LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE I

Composée comme suit :
M. le Juge Liu Daqun, Président
M. le Juge Amin El Mahdi
M. le Juge Alphons Orie

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
30 juillet 2004

LE PROCUREUR

c/

Jadranko PRLIC
Bruno STOJIC
Slobodan PRALJAK
Milivoj PETKOVIC
Valentin CORIC
et Berislav PUSIC

___________________________________

DÉCISION RELATIVE AUX DEMANDES DE COMMISSION DE CONSEILS

___________________________________

Le Bureau du Procureur :

M. Kenneth Scott

Les Conseils de l’Accusé :

Mes Camil Salahovic et Zelimir Par pour Jadranko Prlic
Me Zeljko Olujic pour Bruno Stojic
Me Kresimir Krsnik pour Slobodan Praljak
Me Vesna Alaburic pour Milivoj Petkovic 
Me Tomislav Jonjic pour Valentin Coric
Me Marinko Skobic pour Berislav Pusic

SOMMAIRE

I. INTRODUCTION

II. EXAMEN

A. LE DROIT DE L’ACCUSÉ DE CHOISIR UN CONSEIL ET SES LIMITES
B. LES CONFLITS D’INTÉRÊTS EN CAUSE

1. Me Zeljko Olujic, conseil d’Ivica Rajic et Bruno Stojic

a) Accusations formulées à l’encontre de l’accusé
b) Arguments des parties
c) Conclusions de la Chambre de première instance

2. Me Zelimir Par, coconseil de Jadranko Prlic et conseil de Vinko Martinovic

a) Accusations et déclarations de culpabilité concernant les deux clients
b) Arguments des parties
c) Conclusions de la Chambre de première instance

3. Me Tomislav Jonjic, conseil de Valentin Coric et de Pasko Ljubicic

a) Les accusations portées à l’encontre des deux accusés
b) Arguments des parties
c) Conclusions de la Chambre de première instance

III. DISPOSITIF

I. INTRODUCTION

1. La Chambre de première instance I (la « Chambre de première instance ») du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal ») est saisie de quatre demandes de commission de conseils, dont deux ont été déposées à titre confidentiel par le même conseil. Le 4 mai 2004, Me Zelimir Par a déposé à titre confidentiel une demande de commission d’un coconseil (Request for the Assignment of Co-counsel), par laquelle il demandait l’autorisation de représenter l’accusé Jadranko Prlic. Le 5 mai 2004, il a réitéré cette demande à titre confidentiel en y joignant une lettre qu’il avait adressée au Greffe le 9 avril 2004 (la « Demande de Me Par »). Le 4 mai 2004, Me Zeljko Olujic a déposé une demande de commission d’un conseil principal à l’accusé Bruno Stojic (Request for the Assignment of Lead Counsel to the Accused Bruno Stojic) (la « Demande de Me Olujic ») et, le 5 mai 2004, Me Kresimir Krsnik a déposé une demande de commission d’un conseil principal à l’accusé Slobodan Praljak (Request for the Assignment of Lead Counsel to the Accused Slobodan Praljak) (la « Demande de Me Krsnik »). Ces demandes ont été transmises à la Chambre de première instance sur recommandation du Greffe1.

2. Les six accusés en l’espèce ont été transférés au Tribunal le 5 avril 2004. Aucun n’a demandé l’assistance gratuite d’un conseil. Les conseils n’ont donc pas été commis d’office par le Greffier mais choisis par les accusés2. Les mandats ont été déposés le 6 avril 2004, le Greffier ayant établi que ces conseils sont qualifiés au sens de l’article 44 A) du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »).

3. Le 6 avril 2004, lors de la comparution initiale, le Juge Orie s’est dit préoccupé par le risque de conflit d’intérêts que présentent quatre des conseils choisis par les accusés, à savoir Mes Zeljko Olujic, Zelimir Par, Kresimir Krsnik et Tomislav Jonjic, ceux-ci représentant déjà devant le Tribunal d’autres personnes accusées ou reconnues coupables en première instance à raison des mêmes faits ou de faits en partie similaires à ceux pour lesquels sont mis en cause les accusés qu’ils représentent en l’espèce.

4. Me Zeljko Olujic, choisi par Bruno Stojic comme conseil principal en l’espèce, est le conseil principal commis d’office d’Ivica Rajic dans l’affaire n° IT-95-12-PT. Me Zelimir Par, le coconseil choisi par Jadranko Prlic en l’espèce, est le conseil principal commis d’office de Vinko Martinovic dans l’affaire n° IT-98 -34-A. Me Kresimir Krsnik, le conseil principal choisi par Slobodan Praljak en l’espèce, est le conseil principal commis d’office de Mladen Naletilic dans l’affaire n° IT-98-34-A. Me Tomislav Jonjic, le conseil principal choisi par Valentin Coric en l’espèce, est le conseil principal commis d’office de Pasko Ljubicic dans l’affaire n° IT-00-41-PT.

5. Tout en jugeant ces quatre conseils qualifiés au sens de l’article 44 du Règlement, le Greffier a estimé, après examen des actes d’accusation en cause, que le fait qu’ils soient commis à la défense d’autres accusés présentait un risque de conflit d’intérêts. En conséquence, Me Zelimir Par a soumis au Greffe, le 9 avril 2004, une déclaration relative aux allégations de conflit d’intérêts dans le cas de la représentation simultanée des accusés Vinko Martinovic et Jadranko Prlic (Declaration as to alleged conflict of interests in the case of defence of the accused Vinko Martinovic, and the accused Jadranko Prlic3), niant l’existence de tout conflit d’intérêts. Le 13 avril 2004, Mes Zeljko Olujic et Kresimir Krsnik ont déposé des déclarations similaires (les « Déclarations des conseils »4). De plus, trois accusés dans d’autres affaires, Rajic, Ljubicic et Martinovic5, qui pourraient avoir un conflit d’intérêts avec les accusés en l’espèce, ont présenté des déclarations écrites par lesquelles ils affirmaient avoir été informés du risque de conflit d’intérêts et acceptaient que leur conseil représente un accusé en l’espèce (les « Consentements écrits »). Après avoir consulté les conseils intéressés et vu les Consentements écrits présentés par certains des accusés concernés, le Greffier a maintenu que les cas de Mes Olujic, Par et Krsnik comportaient un risque de conflit d’intérêts. Il a en outre émis des doutes quant à savoir si les accusés concernés mesuraient bien toutes les conséquences possibles de cette double représentation pour leur défense. Il a donc invité ces conseils à saisir de la question la Chambre de première instance, qu’il a présentée comme l’organe responsable en dernier recours de la protection des droits des accusés6. Ainsi qu’il est indiqué ci-dessus, ces demandes ont été déposées devant la Chambre de première instance les 4 et 5 mai 20047.

6. Le 14 mai 2004, l’Accusation a déposé une argumentation générale relative aux conflits d’intérêts concernant les conseils de la Défense (Submission Regarding Conflicts of interest Concerning Defence Counsel) (l’« Argumentation générale  »), par laquelle elle a exprimé ses préoccupations face aux conflits d’intérêts que présentaient ou risquaient de présenter les cas de Mes Zeljko Olujic, Zelimir Par, Kresimir Krsnik et Tomislav Jonjic. L’Accusation a déposé le 14 mai 2004 deux écritures supplémentaires, par lesquelles elle a exposé de manière plus détaillée ses préoccupations concernant d’une part les cas de Mes Zelimir Par et Tomislav Jonjic (l’« Argumentation concernant Mes Par et Jonjic »)8 et d’autre part celui de Me Kresimir Krsnik (l’« Argumentation concernant Me Krsnik  »)9. Le 18 mai 2004, Me Zelimir Par, coconseil de l’accusé Jadranko Prlic, a déposé une réponse à ces argumentations (la « Réponse de Me Par »). Le 19 mai 2004, Me Tomislav Jonjic, conseil de Valentin Coric, a fait de même (Response to Prosecution’s Submissions Regarding Conflicts of Interest of 14thMay 2004) (la « Réponse de Me Jonjic »). Le 20 mai 2004, Me Zeljko Olujic, conseil principal de Bruno Stojic, a déposé une réponse à l’Argumentation générale (Response to the Prosecution’s Submission Regarding Conflict of Interests Concerning Defence Counsel (Stojic)) (la « Réponse de Me Olujic »). Le 21 mai 2004, Me Kresimir Krsnik, conseil de l’accusé Slobodan Praljak, a déposé une réponse auxdites argumentations (Response of the Counsel of the Accused Slobodan Praljak to Prosecution’s Submissions Regarding Conflicts of Interests of 14thMay 2004 ) (la « Réponse de Me Krsnik »). Le 27 mai 2004, l’Accusation a déposé à titre confidentiel une réplique à la Réponse de Me Olujic (la « Réplique de l’Accusation10  »). Me Olujic a répondu à la Réplique de l’Accusation par un document confidentiel déposé le 1er juin 2004 (la « Duplique de Me Olujic »)11.

7. Le 16 juin 2004, Slobodan Praljak a adressé une lettre au Greffier, lui signalant qu’en vertu d’un accord avec Me Krsnik et en raison d’un risque de conflit d’intérêts eu égard aux travaux effectués antérieurement par celui-ci devant le Tribunal, il renonçait à être défendu par lui et choisissait Me Božidar Kovacic comme conseil principal et Me Nika Pinter comme coconseil12. La question du risque de conflit d’intérêts s’agissant de Me Krsnik n’a donc plus d’objet.

8. La Chambre de première instance reste saisie de la Demande de Me Olujic et de la Demande de Me Par. Bien que Me Jonjic n’ait pas présenté de demande, l’Accusation a déposé des argumentations le concernant, auxquelles il a apporté une réponse, et la Chambre de première instance examinera donc brièvement ces écritures.

9. Une audience publique s’est tenue les 19 et 20 juillet 2004 (l’« Audience »), au cours de laquelle les conseils concernés ont été invités à se soumettre à des vérifications complémentaires de la part du Juge de la mise en état.

II. EXAMEN

A. Le droit de l’accusé de choisir un conseil et ses limites

10. Le droit de choisir un conseil est un droit fondamental de l’accusé, reconnu par l’article 21 4) b) du Statut, lequel reprend l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 196613.

11. Cependant, ce droit n’est pas sans limites. À plusieurs reprises, la Chambre d’appel a jugé que « le droit à l’assistance gratuite d’un avocat ne confère pas le droit de choisir son avocat14 » et que c’est au Greffier qu’il revient de décider qui commettre à la défense d’un accusé, conformément à la procédure prévue dans la Directive relative à la commission d’office des conseils de la Défense15. Le Greffier tient généralement compte des préférences de l’accusé « mais il peut passer outre à ces préférences si l’intérêt de la justice le commande16 .

12. Le conseil choisi par l’accusé doit également satisfaire aux conditions de l’article  44 A) du Règlement, selon les directives du Greffier.

13. L’existence ou le risque d’un conflit d’intérêts constitue une autre limite au choix de l’accusé17. Un accusé ne devrait pas pouvoir choisir un conseil qui ne peut défendre ses intérêts au mieux. En vertu de l’article 14 du Code de déontologie pour les avocats exerçant devant le Tribunal international (le « Code18  »), un conseil doit s’abstenir de représenter un client si cette représentation affecte celle d’un autre client, si elle est affectée par celle d’un autre client ou d’un client antérieur, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce que ce soit le cas. L’article 14 du Code se lit comme suit :

A. Le conseil a un devoir de loyauté envers son client. Il a pour devoir envers le Tribunal d’agir en toute indépendance dans l’intérêt de la justice qu’il fait passer avant ses propres intérêts et ceux de toute autre personne, organisation ou État.

B. Le conseil veille avec le plus grand soin à éviter tout conflit d’intérêts.

C. Le conseil ne représente pas un client dans une affaire à laquelle il a été personnellement et largement associé, en qualité de membre permanent ou non du personnel du Tribunal ou en toute autre qualité, à moins que le Greffier ne juge, après consultation des parties et eu égard au point de vue de la Chambre, qu’un conflit entre ses fonctions passées et présentes paraît exclu.

D. Le conseil ou son cabinet ne représente pas un client dans une affaire :

i. si cette représentation est affectée par celle d’un autre client, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle le soit,

ii. si la représentation d’un autre client est affectée par celle de ce client, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle le soit,

iii. si l’affaire est la même ou étroitement liée à une autre dans laquelle le conseil ou son cabinet a auparavant représenté un autre client (le « client antérieur ») et si les intérêts du client sont en grande partie opposés à ceux du client antérieur,

iv. si le jugement professionnel qu’exerce le conseil au profit du client est affecté, ou si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il soit affecté, par :

1. les responsabilités ou les intérêts du conseil vis-à-vis d’un tiers, ou

2. les propres intérêts financiers, commerciaux, matériels ou personnels du conseil.

E. Si un conflit d’intérêts surgit néanmoins, le conseil :

i. avertit immédiatement et pleinement de la nature et de la portée du conflit tous les clients présents et passés susceptibles d’être affectés, et

ii. soit :

1. prend toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au conflit d’intérêts, soit

2. demande l’accord éclairé et sans réserves de tous les clients présents et passés susceptibles d’être affectés pour pouvoir poursuivre sa mission, à moins que cet accord ne risque de porter un coup irrémédiable à la bonne administration de la justice.

14. Les obligations que l’article 14 du Code met à la charge du conseil proviennent d’un « devoir de loyauté envers son client » et d’un « devoir envers le Tribunal d’agir en toute indépendance dans l’intérêt de la justice ». C’est au conseil qu’il revient, en priorité, d’apprécier la question. En pratique, c’est lui qui peut le mieux déterminer s’il existe un conflit entre clients ou s’il risque d’en survenir un : il connaît ses clients actuels et antérieurs, il sait quelles informations il a reçu ou est susceptible de recevoir de leur part et il a une connaissance exhaustive de chacune des affaires dans lesquelles il est intervenu en tant que conseil. Juridiquement, il est tenu de se conformer dans l’exercice de ses fonctions à l’article 14 du Code et il est passible de mesures disciplinaires en cas d’infraction19. Une Chambre de première instance suppose donc normalement que le conseil respecte ses obligations professionnelles20. La relation privilégiée entre un conseil et son client justifie que les autorités judiciaires évitent, autant que possible, d’intervenir dans cette relation.

15. Cependant, les articles 20 et 21 du Statut du Tribunal font obligation à la Chambre de première instance de veiller à ce que le procès soit équitable et rapide, les droits de l’accusé étant pleinement respectés. L’existence ou le risque d’un conflit d’intérêts peut influer sur la conduite du procès. Il se peut que, pour éviter de porter préjudice à un autre client, le conseil hésite à adopter un système de défense, à présenter certains éléments de preuve ou à invoquer certaines circonstances atténuantes lors de la fixation de la peine. Il risque ainsi d’être empêché d’assister son client de façon pleine et entière. Un conflit d’intérêts risque aussi de survenir en cours de procès, ce qui pourrait amener le conseil à se retirer de l’affaire, retardant ainsi la procédure au détriment de l’accusé. Des témoins peuvent alors devoir être cités à nouveau pour déposer sur des questions que le conseil n’avait pas abordées en raison de l’existence ou du risque d’un conflit d’intérêts. Une telle perturbation de la procédure est encore plus préjudiciable lorsque, comme c’est le cas en l’espèce, plusieurs accusés sont en cause.

16. En conclusion, avant d’accepter de représenter un client, le conseil tenu, déontologiquement, de s’assurer qu’il est en mesure de défendre son client loyalement et en toute indépendance. Cette obligation du conseil n’exclut pas que la Chambre de première instance exerce les pouvoirs qui lui sont inhérents et qui découlent de son devoir de garantir le droit de l’accusé à un procès juste et rapide et à une bonne administration de la justice21. Lorsqu’il existe manifestement un conflit d’intérêts ou qu’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il en survienne un, la Chambre de première instance ne peut continuer à supposer que le conseil a respecté ses obligations professionnelles, notamment celles qui sont visées à l’article 14 du Code, mais c’est à elle qu’il incombe de veiller à ce que chaque accusé soit effectivement assisté par un conseil22 et à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à la bonne administration de la justice. Le risque d’un conflit d’intérêts est manifeste lorsque le conseil représente deux accusés qui sont, au moins en partie, accusés des mêmes crimes commis durant la même période et dans la même région. La Chambre de première instance doit alors apprécier des éléments tels que la probabilité objective de conflit et le préjudice que pourraient subir l’accusé et la procédure, en particulier lorsque, comme c’est le cas en l’espèce, plusieurs accusés sont en cause. Elle doit en outre chercher à déterminer si le conseil a conscience de tous les risques de conflit d’intérêts et s’il en a correctement mesuré les conséquences possibles. Après avoir examiné ces éléments, la Chambre de première instance détermine si les risques et préjudices potentiels sont de nature à compromettre le droit de l’accusé à un procès juste et rapide ou à une bonne administration de la justice et, si elle conclut que c’est le cas, prend les mesures appropriées pour rétablir ou préserver l’équité du procès et la bonne administration de la justice. Dans ce cadre, elle peut interdire à un conseil de représenter un accusé. À cet égard, la Chambre de première instance souscrit à la Décision Hadzihasanovic, dans laquelle la Chambre, ayant fait observer que le Règlement l’habilitait à interdire à un conseil de représenter un suspect ou un accusé devant le Tribunal23, en a déduit qu’ « [elle] a[vait] certainement le pouvoir de prendre des mesures moins importantes visant à assurer un procès équitable et une bonne administration de la justice dans une affaire donnée dont elle est saisie24.

B. Les conflits d’intérêts en cause

1. Me Zeljko Olujic, conseil d’Ivica Rajic et Bruno Stojic

17. Bruno Stojic a choisi pour le représenter en tant que conseil principal en l’espèce Me Zeljko Olujic, qui est le conseil principal commis d’office à la défense d’Ivica Rajic.

a) Accusations formulées à l’encontre de l’accusé

18. Ivica Rajic est accusé, sur la base des articles 7 1) et 7 3) du Statut, de crimes commis à Vares et à Stupni Do (Bosnie-Herzégovine) entre octobre 1993 et décembre 1993. Les crimes principaux auraient été commis le 23 octobre 1993 ou vers cette date. Ivica Rajic est accusé de ces crimes sur la base du commandement et de l’autorité qu’il exerçait, de droit et de fait, sur plusieurs unités du Conseil de défense croate dans le secteur placé sous sa responsabilité (comprenant les municipalités de Kiseljak, Kakanj et Vares), notamment la brigade Ban Jelacic, la brigade de Bobovac et les unités connues sous les noms de « Maturice » et « Apostoli »25.

19. Selon l’Acte d’accusation, Bruno Stojic était le chef du Département (par la suite Ministère) de la défense du HVO du 3 juillet 1992 à novembre 199326 et, à ce titre, « occupait les plus hautes fonctions politiques et administratives au sein de cet organe et était responsable des forces armées de la Herceg-Bosna/ du HVO » et « exerçait un pouvoir de jure et/ou de facto, un contrôle effectif et une influence considérable sur tous les aspects des opérations menées par les forces armées27 ». Les paragraphes 207 à 216 de l’Acte d’accusation mentionnent des crimes commis à Vares et à Stupni Do entre octobre et décembre 1993. Ivica Rajic28 ainsi que les unités « Maturice » et « Apostoli »29, sont cités parmi ceux qui ont pris part à ces crimes. Bruno Stojic est mis en cause pour ces crimes au titre de sa participation à une entreprise criminelle commune sur la base de l’article 7 1) du Statut30 et en tant que supérieur hiérarchique sur celle de l’article 7 3) du Statut.

b) Arguments des parties

20. Me Olujic affirme qu’il n’existe aucun conflit d’intérêts entre les deux accusés. Il soutient en premier lieu que tout conflit d’intérêts est exclu par le simple fait que les deux accusés se disent entièrement innocents31. Il estime en outre qu’il n’existe aucun lien entre ses deux clients, étant donné leurs positions respectives dans la hiérarchie32  : Ivica Rajic était un chef militaire alors que Bruno Stojic est accusé en tant que dirigeant civil33. Selon Me Olujic, cela exclut tout risque de conflit d’intérêts entre les deux accusés34. Me Olujic ajoute qu’en supposant même que les deux accusés étaient liés par une relation hiérarchique, il est notoire que le fait de plaider, dans un cas, l’indiscipline et le manque de contrôle sur les unités subordonnées ou, dans l’autre, la simple exécution d’ordres reçus ne permet pas de disculper un accusé. Puisque les deux accusés ont l’intention de plaider leur complète innocence, aucun ne fondera sa défense sur cette prétendue relation35. Lorsque le Juge de la mise en état a signalé que Ivica Rajic affirmait avoir été empêché de mener une enquête par Mate Boban, qui est présenté comme un supérieur de Rajic, bien qu’il fût un dirigeant civil36, et comme l’un des participants à l’entreprise criminelle commune dont il est question dans l’Acte d’accusation, Me Olujic a répondu que cette déclaration avait été faite dans un contexte différent et ne pouvait s’appliquer à la relation entre Ivica Rajic et Bruno Stojic parce que les deux clients avaient été amplement informés de la question et lui avaient cependant assuré qu’ils souhaitaient être représentés par lui37. Me Olujic admet que jusqu’à présent la ligne de défense de Ivica Rajic consiste à rejeter la responsabilité sur des autorités supérieures38 mais il soutient néanmoins que le consentement de ses clients constitue une garantie qu’aucun conflit ne surviendra39. Me Olujic explique à cet égard qu’il a obtenu le consentement inconditionnel des deux accusés pour qu’il représente Bruno Stojic dans cette affaire40. Me Olujic précise cependant qu’un consentement « inconditionnel » ne constitue pas un consentement absolu et reconnaît que ses clients pourraient revenir à tout moment sur leur consentement41.

21. Bruno Stojic a confirmé, lors de sa comparution initiale, qu’il avait discuté de la question avec son conseil et qu’il avait insisté pour que Me Olujic le représente 42. Il a ensuite affirmé à l’Audience qu’il n’existait aucune relation hiérarchique entre lui et Ivica Rajic puisque celui -ci faisait partie de l’état-major principal, qui n’avait rien à voir avec lui43. Il affirme qu’il a quitté le ministère de la défense quelques jours après les événements de Stupni Do et que Ivica Rajic ne le met certainement pas en cause lorsqu’il affirme que des hauts dirigeants civils l’ont empêché d’enquêter sur ces événements44. Bruno Stojic a également expliqué qu’il avait choisi Me Olujic comme conseil sur la foi de sa réputation, qu’il avait travaillé avec lui au cours des quatre ou cinq derniers mois et qu’il voulait le garder comme conseil principal45.

22. Me Olujic insiste sur le droit de l’accusé de choisir son conseil46 et fait observer que les deux affaires sont présidées par le Juge Liu Daqun, ce qui, selon lui, rend tout conflit d’intérêts « pratiquement impossible parce que la défense est sous contrôle dans les deux affaires47 .

23. Enfin, Me Olujic souligne qu’il est assisté par un coconseil dans l’instance engagée contre Ivica Rajic et que, par conséquent, il « peut se retirer de l’affaire à tout moment sans risquer de créer le moindre problème pour la procédure elle-même . Un coconseil peut également être désigné dans l’instance engagée contre Bruno Stojic, ce qui permettrait également à Me Olujic, le cas échéant, de se retirer de l’affaire sans retarder ou perturber outre mesure la procédure48. Lorsqu’on lui a demandé de quelle affaire il se retirerait en cas de conflit, Me Olujic a déclaré que cette question était trop hypothétique pour qu’il y réponde 49.

24. L’Accusation souligne qu’Ivica Rajic est mis en cause pour « exactement les mêmes crimes, commis à Vares et à Stupni Do, que ceux dont Bruno Stojic est accusé en l’espèce50 », ce dernier étant mis en cause notamment comme « coauteur aux côtés de Rajic et supérieur hiérarchique de celui-ci au sens de l’article 7 3)51 . L’Accusation réfute notamment l’argument de Me Olujic selon lequel aucun conflit d’intérêts ne peut survenir parce que Bruno Stojic était un dirigeant civil et Ivica Rajic un chef militaire. Au contraire, la thèse de l’Accusation, telle que présentée dans l’Acte d’accusation, est que Bruno Stojic exerçait « un pouvoir de jure et/ou de facto sur Ivica Rajic et d’autres chefs militaires52 . L’Accusation joint à son Argumentation deux documents signés par Bruno Stojic, qui tendent à démontrer l’existence d’une relation hiérarchique entre celui-ci et Ivica Rajic. Elle soutient qu’un conflit d’intérêts surviendra si Bruno Stojic affirme que les crimes de Vares et Stupni Do ont été commis par des soldats du HVO aux ordres de Ivica Rajic mais qu’il n’en avait pas connaissance, ou si Ivica Rajic soutient que les ordres de commettre les crimes de Stupni Do émanaient en partie de Bruno Stojic, ou que ces crimes ont été commis par d’autres hommes directement subordonnés à ce dernier53. Un conflit d’intérêts surviendrait également si l’un ou l’autre des accusés — ou chacun d’eux — décidait de plaider coupable et de collaborer avec l’Accusation54. Celle-ci conclut qu’il surviendra un « conflit insoluble si Me Olujic représente à la fois Ivica Rajic et Bruno Stojic qui doivent répondre de ces crimes absolument identiques55 » et que « les conflits dans une telle situation sont trop immédiats et trop sérieux pour être résolus par une dérogation ou un consentement56 . Enfin, l’Accusation soutient que le retrait d’un conseil à un stade avancé de la procédure serait extrêmement préjudiciable à l’ensemble de celle-ci57.

25. Dans sa Réponse, Me Olujic indique qu’il ne voit pas en quoi l’éventualité qu’un client adopte une position contraire aux intérêts de l’autre poserait un problème, puisque le conseil est là pour conseiller l’un et l’autre et leur dire comment réduire tout risque de conflit d’intérêts58. Il affirme que « dans le cas d’une double représentation, l’idée est de coordonner les deux défenses en vue d’obtenir une punition moins lourde » et que « [c]e n’est que si les deux accusés avaient un différend, ce qui arriverait s’ils n’avaient pas un médiateur auquel ils peuvent tous deux faire confiance, que tout leur “linge sale” s’étalerait devant le Tribunal59 . Il ajoute que « le fait d’avoir un seul conseil est la meilleure manière de garantir que les deux clients ne seront pas amenés à déposer l’un contre l’autre60  » et conclut qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts61. Me Olujic pense au contraire que l’Accusation tente, par ses arguments, d’inférer que « le fait qu’un conseil est rétribué par une source extérieure laisse supposer que le conseil est coupable62 ». Lorsqu’on lui a demandé à l’Audience de préciser sa pensée sur ce point, Me Olujic a indiqué qu’il avait répondu de cette façon parce qu’il était attaqué par l’Accusation63 et qu’il voulait dire que « grâce aux connaissances obtenues dans les deux affaires, il pourrait aider ses deux clients à choisir ce qui était le mieux pour eux et leur apporter la meilleure défense possible » durant leur procès64.

26. S’agissant des difficultés posées par le retrait du conseil à un stade avancé de la procédure, Me Olujic répond qu’un retrait peut survenir pour beaucoup de raisons autres qu’un conflit d’intérêts, puisqu’un client peut révoquer un conseil à tout moment du procès, et conclut que « [l]es irrégularités provoquées par un “conflit d’intérêts” ne diffèrent pas de celles qui surviennent lorsqu’il n’y a pas de conflit de ce genre et ne sont pas plus importantes65 . Me Olujic met également en doute l’authenticité et la fiabilité des documents joints à l’Argumentation générale. Il conclut notamment que l’Accusation « tente de diminuer l’importance des intérêts des accusés » et « d’imposer ses tactiques, ses objectifs et même les défenseurs66 .

27. L’Accusation rétorque que c’est au conseil de la Défense de démontrer de manière convaincante qu’il n’existe pas de conflit d’intérêts et/ou que tout conflit de cet ordre a été efficacement résolu. Elle ajoute qu’en expliquant que son rôle consisterait à agir comme médiateur et à coordonner au mieux les intérêts de ses deux clients, Me Olujic reconnaît en fait qu’il existe un conflit d’intérêts67. Selon l’Accusation, sa position est cohérente, comme le montre le rapport qu’elle a joint à sa Réplique, daté du 22 juillet 1998 et émanant du chef des services croates de renseignements, qui indique, entre autres, que « la défense d’un accusé ne doit pas compromettre d’autres personnes, en particulier celles contre lesquelles une procédure est déjà engagée68 ». Enfin, elle fait valoir que s’il est vrai qu’un conseil peut être amené à se retirer d’une affaire en cours de procédure pour d’autres raisons, cela ne signifie pas qu’il ne faut rien faire face à un problème de conflit d’intérêts69.

28. Le conseil de la Défense conteste l’authenticité et la fiabilité du rapport de 1998 joint à la Réplique de l’Accusation et signale en outre que ce document ne le concerne pas puisque son nom n’y figure pas, contrairement à ceux d’autres conseils de la Défense70.

c) Conclusions de la Chambre de première instance

29. Les deux accusés sont mis en cause pour les mêmes crimes et auraient été liés par une relation hiérarchique relativement étroite durant la période visée. La lecture des deux actes d’accusation révèle qu’un conflit d’intérêts surviendra probablement entre les deux accusés, si ce n’est pas déjà le cas. Les arguments présentés oralement et par écrit par Me Olujic ne sont pas pertinents. En premier lieu, ceux qu’il avance pour nier l’existence ou le risque d’un conflit sont inexacts. Le simple fait qu’un accusé est mis en cause en tant que dirigeant civil alors que l’autre l’est en tant que chef militaire n’exclut pas l’existence d’une relation hiérarchique entre eux. Deuxièmement, le fait que le même juge dirige les deux procédures est hors de propos. D’une part, rien ne permet d’affirmer que le même juge siègera aux deux procès. Le Juge Liu Daqun préside la Chambre de première instance saisie de ces affaires durant la phase préalable au procès. Dès que ces deux affaires seront en état d’être jugées, elles seront attribuées à la première Chambre de première instance disponible, dont le Juge Liu Daqun ne fera peut-être pas partie. D’autre part, même si un juge saisi des deux affaires pourrait se rendre plus facilement compte de l’existence d’un conflit d’intérêts, sa présence n’empêcherait pas ce conflit de survenir. Enfin, le simple fait que les deux accusés entendent affirmer leur complète innocence ne constitue pas en lui-même une garantie contre tout conflit d’intérêts. Il existe de nombreuses façons de plaider son innocence et la ligne de défense, comme c’est souvent le cas, peut évoluer au cours de l’affaire. Il incombe au conseil de tenir compte de ce facteur lorsqu’il évalue le risque de conflit d’intérêts. En fait, plusieurs arguments présentés par Me Olujic donnent bien à penser que le risque de conflit d’intérêts l’empêchera à coup sur de défendre valablement Ivica Stojic. Par exemple, Me Olujic affirme qu’il « coordonnera les deux défenses », qu’il fera office de « médiateur » entre les accusés pour « réduire tout risque de conflit d’intérêts », ou que le fait d’être le conseil des deux accusés est «  la meilleure façon de garantir que ses deux clients ne seront pas amenés à déposer l’un contre l’autre ». Me Olujic admet implicitement, par ces propos, qu’il pourrait ne pas être en mesure de défendre diligemment et promptement les intérêts de ses clients, ainsi qu’on l’attend et l’exige d’un conseil : proposer un compromis plutôt que de défendre sans restriction l’intérêt de ses clients est contraire aux obligations professionnelles du conseil.

30. La Chambre de première instance estime qu’un conflit d’intérêts surviendra très probablement et que ce risque empêchera très probablement Me Olujic de défendre au mieux les intérêts de Bruno Stojic.

31. Les solutions qu’envisage Me Olujic au cas où un conflit d’intérêts surviendrait ne sont pas satisfaisantes. Le remplacement d’un conseil principal provoque inévitablement des retards et des perturbations dans la conduite d’un procès. Il pourrait même causer un préjudice irréparable aux accusés, dans la mesure où il peut être difficile pour le nouveau conseil de modifier la stratégie de défense adoptée par son prédécesseur et de plaider la cause de l’accusé comme il l’aurait fait s’il avait défendu son client depuis le début de l’instance. Le remplacement d’un conseil en cours de procès doit être évité autant que possible et la Chambre de première instance, en vertu du pouvoir inhérent dont elle dispose pour garantir l’équité et la rapidité du procès et la bonne administration de la justice, n’autorisera généralement pas le conseil à se retirer en cours de procès, sauf si des motifs convaincants sont présentés et si elle est convaincue que l’intérêt de la justice le commande. Cependant, si la Chambre de première instance établit, dès le début de l’instance ou à un stade peu avancé de celle-ci, qu’il existe un risque réel qu’un tel conflit survienne au cours du procès, elle ne doit pas permettre que ce risque soit pris, à moins que des raisons impérieuses ne l’y contraignent. Il convient à cet égard d’établir une distinction entre risques évitables et inévitables. Ainsi que la Chambre de première instance l’a dit dans la Décision Hadzihasanovic, il incombe à la Chambre de première instance de veiller à ce que la procédure ne soit pas entravée par des risques prévisibles et donc évitables : « [l]a Chambre ne saurait attendre qu’un préjudice prévisible vienne porter atteinte à procédure. Il lui appartient d’y parer71 ».

32. Le consentement « inconditionnel » exprimé par Bruno Stojic à sa comparution initiale et le Consentement écrit présenté par Ivica Rajic ne peuvent avoir pour effet de valider la désignation du conseil si la Chambre de première instance est convaincue que les intérêts de la justice commandent d’agir autrement.

2. Me Zelimir Par, coconseil de Jadranko Prlic et conseil de Vinko Martinovic

33. Me Zelimir Par est le conseil principal commis d’office à la défense de Vinko Martinovic depuis le début de l’affaire concernant ce dernier. Il est le coconseil de Jadranko Prlic en l’espèce, le conseil principal étant Camil Salahovic.

a) Accusations et déclarations de culpabilité concernant les deux clients

34. Le 31 mars 2003, Vinko Martinovic a été déclaré coupable par une Chambre de première instance en tant que commandant, au sein du HVO, du groupe antiterroriste (« ATG ») Vinko Skrobo72, pour les crimes commis par cette unité et lui-même dans la municipalité de Mostar de mai à septembre 199373. La Chambre de première instance a conclu que l’ATG Vinko Skrobo tenait des positions sur la ligne de front près du centre médical, au moins à partir de la mi-mai 199374. La Chambre de première instance a reconnu Vinko Martinovic coupable de travail illégal, d’actes inhumains, de traitements inhumains et de traitements cruels sur la base des articles 2 b), 3, 5 i) et 7 1) du Statut pour avoir, notamment, ordonné à des prisonniers du centre de détention de l’Heliodrom d’effectuer des travaux dans des conditions dangereuses dans la zone de responsabilité de l’ATG Vinko Skrobo, ordonné à des détenus d’aider ses hommes à piller des biens privés et ordonné à des prisonniers de transformer une propriété privée en quartier général pour l’ATG Vinko Skrobo75. Vinko Martinovic a également été reconnu coupable du transfert illégal de civils lors des événements survenus les 9 septembre 199376 et 29 septembre 199377.

35. D’après l’Acte d’accusation, Jadranko Prlic aurait occupé le poste de chef du Département des finances du HVO du 15 mai 1992 au 14 août 1992, date à laquelle il a été nommé Président du HVO de Herceg-Bosna. Il est devenu Premier ministre de Herceg-Bosna fin août 1993 et a continué à occuper ce poste durant toute la période couverte par l’Acte d’accusation78. À ce titre, il aurait exercé « un pouvoir de jure et/ou de facto, ainsi qu’un contrôle effectif et/ou une influence considérable sur le gouvernement et les forces armées de la Herceg-Bosna/du HVO79 . Les paragraphes 35 et 88 à 135 concernent les crimes commis dans la municipalité de Mostar d’avril 1993 à avril 1994. Jadranko Prlic serait responsable de ces crimes en tant que membre d’une entreprise criminelle commune sur la base de l’article  7 1) du Statut, et en tant que supérieur hiérarchique sur la base de son article  7 3). Jadranko Prlic est accusé d’actes inhumains (transfert forcé) et du transfert illégal d’un civil, en particulier lors des événements survenus le 9 mai 199380 et fin septembre 199381. Il est également accusé d’actes inhumains, de traitements inhumains et de traitements cruels, notamment au motif que des Musulmans de Bosnie détenus au centre de détention de l’Heliodrom auraient été utilisés pour effectuer des travaux forcés ou pour servir de boucliers humains82.

b) Arguments des parties

36. Me Zelimir Par déclare qu’avant d’accepter le mandat confié par Jadranko Prlic, il a soigneusement examiné si des conflits d’intérêts pourraient survenir entre ses deux clients et a conclu que, quelles que soient les stratégies de défense qui seraient finalement adoptées, aucun conflit d’intérêts n’existait ou ne risquait de survenir entre ces deux affaires83. Me Par signale que la procédure engagée contre Vinko Martinovic, y compris en appel, sera menée à terme avant que ne s’ouvre le procès en l’espèce84 et que la défense de Vinko Martinovic est en tout point définie sous sa forme définitive, ce qui permet d’estimer raisonnablement qu’aucun conflit d’intérêts ne pourra survenir avec la défense de Jadranko Prlic85. Me Par relève également que Jadranko Prlic est accusé en tant que dirigeant civil, tandis que Vinko Martinovic a été reconnu coupable en tant que chef militaire86. Tout en reconnaissant qu’un civil peut en théorie être le supérieur hiérarchique d’un officier militaire87, Me Par affirme qu’en l’occurrence, présenter Vinko Martinovic comme étant sous le commandement et la direction de Jandranko Prlic, n’est « qu’une hypothèse purement théorique selon laquelle Jadranko Prlic serait responsable de tous les crimes commis par n’importe quel soldat du HVO sur le territoire de Herceg-Bosna pendant la période couverte par l’Acte d’accusation88 ». Me Par souligne qu’aucun lien de subordination n’existait entre Jadranko Prlic et Vinko Martinovic, que ce dernier n’a eu de cesse de faire valoir que son unité était placée sous le commandement du responsable militaire des unités stationnées sur la ligne de front et qu’il n’avait aucun lien de quelque nature que ce soit avec d’autres autorités militaires ou civiles89.

37. Me Par affirme que les opinions des accusés sont les éléments décisifs à prendre en compte pour apprécier si un conflit d’intérêts existe ou risque de se produire 90. Il a toutefois précisé à l’Audience qu’il n’avait consulté ses deux clients qu’après être convaincu qu’aucun conflit d’intérêts n’existait entre les deux accusés91. Ces derniers estiment qu’il n’existe aucun conflit d’intérêts entre leurs défenses et ont consenti à être défendus par le même conseil92. Jadranko Prlic a lui-même confirmé lors de sa comparution initiale qu’il s’était entretenu avec son conseil sur cette question et qu’il pensait que tout conflit d’intérêts serait évité93. Il a en outre expliqué à l’Audience qu’il n’était jamais entré en contact avec Vinko Martinovic, qu’il n’avait aucun lien avec celui-ci et qu’il appréciait l’intervention et l’aide de la Chambre de première instance à ce sujet, mais qu’il demandait à pouvoir prendre le risque que survienne un conflit hypothétique et à exercer son droit de choisir Me Par comme coconseil94.

38. Me Par ajoute que les deux affaires étant menées sous la présidence du Juge Liu Daqun, en présence du même représentant de l’Accusation, la probabilité qu’un conflit d’intérêts survienne est « quasiment nulle »95. Il a toutefois précisé à l’Audience qu’il voulait simplement dire par là que les juges de la Chambre et l’Accusation seraient vigilants à son sujet96.

39. Enfin, Me Par souligne qu’il serait coconseil en l’espèce et qu’à ce titre, il n’aurait pas à définir la ligne de défense ni à influer sur celle-ci qui est convenue entre le conseil principal et son client97. Par ailleurs, dans l’hypothèse où un conflit d’intérêts surviendrait malgré tout, il serait garanti, étant donné sa fonction de coconseil, que son retrait de l’affaire n’occasionnerait aucun retard injustifié et ne serait nullement préjudiciable à la bonne marche du procès98.

40. Me Par signale également qu’il a donné la preuve du sens élevé qu’il a de ses responsabilités professionnelles en tant que conseil de la défense dans deux affaires antérieurement portées devant le Tribunal99.

41. L’Accusation affirme que « Jadranko Prlic est mis en cause à la fois en tant que coauteur et en tant que supérieur hiérarchique de Vinko Martinovic sur la base de l’article 7 3) du Statut pour les mêmes crimes ainsi que pour d’autres100. L’Accusation maintient en outre que, bien que Jadranko Prlic soit un dirigeant civil et que Vinko Martinovic ait été reconnu coupable en tant qu’officier militaire, le premier est notamment mis en cause pour sa responsabilité eu égard au comportement du second sur la base de l’article 7 3) du Statut101. L’Accusation doute par conséquent que Jadranko Prlic et Vinko Martinovic aient été pleinement informés des conflits éventuels risquant de survenir lorsqu’ils ont consenti à se faire représenter l’un et l’autre par Me Par102. L’Accusation propose donc qu’ils donnent leur consentement « en bonne et due forme devant un juge (ou la Chambre) lors d’une audience où des mesures seront prises pour veiller à ce que chacun des clients prenne délibérément et en parfaite connaissance de cause sa décision après avoir été dûment informé des questions en jeu103.  »

42. Me Par a indiqué qu’il ne s’opposerait pas à la marche à suivre proposée par l’Accusation afin d’obtenir le consentement de ses deux clients104.

c) Conclusions de la Chambre de première instance

43. Les accusations portées à l’encontre de Jadranko Prlic concernent des actes pour lesquels Vinko Martinovic a été déclaré coupable à son procès en premier instance. De plus, il existerait un lien de subordination entre Jadranko Prlic et Vinko Martinovic. Ce lien serait toutefois moins direct que celui, concernant les deux accusés précédents, dont la Chambre vient d’examiner le cas. Vinko Martinovic exerçait des fonctions relativement peu importantes dans la chaîne de commandement du HVO, et d’après le Jugement Naletilic et Martinovic, son unité était rattachée à la chaîne de commandement de l’état-major principal du HVO ou subordonnée au commandant de secteur lorsqu’elle était envoyée sur la ligne de front105. Jadranko Prlic aurait agi en tant que Premier ministre du gouvernement de la Herceg -Bosna/du HVO. D’après leurs actes d’accusation respectifs, il existe un lien de subordination entre les deux accusés, mais l’écart séparant apparemment l’un de l’autre dans la chaîne de commandement est tel qu’il permet de conclure que le risque qu’un conflit d’intérêts survienne entre eux est suffisamment faible. La Chambre de première instance relève à ce sujet que le nom de Jadranko Prlic n’a pas été cité pendant le procès Naletilic et Martinovic en ce qui concerne Vinko Martinovic 106. Dans ces conditions, la Chambre de première instance doit ajouter foi à l’appréciation du conseil. La Chambre de première instance relève également que Me Par exercerait en tant que coconseil en l’espèce. Les conséquences d’un éventuel conflit pour la défense d’un client seraient par conséquent moins graves. Les perturbations et le retard, non négligeables au demeurant, que pourrait occasionner son retrait de l’affaire pendant le procès porteraient également moins à conséquence que s’il défendait l’accusé en tant que conseil principal.

44. Vinko Martinovic a présenté son consentement écrit aux termes duquel il accepte que son conseil représente également Jadranko Prlic, étant entendu qu’aucun conflit d’intérêts n’existait entre les deux défenses. Lors de sa comparution initiale, Jadranko Prlic a fait savoir qu’il pensait que tout conflit d’intérêts serait évité107. Il a réaffirmé sa volonté d’être représenté par Me Par à l’Audience. La Chambre de première instance est convaincue que l’accusé a exercé son droit de choisir son conseil en pleine connaissance de cause.

3. Me Tomislav Jonjic, conseil de Valentin Coric et de Pasko Ljubicic

45. Me Tomislav Jonjic est le conseil principal de Pasko Ljubicic et il a été choisi par Valentin Coric pour le représenter en tant que conseil principal en l’espèce. Me Jonjic n’a présenté aucune requête devant la Chambre de première instance, car le Greffier n’a exprimé aucune crainte quant à l’existence d’un conflit d’intérêts éventuel ou réel. La question a toutefois été abordée lors de la comparution initiale, et l’Accusation a déposé ses conclusions concernant Me Jonjic.

a) Les accusations portées à l’encontre des deux accusés

46. Pasko Ljubicic doit répondre sur la base des articles 7 1) et 7 3) du Statut d’actes commis dans les municipalités de Vitez et de Busovaca entre janvier et juillet  1993108. Les principaux crimes allégués auraient été perpétrés en avril 1993. Il doit répondre de ces crimes en raison du poste de commandant du 4e bataillon de police militaire qu’il a occupé au sein du HVO de janvier 1993 au 1er juillet 1993, puis en raison du poste d’adjoint au chef de l’administration de la police militaire de la zone opérationnelle de Bosnie centrale qu’il a occupé jusqu’en novembre 1993109.

47. Valentin Coric est présenté dans l’Acte d’accusation comme ayant occupé les postes d’adjoint à la sécurité et de chef de l’administration de la police militaire du HVO d’avril 1992 au 20 novembre 1993, puis celui de Ministre de l’intérieur de la République croate de Herceg-Bosna à compter du 20 novembre 1993 ou vers cette date110. À ce titre, il aurait exercé « un commandement et un contrôle de jure et/ou de facto » ainsi qu’ « un contrôle effectif et une influence considérable sur la police militaire du HVO », et aurait notamment eu « le pouvoir et la responsabilité de commander et de sanctionner les membres de celle-ci111. Les paragraphes 33 et 34 de l’Acte d’accusation mentionnent des crimes commis dans les municipalités de Vitez et de Bosovaca en avril 1993. Les villages cités dans l’Acte d’accusation diffèrent toutefois de ceux qui sont énumérés dans l’acte d’accusation établi contre Pasko Ljubicic, à l’exception du village d’Ahmici. Valentin Coric serait responsable de ces crimes pour sa participation à une entreprise criminelle commune au sens de l’article 7 1) du Statut, et en tant que supérieur hiérarchique au sens de son article 7 3).

b) Arguments des parties

48. Me Jonjic indique que, selon lui, il n’existe aucun conflit d’intérêts entre les deux affaires112, mais reconnaît que les événements survenus à Ahmici le 16 avril 1993 représentent l’essentiel des accusations portées à l’encontre de Pasko Ljubicic113. Il ajoute qu’il s’est entretenu à ce sujet avec Pasko Ljubicic, qui a pleinement consenti à ce qu’il représente Valentin Coric en l’espèce114. Ce dernier a déclaré lors de sa comparution initiale qu’il savait que son conseil représentait également Pasko Ljubicic et que son conseil et lui-même pensaient qu’il n’y avait aucun conflit d’intérêts115.

49. Me Jonjic a en outre affirmé qu’il n’y avait pas véritablement de risque que les procès des deux affaires se déroulent au même moment, étant donné que le procès Ljubicic est sur le point de s’ouvrir, alors que la procédure en l’espèce vient seulement de débuter. Toutefois, il a informé Valentin Coric que si une telle situation devait se produire, il lui faudrait se retirer de la présente affaire116.

50. L’Accusation reconnaît qu’à l’heure actuelle, il ne semble pas y avoir lieu de s’inquiéter de conflits d’intérêts effectifs ou éventuels découlant de la double représentation de Valentin Coric et de Pasko Ljubicic par Me Jonjic. Elle recommande toutefois que Me Jonjic obtienne le plein accord de ses deux clients117. Selon l’Accusation, « ces consentements devraient être données en bonne et due forme devant un juge (ou la Chambre) lors d’une audience où des mesures ser[aie]nt prises pour veiller à ce que chacun des clients prenne délibérément et en parfaite connaissance de cause sa décision après avoir été dûment informé des questions en jeu118 .

51. Me Jonjic rétorque que l’Accusation n’est pas en mesure d’établir concrètement quelle forme pourrait revêtir le conflit d’intérêts119. Il relève que les deux accusés ne sont pas mis en cause pour les mêmes événements qui se sont produits dans la vallée de la Lasva120 et qu’aucun conflit d’intérêts ne peut donc survenir. Me Jonjic souligne en outre que « [c]es préoccupations ne portent que sur les intérêts des accusés et sur la déontologie des conseils » et que l’intervention de l’Accusation à ce sujet est malvenue. Enfin, Me Jonjic indique que les deux accusés ont donné leur accord par écrit et qu’il ne s’oppose pas à ce que la Chambre de première instance ou le Greffe procède à un complément d’enquête si l’une ou l’autre l’estimait nécessaire121. Valentin Coric a déclaré lors de l’Audience qu’il était conscient du risque théorique de conflit entre les deux affaires, mais a ajouté que les événements communs aux deux actes d’accusation étaient mineurs. Il pense par conséquent qu’aucun conflit ne surviendra et a réaffirmé sa volonté d’être défendu par Me Jonjic122.

c) Conclusions de la Chambre de première instance

52. Les crimes reprochés aux deux accusés sont en partie similaires, notamment ceux qui se rapportent à Ahmici. Il y aurait aussi entre les deux accusés un lien de subordination, lequel serait toutefois très indirect. À la lecture des deux actes d’accusation, il existe effectivement un risque de conflit d’intérêts. Cependant, ce risque est raisonnablement faible et la Chambre de première instance est convaincue, à la suite de l’Audience, que le conseil a dûment apprécié les risques et pleinement informé ses clients. Dans ces conditions, la Chambre de première instance doit ajouter foi à l’appréciation du conseil. La Chambre a également été informée que le Greffier, après consultation du conseil et des accusés qu’il représente, a conclu que le risque qu’un éventuel conflit d’intérêts survienne n’était pas de nature à entraver la bonne administration de la justice.

III. DISPOSITIF

EN APPLICATION des articles 20 et 21 du Statut, la Chambre de première instance,

DÉCIDE que Me Zeljko Olujic ne représentera pas Bruno Stojic et invite Bruno Stojic à choisir un autre conseil principal dans un délai d’un mois. Entre-temps, Me Olujic continuera à représenter l’accusé.

PRIE le Bureau de l’aide juridictionnelle et des questions de détention ( OLAD) de lui fournir des explications au cas où un nouveau conseil ne serait pas commis dans le délai imparti.

CONFIRME la commission de Me Zelimir Par en tant que coconseil de Jadranko Prlic.

CONFIRME la commission de Me Tomislav Jonjic en tant que conseil principal de Valentin Coric.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 30 juillet 2004
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
___________
Liu Daqun

[Sceau du Tribunal]


1 Lettre du Greffe datée du 28 avril 2004.
2 Comparution initiale, 6 avril 2004 , CR, p. 4.
3 Déclaration jointe à la Demande de Me Par.
4 Voir la déclaration jointe à la Demande de Me Krsnik.
5 Le 7 avril 2004, Paško Ljubicic, Vinko Martinovic et Ivica Rajic ont présenté chacun une déclaration écrite par laquelle ils consentaient à ce que leur conseil représente un autre accusé devant le Tribunal .
6 Lettre du Greffe datée du 28 avril 2004.
7 Voir par. 1 supra.
8 Prosecution’s Submission Regarding Conflicts of Interest Concerning Defence Counsel (Prlic, Coric), 14 mai 2004 , confidentiel.
9 Prosecution’s Submission Regarding Conflicts of Interest Concerning Defence Counsel (Praljak), 14 mai 2004.
10 Prosecution’s Request for Leave to Reply to Response by Stojic Defence Counsel to Prosecution’s Submission Regarding Conflicts of Interest Concerning Defence Counsel (Stojic).
11 Defence Counsel’s Request for Leave to Reply to Prosecution’s Response from May 27, 2004, Regarding Conflicts of Interests Concerning Defence Counsel (Stojic).
12 Lettre datée du 14 juin 2004 et déposée le 16 juin 2004.
13 L’article 21 4) b) du Statut dispose que toute personne accusée a droit « à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix ». Son article 21 4) d) donne également à toute personne accusée le droit « à être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l’assistance d’un défenseur de son choix ». L’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme prévoit également cette garantie.
14 Le Procureur c/ Kambanda , Arrêt de la Chambre d’appel, affaire n° ICTR-97-23-A, 19 octobre 2000, par. 33  ; Le Procureur c/ Akayesu, Arrêt de la Chambre d’appel, affaire n° ICTR-96 -4-A, 1er juin 2001, par. 61 ; Le Procureur c/ Ntakirutimana, Décision faisant suite aux requêtes de l’accusé aux fins de remplacement du conseil commis d’office , affaire n° ICTR-96-10-T et ICTR-96-17-T, 11 juin 1997, p. 2 ; Le Procureur c/ Blagojevic, Version publique et expurgée de l’exposé des motifs de la décision relative au recours introduit par Vidoje Blagojevic aux fins de remplacer son équipe de la défense, affaire n° IT-02-60-AR73.2, 7 novembre 2003 (« Décision Blagojevic  »), par. 22.
15 En particulier ses articles 7 à 13.
16 Décision Blagojevic, par . 22.
17 Cette limite est expressément énoncée dans le Règlement intérieur harmonisé des barreaux de France, article 4.1 : « Le principe du libre-choix de l’avocat par le client trouve ses limites dans la prise en considération des conflits d’intérêts ».
18 IT/125 Rev. 1, tel que modifié le 12 juillet 2002.
19 Premièrement, la Commission disciplinaire de l’Association des conseils de la défense exerçant devant le Tribunal Pénal International chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (l’« ADC ») peut, « [s]ans porter préjudice à la juridiction du panel disciplinaire et à la procédure disciplinaire prévue par le Code », [...] « entendre le membre contre lequel une plainte a été déposée et faire des recommandations au Greffe du Tribunal international, dans l’intérêt de ce membre, de l’Association et de la justice internationale19 ». Deuxièmement, des sanctions peuvent être imposées au conseil en application du régime disciplinaire prévu au chapitre troisième du Code. Celui -ci vise notamment à protéger les clients « des conseils qui ne se sont pas acquittés , ne s’acquitteront pas ou ne sont pas susceptibles de s’acquitter de leurs obligations professionnelles ». Aux termes de l’article 41du Code, « Les plaintes peuvent être déposées par un client, une partie à la procédure devant le Tribunal ou par un tiers , une organisation ou un État dont les droits ou les intérêts sont susceptibles d’être substantiellement affectés par la faute alléguée ». Un conseil de discipline , qui se compose d’un membre de l’ADC, d’un membre du Conseil consultatif et du Greffier ou d’un représentant confirmé du Greffe désigné par le Greffier, examine la plainte et, après avoir consulté le Juge de permanence du Tribunal, peut prendre des mesures disciplinaires contre le conseil.
20 Voir Le Procureur c/ Tadic , Décision relative à la requête de l’appelant aux fins de prorogation de délai et d’admission de moyens de preuve supplémentaires, affaire n° IT-94-1-A, 15 octobre 1998 (la « Décision Tadic »), par. 48 : « Le Statut et le Règlement présument que l’Accusation et la Défense font preuve de la diligence voulue, à moins qu’une faute grave ne soit prouvée ».
21 Voir la Décision Hadžihasanovic , par. 23.
22 Cette interprétation concorde aussi avec l’article 38 du Code, lequel dispose que le régime disciplinaire mis en place par le Code « ne porte pas atteinte au pouvoir inhérent qu’a le Tribunal de sanctionner les comportements qui entravent le cours de la justice, aux termes du Statut, du Règlement ou toute autre règle de droit applicable ».
23 L’article 46 du Règlement dispose que « la Chambre peut [...] décider que le Conseil ne remplit plus les conditions pour représenter un accusé ou un suspect devant le Tribunal en application des articles 44 et 45 ».
24 Décision Hadžihasanovic, par. 17.
25 Acte d’accusation contre Ivica Rajic, IT-95-12-PT, par. 2 (l’« Acte d’accusation »). Ivica Rajic est présenté dans l’Acte d’accusation comme le commandant du 2e groupe opérationnel du HVO dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale durant la période visée.
26 Acte d’accusation, par. 4.
27 Acte d’accusation, par. 5.
28 Acte d’accusation, par. 208.
29 Acte d’accusation, par. 208.
30 Acte d’accusation, par. 18.
31 Réponse de Me Olujic, par. I ; CR, p. 158 et 159, et p. 168.
32 CR, p. 6.
33 Demande de Me Olujic, par. 9.
34 Demande de Me Olujic, par. 10.
35 CR, p. 159.
36 Le Procureur c/ Rajic, Defence Motion on the Form of the Indictment Pursuant to Rule 72, 23 février 2004, par. XIV (22), p. 8.
37 Audience, CR, p. 165.
38 Audience, CR, p. 166.
39 Audience, CR, p. 165.
40 CR, p. 5 ; Demande de Me Olujic , par. 7 et 8. Ivica Rajic a remis son consentement écrit au Greffier.
41 Audience, CR, p. 172 et 173.
42 CR, p. 8.
43 Audience, CR, p. 176.
44 Audience, CR, p. 177.
45 Audience, CR, p. 177.
46 Demande de Me Olujic, par. 11 et 13.
47 Demande de Me Olujic, par. 14 ; Audience, CR, p. 171.
48 Demande de Me Olujic, par. 15.
49 Audience, par. 175.
50 Argumentation générale, par. 18 .
51 Argumentation générale, par. 20 .
52 Argumentation générale, par. 21 .
53 Argumentation générale, par. 24 .
54 Argumentation générale, par. 26 .
55 Argumentation générale, par. 19 .
56 Argumentation générale, par. 27 .
57 Argumentation générale, par. 29 à 32.
58 Réponse de Me Olujic, par. A a), p. 2.
59 Réponse de Me Olujic, par. A c), p. 3.
60 Réponse de Me Olujic, par. A e), p. 3.
61 Réponse de Me Olujic, par. A f), p. 3.
62 Réponse de Me Olujic, par. A g), p. 3.
63 Audience, CR, p. 167.
64 Audience, CR, p. 170.
65 Réponse de Me Olujic, par. D, p . 5.
66 Réponse de Me Olujic, par. 6, p . 9.
67 Réplique de l’Accusation, par. 8.
68 Réplique de l’Accusation, par. 9.
69 Réplique de l’Accusation, par. 11.
70 Duplique de Me Olujic, par. 9.
71 Décision Hadžihasanovic, par. 44 et 45.
72 Le Procureur c/ Mladen Naletilic et Vinko Martinovic, IT-98-34-T, 31 mars 2003 (« Jugement Naletilic et Martinovic  »), par. 101 ; Vinko Martinovic a admis ce fait (voir paragraphe 98 du jugement et notes de bas de pages y relatives).
73 Jugement Naletilic et Martinovic , par. 160.
74 Jugement Naletilic et Martinovic , par. 102 et 138 ; Mémoire en clôture de Martinovic, p. 38 et 54, auquel il est fait référence au paragraphe 98 du Jugement.
75 Jugement, par. 334.
76 Jugement, par. 652.
77 Jugement, par. 563.
78 Acte d’accusation, par. 2.
79 Acte d’accusation, par. 3.
80 Acte d’accusation, par. 96.
81 Acte d’accusation, par. 109.
82 Acte d’accusation, par. 127 et 128.
83 Demande de Me Par, par. 14 ; voir aussi Audience, CR, p. 154 et 155.
84 Demande de Me Par, par. 16.
85 CR, p. 138.
86 Demande de Me Par, par. 17.
87 Audience, CR, p. 48.
88 Demande de Me Par, par. 18.
89 CR, p. 149 et 150.
90 Réponse de Me Par, par. 4.
91 Audience, CR, p. 154.
92 Demande de Me Par, par. 6 à 10.
93 CR, p. 9 ; ce qui est confirmé au paragraphe 9 de la Demande de Me Par.
94 Audience, CR, p. 157.
95 Demande de Me Par, par. 20.
96 Audience, CR, p. 151 et 152.
97 Audience, CR, p. 141.
98 Demande de Me Par, par. 21.
99 Réponse de Me Par, par. 7.
100 Argumentation concernant Mes  Par et  Jonjic, par. 4.
101 Argumentation concernant Mes  Par et Jonjic, par. 5.
102 Argumentation concernant Mes  Par et Jonjic, par. 11.
103 Argumentation concernant Mes  Par et Jonjic, par. 15.
104 Réponse de Me Par, par. 3 c).
105 Jugement Naletilic et Martinovic , par. 84.
106 Jadranko Prlic a été mentionné pendant le procès Naletilic et Martinovic, principalement en ce qui concerne l’accès aux archives du gouvernement de la République croate de Herceg-Bosna, et dans une décision rendue le 15 janvier 1993, laquelle, selon l’Accusation, aurait été à l’origine du conflit (pièce à conviction P214).
107 CR, p. 9.
108 Acte d’accusation Ljubicic, par . 19.
109 Acte d’accusation Ljubicic, par . 3.
110 Acte d’accusation, par. 11.
111 Acte d’accusation, par. 12.
112 CR, p. 11.
113 Audience, CR, p. 179.
114 CR, p. 10.
115 CR, p. 10.
116 Audience, CR, p. 181 et 182.
117 Argumentation concernant Mes  Par et Jonjic, par. 14.
118 Argumentation concernant Mes  Par et Jonjic, par. 15.
119 Réponse de Me Jonjic, par. 1.
120 Réponse de Me Jonjic, par. 4.
121 Réponse de Me Jonjic, par.5.
122 Audience, CR, p. 182.