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1 Le lundi 30 octobre 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 22.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro
6 de l'affaire ?
7 M. LE GREFFIER : Bonjour, Monsieur le Président. Affaire
8 IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
10 Je salue toutes les personnes présentes, les représentants de l'Accusation,
11 les avocats, Messieurs les accusés. Nous devons poursuivre nos travaux par
12 l'audition d'un témoin, mais avant cela j'ai deux décisions orales à rendre
13 plus également une invitation de la Chambre.
14 Concernant les décisions orales, décisions orales portant sur l'admission
15 des pièces relatives au Témoin Senada Basic, la Chambre se prononce sur
16 l'admissibilité des pièces relatives au Témoin Senada Basic qui a comparu à
17 l'audience du 25 octobre 2006. La Chambre décide d'admettre les éléments de
18 preuve suivants présentés par l'Accusation, aux motifs qu'ils présentent
19 une certaine valeur probante et une certaine pertinence : P 09711, P 07350.
20 Par ailleurs, la Chambre constate que la Défense n'a demandé l'admission
21 d'aucunes pièces.
22 Deuxième décision orale, décision orale portant sur l'admission des pièces
23 relatives au Témoin BW. La Chambre se prononce sur l'admission des pièces
24 relatives au Témoin BW qu'a comparu à l'audience du 19 octobre 2006. La
25 Chambre décide d'admettre les éléments de preuve suivants présentés par
26 l'Accusation aux motifs qu'ils présentent une certaine valeur probante et
27 une certaine pertinence : IC 00058 sous pli scellé, IC 00059 sous pli
28 scellé,
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1 IC 00060 sous pli scellé, P 01316, P 09152, P 09151, P 09151,
2 P 09153, P 09514, P 09155, P 09163.
3 La Chambre décide d'admettre les éléments de preuve suivants présentés par
4 la Défense aux motifs qu'ils présentent une certaine valeur probante et une
5 certaine pertinence : 3D 00472 sous pli scellé, P 01472 sous pli scellé, 3D
6 00454.
7 Bien. Alors, maintenant, je vais lire lentement, et je demande à
8 l'Accusation de bien écouter, ainsi qu'à la Défense, mais dans un premier
9 temps, cela concerne particulièrement l'Accusation : le titre c'est
10 invitation aux parties de faire parvenir à la Chambre leurs arguments
11 concernant l'admission d'éléments de preuve.
12 La Chambre souhaite attirer l'attention des parties sur un point important
13 de procédure liée à l'admission des éléments de preuve. La Chambre tient
14 tout d'abord à rappeler qu'en vertu de la décision portant sur l'admission
15 des éléments de preuve, rendus le 13 juillet 2006, la partie qui souhaite
16 verser une pièce au dossier de la procédure le fait en principe par
17 l'intermédiaire d'un témoin capable de déposer sur sa fiabilité, sa
18 pertinence, et sa valeur probante. La pièce dont le versement est demandé
19 doit être présentée à un témoin à l'audience. Selon cette même décision la
20 Chambre permet une dérogation à ce principe de base. En effet, l'Accusation
21 peut saisir la Chambre de requêtes écrites demandant l'admission d'éléments
22 de preuve qui n'ont pas été présentés à un témoin à l'audience pour autant
23 qu'un certain nombre de conditions strictes soient respectées. Ces
24 conditions sont gouvernées par la ligne directrice numéro 6 de la décision.
25 Parmi ces dernières figurent la condition selon laquelle ces requêtes
26 écrites doivent être déposées dans un délai de huit jours suivant la
27 comparution d'un témoin qui aurait pu déposer sur les pièces dont
28 l'Accusation demande l'admission. Il en découle, que l'admission d'une
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1 pièce par voie de requêtes écrites suppose que la Chambre ait entendu un
2 témoin sur les circonstances dans lesquelles s'inscrit la pièce concernée.
3 Dans le cadre de l'application de la décision du 13 juillet dernier, la
4 Chambre fait plusieurs constats. En premier lieu, la Chambre note que,
5 parmi les pièces mentionnées dans la liste 65 ter de l'Accusation, figurent
6 des pièces importantes qui pourraient éclairer la Chambre sur la structure
7 militaire et la chaîne de commandement du HVO. La Chambre note par ailleurs
8 qu'à plusieurs reprises, l'Accusation a essayé d'introduire de telles
9 pièces par l'intermédiaire de témoins dits "crime base," témoins qui
10 n'étaient pas les plus appropriés à témoigner sur ces pièces.
11 La Chambre constate de surcroît que l'Accusation n'a jamais déposé à ce
12 jour de requête écrite en vertu de la ligne directrice numéro 6. Par
13 conséquent, la Chambre se pose la question de savoir si dans l'intérêt de
14 la justice et de la manifestation de la vérité, il ne conviendrait pas
15 d'assoupir quelque peu les conditions énoncées à la ligne directrice numéro
16 6, notamment en permettant à l'Accusation de déposer dans une mesure
17 limitée des requêtes écrites visant à faire admettre des pièces qui ne
18 seraient pas liées à l'audition des témoins.
19 La Chambre tient d'emblée à préciser qu'elle ne compte pas se
20 démarquer substantiellement de la décision du 13 juillet 2006. Ainsi, la
21 Chambre continue à souscrire au principe de base relatif à l'introduction
22 des pièces à travers des témoins énoncés dans la décision du 13 juillet. La
23 Chambre souhaite cependant compléter la procédure actuellement en vigueur
24 afin de veiller à ce que les pièces strictement nécessaires pour l'affaire
25 soient versées à la procédure. A cet égard, la Chambre invite les parties à
26 lui faire parvenir leur observation par écrit ou par oral au plus tard le 6
27 novembre 2006. La Chambre insiste sur le fait qu'elle a déjà entendu les
28 parties sur le droit applicable en matière d'admission des éléments de
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1 preuve et qu'il ne serait donc être question de rouvrir cette discussion.
2 La Chambre entend donc uniquement recueillir les observations de chacune
3 des parties sur la forme et les conditions auxquelles doit être soumise une
4 requête écrite demandant l'admission de pièces qui n'ont pas été présentées
5 à l'audience.
6 Enfin, elle attire l'attention de l'Accusation sur le fait qu'il
7 incombe à l'Accusation d'opérer une sélection des pièces strictement
8 nécessaire à la détermination des questions en litige. Il ne saurait, par
9 conséquent, être question de verser au dossier toutes les pièces
10 mentionnées dans la liste 65 ter.
11 Donc, voilà l'invitation qui est faite aux uns et aux autres, de nous
12 faire savoir, avant le 6 novembre 2006, votre position. En deux mots,
13 l'objectif que la Chambre recherche est le suivant : il y a des pièces --
14 pour le moment, c'est l'Accusation, mais le moment venu, ce sera au peut-
15 être le cas et sûrement, même, le cas de la Défense. Il y a des pièces qui
16 ne peuvent pas être présentées au témoin parce que le témoin n'est pas là,
17 ne peut pas venir, et cetera, et cetera. Mais que dans l'intérêt de la
18 justice, il y a une nécessité que ces pièces soient introduites et qu'à ce
19 moment-là, par requête écrite, une partie pourra demander l'admission de
20 ces pièces nonobstant le fait qu'il n'y ait pas de témoin. Alors, pour
21 mieux préciser encore les choses, car tout ce qui doit être clair, vaut
22 mieux l'énoncer clairement, c'est le cas, pour le moment, des documents
23 concernant le HVO. L'Accusation n'a pu, alors que cela va faire presque un
24 quart du temps que le procès se déroule -- il n'y a eu aucun militaire du
25 HVO qui est venu et donc l'Accusation, pour présenter certaines pièces
26 émanant du HVO, a présenté des pièces à des témoins qui ne peuvent
27 reconnaître ce type de pièces. Cela pourrait être le cas pour la Défense si
28 la Défense voudra faire venir des pièces de l'ABiH et que la Défense n'a
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1 aucun témoin de l'ABiH à sa disposition. Donc, c'est un équilibre parfait
2 entre les parties et ce, dans l'intérêt de la justice.
3 Alors, vous réfléchissez et, le 6 novembre au plus tard, vous nous
4 faites connaître votre sentiment. Bien. Alors, évidemment, je vous invite à
5 relire avec soin le transcript parce que tout est précisé.
6 Monsieur Prlic.
7 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs
8 les Juges, concernant les questions qui ont été entendues lors des séances
9 à huis clos et des séances audience publique, je souhaitais peut-être
10 parler de cette question. Il s'agit d'une question de sécurité en Bosnie-
11 Herzégovine. On en a parlé dans le contexte des mesures de protection,
12 c'est-à-dire est-ce que l'on devrait accorder des mesures de protection aux
13 témoins qui ont demandé pour ces mesures de protection.
14 J'estime que ces questions n'ont pas été tout à fait abordées de
15 façon très claire. Je crois que la situation en Bosnie-Herzégovine n'est
16 pas telle qu'elle devrait susciter un sentiment d'insécurité. Dans les
17 dernières dix années, on a fait beaucoup d'efforts, des Tribunaux ont été
18 créés en Herceg-Bosna et en Bosnie-Herzégovine. On a également procédé aux
19 processus de remaniement de cadres, avec les Nations Unies, encore une
20 fois, toujours en collaboration avec l'Agence des Nations Unies et avec la
21 police internationale des eaux légères des Nations Unies, appelée IPTF, qui
22 était sur place. Aujourd'hui, en Bosnie-Herzégovine, un grand nombre
23 d'agences de sécurité et d'information sont sur place, ainsi que la police
24 pour l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine. On a également procédé à la
25 création du ministère de la Défense en Bosnie-Herzégovine. Donc, il n'y a
26 absolument aucune raison pour dire qu'il n'y a aucune institution qui
27 existe surplace pour assurer la sécurité.
28 En 2001, j'ai particulièrement étudié l'Agence Stewart [phon] de la
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1 Banque nationale concernant la Bosnie-Herzégovine et, à l'époque, la
2 question de la sécurité n'a jamais été vue comme un empêchement pour des
3 investissements intérieurs.
4 Donc, nous estimons que s'agissant des questions de sécurité générale
5 est tout à fait satisfaisante. Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas de
6 problèmes, qu'il n'y a pas eu d'actes terroristes, je ne veux pas dire non
7 plus que tous les réfugiés sont retournés dans leur pays, mais les
8 propriétés ont été retournées à toutes les personnes qui avaient été
9 réfugiées, aux personnes qui étaient donc réfugiées en Bosnie-Herzégovine.
10 On peut parler librement et selon les Reporteurs sans frontière, on peut --
11 ce pays est l'un parmi des plus de pays où on peut s'exprimer le plus
12 librement. La Bosnie-Herzégovine n'est pas le "Wild West" et même si on
13 n'en parle pas énormément, je crois que les médias ne sont peut-être pas
14 nécessairement, aujourd'hui, en train de couvrir les événements en Bosnie-
15 Herzégovine.
16 Mais lorsqu'on a parlé d'investissement, en Bosnie-Herzégovine, si la
17 Bosnie-Herzégovine n'a pas d'investissement étranger direct, elle ne peut
18 pas survivre de façon économique. Je crois que les questions de sécurité
19 générale doivent être laissées de côté et ne pas envoyer les messages
20 négatifs à ceux qui souhaiteraient venir en aide à la Bosnie-Herzégovine.
21 Je vous remercie.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, pour cette intervention qui porte sur la
23 question de la sécurité en Bosnie-Herzégovine à l'heure actuelle. Peut-être
24 que tout à l'heure, l'Accusation y répondra, parce que je crois, Monsieur
25 Scott, qu'il y a un témoin dont vous voulez demander des mesures de
26 protection.
27 Mme GILLETT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est moi qui
28 examinerai le témoin d'aujourd'hui. Effectivement, il a fait une demande de
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1 mesures de protection. Aimeriez-vous que --
2 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience à huis clos et on va faire baisser les
3 rideaux pour introduire le témoin.
4 [Audience à huis clos]
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26 [Audience publique]
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, pour les besoins de la procédure,
28 donnez-moi votre nom, prénom, date de naissance.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Muamer Trkic, je suis né le 22
2 août 1977, en Bosnie-Herzégovine.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous me l'aviez indiqué tout à l'heure, mais, pour
4 les besoins du transcript, quelle est votre profession actuelle ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis soudeur. C'est ma profession.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous témoigné devant un tribunal international
7 ou un tribunal national soit les faits qui se sont déroulés dans votre
8 pays, alors que vous étiez à l'époque âgé de 16 ans, ou c'est la première
9 fois que vous témoignez devant un tribunal ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je témoigne devant
11 un tribunal.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Autant que je sache, non, Monsieur le
14 Président. Je ne le crois pas.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, lisez le document que Mme
16 l'Huissière va vous présenter.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement de dire la vérité,
18 toute la vérité et rien que la vérité.
19 LE TÉMOIN : MUAMER TRKIC [Assermenté]
20 [Le témoin répond par l'interprète]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. S'il vous plaît, vous pouvez s'asseoir. Je
22 vais vous donner des informations, mais je suppose que M. le Procureur vous
23 les a déjà indiquées lorsqu'il vous a rencontré hier ou ce matin.
24 Vous allez devoir répondre à des questions qui vont vous être posées par
25 Mme Gillett qui va vous poser des questions et donc vous allez devoir
26 répondre aux questions. Quand vous allez répondre, vous verrez il y a un
27 écran devant vous vous allez voir des phrases en anglais s'inscrire. Alors,
28 ce n'est pas la peine d'être fixé tout le temps sur l'écran si vous ne
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1 connaissez pas l'anglais. En revanche, si vous maniez la langue anglaise,
2 vous pouvez vous y référer. Une fois que ceci sera terminé, l'Accusation
3 avait prévu une heure 30, mais peut-être qu'elle réduira. Les avocats des
4 accusés, qui sont nombreux mais, en réalité, il n'y en a qu'un par accusé
5 vous posera des questions dans ce qu'on appelle le contre-interrogatoire.
6 C'est pour vérifier la fiabilité de ce que vous avez dit, voire le cas
7 échéant, à vous poser des questions qui les intéressent particulièrement
8 compte tenu de la responsabilité alléguée dans l'acte d'accusation.
9 Les quatre Juges - d'habitude on est quatre, mais aujourd'hui, en
10 application de l'article 15 bis - nous sommes que trois. Les trois Juges
11 qui sont devant vous pourront à tout moment vous poser des questions. Bien.
12 En règle générale, nous posons des questions, mais si les parties posent
13 les questions auxquelles nous pensons, nous n'avons pas, à ce moment-là, à
14 vous poser des questions, mais il se pourrait que nous intervenions pour
15 préciser quelques points.
16 Si vous éprouvez une difficulté quelconque, n'hésitez pas à nous en
17 faire part, normalement, si tout se déroule bien votre audition doit se
18 terminer aujourd'hui, ce qui vous permettra de regagner votre pays au plus
19 tard demain. Voilà.
20 Alors, il nous reste d'ici la pause encore un certain temps.
21 Donc Madame Gillett, je vous laisse la parole.
22 Mme GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Interrogatoire principal par Mme Gillett :
24 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, j'espère que vous avez bien
25 compris ce qu'a dit le Président, vous allez donner votre témoignage en
26 audience publique. L'avez-vous bien compris ?
27 R. Oui.
28 Q. Monsieur le Témoin, si vous pouviez répondre à mes questions cela me
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1 serait utile. Où étiez-vous né ?
2 R. Je suis né dans la commune de Gornji Vakuf, dans le village de Zdrimci.
3 Q. Où avez-vous vécu la plupart de votre vie ?
4 R. J'ai passé la plupart de ma vie à Zdrimci.
5 Q. Pour vous donner une idée et donner une idée au tribunal de Zdrimci, je
6 voudrais vous demander à quelle distance Zdrimci se trouve de Gornji
7 Vakuf ?
8 R. A trois kilomètres. Il y a trois kilomètres depuis là où je vis et
9 depuis l'extrémité du village, il y a à peu près quatre kilomètres.
10 Q. Quel est le village le plus proche de Zdrimci ?
11 R. Le village le plus proche a pour nom Vrse.
12 Q. A quelle distance se trouve Vrse de Zdrimci ?
13 R. Je dirais un kilomètre, un kilomètre 500, peut-être.
14 Q. De ce que vous savez, le village de Zdrimci est-il le seul village qui
15 porte ce nom dans la commune de Gornji Vakuf ?
16 R. Autant que je sache, c'est effectivement le seul village qui porte ce
17 nom. Je n'en sais rien d'autre.
18 Q. Avant la guerre, pouvez-vous nous donner une idée de quelle était la
19 composition ethnique de la population du village de Zdrimci ?
20 R. Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris votre question et l'usage du
21 mot ethnique, pouvez-vous m'en dire plus ?
22 Q. Je parle de l'époque avant 1993, et à cette époque-là, quel groupe de
23 population vivait dans le village ?
24 R. Honnêtement, je ne comprends pas ce que vous me dites. Qu'est-ce que
25 c'est que ces groupes ?
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Nation, nationalité, je pense que "nation"
27 est la terminologie la plus adéquate.
28 Mme GILLETT : [interprétation] Merci.
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1 Q. Monsieur le Témoin, comprenez-vous mieux, c'est ma question, si je vous
2 pose la question quelles étaient les nationalités représentant le village ?
3 R. Je crois que l'on y ait trouvé des Musulmans dans les quartiers où
4 j'habitais, mais la majorité de la population était croate et, au début de
5 la guerre, en janvier, lorsque le conflit a commencé, les Croates sont
6 venus dans le village, le HVO.
7 Q. Oui, mais avant d'examiner les détails des événements pendant la
8 guerre, pouvez-vous nous donner une proportion ? Vous dites que les Croates
9 représentaient une majorité de la population; pouvez-vous donner un rapport
10 entre ces deux populations, croate et musulman ?
11 R. Je crois qu'il y avait à peu près deux fois et demie plus de Croates
12 que de Musulmans dans le village de Zdrimci.
13 Q. Est-ce que les Musulmans et les Croates habitaient tous dans les mêmes
14 quartiers, dans les mêmes endroits du village, ou est-ce qu'ils étaient
15 séparés ?
16 R. A l'entrée du village, on y trouve que des Croates. Sur la gauche, on
17 trouve quelques maisons musulmanes et beaucoup de maisons croates et puis,
18 100 mètres plus loin, on retrouve quelques Musulmans et plus loin encore,
19 seulement des Croates.
20 Q. Ces différentes zones que vous venez de décrire font-elles toutes
21 partie du village de Zdrimci ou y a-t-il d'autres noms par lesquels on les
22 connaît ?
23 R. Tout ceci compose le village de Zdrimci, même s'il y a évidemment des
24 noms pour chaque partie du village.
25 Q. Pourriez-vous nous dire justement quels étaient ces noms ?
26 R. A l'entrée du village, il y a un hameau, un groupe de maisons peuplé de
27 Croates qu'on appelle Perici. A la gauche de l'entrée, on trouve Polici où
28 il y a peut-être une dizaine de maisons musulmanes et quelques maisons
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1 croates et puis au-delà de Perici, on trouve Trkici. C'est dans cette
2 partie du village que j'habite, là où il y a plus de Musulmans et puis, au-
3 delà de Trkici, il y a une zone peuplée principalement peuplée de Croates
4 que l'on appelle Sekerija.
5 Q. Avant la guerre, quelle était la relation entre les Musulmans et les
6 Croates du village ?
7 R. Pour autant que je puisse dire, il y avait des moments où les relations
8 étaient excellentes, qu'elles n'auraient pas pu être meilleures. C'était
9 cela, l'état des relations.
10 Q. Est-ce que l'état de ces relations a changé à un moment donné ?
11 R. Oui. Quelques jours, quatre ou cinq, peut-être, avant le changement de
12 ces relations, je suis allée acheter quelque chose dans une boutique de
13 Perici. Je voulais aller acheter à boire, mais on m'a dit qu'il n'y avait
14 pas à boire pour les ballasses, m'a-t-on dit.
15 Q. Vous avez dit quelques jours avant, mais quelques jours avant quelle
16 date ? Est-ce que vous pouvez nous donner l'année, le mois, la date, si
17 possible ?
18 R. Comme je vous l'ai dit, c'était avant le 18 janvier, quatre ou cinq
19 jours avant le 18 janvier, avant les premiers tirs.
20 Q. Vous nous dites que les tirs ont commencé, mais quel jour ces premiers
21 tirs ont-ils eu lieu ?
22 R. Le 18 janvier, à six heures du matin.
23 Q. Où vous trouviez-vous lorsque les tirs ont commencé ce 18 janvier ?
24 R. J'étais chez Munib Trkic, ils avaient un sous-sol dans lequel se
25 trouvaient les femmes, au rez-de-chaussée, il y avait une boutique où,
26 justement, je me trouvais.
27 Q. Pourquoi vous trouviez-vous chez Munib Trkic ?
28 R. Mon père et moi-même et cinq ou six hommes du voisinage s'y trouvaient
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1 également.
2 Q. Y avait-il une raison pour laquelle vous vous trouviez chez Munib
3 Trkic ?
4 R. La raison était que l'on voyait les soldats. Il y a d'ailleurs un
5 certain nombre de collines autour du village et on y voyait des soldats.
6 J'imagine que nous nous étions retrouvés parce que nous nous attentions à
7 un événement et que c'est pour cela que nous nous étions retrouvés tous
8 ensemble.
9 Q. Vous évoquez des soldats. Pourriez-vous nous dire si vous vous souvenez
10 de ce que portaient ces hommes ?
11 R. Oui, je m'en souviens. Ils étaient en uniformes de camouflage.
12 Q. Y avait-il des insignes, des badges ou portait sur ces uniformes.
13 R. Je ne les ai pas remarqués immédiatement, non. Justement parce qu'ils
14 étaient relativement éloignés. Lorsque, ultérieurement, j'ai été fait
15 prisonnier, je les ai remarqués, oui.
16 Q. Avant d'en arriver au moment où vous avez été fait prisonniers, pouvez-
17 vous nous dire ce qui s'est passé le 18 janvier ? Vous nous avez dit qu'un
18 certain nombre de coups de feu avait été entendu dès 6 heures du matin.
19 Pouvez-vous nous dire d'où venaient ces tirs ?
20 R. Il y a une petite colline, à côté du village, qu'on appelle par le nom
21 de Baba. Si je comprends bien, elle se trouve au sud-ouest du village.
22 C'est de là que les tirs étaient organisés.
23 Q. Etiez-vous en mesure de dire ce qui était tiré ou ce qui faisait ces
24 bruits ?
25 R. Je ne savais pas quel genre d'armes était utilisé. C'était mineur, mais
26 j'ai entendu les adultes autour de moi dire que c'était des mortiers de 120
27 et des canons antiaériens.
28 Q. Saviez-vous ou pouviez-vous voir quelle était la cible ?
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1 R. J'ai vu que les tirs tombaient sur les maisons et sur le village. C'est
2 là que les obus tombaient.
3 Q. Avez-vous des dégâts causés par ces tirs ?
4 R. Oui. Les obus tombaient et on touchait des maisons et certaines maisons
5 se sont d'ailleurs effondrées. Les obus tombaient, la plupart du temps, sur
6 les maisons.
7 Q. Combien de temps ces tirs ont-ils duré ?
8 R. Pour autant que je me souvienne, cela a duré à peu près deux heures.
9 Q. Où vous trouviez-vous à ce moment-là, pendant toute cette période ?
10 R. J'étais là, chez Munib Trkic.
11 Q. Mais où, dans la maison de Munib Trkic, vous trouviez-vous ?
12 R. J'étais au rez-de-chaussée, qui servait de boutique.
13 Q. Vous souvenez-vous du nombre de personnes qui étaient avec vous,
14 justement, au rez-de-chaussée ?
15 R. Il y avait six ou huit hommes, pour autant que je m'en souvienne.
16 Q. Savez-vous si des tirs de réaction ont été tirés ?
17 R. Personne n'a tiré quoi que ce soit pour répondre à ces tirs, puisqu'il
18 n'y avait que quelques fusils dans le village et pendant que les tirs
19 avaient lieu, des villageois qui avaient les maisons les plus près des
20 maisons croates, à une cinquantaine de mètres, ont réagi, puisque
21 effectivement, on a entendu des tirs de machines, de fusils automatiques,
22 depuis certaines maisons croates et que, également, un certain nombre
23 d'étables ont été incendiés. Il a donc fallu relâcher le bétail.
24 Q. Le bétail a-t-il été libéré effectivement ?
25 R. Oui. Il y avait trois étables qui avaient été incendiés et on a réussi
26 à en faire sortir tous les animaux.
27 Q. Vous avez dit que les tirs ont duré pendant deux heures, environ. Que
28 s'est-il passé ensuite ?
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1 R. Après cela, quelqu'un a annoncé, par un haut-parleur, que nous devions
2 sortir du sous-sol, que nous devions nous rendre.
3 Q. Est-ce que vous-même ou d'autres dans le sous-sol, en fait, est-ce
4 qu'ils ont demandé, est-ce que vous vous êtes rendus ?
5 R. Non. Nous ne sommes pas sortis immédiatement. Nous avions peur qu'ils
6 ne recommencent à tirer. Par conséquent, nous ne sommes pas sortis
7 immédiatement, mais on nous a de nouveau répété, par le biais d'un haut-
8 parleur, que nous devions sortir, que nous devions nous rendre et que, si
9 nous ne nous rendions pas, ils allaient recommencer à tirer.
10 Q. Je vous prie de m'excuser, Monsieur le Témoin. Les interprètes vous
11 demandent de parler un peu plus fort ou de vous approcher des microphones
12 pour qu'ils entendent mieux ce que vous êtes en train de nous dire.
13 R. Très bien.
14 Q. Vous étiez en train de nous dire qu'on vous a demandé, par le biais de
15 haut-parleurs, de vous rendre. Qu'avez-vous fait ensuite ?
16 R. Personne n'est sorti, parce que, comme je vous l'ai dit, nous avions
17 peur. Nous ne savions pas et nous pensions qu'ils allaient recommencer à
18 tirer des obus, donc personne n'est sorti.
19 Q. Alors qu'ont-il fait, étant donné que vous aviez refusé de vous
20 rendre ?
21 R. Le pilonnage a continué de la même manière que cela avait été le cas
22 depuis 6 heures du matin et s'est poursuivi.
23 Q. Est-ce qu'à un moment donné, ce jour-là, vous avez quitté la maison ?
24 R. Non. Personne n'est sorti. Personne n'a quitté la maison. Après une
25 heure environ, les tirs se sont arrêtés et nous avons vu qu'une dizaine de
26 soldats avançaient, qu'ils emmenaient devant eux un homme, que nous -- je
27 connaissais. Donc, ils se sont approchés. Ils se sont approchés derrière
28 une maison et ils ont dit que si personne ne sortait de la cave, du sous-
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1 sol, ils allaient commencer à tirer et utiliser donc un Zolja pour tirer
2 sur la maison.
3 Q. Vous nous dites que vous connaissiez ce Musulman, cet homme musulman
4 qui était escorté par ces dix hommes. Vous souvenez-vous de son nom ?
5 R. Son nom de famille est Catic et je crois -- enfin, quant à son prénom,
6 il y en a un qui s'appelle Kemo, l'autre Hilmo. Il y a deux frères, mais
7 son nom de famille est Catic, mais je ne me souviens plus si c'est Kemo ou
8 Hilmo car il y avait deux frères.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire qu'ils ont menacé d'utiliser un
10 Zolja. C'est quoi un Zolja ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est là une arme. Je pense que c'était un
12 obus, un lance-roquettes portable, pour autant que j'aie pu le savoir, mais
13 je ne connaissais pas bien les armes à l'époque, j'étais jeune.
14 Mme GILLETT : [interprétation]
15 Q. Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que cette personne du nom
16 de Catic était escortée par dix soldats. A quelle armée appartenaient ces
17 soldats ?
18 R. C'était des soldats du HVO.
19 Q. Vous souvenez-vous de ce que portaient ces soldats, des vêtements
20 qu'ils portaient ?
21 R. Ils portaient un uniforme de camouflage et, sur l'épaule, ils portaient
22 un écusson où était inscrit "HVO."
23 Q. Est-ce que ce groupe est entré dans la maison où vous vous trouviez ?
24 R. Oui. On a commencé à sortir de la cave et nous sommes tous sortis de ce
25 sous-sol pour nous rendre dans la rue qui se trouvait à côté de la maison.
26 Q. Combien de personnes au total se trouvaient avec vous ? Vous avez dit
27 précédemment qu'il y avait six ou huit hommes avec vous au rez-de-chaussée,
28 mais combien d'autres personnes y avait-il ?
Page 9162
1 R. Pour autant que je puisse m'en souvenir, il devait y avoir environ dix
2 soldats du HVO et, à ce moment-là, je crois que d'autres soldats du HVO
3 sont arrivés également.
4 Q. Combien de personnes sont sorties de la maison dans laquelle vous vous
5 trouviez; vous en souvenez-vous ?
6 R. Je crois que six hommes ont dû sortir en même temps que moi et il y
7 avait encore une dizaine de femmes qui sont sorties en même temps.
8 Q. Une fois que vous avez tous quitté la maison, que vous est-il arrivé ?
9 R. On nous a dit qu'il ne fallait pas tenter de fuir parce qu'ils allaient
10 nous tuer. Ils nous ont dit qu'il fallait que nous marchions devant eux et
11 qu'il fallait également que les autres qui se trouvaient au sous-sol
12 sortent.
13 Q. Est-ce qu'ils ont réussi --
14 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, à la question de Mme la Procureur,
15 s'il y avait des tirs de réaction par rapport aux obus qui tombaient sur la
16 maison, vous aviez dit que de votre abri, il n'y avait pas de réaction,
17 mais, certainement, de quelques maisons croates, si j'ai bien compris.
18 Maintenant, nous constatons que ce sont des soldats du HVO qui sont entrés
19 dans le village pour vous faire sortir. Ma question : les personnes qui
20 étaient dans la maison d'où partaient les tirs de réaction, ces personnes
21 étaient des personnes musulmanes ou des personnes croates et étaient-elles
22 sorties aussi avec vous, en présence des soldats du HVO ? Les personnes qui
23 avaient répondu aux tirs du HVO, sont-elles sorties aussi, avec vous, dans
24 la cour ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous sommes tous sortis et tous ensemble,
26 avec les femmes, nous nous sommes retrouvés au même endroit. Nous étions
27 tous au même endroit.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, la question qui vient d'être posée, mais
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1 vous ne répondez pas précisément parce que, pour nous, c'est important.
2 Est-ce que, dans votre village, il y avait des membres de la Défense
3 territoriale ou de l'ABiH qui vous protégeaient et qui étaient armés face
4 au HVO ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait là uniquement des gens du
6 voisinage, il y avait mon père, mes cousins, enfin, des gens comme cela.
7 Ils avaient bien quelques fusils et ils ont ripostés là où se trouvaient
8 les maisons à proximité, là où on a mis le feu à ces étables. Ils se
9 trouvaient au même endroit que moi, et quand ils sont arrivés pour nous
10 sortir de la cave, quand nous sommes sortis, tous, ils se sont retrouvés au
11 même endroit, ils ont été désarmés et eux aussi, ils sont sortis sur cette
12 route.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est une question qu'on aurait dû vous poser dès le
14 départ.
15 Donc, vous nous dites que des membres de votre village avaient des
16 fusils et ils ont ripostés et ils ont tiré sur le HVO. Quand le HVO est
17 rentré, le HVO les a désarmés. C'est bien ce que vous nous dites ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est exact.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Votre père avait-il, lui, un fusil.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il avait un fusil, un M-48. Voilà le
21 fusil qu'il avait.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, le M-48 qu'il avait, il l'avait acheté ou on
23 lui avait donné ? D'où venait ce fusil qu'il avait ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il l'a acheté avec son propre argent.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais pourquoi votre papa achète un fusil ? C'était
26 pour tirer sur des lapins, sur des oiseaux ? Pourquoi il avait un M-48 ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit au début, on commençait à
28 sentir -- depuis quelques jours, on commençait à sentir l'armée. Donc, il a
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1 acheté ce fusil et d'autres dans le voisinage ont aussi acheté des fusils.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait combien de fusils en tout, d'après-vous,
3 si vous le savez ? Si vous ne le savez pas, dites : "Je ne sais pas."
4 Grosso modo, il y avait combien de fusils ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Environ trois à quatre fusils, là où je
6 me trouvais. Ailleurs, vraiment, je ne sais pas.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous avez l'impression qu'il y avait un
8 chef. Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui commandait ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non. Non, non, personne ne
10 commandait. C'était des gens ordinaires.
11 Mme GILLETT : [interprétation]
12 Q. Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que les gens étaient rassemblés
13 et sortis des maisons. Est-ce qu'après cela, vous êtes tous restés ensemble
14 dans le même groupe ?
15 R. Là où nous nous sommes retrouvés, nous sommes restés en groupe. Nous
16 nous sommes rendus jusqu'au sous-sol suivant, on a demandé aux gens de
17 sortir de ce sous-sol-là et même chose au deuxième, troisième, quatrième
18 endroit. Les gens sont sortis des caves à chaque et, ensuite, on nous a
19 rassemblés, on nous a tous rassemblés, et c'est là qu'on nous a répartis
20 entre les hommes et les femmes.
21 Q. Vous nous avez expliqué cela, vous nous avez dit qu'il y avait quatre
22 caves, si je ne m'abuse. Donc, cela s'est produit. Vous souvenez-vous
23 combien il y avait de gens dans ce groupe de personnes ?
24 R. Je sais qu'il y avait environ 35 ou peut-être même 40, je l'ignore,
25 mais, en tout cas, 35 à 40 hommes, quant aux femmes, je ne sais plus
26 combien il y en avait.
27 Q. Pouvez-vous nous dire si le nombre de femmes étaient supérieures aux
28 hommes ?
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1 R. Oui, il y avait plus de femmes que d'hommes.
2 Q. Vous nous avez dit que les hommes ont été séparés, est-ce que vous vous
3 trouviez dans le groupe d'hommes qui a été séparé des femmes ?
4 R. Oui. Oui, oui, j'étais dans le groupe des hommes et on nous a séparé.
5 Q. Que vous est-il arrivé à vous et aux autres hommes à ce moment-là ?
6 R. On nous a emmené, enfin, on nous a dit de partir tous ensemble et des
7 soldats du HVO se trouvaient devant et derrière nous et ils nous ont dit
8 d'aller vers les Sekerija et nous sommes arrivés là-bas. Il y avait un
9 garage. On nous a fait entrer dans ce garage.
10 Q. Vous avez mentionné Sekerija. Où se trouvait Sekerija ?
11 R. C'est après les maisons musulmanes où je vivais, moi, 300 mètres plus
12 loin environ, se trouve une maison où résidaient des Croates dont le nom de
13 famille était Sekerija.
14 Q. Ce garage où vous êtes arrivé, vous souvenez-vous de la taille de ce
15 garage ?
16 R. D'après mes souvenirs, il faisait quatre mètres de large et 12 mètres
17 de long, environ. Je ne sais pas exactement.
18 Q. De quoi était fait le sol de ce garage ? Quel était le revêtement ?
19 R. Il n'y avait rien, il y avait qu'un sol en béton, le plafond aussi
20 était en béton, il n'y avait rien d'autre. Il y avait quelques planches
21 entreposées là, donc nous avons mis des planches par terre, et nous nous
22 sommes assis sur ces planches.
23 Q. Vous nous avez dit que vous y avez été enfermé. Comment avez-vous été
24 enfermé dans ce garage ?
25 R. Ils ont fermé la porte à clé, normalement, ils ont tourné une clé dans
26 la serrure et ensuite ils ont fermé à l'aide d'une chaîne.
27 Q. Lorsque vous dites "eux", qui étaient ces personnes et combien étaient-
28 ils ?
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1 R. Je ne sais plus exactement combien ils étaient mais c'étaient tous des
2 soldats du HVO. Je ne les connaissais pas. Je ne les avais jamais vus
3 auparavant. Ce n'était pas des visages connus pour moi.
4 Q. Après qu'on a fermé la porte au moyen de cette chaîne, est-ce que des
5 membres du HVO sont restés au garage ?
6 R. Deux gardes sont restés. Il y en a un que je connaissais qui s'appelait
7 Luka, l'autre je le connaissais également, mais je ne sais pas comment il
8 s'appelle.
9 Q. Parmi ceux d'entre vous qui étaient détenus au garage, quel âge --
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un instant, Mme Gillett. Il vient de dire
11 qu'il connaissait un des deux gardes, qui s'appelait Luka. J'estime que
12 cela devait appeler une question de votre part. Luka c'était un soldat du
13 HVO que vous connaissiez d'où ? Il habitait ce village ? Comment vous le
14 connaissiez ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le connais parce que quand cette armée a
16 été démantelée, pendant que nous étions enfermés, j'ai entendu des rumeurs
17 au moment où l'armée a été dispersée et quelqu'un a dit que c'était Luka,
18 il était du village. L'autre je le connaissais mais je ne sais pas comment
19 il s'appelait.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce fameux Luka, vous l'aviez vu dans le village
21 avant ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, lui aussi il a passé toute sa vie à
23 Zdrimci.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand il vous gardait, il était en tenue de
25 camouflage, il avait une arme et il avait un écusson ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il ne portait pas d'uniforme. Il était un
27 peu plus âgé mais il portait un fusil. Je ne sais pas lequel. Mais il ne
28 portait pas l'uniforme.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Il était habillé en civil ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il portait des vêtements civils, mais il
3 portait un fusil.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : D'après vous, alors, qu'est-ce qu'il faisait avec le
5 HVO ? S'il était habillé en civil, qu'est-ce qu'il faisait avec le HVO ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je ne sais pas. J'imagine qu'on lui
7 avait demandé de nous garder.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : -- alors, non, parce que, nous les Juges, nous
9 essayons de savoir si M. Luka était membre du HVO. Vous dites : "Non, il
10 était en civil," et vous venez de dire que peut-être le HVO lui avait
11 demandé de vous garder. Alors, est-ce à dire que le HVO avait demandé à un
12 Croate du village de vous garder ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement, enfin, il ne portait pas
14 d'uniforme ou d'insigne ou d'écusson indiquant qu'il faisait partie du HVO.
15 Mais peut-être qu'il avait reçu l'ordre de monter la garde, quelqu'un lui a
16 probablement donné l'ordre de monter la garde.
17 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, parmi les soldats du HVO qui
18 étaient dans le village, est-ce que tous étaient en uniforme de camouflage
19 avec des écussons, ou il y avait les soldats qui étaient membres de ce
20 groupe qui obéissaient aux ordres, qui travaillaient avec les autres mais
21 qui n'étaient pas en uniforme, comme le cas de Luka ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart portait l'uniforme, mais à part
23 Luka qui montait la garde chez nous, il n'en portait pas mais il était un
24 plus âgé, et il y a encore un autre homme âgé qui était avec lui. Eux ne
25 portaient pas l'uniforme. Eux portaient des vêtements civils.
26 M. LE JUGE MINDUA : Ils étaient membres du groupe et ils travaillaient avec
27 les autres soldats du HVO sans problème.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez, Madame Gillett.
2 Mme GILLETT : [interprétation]
3 Q. Monsieur le Témoin, au sujet des hommes qui se trouvaient dans le
4 garage avec vous, étaient-ils -- s'agissait-il de civils ou de militaires ?
5 R. La plupart était des soldats. Il y avait peut-être dix hommes de plus
6 de 60 ans et j'étais le plus jeune probablement.
7 Q. Vous nous dites que la plupart était des soldats, est-ce qu'ils
8 portaient un uniforme ?
9 R. Non, personne ne portait d'uniforme parce que j'imagine qu'ils auraient
10 dû l'acheter et ils ne devaient pas avoir les moyens, donc ils portaient
11 des vêtements civils.
12 Q. A quelle armée appartenaient-ils ?
13 R. Je ne sais pas à quelle armée ils appartenaient. Vraiment, je ne sais
14 pas. J'imagine qu'ils appartenaient à l'ABiH, mais, vraiment, je ne saurais
15 pas vous dire.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire que la plupart avaient au-dessus
17 de 60 ans. Vous, vous étiez le plus jeune. Mais alors, ceux qui avaient
18 entre 17 ans et 60 ans, où est-ce qu'ils étaient, eux ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils se trouvaient, au même endroit, là où
20 j'étais détenu, dans le même garage. Ils se trouvaient là.
21 Mme GILLETT : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous préciser une chose ? Combien
23 d'hommes avaient plus de 60 ans, sur les hommes qui se trouvaient dans le
24 garage avec vous ?
25 R. Je crois qu'il y avait à peine dix hommes de plus de 60 ans, mais je ne
26 m'en souviens pas. Mais probablement même pas dix.
27 Q. Au sujet de vos conditions de détention dans le garage, vous avez dit
28 que vous étiez enfermé dans ce garage, alors que se passait-il si vous
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1 deviez aller aux toilettes ?
2 R. Quand nous devions aller aux toilettes et ils ne voulaient pas ouvrir,
3 nous avions un seau, dans un coin, et ils nous ont dit de l'utiliser comme
4 toilette.
5 Q. Est-ce qu'on vous a donné de la nourriture sous une forme quelconque ?
6 R. Quand donc on nous a enfermé, à la nuit tombée, on nous a apporté du
7 lait et plusieurs kilos de pain et quelques boîtes de conserve. Je ne sais
8 plus exactement.
9 Q. Vous nous avez dit que c'était à la nuit tombée. Est-ce que vous avez
10 passé la nuit dans ce garage ?
11 R. Oui. Oui. Nous avons passé la nuit dans ce garage.
12 Q. Que s'est-il passé le lendemain ?
13 R. Rien. Nous sommes restés enfermé là-bas et personne n'est passé nous
14 voir, personne n'est venu.
15 Q. Combien de temps avez-vous passé dans ce garage, au total ?
16 R. Au total, j'y ai passé environ 11 jours. Quant aux autres, je pense
17 qu'ils y ont passé plus de temps, mais je ne sais pas exactement combien.
18 Q. Avez-vous passé la totalité de cette période de 11 jours dans ce
19 garage, ou vous est-il arrivé de quitter ce garage ?
20 R. Après deux jours environ, ils nous ont dit que nous devions nous rendre
21 dans le village voisin, à Vrse, pour dire ce qui nous était arrivé, pour
22 que les autres se rendent également, pour qu'ils voient ce qui allait se
23 passer, sinon, c'est ainsi que je suis sorti et je suis passé voir ma mère.
24 Elle ne m'a pas autorisé à Vrse et après, je suis rentré au garage.
25 Q. Vous nous dites qu'ils vous avaient demandé de vous rendre dans le
26 village de Vrse. Qui vous a dit cela ?
27 R. Ecoutez, vraiment, c'est quelqu'un que je ne connais pas. Vraiment, je
28 ne sais pas qui c'était.
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1 Q. S'agissait-il d'un civil ou d'un militaire ?
2 R. Un militaire.
3 Q. Il appartenait à quelle armée ?
4 R. L'armée du HVO.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause parce que c'est
6 4 heures moins quart. Nous reprendrons dans 20 minutes, à 4 heures 05.
7 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
8 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Gillett, vous avez la parole.
10 Mme GILLETT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur, juste avant la pause, vous étiez en train de nous décrire
12 comment on vous a demandé de vous rendre à Vrse et vous aviez dit que
13 c'était un membre du HVO, un soldat du HVO, qui vous a demandé de vous
14 rendre à Vrse. Est-ce que c'était seulement vous à qui on a demandé d'aller
15 à Vrse ou y avait-il d'autres personnes à qui on a demandé la même chose ?
16 R. Oui. Il y avait mon oncle avec moi, Mirsad. Il s'appelait Mirsad. Il
17 était plus âgé que moi, il avait deux ans de plus que moi. C'est ainsi que
18 pour moi et lui -- à moi et à lui, plutôt, on a dit d'aller à Vrse.
19 Q. Vous avez dit que vous êtes allé voir votre mère et qu'elle s'opposait
20 à ce que vous alliez à Vrse. Combien de temps êtes-vous restés avec votre
21 mère ?
22 R. J'ai passé la nuit là-bas avec ma mère et, le lendemain, nous sommes
23 retournés dans le garage.
24 Q. Où était votre mère ?
25 R. Elle était dans les maisons. Tout le monde était éparpillé dans
26 diverses maisons. Ils ne leur ont pas demandé de partir, mais ils étaient
27 placés dans diverses maisons et l'armée patrouillait pour assurer qu'ils
28 restent dans ces maisons.
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1 Q. Encore une fois, les soldats que vous avez mentionnés, vous avez dit
2 qu'il y avait des soldats qui patrouillaient partout, qui étaient ces
3 soldats ?
4 R. C'était les soldats du HVO.
5 Q. Vous souvenez-vous du nombre de soldats qu'il y avait, qui
6 patrouillaient ?
7 R. J'ignore le nombre exact, mais c'était des groupes, peut-être trois
8 hommes dans un groupe et ce sont eux qui patrouillaient comme cela. Je ne
9 sais pas quel était le nombre exact.
10 Q. Vous nous avez dit avoir passé la nuit avec votre mère et ensuite,
11 après la pause, vous nous avez dit que vous étiez allé dans le garage, que
12 vous êtes retourné dans le garage. Pourtant, lorsque vous êtes retourné
13 dans le garage, est-ce que l'on vous a posé des questions ? Est-ce que les
14 gardes du garage vous ont posé des questions ?
15 R. Non, il y avait d'autres personnes là, ils ne savaient pas.
16 Probablement qu'il y a eu un malentendu ou qu'ils s'étaient mal mis
17 d'accord entre eux, les gardiens entre eux, mais en tout cas, nous avons
18 été enfermés de nouveau puisque nous étions jeunes et ils ne nous ont rien
19 demandé.
20 Q. Vous dites que c'était d'autres personnes, est-ce que vous savez qui
21 étaient ces personnes-là ?
22 R. Non, je ne connaissais pas ces personnes.
23 Q. Combien il y avait d'hommes ?
24 R. Il y en avait deux.
25 Q. Pendant les 11 jours que vous avez passés dans le garage, vous est-il
26 arrivé de sortir du garage à une autre occasion ?
27 R. Oui, deux jours après, si je me souviens bien, deux ou trois jours
28 s'étaient écoulés et, ensuite, les soldats du HVO se sont présentés à la
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1 porte et ont demandé qui se porteraient volontaires pour enterrer deux
2 corps. L'un des corps se trouvait en plein milieu du village, c'était le
3 corps de Trkic, Ihdija, et l'autre corps était dans une maison -- se
4 trouvait dans une maison et cette personne s'appelait Catic, Ahmo.
5 Q. Vous dites que les soldats du HVO se sont présentés à la porte et ont
6 demandé s'il y avait des volontaires. Qui d'autre s'est porté volontaire ?
7 R. Moi-même ainsi que l'un des hommes qui s'appelait Catic. Je crois qu'en
8 réalité, son prénom était Kemal. Il y avait un autre homme, mais je ne me
9 souviens pas de son nom.
10 Q. Vous nous avez donné une description approximative de l'endroit où ces
11 deux corps se trouvaient dans le village. Est-ce que vous les avez vus de
12 vos propres yeux ?
13 R. Oui, car nous étions allés chercher d'abord le premier corps de Trkic,
14 Ihdija qui se trouvait en plein milieu du village, tout près de la route,
15 et nous l'avons placé à bord d'un brouette pour l'emmener à Brijeg et,
16 ensuite, nous sommes allés chercher le deuxième corps. Nous sommes allés
17 dans la maison Catic Ahmo, nous avons pris le deuxième corps et nous avons
18 transporté ce deuxième corps là. Nous les avons emmenés au cimetière à bord
19 d'une brouette.
20 Q. Parlons d'abord du premier corps. Le corps de Trkic, Ihdija. Dans quel
21 était se trouvait ce corps ?
22 R. Il n'y avait qu'une balle qui l'avait atteint. Je n'ai pas aperçu s'il
23 y avait d'autres traces sur son corps, mais j'avais vu qu'il avait été
24 atteint au front avec une balle.
25 Q. Qu'en est-il de l'autre corps, le corps d'Ahmo Catic ? Dans quel était
26 se trouvait ce corps-là lorsque vous l'avez trouvé ?
27 R. Nous avons trouvé Ahmo Catic sur son lit. C'était un homme assez âgé,
28 il devait faire environ 70 ans et il avait sur lui sept à huit -- il était
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1 atteint par sept ou huit balles sur le thorax et au ventre, aussi.
2 Q. Est-ce que vous savez de quelle façon ces deux hommes sont morts ?
3 R. J'avais entendu les gens parler lorsque l'on enterrait Ahmo Catic.
4 Puisque nous étions gardés, il y avait des soldats qui montaient la garde,
5 les soldats du HVO, pendant que nous creusions les tombes et j'ai entendu
6 dire de ces derniers qu'Ahmo Catic avait été tué lorsqu'ils sont entrés
7 dans la maison, ils ont été surpris. Il y avait un homme qui a toussé et
8 ils ont tiré par la porte et c'est ainsi qu'il a trouvé la mort.
9 Q. Lorsque vous aviez terminé de creuser les tombes, où êtes-vous allés ?
10 R. Nous avons été emmenés de nouveau dans le garage, là où il y avait
11 également d'autre personnes détenues.
12 Q. Après votre retour au garage, est-ce qu'il y a eu un autre incident,
13 une autre raison où est-ce que vous avez quitté le garage une deuxième
14 fois ?
15 R. Oui, on m'a demandé -- comme je vous dis, j'étais le plus jeune, et on
16 m'a demandé d'amener un mouton du village et je suis sorti du garage pour
17 chercher le mouton.
18 Q. Où êtes-vous allé lorsque vous avez quitté le garage, à ce moment-là ?
19 R. Je suis allé chercher un mouton et lorsque je suis passé par le
20 village, là où les Musulmans se trouvaient, il y avait des civils, j'ai vu
21 un rassemblement de femmes qui étaient debout, en face du mekteb et j'ai
22 entendu un soldat du HVO leur dire : "Répétez après moi." Il faisait le
23 signe de la croix et il faisait une prière et il demandait à tout le monde
24 de répéter après lui. Il disait que ceux qui ne voulaient pas répéter la
25 prière, qu'ils allaient les tuer.
26 Q. Est-ce que vous avez entendu ce qu'il leur demandait de répéter après
27 lui ?
28 R. Oui. Il leur montrait comment se signer et je ne me souviens pas ce
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1 qu'il avait dit exactement, comment faire la prière, je ne sais pas comment
2 il leur a dit de prier, mais il y avait aussi un autre groupe qui était
3 juste à côté et ils insultaient Allah et tout ce qui est musulman. Donc,
4 ils injuriaient et ils avaient dit qu'ils allaient incendier le mekteb qui
5 se trouvait devant eux.
6 Q. Donc, cet autre groupe qui était là, en train d'injurier ces personnes,
7 de qui s'agit-il ?
8 R. C'était des soldats du HVO, aussi.
9 Q. Vous avez dit qu'ils menaçaient d'incendier le mekteb. Dans quelle
10 condition était -- se trouvait le mekteb en question ?
11 R. Le mekteb était dans un bon état. C'était une construction qui datait
12 de quelques années. Elle était atteinte de quelques balles sur la façade,
13 mais le mekteb était dans un bon état.
14 Q. Est-ce que vous avez revu le mekteb, ce même mekteb, après ce jour-là ?
15 R. Oui. Je suis resté chez ma mère encore un peu et j'ai vu de nouveau,
16 lorsque le mekteb avait été incendié. Je n'ai pas vu les personnes en train
17 d'y mettre feu, mais j'ai vu simplement, deux ou trois jours plus tard, que
18 le mekteb était incendié. Un jour ou deux plus tard, j'ai vu que le mekteb
19 était incendié.
20 Q. Est-ce que vous savez qui était responsable de cela, qui était à
21 l'origine de cet incendie ?
22 R. Je crois que c'était probablement les soldats du HVO puisqu'ils avaient
23 dit qu'ils allaient l'incendier. Je n'ai pas vu qui l'a incendié, mais
24 c'était probablement eux.
25 Q. Vous êtes sorti du garage une troisième fois, donc. Est-ce que plus
26 tard, après avoir trouvé le mouton, est-ce que vous êtes retourné dans le
27 garage ?
28 R. Non, je ne suis plus retourné dans le garage. J'ai passé tout mon temps
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1 avec ma mère et les soldats du HVO m'avaient aperçu, mais j'étais jeune,
2 ils ne m'ont pas demandé de retourner dans le garage.
3 Q. Où se trouvait votre mère, à ce moment-là ?
4 R. Elle était dans la maison qui se trouvait à côté de la mienne. C'était
5 la maison du voisin, Husein Trkic, et c'était la maison qui était voisine
6 de la mienne. Donc, c'est juste la maison à côté de la mienne. Elle se
7 trouvait là, il y avait deux ou trois autres femmes dans la même maison et
8 les autres femmes s'étaient également groupées de la même façon. Donc, dans
9 chaque maison, il y avait deux à trois femmes.
10 Q. Je souhaiterais maintenant revenir à votre séjour dans le garage. Vous
11 nous avez dit avoir passé 11 jours. Pourriez-vous nous dire de quelle façon
12 est-ce que vous avez été traité lorsque vous étiez dans le garage ? Comment
13 est-ce qu'on s'est comporté avec vous ?
14 R. On s'est comporté avec moi très correctement. Pour ce qui est des
15 autres, moins. Par exemple, Salko Brica, lui, on le passait à tabac de
16 façon régulière. Chaque fois qu'ils lui posaient quelque chose, il
17 n'arrivait pas à bien prononcer les mots et chaque fois qu'ils lui posaient
18 une question, comme il n'arrivait pas à répondre comme il faut et à bien
19 prononcer les mots, c'est lui qui avait le plus de -- qui recevait le plus
20 de coups.
21 Q. Est-ce que vous savez qui était l'auteur de ces passages à tabac, qui
22 le frappait ?
23 R. Il y avait également Marko Vukadin qui venait de l'extérieur. C'était
24 un habitant du village voisin. Je le connaissais -- enfin, je le
25 connaissais. C'était le seul d'ailleurs que je connaissais. Les autres, je
26 ne les connaissais pas.
27 Q. Est-ce que Marko était dans l'armée ?
28 R. Oui. Il portait également un uniforme de camouflage et il était membre
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1 du HVO.
2 Q. Autre Salko Brica que vous avez évoqué il y a quelques instants, est-ce
3 que vous savez si d'autres personnes avaient été passées à tabac dans le
4 garage ?
5 R. Oui. Ils ont également passé à tabac Vahid Sakic et, donc, ils l'ont
6 passé à tabac, mais pas autant que Salko Brica. Ils faisaient aussi sortir
7 Memic Dzulejman à l'extérieur pour lui donner des coups, et Halil Brica. On
8 leur avait demandé de creuser leur propre tombe, là, juste à côté. Ensuite,
9 on leur demandait d'entrer dans la tombe, de garder la tête, mais de
10 laisser la tête découverte. Leur corps était enterré, la tête était
11 découverte. Ensuite, on tirait quelques balles à côté de leur tête pour
12 essayer de soutirer des réponses.
13 Q. Outre Marko Vukadin que vous aviez évoqué, y avait-il d'autres
14 personnes qui étaient à l'origine de ces -- de ceci ?
15 R. Dans le garage, là où il y avait les hommes, je ne connaissais pas
16 d'autres personnes. C'était pour moi tous des visages inconnus.
17 Q. Un peu plus tard, vous nous avez donné le nombre de personnes qui
18 étaient dans le garage avec vous, entre 35 et 40 personnes, vous nous avez
19 dit. Est-ce que le nombre de personnes est resté le même, ou est-ce que des
20 personnes sont-elles sorties ? Y a-t-il eu d'autres personnes qui sont
21 venues se joindre à vous ?
22 R. Non. Personne d'autre n'est venu, mais il y avait des personnes qui
23 partaient, effectivement, oui. Je crois qu'on a dû, sans doute, emmener de
24 dix à 15 personnes qu'on avait placées à bord d'un car et, par la suite,
25 j'ai entendu dire que ces personnes avaient été emmenées à Prozor.
26 Q. Pouvez-vous, je vous prie, jeter un coup d'œil sur la pièce 1413 ? Je
27 crois que ce document se trouve juste à côté de vous sur le
28 rétroprojecteur. Vous pouvez prendre la version B/C/S à l'intercalaire 1-4-
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1 1-3, donc 1413. Vous verrez une liste de noms et si vous passez à la
2 deuxième page de cette même liste, vous verrez, au numéro 49, certains --
3 donc, vous verrez des noms et, à côté du numéro 49, vous verrez un nom à
4 côté de Zdrimci. S'agissant de ces personnes, est-ce que c'était des
5 personnes qui se trouvaient avec vous dans le garage ? Est-ce que vous
6 pouvez reconnaître des noms ?
7 R. Non. Les personnes qui avaient été emmenées, c'était la personne numéro
8 49 jusqu'à 56. Donc, de 49 à 56. Donc, 49. Entre 49 et 57, ces personnes-là
9 n'étaient plus dans le garage. Entre 49 et 57, ces personnes-là n'étaient
10 plus dans le garage.
11 Q. S'agissant des numéros allant de 58 à 61, est-ce que vous connaissiez
12 ces personnes-là ? Est-ce que vous connaissez ces noms ?
13 R. Pardon, je n'ai pas compris votre question.
14 Q. Les noms qui se trouvent énumérés entre le numéro 49 et 61 sur ce
15 document, est-ce que c'était les mêmes personnes qui se trouvaient dans le
16 garage avec vous ?
17 R. Oui. Ces personnes-là étaient dans le garage. Ces autres personnes
18 étaient restées dans le garage, alors que ces personnes-ci, elles avaient
19 été emmenées en direction de Prozor. J'avais entendu qu'on les avait
20 emmenés faire des travaux forcés.
21 Q. Pour être tout à fait précis, pendant que vous étiez dans le garage,
22 les personnes se trouvant entre les numéros 58 à 61, est-ce que ces
23 personnes étaient encore dans le garage avec vous, ou les a-t-on emmenés à
24 Prozor, ces quelques personnes ?
25 R. Je peux vous parler des personnes se trouvant à côté des numéros --
26 enfin, entre les numéros 49 et 57. Ces personnes-là avaient été emmenées à
27 Prozor. Pour les autres personnes, je ne suis pas tout à fait sûr.
28 Q. Si vous prenez l'intercalaire suivant, qui porte la cote 1636, c'est le
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1 document qui se trouve -- ou l'intercalaire plutôt, qui se trouve dans la
2 même liasse de documents qui est sous vos yeux. Je vous demanderais de
3 l'examiner et de nous dire si, en B/C/S, comme vous le verrez, il y a une
4 liste de noms et, encore une fois, sur cette première page, aux numéros 26
5 et 27, vous verrez que l'on mentionne le village Zdrimci à côté de deux
6 noms. De nouveau, pourriez-vous nous dire si ces deux personnes, dont on
7 mentionne le nom sur la liste, est-ce que c'était des personnes qui étaient
8 dans le garage avec vous ?
9 R. Oui. Ils étaient avec moi dans le garage. Donc, le numéro 24, il était
10 avec moi dans le garage et, après, il a été emmené. Le numéro 25 était avec
11 moi aussi, mais il a été emmené vers Prozor.
12 Q. Les numéros 26 et 27, est-ce qu'ils sont restés dans le garage, ou est-
13 ce qu'on les a emmenés aussi quelque part ?
14 R. Je crois qu'ils sont partis, mais je ne me souviens pas vraiment.
15 Q. Si vous prenez la page suivante, vous verrez que la liste continue et
16 vers le bas de la liste, à côté du numéro 24 sur cette même liste, vous
17 verrez de nouveau que l'on évoque le village de Zdrimci. Donc, jusqu'au
18 numéro 34, entre le 24 et le 34, est-ce que vous pouvez nous dire si ces
19 personnes se trouvaient avec vous dans le garage ?
20 R. Asim Trkic, au point 26, il était -- si je me souviens bien, il est
21 resté dans le garage, mais je ne me souviens vraiment pas.
22 Q. Il y a une autre liste sur la page suivante. Prenez-la, je vous prie.
23 Une page après, voilà. Alors, prenez connaissance de la liste et dites-nous
24 ce qui en est pour les personnes se trouvaient à côté des numéros de 24 à
25 34. De nouveau, on mentionne le village de Zdrimci, et à côté du nom de
26 Zdrimci, on peut voir des noms. Est-ce que ces personnes étaient dans le
27 garage avec vous ?
28 R. Oui. Au numéro 24, il était là. Au numéro 26, aussi, 24, 25, 26, 27,
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1 28, 29, ainsi que -- enfin, jusqu'à 34. Oui, ces personnes étaient avec moi
2 dans le garage.
3 Q. Est-ce que vous savez si ces personnes avaient quitté le garage pour
4 aller à Prozor ?
5 P40R. Oui, la personne au numéro 24, il est parti. La personne au numéro
6 25 aussi, 26 aussi. La personne au numéro 27, 28, 29, 30. Alors que pour
7 les autres, je ne peux pas vous dire avec certitude, je ne sais pas s'ils
8 étaient partis aussi.
9 Q. Vous nous avez dit ce qui était arrivé à vous et aux personnes qui
10 étaient dans le garage avec vous, vous nous avez également dit que vous
11 êtes sorti du garage pour aller chercher un mouton et que vous êtes resté
12 avec votre mère. Dites-nous : dans quel état se trouvait votre mère et les
13 autres femmes qui se trouvaient dans la maison lorsque vous êtes arrivé
14 vers elles, lorsque vous les avez vues ?
15 R. J'ai vu que ma mère et ma sœur avaient des mains brûlées. Leurs mains
16 étaient complètements recouvertes de brûlures et lorsque je leur ai demandé
17 ce qui s'était passé, elles m'ont dit que lorsque les soldats du HVO
18 venaient incendier des maisons avec de l'essence, ils mettaient de
19 l'essence et ils incendiaient, ils allumaient l'essence et c'est ainsi
20 qu'elles ont essayé d'éteindre le feu et c'est pour cela qu'elles avaient
21 ces brûlures.
22 Q. Ce que vous venez de nous décrire comme état de fait à Zdrimci, est-ce
23 que je peux vous demander combien de temps cela a duré ?
24 R. Cela a duré jusqu'à la fin du premier conflit, c'est-à-dire jusqu'à ce
25 qu'il y ait une manière de trêve, je ne saurais vous dire exactement à
26 quelle date cela a eu lieu.
27 Q. Mais est-ce que vous êtes en mesure de nous donner une idée de combien
28 de temps cela a pris ? Est-ce que c'est resté comme cela plusieurs jours,
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1 plusieurs semaines, plusieurs mois ?
2 R. Je ne saurais vous répondre avec précision. Est-ce que cela a duré 40
3 jours, 30 jours, je ne sais pas.
4 Q. Vous nous avez dit que vous étiez resté en compagnie de votre mère à
5 Zdrimci. Est-ce que vous y êtes resté définitivement ?
6 R. J'ai passé un certain temps avec ma mère pendant tout le temps qu'a
7 duré cette situation, d'ailleurs, jusqu'à la trêve. Quand les choses se
8 sont calmées, je suis allé voir ma sœur avec ma mère et le reste de la
9 famille.
10 Q. Où se trouvait votre soeur ?
11 R. A Vrse. A un kilomètre, un kilomètre 500 de Zdrimci. C'est là que --
12 c'est, effectivement, là-bas que ma sœur s'était mariée et nous sommes donc
13 allés passer un certain temps chez-elle.
14 Q. Pourquoi n'êtes-vous pas rentrés chez-vous à Zdrimci ?
15 R. Nous avions peur. Nous avions peur que les événements se répètent. Tout
16 n'était pas encore particulièrement sûr, nous sommes donc restés chez mes
17 sœurs et puis, de là où nous étions, sur la colline, nous pouvions voir le
18 village et nous avons vu une maison être incendiée et nous n'avons donc pas
19 osé redescendre au village.
20 Q. Connaissiez-vous à l'époque quelqu'un qui s'appelait Zanfula ?
21 R. Oui. C'est une femme du village. C'était la sœur de Munib Trkic. Elle
22 vivait de l'autre côté de la rue, c'était notre voisine. Elle s'est mariée
23 à quelqu'un de Bugojno et, lorsque les événements ont commencé, elle s'y
24 trouvait. Je la connaissais, donc.
25 Q. Avez-vous eu des contacts avec elle après le début du conflit ?
26 R. Non. Je n'ai eu aucun contact avec elle. Je n'avais d'ailleurs aucune
27 difficulté avec elle -- je n'ai eu aucune difficulté avec elle, mais j'ai
28 entendu d'autres femmes dire qu'elle était du côté du HVO et qu'elle leur
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1 donnerait des informations lorsque le HVO souhaitait battre les uns -- ou
2 passer les uns ou les autres à tabac.
3 Q. De quelle nationalité était-elle ?
4 R. C'était une musulmane. Elle était de nationalité musulmane.
5 Q. Vous dites avoir passé un certain temps chez votre sœur à Vrse ?
6 R. Oui.
7 Q. Quand êtes-vous rentré à Zdrimci ?
8 R. Je suis rentré en 2003, lorsque la maison avait été reconstruite et
9 c'est à partir de ce moment-là que je m'y suis réinstallé.
10 Q. Après les tirs, le pilonnage du 18 janvier que vous avez évoqué, dans
11 quel état se trouvaient les bâtiments de Zdrimci ?
12 R. Un certain nombre d'entre eux avaient été frappés par des obus,
13 certains avaient été incendiés. Tous les bâtiments n'avaient d'ailleurs pas
14 été incendiés immédiatement, tous n'avaient pas non plus été frappés par
15 des obus.
16 Q. Est-ce qu'on parle de tous les bâtiments, toutes les maisons et
17 propriétés de Croates et de Musulmans ?
18 R. Non, seulement les maisons musulmanes.
19 Mme GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
20 questions à poser à ce témoin de l'Accusation.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quels documents vous demandez pour l'admission des
22 pièces ?
23 Mme GILLETT : [interprétation] Les deux pièces que j'ai proposées au témoin
24 qui ont la cote 1413 et 1636.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous aviez prévu une heure 30, la Défense a
26 une heure 30, ce qui fait 15 minutes chacun sauf meilleure répartition
27 entre vous.
28 Qui commence ?
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1 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, c'est moi, Me Nozica
2 qui va commencer.
3 Avant toute chose, puis-je demander à l'Huissière de distribuer à la Cour
4 un certain nombre des documents que j'ai préparés pour le contre-
5 interrogatoire. Il n'y a qu'un seul document dans ce dossier.
6 Contre-interrogatoire par Mme Nozica :
7 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce qui s'est
8 passé le jour où les soldats du HVO sont arrivés à la maison où vous vous
9 logiez ? Votre père s'y trouvait-il ?
10 R. Oui.
11 Q. Votre père a-t-il été emmené au garage avec vous et les autres hommes ?
12 R. Non. Il avait d'ailleurs je ne l'avais pas vu -- je me suis seulement
13 rendu compte qu'il avait disparu. Je ne saurais vous le dire comment il
14 avait réussi à s'échapper.
15 Q. Comment cela entre-temps, quelle était la dernière fois où vous avez vu
16 votre père ?
17 R. Bien. Lorsque nous sommes tous sortis de la maison nous étions tous
18 ensemble, y compris mon père. Lorsque nous avons commencé à nous diriger
19 vers l'autre sous-sol c'est à ce moment-là que j'ai découvert qu'il n'était
20 plus là.
21 Q. Y avait-il d'autres hommes avec vous, ou d'autres hommes qui
22 apparaissaient ou disparaissaient ainsi ? Avez-vous vu si d'autres hommes
23 avaient réussi à partir ?
24 R. Non. Ils étaient tous là. Mais je ne saurais vous dire que mon père a
25 disparu.
26 Q. Peut-on en conclure que pendant cette période de 40 jours, vous n'avez
27 donc pas vu votre père ?
28 R. Non, effectivement, je ne l'ai pas vu. Je ne l'ai pas revu avant cette
Page 9184
1 sorte de trêve qui avait été mise en place. J'avais juste entendu dire
2 qu'il avait été abattu. C'était ce qu'on disait de lui.
3 Q. Vous l'avez revu à Vrse lorsque toute la famille s'y est retrouvée ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous avez évoqué la mort de deux hommes, Ihdija Trkic et Ahmo Catic.
6 Vous nous avez dit comment Ahmo Catic avait été tué, mais vous ne l'avez
7 pas vu vous-même. Vous en aviez entendu parler, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Etes-vous allé chercher son corps lorsqu'on vous avait demandé d'aller
10 creuser sa tombe ?
11 R. Non.
12 Q. Est-ce qu'on vous l'avait amené ?
13 R. Je ne comprends pas bien de quel corps vous parlez.
14 Q. Vous dites de Catic qu'il a été abattu chez lui et est-ce que vous êtes
15 allé chez lui récupérer le corps ?
16 R. Oui.
17 Q. Où l'avez-vous trouvé dans cette maison ?
18 R. Il était sur son lit.
19 Q. Dans sa chambre à coucher ?
20 R. Oui, dans sa chambre à coucher, sur son lit.
21 Q. Il y a Trkic; savez-vous comment il est mort ?
22 R. Alors que nous allions au garage, on entendait des coups de feu et j'ai
23 entendu dire qu'il avait tiré sur des soldats du HVO et qu'on l'avait donc
24 abattu.
25 Q. Très bien. Merci. Y avait-il dans le village un mekteb et un mejteb ?
26 D'ailleurs, je ne suis pas absolument certaine que tout le monde sache de
27 quoi on parle. Pouvez-vous nous en dire plus ?
28 R. Bien, mekteb et mejteb, c'est la même chose. C'est une mosquée sans
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1 minaret. S'il n'y a pas de minaret, c'est un mekteb ou un mejteb.
2 Q. Pour vous, c'est donc la même chose, mais ce n'est pas tout à fait la
3 même chose. Vous êtes en train de nous dire que dans votre village il y
4 avait une mosquée sans minaret, un mekteb.
5 R. Oui.
6 Q. Dans votre déclaration -- dans votre témoignage, vous avez dit que,
7 lorsque vous êtes revenu et que vous avez vu des hommes du HVO prier devant
8 le mekteb, il n'avait pas encore été incendié.
9 R. Effectivement, cela n'avait pas encore été incendié.
10 Q. Ultérieurement, à quel moment êtes-vous rendu compte que le mekteb
11 avait été incendié ? Est-ce que vous étiez encore dans le village de
12 Zdrimci ?
13 R. Oui, et quelques jours plus tard, je ne saurais vous dire exactement
14 combien de jours. Je me suis rendu compte plusieurs jours plus tard,
15 qu'effectivement, cela avait été incendié.
16 Q. Vous avez vu que cela avait été incendié mais vous n'avez vu personne
17 l'incendier. Vous ne saviez donc pas qui a commis cet acte ?
18 R. Non.
19 Q. Est-il donc correct de dire qu'après tous ces événements vous n'êtes
20 pas resté dans le village de Zdrimci parce que vous aviez peur que le
21 conflit se déclanche à nouveau ? Est-ce que c'est bien pour cela vous avez
22 quitté votre domicile ?
23 R. Oui.
24 Q. Le Juge -- le Président du Tribunal vous a demandé si vous aviez déjà
25 fait des déclarations ou proposer des dépositions à des enquêteurs en
26 Bosnie-Herzégovine. Vous nous avez dit que vous ne l'aviez pas fait ou que
27 vous ne pouvez pas vous en souvenir; est-ce bien cela ?
28 R. Oui.
Page 9187
1 Q. Dans ce cas-là, je souhaiterais vous rappeler quelque chose qui est
2 peut-être important et qui l'est important pour moi de pouvoir vous
3 montrer.
4 Mme NOZICA : [interprétation] Je voudrais demander d'avoir le document 2D
5 00205 sur le e-court et je demanderais également à l'Huissière de nous
6 aider. Si l'Huissière pouvait avoir la gentillesse de proposer cette
7 déclaration -- ce témoignage au témoin pour qu'il puisse en avoir une copie
8 papier et qu'il examine la signature pour voir si c'est la sienne ou non et
9 qui nous dise s'il se souvient ou non de ce témoin.
10 Apparemment, ce n'est pas disponible sous e-court, même si nous vous
11 l'avons donné vendredi. Dans ce cas-là, je propose qu'on utilise le
12 rétroprojecteur.
13 Pourrions-nous voir le bas de ce document pour voir la date ? Q.
14 Est-ce votre signature ? Examinez ce document, le document qui est à votre
15 droite. Vous voyez où Mme l'Huissière se trouve, vous pouvez voir ce
16 document, et pouvez-vous reconnaître cette signature, et vous souvenez-vous
17 avoir fait cette déclaration ?
18 R. Oui. Dans ce cas-là, je n'ai pas bien compris votre question. Vous
19 m'aviez demandé si j'avais fait des déclarations. Si vous m'aviez dit -- si
20 vous m'aviez demandé si j'avais parlé à la police, je vous aurais dit que
21 oui.
22 Q. Bien. Merci. Est-ce que vous pourriez regarder la première page pour le
23 procès-verbal ?
24 Mme NOZICA : [interprétation] Je voudrais juste rappeler que c'est
25 l'Accusation qui nous a fourni ce document au titre de la Règle 65 ter ?
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Cette déclaration a été enregistrée le 15 décembre
27 1993. L'intéressé est né le 22 août 1977, donc, il avait 16 ans. Est-ce
28 que, dans le droit local, les mineurs peuvent être entendus hors la
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1 présence d'un représentant légal ?
2 Mme NOZICA : [interprétation] En 1993, le témoin aurait pu parfaitement
3 être interrogé par la police, sans la présence de ses parents. Mais je ne
4 saurais vous dire qui d'autre a participé à cet entretien, puisqu'un
5 certain nombre de lignes ont été caviardées.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : D'après la code pénale de Bosnie-Herzégovine, est-ce
7 que c'est dans la loi ?
8 Mme NOZICA : [interprétation] Je ne saurais vous dire quelles étaient les
9 règles applicables au 15 décembre 1993.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons vérifier cela. Dans la traduction
11 anglaise, je n'ai pas la traduction du service qui procède à la
12 déclaration. Pouvez-vous nous le lire en B/C/S pour que les traducteurs --
13 enfin, j'ai compris que c'était à Bugojno. Apparemment, cela va être le
14 ministère de l'Intérieur. Pouvez-vous lire exactement l'intitulé du
15 service ?
16 Mme NOZICA : [interprétation] Oui, effectivement, je le peux. C'est la
17 traduction officielle que nous avons reçue de l'Accusation et cela indique,
18 en en-tête : "République de Bosnie-Herzégovine, ministère de l'Intérieur,
19 service de Sécurité, secteur de Zenica, SDB-RO, SDB-Bugojno. SDB, c'est les
20 services de Sécurité -- le centre des services de Sécurité.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question, mais est-ce qu'on peut passer
22 en audience à huis clos partiel ?
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
24 le Président.
25 [Audience à huis clos partiel]
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1 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aurais
2 quelques questions, après quoi mon client aura également quelques questions
3 à poser d'ordre technique. Nous n'en avons pas pour longtemps.
4 Contre-interrogatoire par M. Kovacic :
5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Au nom du général
6 Praljak, j'aimerais vous poser quelques questions de détail pour éclaircir
7 un certain nombre de points. Tout d'abord, j'aimerais que vous me disiez la
8 chose suivante. Vous avez indiqué à la Chambre, aujourd'hui, un certain
9 nombre de choses dont on ne nous a pas parlé dans la déposition que vous
10 avez donné au bureau du Procureur. Vous avez expliqué aujourd'hui que même
11 si tout le village s'appelait Zdrimci, il y avait plusieurs parties dans ce
12 village qui s'appellent Perici, Polici, Trkici et Sekerija. Pourriez-vous
13 nous expliquer la chose suivante : est-ce que ces parties du village
14 peuvent être considérées comme des hameaux ?
15 R. Oui. C'est ce que j'ai dit effectivement, parce que Perici correspond à
16 l'endroit où résident des gens qui s'appellent Perici et là où il y a des
17 Polici, on a coutume d'appeler cela Polici, parce que c'est le nom de
18 famille des gens qui y habitent. Même chose pour les Trkici et pour les
19 Sekerija. Par conséquent, c'est en fonction du nom de famille qu'on
20 distingue ces différentes parties.
21 Q. Très bien.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous les distinguez, vous, ou il y a une
23 distinction qui est faite par les autorités municipales ? Parce que, sur
24 une carte, j'ai constaté qu'effectivement, Perici existait. Par contre, je
25 n'ai pas trouvé Sekerija, Polici et Trkici. Alors, est-ce que, dans ce
26 village -- enfin, dans ces hameaux, il y a une pancarte où il y a marqué
27 Polici, par exemple ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, mais je le sais. Enfin, quiconque
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1 habitait là-bas le sait.
2 M. KOVACIC : [interprétation]
3 Q. Alors, Monsieur le Témoin, indépendamment de cela, peut-on en déduire
4 que vous, les gens du cru, les locaux, savaient exactement quelle partie de
5 Zdrimci s'appelle de ces différents termes que vous avez utilisés. Donc,
6 les gens qui habitent surplace le savent. Pouvez-vous me répondre par oui
7 ou par non ?
8 R. Je vous prie de m'excuser, mais je n'ai pas compris. Vraiment, je n'ai
9 pas compris.
10 Q. Alors, j'ai probablement mal formulé ma question. Est-ce que nous
11 pouvons en déduire, sur la base de ce que nous avons dit, que vous, les
12 locaux, les gens du cru, les gens de Zdrimci, savaient que telle partie
13 s'appelle ainsi et telle autre, de telle autre manière ?
14 R. Oui.
15 Q. Merci. J'aimerais aborder un autre point. Dites-moi encore une chose.
16 Ces différentes parties que vous avez évoquées, Perici, Polici, Trkici,
17 Sekerija, peuvent être distinguées physiquement. Est-ce que l'on peut voir
18 qu'il s'agit de parties, en quelque sorte, indépendantes à l'intérieur de
19 Zdrimci ?
20 R. Non, il n'y avait pas de séparation, il n'y en a jamais eue. Tout le
21 monde s'entendait bien, mais c'était des appellations en fonction des noms
22 de famille.
23 Q. Attendez, je vous interromps parce que nous n'avons pas beaucoup de
24 temps. C'est probablement moi qui me suis mal exprimé. Est-ce que l'on
25 pouvait reconnaître physiquement ces différentes parties du village ? Est-
26 ce qu'ils étaient séparés par une route ou une colline ou autre ? Est-ce
27 que moi, en tant qu'étranger qui arrive dans le village, j'aurais pu
28 reconnaître de façon distincte ces différentes parties du village ?
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1 R. Non, non.
2 Q. Merci. Dites-moi, vous nous avez dit qu'au début, dans cette maison de
3 Munib Trkic, les femmes se trouvaient dans la cave et les hommes, au rez-
4 de-chaussée. C'est ce que vous avez dit dans votre déclaration ?
5 R. Oui.
6 Q. Mais il y a une différence en termes de chiffres. Combien d'entre-vous
7 se trouvaient au rez-de-chaussée, en haut ?
8 R. Ecoutez, je ne peux pas vous donner de chiffres précis, comme je l'ai
9 dit tout à l'heure, mais de sept à dix personnes, mais je ne sais pas, je
10 n'en suis pas sûr.
11 Q. Mais si je peux vous rafraîchir la mémoire, dans la déclaration que
12 vous avez donnée au bureau du Procureur, le 14 janvier 2004, vous nous avez
13 dit une quinzaine.
14 R. Mais je ne sais pas combien nous étions. Peut-être que nous étions 15,
15 peut-être pas, mais je ne sais pas exactement combien nous étions.
16 Q. Bien. Est-ce que toutes les personnes présentes étaient armées ou
17 uniquement certains ?
18 R. Uniquement certains. Tous ne portaient pas d'armes. Il y avait peut-
19 être trois à quatre fusils, quelque chose comme cela, mais non, les autres
20 n'en avaient pas.
21 Q. Bien. Vous nous avez cité un fusil M-48, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Un fusil M-48, c'est un fusil de l'armée, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce qu'il y avait des fusils de chasse ?
26 R. Oui, il y avait aussi des fusils de chasse, peut-être deux, peut-être
27 même trois, parce que -- enfin, comme je l'ai dit tout à l'heure, mon père
28 avait acheté un M-48, quant aux autres, je crois que c'était des fusils de
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1 chasse.
2 Q. Est-ce qu'il y avait aussi des Kalachnikov ?
3 R. Pour autant que je m'en souviens, non, il n'y avait pas là.
4 Q. Bien. Merci. Après que vous vous êtes rendu, vous nous avez dit qu'ils
5 vous ont emmené plus loin vers d'autres maisons où d'autres gens sont
6 sortis pour se rendre, des gens qui se trouvaient dans des caves. Est-il
7 exact qu'au rez-de-chaussée de ces maisons ou à proximité de ces maisons on
8 trouvait également des hommes locaux armés ?
9 R. Mais, enfin, c'était comme cela à chaque fois qu'il y avait des hommes.
10 Il y en avait peut-être -- enfin lorsqu'il y avait cinq ou six hommes peut-
11 être qu'à ce moment-là il y avait aussi trois ou quatre fusils, mais je ne
12 sais pas exactement.
13 Q. Merci. Etant donné que vous nous avez dit qu'au total il y avait 35
14 personnes enfermées dans le garage, vous étiez donc 35, et c'étaient
15 essentiellement des hommes en âge de porter les armes, par vous-même, et
16 quelques personnes plus âgées, donc ces 35 personnes, enfin, 35 environ,
17 étaient précisément les personnes qui étaient en train de défendre ces
18 maisons, qui se trouvaient autour de ces maisons, n'est-ce pas ?
19 R. Oui. Majorité d'entre eux mais peut-être qu'une majorité d'entre eux ne
20 portaient pas d'armes, n'avaient pas d'armes.
21 Q. Merci. Dites-moi, lorsque vous avez été fait prisonnier, lorsque vous
22 vous êtes rendu, qu'on vous a rassemblé avant de vous emmener au garage,
23 est-il exact que les premières questions des soldats du HVO ont concerné
24 les armes que vous déteniez, est-ce qu'ils vous ont demandé de remettre vos
25 armes ?
26 R. Oui, ils nous ont demandé de remettre nos armes, mais la plupart des
27 armes avaient été remises. Nous étions désarmés et ils posaient tout de
28 même la question, ils demandaient : "Qui était armé, et qui avait quel
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1 fusil, et cetera ?"
2 Q. Bien. Alors, est-ce que cela veut dire qu'ils ont commencé par vous
3 prendre des armes dès votre sortie de la maison, dès que vous êtes sorti de
4 la maison ?
5 R. Oui.
6 Q. Ensuite, au moment où tout le monde a été rassemblé au même endroit, on
7 a, une deuxième fois, vérifié si quelqu'un avait une arme, et à ce moment-
8 là d'autres armes ont été remises ?
9 R. Oui.
10 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous me dire la chose suivante : pouvez-vous
11 m'expliquer pourquoi on vous a fait sortir du garage et pourquoi les
12 membres du HVO vous ont envoyé à Vrse ? Quelle était votre tâche ?
13 R. Ecoutez, je ne sais pas exactement quelle était ma mission ou ma tâche,
14 mais ils m'ont demandé d'aller leur dire dans quelle situation nous nous
15 étions pour qu'ils se rendent. Mais je ne sais pas en quoi consistait cette
16 mission, enfin, ils m'ont simplement demandé d'aller les voir pour leur
17 demander de se rendre.
18 Q. C'était cela alors votre mission d'aller leur dire de se rendre, mais
19 de le dire à qui ?
20 R. Probablement ceux qui étaient en train de tirer de cette partie de
21 Vrse. J'imagine que quand on a tiré c'étaient ceux qui se trouvaient là-bas
22 de l'ABiH. Il fallait que je leur dise à eux.
23 Q. A Vrse se trouvait une Unité de l'ABiH, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, c'est un village musulman et c'est un village plus important que
25 Zdrimci, c'étaient tous des locaux.
26 Q. Vous nous avez dit qu'ils se trouvaient à une distance d'un kilomètre
27 et demi de votre village, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. En terme de déniveler, est-ce que le village de Vrse est plus haut que
2 Zdrimci ?
3 R. Oui, il est un peu plus haut que Zdrimci.
4 Q. De Vrse, on peut bien voir Zdrimci ou, en tout cas, une bonne partie de
5 Zdrimci ?
6 R. Oui, on peut en voir une bonne partie.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : De la colline Baba, parce que vous l'avez dit cela,
8 qu'on tirait sur votre village, est-ce qu'on pouvait tirer également sur
9 Vrse ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est de l'autre côté de Vrse, c'est de
11 l'autre côté par rapport à Vrse, donc, non, on n'aurait pas pu tirer de là-
12 bas. J'ai vu qu'on tirait de Baba parce que même si c'était de l'autre côté
13 on voyait que des tirs étaient partis, mais c'est de l'autre côté de Vrse.
14 M. KOVACIC : [interprétation]
15 Q. Je ne suis pas sûr que vous ayez bien compris la question du Président.
16 Vous vous trouviez dans la maison Trkic, et de là, vous avez vu qu'on
17 tirait en votre direction de Baba. D'autres parties de votre -- mais sur
18 d'autres parties du village, d'autres parties musulmanes, on tirait de
19 Vrse, n'est-ce pas ?
20 R. Ecoutez, je ne sais pas. Lorsqu'ils tiraient de Baba on tirait sur la
21 totalité du village. Je ne sais pas si quelqu'un a tiré de Vrse.
22 Q. Est-ce que des tirs provenaient en direction de Vrse sur les parties
23 croates du village ?
24 R. Je ne sais pas.
25 Q. Est-ce que de Vrse --
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez un instant parce qu'il ne faut pas rester
27 dans l'ambiguïté. On vient de découvrir que l'ABiH était à Vrse. Bon.
28 Imaginons que le HVO est sur la colline de Baba, est-ce qu'il pouvait tirer
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1 sur l'ABiH, tirer en même temps sur votre village ? Est-ce que vous voyez
2 la situation ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Pour autant que je sache et
4 pour autant que je puisse m'en souvenir, il y avait des soldats du HVO à
5 Baba, quant au village de Vrse c'étaient des locaux des villageois. Quant à
6 eux, je ne sais pas en quelle situation ils étaient mais j'ai vu qu'on
7 tirait de Baba où se trouvaient des soldats du HVO --
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Ma question est plus précise que cela. Imaginons que
9 de Baba le HVO tire sur Vrse parce qu'il y a l'ABiH. Est-ce qu'un obus peut
10 tomber sur votre village ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, éventuellement, ce serait possible. Un
12 obus n'aurait pas pu toucher la partie où je me trouvais moi, mais une
13 autre partie du village.
14 M. KOVACIC : [interprétation]
15 Q. Encore une question : dites-moi, avant ces événements dans votre
16 village en janvier 1993, est-ce que votre père se rendait sur les lignes de
17 front contre les Serbes pour effectuer des tours de garde ?
18 R. Je ne sais pas ce qu'il en était. Je me trouvais en Autriche et je suis
19 arrivé juste avant que cela éclate. Je ne sais pas s'il l'a fait avant.
20 Q. Merci. Vous n'êtes pas en mesure de me répondre. Merci.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, je veux éclaircir cette question de la
22 colline Baba. On va vous mettre sous ELMO projecteur une carte que le
23 général Praljak nous avait dressée et je voudrais que vous regardiez sur la
24 carte le village de Vrse, votre village, et vous nous indiquiez où se
25 trouve la colline Baba ? Comme cela on verra tout de suite --
26 M. KOVACIC : [interprétation] Si je peux vous aider, Monsieur le Président.
27 Il y a une bonne carte dans e-court où on voit bien Zdrimci et peut-être
28 quelle pourrait nous aider ?
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Excellent. Alors, autant restez sur cette carte.
2 M. KOVACIC : [interprétation] Merci. Très bien.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. Bien. Alors, marquez avec votre doigt ou le
4 stylo votre village que l'on voit, là. Montrez votre village sur la carte.
5 Non, c'est plutôt sur la droite. Encore, encore. Voilà. Vous voyez. Il y a
6 -- voilà votre village. Il y a Vrse qui est en haut pour vous aider. Voilà.
7 Alors, la colline Baba, où est-elle ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement ici.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Mettez le stylo sur la colline. La colline Baba,
10 elle est là. D'accord. On voit d'ailleurs --
11 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
12 [interprétation] Là, on voit Zdrimci et Vrse.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Remettez le stylo sur Baba ?
14 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien.
16 Mme GILLETT : [interprétation] Monsieur le Président, je me lève quant aux
17 questions de suivi, suite aux questions des Juges. Peut-être serait-il
18 préférable que je pose une brève question maintenant. Merci, Monsieur le
19 Président.
20 Pourrait-on demander au témoin quelle est la distance entre la colline de
21 Baba et le village de Vrse ?
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans votre souvenir, entre Baba et Vrse, il y
23 a combien de kilomètres ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être deux kilomètres, mais une fois de
25 plus, je ne le sais pas avec précision. Peut-être deux kilomètres, mais,
26 enfin, je ne sais pas.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'en
28 mesurant la distance sur la carte et en prenant l'échelle, on peut obtenir
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1 une réponse à cette question. J'en ai terminé avec mes questions, mais mon
2 client aimerait poser des questions également.
3 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :
5 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous poser un certain
6 nombre de questions. Est-ce que vous savez si, avant le 18 janvier 1993, il
7 y a eu des combats à Baba même ? Est-ce que vous avez entendu des tirs à
8 Baba même ? Il y a deux extrémités. Une du côté de Karamustafic et une du
9 côté de votre village. La colline de Baba est assez longue. Est-ce que vous
10 avez entendu des tirs à cet endroit-là ?
11 R. Non. Pour autant que je le sache, il n'y en a pas eu.
12 Q. Est-ce que vous savez si, du côté de Karamustafic, de Baba, quelqu'un
13 de votre village a creusé des tranchées ?
14 R. Ecoutez, je ne sais pas.
15 Q. Si vous ne savez pas, très bien. Au moment où vous vous êtes rendu dans
16 le village de Vrse, avant et après, vous avez vu, à proximité de ce
17 village, des tranchées qui auraient creusé par l'ABiH ? Est-ce que vous en
18 avez vues ?
19 R. Oui. Au moment du deuxième conflit. Quand le deuxième conflit a éclaté
20 entre le HVO et l'ABiH, j'ai vu qu'il y avait des tranchées qui étaient
21 tournées vers Baba.
22 Q. Mais vous faites référence au conflit du mois d'octobre 1992 ?
23 R. Non, je ne sais pas quand il a commencé, mais après l'accalmie, quand
24 il a recommencé -- enfin, que je me trouvais déjà à Vrse quand le deuxième
25 conflit a commencé. A ce moment-là, j'ai vu qu'ils avaient des tranchées
26 qui étaient tournées dans cette direction.
27 Q. Mais avant, avant le 18 janvier 1993, est-ce que -- enfin, parce qu'on
28 peut le voir à l'œil nu, est-ce que vous savez si, autour de Vrse, l'ABiH a
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1 creusé des tranchées ? Est-ce que vous le savez ?
2 R. Pour autant que je le sache, non. Il n'y en a pas eu. Ils n'étaient pas
3 tournés dans cette direction. D'ailleurs, il n'y avait pas de tranchées du
4 tout.
5 Q. Mais quand vous vous êtes rendu à Vrse, vous avez vu ces tranchées ou
6 vous ne les avez pas vues ?
7 R. Non. Je les ai vues au moment du deuxième conflit uniquement. Des
8 tranchées ont été creusées quand le deuxième conflit a commencé.
9 Q. Bien. Ecoutez, pouvez-vous me dire la chose suivante. Est-ce que, par
10 la suite, vous avez été incorporé dans l'armée régulière de la Bosnie-
11 Herzégovine ? Est-ce que vous avez fait l'armée ?
12 R. Non, je n'ai pas fait l'armée.
13 Q. Non. Vous n'avez donc pas servi dans l'armée ?
14 R. Non, je n'ai pas servi dans l'armée.
15 Q. Vous ne savez donc pas qu'un obus de mortier est une arme anti-
16 infanterie, qu'elle ne peut pas détruire une maison, elle ne peut que
17 l'endommager ?
18 R. Je sais qu'elle ne peut pas --
19 Q. Qu'elle peut ou qu'elle ne peut pas ?
20 R. Qu'elle peut détruire une partie de la maison.
21 Q. Savez-vous quel est -- enfin, est-ce que les maisons, dans votre
22 village, étaient assez mélangées ? Est-ce que la partie où vous viviez
23 était mixte ?
24 R. Dans la partie où je vivais, il n'y avait que des Musulmans.
25 Q. Dans l'autre partie, il y avait une population mixte ?
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce que les obus tombaient sur l'une et l'autre partie, s'ils
28 tombaient et quand ils tombaient ?
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1 R. Non. Pour autant que je puisse le savoir, ils tombaient dans la partie
2 qui l'entourait, mais les autres, je ne sais pas.
3 Q. Parce que d'autres --
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour faire suite à ce que vient de dire le général
5 Praljak, vous parliez des mortiers 120. Mais vous aviez dit aussi qu'il y
6 avait des canons antiaériens. Alors, vous l'aviez vu ou vous l'avez
7 entendu ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai entendu de ce qui se trouvait avec
9 moi. On voyait les flammes quand il y avait des tirs de mortier et pour ce
10 qui est des canons antiaériens, je les ai vus également et je l'ai entendu,
11 qu'il y avait ce type d'artillerie.
12 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
13 Q. Mais est-ce que vous avez jamais vu, de vos propres yeux, comment on
14 tirait un obus de mortier ? Est-ce que vous l'avez vu ?
15 R. Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux, mais j'ai vu les flammes --
16 enfin, j'ai entendu, mais je n'ai jamais vraiment vu moi-même.
17 Q. Mais un canon antiaérien a généralement un projectile de 20
18 millimètres. Est-ce que vous en avez vu un qui aurait été un canon, deux
19 canons, trois canons ?
20 R. Je ne l'ai jamais vu de près.
21 Q. Merci. Je vais encore poser quelques questions. Vous avez énumérés tout
22 ce qui vous est arrivé ou tout ce que vous avez vu, que d'autres ont subi
23 en termes de mésaventure. Vous avez dit que certains ont été passés à
24 tabac, que d'autres ont été enterrés vivant, qu'on a demandé aux Musulmans
25 de se signer, de prier, qu'on a incendié des maisons. Alors, écoutez bien
26 ce que je vais dire : est-ce que dans l'un quelconque de ces cas, vous avez
27 vu un groupe de soldats le faire ou alors est-ce que c'était un ou deux
28 soldats seulement, ou un groupe ? Si c'était un groupe, est-ce que vous
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1 avez vu un commandant, quelqu'un qui l'aurait -- qui leur aurait donné des
2 ordres ?
3 R. J'ai vu des groupes de gens, mais je n'ai jamais vu de commandant.
4 Q. Mais est-ce que, pour les incidents que vous avez cités, c'était
5 toujours des personnes à titre isolé qui le faisaient ou alors s'agissait-
6 il d'unités avec, à leur tête, un commandant ?
7 R. Il n'y avait pas de commandant. C'était un petit groupe et parfois, il
8 y a quelqu'un qui disait ce qu'il fallait faire, quelqu'un --
9 Q. Donc, c'était souvent quelqu'un de votre village ?
10 R. Non. Si vous pensez à Marko Vukadin, ce n'était pas lui à ce moment-là.
11 C'était des gens d'ailleurs, des étrangers.
12 Q. Mais quand on demandait à ces femmes de prier, par exemple, combien de
13 ces gens de l'extérieur y avait-il ?
14 R. J'ai vu que quelqu'un leur montrait, leur disait comment elles devaient
15 se signer et à côté, il y avait des soldats, mais je ne sais pas combien
16 ils étaient exactement.
17 Q. Merci. J'aimerais que l'on place sur le rétroprojecteur, le recensement
18 de 1991, même s'il n'a pas été adopté à la municipalité, où on voit qu'il y
19 a 759 Musulmans et 362 Croates à Zdrimci. Donc, 759 Musulmans, ou plutôt,
20 je me reprends, 759 Croates et 362 Musulmans. Alors, sur ces trois -- 162
21 Musulmans, la moitié, donc, sont des hommes, l'autre moitié sont des femmes
22 et si l'on exclut les enfants et les personnes âgées, dans tous les cas, il
23 reste 140 hommes en âge de servir dans l'armée. Etant donné que les Croates
24 ont fait prisonniers 30 ou 40 hommes, où se trouvaient les autres hommes du
25 village ? Pouvez-vous nous le dire ?
26 R. Les autres hommes, avant que n'éclatent les tirs ce matin-là, un groupe
27 a quitté le village. Je ne sais pas combien ils étaient exactement, peut-
28 être une vingtaine de personnes ont quitté le village, ils sont donc
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1 partis, et je sais qu'ils se sont rendus à Vrse, mais je ne sais pas où ils
2 sont partis. Quant à ces autres hommes dont vous m'avez parlé, vous m'avez
3 demandé où ils étaient partis, certains se trouvaient à l'étranger, en
4 Occident, pour travailler.
5 Q. Oui, mais combien étaient-ils à l'étranger ? Parce que d'après mes
6 calculs, il reste 120 hommes qui manquent. Comment ces gens-là savaient-ils
7 que le 18 janvier allait commencer une attaque du HVO, comme vous
8 l'appelez. Par quel biais le savaient-ils ? Comment savaient-ils que le HVO
9 allait commencer à attaquer ce matin-là ?
10 R. J'imagine qu'ils le savaient, peut-être qu'ils avaient un
11 pressentiment. Je ne sais pas comment ils le savaient, mais j'imagine
12 qu'ils le savaient et qu'ils sont partis.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous avais d'ailleurs posé la même question en
14 début d'après-midi parce que je m'étais posé la question de savoir s'il y
15 avait un groupe d'individus qui avait quitté et vous n'aviez pas répondu
16 exactement. Là, vous venez de dire qu'il y avait un groupe de 20 à 30
17 personnes qui avaient quitté le village pour aller à Vrse. Ces gens qui ont
18 quitté le village, ils étaient armés ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas si je me souviens bien, mais
20 avant cette déclaration, j'avais mentionné qu'il y avait des personnes
21 étaient sorties pendant la nuit, à l'extérieur du village. Donc s'agissant
22 -- je ne sais pas s'ils étaient tous armés, mais certains étaient armés.
23 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je me demande si j'ai bien fait les
24 calculs, mais s'agissant des nombres qui ont été utilisés par le général
25 Praljak, j'aimerais savoir si j'ai bien compris. Je crois que vous avez
26 mentionné 360 Musulmans dans le village et je crois que, grosso modo, vous
27 avez mentionné -- en fait, il faudrait compter 180 hommes à ce moment-là
28 et, de ces 180 hommes, vous avez dit que, si l'on excluait les personnes
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1 âgées et les enfants, à ce moment-là, on se trouve avec 140 hommes en âge
2 de porter les armes.
3 Maintenant, je ne suis pas tout à fait certain de ce chiffre, car si vous
4 prenez les jeunes enfants, les garçons, et si vous prenez également les
5 personnes âgées, le chiffre s'élèverait, serait supérieur à 140 -- serait
6 supérieur à 40, il faudrait le soustraire à 180, donc, bien sûr qu'à ce
7 moment-là, si l'on tient compte du nombre d'hommes musulmans, selon mes
8 propres calculs, on se retrouve avec un chiffre au-dessus de 100. Je
9 voudrais simplement savoir si il est possible de parler d'un si grand
10 nombre d'hommes lorsque nous parlons d'hommes musulmans qui seraient en âge
11 de porter les armes et que ces derniers auraient combattus dans le village
12 ou à l'extérieur du village. Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Praljak, c'est plutôt à vous la
14 question. D'après vos calculs, comment pouvez-vous en tirer la conclusion
15 qu'il y avait au moins 100 hommes musulmans en âge de porter les armes
16 alors que le témoin a indiqué qu'un certain nombre étaient à l'étranger.
17 Nous savons que dans tous ces villages, beaucoup de gens allaient
18 travailler à l'étranger, alors d'où vient votre calcul disant qu'il y avait
19 une centaine de personnes en âge de porter des armes ?
20 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Les hommes en âge de porter les armes,
21 Monsieur le Président, selon la loi de l'époque, c'était les hommes âgés de
22 18 ans à 65 ans. Donc, étant donné la mentalité, si j'ai bien conclu, si je
23 compte jusqu'à 17 ans et qu'il y a 181 hommes et si nous excluons les
24 femmes et les hommes qui sont plus âgés de 65 ans et que les hommes meurent
25 en moyenne à 70 ans, alors, à ce moment-là, je suis arrivé à ce chiffre. Je
26 crois qu'ici, même si l'on -- à moins de laisser ceci à 130 ou 125, je me
27 retrouve encore avec 120 personnes -- environ, le chiffre de 120. Donc, à
28 l'époque, même si nous excluons les personnes qui se trouvaient à
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1 l'extérieur, il y avait quand même des gens qui étaient arrivés de Donji
2 Vakuf, de Jajce. Je pourrais même augmenter ce chiffre, mais j'ai essayé
3 d'être très prudent, donc, en prenant plus ou moins un écart -- largeur de
4 5 %. Donc, c'est ce que j'ai pris pour arriver à ce chiffre. Merci.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, alors il est l'heure. On va faire la pause et
6 on va reprendre à 6 heures moins 05. Ensuite, il restera quatre avocats, 15
7 minutes, donc, normalement, on doit terminer à 19 heures.
8 --- L'audience est suspendue à 17 heures 38.
9 --- L'audience est reprise à 17 heures 55.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, avocat suivant.
11 Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
12 les Juges.
13 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Trkic. Je vais, au nom du général
15 Milivoj Petkovic, vous poser un certain nombre de questions très simples,
16 simplement en guise de clarification.
17 Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous demanderais d'abord d'examiner un
18 document de l'Accusation qui se trouve devant vous et qui porte la cote P
19 01636. Je demanderais également que l'on place ce document sur le e-court
20 de nouveau.
21 Q. Si j'ai bien consigné vos propos, Monsieur Trkic, vous nous avez dit
22 que les personnes aux numéros 24 et 25 de ce document, que ces personnes
23 donc étaient avec vous dans le garage dans votre village; est-ce exact ?
24 Vous souvenez-vous d'avoir dit cela ?
25 C'est sur la première page de ce document, Monsieur.
26 Dans la partie détenue laissez de la prison de Prozor et vous nous avez
27 expliqué qui étaient les personnes qui étaient avec vous dans le garage et
28 qui sont les personnes qui avaient été emmenées ultérieurement à Prozor.
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1 Est-ce que vous souvenez-vous des personnes qui sont énumérées ici aux
2 points 24 et 25 ?
3 R. Oui, je me souviens de ces personnes.
4 Q. Ces personnes étaient avec vous dans le garage, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Il s'agissait de Raif Curic de Bugojno ainsi que de Dzemal Causevic de
7 Gornji Vakuf, n'est-ce pas ? Est-ce exact ?
8 R. Je n'ai pas malheureusement entendu les noms que vous m'avez donnés.
9 Vous avez dit 24, Mirsad Trkic, et au numéro 25, Enver Trkic, est-ce que
10 c'est cela ?
11 R. Ces deux personnes ?
12 Q. Non. Prenez la première page de ce document, je vous prie.
13 Est-ce que vous avez la première page du document ?
14 R. Oui.
15 Q. Pourriez-vous nous dire quels sont les noms qui figurent aux numéros 24
16 et 25 ?
17 Sur l'e-court nous n'avons pas la bonne liste. Je ne pose pas les questions
18 sur cette liste-là pour l'instant.
19 C'est la liste qui porte la lettre A qui est identifiée par un A. C'est
20 celle-là qui nous intéresse. Est-ce que vous la voyez, Monsieur Trkic ?
21 R. Oui, oui, je la vois.
22 Q. Il est vrai que le texte en anglais mais vous pouvez reconnaître les
23 noms. Est-ce que vous reconnaissez les personnes aux numéros 24 et 25 ?
24 R. Oui, oui. Je les connais.
25 Q. Est-ce que vous nous avez dit que ces personnes étaient avec vous dans
26 le garage ?
27 R. Excusez-moi, mais je ne connais pas la personne qui figure au nom 24.
28 Raif Curic, je ne le connais pas, alors que Dzemal Causevic, je ne le
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1 connais pas non plus.
2 Q. Ces personnes n'étaient pas avec vous dans le garage. Très bien. C'est
3 clair. Ce qui m'intéressait c'est de savoir comment ces personnes étaient
4 arrivées jusqu'à Zdrimci. Vous nous avez dit que les coups de feu ont
5 commencé à se faire entendre le 18 janvier à
6 6 heures du matin et que ce jour-là les femmes se sont retrouvées dans la
7 cave et que les hommes étaient dans la partie réservée à un bureau qui se
8 trouvait à l'étage ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous avez passé la nuit sur l'étage qui se trouvait au-
11 dessus de la cave, donc au rez-de-chaussée ?
12 R. Non, puisque ce jour-là nous avons été emmenés au garage.
13 Q. Mais la nuit qui avait précédé la matinée où les tirs ont commencé,
14 est-ce que vous aviez passé cette nuit-là dans cette maison ?
15 R. Non, pas toute la nuit mais nous étions là. Nous retournions à la
16 maison et ainsi de suite, donc ce matin-là, nous étions là.
17 Q. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus clairement ce qui s'est passé
18 donc pendant la nuit ? Vous alliez dans vos maisons et ensuite vous
19 retourniez dans la maison dans laquelle vous étiez placés ?
20 R. Oui, en fait, j'étais rentré à la maison pendant la nuit et ma mère
21 aussi et ma sœur aussi et donc pendant la nuit, entre
22 10 heures et minuit, peut-être, et ensuite, lorsque nous sommes allés dans
23 cette maison où le matin les tirs ont commencé, nous ne sommes plus sortis
24 jusqu'à ce que nous ne soyons faits prisonniers.
25 Q. Ensuite, est-ce que le lendemain vous étiez aussi un peu dans la maison
26 et vous sortiez un peu pour faire quelque chose ?
27 R. La plupart du temps, nous étions dans les maisons, mais -- nous étions
28 plutôt dans les maisons, cela dépendait de la situation, mais la veille,
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1 nous étions allés dans cette autre maison.
2 Q. Pourriez-vous nous dire avec un peu plus de précision à quel moment
3 vous avez commencé à vous rassembler dans ces quatre maisons de votre
4 village ?
5 R. Je ne pourrais pas vous le dire exactement, s'agissant de cette cave
6 dans laquelle se trouvait ma mère et où il y avait ce bureau. Trois ou
7 quatre nuits qui avaient précédé, on allait dans la cave et ensuite, on
8 allait un peu dans la maison et ainsi de suite et donc les coups de feu
9 n'étaient pas très intenses et c'est la raison pour laquelle nous n'avons
10 pas passé tout notre temps là-bas.
11 Q. Donc, pendant trois ou quatre nuits, vous faisiez l'aller-retour. Très
12 bien, j'ai compris. Maintenant, dites-nous qui a décidé que c'est ainsi que
13 la population allait s'abriter dans ces maisons-là qui avaient été choisies
14 comme étant des abris ?
15 R. Je ne sais pas quelle était la situation pour les autres maisons, mais
16 je peux vous parler de la mienne puisque mon père et ma mère avaient décidé
17 ainsi, ce sont eux qui avaient dit d'aller dans la cave puisque ils avaient
18 probablement vu que quelque chose se passait.
19 Q. Est-ce que vous aviez entendu dire qu'il fallait peut-être préparer la
20 défense du village car on était en attente d'une attaque ?
21 R. Non, pas du tout, je sais simplement que nous allions là-bas puisque ma
22 mère voulait ainsi, ainsi que mon père.
23 Q. Très bien. Maintenant, vous nous avez dit qu'à la suite de votre départ
24 du garage, vous êtes parti, et pendant un certain temps, vous êtes allé
25 chez votre sœur dans le village de Vrse. Je vais maintenant vous citer,
26 vous avez dit que vous ne vouliez pas resté dans votre maison puisque vous
27 ne vous sentiez pas -- vous n'étiez pas sûr, en fait, et vous aviez peur
28 que les conflits n'éclatent de nouveau ?
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1 R. Oui, nous sommes tous allés vivre chez ma sœur puisque nous ne nous
2 sentions pas en sécurité, nous ne savions pas si d'autre chose allait se
3 passer dans le village.
4 Q. Mais s'agissant de votre maison et de votre village, si vous aviez
5 décidé de rester, si vous aviez voulu rester dans votre village et dans
6 votre maison, il n'y avait pas vraiment une raison pour partir, vous auriez
7 pu; est-ce que c'est exact ?
8 R. J'ai senti qu'il fallait partir. Je ne sais vraiment pas.
9 Q. Objectivement parlant, est-ce que vous auriez pu rester vivre dans
10 votre maison dans le village si vous l'aviez voulu ? Est-ce que c'était
11 possible de vivre dans la maison ?
12 R. Non, puisque lorsqu'on a commencé à tirer --
13 Q. Donc, est-ce que la maison était incendiée ou elle n'était pas
14 incendiée ? C'est ce que je vous demande, je veux simplement savoir si la
15 maison était habitable, si vous voulez.
16 R. Oui, une partie avait commencé à brûler, mais elle n'était pas
17 complètement incendiée. Donc, il était possible, peut-être, de vivre d'une
18 certaine façon dans une partie de la maison.
19 Q. Donc, en d'autres mots, c'était une maison dans laquelle on aurait pu
20 rester vivre si tel avait été votre décision ?
21 R. Oui. Voilà.
22 Q. Très bien. Vous nous avez dit dans votre déclaration qu'une dizaine de
23 soldats du HVO étaient entrés dans le village et que ces derniers avaient
24 un homme devant eux, donc ils menaient cet homme et cet homme marchait
25 devant eux et qu'ils se dirigeaient vers certaines maisons et vous avez
26 employé le terme de "bouclier humain." Qu'est-ce que cela veut dire, selon
27 vous ?
28 R. C'est moi qui ai tiré cette conclusion car ils allaient derrière lui.
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1 C'était des soldats et lui, il marchait devant eux sans arme et ils le
2 poussaient devant lui, donc, ils allaient derrière lui. C'est moi qui avais
3 interprété cet événement comme cela.
4 Q. C'était donc vous-même qui aviez conclu ceci, ou y avait-il d'autres
5 villageois qui avaient employé ce terme ?
6 R. C'est moi qui ai conclu ceci et c'est pour cela que je l'ai dit.
7 Q. Mais aujourd'hui, lorsque vous repensez à tout cela et lorsque vous
8 pensez à ce terme, si un homme marche devant 10 personnes, est-ce que cette
9 personne, cet homme, peut-il vraiment protéger avec son corps 10 personnes
10 derrière lui ?
11 R. Non, mais si les hommes derrière cette personne sont armées et que les
12 armes sont tirées -- enfin pointent vers l'avant et que lui il marche
13 devant et qu'il n'est pas armé, alors c'est ainsi que je voyais les choses.
14 Q. Dites-moi : lorsque les soldats du HVO sont entrés dans le village,
15 est-ce que l'on tirait depuis des maisons en direction des soldats du HVO,
16 c'est-à-dire est-ce qu'on tirait sur eux ?
17 R. Si je me souviens bien, non.
18 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, je n'ai pas d'autres questions.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Alaburic.
20 Avocat suivant.
21 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous
22 n'avons pas de questions pour ce témoin.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, il nous reste Me Ibrisimovic.
24 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions non plus.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
27 Messieurs les Juges, nous n'avons pas de questions pour ce témoin non plus.
28 Merci, Monsieur.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que l'Accusation a des questions
2 supplémentaires ?
3 Mme GILLETT : [interprétation] Non, merci, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Alors, Monsieur, votre témoignage vient de se
5 terminer. Au nom des Juges, je vous remercie d'avoir, par votre présence et
6 votre venue, contribué à la manifestation de la vérité. Je formule mes
7 meilleurs vœux pour votre retour dans votre pays et je vais donc demander à
8 Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner à la porte de la salle
9 d'audience où vous allez être pris en charge par la section des témoins.
10 [Le témoin se retire]
11 Bien, alors, Monsieur Scott, pour le programme de demain, il y a un témoin
12 qui est prévu sur trois jours.
13 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, effectivement, le
14 témoin pour le reste de la semaine est effectivement prévu pour commencer
15 dès demain et c'est, effectivement, ce que l'on va faire, apparemment.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Autant que je me souvienne, l'Accusation avait
17 programmé quatre heures pour son interrogatoire principal.
18 M. SCOTT : [interprétation] Effectivement, je crois savoir que c'est ce que
19 nous avions dit, effectivement, il nous semblait que ce serait faisable
20 dans le courant de la semaine, en fait.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Il nous reste un peu de temps. Est-ce que quelqu'un
22 veut intervenir sur un sujet quelconque ? Maître Murphy.
23 M. MURPHY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si vous me le
24 permettez, je voudrais évoquer rapidement un sujet. Demain, nous allons
25 vous proposer deux réactions à des requêtes de l'Accusation dans le cadre
26 de la règle 92 bis. Il nous semble que la requête de l'Accusation dépassait
27 le nombre total de mots admissibles normalement. Il nous semblait que
28 puisque le dépassement n'était que limité, il ne nous semblait pas
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1 pertinent d'y faire objection, mais il nous semblait, dans ce cas-là,
2 pertinent de pouvoir, dans chacun des cas, répondre, nous aussi, de façon
3 exhaustive et donc de pouvoir excéder la limite de mots de 100 ou 200 mots.
4 Nous ne faisons pas objection à l'Accusation et je ne pense pas que
5 l'Accusation fasse objection non plus, je souhaite donc demander au
6 Tribunal d'avoir la bonté de nous accorder le droit de dépasser de 100 ou
7 200 mots la limite officiellement admise.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, il est fait droit à votre demande et nous
9 autorisons à aller jusqu'à 200 mots.
10 M. MURPHY : Merci beaucoup, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Y a-t-il d'autres questions ? Pas d'autres
12 questions.
13 Alors, demain, nous reprendrons l'audience. Comme vous le savez,
14 cette audience débutera à 14 heures 15.
15 Je vous souhaite donc une bonne soirée.
16 --- L'audience est levée à 18 heures 11 et reprendra le mardi 31
17 octobre 2006, à 14 heures 15.
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