Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 19 juin 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

7 de l'affaire, s'il vous plaît ?

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à

9 toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et

10 consorts. Merci.

11 M. STEWART : [interprétation] Quinze secondes, Monsieur le Président, si

12 vous me le permettez. Je souhaite rendre hommage à

13 M. Petkovic qui arrive toujours à attirer des femmes extrêmement

14 talentueuses au sein de son équipe de la Défense, donc, aujourd'hui, nous

15 avons un autre stagiaire qui va travailler avec nous, Mme Ashley Walker. Je

16 voulais vous la présenter.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Stewart.

18 Bien. Je salue donc toutes les personnes présentes, et je salue Mme Ashley

19 Walker, qui rejoint également le "team" de la Défense du général Petkovic.

20 Je vais donner la parole à M. le Greffier qui a, je crois, deux numéros IC

21 à nous donner.

22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. 3D

23 et 4D [comme interprété] -- les équipes 3D et 4D ont soumis une réponse aux

24 objections du bureau du Procureur s'agissant des pièces à conviction de la

25 Défense versées au dossier par l'intermédiaire du témoin, Bo Pellnas. La

26 liste de l'équipe 3D recevra le numéro IC 605, et la réponse de l'équipe 5D

27 recevra la cote IC 606. Merci beaucoup, Monsieur le Président.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

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1 Je vais donner la parole à M. Scott pour la suite de l'interrogatoire

2 principal.

3 LE TÉMOIN : AZRA KRAJSEK [Reprise]

4 [Le témoin répond par l'interprète]

5 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

6 Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous. S'agissant des deux

7 personnes qui se sont jointes à nous et depuis peu, je dois dire

8 qu'effectivement, il n'y a jamais trop de femmes de talent dans un

9 prétoire. Bienvenue. Il n'y a jamais suffisamment d'hommes talentueux, mais

10 il y a toujours beaucoup de femmes de talent.

11 Interrogatoire principal par M. Scott : [Suite]

12 Q. [interprétation] J'aimerais maintenant que nous revenions à un thème

13 que nous avons abordé hier et j'aimerais traiter encore de quelques

14 questions à ce sujet. Pour ce faire, je vous demande de consulter la pièce

15 10058, je vois que vous n'avez pas le classeur encore.

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. Merci. L'un des conseils de la Défense hier vous a posé des questions

18 au sujet de ce document, et notamment au sujet du dernier paragraphe de la

19 dernière page du document, bien entendu, ceci pourrait aborder au cours du

20 contre-interrogatoire ou même des questions supplémentaires, mais étant

21 donné que la question a été soulevée, je vais l'aborder tout de suite.

22 On vous cite l'extrait suivant, je cite, dans ce paragraphe : "On leur a

23 donné le statut de réfugiés." J'aimerais que nous nous penchions un petit

24 peu plus sur cette question, et pour ce faire, j'aimerais que nous nous

25 rapportions au paragraphe 91 de votre déclaration écrite.

26 R. Je l'ai retrouvé.

27 Q. Paragraphe 91 de votre déclaration, il est question des hommes qui ont

28 été libérés de Dretelj et qui se retrouvent sur Korcula, et on peut lire,

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1 je cite : "Le Dr Granic," et la Chambre et tout le monde ici le savent

2 qu'il s'est expliqué ici, et à l'époque, il était ministre des Affaires

3 Etrangères de la République de Croatie, donc : "Le Dr Granic a annoncé

4 qu'il avait été convenu qu'une fois que les détenus de Dretelj auraient été

5 remis en liberté, ils seraient accueillis par la Croatie et traités comme

6 des invités du pays en attendant leur transit ou leur transfert vers des

7 pays tiers."

8 Maintenant, que nous avons lu ce passage, si nous examinons la pièce 10058,

9 la lettre du Dr Kapetanovic, et peut-être souhaiteriez-vous vous y référer

10 maintenant, est-ce que vous avez trouvé le passage où le Dr Kapetanovic dit

11 que les personnes ont reçu le statut de réfugié ? La question que j'ai à

12 vous poser à ce sujet est la suivante : est-ce que le Dr Kapetanovic avait

13 raison d'affirmer

14 cela ? Est-ce que ces personnes ont reçu le statut de réfugié au moment où

15 elles sont arrivées à Korcula ?

16 R. D'après mes informations, ils n'ont pas obtenu le statut de réfugié,

17 ils n'ont pas pu l'obtenir.

18 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, si vous le permettez, je

19 souhaiterais, étant donné que le Procureur a longuement discuté d'un

20 commentaire que j'ai fait hier, qu'on établisse à quel moment cela s'est

21 passé, cette réunion a eue lieu en 1993, début septembre, et il serait bien

22 de mentionner que M. Silajdzic a participé à cette réunion, donc, la date

23 de la réunion étant le

24 9 octobre -- étant donné que ce document date du 9 octobre, alors, il y a

25 une différence d'un mois.

26 M. SCOTT : [interprétation] Je pense que si le conseil a des questions à

27 poser, il faudrait le faire pendant le contre-interrogatoire. J'essaie de

28 traiter de la chose assez rapidement que possible. Je pense qu'il faut

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1 passer à autre chose.

2 Q. Avant de poursuivre, une question que je vous ai posée hier soir tard

3 dans la soirée, peut-être ma question n'était-elle pas suffisamment claire.

4 Mais j'aimerais que nous examinions la pièce 10067, le dernier document du

5 classeur.

6 R. Je l'ai trouvé.

7 Q. Il s'agit d'une lettre dont vous avez dit -- entre autres, que vous

8 aviez écrit une lettre et que vous aviez des contacts avec des personnes

9 qui avaient été détenues à Dretelj, ensuite, mises en liberté, envoyées à

10 Korcula puis dans des pays tiers. Vous aviez en parler de ces personnes qui

11 souhaitaient rentrer en Bosnie.

12 R. Oui, je m'en souviens bien.

13 Q. Je vais répéter la question que je vous ai posée hier, et ensuite,

14 j'essaierai de la préciser, je vous ai posé la question suivante -- étant

15 donné le nombre de questions dont avait à traiter votre ambassade à

16 l'époque -- je fais référence, je le signale, aux pages 57 et 58 du compte

17 rendu d'audience d'hier : "Etant donné le nombre de questions dont devait

18 traiter votre ambassade à l'époque, pourquoi avez-vous estimé nécessaire

19 d'envoyer un rapport à vos supérieurs au ministère des Affaires Etrangères

20 à ce sujet ?" Je précise ma question. Il ne s'agissait nullement pour moi

21 de critiquer votre service à Zagreb, et vous nous avez expliqué que, de

22 toute manière, ceci n'entrait pas dans le domaine de vos attributions. A ce

23 moment-là, puisque il ne s'agissait pas de personnes qui se trouvaient en

24 Croatie, qui n'étaient pas -- ce n'étaient pas des réfugiés en Croatie, ils

25 étaient ailleurs, pourquoi est-ce que vous avez estimé que c'était une

26 question suffisamment importante pour faire un rapport à ce sujet au

27 ministère des Affaires étrangères de Sarajevo ? Voilà ma question.

28 R. Je considérais que c'était très important parce qu'il s'agissait là des

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1 mêmes personnes, des détenus de Dretelj, qui cherchaient tous les moyens

2 possibles pour rentrer en Bosnie-Herzégovine. Etant donné qu'ils

3 souhaitaient rentrer chez eux, ils ont maintenu, de manière continue, le

4 contact avec notre ambassade à Zagreb.

5 Q. Bien. Passons maintenant à un autre sujet. S'agissant du paragraphe 62

6 de votre -- mais un instant, je vérifie que je n'oublie pas quelque chose.

7 Donc, j'aimerais vous demander de réfléchir maintenant aux questions qui

8 sont évoquées aux paragraphes 62, 63 et 64 de votre déclaration écrite.

9 R. J'ai trouvé les passages en question.

10 Q. Merci. Au paragraphe 63, vous dites que les réfugiés perdaient le

11 statut de réfugié qui leur avait été accordé. La plupart des personnes, qui

12 ont perdu ce statut, se trouvaient à Zagreb, Split, Makarska. 64 : "Les

13 Musulmans de Bosnie, qui venaient d'arriver, n'ont pas bénéficié de

14 protection et ne pouvaient pas obtenir le statut de réfugié. Ils venaient

15 de l'Herzégovine, qui était contrôlée par le HVO, c'était un territoire de

16 la Bosnie-Herzégovine contrôlé par le HVO."

17 Pouvez-vous en dire un peu plus aux Juges au sujet de ce dont vous vous

18 souvenez de l'époque, et je parle de cette question des personnes qui

19 avaient obtenu le statut de réfugié qui leur a ensuite été retiré, ou de

20 personnes qui sont arrivées et à qui on n'a pas accordé ce statut de

21 réfugié ?

22 R. Je me souviens bien que ce problème était particulièrement aigu chez

23 les citoyens bosniaques avec le statut de réfugié venant depuis le

24 territoire sous le contrôle du HVO. A cette époque-là, l'ODPR, le bureau

25 pour les Réfugiés et les Personnes expulsées, avait adopté un décret

26 portant sur ces personnes venues de l'Herzégovine et qu'on ne leur prolonge

27 pas -- qu'on ne renouvelle pas leur statut de réfugié puisqu'il n'y avait

28 plus d'opérations de combat là-bas, et c'est de cette manière-là qu'on leur

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1 avait retiré leur statut de réfugié. Très simplement, ils se faisaient

2 intercepter par la police dans les rues, les policiers prendraient leurs

3 documents, la pièce d'identité, la carte de réfugié, et quant aux nouveaux

4 venus, tout simplement, ils n'arrivaient pas à obtenir ce statut. Ils

5 justifiaient cela par la décision du Dr Adalbert Rebic, le directeur du

6 directorat.

7 Q. A la ligne 10, il est indiqué : "Ce n'était plus la guerre à cet

8 endroit." En dehors de ceci, de cette affirmation, de ce motif, est-ce

9 qu'il y a d'autres justifications, d'autres motifs qui ont été donnés pour

10 refuser le statut de réfugié ou pour révoquer ce statut ?

11 R. A mon avis, il n'y avait aucune justification à cela, y compris celle

12 qu'ils annonçaient, c'est-à-dire le décret, cette décision, parce qu'à

13 cette époque-là, les citoyens bosniaques, les Musulmans de Bosnie, ne

14 pouvaient personnes rentrer en Bosnie de manière sûre. Ils ne pouvaient pas

15 regagner le territoire de la Bosnie par la terre, et c'était le cas avec

16 d'autres citoyens bosniaques aussi, puisqu'il y avait une réelle

17 possibilité que le HVO les arrête et les détienne dans les prisons à

18 nouveau.

19 Q. Passons aux paragraphes 65 à 67. Vous parlez de l'action --vous

20 expliquez que le ministre de l'Intérieur de Croatie a arrêté environ 120

21 Musulmans de Bosnie afin qu'ils soient expulsés vers la Bosnie-Herzégovine.

22 La seule question que j'ai à vous poser à ce sujet -- au sujet de ce

23 paragraphe est la suivante : avez-vous reçu des informations sur le sort

24 qui a été réservé à ces 120 Musulmans ?

25 R. Jamais. Non.

26 Q. Paragraphe 71, maintenant, de votre déclaration.

27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pendant la pause qui vient de se

28 matérialiser, je voudrais savoir, Madame, si vous vous êtes renseignée au

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1 sujet de ce qui est arrivé à ces 120 Musulmans; est-ce que vous avez tenté

2 d'obtenir des éléments d'information ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous le faisions d'une manière

4 systématique. Nous avons pris contact avec toutes les parties en présence,

5 avec les Nations Unies, avec d'autres organisations internationales

6 présentes en Croatie, et nous avons demandé à tous de faire ce qu'ils

7 peuvent afin d'apprendre ce qui leur est arrivé. Mais nous n'avons jamais

8 reçu de réponse. Je n'aimerais pas maintenant émettre d'hypothèse. Je

9 suppose qu'eux-mêmes ne disposaient d'aucune information.

10 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On ne vous a pas entendu, Maître

12 Karnavas.

13 M. KARNAVAS : [interprétation] J'imagine là je pars du principe que Madame

14 dispose de documents confirmant ce qu'elle vient d'affirmer, à savoir

15 qu'elle a fait des demandes auprès de toutes ces organisations afin que

16 nous puissions examiner les documents et vérifier ses propos. J'imagine

17 qu'elle peut présenter ces documents à l'Accusation qui a des contacts avec

18 elle depuis déjà trois ou quatre ans.

19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame, vous avez évoqué des

20 organisations internationales ? Est-ce que vous avez pris des

21 renseignements auprès d'organisations croates par exemple, auprès du MUP ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement non, mais par le biais de

23 notre consulat, j'ai également pu avoir accès à des informations que le

24 consulat avait obtenu du MUP.

25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

26 M. SCOTT : [interprétation]

27 Q. Cette information, quelle était-elle ?

28 R. A cette époque-là, j'ai entendu parler de l'action Rama.

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1 Q. Paragraphe 71 de votre déclaration. Au paragraphe 71, vous évoquez le

2 fait que certaines de ces personnes étaient envoyées en Turquie et vous

3 dites je cite : "Avant que les gens soient envoyés en Turquie nous leur

4 avons offert, donné la possibilité de rentrer en Bosnie." Ensuite, vous

5 développez un petit peu, vous parlez de Tuzla à nouveau. Vers la fin du

6 paragraphe, vous dites, je cite : "C'est la raison pour laquelle nous avons

7 réalisé que nous ne pouvions les faire partir que vers la Turquie."

8 Pourriez-vous, afin que les choses soient précises, indiquer aux

9 Juges la chose suivante : est-ce que c'était la solution de préférence du

10 gouvernement de Bosnie ? Est-ce qu'il souhaitait voir ces personnes

11 envoyées en Turquie ?

12 R. C'était notre dernier recours. La dernière possibilité qui nous restait

13 afin d'assurer leur protection et afin de les envoyer vers les territoires

14 sûrs, où ils ne seraient pas menacés par les arrestations, les expulsions.

15 Evidemment, ce n'était pas une manière habituelle dans notre ambassade et

16 le département chargé des réfugiés s'occupait d'habitude des réfugiés.

17 Q. Dans un même ordre d'idée, mais il sera peut-être nécessaire d'apporter

18 quelque précision. Examinons maintenant le paragraphe 75 de votre

19 déclaration écrite. A la fin de ce paragraphe : "Je souhaite insister sur

20 le fait que nous avons organisé le transport vers la Turquie uniquement

21 pour ceux qui se trouvaient dans une sorte de limbe juridique."

22 Que voulez-vous dire par là ?

23 R. Je voulais dire par cela que nous avons pris les mesures nécessaires

24 nous permettant de discuter, de nous entretenir directement avec chaque

25 citoyen de la Bosnie-Herzégovine qui souhaitait se rendre en Turquie, pour

26 vérifier avec cette personne s'il avait le statut de réfugié en Croatie ou

27 pas. Nous ne voulions pas nous occuper de transfert des citoyens qui

28 bénéficiaient déjà d'un statut de réfugié. Ensuite, les questions que nous

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1 posions à ces personnes-là étaient de savoir quelles étaient les

2 organisations internationales avec lesquelles elles avaient pris le

3 contact. Nous nous adressions principalement au HCR et tous ceux qui nous

4 avons dit qu'ils n'ont pas pu obtenir de l'aide de la part, par exemple, du

5 HCR et même on sait qu'il y avait des personnes qui étaient protégées par

6 le HCR qui se faisaient également arrêter. Donc, nous faisions des

7 questionnaires, et selon leur réponse, nous décidions du choix, nous

8 sélectionnions les personnes pour les retrancher vers la Turquie.

9 Q. Justement à ce sujet, j'aimerais vous demander d'examiner la pièce

10 4150.

11 R. Je l'ai trouvée.

12 Q. Nous avons déjà me semble-t-il examiner ce document. J'aimerais vous

13 demander maintenant d'examiner un autre passage s'agissant de la traduction

14 en anglais, ça se trouve en bas de la troisième page. Est-ce qu'il est

15 question là du déplacement, de l'envoi d'un certain nombre de personnes en

16 Turquie ?

17 R. J'ai trouvé la version anglaise de ce document. Juste un instant, je

18 vous prie.

19 Q. -- la page.

20 R. Oui, je l'ai trouvé et j'ai trouvé le passage en question. Il s'agit

21 bien ici d'étudier la possibilité de déplacer, de [imperceptible] la

22 République de la Bosnie-Herzégovine depuis la Croatie vers les pays tiers.

23 Q. En particulier, la question du déplacement ou de l'envoi en Turquie,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Oui. C'est exact. Nous avons pris contact avec les ambassades de

26 plusieurs pays, mais la Turquie a été la seule à nous donner une réponse

27 concrète et c'était la seule ambassade qui nous a donné la possibilité

28 d'accueillir jusqu'à 2 000 citoyens de l'ABiH.

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1 Q. Bien. J'aimerais maintenant vous demander d'examiner la pièce 10054.

2 R. Je l'ai trouvée.

3 Q. De quoi s'agit-il, s'il vous plait ?

4 R. Il s'agit d'un courrier du service de Réfugiés de l'ambassade de l'ABiH

5 à Zagreb, envoyé au ministère des Affaires étrangères de la République de

6 Croatie, où on discute d'une manière générale -- pardon, excusez-moi. En

7 fait, non, il s'agit là d'un rapport de mission à Split pour la période

8 allant du 7 au 12 septembre 1993.

9 Q. Bien. A quelle occasion vous êtes-vous rendu à Split et sur l'île

10 d'Obonjan entre le 7 et le 12 septembre 1993 ?

11 R. J'ai expliqué dans mon rapport que le but principal de cette mission a

12 été la situation difficile dans laquelle se trouvaient les personnes

13 hébergées à Obonjan. Dans cette lettre, j'ai expliqué les raisons pour

14 lesquelles nous considérions la situation à Obonjan très complexe, et

15 également déclarer que nous comprenions bien les raisons pour lesquelles

16 les concitoyens, qui se trouvaient à Obonjan, se plaignaient sans arrêt et

17 demandaient qu'on les transfère vers d'autres lieux.

18 Q. A la deuxième page de la version du document en anglais, au milieu de

19 la page, je voudrais maintenant rebondir sur ces questions qui ont été

20 posées hier. C'est un paragraphe qui commence par les mots suivants : "Tout

21 comme dans d'autres centres de réfugiés…" et cetera.

22 R. Oui, j'ai trouvé le passage en question.

23 Q. "Tout comme dans d'autres centres de Réfugiés, la plupart de nos

24 ressortissants ne disposent pas de papiers d'identité -- de documents

25 d'identité. Des représentants de l'ambassade se sont rendus sur l'île au

26 début août 1993 et, à ce moment-là, des passeports collectifs ont été

27 délivrés aux citoyens de Mostar et à tous ceux qui étaient intéressés."

28 Nous avons parlé hier des passeports collectifs, je vous le rappelle. Vous

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1 précisez ensuite : "Les passeports collectifs ont été délivrés aux citoyens

2 de Mostar parce qu'ils se trouvaient en transit sur le territoire de la

3 République de Croatie. Nous ne disposions d'aucune information sur la

4 manière dont le pays hôte allait les traiter, si bien que nous avons entamé

5 des préparatifs, c'était une sorte de mesure d'urgence, aux fins de leur

6 réinstallation collective." Est-ce que ça correspond bien à la situation à

7 l'époque, Madame, ce qu'on voit ici ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Pourriez-vous maintenant passer à la page 5 de la version en anglais,

10 s'il vous plaît ? Dernier paragraphe juste avant le grand II en chiffre

11 romain.

12 R. Je suis en train de voir ce passage, en effet.

13 Q. A la troisième ligne de ce paragraphe, il est écrit -- il fait

14 référence donc à la fermeture du centre de Réfugiés sur l'île. Nous parlons

15 donc de l'île d'Obonjan; c'est bien cela ?

16 R. Je n'ai pas ce passage sous les yeux. J'ai ici ma cinquième page et le

17 passage qui est juste au-dessous II en chiffre romain.

18 Q. C'est donc à la troisième ligne de ce paragraphe. Il y a référence à la

19 fermeture du centre de réfugiés se trouvant sur l'île; vous le voyez ?

20 Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire si ce centre de Réfugiés ou

21 ce camp de réfugiés a bel et bien été fermé à peu près à ce moment-là,

22 c'est-à-dire à l'automne 1993 ?

23 R. Non. Jusqu'à mon retour en Bosnie-Herzégovine - et je parle d'août 1994

24 - ce centre de Réfugiés n'a pas été fermé.

25 Q. Au paragraphe 78 de votre déclaration, vous dites ce qui suit et

26 j'aimerais que vous le commentiez -- que vous nous donniez des précisions

27 si possible. Vous avez dit, je cite : "Nous nous sommes rendus compte que

28 les autorités croates attendaient une bonne occasion pour commencer à

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1 déplacer les réfugiés depuis d'autres parties de la Croatie jusqu'à Obonjan

2 et Gasinci, les deux endroits les pires où pouvaient se trouver les

3 réfugiés. Comme les autorités croates le pensaient, les réfugiés ont essayé

4 à tout prix de quitter le pays." Pouvez-vous nous expliquer un petit peu de

5 quoi cela signifie -- ce que cela signifie ?

6 R. Une partie de ma déclaration visait à faire savoir que c'était

7 notoirement connu que de dire que partant du moment où les réfugiés

8 venaient à être déplacés des centres précédant ou des hébergements

9 individuels où ils ont été jusque-là vers Obonjan et Gasinci, ces réfugiés

10 se mettaient à rechercher toutes les possibilités qu'il y avait pour

11 quitter la Croatie. Je comprenais parfaitement bien pourquoi ces gens ne

12 voulaient pas rester longtemps à ces endroits. Je ne sais pas si vous

13 voulez que je vous donne plus de détail concernant les spécificités des

14 sites.

15 Q. Rapidement, s'il vous plaît.

16 R. Alors, ces spécificités pour ce qui est de Gasinci -- de ce centre

17 collectif de Gasinci, il s'agissait d'un site à côté d'un endroit où il y

18 avait un polygone militaire de l'armée croate. Il y avait là des armes

19 lourdes où les réfugiés pouvaient lire des messages ouverts parce que les

20 canons des pièces étaient tournés vers le camp de réfugiés, et très souvent

21 les policiers venaient dans le camp pour les arrêter dans le camp même. Il

22 y a eu des passages à tabac de réfugiés et l'ambiance d'une manière

23 générale était plus que bouleversante. On peut parler d'hystérie dans

24 certaine période pendant les visites que j'ai effectuées. Pour ce qui est

25 de l'île d'Obonjan, les citoyens de la Bosnie-Herzégovine sont des

26 continentaux, et les premiers à être arrivés là c'étaient des personnes

27 âgées, des femmes ou des hommes très âgés, fatigués qui ont quitté pour la

28 première fois leurs logis, leurs maisons de leur vie durant, et ça déjà été

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1 un stress suffisant. C'est quelque chose à laquelle ils n'étaient pas

2 habitués. En plus d'eux sur cette île, il y avait d'ex-criminels à y être

3 installés. Et j'ai déjà dit qu'il y avait des psychopathes, des meurtriers

4 qui attendaient à être déportés vers la Bosnie-Herzégovine après avoir

5 purgé leur peine. Puis, il y avait des membres des forces spéciales de la

6 police de la République de Croatie qui, s'agissant des citoyens bosniens

7 qui étaient logés là-bas, en effet d'intimidation, et ils avaient cette

8 impression de ne pas pouvoir rejoindre terre ferme lorsque bon leur

9 semblerait.

10 Q. Merci. Passons donc plus loin --

11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] S'il vous plaît -- j'aimerais avoir

12 un petit peu de détail, s'il vous plaît.

13 Madame, savez-vous s'il y a eu des crimes qui auront été commis par ces

14 criminels, ceux qui avaient été amenés sur l'île, des crimes donc contre

15 les réfugiés, ou alors, est-ce que c'était juste une perte plutôt abstraite

16 ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, ils ne se sont

18 pas comportés de façon à apporter préjudice aux réfugiés. J'ai rencontré

19 deux ou trois de ces ex-criminels condamnés à des peines pour ce qui est

20 donc de discuter un peu. Ils étaient plutôt fiers de ce qu'ils avaient fait

21 comme délit, ce qu'ils avaient commis comme délit. Alors, je leur ai

22 demandé s'ils avaient parlé de cela aux détenus et ils ont dit que tout à

23 fait normalement, ils pouvaient rencontrer les réfugiés et s'entretenir

24 avec eux.

25 M. KARNAVAS : [interprétation] J'espère que nous allons avoir un peu de

26 preuve pas uniquement des détails colorés. On a quand même besoin de

27 preuve. Ici jusqu'à présent, on a des anecdotes et rien de plus. J'espère

28 quand même que cette femme a des documents pour prouver tout ceci,

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1 documents qu'elle aurait soumis aux enquêteurs.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

3 Madame, une question parce que vos propos peuvent jeter la confusion dans

4 les esprits. Et je me dois d'essayer d'éclairer ce que vous dites. Ces

5 fameux criminels qui étaient là dans l'attente d'un retour en Bosnie-

6 Herzégovine, quand vous avez dit ça, ça m'a interpellé parce que j'ai pensé

7 sur l'exemple des Cubains qui avaient été transférés dans des centres à

8 Miami où il y avait un mélange de réfugié et de criminel. Donc, j'ai cru au

9 départ que c'était cela que vous vouliez dire. Puis, en vous écoutant, je

10 me suis demandé si ces criminels entre guillemets n'étaient pas en fait des

11 ressortissants de la Bosnie-Herzégovine qui avaient été jugés par des

12 tribunaux de la République de Croatie et qui terminaient leur peine dans

13 l'attente d'un retour dans leur pays.

14 Alors, ces criminels, entre guillemets, à votre connaissance, à

15 quelle catégorie faisiez-vous allusion ? Est-ce que c'étaient des

16 ressortissants de la Bosnie-Herzégovine qui avaient été jugés en Croatie et

17 qui devaient repartir dans leur pays, ou bien, des individus qui étaient

18 arrivés avec une foule de réfugiés mais dans lesquels il y avait des

19 éléments criminels ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des personnes condamnées pour

21 des délits variés commis du temps de l'ex-Yougoslavie, et ces personnes

22 devaient purger leur peine dans l'une quelconque des prisons de la Croatie.

23 Après avoir purgé cette peine, la Croatie ne voulait pas les renvoyer en

24 Bosnie-Herzégovine compte tenu des opérations de combat, mais les a

25 installés à cette île, Obonjan, en attendant de les renvoyer en Bosnie-

26 Herzégovine.

27 Pour ce qui est de leur séjour à Obonjan, j'ai envoyé des lettres au

28 HCR et aux autres organisations des Nations Unies en demandant une sorte

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1 d'aide. Ce qui me vient à l'esprit maintenant, c'est une situation où parmi

2 eux il y avait un certain nombre d'ex-condamnés en compagnie de réfugiés de

3 Obonjan, et d'après les informations communiquées par les réfugiés, il y en

4 a eu qui ont été déportés vers la Bosnie-Herzégovine. Alors, j'ai écrit

5 pour dire combien concrètement de personnes il a été emmené depuis Obonjan

6 pour essayer de protéger les personnes là-bas et de nous informer de leur

7 sort nous autres.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, si je comprends bien, Madame, il y

9 avait plusieurs catégories. Il y avait ceux qui avaient été condamnés du

10 temps de l'ex-Yougoslavie et qui purgeaient leur peine dans des prisons

11 croates mais qui avaient la nationalité de la Bosnie-Herzégovine et qui

12 devaient retourner en Bosnie-Herzégovine du fait de l'accession à

13 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine et étant citoyens de la Bosnie-

14 Herzégovine, ils devaient rentrer. Mais vous semblez dire également que,

15 dans le feu des réfugiés, il y avait aussi des individus qui avaient été

16 condamnés mais en Bosnie-Herzégovine et qui avaient été mêlé dans le feu

17 des réfugiés. Ce qui fait que d'après ce que je peux comprendre, il y avait

18 plusieurs catégories de criminels, est-ce bien cela qu'on doit comprendre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je regrette de ne pas avoir été

20 suffisamment précise. D'après ce que j'ai pu savoir c'étaient tous des

21 personnes condamnées qui ont été condamnées du temps de l'ex-Yougoslavie.

22 C'étaient des peines à long terme. Il y en a qui ont purgé des peines de

23 10, 15, 20 ans. Ils ont été libérés à un moment où la Bosnie-Herzégovine

24 était reconnue comme étant indépendant et la République ce Croatie idem.

25 Comme ils étaient citoyens d'un autre pays, compte tenu du nouveau

26 contexte, et d'un pays qui était en guerre, la Croatie ne les a pas

27 renvoyés vers la Bosnie-Herzégovine tout de suite. Elle les a gardés dans

28 cette île d'Obonjan à titre officiel jusqu'à ce qu'il y ait des conditions

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1 de réunies pour les envoyer en Bosnie-Herzégovine.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été très précise.

3 Monsieur Scott.

4 M. SCOTT : [interprétation] Merci donc.

5 Q. Passons au paragraphe 90, s'il vous plaît, de votre déclaration. Ici,

6 vous nous parlez de conversation que vous avez eue avec un prêtre venant de

7 Citluk.

8 R. C'est exact.

9 Q. Pourriez-vous nous dire enfin de compte si selon vous il vous avait

10 demandé d'aider, il s'agissait d'une demande de laisser les Musulmans dont

11 on fait référence ou enfin expliquez-nous un petit peu quelle demande il

12 vous a formulée ?

13 R. Pour être sincère, je dirais que j'étais très préoccupée, s'agissant de

14 ces contacts téléphoniques, ils ont été nombreux. Au début, je pensais que

15 cela devait être une personne sincèrement inquiète pour ce qui est du sort

16 de ces Musulmans menacés dans la région. Mais ce monsieur qui s'était

17 présenté comme étant m'a paru être de moins en moins sincère et en

18 répondant à une question de ma part pour savoir s'il avait la possibilité

19 de les aider pour qu'ils puissent aller en Bosnie s'ils le voulaient, il a

20 répondu qu'ils avaient entendu dire qu'en Bosnie, il faisait froid et qu'il

21 n'y avait pas de quoi manger. Ça m'a aidé à décider parce que j'estimais

22 qu'une telle approche ni s'agissant de moi, ni s'agissant de l'ambassade ne

23 saurait être sincère. Il ne saurait y avoir un citoyen de la Bosnie-

24 Herzégovine qui devait apprendre entre guillemets qu'il faisait froid là-

25 bas. Alors, j'ai dit que le contact était tout à fait dénué de sincérité,

26 et je n'ai plus voulu revenir là-dessus.

27 Il n'a pas conclu autre chose ?

28 R. Enfin, tout ceci, ce sont les réfugiés quand même et les personnes qui

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1 se sont retrouvées en Croatie. Donc, passons au paragraphe 102. Dans ce

2 paragraphe, vous parlez d'un exemplaire d'instructions envoyé au bureau --

3 depuis le bureau de M. Rebic aux bureaux régionaux de Croatie. Le document

4 déclare que le statut de réfugié doit être annulé pour les personnes venant

5 de : "zones sécurisées," entre guillemets, c'est-à-dire Mostar, Stolac,

6 Capljina, Ljubuski, Pocitelj, et toute autre zone sous contrôle du HVO."

7 Pourriez-vous nous dire, en règle générale, quand vous avez appris

8 l'existence de ces consignes venant du bureau de M. Rebic ?

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant que de répondre, je vous demanderais -- parce

10 que l'interprète a dit qu'il s'agissait de zones protégées, et moi, ici,

11 j'ai demandé à ce que ce soit rectifié. Il a été question du décret et de

12 moyens de communication, et il a toujours été question de zones de sécurité

13 -- non, de zones sécurisées. Et partant des contacts, soit les réfugiés

14 venaient au bureau, soit ils se passaient des coups de fil pour demander de

15 l'aide, et demander aussi comment se comporter dans une situation où l'on

16 ne prorogeait pas leur statut de réfugié, et nous avons officiellement

17 contacté le bureau de M. Adalbert Rebic, et nous avons demandé une réponse,

18 mais la réponse officielle n'est pas arrivée. Nos réfugiés nous ont quand

19 même aidés à nous procurer des copies de ce document, de ce décret que ce

20 Bureau principal chargé des réfugiés à Zagreb avait envoyé vers ses bureaux

21 locaux, et le décret en question disait que les citoyens de Bosnie-

22 Herzégovine originaires des villes de Mostar, Stolac, Capljina, Ljubuski,

23 Pocitelj, et autres, sous le contrôle du HVO, ne devaient pas se faire voir

24 -- se faire proroger leur statut de réfugié. Les réfugiés étaient

25 conscients du fait qu'ils ne pouvaient pas retourner vers ces régions,

26 qu'ils n'auraient pas de protection et qu'ils resteraient dénués de toute

27 protection, et ils ont demandé à l'ambassade une aide concrète aux fins de

28 faire en sorte que leur problème soit résolu.

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1 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le témoin

2 n'a pas répondu aux questions -- à la question du confrère. Quand et

3 comment a-t-elle appris ? Alors, nous n'avons pas appris quand, et cela,

4 c'est pertinent.

5 M. SCOTT : [interprétation] Je pense qu'on a vu comment, quand même,

6 puisque c'était par le biais de contacts, donc, avec des réfugiés ou

7 autres, et cetera, donc, la réponse a été donnée. Pour ce qui est du quand,

8 je pense qu'avec les documents suivants, nous allons vite le savoir, et je

9 pense que le témoin a un petit peu anticipé, mais donc, qu'avez-vous

10 entendu ? J'aimerais savoir. J'aimerais que vous me le disiez.

11 R. En substance, j'ai ouï dire qu'il y avait un nouveau problème de

12 survenu, à savoir que les réfugiés originaires de Bosnie-Herzégovine ne se

13 voyaient pas proroger le statut de réfugié et qu'ils n'avaient pas ce

14 statut de réglé pour continuer à séjourner en Croatie.

15 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, maintenant, passer au paragraphe 103,

16 donc, le paragraphe suivant de la déclaration, donc là, il est écrit que

17 vous avez rencontré M. Rebic, et vous lui avez fait part de vos

18 préoccupations à ce propos ?

19 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse

20 d'interrompre. Le confrère vient de dire que cette réponse à la question de

21 savoir quand, et c'est substantiel, nous sera apportée par temps du

22 paragraphe suivant. Alors, on parle du paragraphe 103, mais il n'y a pas le

23 moment. Or, nous ne pouvons pas comprendre ce récit quand on ne sait pas

24 quand. Si c'était en 1993, soit. 1994, soit. Mais si c'est antérieur, cela

25 peut avoir une signification autre, et mon confrère le sait parfaitement

26 bien. D'un mois à l'autre, en ex-Yougoslavie, y compris la Bosnie-

27 Herzégovine, y compris la Croatie, la situation a dramatiquement évolué.

28 Donc, le moment auquel c'est intervenu sont substantiel.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous indiquer la date, à peu près,

2 approximative, au moment où vous avez appris cela ? Est-ce que vous pouvez

3 dater ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne voudrais pas essayer de me souvenir de

5 la sorte. Je sais que, dans le dossier, il y a des courriers, qui ont des

6 dates. Il y a des PV des réunions. Il y a des rapports avec des dates. Je

7 pense qu'il est préférable pour faire -- de le faire en demandant au

8 Procureur de nous aider à retrouver les documents afférents.

9 M. SCOTT : [interprétation] Oui, si je pouvais passer à la pièce suivante

10 tout deviendrait très clair, Monsieur le Président. Et quand -- quand

11 j'avais attiré l'attention de la Chambre sur le paragraphe 103, les gens

12 auraient lu aussi apparemment le paragraphe 100, qui disait : "A partir de

13 1993 -- de septembre 1993 jusqu'à la fin de ma mission, le 31 août 1994, M.

14 Rebic," et cetera, donc, pouvons-nous arriver au document, s'il vous plaît,

15 qui dit : "31 octobre 1993," puisque là, on perd du temps ?

16 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, Madame le Témoin, passer au document

17 10059.

18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Soyez patient, Monsieur Kovacic,

19 vous aurez du temps lors du contre-interrogatoire, mais cela ne vous suffit

20 pas.

21 M. KOVACIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, je vais être patient,

22 comme vous me le demandez, mais parfois, la patience m'amène à avoir à

23 revenir pendant un quart d'heure en arrière, alors, plus personne ne sait

24 plus de quoi il s'agit, au juste. Mais bon. Merci.

25 M. SCOTT : [interprétation]

26 Q. Donc, Madame, il s'agit de la pièce 10059. Pourriez-vous nous dire

27 exactement de quoi il s'agit ?

28 R. Il s'agit d'un courrier de l'ambassade de la RBiH à Zagreb, envoyé au

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1 bureau chargé des Réfugiés et des Personnes expulsées, du gouvernement de

2 la République de Croatie. Le courrier est rédigé au Département chargé des

3 Réfugiés, je vois cela d'après le numéro du protocole. La date est celle du

4 31 octobre 1993. C'est passé par le biais du ministère des Affaires

5 étrangères, et il y a une note d'accompagnement de ce courrier vers le

6 département des personnes expulsées et des réfugiés à l'intention de M.

7 Rebic, et ce courrier prie, avec une argumentation de ce bureau chargé des

8 Réfugiés au sujet de l'Information disant que ces réfugiés -- ou plutôt, je

9 préfère donner lecture : "Les réfugiés se sont faits fournir des

10 explications disant que les conditions étaient réunies pour eux de revenir

11 vers des zones sécurisées de Mostar et autres," on les a énumérées tout à

12 l'heure, et que c'est la raison pour laquelle ils perdaient leur statut de

13 réfugié au sein de la Croatie. Les centres de soins sociaux expliquent que

14 ces décisions se fondent sur une décision prise par le gouvernement de la

15 République de Croatie, à savoir par le bureau chargé des Réfugiés. Donc, je

16 rédige ceci en octobre 1993, et cela, passer par le ministère des Affaires

17 étrangères, et c'est là que je prie une réponse de la part de ce bureau

18 chargé des Personnes réfugiées et expulsées.

19 Q. Passons à la pièce 10060, cela doit être le document suivant dans le

20 classeur. Donc, avez-vous bel et bien reçu une réponse de la part de M.

21 Rebic, ou l'ambassade aurait reçu une réponse de la part de M. Rebic en

22 date du 4 novembre ? Il y a une date en haut de la lettre. Bon, il s'agit

23 quand même d'un document du 4 novembre. Consultez le document.

24 R. J'ai cela.

25 Q. Très bien. Dans cette lettre, M. Rebic dit la chose suivante au

26 deuxième paragraphe : "Nous informons que le bureau a envoyé des directives

27 à ses bureaux régionaux et aux centres sociaux pertinents à propos de la

28 révocation du statut de réfugiés aux personnes qui résident dans des zones

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1 où il n'y a pas de guerre. Le bureau a aussi émis une directive sur

2 laquelle ces réfugiés doivent proroger pour les personnes qui ne peuvent

3 pas rentrer chez eux parce que leurs maisons ont été détruites," et cetera,

4 et cetera.

5 Vous avez dit que cette directive avait été émise et donc cette information

6 reçue dans la lettre de M. Rebic du 4 novembre 1993; corrobore-t-elle bien

7 les informations que vous avez reçues à peu près, à l'époque ?

8 R. En partie. Dans ce segment où l'on dit que le statut de réfugiés n'est

9 pas prorogé pour ce qui est de ceux qui étaient de Stolac, Mostar, et

10 autres. Cela est cohérent. Je n'ai pas vu le document où il est dit que :

11 "Ceux qui n'étaient pas en mesure de revenir en raison de maisons détruites

12 se verraient leur statut proroger."

13 Q. Avez-vous eu des contacts avec des réfugiés ou des personnes déplacées

14 en Croatie qui vous auraient dit qu'ils avaient essayé de profiter, si je

15 puis dire, de ce que j'appellerais la deuxième clause de cette lettre. En

16 vous disant : "Oui, on nous a dit qu'on est censé rentrer chez nous, mais

17 la maison a été détruite, donc, je ne peux pas." Est-ce que vous avez eu

18 des contacts avec des personnes qui étaient dans ces situations-là ?

19 R. J'ai eu des contacts avec des gens qui dans le désir de se procurer la

20 documentation nécessaire partant de laquelle ils pourraient proroger ce

21 statut de réfugiés qui était les leurs, et qui sont venus se renseigner sur

22 ce qu'il fallait faire, et ils ont appris que la plupart de ces documents

23 en originaux pouvaient être délivrés dans les municipalités dont ils

24 étaient originaires. Alors, ça a causé problèmes. J'ai compris pourquoi.

25 Parce que cela supposait que, physiquement parlant, il fallait qu'ils

26 retournent aux endroits depuis -- enfin, aux endroits d'où ils ont été

27 chassés, et eux, ils n'osaient pas le faire.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame, en lisant les courriers que vous adressez et

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1 la réponse que vous donne le gouvernement de la république de Croatie via

2 M. Rebic. Il semblerait d'après ces documents que les autorités croates

3 vont édicter deux directives. L'une, relative aux réfugiés qui perdent leur

4 statut de réfugiés du fait que les zones dont ils sont originaires sont

5 maintenant - j'allais dire - pacifiées, disons qu'elles ont retrouvé le

6 calme, qu'il n'y a plus la guerre sur place, et que ces gens peuvent

7 rentrer chez eux; et la deuxième directive serait relative aux gens qui ne

8 peuvent pas rentrer chez eux parce que leurs maisons ont été détruites et

9 qu'à ce moment-là, la deuxième directive leur répondre le bénéfice du

10 statut de réfugiés. Est-ce que c'est ce que vous avez compris du courrier

11 de M. Rebic, et la situation que vous avez vue par rapport à l'ensemble des

12 réfugiés était-elle conforme à ce document qui est un document officiel du

13 gouvernement croate ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais très surprise en voyant ces

15 informations contenues dans le courrier du Dr Rebic et j'ai insisté qu'une

16 réunion se tienne avec M. Rebic. Lors de cette réunion, j'avais l'intention

17 de lui poser la question ouvertement : "Qui est-ce qui a eu cette idée de

18 supprimer le statut de réfugiés aux citoyens de l'ABiH, aux Musulmans

19 bosniaques, et qui a eu cette idée de les forcer de revenir sur le

20 territoire sous le contrôle du HVO où ils allaient subir le même sort

21 qu'avant, donc, les arrestations et les détentions ? Etant donné que ce

22 décret faisait -- avait pour conséquence qu'ils se retrouvaient sur le

23 territoire croate sans papier et qui s'exposaient de cette manière à des

24 arrestations, donc, j'ai demandé ce qu'il faille faire et ce qu'ils

25 voulaient obtenir par cela. Alors, il m'a dit qu'en fait, cela visait les

26 Croates bosniaques qui avaient fui ce territoire-là et qui commençaient à

27 utiliser leur statut de réfugiés comme une sorte d'autorisation de vacances

28 prolongées en attendant de rentrer chez eux pour reprendre la vie normale.

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Scott, j'ai une question à

2 poser au sujet du document et au sujet de l'original -- ou plutôt, du

3 document en B/C/S parce qu'en l'occurrence il ne s'agit pas de l'original.

4 Il semble qu'il s'agisse d'un document qui est extrait de toute une série

5 de documents. Il y a deux dates sur la version en anglais, 4 décembre et 4

6 novembre. Je ne comprends pas que cela signifie.

7 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je souhaiterais

8 préciser un certain nombre de questions suite à ce que nous venons

9 d'entendre. Mais pour répondre à votre question, Monsieur le Juge, ces

10 documents nous ont été remis sur une disquette informatique. Donc, ces

11 documents ont ensuite été imprimés à partir de la version électronique

12 figurant sur cette disquette. Je suis sûr que le témoin peut le confirmer,

13 et s'agissant de l'erreur de cette date, je ne sais pas. Je ne peux pas

14 vous en dire plus. Mais pour ce qui est du format de ces documents, je

15 pense que le témoin peut expliquer aux Juges de la Chambre de quelle

16 manière, sous quelle forme ces documents en B/C/S ont été fournis à la

17 Chambre.

18 Q. Madame, pouvez-vous expliquer aux Juges comment certains des documents

19 en B/C/S - pas tous les documents - les documents que nous avons vus

20 aujourd'hui et hier ont été fournis au Tribunal ? Pourquoi sont-ils sous le

21 format que nous voyons ici ?

22 R. C'est pour la raison suivante. Notre service de l'ambassade chargé des

23 Réfugiés, nous avions la possibilité de transmettre le courrier

24 électronique. Notre service de Cryptage, qui envoyait ensuite ces courriers

25 électroniques à notre ministère des Affaires étrangères, et cetera, donc,

26 il se peut qu'il y est là une erreur, peut-être que ce jour-là, j'ai envoyé

27 au ministère des documents qui portaient d'autres dates.

28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que je peux poursuivre, s'il

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1 vous plaît, Maître Karnavas ?

2 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce qui m'intrigue -- ce que je

4 trouve un petit peu, c'est que dans la version en anglais, on fait

5 référence à quelque chose qui aurait été écrit à la main dans l'original,

6 "104425." Or, ça je ne le trouve même pas en la version en B/C/S. En aucun

7 moment, on voit la mention rukabis [phon]. Donc, ça me semble un petit peu

8 étrange. Est-ce que vous avez une explication, ou est-ce que vous avez une

9 explication, Maître Karnavas.

10 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne sais pas si j'ai une explication pour

11 la totalité de cet énigme, mais d'après ce que j'ai compris, le témoin a

12 ses propres archives qu'elle a sous format électronique placées sur une

13 disquette, elle a remis ça au Procureur. Il est possible qu'elle dispose

14 également des copies papier avec ces documents, j'imagine qu'est-ce qui

15 s'est passé à ce moment-là. Ceci soulève la question de savoir si les

16 archives dont elle dispose sont les archives complètes : est-ce que ça fait

17 partie des archives qu'elle a remis à l'ambassadeur parce que ça elle le

18 mentionne dans son rapport.

19 Donc, voilà des explications que nous sommes en droit d'obtenir; est-ce

20 qu'il y a d'autres documents dont elle dispose qu'elle ne nous a pas

21 communiqué, des notes personnelles peut-être ?

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne suis pas dans le même optique

23 que vous, Maître Karnavas. Afin, je comprends bien ce que vous voulez dire,

24 mais il me semble que le traduction disposait d'un original qui était

25 différent de celui que nous avons ici sous les yeux, et ça, je pense qu'il

26 est nécessaire de l'exprimer.

27 M. SCOTT : [interprétation] Je peux tout à fait me renseigner, Monsieur le

28 Juge, mais j'ai une petite idée sur ce qui s'est passée, je ne sais pas si

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1 je peux vous en faire part ou si je dois attendre de recevoir des

2 informations.

3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Attendez d'avoir reçu des

4 informations à ce sujet.

5 M. SCOTT : [interprétation] Certains de ces documents nous ont été remis

6 par un autre témoin, et souvent, quand un enquêteur reçoit des documents de

7 la part d'un témoin sur le terrain, il met des notes -- il appose des notes

8 sur ce document. Il indique, par exemple, quel jour où on lui a remis le

9 document. Je n'ai pas les enveloppes ici sous les yeux, mais j'imagine,

10 enfin - c'est une supposition de ma part - je répète que le mot "suspect,"

11 le numéro que vous avez indiqué parce qu'il est écrit à la main, ça rentre

12 peut-être dans ce cadre mais je vais me renseigner. C'est tout ce que je

13 peux dire pour l'instant.

14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Je pense que le témoin ne

15 conteste nullement que ce que les documents que nous avons ici

16 correspondent aux originaux. Cela nous suffit.

17 M. SCOTT : [interprétation] Tout à fait. Personne ne le conteste. A notre

18 époque, de document électronique; notre époque informatique c'est un petit

19 peu inhabituel de voir quelqu'un imprimé des documents à partir d'une

20 disquette. Mais, je pense que le témoin peut nous confirmer qu'il s'agit

21 bien des documents en question.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur Scott, parce que cette histoire

23 de document a fait perdre la teneur de la réponse qu'elle avait donnée tout

24 à l'heure sur la question des deux directives ou de la réponse que lui a

25 donnée M. Rebic.

26 D'après ce que vous nous avez dit, M. Rebic, que vous avez interrogé

27 sur la lettre, vous aurait dit que sa lettre, en fait, ne concernait que

28 des Croates en Bosnie-Herzégovine qui en quelque sorte faisaient partie du

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1 lot des réfugiés. M. Rebic estimait qu'il passait trop de vacances et qu'il

2 fallait qu'il revienne chez eux. Alors, quand vous avez dit ça, ça voulait

3 dire que cette lettre, qui a quand même une portée générale, pour M. Rebic

4 de viser uniquement les Croates et non pas les Musulmans; est-ce bien ce

5 que vous avez voulu dire ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement cela. En fait, cette directive

7 était de nature générale, elle devait s'appliquer à tous les citoyens de la

8 Bosnie-Herzégovine, mais son explication orale disait qu'elle ne visait que

9 les Croates.

10 M. KOVACIC : [interprétation] Une question s'impose, Mme le Témoin, a-t-

11 elle vu cette décision, cette directive ? Il sera bien de le savoir.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Ces deux textes -- ces deux directives, vous les

13 avez vus ? M. Rebic vous les a donnés ? Vous en avez eu connaissance, ou

14 bien, vous n'en avez jamais eu connaissance ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais de lignes de ces directives. M.

16 Adalbert Rebic ne me l'a pas donné, mais je l'ai eu en copie dans nos

17 bureaux régionaux et c'est suite à la lecture -- l'examen de cette

18 directive que j'ai demandé de venir avec M. Rebic.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : D'ailleurs, dans la lettre, M. Rebic, ce dernier

20 paragraphe semble indiquer qu'il avait envoyé les deux directives à votre

21 ambassade. Pour votre information, regardez le dernier paragraphe.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Aujourd'hui, de vous référer à la note de bas

23 de page où j'explique que j'ai examiné le protocole, le registre du

24 courrier reçu par l'ambassade et que j'ai établi, suite à cet examen, que

25 ces directives n'étaient jamais parvenues jusqu'à l'ambassade.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Scott.

27 M. SCOTT : [interprétation]

28 Q. Quelques questions de suivi pour revenir à ce que vous avez dit

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1 précédemment. Vous nous avez dit que M. Rebic vous avait expliqué que,

2 selon lui, cette directive était destinée aux Croates de Bosnie qui

3 vivaient sur la cote Dalmate et ils ne pouvaient retourner dans les zones

4 contrôlées par le HVO. Mais, en dépit de ce que M. Rebic vous a dit, à ce

5 moment-là, est-ce que c'était bien la situation des personnes déplacées,

6 des réfugiés d'appartenance ethnique musulmane ? Est-ce que c'était bien

7 leur situation, ou est-ce que c'était ce que vous voyez sur place, ou est-

8 ce que ça correspondait au rapport que vous receviez ?

9 R. En tant que citoyen de la BiH croate, il s'est adressé à moi pour

10 demander de l'aide, d'autres en revanche, beaucoup de musulmans, citoyens

11 de la BiH, m'ont demandé de les aider enfin de rentrer chez eux, également

12 des personnes dont le statut de réfugié ne pouvait être --

13 Q. Bien, j'aimerais maintenant d'examiner la pièce 7 022. La pièce 7 022

14 est une lettre d'un dénommé Martin Raguz à l'intention de M. Rebic, en date

15 du 3 décembre 1993. M. Rebic -- excusez-moi, je reviens quelque chose que

16 vous nous avez dit précédemment. Il me semble qu'il y a quelques instants

17 vous nous avez expliqué que les explications relatives aux zones sûres en

18 Bosnie-Herzégovine, ces informations donc venaient de quelqu'un qui se

19 trouvait en Herceg-Bosna; qu'en saviez-vous ?

20 R. Est-ce que vous pourriez répéter votre question, s'il vous plaît ?

21 Q. Oui. Je vais vous poser la question de manière suivante : après avoir

22 rencontré M. Rebic, avoir évoqué la question des mesures prises, est-ce que

23 vous avez eu des nouvelles de M. Rebic au sujet des contacts qu'il aurait

24 eu avec les représentants du HVO à Herceg-Bosna ?

25 R. Je n'avais aucune information relative aux négociations, conversations,

26 contacts ou autre chose entre M. Rebic et la Communauté croate du HV. J'y

27 reviendrai un peu plus tard, mais auparavant, avant d'examiner cette pièce

28 à conviction-là, examinons la pièce numéro 10 062.

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1 R. [aucune interprétation]

2 M. SCOTT : [interprétation] Juge Trechsel, ma réaction à vos réponses, --

3 en réponse à votre intervention, ce document, je vous précise, rassemble

4 toute une série de lettres échangées et traduites. Vous constaterez en

5 regardant les originaux en B/C/S que nombre de ces documents ont été

6 imprimés, réimprimés.

7 Q. Une question, Madame le Témoin : est-il exact, si vous regardez la

8 version en B/C/S de ce document, qu'un certain nombre de ces lettres ont

9 été imprimées comme faisant partie d'un seul

10 fichier ?

11 R. C'est ainsi que je comprends -- que j'interprète ces documents, en fait

12 -- ou plutôt, leur forme parce qu'ils étaient sous forme électronique.

13 Q. Dans cette série de lettres, j'aimerais que nous examinions la pièce

14 qui porte la date en anglais, 19 février 1994. Ça se trouve à la quatrième

15 page de la série de documents en anglais. En B/C/S, là j'aurais besoin de

16 votre aide. Mais en B/C/S, donc, essayez de trouver la page qui correspond

17 à cette lettre qui porte cette date du 19 février 1994, une lettre adressée

18 à M. Rebic. Ça commence par les mots suivants : "M. Rebic," et cetera.

19 R. Mais, j'ai trouvé ce courrier et la date qui se trouve en dessus de ce

20 courrier, le 6 février 1994; c'est bien ce courrier-là qui vous intéresse ?

21 Q. Un instant, je vais vérifier. Toutes mes excuses, c'est moi qui me

22 trompais, autant pour moi. J'aimerais donc que nous examinions la page qui

23 porte la date du 14 février 1994. Ça devrait être le deuxième document.

24 Dans cette série, nous avons d'abord une lettre du 6 février : "Cher M.

25 Rebic," et cetera. Ensuite, nous avons une lettre du 14 février 1994 avec

26 en haut la mention suivante : "Cher Mme Turkovic." Est-ce que vous avez

27 trouvé ce passage ?

28 R. Oui.

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1 Q. Je vous ai interrogé sur ce point il y a quelques instants, c'est

2 pourquoi je vous demande de regarder ce document. M. Rebic écrit à

3 l'ambassadeur, Mme Turkovic - c'était l'ambassadeur à l'époque - et il

4 explique ce qu'il en est de ces zones sûres. Certains utilisaient ce terme

5 car c'étaient des "zones sûres," et il dit : "Mme Turkovic, il convient que

6 je vous informe que le bureau du gouvernement de la République de Croatie

7 chargé des Personnes expulsées et des Réfugiées n'est pas en mesure

8 d'identifier les zones de crise dans la République voisine de Bosnie-

9 Herzégovine. Pour cette raison, nous avons agi conformément aux

10 instructions délivrées par le bureau de l'Herceg-Bosna, dans le bureau de

11 la République de l'Herceg-Bosna chargé des Personnes et des Réfugiés qui

12 sont joints au présent document.

13 "Sur la base de ces instructions, les instructions délivrées par ce bureau,

14 la totalité de la région se trouvant en dessous de la Neretva et les zones

15 suivantes en Herzégovine de l'ouest sont déclarées comme étant des zones

16 sûres :

17 "Livno, Duvno, Grude, Ljubuski, Capljina, Posusje, Siroki, Brijeg,

18 Pocitelj, Medjugorje," et cetera.

19 "En conséquence, le statut de réfugiés n'est plus reconnu ou bien a été

20 révoqué…"

21 Pouvez-vous me confirmer qu'il s'agit bien d'une lettre que vous avez reçue

22 à l'ambassade de la part de M. Rebic et qui explique dans quelles

23 circonstances ce statut a été révoqué ?

24 R. Oui, c'est exact. Il s'agit bien de cette lettre-là. Il est également

25 exact ce que nous donne ici dans cette lettre, l'information expliquant les

26 raisons pour lesquelles cette décision avait été prise.

27 Q. Pour revenir à la réunion dont vous avez parlé précédemment avec M.

28 Rebic, est-ce que vous avez eu des discussions pour savoir s'il s'agissait

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1 de zones des Croates ou les Musulmans pouvaient retourner en toute

2 sécurité, ou soit les Croates, soit les Musulmans ou bien les deux ?

3 M. KARNAVAS : [interprétation] Une petite précision. Oui, une précision,

4 quand a eu lieu la première réunion ? Parce que dans ce document, on voit

5 la date de février. Etant donné que la situation évoluait très rapidement,

6 je pense que la réunion a eu lieu l'année précédente. Mais peut-être

7 pourrait-on nous le préciser ?

8 M. SCOTT : [interprétation] Je vous renvoie aux déclarations qu'a faites

9 précédemment le témoin dans ce prétoire. Le premier document que nous avons

10 examiné c'était le document 10059 -- ou plutôt, 10009 qui était en date du

11 31 octobre 1993.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Donc, on pose maintenant une question au

13 témoin au sujet de la situation telle qu'elle se présentait au mois de

14 février. Si elle répond à partir d'une réunion qui a eu lieu plusieurs mois

15 auparavant, étant donné le caractère extrêmement évolutif de la situation,

16 je ne pense pas que ceci soit acceptable, à moins qu'il le lui demande si

17 elle a eu une réunion qui portait sur cette période-là. Voilà où je veux en

18 venir. Maintenant, que nous avons précisé la chose, si elle veut lancer des

19 hypothèses, ça, tout à fait, on peut l'accepter à la limite, mais il n'y a

20 aucun motif -- aucune base qui nous a été donnée pour lui permettre

21 véritablement de répondre à cette question, parce que la réunion en

22 question a eu lieu des mois auparavant.

23 M. SCOTT : [interprétation] Je pensais que lorsqu'il s'était préparé, le

24 conseil de la Défense avait lu la déclaration du témoin. Au paragraphe 100,

25 le témoin évoque cette question et elle dit, je le répète : "A partir de

26 septembre 1993 jusqu'à la fin de ma mission, le 31 août 1994, M. Rebic a

27 pris contact avec nous afin d'obtenir une liste des zones sûres en Bosnie-

28 Herzégovine où l'on pourrait renvoyer, rapatrier les réfugiés à partir de

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1 la Croatie vers la Bosnie-Herzégovine."

2 C'était un processus continu -- d'autres documents que nous avons examinés,

3 des documents que nous allons examiner maintenant, il y a eu toute une

4 série de contacts de 1993 à 1994. C'était une question qui était

5 constamment à l'ordre du jour.

6 M. KARNAVAS : [interprétation] Je sais bien qu'ils avaient des contacts

7 constants. Mais ici, on a une question qui porte sur une réunion. C'est

8 différent des contacts de communication.

9 Si M. Scott vous avait donné la base de sa question, s'il avait dit :

10 est-ce que vous avez rencontré M. Rebic vers cette période au sujet de

11 cette question particulière ? Si le témoin a répondu oui, alors, à ce

12 moment-là, question : qu'est-ce que M. Rebic vous a dit à ce sujet, et

13 cetera, et cetera ? Voilà où je veux en venir. Le fait qu'ils aient eus ou

14 non des contacts, ce n'est pas ce qui nous intéresse ici. La question qui a

15 été posée avait trait à une réunion précise. C'est ça qui fait que je me

16 lève.

17 M. SCOTT : [interprétation] Mais, c'est Me Karnavas parce qu'il dit

18 qu'il faut qu'il y ait une réunion. Pourquoi est-ce qu'ils ne se sont tout

19 simplement pas parler au téléphone ou eu des contacts écrits ? Où est-ce

20 que dans le Règlement de procédure et de preuve, on dit que pour qu'il y

21 ait contact entre les personnes, il faut qu'il y ait une réunion. Enfin,

22 nous perdons du temps ici. Il y a eu un échange de lettre, un échange de

23 correspondance, les documents ont été fournis aux Juges de la Chambre. Tout

24 le monde ici peut les lire. Le témoin a donné des explications détaillées

25 au sujet de cette correspondance.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : -- secondes, Madame. On était sur une lettre du mois

27 de février 1994. Est-ce qu'avant cette lettre, il y a eu une réunion avec

28 M. Rebic, ou bien, ce n'était que des contacts téléphoniques ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai discuté de cela lors de la réunion, donc,

2 nous avons déjà parlé ici et nous avons également vu un document et lors de

3 cette réunion M. Rebic a déclaré que cette décision était cynique parce

4 qu'elle s'appliquait aux citoyens musulmans.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : -- à la lettre du mois de février, la réunion avait

6 eu lieu plusieurs mois auparavant lorsque M. Rebic avait été cynique, ça

7 remontait à plusieurs mois avant.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] La situation est restée inchangée, mais après

9 la réunion avec M. Rebic, il y a eu des périodes pendant lesquelles le

10 statut de réfugiés des Musulmans de Bosnie a été prorogé, puis ensuite, on

11 ne le faisait plus et ça changeait tout donc.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, il est 10 heures 30. On est obligé de

13 faire la pause. Nous faisons une pause de 20 minutes.

14 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

15 --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

17 Monsieur Scott, vous avez la parole.

18 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

19 Q. Madame, afin de gagner du temps, nous allons passer à la pièce

20 suivante, à moins que les Juges aient des questions à vous poser à propos

21 des sujets que nous avions abordés avant la pause.

22 Donc, dans cette série -- dans cet échange de lettres, dans ces contacts,

23 ces contacts à propos de ces sujets, passons maintenant donc à la pièce

24 8060.

25 J'espère que vous aurez le document sous les yeux; pourriez-vous,

26 s'il vous plaît, nous dire de quoi il s'agit ? Comment cela s'intègre à

27 toute cette série de lettres et de contacts entre l'ambassade de Bosnie et

28 de Zagreb à ce sujet ?

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1 R. Les instructions de la part du gouvernement de la République de Croatie

2 et son Département chargé des Personnes expulsées et des Réfugiés

3 suppriment un statut de réfugié à l'intention des personnes originaires de

4 Bosnie-Herzégovine qui vivaient à Mostar. Cela supprime ce statut à

5 l'intention de tous les réfugiés originaires de Mostar qui sur le

6 territoire de la République de Croatie bénéficient de ce statut, en tant

7 que statut reconnu et cette fois-ci, le gouvernement de la République de

8 Croatie affirme que le retour dans la ville de Mostar est supprimé et que

9 cela ne sera possible qu'à compter du 1er avril 1994. Cela s'adresse à tous

10 ceux qui sont originaires de Mostar et qui possèdent un carton individuel

11 disant qu'ils sont des réfugiés. Cela n'a rien à voir avec le sexe, l'âge,

12 le type d'hébergement que ces réfugiés sont censés avoir ou dont ils sont

13 censés bénéficier sur le territoire de la République de Croatie.

14 Q. Passons maintenant à la pièce 10 063.

15 R. Je l'ai retrouvée.

16 Q. Pouvez-vous nous confirmer qu'il s'agit d'une lettre envoyée par

17 l'ambassadeur Turkovic au ministre des Affaires étrangères à Sarajevo à

18 propos -- donc, c'est je suis désolé, c'est le 2 avril 1994, c'est bien

19 cela ? Donc, après avoir fait référence à la lettre de M. Rebic, c'est

20 passé à la deuxième page, donc, en version anglaise la deuxième page en

21 B/C/S il s'agit en fait du paragraphe juste en dessous de la lettre citée

22 en référence. Vous avez donc vu ce qui est écrit après ça.

23 Donc, voici ma question : donc, il est écrit la chose suivante : "La

24 directive a été diffusée à tous les bureaux régionaux et envoyée aux

25 centres sociaux, et ils ont commence à exécuter l'ordre."

26 Donc, est-ce que cela corrobore -- est-ce que vraiment la version --

27 l'information que vous aviez reçue à l'époque, est-ce que cela corrobore

28 bien cela ?

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1 R. Exact.

2 Q. Ensuite, dans la lettre -- enfin, j'aimerais savoir si c'est vous qui

3 avez rédigé cette lettre pour la faire signer par l'ambassadeur. Ce n'est

4 pas vraiment essentiel, mais j'aimerais le savoir.

5 R. Oui. Puisque, mis à part le fait que je connais la teneur de ce

6 courrier, il y a un chiffre, et un sigle pour ce qui est du département de

7 ces -- Département chargé des Réfugiés et des Personnes expulsées, c'est ce

8 code, 04, qui est ici.

9 Q. Très bien. Donc, dans la lettre, vous poursuivez, je ne vais pas lire

10 tous les paragraphes, afin de gagner du temps, mais vous rendez compte d'un

11 certain nombre de problèmes que ceci provoque pour les réfugiés musulmans

12 en Croatie.

13 R. Exact.

14 Q. Donc, avant de quitter ce document, pourriez-vous -- pourrions-nous

15 passer aux paragraphes numérotés dans -- qui sont plus loin dans le

16 document. Donc, il y a -- j'aimerais que l'on passe à la partie du document

17 qui commence par la rubrique "Note," N-o-t-e, et donc, il y a des

18 paragraphes numérotés ensuite, et j'aimerais que l'on passe au numéro 5 de

19 cette série. A la fin de ce paragraphe, il est écrit, et je cite : "L'une

20 des offi -- l'une des explications écrites officielles était que les

21 statuts de réfugiés étaient révoqués suite à une instruction donnée par la

22 République Croate d'Herceg-Bosna." Donc, pour revenir à ce dont nous

23 parlions ce matin, vous souvenez-vous avoir reçu d'autres informations de

24 la part de l'Herceg-Bosna à ce sujet ?

25 R. A ce moment-ci, je ne sais vraiment pas que répondre. Peut-être n'ai-je

26 pas bien compris votre question.

27 Q. Alors, je vous ai demandé si vous vous souveniez d'avoir obtenu des

28 informations supplémentaires à ce propos, mais ce n'est pas grave, nous

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1 allons passer à autre chose.

2 Passons donc --

3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il y a un passage qui me semble

4 intrigant. Au paragraphe 5, environ au milieu du paragraphe, il est écrit

5 le suivant : "L'une des justifications écrites officielles était que le

6 statut de réfugié avait été refusé sur la base de consignes émises par le -

7 - par la 'République croate d'Herceg-Bosna'."

8 Donc, Témoin, pourriez-vous nous expliquer à qui ces instructions avaient

9 été envoyées ? C'était des instructions qui avaient été données à qui, par

10 donc les autorités du -- de l'Herceg-Bosna ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai cru comprendre de ce

12 courrier de M. Rebic communiqué à l'ambassade et adressé à

13 Mme Turkovic. Nous en avons parlé tout à l'heure, avant la pause. A

14 l'occasion d'une communication directe réalisée avec M. Rebic, j'ai eu

15 l'occasion de lui rappeler du fait que j'étais sûre du fait qu'aucune

16 directive de la part du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine n'était reçue

17 par lui à titre officiel et qu'il ne pourrait pas se conformer à chose

18 pareille.

19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous n'avez pas vraiment répondu à

20 ma question. C'était des consignes -- des instructions qui étaient données

21 à qui, exactement ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Aux bureaux régionaux de ce Département chargé

23 des Personnes expulsées et des Réfugiés de Zagreb. Il y avait des bureaux

24 locaux à Split et dans toutes les villes d'importance en République de

25 Croatie.

26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais c'est quand même un peu

27 étrange. Comment pouvez-vous expliquer qu'une autorité, donc, une

28 administration, une autorité, donc, de la République d'Herceg-Bosna donne

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1 des instructions à des autorités croates qui sont dans une république

2 différente, après tout ? Cela ne vous a pas frappée ? Est-ce que vous en

3 avez parlé à qui que ce soit ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'ici, la chose n'est pas bien

5 comprise. Ce bureau chargé des personnes expulsées et des réfugiés du

6 gouvernement de la République de Croatie a donné des instructions à ses

7 bureaux locaux, ou régionaux, partant d'un décret émanant du gouvernement

8 du HZ HB. Ils se sont donc décrétés à ce décret à eux.

9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

10 Maître Karnavas.

11 M. KARNAVAS : [interprétation] Donc, Messieurs les Juges, vous avez posé

12 une question, mais le témoin n'y a pas répondu. Des instructions

13 officielles écrites, mais écrites par qui ? Donc, on ne nous a pas donné du

14 tout d'explications, qui l'a écrit. Elle nous parle d'instructions, mais

15 qui ont donné ces instructions et où est cette instruction ? Elle faisait

16 partie quand même d'une ambassade, donc, elle aurait dû avoir cette

17 instruction sous la main, cette consigne. Quelqu'un a donné des

18 instructions, mais j'aimerais savoir si c'était vraiment la vérité ou si

19 c'était juste plutôt l'embellissement de la vérité.

20 M. SCOTT : [interprétation] Absolument pas, absolument pas. Je croyais que

21 c'était clair. Je pensais que vous alliez pouvoir passer rapidement, mais

22 nous allons devoir quand même reprendre ce qui a été dit avant la pause,

23 maintenant, puisque avant la pause, il nous a été dit que M. Rebic émettait

24 des instructions en tant que directeur de l'ODPR croate aux bureaux sur le

25 terrain de ces mêmes services, ainsi qu'aux centres sociaux. Le témoin nous

26 en a parlé ce matin, et on a vu aussi des pièces qui en parlaient. Suite à

27 cela, il y a eu un échange de lettres, de -- et de contacts, un échange de

28 contacts, aussi. Puis, des questions posées par le témoin, peut-être aussi

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1 Mme Turkovic était-elle impliquée - et M. Rebic - dans cette série de

2 correspondance, a indiqué qu'il faisait cela sur la base d'information

3 reçue d'Herceg-Bosna. On a regardé tout cela, et c'est ainsi que s'est

4 déroulé. Ce n'était pas des instructions qui avaient été envoyées à la

5 République de Bosnie-Herzégovine, mais ces instructions qui venaient de

6 l'Herceg-Bosna à l'intention de la République de Croatie. Je crois qu'il y

7 a des choses qui sont un peu embrouillées maintenant, il faut peut-être en

8 revenir aux documents.

9 Mais si vous regardez la pièce 10062, qui commence donc par une lettre en

10 date du 14 février 1994, donc, dans cette lettre, M. Rebic -- il s'agit

11 donc de la troisième page de la pièce 10062 que nous avons déjà étudiée ce

12 matin, donc là, M. Rebic dit : "En nous basant sur les consignes envoyées

13 par le bureau -- ledit bureau," et, bon, voilà ce qu'il dit : "Chère Mme

14 Turkovic, ambassadeur de la République de BiH, je dois vous dire que -- je

15 dois vous informer donc que le bureau de République de Croatie en charge

16 des Personnes déplacées et des Réfugiés, donc," et cetera, et cetera,

17 "donc, pour ces raisons, nous devons suivre les consignes émises par le

18 bureau de la République Croate d'Herceg-Bosna concernant les personnes

19 déplacées et les réfugiés. En se basant sur ces consignes données par ledit

20 bureau," et cetera, et cetera. Donc, c'est bien la lettre de

21 M. Rebic qui a -- où il y a des informations et des consignes.

22 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, j'ai une objection. Quand même, il y a

23 une différence entre les instructions et les consignes parce qu'il y a une

24 différence entre d'un côté des conseils, et d'un autre côté des consignes.

25 Donc, si ici il s'agit de consignes -- d'instructions et non pas de

26 consignes, d'accord, mais, sinon, j'aimerais que l'on me fournisse quand

27 même ces instructions -- ces consignes, si ce sont des consignes dont on

28 parlait et non pas de conseil.

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1 M. SCOTT : [interprétation]

2 Q. Nous pourrons poursuivre sur le même sujet, donc, la pièce 10062,

3 puisqu'il s'agit d'une question qui a été posée par le Juge Trechsel. Je

4 pensais en avoir fini avec ce document, mais puisqu'il y a des questions

5 des Juges qui demandent que l'on passe plus de temps, j'espère qu'ensuite,

6 on me donnera un petit peu de souplesse, on me donnera un petit peu de

7 temps supplémentaire. Donc, passons au point suivant maintenant en date du

8 19 février 1994, s'il vous plaît. Il s'agit d'une lettre émanant de

9 l'ambassadeur Turkovic, réponse à un courrier de M. Rebic en date du 19

10 février. J'aimerais que l'on voit la quatrième page en anglais : "Cher M.

11 Rebic, je vous remercie de votre lettre du 14 février 1994," donc, on voit

12 maintenant qu'il s'agit bien d'une lettre en réponse à un autre courrier

13 envoyé le

14 14 février 1994. Donc, cette lettre nous oblige à revoir notre

15 correspondance précédente. Donc, dans cette lettre, passons à la deuxième

16 page de la lettre, donc, numéro 5 de la version anglaise et pour vous

17 aider, Madame, je pense qu'en B/C/S, cela se trouvera à la page -- enfin,

18 retournons au paragraphe 6 de la lettre.

19 R. Je l'ai sous les yeux, oui.

20 Q. L'ambassadeur nous dit : "Dear M. Rebic --" dans votre lettre donc du

21 14 février 1994, vous dites que : "Les réfugiés de la République de Bosnie-

22 Herzégovine en ces jours dans la République de Croatie sont traités selon

23 les conseils donnés par le bureau de la soi-disant République croate

24 d'Herceg-Bosna en charge des Personnes déplacées et des Réfugiés." Ces

25 conseils sont joints à la lettre. Cela dit : "L'ambassade ne les a pas

26 reçus." Ensuite, on poursuit pour dire : "Suite pour agir en accord avec

27 les conseils," et cetera, et cetera.

28 Pour reprendre la question soulevée par le Juge Trechsel il y a

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1 quelques minutes, si on peut passer à la page 6 de la version anglaise, et

2 si vous pouviez trouver donc la pièce, la lettre de l'ambassadeur Turkovic

3 qui commence à quelques paragraphes de là, deux paragraphes plus loin que

4 ce que nous regardions auparavant, qui commence par : "Etant donné que la

5 République de Bosnie-Herzégovine

6 --" Vous l'avez trouvé ?

7 R. J'ai cela sous les yeux, oui.

8 Q. Donc, l'ambassadeur Turkovic répond : "Etant donné que la République de

9 Bosnie-Herzégovine est le seul Etat reconnu internationalement, toute

10 information venant d'une institution de la soi-disant République croate

11 d'Herceg-Bosna ne peut pas servir de fondement pour donner des conseils à

12 quoi que ce soit."

13 C'est quand même ce qui est écrit dans cette lettre ?

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame, pour gagner du temps, parce qu'on ne va pas

15 y passer la journée, ces fameuses instructions ou directives ou conseils,

16 votre ambassade ne les a jamais reçus. C'est ce que l'ambassadeur indique.

17 Il ne les avait jamais vus.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons jamais reçu ces instructions

19 émanant du HZ HB. Nous avons reçu le courrier de la part de M. Rebic, donc,

20 il se réfère à ces lignes directrices.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, ces instructions personne ne les a

22 jamais vues ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'ambassade, non.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y, Monsieur Scott.

25 M. SCOTT : [interprétation]

26 Q. Bien. Poursuivons avec cet échange de lettre. Passons maintenant, s'il

27 vous plaît --

28 M. SCOTT : [interprétation] J'ai besoin d'une petite minute, s'il vous

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1 plaît. Je suis désolé. Je ne savais plus très bien où j'en étais.

2 Q. Donc, maintenant passons à la pièce 10064, s'il vous plaît.

3 R. J'ai ce document.

4 Q. J'aimerais que vous me confirmiez qu'il s'agit d'une lettre envoyée par

5 l'ambassadeur Turkovic à certaines organisations internationales portant

6 exactement sur le même sujet; c'est bien

7 cela ?

8 R. Exact.

9 Q. Passons maintenant à la pièce 8195.

10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais sur ce document

11 que nous avions à l'écran, sur la première page au premier paragraphe --

12 donc, c'est le deuxième paragraphe. Il est écrit : "La directive semble

13 avoir été émise le 3 avril 1994." Donc, est-ce correct étant donné que

14 cette lettre quand même date du 6 avril de la même année ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons indiqué que cette instruction avait

16 semble-t-il été datée du 30 avril 1994, et que cela a commencé à être mis

17 en œuvre à partir du 1er avril 1994.

18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui. Mais avec tout le respect que

19 je vous dois, vous écrivez quand même presque -- vous écrivez -- la lettre

20 date -- est en date de trois semaines plus tôt, donc, je ne comprends pas.

21 A-t-il une copie ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose qu'il s'agit d'une erreur de

23 frappe, mais laissez-moi lire un peu plus pour -- avant que de commenter.

24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. MURPHY : [interprétation] Il doit y avoir un autre coquille au moins

26 étant donné si ces instructions ont été faites le 30 avril. Elles devaient

27 être mises en œuvre à partir du 1er avril, donc, peut-être voudriez-vous

28 poser une question à ce propos, Monsieur le Juge Trechsel ?

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui. Merci. Certes. Mais je ne pense

2 pas que ce soit nécessaire. Je pense que c'est évident, ça aurait dû être -

3 - c'est une erreur au niveau du mois visiblement. Ça doit être en mars.

4 Vous pouvez poursuivre.

5 M. SCOTT : [interprétation] Merci. Oui, j'essaie de regarder un petit peu

6 ce qu'il en était. Il me semblait qu'il y avait un autre document

7 précédemment qui portait sur la même chose.

8 M. LE JUGE MINDUA : Oui. En principe, parce que le document P8160, il dit

9 bien que les instructions étaient données le 30 mars, si je comprends bien,

10 le 30 mars 1994, pour commencer à être appliquées le 1er avril.

11 M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Mindua. En

12 effet, c'est exactement cela à ce que je voulais faire allusion, donc,

13 c'était le 30 mars et non pas le 30 avril et la date d'application est le

14 1er avril 1994. Donc, on a bel et bien regardé ce document précédemment.

15 Maintenant, nous allons pouvoir passer au document 8195. C'est celui que

16 nous avions regardé avant toutes ces questions.

17 Donc, Madame, je vous ai posé une question ce matin. Il s'agit donc d'une

18 situation qui a perduré pendant plusieurs mois. Ceci a noté abondamment

19 d'ailleurs. Donc, il y a différents courriers, explications entre M. Rebic

20 et votre ambassade. Avez-vous continué à recevoir des rapports venant du

21 terrain portant sur les Musulmans en Croatie qui étaient harcelés dont le

22 statut de réfugiés a été révoqué -- enfin, qui se trouvaient dans des

23 situations très difficiles ?

24 R. C'est précisément ce qui fait l'objet ou ce qui constitue la

25 problématique de ce courrier émanant du Département chargé des Réfugiés, et

26 signé par l'ambassadrice Turkovic et daté du 14 avril 1994, où on y

27 présente toute une série de détails concernant les problèmes auxquels

28 doivent faire face les réfugiés.

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1 Q. Regardons le troisième paragraphe au milieu de cette lettre. Il est

2 écrit : "Néanmoins, nous avons été informés par des réfugiés venant de

3 Mostar qui séjournent à l'heure actuelle à Split et Sibenik dans la zone de

4 Split et Sibenik que leurs cartes de réfugiés sont révoquées et qu'ils ne

5 reçoivent pas les coupons de nourriture -- ils ne reçoivent plus les

6 coupons de nourriture, ce qui les obligent à retourner à Mostar, voire

7 partir dans un pays tiers."

8 Est-ce que ceci corrobore les informations que recevait votre ambassade à

9 l'époque ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Passons maintenant, s'il vous plaît, au document 10066.

12 R. J'ai retrouvé le document.

13 Q. Il s'agit encore d'une lettre émanant de l'ambassadrice Turkovic en

14 date du 16 avril 1994. Au premier paragraphe, il est écrit : "Malgré

15 l'accord -- malgré l'accord du 11 avril 1994," est-ce que vous vous

16 souvenez qu'il y a bien eu un accord ? Si oui, pouvez-vous nous dire de

17 quoi il s'agissait ?

18 R. Il s'agissait d'un accord qui a dû être conclu lors de la réunion que

19 je mentionne dans ce courrier. Mais je ne peux pas vous dire comme ça de

20 quelle réunion, il s'agit exactement. Il faudrait que je relise d'abord ce

21 document. Il est évident qu'il s'agit là d'une réunion officielle après

22 laquelle nous avons fait une déclaration aux médias au sujet de

23 l'implémentation de cette directive portant sur la révocation du statut de

24 réfugiés pour les habitants de Mostar.

25 Nous avançons dans ce document. Que cela ne se fait pas en accord

26 avec ou conformément à cet accord et nous informons également le professeur

27 Rebic que les citoyens de l'ABiH continuent à prendre contact avec nous et

28 ont toujours des problèmes relatifs à leur statut. On mentionne que vous

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1 avec de nouveau pris contact avec

2 M. Rebic et que nous lui avons demandé de respecter ce qui a été décidé

3 lors de la réunion du 11 avril. Nous donnons ici un exemple concret en

4 mentionnant des noms des citoyens de la Bosnie-Herzégovine. Il s'agit de

5 Mme Emina Novo, Mehmed Pasalic, des réfugiés de Mostar. On explique les

6 problèmes auxquels les deux étaient confrontés, problèmes causés par la

7 police croate. On peut y lire : ce problème a été causé par la police

8 croate. Il n'avait pas en leur possession des passeports ni de cartes

9 d'identité délivrées par la République croate d'Herceg-Bosna. Nous avons

10 également, dans cette lettre, mentionné un document, c'est-à-dire la

11 déclaration de la ODPR à Split. La teneur de ce document a été citée en

12 intégralité pour l'information du ministère des Affaires étrangères. Je ne

13 m'en souviens plus d'ailleurs à qui cela a été adressé exactement. Si, si,

14 c'est bien ça, au ministère des Affaires étrangères de la Bosnie-

15 Herzégovine. C'est ça.

16 Q. Au ministère des Affaires étrangères. Merci beaucoup.

17 J'aimerais maintenant que nous passions aux deux derniers thèmes que je

18 vais aborder pendant mon interrogatoire principal et pour ce faire je

19 souhaiterais vous demander que vous référiez au paragraphe 101 -- plutôt,

20 109 -- 109, de votre déclaration écrite. Ici, vous parlez de communications

21 ou de contacts avec M. Tadic au sujet du départ de Croates de Bosnie à

22 partir de la zone de Vares et Kakanj.

23 Ce M. Tadic c'est bien celui dont vous nous avez parlé quand vous avez

24 parlé du groupe de travail hier ?

25 R. Oui. Oui, je ne connaissais qu'un seul Darinko Tadic.

26 Q. S'agissant de Kakanj et Vares, est-ce que cette conversation vous

27 l'avez eue avec M. Tadic une seule fois, ou est-ce que cette conversation

28 s'est reproduite plusieurs fois ?

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1 R. Cette conversation s'est produite plusieurs fois. Nous avons très

2 régulièrement discuté de ce sujet à chaque rencontre.

3 Q. Lors de ces réunions qui mettaient ce thème sur le tapis ?

4 R. C'était toujours à l'initiative de M. Darinko Tadic.

5 Q. Vous souvenez-vous de la réponse de vous-même et de votre gouvernement

6 à la position prise par M. Tadic au sujet du déplacement des Croates de

7 Bosnie hors de la zone de Kakanj et Vares et tout ce qui apparaît au

8 paragraphe 109 ?

9 R. Je me souviens que cette information que j'ai reçue et qui portait sur

10 les problèmes auxquels étaient confrontés les Croates de Bosnie de la

11 région de Kakanj et Vares, donc, cette information je l'avais reçu de M.

12 Tadic et je l'ai fait suivre au ministère des Affaires étrangères de la

13 Bosnie-Herzégovine et au directeur chargé des réfugiés et des personnes

14 expulsées. Selon ces informations, ils vivaient dans des conditions étaient

15 difficiles, ils n'avaient pas suffisamment de couvertures, pas suffisamment

16 de nourriture, il faisait très froid, j'ai fait suivre ces informations et

17 j'ai demandé de l'information en retour ou plutôt la confirmation de cela

18 et si l'information s'avérait exacte alors, je dois demander de nous dire

19 quelles étaient les mesures entreprises afin d'améliorer la situation.

20 Ensuite, j'ai reçu une réponse écrite et une réponse orale et nous disant

21 qu'ils avaient fait tout ce qu'ils pouvaient pour leur permettre de

22 séjourner là-bas dans des conditions acceptables.

23 Q. Ultérieurement, et pour éviter les difficultés, je vais procéder à

24 rebours. Est-ce que vous avez appris que certains Croates, de cette zone de

25 Vares et Kakanj, avaient été réinstallés et que pas en Croatie ?

26 R. Nous avons reçu cette information - et par "nous," je pense à

27 l'ambassade de la Bosnie-Herzégovine - nous l'avons eue par les médias.

28 Nous avons appris qu'un groupe très nombreux était arrivé à Split et qu'il

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1 se trouvait au stade de Poljud. J'étais, à ce moment-là, en train de

2 traiter d'autres questions, mais malgré cela, nous avons décidé que Mme

3 Turkovic, Mme l'ambassadeur, allait se rendre immédiatement à Split pour

4 rencontrer ces Croates de Bosnie pour voir ce qui se passe avec eux, pour

5 voir ce que l'ambassade pouvait réellement faire de les aider. Un peu plus

6 tard, j'étais informé qu'ils étaient hébergés à Pinete. Je ne sais pas

7 combien de temps s'est écoulé entre ces deux événements, mais je me

8 souviens bien que, pour moi, c'était une priorité. Donc, je me suis rendue

9 là-bas dès que j'ai pu, j'ai parlé à ces personnes. J'ai vu que leurs

10 conditions de réfugié étaient relativement bonnes, qu'ils recevaient déjà

11 de l'aide humanitaire, et cetera. Donc, il ne s'agissait d'un problème

12 qu'il fallait résoudre de toute urgence.

13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais vous alliez peut-être poser la

14 question que je m'apprêtais à poser, donc, je vous laisse la parole.

15 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

16 Q. Bien. Au sujet de ce lieu, c'est peut-être la question que voulait vous

17 poser le Juge Trechsel, ou j'aimerais que vous nous disiez tout d'abord si

18 l'endroit où ces personnes étaient hébergées s'appelait Pinete ?

19 R. Oui, je pense que cet endroit s'appelait Pinete, peut-être que j'ai

20 écrit autre chose ou peut-être qu'il y a eu une faute de frappe dans le

21 texte, mais je pense que ça s'appelait Pinete. Pourriez-vous m'indiquer le

22 passage où on mentionne le nom de cet endroit.

23 Q. Je réagis à ce que vous nous avez dit il y a quelques instants. Est-ce

24 que c'était une zone de district, une région de district ?

25 R. Il s'agit d'un endroit appelé Pinete, et non pas Pineta.

26 Q. C'est moi qui ai mal prononcé, excusez-moi.

27 M. SCOTT : [interprétation] Je ne sais pas, Monsieur le Juge, si c'est la

28 question que vous souhaitiez poser.

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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce qui m'a frappé, Madame, c'est

2 qu'à la page 50, ligne 5, me semble-t-il vous dites que vous êtes allée

3 voir, je cite : "Ces Croates de Bosnie expulsés."

4 Est-ce qu'ils avaient été expulsés, effectivement, et par qui ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'utiliserais pas ce terme-là, le

6 terme "expulser." J'ai passé toute la journée avec ces personnes. J'ai

7 parlé avec ces gens et leur ai demandé comment cela s'est fait qu'ils sont

8 arrivés en Croatie depuis la Bosnie. Alors, ils m'ont dit que le HVO les

9 avait informés qu'une attaque de grande envergure se préparait, que les

10 Moudjahiddines allaient arriver, que les Moudjahiddines sont sans merci,

11 qu'ils égorgent dès qu'ils arrivent dans des zones habitées. D'après le

12 conseil du HVO, ils ont accepté de quitter leur foyer et de partir en

13 Croatie.

14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je comprends bien, ils

15 préféraient être réfugiés qu'expulser. En d'autres termes, personne ne les

16 a contraints à partir ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] A mon avis et d'après les informations dont je

18 disposais, ils n'étaient pas expulsés et, moi-même, je leur ai rendu

19 visite. Ils bénéficiaient déjà du statut de réfugié.

20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce qu'on peut savoir exactement quand

22 elle s'est entretenue avec eux ? Je crois que ça, un rapport avec votre

23 question, quand exactement ? Parce qu'elle a dû prendre des notes. Elle a

24 pris des notes quand elle rencontrait les Musulmans, alors, pourquoi elle

25 ne l'aurait-elle pas fait quand elle a rencontré les Croates ?

26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est peut-être une question tout à

27 fait appropriée pour un contre-interrogatoire parce que ce n'est pas tout à

28 fait dans cet esprit que j'ai posé ma question.

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1 M. SCOTT : [interprétation]

2 Q. J'aimerais maintenant Madame, vous demander de regarder la pièce à

3 conviction 5960.

4 R. Je le trouve.

5 Q. Je précise pour le compte rendu d'audience qu'il s'agit d'un rapport

6 qui vient du bureau du SVH chargé des personnes -- du HVO chargé des

7 Personnes déplacées et des Réfugiés. On voit à la fin du document que c'est

8 un document en date du 26 octobre 1993. Les Juges s'en souviennent, bien

9 entendu, de ce qui s'est passé le 23 et le 24 octobre 1993.

10 Si vous regardez ce document, pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit. La

11 question que j'aurais ensuite à vous poser c'est de savoir si des

12 informations, une partie des informations qui figurent dans ce document

13 correspond à ce que vous avez appris au sujet du déplacement des Croates

14 dans cette zone ou à partir de cette zone, et si cela est conforme aux

15 informations qui vous ont été fournies par ces personnes à l'époque suite

16 aux conversations que vous avez eues avec elles ?

17 Mais avant de répondre à ma question, j'aimerais que vous vous penchiez sur

18 ce document, que vous vous familiarisiez avec ce document afin de pouvoir

19 être en mesure de répondre.

20 R. Je peux confirmer que cela correspond à ce que j'avais appris à

21 l'époque s'agissant de ce groupe de Croates de Bosnie qui étaient déjà

22 déplacés en Bosnie, ensuite, transférés vers la Croatie et obtenu en

23 Croatie le statut de réfugié.

24 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 on voit ce document ce n'est pas un document qui a été préparé par cette

26 dame, cela n'a strictement aucun rapport avec elle. Une fois encore, je

27 m'oppose à la manière dont la question a été formulée. On lui a demandé

28 quand, maintenant on lui montre un document qui a été préparé par quelqu'un

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1 d'autre, elle prend tout son temps pour le lire et puis elle nous donne une

2 réponse. Ça ne correspond pas aux règles qui doivent s'appliquer quand on

3 interroge un témoin. On ne peut pas diriger les réponses du témoin de cette

4 façon. Nous lui avons demandé où elle était allée, elle aurait dû avoir des

5 notes, elle aurait dû avoir ses propres documents. Il ne convient pas de

6 lui montrer un document qui a été préparé par quelqu'un d'autre dans un

7 objectif tout différent.

8 M. SCOTT : [interprétation] Je comprends très bien que

9 Me Karnavas n'aime pas ce document, cela le gêne énormément, mais

10 permettez-moi de poursuivre.

11 Ce que je veux dire ici c'est que le témoin dans sa déclaration qui a déjà

12 été versée au dossier --

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Maître Nozica.

14 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, très brièvement, Mme

15 Témoin vient de déclarer qu'elle s'est rendue là-bas au stade de Split pour

16 visiter les réfugiés ou les expulsés - on peut les appeler comme on veut -

17 et quelques jours plus tard, elle avait appris qu'ils étaient transférés à

18 Pinete, attiré l'attention du Procureur.

19 Le deuxième passage en anglais et en B/C/S, où l'on dit qu'il s'agit

20 là des réfugiés qui avaient été transférés par bateau depuis le port de

21 Ploce, donc, il ne s'agit pas là du même groupe de réfugiés au stade.

22 Merci.

23 M. SCOTT : [aucune interprétation]

24 M. STEWART : [interprétation] Je vais laisser M. Scott terminer.

25 M. SCOTT : [interprétation] Permettez-vous d'en terminer ce que j'ai dit

26 auparavant, je ne sais pas pourquoi on m'a interrompu. Me Karnavas pose des

27 questions au sujet des notes, d'une part il n'est exigé que les témoins des

28 notes. Si Me Karnavas n'aime pas les éléments d'information qui sont donnés

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1 par ce témoin, cela ne signifie pas que ces éléments de preuve ne sont pas

2 acceptables et admissibles.

3 Le témoin a dit ce qu'elle savait de la situation, des éléments

4 d'information qui avaient été portés à l'intention de l'ambassade au sujet

5 de ces citoyens de Bosnie-Herzégovine qui avaient été transportés dans un

6 pays étranger. L'ambassade a été informée, elle s'est renseignée,

7 l'ambassade s'est renseignée. Le témoin nous dit que l'ambassadeur Turkovic

8 s'est rendu auprès de ce groupe, une fois qu'elle-même, elle est allée les

9 voir une autre fois. Tout ceci est limpide, cela reflétait dans ce

10 document, et comme l'Accusation l'a fait des centaines au cours des 13

11 derniers mois, il n'est pas nécessaire que le document soit préparé par le

12 témoin. On peut tout à fait demander au témoin de confirmer ce qui figure

13 dans le document est conforme à ce qui s'est passé. C'est quelque chose qui

14 est tout à fait acceptable dans le prétoire et le témoin peut très bien

15 nous dire : Je regarde le document et je vois qu'à la deuxième page en

16 version en anglais, en haut de la page, on parle de Pinete, premier

17 paragraphe, deuxième page, et cetera.

18 On peut ce qui s'est passé, on peut voir ce qui est arrivé à ces gens. On

19 voit que d'abord ces personnes ont été amenées à Stolac. Un convoi organisé

20 a transporté quelques 6 000 Croates de Kakanj et de Zenica qui ont été

21 logés de manière temporaire à Vares. Ce qu'on voit, il comportait environ

22 120 véhicules. Les véhicules se sont mis en colonne et ces personnes ont

23 été transportées vers la République de Croatie.

24 Les autres véhicules ont transporté les personnes déplacées et ont pris la

25 route une demie heure plus tard pour éviter des bouchons à Capljina où se

26 trouvait le principal centre de réception. Des répartitions des personnes

27 déplacées, à Capljina. Ceci est tout à fait conforme aux éléments

28 précédemment fournis par l'Accusation.

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1 Si bien que les conseils de la Défense peuvent présenter tous les arguments

2 qu'ils souhaitent, ils peuvent le faire pendant leur contre-interrogatoire

3 mais le témoin peut tout à fait nous dire oui ça correspond les

4 informations qui m'ont été données par ces personnes quand je leur ai parlé

5 personnellement.

6 Donc, je pense qu'ici on perd énormément de temps avec ce genre

7 d'intervention et que la déclaration du témoin est tout à fait acceptable

8 sur ce point.

9 M. STEWART : [interprétation] Est-ce que je peux faire une objection que je

10 souhaitais faire précédemment. Je souhaite ici soutenir ce qui a été dit

11 par Me Karnavas, et puis, dire que ce genre de questions, page 52 à partir

12 de la ligne 6, c'est un type de questions qui est tout à fait déplaisant --

13 insatisfaisant. Ça s'est déjà passé précédemment. C'est le genre de

14 questions qui se présente de la manière suivante : est-ce que les

15 informations qui figurent dans ce document correspondent, et cetera, et

16 cetera ?

17 Quand on a un document qui est assez consistant et surtout quand c'est un

18 document qui n'a pas été préparé par le témoin, il est dangereux de poser

19 la question de cette manière car les Juges de la Chambre doivent très bien

20 comprendre si on autorise ce genre de questions, ils doivent tout à fait

21 comprendre si le témoin inévitablement est en mesure de dire qu'il y a

22 cohérence entre le document et ce qu'elle sait. Donc, il faut que ce soit

23 précisé.

24 M. SCOTT : [interprétation] On n'en a jamais donné la possibilité puisque

25 ça fait 15 minutes que nous sommes engagés dans une discussion de procédure

26 et je n'ai pas pu poser des questions supplémentaires au témoin. De toute

27 façon, si j'avais posé des questions plus directrices, ça aurait fait

28 l'objet d'objection. Donc, conformément à ce qui s'est toujours passé dans

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1 ce prétoire, j'ai lui simplement demandé à regarder ce document et de dire

2 si elle était d'accord avec ce qui figure là.

3 C'est quelque chose qui s'est passé avec de nombreux témoins au cours des

4 13 derniers mois, on demande simplement au témoin de confirmer s'il y a

5 certains aspects de ce document ou 100% qui confirment à ce qu'elle sait.

6 M. STEWART : [interprétation] Mais ce n'est pas ça. Il faut déterminer

7 quels sont les passages. M. Scott ne pose pas ses questions de manière

8 appropriée, à moins que M. Scott ne pose des questions supplémentaires. Je

9 continue de dire que ce genre de questions n'est pas satisfaisant si on n'a

10 pas auparavant identifié clairement ce dont on parle. Nous ne sommes pas

11 d'accord sur la manière de procéder.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame, j'ai cru comprendre que vous aviez été à

13 Pinete; est-ce que bien le cas ? Dites-moi, oui ou non ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : A Pinete, vous avez rencontré des réfugiés croates,

16 oui ou non ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Ces réfugiés croates venaient-ils de la région de

19 Kakanj ou Zenica ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] De Kakanj et Vares et j'en suis sûre.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, de ce document que nous avons, il est

22 fait état de réfugiés de Kakanj et de Zenica et qui se sont retrouvés à

23 Pinete et même, il est indiqué que M. Boban leur a rendu visite le 22

24 octobre 1993.

25 Alors, poursuivez, Monsieur Scott.

26 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

27 Q. Dernière question de suivi, il y a quelques instants maintenant, il y a

28 plusieurs minutes maintenant, vous avez dit que lorsque vous êtes

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1 entretenue avec ces personnes, ces personnes qui venaient de Vares et qui

2 se trouvaient à cet endroit. Vous avez dit que le HVO leur avait dit,

3 disons, en substance, qu'ils feraient mieux de s'en aller parce que les

4 Moudjahiddines arrivaient. Est-ce que c'est ça ?

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Alaburic, pendant le contre-interrogatoire,

6 vous auriez l'occasion de répondre. Je constate que chaque fois que

7 l'Accusation pose des questions qui peuvent vous gêner, vous intervenez

8 pour mettre des bâtons dans les roues du Procureur. Donc, laissez-le faire

9 parce que, quand ça sera votre tour, s'il fait pareil, vous ne serez pas

10 contente. Alors, que voulez-vous dire ?

11 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je

12 n'ai rien contre les réponses que Mme le Témoin pourrait donner à cette

13 question. La Défense ne rencontre pour expliquer la situation. J'interviens

14 très rarement, mais je pense que dans ce cas précis, il faut attirer

15 l'attention sur le fait que ce document a été créé le 26 octobre 1993,

16 c'est-à-dire huit à dix jours avant la chute de Vares et avant le départ

17 des habitants de Vares -- de la ville de Vares. Cette raison qu'elle évoque

18 Mme le Témoin, c'est quelque chose que nous entendons d'habitude de la part

19 des nos témoins musulmans de Bosnie et c'est là ça serait l'explication

20 avancée par les habitants de Vares au sujet de leur départ. C'est tout.

21 Merci beaucoup.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Scott.

23 M. SCOTT : [interprétation]

24 Q. Madame, la dernière question, la question que je m'apprêtais à vous

25 poser. Quand vous avez parlé à ces Croates de Bosnie qui venaient de Vares,

26 vous leur avez parlé en personne; est-ce que certains d'entre vous vous ont

27 dit qu'ils avaient vu des Moudjahiddines, et c'était simplement quelque

28 chose que leur avait dit les membres du HVO ?

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1 R. Il s'agissait de ceux qu'on leur a dit de la part du HVO, aucun d'entre

2 eux n'a confirmé avoir vu des Moudjahiddines par ses propres yeux.

3 Q. Dernier sujet que je vais aborder avec vous, au paragraphe 112 de votre

4 déclaration, vous parlez d'un convoi humanitaire. Vous dites : "Qu'il avait

5 été intercepté ou stoppé pendant environ sept mois."

6 S'agissant des convois humanitaires, avant de vous poser un certain nombre

7 de questions sur ce point, j'aimerais vous demander de trouver la pièce

8 10049 dans votre classeur. Avez-vous trouvé le document ?

9 R. Oui.

10 Q. J'aimerais vous demander de vous reporter au deuxième paragraphe du

11 document. Je cite : "En raison de la fermeture de la frontière et de la

12 situation qui existe en Bosnie centrale, tous les déplacements vers

13 l'intérieur, tous les déplacements de personnes et de marchandises sont

14 suspendues le 16 avril."

15 Pouvez-vous confirmer à la Chambre la chose ? Pouvez-vous dire si vous,

16 vous-même et l'ambassade, vous travaillez à l'époque et aviez connaissance

17 de ce blocus qui avait été mis en place le

18 16 avril ?

19 R. Je savais personnellement que c'était bloqué -- que la route était

20 bloquée, mais je ne sais pas quelle date c'était exactement.

21 Q. Quand avez-vous commencé à participer aux efforts entrepris pour

22 libérer ce convoi ? Vous dites au paragraphe 72 qu'il y a quelques sept

23 mois qui se sont écoulés. On se trouvait en septembre, à ce moment-là.

24 Donc, est-ce qu'on peut penser que c'était une situation qui existait

25 depuis au mois février ?

26 R. J'ai commencé à traiter ces problèmes après avoir nommé membre d'un

27 groupe de travail qui était censé traiter les problèmes liés au statut de

28 réfugiés et l'aide humanitaire après l'accord passé en MM. Izetbegovic et

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1 Tudjman en septembre.

2 Q. Paragraphe 112, j'essaie de voir un petit peu la chronologie de tout

3 cela étant donné la suggestion qui a été soulevée précédemment. Donc, je

4 relis le paragraphe :

5 "Comme cela est bien connu, un convoi d'aide humanitaire a été

6 arrêtée pendant environ sept mois à Split au terminal TTS." Vous avez déjà

7 parlé du terminal TTS hier, je crois, mais dans un autre contexte, n'est-ce

8 pas ?

9 Est-ce que vous voyez le passage dont je parle ?

10 R. Je vois cette partie, en effet. Ce que je dis c'est que ce qui est dit

11 au paragraphe 112 est tout à fait exact.

12 Q. Lorsque l'on poursuit la lecture aux paragraphes 113, 114, et cetera,

13 pourriez-vous nous dire si vous avez eu des conversations à ce propos avec

14 ce M. Tadic, le même M. Tadic que ce nous avons parlé précédemment ainsi

15 que Zubac, pour essayer de faire repartir le convoi ?

16 R. Oui. Je ne vais pas rentrer dans les détails de ce qui a été écrit dans

17 votre déclaration, mais pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire si, oui

18 ou non, ce convoi a pu poursuivre sa route, et est finalement arrivé en

19 Bosnie centrale à un moment où à un

20 autre ?

21 R. Après cet accord émanant de l'accord écrit en provenance du travail ou

22 découlant du travail de ce Groupe de travail, le convoi est arrivé à

23 destination finale, et la formation de la FORPRONU à partir de tous les

24 points de contrôle pour ce qui est du passage du convoi par l'itinéraire

25 jusqu'à destination par le cheminement qui était censé être le sien.

26 Q. Madame Krajsek, j'en ai terminé avec mon interrogatoire principal. Je

27 tiens à vous remercier au nom du bureau du Procureur d'être venue ici pour

28 témoigner. J'espère que vous allez pouvoir rentrer tranquillement chez

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1 vous. Je vous remercie.

2 R. Je vous remercie également.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'interrogatoire principal vient donc de se

4 terminer. D'ici la pause, il nous reste encore une trentaine de minutes.

5 Qui veut commencer au niveau de la Défense ?

6 Maître Karnavas.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, bonjour, Monsieur le Président. Je me

8 demandais si on ne pouvait pas faire la pause tout de suite, parce que j'ai

9 besoin de deux ou trois minutes pour me préparer; sinon, je peux commencer,

10 bien sûr. Mais j'ai quand même besoin de deux ou trois minutes pour me

11 préparer.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Si vous avez besoin de temps pour vous

13 préparer, on va faire donc une pause de 20 minutes.

14 Nous reprendrons dans 20 minutes.

15 --- L'audience est suspendue à 11 heures 53.

16 --- L'audience est reprise à 12 heures 15.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Karnavas, vous avez la parole.

18 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

19 Merci, Messieurs les Juges.

20 Contre-interrogatoire par M. Karnavas :

21 Q. [interprétation] Bonjour, Madame. Si j'ai bien compris vos arguments,

22 le bureau des Personnes déplacées et des Réfugiés de République de Croatie

23 était, en fait, l'agence logistique de l'Etat ayant pour but de procéder au

24 nettoyage ethnique des Musulmans. C'est votre argumentation, n'est-ce pas ?

25 C'est ce que vous voulez dire ?

26 R. Je ne serais pas d'accord pour le dire.

27 Je n'ai pas vaqué à ce type de définitions.

28 Q. Très bien. Vous pensez -- vous dites aussi que les réfugiés étaient

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1 détenus dans des camps, entre guillemets, et y étaient gardés par l'armée -

2 - ou plutôt, par la police spéciale; c'est cela, ça fait quand même partie

3 de votre argumentation ?

4 M. SCOTT : [interprétation] Je soulève une objection à propos de

5 l'argumentation, de mot-là, parce qu'il me semble que le témoin est ici

6 pour déposer sous serment, et je ne vois pas pourquoi on est en train de

7 lui suggérer qu'elle n'est pas en train de déposer, mais qu'elle est en

8 train d'argumenter une thèse.

9 M. KARNAVAS : [interprétation]

10 Q. Oui, donc, votre déposition est la suivante : les réfugiés étaient

11 gardés là, dans ces camps, en République de Croatie, ils étaient gardés par

12 l'armée et par la police. C'est bien cela, c'est ce que vous avancez ?

13 R. Je ne suis pas sûre de bien vous comprendre.

14 Q. Donc, vous nous dites aussi que ces réfugiés musulmans n'avaient

15 personnes droit à être scolarisés en République de Croatie, mis à part les

16 services que vous leur offriez, donc, la République de Croatie empêchait la

17 scolarisation des réfugiés musulmans -- empêchaient d'avoir droit à

18 l'éducation, c'est bien cela ?

19 R. Mon témoignage a indiqué que les réfugiés de Bosnie-Herzégovine, les

20 Musulmans, ne pouvaient pas réaliser leur droit à l'éducation dans les

21 écoles normales de la République de Croatie.

22 Q. Très bien. Vous avancez aussi que l'aide humanitaire était dépensée par

23 la République de Croatie de façon irrégulière. Vous l'avez abordé hier, je

24 crois. Vous vous plaigniez du fait qu'ils voulaient utiliser cet argent

25 pour réparer les infrastructures, ou plutôt que d'aider les réfugiés

26 musulmans. C'est bien cela, c'est ce que je vous avez avancé hier, il me

27 semble.

28 R. J'ai fait des commentaires sur certains documents, et je les ai

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1 interprétés oralement, alors si vous pouvez m'aider et m'indiquer de quel

2 document nous sommes en train de parler.

3 Q. Bien. Mais nous allons compulser un certain nombre de documents, mais

4 j'aimerais tout d'abord parler de vous. Donc, si j'ai bien compris,

5 lorsqu'on vous a choisie pour aller en République de Croatie, vous n'aviez

6 aucune expérience dans le domaine -- dans ce domaine-là, n'est-ce pas ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Vous avez admis, d'ailleurs, que lorsque vous vous êtes rendu en

9 République de Croatie pour donc travailler à essayer de mettre sur pied

10 cette opération humanitaire à laquelle vous participiez avec d'autres, vous

11 avez admis de votre propre chef que vous n'aviez aucune instruction

12 officielle.

13 R. C'est exact.

14 Q. Auparavant vous étiez économiste.

15 R. Exact.

16 Q. Travailliez dans l'industrie touristique.

17 R. Exact.

18 Q. Puis, vous aviez aussi un peu travaillé au sein d'Energonivest, si j'ai

19 bien compris, et donc, vous étiez spécialiste du marketing, c'était votre

20 champ de compétence, à l'époque.

21 R. Exact.

22 Q. Donc, quand vous êtes arrivée en République de Croatie, la guerre avait

23 déjà commencé, n'est-ce pas ?

24 R. Exact.

25 Q. Un tiers de la Croatie était occupée.

26 R. Ne vous attendez pas à ce que je vous confirme des pourcentages ou des

27 chiffres. Je suppose qu'il en a été ainsi, mais personnellement, je n'ose

28 pas spéculer de la sorte.

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1 Q. Bien. Disons, une grande partie de la Croatie était occupée.

2 R. Cela, c'est certain, exact.

3 Q. Suite à cette occupation du territoire qui avait lieu depuis un moment

4 avant que vous arriviez, une partie importante de la population croate de

5 République croate avait été déplacée, n'est-ce pas ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Si je vous parle de 300 000, 400 000, 500 000 personnes, est-ce qu'à

8 votre avis, ce sont des chiffres dont parlait la communauté internationale

9 à l'époque, à ce propos ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous avez aussi dit, lorsque vous êtes arrivée, environ

12 300 000 réfugiés sont arrivés de Bosnie-Herzégovine; c'est bien

13 cela ?

14 R. C'est exact, c'était nos évaluations à nous.

15 Q. Donc, si je calcule bien, la partie de Croatie non occupée devait

16 s'occuper de 600 000 à 800 000 réfugiés et personnes déplacées; c'est cela

17 ?

18 R. Exact.

19 Q. Bon, vous avez vu de quoi j'ai parlé hier, mais, donc, si je vous

20 demandais concrètement si l'ambassade pour laquelle vous avez travaillé

21 avait fait des études pour savoir dans quelle mesure la République de

22 Croatie était capable d'absorber un tel afflux de réfugiés, de personnes

23 ayant besoin d'aide humanitaire, j'imagine que votre réponse serait que

24 vous ne savez pas.

25 R. Nous n'avons pas fait d'étude économique, du moins, pas moi-même.

26 Q. Néanmoins, on pourrait se dire qu'avant même d'affirmer qu'un

27 gouvernement ne faisait pas tout ce qu'il pouvait pour aider les réfugiés

28 venant d'un autre pays tout en essayant aussi de s'occuper aussi de ses

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1 propres personnes déplacées. On devrait quand même savoir si

2 l'infrastructure existante était bel et bien capable de gérer un tel afflux

3 de personnes nécessitant une aide humanitaire, mais vous n'avez fait aucune

4 enquête à ce propos, n'est-ce pas ?

5 R. Non, pas plus que je me suis renseignée ou tiré des conclusions pour ce

6 qui est de savoir si on en faisait suffisamment.

7 Q. Très bien. Avant de parler des deux centres de Réfugiés dont on a parlé

8 in extenso pendant deux jours, n'est-il pas vrai que l'on peut dire que la

9 Croatie avec ses îles, avec son tourisme, était quand même un endroit --

10 tourisme qui était assez vivant, avant la guerre, en Croatie, donc, on a

11 utilisé, en fait, différentes installations, comme des hôtels pour loger

12 les réfugiés et les déplacés, n'est-ce pas ?

13 R. C'est exact.

14 Q. On pourrait donc dire qu'au -- que tout endroit a été étudié -- toute

15 installation a été étudiée pour savoir si d'une façon ou d'une autre on ne

16 pourrait pas y héberger les malheureux déplacés et les malheureux réfugiés

17 que la Croatie a dû absorber dans un temps si court, et alors que la

18 situation était aussi complexe.

19 R. [aucune interprétation]

20 Q. Parlons donc du premier centre de Réfugiés. Alors, je vais -- je suis

21 désolé, je vais très certainement écorcher la prononciation. Cela fait six

22 ans que j'essaie de prononcer le B/C/S et je n'y arrive pas, mais je vais

23 essayer de parler de Gasinci. Donc, c'était un centre qui se trouvait au

24 nord de la Croatie, n'est-ce pas ?

25 R. Non loin de Gjakova.

26 Q. Très bien. Donc, il hébergeait des réfugiés qui s'enfuyaient de Bosnie-

27 Herzégovine vers le nord.

28 R. Je ne saurais pas vous dire s'ils fuyaient vers le nord. Ce que je

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1 sais, c'est que le centre de Réfugiés de Bosnie-Herzégovine les

2 accueillait. Ça c'est exact.

3 Q. Bien. Avant la guerre, vous deviez savoir ou, à un moment ou à un

4 autre, vous l'avez su quand même, vous avez dû savoir que ce Gasinci avait

5 été le centre de Formation pour officiers supérieurs de la JNA. Vous le

6 saviez quand même ?

7 R. Personnellement, je ne le savais vraiment pas.

8 Q. Très bien. Donc, vous ne savez pas que ça avait été un centre de

9 formation pour les officiers supérieurs de la JNA ?

10 R. Je ne le savais pas.

11 Q. Pour ceux d'entre nous qui n'ont pas grandi en ex-Yougoslavie, on peut

12 quand même dire que les officiers supérieurs de la JNA avaient un statut

13 bien particulier dans la Yougoslavie de Tito, on peut le dire quand même.

14 R. C'est exact, je le savais également.

15 Q. Bien. Soyez-vous étonnée d'apprendre que ce centre de formation avait

16 une capacité d'hébergement de très haute qualité ?

17 R. Je n'en serais pas surprise. Je peux confirmer la chose.

18 Q. Il y avait aussi par exemple des -- il y avait une installation

19 médicale aussi, puisque comme je l'ai dit avant la guerre, c'était utilisé

20 pour les officiers supérieurs. Il y avait donc une installation médicale.

21 R. Non. Je ne savais rien de ces installations avant la guerre.

22 Q. Dis même que vous ne saviez non plus que cette installation disposait

23 de tous les équipements nécessaires pour héberger un grand nombre de

24 personnes. C'était un centre de formation et ça, vous ne le saviez pas ?

25 R. Non, je ne le savais pas.

26 Q. Pendant tout le temps que vous avez passé là-bas à travailler pour

27 l'ambassade, à vous occuper des réfugiés, vous n'avez jamais su ce qu'avait

28 été ce centre au départ, vous ne l'avez jamais su ?

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1 R. Non, pas vraiment. Je n'ai même posé la question.

2 Q. Très bien. Donc Savez-vous que les coûts d'infrastructure et les coûts

3 des vivres aussi étaient financés par le gouvernement croate. Est-ce que

4 vous saviez que c'est le gouvernement croate qui payait pour tout cela ?

5 R. Je disposais des informations différentes, moi.

6 Q. Saviez-vous aussi que le gouvernement croate n'a pas souligné -- donc,

7 l'information que vous aviez est que le gouvernement croate n'avait pas

8 fourni la nourriture et les autres infrastructures au travers du bureau des

9 personnes déplacées ?

10 R. Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.

11 Q. Qu'est-ce qu'on dirait plutôt, pour moi, une partie des frais engagés

12 pour la nourriture et les frais d'infrastructure était supportée par la

13 République de Croatie. Si je vous dis ça, est-ce que vous seriez d'accord

14 avec moi -- au courant ?

15 R. Je ne peux pas en parler parce que je ne sais vraiment pas cela. Je ne

16 maîtrise pas ces informations. Je ne sais pas quels sont les frais engagés.

17 Q. Pourtant nourrir tous ces réfugiés, cela engageait des frais, des

18 dinars, quelqu'un doit payer tout cela.

19 R. Je suis d'accord.

20 Q. Vous n'êtes pas en train de nous dire que c'est une autre entité qui

21 payait pour tout cela, un autre gouvernement et que le gouvernement croate

22 lui ne supportait aucun frais -- n'offrait absolument rien à ces réfugiés

23 dont ils étaient responsables d'ailleurs. Vous n'êtes pas en train

24 d'essayer de nous dire ça quand même.

25 R. Sur ce sujet tout ce que je puis dire et témoigner c'est que je sais

26 qu'une partie des frais engagés était couverte par une organisation

27 humanitaire. C'est tout ce que j'en sais.

28 Q. Très bien. Donc, pouvons-nous dire quand même que des bâtiments

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1 supplémentaires ont été construits avec l'aide financière des organisations

2 humanitaires. On peut le dire quand même.

3 R. Je ne sais pas.

4 Q. Bien. Alors, je vais essayer de dire les choses simplement. Vous étiez

5 là-bas, vous vous êtes rendue sur place et vous n'avez jamais vu de

6 bâtiment en train d'être construit, de nouvelles installations en train

7 d'être mises sur pied. Vous n'avez rien vu, vous n'en avez aucune

8 connaissance ?

9 R. Quand je suis arrivée toutes les constructions étaient terminées. Les

10 maisonnettes, les constructions étaient terminées. A l'intérieur, il y

11 avait des réfugiés.

12 Q. Bien. Peut-on dire quand même que vous êtes arrivée, il y avait déjà un

13 grand nombre de réfugiés qui étaient entrés en République de Croatie, on

14 peut le dire quand même ?

15 R. C'est exact.

16 Q. Quand vous êtes arrivée en février 1993, aux alentours de ce mois là,

17 n'est-ce pas ?

18 R. Je suis arrivée le 1er mars 1993.

19 Q. Le 1er mars 1993. Pourriez-vous nous dire si vous en souvenez bien sûr,

20 avec le déroulement des événements, vous savez le démantèlement de la

21 Yougoslavie, et cetera, pourriez-vous nous dire à peu près quand la

22 République de Croatie a vu arriver ces déplacés et ces réfugiés, suite à ce

23 qui se passait en Yougoslavie ? Donc pouvez-vous nous dire en quelle année,

24 quel mois ces réfugiés ont commencé à arriver ?

25 R. Je le sais parce que j'étais en Croatie, en septembre 1992, et je sais

26 je puis témoigner du fait que dès ce moment-là, il y avait déjà un bon

27 nombre de réfugiés originaires de Bosnie-Herzégovine en Croatie. J'ai été

28 en mission, je suis passée j'ai fait un voyage officiel et je suis passé

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1 par la Croatie et je puis en témoigner.

2 Q. Pourrait-on dire que ce serait peut-être même avant cela, voire une

3 année avant ou six mois avant que des réfugiés ont commencé à arriver ainsi

4 que les déplacés dans toutes ces installations en Croatie ?

5 R. Je dirais que cela me semble être logique que de le dire.

6 Q. Pourrait-on aussi dire donc que quand il y a un tel afflux de personnes

7 qui arrivent aussi rapidement et quand les infrastructures s'usent

8 rapidement parce qu'il y a tant de monde ?

9 R. Tout à fait logique.

10 Q. Étant donné que vous êtes arrivée en mars 1991, et qu'auparavant, vous

11 nous n'étiez jamais rendue sur place, puisque vous ne saviez pas à quoi

12 servait ce centre auparavant, dans ce cas-là, vous n'avez aucune idée de

13 l'état de ce centre de Réfugiés quand les réfugiés et les déplacés ont

14 commencé à le quitter ? Vous êtes arrivée en 1993, j'ai fait un lapsus et à

15 la ligne 7, ce n'est pas mars 1991, mais mars 1993.

16 R. C'est exact. J'avais disposé d'information à ce sujet qui me provenait

17 de la part d'autres personnes présentes à l'époque.

18 Q. Bien. Vous n'êtes pas en train de nous dire que, lorsque vous y étiez,

19 la police spéciale restait -- était hébergée exactement dans les mêmes

20 installations que les réfugiés et les déplacés. Ce n'est pas ce que vous

21 nous avez dit, n'est-ce pas, ou alors, est-ce que vous affirmez ?

22 R. Sommes-nous en train de parler de ce centre de Réfugiés à Gasinci ? Je

23 n'ai pas voulu dire en même temps que tout le temps il y avait aux côtés

24 des réfugiés une police spéciale à Gasinci et je ne l'ai pas dit.

25 Q. Très bien. Parlons de l'autre centre maintenant Obonjan. Obonjan. La

26 chose -- j'arriverais à prononcer cette langue. Notre possibilité de sortie

27 de Bosnie-Herzégovine pour les réfugiés étaient de partir par le sud, de

28 quitter le pays par le sud, n'est-ce pas ? Dans ce cas ils se retrouvaient

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1 à peu près à un endroit où ils leur seraient faciles d'accéder à l'île

2 d'Obonjan.

3 R. A vrai dire, je ne voudrais pas parler de notion géographique parce que

4 je ne suis pas très forte en la matière.

5 Q. Vous étiez-vous déjà rendu sur cette île avant la guerre ?

6 R. Non.

7 Q. Très bien. Saviez-vous qu'avant la guerre il s'agissait d'un centre

8 hébergeant des scouts ?

9 R. Oui. Ça je le savais.

10 Q. Je crois que c'était -- il s'appelait l'île de la Jeunesse, c'est un

11 ancien camp scout. Etant donné qu'il s'agissait donc d'un camp scout

12 c'était un endroit qui possédait une infrastructure permettant

13 l'hébergement d'un grand nombre de personnes ?

14 R. Je pense que vous ne supposez pas bien, parce que ce centre avait

15 toujours -- c'était toujours plein de carence au niveau infrastructurelle,

16 le management, la direction à qui on le faisait.

17 Q. Nous allons procéder par étape. C'est pour cela que je vous ai posé la

18 question. Vous êtes arrivé deux ans après. Les gens étaient là depuis deux

19 ans. Nous sommes d'accord quand même -- nous avons dit qu'au bout de deux

20 ans il y a quand même une certaine usure. On s'en rend bien compte quand on

21 vit dans une maison. On repeint tout et puis, s'il y a des gamins qui

22 courent partout, ses propres enfants, au bout de six mois il faut tout

23 repeindre.

24 R. Tout ce que j'en sais, c'est que les réfugiés de Bosnie-Herzégovine

25 pouvaient commencer à arriver en Croatie vers le printemps de 1992

26 seulement. Nous ne parlons pas de deux ans auparavant mais d'une seule

27 année auparavant avant mon arrivée.

28 Q. Très bien. Mais nous parlons aussi de personnes déplacées. Cela dit,

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1 c'était un endroit qui avait un camp scout, enfin un endroit où on recevait

2 des jeunes. Donc, de ce fait, sur cette île il devait bien y avoir des

3 installations permettant d'héberger un grand nombre de personnes sur l'île

4 ?

5 R. Ce n'est pas un fait parce qu'au moment où je suis arrivée moi-même il

6 y avait des tentes sur l'île.

7 Q. Bien. Bon. Pour arriver sur l'île, il faut prendre le ferry, n'est-ce

8 pas ?

9 R. C'est exact. Il y avait une alternative, à savoir de louer des

10 embarcations privées, petites de taille.

11 Q. On parle de deux ou 3 000 nautiques donc ce n'est pas comme aller en

12 pleine mer. C'est du cabotage. Deux, 3 000 nautiques entre cette île et

13 Sibenik sur la terre.

14 R. Je ne sais pas vous donner l'impression. Je ne sais combien de milles

15 nautiques, ça fait, mais je sais qu'il fallait une demi-heure de voyage.

16 Q. Il y avait donc des ferry qui faisait la navette ?

17 R. Il y avait des lignes régulières.

18 Q. Les réfugiés qui sont arrivés venaient principalement de Split, ils

19 étaient de Split et puis, ils se sont rendus sur l'île; c'est cela ?

20 R. Je ne sais pas.

21 Q. Je pensais que vous aviez passé beaucoup de temps à leur poser des

22 questions. Vous ne leur avez pas demandé comment ils étaient arrivés par

23 l'hélicoptère, en nageant, en ramant, par le ferry ? Vous ne leur avez pas

24 posé cette question-là, pour leur demander d'où ils venaient ?

25 R. Ce que je sais, c'est qu'ils sont arrivés de Sibenik par ferry jusqu'à

26 Obonjan.

27 Q. Très bien. Donc, vous ne saviez pas qu'ils venaient de Split ?

28 R. Je ne m'en souviens pas.

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1 Q. Oui, mais Split était quand même surpeuplée avec tous les réfugiés et

2 les déplacés qui s'y entassaient ?

3 R. C'est exact.

4 Q. C'était de plus une ville qui était assez proche de la ligne de front,

5 enfin ce n'était pas sur la ligne de front, mais c'était proche ?

6 R. Si ce n'est pas une spéculation, je peux tomber d'accord, et Obonjan

7 aussi était près.

8 Q. Savez-vous si certains des réfugiés qui sont arrivés sur l'île sont

9 arrivés par bateaux ?

10 R. Ils sont tous venus par ferry. Chacun de ces réfugiés est arrivé par

11 ferry.

12 Q. Très bien. Passons à autre chose. A propos de la scolarisation, j'ai

13 une question à vous poser. Hier vous avez parlé d'un certificat de baptême

14 qui aurait été nécessaire. Vous vous en souvenez d'avoir abordé la question

15 du certificat de baptême ?

16 R. Oui.

17 Q. En cas de certificat de baptême, j'imagine qu'on obtient de l'église,

18 l'église catholique.

19 R. C'est exact.

20 Q. Mais jusqu'à ce moment pour s'inscrire à l'école, n'est-ce pas, il faut

21 un certificat de naissance, n'est-ce pas ?

22 Quand on emmène son enfant, quand on va l'inscrire à l'école il faut un

23 extrait de naissance et l'école vous réclame un papier qui vient des

24 autorités, pas de l'école, pas de l'église ?

25 R. Dans mon pays, oui.

26 Q. Oui, mais la Croatie comment ça se passait ? Vous étiez sur place et

27 vous dites que cette mesure a été mise en place; j'ai examiné tous les

28 documents et j'en n'ai trouvé aucun. En tout cas, vous, vous n'avez soumis

Page 20131

1 aucun document relatif à une loi, un décret, une décision, un quelque texte

2 que ce soit qui permettrait de confirmer vos propos, à savoir que pour

3 inscrire un enfant à l'école dans l'enseignement public en Croatie au cours

4 de cette période de 1992 à 1993, il était nécessaire de produire un

5 document à caractère religieux un certificat de baptême et quelque chose,

6 bien entendu, qui ne pouvait pas être fourni pour les enfants musulmans,

7 donc, c'était un facteur de discrimination. Est-ce que vous avez fourni des

8 documents dans ce sens au Procureur ? Enfin, si c'est le cas, est-ce que

9 peut-être on a omis de nous les remettre ?

10 R. Je me suis référée au décret du gouvernement croate publié dans le

11 journal officiel que nous avons obtenu. Nous travaillions en service chargé

12 des réfugiés. Ce décret j'ai dû le joindre à mes rapports envoyés à aux

13 organisations internationales et aux institutions de la République de BiH.

14 Je ne suis pas sûre d'avoir vu ce document parmi les documents que j'ai

15 examinés depuis deux jours.

16 Q. Donc, si j'ai bien compris, surtout n'hésitez pas à m'interrompre si je

17 me trompe, il y a une loi qui était en vigueur et qui portait sur les

18 droits des personnes déplacées et des réfugiés. C'est dans cette loi qu'on

19 va trouver le passage concerné, portant sur cette exigence, ou est-ce qu'il

20 existait une autre législation relative à l'enseignement parce que je vais

21 vous dire très franchement, avant dans vous laisser répondre. J'ai examiné

22 la totalité des documents, j'ai cherché partout, et je n'ai rien trouvé,

23 aucune -- aucun grief de votre part, par écrit, au sujet de cette question,

24 au sujet du certificat de baptême, en dehors de ce que vous avez fait

25 figurer dans votre rapport, mais nous n'avons aucun autre éléments de

26 preuve permettant de le corroborer. Donc, pourriez-vous nous aider à

27 comprendre ce qu'il en est, là, s'il vous plaît.

28 R. Quand j'ai fait ma déclaration, je me suis référée aux documents que

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1 j'avais en ma possession. Dans mes rapports, il y avait mention des numéros

2 de référence des documents que j'ai utilisés, des numéros du journal

3 officiel, et cetera, et cetera. Donc, il serait peut-être bien qu'on essaie

4 d'examiner ces documents afin qu'on essaie de trouver quel est le décret ou

5 la loi à laquelle je me suis référée.

6 Q. Avez-vous consulté le texte de loi relatif aux droits des personnes

7 déplacées et des réfugiés ? Parce que là, il doit sans doute être question

8 des droits des réfugiés et des personnes déplacées qui se trouvaient en

9 Croatie. J'aurais pensé que vous auriez disposé de ce document, que vous

10 auriez pu le consulter et que vous vous en serviez tous les jours.

11 R. Je l'ai fait, mais j'étais aussi consciente que je n'étais pas juriste

12 de formation, donc, je demandais qu'on attache -- je demandais à un

13 juriste, pour les besoins de mon service.

14 Q. Cet expert juridique aurait donc pu être en mesure d'examiner ce texte

15 de loi, de l'analyser, puis à partir de cette analyse, d'indiquer les

16 droits des personnes déplacées et des réfugiés en Croatie, n'est-ce pas ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Fort bien. Nous pouvons maintenant avancer un petit peu. J'aimerais que

19 nous examinions la pièce 1D 01232. Il s'agit d'un document, un décret de

20 loi portant sur les personnes déplacées et les réfugiés, un document qui

21 émane de Bosnie-Herzégovine. Le numéro de référence est le suivant : 1D

22 01232.

23 R. Je l'ai trouvé.

24 Q. Bien. Reportons-nous à la toute dernière page du document. On voit que

25 c'est un document qui porte la signature du Dr Ganic. Je suis sûr que vous

26 savez qui était cette personne à l'époque. C'est un document en date du 6

27 octobre 1992, c'est-à-dire avant que vous ne commenciez à occuper les

28 fonctions qui étaient les vôtres en Croatie, n'est-ce pas ? Cela précède la

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1 période pendant laquelle vous avez travaillé en Croatie, à l'ambassade de

2 Bosnie-Herzégovine.

3 R. Oui, c'est exact. Cette date est antérieure à mon arrivée à

4 l'ambassade.

5 Q. Mais vous travailliez en 1992 au bureau des personnes réfugiées à

6 Sarajevo. Vous connaissiez donc forcément ce document.

7 R. Il est exact que je travaillais là-bas, mais il n'est pas exact que je

8 devais savoir que ce document existait.

9 Q. Bien. A Sarajevo, vous avez travaillé au bureau des réfugiés, d'août

10 1992 jusqu'à la fin février 1993, n'est-ce pas ?

11 R. J'étais employée auprès de la direction en mai. Pendant deux à trois

12 mois, à cette époque, je me suis absentée, j'avais quitté le pays, donc, il

13 se peut que ce soit pour cela que je n'aie pas su qu'il y avait cette loi.

14 Q. A ce moment-là, est-ce que vous avez consulté cette loi ? Je vais vous

15 expliquer pourquoi je pose cette question. Quand vous vous trouviez en

16 République de Croatie, vous auriez peut-être pu dire à M. Rebic : "Bien,

17 regardez la loi que nous avions, nous en Bosnie-Herzégovine, un pays en

18 pleine guerre, à feu et à sang, dont une partie du territoire était occupé,

19 alors que vous, seulement une partie de votre pays est occupé. Pourquoi ne

20 pas faire la comparaison entre le statut octroyé aux réfugiés entre ici et

21 chez nous ?"

22 Q. Examinons maintenant l'article 20. Il est vrai, n'est-ce pas, qu'il y a

23 une différence entre une personne déplacée et réfugiée. Vous connaissez la

24 différence, n'est-ce pas ?

25 Nous allons passer en revue, petit à petit, ce document, mais je voudrais

26 savoir si, de mémoire, vous connaissez la différence qui existe entre un

27 réfugié et une personne déplacée. Il y a une différent, n'est-ce pas ?

28 R. Oui, je le sais.

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1 Q. Bien. Si nous nous reportons à l'article 20 de ce texte, nous

2 constatons au point, je cite : "Le statut d'une personne à laquelle on a

3 reconnu le statut de personne déplacée ou de réfugié, ce statut sera annulé

4 premièrement au terme d'une décision du service chargé des Personnes

5 réfugiées et déplacées au sein de la municipalité suivant son lieu de

6 résidence lorsque les raisons ayant amené la personne à quitter son lieu de

7 résidence ne seront plus -- n'existeront plus." On voit donc, si on lit cet

8 article 20 au paragraphe 1, qu'au terme de ce texte particulier, dès qu'on

9 peut retourner sur son lieu d'origine, on cesse de ne bénéficier du statut

10 de personne déplacée et de réfugié. Bien entendu, la situation a changé,

11 mais cela, on peut quand même clairement le lire dans ce texte, n'est-ce

12 pas ?

13 R. Oui, c'est ce qu'on voit dans ce document.

14 Q. Bien. Au point 2, on peut lire : "Parce que la personne a décidé

15 volontairement de retourner sur son lieu de résidence permanente." En

16 l'occurrence, ici, il s'agit de volonté, peu importe que la destination

17 soit sûre ou pas, chacun a le droit de courir les risques qu'il veut pour

18 retourner sur son lieu de résidence d'origine, n'est-ce pas ?

19 R. C'est exact, c'est bien cela qui est écrit ici, et que chacun peut

20 décider de ce qu'il veut faire.

21 Q. Bien. Au point 3, on peut lire : "Si il ou elle le refuse l'hébergement

22 qui est offert ou l'aide qui est offerte est organisé." Un exemple,

23 imaginons que des réfugiés se trouvent dans un hôtel, dans une station

24 balnéaire, et que le gouvernement souhaite les installer dans des tentes,

25 là où on trouve normalement les réfugiés, partout sur la planète, et si le

26 réfugié ou une personne déplacée refuse cette offre, à ce moment-là, le

27 réfugié -- la personne déplacée peut perdre son statut; est-ce bien exact ?

28 R. C'est exact. Je connaissais cela à l'époque où j'occupais le poste

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1 d'attachée.

2 Q. Bien. J'aimerais que nous examinions l'article 21. A l'article 21, nous

3 n'allons pas passer trop de temps à examiner cet article, mais il y est dit

4 : "Le statut de réfugié d'une personne venant d'une zone touchée par la

5 guerre à la frontière des Républiques de l'ex-Yougoslavie et qui a été

6 reconnu. Ce statut est annulé si on peut arriver à la conclusion que le

7 comportement de l'intéressé enfreint l'ordre juridique en place dans la

8 République. En d'autres termes, si une personne, qui est accueillie en tant

9 que réfugié ou qu'une personne déplacée commet un crime, à ce moment-là,

10 l'intéressé peut perdre son statut. Si quelqu'un vient dans un pays, d'un

11 autre pays commet des crimes, à ce moment-là, il peut perdre son statut de

12 réfugié; est-ce bien exact ?

13 R. Je ne peux pas vous le dire. Ce qui est exact c'est que tout ce qui est

14 écrit dans cet article.

15 Q. Bien. Le point 3, ici encore, nous intéresse parce que ceci a trait aux

16 réfugiés si il ou elle refuse l'hébergement ou l'assistance qui a été

17 organisée à son intention. Reviens ici un petit peu sur ce qui est déjà dit

18 à l'article 21. Mais maintenant, si nous examinons l'article 22.

19 M. SCOTT : [interprétation] Excusez cette interruption, Monsieur le

20 Président, mais je me demande quelle est la pertinence de ce document

21 puisque le seul statut -- le seul document juridique qui pourrait être

22 pertinent en l'espèce c'est la législation en vigueur en République de

23 Croatie à l'époque, puisqu'elle, elle s'occupait des réfugiés, de personnes

24 déplacées qui se trouvaient en Croatie. Je ne vois donc pas très bien

25 pourquoi on passe tout ce temps à parler des réfugiés et de la loi en

26 Bosnie-Herzégovine.

27 M. KARNAVAS : [interprétation] Je peux répondre. Je me réjouis de

28 l'intervention du Procureur, mais cela me surprend de le voir se lever de

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1 la sorte. Pourquoi, pourquoi ? Bien, parce qu'on nous a dit qu'il y avait

2 eu un nettoyage ethnique à rebours. Il y a quelques semaines, on essayait

3 de se débarrasser des Musulmans, on les envoyait ailleurs. Maintenant, on

4 veut les renvoyer en Bosnie. Il semble que les autorités quoi qu'elles

5 aient tenté de faire, aient été blâmées, condamnées. Il y a des obligations

6 des règlements qui s'appliquent aux réfugiés, des obligations à respecter.

7 Le Procureur nous dit qu'il y avait des problèmes au niveau de la

8 scolarisation, les personnes n'étaient pas hébergées suffisamment de

9 manière acceptable. On voulait les installer dans des tentes, mais elles

10 voulaient rester dans des hôtels, dans des zones balnéaires. Et tout ceci,

11 tous ces documents, on nous les a présentés pour nous dire qu'il y avait

12 discrimination, que ça s'inscrivait dans le cadre d'une entreprise

13 criminelle commune. Si on va un peu plus loin, juste un tout petit peu plus

14 loin, on peut voir que les personnes en âge de porter les armes, les hommes

15 en âge de porter les armes ont aussi une obligation. On va pouvoir le voir

16 par l'intermédiaire de ce témoin, peut-être par l'intermédiaire d'un autre

17 témoin, on peut voir que la Bosnie-Herzégovine faisait pression sur la

18 République de Croatie pour qu'elle lui renvoie les hommes en âge de porter

19 les armes afin que ceci participe à l'effort de guerre.

20 Ensuite, si on examine l'article 25 du document, on voit ainsi dans

21 l'article 26 que les personnes déplacées ont droit à l'éducation, à leur

22 scolarisation alors que l'article 26, il est dit que les réfugiés n'y ont

23 pas droit. Et ceci pourquoi. La raison pour laquelle je présente cette

24 pièce, c'est pour la placer dans son contexte. Si la Croatie n'en fait pas

25 assez, c'est parce qu'elle est engagée dans une entreprise criminelle

26 commune, peu importe les actions qu'elle entreprenne. C'est ce qu'on nous

27 dit.

28 Je pense que ceci est pertinent. Ceci est pertinent parce que c'est

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1 l'Accusation qui a commence à utiliser ce type d'argument.

2 M. SCOTT : [interprétation] Je veux répondre, mais je pense que, de

3 toute façon, ce type de discussion ne devrait pas se produire devant le

4 témoin. C'est tout à fait inapproprié. Mais je veux malgré tout répondre.

5 En premier lieu, je ne pense pas que Me Karnavas est en droit de

6 dénaturer la position prise par l'Accusation. Nous estimons oui,

7 qu'effectivement ces politiques, ces mesures ont été employées pour

8 faciliter, pour mettre en œuvre certaines formes de nettoyage ethnique,

9 pour empêcher les Musulmans de rentrer en Bosnie-Herzégovine. Ce que nous a

10 dit le témoin à ce sujet, c'est que les Musulmans en dépit de ce que

11 certains ont couché sur le papier, parfois c'est que les Musulmans de fait

12 ne pouvaient pas rentrer chez eux pour diverses raisons, soit premièrement

13 pourquoi ayant été arrêtés, ayant été expulsés, seraient-ils rentrés chez

14 eux.

15 Deuxièmement, lorsqu'ils essayaient de rentrer en Bosnie-Herzégovine

16 dans les zones contrôlées par l'ABiH, le HVO ne leur permettait pas de

17 traverser le territoire qu'il contrôlait. Donc c'est bien de dire oui, oui,

18 on en était tout à fait prêt à rentrer, à renvoyer les Musulmans chez eux

19 mais les Musulmans ne pouvaient pas rentrer chez eux et tout le monde le

20 savait. Tout le monde qui participait, qui était impliqué là-dedans le

21 savait.

22 Deuxièmement, ici, nous n'avons qu'une fois de plus la défense du tu

23 quoque. On nous dit à ce moment-là pourquoi ne pas examiner la législation

24 croate, tous les conseils qui sont ici viennent de Croatie. Ils peuvent

25 facilement avoir accès à ces lois et examinons cette loi qui ne

26 s'appliquait pas aux personnes en Croatie. En fait, l'idée ici ce n'est pas

27 de montrer un document intéressant au témoin, c'est d'invoquer une défense

28 de tu quoque. Ce qui est tout à fait dénué de pertinence. Le témoin,

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1 contrairement à ce que dit

2 Me Karnavas, nous dit -- nous a dit quelles étaient les raisons qui

3 expliquaient que les Musulmans ne pouvaient pas retourner en Bosnie-

4 Herzégovine même beaucoup d'entre eux le souhaitaient.

5 M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi de répondre en quelques

6 mots, Monsieur le Président.

7 En premier lieu, à la différence de M. Scott, je ne peux pas et je ne veux

8 pas présenter ma thèse avec chaque témoin, c'est ce qu'il essaie de faire.

9 Il essaie de présenter toute sorte de pièces par l'intermédiaire de témoins

10 qui ne sont pas compétents pour le faire, qui ne sont pas les bons pour le

11 faire.

12 Deuxièmement, il faut bien se souvenir d'une chose. Avant 1991, il y avait

13 une République qui s'appelait la Yougoslavie. Un pays qui s'appelait la

14 Yougoslavie, qui a ensuite été démantelée ce pays. La situation donc est

15 très différente après cela. On essaie de critiquer la République de Croatie

16 mais hier, j'ai posé une question au Procureur, il a dit que M. Rebic

17 faisait partie de l'entreprise criminelle commune. Si, s'il l'a fait, tout

18 le monde l'a bien entendu très clairement.

19 M. SCOTT : [interprétation] Non. Donnez-moi la référence du compte rendu

20 d'audience.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Donc, le Procureur voudrait avoir le beurre

22 et l'argent du beurre. J'ai le droit de présenter ma thèse pas synthèse et

23 j'ai le droit de réfuter sa théorie qui ne tient pas debout, mais je pense

24 que j'ai également le droit de présenter ma propre théorie qui est exact si

25 on garde, si on observe les circonstances.

26 M. SCOTT : [interprétation] Il peut répondre à mes arguments, il a le droit

27 de le faire, mais il n'a pas le droit de dénaturer ce qui a déjà été dit.

28 Bien entendu, que Me Karnavas peut procéder à un contre-interrogatoire du

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1 témoin et l'Accusation ne se lève jamais si elle estime que le contre-

2 interrogatoire est juste même s'il est parfois un peu agressif. Mais quand

3 Me Karnavas dénature ce qui a été dit par le témoin, quand il dénature la

4 position présentée par l'Accusation, à ce moment-là, je me lève -- je me

5 lève pour présenter une objection. C'est ce que je suis en train de faire

6 tout de suite.

7 M. MURPHY : [interprétation] J'ai trouvé l'extrait du compte rendu

8 d'audience en question. Si vous souhaitez que je vous donne cette

9 référence, c'était le compte rendu d'hier, la page, la numérotation des

10 pages a disparu pendant la pause, mais je crois que c'est la page 60. En

11 tout cas, je peux vous le citer verbatim ce qui a été dit.

12 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie de regarder ce

13 qui figure dans l'acte d'accusation, mais, effectivement, une des thèses de

14 l'Accusation puisque cela m'a été demandé directement, qu'effectivement

15 oui, il s'agissait d'un élément du nettoyage ethnique des Musulmans de

16 Bosnie-Herzégovine, à partir de la zone d'Herceg-Bosna. Ceci était en

17 réponse directe à une question posée par M. le Juge Antonetti, Monsieur

18 Scott, est-ce que M. Rebic était membre de l'entreprise criminelle commune.

19 M. SCOTT : [interprétation] Ma réponse ne portait pas sur

20 M. Rebic, mais sur la nature de l'entreprise criminelle commune. Excusez-

21 moi, mais quand on m'attaque personnellement -- quand on m'attaque

22 personnellement -- quand on dit que j'ai tenu certains propos au compte

23 rendu d'audience, je peux me défendre.

24 Je n'ai jamais dit que M. Rebic était membre de l'entreprise

25 criminelle commune. J'ai répondu à la question posée par le Président en

26 disant oui. Oui, il s'agit d'un élément constitutif de notre thèse. Nous

27 avançons que cette entreprise criminelle commune comportait, impliquait le

28 déplacement de personnes vers la Croatie, leur expulsion. Cela figure à

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1 l'acte d'accusation. On a mis également en place les mesures ou les

2 conditions qui empêchaient ces gens de rentrer chez eux. C'est ce que j'ai

3 dit. En dépit de qu'affirme

4 Me Murphy à l'instant, je n'ai jamais dit et M. Rebic était membre de

5 l'entreprise criminelle commune. Je ne l'ai pas dit.

6 M. KARNAVAS : [interprétation] Ah, donc, M. Rebic n'est pas membre de

7 l'entreprise criminelle commune. C'est la raison peut-être pour laquelle on

8 parle de lui parce que, si on regarde le droit portant sur l'entreprise

9 criminelle commune il s'agit d'aider, d'encourager un crime, ou il s'agit

10 d'en être membre de l'entreprise criminelle commune, ou M. Rebic est un

11 auteur direct des crimes commis dans le cadre de l'entreprise criminelle

12 commune. Enfin, quel que soit la manière de regarder la chose vu les

13 arguments qui ont été présentés par l'Accusation, c'est ce qu'ils ont dit.

14 Donc, j'ai le droit d'explorer cette question parce que c'est ce qu'ils ont

15 affirmé, et c'est un procès -- une procédure par étape.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : -- le droit de présenter votre thèse et vous faites

17 comme vous voulez. Mais les quatre Juges qui sont devant vous, qui sont des

18 juristes, se posent la question de savoir pourquoi, indépendamment du texte

19 sur les personnes déplacées et réfugiés en Bosnie-Herzégovine, vous n'ayez

20 pas non plus de texte sur le statut des réfugiés et personnes déplacées en

21 République de Croatie. J'ai regardé tout votre document. J'ai vu qu'il y a

22 le statut au Danemark. C'est peut-être très intéressant, mais ce qui nous

23 intéresserait c'est en Croatie parce que, Madame, elle exerçait ses

24 fonctions en Croatie.

25 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci beaucoup de me poser cette question,

26 Monsieur le Président. Je souhaiterais rappeler aux Juges que c'est sur

27 l'Accusation que repose la charge de la preuve. Ce n'est pas à la Défense

28 de montrer, de présenter les preuves qui doivent être présentées par

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1 l'Accusation.

2 Deuxièmement, si je décide de présenter ma thèse, bien, je le ferais le

3 moment venu avec mes propres témoins. Mais pour l'instant, la Chambre de

4 première instance ne peut pas me dire qu'elle doit être ma thèse.

5 Deuxièmement, je pense qu'il est un petit peu injuste que la Chambre

6 de première instance parte du principe qu'elle sait quelle est ma thèse. Je

7 procède étape par étape et je construis mon -- je construis cette édifice

8 pierre par pierre, à pierre, et au bout du compte, vous verrez ce que ça

9 donnera, peut-être que ça donnera rien. Mais vous ne me verrez pas peut-

10 être que je ne pourrais pas le prouver. Mais en tout cas c'est ce que

11 j'essaie de faire. J'essaie de faire les choses de cette manière. Et j'ai

12 obtenu la réponse que je voulais. Cette personne était sur place pendant un

13 an, un an et demi, peu importe, et jamais elle n'a regardé les textes

14 juridiques pertinents. Donc, la totalité de sa déposition repose sur des

15 anecdotes, où on lui a dit certaines choses. Mais il n'y a rien de concret.

16 Elle nous dit : "Oui, il existe une décision portant sur les enfants

17 pour s'inscrire à l'école. Ils ont besoin d'un document qui vient de

18 l'église." Alors, où ça trouve ça dans la législation ? Où se trouve le

19 document montrant que vous vous êtes plainte de cet état de fait ? Non, ça

20 n'existe pas. Je n'ai pas ce document, mais ce n'est pas à moi de le

21 fournir ce document.

22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Karnavas, il y a peut-être

23 ici un malentendu. Il ne s'agit pas ici de savoir quelle doit être votre

24 thèse. Il s'agit de savoir pourquoi nous passons ainsi de très longues

25 minutes à examiner un texte législatif qui n'a absolument rien à voir avec

26 la situation dont nous parle le témoin.

27 Le témoin n'a pas travaillé avec ce texte-là. Elle travaillait sur la base

28 d'un autre texte. Donc, vraiment, on n'arrive absolument pas à comprendre

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1 pourquoi on passe tout ce temps sur ce texte.

2 M. KARNAVAS : [interprétation] Bon. Je vais passer à autre chose. Je ne

3 veux pas me lancer dans une polémique. Si la Chambre de première instance

4 n'est pas intéressée par ce type d'élément, je présenterais les choses en

5 temps voulu. Mais avec tout le respect que je vous dois, on ne peut pas

6 juger ce procès dans le vide sans aucune référence rien du tout. C'est là

7 où je veux en venir. Nous sommes dans une situation où un pays a été

8 complètement démantelé. Il s'est effondré.

9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Karnavas, oui, mais ça ne

10 nous explique pas pourquoi vous utilisez ce document ? Il faut nous

11 convaincre, si vous n'y parvenez pas il faut passer à autre chose.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Bon. Je vais passer à autre chose. Mais je

13 le répète, vous, vous n'avez pas tout le dossier. Ça fait un an et demi que

14 je me prépare -- pratiquement deux ans que je me prépare, donc, j'ai le

15 dossier. En tout cas, nous présenterons ultérieurement ce document et je

16 souhaiterais cependant vous indiquer qu'à l'article 25 il est prévu que les

17 personnes déplacées bénéficient d'une scolarisation alors que cela n'est

18 pas prévu pour les réfugiés. Donc, apparemment, ici il y a deux poids, deux

19 mesures. On dirait que quelqu'un qui -- quand quelqu'un de Bosnie nous dit

20 : "Nous exigeons d'avoir des logements de luxe," alors que si on regarde la

21 législation de Bosnie-Herzégovine, on voit que : "Si on refuse un

22 hébergement quel qu'il soit, on perd son statut de réfugié."

23 Bon. Je vais passer à autre chose.

24 M. SCOTT : [interprétation] Jamais personne n'a parlé de logement de luxe,

25 des logements luxueux. S'il y a d'autre question au sujet de ce statut, de

26 cette loi 1232, je m'y opposerais. J'ai été très patient, mais je suis tout

27 à fait d'accord avec la Chambre. Ce document n'a strictement aucun intérêt

28 ici et il y a beaucoup de choses sur lesquelles je ne suis pas d'accord

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1 avec Me Karnavas. Mais je suis sûr que, si Me Karnavas arrivait à trouver

2 le texte -- avait décidé de trouver le texte pertinent avec l'aide, il

3 aurait pu le faire avec l'aide de ses collègues croates qui sont assis à

4 ses côtés.

5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense qu'il faut laisser Me

6 Karnavas poursuivre son contre-interrogatoire.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci pour les éléments d'information

8 fournis par l'Accusation qui doit d'ailleurs fournir la preuve de ce qu'il

9 affirme.

10 M. SCOTT : [interprétation] Ceci me rappelle un point que je souhaitais

11 soulever. Me Karnavas nous dit : "Je souhaite contester la crédibilité du

12 témoin parce qu'elle n'a fourni aucun texte à l'appui de ce qu'elle

13 affirme." Or, pour l'instant, tout ce que le témoin a dit n'a pas encore

14 été réfuté. Le témoin nous dit : "Oui, je travaillais à l'ambassade à

15 Zagreb pendant cette période, un texte a été adopté dans ce sens, dans un

16 tel ou tel sens." Or, aucun élément n'a été produit ici qui dise le

17 contraire. Me Karnavas peut se lever autant qu'il souhaite en disant : "Où

18 est le document ? Où est le document ?" Cela ne revient nullement à

19 contester les affirmations du témoin et à contredire les dires du témoin.

20 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vais pas ici me

21 lancer dans une polémique. Ce sont des -- nous avons entendu ici du ouï-

22 dire de la part du témoin. Je suggère à M. Scott de lire le livre du Juge

23 May au sujet de la manière de présenter les éléments de preuve devant le

24 Tribunal. Ça pourrait l'aider.

25 Q. Maintenant, j'aimerais qu'on examine le document 1D 01576. 1D 01576.

26 C'est une lettre qui vient du Pr Adalbert Rebic. Rebic est-ce que c'est bon

27 ? C'est la bonne prononciation. Donc, en date du 30 août 1993, c'est une

28 lettre qui était courte. Je vais donc en donner lecture. C'est une lettre

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1 qui vient du bureau des Personnes déplacées et des Réfugiés du gouvernement

2 de la République de Croatie, à l'intention de l'ambassade de la République

3 de Bosnie-Herzégovine en République de Croatie.

4 "Messieurs, nous avons l'honneur de vous informer qu'afin de d'accorder le

5 statut de réfugiés aux citoyens de Bosnie-Herzégovine le centre social de

6 République de Croatie n'exige --" je répète, "-- n'exige aucun type de

7 certificat de votre part. Ceci doit être la conséquence d'un manque

8 d'information des agents qui travaillent dans les centres. Le 30 août 1993

9 les centres ont reçu pour consigne d'accorder le statut de réfugiés pendant

10 trois mois encore aux personnes qui bénéficient déjà ce statut et qui ne

11 sont pas en mesure de rentrer en République de Bosnie-Herzégovine."

12 Madame, est-ce que vous aviez connaissance de cette lettre en date du 30

13 août 1993 ?

14 Répondez par oui ou non, s'il vous plaît.

15 Ça vient de vos documents d'ailleurs. Vous deviez être au courant.

16 R. Je connais tous ces faits, mais je ne peux pas confirmer si j'ai déjà

17 vu ce courrier auparavant ou pas.

18 Q. Seriez-vous étonnée si je vous disais que ceci vient de la série de

19 documents que vous avez donnés au bureau du Procureur, enfin que quelqu'un

20 a donné au bureau du Procureur, en tout cas ?

21 R. Non.

22 Q. Bien. Votre bureau était-il situé dans l'ambassade au

23 fait ?

24 R. Pendant les quelques premiers mois, mon bureau se trouvait dans le

25 bâtiment de l'ambassade, mais plus tard, nous avons déménagé.

26 Q. Auprès de cette ambassade donc, quand on vous a posé une question hier

27 pour savoir combien de personnes y travaillaient, vous avez dit qu'il y

28 avait environ une vingtaine de personnes qui y travaillaient - peut-être

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1 certains d'entre eux travaillaient d'ailleurs pour le consulat - mais

2 combien d'entre eux étaient des Croates de Bosnie, venant de Bosnie-

3 Herzégovine, donc ?

4 R. Je ne le sais pas.

5 Q. Vous avez travaillé pendant un an et vous n'aviez pas de collègues qui

6 venaient de Bosnie-Herzégovine et qui étaient d'origine croate ? Très bien.

7 Qu'en est-il des Serbes, y aurait-il eu des Serbes ?

8 R. Je ne le sais pas.

9 Q. Très bien. Donc, au vu de vos réponses, je vois que dans votre propre

10 service, vous traitiez des réfugiés, il y avait même des réfugiés qui

11 étaient d'origine croate, et pourtant, il n'y avait pas le moindre Croate

12 de Bosnie-Herzégovine qui aurait travaillé avec vous dans le même service ?

13 R. Je ne l'ai jamais dit. Je ne le sais tout simplement pas.

14 Q. Vous étiez combien ? Je ne veux pas passer trop de temps là-dessus,

15 mais combien de personnes travaillaient avec vous ? Vous avez dit hier

16 qu'en tout, à l'ambassade, il y avait 20 personnes, donc vous n'aviez pas

17 énormément de collègues qui travaillaient dans votre service. Parmi les

18 collègues de votre service, vous ne savez absolument pas s'il y en avait un

19 ou plusieurs qui étaient d'origine croate ?

20 R. Je n'avais que six ou sept employés. Je sais que certains disposaient

21 de la citoyenneté de la République de Croatie. Je ne sais pas s'ils se

22 prononçaient en tant que Croates, voire Musulmans ou Serbes. Je vous

23 affirme que nous ne nous sommes pas entretenus sur ce sujet entre nous.

24 Q. Très bien. J'ai encore une question que j'aimerais vous poser à ce

25 propos. Il suffit de toute manière de regarder les noms des personnes, la

26 plupart du temps, cela permet de savoir d'où ils viennent. On peut savoir

27 ainsi si une personne est musulmane ou si elle n'est pas musulmane, au

28 moins. C'est peut-être plus difficile pour savoir qui est Croate et qui est

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1 Serbe, mais même là, je pense que c'est assez simple, quand même, de savoir

2 qui est qui, et donc, le nom permet souvent de connaître l'identité --

3 l'ethnie, quoi, enfin, surtout le prénom, n'est-ce pas ?

4 R. Il est juste de dire que les Croates, le Musulmans et les Serbes ont

5 des noms caractéristiques. En réalité, les Musulmans ont des noms

6 spécifiques.

7 Q. Bien. Il y a deux documents qui semblent être assez identiques. Il

8 s'agit du 1D 01580, et l'autre, c'est le 1D 1581. Ce sont des documents qui

9 sont assez identiques, en tout cas à premier abord. Le 81 semble être la

10 lettre qui a un en-tête, l'autre semble être la lettre que vous avez donnée

11 au bureau du Procureur. C'est une lettre en date du 6 avril 1994 qui émane

12 de M. Rebic, donc, du

13 Dr Rebic, qui est donc le chef du bureau des Réfugiés et Déplacés. Le

14 voyez-vous ?

15 R. J'ai le document sous les yeux, en effet.

16 Q. Bien. On va peut-être en regarder qu'un seul de ces documents, ce sera

17 plus simple. Nous allons, par exemple, nous servir de votre propre

18 document, celui que vous avez fourni, donc, celui qui finit par 580. Donc,

19 déjà : "Objet : instructions portant sur l'abolition du statut de réfugié

20 relatif aux personnes venant de la République de Bosnie-Herzégovine,

21 Mostar, explications supplémentaires." Donc, on a compris l'objet, déjà.

22 Maintenant, passons au troisième paragraphe. Il est écrit, et je cite

23 : "De ce fait, tous les réfugiés qui peuvent rentrer chez eux devraient le

24 faire, étant donné que leurs villes ne sont plus menacées par l'agression

25 et par les activités militaires," fin de citation et "Loi sur les personnes

26 déplacées et réfugiées -- statut des personnes déplacées et des réfugiés,"

27 article 2, paragraphe 1. Donc, on n'a même personnes besoin de regarder la

28 loi croate, puisque elle est citée ici, et elle semble extrêmement

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1 similaire au texte que nous avons étudié précédemment venant de BiH, le

2 texte que vous êtes -- dont vous vous serviez au départ dans votre premier

3 poste.

4 Ensuite, on continue, et je lis le troisième paragraphe : "Et si

5 leurs maisons n'ont pas été endommagées de façon à rendre leur séjour

6 impossible." Donc, cela signifie que si leur maison est complètement

7 endommagée, qu'ils ne peuvent pas ré emménager dans leurs maisons, le

8 statut continue à leur être accordé; c'est bien cela ?

9 R. Ce qui est exact, enfin, je ne puis que confirmer ce que ce courrier

10 nous dit.

11 Q. Bien. Au paragraphe suivant, il y a une recommandation qui déclare à

12 peu près la même chose, et je cite : "La recommandation du bureau est de

13 n'abolir le statut de réfugié que pour -- de ne pas abolir," - c'est assez

14 compliqué - "de ne pas abolir le statut de réfugié dans le cas de personnes

15 qui ne peuvent pas rentrer chez eux parce que leur vie est encore menacée à

16 cause de l'agression ou si leur maison et leur appartement ont été

17 détruits, ce qui fait qu'ils ne peuvent plus y ré emménager." Donc, on

18 parle non seulement du fait que les maisons aient été détruites, mais aussi

19 s'il y a encore agression, donc si ces personnes sont encore menacées, et

20 dans ce cas-là, la République de Croatie ne veut pas mettre leurs vies en

21 danger. C'est une lettre en date du 6 avril 1994, n'est-ce pas ?

22 R. C'est bien ce qui est écrit, ce que vous venez de dire, exact.

23 Q. Passons à la page suivante, s'il vous plaît. Troisième paragraphe à

24 nouveau. On pourrait servir de pièce contextuelle, bien qu'on pourrait

25 peut-être m'accuser de [imperceptible], et je cite : "Le retour de réfugiés

26 croates de Slovénie, de Hongrie et d'Autriche vers la Croatie s'est aussi

27 effectué de la même façon, ce qui fait que, sur les 36 000 réfugiés croates

28 qui existaient -- qui résidaient en Slovénie, il n'y en a plus que 1 000,

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1 la plupart d'entre eux venant de Vukovar, ou il est si -- toujours

2 impossible de revenir. Sur les 56 000 réfugiés croates en Hongrie, il n'y

3 en a -- il n'y a plus maintenant que 2 006, venant de la région de Baranja,

4 région où le retour est impossible. Il n'y a presque plus de réfugiés

5 croates venant de Croatie en Autriche, étant donné que la plupart d'entre

6 eux sont rentrés en Croatie et ils reviennent aussi petit à petit

7 d'Allemagne," fin de citation.

8 Donc, on voit, en tout cas, que le Dr Rebic semble nous dire que

9 d'autres pays semblent avoir adopté une version assez identique de la loi

10 adoptée au Croatie et qui existait déjà en Bosnie-Herzégovine en 1992, loi

11 par laquelle les réfugiés ayant trouvé asile dans les pays avoisinants

12 devaient rentrer chez eux du moment que ce retour était -- ne menaçait pas

13 leur vie, et qu'ils pouvaient séjourner de façon correcte une fois rentrés

14 chez eux. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

15 R. Je ne saurais vous le dire, je ne suis pas un expert en droit. Je

16 suppose que ce que vous dites est exact, mais c'est une chose que,

17 personnellement, j'ignore. Je n'ai pas travaillé à Makja [phon].

18 Q. Très bien, mais j'ai une question de suivi, quand même, à ce propos.

19 Quand vous avez reçu ce texte, vous-même ou l'ambassadeur Turkovic ont reçu

20 cette lettre, envoyée le 6 avril 1994, alors, avez-vous contesté le passage

21 où le Dr Rebic déclare et affirme que les réfugiés croates qui étaient en

22 Slovénie, en Hongrie et en Autriche ont dû rentrer chez eux ? Avec les

23 chiffres qui nous ont -- et qui nous sont donnés ici, alors, est-ce que

24 vous avez contesté ce qui est dit -- est-ce que vous avez essayé de vous

25 renseigner, ou est-ce que vous avez pris -- vous l'avez pris au mot ?

26 J'aimerais bien que vous me répondiez soit par oui, soit par non. Vous ne

27 souvenez-vous pas ?

28 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens plus. Je pense que c'est la première

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1 fois que je vois ce document.

2 Q. Etes-vous étonnée quand même de savoir que c'est un document quand même

3 qui est arrivé dans le dossier que vous nous avez donné vous, Madame, et

4 Mme Turkovic, vous avez donné au bureau du Procureur surtout, puisque nous

5 les avons eus par le biais de la communication. Vous avez donné des

6 documents à l'Accusation pour préparer votre déposition, vous devez quand

7 même donner une déclaration sous serment. Vous n'avez même pas lu ces

8 documents pour savoir exactement ce qui était étayé par ces documents et

9 ces documents qui permettraient ensuite d'étayer vos propos, bien sûr. Vous

10 n'avez rien lu. Je suis très étonné.

11 Je peux vous donner le numéro de pages si l'Accusation n'a besoin. Je peux

12 passer à une question suivante.

13 M. SCOTT : [interprétation] Je soulève une objection. Je pense que ceci est

14 tout à fait une déformation de ce que le témoin a dit. Quant à savoir ce

15 que le document a vu -- ce que le témoin a vu ou pas vu, c'est si -- c'est

16 un document sur lequel qui a été donné par quelqu'un d'autre très

17 certainement. Le bureau du Procureur a des documents qui viennent d'un

18 millier de sources. Si le témoin est en train de -- le conseil est en train

19 de dire que cette personne a fourni ce document, dans ce cas-là je suis

20 d'accord, mais il faudrait le savoir quand même.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Nous n'avons pas de problème. J'aimerais que

22 l'on voit la pièce -- on a une pièce, mais elle est uniquement en B/C/S.

23 Nous allons vous donner votre exemplaire si nécessaire. Il s'agit de la

24 pièce P 01222, numéro ERN 0328-7231. Malheureusement, je perds du temps,

25 peut-être l'Huissier pourrait-il m'aider donc pour montrer ce document qui

26 n'est qu'en B/C/S ?

27 Peut-être nous -- s'il vous plaît.

28 Q. Madame, dites-nous, s'il s'agit d'un document que vous avez

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1 fourni vous-même à l'Accusation, vous ou Mme Turkovic, avec qui vous

2 travaillez extrêmement étroitement à propos de ces sujets sur lesquels vous

3 déposez ? Donc, s'agit-il d'un document que vous avez fourni ?

4 M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, mais elle n'est absolument pas

5 responsable des documents qui ont été fournis par

6 Mme Turkovic. Le conseil est en train d'essayer de la récuser en disant que

7 ce sont les documents qu'elle a bel et bien donnés. Mais ce sont uniquement

8 les documents qu'elle a donnés qui doivent être pris en compte ici.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Certes, certes. Mais je tiens à rappeler

10 quand même à la Chambre de première instance que ce témoin a donné à Mme

11 Turkovic des documents qui venaient de ses propres archives. Ensuite, Mme

12 Turkovic a donné ces documents au bureau du Procureur lors de sa

13 déposition, lors de sa déclaration. Donc, c'est assez compliqué. J'essaie

14 de savoir qui a fait quoi ?

15 Q. Donc, est-ce que vous reconnaissez ce document ? Répondez par oui ou

16 par non, s'il vous plaît.

17 R. Ces faits-là ne me sont pas inconnus. Le document physiquement parlant

18 donc tel je n'en suis pas du tout sûre de l'avoir vu auparavant.

19 Q. Très bien. Très bien. Donc, maintenant, le 6 avril 1984, est-ce que

20 vous travailliez encore à l'ambassade de BiH à Zagreb ?

21 R. [aucune interprétation]

22 Q. Très bien. Pour ce qui est donc des sujets portant sur les réfugiés ou

23 les déplacés, surtout les réfugiés d'ailleurs, puisque c'était

24 principalement ce qui -- c'étaient des réfugiés qui venaient de Bosnie-

25 Herzégovine en Croatie, donc, je pense que tout ce qui traitait de réfugiés

26 et qui émanait du bureau du Dr Rebic passait par vos mains, n'est-ce pas ?

27 R. Oui, ça aurait dû arriver à moi, mais je n'affirme pas que c'est

28 certainement arrivé à moi.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais Me Karnavas, un petit renseignement de la part

2 de la Chambre.

3 Mon collègue, le Juge Prandler m'a faire remarqué que vous avez déjà

4 parlé presque depuis une heure, comme vous le savez, on avait donné six

5 heures à la Défense donc une heure pour chacun. Est-ce que les autres vous

6 ont donné du temps ?

7 M. KARNAVAS : [interprétation] -- content de savoir que le Juge Prandler

8 tient le chronomètre. En effet, j'ai obtenu un peu de temps supplémentaire.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

10 M. KARNAVAS : [interprétation] Je crois que j'ai deux heures en tout à peu

11 près. Peut-être un petit peu plus même. Je surveille l'horloge. Je

12 surveille la pendule et j'aurais un petit peu de temps encore demain. Vous

13 voulez savoir quelle Défense m'a accordé un peu de temps peut-être ?

14 Je peux vous le dire, enfin, j'ai deux heures, en tout cas. J'ai deux

15 heures. Il faut me prendre aux mots pour l'instant.

16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. Avant de passer à autre

17 chose -- à un autre document.

18 Madame le Témoin, c'est quand même assez étrange, tout au début du deuxième

19 paragraphe de cette lettre, il est écrit : "Qu'il y a des réfugiés --"

20 peut-être qu'il faudrait mettre ce terme entre guillemets, qui vivent en

21 partie à Mostar et aussi sur la côte. C'est comme s'ils avaient des grands

22 week-ends. C'est comme s'ils passaient un long week-end à la plage par

23 semaine. C'est ce qui est écrit en tout cas. C'est assez cynique

24 d'ailleurs. Pouvez-vous nous

25 confirmer ? Est-ce que vous êtes au courant de tout cela ? Aviez-vous

26 connaissance de ce qui peut -- de personne ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] La façon dont je comprends ceci est ça a été

28 confirmé par M. Adalbert Rebic à l'occasion d'un contact direct à une

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1 réunion, c'est que cette déclaration se rapporte à des citoyens de l'ABiH

2 croates qui ont fui le secteur de Mostar et que l'instruction intégrale

3 était destinée à eux. Et que point n'était nécessaire pour les membres de

4 leurs familles de rester des réfugiés parce qu'il y avait toutes les

5 conditions de réunies pour qu'ils rentrent en toute sécurité à Mostar.

6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais personnellement, avez-vous

7 connaissance de ce type de "réfugiés," ces réfugiés du week-end, si je puis

8 dire ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas eu de contact avec eux, eux ne

10 m'ont pas contactée moi.

11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. KARNAVAS : [interprétation] Pour clarifier la situation, peut-être que

13 je peux vous faire remarquer qu'il y est écrit : "Une partie de la famille

14 habite dans un endroit et qu'une autre partie de la famille habite

15 ailleurs. Alors, peut-être qu'il y en a qui font la navette, certes.

16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais regardez la ligne suivante :

17 "Une partie de la semaine la famille habite à Mostar et le reste de la

18 semaine sur la côte." Ça c'est la deuxième phrase. C'est celle-là qui m'a

19 quand même interpellé.

20 M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends.

21 Q. Mais quand vous vous êtes entretenu avec M. Rebic à ce propos, et

22 d'ailleurs, j'en ai parlé lors de l'interrogatoire principal, je n'ai peut-

23 être pas soulevé mon objection avec assez de force, mais quand vous avez eu

24 cette réunion avec le Dr Rebic, c'était en novembre, n'est-ce pas, quand

25 vous avez parlé de toutes ces choses, n'est-ce pas ?

26 R. Est-ce que vous pouvez voir cela dans un document pour nous donner le

27 mois, la date ?

28 Q. Très bien. Très bien. Ma collègue va se renseigner, mais vous vous

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1 souvenez quand même avoir rencontré le Dr Rebic en avril 1994 à propos de

2 ceci, aux environs du 6 avril 1994 ? Vous êtes-vous entretenue

3 personnellement avec le Dr Rebic, à ce moment-là ? J'imagine que si oui,

4 vous avez dû ensuite rédiger un document quelconque pour rendre compte.

5 R. Des contacts personnels, non. Du contact personnel, non, non. Bon, pas

6 de réunions.

7 Q. Très bien. Très bien. Donc, ma collègue va se renseigner, nous allons

8 passer à autre chose.

9 Passons au document -- on m'a dit qu'il s'agit de la pièce

10 P 10059, page 31, ligne 14, document qui vous a été montré. Vous ne verrez

11 pas dans mon dossier. C'est un document qui vous a été fourni par

12 l'Accusation dans le classeur de l'Accusation. Ne perdons pas de temps. Ce

13 n'est peut-être pas celui-là, je vais passer à autre chose pour ne pas

14 perdre de temps, car j'ai un autre point à aborder.

15 Le document qui m'intéresse est le 1D 01953 -- 1593, donc 1593, c'est une

16 lettre datée du 7 avril 1994, signée par le Dr Jadranko Prlic. Le

17 connaissiez-vous à l'époque ?

18 R. Rien que par les médias. Je ne l'ai jamais connu personnellement.

19 Q. Une lettre envoyée à un dénommé Valentic, le connaissiez-vous ?

20 R. Pas en personne mais j'ai entendu parler de M. Valentic.

21 Q. Est-ce que c'était le président du gouvernement de la République de

22 Croatie. Je pense que quand vous hochez de la tête, cela veut dire que

23 c'était bien cela ?

24 R. Oui, je savais que c'était le premier ministre.

25 Q. Très bien. Nous allons regarder cette lettre ensemble, je vais en lire

26 certains passages : "Cher Monsieur le Président, pour ce qui est de la

27 décision du bureau de Personnes déplacées et des Réfugiées de la République

28 de Croatie, à propos de l'abolition du statut de réfugié pour toutes les

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1 personnes venant de Mostar," ensuite, il y a des chiffres qui suivent : "je

2 tiens à vous informer de ce qui suit :

3 "La décision a été prise sans consultation préalable et sans

4 négociation avec le gouvernement de la HR HB qui était absolument

5 nécessaire, étant donné les accords conclus précédemment.

6 "Après cette décision, le HCR et l'ambassade de BiH en République de

7 Croatie ont été informés de cette décision, mais pas le bureau des

8 Personnes déplacées et des Réfugiés du HR HB qui a appris la teneur de la

9 décision de la bouche des réfugiés ainsi que par les médias.

10 "Suite aux efforts déployés par M. Martin Raguz, directeur du bureau

11 des Personnes déplacées et des Réfugiés de la HR HB, qu'une conversation

12 téléphonique a été organisée avec un M. Adalbert Rebic, 1er avril 1994,

13 ainsi qu'une réunion avec le chef du bureau régional des Personnes

14 déplacées et Réfugiées à Makarska, M. Ljubo Saric, (le 6 avril 1994).

15 "Aujourd'hui, le retour des réfugiés de Ploce a été organisé et

16 seront poursuis avec des détails.

17 "Étant donné cette décision soudaine et non annoncée, les organes

18 compétents de la HR HB n'ont pas pu préparer, n'ont pas pu s'organiser de

19 façon adéquate pour le retour des réfugiés vers la ville de Mostar ou pour

20 leur garantir un retour sûr et un hébergement sûr ayant surtout en tête les

21 tensions extrêmement négatives entre les représentants de différentes

22 nations qui sont encore présentes.

23 "Veuillez s'il vous plaît donc annuler la décision et ce qui est

24 aussi demandé par les représentants du gouvernement de la République de BiH

25 à Sarajevo avec qui nous avons parlé pour la première fois hier, à propos

26 de la mise en œuvre de la constitution de la Fédération."

27 J'aimerais savoir si vous étiez au courant de tout cela ?

28 R. Non, c'est la première fois que j'entends parler.

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1 Q. Bien. C'est la première fois que vous voyez ce document j'imagine ?

2 R. C'est exact.

3 Q. J'imagine que si le Dr Prlic, compte au président du gouvernement de

4 Croatie, que les représentants du gouvernement de la République de Bosnie-

5 Herzégovine à Sarajevo ont une opinion bien particulière à propos de ces

6 personnes déplacées et de ces réfugiés qui viennent de BiH, j'imagine bien

7 que vous, à votre poste, vous traitiez quand même de ces points en Croatie.

8 Donc, vous auriez dû être informé de cela quand même, étant donné votre

9 poste ?

10 M. SCOTT : [interprétation] La question était vraiment compliquée. Quel est

11 le raisonnement ? Pourquoi suggérez que parce que M. Prlic -- donc le

12 président -- parce que M. Prlic écrit au président de la Croatie --

13 pourquoi demander à ce témoin qu'elle ou la persuader qu'elle aurait dû

14 absolument avoir une copie de ce document ?

15 M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai demandé si elle avait été en copie,

16 c'est tout.

17 M. SCOTT : [interprétation] Écoutez, n'abusez pas.

18 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais passer à autre chose.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez votre dernière question parce que c'est

20 l'heure.

21 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Monsieur le Président. Donc, je

22 vais poser une question très rapide.

23 Q. Au vu de ce document on a quand même l'impression que les gens de la HR

24 HB de l'Herceg-Bosna n'avaient pas vraiment envie de voir revenir des

25 réfugiés et les déplacés dans la zone de Mostar, et ce, au moins avant que

26 leur sécurité puisse être assurée. C'est quand même une conclusion qu'on

27 peut tirer de ce que je vous ai lu, n'est-ce pas ?

28 M. SCOTT : [interprétation] La question est-elle de savoir si c'est ce qui

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1 est écrit dans la lettre ou si ce sont les mesures du gouvernement ? Si

2 c'est pour dire que c'est ce qui est dans la lettre, on peut tous la lire,

3 ça c'est certain. Mais la question est-elle de savoir si c'est bien les

4 mesures prises par la République croate d'Herceg-Bosna. J'affirme que la

5 lettre dit bien ce qu'elle dit. Je ne conteste pas.

6 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais comment est-ce qu'on peut parler d'une

7 mesure si elle n'est pas au courant des communications ?

8 M. SCOTT : [interprétation] Absolument.

9 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais j'essaie de vous montrer que

10 l'Accusation veut montrer les documents pour vous montrer une version des

11 faits et j'essaie de vous montrer tous les documents pour en arriver à la

12 bonne conclusion. Je me demande pourquoi on n'a pas plus de documents de ce

13 type afin d'avoir quand même une approche beaucoup plus équilibrée. Mais je

14 pense que je vais m'en arrêter ici.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Répondez à la question que Me Karnavas vous a posée.

16 Il a demandé votre opinion sur le fait le courrier de M. Prlic adressé au

17 premier ministre de la République de Croatie fait état du fait que les

18 réfugiés qui sont actuellement en Croatie pourraient revenir à Mostar, mais

19 qu'il faut d'abord s'occuper des conditions de sécurité pour que leur

20 retour puisse effectuer. Alors, qu'est-ce que vous pensez de la teneur de

21 ce courrier ? C'est la question que l'avocat vous a posée.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je suis dans la confusion. Je ne

23 sais pas exactement ce qu'on m'a demandé. Il m'a semblé devoir donner une

24 évaluation de ma part pour ce qui est de savoir ce que les autorités là-bas

25 ou le gouvernement avait souhaité obtenir. Est-ce qu'on peut être un peu

26 plus précis ?

27 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, reposez votre question et elle

28 répond et on arrêtera tout de suite.

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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais essayer d'être simple.

2 Q. Lors de l'interrogatoire principal, on vous a montré des passages de

3 votre déclaration où vous étiez en train de donner votre opinion sur les

4 intentions des différentes personnes et des différents représentants

5 officiels. Maintenant, je vous ai montré un autre document, un document

6 concret qui vient du Dr Prlic et qui est envoyé au président de la

7 République de Croatie. Vous dites que vous ne l'avez jamais vu. Alors,

8 maintenant, vous l'avez vu; pouvez-vous en tirer des conclusions dans un

9 sens ou dans un autre ? Je pense que là, je suis assez simple, mais je ne

10 peux pas être beaucoup plus simple.

11 R. Peut-être que je pourrais en tirer quelques conclusions, mais je dois

12 vous signaler le fait que je n'ai jamais émis de conclusion dans mes

13 rapports. Je ne faisais que transmettre les informations que j'avais

14 obtenues. Si vous le souhaitez, je peux relire cette lettre et essayer de

15 l'analyser. Mais c'est tout ce que je peux faire.

16 Q. Très bien. De toute façon, il suffit de dire que vous n'étiez pas au

17 courant de tout ça.

18 R. [aucune interprétation]

19 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Je vais m'en arrêter là, Monsieur

20 le Président, et nous reprendrons demain.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : -- alors, l'audience reprendra demain à 9 heures. Je

22 vous remercie.

23 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le 20 juin 2007, à 9

24 heures 00.

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