Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 10 septembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Popovic est absent]

  5   --- L'audience débute à 9 heures 04.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous. Le Juge Agius ne pourra

  7   pas être parmi nous pour le restant de la semaine, et vraisemblablement, ni

  8   le lundi prochain, en raison d'une affaire personnelle urgente dont il doit

  9   s'occuper. Comme nous l'avons dit hier, nous allons siéger en accord avec

 10   la Règle 15 bis.

 11   M. Popovic n'est pas parmi nous aujourd'hui, comme on l'a dit hier, en

 12   fonction du règlement. M. Ostojic a une question préliminaire ?

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Deux questions.

 14   J'ai consulté avec mes confrères de l'Accusation, et nous aimerions que M.

 15   Bienenfeld vienne témoigner tout de suite après le Pr Wagenaar et avant le

 16   Pr Gogic. Il devait témoigner après, mais en raison de ses affaires

 17   personnelles il m'a demandé si l'on pouvait l'examiner avant.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En ce qui me concerne, je n'ai pas de

 19   problème avec cela, et s'il n'y a pas d'opposition de l'Accusation, il n'y

 20   a pas de raison à ce que la Chambre refuse cette demande.

 21   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci. Notre dernier témoin, qui devrait

 22   commencer demain, je crois que c'est le 2DW80. Nous n'avons pas demandé une

 23   motion pour les mesures protectrices. Nous sommes encore en train de

 24   rédiger le texte qui devrait être déposé devant le Tribunal aujourd'hui.

 25   Nous estimons que des mesures de protection sont nécessaires. Il y a deux

 26   rapports de police que nous avons annexés à notre demande. Il vit en dehors

 27   de l'ex-Yougoslavie. Nous vous l'expliquerons une fois que vous aurez reçu

 28   le texte en fin d'après-midi. C'est une requête d'urgence que nous

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  1   déposons. Je crois que c'est la seule fois que nous l'ayons fait avec nos

  2   témoins. Je crois que la demande est raisonnable, mais c'est à la Chambre

  3   d'en décider.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela pourrait peut-être poser problème à

  5   l'Accusation de répondre sans avoir vu le texte, mais nous attendons de

  6   l'avoir le plus rapidement possible.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Nous répondrons le plus rapidement possible

  8   dès que nous aurons le texte.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 10   permettez, j'aimerais avoir une pause de cinq minutes après la fin de

 11   l'examen du Pr Wagenaar pour que nous puissions tout simplement réorganiser

 12   nos classeurs et nos documents. Même si ce n'est pas l'heure de la pause,

 13   puisque nous allons devoir permuter certains membres de l'équipe à cette

 14   heure-ci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien sûr.

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puisque nous traitons de questions

 18   préliminaires, il reste quelques questions en suspens qui concernent la

 19   Défense de M. Nikolic. La Chambre a été saisie d'une requête concernant des

 20   mesures de protection pour plusieurs témoins. La Chambre examine

 21   actuellement cette requête et va publier sa décision en temps voulu, mais

 22   je constate qu'il y a une requête consistant à rajouter un témoin sur la

 23   liste 65 ter, et d'après ce que j'ai compris il n'y a pas d'opposition de

 24   l'Accusation. Il s'agit d'une requête en date du 28 août, si je ne me

 25   trompe.

 26   M. NICHOLLS : [interprétation] Je pense ne pas avoir d'objection, mais si

 27   vous permettez j'aimerais confirmer cela à la pause, vérifier à la pause.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Il y a également deux requêtes

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  1   concernant l'admission des déclarations écrites; dans un cas selon le 92

  2   bis, et dans l'autre cas le 92 ter. Dans le premier cas, il s'agit d'une

  3   requête en date du 20 août, et la deuxième en date du 9 septembre. En

  4   particulier, le dernier doit déposer très prochainement, très rapidement,

  5   donc la Chambre aimerait entendre l'avis de l'Accusation très rapidement.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour. En ce qui

  7   concerne la requête 92 bis, si c'est celui auquel je pense, il s'agit d'un

  8   témoin de caractère. Nous n'avons pas d'objection. En ce qui concerne la

  9   requête 92 ter, nous aurons une objection et nous allons déposer un texte,

 10   des arguments rapidement. Nous pouvons le faire oralement, selon la

 11   préférence de la Chambre. Je sais que M. Thayer travaille là-dessus

 12   actuellement.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, il devrait

 14   être le premier témoin.

 15   M. BOURGON : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Ça sera le

 16   premier témoin pour la Défense.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre préfère avoir vos arguments

 19   par écrit, si vous pouviez le faire d'ici la fin de la journée de demain,

 20   s'il vous plaît.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pas de problème, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ou en cours de journée demain, de

 23   manière à ce que l'équipe de Défense de Nikolic puisse répondre.

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Cela ne devrait pas poser de problème. Je

 25   sais que M. Thayer y travaille. Cela ne devrait pas être très long.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous accordons la requête 92 bis.

 27   Je ne sais pas si c'est une question urgente, mais nous avons également

 28   reçu une requête concernant une citation à comparaître en ce qui concerne

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  1   un témoin, en ce qui concerne deux témoins, et j'aimerais avoir une réponse

  2   de l'Accusation le plus rapidement possible en ce qui concerne ces

  3   requêtes.

  4   Très bien. Dans ce cas, nous pouvons faire entrer le témoin. Monsieur

  5   Bourgon ?

  6   M. BOURGON : [interprétation] Avant l'arrivée du témoin, j'aimerais,

  7   avec votre permission, clarifier quelque chose que j'ai dit à la page 47,

  8   lignes 8 à 18, qui prête à confusion en lisant le procès-verbal. A la page

  9   47, mon -- pardon, à la page 46, lignes 20 à 22, mon confrère a dit que

 10   l'équipe de Défense Nikolic n'avait pas remis en cause la rencontre entre

 11   Marko Milosevic et Drago Nikolic. Tout d'abord, notre position consiste à

 12   dire que cela n'est pas entièrement correct, mais plus encore et plus

 13   important; deuxièmement, nous avions demandé au témoin Milosevic de marquer

 14   l'endroit où cette rencontre présumée aurait pu avoir lieu. Cela ne

 15   signifie pour autant que nous reconnaissons que la rencontre entre Marko

 16   Milosevic et le colonel Beara avait eu lieu. Merci, Monsieur le Président.

 17   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre en prend note. Maître

 19   Ostojic, vous pouvez continuer et conclure vos questions supplémentaires.

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   LE TÉMOIN: WILLEM WAGENAAR [Reprise]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   Nouvel interrogatoire par M. Ostojic : [Suite]

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur Wagenaar.

 25   R.  Bonjour.

 26   Q.  Bonjour, Monsieur le Professeur, et je vous remercie d'avoir accepté de

 27   revenir. Nous allons faire de notre mieux pour vous permettre de terminer

 28   et de rentrer chez vous le plus rapidement possible. Puis-je commencer ?

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  1   R.  Bien évidemment.

  2   Q.  Hier, mon confrère parlait d'une catégorie de sept témoins qui

  3   représente un groupe où il n'y avait pas de tests d'identification ou alors

  4   des tests non appropriés qui avaient été menés pour ces témoins ?

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  J'aimerais souligner quelques exemples pour que nous ayons un procès-

  7   verbal parfaitement clair, ce qui satisfera à tous. Le bureau du Procureur

  8   semble y avoir une certaine confusion concernant les différents noms qui

  9   ont été retenus et la manière de mener des enquêtes et comment tout cela

 10   cadre avec le fait d'avoir vu ou ne pas avoir vu des affiches de recherche.

 11   Par exemple, le cas de M. Milosevic, à savoir le 126, sur le tableau.

 12   Merci de me dire lorsque vous aurez trouvé le texte approprié.

 13   R.  J'ai le texte sous les yeux.

 14   Q.  Ma première question est la suivante : à quel moment est-ce que le

 15   premier entretien s'est fait avec M. Milosevic et l'OTP ?

 16   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir la date dans mon résumé, dans mes notes.

 17   Q.  Pour vous rafraîchir la mémoire, je ne vous ai jamais donné cet

 18   entretien. Je vous ai donné une référence au témoignage qu'avait entendu la

 19   Chambre lorsqu'il est venu ici, mais le premier entretien avec le bureau du

 20   Procureur et M. Milosevic s'est tenu le 14 mars 2002. Lorsque mon cher

 21   confrère vous a posé cette question, il vous a simplement cité l'année, et

 22   vous sembliez être d'accord avec lui que si l'entretien s'est fait en 2002,

 23   et que les affiches de recherche avaient été publiées en 2002, peut-être

 24   que des tests d'identification ou une présentation de planches

 25   photographiques ne seraient pas appropriés. Je peux même vous donner la

 26   page exacte où cette question vous a été posée par mon cher confrère.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] Pour aider mon confrère, l'entretien en date

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  1   du 14 mars 2002 figure dans le classeur qui a été remis au Pr Wagenaar.

  2   Cela lui a été remis. Nous avons des copies de ce classeur.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Ostojic.

  4   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui. A la page 42, lignes 22 à 25, puis cela

  5   continue jusqu'à la page 43.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes d'accord que le premier

  7   entretien était inclus dans le classeur ?

  8   M. OSTOJIC : [interprétation] En fait, je ne sais pas. J'avais cru

  9   comprendre que ce n'était pas le cas, mais s'il le dit, je n'ai pas de

 10   raison d'en douter, mais c'est un point mineur.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet. Veuillez continuer.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Alors nous avons établi cela, je pense qu'en regardant les différentes

 14   pièces, on constate que la première affiche de recherche datait du 30

 15   octobre 2002, puis l'affiche Interpol en date du 31 octobre 2002. Etant

 16   donné que ça date quelque six mois de plus par rapport à la date du 14 mars

 17   2002, est-ce que vous pensez qu'une parade d'identification par planche

 18   photographique, ou une identification de ce type, est-ce qu'une telle

 19   identification serait indiquée ?

 20   R.  Monsieur le Président, est-ce que je pourrais avoir sous les yeux la

 21   réponse que j'ai donnée à la question hier ? Car d'après mon souvenir, j'ai

 22   dit que si le premier entretien avait eu lieu après la publication des

 23   affiches, cela n'aurait pas été approprié. Ce n'est pas à moi de confirmer

 24   les dates, après tout. C'est à vous de le faire. J'espère l'avoir dit de

 25   cette façon, c'est-à-dire si les affiches ont été publiées avant. Donc

 26   j'aimerais vérifier ce que j'ai dit hier, si vous permettez.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que ça peut être suffisant

 28   comme réponse. Monsieur Nicholls ?

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  1   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est assez difficile de vérifier cela avec

  2   le professeur, car je n'ai pas posé cette question. On peut le vérifier

  3   avec mon confrère. Je regarde à la ligne 25 448, et c'est là que j'ai

  4   commencé à poser des questions sur le Témoin Milosevic, et je ne pense pas

  5   avoir posé de questions sur les affiches de recherche et le témoin n'a pas

  6   répondu.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur Wagenaar, on ne peut pas vous

  8   montrer les pages du procès-verbal sur votre écran, mais M. Ostojic peut

  9   vous donner lecture s'il le souhaite, si nécessaire.

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Il peut répondre, me semble-t-il,

 11   directement. Permettez-moi de poser une autre question.

 12   Q.  Maintenant --

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Je suis désolé.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais répondre à cette question.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit page 42 du procès-verbal

 16   d'hier ?

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Je poserais la question et j'en donnerais

 18   lecture, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'était quelle page dans la version

 20   électronique ?

 21   Vous avez dit 42 ?

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Nous avons reçu le procès-verbal en date

 23   d'hier soir qui sera remis ce matin seulement, donc la pagination n'est pas

 24   vraiment celle de la version officielle, si vous voulez.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le premier mot en haut de la

 26   page ?

 27   M. OSTOJIC : [interprétation] En haut de la page, il y a le mot "not," en

 28   anglais, "n-o-t." A la ligne 2 la réponse est : "Non," et puis le texte se

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  1   poursuit.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet. Merci de donner lecture de ce

  3   passage, et l'Accusation va vérifier que c'est précis.

  4   M. OSTOJIC : [interprétation]

  5   Q.  A la page 42 du procès-verbal d'hier, ligne 22, l'Accusation a posé la

  6   question suivante qui est longue. Soyez patient :

  7   "Merci. J'aimerais maintenant vous poser une question sur le Témoin 126,

  8   Milosevic. Ceci porte sur une rencontre en date du 14 juillet. C'est le

  9   numéro 10 sur votre tableau, qui a été interviewé en 2002 et a témoigné ici

 10   en juin 2007. Vous vous souvenez peut-être que c'est le témoin qui avait

 11   reçu l'ordre de son commandant de porter un message au colonel Beara à

 12   l'école, et il a témoigné au TR1302 : 'Et plus tard dans la journée, vous

 13   aviez reçu des instructions de votre commandant ?' La réponse à la question

 14   était : "Oui, à un moment donné dans l'après-midi, ou tout du moins, il m'a

 15   appelé à la brigade et c'est ce qu'il m'a dit, il m'a dit de chercher M.

 16   Beara à l'école élémentaire, et de lui remettre un message et d'en rendre

 17   compte au commandant de la brigade, et c'est exactement ce que j'ai fait."

 18   Puis M. Nicholls a continué avec un commentaire et une question suivante,

 19   je crois.

 20   "Maintenant, en pensant à la question du rafraîchissement de la mémoire, si

 21   vous devez apporter un message à quelqu'un que vous ne connaissez pas mais

 22   qui s'appelle Beara, vous devez vous souvenir du nom afin de vous le

 23   rappeler tout au long de la tâche pour que vous puissiez vous en souvenir,

 24   avant même la rencontre ?"

 25   Puis, Monsieur le Témoin, vous avez donné la réponse suivante à la page 43,

 26   lignes 12 à 14 :

 27   Votre réponse était : "C'est une possibilité, ce n'est pas à moi de juger

 28   de la situation exacte. Il est possible aussi qu'il y aille en disant il y

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  1   a un colonel là-bas et il faut lui dire ceci ou cela."

  2   J'en donne lecture du procès-verbal. Il se pourrait que ce soit nécessaire

  3   de corriger le procès-verbal d'hier, mais voilà ma question.

  4   M. NICHOLLS : [interprétation] Désolé d'interrompre. La première question

  5   que je posais portait sur les affiches en date de 2002. Voilà quelle était

  6   la difficulté.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Alors qu'ici on parle du 25 449 du procès-

  9   verbal.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet, nous allons continuer. La

 11   question, s'il vous plaît.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Etant donné que M. Milosevic avait donné un témoignage en date du 14

 14   mars 2002, et que les premières affiches étaient publiées en date du 30

 15   octobre, est-ce qu'une identification par planche photographique était

 16   appropriée ou nécessaire ?

 17   R.  Ce n'est pas à moi de dire ce qui est exigé ou pas, car je ne connais

 18   pas le règlement. Mon avis est qu'il serait utile de faire cela afin de

 19   résoudre les éventuelles incohérences dans le témoignage du témoin. En ce

 20   qui concerne la citation que vous avez faite, ça montre à quel point j'ai

 21   continuellement lutté contre l'effort qui a été fait pour me pousser à

 22   donner un avis sur les faits. J'ai continuellement souligné que ce n'est

 23   pas à moi de juger des faits.

 24   Dans la citation que vous avez donnée, en effet il n'est pas à moi de juger

 25   si quelqu'un se souvient de quelque chose ou pas, ou si on lui a donné tel

 26   ou tel nom. Je ne peux qu'envisager certaines possibilités. La même chose

 27   s'applique en ce qui concerne les dates et la publication des affiches de

 28   recherche. Ce n'est pas à moi de déterminer à quelles dates les entretiens

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  1   se sont tenus. Si vous avez des doutes quant aux dates, vérifiez dans le

  2   dossier. Ne me posez pas la question. Je ne suis pas expert en la matière.

  3   Tout ce que je peux vous dire c'est énoncé le principe général, à savoir

  4   que si le témoin a vu des photos de l'accusé autres que celles qui étaient

  5   présentées lors la confrontation, et là d'après les règles que j'ai

  6   énoncées - et je crois que l'Accusation l'a expliqué avec beaucoup de soin

  7   et elle a bien compris - dans ce cas il n'est pas utile de procéder à une

  8   identification par planche photographique. Si les photos ou les affiches

  9   ont été vues bien après, alors, évidemment, on peut procéder à une

 10   identification par planche photographique. C'est une question d'ordre. Mais

 11   ce n'est pas à moi de déterminer dans quel ordre les événements se sont

 12   produits.

 13   Q.  Je suis un peu perplexe parce qu'en ce qui concerne M. Milosevic lors

 14   des questions d'hier à la page d'après, il nous dit la chose suivante. Il

 15   s'agit des lignes 1 à 10 du procès-verbal d'hier. Il dit : "Pas de problème

 16   d'éclairage. Il faisait jour." Je reprends. "Pas de problème d'éclairage.

 17   Il faisait jour. Des conversations de deux à trois minutes, en face à face.

 18   Est-ce qu'une conversation de deux à trois minutes en face à face est

 19   suffisante ?" Puis vous avez donné la réponse qui était : "Bien sûr."

 20   Quel est le lien entre la rétention du nom et la durée de la

 21   rencontre en face à face ?

 22   R.  Ça n'a pas de lien direct, mais dans bien des cas, et je l'ai souvent

 23   remarqué d'ailleurs, j'ai eu moi-même des objections, car il y a eu

 24   plusieurs questions et il y a une certaine confusion parfois qui règne. Ce

 25   que je dirais est la chose suivante : est-ce qu'une exposition de deux à

 26   trois minutes suffit pour se souvenir d'un visage. C'est une question

 27   d'ordre général. On ne m'a pas demandé de confirmer que la rencontre a duré

 28   deux à trois minutes ou même que le témoin a vraiment vu le visage, car ça

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  1   je n'en sais rien. Donc ma réponse à cette question devait être comprise

  2   comme une réponse d'ordre général, c'est-à-dire une exposition à un visage

  3   pendant deux à trois minutes. Ce n'est pas à moi de juger si cela s'est

  4   produit réellement ou pas.

  5   Q.  Etant donné, Monsieur le Professeur, que l'Accusation semble concéder

  6   que la durée de la rencontre était suffisante et que les différents

  7   paramètres étaient satisfaisants, et que ceci s'est produit quelque six

  8   mois avant la publication d'une affiche de recherche, quelle est, à votre

  9   avis, la conséquence du fait que l'Accusation n'a pas mené une

 10   identification par planche photographique pour ce témoin ?

 11   R.  La conséquence est qu'il est beaucoup plus difficile pour le Tribunal

 12   de juger de la fiabilité de la déclaration de ce témoin. Il eut été utile

 13   pour le Tribunal que le bureau du Procureur procède à ce type

 14   d'identification, puisque nous savons que la valeur diagnostique, c'est-à-

 15   dire le poids des éléments de preuve, si ces tests sont administrés de

 16   façon appropriée, notamment la reconnaissance par planche photographique,

 17   le poids de ces éléments de preuve est majeur.

 18   Le fait de priver le Tribunal de ces éléments de preuve a une certaine

 19   valeur à titre d'information, mais ce n'est peut-être pas très utile de

 20   dire cela.

 21   Q.  Je fais une petite pause pour les interprètes. L'Accusation a essayé

 22   d'expliquer les raisons pour lesquelles ils n'ont pas procédé par planche

 23   photographique lors de l'identification pour les témoins qui ont identifié

 24   les personnes après le 30 octobre 2002. Mais j'aimerais parler du concept

 25   que vous nous avez parlé hier à la page 44, aux lignes 6 et 7, et la

 26   reconstruction. Vous nous avez parlé des dangers de la reconstruction.

 27   Pourriez-vous d'abord nous dire de quoi il s'agit exactement ?

 28   R.  Pourriez-vous me donner un peu le contexte, puisque cela veut dire

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  1   plusieurs choses. Pourriez-vous, je vous prie, me remettre dans le

  2   contexte.

  3   Q.  Fort bien. Avec votre permission, Monsieur le Président, c'est une

  4   réponse qui était assez longue que vous avez donnée, et ça commence à la

  5   page 43, ligne 20.

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. C'est une

  9   question qui aurait pu être posée de façon beaucoup plus simple. A la page

 10   bla-bla, vous parlez de la reconstruction. Qu'est-ce que cela veut dire ?

 11   Vous parlez de reconstruction.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Que disent les pages du transcript

 13   ?

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] La réponse commence à la page 43, ligne 20,

 15   et elle se poursuit jusqu'à la ligne 25 sur cette même page, et se continue

 16   à la page 44 --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Car vous voyez que le problème est que

 18   votre pagination ne correspond pas à la nôtre. Vous pouvez commencer les

 19   lectures.

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Ça commence par une réponse du professeur :

 21   "Non, pas nécessairement. C'est pour cela que j'ai essayé d'expliquer. Il

 22   faut connaître plus d'éléments quant à la situation. Si je vous dis que je

 23   serai examiné par M. Nicholls, je sais qu'il y a une personne qui va me

 24   poser des questions. Il n'est pas nécessaire d'avoir le nom. Je ne présume

 25   que M. Nicholls n'est pas obligé de se rappeler du nom."

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je comprends maintenant le contexte.

 27   M. OSTOJIC : [interprétation] Aimeriez-vous, Monsieur le Président, que je

 28   vous donne lecture de la phrase qui précède le mot : "Donc ceci dépend de

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  1   la situation, à savoir si cette personne est envoyée quelque part à ce

  2   moment-là -- et si elle est -- mais c'est pour la raison pourquoi je dis

  3   ceci. Le danger est que la personne reconstruise quelque chose, c'est-à-

  4   dire que si on dit -- le danger est de savoir que la personne pourrait

  5   reconstruire les faits et dire qu'il avait été envoyé pour rencontrer M.

  6   Beara, il pourrait ne pas se souvenir du nom, mais pourrait se souvenir du

  7   fait qu'on l'ait envoyé rencontrer la personne la plus haut gradée."

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, je connais le contexte. Merci.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation]

 10   Q.  On m'apprend maintenant que le transcript officiel est à la page 25

 11   449. Vous pouvez poursuivre, Monsieur le Professeur.

 12   R.  La reconstruction veut dire qu'après un événement qui s'est déroulé,

 13   nous avons soit obtenu de nouvelles informations sur l'événement, nous

 14   repensons à l'événement, et nous tirons certaines conclusions. Ensuite,

 15   nous entrons ces conclusions ou ces nouvelles informations dans la base de

 16   données de notre mémoire précédente. A ce moment-là, les deux deviennent la

 17   même chose. On ne peut plus faire de distinction entre les deux, de sorte

 18   que plus tard, lorsque nous essayons de nous souvenir du même événement,

 19   nous nous souviendrons des détails que nous n'avons pas réellement vécus,

 20   mais qui se sont ajoutés par la suite, qui se sont greffés à cette mémoire.

 21   Notre recherche démontre la plupart du temps l'effet d'une information

 22   post-événement, c'est-à-dire c'est quelque chose qui est venu s'inséré dans

 23   la mémoire ultérieurement, et il n'est plus possible de faire une

 24   distinction entre le souvenir initial, original, ou ce qui a été ajouté.

 25   Donc un témoin qui serait complètement honnête, par exemple pour vous

 26   donner cet exemple, je me souviens qu'on m'a dit d'aller rencontrer Beara,

 27   si le témoin répondait ceci. Je dis seulement, hypothétiquement si, je ne

 28   dis pas que c'est ainsi que cela s'est passé, mais simplement pour éviter

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  1   toute confusion qui règne dans ce Tribunal. Je ne dis pas que je sais ce

  2   qui est arrivé. Je peux simplement vous dire qu'il y a une autre

  3   possibilité. Cette autre possibilité est de dire que la personne a été

  4   envoyée pour rencontrer un colonel ou pour délivrer quelque chose à un

  5   groupe de personnes, et à ce moment-là, il irait livrer quelque chose à la

  6   personne qui est le plus haut gradé du groupe. Par la suite, on lui a dit

  7   c'était M. Beara, et par la suite, le témoin se souvient autre chose et dit

  8   on m'a dit d'aller voir M. Beara, ainsi de suite. De cette façon-là, la

  9   personne ne serait pas en mesure de faire de différence entre ce qui a été

 10   dit, ce qu'on lui a donné pour instruction, et ce dont il se souvient

 11   réellement. Je ne dis pas que ceci est arrivé. Ce n'est pas une description

 12   des faits, de ce qui s'est réellement passé, mais je veux simplement dire

 13   que ceci peut arriver lorsqu'on parle de mémoire.

 14   Q.  Qu'en est-il, Monsieur, du concept d'une reconstruction après

 15   l'événement par une tierce personne ou par une autre partie ?

 16   R.  L'une des possibilités est que d'autres personnes présentent un autre

 17   scénario, un autre récit de ce qui s'est passé. Lorsqu'ils vous apprennent

 18   ceci, ceci peut travailler dans votre mémoire en tant qu'un événement post-

 19   événement, et les informations qu'ils vous donnent peuvent être intégrées

 20   dans votre mémoire. Par la suite, le témoin peut oublier la source de

 21   l'information.

 22   Q.  Essayez de nous expliquer ceci. Comment pouvons-nous savoir si

 23   l'information vient d'une source initiale ou si l'information vient de

 24   cette reconstruction, après coup, par une tierce partie ?

 25   R.  Il n'y a absolument aucune façon de le trouver, le déterminer. Toujours

 26   est-il qu'on ne peut pas, certainement, poser la question au témoin. Le

 27   témoin ne s'en rappelle plus, ou il a scindé  les deux. Mais la seule chose

 28   que l'on peut savoir, c'est si le témoin a parlé à qui que ce soit après

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  1   les événements. Vous pouvez poser cette question-là au témoin, est-ce que

  2   le témoin s'est entretenu avec qui que ce soit immédiatement après coup.

  3   Q.  Maintenant --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.

  5   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, je crains que nous ne

  6   soyons dans le domaine des conjectures. Le témoin est un expert,

  7   effectivement, mais il nous a dit, de toute façon, qu'il ne pouvait pas

  8   jeter plus de lumière dans cette affaire en nous donnant plus

  9   d'informations concrètes. Cette question de reconstruction post-événement

 10   n'a jamais été posée comme question au témoin. C'est un sujet intéressant,

 11   certes, mais il n'a absolument aucun lien avec notre affaire en l'espèce,

 12   car tout témoin dans toute affaire s'appuie sur sa mémoire. Je crois que

 13   même si la discussion est fort intéressante, cela n'a rien à voir avec

 14   notre affaire.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je crois que Me Ostojic justement

 16   allait aborder un autre sujet --

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que

 18   l'Accusation se trompe. Avec tout le respect que je leur droit, j'aimerais

 19   poser une autre question, même si eux avaient le droit de poser des

 20   questions hypothétiques, j'aimerais poser une question un peu différente.

 21   S'agissant du témoin Milosevic, on a parlé de commandant, et si vous vous

 22   souviendrez le commandant et M. Milosevic ont pris la voiture ensemble

 23   pendant environ deux heures. Il y a eu un entretien qui a été mené avec eux

 24   ce même jour, et ils ont parlé des mêmes faits. Donc je crois qu'un

 25   événement impliquant la reconstruction d'un tiers parti n'est pas quelque

 26   chose qui se trouve dans cette affaire. En résumant cet élément de preuve,

 27   je crois que nous pourrons examiner tout ceci.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que la question qui se pose est

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  1   de savoir, M. Nicholls, de quelle façon est-ce que ceci découle du contre-

  2   interrogatoire ? C'est ce que M. Nicholls soulève.

  3   M. OSTOJIC : [interprétation] Le professeur d'abord mentionne les dangers

  4   de la reconstruction; et deuxièmement, mon éminent confrère lui a posé des

  5   questions très précises sur M. Milosevic hier, il lui a posé des questions

  6   sur la rétention des noms. C'est la raison pour laquelle j'ai abordé ce

  7   concept. Il lui a également posé des questions très précises quant au temps

  8   d'exposition, et je crois que cela découle très clairement des questions

  9   qu'il a posées hier au témoin.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'abord, j'aimerais savoir de quelle

 12   façon est-ce que vous auriez posé votre question. Posez votre question et

 13   nous verrons par la suite.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation]

 15   Q.  Hypothétiquement parlant, Professeur, lorsqu'on parle de M. Milosevic

 16   dans l'affaire en l'espèce, et pour revenir à son premier entretien du 14

 17   mars 2002, s'il prend un véhicule avec son commandant et s'il passe une

 18   heure et demie à deux heures avec ce dernier dans le même véhicule, et

 19   sachant que les deux avaient été interrogés par le bureau du Procureur,

 20   quel est l'impact, s'il y a impact, de la reconstruction post-événement,

 21   sachant que les deux allaient donner ou accorder un entretien avec

 22   l'Accusation ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Ostojic, je parle pour moi bien

 24   sûr, mais je crois que le professeur ne sait pas s'ils ont parlé du fait

 25   qu'ils allaient accorder un entretien au bureau du Procureur, et ne peut

 26   répondre à cette question que de façon hypothétique, dans quel cas, du

 27   point de vue de la Chambre de première instance, il a déjà répondu à cette

 28   question précédemment. Donc je crois que vous pouvez aborder un autre

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  1   sujet.

  2   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Parlons maintenant des occasions perdues par le bureau du Procureur

  4   pendant qu'ils menaient une enquête et qu'ils s'entretenaient avec les

  5   témoins. On a parlé d'une occasion où on aurait dû montrer une planche

  6   photographique à un témoin. Nous parlons maintenant de M. Egbers. Il a été

  7   interrogé -- je suis désolé de le résumer, et je pourrais vous donner les

  8   dates. Ce dernier a été interrogé à trois reprises par le bureau du

  9   Procureur. Je vais vous donner les dates afin que nous puissions tous

 10   suivre : le 24 octobre 1995, le 9 juillet 1999 aussi. Prenons maintenant

 11   les deux. Le troisième entretien est celui du 30 août 2000, mais laissons

 12   celui-ci de côté.

 13   En examinant l'entretien qui s'est déroulé au mois d'octobre 1995, et

 14   sachant que ce que vous avez lu, à savoir que M. Egbers prétend avoir

 15   rencontré M. Beara, pourriez-vous nous dire s'il y a quelque façon que ce

 16   soit pour croire ou pour dire que le bureau du Procureur n'aurait pas dû

 17   présenter une planche photographique à M. Egbers le 24 octobre 1995 ? Est-

 18   ce que vous voyez une raison pour laquelle ceci n'a pas été fait ?

 19   R.  Puis-je répondre à cette question, Monsieur le Président ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Je voulais juste m'assurer que vous

 22   me permettiez d'y répondre. Bien sûr, je ne suis pas ici pour parler de

 23   problèmes pratiques. En théorie, lorsqu'on prend son témoignage et

 24   lorsqu'on voit qu'il prétend avoir rencontré quelqu'un qu'il a rencontré

 25   pour la première fois, on aurait dû se rendre compte que son témoignage

 26   pouvait être appuyé. Il aurait pu être étoffé en lui montrant une planche

 27   photographique.

 28   Si je me souviens bien, M. Nicholls a dit hier que l'un des

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  1   prérequis, bien sûr, est d'avoir une photo. Il faut d'abord avoir une photo

  2   pour présenter une planche photographique à quelqu'un. Mais à ce moment-là,

  3   l'enquêteur aurait dû comprendre qu'il est urgemment nécessaire d'obtenir

  4   une bonne photographie de M. Beara qui, en 1995 ou en 1999, de toute façon

  5   je ne sais pas si c'était difficile, si cela aurait été difficile d'obtenir

  6   une bonne photo de lui à ce moment-là.

  7   D'autre part, on aurait pu également prendre une photo de M. Beara. Ceci

  8   aurait pu donner une bonne idée de l'apparence de M. Beara à ce moment-là.

  9   Le fait d'essayer d'obtenir une photographie dans le but de s'en servir

 10   lors d'une présentation planche photographique aurait été très urgent, très

 11   important. Le seul fait de dire, bien, nous n'avions pas de photos à notre

 12   disposition, ceci n'est que la moitié de l'histoire. C'est une

 13   impossibilité pratique, si vous voulez, mais on peut seulement comprendre

 14   cette réponse s'il était absolument impossible d'obtenir des photos en

 15   question.

 16   M. OSTOJIC : [interprétation]

 17   Q.  En juillet 1999, de nouveau le bureau du Procureur s'entretien avec M.

 18   Egbers. En cette date-là, ils n'ont pas non plus montré une planche

 19   photographique au témoin. Quelles sont les conséquences quatre ans plus

 20   tard environ, à partir de la date où cette première rencontre a eu lieu et

 21   le fait de ne pas avoir montré la planche photographique la deuxième fois ?

 22   R.  Ce sont les mêmes désavantages, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une

 23   occasion manquée. Car il faut dire, n'est-ce pas, et je souhaiterais

 24   insister là-dessus, que le plus long est l'intervalle de rétention, plus le

 25   temps s'est écoulé, plus il y a de nombre d'années entre l'identification,

 26   plus il y a de différences entre un bon témoin qui comprend les règles et

 27   qui ne se livrerait pas à des conjectures lors de la présentation d'une

 28   planche photographique, c'est-à-dire que le témoin devrait dire : Non, je

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  1   suis vraiment désolé, je ne suis pas sûr de pouvoir reconnaître quelqu'un,

  2   et à ce moment-là n'indiquerait personne. Ceci ne veut pas dire que

  3   l'accusé n'est pas présent, ne se trouve pas sur la planche photographique.

  4   Mais cela seulement veut dire que le témoin ne se souvient pas.

  5   Ce qui arrive avec l'intervalle, le temps qui passe pour ce qui est

  6   de la rétention, la planche photographique est montrée normalement le plus

  7   tôt possible. Le fait de ne pas l'avoir fait en 1995, on aurait dû le faire

  8   en 1999, et même quelques années plus tard auraient été la meilleure autre

  9   solution, jusqu'au moment où, bien sûr, les photos de l'accusé apparaissent

 10   partout sur les affiches, et cetera, et auraient pu être clairement vues

 11   par M. Egbers.

 12   Q.  Est-ce qu'il en vaut de même pour le troisième entretien qui a eu lieu

 13   avec M. Egbers et le bureau du Procureur en 2000, c'est-à-dire six [comme

 14   interprété] mois avant les affiches ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 16   M. NICHOLLS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. De

 17   nouveau, on pose des questions qu'il n'a jamais posées à notre enquêteur,

 18   M. Tomasc Blasczyk. Il aurait pu lui poser des questions à ce moment-là.

 19   Lorsqu'il a témoigné, il aurait pu poser cette question à M. Blasczyk, à

 20   savoir s'il savait même qui était M. Beara en octobre 1995, est-ce qu'il

 21   était difficile d'obtenir des photographies de M. Beara, est-ce qu'il

 22   aurait été difficile d'obtenir ces photos en 1999, sachant ce qui se

 23   passait à l'époque en Serbie. Il n'a pas posé ces questions-là au témoin.

 24   Maintenant, mon éminent confrère essaie de créer une situation dans

 25   laquelle on nous dit qu'on aurait dû poser ces questions.

 26   M. OSTOJIC : [interprétation] D'abord, M. Blasczyk, je crois, ne savait pas

 27   du tout ce qui se passait en 1995, puisqu'il a rejoint le bureau du

 28   Procureur beaucoup plus tard, d'après son témoignage. Toutefois, lorsque

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  1   j'ai posé des questions à M. Blasczyk, la Chambre de première instance m'a

  2   dit que je ne pouvais pas poser de questions outre le recueil du Corps de

  3   la Drina. Je lui ai posé une fois une question, à savoir du fait qu'il est

  4   allé rencontrer le chauffeur de M. Beara et qu'il est allé lui poser des

  5   questions. Nous pouvons obtenir ce témoignage.

  6   Deuxièmement, si l'Accusation souhaite introduire la planche photographique

  7   comme une excuse, ils doivent à ce moment-là répondre pourquoi ils n'ont

  8   pas mené ces tests adéquats ou appropriés avant les affiches. M. Nicholls

  9   prétend pour dire qu'il était très difficile. Nous aimerions savoir si

 10   c'était effectivement difficile. C'est ce que l'enquêteur aurait dû dire

 11   dans ses rapports d'enquête et dans les rapports d'information. Je

 12   n'accepte pas cette réponse. Ils avaient des photographies de M. Beara et

 13   de presque tous les membres, de toute façon.

 14   Je crois qu'il aurait été raisonnablement prudent, comme je l'ai dit hier,

 15   que l'Accusation demande à leurs propres témoins qui sont des membres de

 16   l'état-major principal, tels que Savcic, Milovanovic et Srkbic, si ces

 17   derniers avaient des photographies de leurs collègues.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est bien difficile de dire quelque

 19   chose, de vous interrompre alors que vous faites vos présentations de part

 20   et d'autre. Je voudrais plutôt passer de parler de l'effet des questions de

 21   l'article 99(H), qui nous mène dans des eaux troubles d'une certaine façon,

 22   mais n'avons-nous pas entendu suffisamment d'éléments de preuve quant aux

 23   questions de ne pas avoir mené ou d'avoir mené une bonne identification par

 24   planche photographique ?

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Mon éminent confrère a essayé hier de parler

 26   de sept témoins et les sept témoins, selon le Pr Wagenaar, ont donné des

 27   identifications. Même d'après les meilleures explications de l'Accusation,

 28   à savoir qu'il y a eu cette question des affiches, c'est leur explication

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  1   pour laquelle ils n'ont pas montré de planches photographiques. J'aimerais

  2   que le compte rendu reflète du fait qu'on aurait dû montrer des planches

  3   photographiques au témoin à plusieurs reprises.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous parlez des entretiens qui ont eu

  5   lieu en 1995 et 1999, à ce moment-là il n'est pas nécessaire d'aborder les

  6   derniers entretiens.

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Je voulais simplement cristalliser le tout.

  8   Q.  J'aimerais maintenant parler du témoin Boering. Mon éminent confrère

  9   vous a posé des questions sur ce témoin hier. Je vais essayer d'abréger --

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au conseil de ralentir et

 11   rappellent Me Ostojic qu'ils doivent interpréter tous ses propos.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Professeur Wagenaar, nous étions en train de parler du témoin Boering.

 14   Il a accordé deux entretiens au bureau du Procureur; l'un en septembre

 15   1995, ou plus précisément le 28 septembre 1995, le 3, le 6 et le 10 février

 16   1998. Maintenant, avant ce procès, mon éminent confrère vous a demandé quel

 17   impact il aurait pu y avoir si la Défense de M. Beara accepte le fait qu'il

 18   y a eu une deuxième rencontre mais pas la première rencontre. J'aimerais

 19   savoir si après 1995, indépendamment du fait qu'il y ait eu une ou deux

 20   rencontres avec M. Boering, est-ce qu'on aurait dû présenter à ce dernier

 21   une planche photographique ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 23   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est un sujet qui a été couvert de

 24   l'interrogatoire principal.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec vous, et je

 26   crois également que le témoin n'est pas en mesure de répondre à cette

 27   question.

 28   M. OSTOJIC : [interprétation] Je voulais simplement savoir pour le compte

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  1   rendu d'audience, et je vais vous citer la page du compte rendu d'audience,

  2   mais pour l'instant j'aimerais parler de la page 29, lignes 16 à 19 du

  3   compte rendu d'audience d'hier.

  4   Q.  Monsieur, essayez de nous expliquer cette théorie des affiches où on

  5   recherchait ces personnes. Si ces affiches des personnes recherchées ont

  6   été publiées, est-ce que cela veut dire qu'à partir de ce moment-là il

  7   n'est plus nécessaire de montrer une planche photographique à aucun autre

  8   témoin ?

  9   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, en réalité. J'ai dit deux choses, si

 10   je me souviens bien; d'abord, il est malheureux de publier des affiches si

 11   on sait qu'il y a des témoins à qui on pourrait donner un test de planche

 12   photographique ou à qui on pourrait demander d'identifier quelqu'un par

 13   planche photographique. Dans ces cas-là, il faut d'abord montrer les

 14   planches photographiques au témoin; ensuite, seulement après, publier les

 15   affiches de personnes recherchées, surtout lorsqu'il s'agit d'endroits où

 16   ces témoins peuvent les voir. Selon moi, il n'est plus utile de montrer une

 17   planche photographique au témoin pour identifier quelqu'un.

 18   Mais s'il y a des témoins, toutefois, pour lesquels on peut conclure qu'ils

 19   n'ont pas eu l'occasion de voir ces affiches de personnes recherchées, soit

 20   parce qu'ils vivent dans des villages où il est impossible de les voir, à

 21   la campagne, ceci peut faire des différences. Pour vous donner un exemple,

 22   si les affiches de personnes recherchées sont publiées dans l'ex-

 23   Yougoslavie, et si vous voulez tester les membres du Bataillon néerlandais

 24   qui vivent aux Pays-Bas et qui ne sont jamais retournés sur le territoire

 25   de l'ex-Yougoslavie, à ce moment-là il n'y a pas énormément d'objection à

 26   faire pour procéder à ce genre de test-là pour ce qui est des membres du

 27   Bataillon néerlandais, par exemple.

 28   Donc il n'a pas de règle générale. Tout dépend des occasions où le témoin

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  1   aurait pu voir ces affiches ou pas.

  2   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il aurait été utile

  3   si l'enquêteur ou quelqu'un d'autre aurait pu poser cette question aux

  4   témoins ?

  5   R.  Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Comme j'ai expliqué hier, si

  6   les témoins vous disent, oui, j'ai vu les affiches, à ce moment-là ceci

  7   peut nous venir en aide. A ce moment-là vous le savez. Mais si les témoins

  8   disent, non, je n'ai pas vu les affiches, vous pouvez toutefois présumer

  9   qu'ils les ont vues mais ne s'en souviennent pas. Donc indépendamment de la

 10   réponse, il faut présumer qu'ils les ont vues, donc la question n'est pas

 11   nécessaire.

 12   Q.  A la page 23 du compte rendu d'audience d'hier, lorsque vous en parliez

 13   avec mon éminent confrère, je crois qu'il vous a expliqué les raisons pour

 14   lesquelles un enquêteur ne voulait pas montrer des photos ou plusieurs

 15   photos au témoin Babic, par exemple, duquel nous parlions, parce qu'on

 16   cherchait des -- pour essayer de trouver la bonne personne. A la page 16,

 17   vous dites :

 18   "Je suis toujours étonné, et je dois vous dire que c'est toujours très

 19   rapide au début d'une enquête que l'on montre ces planches photographiques

 20   aux témoins sans comprendre qu'à ce moment-là vous avez perdu les témoins

 21   pour d'autres fins d'identification ultérieures, ce qui n'est pas un

 22   problème si vous avez un très grand nombre de témoins, mais ceci peut

 23   devenir un problème s'il n'y a pas suffisamment de témoins. C'est pourquoi

 24   je recommande toujours que l'on montre des photos aux témoins, pour trouver

 25   quelqu'un qui pourrait nous montrer quelqu'un."

 26   Je ne comprends pas tout à fait bien votre réponse.

 27   R.  Oui. Voilà ce que j'ai dit. Il y a deux façons où l'on peut se servir

 28   des photos des réactions des témoins. Au début de l'enquête, un témoin peut

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  1   vous donner des indices. Par exemple, vous avez une photo de quelque chose

  2   qui a trait au crime, et vous ne savez pas qui sont ces personnes. Dans ces

  3   cas-là, vous pouvez demander au témoin qui est censé connaître ces témoins

  4   pour que ce dernier vous donne des noms. Ça, c'est ce qui se passe pendant

  5   l'enquête, et c'est ce que M. Nicholls a appelé pour obtenir des indices.

  6   C'est sa façon d'obtenir des indices.

  7   Deuxième, c'est l'identification par planche photographique. C'est là où un

  8   témoin a fait une déclaration sur quelque chose quant à une expérience,

  9   quant à ses souvenirs, et il y a une nécessité d'étayer ces déclarations

 10   par un test où l'on peut savoir, on peut s'assurer que la personne ait

 11   vraiment rencontré une personne. C'est quelque chose de très différent, car

 12   là, l'emploie de photographies sur une planche photographique pourrait être

 13   utilisé comme élément de preuve.

 14   Dans une publication que j'ai faite au tout début, où j'ai parlé d'une

 15   affaire, j'en parle énormément, les photographies qui nous permettent

 16   d'obtenir des indices ne doivent pas se conformer à aucun modèle, ou à

 17   aucune prescription particulière. Mais, le résultat de la procédure ne peut

 18   pas être employé à la place d'une identification par planche

 19   photographique.

 20   Donc, le témoin qui regarde des photos mais qui ne se conforme pas au

 21   modèle d'une planche photographique pourrait donner des indices, mais plus

 22   tard, ce dernier ne peut pas faire l'objet d'une identification par planche

 23   photographique avec les mêmes photos, avec les mêmes personnes sur la

 24   planche photographique parce que si le témoin a identifié quelqu'un sur la

 25   planche photographique, il se pourrait que c'est parce qu'ils aient vu

 26   cette personne sur une photographique qui leur avait été montrée

 27   préalablement, et non pas parce qu'ils ont réellement vu ou le témoin a

 28   réellement vu une personne sur la scène du crime.

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  1   Donc, il faut s'assurer également, pour ce qui est des enquêteurs, qu'il

  2   n'y ait pas de confusion entre le fait de montrer une photo pour obtenir

  3   des indices, ou des photos pour obtenir des indices, ou montrer des photos

  4   pour obtenir des éléments de preuve du témoin qui a réellement vu une

  5   personne, ou pour établir qu'il ait vraiment vu une personne. Et, mon

  6   objection est la suivante, et c'est ce que j'ai également noté dans mon

  7   rapport, en fait mon avertissement, est le suivant : On a montré des

  8   photographies à certains témoins qui ne correspondaient pas au modèle de

  9   planche photographique, et donc il faut que la Chambre de première instance

 10   doit être avertie et doit comprendre que le fait que les témoins aient

 11   identifié des photographies, ce sont des indices, ce n'est pas une

 12   identification précise. Ce n'est pas quelque chose qui nous permettrait de

 13   comprendre que le témoin ait vraiment rencontré quelqu'un.

 14   Q.  Simplement une question de suivi, parce que je souhaite en fait essayer

 15   de quantifier, parce que lorsque vous parler de beaucoup beaucoup de

 16   témoins, et ensuite vous évoquez la rareté des témoins. Est-ce que vous

 17   pourriez m'aider en cela, s'il vous plaît ?

 18   R.  Oui, tout à fait. Et j'ai vu nombre de cas de ce genre où il y avait

 19   toutes sortes. Bon, si vous avez un cas, par exemple, sur lequel j'ai

 20   publié quelque chose, si vous avez un meurtre dans un bar avec 82 témoins,

 21   vous pouvez utiliser cinq à dix de ces témoins pour avoir des idées, et

 22   vous pourriez leur montrer des photos; il vous en reste encore 72.

 23   Si d'un autre côté, comme c'était le cas dans le meurtre dans un

 24   supermarché, il n'y avait que deux témoins de ce meurtre sauvage, et vous

 25   montrez à ces deux témoins simplement les photographies des suspects, il ne

 26   s'agit pas à ce moment-là de présentation de planches photographiques, mais

 27   d'une seule, et ceci peut être catastrophique parce que ces témoins se

 28   souviendront peut-être des meurtriers ou pas, et à ce moment-là, on ne peut

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  1   pas avoir recours à une présentation de planches photographiques à des

  2   témoins pour retrouver les suspects. Vous avez perdu des éléments de preuve

  3   importants dans ce cas, et c'est perdu pour toujours.

  4   Donc, la recommandation que je ferais, c'est d'avoir toujours un

  5   nombre minimum de témoins dont vous avez besoin pour prouver l'identité de

  6   la personne à incriminer. Ce n'est pas à moi, en fait, de citer quel nombre

  7   de témoins sont utiles, et de décider quel nombre de témoins sont

  8   convaincants. Je crois qu'il est important, et c'est la tâche de

  9   l'Accusation, de déterminer quel nombre de témoins est utilisé dans le

 10   cadre d'une identification qui leur permettra de présenter les éléments de

 11   preuve suffisants. Il est toujours sage, en fait, d'avoir un minimum de

 12   personnes à qui vous montrez les photographies de façon à avoir des

 13   indices. Et si vous avez besoin de trois témoins pour avoir une

 14   identification et vous n'avez que trois témoins, vous ne pouvez pas montrer

 15   que trois photographies pour avoir une idée. Si vous faites cela, vous

 16   perdez vos témoins qui vous permettront d'identifier les personnes

 17   incriminées. Donc, le prix à payer est cher, et si vous le faites, c'est

 18   que vous manquez cruellement d'indices.

 19   Q.  Si vous me le permettez, 2D603, est-ce que nous pouvons l'avoir dans le

 20   système électronique du prétoire, s'il vous plaît, simplement pour le

 21   besoin du compte rendu pour que ce soit clair. Ceci est daté du 15 juillet

 22   1999. Il s'agit d'un feuillet comportant les éléments d'informations que

 23   nous avons obtenu il y a 15 jours, mais je ne connais pas la date exacte.

 24   Peut-être que cela remonte à trois semaines. Est-ce que nous pouvons

 25   simplement faire remonter le texte un petit peu. Je souhaite regarder les

 26   deuxième et troisième paragraphes de ce texte.

 27   Monsieur le Professeur, vous voyez ici le rapport. Vous pouvez le lire dans

 28   son intégralité, et je vais vous demander ensuite de vous reporter au

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  1   second et au troisième paragraphe.

  2   R.  Ça y est, j'ai lu.

  3   Q.  Alors ce qui prête à confusion, à mensonge, je ne vous demande pas

  4   d'interpréter ce que dit l'enquêteur, mais dans ce deuxième paragraphe, ce

  5   soldat du bataillon néerlandais dit ne pas évoquer le fait d'avoir vu M.

  6   Beara au cours de cette rencontre avec Egbers, semble-t-il. Ensuite, il dit

  7   qu'on ne lui a jamais posé cette question au cours de l'entretien, je

  8   paraphrase, mais ensuite, il dit, au troisième paragraphe : "Le sergent

  9   Lutke, encore une fois, ne se souvenait pas de quelqu'un qui répondait au

 10   nom de colonel Beara." Encore une fois, ce qui nous pose problème, c'est

 11   "encore une fois", en fait. Le premier paragraphe dit qu'il n'en parle pas.

 12   Est-ce que vous pouvez faire concorder ces deux éléments ?

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que je dois soulever une objection ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, parce qu'en fait j'allais poser la

 15   question au Me Ostojic, à savoir si ce témoin peut répondre à la question.

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Ecoutez, étant donné qu'il a examiné --

 17   M. NICHOLLS : [interprétation] Pardonnez-moi, mais c'est une double

 18   objection, parce que cette personne se trouve sur la liste des témoins.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Je m'excuse, en fait, pour cette double

 21   objection. Est-ce que nous pouvons regarder la pièce suivante, le 2D24.

 22   Q.  Vous avez soulevé la question hier, me semble-t-il, Monsieur le

 23   Professeur, la question était de savoir si M. Egbers savait ce que nous

 24   appelons ici le B/C/S, ce qui était le serbo-croate à l'époque. Bien qu'il

 25   s'agisse d'un document de sept pages en anglais, je vais vous demander de

 26   vous reporter à la page 6 dans le numéro 2D03-0063.

 27   Et je vais de surcroît vous demander de vous reporter au paragraphe numéro

 28   2, en particulier la fin de ce paragraphe, entre parenthèses où on peut

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  1   lire, je cite : "Confère la déclaration en serbo-croate)." Est-ce que vous

  2   y êtes ?

  3   R.  Oui, je le vois.

  4   Q.  Donc, vous avez regardé certains de ces documents. Comment analysez-

  5   vous ceci ?

  6   R.  Il m'est très difficile d'interpréter le sens de ceci. Cela ne me dit

  7   pas grand-chose. Et cela ne me dit pas si le lieutenant Egbers comprend ou

  8   parle le serbo-croate.

  9   Est-ce que vous voulez laisser entendre qu'il fait référence à une

 10   déclaration en serbo-croate qu'il a écrit lui-même, c'est ce qu'il dit --

 11   Q.  Je ne sais pas.

 12   R.  Je ne comprends pas le sens de ceci.

 13   Q.  Nous n'avons pas eu le temps à l'époque de nous pencher là-dessus

 14   davantage. C'est quelque chose que nous allons aborder un peu plus tard

 15   dans le détail.

 16   Je souhaite simplement vous demander ceci.

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, hier j'ai essayé de

 18   présenter la déposition de M. Zoran Malinic, les pages importantes. J'ai

 19   fait une demande auprès des Juges de la Chambre, je crois que ceci est

 20   important parce que ceci a une incidence sur la personne de M. Egbers. Il

 21   est vrai que nous n'avons pas remis ceci au professeur, parce que nous

 22   souhaitions que son analyse porte sur les documents à disposition de la

 23   Chambre. C'est la pièce 3621. Cet entretien a été mené le 14 décembre 2005.

 24   Je souhaite recueillir son avis sur la question. Je sais que les Juges de

 25   la Chambre ont rejeté ma demande hier, et je réitère ma demande, et je vous

 26   demande si je peux poser la question.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de répondre, est-ce que Malinic

 28   n'était pas protégé ?

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  1   M. OSTOJIC : [interprétation] Il n'a pas témoigné. Je ne sais pas si des

  2   mesures de protection soient nécessaires. Il se peut qu'il témoigne dans le

  3   cadre de la présentation des moyens à décharge. Il était sur la liste des

  4   témoins de l'Accusation, et je crois qu'on l'a retiré de la liste.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne sais pas exactement ce à quoi

  7   correspond cette question. Je ne sais pas si c'est sur la liste des pièces,

  8   mais encore une fois il va poser des questions au professeur pour évaluer

  9   des déclarations de témoin. Il a dit à de nombreuses reprises que c'est

 10   quelque chose qui ne rentre pas dans ses compétences.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voyons d'abord quelle est la question.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Cela se trouve à la page 24 du 43, comme cela

 13   est indiqué en bas de la page 3621. Donc, la page 24, et c'est un document

 14   de 43 pages.

 15   Q.  Je vous demande de regarder plus précisément les lignes 7 à 14.

 16   Monsieur le Professeur, je souhaite simplement vous donner les éléments de

 17   contexte, que vous compreniez de quoi il s'agit. Le commandant Zoran - je

 18   ne sais pas si ceci est contesté - était avec le capitaine Egbers, où il

 19   aurait été vu à l'endroit où il aurait été vu, semble-t-il. Hier, nous

 20   avons brièvement évoqué cette question, qui aurait présenté M. Beara, nous

 21   avons vu qu'il y avait différentes versions données par M. Egbers lui-même,

 22   et maintenant c'est l'enquêteur du bureau du Procureur qui tente d'être

 23   juste, et il dit à ce témoin que le représentant des Nations Unies - à mon

 24   sens il fait référence à Egbers - dans ce cas, il a dit que vous et ce

 25   témoin lui a présenté le colonel Beara et qu'il était là, qu'il a assisté à

 26   la conversation.

 27   Nous avons parlé de questions justes en fait. C'est une déclaration erronée

 28   à propos des trois entretiens donnés par Egbers, n'est-ce pas ?

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

  2   M. NICHOLLS : [interprétation] Ceci n'a rien à voir avec le domaine

  3   d'expertise du professeur. Il s'agit simplement de mon confrère qui tente

  4   de présenter ses arguments plus tôt que plus tard, plutôt que d'attendre le

  5   temps et le moment le plus approprié, c'est une question injuste. Il ne

  6   faut pas la poser au professeur.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Venez-en au fait, s'il vous plaît, et

  8   posez la question.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation]

 10   Q.  Professeur, écoutez, nous voyons à la ligne suivante, vous répondez :

 11   "C'est possible. Est-ce que vous pouvez vous en souvenir ?" Réponse : "Non,

 12   je ne m'en souviens pas." Ensuite, il lui pose la question : "Vous

 13   souvenez-vous que le colonel Beara était là à Nova Kasaba à ce moment-là

 14   lorsque les prisonniers ont été détenus ?"

 15   Réponse, ligne 14 du colonel Zoran Malinic : "Je ne pense pas qu'il était

 16   là." Ensuite, nous avons la suite, et inutile de lire.

 17   Compte tenu de tout ceci, pourriez-vous me dire quelle était

 18   l'importance de tout ceci pendant les trois entretiens menés avec

 19   l'Accusation et les enquêteurs, et comment ils percevaient M. Egbers, et

 20   comment se sont déroulés les tests d'identification ?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, je crois que nous avons déjà

 22   entendu la réponse du professeur.

 23   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Professeur, encore une

 24   fois, merci beaucoup. Nous apprécions beaucoup le fait que vous soyez venu.

 25   Merci, Monsieur le Président et merci, Messieurs les Juges, Madame,

 26   Messieurs les Juges.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Professeur Wagenaar,

 28   ceci met un terme à votre déposition. Nous avons entendu votre déposition

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  1   avec grand intérêt. Nous l'apprécions beaucoup. Vous pouvez maintenant

  2   disposer.

  3   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je

  4   peux transmettre un message au professeur, nous souhaitons le voir avant

  5   qu'il ne quitte le Tribunal. Ce serait peut-être un bon moment pour faire

  6   la pause.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Je suis d'accord. En fait, je souhaite

  8   également m'entretenir avec lui avant qu'il s'en aille.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Professeur.

 10   [Le témoin se retire]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a des pièces à présenter

 12   ? Il y a la liste de pièces qu'il nous faut verser au dossier.

 13   La Défense de Beara, l'Accusation, et pour finir la Défense de Gvero. Y a-

 14   t-il des objections eu égard à certains points ?

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, j'ai des objections.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Zivanovic.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pour ce qui est de la pièce qui figure sur

 18   la liste de l'Accusation, c'est 105. Il s'agit de la déclaration portant

 19   sur l'entretien de M. Milorad Bircakovic qui a témoigné devant ce Tribunal

 20   le 7 et 8 mai 2007, ensuite l'entretien n'a pas été versé au dossier. Il a

 21   été examiné et contre-examiné à propos de certaines parties de l'entretien

 22   et, très honnêtement, il est vrai que mon confrère a examiné le professeur

 23   sur cette partie de l'entretien qui portait sur l'identification d'un des

 24   accusés, et il a lu une partie de cet entretien qui portait sur mon client.

 25   L'identification de mon client, néanmoins, ne faisait pas l'objet du

 26   rapport du Pr Wagenaar à cette occasion-ci, en particulier dans la caserne

 27   de la Brigade de Zvornik. En raison de cela, je m'oppose au versement au

 28   dossier de cet entretien dans son intégralité.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Zivanovic. Ce qui a été lu

  2   dans le prétoire et qui figure au compte rendu. Est-ce que vous avez des

  3   commentaires à faire, Monsieur Nicholls ?

  4   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Je

  5   souhaite demander le versement de tous les documents qui ont été remis au

  6   Pr Wagenaar par la Défense dont il s'est servi pour préparer son rapport.

  7   Ceci représente trois classeurs qui n'ont pas été saisis dans le système

  8   électronique encore. Je crois que c'est essentiel pour les Juges de la

  9   Chambre d'avoir ce document, car hier une partie de mes arguments portait

 10   là-dessus. J'ai abordé avec le professeur la conclusion de son rapport, les

 11   citations qu'il nous a fournies dans son résumé. C'est le seul moment ou le

 12   seul endroit où nous trouvons des citations, et ensuite les documents qui

 13   lui ont été remis. Ceci permet aux Juges de la Chambre d'évaluer ses

 14   conclusions, celles qu'il a faites dans son rapport. M. Wagenaar dit telle

 15   et telle chose; comment arrive-t-il à cette conclusion ? Il cite certains

 16   éléments du compte rendu de son rapport du compte rendu d'audience, et les

 17   Juges pourront se pencher là-dessus pour voir si ces conclusions sont

 18   étayées ou non, s'il a commis des erreurs ou non. Avec tout le respect que

 19   je vous dois, je crois qu'il a commis certaines erreurs.

 20   Et de surcroît, il s'agit d'un principe de base ici, lorsqu'un expert

 21   remet un rapport, il est important de savoir sur quoi il se fonde pour

 22   rédiger ce rapport, vous avez les documents à disposition. Dans tout

 23   rapport militaire présenté devant cette Chambre, je me souviens que M. le

 24   Juge Agius, dans l'affaire Brdjanin, a insisté, il souhaitait avoir tous

 25   les documents et les notes en bas de page. Donc si l'expert dit, je tire ma

 26   conclusion de tel et tel rapport de combat, à ce moment-là, les Juges de la

 27   Chambre peuvent se reporter au rapport de combat en question, et voir si

 28   c'est exact. Il serait, en mon sens, très surprenant si l'une des parties

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  1   verse au dossier un rapport d'expert, et que les Juges de la Chambre ne

  2   souhaitent pas voir quels documents étayent le rapport en question. Je l'ai

  3   dit à plusieurs reprises, en fait, je souhaitais parler de son univers.

  4   C'est ce sur quoi il s'est appuyé pour rédiger son rapport.

  5   L'objet de tous ces documents qui comprennent également l'entretien avec

  6   Bircakovic, je crois que l'objet de tout ceci est très clair. Il s'agit de

  7   documents qui étayent ce rapport sans citation, de façon à ce que vous

  8   puissiez voir quels documents ont été utilisés, si ces documents ont été

  9   utilisés à bon escient.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, la requête à laquelle

 11   vous avez fait référence se trouve déjà sur votre liste. Donc mettons de

 12   côté les déclarations de Bircakovic, tous les autres documents qui sont

 13   compris dans les trois classeurs.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Effectivement. Ici, il y a des éléments qui

 15   se chevauchent, mais c'est la déclaration du témoin et les documents

 16   Bircakovic qui sont un peu distincts.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Bourgon. Monsieur

 18   Nicholls, autrement dit, vous ne souhaitez pas demander le versement de la

 19   déclaration Bircakovic pour prouver la teneur des documents étayant le

 20   rapport, mais plutôt vous donner les éléments de contexte dans lequel le Pr

 21   Wagenaar a présenté ses éléments de preuve. C'est exact ?

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] C'est tout à fait exact, 3669, c'est l'index

 23   qui permet de retrouver les documents fournis de la Défense de Beara au Pr

 24   Wagenaar. Ils nous ont donné les classeurs, nous les avons examinés et

 25   l'index est juste. Il s'agit d'un guide concis sur ce qui a été utilisé par

 26   le Pr Wagenaar dans son rapport, et on peut le vérifier.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Bourgon.

 28   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Tout d'abord,

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  1   commentaire que je souhaite faire à propos de ce que mon confrère vient de

  2   dire à propos des témoins experts. Je souhaite évoquer la déposition du

  3   témoin Butler dans ce cas, qui a été étiqueté comme étant un expert par

  4   l'Accusation et accepté par les Juges de la Chambre quand bien même on ne

  5   pouvait même pas dévoiler ou découvrir quels documents cet expert avait

  6   consultés avant de préparer son rapport et de venir témoigner. Lorsque mon

  7   confrère dit aujourd'hui, qu'à moins d'avoir l'univers dans sa totalité de

  8   tout ce dont s'est servi l'expert, qu'il est important que tous les Juges

  9   de la Chambre aient tous les documents pour pouvoir comprendre de quoi il

 10   s'agit, je dois dire que ceci est très surprenant.

 11   Pour ce qu'a dit (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15   Monsieur le Président, lorsque le professeur a été contre-interrogé

 16   et lorsque le procureur lui a posé des questions supplémentaires, toutes

 17   les fois que ces documents ont été cités, les parties pertinentes ont été

 18   lues dans le compte rendu. Inutile de faire revenir tous ces documents,

 19   quand bien même il s'agit de mettre en exergue le contexte selon lequel ce

 20   rapport a été rédigé par le professeur. Nous demandons ceci : lorsque les

 21   Juges de la Chambre évalueront le rapport du professeur, s'ils jugent utile

 22   d'avoir accès à ces documents, par la suite, à ce moment-là, les Juges de

 23   la Chambre pourront demander à avoir ces documents. Mais maintenant, le

 24   Procureur demande à ce que tous ces documents soient admis, à mon sens, ce

 25   n'est pas le moment approprié.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Me Ostojic, et ensuite Me Fauveau.

 27   M. OSTOJIC : [interprétation] Il y a deux principes ici, nous utilisons des

 28   termes assez forts, comme "c'est tout à fait surprenant", et cette Chambre

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  1   a fixé un précédent. Nous avons traité chaque témoin de l'Accusation de la

  2   même façon. Lorsque les Juges de la Chambre ont dit que nous n'avons pas

  3   besoin de ceci, nous souhaitons simplement nous reposer sur la déposition,

  4   devant la barre de témoin, et nous reporter à ce qui a été dit.

  5   L'Accusation, avec beaucoup de diligence, a revu tous les comptes rendus

  6   d'entretiens, tous les éléments qu'ils souhaitaient mettre en exergue,

  7   comme l'a dit mon confrère, pour essayer de déceler dans les rapports des

  8   erreurs, ici dans le cas du Pour Wagenaar et son rapport. Maintenant, nous

  9   allons fixer un précédent, et je vais demander oralement à ce que les Juges

 10   de la Chambre me donnent tous les documents qui font partie de l'univers de

 11   leurs témoins experts.

 12   Un exemple qui vient à l'esprit, c'est Kathleen [sic] Barr, que nous

 13   connaissons tous. Ils ne nous ont pas remis le dossier complet, ils ne nous

 14   ont pas remis leurs notes. Et pendant sa déposition, la Chambre a autorisé

 15   à obtenir cette documentation parce que j'en ai fait une demande. Mais nous

 16   n'avons pas obtenu son univers complet parce qu'ils ont parlé de rapports

 17   privilégiés. Et je crois que le précédent n'est pas très bon.

 18   Ensuite, la question de l'équité. L'Accusation disposait des classeurs dans

 19   leur intégralité. Ils l'ont eu pendant des mois. Nous leur avons toujours

 20   autorisé à rencontrer le Pr Wagenaar. A chaque fois, nous leur avons dit

 21   qu'ils pouvaient le rencontrer sans jamais s'y opposer. Ils ont ses

 22   déclarations portant sur les entretiens depuis longtemps. Maintenant, si

 23   nous ne pouvons pas les présenter, tous les documents qui se trouvent dans

 24   le système électronique, à ce moment-là, leur travail et le nôtre

 25   n'auraient plus de sens. Parce qu'à ce moment-là, les Juges de la Chambre

 26   peuvent simplement prendre tous les documents, vous pouvez le faire tout

 27   seul, sans avoir besoin d'entendre les arguments dans le cadre de

 28   l'interrogatoire principal ou du contre-interrogatoire. J'insiste pour que

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  1   les Juges de la Chambre n'adoptent pas cette position unilatérale,

  2   autrement dit, d'imposer à ce que l'ensemble du dossier soit remis, et

  3   toutes les déclarations qui ont été présentées au cours de sa déposition,

  4   et si oui, que la Chambre de première instance se penche sur les premières

  5   ordonnances. A ce moment-là, il faut se pencher sur M. Butler, Kathleen

  6   [sic] Barr, Dr Wright et toutes les autres personnes qui sont venues

  7   témoigner devant cette Chambre. Merci.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Me Fauveau, et ensuite Me Zivanovic.

  9   Mme FAUVEAU : Objection par rapport à la pièce P3694. Il s'agit de

 10   l'interview du Procureur avec le témoin Celanovic. Si, par hasard, la Cour

 11   estime quand même que cette déclaration doit entrer dans le dossier, je

 12   pense qu'elle devrait entrer uniquement et strictement pour le contexte du

 13   rapport du Pr Wagenaar, et en aucun cas pour la véracité de leur contenu.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Zivanovic.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Simplement, je souhaite me joindre à

 16   l'objection faite par Me Bourgon (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21   M. BOURGON : [interprétation] 3662.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, écoutez, ceci

 23   n'est pas la même chose qu'avec les autres témoins où nous ne demandons le

 24   versement que de certaines parties. Dans le rapport de Butler, il y avait

 25   des notes en bas de page de son rapport. Tous les documents qui comportent

 26   des notes en bas de pages ont été fournis. Il y a des liens hypertextes.

 27   Tout ce qui a été demandé a été remis, avec Kate Barr et avec les notes. Je

 28   pouvais rencontrer le Dr Wagenaar, je l'ai contre-interrogé pendant trois

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  1   heures. J'ai essayé de le faire le plus rapidement possible. Je ne peux pas

  2   le contre-interroger pendant des semaines et revoir toutes ses

  3   déclarations, ce qu'il a dit et ce qu'il n'a pas dit, et c'est ce que j'ai

  4   essayé de souligner. C'est très simple, me semble-t-il. Il a des résumés de

  5   témoins qu'il a faits lui-même à la lecture des classeurs. Il cite les

  6   parties qu'il juge pertinentes. Il est également important de dire qu'il y

  7   a des extraits qu'il n'a pas cités. Ceci est important, nous savons ce

  8   qu'il utilisait. Il y a 12 témoins qu'ils veulent citer à la barre, ils ne

  9   souhaitent pas que vous voyiez les documents pour voir si le rapport est

 10   exact ou non, ce qui n'est plus dans le respect du principe élémentaire de

 11   notes en bas de pages au niveau des rapports. Les documents du rapport

 12   doivent être disponibles et ont été mis à disposition, je crois qu'il n'y a

 13   aucune raison pour laquelle ce ne serait pas le cas, comme c'est le cas du

 14   rapport Butler.

 15   Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Monsieur Nicholls, pardonnez-moi, je

 16   pense que vous parlez des références 3662 et 3694, 3705. Je suppose qu'il

 17   s'agit de trois déclarations qui sont des doublons et qui ont été remis au

 18   Dr Wagenaar ?

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Madame la Juge.

 20   Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Je voulais tout simplement

 21   confirmer cela.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Madame la Juge.

 23   Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais demander à M. Nicholls s'il

 25   ne serait pas suffisant d'inclure ces parties dans le procès-verbal en

 26   donnant lecture de ces parties ?

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, je ne le pense pas, Monsieur le

 28   Président, puisqu'il s'agit là de trois volumes de texte. J'ai essayé de

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  1   faire le plus vite possible dans mon contre-interrogatoire, je m'en suis

  2   tenu à trois heures. J'ai essayé de faire plus court et j'ai fait trois

  3   heures et 15 minutes en n'insistant que sur les parties les plus

  4   saillantes, et j'ai vraiment fait un travail de préparation considérable.

  5   Il y a un certain nombre de points que je n'ai pas pu aborder et qui

  6   seraient néanmoins pertinents et qui ne seront pas disponibles à la

  7   Chambre. Donc je pense qu'il serait important d'essayer de souligner chacun

  8   des points, je n'ai pas pu le faire dans le cas des 12 témoins dans les

  9   trois heures qui m'étaient imparties.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si je comprends bien, il n'y a pas

 11   d'autres objections en ce qui concerne les documents qui sont à verser au

 12   dossier de la Défense Beara ou de la Défense Gvero ? Monsieur Nicholls?

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Permettez-moi, s'il vous plaît, si je peux,

 14   il y avait d'autres documents supplémentaires qui n'ont pas figuré sur la

 15   liste, la déclaration à propos de Zoran Malinic. Je crois que le bureau du

 16   Procureur est en possession du résumé 65 ter de Zoran Malinic, à savoir le

 17   2D606.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous le numéro 65 ter de

 19   l'entretien Malinic ?

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit de la

 21   pièce P3621, mais je vais peut-être vérifier la cote.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 23   M. NICHOLLS : [interprétation] Parmi les pièces de la Défense de M. Beara,

 24   j'ai une objection si le moment est propice.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, allez-y, nous prendrons une

 26   décision après.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] J'ai une objection sur le 2D603, c'est-à-

 28   dire le rapport d'information que mon cher confrère a essayé à plusieurs

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  1   reprises d'utiliser dans son interrogatoire, mais sans succès. Le 2D606, à

  2   savoir le résumé 65 ter qui n'a pas été utilisé avec le témoin et qui, à

  3   mon avis, n'est pas pertinent ici.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en est-il du 3621 ?

  5   M. NICHOLLS : [interprétation] Je ne sais pas ce que c'est, désolé.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est l'entretien de Malinic.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, il veut inclure celui-là, je n'ai pas

  8   d'objection -- non plutôt, j'ai une objection. Cet entretien n'était pas

  9   pertinent, et cela ne faisait pas partie de son rapport.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on n'a pas posé des questions

 11   au témoin à la dernière minute là-dessus ? Le 2D606 est un résumé de Zoran

 12   Malinic, alors que le 3621 c'est l'entretien à proprement parler, n'est-ce

 13   pas, Monsieur Ostojic ?

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, mais à la page 41, aux lignes 16 à 19,

 15   j'ai posé une question sur des pages pertinentes, on n'a pas besoin à mon

 16   sens de verser toute la déclaration, ceci a été la pratique préalable de la

 17   Chambre.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, je ne me souviens pas, il me semble que

 20   vous aviez appuyé mon objection en ce qui concerne Malinic. Cela me

 21   rappelle que c'est justement là que se pose le problème à mon sens.

 22   L'entretien Bircakovic est un bon exemple puisque le Pr Wagenaar a quelque

 23   peu mélangé les trois événements dont on a parlé dans l'entretien qu'il a

 24   utilisé. Il y avait d'autres passages, d'autres parties de l'entretien

 25   qu'il a examinés, qui, à mon sens, ont quelque peu semé la confusion, car

 26   est-ce que l'identification s'est faite par rapport à l'école à Orahovac,

 27   au QG de Zvornik ou lors de la réunion entre Drago Nikolic, Beara et

 28   Popovic. On a du mal à démêler tout cela dans le témoignage lorsqu'on ne

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  1   regarde pas ça séparément.

  2   M. OSTOJIC : [interprétation] Vous savez, je serai très bref si je peux. Il

  3   est très différent lorsque l'on appelle à la barre les différents témoins.

  4   Nous avons entendu les témoignages, les dépositions. En ce qui concerne M.

  5   Malinic, l'Accusation le faisait figurer sur la liste 65 ter et puis l'a

  6   retiré. Nous ne savons pas avec certitude s'il va comparaître ou pas, et je

  7   crois que c'est tout à fait cohérent par rapport à la pratique du Tribunal.

  8   Est-ce que nous devons maintenant retirer toute la déclaration de M.

  9  (expurgé)

 10  (expurgé) qui est présenté devant le Tribunal, lorsqu'on a entendu le

 11   témoignage, la déposition complète de ces témoins.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous en avons assez entendu.

 13   M. NICHOLLS : [interprétation] Encore un point, s'il vous plaît.

 14   Aujourd'hui, il n'y a pas eu de mal puisqu'on ne fait que vérifier quelles

 15   étaient les conclusions.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Josse.

 17   M. JOSSE : [interprétation] Oui, en effet, je pense qu'un dommage a été

 18   fait car on se retrouve sous une véritable montagne de documentation. Ceci

 19   étant dit, si la Chambre le souhaite, nous n'avons pas au nom du général

 20   Gvero d'objection à condition --

 21   En fait, je me suis levé pour parler de nos propres pièces à verser,

 22   à savoir le 6D308 qui figure sur la liste, qui correspond à la page 11 du

 23   2D590. Et nous ne souhaitons que la page 11, c'est pourquoi le numéro 65

 24   ter en l'occurrence est différent.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Gosnell.

 26   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, nous ne voulons

 27   pas être oubliés dans tout ce débat. Nous sommes d'accord avec la

 28   déclaration de principe de la Défense de Gvero. Mais vous savez, si toutes

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  1   ces déclarations sont versées au dossier, il est toujours possible que nous

  2   puissions les citer dans les présentations de conclusion par rapport à la

  3   véracité de leur contenu. En effet, si nous incluons des textes complexes,

  4   si doivent être accompagnés des circonstances, je voudrais demander s'il

  5   s'agit d'inclure ces documents en raison de leur contenu ou tout simplement

  6   pour illustrer ce que le témoin dit devant la Chambre.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Zivanovic.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, je voudrais simplement ajouter que la

  9   partie du procès-verbal doit être expurgée.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En effet, nous nous sommes déjà occupés

 11   de cela.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pause de 25 minutes.

 14   --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.

 15   --- L'audience est reprise à 11 heures 10.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous donnerons notre décision après la

 17   prochaine pause, car nous devions vérifier quelques points dans les procès-

 18   verbaux. Pouvons-nous faire entrer le prochain témoin, s'il vous plaît.

 19   Monsieur McCloskey ?

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, j'ai un commentaire très bref pour ce

 21   qui concerne une question de politique, me semble-t-il. A la Chambre, je

 22   voudrais simplement vous dire que ces matériaux que nous versons au dossier

 23   et que nous demandons à verser au dossier, nous n'avons jamais l'intention

 24   de limiter cette information à vous-mêmes. Evidemment, nous n'envisageons

 25   aucune restriction sur ces matériaux. C'est à vous de l'utiliser autant ou

 26   aussi peu que vous le souhaitez. C'est cela notre politique en la matière,

 27   et je voulais simplement apporter cette clarification.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est un petit peu différent de ce que

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  1   disait M. Nicholls.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je voulais justement clarifier le point.

  3   C'est pourquoi j'ai pris la parole. C'est notre position. C'est tant mieux

  4   si vous voulez le comprendre comme cela. Personnellement, je ne pense pas

  5   qu'il devait y avoir de limite. Il me semble que les éléments qui ont été

  6   avancés par l'équipe de Borovcanin, il me semble que cela nous ramène dans

  7   un autre concept, une autre position, un concept contradictoire que nous

  8   pensons que nous devons tout simplement oublier.

  9   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Puisque j'ai été mentionné, je voudrais

 11   répondre. Nous n'avons pas de problème à ce que le document soit utilisé

 12   pour expliquer ou comprendre ce que le témoin a dit lors de sa déposition.

 13   Mais le problème, c'est lorsqu'une page d'un de ces documents ou une de ces

 14   déclarations se trouve dans une soumission de conclusion, et que nous ne le

 15   remarquons pas, alors si nous omettons de demander à ce que ce soit exclu,

 16   cela peut porter préjudice à notre client. Cela devient extrêmement

 17   complexe. Qui plus est, vous avez accès à ces documents dans le système de

 18   prétoire électronique. Vous pouvez les consulter sans pour autant que ce

 19   soit versé au dossier. C'est justement la différence entre marquer pour

 20   identification et verser au dossier, quelque chose que vous pouvez utiliser

 21   pour formuler votre décision.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Très brièvement. Tout n'est pas dans le

 23   prétoire électronique justement; et, je ne vois pas pourquoi il y aurait

 24   des problèmes dans les conclusions, puisque chaque pièce sera citée avec

 25   son numéro précis. Donc ce serait très facile de retrouver le document.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Question de pratique : quel est le

 27   destin de ces documents qui ont été présentés mais non pas versés au

 28   dossier ? Les Juges ont toujours accès à cela.

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  1   M. JOSSE : [interprétation] Précisément, justement. Je ne sais pas -- nous

  2   n'avons peut-être pas le temps d'avoir ce débat maintenant, mais je ne suis

  3   pas parfaitement sûr d'être d'accord avec M. Gosnell. C'est quelque chose

  4   que nous devrions peut-être examiner soit oralement soit par écrit en temps

  5   voulu. Je ne sais pas si, Monsieur et Madame les Juges, vous avez une

  6   réponse à la question ou si quelqu'un d'autre peut nous aider.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous y reviendrons après la

  8   prochaine pause.

  9   Faites entrer le témoin. C'est M. Bienenfeld.

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] C'est tout à fait cela, Monsieur le

 11   Président.

 12   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Veuillez prêter

 14   serment, s'il vous plaît.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 16   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   LE TÉMOIN: JAKOV BIENENFELD [Assermenté]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

 20   Maître Ostojic.

 21   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Interrogatoire principal par M. Ostojic : 

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. Comme vous le savez, je m'appelle

 24   John Ostojic, et je représente M. Ljubisa Beara. Pour le procès-verbal,

 25   pouvez-vous nous donner votre nom complet, s'il vous plaît ?

 26   R.  Je m'appelle Jakov Bienenfeld.

 27   Q.  Monsieur Bienenfeld, pouvez-vous nous dire quel est votre niveau

 28   d'étude le plus élevé, s'il vous plaît, que vous ayez obtenu ?

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  1   R.  J'ai un diplôme d'université associé.

  2   Q.  Pouvez-vous nous donner votre date de naissance, s'il vous plaît, et le

  3   lieu de la naissance ?

  4   R.  Le 28 juillet 1948 à Zagreb.

  5   Q.  Je sais que vous parler anglais. Pour éviter toute confusion, puis-je

  6   vous demander dans quelle langue vous préférez répondre à mes questions ?

  7   R.  Pour être parfaitement sûr, je préfère le faire en croate.

  8   Q.  Pour être parfaitement clair, puis-je vous demander quelle est votre

  9   origine ethnique, et je vous demande toutes mes excuses de poser cette

 10   question ?

 11   R.  Pas de problème. Je suis né à Zagreb. Je suis citoyen de Croatie, enfin

 12   d'abord de l'ex-fédération de Yougoslavie, et je suis d'ethnicité juive.

 13   Q.  Je crois que le procès-verbal dit que vous êtes d'ethnicité juive, et

 14   c'est également votre religion.

 15   R.  C'est une erreur. La situation est différente aujourd'hui en Croatie.

 16   Je suis citoyen de Croatie et ma religion est la religion juive.

 17   Q.  Pouvez-vous nous dire brièvement si vous aviez un emploi rémunéré avant

 18   la guerre en ex-Yougoslavie en 1990 ?

 19   R.  J'avais une entreprise, et je l'ai depuis 30 ans. Je l'avais à l'époque

 20   de l'ex-Yougoslavie et je l'ai toujours aujourd'hui dans l'Etat de Croatie.

 21   Je m'occupe du développement de logiciels, et je m'occupe également de

 22   construction.

 23   Q.  Pour parler maintenant de la période allant de 1990 à 1995, pouvez-vous

 24   nous dire ce que vous faisiez à l'époque en ce qui concerne l'évacuation de

 25   certaines populations ?

 26   R.  Très bien. Au début des années '90, comme vous le savez, une attaque a

 27   été menée, une bombe a été posée sur un bâtiment de la communauté juive de

 28   Zagreb. Tout de suite après, j'ai été nommé responsable de la sécurité de

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  1   la communauté juive de Zagreb. En accord avec cela et en fonction des

  2   responsabilités qui m'incombaient, j'ai remis mon entreprise dans les mains

  3   de mon fils et je me suis occupé de la communauté juive pendant cette

  4   période de 1990 à 1995. D'après mon estimation personnelle, j'estime qu'en

  5   tant que représentant de la minorité nationale juive, nous avons bénéficié

  6   d'un bon environnement, si vous voulez, tout à fait convenable, vis-à-vis

  7   de toutes les parties du conflit. On m'acceptait comme un individu neutre,

  8   c'est-à-dire une personne non religieuse sans tomber pour autant dans le

  9   piège de l'ethnicité, et donc j'ai pu participer à l'échange de

 10   prisonniers, et c'est ce que je faisais la plupart du temps. Je m'occupais

 11   de l'échange de prisonniers entre la JNA et l'armée croate.

 12   Pendant cette période, je crois qu'on en était déjà en 1991, je pense ne

 13   pas me tromper, nous avions déjà des problèmes en Bosnie et la communauté

 14   de Sarajevo nous a invités à lancer une initiative d'assistance alimentaire

 15   et médicale afin de voir si l'on ne pouvait pas lancer une initiative

 16   d'évacuation de certains membres de la communauté juive de l'ABiH qui

 17   souhaitaient être évacués, et je m'en suis occupé jusqu'en 1994.

 18   Q.  Afin d'obtenir les paramètres tout à fait clairs, vous avez mentionné

 19   que début 1990 vous étiez responsable de la sécurité de la communauté juive

 20   à Zagreb. Vous avez occupé ce poste pendant combien de temps ?

 21   R.  Trop longtemps. Jusqu'en 1996.

 22   Q.  Pouvez-vous nous dire -- bon, vous avez déjà parlé d'échange de

 23   prisonniers de guerre, mais pouvez-vous nous dire si vous étiez impliqué

 24   dans l'évacuation des populations civiles à l'époque où vous étiez

 25   responsable de la sécurité de la communauté juive de Zagreb ?

 26   R.  Bon, j'ai déjà dit que je n'avais aucune affiliation religieuse qui

 27   pesait sur moi et je ne distinguais pas entre les gens selon leur origine

 28   religieuse. Nous avons aidé à l'évacuation d'une partie de la communauté

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  1   juive de Zagreb, mais j'aimerais attirer votre attention à un point

  2   particulier. J'ai personnellement participé à l'évacuation de sept convois,

  3   et dans chaque convoi de la communauté juive, il y avait toujours une autre

  4   minorité qui était représentée, dans chacun des convois.¸

  5   Q.  Nous avançons un peu vite. Je voudrais être sûr d'avoir bien compris.

  6   Vous avez parlé d'une évacuation à laquelle vous avez participé à Sarajevo,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Pouvez-vous nous dire à quel moment cela s'est produit ?

 10   R.  Ce n'était pas quelque chose qui ne s'est produit qu'une fois. Ça s'est

 11   répété à plusieurs reprises en 1992, en 1993 et peut-être même en 1994. Il

 12   se pourrait que je me trompe, et ma mémoire est quelque peu floue en raison

 13   de mon âge.

 14   Q.  Pouvez-vous nous dire si l'organisation dont vous étiez le responsable

 15   de la sécurité, est-ce que vous travailliez avec d'autres organisations

 16   avec lesquelles vous étiez affilié à l'époque ?

 17   R.  Pour être parfaitement et absolument précis, l'initiative consistant à

 18   évacuer les Juifs de Sarajevo ne relevait pas d'une initiative de la

 19   communauté juive de Zagreb, mais plutôt de l'institution américaine Joint

 20   Distribution qui a lancé l'opération à Sarajevo et qui possédait le

 21   matériel nécessaire, la logistique, et nous avons participé à cette

 22   opération. La communauté juive a participé à l'échange de prisonniers de

 23   l'ex-Yougoslavie et de la Croatie et dans la région, mais en ce qui

 24   concerne Sarajevo, nous travaillions en partenariat avec cette institution

 25   américaine.

 26   Q.  Vous avez parlé de la Joint, J-O-I-N-T. Corrigez-moi si je me trompe,

 27   mais je crois qu'on parle du American Jewish Joint Distribution Committee;

 28   c'est bien cela ?

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  1   R.  Oui, c'est bien cela que l'on appelle la Joint.

  2   Q.  Pouvez-vous décrire les événements qui ont précédé l'évacuation de la

  3   population de Sarajevo dont vous avez parlé ? Comment cela s'est produit ?

  4   R.  Comme vous le savez, la guerre a démarré en Slovénie, s'est étendue à

  5   la Croatie, et puis tout le monde pouvait voir que la Bosnie était la

  6   république la plus divisée du point de vue ethnique de l'ex-Yougoslavie et

  7   qui avait été durement frappée. Nous avons rapidement averti la communauté

  8   à Sarajevo que ça pouvait être comme en 1945. Comme en 1945, les Juifs ne

  9   croyaient pas à ce qui allait se produire. La même situation allait se

 10   répéter en 1991. Ils ne croyaient pas que les choses allaient tourner mal.

 11   Lorsque les Croates ont frappé la Bosnie, il y avait une pénurie

 12   d'alimentation, de médicaments. Ils nous ont contactés. Ils se sont tournés

 13   d'abord vers le siège de la Joint à Paris. La Joint nous a contactés. Il y

 14   a eu des contacts radio avec la communauté juive de Sarajevo, et nous avons

 15   commencé la réhabilitation à Zagreb, et nous avons permis aux

 16   communications de ce faire. Nous avons commencé le transport de convois

 17   alimentaires. Lorsque le premier convoi est arrivé, il y avait une certaine

 18   pression en faveur de l'évacuation, non pas pour des raisons de menaces

 19   religieuses, mais en raison de la menace de guerre. Car la communauté juive

 20   de Sarajevo n'a pas été une seule fois menacée en tant que communauté

 21   ethnique. Mais il y avait une crainte tout à fait normale parmi les gens.

 22   C'était en fait la première guerre dans l'histoire où nous n'étions pas

 23   menacés en tant que peuple. Mais j'aimerais attirer l'attention sur le fait

 24   que nous avons été traités avec plus de respect que nous aurions pu

 25   attendre.

 26   Q.  Merci, Monsieur. Je voudrais attirer votre attention sur les sept

 27   convois dont vous avez parlé. Vous avez dit qu'il y avait dans ces convois,

 28   des Juifs, à chaque fois une minorité d'autres ethnicités. Connaissez-vous

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  1   l'ethnicité de ces personnes qui participaient aux convois aux côtés des

  2   Juifs ?

  3   R.  Du point de vue de l'ex-Yougoslavie, la composition des convois était

  4   multiethnique, composée de Croates, de Serbes, d'Albanais, de Rom. Nous

  5   avions également un Albanais. Donc la composition était multiethnique,

  6   c'est-à-dire que le convoi était composé de membres appartenant à toutes

  7   les communautés ethniques. Mais avant de continuer de vous expliquer,

  8   Sarajevo ressemblait à un anneau. A l'intérieur de l'anneau, il y avait des

  9   Musulmans. Ensuite autour, c'étaient les Serbes, et ensuite il y avait les

 10   Croates. Je dois vous dire que pour arriver aux Serbes qui se trouvaient à

 11   Pale, à Lukovic ou ailleurs dans l'anneau serbe, il devait absolument

 12   passer par le barrage musulman, alors que les Croates devaient passer par

 13   l'une barrière et l'autre, par un anneau et l'autre anneau. Les gens se

 14   demandaient comment ça se fait que les Serbes se trouvaient dans le convoi.

 15   C'étaient des Serbes qui voulaient sortir de Sarajevo, qui était placée

 16   sous le contrôle des Musulmans à l'époque. Ces derniers, c'était très

 17   difficile pour eux de sortir de Sarajevo.

 18   Q.  Monsieur, je n'ai pas très bien compris. Lorsque vous nous avez parlé

 19   de la composition des groupes ethniques, à la lecture du compte rendu

 20   d'audience, il n'est pas tout à fait clair. Vous avez parlé de l'évacuation

 21   composée de sept convois. Y avait-il des Bosniens et des Musulmans de

 22   Bosnie qui étaient également évacués par votre organisation et grâce à

 23   votre aide ?

 24   R.  Voyez-vous, en Bosnie, la communauté juive comptait environ 900

 25   personnes. Il y avait très peu de personnes pour correspondre à une vie

 26   normale d'une communauté, et cette communauté a commencé à s'élargir de la

 27   façon suivante. C'est qu'il y avait un très grand nombre de mariages

 28   multiethniques. Plus de 60 % des membres de la communauté juive de Sarajevo

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  1   s'est marié avec une personne non juive, qu'il s'agisse de Musulman, de

  2   Serbe ou de Croate. Mais croyez-moi que, de mon point de vue, si une Juive

  3   est mariée avec un Juif, lorsqu'on examine la situation à Sarajevo à

  4   l'époque, il y avait tellement de morts, il y avait tellement de victimes,

  5   pour moi il n'y avait absolument aucune différence. Nous ne voulions pas

  6   limiter les gens. Tout le monde pouvait sortir. Ce n'était pas une

  7   organisation toutefois chargée de l'importation et de l'exportation, de

  8   l'import-export des gens en Bosnie ou à l'extérieur de Bosnie. Même si vous

  9   vouliez faire sortir quelqu'un, il fallait le faire passer de façon

 10   clandestine. Il a fallu inventer une histoire pour cette personne, inventer

 11   un nom, inventer une histoire derrière la personne, pour que les autorités

 12   locales puissent lui permettre de quitter le territoire, donc il a fallu

 13   inventer une identité.

 14   Q.  Avant la fin de l'évacuation, et en parlant des sept convois, avez-vous

 15   eu l'occasion de mener des négociations avec divers groupes ethniques ? Je

 16   crois que vous avez mentionné qu'il fallait passer par différentes zones,

 17   différents anneaux, comme vous l'avez expliqué. Pourriez-vous simplement

 18   nous expliquer ou préciser la procédure ?

 19   R.  Je venais de Croatie. Etant donné que nous savons tous que les Croates

 20   avaient un contrôle de fait sur le HVO, nous pouvions passer par ce

 21   territoire sans avoir de permis. Toutefois, pour passer par le territoire

 22   serbe et par le territoire bosnien, il nous a fallu mener un très grand

 23   nombre de négociations. Il a fallu conclure des accords. Malheureusement,

 24   l'expérience a prouvé que toutes ces négociations étaient vaines, puisque

 25   le général Vasiljevic, le chef du contre-renseignement, nous avait dit de

 26   parler avec le général Zivanovic, qui était une personne avec laquelle nous

 27   pouvions mener des négociations. Je crois que c'était le chef de l'état-

 28   major, et c'est avec lui que nous menions des négociations relatives à tous

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  1   les convois qui devaient passer par le territoire. S'agissant de la Bosnie,

  2   avec les Bosniens. La municipalité juive de Sarajevo menait des

  3   négociations avec -- je n'ai plus le nom en tête. C'était le vice-président

  4   de la présidence. Oui, je vais me souvenir de son nom, je crois. Je vous le

  5   dirai lorsque le nom me reviendra. Donc nous n'avions absolument aucun

  6   problème pour mener des négociations. Comme je l'ai dit, la seule chose que

  7   j'avais comprise c'est que c'était un homme honorable et nous avions reçu,

  8   des trois groupes ethniques, un soutien maximal et une aide maximale pour

  9   évacuer les membres de notre communauté.

 10   Q.  Connaissez-vous le nom --

 11   R.  Excusez-moi.

 12   Q.  Je m'excuse.

 13   R.  Excusez-moi.

 14   Q.  Oui.

 15   R.  Je veux ajouter quelque chose. Le nom était Ganic. Voilà, je viens de

 16   me souvenir du nom. C'est son nom de famille. Il s'appelait Ganic.

 17   Q.  Merci beaucoup. Est-ce qu'il vous est arrivé de rencontrer une personne

 18   du nom de Ljubisa Beara ou est-ce que vous avez déjà entendu ce nom

 19   auparavant ?

 20   R.  Je connais le nom. Le nom me dit quelque chose, bien sûr, et j'ai

 21   également rencontré M. Beara. Je l'ai rencontré lors des négociations

 22   relatives au deuxième convoi, si je ne m'abuse. Il était présent à une

 23   réunion. J'étais présent à cette réunion avec le général Ivanovic, et

 24   j'étais également accompagné de représentants des services croates du

 25   Conseil de la défense croate. Nous avons été invités chez le général

 26   Milovanovic, et M. Beara était également présent en tant que chef du

 27   contre-renseignement de l'armée de la Republika Srpska. C'est ainsi qu'on

 28   l'appelait à l'époque. Il était présent lors de nos négociations concernant

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  1   l'organisation du deuxième convoi. J'avais compris que nous étions un peu

  2   transférés sous sa compétence pour des raisons de sécurité. C'était la

  3   seule unique fois où je me suis entretenu avec lui en personne.

  4   Q.  Nous allons parler de cette réunion un peu plus tard. Mais du meilleur

  5   de votre souvenir, savez-vous quand est-ce que cette rencontre a eu lieu,

  6   de quel mois de l'année s'agissait-il ?

  7   R.  Vous demandez beaucoup.

  8   Q.  Excusez-moi.

  9   R.  C'était, je crois, au printemps de 1992. Donc fin printemps 1992, mais

 10   je ne pourrais pas mettre ma main au feu pour cela.

 11   Q.  Où est-ce que cette rencontre a eu lieu ?

 12   R.  A Pale.

 13   Q.  Vous avez parlé d'autres personnes. Du meilleur de votre souvenir,

 14   pourriez-vous nous donner une description plus détaillée pour ce qui est du

 15   nombre de personnes ayant pris part à cette négociation portant sur les

 16   sept convois, d'après ce que vous nous dites ?

 17   R.  Vous parlez de cette réunion-là ou de façon générale ?

 18   Q.  Non, je parle de cette réunion-ci.

 19   R.  A cette réunion étaient présents le général Milovanovic, M. Beara, M.

 20   Zarko Keza, et moi-même.

 21   Q.  Combien de temps a duré cette réunion ?

 22   R.  Une heure, une heure et demie.

 23   Q.  Du meilleur de votre souvenir, Monsieur, que s'est-il passé pour que

 24   cette réunion ait lieu avec M. Beara et d'autres personnes à Pale ? Y

 25   avait-il des problèmes relatifs au premier convoi ?

 26   R.  Je crois - et là, je ne fais que me livrer à des conjectures - M. Beara

 27   aurait été appelé ou convoqué, car nous avions annoncé que ce n'était pas

 28   le seul convoi, qu'il y aurait d'autres convois pour acheminer de la

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  1   nourriture, pour sortir de Sarajevo, et cetera. C'est quelque chose qui

  2   était assez sensible. C'était un sujet sensible, le sujet des convois. Je

  3   crois que M. Beara, en tant que professionnel qui occupait le poste qu'il

  4   occupait, avait reçu pour mission, du point de vue de son poste de sa

  5   situation professionnelle, de nous assurer un passage assuré, comme je vous

  6   dis. Il y avait un membre du HVO qui assurait le passage du convoi jusqu'à

  7   la frontière. Il était donc tout à fait naturel que M. Beara soit présent à

  8   cette réunion.

  9   Q.  Vous avez parlé de "passage sans problème, sans embûche." Est-ce

 10   qu'effectivement c'est quelque chose que vous avez réussi à faire,

 11   s'agissant de Sarajevo ?

 12   R.  Pour vous dire la vérité, à l'exception d'un cas isolé, lorsque le

 13   convoi était divisé en deux à cause de la taille du convoi, un des convois

 14   s'est fait sortir. L'autre convoi, avec lequel j'étais, j'ai sorti cela six

 15   heures plus tard avec un groupe de personnes. Selon mes informations que

 16   j'ai reçues plus tard, il y avait un groupe de personnes portant des

 17   uniformes. Ce groupe est entré dans l'autocar et a saisi des passagers de

 18   l'argent et de l'or. Je me sentais très mal, puisque j'ai compris que

 19   c'était tout ce que ces gens possédaient à bord de ces autocars. J'étais

 20   révolté. J'ai d'abord pris le téléphone pour appeler le général

 21   Milovanovic. Je dois lui dire que j'ai dit beaucoup de choses, et j'ai dit

 22   que je voulais que l'on m'assure que les biens soient rendus aux personnes,

 23   et que je ne voulais surtout pas -- et voilà, je le dis depuis la guerre

 24   pour la première fois comme ça, publiquement.

 25   Le général Milanovic a très bien compris le sérieux du problème, car

 26   ce n'était pas quelque chose qui allait bénéficier la Republika Srpska. A

 27   l'époque, il a très clairement compris la situation. Il a dit qu'il

 28   confierait ces tâches et cette mission à quelqu'un. Je lui ai dit que cela

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  1   m'importait peu, mais que je voulais absolument que les biens soient

  2   restitués. C'était dans la soirée, et le lendemain matin, il m'a dit :

  3   Zarko a rendu un sac plein de biens. Il ne manquait qu'un petit jeton de

  4   quatre euros, donc tout a été restitué. Nous n'avons eu aucun blessé dans

  5   les convois, et pour ce qui est de la Republika Srpska, de leur attitude

  6   envers la communauté juive, il n'y a pas eu de problème. Nous avions

  7   toujours eu une escorte devant, une escorte derrière. Tout comme en

  8   Croatie, nous étions excessivement bien traités, c'est-à-dire que nous

  9   n'avons jamais eu de problème.

 10   Q.  Monsieur, vous nous avez parlé d'une réunion qui a duré une heure et

 11   demie à deux heures. M. Beara a assisté à cette réunion. Est-ce que vous

 12   pourriez nous dire si vous l'avez jamais rencontré par la suite à une autre

 13   occasion ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Monsieur, pour être tout à fait clair, et que le tout soit consigné au

 16   compte rendu d'audience, est-ce que vous connaissiez des membres de sa

 17   famille ? Etes-vous ami avec des membres de sa famille ?

 18   R.  Je me souviens qu'il a dit à quelqu'un qu'il avait deux enfants, mais

 19   je n'ai aucune idée de l'âge des enfants, de leur aspect. Je n'ai jamais vu

 20   ses enfants. Par la suite, je n'ai plus revu M. Beara non plus. Je le

 21   revois pour la première fois depuis, mais je sais qu'il a dix ans de plus

 22   que moi, donc j'imagine que ses enfants étaient plus âgés que les miens,

 23   mais je ne sais pas.

 24   Q.  Fort bien. Merci. Monsieur, vous avez évoqué Zarko Keza. Pouvez-vous

 25   nous dire quel était le rôle qu'il a joué lors de cette réunion ?

 26   R.  Zarko Keza était un envoyé du SIS. Le SIS était le pendant du KOS. Il

 27   était une personne qui assurait ma sécurité et il était délégué du SIS pour

 28   m'assister. Il était adjoint de quelque chose, mais je ne sais pas quoi

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  1   exactement.

  2   Q.  Pendant cette réunion, vous était-il possible de voir si M. Beara avait

  3   des préjudices ou s'il avait un biais quelconque à l'encontre d'un groupe

  4   ethnique ou l'autre ?

  5   R.  Voyez-vous, Monsieur, M. Beara était un excellent officier

  6   professionnel. Sans entrer dans les détails du pourquoi, le traitement

  7   qu'on a assuré à la communauté juive à l'intérieur de la Republika Srpska

  8   et à l'intérieur de la Croatie, d'ailleurs je dois dire également pour ce

  9   qui est de la communauté bosnienne, était plus que satisfaisant. Si j'avais

 10   remarqué quoi que ce soit, je me serais levé et j'aurais quitté la salle.

 11   Q.  Sur la base de vos observations, Monsieur, selon vous, qui était la

 12   personne qui était la plus responsable de s'assurer pour que ces convois

 13   qui sortaient de la Republika Srpska étaient évacués de façon correcte ?

 14   Qui assurait le passage aux embûches ?

 15   R.  Je crois que, personnellement, c'était M. Ljubisa Beara qui était la

 16   personne qui assurait notre passage. Etant donné qu'il était chargé

 17   d'assurer notre passage, je crois qu'il était personnellement impliqué dans

 18   chacun des convois qui était parti de Sarajevo, qui quittait la Republika

 19   Srpska. Je ne peux pas croire qu'il n'était pas impliqué personnellement

 20   dans la situation de convois.

 21   Q.  Merci de votre patience. J'aurais encore quelques questions à vous

 22   poser. Vous nous avez parlé de sept convois. Vous nous avez dit que, parmi

 23   d'autres, en tant que chef de sécurité de la communauté juive de Zagreb --

 24   pourriez-vous nous dire, du meilleur de votre souvenir, combien de

 25   personnes appartenant à diverses communautés ethniques étaient évacuées à

 26   bord de ces convois de Sarajevo ?

 27   R.  En tout, selon une évaluation personnelle -- mais nous ne tenions pas

 28   de registre. On pourrait sûrement trouver les détails précis dans le

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  1   registre de la communauté juive de Zagreb. Mais une évaluation personnelle

  2   me pousse à croire qu'il y avait environ de 1 600 à 1 700 personnes. Nous

  3   avions des gens enregistrés dans la communauté juive de Sarajevo, alors que

  4   les autres personnes étaient des personnes d'appartenance ethnique autre

  5   que les Juifs. Donc, je dirais 1 300, 1 400, environ 1 200, je ne sais

  6   plus.

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur. Je n'ai plus

  8   d'autres questions. Merci, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'agissant des autres équipes de la

 10   Défense, y a-t-il des questions pour ce témoin en guise de contre-

 11   interrogatoire ? Je ne vois personne debout. Monsieur Elderkin.

 12   M. ELDERKIN : [interprétation] En fait, je voudrais seulement remercier M.

 13   Bienenfeld de s'être déplacé. Nous n'aurons pas de questions pour lui non

 14   plus.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Ostojic ?

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je suis désolé

 17   d'interrompre. A la ligne 59 -- ou plutôt, à la page 59, ligne 13, on a

 18   fait allusion à Stolac, S-T-O-L-A-C, sans le K, donc il faudrait simplement

 19   le mentionner pour le compte rendu d'audience.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Quelle ligne encore ? Treize, vous

 21   dites ?

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Exact.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Douze.

 24   M. OSTOJIC : [interprétation] Je l'avais mais je ne la retrouve plus. On

 25   pourrait peut-être demander au témoin de préciser.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voulais simplement avoir le numéro et

 27   la page du compte rendu, donc la page et la ligne.

 28   M. OSTOJIC : [interprétation] Page 59, ligne 13.

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela fait partie de votre question ? Ma

  2   pagination n'est pas la même.

  3   M. OSTOJIC : [interprétation] Je l'ai retrouvée. C'est à la ligne 17, qui

  4   fait partie d'une réponse. Je ne sais pas si vous le voyez.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait.

  6   M. OSTOJIC : [interprétation] Vous la voyez ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  8   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci beaucoup. Désolé, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Bienenfeld. Ceci met fin

 11   à votre déposition. Au nom du Tribunal, je souhaiterais vous remercier

 12   d'être venu témoigner. Vous pouvez maintenant disposer.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

 14   [Le témoin se retire]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Aimeriez-vous verser des documents au

 16   dossier ?

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je n'ai pas de

 18   documents.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Qui est le prochain témoin,

 20   et d'ailleurs est-ce qu'il est prêt ?

 21   M. OSTOJIC : [interprétation] C'est le Pr Gogic. L'interrogatoire sera fait

 22   par mon confrère, Me Nikolic.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Aimeriez-vous que l'on fasse une courte

 24   pause avant de le faire entrer ?

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, ce n'est pas

 26   nécessaire.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors faites entrer le témoin, s'il vous

 28   plaît.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Professeur. Pourriez-vous, je

  3   vous prie, lire la déclaration solennelle.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  5   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  6   LE TÉMOIN: LJUBOMIR GOGIC [Assermenté]

  7   [Le témoin répond par l'interprète]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Maître Nikolic, c'est à vous. Je vous écoute.

 10   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Interrogatoire principal par M. Nikolic : 

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Gogic.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Monsieur Gogic, êtes-vous prêt ? Peut-on commencer ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci. Permettez-moi de me présenter d'abord pour le compte rendu

 17   d'audience. Je m'appelle Predrag Nikolic. Je suis conseil de la Défense de

 18   l'équipe défendant les intérêts de M. Beara, et je vous poserai des

 19   questions aujourd'hui au nom de cette équipe de la Défense. Je vous

 20   demanderais également de décliner votre identité.

 21   R.  Je m'appelle Ljubomir Gogic. Je suis né le 10 décembre 1958, à

 22   Sarajevo. Je travaille dans la section du centre de criminologie à Banja

 23   Luka, et j'effectue des travaux relatifs à l'analyse des documents écrits,

 24   des billets de banque et j'analyse les signatures.

 25   Q.  Monsieur Gogic, qu'est-ce que vous avez fait comme études ?

 26   R.  J'ai obtenu un diplôme de la faculté de psychologie à Sarajevo, et j'ai

 27   obtenu un diplôme de pédagogie en 1971 à Sarajevo. Ensuite, j'ai fait des

 28   études dans le domaine de la maîtrise. Je n'ai pas terminé ma maîtrise,

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  1   puisque la guerre avait éclaté. Donc je n'ai complété que la moitié des

  2   cours suivis dans le cadre d'une maîtrise à la même faculté.

  3   Q.  Pourriez-vous nous dire brièvement qu'est-ce que vous avez fait dans le

  4   cadre de votre travail ?

  5   R.  Après avoir terminé mes études de pédagogie et de psychologie, entre

  6   1983 et 1986, j'ai été engagé comme assistant au département de pédagogie

  7   de la faculté de philosophie à Zadar, à l'Université de Split. A cause des

  8   problèmes de famille toutefois, j'avais des parents malades, je suis

  9   retourné à Sarajevo, ma ville natale. En 1986, j'ai été employé au

 10   ministère de l'Intérieur de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine,

 11   dans la section de criminologie, effectuant des tâches de combat du crime

 12   dans la section chargée d'analyser les documents et les signatures.

 13   Entre 1986 à 1992, j'ai été employé au MUP, et à cause de la guerre ce

 14   travail a été suspendu. Après la guerre, j'ai effectué le même genre de

 15   travail au MUP de Banja Luka. Je travaillais dans l'unité organisationnelle

 16   qui ne fait qu'effectuer des expertises dans le cadre duquel on analyse les

 17   signatures et l'écriture.

 18   En 1995, j'ai été nommé par le ministère de la Justice en tant qu'expert

 19   pour analyser des documents, l'écriture et la signature. Je suis devenu à

 20   ce moment-là le graphologue expert, même si ce n'est pas la meilleure façon

 21   de donner la définition de mon travail.

 22   Q.  Pourriez-vous répéter les dates auxquelles vous êtes devenu témoin

 23   expert du Tribunal ?

 24   R.  Le 28 août 1995, je suis devenu un témoin expert permanent par le

 25   ministère de la Justice et de la direction de la Republika Srpska par une

 26   décision du ministre 01702 --

 27   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi les chiffres.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et le 26 juillet 2001, j'ai été nommé en

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  1   tant que témoin expert permanent analysant l'écriture et les signatures, et

  2   le 26 juillet 2002 j'ai été nommé au poste d'expert permanent du Tribunal

  3   chargé d'analyser les documents et manuscrits et signatures par la cour

  4   d'appel de Brcko district de Bosnie-Herzégovine, par la décision SU-249/02,

  5   et par une décision portant le numéro SU-604/02.

  6   M. NIKOLIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Gogic, je souhaite tout d'abord vous demander ceci.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que vous lisez quelque chose

  9   à partir de votre curriculum vitae, c'est cela ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   M. NIKOLIC : [interprétation]

 12   Q.  Je vais vous demander de ralentir, s'il vous plaît, surtout lorsque

 13   vous évoquez les chiffres. Nous avons reçu des éléments d'information qui

 14   indiquent qu'à la page 62, ligne 24, nous avons consigné ce que vous avez

 15   étudié, parce que ce qui est inscrit ici, c'est le mot "théologie". Est-ce

 16   que vous pourriez répéter ?

 17   R.  J'ai fait des études de pédagogie et de psychologie à la faculté de

 18   philosophie de Sarajevo.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Nikolic, ce que je voulais dire,

 20   c'est que comme nous disposons des curriculum vitae, vous pouvez passer là-

 21   dessus plus rapidement.

 22   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voulais

 23   simplement demander au témoin de ralentir et j'allais venir à l'essentiel.

 24   Q.  Monsieur, est-ce que vous pourriez nous donner davantage d'éléments sur

 25   les travaux effectués par vos services ? Quelles sont les tâches auxquelles

 26   vous avez participé ?

 27   R.  Lorsqu'il s'agit d'analyse graphologique, nous devions établir si le

 28   document était un document original ou non. Nous analysons la nature du

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  1   papier, ses caractéristiques, sa taille, sa couleur, sa composition

  2   chimique. Nous identifions les moyens d'écriture, à savoir si c'est un

  3   feutre, un bic, un crayon, si ce sont des machines à écrire, une machine à

  4   écrire simple ou électronique, ou si c'est avec une machine à écrire à

  5   ruban ou avec un laser. Egalement, nous identifions les cartouches

  6   utilisées, le type de caractère utilisé, à savoir si c'est appuyé ou non,

  7   les photocopies. Nous avons scanné des documents. Nous devions identifier

  8   les systèmes d'écriture, les scripteurs, l'écriture des chiffres,

  9   l'écriture manuscrite. Nous reconnaissons l'écriture de chiffres, l'ordre

 10   chronologique, la condition physique et mentale du scripteur, l'influence

 11   des instruments, la position de la plume au moment de l'écriture.

 12   L'INTERPRÈTE : Est-ce nous pouvons demander au témoin de ralentir, s'il

 13   vous plaît ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Professeur, veuillez

 15   ralentir pour les interprètes, s'il vous plaît, lorsque vous répondez.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il vous faut répéter la

 18   dernière partie de votre réponse. Maître Nikolic, pourriez-vous vous en

 19   occuper, s'il vous plaît ?

 20   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Monsieur Gogic, pourriez-vous nous expliquer brièvement, s'il vous

 22   plaît, quels sont les travaux accomplis par un graphologue lorsque vous

 23   procédez à une analyse graphologique, ce que les travaux que vous-même vous

 24   avez faits lorsque vous travailliez au ministère de l'Intérieur ?

 25   R.  Il fallait rassembler les documents originaux pour voir si oui ou non

 26   le document était falsifié. De surcroît, nous devions identifier le

 27   dispositif utilisé, autrement dit les instruments d'écriture, que ce soit

 28   mécanique, électrique, électromécanique, électronique, des imprimantes, une

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  1   matrice thermique à point.

  2   Q.  Pardonnez-moi, Monsieur Gogic. Je vois vous interrompre avant que vous

  3   ne vous répétiez. Vous parlez de la méthode utilisée pour déceler les

  4   éléments d'écriture. Je souhaite que vous ne répétiez pas ce que vous avez

  5   déjà dit. Je souhaite que vous rappeliez que vous avez parlé de détection

  6   de types d'écriture synchrones et asynchrones. Est-ce que vous pourriez

  7   nous en parler lorsqu'il s'agit d'établir de quel type d'écriture nous

  8   voulons parler ?

  9   R.  Lorsqu'il s'agit d'établir l'âge relatif ou véritable d'un document, il

 10   y a trois méthodes qui sont utilisées. La première consiste à établir la

 11   date de l'encre. Il s'agit de dater le document, la date relative du

 12   document, à savoir il s'agit d'établir si oui ou non quelque chose a été

 13   créé en même temps, avant ou après. La troisième méthode permet de déceler

 14   les annotations synchrones ou asynchrones, que les annotations soient

 15   faites de façon séparée ou de façon séquentielle. Dans ce sens-là, il y a

 16   différents critères qui sont appliqués. Il y des points d'entrée qui

 17   permettent de déceler les annotations distinctes ou séquentielles. Ces

 18   critères et points de départ sont déterminés par les différents projets de

 19   recherche, et on se base sur les études de cas pour effectuer cette

 20   analyse-là, études de cas construites à partir de différentes enquêtes, ou

 21   études faites sur différents éléments manuscrits dans différents journaux,

 22   registres ou d'autres documents. Ce qui est très important, ce sont les

 23   travaux de recherche de Robert Foley, parce qu'il a étudié quelque 500

 24   documents de différentes origines qui émanaient du gouvernement et d'autres

 25   organes. Il est parvenu à une conclusion générale, et a établi qu'il y

 26   avait une série de critères qui permettaient de différencier un document

 27   d'un autre ou une écriture d'une autre.

 28   Q.  Monsieur Gogic, lorsque nous parlons de la recherche effectuée sur

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  1   certains documents et sur l'établissement de faits, avez-vous suivi des

  2   programmes de formation ou avez-vous fait  d'autres études ?

  3   R.  Après la guerre, je crois que c'était en l'an 2000, le ministère

  4   américain de la Justice avait organisé un séminaire à Sarajevo dirigé par

  5   Gideon Epstein, c'était une autorité en la matière, quelqu'un reconnu dans

  6   le monde entier, quelqu'un qui était un expert en matière d'analyse

  7   graphologique. Pendant un certain temps, il présidait l'association

  8   américaine des experts sur l'analyse documentaire, et c'est également

  9   quelqu'un qui est connu pour avoir fait partie de l'équipe d'enquêteurs qui

 10   ont enquêté sur les crimes commis par Joseph Mengele. Helmut Gregor à Sao

 11   Paolo a été identifié par lui comme étant Josef Mengele grâce à l'écriture

 12   de cette dernière. Après quoi, au mois de septembre 2001, j'ai passé du

 13   temps à l'institut de recherche graphologique et de la police scientifique

 14   de la police fédérale de Weisbaden et dans le service de la KT-5, qui est

 15   le service qui s'occupe plus particulièrement de l'analyse graphologique de

 16   l'écriture et des signatures, dirigé par Manfred Hecker, qui est

 17   mondialement connu pour avoir mis en place un système qui permet d'analyser

 18   l'écriture manuscrite, à savoir le système FISH, système d'information

 19   permettant d'analyser l'écriture manuscrite, un système repris par le FBI

 20   et d'autres organes.

 21   Q.  Monsieur Gogic, lorsque vous avez assisté à ces séminaires, avez-vous

 22   reçu un diplôme, un certificat attestant du fait que vous aviez participé à

 23   ce séminaire et que vous aviez acquis un certain nombre de connaissances ?

 24   R.  Oui, on nous a remis un certificat après ce séminaire. C'étaient des

 25   certificats qui prouvaient que nous avions assisté à ce séminaire jusqu'à

 26   la fin.

 27   Q.  Au début de votre déposition, vous avez dit que vous étiez un expert en

 28   matière de graphologie en Bosnie-Herzégovine ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu, qu'est-ce que cela

  3   signifie en somme ? Si vous êtes expert graphologue, qu'est-ce que cela

  4   signifie, qu'est-ce que cela recouvre ?

  5   R.  Lorsqu'un tribunal ou un bureau du procureur délivre une ordonnance ou

  6   fait une demande auprès de la police, c'est moi qui m'en occupe, au sein de

  7   la police je m'occupe de ceci. Autrement dit, j'analyse des documents, des

  8   billets de banque, des écritures manuscrites et des signatures.

  9   Q.  Monsieur Gogic, pourriez-vous nous parler un petit peu des méthodes que

 10   vous utilisez lorsque vous travaillez ?

 11   R.  Lorsqu'il s'agit d'analyser les signatures et les différentes

 12   écritures, nous appliquons la méthode comparative, c'est ainsi qu'elle

 13   s'appelle. Ceci nous permet d'analyser certaines caractéristiques

 14   d'écritures particulières et d'écritures plus générales, ceci permet de

 15   différencier l'écriture contestée des écritures suspectes qui auraient pu

 16   être l'origine de certains documents. Ceci nous permet de mener à bien

 17   notre analyse. Avant de commencer, il faut étudier l'objet de l'analyse.

 18   Dans ce cas d'un document écrit à la main, il faut au départ connaître les

 19   caractéristiques de cette écriture avant de commencer à travailler, ainsi

 20   que certaines caractéristiques très particulières de l'écriture en

 21   question. Ceci est un préalable important et c'est important de faire cela

 22   avant de comparer cette écriture-ci à d'autres écritures. Il est important

 23   d'établir les caractéristiques de l'écriture suspecte en question.

 24   Q.  Avez-vous également utilisé les mêmes méthodes lorsque vous avez rédigé

 25   votre rapport sur la mission qui vous avait été confiée par l'équipe de la

 26   Défense ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Quand pour la première fois avez-vous été en contact avec l'équipe de

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  1   la Défense de Ljubisa Beara ?

  2   R.  Je crois que c'était vers la fin du mois de mars ou au début du mois

  3   d'avril de cette année.

  4   Q.  Est-ce qu'on vous a remis tous les documents nécessaires, et si oui,

  5   quels types de documents avez-vous reçus, et est-ce que vous avez reçu des

  6   consignes très particulières sur ce qu'on attendait de vous ?

  7   R.  Oui. J'ai reçu les documents, mais j'ai reçu des photocopies. J'ai reçu

  8   trois ouvrages photocopiés ou registres, le registre de l'officier de

  9   permanence qui comportait le numéro 02935619 sur la page de couverture;

 10   ainsi que le registre de l'IKM de Kitovnice, le poste de commandement

 11   avancé qui comportait le numéro suivant sur la page de couverture,

 12   00760268; et le registre auxiliaire qui comportait le numéro suivant,

 13   02936603.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Nikolic, pour que ceci soit bien

 15   clair, est-ce que l'on peut avoir le numéro 65 ter de ces trois registres ?

 16   Tout d'abord, le registre de l'officier de permanence.

 17   M. NIKOLIC : [interprétation] Oui, je vais le faire. Un instant, s'il vous

 18   plaît, Monsieur. 2D -- pardonnez-moi, 7DP00378.

 19   Mme SOLJAN : [interprétation] Je crois que je peux aider les Juges de la

 20   Chambre dans l'ordre. Ce serait les pièces 377, c'était le premier numéro

 21   comme étant le registre de l'officier de permanence 0293, le deuxième

 22   document c'est P935, c'est le document du poste de commandement avancé de

 23   l'IKM; et le dernier c'est le 7DP378.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que c'est exact.

 25   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci beaucoup. Je remercie ma consoeur pour

 26   son aide.

 27   Q.  Monsieur Gogic, veuillez, s'il vous plaît, nous dire qu'est-ce

 28   que l'équipe de la Défense de M. Beara vous a demandé de faire, quelles

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  1   étaient vos attributions dans ce cadre-là ?

  2   R.  Avec l'expertise que j'ai, on m'a demandé d'établir ce qui suit, à

  3   savoir si les pages en question avaient été modifiées, à savoir si quelque

  4   chose avait été ajouté, réécrit par-dessus, s'il y avait des changements

  5   d'aucune sorte qui pourraient enfreindre leur intégrité et authenticité.

  6   Nous devions évidemment recevoir plusieurs textes pour analyser l'écriture

  7   sur les pages en question, et ensuite, il fallait comparer les documents

  8   entre eux et établir les caractéristiques de l'écriture sur les pages en

  9   question, les classer, regrouper les différents types d'écriture en

 10   fonction de leurs caractéristiques communes. Ensuite, la quatrième tâche

 11   consistait à savoir ce qui avait été écrit par Jokic, Obrenovic Nikolic sur

 12   ces pages, et Trbic, à savoir s'il y avait des termes ou des chiffres qui

 13   avaient été ajoutés sur ces pages et à savoir si l'écriture était une

 14   écriture asynchrone, distincte, ou un type d'écriture synchrone en série.

 15   La sixième tâche consistait à identifier l'endroit où il y avait eu des

 16   ajouts, et la septième tâche consistait à reconnaître les différents

 17   instruments d'écriture.

 18   Q.  Est-ce que vous étiez en mesure d'accomplir toutes ces tâches ?

 19   R.  Oui. Nous avons accompli toutes ces tâches, à l'exception de la tâche

 20   numéro 4 que j'ai évoquée, dans la mesure où il s'agissait de savoir si les

 21   scripteurs de ces registres, Jokic, Nikolic, Trbic et Obrenovic, compte

 22   tenu du fait que je ne disposais pas de leur écriture manuscrite, ce qui ne

 23   me permettait pas de comparer avec les registres si j'avais pu avoir

 24   l'écriture de ces scripteurs, il était difficile de savoir ce qui était de

 25   leur main, et donc je n'ai pas pu procéder à une analyse comparative de

 26   leurs différentes écritures ni d'analyser les caractéristiques propres à

 27   chaque écriture avec l'écriture dont je disposais, qui figurait dans ces

 28   registres.

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  1   Q.  Après cette mission, combien de rapports avez-vous rédigés ?

  2   R.  Il y a deux rapports. Le premier rapport est un rapport qui a été

  3   rédigé et transmis parce qu'on m'avait demandé de procéder à une analyse de

  4   documents. Il s'agissait de photocopies dans ce cas. Compte tenu du fait

  5   que pour soumettre un avis particulier, il est essentiel d'avoir des

  6   documents originaux, j'ai demandé à ce qu'on me procure des documents

  7   originaux.

  8   Q.  Avez-vous eu l'occasion - et si c'est le cas, où et quand - de

  9   consulter les documents originaux ?

 10   R.  Oui. Les documents originaux, je les ai consultés dans les bureaux du

 11   bureau du Procureur du Tribunal de La Haye à la fin du mois de juin de

 12   cette année et j'ai fait cela de façon à pouvoir analyser et examiner les

 13   documents en question sur place.

 14   Q.  Après avoir consulté les documents originaux, est-ce que vous avez

 15   rédigé un autre rapport en vous fondant sur les documents originaux ?

 16   R.  Oui. En me fondant sur les documents originaux que j'avais consultés

 17   dans les locaux du bureau du Procureur du Tribunal de La Haye, et suite à

 18   une expertise que j'ai faite sur l'encre utilisée, que j'ai effectuée à

 19   l'institut de la police scientifique à La Haye, ceci constituait les

 20   éléments qui ont été intégrés à mon deuxième rapport.

 21   Q.  Un instant, s'il vous plaît. Je vais maintenant évoquer ce nouveau

 22   rapport et faire en sorte que chacun puisse suivre. Il s'agit du numéro

 23   2D582.

 24   Monsieur Gogic, est-ce que ce rapport est différent de l'autre rapport qui

 25   avait été rédigé à partir de photocopies, et si oui, quelles sont les

 26   différences ?

 27   R.  Les différences portent sur les éléments suivants : l'encre a été

 28   analysée, et suite à cela, cette section-là a été ajoutée au rapport;

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  1   également, comme une expertise a été effectuée sur les originaux et non pas

  2   sur des photocopies, l'avis donné était plus sûr.

  3   M. NIKOLIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous vous avons

  4   présenté une brève introduction. Maintenant, nous souhaitons aborder

  5   l'analyse même du rapport. Peut-être que nous pouvons faire la pause et

  6   ensuite aborder certains chapitres plus précisément du rapport du témoin.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais avant de faire la pause, je ne sais

  8   pas si Mme Soljan peut répondre à ma question, mais je me souviens du fait

  9   que M. McCloskey avait parlé d'un livre de comparaison dans lequel se

 10   trouvaient à la fois des éléments en B/C/S et en anglais, et il s'agissait

 11   de savoir s'il fallait y inclure le commentaire de l'Accusation. Qu'est-il

 12   advenu de cela, s'il vous plaît ? Puis-je savoir où on en est ?

 13   Mme SOLJAN : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, le 14

 14   décembre, en audience, il a été décidé que les annotations du Procureur ne

 15   seraient pas prises en compte comme éléments de preuve pour les Juges de la

 16   Chambre, mais que cet ouvrage pouvait être une aide utile. Je crois que

 17   c'est le 377(A) dans le système électronique du prétoire, mais je crois que

 18   nous avons distribué des copies papier déjà.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la fois en B/C/S et en anglais.

 20   Mme SOLJAN : [interprétation] Tout à fait. Précisément, en anglais et en

 21   B/C/S, avec des annotations.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne me souviens pas de l'avoir reçu en

 23   format papier, mais est-ce que vous disposez de copies papier du document ?

 24   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 25   Mme SOLJAN : [interprétation] Oui, tout à fait, ils sont disponibles.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce serait fort utile. Merci.

 27   Mme SOLJAN : [interprétation] Tout à fait.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20

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  1   minutes.

  2   --- L'audience est suspendue à 12 heures 28.

  3   --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nikolic, veuillez poursuivre.

  5   Il nous faudra peut-être cinq minutes à la fin de la séance pour une

  6   décision.

  7   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Monsieur Gogic, j'aimerais maintenant passer à l'analyse, ou plutôt une

  9   explication du rapport que vous avez présenté. Mais auparavant, j'aimerais

 10   vous demander d'expliquer certains termes que vous avez utilisés avant la

 11   pause. Vous avez parlé d'écriture séquentielle, séparée. Pouvez-vous nous

 12   expliquer les termes que vous avez utilisés par rapport à votre déposition

 13   ?

 14   R.  En ce qui concerne le sens d'écriture séparée ou asynchrone, les

 15   caractéristiques d'une telle écriture sont les suivantes : la position

 16   précédente de la main lors de l'exécution de l'écriture doit être

 17   repositionnée la fois d'après. Autrement dit, cela indique une écriture

 18   plus lente, plus réfléchie. On trouve des lettres droites, des lettres plus

 19   grandes, ainsi que des chiffres plus grands, et des mots plus courts.

 20   Parfois, on trouve quelques fioritures, une pression plus ou moins forte

 21   des traits que l'on constate par rapport à l'encre, ce qui donne une

 22   lisibilité du contenu. Il y a aussi l'alignement par rapport à la marge qui

 23   nous intéresse, le fait de former les lettres de manière aléatoire. Lorsque

 24   l'on parle d'écriture séquentielle ou en série, une fois que la position de

 25   la main ou la position du poignet est établie, on garde la même position

 26   jusqu'à ce qu'on ait terminé une ligne d'écriture. On constate également

 27   une plus grande rapidité de l'écriture, et l'inclinaison des chiffres et

 28   des lettres peut également être constatée. On obtient une moins bonne

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  1   lisibilité, les lettres sont moins compactes, il y a une moins forte

  2   pression et les lettres sont plus allongées ou plutôt plus écrasées. Puis,

  3   lorsque l'on regarde la régularité d'une écriture en série, on constate que

  4   l'on retrouve une forme répétée, cohérente, des mêmes lettres ou du même

  5   chiffre. Il y a d'autres caractéristiques, mais voilà les caractéristiques

  6   les plus importantes de ces deux types d'écriture.

  7   Q.  Merci.

  8   M. NIKOLIC : [interprétation] J'ai oublié un élément très important. Le

  9   rapport de M. Gogic a été traduit en anglais, et nous pouvons l'examiner à

 10   la page 2D410018, pour ce qui est de la version anglaise, et en B/C/S, la

 11   pagination commence à la page 2D410001. Je pense que cela peut vous rendre

 12   service.

 13   Q.  Monsieur Gogic, revenons maintenant aux conclusions. Vous nous dites

 14   avoir examiné tous ces registres. Est-ce que vous vous êtes concentré sur

 15   l'ensemble des registres ou est-ce que vous avez simplement examiné

 16   quelques pages ?

 17   R.  J'ai regardé les registres en entier, mais je me suis penché plus

 18   particulièrement sur les pages que les conseils de la Défense de M. Beara

 19   m'ont demandé d'examiner.

 20   Q.  Merci. Je voudrais vous demander de bien vouloir faire l'analyse d'une

 21   des pages de la pièce P00377, page RN02935741. Monsieur Gogic -- on va

 22   attendre un instant que la pièce s'affiche à l'écran.

 23   Mme SOLJAN : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons les

 24   originaux des cahiers, si la Défense souhaite s'en référer.

 25   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci. En effet, il serait peut-être utile de

 26   remettre les originaux à M. Gogic, ainsi il peut nous montrer à l'aide du

 27   rétroprojecteur quels sont les éléments importants dans ses conclusions.

 28   Q.  Je vous demande de regarder la page 02935741, s'il vous plaît.

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  1   Monsieur Gogic, est-ce que vous pouvez poser le document d'origine sur le

  2   rétroprojecteur ? Peut-être que l'Huissière peut nous aider. En accord avec

  3   la tâche qui vous a été confiée par l'équipe de la Défense, pouvez-vous

  4   nous expliquer où est-ce que se trouvent les passages que vous avez

  5   analysés ? Avez-vous la page sous les yeux ?

  6   R.  Non, je l'ai ici.

  7   Q.  Monsieur Gogic ?

  8   R.  Oui. J'ai la pièce d'origine, et je la vois également à l'écran. A la

  9   page 02935741, on constate des traces d'épaississement et de retouches.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous l'avons également affiché dans le

 11   prétoire électronique, donc le témoin peut marquer le texte dans la version

 12   B/C/S. On peut peut-être avoir une vue de plus près du texte, mais c'est à

 13   vous de voir, Monsieur Nikolic. Pour le procès-verbal, il s'agit de la page

 14   123 du prétoire électronique, c'est-à-dire, page 123 du registre dans le

 15   document du prétoire électronique.

 16   M. NIKOLIC : [interprétation]

 17   Q.  Merci, Monsieur Gogic. J'aimerais vous demander de nous montrer, en

 18   fonction de la tâche qui vous a été confiée, de nous montrer sur cette page

 19   ce qui a été établi et de bien vouloir entourer d'un feutre ce passage, de

 20   manière à pouvoir l'identifier.

 21   R.  Ici, on voit des traces de retouche ainsi que des signes

 22   d'épaississement. Ici, il y a encore une trace de retouche. On a pu

 23   constater, dans l'analyse de l'encre, que la même encre a été utilisée pour

 24   le texte d'origine ainsi que lors de l'insertion de retouches ou

 25   d'épaississement.

 26   Q.  Monsieur Gogic, une de vos tâches consistait à établir si ces

 27   documents, plus précisément celui-ci ainsi que le suivant, avaient été

 28   écrits par un seul scripteur ou plusieurs. Donc ma question est la suivante

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  1   : en ce qui concerne cette page, est-ce que le texte a été écrit par une

  2   personne ou plusieurs ?

  3   R.  L'écriture, que ce soit des chiffres ou les lettres, a été faite par un

  4   seul scripteur que j'ai appelé scripteur A.

  5   Q.  Merci. Pour ce qui est des épaississements ou des retouches, dans

  6   quelle mesure peut-on dire que ces éléments ont un impact sur

  7   l'authenticité du document ?

  8   R.  Les retouches et les épaississements ont été faits aux points 2 et 4

  9   ici, puis au petit D et D majuscule avec le mot "dule," et puis de nouveau,

 10   on retrouve des épaississements au début de la page. Lorsque l'on a ce

 11   genre de chose, c'est-à-dire des épaississements et des retouches, la

 12   nature de ces éléments n'est pas telle que cela remette en cause

 13   l'authenticité du document.

 14   Q.  Je voudrais vous poser la question suivante : qu'en est-il du type

 15   d'écriture ? De quelle sorte d'écriture s'agit-il ? 

 16   R.  C'est une écriture séquentielle.

 17   Q.  D'accord. Avant de terminer avec ces documents, pouvez-vous, s'il vous

 18   plaît, regarder en bas de la page et y mettre votre nom et la date, de

 19   manière à indiquer que cette page a été vérifiée ?

 20   R.  [Le témoin s'exécute]

 21   Q.  Vous avez parlé de retouches et d'épaississements. Pourriez-vous nous

 22   les identifier sur ce document ? Par exemple, les retouches peuvent être

 23   indiquées à l'aide de la lettre A alors que les épaississements peuvent

 24   être identifiés par la lettre B.

 25   R.  [Le témoin s'exécute]

 26   Q.  Merci. Passons maintenant au document qui porte le numéro ERN 02935742.

 27   Je demanderais que ces documents soient versés au dossier en tant que

 28   pièces, ces documents-ci et tous les autres documents qui seront identifiés

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  1   ou qui seront analysés de cette façon-ci.

  2   Nous avons le document à l'écran. Monsieur Gogic. Concernant la mission qui

  3   vous avait été confiée, pourriez-vous nous dire qu'est-ce que vous pouvez

  4   conclure à l'analyse de ce document ? Y a-t-il un scripteur, plusieurs

  5   scripteurs ? Pourriez-vous nous expliquer s'il y a d'autres éléments qui

  6   ont fait l'objet de vos observations ? Nous allons procéder de la même

  7   façon. Essayons d'identifier toutes vos conclusions sur cette page.

  8   R.  L'ensemble de cette écriture qui se trouve à la page 02935742 a été

  9   fait par trois scripteurs. L'écriture du haut, qui commence avec l'étoile,

 10   et on voit le nom "Vukotic," ensuite nous avons "lovac 2" et une flèche --

 11   c'est un passage qui commence avec l'étoile et qui se termine avec "lovac

 12   2," en fait, il est question de deux scripteurs et non pas de trois

 13   scripteurs. L'ensemble de la page, à partir de "lovac 2" jusqu'à la flèche.

 14   Ce passage est rédigé par le même scripteur, tout comme tout ce qui est au-

 15   dessus du mot souligné "aco". On voit une flèche et la teneur qui peut être

 16   identifiée partiellement comme étant le mot "na dza se" [phon] alors ça,

 17   c'est écrit par une personne. Ensuite, il y a une autre personne qui a

 18   écrit ce qui se trouve au bas de la page, en fait, à partir du milieu. Le

 19   mot commence par un T majuscule, donc le passage rédigé par cette deuxième

 20   personne commence avec un T majuscule, et se termine avec le mot "Beara".

 21   Pour ce qui est de cette page-ci, nous avons des exemples d'épaississement,

 22   de retouches et des mots biffés. Des traces d'épaississement sont présentes

 23   ici. Il y a également des traces de retouches qui sont présentes à cet

 24   endroit-ci, et nous voyons que des mots ont été biffés, et nous voyons

 25   notamment ces mots biffés ici.

 26   Pour ce qui est de la teneur de cette page, donc pour écrire ce qui figure

 27   sur cette page, on s'est servi de deux encres, une encre bleue et une encre

 28   noire. Le premier scripteur, ou le scripteur A, a écrit sur le premier

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  1   passage à l'aide d'un stylo bleu, alors que le texte écrit par le deuxième

  2   scripteur, ou la deuxième personne que j'ai désignée comme étant le

  3   scripteur C a été écrit avec un stylo noir. C'est le même type de stylo,

  4   donc les deux stylos sont des stylos du même type. Alors, ici, nous avons

  5   des exemples d'écritures séquentielles et séparées. Le scripteur A a

  6   employé l'écriture séquentielle, alors que le texte rédigé par le scripteur

  7   C, qui se termine, y compris le dernier paragraphe, avec l'exception que le

  8   mot "Vukotic" a été rédigé de façon séparée devant le mot "da", nous avons

  9   un autre exemple d'écriture séparée à l'endroit où on peut voir le mot

 10   souligné "aco", qui se lit "dzefin dzafin" [phon] avec un trait. Voilà un

 11   exemple d'écriture séparée.

 12   Q.  Monsieur Gogic, pourriez-vous nous montrer de façon concrète, et

 13   encercler, faire un cercle autour du texte rédigé par le scripteur A, et

 14   faire la même chose pour le scripteur C ?

 15   R.  Voici le texte qui a été rédigé par le scripteur A. Et le scripteur A a

 16   également écrit ceci. Ce passage-ci à partir du milieu de la page que je

 17   suis en train d'identifier maintenant a été rédigé par le scripteur C, à

 18   l'exception du mot ou des mots qui ont été ajoutés par le scripteur A dans

 19   le paragraphe du scripteur C.

 20   Q.  Pourriez-vous identifier, s'il vous plaît, les deux passages comme

 21   étant le premier appartenant au scripteur A et le deuxième appartenant au

 22   scripteur B ?

 23   Merci. Est-ce que vous avez remarqué ici, ou en fait d'ailleurs vous nous

 24   avez dit avoir remarqué qu'il y a des mots qui sont biffés. Pourriez-vous

 25   nous montrer l'endroit où ceci se trouve, et si nous pouvons voir les mots

 26   qui figurent derrière les lignes ?

 27   R.  Oui, tout à fait. Pour ce qui est de l'écriture de l'avant-dernière

 28   ligne de la page manuscrite, on a biffé contenu qui n'est pas tout à fait

Page 25580

  1   effacé, dissimulé, caché, et on peut lire derrière les lignes "PUK Beara",

  2   qui veut dire "Régiment Beara". Ensuite, on peut conclure également, à

  3   l'analyse de l'encre, qu'on s'est servi du même stylo noir.

  4   Q.  Y a-t-il d'autre chose de pertinent que vous souhaiteriez mentionner

  5   pour cette page ?

  6   R.  Je crois que c'est à peu près ça.

  7   Q.  D'accord. Merci. Alors nous allons également demander le versement de

  8   ceci au dossier. Veuillez le signer, s'il vous plaît. Je vous prierais

  9   d'apposer vos initiales et de mettre la date d'aujourd'hui, comme tout à

 10   l'heure.

 11   Je vais maintenant demander que l'on montre le document suivant, que l'on

 12   affiche le document 02935744.

 13   Le document est affiché à l'écran. Je vous demandais, Monsieur, de bien

 14   vouloir nous analyser ce document, et conformément à la tâche précédente,

 15   de nous dire s'il y avait un scripteur ou plusieurs scripteurs, et de nous

 16   dire quelles sont vos conclusions à la suite de l'analyse de ce texte,

 17   conformément à la mission qui vous a été confiée. Donc, analysons ce

 18   document de la même façon que les deux documents précédents.

 19   R.  L'écriture se trouvant sur la page identifiée par les chiffes 02935744

 20   est le fruit de trois scripteurs, de trois personnes différentes. Le

 21   premier scripteur, identifié par la lettre A, a écrit ce passage-ci, donc à

 22   partir du haut de la page jusqu'au mot "Bajagica".

 23   Le scripteur B a rédigé les textes des deux derniers paragraphes. Un

 24   scripteur inconnu a écrit "14.07.Jokic."

 25   Lors de l'analyse des moyens employés pour écrire ces mots, il a été conclu

 26   que pour le texte rédigé par le scripteur A, on s'est servi du même stylo

 27   bleu, et à l'analyse du deuxième paragraphe du scripteur B, donc le premier

 28   paragraphe du scripteur B mais le deuxième paragraphe de la page, on s'est

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  1   servi d'un autre type de stylo bleu, ainsi que pour le troisième paragraphe

  2   aussi, un autre type de stylo bleu. Alors que la mention "14.07 Jokic" a

  3   été rédigée au crayon de plomb. Pour ce qui est de ces écritures, nous

  4   voyons là l'exemple d'écriture séquentielle pour les deux, pour le

  5   scripteur A ainsi que pour le scripteur B.

  6   Nous avons un parfait exemple ici aussi d'écriture séparée, c'est-à-

  7   dire il y a des insertions de texte qui est, comme je l'ai dit tout à

  8   l'heure, "14.07 Jokic". Cette mention a été inscrite de façon séparée entre

  9   les deux derniers paragraphes de la page, les deux paragraphes appartenant

 10   au scripteur B.

 11   Q.  Pouvez-vous nous décrire l'entrée "14.07 Jokic" ?

 12   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, il s'agit là de quelque chose qui a été

 13   annoté à part, qui a été saisi par un autre scripteur. Je pense que ceci se

 14   voit bien au vu d'un certain nombre d'éléments. Si, par exemple, on

 15   regardait la façon dont cette personne a écrit les mots et les chiffres, et

 16   si l'on regardait le scripteur numéro 2B et le scripteur numéro 1A, vous

 17   constaterez qu'il y a un espacement entre les lettres, que les lettres sont

 18   droites, elles ne sont pas penchées, et que les chiffres sont gros, et

 19   qu'il y a ici un problème avec la ligne d'écriture. Tout ceci constitue des

 20   éléments qui, sans nul doute, semblent indiquer que quelque chose a été

 21   écrit séparément, à part. Mais bien, ceci n'est pas toujours pertinent, en

 22   fait, ce qui est important, c'est de constater qu'un moyen différent

 23   d'écriture a été utilisé au niveau de cette entrée-là.

 24   Q.  Comment savez-vous que l'entrée "14.07 Jukic" est une entrée qui a été

 25   fait à partir d'un autre instrument d'écriture, et si tel est le cas, quel

 26   est l'autre instrument d'écriture ?

 27   R.  Comme je vous l'ai dit, ceci a été rédigé à l'aide d'un crayon avec une

 28   mine graphite, et nous avons pu analyser l'encre. Ces analyses d'encre ont

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  1   été menées par nos confrères de l'institut de la police scientifique à La

  2   Haye, quelque chose que vous pouvez consulter sur le CD-ROM.

  3   Q.  Pardonnez-moi. Je crois qu'il serait plus efficace de vous poser la

  4   question comme suit. Si vous avez les images du CD-ROM, est-ce que vous

  5   pouvez les saisir dans notre système. Pardonnez-moi.

  6   M. NIKOLIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande à ce que

  7   ceci soit fait parce que ce qui se trouve sur le CD-ROM n'a toujours pas

  8   été téléchargé dans le système électronique du prétoire.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai dans mon attaché-case, mais je ne

 10   l'ai pas ici avec moi, cela se trouve dans l'antichambre où attendent les

 11   témoins.

 12   M. NIKOLIC : [interprétation] Nous avons un problème technique. Le témoin a

 13   laissé les éléments en question dans la salle d'attente des témoins. Je ne

 14   sais pas si nous pouvons laisser partir le témoin maintenant parce que les

 15   Juges de la Chambre ont demandé à ce que nous interrompions l'audience cinq

 16   minutes avant la fin. Et nous pourrons reprendre à ce moment-là la

 17   déposition du témoin demain et laisser partir le témoin maintenant.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est une bonne idée. Demandez

 19   simplement au témoin de signer ce document maintenant, mettez-le de côté,

 20   et nous allons poursuivre demain matin à 9 heures.

 21   M. NIKOLIC : [interprétation] Merci. Pardonnez-moi. Je souhaite demander

 22   aux Juges de la Chambre de dire au témoin de bien vouloir apporter tous ces

 23   documents demain lorsqu'il viendra dans le prétoire, ce qui évitera un

 24   problème analogue demain.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Monsieur le Professeur, je vous

 26   informe du fait que vous ne devez entrer en contact avec aucun membre de

 27   l'équipe de la Défense pour évoquer votre déposition. Nous allons nous

 28   retrouver demain matin à 9 heures.

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  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de notre décision sur

  3   l'admission des déclarations, qui est une question qui a été abordée à la

  4   fin de la déposition de M. Wagenaar. Tout d'abord, je souhaite m'assurer

  5   que nous ne souhaitons pas statuer sur des questions en l'abordant sous un

  6   ordre général. Nous prenons une décision là-dessus, savoir si nous devons

  7   admettre ces documents et les documents de cet expert en particulier,

  8   compte tenu du contexte de son rapport et des éléments de preuve.

  9   Dans ce contexte-là, nous estimons que les documents en question et les

 10   documents contenus dans les classeurs doivent être admis parce qu'ils sont

 11   importants et permettent d'avoir une compréhension exhaustive de la

 12   déposition de M. Wagenaar. C'est la raison pour laquelle nous admettons ces

 13   déclarations, mais dans ce seul but, il ne s'agit pas en fait d'évoquer ici

 14   la véracité du contenu des documents en question.

 15   La même chose vaut pour le document 2D603, le rapport d'information de M.

 16   Lutke. Néanmoins, en ce qui concerne la transcription et le résumé de

 17   l'audience de M. Malinic, nous n'allons pas les admettre car nous n'avons

 18   pas permis à ce que les questions soient posées là-dessus en fin

 19   d'audience.

 20   Cela étant dit, nous levons l'audience pour aujourd'hui, et nous allons

 21   nous retrouver demain matin à 9 heures.

 22   --- L'audience est levée à 13 heures 37 et reprendra le jeudi 11 septembre

 23   2008, à 9 heures 00.

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