avez rencontré les Beara au

  8   cours de ce premier et de ce deuxième dîner ? Est-ce que vous aviez le

  9   moindre doute à ce sujet ?

 10   R.  Non, je n'ai absolument aucun doute.

 11   Q.  Je sais que ce n'est pas facile de toujours devoir répéter les mêmes

 12   choses, Madame.

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vais simplement consulter quelques

 14   instants mon confrère pour voir si je n'ai rien oublié, ensuite je vous

 15   dirai ce qu'il en est --

 16   Bien. Voilà, Monsieur le Président, nous n'avons plus de questions à

 17   poser au témoin, pour l'instant du moins.

 18   Mais on m'apprend -- excusez-moi, on m'apprend qu'il y a une erreur dans

 19   l'orthographe de "Gavrilovic" page 50, ligne 1, donc j'aimerais que les

 20   Juges en prennent bien note.

 21   Merci, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il en sera pris bien note.

 23   Maître Zivanovic.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je n'aurai pas de questions à poser à ce

 25   témoin.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 27   Maître Nikolic.

 28   Mme NIKOLIC : [interprétation] Pas de questions.

Page 24839

  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  2   Maître Lazarevic.

  3   M. LAZAREVIC : [interprétation] Pas de questions pour ce témoin.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  5   Maître Fauveau, vous avez demandé dix minutes.

  6   Mme FAUVEAU : Non, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  8   Maître Krgovic, contre-interrogatoire ?

  9   M. KRGOVIC : [interprétation] Non.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Sarapa.

 11   M. SARAPA : [interprétation] Pas de questions.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc c'est à vous maintenant, Monsieur

 13   Thayer.

 14   M. THAYER : [interprétation] Merci.

 15   Contre-interrogatoire par M. Thayer : 

 16   Q.  [interprétation]  Bonjour, Madame.

 17   R.  Bonjour.

 18   Q.  Je m'appelle Nelson Thayer. J'ai un certain nombre de questions à vous

 19   poser au nom du bureau du Procureur.

 20   Comment qualifierez-vous l'amitié qui vous lie actuellement à Svetlana

 21   Gavrilovic ?

 22   R.  Etant donné que je la connais depuis que je suis toute jeune, on est de

 23   bonnes amies. On se voit régulièrement, on s'appelle. Elle est

 24   esthéticienne. Parfois, je vais la voir à son salon pour me faire faire un

 25   soin. Parfois, je vais chez elle. Parfois on va au théâtre ensemble, au

 26   cinéma. Voilà en quoi ça consiste.

 27   Q.  Si j'ai bien compris ce que vous nous avez dit lors de votre

 28   déposition, vous étiez amie des Gavrilovic, ou de Mme Gavrilovic plus

Page 24840

  1   précisément, avant de rencontrer M. ou Mme Beara, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Oui, je la connaissais déjà avant.

  3   Q.  On a l'impression en vous écoutant que vous êtes devenue très amie avec

  4   Nada Beara. Vous dites que vous lui parliez au téléphone deux fois par

  5   semaine puis que vous la voyiez le week-end; est-ce que c'est bien exact ?

  6   R.  Oui, c'est exact. Tout ça, ça s'explique par les liens qui les liaient

  7   avec mon mari du temps de son vivant. Nada Beara était son patron. Ça

  8   remontre à cette époque-là. Ensuite, on a continué à se fréquenter avec

  9   l'arrivée de Nada à Belgrade avec son jeune fils, Branco.

 10   Q.  Bien. D'accord. Mais ne vous offusquez pas si je détourne le regard

 11   pour regarder l'écran. Il faut que je vérifie l'exactitude du compte rendu

 12   d'audience ou ce qui y figure.

 13   Donc j'imagine que vous êtes allée chez les Beara ?

 14   R.  Oui.

 15   Q. Pouvez-vous donner une approximation du nombre de visites que vous avez

 16   effectuées au domicile des Beara ?

 17   R.  Il m'arrivait d'aller les voir une semaine donnée, puis il pouvait

 18   s'écouler dix jours avant que je retourne chez eux. Comme Nada l'a dit à

 19   très juste titre, je suis la plus jeune de nous et donc c'est moi qui suis

 20   censée aller lui rendre visite. Mais si elle a du temps libre, elle vient

 21   me voir chez moi. Donc je ne peux pas vous donner de chiffre précis du

 22   nombre de visites par semaine. Est-ce qu'il y avait plusieurs visites par

 23   semaine ou toutes les deux semaines, je ne sais pas, mais en tout cas on se

 24   parle régulièrement au téléphone, au moins une ou deux fois. Si on a un peu

 25   de temps, on se voit.

 26   Q.  A combien de fêtes d'anniversaire avez-vous assisté chez les Beara ?

 27   R.  On ne faisait pas toute une affaire des anniversaires. C'est simplement

 28   que c'était une occasion d'être ensemble, de manger ensemble, de boire

Page 24841

  1   ensemble, dans la mesure où on pouvait se le permettre.

  2   Q.  Oui. Je vois bien ce que vous êtes en train de nous expliquer. En fait,

  3   ce n'est pas tellement l'anniversaire qui comptait, c'était plutôt une

  4   occasion de se voir ?

  5   R.  Je n'ai pas compris.

  6   Q.  Le fait que quelqu'un ait fêté ce jour-là son anniversaire, ce n'était

  7   pas la principale raison qui vous amenait à vous voir tel ou tel jour, si

  8   j'ai bien compris.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je ne vais pas vous demander de nous donner de chiffres. Je ne vais pas

 11   insister, mais essayez cependant, au mieux, de nous dire combien de fois

 12   sur toutes ces visites que vous avez faites aux Beara, à combien de

 13   reprises cela s'est déroulé ou cela a coïncidé avec un anniversaire de la

 14   famille Beara ?

 15   R.  Voyez-vous, comme je vous l'ai déjà expliqué, les anniversaires en tant

 16   que tels n'étaient pas si importants que cela, mais en fait on préférait se

 17   voir quand Ljubisa était là, après son retour de la Republika Srpska. On

 18   aimait se voir pour discuter, comme de vrais amis qu'on était. Le petit

 19   Branco était un jeune garçon. Il ne célébrait pas son anniversaire avec

 20   nous, bien entendu. Il sortait avec ses amis pour aller chez le glacier ou

 21   au cinéma.

 22   Mais en tout cas, Nada est une cuisinière hors pair qui préparait des

 23   gâteaux délicieux, et elle nous invitait souvent quand Ljubisa était là,

 24   pour marquer le coup.

 25   Q.  Oui. Vous avez parlé d'un certain nombre de visites que vous avez

 26   rendues à vos amis, et ceci en réponse à Me Ostojic. Pouvez-vous donner une

 27   idée à la Chambre de première instance à combien d'autres fêtes

 28   d'anniversaire vous avez assisté, ou à des fêtes ou à des dîners qui

Page 24842

  1   coïncidaient avec un anniversaire chez les Beara ?

  2   R.  Je n'ai pas compris ce que vous avez dit vraiment quand  vous parlez

  3   "du même jour," ou "de coïncidence."

  4   Q.  Quand quelqu'un fête son anniversaire, pour une raison X ou Y, il

  5   arrive que cet anniversaire ne soit pas célébré le jour de l'anniversaire,

  6   pour une raison X ou Y ou parce que l'anniversaire tombe un jour de

  7   semaine. Parfois on ne peut pas fêter son anniversaire le jour de

  8   l'anniversaire.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Si bien que ma question est tout simplement de vous demander à combien

 11   de reprises, pendant que vous vous trouviez chez les Beara, vous vous êtes

 12   rendu compte que justement ce jour-là  c'était l'anniversaire d'un des

 13   membres de la famille ? Voilà l'essentiel de ma question.

 14   R.  Je ne peux pas vous répondre avec précision. Quand on se rencontrait,

 15   c'était parce que Ljubisa se trouvait là ou parce que c'était

 16   l'anniversaire de quelqu'un. Pour des raisons qui n'intéressent qu'elle,

 17   Nada ne voulait pas dire quel était le jour de son anniversaire, c'est

 18   compréhensible, mais finalement, quand on se réunissait, c'était plus juste

 19   pour se voir, pour être entre amis.

 20   Q.  Si j'ai bien compris, vous ne pouvez pas répondre à ma question, vous

 21   ne pouvez pas dire à combien de reprises vous vous êtes trouvée chez les

 22   Beara et où ça coïncidait avec un anniversaire d'un des membres de la

 23   famille ?

 24   R.  Comme je vous l'ai dit, en 1995 j'ai invité Ljubisa et Nada à mon

 25   anniversaire, mais ce n'était pas vraiment une fête d'anniversaire en tant

 26   que telle. C'était juste une occasion pour nous de se voir. Je crois que

 27   fêter son anniversaire, c'est plutôt pour les jeunes.

 28   Donc on s'est vu en juillet quand Ljubisa était à Belgrade. C'est ce jour-

Page 24843

  1   là qu'on est allé au restaurant. Ensuite, Nada m'a rappelée que le

  2   lendemain, c'était, je crois, le 14 juillet -- parce que c'est elle qui me

  3   l'a dit, sinon, bien entendu, je ne l'aurais pas su. Dans la soirée du

  4   lendemain, on s'est retrouvé chez nous. On s'est revu peut-être un ou deux

  5   mois plus tard. On n'a pas attendu que ce soit l'anniversaire de quelqu'un.

  6   Q.  Est-ce que je vous ai bien comprise ? Je peux bien comprendre que

  7   quelqu'un refuse de dire son âge ou de donner l'année de sa naissance, mais

  8   est-ce que j'ai bien compris ce que vous nous avez dit : vous ignoriez - et

  9   à ce jour encore vous ignorez la date de naissance de Nada Beara  - je

 10   parle de sa date de naissance. Sans parler de l'année de sa naissance, vous

 11   ne connaissez pas le jour de son anniversaire, vous ne savez pas quel jour

 12   de l'année elle fête son anniversaire ?

 13   R.  On est amies, on se voit, on s'appelle, mais je n'ai jamais demandé

 14   quelle était sa date de naissance. Cependant, je sais qu'elle est de 1938

 15   ou 1939, mais je ne connais pas la date.

 16   Q.  Vous venez de nous donner une date précise, celle du 14 juillet et vous

 17   dites que c'est Nada Beara qui vous a dit que c'était cette date-là.

 18   Pendant que Me Ostojic vous posait des questions, vous avez dit très

 19   clairement que vous ne saviez pas quelle était la date précise de

 20   l'anniversaire de M. Beara. Est-ce que c'est bien le cas ?

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avant que vous ne répondiez.

 22   Maître Ostojic. 

 23   M. OSTOJIC : [interprétation] Objection quant à la forme de la

 24   question, ici on déforme les propos du témoin. Je ne pense pas que M.

 25   Thayer présente les faits conformément à ce qui a été dit par le témoin.

 26   Elle n'a pas dit qu'elle ne connaissait pas la date.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense qu'on peut facilement trouver

 28   une réponse à tout cela. On va laisser le témoin répondre. C'est le plus

Page 24844

  1   simple.

  2   Madame Cekic, vous pouvez répondre à la question.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas compris. Est-ce qu'on peut me la

  4   répéter ?

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La question est très simple. A ce

  6   moment-là, est-ce que vous connaissiez la date de naissance de M. Beara ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand on s'est retrouvé au cours de cette

  8   première soirée, pendant qu'on discutait, ou plutôt au moment où on

  9   s'apprêtait à rentrer chez nous, Nada a dit que l'anniversaire de Nada

 10   c'était le lendemain et c'est à ce moment-là qu'elle m'a donné la date,

 11   sinon, je ne l'aurais pas su.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il y a une certaine confusion qui

 13   apparaît maintenant.

 14   Nada vous a dit que le lendemain c'était l'anniversaire de Ljubisa et

 15   non pas le sien.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, l'anniversaire de Ljubisa, pas le

 17   sien.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Nous pouvons poursuivre.

 19   J'imagine que vous vouliez intervenir dans le même sens, Maître Ostojic ?

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Tout à fait.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Thayer.

 22   M. THAYER : [interprétation]

 23   Q.  Mais pourquoi est-ce que vous n'avez pas donné cette information tout à

 24   l'heure il y a quelques instants ? Il a fallu que Me Ostojic parle du dîner

 25   qui a eu lieu un jour, puis de l'autre dîner qui a eu lieu un autre jour,

 26   pourquoi est-ce que vous n'avez pas tout simplement dit quelle était la

 27   date de ce dîner aux Juges de la Chambre pendant l'interrogatoire principal

 28   ?

Page 24845

  1   R.  Pendant que Me Ostojic me posait ses questions soit je n'ai pas

  2   compris, soit il ne m'a demandé expressément de lui donner la date comme

  3   vous venez de le faire à l'instant.

  4   Q.  Nous allons revenir à la question de la date dans quelques instants.

  5   Quand avez-vous pour la dernière fois parlé à Nada Beara ou quand l'avez-

  6   vous vu pour la dernière fois ?

  7   R.  La dernière fois que j'ai vu Nada Beara c'est samedi dernier.

  8   Q.  A quelle occasion vous êtes-vous vues ?

  9   R.  C'est lors de la réunion avec Me Ostojic et d'autres personnes que je

 10   ne connaissais pas. Il y avait Svetlana, Nada, il y avait moi et on est

 11   allés tous ensemble au restaurant pour le déjeuner.

 12   Q.  Donc si j'ai bien compris, Nada Beara avait bien elle aussi compris que

 13   vous alliez venir à La Haye pour déposer ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce que vous avez parlé avec Nada Beara du fait que vous alliez

 16   venir déposer à La Haye comme témoin à décharge dans le procès impliquant

 17   son mari ?

 18   R.  Ça s'est limité à cela, on n'en a pas parlé plus, parce que ce n'était

 19   pas ça le sujet de notre conversation. On a parlé de quelque chose de

 20   complètement différent. Elle ne voulait pas qu'on parle de notre voyage

 21   ici.

 22   Q.  Est-ce qu'il vous est apparu clairement que Nada Beara avait bien

 23   compris que Svetlana Gavrilovic allait elle aussi venir déposer à La Haye

 24   tout comme vous êtes en train de le faire ?

 25   R.  Je crois qu'elle ne s'en est pas rendu compte tout de suite. Il lui a

 26   fallu un ou deux jours pour s'en rendre compte, pour dire les choses

 27   simplement, elle était surprise.

 28   Q.  Quand avez-vous parlé pour la dernière fois à Ljubisa

Page 24846

  1   Beara ?

  2   R.  La dernière fois que j'ai vu Ljubisa c'était en 2001, lorsqu'on est

  3   allé à la messe anniversaire célébrer en l'honneur de mon mari aujourd'hui

  4   décédé. On est allé au cimetière.

  5   Q.  Mais quand avez-vous eu une conversation pour la dernière fois avec

  6   Ljubisa Beara, si ce n'est pas lors de cette célébration de 2001 ?

  7   R.  Non, je ne lui ai pas parlé.

  8   Q.  Excusez-moi. Ma question était très maladroite. Je vais la reposer.

  9   Est-ce qu'après 2001, vous avez parlé à M. Beara sans pour autant le voir ?

 10   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Est-ce qu'avant 2001, vous avez

 11   parlé à M. Beara ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  En quelle année ? Je suis désolé de me servir de cette célébration

 14   organisée en la mémoire de votre mari comme une sorte de jalon, mais

 15   j'aimerais que le Tribunal puisse savoir quand vous avez parlé avec M.

 16   Beara.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Ostojic.

 18   M. OSTOJIC : [interprétation] Une petite confusion peut-être qui s'est

 19   glissée à la ligne 8 de la page 59. En fait, il lui a demandé si c'était

 20   après, alors que c'est écrit "avant", et cetera, donc il y a une confusion.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer.

 22   M. THAYER : [interprétation] Je pense qu'avec la question que j'ai posée

 23   tout est clair maintenant.

 24   Q.  Je répète cette question : après cette célébration en l'honneur de

 25   votre mari en 2001, quand avez-vous ensuite parlé à Ljubisa Beara ?

 26   R.  On s'est rencontré en l'an 2000, mon mari était encore de ce monde,

 27   c'était au mois de juin, on est allé voir Ljubisa et Nada. Ljubisa aimait

 28   nous surprendre, il aimait bien organiser des barbecues parce qu'il avait

Page 24847

  1   habité très longtemps à Split. Il parlait le dialecte de Split. On parlait

  2   de toutes sortes de choses, de la santé, des médecins. Voilà ce dont on

  3   parlait parce que Bozinovic, mon mari, était malade et on a dit qu'il

  4   devrait voir un médecin, et peu après d'ailleurs il est décédé.

  5   Q.  Dernière question sur ce point avant la pause : après la célébration

  6   révisée à la mémoire de votre mari en 2001, quand avez-vous parlé pour la

  7   première fois avec Ljubisa Beara ?

  8   R.  Je l'ai vu six mois ou un an plus tard, mais très fugacement. Je

  9   passais devant leur immeuble, j'avais parlé avec Nada au téléphone, j'avais

 10   demandé des nouvelles de son mari, elle m'avait dit, Si tu veux, tu n'as

 11   qu'à passer prendre un café. Mais je suis restée très peu de temps chez

 12   eux, puisque c'était le matin et je devais retourner au travail. Donc je ne

 13   l'ai vue que très peu de temps, juste le temps de prendre une petite tasse

 14   de café.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons faire une pause qui va

 16   durer 25 minutes.

 17   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 18   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer.

 20   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Q.  Bonjour à nouveau, Madame.

 22   R.  Bonjour.

 23   Q.  Je vais vous poser encore quelques questions à propos du sujet que nous

 24   avions abordé juste avant de nous séparer tout à l'heure. Quelle est la

 25   date à laquelle s'est tenue la cérémonie du souvenir pour votre mari en

 26   2001 ?

 27   R.  Le 8 juillet.

 28   Q.  A votre avis, c'était peut-être six mois ou même un an après cela que

Page 24848

  1   vous avez eu l'occasion de revoir Ljubisa Beara ?

  2   R.  Oui, après 2001, pendant l'été peut-être ou au début de l'automne.

  3   Q.  En 2002, Madame, n'est-ce pas ?

  4   R.  Non, en 2001, après la célébration funéraire, peu après.

  5   Q.  Très bien. Avant la pause, dans votre déposition, vous disiez : "Je

  6   crois que je l'ai vu six mois ou un an après." Il s'agit de cette brève

  7   rencontre que vous avez eue avec lui et dont vous nous avez parlé. C'est à

  8   ce sujet-là que je vous pose la question.

  9   R.  Oui, oui. Oui, oui. Je ne vous avais pas compris. Oui, oui, c'est

 10   exact. A l'été ou à l'automne 2002. Excusez-moi, je vous avais mal compris.

 11   Q.  Quand avez-vous vu pour la dernière fois M. Beara en personne, si vous

 12   vous en souvenez ?

 13   R.  Il se trouve qu'à l'époque, cette année-là, ça n'a pas duré longtemps

 14   du tout. En fait, je suis juste allée les voir, nous nous sommes assis

 15   pendant quelques instants, on a discuté un petit peu, j'ai pris un café et

 16   je suis repartie.

 17   Q.  Pour être tout à fait sûr de bien vous avoir comprise, Madame, il

 18   s'agit bien de cette rencontre de l'été, automne 2002, ou est-ce qu'il

 19   s'agit de cette rencontre qui a eu lieu suite à cela ? C'est ce que

 20   j'essaie de comprendre.

 21   R.  Non, non, cette année-là, été ou début de l'automne, cette année-là.

 22   Q.  Après l'avoir vu à l'été ou à l'automne 2002, après cela, quand avez-

 23   vous vu M. Beara pour la dernière fois après cela ?

 24   R.  Je ne l'ai plus jamais revu.

 25   Q.  Je souhaiterais à présent attirer votre attention sur le premier dîner

 26   que vous avez évoqué avec mon éminent confrère à Belgrade. Serait-il exact

 27   d'affirmer que ce premier dîner avait été planifié ou organisé ce jour-là ?

 28   R.  Oui, ce même jour, le jour où mon regretté mari s'est entretenu avec

Page 24849

  1   Ljubisa au téléphone, et c'est là que nous nous sommes mis d'accord pour

  2   aller manger ensemble au restaurant.

  3   Q.  Qui a choisi le restaurant, Madame ?

  4   R.  Mon regretté mari. C'est lui qui l'a choisi. C'est un petit restaurant,

  5   une taverne, c'est ainsi qu'on appelle ça dans notre quartier, assez

  6   chaleureuse et sympathique, Cuburska Lipa. C'est très près de là où nous

  7   habitons, dans le quartier où nous habitons, enfin, dans le quartier où

  8   j'habite, plutôt, maintenant, moi, puisque mon mari n'est plus des nôtres.

  9   Q.  Ce n'était pas la première fois que vous vous rendiez à ce restaurant,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Non. Non, nous n'y avions jamais été parce que Ljubisa ne voulait pas

 12   fréquenter les bars ou les restaurants. Lorsqu'on se rencontrait, c'était

 13   généralement chez les uns ou chez les autres. C'était la première fois

 14   qu'il avait dit qu'il était d'accord d'aller manger en ville avec mon

 15   regretté mari.

 16   Q.  Très bien. Mais la question que je vous pose est celle de savoir si

 17   c'était la première fois que vous vous rendiez dans ce restaurant ?

 18   R.  Ça, non, non. Mon mari fréquentait ce restaurant. Il y allait assez

 19   souvent et moi aussi j'y allais à chaque fois que j'en avais le temps.

 20   Q.  C'était un restaurant assez connu, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui. Oui, oui.

 22   Q.  Est-ce qu'il fallait faire une réservation ? Est-ce vous avez réservé ?

 23   R.  Non. Il ne fallait pas réserver, parce que mon mari connaissait les

 24   propriétaires et les gens qui travaillaient au restaurant.

 25   Q.  Quel était le nom du propriétaire, Madame ?

 26   R.  Son nom était Buda Koprivica, mais je crois qu'il a un bail sur le

 27   restaurant depuis. Il l'a mis en location. Mais à l'époque, il louait aussi

 28   -- ou plutôt, c'était loué par M. Raicko. Je crois que c'était ça son nom,

Page 24850

  1   parce qu'il était dans la boxe et mon mari aussi. Il avait fait un peu de

  2   boxe à une époque et c'est comme ça qu'ils avaient fait connaissance l'un

  3   de l'autre.

  4   Q.  Outre l'ambiance chaleureuse et la qualité de la nourriture, il y avait

  5   aussi une relation personnelle entre votre défunt mari et le propriétaire

  6   de ce restaurant, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, parce qu'au départ il était de ce quartier, Stara Cubura. Il a

  8   grandi dans ce quartier et il y vivait, et pratiquement tout le monde se

  9   connaissait dans le quartier, surtout quand on va dans un restaurant où les

 10   gens se connaissent entre eux.

 11   Q.  Les deux couples, comment se sont-ils rendus au

 12   restaurant ? Vous êtes partis, vous y êtes allés ensemble, vous-même et

 13   votre mari d'un côté, les Beara de l'autre ? Vous vous êtes retrouvés

 14   ailleurs et vous êtes allés ensemble, tous les quatre, au restaurant ? Est-

 15   ce que vous voulez bien nous décrire comment vous vous êtes rendus à ce

 16   restaurant ?

 17   R.  Mon mari et moi sommes partis de chez nous et nous avons attendu

 18   Ljubisa et Nada à l'entrée du restaurant.

 19   Q.  J'imagine que c'était un dîner, un repas, pas juste un verre. C'était

 20   un repas qui a duré jusqu'à 11 heures du soir, n'est-ce pas ?

 21   R.  [aucune réponse audible]

 22   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir répondre de manière à ce que nous

 23   ayons la réponse au compte rendu d'audience. Veuillez répondre par "oui" ou

 24   par "non" à la question que je viens de vous poser.

 25   Vous avez dîné, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre de quoi vous avez parlé au

 28   cours de ce repas, vous quatre ?

Page 24851

  1   R.  Nous avons parlé de nos familles, de nos enfants, nous avons parlé de

  2   ce qu'ils faisaient, de l'endroit où ils se trouvaient, endroit où se

  3   trouvait leur école. Nous avons parlé de la situation délicate dans le

  4   pays, liée au chômage. Nous avons, bien entendu, parlé de la question de

  5   santé, parce que nous en étions déjà à un âge où on commence à avoir des

  6   problèmes d'hypertension et on commence à parler des médicaments qu'on

  7   prend, les uns et les autres, et cetera. Voilà de quoi on a parlé.

  8   Q.  La situation militaire en Bosnie, vous l'avez évoquée ?

  9   R.  Non. Ljubisa ne voulait jamais évoquer quoi que ce soit qui soit lié à

 10   ce qui se passait en Bosnie, en tout cas pas en ma présence et en présence

 11   de sa femme. Ceci étant dit, est-ce qu'il en discutait avec mon défunt

 12   mari, d'homme à homme, là je n'en sais rien puisque évidemment je n'étais

 13   pas là.

 14   Q.  Vous nous dites que la prise de Srebrenica est un sujet qui n'a jamais

 15   été abordé au cours de ce dîner; c'est exact ?

 16   R.  Non, il n'y a pas été évoqué.

 17   Q.  Je sais bien que ça fait pas mal de temps maintenant, mais vous vous

 18   souvenez de l'addition, qui a payé l'addition et comment ? En espèce, par

 19   carte de crédit ?

 20   R.  Mon défunt mari a payé l'addition en espèce, parce qu'à l'époque nous

 21   n'avions pas de cartes de crédit.

 22   Q.  A quel moment avez-vous appris que M. Beara était à Belgrade ?

 23   R.  Je ne comprends pas. Vous êtes en train de me demander à propos de ces

 24   jours-là ou de la période précédente ?

 25   Q.  Non, au cours de cette période. Je parle du premier dîner, du deuxième

 26   dîner. Au cours de cette période-là.

 27   R.  D'accord, je vous comprends.

 28   Q.  Quand avez-vous appris qu'il était dans le coin, à Belgrade ?

Page 24852

  1   R.  Le jour où nous nous sommes rencontrés au restaurant, aux environs de

  2   midi lorsque Ljubisa était à la maison, il a appelé mon mari, Ljubisa l'a

  3   appelé de chez lui, et nous sommes convenus de nous rencontrer pour aller

  4   dîner au restaurant ce jour-là.

  5   Q.  Au cours de ce dîner, vous êtes tous restés ensemble, ou est-ce que les

  6   hommes, à un moment donné, se sont séparés de vous ? Ou est-ce que vous

  7   êtes restés tous les quatre ensemble pendant toute la durée du dîner ?

  8   R.  Non, on a passé tout le temps ensemble, tous les quatre, à la même

  9   table. Nous avons parlé, nous avons discuté. Nous ne nous sommes pas

 10   séparés.

 11   Q.  Madame, vous avez fait référence à une fête, une sorte de fête qui a eu

 12   lieu le lendemain. C'est ce que vous avez dit dans votre témoignage.

 13   Pouvez-vous nous dire un peu plus de cette fête ?

 14   R.  Le lendemain nous nous sommes rencontrés chez nous avec le couple

 15   Gavrilovic, Nada et Ljubisa, moi-même et mon mari. Nous avons parlé de

 16   tout. Djordje a voulu poser plus de questions à Ljubisa concernant la

 17   situation en Bosnie, mais Ljubisa n'a pas voulu en parler devant les

 18   personnes qui étaient présentes.

 19   Nous avons parlé du vingt-cinquième anniversaire de mariage de Djordje et

 20   de Svetlana. Ils voulaient partir en voyage, mais ils n'avaient pas assez

 21   d'argent. Ils voulaient partir en train. Il leur a dit qu'il allait les

 22   amener à la gare au moins pour voir le train. C'était des sujets dont on a

 23   parlé ce soir-là.

 24   Q.  Nous allons parler de ce deuxième dîner dans quelques instants.

 25   J'aimerais vous poser des questions pour savoir si ce jour-là les Beara ont

 26   préparé quelque chose qui avait un lien avec la fête d'anniversaire ?

 27   R.  J'ai parlé avec Nada. Elle m'a dit que pendant le déjeuner  il y avait

 28   leurs parents et leurs familles chez eux, qu'elle a préparé probablement

Page 24853

  1   des plats qui convenaient pour ce type d'occasion. Elle m'a dit qu'ils ont

  2   pris le déjeuner en famille dans leur maison.

  3   Q.  Est-ce qu'ils vous ont invités à déjeuner ?

  4   R.  Non. Parce qu'on a convenu de se voir chez nous dans la soirée,

  5   ensemble avec les Gavrilovic pour nous régaler avec des plats que j'ai

  6   préparés, des gâteaux, des quiches, et cetera.

  7   Q.  Lorsqu'ils sont arrivés le lendemain soir, avez-vous préparé le dîner

  8   chez vous, dans votre maison, auquel les Beara ont assisté, ou il

  9   s'agissait d'une soirée uniquement pour boire un

 10   verre ?

 11   R.  J'ai préparé des quiches au fromage, des gâteaux, donc il ne s'agissait

 12   pas d'un vrai dîner, mais plutôt d'une sorte de soirée avec des amuse-

 13   bouche, pour être ensemble.

 14   Q.  Vous nous avez dit qu'il y avait des discussions portant sur ce train

 15   Orient-Express, et M. et Mme Gavrilovic ont célébré leur   vingt-cinquième

 16   anniversaire de leur mariage. Pouvez-vous en dire un peu plus sur cette

 17   conversation à la Chambre, s'il vous plaît.

 18   R.  Nous en avons parlé. Je me levais pour aller dans la cuisine pour

 19   amener des plats, des boissons, et je ne pouvais pas  participer à cette

 20   conversation, mais on a fait des blagues à ce sujet. Nous disions que nous

 21   n'avions pas assez d'argent pour voyager, mais nous ne pouvions pas le

 22   faire. La situation ne nous permettait pas de faire des voyages.

 23   Q.  Par rapport à ce sujet, à ce train, Orient Express, pouvez-vous dire à

 24   la Chambre de première instance comment Orient Express est devenu un sujet

 25   de conversation, pouvez-vous nous donner plus de détails ?

 26   R.  Svetlana et Djordje ont parlé de ce train. Ils avaient des rêves par

 27   rapport à des voyages qu'ils voulaient faire, mais ils ne pouvaient pas

 28   faire ces voyages parce qu'ils n'avaient pas assez d'argent. Mais moi, je

Page 24854

  1   n'avais pas participé à cette conversation, parce que je me rendais souvent

  2   dans la cuisine pour amener des plats et des boissons. Je ne pouvais pas

  3   participer à cette conversation et je ne peux pas vous donner plus de

  4   détails.

  5   Q.  Pouvez-vous dire à la Chambre de première instance pourquoi vous vous

  6   souvenez de ce sujet entre autres sujets dont vous avez parlé ?

  7   R.  Je me souviens de ce sujet, parce qu'on a beaucoup ri et c'était

  8   quelque chose d'impressionnant que de pouvoir partir à bord de l'Orient

  9   Express et que d'être en mesure de partir dans une autre ville ou à la mer,

 10   donc je peux me souvenir de cela parce que c'était un sujet qui n'était pas

 11   un sujet ordinaire.

 12   Q.  Connaisses-vous un restaurant qui s'appelle Balkan

 13   Express ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Ce restaurant se trouve à Zemun, c'est près de Belgrade, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, probablement, mais je ne connais pas très bien ce quartier et les

 17   restaurants de ce quartier, mais j'ai entendu parler de ce restaurant, mais

 18   je ne saurais pas vous dire où se trouve exactement ce restaurant.

 19   Q.  Avez-vous entendu dire que ce restaurant est en fait situé dans des

 20   wagons de train et peut-être que c'est pour cela que vous vous souvenez

 21   bien de ce restaurant ?

 22   R.  Oui. J'ai entendu parler de cela.

 23   Q.  Vous souvenez-vous si durant le deuxième dîner, ou peut-être même

 24   durant le premier dîner, pendant que vous prononciez des blagues au sujet

 25   d'Orient Express, que quelqu'un a dit que ce nouveau restaurant qui

 26   ressemblait à des wagons de train existait et que quelqu'un a proposé d'y

 27   aller parce qu'il ne pouvait voyager à bord d'Orient Express ?

 28   M. OSTOJIC : [interprétation] Je soulève une objection, c'est une question

Page 24855

  1   directrice mais je ne veux rien dire de plus en présence du témoin.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense qu'il faut qu'on s'arrête là

  3   et qu'on demande au témoin de répondre.

  4   Madame Cekic, pouvez-vous répondre à cette question ?

  5   R.  Oui. J'ai entendu parler de cela ce soir-là lorsqu'on a parlé d'Orient

  6   Express et de ce wagon de train.

  7   M. THAYER : [interprétation]

  8   Q.  Lorsque vous dites "le wagon de train," vous pensez à ce restaurant,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Je sais que cela s'est passé il y a longtemps, mais pouvez-vous vous

 12   souvenir qui a prononcé cette blague concernant le restaurant-wagon [phon]

 13   ? Pouvez-vous dire cela à la Chambre si vous vous en souvenez ?

 14   R.  Je ne m'en souviens pas. J'ai dit tout à l'heure que je sortais de la

 15   salle à manger pour aller dans la cuisiner et pour amener des plats et des

 16   boissons pour servir mes invités, donc j'étais absente au moment où l'un

 17   des Gavrilovic a dit cela.

 18   M. THAYER : [interprétation] Pouvez-vous m'accorder quelques instants, s'il

 19   vous plaît.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excusez cette interruption.

 22   Mais nous vous attendions nous aussi, Monsieur Thayer.

 23   M. THAYER : [interprétation]

 24   Q.  Est-ce que vous seriez surprise d'apprendre, Madame, que ce restaurant,

 25   le restaurant du train, il n'a ouvert ses portes qu'en 1998 ?

 26   R.  Je suis en train de vous dire que je ne suis jamais allée à ce

 27   restaurant. Je ne sais pas où il est. Je sais simplement qu'il existe, et

 28   j'ignore à partir de quel moment il a ouvert ses portes, en quelle année,

Page 24856

  1   donc je ne peux rien vous dire de plus. Je n'en sais rien.

  2   M. THAYER : [interprétation] Merci. J'aimerais qu'on présente la pièce 3629

  3   sous la liste 65 ter.

  4   Q.  Je vais vous présenter quelques pages d'un rapport qui a été préparé

  5   aujourd'hui à partir d'information reçue très récemment par nous-mêmes.

  6   M. THAYER : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre la sixième page

  7   du document.

  8   Q.  Je sais que vous nous avez dit que vous pensez ne jamais avoir

  9   fréquenté cet endroit, mais j'aimerais vous montrer la photographie pour

 10   que vous me disiez si au cours de vos déplacements en ville vous avez

 11   jamais vu cet endroit ?

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Je pense qu'il faut se référer à la réponse

 13   du témoin, page 69, ligne 21, à ce moment-là je m'oppose à la manière dont

 14   la question est posée. Le témoin a été très clair quant au fait qu'elle ait

 15   ou non fréquenté le restaurant.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Mais le fait de ne pas être allé

 17   dans un restaurant et de ne pas l'avoir vu en photo en passant devant, ce

 18   n'est pas pareil. Donc la question est tout à fait recevable, à moins que

 19   mes collègues ne soient pas d'accord.

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Sauf votre respect, Monsieur le Président, je

 21   peux vous lire la question, j'hésite à le faire, mais il lui dit qu'elle

 22   n'y a pas été.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, mais le fait de ne pas être allé

 24   dans un restaurant comme c'est mon cas ici à La Haye, je ne suis pas allé

 25   dans tous les restaurants, mais il y en a certains que je connais parce que

 26   je suis passé devant, donc ce n'est pas pareil.

 27   Allez-y, Madame Cekic, essayez de répondre à la question, on va d'abord

 28   demander à M. Thayer de terminer de la poser cette question.

Page 24857

  1   M. THAYER : [interprétation]

  2   Q.  Ma question était très simple, Monsieur le Président l'a bien dit.

  3   Regardez cette photographie, vous viviez à Belgrade, vous vous déplaciez à

  4   Belgrade, est-ce que vous vous souvenez avoir vu ce bâtiment ?

  5   R.  Non. Je ne l'ai jamais vu, je ne suis jamais passée devant.

  6   Q.  Nous avons parlé à quelqu'un au restaurant aujourd'hui, ce restaurant

  7   s'appelle Balkan Ekpres, et on nous a dit qu'il avait ouvert ses portes, ce

  8   restaurant, en 1998.

  9   M. THAYER : [interprétation] J'aimerais qu'on nous présente la page 2 du

 10   document.

 11   Q.  C'est une page que nous avons trouvée sur le site internet du

 12   restaurant, est-ce que vous voyez ce document où l'on voit la mention

 13   Balkan Ekspres en haut ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Qu'est-ce qu'on peut lire en dessous ? Qu'est-ce que ça veut dire

 16   "osnovan", Madame ?

 17   R.  Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas si c'est le moment où ça a

 18   été construit ou s'ils ont ouvert leurs portes cette année-là. Je ne sais

 19   pas. Je peux simplement vous dire que je n'y suis jamais allée, je ne suis

 20   jamais passée devant. Vous dites que j'habite à Belgrade, on pourrait donc

 21   partir du principe que je connais ce restaurant, mais je n'ai jamais

 22   emprunté la rue qui m'aurait permise de passer devant le restaurant.

 23   Q.  Ma question maintenant est aussi très simple. Aujourd'hui même, un

 24   employé du restaurant nous a expliqué que cet établissement avait ouvert en

 25   1998, vous voyez maintenant ce document à l'écran, est-ce que l'on ne peut

 26   pas dire que c'est à un autre moment que vous vous êtes réunis avec les

 27   Beara et les Gavrilovic, c'est à une autre occasion que vous vous êtes

 28   réunis et que vous avez parlé de l'Orient Express ?

Page 24858

  1   R.  Non, ce n'est pas à une autre date ou à un autre occasion.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. THAYER : [interprétation]

  4   Q.  Au cours de ce deuxième dîner --

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Thayer, poursuivez.

  7   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Je reprends et je répète : au cours de ce deuxième dîner qui a eu lieu

  9   chez vous, est-ce que tout le monde est resté dans la même pièce pendant

 10   toute la soirée ?

 11   R.  Oui. On est tous resté dans la même pièce.

 12   Q.  Le fait que M. Beara semble maintenant à La Haye, j'imagine que ça a

 13   été le sujet de bien des discussions entre vous-même, Mme Gavrilovic et Mme

 14   Nada Beara ?

 15   R.  Vous parlez de la dernière fois où on s'est vu ou vous parlez d'une

 16   période pendant laquelle on s'est vu et pendant laquelle on parlait de

 17   Ljubisa.

 18   Q.  Toutes mes excuses. Ma question était vraiment très mal posée, je vais

 19   la reformuler.

 20   M. Beara a été arrêté, transféré à La Haye, il est ici depuis un certain

 21   temps, tout cela, j'imagine que vous en avez parlé dans vos conversations

 22   avec Mme Gavrilovic et Mme Beara ?

 23   R.  Votre question est bien compréhensible, mais on s'interrogeait

 24   toujours, on se renseignait sur l'état de santé de Ljubisa, comment ça

 25   allait, quelles étaient les conditions de détention. Mais pour tout ce qui

 26   a trait au pourquoi et au comment, on n'en parlait pas. Non, de ce genre de

 27   choses, on n'en parlait pas.

 28   Q.  Est-ce que Nada Beara suit le procès de son mari sur internet, dans les

Page 24859

  1   journaux ou en suivant ce qu'on dit à ce sujet ?

  2   R.  Je ne sais pas. Quand je la vois, on n'en parle pas. Moi, je lui

  3   demande simplement comment va Ljubisa et s'il l'a appelée au téléphone.

  4   Q.  Vous-même, Madame, est-ce que vous suivez ce procès, est-ce que vous

  5   vous renseignez sur ce qui se passe dans cette affaire ?

  6   R.  Non, je n'ai pas suivi le procès de Ljubisa. J'ignore sur quoi ça

  7   porte. Je ne suis pas vraiment au courant de tout ça. Il m'arrive de voir

  8   des images du prétoire à la télévision mais ça se résume à cela. Il y a

  9   aussi ce qu'on peut voir dans la presse ou à la télévision. Voilà toute

 10   l'étendue de mes informations à ce sujet.

 11   Q.  Qu'en est-il du moment où M. Beara a été inculpé, ou plutôt, le moment

 12   où l'acte d'accusation le concernant a été rendu public en octobre 2002,

 13   indéniablement, à ce moment-là, c'est quelque chose dont vous avez parlé

 14   avec ces personnes. Vous en

 15   souvenez-vous ?

 16   R.  Je n'en ai pas parlé avec Nada, mais j'ai lu des articles à ce sujet

 17   dans les journaux.

 18   Q.  Avec qui avez-vous parlé de tout cela au moment où l'acte d'accusation

 19   concernant M. Beara a été rendu public ?

 20   R.  Très franchement, je ne sais même pas à quel moment cela s'est produit.

 21   Q.  Mais qu'en est-il du moment où il a été incarcéré et amené à La Haye,

 22   est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 23   R.  Oui. C'est passé à la télévision. Peu avant la fin du reportage, je

 24   suis parvenue à voir Ljubisa. Il y avait notre ministre de la Justice qui

 25   était là avec d'autres personnes au moment où ils sont arrivés à

 26   l'aéroport. Ça a été montré à la télévision.

 27   Q.  Vous souvenez-vous du moment où cela s'est produit ?

 28   R.  C'était à peu près il y a trois ans et demi.

Page 24860

  1   Q.  Donc vers 2004 ou 2005 ?

  2   R.  Si c'était il y a trois ans et demi, à ce moment-là c'était à la mi-

  3   2004.

  4   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que j'en suis

  5   arrivé à la fin de l'audience. Je m'apprêtais à aborder un autre sujet.

  6   J'aurais besoin d'un petit peu de temps demain, mais en tout cas, j'en

  7   aurai terminé bien avant la fin du premier volet d'audience.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

  9   Je crois que le témoin peut quitter le prétoire. Madame le Témoin, votre

 10   déposition ne s'est pas encore achevée. Demain matin, vous devrez revenir

 11   pour une période assez limitée, et ensuite vous pourrez partir.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Est-ce que vous pouvez lui rappeler qu'il

 13   faut qu'elle ne parle à personne.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, c'est très important, Madame,

 15   d'ici demain, il vous est absolument interdit de parler avec quoi que ce

 16   soit de ce dont vous nous avez parlé au cours de votre déposition. C'est

 17   très important.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 19   [Le témoin quitte la barre]

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Comme vous l'avez peut-être remarqué,

 22   nous avons eu certaines consultations à l'instant, vous avez peut-être

 23   deviné même ce dont il s'agit. Nous voulons que Mme Gavrilovic revienne

 24   demain matin. Elle est toujours aux Pays-Bas. Ce n'est pas avant demain

 25   après-midi qu'elle va rentrer chez elle, en milieu d'après-midi. Donc nous

 26   voulons l'entendre demain matin. Bien entendu, demain nous allons

 27   poursuivre l'audition du témoin et l'achever également.

 28   Merci. L'audience est suspendue jusqu'à demain matin.

Page 24861

  1   --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le vendredi 29 août

  2   2008, à 9 heures 00.

  3  

  4  

  5  

  6  

  7  

  8  

  9  

 10  

 11  

 12  

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28