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1 Le mardi 9 mai 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, veuillez appeler le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : Bonjour, Monsieur le Président, et bonjour à tous. Affaire
9 numéro IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier, je salue toutes les
11 personnes présentes pour cette audience de ce jour.
12 Nous allons poursuivre nos travaux par la continuation de l'interrogatoire
13 principal. Nous avons fait un calcul, Monsieur Mundis, et vous avez utilisé
14 presque trois heures, donc, 176 minutes. Il vous reste une heure. Alors, il
15 est 9 heures 05, vous avez jusqu'à 10 heures 05. Allez-y.
16 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Est-
17 ce que vous voulez que les parties se présentent aux fins du compte rendu
18 d'audience ?
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas nécessaire puisque tout le monde est
20 présent.
21 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
22 LE TÉMOIN : EDWARD VULLIAMY [Reprise]
23 Le témoin répond par l'interprète]
24 Interrogatoire principal par M. Mundis : [Suite]
25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vulliamy.
26 R. Bonjour.
27 Q. A la fin de la journée d'hier, nous parlions du camp de Ljubuski.
28 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, avec l'aide du système
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1 e-court peut-on montrer au témoin la pièce qui a reçu le numéro P9019.
2 Q. Monsieur Vulliamy, est-ce que quelques images sont affichées à l'écran
3 devant vous ?
4 R. Oui, je vois deux photographies.
5 Q. Reconnaissez-vous ce qui se trouve à l'écran ? Un instant.
6 R. Non, pas comme cela, tout de suite.
7 Q. Excusez-moi. Je vais trouver la bonne page. Nous sommes à la recherche,
8 les derniers chiffres sont 2976, pour ce qui est des derniers chiffres du
9 numéro ERN.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous parlions de Dretelj, et non pas de
11 Ljubuski. Je pense qu'il y a un lapsus de la part de
12 M. Mundis.
13 M. MUNDIS : [interprétation] Excusez-moi, c'est vrai.
14 Q. Vous avez maintenant une image ?
15 R. Oui, ce sont des photographies.
16 Q. Les reconnaissez-vous ?
17 R. Oui. Je reconnais ce qui y figure. Je les ai déjà vues deux fois
18 auparavant, qui me permet de reconnaître les lieux. C'est dans le coin
19 supérieur gauche de Dretelj qu'on voit ces deux hangars qui sont creusés au
20 flanc de la colline, ce qui permet de reconnaître tout de suite qu'il
21 s'agit de Dretelj. Je reconnais aussi cette espèce de remise au milieu de
22 l'image c'était dans celle-là qu'il y avait des poches de plastique qui
23 pendaient du plafond.
24 M. MUNDIS : [interprétation] Est-ce que le Greffier nous permettrait de
25 voir en plein écran la première photographie ?
26 Q. La voici. Vous avez dit avoir reconnu le tunnel. Mme l'Huissière va
27 peut-être vous permettre d'utiliser cet écran tactile, pour que vous
28 indiquiez ce que vous avez qualifié de tunnel. Je pense que nous allons
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1 nous servir du rouge pour l'Accusation.
2 R. Excusez-moi, est-ce que je suis censé annoter ?
3 Q. Vous avez dit, vous avez parlé du tunnel, pourriez-vous l'indiquer ?
4 R. Oui. On voit. Les voilà. Il y en a un ici, et l'autre il est derrière
5 ces arbres-ci, c'est là que se trouve l'entrée de l'autre, là, ici c'est un
6 espace dégagé et entre les deux espaces dégagés voici où se trouvaient les
7 portes.
8 Q. Pourriez-vous indiquer ou apposer la lettre T pour "tunnel" à cet
9 endroit ?
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Vous avez également parlé d'un des hangars hier. Pourriez-vous
12 l'entourer d'un cercle ?
13 R. Celui où je parlais de ces poches de plastique qui pendaient du plafond
14 avec les hommes au sol.
15 Q. Oui. Est-ce que vous pouvez y apposer la lettre H pour "hangar" ?
16 R. [Le témoin s'exécute]
17 Q. Merci. Dans le coin inférieur droit, je vous demande d'indiquer la date
18 d'aujourd'hui, en l'occurrence le 9 mai 2006.
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 Q. Pourriez-vous parafer cette photographie ?
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais demander que ceci soit saisi et versé
23 au dossier avec une cote de la Chambre.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira d'une pièce versée au dossier
26 sous la cote 1C 00003.
27 M. MUNDIS : [interprétation]
28 Q. Hier - et ceci se retrouve à la page 100 du compte rendu d'audience,
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1 lignes 14 et 15 - vous avez dit ceci : "Nous avons redescendu cette pente
2 douce qui partait du hangar et il y avait des gens qui prenaient un repas
3 sur ce bout d'herbe." Est-ce que vous voyez cet endroit où il y a un angle
4 un peu d'herbe, là, où les gens mangeaient, vous reconnaissez cet endroit
5 ici sur la photo ?
6 R. Je pense que c'était ici. Je ne vois pas très bien l'indication que
7 j'apporte. Vous voyez qu'ici quand on sort du tunnel à gauche une espèce de
8 croisée de chemin.
9 Q. Il serait peut-être préférable de prendre une des autres photos. Ce
10 serait peut-être plus visible.
11 R. Je peux essayer d'apporter une annotation ici si la Chambre le
12 souhaite…
13 Q. Pour des raisons techniques, je pense que maintenant il faut utiliser
14 une autre photo pour avoir une photo vierge pour ainsi dire, je m'en
15 excuse. La voici. Est-ce que vous pourriez nous indiquer l'endroit où vous
16 avec vu ces gens manger ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce qu'il est plus facile de voir cet endroit sur cette photo-ci ?
19 R. Oui.
20 Q. Avec l'aide de Mme l'Huissière, vous pourriez peut-être indiquer cette
21 zone ?
22 R. C'est ici dans ces parages. Quelque part, il y avait l'endroit où on
23 cuisinait. Si je me souviens bien les hommes étaient accroupis ici, là dans
24 ce périmètre que j'indique dans le cercle.
25 Q. Je vais demander une fois de plus que vous annotiez E pour
26 "eating", "manger".
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 Q. Je vais vous demander de dater cette photographie dans le coin
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1 inférieur droit et de parapher cette photo ?
2 M. MUNDIS : [interprétation] Nous allons demander que ceci soit saisi.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce sera versée sous la cote 1C
5 00004.
6 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier. Avec l'aide du
7 greffier, nous allons vous montrer un recueil de photos sous forme
8 électronique, la cote qui a été donnée est 9104. Première image, c'est la
9 photo numéro 16, numéro ERN01145482-16. Nous voulons voir la photo dont les
10 deux derniers chiffres sont 1 et 6.
11 Q. Reconnaissez-vous cette image que vous avez à l'écran ?
12 R. Sans nulle doute.
13 Q. Pourriez-vous nous la décrire ?
14 R. C'est un des deux tunnels. C'est sans doute lui qui se trouvait sur la
15 droite par rapport à la photo que nous venons de voir. Quand je l'ai vue,
16 la porte était ouverte, la porte entre ces deux tunnels.
17 Q. Une fois de plus, pourriez-vous apposer votre paraphe et la date
18 d'aujourd'hui, en bas à droite ?
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 M. MUNDIS : [interprétation] De nouveau, je voudrais une cote.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Cette pièce est versée sous la
23 cote 1C 00005.
24 M. MUNDIS : [interprétation] Pouvons-nous maintenant voir dans ce même
25 recueil de photos, la photo 01145483, numéro 16. Le numéro qui m'intéresse,
26 je le rappelle, c'est le numéro 01145483-16. Monsieur le Président, pour ne
27 pas perdre de temps, je pourrais montrer une copie, sur support papier, de
28 cette photographie au témoin.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Je crois que c'est plus pratique.
2 M. MUNDIS : [interprétation] Je suis désolé de donner autant de mal, Madame
3 l'Huissière, mais il faudrait peut-être aussi un feutre rouge au témoin.
4 Q. D'accord. Monsieur Vulliamy, est-ce que vous voyez maintenant une
5 photographie sur le rétroprojecteur ?
6 R. Oui.
7 Q. Pourriez-vous nous décrire ce que vous y voyez ?
8 R. Deux bâtiments le long d'un ou deux sentiers.
9 Q. Est-ce que vous reconnaissez l'un et l'autre de ces bâtiments ?
10 R. Je ne les reconnais pas particulièrement, mais je sais où ils se
11 trouvent. Je sais que je suis passé le long de ces bâtiments, mais de cet
12 angle-ci, je ne les reconnais pas nécessairement.
13 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais demander à Mme l'Huissière de me
14 rendre cette photo et je vais lui en donner une autre qui est peut-être
15 plus efficace, même recueil 01145483-11.
16 Q. Vous reconnaissez ces bâtiments, Monsieur?
17 R. Oui. C'est le sentier qui va de gauche à droite quand on vient de
18 l'entrée à Dretelj vers cette remise que je vous avais annoté sur la
19 première photo et qui se trouve à l'extrême droite.
20 Q. Je vous interromps parce qu'une fois de plus il faudra annoter cette
21 photographie. Vous dites que c'est un sentier qui va de gauche à droite et
22 qui part de l'entrée de Dretelj vers cette remise; est-ce que vous pourriez
23 nous l'indiquer ?
24 R. Oui. L'entrée est ici et ce sentier, là où on va vers la remise, va par
25 ici. Ici, il y a des bâtiments dans lesquels -- ou des structures dans
26 lesquelles nous avons aussi une entrée.
27 Q. Est-ce que vous reconnaissez des structures sur cette photo?
28 R. Je reconnais celle qui se trouve sur l'extrême droite. Cela, c'est
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1 certain. Cela, c'est la remise dont je vous ai dit que c'est là qu'il y
2 avait les poches de plastique suspendu. Quelque part ici, je ne suis pas
3 sûr lequel c'est, mais il y a ce que j'affirmerai, cette installation
4 médicale. Mais, je n'en suis pas tout à fait sûr, je pense que cela en est
5 une.
6 Q. Pourriez-vous, tout d'abord, mettre la lettre S sur cette remise, là où
7 il y avait ces poches de plastique suspendues ?
8 R. [Le témoin s'exécute]
9 Q. Vous avez dit ne pas être trop sûr de l'installation médicale, enfin,
10 de l'infirmerie. A votre avis, elle se trouvait où ?
11 R. Si je ne suis pas sûr, c'est parce que je ne suis pas sûr de laquelle
12 de ces structures même si je sais que c'était sur la gauche avant d'arriver
13 à cette remise, donc, c'est soit, cette structure, l'un ou l'autre. Mais je
14 pense que c'est celle que je vous indique en dernier lieu mais je ne
15 pourrais pas mettre ma main au feu. Je pense que nous avons vu ceci sous un
16 angle différent.
17 Q. Pourriez-vous à l'intérieur du cercle que vous avez tracé pour indiquer
18 ces deux bâtiments, M1, pour ce qui est de l'installation médicale ou de
19 l'infirmerie, et M2, pour l'autre ? Celle dont vous avez pensé que c'était
20 peut-être cette espèce d'infirmerie.
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Q. Merci. Je vais demander qu'on me remette cette photographie après le
23 témoin l'eut daté et signé. J'aimerais montrer une dernière photo du même
24 recueil P9107, numéro ERN 01145483-25.
25 Est-ce que vous reconnaissez ce bâtiment.
26 R. Oui.
27 Q. Qu'est-ce que c'est ?
28 R. C'est cette espèce de hangar -- davantage de remise, vu la taille de la
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1 structure. Celle où nous avons vu les femmes qui étaient détenues lors de
2 la première visite et ces hommes accroupis avec ces poches de plastique
3 suspendues.
4 Q. Est-ce que vous pourriez indiquer d'un S pour signifier le mot anglais
5 "shed", l'endroit où se trouve cette espèce de structure ou hangar.
6 R. [Le témoin s'exécute]
7 Q. s'il vous plaît, encore une fois, parafez ou signez et datez cette
8 photographie.
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Le numéro du document, Monsieur le Greffier.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Premier ERN
12 01145883-11. Ce sera la pièce 1C 0006.
13 Deuxième document numéro ERN, 01145483-25. Ce sera la pièce 1C 0007.
14 M. MUNDIS : [interprétation]
15 Q. Monsieur Vulliamy, nous allons bientôt passer à un autre sujet mais
16 auparavant, pourriez-vous aux Juges de la Chambre, vers quelle heure vous
17 êtes parti ce jour-là de Dretelj ?
18 R. Vers le milieu ou peut-être de l'après-midi. Il faisait encore jour.
19 Q. Pouvez-vous dire aux Juges où vous êtes allé et si quelque chose s'est
20 passé au moment de partir de Dretelj ?
21 R. Oui. J'étais très ébranlé parce que cela avait une après-midi dès plus
22 éprouvantes. Nous allions vers Medjugorje. Une voiture nous suivait et se
23 rapprochait de nous parce qu'elle roulait très vite. Elle m'a écarté de la
24 route. Bon, ce n'était pas un coup trop dur pour vraiment me faire sortir
25 de la route mais enfin, c'était quand même, on ne peut pas dire c'était une
26 "collision", mais ce qu'on appelle, en anglais, cette espèce de voiture qui
27 vous brosse, qui vient à hauteur de votre voiture pour vous écarter et
28 cette voiture a accéléré pour partir.
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1 Q. Qu'est-ce que vous avez fait le lendemain ?
2 R. Je suis sûr que c'était le lendemain, peut-être le surlendemain. A ce
3 moment-là, on essayait d'arriver à Mostar est, mais à l'hôtel de
4 Medjugorje, on a entendu dire qu'il devait y avoir une conférence de presse
5 à propos des camps et du camp de Dretelj, que c'était les autorités de
6 Herceg-Bosna qui allait organiser cette conférence à Medjugorje donc, nous
7 sommes donc restés.
8 Q. Est-ce que vous vous souvenez de la date à laquelle il y a eu cette
9 conférence de presse, ne serait-ce qu'approximativement ?
10 R. C'était peut-être le 7 ou le 8 septembre, peut-être le 9.
11 Q. L'année ?
12 R. 1993.
13 Q. Qui est intervenu à cette conférence de presse; est-ce que vous vous en
14 souvenez ?
15 R. Excusez-moi, je me souviens uniquement de deux noms. C'est assez
16 bizarre. C'était bizarre que ces autorités se rapprochent de nous parce que
17 s'ils venaient à Medjugorje, c'est sans doute pour la presse parce que
18 c'est là que la presse était installée. Il y avait Zubak, Kresimir Zubak.
19 Je pense que c'est lui qui est intervenu en premier lieu ou qui présidait
20 la réunion. L'autre s'appelait,
21 M. Pusic. Je pense qu'il s'appelait de son prénom Branislav.
22 Q. Est-ce que vous vous souvenez du sujet abordé à la conférence de
23 presse ?
24 R. Oui. Il était discuté du camp que nous avions vu la veille à Dretelj et
25 de façon générale, il était question des deux camps de Gabela et de Rodoc.
26 C'est surtout là-dessus qu'a porté la conversation. Les intervenants
27 voulaient aussi attirer notre attention sur des camps où étaient détenus
28 des Croates, des Croates de Bosnie, où étaient détenus par le gouvernement.
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1 Je ne me souviens pas si on a parlé tant du côté serbe ou pas.
2 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ce qu'on a dit à propos de Dretelj ?
3 R. Oui. C'était, en fait -- il n'y avait pas d'accord au sein de ce panel,
4 mais les avis étaient assez opposés parce que M. Zubak estimait qu'il y
5 avait eu des violations des normes internationales.
6 L'INTERPRÈTE : Le micro est débranché.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Il a essayé d'excuser ou de justifier,
8 d'expliciter ceci en faisant référence à la rapidité avec laquelle les
9 détenus avaient dû être incarcérés et que cela avait été fait de cette
10 façon pour des raisons de sécurité. J'avais pris l'habitude déjà, à ce
11 moment-là, de la façon dont ceci était justifié. On disait que c'était la
12 faute d'individus responsables et que ce n'était pas une question
13 politique. Je parle ici des violations.
14 M. MUNDIS : [interprétation]
15 Q. Vous dites : "Que vous aviez, à ce moment-là, déjà pris l'habitude de
16 ce genre de comportement" ?
17 R. Nous avions eu de nombreuses conversations depuis la guerre de Croatie
18 avec des dirigeants qui accusaient des éléments individuels, scélérats,
19 pour ce qui s'était passé. Pour ces atrocités, on disait que c'étaient des
20 individus responsables, Karadzic, il avait parlé des Serbes de Bosnie
21 responsables à Omarska et à Trnopolje. Pour Vukovar, c'étaient les Serbes
22 qui parlaient de ces atrocités. On accusait toujours quelqu'un comme cela
23 qui était, un peu, en dehors des choses.
24 Q. Au moment de cette conférence de presse qui s'est tenu en septembre
25 1993, est-ce que vous saviez qui était M. Zubak ?
26 R. J'avais entendu prononcer son nom et je me souviens qu'il avait été
27 présenté comme étant le vice-président adjoint de la HVO mais je ne sais
28 pas ce que cela voulait dire. Depuis, j'ai suivi ce qu'il a fait, en
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1 matière politique, mais à l'époque, je ne savais pas exactement qui il
2 était.
3 Q. A ce moment-là, en septembre 1993, est-ce que vous saviez qui était
4 l'autre personne, celle que vous avez reconnu en disant que c'était M.
5 Pusic ?
6 R. Il s'est présenté lui-même. Je n'avais pas entendu parler de lui, mais
7 il s'est présenté lui-même, c'était la personne qui était responsable de
8 l'échange des prisonniers.
9 Q. Vous souvenez-vous des propos de M. Pusic lors de cette conférence de
10 presse ?
11 R. Oui. Il a implicitement contesté ce qu'avait dit M. Zubak. Il laissait
12 entendre ou même je crois qu'il disait ouvertement que les conditions à
13 Dretelj étaient conformes aux normes internationales et en application des
14 conventions de Genève et il avait fait une remarque que j'ai notée en
15 disant que si les tunnels étaient suffisamment bien pour les soldats de la
16 JNA, ces soldats devaient convenir également aux prisonniers musulmans. Ses
17 commentaires étaient tout à fait inappropriés. Au vu de ce que nous avions
18 vu le jour précédent, nous avions été choqués par cela.
19 Q. Vous avez également précisé dans ce contexte que Gabela et Rodoc
20 également ont été abordés au cours de cette conférence de presse. Avez-vous
21 eu l'occasion de vous rendre à ces deux endroits ?
22 R. Non.
23 Q. Je souhaite maintenant que vous portiez votre attention sur l'endroit
24 où vous êtes allé après cette conférence de presse et sur quoi -- et vous
25 avez votre reportage a porté sur quoi ?
26 R. Sur Mostar est, l'idée était d'arriver à Mostar est.
27 Q. En réalité, est-ce que vous avez réussi à montrer dans Mostar est ?
28 R. Oui. Je crois que c'était le lendemain, c'est-à-dire le 8 ou le 9
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1 septembre.
2 Q. Est-ce que vous pourriez nous parler un petit peu de la façon dont vous
3 avez pu arriver jusqu'à Mostar est ?
4 R. Il y avait les forces espagnoles des Nations Unies qui avaient
5 abandonné leur base en ville du côté est de la ville au mois de mai déjà et
6 ils patrouillaient cet endroit où la ville tous les deux jours, ou tous les
7 jours, dans des véhicules blindés transports de troupes à bord desquels
8 étaient transportés des passagers. Je crois qu'ils assuraient l'escorte
9 humanitaire également, mais si vous prenez vos dispositions, vous pouviez
10 également monter à bord de ces véhicules pour entrer dans l'enclave; c'est
11 comme cela que j'ai réussi à rentrer.
12 Q. Etiez-vous accompagné d'autres correspondants, à ce moment-là, à cette
13 occasion-là ?
14 R. Oui. Un autre de mes collègues, mais je ne me souviens pas de combien
15 d'autres personnes il y avait dans les véhicules blindés de transports de
16 troupes.
17 Q. Pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre ce que vous avez remarqué
18 lorsque vous êtes entré à Mostar est vers le 9 ou le 10 septembre 1993 ?
19 R. Des dégâts importants qui est visible dans le sud à l'entrée de la
20 poche lorsque vous passiez les lignes. Dans ce que j'appelais le no man's
21 land, il y avait des facilités aéroportuaires et il avait quelque chose que
22 l'on appelait -- un endroit que l'on appelait Blagaj. Il y avait des
23 maisons éventrées, des personnes qui vivaient là. Nous sommes passés en
24 voiture et nous sommes passés à l'est de la ville et nous sommes descendus
25 de notre véhicule blindé. Les dégâts étaient importants. Les fusillades
26 récurrentes, les bombardements étaient récurrents et en l'espace d'une
27 heure, j'ai eu la peur de ma vie. Au cours de cette guerre, c'est le moment
28 où j'ai eu le plus peur car c'était un endroit terrifiant.
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1 Q. Monsieur Vulliamy, pourriez-vous nous décrire les conditions de vie que
2 vous avez pu observer ?
3 R. Ecoutez, au cours de cette journée-la du lendemain, les gens pour la
4 plupart autant que faire ce peu habitaient dans des caves, dans les sous-
5 sols. Lorsqu'ils n'étaient pas dans les sous-sols et qu'ils étaient dans la
6 rue par nécessité, la plupart des gens étaient dans les sous-sols et ils se
7 cachaient dans les appartements ou les endroits où ils résidaient. Mostar
8 est, en réalité, était composée d'une seule rue, une rue principale avec
9 des rues advenantes qui descendaient jusqu'au fleuve. On pouvait très bien
10 voir du côté ouest cet endroit-là et les gens traversaient la rue au son
11 des tirs, des tireurs embusqués et on entendait tirs, crack, crack, crack,
12 qui les prenaient pour cible. Cette rue principale était tellement
13 dangereuse qu'ils devaient construire une route de déviation entre les
14 maisons du côté est de cette rue principale, c'est-à-dire, éloignée du
15 fleuve, autrement dit, il y avait en quelque sorte une route qui traversait
16 les maisons des gens. Cela parait amusant, mais cela n'est pas amusant du
17 tout. Les gens avaient ouvert des petits commerces le long de cette rue
18 principale à l'intérieur de ces maisons. Il y avait un salon de coiffure et
19 si vous vouliez vous faire couper les cheveux, ce qui était mon cas et on
20 entendait des coups de feu, on entendait le pilonnage tout le temps et de
21 façon récurrente. Je n'avais jamais vécu cela. Il n'y a qu'à Vukovar où
22 j'ai connu cela. C'était comme à d'autres endroits, comme à Sarajevo.
23 C'était -- les gens étaient à juste titre effrayés et très nerveux et sur
24 le qui vive sans pareille.
25 Q. Monsieur, je souhaite que vous fassiez la clarté et que vous parliez
26 davantage de ce que vous avez dit à la ligne 25, page 14, lorsque vous avez
27 parlé de "cette route principale qui traversait les maisons." Pourriez-vous
28 nous parler de ceci plus en détail ?
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1 R. Pardonnez-moi, je n'ai pas expliqué ceci comme il faut. Une partie de
2 cette route principale était tellement exposée du côté ouest et cette route
3 était considérée comme tellement dangereuse car tant de personnes avaient
4 été tuées par des tirs de mortier ou des tirs embusqués. Donc, ils ont
5 construit quelque chose sur la gauche de cette rive principale, une sorte
6 de route, une sorte de voie piétonne derrière les maisons du côté est de la
7 rue principale. C'était comme un passage, si vous voulez, pour les piétons
8 pour qu'ils puissent éviter cette rue principale qui était devenue trop
9 dangereuse. Quelquefois, ce passage empruntait -- enfin, traversait les
10 maisons. Ce qui est resté des maisons quelquefois était relié à des jardins
11 ou des murs détruits, et c'est ainsi que les gens passaient dans les
12 propriétés des autres pour éviter le risque de descendre la rue principale,
13 de sorte que cette "rue" était comme un passage qui permettait aux gens de
14 passer d'une maison à une autre sans être exposés aux feus qui venaient de
15 l'ouest.
16 Q. Bien, Monsieur. Combien de personnes environ étaient à l'est de Mostar
17 à cette époque-ci, en septembre 1993, parce que vous étiez dans cette
18 partie de la ville à l'origine. Lorsque cette poche est devenue une enclave
19 vers la fin du mois de mai ou du mois de juin, il y avait 10 000 personnes
20 environ, mais ce chiffre a augmenté pour atteindre 55 000. Ce qui était
21 très choquant et source d'un grand désarroi c'est que la plupart de ces
22 gens étaient des femmes et des enfants. Donc, il fallait comprendre qu'il y
23 avait un schéma derrière tout cela qui avait commencé à Capljina, en
24 réalité. Les hommes étaient partis dans les camps et les femmes et les
25 enfants avaient été placés comme un troupeau dans cet endroit qui
26 s'appelait Blagaj dans la partie est de Mostar en présence des personnes
27 âgées également et contraints à accepter ce barrage.
28 Q. Quels endroits avez-vous visité à cette époque-là, alors que vous étiez
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1 à l'est de Mostar en septembre 1993 ?
2 R. J'ai visité le QG de l'armée de Bosnie ou ce qu'il y avait, ou ce qu'il
3 en restait et c'est un petit peu un euphémisme, mais l'hôpital, ou ce qui
4 était censé ressembler à un hôpital.
5 Q. Pourriez-vous dire ce que vous avez remarqué dans l'hôpital ?
6 R. Oui. C'était absolument épouvantable. Il y avait au niveau du sous-sol,
7 au sous-sol, il y a des gens qui attendaient des nouvelles de leurs parents
8 proches et de blessés, et la plupart d'entre eux -- les soins médicaux et
9 les tentatives à cet égard se passaient au sous-sol et -- c'était terrible,
10 il y avait une jeune fille qui avait environ 11 ans, elle avait été très
11 grièvement blessée à la tête et je crois qu'un de ses membres avait été
12 amputé. A ce moment-là, l'anesthésient était arrivée, mais nous nous sommes
13 entretenus avec un docteur sur place qui nous a dit que par le passé, les
14 amputations avaient dû se faire sans anesthésie. Il nous a cité un chiffre
15 de 400 personnes qui sont décédées dans son hôpital, sans compter ceux qui
16 sont morts dans les rues. Je ne sais pas si ce chiffre est exact, c'est en
17 tout cas ce qu'il nous a dit. Ce qui est très important, à l'époque, en
18 tout cas, je pensais qu'il était très important d'en parler, l'hôpital
19 avait été touché à plusieurs reprises des tirs d'artillerie, des tirs de
20 char, malgré le fait qu'une croix rouge était clairement apposée sur le
21 bâtiment. Il a dit que le toit de l'hôpital avait été fortement endommagé
22 et son approvisionnement en médicaments avait été non pas détruit, mais
23 fortement touché. Je ne sais pas pourquoi les médicaments étaient
24 entreposés sous le toit. Je pense que ce n'était pas une très bonne idée,
25 mais lorsque les gens ont tenté de réparer le toit, on leur tirait dessus.
26 Je suppose que la partie la plus difficile, c'est lorsqu'il a proposé de
27 nous montrer sa morgue, qui était une morgue de fortune, mais j'ai dit bon,
28 d'accord, ce n'était véritablement une morgue. Il n'y avait pas de corps de
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1 réfrigération, il n'y avait pas de sacs pour les corps, il y avait
2 simplement les cadavres, dix ou une douzaine lorsque nous sommes entrés.
3 C'était un endroit épouvantable.
4 Q. Monsieur Vulliamy, vous souvenez-vous du nom de cet hôpital ?
5 R. Je ne me souviens pas du nom. C'était un ancien bâtiment du temps de
6 Habsburg. Cela je m'en souviens. J'ai peut-être inscrit le nom quelque
7 part, mais je ne m'en souviens pas maintenant. Le nom du médecin était
8 Dragan Milovic, quelque chose comme cela.
9 Q. Monsieur Vulliamy, à cette occasion-ci, vous êtes resté combien de
10 temps à Mostar est ?
11 R. Deux ou trois jours.
12 Q. A aucun moment, êtes-vous retourné à Mostar est ?
13 R. Oui, tout à fait.
14 Q. Quand et à quel moment ?
15 R. Vers la mi-février ou la fin février de l'année suivante, 1994.
16 Q. Pourriez-vous brièvement dire à la Chambre quels événements vous avez
17 couverts entre le mois de septembre 1993 et mi-février ou fin février
18 1994 ?
19 R. En fait, je souhaitais faire publier mon livre et je couvrais d'autres
20 événements. J'avais une autre mission. Si je m'en souviens bien, je crois
21 que je ne me suis pas rendu en Bosnie entre septembre 1993 et février 1994.
22 Q. Pourriez-vous nous dire, Monsieur, ou nous parler de votre retour en
23 Bosnie en février 1994 ?
24 R. Oui. C'était pour le journal pour lequel je travaillais. Tout ceci a
25 commencé à l'aéroport de Zagreb. Nous avons atterri à Split, et dans le
26 hall de départ, il y avait Mate Boban.
27 Q. Avez-vous parlé avec Mate Boban à cette occasion-là ?
28 R. Oui, brièvement. J'étais avec un collègue du Washington Post et nous
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1 souhaitions à tout prix lui parler, surtout parce que nous avions suivi les
2 événements à Mostar et dans la presse. Evidemment, j'avais un intérêt tout
3 particulier. Je ne l'avais pas vu depuis la veille lorsqu'il avait annoncé
4 qu'il était président du HDZ. Je crois qu'il m'a reconnu. Il était tout à
5 fait aimable, et je lui ai tout de suite posé des questions à propos de
6 Mostar. Je crois que l'Union européenne avait un projet et parlait de la
7 division de la ville. Je lui ai parlé de cela, et je me souviens qu'il m'a
8 répondu : Mostar restera une seule et même ville, c'est la capitale
9 d'Herceg-Bosna. C'est tout ce dont je me souviens de la conversation que
10 j'ai eue avec lui. Il n'avait pas particulièrement envie de parler avec
11 nous. Il était à bord de l'avion et nous n'étions pas assis côte à côte, et
12 nous avons décidé de ne pas nous entretenir avec lui lorsque nous avons
13 atterri de l'autre côté à Split.
14 Q. Lorsque vous êtes arrivé à Split, où vous êtes-vous rendu ?
15 R. A Medjugorje, pour essayer de rentrer à Mostar est.
16 Q. Pourriez-vous nous parler brièvement des mesures que vous avez prises
17 pour essayer d'arriver à Mostar est ?
18 R. A ce moment-là, le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations Unies
19 avaient organisé un convoi, des convois blindés d'aide pour qu'ils puissent
20 entrer dans l'est de la ville, sous l'égide d'un homme remarquable appelé
21 Jerry Hume. C'était une opération organisée quasiment par un seul homme.
22 C'était une entreprise tout à fait héroïque, et il avait emmené à bord du
23 véhicule blindé d'autres passagers.
24 Q. A cette occasion-ci, vous êtes retourné à Mostar est ?
25 R. Oui.
26 Q. Pour autant que vous vous en souvenez, est-ce que vous pourriez nous
27 donner une date ou une date approximative, s'il vous plaît, de la date et
28 du jour du mois de l'année où vous vous êtes retrouvé à Mostar est ?
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1 R. Cela devait être vers le 20 ou le 21 février.
2 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous avez remarqué à
3 cette occasion-ci, lorsque vous étiez à Mostar est ?
4 R. Oui. Encore une fois, des gens qui se cachaient dans les caves,
5 accroupis dans les caves, y compris moi-même. C'était très dangereux. On
6 avait peur quand on était dehors. Il y avait, au nord de la poche, un bloc
7 d'immeubles qui avaient des traces de balles et qui avait été pilonné et
8 fortement endommagé. On appelait ceci la route, si je me souviens, de la
9 Beirut. Il y a bon nombre de gens qui entraient dans le centre par cette
10 poche et de cette route qui était une déviation, et ceci avait été coupé
11 une partie de la journée du centre-ville, si c'est bien comme cela qu'on
12 peut l'appeler. Les gens étaient dans les caves. La plupart du temps, il
13 n'y avait pas suffisamment de place. Beaucoup de gens arrivaient, et la
14 population avait augmenté. Je ne sais pas combien de personnes sont
15 arrivées; encore une fois, c'étaient surtout des femmes, des enfants et des
16 personnes âgées, et ils étaient rassemblés dans un cinéma ou dans un
17 théâtre. C'était un endroit qui était au-dessus -- à même le sol. Ils
18 étaient assis sur les marches et étaient partout sur le sol de cet endroit.
19 Il y avait toujours des tirs et des pilonnages, et ceux-ci ont continué
20 plus que jamais. Il y avait un médecin que j'ai rencontré pour la première
21 fois, que j'avais déjà rencontré à Sarajevo, et en réalité, je crois qu'il
22 essayait d'établir -- enfin, de faire des comparaisons toutes relatives
23 avec Sarajevo. Il a dit qu'il comparait ceci à Sarajevo, que ceci était un
24 véritable cauchemar. Lorsque nous avons interviewé les réfugiés, les
25 déportés, quel que soit le nom que vous voulez leur donner, j'ai aussi
26 appris, chose que je ne savais pas avant, que le gouvernement ou le côté
27 musulman détenait un promontoire ou deux parties du territoire de l'autre
28 côté, autrement dit, du côté est du fleuve, ce qui m'a beaucoup surpris. Je
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1 devrais dire maintenant que ce fameux pont qui se trouvait là, qui était là
2 lors de ma visite précédente au mois de septembre, ce pont avait été
3 détruit, maintenant, et il y avait -- je ne sais pas comment ils l'ont
4 construit, mais ce n'était pas un pont métallique, mais un espèce de pont
5 de fortune qui traversait le fleuve et qui permettait d'aller à pied et de
6 courir de l'autre côté, endroit que j'ai visité très brièvement.
7 Q. Qu'avez-vous vu lorsque vous êtes parti de l'autre côté pour un bref
8 instant ?
9 R. Bien, du côté ouest, le côté ouest qu'ils détenaient, cela représentait
10 un ou deux blocs d'immeubles, et les maisons étaient tellement endommagées
11 qu'on avait essayé de les faire tenir avec des sacs de sable. Les murs
12 étaient surtout faits de sacs de sable plutôt que de murs construits par
13 des maçons. Nous avons donc traversé le pont, et on avait l'impression de
14 se balancer, cela faisait peur. Il y avait des fusillades, on voyait ces
15 maisons en ruine. J'ai vu la fumée sortir d'une cheminée d'un endroit qui
16 semblait être tout à fait souterrain et j'ai dit : qui est là, qui est là,
17 il semble qu'il y ait des gens qui vivaient ici. Je me suis tourné vers le
18 guide et je lui ai dit que je voulais aller leur parler. Le guide m'a dit :
19 non, non, il ne faut pas aller leur parler, il faut sortir d'ici. Ainsi,
20 j'ai réussi à voir la ligne de front où il y avait des soldats qui tenaient
21 la ligne de front le regard vide. Ils tenaient la ligne de front contre la
22 ligne des Croates de Bosnie, ce qui était une très courte distance, petite
23 distance de l'autre côté de la rue, enfin, un tout petit terrain, sur un
24 tout petit terrain.
25 Q. Combien de temps êtes-vous resté sur cette ligne de front ?
26 R. Pas plus de dix minutes.
27 Q. Ensuite, où êtes-vous allé ?
28 R. J'ai repris ce pont de fortune aussi vite que possible.
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1 Q. Vous êtes retourné dans Mostar est ?
2 R. Oui, dans Mostar est.
3 Q. Combien de temps êtes-vous resté à Mostar est, à cette occasion-ci, en
4 février 1994 ?
5 R. Pas plus de deux jours parce que nous étions à nouveau dans les caves,
6 et le pilonnage et les fusillades reprenaient de plus belle. On disait que
7 quelqu'un devait disposer d'une radioamateur ou quelque chose. On disait
8 qu'il y aurait une transaction et quelque chose dont j'avais été informé
9 avant. Il y avait un Américain qui s'appelait Charles Redmond qui essayait
10 de négocier. Tout ceci était quelque chose sur lequel on devrait tomber
11 d'accord bientôt. Les gens en parlaient beaucoup. Tout le monde en parlait,
12 mais les gens étaient très sceptiques. On ne savait pas si c'était vrai et
13 on ne savait pas si cette négociation allait aboutir. Cette nouvelle est
14 arrivée assez rapidement. Je crois que c'était le deuxième jour de mon
15 arrivée.
16 Q. Je vais maintenant vous poser des questions pour faire suite à celle-
17 ci, mais avant de faire cela, je souhaite vous demander, Monsieur, hormis
18 les tirs embusqués et les coups de feu, vous souvenez-vous d'avoir entendu
19 autre chose lorsque vous étiez à Mostar est ?
20 R. Non, pas cette fois-ci, mais lors de la première visite, oui. Les gens
21 avaient installé des haut-parleurs de l'autre côté du fleuve, et un système
22 qui permettait d'amplifier le son. On entendait des chants patriotiques et
23 de la musique "heavy rock metal" du côté est du fleuve. Les gens ont trouvé
24 que c'était particulièrement curieux. Je crois que c'était l'intention, du
25 reste.
26 Q. Monsieur, lorsque vous dites "qu'ils avaient installé des haut-
27 parleurs", vous faisiez allusion à quoi ?
28 R. C'étaient les Croates de Bosnie, du côté ouest de la Neretva.
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1 Q. Monsieur Vulliamy, hormis la destruction du pont dont vous nous avez
2 parlé, y avait-il d'autres modifications ou changements que vous avez
3 remarqués à l'est de Mostar, entre le mois de septembre 1993, votre
4 première visite, et votre deuxième visite en février 1994 ?
5 R. Il y avait quasiment que des gravats. A certains endroits, il y avait
6 une destruction physique très importante, surtout dans la partie ouest, ce
7 promontoire ouest, une sensation de folie, de siège. La poche de Mostar
8 était toute petite et les gens étaient serrés. On avait des conversations
9 avec les gens qui étaient autour. On avait l'impression que les gens
10 frisaient la folie, à cet endroit-là.
11 Q. Monsieur Vulliamy, pourriez-vous nous parler de votre départ de Mostar
12 en février 1994 ?
13 R. Oui. Pendant une nuit, les fusillades et le pilonnage ont commencé à
14 s'estomper et ont cessé. Ensuite, un matin, nous nous sommes levés assez
15 tôt, aux premières lueurs du matin. Tout ceci avait cessé et les gens
16 commençaient à sortir dans la rue. L'atmosphère était très étrange. Les
17 gens étaient incrédules. Les gens ont commencé à sortir des bâtiments ou
18 des caves. J'étais accompagné d'un collègue qui s'appelait Tom Rhodes, et à
19 l'époque, nous étions d'accord pour dire que nous ne pouvions pas faire un
20 reportage sur cet accord de paix et ce cessez-le-feu. Donc, nous avons
21 décidé de partir au plus vite et nous sommes allés de l'autre côté de
22 Mostar. Nous sommes passé du côté ouest par Medjugorje pour essayer de
23 chercher une voiture.
24 Q. Vous souvenez-vous de la date environ, du jour où vous avez quitté
25 Mostar est pour vous rendre à Medjugorje ?
26 R. Je crois que c'était le 24 février ou le lendemain. Je crois que
27 c'était le 24 février.
28 Q. Encore une fois, 1994 ?
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1 R. 1993.
2 Q. 1993 ?
3 R. Pardonnez-moi; 24 février 1994.
4 Q. Monsieur Vulliamy, sur quoi a porté votre reportage, à ce moment-ci, à
5 la fin du mois de février 1994 ?
6 R. L'étape suivante consistait à -- nous avons entendu dire à Medjugorje,
7 je crois que c'était là, quand nous avons pris une voiture, on a entendu
8 dire qu'il y avait eu un accord, une transaction négociée à Washington. Le
9 plan Redman avait été accepté, et les Croates de Bosnie et les forces de
10 l'armija étaient tombés d'accord. Nous nous sommes rendus dans Mostar est
11 pour aller parler avec les gens du HVO sur cela.
12 Q. Je vais vous poser des questions là-dessus dans quelques instants.
13 Pourriez-vous d'abord nous dire si vous avez remarqué des différences entre
14 Mostar est et Mostar ouest, à cette époque-ci ?
15 R. Bien, oui. Ce qui sautait aux yeux -- c'est quasiment grotesque. A
16 l'est de Mostar, il y avait des voitures qui circulaient. Les cafés étaient
17 ouverts. Il y avait des activités commerciales. Il y avait des soldats qui
18 parlaient entre eux et qui parlaient aux filles dans les cafés. Ce n'était
19 pas la vie normale, car il y avait un siège et tout était militarisé, il y
20 avait des fusillades sans cesse, mais on avait l'impression que la vie
21 était redevenue normale à Mostar est. C'est certain.
22 Q. Je vais vous poser la question. Il y a quelques instants, vous avez dit
23 aux lignes 9 et 10, page 24 : "Nous sommes allés à Mostar ouest pour aller
24 parler avec les gens du HVO à ce propos." Vous souvenez-vous de ceci ?
25 R. Le HVO nous avait recommandé de nous rendre dans un service de presse
26 particulier qu'ils avaient monté eux-mêmes. Lors de notre réunion, je ne
27 sais pas exactement si c'était leur QG ou le QG de leur commandement, je
28 crois que c'était un autre bâtiment qui avait été préparé à cet effet pour
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1 recevoir les journalistes ou d'autres visiteurs. Nous nous sommes
2 entretenus avec un homme, je crois que c'était un homme chargé des affaires
3 publiques ou le porte-parole du HVO. Je ne sais pas si ce dernier
4 représentait l'ensemble du HVO ou simplement le HVO à Mostar. Je ne sais
5 pas.
6 Q. Que vous a dit M. Vegar, à ce moment-là ?
7 R. Je dois insister sur le fait qu'il y avait un calme relatif. Au cours
8 de la nuit, pendant les premières heures, les tirs et les fusillades
9 avaient cessé et ce, pendant le reste de la journée. On n'a pu rien entendu
10 ce jour-là. La première question, évidemment, qu'on allait lui poser, c'est
11 : que va-t-il se passer, est-ce que ce cessez-le-feu va tenir ? Je crois
12 qu'à ce moment-là, nous savions ce qui s'était passé parce que nous savions
13 qu'il y avait eu l'accord de Washington. La question que je lui ai posée,
14 je lui ai demandé si ceci allait tenir. Il m'a dit que c'était vrai. Il a
15 beaucoup insisté sur le fait que ceci devait effectivement tenir. Je dois
16 dire que j'étais sceptique et lui avait vraiment insisté. Il a dit
17 qu'effectivement, on était tombés d'accord. Il a parlé de cela. Il a dit
18 que son armée avait commencé à être remobilisée dans la région. Il a
19 utilisé ce terme que j'ai remarqué, j'ai trouvé que c'était un terme très
20 intéressant; il a parlé du recommencement des hostilités avec les Serbes en
21 impliquant qu'il y avait une sorte de cessation des hostilités avec les
22 Serbes. Il a dit que ceci allait recommencer contre les Serbes.
23 Encore une fois, j'étais sceptique, et si je me souviens bien, il
24 voulait se rendre -- il nous a demandé si nous voulions aller voir les
25 positions assiégées et voir les positions des mortiers de son côté. Tom et
26 moi-même, nous avons dit "oui" tout de suite. Il a envoyé quelqu'un nous
27 chercher en voiture.
28 Q. Où êtes-vous allés à ce moment-là ?
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1 R. Ecoutez, nous sommes allés sur un terrain élevé au-dessus de la
2 partie ouest de la ville, une position tenue par des mortiers.
3 Q. Qu'avez-vous remarqué au niveau de cette position ?
4 R. C'était assez surréaliste. Nous pouvions voir Mostar est de
5 l'autre côte du fleuve, et c'était- comment à quoi ressemblait cet endroit
6 et ce que nous ressentions en sachant que nous avions -- que nous nous
7 étions trouvés à cet endroit-là le matin - c'était encore plus
8 extraordinaire et cela faisait encore plus peur. Nous avons remarqué que,
9 très rapidement, ces mortiers ne tiraient plus. Ils étaient recouverts de
10 bâches en cuir. Je ne sais pas si c'était quelque chose qu'il souhaitait
11 que nous voyions particulièrement. Je ne sais pas, mais ceci ne
12 fonctionnait pas. Clairement, ceci ne fonctionnait pas. J'entends par là
13 que ceci avait cessé de fonctionner.
14 Q. Monsieur Vulliamy, en quelques minutes qui me restent, est-ce que vous
15 pourriez nous dire ceci. Vous avez parlé hier et vous avez dit que vous
16 êtes revenu en Herzégovine en août 1992; pourriez-vous nous décrire les
17 changements que vous avez pu observer entre le mois d'août 1992 et le mois
18 de février 1994 en Herzégovine ?
19 R. Bien, je dois dire que l'endroit avait été complètement transformé avec
20 le recul et l'amertume provoquée par la guerre, chose qui n'avait pas
21 existé en 1992, certaines choses avaient été mises en branle pendant
22 l'automne 1992 et les choses s'étaient brusquement terminées en février
23 1994. La destruction était plus importante et on avait le sentiment que
24 l'endroit était un endroit tout autre, complètement différent, était entré
25 dans une guerre, était sorti de l'autre côté après la guerre.
26 Q. Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites que cela avait été
27 transformé du tout au tout ?
28 R. Bien, Mostar, quand vous pensez à l'Herzégovine, certains des endroits
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1 d'Herzégovine, Livno, Tomislavgrad et d'autres endroits que j'ai mentionnés
2 n'avaient pas été touchés. Mais, pour ce qui est de endroits où je m'étais
3 trouvé, où il y avait eu ces camps de nettoyage ethnique, ces combats, vous
4 posez la question à propos de l'Herzégovine, mais il y avait des endroits
5 de ce genre en Bosnie centrale aussi, transformation parce que les voies de
6 communication avaient été coupées. En février 1994, je ne savais pas si on
7 avait l'intention de reconstituer tout ceci, si ce serait possible de le
8 faire dans cette région-là, mais cela avait été transformé dans la mesure
9 où les gens qui, en août 1992, combattaient contre un ennemi qu'il croyait
10 commun, avaient traversé un conflit sanglant, une guerre. Pour moi, quand
11 on met des femmes, des enfants dans une poche et qu'on les pilonne, qu'on
12 les bombarde, ce n'est pas la guerre, c'est pire que la guerre. C'était une
13 expérience affreuse, atroce. Enfin, mon journal à ce moment-là a exigé que
14 je parte vu l'état dans lequel j'étais.
15 Q. Je vous remercie, Monsieur Vulliamy.
16 M. MUNDIS : [interprétation] Nous n'avons plus de questions à poser au
17 témoin. Nous allons demander que certains des schémas et documents
18 présentés au témoin soient versés 1784, P 8761, P 8762 et
19 P 9497.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur Mundis, vous demandez le 1784. Le
21 1784, c'est la vidéo ?
22 M. MUNDIS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la vidéo nous en avons vue quelques secondes.
24 Cette vidéo fait combien de minutes ?
25 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, nous pourrons le
26 vérifier à la pause, mais je pense que la vidéo, qui a reçu le numéro P
27 1784, c'était 55 secondes, cet extrait très bref montré au témoin. On a
28 coupé, c'est cela et on a pris cet extrait d'un enregistrement plus long.
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1 Mais, en fait, cela devait faire en tout 55 secondes qui ont été montrées
2 au témoin.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors, Monsieur le Greffier.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
5 Ces quatre pièces sont versées au dossier. Voici les cotes respectives : P
6 1784, P 9497, P 8761 et P 8762. Merci, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, merci. Le contre-interrogatoire commence. Hier
8 j'avais indiqué que ce serait Me Nozica ou Me Murphy qui vont commencer
9 pour 40 minutes. Alors, d'ici la pause, il nous reste 25 minutes.
10 M. MURPHY : [interprétation] Monsieur le Président, je m'interroge s'il
11 serait judicieux de faire une pause dès maintenant afin que les conseils de
12 la Défense puissent entendre s'agissant de la durée du contre-
13 interrogatoire de chaque équipe ?
14 Puis, il y a quelques documents, Monsieur le Président, que je voudrais
15 vérifier qu'on est en train de photocopier qui vont être peut-être utilisés
16 en contre-interrogatoire. Est-ce qu'il serait utile de faire une pause dès
17 maintenant ?
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va faire la pause et nous reprendrons à 10
19 heures 30.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 07.
21 --- L'audience est reprise à 10 heures 33.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, l'audience est reprise. Nous avons
23 jusqu'à midi, puis après, nous ferons la pause pendant une heure et demie
24 pour permettre au témoin de se restaurer et aux uns et autres de reprendre
25 de nouvelles forces pour l'après-midi. Cet après-midi, nous irons jusqu'à
26 17 heures, en espérant que l'audition de ce témoin sera terminée.
27 Alors, je me tourne vers Maître Murphy, est-ce que vous vous êtes entendu
28 par la répartition du temps ?
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1 M. MURPHY : [interprétation] Monsieur le Président, il ne devrait pas y
2 avoir de problème immédiat en ce qui concerne le contre-interrogatoire de
3 ce témoin. Je pense que c'est une base que nous pouvons adopter.
4 Contre-interrogatoire par M. Murphy :
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
6 R. Bonjour.
7 Q. Je me permets de me présenter. Je m'appelle Peter Murphy, un des
8 conseils représentant M. Bruno Stojic. Vous travaillez comme journaliste
9 depuis 1977; c'est bien cela ?
10 R. Oui.
11 Q. Lorsque vous étiez en reportage en Bosnie vous travailliez pour le
12 journal Guardian à Londres ?
13 R. Oui, surtout.
14 Q. Bon. Revenons sur votre bagage. Vous avez fait l'université, je
15 suppose ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que vous avez fait des études balkan dans le cadre vos études
18 universitaires ?
19 R. Non, pas précisément.
20 Q. Vous avez dit que vous vous étiez d'abord intéressé à l'Irlande du
21 nord.
22 R. Oui, en tant qu'étudiant, puis en tant que journaliste à la télévision.
23 Q. Est-ce que vous avez jamais servi dans l'armée ?
24 R. Non. Mais plusieurs membres de ma famille ont été des militaires à un
25 très haut niveau, pas moi.
26 Q. A votre connaissance des questions militaires ce n'est pas quelque
27 chose que vous aviez au départ mais que vous avez appris en tant que
28 journaliste ?
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1 R. Grâce à ma famille.
2 Q. En ce qui concerne les Balkans vous connaissez ce sujet grâce à votre
3 travail de journaliste ?
4 R. Oui, et une connaissance de profane que j'avais auparavant en tant
5 qu'étudiant en histoire.
6 Q. Est-ce que vous parlez ou est-ce que vous lisez le croate ?
7 R. Non. J'ai appris des bribes au fil du temps. Je pouvais me débrouiller
8 mais je ne pouvais pas faire d'interview et je ne pourrais toujours pas le
9 faire maintenant.
10 Q. Oui, un peu comme moi quand je parlais en anglais je peux demander un
11 café et dire bonjour.
12 R. Oui. Peut-être un peu plus que cela. Je pouvais un peu que cela il y a
13 12 ans, mais pas maintenant.
14 Q. En tant que journaliste, lorsque vous étiez en Bosnie, manifestement,
15 vous étiez là au frais de votre journal le Guardian.
16 R. Oui.
17 Q. Vous aviez pour fonction d'envoyer des articles à votre journal.
18 R. Oui.
19 Q. Pour qu'ils soient publiés le lendemain.
20 R. Oui, à un moment donné. En général, le lendemain c'était très difficile
21 parce que difficile de trouver un téléphone ou ce serait trop tard pour que
22 ce soit envoyé à la presse, mais, en général, oui.
23 Q. Vous avez parlé de la difficulté qu'il y avait à trouver une ligne
24 téléphonique terrestre pour envoyer, par exemple, quelque chose à
25 Angleterre.
26 R. Oui, il fallait surtout aller en Croatie.
27 Q. A Split, par exemple, ou ailleurs.
28 R. Il y avait un endroit qui s'appelait Imotski populaire parce que
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1 c'était là qu'on trouvait le plus près une ligne téléphonique.
2 Q. Si un article n'était pas publié le lendemain, il fallait qu'il reste
3 intéressant, donc il fallait publier cet article le lendemain un jour
4 d'après pour que cela reste encore d'actualité.
5 R. Cela était une décision que prenait mon rédacteur en chef, pas moi.
6 C'était en fonction du sujet.
7 Q. Donc au fond votre travail c'était d'aller mener une enquête.
8 R. Enfin, enquêter, trouver des témoins faire de son mieux vu les
9 conditions, vous vous êtes rendu compte que ces situations, ces conditions
10 n'étaient pas faciles.
11 Q. Bien entendu. Il fallait agir vite.
12 R. Je ne devais pas, disons, me précipiter faire un espèce de yo-yo comme
13 devait le faire certain journalistes, des gens qui travaillaient pour les
14 agences de presse, mais on ne voulait pas traîner dans les parages, je ne
15 voulais pas le faire.
16 Q. Parlons, si vous voulez bien du temps que vous avez effectivement passé
17 en Bosnie-Herzégovine. Au cours de la déposition d'hier et d'aujourd'hui,
18 vous avez discuté d'événements survenus entre, disons, le mois d'août 1992
19 et le mois de février 1994.
20 R. Oui.
21 Q. Mais, en fait, pendant cette période vous n'avez été en Bosnie-
22 Herzégovine que pendant de brève période de temps.
23 R. Oui, cela dépendait parce que c'était un roulement. Nous étions deux
24 dans le pays, et j'ai passé parfois certains jours parfois des semaines.
25 Q. Essayons d'être plus précis, et de circonscrire ces périodes. Vous avez
26 parlé d'événements qui se sont produits au milieu du mois d'août 1992.
27 R. Oui.
28 Q. Notamment, d'une visite dans un endroit dont vous avez appris plus tard
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1 que c'était le camp de Dretelj.
2 R. Oui.
3 Q. A ce moment-là, au mois d'août, combien de temps avez-vous passé en
4 tout dans le pays ?
5 R. Je pense que cette fois-là la visite avait commencé par une visite à
6 Belgrade, je suis allé à Belgrade, oui, oui, avant d'aller à Omarska et à
7 Trnopolje. Oui, c'est comme cela que la visite a débuté, donc, j'étais en
8 ex-Yougoslavie depuis la fin juillet et je ne sais pas combien de temps j'y
9 suis resté, c'était la même visite, après j'étais à Zagreb. Je ne peux pas
10 vous dire exactement la durée de ce séjour, mais ce fût un séjour assez
11 long.
12 Q. Essayons d'être plus précis : cette fois-là, combien de temps avez-vous
13 passé sur le territoire du HVO, disons ?
14 R. Quelques jours.
15 Q. Quelques jours, dites-vous.
16 R. Oui.
17 Q. Puis vous n'étiez plus en territoire HVO en septembre, pendant le mois
18 de septembre.
19 R. Mais si, je pense que si. Oui, j'étais en Bosnie centrale en septembre,
20 je pense m'être trouvé à Tomislavgrad en septembre, si je me souviens bien.
21 Je ne suis pas allé à Mostar au mois de septembre. Je pense qu'en septembre
22 je suis allé à Vitez.
23 Q. Vous vous souvenez que vous avez état d'une déclaration que vous avez
24 fournie en 1997. Serait-il utile que cette déclaration préalable vous soit
25 présentée, avec l'aide de M. le Greffier.
26 M. MURPHY : [interprétation] C'est la page 5 de la déclaration préalable.
27 Je pense que c'est un document d'accusation, n'est-ce pas, Monsieur le
28 Greffier ? 00484823, c'est le numéro ERN. Mais je vous ai donné le numéro
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1 ERN de la page 5. Apparemment, il s'agit du document 2D 00007.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : La solution serait peut-être de mettre la page sous
3 le projecteur, c'est plus simple, parce que la technique et la pratique
4 parfois cela fait deux.
5 M. MURPHY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, vous avez raison.
6 Je vais demander à Mme l'Huissière de placer le document sous le
7 rétroprojecteur.
8 Q. Je ne sais pas si tout le monde est en mesure de voir ce qui est placé
9 sous le rétroprojecteur. Je suis en train de vous montrer la cinquième page
10 de cette déclaration préalable dont j'ai parlé. Prenez le premier
11 paragraphe tout en haut de la page. Il parle du fait que vous avez relaté
12 le nettoyage ethnique des Musulmans par les Serbes dans le nord-ouest de la
13 Bosnie jusqu'en septembre, puis "j'ai pris quelques jours de congé et je
14 suis rentré en Herzégovine vers la mi ou la fin octobre." Est-ce que ceci
15 vous rafraîchit les souvenirs ?
16 R. Oui. La première phrase parle du fait que nous avons suivi les
17 événements dans ce genre de convoi que j'ai utilisé pour aller de la Bosnie
18 occidentale jusqu'à Travnik. J'ai écrit un article à Travnik où j'ai fait
19 de la recherche à Travnik pour écrire un article sur la façon dont ceci se
20 poursuivait. Quand je dis que j'ai pris un temps, "j'ai pris des congés,"
21 ce n'étaient pas des congés, je travaillais ailleurs. Effectivement, je
22 suis revenu en octobre en Herzégovine.
23 Q. Oui, je ne veux pas insister outre mesure, mais, quand vous travaillez
24 ailleurs, où étiez -- je voulais simplement où vous étiez en septembre ?
25 R. Pendant l'essentiel du mois de septembre, j'étais là mais quand vous
26 avez cette première phrase qui décrit les activités, là j'étais sans doute
27 basé à Turbe et à Travnik et ceci concernait les convois de Musulmans et de
28 Croates qui venaient de la région de Banja Luka, de Prijedor pour aller en
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1 Bosnie centrale, en suivant cet itinéraire que j'avais moi-même utilisé
2 quelques semaines auparavant.
3 Q. Je comprends cela, mais, après cela, vous n'étiez plus en Bosnie, où
4 étiez-vous exactement ?
5 R. Pendant le mois de septembre, entre ces deux séjours je suis allé à
6 Rome ou à Milan plus exactement.
7 Q. D'accord. Donc, vous étiez en Italie quelque part.
8 R. Oui.
9 Q. Fort bien. Vous êtes revenu en octobre 1992. Vous êtes reparti là-bas ?
10 R. Oui.
11 Q. Vous avez au cours de votre déposition relaté certains événements qui
12 se sont produits au cours de cette période. Puis, entre le mois de novembre
13 1992 et le début 1993, vous étiez parti, vous êtes revenu début 1993 pour
14 tourner ce film.
15 R. Oui, cela semble logique. C'est conforme à mes souvenirs.
16 Q. Vous avez passé deux mois à la réalisation de ce film, à y participer
17 en tout cas, puis vous avez été absent jusqu'en juillet 1993 ?
18 R. Exact. C'est ce dont je m'en souviens.
19 Q. A ce moment-là, vous avez passé une semaine à Vitez ?
20 R. Avant de partir en Herzégovine, oui, c'est exact.
21 Q. Comme cela a été dit aujourd'hui, vous êtes reparti en Bosnie en
22 septembre 1993, c'est à ce moment-là que vous êtes allé à Mostar Est, la
23 première fois.
24 R. Oui, en Bosnie, oui. Fin août, j'étais en Croatie à Zagreb
25 effectivement. Fin août, début septembre j'étais de nouveau en Bosnie.
26 Q. Je voudrais aborder quelques autres points avant de donner la parole à
27 mes collègues. Hier, vous avez relaté une conversation que vous avez eue
28 avec un certain nombre Pero Markovic. Vous en souvenez ?
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1 R. Non. J'ai essayé de le rencontrer. C'était le maire de Capljina, n'est-
2 ce pas ?
3 Q. Oui.
4 R. Non, j'ai voulu le voir, m'entretenir avec lui le jour où je suis allé
5 à Capljina en 1992, mais on ne s'était pas parlé.
6 Q. Mais vous avez eu une conversation à propos de ses activités ?
7 R. Oui, à propos de lui.
8 Q. A propos de lui.
9 R. Mais c'est avec des gens du Haut-commissariat, mais, je ne l'ai jamais
10 rencontré, lui.
11 Q. Mais vous avez bien parlé avec des représentants officiels du HCR ?
12 R. Oui.
13 Q. Cette conversation vous a permis de déduire que M. Markovic avait une
14 réputation, ou la réputation d'être assez extrême.
15 R. Oui, c'est ce qu'on m'a dit. Il a aussi été mentionné par les gens de
16 Capljina.
17 Q. Il était le maire, c'était le maire et c'était aussi le chef du HVO
18 local ?
19 R. Oui. Je pense qu'il était les deux -- je suis certain qu'il était
20 maire, en tout cas.
21 Q. A partir des informations que vous avez reçues, est-ce que vous ne vous
22 êtes pas dit que c'était Pero Markovic qui était la force motrice disons,
23 qui avait provoqué ces expulsions à Capljina.
24 R. C'est une impression que j'ai eue après ma conversation avec le HCR.
25 Ils n'avaient pas grande estime de cet homme.
26 Q. Non, c'est bien ce que je pensais. D'après, vous avez accepté ce qui
27 vous a été dit.
28 R. Je n'avais jamais rencontré et j'ai dit ce qui m'avait été rapporté.
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1 Quant à savoir si je l'ai accepté -- bon, si je n'aurais pas accepté
2 jusqu'au point de l'écrire, mais, effectivement, ce qui m'avait été relaté
3 m'avait beaucoup alarmé. J'ajoute que les gens de Capljina avaient donné
4 son nom aussi, pas seulement le HCR.
5 Q. Vous n'avez pas de raison de ne pas croire ce que vous aviez entendu.
6 R. Non.
7 M. MURPHY : [interprétation] Un instant, Monsieur le Président, s'il vous
8 plaît.
9 [Le conseil de la Défense se concerte]
10 M. MURPHY : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le
11 Président. Merci.
12 Q. Merci, Monsieur Vulliamy.
13 R. Merci.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Kovacic.
15 M. KOVACIC : [interprétation] Si vous me le permettez, je voudrais que mon
16 client pose quelques questions, car il connaît mieux les faits. Si vous le
17 permettez, il poserait quelques questions après quoi je poserais quelques
18 questions de suivi. Je vous remercie d'avance.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, Monsieur Kovacic.
20 Monsieur Praljak, vous avez la parole.
21 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.
22 Contre-interrogatoire par l’Accusé M. Praljak :
23 Q. [interprétation] Monsieur Vulliamy, nous n'avons pas beaucoup de temps.
24 Je vais vous demander d'essayer de fournir des réponses brèves et concises.
25 R. D'accord.
26 Q. Vous avez dit que vous étiez allé au camp de Dretelj, le 8 ou le 9 août
27 1992. Il s'y trouvait des Serbes qui étaient détenus au camp et les hommes
28 du HOS contrôlaient ce camp.
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1 R. Exact.
2 Q. Est-ce que vous savez si le HOS ne se trouvait pas être influencé par
3 les structures politiques de la communauté croate d'Herceg-Bosna ?
4 R. Je ne connaissais pas et je ne connais pas les rapports exacts. Je sais
5 qu'ils étaient associés au parti politique qui avait sa base à Zagreb, mais
6 je ne connais pas exactement les rapports qu'ils entretenaient avec la
7 communauté d'Herceg-Bosna. Je sais qu'à l'époque, le HOS avait des rapports
8 assez conflictuels ou hostiles avec le HVO.
9 Q. Est-il permis de conclure que lorsqu'un parti politique a une armée, il
10 n'est pas sous l'influence d'une organisation sociale qui aurait fait
11 partie de la communauté croate Herceg-Bosna, HZ HB ?
12 R. Je ne sais pas quels étaient les rapports existants entre le HOS et la
13 communauté croate Herceg-Bosna.
14 Q. Je vous remercie. Est-ce que le HOS avait son propre QG ?
15 R. Je ne sais pas si elle avait un QG général --
16 Q. Excusez-moi, si vous ne savez pas, dites-le tout de suite et je
17 pourrais poser une autre question.
18 R. Je sais qu'il y avait un QG pour la région de Capljina.
19 Q. Merci. Savez-vous si le commandant du HOS, Blaz Kraljevic, qui a été
20 tué plus tard, avait été nommé général par le président Izetbegovic ?
21 R. Non, je ne le savais pas.
22 Q. Savez-vous s'il y avait davantage de Musulmans que de Croates dans le
23 HOS ?
24 R. Je savais qu'il y avait des Musulmans au HOS.
25 Q. Savez-vous combien de soldats comptaient les Unités du HOS dans
26 diverses parties du territoire de Bosnie-Herzégovine jusqu'à Zenica ?
27 R. Non, je ne pourrais pas vous donner de chiffres.
28 Q. Savez-vous quel genre d'armes ils avaient ?
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1 R. Je les ai surtout vu armer de Kalachnikovs. Je n'ai pas vu beaucoup de
2 signe, de présence de pièces d'artillerie, pas du tout d'ailleurs. Ils
3 avaient surtout des armes légères et des Kalachnikovs.
4 Q. Je vous remercie. Quel genre d'institution y a-t-il au sein de la
5 communauté croate d'Herceg-Bosna politique et militaire s'il est possible
6 de tolérer l'armée du HOS sans pouvoir aucunement la contrôler ?
7 R. Excusez-moi, mais je n'ai pas bien compris votre question.
8 Q. La HZ HB, la communauté croate d'Herceg-Bosna, est-elle une structure
9 organisationnelle importante si en plus de l'armée régulière, il y a une
10 autre faction armée qu'elle ne peut pas du tout contrôler ?
11 R. Je ne connais pas la loi en vigueur en ce qui concerne -- les forces
12 armées de la communauté croate Herceg-Bosna si elles étaient légales ou
13 pas. Mais ce que je savais c'est que l'ABiH et l'armée du HVO étaient
14 alliées. Je ne sais pas si le HOS avait sa place dans cette alliance.
15 Q. Vous avez dit que le HOS était favorable à ce que la Bosnie-Herzégovine
16 fasse partie intégrante de la Croatie, d'une Croatie qui irait jusqu'à la
17 Drina.
18 R. C'est ce que M. Dedakovic m'a expliqué, effectivement.
19 Q. Mais l'idée d'avoir une Croatie qui irait jusqu'à la Drina, est-ce que
20 ce n'est pas là l'idée d'avoir un Etat indépendant de Croatie ? Est-ce que
21 ce n'est pas l'idée qu'avait Ante Pavelic, idée qui a eu pour conséquence
22 d'avoir l'expulsion de Musulmans d'une partie de cette entité ?
23 R. Je sais que le HOS voulait retrouver les frontières de 1941; c'est ce
24 qui m'a d'ailleurs été expliqué.
25 Q. Vous êtes journaliste. Le fait qu'Alija Izetbegovic a nommé un général
26 de cette armée, cela vous intéressait ?
27 R. Est-ce que vous parlez de Kraljevic, cet homme qui a été tué au barrage
28 routier ? Je ne savais pas qu'il était général de l'ABiH. Je connaissais
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1 son nom, mais, personnellement, je ne l'avais jamais rencontré jusqu'alors
2 en tant que je connaissais en tant que commandant du HOS, je ne sais pas
3 s'il a jamais été général de l'ABiH.
4 Q. Merci. Savez-vous que le camp de Dretelj a été fermé par les forces
5 armées du HVO, qui ont risqué d'avoir un conflit avec le HOS ? Je parle du
6 camp de Dretelj en 1992 ?
7 R. Non, je ne le savais pas.
8 Q. Savez-vous quel risque était encouru, étant donné qu'il y avait une
9 agression serbe ? Les risques de voir un conflit s'éclaté entre le HVO et
10 le HOS ?
11 R. A cette date-là, non, je ne le savais. Bien sûr avec le recul, je sais
12 qu'il y avait le risque de conflit entre quelques factions que ce soit sur
13 ce territoire qu'on appelait territoire libre pendant qu'il y avait des
14 combats contres les Serbes.
15 Q. Merci. Savez-vous qui a émis un ordre à l'intention d'un groupe
16 d'individus, ordre disant qu'il fallait fermer en ayant recours à la force
17 ce camp de Dretelj, camp où étaient détenus les Serbes ?
18 R. Qui a donné cet ordre du HVO ? Non, je ne le savais pas que c'était de
19 cette façon-là qu'on avait fermé les camps -- le camp, pardon.
20 Q. Seriez-vous surpris si ce témoin est la personne responsable de cela ?
21 R. Je pensais que votre dernière question pouvait conduire à ce genre
22 d'affirmation.
23 Q. Je vous remercie. Y a-t-il quelque chose que vous trouveriez immoral ou
24 inacceptable dans la déclaration de Mate Boban selon laquelle la
25 constitution de Bosnie-Herzégovine devrait concernée non seulement les
26 citoyens mais porter éventuellement sur les droits de l'homme des Croates
27 et des Serbes également ?
28 R. Je suis désolé, est-ce que -- est-ce que je pense qu'il a tort de
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1 penser cela ?
2 Q. Oui, c'est ce que je vous demande ? Est-ce qu'il a tort à votre avis ?
3 R. Bien, ce n'est pas à moi de déterminer s'il a tort ou raison. Je
4 commençais à me lasser un peu de l'usage très répétitif du mot "narod"
5 parce que je l'ai entendu un peu trop souvent en Croatie ainsi que dans la
6 bouche des Serbes de Bosnie. Je commençais à me lasser de cet accent qui
7 était constamment mis sur l'aspect collectif du peuple "narod." Je ne dis
8 pas que c'est un tort de parler ainsi, je dis simplement que d'après moi
9 cela a conduit à des événements assez regrettables et très violents.
10 Q. Je vous remercie. Les Musulmans, les Croates et les Serbes, sont-ils
11 des peuples constitutifs en Bosnie-Herzégovine et jouissent-ils de droits
12 souverains ?
13 R. Après le démantèlement de la Yougoslavie ou avant ? Aux termes de la
14 constitution --
15 Q. Aux termes de la constitution et en tant que peuple ?
16 R. Je suis tout à fait au courant qu'avant le démantèlement de la
17 Yougoslavie, la notion de peuple "narod" existait pour désigner des groupes
18 de citoyens de l'ex-Yougoslavie et je sais que les Musulmans sont devenus
19 un peuple, un "narod" dans des conditions bien spécifiques, oui.
20 Q. Est-il juste de défendre la liberté et le droit à la souveraineté et
21 d'un peuple, ainsi que des membres individuels d'un groupe ethnique ?
22 M. MUNDIS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.
24 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, ce genre de question
25 donne de la marge à l'accusé. On demande au témoin des avis personnels, or
26 le témoin est un journaliste. Il est censé témoigner au sujet de ce qu'il a
27 vu de ces yeux, vécu personnellement des personnes avec lesquelles il a
28 parlé et nous dépassons largement le cadre de l'interrogatoire à cet
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1 endroit. Puis, demander des avis à un témoin, ce n'est pas une base valable
2 pour un contre-interrogatoire.
3 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Le témoin est en train de tirer des
4 conclusions.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, vous l'aviez.
6 M. KARNAVAS : [interprétation] J'aimerais répondre en quelques mots. Je
7 pense que nous sommes tout à fait dans le champ de l'interrogatoire
8 principal que nous avons entendu hier, et dans le champ des connaissances
9 du témoin qui se trouve ici car il est en train de parler de la distinction
10 entre peuple, "narod," et nation. Il dit simplement que les deux nations
11 existent. Il reconnaît qu'il y a une troisième notion qu'il est en droit de
12 traiter également car il est l'auteur d'un livre dans lequel il a tiré
13 particulière. Donc, si l'on part du principe qu'il sait de quoi il parle,
14 ces questions se situent tout à fait dans le champ. J'insiste pour que M.
15 Praljak soit autorisé à continuer dans le même sens.
16 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me permettez de
17 soulever un sujet additionnel ?
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.
19 M. MUNDIS : [interprétation] Merci. Je ne sais pas si c'est le bon moment
20 pour évoquer cela, Monsieur le Président, mais Me Karnavas représente un
21 autre accusé dans la présente affaire. Donc, il est possible qu'en
22 utilisant la multiplicité des accusés ou des situations qu'il représente,
23 il apporte son aide à l'autre accusé.
24 Me Karnavas pense que ces questions sont justifiées. Peut-être que sur la
25 base de sa formation juridique, il sait comment poser des questions qui ne
26 susciteront pas d'objections lorsqu'il a l'occasion de contre-interroger un
27 témoin mais l'Accusation soulève une objection par rapport à ce type
28 d'intervention de la part de quelqu'un qui ne représente M. Praljak. J'ai
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1 le droit, Monsieur le Président, de dire ce que je dis pour le compte rendu
2 d'audience et je ne vois pas de problèmes à cela si la Chambre souhaite me
3 donner une instruction. D'accord. Mais je pense que dans les circonstances
4 actuelles, je suis en droit de faire ce que j'ai fait.
5 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : La question que les Juges se posent au travers des
7 questions posées par M. Praljak est de savoir : (1) s'il y a une
8 pertinence, (2) si le témoin est la personne idéale pour répondre aux
9 questions de nature politique et, notamment, de nature constitutionnelle.
10 Alors, avant d'autoriser la poursuite des questions, il y a un point que le
11 témoin doit éclaircir pour les Juges de la Chambre.
12 Monsieur, en tant que journaliste, est-ce que vous êtes un journaliste
13 d'investigation ou un journaliste politique ? Car, comme vous le savez, il
14 y a cette différence dans le journalisme. Il y a celui qui, à partir des
15 faits va faire un article à connotation politique avec des références à la
16 constitution, aux notions de peuple, de nation, et cetera. Puis, le
17 journaliste de faits, qui vient, qui constate qu'il y a un camp de
18 détention et qui l'explique, qu'il y a des personnes dans un camp sans
19 faire d'autres commentaires. Alors, la lecture même des questions de M.
20 Praljak se porte sur un plan politique puisqu'il y a des références à Mate
21 Boban, à des écrits, à la constitution. Alors, pour éviter de perdre du
22 temps ou, notamment, en raison des objections, est-ce que vous êtes
23 qualifié pour répondre aux questions ou si vous n'êtes pas qualifié, vous
24 nous le dites et M. Praljak passera à autres choses. Evidemment, en évitant
25 de donner votre point de vue personnelle, car en tant que journaliste, vous
26 écrivez dans un grand journal britannique et, donc, c'est le point de vue
27 du journal. Alors, vous devez répondre à ma question.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Sans problème, Monsieur le Président. Je
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1 n'ai jamais été un journaliste que l'on pourrait appeler un correspondant
2 politique ou un journaliste relevant de la partie politique. Ce que je
3 faisais c'est mené des enquêtes. Cela m'est arrivé. J'ai enquêté sur des
4 problèmes de corruption, mais j'ai aussi couvert une guerre, un conflit.
5 C'est une activité qui est plus proche de ma deuxième activité plutôt que
6 de la première. Par ailleurs, il faut connaître une situation politique, me
7 semble-t-il, même si on n'a pas une connaissance détaillée de la
8 constitution d'un pays mais en tout cas, on est mieux qualifié pour
9 discuter de ce genre de questions quand on y à travailler. Je ne suis peut-
10 être pas la personne la plus appropriée pour discuter de la différence
11 entre un "narod," et nation. Je ne suis en aucun cas un spécialiste de la
12 constitution. Je ne suis pas un journaliste constitutionnel, mais je
13 connais tout de même la différence entre les deux nations.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Praljak, le journaliste vient de
15 préciser qu'il y a un domaine où il ne peut répondre. Alors, tachez de
16 poser des questions plus précises sur ce qu'il peut nous apporter.
17 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Vous avez dit que Mate Boban cite la
18 Suisse comme d'organisation possible pour la Bosnie-Herzégovine, oui ou
19 non ?
20 R. Oui, il l'a fait.
21 Q. La Suisse est-elle exemplaire du point de vue de l'organisation d'un
22 pays comportant trois peuples ?
23 R. Je n'ai pas d'avis particulier sur la Suisse, à vrai dire.
24 Q. Est-il exact que vous n'avez jamais entendu Mate Boban parler de la
25 séparation de la Herceg-Bosna par rapport à la Bosnie-Herzégovine pour un
26 rattachement de celle-ci à la Croatie ?
27 R. C'est exact. Il n'a jamais utilisé le mot "annexion" ou "sécession",
28 mais il a donné l'impression qu'il souhaitait l'établissement de liens très
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1 étroits et il a parlé de liens matériels spirituels et si je me souviens
2 bien, il a parlé également de frontières entre la Herceg-Bosna et la
3 Croatie, à l'époque, en disant qu'elles étaient pratiquement inexistantes.
4 Q. Monsieur Vulliamy, je vous prierais de bien vouloir répondre à mes
5 questions et de ne pas me donner vos avis personnels. Quand vous me
6 répondez, répondez à mes questions, je vous prie. Vos avis personnels, vous
7 les avez donné au Procureur.
8 S'il est exact que Mate Boban et la Croatie ont bien signé le plan
9 Cutileiro, le plan Vance-Owen et tous les plans proposés par la communauté
10 internationale, ne serait-il pas illogique de penser qu'en même temps, il
11 souhaiterait la guerre ?
12 R. Je ne sais pas si c'est logique ou pas mais manifestement, il se
13 préparait à entrer en guerre.
14 Q. Je suis d'accord si vous parlez d'une guerre contre l'agression. Mais
15 est-il logique de supposer que la guerre est la capture d'un territoire et
16 le désir de ceux qui refusent de signer les plans internationaux, les plans
17 de la communauté internationale ?
18 R. Pour autant que je le sache et vous venez d'évoquer le plan Vance-Owen
19 qui reprenait plus ou moins les désirs exprimés par Mate Boban car pour
20 autant que je le sache, les gens qui ont signé le plan Vance-Owen parlaient
21 également du HVO comme étant l'autorité civile et militaire sur place et
22 impliquant qu'ils avaient au moins un certain contrôle sur le HVO. Donc, je
23 pense que oui, en effet, Mate Boban a dit que le peuple croate, le HVO,
24 ainsi que -- et le HVO, qui était leur armée, était armé et près à défendre
25 leur liberté, ce qui d'après mon expérience personnelle, signifiait des
26 actes de défense, mais se défendre ne signifie pas que tout ce qu'on fait
27 est bien nécessairement.
28 Q. Quand vous pensez que Mate Boban allait vous parlez des succès
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1 remportés par lui sur les Serbes au cours de l'été 1992, il vous a parlé
2 des problèmes politiques et cela vous a surpris. La solution politique, qui
3 a présidé à la structure intérieure de la Bosnie-Herzégovine, était-elle
4 une base menant à la guerre ou menant à la paix ?
5 R. Ce qui m'a surpris c'est de voir qu'il était assez réticent pour parler
6 de ces actions vis-à-vis des Serbes, or je présume que lui-même et ses
7 alliés au sein du gouvernement Bosnia et de la partie bosnienne étaient en
8 train de combattre, mais je n'ai rien entendu dans son propos qu'il soit un
9 discours en faveur de la paix. Je l'ai plutôt perçu comme une affirmation
10 des droits dont jouissait le peuple dont nous parlons s'agissant d'utiliser
11 la force armée, en cas de nécessité, ce qui impliquait qu'il pensait que
12 celle-ci pourrait être nécessaire.
13 Q. Je vous remercie. A Grude vous avez vu des automobiles, des voitures
14 qui portaient des plaques d'immatriculation HV. Savez-vous combien il y a
15 de citoyens de Bosnie-Herzégovine nés en Bosnie-Herzégovine qui ont
16 participé à la défense de la Croatie lorsque la Croatie a été attaqué en
17 1991 ?
18 R. Je ne sais pas combien il y en a eu, mais je sais qu'il y en a eu.
19 Q. Merci. Merci. Sommes-nous en droit de conclure qu'il est logique que
20 les personnes qui ont des familles et des maisons en Bosnie-Herzégovine
21 aillent les défendre dès lors qu'en Croatie au début de l'année 1992 une
22 trêve a été signée et que les actions militaires se sont arrêtées ?
23 R. Je n'ai pas compris votre question.
24 Q. Pouvons-nous considérer qu'il est logique que des habitants de Bosnie-
25 Herzégovine qui ont participé aux actions de l'armée de Croatie lorsque la
26 Croatie se défendant contre l'agression de la part des Serbes, alors une
27 fois que la trêve est signée en Croatie, ne pouvons-nous pas considérer
28 qu'ils aillent en Bosnie-Herzégovine pour défendre leurs familles et leurs
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1 propriétés, leurs maisons ?
2 R. En effet.
3 Q. Merci. Vous avez tout de même quelques connaissances médicales. Ne
4 serait-il pas logique d'essayer de réduire les tensions sur le champ de
5 bataille en Croatie et dans le même temps de permettre au même agresseur
6 qu'on combattait en Croatie, à cet même agresseur qui avait les mêmes
7 objectifs que ceux qu'ils avaient en Croatie de déplacer toute sa puissance
8 militaire dans la Bosnie-Herzégovine pour continuer à faire exactement la
9 même chose que ce qu'ils avaient fait à Vukovar et ailleurs ? Est-il
10 possible de faire une distinction entre les deux idées ? Parce que
11 l'agresseur est le même, l'armée à laquelle on est confronté est la même,
12 tous les éléments factuels sont les mêmes. Alors serait-il logique d'avoir
13 ce genre d'idée ?
14 R. Je suis, bien sûr, au courant de la remobilisation de la JNA et de ce
15 qu'on peut appeler l'armée serbe et l'armée des Serbes de Bosnie, et je
16 suis aussi au courant du fait que l'armée croate, le HV, s'est regroupé
17 contre cette deuxième guerre qui avait éclaté en Bosnie. Je ne suis pas le
18 seul à avoir vu ces véhicules. En fait, les observateurs militaires les ont
19 vus également ainsi que les armes que ces véhicules transportaient. Nous en
20 avons entendu parler à Mostar est et au siège également.
21 Q. Combien de voitures portant des plaques d'immatriculation HV avez-vous
22 vues à Grude ?
23 R. A Grude à ce moment précis, je ne me souviens pas de leur nombre exact.
24 Elles étaient à Grude et d'ailleurs on en voyait un peu partout dans toute
25 la région à ce moment-là. Pas en nombres très importants mais je ne saurais
26 pas vous donner un chiffre exact.
27 Q. Est-il possible que ces jeunes gens issus de l'armée croate sans avoir
28 demandé l'autorisation à qui que ce soit soient montés à bord d'une voiture
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1 pour aller dans les localités où se trouvaient leurs parents, leurs
2 familles, leur père et mère, leurs frères pour aller les défendre ? Est-ce
3 que cela est une possibilité ?
4 R. Je ne sais pas.
5 Q. Merci. En 1992, pendant l'été, Mate Boban vous a dit qu'il n'allait pas
6 permettre aux Musulmans de participer au gouvernement de Mostar ou à celui
7 d'autres municipalités dans la communauté croate d'Herceg-Bosna.
8 R. La conversation dont j'ai le souvenir portait précisément sur Mostar.
9 Je ne me souviens pas qu'il ait parlé de l'ensemble du territoire, mais
10 pour Mostar il a dit qu'il ne voulait pas de représentation légale
11 musulman, en effet.
12 Q. Merci. Alors, est-il possible dans ces conditions d'expliquer le fait
13 que Mostar ne cessait de s'armer et a continué à le faire jusqu'au début du
14 conflit jusqu'à ce qu'éclate le conflit en même temps que Boban commandait
15 l'armée, était le premier, commandant suprême de l'armée ?
16 R. Je sais que l'armée bosniaque était en train de s'armer, bien entendu.
17 J'ai parlé du rôle joué par l'armée bosniaque au côté du HVO vis-à-vis les
18 Serbes. Je dois reconnaître que je ne sais pas si Boban était considéré
19 comme le commandant suprême de l'armée bosniaque en Herceg-Bosna ou si lui-
20 même se considérait comme le commandant suprême, cela je ne le sais pas.
21 Mais s'agissant de l'armée bosniaque elle n'était pas sous son
22 commandement. Quand je suis allé sur place en août 1992, l'armée bosniaque
23 avait des armes, bien entendu, cela j'étais au courant, et elle se battait
24 au côté du HVO qui lui aussi avait des armes. Je dois dire que je ne sais
25 pas quelle était la chaîne de commandement et où se situait M. Boban au
26 sein de commandement dans l'armée ou quelle était sa place hiérarchique par
27 rapport à l'ABiH de Mostar, officiellement.
28 Q. Ce qui m'intéresse c'est la logique. Lorsqu'on voit quelqu'un qui veut
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1 soumettre quelqu'un d'autre à son contrôle et qu'il lui donne des armes en
2 même temps cela me semble un paradoxe. Cela me semble illogique.
3 R. Excusez-moi, je ne comprends pas.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez des questions dont le témoin peut répondre
5 parce que par les questions que vous posez vous êtes en train de plaider
6 pour le moment votre cause. Alors, on n'est pas à ce stade. Ce témoin a eu
7 le privilège de rencontrer M. Boban, donc il est intéressant de lui poser
8 des questions sur la nature de l'entretien qu'il a eu mais pas sur des
9 spéculations politiques ou autres dont le journaliste vous répond à
10 plusieurs reprises : "Je ne sais pas."
11 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
12 Q. Savez-vous qu'au mois de mai 1992, toute la rive gauche de la Neretva,
13 depuis Mostar nord jusqu'à la frontière avec la Croatie, avait ethniquement
14 nettoyé par l'agression serbe ?
15 R. Je savais que des combats pour Mostar ont eu lieu en juillet, combats
16 qui ont été remportés par l'alliance croato-musulmane. Je savais aussi
17 qu'au cours de leur avance, quand vous dites le nord, je pense que vous
18 parlez de la rive est de la Neretva. Donc je sais qu'au cours de leur
19 avance, les Serbes avaient subi un nettoyage ethnique aux Croates et aux
20 Musulmans de la zone, quand ils ont pénétré dans Mostar ouest. En effet,
21 j'en ai parlé pendant ma visite du 1992, oui.
22 Q. Où sont partis les réfugiés qui sont s'en sont suivis ?
23 R. Ils sont arrivés à Mostar. Je ne sais pas combien de temps ils y sont
24 restés mais j'en ai rencontré quelques uns. Je parle bien de personnes qui
25 étaient victimes du nettoyage ethnique commis par les Serbes sur la rive
26 est de la Neretva qui venaient, y compris de Trebinje qui est assez loin.
27 Je ne sais pas où ils sont allés après avoir quitté Mostar. Mais quand je
28 suis revenu à Mostar en octobre 1992, j'en ai trouvé un grand nombre qui
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1 était encore là, pas tous mais un grand nombre. J'en ai parlé. J'ai dit que
2 les nouveaux règlements en vigueur les contraignaient à s'enregistrer
3 auprès des autorités du HVO à ce moment-là. Ils provenaient majoritairement
4 de cette rive est dont vous venez de parler.
5 Q. Si j'ai bien compris ce que vous venez de dire, vous continuez à penser
6 que Mate Boban et les responsables politiques souhaitaient faire la guerre
7 aux Musulmans, souhaitaient les expulser, souhaitaient dominer les
8 Musulmans. C'est ce que je crois comprendre de toutes les conclusions que
9 vous avez tirées. Ce que je dis est-il exact ?
10 R. Vous avez utilisé le mot "expulsé"; ce que j'ai vu à Prozor m'a poussé
11 à me poser des questions. Quant à la suprématie sur le territoire de
12 Herceg-Bosna, cela je réponds tout à fait fermement, oui. Excusez-moi, mais
13 quel était votre troisième élément ? Déclarer la guerre. Je trouvais que
14 c'était une attitude assez belliqueuse vis-à-vis des autorités du
15 gouvernement de Sarajevo, en effet, mais vous venez d'évoquer trois
16 éléments. J'ose dire que je suis d'accord avec vous sur deux de ces trois
17 éléments et pour le troisième, expulsion, je dis que je ne suis pas sûr.
18 Q. Merci. Je vous demanderais de bien vouloir répondre un peu plus
19 précisément, un peu plus exactement à mes questions.
20 Comment dans ces conditions, expliquez-vous le fait qu'en 1993, au mois
21 d'avril 1993, sur des territoires qui avaient déjà été ethniquement
22 nettoyés nous sommes en présence de tout le 4e Corps de l'ABiH, de tous les
23 -- alors que tous les réfugiés, personnes déplacées sont rentrés et on peut
24 donc se demander comment ces personnes sont rentrées, qui leur a donné des
25 ordres, et qu'en est-il d'un éventuel désir de nettoyage ethnique en
26 retour ?
27 M. MUNDIS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. La question
28 est extraordinairement multiple, et il y a des éléments dans cette question
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1 qui sont très complexes et ne sont fondés sur aucune pièce à conviction.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Praljak, vous posez une question à
3 plusieurs facettes, donc essayez de couper la question par des termes de la
4 question qui appelle une réponse précise, parce que sinon plus personne ne
5 pourra suivre. Le Procureur se lèvera pour faire objection.
6 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci.
7 Q. Au mois de mai 1992, toute la rive gauche de la Neretva est
8 ethniquement nettoyée, oui ou non ?
9 R. Je n'étais pas là-bas mais j'ai lu des articles à ce sujet donc je suis
10 d'accord, oui.
11 Q. Merci. En juin 1992, le territoire est libéré, l'occupation serbe n'est
12 plus là, oui ou non ?
13 R. Je pensais que c'était en juillet. Je n'étais pas sur place mais si je
14 me trompe j'accepte de le reconnaître.
15 Q. Merci. Bien, alors tous les réfugiés, toutes les brigades ont été
16 renvoyés à leur point de départ, oui ou non, ceux qui l'ont accepté ?
17 R. Excusez-moi, Monsieur. Vous parlez des réfugiés de la rive est, en
18 disant qu'ils étaient rentrés sur le territoire de la rive est contrôlée
19 par les Serbes ? Je ne sais pas.
20 Q. Oui, c'est cela que je vous demande.
21 R. Je ne sais pas.
22 Q. Merci. Du côté est qui était sous le contrôle des Serbes, ce qu'est le
23 4e Corps de l'ABiH, et à Stolac a été créée la brigade Bregava, oui ou
24 non ?
25 R. Je savais que le 4e Corps de Bosnie-Herzégovine faisait partie de
26 l'alliance sur la rive est comme vous venez de le dire, et pour la Brigade
27 Bregava, je n'en ai jamais entendu parler, je suis désolé.
28 Q. Est-ce que tout cela aurait pu avoir lieu sans une participation active
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1 du HVO, aussi bien dans sa composante civile que dans sa composante
2 militaire ?
3 R. Vous parlez du déploiement du 4e Corps d'armée ?
4 Q. Oui et des personnes déplacées.
5 R. J'en doute à ce moment-là, non, cela n'aurait pas pu se faire. Pour
6 autant que je le sache, à l'époque les deux armées se battaient de concert.
7 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, je vous prie de
8 m'excuser pour le temps qui s'écoule
9 Q. Jajce, était-elle reliée à Travnik par un corridor très étroit ?
10 R. Oui. Un corridor que j'ai souvent essayé de franchir, et les conditions
11 pour le franchir étaient très effrayantes.
12 Q. A gauche et à droite du corridor il y avait les Unités serbes, oui ou
13 non ?
14 R. Absolument c'est une certitude.
15 Q. Sur la gauche à l'arrière des lignes Serbes, y avait-il des Unités de
16 l'ABiH si vous êtes au courant, dans les environs de Komar ? Est-ce que
17 vous savez, savez-vous s'il y a une tentative de la part de l'ABiH de
18 R. Peut-être que je le savais à l'époque quand j'avais des cartes sous les
19 yeux, mais je dois dire qu'aujourd'hui je ne me souviens plus exactement ce
20 qu'il y avait de l'autre côté du milieu serbe. Je ne sais plus qui tenait
21 ce territoire, mais je pense que c'était probablement l'ABiH et le HVO. En
22 tout cas, aujourd'hui, très précisément je ne suis pas en mesure de
23 répondre à votre question.
24 Q. Est-ce que vous savez, savez-vous s'il y a eu une tentative de la part
25 de l'ABiH de Bugojno d'élargir le territoire en attaquant les forces serbes
26 par l'arrière ?
27 R. Oui, je crois en avoir entendu parler, mais je n'étais pas là à ce
28 moment-là. Je crois qu'il y a différentes tentatives d'extension du
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1 corridor.
2 Q. Merci. Savez-vous ce qui suit, on a -- des médecins ont été envoyés
3 depuis Zagreb dans un véhicule blindé, un autobus pour sortir avec des
4 blessés de Jajce, des médecins Barisic, et cetera ?
5 R. Je ne le savais pas mais cela ne me surprend pas. Il y avait beaucoup
6 de gens qui se sont comportés en héros le long de ce corridor pour arriver
7 à Jajce et pour sauver les blessés. Cela ne me surprend absolument pas.
8 Q. Savez-vous que tous les blessés quelle que soit leur appartenance
9 ethnique ont pour la plupart été sortis et transportés à l'hôpital du HVO à
10 Bugojno ? Est-ce que vous savez cela oui ou non ?
11 R. Non. Mais cela ne me surprend pas encore une fois, je vous crois.
12 Q. Merci. Savez-vous combien d'unités nous avons envoyées d'Herzégovine
13 pour apporter des renforts à Jajce lorsque nous avons compris que la
14 situation était très mauvaise ?
15 R. Très précisément, je ne sais rien à propos des Unités d'Herzégovine,
16 mais je sais que le HVO était comme l'armée de Bosnie et essayait de faire
17 sortir des gens -- de faire passer les gens dans ce corridor, oui.
18 Q. Savez-vous que pas une seule unité, qui a apporté un renfort à Jajce,
19 n'est véritablement arrivée à Jajce; est-ce que vous savez cela ?
20 R. J'étais sur le point de dire, je ne sais pas s'ils sont arrivés à bon
21 port. C'était très difficile.
22 Q. Savez-vous que toutes les unités ont été arrêtées par l'armée des
23 forces de l'armée de l'ABiH entre Vakuf et Novi Travnik ?
24 R. Non, je ne savais pas cela.
25 Q. Savez-vous que nous avons envoyé une Unité du HOS, des forces armées
26 croates, composée à 70 % de Musulmans pour aller prêter main-forte aux gens
27 de Jajce; est-ce que vous saviez cela ?
28 R. Je ne savais pas cela à propos des gens du HOS à Jajce.
Page 1638
1 Q. Savez-vous que cette unité, en particulier, a été arrêtée par l'ABiH et
2 détenue pendant trois jours, encerclée pendant trois jours et que cette
3 unité n'est jamais parvenue jusqu'à Jajce ?
4 R. Non, je ne savais pas cela et je ne savais rien à propos du HOS, non
5 plus. Je vous ai dit cela. Je ne savais pas que --
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, les Juges, qui sont à ma droite et
7 à ma gauche, et moi-même, étant d'un avis contraire, estiment que vous
8 posez des questions qui ne sont pas pertinentes. La majorité des Juges
9 souhaitent que vous recentriez vos questions sur des questions dont le
10 témoin peut apporter une indication parce que de 2001, il a vu -- ou il y a
11 des événements suffisants permettant de répondre à la question. La question
12 précédente que vous avez posée est une question spéculative qui ne peut pas
13 être utile.
14 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui. Merci.
15 Q. Vous avez parlé de la route du Diamant et vous avez dit que cette route
16 avait été construite par des Unités du Génie britannique ?
17 R. J'ai dit qu'une partie avait été améliorée ou goudronnée lorsque
18 c'était nécessaire. Je n'ai pas parlé de la construction de toute la route.
19 Je n'ai pas dit qu'elle avait été entièrement construite par eux, je crois.
20 Q. Cette route était une route qu'ont empruntée des milliers de réfugiés.
21 Maintenant je souhaite vous poser cette dernière question. Dans votre
22 déclaration, vous dites avoir reçu de moi l'autorisation de visiter le
23 centre de rassemblement, le camp de Dretelj, le 8 septembre 1993 ?
24 R. Je suis sûr que vous ne vous trompez pas au niveau de la date. Je vous
25 reconnais bien là mais pour autant que je sache, oui, je crois que c'est
26 vous qui nous avait donné oralement cette autorisation. Si je me souviens
27 bien nous avions un papier, un ordre, un papier, un document qui nous
28 permettait d'aller à Dretelj, oui.
Page 1639
1 Q. Hier, dans un document qui a été présenté à la Chambre, nous avons vu
2 que le président Franjo Tudjman a envoyé une lettre à Mate Boban, le 6
3 septembre 1993; est-ce exact ?
4 R. Oui, et c'est -- la lettre. Je crois que j'ai lu le contenu de cette
5 lettre dans Slobodna Dalmacija, le 7.
6 Q. Vous avez dit que la raison sans doute de la publication de cette
7 lettre était la pression exercée par la communauté internationale et les
8 menaces de sanctions à l'encontre de la Croatie ?
9 R. Si je me souviens bien, on a soulevé une objection à ce moment-là.
10 C'est le conseil que je souhaite citer. Il a parlé d'analyse et cette
11 objection a été -- cette objection a été acceptée.
12 Je ne sais pas si je dois faire un commentaire à cet égard. Tout ce que je
13 peux dire à la lecture de cette lettre c'est que l'on savait ce qu'elle
14 contenait et on en connaissait le contenu dans les cercles diplomatiques.
15 Q. Vous avez également dit dans votre déclaration que vous avez été le
16 premier journaliste à entrer dans le centre de rassemblement, le camp de
17 Dretelj; est-ce exact ?
18 R. Pour autant que je sache, nous étions le premier groupe de journalistes
19 à nous y rendre et si quelqu'un a publié un article sur Dretelj avant notre
20 visite, alors, à ce moment-là évidemment, l'opinion que nous avions à ce
21 moment-là n'était pas exacte.
22 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je souhaite demander aux Juges de la
23 Chambre d'afficher l'ordre que j'ai moi-même donné le
24 1er septembre 1993. Cet ordre précise que, dans le camp de Gabela,
25 j'autorise une équipe de journalistes allemands d'entrer dans le camp de
26 Gabela.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le
28 permettez, ce document était le dernier de notre liasse de documents. Nous
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1 l'avons placé sur le système électronique et je viens de découvrir que
2 c'est le dernier qui n'est pas dans le système électronique en réalité.
3 Donc je souhaite distribuer des exemplaires dont je dispose et que j'ai ce
4 matin. J'ai quatre exemplaires : une pour la Chambre de première instance,
5 une pour le témoin. Je pensais bien que ce document allait être utilisé ce
6 matin.
7 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
8 Q. Ne s'agit-il pas de six jours précédent la date à laquelle Franjo
9 Tudjman a envoyé cette lettre ?
10 R. Oui, effectivement.
11 Q. Etant donné que cette lettre a été diffusée -- que ceci a été diffusé à
12 la télévision, ne serait-il pas vrai de dire que c'est à ce moment-là que
13 les gens de Croatie ont appris qu'elle était la situation réelle au niveau
14 de ces camps et on peut inclure Franjo Tudjman ?
15 R. Je suis incapable de me livrer à des sputations, à savoir, comment les
16 gens en Croatie ont découvert qu'elles étaient les conditions de détention
17 dans les camps. Je n'ai jamais vu de film. Je ne le savais pas, mais vous
18 avez peut-être raison en ce sens. Je n'ai jamais vu ce film. J'ai dit que
19 nous étions les premiers à entrer à Dretelj car c'est le commandant de ce
20 camp qui nous l'a dit et je n'étais pas au courant de ce film. Je suis
21 d'accord pour dire que c'était effectivement avant la date de la lettre.
22 M. KOVACIC : [interprétation] Pour nous permettre de mieux identifier le
23 document, je souhaite dire pour les besoins du compte rendu, que ce
24 document porte le numéro 3D 00141, de façon à ce que nous puissions le
25 reconnaître par la suite et je demanderais le versement au dossier de ce
26 document après. Merci.
27 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
28 Q. Monsieur Vulliamy, donc, c'est le chef de ce camp qui vous a dit que
Page 1641
1 vous étiez le premier à y entrer ?
2 R. Oui, c'était le commandant du camp, si je m'en souviens bien.
3 Q. Oui. Mais vous ne saviez pas si c'était vrai ou non ?
4 R. Non. Mais je n'ai aucune raison de mettre cela en doute, car je ne
5 savais pas que des journalistes allemands étaient venus avant nous.
6 Q. Savez-vous que le 7 septembre 1993, un journaliste de Globus, qui
7 s'appelait Zeljko Rogosic avait reçu l'autorisation de moi pour entrer à
8 Gabala et à Dretelj, dans les deux camps. Il est effectivement dans ces
9 deux camps après avoir eu quelques difficultés ?
10 R. Je ne savais pas qu'il s'était rendu à ces endroits-là.
11 Q. Pourriez-vous me dire pourquoi vous étiez surpris lorsque vous avez
12 reçu l'autorisation d'entrer dans le camp ?
13 R. Je dois que j'étais reconnaissant en même temps et surpris à la fois,
14 car les gens qui travaillaient avec M. Boban avait dit, le jour précis que
15 vous venez d'évoquer, le 7 et au mois de juillet, avez dit très clairement
16 qu'on ne pouvait pas y aller.
17 Q. M'avez-vous jamais rencontré avant cette date-là ?
18 R. Non. Je ne vous avais jamais vu avant. A cette date, j'avais vu votre
19 photo dans les journaux.
20 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] J'aurais bien d'autres questions à vous
21 poser, mais je vais m'arrêter là. Je vous remercie d'avoir répondu à mes
22 questions. Je remercie les Juges de la Chambre pour m'avoir autorisé à
23 poser ces questions.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, mon général.
25 Contre-interrogatoire par M. Kovacic:
26 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vulliamy. Je m'appelle Bozidar
27 Kovacic. Je suis l'avocat de M. Praljak et j'ai quelques questions
28 supplémentaires à vous poser concernant la déposition que vous avez faites
Page 1642
1 hier.
2 R. Bonjour, Monsieur.
3 Q. Hier, vous avez parlé de vos déplacements à Prozor. Essayons de savoir
4 de quoi il s'agit. A la page 53, lignes 2 à 14 du compte rendu et page 53,
5 ligne 21. Vous avez dit : "Qu'après avoir rencontré Boban, le 24 octobre, à
6 savoir la réunion avec Boban a eu lieu le 24 octobre. Vous vous êtes rendu
7 en Bosnie du nord, à Travnik et à Vitez. Vous avez parlé de la situation
8 critique à Jajce, il y a quelques instants aujourd'hui. Tout ceci avait un
9 rapport avec cela.
10 R. Oui. Je crois qu'entre les deux, c'est quelque chose que j'ai évoqué.
11 J'ai dit qu'il y avait, que les soldats de la FORPRONU ont essayé
12 d'emprunter une route pour traverser Sarajevo et lorsque je suis passé par
13 Prozor après m'être rendu en Bosnie centrale pour voir quelle était la
14 situation à Jajce. Je me souviens. Oui. C'est ce que j'ai dit dans ma
15 déposition.
16 Q. Oui, c'est exact. C'est quelque chose que vous avez rajouté à votre
17 récit d'hier.
18 Donc, nous savons maintenant où nous en sommes. Mais, vous n'êtes pas
19 très sûr. Vous ne savez pas si vous vous dirigez vers le nord en direction
20 de Travnik et si vous avez traversé la ville de Prozor, le 24 ou le 25.
21 Mais, vous avez dit, vous vous êtes souvenu que c'était un week-end, c'est
22 exact ?
23 R. Oui. Je me souviens que j'allais vers le sud. Je crois que c'était
24 normal, c'était un de ces premiers déplacements. C'était un vendredi ou un
25 samedi. Je crois que j'ai parlé d'un samedi. C'était sans doute un vendredi
26 après-midi ou un samedi. Mais très franchement, je ne me souviens pas du
27 jour exact, mais nous nous dirigeons vers le sud en voiture.
28 Q. Cela signifie, en rentrant de Travnik ?
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1 R. Oui.
2 Q. Pardonnez-moi. Je parle anglais. Je vais --
3 R. Oui, nous sommes allés de Bosnie centrale en Bosnie-Herzégovine.
4 Q. Donc, c'est un peu différent par rapport à ce que vous avez dit hier.
5 Hier, à la manière dont j'ai compris ce que vous avez dit et j'ai vérifié
6 le compte rendu. Comme j'ai compris les choses, vous avez dit que pendant
7 ce week-end qui était le week-end qui a suivi la réunion que vous avez eue
8 avec Boban, vous êtes tout à fait certain que la réunion avec Boban, a eu
9 lieu le 24. Mais vous n'étiez pas sûr en revanche et après un certain
10 nombre d'années. Ceci est compréhensible. Vous ne savez pas si vous avez
11 voyagé vers le nord en direction de Travnik, le même jour ou le lendemain.
12 Ensuite, vous avez dit que c'était certainement au cours du week-end.
13 R. Si je me souviens bien, c'est effectivement pendant le week-end et je
14 me dirigeais vers le sud lorsque j'ai traversé Prozor la première fois.
15 Q. Si vous --
16 R. Pas pour la première fois, mais la première fois, à ce moment-là.
17 Q. Oui. J'entends bien, Monsieur. Mais si vous pensez que vous vous
18 dirigez vers le sud et donc, vous rentriez de Travnik et vous alliez en
19 Bosnie-Herzégovine, au niveau du voyage du retour, ceci et totalement
20 impossible car vous avez dit que le 24, vous avez rencontré Boban quelque
21 part.
22 R. Oui. A Grude.
23 Q. Dans le sud. Donc, vous êtes allé ensuite à Vitez et à Travnik.
24 Ensuite, à un endroit, je regarde ces pages, vous avez dit : "Je suis
25 rentré deux ou trois jours après." Donc, ceci doit correspondre à 26 ou 27.
26 Mais, quoi qu'il en soit, ceci n'est peut-être pas si important que soit.
27 Ce qui est important, en revanche, c'est ceci. Vous avez dit que la
28 première fois et lors de mon premier voyage vers le nord, j'ai traversé
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1 Prozor et les choses étaient assez calmes. Il ne s'est passé quasiment
2 rien.
3 R. Non. Le premier voyage était en direction du sud.
4 Q. Comment se fait-il que vous veniez vers le nord pour aller vers le
5 sud ?
6 R. J'ai quitté les britanniques et je me suis rendu en Bosnie centrale. Je
7 crois que je suis passé par Kiseljak, je crois.
8 Q. Donc, vous avez emprunté un autre chemin. Vous n'avez pas traversé
9 Prozor ?
10 R. Je me dirigeais vers le nord avant de descendre, j'ai traversé Prozor.
11 Je ne me souviens pas. Je me souviens de la route. Je crois que c'était
12 Kiseljak.
13 Q. Quelque soit la direction que vous avez empruntée, vous avez parlé du
14 week-end ?
15 R. J'ai dit que je ne me souvenais pas de la date.
16 Q. Donc, cela peut-être, le 24, le 25, où ?
17 R. Je ne sais pas exactement quelle était la date ? C'était un vendredi,
18 samedi ou dimanche.
19 Q. Bien. Mais quoi qu'il en soit --
20 R. Les gens allaient à l'église si cela peut vous aider.
21 Q. Quoi qu'il en soit, vous dites que lors de ce voyage-là, les choses
22 étaient calmes à Prozor.
23 R. Oui.
24 Q. Quelques jours plus tard, deux ou trois jours plus tard --
25 R. Quelque chose comme cela.
26 Q. Donc, c'était un enfer.
27 R. Oui.
28 Q. Bien. Je souhaite vous présenter les documents maintenant, et je crois
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1 qu'il serait utile dans cette procédure à l'avenir de les présenter aux
2 Juges de la Chambre. Etant que c'est vous qui avez commencé à parler de
3 cela, nous devons en parler.
4 Je souhaite que le document 3D 00124 soit placé à l'écran, s'il vous plaît.
5 En attendant, je souhaite simplement vous signaler que c'est un
6 document qui a été rédigé le 24/10. Il émane des autorités militaires,
7 groupes tactiques numéro 1 de Jablanica. Je vais vous donner un descriptif
8 rapide. Ce document est un document qui est assez long, deux bonnes pages.
9 Il est signé de la main du commandant Salko Zeren, d'après un nom qui est
10 Musulman et ce document émane d'une unité qui est certainement rattachée à
11 l'armée. Dans le paragraphe d'introduction, le document précise :
12 "Conformément à la requête orale de l'état-major sur l'envoi de forces
13 armées des Unités de Jablanica à Prozor, nous vous rendons compte de ce qui
14 suit. Pendant la nuit, l'unité était prête à partir, mais n'a pas été
15 envoyée pour les raisons suivantes."
16 Je crois qu'il n'est pas nécessaire de lire tout ceci maintenant. Plus loin
17 dans le document, vers la fin, il explique
18 que : "Notre unité ne pouvait pas remplir sa tâche car il y a une forte
19 concentration des forces du HVO et le niveau de l'équipement de l'unité
20 cette même unité; en entendant celle-ci aurait subi de très fortes pertes
21 s'il y avait eu un engagement car il fallait couper les communications et
22 empêcher l'évacuation des réfugiés et des blessés de Prozor," et cetera, et
23 cetera.
24 Donc, ceci indique clairement que ces jours-là, en particulier, le 24
25 octobre, bien évidemment, quelque jour avant, deux jours avant peut-être,
26 un jour ou deux avant, qu'il y avait une engagement des forces, il y a un
27 conflit entre ces deux forces armées.
28 Voyons comment cette situation a évolué.
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1 M. KOVACIC : [interprétation] Je souhaite que l'on présent le document 3D
2 00123.
3 Q. Monsieur, je souhaite vous montrer quelques documents et ensuite je
4 souhaite recueillir vos commentaires là-dessus sur les différents
5 événements.
6 R. Bien.
7 Q. Donc, dans les deux jours qui ont suivi, vous avez vu une partie de ces
8 événements.
9 R. Oui.
10 Q. Il s'agit ici d'un document qui a été émis par le HVO, le 23 octobre,
11 donc, la veille du document suivant. Ce document est signé de la main du
12 commandant du HVO de Prozor, et contient des informations, et il a été
13 également signé par le président des autorités civiles du HVO à Prozor, et
14 destiné aux représentants militaires et civils des Musulmans de la
15 municipalité de Prozor, daté du 23 octobre. Objet : nos propositions afin
16 de trouver une solution à la nouvelle situation politique et la situation
17 sur le plan de la sécurité.
18 R. Je ne vois pas ce que vous êtes en train de lire, pardonnez-moi.
19 Q. Cela se trouve à la première page du texte traduit, ou peut-être une
20 page avant.
21 R. Merci. Merci.
22 Q. Je vais vous demander de faire particulièrement attention au point 1,
23 par exemple, on demande, on exige que cesse instamment les opérations
24 militaires et de façon inconditionnelle. Donc, je suppose que l'on peut
25 confortablement conclure qu'il se passait quelque chose. On demande ici
26 précisément que les Unités de l'armée soit retirée de la ville ce qui
27 implique que ces unités sont présentes.
28 M. KOVACIC : [interprétation] Le document suivant, s'il vous plaît,
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1 comportant le numéro 3D 00122. Malheureusement, c'est un document qui est
2 assez long. C'est un document de deux pages. Encore une fois, il nous faut
3 attendre un petit peu.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : La numérotation du document, vous indiquez le numéro
5 qui est en bas de la page.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
8 [Le conseil de la Défense se concerte]
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. J'indique à la Défense que lorsqu'elle cite le
10 numéro : il faut que ce soit le numéro e-court, pas votre numéro à vous.
11 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je viens de
12 comprendre que je citais des numéros qui n'étaient pas les bons, aussi
13 bien, par rapport au système que de façon générale. Mais quoi qu'il en
14 soit, je pense que ma commise à l'audience et le responsable de la Chambre
15 ont réussi à trouver le bon numéro, pendant que je citais le mauvais.
16 Q. Monsieur Vulliamy, ce document porte la date du 23, il est certain que
17 c'est un peu avant votre passage par la région. C'est toujours l'ABiH qui
18 est en cause grand quartier général à Konjic. Ce sur quoi j'aimerais mettre
19 l'accent dans ce document, c'est le point 3, dans lequel on décrit les
20 missions de l'unité, et à la page suivante, page 2, au point 3/3, on décrit
21 plus précisément la mission donnée à l'état-major municipal de Prozor. Dans
22 ce paragraphe,
23 M. Divjak, Jovan Divjak, le signataire, dit, je cite : "Défendre fermement
24 les positions actuelles et quand arrivera le Bataillon de l'état-major
25 municipal de Jablanica, empêcher la capture de Prozor et prendre les
26 mesures destinées à déployer les forces susceptibles de défendre Prozor et
27 de repousser celles qui s'opposent à la municipalité de Prozor. Dans les
28 discussions avec l'état-major du HVO, trouver les mesures nécessaires pour
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1 résoudre les problèmes existants."
2 Je ne vais pas lire l'intégralité du document - nous pouvons le lire pour
3 nous-même - mais nous voyons que des actions sont déjà en train d'être
4 prises à ce moment-là, donc avant le 23 octobre. A ce sujet, il y a un
5 autre document, dont j'aimerais parler. Un instant, je vous prie.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que l'on
7 soumette au témoin le document 3D 040016. Oui, c'est bien ce document. Il
8 n'est pas encore à l'écran, un instant.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Kovacic. Je vous
10 demanderais d'avoir l'amabilité de citer dans tous les cas ce que vous
11 appelez le numéro relevant du système de pré numérotation qui n'a pas de
12 numéro -- qui n'est pas un numéro en 04 mais un numéro 3D 00, suivi de
13 trois chiffres. Cela simplifierait la vie à tout le monde. Je vous
14 remercie.
15 M. KOVACIC : [interprétation] C'est le numéro que j'ai cité tout à l'heure.
16 Le Juge m'indique qu'il dispose du document. Oui, c'est bien celui-ci.
17 Donc, c'est le document 3D 00125. Voilà. Il apparaît à l'écran. Très bien.
18 C'est un document très court. Cette fois-ci c'est un document du HVO signé
19 par le général de brigade Milivoj Petkovic - il était à l'époque général de
20 brigade - et il est très court. Je le répète, on constate à la lecture de
21 ce document, qui date du 24 octobre, donc, on voit dans ce document que le
22 général Petkovic demande que des contacts soient pris avec les parties
23 impliquées dans le conflit. Donc, quelque chose est en train de se passer
24 et il parle sans cesse de cessez-le-feu. Donc, un conflit est en cours et
25 il ordonne d'arrêter les déplacements des unités dans les secteurs
26 extérieurs au territoire sur lequel il y a de conflits. Il est question des
27 unités qui sont en train d'arriver sur le lieu du conflit quel qu'elles
28 soient. Il demande également l'instauration d'un cessez-le-feu et dans la
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1 pratique il interdit tous les déplacements.
2 Alors, deux choses, Monsieur le Président. Je pense que l'heure est venue,
3 après quoi nous mettrons un terme aux questions relatives à ce sujet.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, il est midi 5. Nous allons faire la
5 pause pour permettre au témoin de se restaurer et nous reprendrons à 13
6 heures 30.
7 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 05.
8 --- L'audience est reprise à 13 heures 34.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Kovacic, vous avez la parole.
10 M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
11 Je vais demander à Mme l'Huissière d'enlever le document -- ou plutôt, au
12 Greffier d'opte de l'écran le document qui se trouve là pour le moment.
13 C'est le document 5D 3636. Je pense que c'est un document qui appartient à
14 Me Jonjic qui va l'utiliser plus tard.
15 Le dernier document affiché portait le numéro D 00125. Nous allons
16 examiner un autre document et s'en sera terminé.
17 Cependant, je voudrais par le truchement de ce témoin abordé quelque
18 chose qui est en rapport avec les événements d'octobre à Prozor. Il s'agit
19 ici du document 00137, donc, c'est le numéro 3D 0001237.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, donnez le numéro qui est en
21 bas de la page.
22 Bien. Allez-y.
23 M. KOVACIC : [aucune interprétation]
24 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que le micro n'est pas branché.
25 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, ce n'est pas le
26 document que j'ai demandé. J'avais demandé le document portant le numéro 3D
27 00137. Excusez-moi. On me fait savoir qu'il s'agit de la version en anglais
28 du document que j'avais demandé. Excusez-moi.
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1 Q. Monsieur Vulliamy, à l'examen de ce document vous verrez que c'est un
2 document du HVO commandement de la Brigade Rama, le 5 novembre 1992, est-ce
3 qu'on peut voir qui est le signataire de ce document ? En fait, il y a
4 plusieurs signataires. Il y a le président de la commission, Mijo Jozic,
5 qui l'a signé au nom du HVO, il y a commandant de la Brigade Rama, Ilija
6 Ramic, et l'officier chargé des opérations à la brigade Tomislav. Autant de
7 membres du HVO. Vu l'en-tête, il est possible de voir que ce rapport a été
8 élaboré à la demande du Grand état-major du HVO, en application de
9 l'article 2367/92, et vous avez en dessous du -- vous avez l'objet de ce
10 rapport; on parle des causes expliquant le conflit opposant la TO et le
11 HVO, en ce qui concerne Prozor.
12 Ce document est long. Il fait le détail de la chronologie des relations
13 existant entre la TO et le HVO, à commencer en 1992. Je vais sauter ce
14 passage aussi.
15 M. KOVACIC : [interprétation] Je vais demander que ce soit affiché le point
16 4 qui se trouve à la page 3 du document. En version anglaise, c'est la page
17 5. Page 5, s'il vous plaît.
18 Q. Oui, oui, voilà. Voici le point 4. Dans ce paragraphe, est faite la
19 synthèse des conséquences du conflit au niveau des pertes, des personnes
20 tuées ou blessées de part et d'autre, ainsi que l'état des lieux, des
21 dégâts infligés aux différentes installations. Nous le voyons 11 personnes
22 ont trouvé la mort du côté de l'ABiH, cinq du côté du HVO, 18 membres du
23 HVO ont été blessés, un nombre inconnu de blessés à la TO, et certains des
24 membres de la TO ont été hospitalisés à l'hôpital de guerre de Rumboci, et
25 le texte se poursuit. Mais je vais vous expliquer pourquoi je voulais que
26 vous voyiez ce document.
27 Monsieur Vulliamy, convenez-vous du fait que les dates que vous avez
28 données, 24 et 25, au moment de votre première visite à Prozor, lorsque le
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1 calme régnait encore; cela ne peut pas être des dates exactes parce que ce
2 document nous permet de voir qu'il y a un conflit grave qui a éclaté entre
3 les deux armées dès le 23 ?
4 R. Je vois qu'il y a eu la mobilisation du fait du document précédent, que
5 je ne peux pas contester. Pendant la pause, j'ai essayé de rétablir
6 l'évolution des choses dans le temps. Je ne peux pas vous donner la date
7 précise, le jour où je suis allé en voiture vers le sud à Prozor,
8 apparemment ici tout semblait normal, il n'y avait pas de trace d'hostilité
9 dans ce lieu. Je peux vous dire maintenant ou plus tard quand vous le
10 voudrez ce qu'il en est d'autres moments, d'autres étapes de mon voyage.
11 Vous voulez que je le fasse maintenant ?
12 Q. Non, non, merci.
13 R. Vous voulez que je parle du document ?
14 Q. Non, non. En conclusion sur ce point, ce sujet, quelle que soit la
15 date, et c'est tout à fait normal 13 ans se sont écoulés il est difficile
16 pour vous de vous souvenir de toutes les dates, quel que soit aussi
17 l'itinéraire que vous avez suivi, que vous alliez vers le sud ou vers le
18 nord, une chose est manifeste cela commençait le 23 et cela s'est poursuivi
19 les 24 et 25, il y a eu des événements en ce lieu qui étaient très forts,
20 très intenses et cela ne correspond pas à ce que vous avez vu un jour ou
21 deux plus tard.
22 R. Je ne suis pas d'accord pour ce qui est de ce qu'on pouvait depuis la
23 grande rue, la rue principale de Prozor. Pour vous aider, pour aider les
24 Juges de la Chambre, j'ai pris la liberté - j'espère qu'on ne m'en voudra
25 pas - j'ai appelé la bibliothèque du Guardian. Vous pouvez aisément
26 vérifier cet appel pour bien voir que c'est le seul appel que j'ai passé et
27 ceci je le fais uniquement en raison de la discussion que nous avons eue
28 hier soir. Nous n'avons pas la date des articles que tout le monde peut
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1 consulter par l'Internet et je m'étais dit que, pour aider les Juges, il
2 serait peut-être utile que je vous donne les dates de parution de trois
3 articles pour que l'évolution de ces événements dans le temps soient plus
4 clairs.
5 J'ai parlé à un chercheur, une dame, Linda McDonald - vous pourrez vérifier
6 - voici ce que j'ai. J'ai la date de la parution de l'article consacré aux
7 sapeurs-pompiers de Novi Travnik et c'était le matin du 24 octobre, date de
8 parution de l'article que j'ai écrit sur les événements relatifs à Mostar
9 dont je parlais auparavant. Je suppose aussi pour inclure l'interview de M.
10 Boban, je n'ai pas posé de questions supplémentaires à Mme McDonald. Je
11 voulais uniquement la date et cette date c'est la date du 26 octobre. Le
12 premier article consacré à Prozor est paru ou cela s'est passé suite à un
13 voyage vers le nord et la date de parution c'est le 28 octobre. Je suppose
14 que je l'ai envoyé de Travnik et je l'ai expliqué dans le cadre de ma
15 déposition. J'essaie de vous aider au niveau du temps. Je suppose que
16 c'était dans la nuit du 27 au 28.
17 Je ne peux pas vous donner la date précise de mon voyage vers le sud au
18 cours duquel je suis passé par Prozor et tout semblait relativement normal,
19 je l'ai déjà dit, mais je peux vous donner la date probable de mon retour,
20 de mon voyage de retour vers le nord. Je pense que cela c'était le 27, la
21 veille de la publication de ce premier article. Je maintiens ce que j'ai
22 dit dans ma déclaration. Je n'ai vu aucun signe d'hostilité depuis la
23 grande -- ou à proximité de la grande route au cours de ce voyage que j'ai
24 fait vers le sud, sans doute le 26, mais je suis catégorique, je maintiens
25 ce que j'ai dit. Il y avait un contraste tout à fait spectaculaire entre le
26 terme relatif, voire la normalité de la situation au moment du voyage vers
27 le sud et ce changement abrupt, soudain et spectaculaire que nous avons vu
28 au retour vers le nord, le 27, je pense. Bien sûr, je relève ce qui est dit
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1 dans votre document, mais il n'y avait pas de signes de combat encore moins
2 de combat très intense lorsque je suis allé vers le sud.
3 Q. Je vous remercie de ces explications supplémentaires. Je crois que
4 maintenant tout ceci a été tiré au clair. Mais, une question s'impose : vu
5 le temps que vous avez passé en Bosnie-Herzégovine, vu les événements dont
6 vous avez été témoin, à partir des explications que vous venez de fournir,
7 compte tenu du fait que vous avez traversé une ville un certain jour sans y
8 voir de traces de signes de combat, alors que vous en avez vu trois jours
9 plus tard. Dans l'intervalle, nous voyons, à partir des documents, qu'il y
10 a eu des activités de combat, des accrochages, des combats, même si ceci
11 n'était pas nécessairement visible à l'œil nu pour un voyageur qui
12 traversait la ville. Peut-on en conclure que parfois même quand on est sur
13 le terrain, il n'est pas possible de saisir et plus tard de transmettre les
14 informations les plus fiables ?
15 R. Bien, vous essayez de transmettre les informations les plus fiables
16 possibles dans la mesure du possible. S'il y avait eu des combats loin de
17 cette route principale, je ne l'ai pas vu. Si vous voulez insister ou vous
18 voulez que j'entérine ce que j'ai dit, à savoir qu'il y avait des citoyens
19 dans la rue, des gens qui sortaient d'église parce que c'était le week-end,
20 bon, je peux entériner ce que j'ai dit qu'il n'y avait pas, à ce moment-là,
21 de signes d'hostilité, rien qui ressemble à ce que j'ai vu, ce que nous
22 avons vu lors du voyage du retour vers le nord. Pas plus qu'il y avait de
23 signes d'expulsion de civils alors que cela c'était manifestement le cas au
24 retour le lendemain, le 28, je suppose. J'imagine, je n'ai pas posé la
25 question à Mme McDonald du Guardian, sans doute y a-t-il un autre article
26 relatif aux personnes que nous avons trouvées dans les collines. Pour ce
27 qui est de la véracité de mes dires, je peux vous donner le nom, les
28 coordonnées de toutes les personnes travaillant pour des organisations
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1 internationales avec qui j'ai travaillé. Vous pourrez leur parler, vérifiez
2 les publications, donc, il n'y a pas que moi ici qui suis en cause.
3 Q. Monsieur Vulliamy, je vous remercie de ces explications très
4 circonstanciées. Mais au fond, tout du moins dans la première partie de
5 votre réponse, nous avons exactement conclu ce que j'ai laissé entendre
6 quand on traverse une ville, on ne voit pas nécessairement tout ce qui s'y
7 passe, tout ce qui se passe à proximité de cette ville, dans les collines à
8 deux ou trois kilomètres de là; c'est ce que je voulais dire. Mais laissons
9 ceci de côté.
10 R. Oui, oui. Mais c'est une question aussi que vous posiez. On peut en
11 traversant une ville, en voiture, voir la différence qu'il y a entre une
12 grande rue ou une rue principale de cette ville où vous avez des civils,
13 des gens dans la rue qui font des achats, des emplettes, qui sont assis
14 dans des cafés et lorsqu'on revient dans cette vile qu'il y a beaucoup de
15 bâtiments qui ont été incendiés, attaqués à l'arme légère, cela se voit
16 facilement, aisément, lorsqu'on traverse cette ville et c'est bien ce que
17 j'ai vu.
18 Q. Je pense que la communication n'est pas bien établie entre nous. Tout
19 d'abord vous avez confirmé que quelquefois il n'est pas toujours possible
20 de tout voir alors que c'est parfois possible. Je crois que nous sommes
21 parfaitement d'accord là-dessus et ceci découle de la discussion que nous
22 venons d'avoir.
23 R. Bien, convenons du fait qu'on ne peut pas tout voir, mais lors du
24 voyage vers le sud, je suis allé entre Prozor et Jablanica dans l'arrière
25 des terres, mais aussi dans d'autres parties. On peut faire la différence
26 entre une grande rue où il y a beaucoup de tirs, de pilonnages, et une
27 grande rue où cela n'a pas été le cas. J'ai vu la différence, je l'ai
28 remarquée. Au cours de ces deux voyages dans les deux sens.
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1 Q. Très bien. Laissons ceci de côté. Je pense que ceci a été tiré au
2 clair. Je voudrais simplement mentionner un petit détail. Vous avez parlé
3 une fois de plus de la situation dans son ensemble. Apparemment, ceci s'est
4 passé deux ou trois jours après la date ou les dates que vous aviez
5 fournies au départ. Je ne veux pas être négatif en le disant parce qu'il y
6 a beaucoup de temps qui s'est passé depuis. Mais, ce jour-là, vous avez vu
7 des réfugiés, mais vous ne savez pas pourquoi ces gens étaient dans la rue.
8 Est-ce qu'ils fuyaient ? Est-ce qu'ils s'échappaient de quoi ? Qu'est-ce
9 qu'ils fuyaient ? Est-ce que vous avez des informations fiables ?
10 R. Ces gens nous ont raconté la raison de leur présence-là. C'est bien ce
11 que j'ai publié. Vous le dites à juste titre je n'étais pas à Prozor même
12 lorsque a eu lieu l'attaque, ou lorsque ces gens ont pris la fuite. Mais
13 j'ai parlé à ces personnes tout près de la ville, peu de temps après qu'ils
14 l'aient fui. Est-ce que je peux être précis quant à la date, je pense, si
15 le premier article envoyé de Travnik a été publié le 28. Cela a dû être ce
16 jour-là que je les ai rencontrés parce que je crois avoir dit que je suis
17 aussitôt reparti parce qu'on avait dit qu'il y avait 5 000 Musulmans qui
18 étaient portés disparus, 5 000 Musulmans de cette ville.
19 Q. Fort bien. Je vais reformuler ma question : aujourd'hui, vous avez
20 répété une partie de ce que vous aviez dit hier, mais la seule chose que
21 vous savez à propos de ces réfugiés c'est ce qu'ils vous ont raconté au
22 cours de deux ou trois brèves conversations, n'est-ce pas ?
23 R. Il y a eu plusieurs conversations qui n'ont pas été si brèves que cela.
24 Nous avons passé un temps certain dans ces collines et je crois également
25 avoir déclaré que sur la route du retour de Tomislavgrad. Ce soir-là, nous
26 avons été pris dans un convoi de taille petite ou moyenne de soldats qui
27 repartaient à Tomislavgrad, et nous avions eu une conversation avec le
28 commandant du HVO qui nous a dit que Prozor était désormais nettoyé et pur.
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1 Q. C'est quelque chose que l'on peut voir dans le document. Inutile de les
2 examiner maintenant. Vous avez donné le nom de cette dame dans le Guardian.
3 Est-ce que vous pourriez envoyer par télécopie ces articles à la Chambre
4 puisque l'Accusation dit ne pas avoir de copies de ces articles ?
5 R. Vous parlez de quel article et de quelle dame ?
6 R. J'ai mentionné certains articles, notamment, celui dans lequel vous
7 parlez de la conversation que vous avez eue et vous avez une conversation
8 avec cette dame, dans le Guardian qui m'a donné les dates.
9 R. Oui. Elle m'a donné les dates.
10 Q. Quand vous rentrerez à Londres, pourriez-vous envoyer par télécopie ces
11 articles à la Chambre ?
12 R. Oui, par télécopie, de toute façon maintenant, tout se fait
13 électroniquement. On pourrait les envoyer par courriel à n'importe quelle
14 adresse. Si vous me donnez une adresse, vous les recevrez.
15 Q. Vous pensez que votre bureau pourrait nous les envoyer aujourd'hui ?
16 Enfin, c'est une question que l'on peut laisser de côté pour le moment ?
17 R. Oui, c'est faisable.
18 Q. Je vous en serai très reconnaissant. Encore quelques détails en ce qui
19 concerne et ce que vous avez dit hier. Nous avons vu un bref vidéo qui
20 portait un numéro P 1784. Je ne sais pas si j'ai bien compris la
21 discussion qu'il y avait après la discussion. Vous avez dit que vous
22 n'étiez pas trop sûr, que vous ne saviez plus ce qui s'était passé en
23 octobre 1992, est-il exact ?
24 R. Je vais essayer d'être le plus bref possible. Quand j'ai réalisé ce
25 film, début 1993, je vais vous l'expliquer. Le producteur du film a fait le
26 montage du film alors que j'ai vaqué à d'autres occupations et il y a
27 certaines de ces images qui sont venues des archives de l'Huissier qui ont
28 été choisies par celui qui montait le film. Je crois que cela avait été
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1 étiqueté "Prozor," au cours de ces événements. Je pense avoir apporté un
2 commentaire, hier. La rue ressemblait à ce que j'avais dans mon souvenir et
3 j'avais dit qu'effectivement, les soldats avaient l'air davantage de
4 voyous, que je me souvenais qu'ils ne portaient pas ces rubans rouges à
5 l'épaulette mais ce sont les gens de la BBC qui ont choisi ces images
6 d'archives pendant qu'ils faisaient le montage du film à l'autre, mais je
7 n'étais pas là. Donc, je ne peux pas vous en dire plus, malheureusement.
8 Q. En d'autres termes, inutile de répéter ce que vous avez dit hier, "Vous
9 n'êtes pas sur que les images que nous avons vues hier, concernaient
10 Prozor, Travnik, en 1992." Vous l'avez dit, vous-même, d'autant que ceci ne
11 cadre pas bien avec le souvenir que vous avez des événements. Vous l'avez
12 déjà dit que les soldats que vous avez vus à l'époque, avaient l'air un peu
13 plus robuste et portaient des rubans rouges à l'épaulette, or celles
14 d'hier, ces images n'en portaient pas. Donc, si les images que nous avons
15 vues hier n'étaient pas forcément les images de ce que vous avez vu à
16 Prozor, en 1992. Je voulais m'en assurer.
17 R. Je ne pourrais pas jurer que ces images ont été filmées à Prozor
18 puisque ce n'est pas moi qui étais là et ce n'est pas moi qui les ai
19 choisies. Vous parlez de différences. C'est vrai, j'en ai parlé hier.
20 Quant au climat de pillages et d'incendies volontaires et intentionnels
21 qu'il y avait à l'époque, oui effectivement, cela correspondait à mes
22 souvenirs. Mais si vous voulez insister là-dessus, consultez la BBC, car je
23 ne pourrais pas vous aider davantage, je m'en excuse.
24 Q. Non, non, je ne vais pas contacter la BBC. L'Accusation se basant sur
25 vos connaissances a présenté cet extrait mais vous, il ne vous est pas
26 possible de confirmer ou d'infirmer que ces images montrent Prozor en
27 octobre 1992.
28 R. Je peux vous dire que les archives de la BBC ont repris ceci comme
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1 étant des images de Prozor et je les crois sur parole. En tout cas, je les
2 ai cru sur parole. C'est tout ce que je peux dire. Disons que je fais
3 confiance à la BBC davantage qu'à d'autres organisations du même genre.
4 Q. Je pense que vous n'avez pas toujours répondu à ma question. Or, elle
5 était simple. Etes-vous sûr ou pas ?
6 R. Je ne suis pas sûr mais je ne peux pas dire que je sois incertain, que
7 je sois dans le doute.
8 Q. Merci.
9 R. Merci.
10 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je appeler votre
11 attention sur la liste des témoins viva voce, que l'Accusation a
12 l'intention de citer, noms énumérés dans l'annexe du mémoire préalable au
13 procès déposés le 19 janvier. Puis, il y aussi ce tableau comparatif du 18
14 avril. Vous verrez qu'il y a plusieurs paragraphes sur lesquels devraient
15 porter la déposition du présent témoin. On dit aussi que le seul accusé
16 vraiment mis en cause ici, c'est M. Praljak. Etant donné que l'Accusation
17 n'a posé aucune question sur certains de ces paragraphes, je vais peut-être
18 en prendre deux, à titre illustratif. J'aimerais poser une ou deux
19 questions à ce témoin à propos de deux paragraphes. De cette façon, nous
20 saurons s'il y a un lien quelconque entre ces paragraphes et mon client.
21 Q. Monsieur Vulliamy, ne vous préoccupez pas de ces questions que je viens
22 d'aborder qui sont d'ordre procédural uniquement. Je vais vous poser
23 quelques questions qui ne vous ont pas été posées en interrogatoire
24 principal.
25 Au paragraphe 7, de l'acte d'accusation, il est dit que mon client a
26 exercé certaines fonctions. Voici ma question : Mars 1992 jusqu'en juillet
27 1993, est-ce que vous saviez que mon client était un officier de haut rang,
28 un officier supérieur de l'armée croate ? Vous le saviez ou pas ?
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1 R. De l'armée croate ? Non, je ne savais pas.
2 Q. Est-ce que l'Accusation vous a posé des questions à ce propos ?
3 R. Non, je ne m'en souviens pas.
4 Q. Saviez-vous que mon client était ministre adjoint de la Défense en
5 Croatie ?
6 R. Cela, je pense que je le savais. Oui.
7 Q. Au cours de votre entretien avec l'Accusation, est-ce que cette
8 dernière vous a posé des questions à ce propos ?
9 R. Non, pas à propos de ces fonctions ministérielles.
10 Monsieur le Président. Je voudrais corriger le compte rendu pas dans les
11 conversations en anglais AN, plutôt que OA.
12 Q. Cela va être corrigé au compte rendu d'audience.
13 Savez-vous que M. Praljak, mon client, avait pour responsabilité de fournir
14 des renseignements aux autorités croates ou à des personnalités importantes
15 du gouvernement croate, renseignements concernant les événements en Bosnie-
16 Herzégovine entre mars 1992 et juillet 1993 ? Aviez-vous ce genre de
17 renseignements ?
18 R. Oui. Mais je ne savais pas si à l'époque je le savais. J'étais au
19 courant de ses fonctions lorsque je l'ai rencontré. Je ne pense pas qu'il
20 était au courant, non.
21 Q. Dans la déclaration préalable que vous avez faite à l'attention de
22 l'Accusation ceci n'est pas abordé. Vous rappelez-vous que l'Accusation
23 vous a posé des questions sur ce point ?
24 R. Sur les fonctions d'officiers de liaison du général Praljak ont fait
25 l'objet de votre dernière question, non.
26 Q. Merci beaucoup.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme je manque de
28 temps je pense que je peux m'arrêter là. Je pense que ma démonstration est
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1 faite vis-à-vis des paragraphes 7 et 8 de l'acte d'accusation, en
2 particulier, et que ces éléments qui figurent dans ces paragraphes n'ont
3 aucun rapport avec nous.
4 Q. Mais encore peut-être une petite question puisque nous venons de parler
5 de Prozor et de votre voyage à Travnik. Quand vous vous trouviez à Travnik
6 au mois d'octobre, vous est-il arrivé d'entendre parler d'un certain Stojic
7 qui aurait été le chef du HVO de Travnik ? Auriez-vous entendu dire que
8 c'est en raison du rôle qu'il jouait que M. Boban est venu à Travnik ?
9 Auriez-vous entendu parler de la mort d'un certain Stojic ?
10 R. Je savais que M. Boban était venu à Travnik, mais je n'ai pas entendu
11 parler d'une personne en particulier qui aurait trouvé la mort. Si j'en ai
12 entendu parler à l'époque je m'en souviens pas aujourd'hui. Il est possible
13 que ceci ait été mentionné dans des articles, mais je ne m'en souviens plus
14 aujourd'hui.
15 Q. Est-ce que vous avez reçu des informations précises quant aux raisons
16 qui ont justifié la visite de Boban à Travnik dans cette période ?
17 R. Je ne me souviens pas d'aucun motif en particulier, non. Je ne me
18 souviens pas d'avoir lu quoi que ce soit à ce sujet. J'ai lu le discours
19 qu'il a prononcé et il m'a été lu ce discours, mais je ne me souviens pas
20 de cela.
21 Q. Très bien. Merci. Je crois que j'en ai terminé. A plusieurs reprises en
22 cours de votre déposition, vous avez dit que, lorsque vous vous rendiez en
23 Bosnie-Herzégovine, vous arriviez à partir de la République de Croatie;
24 c'est bien cela ?
25 R. Oui. En général, j'y venais de Split ou de la côte jusqu'à un certain
26 moment, en tout cas. Car un moment est arrivé où je n'ai plus la
27 possibilité de me rendre en territoire serbe.
28 Q. Les autorités croates lorsque vous traversiez le territoire serbe pour
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1 vous rendre en Bosnie, est-ce que les autorités croates vous auraient de
2 temps en temps créé des obstacles, auraient rendu votre voyage difficile ?
3 R. Vous parlez bien des autorités croates ?
4 Q. Oui.
5 R. Non, non.
6 Q. Lorsque vous faisiez ces voyages est-ce qu'il vous est arrivé de
7 rencontrer des convois d'aide humanitaire qui venaient de Croatie pour se
8 rendre en Bosnie-Herzégovine ? Je parle de la période où vous étiez en
9 Croatie et de la période ultérieure quand vous étiez en Bosnie. Est-ce que
10 vous auriez vu des convois d'aide humanitaire qui traversaient la Croatie
11 pour se rendre en Bosnie ?
12 R. Souvent.
13 Q. Sur ces routes que vous empruntiez pour aller de Bosnie-Herzégovine en
14 Croatie est-ce que vous avez rencontré des convois de réfugiés provenant de
15 Bosnie-Herzégovine, des réfugiés qui cherchaient un abri en Croatie ?
16 R. Oui, en fait, je me souviens qu'à Split une partie de l'hôtel où
17 j'habitais abritait des réfugiés. Oui, effectivement, je me souviens de
18 certains convois de ce genre.
19 Q. J'allais vous interroger au sujet des hôtels de Split qu étaient
20 bondés, et vous, vous vous êtes trouvé souvent à Split. Est-ce que vous
21 avez à quelque moment que ce soit remarqué des réfugiés qui étaient logés
22 dans des hôtels par les autorités croates ? Est-ce que ces réfugiés étaient
23 uniquement croates, serbes, ou musulmans ? Ou est-ce qu'on y trouvait les
24 trois groupes ethniques représentés ?
25 R. La majorité était soit croate soit musulman. Il se peut qu'il y ait eu
26 quelques Serbes parmi eux. Bien entendu, on ne pouvait pas s'empêcher de
27 les remarquer. Ils étaient partout.
28 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, j'en ai
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1 terminé. Ah, excusez-moi, Monsieur le Président, est-ce que je devrais
2 proposer le versement au dossier maintenant ? En fait, je demande que tous
3 les documents que j'ai utilisés au cours de mon contre-interrogatoire
4 soient versés au dossier, et je peux vous donner lecture des numéros.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, donnez les numéros, mais avant de vous
6 permettre de donner les numéros, j'aimerais connaître la situation
7 juridique des trois articles, rédigés le 24 octobre 1993 sur les sapeurs-
8 pompiers de Travnik, l'article du 26 octobre 1993 sur Mostar et Boban, et
9 du 28 octobre 1993, sur les événements de Prozor. Est-ce que ce sont des
10 documents que nous n'avons pas, mais dont le témoin s'est engagé à nous les
11 envoyer le plus tôt possible. Est-ce que c'est des documents que vous
12 demandez le versement pour vous ou c'est des documents -- quelle est la
13 nature de ces documents ?
14 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais d'abord
15 voir ces documents. Après quoi, bien sûr, s'ils contiennent des
16 renseignements pertinents j'en demanderais le versement au dossier
17 éventuellement.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. Bon. Donc vous mettez ces trois documents,
19 comme on dit en anglais, en "stand by".
20 M. KOVACIC : [interprétation] Oui. Puisque nous ne les avons pas encore.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors donnez les numéros de vos
22 documents. Tendez l'oreille.
23 M. KOVACIC : [interprétation] Alors, pour raccourcir les choses pour le
24 Greffier, c'est que tous les documents commencent par "3D", après quoi il y
25 a deux "00", donc, je vais me contenter de lire les trois derniers chiffres
26 si le Greffier m'y autorise : les 122, 123, 124, 125, 141, 137.
27 Monsieur le Président, hier, vous nous avez demandé également de vous
28 donner la source de ces documents. J'ai ce renseignement, même si je pense
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1 que tout le monde est au courant à l'heure actuelle.
2 Mais, enfin, le document 122 vient de mon travail de recherches, je
3 les ai trouvées dans les archives de la Croatie.
4 Le document 123, je l'ai reçu de l'Accusation, c'était un document
5 annexé au mémoire préalable au procès.
6 Le document 124, je l'ai trouvé dans les archives croates.
7 Le document 125, donc, je l'ai reçu du Procureur en application de
8 l'article 68 du Règlement.
9 Le document 141, c'est également un document que j'ai trouvé dans le
10 cadre de mon travail de recherche dans les archives croates.
11 Le document 137 fait partie des annexes du Procureur annexé au
12 mémoire préalable au procès. Je vous remercie.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis ?
14 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne voudrais
15 pas parler trop longtemps de ce sujet, mais je remarque que certains des
16 documents, qui viennent d'être évoqués et dont le versement a été demandé
17 au dossier par mon collègue, Me Kovacic, sont signalés comme étant des
18 traductions officieuses.
19 Alors, Monsieur le Président, nous aimerions garder des réserves par
20 rapport à ces documents qui n'ont pas été traduits par le service
21 linguistique du Tribunal. Nous pourrions revenir sur la traduction de ces
22 documents dans une des langues officielles du Tribunal une fois que nous
23 aurons la possibilité de lire ces traductions. Mais ils ne sont pas
24 nombreux ces documents qui ont été traduits par d'autres que les
25 traducteurs officiels du service linguistique du Tribunal. Bien entendu,
26 ils sont considérés comme des traductions officieuses.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si je peux me
28 permettre. Je suis tout à fait d'accord. Les documents qui viennent d'être
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1 soumis sont des documents dont la traduction est officieuse, traduction
2 réalisée par des employés de mon bureau. Nous avons soumis ces documents au
3 Greffe déjà, mais nous n'avons pas encore reçu la traduction officielle du
4 Tribunal. Donc, dès lors que nous recevrons les traductions officielles du
5 Tribunal, nous remplacerons les uns par les autres car, bien entendu, il
6 faut que ce soit les traductions pertinentes officielles qui soient prises
7 en compte.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Il semblerait qu'il y a au moins deux documents qui
9 ont une traduction officielle. C'est le 123 et le 125 puisqu'ils émanent du
10 bureau du Procureur. Donc, ces deux documents peuvent être admis
11 définitivement et les autres aux fins d'identification. D'accord.
12 Alors, Monsieur le Greffier, allez-y.
13 M. LE GREFFIER : Je vous remercie, Monsieur le Président.
14 [interprétation] Les documents suivants sont admis. Il s'agit des documents
15 3D 00122 enregistrés comme identification :
16 3D 00123, document admis.
17 3D 00124, enregistré aux fins d'identification.
18 3D 00125, document admis.
19 3D 00141, enregistré aux fins d'identification.
20 3D 00137, enregistré aux fins d'identification.
21 Dans l'attente de traduction définitive pour ceux qui sont
22 enregistrés aux fins d'identification.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Avocat suivant. Alors, il y en a deux qui se lèvent.
24 Normalement, c'est Me Alaburic à moins que
25 Me Ibrisimovic veuille intervenir.
26 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vous
27 demanderais simplement une pause de quelques petites minutes pour que les
28 conseils qui ne se sont pas encore exprimés puissent s'entendre sur l'ordre
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1 de leurs interventions. Je crains que nous nous retrouvions dans la
2 situation de l'autre jour. Si quelques petites minutes nous sont accordées,
3 cela évitera d'en perdre davantage par la suite.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, normalement l'ordre c'était
5 Me Alaburic, ensuite Me Jonjic, et vous-même en dernier. Mais si, entre
6 vous, vous voulez un ordre différent, il n'y a aucun problème.
7 Bien, autant précisé, j'avais oublié Me Karnavas. C'est lui qui
8 interviendra en dernier.
9 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous nous
10 efforcerons de respecter le temps qui nous est imparti. Tout en menant
11 notre contre-interrogatoire, comme prévu par nous, je m'appelle Vesna
12 Alaburic et je suis avocat à Zagreb. Dans l'affaire présente, je défends
13 l'un des accusés.
14 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :
15 Q. [interprétation] Je vais vous poser une série de questions sur votre
16 travail en tant que correspondant de guerre en Bosnie-Herzégovine. Elles
17 porteront sur des éléments dont j'estime qu'ils sont pertinents pour la
18 présente affaire. D'abord j'aimerais que nous définissions le terme de
19 correspondant de guerre. Conviendrez-vous avec moi qu'un correspondant de
20 guerre est un journaliste qui dans une certaine mesure est un journaliste
21 d'investigation car il doit mener des enquêtes sur tous les éléments
22 concrets qui concernent les événements lesquels il travaille, mais, en même
23 temps, il doit avoir de très grandes compétences dans le domaine que l'on
24 appelle parfois le journalisme d'analyse car il doit resituer les
25 événements dont il parle dans leur contexte. Alors, êtes-vous d'accord pour
26 dire que votre travail combine d'une certaine façon les notions de
27 journalisme d'investigations et de journalisme d'analyse ?
28 R. Ces deux éléments sont présents, mais bien d'autres éléments également.
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1 Q. Je vous remercie. Ce qui m'intéresse c'est la cause de votre arrivée en
2 Bosnie-Herzégovine. Vous nous avez dit que vous êtes arrivé en Herzégovine
3 pour la première fois au mois d'août 1992 et vous avez ajouté qu'à ce
4 moment-là vous étiez sur le territoire que l'on appelle la Republika Srpska
5 en Bosnie-Herzégovine et que vous envoyez vos reportages qui portaient sur
6 les endroits tenus par les Serbes de Bosnie. Vous avez évoqué Momcilo
7 Krajisnik par son nom. Vous avez dit qu'on vous avait demandé d'être plus
8 objectif à ce moment-là. Je vois que vous opinez du chef, ou en tout cas
9 que vous agitez la tête. Est-ce que cela signifie que vous n'avez pas parlé
10 de Momcilo Krajisnik dans ce genre de contexte ?
11 R. Je pense que j'ai parlé de Nikola Koljevic.
12 Q. Pouvez-vous nous dire exactement dans quel contacte vous avez parlé de
13 Nikola Koljevic ?
14 R. Oui. Le contexte était le suivant : quand nous sommes arrivés à Omarska
15 et Trnopolje, cela a agité pas mal de monde. Une conférence de presse a été
16 organisée à Belgrade et le vice-président, M. Koljevic, en personne, a cité
17 une liste de camps dans lesquels il disait que les détenus étaient des
18 Serbes aux mains des autres parties. Je n'ai pas discuté avec lui. J'ai
19 parlé avec mon rédacteur en chef pour voir comment il fallait continuer le
20 travail. Est-ce que l'on allait poursuivre dans le même sens que ce qu'on
21 avait déjà fait à Prijedor, ce que semblait faire tous les journalistes ?
22 Ou s'il fallait prendre la liste fournie par M. Koljevic, je crois avoir
23 dit que, du point de vue journalistique, des pressions étaient effectuées
24 pour qu'on s'intéresse à la partie d'en face.
25 A la conférence de presse de Capljina, qui était, à mon avis, la pire des
26 conférences de presse que j'ai vécue, Dretelj n'a même pas été mentionnée.
27 On parlait de Capljina pour désigner Dretelj.
28 Q. Dites-nous, je vous prie : est-ce qu'il a été question de centre de
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1 détention où des musulmans bosniaques emprisonnaient des Serbes de Bosnie ?
2 R. Le nom dont je me souviens est Tarcin, c'est un nom qui figurait sur la
3 liste. Il s'agit d'un tunnel qui se trouve sur la route et quand j'y suis
4 arrivé - parce que j'y suis allé - donc, nous y sommes allés et nous n'y
5 avons rien trouvé. Il y avait aussi un autre camp qui s'appelait Konjic qui
6 n'avait pas attiré beaucoup l'attention, mais quand on nous a parlé de ce
7 camp, j'ai émis le souhait de m'y rendre plutôt que d'aller à Tarcin. Je
8 souhaite aujourd'hui que nous y soyons allés plutôt que d'aller à Tarcin.
9 Q. Serait-il exact si je -- me serait-il permis de dire qu'au cours de
10 l'été 1992, vous n'avez pas trouvé un seul centre de détention dans lequel
11 les Musulmans de Bosnie détenaient des Serbes de Bosnie ?
12 R. Vous avez raison. Oui. Comme je l'ai déjà dit, nous sommes allés dans
13 un endroit qui s'appelait Celebici. Après quoi, nous sommes allés à Konjic
14 qui n'était pas un endroit sous le feu des projecteurs, à l'époque. Mais,
15 en tant que journaliste, je regrette aujourd'hui que nous ne nous soyons
16 pas allés. Nous y serions allés si nous avions su ce que nous savons
17 aujourd'hui.
18 Q. Dites-nous, je vous prie, est-ce que vous vous considérez comme une
19 personne qui connaissait bien la situation en Bosnie-Herzégovine et dans
20 toutes les entités de la Bosnie-Herzégovine entre 1992 et 1993 ? En tant
21 que journaliste d'investigation, est-ce que vous considérez que vous
22 connaissiez bien cette région ?
23 R. Je sais que j'avais pas mal de connaissance mais personne ne saurait
24 prétendre tout savoir. Il y avait la vallée de la Drina, en particulier, et
25 des petits villages, ici ou là, qui étaient tout simplement inaccessibles
26 parce que se déplacer n'était pas facile. On suivant des itinéraires assez
27 bizarres de temps en temps parce qu'on ne pouvait se déplacer qu'au mieux
28 de nos capacités, dans des conditions difficiles.
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1 Q. Je n'en doute pas mais ma question ne consistait pas à vous demander si
2 vous aviez tout. Bien sûr, c'est impossible de tout savoir. Je vais vous
3 demander simplement si vous vous considériez comme quelqu'un qui
4 connaissait les circonstances particulières de la Bosnie-Herzégovine et ma
5 question repose sur des critères exclusivement professionnels. En tant que
6 professionnel du journaliste, est-ce que vous considériez bien connaître la
7 situation ?
8 R. Je me considérais comme quelqu'un qui s'était efforcé de couvrir la
9 guerre ou en tout cas, ce conflit du plus près possible. Autrement dit
10 d'être au plus près des événements. Ce qui impliquait de faire face à des
11 éléments assez effrayants parce qu'en tant que correspondant de guerre,
12 nous couvrons toujours des guerres.
13 Il y a par contre des gens qui se trouvent là-bas qui n'ont rien à
14 voir avec ce genre de travail. Je ne suis prêt à précisément parler un
15 correspondant de guerre. J'ai été envoyé de temps en temps dans des zones
16 de conflit mais je ne suis pas professionnellement parlant ce qu'il est
17 convenu d'appeler de façon très précise un correspondant de guerre. Je ne
18 suis pas de ces journalistes qui passent d'une guerre à une autre comme
19 certains le font et je trouve les guerres particulièrement effrayantes.
20 Q. Monsieur Vulliamy, conviendriez-vous avec moi qu'un journaliste ne peut
21 bien remplir sa mission d'information sur des événements de cette nature
22 que s'il passe dans le territoire en question, un temps assez long que s'il
23 a des interlocuteurs valables, que s'il a d'autres sources d'information et
24 uniquement, il est en mesure de se familiariser réellement avec le système
25 politique et la structure sociale de l'endroit où il se trouve. Est-ce que
26 vous seriez d'accord avec ces critères que je viens d'évoquer comme étant
27 des conditions préalables pour un bon travail de journaliste ?
28 R. Pas mal de choses sont nécessaires pour faire du bon journaliste dans
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1 une zone de conflit. J'ai beaucoup travaillé dans le secteur de Prijedor où
2 je n'avais pratiquement aucun contact puisque c'est le terme que vous venez
3 d'utiliser parmi les Serbes de Bosnie et les autorités bosno Serbes. On
4 rencontrait simplement de temps en temps les gens sur qui on tombait ici ou
5 là. On travaillait plutôt dans les convois de réfugiés pour obtenir des
6 renseignements sur la situation politique. On discutait des éléments
7 politiques. Cela, oui. Je l'ai déjà dit, je ne suis pas journaliste
8 politique, mais, bien entendu, je ne laisse pas de côté les événements
9 politiques. Je ne les ignore pas.
10 Qu'est-ce que vous avez dit dans votre question ? Je ne me souviens
11 plus de tous les éléments maintenant. Oui. Passer du temps -- passer du
12 temps avec certaines personnes. Vous parlez de responsables politiques,
13 peut-être ? Non, je n'ai pas passé beaucoup de temps avec des responsables
14 politiques pendant le conflit. Nous avons eu l'occasion de parler avec M.
15 Boban. J'ai rencontré le
16 Dr Karadzic et, sinon, je ne crois pas avoir parlé à d'autres membres du
17 gouvernement à Sarajevo. En tout cas, pas à des représentants du
18 gouvernement faisant partie du SDA.
19 Q. Dites-nous, je vous prie, en tant que représentant de la profession
20 journalistique, vous êtes tout à fait en mesure de comprendre la teneur des
21 déclarations faites par Mate Boban au sujet de la structure politique de la
22 Herceg-Bosna. Mais au cas où vous aviez eu des manques dans votre
23 connaissance du système politique et de l'organisation territoriale de la
24 Herceg-Bosna, vous vous considériez comme quelqu'un qui était capable de
25 comprendre l'aspect politique de ces déclarations. C'est cela que je
26 voulais dire tout à l'heure.
27 R. Je crois qu'en répondant aux questions du général Praljak, j'ai admis
28 ne pas avoir la même connaissance de la constitution que certains juristes
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1 croates de Bosnie parce que je me souviens que certains des avocats croates
2 de Bosnie connaissaient très bien la constitution. Mais, enfin, en tant que
3 non spécialiste, je crois, tout de même, que j'avais une certaine idée de
4 ce dont parlait Mate Boban et de ce qu'il entendait faire de la Herceg-
5 Bosna. Cela, oui.
6 Q. Partons de la prémisse que le temps que vous passez dans un certain
7 territoire vous suffit, tout de même, à vous familiariser avec les
8 événements et les gens. Je vous rappelle que vous avez, dans une des
9 réponses fournies aujourd'hui, parlé du temps que vous avez passé en
10 Bosnie-Herzégovine --
11 M. MURPHY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Nous
12 n'entendons pas l'interprétation anglaise de cette question.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Une autre question, Maître Alaburic.
14 Mme ALABURIC : [interprétation]
15 Q. Donc, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que le temps qu'un
16 journaliste dans un territoire déterminé est l'une des bases de la bonne
17 connaissance qu'il peut avoir des événements. Je pense que vous serez
18 d'accord avec moi. Mais, à un moment donné, vous avez répondu à une
19 question de Me Peter Murphy : qui vous interrogeait sur le temps que vous
20 aviez passé en Bosnie-Herzégovine ? Après quoi, j'essayais de vous amener à
21 des éléments un peu plus concrets. Vous avez répondu à Me Murphy que votre
22 séjour avait duré quelques jours, "a matter of days", avez-vous dit en
23 anglais ? Est-il permis, sur la base de votre réponse, de conclure que vous
24 n'avez passé que quelques jours en Bosnie-Herzégovine et pas des semaines
25 ou des mois ?
26 R. Si je me souviens bien - et dites-moi si je me trompe - votre confrère
27 m'interrogeait au sujet d'une visite particulière que j'ai faite en Bosnie-
28 Herzégovine, en 1992. La visite qui a donné lieu à la visite du camp de
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1 Capljina. Quand à la question que vous venez de poser, je réponds : non,
2 non, non. Mais ces jours, en Bosnie-Herzégovine ne sont pas limités à
3 quelques jours. Je croyais en répondant à Me Murphy qu'il m'interrogeait
4 uniquement sur ce voyage qui a donné lieu à la visite du camp de Capljina.
5 Mais, dans l'ensemble, j'ai passé entre 1992 et 1993 beaucoup plus de temps
6 en Bosnie-Herzégovine, pas uniquement quelques jours. Non, non.
7 Q. J'ai essayé, en me fiant à votre déposition d'hier, de compter le
8 nombre de jours que vous avez passés dans certaines régions de la Herceg-
9 Bosna, en Bosnie-Herzégovine. Je suis arrivé à ce calcul. Vous êtes resté
10 en Bosnie-Herzégovine moins de dix jours, entre 1992 et septembre 1993.
11 Lorsque je parle de jours, j'ai compté chaque jour où vous y étiez, sans
12 compter le nombre d'heures que vous avez passées là-bas, et j'ai ajouté
13 sept semaines à Travnik, au début de 1993, et un autre moment que vous avez
14 passé en Bosnie centrale, à Vitez et Travnik. Il en découle qu'à ce moment-
15 là, vous avez passé environ 30 jours dans la région. Bien évidemment, on ne
16 peut pas être précis au jour près, mais ce calcul que j'ai fait, en me
17 fondant sur votre déposition d'hier, est-ce que vous pensez que ce calcul
18 est dans les grandes lignes exactes ?
19 R. Je n'ai moi-même pas compté le nombre de jours. Dix jours en Bosnie-
20 Herzégovine au cours de l'année et 30 jours au total. Non, je ne peux pas
21 être d'accord avec vous. Ce chiffre est bas. Nous avons parlé d'épisode
22 particulier concernant des questions où les périodes pertinentes eu égard
23 aux questions qui m'ont été posées. J'ai parlé de janvier 1993, le début de
24 l'année 1993. Vous avez passé de plusieurs semaines à Travnik. C'était à
25 Travnik et Kiseljak. Je crois que j'ai également parlé du fait que nous
26 nous déplacions entre la ville de Vitez. Je n'ai pas fait le calcul des
27 jours comme vous mais d'après ce dont je me souviens j'ai passé beaucoup
28 plus de temps que cela en Herzégovine et en Bosnie-Herzégovine entre ces
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1 dates que vous avez évoquées, bien davantage.
2 Q. Vous nous avez également dit que vous avez remarqué des différences
3 considérables entre ces différents moments dans ces différents endroits
4 entre vos différentes visites à Travnik et Mostar, et cetera. Pourriez-vous
5 me répondre, s'il vous plaît, un journaliste qui ne passe pas beaucoup de
6 temps dans une région, mais qui vient de temps en temps, est-ce difficile
7 pour ce journaliste de comprendre les raisons pour lesquelles les
8 changements se sont produits et de comprendre la chronologie des
9 événements ?
10 R. Bien, vous remarquerez les changements, essayez de comprendre de quoi
11 il s'agit. Si vous allez en voiture de Kiseljak à Vitez, et que toutes les
12 maisons ont quasiment -- toutes les maisons sont habitées et sont debout
13 et, peu de temps après, vous empruntez la même route et ces maisons sont
14 incendiées, il y a des traces de balles, de coups de feu. Ensuite, vous
15 allez une troisième fois ou, plus tard, vous constatez que ces maisons sont
16 inhabitées, je veux dire vous remarquez la différence, et vous commencez --
17 vous essayez de comprendre ce qu'il s'est passé.
18 Q. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que de telles tentatives,
19 autrement dit, essayer de comprendre ce qu'il s'est passé, vous avez dû
20 vous fonder sur des éléments d'information que d'autres personnes vous ont
21 fournies, n'est-ce pas ?
22 R. De façon générale.
23 Q. Veuillez nous donner des réponses courtes, s'il vous plaît, de façon à
24 pouvoir -- de façon à ce que je puisse poser plus de questions. Hier, vous
25 nous avez cité la liste de toutes les personnes, je vous en prie.
26 R. Ecoutez, en général, on obtient les informations de civils qui étaient
27 encore sur place, de réfugiés qui étaient à différents endroits et des
28 forces armées, et des soldats et les représentants officiels. De façon
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1 générale, ce sont ces personnes-là que vous vous adressez.
2 Q. Oui, oui. Lorsque vous avez énuméré les noms des personnes avec
3 lesquelles vous vous êtes entretenu en 1992 et 1993, je ne parle ici que de
4 la région d'Herceg-Bosna. Aujourd'hui, vous avez parlé de deux
5 conversations avec Mate Boban, au mois d'août 1992, et en octobre 1992, et
6 vous avez également eu une conversation au mois d'octobre 1992, avec M.
7 Lasic à Mostar, et le 24 octobre avec
8 M. Siljeg à Tomislavgrad. Ensuite, vous avez évoqué le nom du côté croate,
9 M. Sakota, en septembre 1993. D'après ce que vous ont dit vos
10 interlocuteurs, ai-je raison de supposer que vous n'avez parlé à personne
11 d'autre, quelqu'un qui occupait un poste au niveau des entités civiles ou
12 militaires ou qui semblaient exercer l'autorité en Herceg-Bosna ?
13 R. Non, ceci n'est pas exact. Je crois que j'ai parlé de Filipovic du HVO
14 à Travnik. Je crois que j'ai dit que j'étais l'invité du HVO à Travnik à
15 une occasion et à d'autres occasions aussi. J'ai évoqué un officier
16 supérieur, c'était peut-être le commandant à Travnik, Pokrajcic, et
17 également on passe beaucoup de temps en présence de soldats. Si, pardonnez-
18 moi, ce n'est pas l'Herceg-Bosna, mais si vous parlez du HVO, j'étais dans
19 un endroit qui s'appelait Tesanj, pendant un certain temps, pendant
20 longtemps, et à Tuzla également, et on passe du temps à Tomislavgrad, à
21 Mostar. On passe beaucoup de temps à Mostar avec les soldats, on leur
22 parlait. Peut-être qu'il y en avait d'autres. Je vais essayer d'y
23 réfléchir. Je ne suis sûr qu'il y a eu d'autres -- pardon --
24 Q. Merci. Pardonnez-moi, je n'ai peut-être pas été suffisamment précis en
25 ce qui concerne M. Filipovic. Bien sûr, je ne l'ai pas oublié, mais ma
26 question portait sur les entretiens que vous avez menés dans la région
27 d'Herzégovine. Pourriez-vous nous parler maintenant de ceci ? Lorsque vous
28 préparez une interview avec Mate Boban, dans ce cas présent, vous êtes-vous
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1 préparé à cette interview ?
2 R. En ce qu concerne la première interview, non, je ne peux pas parler de
3 préparatif en tant que tel. Je savais qui il était et j'avais lu certaines
4 choses sur lui, mais j'avais fait une recherche en bibliothèque. Mais la
5 deuxième fois, au mois d'octobre, j'étais beaucoup plus informé sur son
6 passé, j'avais beaucoup plus de renseignements sur son passé, et donc on se
7 préparait à cette interview en étant à Novi Travnik et à Mostar les jours
8 précédents parce que c'est cela dont nous voulions parler.
9 Q. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, pour ce qui est de votre
10 préparation pour cette interview, est-ce que vous avez essayé d'apprendre
11 ce que représentait la communauté croate d'Herceg-Bosna en premier,
12 pourquoi celle-ci avait été mise en place, et s'il y avait des documents à
13 l'appui de ce genre de choses ?
14 R. Oui. J'avais lu un certain nombre de choses dessus et j'en avais parlé
15 et je sais que ceci avait été mis en place avant la guerre, et j'en ai
16 parlé avec M. Boban, et j'avais lu un certain nombre de choses sur les
17 raisons de la création de cette communauté, et le peuple croate voulait
18 défendre leurs droits en Bosnie-Herzégovine, et cetera. Mais, si je me
19 souviens bien, ceci a été créé avant que je ne rencontre M. Boban, bien
20 sûr, mais évidemment avant que la guerre n'éclate en Bosnie.
21 Q. Très bien. Lorsque vous vous êtes préparé pour cette interview est-ce
22 que vous avez essayé de savoir quelles municipalités composaient l'Herceg-
23 Bosna ?
24 R. Oui, certainement. Je l'ai certainement fait, mais j'ai supposé que
25 tout ceci faisait partie de l'Herzégovine. Je ne me souviens pas maintenant
26 jusqu'où dans le nord se déployait le territoire d'Herceg-Bosna et le
27 découpage des municipalités en 1991. Nous avons surtout parlé de Travnik.
28 Je ne sais pas si cela en faisait partie.
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1 Q. D'après votre déclaration, vous dites avoir été surpris à l'automne ou
2 au mois d'octobre à Travnik et lorsqu'il a déclaré que Travnik faisait
3 partie d'Herceg-Bosna, on pourrait en conclure que vous ne saviez vraiment
4 pas que Travnik conformément à une décision sur la création de l'Herceg-
5 Bosna était une des municipalités qui faisait partie de l'Herceg-Bosna.
6 D'après votre attitude, on pourrait en conclure que vous ne saviez pas
7 grand-chose sur l'Herceg-Bosna, à propos duquel vous faisiez -- sur lequel
8 vous faisiez un reportage.
9 R. Je vais vous dire je ne me souviens pas si je savais que Travnik en
10 faisait partie d'Herceg-Bosna ou non. Mais ce qui m'a surpris c'était ce
11 que l'on prétendait à ce moment-là, et corrigez-moi si je me trompe, mais
12 sur un plan stratégique cette ville avait une certaine importance sur un
13 plan historique également pour la majorité musulmane.
14 Q. La teneur de la remarque -- je suis sûr que vous l'avez compris -- vous
15 saviez qu'une décision avait été prise sur la création de cette communauté
16 et vous n'avez pas été surpris par la visite à Travnik ou à Travnik que
17 cette municipalité faisait partie d'Herceg-Bosna, c'était au mois d'octobre
18 1992. Dites-nous, alors : que vous vous prépariez pour cette interview que
19 vous deviez avoir avec M. Boban, certainement, avec d'autres personnes que
20 vous avez interviewées, est-ce que vous avez essayé de comprendre quel
21 genre d'échanges ou discussions avaient eu lieu sur la question
22 d'organisation territoriale et la création de la Bosnie-Herzégovine avant
23 cela, et le genre de débats et de discussions que ceci avait occasionné, à
24 ce moment-là ?
25 R. Ecoutez, on essayait de suivre tout cela autant que faire ce peu. Ces
26 discussions comme vous dites étaient menées à différents niveaux et ceci
27 s'est passé de façon complètement confidentielle. Parfois c'était des
28 débats politiques houleux. On entendait beaucoup de rumeurs à propos de M.
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1 Boban et M. Karadzic, problèmes que M. Boban, chose qu'il a réfutée. Alors
2 qu'aucun des deux n'étaient originaire de Bosnie, entre président Tudjman
3 et président Milosevic, ces négociations on essayait de suivre tant que
4 faire se peut le déroulement de ces négociations, alors quelquefois on nous
5 disait autre chose et différentes personnes nous disaient différentes
6 choses.
7 Je peux dire que nous avons essayé et jusqu'à un certain point pour ce qui
8 est de Travnik peut-être que je n'aurais pas dû être surpris, mais
9 simplement j'ai parlé de la majorité musulmane et la plupart des gens qui
10 habitaient à Travnik estimaient qu'ils ne faisaient pas partie de la
11 Herceg-Bosna. C'est cela que j'essayais de vous dire.
12 Q. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi, Monsieur Vulliamy, pour dire
13 que pas un seul débat ou discussion a porté sur la création et
14 l'organisation de la Bosnie-Herzégovine, sans que soit évoqué la question
15 de la séparation et de la démarcation territoriale entre les trois peuples
16 constitutifs ? Savez-vous que pas -- n'y a-t-il eu un simple désaccord ou
17 une seule négociation qui n'ait pas évoqué cette question-là ?
18 R. Bien, il y a eu le référendum sur l'indépendance et la constitution,
19 mais je reconnais que la constitution comprend différents éléments, je
20 reconnais qu'elle comprend l'existence effectivement des trois peuples de
21 ce pays. Je sais également que tous les plans de paix au fil de ces trois
22 ans ont échoués et que ces plans de paix avaient essayé de tenir compte de
23 ces éléments.
24 Q. Simplement j'aimerais faire une digression par rapport à cette
25 question-ci pour éviter tout malentendu. Lorsque je vous ai parlé de la
26 création d'Herceg-Bosna, vous avez dit que ceci avait été créé avant la
27 guerre. Je crois que cela se trouve à la page 95 du compte rendu. Est-ce
28 que vous pouvez nous dire de quelle guerre il s'agit et ce que vous aviez à
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1 l'esprit ?
2 R. Bien sûr, mais corrigez-moi, si je me trompe, d'après la manière dont
3 j'ai compris les choses, la communauté croate ou bon le terme d'Union
4 croate d'Herceg-Bosna a été créé en 1991, et par là, j'entendais avant le
5 référendum sur l'indépendance et avant l'éclatement des hostilités en
6 Bosnie en 1992, mais, bien évidemment, pas avant ce que nous allons --
7 appelons les guerres qui ont mené au démantèlement de la Yougoslavie en
8 1991.
9 Q. Lorsque vous parlez de guerre et d'hostilités dans votre phrase
10 précédente, est-ce que vous entendez par là les hostilités entre les
11 Croates et les Musulmans, ou les hostilités de façon générale sur le
12 territoire de la Bosnie-Herzégovine ?
13 R. Lorsque je parle du début de la guerre en Bosnie ? Non, je dirais -- ou
14 je -- la date que je donnerais ou la date de départ c'est ce que j'appelle,
15 en fait, l'agression dans ce prétoire, en tout cas, de la part des Serbes
16 de Bosnie dans la vallée de la Drina et la partie nord-ouest de la Bosnie
17 également contre Sarajevo.
18 Q. Savez-vous qu'à la fin de l'année 1991, la JNA, accompagnée des Serbes
19 de Bosnie, ont attaqué un endroit croate en Herzégovine et on estime que
20 ceci a marqué le début de la guerre en l'Herceg-Bosna, en présence de
21 l'armée populaire yougoslave et des Serbes de Bosnie et qu'il en découle
22 qu'Herceg-Bosna a été créé après le début de la guerre, mais j'entends la
23 guerre entre les Serbes et les Croates; est-ce que vous savez cela ?
24 R. Ecoutez, je le sais, maintenant, mais, en 1992, je ne le savais pas
25 parce qu'on n'en n'a pas beaucoup parlé. Les gens d'Herzégovine en ont
26 beaucoup parlée.
27 Q. D'après votre déposition hier, j'avais l'impression que vous ne faites
28 pas la différence entre le HVO, le Conseil de Défense croate en tant que
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1 formation militaire de l'armée du HV qui est rattaché au gouvernement et de
2 la composante civile ou des autorités civiles. C'est ce que j'en ai conclu;
3 ai-je raison ? Lorsque vous parlez du HVO, vous dites que cette autorité
4 civile et militaire dont on en a conclu qu'il s'agit d'un organe unifié,
5 responsable de toutes les questions civiles et militaires, et on pourrait
6 en conclure d'après ce que vous dites, que vous ne faites pas la différence
7 entre les autorités militaires et civiles en Herceg-Bosna; ai-je raison de
8 conclure cela ?
9 R. Non. Avec tout le respect que je vous dois, mais j'établis une
10 distinction très nette entre le HVO et le HV. Je sais que l'un représente
11 les forces armées de la communauté croate d'Herceg-Bosna et l'autre
12 représente l'armée de Croatie.
13 Q. Pardonnez-moi, mais il y a une erreur au niveau du compte rendu
14 d'audience à la page 97, ligne 16. Je n'ai pas parlé du HV de l'armée de
15 Croatie, je n'ai parlé que du HVO. C'est une erreur d'interprétation. Nous
16 parlons du HVO. Nous n'avons absolument pas mentionné le HV. C'est le HVO.
17 R. J'entends bien. Je vais relire la question, si vous me le permettez.
18 Lorsque j'ai utilisé cette expression, "autorité civile et militaire" qui
19 lie les deux autorités entre elles, je me souviens de Lasic - je ne sais
20 pas quel était son grade - et je cite ce dont je me souviens : Lasic à
21 Mostar, étant donné la situation en Bosnie-Herzégovine à l'époque, on
22 comprend fort bien ce lien entre les autorités civiles et militaires, mais
23 je comprends qu'il y avait des colonnes civiles et militaires reliées entre
24 elles, autrement dit, le HVO et les liens avec le HDZ. Je comprends, par
25 exemple, que Mate Boban, par exemple, était un civil; le général Praljak
26 était un militaire. Je sais que leur description de poste était différente
27 ou peut-être quand bien même il défendait une cause commune.
28 Q. Si je devais vous dire que Mate Boban n'avait rien à voir avec le HVO,
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1 est-ce que ceci aurait une incidence sur vos conclusions ?
2 R. Bien, si vous me dites qu'il n'avait rien à voir, je vous croirais car
3 vous devez certainement en savoir plus sur ces différentes structures,
4 mais, d'après les réunions que j'ai eues avec lui et le langage qu'il
5 utilisait au cours de ces réunions et les personnes qui se trouvaient dans
6 son QG, en particulier, les gens de Grude, et la manière dont il parlait du
7 HVO, il nous donnait l'impression qu'il en était très proche et surtout
8 lors des seconde et troisième réunions. On avait l'impression qu'il
9 estimait qu'il
10 avait une certaine influence - peut-être pas une certaine autorité - mais,
11 en tant que civil et sur ce qu'il faisait, leurs activités. Quand bien même
12 quand vous dites sur un plan purement formel, il n'assurait pas le
13 commandement et ce n'était pas un militaire, mais il en parlait. Il parlait
14 du HVO comme quelque chose dont il n'était pas entièrement détaché.
15 J'ajouterais que nous nous attendions lors de ces réunions que la réunion
16 se termine avant d'avoir notre deuxième conversation et tous les hommes de
17 sa compagnie étaient des militaires. La plupart faisaient partie du HVO,
18 peut-être pas tous.
19 Q. Je vais maintenant terminer sur ce sujet, en disant que vous ne
20 connaissez pas bien les différentes formations civiles et militaires.
21 Maintenant, je souhaite vous poser une question concernant Mate Granic.
22 Est-ce que vous avez dit, à la page 81, lignes 12 et 13 du compte rendu
23 d'hier, avec que Mate Granic, ministre des Affaires étrangères de Croatie,
24 en juillet 1993, a déclaré : "Que la Croatie était disposée à favoriser
25 l'expulsion en masse de 50 000 personnes et c'est dans ce contexte-là
26 qu'une réunion a été organisée afin de mettre en place cette expulsion."
27 Est-ce que j'ai bien interprété vos propos d'hier ? J'ai essayé de citer
28 vos propres paroles ?
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1 R. Oui. Mais je n'ai pas participé à cette réunion. On m'en a parlé et ce
2 sont les personnes qui ont participé qui m'en ont parlé. C'étaient des
3 représentants du HCR.
4 Q. Dans son ouvrage : "Les Affaires étrangères, derrière la scène
5 politique," a décrit cette réunion, M. Granic, et entre autres choses, a
6 dit : "Que les représentants du gouvernement de Bosnie-Herzégovine ainsi
7 que les représentants de l'ABiH ont assisté à cette réunion présidée parle
8 le vice-président Hadzo Efendic." Ensuite, il a poursuivi en disant : "Que
9 plusieurs ministres du gouvernement de Bosnie-Herzégovine ont également
10 assisté à cette réunion, y compris Hasan Muratovic et Kasim Trnka." Je ne
11 pense pas qu'il soit utile. Je ne pense pas que nous ayons des raisons de
12 ne pas faire confiance à M. Mate Granic lorsqu'il parle de ceci dans son
13 livre. Lui-même a assisté à cette réunion. Par conséquent, je souhaite vous
14 demander si vous pensez vraiment que ceux, qui ont assisté à cette réunion
15 au début du mois de juillet 1993, ont véritablement évoqué cette question.
16 Autrement dit, comment déporter et expulser 50 000 personnes de Bosnie-
17 Herzégovine ou est-ce qu'au contraire, ils essayaient de trouver une
18 solution à cette question brûlante ?
19 R. Ecoutez, lorsque j'ai fait mon reportage, j'ai parlé de ce qu'ils m'ont
20 dit. Ils m'ont donné les noms des personnes que vous venez d'évoquer. Ils
21 m'ont dit qu'ils avaient assisté à la réunion. Ils m'ont un petit peu parlé
22 de ce qu'il y avait à l'ordre du jour et ce dont ils ont parlé. J'ai
23 rapporté ce qu'ils m'ont dit, et c'est ce que j'ai dit dans mon témoignage
24 d'hier.
25 Q. Egalement, pour ce qui est de M. Mate Granic, hier, vous avez dit
26 quelque chose qui a été consigné à la page 102 du compte rendu, à savoir
27 qu'au mois de septembre 1993, M. Sakota, avant les visites de la Croix-
28 Rouge -- donc, M. Sakota vous a dit qu'avant les visites de la Croix-Rouge,
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1 M. Granic avait téléphoné lui demandant d'améliorer les conditions de
2 détention dans le centre de détention; est-ce que vous pourriez nous
3 préciser le sens de ceci ? Est-ce que vous avez dit cela dans le cadre où
4 M. Granic laissait entendre, qu'il y avait des centres de détention, mais
5 simplement qu'il s'agissait d'améliorer les conditions dans ces endroits-là
6 et que les conditions devaient être maintenues à un bon niveau ou est-ce
7 que vous êtes en train de dire autre chose ?
8 R. Je ne sais pas ce qu'a dit -- je ne sais pas ce que savait M. Granic et
9 ce qu'il ne savait pas parce que je pense qu'il devait connaître
10 l'existence de ces endroit. C'est pour cela qu'il a téléphoné, du reste.
11 Dans mon reportage, j'ai parlé de ce que m'a dit M. Sakota, qu'il avait
12 reçu cet appel téléphonique et on lui avait demandé si je ne me souviens
13 pas de ces propos exacts. Je crois que c'était de l'ordre de faire en sorte
14 que la vie de ces gens soit facilitée. Mais je ne peux pas vous dire
15 exactement ce que M. Granic savait ou ne savait pas.
16 Q. Non, non, ce n'est pas la question que je vous pose. Je vous demande ce
17 que savait M. Granic. Je suis simplement en train d'essayer de comprendre
18 le sens de ce que vous nous avez dit. Je vous pose cette question : savez-
19 vous que -- étiez-vous au courant de toutes les activités menées par M.
20 Granic, à partir du début du mois de juillet 1993, activités qui visaient à
21 démanteler le centre de détention et à y mettre un terme et dans
22 l'intervalle, en tout cas, à y améliorer les conditions ?
23 R. Ecoutez. Je ne sais rien précisément à propos du démantèlement de ce
24 centre de détention, mais je savais d'après les journaux si je me souviens
25 bien qu'à Zagreb, on estimait que c'était quelqu'un qui n'était pas
26 toujours d'accord avec tout ce qui se passait et qu'il avait pris une part
27 active aux négociations. Mais, à mon sens, je n'étais pas au courant
28 d'exigences ou des demandes qu'il avait faites par rapport à la question
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1 des camps.
2 Q. Je vous remercie. Il me reste plusieurs minutes avant que ne sonne 3
3 heures. Je vais les mettre à profit. Vous avez parlé de la conversation que
4 vous avez eue avec M. Boban, et vous avez dit que dans le plan Vance-Owen
5 se retrouvait pratiquement les mêmes propositions, les propositions quasi
6 identiques pour ce qui est des divisions à cantons. Vous avez dit que HVO
7 était quelquefois traduit par "merci," vala, Vance-Owen," en guise de
8 plaisanterie. Est-ce que vous connaissez le plan qu'avait la communauté
9 internationale s'agissant de la structure territoriale de la Bosnie-
10 Herzégovine ? Je parle des plans qui existaient avant juillet 1993.
11 R. Oui. Je crois qu'il y en a eu plusieurs. Excusez-moi, Madame. Dans la
12 foulée des événements, je me souviens de ce gros titre, dans Oslobodjenje :
13 "Clinton trazi novi plan," "Clinton à la recherche d'un nouveau plan." Oui,
14 effectivement, il y avait eu le sommet de Londres, en août 1992, qui a
15 donné lieu à des plans, mais il y avait eu plusieurs tentatives auparavant.
16 Lord Owen et Cyrus Vance n'étaient pas les premiers à faire une tentative,
17 mais, pardonnez-moi, il faudrait que les parcourent tous, Carrington, Cyrus
18 Vance, Owen, Washington, Genève, mais je ne suis pas sûr de me souvenir des
19 détails de chacun de ces plans, mais je sais qu'il y avait des dispositifs
20 tout à fait extraordinaires, de cartes. Je suivais tous ces événements
21 d'une façon très attentionnée -- avec beaucoup de soins, à l'époque. Mais,
22 maintenant, je ne me souviens pas nécessairement des détails.
23 Q. Mais c'était en fait la finalité de ma question précédente. Savez-vous
24 s'il y a eu une seule conversation ou on n'a pas discuté des frontières ou
25 on n'a pas discuté des frontières et cartes de la Bosnie-Herzégovine ?
26 Connaissez-vous un seul pays où vous avez plusieurs peuples, disons, qui
27 ont un statut de nation constitutive, sans que ce pays connaisse une
28 structure complexe, par exemple, celle d'une Fédération, des structures en
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1 canton, Fédération, Confédération. Donc, je parle de structures complexes.
2 Je connais des pays qui ont des structures internes complexes, qui ne sont
3 pas nées de la violence.
4 Q. Ma question ne concerne pas du tout la violence. C'est une question de
5 principe que je vous pose et qui compte beaucoup pour nous. Il est
6 important de voir comment vous, vous interprétez la déclaration de Mate
7 Boban et les événements en Bosnie-Herzégovine. Connaissez-vous un seul pays
8 qui n'aurait pas de structures complexes et qui comptaient deux ou
9 plusieurs peuples constitutifs sur son territoire ?
10 R. Oui. Mais ceci, c'est sur ma première réponse parce que, effectivement,
11 tout ceci se déroulait dans un climat de violence et je pense, à l'époque,
12 qu'il allait accoucher de la violence et de ce qui s'est passé. Il les
13 connaissait ces cas, il y a la Suisse, la Confédération de Vedik [phon], il
14 y a la Belgique.
15 Q. La Suisse, c'est un pays complexe à ma connaissance qui compte six
16 cantons. Je ne pense donc pas que ce soit un bon exemple.
17 R. Si je le mentionne c'est parce qu'il l'a mentionné aussi, et c'est un
18 pays où on parle quand même trois langues différentes. Je ne savais pas
19 combien il y avait de canton en Suisse.
20 Q. Hier et aujourd'hui -- aujourd'hui le général Praljak vous a posé des
21 questions et vous avez dit que vous étiez un peu lassé de l'utilisation de
22 ce terme de "narod," qui signifie peuple ou nation. Je vous pose cette
23 question pour avoir une bonne idée de la réponse ou des réponses que vous
24 avez fournies tant hier qu'aujourd'hui. Afin de protéger les droits d'un
25 peuple comment peut-on s'y prendre si on ne donne pas à ce peuple un Etat,
26 un statut constitutionnel -- garantir ces droits dans la constitution ?
27 Lorsqu'il y a fondation d'un Etat uniquement sur les droits des citoyens en
28 tant qu'individu interrompu ou que Me Kovacic --
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous posez la même question que
2 M. Praljak avait posée et l'Accusation a fait objection.
3 Monsieur Mundis.
4 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Une fois de
5 plus, je tiens à le dire, objection, aux fins du compte rendu, parce que
6 ceci dépasse de loin les connaissances de ce témoin parce que là on
7 s'aventure dans le discours politique le plus complexe et c'est sans
8 pertinence.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais interrompre l'audience parce qu'il faut
10 avoir de la pause.
11 Mais, avant de faire cela, je devrais indiquer aux avocats : Vous
12 posez des questions de nature politique, libre à vous. Mais sachez que
13 dans, un jugement de ce Tribunal, tous les jugements, les contextes
14 politiques sont évoqués parfois en annexe ou dans deux ou trois pages. Les
15 Juges, qui doivent se prononcer sur une responsabilité pénale, vont
16 examiner le rôle de chacun dans la commission de crime. Tout le temps que
17 vous passez dans ce type de questions, libre à vous, d'y passer du temps,
18 mais sachez que les Juges ne passeront pas autant, et que je me dois
19 d'intervenir concernant la modalité de l'interrogatoire au titre de
20 l'article 90 pour vous dire de bien réfléchir aux questions que vous posez
21 car vos questions doivent être utiles dans l'intérêt de la justice, dans
22 l'intérêt de vos clients, et que nous, nous n'avons pas à écrire
23 l'histoire, mais à se prononcer sur une responsabilité pénale.
24 Alors, il est 15 heures 05, et nous allons faire la pause de 20 minutes.
25 Mais je rappelle que l'Accusation a eu quatre heures pour présenter
26 ce témoin, d'après nos calculs, et je vais demander à la Juriste de la
27 Chambre de me faire le décompte tout à l'heure et, d'après mes calculs,
28 vous avez en ce qui concerne la Défense sur le plan général vous avez déjà
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1 utilisé 162 minutes et il vous reste normalement 78 minutes. Il reste
2 encore trois avocats à intervenir et tous vous-même.
3 Bon. Alors, il est 3 heures 5; nous reprendrons dans 20 minutes à 15
4 heures 25.
5 --- L'audience est suspendue à 15 heures 08.
6 --- L'audience est reprise à 15 heures 30.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, il nous reste exactement une heure et
8 demie. Je redonne la parole à Me Alaburic.
9 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
10 Juges. J'ai terminé ma partie du contre-interrogatoire.
11 Vu le respect que j'ai envers la Chambre, mes collègues et
12 M. Vulliamy, j'aimerais dire ceci.
13 En raison de la dernière question que j'ai posée, je ne voulais pas en la
14 posant obtenir une remarque d'ordre politique de la part du témoin. Mais 14
15 années se sont écoulées depuis qu'il a parlé à Mate Boban, pourtant il a
16 réussi à citer les mots prononcés par Mate Boban quand il a expliqué
17 pourquoi il ne pouvait pas accepter la constitution de la Bosnie-
18 Herzégovine et pourquoi il pensait qu'il fallait pour la Bosnie-Herzégovine
19 une structure cantonale. Je trouve que le témoin a été très émotif
20 lorsqu'il nous a dit qu'il était lassé d'entendre utiliser le mot "narod"
21 en ex-Yougoslavie. C'est pour cela que j'ai pensé qu'il était important de
22 lui poser la question pour faire une distinction entre un Etat civique ou
23 citoyen et un Etat qui compte comme élément constitutif des notions parce
24 que je pense que selon la vie qu'on a, on aura une façon différente de
25 faire un reportage sur ce pays, de relater les événements qui sont -- qui
26 s'y produisent. Pour ce qui est de ces articles, disent-ils utiliser, je
27 pense qu'ils avaient une certaine connotation politique, ce qui est normal.
28 C'est ce que je voulais dire en guise d'explication. Il me semblerait que
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1 le témoin souhaite intervenir.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous me le permettez, Monsieur le Président,
3 parce qu'effectivement, au début, vous m'avez posé une question. Ce n'était
4 pas une question politique, c'était plutôt sur la façon dont j'interprétais
5 le terme "narod", "peuple". Je vous en suis gré parce que lorsque j'ai dit
6 que j'étais las de ce terme, je ne voulais pas critiquer qui que ce soit au
7 niveau de l'identité, de la culture, de l'histoire de la langue de qui que
8 ce soit. Je voulais dire que j'étais fatigué de voir la façon dont il était
9 utilisé ce terme, à l'époque en ex-Yougoslavie. J'étais las de voir ce
10 qu'en faisait les gens pendant toute l'année 1991 et je sais que cela s'est
11 passé ailleurs. Mais j'ai entendu des gens me dire que chaque fois qu'on
12 entendait "sprski narod", "peuple serbe", c'était la Serbie.
13 Je l'ai entendu dire à Knin. Je l'ai entendu en Slavonie orientale, deux
14 endroits qui se trouvent en Croatie et j'ai vu aussi comment on a -- ce
15 qu'avait produit comme effet l'utilisation et la propagation de ce terme.
16 Donc, ce n'est pas le terme qui me heurte ou dont je suis las, et je
17 ne veux vexer personne, aucun peuple dans sa culture, son identité. Ce qui
18 me heurtait peut-être, c'était la façon dont certains utilisaient ce terme
19 pour se livrer à des actes de violence, surtout au cours de la deuxième
20 conversation que j'ai eue avec M. Mate Boban, lorsqu'il a dit que le peuple
21 croate était armé et prêt à défendre sa liberté. Au vu de ce que j'avais
22 connu comme utilisation de ce terme, l'expérience que j'avais acquise à cet
23 égard, je savais comment on utilisait ce terme et je ne voulais pas du
24 tout, en disant que j'étais las de l'entendre, critiquer quelque peuple,
25 quelque identité culturelle que ce soit.
26 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci beaucoup de cette explication. C'est
27 tout à fait comme cela que j'avais interprété vos paroles; c'était la
28 raison pour laquelle je voulais rappeler votre attention sur le terme
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1 "narod" comme étant un élément constitutif dans la théorie de la création
2 d'un Etat. Mais je pense que maintenant, nous avons suffisamment consacré
3 de temps à la question. Merci. Merci, Monsieur le Témoin.
4 M. JONJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
5 Juges.
6 Contre-interrogatoire par M. Jonjic :
7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vulliamy. Je m'appelle Tomislav
8 Jonjic. Je vais vous poser des questions au nom de M. Valentin Coric. Ces
9 questions vont revenir en partie sur certains des sujets abordés par mes
10 confrères et consoeurs, mais je vais essayer de voir ces problèmes sous
11 d'autres angles pour aborder d'autres détails qui me semblent importants.
12 Aujourd'hui, M. le Président vous a posé une question et d'autres confrères
13 et consoeurs vous ont posé des questions, et vous avez dit que vous n'aviez
14 pas seulement fait du journalisme d'analyse, mais que vous avez fait aussi
15 un journalisme de recherche investigatif [phon], et que pour ce faire, il
16 fallait des préparatifs tout à fait complexes et détaillés. La première
17 fois que vous êtes venu en Bosnie-Herzégovine, que vous êtes allé en
18 Bosnie-Herzégovine, qu'est-ce que vous connaissiez de ce pays ? Comment
19 vous êtes-vous préparé ? Qu'est-ce que vous avez lu, et qui vous a peut-
20 être donné des explications ?
21 R. Je pense avoir déjà donné une amorce de réponse. Je l'ai dit, je ne
22 suis pas un expert des Balkans. Disons que je suis un profane instruit dans
23 les choses qui concernent l'ex-Yougoslavie. J'ai lu des livres sur l'ex-
24 Yougoslavie pendant la guerre d'indépendance de la Croatie en 1991, et au
25 moment où je suis arrivé en Bosnie-Herzégovine, disons que j'avais une
26 connaissance de profane. Je n'étais pas un éditorialiste, il y avait
27 beaucoup de gens qui se livraient à ce genre de chose et eux étaient des
28 experts en histoire des Balkans. J'ai été envoyé comme journaliste, et
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1 quand on dit du journalisme de "recherche", cela veut dire en général autre
2 chose. Cela veut dire qu'on veut dévoiler des cas de corruption, ou ce sont
3 des enquêtes longues que fait ce genre de journaliste. Ce n'était pas mon
4 travail; je ne voulais pas nécessairement ou je ne devais pas faire une
5 analyse politique de la situation dans les Balkans en tant qu'expert. Mais
6 j'espère que je me suis acquitté du mieux que j'ai pu de ma tâche.
7 Q. Merci. Merci beaucoup. Vous avez dit que vous vous étiez servi de
8 véhicules du Bataillon britannique de la FORPRONU pour vous déplacer, vu
9 l'état des routes et les routes qui existaient en Bosnie-Herzégovine. Est-
10 ce que vous avez bien compris ? Est-ce que ce sont des membres du Bataillon
11 britannique qui vous ont transporté plusieurs fois ?
12 R. Non, pas tellement de fois. A plusieurs reprises, j'avais mon véhicule
13 personnel, et il est arrivé une fois que nous tombions dans une embuscade
14 assez effrayante tendue par les Serbes, mais je ne me suis pas beaucoup
15 servi de véhicules. Si je vous ai donné cette impression, elle est erronée.
16 Q. Les commandants ou les officiers du Bataillon britannique vous ont-ils
17 donné des instructions ou des informations sur ce qui se passait sur le
18 terrain ?
19 R. Oui, ils l'ont fait de deux façons différentes. D'une part de façon
20 informelle, disons, officieusement, ce n'était pas consigné, c'était
21 lorsque nous étions basés à Vitez, où se trouvait leur base à eux aussi, il
22 nous arrivait de manger à leur messe -- à leur cantine s'il n'y avait pas
23 d'autre endroit pour manger. L'autre façon, cela s'est passé après un
24 certain temps. Ils ont organisé des briefings, des conférences de presse
25 avec des cartes, l'évolution des lignes et les activités du bataillon.
26 Q. Merci. Vous qui êtes un journaliste britannique, vous savez sans doute
27 très bien que certains organes de la presse britannique et aussi pour ce
28 qui est des maisons d'édition dans l'histoire britannique, on n'a pas un
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1 avis très favorable du rôle qu'a joué le Bataillon britannique dans son
2 histoire et aussi dans le rôle qu'il a joué dans les guerres de l'ex-
3 Yougoslavie.
4 R. Ici, je ne peux pas parler au nom de toute la presse britannique, mais
5 j'aimerais penser qu'il faudrait quand même récompenser ceux qui méritent
6 des récompenses. Je n'ai pas connaissance d'hostilités au niveau
7 didactique, ou peut-être mis à part quelques publications d'extrême gauche
8 que je ne prends pas très au sérieux où on parle d'impérialisme. Cela ne
9 m'intéressait pas. Sinon, je ne vois pas très bien à quoi vous voulez en
10 venir.
11 Q. Inutile de s'appesantir sur ce point. Je voudrais vous poser quelques
12 questions pour voir si vous connaissiez bien les événements qui se sont
13 produits en Bosnie-Herzégovine. Page 20 du compte rendu d'aujourd'hui,
14 lignes 15 à 18, vous avez déclaré que c'est uniquement au cours de votre
15 dernière visite à Mostar, en février 1994, que c'est seulement à ce moment-
16 là à votre grande surprise que vous avez compris que l'ABiH contrôlait
17 plusieurs pâtés d'immeubles sur la rive occidentale, la rive ouest de la
18 Neretva.
19 R. Au cours de ma première visite, effectivement, je ne m'étais pas rendu
20 compte qu'ils avaient un certain territoire de l'autre côté sur l'autre
21 rive, la rive ouest. Cela, je l'ai appris en fait dans l'intervalle qui est
22 intervenu entre mes deux visites. En février, lorsque je suis allé à
23 Mostar, je voulais voir l'aspect qu'avait la rive ouest.
24 Q. C'est à ce moment-là que vous avez compris que l'ABiH détenait aussi du
25 territoire sur la rive ouest de la Neretva ?
26 R. Oui. Entre septembre, date de ma première visite, et celle de février,
27 je l'ai appris par divers reportages, mais je ne savais pas effectivement
28 la première fois que je suis allé en septembre, vous avez raison.
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1 Q. Dans votre déclaration préalable de 1997 et aussi hier, ici, lors de
2 votre déposition, vous avez déclaré avoir rencontré Mate Boban lorsqu'il
3 fêtait le remplacement de Stjepan Kljujic, ou plutôt le fait qu'il avait
4 été nommé chef de la communauté croate d'Herceg-Bosna. Vous avez dit que
5 Kljujic était un homme modéré et qu'il avait été remplacé par Mate Boban
6 qui lui ne l'était pas. Est-ce que je vous ai bien compris ?
7 R. Je ne sais pas si je me suis servi du terme "modéré" ou pas, mais cela
8 revient à dire cela, effectivement. Par la suite, j'ai conversé avec M.
9 Kljujic de cet épisode et lui a qualifié cet épisode de putsch. Ce n'est
10 pas moi qui le dis.
11 Q. Je vais demander l'aide de Mme l'Huissière. Je voudrais vous montrer un
12 document de la liste 65 ter P -- ou 5D peut-être 0049. Oui, c'est le bon
13 document. Veuillez examiner la première colonne à gauche et le début de la
14 deuxième. Il s'agit ici d'un article publié par ce qu'on appelle le
15 "Croatian Monitor,"
16 24 mai 1992. Je tiens à préciser que c'est un journal d'opposition. Ce
17 n'est pas un journal du gouvernement, de la République de Croatie. On parle
18 d'un accord historique entre les Croates et les Musulmans. Vous avez sans
19 doute l'habitude d'une lecture rapide puisque vous êtes journaliste. On
20 parle d'une réunion et de réunions historiques qui se sont tenues à Split
21 les 17 et 18 mai 1992. Vous le constaterez, il s'agissait d'une réunion du
22 HDZ de Bosnie-Herzégovine et du SDA. Le HDZ de Bosnie-Herzégovine était
23 représenté par Miljenko Brkic - c'est lui qui était son représentant
24 d'alors - et on était parvenu à un accord. En bas de page - je ne sais pas
25 s'il est possible de voir ce bas de page - regardez la partie qui a été
26 soulignée. Vous voyez qu'il y a eu un accord pour parler de relation
27 confédérale entre la Bosnie-Herzégovine et la Croatie. En conséquence,
28 l'accord de Graz avait été révoqué. Je parle ici de l'accord entre les
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1 Croates et les Serbes. A la dernière ligne, il est dit que tous les partis
2 de Croatie ont salué unanimement la signature de cet accord entre les
3 Croates et les Musulmans, qui a été approuvé par M. Izetbegovic. Cela,
4 c'est le bas de la deuxième colonne.
5 Stjepan Kljujic n'a pas été aussitôt remplacé par M. Mate Boban. Or, à vous
6 entendre, c'est l'impression qu'on aurait eue. Ce qui compte davantage,
7 c'est la question de savoir quand vous êtes arrivé en Bosnie-Herzégovine en
8 août 1992, à l'époque, est-ce que vous saviez qu'il y avait un accord entre
9 les Croates et les Musulmans ?
10 R. Oui. Je ne me souviens pas si j'avais connaissance de certaines
11 réunions en particulier, mais je savais qu'il y avait ce genre d'accords
12 entre les Musulmans et les Croates. Ce qui est intéressant, c'est que c'est
13 la première fois que m'a été confirmé l'existence d'un accord antérieur
14 entre Mate Boban et les Serbes de Bosnie.
15 Q. Non, non. Si vous lisez attentivement ce qui vous est présenté ici, il
16 n'est pas question d'un accord, mais d'une rencontre, d'une réunion à Graz,
17 et pas d'un accord.
18 R. Peut-être que je ne suis pas en train de lire la bonne page.
19 Q. Vous avez la bonne page, mais pas le bon passage.
20 M. JONJIC : [interprétation] Peut-on aller un peu plus bas dans le texte.
21 Je demande à Mme l'Huissière de montrer le bas du texte.
22 Q. Dernier paragraphe, avec cette réunion --
23 R. Oui, oui, c'est le mot "annulé" qui est important.
24 Q. Il y a aussi de "The recent meeting -- la récente réunion." Il est
25 question "d'une réunion récente" et pas "d'un accord récent."
26 R. Oui, oui. Excusez-moi, c'est bien le mot "réunion" qui figure ici, mais
27 on peut se poser des questions quant à savoir comment on annule une
28 réunion, enfin, quoi qu'il en soit.
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1 Q. Ce sera vérifié plus tard.
2 M. JONJIC : [interprétation] Avec l'aide de M. le Greffier, j'aimerais
3 maintenant qu'un autre document soit soumis au témoin.
4 Dans le numéro au titre de l'article 65 ter du Règlement et 5D 00064.
5 Il est question dans ce document de quelque chose que vous connaissez sans
6 doute un peu mieux, puisqu'il s'agit d'un accord entre le président Tudjman
7 et le président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, Alija Izetbegovic,
8 qui voient d'une façon très semblable la question avec le mois précédent,
9 un accord sur cette question entre le HDZ et le SDA. Il est dit également
10 dans ce document, un peu plus loin, que la République de Croatie appuie les
11 efforts déployés par la communauté internationale pour mettre un terme à
12 l'agression contre la Bosnie-Herzégovine et les opérations armées. Est-ce
13 que vous connaissiez ce document à l'époque, ou en tout cas, si vous ne
14 connaissiez pas ce document, est-ce que vous connaissiez éventuellement ces
15 efforts déployés en vue d'un accord entre Musulmans et Croates, efforts
16 datant de la mi-1990 ?
17 R. Si je ne m'abuse, il ne s'agit pas d'une période antérieure, mais
18 ultérieure de quelques mois. Je ne me souviens pas si je connaissais cette
19 déclaration en particulier, si j'avais eu connaissance de cette réunion. Je
20 suppose que j'ai dû lire quelque chose à ce sujet. Mais je ne connais pas
21 ce document en tant que tel. Cela étant, il est certain, qu'à l'époque,
22 j'étais au courant. Je crois même avoir parlé du mois de mai, lorsque nous
23 discutions du document précédent et du mois de juin également, dates
24 auxquelles il était prévu de créer une alliance, ou en tout cas, des
25 relations politiques amicales entre les deux groupes. Je pense en avoir
26 parlé dans ma déposition, avoir parlé de cette alliance, avoir dit qu'elle
27 fonctionnait militairement sur le terrain au départ, et que dans certains
28 endroits particuliers ce bon fonctionnement s'est poursuivi d'ailleurs.
Page 1697
1 Q. Je vous remercie. Quelque temps plus tard, en fait, deux mois plus
2 tard, au mois d'août 1992, vous avez rencontré Mate Boban à Grude et
3 discuté avec lui. Le général Praljak vous a interrogé sur ce point, et
4 puisque j'ai sous les yeux une citation, j'aimerais que nous soyons un peu
5 plus précis vous et moi sur cette question.
6 Alors, hier, page 28 du compte rendu d'audience de la journée d'hier,
7 lignes 1 à 5, vous avez dit qu'à cette occasion, Mate Boban vous avait
8 déclaré désirer, je cite ce que vous avez dit : "Une division de la Bosnie-
9 Herzégovine en canton d'après l'exemple suisse."
10 Aujourd'hui, répondant aux questions de M. Praljak, pages 45 et 46 du
11 compte rendu d'audience, vous avez dit ne pas avoir de connaissances
12 particulières au sujet de la Suisse. Pour ma part, j'ai eu la chance de
13 passer quelques années en Suisse. Donc, il est possible que j'aie davantage
14 d'informations. Ce que je sais, c'est que la Suisse est divisées en
15 cantons, mais elle est unie. Alors, pouvez-vous nous expliquer pourquoi la
16 Suisse qui est un pays intégré réparti en cantons, pourquoi est-ce que vous
17 pensez que la division en cantons de la Bosnie-Herzégovine aurait pu se
18 faire selon les mêmes modalités ?
19 R. J'ai déjà évoqué mon ignorance quant au fonctionnement de la Suisse. Je
20 ne sais pas si la répartition en canton est faite sur base ethnique en
21 Suisse. Très franchement, je ne sais pas si en Suisse, il existe un canton
22 francophone, un canton germanophone et un canton italianophone. Lors de
23 cette rencontre que j'ai eue avec M. Boban, je n'ai pas eu le sentiment
24 qu'il désirait vraiment une division de la Bosnie-Herzégovine. D'ailleurs,
25 il n'a pas beaucoup parlé de ce qu'il désirait. En fait, il n'a pas
26 beaucoup parlé de l'unification de la Bosnie-Herzégovine. Il a dit qu'il ne
27 pouvait pas appliquer la constitution pour des raisons dont nous avons
28 longuement discutées ici. Il a dit qu'il ne pouvait pas admettre que
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1 Sarajevo soit la capitale de la Bosnie-Herzégovine. Donc, je ne parle de la
2 Suisse quant à la façon dont elle est organisée en canton tout en étant un
3 pays intégré, unifié. Tout ce que je peux dire, c'est qu'à en juger par les
4 remarques de M. Boban, je n'ai pas eu l'impression qu'il souhaitait mettre
5 l'accent sur le côté unifié du pays qui avait été reconnu sur le plan
6 international et dont l'indépendance avait été proclamée par rapport à la
7 Yougoslavie. Il s'agissait de la République de Bosnie-Herzégovine. Il n'a
8 pas utilisé ce terme et s'il l'a fait, il ne l'a pas employé avec
9 enthousiasme. D'ailleurs, je ne sais pas, je le répète, si la division en
10 canton, en Suisse, est faite sur base ethnique, et je ne sais pas si
11 l'équivalence peut être faite entre la Bosnie-Herzégovine et la Suisse à
12 cet égard.
13 Q. Nous allons tirer cela au clair en une seule phrase assez rapidement.
14 Mais vous n'avez pas utilisé l'expression "neutre," organisation de la
15 Bosnie-Herzégovine quand vous avez parlé de Mate Boban et de ce qu'il a dit
16 au sujet des cantons. Dans votre propos, vous avez utilisé un mot tout à
17 fait clair. Vous avez utilisé le mot "division," de la Bosnie-Herzégovine
18 en parlant de cela, et c'est la raison qui justifie ma question.
19 R. Très bonne question. J'ai employé le mot "division," par lequel je
20 suppose que je pensais à une séparation sur base ethnique. D'après ce que
21 j'ai cru comprendre, c'est bien la tension qui existait à l'époque, de
22 créer des cantons en fonction dans la mesure du possible de l'appartenance
23 ethnique des personnes qui y vivaient. Une chose que j'ai remarquée, j'ai
24 dit cela pour compléter ma réponse, c'est qu'au fil du conflit dont nous
25 parlons ici, l'Herceg-Bosna a créé ses propres plaques d'immatriculation,
26 par exemple. Elle a émis ses propres timbres-poste. Je me souviens de
27 l'époque où les communications téléphoniques ont commencé à fonctionner en
28 Bosnie centrale dans les postes, par exemple, avec comme numéro d'accès
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1 régional, le 385, qui est le code d'accès de la Croatie. Je me souviens
2 qu'on pouvait appeler la Croatie, mais qu'on ne pouvait pas, par exemple,
3 appeler Sarajevo.
4 Q. Nous reviendrons sur ce plan particulier, un peu plus tard. Mais
5 parlons un peu de l'émission de timbres-poste, de devises, de billets de
6 banque, et cetera. Je vous demande à ce sujet si les billets de banque
7 utilisés à Londres et à Edimbourg sont absolument identiques, étant
8 entendu, bien sûr, que Londres et Edimbourg appartient au même pays.
9 R. Très bonne remarque. Comme vous le savez, les billets de banque
10 utilisés à Edimbourg et à Londres ne sont pas identiques, puisqu'il existe
11 une banque d'Angleterre et une banque d'Ecosse.
12 Q. Merci beaucoup. J'aimerais maintenant aborder une autre série de
13 questions relatives au HOS, pour le compte rendu d'audience, j'indique
14 d'emblée, et nous serons sans doute d'accord là-dessus, que le sigle HOS
15 signifie "forces armées croates," puisque le HOS est l'initial du mot "H"
16 qui veut dire Croatie. Bien sûr, il importe de faire la différence entre le
17 HOS et le HVO, HVO qui signifie "Conseil croate de la Défense." Je ne sais
18 pas si en langue anglaise, cette distinction est tout à fait évidente mais
19 bien entendu, de votre côté, vous étiez au courant de cette différence,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Le mot "force" a pour moi une connotation bien plus militaire que le
22 mot "conseil", bien entendu. Vos confrères m'ont déjà interrogé au sujet de
23 l'entremêlement des aspects civils et militaires de la question. Je vous
24 remercie de m'avoir la question que vous venez de poser, car effectivement,
25 le HVO, d'après ce que j'ai pu constater, était assez enchevêtré avec le
26 HOS. Je ne sais pas exactement quelles étaient les compétences ou les
27 attributions des uns ou des autres, mais je sais qu'un parti politique
28 était parti prenante dans toute cette histoire.
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1 Q. Nous reviendrons là-dessus plus en détail plus tard. Mais au préalable,
2 j'aimerais vous poser la question suivante : quand vous êtes arrivé en
3 Bosnie-Herzégovine en août 1992, quels étaient les rapports entre le HOS et
4 le HVO ? Est-ce que leurs rapports étaient bons ou est-ce qu'il existait
5 une sorte d'antagonisme entre les deux ?
6 R. Je pense avoir dit dans ma déposition que je me suis penché à l'époque
7 sur un rapport dont l'auteur était un dirigeant du HOS, sinon, le premier
8 dirigeant du HOS. Je crois qu'il s'appelait Kraljevic, qui a ensuite été
9 exécuté à un barrage routier. Je n'ai pas beaucoup parlé avec M. Boban du
10 HOS, mais j'ai parlé à
11 M. Dedakovic du HOS de Capljina assez longuement, et avec lui, j'ai discuté
12 du HVO. Nous avons discuté longuement des aspirations territoriales des uns
13 et des autres. Je crois avoir abordé cette question dans ma déposition
14 aujourd'hui. Nous avons également, nous sommes également revenus les
15 désaccords qui s'étaient fait jour au sujet de la meilleure de défendre
16 Vukovar, qui est une des cicatrices les plus importantes dans l'histoire
17 croate, comme vous le savez.
18 Q. Avec l'aide de Mme l'Huissière, j'aimerais que l'on soumette au témoin
19 le document 5D 01013, avec la traduction anglaise qui est attachée à ce
20 document.
21 Il ne s'affiche toujours pas à l'écran.
22 C'est bien ce document que je voie maintenant à l'écran dans sa version
23 anglaise. C'est donc un document du commandement du HOS de Bosnie-
24 Herzégovine qui date de la première quinzaine du mois d'août 1992, puisqu'à
25 la deuxième ligne, il est dit que le commandant en second du HOS a été
26 arrêté le 7 août 1992. Le texte se poursuit en indiquant que le HVO et
27 d'autres forces dépendantes du HVO se sont autoproclamés forces militaires
28 à la différence du HOS, qui constituaient la force militaire régulière de
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1 Bosnie-Herzégovine. Il est indiqué que : "Tous les membres du HVO doivent
2 être arrêtés." Ceci figure au deuxième paragraphe. Le HVO étant accusé
3 d'être un instrument du KOS, service de Renseignement et d'Udba, service de
4 Sécurité de l'Etat.
5 Alors, Monsieur Vulliamy, vous avez dit hier à Capljina vous avez vu
6 la photo d'Ante Pavelic et que vous avez sur les murs des lettres
7 majuscules U inscrites sur les murs. Ceci figure en page 32 du compte rendu
8 d'audience de la séance d'hier. Vous dites également avoir parlé à M.
9 Paraga, président du Parti croate du droit à Zagreb. Ceci figure en page 36
10 du compte rendu d'audience d'hier lignes 12 à 14. Conviendriez-vous avec
11 moi qu'au vu de ce document les rapports entre le HVO et le HOS n'étaient
12 pas optimaux et que le HOS était considéré comme faisant partie intégrante
13 des forces armées régulières de Bosnie-Herzégovine ?
14 R. Avant de répondre, j'aimerais indiquer qu'au compte rendu en anglais le
15 nom de Kraljevic apparaît non pas comme Kraljevic, mais comme
16 "Kriminaljevic", ce qui n'est peut-être pas très souhaitable. Bon. Excusez-
17 moi. Je réponds maintenant à votre question. Je n'avais absolument pas la
18 moindre illusion quant aux faits que le HOS et le HVO entretenaient des
19 rapports idylliques. Je ne savais pas que le HOS constituait une forme
20 armée illégitime et que le HVO se considérait comme une force armée
21 légitime. C'est un problème qui était leur problème à ces deux groupes.
22 Pour autant que j'en étais informé le HVO représentait effectivement les
23 forces armées officielles de la communauté croate d'Herceg-Bosna ce qui
24 n'était pas le cas du HOS. En tout cas, j'en apprenais tous les jours au
25 sujet de la situation. Vous avez évoqué le fait que j'ai parlé d'Ante
26 Pavlic et de la lettre U qui illustrait le mot "Oustachi", d'où j'avais
27 tiré la conclusion à juste titre me semble-t-il que le HOS se considérait
28 comme un descendant de ce mouvement du passé. J'ai vu donc effectivement la
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1 photo de Pavelic et le U majuscule sur les murs à Grude. Mais je ne pense
2 pas avoir jamais entendu dans ce qui appelait être écrit au sujet du HVO à
3 l'époque quiconque prétendre qu'il était le descendant du mouvement
4 oustachi. Toutefois pendant le temps que j'ai passé là-bas les soldats du
5 HOS ont visiblement été placés sous le commandement du HVO durant l'année
6 1993 puisqu'on pouvait le constater au niveau des barrages routiers et au
7 niveau des équipes qui se relayaient à ces barrages et des uniformes que
8 portaient les hommes qui tenaient ces barrages. Donc, oui, je suis
9 absolument au courant qu'au départ les rapports entre les deux groupes
10 étaient tout à fait mauvais.
11 Q. Nous conviendrons ensemble, je suppose, que le HOS se référait au
12 mouvement oustachi et à l'Etat indépendant de Croatie, n'entrons pas dans
13 les détails, mais il se disait donc le descendant d'un mouvement qui au
14 cours de la Seconde guerre mondiale était du côté du Troisième Reich. Je
15 crois vous avoir également entendu confirmer le fait que le HOS était le
16 bras armé d'un parti politique, à savoir, le Parti croate des droits.
17 M. JONJIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le
18 Président, j'aimerais toujours avec l'aide de l'Huissier vous soumettre un
19 nouveau document. Le document P D 0093. Nous voyons apparaître à l'écran la
20 traduction anglaise de ce document.
21 Q. C'est un ordre du président du Parti croate des droits, Dobroslav
22 Paraga, qui indique que des officiers du HOS sont désormais promus à
23 certains postes dans la municipalité de Maglaj, qui se trouve en Bosnie-
24 Herzégovine, comme vous le savez.
25 R. Oui, j'y suis allé. C'est une ville qui était assiégée.
26 Q. Ceci étaye ce dont nous avons déjà discuté à savoir que le HOS était
27 censé fonctionner sous l'égide du Parti croate des droits. Pendant votre
28 séjour en Herzégovine est-ce que vous étiez informé de la composition
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1 ethnique des Unités du HOS ?
2 R. Oui. Elles étaient composées de Croates de Bosnie, de Croates également
3 d'ailleurs et de Musulmans de Bosnie.
4 Q. Aviez-vous la moindre idée quant au pourcentage de Croates et de
5 Musulmans au sein des Unités du HOS ?
6 R. Non. Je suppose que cela variait d'une région à une autre. En dehors de
7 la question du caractère unifié ou du caractère non unifié de la Bosnie cet
8 élément avait pour moi de l'importance par rapport aux faits de déterminer
9 si l'armée bosnienne était présente ou pas dans le secteur. Je pense que
10 dans la région de Capljina en tout cas il est possible qu'elle ait été.
11 Mais le HOS était sans doute plus à même de lutter les armes à la main
12 contre les Serbes.
13 M. JONJIC : [interprétation] Avec l'aide de l'Huissier j'aimerais qu'on
14 vous soumette à nouveau un document. Numéro 5, j'insiste 5D 00102. C'est
15 l'extrait d'un livre dont je ne sais pas si vous le connaissez. Le livre de
16 Mehmed Dizdar, qui s'appelle : "Stolac en jugement." Ce livre compte 260
17 pages. Je suppose que l'Accusation est en possession de l'intégralité de
18 cet ouvrage, mais la question n'est pas de la première importance à
19 l'instant même. La Défense ne voit pas comment elle pourrait faire traduire
20 l'intégralité de ce livre. Nous en avons donc choisi certains extraits.
21 L'auteur de ce livre, Mehmed Dizdar, était jusqu'au début de la
22 guerre l'un des commandants du poste de police de Stolac et, plus tard, il
23 est devenu l'un des principaux organisateurs de l'ABiH sur le territoire de
24 Stolac et de Capljina.
25 Je demande qu'on affiche à l'écran la première page de la traduction.
26 Je ne sais pas quelle est la pagination dans le système électronique. Oui.
27 C'est bien cette page-là.
28 Q. Donc, l'auteur de ce livre évoque un dialogue qui a eu lieu au
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1 cours de l'été 1992 avec l'un des commandants du HOS, un peu plus bas que
2 la moitié de ce passage, vous voyez une question posée par l'auteur. Je
3 cite : "Qui a-t-il d'autre au sein du HOS ? Son interlocuteur est un
4 Musulman de Bosnie qui s'appelle Meco [phon] et qui lui dit ils sont tous
5 Musulmans. Puis, ensuite vient une question, je crois qu'il y a une erreur
6 de traduction. La question est la suivante. Quels sont vos rapports avec le
7 HVO et, ensuite, vient la réponse, nous n'en avons aucun."
8 Alors, Monsieur Vulliamy, est-ce que vous êtes surpris de constater que la
9 grande majorité des membres du HOS présents en Herzégovine est censée être
10 composée de ressortissants du peuple musulman, d'après ce que M. Dizdar dit
11 dans son livre ?
12 R. Je n'ai jamais entendu parler de ce livre pas plus que de son auteur.
13 Je le crains si cela est vrai, je ne sais pas très bien quoi dire. Cela
14 confirme peut-être ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir que la
15 situation variait d'une région à une autre. Les autres qui tenaient les
16 barrages routiers du HOS dans les environs de Prozor étaient tous Croates,
17 et je crois savoir que M. Dedakovic était à moitié Serbe -- mais je ne
18 connais pas ce livre. Je n'ai aucune raison de penser que ce qu'il dit
19 n'est pas vrai, car de toute façon, j'ai déjà dit dans ma déposition que
20 j'étais au courant du fait qu'il y avait des Musulmans au sein du HOS.
21 Q. Bien. Merci. Nous reviendrons sur cet ouvrage, enfin, sur les autres
22 extraits de ce livre qui se déroulent en Bosnie-Herzégovine. Mais il y a
23 quelques instants, nous avons évoqué cette lettre du 7 ou 8 août 1992, dans
24 laquelle le commandant du HOS de Mostar considère que le HOS constitue
25 l'armée régulière de Bosnie-Herzégovine. Maintenant, j'aimerais qu'on vous
26 soumette le document 5D 00130. Il s'agit d'un ordre datant du 15 août 1992,
27 signé par Sefer Halilovic. Vous connaissez sûrement ce nom. Sefer Halilovic
28 est à ce moment-là le chef d'état-major du commandement suprême des forces
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1 armées de la République de Bosnie-Herzégovine, et comme vous le constatez
2 ici, il ordonne que les Unités du HOS des municipalités de Konjic,
3 Jablanica et Prozor qui sont commandées par le commandant Zvonko Lukic --
4 je ne sais pas si sur la base du prénom et du nom, vous êtes capable de
5 reconnaître l'appartenance ethnique de M. Lukic, mais pour ma part, je
6 tiens à vous indiquer qu'il n'est en aucun cas Musulman.
7 R. Je crois que j'aurais pu le deviner. Il est sans doute Serbe.
8 Q. Il pourrait être soit Serbe, soit Croate, je ne sais pas. Mais quoi
9 qu'il en soit, les Unités du HOS dans ces trois municipalités placées sous
10 son commandement sont resubordonnées au commandement du TG 1 à Konjic. A
11 partir de là, pouvons-nous en conclure que le commandement de l'ABiH
12 commandait les Unités du HOS ?
13 R. Ecoutez, sur la base de ce document, il était en mesure de leur donner
14 des ordres, oui.
15 Q. Merci. Bien. Etant donné que vous avez dit vous-même que l'objectif
16 politique, ou plutôt l'objectif territorial du Parti croate des droits du
17 HOS était d'englober l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine dans l'Etat
18 croate, pourriez-vous nous expliquer comment ceci aurait pu être accepté
19 par les dirigeants musulmans, Sefer Halilovic et Alija Izetbegovic ? Ceci
20 n'était-il pas diamétralement opposé à ce qu'ils prônaient en public ?
21 R. Ecoutez, je ne sais pas si Halilovic ou Izetbegovic avaient anticipé
22 cela, à savoir que la Bosnie aurait fait partie d'une Croatie plus grande.
23 Non.
24 Q. Oui, je suis d'accord avec vous sur ce point.
25 Mais la question qui se pose est : quel est le rôle joué par le HOS,
26 étant donné ses objectifs territoriaux et politiques et la présence des
27 forces armées de l'ABiH ?
28 R. Je ne sais pas. D'après mon expérience, les gens du HOS que je
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1 connaissais étaient sous le commandement du HVO, et clairement dans ce cas,
2 ils étaient placés sous le commandement de l'armée de Bosnie. Je ne sais
3 pas à quel moment le HOS a été démantelé. Je ne sais pas si ceci s'est
4 jamais produit ou avec qui ils se sont alliés. J'avais l'impression qu'ils
5 partaient dans tous les sens.
6 Q. Merci. Je vous pose la question parce qu'hier, vous nous avez décrit la
7 première visite que vous avez faite à Dretelj au cours de l'été 1992,
8 lorsque le HOS assurait le commandement. Aux pages 34 et 35 du compte rendu
9 d'hier, vous avez dit qu'à l'entrée de ce centre de détention, il y avait
10 un soldat qui portait un uniforme de l'ABiH. On peut donc en conclure qu'en
11 1992, le centre de détention de Dretelj était commandé et géré à la fois
12 par des Croates et des Musulmans qui faisaient partie du HOS.
13 Mais afin de pouvoir mieux comprendre le rôle joué par le HOS, car
14 j'essaie de gagner du temps, je souhaite maintenant demander à la Huissière
15 de nous remontrer le livre de Mehmet Dizdar, numéro du document 5D 0102. Il
16 s'agit des pages de traduction, page 164 de cette même page. Nous ne
17 l'avons pas encore à l'écran. Il nous faut la traduction de la page 164,
18 s'il vous plaît. C'est la page suivante. C'est cela.
19 Alors nous parlons de la même époque, ici. Nous sommes en présence
20 des mêmes orateurs. L'auteur du livre demande au HOS quelles sont leurs
21 intentions ou leurs plans. Cet autre homme, Beso, qui était un officier de
22 haut rang du HOS, dit : "Nous allons tous rejoindre l'armée, autrement dit,
23 l'ABiH, dès que les conditions nous le permettent. Telle était l'ambiance
24 au sein de l'armée, et les Musulmans du HOS ont la même opinion." Déjà au
25 cours de l'été 1992, les Musulmans du HOS et les Musulmans du HVO sont
26 disposés à rejoindre l'armée de l'ABiH pour y être intégrés. Si nous
27 regardons la page suivante, nous avons ici un dialogue à mi-chemin sur ce
28 qui a lieu au mois d'août 1992. L'auteur de ce livre, qui était un des
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1 organisateurs de l'ABiH à Stolac et à Capljina, s'entretient avec Avdo
2 Hebib. Je ne sais pas si vous connaissez ce nom d'Avdo Hebib. C'était un
3 des hommes politiques de haut rang au sein du Parti de l'Action
4 démocratique pendant 10 ans et il était premier ministre des Affaires
5 étrangères adjoint. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de lui.
6 R. Non.
7 Q. Bien.
8 Donc, au cours de cette conversation - nous n'allons pas lire toute la
9 conversation - mais il parle de la manière dont est organisée l'ABiH à
10 Stolac et Capljina. Ensuite, Hebib dit à l'autre homme -- il est en train
11 de décrire la manière dont ils ont piégé les Serbes et nous avons réussi à
12 nous sauver. Le HVO, semble-t-il, se livrait à la terreur et Hebib dit
13 qu'il les a piégés également. Il entendait par là les Croates.
14 Dites-moi, s'il vous plaît, d'après ces deux extraits que nous venons de
15 lire, est-ce que nous pouvons en conclure que les Musulmans du HVO ou du
16 HOS, déjà en 1992, si ce témoignage est exact, avaient préparé des
17 opérations contre le HVO ?
18 R. C'est difficile à dire à partir d'extraits d'un livre que je n'ai pas
19 lu. Je ne sais pas si tout ceci est véridique. Il semble qu'ils aient
20 l'intention de les piéger. Il y a des Musulmans, semble-t-il, au sein du
21 HVO, chose que j'ai déjà dite dans ma déposition. J'ai déjà parlé du nombre
22 de Musulmans qui ont été arrêtés sur la ligne de front et emmenés au camp
23 de Dretelj. Je n'ai pas très bien compris votre question. Mais si je suis
24 censé comprendre la teneur des propos de M. Boban lors de cette réunion,
25 celle que nous invoquons et qu'il s'agit de la complexité des problèmes du
26 HVO avec le HOS, c'est certainement quelque chose dont il ne m'a pas fait
27 part. Je veux parler de ce qui a été dit au cours de cette réunion, et
28 c'est difficile pour moi de parler de ce livre. On ne sait pas qui a
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1 préparé cette opération. Je ne vois pas, mais il est clair que ceci a été
2 précisé. Je ne suis pas en désaccord avec vous sur le rapport entre le HOS
3 et le HVO en 1992, ces rapports n'étaient pas bons, ils étaient même
4 hostiles. J'ai dit ceci au cours de la conversation avec M. Boban, ces
5 rapports ou le type de rapport avec la constitution, il ne se préoccupait
6 pas du HOS malgré le fait que nous souhaitions, nous, en parler et que cet
7 homme avait été tué au niveau du barrage routier.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Jonjic, à 4 heures 25, j'ai une grosse
9 inquiétude puisque l'avocat de Pusic et l'avocat de Prlic doivent
10 intervenir. Est-ce qu'ils vous ont abandonné leur temps de parole ? Je ne
11 sais pas.
12 M. JONJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes parvenus à
13 un accord. Je pense que ceci ne posera aucun problème. Il me faut encore
14 trois ou quatre minutes. Je souhaite que M. Vulliamy fasse la clarté sur un
15 détail qui a été évoqué aujourd'hui.
16 Q. Lorsque M. Praljak vous a posé une question, le HOS a été évoqué dans
17 le cadre de la chute de Jajce, et étant donné ce fait à l'époque à la fin
18 du mois d'octobre, vous étiez en Bosnie centrale. En octobre 1992, saviez-
19 vous qu'un commandement conjoint avait été mis en place à l'époque entre le
20 HVO et l'ABiH ?
21 R. A Jajce ?
22 Q. Après la chute de Jajce.
23 R. Où ? A quel endroit ?
24 Q. En Bosnie centrale, là où il y avait le colonel Blaskic et du côté
25 croate. Mais si vous ne savez rien à ce propos, dites-le-nous.
26 R. Je savais qu'on avait entamé cela, ce commandement conjoint, mais je ne
27 sais pas si ceci est entré en vigueur ou pas ou combien de temps cela a
28 duré. Je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas.
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1 Q. Très bien. Deux petites questions encore. A plusieurs reprises hier au
2 cours de votre déposition, c'est quelque chose que vous avez également
3 évoquée aujourd'hui, afin d'envoyer vos reportages et vos articles à
4 Londres, vous deviez vous rendre à Split et qu'à partir de Tomislavgrad,
5 qu'il n'y avait aucune transmission possible. Ai-je raison de dire que vous
6 deviez passer en Croatie pour envoyer vos reportages ? Est-ce que vous
7 deviez passer la frontière ?
8 R. Cela dépendait des époques. Certains utilisaient des téléphones par
9 satellite. Je ne disposais pas de ce genre de dispositifs. J'ai utilisé une
10 fois un téléphone à Tomislavgrad. Ce téléphone satellite appartenait à
11 quelqu'un, mais je n'ai pu m'en servir qu'une seule fois. Je ne me souviens
12 pas s'il y avait des lignes terrestres à Tomislavgrad du début de la
13 guerre. Je ne pense pas. Mais à Split, en tout cas, nous étions dépendants
14 de notre passage en Croatie, c'est exact.
15 Q. Oui. Donc il est vrai que les lignes téléphoniques ne marchaient pas en
16 tout cas en Herceg-Bosna. Pour ce qui est de ma dernière question, hier, en
17 page 82 du compte rendu, vous m'avez dit que l'imam, le chef religieux, a
18 parlé des civils et a dit aux représentants du HCR, que la personne la plus
19 responsable était Pero Markovic, la personne la plus responsable, en pages
20 36 et 37 en réponse à une question qui vous a été posée par M. Murphy. Vous
21 n'avez parlé que de Capljina, et vous avez dit que les renseignements que
22 vous avez reçus ont été reçus du HCR. Je souhaite faire la clarté là-
23 dessus. Est-ce que ces informations font référence à Capljina, Stolac et
24 Dretelj de la même façon, et ces renseignements fournis par le HCR ont-il
25 été confirmés par l'imam et d'autres civils avec lesquels vous avez pu
26 parler ?
27 R. Je ne suis pas retourné pour aller parler à l'imam ou aux civils de
28 Capljina après m'être entretenu avec les gens du HCR. Je ne peux pas
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1 répondre à votre question pour ce qui est de Stolac. C'est le nom qui a été
2 évoqué au cours de nos conversations avec l'imam et les femmes de Capljina.
3 Je crois que j'ai décrit la teneur de mes conversations avec le HCR à
4 propos de cet homme et de leur opinion sur son point de vue.
5 Q. Merci beaucoup.
6 M. JONJIC : [interprétation] J'en ai terminé avec mon contre-
7 interrogatoire, Monsieur le Président. Je souhaite verser au dossier les
8 documents qui ont été présentés au témoin.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Faites attention. Nous aurons les numéros ?
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Les
11 documents suivants sont versés au dossier, Monsieur le Président, les
12 documents suivants : 5D 0009, 5D 00064, 5D 01013, 5D 01012, et 5D 00130. Je
13 ne pense en avoir oublié aucun.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors normalement il nous reste 30 minutes. Oui. Il
15 y a un document qui a été oublié ?
16 M. JONJIC : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, mais je
17 crois que le document comportant les deux derniers chiffres 93 n'ont pas
18 été mentionnés. Il s'agit de la liste de documents et l'ordre de Paraga; 5D
19 00093.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier ?
21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Cette pièce
22 est versée au dossier sous la cote 5D 00093. Merci.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors il nous reste, en théorie, 30 minutes
24 pour les questions de l'avocat de M. Pusic et de M. Prlic, le cas échéant,
25 des questions supplémentaires et des questions des Juges. Mais là je suis
26 un peu optimiste. Alors, Maître Ibrisimovic ?
27 M. SAHOTA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Contre-interrogatoire par M. Sahota:
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1 Q. [interprétation] Je m'appelle Roger Sahota. Je représente M. Pusic, et
2 en son nom, j'aimerais vous poser quelques questions.
3 Vous avez témoigné dans le détail et parlé de votre visite à Dretelj
4 en septembre 1993. Vous avez également parlé de la conférence de presse qui
5 a eu lieu quelques jours plus tard à Medjugorje, également en septembre
6 1993.
7 R. C'était le lendemain, si je me souviens bien.
8 Q. Puis-je demander d'apporter une correction au niveau de la traduction ?
9 On ne doit pas lire le mot "président", mais "conférence de presse." Je
10 crois que vous sous-entendiez dans votre déposition que la première fois
11 que vous avez rencontré mon client, M. Pusic, c'était lors de cette
12 conférence de presse; est-ce exact ?
13 R. Oui, pour autant que je sache. Oui, c'était la seule et unique fois.
14 Q. Vous avez également, dans votre déposition, dit qu'avant votre visite à
15 Dretelj, vous aviez pendant un certain temps essayé d'obtenir ou d'avoir
16 accès à ce centre de détention.
17 R. Nous avions essayé la veille, avant que le général Praljak nous donne
18 son autorisation, nous avions essayé une fois auparavant au mois de
19 juillet.
20 Q. Vous n'avez pas réussi jusqu'au moment où vous avez croisé le général
21 Praljak; c'est exact ?
22 R. C'est exact.
23 Q. Je crois que ceci n'est pas contesté et c'est bien le général Praljak
24 qui vous a autorisé à entrer à Dretelj.
25 R. Oui. J'espère que j'ai décrit ceci de façon assez concise.
26 Q. Lorsque vous avez tenté d'obtenir cette permission pour visiter
27 Dretelj, est-ce que quelqu'un vous a signifié que vous pourriez contacter
28 M. Pusic, que c'était quelqu'un qui exerçait une certaine autorité et qui
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1 aurait pu vous donner cette autorisation ?
2 R. Non.
3 Q. Pendant votre visite à Dretelj, le nom de M. Pusic n'a-t-il jamais été
4 évoqué par quiconque ou en particulier comme étant le commandant qui vous
5 escortait, le commandant Sakota ?
6 R. Non.
7 Q. Pourriez-vous préciser ceci. Est-ce que quelqu'un a jamais évoqué le
8 nom de M. Pusic avant le mois de septembre 1993 ? Aviez-vous jamais entendu
9 parler de ce nom-là dans ce contexte-là ?
10 R. Je ne me souviens pas avoir entendu parler de son nom. Je crois que,
11 pour autant que je m'en souvienne, la première fois c'était le 1er jour que
12 je l'ai vu lors de la conférence de presse.
13 Q. Pour revenir à la conférence de presse, vous avez dans votre déposition
14 dit aujourd'hui que cette conférence était présidée par quelqu'un du nom de
15 Kresimir Zubak.
16 R. Je crois que c'est lui qui a tenu et fait les propos liminaires. Je
17 crois que c'était l'élément moteur au niveau de ce panel de gens. Je ne
18 sais pas si c'était le président à proprement parler, il a simplement
19 introduit la conférence de presse.
20 Q. Est-il vrai que vous n'avez jamais rencontré M. Zubak auparavant, mais
21 que vous aviez entendu parler de lui ?
22 R. J'avais entendu parler de lui, mais je ne l'avais jamais rencontré.
23 Q. M. Zubak s'est présenté comme étant quelqu'un qui occupait un certain
24 poste. Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agissait ?
25 R. Je crois qu'il s'appelait le vice-président du HVO. Je ne sais pas si
26 c'est exactement cela qu'il entendait, mais en tout cas, ou si cela était
27 le cas.
28 Q. Monsieur Vulliamy, vous avez également dit aux Juges de cette Chambre
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1 que vous ne parlez pas couramment le B/C/S; est-ce exact ?
2 R. Oui, je crois que nous avons déjà parlé de cela. Je le parlais, c'était
3 vraiment assez élémentaire. Je m'en souviens un petit peu.
4 Q. Je sais que cette conférence de presse a eu lieu il y a longtemps,
5 j'essaie simplement de savoir s'il y avait un interprète pour les orateurs
6 qui faisaient partie de ce panel.
7 R. Ce qui a été dit a certainement été interprété. Je ne sais pas si
8 l'interprète siégeait au niveau du panel. Je pense que oui car bon nombre
9 de personnes présentes à cette conférence de presse où je dirais la moitié
10 des personnes présentes étaient des représentants de la presse
11 internationale, mais je ne me souviens pas d'où venait l'interprétation.
12 Q. Pour être tout à fait juste, vous dites que vous ne vous en souvenez
13 pas.
14 R. Je ne m'en souviens pas, j'entends par là qu'il y a des façons de
15 procéder et quelques fois il y avait un interprète officiel et quelques
16 fois c'était votre propre interprète qui traduisait. Je ne me souviens pas
17 exactement. Je sais que ceci a été traduit.
18 Q. Les discours ont certainement été donnés en B/C/S.
19 R. Oui, pour autant que je m'en souvienne, oui.
20 Q. Dernière question : est-il exact de dire que vous n'avez jamais croisé
21 M. Pusic avant et que vous n'avez jamais entendu parler de son nom dans
22 aucun contexte avant cette conférence de presse ?
23 R. Comme je l'ai dit, pour autant que je m'en souvienne, non. J'entends
24 non et oui. Non, je n'avais jamais entendu son nom et je ne l'avais jamais
25 rencontré avant la conférence de presse.
26 Q. Merci, Monsieur Vulliamy. Je n'ai plus de questions à vous poser.
27 M. SAHOTA : [interprétation] Merci.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Sahota. Voilà un bon exemple
Page 1716
1 d'interrogatoire qui va certainement inspirer Me Karnavas.
2 Vous avez la parole, Me Karnavas.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,
4 Messieurs les Juges. Merci pour cette confiance que vous me faites.
5 Contre-interrogatoire par M. Karnavas :
6 Q. [interprétation] J'ai quelques questions à vous poser, Monsieur
7 Vulliamy. Je souhaite reprendre à l'endroit où vous vous êtes un petit peu
8 arrêté. Parce qu'était de M. Zubak, vous avez entendu parler de lui après
9 cette conférence de presse et vous avez suivi un peu son parcours après.
10 R. Je ne peux pas dire que j'ai suivi son parcours, mais c'est vrai qu'il
11 occupait un poste politique, si je me souviens bien, au sein de la
12 Fédération à un moment donné et c'est un nom qui revenait.
13 Q. Si j'ai bien compris, vous ne vous souvenez pas si c'était l'homme qui
14 a remplacé Mate Boban et lorsque celui-ci a cessé d'exercer ses fonctions.
15 R. Lorsque que j'ai parlé de la Fédération peut-être, mais ce que
16 j'entendais par là, je n'étais pas très sûr et je savais qu'il occupait un
17 poste, mais je ne sais pas exactement lequel.
18 Q. "Une saison en enfer," votre livre, a comme sous-titre : "Comment
19 comprendre la guerre en Bosnie ?" Bon, c'est assez ambitieux comme titre,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Est-ce ambitieux ? Je ne sais pas, oui, peut-être.
22 Q. Je vous dis cela car la guerre en Bosnie était assez complexe.
23 R. D'une certaine façon oui, d'une certaine façon non.
24 Q. Bien. Je vais vous donner un exemple. Vous avez précisé un peu plus tôt
25 que vous étiez quelque peu surpris de constater qu'il y avait des soldats
26 musulmans du HVO qui étaient détenus en prison, vous avez fait un
27 commentaire à ce propos, hier, je crois; est-ce exact ?
28 R. Oui. Non pas forcément surpris, étant donné ce qui s'était passé
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1 jusque-là. Mais dans ma déposition, j'ai parlé de l'esprit de la ligne de
2 front qui est -- dont la collégialité sans pareille et je me souviens
3 d'avoir évoqué cette question-là avec certains de mes collègues, et bon, si
4 je n'étais pas surpris, j'étais du moins un peu abattu à l'idée que
5 certains camarades pouvaient arrêter leur propres camarades à côté desquels
6 ils s'étaient battus pendant une période d'un an peut-être, en ce qui
7 concerne les Serbes qui étaient à l'est.
8 Q. Bien. Donc vous auriez été également surpris d'apprendre qu'au mois de
9 juin 1993, les soldats musulmans du HVO ont tué des soldats croates du HVO
10 alors qu'ils dormaient à Bijelo Polje dans le camp du nord. Est-ce que vous
11 saviez cela ?
12 R. Non, je ne savais pas cela et je trouve que cela évoque le même
13 sentiment que ce que je viens de décrire.
14 Q. S'il y a parmi vos rangs certains éléments qui tuent d'autres membres
15 de cette entité, est-ce que vous comprenez en tout cas que certains d'entre
16 eux pourraient être jetés en prison ou que les gens soient bouleversés ?
17 R. Ecoutez, je ne vois pas à quelle épisode vous faites référence, mais
18 cela ne ressemble pas à cette collégialité de la ligne de front.
19 Q. Merci. Maintenant, nous allons revenir sur la question du HOS et mon
20 confrère, M. Jonjic, a eu l'amabilité de nous communiquer certains de ses
21 documents, et je souhaite en parler un petit peu. Vous saviez certainement,
22 en tout cas aujourd'hui, vous savez que le HOS faisait partie de l'ABiH,
23 dans l'ABiH.
24 R. Je savais qu'il y avait des Musulmans au sein du HOS. Je ne savais pas
25 qu'il y avait une chaîne de commandement directe. Je ne savais pas non plus
26 --
27 Q. Bien. Bien, d'accord, d'accord. Je suis d'accord.
28 R. J'étais sur le point de dire : je ne savais pas que des ordres
Page 1718
1 pouvaient être donnés par Sarajevo aux membres du HOS.
2 Q. Je crois que c'est le général Praljak qui avait précisé qu'Alija
3 Izetbegovic avait promu quelqu'un au rang de général.
4 R. Je ne me souviens pas mais je sais que le général Praljak m'a posé la
5 question et j'espère que j'ai dit non, parce que je ne savais pas.
6 Q. C'est l'homme qui a été tué.
7 R. Je ne le savais pas.
8 Q. Me Jonjic nous a fait part des ambitions du HOS qui étaient de
9 repousser les frontières croates jusqu'au bord de la Drina ce qui signifie
10 englober l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
11 R. Oui. Dans ma déposition j'en ai parlé après ma conversation avec
12 Dedakovic également.
13 Q. Pour vous paraphraser, vous avez l'air surpris, c'est même un peu
14 surprenant de voir qu'Alija Izetbegovic et côte à côte avec lui est à côté
15 du HOS, alors que les ambitions sont différentes. Il s'agit de repousser
16 les frontières le long de la Drina. Ils sont dans le même lit en quelque
17 sorte. Cela sonne tout à fait ridicule, n'est-ce pas ?
18 R. Vous ne cessez de me paraphraser. Vous dites qu'ils "sont dans le même
19 lit," et c'est ridicule. Je ne suis pas en mesure de dire cela.
20 Q. Vous ne trouvez pas que c'est bizarre ?
21 R. Ecoutez, oui c'est bizarre. Bien sûr que la partie bosniaque prônerait
22 l'intégration complète au sein d'une Grande-Croatie, oui, bien sûr.
23 Q. Oui. Bien sûr, si vous regardez les autres documents qui nous ont été
24 fournis par Me Jonjic, à un moment donné, on parle de piéger les Croates et
25 de prendre les armes et de passer du côté de l'ABiH. C'est une autre façon
26 d'aborder la question, n'est-ce pas ? Est-ce que ceci aurait un sens ?
27 R. Ecoutez, je ne sais pas si ce livre dit vrai. Il se peut que --
28 Q. Mais, donc, ce scénario serait valable à ce moment-là, c'est la raison
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1 pour laquelle Alija Izetbegovic soutiendrait le HOS ainsi que leurs
2 ambitions territoriales, s'il avait des combattants musulmans qui avaient
3 l'intention, à un moment donné, de prendre les armes et de changer de
4 côté ?
5 R. Ecoutez, je ne sais pas ce qu'il avait en tête. Tout ceci s'est passé
6 dans les coulisses. Je ne sais pas. Il me semble qu'il y a une manipulation
7 ici quelque part, ce qui ne me surprendrait pas de part et d'autre.
8 Q. Bien. Il y a eu beaucoup de manipulation pendant la guerre de tous
9 côtés ?
10 R. Oui, tout à fait.
11 Q. Je vais simplement mettre en lumière quelques points importants. Je
12 n'ai pas beaucoup de temps. Pour ce qui est de l'Herceg-Bosna, vous avez
13 dit que ceci avait été bien organisé.
14 M. Jonjic vous avait parlé de devise. M. Jonjic vous a dit que la devise en
15 Ecosse était différente de la devise utilisée en Angleterre. Savez-vous si
16 la banque centrale de Bosnie-Herzégovine fonctionnait à l'époque ? Est-ce
17 que vous saviez si, oui ou non, elle fonctionnait ?
18 R. Je sais qu'elle a commencé à fonctionner à un certain moment, mais je
19 ne sais pas quand. S'agissant de ce qu'on a dit au sujet de l'Ecosse, vous
20 savez, cela n'a pas grand-chose à voir, parce qu'on peut utiliser les
21 billets à Londres comme en Ecosse.
22 Q. D'accord, d'accord. Mais parlons de la banque centrale. Savez-vous avec
23 certitude, oui ou non, si la banque centrale de Bosnie-Herzégovine
24 fonctionnait à ce moment-là comme elle aurait dû fonctionner ?
25 R. Je ne sais pas comment elle aurait dû fonctionner.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Parlez plus lentement parce que les interprètes ont
27 du mal.
28 M. KARNAVAS : [interprétation]
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1 Q. Sarajevo était-elle assiégée à l'époque ?
2 R. J'ai dit que je ne savais pas si la banque fonctionnait.
3 Q. Ma question à l'instant consistait à vous demander si Sarajevo était
4 assiégée. C'est la question que je vous pose. Je suis sûr que vous l'avez
5 comprise. Veuillez y répondre, oui ou non, dans cette période-là ?
6 R. Dans cette période-là, oui, bien sûr.
7 Q. D'accord. Le gouvernement de Sarajevo était-il en mesure de travailler
8 comme il l'aurait fait normalement en temps de paix ?
9 R. Non.
10 Q. D'accord. Je ne veux pas être agressif, mais j'essaie d'avancer le plus
11 vite possible. Ne croyez surtout pas que je fasse preuve d'agressivité à
12 votre égard.
13 R. Pas de problème, pas de problème.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, et je présente mes excuses aux
15 interprètes.
16 Q. Revenons un peu sur le contexte. Je ne veux pas aller dans le détail,
17 mais pour l'essentiel, si j'ai bien compris ce que vous avez dit, vous
18 étiez correspondant étranger, vous couvriez certaines guerres, et de temps
19 en temps, vous faisiez des reportages sur telle ou telle région et tel ou
20 tel aspect de la guerre ?
21 R. Oui, comme vous le dites, de temps en temps, sporadiquement, je faisais
22 des visites à tel ou tel endroit pour un certain temps. Je n'étais pas sur
23 place en permanence. J'y allais en fonction des décisions prises par le
24 journal ou des d'élan personnel. Je crois savoir qu'il n'y avait que deux
25 ou trois personnes, maximum, qui étaient présentes là-bas tout le temps.
26 Q. Je ne critique absolument pas ce que vous avez fait. Je dis simplement
27 qu'après vous avoir écouté, vous n'êtes pas avocat de formation, vous
28 n'êtes pas juriste, n'est-ce pas ?
Page 1721
1 R. Non, je ne suis pas juriste de formation.
2 Q. Pas plus qu'expert constitutionnel ?
3 R. Je ne suis pas un expert en matière constitutionnelle.
4 Q. Je suppose que vous n'avez pas eu la possibilité de regarder de très
5 près la constitution de l'ex-Yougoslavie ou pas plus que celle de la
6 République socialiste de Bosnie-Herzégovine ?
7 R. J'ai lu des livres portant sur l'histoire yougoslave qui comportaient
8 des références à ces deux constitutions, mais effectivement, je n'ai jamais
9 lu ces deux documents de la première à la dernière page, non.
10 Q. Est-il permis de dire que vous n'avez pas étudié le cadre juridique ou
11 législatif qui était à la base de la création de la communauté croate
12 d'Herceg-Bosna de très près ?
13 R. J'ai lu des choses au sujet de cette création, mais je n'ai pas lu de
14 documents juridiques, non.
15 Q. Si vous les aviez lus, vous auriez appris que Travnik, en tout cas,
16 lors de la création du HVO -- plutôt non, de la communauté croate d'Herceg-
17 Bosna, je crois que c'était en le 18 novembre 1991, donc c'est à cette date
18 que la communauté croate a été créée ?
19 R. Oui. J'ai répondu à cette question. Je n'avais peut-être pas très bien
20 compris la question posée par votre confrère.
21 Q. Mais pour que nous soyons bien précis sur ce point, je vous ai écouté
22 hier - et dites-moi si je me trompe - j'ai eu l'impression que suite à
23 votre réunion avec Boban, et après avoir lu quelque part que Boban s'était
24 rendu à Travnik, et vous avez parlé du jour où la communauté croate
25 d'Herceg-Bosna a été créée, et vous avez dit que le conflit avait éclaté
26 très peu de temps après cette date. Donc, plus ou moins, vous essayez
27 d'établir un lien entre les deux événements, n'est-ce pas ?
28 R. Je ne dirais pas que j'ai essayé d'établir un lien.
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1 Q. Mais vous les jugez liés ?
2 R. Les événements en question se sont succédés rapidement. Je n'irai pas
3 vérifier le compte rendu d'audience pour trouver les mots exacts que j'ai
4 utilisés littéralement, mais oui, dans certains articles, il a été dit que
5 la chose s'était passée très peu de temps après sa visite sur place. Je ne
6 pense pas que j'ai dit, néanmoins, qu'il était allé à Travnik pour déclarer
7 la guerre.
8 Q. D'accord, d'accord. Toutefois, vous avez tout de même mis en exergue sa
9 visite à Travnik et le fait que très peu de temps après la guerre ou le
10 conflit a éclaté suite au fait que Boban, lors de sa visite, avait déclaré
11 que Travnik entrait dans le cadre de la communauté croate d'Herceg-Bosna ?
12 R. Comme je l'ai dit, il faudrait que j'aille revoir le transcript pour
13 trouver les mots exacts que j'ai employés. Mais j'ai dit que les deux
14 choses s'étaient passées successivement; cela oui. La violence a éclaté
15 assez rapidement après cette visite.
16 Q. Mais en tant que personne douée de raison, vous n'excluez pas la
17 possibilité que ces deux événements n'aient rien eu à voir l'un avec
18 l'autre ?
19 R. Je n'exclus pas cette possibilité, mais on peut parler de coïncidence
20 dans ce cas; cela c'est sûr.
21 Q. D'accord. Alors, saviez-vous que le 17 octobre, une réunion de la
22 présidence de la communauté croate d'Herceg-Bosna a eu lieu à Travnik ?
23 Saviez-vous cela, et pensez-vous que c'était une bonne raison justifiant la
24 visite de Boban, et qu'il n'y en avait peut-être pas d'autres ?
25 R. Je n'ai rien lu au sujet de cette réunion du 17, non.
26 Q. Saviez-vous que le 21 octobre, le commandant du HVO de Travnik, un
27 certain Stojic, a été tué à Novi Travnik ? Est-ce que vous l'avez appris ?
28 R. Maintenant que vous le dites, oui, je crois l'avoir appris. Bien sûr,
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1 j'étais avec le HVO. Je me cachais derrière un mur, pendant un combat fort
2 sonné, et je crois que c'est le lendemain, ou pour le moins deux jours plus
3 tard, que j'ai entendu parler de cela, oui.
4 Q. D'accord. La raison pour laquelle nous parlons de Travnik, Novi Travnik
5 et Prozor, c'est que toutes ces localités sont très proches les unes des
6 autres géographiquement, n'est-ce pas ?
7 R. Prozor est tout de même assez loin. Mais Travnik et Novi Travnik sont
8 tout près l'une de l'autre, oui. Elles sont même limitrophes.
9 Q. Vous avez indiqué que Prozor, vous avez traduit ce mot qui veut dire
10 "fenêtre", vous avez dit que Prozor était importante. Si elle était
11 importante pour une partie au conflit, elle devait sans doute l'être aussi
12 pour l'autre, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Donc, quelle que soit la partie belligérante qui avait le contrôle sur
15 Prozor, elle avait la chance, par la même, d'avoir le contrôle sur toute la
16 région ?
17 R. Il faudrait que je vérifie le compte rendu d'audience pour voir
18 exactement les mots que j'ai utilisés. Est-ce que j'ai parlé de porte
19 d'entrée -- en tout cas, je voulais dire que Prozor avait une grande
20 importance stratégique sur le plan militaire, et que quiconque exerçait le
21 pouvoir en Bosnie centrale donnait une grande importance à Prozor étant
22 donné que c'était le point d'entrée pour l'aide humanitaire. On m'a
23 interrogé sur les convois en Croatie. Comme vous le savez, quand ces
24 convois arrivaient en Bosnie-Herzégovine, les choses étaient bien
25 différentes. J'ai, dans un de mes articles, parlé d'un convoi qui aurait
26 été arrêté et absolument pillé par le HVO.
27 Q. Dans ce secteur, je crois que vous parlez d'un morceau de territoire
28 bien particulier, ville appelée Makmet [phon], je pense. Cet homme qui vous
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1 a parlé d'un triangle musulman. Est-ce que vous vous rappelez de cela ?
2 R. Oui. Je m'en souviens. Je me rappelle.
3 Q. Mais est-ce que j'ai écrit un article à ce sujet, cela, je ne sais pas.
4 Cet homme me décrivait la stratégie des Musulmans lorsqu'ils avaient des
5 vues sur une région de Bosnie-Herzégovine, en effet.
6 R. Je pense qu'il m'a dit, tout à fait, cela.
7 Q. D'accord. Maintenant revenons sur le mois de mars dont nous parlions,
8 il y a quelques instants si je me souviens bien, une ou deux petites
9 questions à aborder encore. Un point fondamental, en tout cas, c'est de
10 déterminer si vous avez lu quelque chose ou entendu quelque chose à
11 l'époque qui portait sur l'idée d'un système unifié, un système unifié par
12 lequel chaque personne avait une voix en tant qu'électeur, disposait d'une
13 loi en tant qu'électeur. C'est l'un des points principaux qui faisait
14 obstacle dans les rapports entre les Croates et la Bosnie-Herzégovine. Vous
15 rappelez-vous de ce genre de discussion ?
16 R. Oui. Je ne sais pas si on parlait d'une voix pour une personne, mais je
17 me souviens que Mate Bodan a parlé de ses inquiétudes par rapport à la
18 constitution et à la nécessité pour celle-ci de garantir les droits de
19 chaque individu, pas seulement d'un peuple.
20 Q. Non. Pas simplement d'un peuple. D'accord. Mais ce mot "narod," il est
21 traduit par "peuples" ou par "nation" assez indifféremment en général. Or,
22 il comporte une notion un peu différente que celle d'appartenance ethnique.
23 Vous conviendrez avec moi que, sans rentrer dans le détail, c'est bien le
24 cas ?
25 R. Ce mot "narod," a une signification qui lui est propre. Il ne signifie
26 ni l'un ni l'autre à 100 %.
27 Q. D'accord.
28 R. Si on voulait le traduire, on devait revenir à l'organisation de
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1 l'Allemagne au siècle dernier.
2 Q. Mais, en tout cas, à lire votre déclaration et votre livre, est-ce que
3 vous dites que Mate Boban aurait déclaré qu'il souhaitait qu'une partie de
4 la Bosnie-Herzégovine et de l'Herceg-Bosna fassent intégralement et
5 géographiquement de la Croatie ? Est-ce que ce n'était pas cela ?
6 R. Je pense que j'ai déjà parlé de cela à plusieurs reprises dans ma
7 déposition. Il n'a jamais parlé "d'annexion" ou de "sécession", mais quand
8 on parlait de la Croatie, il a exprimé des regrets en disant qu'il
9 regrettait les conditions assez malheureuses sur le plan historique de la
10 Croatie, et le fait que les Croates de Bosnie auraient dû, d'après lui en
11 tout cas, spirituellement, je crois que c'est un mot qu'il a utilisé à
12 plusieurs reprises, être reliés à la Croatie.
13 Q. Un peu comme ce qui s'est passé en Grèce antique ?
14 R. On pourrait parler des Protestants et de la Grande-Bretagne aussi pour
15 donner un autre exemple.
16 Q. Mais quand vous parlez de la Bosnie-Herzégovine, je pense que vous
17 savez que la Bosnie-Herzégovine a été attaquée par la JNA au préalable,
18 n'est-ce pas ?
19 R. Excusez-moi, de quelle période vous parlez ? Quand j'étais en Bosnie ?
20 Q. Quand y êtes-vous allé pour la première fois ?
21 R. Oui, quand je suis allé la première fois, j'étais au courant.
22 Q. Donc, manifestement, vous savez qu'à cette époque, la Croatie avait été
23 attaquée par la JNA.
24 R. J'étais plus qu'au courant de cela. J'ai consacré pas mal de temps à
25 parler de cela quand j'ai parlé d'Osijek.
26 Q. Vous le saviez donc ?
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Pourriez-vous ralentir, s'il vous plaît. Parce que
28 nous avons des problèmes.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation]
2 Q. Manifestement, vous saviez que le territoire de Bosnie-Herzégovine
3 avait servi de point de départ pour l'attaque de la Croatie par la JNA.
4 R. J'étais au courant que la JNA avait des bases en Croatie --excusez-moi,
5 en Bosnie, notamment au nord de la Bosnie, et beaucoup de choses ont été
6 écrites au sujet de la rivière Sava, du franchissement de la rivière Sava à
7 cet égard.
8 Q. Très bien. C'était l'époque où Alija Izetbegovic présidait la
9 présidence, n'est-ce pas ?
10 R. Présidente tournante, 1991.
11 Q. Elle n'a jamais tourné. En fait, faites-moi confiance.
12 R. Excusez-moi, il détenait le pouvoir --
13 Q. Vous rappelez-vous quelle a été sa réponse lors de sa réaction lors de
14 l'attaque de Ravno le 5 mai 1991 ? Ce n'est pas le mois de mai. Excusez-
15 moi. Je me suis trompé de date. Mes confrères et consoeurs me disent qu'il
16 s'agit du mois de septembre en 1991.
17 R. L'attaque de Ravno n'a pas bénéficié de l'attention qu'elle aurait
18 méritée. Je ne me souviens pas d'une quelconque réaction.
19 Q. Bien, cette réaction a consisté pour certains à dire cette guerre n'est
20 pas la nôtre et, bien sûr, les habitants de Ravno étaient Croates et pas
21 Musulmans, mais ils étaient sur le territoire de Bosnie-Herzégovine. Alors
22 maintenant qu'on repense rétrospectivement à tout cela, comment pensez-vous
23 aurait pu se sentir le peuple croate et le peuple de Bosnie-Herzégovine
24 alors que le président de la présidence déclare qu'après qu'un village ait
25 été rayé de la carte, la raison de cet acte, à savoir la guerre, n'est pas
26 sa guerre ?
27 R. Je ne vais pas m'excuser pour le SDA.
28 Q. Je comprends.
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1 R. Je vous comprends.
2 Q. D'accord. J'aurais eu quelques petites questions supplémentaires à vous
3 poser, mais compte tenu du temps, je dois m'arrêter ici.
4 R. Merci.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Karnavas. Vous avez parfaitement
6 respecté le temps imparti, et je vous en suis gré. La discipline a du bon
7 lorsque tout le monde respecte le temps de parole accordé. Bien, Monsieur
8 Mundis, pas de questions supplémentaires qui rallongeraient le temps ?
9 M. MUNDIS : [interprétation] Nous n'avons pas d'autres questions pour ce
10 témoin, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges vont se discipliner eux-mêmes.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin.
13 Questions de la Cour :
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur, vous avez longuement
15 discuté avec Mate Boban. Vous nous avez donné le sentiment qu'il s'était
16 présenté lui-même en vous disant qu'il était le dirigeant des Croates
17 d'Herceg-Bosna, comme s'il était en quelque sorte un dieu politique. Mais
18 a-t-il fait la moindre allusion à quelque moment que ce soit au fait qu'il
19 existait d'autres Croates et que peut-être il aurait peut-être pu exister
20 un autre pouvoir croate incarné par quelqu'un d'autre que lui, autre
21 pouvoir croate pour lequel il aurait eu éventuellement du respect, sinon
22 une certaine allégeance ?
23 R. J'ai essayé de m'expliquer, mais je voudrais faire encore une fois état
24 de mon ignorance quant au rapport exact qui le liait au HVO et aux forces
25 armées. Je ne sais pas exactement quelle était sa position en tant que
26 dirigeant d'un Etat par rapport aux forces armées qui menaient la guerre.
27 Je ne me situe pas par rapport à nos sociétés démocratiques à cet égard.
28 Mais il ne fut aucun doute qu'il a parlé de ses intentions et qu'il a dit
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1 qu'il souhaitait qu'elles soient mises en œuvre. J'en ai parlé dans ma
2 déposition. J'ai dit qu'il disait : "Il n'y aura plus de voyages à Genève
3 sans mon autorisation." Cela, c'est également quelque chose qui est en
4 désaccord avec l'idée qu'il voulait quitter le pouvoir. En tout cas, il n'a
5 pas été très, très clair, mais il a parlé du fait que c'était lui qui
6 menait la danse. Oui.
7 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai juste une
8 courte question.
9 Monsieur le Témoin, J'aimerais juste une clarification par rapport à votre
10 déposition de ce matin en ce qui concerne M. Pusic. En répondant au contre-
11 interrogatoire clair et précis de Me Sahota, vous avez confirmé que vous
12 avez vu M. Pusic pour la première fois en conférence de presse à
13 Medjugorje, et qu'il ne semble pas en position d'influencer sur les
14 décisions. Pourriez-vous être un peu plus précis sur son manque d'influence
15 sachant que vous avez dit ce matin que
16 M. Pusic était responsable de l'échange des prisonniers, et avait-il une
17 quelconque influence sur les conditions de détenus à Dretelj ?
18 R. Monsieur le Juge, je vous prie de m'excuser. Mais je ne peux pas vous
19 éclairer quant à l'influence qui était ou qui n'était pas la sienne. Il
20 s'est présenté, à moins que ce ne soit quelqu'un d'autre qui l'ait
21 présenté, je ne me souviens même plus exactement en quel terme, mais en
22 tout cas, il était clair qu'il était censé avoir quelque chose à voir avec
23 les échanges de prisonniers. Mais, je ne sais rien de l'influence qui était
24 ou qui n'était la sienne. Il s'est efforcé non pas de justifier les
25 conditions d'existence à Dretelj, mais de persuader les participants à la
26 conférence de presse que cette conférence était conforme aux droits de la
27 guerre et au droit international. Sur ce sujet des échanges de prisonniers,
28 l'un des points dont je me souviens qu'il a été discuté consistait à savoir
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1 si les prisonniers de Dretelj étaient prévus pour ce genre d'échanges. Je
2 pense qu'il y avait certains centres de détention où on regroupait un petit
3 peu les gens comme des pions en vue d'échanges éventuels ultérieurs, et je
4 pense que -- je ne sais pas si quelqu'un a parlé de Dretelj en disant que
5 les détenus de Dretelj pouvaient faire l'objet d'un échange quelques
6 semaines plus tard éventuellement. Aucune conclusion particulière n'a été
7 tirée, me semble-t-il, durant cette conférence de presse à ce sujet. Donc,
8 je ne peux pas vraiment vous aider, je suis désolé sur l'influence exercée
9 par M. Pusic ou non exercée par lui, mais, apparemment, il ne semble pas
10 être particulièrement responsable des échanges de prisonniers. Je ne trouve
11 pas de meilleure expression pour décrire les choses.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Vulliamy, votre audition vient de se
13 terminer. Je veux vous remercier au nom de tous les Juges d'être venu
14 témoigner pendant deux jours, et je vais demander à Mme l'Huissière de bien
15 vouloir vous raccompagner à la porte de la salle d'audience.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 [Le témoin se retire]
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors maintenant, je vais me tourner vers M.
19 Mundis pour l'audition du témoin expert demain. Ma première question : le
20 témoin expert est-il à la disposition de la Chambre, et deuxièmement, quel
21 temps comptez-vous utiliser pour votre interrogatoire principal ? Vous
22 envisagez de nous présenter combien de documents ?
23 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. S'agissant des
24 deux premières questions que vous m'avez posées, je crois pouvoir y
25 répondre. Quant à la troisième, je suis en regret de dire que je crains de
26 ne pas pouvoir vous aider beaucoup. Le Pr Donia n'est pas encore ici, et il
27 sera prêt pour démarrer sa déposition demain à 9 heures du matin. Si je
28 suis bien informé, c'est mon confrère, M. Scott, qui procédera à
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1 l'interrogatoire principal qui, selon nos prévisions, devrait durer environ
2 deux heures. Je ne suis pas actuellement en mesure de vous dire le nombre
3 de documents que M. Scott a l'intention de soumettre au témoin, mais je
4 peux peut-être chercher à obtenir ce renseignement très rapidement pour le
5 transmettre aux Juges et à la Défense. Je crois, en tout cas -- je pense
6 pouvoir dire très certainement qu'il utilisera son rapport ainsi qu'un
7 certain nombre de documents cités dans son rapport.
8 M. le Président, mon commis aux audiences m'indique que l'on parle de
9 35 documents à peu près qui devraient être soumis au témoin, mais encore
10 une fois, j'hésite un peu à vous donner un chiffre exact, car c'est M.
11 Scott qui est responsable de l'interrogatoire principal et il n'est pas ici
12 en ce moment.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors voilà donc une bonne indication. Il y
14 aura deux heures, et nous aurons également un rapport et 35 à 40 documents.
15 C'est là où je me tourne vers la Défense. Comme vous le savez, nous
16 avons audience demain, de 9 heures à 17 heures, avec interruption de 1
17 heure 30, et puis, nous reprendrons jeudi matin jusqu'à 13 heures 45. Donc,
18 c'est dans ce créneau horaire que vous devez vous arranger entre vous pour
19 procéder au contre-interrogatoire.
20 Si vous ne vous entendez pas d'ici demain, à ce moment-là, nous ferons sur
21 ce ton la règle de l'un sixième, mais je pense que vous allez vous
22 entendre, étant précisé que demain, normalement, le premier qui doit
23 contre-interroger, cela devrait être Me Kovacic puisque nous suivons
24 l'ordre. Voilà. Alors, réunissez-vous, entendez-vous, et demain en début
25 d'audience, vous m'expliquerez comment vous vous êtes réparti le temps.
26 Etant précisé que jeudi à 13 heures 45, ce sera "stop" pour tout le monde.
27 Maître Kovacic ?
28 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous venez d'indiquer
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1 que je serai le premier à contre-interroger le témoin. Or, nous avons déjà
2 discuté entre nous de la façon dont nous allions contre-interroger le
3 témoin expert, M. Donia, donc je suppose pouvoir dire au nom de tous les
4 conseils que pour peu que nous soyons absolument d'accord sur la façon de
5 procéder, nous nous mettrons d'accord pour que cela soit un autre conseil
6 qui commence l'audition, si la chose est permise. Je crois pouvoir vous
7 dire d'emblée que c'est Me Karnavas, qui contre-interrogera le premier et
8 qui pourra donc utiliser le temps qui lui est chaud.
9 Toutefois, ce n'est sans doute pas le meilleur moment pour en parler
10 maintenant, mais j'en arrive à mon deuxième point qui est que nous
11 pourrions peut-être reprendre cette question à la fin de l'interrogatoire
12 principal, car à ce moment-là, nous verrons beaucoup plus clairement si le
13 problème est complexe, compliqué ou pas.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : L'idéal, c'est qu'entre vous, vous fassiez votre
15 propre discipline pour que vous nous présentiez qui interroge dans le
16 temps. Nous, nous n'avons qu'un seul objectif, nous sommes malheureusement
17 tenus par des contraintes de temps, et à titre personnel, nous
18 souhaiterions bien entendu consacrer énormément de temps, mais
19 malheureusement, le temps nous est compté. C'est dans ce cadre que vous
20 devez, vous, vous entendre. Si vous n'arrivez pas à vous entendre entre
21 vous, à ce moment-là, nous appliquons les règles mathématiques élémentaires
22 avec les tours de rôle. Mais si vous estimez que demain, Me Karnavas,
23 commence - mais il commencera - le tout pour nous, c'est que jeudi à 13
24 heures 45, l'audition de ce témoin expert sera terminée. Entendez-vous,
25 faites des réunions de concertation pour savoir quelles sont les bonnes
26 questions à poser; surtout en matière d'expertise, ce n'est pas la peine de
27 poser six fois la même question. Donc, c'est un travail sérieux. Vous avez
28 tous l'expérience, et ce qui compte, c'est d'apporter des éléments
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1 d'appréciation aux Juges. C'est cela, le but de l'exercice. Si nous n'en
2 retirons rien, c'est du temps perdu pour tout le monde et du temps perdu
3 pour votre propre Défense. Voilà. Il est 17 heures 10. Je m'excuse auprès
4 des interprètes, car nous avons un peu joué des prolongations. Nous aurons
5 donc le plaisir de nous revoir tous, demain à 9 heures. Je vous remercie.
6 --- L'audience est levée à 17 heures 13 et reprendra le mercredi 10 mai
7 2006, à 9 heures 00.
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