Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 5 avril 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 10 heures 01.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le

7 numéro de l'affaire, s'il vous plaît ?

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

9 tous et à toutes. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre

10 Prlic et consorts. Merci.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je salue

12 M. Scott, je salue Mmes et MM. les avocats, je salue MM. les accusés, et je

13 salue M. l'Ambassadeur, dont le témoignage va s'achever ce jour. Nous

14 poursuivons le contre-interrogatoire. Alors, étant précisé concernant le

15 temps, nous allons faire pendant une heure et demie donc le contre-

16 interrogatoire; on fera une pause de 20 minutes. On reprendra ensuite, ce

17 qui devrait nous emmener aux environs de 13 heures 15, 13 heures 20. On

18 fera un "break" d'une durée d'une heure pour des raisons administratives,

19 et également pour permettre aux uns et aux autres de se restaurer, et nous

20 reprendrons aux environs de 14 heures 15, 14 heures 20, et j'ose espérer

21 que le contre-interrogatoire, avec les questions additionnelles et autres,

22 se terminera aux environs de 16 heures, pour permettre après aux accusés

23 d'intervenir sur les problèmes de procédure, ce qui devrait au plus tard

24 nous conduire à 17 heures, mais si nous terminons avant cela ne sera que

25 mieux.

26 Je donne la parole maintenant à la suite de la Défense pour le contre-

27 interrogatoire.

28 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

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1 LE TÉMOIN : HERBERT OKUN [Reprise]

2 [Le témoin répond par l'interprète]

3 Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak : [Suite]

4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

5 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Alors, en attendant que nous fassions

6 le reste, j'ai l'impression qu'il me reste une trentaine de minutes;

7 j'aimerais que la chose soit vérifiée.

8 Avant que de continuer à poser mes questions, j'aimerais que dans le

9 prétoire électronique on nous montre le 3D 00873.

10 Q. Dans l'attente de ce document, je demanderais à

11 M. l'Ambassadeur, quelque chose : Monsieur l'Ambassadeur, je me propose

12 d'énumérer certaines initiatives de paix internationales ainsi que les

13 plans qui ont été proposés aux parties belligérantes. Il y a le plan

14 Cutileiro du mois de mars 1992, puis le plan Vance-Owen 1992/1993, qui a

15 évolué, qui a été modifié. Puis ensuite, les propositions émanant de la

16 communauté internationale pour ce qui est de l'organisation de la Bosnie-

17 Herzégovine en sa qualité d'union de trois républiques. Genève, le 20 août

18 1993, puis il y a l'accord de Washington du 1er mars 1994. Puis, le plan du

19 Groupe de contact concernant l'aménagement intérieur en deux entités,

20 Genève, 4 juillet 1994, et pour finir les accords de Dayton le 10 novembre

21 1995.

22 Monsieur l'Ambassadeur, est-ce bien ce que la communauté internationale a

23 placé sur la table devant les parties en conflit en Bosnie-Herzégovine au

24 fil de ces années-là ?

25 R. Oui, c'est cela. Vous avez omis deux plans. L'un était le plan Owen-

26 Stoltenberg, et l'autre s'appelait le plan Invincible qui a été rédigé sur

27 le bateau de guerre britannique, mais au fond, votre présentation est

28 correcte.

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1 Q. Oui, le bateau s'appelait "Invincible."

2 Ce que je voudrais savoir : à chacune de ces propositions est-ce que la

3 partie croate a été la première a signé, et n'a jamais retiré sa

4 signature ?

5 R. Je vous comprends en serbo-croate et je lis ici l'anglais, mais je

6 n'entends rien dans mes écouteurs. Est-ce que cela peut -- pour régler,

7 j'ai appuyé un peu tous ces boutons, mais cela n'a pas aidé.

8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Numéro 4.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Pouvez-vous parler, mon Général, pour que nous

10 testions le système ?

11 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

12 Q. Bonjour, bonjour.

13 R. Je n'entends que du serbo-croate. Excusez-moi. Est-ce que je devrais

14 plutôt prendre ces écouteurs.

15 Q. Un, un, deux, deux.

16 R. Oui, merci beaucoup. Cela y est, maintenant. C'est bon.

17 Q. Ma question était la suivante : est-ce que chacun --

18 R. Alors, oui, pour ce qui est de vos questions et de vos

19 propositions, n'a-t-elle pas été la première à signer, la partie croate.

20 N'a-t-elle jamais retiré sa signature ?

21 Alors, c'est le cas pour ce qui est du plan Cutileiro et du plan de Vance-

22 Owen. Je n'ai pas été impliqué dans d'autres, ce qui fait que je ne peux

23 pas en être certain. Je ne peux pas dire que je le sais pour les autres,

24 mais pour ce qui est du plan Cutileiro de 1992 et du plan Vance-Owen

25 janvier 1993, il est vrai que la partie croate a été la première à les

26 signer.

27 Q. Merci. Pourrons nous constater qu'à Dayton pour finir, nous avons

28 obtenu et vous en votre qualité d'analyste politique, vous le savez je

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1 crois, nous avons eu un Etat partagé, une Fédération d'un côté et une

2 Republika Srpska avec 49 % des territoires d'un autre côté. Est-ce que

3 c'est bien cela d'après les connaissances qui sont les vôtres ?

4 R. Oui. Je suis conscient du fait que le plan de Dayton a partagé l'Etat

5 de Bosnie-Herzégovine en deux moitiés, moitié étant la fédération entre les

6 Croates et les Musulmans, à 51 % du territoire et la Republika Srpska

7 occupant 49 %. On parle de territoire.

8 Q. Merci. Alors, avez-vous connaissance d'un autre fait : d'après le

9 recensement de la population de 1991 sur le territoire de la Republika

10 Srpska, il est resté moins de 10 % des Croates qui y résidaient, qui

11 résidaient sur ce territoire avant la guerre. Il est resté -- enfin, il est

12 parti autant de Musulmans, 85 % peut-être deux à trois % de plus de Croates

13 qui sont partis et qui ne vivent plus sur le territoire de la Republika

14 Srpska; êtes-vous au courant ?

15 R. Enfin, je n'étais pas au courant de ces chiffres précis.

16 Q. Merci. Alors, je vais passer à la question suivante. Le livre : "Ma

17 vie," de Bill Clinton, avez-vous eu en main son livre intitulé : "Ma vie" ?

18 R. Jamais.

19 Q. Peu importe. Il présente ici certaines thèses politiques. J'aimerais

20 qu'on nous montre cela, qu'on nous montre d'abord la page de garde, la page

21 de couverture, et ensuite, passez au 3D 00873.

22 3D, disais-je, 00873. Alors, c'est le livre. Maintenant, on pourrait passer

23 au 3D 00856, 3D 00856.

24 Dans son livre, le président américain, Bill Clinton, aux pages qui sont

25 traduites, et je voudrais en donner lecture et je vous demanderais de nous

26 dire si vous êtes d'accord avec ses évaluations, ses estimations et sa

27 façon de voir les faits.

28 Alors, il dit que Slobodan Milosevic avait fait un spectacle en faisant

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1 mine de retirer son armée de la Bosnie, alors que l'armement, les réserves

2 avaient été placées sous le commandement du commandant des Serbes de

3 Bosnie, Ratko Mladic. Les combats et les tueries ont continué dans l'année

4 1992 et les dirigeants de la Communauté européenne ont été réservés alors

5 que le gouvernement Bush était peu certain de ce qu'il convenait de faire

6 sans être très disposé à s'aventurer dans de nouveaux problèmes dans une

7 année électorale, ce qui fait que les problèmes ont été abandonnés à la

8 Communauté européenne pour que celle-ci les résolve.

9 En continuation, il dit que le gouvernement Bush s'était employé

10 auprès des Nations Unies de façon en faveur de l'imposition de sanctions

11 économiques à la Serbie, mesure à laquelle s'étaient opposés le secrétaire

12 général Boutros Boutros-Ghali, les Français et les Anglais. Puis, il dit -

13 et là je saute quelques passages - puis, M. Clinton dit : "Le problème

14 était le suivant : avec l'embargo, c'est que les Serbes avaient

15 suffisamment d'armes et de munitions et avaient de quoi à se battre pendant

16 des années encore."

17 Alors, maintenant, je voudrais passer à la page 849 de la version croate,

18 page 489, où il dit : "Début février, j'ai décidé à ne pas apporter mon

19 soutien au plan Vance-Owen," puis pour continuer, il dit : "Quelques jours

20 plus tard, nous avons conclu ou complété une nouvelle proposition pour la

21 politique en Bosnie et Christopher Warren dit que les Etat Unis était

22 disposé à discuter d'un accord nouveau."

23 Puis ensuite, la même page, on dit : "Qu'au même mois le 9, le président

24 français, François Mitterrand, a fait savoir que bien qu'il ait envoyé 5

25 000 soldats français en Bosnie, dans le cadre des forces humanitaires

26 envoyées par les Nations Unies, il serait plus enclin à l'égard des Serbes

27 que moi et serait moins porté sur la possibilité de voir une Bosnie unifiée

28 dirigée par les Musulmans."

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1 "J'ai rencontré le chancelier Helmut Kohl le 26 mars, et il se plaint du

2 fait que dans les séquences des événements il y avait des personnes

3 favorables à la suppression de l'embargo sur les armes. Il n'a pas réussi à

4 convaincre les Français, les Britanniques qui pensaient que cela ne ferait

5 que prolonger la présence des forces de l'ONU.

6 "Les membres de l'équipe américaine pour l'aide humanitaire militaire et

7 autres sont revenus de Bosnie avec des requêtes demandant à ce que nous

8 nous impliquions militairement pour faire stopper le conflit."

9 Alors, je saute quelques passages et je dis : "Vers la fin du mois l'équipe

10 chargée de la politique étrangère a recommandé si l'on ne pouvait pas faire

11 stopper les Serbes dans leur tuerie, supprimer l'embargo sur les armes à

12 l'égard des Musulmans et entamer des frappes aériennes en direction des

13 cibles militaires serbes."

14 Le paragraphe suivant dit : "A la fin de cette période des 100 premiers

15 jours, nous étions encore loin d'une solution satisfaisante pour ce qui est

16 de la crise en Bosnie. Les Britanniques et les Français ont rejeté les

17 efforts déployés par Warren Christopher et ont réaffirmé leur droit d'être

18 ceux qui étaient en première position pour évoquer les solutions des

19 problèmes."

20 Le dernier paragraphe que je me propose de vous lire : "Je suis tombé dans

21 ce que Holbrooke a appelé d'omission -- ou qualifié d'omission collective

22 de la plus grande de l'Occident au cours des 30 dernières années. Dans son

23 livre, il parle de plusieurs éléments d'omission. D'abord, fausse

24 interprétation de l'histoire des Balkans et ainsi de suite; deuxièmement,

25 perte de l'importance de stratégie yougoslave après la Guerre froide;

26 troisièmement, la victoire du nationalisme vis-à-vis de la -- sur la

27 démocratie qui était le facteur prédominant de l'ex-Yougoslavie;

28 quatrièmement, le manque de volonté du gouvernement Bush après la guerre en

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1 Irak de 1991 de s'impliquer dans une autre action militaire; et

2 cinquièmement, décision des Etats-Unis d'Amérique de reléguer la question

3 vers la Communauté européenne plutôt qu'à l'OTAN et une réponse assez

4 confuse de l'Europe."

5 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Cela fait

6 sept minutes que nous entendons -- nous écoutons des citations sans en

7 arriver à la question.

8 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Mais bien sûr qu'on en arrivera à la

9 question. Ce n'est pas une déclaration. Je donne lecture et vous l'avez

10 fait du reste vous-même.

11 Alors, dans -- pour ce qui est des dires d'Holbrooke --

12 M. SCOTT : [interprétation] Je fais objection à ce qu'il soit donné lecture

13 plus en avant de ce document et il faudrait que

14 M. Praljak pose sa question directement.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Praljak, vous aviez terminé les cinq

16 points de M. Holbrooke, donc, allez-y posez votre question parce que

17 l'Ambassadeur a eu également le temps de lire le passage de M. Bill

18 Clinton, donc, vous pouvez peut-être lui poser la question maintenant.

19 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] J'ai encore deux lignes, Monsieur le

20 Président. Alors, sur cette liste d'Holbrooke : "J'ajouterais un sixième

21 élément. Certains dirigeants européens ne voulaient pas avoir un Etat

22 musulman au cœur des Balkans en redoutant que cela pourrait servir de base

23 pour l'implantation d'un extrémisme et le résultat de cette mise de côté du

24 problème a aux finalités été le même."

25 Q. Alors, Monsieur l'Ambassadeur, je vous demande de me dire

26 -- de dire, plutôt, pas à moi mais aux Juges de la Chambre, si

27 M. Bill Clinton a présenté avec exactitude les problèmes que vous avez

28 constatés, vous-même, dans la présentation des différents plans de paix

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1 destinés à la Bosnie-Herzégovine ?

2 R. Une partie de cette analyse et de son analyse est correct, et une

3 partie ne l'est pas.

4 Q. Est-ce que vous pourriez dire -- nous dire, ou non, laquelle des

5 parties de l'analyse n'est pas correcte ?

6 R. Celle qui n'est pas correcte c'est tout d'abord le rejet du plan Vance-

7 Owen. Vous avez remarqué dans le livre que je vois pour la première fois

8 comme je l'ai dit auparavant qu'il n'avance aucune raison pour ce qui est

9 du rejet du plan Vance-Owen par les Etats-Unis et ce silence en dit très

10 long. Alors, pour en venir aux points qu'il énumère en citant Holbrooke, le

11 premier point n'est pas correct. Il n'y a pas lieu de parler de mauvaise

12 interprétation de la situation par les négociateurs. La presse a souvent

13 parlé de ces rivalités ou haines d'antan et comme la presse souvent veut le

14 faire les négociateurs ont compris parfaitement bien la chose comme cela a

15 été le cas des pays européens pour ce qui est de la situation prévalente

16 dans les Balkans parce que ce n'était pas la première fois dans l'histoire

17 de l'Europe que les Balkans ont constitué un grave problème pour le reste

18 de l'Europe pour autant -- pour autant que nous le sachions tous.

19 Le deuxième point est correct. La perte de l'importance stratégique

20 de la Yougoslavie, une fois la Guerre froide terminée, étant donné que la

21 Yougoslavie pendant la Guerre froide en sa qualité de leader des non-

22 alignés avait beaucoup d'importance face à l'Union soviétique pendant cette

23 période de Guerre froide.

24 Le troisième point porte sur le nationalisme qui l'emporte vis-à-vis

25 de la démocratie. Cela c'est un point qui constitue un cliché. Il n'y a

26 rien à ajouter. Pour ce qui est du gouvernement Bush, ce n'est pas exact.

27 Le gouvernement Bush n'a pas mis cela de côté. La décision des Nations

28 Unies de re-balancer cela à l'Europe au lieu de l'OTAN, cela est également

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1 inexact. Pour finir, et il y a eu une réponse plutôt passive et confuse,

2 maladroite de la part de l'Europe, ceci est grandement exact, enfin, dans

3 une grand mesure exact. La réponse de l'Europe n'a pas été passive, mais on

4 ne peut pas non plus la qualifier d'active notamment pas pour ce qui est du

5 domaine militaire.

6 Pour ce qui est du sixième point évoqué par le président Clinton au

7 sujet de la création d'un Etat musulman dans le cadre de l'Europe, il y a

8 des leaders européens qui ont été de cet avis-là, cela ne fait pas l'ombre

9 d'un doute, mais il ne convient pas d'oublier que l'Albanie est aussi un

10 Etat musulman comme Clinton le dit qui se trouve déjà au cœur de l'Europe.

11 L'Albanie est également membre de la conférence de la -- de l'organisation

12 de la Conférence islamique, et il y a donc là déjà un Etat musulman dans

13 les Balkans, donc, Clinton exagère. C'est ma réponse.

14 Q. Mais seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'avec certaines

15 exagérations au niveau de la façon de comprendre -- a soulevé sur -- de

16 façon considérable sur la création de la politique dans les Balkans et

17 notamment en Bosnie-Herzégovine ? Je crois que nous pouvons tomber d'accord

18 là-dessus ? L'Amérique et Bill Clinton ont créé ce qui a -- et constituait

19 la teneur des accords de Washington et l'accord de Dayton; est-ce bien

20 exact ?

21 R. C'est absolument exact.

22 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Alors j'aimerais maintenant qu'on nous

23 montre sur le prétoire électronique la pièce 3D 00858. Je répète 3D 00858.

24 Q. Il s'agit d'une interview du général Jacques Klein. Vous savez

25 certainement qui était M. Jacques Klein ?

26 R. Il n'était pas général, soi-disant en passant. C'était quelqu'un qui a

27 travaillé dans le service des Relations internationales.

28 Q. Bien. Alors, je voudrais que nous donnions lecture d'un petit passage,

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1 vers la fin de son interview M. Klein dit la chose suivante : "Dans la

2 politique, il y a des réalités que bon nombre de personnes ne comprennent

3 pas ou ne veulent pas voir. Combien de fois m'a-t-on dit" et là il se

4 réfère à M. Izetbegovic, à M. Tudjman, et cetera. Il disait : "Je ferais

5 volontiers comme vous dites, M. Klein, mais si je le dis à mon peuple, je

6 vais perdre le soutien dont je bénéficie. Il dit : "Après le président

7 Tudjman m'ait dit qu'Izetbegovic lui avait véritablement proposé la

8 sécession de l'Herzégovine, j'ai posé la question au président de la

9 Bosnie-Herzégovine, de façon ouverte, à Sarajevo et il a dit que pour lui

10 les Croates c'était un grand problème, il voudrait bien s'en débarrasser et

11 qu'a son avis, c'est la meilleure des façons de le faire. Mais Tudjman n'a

12 pas accepté cette offre."

13 Alors, ma question se lit comme suit : est-ce que vous, dans vos activités,

14 vous avez entendu ouï-dire que M. Izetbegovic avait proposé à Franjo

15 Tudjman l'Herzégovine pour en faire une sécession et l'annexer à la Croatie

16 et que Franjo Tudjman aurait refusé ? Si vous n'avez pas entendu parler de

17 la chose, dites-le-nous aussi.

18 R. Non, je n'ai rien entendu de dire de la sorte. C'est tout à fait le

19 contraire. Alija Izetbegovic, président de la Bosnie, a été tenace en

20 public et à titre privé pour affirmer qu'il voulait maintenir l'intégrité

21 territoriale. C'était une espèce d'idée fixe qu'il avait.

22 Q. Je vais vous énumérer cinq ou six noms de sites en Bosnie-Herzégovine :

23 Trusina, Grabovica, Uzdol, Doljani, Hoducko, Gracanica, Krizancevo Selo. Je

24 m'arrête là.

25 Monsieur l'Ambassadeur, la question est la suivante : avez-vous entendu à

26 quelle occasion que ce soit les noms de sites que je viens de vous lire ?

27 R. Oui, Gracanica. Le reste, non, je ne m'en souviens pas. Oui, oui, je

28 devrais aussi dire Uzdol aussi. Uzdol et Gracanica, je m'en souviens. Le

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1 reste, non.

2 Q. Dites-nous : au sujet de quoi que vous avez gardé Uzdol et Gracanica en

3 mémoire ?

4 R. En raison des combats là-bas et il me semble que ces combats étaient

5 plutôt âpres, et c'est probablement cela qui a attiré notre attention.

6 Q. Je voudrais attirer votre attention sur le fait qu'à Uzdol, le 14

7 septembre 1993, il y a eu un crime vis-à-vis de civil croate et il y en a

8 eu 141 de tués par l'ABiH. A Gracanica, il a été tué 21 civils, à Doljani

9 63. Ma question est la suivante, c'est une question célèbre : là où il n'y

10 a pas eu de télévision pour filmer ce qui s'est passé comme cela est le cas

11 de Stupni Do et Ahmici, ce sont des choses dont de facto on a rien su.

12 C'est la vieille thèse avancée par la théorie des communications des médias

13 de nos jours. Si ce n'est pas diffusé par la BBC ou CNN, cela ne s'est pas

14 passé. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire --

15 R. Non, non, je ne suis pas du tout d'accord avec vous, mon Général, parce

16 que nous avons eu des soldats de la FORPRONU de l'ONU qui étaient sur le

17 terrain et qui ont enquêté, puis on a eu des observateurs de MOCE. Vous

18 venez de poser la question, je vous ai dit qu'au bout de 14 ans j'ai gardé

19 en mémoire Uzdol. Je tiens à attirer votre attention et je puis vous

20 assurer que puisque je suis intervenu il y a 14 ans, donc, entre 1993 et à

21 la date d'aujourd'hui avril 2007, c'est la première fois que j'entends

22 quelqu'un me mentionner Uzdol. Je ne fais pas d'objection, mais je pense

23 que l'interprétation que vous en faites n'est pas la bonne.

24 Q. Toujours est-il que nous pouvons constater que sur les sites énumérés

25 vous avez gardé en mémoire les deux que vous avez dit en raison de conflit

26 qu'il y a eus là-bas, mais pas en raison de victimes croates.

27 Je ne veux pas priver les autres du temps qui est les leurs, je vais

28 terminer en vous demandant --

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1 R. Excusez-moi, Général. Excusez-moi. Merci. Lorsque j'ai parlé de

2 combat, j'ai sous-entendu l'événement, à savoir les exécutions. Nous en

3 avons eues vent.

4 Q. Monsieur l'Ambassadeur, savez-vous qu'à Trusina, il a été tué 23

5 civils, et soldats prisonniers, et cela s'est passé le 16, le même jour où

6 il y a eu les événements d'Ahmici ? Est-ce que vous avez appris des

7 événements d'Ahmici, parce que cela a été filmé, mais Trusina vous n'avez

8 pas été mis au courant parce que cela n'a pas été filmé ?

9 Alors, dites-moi, sincèrement, avez-vous entendu parler de

10 Trusina à le même site qui a fait l'objet donc d'événements regrettables le

11 même jour, mais qui n'ont pas été filmé où les victimes étaient des

12 Croates ?

13 R. Comme je l'ai déjà dit, nous avons été informés de manière adéquate et

14 rapide, peut-être pas toujours le jour même, mais nous étions informés de

15 manière adéquate et rapide par les observateurs -- la Mission d'observation

16 de l'Union européenne et par les forces de la FORPRONU de l'ONU des

17 événements qui avaient eu lieu en Bosnie-Herzégovine.

18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, je ne puis

19 m'empêcher de me demander où vous voulez aller avec votre question. Je dois

20 dire que depuis ce matin, je ne vois pas très bien en quoi cela peut aider

21 la Chambre. C'est M. Klein, ce sont des ouï-dire de cinquième main

22 pratiquement, et donc vraiment je me demande : pourquoi vous utiliser votre

23 temps de cette manière ?

24 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, c'est très

25 simple. Je veux démontrer quels ont été les conflits qui se sont produits

26 au niveau de la communauté internationale sur la façon de surmonter les

27 problèmes et quelles ont été les séquelles de ces conflits sur la fin de

28 l'achèvement des conflits.

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1 M. Jacques Klein n'était pas quelqu'un de -- ce n'était pas n'importe

2 qui. C'était quelqu'un -- un envoyé spécial des Nations Unies, un

3 intervenant politique qui était envoyé là-bas pour apaiser la situation, et

4 ce n'est pas la seule déclaration qui nous dit qu'Izetbegovic avait proposé

5 à Tudjman la sécession de l'Herzégovine. Pour ce qui est des rapports de

6 télévision, je ne peux pas en dire plus.

7 Mais ce que je voulais dire par là c'est que les opinions

8 concernant les événements se produisant là-bas s'étaient formulés de

9 suivant la présence ou l'absence de la BBC et de la CNN du lieu des

10 événements. Comme cela se produit souvent dans le monde, et quand on voit

11 des cadavres de filmés, bien entendu, cela influx sur l'opinion que les uns

12 ou les autres se font des parties au conflit.

13 C'est la façon dont je voulais m'adresser à l'ambassadeur, je n'ai

14 pas suffisamment de temps, mais je pense que les positions que j'ai

15 formulées sont tout à fait claires pour ce qui est de ce qui s'est passé et

16 pour ce qui est des informations qui ont influé sur les positions

17 ultérieurement prises et sur l'intervention de M. Okun et des autres.

18 Q. Ma dernière question, Monsieur, et j'en finis avec mes questions :

19 hier, lorsque je vous ai demandé si vous aviez à l'esprit des exemples

20 autres dans l'histoire, vous avez, par exemple, mentionné le fait que les

21 Japonais aidaient les deux parties au conflit pendant leur guerre civil, ce

22 qui est normal parce que les Chinois étaient leurs ennemis, mais est-ce que

23 vous pouvez vous imaginer la position d'un commandant de l'armée quand il

24 l'aide une armée en laissait passer un convoi d'armes et ces mêmes armes

25 sont utilisées le lendemain pour lui tirer dessus à lui et à ses hommes ?

26 Alors, nous avons laissé passer des armes vers la Bosnie-Herzégovine mais

27 pas pour qu'on nous tire dessus. Alors, quand on laissait passer un convoi

28 et on en a laissé passer des convois de façon régulière, et c'était une

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1 armée de 250 000 hommes pour que le lendemain, elle se tourne contre nous,

2 est-ce que vous pouvez comprendre la position du soldat ou du commandant ?

3 Est-ce que vous ne vous êtes pas posé la question de savoir : comme se

4 fait-il que quelqu'un ne m'est pas abattu, parce que ces armes que j'ai

5 laissé passer ont servi à tuer son frère ou son cousin, ou qui sais-je ?

6 Voilà, c'est tout.

7 R. Oui, bien sûr.

8 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, je vous interromps

9 avant que vous répondiez. Pouvons-nous avoir la date auquel fait référence

10 M. Praljak lorsqu'il dit qu'un convoi est passé et que les armes ont été

11 utilisées par tuer des soldats croates ?

12 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Jusqu'à présent, nous avons montré

13 toute une série de documents à ce sujet, je vais rappeler à

14 M. Scott que je vais présenter au Tribunal toute l'aide apporté par la

15 Croatie sur 100 000 pages sur des CD et 33 classeurs que j'en ai sortis, 33

16 % sont donc sur des papiers parce que les Juges préfèrent la version papier

17 pour qu'ils puissent l'étudier; 100 000 pages de document, Monsieur Scott,

18 dans ce procès pour conforter la thèse des armes qui n'ont jamais cessé de

19 transiter vers la partie musulmane.

20 Si vous vous penchez sur la question logiquement : si on n'a pas laissé

21 passer ces armes nous les Croates d'Herceg-Bosna avec quoi ont-ils donc

22 bien pu tirer ? Je voudrais que M. l'Ambassadeur Okun me réponde.

23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak,

24 M. Scott vous a posé une question. Il vous a demandé une date. La réponse

25 que vous avez donnée n'a absolument pas répondu cette question. Vous parlez

26 de quelque chose complètement différent. Il serait utile que vous voyez un

27 peu plus concentré dans vos réponses.

28 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que

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1 mon éminent confrère, le Procureur, ait le droit de poser ces questions à

2 l'accusé. Il peut essayer, mais l'autre partie n'est pas forcément censée

3 répondre.

4 Alors, puisque j'ai pris la parole, je sens dire -- je sens donner les

5 dates et les numéros de documents pour autant que je le sache d'après mes

6 mémoires, jusqu'à présent, il y a eu au moins six documents qui montrent de

7 façon évidente et confirmé par le témoin, qui montrent donc que depuis la

8 Croatie, pendant l'année 1992 et pendant l'année 1993, suite aux détenus

9 des conflits avec les Croates, que des armes du côté croate sont arrivées

10 jusqu'à l'ABiH. Ce sont des pièces qui existent au compte rendu d'audience

11 et je crois que ce que M. Praljak vient de dire a des fondements. Cela ne

12 peut pas être contesté, et la Défense a le droit de procéder par

13 anticipation, s'agissant de pièces à conviction qu'elle a l'intention de

14 verser au dossier.

15 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] M. Okun a dit hier du reste que la

16 Croatie --

17 M. SCOTT : [interprétation] Avant que cette question soit posée, j'aimerais

18 répondre à ce qui a été dit concernant ma question. Bien sûr, ma question

19 n'était pas posée vraiment à M. Praljak, tout ce que je voulais faire

20 c'était faire une objection, je ne suis pas en train de dialoguer avec M.

21 Praljak et je ne souhaite pas le faire en quelconque moment. J'ai objecté

22 parce que je souhaite que la Chambre soutienne nos objections et qu'on

23 demande à l'accusé de donner ces renseignements. Cela c'était la première

24 chose.

25 La deuxième chose, nous [imperceptible], Monsieur le Président, et je

26 continue de soulever cette question à chaque fois qu'elle est soulevée. La

27 Chambre sait très bien que pendant la guerre, entre 1991 et 1995, dans

28 certains endroits, de nombreux endroits, les Croates et les Musulmans

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1 combattaient ensemble contre les Serbes. Puis, à nouveau, en 1980, 1992 --

2 entre 1991 et 1995, et en plus en 1993, ils se battaient encore contre les

3 Serbe en Bosnie lorsque ces déclarations générales sont faites sur comment

4 on armait les Musulmans, et cetera, et cetera. Cela n'a une signification

5 que lorsqu'on parle de certaines dates et de certains endroits. Lorsque la

6 Croatie a donné des armes à la Bosnie en 1991 et au début 1992 pour se

7 battre contre les Serbes, cela n'a rien à voir avec le fait que ces armes

8 ont été utilisées pour soi-disant tuer ses propres soldats.

9 Donc, ma question est très -- mon objection est très précise et très

10 spécifique -- la question est très spécifique et très particulière, et j'ai

11 demandé à M. Praljak de donner un cadre à ses questions, une date à quel

12 moment il a utilisé le convoi. On laissait passer -- on a laissé passer des

13 convois, et la date exacte à laquelle ce convoi est passé et le lendemain

14 des soldats ont été tués. Donc je demande à l'accusé de répondre, de donner

15 un cadre temporel très clair à cette question.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur en plusieurs minutes vient de vous dire

17 qu'il ne conteste pas que des armes ont été données en 1991 et 1992. En

18 revanche sur la période cruciale qui est 1993, si vous vous estimez que

19 votre question posée au témoin porte sur 1993, à quelle période exacte

20 faites-vous référence concernant les armes qui ont été adressées à la

21 Bosnie-Herzégovine.

22 En mémoire, je me souviens qu'on a vu des documents qui établissaient

23 des livraisons d'armes, je n'ai pas ces documents sous les yeux mais vous

24 vous devez mieux les connaître que moi et vous devez, concernant ces

25 documents, vous souvenir des dates. Donc, voilà.

26 Alors, Monsieur Praljak, pouvez-vous préciser votre question en

27 faisant une référence précise à des dates puisque l'objection porte sur

28 cela ?

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1 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Messieurs les Juges, non pas cinq, six,

2 mais plus de 20 ou 30 documents ont déjà été montrés aux Juges de cette

3 Chambre jusqu'au mois d'avril 1993, il y en a même d'après, où Micija Vasic

4 [phon], à l'intention d'Arif Pasalic, et ce témoin dont je ne vais pas

5 mentionner maintenant le numéro, qui a explicitement dit que les armes

6 venaient à Mostar en allant d'abord à Visoko dans le courant de l'été 1993

7 alors que le conflit était déjà là. Dans le journal de M. Okun, c'est

8 mentionné également.

9 Quatrièmement, M. l'Ambassadeur, en répondant à une question que j'ai posé

10 hier, l'a confirmé également pour dire que des armes de Croatie ou en

11 passant par la Croatie, parvenaient à l'armée de Bosnie-Herzégovine pendant

12 toute la guerre.

13 Ma question est tout à fait logique, elle a un fondement. Je n'ai pas

14 préparé le renseignement exact, mais je voudrais que

15 M. l'Ambassadeur me réponde s'il le souhaite.

16 Q. Monsieur l'Ambassadeur, savez-vous si, oui ou non, passer par la

17 Croatie en provenance de Turquie, de l'Iran, d'Argentine --

18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak --

19 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

20 Q. -- des armes sont arrivées ?

21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, s'il vous plaît,

22 vous avez déjà posé cette question hier, on vous y a répondu. Il a été

23 répondu à cette question, nous n'avons pas le temps de reposer la même

24 question au même témoin.

25 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

26 Q. Monsieur Okun, donnez-nous votre opinion et merci.

27 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

28 Q. Merci, Monsieur, d'avoir répondu à mes questions. Monsieur

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1 l'Ambassadeur, je vous souhaite un bon voyage de retour.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-on maintenant passer à un autre défenseur ?

3 Maître Alaburic.

4 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs mes

5 confrères.

6 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur. Bonjour à tous.

8 Je suis le conseil de la Défense du général Milivoj Petkovic, et je

9 voudrais tirer au clair certains détails qui ont de l'importance pour cette

10 affaire parce que j'estime que votre expérience diplomatique et d'analyste

11 politique peuvent aider les Juges à mieux comprendre les événements qui se

12 sont produits sur nos territoires à nous, ceux de l'ex-Yougoslavie.

13 Alors, vous venez de recevoir un jeu de documents auquel je vais

14 probablement me référer. Cela dépendra bien entendu des réponses que vous

15 apporterez à mes questions.

16 Dans votre journal, il est fait mention de la Commission Badinter. Hier

17 encore, vous avez à plusieurs reprises mentionné ladite Commission. Ma

18 question pour cela est la suivante : Est-ce que c'est bien une Commission

19 d'experts en matière de droit en provenance de pays européens censée

20 définir des règles juridiques pour comme vous l'avez dit, un divorce à

21 l'amiable entre les républiques de l'ex-Yougoslavie ?

22 R. La Commission Badinter - dont le nom est, en réalité, la Commission

23 d'arbitrage, le président en était l'excellent ancien ministre de la

24 Justice, M. Robert Badinter - avait pour but où on lui a posé beaucoup de

25 questions. C'est Lord Carrington qui lui a donc posé de nombreuses

26 questions d'une façon à aider le Conseil sur l'ex-Yougoslavie sur --

27 concernant un grand nombre de questions. L'une de ces questions bien

28 entendu était la séparation, mais il y avait d'autres questions. La

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1 Commission Badinter était donc consultée pour donner son point de vue dans

2 le cadre du droit international, mais il y avait toute une série de

3 questions -- selon le public.

4 Q. Merci beaucoup de cette réponse détaillée. Alors, j'aimerais maintenant

5 que vous vous référiez à mon jeu de documents. J'aimerais qu'on nous

6 affiche cela sur les moniteurs, 4D 00540. Il s'agit de trois opinions

7 formulées par cette Commission d'arbitrage présidée par Badinter suite à

8 des questions posées par Lord Carrington. Ce qui m'intéressera ici, en ce

9 moment : si c'est la question des frontières.

10 L'opinion numéro 2 qui se trouve en page 3, porte sur des points qui sont

11 les suivants les Serbes en Croatie et en Bosnie-Herzégovine en leur qualité

12 de peuple constitutif de la Yougoslavie peuvent-ils avoir le droit à

13 l'autodétermination. Au paragraphe 1 il est dit : "La commission considère

14 que le droit à l'autodétermination ne peut pas impliquer des modifications

15 de frontière existante au moment de l'acquisition de l'indépendance, à

16 moins que l'Etat -- ou les Etats concernés ne se mettent d'accord de façon

17 autre sur la chose."

18 Opinion numéro 3, cela se rapporte à la question de savoir si les

19 frontières internes entre la Serbie et la Croatie, et la Bosnie-Herzégovine

20 et la Serbie devaient -- pouvaient être considérées comme étant des

21 frontières en application de droit public international."

22 Au paragraphe 2 de la réponse, il est dit, au second : "Les

23 frontières entre la Croatie et la Serbie, et entre la Bosnie-Herzégovine et

24 la Serbie ne doivent pas être modifiées à moins d'un libre accord auquel

25 les parties impliquées arriveraient."

26 Je vous donne une interprétation ou traduction libre que je fais de

27 l'anglais. Il y a peut-être une différence entre ce que je dis et le texte

28 que vous êtes en train de lire.

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1 Alors, Monsieur Okun, est-ce que ces opinions formulées par la

2 Commission Badinter sont devenues des positions adoptées par la Conférence

3 sur l'ex-Yougoslavie et du Conseil des ministres de la Communauté

4 européenne et de tous les autres facteurs intervenants sur la scène

5 politique internationale ?

6 R. Oui. Ces positions, ces opinions rendues par la Commission d'arbitrage

7 étaient acceptées de manière très large par la communauté internationale.

8 Q. Monsieur Okun, vous devez certainement le savoir, puisque vous avez

9 déjà été impliqué dans l'ex-Yougoslavie, savoir que le Conseil des

10 ministres de l'Union européenne, de la Communauté européenne le 16 décembre

11 1991 à Bruxelles a adopté des lignes directrices pour la reconnaissance de

12 nouveaux Etats en Europe de l'Est et en Union Soviétique ?

13 R. C'est partiellement exact. Mais en sus de cela, Madame Alaburic, la

14 Communauté européenne et la Conférence de Lord Carrington sur l'ex-

15 Yougoslavie a demandé de manière formelle, que la Commission Badinter rende

16 une décision quant à savoir si les quatre Républiques qui avaient déclaré

17 leur indépendance pouvaient être reconnues par la Commission européenne.

18 Ces quatre Républiques étant, bien sûr, la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-

19 Herzégovine et la Macédoine. Il s'agit des quatre Républiques qui en

20 décembre 1991 avaient déjà déclaré leur indépendance. Elles n'avaient pas

21 encore été reconnues par qui que ce soit. Donc, Lord Carrington a demandé à

22 la Commission Carrington de rendre une opinion quant à savoir si et quelle

23 République méritait qu'on la reconnaisse.

24 Q. Ce que vous venez de dire à présent ne se rapporte pas directement au

25 document qui fait l'objet de ma question. Je suis au courant, toutefois, de

26 ce que vous venez de dire. Cela n'est pas contesté mais essayons de tirer

27 au clair le document au sujet duquel je vous ai posé la question, le 4D

28 00542. Je vous prie. Ce sont des documents qui suivent à ce que vous venez

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1 de dire et qui s'enchaînent sur ce que j'essaie de vous montrer.

2 Alors, dans ce document, instruction relative à la reconnaissance d'Etat

3 nouvellement créé en Europe de l'Est et en Union Soviétique. Chose qui a

4 été adoptée le 16 décembre 1991. Ce qui m'intéresse, en ce moment-ci, ce

5 sont les frontières, rien que les frontières. J'aimerais que l'on se penche

6 sur le troisième petit tiret, il est dit, que l'on acceptait les positions

7 communes dans ce processus de reconnaissance d'Etat nouvellement créé, qui

8 requiert, deux points, troisième alinéa : "Respect de l'inviolabilité de

9 toutes les frontières qui ne peuvent être modifiées que par des moyens

10 pacifiques, moyennant accord conjoint." Je suppose que vous avez

11 connaissance de ce document ?

12 R. Vous vous savez c'est tout à fait standard. Vous savez cela fait partie

13 de la charte des Nations Unies, c'est également dans la charte de la

14 société des nations. Ce n'a rien de différent par rapport à ce qui se passe

15 depuis des années. C'est quelque chose qui est connu de la communauté

16 internationale, qu'on ne change pas les frontières par force parce que,

17 sinon, c'est une agression telle que cela est défini par l'article 2 de la

18 charte des Nations Unies.

19 Q. Monsieur Okun, en ce moment-ci, nous sommes en train de parler de

20 l'année 1991 et de la Yougoslavie, où il n'y a toujours pas de frontière

21 internationalement reconnue. Ce dont je parle c'est un élément que l'on

22 avait considéré comme étant des frontières internes dans le cadre d'un Etat

23 qui s'appelait la Yougoslavie. Pour ne pas donc re narrer les documents qui

24 sont des documents internationaux, cela a un grand poids voulais-je dire

25 sur ce qui s'est passé entre les différentes Républiques ayant constitué

26 l'ex-Yougoslavie et l'organisation future de ces Etats. Etes-vous d'accord

27 avec moi ?

28 R. Comme je l'ai déjà dit quand je vous ai répondu hier, la Communauté

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1 européenne, et conformément à l'accord de Helsinki de 1975, avait déjà

2 décidé que les frontières internes de l'ex-Yougoslavie ne pouvaient être

3 modifiées sauf accord mutuel.

4 Q. Oui, alors tous ces documents ont précédé la position finale. Mais nous

5 pouvons tomber d'accord sur le fait que la communauté internationale de

6 façon incontestable n'allait reconnaître aucune modification des frontières

7 des Républiques de l'ex-Yougoslavie, à moins que celles-ci n'en conviennent

8 de façon pacifique. N'était-ce pas là l'action suivant laquelle s'était

9 déroulée la Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie et les activités

10 de toutes les autres organisations qui se sont penchées sur les questions

11 liées à l'ex-Yougoslavie. Etes-vous d'accord ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Je suppose que nous sommes d'accord pour dire que cette décision, tout

14 comme toutes les autres décisions émanant des institutions internationales,

15 était connue du président croate,

16 M. Franjo Tudjman. Avez-vous connaissance du fait qu'il ait été mis au

17 courant de cette décision ?

18 R. Je ne peux pas parler au nom du président sur n'importe quel sujet,

19 mais sur la question de savoir, de manière générale, si les frontières de

20 la Croatie par exemple, correspondaient à la frontière interne de la

21 Yougoslavie, s'il s'agissait de l'ensemble de la Croatie et si elles

22 pouvaient être modifiées ou non, bien entendu, il le savait. Cela est

23 devenu particulièrement important lorsque Vance et moi négocions avec --

24 pour cessation des hostilités, en Croatie, pendant l'invasion serbe de la

25 Croatie. Donc, bien entendu, c'est quelque chose qu'il avait à l'esprit.

26 Q. Veuillez me dire si le président Tudjman pouvait penser que cela

27 n'était valide que pour la Croatie ou que c'était quelque chose de valable,

28 d'en vigueur pour toutes les Républiques de l'ex-Yougoslavie ?

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1 R. Son opinion tout au moins, autant que je le sache, son attitude

2 principale c'était la Croatie. Est-ce que cela signifie que vous n'étiez

3 pas au courant du fait que le président Tudjman concernant ces frontières

4 du Conseil antifasciste de Libération nationale, indépendamment de

5 l'opinion qui serait la sienne, c'était quelque chose que la communauté

6 internationale ne permettrait pas de modifier à moins qu'il n'y ait accord

7 ou consentement mutuel des parties intéressées ? Alors, est-ce que cela

8 signifie que vous n'en n'aviez pas connaissance ?

9 R. Non, cela ne signifie pas ce que vous dites.

10 Q. Alors est-ce que vous pouvez me dire si vous aviez su que Franjo

11 Tudjman était au courant du fait que cette règle telle que formulée dans

12 les documents que nous venons de voir était en vigueur pour la totalité des

13 républiques de l'ex-Yougoslavie ?

14 R. Je suis tout à fait sûr -- que le président savait de manière abstraite

15 -- savait cela de manière abstraite mais cela n'avait pas nécessairement un

16 effet sur sa façon d'appliquer ses politiques et celles des personnes de

17 l'Herceg-Bosna en Bosnie.

18 Q. Monsieur Okun, on reviendra un peu plus tard à l'Herceg-Bosna. Je

19 voudrais au niveau des principes que nous tirions au clair ce qui

20 constituera des prémisses pour la suite de notre entretien.

21 Alors, d'après vous, le président Tudjman était-il conscient du fait

22 qu'entamer la question de la modification des frontières délimitées ou

23 fixées par le Conseil antifasciste de Libération nationale entre les

24 républiques de Yougoslavie résulterait par la question des frontières de la

25 Croatie, à savoir la jonction de certains territoires de la République de

26 Croatie où résidaient des Serbes de Croatie et où il a été créé ce qu'il a

27 été convenu d'appeler la Krajina ?

28 R. Oui. Comme je l'ai déjà dit, il était très conscient de la situation

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1 croate. Les Serbes, comme nous le savons tous, ils tentaient de manière

2 militaire et politique de détacher la Slavonie orientale de la Croatie.

3 C'est la région dans laquelle où il y a eu les combats les plus forts, don

4 il était très au courant de la nécessité de protéger les frontières de la

5 Croatie. Puis-je vous donner un comme exemple concret du fait que le

6 président Tudjman était conscient de cela ? En fait, je ne peux pas, je ne

7 peux pas vous donner d'exemple; cependant, je tenterai de répondre à votre

8 question, pas de problème.

9 Q. Monsieur Okun, croyez-moi bien que c'est avec un grand intérêt que

10 j'écoute vos questions -- vos réponses, mais j'ai beaucoup de questions à

11 vous poser et j'ai malheureusement très peu de temps. Vous venez de me

12 parler de la Slavonie orientale. Alors, dites-nous : est-ce que le problème

13 des frontières se situait aussi au niveau de la Slavonie occidentale et de

14 la Krajina de Knin qui pendant ces années-là était tenue sous le contrôle

15 des Serbes de Croatie ?

16 R. La Slavonie occidentale était beaucoup moins un problème quoi que les

17 Serbes en Croatie comme vous le savez avaient déclaré une région autonome,

18 la SAO de Slavonie orientale -- orientale et la Krajina, mais la Slavonie

19 occidentale n'était pas un problème parce que les forces armées de la

20 Croatie ont fait fuir les Serbes de la Slavonie occidentale et l'armée

21 croate était au contrôle -- avait le contrôle de la Slavonie dès la fin de

22 1991. La Krajina c'était un problème à part dans la mesure ou 90 % de la

23 population était Serbe et donc il y avait une sorte d'autonomie de facto et

24 c'est dont pour cette raison particulière que dans ces régions les

25 opérations de maintien de la paix que le secrétaire Vance et moi avons mis

26 au point était que pour avoir quatre régions protégées qui n'étaient pas

27 connectées et qui n'étaient pas contiguës. La Slavonie orientale, la

28 Slavonie occidentale et le sud et le nord de la Krajina de façon à éviter à

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1 rendre impossible le désir des Serbes d'avoir un cessez-le-feu le long de

2 la ligne de confrontation qui aurait donné aux Serbes un quart de la

3 Croatie ou quasiment un quart de la Croatie. Le président Tudjman ne

4 souhaitait pas accepter cela et nous nous n'étions absolument pas d'accord

5 avec cela, donc pour la première fois dans l'histoire une sécession des

6 hostilités avec force de maintien de la paix n'avait pas une ligne de front

7 contiguë avec une ligne verte comme il y a à Chypre, par exemple, Israël en

8 1989 [comme interprété].

9 Enfin, pour finir, le président Tudjman a beaucoup insisté. En fait,

10 j'ai commencé à parler du plan Vance-Owen et, en fait, je parle du plan

11 Vance et le plan de maintien de la paix en Croatie a essayé

12 -- d'avoir le retrait de toutes les forces de la JNA de l'ensemble de la

13 Croatie. Donc, nous étions très attentifs, de façon à bien répondre à votre

14 question, et le président Tudjman a la nécessité de maintenir l'intégrité

15 territoriale et de maintenir l'intégrité territoriale de la Croatie.

16 Je suis désolé d'avoir pris du temps pour répondre à votre question

17 mais il faut vraiment essayer, tenter de donner aux Juges l'ensemble de la

18 situation.

19 Q. Merci beaucoup. Dans la dernière partie de votre réponse, vous

20 avez évoqué ce qui faisait -- devait faire l'objet de ma question suivante,

21 à savoir la préoccupation principale, le souci principal du président

22 Tudjman à l'époque était bel et bien l'intégrité territoriale de la

23 République de Croatie dans les frontières telles que tracées en ex-

24 Yougoslavie, n'est-ce pas ?

25 R. Oui, tout à fait. C'est ce qu'il a demandé. C'est ce que nous avons

26 demandé et c'était le retrait de la JNA de l'ensemble de la Croatie. Le

27 retrait immédiat, ce que les Serbes n'ont pas fait, mais la JNA en fin de

28 compte a fini par s'en aller.

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1 Q. Monsieur Okun, d'après les informations qui sont les vôtres, aux fins

2 de réaliser cet objectif-là, M. Tudjman, le président Tudjman n'a-t-il pas

3 été l'un des premiers à réclamer un arbitrage international pour la

4 solution du problème de démantèlement cette Yougoslavie, de l'ex-

5 Yougoslavie ?

6 R. Non, je ne crois pas que cela a été le premier. Il y a eu, en fait, un

7 désir répandu général de la Communauté européenne d'établir un arbitrage,

8 en instituant un arbitrage concernant les déclarations d'indépendance de la

9 Slavonie et de la Croatie. Il faisait certainement partie d'eux, mais il y

10 avait très rapidement après le 25 juin 1991 et la déclaration de ce jour-

11 là, très rapidement la Communauté européenne a répondu.

12 Je ne veux pas critiquer le président Tudjman, je voulais simplement

13 signaler le fait qu'il n'était pas seul dans ce désir.

14 Q. Monsieur Okun, je n'ai pas pensé non plus qu'il fût le seul. Je pense

15 que c'était une façon de frapper à une porte ouverte par la communauté

16 internationale, mais ce que je voulais dire c'est qu'il était l'un des

17 premiers du territoire de l'ex-Yougoslavie à avoir réclamé un arbitrage de

18 la part de la communauté internationale. Est-ce que nous pouvons tomber

19 d'accord là-dessus ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce qu'on peut tomber d'accord sur le fait de dire qu'il a également

22 été l'un des premiers du territoire de l'ex-Yougoslavie à avoir réclamé que

23 des forces de maintien de la paix des Nations Unies viennent dans les

24 territoires où il y a -- où il y a eu des conflits pour rétablir la paix ?

25 R. Non, non, non, ce n'est pas vrai. De manière paradoxale, c'est

26 Milosevic qui a été le premier à suggérer que c'est dans mon journal, et

27 très clair.

28 Q. Monsieur Okun, je n'ai pas dit "le premier," j'ai dit "parmi le

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1 premier." Pouvons-nous tomber d'accord pour dire qu'entrent le président

2 Milosevic et le président Tudjman ?

3 R. Bien, il y avait un conflit entre deux parties. Milosevic était le

4 premier. Il était le deuxième, c'est-à-dire qu'il était le dernier. C'était

5 peut-être l'un des premiers, mais il n'y avait que deux parties, donc, si

6 vous êtes le deuxième, vous savez que cela fait de vous le dernier. Il faut

7 bien que je dise aux Juges, il faut que les Juges sachent que Milosevic n'a

8 pas proposé cette opération

9 -- d'opération de la paix parce qu'il voulait rendre savoir au président

10 Tudjman. Ce qu'il voulait c'est une ligne verte. Il voulait que les troupes

11 des Nations Unies soient sur la ligne de confrontation, qui aurait permis à

12 la JNA de contrôler d'un quart à un tiers de la Croatie. C'est pour cela

13 qu'il a proposé l'opération de maintien de la paix.

14 Q. Monsieur Okun, pouvons-nous nous mettre d'accord sur le fait que

15 l'initiative du président Milosevic se rapportait au territoire occupé de

16 la Croatie, alors que l'initiative du président Tudjman se rapportait aux

17 frontières entre les républiques de l'ex-Yougoslavie, et étant indépendant

18 dès lors ?

19 R. Bien, le président Tudjman, comme nous l'avons dit plusieurs fois déjà,

20 était, bien entendu, intéressé à conserver et maintenir l'intégrité

21 territoriale de la Croatie. C'est la raison pour laquelle il ne souhaitait

22 pas accepter ce concept de ligne verte.

23 Q. Dites-moi : est-ce que Milosevic souhaitait en réalité que ces forces

24 internationales du maintient de la paix viennent défendre les Serbes aux

25 territoires occupés de la Croatie, et que le président Tudjman lui voulait

26 faire protéger les frontières de l'Etat contre l'arrivée d'une armée de la

27 partie adverse hostile ou pas ?

28 R. Le président Tudjman voulait que la JNA se retire entièrement de

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1 Croatie de manière à ce que la Croatie soit maîtresse de sa propre

2 destinée. Il était tout à fait en accord avec notre concept de quatre

3 régions protégées par les Nations Unies qui ne soient pas contiguës avec le

4 retrait total de la JNA de la Croatie. Il a toujours été d'accord, bien

5 sûr, pour la protection des frontières. Il était bien sûr inquiet en ce qui

6 concerne les frontières. C'est tout à fait compréhensible.

7 Q. Monsieur Okun, je souhaite une réponse un peu plus précise à ma

8 question, à savoir que M. Tudjman, le président Tudjman voulait que les

9 forces internationales viennent aux frontières de la Croatie. Lorsque la

10 JNA se serait retirée que les forces internationales viennent protéger les

11 frontières de l'Etat croate. Si vous ne pouvez pas être plus précis, nous

12 pouvons aussi aller de l'avant.

13 R. Je peux répondre précisément, parce que cela a fait l'objet de

14 négociations très intenses entre M. Vance et moi et le président Tudjman et

15 Milosevic.

16 Le président Tudjman, dans sa première position, souhaitait que la JNA se

17 retire entièrement de Croatie, tout de suite, immédiatement. La position de

18 Milosevic, je l'ai déjà dit, je suis désolé il faut que je réponde à votre

19 question. Je suis en train de répondre à votre question.

20 Q. Monsieur Okun, nous n'avons pas le temps.

21 R. Vous me posez une question et j'essaie d'y répondre aussi brièvement,

22 et aussi exactement, mais aussi de manière aussi exhaustive que possible;

23 si vous ne m'interrompiez pas, nous aurions déjà terminé.

24 Q. Je m'excuse, mon intention n'est pas d'être indécente ni de vous

25 bousculer, mais nous ne pouvons pas maintenant nous pencher sur ces

26 questions de situation interne et de la guerre en Croatie. Ce qui

27 m'intéresse c'est le sujet des frontières et rien que cela, et si dans vos

28 réponses aux questions nous pouvions nous concentrer rien que sur les

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1 frontières. Bien entendu, vous n'avez souhaité que la JNA s'en aille de

2 Croatie, on a dépassé la question et vous avez répondu et vous avez

3 argumenté de façon détaillée. Ce que je voudrais maintenant définir c'est

4 que le président Tudjman souhaitait voir les forces internationales situées

5 sur les frontières de la République de Croatie. Chose qui sera importe pour

6 passer aux relations avec la Bosnie-Herzégovine voisine, et c'est la raison

7 pour laquelle je parle de ces frontières, et je serais autrement très

8 intéressée par la situation en Croatie et surtout ce qui se passait là-bas.

9 Je m'excuse une fois de plus, je n'ai pas du tout eu l'intention de manquer

10 de politesse. A votre avis, est-ce que le président Tudjman était

11 quelqu'un, un homme politique réaliste et pragmatique ?

12 R. Oui.

13 Q. Veuillez m'indiquer si lui, tout comme d'autres hommes politiques

14 présentaient parfois des positions pour apprendre ce que l'autre partie ou

15 une autre partie était en train de penser sur tel ou tel point ?

16 R. Ce n'était pas son style. Le président Tudjman était quelqu'un de très

17 sérieux. Comme je l'ai déjà dit, et comme

18 M. Karnavas a lu l'intervention que j'ai donnée et c'était tout à fait

19 exact ce que je disais sur M. Tudjman, et si vous vous souvenez je disais

20 que dans son style il était assez rigide. Ce n'était pas le genre de

21 personne qui jouait avec des idées. Donc pour répondre à votre question --

22 la réponse à votre question c'est vraiment grosso modo de manière générale,

23 non.

24 Q. Veuillez m'indiquer si, selon vos informations, le président Tudjman

25 toujours de façon ouverte et publique présentait ses opinions sur certains

26 sujets, ou est-ce que vous avez dû pour apprendre quelles étaient ses

27 positions sur tel point -- avoir recours à des services secrets, ou des

28 sources d'information particulières ?

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1 R. Nous n'étions pas entre les mains des services secrets. Moi-même et M.

2 Vance et Lord Owen, nous parlions souvent avec le président Tudjman. Vous

3 êtes au courant de ces déclarations publiques, nous les prenions en compte.

4 Naturellement, nous -- ce à quoi nous portions le plus d'attention c'est ce

5 qui nous disait en privé. Bien sûr, j'imagine que nous pouvons comprendre

6 cela facilement.

7 Q. Dites-moi : avez-vous eu connaissance des positions adoptées par le

8 président Tudjman concernant la Bosnie-Herzégovine, et que ces positions-là

9 n'auraient pas été des positions qu'il vous aurait directement présentées

10 ou que vous auriez pu lire dans certains ouvrages ou dans les médias ?

11 R. Nous l'avons appris directement du président Tudjman, et ensuite nous

12 le voyons lors de ses réunions avec Izetbegovic, par exemple. Il n'aimait

13 pas du tout Izetbegovic. Il nous l'a dit, il l'a même dit directement à

14 Izetbegovic. Il parlait toujours d'Izetbegovic en l'appelant d'intégriste.

15 L'intégriste Izetbegovic.

16 Concernant la gouvernance de l'Etat d'Izetbegovic, il avait beaucoup de

17 mépris et il la dénigrait, et prétendait qu'Izetbegovic ne serait même pas

18 au pouvoir si les Croates ne le défendaient pas. Il ne respectait pas

19 Izetbegovic, ni la façon qu'il avait de gérer l'Etat. Cela c'était très

20 clair, il le disait de façon très claire.

21 Q. Monsieur l'Ambassadeur, pouvons-nous tomber d'accord sur le fait de

22 dire que le président Tudjman le disait publiquement en affirmant que les

23 frontières de la Croatie fixées par le Conseil antifasciste de Libération

24 nationale était, de son avis, injustes ?

25 R. Les frontières de l'AVNOJ, le Conseil antifasciste de Libération

26 nationale, je ne me souviens pas si l'on a vraiment parlé. Il y a eu des

27 moments mais je ne veux pas rentrer dans les détails. C'était plutôt les

28 Serbes qui parlaient des frontières du Conseil antifasciste de Libération

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1 nationale. Ils ont parlé, ils se sont plaints. Lorsque j'ai eu la

2 discussion directe avec Milovan Djilas parce qu'en 1991, Djilas était la

3 personne qui était en charge des choses pour Tito en 1995 [comme

4 interprété] pour ce qui était la décision des frontières. Puis, il était

5 contre, il était très émotionnel. Donc, les Serbes -

6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour le compte rendu, est-ce que

7 vous pouvez épeler le nom. Ici, il y a un G, je crois que c'est une erreur.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement, vous avez raison, Monsieur le

9 Juge. C'est D-j-i-l-a-s. D comme David, J comme Juge, I comme Île, L comme

10 lentille, A comme Avion et S comme Suite.

11 Mme ALABURIC : [interprétation]

12 Q. Partant de la réponse que vous venez d'apporter, ai-je droit de

13 conclure que le président Tudjman, s'agissant des frontières existantes de

14 la Croatie, estimait que c'était des frontières justes, équitables ? Je

15 précise que les frontières existantes sont celles de l'AVNOJ, du Conseil

16 antifasciste de Libération nationale.

17 R. Non. Il n'est jamais allé aussi loin parce qu'en tant que militaire, et

18 je l'ai déjà dit dans des témoignages précédents, il était très conscient

19 du fait de la Cazinska Krajina et de son importance stratégique pour les

20 Croates. Il en parlait souvent, il parlait de la voie ferrée entre Belgrade

21 et les grandes villes de la cote dalmate et qui traversait la Bosnie-

22 Herzégovine et qui passait à travers la Cazinska Krajina. Il était très

23 conscient du fait, et ce n'est pas la peine de préciser, que les Serbes qui

24 vivaient en Croatie et qui étaient à cheval sur la frontière dans la mesure

25 où la Krajina était occupée de manière très claire, donc, des deux côtés de

26 la frontière, c'est-à-dire du côté croate et du côté bosniaque avec les

27 Serbes auto déclarés de la capitale de Knin. C'était une inquiétude pour

28 lui, il était très conscient du fait que cette Croatie et celle de la

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1 frontière AVNOJ, c'était que le fantôme de ce que cela avait été autrefois.

2 Q. Pouvons-nous essayer de définir la position du président Tudjman vis-à-

3 vis des frontières de la Croatie ? Etait-il satisfait ou pas de ces

4 frontières ? Vous avez, me semble-t-il répondu par la négative aux

5 questions.

6 R. Oui, je pense qu'il envisageait un élargissement soit directement, soit

7 à travers - par le fait que l'Herceg-Bosna rejoigne la Croatie d'une

8 manière ou d'autre, je l'ai dit dans ma déclaration et je l'ai toujours dit

9 lorsqu'on m'a posé des questions. Quiconque me posait la question, je crois

10 que j'y ai répondu de manière adéquate et je serais ravi d'y répondre à

11 nouveau.

12 Q. Non. Vous n'avez pas à me répondre une fois de plus sur ce point-là. Je

13 voudrais que nous nous entretenions des désirs et des réalités. Ce que

14 quelqu'un pourrait désirer en politique et sa perception de la possibilité

15 qu'il y avait à le réaliser. Alors, savez-vous qui était Josip Manolic ?

16 Est-ce que ce nom vous dit quelque chose, Josip Manolic ?

17 R. Non.

18 Q. Avez-vous entendu parler de ce nom ?

19 R. Non, je ne sais pas qui c'est. J'ai vu ce nom mais vraiment je ne vois

20 pas qui c'est.

21 Q. Bien. J'ai voulu le citer en me disant que vous devez certainement

22 savoir de qui il s'agissait. Alors, je vais paraphraser d'une certaine

23 façon. Il a été témoin dans cette affaire en 1992, 1993. C'était l'un des

24 plus proches collaborateurs du président Tudjman et il était en conflit

25 politique avec Gojko Susak. En 1994, il a quitté le HDZ, le Conseil croate

26 -- le Conseil démocratique croate. Il a dit là que Franjo Tudjman était un

27 homme politique très réaliste qui ne jurait jamais, je paraphrase, avec le

28 sort de la Croatie pour réaliser l'un quelconque de ses désirs. Un des

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1 désirs, qui était le sien, était une partie du territoire de la Bosnie-

2 Herzégovine où la population croate résidait en tant que majorité.Alors,

3 Monsieur Okun, connaissant Franjo Tudjman comme étant comme vous l'avez

4 dit, un homme politique réaliste que pragmatique, est-ce que la destinée de

5 sa Croatie dont il prenait soin pendant des années, la mettrait-il ou

6 remettrait-il en question pour un bout de territoire dans un autre pays ?

7 R. En soutenant Mate Boban et les personnes de l'Herceg-Bosna, il ne

8 mettait la Croatie en danger d'aucune façon.

9 Q. Pour ce qui est du soutien apporté à Mate Boban et à l'Herceg-Bosna, le

10 même dénommé Manolic a dit que la politique de la Croatie était, et je vais

11 citer ses mots précis mais on me donne juste un instant. Il a dit, et je

12 cite : page 43 179, que la politique du président Tudjman vis-à-vis de

13 l'Herceg-Bosna était la suivante.

14 Monsieur Okun, ceci je ne vous l'ai pas donné dans le jeu de documents, ce

15 n'est pas une pièce à conviction. Je vais en donner lecture, je vais donner

16 lecture en anglais pour qu'il n'y ait pas d'erreur dans ma traduction à

17 moi.

18 "Il tenait la position que là aussi organisez la même position que moi,

19 organisez vous-mêmes, mobilisez-vous vous-mêmes dans vos secteurs où vous

20 vous sentez en danger. Résistez à l'agression et nous vous aiderons à

21 l'intérieur du cadre et des possibilités qui nous sont permises parce que

22 nous sommes aussi menacés par l'agresseur serbe."

23 Seriez-vous d'accord avec la teneur de la déclaration d'un homme qui a

24 quitté Franjo Tudjman en 1994 en raison précisément de motifs politiques.

25 R. Il est clair que le président Tudjman ici parle de résister aux Serbes.

26 Il utilise le terme "agresseur" c'est tout à fait incompréhensible. Il dit

27 : "Nous sommes menacés par les Serbes." C'est exact bien que le cessez-le-

28 feu ait été en vigueur. Même s'il y avait eu quand même des problèmes avec

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1 la mauvaise foi des Serbes et vous aussi en Bosnie, vous opposiez

2 [inaudible] donc, c'est tout à fait cohérent et je l'ai déjà dit d'ailleurs

3 dans ma déclaration de témoin.

4 Q. Monsieur Okun, juste pour finir avant la pause, si possible, une petite

5 question. Est-ce que nous pouvons tomber d'accord pour dire que Franjo

6 Tudjman en sa qualité d'homme politique, réaliste et pragmatique,

7 n'essaierait jamais par la force en contrecarrant la volonté de la

8 communauté internationale de modifier les frontières de son propre Etat

9 parce qu'il était conscient d'un qu'il ne pouvait pas le faire; et de deux

10 que suite à cette tentative de sa part son Etat longuement attendu subirait

11 des préjudices ?

12 R. Le président Tudjman, le réalisme et le pragmatisme du président

13 Tudjman était aussi accompagné d'un sens très fort de l'histoire croate.

14 Peut-être c'est ce qui faisait de lui quelqu'un à part parmi les anciens

15 dirigeants, les dirigeants de l'ex-Yougoslavie c'est-à-dire cette

16 compréhension très profonde ce qui fait que son combat contre les Serbes et

17 l'agression de la JNA en Croatie et son désir d'indépendance -- pour un

18 Etat indépendant d'Herceg-Bosna pour l'intermédiaire de Mate Boban et de

19 ses -- ceux qui l'accompagnaient étaient tout à fait cohérents. C'était

20 tout à fait clair. Il n'y avait aucun doute à ce sujet et je l'ai dit de

21 façon très claire dans ma déclaration. Il nous a dit de façon très claire

22 qu'il soutenait les objectifs et les activités de Mate et des gens qui les

23 suivaient.

24 Q. Merci beaucoup.

25 Mme ALABURIC : [interprétation] J'en ai fini.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons prendre une pause de 20 minutes.

27 --- L'audience est suspendue à 11 heures 30.

28 --- L'audience est reprise à 11 heures 52.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

2 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

3 permission, avant de continuer mon contre-interrogatoire, j'aimerais vous

4 demander quelque chose concernant le temps que nous avons à notre

5 disposition. Pour l'instant, nous avons consulté notre client, je pense

6 qu'une demi heure, pour des questions de procédure serait suffisant.

7 J'aimerais savoir donc si nous pouvons avoir un peu plus de temps pour le

8 contre-interrogatoire du Témoin Okun.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors --

10 Mme ALABURIC : [interprétation] Si vous estimez que les questions sont --

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Jusqu'à présent, il y a cinq heures 40 qui ont été

12 utilisées, je crois. Mais M. le Greffier va corriger. Donc, vous faites la

13 soustraction, huit heures moins cinq heure 40, voilà le temps qui reste à

14 la Défense.

15 Poursuivez votre contre-interrogatoire.

16 Mme ALABURIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur Okun, dans votre réponse à ma dernière question vous avez dit

18 une phrase qui ne figure pas dans votre déclaration, ni dans vos journaux

19 si je les ai bien lus. Personne n'a déclaré cela dans ce prétoire et moi,

20 en tant que citoyenne s'est bien informée, citoyenne de la République de

21 Croatie, je ne connais pas.

22 Vous avez dit que le président Tudjman souhaitait la création de

23 l'Etat indépendant de l'Herceg-Bosna.

24 Mme ALABURIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je

25 souhaite expliquer cette dernière phrase, le souhait du président Tudjman

26 c'était donc une citation d'une partie de la réponse du Témoin Okun à la

27 dernière question qui figure dans la ligne 35 du compte rendu d'audience

28 d'aujourd'hui.

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1 Q. Pourriez-vous me répondre ?

2 R. Vous me posez une question.

3 Q. Oui. ma question est la suivante : est-ce que vous pouvez nous dire où

4 dans votre déclaration, où dans votre journal il est écrit que le souhait

5 du président Tudjman était la création de l'Etat indépendant d'Herceg-

6 Bosna ?

7 R. J'ai dit que le président Tudjman soutenait les buts, les objectifs et

8 les actions de Mate Boban et de son peuple. C'étaient mes propos. Je vous

9 rappelle le paragraphe 6 de ma déclaration de témoin où après que j'ai

10 expliqué quels étaient les objectifs de la guerre, je répète que le dernier

11 était de créer et maintenir et là je cite le paragraphe 6 de ma déclaration

12 de témoin, je cite : "De créer et maintenir une entité croate de Bosnie

13 séparée (Herceg-Bosna) qui pour finir pouvait s'unir avec la République de

14 Croatie de manière officielle ou officieuse. Ces objectifs de guerre ont

15 clairement été présentés aux négociateurs internationaux tout au long de la

16 période 1992, 1993, par les dirigeants croates de Bosnie, Mate Boban et ses

17 associés. Le président Tudjman en privé faisait comprendre aux négociateurs

18 qu'il soutenait entièrement ces objectifs."

19 Fin du paragraphe 6 de ma déclaration de témoin.

20 Q. Monsieur Okun, au paragraphe 6 de votre déclaration, tout comme dans

21 toutes les déclarations de Mate Boban que vous avez consignées à vos

22 journaux, elles portent sur la création d'une entité croate au sein de la

23 Yougoslavie, donc, au sein des frontières de l'État de Bosnie-Herzégovine

24 internationalement reconnues. Tel n'est pas le cas. Dites-moi : dans quelle

25 partie de votre journal figure une déclaration différente faite par Mate

26 Boban ou un quelconque autre dirigeant de l'Herceg-Bosna ou représentant de

27 l'Herceg-Bosna ?

28 R. Nous avons déjà beaucoup parlé de cela, Maître, dans ce prétoire. A la

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1 fois les Serbes de Bosnie, Karadzic et autres, et les Croates de Bosnie

2 savaient qu'officiellement, ils devaient rester au sein des frontières de

3 l'Etat bosniaque; cependant, leur but allait au-delà de cela.

4 Q. Peut-on dire qu'il est alors incontestable parlant de l'entité croate

5 en Bosnie-Herzégovine, que l'on parle toujours d'un arrangement interne au

6 sein de l'Etat indépendant et souverain de la Bosnie-Herzégovine, et que

7 toutes les négociations concernant la structure interne de cet Etat, y

8 compris dans le cadre du plan de paix Vance-Owen, portaient sur une telle

9 structure, une telle organisation de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat

10 indépendant ?

11 R. Le plan de paix Vance-Owen, tout comme les autres plans de paix,

12 envisageait un Etat bosniaque souverain et indépendant. Vous vous

13 souviendrez que dans les principes constitutionnels du plan de paix Vance-

14 Owen il était explicitement interdit à quelques provinces que ce soit

15 d'avoir des relations avec tout Etat étranger ou organisation

16 internationale. Ceci a été inséré aux dispositions constitutionnelles du

17 plan de paix Vance-Owen justement afin de mettre la barrière au but qui

18 d'après ce que l'on savait était le but des Serbes et des Croates de

19 Bosnie, et qui était d'avoir des relations spéciales avec leur mère patrie;

20 sinon, il n'aurait pas été nécessaire d'avoir cette disposition

21 constitutionnelle.

22 Je ne sais pas si je peux répondre plus clairement que cela.

23 Q. Dites-moi, s'il vous plaît : est-ce que les lois et réglementations

24 prévues dans le cadre de la législation de la Bosnie-Herzégovine et

25 l'accord de Dayton permettent aux entités de la Bosnie-Herzégovine d'avoir

26 des liens étroits avec les pays limitrophes ? Par exemple, entre la

27 Republika Srpska et l'ex-Yougoslavie, maintenant la Serbie ?

28 R. En vertu de l'accord de Dayton ?

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1 Q. Oui, conformément à l'accord de Dayton et à la législation en vigueur

2 en Bosnie-Herzégovine en ce moment ?

3 R. L'accord de Dayton du 19 novembre --

4 Q. Il me suffit que vous me disiez --

5 R. Non, ceci ne suffit pas, Maître. Excusez-moi, pas du tout.

6 Q. Monsieur Okun, la législation et les accords le permettent ou ne le

7 permettent pas. Une réponse directe me suffira car, croyez-moi, je n'ai pas

8 suffisamment de temps pour entrer dans tous les détails.

9 R. Je compatie avec vous. Si vous souhaitez me réduire au silence,

10 d'accord. Prenez la parole.

11 Q. Bien sûr que je ne souhaite pas vous réduire en silence. Vous êtes ici

12 pour ne pas garder votre silence, mais, dites-moi, s'il vous plaît, si vous

13 me dites qu'il est impossible de répondre par un "oui" ou par un "non," je

14 vais décider si je vais vous demander une explication supplémentaire, ou si

15 je vais aborder un autre sujet.

16 Si je vous ai bien compris, il n'est pas possible de répondre par un oui ou

17 un non à cette question.

18 R. Je vais répondre par oui.

19 Q. Merci beaucoup. Dites-moi : afin de clarifier une déclaration que vous

20 avez faite lors de votre déposition, au cours de ces derniers jours,

21 notamment le 3 avril, ceci figure à la page 10 du compte rendu d'audience

22 de ce jour-là, vous avez dit que le plan de paix de Vance-Owen s'agissant

23 des cartes était généreux, mais équitable envers les Croates; est-ce que

24 vous vous souvenez de cette déclaration ?

25 R. Oui.

26 Q. Pourriez-vous nous expliquer en quoi se reflétait la générosité ?

27 R. Si le plan était généreux car, dans les zones mixtes bosniennes croates

28 et bosniennes musulmanes, le bénéfice du doute allait largement en faveur

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1 des Croates de Bosnie, et c'est la raison d'ailleurs pour laquelle

2 Izetbegovic a refusé de signer la carte, et ceci ressortait clairement de

3 ce qui s'est passé le jour où la carte a officiellement été présentée en

4 janvier 1993. Effectivement, je n'étais pas à Zagreb à cette époque-là,

5 mais on m'a dit que dans les journaux on trouvait les titres disant le HVO

6 voulait dire : "Hvala, Vance-Owen," autrement dit : "Merci, Vance-Owen," et

7 ils faisaient référence à la carte. Par la suite, j'ai appris qu'il y a eu

8 de telles déclarations et de tels titres de journaux donc les Croates de

9 Bosnie, le peuple croate, étaient extrêmement satisfaits de la manière dont

10 ils avaient été traités, et dont les frontières des provinces ont été

11 établies dans le cadre du plan de paix Vance-Owen.

12 Ai-je répondu à votre question ?

13 Q. Oui, Merci beaucoup. Peut-on parler un peu plus concrètement s'agissant

14 des provinces elles-mêmes ? Qu'est-ce que ceci signifierait ? Je suppose

15 que vous avez cette carte, non seulement à l'esprit mais devant vous. Peut-

16 on examiner s'agissant de quelles provinces le plan de paix de Vance-Owen

17 serait donc généreux ? Quelles provinces d'après ce critère-là serait

18 considéré d'une certaine manière comme des provinces dans lesquelles soit

19 les Croates sont une majorité soit sont favorisés d'une certaine manière ?

20 Est-ce que vous pouvez me dire de quel numéro de provinces il s'agit ?

21 R. Oui. Si on jette un regard rapidement sur la carte, on peut voir que si

22 l'on examine la province numéro 8, nous pouvons noter que la partie

23 orientale, centrale et orientale, est entièrement verte, autrement dit

24 entièrement musulmane, et juste à côté nous avons une grande zone bleue, où

25 se trouvent les Serbes, et puis il y a des zones musulmanes dissipées

26 partout dans la province 8, mais il serait très facile de dresser une ligne

27 droite, et de placer toute cette zone verte dans la province 7, à majorité

28 musulmane.

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1 De même, la province 10 tout au nord, vous voyez cette partie pointue qui

2 est tout à fait verte et qui était donc une zone musulmane qui faisait

3 partie de la province à majorité croate. Ensuite, 9 c'est moitié moitié.

4 Donc, il n'y a pas de doute que la carte Vance-Owen était profondément plus

5 qu'acceptable pour les Croates de Bosnie, mais généreuse.

6 Je dois ajouter qu'à ce moment-là l'idée était que les provinces n'allaient

7 pas être fondées selon les critères ethniques - c'était l'essentiel du plan

8 Vance-Owen, donc, ils ont vraiment essayé de trouver un équilibre dans les

9 provinces afin de souligner le caractère multiethnique du pays. J'ai dit

10 hier -- je ne vais pas le répéter aujourd'hui, mais j'ai dit hier quels

11 étaient les pourcentages des Serbes, des Croates et des Musulmans qui

12 étaient à l'extérieur de leur zone de majorité, et les Serbes de Bosnie

13 s'opposaient amèrement à cela en particulier. Leur juriste, Buha, disait :

14 "Vous avez donné aux Croates et aux Musulmans tout. Nous, les Serbes, tout

15 ce qu'on a hérité c'était des serpents et des cailloux de la Bosnie

16 occidentale."

17 Donc, il faut tenir compte de cela. Mais il n'y a aucun doute que les

18 Croates de Bosnie ont été bien traités dans le cadre de ce plan.

19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Alaburic, peut-être vous

20 pouvez -- vous vouliez soumettre la même chose, mais je souhaite poser une

21 question.

22 Monsieur l'Ambassadeur, vous avez fait référence à la province numéro 9,

23 donc, si j'ai bien compris -- ou plutôt, je vous cède la parole, Madame

24 Alaburic, vous alliez poser la même question.

25 Mme ALABURIC : [interprétation] Oui.

26 Q. Justement je souhaitais que l'on clarifie la province numéro 9, donc,

27 vous avez dit, Monsieur l'Ambassadeur, que c'était moitié/ moitié, alors

28 qu'en regardant la province numéro 9, je vois très peu de zones peuplés par

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1 des Croates. C'est la raison pour laquelle je souhaite une clarification et

2 vous avez vraiment pensé à un arrangement moitié, moitié, dans le sens

3 moitié Musulmans, moitié Croates, ou est-ce que vous aviez un autre partage

4 dans l'esprit ?

5 R. Non, j'ai moitié, moitié, mais je l'ai dit d'une manière assez libre

6 pour indiquer qu'il y avait les deux populations. Excusez-moi, mais je

7 n'étais pas suffisamment précis dans ce commentaire.

8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je souhaitais soulever une autre

9 question. Vous avez commencé à parler des, je

10 cite : "Provinces croates," et vous avez mentionné la province numéro 9,

11 mais d'après la carte que j'ai sous les yeux, c'était une province verte.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était justement l'erreur que j'ai commise.

13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je m'en excuse.

14 Mme ALABURIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Okun, nous allons maintenant revenir au sujet du caractère

16 multiethnique du pays. Je sais que mis à part le critère ethnique, vous

17 avez tenu compte de bien d'autres critères lors de la constitution --

18 décrite, des provinces. Par conséquent, c'est 29 % des Croates si j'ai bien

19 pris note du pourcentage restait à l'extérieur des provinces à majorité

20 relative Croates. Ai-je raison de dire cela ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Parlons-nous de 29 % des Croates qui restent en dehors des provinces 3,

23 8 et 10 ?

24 R. Oui, ce serait le numéro. Le numéro de Croates qui restait à

25 l'extérieur des provinces 3, 8 et 10. Vous avez tout à fait raison.

26 Q. Très bien. Je vais maintenant m'occuper de mon client. Je vous prie de

27 vous pencher sur un entretien, une interview de Milivoj Petkovic.

28 Mme ALABURIC : [interprétation] Dans la liasse de documents, il s'agit de

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1 4D 00100.

2 Q. C'est une interview donnée en février 1993. Je vous prie de bien

3 vouloir vous pencher sur la fin de cet entretien qui figure à la dernière

4 page. Ce qui m'intéresse, en particulier, c'est la réponse à la dernière

5 question et la fin de la réponse à la question précédente.

6 S'agissant du plan de paix Vance-Owen, le général Petkovic déclare, je cite

7 : "Nous, les représentants du peuple croate dans ce document de Genève, ce

8 qui nous intéressaient le plus c'était la première et la septième partie.

9 Dans la première partie, il est question de la sécession des hostilités en

10 Bosnie-Herzégovine et dans la septième il était question du fait que dans

11 un délai de 45 jours, toutes les unités de l'Herceg-Bosna devaient se

12 retirer dans leurs propres provinces."

13 Avez-vous réussi à trouver cela, même s'il s'agit là de la fin de

14 l'interview, dernière page ?

15 R. Je cherche.

16 Q. Je suis en train de lire ce qui est écrit dans le texte.

17 R. Je vous crois mais je n'arrive pas à le retrouver cela. Peut-être

18 quelqu'un peu m'aider ?

19 Q. Il s'agit de la dernière -- cinquième page ?

20 Il s'agit du troisième paragraphe en allant du haut du document.

21 R. Oui, je l'ai trouvé, Maître. Nous, les représentants du peuple croate.

22 Vous faites référence à cela ?

23 Q. Oui. Dites-nous, s'il vous plaît : cette septième partie du document de

24 Genève dans lequel il est question du retrait des unités militaires dans

25 leurs propres provinces dans un délai de 45 jours, est-ce que vous pourriez

26 le clarifier de quoi il s'agit là en réalité ? Je vais vous aider en vous

27 disant où exactement dans le plan de paix de Vance-Owen ceci se trouve,

28 d'après le document que vous avez reçu de la part de l'Accusation. Il

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1 s'agit du document

2 P 9852.

3 R. Merci beaucoup. Je sais exactement où cela se trouve dans le plan de

4 paix Vance-Owen. Merci de votre aide, mais ce n'est pas nécessaire. Donc,

5 le plan de paix Vance-Owen --

6 Q. Excusez-moi, mais il y en a qui ne se retrouve pas aussi bien que vous

7 dans ce document et je vais l'indiquer. Il s'agit de l'annexe numéro 7,

8 page 36 de la pièce à conviction de l'Accusation.

9 Dites ce que vous voulez dire, Monsieur le Témoin ?

10 R. Puis-je répondre à la question ?

11 Q. Oui, s'il vous plaît.

12 R. Oui. Il y avait deux parties pertinentes dans le plan de paix de Vance-

13 Owen qui portaient sur la question que vous avez soulevée. Tout d'abord, la

14 section E du premier annexe au plan de paix Vance-Owen, tel qu'il a été

15 imprimé par les Nations Unies. Le numéro d'identification est S/25479. Je

16 répète S/25479, page 12, je vais citer, c'est très bref ce qui est dit sur

17 le retrait des forces, je cite :

18 "La province de Sarajevo sera immédiatement démilitarisée. Les forces

19 serbes vont se retirer dans les provinces 2, 4 et 6; les forces du HVO se

20 retireront dans la province 3; les forces de l'ABiH dans la province 1. A

21 la fois l'armée bosniaque et les forces du HVO seront déployées dans les

22 provinces 5, 8, 9 et 10. En vertu des arrangements qui ont fait l'objet de

23 leurs accords, le processus de démilitarisation s'appliquera à toutes les

24 forces dans toutes ces neuf provinces," et ensuite l'on décrit la manière

25 dont ceci doit être effectué.

26 Ensuite, dans l'annexe VIII du plan, page 41 de ce même document de

27 l'ONU, il est écrit : "Afin de permettre le processus du retour à la

28 normalité et une sécession des hostilités immédiates et la séparation des

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1 forces," et ici j'ajouterais que s'agissant de : "La séparation des

2 forces." On fait référence justement au paragraphe que je viens de vous

3 lire portant sur les provinces dans lesquelles ils doivent aller. Je vais

4 continue de lire : "Et la séparation des forces et le retour aux provinces

5 désignées sera conduite." Donc, vous avez ce paragraphe que vous avez lu,

6 qui stipule les principes généraux selon lesquels la séparation des forces

7 aura lieu. Puis, on indique quelles sont les provinces dans lesquelles les

8 forces vont se retirer. Ensuite, vous avez la section E portant sur le

9 déploiement des forces au sein des provinces. Donc, en fait, c'est tout à

10 fait clair.

11 Lorsque le général Petkovic fait cette interview que je vois aujourd'hui

12 pour la première fois mais cela ne pose pas de problème, mais, à ce moment-

13 là, c'est en février 1993; n'ai-je pas tort ? Donc, ici, il est dit :

14 "Vecernji List," à la date du 16 février. Donc, cela c'était déjà un mois

15 après que le ministre de la Défense des Croates de Bosnie avait donné un

16 ordre essentiellement illégal car il allait à l'encontre du plan Vance

17 portant sur la subordination des unités du HVO dans certaines provinces ou

18 - pardon. La subordination des unités de l'armée bosniaque aux unités du

19 HVO dans certaines provinces. Ceci n'allait pas du tout dans le sens du

20 plan de paix Vance-Owen.

21 Je sais que nous avons déjà parlé de cela, mais je pense que puisque nous

22 avons soulevé cela, je dois clarifier que lorsque le général Petkovic dit

23 que c'est ce qui nous intéresse, il n'est pas du tout complet à -- bien.

24 Q. Excusez-moi, mais je dois vous interrompre.

25 R. Excusez-moi, j'espère que j'ai répondu à votre question, mais j'essaie

26 de parler clairement.

27 Q. Je vais y venir à cet ordre de mon client que vous venez juste de

28 mentionner, mais nous allons procéder plus souvent de la méthode qui me

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1 parait la meilleur.

2 Car au début de votre réponse, vous avez parlé de la section A du premier

3 annexe et vous parlez du retour des forces serbes vers les provinces 2, 4

4 et 6. Vous parlez du retour des forces croates vers la province 1 et de

5 l'accord entre l'armée et le HVO pour ce qui est des provinces 5, 8, 9 et

6 10. Vous faites référence à la déclaration introductive de Lord Owen; est-

7 ce exact ?

8 R. Non. Ce n'est pas exact.

9 Q. Est-ce que vous pouvez je vous prie prendre la page 12 à laquelle vous

10 avez fait référence.

11 R. La page 12, c'est le document à proprement parler. Il ne s'agit pas du

12 tout d'une déclaration d'introduction. Il s'agit du plan de paix Vance-

13 Owen. Cela n'est pas remis en question pour autant que je le sache. Je ne

14 comprends pas à quoi vous faites référence lorsque vous parlez de la

15 déclaration de Lord Owen. Il s'agit du texte du plan de plan de paix, c'est

16 l'annexe 1, accord conclu à propos de mesures intérimaires. Vous avez A

17 majuscule, présidence intérimaire et gouvernement intérimaire. Puis, B

18 majuscule -- laissez-moi terminer je vous prie, Maître. Vous avez

19 Commission relative aux frontières. Ensuite, C majuscule, Sarajevo; D

20 majuscule, provinces; E majuscule, retrait des forces. Cela n'a absolument

21 rien à voir avec la déclaration de Lord Owen. Il s'agit du texte, à

22 proprement parler, du plan de paix Vance-Owen.

23 Q. Monsieur Okun, je voulais indiquer ce qui suit aux fins du compte rendu

24 d'audience. Dans le document P0952 auquel je faisais référence, aux pages

25 11, 12 et 13 de ce document, nous avons la déclaration introductive de Lord

26 Owen. Je ne vais plus me pencher sur document parce que nous n'avons plus

27 beaucoup de temps, mais j'aimerais plutôt que nous examinions l'ordre de

28 mon client que nous n'avons pas encore vu ici au sein de ce prétoire. Nous

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1 n'avons vu que l'ordre de M. Prlic.

2 Alors, il s'agit de mon jeu de documents, je vous prie. Est-ce que vous

3 voulez bien prendre le document P 01135 ? Il s'agit d'un ordre du général

4 Petkovic.

5 R. Oui, je l'ai trouvé.

6 Q. Donc, nous pouvons être d'accord pour ce qui est de l'introduction du

7 document. Il s'agit de l'ordre donné par le chef du département de la

8 défense en date du 15 janvier, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, c'est ce qui est indiqué.

10 Q. C'est un ordre dont vont parler mes collègues, mes confrères qui sont

11 la Défense de M. Stojic. Mais je vais en fait m'intéresser seulement à la

12 partie qui est différente de l'ordre de M. Prlic. Donc, il s'agit de la

13 décision du Conseil de Défense croate signée par le président du HVO, le Dr

14 Jadranko Prlic. Alors, vous avez le paragraphe 5 de cet ordre, donc de

15 l'ordre du général Petkovic qui indique ce qui suit : "Utiliser les forces

16 de la zone opérationnelle de la Bosnie centrale pour fermer toutes les

17 routes de la zone de Zenica vers les zones placées sous le contrôle de

18 cette zone opérationnelle"

19 Donc, il s'agit en quelque sorte de la mise en vigueur de l'accord.

20 Monsieur Okun, en janvier 1993, est-ce que vous connaissiez les directives

21 du commandement du commandant -- du commandement de la Bosnie-Herzégovine

22 et du HVO ?

23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes voudraient -- souhaiteraient que Me Alaburic

24 parle un peu plus haut parce qu'il est difficile de l'entendre.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, est-ce que je peux vous poser parce

26 que je n'ai pas compris quelque chose ?

27 La citation -- plutôt, vous dites : "Il s'agit de la mise en vigueur de

28 l'accord," avez-vous dit. Alors, là, ce que je ne comprends pas c'est de

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1 quelle mise en vigueur vous parlez, alors, de quel accord vous parlez ?

2 Est-ce que vous pourriez peut-être un peu étoffer votre propos et nous dire

3 : de quelle mise en vigueur vous voulez parler ? De quel accord vous voulez

4 parler ?

5 Mme ALABURIC : [interprétation]

6 Q. Regardez l'introduction, il est dit : "Conformément à l'accord ou aux

7 accords relatifs à la réglementation de Bosnie-Herzégovine." Donc c'est un

8 ordre qui a trait à l'annexe que nous avons étudié il y a un petit moment

9 de cela à propos du retrait des forces ou des unités militaires vers les

10 provinces, et ce, dans un laps de temps de 45 jours. Donc, il s'agit d'un

11 accord des commandements conjoints et c'est à cela que vous avez fait

12 référence. Est-ce que vous saviez qu'il y avait eu des accords conclus

13 entre l'armée de la Bosnie-Herzégovine et le HVO ?

14 R. Non, je ne suis pas au courant de ces accords.

15 Q. Alors, nous allons je vous prie prendre le document

16 4D 00395. C'est un document du mois de novembre 1992 signé par le chef de

17 l'état-major principal des force armées de la Bosnie-Herzégovine, Sefer

18 Halilovic. Est-ce que nous pourrions, je vous prie, étudier ensemble ce

19 document dans le paragraphe d'introduction ?

20 Vous voyez qu'il est dit à la deuxième phrase : "Durant la discussion

21 des commandements conjoints, il faut proposer un système en fonction duquel

22 par exemple dans le Corps de Mostar, l'officier commandant nommé est choisi

23 parmi les forces du HVO, et la personne qui se -- une personne qui sera

24 choisie pour l'armée la BH, et cetera. Ce qui fait qu'en terme de

25 pourcentage, on se fondera sur le nombre actuel, le nombre véritable des

26 soldats pour tous les QG, pour toutes les unités sur le territoire placées

27 sous la responsabilité du Corps de Mostar. Pour Zenica, la personne qui

28 commandera devra être nommée de l'armée -- dans l'armée de la BH et l'autre

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1 personne pour les Unités du HVO. Ceci devrait être le principe utilisé pour

2 nommer les commandants des plus petites unités militaires et ce jusqu'au

3 QG. Vous pouvez également mentionner l'accord entre le président

4 Izetbegovic et M. Mate Boban. Est-ce que ce document vous a rafraîchi la

5 mémoire à propos de ces informations eu égard à la formation du

6 commandement conjoint ?

7 R. Oui. Cela a rafraîchi ma mémoire pour ce qui est de la chronologie des

8 événements. Effectivement au début du mois de novembre jusqu'à après la

9 présidence du HVO à Prozor, il y a une période d'activité intense, ce ne

10 fut pas la première, ce ne fut pas la dernière, mais au cours de cette

11 période il y a eu certaines activités déployées pour essayer de faire en

12 sorte que le HVO et l'ABiH puissent établir une meilleure relation.

13 D'ailleurs cela a été voué à l'échec. Par la suite, comme nous le savons,

14 il y a eu donc tout ce qui s'est passé en janvier, une fois de plus en

15 avril 1993. Donc cette déclaration-ci porte sur la situation après Prozor,

16 donc en octobre, en novembre 1992. Le document que vous avez affiché à

17 l'intention de la Chambre de première instance, à savoir l'ordre du général

18 Petkovic du 16 février 1993, fait référence à une situation qui est quand

19 même plutôt différente.

20 Q. Est-ce que vous pourriez préciser quelque chose, à propos du 16 février

21 1993, car vous pensez à cet entretien, n'est-ce pas ?

22 R. Oui. Je pense au document que vous nous avez montré.

23 Q. Mais il y a l'entretien, également ?

24 R. Oui.

25 Q. Monsieur Okun --

26 R. Je faisais référence non pas à l'entretien, mais à l'ordre, mais ce

27 sont des documents qui sont assez identiques.

28 Q. L'ordre auquel je faisais référence a été émis le 15 janvier 1993 ?

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1 R. Oui, cela c'est la date de l'ordre que je viens de vous montrer.

2 L'entretien s'est déroulé le 16 février. Ce que j'essayais de dire, Maître,

3 ce que j'essayais de vous faire comprendre, c'est que cela a suivi la

4 présentation du plan de paix Vance-Owen avec la section E, qui était la

5 section qui visait le redéploiement des unités. Cela veut dire en anglais

6 déploiement des ordres. J'entendais déploiement des forces.

7 Q. Monsieur Okun, est-ce que vous savez que cet ordre, cette décision qui

8 porte la date du 15 janvier, en fait j'utilise le pluriel lorsque je parle

9 de décisions ou d'ordres parce que je fais une dernière référence à la

10 décision du HVO et à la décision du ministre de la Défense et du chef de

11 l'état-major principal. Est-ce que vous savez donc que cette décision a

12 également été fournie aux membres de l'ABiH -- ou plutôt, à la Bosnie-

13 Herzégovine ou encore aux représentants de la Bosnie-Herzégovine. Cette

14 décision a fait l'objet de discussion et l'autre camp a rejeté ces

15 propositions ?

16 R. Oui, oui. cela a été présenté à la Chambre, le fait que le président

17 Izetbegovic n'avait pas accepté l'ordre émis par le ministre de la Défense

18 parce qu'il avait dit qu'il était -- qu'il s'agissait d'un ordre absolument

19 unilatéral et par conséquent illicite.

20 Q. Une petite précision qui porte sur l'ordre du ministre de la Défense de

21 Bosnie-Herzégovine. Je fais référence à l'ordre du ministre de la Défense

22 d'Herceg-Bosna.

23 Quoi qu'il en soit ce qui a son importance pour moi, c'est que vous venez

24 de dire que vous saviez que les représentants de la Bosnie-Herzégovine ou

25 de l'ABiH ont rejeté cette proposition.

26 Ce qui m'amène à vous poser ma question suivante : savez-vous qu'il n'y

27 avait pas d'obstacle qui empêchait la mise en œuvre de ces ordres -- ou

28 plutôt les Unités de l'ABiH n'étaient pas désarmées et personne n'a insisté

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1 pour qu'elles soient re-subordonnées à certaines unités ? Personne n'a

2 insisté pour qu'elle re-subordonnées ou rattachées à des unités qui étaient

3 des Unités musulmanes; vous le saviez cela ?

4 R. Ce que je savais c'est que l'ordre du HVO était fondamentalement comme

5 suit : toute l'armée, toutes les Unités de l'ABiH dans certaines provinces

6 devraient être subordonnées au HVO. Voilà ce que je savais.

7 Q. Oui, mais ce qui m'intéresse c'est ce que je vais vous expliquer. Ces

8 ordres n'ont pas été exécutés, n'est-ce pas ?

9 R. Nous ne pouvons pas le dire car le HVO a essayé de faire en sorte que

10 ces ordres soient exécutés. Si vous dites qu'ils n'ont pas été exécutés, si

11 vous entendez qu'ils n'ont pas été mis en vigueur, officiellement, avec

12 l'aval du gouvernement de la Bosnie, nous savons qu'il n'y avait pas

13 d'aval, nous en avons parlé. Le président Izetbegovic a réfuté et refusé la

14 déclaration du ministre de la Défense, mais le HVO a essayé, de façon

15 unilatérale -- mais a essayé toutefois d'exécuter les ordres qu'il s'était

16 donné parce qu'en fait, dans la pratique, ces ordres leur disaient ce qu'il

17 fallait qu'ils fassent.

18 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire où et quand -- quand est-ce que le

19 HVO et où est-ce que le HVO a essayé d'exécuter ces ordres de façon

20 unilatérale ?

21 R. Ils l'ont fait par l'entremise de leurs actes et par l'entremise des

22 nettoyages ethniques effectués sur le terrain dont nous avons parlé.

23 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire, Monsieur Okun, parce qu'en fait,

24 nous parlons d'ordre ici, d'ordre qui fait référence au rattachement des

25 unités, d'Unité de l'ABiH au commandement du HVO ? C'est de cet ordre que

26 nous parlons. Alors, j'aimerais savoir : quand et où le HVO a pris des

27 mesures pour essayer d'exécuter cet ordre ?

28 R. Vous voulez dire pour essayer de rattacher l'ABiH ? Écoutez, je ne peux

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1 pas vous donner la date exacte et je ne peux pas vous donner le lieu précis

2 mais nous savons quelles sont les mesures prises. Ce qu'ils écrivaient dans

3 les documents c'était une chose et ce qu'ils faisaient sur le terrain,

4 c'était autre chose.

5 Q. Monsieur Okun, si vous dites que vous saviez quelles sont les mesures

6 qu'ils ont prises, ce qui est important pour nous, ici dans ce prétoire,

7 c'est de savoir : où cela s'est passé et quand ? Ce sont les faits qui

8 m'intéressent, Monsieur. Si vous ne pouvez pas être précis, dites-le-moi.

9 R. Je vous parle des faits. Vous vous souviendrez d'une longue réunion

10 entre les Croates de Bosnie et les Musulmans de Bosnie à Sarajevo et à

11 Zagreb, nous avons parlé longuement. Ce sont des faits, Maître, c'est de

12 cela dont il s'agit.

13 Q. Monsieur Okun, ce ne sont pas des faits qui prouveront ou qui peuvent

14 prouver que le HVO a pris des mesures pour désarmer l'ABiH ou pour

15 l'expulser le HVO des provinces croates ou pour -- ou plutôt, pour expulser

16 l'ABiH des provinces croates ou pour rattacher l'ABiH au HVO. Nous parlons

17 d'un ordre. Je vous demande de répondre à ma question : où et quand cela

18 s'est passé ? Quand est-ce que cet ordre a été exécuté ?

19 R. Je répète, il y a toutes les mesures qui ont été prises sur le terrain

20 qui ont fait l'objet de moult discussions intenses lors des réunions à

21 différents, à la Conférence internationale; et c'est cela la réponse à

22 votre question, Maître.

23 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont les mesures qui ont été

24 prises sur le terrain auxquelles vous faites référence ?

25 R. Oui. L'opération de nettoyage à Gornji Vakuf pour commencer dans un

26 premier temps.

27 Q. Bien, nous allons passer à autre chose. Quelle était la deuxième

28 mesure ?

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1 R. Vous voulez dire la deuxième opération de nettoyage ? Ahmici.

2 Q. Est-ce qu'il y a d'autres opérations, d'autres mesures qui ont été

3 prise pour exécuter cet ordre ? Monsieur Okun, nous parlons de l'ordre en

4 vertu duquel l'ABiH devait être rattachée et resubordonné au HVO. Il

5 s'agissait de désarmement, d'expulsion des provinces croates. Regardez

6 l'ordre dont nous parlons, Monsieur, et nous parlons de la façon dont cet

7 ordre a été mis en vigueur. Quand est-ce que les mesures ont été prises, et

8 ou est-ce que des mesures ont été prises pour exécuter cet ordre ? Parce

9 que sur la base des réponses que vous apportez, je tire la conclusion que

10 vous n'en savez rien.

11 R. C'est inexact --

12 Q. Si vous ne le savez pas, c'est parce que ce genre de mesures-là n'ont

13 pas été prises ?

14 R. Ce n'est pas la conclusion idoine, Maître. Je dois dire, de façon très

15 claire et très précise, à l'attention de la Chambre de première instance,

16 que les actes sont très souvent beaucoup plus percutants que les mots et

17 les propos tenus. Je l'ai dit. Je le réitère. Vous pouvez écrire ce que

18 vous voulez, dans un document. Joseph Stalin avait l'habitude de dire :

19 "Vous savez, le papier tolère tout et n'importe quoi." Ce sont les actions

20 -- ces actes qui nous préoccupent ici.

21 Q. Monsieur Okun, c'est pour cela que je vous pose des questions à propos

22 de ces actes ou de ces mesures. Quand est-ce que et où est-ce que le HVO a

23 désarmé des membres de l'ABiH ? Quand est-ce qu'ils les ont expulsés des

24 provinces croates ? Puisque nous parlons de l'ABiH. Quand est-ce qu'ils ont

25 fait quoi que ce soit pour exécuter par la contrainte, et de façon

26 unilatérale, cet ordre qui porte la date du 15 janvier 1993 ? Seuls les

27 actes effectués nous intéresse.

28 R. Bien, ils l'ont fait par l'ensemble de leurs actions, de leurs

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1 opérations en Bosnie centrale.

2 Q. Monsieur Okun, la conclusion que je peux dégager c'est que vous n'êtes

3 pas en mesure de répondre de façon précise à ma question. Est-ce que vous

4 pourriez nous dire quand est-ce que le conflit en Bosnie centrale a

5 éclaté ?

6 R. Il y a toujours eu de petites escarmouches ici et là, avec des épisodes

7 de violence gratuites et aléatoires, mais les grandes opérations -- les

8 actes, les grandes actions, pour reprendre vos propos, cela a eu lieu après

9 la mi-janvier.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, concernant le temps, la Défense à

11 la minute où je parle a utilisé six heures 40, ce qui fait qu'en théorie,

12 Me Nozica et Me Murphy, qui ont demandé une heure 20, devraient maintenant

13 prendre la parole, sauf rétrocession de leur temps à vous-même.

14 Maître Nozica, quelle est votre position ?

15 Mme ALABURIC : [interprétation] Ma consoeur, Senka, vient de m'accorder

16 cinq minutes supplémentaires, et est-ce que je pourrais avoir une ou deux

17 minutes de plus, Messieurs les Juges, parce qu'il y a certaine chose que je

18 voudrais préciser et j'aimerais aller aussi rapidement que possible ?

19 Q. Monsieur Okun, vous avez mentionné à plusieurs reprises Prozor en

20 octobre 1992 et vous avez mentionné Prozor comme exemple d'opération de

21 nettoyage ethnique dans la zone de Prozor, vous vous souvenez qu'il y a

22 quelques minutes vous avez mentionné Prozor à titre d'illustration comme un

23 exemple donc de nettoyage ethnique commis par les Croates; vous vous en

24 souvenez de cela ?

25 R. Oui.

26 Q. Bien, regardez dans la liasse de document que je vous ai fourni. P

27 00744. Je n'ai pas suffisamment de temps pour vous montrer le document qui

28 expose les causes et les motifs du conflit à Prozor, mais j'aimerais

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1 toutefois que vous étudiez -- examinez un document, disais-je, que les

2 Musulmans de Prozor ont rédigé. Il s'agit d'un document qui porte la date

3 du 14 novembre 1992. Regardez le deuxième paragraphe, plutôt la fin du

4 deuxième paragraphe, qui est libellé comme suit, et j'aimerais dire en fait

5 que c'est un conflit qui a duré une journée, le 23 octobre 1992. Alors, je

6 vais vous lire une partie du document.

7 "Au moment du pilonnage il n'y a pas eu de dégât infligé aux bâtiments si

8 ce n'est ceux qui avaient fait l'objet d'un ciblage précis. Nous savons

9 également que lors de cette attaque il n'y a pas eu de victimes civiles.

10 Après l'attaque de l'artillerie, la retraite a commencé (le 24 octobre). Ce

11 sont les soldats et les civils qui sont partis de la ville -- ils ne sont

12 pas partis par la sortie sud de la ville." Il est marqué entre parenthèses

13 : "En direction de Jablanica." Puis : "Pendant -- lorsque les unités se

14 sont retirées un de nos soldats a été tués, les forces croates sont entrées

15 dans Prozor vers midi."

16 Monsieur Okun, est-ce qu'il s'agit de cette attaque si brutale lancée

17 contre Prozor, ou de cette attaque, ou est-ce qu'il s'agit d'autre

18 événement et que vous ne connaissez pas ?

19 R. Excusez-moi, Maître, mais qui a rédigé ce document ? A qui appartient

20 ce document ? De qui vient ce document ?

21 Q. C'est un document qui a été rédigé par les Musulmans de Prozor. Ils

22 s'étaient rassemblés au sein du forum des organisations musulmanes

23 expulsées et des organisations pour les Musulmans expulsés plutôt. C'est un

24 document qui a été utilisé par l'Accusation et j'ai cité donc la partie

25 relative à Prozor. Je n'ai pas voulu vous montrer des documents du HVO

26 parce que je ne voulais surtout pas que vous mettiez en doute leur

27 authenticité. Ma question est comme suit : lorsque vous mentionnez Prozor,

28 lorsque vous mentionnez ces opérations brutales de nettoyage ethnique, est-

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1 ce que vous faites référence à cette attaque, ou à une autre attaque dont

2 nous n'avons pas entendu parler ?

3 M. SCOTT : [interprétation] Il faudrait par souci d'équité envers le

4 témoin, que l'on lise ou que l'on montre en tout cas au témoin le

5 paragraphe numéro 3, qui suit immédiatement le paragraphe dont on vient de

6 donner lecture, section 12 [comme interprété].

7 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

8 bien, mon collègue, M. Scott, pourra faire cela lorsqu'il posera des

9 questions supplémentaires, et je serais tout à fait disposée à entendre les

10 réponses qu'apportera ce témoin aux questions, mais ce qui m'intéresse pour

11 moi, c'est l'intensité de l'attaque.

12 Q. Pour parler rapidement de Prozor, j'aimerais vous dire que dans l'acte

13 d'accusation ou les chefs d'inculpation sont incriminés à mon client, il

14 est question de l'attaque d'un village et lors de cette attaque deux

15 personnes ont été tuées et il est indiqué toujours dans l'acte d'accusation

16 qu'en novembre 1992, après les négociations des différents organes du

17 gouvernement de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et de l'ABiH les civils

18 sont repartis à Prozor il s'agit du paragraphe 50 de l'acte d'accusation

19 actuel. Est-ce que c'est cela une exemple de nettoyage ethnique intense

20 auquel vous avez fait référence à cinq voire six reprises ?

21 R. Puis-je répondre ?

22 Q. Oui, je vous en prie.

23 R. La dernière phrase est comme suit : "Vers midi les forces croates sont

24 entrées dans Prozor." C'est justement après cette heure-là que le nettoyage

25 ethnique a commencé --

26 R. Ecoutez, Maître, Maître, Maître.

27 Q. Monsieur Okun, vous essayez de me faire taire. Qu'il soit indiqué dans

28 le compte rendu d'audience que vous essayez de me faire taire, Maître.

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1 Monsieur Okun, là maintenant, c'est à vous que je demande d'être équitable.

2 Vous voyez ce qui est écrit dans la phrase précédente, la phrase qui

3 précède donc les forces croates qui sont entrés à Prozor à midi, il est dit

4 qu'après l'attaque, la population civile et les soldats se sont retirés de

5 la ville, ce qui signifie qu'ils ont quitté Prozor avant que le HVO n'entre

6 dans Prozor. C'est cela que je voulais vous montrer, mais les Juges

7 connaissent très bien ce document et nous pouvons passer à autre chose.

8 R. Maître, ce document ne dit pas ce que vous venez de dire. Ce qui est

9 indiqué dans le document c'est que les civils et les soldats ont commencé à

10 partir. Je répète ont commencé à partir. Cela ne signifie pas qu'ils

11 étaient tous partis et qu'ils avaient fini de partir, de quitter la ville.

12 Q. Ils disent quand est-ce qu'ils ont commencé à partir, ils disent qu'à

13 ce moment-là, un soldat a été tué, que cela a commencé la nuit et que le

14 HVO est entré dans Prozor le lendemain à midi.

15 Mais nous allons passer à autre chose, Monsieur Okun.

16 Vous avez également mentionné un autre exemple de nettoyage ethnique. Vous

17 avez parlé d'un événement qui s'était déroulé en avril 1993, donc, pendant

18 la guerre. Le général Praljak a essayé de savoir ou de déterminer si vous

19 étiez également informé des crimes commis contres les Croates, puisque vous

20 semblez connaître très bien les crimes qui apparemment ont été commis

21 contre les Musulmans, mais j'aimerais vous montrer une décision P 02078.

22 Nous en avons déjà parlé. Il s'agit d'une déclaration conjointe signée par

23 Mate Boban et Alija Izetbegovic le 25 avril 1993, tout de suite après

24 minuit. C'est un document qui a été rédigé après une réunion à laquelle

25 vous-même vous avez participé et dans ce document au paragraphe 5, voilà ce

26 qui est indiqué, c'est au milieu du paragraphe : "Conformément aux

27 informations que nous avons aujourd'hui, les deux camps sont responsables

28 des violations du droit humanitaire international et ils se sont engagés de

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1 manière à bien mener des enquêtes de façon urgente chaque fois qu'il y a eu

2 ce genre de violations."

3 Monsieur Okun, étant donné que vous étiez présent à cette réunion, est-il

4 exact de dire qu'en avril 1993, il y avait donc un conflit qui opposait

5 deux armées, et que le HVO et l'ABiH étaient impliqués et que les deux

6 côtés étaient responsables à part égale de tous les événements et de tous

7 les crimes qui ont été commis au cours de ce combat ?

8 R. Je l'ai déjà dit. En ce qui concerne le 24 avril, j'étais là. Je suis

9 au courant de cette réunion. J'ai déjà dit qu'il n'y avait d'anges. Vous

10 avez la déclaration de Lord Owen qui dit qu'il n'y a aucune partie

11 innocente dans cela et qu'il s'agissait d'actions réciproques mais que le

12 niveau d'activités, l'ampleur, la majeure partie des dommages a été fait

13 par le HVO et le côté des Croates de Bosnie, et j'aimerais vous rappeler

14 tout simplement une Résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies qui

15 dénonçait les activités des Croates de Bosnie, à ce moment.

16 Je comprends quand vous levez la main parce que vous ne voulez pas entendre

17 ce que j'ai à dire, mais je pense, toutefois, qu'il est important que je le

18 dise.

19 Q. Monsieur Okun, je suis heureuse d'entendre tout ce que vous avez à dire

20 dans la mesure où cela est fondé sur des renseignements très bons et très

21 équilibrés.

22 Mais dites-moi : connaissiez-vous de nombreux membres de l'ABiH --

23 combien l'ABiH avait de membres en janvier 1993 ?

24 R. Non, pas précisément.

25 Q. Savez-vous que l'ABiH a six fois -- avait six fois plus de soldats que

26 le HVO ?

27 R. A tout moment, le HVO était mieux équipé et il convient de dire mieux

28 diriger que l'ABiH, et que les chiffres doivent être vus dans l'ensemble,

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1 dans des combats partout en Bosnie. On n'a pas besoin de regarder tous les

2 ordres et tous les déploiements lors des batailles, et nous n'allons pas le

3 faire de façon à pouvoir répondre à votre question.

4 Mais pour répondre à la question de manière précise pour savoir s'ils

5 avaient six fois ou 600 fois plus d'hommes, cela ne permettait pas de

6 répondre à la question du tout.

7 Q. Mais dans quelle doctrine militaire le nombre de soldats sur le terrain

8 est un facteur qui n'est pas révélateur ? Mais je ne veux pas rentrer dans

9 les détails de cela. Nous n'en n'avons pas le temps.

10 Alors, résumons les choses. Monsieur Okun, connaissez-vous une zone de

11 Bosnie-Herzégovine qui était sous le contrôle de l'ABiH, l'armée de Bosnie-

12 Herzégovine au début de votre implication en Bosnie-Herzégovine ainsi qu'à

13 la fin de votre implication en Bosnie-Herzégovine ? Est-ce que cette zone -

14 - ce territoire s'est-il augmenté, ou est-il resté le même ? Je vous pose

15 une question parce que c'est par rapport au HVO. Si on regarde les

16 territoires, c'est en relation avec le HVO et non pas avec la Republika

17 Srpska. Il ne peut y avoir que trois réponses.

18 R. Vous voulez me dicter mes réponses ?

19 Q. Non. Vous pouvez répondre tout simplement brièvement parce que je n'ai

20 déjà plus de temps.

21 R. Dans les zones qui étaient derrière les lignes de confrontation avec

22 les Serbes de Bosnie, on aurait dit un damier avec telle armée ou même

23 Défense territoriale qui détenait le contrôle d'une zone. Je pense que

24 c'est facile à comprendre que vous pouvez le comprendre. La question de

25 savoir si et à quel moment ces zones derrière la ligne de confrontation

26 avec les Serbes. Comment elles ont changé au fil du temps -- et elles ont

27 changé au fil du temps, si c'est cela la question.

28 Q. Oui, Monsieur Okun, mais ma question c'était : comment elles ont

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1 changé ? Au début, lorsque vous étiez en Bosnie-Herzégovine et que vous

2 participiez -- et vous étiez impliqué là-bas, le contrôle et le territoire

3 de l'ABiH, s'est-elle -- a-t-elle diminué sous le contrôle ou non du HVO ?

4 R. Dans certaines zones, la zone de l'ABiH a augmenté. En ce qui concerne

5 les zones du HVO, elles ont augmenté. Bien sûr, il y avait beaucoup d'aller

6 et retour parce qu'ici on parle d'une guerre, on parle d'opération de

7 combat. On parle donc d'une situation qui change tous les jours.

8 Q. Oui, c'est tout à fait le cas. Mais, Monsieur Okun, passons du

9 particulier au général. Tentons de tirer une conclusion qui résume la chose

10 et tentons de regarder l'ensemble. Si on regarde le territoire entier qui

11 était sous le contrôle de l'ABiH ce territoire, a-t-il augmenté pendant que

12 vous étiez impliqué en Bosnie-Herzégovine au dépend du HVO ? En d'autres

13 termes, l'intensité des opérations de combat de l'ABiH a-t-elle augmenté

14 considérablement au cours de l'année 1993 ?

15 R. Je ne suis pas au courant de cela.

16 Q. Merci. Très bien. Merci beaucoup.

17 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour le compte rendu

18 d'audience, j'aimerais dire que je n'ai pas terminé mon contre-

19 interrogatoire, mais qu'il faut que je m'arrête là. En tout état de cause,

20 merci de m'avoir donné un peu plus de temps.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour le compte rendu d'audience, on vous a

22 donné 20 minutes de plus.

23 Il est 13 heures. Nous allons faire la pause d'une heure, ce qui permettra

24 à Me Nozica et Me Murphy de se préparer, et nous reprendrons exactement

25 dans une heure.

26 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 59.

27 --- L'audience est reprise à 14 heures 01.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

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1 Je donne donc la parole à Maître Murphy.

2 M. MURPHY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

3 Contre-interrogatoire par M. Murphy :

4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur.

5 Pour m'introduire, je vais dire que je m'appelle Peter Murphy et je

6 représente M. Bruno Stojic avec ma collègue, Mme Nozica. Je vais vous poser

7 quelques questions, de même que Mme Nozica, mais probablement pas pendant

8 longtemps.

9 Tout d'abord, n'avez-vous jamais rencontré M. Stojic ?

10 R. Je crois que non.

11 Q. Pour autant que vous vous en souvenez vous ne lui avez pas reparlé ?

12 R. Oui. Autant que je m'en souvienne, je ne lui ai jamais parlé.

13 Q. Je suppose que vous n'avez jamais eu de correspondance avec lui ?

14 R. Non, pour autant que je le sache.

15 Q. Je souhaite pour commencer attirer votre attention sur e paragraphe 6

16 de votre déclaration de témoin que vous nous avez déjà lu. Est-ce que vous

17 l'avez toujours devant vous ?

18 R. Oui.

19 Q. J'ai l'impression, Monsieur l'Ambassadeur, en écoutant votre déposition

20 depuis quelques jours, que probablement en raison de votre longue

21 expérience, comme diplomate, vous accordez une grande importance à la

22 précision du langage, n'est-ce pas ?

23 R. Oui, je l'essaie. Je suis certain que je suis aussi imparfait que

24 quiconque mais j'essaie d'être précis.

25 Q. C'est mon impression justement. Lorsque j'examine le paragraphe 6 de

26 votre déclaration, je souhaite vous poser une question au sujet d'une

27 phrase en particulier que vous avez utilisé pour décrire les objectifs de

28 guerre des Croates de Bosnie. Vers le milieu du paragraphe vous dites :

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1 "L'un des objectifs était de créer et maintenir une entité politique

2 séparée des Croates de Bosnie, Herceg-Bosna, qui pour finir pouvaient

3 s'unir avec la République de Croatie officiellement ou officieusement."

4 Avec une telle précision de langage lorsque vous faites référence à

5 une entité qui finirait éventuellement par s'unir avec la République de

6 Croatie je suppose que vous faites référence ici à un processus politique ?

7 R. Oui, officiellement ou officieusement. Oui, un processus politique qui

8 aurait pu se dérouler en avec le temps. Je n'ai pas parlé de tout cela ici,

9 mais les Croates de Bosnie, par exemple, parlaient parfois des relations

10 spéciales. Il y avait des formulations différentes que j'ai essayé de

11 résumer en utilisant ces termes : "Officiellement ou officieusement."

12 Q. Oui. Je pense qu'aujourd'hui à un moment donné vous avez décrit la

13 Croatie et la Serbie aussi comme mère patrie de ces deux groupes au sein de

14 la Bosnie.

15 R. Oui, c'est ainsi que les Croates de Bosnie voyaient la Croatie et les

16 Serbes de Bosnie en Serbie.

17 Q. Maintenant, nous allons brièvement nous concentrer sur la création de

18 la Communauté croate d'Herceg-Bosna, est-ce que vous vous souvenez du fait

19 que cette communauté a vu le jour au mois de novembre 1991 ?

20 R. Oui, je m'en souviens, mais ce n'était pas notre première préoccupation

21 en novembre 1991. M. Vance et nous étions préoccupés beaucoup plus par ce

22 qui se passait en Croatie.

23 Q. Je comprends. Ma question visait simplement à établir la chronologie.

24 Vous êtes d'accord avec moi pour dire que c'était pendant cette période-là

25 que cette entité a été créée ?

26 R. Oui.

27 Q. A ce moment-là, certaines régions autonomes serbes existaient déjà,

28 n'est-ce pas ?

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1 R. En Croatie ?

2 Q. Non, en Bosnie-Herzégovine.

3 R. Oui, des entités ou des régions autonomes serbes autocrées et

4 autoproclamées dans certaines parties de la Croatie et de la Bosnie-

5 Herzégovine, oui.

6 Q. Ces régions serbes autoproclamées ont précédé la formation de la

7 Communauté croate d'Herceg-Bosna de peu ?

8 R. Cela s'est passé presque en même temps, mais probablement l'ont

9 précédé.

10 Q. Nous allons aller un peu loin dans l'avance, au mois d'avril 1992,

11 donc, au bout de cinq mois. Pendant cette période-là, la République de

12 Bosnie-Herzégovine a été reconnue comme Etat indépendant par l'Union

13 européenne et par les Etats-Unis ?

14 R. Oui. Le 6 et 7 avril 1992.

15 Q. Par conséquent, lorsque la Communauté croate d'Herceg-Bosna a été

16 constituée, nous pouvons nous mettre d'accord pour dire que ceci n'a pas

17 été constitué sur le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine en

18 tant qu'Etat indépendant ?

19 R. La constitution initiale a eu lieu sur le territoire de la Bosnie-

20 Herzégovine, mais pas au sein de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat

21 international reconnu, cependant cela s'est passé sur le territoire de la

22 Bosnie-Herzégovine qui avait déclaré son indépendance de l'ancienne

23 Yougoslavie.

24 Q. Monsieur, je crois que le premier jour de votre déposition, vous nous

25 avez dit que dans le passé vous avez fait des conférences, vous étiez

26 conférencier et vous donniez des conférences sur le droit international à

27 l'université de Yale ?

28 R. Oui, c'est exact.

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1 Q. En ce moment, vous enseignez à Johns Hopkins, n'est-ce

2 pas ?

3 R. Oui, mais j'ajouterais que je ne suis pas un juriste.

4 Q. Non, je comprends cela. Mais je crois que vous avez mentionné que vous

5 avez enseigné entre autres choses le droit international ?

6 R. Oui.

7 Q. Pendant votre longue carrière et distinguée, vous avez participé à

8 l'application pratique du droit international public en tant que

9 diplomate ?

10 R. Oui. J'ai eu de la chance de pouvoir négocier lors de plusieurs traités

11 pendant mes années de service.

12 Q. Au moment où la Communauté croate d'Herceg-Bosna a été constituée,

13 c'était pendant la période générale pendant laquelle les Serbes de Bosnie

14 exerçaient une force ou plutôt attaquaient la République de Croatie depuis

15 le territoire de la Bosnie-Herzégovine; est-ce exact ?

16 R. Oui, depuis la Bosnie, depuis la Serbie, c'est exact.

17 Q. Puisque vous avez travaillé pendant longtemps et de manière active sur

18 le plan diplomatique, avez-vous eu l'occasion de découvrir un système pour

19 établir où -- plutôt je vais revenir en arrière. Avant cela, dites-nous

20 d'abord, sur la base de votre longue expérience en matière de droit

21 international, tout d'abord, est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour

22 dire que du point de vue du droit international traditionnel avant qu'une

23 entité ne soit reconnue comme État, il faut qu'elle possède certaines

24 caractéristiques.

25 R. Oui, le contrôle du territoire, ce genre de chose.

26 Q. Le contrôle de ses frontières, un gouvernement qui fonctionne; est-ce

27 exact ?

28 R. Oui.

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1 Q. Si l'Etat qui a montré pendant une certaine période de telles

2 caractéristiques graduellement, cet Etat peut devenir reconnu par les

3 autres au sein de la communauté internationale, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, mais il existe de nombreuses exceptions à cette règle, vous le

5 savez sans doute.

6 Q. Oui. Vous savez également que en temps moderne la pratique établie pour

7 qu'un Etat puisse bénéficier du statut d'Etat passe par le processus direct

8 de la reconnaissance de la part d'autres Etats ?

9 R. C'est la pratique habituelle. Encore une fois, ce n'est pas toujours le

10 cas. Par exemple, vous avez la situation actuelle au Kosovo.

11 Q. Bien sûr, je comprends que dans un grand nombre d'Etats, soi-disant ils

12 reconnaissaient la Palestine mais comme on le sait ceci n'était pas

13 généralement accepté.

14 R. S'agissant de ce même point je souhaite mentionner, Monsieur Murphy, et

15 c'est très pertinent que l'Etat d'Israël a été créé en 1947 et a, ensuite,

16 proclamé son indépendance et ne contrôlait pas son territoire.

17 Q. Oui.

18 R. Mais il a, immédiatement, été reconnu par l'Union soviétique et les

19 Etats-Unis en mai 1948. Donc, simplement pour vous dire que je suis

20 d'accord avec vous. Il y a toute sorte de solutions souples en ce qui

21 concerne la reconnaissance.

22 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que même si un Etat est reconnu il peut

23 toujours ne pas fonctionner effectivement, en tant qu'Etat ?

24 R. Oui, c'est exact.

25 Q. On peut ainsi en matière ou plutôt du point de vue du droit

26 international, surtout récemment parler dans ce cas-là d'un Etat qui a

27 échoué ?

28 R. Oui, l'expression un "Etat qui a échoué" n'est pas un terme officiel,

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1 mais ceci décrit de manière précise ce genre d'Etat.

2 Q. Monsieur Okun, vous avez encore d'autres documents devant vous,

3 notamment ceux qui concernent la Défense Stojic, ils sont en rose. Est-ce

4 que vous avez le classeur devant vous ?

5 R. Oui.

6 Q. Je souhaite maintenant attirer votre attention sur un document qui est

7 parmi les premiers. Il s'agit de la pièce 2D 00440, cela devrait être le

8 premier document avec la table des matières ou la liste des documents et le

9 titre devrait être : "La Fondation pour la paix, les Etats échoués, index

10 2006." Vous voyez ?

11 R. Oui.

12 Q. Oui. Les Juges ont cet exemplaire aussi.

13 Tout d'abord, est-ce que vous connaissez cette fondation pour la

14 paix ?

15 R. D'une manière générale, je sais que c'est une organisation non

16 gouvernementale américaine. Mais je ne connais pas les détails. Mais j'ai

17 certainement vu le nom.

18 Q. Puis nous y voyons une référence, une abréviation C-A-S-T, ne l'avez-

19 vous jamais vu ?

20 R. Non.

21 Q. Puisque nous n'avons pas beaucoup de temps, est-ce que vous pourriez

22 accepter et on me corrigera si je me trompe, que ce que ce document fait

23 c'est qu'il décrit ce que cette formation pour la paix appelle les Etats

24 échoués. Est-ce que vous avez déjà vu cela ?

25 R. Non, c'est la première fois.

26 Q. Donc, vous ne savez pas que plusieurs dirigeants y compris les membres

27 du gouvernement américain utilisent maintenant ce système dans le cadre de

28 leurs analyses politiques ?

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1 R. Non, je n'ai jamais entendu. J'ai beaucoup traité, officiellement et

2 officieusement, avec le gouvernement américain, mais je n'ai jamais entendu

3 qui que ce soit parler de cette manière.

4 Q. Très bien. Nous n'allons pas rentrer dans tous les détails. Mais

5 puisque vous avez beaucoup d'expériences en la matière, peut-être que vous

6 pourriez nous aider, si l'on assume et nous pouvons utiliser ce système

7 afin de faire certaines évaluations au sujet d'un Etat, vers le milieu de

8 la page vous verrez une référence à deux indices. Est-ce que vous les

9 voyez ?

10 R. Oui, je vois.

11 Q. Je vais vous expliquer quels sont les indices -- que ce sont les

12 indices utilisés par cette fondation afin d'analyser le statut d'un Etat

13 pour établir s'il s'agit d'un Etat échoué. Nous n'allons pas entrer dans

14 les détails, mais nous voyons tous ces critères, c'est 12 indices. Je

15 souhaite vous poser quelques questions concernant des indices différents,

16 notamment que l'on se concentre sur une certaine période entre avril 1992,

17 en allant jusqu'à la fin de l'année 1993 par exemple. Il n'est pas

18 nécessaire d'aller au-delà. Peut-on se concentrer sur cette période ?

19 R. Oui.

20 Q. Le premier de ces indices porte sur les pressions démographiques

21 croissantes. Nous pouvons voir éventuellement sur le Web ce que ce terme

22 signifie exactement, mais au fond cela veut qu'il existe un grand nombre de

23 pressions que des groupes de population au conflit, ce qui peut provoquer

24 un conflit concernant des disputes au sujet de la terre, des biens,

25 immobiliers, et cetera.

26 Nous pouvons être d'accord, n'est-ce pas que cet indice serait

27 caractéristique de la Bosnie-Herzégovine pendant la période mentionnée ?

28 R. Je ne suis pas d'accord.

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1 Q. Vous n'êtes pas d'accord ?

2 R. Non, puisque la Bosnie-Herzégovine n'avait pas du tout une grande

3 population. Avant la guerre il s'agissait d'une république constituée d'un

4 peu moins que quatre millions de personnes et en raison de l'invasion et

5 des combats et du fait que des centaines de milliers de réfugiés mentionnés

6 avant par Me Karnavas et d'autres membres de la Défense, il y en avait

7 beaucoup moins que ce nombre. Donc aujourd'hui je pense qu'ils ne sont pas

8 au nombre de quatre millions mais il ne s'agit certainement pas du nombre

9 suffisamment grand compte tenu de la taille de la Bosnie-Herzégovine pour

10 pouvoir parler de pressions démographiques.

11 Q. Je ne souhaitais pas dire pressions démographiques dans le sens qu'il y

12 avait trop de gens, mais ce que j'essaie de dire c'est qu'il y avait des

13 groupes différents de population au conflit et que souvent leurs disputes

14 concernaient la terre, le bien immobilier, et cetera.

15 R. Oui, dans ce sens-là, oui.

16 Q. Le deuxième indice porte sur le mouvement massif des réfugiés ou des

17 personnes internement déplacées IDP est l'abréviation utilisée ici ce qui

18 créé des situations d'urgence humanitaires. Vous êtes d'accord que ceci se

19 déroulait à l'époque, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Puis, le troisième critère c'est quelque chose qui est dû à la

22 vengeance c'est-à-dire des groupes différents ont leurs griefs et cherchent

23 à se venger les uns contre les autres à cause de leurs vieux griefs et

24 c'est certainement vrai, n'est-ce pas ?

25 R. C'est certainement vrai surtout s'agissant des Serbes. Ce n'est pas

26 vrai s'agissant des Musulmans. Puis, ce n'est pas vrai dans une grande

27 mesure s'agissant des Croates de Bosnie car ils ne parlent pas de leurs

28 anciens griefs comme les Serbes le faisaient car Mladic, le général Mladic,

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1 par exemple, dans une seule phrase, il vous disait immédiatement qu'il

2 était né en Bosnie-Herzégovine, que son père était un Bosniaque qui avait

3 été tué pendant la Deuxième Guerre mondiale par des fascistes et c'était

4 les Serbes qui parlaient ainsi mais non pas les Bosniaques ou les Croates.

5 Q. [aucune interprétation]

6 R. [aucune interprétation]

7 Q. Dans les discussions avec les Serbes de Bosnie c'était souvent le cas ?

8 R. Non, certainement pendant avec les Serbes de Bosnie.

9 Q. Le quatrième indice porte sur des flux humains chroniques et soutenus

10 donc une tendance nous pouvons voir par exemple une tendance selon laquelle

11 les professionnels, les intellectuels et ceux qui craignent les

12 persécutions ou de mauvais traitements ont tendance à quitter le pays et

13 devenir des personnes déplacées; vous êtes d'accord ?

14 R. Ce qui est assez étonnant ceci ne se déroulait pas à l'époque, c'était

15 surprenant de voir le nombre d'intellectuels, de journalistes, juristes,

16 d'autres professionnels qui sont restés à Sarajevo pendant les pilonnages

17 serbes intenses, le pilonnage de la ville et c'était le cas ailleurs aussi.

18 Donc effectivement c'était assez remarquable mais les gens souhaitaient

19 rester sur place. Ce n'était pas typique pour ce genre de combat.

20 Q. Très bien. Nous allons passer à autre chose. Ensuite nous avons un

21 développement économique inégal suivant les groupes différents. Autrement

22 dit, certains segments de la population avaient peut-être des griefs en

23 raison d'une inégalité où ce qu'ils concevaient comme inégalité portant sur

24 la distribution de la richesse et des opportunités.

25 R. Ceci n'était pas non plus un facteur. Les Musulmans de Bosnie et les

26 Croates -- les Musulmans étaient le peuple qui était le plus urbanisé des

27 trois. Les Serbes étaient le peuple le plus rural. Les Croates étaient

28 entre les deux mais il n'y avait pas beaucoup de différence économique

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1 parmi les trois groupes.

2 Q. Très bien. Ensuite déclin économique sévère.

3 R. Ceci a eu lieu après le début des combats car avant la Bosnie allait

4 bien.

5 Q. Lorsque la guerre a commencé à se dérouler il y avait vraiment une

6 aggravation économique sévère, n'est-ce pas ?

7 R. Oui et non. Car il y avait des endroits où les approvisionnements en

8 nourriture étaient réduits. Par exemple, à Sarajevo, en raison du siège

9 serbe. Il fallait apporter de la nourriture à Sarajevo par avion. Mais

10 s'agissant du reste du pays, lorsqu'on allait dans des petites villes on

11 pouvait aller dans un restaurant local et obtenir de la viande sans

12 problème.

13 Q. Numéro 7 c'est la criminalisation et la délégitimisation [phon] de

14 l'Etat, par exemple, cela veut dire que les gens perdent confiance en

15 l'institution de l'Etat, une tendance vers la corruption et la chute des

16 institutions gouvernementales. C'était le cas certainement ?

17 R. Bien. En particulier, les Serbes de Bosnie parlaient beaucoup de cela.

18 Ils affirmaient constamment que la Bosnie-Herzégovine n'existait pas du

19 tout.

20 Q. Oui. Numéro 8, détérioration progressive des services publics. Vous

21 êtes d'accord, certainement.

22 R. Tout compte fait les choses tenaient plutôt bien, d'ailleurs

23 remarquablement bien s'agissant des services publics. Encore une fois,

24 Sarajevo est le meilleur exemple. Ici nous avons la capitale assiégée

25 depuis des mois avec environ 5 000 obus qui tombaient au jour le jour. Nous

26 avions des observateurs de l'ONU dans la ville et autour dans les collines

27 qui ont compté le nombre d'obus qui tombaient sur Sarajevo au nombre de 5

28 000 par jour, et malgré cela le système des eaux, le système de la

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1 canalisation [inaudible] très important pour la ville était maintenu de

2 manière difficile avec l'aide étrangère, mais ceci fonctionnait pendant

3 l'ensemble du siège serbe.

4 Q. Très bien. Enfin, je ne suis pas d'accord mais nous n'allons pas parler

5 des détails. Numéro 9, violation des droits de l'homme à grande échelle ?

6 R. Oui, effectivement.

7 Q. Le numéro 10, l'appareil de sécurité qui fonctionne au sein d'un Etat,

8 au sein de l'Etat, des armées privées --

9 R. Nous avons déjà parlé du HVO.

10 Q. Oui ?

11 R. Puis, les milices territoriales des Serbes de Bosnie mais je ne dirais

12 pas que c'était un appareil de sécurité d'un Etat au sein d'un autre Etat.

13 C'est autre chose car vous parlez des institutions telles que NKVD en

14 Russie ou le ministère de la sécurité d'Etat en vielle république

15 démocratique allemande, ce genre de pays. Ceci ne se déroulait pas en

16 Bosnie.

17 Q. Très bien. Le numéro 11, l'augmentation des élites partagées en

18 factions autrement dit des groupes différents --

19 R. Cela c'est un autre point intéressant car on s'attendrait peut-être

20 comme je l'ai dit en répondant à une autre question concernant la

21 vengeance, on s'attendait à ce que cela se passe, mais ceci ne se passait

22 pas beaucoup en Bosnie-Herzégovine. Par exemple, les journalistes

23 d'Oslobodjenje à Sarajevo, les Serbes, les Croates et les Musulmans

24 travaillaient ensemble, dans la plupart des cas, et essayaient de maintenir

25 une Bosnie multiethnique. Haris Silajdzic appartenait certainement à une

26 élite et c'était ce ministre des Affaires étrangères qui était tout à fait

27 Musulman et qui faisait partie du gouvernement croate, qui défendait

28 partiellement justement l'idée de -- s'opposait à cette constitution des

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1 élites suivant des factions opposées. Donc, la situation était plus

2 complexe que cela. C'était là l'un des -- c'était encourageant d'ailleurs

3 de la situation qui était déprimante en 1992/1993.

4 Q. L'une des raisons de cette image déprimante, c'était que la rhétorique

5 politique suivait les lignes ethniques, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, c'est ce qui s'est passé.

7 Q. Finalement, le numéro 12, l'intervention d'autres Etats ou des acteurs

8 externes, cela s'est passé sans doute ?

9 R. Oui.

10 Q. Maintenant, la raison pour laquelle j'ai parlé de tous ces indices si

11 longuement était afin d'établir si l'on est d'accord avec cette hypothèse,

12 si on peut dire qu'entre avril 1992 et fin 1993, même si la Bosnie-

13 Herzégovine était un Etat reconnu, et c'était certainement un Etat échoué.

14 R. Je ne suis pas d'accord.

15 Q. Oui.

16 R. Puis-je expliquer ?

17 Q. S'il vous plaît.

18 R. L'Etat a subi une invasion et 70 % du territoire était occupé par les

19 Serbes. Ceci ne veut pas dire que c'était un Etat échoué pas plus que la

20 France ne l'était entre 40 et 44. C'était un Etat occupé par l'armée

21 allemande. Ils ont lutté ou mené une guerre. Malheureusement, pas avec

22 beaucoup de succès, et donc, l'armée allemande a occupé le pays. Ceci n'est

23 pas du tout conforme au concept de l'Etat échoué.

24 Q. Nous allons maintenant nous pencher sur ce qui se passait. Je pense que

25 vous avez dit dans votre déposition que le président Izetbegovic avait une

26 fonction double.

27 R. Oui, c'est exact.

28 Q. D'autre part, il se représentait, il se présentait comme représentant

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1 de l'Etat indépendant de Bosnie-Herzégovine.

2 R. C'est exact.

3 Q. D'autre part, il assistait aux négociations auxquelles vous avez

4 participé, et il représentait le côté musulman en tant que chef de cette

5 délégation ?

6 R. Lorsque vous dites il se présentait comme le président de Bosnie-

7 Herzégovine, ce n'est pas tout à fait exact. Car il était le président de

8 la Bosnie-Herzégovine.

9 Q. Très bien. Il était le président.

10 R. Mais vous avez raison. Il a pris partie des Musulmans.

11 Q. En même temps, un membre de son gouvernement, un collègue enfin du même

12 gouvernement, M. Akmadzic, qui était ministre, était membre de ce qu'on

13 peut appeler une délégation opposée lors de cette discussion ?

14 R. Je ne souhaiterais pas dire qu'il s'agissait d'une délégation opposée,

15 il s'agissait d'une délégation différente de la délégation musulmane. Il

16 était avec les Croates et représentait le point de vue croate.

17 Q. Oui.

18 R. Il ne dissimulait absolument pas.

19 Q. C'est justement ce à quoi je veux en venir. Tout cela était ouvert et

20 franc -- il y avait différentes factions au sein du gouvernement de la

21 Bosnie-Herzégovine qui essayaient d'obtenir un résultat différent.

22 R. Oui, tout à fait.

23 Q. De ce fait et du fait des conditions plutôt difficiles à Sarajevo, ce

24 que j'avance à votre intention c'est que le gouvernement à Sarajevo n'a pas

25 été en mesure d'assurer les services auprès -- par l'intermédiaire de

26 l'Etat, les services qui devaient fournir à la population ?

27 R. Oui, cela est vrai. Je vous dis que l'armée serbe contrôlait environ 70

28 %, de l'Etat. Donc, ipso facto, les Bosniaques ne contrôlaient pas ces 70 %

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1 et ne pouvaient pas donc faire en sorte que les services soient fournis.

2 C'était quand même un pays en état de guerre.

3 Q. Bien, Monsieur Okun, j'aimerais maintenant à partir de ce qui vient

4 d'être dit, vous faire la suggestion suivante, il s'agissait de conditions

5 très difficiles tout groupe quel qu'il soit, mais puisque nous parlons des

6 Bosniaques, parlons des Bosniaques, pendant la période mentionnée, à savoir

7 depuis le mois d'avril 1992 jusqu'à la fin de l'année 1993, tout groupe

8 avait le droit de s'organiser de prendre des mesures pour assurer sa

9 survie, sa défense, et pour faire en sorte que les besoins quotidiens du

10 groupe soient respectés ?

11 R. Oui, jusqu'à une certaine mesure, oui. Au-delà de cette limite, non.

12 Bien entendu, que tout groupe avait le droit à l'autodéfense. Il s'agit de

13 l'article 51 de la charte des Nations Unies. Cela fait partie intégrante du

14 droit international. Ce n'est pas une question d'autodéfense. Mais ce que

15 les Serbes de Bosnie ont fait ce que les Croates de Bosnie ont fait

16 également cela dépassait en fait cette limite.

17 Q. Oui, mais pour le moment je suis en train de parler en fait de ce que

18 les gens avaient droit -- ce à quoi les gens avaient droit. Nous sommes

19 tous d'accord pour dire que certaines choses n'auraient pas dû se passer

20 dans ce conflit.

21 R. [aucune interprétation]

22 Q. Je vais vous expliquez pourquoi je vous pose cette question. Vous avez

23 indiqué à la Chambre de première instance que la Communauté croate

24 d'Herceg-Bosna représentait -- l'était en quelque sorte -- avait été créée

25 en tant qu'entité politique et que leur objectif ultime était d'être

26 intégré ou d'être annexé par la République de la Croatie ?

27 R. C'est exact.

28 Q. Ce que je suis en train de vous dire et c'est une question de droit

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1 international et c'est également une question de faits et de faits qui ont

2 prévalu pendant cette période, ce que je suis en train de vous dire c'est

3 qu'il y a une autre explication à l'existence de cette entité, qui n'a rien

4 à voir avec les revendications territoriales, mais que l'on peut plutôt

5 associer à défense et au besoin pragmatique de survivre en temps de

6 guerre ?

7 R. Cela a transcendé en fait ce que vous avancez. Si cela c'était arrêté à

8 ce que vous dites, il n'y aurait pas eu de litige, mais nous avons quand

9 même eu des exemples des Serbes de Bosnie et des Croates de Bosnie, qui

10 nous parlaient et qui nous parlaient de leurs aspirations pour la future

11 composition territoriale de leur Etat cela dépassait le concept

12 d'autodéfense.

13 Q. Pour un moment supposons que cela était exact. Vous savez, on dit

14 qu'avec le recul, vous savez avec le recul tout le monde peut être

15 particulièrement génial et intelligent. Il est erroné en fait de considérer

16 ce qui s'est passé dans le passé en se plaçant de la perspective actuelle.

17 R. Oui, bien sûr.

18 Q. Nous avons ici, en fait, des [imperceptible] dans la situation des gens

19 qui se trouvaient là-bas à ce moment-là. Nous avons essayé de comprendre

20 les choses.

21 R. Oui.

22 Q. N'êtes-vous pas d'accord avec moi pour dire que, pendant cette période

23 dont nous parlons, on ne savait pas véritablement si la République de

24 Bosnie-Herzégovine pouvait survivre, il y avait quand même un doute assez

25 important ?

26 R. Oui. Certes. Il y avait certain doute du fait de la nature des

27 conflits, mais j'avais également un espoir, un espoir tout aussi important

28 que les doutes qui régnaient à l'époque. Un espoir -- un espoir pour les

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1 Serbes de Bosnie et pour -- dans une autre mesure pour les Croates de

2 Bosnie.

3 Q. Mais si vous vous trouviez dans cette situation --

4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je m'excuse. Je m'excuse mais vous

5 dites, Monsieur, qu'il y avait un espoir. Mais quel était cet espoir ?

6 Qu'est-ce qu'ils voulaient ? Qu'est-ce qu'ils espéraient avoir ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils espéraient pouvoir établir les liens entre

8 leur entité politique, la Republika Srpska pour les Serbes de Bosnie, et la

9 Communauté d'Herceg-Bosna pour les Croates de Bosnie, ils voulaient établir

10 le lien entre ces entités et la mère patrie dès qu'ils le pourraient ou

11 quand ils le pourraient.

12 M. MURPHY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Trechsel.

13 Parce que là c'est à cela que je voulais en venir.

14 Q. Supposons que cela est exact. Dans le contexte d'un, est-il exact qui

15 est en pleine décomposition, ce qui était l'Etat pour l'ex-Yougoslavie,

16 vous serez d'accord ? Au vu de la situation de chaos dans laquelle se

17 trouvait la Bosnie-Herzégovine pendant cette période, j'avance que du point

18 de vue légal, il n'y avait -- de tous les autres points de vue --

19 d'ailleurs, il n'y avait absolument rien d'illégitime dans cette

20 proposition ?

21 R. Bien, là, je pense que vous avez tout à fait tort, Maître. Parce que,

22 comme l'ont dit certains de vos confrères qui m'ont posé des questions,

23 l'intégrité territoriale est importante. La Bosnie et l'Herzégovine était

24 un Etat souverain qui était reconnu par la communauté international qui

25 avait des frontières internationales qui étaient reconnues, donc, dire que

26 c'était le chaos qui régnait pendant cette période, bien, et nous dire

27 maintenant que la proposition qui avait été faite était tout à fait légale.

28 Je dis que tout cela était tout à fait illégitime. Je ne peux pas marquer

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1 mon accord avec vous. C'était tout à fait illégitime du début à la fin

2 parce que, quand il s'agissait de tirer profit d'une situation de guerre

3 pour pouvoir créer d'autres Etats.

4 Q. Mais ce n'est pas ce que j'étais en train de vous dire.

5 R. D'accord.

6 Q. Alors, vous avez établi la comparaison entre la Communauté croate

7 d'Herceg-Bosna et la Republika Srpska, alors ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Donc, dans la mesure où les Serbes de Bosnie souhaitaient créer une

10 entité qui en fin de compte pourrait être incorporée avec la Serbie ou

11 aurait établi un lien avec la Serbie, le fait est qu'ils ont réussi en

12 partie.

13 R. C'est exact.

14 Q. Parce qu'aujourd'hui, la Republika Srpska, telle que nous la

15 connaissons est une entité au sein de la Bosnie-Herzégovine.

16 R. C'est exact.

17 Q. Cet accord fut le fruit d'un accord international.

18 R. Oui, oui, oui, c'est l'Accord cadre de Dayton.

19 Q. C'est un accord qui a été conclu parce que les personnes qui menaient à

20 bien les négociations se sont rendues compte qu'ils devaient bien accepter

21 certaines réalités ?

22 R. Écoutez, cela c'est une très longue histoire. Je pourrais vraiment

23 beaucoup de choses à ce sujet, je suis sûr que vous ne souhaitez pas que je

24 le fasse. Il y a de nombreuses raisons qui expliquent pourquoi cela a été

25 reconnu.

26 Q. Oui. Mais le fait est qu'il y a eu cette approbation internationale qui

27 a été parfois donnée avec beaucoup de réticence, mais elle a été donnée.

28 L'Etat est reconnu, est reconnu de nos jours ?

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1 R. Oui.

2 Q. Alors, vous avez travaillé longuement et travaillé durement. Je ne sais

3 pas si d'autres l'ont dit, peut-être que

4 M. Scott l'a dit d'ailleurs. Mais au cas où personne ne vous l'aurait dit,

5 je vous dirais que nous sommes particulièrement reconnaissants de tout le

6 travail que vous avez fait avec M. Vance pour essayer de trouver une

7 solution à la situation. Mais il y a quand même quelque chose qui

8 m'intrigue, à propos de ce que vous avez dit sur l'Accord Vance-Owen. Vous

9 avez dit à plusieurs reprises que la proposition ne se fondait sur aucune

10 appartenance ethnique. Vous l'avez dit, cela, c'est cela ?

11 R. Non, ce que j'ai dit, Maître Murphy, c'est que la composition des

12 provinces ne se fondait pas sur cette appartenance ethnique, et d'ailleurs

13 nous en avons déjà parlé. Je vous ai donné les pourcentages, combien de

14 personnes vivaient ici et là. J'ai également dit qu'il y avait un aspect

15 important du plan qui était donc de jubiler et contrecarrer la tendance du

16 nettoyage ethnique et de faire en sorte de préserver dans la mesure du

17 possible la nature multiethnique de la République de Bosnie-Herzégovine.

18 Alors, bien sûr, qu'il fallait prendre en considération le fait que

19 certaines personnes habitaient ou résidaient dans certains endroits. Nous

20 n'avons pas dessiné des cartes à partir de la ligne. Bien entendu, qu'il y

21 a eu des situations anormales ou un lien. Il y a un de vos confrères qui

22 m'a posé des questions, qui m'a dit, regardez les provinces, où se

23 trouvaient les Serbes, et cetera. Mais l'objectif c'était de maintenir un

24 Etat multiethnique, ce que la Bosnie-Herzégovine avait été disons pendant

25 les -- en 1990, ils essaient de le faire dans la mesure du possible.

26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je m'excuse. Il faudra peut-être que

27 vous ralentissiez parce qu'ils ont pris beaucoup de retard, je pense que

28 quelque chose risque d'être perdu.

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1 M. MURPHY : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. J'ai

2 écouté en français comme je fais d'habitude donc je n'écoutais pas

3 l'ambassadeur et je m'excuse.

4 Q. Vous avez dit ce matin que en cas de doute ou d'incertitude lorsque

5 vous aviez une zone mixte croate ou musulmane. Vous leur accordiez ce que

6 vous avez appelé le bénéfice du doute et que vous accordiez le bénéfice du

7 doute aux Croates.

8 R. Oui.

9 Q. Ce qui indique, n'est-ce pas, que fondamentalement le passage des

10 frontières entre les cantons ou les provinces se fondait sur cette

11 appartenance ethnique ?

12 R. Non, non, parce qu'il y avait d'autres paramètres, Maître Murphy, qui

13 ont été pris en considération. D'ailleurs ils sont indiqués dans le plan.

14 Lorsque nous avons discuté des structures des provinces il est évident que

15 les gens qui habitaient ont été pris en considération, mais la géographie

16 du terrain, les montagnes, les vallées, la trame industrielle, des cantons,

17 qu'en est-il du système de réseau énergétique par exemple. C'était aussi un

18 des paramètres qu'il fallait prendre en considération. Il y avait toute une

19 pléthore de facteurs qui ont été pris en considération. C'était une

20 situation très complexe. Alors, pour répondre directement à votre question,

21 je vais vous donner un exemple, la province où les Musulmans étaient

22 majoritaires avait les grands fleurons de l'industrie avant la guerre en

23 Bosnie-Herzégovine. Alors, ce n'était pas un bastion industriel mais comme

24 nous en avons parlé, il y avait quand même certaines installations

25 industrielles. La seule usine d'avions à réacteur se trouvait -- qui était

26 en Yougoslavie se trouvait à Sarajevo par exemple. Nous avons parlé de Novi

27 Travnik, de ce genre de chose. Ce que je voulais vous dire lors de ma

28 réponse, lorsque j'ai parlé du bénéfice de doute c'est que nous savions

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1 d'après notre carte et d'après ce que nous disait nos experts que les

2 Musulmans eux allaient pouvoir avoir toute cette trame industrielle sur

3 leur territoire et que nous voulions être justes à l'égard des Croates de

4 Bosnie pour -- donc, nous sommes assurés qu'il y avait des compensations

5 pour, tout comme pour les Serbes de Bosnie. Si vous prenez la carte du plan

6 de paix Vance-Owen, ils avaient 43 % de tout le pays qui se trouvait dans

7 des provinces majoritairement serbes, mais comme l'a dit M. Buha, vous nous

8 avez donné les serpents et les rochers et cailloux parce que c'était

9 véritablement les zones les plus pauvres de ce pays.

10 Donc, pour dessiner cette carte, ce fut une tâche qui fut loin d'être

11 aisée, beaucoup le savaient. Il a fallu prendre en considération de

12 nombreux facteurs, et les négociateurs ont fait de leur mieux.

13 Q. Alors, j'aimerais juste en dernier lieu vous poser une toute dernière

14 question, Monsieur l'Ambassadeur. J'aimerais savoir si vous avez lu l'acte

15 d'accusation de cette affaire ?

16 R. Oui, oui, je l'ai lu il y a quelques mois de cela. Je ne l'ai pas lu

17 récemment.

18 Q. Je pense que c'est tout. Ma consoeur, Me Nozica, a quelques questions à

19 vous poser.

20 R. merci, Monsieur Murphy.

21 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

22 Juges.

23 Contre-interrogatoire par Mme Nozica :

24 Q. [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, je m'appelle Senka Nozica. Je

25 suis avocate de Sarajevo.

26 Au cours des quatre derniers jours, vous nous avez montré que vous aviez

27 des connaissances très sérieuses à propos de la Bosnie-Herzégovine sur le

28 territoire et de l'ensemble des Balkans. D'ailleurs, vous nous avez prouvé

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1 que vous vous souveniez de beaucoup de choses que vous avez une mémoire qui

2 est assez exceptionnelle mais que vous aviez également beaucoup de

3 renseignements, que vous -- en fait, il y a beaucoup de renseignements qui

4 ont été mis à votre disposition du fait de ce dernier élément parce qu'en

5 fait, vous avez passé toute la guerre à Sarajevo. Mon confrère vous a posé

6 une question à propos du système des communes. Vous avez dit en fait, que

7 les observateurs de Sarajevo vous ont dit qu'en dépit des 5 000 obus qui

8 tombaient sur la ville chaque jour, ce système, cette infrastructure,

9 l'eau, l'électricité, le gaz, tout cela a continué à fonctionner. Mais

10 j'aimerais vous dire qu'il y avait donc pour ce qui est des quatre années

11 de guerre, vous n'aviez de l'eau que deux jours par semaine, de même pour

12 l'électricité. Il y avait de l'eau juste à trois ou quatre emplacements

13 dans la ville, qu'il était très dangereux de s'y rendre et nous avions

14 très, très d'électricité, donc, je pense qu'en fait, les informations qui

15 vous ont été fournies n'étaient pas tout à fait entièrement complètes.

16 Alors, j'aimerais aborder d'autres sujets. Je n'ai pas beaucoup de temps à

17 ma disposition, mais ma consœur, Me Alaburic, a évoqué certaines questions

18 et je vais, en fait, enchaîner à la suite des questions.

19 J'aimerais revenir sur certains documents qui vous ont été montrés par le

20 Procureur. Au moins deux documents où il est fait référence à M. Bruno

21 Stojic. Il s'agit du document qui traite du mois de janvier 1993 et il

22 s'agit de documents qui font état de subordination du HVO, de l'ABiH, dans

23 les deux directions. Pendant l'interrogatoire principal à propos de ces

24 documents, vous avez dit à propos de ces ordres et de ces décisions qu'ils

25 étaient prématurés.

26 R. Ecoutez, je n'ai jamais dit cela. C'est Lord Owen qui a utilisé le

27 terme "prématuré," cela ce sont les termes de Lord Owen. Si j'ai utilisé ce

28 terme, c'est que je le citais.

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1 Q. Merci. Est-ce que vous avez dit que cela en fait ne tenait pas compte

2 de l'esprit du plan de Vance-Owen; c'est exact ?

3 R. J'ai dit qu'il ne tenait pas compte ni de l'esprit de la lettre du plan

4 de paix Vance-Owen.

5 Q. Bien. Troisièmement, vous avez donc donné donc, vous avez apporté ces

6 trois nuances et vous avez dit en fait que cela avait eu des incidences ou

7 des conséquences plus souhaitables. Etes-vous d'accord avec ce troisième

8 critère que vous aviez avancé ?

9 R. Oui, oui, j'ai dit cela.

10 Q. Merci. J'aimerais maintenant que nous revenions sur le deuxième

11 élément. Il y a donc cet ordre qui a été signé par mon client et d'ailleurs

12 avec cet ordre on peut établir le lien entre cet ordre et l'ordre qui a

13 suivi. Alors, est-ce que cet ordre tenait compte de l'esprit de la lettre

14 du plan de Vance-Owen. Nous avons déjà eu la possibilité d'examiner ce

15 document.

16 Mme NOZICA : [interprétation] Il s'agit du document P 09852. Il a déjà été

17 affiché. J'aimerais qu'il soit affiché à nouveau.

18 Q. Je pense que c'est le quatrième document de votre liasse de documents.

19 C'est un document vert cela pour que vous le trouviez plus facilement, et

20 j'aimerais informer toutes les personnes présentes dans le prétoire que

21 j'ai placé tous les documents que je souhaite examiner dans la liasse de

22 documents, y compris les documents qui ont été utilisés par l'Accusation.

23 Alors, les nôtres sont roses et les documents qui ont été utilisés par

24 l'Accusation lors de l'interrogatoire principal sont verts.

25 Q. Est-ce que vous avez trouvé ce document ? Le numéro du document je vous

26 le rappelle est P 09852.

27 R. Oui, je l'ai trouvé.

28 Q. Est-ce que nous pouvons, je vous prie, consulter ensemble la page 13.

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1 Mon confrère m'a dit il y a un petit moment que l'on pouvait trouver cela à

2 la page 11. Il s'agit de la déclaration introductive de Lord Owen. Mais à

3 la page 13, vous avez dit qu'il s'agissait des principes qui avaient été

4 avancés -- et présentés par Lord Owen -- ou dont Lord Owen avait -- que

5 Lord Owen avait paraphrasé dans son discours d'introduction, donc il s'agit

6 de la page 13.

7 R. Nous n'avons pas besoin de la paraphrase de Lord Owen. Nous avons le

8 texte, Maître Nozica, donc Lord Owen a paraphrasé, le secrétaire Vance a

9 paraphrasé. Bien quand on parle de paraphrase, il s'agit tout simplement

10 des paraphrases. Nous avons le texte en face de nous. Ce n'est pas la peine

11 de nous lancer dans des paraphrases.

12 Q. Monsieur l'Ambassadeur, j'aimerais vous demander de voir ce qu'il dit

13 en matière de subordination, M. Owen à cette conférence, cette Conférence

14 qui a eu lieu à Genève. A propos donc de cette question de subordination,

15 nous n'avons pas reçu de la part de l'Accusation la traduction de ce texte

16 en croate ou en bosniaque ou en serbe. Mais pour que ce soit le compte,

17 pour que la phrase soit exacte, est-ce que vous pourriez nous donner

18 lecture à voix haute de cette phrase pour que cela soit consigné par le

19 compte rendu d'audience ?

20 R. Ce qu'a dit Lord Owen ?

21 Q. Oui. Cela commence par : "Les forces des Serbes de Bosnie." Il s'agit

22 de la deuxième ligne -- donc, deuxième phrase, deuxième ligne de la page

23 13.

24 R. Oui, je le vois. Lord Owen a dit et je cite : "Les forces Serbes de

25 Bosnie pourraient se retirer dans les provinces 2, 4 et 6. Les forces

26 Croates de Bosnie pourraient être déployées dans la province 3 et les

27 autres forces, les forces qui restent. Nous l'espérons concluront un accord

28 eu égard à leur déploiement dans les provinces 1, 5, 8, 9 et 10,

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1 conformément à nos principes constitutionnels, (j'ouvre la parenthèse

2 numéro 8), la Bosnie-Herzégovine devra faire l'objet d'une démilitarisation

3 progressive."

4 Q. Merci. Comme vous l'avez dit il est question de principes

5 constitutionnels et du numéro 8 qui est en fait le principe constitutionnel

6 relatif à la démilitarisation, n'est-ce pas ?

7 R. Je le suppose si Lord Owen l'a dit. Je ne les ai pas en face de moi.

8 Q. Est-ce que vous pourriez vérifier à la page 11 qui précède ce

9 paragraphe s'il y a des incertitudes afin que nous soyons absolument sûr et

10 certain de ce que nous lisons. Donc, il s'agit de l'annexe 3, déclaration

11 d'ouverture de Lord Owen. Donc, pour le compte rendu d'audience pour que

12 nous sachions ce que nous lisons --

13 L'INTERPRÈTE : Réponse du témoin est inaudible.

14 Mme NOZICA : [interprétation]

15 Q. Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous pouvez convenir d'après cette

16 explication et les nuances apportées par M. Owen qu'il semble que les

17 armées dans les provinces étaient censées conclure un accord sur la façon

18 dont elles allaient être déployées ?

19 R. Oui. Oui, c'est ce qui est déclaré. C'est ce que l'on trouve également

20 dans le plan de paix Vance-Owen.

21 Q. Merci. Le Procureur vous a donné lecture d'une partie d'une

22 intervention du président Izetbegovic, il s'agissait d'une réunion qui a eu

23 lieu à Zagreb, le 15 janvier 1993. Lors de cette réunion -- ou plutôt, vous

24 vous avez dit que vous n'aviez pas participé à cette réunion que vous

25 n'étiez pas présent.

26 Etes-vous fatigué, Monsieur ? J'ai l'impression que vous êtes un peu

27 fatigué ?

28 R. Non, non. Je vous suis avec beaucoup d'intérêt et même avec beaucoup

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1 d'enthousiasme.

2 Q. Je suis ravie de l'entendre.

3 Vous nous avez dit que vous n'étiez pas à cette réunion ?

4 R. Ecoutez, nous en avons déjà parlé plusieurs fois. Vous avez le compte

5 rendu d'audience. Je pense que je n'y étais pas. Il faudrait que je

6 consulte mon journal de bord. Mais contrairement à

7 Me Karnavas, je n'ai pas lu mon journal de bord 10 000 fois, donc, je m'en

8 tiens à ce que vous me disiez, et puis, je pense que cela sera clairement

9 consigné au compte rendu d'audience; pourquoi ne poursuivez-vous pas,

10 Maître.

11 Q. Bien. Bien. Alors, est-ce que nous pourrions peut-être consulter le

12 compte rendu d'audience ? Alors, vous avez, dans un nombre de documents, le

13 document P 01158. Il s'agit du sixième document en partant de la fin.

14 Le Procureur vous a donné lecture d'une partie de la discussion. Vous avez

15 l'intervention de M. Izetbegovic à la page 18 de la version anglaise, il

16 s'agit de la page 48 dans la version croate.

17 J'aimerais vous rappeler et vous pouvez me croire si je vous dis qu'il

18 s'agit du passage où M. Alija Izetbegovic semble être un tant soit peu

19 nerveux ou mécontent parce qu'il considère que l'interprétation du plan par

20 les Croates de Bosnie ne se fait pas comme cela aurait dû être fait si l'on

21 tient compte du plan, notamment pour ce qui est de cette question de la

22 subordination et cela le 15 janvier.

23 Alors, est-ce que nous pouvons, je vous prie, ensemble à nouveau voir ce

24 qu'a dit M. Owen à cette réunion à ce sujet ? Nous allons trouver cela à la

25 page 52 de la version croate et à la page 20 de la version anglaise. Si

26 vous ne pouvez pas trouver, je vous en donnerai lecture.

27 R. Je l'ai trouvé. Merci. Merci.

28 Q. Bien. C'est parfait. Alors, j'aimerais commencer par la troisième

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1 phrase : "En ce qui concerne les provinces individuelles en expliquant le

2 système, je dis que les forces serbes militaires devaient se retirer à

3 Banja Luka, Bijeljina et en Herzégovine orientale. Pour ce qui est du

4 reste, je ne vais faire aucune suggestion, mais je pense avoir déjà

5 mentionné le fait qu'il s'agit d'une question qu'il faut que nous résolvons

6 ensemble et qu'il faut, en fait, que ce soit l'ABiH et le HVO qui trouvent

7 une solution."

8 Est-ce que vous êtes d'accord avec moi ? Est-ce que vous voyez qu'une

9 fois, M. Owen suggère que la consultation et l'accord -- les accords

10 devront être utilisés pour résoudre ce problème à propos de l'ABiH et du

11 HVO ?

12 R. Oui, il résume la section E, du plan Vance-Owen, qui préconise le

13 retrait des forces et, en fait, la ligne dans le plan qu'il résume est

14 comme suit : "Les forces de l'ABiH et du HVO seront déployées dans les

15 provinces 5, 8, 9 et 10, compte tenu d'accord conclu entre eux."

16 Alors, effectivement, qu'il devait y avoir une consultation conjointe

17 à propos du déploiement dans ces provinces, c'est ce qu'il entendait Lord

18 Owen. Il n'avait pas le plan devant lui lorsqu'il s'exprimait. Il y a

19 certains mots qui sont peut-être pas les mêmes mais il est tout à fait

20 exact et il a raison lorsqu'il dit que c'était quelque chose qui devait

21 être discuté par le HVO et par l'ABiH ensemble, oui, certes.

22 Q. Merci. Merci, Monsieur l'Ambassadeur. Prenons maintenant une de ces

23 ordonnances qui n'a pas été montrée par l'Accusation, et il s'agit de la

24 pièce P 01140. Le numéro 3 en haut de la chemise que vous avez sous les

25 yeux, et vous voyez qu'il y a un autocollant rose dessus.

26 Pouvons-nous le voir, s'il vous plaît, parce que je pense que c'est quelque

27 chose d'essentiel cela a été signé par M. Stojic. Le point 1 et le point 5,

28 parce qu'on a déjà vu les autres. Voyons ce qui est écrit au point 1.

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1 "L'état-major des forces du HVO doivent établir immédiatement le contact

2 avec toutes les forces opérationnelles et le commandement de l'armée de la

3 Bosnie-Herzégovine dans les territoires des provinces 3, 8, et 10, et 1, 5

4 et 9 afin que la mise en œuvre de la décision se concrétise."

5 Avez-vous trouvé ce texte ? Je vois que vous feuilletez encore, vous

6 cherchez, et chaque mot est important pour moi. Donc, 1140, la troisième en

7 partant du haut, avec un autocollant rose.

8 Monsieur l'Ambassadeur, vous pouvez voir le texte sur l'écran aussi.

9 R. Merci. Je l'ai trouvé.

10 Q. Pour mettre concrètement en oeuvre la décision du HVO HZ, daté du 15

11 janvier 1993. Il s'agit d'une décision qui a été prise par le HVO et signée

12 par M. Prlic.

13 Je vous demanderais maintenant de voir le point numéro 5, qui dit : "Des

14 officiers de l'ABiH passeront sous contrôle des forces armées du HVO au

15 niveau des zones d'opérations et des brigades d'une manière proportionnelle

16 au nombre de soldats qui se trouvent sur la ligne de front."

17 Nous voyons à la fin à qui cela est adressé état-major du HVO, armée de la

18 BH, au ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine, l'administration de

19 la police militaire, et cetera.

20 Ce préambule, j'imagine que vous voyez ce document pour la première fois,

21 dans le préambule on donne instruction à l'état-major des forces armées

22 afin qu'elles établissent un contact direct avec toutes les forces

23 opérationnelles et avec l'ABiH pour mettre en œuvre la décision sur le plan

24 concret.

25 Est-ce que cet ordre n'implique pas un essai de parvenir à un accord de la

26 manière dont cela est précisé dans le plan Vance-Owen et dans cette

27 annexe ?

28 R. La réponse est non, et pourquoi, pour les raisons que je vais vous

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1 expliquer : le même jour, dans le document précédent dans votre liasse de

2 documents, il y a une décision qui est annoncée par le Conseil de Défense

3 croate, et qui est signée par le Dr Prlic, et qui dit à la première phrase

4 : "Toutes les unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui en ce moment se

5 trouve stationnée dans les provinces 3, 8 et 10, qui ont été déclarées les

6 provinces croates dans les accords de Genève, seront maintenant

7 subordonnées sur le commandement de l'état-major des forces du HVO."

8 Ce que vous avez lu découle de ce document. Donc, lorsque vous dites :

9 "Vous savez qu'on doit discuter avec eux et sous la subordination du HVO,"

10 c'est très clair à la lecture de document du Dr Prlic que je viens de lire.

11 Donc, ce n'était pas une façon indépendante de dire : "Venez nous allons

12 discuter de ces questions-là." Vous êtes subordonné à nous. Vous allez

13 faire rapport et puis maintenant nous allons discuter.

14 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je vais vous dire très sincèrement que je ne

15 m'attendais pas à une réponse différente de votre part. Je voudrais vous

16 demander de revoir ces documents, et les Juges vont tirer la conclusion.

17 La décision qui a été envoyée par M. Prlic c'est une décision, et ici, il

18 s'agit d'un ordre qui permet de mettre en œuvre cette décision. Je voudrais

19 savoir si ce qui est dit dans cet ordre que la décision signée par M. Prlic

20 peut être effectuée, mise en œuvre ensemble avec l'ABiH. Est-ce que c'est

21 bien cela qui est écrit ? Je vous demande simplement de répondre au niveau

22 de ce qu est écrit ? Est-ce que c'est bien cela ?

23 R. [aucune interprétation]

24 Q. Non, alors, avançons parce que j'ai très peu de temps. J'ai d'autres

25 documents à passer en revue. Je suis désolée. A la fin, je vais vous

26 laisser le temps de nous dire ce que vous pensez, et je serais très

27 intéressée, mais vous êtes allé pour la première fois dans un prétoire où

28 notre temps est très limité. Excusez-nous si nous sommes un peu impoli,

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1 mais je n'ai pas d'autre façon de travailler.

2 L'Accusation vous a montré un document P 01168. C'est le document numéro 5

3 dans la liasse avec un autocollant vert puisque c'est un document qui vous

4 a été montré par l'Accusation. Je voudrais vous rappeler qu'il s'agit d'une

5 ordonnance signée par M. Halilovic en date du 16 janvier 1993. Avez-vous

6 trouvé ce document ?

7 R. Oui.

8 Q. Une ordonnance précédente de M. Stojic comme nous l'avons vu et dans

9 laquelle il envoie un ordre à l'état-major de l'ABiH. Dès la première

10 phrase, cet ordre M. Halilovic nous voyons qu'il l'a reçu parce qu'il dit à

11 la première phrase : "Le 15 janvier 1993, l'état-major des forces armées de

12 la République de Bosnie-Herzégovine a été informé par la décision du HVO

13 d'Herceg-Bosna et le commandement du ministère de la Défense HVO HZ HB à

14 Mostar."

15 Plus loin dans cet "ordre," il est étayé, M. Halilovic dit : "Les états-

16 majors et les unités et les institutions de l'armée peuvent ne pas accepter

17 ou ne pas mettre en œuvre la décision du HVO mais doivent respecter la

18 décision de l'état-major du commandement Suprême des forces armées de la

19 République de Bosnie-Herzégovine."

20 Ce document vous a été montré par l'Accusation. Est-ce qu'on peut conclure

21 à la vue de ce document que l'ABiH -- ou plutôt, l'état-major n'avait pas

22 accepté la proposition de discuter ensemble et de convenir d'action

23 future ? Nous voyons qu'il l'a reçu. Ici, nous voyons au premier paragraphe

24 qu'il donne instructions à l'ABiH de ne pas accepter, de ne pas mettre en

25 œuvre cette décision. Est-ce qu'on peut conclure de ce document ceci ?

26 R. Il donnait instructions à l'ABiH de ne pas être d'accord avec l'annonce

27 unilatérale du HVO selon lequel il devait se subordonner au HVO.

28 Q. Monsieur l'Ambassadeur, vous agissez presque comme le conseil de M.

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1 Halilovic parce qu'il n'a pas dit cela dans cet ordre. Il a dit : "Vous ne

2 devez pas accepter." Mais il ne donne pas d'explication aux arguments que

3 vous avancez. Mais avançons.

4 R. Je ne suis pas d'accord avec vous, Madame. Je souhaite être brève. Si

5 vous ne lisez que les deux premières phrases de sa déclaration, on peut

6 lire : "Le 15 janvier, et -- le commandement -- les commandants de

7 l'unité," et cetera, et cetera. Ces documents contiennent le commandement

8 selon lequel toutes les Unités de l'armée de la BiH qui sont pour le moment

9 sur le territoire des provinces 3, 8 et 10, les provinces qui ont été

10 déclarées Croates dans les discussions de Genève doivent se subordonnées au

11 commandement des quartiers généraux du HVO. C'est écrit et j'ai dit que :

12 "Je n'étais pas d'accord." Qu'on ne pouvait pas dire qu'on y passait. Je

13 viens de vous le lire. Pourquoi dites-vous qu'il ne le dise pas alors que

14 je viens de vous le lire ?

15 Q. Oui, je suis d'accord avec ce que vous avez dit mais, bon s'il vous

16 plaît, poursuivons.

17 R. [aucune interprétation]

18 Q. Une réunion a eu lieu à Zagreb -- non, excusez-moi, c'est la réunion de

19 Sarajevo, le 20 janvier 1993 et lors de cette réunion et cela se trouve

20 dans votre journal, j'espère que vous me ferez confiance parce que nous

21 n'avons pas le temps de trouver ce texte.

22 Mais je dis pour le compte rendu qu'il s'agit du document

23 P 01038, page RO 164313, et la discussion portait sur un ordre de m. Rajic.

24 Vous souvenez-vous de cela ?

25 R. Oui, j'étais présent lors de cette réunion. J'ai consacré un paragraphe

26 entier dans ma déclaration de témoin. Bon, je ne vais pas la lire, mais

27 simplement pour le bénéficie de la Cour, il s'agit du paragraphe 19 de ma

28 déclaration de témoin.

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1 Q. Oui, c'est bien vrai. Dans votre journal vous consacrez un paragraphe

2 entier où vous citez M. Owen, et vous dites : "Je pense personnellement que

3 l'annonce du ministre de la Défense était prématurée." Il s'agit de ce que

4 M. Owen a dit, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, j'en ai parlé d'une manière très sûre dans ma déclaration de

6 témoin et j'ai dit en deux lignes : "S'agissant de cet ordre, il était

7 'prématuré,' ce qui d'une manière diplomatique veut dire que j'ai exprimé

8 son désaccord avec Akmadzic, Lord Owen a dit clairement qu'il était --

9 qu'il soutenait la position d'Izetbegovic."

10 Mme NOZICA : [interprétation] Pouvons-nous prendre le document 2D 00441.

11 Q. C'est-à-dire le troisième document dans la chemise en partant du bas.

12 L'avez-vous trouvé ?

13 R. Oui.

14 Q. Merci. Il s'agit d'un ordre de M. Bozic Rajic, en date du 21 mars 1993.

15 Donc, nous sommes d'accord que c'est un ordre qui a été émis le lendemain

16 de la réunion à Sarajevo lorsque Lord Owen a dit qu'il n'était pas d'accord

17 et qu'il n'était pas satisfait de cet ordre.

18 Le 21 janvier, M. Bozic Rajic, le ministre de la Défense de la République

19 de Bosnie-Herzégovine, au point 1, dit : "La date limite pour l'exécution

20 de l'ordre du 16 janvier 1993 prévue pour le 20 janvier 1993 à minuit a été

21 prolongée jusqu'à ce que soit terminé des conversations de paix à Genève."

22 Il s'adresse aux mêmes personnes que dans l'autre ordre que nous avons

23 examiné en date du 15 janvier.

24 Il s'agit d'un document qui vient des archives d'Etat de Croatie, et qui

25 porte un cachet en bas de page pour éviter toute remise en question de ce

26 document.

27 Monsieur l'Ambassadeur, à la lecture de cet ordre, on peut conclure que M.

28 Rajic a résilié l'ordre du 16 janvier avant de déclarer que la décision du

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1 ministre de Bosnie-Herzégovine ne publiait au bulletin officiel le 29

2 janvier était invalide, une décision émise par M. Izetbegovic. Est-il

3 possible de tirer cette conclusion sur la base de ce document ?

4 R. Je dirais que ce document per se établit l'abrogation de l'ordre

5 précédent. A-t-il été suivi sur le terrain ou devait-il être suivi sur le

6 terrain par les forces du HVO, cela c'est une autre question.

7 Q. Malheureusement, je n'ai pas le temps parce que ma collègue, Mme

8 Alaburic vous a posé une question sur la mise en œuvre de cet ordre. Je

9 voudrais simplement suivre la voie suivie par cet ordre.

10 Pour le compte rendu d'audience, je voudrais dire que, le

11 20 janvier 1993, il s'agit du document P 0 -- ce n'est pas dans ma chemise,

12 mais pour le compte rendu d'audience, je n'ai pas le temps, il s'agit du P

13 01240. Il s'agit d'une réunion qui a eu lieu le

14 20 janvier chez Tudjman, et à cette réunion, il y avait M. Boban, et le 20

15 janvier, c'est-à-dire le lendemain de votre visite à Sarajevo, vous avez

16 annoncé l'abrogation de cet ordre. Puisqu'il ne nous reste pas beaucoup de

17 temps, j'ai mis moins de temps que ce à quoi je m'attendais donc je vais

18 passer directement au mois d'avril et des conflits du mois d'avril. C'est

19 une question qui a été abordée par

20 Me Karnavas, mais il n'a pas eu le temps, malheureusement, lui non plus.

21 Vous avez à plusieurs reprises dit -- vous avez dit à cette Chambre que

22 vous avez parlé de ce conflit au cours duquel le HVO avait opéré des

23 opérations de nettoyage ethnique pour lequel il a été reconnu

24 officiellement responsable. Vous avez lié tout cela aux ordres de janvier

25 1993.

26 Je voudrais vous demander, vous avez participé à la réunion.

27 M. Karnavas vous a posé une question là-dessus. Il a même cité une partie

28 du texte du résultat de cette réunion du 24 avril 1993, lorsque M. Owen a

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1 parlé de la responsabilité de ces conflits. Vous avez demandé : est-ce que

2 ceci est inclus dans mon journal ? La réponse était oui. Donc, j'aimerais

3 maintenant lire ce point. Nous pouvons tout d'abord prendre le compte rendu

4 de la réunion à laquelle vous avez participé, document P 02059. Dans ma

5 chemise, il s'agit du cinquième document en partant du haut, excusez-moi en

6 partant du bas. Je suis sûre que vous vous souviendrez de tout cela. Je

7 voulais simplement vous le montrer. Il s'agit de la page 48, la même page

8 en anglais et en version croate, pour que vous voyiez ce qu'a dit

9 M. Owen au sujet du conflit du mois d'avril.

10 Page 48, il est écrit : "Il y a beaucoup de discussions avant cela au sujet

11 de ces conflits," mais je n'ai pas le temps de voir ceci en détail. Mais,

12 Messieurs les Juges, vous avez ce document. A la fin, M. Owen dit : "Si

13 vous me permettez, je voudrais dire qu'il n'y a aucun doute que les deux

14 côtés sont responsables." Je voudrais lire une partie d'un article du New

15 York Times, il ne s'agit pas d'un journal antimusulman, cet article dit, je

16 cite : "Les porte-parole des Nations Unies à Sarajevo, le commandant Barry

17 Frewer, du Canada a dit que les forces de Bosnie sont concentrées sur

18 l'expulsion des Croates de la ville musulmane de Zenica, 20 miles au nord-

19 est de Vitez. Un grand nombre de Croates marchent avec des fardeaux, tandis

20 que des réfugiés musulmans fuient eux dans la direction opposée vers

21 Zenica, alors que les Croates fuient vers Vitez. D'après ce que l'on peut

22 voir, tout indique qu'il y a des opérations de nettoyage ethnique. Les

23 maisons sont incendiées, on trouve des cadavres de civils dans les rues. Il

24 est évident que ceci se passe des deux côtés. Je pense qu'il ne faut pas

25 penser qu'il n'y a qu'une partie qui soit impliquée. J'ai aussi reçu

26 d'autres rapports, et je peux les publier."

27 Ensuite, M. Izetbegovic dit : "Je ne dis pas que les deux parties ne soient

28 pas responsables, ne puissent pas être blâmées. Je dis qu'il ne faut pas le

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1 mentionner à l'avance," parce qu'il fait référence à la déclaration finale.

2 Cette histoire se poursuit, M. Izetbegovic insiste. Pouvons-nous voir

3 la page 50, s'il vous plaît ? M. Owen dit au premier paragraphe, troisième

4 ou quatrième phrase, je cite : "Mais je pense qu'il est très important

5 d'admettre que les deux parties sont responsables de ces événements non

6 souhaitables. Je crois que c'est vraiment très important."

7 Pour terminer, je vais vous montrer votre journal où une page dans

8 votre journal. Il s'agit du document P 01772. Dans mes documents vous

9 pouvez trouver uniquement cette page du journal, donc, c'est plus facile

10 pour vous de vous y retrouver. Il s'agit de la page 064542 où on dit d'une

11 manière tout à fait explicite, il s'agit du

12 24 avril 1993. Il s'agit d'une note au sujet de cette réunion. On peut lire

13 : "Les deux parties sont responsables." A la même date, mais à la page

14 164544, où M. Owen dit encore une fois : "Le problème c'est la Bosnie

15 centrale. Les tensions ne sont pas nouvelles. Elles précèdent le plan

16 Vance-Owen. D'après les informations tout le monde y a contribué."

17 Monsieur l'Ambassadeur, après vous avoir montré ces documents et

18 après vous avoir rappelé toutes ces choses parce que vous étiez présent, je

19 veux simplement rafraîchir votre mémoire. Vous vous souvenez que s'agissant

20 des conflits du mois d'avril, où vous avez toujours attribué la

21 responsabilité aux Croates, est-ce que vous pouvez conclure que la position

22 de M. Owen était que les deux côtés étaient responsables ?

23 R. J'ai dit dans ce prétoire que les deux parties étaient

24 responsables. J'ai même dit qu'aucun des deux n'était des anges. Donc j'ai

25 dit la même chose que Lord Owen. Il n'y a pas de différence entre nos deux

26 déclarations et ce que je dis dans ce prétoire.

27 Q. Monsieur l'Ambassadeur, merci beaucoup pour cette réponse. Dans vos

28 réponses il y avait plusieurs fois des indications et même des déclarations

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1 tout à fait ouvertes en disant que les Croates étaient plus responsables,

2 vous avez même nié cela à la décision de janvier 1993. Nous allons relire

3 avec beaucoup d'attention le compte rendu d'audience.

4 Mme NOZICA : [interprétation] J'aurais encore une ou deux questions si j'en

5 ai le temps, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Terminez les unes ou deux questions, en étant

7 très synthétique, Maître.

8 Mme NOZICA : [interprétation] Oui, je serai précise.

9 Q. C'est très important pour moi. Le document qu'on vous a montré, c'est

10 un document qui est adressé à mon client. C'est la raison pour laquelle je

11 considère qu'il est important de vous le montrer. Il s'agit du document P

12 01338, un document qui est le quatrième en partant de la fin. Je vérifie.

13 Non excusez-moi c'est le troisième, P 01338.

14 L'avez-vous trouvé, Monsieur l'Ambassadeur ?

15 R. Oui.

16 Q. Ce document vous a été montré par l'Accusation, parce que dans ce

17 document il est écrit, ou dans cette lettre plutôt envoyée à M. Stojic, il

18 se plaint de la décision de Rajic. Il dit que c'était une décision

19 unilatérale. Le temps est tel que ce à quoi on peut s'attendre et il parle

20 également des forces de l'armée qui n'a pas besoin de l'assistance de

21 personne. Mais il y a deux points importants qui sont importants sur

22 lesquels vous pouvez faire un commentaire. Il s'agit de la page 2 en

23 anglais, troisième paragraphe, où il était écrit : "Que l'état-major et les

24 unités n'ont pas et ne veulent pas avoir des unités composées d'étrangers."

25 C'est une réponse au reproche selon lequel il y a des Moudjahiddines dans

26 ces unités.

27 Vous avez été le témoin qu'il y avait des Moudjahiddines sur le

28 territoire de Bosnie-Herzégovine ou plutôt le territoire contrôlé par

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1 l'armée de la Bosnie-Herzégovine.

2 R. Oui. Lorsque j'ai vu les Unités musulmanes, c'est-à-dire ces

3 types avec un bandeau vert autour de la tête où il y avait des choses

4 écrites en arabe, j'ai déjà mentionné, mais il s'agissait en fait des zonez

5 contrôlées par les Croates. Ils étaient dans un camion et tiraient des

6 coups en l'air, comme je l'ai déjà dit. Mais c'était le jour, j'ai dit cela

7 au Tribunal, j'ai dit cela à la Chambre, on est parti de Split à Sarajevo,

8 et cetera, mais c'était dans une zone contrôlée par les Croates. Je n'ai

9 pas tiré de conclusions de cela, Madame Nozica, j'ai répondu simplement à

10 la question.

11 Q. Ce sont les seules informations dont vous disposez au sujet des

12 Moudjahiddines sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, sur le

13 territoire contrôlé par l'ABiH pendant cette période. Oui, j'ai compris,

14 c'est ce que vous avez vu. Mais au sujet des informations, est-ce que vous

15 avez des informations sur cette période ? Cela serait autre chose, il

16 s'agit de la présence des Moudjahiddines en présence de l'ABiH ou le

17 contrôle de l'ABiH sur le territoire. Vous avez des informations à ce

18 sujet ?

19 R. Oui. On savait qu'il y avait des Unités arabes différentes, des gens du

20 Gulf, de l'Iran. Maintenant, quant à la question de savoir dans quelle

21 mesure ils étaient formellement incorporés au sein de l'armée je ne le

22 savais pas, et je ne le sais pas encore aujourd'hui.

23 Mme NOZICA : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, comme ceci a

24 été fait par mon éminent collègue de l'Accusation, je vais indiquer qu'il

25 existe un document 2D 00438. Il s'agit du document de la République de

26 Bosnie-Herzégovine, son commandement Suprême, qui confirme ce que je viens

27 de dire, mais on n'a pas le temps de le présenter.

28 Q. Pour terminer ma dernière question, Monsieur le Témoin, porte sur la

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1 chose suivante. M. Sefer Halilovic dit : "Maintenant et à l'avenir que le

2 commandement Suprême des forces armées mettra en œuvre les ordres de la

3 présidence en tant que seul organe légitime représenté de tous les citoyens

4 de la République de Bosnie-Herzégovine." A la fin, il dit cela; cela a

5 l'air très bien, n'est-ce pas ? J'ai préparé un autre document que la

6 Chambre a déjà vu donc nous n'allons pas nous pencher dans ces détails. Je

7 souhaite simplement mentionner cela pour le compte rendu d'audience.

8 Puisqu'il s'agit, en fait, d'une interview dans laquelle M. Sefer

9 Halilovic, il a donné cette interview un jour avant la réponse de mon

10 client, c'est-à-dire le 27 janvier, et ceci a été accordé à un journal

11 espagnol, 2D 0048 est le numéro du document, et il y est dit que les hommes

12 politiques peuvent négocier comme ils veulent mais l'ABiH continuera à

13 lutter pour une Bosnie-Herzégovine unitaire et souveraine, et cela

14 continuera d'être le cas.

15 Au cours des négociations, est-ce que vous avez eu l'impression qu'il

16 y avait des positions différentes, des attitudes différentes, par exemple,

17 lorsque vous parlez des différences entre le Corps des Musulmans les

18 différences entre les hommes politiques et l'armée notamment ? Est-ce que

19 vous avez eu l'impression, que l'armée à sa manière ne permet pas aux

20 hommes politiques de signer un accord ou d'arriver à la paix ?

21 R. Non, je n'avais pas cette impression, ni s'agissant des Musulmans ni de

22 leurs dirigeants civils, ni de leurs dirigeants politiques, ni pour ce qui

23 est des Croates de Bosnie, ni des Serbes de Bosnie. Je pense que Mladic et

24 Karadzic travaillaient de mèche. Je n'ai pas de raison de croire le

25 contraire.

26 Q. Est-ce que vous permettez la possibilité que ce qui était dit

27 publiquement était différent de ce qui se déroulait vraiment ?

28 R. Bien, souvent ce genre de chose se passe dans le monde, bien sûr, que

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1 c'était possible.

2 Q. Monsieur l'Ambassadeur, merci. Malheureusement, nous n'avons pas

3 suffisamment de temps. Nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour

4 discuter de certaines choses, notamment de vos conclusions, les raisons

5 pour lesquelles M. Boban a accepté le plan militaire et les principes

6 constitutionnels, mais en raison du temps, nous ne pouvons pas en entrer

7 dans tous ces détails. Vous étiez un témoin important. Je ne suis pas en

8 train de me plaindre d'une décision de la Chambre de première instance,

9 mais je souhaite simplement souligner que parfois la situation est telle

10 que des témoins-clés qui viennent déposer ici, bien, malheureusement, nous

11 n'avons pas suffisamment de temps pour leur poser toutes les questions.

12 Merci beaucoup.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : J'aurais quatre questions à poser, mais avant

14 d'envisager la mise en œuvre d'une question, je vais demander à M. Scott

15 aurait-il des questions supplémentaires, et si c'est le cas, quel temps

16 compte-t-il prendre ?

17 M. SCOTT : [interprétation] J'ai quelques questions supplémentaires, je ne

18 suis pas sûr. Je ne pense pas que cela va beaucoup trop longtemps, mais

19 plus de dix ou 15 minutes. Je suppose 20 à 25 minutes.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, ce que nous allons faire parce qu'on

21 est obligé pour des raisons techniques de faire une pause de 20 minutes.

22 Ensuite, les Juges poseront leurs questions, mais qui ne va pas prendre

23 énormément de temps et puis, je donnerais la parole à M. Scott pour les

24 questions supplémentaires, ce qui ne permettra donc de conclure l'audition

25 du témoin. Après quoi, une fois que le témoin aura quitté la salle

26 d'audience, nous donnerons donc la parole à -- je crois que c'est M. Prlic

27 qui interviendra, ce qui nous permettra donc de conclure cette audience.

28 Alors, nous nous retrouvons dans 20 minutes exactement.

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1 --- L'audience est suspendue à 15 heures 36.

2 --- L'audience est reprise à 15 heures 56.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

4 Questions de la Cour :

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur l'Ambassadeur, j'ai deux questions

6 très brèves. La première question : vous m'aviez indiqué que vous aviez

7 déjà témoigné à trois autres reprises dans trois procès. Savez-vous le

8 temps que vous aviez passé dans chaque cas de ces témoignages ? Vous m'avez

9 cité le procès Milosevic. Combien de jours avez-vous témoigné ? Si vous en

10 souvenez; sinon, ce n'est pas la peine.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je viens de le lire. J'ai déposé dans

12 l'affaire Milosevic pendant trois jours, les 26, 27 et 28 février 2003.

13 J'ai déposé dans l'affaire Krajisnik pendant trois jours aussi, les 22, 23

14 et 25 juin 2004. J'ai déposé dans l'affaire Mrksic pendant deux jours, les

15 16 et 17 novembre 2005.

16 M. STEWART : [interprétation] Je pense que M. Okun a également déposé le 24

17 juin dans l'affaire Krajisnik.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Merci de cette correction.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, vous aurez témoigné quatre jours dans

20 l'affaire Krajisnik. Très bien. Donc, plus les quatre jours pour ce

21 dossier.

22 Ma deuxième question est la suivante : vous aviez, en répondant à une

23 question, indiqué que vous receviez des informations à Genève de la part de

24 la Mission européenne et la FORPRONU. Vous confirmez bien avoir informé au

25 fil du temps de tout ce qui se passait sur le terrain ?

26 R. Je peux confirmer, Monsieur le Président, que nous avons lu

27 attentivement chaque document que nous avons reçu. Je crois qu'ils étaient

28 exacts et détaillés. Je ne peux pas dire qu'ils couvraient la situation

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1 dans chaque région, chaque partie de la Bosnie-Herzégovine mais ils ont

2 certainement couvert une bonne partie.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous assister dans cette tâche de lecture et

4 d'exploitation de ces rapports, vous aviez des conseillers militaires, des

5 assistants militaires qui vous faisaient un décryptage militaire de ce qui

6 se passait sur le terrain ?

7 R. Oui, la Conférence internationale avait des conseillers militaires qui

8 étaient très bons. Ils nous faisaient des interprétations conformément à ce

9 que vous venez de dire.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur l'Ambassadeur.

11 Je vais laisser la parole à mon collègue.

12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite

13 soulever deux points avec vous. Tout d'abord, je pense que je vous ai bien

14 compris mais je souhaite simplement écarter tout doute à ce sujet.

15 Aujourd'hui, lors de votre déposition ici, vous avez expliqué les

16 principes de base qui imprégnaient le plan de paix Vance-Owen, ce qui

17 incluait le caractère multiethnique des provinces, la décentralisation à la

18 prise des décisions consensuelles, puis vous nous avez montré une carte qui

19 ressemblait plus ou moins à un damier à plusieurs couleurs. Puis d'autre

20 part, dans les documents que nous avons reçus, nous avons la carte numéro

21 11 que vous connaissez très bien qui est monochrome.

22 Ma question est la suivante : est-ce que toutes les parties aux

23 négociations ont entièrement compris et accepter les principes tels que

24 vous les avez décrits devant nous ?

25 R. Toutes les parties ont compris les principes. Excusez-moi, toutes les

26 parties ont compris les principes. Ils n'ont pas accepté tous les

27 principes. Comme je l'ai déjà dit, les Serbes de Bosnie n'ont jamais

28 accepté quoi que ce soit si ce n'est que le 2 mai sous la contrainte

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1 Karadzic a signé le plan. Immédiatement après ce plan a été rejeté par le

2 parlement des Serbes de Bosnie. Donc, les Serbes n'ont rien accepté et les

3 Croates et les Musulmans de Bosnie ont effectivement accepté.

4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce qui nous concerne ici, bien sûr,

5 ce sont surtout les Croates de Bosnie et en particulier j'ai cru comprendre

6 que vous avez dit que tout d'abord, ils ont commencé à mettre en œuvre le

7 plan de paix même si celui-ci ne constitue pas un document adopté et valide

8 sur le plan juridique. Mais, deuxièmement, je pense que vous nous avez dit

9 qu'ils sélectionnaient, qu'ils l'appliquaient de manière sélective. Ils ont

10 commencé à mettre en œuvre les parties qui leur convenait mais ils

11 n'étaient pas prêts à mettre en œuvre les autres volets. Est-ce que c'est

12 bien ce que vous nous avez dit ?

13 R. Oui.

14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Le deuxième point que je

15 souhaite soulever concerne un document qui vous a été montré plusieurs

16 fois. Il s'agit du procès verbal de la réunion qui a eu lieu le 15 janvier

17 au palais présidentiel, à Zagreb. Je souhaite vous demander de vous pencher

18 sur la page 49. Vous y trouverez une déclaration de Lord David Owen à

19 laquelle l'on a fait référence, mais je crois qu'une phrase n'a pas été

20 citée alors que je pense qu'elle peut être pertinente pour nous. Dans la

21 troisième phrase, on dit que Lord David Owen dit comme suit, je cite : "Je

22 pense que le HVO était plus agressif dans certaines de ces actions."

23 Je me demande si vous pouviez nous clarifier cela car vous étiez sur place.

24 Vous avez entendu cette déclaration; est-ce que vous nous donnez quelques

25 détails, à quoi faisait-il référence lorsqu'il disait : "Certaines de leurs

26 actions" ?

27 R. Il parlait des activités de nettoyage à Gornji Vakuf et aux alentours

28 surtout.

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. C'est tout.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

3 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

4 Juges.

5 Nouvel interrogatoire par M. Scott :

6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur.

7 R. Bonjour.

8 Q. Monsieur, je vais essayer de procéder rapidement compte tenu le temps

9 car il est 16 heures maintenant et un peu plus; cependant, je souhaite

10 équilibrer un peu ce qui a été dit au cours du contre-interrogatoire ces

11 derniers jours.

12 Le conseil de la Défense a plusieurs fois parlé aujourd'hui de la

13 déposition de Josip Manolic. Vous savez certainement qui c'était. C'était

14 un haut fonctionnaire croate au début des années 1990 et dans l'intérêt de

15 l'équité vis-à-vis de l'autre partie je vais vous lire une partie et

16 demander votre réponse par rapport à une partie de sa déposition publique.

17 En parlant de la politique de la Croatie vis-à-vis de la Bosnie-

18 Herzégovine, à l'époque, en répondant à une question, M. Manolic a dit :

19 "Jusqu'à ce moment-là, nous avions indiqué que Gojko Susak et ce qu'on

20 appelait le lobby de l'Herzégovine était les acteurs principaux de cette

21 politique de l'Herceg-Bosna, impliquant le conflit avec les Musulmans,

22 l'affaiblissement du gouvernement centrale, et les demande du partage de la

23 Bosnie-Herzégovine. Cependant, dans un discours du président Tudjman, fait

24 devant son club de députés au sein du parlement croate où il y a eu une

25 séparation définitive entre les deux, lorsqu'il a dit que la politique qui

26 était mise en œuvre en Bosnie-Herzégovine et la politique à l'égard de la

27 Bosnie-Herzégovine était la sienne, donc, il a assumé les responsabilités

28 en disant que c'était sa politique à lui. Gojko Susak, en tant que ministre

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1 de la Défense, d'après Tudjman était un bon ministre car il mettait en

2 œuvre la politique de Tudjman. Donc, ceci prouve qui était responsable de

3 ce qui se passait dans la région à l'époque."

4 Pour le compte rendu d'audience, je cite la déposition du

5 4 juillet 2006, pages 4330 à 4331.

6 Si vous pouvez penser à cela, maintenant, je vais lire une autre

7 déclaration directement à la fin du paragraphe huit de votre déclaration,

8 où vous faites référence aux accords de Graz et Karadjordjevo, vous dites :

9 "Les négociateurs ont compris que les résultats principaux de ces réunions

10 étaient un accord entre les Croates et les Serbes visant à établir la

11 structure de la Bosnie-Herzégovine suivant les lignes de l'Accord

12 Cvetkovic-Macek de 1939, à savoir un partage de l'Etat.

13 Donc, vous avez exprimé dans votre déclaration au cours de ces

14 derniers jours comment vous compreniez les choses. Donc, vous en avez parlé

15 aussi au cours du contre-interrogatoire portant sur les propos tenus par M.

16 Manolic. Est-ce que vous avez été préoccupé comme vous l'avez dit, dans

17 votre déclaration : est-ce que vos préoccupations étaient conformes à ce

18 que M. Manolic a dit au sujet de la répartition -- du partage de la Bosnie-

19 Herzégovine ?

20 R. Tout d'abord, je souhaite dire que j'entends cette déclaration que vous

21 avez citée de M. Manolic pour la première fois, mais, effectivement, c'est

22 conforme au fait que le président Tudjman a fait confiance en Gojko Susak,

23 et je dois dire que, d'après mes contacts avec lui, je considère que ceci

24 était tout à fait correct car Susak était quelqu'un de très intelligent, de

25 très capable et il défendait fortement les intérêts croates pendant

26 l'invasion serbe, et par la suite, il était de Grude. Il était de

27 l'Herzégovine, tout comme Mate Boban, et plusieurs autres membres

28 importants de la délégation des Croates de Bosnie. Ils étaient tous des

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1 Herzégoviniens. Ils le ne cachaient pas du tout.

2 Q. Puis, compte tenu, des questions qui se sont poursuivies au sujet de la

3 réunion de Graz.

4 M. SCOTT : [interprétation] Je souhaite attirer votre attention sur une

5 nouvelle pièce à conviction qui va être utilisé dans le cadre de mes

6 questions supplémentaires, pièce 9853, et puis, 9927 tout à l'heure.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Je souhaite soulever une objection.

8 Apparemment, au moins à première vue, car nous venons de recevoir ces

9 documents. On dirait que s'agissant de 9853, d'après ce qu'on me dit c'est

10 la première fois que ce document nous est communiqué. Il n'était pas placé

11 à notre disposition avant. 9927, c'est un extrait d'un livre que je connais

12 puisque je l'ai lu. Je souhaite indiquer qu'une page ou deux pages du texte

13 avec beaucoup de notes en bas de page y figurent. Je ne vois pas les notes

14 en bas de page qui sont annexées au document. Donc, je ne fais pas

15 objection à ce que 9917 soit utilisé car c'est un document public, si

16 l'Accusation nous fournit également les notes en bas de pas. Mais

17 s'agissant de 9853, je pense que l'Accusation nous doit une explication

18 quant à la question de savoir d'où vient ce document. Car c'est la première

19 fois que nous le voyons.

20 M. SCOTT : [interprétation] Bien. Des parties différentes de la plupart des

21 documents qui font partie de ce document marqué comme P 09853, la plupart

22 de ces documents ont déjà été versés au dossier et présentés dans ce

23 prétoire dans le cadre de la pièce 187, puis une autre partie en tant que

24 pièce P 00192. Mais il y a quelques pages supplémentaires et je suis

25 d'accord avec Me Karnavas, nous les avons ajoutées et nous les avons

26 ajoutées en particulier pour en traiter avec ce témoin en contenues des

27 questions qui se sont poursuivies compte tenu concernant cette réunion à

28 Graz.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, le seul problème que la Chambre a,

2 c'est les pages supplémentaires. Est-ce que ces pages supplémentaires, la

3 Défense les avait déjà en sa possession dans le cadre de la communication

4 des pièces ?

5 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Ceci a été

6 communiqué dans le cadre de la communication générale des pièces. Comme je

7 l'ai déjà dit, il existe certaines pages qui font partie de cette pièce à

8 conviction et qui n'ont pas été inclues avant, mais en ce qui concerne la

9 communication, cela a déjà été fourni, et comme je l'ai déjà dit, la

10 plupart des documents ont déjà été utilisés, en tant que document faisant

11 partie des pièces 187 et 192.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Juste pour clarifier, je ne souhaite pas

13 exagérer, mais si j'ai bien compris, sans équivoque, l'Accusation dit que

14 tous ces documents ont été communiqués à nous, à la Défense, même s'ils ne

15 les ont pas encore présentés ici, mais que tous ces documents ont été

16 communiqués. Je ne me souviens pas, je ne suis pas sûr, mais je ne m'en

17 souviens pas.

18 M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi. C'est ce que je crois. Je sais que

19 nous avons fourni de tels documents dans le cadre de la communication.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez.

21 M. SCOTT : [interprétation]

22 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite vous poser quelques questions au

23 sujet du document devant vous 9853. Vous avez déjà parlé du contenu de

24 l'accord contenant six points, portant sur les frontières à Mostar et la

25 partie au sud de Mostar. Je ne vous pose pas de questions à ce sujet. Mais

26 veuillez maintenant examiner la première page, est-ce qu'il est exact de

27 dire que la mission des observateurs de la CE étaient à Zagreb à partir du

28 mois de mai 1992 ?

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1 R. Oui.

2 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire dans le cadre des missions

3 diplomatiques Internationales est-ce que vous pouvez nous dire ce que le

4 "HOM" veut dire ? C'est ce qu'on trouve à la premier page, Qu'est-ce que

5 cela veut dire d'habitude ?

6 R. HOM à HDC de Sarajevo. HOM cela se référait au président de la

7 Conférence de Lord Carrington. La Conférence sur la Yougoslavie au fond.

8 Q. HOM comme "head of mission" ?

9 R. Oui, HOM "head of mission," chef de mission. Cutileiro, comme je l'ai

10 dit, et comme tout le monde le sait, était devenu l'adjoint de Lord

11 Carrington chargé de traiter en particulier de la Bosnie sous l'égide de la

12 présidence de Lord Carrington dans le cadre de la Conférence sur la

13 Yougoslavie.

14 Q. Si on utilise la terminologie, de MOCE, à l'époque, vous vous

15 souviendrez que HRHC cela veut dire le chef de l'organe de coordination

16 régional, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, à Sarajevo. C'était Colm Doyle.

18 Q. Oui, vous avez déjà anticipé ma question suivante. A la page suivante,

19 est-ce que vous pouvez nous dire ce qui est écrit dans l'en-tête de la page

20 d'après grâce à vos connaissances linguistiques ?

21 R. Oui, il est écrit militaire des Affaires étrangères, cabinet du

22 ministre. C'est en portugais car l'ambassadeur Cutileiro était portugais.

23 Q. Apparemment, c'est une notre de l'ambassadeur Cutileiro ?

24 R. C'est une notre de l'ambassadeur Cutileiro à Colm Doyle.

25 Q. Qui était Colm Doyle ?

26 R. Colm Doyle était le chef de la MOCE, donc, de la mission de

27 l'observateur de la Communauté européenne à Sarajevo. Il était là-bas

28 depuis 1991. Il connaissait bien la situation et il n'était pas non nouveau

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1 et c'était une personne bien informée.

2 Q. Est-ce que vous pouvez maintenant passer à la page suivante, encore une

3 fois, nous dire s'il s'agit là de l'écriture de l'ambassadeur Cutileiro ?

4 Est-ce qu'on fait référence à lui ?

5 R. Vous voyez il est indiqué ambassadeur Jose Cutileiro, puis en bas il y

6 a marqué abrosos [phon], c'est le mot qui commence par "A," qui veut dire

7 salutations. Donc, c'est la façon cordiale en portugais de s'exprimer, puis

8 c'est signé Jose Cutileiro. Voilà. Donc, c'est deux, de Jose Cutileiro à

9 Doyle.

10 Q. Bien. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges, ce qui suit ? Cette

11 réunion à Graz en mai 1992 entre Karadzic et Boban, est-ce que c'est le

12 genre d'information qui aurait été considérée comme important pour

13 quelqu'un comme l'ambassadeur Cutileiro à l'époque ?00R. Vous voulez

14 parler de la décision à laquelle sont parvenus Mate Boban et Karadzic ?

15 Q. Oui.

16 R. Cela aurait important.

17 Oui, bien sûr.

18 Q. Est-ce que c'est le genre de chose sur lequel son intention aurait été

19 attirée aussi rapidement que possible ?

20 R. Oui, absolument.

21 Q. J'aimerais maintenant vous demander de tourner quelques pages, alors,

22 il s'agit d'articles de presse. La BBC, le Guardian, Los Angeles Times.

23 Est-ce que vous vous souvenez si la réunion de Graz a véritablement fait

24 l'objet de nombreux reportages internationaux à l'époque ?

25 R. Oui, dans la presse internationale ainsi que dans la presse serbe et

26 croate à l'époque également.

27 Q. Merci. Me Karnavas a passé ou a consacré beaucoup de son temps à parler

28 de l'accord ou du plan Cutileiro. Alors, j'aimerais vous demander, je vous

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1 prie, de consulter l'autre pièce à conviction qui a été affichée il y a

2 quelques minutes ou qui a été placée en face de vous il y a quelques

3 minutes, il s'agit de la pièce P 09927. Est-ce que vous connaissez un livre

4 intitulé : "La guerre en Bosnie-Herzégovine, conflits internationaux,

5 intervention internationale," livre écrit par Steven L. Burg et Paul S.

6 Shoup ?

7 R. Oui.

8 Q. Que pensez-vous de cet ouvrage?

9 R. Cet ouvrage écrit par les Pr Burg et Shoup a été rédigé en 1999 et je

10 dois dire que c'est une description qui est à la fois excellente,

11 méticuleuse, précise et exacte des événements qui se sont déroulés.

12 Q. Est-ce que vous avez lu ce livre vous-même ?

13 R. Oui.

14 Q. D'après vous, est-ce qu'il correspond aux événements qui se sont

15 déroulés là-bas ? Est-ce que cela correspond à ce que vous connaissiez de

16 ces événements ?

17 R. Oui, essentiellement oui.

18 Q. Très bien. J'aimerais maintenant que nous passions à la page 111, donc

19 il s'agit de la troisième feuille de cette pièce à conviction, en fait, je

20 ne veux pas vous demander de consulter cela. Je vais vous demander de

21 tourner cinq pages de la pièce à conviction. Est-ce que vous pouvez voir

22 toute une série de cartes. Vous avez la carte 3.3, carte du SDA ?

23 R. Oui.

24 Q. Carte 3.4, carte du HDZ et carte 3.5, carte du SDS ?

25 R. Oui, je les vois.

26 Q. Me Karnavas, lors de son contre-interrogatoire, vous a montré une

27 carte, à moins que je ne m'abuse, je ne pense pas qu'il vous ait montré la

28 carte qui correspond à la carte du HDZ, la carte 3.4.

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1 R. C'est exact.

2 Q. D'après ce que vous savez de la situation, nous avons regardé de

3 nombreuses cartes au cours des derniers jours, notamment le jeu de cartes

4 qui se trouvent -- qui ont été présentées par l'Accusation.

5 Il y a également la carte P 09841. Il s'agit de la carte que vous aviez

6 fournie vous-même, donc, la carte avec les frontières du plan Vance-Owen

7 qui avaient été imposées sur la carte démographique. Je ne sais pas si vous

8 avez encore un exemplaire de toutes ces cartes.

9 R. Oui. Accordez-moi juste une petite seconde pour les sortir.

10 Q. [aucune interprétation]

11 R. Cela y est, je les ai en face de moi.

12 Q. Alors, pour ne pas perdre de temps, Monsieur, est-ce que vous pourriez

13 nous dire ce qui suit : lorsque vous prenez la carte du HDZ qui porte la

14 date du mois de mars 1992, lorsque vous voyez les frontières de ce que l'on

15 appelle les districts croates dans cette version cartographique, est-ce

16 qu'il s'agit de frontières que vous vous attendiez à voir, quand et --

17 j'établis le parallèle avec le plan Vance-Owen et les frontières de ce

18 plan ?

19 M. KARNAVAS : [interprétation] A moins -- avant que l'ambassadeur ne

20 réponde à cette question, dans un premier temps, il faudrait peut-être

21 jeter la base de la question, tout simplement parce que les cartes se

22 trouvent dans ce livre. Cela ne signifie pas pour autant qu'il s'agissait

23 de cartes officielles du SDA ou du HDZ. Si vous voyez ce qui est écrit,

24 cela vient de la revue Politika. Politika c'est un journal de la presse

25 Belgradoise [phon]. C'est un journal serbe. Donc, je pense qu'il faudrait

26 peut-être que l'on en explique le fondement. Laissez-moi terminer.

27 M. SCOTT : [interprétation] Je m'excuse.

28 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est un peu prématuré alors. Si on nous

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1 donne les bases de ces cartes, peut-être que je n'aurais aucune objection à

2 soulever.

3 M. SCOTT : [interprétation] Voilà ce que je dirais : essentiellement, tout

4 le monde dans ce prétoire a utilisé des cartes qui proviennent de ce qu'on

5 appelle les sources publiques. Alors, tout le monde peut utiliser ce genre

6 de documents et l'Accusation ne peut pas dire autrement. Me Karnavas a

7 utilisé une carte qui venait d'une certaine publication et plusieurs

8 confrères de la Défense ont utilisé des cartes qui venaient de documents

9 publics, alors, je ne vois pas pourquoi il y aurait une règle pour la

10 Défense puis une règle pour l'Accusation qui serait différente. Je ne pense

11 pas que ce soit comme cela qu'il faut se comporter.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Ambassadeur, lorsque vous êtes réuni avec

13 vos collègues dans le cadre des travaux du plan Vance-Owen, est-ce que les

14 différentes composantes politiques, SDA, HDZ, et cetera ont fourni des

15 cartes, tels qu'ils voyaient la situation de leurs points de vue ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Les cartes que vous avez sous les yeux

18 correspondent-elles aux cartes qu'on vous a fournies, à l'époque ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette carte du HDZ est en règle générale

20 conforme à la carte du HDZ ou aux cartes du HDZ qui nous ont été données en

21 1992, 1993. Cela représente le point de vue extrême du HDZ, ce à quoi on

22 s'attendait d'ailleurs dans le cadre d'une négociation, bien entendu qu'ils

23 ont placé la barre très haute.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Scott, continuez puisque le

25 témoin a dit que la carte est que vous exhibez, c'était un document qu'ils

26 avaient eu à l'époque.

27 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Compte

28 tenu de votre question, Monsieur le Président, et de la réponse apportée

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1 par le témoin, je dirais que vous -- qu'en fait, c'est ce que je voulais

2 aborder maintenant. Je vous en remercie.

3 Q. Alors, avant que nous ne passions à autre chose, est-ce que vous

4 pourriez prendre l'avant-dernière page, Monsieur, parce que toujours dans

5 le même contexte vous avez dit il y a quelques minutes de cela qu'à la fin

6 de l'année 1992, au début de l'année 1993, les différentes parties

7 fournissaient des cartes. Est-ce que vous vous souvenez de cette carte qui

8 est présentée ici comme la carte croate du mois de décembre 1992 ? Est-ce

9 que d'après vous cette carte est conforme aux cartes dont vous vous

10 souvenez à l'époque, cartes donc étaient reçues de la part des Croates ?

11 R. Vous savez le SDS ce sont les Serbes.

12 Q. Je m'excuse. C'est la carte suivante, la carte 5.2.

13 R. 5.2. Oui, oui, si vous comparez cela au 2 janvier 1993 et au projet de

14 cartes qui a été donné à M. l'Ambassadeur Cutileiro en mars 1992, vous

15 voyez que ces cartes sont quasiment identiques.

16 Q. Pour avoir une référence qui sera utile à l'avenir et pour être utilisé

17 facilement, j'aimerais dire que j'ai également inclus dans cette liasse de

18 documents la carte 5.5 qui en fait est un autre exemplaire du plan Vance-

19 Owen; vous voyez cela ?

20 R. Oui.

21 Q. Alors, il y a un certain nombre de mes confrères qui vous ont posé des

22 questions à propos du plan Cutileiro. J'aimerais vous demander maintenant

23 de reprendre la deuxième page du document après le titre du livre. Alors,

24 voyez qu'il est écrit : en dessous de la carte Cutileiro, au milieu du

25 paragraphe et je vais vous donner lecture de deux phrases : "Dans un

26 premier temps, les Croates de Bosnie se sont ralliés au plan, très

27 probablement parce qu'ils espéraient que cela allait sceller définitivement

28 le divorce entre la Bosnie-Herzégovine et les Serbes"

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1 R. Ecoutez, je m'excuse, mais je ne vois pas du tout ce que vous lisez.

2 Q. Il s'agit de la page 111 sous le plan, sous la carte Cutileiro.

3 R. Maintenant je le vois.

4 Q. [aucune interprétation]

5 R. [aucune interprétation]

6 Q. Alors, voyez cela : "Les Croates de Bosnie se sont dans un premier

7 temps ralliés au plan, probablement parce qu'il nourrissait l'espoir que

8 cela scellerait définitivement le divorce définitif de la Bosnie-

9 Herzégovine de la Yougoslavie et des Serbes, mais également probablement

10 parce que ce qui était prévu facilitait les relations entre les zones

11 croates en Bosnie et la Croatie et fournissaient une autonomie pour les

12 opstina à majorité croate. Mais l'accord Villa Konak avait été finalement

13 rejeté par les trois communautés ethniques. L'un des problèmes critiques

14 était qu'il fallait dessiner des frontières cantonales ce qui a créé une

15 confusion absolument des plus totale."

16 Alors, je vais m'en tenir à cela pour ne pas trop perdre de temps,

17 mais est-ce que cela correspond à ce que vous saviez du plan Cutileiro et

18 de ce qui s'est passé après ?

19 R. Oui, en fait, le blâme accusateur a été, essentiellement, pointé vers

20 Izetbegovic, mais finalement, les trois parties ont rejeté le plan

21 Cutileiro, comme cela est décrit dans le paragraphe que vous venez de nous

22 lire.

23 Q. Je vous remercie.

24 J'aimerais maintenant au vu de certaines questions qui vous ont été posées

25 par Me Nozica, le conseil de M. Stojic, je vais vous demander ainsi qu'aux

26 Juges de consulter à nouveau la pièce à conviction P 01155 ?

27 R. Est-ce que j'ai cette pièce, est-ce que j'ai ce document ?

28 Q. Je n'en suis pas sûr. Peut-être que vous n'avez plus le jeu de

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1 documents de l'Accusation.

2 R. Non, je ne l'ai plus.

3 Q. On pourra peut-être afficher. En tout cas, il va falloir apporter le

4 document au témoin, je vous prie. Donc, il s'agit de la pièce P 01155.

5 R. Je vois le document sur l'écran.

6 Q. Nous en avons déjà parlé et je ne serai pas revenu sur ce document si

7 d'autres questions avaient été posées à propos de ce document, mais dans un

8 premier temps la première ligne de la décision de M. Prlic qui commence par

9 --

10 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je

11 voudrais quand même indiquer que ce n'est pas ce document que je veux

12 montrer au témoin. Le témoin a parlé dudit document effectivement, mais

13 cela n'a pas été mentionné pendant mon contre-interrogatoire. C'est le

14 document P 0 -- ou plutôt, un document qui a trait à Bruno Stojic. Il

15 s'agit du document P 0140. Je soulève une objection car l'Accusation fait

16 quelque chose maintenant qu'il a omis de faire pendant l'interrogatoire

17 principal.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Le document de M. Stojic, vous avez dit qu'il y

19 avait un lien avec ce document du 15 janvier 1993 de

20 M. Prlic. Dans vos propos, vous évoquez également ce document.

21 Bien, continuez, Monsieur Scott.

22 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, c'est

23 tout à fait juste.

24 Q. Alors, regardez à nouveau, nous allons commencer par le début, je vous

25 demande à nouveau, cela commence par : "Conformément aux accords." Alors,

26 le 15 janvier 1993, est-ce qu'il y avait un accord entre les trois

27 parties ?

28 R. Non.

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1 Q. Lorsque vous examinez le document que vous avez, est-ce que je lis bien

2 lorsque je vois qu'il est question d'une décision au milieu du document ?

3 R. C'est ce qui est écrit dans mon document.

4 Q. Au paragraphe numéro 1, est-ce que je m'induis en erreur lorsque je

5 vois qu'il est question des : "Régions 3, 8 et 10 qui ont été proclamées

6 croates dans les accords de Genève." Vous venez de dire que cet accord

7 n'existait, "seront subordonnés," et cetera. Alors, est-ce que vous voyez

8 qu'il est indiqué nous proposons, nous avançons ou est-ce que c'est une

9 lettre destinée à M. Izetbegovic dans laquelle il serait indiqué pourquoi

10 est-ce que nous ne nous réunirions pas pour parler de cela ou est-ce qu'il

11 s'agit d'un acte unilatéral ?

12 R. Non, c'est un ukaz[phon] c'est ordre direct.

13 Q. Pour enchaîner à la suite de ce qui a été dit par mon confrère, si vous

14 aviez le 1140.

15 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que M. Scott aurait l'amabilité de

16 voir le paragraphe 2 qu'il a omis d'étudier hier et qu'il omet d'indiquer

17 aujourd'hui ?

18 M. SCOTT : [interprétation] Je le ferais dans un moment.

19 M. KARNAVAS : [interprétation] Il n'a qu'à le faire maintenant.

20 M. SCOTT : [interprétation] Je ne veux pas le faire maintenant.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais je ne vois pas pourquoi; est-ce qu'il

22 saute ici et là dans le document ?

23 M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est pas du tout ce que je fais. Je

24 reviendrai avec grand plaisir.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Karnavas, j'aimerais vous

27 rappeler quand même que vous nous avez dit que le chemin le plus direct

28 n'est pas toujours le plus judicieux ou le plus exact.

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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, mais cela je l'ai dit pendant le

2 contre-interrogatoire.

3 M. SCOTT : [interprétation]

4 Q. Si vous avez le document 1140, alors, juste pour revenir à la charge,

5 je dirais qu'est-ce qu'il est indiqué qu'il y a l'ordre de M. Stojic

6 conformément à la décision de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et du

7 HVO. Décision 01-I-32/93 du 15 janvier 1993, d'ailleurs si l'on -- ce qui

8 est en fait la référence à la décision de M. Prlic. Si quelqu'un veut

9 donner la peine de la consulter.

10 R. Oui, cela avait été effectivement rédigé pour mettre, pour exécuter cet

11 ordre.

12 Q. Alors, maintenant, nous avons ces deux documents, nous allons utiliser

13 le 1155, et nous allons parler du fameux paragraphe de Me Karnavas, le

14 numéro 2.

15 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas mon paragraphe et ce n'est pas

16 la décision de M. Prlic. C'est une décision qui a été à laquelle est

17 parvenue le conseil exécutif. Alors, essayons d'être précis et juste, et

18 équilibré, comme vous essayez toujours de nous le rappeler, Monsieur Scott.

19 M. SCOTT : [interprétation] Je vous en prie, Maître Karnavas. M. Prlic a

20 signé ce document, c'était le président de l'organe. Il a signé le

21 document, vous-même et d'autres d'ailleurs avaient fait référence à ce

22 document lorsque vous parlez de votre client.

23 Alors, paragraphe numéro 2 : "Toutes les Unités des forces armées du HVO

24 qui se trouvent à l'heure actuelle dans des régions 1, 5 et 9 qui ont été

25 proclamées musulmanes dans les Accords de Genève, accords qui n'existaient

26 pas, sont subordonnés au commandement de l'état-major du commandement de

27 l'ABiH."

28 Là, à nouveau, il va falloir utiliser votre carte, enfin, celle que vous

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1 m'aviez donnée le week-end dernier qui est le numéro

2 P 09841. Est-il exact, Monsieur, que la province numéro 1 se trouve dans le

3 coin nord-ouest de la Bosnie et, en fait, vous voyez c'est tout en vert sur

4 la carte. Vous le voyez ou en tout cas le pourtour, vous le voyez ?

5 R. Oui.

6 Q. Le numéro 5, la province numéro 5, c'est la région de Tuzla. C'est là

7 où on a ce fameux doigt qui établit le lien avec la Sava, c'est cela ?

8 R. Oui.

9 Q. Alors, il y a très peu de zones roses, je vous l'accorde. C'est

10 essentiellement vert, là ?

11 R. C'est surtout vert.

12 Q. Vous avez la province numéro 9 qui le proposait et là il y a très peu

13 de zones en rose, mais est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'elle est

14 essentiellement verte, cette province ?

15 R. Oui. Essentiellement, oui, elle est verte.

16 Q. Est-ce que je pourrais vous demander et j'aimerais pour ne pas trop

17 perdre de temps que soit affiché le livret de cartes de l'Accusation, le

18 document P 09276, carte 6, qui est la page 7 dans le système électronique.

19 R. Est-ce que M. l'Huissier pourrait me faire parvenir cela, je vous

20 prie ?

21 Q. Je peux tout à fait fournir un exemplaire au témoin.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour votre information, parce qu'on est dans les

23 cartes, donc --

24 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Les tailles ne correspondent pas au

25 nombre d'habitants. Il faudrait peut-être poser la question pour savoir

26 combien de Croates il y avait dans ces différentes -- parce qu'il y avait

27 plus de Croates à Zenica qu'en Herzégovine, donc, c'est le nombre

28 d'habitants qui est le facteur décisif, qui devrait l'être.

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1 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Praljak. Il faudrait

2 peut-être dire la même chose pour ce qui est en vert dans les provinces 8

3 et 10.

4 Q. Donc, si vous avez maintenant la carte, est-ce que vous pouvez comparer

5 le paragraphe 5 -- ou plutôt, est-ce que vous pouvez examiner les provinces

6 5 et 9 ? Est-ce que vous pourriez -- donc, nous savons que la province

7 numéro 1 se trouve tout en haut dans le coin, mais les provinces 5 et 9,

8 est-ce qu'il s'agit de provinces qui sont incluses soit à l'intérieur des

9 frontière revendiquées par l'Herceg-Bosna ou à l'intérieur des frontières

10 de la Banovina de 1939 ?

11 R. Non.

12 Q. J'aimerais vous demander de faire référence à votre journal de bord,

13 pièce P 00159. Là, j'aurais besoin de l'aide de

14 M. l'Huissier, je vous prie. Il s'agit de la première liasse des documents.

15 R. [aucune interprétation]

16 Q. Je m'excuse, Monsieur l'Ambassadeur, nous avons différents huissiers,

17 cet après-midi. Alors, est-ce qu'on pourrait peut-être avoir affiché cela

18 à l'écran, pour ne pas trop perdre de temps. Je souhaiterais que ce soit la

19 page R016-3828.

20 R. Je n'ai pas trouvé cela.

21 Q. Excusez-moi, une seconde. Je suis désolé. Peut-être qu'on pourrait voir

22 cela sur le système électronique je qu'en fait c'est une référence au

23 journal que M. Karnavas a utilisé. Pas de problème, mais je ne crois pas

24 avoir marqué une page en particulier. Je vous demande de prendre la page

25 3828 -- R0163828.

26 M. Karnavas vous a montré cette page. C'est une partie de votre journal du

27 18 avril 1992 où on y parle de savoir si M. Izetbegovic avait menti --

28 Est-ce que je peux vous demander de voir le dernier -- la dernière

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1 chose que vous avez écrite du côté de cette gauche ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que vous pouvez le lire ? Vous pouvez le lire ?

4 R. "Toutes ces parties ont menti, mais les Serbes sont moins sophistiqués

5 à ce sujet."

6 Q. De quelle manière sont-ils moins sophistiqués ?

7 R. Ils sont plus directs. Ils mentent avant les autres, et plus

8 fréquemment que les autres. Ils ne disaient pas qu'ils disaient la vérité,

9 alors que les autres disaient qu'ils disaient la vérité. Comme je l'ai

10 noté, ils étaient moins sophistiqués au sujet de leur mensonge, et de toute

11 façon moi je sais ce qu'a dit l'ambassadeur Cutileiro.

12 Q. Votre expérience -- d'après votre expérience de comment les Croates

13 étaient-il plus sophistiqués dans leur mensonge, et d'après votre

14 expérience.

15 R. Bien, ils mentaient que les Serbes, ils ne faisaient les choses d'une

16 façon indirecte. En général, ils étaient meilleurs, oui.

17 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir le point de vue sur

18 les Musulmans aussi pour que tout soit équilibré ?

19 M. SCOTT : [interprétation]

20 Q. Les Musulmans ?

21 R. Oui, on m'a déjà posé la question et je vais répondre. Izetbegovic en

22 général il était vague et il exprimait son accord ou son désaccord en des

23 termes très vagues. Il était -- entre les doigts, il était difficile à

24 appréhender.

25 Q. [aucune interprétation]

26 R. Si vous me permettez de dire plus précisément puisqu'on parle -- au

27 fait du stéréotype ethnique, le "leader" musulman en Bosnie-Herzégovine a

28 un jour expliqué comment étaient les trois parties et cela à mon attention,

Page 17088

1 pas en termes de véracité, non, c'était un comportement général, et il m'a

2 caractérisé ces trois parties en ces termes. Il m'a dit les Serbes sont des

3 bouchers, les Croates sont des assassins, et nous sommes des meurtriers.

4 C'était son avis, mais cela donne une idée de la manière dont il évaluait

5 la situation et ceci venait de la bouche d'un leader musulman de Bosnie.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Ecoutez, je me demande si, dans la traduction, il

7 n'y a pas une erreur ? Dans le texte anglais, il y a les Croates sont des

8 tueurs, et nous, nous sommes des assassins. J'ai l'impression que vous

9 aviez dit le contraire. Pouvez-vous -- vous confirmez bien que ce qui est à

10 l'écran est bien ce que vous avez dit, parce que dans ma traduction j'ai

11 cru comprendre que c'était le contraire ? Pouvez-vous préciser ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ce qui est écrit en anglais sur l'écran,

13 c'est correct.

14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si voudrais insister, il s'agit

15 d'une question linguistique parce que assassin c'est la forme qualifiée de

16 la tuerie, et en français cela peut avoir l'air bizarre ou erroné.

17 M. SCOTT : [aucune interprétation]

18 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Messieurs les Juges, je désire dire

19 qu'en tant que Croate je considère qu'il s'agit d'une insulte et qu'on ne

20 peut pas permettre qu'un journal privé décrive ce genre de stéréotypes.

21 C'est absolument impensable et inadmissible. Merci.

22 M. SCOTT : [interprétation]

23 Q. Très rapidement, Monsieur l'Ambassadeur, je vais passer sur une

24 question que j'avais parce que nous n'avons plus de temps, mais quand même

25 il y a deux choses sur lesquelles je voudrais revenir. La question du

26 référendum pour l'indépendance. Je voudrais que l'on voit la pièce P 01622.

27 Surtout la page 32. Est-ce qu'on pourrait tourner la page ? C'est la

28 version en B/C/S. La page 32, s'il vous plaît, en anglais, est-ce qu'on

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1 pourrait l'avoir ? C'est à la page 32 aussi en B/C/S.

2 Est-ce qu'on peut voir le bas de la page ? Il s'agit du président Tudjman

3 qui parle.

4 Vous voyez cela, Monsieur, et je vous demanderais de réagir à ce texte

5 suite aux questions que vous avez été posées lors du contre-interrogatoire

6 lorsqu'il s'agissait l'indépendance en février -- à la fin de février :

7 "Nous avons échappé à tous ces obstacles --" Non, je voudrais remonter plus

8 haut. Donc, nous avons échappé --

9 "Dans le cas de la Bosnie-Herzégovine, nous avons échappé d'être nommé en

10 tant qu'agresseurs, vous comprenez. Si nous n'avions pas opté pour un

11 référendum, si nous n'avions pas voté pour une Bosnie indépendante, on

12 aurait été nommé agresseurs. On serait dans la position de la Serbie."

13 Est-ce que vous pouvez donner votre réaction quelle est votre expérience

14 avec Franjo Tudjman et les différentes positions de négociations des

15 parties à cette époque ?

16 R. Ce n'est pas la véritable raison pour laquelle les Croates de Bosnie

17 ont voté pour le référendum. On m'a déjà posé la question et j'ai répondu

18 qu'il y avait une très bonne raison pour les Croates de Bosnie votent pour

19 l'indépendance, c'est-à-dire qu'en février 1992, la Yougoslavie comprenait

20 la Serbie, la Bosnie, Monténégro, et la Macédoine. C'était dominé par les

21 Croates de Bosnie, ainsi que les Musulmans de Bosnie voulaient sortir de là

22 -- sortir de la domination serbe, et c'est pourquoi ils ont voté pour le

23 référendum pour l'indépendance.

24 Q. Est-ce que la politique ou la position du président Tudjman à la

25 lumière de qui est sorti de l'indépendance, est-ce qu'on aurait retrouvé la

26 communauté internationale on aurait parlé comment ?

27 R. L'indépendance de la Bosnie.

28 Q. La Bosnie-Herzégovine.

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1 R. Pas particulièrement.

2 Q. Très bien. Je voudrais vous demander de prendre parce qu'il y a

3 tellement de questions à ce sujet, je voudrais vous demander de prendre la

4 pièce 0278, la déclaration conjointe du 25 avril 1993. Est-ce qu'on

5 pourrait vite voir cela sur le système électronique ?

6 M. SCOTT : [interprétation] 2078, paragraphe numéro 5, et ensuite, je

7 demanderais à l'Huissier de passer rapidement à la page suivante.

8 Q. Vous voyez exactement ce qui est écrit dans cette déclaration et nous

9 verrons à la page suivante qu'il a signée. "Les signataires de la

10 déclaration conjointe -- condamne avec sévérité toutes les violations des

11 règles du droit humanitaire indépendamment de ceux qui l'ont exercé, les

12 deux parties sont responsables conformément aux données disponibles jusqu'à

13 présent, et entreprennent d'entamer avec urgence des enquêtes conjointes

14 individuelles concernant toutes les violations de ces droits et examinent

15 immédiatement les responsabilités personnelles des conflits et des crimes

16 perpétrés contre la population civile." Signé par Mate Boban, Tudjman et

17 Izetbegovic ?

18 R. C'est bien cela.

19 Q. Pour terminer, par rapport aux différentes questions posées par la

20 Défense. Dans ce que je viens de lire, il est écrit que les deux parties

21 sont responsables. Est-ce que l'on dit quelque part qu'il s'agit d'une

22 responsabilité égale ?

23 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président. Excusez-moi, Monsieur

24 l'Ambassadeur. Tout d'abord, il s'agit d'une déclaration négociée qui a été

25 rédigée par les parties et nous comprenions tous comment ces déclarations

26 sont généralement rédigées. Il a les différents mots qui sont utilisés et

27 qui peuvent être acceptés. Alors, responsabilité égale, pas responsabilité

28 égale, je ne sais pas, mais demandez à l'Ambassadeur d'exprimer son avis

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1 là-dessus, ce n'est pas juste.

2 M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est pas un avis, Monsieur le Président, je

3 suis désolé --

4 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous tous, nous sommes capables de lire pour

5 dire ce qui est écrit là.

6 M. SCOTT : [interprétation] Bien, je suis désolé, Monsieur Karnavas. Je

7 suis désolé. Mes deux conseils de la Défense,

8 Me Alaburic et Me Nozica, ont parlé de cela lorsqu'ils ont examiné ce

9 document. Elles ont dit que les deux parties avaient la même

10 responsabilité. C'était ce qui a été dit -- ce n'est pas ce que dit le

11 document.

12 Mme NOZICA : [interprétation] Je dois dire pour le bénéficie du compte

13 rendu d'audience que je n'ai pas utilisé cela. Au contraire, j'ai utilisé

14 un document du 24 avril et ce qu'a dit M. Owen et pas ce que les deux

15 parties avaient signé.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

17 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, pouvons-nous voir le

18 début de ce document, s'il vous plaît, pour que nous puissions voir à

19 quelle partie du document on fait référence à l'égalité des responsabilités

20 des deux parties et vous verrez qu'il s'agit de la responsabilité du

21 conflit. Donc, la partie que j'ai citée, c'est un autre point qui vient de

22 ce document conjoint. Donc je demanderais que les choses soient correctes.

23 M. SCOTT : [interprétation] Où est-il écrit que c'est égal ?

24 Mme ALABURIC : [interprétation] Peut-on remonter en haut du document pour

25 voir le début ?

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

27 Mme ALABURIC : [interprétation] Non, c'est le bas de la page.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : L'égalité des responsabilités, d'où tirez-vous

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1 cela ?

2 M. SCOTT : [interprétation] Non, non, ce n'est pas moi. C'est la Défense

3 qui a parlé, qui a dit que les responsabilités étaient égales, ce n'est pas

4 moi.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

6 M. SCOTT : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président, je ne veux pas

7 qu'on m'accuse de mentir. C'est tout à fait incorrect. On ne pourrait pas

8 accepter cela dans un prétoire alors on peut voir le compte rendu.

9 Il y a deux conseils de la Défense qui ont dit et si je me trompe le compte

10 rendu va me le montrer que je n'ai pas dit cela. Dans ce document, on parle

11 des : "Responsabilités égales," et si on veut dire les choses telles

12 qu'elles soient, il faut que ce soit correct.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous imputez cela à la Défense, alors posez votre

14 question et qu'on en termine avec cela.

15 M. SCOTT : [interprétation] Je crois qu'on l'a dit.

16 Q. Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous pouvez trouver quelque part

17 dans le document quelque part où c'est écrit égalité -- responsabilité

18 égale ?

19 R. Non, ce n'était pas la même responsabilité et le document ne dit pas

20 que c'était la même responsabilité.

21 Q. Enfin, Monsieur, j'ai bien écouté votre déposition lors de

22 l'interrogatoire principal --

23 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président --

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Nozica.

25 Mme NOZICA : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, la dernière

26 question de M. Scott était une direction directrice. Cela -- je voudrais

27 que l'on retrouve cela dans le compte rendu d'audience.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

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1 M. SCOTT : [interprétation] Une dernière question, Monsieur le Président.

2 Q. Monsieur, j'ai bien écouté votre déposition lors de l'interrogatoire

3 principal et du contre-interrogatoire, et ma dernière question à votre

4 adresse est celle-ci : Me Karnavas a parlé d'une interview que vous aviez

5 donnée en 2006, dans laquelle vous exprimez votre point de vue au sujet de

6 M. Tudjman; vous souvenez de cela ?

7 R. Oui.

8 Q. Lorsque vous avez répondu à la question de Me Karnavas, je sais que

9 vous avez fait très attention et vous avez toujours dit qu'il s'agissait

10 d'une -- interview qui a été donnée au sujet de sa conduite par rapport à

11 la Croatie et ce qui s'était passé en Croatie, vous avez fait très

12 attention à ce que vous avez dit.

13 R. [aucune interprétation]

14 Q. Est-ce que vous avez un point de vue différent lorsqu'il s'agit de sa

15 conduite ou de son comportement vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine ?

16 R. Dans toutes les circonstances, le président Tudjman a toujours été

17 ferme, sérieux, même rigide, comme je l'ai dit dans l'interview, obstiné.

18 Ses points de vue et ses activités et je souligne points de vue parce qu'on

19 n'était pas -- on ne connaissait pas d'une manière très intime ses

20 différentes activités. Donc, ses points de vue vis-à-vis de la Bosnie-

21 Herzégovine il ne nous les a fait connaître. Je répète très brièvement ce

22 que j'ai dit auparavant. Il méprisait le président Izetbegovic. Il parlait

23 de lui. Lorsqu'il nous parlait de lui, il parlait du fondamentaliste

24 Izetbegovic. Il était fermement favorable à Mate Boban et à Susak. On a pu

25 le voir quand on était ensemble. Lorsqu'ils étaient ensemble, donc, je ne

26 veux pas tirer des parallèles entre les différentes situations parce que

27 c'était des situations différentes, mais il savait ce qu'il faisait en

28 Bosnie. Il savait ce que faisait Boban pour lui. Donc, il connaissait bien,

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1 il savait très bien ce qui se passait en Bosnie.

2 Q. Monsieur l'Ambassadeur, encore une fois, merci d'être venu à La Haye et

3 je vous remercie aussi pour les services que vous avez rendus au cours de

4 cette période. Encore une fois merci.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Ambassadeur, au nom de mes collègues, je

6 vous remercie d'être venu apporter votre témoignage et je formule mes

7 meilleurs vœux de retour. Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir

8 vous raccompagner.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux

10 prononcer quelques mots avant de partir ?

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Si ce sont des mots de remerciement, mais n'abordez

12 plus le fond du dossier.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exactement cela, Monsieur le

14 Président. Je voudrais vous remercier, vous et vos collègues, et remercier

15 tous les juristes des deux côtés, les huissiers pour leur gentillesse, leur

16 amabilité et leur caractère professionnel et tous les sentiments dont ils

17 ont fait part à mon égard.

18 Je vous remercie.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

20 [Le témoin se retire]

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, maintenant, nous allons continuer l'audience

22 qui est une audience record puisqu'on est à presque 132 pages de

23 transcript.

24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

25 suggérer qu'on arrête. Je sais que M. Prlic a été frustré parce qu'il

26 souhaitait s'adresser à la Chambre, mais ce serait lui rendre un mauvais

27 service après une journée aussi longue alors que nous sommes tous fatigués,

28 car moi je dois avouer que je suis fatigué, et commencer maintenant avec un

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1 autre sujet, j'espère que

2 M. Prlic me comprendra. C'est vraiment, cela va dans son sens.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic, est-ce que la meilleure solution

4 serait que vous interveniez lundi quand on reprendra l'audience dont vous

5 aurez la parole en premier ?

6 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je suis entièrement à votre disposition,

7 Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, donc, la Chambre prend l'engagement,

9 Monsieur Prlic, lorsque nous reprendrons l'audience avant d'introduire le

10 témoin, vous aurez donc la parole.

11 Alors, il est 17 heures. Il faut que nous terminions l'audience. Je

12 remercie donc tous les participants. Comme vous le savez, nous nous

13 retrouverons pas ce lundi qui vient, mais l'autre lundi, il y a donc un

14 programme qui est déjà prévu ce qui va nous permettre pendant quelques

15 jours de reprendre des forces, puisque depuis trois mois sans arrêt, nous

16 avons donc tenu des audiences sans aucune interruption, donc, nous

17 reprendrons sur le même rythme à partir non pas de lundi qui vient, mais de

18 l'autre lundi. Je vous remercie.

19 --- L'audience est levée à 17 heures 00 et reprendra le lundi 16 avril

20 2007, à 14 heures 15.

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