Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 34737

  1   Le mardi 18 novembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, appeler le numéro de

  6   l'affaire.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Affaire

  8   IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 10   Bien. En ce mardi 18 novembre 2008, je salue MM. les Accusés, Mmes et MM.

 11   les Avocats, le bureau du Procureur et toutes les personnes qui nous

 12   assistent.

 13   Bien. Je constate que M. Praljak n'est pas là. Il doit être malade.

 14   Il y a un virus qui doit courir. Et moi-même, je fais des efforts pour être

 15   présent.

 16   Je vais maintenant donner la parole à M. le Greffier pour nous donner deux

 17   numéros IC.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Le

 19   premier concerne l'objection faite par la Défense Prlic aux pièces versées

 20   par le truchement du témoin Batinic. Ce sera le document ou la pièce IC

 21   00886.

 22   Ensuite nous avons la réponse de l'Accusation à ce qui a été déposé

 23   par la Défense Prlic concernant Batinic, et ce sera désormais la pièce IC

 24   00887.

 25   Troisièmement, nous avons une demande de versement de pièces par le

 26   truchement du témoin Batinic ce sera la pièce IC 00888, Monsieur le

 27   Président.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

Page 34738

  1   Bien. Monsieur Scott, je vous donne la parole. Encore faut-il qu'il y ait

  2   le témoin.

  3   Oui, Maître Kovacic.

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]  

  5   M. KOVACIC : [interprétation] En attente du témoin, permettez-moi, Monsieur

  6   le Président, de dire ceci : la Défense Praljak a aussi déposé une liste IC

  7   il y a un certain temps de cela. Ça a été déposé au greffe, mais on n'en a

  8   pas donné lecture aujourd'hui, peut-être est-ce parce que M. Chuka n'est

  9   pas là, on pourra le faire plus tard mais je voulais m'assurer.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : La Juriste de la Chambre va, en liaison avec le

 11   greffier, vérifier cela et, bien entendu, on donnera un numéro.

 12   LE TÉMOIN : NEVEN TOMIC [Reprise]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, le contre-interrogatoire se

 15   poursuit. Je ne sais pas s'il se terminera aujourd'hui, tout dépendra de Me

 16   Karnavas, mais si jamais Me Karnavas n'a pas le temps de terminer son

 17   contre-interrogatoire, il se poursuivra demain.

 18   Monsieur Scott, oui.

 19   Monsieur le Témoin, à moins que vous n'ayez une indisponibilité totale.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Demain ce n'est pas possible, car mon épouse

 21   part en voyage et je dois prendre soin des enfants. Nous avons des enfants

 22   en bas âge, 3 ans et un an et demi.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors que chacun fasse un effort afin que vous

 24   puissiez garder vos enfants.

 25   Monsieur Scott, vous avez la parole.

 26   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à vous tous, bonjour à toutes

 28   les personnes se trouvant dans ce prétoire et autour de celui-ci.

Page 34739

  1   Contre-interrogatoire par M. Scott : [Suite]

  2   Q.  [interprétation] Bonjour aussi à vous, Monsieur Tomic.

  3   Monsieur Tomic, je voulais mettre la dernière main à certains sujets

  4   évoqués en fin de journée hier. J'aimerais d'abord vous montrer la pièce P

  5   10657. Je répète le numéro, la pièce se trouvant dans le troisième

  6   classeur, 10657. Nous allons essayer de tirer le meilleur parti possible du

  7   temps qui nous est donné, bien sûr, nous voulons tenir compte de vos

  8   obligations, mais je pense qu'il est utile que chacun fasse un effort pour

  9   être le plus efficace que possible. C'est dans l'intérêt de tout le monde.

 10   Je répète le numéro de la pièce P 10657. Simplement quelque chose tout à

 11   fait de base, ce ne sera pas difficile, vous verrez.

 12   C'est une série de décisions délivrées par le premier ministre faisant

 13   fonction, Ivan Bender. Apparemment, d'après le premier document du

 14   classeur, c'est une décision qui démet de ses fonctions M. Jadranko Prlic,

 15   alors qu'il était premier ministre de la République d'Herceg-Bosna. La

 16   signature étant le 15 juin 1996 ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Est-ce que ceci concorde avec les souvenirs que vous avez de la

 19   situation ? Peut-être pas pour ce qui est de la date précise, mais est-ce

 20   que vers le milieu de l'année 1996, M. Prlic a cessé d'être premier

 21   ministre de la République croate d'Herceg-Bosna ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Q.  Prenons la deuxième décision, chiffre romain II, c'est le même

 24   document. Vous allez voir je pense et je vous demande de le confirmer,

 25   qu'en application de cet ordre, M. Valentin Coric, M. Pero Markovic, entre

 26   autres, sont démis de leurs fonctions de vice-premiers ministres du

 27   gouvernement de la République croate d'Herceg-Bosna. Dans la même veine, si

 28   vous prenez le chiffre romain III, vous voyez :

Page 34740

  1   "Sont démis de leurs fonctions de membres du gouvernement de la République

  2   croate d'Herceg-Bosna les personnes suivantes :"

  3   Et pour ce qui nous intéresse ici, je mentionne simplement 4, Neven Tomic,

  4   et le numéro 5, M. Kozulj. Je pense que nous pouvons passer à la page

  5   suivante, nous allons voir Bozo Rajic, Jozo Maric, et Vladislav Pogarcic,

  6   un nom qui a été souvent évoqué pendant votre audition. 

  7   Pouvez-vous aussi confirmer que, de façon générale, c'est vers le milieu de

  8   l'année 1986 que vous et ces autres personnes avaient quitté pour ainsi

  9   dire vos fonctions au sein du gouvernement de la République croate

 10   d'Herceg-Bosna ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Très bien. Merci. Prenons maintenant, si vous le voulez bien, la pièce

 13   P 10704. Troisième classeur, elle aussi, je répète le numéro du document P

 14   10704.

 15   Rappelez-vous, hier je vous avais posé une question ou, de toute façon, je

 16   vous avais présenté l'hypothèse suivante : n'était-il pas vrai de dire

 17   qu'au moment de l'automne 1994, il y avait des discussions qui essayaient

 18   de se départir de l'idée que chacun des trois groupes, Croates, Serbes,

 19   Musulmans, qu'on parle d'unité, d'entité, quel que ce soit le terme qu'on

 20   préfère, qu'il y avait une évolution - ce n'était pas peut-être les mots

 21   utilisés à l'époque - mais une évolution vers ce qui est devenu en fin de

 22   compte la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Vous vous souvenez de ces

 23   questions ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que c'est vers cette époque qu'en plus d'une discussion à propos

 26   d'une éventuelle fédération on a commencé à discuter d'une éventuelle

 27   confédération qui se composerait de la fédération, donc là, c'est la

 28   fédération croato-musulmane qui constituerait, pour ainsi dire, une unité

Page 34741

  1   de la confédération, et la République de Croatie étant l'autre composante,

  2   l'autre unité de cette confédération.

  3   R.  Cela faisait partie intégrante des accords de Washington. Il y avait un

  4   contrat très confédéral entre la Croatie et la Fédération de Bosnie-

  5   Herzégovine.

  6   Q.  Mais est-ce que c'est vers cette époque, d'après les souvenirs que vous

  7   en avez, qu'il y avait du moins dans certains milieux, une espèce

  8   d'antienne qui disait que "sans fédération il n'y a pas de confédération" ?

  9   R.  Oui, on avait insisté sur la mise en œuvre des accords de Washington

 10   dans leur intégralité. Car la partie bosnienne ne voulait pas en parler de

 11   cet accord préconfédéral, mais voulait uniquement parler de l'autre partie

 12   des accords de Washington portant sur l'accès aux ports de Ploce et de

 13   Neum. Et c'est de cela le plus souvent qu'on a parlé --

 14   Q.  Excusez-moi, Monsieur, de vous interrompre, mais j'agis dans l'intérêt

 15   de vous comme de moi. La question, ce n'est pas l'accès à la mer, mais est-

 16   ce que finalement tout le monde ne disait pas que c'était ça qu'il faut

 17   faire. Est-ce que vous vous souvenez de l'origine de ce qui se disait, qui

 18   a formulé ces termes, qui a donné cette formule ?

 19   R.  Pour autant que je m'en souvienne, cela venait le plus souvent de la

 20   part de M. Bender.

 21   Q.  Examinons la pièce P 10704, celle que je vous ai demandé d'examiner il

 22   y a un instant. Vous voyez, en grande partie on voit que c'est un entretien

 23   avec M. Bender qui est repris dans un article de la BBC, le 15 juin 1994,

 24   la source étant la radio croate de Zagreb, à 15 heures 30, temps de

 25   Greenwich, le 13 juin 1994. Regardez, s'il vous plaît, le milieu de la

 26   page, on fait une introduction, puis je crois que vous allez voir entre

 27   crochets, dans la première partie entre crochets, le nom de M. Bender.

 28   Essayez de trouver ce passage pour vous orienter.

Page 34742

  1   Dans ce paragraphe, M. Bender dit ceci :

  2   "Au début, il faudrait souligner que cette réunion a été organisée alors

  3   que la délégation de la République Croate d'Herceg-Bosna effectuait une

  4   visite à Zagreb à l'occasion du jour de l'indépendance de la Croatie en

  5   tant qu'Etat.  M. Jadranko Prlic et M. Pero Markovic étaient à la tête de

  6   la délégation."

  7   Je saute un paragraphe. Le paragraphe suivant dit ceci, c'est M. Bender qui

  8   parle encore, il dit :

  9   "Nous devons rappeler que la Fédération de Bosnie-Herzégovine et son

 10   organisation sont étroitement liées à l'établissement de la confédération

 11   avec la Croatie. Ça fait partie d'un tout. En effet, s'il n'y a pas

 12   établissement de la confédération, il ne peut pas y avoir de fédération. Je

 13   crois que tous doivent le comprendre, et il faut rappeler que ceci c'est un

 14   tout indissociable, que c'est un tout unitaire, et ceci ne doit aucunement

 15   être contesté."

 16   Pensez-vous que M. Bender rend bien compte de la position du HVO et des

 17   dirigeants de l'Herceg-Bosna à l'époque ? Nous sommes alors en juin 1994.

 18   R.  Cela n'était pas une position généralement adoptée. C'était surtout

 19   sous l'impact du fait que c'était le président du HVO de Neum, et

 20   s'agissant de ce deuxième volet des accords de Washington, c'est lui qui

 21   avait surtout insisté sur cette approche lorsqu'il a pris la parole.

 22   Mais en substance, il s'agissait de la mise en œuvre des accords de

 23   Washington en tant que paquet de décisions signées dans leur intégralité.

 24   Q.  Le paragraphe suivant, plus exactement la deuxième ligne, qui dit

 25   :

 26   "Les organes de la République croate d'Herceg-Bosna et l'Herceg-Bosna

 27   elle-même resteront en vigueur tant que ce tout dont j'ai parlé n'a pas été

 28   établi. Il n'est pas question de suspendre les activités du gouvernement de

Page 34743

  1   la République croate d'Herceg-Bosna. Au contraire, ce gouvernement doit

  2   être renforcé encore plus tant qu'on n'a pas une fédération et une

  3   confédération."

  4   Je ne reprends pas tous les détails. Je ne reprends pas toutes les

  5   nuances, mais était-ce bien ce que pensaient à l'époque les dirigeants

  6   d'Herceg-Bosna ?

  7   R.  La position de nos dirigeants était celle de dire qu'il fallait mettre

  8   en œuvre les accords de Washington tels que signés, et cela englobait la

  9   création d'une Fédération de Bosnie-Herzégovine et la réalisation des

 10   autres documents; accès à Ploce, libre passage à Neum, et contrat

 11   préconfédéral qui faisait partie intégrante des accords de Washington.

 12   Q.  Monsieur, je vous demande de répondre à la question précise que je vous

 13   ai posée. Est-ce que le HVO et les autorités de l'Herceg-Bosna à l'époque,

 14   pensant que l'Herceg-Bosna en tant qu'entité ainsi décrite ici,

 15   gouvernement de la République croate d'Herceg-Bosna, allait rester en

 16   fonction, qu'il n'était exclu que cette entité cesse d'exister tant qu'il

 17   n'y aurait pas de fédération et de confédération établies avec la Croatie ?

 18   Est-ce que c'était bien la position du HVO Herceg-Bosna ?

 19   R.  C'est ce qui est écrit dans les accords de Washington, qui disent les

 20   arrangements existants sur le plan administratif, à savoir l'Herceg-Bosna -

 21   -

 22   Q.  Excusez-moi. Je vous demande de coopérer. Ma question était très

 23   claire. Vous ne cessez de répondre que c'était la substance de l'accord de

 24   Washington. Est-ce que vous voulez dire que ce n'était pas là la position

 25   du HVO ? Vous n'étiez pas d'accord là-dessus ? L'Herceg-Bosna et le HVO et

 26   ses dirigeants avaient une position différente ?

 27   R.  Non. Dans ce cas-ci, les positions étaient les mêmes. Je vous l'ai déjà

 28   dit. Avant la création de la fédération, avant que les institutions

Page 34744

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34745

  1   fédérales ne soient mises en place, on fait fonctionner un arrangement

  2   fédéral avec les écoles, et cetera. Donc on attend que soient mises en

  3   place les institutions fédérales. J'en ai déjà parlé. Donc dans cette

  4   période transitoire, l'Herceg-Bosna a continué à fonctionner en application

  5   des dispositions transitoires des accords de Washington.

  6   Q.  Prenons maintenant la pièce P 10696. Ça se trouve dans le même

  7   classeur. C'est encore un article de la BBC, mais qui paraît, celui-là, six

  8   mois plus tard, à savoir le 12 décembre 1994, et qui reprend ce qui a été

  9   transmis à la radio croate à Zagreb le 10 décembre. Apparemment ça a été

 10   diffusé le 10 décembre 1994. Il est question d'une réunion, d'une

 11   déclaration présentée par le bureau du président Tudjman. Il semble,

 12   qu'entre autres personnes participant à cette réunion, vous étiez là. Il y

 13   a un premier paragraphe assez long. Je vois le nom de M. Zubak, celui de M.

 14   Prlic, celui de Neven Tomic, en plus d'autres personnes. Pour ce qui nous

 15   intéresse ici, je vous demande de prendre l'avant-dernier paragraphe :

 16   "Le président Tudjman a déclaré que la Croatie soutenait

 17   vigoureusement la création de la fédération et de sa confédération avec la

 18   Croatie et que la République croate d'Herceg-Bosna continuerait d'exister

 19   tant que la fédération et la confédération n'auraient pas commencé à

 20   fonctionner."

 21   Vous étiez à cette réunion apparemment. Etes-vous d'accord pour dire

 22   que c'était là la quintessence, en tout cas, la position adoptée par le

 23   président Tudjman et la délégation d'Herceg-Bosna ? Je rappelle la date,

 24   nous sommes en décembre 1994.

 25   R.  C'est exact, et c'est conforme à ce que j'ai dit.

 26   Q.  Monsieur --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, excusez-moi d'intervenir. Je

 28   vais aller très vite, parce qu'on est dans un sujet très important et nous

Page 34746

  1   ne pouvons faire d'erreur.

  2   Si je comprends bien ce que vous dites, les accords de Washington, d'après

  3   vos propres dires, en quelque sorte ont reconnu l'existence de la

  4   République de l'Herceg-Bosna, mais comme le dit le président Tudjman dans

  5   le document que le Procureur vous montre, la République d'Herceg-Bosna va

  6   fonctionner jusqu'à ce que la création de la fédération ou de la

  7   confédération entre la Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine se

  8   mette en place. La République d'Herceg-Bosna doit continuer à fonctionner.

  9   Est-ce bien cela que vous dites dans l'esprit des accords de

 10   Washington ? Bon, évidemment, les Juges, on va regarder cela de très près,

 11   mais il y a -- comme vous, vous étiez un acteur à l'époque, vous pouvez

 12   peut-être répondre.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Les accords de Washington, j'en ai déjà parlé,

 14   prévoyaient la mise en place de nouvelles institutions fédérales, donc le

 15   gouvernement fédéral, les douanes fédérales, une banque centrale, et

 16   cetera. Cela ne prévoyait pas la suppression de l'Herceg-Bosna et le fait

 17   de faire réintervenir les institutions de la république qui existaient déjà

 18   mais d'en créer de nouvelles. Dans les dispositions transitoires de ces

 19   accords de Washington, il est dit que l'arrangement administratif existant,

 20   c'était l'appellation autre pour l'Herceg-Bosna, fonctionnerait jusqu'à la

 21   mise en place des institutions fédérales. A partir du moment où l'on

 22   mettrait en place une douane fédérale, on supprimerait la douane de

 23   l'Herceg-Bosna, mais celle de la Bosnie-Herzégovine également. Lorsqu'on

 24   ferait une administration des impôts de la fédération, on supprimerait tant

 25   celle de l'Herceg-Bosna que de la Bosnie-Herzégovine. Donc c'était cela, en

 26   substance, les résistances pour ce qui est de la mise en œuvre des accords

 27   de Washington, parce que la partie bosnienne insistait sur la suppression

 28   de l'Herceg-Bosna pour que l'on rejoigne les institutions existantes qui

Page 34747

  1   étaient celles de la République de Bosnie-Herzégovine. Et ce n'était pas

  2   cela la teneur des accords de Washington.

  3   Au final, on a reconnu la chose, car avant les accords de Dayton, il a été

  4   signé un accord de revitalisation de la fédération et il a été créé un

  5   gouvernement de la fédération à partir de ce gouvernement de la république,

  6   et on a commencé à édifier les institutions fédérales. Au fur et à mesure

  7   que cela s'est édifié, il y a eu disparition des institutions de l'Herceg-

  8   Bosna, à partir, par exemple, de l'établissement chargé des paiements

  9   jusqu'à l'administration des impôts, de la police, et cetera. Enfin, je

 10   parle surtout des domaines où j'ai eu à intervenir.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- terminer. Vous dites qu'il y a eu un accord de

 12   revitalisation avant les accords de Dayton. C'est ligne 6, page 11. Cet

 13   accord a été signé entre qui et qui ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Cet accord a été signé entre M. Zubak, me

 15   semble-t-il, et M. Ganic, qui étaient président et vice-président de la

 16   fédération. Ça a été également signé en Amérique - je ne sais plus si

 17   c'était à Vienne. C'était juste avant les accords de Dayton, lorsqu'il

 18   était devenu clair qu'on ne pouvait pas aller de l'avant en maintenant la

 19   situation telle quelle et lorsque la partie bosnienne avait pu bénéficier

 20   de certaines garanties disant que la République de Bosnie-Herzégovine

 21   continuerait à exister comme une Bosnie-Herzégovine nouvelle en application

 22   des accords de Dayton. A ce moment-là, ils ont accepté de dissocier le

 23   gouvernement de la fédération du gouvernement de la République de Bosnie-

 24   Herzégovine, et c'est là que le processus véritable de la mise en place

 25   d'une fédération a commencé.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 28   permettez, je voudrais juste souligner une erreur qui peut nous amener à

Page 34748

  1   des incompréhensions, et c'est important, lorsque vous essaierez de

  2   comparer les accords de Washington avec le témoignage de M. Tomic.

  3   En page 10, ligne 18, le témoin dit : "dans les dispositions transitoires

  4   de ces accords de Washington." Il y a eu une notion d'utilisée "regional

  5   arrangements," à savoir, "l'arrangement original" en français. Mais si j'ai

  6   bien compris le témoin, il a parlé d'arrangements administratifs, et c'est

  7   la notion de "arrangements administratifs" qui a été utilisée dans la

  8   disposition transitoire pour parler de l'Herceg-Bosna. Je pense que c'est

  9   important, et on peut reposer la question au témoin si vous le souhaitez,

 10   pour qu'il nous l'explique.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- l'arrangement administratif dans les accords, en

 12   fait, concernait la République de l'Herceg-Bosna ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] On disait "l'arrangement administratif

 14   existant." Ce sont les termes mêmes des accords de Washington, "arrangement

 15   administratif existant."

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 17   Monsieur Scott.

 18   M. SCOTT : [interprétation]

 19   Q.  Pour en terminer de ce sujet - et je vous remercie d'avance de faire

 20   preuve de brièveté - je reprends ce que vous disiez il y a un instant : au

 21   cours de cette période, entre les accords de Washington et les accords de

 22   Dayton, les premiers signés en 1994 et l'autre accord, en 1995, au cours de

 23   cette période, la fédération n'a jamais vraiment été une structure

 24   opérationnelle, elle n'a jamais vu le jour avant Dayton, n'est-ce pas ?

 25   R.  Les institutions, comme je vous l'ai dit, n'étaient pas encore mises en

 26   place; c'est exact.

 27   Q.  S'agissant de la confédération de la fédération avec la République de

 28   Croatie, jamais cette confédération n'a été établie, n'est-ce pas ?

Page 34749

  1   R.  Exact.

  2   Q.  Conviendrez-vous que dans ce conflit épouvantable, qui est la raison de

  3   notre présence même ici dans ce prétoire, au cours de ce conflit

  4   épouvantable, chacun des camps a commis des crimes et qu'il y a eu des

  5   victimes de part et d'autre ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quels furent certains des

  8   crimes commis par le HVO, en guise de suivi ?

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Si je ne me trompe, ici, c'est un témoin des

 10   faits. Comment peut-il maintenant se prononcer sur la question de savoir

 11   qui a commis des crimes et quel genre de crimes on aurait commis ? Peut-

 12   être que la question précédente était de teneur générale, mais je pense

 13   qu'ici on va trop loin. C'est peut-être une question destinée à un expert.

 14   Mais en fin de compte, ici, c'est bien la Chambre qui devra apprécier tout

 15   ceci.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Pas du tout, Monsieur le Président, Messieurs

 17   les Juges. Cet homme était un haut fonctionnaire, un haut commis de l'Etat

 18   pendant cette période. Il dit que le HVO a commis des crimes. C'est un

 19   homme qui a une bonne éducation. Alors à moins qu'il n'ait joué la

 20   politique de l'autruche, je pense qu'il doit avoir une idée s'il dit : "Je

 21   suis d'accord, on a commis des crimes de part et d'autre. Dans tous les

 22   cas, je pense que la Chambre a le droit de savoir ce qu'il en pense. Ceci

 23   ne dépasse pas ses compétences du tout.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est une question des plus vagues

 25   me semble-t-il. Quel intérêt la Chambre peut-elle en retirer s'il reçoit

 26   une réponse ? Si on dit : "Voilà, je sais qu'il y a eu des viols, des

 27   incendies volontaires, criminels," --

 28   M. SCOTT : [interprétation]

Page 34750

  1   Q.  Est-ce que vous voulez dire que pendant toute la durée du conflit,

  2   Stupni Do, Ahmici, Stolac, l'Heliodrom, le siège à  Mostar, vous voulez

  3   dire que cet homme ne savait rien de tout cela ? Est-ce que c'est bien ce

  4   que la Chambre dit ?

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous semblez partir un peu là dans

  6   une expédition.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Pas du tout. Je pense que cet homme - et là, je

  8   suis tout à fait en désaccord avec vous, Monsieur le Juge Trechsel - cet

  9   homme peut parler de cela, et ceci intervient pour déterminer sa

 10   crédibilité. Il était à quelques mètres à peine à Mostar, du lieu où se

 11   commettaient quotidiennement des crimes --

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Scott.

 13   M. SCOTT : [interprétation] -- et vous voulez dire qu'il n'en sait rien ?

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous aviez une possibilité technique d'aborder ce

 15   sujet, car vous aviez présenté un compte rendu présidentiel où il était

 16   fait état de Stupni Do, bien. Et donc vous n'avez pas posé des questions

 17   sur Stupni Do. Vous avez posé des questions sur autre chose. Moi-même, j'ai

 18   indiqué que cette réunion avait eu lieu suite à l'affaire de Stupni Do.

 19   Donc partant de là, vous auriez pu li dire : Est-ce qu'il a eu connaissance

 20   d'événements à Ahmici, Stupni Do. Bon, il répondu : "Oui," "non." S'il

 21   répondu "oui," à ce moment-là, vous poursuivez la question. S'il répondu

 22   "non," c'est terminé, voilà. Et ça éviterait aux avocats de se lever telle

 23   une vague qui déferle sur la salle d'audience pour faire des objections.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi. Ce n'était pas une vague

 25   déferlante. Ce n'était qu'un conseil qui s'était levé --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai vu Me Karnavas se lever aussi.

 27   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, la quintessence, et je

 28   voudrais répondre ici aux questions des Juges, ce qui compte ici, c'est que

Page 34751

  1   j'aurais pu m'y prendre de cette façon-là. J'aurais pu poser des questions

  2   en disant : "Mais qu'en est-il de l'Heliodrom, de Stupni Do, de Stolac," de

  3   ceci et de cela ? J'aurais pu m'y prendre de cette façon-là. Mais c'est

  4   parfaitement correct de demander au témoin de quoi il se souvient. Qu'est-

  5   ce qui l'a frappé, lui, à l'époque ? Qu'est-ce qu'il a à nous dire ? Il

  6   était d'accord pour dire que des crimes avaient été commis par son camp

  7   aussi, pour ainsi dire. Alors pourquoi est-ce qu'il ne peut pas nous en

  8   parler ? Je suis tout à fait perplexe. Je ne comprends pas pourquoi vous

  9   trouvez que ceci soulève des objections. Le témoin est parfaitement à même

 10   de répondre à ces questions, et c'est tout à fait pertinent pour ce qui est

 11   de sa crédibilité.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Une première chose, il faut d'abord poser

 13   les bases. Il faut montrer que ce témoin était à Ahmici et à Stupni Do.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est pas nécessaire.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Laissez-moi parler. Taisez-vous, ne serait-

 16   ce que quelques instants.

 17   S'il ne peut pas poser des bases de ce qu'il dit, c'est une question qui

 18   est tout à fait hors de propos.

 19   Puis, la Chambre a déjà rendu une décision. Je pense que maintenant vous

 20   devez donner instruction à M. Scott de poursuivre.

 21   M. SCOTT : [interprétation] La Chambre n'a pas statué. La Chambre essayait

 22   de nous donner quelques instructions, et sauf le grand respect que je dois

 23   à la Chambre, je ne pense pas que ce soit incorrect de voir comment j'ai

 24   procédé --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 26   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas ici

 27   ajouter à cette vague qui a déferlé sur vous, mais nous voulons soutenir ce

 28   que vient de dire Me Kovacic. La question de M. Scott était très générale

Page 34752

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34753

  1   et lui demandait s'il était d'accord pour dire qu'il y a eu des méfaits

  2   dans tous les camps. Mais de passer de là à des crimes, il y a des

  3   composantes juridiques qui constituent une infraction ou pas. Si M. Scott

  4   avait, comme vous, Monsieur le Juge Antonetti, vous l'avez laissé entendre,

  5   s'il avait voulu poser des questions précises sur certains incidents précis

  6   dont il a connaissance, mais là, c'est une autre paire de manches. Mais

  7   ici, lorsqu'on parle de crimes, il y a des qualifications juridiques, et je

  8   pense que c'est que ce Me Kovacic a dit. La question n'est pas de propos.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges vont délibérer.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Les Juges qui ont délibéré estiment que vous

 12   pouvez, Monsieur Scott, poser des questions sur les événements. La

 13   qualification de crime, c'est beaucoup plus compliqué, donc --.

 14   Je répète, la Chambre a délibéré.

 15   Bien. Alors pour vous, ça marche. Maintenant, ça doit marcher.

 16   Je disais que la Chambre, qui a délibéré, estime que vous avez la

 17   possibilité de poser des questions sur les événements, lui poser des

 18   questions sur s'il a eu connaissance de Stupni Do, et cetera. Mais

 19   concernant les qualifications juridiques de crimes, qui sont quelque chose

 20   de beaucoup plus difficile, la Chambre estime que vous ne devez pas aborder

 21   les questions sous cet angle-là.

 22   M. SCOTT : [interprétation] Bien.

 23   Q.  Je vous demanderais de passer à la pièce P 10715, qui sera toujours

 24   dans le troisième classeur.

 25   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez bien, Monsieur le

 26   Juge ?

 27   Q.  Il s'agit d'un compte rendu de la BBC en date du 20 août 1993, qui est

 28   basé sur un compte rendu sur la radio croate Herceg-Bosna, Mostar, le 18

Page 34754

  1   août 1993. Ceci couvre une lettre qui aurait été adressée par M. Prlic à

  2   Lord Owen et M. Stoltenberg. Juste après la moitié de ce courrier, dans le

  3   texte du document :

  4   "Messieurs, nous utilisons ces exemples tragiques afin d'attirer

  5   votre attention sur le comportement tout à fait inhumain de la part des

  6   membres des forces armées musulmanes dans la guerre contre les Croates

  7   locaux. Nous avons toutes les raisons de penser que les crimes qui auraient

  8   été perpétrés," là, M. Prlic n'avait pas eu de problème à employer le mot

  9   "crime," "… génocide, nettoyage ethnique sont conformes aux objectifs

 10   d'ensemble de la lutte musulmane, même si ces actes sont tout à fait

 11   contraires à la convention humanitaire internationale et toutes les

 12   Conventions de Genève sur les conduites de la guerre," connues de M. Prlic.

 13   "Nous pensons qu'en faisant abstraction de tels comportements ou en

 14   qualifiant ça d'excès, d'actions, là, les médias créent effectivement des

 15   supputations concernant certains individus ou groupes indépendants

 16   concernant l'absence de confiance dans la population …"

 17   Alors, ce que M. Prlic essaie de dire aux personnes à qui il

 18   s'adresse, c'est que ces crimes ne doivent pas être écartés comme de

 19   mauvais actes individuels, mais que de l'avis de M. Prlic ces actes partent

 20   du haut vers le bas; coordonnés, organisés et basés sur une politique,

 21   c'est bien ça, d'après M. Prlic ?

 22   R.  C'est ce qui indiqué.

 23   Q.  Pourriez-vous répondre à ma question, s'il vous plaît ?

 24   R.  C'est ce qui est écrit dans cette lettre.

 25   Q.  N'est-ce pas là le propos ici, avec les propres mots de M. Prlic, ce

 26   qui s'est passé alors ? Ce que vous avez entendu, c'est-à-dire que vous

 27   avez certainement entendu dire au cours des dix, 15 dernières années, il me

 28   semble que lorsque les crimes sont commis, on peut utiliser la

Page 34755

  1   terminologie, par la partie adverse, par l'autre camp, organisés, alimentés

  2   par la politique, comme le dit M. Prlic ici, mais que lorsque les crimes

  3   sont commis, si vous permettez de le dire, par votre camp ou par le groupe

  4   ethnique auquel vous vous identifiez le plus, c'est que là, l'explication

  5   est toujours : "Bien, il s'agit de mauvais comportements individuels, mais

  6   rien de plus." Ne l'avez-vous pas entendu dire concernant les trois

  7   groupes, les Serbes, les Musulmans et les Croates, pendant et depuis la fin

  8   de la guerre ?

  9   R.  Oui, c'était là une façon de s'exprimer qui était habituelle.

 10   Q.  Seriez-vous d'accord avec M. Prlic pour décrire les actes de cette

 11   façon, de ces crimes, dire qu'il s'agit d'actes répréhensibles individuels

 12   est une mauvaise qualification, en fait, une minimisation de tels

 13   comportements ?

 14   R.  Personnellement, je pense qu'il faut les envisager dans un contexte

 15   plus large en tenant compte des autres activités qui avaient lieu sur ces

 16   différents territoires.

 17   Q.  Abordons, si vous le voulez, la pièce 1D 0 --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, je me demande s'il n'y a pas une erreur de

 19   compréhension de ce document. J'ai cru comprendre que M. Scott --

 20   M. SCOTT : [interprétation] Pourriez-vous répéter. Il semble y avoir un

 21   problème avec le micro, s'il vous plaît.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je répète.

 23   Monsieur le Témoin, je me demande si M. Scott n'a pas fait une

 24   interprétation large de ce texte, en regardant le compte rendu de la lettre

 25   que M. Prlic adresse à MM. Stoltenberg et Owen, où il rappelle qu'il y a eu

 26   des crimes. Mais dans cette lettre, il parle d'individus, de groupes

 27   indépendants, mais lisez-vous le fait que outre des individus ou des

 28   groupes indépendants, il y a toute une organisation ? Il ne semble pas que

Page 34756

  1   ce soit écrit, mais M. Scott semble le dire. Qu'est-ce que vous en pensez ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant tout, nous avons ici une réaction à des

  3   estimations et des évaluations qui ont été celles d'organes internationaux

  4   et de la communauté internationale au moment où des attaques et des

  5   meurtres avaient lieu, des destructions également des biens des Croates, et

  6   au moment où cela a fait l'objet d'interprétation qui présentait ces actes

  7   comme des actes isolés et étant le fait d'individus. C'est pourquoi, dans

  8   cette lettre de M. Prlic, nous avons cette mention selon laquelle si ce

  9   type d'actes continue à être qualifié d'actes isolés et d'actes étant le

 10   fait d'individus, cela nourrira au sein du peuple croate le sentiment selon

 11   lequel les organes de la communauté internationale ne sont pas équitables

 12   dans le traitement qu'ils réservent à toutes les différentes parties

 13   présentes en Bosnie-Herzégovine. M. Prlic met en avant qu'il s'agit là d'un

 14   des éléments d'activités organisées qui sont le fait de la partie

 15   bosnienne.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 17   M. SCOTT : [interprétation]

 18   Q.  C'est précisément ce que j'entends dire, et la Chambre comprendra peut-

 19   être le concept qui est spécifique, peut-être plus général. On pourrait

 20   effectivement le dire. Je vous soumets que ceci concerne quelque chose qui

 21   s'est déroulé dans ce cas précis mais qui est signalé ici. On pourrait

 22   effectivement dire la même chose à propos d'Ahmici ou de Stupni Do, et des

 23   Musulmans qui avaient été obligés de quitter Capljina et Stolac. Et si un

 24   des dirigeants musulmans rédigeait cette lettre à la place de M. Prlic, je

 25   suppose qu'ils diraient la même chose.

 26   Ce que je vous soumets, et l'idée que je souhaitais poursuivre, pas

 27   représenter dans ce document, c'est que n'était-ce pas le cas de tous les

 28   camps, si c'est de votre côté, c'est un acte individuel répréhensif, si

Page 34757

  1   c'est de l'autre côté, tout est organisé, tout est alimenté par la

  2   politique ? C'est ce que vous avez constaté dans le dialogue depuis et

  3   après la guerre, n'est-ce pas ?

  4    Précédemment, je vous rappellerai, avant toutes les interventions, vous

  5   avez répondu : "Oui." C'est bien ça ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  A présent, je vous demanderais de passer au document que j'aurais

  8   souhaité vous soumettre il y a un quart d'heure, 1D 01183, dans le

  9   troisièmement -- non, dans le quatrième classeur. Merci. Petit classeur.

 10   On en revient à un rapport d'une réunion HVO HZ HB, le 18 mars 1993.

 11   J'attire votre attention, si vous le voulez bien, en ce qui figure sur le

 12   point 4 de l'ordre du jour, pas dans la liste, mais lorsqu'on abordera le

 13   texte vous verrez une série de rubriques : "AD "1, 2, 3." Passez à "l'AD

 14   4," qui se trouve à la deuxième page de la version en langue anglaise et de

 15   la version croate. Sous ce titre il y a un paragraphe :

 16   "M. S. Bozic," il s'agit sans doute de M. Slobodan Bozic, qui est le

 17   délégué du département de la Défense.

 18   Il affirme que : "Conformément à la conclusion précédente du HVO HZ

 19   HB, les projets des décrets situ ont été composés, mais un avis sur ces

 20   décrets doit être sollicité auprès du département finance du HZ HB HVO."

 21   Ceci nous ramène un petit peu en arrière, enfin, le début de votre

 22   déposition, lorsque vous êtes venu il y a quelques semaines, mais cela ne

 23   nous rappelle-t-il pas qu'une des fonctions de votre département finance

 24   était de passer en revue les décisions HVO et les décrets afin de

 25   déterminer leur impact financier, comment ces décrets seraient

 26   financièrement mis en œuvre, à supposer que de telles politique et

 27   décisions étaient adoptées; c'est bien cela ?

 28   R.  Oui, il s'agissait exclusivement de déterminer si ces projets de

Page 34758

  1   décrets et de textes étaient réalistes d'un point de vue financier et si

  2   nous disposions au sein du budget des moyens nécessaires.

  3   Q.  Poursuivons à la pièce P 05610, dans le classeur numéro 2.

  4   P05610.

  5   Monsieur, il s'agit d'un compte rendu d'une autre réunion HVO HB-HZ

  6   du 4 octobre 1993, et j'attire votre attention sur le bas de la page sur le

  7   point 1, en bas de la page dans la version anglaise et de même dans la

  8   version croate. M. Stojic intervient en disant :

  9   "M. Bruno Stojic a soulevé une objection s'agissant du point 7 du

 10   projet de compte rendu en affirmant qu'il n'avait pas participé à la

 11   réunion précédente. Il faisait valoir que la conclusion concernant la

 12   méthode de demande de remboursement pour les carburants utilisés pour

 13   expulser les personnes de Kakanj doit être modifiée, estimant que le coût

 14   du carburant doit être supporté par le bureau des personnes déplacées et

 15   des réfugiés, non pas du département de la Défense. La modification

 16   proposée à cette conclusion a été adoptée à l'unanimité …"

 17    Ceci reflète-t-il non seulement dans ce cas précis mais des discussions et

 18   des décisions par le HVO de temps en temps quant à quel service, quelle

 19   autorité, quelle agence devait supporter tels ou tels coûts ?

 20   R.  Non. Nous avions là une situation dans laquelle le carburant qui était

 21   fourni par la société Interina faisait l'objet d'une comptabilité

 22   mensuelle. Tous les mois nous faisions le compte des besoins de chacun des

 23   départements et services du HVO. Nous en faisons les comptes mensuellement,

 24   nous collections également les taxes correspondantes et les paiements

 25   correspondant à ces besoins en carburant étaient effectués mensuellement.

 26   Les coûts en question étaient supportés par un département en particulier,

 27   et cela augmentait les frais de ce département, alors qu'en réalité une

 28   partie du carburant qui avait été affectée est payée par ce département

Page 34759

  1   avait été utilisée pour évacuer les réfugiés. Ensuite, c'est le moment où

  2   M. Stojic a soulevé son objection, c'est alors que ces coûts ont été

  3   affectés au département des personnes déplacées et des réfugiés.

  4   Q.  -- position précédente sur ces deux sujets, le gouvernement du HVO

  5   n'avait-il jamais débattu du financement pour ce qui est de l'arrestation

  6   et de la détention de milliers de Musulmans pendant l'été 1993 ?

  7   R.  J'ai déjà dit dans ma déposition que le premier projet de budget

  8   n'avait été établi que pour l'année 1994.

  9   Q.  Je ne vous pose pas la question concernant le budget. Nous venons de le

 10   voir. Nous l'avons vu il y a dix jours, il y a deux semaines, d'autres cas

 11   où les décisions vous étaient soumises, votre département des finances

 12   devait décider, il fallait prévoir : "Comment allons-nous y prévoir, quel

 13   est le coût financier de cette politique ou de cette décision ?" Il y a une

 14   décision à l'été 1993  visant à arrêter, à détenir des milliers de

 15   Musulmans.

 16   Qui allait en financer le coût ? Comment ces crédits allaient-ils être

 17   assurés ? Il y a rien à voir sur la question de savoir s'il y avait un

 18   budget ou pas. Quelles décisions prises par le HVO HZ HB pour prévoir ces

 19   besoins financiers ?

 20   R.  Les décisions étaient prises sur la base des requêtes et des demandes

 21   qui nous parvenaient. Il n'y avait pas eu de demandes allant dans ce sens.

 22   Nous n'en avons pas reçu.

 23   Q.  D'où provenaient ces fonds, à votre connaissance, les fonds dépensés en

 24   vue d'arrêter ces hommes ou de les mettre en différents lieux, pour

 25   apporter des services médicaux, suivant le cas, d'où provenaient ces fonds

 26   ?

 27   R.  Je l'ignore.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, derrière cet aspect budgétaire

Page 34760

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34761

  1   sur l'imputation des crédits concernant l'essence, il y a un problème plus

  2   important. M. Stojic intervient. Vous, vous êtes présent à cette réunion.

  3   M. Stojic intervient pour parler des évacués de Kakanj. Alors à ma

  4   connaissance, les évacués de Kakanj, ce sont les Croates qui quittent

  5   Kakanj. Oui ou non ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc les Croates qui quittent Kakanj sont

  8   expulsés, non pas par les Croates, mais par les Musulmans qui apparemment

  9   font une offensive, et à ce moment-là le coût de transport des Croates doit

 10   être imputé sur le budget de l'office et pas du ministère de la Défense.

 11   C'est ce que semble dire M. Stojic.

 12   Alors vous n'avez peut-être pas un souvenir de cette réunion, mais en vous

 13   rafraîchissant la mémoire, qui assumait les dépenses des Croates déplacés,

 14   la Défense ou l'office pour les personnes déplacées et les réfugiés ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de ces coûts - et je parle des

 16   coûts relatifs à l'essence - ils ont été imputés au bureau des personnes

 17   déplacées et des réfugiés qui s'occupait de leur accueil. S'il s'agit de

 18   frais, ils n'étaient pas imputés au département de la Défense, mais au

 19   bureau des personnes déplacées et des réfugiés.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc en termes budgétaires, M. Stojic a raison

 21   d'intervenir en ce sens ou pas ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, car il a été fait une

 23   présentation de son budget dans laquelle ce dernier a été majoré d'une

 24   somme correspondant à des frais qui ne relevaient pas de son département.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : -- texte concerne des Croates déplacés,  mais

 26   maintenant prenons une hypothèse qui serait des Musulmans qui seraient

 27   déplacés. Qui devrait payer le coût de déplacement de ces Musulmans

 28   déplacés, l'office ou le ministère de la Défense ? 

Page 34762

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas eu de demandes visant à couvrir

  2   des frais de ce type. Je ne sais pas qui a financé cela et de quelle façon.

  3   Mais en tout cas, personne ne s'est adressé au HVO de la HZ HB avec une

  4   demande visant à couvrir le coût du transport de ces personnes.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Monsieur Scott.

  6   Monsieur Scott, je crois que vous aviez fait une erreur, parce que le texte

  7   s'applique aux Croates déplacés, pas aux Musulmans.

  8   M. SCOTT : [interprétation] Non, je ne crois pas, mais si c'est le cas,

  9   autant pour moi -- en fait, je parlais plutôt de la procédure, pas de la

 10   question des faits. J'avais suivi avec une question, utilisant ça comme un

 11   exemple, mais bon. J'ai essayé à plusieurs reprises de montrer le document

 12   à ce témoin, d'aborder cette question, également de souligner cela de

 13   manière plus générale, et ma question supplémentaire, lorsque les hommes

 14   musulmans - il y a eu des preuves manifestes dans ce sens, quelles que soit

 15   les autres conditions - ont été arrêtés pendant l'été 1993. Et ma question

 16   au témoin : d'où provenaient les fonds pour ce faire. C'était la question,

 17   et je ne pense pas que j'ai dénaturé le document.

 18   Q.  Les questions qui vous ont été posées par certains des accusés, enfin,

 19   plutôt par les conseils de la Défense, concernant le financement, et les

 20   demandes de crédit, et d'une éventuelle pénurie de fonds, je vous pose la

 21   question suivante : vous et d'autres, vous êtes donnés beaucoup de mal pour

 22   montrer combien il était difficile pour l'Herceg-Bosna de fonctionner dans

 23   ces conditions très difficiles. Il est juste de dire que le gouvernement

 24   Bosnie-Herzégovine de Sarajevo était confronté à d'énormes difficultés

 25   financières et autres, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et je conclus que dans la mesure où des Croates étaient détenus par le

 28   gouvernement de Bosnie-Herzégovine ou ses représentants dans des conditions

Page 34763

  1   inhumaines et maltraités, vous ne diriez pas que cela a été acceptable

  2   puisque le gouvernement BH n'avait pas les moyens d'agir autrement ?

  3   Seriez-vous d'accord avec cela ?

  4   R.  Non, effectivement. Il n'est absolument pas acceptable que cela soit

  5   fait dans ces conditions.

  6   Q.  -- votre réponse.

  7   R.  Il n'est pas acceptable que des personnes soient dans ces conditions-

  8   là.

  9   Q.  Est-ce que vous et d'autres membres du gouvernement HVO, des dirigeants

 10   Herceg-Bosna, savaient-ils, aux alentours de 1993 de la période en

 11   question, qu'il y avait différents éléments extrémistes et durs parmi vous

 12   ?

 13   R.  Il y a eu ces étiquettes dispensées par les médias.

 14   Q.  Avez-vous pensé que certaines de ces personnes étaient activement

 15   impliquées dans le HVO ?

 16   R.  Je n'ai pas bien compris votre question, impliquées dans quoi ?

 17   Q.  Saviez-vous, les dirigeants du HVO dont vous faisiez partie, le

 18   gouvernement, les réunions auxquelles vous participiez sur une base

 19   hebdomadaire, les conversations que vous avez eues avec votre très bon ami

 20   et proche associé, M. Prlic, avez-vous jamais discuté entre vous en disant

 21   : "Bon, il est vrai qu'il y a certains extrémistes et certains éléments

 22   durs parmi nous qui causent un certain nombre de problèmes," ou dites-vous

 23   à la Chambre que c'est quelque chose dont vous n'avez tout simplement

 24   jamais parlé en 1993 et 1994 ?

 25   R.  J'ai déjà témoigné pour dire que j'avais eu des problèmes avec certains

 26   présidents des conseils municipaux et on avait, à chaque fois, évoqué cette

 27   question, parce qu'ils s'efforçaient de mettre en œuvre leurs propres

 28   réglementations et décisions. J'ai donc estimé que c'étaient des gens de

Page 34764

  1   nature à ne pas vouloir accepter la réglementation de la HZ HB. Je

  2   m'adressais à eux, je leur écrivais, je leur parlais directement, pour les

  3   obliger à mettre en œuvre cette réglementation de la HZ HB.

  4   Q.  Examinons la pièce P 07570. Cette pièce se trouve dans le deuxième

  5   classeur. Je répète le numéro de la pièce P 07570. Ici, nous avons un

  6   procès-verbal d'une réunion présidentielle. M. Tudjman rencontrait à Zagreb

  7   certaines personnalités le 12 janvier 1994. Vous voyez qu'il y a, parmi les

  8   participants, M. Prlic. Nous allons prendre, si vous le voulez bien, la

  9   page 62; 62 de la partie inférieure.

 10   M. Tudjman : "Mais dites-moi, alors est-ce qu'ils ont commis des crimes à

 11   Krizancevo Selo ?"

 12   "Oui. Il ne faut pas vous leurrer. Vous savez très bien qui ils ont

 13   emporté. Ils ont éliminé ceux qui se combattaient.

 14   "Mais je vais vous dire autre chose, et il faut le savoir. Aujourd'hui, ils

 15   commencent à gueuler. Mais ici, c'était un combat pour la vie ou la mort de

 16   Vukovar à Gospic. S'il n'y avait pas eu des gens de cette trempe, on

 17   n'aurait pas aujourd'hui la Croatie. Il faut que ce soit dit clairement. Il

 18   faut le comprendre. Je suis quelqu'un qui est sorti de la guerre sans avoir

 19   vu une arme, mais je sais ce que sont les objections qu'on peut avoir

 20   contre les radicaux croates. Mais s'ils n'avaient pas été là, nous

 21   n'aurions pas eu la Croatie."

 22   Est-ce que ceci était discuté parmi les dirigeants ? Il y avait des

 23   éléments durs, il y avait des extrémistes, mais ils étaient indispensables

 24   si on voulait que la besogne soit faite, n'est-ce pas ?

 25   R.  Aux sessions du HVO, il n'en a pas été question de cela. Mais j'ai déjà

 26   évoqué le fait dans quel contexte il a été question de personnes ayant fait

 27   obstruction au HVO de la HZ HB.

 28   Q.  Bien, nous allons examiner --

Page 34765

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin --

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic -- la parole.

  4   M. le Procureur vous a attiré l'attention sur un propos tenu par M. Tudjman

  5   à la page 62, où Tudjman réagit à la suite de crimes commis dans cette

  6   localité de Krizancevo Selo, que je ne connais pas. Et là, M. Tudjman

  7   semble, lui, se démarquer des Croates radicaux, il le dit.

  8   Alors, à votre connaissance, M. Tudjman, vous le situez comment ? Comme un

  9   radical, un extrémiste, un modéré, un libéral ? Comment vous le qualifiez -

 10   - vous pourriez lui donner un qualificatif ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous donner une opinion personnelle. A

 12   mon avis, c'était en premier lieu un général, de par la façon de penser qui

 13   était la sienne. Il savait ce qu'il voulait. Dans l'ensemble, il s'était

 14   placé à la tête d'un projet visant à créer un Etat croate, une chose qui

 15   s'est d'ailleurs, au final, réalisée.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous dites, c'était un général, mais

 17   politiquement, vous avez du mal à le qualifier ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur le plan politique, il a été caractérisé

 19   comme étant le président d'un parti, et fondateur de ce parti du reste, qui

 20   avait une orientation populiste comme parti et faisait partie d'un bloc

 21   conservateur. C'est dans ce contexte que je le place.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur -- Maître Kovacic, excusez-moi, je

 23   vous avais coupé.

 24   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 25   il me semble que nous sommes en train de mal comprendre le PV, et c'est la

 26   raison pour laquelle vous avez dû poser des questions complémentaires.

 27   Pour autant que je le sache, et avec toutes les réserves qui s'imposent,

 28   c'est à Krizancevo Selo que, vers la fin de 1993, il y a eu des Croates à

Page 34766

  1   périr, à l'occasion d'une offensive de l'ABiH. Il me semble qu'il y a eu un

  2   acte d'accusation dressé à ce sujet. Je ne sais plus lequel. Alors, si ceci

  3   est exact, le contexte est différent. On ne saurait le comprendre sans

  4   connaître des événements dont on parle.

  5   Si le Procureur pose une question au témoin partant d'un extrait de

  6   compte rendu et si on ne comprend pas le contexte, je trouve que ce n'est

  7   pas correct vis-à-vis du témoin, parce qu'il ne peut pas dire quelle est

  8   son évaluation subjective sans savoir de quoi il s'agit. Et je ne comprends

  9   pas le débat qui fait l'objet de cette partie du compte rendu.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le

 11   permettez, j'estime que Me Kovacic est intervenu de façon très importante.

 12   Il s'agit d'un crime commis dans un village qui s'appelle Krizancevo Selo

 13   le 22 décembre 1993. D'après les rapports émanant d'officiers britanniques,

 14   il s'est agi de l'exécution de 74 civils croates. C'est une faction de

 15   l'ABiH qui a commis ces crimes. Je pense que le débat des intervenants qui

 16   précède à la partie où l'on cite Tudjman, il nous montre qu'il s'agit d'un

 17   crime perpétré par l'armée musulmane. Je crois qu'il est important de

 18   connaître le contexte. Merci.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons maintenant le contexte.

 20   Monsieur Scott.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Je dois répondre, Monsieur le Président, et je

 22   n'aurai pas le temps de poser des questions au témoin. Mais étant donné

 23   tout ce qui a été dit, je peux préciser que maintenant, on dénature

 24   l'utilisation que l'Accusation fait de ce document. Ça semble devenir

 25   systématique.

 26   Je le dit à la Chambre, nous pensons, de ce document, qu'en fait il est

 27   illustratif de ce que j'essayais de vous montrer précisément il y a une

 28   demi-heure. C'est un exemple pour dire que des crimes ont été commis dans

Page 34767

  1   tous les camps. M. Tudjman commence, en l'espace de trois lignes -- deux

  2   phrases sur un sujet, puis il se met à parler de façon bien plus générale.

  3   Il change de sujet. Il parle de Mercep, un Croate, puis il parle de Vukovar

  4   à Gospic, et que nous n'aurions pas la Croatie. Il ne parlait pas des

  5   Musulmans quand il dit : "Si nous n'avions pas eu des gens de cette trempe,

  6   des gens comme eux, nous n'aurions pas eu de Croatie." Alors, est-ce que

  7   nous pouvons s'écarter de cet argument, de ce qu'on essaie d'ergoter ici à

  8   propos de significations qu'il faut ou ne faut pas donner. Nous pourrons

  9   peut-être terminer le contre-interrogatoire.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Mon confrère, dont je ne mets pas les

 11   connaissances en doute, vient de toucher au problème crucial. Les propos de

 12   M. Tudjman, dans ces comptes rendus présidentiels, et pas seulement au

 13   passage qu'il vient d'évoquer, mais à bon nombre d'endroits, ça n'a pas été

 14   consigné de façon cohérente, ce n'est pas complet. Nous qui lisons cela

 15   depuis des années déjà, nous savons que feu le président Tudjman avait pour

 16   coutume d'entamer un sujet, puis de faire des digressions, puis de revenir

 17   de la digression vers sa pensée originale.

 18   Si vous le permettez, je vais finir.

 19   C'est pourquoi il est plutôt difficile de se servir de ces procès-verbaux.

 20   Je veux dire par là qu'on ne peut pas les placer devant un témoin qui ne

 21   les a pas lus. On ne peut pas lui demander de les lire, parce que souvent

 22   il ne comprend pas. Moi, très souvent, je ne comprends pas. Je trouve que

 23   ce n'est pas équitable. Jamais, dans aucune juridiction, on interroge ainsi

 24   un témoin. Qu'on prenne un autre exemple, un exemple plus transparent et

 25   plus clair. C'est l'élément que je veux mettre en exergue. Je pense que ce

 26   n'est pas équitable vis-à-vis du témoin. Si vous pensez autrement, à vous

 27   de le dire, mais je me suis senti obligé de vous le dire.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Là, c'est vraiment couper des

Page 34768

 1  

 2  

 3  

 4  

 5   

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34769

  1   cheveux en quatre. Vous allez très loin là. Il y a une chose qui m'éclaire,

  2   en tout cas moi, tous ces commentaires n'étaient pas pertinents.

  3   Je vous demande de poursuivre, Monsieur Scott.

  4   M. SCOTT : [interprétation]

  5   Q.  Ce que je vous soumettais comme idée - en dépit de toutes les

  6   interventions qu'il y a eu, je reviens à mon point de départ, je vous l'ai

  7   présenté il y a 20 minutes - c'était simplement un exemple afin d'illustrer

  8   mon propos. Vous avez, en présence de Jadranko Prlic, le président Tudjman

  9   qui dit quelque chose, et c'était, si vous voulez, un exemple pour revenir

 10   à la question que je vous avais posée et que je vous repose. L'idée que je

 11   vous soumets, c'est que vous, les dirigeants du HVO, que Prlic, Neven

 12   Tomic, vous saviez qu'il y avait des extrémistes, des éléments durs dans le

 13   HVO qui se rendaient coupables d'actes atroces, épouvantables, effroyables,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Pour ce qui est de ces atrocités, on en a entendu parler. Pour ce qui

 16   est des individus je dirais que jamais le HVO n'en a débattu.

 17   Q.  Jamais vous n'avez discuté d'atrocités rapportées dans la presse comme

 18   étant le fait du HVO, quand à Ahmici ça s'est passé on en a parlé dans le

 19   monde entier, quand il y a eu Stupni Do aussi tout le monde en parlé. On a

 20   en parlé au Conseil de sécurité des Nations Unies quelques jours à peine

 21   après que ça soit survenu. Il y a eu des articles qui ont paru dans toutes

 22   les presses locales - et regardez. Vous voulez dire que le HVO n'en a

 23   jamais discuté ?

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je désire attirer

 25   votre attention sur le fait que la réponse du témoin est inscrite aux

 26   lignes 23 et 24 de la page précédente de façon erronée. Ce n'est pas ce que

 27   le témoin a dit. Afin que je ne relate pas ce qu'il a dit lui-même, peut-

 28   être pourrions-nous lui demander ce qu'il a dit au sujet des événements

Page 34770

  1   mêmes et ce qu'il a dit au sujet des individus qui auraient commis des

  2   crimes et de quoi le HVO n'a pas débattu. Et je crois que mon confrère M.

  3   Scott va alors modifier sa question. Merci.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que nous n'avons jamais débattu

  5   d'individus à l'occasion de nos réunions du HVO. Nous avons au sujet

  6   d'événements en question entendu parler, nous les avons condamnés, mais

  7   nous n'avons pas débattu au sujet d'individus puisque cela ne relève pas de

  8   nos compétences.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Parlons de certains individus.

 10   Pour ce faire, prenons la pièce P 09078, prenons la page 29, je pense que

 11   vous en avez des extraits. C'est ce que vous avez dans le classeur, et si

 12   vous avez trouvé le texte en anglais, prenez la page 85. Si vous utilisez

 13   la version croate, vous allez trouver ce passage à la page 29. Dans le

 14   prétoire électronique, ça devrait être la page 122.

 15   Q.  Ici nous avons une déclaration de M. Prlic, document versé au dossier

 16   de l'espèce, soyons très clairs. C'est une déclaration que fait Jadranko

 17   Prlic. Je vous ai demandé de vous reporter à une page précise, où il dit :

 18   "…par rapport au HV, la guerre a été luttée par des dirigeants politiques à

 19   travers l'état-major principal du HVO, en fait, surtout par les organes

 20   militaires. Comme dans toute guerre, on en voit de cette guerre dans les

 21   destructions, dans les personnes qui sont tuées, qui sont capturées ou

 22   emprisonnées, et dans les réfugiés. Les autorités militaires ont fait cette

 23   guerre, et de cette façon ils ont 'produit' des prisonniers de guerre."

 24   Il dit que la guerre, elle a été menée par des dirigeants politiques. Qui

 25   était du côté des Croates de Bosnie les dirigeants politiques qui ont mené

 26   cette guerre, d'après les dires de M. Prlic ?

 27   R.  Le commandant suprême des forces armées de l'Herceg-Bosna c'était le

 28   président de la HZ HB.

Page 34771

  1   Q.  Qui était-ce ?

  2   R.  M. Boban.

  3   Q.  Qui était les autres dirigeants politiques du HVO, mis à part M. Boban,

  4   parce que M. Prlic parle de dirigeants politiques au pluriel, "…menée par

  5   des dirigeants politiques à travers l'état-major principal du HVO." Donc on

  6   a Boban. Qui d'autre ?

  7   R.  Nous avions une présidence de la HZ HB qu'il présidait.

  8   Q.  Donc c'est la présidence qui a mené cette guerre, vous dites que c'est

  9   la présidence de la HZ HB qui a fait cette guerre ?

 10   R.  Vous m'avez posé une question au sujet des leaders politiques.

 11   C'étaient les leaders politiques de l'époque. Le HVO c'était un pouvoir

 12   exécutif.

 13   Q.  Le HVO. Qu'en est-il du HVO HZ HB, est-ce qu'on peut compter le HVO HZ

 14   HB parmi les dirigeants politiques qui ont combattu, qui ont mené cette

 15   guerre par l'état-major ?

 16   R.  Le HVO c'est un pouvoir exécutif. Moi, je ne le perçois pas comme une

 17   force politique. Je n'ai jamais estimé que j'étais un leader politique en

 18   ma qualité de membre du HVO.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Je m'excuse auprès des interprètes, parce que

 20   je suis intervenu.

 21   Q.  Bien sûr, je sais que le HVO c'est l'organe exécutif. Vous dites des

 22   dirigeants politiques, alors ce sont des gens comme Prlic, comme vous-même,

 23   comme les autres membres du gouvernement, vous ne pensiez pas que c'étaient

 24   des dirigeants politiques; est-ce là la distinction que vous voulez opérer

 25   ?

 26   R.  Oui, exact.

 27   Q.  Je vois. Qui ont fondé l'Herceg-Bosna, qui étaient les fondateurs de

 28   l'Herceg-Bosna qui ont participé à ces ordres ?

Page 34772

  1   M. KOVACIC : [interprétation] Nous avons ici une réponse importante du

  2   témoin qui n'a pas été reprise au procès-verbal, parce qu'il y a eu un

  3   chevauchement entre le Procureur et le témoin. Il a dit quelque chose, et

  4   il a dit, "Je sais que moi, je ne me voyais pas comme étant quelqu'un de

  5   politique," c'est quelque chose dont dans ce bout-là qu'il a dit.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : -- quelque chose, Monsieur le Témoin ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'en ma qualité de membre du pouvoir

  8   exécutif, je ne me considérais pas comme étant un leader politique. Nous

  9   étions une instance exécutive.

 10   M. SCOTT : [interprétation]

 11   Q.  Parlant de ces dirigeants politiques, vous pensiez à la présidence de

 12   la HZ HB. Je suppose que vous serez d'accord pour dire que sur une période

 13   de 12 mois il n'y a eu que deux réunions de la présidence, vous conviendrez

 14   dès lors, que la HZ HB ne faisait pas cette guerre en exerçant une

 15   direction énergique, active ?

 16   R.  Je ne serais pas d'accord avec cette affirmation. Parce que les membres

 17   de la HZ HB c'étaient des gens issus des municipalités. Ces municipalités

 18   en grande mesure finançaient leurs propres unités sur leurs propres

 19   territoires, ça a duré jusqu'en 1994. Date jusqu'à laquelle ils ont financé

 20   eux-mêmes leurs propres unités.

 21   Q.  Poursuivons. Passons à la page 121 et la page suivante en anglais,

 22   pages 18 et 19 en croate, prétoire électronique page 162, et 163. Ici M.

 23   Prlic dit ceci on lui demande qui était responsable et qui, d'après lui

 24   avait essayé de lui faire porter la responsabilité des crimes commis par le

 25   HVO, il dit ceci :

 26   "Il y a beaucoup de gens qui essaient se dégager de leur responsabilité et

 27   de faire porter la responsabilité par le HVO HZ HB. Il y a Pero Markovic,

 28   Jozo Maric notamment --" un instant, s'il vous plaît, je recherche le bon

Page 34773

  1   endroit, "-- Mijo Tokic," je ne veux pas les énumérer tous, mais il y a

  2   "Ante Jelavic, toute une série de personnes de l'armée, je ne connais même

  3   pas leurs noms. La liste serait assez longue."

  4   Question : "Qu'en est-il de Bruno Stojic ?" Plus loin on dit :

  5   "Est-ce qu'il fait partie de ceux qui vous ont utilisé ?"

  6   Réponse : "Oui, à cet égard, oui."

  7   Ligne 12 : "Qu'en est-il de Valentin Coric, où est-ce que vous le placez ?

  8   Est-ce que c'est un des hommes qui vous ont utilisé ?"

  9   Réponse : "Oui, oui, parce qu'il était contre moi, mais je ne sais pas si

 10   je peux dire qu'il m'a utilisé, parce que j'ai utilisé ce terme, et je vous

 11   ai expliqué comment j'avais été 'utilisé,' mais je ne sais pas si on peut

 12   ainsi qualifier la façon dont il se comportait avec moi."

 13   Question : "Pourquoi est-ce qu'il était contre vous ?"

 14   Prlic : "Vous devez lui poser la question à lui, il faut lui poser la

 15   question. Mais tout le monde il était contre moi. Nous étions trop

 16   différents. Nous avions deux conceptions différentes. Nous avions des

 17   façons différentes de voir le monde."

 18   Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que dit Prlic en guise de

 19   commentaire, est-ce que ces hommes étaient contre lui, Pero Markovic, Jozo

 20   Maric, Ante Jelavic, Bruno Stojic, Valentin Coric ?

 21   R.  Je l'ai déjà dit que toutes les personnes qui ne mettaient pas en œuvre

 22   la réglementation du HVO de la HZ HB étaient des gens qui étaient contre

 23   nous, nous qui étions au sein de ces instances.

 24   Q.  Y compris Bruno Stojic ?

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce qu'on peut permettre au témoin de

 26   terminer sa réponse. Ça fait la deuxième fois qu'il est interrompu. Est-ce

 27   qu'on peut laisser la possibilité au témoin de finir sa réponse parce qu'il

 28   veut l'attaquer, oui d'accord, mais laissez-lui au moins le temps de --

Page 34774

  1   M. SCOTT : [interprétation] Ici je ne veux pas faire le méchant, Monsieur

  2   le Président. Me Karnavas, comme d'habitude, il a deux jeux de règles,

  3   celles qui s'appliquent à lui et l'autre jeu c'est pour les autres. Parce

  4   que quand c'était la présentation des moyens à charge, il a exigé des

  5   témoins des réponses courtes, il ne cessait de se plaindre du peu de temps

  6   qu'il avait. Moi aussi j'ai des contraintes en matière de temps. Je pense

  7   que le témoin peut répondre tout à fait directement. Je lui ai demandé si

  8   Bruno Stojic était une de ces personnes; c'est un "oui" ou un "non ?"

  9   R.  Je sais que M. Prlic à l'occasion de conversations avec moi s'était

 10   plaint en parlant de M. Stojic, et il disait qu'il n'avait pas suffisamment

 11   d'information sur ce qu'il faisait, comment ça se faisait et ce genre de

 12   choses.

 13   Q.  Mais ce n'est pas ce que dit M. Prlic ici. Il dit : "Bruno Stojic était

 14   contre moi," il ne dit pas : "Je n'ai pas eu assez de renseignements ?"

 15   R.  Si c'est une appréciation de sa part et s'il le pensait. Moi, je vous

 16   ai dit ce que moi j'en savais. Je sais qu'il y a eu des problèmes de manque

 17   d'information et de communication, et qu'en

 18   substance c'était la cause du conflit survenu entre les deux.

 19   Q.  Qu'en est-il de Valentin Coric ? Là où il dit : "Nous étions des deux

 20   côtés différents du monde," quels étaient les rapports entre Stojic et

 21   Prlic ?

 22   R.  Ça je ne le sais vraiment pas. Parce que M. Valentin Coric, je ne le

 23   connaissais pas beaucoup à l'époque. Je n'ai pas d'opinion.

 24   Q.  Mais du côté du gouvernement, du côté politique, nous avons les

 25   personnes qui étaient au sommet de la direction qui sont responsables de ce

 26   qui s'est passé ? On peut faire une guerre en se servant de l'armée mais ce

 27   sont quand même les civils qui établissent les politiques à suivre.

 28   R.  Je ne peux pas tomber d'accord avec une constatation qui dit que le

Page 34775

  1   gouvernement conduit la guerre. Parce qu'en ma qualité de membre du

  2   gouvernement, je n'ai jamais conduit de guerre. Je n'y ai pas participé en

  3   ma qualité de membre de ce pouvoir exécutif. Nous avons cherché à organiser

  4   les choses sur le territoire de la HZ HB.

  5   Q.  Veuillez prendre la page 128 en anglais, 128; dans le prétoire ce sera

  6   169; dans le système du prétoire électronique et en croate ce sera la page

  7   25.

  8   On lui demande des noms, les noms des personnes responsables du nettoyage

  9   ethnique, un sujet évoqué à ce moment-là, il répond ceci M. Prlic :

 10   "Oui. Ceci n'aurait pu être fait que par les dirigeants les plus élevés,

 11   les dirigeants politiques, le président du HDZ, le vice- président, et ce

 12   groupe plus restreint qui étaient membres des autorités exécutifs des

 13   municipalités où ça s'est passé, Capljina, Stolac. Je suis sûr que Pero

 14   Markovic en faisait partie de ce groupe parce que toute sa gestuelle

 15   politique montrait qu'il avait la haine des Musulmans."

 16   Est-ce que ceci ne correspond pas à ce que vous disiez comme thématique, à

 17   savoir que la plupart de ces problèmes étaient évoqués ou étaient le fait

 18   de structures municipales du HVO. Vous êtes d'accord pour dire que Pero

 19   Markovic est un de ceux responsables des crimes commis sur les Musulmans à

 20   Capljina et à Stolac ?

 21   R.  Je sais que Pero Markovic était président du HVO du municipal et le

 22   président du HZ Herceg-Bosna -- membre de la présidence. Il était très

 23   influent pour ce qui est des unités. Mais pour ce qui est de ses

 24   responsabilités, maintenant --

 25   Q.  Ma question était simple, il le dit : "Je suis tout à fait sûr, je suis

 26   sûr que Pero Markovic faisait partie de ce groupe, parce que tout son

 27   comportement était tel qu'à l'évidence il haïssait les Musulmans."

 28   Vous êtes d'accord avec ce que dit ici, M. Prlic ?

Page 34776

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12   

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34777

  1   R.  C'est une opinion de M. Prlic que j'accepterais en partie.

  2   Q.  Vous dites en partie, alors sur quelle partie êtes-vous d'accord avec

  3   lui ?

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Il va falloir faire la pause.

  5   M. SCOTT : [interprétation] Oui. Je reviendrai à cette question après la

  6   pause. Merci, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce qu'après la pause, vous avez une question à

  8   poser sur la page 129 ? Si vous n'avez pas une question, je vais la poser.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 11   M. SCOTT : [interprétation] Manifestement, il y avait une conversation qui

 12   se passait en même temps. Je n'ai pas tout à fait attendu.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Je demandais, Monsieur Scott, est-ce que vous avez

 14   une question à poser sur la page 129 ?

 15   M. SCOTT : [interprétation] Je ne pense pas.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 17   M. SCOTT : [interprétation] Mais on n'a toujours pas répondu à la question

 18   que j'avais posée maintenant. Mais je suis tout à fait prêt à y revenir à

 19   cette question après la pause.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous reviendrez alors.

 21   Je crois qu'au point de vue du temps, il doit vous rester 30 minutes

 22   au maximum. On va vérifier cela.

 23   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   --- L'audience est suspendue à 15 heures 51.

 25   --- L'audience est reprise à 16 heures 12.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donner la parole au greffier pour une

 27   clarification d'un numéro IC.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Une clarification, Messieurs les Juges,

Page 34778

  1   le numéro indiqué IC 00888 est le numéro attribué à la liste présentée par

  2   3D. Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  4   Monsieur Scott, vous avez la parole.

  5   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Monsieur Tomic, la question qui était en suspens juste avant la pause -

  7   et je vous prie d'excuser l'interruption à cet égard - je vous avais posé

  8   la question concernant les déclarations de M. Markovic. Vous avez dit que -

  9   nous ne l'avons plus à l'écran en temps réel, mais vous étiez en partie

 10   d'accord.

 11   La question supplémentaire que je vous pose : avec quelle partie

 12   êtes-vous d'accord, de cette déclaration ? Si cela peut vous aider,

 13   Monsieur, entre autres, ce que M. Prlic avait dit aux pages 128 en anglais

 14   et 169, 170 dans le prétoire électronique, entre autres, je ne veux pas que

 15   quiconque pense que je suis en train de vous induire en erreur :

 16   "M. Markovic faisait partie de ce cercle car son comportement était

 17   tel que manifestement il haïssait les Musulmans."

 18   Et là, vous avez dit que vous étiez en partie d'accord avec la

 19   déclaration de M. Prlic. Pourriez-vous dire avec quelle partie vous êtes

 20   d'accord ?

 21   R.  Je suis d'accord avec une partie de cette déclaration, je pense que M.

 22   Pero Markovic nous donne l'exemple d'un président du HVO municipal qui

 23   n'était pas le seul opposant à M. Prlic, et qui non seulement était un

 24   opposant à M. Prlic, mais qui s'opposait également à d'autres responsables

 25   de certains services et départements municipaux; ça a été le cas à la

 26   municipalité de Capljina, qui devait constamment remettre sur la table

 27   certaines questions sur lesquelles un accord avait été déjà trouvé pour

 28   mettre en application les réglementations du HVO.

Page 34779

  1   Q.  On revient au contexte de la déclaration de M. Prlic, donc la personne

  2   responsable de l'épuration ethnique. Vous êtes d'accord avec M. Prlic qui

  3   dit que Pero Markovic était responsable de l'épuration ethnique des

  4   Musulmans et de la municipalité de Capljina, c'est bien ça ?

  5   R.  Il était le président du HVO municipal, et comme je l'ai déjà dit, il

  6   avait toute compétence et un contrôle complet en ce qui concerne la

  7   municipalité de Capljina, mais pour ce qui est de sa responsabilité propre,

  8   je ne peux en juger.

  9   Q.  Je vous repose la question une dernière fois. Vous esquivez ma

 10   question. La question que je vous pose précisément est la

 11   suivante : êtes-vous d'accord avec M. Prlic que M. Pero Markovic était

 12   responsable pour l'épuration ethnique dans cette municipalité de Capljina;

 13   oui ou non ?

 14   R.  Je ne peux pas répondre par oui ou par non. Ce que je dois dire, c'est

 15   que cela s'est passé sur le territoire de la municipalité de Capljina, où

 16   M. Markovic était président du HVO municipal; quant à sa responsabilité

 17   pour ces différentes actions, elle doit être déterminée avec précision.

 18   Q.  Bien. Et les hautes autorités militaires du HVO n'étaient-elles pas

 19   aussi responsables des crimes commis par le HVO ?

 20   R.  En ce qui concerne les questions de responsabilité, je ne peux en

 21   parler tant que ces responsabilités n'ont pas été établies. Je sais que des

 22   crimes ont été commis, mais qui en est directement responsable, cela,

 23   réellement, je l'ignore.

 24   Q.  Je vous demande de bien vouloir, dans le même document que nous

 25   examinons, en anglais, page 74, prétoire électronique 108. Dans la version

 26   croate, dans la partie unité 3 sur 4, je crois qu'il y a une désignation

 27   dans la version croate, il y a bandes 1, 2, 3, là nous sommes bande 3, page

 28   15. Vous l'avez également à votre disposition en B/C/S.

Page 34780

  1   A ce stade, M. Prlic dit :

  2   "Qui a commis les crimes ? Il est clair que les unités militaires du

  3   HVO, les membres des unités militaires, ont commis les crimes, et donc les

  4   autorités militaires étaient responsables."

  5   Etes-vous d'accord avec M. Prlic ?

  6   R.  En vertu des informations dont je disposais, je sais que des soldats du

  7   HVO y ont participé. Mais en termes de responsabilité directe, je ne peux

  8   rien vous dire. Je ne sais pas.

  9   Q.  Pour le procès-verbal, lorsque vous dites que vous savez que les

 10   troupes du HVO ont participé, ont participé à quoi ?

 11   R.  Ce que j'ai dit, c'est que des membres des unités militaires ont

 12   participé aux événements sur le territoire de la municipalité de Capljina,

 13   que vous avez évoqués.

 14   Q.  M. Prlic indique :

 15   "Il est clair que les unités militaires du HVO, les membres des

 16   unités militaires ont commis des crimes."

 17   Donc ne participaient pas aux actions ou aux événements de la

 18   municipalité de Capljina, vous êtes d'accord avec M. Prlic que ce sont les

 19   autorités militaires du HVO qui ont commis les crimes, et donc les

 20   autorités militaires étaient responsables ?

 21   R.  Non. Ce que j'ai dit, ce sont des membres des unités militaires et,

 22   effectivement, c'est leur hiérarchie militaire qui répond de cela.

 23   Q.  Reportez-vous, s'il vous plaît, page 82 dans la version anglaise, 118

 24   dans la version du prétoire électronique en croate. C'est la bande 3 sur 4

 25   à la page 25.

 26   M. Prlic, dans le bas -- en anglais, dans le bas de la page 82, M. Prlic,

 27   "La façon dont ceux-ci se sont déroulés, notamment la façon dont ils

 28   ont terminé, ils ont arrêté, comment ont-ils été arrêtés, ils montrent

Page 34781

  1   qu'il y avait peut-être un ordre ou des ordres, il pourrait y avoir de tels

  2   ordres. Qui a émis un tel ordre ou ordres, je dois vous avouer que je ne le

  3   sais pas, mais je pense que de tels ordres auraient pu être émis par ceux

  4   qui ont créé cette zone, les fondateurs ou certains fondateurs du HZ HB qui

  5   voulaient cette partie de l'Herceg-Bosna."

  6   Et je vous demanderai quelques instants, je vous parle de la partie

  7   supérieure où j'ai commencé, où j'ai commis une erreur, j'en assume la

  8   responsabilité, M. Prlic commence cette section en indiquant :

  9   "Comme je l'ai dit, j'ai dit que les soldats, membres des unités

 10   militaires, étaient ceux qui ont commis les crimes, en fait, des actions

 11   qui pourraient être caractérisées de crimes, et donc les autorités

 12   militaires devraient être responsables et devraient répondre de cela.

 13   Comment cela s'est-il passé ? Il y a deux façons -- il y a deux

 14   explications à cela. La première est qu'il y a eu un ordre qui a simplement

 15   été exécuté, ou ces crimes étaient menés sous l'impression qu'ils devaient

 16   être menés pour défendre le territoire qu'ils jugeaient comme étant le

 17   leur. Quant à savoir s'il y avait des ordres ou pas, le numéro, la

 18   simultanéité…"

 19   C'est là où -- je vous prie de vous excuser, c'est à ce moment-là que

 20   M. Prlic poursuit en disant :

 21   "Sur la base de la façon dont les choses ont été faites et arrêtées,

 22   là, on pourrait effectivement conclure qu'il y avait eu des ordres."

 23   Ensuite, on en revient aux fondateurs :

 24   "Je pense que de tels ordres auraient pu être émis par ceux qui ont

 25   créé cette zone, les fondateurs ou certains des fondateurs du HZ HB."

 26   Qui seraient ces fondateurs ou certains de ces fondateurs, sur la

 27   base de votre connaissance sur le terrain au moment pertinent pendant ce

 28   conflit ?

Page 34782

  1   R.  Les fondateurs de la HZ HB étaient les présidents des HVO municipaux et

  2   des branches municipales du HDZ, les autorités municipales.

  3   Q.  M. Prlic, au-dessus, se réfère, lorsqu'il dit : "Les autorités

  4   militaires devraient répondre," quelles sont les autorités militaires qui

  5   devraient répondre des crimes commis par le HVO ?

  6   R.  Je pense que cela est défini par les réglementations qui régissent

  7   l'organisation des forces armées. Il existe une ligne de responsabilité

  8   qu'il faut respecter en vertu des dispositions de ce document.

  9   Q.  Toujours sur la question des crimes de guerre, vous êtes toujours

 10   d'accord - pour connaître votre position en la matière - vous êtes d'accord

 11   pour dire que des gens comme Kordic et Cerkez, qui ont été condamnés par ce

 12   Tribunal, qu'ils étaient responsables pour des crimes horribles qui ont été

 13   menés en Bosnie centrale, n'est-ce pas ?

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Objection. Quelle est la pertinence ? Quel

 15   est le lien en cela ?

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je voudrais savoir -- la Chambre doit savoir

 17   quel est son comportement concernant -- pourquoi --

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Crédibilité de quoi ?

 19   M. SCOTT : [interprétation] Pense-t-il que ces crimes sont acceptables ?

 20   Pense-t-il que ces hommes étaient des héros de guerre comme le pensent

 21   certains ?

 22   Je vous prie de m'excuser, Monsieur le Juge.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant la crédibilité, vous pouvez le tester sur

 24   l'opinion qu'il peut avoir sur des auteurs de crimes.

 25   Monsieur Scott.

 26   M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.

 27   Q.  Monsieur, êtes-vous d'accord ou pas que les gens comme Kordic et Cerkez

 28   ont commis des crimes horribles qui ont été jugés responsables par ce

Page 34783

  1   Tribunal ?

  2   R.  Si ce Tribunal a établi leur responsabilité, j'accepte évidemment la

  3   décision et les points de vue qui sont ceux du Tribunal.

  4   Q.  Etes-vous en désaccord avec cela ?

  5   R.  J'ai dit que j'acceptais la décision du Tribunal.

  6   Q.  Bien, il y a une différence. C'est un petit peu comme on accepte le

  7   sort. J'accepte la météo aujourd'hui. Je n'y peux rien, mais j'accepte la

  8   météo. Etes-vous d'accord avec ça lorsque le Tribunal a émis son jugement

  9   de M. Kordic, jugeant celui-ci responsable des crimes commis à Ahmici ?

 10   Etiez-vous d'accord ou aviez-vous le sentiment que : "Voilà encore ce

 11   Tribunal qui ne sait pas de quoi il parle"?

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Il a indiqué, Monsieur le Président, qu'il

 13   acceptait le jugement. Quant à savoir s'il est d'accord ou pas, il est

 14   impossible pour quelqu'un qui n'a pas assisté au procès et qui ne connaît

 15   pas les événements, comment peut-il être d'accord ? Il l'accepte. On ne

 16   peut pas faire mieux que ça.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin, qui a été ministre, est capable de

 19   répondre à toute question quel que soit le degré de difficulté. C'est une

 20   question personnelle qui lui est posée. Qu'il réponde personnellement.

 21   Bien. Alors, Monsieur le Témoin, M. Scott vous a posé une question.

 22   Vous pouvez y répondre, vous ne pouvez pas ? Libre à vous.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que j'acceptais la décision de

 24   ce Tribunal, décision relative à cette affaire. J'estime, à titre

 25   personnel, que ces décisions ont été trop sévères par rapport à la

 26   responsabilité qui avait été celle des personnes concernées. Mais je ne

 27   remets absolument pas en question le fait que les crimes aient été commis,

 28   que ces événements aient eu lieu, et je suis absolument pour le fait de

Page 34784

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34785

  1   faire répondre de leurs actes ceux qui les ont commis.

  2   M. SCOTT : [interprétation]

  3   Q.  Je vous demanderais, Monsieur le Témoin - voilà la dernière pièce

  4   que je vais vous montrer, qui sera une bonne nouvelle pour tout un chacun.

  5   Donc la pièce P 084 --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Je veux rester sur ce document.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Tomic, il apparaît que le 9 mai 1993 est

  9   une date importante. Dans l'acte d'accusation, il est indiqué que le 9 mai

 10   1993, le HVO a attaqué à Mostar les positions musulmanes. La Défense

 11   conteste cette vision et tente d'établir - et elle le fera peut-être avec

 12   ses témoins - que c'est l'ABiH qui a attaqué le 9 mai à Mostar. Il se

 13   trouve qu'à la page 129 de la déclaration de M. Prlic, en présence de M.

 14   Scott, qui était à l'époque -- qui conduisait l'audition - mais ce n'est

 15   pas la peine de regarder, je vais vous synthétiser ce qu'il y a - il se

 16   trouve que le 9 mai 1993, M. Prlic est à Makarska, certainement sur la

 17   plage. Et ce jour-là, qui est une date importante, il explique qu'il reçoit

 18   un appel téléphonique sur les événements du 9 mai et il indique également

 19   que vous-même, vous allez vous entretenir avec lui de cette question car

 20   vous-même, vous êtes aussi ensoleillé à Makarska. Alors est-ce que vous

 21   vous souvenez de ces événements du 9 mai où M. Prlic est à Makarska, vous-

 22   même, vous y êtes, et d'après ce que dit M. Prlic, il semble découvrir ce

 23   qui est en train de se passer ? Alors qu'est-ce que vous pouvez nous dire

 24   sur cet événement où vous êtes, vous, témoin important, puisque votre nom

 25   est cité comme étant quelqu'un qui a appelé M. Prlic ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est exact que le 9 mai, nous nous trouvions

 27   à Makarska. Nous étions en visite à nos familles, car aussi bien la famille

 28   de M. Prlic que la mienne se trouvait à Makarska. Ce matin-là, j'ai reçu un

Page 34786

  1   appel de M. Azer Sirko, qui était une de nos connaissances, un de nos bons

  2   amis, et dont le nom est apparu dans certains documents. Il était président

  3   du conseil d'administration de la société Elektroprivreda de la HZ HB à

  4   cette époque-là. Il m'a appelé et il m'a dit que ses parents avaient été

  5   emmenés au stade, que des affrontements avaient éclaté à Mostar, que l'on

  6   tirait à Mostar et que des gens étaient emmenés au stade.

  7   Je me suis alors entretenu avec M. Prlic et me suis rendu auprès de

  8   lui. Entre-temps, il avait pris contact, je crois, avec M. Zubak, qui à ce

  9   moment-là était à Citluk, et c'est alors que nous sommes partis en

 10   direction de Mostar.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après vous, est-ce que M. Prlic découvre la

 12   situation ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est par l'appel de M. Sirko qu'il a

 14   appris ce qui était en train de se passer à Mostar.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors tous les deux, vous êtes revenus dans la même

 16   voiture. C'est ce que dit M. Prlic. Je présume que dans la voiture, le

 17   chemin est quand même long, un petit peu long, vous avez dû discuter car

 18   votre retour semble être précipité. Dans votre souvenir, qu'est-ce que M.

 19   Prlic vous a dit sur cet enchaînement de faits, puisque maintenant avec

 20   l'appel d'Azer Sirko, vous savez qu'il y a eu des arrestations. Vous savez

 21   qu'il se passe des événements. Alors qu'est-ce que M. Prlic vous dit ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'un voyage particulièrement

 23   pénible. Nous nous efforcions de joindre par ce téléphone portable, qui

 24   avait des possibilités très limitées, nous nous efforcions de joindre

 25   différentes personnes, joindre nos amis. Mais ça a été très difficile, et

 26   nous avons été tout à fait surpris par cette situation. Dans l'ensemble, la

 27   situation était vraiment difficile et très pénible. Il y avait beaucoup de

 28   tension à Mostar, mais nous ne nous attendions pas à ce que cela puisse

Page 34787

  1   prendre une telle ampleur et se transformer en affrontement.

  2   Lorsque nous avons atteint Citluk, des chauffeurs sont venus nous

  3   chercher. Lorsque nous sommes entrés dans la ville, nous avons vu que des

  4   combats étaient menés au niveau de la frontière. On pouvait voir de la

  5   fumée. Et les informations que nous avons alors reçues en provenance des

  6   personnes de Mostar étaient que ce matin-là, à Bijelo Polje, une attaque et

  7   une trahison en quelque sorte - c'était l'explication qui était fournie en

  8   tout cas - avait eu lieu. Et c'est suite à cela que les affrontements

  9   avaient connu une recrue d'essence et s'étaient aggravés.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question. Vous êtes dans le véhicule avec

 11   M. Prlic et vous essayez, vous ou M. Prlic, d'avoir des informations grâce

 12   au téléphone portable. M. Boban Mate est le commandant de l'armée du HVO.

 13   M. Prlic a une fonction au niveau du HVO. Dans votre souvenir, est-ce que

 14   M. Prlic a essayé d'appeler M. Boban pour avoir, pour le moins, des

 15   explications sur les événements concernant une action militaire à Mostar ?

 16   Est-ce qu'il a essayé de l'appeler ou pas ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il a essayé de joindre également

 18   M. Boban ainsi que le président du HVO municipal à Mostar. Je n'en ai pas

 19   aujourd'hui le souvenir exact. Je pense que les informations que nous avons

 20   reçues, nous ne les avons obtenues qu'au moment où nous avons rencontré ces

 21   chauffeurs à Citluk, ensuite lorsque nous sommes arrivés à Mostar même.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Scott, vous vouliez passer à

 23   un autre document, qui est certainement le dernier document ?

 24   M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, pour situer ça dans le contexte où nous étions dans

 26   la dernière série de questions, nous parlions de M. Kordic et de ses

 27   responsabilités en particulier, P 08489, donc le document P 08489 dans le

 28   deuxième classeur.

Page 34788

  1   J'en profite pour dire qu'il s'agit d'un compte rendu dans les bureaux du

  2   président Tudjman le 24 novembre 1995. J'attire votre attention à la page

  3   4. Je voudrais commencer là.

  4   M. Prlic parle à ce stade, et dans ce paragraphe, deuxième

  5   paragraphe, sous son nom, il est dit :

  6   "Aujourd'hui, à la lumière de cette nouvelle situation avec le

  7   soulèvement des actes d'accusation par le Tribunal de La Haye, le président

  8   de l'Union démocratique croate a également présenté sa démission, et à cet

  9   égard il faut préparer les décisions formelles correspondantes et organiser

 10   les préparatifs pour gérer le conseil central du parti pour régler cette

 11   question."

 12   Et je passe maintenant à la page suivante :

 13   Le président Tudjman : "En avez-vous discuté ?"

 14   Prlic : "Oui, nous en avons parlé." Une des conclusions de la réunion

 15   d'aujourd'hui était qu'une infrastructure complète et des mesures

 16   financières doivent être prévues pour la préparation de la défense de tous

 17   ceux qui sont inculpés, y compris un règlement financier complet en termes

 18   d'emplois et de logements pour les familles de ceux qui sont mis en

 19   accusation. A cet égard, pensez-vous que nous pouvons tout faire à un

 20   niveau satisfaisant dans la mesure du possible à ce stade ?"

 21   Nous passons maintenant à la page 10, où M. Prlic prend la parole. A

 22   la page 10, Dario Kordic, huit, neuf lignes après le début de son

 23   intervention, M. Kordic dit :

 24   "Nous apportons notre plein appui à la politique globale croate et à

 25   vous, Monsieur le Président, car il est clair, comme l'indique M. Prlic,

 26   qu'en même temps que la réalisation des intérêts croates généraux, qui est

 27   au-delà de toute question, il y a certaines choses sur le terrain qui

 28   doivent être expliquées et réalisées."

Page 34789

  1   J'en viens maintenant au haut de la page 11. Premier paragraphe à

  2   cette page, M. Kordic présente sa démission et il vient d'être mis en

  3   accusation par le Tribunal :

  4   "J'ai présenté ma démission et l'envoie par écrit au conseil central

  5   de l'Union démocratique centrale de la Bosnie-Herzégovine, vous êtes le

  6   président de l'Union démocratique centrale…"

  7   J'attire maintenant votre attention à la page 25 où le président

  8   Tudjman intervient. Il s'agit du bas de la page 25 :

  9   "Vous le voyez, au moment où ils se préparaient à cette solution, mes

 10   amis m'ont posé des revendications à propos de Mate Boban. Et soyons

 11   clairs, ceci venait aussi du Vatican. Il y avait des menaces concernant ces

 12   actes d'accusation."

 13   Je saute quelques lignes, et nous passons à la page 26.

 14   "Mais je n'ai pas dit à ce moment-là non plus que Mate Boban devrait

 15   être jeté à la poubelle de l'histoire. J'ai demandé, mais malheureusement,

 16   il n'a pas participé plus activement à d'autres activités. Dès que j'ai

 17   entendu qu'il y avait un acte d'accusation, j'ai rendu une décision qui

 18   était de faire venir le général Blaskic  en Croatie. Ça a été interprété

 19   par quelques ambassadeurs et par d'autres comme étant peu sage comme

 20   mesure. Mais ce faisant, j'ai voulu prouver que nous voulions protéger nos

 21   gens. Et j'ai dit que ces hommes -- nos hommes qui avaient défendu la

 22   Bosnie centrale à la vallée de la Lasva, c'étaient nos hommes. "Dario

 23   Kordic ne va pas rester à ce poste, mais c'est avec plaisir que j'ai lu

 24   l'entretien donné par Skopljak.

 25   "Question : Est-ce bien son nom ?

 26   "Réponse : Oui.

 27   Nous allons donc faire l'impossible pour veiller à ce qu'il n'y ait aucun

 28   mandat d'arrêt qui soit suivi des faits."

Page 34790

  1   Vous le saviez à l'époque, n'est-ce pas, alors que nous sommes en 1995 et

  2   que vous étiez encore un membre des autorités de l'Herceg-Bosna et que vous

  3   étiez encore proche de M. Prlic, vous connaissiez la politique de Tudjman

  4   et de son gouvernement, qui était à l'époque de protéger les gens mis en

  5   accusation par notre Tribunal, qui était de faire sortir Blaskic de la

  6   Bosnie, de le cacher, de le protéger, de veiller à ce que les mandats

  7   d'arrêt restent sans effet ? Vous saviez que c'était la position du

  8   président Tudjman et de son gouvernement, n'est-ce pas ? 

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-il exact de dire qu'en rapport avec M. Kordic, vous avez participé

 11   à une action destinée à collecter des fonds pour le soutenir pendant qu'il

 12   était en train d'être jugé par ce Tribunal ?

 13   R.  J'ai participé à une vente de tableaux aux enchères à Siroki Brijeg, et

 14   les recettes ont été destinées à la défense et à l'aide de la famille de M.

 15   Kordic.

 16   Q.  C'était en juin 1999; est-ce exact ?

 17   R.  Je ne sais pas vous donner de date précise.

 18   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tomic. Merci,

 19   Messieurs les Juges de la Chambre. J'ai terminé mon contre-interrogatoire.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Scott, d'avoir fait le maximum pour

 21   terminer dans le temps imparti.

 22   Maître Karnavas, vous avez la parole.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Est-ce que je peux avoir l'aide de M. l'Huissier pour bénéficier du pupitre

 25   moi aussi. Merci.

 26   Nouvel interrogatoire par M. Karnavas :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Tomic, je vais voir si je peux

 28   terminer les questions supplémentaires aujourd'hui de façon à vous éviter

Page 34791

  1   de revenir une troisième fois.

  2   Tout d'abord, la semaine dernière l'Accusation voulait une heure et demie

  3   de plus pour parler de la confédération, par conséquent, plutôt que de

  4   regarder des articles et de faire des suppositions quant aux dires de

  5   journalistes, regardons de plus près l'accord de Washington. Il s'agit de

  6   la pièce 4D 01234. Et ce sera en fin de classeur. Je répète le numéro de la

  7   pièce 4D 01234. Je suis quelque peu surpris que personne n'ait voulu

  8   examiner ce document avec vous, alors qu'on vous a posé des questions à son

  9   encontre.

 10   Est-ce que vous l'avez trouvé ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Fort bien --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'avais conduit l'interrogatoire, bien entendu,

 14   j'aurais utilisé ce document. Mais comme dans cette procédure ce n'est pas

 15   le président qui conduit l'interrogatoire, il laisse faire.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous,

 17   Monsieur le Président.

 18   Q.  On a parlé d'une période de transition et d'accord transitoire.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Prenons le chiffre romain VIII, page 10 en

 20   anglais, Messieurs les Juges.

 21   Q.  Vous l'avez trouvé, Monsieur ? On dit : "Dispositif en vigueur pendant

 22   la période de transition." Si vous l'avez, dites simplement "oui," comme ça

 23   je peux commencer à poser des questions.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Merci. Je voudrais pour inscrire ceci au procès-verbal évoquer

 26   certaines parties, puis vous pourrez répondre. On dit :

 27   "Les deux parties sont d'accord pour établir un comité de haut niveau

 28   chargé de préparer un projet de constitution de la fédération et de

Page 34792

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34793

  1   coordonner d'autres sujets en rapport avec la mise en œuvre d'un accord-

  2   cadre."

  3   Cette commission, a-t-il ajouté, commencera ses activités le 4 mars

  4   1994 à Vienne. Je pense que vous avez parlé hier d'une réunion à Vienne. Le

  5   texte dit ensuite ceci :

  6   "Tant que la constitution de la fédération n'entrera pas en vigueur,

  7   les dispositifs administratifs actuels continueront d'avoir leurs effets

  8   partout en République de Bosnie-Herzégovine, à moins que la commission n'en

  9   décide autrement par consensus et sauf dans la municipalité de la ville de

 10   Mostar à propos de laquelle les deux parties s'entendent pour dire que ce

 11   sera un administrateur de l'Union européenne qui se chargera de ces

 12   activités pendant deux ans maximum." 

 13   Est-ce que vous parliez, quand vous avez dit auparavant qu'il y avait

 14   un dispositif administratif qui devait continuer d'avoir des effets

 15   jusqu'au moment où les deux parties se mettaient d'accord sur une

 16   disposition constitutionnelle. Est-ce bien de cette disposition dont vous

 17   parliez ?

 18   R.  C'est exact, c'est la partie que j'ai évoquée dans mon

 19   intervention.

 20   Q.  Très bien. On a fait tout un tabac de la confédération, mais on n'a pas

 21   vu cette partie-ci. Regardons l'annexe 2, page 13. Ne regardons pas ce que

 22   disent certains articles de journaux. Voyons les vrais documents.

 23   M. SCOTT : [interprétation] Me Karnavas m'a critiqué les rares fois où j'ai

 24   fait un commentaire, et c'est ce que fait sans arrêt Me Karnavas. Ceci n'a

 25   pas sa place ici. Il doit présenter ses questions au témoin sans les

 26   assortir de conclusions ou de commentaires. Je peux si vous me donnez le

 27   temps vous expliquer comment et pourquoi j'ai mené le contre-interrogatoire

 28   de la façon dont je l'ai fait.

Page 34794

  1   N'importe qui peut lire un document, je ne voulais pas abuser de votre

  2   temps en donnant lecture de documents. Ce qui m'intéressait c'était les

  3   positions de M. Tudjman et de ces gens et pas ce que dit un document, parce

  4   que ça c'est versé au dossier, tout le monde peut le lire.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est une façon de voir les choses, mais on

  6   pourrait le voir aussi autrement, à savoir qu'il essayait d'induire le

  7   témoin en erreur.

  8   M. SCOTT : [interprétation] Mais vous savez, c'est ce qu'il a l'habitude de

  9   dire, Me Karnavas.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 11   M. KARNAVAS : [interprétation]

 12   Q.  Annexe II, page 13, chiffre romain II, on voit annexe de l'accord :

 13   "Esquisse d'un accord préliminaire sur les principes et les fondements

 14   nécessaires à l'établissement d'une confédération entre la République de

 15   Croatie et la fédération." Parcourons ce texte, il dit ceci :

 16   "Il est prévu qu'une confédération sera" - c'est un futur - "établie par la

 17   République de Croatie (ci-après la Croatie) et la Fédération de Bosnie-

 18   Herzégovine (ci-après la fédération)."

 19   Il est dit ensuite ceci : il y aura un accord préliminaire suivi d'un

 20   accord définitif. Prenons le chiffre romain I, il est dit ceci :

 21   "L'établissement de la confédération ne va pas ou ne doit pas modifier

 22   l'identité internationale, la personnalité juridique de la Croatie ni de la

 23   fédération."

 24   Chiffre romain II :

 25   "La confédération doit…" - et sont énumérés plusieurs dispositions, un

 26   marché commun, libre circulation des biens, des services, il y a d'autres

 27   éléments qui relèvent d'une politique de coopération, le transport,

 28   l'énergie, l'environnement, et cetera.

Page 34795

  1   Chiffre romain III :

  2   "La Croatie et la fédération doivent dans les meilleurs délais prendre des

  3   dispositions administratives pour avoir des systèmes permettant d'avoir des

  4   douanes communes, un système douanier, un accord en matière de défense," et

  5   cetera.

  6   Des questions vous ont été posées à propos de la confédération, était-ce à

  7   ce document que vous pensiez lorsque vous répondiez, il s'agit de l'accord

  8   conclu entre les parties ?

  9   R.  Oui, je l'ai évoqué en tant que partie intégrante des accords de

 10   Washington.

 11   Q.  Fort bien. Il s'agissait d'un accord, et suite à l'accord de

 12   Washington, la fédération a vu le jour en tout cas sur le papier, et toutes

 13   les parties signataires à cet accord, les Croates, les Croates de Bosnie-

 14   Herzégovine ainsi que les Musulmans de Bosnie-Herzégovine, est-ce que tous

 15   avaient l'obligation d'appliquer cet accord, de le mettre en œuvre ?

 16   R.  C'est exact.

 17   Q.  Je vais vous demander d'examiner la pièce 1D 01530.

 18   1D 01530. Nous avons la date du 6 avril 1994, dites-moi quand vous aurez

 19   trouvé le document.

 20   Une loi portant ratification de l'accord préliminaire sur l'établissement

 21   d'une confédération entre la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la

 22   République de Croatie. Est-ce que vous connaissez cette loi ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous nous l'avez dit au moment de l'interrogatoire principal, mais

 25   veuillez nous l'expliquer davantage, est-ce qu'en Bosnie-Herzégovine, les

 26   deux parties, les Croates et les Musulmans, est-ce que ces deux parties

 27   avaient fait un effort réel, honnête, afin de veiller à la concrétisation

 28   de cette fédération ?

Page 34796

  1   R.  Les Croates, s'agissant de cette question, l'ont mis en exergue sur un

  2   pied d'égalité avec les autres éléments issus des accords de Washington

  3   pour ce qui est d'une mise en œuvre. Mais la partie bosnienne n'était pas

  4   du tout intéressée par cette partie-ci de l'accord pour ce qui est d'une

  5   mise en œuvre de cette dernière.

  6   Q.  Quelle est la partie de l'accord qui les intéressait le plus ?

  7   R.  Ils étaient surtout intéressés par la réalisation de l'annexe portant

  8   sur un libre accès au port de Ploce.

  9   Q.  La seule chose qui les intéressait, c'est de savoir comment ils

 10   pouvaient avoir un port de haute mer plutôt que d'avoir un accord ou une

 11   relation basée sur un accord qui avait été négocié et conclu au niveau

 12   international. C'est ça que vous nous dites ?

 13   M. SCOTT : [interprétation] Il n'est peut-être pas judicieux que Me

 14   Karnavas pose des questions directrices. Ce n'est pas un contre-

 15   interrogatoire maintenant.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je puis dire à titre d'exemple : à l'époque,

 17   M. Izetbegovic et M. Tudjman avaient signé un accord portant sur un passage

 18   frontalier se trouvant sur la route conduisant vers le port de Ploce.

 19   L'intérêt n'était pas de créer une nouvelle administration douanière pour

 20   la fédération entière, mais un passage frontière concret. Et partant de cet

 21   accord, il y a eu suite à cela un conflit au sein du gouvernement et ça

 22   s'est soldé par les textes dans le journal "Oslobodjenje" que nous avons

 23   déjà commentés.

 24   Q.  Vous dites que ce n'était pas dans votre intérêt. Mais comment ? Je ne

 25   suis pas sûr de vous avoir compris, est-ce que ce n'était pas utile d'avoir

 26   un nouveau système douanier ? Est-ce que vous pourriez nous donner un peu

 27   plus d'explication là-dessus ?

 28   R.  En application des accords de Washington et de la constitution de la

Page 34797

  1   fédération, il s'agissait d'édifier de nouvelles institutions et une

  2   administration douanière, entre autres. Et mon ministère avait préparé un

  3   projet de loi relatif à l'administration des douanes. Mais à l'époque,

  4   étant donné que l'intérêt des Bosniens était dirigé uniquement vers cette

  5   partie relative au port de Ploce, il y a eu un accord à part entre

  6   Izetbegovic et Tudjman parlant d'un document à part à adopter au sujet de

  7   ce passage frontière vers Doljani pour qu'il fasse l'objet d'un loi

  8   spéciale qui serait fédérale. Au sujet des autres passages frontières, rien

  9   n'a été dit.

 10   Du point de vue du ministre des Finances à l'époque, c'était plutôt

 11   du domaine de l'attraction de voir deux présidents se concerter et se

 12   mettre d'accord au sujet de l'ouverture d'un passage frontière.

 13   Q.  Hier, toute une série de questions vous ont été posées par

 14   l'Accusation, et M. Scott laissait entendre par ces questions que c'est au

 15   cours de l'automne de l'année 1993 que les Croates se préparaient à

 16   négocier une espèce d'accord en vue d'établir cette fédération. Est-ce que

 17   vous vous souvenez de toute cette série de questions que vous a posées M.

 18   Scott ?

 19   R.  Oui, je m'en souviens.

 20   Q.  Parfait. Intéressons-nous --

 21   M. SCOTT : [interprétation] Maître Karnavas, excusez-moi, je ne fais pas

 22   objection à la question, mais je ne voudrais pas qu'ici mes propos soient

 23   déformés, et je m'excuse auprès de la Chambre. Mais je pense qu'il y a une

 24   distinction importante à faire ici. Le dialogue politique qu'il y avait à

 25   l'époque dans la communauté internationale évoluait - et c'est l'idée de

 26   l'Accusation - et s'écartait de la position croate qui voulait sa propre

 27   entité croate, donc ce n'était pas la politique qui évoluait dans ce sens.

 28   Bien sûr, libre à Me Karnavas de poser sa question, mais je ne voudrais pas

Page 34798

  1   qu'on comprenne mal notre position.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] A la lumière de ce qui vient d'être dit, il

  3   est d'autant plus nécessaire d'examiner ce document qui porte le numéro 1D

  4   02850 [comme interprété], en effet, ce document porte la date du 29

  5   décembre 1993. Il émane du Conseil de sécurité. Nous ne parlons pas de

  6   l'été, fin de l'été, de l'automne, on parle du mois de décembre 1993.

  7   Et la première page le dit déjà, il s'agit d'une lettre signée par Boutros

  8   Boutros-Ghali qui, à l'époque, était le secrétaire général, nous le savons

  9   tous, 23 décembre 1993, les coprésidents du comité de pilotage ont préparé

 10   et rendu un rapport.

 11   Regardez ce texte, page 2, "Annexe, rapport des coprésidents du comité de

 12   pilotage portant sur les activités de la conférence internationale sur

 13   l'ex-Yougoslavie." Dès le premier paragraphe, nous voyons qu'il est fait

 14   référence à une réunion qui s'est tenue le 23 septembre sur le vaisseau

 15   l'Invincible. Nous voyons qu'il y avait Izetbegovic, M. Boban, M. Karadzic,

 16   et en présence des coprésidents, les présidents Bulatovic, Milosevic et

 17   Tudjman, le vice-ministre des Affaires étrangères Churkin ainsi que

 18   l'ambassadeur Redman. Un accord constitutionnel a été obtenu qui prévoit

 19   une union des républiques de Bosnie-Herzégovine.

 20   J'ai peu de temps, je saute donc un passage pour passer au deuxième

 21   paragraphe. On dit, deux des trois parties ont signé, mais je vois la toute

 22   dernière phrase : "La présidence bosniaque a dit que leur assemblée élargie

 23   n'avait pas signé l'accord."

 24   Paragraphe numéro 4, il dit ceci, les coprésidents ont décidé d'avoir une

 25   politique double ou parallèle, à savoir voir s'il est possible en abordant

 26   certains problèmes ensemble qui se posent en ex-Yougoslavie, il serait

 27   possible d'avoir plus d'options en vue de parvenir à une solution durable

 28   en Bosnie-Herzégovine.

Page 34799

  1   "Une des idées" - est-il dit dans le texte - "qui a été examinée de façon

  2   précise, c'est la possibilité d'avoir un échange de territoire entre la

  3   Bosnie-Herzégovine et la République de Croatie, un tel échange permettant

  4   éventuellement la conclusion d'un accord pour avoir un accès à la mer qui

  5   serait ainsi à la disposition de la République de Bosnie."

  6   Page suivante, nous voyons les délibérations, chiffre romain II, paragraphe

  7   6 :

  8   "Les discussions qui ont eu lieu poursuivaient les objectifs suivants : il

  9   s'agissait de donner davantage forme au jeu de mesures conclu sur

 10   l'Invincible; et de donner à la république à majorité musulmane un minimum

 11   de 33,3 % des territoires."

 12   Je le dis, c'est important, parce que c'est la communauté internationale

 13   qui se met d'accord là-dessus : 

 14   "… pourrait donner à la république à majorité musulmane un accès à la mer."

 15   Puis on voit 33,3 % et 17,5 % pour la république ayant une majorité de

 16   Croates, le reste étant, bien sûr, pour les Serbes.

 17   Prenons la page 4, "Résultat" au chiffre romain III - et là je rappelle la

 18   date, 23 décembre 1993 - ce sont les résultats obtenus par la communauté

 19   internationale :

 20   "A la suite des discussions qui se sont tenues à Genève le 21 décembre et à

 21   Bruxelles les 22 et 23 décembre, on a une situation qu'il est possible de

 22   résumer de la façon suivante : tous les trois côtés s'entendent pour dire

 23   que la Bosnie-Herzégovine devrait être organisée sous la forme d'une union

 24   de trois républiques."

 25   "Un accord a été trouvé pour dire que la république en majorité musulmane

 26   devrait disposer de 33,3% du territoire et que les Croates devraient avoir

 27   17,5 %."

 28   Monsieur le Témoin, est-ce que vous saviez à l'époque que c'était là

Page 34800

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34801

  1   l'objet des négociations et ce que prônaient les internationaux qui

  2   essayaient de trouver une solution pacifique aux problèmes de la Bosnie-

  3   Herzégovine ?

  4   R.  Oui, je sais aussi qu'il a été question de cette issue sur la mer qui

  5   devait être assurée quelque part le long de la frontière entre le

  6   Monténégro et la Croatie. C'est donc dans le cadre de tout ce qui s'était

  7   dit au sujet des événements portant sur l'invisibilité.

  8   Q.   Merci. Je pense que j'ai terminé ce volet-là de mes questions

  9   supplémentaires, revenons dès lors au début du contre-interrogatoire, qui a

 10   débuté la semaine dernière ou la semaine avant.

 11   D'abord, Me Alaburic vous avait posé une question, ceci se trouve à la page

 12   33 971 du compte rendu d'audience. Ça portait en somme sur la question du

 13   contrôle, on parle financement et logistique, des civils contrôlaient

 14   l'armée, est-ce que c'est comme ça que ça avait été établi et effectué ?

 15   Est-ce qu'il y avait un contrôle civil sur l'armée et est-ce que ce

 16   contrôle est contrôlé par la finance et la logistique ?

 17   Voyons si j'ai bien compris, et comment vous voyez les choses à l'époque,

 18   qu'est-ce que ça voulait dire ce terme "contrôle" ? Vous, vous étiez chef

 19   du département des Finances, dans quelle mesure étiez-vous en mesure de

 20   contrôler l'armée à l'époque ?

 21   R.  Il ne s'agit pas d'un contrôle dans le sens où il y aurait contrôle des

 22   dépenses de ressources. Car le département de la Défense, dans ce segment

 23   de la dépense des ressources, se concertait avec le président de la HZ HB,

 24   qui était le commandant suprême. Nous, on ne faisait que verser des moyens

 25   au département de la Défense qui, d'après les rapports annuels, étaient

 26   dépensés à des fins de logistiques, de mobilisation, de fonctionnement du

 27   Département de la Défense. Donc il n'y a pas eu surveillance vis-à-vis de

 28   ces ressources de réalisée, et il n'y a pas eu non plus d'inspection de

Page 34802

  1   réalisée vis-à-vis de ce département de la Défense.

  2   Ce n'est qu'en 1994 qu'on avait envisagé un premier budget, et c'est là que

  3   les moyens sont versés rien qu'à des fins de salaires et à des fins

  4   d'utilisation à affectations spéciales.

  5   Q.  Ce n'était pas une question qui portait tellement sur le ministère de

  6   la Défense, mais sur l'armée. Parce qu'on parlait du contrôle civil sur

  7   l'armée, qui était établi et exercé en passant par le financement et la

  8   logistique. C'est pour ça que je vous posais la question. En votre qualité

  9   individuelle, vous qui étiez ministre du département des Finances, est-ce

 10   que vous aviez un contrôle quel qu'il fut sur l'armée, contrôle qui se

 11   serait exercé par le financement de l'armée ?

 12   R.  J'ai dit qu'il n'y avait pas de contrôle de réalisé de la part de ce

 13   département chargé des finances. Nous ne faisions que transférer des moyens

 14   pour la défense au département de la Défense. Maintenant de là à savoir à

 15   qui le département de la Défense transférait cela, c'est eux qui le

 16   faisaient conformément à leur propre programme.

 17   Q.  Oui, c'est ce que j'allais vous demander. D'accord, vous avez ce

 18   département des Finances qui n'était pas en mesure de contrôler l'armée,

 19   mais qu'en est-il du gouvernement, du HVO de la HZ HB, qui est l'exécutif ?

 20   Est-ce que celui-là avait un contrôle, je veux dire est-ce qu'il donnait

 21   des ordres à l'état-major sur la façon d'utiliser les fonds que l'état-

 22   major recevait, est-ce qu'ils lui disaient ce qu'il fallait faire, est-ce

 23   qu'on lui donnait des ordres à cet état-major, et est-ce que ce dernier

 24   devait les exécuter parce que peut-être qu'on pourrait couper les fonds ?

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 26   permettez, la question sous-entend que l'état-major prenait des décisions

 27   de nature financière et par la suite il s'en occuperait. Nous n'avons pas

 28   encore vu de document disant que c'était l'état-major qui s'occupait du

Page 34803

  1   budget, et qui décidait de l'affectation des ressources financières.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Le HVO de la HZ HB, lorsque je participais à

  3   ces activités, n'a jamais pris de décision portant sur les types de

  4   dépenses dans le cadre de tel ou tel autre département, et il en va ainsi

  5   pour ce qui est de la répartition des ressources du département de la

  6   Défense.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas.

  9   Pourrions-nous remonter un peu en arrière, au moment où le témoin a répondu

 10   que le département des Finances n'avait aucun contrôle. Page 64, ligne 22,

 11   qu'on va bientôt perdre de l'écran.

 12   "La façon dont ces fonds étaient acheminés, il n'y a qu'eux qui peuvent le

 13   dire, et ils le faisaient en fonction de leur propre programme."

 14   Monsieur Tomic, quand vous dites "ils" vous pensez à qui ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pensais aux différents départements. J'ai

 16   déjà dit que le premier budget a été élaboré pour l'année 1994. Et jusqu'à

 17   cette date-là, les fonds étaient alloués en fonction des demandes émanant

 18   des différents départements, et cela, sur la base de décisions

 19   individuelles. L'essentiel des fonds était alloué aux besoins de la défense

 20   à destination du département de la Défense et du département des Affaires

 21   intérieures.

 22   Et à la fin de l'année 1992, dans le cadre du rapport concernant le

 23   fonctionnement du HVO, un rapport a également été inclus concernant

 24   l'allocation des moyens dont nous disposions, mais il n'y avait aucun

 25   élément de surveillance ou de contrôle.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bien. Je vous remercie. Donc qui

 27   allouait les fonds au département ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous pouviez le voir également dans le rapport

Page 34804

  1   concernant l'exercice en 1992, qu'une partie des moyens que le département

  2   de la Défense recevait, il recevait du département des Finances, je pense

  3   que cela n'allait certainement pas au-delà de 5 % de ses besoins. Alors que

  4   le reste des fonds du département de la Défense provenait du fonds qui

  5   était financé par les contributions de la diaspora et dont les transactions

  6   passaient par Zagreb.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et ils étaient acheminés directement

  8   de Zagreb au département de la Défense ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et ça correspondait à

 11   95 % des fonds à la disposition du département. Donc 5 de votre

 12   département, avez-vous dit, et le solde  -- une troisième, quatrième source

 13   de fonds pour le département de la Défense ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas l'ensemble de ce qui restait

 15   qui venait de Zagreb, car le département de la Défense recevait une partie

 16   de son budget également par l'intermédiaire de la vente de certains biens.

 17   Il y avait également d'autres recettes. Cependant, la plus grande partie du

 18   reste de son budget provenait de ce fonds financé par les contributions de

 19   la diaspora.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation]

 22   Q.  J'aimerais reprendre là où le Juge Trechsel avait posé la question,

 23   parce que toute cette question d'avoir un budget - je sais qu'on l'en a

 24   discuté précédemment - lorsque vous dites qu'un budget a été mis en place,

 25   pouvez-vous nous expliquer en quoi, qu'entendez-vous au juste ? S'agit-il

 26   d'articles budgétaires qui montrent la somme qui est allouée à tel ou tel

 27   poste, à telle ou telle demande ?

 28   R.  Le budget, dans sa véritable forme de budget, a été préparé pour la

Page 34805

  1   première fois en 1994, où nous avions d'un côté les recettes et de l'autre

  2   côté les dépenses qui étaient ventilées selon les différents postes et par

  3   département. C'était la première fois que nous avions cette division du

  4   budget en recettes et dépenses.

  5   Q.  Le Juge Trechsel vous a posé la question et vous avez indiqué que

  6   l'argent allait directement au département de la Défense. Votre

  7   département, de quelque manière que ce soit, ou le HVO HZ HB avaient-ils

  8   une quelconque autorité ou contrôle quant à la façon dont ce budget ou ces

  9   fonds qui allaient directement au département de la Défense, comment ces

 10   sommes, comment ces fonds seraient dépensés tant pour des armes, tant pour

 11   les vêtements, tant pour l'alimentation ? Y avait-il un contrôle sur cet

 12   aspect-là ?

 13   R.  J'ai déjà déclaré que le HVO de la HZ HB recevait un rapport annuel

 14   concernant l'utilisation de ces moyens. Cela est devenu partie intégrante

 15   du rapport annuel du HVO de la HZ HB. Mais ce dernier ne prenait aucune

 16   décision relative à la répartition de ces ressources à l'intérieur du

 17   département de la Défense.

 18   Q.  Aujourd'hui, vous avez indiqué à un moment que les municipalités

 19   finançaient leurs propres unités, en réponse à une question qui vous a été

 20   posée précédemment. Pouvez-vous nous en expliquer un petit peu plus pour

 21   que l'on comprenne bien, car vous semblez indiquer que peut-être qu'au

 22   niveau municipal une procédure différente était en place ?

 23   R.  J'ai déjà parlé de cela. C'était là l'un des grands problèmes auquel

 24   nous avons été confrontés. Le département de la Défense, lui aussi, y a été

 25   confronté. Il s'agissait de la chose suivante : certaines municipalités, et

 26   avant tout Tomislavgrad, Livno, Capljina, je pense qu'en ce qui concerne

 27   Tomislavgrad et Capljina, cela s'est prolongé sur une période de temps

 28   longue, jusqu'en 1994, la situation qui prévalait là-bas était la suivante,

Page 34806

  1   à savoir que ces municipalités payaient la solde de leurs unités et se

  2   chargeaient également de financer leur approvisionnement, par exemple, pour

  3   ce qui est des besoins vestimentaires. Lorsque nous parlons encore de

  4   Tomislavgrad et de Livno, après que certaines pressions ont été exercées

  5   afin que les réglementations du HVO HZ HB soient respectées et mises en

  6   œuvre, les présidents de ces municipalités, puisqu'ils étaient membres

  7   fondateurs de la présidence de la HZ HB, ont fait obstruction à cela.

  8   Cela s'est prolongé jusqu'à l'année 1994, lorsque le ministre

  9   Martinovic a décidé de prendre les choses en main et de clarifier tout

 10   cela. Jusqu'à ce moment-là, ils se contentaient de nous dire qu'ils avaient

 11   versé telle et telle somme aux unités armées, et nous, nous reconnaissions

 12   ces dépenses au même titre que s'il s'était agi de versements au budget, et

 13   nous le considérions comme étant une sorte de livre de paie.

 14   Si bien que jusqu'au début de 1994, Capljina, également, pour une

 15   bonne partie de l'année 1993, les soldes et les salaires étaient versés de

 16   cette façon-là.

 17   Q.  Fort bien. Passons à une autre question qui vous a été posée. La

 18   question était :

 19   "Les questions de stratégie militaire étaient-elle débattues lors de

 20   réunions HVO HZ HB ?"

 21   Ensuite, la question poursuit :

 22   " … ou de telles questions étaient-elles débattues dans d'autres réunions

 23   qui se tenaient ailleurs avec d'autres personnes ?"

 24   Ça c'était 33 975, page. Traitons la première partie de la question :

 25   A votre connaissance, pouvez-vous nous expliquer si, le cas échéant, les

 26   réunions de stratégie militaire se déroulaient au niveau du HVO HZ HB ?

 27   R.  Il n'y avait pas de réunions au cours desquelles on aurait discuté de

 28   la stratégie au niveau du HVO de la HZ HB, et je pense que cela était

Page 34807

  1   conforme à la Loi relative aux forces armées. Le HVO HZ HB n'avait pas

  2   compétence en la matière.

  3   Q.  Bien. Savez-vous, puisque la question poursuit, de telles questions,

  4   enfin, de stratégies militaires, étaient-elles évoquées dans d'autres

  5   réunions qui se tenaient ailleurs avec d'autres personnes ? Savez-vous si

  6   de telles réunions se déroulaient; et si oui, où se tenaient-elles et qui

  7   étaient les participants ?

  8   R.  Non, je l'ignore, je n'ai pas connaissance de telles réunions, mais je

  9   suppose que cela serait du niveau de présidents de la HZ HB.

 10   Q.  Vous parlez au niveau de la municipalité ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Le président --

 13   R.  Le président de la HZ HB, à son niveau à lui, en tant que commandant

 14   suprême des forces armées.

 15   Q.  Bien. M. Boban, a-t-il tenu une session de stratégie militaire à une

 16   des quelconques réunions ou avec l'un ou l'autre des membres au HVO HZ HB

 17   afin de discuter de questions opérationnelles par rapport à ce qui se

 18   passait sur le terrain ?

 19   R.  Non, je ne serais pas en mesure de répondre à cette question.

 20   Q.  Je vous présente la chose suivante : étiez-vous, vous-même, présent

 21   physiquement lorsque des sessions de stratégie militaire, des sessions

 22   opérationnelles, se tenaient où Boban préside une telle réunion avec ses

 23   proches conseillers ?

 24   R.  Non, je n'ai pas assisté à des réunions au cours desquelles des

 25   questions stratégiques auraient été débattues. J'ai participé à un petit

 26   nombre de réunions tenues à Siroki Brijeg, réunions que nous avons eues

 27   avec les présidents des municipalités, avec le quartier général, et cela

 28   concernant la question de la situation qui prévalait sur le territoire de

Page 34808

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34809

  1   la HZ HB. En effet, nous étions confrontés au besoin de nous informer de la

  2   situation qui prévalait notamment en Bosnie centrale, afin de pouvoir

  3   décider de la façon dont nous poursuivrions nos activités en ce qui

  4   concerne le système financier; par exemple, comment planifier la suite de

  5   nos activités afin que les réglementations de la HZ HB puissent être mises

  6   en œuvre.

  7   Q.  Bien. Commençons maintenant où le contre-interrogatoire a commencé par

  8   l'Accusation. Premier thème, si je puis dire, concernait la question de

  9   programme de travail. Si je comprends bien votre déposition, on peut

 10   trouver cela à la page 34 119 à 120 du compte rendu d'audience, vous

 11   indiquez le premier véritable programme a été établi pour 1994. Avez-vous

 12   le souvenir d'avoir dit ça ?

 13   R.  Est-ce de ce premier budget, qu'il s'agit ici, le budget de 1994.

 14   Q.  Bien. Mais parlant d'un programme de travail, vous dites c'est le

 15   premier qui a été établi. Là encore, en quoi consiste ce programme de

 16   travail ?

 17   R.  Il s'agit d'un programme de travail portant sur la question de savoir

 18   comment assurer des recettes budgétaires, comment organiser les

 19   institutions dans le cadre du département des finances, et cetera.

 20   Q.  Qu'en est-il des autres départements ? Avaient-ils des programmes de

 21   travail avant le premier programme véritable qui a été établi, comme vous

 22   l'avez indiqué, pour 1994 ?

 23   R.  Je pense que chacun des départements avait élaboré son propre programme

 24   de travail, le programme de ses propres activités, et que cela a ensuite

 25   été intégré et initié au titre du programme du HVO de la HZ HB.

 26   Q.  Dans quelle mesure est-ce que vous, en tant qu'un des responsables du

 27   département, étiez responsable à l'égard des actions d'un autre département

 28   ?

Page 34810

  1   R.  Conformément aux compétences qui étaient celles du département des

  2   finances, ce dernier devait s'assurer que les dépenses ne dépassent pas les

  3   dépenses qui avaient été planifiées. Je parle ici du premier budget, celui

  4   de 1994. Il fallait également s'assurer de la chose suivante, à savoir que

  5   lorsque des décrets ou des décisions individuelles étaient prises, le

  6   département des finances donne son avis. Il s'agissait de savoir si cette

  7   décision ou ce décret entraînait des dépenses supplémentaires, ou alors

  8   est-ce que ces décrets pouvaient être mis en œuvre d'un point de vue

  9   financier. 

 10   Q.  Bien. On vous a accusé d'être l'homme des finances, entre guillemets,

 11   du HVO ou HDZ, à la page 34 121 à  122, lorsque vous étiez membre --

 12   lorsque vous indiquiez que vous étiez membre associé de l'état-major de

 13   crise. Autrement dit, vous n'étiez pas simplement un membre associé; vous

 14   étiez l'homme des finances du HVO ou du HDZ; c'est bien ça ? C'est là qu'on

 15   vous a demandé dans un premier temps à aider l'état-major de crise, comme

 16   vous l'aviez indiqué. Ça, c'est avant la mise en place du conseil objectif

 17   spécial, si vous vous souvenez de cette partie-là de votre déposition ?

 18   R.  Oui, je m'en souviens, oui. En avril 1992, j'ai reçu une décision

 19   signée par le président de la cellule de Crise. Il s'agissait d'une

 20   décision par laquelle j'étais la personne du département des Finances qui

 21   était responsable pour les questions relatives aux transactions

 22   financières, de la disponibilité des espèces.

 23   Q.  Il y avait un autre individu qui vous assistait ?

 24   R.  Nous étions deux; M. Senad Kazazic et moi-même.

 25   Q.  Bien. Ce que laissait entendre l'Accusation, on vous a accusé, si je

 26   puis dire, si je peux employer ce terme, l'homme de finance, le financier

 27   du HVO ou HDZ. Autrement dit, vous aviez un autre agenda; vous travailliez

 28   pour quelqu'un d'autre ?

Page 34811

  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Pour la

  2   deuxième fois, Monsieur Karnavas, vous avez utilisé le terme "accuse." Vous

  3   prenez ça bien du compte rendu d'audience ou est-ce votre propre

  4   interprétation ?

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] -- parce que vous posez la question au

  6   monsieur.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez employé ce terme et je

  8   considère que c'est votre interprétation.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est une accusation.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est votre interprétation qui est

 11   cela, car ça n'a pas été formulé en tant que tel, n'est-ce pas ?

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Pendant cette pause

 15   alors, je voudrais dire la même chose.

 16   Je ne pense pas que ce soit juste. Comme la Défense, l'Accusation est

 17   fondée à poser des questions au témoin. J'ai posé mes questions au témoin.

 18   Un certain nombre de ces questions étaient des questions directrices, comme

 19   c'est adapté pour le contre-interrogatoire. Ce n'était pas des accusations.

 20   Il n'y avait rien qu'il promet ou qu'il avait un autre programme, un autre

 21   agenda. Je posais des questions concernant son implication dans le conseil

 22   d'état-major de crise. Rien de mystérieux.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit un point

 24   très important. Je voulais juste --

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est peut-être pas un point important, mais

 26   entreprise criminelle, et c'est là où je vais en venir, j'ose dire que

 27   pendant tout le contre-interrogatoire, ce monsieur a été accusé d'avoir

 28   fait partie de l'entreprise criminelle conjointe, et quiconque prétendrait

Page 34812

  1   autrement sur la base de ce que dit l'Accusation se tromperait.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Karnavas, mon sentiment,

  3   tous ceux qui sont accusés sont ceux qui sont mentionnés dans l'acte

  4   d'accusation. D'autres peuvent être mis dans le voisinage, mais c'est une

  5   question formelle, telle que je vois.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais poursuivre, Monsieur le Juge.

  7   Q.  Toujours sur ces mêmes questions, vous étiez membre de l'état-major de

  8   crise. Etiez-vous sous les ordres du HVO ou HDZ s'agissant de vos activités

  9   de l'état-major de crise où on vous a demandé dans un premier temps

 10   d'apporter votre aide ? Vous travailliez avec votre collègue à ce moment-là

 11   ?

 12   R.  Dans ces compétences-là, nous n'avions aucune forme de communication et

 13   aucun moyen particulier ne nous était assuré à cette fin, que ce soit avec

 14   le HDZ ou quiconque d'autre. La cellule de Crise avait un membre et j'ai

 15   cité le nom de cette dame qui était secrétaire municipale aux finances. La

 16   situation était telle que l'ensemble du système s'est effondré. Nous nous

 17   sommes retrouvés confrontés à une situation où nous n'avions pas assez

 18   d'espèces monétaires. C'est alors que la cellule de Crise a engagé nous

 19   deux, en nous affectant des tâches spécifiques qui avaient trait à

 20   l'organisation de la comptabilité publique et à la protection des espèces

 21   disponibles sur le territoire de la municipalité de Mostar. Nous devions

 22   communiquer avec le SDK. Nous n'assurions aucune recette ni aucun fond pour

 23   le budget de la cellule de Crise ni pour personne d'autre. Nous avons

 24   simplement adopté un certain nombre de réglementations qui s'appliquaient

 25   aux transactions en espèces et à la comptabilité publique.

 26   Q.  Je crois que c'était la semaine dernière on vous a posé quelques

 27   questions concernant la façon dont le HVO HZ HB fonctionnait. Hier encore,

 28   il y avait des questions qui vous ont été posées pour savoir comment le Dr

Page 34813

  1   Jadranko Prlic se présentait. Il y avait, vous vous souviendrez, des

  2   questions assez sarcastiques qui vous ont été posées quant à la façon dont

  3   il se représenterait.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] "Présentait" pas "représentait". La

  5   façon dont il se présentait.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Présenter ou se représenter. Je ne veux pas

  7   débattre avec vous, Monsieur le Juge Trechsel, enfin pas aujourd'hui en

  8   tout cas.

  9   Q.  En tout état de cause, si on pouvait simplement discuter des

 10   responsables de départements. Vous indiquiez qu'ils faisaient des

 11   propositions mais qu'ils étaient autonomes; est-ce exact ? Vous vous

 12   souvenez avoir dit ça ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce qu'un membre ou un responsable d'un département avait l'autorité

 15   de déplacer un autre responsable de département ? A commencer dans le sens,

 16   de façon générale ? Par exemple, aviez-vous le droit de limoger le

 17   responsable du département de l'Intérieur ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Bien. Quid du président du HVO de la HZ HB ? Après tout, il a ce titre

 20   de "président." Est-ce que lui avait l'autorité de vous limoger ?

 21   R.  Nous avions été nommés par la présidence de la HZ HB.

 22   Q.  Ce qui m'amène au point suivant. Qui aurait donc l'autorité lui

 23   permettant de limoger un responsable du département ? Si vous êtes nommé

 24   par la présidence, qui avait l'autorité en vertu de ce système ?

 25   R.  La présidence de la HZ HB.

 26   Q.  Bien. A un certain point on vous a demandé si ça avait trait aux

 27   municipalités et au fait que parfois celles-ci n'appliquaient pas les

 28   décrets votés par le HVO de la HZ HB. On vous a demandé : "Pourquoi ne pas

Page 34814

  1   envoyer les militaires, les militaires du HVO HZ HB, ou la police pour les

  2   limoger pour appliquer ces décrets ?" Dans quelle mesure cette question

  3   était-elle réaliste ?

  4   R.  J'ai déjà eu l'occasion de parler de cela, de ce rapport étrange qui

  5   existait, à savoir que ceux-là même qui étaient censés mettre en œuvre les

  6   réglementations de la HZ HB sur le terrain; donc les HVO municipaux, et

  7   cela, en conjonction avec les départements de la HZ HB, mais sur le

  8   territoire des municipalités c'étaient les présidents des HVO municipaux

  9   qui étaient responsables de cette mise en œuvre. Ces mêmes présidents

 10   étaient en même temps membres de la présidence de la HZ HB, présidence

 11   devant laquelle nous devions rendre des rapports de travail, des rapports

 12   concernant nos travaux et nos activités, et c'étaient ces mêmes personnes

 13   qui devaient évaluer notre travail. Il s'agissait là d'un conflit permanent

 14   auquel tous les chefs de départements ont été confrontés dans le cadre de

 15   leurs activités, à tel point qu'ils devaient en pratique se livrer à des

 16   négociations supplémentaires avec les présidents des municipalités,

 17   négociations portant sur la mise en œuvre de ces réglementations, et cela,

 18   en sachant pertinemment qu'il s'agissait de personnes siégeant à la

 19   présidence de la HZ HB. Par conséquent, aucune option contraignante à

 20   l'égard de ces personnes n'entrait en ligne de compte à l'époque, et cela,

 21   certainement pas en ce qui concernait les municipalités qui disposaient de

 22   recettes suffisantes leur permettant de financer des unités armées sur leur

 23   propre territoire. C'est de cela que je parlais tout à l'heure également.

 24   Q.  Je vais insister, si vous le permettez. Nous savons que Mate Boban

 25   était le président de la présidence. Et nous savons que la présidence se

 26   compose des présidents des municipalités. Dites-nous, tout d'abord, dans la

 27   mesure du possible, de quelle façon ces personnes se voyaient nommées à ces

 28   postes, qui les désignait, qui les élisait ? Est-ce que c'était le HVO de

Page 34815

  1   la HZ HB qui le faisait, ou est-ce que ça se faisait d'une autre façon ?

  2   R.  Ils étaient élus dans les municipalités. C'était ce qu'on appelait dans

  3   l'ancien système les chefs de service municipaux qui sont devenus des

  4   présidents du HVO municipal --

  5   Q.  D'accord. Qu'en est-il de Boban personnellement, comment est-il devenu

  6   président de la présidence ? Est-ce qu'il s'est autoproclamé ? Est-ce qu'il

  7   a été élu ? Et s'il a été élu, par qui l'a-t-il été ?

  8   R.  D'après mes souvenirs, il a été élu par la présidence de la HZ Herceg-

  9   Bosna, ou suite aux transformations de l'époque, il serait devenu président

 10   de la présidence de la HZ HB. Je ne sais pas exactement vous le dire.

 11   Q.  Très bien. On vous a dit, plutôt qu'on ne vous a demandé, on vous a dit

 12   -- on vous a rappelé, devrais-je dire, que la présidence n'a pas eu plus

 13   que quelques réunions. Je pense que c'est ça qui a été dit entre 1992 et

 14   1993. Il se peut que je me trompe en matière de date. Est-ce que vous savez

 15   si M. Boban a eu des réunions en tête-à-tête avec les présidents des

 16   municipalités; est-ce qu'il aurait rencontré non pas en tant que part d'un

 17   organe collégial, mais est-ce qu'il les a rencontrés individuellement, ou

 18   est-ce qu'il leur a téléphoné ?

 19   R.  Ce que j'en sais, c'est que le président de la présidence de la HZ HB

 20   avait eu des réunions individuelles, voire des réunions avec des groupes de

 21   présidents des HVO municipaux. Et d'une certaine façon, il évitait la tenue

 22   de sessions de la présidence de la HZ HB, car à ces sessions-là on entamait

 23   bon nombre de questions qui ne pouvaient connaître de réponses, car un

 24   grand nombre de municipalités étaient restées sans ressource et demandaient

 25   des réponses, ou des variantes, des alternatives. Et lui, le plus souvent,

 26   rencontrait ces gens à titre individuel.

 27   Et en guise d'exemple, je dirais -- je pense l'avoir dit d'ailleurs. Il y a

 28   cette décision portant sur l'impôt de guerre à l'égard de nos travailleurs

Page 34816

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34817

  1   employés à l'étranger, et on a mis ceci hors de vigueur, parce qu'il y a eu

  2   des pressions de la part des municipalités de Tomislavgrad et Livno, et en

  3   réalité ça n'a jamais été promulgué.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Une dernière question éventuellement avant

  5   la pause, ou on peut faire la pause maintenant. Comme vous voulez, à vous

  6   de juger.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaut mieux faire la pause maintenant. On

  8   reprendra à 18 heures précise.

  9   --- L'audience est suspendue à 17 heures 44.

 10   --- L'audience est reprise à 18 heures 02.  

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Karnavas, vous avez la parole.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, merci,

 13   Messieurs les Juges.

 14   Q.  Monsieur Tomic, reprenons notre discussion là où nous nous étions

 15   arrêtés.

 16   Il y avait une question que je voulais vous poser : c'est de savoir

 17   s'il aurait été réaliste  - là nous ne sommes plus dans le domaine des

 18   hypothèses mais dans les faits, donc pas seulement de jure mais de facto -

 19   qu'est-ce qui ce serait passé si un président de la HZ HB avait essayé de

 20   démettre de ses fonctions un président d'une municipalité en posant la

 21   question à Boban lui-même, qui était élu par les membres des municipalités

 22   au poste de président de la présidence, est-ce que ce sont là, est-ce que

 23   c'est plausible ?

 24   R.  J'ai déjà dit que ce n'était foncièrement pas faisable. Et j'ai

 25   qualifié cela de relations bizarres entre le HVO et la présidence de la HZ

 26   HB et les présidents des municipalités qui étaient en même temps membres

 27   eux-mêmes de cette présidence.

 28   Q.  Très bien. Restons sur le sujet du HVO de la HZ HB. Vous étiez chef du

Page 34818

  1   département des Finances. En tant que tel, est-ce que vous aviez la

  2   responsabilité d'activités menées par d'autres départements ? Est-ce que

  3   vous pouviez être tenu responsable de ce que faisait, disons, je prends un

  4   exemple, le département du ministère de l'Intérieur ?

  5   R.  Chacun d'entre nous a des responsabilités vis-à-vis de son propre

  6   département.

  7   Q.  Ayez l'obligeance de répéter votre réponse. Je pense que les

  8   interprètes ne vous ont pas bien saisi.

  9   R.  Je disais que tout président du département était responsable de la

 10   situation telle qu'elle se présentait dans son propre domaine.

 11   Q.  Bien. Plusieurs questions vous ont été posées qui portaient sur le

 12   sujet de la devise ou des devises. A un moment donné, vous avez dit que la

 13   Croatie essayait sciemment de nuire ou de saboter, en tout cas, l'économie

 14   de la Bosnie-Herzégovine. Page 34 160 et 62. On vous a dit qu'on a eu

 15   recours aux dinars croates. C'était une façon de se prendre un espace

 16   croate. Revenons à la première question.

 17   Est-ce qu'à aucun moment la Croatie a sciemment et délibérément

 18   essayé de saboter l'économie de Bosnie-Herzégovine ?

 19   R.  Je n'ai pas témoigné sur ce type de tentatives.

 20   Q.  Essayons de remettre ceci dans son contexte vu la façon dont la

 21   question vous a été posée. A la lumière du fait qu'il y avait une grande

 22   quantité de dinars yougoslaves - on peut me corriger - mais disons qu'on

 23   les déversait, qu'on les jetait en Bosnie-Herzégovine, et que du coup, je

 24   suppose que c'était ainsi tenter de saboter l'économie de Bosnie-

 25   Herzégovine. Vous avez bien donné une explication, mais je voudrais que

 26   vous l'étoffiez. Comment peut-on dire que le gouvernement croate aurait

 27   quelque part essayé de saboter l'économie de Bosnie-Herzégovine en envoyant

 28   des dinars yougoslaves de l'autre côté de sa frontière ?

Page 34819

  1   R.  L'arrivée de ces quantités considérables de dinars yougoslaves s'est

  2   produite à un moment qui a précédé la déclaration d'indépendance de la

  3   Bosnie-Herzégovine. A l'époque, on pouvait parler, entre guillemets, de

  4   l'attitude vis-à-vis de l'économie yougoslave. Il ne demeure pas moins que

  5   ce dinar yougoslave a été imprimé hormis quelque contrôle que ce soit. De

  6   ce fait, cela faisait dégringoler sa propre économie, et seules certaines

  7   entreprises ou compagnies acceptaient encore à ce moment-là ce dinar

  8   yougoslave. C'était, pour l'essentiel, des cas d'exception. Tout le reste

  9   passait par la filière du marché noir.

 10   Là, en majeure partie, du moins sur le secteur de l'Herzégovine,

 11   c'étaient des gens originaires du Sandzak qui sont du côté du Monténégro,

 12   et eux vaquaient à ce type de business de façon organisée. Donc c'est là

 13   que prenait fin le voyage de ces dinars. Cela retournait dans cette partie-

 14   là de ce qui était resté de la Yougoslavie à l'époque.

 15   Q.  Pendant l'interrogatoire principal, vous avez effectivement parlé de

 16   l'utilisation du dinar croate et aussi, à un moment donné, du mark

 17   allemand. Mais l'Accusation vous a dit qu'en ayant recours au dinar croate,

 18   c'était un moyen de se découper un espace croate. Vu ce qui se passait sur

 19   le terrain, vous étiez là, vous êtes économiste de formation, est-ce qu'il

 20   était réaliste, possible, de forcer les gens qui habitaient dans cette

 21   région en Bosnie centrale, en Herzégovine, est-ce qu'il était possible de

 22   forcer ces habitants à utiliser telle ou telle devise, devise qu'ils

 23   n'auraient pu utiliser en dehors de la Bosnie-Herzégovine en tant que

 24   devise solide ?

 25   R.  J'ai déjà parlé de cela et on peut le voir dans les documents. Les

 26   municipalités ont mis en place ce dinar croate en parallèle avec le dinar

 27   yougoslave. Et quand ce dinar a perdu toute possibilité de payer quoi que

 28   ce soit, on l'a rejeté. La HZ HB a pris une décision portant réglementation

Page 34820

  1   des échanges en dinars croates. Je veux dire par là, si on avait imposé

  2   quelque autre monnaie que ce soit qui ne permettait pas d'acheter des

  3   choses dans le commerce, bien cela aurait été dénué de sens parce

  4   qu'inutile. 

  5   Q.  Quand on pense à ce qui se passe aujourd'hui dans le monde, il y a un

  6   mot qui vient à l'esprit et qui est d'une importance primordiale, c'est la

  7   "confiance." Quand on pense à la confiance qu'on peut avoir envers les

  8   marchés et surtout lorsqu'il s'agit d'une devise précise, est-ce que la

  9   confiance joue un rôle ? Et dans l'affirmative, quel est ce rôle que

 10   jouerait la confiance ?

 11   R.  J'ai dit à l'occasion de mon témoignage que la confiance est l'élément

 12   crucial. Je vais, par exemple, vous parler de l'introduction du mark

 13   convertible.

 14   En Bosnie-Herzégovine, après les accords de Dayton, après les accords

 15   de Washington, il y a eu une tentative qui visait à imposer un dinar bosno-

 16   herzégovien. Mais le dinar de Bosnie-Herzégovine n'était pas sur les listes

 17   de change au niveau des banques à l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine.

 18   Donc pour ce dinar-là, on ne pouvait pas acheter de la monnaie convertible

 19   à l'extérieur, exception faite de la Banque centrale sise à Sarajevo. Ce

 20   qui fait que ce dinar BiH n'a pas connu une propagation, n'a pas fait tache

 21   d'huile à l'extérieur de cette fédération après les accords de Washington,

 22   notamment du fait de cette défiance vis-à-vis de la quantité de dinars

 23   sortis de la planche à billets et notamment aussi compte tenu de la gestion

 24   de cette monnaie.

 25   Après Dayton, lorsque l'on a nommé un gouverneur étranger de la Banque

 26   centrale de Bosnie-Herzégovine, parce que d'abord la Banque populaire est

 27   devenue Banque centrale. Ça a été l'une des mesures visant à réinstaller la

 28   confiance. Ensuite, on a introduit une monnaie nouvelle, le mark

Page 34821

  1   convertible. Parce que déjà, l'appellation fait penser au mark allemand,

  2   qui était acceptable pour tout le monde. Donc c'est là aussi une question

  3   de confiance. Et troisième élément, le Fonds monétaire international s'est

  4   mis clairement derrière le projet, c'est-à-dire l'a appuyé, l'a soutenu, et

  5   la Banque centrale de Bosnie-Herzégovine était censée fonctionner sur un

  6   principe de "currency board." Il y a un comité d'administration pour ce qui

  7   est du taux de change et on ne joue pas avec la valeur de la monnaie. Donc

  8   ce mark convertible est devenu un moyen de paiement accepté dans toutes les

  9   parties de la Bosnie-Herzégovine.

 10   La confiance, c'est l'élément-clé du fonctionnement d'une monnaie en

 11   sus, bien entendu, de ce qui sous-tend la valeur d'une monnaie sur le plan

 12   économique.

 13   Q.  Je pense qu'il faut apporter quelques corrections au compte rendu

 14   d'audience. D'abord, à la page 81, ligne 14, le témoin a dit qu'il

 15   s'agissait du dinar de Bosnie et pas du dinar de Croatie -- ligne 18

 16   plutôt. Et à la ligne 22, je pense que le témoin a dit que c'était

 17   "Sarajevo," "la Banque nationale de Sarajevo".

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ligne 23, page 81, est-ce que c'est

 19   aussi le dinar de Bosnie plutôt que le dinar de

 20   Croatie ?

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Tout à fait.

 22   Q.  Si j'ai bien compris - et dites-moi, si je me trompe - suite aux

 23   accords de Dayton le gouverneur de la Banque centrale pour la première fois

 24   depuis ces cinq dernières années, c'est un étranger, n'est-ce pas ?

 25   R.  Tout d'abord, c'était un français, ensuite ça a été un gouverneur

 26   originaire de Nouvelle-Zélande. Et lui, il est même resté plus longtemps

 27   que cela n'était prévu par les accords de Dayton. Mais c'était une fois de

 28   plus du fait que c'était un homme de confiance et un homme neutre.

Page 34822

  1   Q.  Sujet suivant que j'aborderai brièvement, c'est la question des

  2   douanes. Je vais faire référence au procès-verbal à des questions qui vous

  3   ont été posées à la page 34 192, 34 201, 204, et aussi à une question posée

  4   à la page 34 203. Au fond, on vous a dit qu'on a rassemblé des fonds grâce

  5   au système des douanes mais que ces fonds ne sont jamais arrivés à

  6   Sarajevo, au gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Et vous avez dit que

  7   c'était une décision politique de ne pas envoyer de fonds au gouvernement

  8   de Bosnie-Herzégovine, non pas qu'il était impossible de le faire,

  9   d'envoyer cet argent au gouvernement de Bosnie-Herzégovine. C'était la

 10   synthèse de que vous demandait l'Accusation.

 11   Je vais d'abord vous demander ceci en conséquence de cela : est-ce

 12   qu'à l'époque Sarajevo, le gouvernement de Bosnie-Herzégovine, est-ce qu'il

 13   contribuait au fonds, est-ce qu'il apportait des contributions qu'il était

 14   censé faire ?

 15   R.  Bien sûr que non, parce que le budget de la Bosnie-Herzégovine n'a pas

 16   été adopté pour 1992, et pas non plus pour 1993, à mon avis. Ce n'est que

 17   fin 1994 que l'on a adopté un premier budget en tant que document, partant

 18   de quoi on pouvait gérer les finances publiques.

 19   Q.  Pourtant l'Accusation vous a dit qu'il y avait des bureaux de

 20   logistique à Zagreb, et que la République de Bosnie-Herzégovine utilisait

 21   des comptes en Croatie et dans d'autres pays, donc si on avait voulu faire

 22   des contributions du côté de la Bosnie-Herzégovine, il aurait été facile de

 23   faire des dépôts dans ces banques au nom de la Bosnie-Herzégovine. C'était

 24   au fond ce que vous disait le Procureur ?

 25   Je vous demande maintenant ceci. Est-ce que le gouvernement de

 26   Bosnie-Herzégovine a jamais adopté les lois nécessaires, est-ce que ce

 27   gouvernement a ouvert des comptes auprès de ces banques permettant ce genre

 28   de contribution, se disant qu'une fois que l'Etat aurait pris sa part, le

Page 34823

  1   reliquat reviendrait à l'Herceg-Bosna ?

  2   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin ne

  3   réponde, j'ai bien veillé pendant mon contre-interrogatoire à faire ceci,

  4   j'ai essayé de délimiter la connaissance qu'avait le témoin de la question.

  5   Pendant le contre-interrogatoire, je pense que nous avons établi que M.

  6   Tomic pendant cette période qui va de 1992 à 1994 n'avait jamais été à

  7   Sarajevo, n'avait aucun contact avec Sarajevo. J'ai demandé quel contact

  8   régulier il avait avec Sarajevo, et est-ce qu'il s'était trouvé à Sarajevo

  9   pendant cette période ? Et il a répondu qu'il ne s'était pas trouvé à

 10   Sarajevo et qu'il n'avait aucun contact régulier avec qui que ce soit et

 11   qu'il n'y avait été une fois à Zenica et il était passé par là en octobre

 12   1992. Alors il faudrait quand même prouver que ce témoin savait ce que

 13   faisait le gouvernement de Sarajevo, s'agissant de sa législation et de ses

 14   comptes en banque. C'est une objection.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi de répondre.

 16   On lui a posé une question à propos de Zagreb. On ne parlait pas de

 17   Sarajevo. Nous avons déjà établi que le système bancaire ne fonctionnait

 18   pas, car il n'y avait pas suffisamment de communication. Le témoin l'a déjà

 19   dit. Et le Procureur a dit au témoin que :

 20   "Après tout, ce n'est pas tant qu'il n'était possible

 21   d'envoyer l'argent au gouvernement de Bosnie-Herzégovine que la décision

 22   était d'ordre politique, car il y avait des banques établies ou des comptes

 23   en banque établis à Zagreb par le gouvernement de Bosnie-Herzégovine."

 24   On voulait dire qu'il était possible de déposer l'argent à Zagreb.

 25   Et je demande maintenant au témoin : est-ce que le gouvernement de

 26   Bosnie-Herzégovine a adopté la législation nécessaire avec des fonds qu'il

 27   était possible à ce moment-là de verser, l'idée étant que ces fonds

 28   pouvaient être restitués à l'Herceg-Bosna ?

Page 34824

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34825

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

  2   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Me Karnavas

  3   a en partie raison. C'est pour ça, vous l'aurez remarqué, que je n'ai pas

  4   fait objection à la première partie de sa question. Il l'a bien dit, et

  5   c'est ce que pense l'Accusation, s'il y avait eu la volonté d'effectuer ces

  6   paiements, si les Croates avaient -- ou plus exactement, le HVO au

  7   gouvernement de Bosnie-Herzégovine, nous pensons que c'était faisable.

  8   Cette partie-là de sa question était juste. Je n'y ai pas fait objection.

  9   Maintenant Me Karnavas passe à ce qui s'est fait en matière de

 10   législation à Sarajevo --

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais poser des bases parce qu'ici on

 12   essaie de me prendre le temps que j'ai. Car on a eu moult témoins qui nous

 13   ont dit qu'un budget est assorti de certains fonds et que ces fonds sont

 14   acheminés, ce n'est pas qu'on met tout l'argent dans un énorme compte en

 15   banque. Peut-être que ce serait là d'où vient M. Scott, mais ici nous avons

 16   un système financier très évolué.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Ça n'a rien à voir avec la question posée au

 18   témoin. Pas la question à laquelle j'ai fait objection.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation]

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous allez pouvoir continuer, parce que vous avez

 22   un témoin qui est technicien en matière de finances publiques. C'est comme

 23   si un si à un médecin on va lui poser une question sur la pénicilline. Même

 24   s'il ne fait que des opérations du genou, le médecin est capable de

 25   répondre. Donc je présume que même s'il ne sait pas ce qui se passe à

 26   Sarajevo, il y a quand même des aspects où il est capable de répondre.

 27   Allez-y.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation]

Page 34826

  1   Q.  Le Procureur vous a dit qu'il y avait des comptes en banque à Zagreb,

  2   dans d'autres pays, je parle ici du gouvernement de Bosnie-Herzégovine,

  3   qu'il avait ces comptes. Est-ce que ce gouvernement vous a jamais contacté

  4   pour vous demander où il était possible de déposer des fonds sur des

  5   comptes précis ?

  6   R.  Pendant les contacts que j'ai eus avec ces gens faisant partie de

  7   l'administration à Zagreb, il n'y a jamais eu de demande de formulée.

  8   Q.  Ce n'est pas la question que je vous posais. Je vous ai demandé si le

  9   gouvernement vous a jamais dit que ce gouvernement avait un compte en

 10   banque à Zagreb et vous aurait donné le numéro de compte et le nom du

 11   fonds, ce qui veut dire que vous auriez pu effectuer ces apports, et qu'une

 12   fois la partie leur étant donnée, le reste pouvait être donné à l'Herceg-

 13   Bosna. Est-ce qu'il est arrivé au gouvernement de Bosnie-Herzégovine de

 14   faire ce genre de choses ?

 15   R.  Non, ça n'a pas été fait.

 16   Q.  Très bien. On vous a posé des questions sur des contributions faites à

 17   l'Etat. Est-ce que le gouvernement de Sarajevo a contribué à la Communauté

 18   croate d'Herceg-Bosna alors qu'elle avait collecté des millions de dollars

 19   et elle avait aussi de l'argent blanchi, blanchi en passant par des

 20   organisations caritatives pour financer la guerre que ce gouvernement

 21   menait ?

 22   M. SCOTT : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Non pas tant

 23   que Me Karnavas - il a le droit de poser la question de savoir si des fonds

 24   sont venus du gouvernement de Sarajevo et aient été affectés à l'Herceg-

 25   Bosna - mais manifestement dans la deuxième partie, c'est uniquement une

 26   partie du commentaire dont il ne cesse d'accompagner ceci, est-ce que

 27   c'était des fonds du blanchiment d'argent --

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Je --

Page 34827

  1   M. SCOTT : [interprétation] Désolé, Maître Karnavas. Je formule mon

  2   objection comme Me Karnavas a coutume de le faire.

  3   Ceci est déplacé. C'est un simple commentaire de sa part une fois de

  4   plus. Mais je ne m'oppose pas à la bonne partie de la question, la

  5   première.

  6   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous vous répétez, et ça donne

  8   l'impression que vous voulez vraiment utiliser son temps. Il suffit de dire

  9   les choses une fois.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, peut-on examiner

 11   plusieurs documents, documents que nous avons à notre disposition. Le

 12   bureau du Procureur le sait car il avait recruté un expert pour l'affaire

 13   Delic.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : -- de M. Scott.

 15   C'est que je pense que Me Karnavas a les documents à l'appui de ce

 16   qu'il vient de dire. Donc avant de faire l'objection, attendez de voir

 17   comment il va démontrer la question.

 18   M. SCOTT : [interprétation] Mais je ne sais pas, mais ce n'est pas ma

 19   nature de mon objection, excusez-moi, Monsieur le Juge Trechsel, si je n'ai

 20   pas été aussi efficace que j'aurais pu l'être. Je pense que je suis l'un

 21   des avocats les plus succincts et si vous voulez faire le décompte du temps

 22   que j'ai utilisé dans les archives, vous pouvez le faire.

 23   Mais ce n'est pas là le problème. Ce n'est pas le fait de savoir si

 24   Me Karnavas a un document. Il en a sans doute plusieurs mais quelle est la

 25   pertinence de poser la question au témoin de savoir d'où venait l'argent.

 26   Est-ce qu'il veut montrer que le gouvernement de Sarajevo ne soutenait pas

 27   la Communauté croate d'Herceg-Bosna, je ne m'opposais pas à cela.

 28   Maintenant il veut parler de blanchiment d'argent d'organisations

Page 34828

  1   caritatives, ça n'a rien à voir avec la question. C'est essayé comme ça de

  2   faire des effets de manche.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Pourrait-on prendre le document 1D 03126.

  4   Nous allons examiner plusieurs documents, essayez de répondre brièvement;

  5   1D 03126.

  6   Ici on parle d'une agence de secours au Tiers-Monde, on dit :

  7   "Le président Izetbegovic vers le milieu de l'année 1991 a eu des

  8   contacts avec M. Hassanein qu'il connaissait depuis les années 1970."

  9   Et puis on dit :

 10   "Cette organisation, TWRA en anglais, est contrôlée par un comité qui

 11   se compose de Hassanein et de Hasan Cengic" - je pense que vous avez dit

 12   que vous connaissiez ce monsieur ou que vous en aviez entendu parler -  "ce

 13   monsieur avait la responsabilité de milice organisée par le parti du SDA."

 14   Et je saute des noms. On dit :

 15   "Tous sont des membres importants du SDA, sauf Ljevakovic et qui

 16   était un coaccusé avec Izetbegovic dans le procès de 1983. Il a approuvé

 17   trois des montants qui dépassaient les 500 000 $ auxquels cas il faut

 18   l'approbation de M. Izetbegovic --

 19   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous aider [comme

 20   interprété] ? Je suis désolé.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai le droit de consigner des éléments au

 22   procès-verbal avec ce témoin. J'ai le droit de faire des questions

 23   supplémentaires. Dans l'affaire Delic, un monsieur a été recruté qui a fait

 24   un rapport sur ce point précis. L'on parle ici de 350 millions de dollars

 25   de Silajdzic, Ganic, ils étaient enlisés dans cette affaire et ils étaient

 26   partie prenante jusqu'au cou pour ce qui est de la levée de fonds.

 27   Maintenant on a posé des questions pour savoir ce qui était donné au

 28   gouvernement. C'est m'ouvrir la porte pour ramener le problème ici, c'est

Page 34829

  1   ici que le bât blesse. Si ça ne plaît au Procureur, il ne devrait pas poser

  2   de questions au contre-interrogatoire là-dessus parce que la question qui

  3   se pose, c'est de savoir pourquoi 350 millions de dollars qui viennent de

  4   gouvernements radicaux islamistes, où est-ce qu'il allait cet argent ?

  5   Pourquoi est-ce qu'il n'y avait pas une partie, un tiers qui allait à

  6   l'Herceg-Bosna pour financer les écoles, pour payer les hôpitaux, tout ce

  7   qu'il fallait financer à l'époque ou la défense ? C'est peut-être pour ça.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Une fois de

 10   plus c'est tout à fait sans intérêt. Pourquoi est-ce que la source des

 11   fonds est importante dans le contexte de ce qu'il veut dire si ce n'est que

 12   pour attaquer de façon générale Izetbegovic, ça n'a aucune pertinence dans

 13   ce procès. C'était peut-être pertinent au procès Delic, mais c'était une

 14   autre affaire, un autre procès, et il y avait un accusé musulman, et peut-

 15   être que les raisons étaient différentes qui aurait expliqué la pertinence.

 16   Soyons clairs, ici je fais preuve de modération. Je n'ai pas fait

 17   objection, et Me Karnavas peut dire ce qu'il veut lorsqu'il dit que le

 18   gouvernement de Sarajevo n'avait pas envoyé un tiers des recettes à

 19   l'Herceg-Bosna. Je ne suis peut-être pas d'accord avec lui mais il a le

 20   droit de poser la question. Mais quant à savoir d'où venait ces fonds ?

 21   C'est ici sans aucun intérêt. Et la seule raison pour laquelle il veut en

 22   parler, c'est parce qu'il semble se délecter de dire des méchancetés à

 23   propos d'Izetbegovic et des Musulmans. Il peut le dire peu importe d'où

 24   venait l'argent. Et que l'Herceg-Bosna ait un tiers ou pas, ça n'a rien à

 25   voir avec l'origine des fonds. C'est là la nature de mon objection.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donner mon opinion personnelle.

 27   La thèse de la Défense est de dire que la République de Bosnie-Herzégovine

 28   était alimentée par des pays qui envoyaient des fonds. On cite des chiffres

Page 34830

  1   de 350 millions de dollars, et que cet argent n'allait pas dans la

  2   République, aux Croates. De l'autre côté, on a eu des éléments de preuve,

  3   et ce témoin nous l'a indiqué, que dans le cadre du budget, il incluait

  4   dans le budget les donations faites par la diaspora croate qui permettaient

  5   d'avoir un budget en équilibre, et que de ce fait on a un système financier

  6   à l'époque où un des belligérants reçoit des sommes colossales à partir de

  7   fonds provenant de différents Etats, et d'un autre côté, un autre

  8   belligérant reçoit lui des fonds par la diaspora.

  9   Voilà. C'est tout. C'est le contexte des événements.

 10   Bien. Maître Karnavas.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Passons au document 1D 03122. La dernière

 12   phrase :

 13   "Dans les comptes, dans les documents et les comptes bancaires de

 14   l'agence de secours pour le Tiers-Monde, les enquêteurs autrichiens ont

 15   identifié 350 millions de dollars de gouvernements musulmans et de

 16   mouvements islamiques radicaux jusqu'à la Bosnie."

 17   Et ensuite au deuxième paragraphe :

 18   "L'agence a piloté de nombreux projets civils en BiH depuis 1992."

 19   Ensuite on dresse la liste.

 20   Un peu plus loin :

 21   "Un banquier occidental en Autriche a parlé d'Al-Hassanein, comme le

 22   'porte valise' du président bosniaque Alija Izetbegovic."

 23   Et si nous passons maintenant à un autre document, 1D 03135 [comme

 24   interprété], je pourrais passer plusieurs heures, mais nous ne le ferons

 25   pas, le temps nous est compté. Là encore, une référence à un article de

 26   John Pomfret, où un banquier occidental aurait parlé de Hassanein comme

 27   porte valise.

 28   Ensuite 1D 03114, et je vous réfère à la page - je crois que ça doit

Page 34831

  1   être la page 78, sous "Les armes au lieu de l'aide humanitaire", à la page

  2   8, tout en haut de la page :

  3   "Des données de renseignement indiquent également que plus de 2,5

  4   milliards de dollars US ont atteint le TWRA en provenance de pays

  5   islamiques et que le 10 juillet 1992, le ministre des affaires étrangères

  6   bosniaque, Haris Silajdzic, a signé un document autorisant Al Hassanein et

  7   l'agence TWRA à collecter des dons pour les réfugiés en Bosnie-

  8   Herzégovine."

  9    Je ne vais pas poursuivre, je vais m'arrêter là, avec un dernier

 10   document 1D 03125, celui-ci concerne Silajdzic, qui est suspecté de

 11   contrebande en armes internationales.

 12   Q.  Je vous pose la question suivante : saviez-vous, la Communauté croate

 13   d'Herceg-Bosna était-elle informée des grosses sommes d'argent que le

 14   gouvernement de Sarajevo collectait, et une partie de cet argent était-il

 15   proposé pour financer ce que le gouvernement d'état était censé financer au

 16   niveau régional ou

 17   local ?

 18   R.  Concernant ces fonds, aucune partie n'en a été dirigée à

 19   destination de la HZ HB. Une partie seulement s'est retrouvée sous forme de

 20   marchandises - et j'en ai déjà parlé - je parle d'essence, de produits

 21   pétroliers, de mazout qui ont été livrés à Ploce et qui ont été utilisés

 22   pour l'entretien de la route du salut.

 23   Q.  Le 1D 03132, c'est un texte par une personne qui a été recrutée

 24   par le Tribunal en tant qu'expert. J'attire votre attention à la page 46 où

 25   il est dit :

 26   "Osama bin Laden en personne aurait donné de grosses sommes d'argent

 27   à l'agence TWRA pour financer l'achat d'armes et d'aider les radicaux

 28   musulmans au sein du gouvernement bosniaque."

Page 34832

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 34833

  1   Ça poursuit :

  2   "L'agence TWRA était également impliquée dans l'achat et le transport

  3   d'armes essentiellement en provenance du Soudan et de l'ex-URSS directement

  4   jusqu'à la ligne de front en Bosnie…"

  5   Un peu plus loin :

  6   "C'est en septembre que la Croatie a décidé subitement d'arrêter les

  7   survols d'hélicoptère au-dessus de son territoire après une enquête d'un

  8   an. Les autorités slovènes ont enfin lancé un raid contre l'entrepôt

  9   découvrant une centaine de fusils d'assaut, 750 000 projectiles et

 10   différentes roquettes et des explosifs pour une valeur d'environ dix

 11   millions de dollars américains.

 12   "En 1993, la police allemande a découvert une autre police [comme

 13   interprété] de contrebande qui valait 15 millions, financée par la TWRA.

 14   Dans le cadre de cette opération, des soldats malaisiens et turques ont

 15   participé aux casques bleus en Bosnie, particulièrement sympathiques à

 16   l'égard du sort désespéré des membres de la même religion qu'eux, et qui

 17   ont contribué à acheminer des armes de Croatie."

 18   Ensuite, la page suivante :

 19   "Paradoxalement, une bonne partie de cet 'argent de sang' ne venait

 20   même pas d'Osama bin Laden, mais de présumés alliés des Etats-Unis dans le

 21   monde musulman. En fait, de manière gênante, le gouvernement d'Arabie

 22   Saoudite était le premier bailleur de fonds à l'agence TWRA."

 23   Saviez-vous, en tant que responsable du département des Finances, que

 24   ce genre de sommes arrivait et que le gouvernement de Sarajevo avait accès

 25   à ces moyens pour financer ses militaires ?

 26   R.  A cette époque-là, je n'en avais pas connaissance, je n'avais non

 27   plus d'information relative à cela.

 28   Q.  Je poursuis - et qu'en est-il de ce qui après - je ne veux pas déposer,

Page 34834

  1   mais c'est un secret de polichinelle ce qui se passait en Bosnie pendant de

  2   nombreuses années. Pouvez-vous nous en dire un petit peu plus ?

  3   M. SCOTT : [interprétation] La période pertinente dans la mesure où ça

  4   concerne cette affaire serait le milieu des années 90 au moment où ça se

  5   passait - je vous prie de m'excuser. Je fais objection à ce commentaire

  6   incessant, en fait, le témoin, et j'appuie cela, M. Tomic dit : "Je n'avais

  7   pas connaissance de cela au moment," c'est la fin de l'enquête

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je poursuis.

  9   M. SCOTT : [interprétation] -- des articles de presse.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Je poursuis.

 11   Q.  Venons-en à présent à l'accord de Washington. J'en reviens quelques

 12   instants là-dessus. Et toujours avec le même auteur, je vous demanderais de

 13   regarder 1D 03133, là encore il s'agit du témoin expert du Tribunal. Là

 14   aussi --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce témoin expert du Tribunal, c'est un expert du

 16   Procureur ?

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Tout à fait, un témoin du Procureur recruté

 18   pour l'affaire Delic. Dans le transcript, il y a trois ans, j'avais fait

 19   une demande pour son rapport qui n'avait pas été complété à l'époque.

 20   Q.  Ici à la page 125, il est dit :

 21   "La réunification des factions bosniaques, croates et musulmanes, bien que

 22   détestables aux Moudjahiddines étrangers avaient renversé le cours de la

 23   guerre. Pour la première fois depuis 1992, les Bosniaques réalisaient des

 24   combats réels dans d'âpres combats avec les forces militaires serbes."

 25   Plus loin :

 26   "Au début de février, la pression publique des civils croates contre la

 27   présence des Moudjahiddines à Podbrezje s'est traduite par une visite de

 28   conciliation du vice-président musulman de la Bosnie-Herzégovine. Des

Page 34835

  1   sources militaires de renseignements des Nations Unies indiquaient que

  2   Galic avait servi comme 'envoi' entre le régime d'Izetbegovic à Sarajevo et

  3   la direction du Katibat Al Moudjahiddine. Galic avait publiquement soutenu

  4   les plaintes des Croates, en réagissant avec sympathie : 'On rencontre les

  5   fanatiques musulmans qui souhaitent se battre. Nous disons que vous êtes le

  6   baiser de la mort. Nous n'avons pas besoin d'eux, nous sommes nombreux,

  7   nous avons besoin d'armes.'"

  8   "Spahija Kozlic, un porte-parole de l'armée bosniaque, 3e Corps d'armée, a

  9   essayé de justifier le silence --

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] "Assourdissant."

 11   M. KARNAVAS : [interprétation]  -- désolé -- je -- le silence assourdissant

 12   du gouvernement bosniaque sur la question des combattants étrangers gênants

 13   à Zenica."

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] La page en question est 126, donc ce serait

 15   la page suivante, la deuxième page dans ce document. Je lis de la page 126,

 16   il a dit :

 17   "Ces gens sont venus ici pour nous aider. Ils font leur travail de façon

 18   normale. Nous ne savons pas s'ils vont se déplacer. M. Ganic a entendu la

 19   version croate de l'histoire. Mais nous n'avons aucune difficulté avec les

 20   Moudjahiddines."

 21   Ensuite :

 22   "Jadranko Prlic, le ministre de la Défense de la fédération musulmane

 23   croate qui, lui, avait un comportement bien moins cavalier concernant la

 24   situation. 'Nous ne pouvons plus accepter que ces Moudjahiddines sèment la

 25   terreur dans un voisinage croate,' a-t-il insisté. 'A la fois le progrès

 26   sur la fédération dépend d'une résolution de ce problème.' Le 11 mars,

 27   divers groupes politiques locaux, y compris l'Union démocratique de Zenica,

 28   le Parti populaire de Croatie, le Parti civique de Bosnie-Herzégovine, la

Page 34836

  1   branche Zenica de la Société culturelle croate Napredak, et la branche

  2   Zenica du Club culturel croate, ont publié une déclaration conjointe aux

  3   médias soulignant que 'les promesses données par les hauts responsables

  4   militaires et les officiels d'Etat seront enfin remplies s'agissant de

  5   l'enlèvement de cette unité El-Moudjahid de Podbrezje Zenica.'"

  6   Je vous pose la question suivante, partant : la présence des Moudjahiddines

  7   constituait-il un obstacle, comme cela semble apparaître dans l'ouvrage de

  8   cette personne; un obstacle pour ce qui est de la mise en œuvre de l'accord

  9   de la fédération, de l'accord de Washington, autrement dit ?

 10   R.  Cela exerçait une influence toute particulière sur le retour des

 11   personnes en Bosnie centrale.

 12   Q.  Bien. Hier au aujourd'hui - je ne me souviens plus très bien - vous

 13   indiquiez qu'il y avait une réunion qui aurait eu lieu entre M. Zubak et M.

 14   Ganic s'agissant de l'application de l'accord de Washington pour la

 15   fédération. Donc je souhaiterais attirer votre attention à 1D 03134.

 16   Pendant que vous recherchez cette pièce, je voudrais dire à tous ceux qui

 17   sont présents, je n'ai que la version croate. Je vais donc demander au

 18   témoin de lire le titre et une partie du texte, et nous entendrons la

 19   traduction. Voilà. Ceci a surgi pendant la pause, Messieurs les Juges.

 20   C'est pour ça que je suis un petit peu pris les deux pieds dans le même

 21   sabot.

 22   Puis-je vous demander de lire à haute voix le titre lentement : "211

 23   Daytonski…"

 24   R.  "Accord de Dayton : accord de revitalisation de la Fédération de

 25   Bosnie-Herzégovine, (Dayton, le 10 novembre 1995). "

 26   M. KARNAVAS : [interprétation]

 27   Q.  Je vous demanderais de passer sur les deux premiers paragraphes et de

 28   commencer par le troisième paragraphe.

Page 34837

  1   R.  "Les responsabilités et l'organisation du gouvernement de la fédération

  2   et du gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine doivent être

  3   séparées. Tout en coopérant mutuellement pour le bien de la population,

  4   aucun des deux gouvernements suscités ne doit empiéter sur les compétences

  5   de l'autre gouvernement, sans empiéter sur la souveraineté et la continuité

  6   de cette dernière ni l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, le

  7   gouvernement de la république doit à présent transférer des fonctions au

  8   gouvernement de la fédération en conformité avec la constitution de la

  9   fédération. Le gouvernement de la république ne doit conserver que celles

 10   des fonctions qui lui permettent d'opérer en tant que gouvernement de

 11   l'Etat internationalement reconnu de Bosnie-Herzégovine, et en conformité

 12   avec la constitution de la Bosnie-Herzégovine, telle que formulée au cours

 13   des récentes négociations de Dayton. Toutes les autres fonctions seront

 14   transférées au gouvernement de la fédération. Parallèlement --"

 15   Q.  Cela suffit pour le moment. On fera traduire ce document. Mais au vu de

 16   ce que vous venez de lire, ceci est-il conforme avec ce que vous essayiez

 17   de nous expliquer hier, voire même aujourd'hui pour ce qui est de

 18   l'application de l'accord de Washington et les obstacles qui semblaient se

 19   dresser devant celui-ci, car ceci est daté novembre 1995 et que nous savons

 20   que l'accord de Washington a été signé, je crois que c'était en mars 1994.

 21   R.  C'est précisément en vertu du présent accord, auquel je me suis référé,

 22   qu'une étape tout à fait concrète a été franchie dans la mise en œuvre des

 23   accords de Washington. L'on a ainsi avancé en direction de la mise en place

 24   des institutions de la Fédération de Bosnie-Herzégovine en accord avec les

 25   accords de Washington.

 26   Q.  Bien. Il y avait un certain nombre de questions hier concernant la

 27   visite de M. Prlic à Banja Luka, et nous avons vu un certain nombre

 28   d'articles. Tout d'abord, je considère que vous connaissiez les

Page 34838

  1   déplacements de M. Prlic à Banja Luka à peu près dans la période qui vous a

  2   été présentée hier.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Je suppose, puisque ceci était extrêmement public, qu'il ne s'agissait

  5   pas de réunions secrètes.

  6   R.  Non, en effet.

  7   Q.  Historiquement parlant, y a-t-il une population croate qui réside ou

  8   qui a résidé à Banja Luka ?

  9   R.  Avant la guerre, il s'y trouvait une population croate importante à

 10   Banja Luka.

 11   Q.  Si je comprends bien, il y a également un évêque là, n'est-ce pas ?

 12   R.  Pendant toute la durée de la guerre l'évêque s'est trouvé à Banja Luka,

 13   effectivement.

 14   Q.  Bien. Qu'en est-il des Croates là-bas; ce sont-ils heurtés à des

 15   difficultés pendant la période des conflits ?

 16   R.  Un bon nombre d'entre eux ont quitté la région de Banja Luka car ils

 17   s'étaient retrouvés sans travail, ou alors ils ont été mobilisés, et leur

 18   nombre s'en est trouvé considérablement amputé. Selon les informations

 19   fournies par l'évêque Komarica, il ne reste aujourd'hui qu'environ 5 000

 20   Croates dans cette région.

 21   Q.  Je voudrais évoquer cette période. Vous dites qu'ils furent mobilisés.

 22   Qui les a mobilisés, à quelle armée, à quelle faction ?

 23   R.  L'armée de la Republika Srpska.

 24   Q.  Bien. Quel était l'objet de la visite du Dr Jadranko Prlic pour ce qui

 25   est des Croates qui étaient là, qui étaient mobilisés dans l'armée de la

 26   Republika Srpska qui, comme chacun sait, était un des agresseurs ?

 27   R.  Il s'agissait d'une tentative de venir en aide à ces personnes-là

 28   également, à ces Croates de la région de Banja Luka qui, en pratique,

Page 34839

  1   n'avaient plus que leur évêque par l'intermédiaire duquel ils pouvaient

  2   encore communiquer. Ils s'étaient également vu refuser l'accès aux soins,

  3   aux hôpitaux. Ils avaient des problèmes d'endettement important et nous

  4   étions donc confrontés à toute une série de questions urgentes demandant

  5   une intervention rapide afin d'assurer un minimum de soins médicaux,

  6   d'arrêter le processus de mobilisation de ces personnes, et cetera.

  7   Q.  Des efforts étaient-ils déployés pour qu'ils évacuent, pour qu'ils

  8   quittent complètement, y compris l'évêque, afin peut-être d'être repeuplés

  9   ailleurs ? Enfin était-ce là un des objets de la visite ?

 10   R.  Non, au contraire. L'intention était de venir en aide à ces personnes

 11   afin qu'elles puissent rester sur place, afin qu'elles ne quittent pas ce

 12   qui était leurs biens, leurs conditions de vie précédente.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie d'être venu ici pour

 14   témoigner.

 15   J'ai écourté mes questions supplémentaires pour aider le témoin d'essayer

 16   d'apporter le maximum d'aide à la Chambre d'une façon limitée. Je vous

 17   remercie, Messieurs les Juges.

 18   Vous, Monsieur le Témoin, et bon retour.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, une question technique. Le document

 20   que vous avez fait lire au témoin, le 1D 03134 n'est pas sur la liste 65

 21   ter donc vous demandez le rajout, je présume.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Merci.

 23   On m'informe que je dois demander 1D 0326 [comme interprété], 322 [comme

 24   interprété], 3115, 3114, 3125, 3126, 3133, 3134. Toutes mes excuses.

 25   C'était une tentative de dernière minute pour condenser tout ça, c'est pour

 26   ça que nous avons suivi cette approche et nous vous remercions de votre

 27   compréhension.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

Page 34840

  1   Monsieur Tomic, au nom de mes collègues, je vous remercie d'être venu

  2   à La Haye à deux reprises. Ça a été long, mais votre audition vient de se

  3   terminer et je vous souhaite un bon retour, un bon retour dans votre pays,

  4   sachant que dès demain vous avez une charge familiale à accomplir. Je vais

  5   demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

  7   [Le témoin se retire]

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors pour la semaine prochaine, Maître

  9   Karnavas, nous avons un expert. Il n'y a pas de problème, l'expert sera là

 10   ?

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Pas de problème, Messieurs les Juges, et

 12   nous nous efforcerons de garder l'interrogatoire à deux heures, deux heures

 13   à deux heures et demie, et le rapport est un rapport assez complet, est

 14   assez parlant, mais au jour d'aujourd'hui, il n'y a pas de véritables

 15   problèmes.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] A titre personnel, je tiens à

 17   exprimer ma gratitude à M. Karnavas qui a réduit, a écourté ses questions

 18   supplémentaires, et s'est acquitté de façon satisfaisante. Merci, Monsieur

 19   Karnavas.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je ne peux que joindre également mes

 21   compliments à Me Karnavas. Il est toujours possible de faire bien en

 22   concentrant les questions sur l'essentiel, et ça permet de gagner du temps

 23   pour tout le monde, et ce dans l'intérêt même de la justice.

 24   Voilà donc, il est quasiment 19 heures dans quelques secondes. Je souhaite

 25   à tout le monde une bonne fin de journée et nous nous retrouverons les

 26   accusés, les avocats et le Procurer lundi prochain à 14 heures 15.

 27   Je vous remercie.

 28   --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le lundi 24 novembre

Page 34841

  1   2008, à 14 heures 15.

  2  

  3  

  4  

  5  

  6  

  7  

  8  

  9  

 10  

 11  

 12  

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28