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1 Le jeudi 30 mars 2006
2 [Conférence de mise en état]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés ne sont pas présents dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, pouvez-vous appeler le numéro
7 de l'affaire, s'il vous plaît ?
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Il s'agit de
9 l'affaire IT-04-74-PT, le Procureur contre Jadranko Prlic et consorts.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière.
11 Je vais demander aux représentants de l'Accusation de bien vouloir se
12 présenter.
13 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge, Kenneth Scott, au
14 nom de l'Accusation.
15 M. MUNDIS : [interprétation] Daryl Mundis, au nom de l'Accusation.
16 Mme D'AOUST : [aucune interprétation]
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vais -- et je vais leur demander de se
18 présenter dans l'ordre où ils sont placés. Je vais d'abord donner la parole
19 au premier.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Michael
21 Karnavas, au nom de M. Prlic.
22 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Suzana
23 Tomanovic, co-conseil du Dr Prlic.
24 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour. Senka Nozica, qui représente les
25 intérêts de M. Bruno Stojic.
26 M. KOVACIC : [interprétation] Bozida Kovacic, représentant les intérêts de
27 M. Slobodan Praljak, et je vous présente Me Nika Pinter, qui est pour la
28 première fois aujourd'hui parmi nous.
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1 Mme PINTER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Je m'appelle Me
2 Nika Pinter, co-conseil.
3 Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Mme Alaburic,
4 pour M. Petkovic.
5 M. JONJIC : [interprétation] Je représente Valentin Coric.
6 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Fahrudin
7 Ibrisimovic et notre conseiller juridique, pour représenter les intérêts de
8 M. Berislav Pusic.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : J'accueille toutes les présentes, les représentants
10 de Mme le Procureur, les trois représentants qui sont ici présents, je
11 salue tous les avocats qui se sont présentés, je ne manque pas d'associer
12 dans mes salutations le personnel de cette salle d'audience; en premier
13 lieu, Mme le Greffière, la Juriste de la Chambre, Mme l'Huissière, la
14 sténotypiste, ainsi que les interprètes qui sont dans les cabines et qui
15 vont nous assister pendant cette audience qui durera, je l'espère, jusqu'à
16 13 heures 45.
17 Nous avons une audience de mise en état très chargée. Vous avez eu un ordre
18 du jour qui vous avait été communiqué. A cet ordre du jour, je rajouterai
19 également un autre sujet qui est essentiel et dont je vous entretiendrai
20 tout à l'heure.
21 L'ordre du jour était le suivant : les requêtes pendantes; le second sujet,
22 c'est l'état de santé des accusés; le troisième sujet, c'était le temps
23 accordé à l'Accusation pour la présentation de ses moyens à charge et
24 éventuellement, la question de l'article 98 bis; le quatrième sujet, le
25 temps accordé au conseil de la Défense pour le contre-interrogatoire;
26 cinquième sujet, c'est la question de l'admissibilité des pièces; sixième
27 sujet, l'admissibilité des vidéos; septième sujet, la déposition des
28 témoins experts, article 94 bis; huitième sujet, les déclarations
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1 liminaires des accusés et temps de parole accordé. Il a été saisi d'une
2 requête de l'accusé Praljak. Neuvième sujet, la question qui avait été
3 soulevée par M. Praljak de pouvoir poser des questions à la Chambre;
4 dixième sujet, la situation de l'Accusation concernant la production du
5 tableau des témoins et des pièces. J'aborderai ensuite deux autres sujets à
6 huis clos partiel, mais ce n'est pas la peine de les dire maintenant.
7 Eventuellement, diverses autres questions. Etant précisé, comme vous le
8 savez, que la prochaine Conférence de mise en état aura lieu le 12 avril
9 prochain.
10 Avant d'aborder les sujets, je tiens tout d'abord à saluer les deux
11 nouveaux avocats qui sont présents. Je ne les connaissais pas, c'est la
12 première fois que je les rencontre Me Kovacevic et
13 Me Pinter, qui ont été désignés par la Greffière suite à une décision de la
14 Chambre afin que l'accusé Slobodan Praljak puisse être assisté. J'ai
15 également appris par la Greffière que Me Nozica sera assistée également par
16 Me Murphy pour l'accusé Bruno Stojic.
17 Il y a, actuellement encore, des accusés qui n'ont qu'un conseil. J'ai fait
18 savoir au Greffe qu'il serait hautement souhaitable qu'il y ait également
19 un co-conseil parce qu'on ne sait jamais, un avocat peut tomber malade, il
20 peut avoir une grippe ou faire une chute de vélo, avoir quelques jours
21 d'indisponibilité. De ce fait, il faut bien que quelqu'un le remplace lors
22 de l'audience. On ne sait jamais, il peut également glisser sur une peau de
23 banane, donc tout est possible et il faut que vous soyez au minimum à deux.
24 Alors d'autant que les Juges -- je vais vous donner une information qui
25 date d'hier après-midi. Comme vous le savez, vous ne le savez pas, mais je
26 pense que vous le savez puisque vous suivez tous attentivement la vie de ce
27 Tribunal, le Conseil de sécurité, dans une résolution 1660, a créé un Juge
28 de réserve. De ce fait, le Juge de réserve qui a été créé par le Conseil de
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1 sécurité devait être traduit dans le Règlement. Je sais que Me Karnavas, au
2 titre de l'Association des conseils de la Défense, a participé aux travaux
3 du comité du Règlement. Les Juges se sont réunis hier en assemblée
4 plénière, et nous avons modifié l'article 15 bis du Règlement et créé un
5 article 15 ter.
6 En deux mots, pour ce procès, nous serons quatre Juges : un Juge permanent,
7 moi, en l'occurrence, deux Juges ad litem qui constitueront la Chambre
8 Prlic, et il y aura un Juge ad litem, dit de réserve, qui complètera la
9 Chambre. Mais selon l'article 15 ter de ce Règlement, ce Juge de réserve
10 assistera, bien entendu, à toutes les audiences, pourra, le cas échéant,
11 par l'intermédiaire du Président de la Chambre, poser une question au
12 témoin qui déposera, mais ce Juge de réserve ne participera pas aux
13 délibérations donnant lieu à un vote.
14 Voilà. L'utilité du Juge de réserve, c'est que si jamais je venais à
15 disparaître ou un autre Juge venait à disparaître pour diverses raisons, le
16 procès puisse continuer, et à ce moment-là, le Juge de réserve qui aura
17 assisté au début du procès pourra embrayer sans aucun problème.
18 Il y a également une autre possibilité prévue par le Règlement, qui est la
19 possibilité de faire venir un Juge suppléant. Ce cas de figure a eu lieu
20 dans le procès Milosevic, où, comme vous le savez, le Juge May avait été
21 amené, pour des raisons de santé, à démissionner, et il avait été remplacé
22 comme Juge suppléant par le Juge Bonomy. Mais cette procédure de Juge
23 suppléant requiert l'accord des accusés, tandis que la procédure de Juge de
24 réserve, c'est automatique. Il est réserviste, et en cas indisponibilité,
25 il entre en jeu immédiatement. Il n'y a pas besoin de demander une
26 permission à l'accusé, puisqu'il a assisté au début de l'audience.
27 Alors, le Règlement a donc été modifié hier, et vous aurez très rapidement,
28 les uns et les autres, le Règlement modifié qui vous sera transmis. Je
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1 remercie tous ceux qui ont pu travailler à la réflexion qui nous a amenés à
2 modifier les articles du Règlement afin de permettre cette possibilité.
3 Par ailleurs, je voudrais maintenant aborder le point des requêtes
4 pendantes. Concernant les requêtes pendantes, comme vous le savez, trois
5 décisions de la Chambre ont été rendues depuis la dernière Conférence de
6 mise en état. Par mémoire, je rappelle une décision du 17 février 2006 qui
7 a été prise suite à une requête de l'Accusation demandant l'admission en
8 tant qu'éléments de preuve des documents de la FORPRONU du Bataillon
9 espagnol, une décision en date du 14 mars 2006 faisant partiellement droit
10 à la requête de l'Accusation relative au constat judiciaire de faits admis
11 dans d'autres affaires du Tribunal. Comme vous le savez, la Chambre a
12 dressé le constat judiciaire de 88 faits. Mais ces faits pourront être
13 éventuellement réfutés par la Défense lors du procès, conformément à
14 l'article 94 (B) du Règlement.
15 La troisième décision a été prise également le 14 mars 2006. Cette décision
16 a rejeté une requête confidentielle de l'accusé Prlic relative à la
17 suppression de déclarations.
18 Concernant les requêtes pendantes, à chaque fois je me pose toujours la
19 question, parce qu'il y a beaucoup de requêtes qui ont le cachet
20 confidentiel. Mais en réalité, on peut se poser la question de la
21 confidentialité. Il y avait une requête des conseils de la Défense des
22 accusés Praljak et Prlic des 25 et 26 juillet 2006 [comme interprété],
23 relative à une demande de production de documents adressés à un Etat.
24 Je me tourne vers Me Karnavas et Me Kovacic. Est-ce que l'Etat en question
25 vous a répondu, ou vous êtes toujours en stand-by ?
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, si j'ai bien compris,
27 cet Etat a coopéré dans une certaine mesure, et nous continuons cette
28 coopération avec cet Etat pour obtenir les documents nécessaires. C'est
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1 tout ce que je peux vous dire pour le moment.
2 M. KOVACIC : [interprétation] Ma position sera à peu près la même. Je dois
3 dire que vous m'avez un peu pris à contre-pied, mais je pense que nous
4 devons demander l'aide de la Chambre parce que le gouvernement réagit, mais
5 très lentement, et il n'est pas possible de consulter certains documents
6 s'il n'y a pas un peu de forts signes de ce côté-ci. Je dois dire
7 qu'effectivement, une fois que cette pression est exercée, il y a une
8 amélioration dans la fourniture de documents, les résultats sont bien plus
9 rapides même si ce n'est pas parfait, parce que nous recevons des documents
10 encore aujourd'hui qu'on aurait pu recevoir il y a un an.
11 Mais ce n'est pas le souhait du gouvernement, donc, on ne peut pas demander
12 à la Chambre d'insister parce que c'est simplement que ce gouvernement
13 n'est pas à même de gérer ces questions administratives. C'est comme si je
14 vous demandais de changer le temps qu'il fait.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous avez compris, je n'ai pas donné le nom de
16 cet Etat puisque nous restons dans le confidentiel, mais sur un plan
17 général.
18 D'après ce que vous me dites, la conclusion que je peux en tirer, c'est que
19 vous avez eu certains documents à votre niveau. Vous estimez qu'il y en a
20 d'autres qui auraient dû vous être amenés. Si vous voulez une intervention
21 efficace de la Chambre, vous pouvez toujours à ce moment-là me faire ou
22 faire, quand on va démarrer le procès, une nouvelle requête en identifiant
23 précisément le type de documents recherchés, et à ce moment-là, nous
24 pourrons adresser à l'Etat en question une ordonnance lui faisant
25 injonction de produire ces documents. Mais mon expérience passée me montre
26 qu'en règle générale, les Etats ou les instituions dans cette situation
27 disent toujours : "Mais nous, il y a aucun problème. Simplement, on voulait
28 savoir exactement ce qu'on nous demande."
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1 Donc c'est pour cela que je vous indique, il faudra dans votre requête bien
2 identifier les documents, et à ce moment-là, il sera beaucoup plus facile
3 pour la Chambre de demander à l'Etat concerné sa pleine coopération. Sinon,
4 on pourra toujours me dire : "Oui, mais la demande était imprécise, nous ne
5 savions pas ce qu'ils voulaient," et cetera. Bon. Vous avez compris.
6 Par décision orale aujourd'hui sur ces deux requêtes pendantes. Je conclus
7 qu'en l'état, j'estime qu'une partie de la demande a été satisfaite et que
8 l'autre partie manquante pourra être réglée après le début du procès.
9 Nous avions également des requêtes au titre de l'article 92 bis, paragraphe
10 (A), (B), (C) et (D). Bon. Une décision va être rendue d'ici 48 heures. La
11 décision est en train de circuler entre les Juges, et il y aura très
12 rapidement une décision.
13 J'avais une requête, également, en date du 27 décembre 2005, demandant à la
14 Défense de notifier l'éventuelle défense d'alibi, au titre de l'article
15 67(A)(i). Là aussi, dans les prochaines heures, la décision sera rendue.
16 Il y avait également une requête confidentielle de l'accusé Prlic en date
17 du 7 mars sur la date du procès. Mon ordonnance récente du 23 février règle
18 le problème. De ce fait, cette requête est devenue sans objet.
19 Par ailleurs, il y a également une requête de l'accusé Praljak en date du
20 13 mars, et un complément en date du 16 mars demandant à la Chambre
21 l'autorisation de faire une déclaration liminaire en application de
22 l'article 84 bis du Règlement. Bien entendu, la Chambre ne peut que
23 souscrire à cette demande. La seule question qui se pose est la durée du
24 temps, parce que l'accusé Praljak demande six heures. Pourquoi pas, s'il
25 est tout seul. Je ne sais pas si les cinq autres accusés feront aussi des
26 déclarations liminaires. On verra le moment venu. Si chacun des accusés
27 veut faire une déclaration liminaire, alors à ce moment-là, il faudra
28 trouver un équilibre. Si seul M. Praljak veut intervenir, à ce moment-là,
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1 on pourra lui donner un laps de temps entre quatre heures et six heures.
2 Tout cela sera à déterminer le moment venu.
3 Nous avions également plusieurs requêtes relatives à la traduction de
4 documents. Une requête de l'Accusation en date du 24 janvier 2006,
5 demandant à ce que la Chambre se saisisse de la question relative à la
6 traduction de documents et demandant un délai pour février pour fournir des
7 documents traduits prévus aux articles 66 et 68. Mais là, comme maintenant
8 l'accusé Praljak a un avocat qui travaille dans la langue anglaise, il n'y
9 a plus de problème, donc cette requête est sans objet.
10 Egalement, nous avions été saisis de plusieurs écritures de l'accusé
11 Praljak qui était tout seul, sans avocat à l'époque, et qui demandait
12 également des traductions de documents. Dans la mesure où maintenant, il a
13 deux avocats, là aussi, ces requêtes deviennent sans objet.
14 Il y avait également une requête de l'Accusation en date du 2 décembre 2006
15 [phon], relative à l'ordonnance du 30 novembre 2005, qui prévoyait la
16 communication en version papier de documents. Là aussi, l'accusé Praljak
17 nous avait fait savoir que le système électronique qui avait été mis en
18 place le satisfaisait. Donc, de ce fait, cette requête aussi est sans
19 objet.
20 Sur ces trois requêtes de nature plutôt technique, une décision écrite sera
21 prise rapidement, faisant jonction de ces trois requêtes et disant que tout
22 cela est maintenant sans objet.
23 Autres requêtes pendantes. Le 17 février, l'Accusation avait demandé
24 l'autorisation de déposer une réplique à la réponse de l'accusé Praljak
25 concernant les écritures de l'Accusation en date du 30 janvier 2006,
26 relatives à l'ordonnance du 24 janvier 2006. Par décision orale de ce jour,
27 la réponse de l'accusé Praljak et la demande de réplique sont rejetées, car
28 les écritures de l'Accusation qui avaient été demandées par le Juge de la
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1 mise en état à l'époque n'appelait pas de réponse. Il n'y a pas lieu de
2 perdurer dans le traitement de ce point.
3 Par ailleurs, l'Accusation, le 22 février, avait demandé l'autorisation de
4 déposer une réponse au mémoire préalable de la Défense. Par suite, la
5 Défense de l'accusé Petkovic a déposé une demande de réplique en y
6 incorporant sa réplique. Je rappelle que le mémoire préalable que la
7 Défense fournit, conformément à l'article 65 ter (F), n'est pas une requête
8 appelant une réponse de l'Accusation. Puisque le système est ultra simple,
9 l'Accusation fait son mémoire préalable, la Défense qui a connaissance du
10 mémoire préalable à l'Accusation répond tant au mémoire de l'Accusation
11 qu'en exposant son point de vue. Il y a un moment donné où il faut arrêter,
12 parce que cela continuerait sans arrêt.
13 En l'état, j'estime que nous avons, et la Chambre a, le mémoire préalable
14 de l'Accusation et les mémoires des six accusés, conformément à l'article
15 65 ter (F).
16 Je me dois également d'aborder la question de la communication des pièces.
17 J'espère que la communication continue aux titres de l'article 66(A)(i),
18 66(A)(ii) et au titre de l'article 68. S'il y a encore des problèmes d'ici
19 l'ouverture du procès, j'invite les accusés, enfin, les avocats des
20 accusés, à se rapprocher de l'Accusation pour régler ces problèmes, à moins
21 qu'il y ait un tel problème, que celui-ci appelle de votre part une
22 intervention.
23 Si ce n'est pas le cas, je vais maintenant aborder ce qui me parait être le
24 cœur de notre audience. Le 26 mars 2004, le Conseil de sécurité a adopté
25 une résolution 1534. Dans cette résolution 1534 qui rappelait la résolution
26 1503, il est indiqué par le Conseil de sécurité, et je cite lentement, afin
27 que l'Accusation écoute attentivement, parce que mes propos concernent
28 essentiellement l'Accusation. Voilà ce que disait le Conseil de sécurité :
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1 "Il est demandé au Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de
2 prendre toutes mesures en leur pouvoir pour mener à bien les enquêtes d'ici
3 à la fin de 2004, achever tous les procès en première instance d'ici à la
4 fin de 2008, et terminer leurs travaux en 2010."
5 Dans cet esprit, le Conseil de sécurité a demandé à ce que le Procureur, la
6 Procureur, en l'espèce, et le Président du Tribunal, tous les six mois, se
7 rendent à New York pour faire le point des mesures prises pour terminer les
8 procès en 2008. A partir de là, nous sommes au mois de mars 2006. Le
9 Conseil de sécurité fait une obligation impérieuse à terminer tous les
10 procès en 2008. A partir de l'acte d'accusation du mémoire préalable des
11 tableaux des témoins, des pièces à conviction, j'ai, ainsi que mes
12 collaborateurs, effectué un travail afin d'évaluer au mieux le temps
13 nécessaire à l'Accusation pour présenter sa cause.
14 Dans le cadre de ce travail, qui nous a pris un certain temps parce qu'il a
15 fallu faire des additions d'heures en fonction du nombre de témoins prévus,
16 nous sommes arrivés au constat suivant : que si on suivait ce que le
17 Procureur pense faire, nous aurions un procès qui durerait trois ans, deux
18 semaines, et quatre jours, car la présentation principale du Procureur
19 prendrait 804 heures, le contre-interrogatoire, autant, donc on est à 804.
20 On calcule questions supplémentaires, 10 %, donc 80 heures. Questions des
21 Juges 10 %. Quelques témoins de l'article 92 bis qui viendraient être
22 interrogés, et cetera. Au total, on serait à 2123 heures, et ceci nous
23 ferait un temps de 3 ans, deux semaines et quatre jours.
24 La dernière fois quand je vous avais vus, j'avais dit que pour mon
25 estimation personnelle, j'avais évalué ce procès à quatre ans. Dans le
26 calcul des trois ans que je viens de vous indiquer, il faut rajouter
27 évidemment, si on donne le même temps à la Défense, trois ans
28 supplémentaires, ce qui fait que ce procès durerait six ans, ce qui n'est
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1 pas possible. Alors, à partir de là, tout devient maintenant très clair.
2 Je regarde les trois représentants du Procureur. Nous avons tous,
3 l'Accusation, les Juges et les avocats, l'obligation de terminer nos
4 travaux pour 2008. Alors, je voudrais qu'on m'explique, et j'invite Mme
5 Carla Del Ponte à venir, si elle le veut, s'expliquer le 12 avril, lors de
6 la prochaine conférence de mise en état, sur ce qu'elle compte faire, parce
7 que comment aller à New York et dire qu'on a pris des mesures pour terminer
8 en 2008, alors même qu'on va présenter une cause qui peut durer trois ans,
9 trois ans pour l'Accusation ?
10 Là, il y a un véritable problème qu'il convient, au niveau de l'Accusation,
11 de prendre en compte. Alors, certainement pas à vos niveaux à tous les
12 trois, car vous êtes subordonnées à un chef qui était hier à Belgrade et
13 demain, je crois, à Bruxelles, mais qui doit se préoccuper de la gestion de
14 ce dossier.
15 Ce n'est pas un problème nouveau dans ce Tribunal, car l'affaire
16 emblématique qu'était le procès Slobodan Milosevic, cette affaire avait été
17 également appréhendée au niveau du temps. Pour mémoire, je rappelle qu'il y
18 avait trois actes d'Accusation, et à l'époque, le Juge May était intervenu
19 le 10 avril 2002. Je vous renvoie au transcript de l'audience, page 2782 à
20 2785, où le Juge May avait donc expliqué qu'il devait y avoir une équité
21 dans un procès, équité pour le Procureur, équité pour l'accusé, et qu'il
22 fallait tenir compte également de la question de la durée.
23 Le Juge May disait : "Plus un procès dure, plus le jugement sera
24 difficile." Evidemment, c'était le bon sens même.
25 Le Juge May avait indiqué que c'était au Procureur qu'il appartient
26 de présenter ses moyens de preuve et que le Procureur devait se voir
27 accorder une possibilité raisonnable de le faire, car c'était au Procureur
28 d'apporter la preuve de ses allégations; affirmation que je partage
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1 totalement. Mais le Juge May, qui était très conscient du problème, avait à
2 ce moment-là indiqué que le procès Milosevic prendrait 14 mois.
3 Bon, vous savez que par la suite à cette décision orale, il y a eu,
4 le 20 mai 2003, une nouvelle décision orale qui avait abordé le problème,
5 parce que l'Accusation voulait rajouter à nouveau des témoins, et qu'à ce
6 moment-là, il avait été fait injonction à l'Accusation d'accélérer. A ce
7 moment-là, l'Accusation s'était vue attribuer 100 jours supplémentaires
8 pour présenter d'autres témoins.
9 Alors, j'ai donc un exemple sous les yeux, qui est le procès
10 Milosevic, mais j'en ai un autre, qui est le procès Nuremberg. Le procès
11 Nuremberg, qui visait un nombre d'accusés beaucoup plus important que le
12 notre, des faits qui s'étaient déroulés quasiment à l'échelle planétaire,
13 des millions de victimes. Ce procès Nuremberg a été géré quasiment en moins
14 d'une année.
15 A partir de ce constat, que faire ? En tant que Juge de la mise en
16 état, mais également Juge du procès, le Règlement me donne déjà une
17 solution. C'est l'article 90 (F), que je vais lire lentement : "La Chambre
18 de première instance exerce un contrôle sur les modalités de
19 l'interrogatoire des témoins et de la présentation des éléments de preuve,
20 ainsi que sur l'ordre dans lequel ils interviennent, de manière à rendre
21 l'interrogatoire et la présentation des éléments de preuve efficaces pour
22 l'établissement de la vérité et éviter toute perte de temps inutile. Donc,
23 le Juge a la responsabilité d'éviter toute perte de temps inutile." Ce qui
24 explique pourquoi j'ai demandé à l'Accusation de faire très vite pour que
25 je puisse avoir le tableau nous permettant de croiser les témoins, les
26 allégations et les pièces à conviction, pour avoir une vision de la façon
27 dont l'Accusation avance dans cette affaire. Mais également, je peux
28 estimer qu'il y a des témoins qui peuvent paraître inutiles parce que comme
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1 vous le savez, c'est la Chambre qui détermine la liste des témoins. Donc,
2 on pourrait dire : sur les 400 témoins, il y en a deux cent qui ne
3 viendront pas. C'est une possibilité.
4 Mais ma culture n'est pas d'imposer, ma culture, c'est plutôt de
5 rechercher un accord et de trouver une solution avec des parties
6 intelligentes qui prennent en compte certains paramètres.
7 Alors, d'ici le 12 avril, vous aurez le temps de réfléchir à cela. Je
8 vais devant vous me livrer à un calcul, donc vous êtes tous à vos stylos,
9 et vous allez cocher sur vos feuilles de papier les éléments suivants.
10 Si, conformément à la résolution du Conseil de sécurité, nous devons
11 terminer en 2008 ce procès, ce qui veut dire qu'à ce moment-là,
12 l'Accusation a un an pour présenter ses éléments de preuve et la Défense,
13 dans sa globalité, a un an pour présenter sa défense. Un an, un an, nous
14 sommes à deux ans, 2008, conformément à la résolution du Conseil de
15 sécurité.
16 Dans l'année, une année fait 52 semaines.
17 Oui, Maître.
18 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'estime que c'est
19 mon obligation de dire ce qui suit : la décision politique du Conseil de
20 sécurité est certainement très importante pour le processus de prise des
21 décisions, la manière dont fonctionne ce Tribunal. Néanmoins, j'estime
22 qu'une décision politique prise par le Conseil de sécurité ne peut pas
23 avoir une incidence sur la manière dont cette Chambre fonctionne, car
24 lorsque nous entrons ici dans la Chambre avec un procès et une procédure,
25 je crois que toutes les parties dans ce procès doivent être traitées de
26 façon équitable. Si nous ne pouvons pas établir les conditions nécessaires
27 pour un procès juste et équitable par rapport à une décision du Conseil de
28 sécurité qui nous impose des délais, j'estime que c'est un dilemme grave
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1 auquel nous avons à faire face. J'estimais important de vous faire part de
2 mon point de vue, et je vous explique pourquoi j'estime que ceci est
3 particulièrement important.
4 J'estime que nous avons pour tâche d'assurer que ce procès soit juste et
5 équitable. J'estime que l'acte d'accusation et l'Accusation doivent avoir
6 suffisamment de temps pour citer à la barre tous les témoins qu'ils jugent
7 nécessaires. Bien sûr, cela revient à la Chambre de première instance et
8 aux Juges de la Chambre d'évaluer quelles pièces sont nécessaires pour
9 établir la preuve et quelles sont celles qui permettent d'établir les faits
10 qui sont pertinents dans ce procès et dans cette procédure.
11 J'estime que les six accusés dans ce procès ne peuvent pas être pris
12 comme un groupe, comme un ensemble, comme un objet, et pour qu'ils soient
13 tous pris ensemble, ils doivent avoir autant de temps que possible à leur
14 disposition, autant de temps que l'Accusation. Je crois qu'il s'agit ici de
15 six accusés individuels qui pourront avoir, peut-être, des stratégies de
16 défense différentes, et chacun a le droit de se défendre à sa manière,
17 comme si c'était le seul accusé à être jugé devant cette Chambre. C'est la
18 raison pour laquelle le temps minimum que nous devrions prévoir dans ce cas
19 et le temps accordé à la Défense devraient correspondre à six fois le temps
20 accordé à l'Accusation.
21 Si nous devions comparer ce procès, cette procédure, avec tous les
22 autres procès que nous avons eus dans ce Tribunal jusqu'au jour
23 d'aujourd'hui, nous pourrions estimer que nous avons le plus grand nombre
24 d'accusés dans ce procès-ci, le plus grand nombre d'accusés, l'espace
25 géographique le plus important et une période de temps la plus longue
26 jamais abordée.
27 C'est un procès très complexe, nous l'avons appelé un méga-procès. Il
28 faudrait que ceci soit terminé d'ici 2008; j'estime que cela n'est
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1 absolument pas réaliste, et il n'y a pas un seul procès, même un petit
2 procès par rapport au nôtre, qui ait été terminé en un laps de temps aussi
3 court.
4 Si la prise de décision sur les méthodes de travail de cette Chambre
5 sont déterminées par le Conseil de sécurité et par, en somme, une décision
6 politique, autrement dit, que les procès doit être terminé d'ici 2008,
7 j'estime que nous ne seront pas en mesure d'assurer un procès juste et
8 équitable. Face à cette situation, personnellement, j'estime que je ne
9 pourrai pas faire mon travail correctement, je ne pourrai pas défendre mon
10 client correctement. Si les travaux dans cette Chambre sont abordés de
11 cette manière-là, je vais demander à être relevée de ma charge ici, car je
12 ne peux pas endosser cette responsabilité s'il y a de tels délais et
13 pressions exercées du point de vue temps.
14 C'est la raison pour laquelle j'ai pris la parole. La question reste
15 ouverte, qu'est-ce que nous pouvons faire avec une telle difficulté ? Je
16 crois qu'il y a deux solutions qui s'offrent à nous. La première : si nous
17 estimons que la décision politique prise par le Conseil de sécurité --
18 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai pris notre de votre intervention qui, bien
19 entendu, sera portée à la connaissance de ceux qui ont la responsabilité
20 devant le Conseil de sécurité d'exposer les problèmes. Vous soulevez un
21 problème qu'il convient, bien entendu, d'appréhender, mais ce problème peut
22 se gérer dans le cadre d'une série de solutions.
23 Juste avant que vous interveniez, j'allais les aborder, et je vous
24 redonnerai donc la parole après. Oui, comme j'ai expliqué, je demandais à
25 l'Accusation de prendre son stylo pour le calcul
26 suivant : si nous prenons une base d'une année. Une année, il y a 52
27 semaines. Quand vous enlevez les semaines dites des vacations judiciaires,
28 des jours fériés de l'ONU et de quelques jours où il y a quelques problèmes
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1 d'ordre technique divers, nous pouvons partir sur une base de 40 semaines
2 sûres, évidentes. Quarante semaines, si nous prenons cinq jours par semaine
3 d'audience, nous avons, de ce fait, 200 audiences dans l'année, ce qui fait
4 que la cause de l'Accusation pourrait être présentée au cours de 200
5 audiences. Une audience qui démarre à 9 heures du matin et qui va jusqu'à
6 13 heures 45, en réalité, vous le savez d'expérience, nous n'avons en temps
7 utile que trois heures, trois heures et demi, parce que tout le reste, il y
8 a des problèmes sur l'admissibilité des pièces, la liste des pièces, tels
9 ou tels problèmes. En réalité, l'interrogatoire se consacre principalement
10 pendant trois heures utiles. Trois heures multipliées par 200 jours, cela
11 fait 600 heures, ce qui veut dire que dans le cadre d'une année de
12 présentation d'éléments de preuve par l'Accusation, nous aurions 600
13 heures, donc 600 heures tout compris, c'est-à-dire le temps de l'Accusation
14 et le temps de la Défense pour le contre-interrogatoire.
15 L'Accusation disposerait d'un capital de 600 heures. Libre à elle de
16 répartir ce capital comme elle le veut en fonction de la présentation de
17 ses éléments de preuve. Mais cette répartition, les Juges ont également
18 leur mot à dire, car nous devons, nous, éviter toute perte de temps
19 inutile, et nous sommes également guidés par deux objectifs : l'intérêt de
20 la justice et la manifestation de la vérité. Ces objectifs prennent en
21 compte, bien entendu, l'acte d'accusation.
22 L'acte d'accusation qui nous est présenté, nous avons trois grandes parties
23 : l'entreprise criminelle commune, la responsabilité pénale individuelle de
24 chacun des accusés et les faits, les faits qui regroupent plusieurs
25 municipalités. Voilà donc les trois points forts de la présentation
26 d'éléments de preuve.
27 A titre personnel, les faits - c'est important, puisque les faits doivent
28 établis - sont très nombreux, vous le savez. Ils sont colossaux. Pas plus
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1 tard que ce matin, je me suis replongé à nouveau sur les faits de la
2 municipalité de Prozor où, dans le document annexe, nous avons plus de 175
3 points à établir selon l'Accusation.
4 En faisant le pointage précis de ces 175 points, j'en ai trouvé exactement
5 122 qui là, nécessitent au moins un témoin pour établir la réalité du fait
6 qui est mentionné. Tout cela prend du temps, à partir du constat que nous
7 pouvons tous faire les uns et les autres.
8 D'après les écritures de l'Accusation, et notamment, quand on regarde
9 toutes les annexes concernant les municipalités, ceci, dans la procédure
10 traditionnelle de ce Tribunal, peut prendre un temps colossal. Les faits,
11 il faut les évoquer. A titre de suggestion, sur les 600 heures, j'estime
12 qu'au moins un tiers du temps pourrait être consacré aux faits, c'est-à-
13 dire, 200 heures. Ce qui fait, divisé par les 12 municipalités et prisons,
14 sur chaque municipalité, je prends par exemple Gornji Vakuf, l'Accusation
15 aurait un capital de 20 à 30 heures pour présenter les faits de Gornji
16 Vakuf.
17 Les 400 heures qui restent -- comme je l'ai indiqué, il y a deux autres
18 points importants : l'entreprise criminelle commune, qui nécessite,
19 évidemment, des éléments, et la responsabilité individuelle de chacun, qui
20 doit aussi être, par l'Accusation, prouvée. Il pourrait y avoir aussi une
21 répartition du temps entre une centaine d'heures pour l'entreprise
22 criminelle commune et 300 heures pour la responsabilité individuelle, ce
23 qui fait que chaque accusé, si je divise 300 heures par six, il y aurait 50
24 heures qui seraient principalement consacrées à chaque accusé.
25 J'indique cela à titre de piste de réflexion. Il incombe, bien entendu, à
26 l'Accusation de savoir ce qu'elle veut faire, mais il y a un véritable
27 problème. Je me dois, dans ma responsabilité, de l'évoquer. Alors, bien
28 entendu, j'ai écouté avec attention l'intervention de tout à l'heure sur le
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1 procès équitable, et il faut que lorsqu'il y a une charge, la Défense
2 puisse utilement donner son point de vue dans le cas du contre-
3 interrogatoire, et ensuite, en présentant sa Défense dans le cas également
4 de sa stratégie pour qu'il y ait l'égalité des armes et un procès
5 équitable.
6 Mais si on se réfère à des affaires jugées ou à des affaires qui auraient
7 pu l'être, comme l'affaire Slobodan Milosevic, ceci n'est pas -- rien n'est
8 impossible. Pourquoi ? L'Accusation a en sa possession la possibilité de
9 réduire son acte d'accusation, donc à tout moment, l'Accusation peut saisir
10 la Chambre aux fins de modification de l'acte d'accusation. En termes
11 marins, vous pouvez réduire la voilure, donc c'est une possibilité
12 technique - pour ceux qui font du bateau, ils savent ce que cela veut dire,
13 surtout que je sais qu'il y a un officier de marine dans la salle - c'est
14 une possibilité. En réduisant la voilure, on peut peut-être entrer dans le
15 temps qui est imparti.
16 Une autre solution, mais qui serait révolutionnaire pour ce Tribunal,
17 mais qui moi, à titre personnel, ne me poserait aucun problème, et le
18 Règlement le permettrait -- mais comme je dis, ce serait une véritable
19 révolution pour ce Tribunal. L'autre solution serait que, bien entendu,
20 l'Accusation fasse venir ses témoins, mais que l'interrogatoire du témoin
21 démarre par les questions des Juges tout de suite pour aller à l'essentiel,
22 et qu'après les questions des Juges, l'Accusation fasse son interrogatoire
23 principal, et la Défense, son contre-interrogatoire. Mais tout le monde
24 aurait compris par les questions des Juges, le problème serait tout de
25 suite centré. Là, croyez-moi, c'est un gain de temps colossal.
26 L'expérience montre que lorsqu'un témoin témoigne pendant une
27 journée, en réalité, il y a 15 à 20 minutes utiles, tout le reste ne sert
28 parfois à peu de choses, et il suffit de voir dans les Jugements les
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1 références au témoignage.
2 Bon, cela peut être une technique, mais comme je l'ai dit, cela
3 serait une telle révolution que je la suggère, sauf si évidemment tout le
4 monde était d'accord pour me confier cette responsabilité d'interroger en
5 premier le témoin.
6 Ce que je ne crois pas être l'intention de l'Accusation.
7 Alors, la troisième solution qui serait beaucoup plus simple serait
8 la suivante : lorsqu'un témoin vient, l'Accusation pourrait uniquement
9 consacrer ses questions au cœur du témoignage et éviter des questions qui
10 peuvent être intellectuellement intéressantes, mais qui, pour notre
11 affaire, n'ont aucun intérêt.
12 Je vais prendre un exemple. Imaginons un témoin X victime, dans une
13 municipalité Y, d'effets suivants : on vient la chercher chez elle, on
14 l'amène dans un camp de détention, sa maison est brûlée, ses biens sont
15 pillés et dans ce camp, elle subirait peut-être des violences. Bon. Donc ce
16 témoin, il vient. Vous le savez, il y a un certain nombre de témoins qui
17 peuvent entrer dans ce profil.
18 A ce moment-là, qu'est-ce qui est important pour les uns et les
19 autres ? C'est de savoir si ce que dit ce témoin est vrai, si
20 effectivement, elle a été battue, si sa maison a été détruite et si ses
21 biens ont été pillés; donc une série de questions qui vont tout de suite au
22 cœur du sujet. Par un jeu de questions intelligentes, le témoin peut
23 relater exactement ce qui lui est arrivé, et cela, en 25, 30 minutes, la
24 question peut être réglée.
25 Si l'Accusation procède de manière efficace, à ce moment-là, une
26 audience, on peut avoir trois ou quatre témoins de ce type, et c'est un
27 gain de temps considérable parce qu'à ce moment-là, on centre les questions
28 sur le cœur même du sujet. Savoir quelles études elle a faites, quelle est
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1 sa situation familiale, et cetera, bon, cela peut, quand on a du temps,
2 être très intéressant, mais pour l'acte d'accusation et pour les points
3 allégués, ce n'est peut-être pas nécessaire. En revanche, il est nécessaire
4 qu'elle décrive ce qui lui est arrivé et qui lui a fait quoi au juste,
5 voilà. Donc en centrant les questions, il peut y avoir un gain de temps
6 considérable, mais cela, cela vous appartient.
7 Le Règlement peut m'obliger à intervenir en disant : "Ne posez pas
8 cette question." Bon. Le mieux, c'est que des professionnels d'eux-mêmes
9 sachent comment poser des questions et éviter les pertes de temps inutiles,
10 plutôt qu'à chaque fois le Juge leur dise : "Non, c'est mal posé, vous
11 perdez du temps,"Ce qui est désagréable. Donc voilà.
12 Moi, c'est une suggestion que je vous fais. Il faut que vous
13 réfléchissiez à ces questions. Je pense que cela incombe à Mme Carla Del
14 Ponte en personne parce qu'il n'est pas possible que ce procès dure six
15 ans. Car c'est vrai, techniquement, il peut durer six ans vu le nombre de
16 pièces, vu le nombre de témoins, vu la façon de travail des Chambres, cela
17 pourrait durer six ans, c'est vrai, mais nous ne pouvons pas avoir ce
18 temps.
19 Le Conseil de sécurité, à plusieurs reprises, l'a rappelé. S'il a
20 institué des Juges ad litem, c'était justement pour accélérer. S'il a créé
21 les Juges de réserve, c'est pour accélérer. Si par ailleurs on a crée un
22 article 11 bis, c'est également pour renvoyer certaines affaires devant des
23 juridictions nationales en ne gardant ici que les affaires les plus
24 importantes.
25 Donc, il y a une volonté du Conseil de sécurité de faire en sorte que
26 ce Tribunal qui n'est pas éternel termine ses travaux un moment. C'est pour
27 cela d'ailleurs que l'Accusation s'est vue, à partir de 2004, interdire
28 d'entamer de nouvelles enquêtes. Voilà.
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1 Alors, le procès équitable, oui, vous avez tout à fait raison, et ce
2 que vous avez dit tout à l'heure, j'en ferai une copie que je transmettrai
3 au Président de ce Tribunal qui ira devant le Conseil de sécurité, donc
4 j'en ferai part. Mais tout de dépend de la façon dont l'Accusation présente
5 sa cause. Sur le plan technique, je dis qu'actuellement, au regard des
6 documents, des nombres de témoins et du nombre de municipalités, des
7 problèmes extrêmement complexes tels que l'acte d'accusation est
8 actuellement rédigé, cela me parait quasiment impossible que ce procès même
9 puisse se tenir dans la procédure traditionnelle en moins de deux ans. Si
10 on arrive à le finir en deux, c'est qu'il y aura eu, également, beaucoup
11 d'efforts et beaucoup de changements de mentalité pour y arriver.
12 Je voulais aborder avec vous ce problème pour que tout le monde soit
13 parfaitement informé de cela. Si, à ce stade, l'Accusation veut intervenir,
14 c'est bien volontiers que je lui donnerai la parole, étant précisé que pour
15 moi, c'est plutôt à Mme Carla Del Ponte d'informer la Chambre de ce qu'elle
16 compte exactement faire.
17 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci de me
18 donner la parole. Il est certain que je vais transmettre votre invitation à
19 Mme Carla Del Ponte et je suis sûr qu'elle pourra vous donner sous peu une
20 réponse bien plus complète. Dans ces quelques minutes qui vont suivre, je
21 voudrais vous faire part d'un premier avis de quelques amorces de réflexion
22 suite à ce que vous avez dit.
23 Tout d'abord, la résolution du Conseil de sécurité ne concerne pas
24 directement le Procureur. Elle s'applique à l'ensemble du TPIY. Si nous
25 faillissions dans notre tâche en tant qu'institution, il y a peut-être à
26 tout ceci toute une foule de raisons. Ce ne sera pas nécessairement la
27 faute uniquement du bureau du Procureur. Si le TPIY insiste pour retenir la
28 démarche la "common law" la plus traditionnelle, ne fait pas preuve d'un
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1 esprit d'innovation, effectivement, ce sera peut-être une faillite pour
2 l'institution, mais ce ne sera pas nécessairement la faute du bureau du
3 Procureur.
4 Vous avez devant vous une équipe du bureau du Procureur qui, depuis deux
5 ans, fait l'impossible pour essayer d'être le plus efficace possible. Nous
6 avons utilisé tous les moyens possibles, certains traditionnels, et
7 d'autres outils plus créatifs pour essayer de faire avancer cette affaire.
8 Il y a à peu près un an, nous avons déposé une requête afin que des faits
9 soient établis et convenus. Vous avez, près d'un an plus tard, rendu une
10 décision, et nous aurions voulu que la Chambre soit un plus généreuse pour
11 ce qui est des faits établis et qu'en réalité, ce qu'elle est. S'il faut
12 revenir et revenir sans cesse sur des faits qui sont déjà établis et admis
13 dans d'autres procès, cela rend notre procès beaucoup moins efficace.
14 Nous avons bien sûr essayé de nous mettre d'accord avec la Défense pour
15 voir s'il y a des choses qui ne sont pas en litige. A ce moment-là, inutile
16 d'utilise le temps d'audience, il est possible de circonscrire les
17 éléments, s'il n'est pas contesté que tel ou tel village a été attaqué tel
18 ou tel jour. Il n'y aurait pas de contestation pour dire que cette femme et
19 cet enfant ont été jetés de chez eux au milieu de la nuit. Si ceci n'était
20 pas contesté, cela irait beaucoup plus vite.
21 On a fait l'impossible pour circonscrire les cas, mais cela n'a pas
22 donné grand-chose. Cela n'a pas vraiment débouché sur des résultats
23 significatifs.
24 Nous avons déposé bon nombre de requêtes en application du 92 bis afin que
25 soient présentés par écrit certains témoignages, mais cela a été rejeté
26 jusqu'à ce jour, donc ce n'est pas la faute de l'Accusation. Nous avons
27 demandé le versement de certaines pièces avant le début du procès, par
28 exemple, la MCCE, le Bataillon espagnol. Nous avons essayé de le faire,
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1 parce qu'on dit : pourquoi est-ce que tout ceci ne pouvait pas se faire à
2 la mise en état ? Pourquoi perdre du temps de procès sur ce genre de
3 choses ? Ce qui veut dire que cette équipe a essayé de faire preuve d'un
4 esprit d'innovation, a essayé de le faire au niveau de la mise en état.
5 Hélas, nos efforts sont restés vains.
6 Notre réponse à la réplique de la mémoire, que ce soit accepté ou pas,
7 notre position reste la même. La Défense ne s'est pas conformée à l'article
8 65 ter (F), qui oblige la Défense de dire quels sont les faits contestés et
9 pourquoi ils le sont. J'invite la Chambre à examiner le libellé de cet
10 article. Je vous fais valoir humblement que ce n'était pas l'intention,
11 cela n'aurait pas pu être l'intention des auteurs de ce texte de dire qu'on
12 accepte : "Voilà, on nie le tout." Si cela, c'est une démarche acceptable,
13 à ce moment-là, cet article est dénué de son sens, et effectivement, comme
14 vous l'avez dit vous-même, il n'est pas possible d'avoir un procès efficace
15 parce qu'on va perdre énormément de temps, Monsieur le Juge, pour prouver
16 des choses qui, en fin de compte n'auraient pas été contestées; cependant,
17 on n'a pas imposé de critères à la Défense pour qu'elle se conforme au 65
18 ter (F), et elle conteste tout, en bloc.
19 Vous savez que les chiffres, si on les compare, ne sont pas toujours
20 porteurs de sens, parce que vous aviez, par exemple à Nuremberg, des
21 procédures tout à fait différentes de celles qu'on a ici au TPIY.
22 Vous l'avez dit vous-même, toutes les parties, y compris l'Accusation, ont
23 le droit d'avoir un procès équitable. Si la Chambre ne permet pas à
24 l'Accusation de bien présenter sa cause, elle n'aura pas eu, cette
25 Accusation, le droit à procès équitable si on ne permet pas à l'Accusation
26 de présenter suffisamment de faits.
27 Vous aviez la requête -- si la requête en application du 92 bis est
28 soulevée et si, effectivement, les éléments ne sont pas suffisants,
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1 l'Accusation pourra, effectivement, se mettre en accord avec la Défense et
2 dira qu'elle n'aura pas été à même de présenter bien sa cause et qu'elle a
3 été lésée.
4 Il y a bien sûr des solutions de rechange, et la solution suprême, c'est la
5 créativité, c'est ce que nous voulons faire en tant qu'équipe de
6 l'Accusation. Nous ne devons pas nécessairement avoir épousé et être à
7 jamais lié à la "common law." Je viens de cette tradition et je la pratique
8 depuis 25 ou 26 ans, mais je peux vous dire que je ne suis pas lié par des
9 liens de mariage à cette démarche. Il faut développer d'autres moyens, il
10 n'est pas nécessaire d'appeler tous ces témoins. On pourrait éventuellement
11 avoir un dossier, un dossier modifié à partir de chaque municipalité, avec
12 tel ou tel témoin. Prenons Prozor, dans un dossier, cela serait présenté à
13 la Défense, et on demanderait à la Défense une fois de plus de nous dire ce
14 qui est contesté dans ce dossier, et c'est à partir de cela qu'on pourrait
15 décider quels seraient les éléments qu'il faudrait vraiment présenter. On
16 peut faire preuve de plus de créativité, on peut être plus efficaces dans
17 la gestion du procès, on peut le faire à la vieille école.
18 Ce que je veux dire, Monsieur le Juge, est ceci. Vous allez trouver dans
19 cette équipe de l'Accusation de la bonne volonté, la volonté de création et
20 de créativité pour faire avancer ce procès de façon efficace. Nous sommes
21 tout à fait prêts à œuvrer avec vous dans ce sens. Bien sûr, au bout du
22 compte, il faudrait voir quelle est la meilleure façon de présenter nos
23 moyens parce que nous avons l'obligation, la charge de la preuve, et nous
24 avons une obligation envers la communauté internationale, envers les
25 victimes, aussi, qui méritent que justice soit faite.
26 C'est une première réponse suite à vos réflexions de ce matin, et je suis
27 sûr que notre réponse pourra être bien plus complète le 12 avril. Je vous
28 remercie infiniment.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Je vous ai écouté attentivement,
2 et du moins, tout ce que vous dites est parfaitement sensé. Il est vrai que
3 si la Chambre avait automatiquement fait droit à toutes les requêtes
4 déposées au titre de l'article 92 bis ou au titre du procès judiciaire, et
5 cetera, cela aurait permis d'avancer les choses. Mais il y a deux parties :
6 il y a vous et il y a la Défense. La Défense, si elle dit : "On veut faire
7 le constat de tel fait, mais nous, on n'est pas d'accord parce que cela
8 touche à la responsabilité de mon client," et cetera, je ne peux pas, en
9 tant que Juge, dire : "Je n'en tiens pas compte et je tiens pour acquis tel
10 fait." C'est cela, la difficulté. La difficulté, elle est là.
11 Le Règlement a prévu des façons qui permettent d'aller très vite, mais cela
12 ne peut aller vite que si tout le monde joue le jeu. Mais, du moment que la
13 Défense dit : "Je ne suis pas d'accord," là, à ce moment-là, les
14 dispositions ne peuvent produire leur plein effet.
15 Mais je rebondis sur ce que vous avez dit parce que cela est très
16 intéressant. Pour Prozor -- et là, évidemment j'invite la Défense à
17 réfléchir.
18 Vous verrez dans l'annexe sur Prozor, il y a 175 faits qui sont décrits les
19 uns après les autres. Bien. Il serait certainement que la Défense prenne
20 une position parce que je vois, il y a le fait 133 au fait 152, qui liste
21 des personnes qui ont été tuées lors de l'attaque. Bon. Si la Défense ne
22 conteste pas que ces personnes aient été tuées, à ce moment-là, c'est une
23 avancée, mais simplement et évidemment, on dit que durant l'attaque le HVO
24 a tué, alors c'est là où vous avez le problème. Ou vous admettez que ces
25 gens là ont pu être tués par des forces du HVO, mais peut-être au cours des
26 combats ou je ne sais quoi; à ce moment-là, on peut progresser. Donc, il y
27 a toute une série comme cela d'indications qui peuvent, si la Défense est
28 d'accord, permettre d'avancer.
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1 A autre titre d'exemple. Alors là, évidemment, c'est beaucoup plus délicat,
2 parce qu'il est allégué également qu'il y a des personnes qui ont été
3 victimes d'actes sexuels ou de viols. Bon, alors là, cela aussi, ou c'est
4 contesté, ou c'est admis. Si c'est admis, le seul problème que tout le
5 monde aura, c'est de remonter dans la chaîne des responsabilités.
6 Alors, comme le dit M. Scott, il faut faire preuve de créativité. Cela,
7 c'est certain.
8 Dans l'acte d'accusation, concernant les municipalités, on se rend compte
9 qu'il y a des villages où il y a eu des dizaines de maisons brûlées ou
10 pillées, et il n'est pas nécessaire à ce moment-là, à mon sens, de faire
11 venir quatre ou cinq témoins pour dire la même chose. Un peut suffire, mais
12 à ce moment-là, c'est à l'Accusation de dire : "Ce témoin est suffisant.
13 J'en n'ai pas besoin des quatre autres."
14 La créativité doit être aussi la créativité de la Défense, pas uniquement
15 au niveau de l'Accusation. Alors, à ce stade, je serais très intéressé
16 d'écouter la position des uns et des autres. Alors, Me Karnavas en premier.
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Une fois de plus, Monsieur le Président, je
18 vous souhaite bien le bonjour. L'Accusation dit qu'il faut faire preuve de
19 créativité. Je leur dis qu'ils devraient faire preuve de davantage
20 d'équité. Aujourd'hui même, ils sont encore en train d'enquêter sur les
21 lieux. Ils ont décidé du moment où ils voulaient décerner cet acte
22 d'accusation, de ce qu'ils voulaient y mettre. Ils ont déterminé les
23 modalités de celui-ci. Ils l'ont modifié de façon à inclure tous les modes
24 de responsabilités, y compris ceux créés par le TPIY, l'entreprise
25 criminelle commune, et ici, ils ont l'audace de dire qu'eux sont créatifs
26 et que nous, nous freinons.
27 J'ai été créatif dans une affaire précédente. On nous a dit qu'il faut
28 respecter le Règlement. L'Accusation dit maintenant qu'elle veut être
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1 créative; je dis qu'il faut quand même qu'elle respecte le Règlement. Bien
2 sûr, il faut penser de façon créative en dehors d'un cadre contraignant,
3 mais quand même, il faut en tout premier lieu rappeler que nous devons
4 avoir comme priorité les droits de l'accusé. Dans le passé, ce Tribunal a
5 eu des procès qui ont duré des années à un premier niveau. Il y en a un qui
6 vient de se terminer, qui aurait dû durer six mois. Mais quand on est à
7 l'extérieur, on a tendance à se demander, bon, est-ce que cette personne a
8 un procès plus long, équitable parce qu'il est d'une telle ou telle
9 nationalité, alors que dans d'autres procès de moins de ressources, on est
10 sous pression. Je ne veux pas ici m'aventurer dans des conjectures. Cela
11 revient à dire que dans les procès qu'il y a eus avant le notre, milieu des
12 années 1990, fin des années 1990, il y avait davantage d'argent qu'on
13 pouvait consacrer à la préparation, plus de temps et plus de patience.
14 Maintenant, le Conseil de sécurité nous dit d'en terminer d'ici à 2008. Ce
15 n'est pas possible. Il suffit de faire quelques additions, et quand on voit
16 le nombre de procès qu'il doit encore y avoir, quand on voit la taille des
17 procès, c'est impossible, on ne pourra pas tenir ces délais si on veut que
18 les procès soient équitables.
19 Le Juge Hunt avait indiqué que les Nations Unies n'avaient pas
20 l'argent ou la volonté intérieure d'assurer l'équité des procès de
21 personnes qu'elles avaient inculpés. Si c'était le cas, il ne devrait pas y
22 avoir de Tribunal. Je suis d'accord avec le Juge Hunt. C'est le Conseil de
23 sécurité qui a établi cette institution, il devrait la financer.
24 Parce que le Procureur a le droit de poursuivre des personnes de la
25 façon dont il l'entend. Nous avons le Procureur qui a vu ses pouvoirs
26 limités par le Conseil de sécurité parce que le bureau a dû intervenir pour
27 voir quel devait être le genre de procès dont ce Tribunal allait connaître
28 ici plutôt qu'au niveau national. Le problème, c'est que l'Accusation dans
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1 ce Tribunal, et là, vous avez les écrits de Juges qui en ont parlé -- les
2 procès sont utilisés dans ce Tribunal pas uniquement pour juger telle ou
3 telle personne pour savoir si cet individu a bien commis un crime dont il
4 est accusé, mais c'est plutôt pour parvenir à une vérité historique en vue
5 de la réconciliation. Quelque part, à mon avis, ce Tribunal, et je parle
6 ici de tous ceux qui participent à l'œuvre de ce Tribunal, ils ont perdu de
7 vue que ceci, c'est simplement un Tribunal pénal international. On ne va
8 pas parvenir à une vérité historique ici, c'est impossible, parce que quand
9 on fait des marchandages avec des accusés pour qu'ils plaident coupables ou
10 lorsque certains suspects ne sont pas mis en accusation, alors que d'autres
11 le sont, lorsque des gouvernements refusent de coopérer, de fournir tous
12 les documents, lorsque l'Accusation ne peut pas obtenir à temps tous les
13 documents et vice versa, comment voulez-vous établir une vérité
14 historique ? Il faut prendre le recul nécessaire et se rendre compte que
15 ceci, c'est un Tribunal pénal international où on applique un droit
16 international et on utilise des procédures évolutives.
17 Parce qu'au fur et à mesure que le Règlement change, bien sûr, le jeu
18 s'adapte. Quand il n'y a pas de modifications radicales, ce n'est pas un
19 problème, mais si on change le Règlement à tel point que ceci ait une
20 incidence sur une part ou une autre, cela pose problème. Evidemment, si
21 vous voulez prendre un rôle directeur au niveau des questions, cela ne me
22 dérange pas. Plus je me trouve dans ce procès, plus j'apprécie le droit
23 romano-germanique, surtout le système français où vous avez un juge
24 d'instruction. C'est bien le problème parce que maintenant, l'Accusation
25 nous parle d'un dossier. Mais l'Accusation ne peut pas être considérée
26 comme étant le juge d'instruction, parce que l'Accusation n'a pas
27 l'obligation de chercher des éléments à décharge. Bien sûr, si elle en
28 trouve, elle doit les communiquer, mais on ne commence pas une enquête ou
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1 on ne l'a pas pour essayer de tenir un point de vue équilibré parce que
2 l'Accusation a un objectif, elle travaille envers cet objectif, et c'est
3 dans ce sens qu'elle réunit des éléments de preuve, elle décide des
4 personnes sur lesquelles elle va enquêter, les documents qu'elle va essayer
5 de rassembler. Dire que quelque part, l'Accusation peut maintenant établir
6 un dossier, je le crains fort. Ce n'est pas une idée que j'accueillerais
7 les bras ouverts parce que j'aurais même certains soupçons.
8 Quand on parle de faits admis, de faits jugés, tous ceci lèse les
9 accusés, et tout ceci sert l'Accusation. Dans d'autres procès, les avocats
10 ont peut-être adopté d'autres tactiques. Peut-être y avait-il moins de
11 documents à prendre en compte. Si vous regardez l'acte d'accusation, sans
12 doute que dans d'autres procès, il n'y avait pas ce qu'il y a dans le
13 nôtre. Alors comment pourrait-on se mettre d'accord sur des faits si le
14 Juge avait moins de preuves à reprendre, il y aurait peut-être moins de
15 créativité au niveau des avocats. Je sais que je défends un client et qu'il
16 a le droit aux mêmes avantages, au même traitement que ce qui fut le cas
17 dans d'autres procès.
18 Je pense que ce délai de deux ans n'est pas tenable. J'aimerais
19 pouvoir le tenir. Pourtant, on peut peut-être essayer. La seule façon d'y
20 parvenir c'est que l'Accusation revienne à la trame même de son acte
21 d'accusation pour le modifier et, effectivement, pour réduire la voilure.
22 Pourquoi est-ce que je dis ceci ? Prenez le paragraphe 17 de l'acte
23 d'accusation. Pour moi, c'est le 17.1 puisque c'est là qu'on parle du Dr
24 Prlic. Une fois de plus, on a accusé suivant tous les modes éventuelles et
25 possibles de responsabilité, on l'a fort bien dit à l'Accusation, sans
26 doute que l'Accusation avait à l'esprit des éléments de preuve, des
27 témoins, lorsque l'Accusation a dit, il a planifié, commis, encouragé à
28 commettre, puisqu'ils ont parlé tous les modes. Il devrait avoir. Ou est-ce
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1 qu'en fait, on a tout mis dans le sac même l'évier de la cuisine en
2 espérant que tout ceci pourra quelque part faire mocher ? Evidemment, nous,
3 on essaie d'une certaine espèce de combat dans l'ombre, on essaie devoir
4 sur cette cible mobile à quel moment elle va s'arrêter.
5 Effectivement, qu'il réduise la voilure, qu'il donne ce tableau que vous
6 avez demandé, un tableau qui dit précisément à quoi se rapporte chaque
7 document. Si l'Accusation agissait de la sorte, nous pourrions faire ce que
8 l'Accusation nous demande de faire, à savoir, de dire de façon précise ce
9 que nous contestons. Mais, effectivement, lorsque nous soumettons un
10 mémoire préalable au procès, il faut faire un tri. L'Accusation nous
11 demande de dire déjà quelle sera notre Défense avant même qu'elle ne
12 commence afin qu'elle puisse réfuter mes moyens de défense au moment de la
13 présentation de ses moyens à elle. Ce n'est pas juste. Quelque part ici,
14 nous avons un problème, un débat au contradictoire. C'est l'Accusation qui
15 a la charge de la preuve, et je ne suis pas ici pour lui rendre la vie plus
16 facile; au contraire, c'est pour lui rendre la vie plus difficile. Soyons
17 honnête. Je ne suis pas ici pour être inéquitable. Je suis ici pour vous
18 aider, vous, Monsieur le Juge, à faire le tri dans les faits afin qu'au
19 bout du parcours vous puissiez rendre un jugement valable approprié à
20 partir des faits présentés en prenant les faits en appliquant le droit
21 applicable pour parvenir à une juste décision.
22 Donc, je ne crois pas que l'Accusation n'est pas juste quand elle essaie de
23 nous pointer du doigt. M. Scott et son équipe ont travaillé d'arrache pied,
24 je le sais, et je les en félicite. Je peux vous dire qu'ils continuent de
25 le faire. Ils continuent à rassembler des éléments de preuve. Grand Dieu,
26 comment moi, puis-je vous dire que je vais me conformer à tel ou tel délai
27 si, en même temps, l'Accusation continue de réunir des éléments de preuve
28 parce qu'elle ne sait pas trop qu'elle sera ces véritables éléments de
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1 preuve ? Elle essaie toujours de retrouver ce revolver qui fume encore
2 après toutes ces années, ce n'est pas comme si je travaillais dans un cadre
3 précis de documents et de témoins, que je connaîtrais les confins de ce
4 dossier.
5 On parle de créativité au niveau du dossier et c'est bien la raison
6 pour laquelle j'apprécie de plus en plus le système romano- germanique. Au
7 niveau de la mise en état, je suis parfaitement incapable d'influer sur le
8 niveau d'enquête. Je peux dire à l'Accusation : "Mais peut-être que vous
9 devriez parler à ce témoin-ci afin de réunir cet élément de preuve." Je ne
10 peux pas le faire. C'est l'Accusation qui décide elle-même de la démarche
11 qu'elle va retenir. Fort bien. Pas de problème. C'est son apanage.
12 Manifestement, elle ne se sent pas à l'aise puisqu'elle poursuit ses
13 enquêtes. Est-ce qu'elle peut nous garantir qu'elle va arrêter de façon
14 définitive ses enquêtes, qu'elle ne va pas plus aller sur le terrain pour
15 interroger ces témoins, qu'elle ne va plus réunir d'éléments de preuve ?
16 Maintenant, nous avons un nombre défini de pièces. Je m'avance à dire
17 qu'elle n'ose pas le faire. Elle ne doit pas le faire non plus parce
18 qu'elle a le droit aussi au procès équitable. Je le comprends parfaitement.
19 Par ailleurs, il faut comprendre la position de la Défense. Chaque
20 fois que l'Accusation va voir un nouveau témoin, je dois envoyer quelqu'un
21 au même endroit pour voir si ce témoin dit la vérité ou pas. Chaque fois
22 que l'Accusation a remis des éléments de preuve, je dois vérifier s'il y a
23 autre chose que l'Accusation n'aurait pas trouvé parce qu'il me faut le
24 dire, l'Accusation n'a pas l'obligation de réunir les éléments à décharge.
25 Ce n'est pas comme la Chambre de première instance et c'est sans doute pas
26 comme l'ex-Yougoslavie où au moins il y avait un Juge d'instruction où le
27 ministère Public n'avait pas la même démarche intellectuelle. Je ne veux
28 pas ici jeter le blâme sur cette équipe de l'Accusation, mais elle n'est
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1 pas ici pour nous aider. Elle cherche un résultat. C'est l'objectif ultime
2 de ses recherches, de sa procédure, ses résultats qu'elle cherche. Elle
3 cherche condamnation pour chacun des chefs qu'elle a retenus. Je ne vais
4 pas maintenant leur faciliter la tâche. Je vais faire des concessions quand
5 je penserais qu'il n'est pas nécessaire de poursuivre une discussion
6 uniquement pour l'amour de l'art.
7 La seule chose que je dois me demander chaque fois que je me lève
8 pour vous parler c'est de savoir si la question ou l'argument que je
9 présente est utile pour l'affaire, pour le Juges des faits, qui pourra
10 ainsi mieux voir quelle est ma cause ? C'est cela qui me motive. Une seule
11 question. Ce que je fais, est-ce pertinent, ni plus ni moins ?
12 Je n'ai rien d'autre à dire. Je pense que Me Alaburic a été de plus
13 éloquente lorsqu'elle a parlé de la politique du Conseil de sécurité. Je ne
14 veux pas insister ou revenir sur tout ce qu'elle a dit, mais je suis
15 d'accord avec chacun des mots qu'elle a prononcés, or ici nous ne parlons
16 pas de politique. Nous parlons de plusieurs individus que l'Accusation
17 voudrait voir mourir en prison. Cela c'est leur motif -- leur motivation en
18 fin de procès, leur réquisitoire visera à ce que ces gens -- morts en
19 prison. C'est cela qui me motive, tous les matins, me pousse à me lever à
20 venir ici à dire : Non, pas aujourd'hui, non. Je ne vais faire aucune
21 concession. C'est à vous d'apporter la preuve. Si vous êtes à même de le
22 faire, fort bien; sinon, tant pis. Merci.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant la pause, il nous reste encore cinq minutes.
24 Est-ce qu'en cinq minutes vous voulez intervenir ? Oui, allez-y.
25 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais essayer
26 de m'en tenir à ces cinq minutes.
27 Vous avez soulevé une question aujourd'hui vous avez demandé s'il était
28 possible de terminer ce procès en l'espace de deux ans, s'il est possible
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1 de mener cette tâche à bien, je dis que c'est une mission impossible. C'est
2 impossible à tenir comme délai sans la condition mentionnée par Me
3 Karnavas, à savoir que l'Accusation diminue ou réduise de façon
4 spectaculaire l'acte d'accusation ou qu'on se débarrasse des charges
5 subsidiaires parce que c'est à cause de ces chefs d'accusation ou la
6 subsidiaire, comme l'a dit Me Karnavas, que nous sommes dans
7 l'impossibilité d'accepter des faits admis dans d'autres affaires parce que
8 là, ils ont été acceptés dans un contexte tout à fait différent.
9 Je voulais dire autre chose. Je pense qu'il est impossible et inacceptable
10 et ceci est tout à fait inconsciable [phon] avec le principe de l'équité du
11 procès que de terminer ce procès en deux ans, en effet, l'Accusation a
12 l'intention de citer des témoins qui à eux seuls vont nécessiter deux ans.
13 Il y a autre chose qu'il faut garder à l'esprit. Il a le principe de
14 l'équité du procès, bien entendu, mais il est aussi important d'établir les
15 faits parce que ceci va avoir une incidence énorme sur l'avenir de la
16 région dont viennent les accusés. Ce sont des faits très importants qui
17 vont avoir une incidence sur le long terme sur ce qui va se passer à
18 l'avenir dans cette région, et c'est bien là la raison pour laquelle nous
19 ne pouvons pas accepter l'idée que ce procès se termine en l'espace deux
20 ans. Il faut pouvoir avoir plus de temps il faut le dire clair aujourd'hui.
21 Je le répète : à mon avis, c'est une mission impossible. Les avocats de M.
22 Bruno Stojic a fait l'impossible pour veiller à ne pas perdre une journée
23 dans ce procès. Me Murphy a été élu hier. Nous n'avons même pas
24 démilitarisée une journée de répit. Nous nous sommes trouvés dans une
25 situation où nous avions 9 700 documents et CD. Pour ouvrir un seul
26 document, il vous faut trois minutes, cela vous donne une idée des efforts
27 que nous avons dû déployer, nous avocats de
28 M. Stojic. Mais c'est vrai de tous les avocats de la Défense pour veiller à
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1 ce que le déroulement du procès se fasse sans heurt.
2 Je comprends bien quelque part la position dans laquelle se trouve
3 l'Accusation, moi-même j'ai été Procureur pendant 17 ans, donc, je
4 comprends certaines des choses que l'Accusation fait et les motivations qui
5 la poussent à les faire. Je ne veux pas ici utiliser des mots trop durs,
6 mais je pense que c'est irresponsable que d'accuser la Défense de ne pas
7 vouloir accepter certains faits, certains chefs dans l'acte d'accusation.
8 Nos accusés ne sont pas accusés de faits d'infractions précises et elle ne
9 peut pas attendre d'eux qu'ils disent si certains Bosniens ont été tués à
10 Prozor par qui parce que c'est l'Accusation qui a la charge de la preuve,
11 pas nous.
12 En conclusion, voici ce que je voudrais dire. Jusqu'à ce jour, et
13 nous n'allons pas tenir compte d'aujourd'hui parce que nous venons de
14 recevoir un nouveau document de l'Accusation, mais jusqu'à hier on nous dit
15 que parmi les premiers témoins, il y aurait deux témoins, et un témoin
16 expert. Nous n'avons reçu aucune déclaration s'agissant de ce témoin. Quant
17 au rapport du témoin expert, nous l'avons reçu il y a cinq jours à peine.
18 Or, le procès est censé s'ouvrir bientôt, procès auquel se prépare
19 l'Accusation depuis deux ans, parce que, si pas plus, nous sommes supposés
20 venir dans ce prétoire sans aucune information concernant le premier
21 témoin, ou les premiers témoins. On vient seulement de recevoir et c'est
22 seulement qu'on se met a pied d'œuvre.
23 Je pense que le moment est venu de dire et de rappeler que ce procès
24 ne peut pas se tenir en deux ans, c'est quelque chose que personne ne peut
25 attendre de nous.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les raisons techniques de faire la pause dite
27 technique. On reprendra à 11 heures moins dix, et je donnerai la parole
28 donc à Me Kovacic.
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1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
2 --- L'audience est reprise à 10 heures 51.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience étant reprise, je donne la parole à Me
4 Kovacic.
5 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais tâcher
6 d'être bref. Je vous demande de bien vouloir m'exprimer dans ma propre
7 langue. Ce sera plus facile pour moi et ce sera davantage précis. Je vous
8 remercie, Monsieur le Président.
9 Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec ce qui a déjà été dit par
10 mes collègues M. Karnavas et Mme Nozica, et je suis d'accord avec ce qu'ils
11 ont dit, donc je vais éviter les redites.
12 Je suis également d'accord avec toutes les thèses présentées par rapport à
13 la stratégie d'achèvement que vous avez évoquée vous-même, Monsieur le
14 Président, et votre point de départ dans ce débat, en tenant compte
15 particulièrement de vos affirmations sur les possibilités ouvertes au
16 Tribunal et permettant à ce Tribunal de réduire le temps des procès.
17 Néanmoins, comme vous avez déclaré vous-même et vous avez cité M. le Juge
18 May, au-delà de toutes ces demandes en vue d'avoir un procès rapide et
19 juste et, eu égard à la stratégie d'achèvement, je crois que l'élément qui
20 ressort c'est celui du procès équitable. Je crois que, parmi tous les
21 principes avancés, l'élément essentiel est celui-ci, il faut que nous ayons
22 un procès équitable, je crois que je n'ai pas besoin de m'étendre là-
23 dessus, car si nous poursuivons la procédure et si nous nous conformons aux
24 fondateurs, et le Conseil de sécurité et les délais proposés par ces
25 derniers, et que le procès n'est pas équitable à ce moment-là nous
26 n'aurions pas rempli notre objectif. Tel est le dilemme. Je crois qu'il n'y
27 a pas de dilemme à ce propos.
28 Bien, si nous regardons en substance ce dont il est question ici, la
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1 longueur du procès et les procès de par le monde, ce Tribunal ne fait pas
2 exception à la règle par rapport aux procédures en cours, la durée de
3 chaque procès est fixé par l'acte d'accusation. Le Procureur a tous les
4 droits et peut définir et rédiger l'acte d'accusation, et fonctionne
5 d'après les principes de base de l'égalité et a le droit de fonctionner de
6 la sorte devant ce Tribunal également et peut se fonder sur ce principe.
7 Autrement dit, quelqu'un est tenu pour responsable et ceci -- on doit
8 néanmoins tenir compte d'un certain nombre de paramètres, les intérêts de
9 la justice, les intérêts des victimes, et cetera.
10 Dans l'affaire Kupreskic, nous avons parlé de la même guerre du conflit
11 entre les Croates et les Bosniens en 1993, ceci n'était pas un conflit
12 international, ceci n'a pas été plaidé. Mais, dans Kordic et Cerkez et dans
13 Blaskic également, pour ces procès, ceci ne se retrouve dans aucun de ces
14 procès. Dans Halilovic, dans Hadzihasanovic, par exemple, dans ces
15 affaires-là, l'acte d'accusation était très limité, très étroit, seuls
16 quelques faits ont été sélectionnés et l'acte d'accusation a été rédigé
17 autour de ces quelques faits. Je puis dire que ceci a été fait car, sinon,
18 ce serait trop large.
19 L'acte d'accusation définit la durée du procès. Toutes les autres mesures
20 ou toutes autres systèmes qui pourraient être impliqués sans pour autant
21 enfreindre le principe du procès équitable peuvent avoir une incidence. Que
22 ce soit de cinq à dix pourcent, mais ces derniers ne peuvent avoir une
23 incidence plus forte et plus forte que 20 %.
24 L'Accusation, dans ce qu'elle a dit il y a quelques instants, a déclaré que
25 cette Chambre de première instance, ce Tribunal, ou le Juge la mise en état
26 ne permet pas à l'Accusation d'utiliser sa créativité et les différents
27 instruments à ces instruments qui lui permettrait de raccourcir la longueur
28 du procès. Nous parlons ici de faits admis, par exemple, de faits connus,
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1 de la présentation ou de citer à la barre une centaine de témoins, et
2 cetera. Je ne vais pas évoquer tout ceci. Mon collègue, M. Karnavas, a
3 présenté ses arguments sur les limites que présentent cette façon-là de
4 procéder. Il n'y a pas d'entreprise criminelle commune a-t-il dit, et
5 cetera ? Il a évoqué ces questions-là.
6 L'Accusation, si j'ai bien compris, recherche une procédure écrite, si je
7 puis m'exprimer comme cela. Les avocats qui viennent du système du "common
8 law" ou du système romano-germanique, nous savons tous que des procédures
9 écrites ou des écritures ou une des procédures qui évolue par le biais de
10 documents et d'éléments écrits sur les comptes rendus d'audience et ceci
11 s'applique également à des affaires civiles mais dans des affaires pénales
12 et je crois que l'optimisme dont fait preuve le Procureur devant ce
13 Tribunal se fonde sur l'utilisation d'éléments qui proviennent d'autres
14 faits admis dans d'autres procès, et je crois qu'ils sont très optimismes à
15 cet égard car lorsque l'on parle d'un cas précis et qu'on constate qu'il y
16 a des différences et pourquoi certains moyens peuvent être utilisés alors
17 que d'autres moyens ne peuvent pas être utilisés dans un autre cas. Nous
18 constatons que nous avons un problème assez grave et ceci à ces limites et
19 il faut à ce moment-là abandonner l'idée d'un procès équitable afin de
20 neutraliser ces limites et utiliser des documents d'autres procès.
21 Ce que je suis en train de dire c'est cela, les possibilités de raccourcir
22 la durée du procès sont bien limitées. On peut appliquer certaines mesures
23 mais ces mesures ne peuvent avoir qu'une petite incidence, 90 % des
24 procédures sont dus à la rédaction d'un acte d'accusation. Dans ce cas-ci,
25 je dois dire que l'Accusation dit d'une part que nous devons utiliser et
26 tenter d'utiliser des moyens provenant d'autres procès, que ce soit des
27 comptes rendus d'audience, des déclarations de témoins, des faits admis,
28 des faits non contestés, et ce genre de chose, mais d'autre part,
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1 l'Accusation ne souhaite pas ou ignore la possibilité ou ne souhaite pas
2 tenir compte de tout ceci de façon réaliste, et dans ce procès, en
3 particulier.
4 Dans ce procès, en particulier, il y a six accusés, et le temps couvert, la
5 période couverte par l'acte d'accusation et les événements se sont déroulés
6 dans l'acte d'accusation de 1991, à partir des accords de Dayton jusqu'en
7 1994, l'accord de Washington en 1994. On déclare que le conflit entre les
8 Musulmans de Bosnie-Herzégovine et les Croates de Bosnie-Herzégovine
9 commence au moment où est établie cette entreprise criminelle commune. Ceci
10 commence à partir de l'année 1991.
11 Dans les procès qui ont été évoqués il y a quelques instants, il a
12 été établi, dans des limites qui n'ont pas été très clairement définies,
13 lorsque vous regardez les détails des arrêts dans l'affaire Blaskic,
14 Kordic, Kupreskic, et cetera, il a été établi que ce conflit, qui
15 représente l'ossature de cet acte d'accusation, le conflit croato-musulman
16 de Bosnie correspond en réalité à l'année 1993. Il y a trois années
17 calendaires contenues dans cet acte d'accusation. Si l'Accusation a
18 l'intention de se reporter à d'autres affaires, à ce moment-là, nous
19 devrions simplement traiter de l'année 1993. C'est la seule année
20 pertinente.
21 Du point de vue de la Défense, si l'Accusation présente les faits,
22 comme si les accusés se livraient à des activités criminelles déjà en
23 l'année 1991, pour ce qui est du mens rea de l'intention délictueuse et des
24 plans qui ont été préparés correspondant à l'année 1992 pour un conflit qui
25 se serait déroulé en 1993, je vais devoir contester cela, je dois défendre
26 cela. Egalement, sans l'existence d'une entreprise criminelle commune, je
27 dois me reporter à l'intention délictueuse, car je dois retourner à ce
28 moment-là à l'année 1991, car le Procureur commence à partir de l'année
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1 1991, en particulier parce que l'entreprise criminelle commune et la
2 responsabilité remontent à l'année 1991. Je vais devoir traiter l'année
3 1992 et le conflit en 1993 lorsque les événements ici dont ils sont accusés
4 traitent en réalité de l'actus reus, l'action délictueuse. Donc je dois
5 parler de tout cela.
6 Si l'Accusation nous a fourni ce cadre-là, la Défense va devoir
7 répondre à ce cadre-là, sinon la Défense ne sera pas considérée comme étant
8 compétente et le procès sera considéré comme étant inéquitable et non
9 juste. Donc, la position de l'Accusation est celle-ci : cela n'est pas leur
10 problème, et ce procès doit durer aussi longtemps que le temps minimum que
11 vous avez cité. Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur le Juge, je
12 crois que d'après vos estimations et les calculs que vous avez faits, vous
13 vous êtes montré très optimiste. Bien évidemment, il y a quelque chose qui
14 ne va pas ici, car la durée de ce procès, quelles que soient les mesures
15 qui pourront être adoptées, sont fixées par l'acte d'accusation et le
16 contenu de l'acte d'accusation. Ceci n'est pas la faute de la Chambre de
17 première instance si les accusés et les conseils de la Défense aillent
18 devoir aller au-delà du temps fixé par le conseil de la Défense, car les
19 problèmes soulevés par l'acte d'accusation sont des problèmes qui se sont
20 présentés dès le départ, et cela ne suffit pas pour que le procès soit
21 terminé. C'est à la Chambre de première instance et au Tribunal de
22 déterminer ce qui est important. Ceci devrait être une priorité. La
23 stratégie d'achèvement a été imposée par les créateurs de ce Tribunal, et
24 pour avoir un procès équitable, il faut tenir la procédure comme il faut.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous donne la parole pour un très court
26 moment.
27 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci. Comme je vous ai déjà présenté ma
28 position, je n'ai besoin que de six phrases. La première est celle-ci :
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1 cette procédure a commencé en avril 2004 lorsque l'acte d'accusation a été
2 rédigé. Compte tenu de tout ce qui a été dit dans ce prétoire, il
3 semblerait que le procès ne sera pas terminé en 2008, conformément à la
4 résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Je ne pense pas que
5 d'autres débats sur ce qui doit porter la faute de tout ceci ou qui doit
6 être tenu pour responsable de ne pas terminer à temps. Ceci n'est pas
7 utile. Mais je crois qu'il est essentiel dans ce prétoire de tenir compte
8 de la Défense et de la présentation des moyens de défense. En abordant la
9 question de temps de façon rationnelle, je ne souhaite pas tenir compte des
10 modes de responsabilité de tous les accusés dans ce procès. Chaque fait, y
11 compris les faits incriminés, porte sur les événements et les actes commis
12 par nos accusés. Ce type d'acte d'accusation détermine la présentation des
13 moyens à décharge, donc vous ne pouvez pas vous attendre à ce que les
14 équipes de la Défense coopèrent à la manière dont l'Accusation le
15 souhaiterait, car ce serait au détriment de nos clients.
16 De surcroît, la Chambre a fait droit aux demandes de l'Accusation que
17 les faits portant sur les crimes fassent l'objet de requêtes écrites et des
18 moyens de preuve écrits. Cela signifie que les agissements des accusés, ou
19 en tous cas, que ceci fasse mention de cela, et notre Règlement de
20 procédure et de preuve ne permet pas aux moyens de preuve d'être présentés
21 de cette façon-là.
22 Nous avons une solution qui est un acte d'accusation modifié. Je ne
23 souhaite pas encore une fois parler de cette question, je souhaite
24 simplement vous donner un exemple. Le 16 novembre, nous avons eu un acte
25 d'accusation modifié devant ce même Tribunal, nous avons les modes de
26 responsabilité dont sont accusés nos accusés. Je veux le dire en anglais,
27 car cela m'est plus facile, aider et encourager dans l'entreprise
28 criminelle commune. Seize jours avant le 1er novembre 2005, dans l'affaire
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1 Cermak Markac, l'acte d'accusation -- l'Accusation a retiré certaines
2 charges de l'acte d'accusation et dispositions portant sur le fait d'aider
3 et d'encourager l'entreprise criminelle commune.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Je vous remercie.
5 M. JONJIC : [interprétation] L'accusé Valentin Coric, la Défense a présenté
6 une requête à cet effet pour qu'il y ait disjonction. Ceci a été rejeté par
7 la Chambre de première instance. Merci.
8 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne
9 souhaite pas répéter ce qu'ont dit mes collègues avant moi, je crois que M.
10 Karnavas vous a tout expliqué de façon claire. Bien évidemment, c'est dans
11 l'intérêt des équipes de la Défense d'avoir un procès efficace et rapide.
12 Néanmoins, ceci ne peut pas se faire au détriment d'un procès équitable et
13 juste et au détriment de nos clients. Il y a une chose qui m'inquiète et
14 qui pourrait survenir au cours de ce procès si nous devions limiter la
15 durée de ce procès, pour l'Accusation également, la Défense et l'Accusation
16 seraient soumises à beaucoup de pression. J'aimerais comparer ceci à un jeu
17 d'échecs. Si vous avez une pression qui est exercée et si vous avez peu de
18 temps, quelquefois vous pouvez agir de façon déraisonnable, et ceci peut
19 être au détriment de votre défense. Merci.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Parole à M. Scott. Je remercie donc tous les avocats
21 d'avoir fait le point sur cette question et donné leurs opinions
22 personnelles. M. Scott va certainement répondre à quelques points.
23 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais être très
24 bref. La Défense a consacré 20 minutes [comme interprété] à ces différentes
25 réponses, et moi-même, j'en n'ai consacré que sept à ma réponse, mais si
26 vous me le permettez, je vais prendre trois minutes de votre temps pour
27 répondre.
28 Si vous avez écouté, vous avez écouté les différents conseils de la Défense
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1 dire qu'ils ne souhaitent pas travailler de façon efficace. Ils ne
2 souhaitent pas travailler de façon créative. Rien ne les intéresse qui
3 pourrait faciliter le déroulement de ce procès, le rendre plus efficace. En
4 réalité, M. Karnavas a été très clair. Il souhaite que ceci soit rendu le
5 plus difficile possible pour l'Accusation et la présentation des moyens à
6 charge.
7 Nous avons soulevé la question du 65 ter (F) déjà par le passé, je souhaite
8 consacrer quelques secondes là-dessus. Ce que l'article précise, c'est
9 lorsque la Défense a déposé son mémoire préalable au procès, en réponse, il
10 y a le mémoire de l'Accusation où est écrit ce qui suit : "En termes
11 généraux, la nature de la défense de l'accusé; les points du mémoire
12 préalable du Procureur que l'accusé conteste; et troisième point, pour
13 chacun de ces points, les motifs de contestation par l'accusé."
14 Bien évidemment, la Défense ne souhaite pas faire cela, et comme l'a dit Me
15 Karnavas, soyons très transparents. Nous sommes tous adultes devant cette
16 Chambre. La Défense souhaite, en l'étirant le plus longtemps possible et en
17 la rendant aussi difficile que possible pour la présentation des moyens à
18 charge -- à un moment donné, vous allez rendre une décision et vous allez
19 faire tomber le marteau, et vous allez faire cesser la présentation des
20 moyens à charge. Si la Défense rend ce procès difficile et rend difficile
21 la présentation des moyens à charge, ceci sera au détriment de
22 l'Accusation. Je crois que c'est assez facile à voir.
23 Notre réponse, bien sûr, consiste à dire qu'il ne faut pas impliquer
24 l'article 65 ter (F), ceci n'aidant en rien le problème qui est le nôtre,
25 et réduire ce temps par rapport à des questions tout à fait conformes.
26 Essayons de travailler de façon efficace. Faisons en sorte que ce système
27 fonctionne lentement et aussi difficilement que possible : cela n'est pas
28 l'objet, ici, que de façon à ce que le Juge rende une décision et réduise
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1 la présentation des moyens à charge, que l'Accusation soit obligée de
2 réduire la présentation de ces moyens à charge. C'est ce que souhaite
3 l'équipe de la Défense. Mesdames et Messieurs, je crois que nous allons
4 nous en tenir à notre position. Nous ne voulons pas étirer la procédure et
5 la rendre aussi difficile que possible. L'Accusation ne souhaite pas
6 abandonner la présentation de ses moyens. L'Accusation devra, à ce moment-
7 là, réduire l'acte d'accusation. L'accusation ne souhaite pas avoir à citer
8 moins de témoins. C'est ce que souhaite l'équipe de la Défense. Nous
9 souhaitons avoir un procès équitable pour la communauté internationale et
10 pour les victimes.
11 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis avoir un
12 moment pour répondre.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Quelques minutes.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Dans Cool Hand Luke, c'est un film, il y a
15 ici un problème de communication. Nous parlons anglais, ainsi que M. Scott,
16 sa langue maternelle, c'est l'anglais. Je ne sais pas comment il a
17 interprété ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit, c'est que mon rôle est de
18 rendre sa tâche difficile s'il veut obtenir une condamnation, s'il pense
19 que je suis là simplement pour graisser les roues de l'Accusation, il se
20 trompe, et s'il pense qu'il peut repartir alors que mon client est
21 emprisonné pour le restant de ses jours, il se trompe. L'Accusation et la
22 manière dont le bureau du Procureur est organisé au sein du TPIY
23 correspondent à des règles du "common law." Ils ne sont pas là pour
24 présenter des moyens de preuve, ils sont là pour obtenir une condamnation -
25 -
26 M. SCOTT : [interprétation] Je soulève une objection.
27 M. KARNAVAS : [interprétation] Il est ici pour obtenir une condamnation.
28 Pourquoi est-ce que je reçois aujourd'hui ces moyens de preuve, maintenant,
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1 par rapport à un témoin, M. Donia, que je vais devoir parcourir ? J'obtiens
2 enfin la liste de cinq témoins. Ils savaient bien longtemps à l'avance.
3 J'aurais pu avoir tout ceci il y a des mois. Et ils sont là en train de
4 vous dire qu'ils sont là pour jouer et pour avoir un procès équitable et
5 être créatifs. Si ceci est être créatif, à ce moment-là, je dois dire que
6 je ne suis pas d'accord. C'est une façon de faire obstruction à la Défense.
7 Ceci m'empêche de faire mon travail, et mon travail consiste à m'assurer
8 que s'il obtient cette condamnation, il va devoir travailler pour cela. Il
9 va devoir fournir les preuves. Il ne peut pas simplement proposer l'acte
10 d'accusation, y lancer et y jeter tous les modes de responsabilité, et dire
11 aux Juges de la Chambre : C'est à vous de choisir. Faites votre choix. Pour
12 la première fois, l'Accusation est confrontée à cela. C'est vous qui avez
13 rédigé cet acte d'accusation. C'est vous qui avez inscrit ces modes de
14 responsabilité. C'est vous qui avez présenté ces 9 000 documents, et c'est
15 à vous de nous dire où ces documents correspondent à l'acte d'accusation.
16 Ce n'est pas aux Juges de la Chambre ni à la Défense d'essayer de
17 comprendre tout cela. Je suis vexé par l'attitude de l'Accusation, et en
18 fait, elle fait porter le blâme à la Défense. Si la Chambre de première
19 instance avait seulement accepté tous ces faits admis par rapport à ces
20 déclarations 92 bis.
21 A ce moment-là, ils peuvent réduire l'acte d'accusation pour que tout soit
22 juste pour tout le monde. Rien ne les empêche de mettre le doigt exactement
23 sur ce qu'ils pensent pouvoir prouver. S'ils savaient ce qu'ils seraient en
24 mesure de prouver, ils ne seraient pas en train de mener des enquêtes
25 maintenant. Je souhaite rappeler à la Chambre que cette Accusation n'est
26 pas la même dans un système de droits romano-germanique. Ce ne sont pas des
27 magistrats. Ce sont des parties. Ce sont des avocats, comme la Défense, et
28 c'est là où se trouve la différence. Merci.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Si nous revenons tous au calme. Une petite
2 précision. Il a été évoqué tout à l'heure l'article 65 ter (F). Comme vous
3 le savez, une fois que le Procureur a déposé les documents mentionnés au
4 paragraphe (E), le Juge de la mise en état ordonne à la Défense dans un
5 délai fixé par lui-même de déposer un mémoire préalable traitant des points
6 de faits et de droit, qui précise la nature de la Défense de l'accusé, les
7 points du mémoire préalable que l'accusé conteste et, pour chacun des
8 points, les motifs de contestation par l'accusé.
9 Comme vous vous en doutez, à l'issue de la production du mémoire préalable,
10 j'ai regardé attentivement tous les mémoires qui ont été déposés par la
11 Défense. Evidemment, j'ai constaté que chacun des accusés contestant une
12 quelconque responsabilité indiquait qu'à partir de là, ils contestaient
13 tout. Il est impossible, dans ces conditions, d'avoir un consensus sur
14 certains faits ou certaines questions de droit, puisqu'il y a une
15 contestation générale.
16 Ce n'est pas la première fois que cela existe dans un procès. Dans le
17 procès précédent que j'ai eu à connaître, où d'ailleurs, M. Mundis
18 représentait l'Accusation dans l'affaire Hadzihasanovic-Kubura, et
19 d'ailleurs Me Ibrisimovic était aussi présent, la Défense avait également
20 tout contesté. Donc quand la Défense conteste tout, bien entendu, il faut
21 que l'Accusation, à ce moment-là, prouve par ses témoins et ses éléments de
22 preuve tout ce qui est allégué dans l'acte d'accusation.
23 Tout le monde a bien compris après ce tour de table où chacun s'est
24 exprimé librement. J'ai laissé le soin à chaque avocat de bien définir sa
25 position, et il apparaît de toute évidence que la balle est dans le camp de
26 l'Accusation. C'est à elle de savoir ce qu'elle compte faire, comment
27 envisage-t-elle dans les mois, voire les années, à présenter ses éléments
28 de preuve, étant précisé que la Défense aura aussi son temps pour ses
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1 éléments à décharge. C'est pour cela qu'il m'apparaît important que la
2 Procureur, Mme Carla Del Ponte en personne, vienne nous dire comment elle
3 conçoit ce dossier.
4 Je le rappelle, ce dossier va être dans l'histoire de ce Tribunal, le
5 procès où il y aura un grand nombre d'accusés. Il y en a déjà eu dans
6 l'affaire Kupreskic, mais dans Kupreskic, il y avait en réalité très peu de
7 faits, tandis qu'ici, nous sommes dans une dimension très importante. Comme
8 c'est cette affaire qui démarre pour les procès à de nombreux accusés,
9 encore faut-il que l'Accusation nous indique le temps qu'il lui parait
10 nécessaire.
11 Il était de ma responsabilité de rappeler que malheureusement il y a une
12 résolution du Conseil de sécurité. Il y a des problèmes divers qui peuvent
13 se poser, donc comme Mme le Procureur va elle-même au Conseil de sécurité
14 pour expliquer ce qu'elle fait, elle pourrait venir ici expliquer comment
15 elle conçoit la présentation de cette affaire. Parce que c'est bien beau de
16 parcourir l'Europe pour rechercher des fugitifs, mais encore faut-il
17 également avoir une vision claire sur la façon dont on présente les
18 affaires, surtout dans un dossier, comme tout le monde l'a appelé, nous
19 avons presque 10 000 pièces à conviction, et pour le moment, 400 témoins.
20 On y verra peut-être plus clair à partir du 12 avril.
21 Je voudrais maintenant aborder les autres points à l'ordre du jour. Un
22 point que j'ai indiqué, c'est la question de l'état de santé des accusés.
23 J'estime, en tant que Juge, que j'ai une responsabilité personnelle pendant
24 le procès, notamment au regard de l'état de santé des accusés. C'est ma
25 conception.
26 De ce fait, si jamais un accusé est atteint d'une quelconque pathologie,
27 j'invite donc les avocats à m'en informer à titre confidentiel ou
28 confidentiel exporté, comme ils veulent, pour me dire qu'un tel a telle ou
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1 telle chose, pour que je le sache. Si vous ne m'adressez aucun document,
2 aucune écriture, ma conclusion sera que tout le monde va très bien. C'est
3 ce que j'espère. Mais si jamais il y avait un problème quelconque, il faut
4 me le signaler.
5 Je voulais quand même inscrire ceci pour que tout le monde soit
6 parfaitement informé que lorsqu'on a un procès qui peut durer longtemps, il
7 y a cette question dont il faut tenir compte.
8 L'autre point qui est important, et j'avais invité les avocats et
9 l'Accusation à se rencontrer, c'est la question de la durée du contre-
10 interrogatoire une fois que l'Accusation aura interrogé son témoin. Je n'ai
11 pas l'impression que tout cela a bien avancé. Je vais quand même donner la
12 parole aux uns et aux autres, parce qu'il est bien évident, comme je l'ai
13 souligné la dernière fois, si l'Accusation sur un témoin -- je vais prendre
14 le premier témoin -- un témoin qui est dans la liste des témoins, le témoin
15 2, un témoin qui est viva voce et qui est au numéro deux dans la liste des
16 témoins.
17 Concernant ce témoin numéro 2, l'Accusation avait prévu de l'interroger
18 pendant une heure et demie, parce que ce témoin ne déposera sur les points
19 1, 2, 3, 8, 9, 15, 16, 17 et 22 de l'acte d'accusation, renvoyant aux
20 paragraphes 99, 101 et 108. Donc, il est prévu une heure et demie. Alors,
21 imaginons que ce témoin viendrait demain. Que fait la Défense dans le
22 contre-interrogatoire ? Est-ce que chacun des avocats va prendre une heure
23 et demie ou un des avocats interviendrait à titre principal pour le contre-
24 interrogatoire, les autres interviendraient le cas échéant pour les
25 questions complémentaires ou subsidiaires.
26 Voilà un élément très important, car tout le monde a bien compris que
27 le calcul que je faisais sur les trois ans, deux mois et quatre jours,
28 c'était à équivalence de temps. Si, pour ce témoin, c'est une heure et
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1 demie pour l'Accusation, cela voulait dire une heure et demie également
2 pour la Défense. Mais si chacun veut prendre une heure et demie, donc ce
3 n'est pas trois ans, c'est 18 ans. Alors là, tout le monde comprend le jeu.
4 Dans 18 ans, il y a des chances que je ne sois plus de ce monde. Alors,
5 voilà.
6 Donc, je serais intéressé de savoir s'il y a eu entre les avocats des
7 contacts, et si on a avancé dans cela, parce que la durée du procès dépend
8 de cela aussi. Alors, M. Scott ou M. Mundis.
9 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Là, nous n'avons pas
10 beaucoup avancé depuis la dernière conférence de mise en état sur ce point,
11 même s'il y a eu plusieurs échanges entre les parties sur la meilleure
12 façon de procéder. C'est tout ce que je peux vous dire pour ce qui est de
13 ces rencontres entre les parties.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Karnavas.
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mis à part ces
16 écritures, je crois que nous sommes tout à fait d'accord du côté de la
17 Défense. Je peux vous dire que quatre équipes se sont rencontrées hier
18 soir. Malheureusement, les deux autres équipes n'étaient pas disponibles.
19 Mais effectivement, cette question s'est posée, nous avons longuement
20 discuté. Sachant tous que nous, en tant qu'équipe de la Défense, nous
21 devions faire preuve de discipline pour veiller à respecter certains délais
22 tout en respectant, bien sûr, la nécessité de défendre nos clients
23 respectifs.
24 Mais je répète ce que j'ai déjà dit hier soir. Il faudrait uniquement
25 poser des questions pertinentes pour chacun de nos clients respectifs.
26 Regardez l'acte d'accusation et vous verrez que 80 % [comme interprété] des
27 cas, puisqu'il y a l'entreprise criminelle commune, nous concerne tous.
28 Puis, vous avez 15 % qui concerne tel ou tel individu. Pour certains des
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1 témoins, il suffira que ce soit une ou deux équipes de la Défense qui
2 contre-interroge, parce que seuls ces clients seront concernés.
3 La Défense pense que la meilleure démarche est la suivante : nous
4 pourrions, entre nous, avant la venue dans ce prétoire, déterminer qui va
5 mener le jeu, voir quelles seraient les questions à poser, les sujets à
6 évoquer, et agir en l'avenant. Je peux vous le garantir, ceci sera
7 important pour tous les grands témoins, puisque M. Prlic est au numéro un
8 dans la liste des accusés. Souvent, je serai appelé à contre-interroger,
9 sinon tous les témoins, la plupart d'entre eux. Mais je reviens à ce que
10 j'ai déjà dit. Le postulat de chaque question devra être celui-ci. Dans
11 quelles mesures ceci est-il pertinent pour l'affaire ? Si ce n'est pas
12 pertinent, ce n'est pas nécessaire. Nous nous sommes aussi entendus pour
13 dire qu'il fallait éviter les répétitions, les redites. Si un sujet a été
14 évoqué qui peut avoir une incidence sur un autre accusé, inutile que celui-
15 ci contre-interroge. Mais il peut se présenter des cas où un sujet a été
16 évoqué, mais peut-être qu'il y a une facette, une nuance sur laquelle il
17 faut insister, vu le type de défense d'un autre accusé. Ce ne sera pas une
18 redite si un autre avocat pose une question liminaire et se concentre sur
19 cette nuance. Je pense que c'est meilleure façon de faire.
20 Il n'est pas possible d'avoir une formule mathématique, à mon avis.
21 L'Accusation peut interroger Donia pendant une heure ou deux. Moi, peut-
22 être que j'aurais besoin de deux ou trois jours, au bas mot. Peut-être deux
23 ou trois fois plus, s'il s'en tient à ce qu'il promet de dire.
24 Quelquefois, il faut tourner un peu autour du pot pour ramener le
25 témoin à répondre à la question que vous posez. Je ne dis pas que cela va
26 être le cas ici, pour ce témoin ou pour un autre, mais l'expérience que
27 j'ai, c'est qu'on ne peut pas simplement se concentrer, même si -- bon,
28 peut-être que si c'est Chambre qui pose la question, parce que vous êtes
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1 bien plus élevés que nous et il semble y avoir un rapport différent entre
2 la Chambre et le témoin. Quelquefois, il serait peut-être utile que la
3 Chambre le fasse, cela dépendra pour le témoin, cela dépendra de la façon
4 dont le témoin a été préparé ou de ce qu'il a à son ordre du jour
5 personnel. Effectivement, il sera peut-être moins prêt à répondre, et je
6 vais devoir travailler plus dur. Merci.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous vous êtes adressés au nom de l'ensemble des
8 avocats. Comme vous l'indiquez sur cette question, il est bien évident
9 quand les avocats de la Défense doivent se réunir entre eux, et comme vous
10 l'avez mentionné, doivent désigner un ou deux d'entre vous pour procéder au
11 contre-interrogatoire.
12 Alors, je voudrais vous faire les suggestions suivantes. En l'acte
13 d'accusation, trois temps forts : les faits commis dans les municipalités,
14 cette notion d'entreprise commune criminelle et la responsabilité
15 individuelle de chacun des accusés.
16 Concernant les faits, sur les faits, je reviens au témoin numéro 2, qui va
17 décrire que dans son village de Ristani, le 25 mai 1993, alors qu'ils
18 étaient dans l'appartement, il y a le HVO qui va venir les prendre, et
19 cetera, et donc relate ce qui lui est arrivé.
20 Est-il vraiment nécessaire que dans le contre-interrogatoire, chacun des
21 avocats viennent lui faire repréciser qu'est-ce qui s'était passé ? Un
22 devrait suffire, normalement, en principe. Je pense que sur ce type même de
23 faits, il suffit qu'il y ait un avocat leader pour régler le problème. Si,
24 bien entendu, une idée géniale vient à un autre avocat pendant
25 l'interrogatoire de son collègue, il peut évidemment poser aussi une
26 question, mais normalement, comme vous êtes tous d'excellents
27 professionnels, celui qui fera le contre-interrogatoire le fera
28 complètement. Donc cela peut être déjà une solution.
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1 Maintenant, j'aborde les deux autres points qui me semblent aussi
2 importants, qui sont l'entreprise criminelle commune. Je vais vous donner
3 la parole, mais je termine -- et la responsabilité pénale de chacun des
4 accusés. Il est évident, et c'est la logique qui l'impose, que lorsque
5 l'Accusation va aborder par ses témoins la question globale de l'entreprise
6 criminelle, chacun d'entre vous a un positionnement sur ce problème, donc
7 il est tout à fait logique que vous puissiez intervenir. Ensuite, si
8 l'Accusation - et je ne sais pas comment elle va procéder, mais à sa place,
9 je sais comment j'aurais fait. Si l'Accusation aborde individuellement les
10 responsabilités des uns et des autres comme elle l'a fait dans ses
11 écritures, à ce moment-là, il est tout à fait logique que si elle prend dix
12 heures pour M. Prlic, l'avocat de M. Prlic a au minimum dix heures
13 également. Cela, c'est évident. Les autres avocats peuvent intervenir si,
14 par ricochet, ils peuvent être intéressés. Voilà, cela peut être un
15 système.
16 Mais c'est à vous, entre avocats, de voir ce qu'il convient de faire. En
17 règle générale, dans les pays de droit romano-germanique, les avocats se
18 concertent entre eux pour savoir qui intervient en premier, et cetera. Je
19 pense que dans les pays "common law", cela fonctionne de la même façon.
20 Donc là, il devrait y avoir de votre part une "créativité" qui permette
21 d'éviter les problèmes, parce que si on joue la règle stricte, cela veut
22 dire que dans 18 ans, on sera tous encore là. Enfin, peut-être pas tous,
23 mais quelques-uns.
24 Oui.
25 Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
26 J'aimerais apporter un éclaircissement sur un seul point, un point qui
27 risque de poser problème à l'avenir. C'est en rapport avec une situation où
28 un conseil va contre-interroger au nom des autres. Ce n'est pas ce dont
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1 nous étions convenus. Il se peut que chacun des accusés ait sa propre
2 conception de sa défense, ce qui veut dire que chaque équipe de la Défense
3 va se préparer individuellement au contre-interrogatoire, et nous allons
4 essayer de trouver un modus operandi pour essayer de tirer le meilleur
5 parti du temps que nous avons. Si M. Karnavas pose une question que nous
6 trouvons pertinente et si nous sommes satisfaits de la réponse, nous
7 n'allons pas ajouter de question. C'est de cette façon que nous aimerions
8 coopérer pour utiliser rationnellement le temps qu'il nous est donné.
9 Je pense qu'il faut aussi tenir compte de la pertinence des éléments de
10 preuve. Nous en avons discuté hier soir entre nous. Là, nous pourrions
11 rencontrer des problèmes, surtout au niveau des témoins experts. Il faut
12 les contre-interroger sur la base de leurs rapports d'experts et des
13 témoignages qu'ils ont faits dans d'autres procès. Nous avons ainsi un
14 témoin qui a déposé dans l'affaire Milosevic, il y a eu interrogatoire
15 principal de 40 minutes, et au niveau du contre-interrogatoire, il y a eu
16 quatre heures et demie. Soyons équitables alors, là aussi.
17 M. KOVACIC : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter deux phrases. Mes
18 estimés confrères viennent de dire quelque chose à quoi nous pensions tous,
19 et je pense que là, notre position est justifiée. Le point fondamental,
20 c'est la pertinence. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'établir des
21 règles déterminées par le temps. Le point déterminant, c'est la pertinence.
22 Vous allez peut-être avoir un témoin qui dépose deux heures sans qu'aucune
23 question lui soit posée. Cependant, il faut permettre la possibilité d'un
24 conflit éventuel entre les différents systèmes de Défense. Quelque chose
25 qui compterait peut-être pour l'équipe A au moment du contre-
26 interrogatoire, ce serait bien pour cette Défense, mais peut-être pas pour
27 une autre équipe de la Défense, laquelle devra peut-être aborder une autre
28 facette du témoignage. Je pense qu'il faut en tenir compte.
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1 Autre exemple, vous venez de parler du témoin 2, de ce type de déposition
2 tout à fait typique. On peut s'attendre à ce qu'il y en ait beaucoup. Moi,
3 ma question pertinente dans l'exemple que vous avez donné, le témoin était
4 là, le HVO est entré, le témoin est arrêté et transporté, fort bien; mais
5 ma seule question, je dirais, par qui ? Qui vous a arrêté ? Quelle était
6 l'insigne ou l'écusson sur l'uniforme ? C'est tout ce qui compte parce
7 qu'effectivement, mon client est un soldat, il y a le 7,1 qui joue. Est-ce
8 qu'il était là ? Non. Est-ce qu'il aidé qui que ce soit ? On verra plus
9 tard. En vertu de l'article 7(3) il nous faut déterminer si c'étaient des
10 effectifs à lui. Au titre de l'entreprise criminelle commune, je n'aurais
11 pas besoin de ce témoin-là, bien entendu. Quelquefois ce sera différent,
12 cela pourra varier.
13 Merci, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
15 Mme NOZICA : [interprétation] Je voulais simplement ajouter un seul point
16 suite à ce qu'ont dit mes confrères et consoeurs. Je vous demande
17 respectueusement de tenir compte de ceci : pendant le procès, nous
18 utiliserons uniquement le temps nécessité par l'Accusation, en tout cas,
19 pour la plupart des témoins. Quelquefois, il faudrait plus de temps pour le
20 contre-interrogatoire de certains témoins. Il y aura sans doute des témoins
21 pour lesquels nous n'aurons pas de questions. Il faudra voir ce qui est
22 pertinent pour nos défenses respectives, et je pense qu'en fin de compte,
23 nous nous rendrons compte que nous n'allons pas utiliser plus de temps que
24 l'Accusation.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a les témoins experts, les témoins victimes,
26 les témoins oculaires qui étaient là parce que le hasard a voulu qu'ils
27 soient là et les témoins internationaux. Il y en a un certain nombre, donc
28 chacune des catégories de témoins appelle évidemment de la part de la
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1 Défense des questions qui peuvent être différentes selon la nature des
2 témoignages. Vous avez parfaitement raison de souligner cela, et justement,
3 c'est la question des témoins experts. Il est évident que les témoins
4 experts qui vont venir déposer, cela peut appeler de la part des uns et des
5 autres des questions dans le cadre du contre-interrogatoire de manière
6 approfondie, certes, mais il convient pour la Défense de bien faire le
7 distinguo entre les témoins. C'est en fonction des témoins que vous devez
8 vous adapter.
9 Si j'ai évoqué la question du témoin numéro 2, parce qu'il y a
10 beaucoup de témoins dans cette catégorie, pour que ce témoin mette en
11 évidence le fait qu'on l'a arrêté, transporté, détenu, voire maltraité ou
12 abusé. C'est à l'Accusation, bien entendu, par ses questions, mais si elles
13 sont bien centrées, de dresser le tableau, et ensuite, l'avocat leader
14 pourra contre-interroger. S'il manque des questions, les autres avocats
15 pourront intervenir. Mais faites également confiance aux Juges pour poser
16 des questions, car dans notre office de Juges, nous ne laisserons pas dans
17 l'obscurité certains points. Même si vous, vous ne posez pas les bonnes
18 questions, sachez que le Juge impartial, qui lui n'est mu que par la
19 manifestation de la vérité, posera les questions. Quoi qu'il en soit,
20 lorsque le témoin vient déposer, il faut que cela soit utile. Une audition
21 de témoin, ce n'est pas uniquement pour que chaque parti se fasse plaisir,
22 mais c'est pour la manifestation de la vérité. Et n'oubliez pas que le but
23 final de l'audition des témoins, avec la présentation des éléments de
24 preuve, c'est que les Juges en tirent, au regard de la pertinence de la
25 valeur probante, quelque chose. Donc, un témoin de l'Accusation ou de la
26 Défense, c'est parce que celui qui le cite vise un but. Si le but n'est pas
27 atteint, cela ne sert à rien de le faire venir. Lorsqu'on vise un but, il
28 faut se concentrer sur l'objectif en posant les bonnes questions.
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1 Tout à l'heure, Me Kovacic a, à juste titre, évoqué le 7(1) et le
2 7(3). Si ce témoin numéro 2 est arrêté par un soldat, se pose la question
3 évidemment qui l'a arrêté, et notamment la question du badge et de
4 l'identification. Cela évidemment, c'est à la tâche de l'Accusation, qui
5 doit justement répondre à ce type de préoccupation. Si elle ne le fait pas,
6 bien entendu, la Défense pourra toujours contre-interroger, mais sachez que
7 les Juges également ne laisseront pas cela dans le clair obscur. Nous
8 interviendrons pour avoir ce type de précision.
9 D'ailleurs, j'invite les uns et les autres à lire l'arrêt de la
10 Chambre d'appel qui a été rendu il y a quelques jours dans l'affaire
11 Stakic, où il est bien indiqué, à un moment donné, il y a eu un problème,
12 une question était restée dans le clair obscur, et la Chambre d'appel a
13 indiqué, il incombait à la Défense ou aux Juges de poser des questions.
14 Donc, faites confiance aux Juges, nous saurons intervenir quand il le
15 faudra.
16 Je vous invite donc à continuer à travailler sur cette question qui
17 est fondamentale, et il faudrait que vous arriviez très vite à trouver un
18 modus operandi.
19 Monsieur Mundis.
20 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons,
21 bien sûr, tenir compte de vos conseils et nous allons essayer de travailler
22 avec la Défense. Mais permettez-moi de dire ceci. Nous avions demandé à ce
23 qu'un point soit prévu à la Conférence de mise en état d'aujourd'hui, ce
24 point-ci pour une raison plus précise. En fait, il y a deux aspects à cette
25 question pour voir comment va se dérouler le type de contre-interrogatoire.
26 Il y a d'abord la possibilité d'avoir effectivement 18 ans de procès, comme
27 vous l'avez fort bien dit. Cela pourrait être la durée maximale de ce
28 procès.
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1 L'autre facette du problème est d'ordre plus pratique. L'Accusation
2 doit informer la section des Victimes et des Témoins pour les modalités de
3 venue des témoins, pour ne pas être à court de témoins ou pour ne pas voir
4 des témoins qui attendent plusieurs jours pour peut-être devoir être
5 renvoyés sans comparaître et ramenés plus tard à La Haye pour comparaître.
6 Nous sommes tous des professionnels et nous comprenons tous à quel
7 point il est difficile de prévoir la durée d'un interrogatoire. Je reviens
8 à ligne 2 et à la ligne 3 de la page 55 où M. Karnavas a dit qu'il "n'était
9 pas possible de trouver une formule mathématique, une panacée universelle."
10 C'est vrai. Mais l'Accusation pense qu'il faudrait avoir quand même une
11 formule assez schématique par défaut, de façon à ce que nous prévoyions
12 approximativement un échéancier des venues des témoins. On pourrait
13 aisément illustrer cette situation avec quelques exemples.
14 Nous avons dit que nous allions commencer la présentation de nos
15 moyens avec quelques témoins de taille importante, des témoins
16 internationaux qui ne sont pas des témoins sur les faits incriminés.
17 D'après les estimations du 65 ter, on exagère un peu plus par rapport aux
18 témoins qui dureraient une heure et demie. Il s'agit là de témoins qui
19 pourraient, s'agissant de l'interrogatoire principal, déposer pendant
20 quatre, cinq, six heures, parfois même huit heures. Là, le problème,
21 Monsieur le Président, c'est que quand on sait qu'il faudra plus d'une
22 journée d'audience pour l'interrogatoire principal d'un témoin, est-ce que
23 la Défense aura le droit d'avoir un jour, un jour et demi, deux, trois
24 jours en tout, pour l'ensemble des équipes ? Est-ce que ce sera six ou sept
25 jours ? C'est cela qui est important. Parce que si on commence lundi avec
26 un témoin d'un jour, est-ce que je dois prévoir le témoin suivant pour le
27 mercredi, pour le jeudi, pour la semaine d'après ou sous quinzaine ?
28 Voilà le genre de retombée pratique, et il faudra avoir une position
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1 de repli, si vous voulez. On dit, par exemple, un ratio deux à un, quatre à
2 un, pour la Défense, de façon à ce que je puisse dire à la section des
3 Victimes et des Témoins : "Mon témoin doit être là dans trois jours, ou
4 lundi prochain ou dans deux semaines et demie." Sinon, on va se trouver
5 dans une situation où on va devoir dire : Nous sommes à court de témoins
6 pour cette semaine, hélas, ou à défaut, on aura d'énormes pressions
7 exercées par le Greffe parce qu'un témoin aura déjà attendu quatre ou cinq
8 jours, et il va rentrer chez lui parce qu'il ne pourra pas témoigner avant
9 cinq ou six jours. Ce sont donc les détails plus pratiques, sans parler des
10 18 ans possibles. C'est pour cela qu'il nous faudra avoir quelques lignes
11 directrices de votre part, Monsieur le Président, de façon à être le plus
12 efficace possible dans la gestion du procès.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, vous avez parfaitement posé le
14 problème parce que vous avez, en plus du temps prévu pour l'interrogatoire
15 direct, à vous préoccuper de la venue des témoins, parce qu'il y a tout un
16 planning, et tout cela n'est pas simple. Vous venez d'identifier
17 parfaitement la question en indiquant, si je fais venir mon témoin
18 international, si je l'interroge pendant huit heures, quatre heures, j'ai
19 besoin de savoir quel est le temps accordé à la Défense, pour prévoir le
20 témoin qui va lui succéder. Vous avez très bien défini le problème.
21 De ce problème, pour le moment, je suis dans l'incapacité de vous dire
22 aujourd'hui quelle sera la position finale. Pourquoi ? Parce que j'attends,
23 pour le 14 avril, votre document complet faisant le lien entre les
24 documents, les témoins et les faits. A titre d'exemple, j'en reviens à mon
25 témoin numéro 2. Le témoin numéro 2, où il est prévu une heure et demie,
26 vous avez dans vos écritures parfaitement indiqué des mentions que
27 j'allais, dans mon ordonnance, demander. J'ai le nom du témoin, le résumé
28 sur quoi il va déposer, les chefs de l'acte d'accusation, les paragraphes
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1 et le temps 1,5, donc une heure 30. Mais quand ce témoin va venir, je ne
2 sais pas aujourd'hui quel document vous allez présenter. Cela concerne ce
3 qui s'est passé au village de Ristani. Il y a eu également d'autres
4 personnes qui ont été tuées, et cetera. Je ne sais pas, est-ce que vous
5 allez introduire des documents ou pas ?
6 Témoin par témoin, je pourrais faire cette démonstration. Le travail
7 qui vous a été demandé permettra déjà d'avancer. Alors, il y a certains
8 témoins où il n'y aura pas de documents, mais il y a d'autres témoins où il
9 y aura beaucoup de documents; c'est évident.
10 Pour cela, est-ce que la Défense prendra du temps sur les documents
11 par rapport au témoignage oral ? Vous êtes, les uns et les autres, comme je
12 l'ai dit, de grands professionnels. Vous savez très bien que, dans ce type
13 d'affaire, ce qui compte aussi, voire principalement, ce sont les
14 documents. Car les témoignages, c'est une chose, mais un témoignage est
15 toujours relatif. Par contre, un document a son poids. Une Défense qui fait
16 bien son travail va aussi se consacrer aux documents, surtout dans les
17 opérations militaires où il y a des ordres, et cetera, la connaissance,
18 donc il y aura un débat sur les documents. Cela peut prendre également
19 beaucoup de temps.
20 Evidemment, j'ose espérer, comme je l'ai fait à mon niveau, que les
21 Défenseurs se sont déjà plongés depuis plusieurs mois dans les 10 000
22 documents. J'ose espérer également que les Défenseurs ont fait comme moi,
23 se sont plongés dans les vidéos. Parce que si vous n'avez pas fait ce
24 travail, là vous allez avoir un handicap.
25 Alors, pour répondre parfaitement à votre question, qui commence à
26 poser problème, ce dont j'ai besoin, et cela je l'avais demandé. Je vous
27 avais demandé de me donner la programmation pour les deux mois à venir, des
28 témoins que vous envisagiez de faire venir. Le premier témoin, d'après ce
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1 que j'ai compris, c'est le témoin expert Donia. C'est bien cela ? C'est
2 bien le premier témoin qui va venir ?
3 Monsieur Scott.
4 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Si vous voulez
5 m'accorder quelques instants, s'il vous plaît. Si nous pouvons passer à
6 huis clos partiel, parce que quelques témoins vont peut-être demander des
7 mesures de protection.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Huis clos partiel.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
10 [Audience à huis clos partiel]
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22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE ANTONETTI : L'Accusation nous a donc informé qu'il y a une liste
24 de témoins qui a été transmise à la Défense et qui sera fournie à la
25 Chambre à compter du 14 avril, conformément à l'ordonnance, et que dans la
26 venue de ces témoins, une logique sera respectée afin de permettre une
27 bonne compréhension du dossier. Donc, je vous donne acte de cela. Mais cela
28 ne résout pas pour autant la question de la durée.
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1 Alors, sur la question de la durée, d'abord, mon handicap, c'est que
2 je n'ai pas mes deux autres Juges pour en discuter, ceux de l'audience,
3 parce qu'ils n'arriveront que 15 jours avant le début du procès. Vous
4 voyez, j'ai déjà donc ce problème, parce que j'ai peut-être un avis, mais
5 eux, ils ont peut-être un autre avis. Là, je ne peux pas me porter fort
6 pour eux.
7 Mais quoi qu'il en soit, pour le moment, sur ces témoins, il y a des
8 durées indicatives que vous aviez indiquées dans vos écritures. Donc, la
9 seule question qui n'est pas résolue, c'est pour le témoin numéro 1,
10 combien de temps la Défense doit avoir.
11 La règle générale dans tous les procès jusqu'à présent, c'est que
12 pour ce type d'affaire, la règle, c'est que la Défense a autant de temps
13 que l'Accusation. La seule différence, c'est qu'ici il se trouve que
14 l'Accusation, par rapport à l'Accusation, ils sont six défenseurs. Mais
15 comme le premier témoin, il s'agit d'un témoin victime, peut-être que les
16 avocats entre eux se mettront d'accord pour savoir lequel procèdera au
17 contre-interrogatoire. Donc, il faut que le procès démarre avec une
18 certaine flexibilité et qu'au fur à mesure, nous corrigions le tir.
19 Pour le numéro 1, ma réponse, pour le moment, c'est -- pouvez-vous me
20 l'indiquer, parce que je n'ai pas eu le temps de regarder, quel était le
21 temps qui était prévu pour le témoin numéro 1. C'est une heure et demie,
22 deux heures ou trois heures ? Deux heures ?
23 M. SCOTT : [interprétation] Pardonnez-moi. Excusez-moi, Monsieur le
24 Président. Pardonnez-moi.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Deux heures et demie ?
26 M. SCOTT : [interprétation] Oui, sur la liste 65 ter, oui, je crois que
27 c'est cela. C'est, en tout cas, ce qui nous sert d'orientation ou de
28 principe directeur sur ce point.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : S'il est prévu une durée de deux heures et demie, le
2 minimum, c'est que la Défense a deux heures et demie. Entre vous, voyez
3 lequel sera l'avocat leader qui contre-interrogera cette dame. Voilà. Et
4 ensuite, on verra au coup par coup, parce que je ne peux pas, moi, régler
5 ce problème tout de suite, d'autant plus que cela va dépendre également de
6 la réponse à ma demande sur la durée du procès. Est-ce que vous allez
7 prendre un an, deux ans ou trois ans, 18 ans ? Je ne sais pas. Mais c'est
8 Mme Carla Del Ponte qui est la responsable, c'est à elle de nous dire.
9 Voilà. Alors, donc il y a aussi cette question.
10 Bon. Donc on aura l'occasion d'y revenir, à moins que Me Karnavas, qui
11 brûle d'intervenir.
12 Maître Karnavas.
13 M. KARNAVAS : [interprétation] Juste un ou deux points que j'aimerais
14 évoquer. Pour ce qui est du premier témoin, je remarque qu'il y a deux
15 prénoms différents pour ce qui est de ce premier témoin et deux dates de
16 naissance différentes. Je suppose que l'Accusation va nous dire s'il s'agit
17 de la même personne ou non, s'il s'agit de deux personnes différentes. Je
18 ne veux pas citer de noms, mais c'est quelque chose que je souhaite porter
19 à votre attention.
20 Pour ce qui est du quatrième témoin qu'ils ont indiqué, je souhaite faire
21 remarquer que c'est le 116 sur la liste 65 ter. C'était la semaine dernière
22 que nous avons reçu cela. Nous n'avons qu'une seule vidéo, eu égard à ce
23 témoin. Aucune pièce n'a été communiquée par rapport à ce témoin.
24 J'évoque cette question, car si nous devions prévoir le temps qu'il nous
25 faudrait pour contre-interroger certains témoins, il faut que nous sachions
26 cela à l'avance, c'est quelque chose qui aurait dû nous être communiqué il
27 y a des mois, je dois dire dire. Tous les documents auraient dû nous être
28 communiqués, tous les documents ayant rapport avec les témoins.
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1 Un dernier point, l'Accusation a parlé de son attitude magnanime
2 parce qu'elle nous a communiqué des pièces avant le 14 avril, donc 15 jours
3 à l'avance, et ils nous ont donné deux des noms qui figurent sur la liste.
4 Ensuite, l'Accusation poursuit en disant qu'ils ont un plan logique. Cela
5 fait longtemps qu'ils y travaillent. Je me souviens qu'au mois de novembre
6 ou décembre, lors de l'une de nos Conférences de mise en état, vous
7 souhaitiez, Monsieur le Président, que l'Accusation présente ses moyens de
8 façon logique, où on parle de différents sujets les uns après les autres.
9 Si vous regardez ce qui nous est présenté aujourd'hui, cela ressemble
10 davantage à une production hollywoodienne. Si nous étions devant un jury,
11 je comprends très bien, il serait important d'avoir une vidéo pour
12 commencer, d'avoir les victimes et d'avoir quelque chose qui est mis en
13 scène. Il y a eu des victimes de part et d'autre dans cette guerre, et
14 toutes les parties se sont mal comportées à différentes occasions. Mais
15 c'est ce que nous avons ici. Ensuite, nous avons ce que j'appellerais une
16 approche particulière qui consiste à présenter quatre témoins qui ne seront
17 pas forcément présentés dans un ordre précis, ce que j'appelle, en fait,
18 une attitude ou une approche ratatouille. On ne présente pas un groupe de
19 témoins de façon cohérente.
20 C'est quelque chose que j'ai voulu porter à votre attention, car si
21 l'Accusation souhaite se lever pour attaquer la Défense et dire qu'ils ont
22 été magnanimes. Ils nous disent qu'ils vont présenter leurs moyens d'une
23 certaine façon. Ils ne le font pas. C'est leur thèse, ils peuvent la
24 présenter comme bon leur semble. Mais si les éléments sont présentés de
25 façon complexe, à ce moment-là, il nous faudra beaucoup de temps pour
26 essayer de comprendre comment il faut aborder toutes ces questions. Cela,
27 c'est la première question.
28 La deuxième question c'est que je pense que si ce plan logique avait
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1 été préparé des mois à l'avance, il devrait y avoir déjà des différentes
2 catégories, des différents blocs, et un ordre dans lequel ils souhaitent
3 présenter tout ceci, comme un plan, un plan des différents sujets à
4 aborder. Ils pourraient nous le communiquer, donc le plan des sujets
5 abordés des témoins. A ce moment-là, nous saurions que pour un groupe de
6 personnes et ce groupe de sujets, nous n'avons pas besoin de nous en
7 préoccuper avant l'année prochaine, par exemple.
8 Et ceci est juste, car comme l'a dit M. Scott, il connaît bien l'affaire,
9 l'Accusation connaît bien l'affaire mieux que tout autre, ce qui est
10 normal, car c'est leur affaire. Donc, pourquoi ne pas être un peu plus
11 transparents ? Si véritablement ils recherchent la vérité, si véritablement
12 ils veulent se montrer équitables envers l'accusé, c'est comme cela qu'il
13 faut procéder. Egalement, il faut procéder de cette manière envers la
14 Chambre de première instance, car vous prenez part à ces questions ainsi
15 que vos deux collègues, vous posez des questions, et ceci vous permet
16 également de savoir où tourner votre attention et centrer votre attention.
17 C'est tout ce que je voulais dire, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic.
19 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Un ou deux mots
20 sur la préparation des témoins dont on nous dit qu'un passera en premier,
21 l'autre passera en second. Enfin, voilà, nous ne savons pas très bien, mais
22 en parallèle, le bureau du Procureur nous communique un certain nombre de
23 documents.
24 Il y a un article 68 qui malheureusement, est souvent évoqué devant
25 les Chambres et dans cette Chambre-ci également, et je fais valoir ceci :
26 les documents relevant de l'article 68 auraient dû être communiqués depuis
27 longtemps déjà, depuis des mois, ce qui n'a pas été le cas.
28 Le 16 mars, à savoir, il y a deux semaines, nous avons reçu une
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1 lettre de l'Accusation nous indiquant que de nouvelles communications ont
2 été faites par le biais du système de communication électronique, EDS, et
3 nous avons constaté effectivement qu'il y a deux nouveaux classeurs, et
4 pour le compte rendu, nous souhaitons dire que l'un de ces classeurs relève
5 de l'article 68, donc c'est quelque chose qui nous a été communiqué très
6 tardivement. Ceci contient, comme l'a dit l'Accusation, 96 documents; 96
7 documents, ma foi, puisque nous devons traiter et gérer des milliers de
8 documents, cela n'a pas grande importance, certes. Mais lorsqu'on ouvre ces
9 documents électroniques, on constate qu'il existe en réalité 391 dossiers.
10 Cela dépend évidemment du dossier, car il y a aussi des images parmi tous
11 ces documents, compte tenu des autres classeurs qui relèvent de l'article
12 66, bon an, mal an, ceci doit représenter quelque 5 100 pages. Donc, on ne
13 peut pas y consacrer un après-midi ou deux après-midi. Je crois que c'est
14 un certain nombre de jours de travail de la part de nos conseils.
15 Dans la même lettre qui est datée du 16 mars, l'Accusation nous
16 informe du fait qu'elle va nous envoyer tous ces documents sur des DVD.
17 C'était soit des enregistrements vidéos ou audio, et j'ai vérifié et je
18 n'ai pas pu tout vérifier, mais pour la plupart, il s'agit d'éléments qui
19 permettent de remplacer une traduction qui devrait être faite dans la
20 langue de l'accusé, donc ceci n'est pas fourni sur un support papier, mais
21 sous forme vidéo.
22 Je ne vais pas entrer dans les détails de tout ceci, mais ces DVD,
23 encore une fois, il y a un DVD qui relève de l'article 66. Il y a 16
24 enregistrements audio. Il y a ceux qui relèvent de l'article 66, 27, 14,
25 14, 25, et cetera.
26 En d'autres termes, l'accusé, bien évidemment, est en droit de
27 recevoir les documents dans une langue qu'il comprend. Nous connaissons les
28 difficultés techniques que cela engendre, mais quelquefois, il devrait y
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1 avoir des exceptions, et l'Accusation n'est pas en mesure de nous fournir
2 une traduction écrite. Au lieu de cela, ils nous remettent une vidéo ou un
3 enregistrement audio. Vous pouvez vous imaginer la situation, Monsieur le
4 Président. Le témoin est interrogé par l'Accusation, par les enquêteurs, et
5 en général, ceci peut prendre un jour, deux jours, voire même trois jours.
6 Au lieu de taper ces documents en croate pour mon client de façon à ce
7 qu'il puisse les lire en l'espace de quelques heures et moi aussi, bien que
8 je lise la version anglaise, il aurait besoin du même temps que le temps
9 consacré à l'entretien d'origine.
10 Si vous vous livrez à un jeu mathématique, dans ce cas-là en particulier,
11 pour ces deux vidéos et ces enregistrements audio, mon client devra rester
12 deux ou trois mois supplémentaires à Zagreb ou à Scheveningen, cela n'a pas
13 d'importance, simplement pour écouter ce qu'un témoin a dit au cours de
14 l'entretien.
15 Encore une fois, je ne vais pas me plaindre si ici et là, à cause d'erreurs
16 ou d'omissions, nous travaillons avec des milliers de documents, si
17 l'Accusation met une "communiquing" [phon] traduction en temps et en heure.
18 Au lieu de cela, ils me remettent une vidéo. Ecoutez, nous serons tout à
19 fait d'accord pour nous adapter, mais si cela devient une pratique
20 courante, je ne vais pas m'étendre davantage là-dessus, car je n'ai pas non
21 plus toute la journée pour en parler, mais j'ai pris le temps de le faire
22 aujourd'hui. A ce moment-là, nous perdrons notre temps, nous ne pouvons pas
23 faire notre travail.
24 J'ai besoin de préparer les mémoires préalables, et mon client était là,
25 pas moi, donc il sait quelque chose. J'ai besoin de voir mon client. J'ai
26 entendu des témoins. J'ai lu des documents et j'ai appris quelque chose à
27 propos de cela. Mais mon client était là, sur place. Je ne peux pas parler
28 des faits sans avoir un retour de la part de mon client. L'Accusation voit
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1 qu'il y a une occasion ici de garder le client dans le noir, dans
2 l'obscurité.
3 Donc, je ne suis pas en mesure de parler de cela. J'en viens
4 maintenant au fait. Je ne suis pas en mesure d'aborder la question de
5 certains de ces témoins, car mon client n'a pas encore lu la traduction,
6 ou, bien sûr, j'ai une autre possibilité qui s'offre à moi. Je peux
7 demander à un ou deux membres de mon personnel, vous savez, nous sommes
8 très limités d'après la politique du greffe, de traduire ceci pour mon
9 client, et à ce moment-là, je pourrais en parler avec lui et voir si ces
10 témoins sont importants pour moi ou non. A ce moment-là, je pourrais vous
11 dire, Monsieur le Président, je vais avoir dix documents à soumettre à ce
12 témoin, j'aurais besoin de le contre-interroger sur tel et tel point, et
13 cela prendre une heure ou dix heures.
14 Nous sommes dans l'obscurité pour aussi longtemps que possible et
15 autant que faire se peut. Ceci est un exemple assez flagrant. Le Procureur
16 nous donne le document que mon collègue vous a montré il y a quelque temps,
17 nous avons des enregistrements audio que nous avons
18 reçus aujourd'hui, document qui est en ma possession, qui m'a été remis par
19 le Procureur, la lettre du 16 mars, et cetera.
20 Malheureusement, nous allons siéger. Je ne parle au nom de mes autres
21 confrères et consoeurs. Nous devons attendre et savoir quel témoin va venir
22 témoigner, ce que le témoin va véritablement dire ou ne pas dire et ce que
23 j'ai reçu avant le contre-interrogatoire pour pouvoir en parler dans le
24 détail.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : -- tous les deux. Tout d'abord, d'après ce que j'ai
26 compris de l'exposé de M. Scott, les premiers témoins qui vont venir, c'est
27 en quelque sorte un patchwork d'illustrations de la cause. Me Karnavas a
28 parlé de production hollywoodienne. Parfois, il y a des productions
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1 hollywoodiennes de grandes qualités. Attendons de voir ce qu'est ce
2 patchwork qui, normalement, doit être relié à la présentation orale de la
3 cause lorsque le procès va démarrer. Si je comprends bien, l'Accusation va,
4 dans sa présentation, nous décrire sa logique de la présentation de ses
5 moyens de preuve. Aussitôt, on aura des illustrations de cette logique par
6 les témoins qui ont été cités. Ce n'est qu'après que la logique sera
7 respectée par les témoins. C'est comme cela que j'ai compris.
8 Tout à l'heure, Maître Kovacic, vous avez abordé les difficultés de la
9 communication électronique. Je suis parfaitement d'accord avec vous. C'est
10 parce que je me suis rendu compte de ce problème, qu'aujourd'hui vous êtes
11 là. Parce qu'au départ, M. Praljak se défendait tout seul, sans avocat, et
12 on lui communiquait par le système électronique les éléments de preuve. Il
13 y avait ce problème, évidemment, des documents non traduits dans sa langue,
14 qui posait un véritable problème. Pour trouver une solution, la meilleure
15 était que ces avocats soient très vite désignés. C'est dans ces conditions
16 que tous les deux vous avez été désignés.
17 Il est exact que dans la communication électronique, il y a des documents
18 qui sont en anglais. Le principe général de la communication électronique,
19 c'est que dans la mesure où les avocats pratiquent l'anglais et le B/C/S,
20 ils peuvent communiquer avec leur client. Alors, quid de ces vidéos qui
21 sont nombreuses, et qui, effectivement, pour certains ne sont pas
22 traduites ? Quand j'ai reçu, conformément à ma demande les CD-ROM, j'ai
23 commencé à les visualiser. J'ai constaté que beaucoup de reportages
24 n'étaient pas traduits. Soit certains l'étaient, d'autres ne l'étaient pas.
25 La question qui m'est venue à l'idée immédiatement, c'est de savoir à quel
26 moment le Procureur va introduire ces vidéos.
27 Il y a deux façons de faire. Il y a la façon dont nous avions procédé dans
28 l'affaire Hadzihasanovic, puis il y a la façon courante. Dans l'affaire
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1 Hadzihasanovic, nous avions réservé plusieurs jours à la diffusion des
2 vidéos. Les vidéos étaient diffusées, tout le monde les regardait et la
3 parole était donnée aux avocats pour contester la fiabilité, et cetera,
4 ensuite, nous avions décidé de l'admission. C'est une technique.
5 La deuxième technique est la suivante; à partir de la liste des témoins et
6 de la liste des pièces à conviction, les vidéos peuvent être introduites à
7 ce moment. Prenons un cas simple, Mostar, il y a beaucoup de vidéos sur
8 Mostar, énormément. L'Accusation peut faire venir un témoin de Mostar,
9 commence à lui poser quelques questions et tout de suite dit : "Je vais
10 demander la diffusion de la vidéo." La vidéo passe et l'Accusation continue
11 le contre-interrogatoire en disant : "Vous venez de voir quelques images.
12 Etiez-vous là ?" Ensuite, on demande l'admission de la vidéo.
13 Pour cela, tout va dépendre de la liste que j'ai demandée. En principe, à
14 partir des témoins, on devrait avoir les documents. Même si vous n'avez pas
15 cela, même si vous ne comprenez pas la langue, faites comme moi, regardez
16 la vidéo, puis vous l'écoutez et vous l'utiliserez après lors du contre-
17 interrogatoire. Parce que même s'il y a des vidéos, à mon avis,
18 lorsqu'elles passeront, vous n'aurez pas dans la langue de l'accusé des
19 traductions. Il y a des chances. Quand la vidéo passe, la bande de son est
20 traduite par les cabines d'interprètes, ce qui fait que les accusés auront
21 dans leur langue le contenu.
22 Je ne parle pas de l'interview de M. Praljak pendant plus d'une heure que
23 nous avons en vidéo, là, comme il s'exprime dans sa langue, il n'y aura
24 aucun problème pour lui. Mais il y a d'autres vidéos, par exemple, tournées
25 par la télévision espagnole, la TVE, où le commentaire est en espagnol. Si
26 je comprends l'espagnol, peut-être que vous, vous ne le comprenez pas.
27 Encore faudra-t-il qu'il y ait une traduction en anglais et en B/C/S du
28 commentaire espagnol.
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1 Pour les vidéos, j'invite l'Accusation à bien vérifier toutes les vidéos.
2 J'indique également à l'Accusation, que parfois, il y a des vidéos - quand
3 vous faites venir la vidéo, vous avez l'impression que c'est sur une
4 période donnée, puis vous vous apercevez que la période est beaucoup plus
5 longue. Il y en a une, je vous cite de mémoire. Il y a une scène qui se
6 passe sous la neige, puis il y a une image après, c'est le plein été. C'est
7 la même vidéo. Donc, il s'est passé quelque chose. Voilà. Rien ne
8 m'échappe. Je vous le signale.
9 Il incombera à l'Accusation de savoir comment elle va introduire ces vidéos
10 et à quel moment, et cetera. Il y a deux solutions; ou on passe la vidéo à
11 tout le monde lors d'une audience et plusieurs audiences ou vous
12 l'introduisez témoin par témoin. C'est à vous de voir. Moi, en l'espèce, je
13 n'ai rien à dire.
14 Comme d'ailleurs, lorsque la Défense viendra, si elle a des vidéos à
15 passer, elle agira comme bon lui semble.
16 Il est pratiquement l'heure de faire la pause. Je vais faire la pause
17 pour continuer après d'autres sujets parce qu'on ne les aura pas tous
18 épuisés. Il est quasiment midi et demi. Nous reprendrons à
19 1 heure moins 10.
20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 29.
21 --- L'audience est reprise à 12 heures 52.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Pour l'heure qui nous reste,
23 on va essayer d'accélérer.
24 Tout d'abord, suite aux interrogations de l'Accusation concernant le
25 calendrier de la venue de ces témoins, il y a une question fondamentale qui
26 se pose - là, je suis obligé de passer à huis clos. Nous passons à huis
27 clos, Madame la Greffière.
28 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
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27 [Audience publique]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, audience publique. Je voudrais aborder la
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1 question des témoins experts. Pour le moment, j'ai un tableau où il y a dix
2 témoins experts; le 19, qui est un expert militaire; le 27, qui est un
3 expert financier; le 60, qui est l'expert historique, M. Donia, dont nous
4 avons eu un rapport; le 74, qui est un graphologue; le 157 qui est un
5 expert historique; le 185, qui est un militaire; le 218, qui est un expert
6 historique; le 222, qui est un démographe; le 226 qui est un expert
7 historique; et le 233 qui est expert en tirs.
8 Il y a une particularité, c'est que parmi la liste des témoins 92
9 bis, on trouve trois autres experts, dont M. Donia. Donc on ne sait plus
10 dans quelle catégorie il est. Est-ce qu'il est viva voce, ou 92 bis ? On a
11 également deux experts juridiques dans le 92 bis. Alors, concernant les
12 experts, première réflexion, il y a plusieurs experts historiques. Est-ce
13 bien nécessaire ? Est-ce qu'un ne suffirait pas ? Pourquoi tous ces
14 historiques ?
15 Deuxièmement, il y a un expert graphologue. S'il y a un graphologue, c'est
16 que vous estimez qu'il y a peut-être une contestation sur certains
17 documents. Alors un graphologue va venir pour dire, cela, c'est la
18 signature de Praljak, cela, c'est la signature de M. Prlic. Bon. Mais il
19 n'y a peut-être pas de contestation de signature. Je ne sais pas si c'est
20 vraiment utile de faire venir un graphologue, à moins que vous ayez une
21 idée précise que je ne connais pas.
22 Bon. Expert militaire. Je ne sais pas non plus dans quel sens; est-ce que
23 c'est un expert qui va nous parler du matériel des armes ou des angles de
24 tir ? Si ce sont les angles de tir, c'est peut-être la question des
25 snipers. Là, je ne sais pas.
26 Par ailleurs, il y a un expert démographique. Est-ce que c'est un véritable
27 problème ? Nous savons qu'en les municipalités, il y avait des compositions
28 ethniques différentes. Est-ce qu'il y a lieu d'approfondir cette question,
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1 surtout s'il n'appelle pas de la Défense des observations particulières.
2 Est-il nécessaire de faire venir l'expert démographique ?
3 J'en reviens au rapport de M. Donia que nous avons eu les uns et les
4 autres. Première observation, j'aurais aimé que dans ce rapport il y ait
5 des notes de renvoi de page, non pas aux numéros ERN mais aux numéros de
6 votre liste des pièces à conviction. Cela aurait été plus simple. Parce que
7 cela permet de suivre. Parce qu'un numéro ERN, c'est beaucoup plus
8 compliqué à rechercher. Par exemple, en note bas de page 40 dans ce
9 rapport, il y a B/C/S ERN 004498892. Il aurait été plus simple de marquer
10 le numéro qui figure dans la liste. Voilà quelques observations.
11 En théorie, conformément à l'article 94 bis, la Défense prend
12 connaissance du rapport, elle a normalement un mois pour y répondre. Il y a
13 une question de date. Parce qu'un mois, il faut un mois avant qu'il arrive,
14 parce que si le mois est postérieur à la venue du témoin, là, il y a un
15 véritable problème.
16 La Défense peut peut-être me dire quelles sont les difficultés qu'ils
17 rencontrent. J'ai parcouru ce rapport très rapidement. Il n'y aura peut-
18 être aucune difficulté particulière. Si la Défense veut que le témoin
19 vienne, peut-être qu'un contre-interrogatoire sera suffisant. Mais je ne
20 connais pas la position des uns et des autres.
21 Monsieur Scott, sur les experts, pouvez-vous éclairer ma lanterne ?
22 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas les numéros
23 des témoins, je ne les ai pas sous les yeux. Pour éviter de dire des
24 erreurs, je préférerais passer à huis clos partiel, s'il vous plaît.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-on aller à huis clos partiel, s'il vous plaît.
26 M. LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes à
27 huis clos partiel.
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15 [Audience publique]
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci. Pour ce qui est du rapport du Dr
17 Donia, si c'est comme cela que vous voulez l'appeler, je décide de ne pas
18 l'appeler. Cela n'est pas un rapport d'expert. La première chose que j'ai
19 remarquée, c'est qu'il y avait des notes en bas de page, davantage de notes
20 en bas de page que le rapport qui a été présenté dans une autre affaire où
21 il n'y avait pas de notes en bas de page du tout. Ceci me paraît assez
22 choquant, car c'est censé être un universitaire qui a fait une thèse de
23 doctorat, en histoire. Ceci porte sur une période qui n'est pas pertinente
24 par rapport à l'acte d'accusation.
25 J'estime que ceci n'est pas un rapport en tant que tel. Cela couvre un
26 certain nombre de points. Au niveau du titre on peut lire
27 - je ne me souviens pas exactement, mais cela ne couvre pas l'ensemble de
28 l'acte d'accusation; cela ne couvre qu'une partie des points ou certaines
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1 des périodes couvertes par l'acte d'accusation. Certaines périodes sont
2 contenues dans ce document, certaines périodes ne sont pas pertinentes pour
3 les affaires qui nous concernent.
4 Comme l'a dit M. Scott, au niveau des réunions 65 ter, ils allaient
5 remettre -- la Défense allait poser des questions qui remontaient au Moyen
6 Age, les années 1500. Je souhaite clairement indiquer que telles ne sont
7 pas nos intentions.
8 Je souhaite m'en tenir à la période couverte par l'acte d'accusation
9 1991, 1994. Nous allons repartir à un certain nombre d'années, mais il est
10 inutile de parler du Moyen Age.
11 Nous contestons ce rapport en tant que document ou ce document. Je
12 suis disposé à faire un dépôt d'écriture pour indiquer très précisément ce
13 que je conteste. Certaines choses je trouve troublante. Certaines de ses
14 conclusions. Il fait des généralisations hâtives, sans pourtant, citer ces
15 références. Lorsqu'il cite ces références, il cite des journaux dans bon
16 nombre de cas. Comment les journaux ou la presse peut-elle, en temps de
17 guerre ou une période assez turbulente, où la presse était très liée à un
18 parti politique ou à un autre, à une nation ou à une autre, comment peut-on
19 se fier à ce genre de choses comme étant un document faisant foi. Vous
20 allez y tirer des conclusions. En tant qu'universitaire, vous allez
21 demander à la Chambre d'être d'accord avec tout cela et en déduire une
22 conclusion tout à fait raisonnable.
23 Nous contestons ce rapport et nous estimons qu'il ne devrait
24 absolument pas être versé du tout. Le Dr Donia peut venir en personne, il
25 peut présenter ce qu'il veut présenter, il peut se défendre lui-même. Il a
26 témoigné de part et d'autre dans bon nombre d'affaires déjà, et il peut
27 venir le faire. Mais pour nous, ceci n'est pas un rapport. Je souhaite
28 ajouter - c'est quelque chose qui sera consigné au compte rendu d'audience
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1 pendant le procès - il a été recruté par l'Accusation. C'est un homme qui a
2 été salarié par l'Accusation. Ce n'est pas un expert indépendant; c'est un
3 analyste. Il a été employé par l'Accusation. Ils essaient de le transformer
4 en témoin expert comme une autre personne évoquée par l'Accusation. Nous-
5 mêmes, nous faisons la différence entre quelqu'un qui a des attitudes
6 partisanes, subjectives et qui est concentré sur les -- qui s'attache aux
7 résultats, par opposition à un expert qui peut ne pas être d'accord sur
8 certaines analyses et certains points de vue. Le
9 Dr Donia et l'autre monsieur ne sont certainement pas des témoins experts.
10 D'anciens employés de l'Accusation. C'est comme si vous avez un des
11 Procureurs ou un des membres du bureau du Procureur qui vient témoigner ici
12 dans cette affaire. Cela revient au même.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que tous les autres avocats sont sur le même
14 plan. On va essayer de gagner du temps parce qu'il me reste juste un quart
15 d'heure.
16 Mme NOZICA : [interprétation] Je voulais simplement évoquer quelque chose
17 qui n'était pas en rapport avec ce sujet, qui portait sur quelque chose
18 aussi important que vous avez soulevé, Monsieur le Président. L'Accusation
19 n'a pas répondu. C'est le nombre de notes de bas de page de mémoire du
20 Procureur. Vous parliez de ces numéros, c'est important pour la Défense,
21 très important.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant les "footnotes" tant du mémoire de
23 l'Accusation que ce rapport d'expert. Comme l'Accusation a maintenant la
24 liste des pièces, si elle pouvait, dans son mémoire préalable, en faire un
25 modifié en faisant les références par rapport à la liste et non pas avec
26 les numéros ERN, ce serait beaucoup plus simple. Cela ne doit pas très
27 compliqué. Surtout avec les ressources que vous disposez, vous pouvez très
28 bien faire ce travail et me recommuniquer un mémoire préalable conforme aux
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1 numéros des pièces, puis à vos experts salariés ou rétribués, leur demander
2 également de faire ce travail.
3 Concernant l'expert, je n'ai pas le CV de l'expert. M. Donia, je ne
4 sais pas qui c'est, en réalité. La Défense doit me répondre avant le 13
5 avril sur ledit rapport, c'est-à-dire, je vois très bien que vous en
6 demandez la non admission et la venue de ce témoin.
7 Je continue toujours en audience à huis clos. J'aborde la visite sur
8 les lieux. On repasse à huis clos.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
10 Monsieur le Président.
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2 [Audience publique]
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Je disais qu'en audience publique, je dois clôturer
4 cette Audience de mise en état. La prochaine Audience de mise en état se
5 tiendra le 12 avril, à 9 heures du matin, je crois, sauf erreur de ma part.
6 Nous aurons, comme aujourd'hui, toute la journée pour avancer dans les
7 problèmes résiduels. J'espère que nous aurons le plaisir de voir Mme Carla
8 Del Ponte venir nous expliquer comment elle compte traiter cette affaire
9 conformément à la résolution du Conseil de sécurité, parce que c'est un
10 véritable problème de fond. Puis nous aborderons après toutes les autres
11 questions, parce qu'il y a un certain nombre de points que je n'ai pas pu
12 évoquer, ne serait-ce que la question de l'admissibilité des pièces.
13 Alors, il était prévu, en principe, le 12 avril, après l'audience, une
14 démonstration du système e-court. Mais si jamais nous n'avons pas le temps,
15 je donnerais priorité à l'Audience de mise en état, et le système e-court,
16 vous pourriez le voir ultérieurement un autre jour.
17 Etant précisé que lorsqu'on a fait la démonstration, j'ai demandé à ce
18 qu'il y ait une imprimante en couleur, on m'a donné des garanties comme
19 quoi il y aura une imprimante en couleur, donc vous aurez, comme à
20 Hollywood, des documents multicolores, et par ailleurs, j'ai également
21 demandé d'avoir des écrans plus grands. Alors, l'idéal aurait été d'avoir
22 quasiment un écran de cinéma pour projeter sur l'écran les vidéos, et
23 cetera. On m'a dit qu'il y aura peut-être un écran plus grand, mais je ne
24 sais pas lequel. Voilà. Je remercie à nouveau le greffe pour toutes les
25 dispositions qu'il prend pour que ce procès se déroule dans les meilleures
26 conditions possibles.
27 Je vous remercie, et nous nous retrouverons le 12 avril.
28 --- La Conférence de mise en état est levée à 13 heures 54.