Affaire n° : IT-04-74-AR73.1

LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Fausto Pocar, Président

M. le Juge Mohamed Shahabuddeen
Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba
M. le Juge Wolfgang Schomburg
Mme le Juge Inés Mónica Weinberg de Roca

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
24 novembre 2004

LE PROCUREUR

c/

Jadranko PRLIC
Bruno STOJIC
Slobodan PRALJAK
Milivoj PETKOVIC
Valentin CORIC
et Berislav PUSIC

___________________________________________________________________________

DÉCISION RELATIVE À L’APPEL INTERJETÉ PAR BRUNO STOJIC CONTRE LA DÉCISION DE LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE RELATIVE À SA DEMANDE DE NOMINATION D’UN CONSEIL _________________________________________________________________________

Le Bureau du Procureur :

M. Kenneth Scott

Les Conseils de Slobodan Praljak :

M. Bozidar Kovacic
M. Nika Pinter

Les Conseils de Jadranko Prlic :

M. Camil Salahovic
M. Zelimir Par

Le Conseil de Milivoj Petkovic :

M. Vesna Alaburic

Le Conseil de Bruno Stojic :

M. Zeljko Olujic

Le Conseil de Valentin Coric :

M. Tomislav Jonjic

Le Conseil de Berislav Pusic :

M. Marinko Skobic

 

1. La Chambre d’appel est saisie de l’appel interjeté par l’accusé Bruno Stojic (l’ « Appelant ») contre la décision de la Chambre de première instance en date du 30 juillet 2004 relative à sa requête aux fins de nomination de Zeljko Olujic en tant que conseil principal (Appeal Against Decision of the Trial Chamber dated July 30, 2004 Regarding the Motion to Appoint Zeljko Olujic Lead Counsel1).

2. Le présent appel interlocutoire conteste la Décision relative aux demandes de commission de conseils, rendue par la Chambre de première instance I le 30 juillet 2004 (la « Décision attaquée »). La Chambre de première instance a estimé que, M. Zeljko Olujic2 étant le conseil principal engagé par l’Appelant ainsi que le conseil principal commis d’office à l’accusé Ivica Rajic dans l’affaire n° IT-95-12-PT, un « conflit d’intérêts surviendra très probablement et que ce risque empêchera très probablement M. Olujic de défendre au mieux les intérêts de [l’Appelant] »3. En conséquence, la Chambre de première instance a décidé que M. Zeljko Olujic ne représenterait pas l’Appelant et invité celui-ci à choisir un autre conseil principal dans un délai d’un mois.

3. Le 5 août 2004, l’Appelant a déposé une requête aux fins de certification4. Le 1er septembre 2004, la Chambre de première instance a fait droit à la Requête aux fins de certification de l’Appelant en application de l’article 73 B) du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement ») et décidé de surseoir à l’exécution de la Décision attaquée jusqu’à ce que la Chambre d’appel ait tranché la question5.

4. Le Mémoire de l’Appelant a été déposé le 13 septembre 20046. L’Accusation a répondu le 22 septembre 20047. Aucune réplique n’a été déposée.

I. Contexte

5. L’Appelant n’a pas demandé la commission d’office de Me Olujic dans le cadre du système d’aide juridictionnelle du Tribunal international. Les services de Me  Olujic sont rétribués par le Gouvernement croate8. Un mandat a été déposé le 6 avril 2004, le Greffier ayant établi que Me Olujic satisfaisait aux conditions prévues par le Règlement. Le 6 avril 2004, lors de la comparution initiale, le Juge Alphons Orie s’est dit préoccupé par le risque de conflit d’intérêts, Me Olujic représentant déjà devant le Tribunal un autre accusé, Ivica Rajic, comparaissant à raison des mêmes faits ou de faits en partie similaires à ceux pour lesquels est mis en cause l’Appelant.

6. Après examen des actes d’accusation établis à l’encontre de l’Appelant et d’Ivica Rajic, le Greffe a conclu que la représentation par le même conseil de l’Appelant et d’Ivica Rajic risquait de provoquer un conflit d’intérêts et a invité l’Appelant à saisir la Chambre de première instance en l’espèce de la question9. Le 4 mai 2004, l’Appelant a déposé une demande de commission d’office d’un conseil principal à l’accusé Bruno Stojic (Request for the Assignment of Lead Counsel to the Accused Bruno Stojic) ; c’est sur cette demande que porte la Décision attaquée.

II. Arguments des parties

Droit de l’accusé de choisir son conseil

7. L’Appelant affirme que la Décision attaquée ne tient pas compte des garanties prévues par l’article 21 4) d) et e) du Statut du Tribunal international (le « Statut  »)10. L’Appelant conteste la proposition selon laquelle le droit à l’assistance gratuite d’un avocat ne confère pas le droit de choisir son avocat et avance que « personne, pas même la Chambre d’appel du TPIY, n’a le pouvoir de modifier à ce point les règles fondamentales du Statut du Tribunal … »11. L’Accusation répond que, dans plusieurs décisions rendues dans des affaires portées devant les deux Tribunaux, la Chambre d’appel a statué que le droit à l’assistance gratuite d’un avocat ne conférait pas à l’accusé le droit de choisir son avocat et que cette conclusion « résultait d’une interprétation textuelle et systématique du Statut et du [Règlement]  »12. L’Accusation ajoute que dans les affaires où les conseils ne sont pas commis d’office par le Greffe, le droit d’un accusé d’être assisté du conseil de son choix n’est pas un droit absolu, puisqu’il est limité par l’article 44 du Règlement et l’article 20 du Statut13.

Conflit d’intérêts

8. L’Appelant affirme que l’absence de conflit d’intérêts et du risque de voir survenir un tel conflit ne fait l’objet d’aucune contestation14. Il semble avancer que l’article 14 du Code de déontologie pour les avocats15 est trop général car « tout conseil exerçant devant le Tribunal pour la première fois pourrait se voir récusé, en particulier si l’on recourt au leitmotiv du conflit d’intérêts auquel on peut raisonnablement s’attendre»16. L’Appelant souligne qu’en réalité c’est le conseil de la Défense qui « connaît parfaitement tous les conflits d’intérêts possibles en dehors du TPIY »17. L’Accusation fait valoir que l’absence de conflit d’intérêts est bel et bien contestée et que l’obligation du conseil d’agir en cas de conflit d’intérêts n’exclut pas l’exercice par la Chambre de première instance des pouvoirs que lui confère l’article 20 du Statut18.

9. L’Appelant affirme que « la priorité de [la Chambre de première instance], ce ne sont pas les droits de l’accusé, mais la procédure elle-même »19. L’Accusation rétorque que la bonne administration de la justice suppose que l’accusé soit correctement représenté20.

10. Il est rappelé dans la Décision attaquée que Me Olujic avait estimé que tout conflit d’intérêts entre les deux accusés était exclu, du simple fait que Ivica Rajic était un chef militaire, alors que l’Appelant est accusé en tant que dirigeant civil, et il est indiqué que Me Olujic avait admis que la ligne de défense d’Ivica Rajic consistait à rejeter la responsabilité sur des autorités supérieures21. L’Appelant affirme que ces propos ont été « mal interprétés ou mal traduits » et ajoute que « Ivica Rajic ne ferait pas porter la responsabilité à ses supérieurs  »22. À ce sujet, le Mémoire de l’Appelant manque de clarté, puisqu’il avance que :

[l]a Défense n’a jamais dit que le fait d’être accusé en tant que civil exclut tout conflit d’intérêts avec une personne, qui est accusée en tant que militaire. La Défense a dit que le fait qu’un individu soit accusé uniquement en tant que civil exclut tout conflit avec un militaire23.

L’Accusation répond que l’Appelant est mis en cause, sur la base de l’article 7 3) du Statut, pour a) des crimes commis par Ivica Rajic, sur la base de l’autorité qu’il exerçait sur celui-ci, de droit et de fait, et b) pour des crimes commis à Vares et à Stupni Do sur les ordres de Ivica Rajic24.

11. Si l’Appelant reconnaît que Ivica Rajic et lui sont « accusés de crimes liés aux mêmes événements »25, il affirme qu’« il est faux que [lui] et Ivica Rajic soient accusés des mêmes crimes »26. L’Accusation avance que « tous les crimes reprochés à Ivica Rajic dans l’Acte d’accusation modifié se trouvent également… dans l’Acte d’accusation établi contre [l’Appelant]27 ».

12. L’Appelant affirme qu’il ne peut survenir de conflit d’intérêts si lui-même ou Ivica Rajic décidait de plaider coupable28. Dans sa Réponse, l’Accusation déclare ne pas comprendre ce raisonnement et avance que si l’un des accusés plaidait coupable, cela porterait préjudice à l’autre29.

13. La Décision attaquée fait observer que, selon Me Olujic, le fait que l’espèce et l’affaire d’Ivica Rajic soient présidées par le Juge Liu Daqun rend tout conflit d’intérêts « pratiquement impossible » « parce que la défense est sous contrôle dans les deux affaires »30. Le Mémoire de l’Appelant paraît confus et contradictoire sur ce point. L’Appelant affirme dans un premier temps que :

Il convient d’insister sur le fait que le même juge préside les deux affaires, si bien qu’il peut naturellement se rendre compte de l’existence de tout conflit d’intérêts ou en prévenir l’apparition éventuelle 31.

Dans les paragraphes suivants, le Mémoire de l’Appelant se lit comme suit :

La [Décision attaquée] déclare à tort que la Défense a insisté sur l’importance du fait que les deux affaires étaient menées sous la présidence du même juge…32

La [Décision attaquée] affirme sans fondement que la Défense s’oppose à la présence du même juge…33

14. D’après Me Olujic, le rôle du conseil de la Défense consiste à conseiller ses clients sur la façon de réduire tout risque de conflit d’intérêts et de coordonner les deux défenses en vue d’obtenir une punition moins lourde ; en conséquence, il ne voit pas en quoi l’éventualité qu’un client adopte une position contraire aux intérêts de l’autre poserait un problème34. S’agissant du rôle de Me Olujic, l’Appelant écrit dans son Mémoire que « Me Olujic a toujours évoqué l’éventualité qu’il puisse avoir à prévenir ou à minimiser des conflit d’intérêts au conditionnel, [c’est-à-dire] de manière potentielle35.  » L’Appelant ajoute que « … même s’il survient… ce conflit d’intérêts sera neutralisé par l’existence d’un conseil commun, et non par l’imposition de conseils différents aux deux accusés…36 ». L’Accusation rétorque que le rôle du conseil n’est pas de « donner des instructions à son client, de filtrer, de modifier ou d’interpréter » les moyens de preuve relatifs à la cause de l’un de ses clients pour éviter de porter préjudice à celle d’un autre37.

Position privilégiée de l’Accusation

15. L’Appelant affirme que la Défense est désavantagée par rapport à l’Accusation, puisque celle-ci est représentée par la même personne en l’espèce et dans l’instance engagée contre Ivica Rajic38. Il avance d’autre part que :

… l’Accusation s’oppose à la prise en charge simultanée de deux affaires où elle est représentée par le même Procureur ! L’Accusation, si supérieure à bien d’autres égards, veut s’assurer l’exclusivité d’un autre droit, celui de communiquer avec les deux accusés39.

16. L’Accusation répond que cet argument n’est pas valable car il ne tient pas compte de la mission de l’Accusation, qui est de représenter la communauté internationale  ; elle affirme qu’aucun conflit ne résulte de la représentation de l’Accusation par la même personne dans deux affaires liées, et avance que la stratégie de la Défense consiste, pour partie, à s’en prendre à l’Accusation40.

17. En réponse à l’allégation de l’Appelant qui affirme que l’Accusation cherche à l’empêcher de bénéficier d’une défense adéquate (parce qu’elle l’estime « plus important politiquement »41), l’Accusation se dit persuadée que l’Appelant « peut bénéficier d’une défense efficace assurée par un conseil libre de tout conflit d’intérêts »42.

Retard

18. L’Appelant fait observer que Me Olujic s’occupe de son affaire depuis six mois et déclare, après avoir décrit le travail accompli par son conseil, qu’« un nouveau conseil réduirait à néant tout ce travail et retarderait la procédure »43.  En réponse, l’Accusation affirme que si la question n’est pas résolue maintenant, il pourrait en résulter des retards beaucoup plus longs à des stades ultérieurs et critiques du procès44.

III. Examen

19. En application de l’article 21 4) b) et d) du Statut, l’accusé à le droit de bénéficier de l’assistance du défenseur de son choix. Cependant cette garantie n’est pas sans limites. Dans de précédentes décisions, la Chambre d’appel a établi que le droit d’un accusé à bénéficier de l’assistance gratuite de l’avocat de son choix était limité45. En principe, il convient, dans les affaires portées devant les Tribunaux internationaux, de respecter le choix par l’accusé de son conseil, à moins que des motifs suffisants ne justifient de passer outre aux préférences de l’accusé, dans l’intérêt de la justice. Lorsque l’équité du procès, qui constitue également un des droits fondamentaux de l’accusé reconnu par l’article 21 du Statut, est mise en jeu comme cela est avancé en l’espèce, il est possible de passer outre au choix de l’accusé, même si le conseil désigné par l’accusé est rétribué par ses soins. Comme le rappelle à juste titre la Décision attaquée, une des limites à la liberté de choix de l’accusé est l’existence d’un conflit d’intérêts touchant son conseil46.

20. La Chambre d’appel rejette le raisonnement selon lequel « [du fait que] les intérêts de l’accusé ne sont pas définis par l’Accusation ou la Chambre de première instance, mais par les accusés eux-mêmes »47, la Chambre de première instance s’est fourvoyée en rendant une conclusion sur le risque de voir survenir un conflit d’intérêts.

21. La Chambre d’appel rappelle que la question de la qualification, de la nomination et de la commission d’office d’un conseil est susceptible d’être soumise à un examen judiciaire48. La question soulevée touche à la nature fondamentale de la défense assurée par Me Olujic et à la bonne exécution des obligations qu’impose la représentation juridique de l’Appelant49. Tout problème lié à la défense de l’Appelant aurait des conséquences sur la conduite de l’affaire, que la Chambre de première instance a le devoir de contrôler en conformité avec les critères énoncés à l’article 20 du Statut50. En résumé, un conflit d’intérêts entre Ivica Rajic et l’Appelant affecterait l’équité du procès. Cela met en jeu, d’une part, la responsabilité de la Chambre de première instance de veiller à cette équité et, d’autre part, le droit de l’Appelant et de Ivica Rajic à en bénéficier51.

22. Il y a conflit d’intérêts entre un avocat et son client dans toute situation où, du fait des circonstances, la représentation par l’avocat porte préjudice ou pourrait porter préjudice aux intérêts de son client et, plus généralement, à l’intérêt de la justice52. L’article 14 du Code de déontologie53 sur l’existence des conflits d’intérêts prévoit qu’un conseil ne peut représenter un client si cette représentation affecte ou peut affecter celle d’un autre client. Les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

D. Le conseil ou son cabinet ne représente pas un client dans une affaire :

i. si cette représentation est affectée par celle d’un autre client, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle le soit,

ii. si la représentation d’un autre client est affectée par celle de ce client, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle le soit,

iii. si l’affaire est la même ou étroitement liée à une autre dans laquelle le conseil ou son cabinet a auparavant représenté un autre client (le « client antérieur ») et si les intérêts du client sont en grande partie opposés à ceux du client antérieur,

iv. si le jugement professionnel qu’exerce le conseil au profit du client est affecté, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il soit affecté, par :

1. les responsabilités ou les intérêts du conseil vis-à-vis d’un tiers, […]

E. Si un conflit d’intérêts surgit néanmoins, le conseil :

i. avertit immédiatement et pleinement de la nature et de la portée du conflit tous les clients présents et passés susceptibles d’être affectés, et

ii. soit :

1. prend toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au conflit d’intérêts, soit

2. demande l’accord éclairé et sans réserves de tous les clients présents et passés susceptibles d’être affectés pour pouvoir poursuivre sa mission, à moins que cet accord ne risque de porter un coup irrémédiable à la bonne administration de la justice.

23. Ivica Rajic est accusé, au titre des articles 7 1) et 7 3) du Statut, de crimes commis à Vareš et à Stupni Do entre octobre 1993 et décembre 1993, sur la base de l’autorité qu’il exerçait, de droit et de fait, sur plusieurs unités du Conseil de défense croate dans le secteur placé sous sa responsabilité (comprenant les municipalités de Kiseljak, Kakanj et Vareš), notamment la brigade Ban Jelacic, la brigade de Bobovac et les unités connues sous les noms de « Maturice » et « Apostoli »54. L’Appelant est mis en cause pour participation à une entreprise criminelle commune au titre de l’article 7 1) du Statut, et en tant que supérieur hiérarchique au titre de l’article 7 3) du Statut, pour des crimes commis en sa qualité de chef du Ministère de la défense du HVO du 3 juillet 1992 à novembre 1993, sur la base du pouvoir qu’il exerçait de droit et de fait sur les forces armées de la Herceg-Bosna/du HVO. L’Acte d’accusation établi contre l’Appelant recouvre des crimes commis à Vareš et à Stupni Do entre octobre et décembre 1993. Ivica Rajic ainsi que les unités « Maturice » et « Apostoli », sont cités parmi ceux qui ont pris part à ces crimes55.

24. À la lumière de ce qui précède, la Chambre d’appel estime que la Chambre de première instance disposait de suffisamment d’éléments pour conclure raisonnablement que les deux accusés sont mis en cause pour les mêmes crimes et qu’ils auraient été liés par une relation hiérarchique relativement étroite durant la période visée. En conséquence, la Chambre d’appel n’est pas convaincue que l’Appelant ait démontré que la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant « qu’un conflit d’intérêts surviendra très probablement et que ce risque empêchera très probablement Me Olujic de défendre au mieux les intérêts de Bruno Stojic »56. La Chambre d’appel est convaincue qu’il existe bien un conflit d’intérêts, étant donné qu’aucun conseil de la défense ne saurait travailler simultanément au mieux des intérêts de l’Appelant et de Ivica Rajic. Ce scénario permettrait au conseil de la défense de rejeter d’un accusé à l’autre la responsabilité - éventuelle - pour les crimes reprochés. L’argument relatif au Bureau du Procureur n’est pas valable car le Procureur représente les intérêts de la communauté internationale. Le Procureur n’est l’avocat d’aucun accusé et ne saurait donc être affecté par un conflit d’intérêts survenant entre deux accusés.

25. La Chambre d’appel rejette l’affirmation selon laquelle tout risque de conflit d’intérêts entre les deux accusés est exclu puisque Ivica Rajic est accusé en tant que chef militaire, alors que l’Appelant est « seulement » mis en cause en tant que dirigeant civil. Au sujet de l’argument de l’Appelant selon lequel le même juge préside les deux affaires, si bien qu’il peut se rendre compte de l’existence de tout conflit d’intérêts ou les prévenir, la Chambre d’appel estime que, dans une affaire de ce type, la protection des intérêts de la justice requiert non seulement l’existence d’un mécanisme permettant de supprimer les conflits d’intérêts une fois qu’ils sont survenus, mais aussi la prévention de ces conflits avant qu’ils ne surviennent. La Chambre d’appel conclut que l’objectif de la Décision attaquée est justement d’empêcher de tels conflits de survenir57.

26. En application de l’article 14 E) du Code de déontologie, Ivica Rajic a présenté une déclaration écrite par laquelle il acceptait que Me Olujic assure la défense de l’Appelant et déclarait qu’il n’existait pas de conflit d’intérêts entre sa défense et celle de l’Appelant58.

27. La Chambre d’appel rappelle qu’il convient généralement, en l’absence de toute indication contraire, de considérer comme éclairé l’accord qu’un client ou un client antérieur susceptible d’être affecté, donne, après consultation avec le conseil, pour mettre fin à un conflit d’intérêts59. Cependant un tel accord ne permet pas de conclure à l’absence de conflit d’intérêts. Si bien qu’il est inutile de se demander si l’accord a vraiment été délibéré. La Chambre d’appel fait observer que, peu après la présentation de l’accord écrit d’Ivica Rajic, le Greffe a déclaré expressément ne pas être convaincu que Ivica Rajic était conscient de toutes les conséquences et limitations possibles que la représentation simultanée de l’Appelant par Me Olujic pouvait imposer à sa stratégie de défense d’Ivica Rajic60. La Chambre d’appel partage l’opinion du Greffe.

28. L’article 16 E) de la Directive relative à la commission d’office de conseils de la défense n’interdit pas à un conseil d’être simultanément commis à la défense de plusieurs suspects ou accusés, à condition que cela ne porte pas préjudice à la défense de l’un ou l’autre des accusés, ni ne crée un conflit d’intérêts potentiel 61.

29. À cet égard la Chambre d’appel n’est pas convaincue que l’Appelant ait démontré que la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant que :

[l]e consentement « inconditionnel » exprimé par Bruno Stojic à sa comparution initiale et le consentement écrit présenté par Ivica Rajic ne peuvent avoir pour effet de valider la désignation du conseil si la Chambre de première instance est convaincue que les intérêts de la justice commandent d’agir autrement62.

30. À la lumière des arguments développés par l’Appelant devant la Chambre de première instance et la Chambre d’appel, cette dernière estime que la Chambre de première instance a conclu à juste titre que :

Me Olujic admet implicitement […] qu’il pourrait ne pas être en mesure de défendre diligemment et promptement les intérêts de ses clients, ainsi qu’on l’attend et l’exige d’un conseil : proposer un compromis plutôt que de défendre sans restriction l’intérêt de ses clients est contraire aux obligations professionnelles du conseil 63.

31. La Chambre d’appel n’est pas convaincue par l’allégation de l’Appelant selon laquelle l’Accusation cherche à l’empêcher de bénéficier d’une défense adéquate et rejette l’argument de l’Appelant selon lequel la Défense est désavantagée par rapport à l’Accusation parce que celle-ci est représentée par la même personne en l’espèce et dans l’instance engagée contre Ivica Rajic.

32. La Chambre d’appel conclut en outre que, même si le remplacement du conseil doit inévitablement entraîner un retard dans la conduite du procès, ne pas résoudre, au stade actuel de la procédure, le conflit d’intérêts relatif à la représentation de l’Appelant et d’Ivica Rajic risque de porter un coup grave à la bonne administration de la justice.

33. Par ces motifs, la Chambre d’appel

REJETTE l’appel, et

CONFIRME la Décision attaquée.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre d’appel
_____________
Fausto Pocar

Le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba joint une Opinion individuelle à la présente Décision et les Juges Mohamed Shahabuddeen, Wolfgang Schomburg et Inés Mónica Weinberg de Roca y joignent une Déclaration conjointe.

Le 24 novembre 2004
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal[


OPINION INDIVIDUELLE DU JUGE MUMBA

1. Je souscris à la décision de rejeter l’appel interlocutoire en l’espèce. Mais mon rejet se fonde sur les motifs suivants : le conseil risquerait d’être surchargé de travail et de ne pas avoir suffisamment de temps pour recevoir des instructions de chacun de ses clients et pour se préparer correctement au procès, au fur et à mesure de l’évolution de l’instance.

2. J’estime que, dans les affaires portées devant le Tribunal, il ne faut pas permettre à un conseil de la défense de représenter plusieurs accusés simultanément, car il est probable que les accusations portées débouchent sur des procès complexes nécessitant la prise rapide de décisions par le conseil, après consultation de son client, afin de faire face aux urgences et d’éviter les retards. C’est ce qui a pu être observé au fil des ans au Tribunal, au point de devenir un fait de notoriété publique dont la Chambre d’appel peut faire le constat sans qu’il soit nécessaire pour les parties de présenter leurs arguments à ce sujet. La bonne administration de la justice doit être garantie par les Juges en vertu du pouvoir inhérent dont ils disposent de contrôler la procédure afin de garantir l’équité et la rapidité du procès. La notion d’« intérêt de la justice » recouvre également la justice envers l’Accusation, qui, lorsque elle planifie la venue de ses témoins conformément aux règles de procédure, est en droit d’attendre de la Défense qu’elle soit prête à les contre-interroger, ou encore à prendre toute autre mesure éventuellement nécessaire, en temps opportun.

3. Le devoir des Juges étant de veiller à une bonne administration de la justice, il est à mon sens de la plus haute importance de faire preuve de prudence au moment d’intervenir dans le choix des conseils. Le droit d’un accusé à choisir son conseil, même s’il n’est pas absolu, fait partie intégrante du droit à un procès équitable. Si, dans les affaires entendues par le Tribunal, les charges se recoupent souvent, cela ne donne aucunement le droit à l’Accusation de décider de la stratégie de la Défense. L’examen, dans la Décision attaquée, des scénarios possibles de conflits d’intérêts repose, selon moi, sur de simples conjectures. Aucun élément de preuve n’a été produit pour justifier l’intervention demandée par l’Accusation dans la stratégie de la Défense. De même, c’est à l’accusé, et non à la Chambre, de définir la stratégie de sa défense. Étant entendu que des conflits d’intérêts sont susceptibles de surgir dans tous les procès, une Chambre ne saurait intervenir sur la base de simples conjectures dans cet aspect essentiel du droit de l’accusé à un procès équitable. J’estime que le consentement des accusés concernés était un consentement éclairé. Ensuite, l’obligation de la Chambre de première instance est de préserver l’intégrité du débat contradictoire pendant le procès. De plus, l’analyse faite par la Chambre de première instance des stratégies de défense envisageables par les accusés traduit une incompréhension des fonctions du conseil de la Défense, étant donné que la perception par l’Accusation d’un conflit d’intérêts repose sur les allégations figurant dans un acte d’accusation qui reste encore à prouver ; l’adoption de ce raisonnement constitue selon moi une erreur.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 24 novembre 2004
La Haye (Pays-Bas)
______________
Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba

[Sceau du Tribunal]


DÉCLARATION CONJOINTE DES JUGES SHAHABUDDEEN, SCHOMBURG ET WEINBERG DE ROCA

1. La décision rendue aujourd’hui l’a été à l’unanimité. Cependant nous y joignons la présente déclaration afin d’en préciser un point. Nous reconnaissons que la Chambre d’appel ne peut se prononcer contre la représentation par un conseil sur la base de simples conjectures relatives à l’existence d’un conflit d’intérêts. Et nous n’aurions donc pas appuyé la décision si elle ne reposait que sur des conjectures ; or ce n’est pas le cas.

2. Dans une affaire de ce type, il paraît utile de faire la distinction entre la prévoyance raisonnable et de simples conjectures. Et la prévoyance raisonnable nous semble constituer une base suffisante pour étayer une décision. Les faits de l’espèce indiquent que l’appelant-accusé est susceptible d’adopter au procès une position qui s’opposera à celle d’un autre accusé représenté par le même conseil. Si tel est le cas, il en résultera un conflit d’intérêts pour le conseil de la défense. Les paragraphes 10, 14, 23, 24 et 27 de la décision de la Chambre d’appel sont pertinents à cet égard.

3. Le fait que l’appelant-accusé, pour des raisons qui lui sont propres, ait cependant consenti à une double représentation n’exonère pas la Chambre d’appel de sa responsabilité de garantir, dans l’intérêt de la justice, que sa cause soit présentée dès le départ sans aucune entrave résultant de l’engagement du même conseil qu’un autre accusé.

4. Les règles relatives aux conflits d’intérêts varient selon les pays. Dans le système allemand (évoqué à la note de bas de page 61 de la décision de la Chambre d’appel), afin d’éviter tout conflit d’intérêts, il est strictement interdit à un avocat de représenter plus d’un accusé pour les mêmes charges. D’autres systèmes autorisent une telle représentation à condition qu’il n’y ait ni conflit d’intérêts, ni risque raisonnable de voir surgir un tel conflit. Aux termes de l’article 7 du Code néerlandais de déontologie des avocats de 1992 (Gedragsregels 1992 ), « les avocats ne peuvent défendre les intérêts de plusieurs parties dont les intérêts sont en conflit ou sont susceptibles de le devenir dans certaines circonstances  ». Le principe édicté par cette disposition paraît constituer une base raisonnable pour déterminer ce qu’exige l’intérêt de la justice ; il admet la notion de prévoyance raisonnable.

5. Nous hésitons à souscrire à l’idée selon laquelle le conseil risque d’être surchargé de travail et de ne pas avoir suffisamment de temps pour recevoir des instructions de chacun de ses clients et pour se préparer correctement au procès au fur et à mesure de l’évolution de l’instance. Ces considérations sont d’importance, mais nous ne pensons pas que la Chambre d’appel ait bénéficié de l’exposé des arguments pertinents.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

___________
Mohamed Shahabuddeen

___________
Wolfgang Schomburg

___________
Inés Mónica Weinberg de Roca

Le 24 novembre 2004
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1 - Le « Mémoire de l’Appelant ».
2 - « Me Olujic ».
3 - Décision attaquée, par. 30.
4 - Le Procureur c/ Jadranko Prlic et consorts, affaire n° IT-04-74-PT, Accused Bruno Stojic’s Request for Certification of the Right to Appeal in Order to Appeal Against the Decision of the Trial Chamber Dated 30, July 2004 Regarding the Motion to Appoint Zeljko Olujic Lead Counsel » (la « Requête aux fins de certification »).
5 - Le Procureur c/ Jadranko Prlic et consorts, affaire n° IT-04-74-PT, Certification de l’appel de la décision relative au conflit d’intérêts, révoquant le conseil de l’accusé Stojic (la « Certification »). 
6 - En application de l’article 73 C) du Règlement, dès qu’il est fait droit à la demande de certification, la partie concernée dispose de sept jours pour former un recours auprès de la Chambre d’appel. Cependant, dans une communication datée du 7 septembre 2004, la Chambre de première instance a reconnu que l’Appelant n’avait reçu une copie de la Certification que le 6 septembre 2004. Communication électronique entre Me Olujic et la Chambre de première instance du 7 septembre 2004.
7 - Le Procureur c/ Jadranko Prlic et consorts, affaire n° IT-04-74-PT, Prosecutor’s Response to the Appeal Against the Decision of the Trial Chamber dated July 30,  2004 Regarding the Motion to Appoint Zeljko Olujic Lead Counsel (la « Réponse de l’Accusation »). 
8 - Lettre du Chef du Bureau de l’aide juridictionnelle et des questions de détention en date du 28 avril 2004, appelée « Lettre du Greffe » dans la Décision attaquée.
9 - Lettre du Chef du Bureau de l’aide juridictionnelle et des questions de détention en date du 28 avril 2004. Voir la Décision attaquée, note de bas de page 6.
10 - Mémoire de l’Appelant, p. 1, par. 10.
11 - Ibid., p. 1, par. 11.
12 - Réponse de l’Accusation, par. 3.
13 - Ibid., par. 4.
14 - Mémoire de l’Appelant, p. 2, par. 13.
15 - Code de déontologie pour les avocats exerçant devant le Tribunal international, IT/125, Rév. 1, tel que modifié en juillet 2002.
16 - Mémoire de l’Appelant, p. 2, par. 13.
17 - Mémoire de l’Appelant, p. 3, par. 13.
18 - Réponse de l’Accusation, par. 6 à 7.
19 - Mémoire de l’Appelant, p. 3, par. 14.
20 - Réponse de l’Accusation, par. 9.
21 - Décision contestée, par. 20.
22 - Mémoire de l’Appelant, p. 5, par. 20.
23 - Ibid., p. 7, par. 29 b).
24 - Réponse de l’Accusation, par. 16 et 17.
25 - Mémoire de l’Appelant, par. 24.
26 - Mémoire de l’Appelant, p. 7, par. 29.
27 - Réponse de l’Accusation, par. 19.
28 - Mémoire de l’Appelant, par. 24.
29 - Réponse de l’Accusation, par. 20.
30 - Décision attaquée, par. 22.
31 - Mémoire de l’Appelant, p. 5, par. 22.
32 - Ibid., p. 8, par. 29 c).
33 - Ibid.
34 - Décision attaquée, par. 25.
35 - Mémoire de l’Appelant, p. 9, par. 29 e).
36 - Mémoire de l’Appelant, p. 9, par. 29 e).
37 - Réponse de l’Accusation, par. 10.
38 - Mémoire de l’Appelant, p. 8, par. 29 c).
39 - Ibid.
40 - Réponse de l’Accusation, par. 22 et 23.
41 - Mémoire de l’Appelant, p. 9, par. 30.
42 - Réponse de l’Accusation, par. 24.
43 - Mémoire de l’Appelant, p. 4, par. 14.
44 - Réponse de l’Accusation, par. 14.
45 - Le Procureur c/ Jean Kambanda, affaire n° ICTR-97-23-A, Arrêt de la Chambre d’appel, 19 octobre 2000, par. 33 ; Le Procureur c/ Jean-Paul Akayesu, affaire n° ICTR-96-4-A, Arrêt de la Chambre d’appel, 1er juin 2001, par. 61 et 62 ; Le Procureur c/ Vidoje Blagojevic et consorts, affaire n° IT-02-60-AR73.4,Version publique et expurgée de l’exposé des motifs de la décision relative au recours introduit par Vidoje Blagojevic aux fins de remplacer son équipe de la défense, 7 novembre 2003, par. 22 ; Le Procureur c/ Zeljko Mejakic et consorts, affaire n° IT-02-65-AR73.1, Décision relative à l’appel interjeté par l’Accusation afin de résoudre le conflit d’intérêts concernant Jovan Simic, 6 octobre 2004, par. 8.
46 - Décision attaquée, par. 13 ; Le Procureur c/ Zeljko Mejakic et consorts, affaire n° IT-02-65-AR73.1, Décision relative à l’appel interjeté par l’Accusation afin de résoudre le conflit d’intérêts concernant Jovan Simic, 6 octobre 2004, par. 8.
47 - Mémoire de l’Appelant, p. 9, par. 29 e).
48 - Le Procureur c/ Enver Hadzihasanovic et consorts, affaire n° IT-01-47-PT, Décision relative à la Requête de l’Accusation aux fins d’examen de la Décision du Greffier de nommer M. Rodney Dixon comme coconseil de l’accusé Kubura, 26 mars 2002, par. 21.
49 - Le Procureur c/ Vidoje Blagojevic et consorts, affaire n° IT-02-60-T, Décision relative à la requête du Conseil indépendant de Vidoje Blagojevic aux fins de solliciter du Greffier qu’il commette d’office un nouveau conseil principal et un nouveau coconseil, 3 juillet 2003, par. 27.
50 - Le Procureur c/ Enver Hadzihasanovic et consorts, affaire n° IT-01-47-PT, Décision relative à la Requête de l’Accusation aux fins d’examen de la Décision du Greffier de nommer M. Rodney Dixon comme coconseil de l’accusé Kubura, 26 mars 2002, par. 21.
51 - Le Procureur c/ Blagoje Simic et consorts, affaire n° IT-95-9-PT, Decision on the Prosecution Motion to Resolve Conflict of Interest Regarding Attorney Borislav Pisarevic, 25 mars 1999, p. 6.
52 - Ibid.
53 - Code de déontologie pour les avocats exerçant devant le Tribunal international, IT/125, Rév. 1, tel que modifié le 12 juillet 2002 (le « Code de déontologie »).
54 - Décision attaquée, par. 18 ; Acte d’accusation modifié contre Ivica Rajic, affaire n° IT-95-12-PT, 14 janvier 2004, par. 2.
55 - Décision attaquée, par. 19 ; Acte d’accusation modifié contre l’Appelant, affaire n° IT-04-74-PT, 4 mars 2004, par. 4, 5, 18, 207 à 216.
56 - Décision attaquée, par. 30.
57 - Décision attaquée, par. 29.
58 - Déclaration en date du 7 avril 2004.
59 - Le Procureur c/ Milan Martic, affaire n° IT-95-11-PT, 2 août 2002, Décision relative à l’appel interjeté contre la décision du Greffe, p. 7.
60 - Lettre du Chef du Bureau de l’aide juridictionnelle et des questions de détention en date du 28 avril 2004, appelée « Lettre du Greffe » dans la Décision attaquée.
61 - Directive relative à la commission d’office de conseils de la défense, IT/73, Rév. 10, 28 juillet 2004. Dans certains pays, il est interdit aux conseils de représenter plus d’un accusé dans une même affaire. Ainsi le Code allemand de procédure pénal prévoit en sa Section 146 : « Un conseil de la défense ne peut représenter simultanément plusieurs personnes accusées de la même infraction. Il ne peut pas non plus, dans une même instance, représenter simultanément plusieurs personnes accusées d’infractions différentes. » (Traduction non officielle).
62 - Décision attaquée, par. 32.
63 - Ibid., par. 29.