Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 4 février 2008

  2   [Audience de Règle 98 bis]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   [L'accusé Pusic n'est pas présent dans le prétoire]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, toutes les

 10   personnes présentes dans le prétoire. Il s'agissait de l'affaire IT-04-74-

 11   T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 12   Merci, Messieurs les Juges.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je salue toutes les personnes présentes ou les

 14   représentants de l'Accusation, Mmes et MM. les avocats, MM. les accusés

 15   ainsi que toutes les personnes de cette salle qui nous assistent.

 16   Je constate, pour les besoins du transcript, que M. Pusic est absent.

 17   Aujourd'hui va commencer l'intervention de l'Accusation concernant sa

 18   réponse à la procédure de l'article 98 bis, étant précisé que la semaine

 19   dernière c'est la Défense qui était intervenue. Alors, je vois que M. Scott

 20   est prêt, il a le pupitre, donc, je lui donne la parole.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 22   Juges, ainsi que toutes les personnes qui sont dans le prétoire.

 23   Plaise aux Juges, avant d'aborder la question des arguments de la Défense,

 24   et en particulier, je souhaite évoquer le critère qui sera appliqué par les

 25   Juges de la Chambre lorsqu'elle tiendra compte de l'article 98 bis et des

 26   éléments présentés par l'Accusation lors de la présentation de ses moyens.

 27   La version actuelle de 98 bis, que chacun connaît s'applique aux

 28   chefs plutôt qu'aux charges ou aux infractions, c'est ainsi que ceci a été

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  1   appliqué dans plusieurs cas, récemment dans l'affaire Milutinovic en mai

  2   2007. Ceci précise que : "A la fin de la présentation des moyens à charge,

  3   la Chambre de première instance, que ce soit oralement et après avoir

  4   entendu les arguments oraux des parties, prononcera un jugement sur un chef

  5   d'accusation si aucun élément n'existe qui permettrait de condamner en

  6   vertu de ce chef d'accusation."

  7   Cette Règle doit être appliquée séparément par rapport à chaque

  8   accusé et par rapport à chaque argument 98 bis. La Chambre de première

  9   instance, dans l'affaire Milutinovic, a clairement indiqué la voie à

 10   suivre, je cite : "Le critère qui doit être appliqué est de savoir si, oui

 11   ou non, il existe des éléments de preuve sur lesquels on peut se reposer

 12   pour autant qu'il soit accepté qu'un Tribunal de fait puisse être convaincu

 13   au-delà de tout doute déraisonnable de la culpabilité d'un accusé compte

 14   tenu du chef en question. Le critère ne porte pas sur le fait de savoir si

 15   la Chambre de première instance condamnerait au-delà de tout doute

 16   raisonnable mais si la Chambre pourrait le faire."

 17   Ceci a été statué dans l'affaire Milutinovic le 18 mai 2007.

 18   La Chambre de première instance a de surcroît indiquer que, dans

 19   l'application de l'article 98 bis, la Chambre de première instance ne

 20   s'engage pas à évaluer la crédibilité des témoins, à moins que des éléments

 21   "sont si improbables que l'on ne puisse pas condamner pour ce chef même

 22   lorsque les éléments de preuve sont évalués au sens le plus haut du terme."

 23   L'Accusation, Messieurs les Juges, sauve [phon] votre respect, argue du

 24   fait que des éléments n'ont pas été présentés par l'Accusation et tombe

 25   dans cette catégorie, aucun élément de preuve ne peut être considéré comme

 26   tout à fait "difficile à croire." Subsidiairement, même si la Chambre

 27   estime qu'un élément de preuve tombe dans cette catégorie, quand bien même

 28   que de tels éléments auraient été présentés par l'Accusation ces éléments

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  1   sont très limités et leur portée est extrêmement limitée quand bien même

  2   cela existerait cela n'aurait aucune incidence sur les éléments à charge

  3   présentés par l'Accusation.

  4   De surcroît, hormis peut-être encore une fois dans les cas les plus

  5   extrêmes, l'article 98 bis n'évoque pas le fait de soupeser les éléments de

  6   preuve, à savoir faire peser les éléments de preuve de l'Accusation contre

  7   les éléments présentés par l'Accusation lors du contre-interrogatoire des

  8   témoins. Il ne s'agit pas d'un moment où la Chambre en fait prend les

  9   éléments présentés à charge et les soupèse par rapport aux éléments

 10   présentés par la Défense. Ceci n'est pas le rôle joué par l'article 98 bis.

 11   Pour finir, l'article n'exige pas que la Chambre soit convaincue qu'il y

 12   ait suffisamment d'éléments de preuve à l'appui de chaque chef d'accusation

 13   qui représenterait -- chaque charge représentant un chef d'accusation comme

 14   cela a été indiqué au cours des dernières semaines.

 15   La Chambre de première instance se préoccupe plus particulièrement des

 16   chefs d'accusation, quand bien même les faits incriminés ou modes

 17   responsabilité sont distincts. De surcroît, comme ceci est indiqué aux

 18   paragraphes 221 à 228 de l'acte d'accusation modifié, ces accusations sont

 19   accusés de plus d'une forme de responsabilité. L'Accusation argue du fait

 20   que les éléments de preuve documentaires et testimoniaux qui ont été

 21   présentés au cours de l'interrogatoire principal établissent de façon

 22   irréfutable la criminalité pénale de chaque accusé eu égard à chaque chef

 23   d'accusation de l'acte d'accusation, à savoir toute une série de crimes ont

 24   été commis sur l'ensemble du territoire de ce qui était l'Herceg-Bosna

 25   entre 1992 et 1993; et que ces crimes ont été dirigés contre la population

 26   musulman de Bosnie -- ceci faisait partie d'une campagne systématique,

 27   délibérée et de grande envergure; l'objectif de cette campagne consistait à

 28   assujettir, et déplacer et à nettoyer les Musulmans de Bosnie ainsi que

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  1   d'autres personnes qui n'étaient pas de nationalité croate du territoire

  2   qui formait à ce moment-là l'Herceg-Bosna; chaque accusé porte une

  3   responsabilité pénale pour chacun de ces crimes.

  4   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, l'Accusation n'a pas

  5   l'intention de vous présenter les éléments dans le détail et de façon

  6   longue pour prouver tous les crimes qui ont été répétés, à commencer par le

  7   mois d'octobre 1992 à Prozor et qui se sont poursuivis jusqu'à la fin de

  8   l'année 1993 et voire même au début de l'année 1994. Les méthodes utilisées

  9   -- les moyens utilisés pour réaliser ce déplacement de la population

 10   musulman est restée cohérente tout au long de cette période, que ce soit

 11   par assassinat, emprisonnement, expulsion, destruction, pillage, la seule

 12   modification c'est la période en question et le niveau d'atrocité.

 13   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, d'après la façon dont nous

 14   comprenons les éléments, les accusés ont présenté des arguments qui ne sont

 15   pas réfutables conformément à l'article 98 bis, nous ne sommes pas d'accord

 16   avec les faits qui seront jugés plus tard, pour nous les arguments ne

 17   remettent pas en question le fait incriminé -- ils ne présentaient que des

 18   éléments généraux. Par exemple, l'argument de Coric sur les viols, la

 19   Défense n'argue pas du fait qu'il n'y a pas eu de viol mais nie la

 20   responsabilité de Coric dans ces derniers sur un seul élément. Autrement

 21   dit, il n'y a pas eu des rapports là-dessus, c'est ce que j'ai entendu la

 22   semaine dernière, rien ne pouvait être fait et ce qui aurait pu être fait a

 23   été fait, et cetera, mais on n'a pas indiqué -- il n'a pas été indiqué que

 24   les viols n'ont pas eu lieu. L'Accusation avance que, compte tenu des

 25   arguments présentés par la Défense la semaine dernière, ce que nous

 26   appelons en fait les faits incriminés, n'ont pas été remis en cause. Et

 27   c'est pour cette raison - et en grande partie pour cette raison - que

 28   l'Accusation ne va pas aborder ceci dans le détail autrement dit les faits

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  1   incriminés et les éléments de preuve à l'appui, sauf lorsque cela porte sur

  2   des questions qui ont été soulevées par les accusés qui ont présenté les

  3   arguments. Nous n'allons pas non plus évoquer tout ce qui est peut être

  4   associé aux éléments de preuve et des associations à chaque accusé qui a

  5   présenté des arguments, nous n'allons pas non plus aborder la question de

  6   toutes les formes de responsabilité. Pour ce qui est de l'article 98 bis,

  7   et ce qu'il les concerne ici, la seule question qui nous intéresse est de

  8   savoir si chaque chef d'accusation peut être maintenu pour chaque accusé

  9   compte tenu d'une théorie ou sur la base de leur responsabilité.

 10   Et pour cette raison, l'Accusation va se concentrer plus particulièrement

 11   sur l'existence et l'opération vu l'entreprise criminelle commune et les

 12   formes 1 et 3 de ces éléments de responsabilité. Nous n'allons pas aborder

 13   la question de la responsabilité d'un des accusés conformément à l'article

 14   7(3), car nous avançons que la Chambre ne doit pas tenir compte de cet

 15   élément-là pour établir le fait que chaque chef d'accusation sera retenu et

 16   maintenu contre les accusés.

 17   Nous allons donc rechercher les instructions de la Chambre à cet égard :

 18   l'Accusation va brièvement aborder la question de l'entreprise criminelle

 19   commune et aborder certaines autres affaires qui ont été jugées devant ce

 20   Tribunal, de façon à ce que les Juges puissent tenir compte de la

 21   jurisprudence devant ce Tribunal lorsqu'elle tiendra compte des arguments

 22   de l'Accusation.

 23   Deuxièmement, nous allons présenter les éléments de cette affaire dans le

 24   détail, un aperçu, ses caractéristiques principales et l'entreprise

 25   criminelle commune. Encore une fois, on ne tiendra pas des faits incriminés

 26   mais on tiendra compte des éléments de preuve présentés par l'Accusation

 27   dans leur ensemble, après quoi, l'Accusation traitera ensuite les arguments

 28   particuliers qui ont été présentés par les équipes de la Défense Petkovic,

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  1   Coric et Pusic.

  2   Alors, pour ce qui est de termes utilisés par le Tribunal et la

  3   jurisprudence qui existe jusqu'à ce jour, dans l'affaire Krajisnik,  la

  4   Chambre de première instance a décidé que le principal objectif des

  5   dirigeants serbes de Bosnie, les Juges de la Chambre voudront peut-être

  6   tenir compte des parallèles qui ont été -- des parallèles qui existent

  7   entre les objectifs des dirigeants croates de Bosnie dans l'affaire

  8   Krajisnik, concernant les dirigeants serbes de Bosnie, la Chambre pourra

  9   aborder la question sous l'angle de l'objectif central : "De recomposer sur

 10   un plan éthique les territoires placés sous ce contrôle en chassant de

 11   façon dramatique et en réduisant une partie de la population musulmane de

 12   Bosnie qui y vivait ainsi que des Croates de Bosnie."

 13   Ils vont découvrir que les crimes d'expulsion et de transfert forcé :

 14   "C'étaient les moyens utilisés pour mettre en œuvre cet objectif commun

 15   pour déplacer par la force les Musulmans de Bosnie, les Croates de Bosnie

 16   de régions importantes de Bosnie-Herzégovine," et on fait référence à ces

 17   crimes comme étant les "crimes originaux," ce qui correspond à ce que

 18   j'appelle l'entreprise criminelle commune forme numéro I. Ceci reprend

 19   l'arrêt dans l'affaire Krajisnik au paragraphe 1097.

 20    Au-delà de ces crimes de l'acte d'accusation dans l'affaire Krajisnik,

 21   mais l'accusé a été accusé de persécution, de meurtre, d'extermination,

 22   d'expulsion et de transfert forcé. En supposant les crimes restant, ceux

 23   qui tombaient dans les catégories I et III de l'entreprise criminelle

 24   commune, la Chambre de première instance a noté que : "Les crimes soient

 25   originaux, répondaient à un objectif commun ou qu'ils aient été ajoutés par

 26   la suite, bien sûr, relèvent des éléments de preuve et non pas d'analyse

 27   logique."

 28   La Chambre de première instance avance, par conséquent, ce qu'on

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  1   appelle une "approche strictement empirique" ne consiste à spéculer sur le

  2   crime s'il reprend l'objectif initial de l'entreprise criminelle commune,

  3   mais établit sous la forme d'un concept l'objectif commun qui devient alors

  4   un moyen criminel. C'est ce que précise l'arrêt Krajisnik au paragraphe

  5   1098.

  6   Il explique les moyens par lesquels un plan commun peut se développer en

  7   déclarant : "Lorsque les moyens criminels se développent, l'objectif est

  8   prouvé lorsque les membres dirigeants de l'entreprise criminelle commune

  9   sont informés du nouveau type de crime qui ont été commis conformément à la

 10   mise en œuvre de cet objectif commun et ne prend pas les mesures effectives

 11   pour empêcher que de tels crimes soient commis et persiste dans la mise en

 12   œuvre de l'objectif commun de l'entreprise criminelle." Lorsque ceci

 13   arrive, la Chambre de première instance indique que : "Les membres de

 14   l'entreprise criminelle commune ont accepté que ces moyens soient déployés

 15   étant donné que la mise en œuvre de l'objectif commun ne peut plus être

 16   compris comme étant une commission stricte et limitée des crimes

 17   originaux." Ceci reprend le paragraphe 1098 de l'arrêt Krajisnik.

 18   La Chambre de première instance a constaté que, si on l'accepte la

 19   commission de ce nouveau type de crime, et le fait que l'on contribue à

 20   nouveau à ces objectifs, cela ressemble à une intention, et la commission

 21   de ces crimes, qui a lieu par la suite, fait partie de l'entreprise

 22   criminelle commune et reprend la forme de responsabilité numéro I dans le

 23   cadre de l'entreprise criminelle commune.

 24   Si on applique ces critères, la Chambre de première instance, dans

 25   l'affaire Krajisnik, a décrété que la détention illégale de civils, le

 26   traitement cruel et inhumain de détenus, les meurtres, détention, abus

 27   sexuel, condition inhumaine de vie, meurtre de civils pendant les attaques

 28   entre les villes et les villages, extermination des Musulmans, pillage,

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  1   appropriation de biens, destruction de lieu culturel et de lieu de culte

  2   font partie de l'objectif commun de l'entreprise criminelle commune au fil

  3   des jours; parce que les dirigeants politiques de Bosnie savaient que ces

  4   crimes étant commis et n'ont pas cessé de mettre en œuvre leur programme de

  5   déplacement forcé et discriminatoire de la population même en tenant compte

  6   des crimes qui étaient rapportés, qui étaient commis, plutôt ont continué

  7   leur conquête de territoire et leur recomposition démographique.

  8   Ceci a été abordé de façon précise, Monsieur le Président, Messieurs les

  9   Juges, dans d'autres affaires mais également pour gagner du temps dans

 10   l'arrêt Krstic, on en parle très longuement. C'est le jugement rendu dans

 11   l'affaire Kovocka qui évoque des éléments similaires lorsque l'on tient

 12   compte des arguments 98 bis dans l'affaire Milutinovic.

 13   Je fais une pause et reprends la décision prise dans le cadre de l'affaire

 14   Milutinovic et reprend les éléments de l'entreprise criminelle commune

 15   numéro 3. Dans ce cas, les arguments présentés dans le cadre de l'article

 16   98 bis ou la décision a été prise, la Chambre précise que : "A la lumière

 17   des éléments de preuve discutés ici ainsi que compte tenu du sens d'un

 18   mouvement organisé de la population albanaise du Kosovo et le comportement

 19   de l'accusé par rapport à ces événements, la Chambre peut constater qu'il y

 20   a entreprise criminelle commune pour la période qui nous intéresse, dont le

 21   but était de déplacer par la force la population albanaise du Kosovo du

 22   Kosovo. De surcroît dans le cas où des crimes précis feraient l'objet d'un

 23   acte d'accusation comme le viol le meurtre, ceci ne faisait pas partie d'un

 24   plan commun, néanmoins c'était envisageable et prévisible que de tels

 25   crimes pourraient être commis au cours des expulsions massives de la

 26   population."

 27   Donc, en tenant compte de ces éléments de jurisprudence, je vais maintenant

 28   vous présenter les éléments de preuve à charge dans leur ensemble.

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  1   L'Accusation avance que les crimes qui ont été commis dans cette affaire,

  2   les crimes qui font l'objet de l'acte d'accusation indiquent qu'il y avait

  3   des dirigeants qui haut vers le bas avaient mis en place un programme

  4   politique et géopolitique, une stratégie que l'on peut appeler en réalité

  5   un gouvernement de Tudjman-Susak-Boban et Prlic parce qu'en réalité,

  6   c'était un système qui avait été mis en place. L'organisation, le pouvoir

  7   repris par Tudjman, Susak, Boban, Prlic ainsi que d'autres en fait était

  8   une opération où il y avait aucune fuite entre Zagreb et Mostar.

  9   Les événements allégués dans l'acte d'accusation qui se sont déroulés ont

 10   fait partie de la dissolution de l'ex-Yougoslavie. La Chambre connaît les

 11   éléments historiques. La Communauté européenne reconnaît la République de

 12   Croatie comme étant indépendante le 15 juin 1992, et les Nations Unies ont

 13   admis la Croatie comme étant membre le 22 mai 1992.

 14   Donc, au cours de ces événements, la Communauté croate d'Herceg-Bosna a

 15   décrété son existence, entité politique et territoriale sur ce qui était

 16   autrefois la République socialiste de Bosnie-Herzégovine. Comme le sait la

 17   Chambre, en août 1993, la Communauté croate d'Herceg-Bosna a déclaré

 18   qu'elle était une République croate d'Herceg-Bosna. Mate Boban était le

 19   président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna depuis sa création et a

 20   continué à être président de la République croate d'Herceg-Bosna jusqu'à la

 21   fin de l'année 1993 et après.

 22   Donc, différentes actions menées le 8 avril 1992 et le 15 mai 1992,

 23   différents dirigeants d'Herceg-Bosna y compris Mate Boban ont mis en place

 24   le Conseil de Défense croate ou le HVO qui était -- représentait les forces

 25   armées du HVO du gouvernement, qui ont décrit le HVO comme étant l'organe

 26   administratif exécutif et de défense suprême de l'Herceg-Bosna.

 27   Dans l'acte d'accusation modifié au paragraphe 15, on peut lire ce qui suit

 28   : "Entre le 18 novembre 1991 ou avant avril 1994 environ et après,

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  1   différentes personnes ont mis sur pied une entreprise criminelle commune et

  2   ils ont participé en vue de soumettre politiquement et militairement les

  3   Musulmans de Bosnie et autres non-Croates qui vivaient des de régions du

  4   territoire de la République de Bosnie-Herzégovine revendiquées comme

  5   faisant partie de la Communauté croate, future République d'Herceg-Bosna;

  6   et de réunir à court et à long terme ces dernières au sein d'une 'Grande-

  7   Croatie' soit par attachement à la République de Croatie, soit en une

  8   étroite association avec elle, et ce, par la force, l'intimidation, la

  9   menace du recours à la force, la persécution, l'emprisonnement et la

 10   détention, le transfert forcé et l'expulsion d'appropriation et la

 11   destruction de biens qui par d'autres moyens consistent à -- commettre des

 12   crimes sanctionnés par les articles 2, 3, et 5 du Statut du Tribunal.

 13   L'ambition territoriale de l'entreprise criminelle commune est un décret,

 14   un territoire croate, reprenant les frontières de la banovine Croate entité

 15   territoriale ayant existé de 1939 à 1941. Elle visait notamment à

 16   redessiner la carte politique et ethnique de ces régions de façon à ce

 17   qu'elle soit dominée par les Croates tant sur le plan politique que sur le

 18   plan démographique."

 19   Je vais maintenant aborder la question territoriale de l'entreprise

 20   criminelle commune.

 21   Le président de Croatie, Franjo Tudjman, avait depuis longtemps parlé de

 22   son obsession, à savoir l'acquisition par la Croatie de certaines parties

 23   de la Bosnie-Herzégovine. Comme cela a pu être étayé par la déposition de

 24   Robert Donia, à la pièce P 09536, dès 1981, Tudjman, dans les œuvres

 25   publiées par lui, a décrit la Bosnie et la Croatie comme "étant une entité

 26   économie et géographique indivisible." En public, il a soutenu les

 27   prétentions de la Croatie à des grandes parties de la Bosnie qui avaient --

 28   faisaient à ce moment-là partie de la banovine Croate.

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  1   Comme le sait la Chambre, la banovine Hrvatska était une région autonome

  2   croate établie vers 1939 qui a existé jusqu'en 1941 environ. Elle répondait

  3   aux desiderata des plus grands acteurs en Yougoslavie, les Serbes et les

  4   Croate, aux dépens des Musulmans de Bosnie avec l'aide d'un territoire

  5   souverain de Bosnie-Herzégovine qui souhaitait reprendre donc ses terrains

  6   croates.

  7   Les éléments de preuve montrent que ce Tribunal, dans cette affaire-ci

  8   ainsi que d'autres affaires, ce que l'on peut appeler les affaires serbes

  9   avec la dissolution de la Yougoslavie, la Serbie et la Croatie ont vu

 10   l'occasion de faire valoir des expansions territoriales en Bosnie-

 11   Herzégovine. Des discussions avaient pour but de diviser la Bosnie et

 12   l'Herzégovine; ces discussions ont eu lieu entre Tudjman et Slobodan

 13   Milosevic à Karadjordjevo en octobre 1991. A la veille de l'indépendance de

 14   la Croatie par rapport à la Yougoslavie, Tudjman a fait connaître ses

 15   ambitions au niveau de la Bosnie très claires le 8 juin 1991, la pièce P

 16   00037 : "Et bien, Messieurs, si nos optons pour l'indépendance de la

 17   Croatie, que ce soit à l'intérieur d'une alliance ou que ce soit sous la

 18   forme d'une indépendance totale, les frontières de la Croatie telles

 19   qu'elles existent aujourd'hui sont absurdes tout à fait impossible dans le

 20   sens d'une administration et du commerce, sans tenir compte de la question

 21   de la protection des frontières avec la Croatie. Par conséquent, d'après

 22   nous, cela ne pose pas de problème, il faut trouver une solution

 23   essentielle à ce problème parce qu'il faut créer une Bosnie -- les

 24   frontières de la Bosnie après la Deuxième Guerre mondiale et ceci est

 25   historiquement absurde."

 26   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 27   M. SCOTT : [aucune interprétation] 

 28   Ceci a été confirmé à une réunion importante de la Chambre. Nous avons

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  1   entendu le Témoin Kljuic qui a participé à cette réunion à Zagreb le 27

  2   décembre 1991; ceci se trouve à la pièce P 00089.

  3   Au cours de cette réunion, Tudjman, encore une fois, a indiqué que : "La

  4   survie de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat indépendant et souverain,

  5   quand bien même c'est possible, est de toute façon contre les intérêts de

  6   l'Etat croate et rend impossible la mise en place au plan du territoire de

  7   l'Etat croate et crée les conditions de la disparition de ce qui reste du

  8   peuple croate en Bosnie-Herzégovine aujourd'hui. Tout ce que l'histoire

  9   nous a montré c'est que la Bosnie-Herzégovine n'est pas une solution pour

 10   le peuple croate. La Bosnie et l'Herzégovine ne doivent pas être considérée

 11   comme quelque chose qui a été reçu de Dieu et -- préservé. Nous ne devons

 12   jamais oublier combien cela peut nous faire du mal parce que lorsque la

 13   Bosnie-Herzégovine a été créée, la Croatie a été placée dans une situation

 14   impossible par rapport à son territoire.

 15   "Par conséquent, nous voulions pour finir et ceci n'était pas un

 16   accident dans le préambule de la constitution croate où nous évoquons la

 17   banovine de Croatie. Il me semble que nous avons bénéficié de ce moment

 18   historique pour mettre en place une Croatie indépendante, reconnue au plan

 19   international, à mon sens le moment est venu pour rassembler le peuple

 20   croate au sein de frontières les plus larges possibles."

 21   Ce que les éléments de preuve présentés par l'Accusation au-delà de tout

 22   ceci c'est que et c'est ce qui vraiment dans une grande mesure qui a donné

 23   lieu au conflit ceci a fait en sorte que Tudjman et d'autres accusés ont --

 24   avaient des revendications territoriales en Bosnie-Herzégovine qui dans des

 25   régions qui n'étaient même pas à majorité Croates et qui dans certains cas

 26   n'avaient même pas une compilation croate importante. Ce qui peut être

 27   illustré par une autre déclaration de Tudjman lorsqu'il s'est adressé à des

 28   représentant de l'Herceg-Bosna en septembre 1993 : "A Stolac. Je connais

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  1   l'importance stratégique de Stolac en tant que président de la Croatie et

  2   si vous voulez en tant que soldat aussi. Je sais que Stolac et Jablanicki

  3   Kotar et Konjic ont été compris dans la banovine Croate en 1939. Il s'agit

  4   là d'arguments que j'ai soutenus depuis le premier jour. Quoi qu'il en

  5   soit, ils disent Stolac était principalement Musulman, et par conséquent,

  6   il y a eu un nettoyage ethnique."

  7   Le 8 juin 1991, Tudjman a indiqué qu'en réalité, les dirigeants musulmans

  8   en Bosnie-Herzégovine devaient accepter la division de la Bosnie-

  9   Herzégovine. Tudjman, je cite : "Je crois que nous allons réussir parce que

 10   ceci est également dans l'intérêt de la Serbie et de la Croatie, alors que

 11   la composante musulmane n'a pas d'autre sortie que d'accepter cette

 12   solution, mais il ne sera pas aisé de trouver une solution mais en somme

 13   voilà c'est cela."

 14   Voire en octobre 1993, beaucoup plus tard, Tudjman en fait la situation

 15   précédente date du mois de juin 1991, déjà en octobre 1993, Tudjman parlait

 16   encore de combats en Bosnie-Herzégovine et ce combat portait sur les

 17   frontières de l'Etat croate. A la pièce P 00612, Tudjman dit : "Il y a

 18   plusieurs mois je vous ai parlé de cette situation et j'ai donné des

 19   missions à remplir au ministre de la Défense Susak et le général Bobetko

 20   concernant notre aide et notre engagement en Herceg-Bosna. Je leur ai dit

 21   que c'est là que seraient dessinées les frontières futures de l'Etat

 22   croate, et donc, je leur ai indiqué à ce moment-là combien il était

 23   important de défendre leurs positions et les territoires du HVO qu'ils

 24   tenaient à cet endroit-là. C'était le problème de Novi Travnik, Vitez,

 25   Busovaca, Mostar et les problèmes de Gornji Vakuf et de Bugojno auxquels on

 26   devait trouver une solution le plus rapidement possible." Et c'est Tudjman

 27   qui a dit cela en octobre 1993.

 28   La Chambre nous a aidé en ceci parce que les aspirations territoriales de

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  1   Tudjman ont été bien établies par des faits admis en vertu de jugement

  2   antérieur, et je vais en invoquer certains ici.

  3   "Le président Tudjman aspire à un partage de ce pays voisin, la Bosnie-

  4   Herzégovine," fait admis en vertu d'un jugement antérieur 73 par la Chambre

  5   le 16 septembre 2006, je cite : "Le nationalisme de Franjo Tudjman et son

  6   désir d'annexer une partie de la Bosnie-Herzégovine semblait tout à fait

  7   clair à Lord David Owen à qui le président Tudjman a indiqué ses

  8   revendications, 17,5 % du territoire de Bosnie devrait revenir à la

  9   république qui a une majorité croate." Fait admis en vertu d'un jugement

 10   antérieur numéro 75.

 11   "Le président Tudjman, en tant que leader du HDZ, devrait promouvoir

 12   l'identité croate en faisant appel à la Croatie comme étant une entité

 13   continue, distincte sur un plan historique." Numéro 77.

 14   De multiples dont on fait référence en tant que "frontières naturelles de

 15   la Croatie" peut être trouvé au fait admis 79.

 16   "L'admission de Tudjman quant à la politique de positions et malgré la

 17   position qu'il avait adoptée, ne fait que fortifier les discussions qui

 18   avaient lieu entre Tudjman et Milosevic dans le cadre de la Fédération

 19   yougoslave en 1991." Fait admis 81.

 20   Ces aspirations pour partage ont été démontrées lors de pourparlers

 21   confidentiels entre Franjo Tudjman et Slobodan Milosevic et Karadjordjevo

 22   le 30 mars 1991 sur la division de Bosnie-Herzégovine. Fait admis 82.

 23   Excusez-moi, Monsieur le Juge Prandler, je vais ralentir. Merci.

 24   A la suite de la réunion de Karadjordjevo, Franjo Tudjman a dit : "Qu'il

 25   serait difficile pour que la Bosnie survive et que les Serbes allaient

 26   prendre la banovine, Kazim, Kladusa et Bihac." Fait admis numéro 84.

 27   Franjo Tudjman également a ajouté : "Qu'il n'y aura plus de région

 28   musulmane à l'intérieur de l'ex-Yougoslavie, et que ceci ne serait qu'un

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  1   tout petit élément d'un Etat croate." Fait admis 89.

  2   "L'accord signé entre les Serbes et les Croates sur la partition ou le

  3   partage de la Bosnie a été confirmé à la suite d'une réunion entre les

  4   dirigeants politiques serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Mate Boban à

  5   Graz en Autriche le 6 mai 1992." Fait admis 90.

  6   Les aspirations de Franjo Tudjman visant à annexer "les régions croates de

  7   la Bosnie se sont vu -- pendant le conflit, tout au long du conflit" Fait

  8   admis 88.

  9   Je ne vais pas insister plus longuement là-dessus. Ceci ressort d'autres

 10   faits présentés devant le TPI, d'autres affaires et ce sont tous des faits

 11   admis.

 12   Je ne vais pas maintenant me pencher sur les cartes, mais la Chambre se

 13   rappellera du livre de carte que l'Accusation a remis aux Juges dans le

 14   cadre de cette affaire et l'Accusation respecte sous-tend respectueusement

 15   que tout ce qu'il y a à faire c'est de regarder ces cartes, et carte par

 16   carte vous verrez que ceci correspond avec un objectif d'établir les

 17   frontières de la banovine. Ce n'est pas une coïncidence que les lignes

 18   territoriales de l'Herceg-Bosna coexistaient presque ou -- en fait étaient

 19   presque identiques aux frontières de la banovine. Chaque carte de paix,

 20   qu'il s'agisse de carte proposée par Vance-Owen, chaque carte proposée par

 21   les Croates correspond au fait d'établir une -- les frontières de la

 22   banovine.

 23   Maintenant qu'ont dit nos accusés sur cet aspect de l'affaire en l'espèce ?

 24   Le plan, la banovine, l'entreprise criminelle commune, et cetera. Alors,

 25   prenons les accusés un par un pour voir ce qu'ils ont dit là-dessus.

 26   M. Prlic, dans sa déclaration, la pièce P 09078 dit, je cite : "Le plan

 27   proclamé, soutenu par Zagreb qui également le centre politique du pouvoir

 28   était d'abord d'établir une République des frontières de la Croatie

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  1   reconnue internationalement. Le deuxième objectif politique était

  2   d'intégrer une partie de l'ABiH à l'intérieur de la République de Bosnie-

  3   Herzégovine. Lié à ceci est le lien qui existait entre le HV et le HVO

  4   entre le gouvernement et la République de Croatie et les autorités

  5   d'Herceg-Bosna. Le HDZ en Croatie et l'armée serbe, l'armée pardon de

  6   l'ABiH ont également parlé au public pour dire au public que chaque -- que

  7   tout a été fait et que tous les préparatifs ont été faits et prêts pour

  8   défendre la Bosnie-Herzégovine qui ce qui n'était pas que partiellement

  9   correct."

 10   Je cite, bien sûr, la déclaration de Prlic, que c'était partiellement

 11   vrai. Ils l'ont dit au public, tous ces préparatifs avaient été proclamés

 12   mais entre eux ils avaient créé un autre plan qui a été adopté et qui avait

 13   été proclamé, soutenu par Zagreb, et encore une fois, ainsi c'est pour dire

 14   que c'était le centre politique du pouvoir.

 15   Donc, l'objectif -- le point principal de ce plan était de défendre le

 16   territoire et possiblement également, je cite : "De leur attacher aux

 17   territoires de Croatie." Et je dois dire que cette idée a été soutenue par

 18   la majorité des gens d'Herzégovine. Donc, il ne s'agissait pas seulement de

 19   plan de conspiration d'un groupe. Une autre déclaration faite par M. Prlic

 20   : "Zagreb voulait intégrer une partie de Bosnie-Herzégovine à la République

 21   de Croatie si la Bosnie-Herzégovine était --a été démantelée." Encore une

 22   fois, il s'agit d'une déclaration que l'on peut retrouver au transcript à

 23   la page 65 : "La plupart des Croates en Bosnie-Herzégovine ont soutenu ce

 24   plan, pour attacher l'Herceg-Bosna à la Croatie."

 25   Que dit Slobodan Praljak, s'agissant du plan ? Mais en fait c'était l'une

 26   de ses pièces à lui qu'il nous a présentée, la pièce

 27   3D 004482; il s'agissait d'une note d'une réunion qui a été faite lors

 28   d'une réunion du général de l'armée croate Anton Tus et le général de

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  1   l'armée croate Slobodan Praljak avec une délégation française le 13 janvier

  2   1993. Le compte rendu d'audience décrit Slobodan Praljak comme étant : "Le

  3   commandant général Slobodan Praljak, assistant du ministre de la Défense de

  4   la République de Croatie."

  5   M. Praljak dit : "La position croate a été claire depuis le début. Le

  6   territoire qui appartient à la Croatie correspond aux frontières de la

  7   banovine Hrvatska de 1939, division de -- s'agissant de la division de la

  8   Yougoslavie synchronisée avec le recensement de 1981, mais entre

  9   parenthèses (le recensement de 1991 selon lui n'est pas valide). Les

 10   Croates se trouvent en Bosnie-Herzégovine en tant que une nation

 11   constitutive. Les problèmes qui existent parmi les Croates entre les

 12   Croates et les Musulmans résultent de divers objectifs se trouvant au sein

 13   des combats politiques. Les Croates se battent à l'intérieur de la Bosnie-

 14   Herzégovine avec l'autonomie des Croates alors que les Musulmans se battent

 15   pour un état civil."

 16   Maintenant, je ne viens que de vous faire lecture d'une partie de cette

 17   déclaration, lorsque M. Praljak parle de se battre pour l'état de Bosnie-

 18   Herzégovine, mais il parle également de l'établissement de la banovine et

 19   des frontières de la banovine. Il y a eu également d'autres déclarations et

 20   d'autres éléments de preuve que nous avons entendus, et qu'il a dit dans ce

 21   même sens.

 22   Que dit maintenant M. Stojic concernant les objectifs des Croates de Bosnie

 23   tels que Tudjman, Boban et autres ? La pièce

 24   P 00185 est une conversation téléphonique enregistrée du 5 mai 1992,

 25   conversation qui a eu lieu entre deux dirigeants croates de Bosnie, Bruno

 26   Stojic et Branko Kvesic et deux dirigeants serbes de Bosnie, le ministère

 27   de l'Intérieur Momcilo Mandic, en fait un autre accusé devant ce Tribunal,

 28   M. Mico Stanisic concernant les revendications territoriales des Croates et

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  1   des Serbes en Bosnie-Herzégovine et le besoin pour que les Croates et les

  2   Serbes s'assoient et se mettre d'accord sur leurs revendications.

  3   D'autres, il s'avère que la conversation a eu lieu un jour avant l'accord

  4   de grâce, le 6 mai 1992, la pièce P 00187.

  5   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

  6   M. SCOTT : [interprétation] Au cours de la conversation, Stojic dit très

  7   clairement que les frontières désirées par les Croates sont les frontières

  8   de la banovine de 1939.

  9   La conversation se poursuit, elle dure un certain temps, et je ne

 10   veux pas vous donner lecture de l'ensemble de la conversation ou quoi que

 11   lire la conversation remet les choses dans son contexte, mais pour gagner

 12   du temps je ne vais pas donc lire l'ensemble Stojic et Mico Stanisic

 13   parlent.

 14   Stanisic dit : "Ecoute, Karadzic aussi veut un accord, il veut

 15   s'asseoir pour se mettre d'accord sur un plan, sur un accord, mais quand ça

 16   commence ça recommence."

 17   Bruno : "Arrête, qu'est-ce qui se passe avec toi."

 18   Stanisic : "Et bien, écoute donne-nous une initiative."

 19   Bruno : "Toi et nous. Non, non, cela n'a absolument -- ne fait aucun

 20   sens."

 21   Stanisic : "Nous allons vous donner ici nous allons vous donner

 22   Visoko, Vares, Kakanj, et Zenica. Nous allons vous les donner."

 23   Bruno : "Vous ne pouvez pas nous donner ce qui est à nous. Vous ne

 24   pouvez pas nous donner ce qui est déjà à nous. C'est la banovine de 1939.

 25   Alors qu'est-ce qui se passe là-bas ?"

 26   La conversation se poursuit et quelques minutes après, on parle de Neretva.

 27   Stojic dit à Stanisic : "Laissez tomber ces rêves. Quelle Neretva ?

 28   Vous vous accrochez à Drina."

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  1   Et Stanisic lui dit : "Il n'y a pas une seule personne ou 50

  2   kilomètres à la ronde de l'autre côté de la Neretva. Est-ce qu'est d'accord

  3   avec moi ?"

  4   Bruno : "Mais ceci n'est absolument aucun sens avec les aéronefs, les

  5   avions."

  6   Stanisic : "Et bien, nous allons commençons quelque chose. Nous

  7   allons vous donner quelque chose, nous -- quelque chose, et nous allons

  8   pourriez-vous de cette façon-là établir les frontières naturelles."

  9   Bruno : "Quelles frontières naturelles ?"

 10   Stanisic : "Les, et bien."

 11   Bruno : "Il n'y a que les frontières de 1939 et je suis tout à fait

 12   sérieux il n'y a pas d'autre frontière."

 13   Stanisic : "Il faut être réaliste. Il faut s'asseoir et nous mettre

 14   d'accord sur quelque chose."

 15   Bruno : "Seulement les frontières de 1939 et aucun -- nous n'allons

 16   pas essayer de trouver d'autres solution. Ah, ah.

 17   " Stanisic : "N'essaie pas de blaguer avec moi. En 1939 on n'avait

 18   pas encore d'Etat, ah, ah."

 19   Que dit maintenant Petkovic dans la pièce P 00279. Ce qui est

 20   intéressant c'est le rapport du 26 juin 1992, quelques semaines après la

 21   conversation téléphonique avec M. Stojic. Milivoj Petkovic parle au

 22   commandant du HVO et aux dirigeants politiques s'agissant des succès

 23   militaires récents réalisés par le HVO en Herzégovine Bosnie et le travail

 24   qui reste encore à faire pour pouvoir atteindre ces objectifs, et voici ce

 25   que M. Petkovic a écrit dans un document du 26 juin 1992.

 26   "1. Situation tactique et opérationnelle. Par le biais d'activités

 27   offensives dans l'ensemble de la région du sud-ouest de l'Herzégovine où

 28   les forces du HVO avec l'aide de l'armée croate assez importante et leur

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  1   équipement ont réussi -- ont eu un succès qui nous a tous surpris et a

  2   surpris également les autorités juridiques. Aujourd'hui nous avons le

  3   contrôle de presque tout l'ensemble du territoire des municipalités croates

  4   telles Neum, Ravno, Stolac, Capljina, Ljubuski, Citluk, Siroki Brijeg et

  5   Mostar. Bien sûr, il y a encore une partie du territoire pour la plupart

  6   des municipalités de Mostar et Stolac qui ne sont pas sous le contrôle des

  7   forces du HVO. Donc, nous avons quatre missions principales qui nous

  8   attendent.

  9   "D'abord, de placer sous notre contrôle les zones qui restent des

 10   municipalités croates;

 11   Deux, d'assurer et de fortifier les lignes que nous avons déjà;

 12   Trois, de mener à bien notre organisation des forces déjà existante

 13   du HVO; et

 14   Quatre, d'établir un règne croate sur toutes les municipalités.

 15   C'était le plan en date du -- enfin en juin 1992."

 16   L'Accusation sous-tend que le Parti HDZ de l'Herceg-Bosna et le HVO

 17   sont des instruments employés par le gouvernement de Tudjman et l'Herceg-

 18   Bosna et les dirigeants du HVO, y compris ces accusés, pour faire une

 19   Grande-Croatie se basant sur les frontières de banovine en tenant le

 20   contrôle de certaines municipalités croates soit à l'intérieur des

 21   frontières déjà croates ou de mini-Etat croate qui serait identifié ou qui

 22   serait aligné -- allié -- identifié avec la Croatie. Quand il est devenu

 23   apparemment que les Musulmans n'allaient pas acquiescer à tout ça de façon

 24   volontaire il y a eu une violence de stratégie qui s'est fait sentir de

 25   plus en plus et ceci pour atteindre un programme géopolitique que j'ai

 26   décrit un peu plus tôt sur la base de la preuve entendue il y a quelques

 27   instants.

 28   Tout comme les Chambres de première instance du TPIY ont trouvé qu'il

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  1   y avait une existence vers une aspiration du gouvernement Tudjman vers la

  2   Croatie, il y a eu un très grand nombre de faits admis sur le contrôle de

  3   la Croatie sur le HVO et l'Herceg-Bosna établissant l'existence d'un

  4   conflit international armé sous le contrôle de la Croatie et de l'entité

  5   croate.

  6   Je vais maintenant de nouveau passer et sauter sur d'autres choses,

  7   je crois que ceci -- qu'il s'agit de faits admis et ceci -- des faits admis

  8   qui ont été admis par cette Chambre première instance, donc, je ne vais pas

  9   les citer.

 10   Citation : "Outre l'intervention directe par les forces de l'armée

 11   croate et de la Croatie et il y a eu un contrôle indirect sur le HVO et le

 12   HZ Herceg-Bosna." Fait admis numéro 504.

 13   "Il n'y a absolument aucun doute que la République de Croatie a eu un

 14   lien très prêt avec les Croates en Bosnie-Herzégovine." Fait admis 461.

 15   "Il n'y a absolument aucun doute que la République de Croatie

 16   et le HZ HB avaient le même objectif final notamment l'incorporation des

 17   provinces croates de Bosnie-Herzégovine en un Etat croate." Fait admis 91.

 18   "Les liens qui existaient entre le président Tudjman en tant que chef

 19   du HDZ en Croatie et les dirigeants du HZ HB étaient très prêts tout au

 20   long du conflit." Fait admis numéro 94.

 21   "Pour Mate Boban, le HDZ était la branche bosnienne du parti qui a

 22   été créé par Franjo Tudjman." Fait admis 45.

 23   "Les délégations du HDZ de Bosnie se rendaient régulièrement pour

 24   consulter le président Tudjman." Fait admis 98.

 25   "Il y avait des réunions régulières avec le président Tudjman

 26   et les dirigeants croates de Bosnie nommés par la Croatie ou avec son

 27   consentement et ont continué avec les dirigeants croates de Bosnie nommés

 28   par la Croatie et avec son consentement ont continué de diriger le HZ HB,

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  1   le HVO après juin 1992." Fait admis 99.

  2   "La Croatie a donc été impliqué directement dans le contrôle des

  3   forces du HVO qui ont été créées le 8 avril par le HZ HB, c'est-à-dire par

  4   leur présidence." Fait admis 471.

  5   "La République de Croatie a participé à l'organisation et la

  6   planification ou la coordination des opérations militaires menées dans le

  7   contexte d'un conflit existant entre le HVO et l'ABiH." Fait admis 474.

  8   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, l'Accusation sous-tend

  9   que ce niveau de contrôle en soit sans même entrer dans les incidents

 10   spécifiques s'agissant de la participation directe de l'armée croate sur le

 11   terrain, même si nous n'abordons pas ces éléments de preuve-là l'étendue du

 12   contrôle absolu sur les dirigeants d'Herceg-Bosna et du HVO établit

 13   l'existence d'un conflit international armé, et l'Accusation ne croit pas -

 14   - ou ne va pas parler de ces aspects militaires dans le cadre de ces

 15   arguments présentés en vertu de l'article 98 bis afin -- à moins que la

 16   Chambre n'ait des questions à nous poser, mais cette participation est très

 17   large, il y a donc des pièces qui nous permettent de savoir qu'il y avait

 18   des Brigades et des Unités croates qui opéraient sur le territoire de

 19   Bosnie-Herzégovine.

 20   Pour revenir maintenant à la chronologie des événements pour ce qui est de

 21   l'Herceg-Bosna, je souhaiterais revenir à la date du

 22   12 novembre 1991. En fait, il s'agit de six jours avant que -- vers le 18,

 23   donc, il y a deux réunions, l'une la Herzégovine menée par Mate Boban, et

 24   en Bosnie centrale, Dario Kordic se sont rencontrés à Grude et ont conclu

 25   cette réunion. Le compte rendu de cette réunion porte la cote P 00071 : "La

 26   communauté régionale d'Herzégovine et la Communauté régionale de Travnik

 27   maintiennent leurs conclusions à laquelle -- ont été arrivées lors des

 28   réunions précédentes que le peuple croate de ces régions continue de tenir

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  1   les décisions acceptées de façon unanime et les conclusions adoptées au

  2   cours des consultations avec le président, le Dr Franjo Tudjman, les 13 et

  3   20 juin 1991 à Zagreb.

  4   "A la suite de conclusions de ces réunions, desquelles nous avons parlées

  5   un peu plus haut et des consultations spéciales du 15 août -- octobre 1991

  6   à Grude et du 22 octobre 1991 à Busovaca et celle-ci du 12 novembre 1991,

  7   ces deux communautés régionales se sont -- ont décidé, de façon conjointe

  8   et unanime, que le peuple croate en Bosnie-Herzégovine doit finalement

  9   mener à bien une politique active et décider qui nous mènera à la

 10   réalisation de notre rêve que nous avons eu depuis plusieurs siècles,

 11   c'est-à-dire de joindre un Etat -- de créer un Etat -- de rejoindre un Etat

 12   croate pour mener à bien cet objectif historique deviendra réalité. Et pour

 13   que ceci se fasse, il faut commencer des activités pour formuler et pour

 14   donner des documents politiques et juridiques afin de pouvoir proclamer une

 15   banovine Croate en Bosnie-Herzégovine et qu'un référendum doit être mené

 16   sur la section de la République de Croatie, et cetera. Ceci serait une

 17   première étape sur la route d'un -- règlement final dans la question de la

 18   création d'une Croatie souveraine pour créer ses frontières maintenant

 19   possibles ethniques et historiques."

 20   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la preuve sur ces questions est

 21   très longue et je ne vais pas trop m'appesantir sur ces dernières mais les

 22   transcripts que vous avez que la Chambre a déjà eus, qui sont déjà versés

 23   au dossier; vous verrez que ces discussions se répètent de nombreuses fois.

 24   La pièce -- par exemple, la pièce

 25   P 00699, réunion du 3 novembre 1992, très souvent impliquant un très grand

 26   nombre de nos accusés, ceci implique Mate Boban, Jadranko Prlic et Bruno

 27   Stojic; et Jadranko Prlic et Susak étaient également présents à cette

 28   réunion. Et voilà ce que je voudrais mentionner. C'est que l'un de nos

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  1   accusés était là et Susak dit : "De plus, pour pouvoir comprendre -- avoir

  2   une meilleure compréhension de la politique générale pour l'ensemble de la

  3   Bosnie-Herzégovine, nous avons convoqué une réunion de la région élargie du

  4   20 juin 1992 y compris les municipalités. Et ils ont reçu les instructions

  5   à ce moment-là. Et le 19 juin -- août, plutôt, 1991, les personnes

  6   suivantes ont été appelées et étaient présentes aux réunions : le ministre

  7   de la Défense, Mate Boban; Neven Tomic; Jozo Maric; Bruno Stojic, président

  8   --" - je cite - "président du département de la Défense d'Herceg-Bosna, et

  9   Jadranko Prlic, président du HVO, HZ HB." Et Susak se plaint dit donc : "Ce

 10   n'est pas vrai comme il est dit dans ce rapport qu'il ne savait pas qu'elle

 11   était la politique croate concernant les Croates en Bosnie-Herzégovine et

 12   qu'elles étaient les lignes directrices."

 13   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 14   M. SCOTT : Monsieur le Président, Messieurs les Juges, les mesures d'autres

 15   citations que je pourrais vous citer, nous prenons la pièce P 01622 du 8

 16   mars 1993; la pièce P 02099 du 26 avril 1993; la pièce P 02122 du 27 avril

 17   1993; la pièce P 03112 du 2 juillet 1993; la pièce P 05498 du 30 septembre

 18   1993; la pièce P 06591 du

 19   10 novembre 1993. Toutes ces pièces nous montrent qu'il y a eu d'énormes

 20   discussions pour pouvoir mener à bien ce plan. Cet objectif, je pourrais

 21   vous donner lecture pendant des heures de ces pièces, mais j'invite les

 22   Juges de la Chambre de relire les transcripts de ces réunions

 23   présidentielles car en fait c'est un vrai trésor nous permettant d'établir

 24   les faits dans cette affaire.

 25   Mais je souhaiterais simplement me pencher sur une pièce en date du 13

 26   février 1994, toujours une date qui se trouve encore à l'intérieur de la

 27   période couverte par l'acte d'accusation, la pièce P 07856, Jadranko Prlic

 28   participe à une réunion avec Tudjman et il dit à Tudjman et je cite : "Nous

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  1   avons créé un Etat, l'Etat d'Herceg-Bosna à tous les systèmes, y compris

  2   les coutumes et les finances, des gens meurent et naissent avec des

  3   documents émanant de l'Herceg-Bosna. Je crois que nous devrions peser tous

  4   les éléments, de façon très attentive, absolument aucune solution n'est

  5   acceptable sans une République croate d'Herceg-Bosna, en d'autres mots, une

  6   république croate et les frontières doivent englober le plus de zones

  7   possibles à l'intérieur de l'Herceg-Bosna. Et je crois que ceci peut être

  8   fait avec les moyens mêmes militaires s'il est nécessaire afin de pouvoir

  9   nous assurer que les choses se développent de la façon dont elles se

 10   développent."

 11   Et une dernière pièce relative à ce point particulier, la pièce P 08288, 31

 12   mai 1994. C'est après l'accord de Washington et ceci nous dit, Monsieur le

 13   Président, Messieurs les Juges, que le plan n'était pas mort, qu'une vision

 14   était encore -- existait encore et qu'on essaie de la maintenir. Le 31 mai

 15   1994, Tudjman dit aux dirigeants d'Herceg-Bosna qui se trouvaient sur

 16   place, y compris Jadranko Prlic, Dario Kordic et autres, je cite : "Nous

 17   devons maintenir notre politique de la façon à nous approprier --"

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 19   M. SCOTT : [aucune interprétation] 

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : -- quand vous citez une pièce, est-ce que la pièce

 21   apparaît sur l'écran ou pas ? Vous avez demandé à ce que le Greffier fasse

 22   apparaître la pièce pour qu'on puisse la voir très vite ?

 23   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, pour

 24   gagner du temps, non, nous n'avons pas fait ceci. Si j'avais vraiment voulu

 25   faire tout ceci une présentation de cette façon-là, je n'ai pas eu en fait,

 26   je n'ai pas eu le temps de le faire. Peut-être, si vous voulez, à l'avenir,

 27   je pourrais vous donner

 28   la pièce -- le numéro de la pièce, afin que vous puissiez vérifier mes

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  1   citations. Mais si je dis quelque chose est une citation, c'est réellement

  2   une citation, donc ce n'est pas mes propres mots. Je cite -- lit

  3   textuellement, donc, j'espère que, dans le cadre de mes -- donc des

  4   réquisitoires, je pourrais justement faire une présentation de ce type-là

  5   lorsque j'évoquerai des documents.

  6   Mais Tudjman dit : "Nous devront continuer notre politique et nous allons

  7   mener une politique intelligente. Nous devons être perçus comme étant du

  8   côté des Musulmans mais nous ne voulons pas qu'ils créent leur Etat

  9   musulman et ceci crée un problème." Et Tudjman assure les dirigeants

 10   d'Herceg-Bosna que nous allons faire en sorte que je cite : "Les Musulmans

 11   se prononcent comme étant des Croates de religion musulmane. Nous n'avons

 12   pas de choix."

 13   Monsieur le Président, pour ce qui est de la mise en place de Herceg-Bosna,

 14   du HVO, en avril et mai 1992, tout ceci vous vous souviendrez de la

 15   déposition de Stepjan Kljuic, par exemple, de Milivoj Gagro qui nous ont

 16   parlé de l'évolution politique de la situation en 1991, vers la fin de

 17   cette année, et ceci a amené à la réunion du 27 décembre 1991, à Zagreb,

 18   une réunion à laquelle Kljuic a participé, il nous en a parlé lui-même ici.

 19   Et il s'agissait, en l'occurrence, de la dernière épreuve de force entre le

 20   HDZ de Bosnie-Herzégovine plutôt modéré, et les extrémistes, Mate Boban,

 21   Dario Kordic et les autres. Et il apparaît clairement à la fin de cette

 22   réunion que les modérés ont perdu et que les extrémistes, les durs, ont

 23   gagné cette bataille. Tudjman appuie cette solution et il fait un certain

 24   nombre de déclarations à ce sujet.

 25   A l'issue de cette réunion - il s'agit de la pièce P00089 - après

 26   avoir entendu toutes les parties se prononcer, Tudjman déclare, je cite :

 27   "Pourquoi ne pas accepter une offre de démarcation si c'est dans l'intérêt

 28   du peuple croate ? Parce que, quant à moi, je ne vois aucune raison -- pas

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  1   une seule raison sérieuse qui ne parle contre cela. En cas de démarcation

  2   des frontières, la Croatie obtiendrait non seulement ses deux communautés,

  3   l'Herceg-Bosna et la Posavina, mais pour des régions géopolitiques, elle

  4   obtiendrait également Cazinska et Bihacka Krajina, ce qui correspondrait de

  5   manière pratiquement idéale, aux intérêts nationaux croates. Et il

  6   s'agirait également de créer un petit Etat avec ce qui reste autour de

  7   Sarajevo où se trouveraient l'essentiel des Musulmans et certains Croates

  8   catholiques, ça ressemblerait à une petite Bosnie historique. Ça

  9   constituerait un tampon entre la Serbie et la Croatie. Et dans ces

 10   conditions, cet Etat devrait s'appuyer sur la Croatie dans une grande

 11   mesure. De ce point de vue, même une sorte de canonisation avec une

 12   poursuite de l'existence de la Bosnie-Herzégovine ne constituerait pour

 13   nous une solution telle que la solution de la démarcation des frontières."

 14   Ensuite, il y a une série de pièces, une série d'éléments de preuve

 15   qui confortent la thèse de l'Accusation, et ce que nous avons qualifié de

 16   politique à deux vitesses ou à deux niveaux et qui constituaient en la

 17   chose suivante. C'est que d'une part, lors des réunions, d'ailleurs et dans

 18   les comptes rendus, on l'a déjà vu précédemment, c'est-à-dire qu'il y avait

 19   une politique délibérée qui était confirmée et annoncée par Tudjman; ça se

 20   revoit dans toutes les transcriptions des réunions, et qui se manifeste de

 21   la manière suivante, c'est-à-dire d'une manière publiquement, nous allons

 22   dire que nous sommes en faveur d'une Bosnie-Herzégovine souveraine. Nous

 23   allons le dire -- l'affirmer que nous sommes en faveur d'une Bosnie-

 24   Herzégovine indivisible, mais, en réalité, nous avons un autre programme,

 25   et c'est ce programme -- cet objectif que nous allons poursuivre.

 26   Lors de cette fameuse réunion du 27 septembre dont j'ai déjà parlé,

 27   Perica Juric dit : "Au niveau diplomatique, les nôtres à Sarajevo peuvent

 28   continuer à jurer qu'ils sont en faveur d'une Bosnie-Herzégovine

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  1   souveraine, comme nous l'avons fait nous-mêmes jusqu'à présent -- comme ils

  2   l'ont fait eux-mêmes jusqu'à présent." Tudjman, lui-même, a précisé la

  3   nature de cette politique lors d'une réunion avec les dirigeants de croates

  4   de Bosnie en mars 1993. Il s'agit là de la pièce P01594. Bien que du fait

  5   du climat diplomatique, ils fussent contraints de se prononcer du moins sur

  6   la forme en faveur d'une Bosnie-Herzégovine souveraine, Tudjman, lui, fait

  7   clairement comprendre ce qu'il en est vraiment, je cite : "Pour l'instant,

  8   l'occident se prononce pour une Bosnie-Herzégovine entière, mais avec un

  9   système politique qui mènera probablement à une solution finale, et peuvent

 10   encore penser dans le monde que si la Yougoslavie n'est pas parvenue à

 11   survivre, la Bosnie, elle pourrait le faire."

 12   Cela ça s'est passé au cours du mois de décembre 1991, mais en

 13   juillet 1993, alors qu'on est au cœur de la période visée à l'acte

 14   d'accusation à l'espèce, à la pièce P03195, Tudjman déclare à son cercle de

 15   conseillers très proche, je cite : "Nous n'allons pas dire maintenant que

 16   nous sommes en faveur d'une division de la Bosnie tout comme nous avons

 17   recommandé aux Croates de Bosnie-Herzégovine de voter lors du référendum

 18   lorsque les Serbes, eux, s'étaient déjà séparés du reste du territoire. Ils

 19   avaient déjà fait scission."

 20   Ensuite, là, je vais résumer en quelques mots un certain nombre de

 21   pièces, un certain nombre de dépositions que nous avons entendues en

 22   l'espèce, mais disons que au printemps 1992, le HVO avait été mis en place.

 23   Vous vous souviendrez, Messieurs les Juges, des dépositions de plusieurs

 24   dirigeants de municipalité qui nous ont expliqué que municipalité après

 25   municipalité, on a vu le HVO s'emparer du pouvoir et exclure les Musulmans,

 26   de l'administration municipale, de la vie économique; il ne restait peut-

 27   être parfois que quelques Musulmans, très peu. Il y a eu une politique de

 28   croatisation qui s'est mis en œuvre avec un programme exclusivement croate

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  1   à l'école. C'est la langue croate qui devait être utilisée. On changeait

  2   les pancartes, et cetera, on ne parlait plus de "Prozor," on disait "Rama,"

  3   et cetera, et cetera. Et cela, ça s'est poursuivi tout au long de l'année

  4   1992, il y a un nombre certain d'éléments de preuve qui en attestent, il y

  5   a un nombre certain de témoins qui nous en ont parlé.

  6    Je me rattache à seulement certains points, mais je reviens aux

  7   faits constatés judiciairement; une fois encore, vous pouvez en faire un

  8   point de départ, Messieurs les Juges. "Le nationalisme croate et la

  9   discrimination contre les musulmans augmentent en Bosnie centrale en 1991

 10   et 1993." Fait constaté judiciairement numéro 104.

 11   "Mostar est dominé politiquement par les Croates de Bosnie-

 12   Herzégovine." Fait constaté judiciairement, numéro 223.

 13   "Il y a une disposition qui a été adoptée par la République de

 14   Croatie, qui donne la nationalité croate à tous les citoyens de la nation

 15   croate." Fait numéro 106.

 16   "Il y a une nouvelle loi qui autorise tous les Croates à voter lors

 17   des élections en Croatie, notamment aux élections parlementaires." Fait

 18   107.

 19   "Les Croates de Bosnie-Herzégovine pouvaient facilement obtenir un

 20   passeport croate, obtenir la nationalité croate et voter lors des élections

 21   en République de Croatie." Fait numéro 108.

 22   "On a constaté une division entre les Musulmans et les Croates en

 23   1992." Fait constaté judiciairement numéro 41.

 24   Nous avons vu plusieurs aspects de cette situation, en 1992, on a vu

 25   la prise en main des médias. On sait très bien que ça a eu les 50 premières

 26   années -- ou la première partie du XXIe siècle, on a appris l'essentiel,

 27   c'est de s'emparer du contrôle des médias, et ça, en s'emparant d'une

 28   station de radio, en croatisant le nom, le nom de radio Mostar, et cetera.

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  1   En 1994, Prlic pouvait dire à Tudjman - pièce 04759 : "Monsieur le

  2   Président, tous les Croates en Bosnie-Herzégovine sont des Croates payés,

  3   c'est-à-dire, tout le monde perçoit un budget, tout le monde perçoit un

  4   salaire émergeant au budget d'Herceg-Bosna, à l'exception de la partie en

  5   territoire serbe."

  6   Dans cette affaire, on a beaucoup parlé, on a entendu des témoins

  7   nous parler, on a vu des éléments qui évoquaient la coopération entre les

  8   Serbes et les Croates dans la période visée à l'acte d'accusation en

  9   l'espèce qui est pertinente. Je vais ici sauter une bonne partie de ce que

 10   j'avais prévu de vous dire pour me concentrer sur un exemple, un exemple

 11   qui me paraît le mieux illustrer la situation. Je vais me concentrer sur

 12   une seule pièce à conviction. Il s'agit d'une réunion entre Slobodan

 13   Praljak et d'autres et le président Tudjman. Pièce P 05096, fin septembre

 14   93.

 15   Il s'agit là de la nature de la coopération entre les Croates et les

 16   Serbes et la façon dont ceci est devenu absolument essentiel dans

 17   l'évolution militaire du HVO -- dans sa situation militaire. On voit, dans

 18   cette conversation, la pression internationale se fait sentir et on

 19   envisage une paix avec les Musulmans de Bosnie. C'est Tudjman qui

 20   l'envisage avec ses conseillers, donc, Praljak, et lors de cette réunion,

 21   on s'inquiète, on se demande comment le changement dans la relation avec

 22   Musulmans va affecter la coopération, qui est excellente, entre les Croates

 23   et les Serbes.

 24   Praljak, je cite : "La relation entre les Croates et les Serbes s'est

 25   améliorée, en particulier sur -- dans le domaine militaire parce que toutes

 26   nos unités sont tributaires de la coopération avec les Serbes. En Bosnie-

 27   Herzégovine, cet accord avec les Musulmans aggraverait la situation, si

 28   bien que Zepce, Kiseljak, et donc, Vitez, le bataillon qui se trouve en

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  1   dessous de Konjic et Vares; dans ces zones, nous serons en -- dans une

  2   situation difficile pour les ravitailler."

  3   Tudjman intervient et dit : "Oui, c'est peut-être -- ce sera peut-

  4   être le cas, Praljak, mais il faut qu'on fasse un -- fasse un accord avec

  5   les Musulmans."

  6   Praljak, lui, avance qu'il sera difficile de s'adapter à cette

  7   nouvelle situation, je le cite : "Ça va s'arrêter," - enfin, les combats

  8   avec les Musulmans vont s'arrêter - "mais ça va être différent. Il y a un

  9   an, nous pensions que nous ne pouvions avoir aucune discussion avec les

 10   Serbes, mais nous sommes parvenus à conclure certains accords avec les

 11   Serbes. Et maintenant, nous devrions commencer une guerre contre eux pour

 12   apaiser les tensions avec les Musulmans, et il faudra sans doute pas mal de

 13   temps pour modifier la donnée psychologique des choses.

 14   "On voit qu'il y a un changement d'état d'esprit. Ils ont coopéré

 15   avec les Serbes. Maintenant, on va opérer un virage à 180 degrés, alors

 16   qu'il y a des unités qui sont tributaires des Serbes, à Vares, Kiseljak et

 17   autres." Voilà ce que Slobodan dit au sujet de -- Slobodan Praljak dit au

 18   sujet de la coopération avec les Serbes.

 19   Maintenant, j'aimerais aborder autre chose, un élément de portée plus

 20   générale, dans le cadre de ce passage en revue de l'affaire. Il s'agit de

 21   l'automne 92. Quel est le contexte de l'évolution de la situation ? La

 22   guerre en ex-Yougoslavie dure depuis un certain temps et, selon nous, il

 23   est important que la Chambre de première instance note le fait que ces

 24   conflits armés et ces persécutions, ces opérations de nettoyages ethniques

 25   et de détentions et d'arrestations massives en ex-Yougoslavie n'ont pas

 26   commencé en 1993 à la date où commence l'acte d'accusation, pas du tout.

 27   En août 1992, déjà, quand on -- comme on peut le voir dans la pièce P

 28   05096, le Conseil de sécurité des Nations Unies avait déjà à plusieurs

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  1   reprises manifesté "sa grave préoccupation face aux violations du droit

  2   humanitaire international considérables que l'on constatait en ex-

  3   Yougoslavie," dont, notamment, je cite : "Les expulsion de masse forcées,

  4   des expulsions de civils, des détentions et des mauvais traitements

  5   infligés à des civils dans des centres de détention, des attaques

  6   délibérées menées contre des non-combattants, des obstacles posés à

  7   l'approvisionnement en vivres et en fournitures médicales des populations

  8   civiles et la dévastation et la destruction sans motif des biens." Le

  9   Conseil de sécurité avait, je cite, "condamné fermement" toute violation du

 10   droit humanitaire international, y compris ce que, à l'époque, en août

 11   1992, on appelait déjà le 'nettoyage ethnique'."

 12   Je vais résumer tout ce qui concerne ce volet de mon intervention de

 13   la manière suivante : nous avons beaucoup d'éléments à ce sujet au dossier,

 14   nous avons beaucoup de documents qui viennent des Nations Unies, beaucoup

 15   de résolutions qui, chacune d'entre elles, après tous les rapports qui sont

 16   reçus, montrent que déjà, au milieu de l'année 1992, il y avait déjà

 17   beaucoup de choses qui s'étaient produites et qui étaient typiques du

 18   conflit en ex-Yougoslavie. La Chambre se souviendra que le Dr Miller a

 19   résumé bien tout cela dans son rapport P010239 : "Caractéristiques du

 20   conflit dans les Balkans", fin 1992, conformément à des informations

 21   connues largement de tous."

 22   Le Dr Miller conclut, dans son rapport -- je pense que c'est une

 23   bonne conclusion d'une bonne partie des éléments de preuve présentés en

 24   l'espèce à ce sujet et que je n'ai pas le temps de présenter de manière

 25   approfondie, je cite : "Tout au long de l'année 1992, à l'été et à

 26   l'automne 1992 également, ainsi qu'en 1991, les caractéristiques d'un

 27   conflit reposaient sur l'affrontement ethniques, les pratiques. Les types

 28   de comportements qu'on pu constatés dans ce conflit sont devenus notoires.

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  1   On en a beaucoup parlé et tout le monde a commencé à bien comprendre de ce

  2   dont il s'agissait : les attaques contre les civils, les transferts forcés

  3   de populations, les arrestations de grande envergure étaient connus de

  4   beaucoup sous le terme de 'nettoyage ethnique'."

  5   Le Dr Miller concluait en disant : "Toute personne modérée et bien

  6   informée vivant et travaillant en ex-Yougoslavie ne pouvait qu'être

  7   informée de cette évolution, de ces rapports et de la pratique qui se

  8   développait dans le conflit des Balkans. Les opérations, les actions des

  9   partis belligérants jusqu'à la moitié de l'année 1992 montrent clairement

 10   que les meurtres de civils, les expulsions forcées, les destructions de

 11   grandes envergures auraient forcément lieu si un groupe ethnique essayait

 12   de soumettre l'autre en Bosnie-Herzégovine. La nature ethnique du conflit

 13   était manifeste avant même qu'il ne commence comme ont montré les violences

 14   de Plitvice, Borovo Selo et Pakrac. La probabilité de -- d'actes de

 15   violence compris contre des civils a été rendue très claires par les

 16   événements de Dalj, Tenja, et par des dizaines d'autres incidents dont j'ai

 17   examiné certains exemples dans mon rapport."

 18   Voilà le contexte dans lequel se déroulaient ces événements à la mi-1992,

 19   avant que les événements incriminés dans l'affaire qui nous intéresse

 20   n'aient été commis. Et ceci nous amène à -- au mois d'octobre 92 et à la

 21   première offensive de grande envergure -- au premier combat à Prozor et

 22   Novi Travnik, fin 1992.

 23   Plus ce qui figure dans le rapport Miller est conformément à ce qu'il avait

 24   lui-même et Boban, la plupart des Musulmans de Bosnie n'ont pas accepté le

 25   contrôle du HVO même quand on a essayé de le leur imposer. Vers la fin

 26   1992, il était déjà clair que Tudjman -- que le projet de Tudjman et des

 27   dirigeants d'Herceg-Bosna de mettre sur pieds une grande Croatie ne

 28   pourrait être réalisé par la simple application d'une pression politique.

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  1   Il faudrait avoir recours à la persécution. Il était manifeste que des

  2   actions de force devraient intervenir, telles que la violence ethnique, le

  3   conflit armé et les transferts forcés de populations. Les dirigeants

  4   croates, les dirigeants de l'Herceg-Bosna se préparaient déjà au conflit

  5   avant même les combats à Prozor en octobre 1992.

  6   Dans une réunion du 11 septembre 92, pièce P 00466, Slobodan Praljak a dit

  7   à Tudjman et Susak, je cite : "On peut anticiper une guerre avec les

  8   Musulmans."

  9   Et Susak a répondu à Praljak : "Oui, ça fait plus d'une semaine que nous en

 10   sommes rendu compte et que nous prenons des préparatifs en la matière."

 11   Réunion du 11 septembre 92, Prozor 23 octobre 92.

 12   La réunion se poursuit, la conversation aussi.

 13   Tudjman : "Messieurs, messieurs, nous n'avons rien à conquérir. Il faut

 14   défendre les Croates."

 15   Et Slobodan Praljak intervient : "Non, c'est impossible, Monsieur le

 16   Président, il est impossible de passer plus loin."

 17   Et Tudjman répond : "Préparons-nous" - et je vous rappelle ça s'est passé

 18   le 11 septembre 1992 - "Préparons-nous à les nettoyer de la Croatie, mais,

 19   comme je l'ai dit, il ne faut pas que vous participiez à une conquête de la

 20   Bosnie."

 21   Praljak : "Non, Monsieur le Président, croyez-moi, les attaques ont été

 22   interrompues."

 23   Susak : "Rien dans la banovine. Nous n'avons pas avancé même d'un seul

 24   mètre."

 25   Praljak : "Croyez-moi on pourrait y être en 12 heures, à Nevesinje,

 26   Trebinje, sans aucun problème."

 27   Susak : "On n'aurait aucun problème à y entrer demain. Mais on ne peut pas

 28   à cause de la situation."

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  1   Tudjman : "Non, écoutez, il faut être réaliste. On vient d'échapper avec

  2   difficulté à ce que voulait nous imposer le gouvernement islamique et le

  3   monde, il ne faudrait pas qu'on subisse maintenant des sanctions parce que

  4   soi-disant nous ferions office d'agresseurs en Bosnie, nous serions ceux

  5   qui voudraient conquérir la Bosnie. Donc il ne faut pas surtout."

  6   Susak répond : "Monsieur le Président, nous sommes tout ce qui a pu

  7   discipliner."

  8   Dans une deuxième réunion qui a eu lieu quelques jours plus tard avec

  9   beaucoup des mêmes participants, le 26 septembre 92, c'est-à-dire peu de

 10   temps après ce qui s'est passé à Prozor, donc le 26 septembre 1992, nous

 11   avons la pièce P 00524. Slobodan Praljak met en garde Tudjman et Susak. Il

 12   les mit en garde contre le danger causé par l'arrivée massive de réfugiés

 13   musulmans venant de certaines régions d'Herceg-Bosna ou se rendant plutôt

 14   dans des régions d'Herceg-Bosna revendiquées par la cet Herceg-Bosna.

 15   Praljak conseille Tudjman et Susak : "Il vaut mieux faire face à la

 16   situation maintenant, pendant la guerre parce que ce sera difficile de les

 17   expulser plus tard."

 18   Pièce 524, pages 17 et 18. Praljak, je cite : "Au sein du gouvernement, il

 19   a été question des réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui devraient pouvoir

 20   recevoir l'autorisation d'entrer en Croatie; étant donné qu'ils sont déjà

 21   sur le territoire où se trouve le peuple croate. Ensuite, à partir de la

 22   Croatie et sous la pression de la communauté internationale, il faudrait

 23   les envoyer jusqu'à la frontière, et puis ensuite, tant pis pour eux. Mais

 24   il semble maintenant parce que les nôtres s'installent sur les territoires

 25   à partir de Travnik et en dessous, je crains que nous n'ayons pas beaucoup

 26   de chance en ce moment -- ou plutôt, nous n'aurons pas de beaucoup de

 27   chance quand la guerre sera finie. Il y a eu beaucoup de modifications de

 28   la composition ethnique. Et il sera très difficile de les chasser et sans

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  1   les chasser, sans chasser ces gens nous n'aurons pas la majorité dans ces

  2   régions." Voilà ce que déclare Praljak en septembre 1992.

  3   Je sais que le moment est bientôt venu de faire la pause, mais encore une

  4   chose, ce que nous montrent les éléments de preuve c'est que comme bien

  5   souvent on voit que le HVO obtient souvent des choses par la force, c'est

  6   ce qu'on voit à Prozor en octobre 92, à Gornji Vakuf en janvier 1993, en

  7   Bosnie centrale, à Doljani en avril 1993. On voit toujours que ça se répète

  8   cette façon de faire.

  9   Le 23 octobre 1992, dans la pièce P 00628, quelques jours seulement après

 10   les conversations entre Praljak, Tudjman et Susak, que j'ai évoquée

 11   précédemment, les dirigeants du HVO à Prozor insistent pour que les

 12   Musulmans acceptent les structures militaires et politiques du HVO. Dans ce

 13   document, ils disent la chose suivante -- ils font les revendications

 14   suivantes, je cite : "Nous exigeons une cessation urgente et sans condition

 15   de toutes les opérations militaires;

 16   "Deuxièmement, nous insistons que vous envoyez un message à tous vos

 17   soldats -- ou plutôt, nous insistions que vous envoyiez tous vos soldats

 18   sur la ligne de front pour renforcer vos unités face aux Chetniks;

 19   "Troisièmement, retrait de toutes les unités armées de la ville;

 20   "Quatrièmement, passage pour la police militaire venant de

 21   l'extérieur de la municipalité et allant vers sa destination définitive,

 22   c'est-à-dire vers son poste de combat;

 23   "Cinquièmement - c'est la chose la plus importante - nous insistons

 24   pour que soit accepté immédiatement et instantanément la structure civile

 25   et militaire du HVO de la HZ HB au sein de laquelle les représentants

 26   musulmans auront une représentation proportionnelle.

 27   "Acceptation immédiate exigée par le HVO de cette structure militaire et

 28   civile. Les Musulmans répondent non, une fois encore c'est pourquoi il y

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  1   aura des combats à Prozor les 23 et 24 octobre 1992."

  2   Bon, si on regarde la pièce du 24 octobre 1992, la pièce

  3   P 00647, le commandant de la zone opérationnelle du HVO, Zeljko Siljeg,

  4   déclare : "La ville de Prozor et le lac de Rama sont sous le contrôle du

  5   HVO de Prozor. Ces deux zones sont ethniquement pures. La population

  6   musulmane a été soit arrêtée soit contrainte de fuir." Et, je parle de la

  7   situation telle qu'elle se présente à la date du

  8   24 octobre 1992. Donc, les combats forcément n'ont pas vraiment lieu

  9   d'être.

 10   Je regarde l'horloge et je me dis que le moment est sans doute bienvenu

 11   pour faire la pause.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : -- faire une pause de 20 minutes.

 13   --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.

 14   --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, vous avez la parole.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Avant de quitter Prozor au mois d'octobre 1992, bien évidemment, nous ne

 18   voulons pas écarter M. Coric ici. La pièce P 00956 c'est le rapport de M.

 19   Coric sur le travail de la police militaire du HVO qui couvre la période

 20   depuis le début au mois d'avril 1992 à la fin de l'année 1992. Ce rapport

 21   est daté du

 22   26 décembre 1992. Je vais peut-être inviter les Juges de la Chambre à

 23   regarder cette pièce.

 24   C'est une des rares pièces qui couvre l'ensemble de la période sur --

 25   depuis la création de la police militaire jusqu'à la fin de l'année. C'est

 26   une source d'information assez importante. Dans ce rapport, M. Coric parle

 27   de Prozor, et je cite : "Le 23 octobre 1992, il y a eu une confrontation

 28   armée entre les membres de l'ABiH et du HVO à Prozor et les Unités de la

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  1   Police militaire sont intervenues. En un très court laps de temps, la ville

  2   a été placée sous le contrôle de la police militaire. Du côté de la police

  3   militaire, un membre a été tué et cinq personnes ont été blessées en même

  4   temps, il y a eu une confrontation entre eux à Gornji Vakuf et Bugojno."

  5   En même temps et pour placer ceci dans un contexte plus large, dans ce même

  6   rapport, M. Coric a indiqué : "Le 21 octobre 1992, pour ce qui est de la

  7   situation qui empirait en Bosnie centrale, un siège complet de la ville de

  8   Mostar a été réalisé et 500 policiers militaires ont participé à cette

  9   opération." Donc, la police militaire du HVO a également œuvré sous les

 10   ordres de M. Coric.

 11   A la fin de l'année 1992, c'est maintenant la période à laquelle nous

 12   sommes parvenus, et à la mi-janvier 1993, nous constatons les différentes

 13   évolutions eu égard au plan Vance-Owen. Aucun -- ni les Serbes, ni les

 14   Musulmans n'étaient tombés d'accord sur le plan Vance-Owen à la mi-janvier

 15   1993. Il est vrai qu'il y avait quelques parties du plan sur lequel

 16   d'aucuns étaient tombés d'accord et, bon, je crois que ceci doit être

 17   clair, mais certaines parties du plan avaient été acceptées mais le plan

 18   dans son ensemble n'a jamais été accepté. Et les Serbes et les Musulmans ne

 19   s'étaient jamais mis d'accord sur le plan, et à la mi-janvier 1993,

 20   Tudjman, Susak et ensuite les dirigeants du HVO d'Herceg-Bosna, y compris

 21   l'accusé, ont trouvé que ce plan tel qu'ils l'envisageaient, tel qu'ils

 22   l'interprétaient était tout à fait en leur faveur. Et pour l'essentiel dans

 23   ce plan Vance-Owen, les provinces 3, 8 et 10 leur revenaient. C'était pour

 24   l'essentiel les frontières de la banovine.

 25   Cela étant dit, bon nombre de ces régions à l'intérieur de ces frontières

 26   avaient des populations qui étaient -- avaient une population musulmane

 27   égale qui n'était pas tombée d'accord là-dessus et qui n'avait pas consenti

 28   à cette partie de l'Herceg-Bosna. Et il semblait que les propositions du

Page 27058

  1   plan Vance-Owen semblaient donner aux Croates, en tout cas, à ce moment-là,

  2   17,5 % sur l'ensemble de la population de la Bosnie-Herzégovine, environ 28

  3   % de l'ensemble du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et Tudjman, lui-

  4   même, a déclaré plus tard, au mois de juin 1993, dans la pièce P 02613, que

  5   le plan des propositions Vance-Owen, que les provinces 3, 8 et 10, et je

  6   cite : "Etant bon an, mal an ce qui est -- a fait partie de la banovine de

  7   Croatie en 1939."

  8   C'est en raison de ce traitement, semble-t-il, favorable en tout cas

  9   tel que ça été interprété par les Croates lors de ces discussions Vance-

 10   Owen qu'à Zagreb et -- à Zagreb et dans l'ABiH, on commençait à dire que le

 11   HVO défendait les intérêts -- le plan Vance-Owen défendait le HVO.

 12   A la mi-janvier 1993, les dirigeants du HVO d'Herceg-Bosna étaient désireux

 13   de mettre en œuvre cette proposition du plan Vance-Owen et ont refusé

 14   d'attendre les Musulmans et les Serbes d'accepter leur interprétation. Au

 15   lieu de ça -- de cela, ils ont préféré prendre une -- adopté une action

 16   unilatérale pour le mettre en œuvre. A une réunion à Zagreb qui a eu lieu

 17   le 15 janvier 1993, ceci est consigné dans la pièce P 01158. Tudjman, Susak

 18   et Boban n'ont pas réussi à convaincre le président de la Bosnie-

 19   Herzégovine, Alija Izetbegovic - c'est une réunion à laquelle a assisté

 20   Izetbegovic et cela est consigné dans le compte rendu - n'ont pas réussi à

 21   convaincre Izetbegovic d'accepter leurs points de vue, et ceci est daté du

 22   15 janvier 1993. Et ensuite, ils ont tout de suite mis en œuvre leur plan.

 23   Izetbegovic s'en est plaint au cours de cette réunion. Il a indiqué

 24   que les autorités d'Herceg-Bosna et du HVO avaient privé les Musulmans de

 25   Mostar de leurs droits et qui -- ceci comprenait la moitié de la population

 26   de la ville et que les autorités du HVO et du HZ HB ont dissout les

 27   gouvernements légaux. Izetbegovic a également attiré l'attention sur le

 28   fait que Tudjman, Susak, et Boban avaient interprété le plan Vance-Owen et

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  1   avaient indiqué que ce dernier leur donnait le feu vert et pouvait forcer

  2   l'ABiH à se retirer des trois régions de Bosnie-Herzégovine et que les

  3   dirigeants croates considéraient leur appartenir.

  4   Izetbegovic est très clair lors de cette réunion. Il suffit de relire

  5   le compte rendu pour cela pour s'apercevoir, il est très clair que, le 15

  6   janvier, ceci n'est pas sa position, ceci n'est pas son point de vue.

  7   Izetbegovic, et je cite : "Ce n'est pas ainsi que j'ai compris ce

  8   document et je ne sais pas si tel était l'intention derrière ce document.

  9   Mais parce que je ne vois pas en quoi il définisse qui a droit à quel

 10   territoire, à qui sont ces armées, vous savez, donc, je crains que ce qui

 11   se passe maintenant à Gornji Vakuf est quelque chose qui est peut-être dû à

 12   un malentendu de ce point de ces accords."

 13   Izetbegovic poursuit en disant, je cite : "Je ne pense pas que ceci

 14   avait été prévu par ces propositions. Il n'avait pas été prévu que l'ABiH

 15   quitte la province de Travnik ou Mostar. Ça n'est pas ainsi que j'ai

 16   compris ce document."

 17   Le même jour, le 15 janvier 1993, nonobstant la position d'Izetbegovic sans

 18   équivoque, il rejetait les positions du HVO. Le président du HVO, Jadranko

 19   Prlic, a signé une décision, et je cite : "En vertu de quoi toutes les

 20   Unités de l'ABiH, qui à ce moment-là étaient cantonnées dans les provinces

 21   3, 8, et 10, qui avaient été proclamées provinces croates au terme des

 22   accords de Genève, seront subordonnées à l'état-major général des forces

 23   armées du HVO. Le délai fixé pour la mise en œuvre de cette décision est

 24   ainsi fixée à cinq jours à partir d'aujourd'hui, le 15 janvier 1993." Ceci

 25   se trouve à la pièce P 01155.

 26   Messieurs les Juges, dans ce cas, nous constatons que ceci est une parfaite

 27   illustration de l'ensemble de la chaîne de commandement du HVO. Je vais

 28   commencer par la décision prise par Jadranko Prlic que je viens de citer, P

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  1   01155, suivie tout de suite par les services du ministre de la Défense

  2   Bruno Stojic qui lui donne son ordre. C'est la pièce P 01140 qui fait plus

  3   précisément allusion à la décision de Prlic, qui ensuite est suivie à son

  4   tour, comme on pourrait s'y attendre par le président et le ministre de la

  5   Défense qui se trouvent être des soldats de carrière suivie par les ordres

  6   correspondants de l'état-major général du HVO Milivoj Petkovic. Ceci est à

  7   la pièce P 01139. Ceci a été transmis tout au long de la chaîne de

  8   commandement le 15 janvier 1993. L'ordre de Petkovic est très précis. Le

  9   numéro de la décision et l'ordre ont été donnés.

 10   Encore une fois, les éléments, ces fonds pour l'essentiel ont été établis

 11   par les faits admis en vertu de jugement antérieur.

 12   "Mate Boban, le dirigeant du HDZ BiH est tout de suite d'accord avec

 13   les conditions du plan Vance-Owen, parce qu'il promet des gains de

 14   territoires très importants pour les Croates de Bosnie." Fait admis 464.

 15   "Et Mate Boban a signé le plan Vance-Owen au nom des Croates de

 16   Bosnie-Herzégovine le 2 janvier 1993. Ni les Serbes de Bosnie ni les

 17   représentants musulmans de Bosnie-Herzégovine avaient signé le plan à ce

 18   stade." Fait admis 128.

 19   "Tout en sachant que les autres parties n'avaient pas signé mais

 20   sachant et que l'opinion publique mondiale les soutenait, les Croates de

 21   Bosnie-Herzégovine ont tenté de mettre en œuvre le plan Vance-Owen de façon

 22   unilatérale." Fait admis numéro 129.

 23   Malgré le fait que ni le président de la Bosnie-Herzégovine, M.

 24   Izetbegovic, ni les négociateurs internationaux n'étaient tombés d'accord

 25   sur la mise en œuvre unilatérale des propositions du plan Vance-Owen, les

 26   autorités de l'Herceg-Bosna et du HVO ainsi que leurs forces, une fois

 27   passé le délai du 15 juin 1993, ont engagé des actions militaires et

 28   violentes pour faire exécuter l'ultimatum, en attaquant les Musulmans en

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  1   exerçant des pressions sur eux dans bon nombre d'endroits, y compris à Novi

  2   Travnik, Gornji Vakuf et Busovaca. Dans ce rapport régulier de l'état-major

  3   du HVO, le

  4   16 janvier 1993, un jour après les ordres donnés par Prlic, Stojic et

  5   Petkovic, le commandant de la zone opérationnelle de la partie nord-ouest,

  6   Zeljko Siljeg, consigne dans un rapport : "Ce soir à Gornji Vakuf, le

  7   colonel Siljeg et le colonel Andric vont négocier avec les représentants de

  8   l'ABiH. Il n'y a pas eu de résultat à moins qu'il y ait un accord. Sans

  9   accord, Gornji Vakuf et les bastions du sud seront pris et nous allons

 10   étendre la ligne de front. Le général Praljak leur envoie un message en

 11   indiquant qu'ils seront détruits ou anéantis s'ils n'acceptent pas les

 12   décisions du HZ Herceg-Bosna."

 13   Le 20 janvier, le délai est dépassé et la première grande

 14   confrontation entre le HVO et les Musulmans depuis Prozor en octobre 1992

 15   éclate dans plusieurs régions de Bosnie-Herzégovine, y compris Gornji Vakuf

 16   et Busovaca.

 17   Les observateurs internationaux sur le terrain ont clairement compris

 18   que les confrontations sur le terrain étaient dues, d'après eux, "au désir

 19   prématuré de se saisir de ces territoires." Ceci se trouve à la pièce P

 20   01285. Il y a un représentant de la FORPRONU qui indique que, le 28 janvier

 21   1993 : "Depuis les pourparlers de janvier -- au début du mois de janvier,

 22   les tensions se sont accrues de façon progressive entre différents éléments

 23   à la fois du HVO croate et de l'armée musulmane de BiH et essentiellement

 24   musulmane en Bosnie centrale et en Bosnie du sud. Au cours de la dernière

 25   semaine les dirigeants politiques et militaires de la Communauté croate

 26   d'Herceg-Bosna ont commencé à mettre en œuvre 'leur accord' de l'accord qui

 27   -- de la proposition d'accord. Ce désir prématuré de se saisir des

 28   provinces 3, 8, et 10 ont provoqué des tensions extrêmement fortes et de

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  1   très lourds combats."

  2   Ceci a coïncidé et je passe un peu -- j'évoque une partie du rapport

  3   un peu plus loin. Ceci a coïncidé avec les préparatifs récents et un retour

  4   à Genève. Les Unités du HVO venant des municipalités du sud majoritairement

  5   croates ont été déplacées en Bosnie centrale. Il y a eu de façon plus

  6   inquiétante d'après des sources des Nations Unies des soldats portant des

  7   écussons qui les identifient comme étant des membres de l'armée croate.

  8   Dans cette zone, le rôle des soldats n'est pas clair mais le fait d'avoir

  9   aperçu ces soldats correspond à ce qui a été constaté, à savoir que les

 10   Unités du HVO se trouvaient dans les municipalités du sud.

 11   Le 25 janvier 1993, pièce P 01297, Tudjman précise encore une fois de

 12   façon très claire. Il n'y a pas de malentendu, Izetbegovic n'a absolument

 13   pas accepté cette voie. Tudjman a très précisément admis qu'il avait une

 14   position contraire et qu'il ne cautionnait pas du tout le point de vue

 15   avancé par le HVO. Et Tudjman dit : "La position d'Izetbegovic, eu égard à

 16   l'avenir de la Bosnie, ne concordait pas avec celle des intérêts croates ni

 17   des dirigeants croates en Bosnie-Herzégovine."

 18   Une référence très claire à Boban et consorts, le 27 janvier, deux

 19   jours plus tard, la pièce 01325, au cours du conflit en cours en Bosnie

 20   centrale -- dans la deuxième moitié de janvier 1996 -- 1993 et Susak, dans

 21   un rapport, indique qu'il a reçu des mises à jour de Stojic et Kordic sur

 22   les combats à Busovaca et a dit que Praljak et Stojic avaient, je cite,

 23   "tout organisé -- organisé tout ce qu'ils pouvaient là-bas dans le sud."

 24   Praljak et Stojic avaient tout organisé.

 25   A la date du 1er février 1993, la FORPRONU consigne dans ses rapports, je

 26   cite : "Le HVO continue à montrer une détermination très ferme et souhaite

 27   encore à l'avenir contrôler les 'provinces croates' 8 et 10. Sans un accord

 28   convenu bientôt, le HVO va asseoir son contrôle sur les provinces,

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  1   proposées dans l'accord, 3, 8 et 10 -- il faut trouver un accord

  2   rapidement; sinon, le HVO ne pourra pas asseoir son contrôle sur les

  3   provinces 3, 8 et 10. Il s'agit donc de ce désir de s'emparer de ces

  4   territoires et les intentions de la Communauté croate."

  5   Bien qu'il y a des cessez-le-feu localement qui avaient été déclarés

  6   à la fin du mois de janvier, début du mois de février, Tudjman, Boban et

  7   les autres n'avaient absolument pas l'intention de renoncer à une plus

  8   grande Croatie. Le 8 mars 1993, tel qu'il est dit dans la pièce P 01622,

  9   Boban dit à Tudjman, Susak et à un groupe de leaders croates de Bosnie :

 10   "Si la Bosnie-Herzégovine doit exister nous avons une frontière. Nous

 11   savons exactement comment nous allons préparer un plan à l'avance.

 12   L'Herceg-Bosna ne cessera jamais d'exister. Même dans le cadre d'autre

 13   chose cela restera toujours l'Herceg-Bosna."

 14   Dans une autre réunion, le 9 mars, il s'agit de la pièce

 15   P 01452. Je vais vérifier. Il peut s'agir du 9 février, quoi qu'il en soit

 16   c'est la pièce P 01452. En la regardant maintenant il me semble que la date

 17   peut être erronée. Mais dans cette pièce Tudjman dit : "Encore une fois, le

 18   problème était que les Musulmans n'étaient pas d'accord avec le fait qu'une

 19   autorité croate soit établie dans les provinces désignées comme Croates

 20   selon les termes de la proposition du plan Vance-Owen."

 21   Susak a déclaré : "Qu'Izetbegovic doit présenter une déclaration car

 22   les provinces doivent être -- les provinces qui doivent être partagées

 23   entre les Croates et les Serbes doivent ne pas faire l'objet de différends

 24   et doivent être des conditions sine qua non."

 25   Les tensions restaient élevées et il y avait des escarmouches

 26   localement. Un conflit majeur a pu être évité jusqu'à la fin du mois de

 27   mars 1993.

 28   Je crois, Monsieur le Président, qu'en réalité, il s'agit bien de la

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  1   date du mois de février pour la pièce P 01452. Il y a eu une période où

  2   aucun conflit majeur n'avait éclaté jusqu'à la fin du mois de mars 193. A

  3   ce moment-là, vers le 26 et le 27 mars, Izetbegovic signe la plus grande

  4   partie du plan Vance-Owen pour la première fois et accepte de façon

  5   provisoire le plan quoi qu'il y ait eu certains termes -- certains des

  6   termes de l'accord qui restent incertains. Et les Serbes sont également

  7   d'accord avec ce plan -- la condition était que les Serbes soient d'accord

  8   avec ce plan, chose qui n'a jamais -- ne s'est jamais réalisée. Les aspects

  9   militaires et la répartition des forces doivent être clairement définis.

 10   A cet égard, il est important que la Chambre admette que, dans ces

 11   documents, le plan Vance-Owen, signé par Izetbegovic, n'évoquait pas la

 12   question de la subordination des Unités de l'ABiH aux provinces 8 et 10 au

 13   HVO mais a clairement indiqué - ceci se trouve à la pièce P 01398 - fait

 14   partie des documents Vance-Owen en annexe : "Le retrait des forces." Dans

 15   cette annexe, on peut lire : "L'armée de Bosnie et les forces du HVO seront

 16   déployées dans les provinces 5, 8, 9 et 10, conformément aux accords entre

 17   eux."

 18   Encore une fois, je peux vous citer des faits admis en vertu de

 19   jugements antérieurs dans le cadre des événements que je vous présente dans

 20   ma chronologie :

 21   "Les négociations du plan Vance-Owen se sont poursuivies en février,

 22   mars 1993." Fait 151.

 23   "Le président Izetbegovic a signé le plan Vance-Owen au nom des

 24   Musulmans de Bosnie le 25 mars 1993. Et les représentants Serbes de Bosnie

 25   n'avaient toujours pas signé le plan." Fait numéro 152.

 26   "Le 3 avril 1993, les dirigeants du HVO se sont réunis à Mostar pour

 27   aborder la question de la mise en œuvre du plan Vance-Owen -- du plan de

 28   paix Vance-Owen." Fait 155.

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  1   Je fais valoir, Messieurs les Juges, qu'il y a au moins deux

  2   documents qui sont essentiels pour les Juges de la Chambre. Il est

  3   important de les examiner dans leur totalité. Il y en a même trois. La

  4   Chambre ne sera pas surprise de constater qu'il s'agit encore d'un compte

  5   rendu des réunions de la présidence. C'est la pièce P 01737, le 27 mars

  6   1993. Lors d'une autre réunion encore une fois en présence d'Izetbegovic

  7   également ainsi que d'autres personnes, Tudjman insistait auprès

  8   d'Izetbegovic au cours de cette réunion, vous pourrez le lire, et a dit à

  9   Izetbegovic de rencontrer Slobodan Praljak et de façon à faire une

 10   déclaration conjointe -- et sur l'accord de prise de contrôle par le HVO

 11   des provinces soi-disant Croates et d'organiser le retrait et la

 12   subordination de l'armée de l'ABiH dans ces provinces.

 13   Souvenez-vous de ce que j'ai dit il y a un instant. Ceci s'est trouvé

 14   dans l'annexe. Il y avait eu un accord. Il n'y avait pas eu d'accord sur la

 15   disposition des forces du HVO et de l'ABiH, un accord n'avait pas encore

 16   été conclu. Le 27 mars, Tudjman insiste auprès d'Izetbegovic pour qu'il

 17   rencontre Praljak et pour parvenir à un autre accord.

 18   En même temps, ceci se trouve à la pièce P 01737.

 19   En même temps, Boban propose sa déclaration conjointe du

 20   2 avril 1993. C'est la pièce P 01792. Ceci est encore un autre document qui

 21   est fort important ce qui montre qu'Izetbegovic n'a pas signé cela en nom

 22   seulement, c'est une -- il importe que le document dit : déclaration

 23   conjointe mais c'est tout. Il n'a pas été préparé par le HVO. Il est signé

 24   par Mate Boban. Il n'a jamais été signé par la partie musulmane. Encore une

 25   fois, on fixe d'autres délais le mois de janvier -- à la date du 15 avril

 26   1993, date butoir pour que soit subordonnée l'ABiH aux Unités du HVO dans

 27   les provinces 8 et 10, ou qu'elles se retirent. Souvenez-vous de la date

 28   c'est le 15 avril

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  1   1993 ?

  2   Il y a deux ou trois documents que je vous signalais il y a quelques

  3   instants. Il est très important, Messieurs les Juges, que vous regardiez

  4   ces documents en ce qui concerne -- parce qu'il y a une réunion en

  5   particulier au quelle ont assisté un certain nombre de personnes.

  6   Voici comment nous nous proposons d'avancer eu égard à ce plan et

  7   ceci se retrouve au procès-verbal de la réunion de l'Herceg-Bosna et du HVO

  8   le 3 avril 1993.

  9   Ce jour-la, c'est la pièce P 01798. Il est inhabituel, je dois vous

 10   dire, entre autres, parce que M. Boban assistait rarement aux réunions du

 11   gouvernement du HVO qui étaient présidées par M. Prlic en tant que

 12   président du gouvernement du HVO, mais à cette occasion-là, Boban a assisté

 13   également. Et les participants étaient Jadranko Prlic qui "présidait la

 14   réunion," le président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, Mate Boban,

 15   Bruno Stojic et toute une série d'autres personnes de personnalités du HVO.

 16   Je fais maintenant référence à la proposition de déclaration

 17   conjointe, celle qui n'a jamais été signée par Izetbegovic et qui fixait

 18   les délais au 15 avril 1993, le procès-verbal déclare, je cite : "Le HVO HZ

 19   HB" - à savoir l'organe présidé par Jadranko Prlic, le gouvernement du HVO

 20   - "le HVO HZ HB espère qu'en raison de l'importance cruciale de cette

 21   déclaration, M. Alija Izetbegovic va signer ce document parce que ceci

 22   indique encore une fois que nous souhaitons avoir la paix et que chacun

 23   souhaite avoir la paix. Au cours de cette réunion, le HVO, HZ HB a adopté

 24   la position suivante, à savoir si la déclaration susmentionnée n'est pas

 25   signée par les dirigeants des délégations musulmanes concernant les

 26   provinces, numéro 3, 8 et 10, l'élément important sur lequel se repose le

 27   plan

 28   -- repose le plan de paix décrète que les forces armées doivent se retirer

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  1   dans les provinces où elles éliront domicile."

  2   [aucune interprétation]

  3   "Si la déclaration conjointe n'est pas une mise en œuvre, les autorités

  4   militaires et autres du HVO, HZ, HB mettront en œuvre la disposition de ce

  5   document de base du plan de paix pour ce qui est des régions 3, 8 et 10."

  6   Je ne vais pas citer tout ceci parce que vous disposez du document. Le

  7   procès verbal néanmoins se lit comme suit : "Puisque le pouvoir des

  8   autorités centrales à venir et des autorités dans les provinces ont été

  9   clairement définies et de façon distincte par le document de référence ou

 10   de base et de l'accord sur une organisation provisoire, le HVO HZ HB

 11   empêchera toute tentative d'installation de différents organes nommés par

 12   une présidence qui ne représente qu'une des parties et le gouvernement de

 13   la République de Bosnie-Herzégovine."

 14   Le procès verbal conclut cette partie en disant : "Il a été convenu à cette

 15   réunion que, dans les prochains jours, le HVO HZ HB devra se rendre dans

 16   les municipalités des provinces 3, 8 et 10 afin d'expliquer aux autorités

 17   l'essentiel du plan Vance-Owen et des conclusions auxquelles nous nous

 18   sommes parvenus à cette réunion."

 19   Donc, c'est un plan très complet. Nous avons besoin de nous y rendre. Nous

 20   devons nous retrouver parmi les gens là-bas. Nous devons nous rendre dans

 21   les municipalités, nous devons leur expliquer ce qui se passe et quel est

 22   ce plan.

 23   En réalité, ce deuxième document, avant cette réunion qui s'est  déroulée

 24   le 2 avril, un jour la veille, Slobodan Praljak et Valentin Coric avaient

 25   déjà commencé à apporter la bonne parole et étaient rentrés en Bosnie

 26   centrale à cette occasion-là pour rencontrer Dario Kordic, Tihomir Blaskic

 27   et les dirigeants militaires du HVO qui s'étaient rassemblés en Bosnie

 28   centrale, Slobodan Praljak, Valentin Coric. Voici ce que dit le procès

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  1   verbal, cette réunion se trouve consigner à la pièce P 01780 [comme

  2   interprété].

  3   Praljak président la réunion, et encore une fois, Blaskic et Kordic sont

  4   là, ils préparent un rapport et veulent indiquer ce qui va advenir de la

  5   population de Bosnie centrale. Le document se lit comme suit : "Le général

  6   Praljak a ouvert la réunion en indiquant aux participants -- en invoquant

  7   aux participants l'arrivée de cinq ou six officiers d'Herzégovine. Il l'a

  8   clairement indiqué qu'il fallait signer le plan et que la FORPRONU  allait

  9   rester dans la région pendant trois mois encore." Il était sans doute assez

 10   optimiste. "Cette déclaration établit le caractère immuable des frontières

 11   de la République de Croatie. On ne pourra plus l'échanger que ce soit par

 12   la paix ou par la force. La République de Croatie peut maintenant signer

 13   elle-même des traités avec les organisations internationales. Cette

 14   déclaration représente une très grande victoire et nous devons être

 15   patient."

 16   Le texte se poursuit en disant : "La République de Bosnie-Herzégovine --

 17   l'option de Alija Izetbegovic est maintenant hors de question."

 18   Il a signé comme je l'ai indiqué un peu plus tôt.

 19   Le procès verbal se poursuit comme suit : je crois qu'ils sont suffisamment

 20   révélateurs. On peut lire que Slobodan Praljak a donné une interview et

 21   indiquait : "La Communauté croate d'Herceg-Bosna restera à sa propre

 22   assemblée et le gouvernement provincial va diriger le pays. Le gouvernement

 23   central n'aura rien. La province de Sarajevo ne restera pas telle qu'elle

 24   existe aujourd'hui. L'occident ne s'intéresse pas à l'histoire mais le

 25   nombre de Croates qui se trouvent dans ces régions. Il n'y aurait plus

 26   qu'un pour cent des Croates sur tout l'ensemble du territoire de la Bosnie-

 27   Herzégovine en raison de populations qui ont été déplacées et les Musulmans

 28   et les Serbes. Le salut ne viendra que de la protection de la population et

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  1   de l'augmentation du taux de natalité. Les gens qui se trouveront en dehors

  2   de ces provinces auront une vie difficile. Les Musulmans ne savent -- ne

  3   sont pas confiants de leur perte. Nous devons être patients avec eux. Tous

  4   ceux qui sont venus sont des réfugiés, les Croates pourront venir dans ces

  5   provinces quand bon leur semble et de quelle manière qu'ils souhaitent. Les

  6   provinces musulmanes seront surpeuplées. Le fanatisme religieux fera

  7   surface c'est inévitable. Il y aura des déplacements, il y aura des

  8   réinstallations et la population sera ensuite homogène."

  9   Le procès verbal se poursuit comme suit : "Il faut séparer les deux

 10   politiques. Il y aura peut-être des querelles comme il y en aura mais notre

 11   intérêt global -- national n'est pas disons cause de la politique

 12   nationale, de l'état et d'autres choses. La République de Croatie et le HZ

 13   HB a son propre chemin. Nous sommes en train de faire un très bon progrès

 14   le long de cette route -- de ce chemin. Restons dessus."

 15   Et si vous vous rappelez, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la

 16   carte qui avait été signée à la fin du mois de mars, n'est-ce pas, vous

 17   vous rappelez qu'il y a eu une préoccupation constante si Vares serait

 18   incluse et ferait partie des territoires croates ?

 19   Donc, après ces commentaires faits par M. Praljak, le procès verbal

 20   poursuit pour dire : "Le colonel Tihomir Blaskic a ouvert une discussion

 21   avec les commandants. Borivoje Malbasic a posé une question concernant

 22   Vares. Le général Praljak a dit, je cite : 'Il n'y a aucune politique qui

 23   peut nous permettre avoir tout. Si vous pensez que ceci existe, dites-nous-

 24   le. Donc, il n'y a absolument aucune politique qui peut nous permettre de

 25   tout avoir, n'est-ce

 26   pas ?'."

 27   Et ensuite, la question qui s'ensuit : "Mais qu'est-ce qui va se

 28   passer s'ils nous demandent d'avoir d'autres municipalités ? Par le biais

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  1   de notre politique, nous avons pris tout ce que nous avons pu. Les

  2   négociations, bien, quelque chose doit être signé. La meilleure route pour

  3   la Croatie, la meilleure façon pour la Croatie pour procéder, c'est d'avoir

  4   un territoire qui va jusqu'à la Drina. Nous n'avons jamais pu obtenir rien

  5   de ceci, et nous ne l'aurons jamais. En Croatie centrale près de 49 %, les

  6   Croates n'ont rien à demander. C'est un exemple classique de stupidité. Il

  7   n'y a pas d'état sans une nation et dans cet état-là, où serions-nous ?

  8   Maintenant, nous avons ce que nous avons voulu, la homogénéisation de notre

  9   population se poursuit. Nous pouvons maintenant protéger ce qui est à nous,

 10   et nous pouvons construire notre propre espace, notre propre état. Tout est

 11   aussi clair comme une journée limpide de printemps."

 12    Vous vous rappellerez, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que la

 13   date butoir ou le délai du 15 avril avait été présenté, les Musulmans

 14   n'étaient pas d'accord. Izetbegovic n'a jamais signé et le 16 avril nous

 15   avons une série d'attaques qui avaient été menées et des crimes que nous

 16   appelons maintenant comme des crimes les plus notoires, le 16 avril, par

 17   exemple l'attaque sur Ahmici qui a été établie comme un fait admis dans un

 18   certain nombre d'affaires devant ce Tribunal.

 19   Mais dans cette affaire-ci, nous avons les combats autour de Sovici et de

 20   Doljani, vers le 17 avril, et ensuite, il y avait aussi les attaques menées

 21   contre Parcani, Lizoperci et Toscanica, le 17 et 19 avril, tel que stipulé

 22   dans l'acte d'accusation. Donc date butoir du 15 avril après la date.

 23   Après du délai du 15 avril, le HVO mène l'attaque.

 24   Un très grand nombre de rapports faits par des observateurs des Nations

 25   Unies, y compris les membres de la MOCE, le FORPRONU et des Nations Unies,

 26   ont dit très clairement que des crimes de guerre ont été commis en Bosnie

 27   centrale et que ceci fait partie d'une lancée d'événements selon laquelle

 28   le HVO de l'Herceg-Bosna essaie de mettre en œuvre le plan Vance-Owen. Il y

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  1   a un très grand nombre de pièces, bien sûr, mais la pièce peut-être la plus

  2   importante est la pièce

  3   P 01981, mais je ne vais pas me pencher trop longuement sur cette dernière.

  4   Il est bien sûr intéressant de remarquer l'intérêt historique, le 17 avril

  5   1993, deux jours après que l'ultimatum eut été fait concernant les attaques

  6   de Sovici et Doljani, et cetera. Le 17 avril, le Conseil de sécurité des

  7   Nations Unies a adopté la résolution 820 réaffirmant par cette dernière que

  8   si l'on s'empare du territoire par la force et toute pratique de "nettoyage

  9   ethnique" était illégale et complètement inacceptable, et il fait appel au

 10   secrétaire général de faire un rapport sur l'établissement d'un Tribunal

 11   sur les crimes de guerre le plus tôt possible. C'est bien sûr notre

 12   Tribunal.

 13   Lors d'une réunion du 24 avril 1993, la pièce P 02059, Izetbegovic de

 14   nouveau dit que : "La vision de Tudjman concernant une solution pour la

 15   Bosnie-Herzégovine avec chaque groupe ethnique ayant son propre territoire

 16   n'est pas ou tout du moins de son point de vue n'est pas la Bosnie-

 17   Herzégovine du plan de paix Vance-Owen."

 18   Izetbegovic de nouveau incite pour dire que : "Les dirigeants croates ont

 19   interprété les dispositions du plan de façon complètement erronée."

 20   Izetbegovic dit plus loin dans cette réunion, de la pièce

 21   P 020509, je cite : "Le conflit a éclaté parce que les autorités croates

 22   ont commencé à être mis -- placent dans les provinces de Mostar et Travnik.

 23   Nous savons que nous avons été très coopératifs et tolérants lorsque les

 24   frontières de ces provinces avaient été établies. Nous acceptons que la

 25   promesse selon laquelle tout le monde serait égal, mais le plan Vance-Owen

 26   était un trou contenant un chapitre très volumineux sur les droits

 27   nationaux et humains, et qu'il y avait également été signé et que les

 28   gouvernements participants seraient sécurs [comme interprété]. Nous

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  1   tolérons le fait qu'il y a dix larges municipalités musulmanes qui

  2   demeurent à Travnik et à Mostar et nous avons l'impression d'avoir été

  3   trompés."

  4   A la fin du mois avril 1993, une mission du Conseil de sécurité a mené une

  5   enquête pour ce qui est de Bosnie-Herzégovine et ceci concernant un

  6   massacre du HVO sur Ahmici et le 16 avril et je vais mentionner la pièce P

  7   02150. Je veux simplement résumer pour dire qu'il y a eu au cours de cette

  8   période beaucoup de discussions sur le développement en Bosnie centrale

  9   avec Tudjman et Boban admettant bien sûr que les crimes avaient été commis

 10   et avec les promesses qui avaient été données selon lesquelles on allait

 11   entreprendre les mesures nécessaires pour traduire en justice les auteurs

 12   de ces crimes. Mais, bien sûr, ceci malheureusement n'a pas été fait.

 13   Au cours de cette même période, le 27 avril 1993, Mate Boban, Franjo

 14   Tudjman et le président Izetbegovic ont effectivement signé une déclaration

 15   conjointe à Zagreb demandant l'arrêt de toute hostilité entre les Croates

 16   et les forces du gouvernement de l'ABiH en Bosnie centrale, je cite : "Ceci

 17   a causé un très grand nombre de pertes en vies humaines et de violations

 18   très graves du droit humanitaire international."

 19   Encore une fois, cette déclaration condamne, je cite : "Très sévèrement

 20   toutes les violations des règles du droit humanitaire international," et a

 21   admis que des deux côtés, même les Croates ont, je cite : "Violé cette loi

 22   sur la base des informations disponibles." Boban et les autres ont

 23   entreprise, je cite : "D'initier de façon urgente une enquête conjointe et

 24   individuelle concernant chaque crime de violation des droits de l'homme et

 25   d'entreprendre les mesures immédiatement pour traduire en justice les

 26   auteurs des crimes menés contre la population civile."

 27   En date du 1er mai, le chef de la mission de la MOCE, qui s'était chargé de

 28   la Bosnie centrale et l'Herzégovine, dit, dans son rapport : "Les dernières

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  1   réunions des autorités d'Herceg-Bosna à Citluk, le 30 avril 1993, ont

  2   révélé ou ont démontré quel était l'aspect politique des événements

  3   militaires, et c'est maintenant ou jamais le moment d'exprimer le sentiment

  4   très claire des 23 observateurs de la MOCE en Bosnie-Herzégovine.

  5   "Un, des Croates de Bosnie continuent de formuler leurs plaintes selon

  6   lesquelles ils se font attaquer par les 'forces musulmanes' de tous les

  7   côtés malgré le fait que nous estimons qu'ils sont complètement

  8   responsables du conflit qui a éclaté le 14 avril et s'est poursuivi. Les

  9   combats ont commencé sans doute d'après l'initiative du HVO, prétendant

 10   qu'il ne faisait que répondre à une attaque systématique anti-croate.

 11   C'était tout à fait clairement une tentative de s'emparer des 'provinces

 12   croates'."

 13   Il y a un autre document de la MOCE qui est en rapport avec cette période,

 14   mais je ne vais pas de nouveau vous donner lecture de ce document il s'agit

 15   de la pièce P 02787, vous pourrez en prendre connaissance, bien sûr,

 16   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, et l'Accusation en fait, dans

 17   ce document, établit -- ou fait une analyse très précise et est très

 18   détaillée de ce qui se passait sur le territoire à l'époque. Je répète

 19   c'est bien la pièce P 02787.

 20   Je vais toutefois que citer un passage très court : "L'objectif pour le HVO

 21   semble être de nettoyer les provinces 8 et 10 des Musulmans et de

 22   poursuivre leur rêve selon lequel ils auraient l'Herceg-Bosna."

 23   Pour la chronologie, je crois qu'il est important de mentionner que c'est

 24   au mois d'avril de 1993 qu'à Mostar, il y a eu un passage d'un décret

 25   administratif. C'est la décision du mois d'avril 1993 qui a mené au fait

 26   qu'on n'a pas donné d'aide humanitaire à environ

 27   10 000 personnes en besoin à Mostar. La façon dont ceci fonctionnait, en

 28   fait, cette règle a affecté de façon disproportionné les Musulmans, les

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  1   réfugiés, les personnes déplacées qui s'étaient retrouvées et rassemblées

  2   autour de Mostar, ou dans la région de Mostar, il y avait d'autres

  3   organisations internationales - je ne veux pas mentionner de nom car nous

  4   avons entendu un témoin protégé - qui a dit que cette décision n'était rien

  5   d'autre qu'un type de nettoyage ethnique en application d'un décret

  6   administratif. Effectivement, après cette décision, les organisations

  7   humanitaires internationales ont fait un rapport selon lequel les Musulmans

  8   ont eu un autre délai et cette fois-ci c'était le 9 mai pour quitter --

  9   abandonner les appartements qui se trouvaient à Mostar, les appartements

 10   abandonnés dans lesquels les Musulmans avaient emménagé. La date butoir

 11   selon laquelle il fallait abandonner ces appartements avant le 9 mai. Vous

 12   vous rappellerez. Je -- en fait, je demande aux Juges de la Chambre de

 13   garder à l'esprit la date du 9 mai.

 14   Pour suivre, bien sûr, cette chronologie, le 6 mai 1993, l'assemblée serbe

 15   de Bosnie a voté deux à 12 contre la ratification du plan de paix Vance-

 16   Owen. Donc, il n'y avait absolument aucune question qui s'est posée à cette

 17   époque. Donc, en date du 6 mai, le plan Vance-Owen était mort. Il n'y avait

 18   plus de plan Vance-Owen. Les Serbes avaient rejeté de façon catégorique le

 19   plan Vance-Owen, et ce plan était donc mort.

 20   Maintenant, parlons des stratégies du HVO et des pratiques. De nature

 21   systématique du fait d'enlever les Musulmans des territoires que l'on

 22   [imperceptible] annexé de l'Herceg-Bosna, ça a été fait de façon

 23   progressive. Et on a également mis en prison les -- l'intelligentia de ces

 24   derniers de ces groupes. Ensuite, on a arrêté les dirigeants intellectuels

 25   politiques et religieux même avant les événements du mois de mai, c'est-à-

 26   dire l'attaque menée contre Mostar. Au début de 1993, le HVO a mis en

 27   prison environ 1 000 intellectuels. Au mois d'avril, mai, juin 1993, tous

 28   les imans qui ont pu être capturés par le HVO se sont faits arrêter et des

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  1   dizaines avaient été faits prisonniers à ce moment-là.

  2   Je dois souligner que les intellectuels musulmans faisaient l'objet d'un

  3   traitement spécial. Ces derniers avaient été placés à un endroit

  4   particulier c'était la prison du HVO de Ljubuski. Vous avez entendu des

  5   éléments de preuve concernant ce sujet également. Nous avons entendu que

  6   certains des hommes avaient été emmenés à cet endroit-là et avaient été

  7   détenus pendant très longtemps. Maintenant, le nettoyage ethnique s'est

  8   poursuivi au cours de l'été 1993, bien sûr, et tous les hommes musulmans en

  9   âge de porter les armes avaient été arrêtés malgré les avertissements

 10   internationaux aux autorités croates que c'était contre le droit

 11   humanitaire, que c'était une -- quelque chose qui a été fait contre

 12   l'action -- contre le droit humanitaire international.

 13   Encore une fois, je vais citer une pièce, la pièce P 09078, dans laquelle

 14   Jadranko Prlic dit qu'il avait de très -- des contacts très près avec le

 15   ministre de l'étranger croate, Mate Granic, qui avait une influence sur

 16   Tudjman concernant ce qui s'était passé en Bosnie-Herzégovine, et Granic

 17   avait informé Prlic, selon Prlic, que des crimes avaient été commis en

 18   Herceg-Bosna qui ont résulté avec Boban et Susak à qui on avait dit que

 19   ceci devait arrêté, que si ces choses n'arrêtaient pas que tous les combats

 20   qui étaient en train d'avoir, et toutes les choses dont vous n'avez pas

 21   connaissance telles l'emprisonnement non sélectif, et cetera. Et c'est à la

 22   pièce P 09078, transcript page 12 425.

 23   Prlic a également dit que les conséquences de la guerre croato-musulmane

 24   n'étaient pas seulement d'avoir des prisonniers de guerre mais aussi il y

 25   avait des prisonniers qui étaient emprisonnés de façon non sélective, et

 26   ceci ne pouvait pas être décrit comme étant des prisonniers de guerre. Page

 27   86 du transcript. Lorsqu'on doit demander la question : "Qui a commis les

 28   crimes du côté du HVO ? Prlic a répondu mais c'étaient les membres de

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  1   l'armée du HVO et donc c'étaient les autorités militaires qui en sont

  2   responsables, qui sont les coupables de ces crimes." Page 74.

  3   Citation. "L'armée doit être tenue responsable des crimes commis."

  4   Jadranko Prlic, transcript, page 82.

  5   Au même moment, Prlic reconnaît que la guerre avait été menée par les

  6   combattants politiques par le biais de l'état-major du HVO et par les

  7   organes militaires. Page du transcript 85.

  8   Nous savons, bien sûr, que ce n'est pas les généraux qui mènent une guerre

  9   mais plutôt les -- ces hommes politiques, comme nous le savons.

 10   Pour ce qui est des personnes responsables des crimes de guerre et pour

 11   citer Prlic, il dit je cite : "Je vous ai dit aujourd'hui que des centaines

 12   de meurtriers de déplacent encore aujourd'hui ou marchent dans les rues de

 13   la ville" -- enfin, à Mostar. "Mais une telle décision a été prise par

 14   l'armée et il devait être appuyée par les hommes politiques. Eux" - c'est-

 15   à-dire - "l'armée, elle-même, ne pouvait pas donner de telles décisions --

 16   prendre de telles décisions par elle-même." Transcript, page 128.

 17   En réalité, Prlic, lui-même, avait été impliqué à de telles discussions et

 18   a pris part aux décisions stratégiques. Et dans une autre réunion

 19   impliquant Tudjman, Boban, Slobodan Praljak, nous allons presque tous les

 20   avoir, Tudjman, Boban, Slobodan Praljak, Milivoj Petkovic, Jadranko Prlic,

 21   le 5 novembre 1993, il s'agit ici de la pièce P 06454. Tudjman a donné aux

 22   dirigeants rassemblés de l'Herceg-Bosna des instructions très précises sur

 23   ce qu'ils doivent faire. Et c'est à la page de 1 à 4, s'agissant de ce

 24   traité.

 25   "Président Tudjman : Messieurs commençons avec la réunion. Ceci -- cette

 26   réunion a été organisée selon l'initiative car le président je dis -- à

 27   cause de la situation je dirais critique de la situation en Herceg-Bosna et

 28   dans l'ensemble de Bosnie-Herzégovine. Il est tout à fait possible que ceci

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  1   puisse avoir un impact négatif sur la Croatie, plus particulièrement après

  2   les événements de Stupni Do."

  3   Et n'oubliez pas que cette conversation a eu lieu le

  4   5 novembre, donc, quelques jours après Stupni Do, le 23 octobre.

  5   "Donc outre ces questions concrètes, nous devons également discuter

  6   des questions importantes, telles les intérêts stratégiques et politiques

  7   de la Croatie concernant le comportement des Musulmans et les événements

  8   que nous avons pu observer dernièrement.

  9   Tudjman de nouveau dit, je cite : "Le problème de Bosnie-Herzégovine

 10   est un problème de peuple -- du peuple croate en Bosnie-Herzégovine, mais

 11   c'est également un problème de l'Etat croate et de son avenir. Il s'agit,

 12   bien sûr, d'une question très difficile, épineuse. Lorsqu'on essaie de

 13   résoudre cette question, nous avons pris des mesures -- certaines mesures

 14   très concrètes et nous avons fait des propositions concrètes. Nous avons

 15   toujours commencé en -- pensant à la réalité qui existait avant la guerre

 16   ou qui a été créé pendant la guerre. En ce faisant, nous avons toujours

 17   tenu à l'esprit les intérêts stratégiques de l'importance de l'avenir du

 18   peuple croate et de la Croatie en général, y compris la question de ses

 19   frontières."

 20   Et par la suite, une longue discussion s'ensuit, plusieurs personnes

 21   prennent la parole, Boban, Praljak, Prlic, et ensuite, vers la fin de la

 22   réunion, Tudjman revient pour dire - et c'est aux pages 80 à 85 de ce

 23   compte rendu d'audience; encore une fois, je vous rappelle il s'agit de la

 24   pièce P 04654 -, Tudjman dit :

 25   "Messieurs, nous pourrions poursuivre cette réunion pendant des

 26   journées et des journées, mais l'image est effectivement telle que la

 27   présentée. La situation est critique mais soyons actifs au niveau

 28   opérationnel. Une guerre est en cours, et malgré tout ce qui se passe,

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  1   c'est encore pire ce que vous m'avez dit, nous reconnaissons la République

  2   croate d'Herceg-Bosna. Bien, trouvez une situation pareille dans ce chaos

  3   du point de vue du peuple croate en tout dans un Etat croate. Donc, le

  4   problème revient à dire qu'il faut nous assurer les frontières dans la

  5   République d'Herceg-Bosna de la façon la plus favorable que nous ne

  6   pouvons. Ce que je vous ai dit concerne la Bosnie occidentale Bihac, et

  7   cetera, car la Krajina ils allaient faire partie de l'Etat croate. Et cette

  8   partie ces gens-là ne feraient pas partie de ceci et nous devons comprendre

  9   que même les plus grands Etats ne peuvent s'assurer que tous leurs membres

 10   puissent appartenir à un seul et même Etat."

 11   Lors de cette réunion, Tudjman a dit -- donné des instructions très

 12   précises à Petkovic en lui disant de faire une percée avec les forces du

 13   HVO de Kiseljak à Busovaca. Et n'oubliez pas vous vous rappellerez,

 14   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que nous avons entendu des

 15   éléments de preuve concernant Vares et ce qui s'est passé à Vares et

 16   quelles étaient les directions qu'avait pris le commandant du HVO à Vares.

 17   Nous ne pouvons pas punir ces soldats maintenant tout de suite car nous en

 18   avons besoin pour une opération de percée. Nous devons mener une percée de

 19   Kiseljak à Busovaca. Il faut absolument faire ceci et nous allons nous

 20   servir des mêmes troupes qui sont allées à Stupni Do car nous en avons

 21   besoin, nous avons besoin de ces personnes maintenant. Et le 5 novembre,

 22   Tudjman dit à Petkovic, je cite : "Transfert tout ce qui reste des troupes

 23   à Vares et Kiseljak et mène une percée vers Busovaca." Pages 49 à 62.

 24   Lors de cette même réunion, Prlic parle également de la situation

 25   militaire en Bosnie-Herzégovine. Pages 30 à 39 du même transcript. Il dit

 26   et je cite : "Je crois qu'en ce moment, une victoire militaire est

 27   impérative pour rétablir la situation et l'état d'esprit. Je crois qu'il

 28   est tout à fait clair et il n'est pas besoin d'expliciter quoi que ce soit

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  1   qu'il s'agisse de Mostar, qu'il s'agisse de Vakuf ou de cette action qui

  2   avait été planifiée là-bas pour établir un lien entre Kiseljak et Busovaca.

  3   Nous devons nous rapprocher pour encercler les territoires. En tant que

  4   gouvernement au printemps dernier, nous avons défini la proposition et les

  5   conclusions même lorsqu'il s'agit de déplacer certaines brigades de

  6   certaines zones qui comprendraient -- qui feraient en sorte que la

  7   population soit déplacée de ces zones-là et de nous concentrer sur

  8   certaines directions qui, selon nous, pourraient devenir et rester des

  9   zones croates. Je sais qu'il faut résoudre cette situation de façon

 10   pragmatique. Je sais que des efforts ont été menés pour que chaque Croate

 11   reste là où il vit, en ce moment, mais il y a le pragmatisme. Il y a la

 12   concentration des forces. Il y a tout le reste."

 13   Il faudrait également remarquer que, dans le -- en parlant du

 14   contexte, donc, du printemps, l'été et l'automne de 1993, était que les

 15   forces du HVO ont suivi ce schéma -- qu'il s'agisse de Prozor, de Stolac,

 16   de Capljina, ils ont suivi ce schéma. D'après, la plupart des hommes en âge

 17   de porter les armes musulmans, et des fois on les décrirait comme étant des

 18   hommes âgés entre les âges de 16 et 60 ans étaient d'abord encerclés, ils

 19   se faisaient arrêtés, détenus, placés dans diverses prisons du HVO et

 20   laissant les femmes, les enfants et les personnes âgées dans les villages

 21   non protégés par les hommes adultes. Ensuite, lorsque la plupart des hommes

 22   musulmans avaient été déplacés, le HVO prenait le contrôle des villages, en

 23   cerclant de façon systématique les femmes musulmanes, les enfants et les

 24   personnes âgées soit qu'ils étaient envoyés quelque part sur le territoire

 25   contrôlé par l'ABiH ou ailleurs. La Chambre se rappellera des éléments de

 26   preuve entendues qu'ils avaient été emmenés à certains endroits par camion,

 27   et on leur disait ensuite de descendre et de marcher vers Jablanica, vers

 28   Gornji Vakuf, et d'autres destinations.

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  1   Il y avait un grand nombre de pratiques, effectivement, qui pour ceux qui

  2   sont impliqués dans cette entreprise criminelle commune c'était d'employer

  3   la terreur et la force. Et dans le cas, de très souvent des hommes

  4   musulmans avaient été tués, dérobés de leurs biens, qui ont fait l'objet de

  5   divers abus. Des papiers d'identité avaient été amenés de façon routinière,

  6   donc, en les exposant à divers risques ne leur permettant pas d'avoir leurs

  7   documents. Des attaques avaient été menées contre les villages musulmans,

  8   et le siège de l'est Mostar avait été fait, et donc, il s'agissait

  9   également d'un pilonnage systématique et régulier des civils musulmans.

 10   Il y avait également un autre schéma c'est l'appropriation et la

 11   destruction des biens. Herceg-Bosna ou les autorités de cette dernière et

 12   les soldats ont forcé les Musulmans de Bosnie de partir de leurs maisons,

 13   et devaient donner leurs maisons, signer un document, laissant les clés de

 14   la maison. Les voitures, les biens personnels avaient très souvent -- les

 15   objets personnels avaient très souvent été pris, l'argent, les voitures, et

 16   tout avait été pillé. Les bâtiments officiels détruits et pillés y compris

 17   les bâtiments musulmans et les écoles et les mosquées avaient été détruits

 18   également.

 19   L'Accusation sous-tend que cette destruction avait été faite dans un but

 20   précis, et c'est de faire en sorte que les Musulmans ne puissent plus

 21   revenir dans les régions dans lesquelles ils avaient leurs centres

 22   culturels où ils habitaient.

 23   Nous verrons également que le HVO -- les autorités en fait du HVO d'Herceg-

 24   Bosna se sont appropriées des biens publics et, bien sûr, nous avons vu

 25   très souvent dans Narodni List, par exemple. Nous avons entendu des

 26   témoignages nous disant que ces biens avaient été pris et qu'ils

 27   appartenaient maintenant à la République de Bosnie-Herzégovine, qui était

 28   l'Etat reconnu.

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  1   Vous vous rappellerez qu'il y a eu des camps de prisons -- de prisonniers.

  2   Il y a eu l'Heliodrom, il y a eu la prison de Ljubuski, Dretelj, et la

  3   prison de Gabela. Nous allons aborder cette question tout à l'heure.

  4   Vous avez entendu parler de la déportation et des transferts forcés des

  5   Musulmans, Musulmans qui ont été déplacés vers d'autres parties de la

  6   Bosnie qui ne faisaient pas l'objet de prétention des Croates -- Musulmans

  7   pour aller dans les parties qui étaient contrôlées par les Musulmans, ou

  8   étaient très souvent déportés à l'extérieur du pays. Je vais laisser ceci

  9   de côté car je vais l'aborder lors des arguments présentés en réponse à la

 10   Défense de Coric et Pusic, l'utilisation des lettres de garantie et les

 11   visas de transit, par lesquels les Musulmans avaient été déplacés de façon

 12   systématique nous aborderons tous ces sujets ultérieurement non pas

 13   seulement à l'extérieur de l'Herceg-Bosna mais également vers d'autres

 14   pays.

 15   Vous avez également souvent entendu parler du blocage de l'aide humanitaire

 16   les obstacles qui ont été posées au passage de cette aide humanitaire et

 17   ceci en tant qu'arme de guerre.

 18   Je ne vais pas en parler au cours de cette procédure 98 bis, parce que ça

 19   prolongerait trop nos débats mais il faut savoir que l'aide humanitaire a

 20   été bloquée, pillée. On a empêché à ces convois d'entrer dans des villes,

 21   comme par exemple, Mostar, et pendant près de deux mois, personne n'a pu

 22   entrer dans cette ville, jusqu'au

 23   25 août 1993. De nombreux témoins ont parlé de cela et du fait que c'est

 24   finalement la fin août seulement qu'un convoi a pu entrer à Mostar.

 25   S'agissant des déplacements aussi bien des personnes que de l'aide

 26   humanitaire, c'est-à-dire du passage des hommes et des femmes et de l'aide

 27   humanitaire à travers l'Herceg-Bosna, M. Praljak a confirmé que c'était

 28   bien lui, M. Praljak, que c'était Bruno Stojic, Milivoj Petkovic et

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  1   d'autres qui contrôlaient ce passage, le passage des hommes, des femmes et

  2   le passage de l'aide humanitaire. Cela on le trouve au compte rendu

  3   d'audience, pages 19 331, à 19 332.

  4   D'autre part, il faut savoir que la pratique des travaux forcés était

  5   généralisée. Je ne vais pas entrer dans les détails. Les Juges ont entendu

  6   de nombreux témoins à ce sujet. Vous avez reçu les documents y afférant,

  7   nous indiquant qu'au quotidien, on emmenait des prisonniers à partir de

  8   l'Heliodrom, par exemple, pour aller travailler sur la ligne de

  9   confrontation à Mostar et ailleurs. C'était systématique, c'est indéniable

 10   pendant longtemps, et on ne peut pas donner d'explication à ceci en

 11   invoquant des éléments incontrôlés, des unités incontrôlées. Il s'agit d'un

 12   système délibérément mis en place avec des documents, et cetera. On tenait

 13   compte, on gardait la trace de départ de chaque prisonnier et de son retour

 14   ou de son non-retour lorsqu'ils étaient blessés ou tués.

 15   Maintenant, parlons de Mostar du 9 ou du 10 mai 1993. Nous avons entendu

 16   beaucoup d'argument s'échanger au sujet de savoir qui était à l'origine de

 17   ces affrontements. Mais peu importe. Tous les observateurs -- les

 18   intervenants de la communauté internationale l'ont dit, c'est le HVO qui

 19   était à l'origine de ces opérations. Mais peu importe, peu importe, parce

 20   qu'il est indéniable que ce qui s'est passé c'est bien se passer qu'il y a

 21   eu des arrestations massives et des expulsions de Musulmans de Mostar, qui

 22   ont été repoussés vers Mostar Est, emmenés à l'Heliodrom et que beaucoup

 23   ensuite ont été libérés pour être de nouveau emprisonnés quelques jours

 24   plus tard.

 25   Je ne vais pas passer trop de temps sur ce point. Nous estimons que

 26   c'est le HVO qui a tout commencé, mais savoir qui a tiré le premier coup de

 27   feu le 9 mai ça ne change pas grand-chose parce que nous savons

 28   pertinemment ce qui s'est passé. On a emmené des hommes et des femmes -- ou

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  1   plutôt, des femmes et des enfants au stade de foot Vales. On les a fait

  2   monter à bord d'autocars, et on les a emmené jusqu'à l'Heliodrom.

  3   Il y a ensuite eu une résolution du Conseil de sécurité condamnant

  4   fermement ce qui s'était passé à Mostar. Il s'agit de la pièce P 02274.

  5   "Le Conseil de sécurité exige que toutes les attaques menées contre

  6   Mostar, Jablanica, et Dreznica s'arrêtent immédiatement, et que les Croates

  7   de Bosnie et leurs unités paramilitaires se retirent de cette zone et

  8   respectent leurs engagements pris précédemment ainsi que l'accord de

  9   cessez-le-feu [imperceptible] le jour même entre les Croates de Bosnie et

 10   les Musulmans de Bosnie.

 11   "Le Conseil de sécurité s'est également dit : "Très préoccupé de

 12   constater que le Bataillon de la FORPRONU, qui se trouvait dans la zone," -

 13   nous savons que c'est le Bataillon espagnol - "avait été contraint sous les

 14   tirs de se redéployer suite à cette dernière offensive et le Conseil de

 15   sécurité condamne le refus des unités paramilitaires croates de Bosnie

 16   d'accepter la présence des observateurs militaires des Nations Unies, en

 17   particulier dans la ville de Mostar.

 18   "Le Conseil de sécurité en appelle à la République de Croatie,

 19   conformément aux engagements de l'accord de Zagreb du 25 avril 1993,

 20   d'exercer toute l'influence possible sur les dirigeants croates de Bosnie

 21   et à leurs unités paramilitaires afin de faire cesser immédiatement les

 22   attaques, en particulier dans les zones de Mostar, Jablanica, et Dreznica.

 23   "D'autre le Conseil en appelle à la République de Croatie pour

 24   qu'elle respecte strictement ses obligations aux termes de la résolution

 25   752 du Conseil de sécurité en mettant un terme notamment à toutes les

 26   formes d'ingérence et en respectant l'intégrité territoriale de la

 27   République de Bosnie-Herzégovine."

 28    Pour revenir ici à la question du conflit armé international et au

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  1   contrôle exercé par la République de Croatie sur les forces croates

  2   présentes en République de Bosnie-Herzégovine.

  3   Je voudrais dire la chose suivante, je rappelle ce qu'a dit

  4   M. Galbraith qui était l'ancien ambassadeur des Nations Unies, il a dit que

  5   tout le monde savait bien ce qui se passait en Herceg-Bosna était contrôlé

  6   par Zagreb. Je ne vais pas citer ses mots, mot pour mot, mais il avait dit

  7   que : "C'était un secret de polichinelle à tel point que ce n'était plus du

  8   tout un secret." Oui, c'est ce qu'il a dit : "Un secret polichinelle qui

  9   n'était même plus un secret." Si on voulait que Praljak et les autres

 10   fassent quelque chose il fallait s'adresser à Zagreb. C'est ce qu'a dit

 11   Galbraith et c'est ce qu'ont répété également d'autres témoins après lui.

 12   Je parle de ceci maintenant parce qu'on constate dans la résolution du

 13   Conseil de sécurité lors d'attaque menée à Mostar, pourquoi est-ce que le

 14   Conseil de sécurité en appelle à la Croatie pour qu'elle mette un terme au

 15   conflit et au combat ?

 16   On vient de m'apprendre que c'est à la page 6471 du compte rendu

 17   d'audience, ligne 5 que l'on trouve les propos de M. Galbraith que je viens

 18   de citer.

 19   Le 11 mai 1993, après la deuxième journée de l'attaque croate contre

 20   Mostar, Tudjman a de nouveau rencontré des dirigeants du gouvernement

 21   croate et des représentants militaires de ce gouvernement, il a confirmé

 22   que selon lui quand Izetbegovic avait accepté de manière provisoire le plan

 23   Vance-Owen, cela ne constituait pour lui une reconnaissance du caractère

 24   "croate" des provinces 3, 8 et 10. Pièce P 02302.

 25   Tudjman reconnaît lors de cette réunion, je cite : "Lorsque les dirigeants

 26   musulmans ont accepté le plan Vance-Owen, ils ne l'ont fait que pour la

 27   forme. Izetbegovic n'a jamais accepté ce plan Vance-Owen parce que ces

 28   provinces auraient dû être croates." De Tudjman. Izetbegovic n'a jamais

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  1   accepté le plan Vance-Owen.

  2   Le 20 mai 1993, pièce 02466, Tudjman indique qu'il a déclaré Izetbegovic

  3   que je cite : "Les Croates ne peuvent pas vraiment pas accepter de perdre

  4   certaines régions qui auparavant faisaient partie de la banovine croate

  5   même si quelque 140 000 réfugiés s'y trouvent actuellement, dont 100 000

  6   Musulmans." "La Croatie en tant que pays ne saurait accepter une

  7   modification de la structure démographique dans cette région, dans ces

  8   régions." "La Croatie en tant que pays ne peut accepter une modification de

  9   la structure démographique de ces régions." Je vous le répète.

 10   A la date du juin 1993, les forces du HVO avaient entamé un siège contre

 11   Mostar Est. Un véritable siège. Il y avait un chemin de montagne, un

 12   sentier qu'on pouvait emprunter en passant par les montagnes mais il était

 13   très peu praticable. Il était donc très difficile d'accéder à Mostar et

 14   d'en sortir, en tout cas, on n'empruntait pas une autoroute. Il s'agissait

 15   d'un véritable siège, il y avait des tireurs embusqués. On manquait de

 16   nourriture, d'aide humanitaire, de fourniture médicale. Il y avait des

 17   tirs, des tirs de tireurs embusqués. La Chambre le sait bien. Je voudrais

 18   revenir à la pièce de la Défense 3D 00482 de M. Praljak. Une note qui émane

 19   d'une réunion avec le général de l'armée croate Anton Tus qui rencontre la

 20   délégation française le 13 janvier 1993.

 21   M. Praljak, et là il dit, je cite : "Les Serbes dominent dans le domaine de

 22   l'artillerie, mais ceci n'est pas décisive. L'artillerie on s'en sert pour

 23   détruire les villes sans objectif militaire. Ils ne touchent jamais les

 24   premières lignes de combat, c'est la même chose pour Sarajevo, Mostar,

 25   Jajce, Bosanski Brod, Slavonski Brod, et ailleurs. Leur tactique c'est de

 26   détruire ou d'anéantir la défense en se servant de femmes, d'enfants et de

 27   personnes âgées morts."

 28   Je laisse aux Juges de la Chambre le soin de réfléchir à ce que vient de

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  1   dire M. Praljak qui attribue aux Serbes cette vision de l'emploi de

  2   l'artillerie des villes. On peut dire que selon moi la même chose

  3   s'applique au pilonnage de Mostar Est.

  4   Après une attaque menée par l'ABiH contre un camp du HVO au nord de Mostar,

  5   le 30 juin, et ceci ne fait aucun doute, l'Accusation ne l'a jamais remis

  6   en question, ne remettra jamais en question, il y a une guerre. Des combats

  7   font rage avec des intervenants des deux côtés. Il y a eu une attaque de

  8   l'ABiH sur les casernes de Mostar au nord de Mostar, le 30 juin, c'est

  9   indéniable. Ce sont les soldats qui se battent contre des soldats. Des

 10   militaires qui se battent contre des militaires.

 11   Ceci ressort d'une déclaration, d'une décision et d'un ordre de Jadranko

 12   Prlic et Bruno Stojic le 30 juin. Pièce P 03038, document où figurent les

 13   noms et les signatures de Prlic et Stojic. Les Croates sont exterminés et

 14   si les Croates sont exterminés l'existence même des Croates en Bosnie-

 15   Herzégovine est en péril. Mostar doit rester une ville croate, c'est ce

 16   qu'on peut lire dans ce document. Pour replacer le document dans son

 17   contexte, le 2 juillet, c'est-à-dire quelques jours après ce 30 juin,

 18   Franjo Tudjman a dit à Susak et d'autres à Zagreb lors d'une réunion : "Il

 19   est important de faire pression sur les Unités musulmanes sur le front de

 20   la Neretva."

 21   Ici encore, nous avons un exemple pratiquement parfait de ce qu'est la

 22   filière hiérarchique du HVO, sa chaîne de commandement et de la manière

 23   dont elle fonctionne. Nous avions précédemment vu les ordres de Stojic et

 24   de Petkovic conformément à l'ultimatum du 15 janvier 93. Et ici, nous avons

 25   la décision, l'ordre de Prlic et Stojic. Pièce P 03038, je le répète. Et ce

 26   document est suivi par la pièce P 03039, un communiqué de Zeljko Siljeg, de

 27   la zone opérationnelle nord-ouest, qui transmet l'ordre Prlic-Stojic que je

 28   viens de mentionner et on voit sa référence mentionnée dans ce dernier

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  1   document. L'ordre est donc transmis en aval de la filière hiérarchique dans

  2   la zone opérationnelle nord-ouest, pièce P 03039.

  3   Le même jour, pièce P 03019, le général Petkovic, le jour même donc ce 30

  4   juin, donne son ordre à lui, je cite : "Dans les unités où il y a encore

  5   des soldats musulmans, il faut désarmer, les isoler -- isoler tous les

  6   hommes aptes au combat dans les villages musulmans dans votre zone de

  7   responsabilité et laisser les femmes et les enfants dans leurs maisons ou

  8   leurs appartements."

  9   Voilà l'ordre de Petkovic donné suite à la décision et à l'ordre de Prlic

 10   et Stojic.

 11   A la fin de cet ordre de Petkovic, on trouve un autre ordre, l'ordre de

 12   Mijenko Lasic pour la zone opérationnelle du sud-est où se trouve Mostar,

 13   et ce qu'a fait Lasic c'est qu'il a écrit en bas à la fin de l'ordre de

 14   Petkovic, il s'est servi de ce document pour transmettre à ses subordonnés,

 15   aux 2e et 3e Brigades du HVO. Le même jour, on trouve un autre document, le

 16   document P 03035, c'est l'ordre de la 3e Brigade du HVO, donc, là, on est

 17   maintenant au niveau, à l'échelon de la brigade et on met en œuvre l'ordre

 18   de Mijenko Lasic, je cite : "Dans les unités où il y a encore des

 19   combattants de nationalité musulmane, les désarmer et les isoler. Dans les

 20   endroits où se trouve une population musulmane dans votre zone de

 21   responsabilité, isoler tous les hommes en âge de porter les armes. Il faut

 22   laisser les femmes et les enfants dans leurs maisons ou leurs

 23   appartements."  On reprend donc pratiquement mot pour mot l'ordre de

 24   Petkovic. Ensuite, on trouve la pièce P03075 qui date du lendemain, 1er

 25   juillet 1993. Il ne faut ici oublier la police militaire. Nous avons un

 26   rapport de la 3e Compagnie, 3e Bataillon de la Police militaire du HVO pour

 27  la période du 30 juin au 1er juillet 1993. Je cite : "Le 30 juin à 9 heures,

 28   un groupe de 17 policiers militaires se sont rendus en mission à Mostar sur

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  1   les ordres de l'administration de la police militaire. On a procédé à une

  2   [imperceptible] générale des membres restants de la compagnie. En

  3   conséquence, une section s'est occupée de rassembler les Musulmans à

  4   Stolac, les autres se sont livrés à leurs activités habituelles et ont

  5   notamment tenu les points de contrôle. La section de Neum s'est également

  6   livrée à ses activités habituelles, et de plus, a rassemblé les personnes

  7   susmentionnées. La section qui était en attente a escorté, réceptionné et

  8   assuré la garde des personnes détenues. Jusqu'à présent, environ 1 300

  9   personnes ont été interpellées et on les a faits venir des municipalités de

 10   Stolac, Capljina, Mostar et Neum, le 30 juin et le 1er juillet 1993. Les

 11   arrestations et les déplacements des personnes concernées se sont fait en

 12   coopération avec la Brigade de Police du MUP de Capljina et la 1re Brigade

 13   de Knej Domagoj."

 14   Même journée du 1er juillet 1993, nous avons une autre pièce, la pièce

 15   P03082, adressée à toutes les zones opérationnelles et les brigades du HVO

 16   : "Prendre des mesures vigoureuses concernant tous les membres du HVO qui

 17   ne rempliraient ou ne s'acquitteraient pas de leurs fonctions de la manière

 18   la plus consciencieuse et la responsable possible. On ne saurait tolérer

 19   aucun caractère arbitraire superficiel ou irresponsable dans les activités

 20   de chacun. Tout le monde doit bien comprendre seuls les Croates vont

 21   défendre la HZ HB."

 22   Le 2 juillet, nous avons une autre pièce, la pièce P03128, encore un

 23   ordre de Petkovic, signé par Bruno Stojic, il fait référence à toutes les

 24   unités et zones opérationnelles du HVO : "L'objectif c'est d'éliminer les

 25   forces armées musulmanes et de se préparer à la dernière confrontation --

 26   l'ultime confrontation avec les forces musulmanes. La police militaire du

 27   HVO et la police civile se voient conférer toute l'autorité nécessaire sur

 28   leurs organes militaires et civiles."

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  1   Et on poursuit ensuite : "Jusqu'à la fin de ces missions, vous êtes

  2   placés directement sous les ordres de l'état-major général du HVO." Voilà

  3   ce qui est dit à ces unités.

  4   Le 6 juillet 1993, un autre document est établi, P03234, un ordre de

  5   Zeljko Siljeg, commandant de la zone opérationnelle nord-ouest du HVO, je

  6   cite : "Au vu de la situation actuelle dans la zone de la municipalité

  7   Rama, Prozor, j'ordonne ce qui suit : Arrêter tous les hommes musulmans

  8   âgés entre 16 et 60 ans. Les unités suivantes sont chargées d'exécuter ces

  9   ordres : La police militaire et le SIS (Service d'information et de

 10   sécurité) de la Brigade de Rama."

 11   Voici quelques-uns des ordres, si sous cet ordre qui ont été émis en

 12   le 30 juin, le 1er, le 2 et le 6 juillet, et qui nous rappelle ce que les

 13   Juges de la Chambre savent déjà. Ces arrestations massives d'hommes

 14   musulmans à partir de juillet 1993. Des hommes qui ont ensuite été emmenés

 15   dans différents camps, Heliodrom, Ljubuski, Dretelj, et cetera. Les ordres

 16   viennent du sommet de la voix hiérarchique et descendent jusqu'au niveau

 17   des brigades et des compagnies.

 18   A ce sujet, s'agissant des ordres militaires, de la chaîne de

 19   commandement, il semble que c'est indéniable que au cours du printemps 1993

 20   et jusqu'en novembre 1993, nous savons qui étaient ceux qui étaient à la

 21   tête du HVO, avant M. Praljak, fin juillet 1993, c'était M. Petkovic, qui

 22   était à la tête des forces armées du HVO.

 23   Ensuite, c'est M. Praljak qui l'a remplacé. Il nous l'a dit, lui-

 24   même, et je reprends la page 24 314 du compte rendu d'audience en l'espèce.

 25   Donc : "Le chef de l'état-major principal - c'était moi - et l'adjoint,

 26   est-ce qu'on peut déterminer qui était qui et qui faisait quoi ? Le

 27   commandant et le témoin peuvent nous dire si c'est vrai ou pas. Le

 28   commandant de l'état-major principal, c'était Slobodan Praljak. Le

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  1   commandant second de l'état-major principal c'était le général Milivoj

  2   Petkovic. Le chef d'état-major, le général Tole. L'adjoint du chef d'état-

  3   major c'était le général Matic."

  4   Lorsqu'on évoque les principaux militaires du HVO, il faut se

  5   rappeler de la déposition du général Pringle et son rapport d'expert. Pièce

  6   P09549.

  7   Quels sont les principaux arguments développés par le général Pringle

  8   ? En premier lieu, le HVO n'a pas été construit, mis en place à partir de

  9   rien. Des préparatifs ont été réalisés précédemment et on s'est servi de la

 10   doctrine de la JNA. Ceci a permis à Petkovic et Praljak de développer des

 11   outils leur permettant d'imposer la discipline. Ils se sont servis de

 12   nombreux manuels pour la formation de leurs hommes, et cetera, et notamment

 13   des manuels portant sur le droit de la guerre, et cetera. Le général

 14   Pringle en a longuement parlé.

 15   Deuxièmement, le général Pringle a parlé du : "Fait que la

 16   documentation du HVO reprenait le concept du contrôle politique sur

 17   l'armée."

 18   Pages 6 et 7 de son rapport.

 19   Le général Pringle a également longuement parlé du climat de

 20   commandement, c'est-à-dire du climat qui est créé par un chef -- par un

 21   commandant et qui se fait par l'exemple, et non pas seulement par

 22   l'application des règlements. Il a donné l'exemple d'un chef qui parle :

 23   "De la partie adverse de manière insultante, en utilisant, par exemple, le

 24   terme de 'balija.' Selon lui, quand on fait une chose de ce genre, on

 25   envoie un message à ses soldats, à ses subordonnées, au sujet de l'attitude

 26   à adopter envers l'adversaire."

 27   Il me reste deux minutes seulement pour ce qui est du général

 28   Pringle, je vais accélérer.

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  1   Il nous a dit également que plus la situation est confuse, plus la

  2   responsabilité du commandant est importante. Personne n'a jamais affirmé

  3   qu'il n'y a pas confusion lorsqu'il y a une guerre. Nous n'avons jamais dit

  4   le contraire, mais ce que nous a dit le général Pringle, c'est que plus la

  5   situation est compliquée, confuse, plus la responsabilité du commandant est

  6   engagée est importante.

  7   Le général Pringle nous a également expliqué que la discipline

  8   militaire est essentielle, que le fait de ne pas imposer la discipline est

  9   interprété comme une acceptation, même une approbation de certains

 10   comportements, et que si ces comportements ne sont pas sanctionnés, à ce

 11   moment-là, ils vont devenir "la norme."

 12   Le général Pringle, pendant sa déposition, page 24 059 du compte

 13   rendu d'audience, a dit que Praljak avait démontré qu'il avait la

 14   personnalité - une personnalité lui permettant d'imposer la discipline s'il

 15   l'avait voulu.

 16   Le général Pringle a également ajouté qu'un chef -- qu'un commandant

 17   devait savoir ce que faisaient les hommes sous ses ordres. Vous vous

 18   souviendrez qu'il nous a parlé des deux échelons au-dessus et au dessous du

 19   commandant. Il doit être informé de ce qu'au fond, ses subordonnées, c'est

 20   une obligation qu'il a. Les commandants doivent assurer le suivi des ordres

 21   pour s'assurer qu'ils ont été exécutés.

 22   Le général Pringle a répété, à plusieurs reprises, donner un ordre,

 23   ça c'est facile, mais faire exécuter cet ordre, ça c'est beaucoup plus

 24   difficile, c'est une autre paire de manches.

 25   Le général Pringle a également rappelé que lorsqu'un grand nombre de

 26   personnes sont emprisonnées, les commandants - et en l'espèce, il

 27   s'agissait de Petkovic qui occupait le poste suprême - les commandants

 28   concernés doivent avoir connaissance de la logistique que cela implique,

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  1   approvisionnement en vivres, en eau, hébergement, et cetera.

  2   Et le général Pringle s'est montré très prudent -- pragmatique. Il a

  3   dit : oui, bien entendu, le premier et le deuxième jours, on a en tête des

  4   problèmes. On ne peut pas régler toutes les difficultés du jour au

  5   lendemain. Mais ce qu'il a ajouté le général Pringle c'est qu'au dixième

  6   jour, le commandant devait se demander : comment est-ce qu'on hébergeait,

  7   ce qu'il en était de l'hébergement de tous les détenus. Et s'agissant du

  8   général Pringle, je rappellerai qu'à la fin de son rapport d'expert, pièce

  9   09549, il a dit, je cite : "Le HVO a été confronté à un défi considérable."

 10   Je le répète : "Le HVO a été confronté à un défi considérable. Mettre en

 11   place la Communauté d'Herceg-Bosna, former et entraîner une armée, mettre

 12   en place toutes les règlementations nécessaires à la HZ HB, tout en étant

 13   engagé dans un véritable conflit d'abord avec les Serbes de Bosnie ensuite

 14   les Musulmans de Bosnie."

 15   Tout ceci, bien entendu, représentait des difficultés considérables.

 16   Ceci étant dit, une bonne partie des éléments des documents qui m'ont été

 17   fournis par le bureau du Procureur indique selon moi qu'il s'agissait d'un

 18   gouvernement opérationnel qui fonctionnait avec des dirigeants militaires

 19   et civils responsables, un système dans lequel les ordres et les consignes

 20   circulaient en aval de la voie hiérarchique à partir de la présidence et

 21   vers les commandements opérationnels en passant par le ministère de la

 22   Défense et l'état-major principal.

 23   Il était manifeste qu'existait une armée qui fonctionnait et qui s'était

 24   dotée d'un code de discipline militaire. Elle a fait appel à des forces qui

 25   avaient été mobilisées localement et qui n'étaient pas bien formées.

 26   D'autre part, la formation militaire régulière n'était au niveau requis.

 27   Ceci, bien entendu, posait d'énormes difficultés pour le système de

 28   formation des hommes et les officiers de cette armée dont beaucoup

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  1   n'avaient pas non plus été formés comme il se doit.

  2   Mais ceci étant dit, ils disposaient de la doctrine, ils disposaient des

  3   documents concernant le droit humanitaire international, les lois de la

  4   guerre, et cetera, et ceci aurait dû être suivi des faits dans le cadre de

  5   leur fonctionnement quotidien. Les commandants doivent donner l'exemple, et

  6   ceci aurait dû être le cas aux conventions de la JNA.

  7   [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  9   --- L'audience est suspendue à 17 heures 39.

 10   --- L'audience est reprise à 18 heures 00.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 13   Juges.

 14   Avant de poursuivre, je souhaite apporter une correction. On m'a dit que

 15   j'ai fait référence à une pièce, j'ai donné un numéro qui était le P 01737

 16   à la page 48 du compte rendu, ligne 8, et ceci aurait dû être la pièce

 17   01739.

 18   Donc, je poursuis, Monsieur le Président. Encore une fois, je vais aborder

 19   la partie de nos arguments où les Juges de la Chambre pourront être aidés

 20   par les faits admis en vertu du jugement antérieur qui établissent un lien

 21   non seulement entre Mostar et ce qui se passait en Herzégovine à cette

 22   époque, l'été de l'année 1993. Je cite : "Il y avait une attaque

 23   généralisée et systématique contre la population civile musulmane de la

 24   région. Ce qui est pertinent eu égard à l'acte d'accusation. Cette campagne

 25   avait pour but de transformer cette région mixte à l'origine ethniquement

 26   mixte dans et autour de Mostar en territoire croate en Bosnie-Herzégovine

 27   pour être habitée par une population croate ethniquement pure." Fait numéro

 28   156

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  1   "Des milliers de civils musulmans ont été contraints de quitter leur

  2   maison, à Sovici Doljani et à Mostar Ouest." Fait numéro 157.

  3   "La campagne contre la population musulmane de Bosnie-Herzégovine dans la

  4   région a atteint son apogée après l'attaque de Mostar au début du mois de

  5   mai 1993 lorsque après les hostilités musulmanes de Bosnie-Herzégovine a dû

  6   quitter, contrainte par la force de -- a dû quitter Mostar Ouest suite à

  7   des actions concertées." Fait numéro 158.

  8   "Le harcèlement dont ont fait l'objet les Musulmans de Bosnie, on les a

  9   obligés à quitter leurs appartements, on les a détenus. Ceci est devenu --

 10   ceci s'est répandu et a été généralisé à partir du

 11   9 mai jusqu'à l'automne 1993." Fait numéro 159.

 12   "Les sites religieux musulmans comme les mosquées de Sovici et Doljani ont

 13   été systématiquement détruits." Fait numéro 160.

 14   "Les centres de détention pour la population musulmane de Bosnie-

 15   Herzégovine ont été établis ou créés dans l'ensemble de la région." Fait

 16   numéro 162.

 17   "Les prisonniers ont été déplacés entre ces endroits et différents centres

 18   de détention. Par exemple, les soldats de l'ABiH qui s'étaient rendus ou

 19   qui avaient été capturés à Sovici ou Doljani ont été emmenés à la prison de

 20   Ljubuski le 18 avril 1993 et ont ensuite été emmenés à l'Heliodrom." Fait

 21   numéro 163.

 22   "Les civils musulmans de Bosnie-Herzégovine qui ont été détenus et les

 23   soldats musulmans de Bosnie-Herzégovine hors de combat, ont souvent fait

 24   l'objet de mauvais traitements humiliants et brutaux de la part de soldats

 25   qui pouvaient donner libre cours à leurs instincts dans ces centres de

 26   détention. Bon nombre de civils musulmans et de prisonniers de guerre ont

 27   été battus ou sinon ont subi de très mauvais traitements dans les

 28   différents centres de détention et les soldats qui se livraient à ce genre

Page 27097

  1   d'activité venaient des différentes unités militaires." Fait numéro 165.

  2   Dans le courant de l'été 1993, nous disposons d'autres éléments qui

  3   indiquent que l'accusé Bruno Stojic en rapport avec ces événements -- ayant

  4   eu un rapport avec ces événements en principe surtout en ce qui concerne la

  5   population musulmane de Mostar. Ce qui a été confirmé lors d'un dîner avec

  6   les observateurs internationaux à la mi-juillet 1993. La Chambre en a eu

  7   connaissance récemment lorsque les éléments de preuve ont été présentés par

  8   l'Accusation par

  9   M. Stojic puisqu'il a parlé d'une solution militaire définitive, ce qui

 10   d'après lui permettait de trouver une solution [imperceptible] de problème

 11   musulman. Cette stratégie se retrouve dans un rapport où dans un procès

 12   verbal de la réunion P 03530, P 03545, P 03547. On y déclare : "La

 13   stratégie consiste à prendre Mostar Est par le biais d'une offensive de la

 14   HVO -- HVO/HV depuis le sud. Bruno Stojic propose, pour faciliter cette

 15   offensive militaire à la FORPRONU, d'évacuer toute la population civile et

 16   musulmane de Mostar Est."

 17   C'est au cours de cette époque le 17 juillet 1993 que Stojic a dit :

 18   "Cela prendra peut-être 20 jours mais pas davantage. Ce sera soit eux, soit

 19   nous." Ceci se retrouve dans les pièces que je viens de citer P 10367. Il

 20   s'agit de la déposition du Témoin DZ.

 21   Dans sa déclaration qui a été versée au dossier sous le numéro P 09078,

 22   Jadranko Prlic a indiqué que les premières expulsions de Musulmans se sont

 23   produites immédiatement après la date du 9 mai 1993. La deuxième fois Prlic

 24   a reçu des éléments à cet égard sur le fait que les Musulmans avaient été

 25   chassés dit-il au mois de juillet 1993. A ce moment-là, il a donné sa

 26   démission à Mate Boban parce que lui et Prlic étaient contre l'expulsion de

 27   citoyens musulmans -- de citoyens d'origine ethnique musulmane. Telle est

 28   sa déclaration consignée au compte rendu, aux pages 124 à 126. 

Page 27098

  1   Il est intéressant de constater que c'est vers cette époque que Bruno

  2   Stojic dans ces déclarations parle de la façon dont on peut trouver une

  3   solution une bonne fois pour toute aux problèmes musulmans de Mostar. Prlic

  4   dit : "Qui a proposé -- qui a donné -- proposé sa démission parce que, dit-

  5   il, aucun objectif de ce type ou de combat ou de nation ou toute personne -

  6   - ces objectifs ne pourraient être les objectifs d'une nation ou d'une

  7   personne, et ceci ne justifie en rien le comportement des actions qui se

  8   déroulaient à Mostar."

  9   Concernant cette information, M. Praljak nous a fourni pendant le

 10   procès différents éléments et il a confirmé que Gornji Vakuf, Prozor, Ramoc

 11   Bilapel [phon], pour utiliser les termes croates, ne pouvaient pas être

 12   séparés. Vakuf et Prozor -- Prozor, les choses se sont passées comme --

 13   l'expulsion des Musulmans. Et ceci se retrouve au compte rendu à la page 22

 14   240 -- donc, à 22 250.

 15   Je souhaite maintenant consacrer quelques instants à l'opération des

 16   prisons du HVO et des camps de détention. Et pour les besoins de notre

 17   argumentation, Messieurs les Juges, je vais me concentrer maintenant sur ce

 18   qui s'est passé en 1993. Encore une fois, ceci a été grandement évoqué par

 19   les -- dans les arguments concernant M. Coric et M. Pusic. Je pense qu'il

 20   est important de venir en aide aux Juges de la Chambre à cet égard. Vous

 21   vous rappellerez les éléments de preuve sur la création et la mise en œuvre

 22   de ces camps en 1992. Il s'agit non seulement de camps du HVO et de prisons

 23   qui avaient été utilisés mais qui avaient déjà été utilisés dans une autre

 24   guerre avec les Serbes.

 25   Encore une fois dans sa déclaration P 09078, Jadranko Prlic a indiqué que

 26   les centres de détention du HVO avaient été créés pendant la guerre avec la

 27   JNA en 1992. Un des -- importants ou particulièrement importants à cet

 28   égard est la pièce P 00292. Il s'agit du décret sur le traitement des

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  1   personnes capturées lors de combats dans la communauté croate d'Herceg-

  2   Bosna daté du 1er septembre 1992.

  3   La Chambre se souviendra peut-être de la déposition fournie et ainsi que du

  4   document, lui-même, à l'article 2 : "Le ministre de la Justice et les

  5   différents services administratifs en coopération avec le chef des services

  6   de la Défense et le chef des services de l'Intérieur nommeront les endroits

  7   où les prisonniers devront être détenus conformément avec le décret

  8   susmentionné."

  9   A l'article suivant 3 : "Les services de Défense, le ministère de la

 10   Défense sera responsable des locaux tel que c'est indiqué à l'article 2 de

 11   ce décret."

 12   C'est la pièce P 00452 qui est la décision rendue par Bruno Stojic

 13   qui était à la tête des services de Défense du HVO portant sur la mise en

 14   place de la prison centrale à l'Heliodrom en septembre 1992.

 15   A partir du moment où il a été nommé à la tête de l'administration de la

 16   police militaire en avril 1992, Valentin Coric a participé activement à la

 17   mise en place et à l'administration des prisons du HVO et des camps du HVO,

 18   y compris l'Heliodrom, ce que -- auquel a participé M. Coric. Il a

 19   participé à la mise en place de ces camps en septembre 1992. En réalité,

 20   c'était lui qui avait recommandé cela à M. Stojic. Cela se retrouve à la

 21   pièce P 00513 ainsi que la pièce P 00515.

 22   La pièce P 00916 est un ordre qui est daté du 16 septembre 1992. Il

 23   émane du commandant de la 3e Compagnie du 3e Bataillon de la Police

 24   militaire du HVO qui précise que la police militaire du HVO placée sous le

 25   commandant de Valentin Coric était responsable de l'Heliodrom. Et dans cet

 26   ordre en particulier, on précise que tous les détenus doivent être envoyés

 27   à l'Heliodrom la prison militaire.

 28   Mais comme je l'ai indiqué un peu plus tôt cet après-midi, la pièce P

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  1   00956 nous fournit un -- très bon aperçu et un résumé, un rapport avec le

  2   fonctionnement des camps de la police militaire entre avril et décembre

  3   1992, y compris la création des différentes prisons du HVO et de camps. Il

  4   s'agit du rapport rédigé par -- de la main de Valentin Coric et fournit des

  5   éléments d'information très détaillés qui pourront être examinés par la

  6   Chambre. Je vais simplement vous en citer quelques éléments.

  7   Dans ce rapport, tout d'abord, il précise que le 13 avril, en vertu

  8   d'une décision rendue par le président du HZ HB, M. Boban,

  9   M. Valentin Coric a effectivement -- ceci est indiqué dans le rapport.

 10   C'est son rapport a été nommé commandant adjoint chargé de la sécurité et

 11   des services de renseignements ainsi que de toutes les unités de police

 12   militaire existantes alors s'était placé sous son commandement à savoir le

 13   commandant de Coric.

 14   Le document nous précise également qu'à ce moment-là, une enquête --

 15   une prison militaire chargée des interrogatoires a été créée -- et mise en

 16   place à Capljina. Le quatrième du genre sur le territoire de la HZ HB.

 17   Néanmoins, la police militaire -- l'administration de la police militaire a

 18   essayé de mettre en place une prison militaire centrale parce que les

 19   interrogatoires militaires dans les prisons se déroulaient en général dans

 20   des locaux assez délabrés et ne pouvait pas accueillir un nombre suffisant

 21   de prisonniers de guerre, de détenus.

 22   Et le texte se poursuit en disant : au début du mois de septembre en

 23   vertu d'une décision rendue par les services de Défense la prison militaire

 24   centrale a été créée à Mostar. Encore une fois, ceci nous ramène aux ordres

 25   donnés par M. Stojic et M. Coric qui avaient mis en place l'Heliodrom.

 26   Ensuite, une section particulière de ce même rapport qui évoque la

 27   police militaire. Sous le titre : "Détenus et prisonniers," on peut lire :

 28   !A la fin du mois de juin, compte tenu des exigences du HZ HB,

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  1   l'administration de la police militaire a mis en place trois prisons

  2   militaires chargées d'interroger les prisonniers à Ljubuski, Mostar et

  3   Livno. Tous les prisonniers de guerre et détenus, les soldats du HVO qui

  4   ont commis, qui ont mal agi ou qui ont commis des infractions et les civils

  5   qui ont commis des infractions contre les membres du HVO seront placés à

  6   cet endroit."

  7   Ensuite, le texte poursuit et parle de la prison militaire, la prison

  8   centrale de Mostar. Dans ce rapport, il y a certaines dispositions que je

  9   ne vais pas évoquer car je manque de temps. On parle plus précisément du

 10   traitement de prisonniers et les conditions de détention doivent être

 11   conformes aux conventions internationales telles que cela a été -- a dicté

 12   par les représentants des organisations internationales des droits de

 13   l'homme, le Helsinki Watch au cours de leur visite le 24 octobre 1992. Et

 14   ceci est bien avant 1993. Les prisons avaient déjà commencé à fonctionner.

 15   Les normes internationales étaient débattues, les inspections avaient déjà

 16   commencé. Et M. Coric dans son rapport indique que la police militaire

 17   s'occupe des échanges des prisonniers de guerre par l'intermédiaire de ses

 18   représentants et de ses comités de négociations chargées des échanges et,

 19   en réalité, a effectué des échanges. L'administration de la police

 20   militaire a gardé toutes les archives et sur les personnes détenues, les

 21   prisonniers de guerre, et ceux qui s'y trouvent de la partie ennemie, du

 22   côté ennemi, du côté [imperceptible]. Le rapport portant les détenus et les

 23   prisons, on peut lire ce qui suit. Je crois que les Juges de la Chambre

 24   devraient tenir compte de ce qui s'est passé en 1993 : "La police militaire

 25   a également mis en place un système de coopération avec la municipalité --

 26   avec les organes de la municipalité ainsi que les organisations

 27   internationales et institutions au CICR, la MOCE et la FORPRONU."

 28   La pièce P 00677 est un autre document d'importance. C'est un rapport

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  1   encore une fois de Valentin Coric, la [imperceptible] de la police

  2   militaire et qui envoie un rapport à Bruno Stojic, son supérieur

  3   hiérarchique, en tant que chef des services de défense du HVO daté du 31

  4   octobre 1992. Entre autres, ce document démontre que le HVO à Livno et

  5   Mostar, Tomislavgrad, dans ces prisons étaient placées sous

  6   l'administration de la police militaire du HVO. Et encore une fois, Coric

  7   remettait les rapports à son supérieur hiérarchique, Bruno Stojic.

  8   J'invite les Juges de la Chambre a examiné de près ce rapport et à

  9   vous, c'est un rapport qui a été préparé non pas en octobre 1993 mais en

 10   octobre 1992 à une époque où c'était surtout les Serbes qui étaient détenus

 11   et non pas des Musulmans. Dans ce rapport, M. Coric indique que :

 12   "Conformément à un accord conclut avec le CICR, les observateurs européens

 13   et la FORPRONU ainsi qu'un ordre établit par le chef des services de la

 14   défense le 28 octobre 1992, tous les prisonniers de guerre ont été remis en

 15   liberté sans condition à Livno, Mostar, Tomislavgrad le 30 octobre 1992.

 16   Les représentants du CICR ont mené une étude portant sur les prisonniers

 17   qui ont exprimé leur préférence, à savoir s'ils souhaitaient aller en

 18   Yougoslavie."

 19   Le texte évoque ceci dans le détail. Certains prisonniers souhaitaient

 20   partir d'autres non. Et ce, en rapport avec les représentants de l'Union

 21   européenne et du CICR, de la Croix-Rouge internationale.

 22   Le texte se poursuit en disant : "Le 30 octobre 1992, l'ordre portant sur

 23   la remise en liberté des prisonniers des centres de détention militaires

 24   préventifs à Livno, Mostar, et Tomislavgrad ont été menés à bien. En tout

 25   363 prisonniers ont été libérés en présence des représentants du CICR et

 26   des représentants européens."

 27   La pièce P 00740 et un rapport des services de Sécurité et du

 28   Renseignement du HVO, il est daté du 13 novembre 1992 et porte sur les

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  1   prisonniers qui ont été emmenés de l'Heliodrom pour accomplir certaines

  2   tâches à différents endroits, y compris la ligne de front.

  3   Dans ce rapport, il s'agit de novembre 1992, n'est-ce pas, l'adjoint

  4   directeur de l'Heliodrom, les directeurs de prison à l'Heliodrom, Josip

  5   Praljak a confirmé qu'ils ont enregistré chaque instance lorsque les

  6   prisonniers avaient été emmenés au travail. Ensuite il dit : "Jusqu'au 27

  7   octobre 1992, le processus d'emmener les prisonniers pour effectuer des

  8   travaux impliquait une certification d'une demande par l'une des personnes

  9   qui était chargée de la question de logistique et une notification verbale

 10   de Valentin Coric, chef de l'administration de police du HZ HB." Et je cite

 11   encore le document : "Conformément aux sources, ils se sont plaints de la

 12   façon dont les prisonniers étaient emmenés. A la suite de ceci, Valentin

 13   Coric a émis une décision selon laquelle personne avait le droit de sortir

 14   de prison sans sa signature."

 15   Maintenant, parlons de je -- en abordant ces questions des camps de

 16   1992. Nous pouvons maintenant revenir au rapport du

 17   Dr Miller sur les caractéristiques du conflit des Balkans. Il s'agit encore

 18   une fois de la pièce P 10239, page 15. Encore une fois, le

 19   Dr Miller dit que : "Déjà en date de la mi -- en date de milieu de 1992, il

 20   y a eu une -- le camp de détention existait de façon très étendue et il y

 21   avait également le crime de viol était commis comme un phénomène ainsi que

 22   des meurtres organisés. Et l'un des camps qui est mieux connu était le camp

 23   de Manjaca près de Banja Luka était employé en tant que camp de prisonniers

 24   au cours de la première année de la guerre en Croatie." Ensuite, il dit que

 25   : "Au mois de juillet 1992, les représentants de la Croix-Rouge se sont

 26   rendus dans les camps et les prisons de Mostar, Ljubuski, Capljina,

 27   Bosanski Brod, Zenica, et Bjelica, et dans cette année-là, dans l'année

 28   depuis le début du conflit des violations du droit international

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  1   humanitaire avaient été commises par toutes les parties qui ont pris part

  2   au conflit, et ceci était devenu une pratique plus particulièrement

  3   lorsqu'il s'agissait de la population civile."

  4   En août 1993, je fais encore une fois -- enfin je fais toujours

  5   référence au rapport du Dr Miller. Donc, au mois d'août 1992, l'existence

  6   des camps du HVO à Ljubuski et Capljina était bien connue, tout comme

  7   étaient connus des camps serbes aussi.

  8   En dernier lieu, quelques commentaires -- d'autres commentaires sur

  9   le camp et en fait l'assistant de M. Praljak, il avait dit que : "Il avait

 10   une autorité sur les camps de prison du HVO tout du moins du camp de

 11   Dretelj en 1992."

 12   Pendant ou à l'époque plutôt où les Serbes avaient été détenus et

 13   selon ce qu'a dit M. Praljak en audience aux pages du transcript de 15 à

 14   22, c'est lui qui a fermé le camp de Dretelj en 1992.

 15   Je souhaiterais maintenant faire référence au quatrième rapport de M.

 16   Mazowiecki, le rapporteur spécial des Nations Unies. Ce rapport est déjà

 17   versé au dossier. Il s'agit bien sûr de la pièce P 04822. Ce rapport aborde

 18   --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 20   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] je voulais simplement que l'on dit

 21   qu'il s'agit bel et bien de Josip Praljak à côté du nom de Praljak pour que

 22   l'on sache qu'il ne s'agissait pas de moi. Merci. Pour qu'il ne s'ait pas

 23   de malentendu, bien sûr, n'est-ce pas ?

 24   M. SCOTT : [interprétation] Non, très bien, Monsieur le Président. Je fais

 25   référence à la page du transcript 1 624,

 26   M. Slobodan Praljak nous a dit ici en audience que c'est lui qui avait

 27   fermé le camp en 1992. Le camp de Dretelj. Je suis tout à fait certain que

 28   nous pouvons faire référence au compte rendu d'audience pour vérifier mes

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  1   propos.

  2   Je ne sais pas si M. Praljak a peut-être oublié. Bien.

  3   Monsieur le Président, le quatrième rapport établi par

  4   M. Mazowiecki, il parle en profondeur et nous décrit les opérations du

  5   camp. Je crois que la Chambre a déjà eu l'occasion de lire ceci s'agissant

  6   du camp de Dretelj, Gabela, ou lorsque vous aurez en fait examiné cet

  7   élément vous verrez que les éléments directs, les preuves directes où vous

  8   avez entendu ici ce sont des personnes qui se trouvaient sur place. Et ce

  9   rapport spécial des Nations Unies confirme ceci.

 10   L'Accusation souhaite souligner plus particulièrement dans cette partie-ci

 11   de son exposé et en fait la Chambre se demandera et elle pourra parler de

 12   1992 car l'établissement des opérations des camps n'était pas chose

 13   nouvelle en 1992. On a procédé à une arrestation massive d'hommes musulmans

 14   au début du mois de juillet 1993. Il fallait qu'ils s'en débarrassent, il

 15   fallait qu'ils les mettent quelque part, et les camps existaient en 1992,

 16   et c'est eux qui voulaient les observateurs internationaux s'occupaient des

 17   camps en 1992.

 18   Maintenant, très brièvement, concernant les travaux forcés, je ne vais

 19   aborder que très brièvement ce sujet. Mais on peut bien établir qu'il

 20   s'agissait d'une pratique systématique et généralisée. On ne pouvait pas

 21   parler de pratique plus systématisée -- des systématiques plutôt les

 22   prisonniers avaient été emmenés pour faire des travaux forcés et d'autres

 23   personnes avaient été tuées sur les lignes de confrontation.

 24   Alors, pour vous donner deux exemples très rapides, la pièce

 25   P 03474, le 15 juillet 1993, M. Petkovic a donné l'ordre aux Unités du HVO

 26   dans la zone opérationnelle de l'Herzégovine d'organiser immédiatement les

 27   fortifications et de placer un barricade des lignes de la défense pour y

 28   arriver en engageant l'équipement militaire des prisonniers et des détenus.

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  1   Et quelques jours plus tard, à partir du 29 juillet 1993, pièce P 03592,

  2   Petkovic de nouveau donne l'ordre concernant les travaux de -- du génie :

  3   "De faire travailler les prisonniers et de prendre tout l'équipement

  4   disponible pour mener à bien cette mission."

  5   Je voudrais maintenant passer quelques minutes, Monsieur le Président,

  6   Messieurs les Juges, sur le sujet de ce que l'on a appelé le nettoyage

  7   ethnique inverse. Ceci nous montre effectivement la nature systématique et

  8   délibérée de ce plan. Un plan, les stratégies qui existaient, qui

  9   n'impliquaient pas seulement les Musulmans en réalité mais qui impliquaient

 10   de déplacer les Croates musulmans également. Effectivement, lorsque le

 11   Témoin BF, dans l'un de ces rapports que la Chambre a lu, a décrit -- en

 12   fait, a décrit : cette pratique comme étant une pratique machiavélienne.

 13   Les Croates des autres parties de la Bosnie ont été "encouragés" -

 14   encouragés entre guillemets - "on les a forcés de quitter leur maison pour

 15   consolider une majorité croate des municipalités qui se trouvaient au cœur

 16   de la banovine d'Herceg-Bosna."

 17   L'Accusation sous-tend que s'agissant de ce programme selon lequel il

 18   fallait viser -- créer une Grande-Croatie d'Herceg-Bosna est composée de

 19   trois objectifs importants. Dans certaines municipalités et dans des zones

 20   prétendues par l'Herceg-Bosna qui étaient plus croates, que d'autres, il y

 21   avait certaines régions qui étaient plus dirigées vers la Bosnie centrale

 22   et qui n'avaient pas une population croate trop importante ou une majorité.

 23   Un jugement a été fait, nous soutenons qui a évolué avec le temps, mais ce

 24   qui était vraiment important c'est de déplacer la population croate des

 25   zones plus marginales qui se trouvent sur les frontières aux régions plus

 26   centrales pour que l'on puisse renforcer ou consolider une majorité croate.

 27   Tudjman, lui-même, a reconnu les bénéfices de ceci. Le fait de déplacer des

 28   Croates de leur maison même si c'était difficile. Dans la pièce P 0645,

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  1   Tudjman déclare : "Bien sûr que c'est pénible. Outre ceci, 200 000 Croates

  2   ont déjà été chassés de leur maison. Il y aura sans doute 100 000 autres

  3   Croates. C'est affreux pour eux, mais même du point de vue historique, ces

  4   100 000 à 200 000 Croates vont assurer le territoire croate Istria Baranja,

  5   vous comprendrez, lorsque nous en aurons terminé, et cetera. Donc, chaque

  6   mauvaise chose n'est pas seulement mauvaise mais il faut tirer au profit le

  7   meilleur de toute situation."

  8   Deuxièmement, pour parler des questions économiques, militaires et

  9   politiques, ce que j'appelle [imperceptible] qu'avec les Musulmans et les

 10   Serbes, Tudjman et les dirigeants de l'Herceg-Bosna avaient reconnu qu'il

 11   fallait abandonner certaines régions qui se trouvaient au centre du

 12   territoire de la banovine. Un de mes meilleurs exemples pour ceci, Monsieur

 13   le Président, c'est sans doute Vares. Ce territoire était presque

 14   complètement encerclé par les zones serbes et musulmanes.

 15   Troisièmement, très important aussi ce que j'ai déjà mentionné c'est de re-

 16   localiser les Croates venant d'autres parties de Bosnie-Herzégovine et de

 17   les faire emménager dans des maisons et des appartements qui avaient saisis

 18   par les familles musulmanes qui avaient été expulsées, donc, appartements

 19   abandonnés par ces dernières, ce qui faisait en sorte qu'il était

 20   impossible aux Musulmans de vouloir revenir dans ces régions car leurs

 21   maisons et leurs appartements avaient été pris par les Croates.

 22   De nouveau, Tudjman dit en septembre 1993 - et on parle de la pièce 5255 :

 23   "Moi aussi, j'ai dit à notre peuple : placer ces réfugiés dans ces régions,

 24   Tasovici, Stolac, et cetera afin que ces régions puissent devenir croates

 25   pour que les Croates et le peuple croate puissent être présents sur place."

 26   Dans cette même réunion, Tudjman a dit à ses supporters pour l'Herzégovine

 27   de ne pas -- de faire, c'est ce que dit Tudjman : "D'emménager dans les

 28   régions de Ravno, Capljina, Neum et Stolac, et ensuite, nous allons

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  1   insister pour obtenir ces régions que la rive gauche de la Neretva fera

  2   partie de la République bosnienne, et donc de faire l'inverse, de faire

  3   emménager les personnes à Ravno, Capljina, Neum et Stolac."

  4   Les représentants des organisations internationales telles le Témoin BA et

  5   le Témoin DZ ont déposé devant nous et ont parlé de la façon dont les

  6   populations étaient transférées, qui avaient un large groupe de Croates

  7   bosniens qui avaient été déplacés, et ceci a fait l'objet de grandes

  8   discussions pour ce qui est des dirigeants vers le milieu de 1993, y

  9   compris Boban, Jadranko Prlic, Bruno Stojic, et autres, ils ont insisté

 10   auprès des organisations internationales de prêter main-forte pour ce

 11   qu'ils ont appelé une évacuation des dizaines de milliers de Croates de

 12   Bosnie de la région centrale de Bosnie.

 13   Et ceci est clairement visible dans la pièce P 09712, P 02872.

 14   Maintenant, pour faire référence au Témoin BA qui connaissait des -- qui

 15   avait des collègues de Bosnie centrale, même s'il savait qu'il y avait un

 16   conflit il était confirmé que ces Musulmans ne voulaient pas en fait

 17   quitter cette région.

 18   De façon générale, c'était la politique de cette organisation humanitaire

 19   dont fait partie le Témoin BA et de prêter main-forte lors des évacuations

 20   seulement dans les situations où les civils étaient placés à risque et

 21   c'était -- il était -- en fait cette organisation avait évalué que ce

 22   n'était pas le cas pour ce qui est de ces régions-là, telle Zenica.

 23   Le Témoin BC s'est entretenu avec les Croates de Bosnie déplacés concernant

 24   les circonstances de leur départ. Un très grand nombre d'entre eux ont dit

 25   ou déclaré au Témoin BC qu'ils avaient été manipulés ou forcés par les

 26   soldats du HVO d'entrer dans les autobus. Un très grand nombre d'entre eux

 27   ne voulaient pas partir comme il nous a dit. Le modus operandi de façon

 28   typique était que les soldats arrivaient dans les villages, disaient

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  1   quelque chose en genre, nous allons nous retirer de cette zone, les

  2   Moudjahidines arrivent il vaut mieux quitter cette région pendant que vous

  3   le pouvez encore.

  4   Et un très grand nombre de Croates de Bosnie étaient en colère car ils

  5   avaient l'impression qu'ils n'avaient pas le choix et qu'il fallait

  6   absolument qu'ils quittent leur demeure. L'emploi de la terreur comme je

  7   viens de le mentionner était souvent combiné avec une promesse de meilleure

  8   condition de vie en Herzégovine, par exemple. Plus tard comme c'était le

  9   cas pour les personnes croates dans la plupart des camps. Mais encore une

 10   fois, ce n'était pas encore pour les Musulmans mais les Croates de Bosnie

 11   également que cette stratégie existait.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste une précision. Ce que vous venez de dire,

 13   comment est-ce compatible avec ce qui s'est passé à Guca Gora où les

 14   Moudjahidines sont arrivés effectivement ?

 15   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, vous verrez, en fait,

 16   les éléments de preuve reçus à cet égard n'ont pas été tout à fait clairs.

 17   Je crois que le témoin nous a dit que la situation à Guca Gora était que

 18   alors que certaines choses très mauvaises s'étaient passées à cet endroit-

 19   là, elles n'avaient pas été vues de façon très précise. L'Accusation sous-

 20   tend depuis le début de ce procès qu'il y a effectivement des crimes qui

 21   avaient été commis par le côté musulman et qu'il y a effectivement eu des

 22   crimes donc commis par eux. Ceci est incontestable. Mais les témoins qui

 23   ont témoigné dans cette affaire nous soutenons et ce que nous démontrent

 24   également les documents internationaux que outre quelques incidents, il y

 25   avait eu un plan de stratégie de manipulation pour que les Croates de

 26   Bosnie soit déplacé vers l'Herzégovine. Et nous nous estimons -- nous

 27   croyons que c'est ce que présente les éléments de preuve.

 28   Le Témoin BA -- excusez-moi, Monsieur le Président, je -- vous avez posé

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  1   une question ? Je crois que j'y ai répondu, n'est-ce pas ?

  2   Pour continuer, le Témoin Peter Galbraith, qui a témoigné, il

  3   -- Galbraith nous a dit que Mate Boban, au mois de juillet 1993, il lui a

  4   dit que le HVO et la Croatie voulaient déplacer un très grand nombre de

  5   Croates de la région de Vares à la région croate

  6   présumément [comme interprété] en Herzégovine. Et ce que Galbraith nous a

  7   dit et ce qui était vraiment étonnant selon lui et c'est ce qu'il nous a

  8   dit ici, c'est que Boban n'a pas demandé l'aide internationale pour

  9   protéger la population croate qui était déjà sur place, c'est-à-dire de les

 10   laisser à Vares et de les protéger là mais ce que Boban voulait faire c'est

 11   de les faire sortir de Vares.

 12   Nous avons également les rapports écrits du Témoin DE. Je parle de la pièce

 13   P 080865, donc, 80865. Mais je crois qu'il y a une erreur ici. Je vais

 14   devoir vérifier le numéro. Je crois qu'il y a trop de numéros. C'est peut-

 15   être P 0 -- en fait, non, je vais devoir vérifier.

 16   Mais dans ce récit relatif au Témoin DE, il dit, et je crois que

 17   c'est tout à fait clair ce qu'il a dit : "J'accuse le plus haut niveau des

 18   hommes politiques croates d'avoir trahi les intérêts croates en Bosnie

 19   centrale, plus particulièrement à Vares où je suis né. Je comprends

 20   maintenant plus clairement la chute de Travnik et de Kakanj. Tout avait été

 21   fait conformément au scénario déjà prémédité. Je les accuse d'un exode sans

 22   égal des Croates de Vares et de la souffrance. Vous avez fait tout ce que

 23   vous avez pu pour nous faire quitter nos vieilles demeures qui nous

 24   appartenaient depuis des siècles. Quelle était la région que vous nous avez

 25   -- que vous aviez réservée pour nous ? Quel était notre avenir ?"

 26   Et il nous a dit ceci -- à la pièce P 08086 -- donc 8086.

 27   Et pour terminer je vais -- pour terminer ce sujet, je vais me rapporter au

 28   rapport qui porte la cote P 02845, rédigé par le Témoin BS qui a témoigné

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  1   il n'y a pas longtemps. Et il a dit -- il a donné une évaluation très

  2   frappante. Il a dit : "Il semblerait que c'est machiavélique mais ce n'est

  3   que les Balkans. Et tous ceux qui ont rencontré de façon régulière les

  4   dirigeants croates de Bosnie, Boban, Stojic, Kordic, Valenta, dans

  5   différentes situations et qui ont abordé des différents sujets qu'il s'agit

  6   -- que leur paranoïa et l'extrémisme n'avait pas été caché --"

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- [imperceptible] -- là où il y a 20, oui, ça y

  8   est, c'est corrigé.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   J'en arrive à la fin de ce survol. Nous sommes maintenant à l'automne 1993

 11   et il n'est pas surprenant de constater qu'à ce moment-là la poursuite du

 12   transfert forcé et illégal et des arrestations de civils ont conduit la

 13   communauté internationale à -- faire de plus en plus pression à la fois sur

 14   la Croatie et sur les dirigeants de l'Herceg-Bosna.

 15   En conséquence, le 6 septembre 1993, le gouvernement du HVO, -- appelé

 16   aussi le cabinet du HVO, a organisé une réunion spéciale pour aborder ces

 17   problèmes parce qu'on s'alarmait du mal qui était causé à la cause croate

 18   aussi bien sûr place qu'à Zagreb. On trouve cela da la pièce P 04841.

 19   Après avoir essayé de prétendre que le gouvernement du HVO n'était

 20   pas responsable des violations des droits de l'homme dans les camps qu'il

 21   avait lui-même mis en place et géré, ces hommes n'ont fait pratiquement

 22   aucun effort pour fermer ces camps, parce qu'ils avaient encore une raison

 23   d'être tant qu'il existait des Musulmans en Herceg-Bosna. C'est seulement

 24   quand tous les Musulmans auraient été chassés des zones les plus

 25   importantes qu'on verra certains de ces camps être fermés à la fin 1993,

 26   même si certains sont restés ouverts jusqu'en 1994.

 27   La campagne du HVO d'Herceg-Bosna, campagne de nettoyage ethnique et

 28   d'offensive militaire menée à bien par le HVO sous la direction des

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  1   dirigeants politiques de l'Herceg-Bosna s'est poursuivie à la fin 1993,

  2   comme cela a été illustré une fois encore par ce qui s'est passé le 23

  3   octobre 1993 et l'attaque menée contre le village musulman de Stupni Do. Je

  4   ne vais pas entrer dans les détails de cet événement mais je pense que les

  5   Juges de la Chambre ont entendu suffisamment de témoignages, d'éléments de

  6   preuve à ce sujet, des éléments de preuve très convaincants qui viennent

  7   pour certains de membres du HVO. Les discussions ont lieu à Zagreb sur ce

  8   qu'il fallait faire de l'officier du HVO et les Juges savent de qui il

  9   s'agit, l'officier du HVO qui commandait les forces du HVO qui ont

 10   participé aux meurtres de Stupni Do. Les principaux dirigeants militaires

 11   et politiques se sont lancés dans ce que Franjo Tudjman a lui même qualifié

 12   de jeu.

 13   La Chambre est au courant de tous les efforts qui ont été déployés pour

 14   dissimuler les crimes commis. On voit qu'Ivica Rajic reçoit un nouveau nom,

 15   un faux nom; il devient Viktor Andric. Il est soi-disant mis à pied mais en

 16   fait il reste à son poste sous le nom de Viktor Andric. C'est toujours le

 17   même homme. Nous savons bien toutes les manœuvres qui ont eu lieu. Il

 18   s'agit sans doute d'une des plus grandes opérations de dissimulation qui se

 19   soient déroulées pendant la guerre des Balkans. Et il y a eu plusieurs

 20   réunions, comme le dit Tudjman, lui-même, plus d'une réunion présidentielle

 21   au cours desquelles on a parlé de Stupni Do, de manière très approfondie.

 22   M. Petkovic y participait et Tudjman utilise encore une fois le terme de

 23   jeu.

 24   Et ce qu'on dit à la communauté internationale c'est qu'on a démis Rajic de

 25   ses fonctions mais alors qu'en réalité il a changé de nom et il est resté

 26   pratiquement au même poste. Et les hommes qui sont allés à Stupni Do,

 27   quelques jours plus tard ont rebroussé chemin et se sont dirigés vers

 28   Busovaca. C'est l'ordre qu'on leur a donné.

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  1   Dans une résolution adoptée le 20 décembre 1993, l'assemblée générale a

  2   condamné le pilonnage aveugle des villes et des civils et le meurtre des

  3   non combattants. Elle a pris tout particulièrement pour cible les Croates

  4   de Bosnie dans cette résolution et le nettoyage ethnique a été condamné des

  5   deux côtés et en particulier celui commis par les forces croates de Bosnie.

  6   Il s'agit d'une résolution du Conseil de sécurité, pièce P 07268.

  7   L'assemblée générale une fois encore a demandé au gouvernement croate de

  8   faire usage de son influence : "Auprès des autorités autoproclamées de la

  9   Bosnie-Herzégovine pour mettre un terme à la pratique du nettoyage ethnique

 10   immédiatement et pour en inverser les effets."

 11   Le sixième rapport de Mazowiecki, qui avait été désigné par les Nations

 12   Unies, c'est la pièce P 07917. C'est un rapport dans lequel on voit relater

 13   dans les détails ce qui s'est passé au cours de cette période en

 14   Herzégovine. Je ne vais pas donner lecture de certains extraits de ce

 15   rapport car les Juges bien entendu disposent de ce document.

 16   Suite à la campagne du HVO d'Herceg-Bosna, campagne de persécution et de

 17   nettoyage ethnique, la population musulmane de Bosnie a été grandement

 18   diminuée en nombre dans beaucoup de régions de l'Herceg-Bosna et

 19   parallèlement on a vu augmenter fortement la proportion de la population

 20   croate dans les mêmes régions. Les Musulmans qui restaient étaient, c'était

 21   manifeste, dominés par les autorités du HVO d'Herceg-Bosna. C'est ce qui

 22   était prévu, c'était l'intention d'ailleurs de l'entreprise criminelle

 23   commune. A la fin de l'automne 1993 on peut dire qu'en grande partie les

 24   nettoyages des Musulmans de nombreuses régions de l'Herceg-Bosna avait été

 25   réalisé. Il n'était vraiment plus nécessaire, à ce moment-là, de conserver

 26   les camps. Si en septembre on trouvait encore 8 000 Musulmans à Stolac et

 27   14 000 à Capljina, au mois de novembre déjà, c'est-à-dire seulement neuf

 28   mois plus tard en novembre, bien, il ne resterait plus un seul Musulman à

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  1   Stolac, et sur les 14 000 Musulmans qui se trouvaient à Capljina, le mois

  2   précédent, on en trouvait plus que 3 852.

  3   La portée des efforts déployés, la réussite des efforts déployés pour

  4   chasser les Musulmans les dirigeants de l'Herceg-Bosna en étaient

  5   pleinement conscients. Lors d'une réunion, Dario Kordic, ce criminel de

  6   guerre condamné, vice-président des Croates de Bosnie, a signalé que :

  7   "Environ 75 000 Musulmans avaient été chassés par la HV." Là, il y a peut-

  8   être une faute de frappe, peut-être que c'était le HVO, on va lui donner le

  9   bénéfice du doute. Mais, en tout cas, c'est ce qu'on trouve à la pièce P

 10   08597 : "Près de 75 000 Musulmans ont été expulsés.

 11   Zoran Maric s'est vanté, il a fanfaronné devant Tudjman lors d'une

 12   réunion de mars 1993, je cite : "En ce moment, il y a vraiment très peu de

 13   Musulmans qui restent à Busovaca. Il y en a beaucoup qui voulait revenir

 14   mais nous avons installé des Croates dans leurs maisons."

 15   Je cite encore, il s'agit là de la pièce P 01622 : "Lors d'une

 16   réunion assez exceptionnelle qui a eu lieu le 21 septembre 1993," pièce

 17   05237, Andjelko Markovic du HVO informe avec fierté Tudjman du fait suivant

 18   : "Aujourd'hui il ne reste plus un seul Musulman à Stolac. Nous avons

 19   peuplé Stolac de nos réfugiés en provenance de Bosnie."

 20   Et Tudjman répond, je cite : "Andjelko, je sais tout ça. Tu

 21   m'apprends rien du tout."

 22   Pero Markovic du HVO de Capljina, un autre Markovic, dit à Tudjman au

 23   cours de la même réunion, je cite : "En ce qui concerne le territoire qui

 24   se trouve au sud de la Buna et qui va jusqu'à Stolac et qui remonte à

 25   Capljina, et ça c'est une zone d'environ 250 kilomètres carrés, et là, il

 26   ne reste plus un seul Musulman. Ce sont les Croates qui habitent cette

 27   zone. Et nous avons emmené 3 000 Croates de Kakanj, de Travnik aussi, et

 28   également de Konjic. Toutes les maisons qui sont habitables ont habitées.

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  1   Leurs prêtres les ont également suivis."

  2   Tudjman, je cite : "Attends. J'ai dit que les conteneurs aussi."

  3   Et Markovic : "Oui, on a environ 100 petites maisons. Nous avons déjà

  4   rempli Stolac au maximum."

  5   Tudjman déclare que : "Il avait donné des instructions pour que les

  6   Croates s'installent à Tasovici, Stolac, et ailleurs en Bosnie-Herzégovine.

  7   Je leur ai dit qu'il fallait installer ces réfugiés dans ces zones pour

  8   qu'il y ait des Croates à cet endroit." C'est la pièce P 05237.

  9   Le travail entrepris par le témoin à charge Mme Tabeau nous montre

 10   les éléments suivants : sur la base de ce qu'elle qualifie d'analyse

 11   statistique prudente. Mme Tabeau a étudié l'évolution de la population dans

 12   huit municipalités de l'Herceg-Bosna, Et parmi ces conclusions, on peut

 13   citer les suivantes : "La population d'Herceg-Bosna examinée s'est divisée

 14   le long de" -- enfin, "conformément à des répartitions ethniques au cours

 15   du conflit de 1993 et 1994 entre les Croates et les Musulmans. Ça ne

 16   surprend personne. Parmi toutes ces personnes, environ 43,2 % des non-

 17   Croates qui habitaient dans les certaines municipalités, dans les huit

 18   municipalités avant le conflit, n'habitaient plus sur leurs lieux de

 19   résidence de 1991 en 1997, 1998, C'est-à-dire que 43,2 % des personnes

 20   avaient été déplacées.

 21   49 % de la population musulmane, et qui habitait avant le conflit

 22   dans les municipalités concernées, n'y vivait plus en 1997, 1998, les

 23   Musulmans, donc, 49 %.

 24   Il est vrai que chacune des communautés ethniques a souffert,

 25   l'Accusation sera toujours prête à reconnaître qu'on a souffert de tous les

 26   côtés, du côté des Musulmans, des Serbes, des Croates, c'est vrai, on a

 27   souffert dans toutes les communautés, mais le plus grand nombre de

 28   personnes déplacées et le plus grand nombre de réfugiés on les trouve parmi

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  1   les Musulmans de Bosnie, au minimum, et là encore on fait preuve de

  2   prudence sur la plan statistique, au minimum il n'y a que 26 663 à 40 266

  3   personnes qui ont été déplacées à l'intérieur du territoire ou qui sont

  4   devenus des réfugiés. Ceci représente 43,4 % du total des personnes

  5   déplacées ou réfugiés, c'étaient donc ces Musulmans.

  6   Si on regarde la zone qui est visée à l'acte d'accusation en

  7   l'espèce, et si on compare le pourcentage des différents groupes dans la

  8   population entre 1991 et 1997, 1998, on voit qu'à Prozor, on est passé de

  9   62,2 % de Croates à 93 % de Croates. Mostar-Jug on passe de 49 % de Croates

 10   dans la population à 96,1 % de Croates parmi les habitants. Mostar-

 11   Jogozapad - excusez ma prononciation si jamais j'ai massacré ce nom - en

 12   tout cas, on est passé d'une population croate à 47,9 % d'une opération

 13   croate à 78,2 %. Mostar-Zapad passe de 41,6 % de Croates à 75,2 % de

 14   Croates. Capljina le pourcentage des Croates passe de 53,8 % à 92,3 %. Et à

 15   Stolac, on trouvait 48 % de Musulmans dans la population en 1991 et on

 16   passe à un pourcentage de 95,5 % de Croates dans la population après le

 17   conflit.

 18   Tous les Musulmans qui sont restés sur place après cette campagne

 19   active de nettoyage menée par le HVO ou ceux qui ont pu revenir ont dû

 20   changer leurs identités nationales. Tudjman a déclaré à plusieurs

 21   dirigeants croates, pièce P 08288 : "Commencez immédiatement à faire en

 22   sorte qu'ils se déclarent comme Croates de confession musulmane. Il faut

 23   s'y mettre tout de suite. On n'a pas le choix."

 24   Ce qui nous emmène, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, aux

 25   accords de Washington de mars 1994, et à la fin de la période visée à

 26   l'acte d'accusation notifiée. Et à ce moment-là, le plan continuait à être

 27   mis en application. Tudjman encourageait ses hommes, il ne fallait pas

 28   abandonner l'Herceg-Bosna, l'Herceg-Bosna continuerait toujours à exister,

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  1   jamais elle ne disparaîtrait. Je terminerais en reprenant les termes de la

  2   déposition du Témoin DZ, qui dans son rapport P 08167, nous a expliqué que

  3   beaucoup de Croates qu'il rencontrait au cours du printemps 1994, avant

  4   qu'ils ne quittent la zone avaient déclaré que les accords de Washington

  5   c'était un mariage obligé destiné à préparer un meilleur divorce.

  6   Monsieur le Président, j'en suis arrivé à mon survol de notre

  7   affaire, M. Stringer et moi-même demain, répondront à certains des

  8   arguments développés par les équipes Coric et Pusic.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, vous avez utilisé quatre heures grosso

 10   modo, hein. Je ne vais pas compter les secondes ou les minutes qui

 11   manquent. Si demain vous avez également encore quatre heurs. Ça serait bien

 12   de terminer donc demain. Bien que dans notre décision on avait dit neuf

 13   heures, mais il se peut que demain vous aurez terminé.

 14   Alors, comme vous le savez, demain nous nous retrouvons à 9 heures du

 15   matin, puisqu'on est du matin. Donc je vous invite à revenir pour

 16   l'audience qui débutera demain à 9 heures.

 17   --- L'audience est levée à 18 heures 56 et reprendra le mardi

 18   5 février 2008, à 9 heures 00.

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