Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 18 juin 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  8   toutes les personnes dans ce prétoire et autour du prétoire. Affaire IT-04-

  9   74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce mercredi, 18 juin

 11   2008, je salue M. le Témoin, MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats, Mmes

 12   et MM. du bureau du Procureur, ainsi que toutes les personnes qui nous

 13   assistent.

 14   Je vais d'abord donner la parole à mon collègue, et après je donnerai la

 15   parole à Me Karnavas.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bonjour à tous. J'aimerais faire une

 17   observation qui n'est pas de nature personnelle. Je me suis entretenu avec

 18   mes collègues et nous sommes tous du même avis. Ce n'est pas non plus

 19   dirigé précisément contre la première équipe de la Défense représentée par

 20   Me Karnavas, mais ceci s'adresse à toutes les parties. Ce qui suscite cette

 21   intervention de ma part, c'est en présence de ce témoin et la façon dont

 22   les documents lui sont présentés.

 23   Les documents sont présentés aux Juges dans le désordre, ce qui veut dire

 24   qu'on est sans arrêt en train de se tourner et de chercher des documents.

 25   J'ai de la chance, parce que je suis à gauche ici et j'ai une chaise, mais

 26   M. le Président de la Chambre, il doit se baisser, et c'est vrai pour tout

 27   le monde.

 28   Ce n'est pas une simple entrave ou un exercice physique et utile, qui n'est

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  1   pas la meilleure façon de se tenir en forme, même si ça peut y contribuer,

  2   mais ceci ne vous dessert pas. En effet, souvent on trouve le document

  3   juste au moment où vous êtes passé au second, alors on ne peut pas vraiment

  4   s'en servir. On est presque tenté de soupçonner, mais on ne le dit pas, on

  5   a presque l'impression que vous ne voulez pas qu'on lise les documents. Ce

  6   n'est pas sérieux ce que je dis, bien entendu, mais vous voyez ce que je

  7   veux dire. Je pense que la Chambre serait gré aux parties de fournir les

  8   documents dans l'ordre dans lequel les parties ont ces documents, ordre

  9   dans lequel ils sont présentés au témoin. Notre travail serait plus facile

 10   et le vôtre plus efficace.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci. Je m'en suis rendu compte hier tout

 12   particulièrement. Nous allons essayer de corriger le tir. Ce n'était pas

 13   intentionnel. Vous savez, c'est seulement dans la nuit du dimanche qu'on a

 14   terminé l'organisation des classeurs. Vous savez comment nous préparons nos

 15   documents. Nous les avons dans l'ordre chronologique. Nous les examinons,

 16   après quoi, en fonction du nombre de documents, ils sont réorganisés à la

 17   dernière minute, bien sûr, tout ceci pour répondre aux impératifs de temps.

 18   Mais je suis conscient du problème et je peux vous assurer que nous allons

 19   veiller à ce que ceci ne se reproduise plus.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je m'attendais à votre réponse.

 21   Merci.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Puis-je poursuivre, Monsieur le Président ?

 23   J'aurais voulu soulever une autre question en ce qui concerne un document

 24   précis, le document 1D 02940. Des copies sur support papier ont été

 25   fournies à tous. Ceci ne se trouve pas en prétoire électronique.

 26   Hier à un moment donné, à la suite de l'entretien qui se poursuivait, j'ai

 27   demandé à quelqu'un aux Etats-Unis de trouver la présentation faite par M.

 28   Silajdzic au Sénat à l'époque. J'ai obtenu le document par télécopie hier

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  1   soir, tard dans la nuit. Je me rends bien compte que c'est un nouveau

  2   document. N'empêche que j'aimerais l'utiliser pour poser quelques

  3   questions. Il n'y a rien de neuf, puisque nous avons vu les lettres. Je

  4   souhaitais cependant évoquer quelques points avec le témoin tout

  5   particulièrement, mais pas seulement une réponse de M. Izetbegovic à une

  6   des lettres de M. Akmadzic envoyée à M. Biden. Si vous m'y autorisez,

  7   j'aimerais poser quelques questions au témoin.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Procureur, des réserves ou pas ?

  9   M. SCOTT : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Nous comprenons que

 10   ce genre de chose peut se passer. Pas d'objection à ce que ce document soit

 11   utilisé. Ce ne sera pas toujours le cas, mais ici, pas de problème.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci beaucoup.

 13   LE TÉMOIN : MILE AKMADZIC [Reprise]

 14   [Le témoin répond par l'interprète]

 15   Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]

 16   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, examinons le document 1D 02940. Il

 17   vous a été présenté. Hier, nous avons dit que vous vous êtes trouvé à New

 18   York. La toute première page du document le montre, il s'agit du 18 février

 19   1993. C'est une audition d'Haris Silajdzic, ou présentation faite par lui,

 20   devant ce qui était le sous-comité des Affaires européennes, qui fait

 21   partie du comité des Relations étrangères.

 22   Prenez la page 50, si vous le voulez bien. C'est vers le milieu de la page,

 23   troisième paragraphe, me semble-t-il. Je vais vous le lire :

 24   "Malheureusement, les négociations au nom de la paix ont facilité

 25   l'intensification de la guerre. Pourquoi ? La raison est très simple. Au

 26   lieu de répondre à une agression non masquée, le processus de paix soutenu

 27   par les Nations Unies n'a fait qu'augmenter les possibilités d'agression

 28   pour l'agresseur."

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  1   Il s'agit ici d'un ministre des Affaires étrangères qui parle au nom

  2   de la République de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous partagez ce qu'il

  3   dit au sous-comité du Sénat ?

  4   R.  Monsieur le Président, je ne partage pas ces points de vue. Je viens de

  5   recevoir ce document. Ce n'était pas le point de vue de la présidence en

  6   tant que tel non plus. Nous étions tous d'accord pour dire, au sein de la

  7   présidence, que sous les auspices de la conférence de la paix pour l'ex-

  8   Yougoslavie et de la conférence de Londres, il fallait négocier, il fallait

  9   chercher une solution, négocier pour la paix.

 10   Q.  Prenons un autre passage, page 59 je crois, bas de page.

 11   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Honnêtement, j'écoute maintenant la

 12   déclaration du témoin, mais je ne sais pas si le témoin se rend compte que

 13   le Dr Silajdzic à l'époque parlait surtout de l'agression serbe. Le

 14   paragraphe suivant dit, je le cite : "L'espoir qui soutient ce processus

 15   semblait avoir été que si on faisait suffisamment de concessions à

 16   l'agresseur il serait satisfait."

 17   Je suppose que ce sont des concessions données par les Nations Unies, à ce

 18   moment-là, l'agresseur aurait été satisfait. Je ne sais pas dès lors --

 19   bien sûr, le témoin n'a pas eu l'occasion de lire le chapitre dans sa

 20   totalité, mais peut-être devrait-on lui donner le temps d'examiner le tout

 21   pour qu'il réponde à votre question. Merci.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation]

 23   Q.  C'est l'inconvénient quand on n'a pas le document au préalable.

 24   Evidemment, je ne veux pas lui souffler de réponse, et on ne peut pas faire

 25   ça de façon télégraphique. Il faut voir ce que disait Boutros Boutros-

 26   Ghali, ce que disait Lord Owen, et on voit comment tout ceci s'imbrique.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi d'utiliser ce passage

 28   à vide, si j'ose dire, pour aller dans le même sens. Un peu plus loin dans

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  1   les paragraphes de cette page, M. Silajdzic parle du gouvernement de

  2   Bosnie-Herzégovine. Qu'avez-vous à dire de cela, Monsieur le Témoin,

  3   Monsieur Akmadzic ? Est-ce que vous vous retrouvez vous-même dans ce qui

  4   est dit ici ? Il dit : "Le gouvernement de Bosnie-Herzégovine a apporté un

  5   accord inconditionnel à ces négociations…" Voilà un exemple.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois dire que souvent le gouvernement et la

  7   présidence -- dans le système américain, on considère que le gouvernement

  8   c'est aussi le chef de l'Etat, et ici M. Silajdzic fait un amalgame entre

  9   ces différentes fonctions. Je dois dire que, déjà tout à l'heure, M.

 10   Silajdzic a dit que la conférence internationale récompense l'agresseur,

 11   d'une certaine façon. Evidemment que je suis contre cela. Mais je pense que

 12   les négociations, quand on parle de négociations proprement dites,

 13   c'étaient des négociations où les trois côtés étaient traités de façon

 14   égale. On n'a récompensé personne dans le cadre de ces négociations en tout

 15   cas.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Votre réponse fut précise et

 17   directe.

 18   Mais je veux être sûr d'une chose. D'après vous, quand on dit "agresseur"

 19   ici, à qui fait-on référence ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas précis, et en général dans les

 21   documents dont on dispose, quand on dit "agresseur," d'après ce que je

 22   sais, on a toujours fait référence au côté serbe, de la façon dont la

 23   présidence de Bosnie-Herzégovine avait à l'époque défini la guerre en

 24   Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire que cette agression menée par la Serbie et

 25   le Monténégro, ou plutôt la Yougoslavie et la JNA, on appelait cela une

 26   agression interne. C'est un terme qui n'existait pas dans la guerre. Donc

 27   il s'agissait des forces organisées par le SDS à l'intérieur de la Bosnie-

 28   Herzégovine.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation]

  3    Q.  Page 59, à partir du bas de la page, c'est le troisième paragraphe. M.

  4   Biden lui pose une question :

  5   "Veuillez décrire la composition de votre pays de la Bosnie-Herzégovine,

  6   pas nécessairement la répartition en pourcentage, mais je veux connaître la

  7   composition ethnique. Pourquoi pensez-vous qu'il est possible de

  8   reconstituer le tout ?"

  9   Voici la réponse de M. Silajdzic : "La Bosnie-Herzégovine est un vieux

 10   pays. Avant, on était tous des habitants de Bosnie. Il y avait les

 11   Catholiques de Bosnie, les Musulmans de Bosnie et les Orthodoxes."

 12   Sénateur Biden : "Catholiques, Orthodoxes et Musulmans."

 13   M. Silajdzic : "Oui, et des Juifs. C'étaient les quatre groupes de

 14   personnes qui ont en fait bâti la Bosnie, toute la Bosnie. Avant, la

 15   Bosnie, c'était un grand royaume des Balkans qui comprenait de grandes

 16   parties de la Croatie et de la Serbie, et ça n'a jamais été l'inverse."

 17   A ce moment-ci de l'histoire, parlons-nous d'une Bosnie où les gens

 18   s'identifient comme étant des Bosniaques et qu'il y a simplement des

 19   dénominations par confession religieuse, avec des Catholiques, des

 20   Orthodoxes, des Musulmans ? Et la réponse donnée par M. Silajdzic au

 21   sénateur Biden, est-elle correcte ?

 22   R.  Le Dr Silajdzic n'a pas répondu exactement au sénateur Biden. Je vais

 23   vous fournir quelques éléments. Tout d'abord, le royaume bosniaque en tant

 24   que tel a cessé d'exister en 1463, je pense, à l'époque de l'occupation

 25   turque.

 26   A l'époque de ce royaume dont il fait mention, vous avez le roi bosniaque

 27   le plus grand, qui était le roi Tvrtko. Nous considérons aujourd'hui qu'il

 28   a été Croate, Catholique, enfin on ne sait pas comment -- c'est ce qu'il

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  1   disait lui-même. Mais ce que nous savons, c'est qu'il est mort en 1391,

  2   c'est-à-dire vers la fin du XIVe siècle. Pour la période qui est

  3   intéressante pour ce Tribunal et qui est pertinente, la Bosnie-Herzégovine

  4   dispose de trois peuples souverains, les Serbes, les Croates et les

  5   Musulmans. Ce sont les peuples qui forment la Bosnie-Herzégovine.

  6   Pendant la Deuxième Guerre mondiale, vers la fin de cette guerre, il y a eu

  7   une grande assemblée, et on a décidé que la Bosnie-Herzégovine sera un Etat

  8   ni serbe, ni croate, ni musulman, mais un Etat aussi bien serbe que

  9   musulman et que croate. Le peuple musulman en tant que peuple a été reconnu

 10   par les amendements à la constitution de 1974, la constitution yougoslave,

 11   et en tant que peuple bosnien, il a été reconnu lors des négociations de

 12   Washington.

 13   Q.  Très bien. Page 96, la toute dernière page. Hier, nous avons vu deux

 14   lettres que vous avez envoyées au sénateur Biden et nous avons également vu

 15   la déclaration qu'il a faite en réponse à vos lettres. Voici ici en annexe,

 16   mais dans le procès-verbal, une lettre de M. Izetbegovic et j'aimerais

 17   l'aborder rapidement. La toute dernière page, vous l'avez ?

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   Q.  Très bien. La date est celle du 25 février 1993. Je lis :

 20   "Cher Sénateur Biden, je vous informe par la présente que mon mandat de

 21   président de la présidence a été prorogé au-delà du 24 décembre 1992, en

 22   vertu des dispositions de la constitution qui permettent une prorogation en

 23   raison de 'la situation d'urgence'. Ceci a été fait avec l'approbation de

 24   la totalité de la présidence."

 25   Est-ce exact ou est-ce faux ?

 26   R.  J'en ai discuté avec les Juges de la cour constitutionnelle puisque je

 27   ne suis pas juriste de formation, et dans la constitution on dit qu'en cas

 28   de guerre et pendant la période de l'état de guerre, on prolonge le mandat

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  1   de président et des membres de la présidence, mais il est évident que cela

  2   s'applique aux membres de la présidence et que ceux-là, entre eux, régulent

  3   le mandat du président conformément aux règlements de fonctionnement de la

  4   présidence, qui limite le mandat du président à une année, prolongé d'une

  5   année au maximum. Donc, cette lettre de M. Izetbegovic, il n'a pas raison

  6   tout simplement, et il n'a pas raison d'autant que toute la présidence

  7   n'était pas d'accord avec cela.

  8   Q.  Je vais être plus direct. Est-ce que cette déclaration est fidèle à la

  9   réalité ou est-ce qu'elle est fausse ?

 10   R.  C'est sans doute le président qui l'a vraiment écrite, c'est

 11   authentique sans doute, mais ce qu'il dit là n'est pas vrai.

 12   Q.  Je poursuis la lecture : "La présidence représente les Croates, les

 13   Musulmans, les Serbes" --

 14   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Désolé de vous interrompre, Maître

 15   Karnavas, mais il s'agit ici d'une question véritablement importante. Parce

 16   que cette question a souvent été soulevée -- la Chambre et les Juges

 17   voudraient savoir comment les choses se sont vraiment passées.

 18   Nous aimerions avoir une confirmation écrite quant à savoir si une

 19   décision a été répercutée dans les comptes rendus de la présidence ou pas.

 20   C'est la question que j'ai et j'espère que nous allons obtenir une réponse

 21   à cette question, que ce soit la Défense ou l'Accusation qui nous la donne,

 22   il nous faut examiner les documents eux-mêmes. Je vous remercie.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] A notre connaissance, Monsieur le Juge, et

 24   votre question est excellente, et malgré nos efforts, nous n'avons pas pu

 25   trouver ces procès-verbaux, car nous croyons comprendre que les procès-

 26   verbaux de ces journées-là ont disparu. Ils ne se trouvent plus dans les

 27   archives. A vous de déterminer où ces procès-verbaux se trouvent ou ce

 28   qu'il est advenu d'eux. Mais nous pourrions demander à ce monsieur, notre

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  1   témoin, s'il était présent aux réunions où il avait été pris une décision

  2   de proroger le mandat de M. Izetbegovic en tant que président en raison

  3   d'un état d'urgence. Ça pourrait peut-être nous aider. 

  4   Q.  Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous aider sur ce point ?

  5   R.  Oui. Avant le départ aux négociations de Genève qui ont commencé le 2

  6   janvier 1993, à peu près le 17 ou le 18 décembre 1992, quelques jours avant

  7   la fin de la deuxième année du mandat de M. Izetbegovic, j'en ai parlé avec

  8   celui-ci. Je l'ai mis en garde et je lui ai dit que grâce aux membres

  9   croates de la présidence, il avait été réélu pour la deuxième fois et que

 10   maintenant c'était le tour d'un Croate de devenir membre de la présidence,

 11   parce que d'après les règlements de fonctionnement de la présidence,

 12   puisqu'on n'a même pas parlé de la constitution, on a parlé de ces

 13   règlements du fonctionnement de la présidence, il n'avait pas le droit de

 14   proroger son mandat pour encore une année, qui aurait été la troisième

 15   année. Il m'a répondu qu'on allait se mettre d'accord là-dessus à Genève.

 16   Je l'ai mis en garde qu'une fois à Genève, on allait être dans une

 17   période qui va dépasser d'une dizaine de jours la fin de son mandat, et il

 18   m'a dit qu'il allait en discuter avec M. Tudjman. Je lui ai répondu que

 19   deux membres de la présidence croates étaient là et que moi, qui étais à

 20   l'époque le président du gouvernement, je pouvais lui faire part de notre

 21   décision, cette décision nous appartenait, elle n'appartenait pas à

 22   Tudjman.

 23   Il m'a répondu que l'armée ne lui permettait pas de quitter le poste

 24   de président de la présidence.

 25   Q.  Merci. Je ne sais pas si vous avez une question de suivi, Messieurs les

 26   Juges.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Simplement pour préciser aux fins du

 28   dossier.

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  1   Je trouve surprenant que nous ayons ici la transcription d'une

  2   audition du 18 janvier, et nous avons en annexe des lettres envoyées plus

  3   tard. Ça me semble assez bizarre. Mais enfin -- je voulais le dire aux fins

  4   du dossier, nous l'avons relevé. C'est un peu surprenant.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Juge Trechsel, je

  6   pense que dans le document que je vous ai montré vous avez la réponse de M.

  7   Biden, il a dit qu'il allait inscrire ça en annexe au procès-verbal de

  8   l'audition. Je relève qu'en fait ce procès-verbal fait 90 ou 100 pages. Ici

  9   nous n'avons repris que l'audition de M. Silajdzic --

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] D'après le document que j'ai, la

 11   dernière page de l'audition, c'est la page 66 où il est dit : "On a mis fin

 12   à la réunion publique."

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est vrai. J'ai demandé à quelqu'un d'aller

 14   à la bibliothèque de Philadelphia hier pour aller trouver ce document.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] En fait, l'audience s'est terminée à

 16   5 heures 55 du soir à la page 94, toujours le même jour.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. Bon. Je n'ai pas travaillé à

 18   Washington, mais je vois ici d'après la réponse du sénateur Biden qu'il

 19   indique que cette lettre de M. Akmadzic, qu'il a reçue après l'audition,

 20   qu'il allait la verser en tant que partie du compte rendu au procès-verbal;

 21   donc je suppose que ceci s'inscrit dans une même continuité, c'est sans

 22   doute pour ça que vous avez la lettre de M. Akmadzic du 22.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai bien vu ça. Mais quand est-ce

 24   que M. Biden a dit ça, quand a-t-il dit qu'il allait intégrer ceci aux

 25   archives au procès-verbal ?

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Veuillez me donner un instant, je vais

 27   trouver peut-être --

 28   Le 1D 02847, 25 février 1993, question concernant le gouvernement de

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  1   Bosnie. "Il y a une semaine, le sous-comité des Affaires européennes a tenu

  2   audition pendant toute une journée sur le sujet de la politique américaine

  3   en Bosnie." On parle de Silajdzic. Puis il dit : "Hier, j'ai reçu une

  4   lettre du premier ministre de la Bosnie, Mile Akmadzic."

  5   Si j'ai bien compris --

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, la phrase suivante dit : "…je

  7   vais intégrer dans le procès-verbal."

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. C'est là que ma mémoire me faisait un

  9   peu défaut, parce que je sais qu'effectivement le Sénat travaille comme ça,

 10   ça fait partie de l'annexe. Page 95, normalement c'est ajouté au procès-

 11   verbal de l'audition puisque manifestement M. Akmadzic a contesté ce que le

 12   ministre des Affaires étrangères avait déclaré et avait porté à l'attention

 13   de M. Biden qu'Izetbegovic n'était plus président de la présidence puisque

 14   son mandat avait expiré.

 15   Prenons le paragraphe suivant.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'étais pas intervenu jusqu'à présent. J'ai

 17   regardé avec attention le document et j'ai constaté que la réunion avait eu

 18   lieu dans la salle SD 562 du Sénat américain et qu'elle s'est terminée à 16

 19   heures 29. A 16 heures 43, un autre intervenant a suivi, le général Odon,

 20   qui devait normalement parler des aspects militaires de la situation dans

 21   l'ex-Yougoslavie. Alors vous aviez le début de son audition et puis il n'y

 22   a pas le reste et on passe à la page 94. Alors il aurait été peut-être

 23   intéressant de savoir ce que ce général avait dit, mais il n'y a peut-être

 24   aucun rapport avec le témoin. Mais j'ai noté cela au passage et je tenais à

 25   vous en faire part.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Effectivement je l'ai remarqué, Monsieur le

 27   Président, j'ai demandé rapidement à mon contact de se rendre à la

 28   librairie pour retrouver ce document, j'ai demandé qu'il aille à la

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  1   bibliothèque retrouver la déclaration du Dr Haris Silajdzic -- cela ne se

  2   trouve pas sur internet -- il a simplement photocopié et envoyé par fax ce

  3   passage, mais je peux mettre à votre disposition l'ensemble de la

  4   procédure, et comme je l'ai dit, cela fait environ 90 pages d'après ce

  5   qu'on m'a dit. Mais cela ne me poserait aucun problème, je peux le faire.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  7   M. KARNAVAS : [interprétation]

  8   Q.  Vers le milieu de la lettre, on peut lire : "La présidence" -- dernière

  9   page, il s'agit toujours de la lettre de M. Izetbegovic. Je cite :

 10   "La présidence représente les Croates, les Musulmans, les Serbes et les

 11   autres en Bosnie-Herzégovine. En outre, tous les membres de la présidence,

 12   y compris moi-même, continuent à exercer leurs fonctions conformément aux

 13   mandats qui leur a été confiés au départ."

 14   Est-ce que vrai ou faux ? J'ai très peu de temps, Monsieur Akmadzic.

 15   R.  La période de temps dont parle M. Izetbegovic, c'est où les deux

 16   membres serbes de la présidence avaient déjà quitté cette présidence. Il en

 17   est venu deux autres qui n'avaient pas remporté aux élections. Leur

 18   légitimité était placée sous un point d'interrogation.

 19   Q.  Alors, vrai ou faux ?

 20   R.  C'est inexact.

 21   Q.  Bien. Le texte se poursuit, voilà ce que dit Alija Izetbegovic : 

 22   "Le Dr Haris Silajdzic est officiellement à la tête de la délégation de la

 23   République de Bosnie-Herzégovine dans le cadre des pourparlers en cours qui

 24   se déroulent sous les auspices de la conférence sur l'ex-Yougoslavie qui se

 25   déroule à New York. Sa déposition devant votre comité reflète pleinement la

 26   position de la République et de la présidence de la Bosnie-Herzégovine."

 27   Vrai ou faux ?

 28   R.  C'est inexact.

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  1   Q.  Je rappelle que vous étiez premier ministre, Haris Silajdzic était

  2   ministre des Affaires étrangères, donc il était subordonné à vous dans le

  3   cadre du gouvernement ?

  4   R.  C'est sous la direction du premier ministre, dans la mesure où ce

  5   ministre est sous la coupe du premier ministre.

  6   Q.  Haris Silajdzic était-il membre de la présidence ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Une dernière question. Ne vous a-t-on jamais remis un exemplaire de la

  9   lettre envoyée par M. Izetbegovic au sénateur Biden ?

 10   R.  Non, jamais.

 11   Q.  Revenons-en à nos documents, nous allons reprendre là où nous nous

 12   étions arrêtés hier, nous allons reprendre avec le document 1D 02314. Hier,

 13   nous avons parlé de la question de Medjugorje et de l'accord qui avait été

 14   conclu. C'est là que nous en étions restés hier, premier classeur.

 15   Je rappelle qu'hier nous avons vu un extrait du livre de M. Owen, 1D

 16   02037, et nous avons constaté que le 2 mai, un certain Douglas Hogg

 17   essayait de faire reconnaître à M. Owen que le plan de paix Vance-Owen

 18   était mort. J'insiste sur la date du 26 mai, car ce document ici, le

 19   document 1D 02314, date du 27 mai 1993, il est adressé à un conseiller

 20   juridique. Au premier paragraphe, on peut lire :

 21   "Lord Owen souhaite rassembler un groupe de travail composé de

 22   juristes qui représente toutes les parties dans le cadre d'un organe de

 23   coordination qui doit se réunir dès que possible à Genève."

 24   Premier paragraphe.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Je vous invite à examiner le document 1D 02314.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-être que l'huissier pourrait

 28   aider le témoin à retrouver le document.

Page 29521

  1   Q.  Au paragraphe numéro 1, on peut lire :

  2   "En prévision de la réunion de l'organe de coordination convenue à Zagreb

  3   le 24 avril et prévue le vendredi 4 juin, Lord Owen souhaite réunir un

  4   groupe de travail composé de juristes représentant toutes les parties de

  5   l'organe de coordination dès que possible à Genève."

  6   Est-ce que vous voyez cela ?

  7   R.  Oui, j'ai retrouvé.

  8   Q.  Savez-vous si ces juristes se sont effectivement rencontrés afin de

  9   rédiger des textes de loi ?

 10   R.  Non, je ne le sais pas.

 11   Q.  Document suivant, 1D 02322.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Premier classeur, Messieurs les Juges. Ce

 13   document est daté du 30 mai 1993. Il s'agit d'une annonce publique. Cette

 14   annonce est faite par le Parti démocratique croate, et au milieu du

 15   paragraphe nous voyons : "Nous acceptons la mise en œuvre de ces accords en

 16   vue d'une union forte et permanente avec les Croates."

 17   Q.  On recommande certaines personnes. On voit d'abord le nom du Dr Ismet

 18   Hadziosmanovic; est-ce que vous le voyez ?

 19   R.  Je le vois.

 20   Q.  Alors savez-vous ce qu'est le Parti démocratique croato-musulman dont

 21   il est question ici ?

 22   R.  Le Parti démocratique musulman croate, c'est un parti de Musulmans

 23   résidant essentiellement à Zagreb mais ayant aussi des affiliés en Bosnie-

 24   Herzégovine. Ce n'est pas un parti qui serait d'accord avec le SDA qui

 25   était au pouvoir du fait de l'avoir remporté aux élections.

 26   Q.  Bien. Document suivant, 1D 02468.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Deuxième classeur, Messieurs les Juges. La

 28   date est celle du 31 mai 1993.

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  1   Q.  Veuillez examiner ce document, je vous prie. Avez-vous retrouvé ce

  2   document, Monsieur ?

  3   R.  Oui, je l'ai trouvé.

  4   Q.  Veuillez en prendre connaissance car je vais y faire référence. Nous

  5   avons là une lettre adressée à Lord Owen et à M. Stoltenberg, et cette

  6   lettre a été rédigée par Mate Boban. Il est fait référence à une invitation

  7   à une réunion qui doit se tenir à Sarajevo. Voilà ce que dit en gros Mate

  8   Boban, paragraphe 2 :

  9   "Toute nouvelle réunion avec M. Izetbegovic serait superflue et reviendrait

 10   à poursuivre la pratique qui consiste à éviter la mise en œuvre de ce qui a

 11   déjà été convenu."

 12   Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que dit M. Boban ici, si

 13   vous le savez ?

 14   R.  Ici, il est fait référence aux accords que M. Izetbegovic n'avait pas

 15   mis en œuvre. Entre autres, cette instance de coordination ne s'est pas

 16   réunie et n'a pas pris en charge les fonctions qui avaient été convenues à

 17   l'occasion de la réunion de Medjugorje.

 18   Q.  Document suivant, 1D 02904.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges. Je

 20   peux vous garantir que cela ne se reproduira plus. 1D 02904.

 21   Q.  Il s'agit du procès-verbal d'une réunion à laquelle ont assisté les

 22   membres de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine. La date

 23   est celle du 15 juin 1993. Le procès-verbal a été recueilli par M. Trnka.

 24   Nous voyons votre nom dans le premier paragraphe, nous voyons également le

 25   nom de M. Boras.

 26   Etiez-vous présent lors de cette réunion ?

 27   R.  Oui, j'étais présent.

 28   Q.  Deuxième paragraphe, on peut lire que :

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  1   "Les participants se sont vus remettre des projets de décret (en

  2   anglais) portant sur 1, un organe de coordination chargé de la mise en

  3   œuvre; 2, de la création de provinces et de leurs organes; 3, les

  4   médiateurs; 4, un tribunal chargé des droits de l'homme, puis il est

  5   question d'instruments internationaux chargés de la protection des droits

  6   de l'homme, de la coopération avec la mission chargée de surveiller les

  7   droits de l'homme…" et ainsi de suite.

  8   R.  On nous a distribué cela à l'occasion de la réunion. Oui, on les a

  9   reçus.

 10   Q.  En raison des contraintes de temps nous allons passer au document

 11   suivant, à moins que les Juges de la Chambre n'aient des questions à poser

 12   concernant ce document. En fait, au troisième paragraphe le texte se lit

 13   comme suit : 

 14   "Avant d'entamer les débats sur les projets proposés, Ejup Ganic a

 15   demandé que l'on examine la situation à Gorazde étant donné qu'elle était

 16   critique, et ce, afin que l'on mette un terme à l'agression."

 17   Alors qu'essaie de faire M. Ganic ici ?

 18   R.  M. Ganic essaie et réussit d'une certaine façon à remettre à plus tard

 19   la prise de décision, et il pose des conditions au sujet de ce que nous

 20   n'avions pas estimé nécessaire à l'occasion des négociations pour prendre

 21   cela comme un préalable à la continuation des négociations.

 22   Q.  [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Un instant. Au quatrième paragraphe,

 24   Lord Owen indique qu'il s'agissait d'une réunion de consultations. Donc

 25   cette réunion n'était pas censée se solder par des décisions, n'est-ce pas

 26   ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Lord Owen a raison à cet effet, les

 28   négociations sans qu'il y ait eu des conclusions concrètes, Lord Owen avait

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  1   parlé de cela. Donc il n'y a pas eu de conclusions concrètes, mais les

  2   négociations se sont poursuivies.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation]

  5   Q.  Et cette réunion ne portait absolument pas sur Gorazde ? Les Croates et

  6   les Musulmans ne parlaient pas de Gorazde dans le cadre de leurs

  7   discussions, n'est-ce pas ?

  8   R.  A Gorazde il n'y avait ni HVO, et ce n'était pas une raison pour que

  9   nous et les Musulmans en parlent à moins que sur un plan trilatéral il

 10   n'ait été question de cela dans la totalité ou dans le cadre du processus

 11   en entier.

 12   Q.  Compte tenu de ce que nous venons de voir, je vais vous présenter

 13   plusieurs documents, et je demanderais votre confirmation. Tout d'abord, 1D

 14   02407.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Les documents suivants se trouvent dans le

 16   deuxième classeur, Messieurs les Juges.

 17   Q.  Il s'agit de la proposition faite par la présidence de la Bosnie-

 18   Herzégovine sur les décrets relatifs aux provinces. Lors de cette réunion

 19   tenue à Genève, on a parlé du fait que les représentants s'étaient vus

 20   remettre des projets de décrets, c'est de cela qu'il s'agit, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Si l'on examine le document 1D 02408, nous voyons qu'il s'agit d'un

 23   projet de décret portant sur la création d'un bureau de l'ombudsman ?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  1D 02409, --

 26   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît,

 27   veuillez ralentir, Maître Karnavas.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi.

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  1   Q.  1D 02409. Il s'agit d'un décret décrit en force de lois portent sur le

  2   tribunal chargé des droits de l'homme en République de Bosnie-Herzégovine;

  3   est-ce exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Q.  Puis nous avons le texte 1D 02410. Il s'agit encore d'un décret portant

  6   sur l'adoption d'instruments internationaux dans le domaine de la

  7   protection des droits de l'homme; est-ce exact ?

  8   R.  Exact.

  9   Q.  Document suivant, 1D 02411. Là encore il s'agit d'un projet décret sur

 10   la coopération avec la mission d'observation internationale dans le domaine

 11   des droits de l'homme; est-ce exact ?

 12   R.  Exact, ce sont des projets de texte final.

 13   Q.  Alors tous ces textes, tous ces projets ont été débattus dans le cadre

 14   du processus de négociations, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Puis nous avons le document 1D 02412, il s'agit d'un décret portant sur

 17   --

 18   R.  Oui, je le vois.

 19   Q.  Puis dernier document 1D 02413. Il s'agit d'une décision portant

 20   nomination des membres du conseil militaire et nous voyons votre nom --

 21   R.  Ça faisait partie du processus de négociations, oui.

 22   Q.  Le document suivant, 1D 01940.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Il se trouve dans le premier classeur,

 24   Messieurs les Juges, 1D 01940.

 25   Q.  Je vous invite à prendre connaissance de ce document en attendant que

 26   tout le monde l'ait trouvé. Il s'agit du procès-verbal de la séance de

 27   travail de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine tenue à

 28   Genève le 16 juin 1993. A la deuxième page, nous voyons votre nom ainsi que

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  1   le nom de M. Boras. Avez-vous assisté à cette réunion, Monsieur ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Au point 2, nous voyons : 

  4   "Afin de mettre en œuvre le plan Vance-Owen le mieux possible, les

  5   coprésidents de la conférence de la Paix sur l'ex-Yougoslavie ont proposé

  6   les six projets de lois suivants."

  7   Il s'agit des lois que nous avons examinées plus tôt, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Page 2, nous voyons votre nom plusieurs fois. Au premier paragraphe, on

 10   peut lire : "Akmadzic a déclaré qu'il pensait que le plan Vance-Owen

 11   n'avait pas échoué." C'est ce que vous pensiez à l'époque, n'est-ce pas ?

 12   Est-il exact que vous nourrissiez encore un certain espoir ?

 13   R.  Oui, je n'étais pas seul, il y avait d'autres espoirs encore, puis on a

 14   pu aussi voir que de plus en plus on parlait un langage tout à fait autre.

 15   Q.  Le deuxième paragraphe est intéressant. On peut lire : "Akmadzic

 16   pensait que l'organe de coordination devait nommer un premier ministre élu

 17   du gouvernement provisoire de la République de Bosnie-Herzégovine." Et je

 18   pense que nous avons déjà vu un document où il était dit que le Dr Prlic

 19   avait été nommé premier ministre. Est-ce que vous pourriez nous apporter

 20   une explication sur ce point ?

 21   R.  J'ai continué à insister indépendamment de tout ceci pour que M.

 22   Jadranko Prlic soit nommé premier ministre comme convenu à Medjugorje le 18

 23   mai 1993.

 24   Q.  Veuillez ralentir, s'il vous plaît.

 25   Un peu plus loin, nous voyons que Silajdzic a déclaré que :

 26   "Il était inutile de débattre des décrets proposés si l'on

 27   abandonnait le plan Vance-Owen. Ces documents ne peuvent pas être débattus

 28   et adoptés en faisant référence au plan Vance-Owen alors que nous ne savons

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  1   même pas ce qu'il implique au juste."

  2   A votre avis, à ce moment-là, en tant que membre de l'équipe chargée

  3   des négociations, est-ce que vous saviez que l'on était en train

  4   d'abandonner le plan Vance-Owen ?

  5   R.  Je ne savais pas que c'était abandonné, mais j'ai supposé que

  6   l'application du plan Vance-Owen dépendait de notre volonté pour ce qui est

  7   de savoir si on allait l'accepter ou pas.

  8   Q.  Nous voyons l'intervention de M. Izetbegovic qui dit :

  9   "Il était difficile d'expliquer et d'accepter que la partie qui ne

 10   reconnaît pas l'existence de la Bosnie-Herzégovine et qui n'a pas signé le

 11   plan devrait faire partie des instances les plus élevées de l'Etat. Il est

 12   inacceptable que l'organe de coordination présente une caractéristique

 13   d'une instance de l'Etat et puisse adopter des décisions contraignantes."

 14   Est-ce que vous pouvez expliquer ce que dit Izetbegovic ici, car je pensais

 15   qu'un accord avait déjà été conclu par lequel un organe de coordination

 16   avait été créé. Alors, que dit Izetbegovic ici ?

 17   R.  Izetbegovic continuait à insister sur un statu quo afin qu'il n'y ait

 18   pas création de cet organe de coordination et qu'on choisisse un nouveau

 19   premier ministre. Il insiste aussi pour que la partie serbe ne fasse pas

 20   partie de cet organe de coordination puisque d'après lui cette partie-là

 21   c'était l'agresseur.

 22   Q.  Bien. Passons à la page 3. Nous voyons les conclusions.

 23   Dernière conclusion : 

 24   "La présidence maintient son soutien au plan Vance-Owen mais reste

 25   ouverte à d'autres négociations."

 26   Alors, est-ce une déclaration exacte ? Est-ce qu'on est bien parvenu à

 27   cette conclusion ? Silajdzic dit que le plan a été abandonné mais qu'il y a

 28   un certain soutien en faveur de ce plan. Izetbegovic dit qu'il n'est pas

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  1   d'accord. Alors est-ce que vous pourriez nous expliquer cette conclusion

  2   car c'est un peu confus ?

  3   R.  Nous avons conclu de la nécessité de continuer à discuter sur la base

  4   des négociations en application du plan Vance-Owen indépendamment des

  5   divergences d'opinions pour ce qui est de la phase dans laquelle on se

  6   trouvait au moment présent.

  7   Q.  Au point 5, il est dit : 

  8   "La présidence a accepté la proposition faite par l'Union

  9   démocratique croate en la personne de M. Akmadzic selon laquelle des

 10   procédures devraient être engagées pour nommer Ante Cuvalo ambassadeur de

 11   la République de Bosnie-Herzégovine aux Etats-Unis d'Amérique."

 12   Est-ce que M. Cuvalo a été nommé ambassadeur suite à votre initiative ou à

 13   l'initiative du Conseil de Défense croate, initiative acceptée

 14   manifestement par la présidence ?

 15   R.  Il était habituel de voir les parties avancées des initiatives, et on

 16   l'a fait, la présidence les a prises en considération mais cet homme n'a

 17   jamais été nommé ambassadeur à Washington, M. Cuvalo.

 18   Q.  Document suivant, 1D 02840.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Troisième classeur, Messieurs les Juges. Il

 20   s'agit d'une annonce -- 

 21   Est-ce que l'on m'entend maintenant ? Bien.

 22   Q.  "Conformément aux demandes présentées par les coprésidents de la

 23   conférence de la Paix sur l'ex-Yougoslavie et conformément aux conclusions

 24   tirées lors de la réunion tenue à Genève le 16 juin 1993 le week-end

 25   précédent, les représentants de la communauté croate d'Herceg-Bosna ont

 26   rencontré les représentants des parties musulmane et serbe dans le but de

 27   parvenir à un accord sur la nouvelle proposition portant sur la résolution

 28   de la crise en Bosnie-Herzégovine. Dans le cadre de pourparlers distincts

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  1   tenus avec les hauts représentants des deux autres peuples de Bosnie-

  2   Herzégovine, M. Mate Boban et ses collaborateurs ont présenté le point de

  3   vue croate sur l'organisation future de l'Etat de Bosnie-Herzégovine…".

  4   Est-ce que cela s'est passé ainsi ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Apparemment, la délégation croate, tout comme la délégation musulmane

  7   et la délégation serbe, sont encouragées par les coprésidents de la

  8   conférence sur la Paix, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Bien. Nous allons aborder un autre sujet maintenant.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, il doit vous rester une dizaine de

 12   minutes.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agira

 14   d'un effort herculéen, mais nous allons voir ce que nous pouvons faire.

 15   Passons au document 1D 02664. Deuxième classeur, Messieurs les Juges. 

 16   Q.  Monsieur Akmadzic, je vous saurais extrêmement reconnaissant d'être

 17   aussi rapide et efficace que possible. Bien entendu, la confusion qui règne

 18   dans ce prétoire est en partie de ma faute.

 19   Nous voyons qu'il s'agit ici d'un enregistrement audio d'une réunion de la

 20   présidence tenue le 29 juin 1993. Est-ce que vous avez eu l'occasion de

 21   voir ce document auparavant, Monsieur ?

 22   R.  Oui, je l'ai vu.

 23   Q.  Si on parcourt ce document, nous constatons que vous étiez présent à

 24   l'époque et que vous avez fait plusieurs observations, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est exact, oui.

 26   Q.  Si j'ai bien compris, hier ou avant-hier, vous avez dit que M. Fikret

 27   Abdic s'était plaint de M. Delic.

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  Nous retrouvons la conversation sur ce point dans ce procès-verbal,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est cela.

  4   Q.  Nous pouvons lire ce document, donc nous pouvons voir qui a dit quoi.

  5   Il semblerait également que des plaintes étaient émises au sujet de M.

  6   Izetbegovic. Certains se sont plaints qu'il se servait de ses fonctions

  7   pour faire certaines choses sans informer les autres membres de la

  8   présidence. Il s'agit d'une remarque faite, je pense, par M. Lasic; est-ce

  9   exact ?

 10   R.  C'est exact.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Cela se trouve aux pages 9 et 10 de ce

 12   document, Messieurs les Juges. Nous pouvons passer au document suivant.

 13   Désolé de ne pas passer davantage de temps sur ce document. Ce document se

 14   passe de commentaire, enfin je veux parler du procès-verbal.

 15   Document suivant, 1D 02309, deuxième classeur.

 16   Q.  Est-ce que vous avez le document sous les yeux, Monsieur ? 1D 02309.

 17   R.  Oui, je l'ai.

 18   Q.  Daté du 1er juillet 1993, adressé au secrétaire général des Nations

 19   Unies, et vous avez un commentaire que l'on trouve au tout premier

 20   paragraphe à propos d'une attaque qui a commencé le 30 juin 1993 dans la

 21   ville de Mostar. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

 22   R.  Je m'en souviens, oui.

 23   Q.  Vous exprimez bien un avis au paragraphe 4 :

 24   "L'objectif de cette agression, c'est d'empêcher l'application des accords

 25   de paix qui existent déjà, c'est d'empêcher que se poursuive le processus

 26   de paix et de faire capoter les pourparlers sur la future structure

 27   politique de la Bosnie-Herzégovine."

 28   Dites-nous en quelques mots sur ce qui s'est passé le 30 juin, si vous vous

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  1   en souvenez ?

  2   R.  C'est la période au cours de laquelle les forces musulmanes mènent des

  3   attaques en Bosnie centrale et à Mostar. C'est au moment où il s'agissait

  4   de savoir ce qui allait se passer si jamais le plan Vance-Owen n'allait pas

  5   être mis en œuvre. C'est aussi le moment où le fait de ne pas accepter le

  6   plan --

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi d'attirer votre

  8   attention sur le fait que maintenant je viens de trouver le document qui se

  9   trouvait dans le premier classeur et pas dans le second, comme vous l'avez

 10   dit. Je suis désolé, mais je crois que je ne suis pas responsable.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Pas du tout.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais pendant que je cherchais, je ne

 13   suivais pas.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est un des problèmes que pose les

 15   contraintes de temps, les limites, mais nous allons faire de notre mieux.

 16   Nous avons recruté du personnel supplémentaire. Nous avons la version

 17   électronique et les documents papier. A l'avenir, il faudra recruter encore

 18   davantage de personnes. Imaginez la difficulté de la tâche quand on

 19   travaille sur ces documents, et puis qu'il faut les rassembler.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Tout à fait.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Il serait peut-être bon de dire à M. le

 22   Greffier de nous donner davantage de fonds pour répondre à ces besoins.

 23   Quoi qu'il en soit -- 

 24   Q.  Maintenant que nous avons la lettre, dites-nous en quelques mots à

 25   peine sur ce qui s'est passé le 30 juin. Mais parlez lentement, de façon à

 26   ce que votre réponse soit complètement reprise au compte rendu d'audience.

 27   R.  Le 30 juin, les forces musulmanes ont fait une attaque à Mostar, en

 28   attaquant le HVO et le peuple croate de Mostar. En même temps, il y a eu de

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  1   plus en plus d'attaques en Bosnie centrale, qui avaient commencé déjà au

  2   mois d'avril, elles se sont poursuivies. Nous attirons l'attention sur le

  3   fait que les Musulmans hésitent et ne vont peut-être pas accepter le plan

  4   Vance-Owen, et les résultats des négociations, et qu'avec leurs attaques

  5   agressives ils essaient de faire en sorte que des décisions soient

  6   différentes.

  7   Q.  Document suivant, 1D 01937. Nous sommes alors le 11 juillet 1993.

  8   Premier classeur, 1937. Il s'agit d'une lettre envoyée à la présidence, ou

  9   plutôt une déclaration faite à son intention.

 10   "A la séance qui s'est tenue à Zagreb le 11 juillet 1993, présidée par le

 11   membre de la présidence, le Dr Ejub Ganic, la présidence de la République

 12   de Bosnie-Herzégovine a discuté du projet de texte qu'il a étoffé et qui

 13   porte sur l'ordre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine."

 14       En fin de page, nous voyons que nous avons ce qui est sans doute le

 15   projet de constitution.

 16   Page 2, paragraphe 9, on dit que :

 17   "La constitution de Bosnie-Herzégovine soit adoptée dans le cadre d'une

 18   conférence internationale et que les constitutions des unités fédérales

 19   doivent être adoptées par chacune d'entre elles, mais qu'elles ne peuvent

 20   pas contrevenir à la constitution de la Bosnie-Herzégovine ni aux décisions

 21   de la cour constitutionnelle."

 22   Enfin, avant de vous poser la question, je vous renvoie à la page 3,

 23   chiffre romain II :

 24   "Principes constitutifs des unités fédérales : 1, ces unités fédérales ne

 25   peuvent pas se constituer sur une base exclusivement ethnique. 2, la

 26   nature, la géographie, la culture, la circulation, tout ceci doit être pris

 27   en compte lors de la constitution des unités fédérales."

 28   Je pense que le Juge Trechsel vous a posé une question hier à propos de la

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  1   façon dont vous voyez, vous, ces constitutions de l'unité fédérale. Est-ce

  2   que vous compreniez ceci de cette façon, puisque ici on discute d'un projet

  3   de plan de paix différent ?

  4   R.  Oui. Quel que soit le plan de paix, nous avons toujours eu le même

  5   point de vue, à savoir que la Bosnie-Herzégovine devait être organisée

  6   comme un Etat décentralisé, sur la base des critères indiqués ici, pas

  7   seulement les critères ethniques, mais aussi culturelles, géographiques,

  8   économiques, et cetera. La Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant

  9   qu'Etat souverain, mais un Etat qui est constitué des unités constitutives

 10   et des peuples constitutifs.

 11   Q.  Revenons à la première page. Il y a Lord Owen et Stoltenberg qui sont

 12   mentionnés. Est-ce que ceci s'est fait à leur initiative ou est-ce que

 13   c'est le plan de paix Vance-Owen qui a pris l'initiative ?

 14   R.  Le nouveau plan est lancé par Owen et Stoltenberg, mais les critères

 15   restent les mêmes. Les critères sont les mêmes, c'est juste la formulation

 16   qui est un peu différente.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Sujet suivant. Ça me prendra quelques

 18   instants à peine et je pense que je pourrai rapidement terminer. Je vais

 19   peut-être demander votre indulgence pour quelques secondes.

 20   Q.  Classeur suivant, Monsieur l'Huissier. Nous allons examiner un

 21   document, P 05051.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est le premier document. Quatrième

 23   classeur, Messieurs les Juges. P 05051.

 24   Q.  Vous l'avez ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Nous avons déjà vu ce document dans ce prétoire, 14 septembre 1993, une

 27   déclaration conjointe signée par les présidents Tudjman et Alija

 28   Izetbegovic, chiffre romain II. Il est question de la constitution de

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  1   groupes de travail. Troisième page, nous voyons que le président Franjo

  2   Tudjman nomme Mate Granic comme agent fiduciaire et que pour sa part

  3   Izetbegovic nomme M. Silajdzic.

  4   R.  [aucune interprétation]

  5   Q.  Partant de cette déclaration conjointe, est-ce que vous avez participé

  6   à un groupe de travail ?

  7   R.  Oui, j'ai participé au travail d'un de ces groupes. C'était le groupe

  8   chargé de diminuer les tensions entre les deux peuples.

  9   Q.  Pourquoi y a-t-il eu cette déclaration conjointe; le savez-vous ?

 10   R.  Nous avons constaté que la guerre en Bosnie centrale se poursuivait et

 11   qu'en dépit de nos demandes, cette guerre ne s'arrêtait pas, donc on a

 12   essayé de trouver la solution d'une autre façon. Les Musulmans en Bosnie-

 13   Herzégovine se tournaient plus volontiers vers la République de Croatie que

 14   vers nous, le peuple croate de Bosnie-Herzégovine. C'est pour cela qu'on a

 15   nommé deux représentants, un qui était le représentant de Franjo Tudjman et

 16   l'autre d'Alija Izetbegovic. Donc il s'agissait de poursuivre des contacts,

 17   des liens, et on a créé aussi des groupes de travail pour essayer de

 18   résoudre ce problème qu'on n'avait pas réussi à résoudre jusqu'alors.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, mes collègues me disent c'est

 20   terminé.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Pourrais-je plaider l'indulgence de la

 22   Chambre pour avoir le reste du temps prévu dans ce premier volet ? Je sais

 23   que nous avons demandé six heures. Si vous refusez, je voudrais tout du

 24   moins lire pour le compte rendu d'audience les documents que je voulais

 25   lire, qui en fait sont fondés sur la dernière réponse fournie par le

 26   témoin, les groupes de travail. Je comprends que la Chambre va peut-être

 27   penser que nous devrions poursuivre et passer à autre chose. Nous le ferons

 28   si vous le décidez.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez combien de documents à citer ?

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Les documents que j'ai, je ne dois pas

  3   nécessairement en discuter longuement parce que ça s'inscrit dans le

  4   processus de ce processus. 1D 02837, 2898, 2897, 2899, 2900, et je pense

  5   qu'il y a 1D 01291, et puis 2876, autant de documents qui concernent ces

  6   groupes de travail, pour montrer que c'était un processus continu. 

  7   Et la dernière chose que je voulais faire, je voulais que le témoin

  8   discute d'une partie d'un procès-verbal, mais peut-être que l'Accusation va

  9   en parler. C'est le transcript présidentiel, P 07260, page 24. Je suis sûr

 10   que ça n'a pas échappé à M. Scott, à son œil de lynx, et je ne voulais pas

 11   vous croyiez qu'on essayait d'éviter de poser des questions difficiles. Un

 12   dernier document, 1D 01556. Ça  vient de l'Odyssée des Balkans, mais en

 13   fait c'était une communication qui a été soumise. Si je n'ai plus de temps,

 14   je déposerai par voie de requêtes ces documents; j'en demanderai le

 15   versement. A votre disposition.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : D'autant que vous avez dû voir ces documents avec le

 17   témoin, qu'il les a -- qu'il les a vus avec vous. "Yes ?"

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Tout à fait exact.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Bien, merci, Maître Karnavas. Alors le mieux

 20   c'est de faire - il est 15 heures 30 - c'est de faire peut-être la pause.

 21   Ensuite je demanderai aux avocats des autres accusés s'ils veulent poser

 22   des questions. Voilà. Donc on va faire une pause de 20 minutes et on

 23   reprend dans 20 minutes.

 24   --- L'audience est suspendue à 15 heures 30.

 25   --- L'audience est reprise à 15 heures 52.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est donc reprise. Je vais demander

 27   Me Nozica si elle a des questions à poser. Mais elle n'est pas là. Voilà,

 28   voilà. Oui. Bien.

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  1   Alors je vais demander à Me Nozica si elle a des questions à poser, mais

  2   avant cela pour que ça soit inscrit au transcript, la Chambre donc par

  3   décision orale a décidé que le document 1D 02940 serait donc ajouté à la

  4   liste 65 ter. Voilà, c'est clair.

  5   Bien.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Avant, je voulais remercier le témoin, je

  7   n'avais pas eu l'occasion de le faire. Je voulais vous remercier, Monsieur

  8   Akmadzic, sachez que nous vous sommes très reconnaissants d'être venu à La

  9   Haye pour déposer au nom de notre Défense. Merci de vos réponses très

 10   honnêtes. Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors D2, y a-t-il des questions ?

 12   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La Défense D2 a

 13   des questions à poser à ce témoin. Mais nous nous sommes mis d'accord que

 14   c'est Me Alaburic qui va commencer, ensuite je vais prendre la suite.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, D3 ?

 16   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense D3 n'a pas

 17   de questions pour ce témoin. Je vous remercie.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors D4 ?

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 20   Monsieur les Juges, et Monsieur Akmadzic.

 21   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

 22   Q.  [interprétation] Monsieur Akmadzic, je m'appelle Vesna Alaburic, je

 23   suis avocate au barreau de Zagreb et ici je représente les intérêts du

 24   général Milivoj Petkovic.

 25   Tout d'abord, je vais présenter une explication par rapport à mon contre-

 26   interrogatoire pour les Juges et je vais vous demander aussi d'écouter pour

 27   voir ce que je souhaite aborder avec vous, Monsieur Akmadzic.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Donc par rapport à la partie de

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  1   l'interrogatoire principal où M. Karnavas avait montré au témoin la note

  2   adressée au président du Conseil de sécurité où on décrit le HVO comme des

  3   unités paramilitaires des Croates de Bosnie et qui a donné suite à une

  4   lettre de protestation adressée par le témoin au Conseil de sécurité, je

  5   souhaite poser quelques questions à ce témoin au sujet du HVO qui était une

  6   composante égale des forces armées de Bosnie-Herzégovine. Le deuxième thème

  7   que je souhaite aborder concerne le procès-verbal d'une session de travail

  8   de la présidence de Bosnie-Herzégovine en date du 26 décembre 1992. Le

  9   document 1D 2663, qui se trouve dans le deuxième dossier, et il a été

 10   montré au témoin hier. Ensuite ce qui m'intéresse par rapport à ce procès-

 11   verbal, c'est la partie où Sefer Halilovic parle de son remplaçant, Jovo

 12   Divjak, originaire de Serbie, enfin c'est sa nationalité, donc s'il était

 13   arrêté ou s'il faisait l'objet de mise aux arrêts à ce moment-là et je vais

 14   demander que le témoin en parle, qu'il me donne son point de vue à ce

 15   sujet.

 16   Je pense que cela va durer une dizaine ou une quinzaine de minutes. Nous

 17   allons tout d'abord aborder le thème du HVO comme partie composante des

 18   forces armées de Bosnie-Herzégovine.

 19   Q.  Hier vous avez dit et ceci figure dans votre document 1D 2096, que vous

 20   avez dit au président du Conseil de sécurité que le HVO était une armée

 21   légitime reconnue par le gouvernement et la présidence de Bosnie-

 22   Herzégovine; est-ce exact ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  Dans le document 1D 2664, vous n'avez pas besoin de chercher le

 25   document puisque je vais vous donner lecture de tous les éléments

 26   pertinents. C'est un document qui se trouve dans le deuxième dossier. Il

 27   s'agit d'un procès-verbal de la session de travail de la présidence de

 28   Bosnie-Herzégovine en date du 29 juin 1993. On a inscrit vos propos comme

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  1   suit, Monsieur Akmadzic. Il a été question de savoir si M. Rasim Delic

  2   était membre de la présidence ou non, conformément à sa fonction de

  3   commandant de l'ABiH. Vous avez dit à l'époque, je cite la page 9 en B/C/S

  4   et à la page 8 en anglais. Je cite donc -- vous pouvez constater pour ce

  5   qui me concerne que M. Delic ne fait pas partie de la présidence. Il n'est

  6   pas membre sauf si M. Petkovic est assis à côté de lui :

  7   "Donc il faut que l'on prenne la décision. Est-ce qu'il y en a deux

  8   ou est-ce qu'il y en a un seul qui doit être là ? On ne peut pas décider de

  9   cela à présent. On ne peut pas voter puisque les représentants de l'armée

 10   ne sont pas présents et ce n'est pas à l'ordre du jour. Est-ce que l'on

 11   peut en discuter alors ?"

 12   Est-ce que vous pouvez me dire, Monsieur Akmadzic, ce que vous avez

 13   effectivement demandé lors de cette session de travail ?

 14   R.  J'ai demandé que conformément à la décision adoptée par la présidence

 15   de Guerre, qui consistait à dire que les forces armées de Bosnie-

 16   Herzégovine étaient composées de l'ABiH et du HVO, puisque le représentant

 17   de l'armée ou le représentant de l'armée dans la présidence de Guerre

 18   devient le membre de la présidence de Guerre, et qu'il n'y avait plus de

 19   Défense territoriale, que soit les deux commandants de deux segments des

 20   forces armées soient présents lors des sessions de travail, ou bien aucun.

 21   Puisque cela ne figurait pas à l'ordre du jour, j'ai dit qu'il fallait

 22   respecter le règlement de fonctionnement de la présidence, qu'on peut

 23   éventuellement en discuter, et si on ne pouvait pas adopter la décision ce

 24   jour-là, on pouvait l'adopter par la suite, on pouvait décider de cela par

 25   la suite, mais en attendant j'ai considéré que Rasim Delic n'était pas

 26   membre de la présidence.

 27   Q.  Monsieur Akmadzic, dites-nous, est-ce que le président de la présidence

 28   a jamais mis ce thème sur l'ordre du jour, est-ce que vous avez jamais

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  1   décidé de cela, à savoir si les deux commandants allaient faire partie de

  2   cette présidence de Guerre, oui ou non ?

  3   R.  Le président a évité cette fois-ci, comme par la suite, de débattre de

  4   ce thème et il a exigé que Rasim Delic fasse partie de la présidence tant

  5   qu'on n'a pas décidé autrement. Et moi j'ai été contre cela. J'ai dit que

  6   ce n'était pas possible et il ne pouvait pas faire partie de la présidence

  7   tant qu'on n'a pas décidé qu'il allait faire partie de la présidence côte à

  8   côte avec M. Petkovic ou quelle que soit cette personne, mais dont la

  9   fonction est le chef du QG du HVO. Le cas échéant, c'était Petkovic à

 10   l'époque.

 11   Q.  Tout cela s'est produit en 1993, mais dites-nous, en 1992, est-ce qu'il

 12   y a eu des initiatives initiées par les membres croates de la présidence

 13   demandant qu'il y ait un commandement commun de deux armées du HVO et de

 14   l'ABiH ?

 15   R.  De notre côté, du côté croate, il y a eu plusieurs initiatives allant

 16   dans ce sens et qui étaient initiées dans le cas de la présidence et du

 17   gouvernement, mais aussi dans le HVO, au sein du HVO. Il est même arrivé

 18   que l'on négocie à ce sujet et parfois qu'on se mette d'accord, et puis du

 19   point de vue formel on a abouti à un accord portant sur un commandement

 20   commun. Mais cela n'a jamais vraiment été mis en œuvre, pas avant la fin

 21   des négociations de Washington.

 22   Q.  Puisque vous avez parlé des accords de Washington, je vais vous

 23   demander d'examiner le petit dossier que je vous ai communiqué. Il s'agit

 24   du document 4D 1234.

 25   C'est le document, c'est la lettre de l'ambassadeur Sacirbey et de Nobilo

 26   adressée au Conseil de sécurité. Et en annexe on fait parvenir un

 27   exemplaire des accords de Washington. 

 28   Dans notre langue, vous n'allez voir qu'une partie de ces accords, il

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  1   s'agit de la portion qui parle de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Ce

  2   qui m'intéresse tout particulièrement, c'est le point 6 de cet accord, on

  3   parle des accords militaires. On peut examiner cela ensemble. Les deux

  4   parties sont d'accord pour créer un commandement militaire commun des

  5   forces armées de la fédération. Ensuite, je saute un paragraphe et je

  6   poursuis : "L'organisation du commandement actuel va rester en place. Les

  7   forces des deux parties vont être séparées immédiatement…" et à la fin on

  8   dit que "toutes les forces et unités étrangères, mis à part celles qui sont

  9   mentionnées dans l'accord avec la République de Bosnie-Herzégovine et

 10   autorisées par le Conseil de sécurité, vont quitter le territoire de la

 11   fédération."

 12   Monsieur Akmadzic, vous avez participé à ces négociations de Washington ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pourriez-vous nous aider pour que l'on puisse mieux comprendre ce qui

 15   est écrit au point 6. Cette provision qui prévoit que l'on allait créer un

 16   commandement militaire uni, est-ce que cela veut dire qu'il s'agirait là

 17   d'un commandement commun du HVO et de l'ABiH ?

 18   R.  Exactement. Il a été prévu qu'il y ait un commandement commun entre le

 19   HVO et l'ABiH.

 20   Q.  On y dit aussi que l'organisation du commandement actuel va rester en

 21   vigueur jusqu'à nouvel ordre. Est-ce que cela veut dire qu'après les

 22   accords de Washington, le HVO va continuer à opérer avec la même structure

 23   ?

 24   R.  Oui, pas seulement le HVO. Des deux côtés, toutes les parties doivent

 25   continuer à fonctionner jusqu'à nouvel ordre tant qu'il n'y a pas une

 26   nouvelle structure d'organisée.

 27   Q.  Veuillez vous pencher sur un deuxième document dans mon classeur, le 4D

 28   8226. Il s'agit d'une loi portant promulgation d'une loi relative à la

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  1   défense de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Ce qui m'intéresse ici

  2   c'est l'article 37, qui se trouve à être traduit en anglais.

  3   Dans cet article 37 de la loi de la Fédération de Bosnie-Herzégovine,

  4   il est dit, 37, le paragraphe 2 : 

  5   "L'armée de la fédération est composée d'unités de l'ABiH et du Conseil

  6   croate de la Défense, y compris jusqu'au niveau de corps d'armée et de

  7   district."

  8   Cela signifie-t-il que le HVO, tout comme l'ABiH, a continué à

  9   intervenir de façon autonome jusqu'à l'adoption de cette loi-ci ? Et par

 10   l'adoption de cette loi, c'est devenu comme l'ABiH une partie de l'armée de

 11   la fédération ?

 12   R.  C'est absolument exact. D'après ce que j'en sais, le HVO constitue de

 13   nos jours encore un segment des forces armées.

 14   Q.  Dites-nous, si vous le savez, les soldats du HVO dans leurs droits du

 15   point de vue de l'invalidité, des pensions, des droits aux actions et

 16   autres, sont-ils sur pied d'égalité à tout point de vue avec les soldats de

 17   l'ABiH en Bosnie-Herzégovine de nos jours ?

 18   R.  Je pense que oui. Oui.

 19   Q.  Bon. On vient d'épuiser un premier volet et je voudrais maintenant que

 20   vous nous commentiez le débat au sujet de Jovo Divjak. Avant cela, je veux

 21   vous dire --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Nozica, la Chambre se pose des questions sur

 23   la pertinence de l'évocation de cette affaire concernant M. Divjak. Pouvez-

 24   vous nous apporter des renseignements complémentaires. Quelle est la

 25   pertinence ? Quel est l'intérêt ? Que voulez-vous démontrer ?

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Avec plaisir, Monsieur le Président. M.

 27   Jovan Divjak se trouvait être l'adjoint de M. Sefer Halilovic. Au mois de

 28   novembre ou au mois de décembre 1992, il a été mis aux arrêts sous

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  1   suspicion d'avoir stimulé et encouragé les conflits entre Croates et

  2   Musulmans à Prozor les 23 et 24 octobre 1993. Il s'agit d'un événement qui

  3   figure comme chef d'accusation dans l'acte d'accusation qui nous concerne.

  4   Et j'estime qu'il est important de démontrer qu'à l'intérieur des

  5   structures au sommet de l'ABiH, il y avait eu des accusations à l'encontre

  6   d'un commandant pour ce qui est d'avoir encouragé les conflits entre

  7   Croates et Musulmans. Etant donné qu'on a présenté cela comme étant un

  8   conflit qui a été entamé et réalisé par les Croates, et ce, à l'encontre de

  9   civils musulmans, je veux démontrer qu'il n'en est pas ainsi.

 10   Nous avons ici l'opportunité unique et peut-être la dernière des

 11   opportunités pour ce qui est des conversations qui ont eu lieu au niveau de

 12   la présidence concernant l'arrestation de M. Jovo Divjak, et M. Akmadzic a

 13   dit à cette réunion qu'il se trouvait peut-être exact de dire que Jovo

 14   Divjak a été arrêté à juste titre. Alors après ces questions à l'égard du

 15   témoin, je voudrais montrer un document --

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, veuillez vous

 17   pencher sur la page 37, lignes 21 et 23 du compte rendu d'audience. Il doit

 18   y avoir une erreur en ce qui concerne la date. Il n'a pas été arrêté en

 19   décembre 1992 pour avoir commis des agissements répréhensibles en octobre

 20   1993.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Bien sûr. L'autre année, c'est encore 1992

 22   plutôt que 1993. Tout cet événement au sujet de M. Divjak porte sur un chef

 23   d'accusation à Prozor au mois d'octobre 1992. L'arrestation, les débats au

 24   sujet de cette arrestation et la déclaration de M. Jovo Divjak sur laquelle

 25   on se penchera, si les Juges de la Chambre sont d'accord, se rapportent à

 26   la fin de l'année 1992. 

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, oui, allez-y. Allez-y, parce qu'on comprend que

 28   c'est en relation avec Prozor, alors que dans les documents ce n'était pas

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  1   évident de prime abord.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : Mais c'est un sujet en dehors --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Alors ce sujet n'avait pas été abordé lors de

  4   l'interrogatoire principal de Me Karnavas, donc normalement le temps que

  5   vous allez passer va vous être décompté sur votre interrogatoire principal.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, bien sûr, vous allez

  7   statuer comme vous le jugerez utile et juste de le faire. Mais je voulais

  8   juste dire que ce document a été montré hier au témoin, et ce document dans

  9   son intégralité, j'imagine, sera versé au dossier comme élément de preuve.

 10   Et j'estime que mon contre-interrogatoire au sujet de quelle que partie que

 11   ce soit du compte rendu doit être considéré comme étant un contre-

 12   interrogatoire; et comme M. Karnavas l'a dit lui-même, ces comptes rendus

 13   comportent toute une série d'allégations et d'observations très importantes

 14   pour la Défense de M. Prlic, et nous n'avons pas eu le temps de nous

 15   entretenir sur tous les points. Mais étant donné que c'est un document qui

 16   a fait l'objet de l'interrogatoire principal, je crois que ça devrait être

 17   décompté sur mon temps de contre-interrogatoire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 19   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je ne suis pas

 20   sûr d'avoir salué les membres de la Chambre aujourd'hui, donc je le fais

 21   maintenant. Je salue toutes les personnes présentes dans le prétoire et à

 22   l'extérieur de celui-ci.

 23   Encore une fois, je rappelle les questions soulevées par l'Accusation

 24   depuis le début de la présentation des moyens à décharge. Nous souhaitons

 25   réitérer que nous n'estimons pas que ce qui a été dit jusqu'à présent

 26   s'inscrit dans le cadre d'un contre-interrogatoire. Il s'agit d'un

 27   interrogatoire principal d'un témoin amical et il faut que cela soit

 28   considéré comme tel et par conséquent aucune question directrice ne saurait

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  1   être tolérée.

  2   Par ailleurs, je ne vais pas m'acharner sur Me Karnavas -- quand c'était la

  3   présentation des moyens à charge de l'Accusation, mais maintenant c'est la

  4   présentation des moyens de Prlic, après ce sera la présentation des moyens

  5   de Stojic, et ainsi de suite. Tout le monde doit présenter une notification

  6   en application de l'article 65 ter.

  7   Il s'agit d'un exemple classique pour ce qui est de l'implication de

  8   M. Divjak, l'Accusation n'a été absolument pas informée de cela, rien n'a

  9   été dit à ce sujet. Par conséquent, nous pensons qu'il s'agit là d'une

 10   lacune fondamentale dans le processus. L'Accusation n'a absolument pas été

 11   avertie de cela. On n'en a jamais entendu parler auparavant. Donc il s'agit

 12   là d'un problème. Est-ce qu'il y aura d'autres questions directes posées

 13   par les conseils de la Défense, nous verrons. Sauf le respect que je dois à

 14   Me Alaburic, elle a dû savoir ce qu'il en était, et non pas seulement il y

 15   a cinq minutes. Or, ça fait quelques jours que je prépare mon contre-

 16   interrogatoire, cela fait quelques semaines, je vais peut-être devoir

 17   travailler pendant la nuit pour me pencher sur cette nouvelle question,

 18   mais il est sans doute possible que les autres conseils de la Défense

 19   préviennent de la nature de leur interrogatoire pour que tout le monde soit

 20   préparé.

 21   Il y a une certaine frustration qui vient là parce qu'il faut

 22   préparer un nombre important de documents qui seront peut-être

 23   éventuellement utilisés.

 24   Dans le cas de l'Accusation, nous nous trouvons dans une situation

 25   où, en l'absence de déclarations préalables, de résumés dignes de ce nom,

 26   nous devons deviner des semaines à l'avance avant l'arrivée du témoin,

 27   deviner quels documents seront peut-être utilisés. La Chambre s'en

 28   préoccupe, peut-être pas. Peut-être que la Chambre ne se préoccupe pas de

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  1   la position de l'Accusation, mais ce n'est pas juste à l'égard de

  2   l'Accusation; c'est le premier point. Puis deuxièmement, cela suppose un

  3   nombre important de documents et une préparation importante.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Puis-je intervenir un instant.

  5   Avant tout, ce sujet se trouvait bien mentionné dans notre liste,

  6   nous en avons parlé avec le témoin. Nous n'avons pas eu la possibilité de

  7   l'évoquer car nous avons épuisé le temps qui nous était imparti.

  8   Deuxièmement, si l'Accusation avait examiné la liste des documents

  9   que nous avons présentés et les transcriptions disponibles, elle se serait

 10   rendu compte des documents dans lesquels le nom de M. Akmadzic est

 11   mentionné.

 12   Troisièmement, je ne me souviens pas avoir reçu la compassion des

 13   Juges de la Chambre lors de nos contre-interrogatoires. La situation est

 14   comme elle est. Nous recevions une liste de l'Accusation pour notre contre-

 15   interrogatoire, nous lisions tous les documents. Ensuite, nous faisions nos

 16   recherches et nous nous préparions en vue de notre contre-interrogatoire.

 17   Je me permets de rappeler que dans le système fédéral des Etats-Unis,

 18   la Défense ne reçoit que les déclarations des accusés, rien de la part des

 19   témoins, mais seulement après l'interrogatoire principal des témoins. C'est

 20   vrai, vous le savez.

 21   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne vois pas où réside le problème. Il

 23   appartient à l'Accusation d'examiner les documents que nous avons

 24   présentés, des documents que nous avons signalés comme étant des documents

 25   que nous utiliserions avec le témoin et voir ensuite ce qu'il y a à faire.

 26   L'Accusation sait où nous voulons en venir.

 27   Et pour terminer, je rappelle aux Juges de la Chambre que ce témoin a

 28   déjà témoigné, l'Accusation le savait, l'un des Procureurs, qui se trouve

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  1   dans ce prétoire, a travaillé dans ce procès. Donc ils disposaient du

  2   compte rendu de la déposition faite par ce témoin dans une autre affaire,

  3   il y avait une déclaration qui a été recueillie, je ne sais pas si

  4   l'Accusation en dispose ou pas, mais c'est clair à la lecture du compte

  5   rendu d'audience. M. Scott, je pense, a participé à ce procès, donc je ne

  6   vois pas d'où vient le drame. Je pense que Me Alaburic devrait être

  7   autorisée à évoquer des sujets que j'ai peut-être omis d'évoquer, car cela

  8   ne fait pas partie de ma thèse ou à cause des contraintes de temps.

  9   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Que de temps perdu, que de temps perdu. Mais

 11   vous pouvez continuer, Monsieur Scott.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Sauf le respect que je vous dois, je ne pense

 13   pas qu'il s'agit d'une perte de temps. Peut-être que je suis le seul à le

 14   penser ici dans cette salle, mais il se trouve que je pense que la

 15   communauté internationale, les victimes et l'Accusation ont droit à un

 16   procès équitable.

 17   Je suis peut-être le seul à le penser.

 18   Mais je rappelle aux Juges de la Chambre, s'agissant des résumés 65

 19   ter que nous avons reçus, il n'y est absolument pas fait référence à M.

 20   Divjak. Il y a deux longs paragraphes qui sont très généraux, il n'est pas

 21   question de l'affaire Kordic, et c'est très important, on aurait dû être

 22   averti, avant quoi serait-il injuste, en quoi serait-il défavorable à la

 23   Défense de nous communiquer des informations raisonnables au préalable ?

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais consulter les Juges pour savoir si --

 25   attendez. Je vais vous donner la parole. Mais je vais consulter les Juges

 26   pour savoir si on autorise Me Alaburic à poser des questions directrices ou

 27   non directrices, concernant la question de savoir si ça rentre dans le

 28   contre-interrogatoire ou l'interrogatoire principal, nous verrons ça

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  1   ultérieurement. L'urgence est de savoir questions directrices ou non

  2   directrices. Voilà.

  3   Mais, Maître Khan, avant que les Juges se concertent, que voulez-vous

  4   dire ?

  5   M. KHAN : [interprétation] Oui, il s'agit d'une perte de temps

  6   effectivement. La Chambre est saisie d'une requête qui porte sur ce point

  7   particulier. L'Accusation ne cesse d'insister sur le fait que le contre-

  8   interrogatoire des autres accusés doit être considéré comme un

  9   interrogatoire principal. Alors la question est débattue en ce moment, on

 10   revient sans doute sans cesse là-dessus, l'Accusation insiste mais elle

 11   n'en est pas plus convaincante. Vous avez raison, Messieurs les Juges, de

 12   dire que c'est une perte de temps inutile.

 13   Vu l'ambiance dans le prétoire -- bon, évidemment, je suis arrivé à un

 14   stade un peu tardif dans cette affaire, mais je pense que l'une des raisons

 15   pour lesquelles les choses dégénèrent, c'est parce qu'il y a une charge

 16   émotive et ce n'est pas dans l'intérêt de la justice ni dans l'intérêt des

 17   victimes. La Défense ne devrait pas être aussi passionnée, et je sais que

 18   M. Scott a beaucoup d'expérience et c'est un Procureur tout à fait éminent,

 19   mais ça ne lui sert à rien d'insister sur ce point, puisque la Chambre

 20   dispose déjà de tous les arguments.

 21   Bien entendu, vous pouvez tout à fait modifier le Règlement de procédure,

 22   cela relève de votre pouvoir discrétionnaire, afin que le procès se déroule

 23   de façon plus équitable et plus rapide. Mais l'article 65 ter mentionné par

 24   mon collègue ne mentionne pas les informations à évoquer lors du contre-

 25   interrogatoire.

 26   Lorsque mon confrère interroge le témoin, avant le contre-

 27   interrogatoire il doit recevoir les documents, c'est ce que font tous les

 28   conseils de la Défense. Alors s'il s'agit de modifier le Règlement, la

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  1   Chambre peut le faire dans le cadre d'une séance plénière.

  2   Me Karnavas a tout à fait raison de mentionner la pratique aux Etats-

  3   Unis, bien entendu, M. Scott connaît bien son système. Moi, non, je viens

  4   d'un autre système. Mais aux Etats-Unis d'Amérique, il se trouverait dans

  5   une situation beaucoup plus défavorable que celle qui est la sienne devant

  6   ce Tribunal international. Cela ne sert pas les Juges de ce Tribunal de

  7   répéter que c'est injuste, car il sait exactement qui sera appelé à la

  8   barre, alors qu'aux Etats-Unis il n'aurait aucune idée de l'identité de la

  9   personne qui se trouve derrière la porte, qui est le témoin suivant. Aux

 10   Etats-Unis d'Amérique, mon confrère disposerait de beaucoup moins

 11   d'informations, et on saurait dire qu'un juriste aussi expérimenté que M.

 12   Scott, avec autant de ressources, est lésé pour ce qui est de la manière

 13   dont il a à traiter avec les témoins. Alors nous pensons que du temps a été

 14   perdu inutilement et qu'on aurait pu empêcher cela.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Juste deux phrases avant que vous ne vous

 16   consultiez entre vous. Je voulais signaler qu'au compte rendu, il y a au

 17   moins cinq pages de consacrer à l'arrestation de M. Jovo Divjak, et je

 18   voudrais également rappeler à mon confrère M. Scott qu'il y a longtemps que

 19   nous avons versé au dossier un document de la Défense M. Stojic 2D 00263,

 20   qui se trouve dans le classeur de l'audition de ce témoin, où il est

 21   question de l'arrestation de M. Divjak.

 22   Cela a été le sujet de nos interrogatoires ou contre-interrogatoires des

 23   témoins de l'Accusation.

 24   Par conséquent, M. Akmadzic, je ne vous propose pas de lui poser des

 25   questions autres si ce n'est les questions que nous avons déjà posées à

 26   d'autres témoins. La seule différence c'est que ce témoin, lui, était

 27   présent à la session de la présidence de Bosnie-Herzégovine où il était

 28   question de tout cela, et où il a été entendu une explication de Sefer

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  1   Halilovic. J'estime que cela relève de l'éthique élémentaire de lui

  2   demander des explications au sujet de choses dont nous avons parlé lorsque

  3   nous avons contre-interrogé des témoins de l'Accusation.

  4   M. SCOTT : [interprétation] Une minute. Je regarde le chronomètre, je vous

  5   promets ça ne sera pas plus que 60 secondes.

  6   D'abord, pour répondre à Me Khan, mes commentaires étaient tout à fait

  7   modérés, mesurés, je n'ai pas élevé la voix. Et vous savez qu'il y a des

  8   choses qui depuis deux ans se passent dans ce procès et au vu de cela mes

  9   commentaires étaient tout à fait calmes et mesurés. Personne n'avait

 10   vraiment les sentiments à fleur de peau. C'est un point de principe que je

 11   ne cesse de soulever et j'y crois fermement.

 12   Deuxième chose, et je n'essaie pas du tout d'enlever la possibilité aux

 13   avocats de la Défense évoqués mais il faudrait au moins être averti. Il y a

 14   maintenant des milliers de documents dans ce dossier, et parce qu'il y a un

 15   document qui est quelque part dans ce dossier on devrait être capable du

 16   côté de l'Accusation de deviner, de devancer déjà les sujets que vont

 17   évoquer les avocats de la Défense. Je pense que ça relève de l'absurde.

 18   M. STEWART : [interprétation] Nous soutenons la Défense Petkovic et nous

 19   sommes tout à fait de l'avis de Me Khan. Mais je veux rassurer M. Scott. Il

 20   y a certaines hyperboles, il a dit : "Je suis peut-être le seul dans ce

 21   prétoire, le seul, ayant le droit à un procès équitable." C'est un petit

 22   peu exagéré. Mais nous sommes tous d'accord. Jamais nous n'avons dit

 23   quelque chose qui serait aussi ridicule que de dire que l'Accusation n'a

 24   pas le droit à un procès équitable. C'est simplement qu'on n'est pas

 25   toujours d'accord pour savoir ce qu'il faut pour avoir la régularité de la

 26   procédure. Et comme l'a dit Me Khan, toutes ces questions se trouvent dans

 27   les écritures assez étoffées et complexes que nous avons faites suite à la

 28   requête déposée par l'Accusation.

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  1   Bien entendu, nous pourrions tous vous inviter à vous prononcer dans

  2   les meilleures limites du possible, mais ça n'ajoute rien que de présenter

  3   ces conclusions alors que nous attendons votre décision.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous voulez intervenir ? Pourquoi

  5   ?

  6   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je voudrais poser une question à

  7   l'attention des Juges de la Chambre, si vous le permettez.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais une question qui porte sur quoi ? Parce que mes

  9   collègues --

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Ça porte sur la répétition faite par

 11   les gens de l'Accusation, comme quoi nous sommes en train de répondre

 12   devant une organisation internationale. Est-ce qu'on estime que je réponds

 13   ici devant la justice ou devant une organisation politique que l'on appelle

 14   la communauté internationale où on peut caser toutes sortes de choses ?

 15   Alors j'aimerais que la chose soit tirée au clair. Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors les Juges vont se consulter.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors la Chambre qui a délibéré tout d'abord

 19   sur l'interpellation de M. Praljak, lui dit que c'est un Tribunal qui juge

 20   et non pas la communauté internationale.

 21   Deuxième point, concernant la demande de Me Alaburic, la Chambre décide que

 22   les questions qui vont être posées à partir de ces deux documents seront

 23   des questions non directrices.

 24   Troisièmement, la Chambre indique que s'il est vrai que l'Accusation quand

 25   elle a présenté ses témoins il y avait des déclarations écrites, en

 26   revanche quand c'est la Défense qui fait venir ses témoins, nous n'avons

 27   pas de déclaration, simplement des documents qui sont introduits et que

 28   dans certains cas, l'Accusation peut à ce moment-là légitimement penser

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  1   qu'elle peut avoir un préjudice.

  2   Voilà c'est tout ce que nous voulons dire.

  3   Donc, Maître Alaburic, vous pouvez poser vos questions, par contre, pour

  4   savoir si le temps vous sera imparti ou pas, je ne peux pas vous le dire

  5   pour le moment. Simplement posez vos questions de manière générale sans

  6   qu'elles soient directrices et ça suffira comme le font les Juges quand ils

  7   posent des questions.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. 

  9   Q.  Monsieur le Témoin, dans cette transcription, nous n'allons pas perdre

 10   le temps à la retrouver, je donnerai le numéro de la page à l'intention des

 11   Juges de la Chambre. En haut à droite, le numéro de la page 01806421, il

 12   s'agit du document 1D 2663, si j'ai bien suivi ça se trouve dans le

 13   deuxième des classeurs de la Défense de M. Prlic.

 14   Monsieur Akmadzic, il est question ici de savoir si Jovo Divjak a été

 15   arrêté ou pas. M. Sefer Halilovic présente des explications qui ne sont pas

 16   tout à fait claires pour savoir de quoi il s'agit au juste. Et vous avez

 17   dit, je cite, page que je vous ai déjà indiquée :

 18   "Sommes-nous sûrs pour ce qui est de ce qui a été reproché à M.

 19   Divjak. Les inculpations ne tiendraient pas debout semble-t-il."

 20   Alors vous posez la question : "Est-ce que M. Divjak de façon justifiée

 21   s'était trouvé mis aux arrêts pour ce qu'on lui a reproché ?" 

 22   Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agissait là au juste ?

 23   R.  Il s'agissait de façon évidente de deux segments au niveau de la

 24   présidence. Certains membres de la présidence avaient été mis au courant de

 25   la situation, d'autres pas. Le fait est que M. Divjak a été mis aux arrêts.

 26   Le fait est que M. Halilovic avait affirmé que ce n'était pas une

 27   arrestation classique, que c'était une mise en examen, quelque chose de ce

 28   genre. On ne dit pas explicitement pourquoi M. Divjak est mis aux arrêts.

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  1   On ne dit pas non plus ce qui s'est passé.

  2   Et ma question disait qu'il avait été mis en accusation pour une

  3   chose qui s'était probablement produite. Pourquoi l'adjoint du chef d'état-

  4   major, du Grand état-major de l'armée serait-il arrêté comme ça au petit

  5   bonheur, alors j'ai demandé une réponse. Si mes souvenirs sont bons, on

  6   m'avait dit comme conclusion qu'il en serait question ultérieurement mais

  7   pas jusqu'au bout des choses.

  8   Q.  Veuillez vous pencher sur le 2D 263 maintenant, s'il vous plaît. Il

  9   s'agit d'un rapport émanant du commandant Arif Pasalic à l'intention de son

 10   supérieur, M. Sefer Halilovic. Dans la première partie de ce rapport, il

 11   est dit qu'à la date du 2 décembre 1992, à 10 heures 30, de la part des

 12   membres de la Brigade de Neretvica, dans un bâtiment dont le propriétaire

 13   est Zejnil Delalic, on a arrêté M. Jovo Divjak. La raison de la prise de

 14   cette mesure est une supposition, à savoir qu'il a été en contact avec des

 15   personnes qui sur le territoire de la municipalité de Konjic auraient

 16   commis plusieurs délits au pénal, à savoir que M. Divjak aurait participé à

 17   la prestation d'ordres ou à la délivrance d'ordres qui ont généré une

 18   intolérance entre Croates et Musulmans sur ce territoire. Alors je laisse

 19   de côté le reste pour ce qui est de paraphraser ce qui est dit.

 20   Alors, est-ce que cela correspond aux informations que vous avez reçues au

 21   sujet des raisons qui ont motivé l'arrestation de M. Divjak ou pas ?

 22   R.  Non. Cette explication n'a pas été présentée à la présidence. J'ai dit

 23   qu'il se pouvait que certains des membres tels Alija Izetbegovic, voire

 24   Halilovic, le savaient, mais nous autres, membres de la présidence, nous ne

 25   le savions pas.

 26   Q.  Bien. Penchez-vous maintenant sur le 4D 427. Nous allons d'abord voir

 27   si vous avez été informé de la chose. Est-ce que M. Jovo Divjak a donné une

 28   déclaration au sujet de sa propre arrestation ?

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  1   R.  Oui. J'en ai entendu parler, mais je n'ai jamais reçu cela par écrit.

  2   Q.  Penchez-vous sur la page 3, je vous prie. En B/C/S et en anglais

  3   pareil. Alors M. Divjak dit au sujet de l'affaire Prozor et des relations

  4   entre Musulmans et Croates, à savoir entre l'armée de BiH et le HVO : 

  5   "Je rejette toute suspicion et toute idée disant que j'aurais incité

  6   et/ou encouragé ces conflits. Et j'affirme que j'ai insisté sur la

  7   tolérance, sur les pourparlers et l'affaissement de la situation."

  8   Est-ce que ceci correspond à ce que vous en savez pour ce que Jovo

  9   Divjak aurait rédigé comme déclaration ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Pouvons-nous en déduire qu'à l'époque vous n'avez jamais reçu

 12   d'information pour savoir pourquoi M. Jovo Divjak a été arrêté ?

 13   R.  Je n'ai jamais obtenu ce type d'information.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai fini mon interrogatoire.

 15   Q.  Monsieur Akmadzic, je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je crois que je vais revenir à Me Nozica

 17   maintenant.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Pendant que l'on attend le dossier, je souhaite saluer le Président, les

 20   Juges, le témoin et toutes les parties présentes dans ce prétoire. Tout

 21   d'abord, je voudrais dire que je vais passer un petit peu plus de temps

 22   avec ce témoin puisque les Défenses Pusic et Coric m'ont accordé leur

 23   temps. Je voudrais être rassurée que mes collègues soient rassurés aussi, à

 24   savoir si on enlève une partie de mon interrogatoire comme une partie --

 25   qu'en faisant partie de mon interrogatoire principal --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je souhaite consulter mes collègues.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Maître Alaburic -- Maître Nozica, j'ai

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  1   consulté mes collègues parce qu'à un moment donné vous avez dit : "Les

  2   autres m'ont donné du temps." La Chambre qui avait réfléchi à cette

  3   question avait pris la position de ne pas autoriser les rétrocessions de

  4   temps. En revanche, au cas par cas, la Chambre peut accorder du temps

  5   supplémentaire dans la mesure où on avait dit qu'il y aurait trois heures

  6   pour la Défense globalement et que si vous êtes avec Me Alaburic la seule à

  7   intervenir, dans les trois heures divisées par cinq, donc vous auriez

  8   normalement 36 minutes, 36 minutes dans votre temps à vous. Bon. Mais comme

  9   nous avons du temps devant nous, nous vous autorisons bien entendu à aller

 10   au-delà des 36 minutes mais pas sur le temps de M. Pusic ou de M. Coric.

 11   Donc vous avez compris.

 12   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous ai compris, Monsieur le Président,

 13   mais je suis tout de même perplexe et je dois le dire parce que la dernière

 14   fois quand ma consœur Alaburic est intervenue pour dire que toutes les

 15   Défenses avaient 15 minutes pour le contre-interrogatoire, ce qui

 16   reviendrait à trois ou sept minutes pour chaque Défense, le Juge Trechsel a

 17   dit que toute la Défense s'est vu accorder un quart d'heure et la façon

 18   dont vous allez vous partager ces 15 minutes, cela est votre problème et

 19   c'est exactement ce que nous avons fait aujourd'hui. Nous nous sommes mis

 20   d'accord que mis à part Mme Alaburic et moi-même, personne n'allait faire

 21   de contre-interrogatoire. Et moi uniquement parce que c'est correct, j'ai

 22   demandé à mes collègues de voir si eux, s'ils comptent avoir un contre-

 23   interrogatoire, ils m'ont dit que non et donc j'en ai informé les Juges.

 24   Donc là il s'agit de mon temps et d'après ce que M. le Juge Trechsel m'a

 25   dit, je me suis préparée pour faire ce contre-interrogatoire et il va être

 26   plus long que 36 minutes, donc j'espère que vous allez m'indiquer quelles

 27   sont vos instructions parce que je dois faire des coupures très importantes

 28   si je vais avoir moins de temps que ce que j'avais prévu.

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  1   M. STEWART : [interprétation] Messieurs les Juges, nous ici nous ressentons

  2   une certaine confusion dans le même sens, de la même façon, je ne sais pas.

  3   Ce qui est en train de se passer ne semble pas se conformer aux lignes

  4   directrices que vous avez données le 24 avril 2008. Je parle de la décision

  5   portant adoption des lignes directrices en vue de la présentation des

  6   moyens à décharge. En effet en son paragraphe 15, elle dit ceci :

  7   "A moins que la Chambre ne prenne une autre décision, les équipes devraient

  8   se concerter sur le temps qui est consacré par l'une ou l'autre des

  9   Défenses. Alors c'est le cas de figure qui se présente, me semble-t-il, et

 10   nous nous rallions à ce qu'a dit Me Nozica, ceci semble s'inscrire dans le

 11   droit fil de ce que vous avez dit jusqu'à présent, Messieurs les Juges.

 12   Bien sûr c'est Me Karnavas qui présente ses moyens, mais c'était le système

 13   prévu.

 14   Là aussi nous avons beaucoup d'éléments écrits dont la Chambre a été

 15   saisie à propos de ces lignes directrices, mais si maintenant surgit une

 16   autre question, il nous faut tous avoir la possibilité d'examiner ce

 17   problème complètement.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : On va réexaminer cela. On va réexaminer cela. Donc

 19   sans préjudice de quiconque, nous avons décidé que la Défense aura trois

 20   heures pour le contre-interrogatoire. Donc vous pouvez utiliser, Maître

 21   Nozica et Maître Alaburic, les trois heures.

 22   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pour commencer,

 23   j'ai voulu dire que je vais aborder un certain nombre de thèmes. Je

 24   considère que ces thèmes ont été mentionnés pendant l'interrogatoire

 25   principal. Je pense qu'il s'agit là d'un contre-interrogatoire. Il y a

 26   cependant un thème qui n'a pas été abordé. Il s'agit de deux documents qui

 27   corroborent ce thème, les documents 2D 544, et 2D 705. Il s'agit du contact

 28   que ce témoin a eu avec le secteur de santé du HVO au cours de l'année

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  1   1993. Je vais dire à quel moment je vais aborder ce thème et je considère

  2   que ce temps devrait être considéré comme l'interrogatoire principal.

  3   Avant de commencer, je souhaite dire que j'ai mis mes documents dans

  4   les classeurs en respectant l'ordre de l'interrogatoire du témoin, je

  5   savais à l'avance quels étaient les désirs du Juge Trechsel et je l'ai

  6   devancé.

  7   J'y ai mis aussi les documents de la Défense 1D de sorte que vous

  8   n'ayez pas besoin de les utiliser. Je souhaite dire que je sais que la

  9   tâche qui incombe à présent à la Défense 1D et que moi aussi je vais me

 10   trouver dans une situation très difficile pour assembler ces documents dans

 11   les dossiers de la façon dont cela a été demandé par les Juges. Cette fois-

 12   ci pour moi, c'était plus facile de le faire puisque j'avais besoin de

 13   moins de documents, de beaucoup moins de documents, que mon confrère M.

 14   Karnavas.

 15   Contre-interrogatoire par Mme Nozica :

 16   Q.  [interprétation] Je vous salue à nouveau, Monsieur le Témoin. Pour le

 17   compte rendu d'audience, je vais vous dire - nous nous connaissons de toute

 18   façon, nous nous sommes déjà rencontrés - mais je me présente, je m'appelle

 19   Senka Nozica, ici dans ce prétoire je représente les intérêts, avec mon

 20   confrère M. Khan, de M. Stojic. Je vais commencer tout de suite par un

 21   document, qui faisait partie du dossier de M. Karnavas. Il s'agit du

 22   document 1D 2067. Vous l'avez, il s'agit de la déclaration des membres du

 23   HZ HB, c'est votre déclaration, que vous avez signée le 21 avril 1993.

 24   Au cours de ce procès ici, nous avons déjà eu la possibilité de voir

 25   cette déposition par le biais d'un témoin qui était présent ici, et dont je

 26   ne peux pas vous donner le nom. Dorénavant, je vais faire référence

 27   uniquement à la première partie de cette déclaration, à savoir ce qui

 28   figure dans le document au moment de la réunion des membres de la

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  1   présidence, du président du gouvernement et des membres du gouvernement de

  2   la République de Bosnie-Herzégovine, venus du peuple croate, qui a eu lieu

  3   hier à Mostar et concernant l'agression menée par les unités musulmanes de

  4   l'ABiH contre la population croate de Bosnie-Herzégovine. La déclaration

  5   suivante a été acceptée et nous la publions dans son intégralité.

  6   Monsieur Akmadzic, voici ma question : quelles étaient les informations

  7   dont vous disposiez à l'époque, avant le 21 avril, avant de donner cette

  8   déclaration concernant les activités militaires de l'ABiH ? Il s'agit

  9   uniquement de la Bosnie centrale, on va se limiter à ce territoire-là.

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'elles n'ont pas reçu de

 11   dossier.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit et je voudrais réitérer que le

 13   mois d'avril 1993 était le mois le plus dur pour la situation en Bosnie

 14   centrale, c'était le début mais c'était très difficile. L'ABiH, qui

 15   représentait un segment des forces armées de Bosnie-Herzégovine, perpètre

 16   l'agression contre un autre segment de l'ABiH et contre la population de la

 17   Bosnie centrale. La présidence de Bosnie-Herzégovine, à laquelle nous avons

 18   déjà fait appel directement et indirectement, ne prend pas les mesures

 19   nécessaires. Lors de la réunion que nous avons tenue, nous en arrivons à la

 20   constatation que nous sommes pratiquement impuissants, que nous ne nous

 21   voyons pas capable d'arrêter le conflit. Nous faisons une déclaration

 22   publique, un communiqué pour les médias au niveau national et international

 23   pour dire qu'on se trouvait dans une situation difficile et que notre

 24   peuple faisait l'objet d'une attaque.

 25   Q.  Monsieur Akmadzic, je vais vous poser une question précise. Est-ce qu'à

 26   l'époque, au moment où vous avez fait ce communiqué, vous saviez quoi que

 27   ce soit au sujet des attaques de l'armée sur Zenica, Travnik, et cetera,

 28   cette partie-là de Bosnie centrale ?

Page 29564

  1   R.  Non, on n'était pas au courant de l'attaque sur Zenica. Mais on était

  2   au courant d'une attaque depuis Zenica menée contre la Bosnie centrale en

  3   direction de Travnik, Bugojno, Novi Travnik. En général, en direction des

  4   territoires sur lesquels se trouvaient des grandes usines d'armement de

  5   Bosnie-Herzégovine.

  6   Q.  Quand j'ai parlé de l'attaque sur Zenica, en fait, je pensais à

  7   l'attaque sur le HVO à Zenica, et vous avez bien expliqué cela. Mais quand

  8   vous dites qu'il s'agissait d'attaques menées contre les territoires où se

  9   trouvaient les plus grandes usines d'armement de Bosnie-Herzégovine, est-ce

 10   que c'était la conclusion à laquelle vous étiez arrivé à l'époque ou est-ce

 11   qu'auparavant déjà vous aviez reçu des informations indiquant que les

 12   activités allaient être dirigées précisément contre ces territoires-là ?

 13   R.  Oui, nous avons été un peu informé de cela. Parce que la Bosnie

 14   centrale, je dois informer les Juges du fait qu'il s'agit là du cœur de

 15   Bosnie-Herzégovine. Ce que nous avons dit tout à l'heure quand on a parlé

 16   du royaume de Bosnie-Herzégovine d'antan, c'est là que ce royaume a eu

 17   lieu, puisque le siège se trouvait à Vares, le siège de ce roi. Et au jour

 18   d'aujourd'hui encore, je l'espère au moins, on garde les armoiries de ce

 19   royaume bosniaque.

 20   C'est justement dans cette Bosnie centrale-là aussi que se trouve, à

 21   Travnik notamment, l'usine où l'on fabrique les uniformes. A Novi Travnik

 22   et à Bugojno, vous avez les usines d'armement. A Konjic aussi, il y a une

 23   usine d'armement.

 24   La population musulmane, avec la chute de Jajce, se dirige vers la

 25   Bosnie centrale, il s'agit là de réfugiés. Et vous avez un déséquilibre qui

 26   est créé. J'en ai parlé avec M. Izetbegovic. Il m'a dit : On va pallier à

 27   ce problème de déséquilibre entre les populations. Mais il était clair

 28   qu'il n'avait pas l'intention de le faire, qu'il ne voulait pas le faire ou

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  1   qu'il ne pouvait pas le faire. On savait qu'il y avait un danger, que la

  2   Bosnie centrale était menacée.

  3   Q.  Est-ce que je peux vous demander ou vous rappeler, je pense que vous le

  4   savez, puisque vous avez mentionné différentes villes, les villes où il y

  5   avait l'industrie d'armement. Vous n'avez pas parlé de Vitez, est-ce que

  6   Vitez était une ville importante ?

  7   R.  Oui, Vitez aussi était une ville importante, puisque là-bas il y avait

  8   une usine d'explosifs nécessaires pour utiliser différentes armes. Mais du

  9   point de vue de l'agression de l'ABiH, au cours de la période dont on

 10   parle, je pense - c'est pour cela que je n'en ai pas parlé d'ailleurs - que

 11   Vitez n'était pas vraiment menacée, pas tant que cela. Mais elle deviendra

 12   menacée par la suite bientôt après, quand Vitez aussi a fait l'objet d'une

 13   agression.

 14   Q.  Si je vous ai bien compris, quand vous parlez de ce déséquilibre entre

 15   différentes nations avec l'arrivée, l'influx d'une grande quantité de la

 16   population musulmane en Bosnie centrale, et ensuite vous parlez des

 17   attaques menées contres les usines d'armement en Bosnie centrale, est-ce

 18   que je vous ai bien compris, est-ce que vous avez dit tout cela dans le

 19   contexte où on s'attendait à ce que l'ABiH attaque les unités du HVO se

 20   trouvant dans ce territoire ?

 21   R.  Oui, nous étions au courant de ce danger. Nous avions à l'époque mis en

 22   garde la présidence contre ce danger en leur demandant de prendre des

 23   mesures adéquates. Et je me souviens de l'entretien que j'ai eu avec M.

 24   Izetbegovic où je parlais de cela. Nous avons parlé de cela.

 25   Q.  Maintenant on va parcourir un certain nombre de documents qui vont

 26   illustrer la situation militaire en Bosnie centrale, notamment à Zenica et

 27   à Kakanj, vous en avez parlé.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous abandonnez ce document, moi, j'ai une

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  1   question à poser à partir de ce document sur un sujet que vous n'avez pas

  2   abordé, qui est le paragraphe numéro 3.

  3   Monsieur le Témoin, pouvez-vous regarder le paragraphe numéro 3, où là, de

  4   manière très claire, vous parlez de l'usurpation par M. Izetbegovic de sa

  5   présidence puisque vous indiquez que son mandat avait cessé le 20 décembre

  6   92, et que donc il a usurpé sa fonction. Donc vous le déclarez le 21 avril

  7   1993.

  8   Lisant cela, la question suivante vient à mon esprit. Les membres croates

  9   de la présidence estiment que le fonctionnement de la présidence est

 10   illégal pour une raison juridique que vous développez. Comment se fait-il

 11   alors que vous et vos camarades croates, voire également les Serbes, vous

 12   n'avez pas à ce moment-là dit à la communauté internationale, avec toutes

 13   les négociations en cours, que dans ces conditions, vous vous retiriez de

 14   toutes les négociations et qu'à ce moment-là, la communauté internationale

 15   gère cela uniquement avec les usurpateurs ? Pourquoi vous n'avez pas pris

 16   cette position, et à ce moment-là il y aurait peut-être eu un problème vis-

 17   à-vis des négociateurs qui n'auraient eu face à eux qu'un camp et non pas

 18   les trois ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous l'avons dit à la

 20   communauté internationale. Nous avons dit cela aux coprésidents qui

 21   représentaient à nos yeux la communauté internationale. Nous savons que la

 22   communauté internationale, c'est un terme général, il ne s'agit pas là d'un

 23   organe juridique, judiciaire. Pour nous, la communauté internationale qui

 24   négociait était représentée par les Nations Unies et par la Communauté

 25   européenne. Nous ne sommes pas allés au-delà puisqu'on a nommé ces

 26   coprésidents lors de la conférence de Londres qui était encore plus large,

 27   qui avait une portée encore plus grande que ce que je viens de dire.

 28   Mais je voudrais vous dire que les difficultés des Croates étaient

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  1   grandes, mais on n'était pas les seuls qui avaient des difficultés; mais

  2   c'était surtout les nôtres qui étaient importantes. Parce que la communauté

  3   internationale, pour l'appeler ainsi, avait d'un côté une présidence avec

  4   laquelle elle était obligée de négocier, et de l'autre côté, elle avait les

  5   trois parties au conflit avec lesquelles il fallait qu'elles discutent

  6   aussi.

  7   Nous n'avons jamais contesté le fait qu'Alija Izetbegovic était un

  8   membre légitime de la présidence de Bosnie-Herzégovine. Nous n'avons jamais

  9   contesté le fait qu'il représentait le peuple musulman de Bosnie-

 10   Herzégovine. Tout ce que l'on voulait, c'était de faire savoir que la

 11   présidence de Bosnie-Herzégovine devait fonctionner conformément aux

 12   règlements qui étaient à l'origine de sa création, conformément aux lois, à

 13   la constitution, et qu'il fallait que cette présidence reconnaisse le droit

 14   de notre peuple, qui était un peuple constitutif ayant les mêmes droits que

 15   les autres. Nous ne connaissions pas les décisions, de nombreuses décisions

 16   qui avaient été prises parallèlement, et pas seulement au niveau de la

 17   présidence. Nous n'avions pas connaissance de toutes les décisions et de

 18   leur mise en œuvre qui avaient été prises au niveau de la présidence même.

 19   C'est dans ce sens-là que nous avons réagi. Cette lettre était un début,

 20   enfin, ce n'est pas une lettre, c'est une déclaration. C'était un point de

 21   départ, mais par la suite nous avons vu que nous n'avions pas réussi à

 22   réaliser ce que nous pensions qu'il était nécessaire de réaliser.

 23   Nous avons, comme je l'ai dit hier, gelé nos activités au sein de la

 24   présidence et du gouvernement pour essayer d'utiliser tous les moyens

 25   légaux pour faire pression sur le côté musulman, pour exiger qu'ils

 26   respectent les décisions prises de façon commune et qu'ils coopèrent au

 27   niveau des négociations. 

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette réponse.

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  1   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Monsieur, à présent je vais vous demander d'examiner le document

  3   suivant, à savoir le document 2D 00472. Pour le compte rendu d'audience, je

  4   voudrais dire que ce document est une pièce à conviction. Il s'agit là d'un

  5   ordre d'attaque, un document de l'ABiH, de la 7e Brigade musulmane, le

  6   commandement du 2e Bataillon de Zenica, la date est le 17 avril et dans cet

  7   ordre d'attaque, je vais juste lire ce qui figure au niveau du premier

  8   paragraphe, la direction du bataillon, on dit quels sont les ennemis et il

  9   s'agit de prendre le contrôle de la zone urbaine et suburbaine de Zenica.

 10   Monsieur Akmadzic, est-ce que vous pouvez confirmer que c'étaient les

 11   informations dont vous disposiez quand il s'agissait des attaques menées

 12   contre le HVO à Zenica, pour être vraiment très précise, à l'époque ?

 13   R.  Oui, effectivement, avec votre permission, je voudrais vous fournir une

 14   explication par rapport à toute ma déposition. Je voudrais ajouter cet

 15   élément, le HVO était présent même dans les endroits où les Croates étaient

 16   véritablement minoritaires. Là, vous avez l'exemple de la ville de Zenica.

 17   Donc il y avait des unités du HVO là-bas, mais à Sarajevo, là où

 18   j'habitais, il y avait aussi des unités du HVO. Donc le HVO et toutes les

 19   structures de la communauté croate de l'Herceg-Bosna de l'époque étaient

 20   présentes dans toute la Bosnie-Herzégovine, quelle que soit la composition

 21   ethnique. 

 22   Donc ici, dans cet exemple précis, le document que nous avons sous

 23   les yeux, il s'agit de l'attaque d'une armée bien plus puissante qui

 24   attaque le HVO. Là vous avez un segment de forces armées qui est beaucoup

 25   plus puissant qui attaque un autre segment de ces forces armées qui est

 26   moins grand. Nous avons reçu des plaintes de Zenica et nous n'étions pas en

 27   mesure d'empêcher ces attaques. Je pense qu'on ne pouvait pas le faire. On

 28   ne pouvait pas les empêcher parce que, justement, dans cette ville, à

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  1   Zenica, il y avait beaucoup de forces extrémistes. A cette époque-là,

  2   l'époque dont on débat ici, on a vu d'autres unités se joindre à l'ABiH,

  3   des unités venues de l'étranger ou envoyées de l'étranger, des

  4   Moudjahidines avant tout. Donc c'est l'époque où, dans le cadre de l'ABiH

  5   ou plutôt en dehors justement de ces cadres, agissent d'autres unités,

  6   d'autres forces comme le MOS, les forces armées musulmanes, par exemple, et

  7   nous n'étions pas en mesure de discuter, négocier ou coopérer avec eux.

  8   Q.  Monsieur Akmadzic, vous avez parlé de quelque chose qui se trouvait à

  9   l'extérieur de mon sujet, mais il serait peut-être important d'apporter des

 10   éclaircissements brefs aux Juges. A l'extérieur du territoire du HZ HB, à

 11   l'extérieur donc du HZ HB, il y avait des unités du HVO. Vous venez

 12   d'énumérer Sarajevo, et vous avez dit que ça existait sur tout le

 13   territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 14   R.  Oui, sur tout le territoire, à Tuzla, Bihac, dans la Posavina, à

 15   Zenica, à Vares, à Kakanj aussi. Je suis en train de vous parler de

 16   localités qui, en premier lieu, avaient une composition mixte de la

 17   population, et avec une majorité musulmane notamment.

 18   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire contre qui ces unités et aux côtés de

 19   qui le HVO à Sarajevo et ailleurs se sont-elles battues pendant toute la

 20   durée de la guerre ?

 21   R.  A Sarajevo, du moins pas au début, il n'y a eu aucune confrontation

 22   entre le HVO et l'ABiH. Il y avait une pleine coopération et ils se sont

 23   battus de concert contre l'agresseur, comme d'ailleurs précisé.

 24   Q.  Alors c'est allé comme ça jusqu'à la fin 1993 ? Je ne veux pas entamer

 25   le sujet, mais ça ne s'est pas passé jusqu'à la fin, comme cela, jusqu'en

 26   1993. Il y a eu un conflit puisqu'il y a eu volonté de resubordonner le HVO

 27   à l'ABiH par la force ?

 28   R.  Je ne pense pas qu'on pourrait parler de conflits. Il y a eu des

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  1   malentendus. La présidence, en sa fonction de commandement Suprême,

  2   s'agissant de la brigade du HVO qui existait à Sarajevo, a été jointe ou

  3   intégrée à l'ABiH à part entière.

  4   Q.  Nous allons avoir un témoin sur ce sujet qui est très important pour

  5   voir comment le HVO a fonctionné sur le territoire entier de la Bosnie-

  6   Herzégovine. Je reviens maintenant à Zenica. Je voudrais que vous vous

  7   penchiez sur le 2D 101. C'est le troisième des documents dans le classeur.

  8   Je pense que vous avez déjà eu l'occasion de le voir celui-là. Allez-y.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Nozica.

 10   Maintenant que nous sommes sur ce document, au premier paragraphe, Monsieur

 11   le Témoin, nous pouvons lire quelles sont les raisons pour lesquelles

 12   l'ordre a été donné : "Compte tenu de l'évolution récente de la situation

 13   et du comportement des soldats du HVO, et afin d'empêcher des surprises…"

 14   Alors disposez-vous de renseignements pouvant éclairer la Chambre sur ce

 15   que l'on entendait par "soldats du HVO" ? Peut-être que vous ne le savez

 16   pas. Je l'accepte tout à fait, mais je souhaiterais vous donner la

 17   possibilité de faire des commentaires à ce sujet.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense, pour ce qui est de la partie

 19   introductive, on parle du contexte des négociations internationales au

 20   niveau politique, puis la situation politique en tant que telle au niveau

 21   de l'Etat, puis le comportement des unités du HVO. Je ne peux pas en

 22   parler, mais j'imagine qu'il y a forcément des difficultés du point de vue

 23   de la coopération, bien que le HVO avait proposé un commandement conjoint.

 24   Je ne saurais parler de ce que l'on voulait dire par "comportement des

 25   unités du HVO". Ici, on ne parle pas du HVO tout entier, on parle d'unités

 26   avec lesquelles il y a contact.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel. Nous allons

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  1   pouvoir tirer la chose au clair avec un document suivant, qui est le

  2   document 2D 101.

  3   Q.  Est-ce que vous l'avez retrouvé, Monsieur ?

  4   R.  Oui, je l'ai retrouvé.

  5   Q.  Il s'agit d'un rapport portant sur l'organisation du HVO de Zenica et

  6   les événements qui ont précédé à sa neutralisation sur le territoire de la

  7   municipalité de Zenica. Ce rapport est présenté par Baresic Vinko, le

  8   commandant de cette brigade de Zenica du HVO.

  9   Monsieur Akmadzic, je voudrais vous montrer certaines parties de ce

 10   rapport portant la date du 23 avril 1993. Cela englobe les événements du

 11   17, du 18 avril. Comme vous avez déjà eu l'occasion de voir ce document, je

 12   voudrais juste prélever des parties. 

 13   Dans la partie introductive, le commandant de cette brigade de Zenica

 14   dit que de fait il avait été membre de l'ABiH de Zenica et qu'au mois de

 15   mai 1992, il est passé au HVO. De fait, ça s'est bien passé jusqu'en

 16   novembre 1992 entre le HVO et l'ABiH, date à laquelle il y a création d'un

 17   commandement de 3e Corps de l'ABiH avec pour siège Zenica. Le commandant

 18   dit que c'est là que commencent les problèmes. Il dit que les services

 19   d'information du 3e Corps ont usurpé tous les moyens de communication avec

 20   le public avec une campagne très forte pour indiquer que les unités de

 21   l'ABiH étaient les seules unités légitimes dans le combat en faveur d'une

 22   Bosnie-Herzégovine autonome, indépendante, libre et entière.

 23   Alors en page 2 de ce texte croate, et pour les Juges de la Chambre

 24   je précise qu'il s'agit, en version anglaise, de la page qui porte le 0061.

 25   Il me semble que c'est la page 2, dernier paragraphe, il est dit : "Les

 26   pressions à l'égard du HVO de Zenica ne font que croître." Je pense que

 27   cela apporte une réponse à la question posée par M. le Juge Trechsel. Ce

 28   qui se produit, c'est qu'il y a des meurtres individuels, des arrestations

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  1   et des individus emmenés dans des directions connues d'eux seuls.

  2   S'agissant des protestations à l'égard de l'ABiH et des autorités civiles,

  3   la réponse apportée a toujours été la même, à savoir qu'il n'avait rien à

  4   voir avec et qu'il ferait tout pour le cas où il s'agirait éventuellement

  5   de membres de l'ABiH pour découvrir les auteurs, mais pour aucuns des

  6   incidents ils n'ont accepté de reconnaître leur culpabilité, voire leur

  7   responsabilité, pas plus qu'ils n'ont découvert les auteurs.

  8   Au meilleur des cas, il y avait des indices qu'il s'agissait de

  9   groupes qu'il était difficile de contrôler et on dit qu'ils émettaient des

 10   réserves à leur égard. Alors les médias communiquaient à l'intention du

 11   public qu'il s'agissait d'indiscipline de la part des soldats du HVO et

 12   qu'un jour ou l'autre il faudra bien qu'ils soient placés sous le contrôle

 13   de l'armée officielle et régulière de la République de Bosnie-Herzégovine,

 14   à savoir l'ABiH.

 15   Dans le texte qui suit, on dit que le HVO de Zenica avait eu des

 16   informations disant que la situation était tout à fait à l'opposé, c'était

 17   grave et que l'on préparait l'opinion publique pour un règlement de compte

 18   avec le HVO de Zenica. On évoque le commandement de la 7e Brigade musulmane

 19   et il est question du fait que ce commandement était composé pour

 20   l'essentiel de volontaires étrangers et de Moudjahidines qui déambulaient

 21   dans Zenica et qui ont même couru dans la ville en portant des drapeaux

 22   religieux et en chantant des chansons incompréhensibles et en faisant

 23   montre de force et de puissance. Ils étaient chargés de toutes les sales

 24   besognes sur le territoire de la Bosnie centrale et autres territoires

 25   libérés.

 26   Monsieur Akmadzic, est-ce que c'était bien les informations dont vous avez

 27   disposé lorsque vous avez parlé de Moudjahidines et lorsque vous avez parlé

 28   des préparatifs en matière de pression pour battre le HVO sur le territoire

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  1   de Zenica et ailleurs ?

  2   R.  Je dirais --

  3   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, avant de

  4   passer à cela, nous allons passer trois heures à entendre des questions qui

  5   durent cinq minutes. Là il s'agissait d'une question très longue. J'ai

  6   examiné le compte rendu d'audience. Alors il faut la diviser en plusieurs

  7   parties et quelles sont les connaissances du témoin et qu'est-ce qu'il sait

  8   de tout cela ? A-t-il jamais vu ce document ? Est-ce qu'il a quoi que ce

  9   soit comme information à ce sujet ? Apparemment nous lisons seulement des

 10   documents.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Ça ne m'a pas échappé. Maître Nozica.

 12   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, ce document a déjà été

 13   proposé pour versement et on l'a rejeté. Je veux déterminer avec le témoin,

 14   pour ce qui est des documents que j'estime pertinent pour la Défense, je

 15   voudrais savoir s'il a eu connaissance de la chose et je voudrais faciliter

 16   aux Juges de la Chambre la prise de décision pour ce qui est du versement

 17   ou pas de ces documents. Dans ces documents il y a bien des éléments

 18   pertinents. Je m'efforce de les parcourir au plus vite, et ce que je viens

 19   de citer à l'instant confirme ce que le témoin a dit tout à l'heure. Je

 20   voudrais brièvement demander au témoin de répondre pour pouvoir me référer

 21   à deux autres détails qui sont importants dans ce document.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais dire aux Juges de la Chambre que

 23   j'étais premier ministre de Bosnie-Herzégovine et je n'aime être sous la

 24   pression de qui que ce soit et je vais présenter mes opinions telles

 25   qu'elles sont sans pour autant me référer aux pressions exercées par les

 26   uns ou par les autres, donc je veux répéter que le Conseil croate de la

 27   Défense et l'ABiH étaient des partenaires et avaient une bonne coopération

 28   pendant une période de temps déterminée.

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  1   Comme je l'ai déjà dit, et comme au niveau de la présidence nous le

  2   pensions, les relations se sont détériorées du fait de l'agression à

  3   l'encontre de la Bosnie-Herzégovine et compte tenu de la situation dans son

  4   ensemble. Lorsque ce document vient sur le tapis, je ne sais pas vous dire

  5   comment se sont comportés les individus au sein du HVO, voire au sein de

  6   l'ABiH. Ce que je sais, c'est que nous avions convenu de façon ferme qu'il

  7   fallait défendre ensemble la Bosnie-Herzégovine.

  8   Il y a un instant en répondant à une autre question, j'ai dit qu'il me

  9   semblait que pour ce qui est de Zenica dans le cadre de l'ABiH, il y avait

 10   là-bas des individus extrémistes et indépendamment de ce qui a été convenu,

 11   il ne faut jamais négliger l'aspect des individus, des particuliers, à

 12   savoir des individus qui sont à la tête de certaines unités. Pendant toute

 13   la durée de la guerre, nous avons eu d'énormes difficultés avec Zenica,

 14   justement le HVO dans Zenica était un petit segment de ces forces armées

 15   conjointes. Ils ont été placés sous des pressions, comme le dit le présent

 16   rapport, ils ont été exposés à des pressions de la part de formations

 17   paramilitaires.

 18   Je ne sais pas si quelqu'un a dit aux Juges de cette Chambre, si ça n'est

 19   pas le cas, j'aimerais le dire moi, à savoir que la présence des groupes

 20   individuels étrangers et bien organisés, notamment en Bosnie centrale, a

 21   conduit à la création d'une situation plus que difficile même après la

 22   guerre, car sans qu'on n'en ait eu connaissance et sans qu'on n'ait pris

 23   part à la chose, bon nombre de personnes se sont vues attribuer des

 24   nationalités, une citoyenneté, et cela s'est traduit par des problèmes qui

 25   ont conduit au changement de la législation et aux problèmes de savoir

 26   comment les priver de la citoyenneté une fois accordée du fait des

 27   interventions qui n'ont pas manqué de ce faire de la part de la communauté

 28   internationale.

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  1   Mme NOZICA : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Akmadzic, ceci est décompté dans mon temps, enfin si vous avez

  3   dit tout cela suite à l'intervention du Procureur, je suis reconnaissante.

  4   Je ne veux pas exercer de pression mais vous savez que mon temps est

  5   limité. Donc je voudrais pouvoir dire que ça fait à peu près une heure et

  6   demie que nous avons commencé et j'aimerais demander aux Juges de me

  7   signaler le moment de la pause, je vais m'interrompre à ce moment. Mais

  8   j'aimerais que si possible on en termine avec ce document.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter à 5 heures et demie et on fera la

 10   pause à 5 heures et demie, si ça vous convient. Comme vous voulez, moi je

 11   suis à votre disposition.

 12   Mme NOZICA : [interprétation] Cela me convient, Monsieur le Président. Je

 13   m'étais dit étant donné que la première pause a eu lieu un peu plus tôt que

 14   d'habitude, mais bon, continuons.

 15   Q.  Etant donné que vous avez déjà précisé que vous aviez vu ce document,

 16   je veux attirer votre attention sur le paragraphe 3 en langue croate. Je ne

 17   vais pas donner lecture de ce paragraphe 3. Il s'agit de la page 0063,

 18   paragraphe 2 en version anglaise et le paragraphe d'après. On dit que le

 19   HVO à Zenica a commencé le 17 avril, à savoir le 18 avril à 5 heures du

 20   matin, et on parle à la page suivante du fait que les forces musulmanes

 21   vers 18 heures se sont emparées de Zmajevac, chose qui est très importante,

 22   puis ensuite à l'avant-dernière page, tant en version anglaise que de

 23   celle-ci, il est dit qu'à l'occasion de la rédaction de ce rapport, à

 24   savoir le 23 avril 1993, il n'y a plus à Zenica d'unités du HVO, les

 25   responsables des autorités civiles sont en détention à vue, la plupart des

 26   membres du HVO sont en prison et les objets du HVO, les dossiers, tout

 27   étant sous pli scellé dans les coffres de l'ABiH, on n'autorise personne à

 28   s'en aller ni à se regrouper sous prétexte d'une protection. En réalité,

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  1   ils sont presque gardés en guise d'otages.

  2   Monsieur, je voudrais que vous nous disiez si la situation se présentait

  3   telle qu'on le dit ici ou pas, selon vous ?

  4   R.  Très certainement m'est-il difficile de témoigner de tout élément

  5   individuel parce que je ne m'y trouvais pas, mais d'après les informations

  6   qui nous parvenaient, c'est exactement ainsi que ça se passait.

  7   Q.  Je voudrais qu'on se penche sur un autre document qui se rapporte à

  8   Zenica très brièvement. Il s'agit du document suivant 2D 00473. C'est un

  9   autre ordre d'attaque. Vous me direz quand vous l'aurez retrouvé.

 10   R.  C'est 20473.

 11   Q.  Oui.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Alors il s'agit du commandant du 2e Bataillon de la 7e Brigade de

 14   Montagne musulmane, quand on s'est emparé Zmajevac. On vient de voir cela

 15   tout à l'heure. Alors j'attire votre attention sur deux détails ici au

 16   paragraphe 1, avant-dernier alinéa on dit que le secteur de Zmajevac est

 17   attaqué, et au paragraphe 3, dernier alinéa on dit que : "Le début est à 5

 18   heures le 18 avril 1993." Ceci correspond entièrement au rapport que nous

 19   avons vu et qui émane de M. Baresic Vinko commandant de la Brigade du HVO.

 20   Est-ce que cela correspond aux informations qui ont été les vôtres ?

 21   R.  Oui, justement.

 22   Q.  Penchons-nous maintenant sur un document très intéressant, le 2D 01405,

 23   il s'agit d'un document de l'ABiH du 3e Corps. Le document porte la même

 24   date, à savoir le 17 avril. Dans la deuxième partie de ce document on dit

 25   que l'archevêque de Bosnie, Monseigneur Vinko Puljic, se propose de visiter

 26   le territoire de la région de Zenica. 

 27   Le commandant du 3e Corps, Enver Hadzihasanovic, donne l'ordre au

 28   paragraphe 2, dans le cadre de cette visite et en général, interdit la mise

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  1   en détention de la population croate et la destruction ou la mise à feu de

  2   bâtiments et quelques mauvais traitements que ce soit à l'égard des

  3   personnes.

  4   Monsieur Akmadzic, le document en dit long lui-même. Etant donné qu'il

  5   parle du cas de cette visite et en général, avez-vous eu des informations

  6   disant qu'on a continué à arrêter, à mettre en détention, à malmener des

  7   gens de cette région de Zenica ?

  8   R.  Oui, j'ai eu ces informations, et on a estimé qu'il était pour eux tout

  9   à fait normal d'empêcher ce type de comportement lors de la visite du

 10   cardinal Vinko Puljic, étant donné que le cardinal Vinko Puljic était très

 11   estimé en sa qualité de responsable religieux et en sa qualité d'individu,

 12   de notable. Ils ne voulaient certainement pas qu'il s'en rende compte par

 13   lui-même et qu'il le communique au public.

 14   Q.  A l'occasion de notre contre-interrogatoire on se penchera sur les

 15   documents de l'armée pour savoir ce qui s'est passé ultérieurement, mais on

 16   en finit avec ce qui s'est passé à l'occasion de cette attaque sur la

 17   Bosnie centrale. Pour les besoins du compte rendu d'audience, je rattache

 18   ceci à votre déclaration. Je précise qu'il s'agit d'une corrélation avec

 19   votre déclaration du 21 avril, dernier document, 2D 01404, il est question

 20   d'un ordre émanant du commandement du 3e Corps. Au paragraphe 1 on dit :

 21   "Procéder immédiatement à des reconnaissances sur la Travnik-Vijenica-

 22   Stojkovici dans l'objectif de maîtriser cet axe, notamment les entrepôts du

 23   HVO." Est-ce que ceci correspond à ce que vous nous avez dit, à savoir ce

 24   plan et cette attaque datée du mois d'avril 1993 à l'encontre du HVO, et on

 25   voit également à l'encontre de Travnik ?

 26   R.  Oui. J'en ai déjà parlé. Ceci est un détail dans le cadre de la

 27   totalité des attaques qui se sont produites.

 28   Q.  Merci. Merci. Nous allons poursuivre tout à l'heure, mais tous ces

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  1   détails nous permettent d'avoir une image d'ensemble, je vous remercie pour

  2   tous les détails que vous avez bien voulu nous élucider.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Pouvons-nous faire une pause maintenant ?

  4   M. SCOTT : [interprétation] Avant de faire la pause, là encore je soulève

  5   une objection pour ce qui est de la procédure. Veuillez examiner la

  6   déclaration que vient de faire le conseil de la Défense. Tous ces détails

  7   seront utiles et nous nous en servirons par la suite. Le témoin n'a pas

  8   examiné tout cela et il n'a rien confirmé. Alors nous ne savons pas si le

  9   témoin a déjà vu ces documents avant aujourd'hui et sous prétexte on ne

 10   sait pas s'il a confirmé tout cela, on ne sait pas sur quelle base, ce

 11   qu'il sait ou ce qu'il ne sait pas, et puis par ailleurs, à la décharge du

 12   témoin, le témoin lui-même a dit qu'il ne savait pas. On a continué à lui

 13   présenter d'autres documents. La Chambre ne peut pas savoir si le témoin a

 14   confirmé tous les détails qui se trouvent dans un document qui comportent

 15   plusieurs pages.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, si j'ai bien compris mais peut-être que j'ai

 17   mal compris, la Défense vient de vous montrer toute une série de documents

 18   militaires émanant du 3e Corps. Ces documents établissent qu'au mois

 19   d'avril il y a une opération d'envergure à partir du 3e Corps où l'on voit

 20   que des membres du HVO sont arrêtés, notamment à Zenica, on voit également

 21   que M. Totic est également prisonnier.

 22   J'ai cru comprendre qu'on vous demandait si un, vous étiez au courant de

 23   cela, et si cette situation correspondait à ce que vous avez dit lors de

 24   l'interrogatoire principal sur l'action menée par les troupes de l'ABiH

 25   sous l'instigation d'Alija Izetbegovic. Alors est-ce que j'ai bien compris,

 26   ou j'ai mal compris parce que le Procureur dit que tous ces documents vous

 27   ne les connaissez pas, vous ne savez rien. Alors répondez.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je confirme ces

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  1   documents en tant que tel. L'observation que j'ai faite portait sur des

  2   détails. J'ai dit qu'il y avait bien plus d'éléments encore qui à ce niveau

  3   où on en est arrivé, n'ont pas encore été évoqués. Il y a eu d'autres

  4   ordres, il y a eu d'autres attaques dans d'autres villes encore, pas

  5   seulement ici, parce qu'ici ça se rapporte à Zenica et à ce district. Mais

  6   il y a eu d'autres attaques encore. J'ajouterais que non suite à ordre

  7   d'Alija Izetbegovic, mais que cela se situe dans le cadre de la politique

  8   conduite par Alija Izetbegovic et du fait des ordres du commandement

  9   Suprême, mais lui n'était pas sur le terrain pour donner des ordres.

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le permettez,

 11   il ne faut pas que M. Scott se soucie. Il y a une transcription, on voit

 12   clairement ce que le témoin a confirmé. J'estime avoir donné le cadre,

 13   d'abord je lui ai demandé s'il était au courant de ce qui se passait en

 14   Bosnie centrale, il a dit que oui. Il a décrit ce qui s'était passé, puis

 15   je suis passée au document. Mais je crois que le compte rendu est là pour

 16   montrer aux Juges de la Chambre ce que le témoin a confirmé et comment il

 17   l'a fait. 

 18   Merci.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Nous allons faire la pause de 20 minutes.

 20   --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.

 21   --- L'audience est reprise à 17 heures 53.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 23   Mme NOZICA : [interprétation] Je souhaite présenter mes excuses à tous les

 24   interprètes, surtout à la cabine française, puisqu'on vient de me dire que

 25   je parlais trop rapidement, surtout vers la fin. Je vais essayer de

 26   ralentir pour que vous puissiez recevoir une interprétation de qualité.

 27   Q.  Monsieur le Témoin, jusqu'à présent, nous avons parlé du mois d'avril

 28   1993. Maintenant, je voudrais parler du mois de juin 1993. Et pour cela, je

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  1   vais vous demander d'examiner le document 1D 01406. Je vais vous montrer

  2   quelques parties de ce document, ensuite je vais vous poser des questions

  3   au sujet des rapports qui prévalaient entre l'ABiH et la présidence par

  4   rapport aux négociations qui étaient en cours à l'époque. Ici, nous avons

  5   une lettre, c'est une lettre du commandement du 3e Corps d'armée, en date

  6   du 9 juin.

  7   Premier paragraphe de ce document, on dit : "Les derniers accords des

  8   puissants du monde international décident des conditions sur le théâtre des

  9   opérations." Je vais répéter, il s'agit du document 2D 01406.

 10   Le 3e Corps dit qu'il faut comprendre quelle est la vérité.

 11   "Puisqu'on est tout seul, il faut se tourner vers son peuple." On fait un

 12   appel aux citoyens pour qu'ils se réunissent, pour qu'ils réunissent tous

 13   les moyens admis pour défendre une Bosnie-Herzégovine souveraine,

 14   indépendante, son intégrité et sa liberté. Il s'agit d'appeler les citoyens

 15   à rassembler toutes les armes dont ils disposent, on donne aussi une date

 16   limite, le 30 juin, et on évoque les sanctions que l'on va mettre en place

 17   si on ne le fait pas.

 18   Donc là il s'agit du 3e Corps d'armée.

 19   Monsieur Akmadzic, vous avez dit, n'est-ce pas, que pendant cette

 20   période-là, il y avait des négociations en cours. Le 18 mai, il y a eu un

 21   accord, qui a été signé à Medjugorje. Mais on vous a également montré une

 22   lettre de M. Prlic en date de décembre 1992. Il s'agit du document

 23   1D 01945. Dans cette lettre, M. Prlic montre du doigt le comportement de M.

 24   Halilovic, qui est contraire aux accords politiques.

 25   Je voudrais vous demander si vous savez comment s'est comportée

 26   l'ABiH pendant toutes ces négociations qui étaient en cours à l'époque,

 27   quand il s'agissait d'adopter le plan Vance-Owen. Est-ce qu'il est exact

 28   qu'ils ont insisté pendant toute cette période pour que les opérations

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  1   militaires se poursuivent ? Et vous m'avez dit quelque chose. Vous m'avez

  2   dit que M. Izetbegovic vous a dit que s'il n'en tenait qu'à lui, il

  3   laisserait tomber son troisième mandat, mais que l'armée ne lui permettait

  4   pas de le faire.

  5   Pourriez-vous nous dire quel était le rôle de l'ABiH dans ces

  6   négociations ? Est-ce que vous pensez que l'armée avait un rôle important

  7   quand il s'agissait de ne pas accepter le plan Vance-Owen et quand il

  8   s'agissait de faire en sorte que les négociations ne réussissent pas ?

  9   R.  Tout d'abord, vous avez mentionné M. Sefer Halilovic. Je voudrais dire

 10   qu'à un moment donné, il est entré en conflit avec M. Izetbegovic. Je

 11   voudrais aussi dire que celui-ci, lors des sessions de travail de la

 12   présidence, disait, je cite : "C'est l'armée qui le demande. L'armée veut

 13   ceci ou cela." J'ajouterais aussi, par rapport à ce communiqué que vous

 14   avez lu, que là il s'agit sans doute d'un pamphlet, rien d'autre. La

 15   situation était comme celle que j'ai pu vivre à Sarajevo ou on entre par

 16   infraction dans votre garage, dans votre maison pour fouiller, pour voir si

 17   vous avez quelque chose dont ils ont besoin. On vous prend votre véhicule,

 18   sans que ceci ait été décidé au préalable par le commandement Suprême.

 19   Dans ce sens, je pourrais dire que l'ABiH, quelles qu'aient été les

 20   conditions politiques, avait des positions plus extrémistes.

 21   Q.  Mais si on essaie de faire le lien avec ce que M. Izetbegovic vous a

 22   dit, à savoir que s'il n'en tenait qu'à lui il n'accepterait pas la

 23   troisième année de mandat, parce que ce n'était pas prévu par le règlement

 24   mais que c'était imposé par l'armée, est-ce que cela --

 25   M. SCOTT : [interprétation] Objection. J'ai l'impression que c'est une

 26   question directrice, Monsieur le Président.

 27   Mme NOZICA : [interprétation] -- ne correspond pas aux positions

 28   prises par l'ABiH ?

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  1   Je vais poser la question autrement.

  2   Q.  Monsieur --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi de vous fournir

  4   une information d'ordre technique, Monsieur le Témoin.

  5   C'est différent de ce qui s'est passé la plupart des jours

  6   précédents, maintenant vous êtes interrogé dans votre langue maternelle, et

  7   votre tendance n'est que naturelle, dès que vous avez compris la question,

  8   vous répondez. N'oubliez pas que nous, nous allons recevoir la traduction

  9   beaucoup plus tard, donc nous allons comprendre cette question bien plus

 10   tard. N'oubliez pas de ménager une pause avant de répondre, sinon ça rend

 11   la tâche des interprètes trop difficile.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, quand j'ai vu M. Scott se lever,

 14   j'étais prête à poser la question autrement. Mais il s'agit là d'un contre-

 15   interrogatoire, je ne vois pas où est le problème, pourquoi cette question

 16   serait si directrice que cela. Mais voilà, je repose la question.

 17   Q.  Monsieur, la déclaration de M. Izetbegovic, quand il a dit qu'il ne se

 18   présenterait pas pour ce mandat supplémentaire si l'armée n'insistait pas,

 19   est-ce que vous pouvez nous dire quels étaient les rapports qui prévalaient

 20   entre l'armée et M. Izetbegovic pour que l'armée puisse lui imposer quoi

 21   que ce soit ? Est-ce que vous pouvez nous apporter quelques éléments là-

 22   dessus ? Est-ce que l'armée représentait un facteur politique ?

 23   R.  Je vais vous répondre de la même façon que je vous ai répondu tout à

 24   l'heure. Je n'ai pas demandé à l'époque à M. Izetbegovic ce que cela

 25   signifiait. Je ne lui ai pas posé la question et je ne peux pas confirmer

 26   qu'il était vraiment placé sous les pressions de l'armée. Mais je peux

 27   supposer que l'armée et ses dirigeants lui ont fait comprendre, et avant

 28   tout M. Halilovic : Président, il ne faut pas abandonner la fonction de

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  1   président, il ne faut pas la lâcher.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : La question posée par Me Nozica est très

  3   intéressante parce que c'est une des premières fois qu'on semble aborder ce

  4   thème, à savoir qu'il y aurait entre Izetbegovic et l'armée, représentée

  5   par Halilovic, des dissensions. Et quand j'ai entendu la question tout à

  6   l'heure, je me suis projeté en janvier 1993, à Genève, où il y avait donc

  7   des discussions, et sauf erreur de ma part, il me semble que M. Halilovic

  8   et M. Petkovic ont participé à des entretiens, à des négociations, avec la

  9   communauté internationale.

 10   Alors, est-il possible que M. Halilovic à Genève, signant des

 11   documents, participant aux négociations internationales, n'ait pas un

 12   mandat clair et précis de M. Izetbegovic et que, dans son dos ou

 13   parallèlement ou contrairement, mène un propre jeu, alors que, je rappelle,

 14   vous étiez, vous, à un moment donné premier ministre, et donc a priori vous

 15   aviez peut-être votre mot à dire dans certains aspects de la défense.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, quand on parle de cette époque, à

 17   l'époque où le mandat du président est arrivé à sa fin, c'était le 20

 18   décembre 1992, à ce moment-là, les rapports entre le président et le

 19   général Halilovic, même entre la présidence et le général Halilovic, ce

 20   n'était pas des rapports conflictuels. Ces rapports sont devenus

 21   conflictuels vers la fin de la guerre, il en a parlé lui-même, il en parle

 22   au jour d'aujourd'hui encore.

 23   Le général Halilovic était à Genève en janvier 1993, où il a discuté,

 24   négocié, signé avec l'accord du président parce que le président n'a jamais

 25   contesté de quelque façon que ce soit cette possibilité, il n'a jamais fait

 26   comprendre qu'il ne serait pas d'accord avec quoi que ce soit.

 27   Personnellement, je pense que quand il s'agit du mandat du président, que

 28   là, il ne s'agissait pas vraiment de pression de l'armée, c'était peut-être

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  1   une demande qui avait été formulée et M. Izetbegovic en a profité pour

  2   citer cela parmi les raisons pour faire acte de candidature pour prolonger

  3   son mandat. 

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica.

  5   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Donc reprenons, vous avez dit que c'était une sorte d'excuse de M.

  7   Izetbegovic, un prétexte. Mais là on va à nouveau parler du mois de juin et

  8   de ce qui se passe en Bosnie centrale. Au début, j'ai dit que c'était

  9   l'époque qui fait l'objet de questions posées par M. Karnavas aujourd'hui,

 10   il s'agit du début du mois de juin. Les négociations sont toujours en cours

 11   à Genève. Il y a un accord qui a été signé à Medjugorje le 18 mai, donc on

 12   cherche à établir la paix, à organiser du point de vue interne la Bosnie-

 13   Herzégovine. Est-ce que vous savez si l'armée a continué ses attaques au

 14   cours de cette période-là, les attaques contre Vitez, Travnik et autres

 15   régions de Bosnie centrale, et comment cela s'inscrit dans toute cette

 16   situation, d'un côté, vous avez les négociations, et de l'autre côté, vous

 17   avez la poursuite d'une offensive ?

 18   R.  Je voudrais dire que le mois de juin et le mois de juillet

 19   étaient des mois très chargés du point de vue de nos activités. Le plan

 20   Vance-Owen n'avait pas été accepté. Il n'était pas question de l'appliquer.

 21   La présidence de Bosnie-Herzégovine organisait des réunions dans le pays et

 22   à l'étranger. Nous ne sommes pas d'accord par rapport à l'avenir politique

 23   du pays, il y a même beaucoup de désaccords. Et je suppose que cette

 24   situation se reflète sur ce qui se passe au niveau militaire, puisque de

 25   toute façon la situation était déjà difficile.

 26   Q.  Je vous ai demandé si vous disposez d'informations concernant

 27   l'activité de l'ABiH, les attaques qui avaient eu lieu au début du mois de

 28   juin dans la vallée de Lasva, Travnik, et cetera. Est-ce que vous disposiez

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  1   d'informations à ce sujet ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Maintenant je vais vous demander d'examiner le document --

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pas tout à fait répondu à la question

  5   extrêmement intéressante de Me Nozica. Vous avez répondu, mais votre

  6   réponse ne me satisfait pas, je vais vous dire pourquoi. Me Nozica vous

  7   dit, au mois de juin, il y a donc des actions militaires à Vitez, Travnik

  8   et en Bosnie centrale, et elle vous dit, comment peut-il y avoir ces types

  9   d'actions militaires alors même qu'il y a donc des négociations sur la

 10   paix, et cetera. Donc la question est très bien posée, évidemment tout le

 11   monde attend la réponse parce que n'y a-t-il pas une contradiction. On

 12   négocie la paix, tout le monde se réunit, tout le monde applaudit, et puis

 13   parallèlement, il y a des conflits militaires.

 14   Alors, vous qui avez été un des acteurs principaux, il est

 15   intéressant de connaître votre position, et essayer de comprendre, parce

 16   que les Juges, nous, nous n'étions pas sur place, et on essaie de

 17   comprendre, de comprendre comment peut-il y avoir parallèlement des

 18   négociations tout en ayant une offensive en Bosnie centrale, car c'est

 19   indéniable qu'il y a eu une offensive de l'ABiH qui va durer d'ailleurs --

 20   en juillet jusqu'à quasiment au mois de novembre.

 21   Alors pouvez-vous répondre, si vous pouvez ? Si vous ne pouvez pas,

 22   dites que vous ne pouvez pas.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Jusqu'en novembre -- je peux vous répondre par

 24   rapport à la situation jusqu'en novembre. Par rapport à cette période, j'ai

 25   dit que je pensais qu'il y avait beaucoup de tension, beaucoup de

 26   désaccords au niveau de la présidence, et la présidence était l'instance la

 27   plus élevée du pays, cela se reflétait sur l'ABiH où il y avait aussi des

 28   tensions, parce que les négociations étaient en cours. Leur issue n'était

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  1   pas certaine. Nous n'avions pas vraiment accepté le plan Vance-Owen, mais

  2   de l'autre côté les plans Stoltenberg-Owen n'étaient pas encore présentés.

  3   Il s'agissait d'avoir un conflit pour avoir un avantage au niveau des

  4   négociations. 

  5   Il s'agissait de conquérir le plus de territoire possible pour avoir

  6   les arguments au moment des négociations, pour en avoir plus. Vous avez

  7   l'argument de la force au lieu d'avoir une force d'argument.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc là vous avez répondu. On essayait d'avoir plus,

  9   conquérir plus de territoire pour être en position de négocier. C'est ce

 10   que vous nous avez dit ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. C'est exact.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dernière question qui est ultra courte. Dans

 13   cette situation, les Croates qui globalement étaient d'accord au plan qui

 14   était en train de s'esquisser, à partir du plan Vance-Owen et la suite,

 15   comme vous vous étiez dans cette voie, pourquoi à ce moment-là ne pas, à

 16   votre niveau, avoir saisi la communauté internationale en disant, nous on

 17   est à 100 % avec vos vues, mais arrêtez les autres qui posent le problème.

 18   Est-ce qu'il y a eu des démarches dans ce sens ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, souvent je l'ai dit

 20   moi-même personnellement, surtout quand il s'agissait du plan Vance-Owen.

 21   Lord Owen m'a répondu en me disant : "Mile - je vais le dire en anglais -

 22   le plan Vance-Owen est mort." Voilà ce qu'il m'a dit. Dans ce sens et au

 23   cours des négociations qui ont eu lieu par la suite, des négociations qui

 24   portaient sur d'autres plans, nous acceptions tout parce qu'on représentait

 25   17.5 % de la population, Monsieur le Président. Même si au niveau des

 26   négociations on avait les mêmes droits, c'est un pourcentage qui est trop

 27   petit pour le remporter sur 82 % des autres. 

 28   Parce que mis à part les rapports entre les Musulmans et les Croates,

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  1   il y avait aussi cette troisième partie que l'on appelait "l'agresseur",

  2   qui tenait, qui contrôlait sous la force des armes un énorme pourcentage du

  3   territoire, jusqu'à 70 % je pense même. Au cours de négociations

  4   internationales, on appelait cela des faits accomplis. C'était l'argument

  5   le plus puissant malheureusement au cours des négociations.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci encore pour votre réponse.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très rapidement, je suis sûr que

  8   votre réponse sera tout aussi brève. Pourriez-vous replacer dans le temps,

  9   situer dans le temps le moment où Lord Owen vous a dit que le plan Vance-

 10   Owen était mort ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, non, je ne peux pas vous

 12   donner la date exacte. Je pense que c'était justement au cours du mois de

 13   juillet, la période dont on est en train de parler.

 14   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur les

 15   Juges.

 16   Q.  Nous allons revenir sur le mois de juin parce que je pense que

 17   suffisamment de base a été étayée pour poser les questions que je vais

 18   poser. Je vais vous demander d'examiner un certain nombre de documents

 19   militaires. Le document suivant, c'est le document 2D 1407. Dites-moi quand

 20   vous l'aurez trouvé.

 21   R.  Je l'ai trouvé.

 22   Q.  C'est un document qui a été signé par Tihomir Blaskic en date du 9 juin

 23   1993, donc la même date que la date à laquelle le 3e Corps d'armée envoie

 24   sa proclamation. Dans le premier paragraphe on dit : "Les forces musulmanes

 25   et les Moudjahidines ont procédé à une agression ouverte contre les

 26   territoires croates de la région de la Lasva. 

 27   "Au cours de l'attaque, une brigade a participé ainsi que les

 28   détachements des Moudjahidines de Travnik et Ravni Rostovo ainsi que des

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  1   portions de la 7e Brigade musulmane. Cette attaque du MOS et des

  2   Moudjahidines a détruit et chassé les Croates de la municipalité de

  3   Travnik. Mais cela ne leur a pas suffit, ils ont procédé à une attaque

  4   violente en direction de Zenica contre Guca Gora, 39 villages croates ont

  5   été vidés, 25 000 Croates sont partis à cause de la position extrêmement

  6   difficile dans laquelle se trouvait la Brigade de Travnik. Souhaitant

  7   préserver la vie des civils, des femmes et des enfants, nous étions obligés

  8   de procéder à l'évacuation de la population civile croate."

  9   Monsieur Akmadzic, pendant cette période de nombreux Croates quittent ce

 10   territoire. Dites-nous, est-ce que ce déplacement était le résultat

 11   justement de ces attaques, de ces opérations qui ont eu lieu au moins de

 12   juin, au mois de juillet, comme vous l'avez dit vous-même ?

 13   R.  Je ne sais pas quelle cours va prendre ma déposition par la suite. Je

 14   ne sais pas si je dois uniquement parler de cette période-là ou si je dois

 15   aussi parler de ce qui va se passer à l'avenir. Mais bon, de toute façon,

 16   je peux dire que la Bosnie centrale, la vallée de la rivière Bosna, de

 17   Lasva, de la rivière Lasva et Vrbas, que celui qui contrôle la Bosnie

 18   centrale, qui est le cœur de la Bosnie, comme je l'ai déjà dit, parce qu'à

 19   proximité se trouve la pierre où à un moment donné se trouvait

 20   l'inscription, "Le centre de la Yougoslavie." Parce que du point de vue

 21   militaire, stratégique et politique, ça a été une région extrêmement

 22   importante. A cause de cela, le gros des forces de l'ABiH et des autres

 23   forces qui l'accompagnaient, et à cause des usines que j'ai mentionnées

 24   aussi, le côté musulman voulait prendre le contrôle de cette région.

 25   Nous n'avons pas encore parlé, quand on a parlé des villes, de Fojnica,

 26   Kakanj ou Vares dont beaucoup d'habitants sont partis. Dans le monastère de

 27   Fojnica qui préserve beaucoup de souvenirs de ce qui était antan le royaume

 28   de Bosnie-Herzégovine, deux frères ont été assassinés alors que ces hommes

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  1   de foi pendant cette période-là et auparavant, enfin au cours de tout le

  2   temps, ont toujours eu de très bons rapports avec les citoyens, avec l'Etat

  3   mais aussi avec le côté musulman.

  4   Donc je ne suis pas du tout surpris par cela parce que là vous avez les

  5   lieux du culte des Croates de Bosnie, vous avez des églises, vous avez des

  6   monastères qui s'y trouvent et ces lieux ont été, bon je ne dirais pas

  7   détruits parce que je ne suis pas allé là-bas pour le voir, mais ils ont

  8   fait l'objet d'attaques.

  9   Q.  Monsieur Akmadzic, vous avez dit que la population croate est partie

 10   mais qu'est-ce que -- on va revenir là-dessus parce que qu'est-ce que cela

 11   veut dire exactement quand on dit qu'on a quitté un territoire ou qu'on a

 12   déménagé ? Je voudrais vous demander d'examiner un document. Il s'agit du

 13   document 2D 00902. Vous l'avez trouvé ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Il s'agit d'un document qui est à nouveau signé par M. Blaskic. Il

 16   s'agit d'un communiqué et il s'agit d'un document en date du 11 juin 1993.

 17   On parle d'un véritable désastre de la population de la Bosnie

 18   centrale dans ces villages, dans ces villes où vous avez plus de 30 000

 19   réfugiés, des personnes sans aucun espoir cherchant un refuge à Novi

 20   Travnik, Vitez et Busovaca, essaient d'échapper aux combattants musulmans.

 21   Les Croates attendent qu'on leur tire dessus, ils se cachent. La nuit

 22   dernière, à Vitez, on a tiré 18 enfants qui sont morts suite à cela.

 23   Vous avez parlé de l'attaque sur Vitez. Est-ce que vous parlez de cela ?

 24   R.  Oui, mais je dirais que les désastres ont été encore plus grands par la

 25   suite parce qu'on n'a pas encore parlé de Buhine, Kuce, de Vares et

 26   Krezancevo Celo. Le pire est encore à venir.

 27   Q.  Monsieur Akmadzic, je vais vous demander, j'espère que j'aurai

 28   suffisamment de temps, de nous dire ce que vous savez à ce sujet. J'espère

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  1   que j'aurai suffisamment de temps parce que je pense que ces informations

  2   seraient très utiles aux Juges de la Chambre. Mais pour conclure le thème

  3   que nous avons abordé, je vais vous demander d'examiner deux documents de

  4   l'armée qui datent de cette même période. Le premier porte, parce que les

  5   Juges de la Chambre savent ce qui s'est passé à Kakanj et Bugojno, on nous

  6   a déjà présenté les informations au sujet de cela. Il s'agit de deux

  7   documents. Le premier document c'est 2D 00438.

  8   Il s'agit d'un document de l'armée, d'un document de la République de

  9   Bosnie-Herzégovine, de l'état-major principal, poste de commandement

 10   avancé, n'est-ce pas, il s'agit de l'information portant sur l'échange de

 11   civils dans la zone de Travnik. Cette information est communiquée à l'état-

 12   major principal de Sarajevo pour information au président de la présidence.

 13   Les membres de la commission signent ce document. Je vais vous

 14   montrer certaines parties, portions de ce document que je trouve très

 15   importantes. "La commission chargée de libérer les détenus sur la base de

 16   l'accord en date du 10 juin 1993 a visité aujourd'hui le village Skradno

 17   dans la municipalité de Busovaca et les villages de Mehurici dans la

 18   municipalité de Travnik où on a constaté ceci :

 19   Dans le village Skradno se trouve 45 réfugiés du cru plus 90 réfugiés

 20   de Velika Bukovisa. Il s'agit de réfugiés musulmans puisque l'on sait que

 21   les Musulmans aussi étaient des réfugiés. Mais c'est surtout le deuxième

 22   paragraphe qui m'intéresse.

 23   "Dans le village de Mehurici, on a trouvé 247 civils de nationalité

 24   croate hébergés dans la salle de sport d'une école, dans le gymnase d'une

 25   école, qui sont placés sous la protection de la police militaire de la 306e

 26   Brigade, mais ils se voient exposés à un danger de mort de la part de ce

 27   que l'on appelle la Brigade de la Mort, dont les membres sont

 28   principalement des Moudjahidines, des étrangers qui se trouvent à

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  1   proximité.

  2   "M. Salko Beba du Groupe opérationnel ouest, qui faisait partie de

  3   notre escorte, nous a informés que la veille de notre arrivée, ces mêmes

  4   Moudjahidines ont fusillé une cinquantaine de civils dans un village à

  5   proximité. Un civil a réussi à survivre à ce massacre et se trouve parmi

  6   les 247 civils à Mehurici. Ensuite on dit qu'un membre de la 306e Brigade à

  7   Mehurici a dit que ces mêmes Moudjahidines maltraitent la population locale

  8   musulmane."

  9   Ensuite le paragraphe suivant, on peut lire : "Nous considérons que

 10   les problèmes des Moudjahidines compliquent à ce point les rapports déjà

 11   complexes entre le peuple musulman et le peuple croate dans la zone de

 12   responsabilité du 3e Corps. Que le président de la présidence de la

 13   République de Bosnie-Herzégovine avec les commandants de l'ABiH devraient

 14   venir à Zenica ou convoquer les commandants du 3e Corps pour des

 15   consultations urgentes à Sarajevo pour résoudre ces problèmes.

 16   Le dernier paragraphe, on peut lire entre M. Salko Beba et Petar Skopljak,

 17   qui étaient les représentants du HVO, il est convenu que demain le 24 juin

 18   1993 on procède à l'échange des civils du village Skradno contre des civils

 19   qui se trouvent dans le village de Mehurici. Même s'il s'agit d'un

 20   nettoyage ethnique au sens classique du terme, mais incapable de protéger

 21   ces civils de ces dangers imminents, nous, les membres de la commission,

 22   nous sommes d'accord que l'on procède à cet échange.

 23   Dans ce document on raconte quelle est la situation et je pense qu'on n'a

 24   vraiment pas besoin de faire des commentaires là-dessus puisque le document

 25   suivant c'est juste une suite logique de ce document. Il s'agit du document

 26   2D 00686.

 27   On l'a évoqué souvent dans le prétoire mais peut-être pour les Juges

 28   de la Chambre serait-il utile de le redire. Savez-vous nous dire qui est M.

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  1   Stjepan Siber ?

  2   R.  Bien sûr que je le sais. Je sais autant que je sais qui est Jovan

  3   Divjak.

  4   Q.  Alors le 25 juin 1993, il signe comme s'il était commandant adjoint,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, lui et Divjak, enfin je ne peux pas trop vous le dire, il devait

  7   être adjoint ou suppléant. Je ne sais pas comment ça s'appelait à l'époque,

  8   mais ils étaient au sommet même de cette pyramide militaire.

  9   Q.  Ce document de façon évidente a été rédigé par ses soins et il suit de

 10   deux jours ce document de la commission chargée des échanges à l'intention

 11   du président de la présidence en main propre et au commandant du Grand

 12   état-major de l'ABiH en main propre. Puis il dit, il se réfère à un

 13   courrier du 15 juin et il dit : "Je prends la liberté d'insister une fois

 14   de plus sur un déplacement de votre part vers Zenica."

 15   Mon collègue attire mon attention sur -- enfin je crois que tout le monde a

 16   été, l'a retrouvé, il s'agit du 2D 686.

 17   Au paragraphe 2, et là il s'agit d'un rapport assez extensif, je vais

 18   prendre l'essentiel. Au point 2, on dit : "Le 26 mai, le président du

 19   gouvernement municipal de Dzaferovic Ramiz devant Siber et Kraic et Vranj a

 20   dit : 'En ma qualité de citoyen, je suis déçu par le 3e Corps et le

 21   commandement du 3e Corps est impliqué dans des pillages et de la

 22   criminalité. Il y a des responsables qui

 23   procèdent à des exécutions de personnes après pillages.'" Je saute quelques

 24   passages, puis troisièmement.

 25   Il dit : "Merdan est l'organisateur principal des unités religieuses,

 26   l'unité de Suvalic et de Puric, 7e Brigade musulmane." Je saute un alinéa,

 27   et c'est là l'essentiel de ce que vous avez dit vous aussi -- "Zenica et

 28   l'armée du 3e Corps sont régis par des commandants qui sont de graves

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  1   criminels qui ne veulent pas, parce que ça ne leur convient pas, que

  2   d'avoir une victoire à l'égard des Chetniks, mais en même temps, ce qui

  3   leur convient, c'est d'avoir des conflits avec le HVO."

  4   Je passe quelques passages, puis ça commence par : "Entre-temps, le 8

  5   juin 1993, il a été exécuté 35 Croates dans le village de Bikosi. Quatre

  6   témoins ont été blessés mais sont restés vivants. Ces exécutés ont été

  7   exécutés par des Moudjahidines.

  8   "Le 10 juin 1993, il a été exécuté plus de 30 Croates dans le village

  9   de Susanj, non loin d'Ovnak par une 'armée'. 

 10   "Le 22 juin 1993, les membre de la commission pour la libération des

 11   prisonniers, Alihodzic et Negovetic -- Salko Beba du Groupe opérationnel

 12   ouest…" on parle d'exécutions de détenus et de civils croates. "Puis je

 13   souligne", dit-il au paragraphe suivant, c'est le commandant adjoint qui le

 14   dit, "les pillages et la criminalité règnent. Les combattants depuis leur

 15   position portent des sacs pleins de produits et de marchandises. J'ai

 16   obtenu une information disant que des individus refusaient d'aller sur des

 17   positions s'il n'y avait rien à piller (309e Brigade). Les policiers de la

 18   brigade continuent à arrêter et à battre les civils dans les caves. Le

 19   ministère de l'Intérieur, à savoir le centre de Sécurité publique, ainsi

 20   que le service de sécurité du 3e Corps ne coopèrent pas du tout, chose que

 21   M. Ganic a pu vérifier lors de la réunion au niveau du corps le 15 mai

 22   1993."

 23   Je pense que dans le compte rendu on doit retrouver une date qui est

 24   celle du 22 juin 1992, or, il faut que l'on lise 1993. Il s'agit de la page

 25   88, ligne 4

 26   Monsieur --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour ce qui est du numéro, j'ai

 28   l'impression que ce n'est pas le bon numéro. Le bon numéro c'est 2D 00686.

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  1   Vous avez ajouté un 2, et ça n'en fait pas partie.

  2   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Peut-être n'est-ce

  3   pas de ma part, mais peut-être à l'occasion de la frappe cela a-t-il été

  4   fait. Je crois avoir deux fois dit 2D 686.

  5   Q.  Monsieur Akmadzic, je voudrais vous demander tout d'abord d'une manière

  6   générale, puisqu'il s'agit de documents émanant de l'armée, avez-vous eu

  7   connaissance de cette situation telle qu'elle se présentait sur ces

  8   territoires avec les crimes commis à l'égard de la population croate ?

  9   Combien d'informations avez-vous obtenues sur ce point-là ?

 10   R.  Nous avons reçu des informations de ce type, moi-même j'en ai reçu. Ce

 11   que je puis vous dire, c'est qu'au sein de l'ABiH qui était essentiellement

 12   composée de Musulmans, il y avait des soldats de différentes régions de

 13   l'ex-Yougoslavie, et il y en avait même qui étaient venus de l'étranger. Je

 14   ne sais pas si je vous l'ai dit, mais je pourrais le redire, à savoir que

 15   M. Halilovic et M. Ganic sont des gens originaires du Sandzak. Nous, on les

 16   appelait les Sandzaklija, à savoir les gens du Sandzak. Il y en avait aussi

 17   qui étaient venus du Monténégro. Il y avait des gens qui n'étaient peut-

 18   être pas au courant de tout l'aspect délicat de nos relations

 19   interethniques, et j'entends par là essentiellement les Moudjahidines. Donc

 20   les crimes dont il est fait état ici ne reflètent pas la véritable image de

 21   ce que j'ai ouï dire se produire.

 22   Q.  Excusez-moi.

 23   R.  Il y a eu des tortures des plus graves et des souffrances les plus

 24   graves où ces gens ont été exécutés.

 25   Q.  Pour qu'il n'y ait pas d'interventions, vous avez dit, cela ne traduit

 26   pas la totalité des choses, mais avez-vous eu informations de ceci ?

 27   R.  De ceci, oui, j'ai eu vent de la chose.

 28   Q.  Merci. Ma question a été consignée, je vois. Ça n'a pas été consigné,

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  1   votre réponse. Alors est-ce que s'agissant des événements dont je viens

  2   parler au travers en citant ces deux documents, vous avez eu des

  3   informations ou pas à leur sujet ?

  4   R.  Oui, j'ai eu des informations.

  5   Q.  Je voudrais maintenant revenir sur les termes que vous avez utilisés, à

  6   savoir que les citoyens du groupe ethnique croate avaient quitté ces

  7   territoires-là. Pouvez-vous nous dire, parce qu'il faut que nous soyons

  8   très précis.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- passer sur un autre plan, je voudrais une

 10   question de suivi à partir des deux documents.

 11   Monsieur le Témoin, on vient de voir deux documents que je connaissais

 12   déjà, et je vous l'indique tout de suite. Ces deux documents qui sont --

 13   l'un est adressé au commandement Suprême de l'armée, donc à Sarajevo, et au

 14   président de la présidence. C'est le document 2D 438. Et le deuxième

 15   document, le 2D 686, est également adressé aux mêmes personnalités. Ce

 16   document, sans contexte -- sans contestation, semble indiquer que des

 17   membres de l'armée de l'ABiH font état d'exactions commises par l'ABiH. Ce

 18   qui montre que la situation est très compliquée. Parce que le premier, le

 19   document 2D 686, qui est écrit par Siber, fait état donc de problèmes. Et

 20   l'autre document, qui est également rédigé par Ivan Negovic et Fadil

 21   Alihodzic, parle de la situation à Mehurici. Apparemment, vous avez dit que

 22   vous étiez au courant de cette situation, mais de la place où vous étiez,

 23   saviez-vous qu'au sein du commandement de l'ABiH il pouvait ne pas y avoir

 24   une unité, puisque certains semblaient contester certains actes. Est-ce que

 25   vous avez eu ce sentiment qu'au sein même de l'armée, il y avait des

 26   dissensions, des divergences ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas vous

 28   apporter un témoignage fiable à ce sujet, mais partant des documents et

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  1   partant des informations qui sont arrivées à la présidence, il nous est

  2   donné la possibilité de conclure qu'il y a eu bel et bien des divergences.

  3   En d'autres termes, les dirigeants d'une brigade ou d'un corps étaient

  4   conditionnels au comportement de cette unité ou de ce corps.

  5   J'ai dit qu'il me semblait que ce 3e Corps était le plus extrémiste et a

  6   commis les pires des crimes à l'égard des Croates. Ça, c'est mon opinion

  7   personnelle. Et c'est précisément le corps dont il est question ici. Donc

  8   au sommet même de l'armée à Sarajevo, on relevait la présence d'événements

  9   de la sorte, et j'en ai parlé en personne au niveau de la présidence. J'ai

 10   dit : "Quand on était au sommet de la colline, on pouvait pousser une

 11   pierre, mais qu'on ne savait plus l'arrêter." D'une certaine façon,

 12   certaines unités, et certaines unités, dirais-je, de l'armée, ont échappé

 13   au peu de contrôle qu'il y avait eu.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'est votre réponse, pour vous, certaines

 15   armées de l'ABiH ont échappé au contrôle, y compris au contrôle de la

 16   présidence ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suppose cela, ce n'est pas une

 18   supposition, c'est une évaluation que je fais.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica. Excusez-moi de vous avoir

 20   interrompue, mais je voulais terminer sur les deux documents.

 21   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ces questions

 22   que vous avez posées ont été utiles, alors je n'en ai pas terminé pour ce

 23   qui est de l'intégralité de ces documents.

 24   Q.  Je vais enchaîner sur vos questions, Monsieur le Juge Antonetti, il est

 25   question de membres de l'ABiH et je veux revenir à ces citoyens, à ces

 26   civils croates, qui résidaient sur ces territoires. Est-ce qu'ils fuient ou

 27   est-ce qu'ils sont expulsés, peu importe de la part de qui ? Membres sous

 28   contrôle de l'ABiH ou membres de l'armée qui ne sont pas sous contrôle de

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  1   l'ABiH, mais qui interviennent dans le cadre de l'ABiH ? J'y reviens parce

  2   que vous avez dit que ces citoyens du groupe ethnique croate avaient quitté

  3   la région, alors pouvez-vous être plus précis ?

  4   R.  Les citoyens croates de la Bosnie centrale s'en allaient massivement

  5   dans des directions variées. La plupart s'en allait vers l'Herzégovine.

  6   Q.  Monsieur Akmadzic, dites-nous pourquoi ? La question est de savoir

  7   pourquoi. Pourquoi s'en vont-ils ?

  8   R.  Ils s'en vont sous des pressions et des menaces de l'ABiH et autres

  9   forces musulmanes qui sont évoquées ici.

 10   Q.  Excusez-moi, continuez. C'est ce que je voulais entendre.

 11   R.  Donc il y en a qui s'en vont vers l'Herzégovine. D'autres déménagent

 12   sous les mêmes pressions, bien sûr, vers des localités autres où il n'y a

 13   pas encore prédominance de ce fléau de guerre, ils sont partis vers

 14   Kiseljak, ceux-là, de Kakanj ils passaient par Kraljeva Sutjeska pour aller

 15   à Vares et ensuite de Vares ils allaient une fois de plus vers

 16   l'Herzégovine. Mon frère vivait à Vares avec sa famille. Et mon épouse est

 17   originaire de Vares, mais à l'époque elle n'y résidait pas.

 18   Mon frère a dû quitter Vares pour aller vers l'Herzégovine. Là-bas il y a

 19   eu de grands crimes de commis et d'énormes masses de la population, dont je

 20   ne saurais donner davantage de précision, mais je pourrais dire qu'il

 21   s'agissait de dizaines de milliers de personnes ayant quitté chez eux sous

 22   la pression de ces événements de guerre.

 23   Q.  Merci, Monsieur Akmadzic. Ce sont les précisions que nous avions voulu

 24   entendre.

 25   Je vais aborder un autre sujet. Si nous allons travailler jusqu'à 7 heures,

 26   j'essaierai de terminer, le temps est précieux, et je m'en remets aux Juges

 27   de la Chambre, si vous estimez qu'il est utile de continuer je peux le

 28   faire, si je ne finis pas peut-être pourrais-je terminer demain.

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  1   Début 1993, Monsieur Akmadzic, vous étiez premier ministre de la République

  2   de Bosnie-Herzégovine. Nous allons maintenant parler du sujet de l'armement

  3   de l'ABiH et du HVO à l'époque et même avant, et peut-être un peu après.

  4   Dans le cadre du gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine, y

  5   avait-il un accord, une convention sur la façon de répartir les armes qu'on

  6   se procurait ou qu'on fabriquait sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine

  7   ?

  8   R.  Ici je dois dire aux Juges de la Chambre qu'au tout début de la guerre,

  9   il y a eu un accord portant sur l'assistance humanitaire durant la guerre,

 10   et il avait été convenu, soit dit en passant, que cette aide humanitaire

 11   soit partagée en trois segments. Pendant la guerre, il y a d'abord eu des

 12   conflits armés en Bosnie centrale justement à cause des armes parce que

 13   nous manquions tous d'armes et il y avait en vigueur un embargo. Dans ces

 14   circonstances-là, il y a eu une sorte d'entente, que mon décédé adjoint

 15   avait confirmée, Hakija Turajlic, parce que c'est lui qui avait la charge

 16   des relations économiques, je crois vous l'avoir déjà dit. Et il était

 17   entendu que les armes soient partagées : 50 % vers le HVO et 50 % vers

 18   l'ABiH, là où on arriverait à se procurer des armes.

 19   Q.  Je me propose de vous montrer un document, c'est un document que j'ai

 20   déjà présenté dans le prétoire, c'est le 2D 147. On parle directement de

 21   vous-même. Lorsque vous l'aurez retrouvé, dites-le-moi.

 22   R.  Je l'ai.

 23   Q.  C'est un document de la République de Bosnie-Herzégovine, armée de la

 24   République de BiH. Commandement du 4e Corps, la date est celle du 17

 25   février 1993, et ici on parle de production de munitions et de fourniture

 26   de ces munitions à l'entreprise Igman de Konjic, de quelle façon cela a été

 27   livré et comment. Le document, on l'a déjà vu, je ne vais pas m'y attarder

 28   longuement, ça été essentiellement, je dirais même, non pas essentiellement

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  1   mais exclusivement, livré au 4e Corps et à ces brigades.

  2   Au paragraphe 2, page 2, c'est là qu'on parle de vous. C'est ce que vous

  3   venez de nous dire. En vérifiant chez Dzevad Hadjihuseinovic, j'ai constaté

  4   qu'il avait un courrier du gouvernement de la République de Bosnie-

  5   Herzégovine, daté du 31 janvier 1993, sans numéro d'enregistrement et sans

  6   la signature de Mile Akmadzic, mais avec le cachet du gouvernement de la

  7   République de Bosnie-Herzégovine, où l'on dit qu'il est donné ordre de

  8   procéder à un partage des quantités livrées et fabriquées de munitions à 50

  9   %/50 % entre l'armée et le HVO, et ensuite on dit que cela n'a pas été fait

 10   de la sorte; puis tout en bas on dit que partant d'un aperçu de quantités

 11   de munitions livrées pour la période du 1er janvier au 12 décembre 1993, on

 12   voit qu'il n'a pas été agi en fonction de ce qui a été convenu, et cela est

 13   également valable pour la période précédente d'après Dzevad. Est-ce que

 14   vous savez nous dire comment cela se passait ?

 15   R.  Oui, je me souviens de ce qui a été convenu. Il ne s'agissait pas

 16   d'ordre, les ordres, cela relevait des attributions d'autrui, mais nous

 17   avions quelque chose de convenu, et ce monsieur se réfère justement à ce

 18   type d'accord, à savoir que les armes, les munitions et tout le reste

 19   devaient être partagés à parts égales. Et ces forces militaires qui étaient

 20   chargées de la mise en œuvre ne s'en sont pas tenues à ce qui a été

 21   convenu, c'est évident.

 22   Q.  Donc l'accord était en vigueur. Le document est daté du 17 février 1993

 23   ?

 24   R.  Je m'excuse, mais il faudrait que j'ajoute aussi que nous, nous

 25   n'avions pas d'accord d'établi par écrit à cet effet. Nous avions convenu

 26   de la chose sans mettre cela sur papier. Cela a été quand même une chose

 27   convenue bien que n'ayant pas fait l'objet d'un contrat.

 28   Q.  Mais pour qu'il n'y ait pas de confusion, dans ce document M. Dzevad

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  1   dit qu'il a reçu de la part du gouvernement le 31 janvier 1993 un document,

  2   un courrier du gouvernement sans votre signature pour ce qui est de

  3   procéder de la sorte au niveau du partage ?

  4   R.  Que les choses soient tout à fait claires, le courrier existe et ça

  5   c'est exact; la chose convenue entre les deux parties c'est tout à fait

  6   autre chose. Le courrier est tout à fait authentique lui.

  7   Q.  Ceci me suffit.

  8   Penchons-nous maintenant sur le document suivant le 2D 228. Très

  9   brièvement, les documents sont courts, c'est un document du commandement du

 10   4e Corps daté d'une date antérieure à celle de tout à l'heure où il est

 11   question de l'accord tel qu'il existait. C'est signé par M. Arif Pasalic,

 12   et dans la première partie, il est dit : "J'ordonne qu'à tous les postes de

 13   contrôle sous l'autorité de l'armée de la RBiH et de la police militaire,

 14   il soit procédé à un renforcement du contrôle des personnes et des

 15   véhicules ainsi que des marchandises transportées, et à cet effet il

 16   convient d'empêcher tout transport d'armes, de mines et de moyens explosifs

 17   ainsi que de personnel pour les besoins du HVO."

 18    Vous venez de voir ce document ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pouvez-vous nous dire si vous avez su combien, jusque-là et après cela,

 21   il est arrivé d'armes pour les besoins de l'ABiH ? Je ne m'attends pas à

 22   des chiffres, mais pouvez-vous nous dire brièvement ce qui est arrivé pour

 23   l'ABiH en passant par des territoires contrôlés à ce moment-là par le HVO ?

 24   R.  L'ABiH ne pouvait se procurer des armes que de deux façons : l'une des

 25   façons c'était la fabrication au niveau des unités dont j'ai parlé en

 26   Bosnie centrale et à Igman, l'usine Igman de Konjic, et le reste c'étaient

 27   des armes qui passaient, qui transitaient directement par le territoire

 28   sous le contrôle du HVO.

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  1   Alors de quelle quantité d'armes il s'agit, j'ai du mal à en parler plus

  2   dans le détail, mais la plupart des armes qui étaient en possession de

  3   l'ABiH ne pouvaient provenir que de ces deux façons-là.

  4   Q.  Bon. J'ai encore un petit document bref pour ce qui est du même sujet,

  5   Monsieur --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de suivi. Pour un observateur

  7   extérieur, cette situation est paradoxale, étonnante, stupéfiante. On

  8   s'aperçoit par ces documents, mais qu'on nous avait déjà présentés avec

  9   d'autres témoins, que l'ABiH était alimentée par des armes qui transitaient

 10   par le HVO, alors même que les unités de l'ABiH se livraient à des

 11   opérations militaires contre le HVO. Donc d'un côté on donnait des armes

 12   qui allaient servir contre soi-même. Quelle est l'explication qu'à votre

 13   niveau vous pouvez donner sur cette situation qui est, qui peut être

 14   stupéfiante ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, il y a plus paradoxal que

 16   cela, des situations dont je n'ai pas parlé. Une troisième source pouvait

 17   être l'achat auprès des effectifs de l'armée de la Republika Srpska. Cette

 18   guerre a été truffée de paradoxes. Cependant, l'ABiH et le HVO n'ont jamais

 19   cessé à part entière ou complètement d'être des partenaires. Il y a

 20   toujours eu des accords, indépendamment des conflits en temps de guerre.

 21   J'étais personnellement présent à une conversation chez M. Boban.

 22   Je ne décidais de rien, je n'étais pas encore premier ministre, mais M.

 23   Boban a été sollicité pour la livraison d'une certaine quantité d'armes et

 24   il a promis cela devant moi. Je n'ai pas suivi au-delà, je pourrais même

 25   dire à qui cela a été fait comme promesse, qui avait demandé ces armes et

 26   peu importe en l'occurrence. Notamment dans cette première phase de la

 27   guerre, lorsqu'on n'avait pas encore lancé la production, qu'on n'avait pas

 28   encore maîtrisé la technologie de la fabrication, le gros des armes de

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  1   l'ABiH venait par le biais du HVO.

  2   M. Izetbegovic m'a dit lui-même que la ville de Sarajevo qui était

  3   complètement assiégée, il arrivait ou recevait certaines quantités d'armes

  4   tout de même. Alors nous étions en bons termes, je lui ai demandé mais

  5   comment, puisqu'il n'y a pas un oiseau qui pourrait passer les lignes pour

  6   arriver à la ville et il m'a dit : Mile, tu sais les armes on les

  7   transporte aussi à cheval.

  8   Alors y a-t-il eu d'autres filières, par exemple en passant en paquet avec

  9   l'aide humanitaire, ça je ne peux pas en témoigner car il y avait des

 10   sanctions en vigueur et je ne le sais pas. Mais il se peut qu'il y ait eu

 11   de cela aussi. Je parle des transports aériens.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Nous sommes contraints d'arrêter. Hier, déjà

 13   on a été au-delà de l'heure, alors Monsieur, notre audience reprendra donc

 14   demain à 14 heures 15. Vous avez compris que manifestement vous serez

 15   obligé d'être là lundi parce que nous n'avons pas terminé avec le temps de

 16   la Défense.

 17   J'indique à Maître Nozica quelle a utilisé une heure et 11 minutes, donc

 18   pour ses tablettes, je lui indique cela.

 19   Donc demain, en reprenant la Défense terminera le contre-interrogatoire et

 20   après l'Accusation commencera aussi son propre contre-interrogatoire. Donc

 21   prenez vos dispositions pour être là jusqu'à lundi après-midi,

 22   malheureusement on avait pris du retard à cause d'un autre témoin ce qui

 23   montre le décalage. Nous ne sommes malheureusement pas maître de cela.

 24   Voilà. Donc avec toutes nos excuses.

 25   Nous nous retrouverons donc demain à 14 heures 15 et je vous remercie. Je

 26   vous souhaite une bonne soirée.

 27   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le jeudi 19 juin 2008,

 28   à 14 heures 15.