Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 12 janvier 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  8   toutes et à tous dans ce prétoire et autour de celui-ci, bonne année.

  9   Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais vous répondre

 11   également en souhaitant à tout le monde une bonne année, et

 12   particulièrement aux accusés, à leurs avocats et à l'Accusation. Je

 13   souhaite que cette année puisse dérouler pour les uns et les autres dans

 14   les meilleures conditions possibles ainsi que pour vos familles.

 15   Je vais faire une annonce de nature administrative. En raison d'un procès

 16   qui va se tenir, procès numéro 7, la présidence de ce Tribunal a demandé à

 17   toutes les Chambres d'annuler quelques audiences pour que ce septième

 18   procès puisse se terminer. Dans ces conditions, concernant l'affaire Prlic,

 19   il a été décidé que le 18 février qui est un mercredi et le 26 février qui

 20   est un jeudi, il n'y aura pas d'audience. Alors j'ai regardé le tableau des

 21   témoins de la Défense Stojic qui était prévu pour ces dates, pour le 18

 22   février a priori, il ne devrait pas y avoir de problème car le témoin qui

 23   est prévu sur trois heures était prévu sur quatre jours, et donc on aura

 24   trois jours, c'est donc faisable. Pour le 26 février, le témoin qui était

 25   prévu est prévu pour deux heures d'interrogatoire principal, donc supprimer

 26   le jeudi 26 février ne devrait pas entraîner de problème majeur. Donc je

 27   tenais à vous indiquer cela afin que les uns et les autres puissent prendre

 28   vos dispositions.

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  1   Tout en ayant le calendrier des témoins à venir pour la Défense Stojic et

  2   également en tenant compte des heures qui ont été allouées aux autres

  3   Défenses, d'après mes calculs qui sont empiriques et qui ne valent qu'à

  4   titre simplement de renseignement, nous devrons, sauf problème nouveau,

  5   terminer les témoins de la Défense au plus tôt dans la semaine du mois de

  6   mai 2010. Voilà tel que peuvent se présenter nos calendriers, en tenant

  7   compte des heures qui ont été allouées. Si ça peut vous intéresser, nous

  8   devrions pour la Défense Stojic terminer aux environs du 23 avril, après

  9   quoi, la Défense de M. Praljak devrait donc commencer et ces derniers

 10   témoins devraient arriver fin août 2009. Nous devrions donc reprendre avec

 11   les témoins Petkovic à compter de septembre 2009, et nous irions jusqu'en

 12   début décembre 2009, après quoi, nous commencerions avec les témoins de M.

 13   Coric jusqu'en mars 2010 et nous commencerions la dernière semaine de mars

 14   2010 avec les témoins de M. Pusic et nous irions ainsi jusqu'en mai 2010,

 15   mais ceci évidemment, si tout se déroule conformément au calendrier qui

 16   avait été proposé et au respect des heures allouées par la Chambre. Voilà,

 17   donc tablons sur mai 2010, la fin des derniers témoins.

 18   Je vais demander à M. le Greffier pendant quelques secondes de passer à

 19   huis clos.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 21   partiel, Monsieur le Président.

 22   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, en audience publique, nous avons donc le

 25   témoin de M. Prlic, le Sieur Cvikl, qui va venir témoigner. La Chambre a

 26   appris que ce témoin voulait être assisté de son ordinateur. La Chambre,

 27   qui a délibéré ce matin, a constaté que, depuis que ce Tribunal existe,

 28   jamais un témoin n'est venu avec un ordinateur personnel. Donc, de ce fait,

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  1   la Chambre ne peut pas donner l'autorisation au témoin d'avoir en sa

  2   possession son ordinateur personnel. En revanche, nous avons cru comprendre

  3   qu'il voulait son ordinateur pour se référer à son rapport. Mais comme il y

  4   a donc un rapport écrit, il suffira à M. Cvikl d'avoir sous la main son

  5   rapport écrit, pour s'y référer et se référer aux notes de bas de page.

  6   Voilà donc ce que je tenais à dire à titre préliminaire.

  7   Pour ce témoin, la Défense de M. Prlic a besoin, je crois, de quatre

  8   heures; c'est bien ça, Maître Karnavas ? Que je salue à nouveau.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à

 10   toutes et à tous dans ce prétoire et autour de celui-ci, et je vous

 11   souhaite une bonne année 2009. Si je comprends bien, il nous faudra au

 12   moins quatre heures. On va essayer de ne pas en avoir besoin de quatre

 13   heures. Nous avons une présentation par laptop. Il voulait utiliser son

 14   ordinateur personnel tout simplement pour faire une recherche rapide de

 15   certains documents, mais ce ne posera pas de problème. Quoi qu'il en soit,

 16   nous avons une présentation sous forme PowerPoint. Nous avons fourni une

 17   copie à tout le monde et vous verrez, nous avons aussi l'ordre de

 18   présentation et l'utilisation des documents. Nous allons essayer de le

 19   faire en moins de quatre heures, mais il faudra sans doute quatre heures.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

 21   Je vais demander à M. l'Huissier d'aller chercher le témoin.

 22   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. J'espère que vous

 24   m'attendez. Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de naissance ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Milan Cvikl. Je suis né le 19 mai

 26   1959.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous actuellement une profession ou une qualité

 28   ? Si oui, laquelle ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je suis secrétaire généralement et chef

  2   d'état-major du gouvernement de Slovénie.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné devant un

  4   Tribunal soit international soit national sur les événements qui se sont

  5   déroulés dans l'ex-Yougoslavie, ou bien c'est la première fois que vous

  6   témoignez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sera la première fois.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur.

  9   Je vous demande de lire le serment.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 11   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 12   LE TÉMOIN : MILAN CVIKL [Assermenté]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous pouvez vous asseoir, Monsieur.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je vais vous donner quelques éléments

 17   d'information, mais je pense que Me Karnavas vous les a déjà indiqués, mais

 18   on ne sait jamais. Compte tenu de vos fonctions éminentes que vous avez

 19   déjà occupées dans le temps et vos fonctions actuelles, vous allez très

 20   vitre comprendre que la procédure qui se déroule devant ce Tribunal est une

 21   procédure où les Juges sont en retrait, car c'est d'abord les avocats des

 22   accusés qui vont vous poser des questions, et en l'occurrence, c'est Me

 23   Karnavas qui va vous poser des questions à partir d'un travail que vous

 24   avez effectué, après cette phase les autres avocats des autres accusés vous

 25   poseront également des questions, dans le cade dit du contre-

 26   interrogatoire. Lorsque ceci ce sera déroulé, le Procureur, qui se trouve à

 27   votre droite, mènera lui le contre-interrogatoire, mais les quatre Juges

 28   qui sont devant vous - là, nous sommes trois parce qu'il y en a un qui est

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  1   malade et j'espère qu'il arrivera très rapidement - vous poseront

  2   également, le cas échéant, donc des questions à partir des documents. Nous

  3   savons qu'il y a beaucoup de documents, et je ne veux donc pas perdre de

  4   temps, en laissant immédiatement la parole à Me Karnavas, étant précisé,

  5   Monsieur, que vous êtes maintenant témoin de la justice ce qui implique

  6   pour les jours à venir, parce que vous allez devoir rester pour le moins

  7   cette semaine ici, vous n'aurez aucun contact avec Me Karnavas, mais ça

  8   vous avez dû en être informé par l'avocat lui-même.

  9   Voilà ce que je tenais à vous dire, et c'est bien volontiers que je cède la

 10   parole à Me Karnavas.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,

 12   Messieurs les Juges.

 13   Interrogatoire principal par M. Karnavas :

 14   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Cvikl.

 15   R.  Bonjour.

 16   Q.  Si j'ai bien compris, aujourd'hui vous préférez une présentation par

 17   PowerPoint.

 18   R.  C'est exact. J'ai préféré une présentation par PowerPoint pour faire la

 19   synthèse du rapport que j'ai préparé.

 20   Q.  Vous allez parler en anglais et, moi aussi, je parle l'anglais et nous

 21   avons ces merveilleux interprètes mais ils ont besoin de respirer. Je vais

 22   donc vous demander de ménager une pause entre mes questions et vos

 23   réponses.

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Parlez lentement et prononcez bien clairement, c'est utile.

 26   Si j'ai bien compris, vous avez préparé un rapport et c'est la pièce 1D

 27   03111, 3111; c'est exact ? Vous l'avez à l'écran ou est-ce que vous l'avez

 28   avec vous ?

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  1   R.  Oui, j'ai ce rapport ici dans un des classeurs; c'est le rapport que

  2   j'ai effectivement préparé.

  3   Q.  Fort bien. Quelques questions en ce qui concerne ce rapport avant

  4   d'aborder le sujet. Qui l'a préparé ce rapport ?

  5   R.  Moi-même partant des documents qui m'ont été fournis, beaucoup d'entre

  6   eux m'ont été fournis par vous.

  7   Q.  Prenons la page 7 (VII), préface, on y trouve une partie qui montre

  8   votre parcours scolaire et votre expérience professionnelle ?

  9   R.  C'est exact. C'est un curriculum vitae bref qui résume mes activités.

 10   Q.  A la page 8 (VIII), au chapitre : "Sujet" -- ou "Objet de l'analyse,"

 11   on voit ce titre puis on voit pratiquement la tâche qui vous avait été

 12   conviée, les documents que vous avez examinés et les personnes que vous

 13   avez rencontrées pour préparer votre rapport ?

 14   R.  C'est exact. On voit ce que j'ai fait l'analyse des documents qui m'ont

 15   été donnés --

 16   L'INTERPRÈTE : [interprétation] Monsieur le Président, pourriez-vous

 17   éteindre votre micro ? Merci.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'abord sur la Communauté croate puis sur

 19   la République croate d'Herceg-Bosna, puis j'ai utilisé les documents

 20   fournis; en plus de cela, j'ai aussi trouvé des documents supplémentaires

 21   qui expliquent ce qui se passait en économie pendant les [imperceptible] de

 22   la Yougoslavie et plus tard dans différentes parties de la Yougoslavie.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation]

 24   Q.  Fort bien. On peut voir la table des matières qui se trouvent au

 25   chiffre romain I, et je pense que ça se poursuit aux chiffres romains III

 26   et IV, mais en quelques mots dites-nous cette présentation au PowerPoint

 27   que vous avez préparé en vue de votre audition. Est-ce que vous pourriez

 28   nous expliquer ceci ? Est-ce qu'elle suit l'ordre du rapport ? Est-ce

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  1   qu'elle correspond bien à la teneur de votre rapport ou est-ce qu'on

  2   retrouve dans cette présentation des éléments qu'on ne trouveraient pas

  3   dans le rapport ?

  4   R.  Non. Cette préparation en PowerPoint que j'ai préparée s'inspire du

  5   rapport. Elle fait simplement la synthèse de ce qui se trouve dans le

  6   rapport; bien sûr, je voulais résumer en 38 clichés les événements les plus

  7   saillants, l'intention des Juges et de ceux qui vont comprendre mon

  8   rapport.

  9   Q.  Si je comprends bien en plus de la présentation PowerPoint, il y a une

 10   liste des documents, une quarantaine à peu près, peut-être quelques-uns de

 11   plus. Est-ce que tous ces documents sont mentionnés et trouvent référence

 12   dans votre rapport ?

 13   R.  Oui, pratiquement tous. Il y en a quelques-uns à peine que j'ai reçus

 14   plus tard et que je n'ai pas pu reprendre dans ce rapport; mais la plupart

 15   des documents se trouvent dans ce rapport. Quant aux documents

 16   supplémentaires, ils se contentent de décrire ce qui s'est passé et ce que

 17   moi-même j'ai décrit dans ce rapport.

 18   Q.  Qui vous a donné ces documents supplémentaires, ceux qu'on ne trouvait

 19   pas dans votre rapport ?

 20   R.  Par vous, c'est vous qui nous les avez donnés.

 21   Q.  Ça s'est fait quand ?

 22   R.  Ce dernier week-end, quand je suis arrivé à La Haye.

 23   Q.  Quand nous arriverons à l'examen de ce document, veuillez le dire aux

 24   Juges.

 25   R.  Oui.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, ils ont été fournis à

 27   tout le monde, je le précise, aux fins du compte rendu.

 28   Q.  Parfait. Prenons cette présentation PowerPoint, entrons dans le vif du

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  1   sujet. Prenez le troisième -- la troisième page. Ici vous donnez une idée

  2   de votre expérience professionnelle. Commençons par la fin, on voit ce que

  3   vous faites aujourd'hui. Vous avez dit que vous étiez secrétaire général et

  4   chef d'état-major du gouvernement de Slovénie. Pourriez-vous nous expliquer

  5   en quoi consiste ce poste ?

  6   R.  Oui. A partir du mois de novembre 2002, c'est à ce moment-là que le

  7   nouveau gouvernement slovène s'est rencontré pour la première fois, a eu sa

  8   première réunion. Le premier point à l'ordre du jour c'était une

  9   proposition du premier ministre et j'avais été élu par le gouvernement

 10   secrétaire général ou chef, pas d'état-major mais chef du cabinet du

 11   gouvernement. C'est le poste le plus élevé et j'ai eu une équipe qui

 12   travaille au sein du secrétariat général qui compte environ 120 personnes

 13   qui sont directement sous mes ordres et j'ai aussi quelques centaines de

 14   fonctionnaires subordonnés dans d'autres services. Nous assurons la

 15   coordination du travail du gouvernement. En fait, le gouvernement se divise

 16   en trois grands organes : l'un s'occupe des questions disons économiques et

 17   qui est présidé par un des ministres; l'autre organe c'est celui qui

 18   s'occupe de l'organisation de l'Etat, des affaires publiques et qui est

 19   présidé par le président -- le ministre de l'Intérieur; et le troisième

 20   organe gouvernemental c'est celui chargé de l'administration et des

 21   questions de personnel que je préside. Le gouvernement a des activités à

 22   des réunions dans chacun de ces comités et sous la tutelle du premier

 23   ministre pour ces réunions du jeudi matin, j'établis un ordre du jour et je

 24   m'assure que tout ceci a été préparé conformément aux règlements

 25   intérieurs, une fois que les décisions sont prises, elles sont diffusées au

 26   pays, aux différents ministères.

 27   Q.  Vous parlez du mois de novembre, vous parlez du novembre -- de novembre

 28   2008 ?

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  1   R.  Oui, 22 novembre 2008. Nous avons eu des élections le 21 septembre

  2   2008, et donc nous avons gagné ces élections et puis nous avons deux mois

  3   plus tard commencé le gouvernement.

  4   Q.  C'est important comme repère dans le temps pour savoir de quelle

  5   période nous parlons.

  6   Remontons dans le temps dans votre carrière, je vois qu'avant d'occuper le

  7   poste que vous occupez actuellement, vous avez aussi été ministre des

  8   Affaires européennes en Slovénie. En quoi ceci consistait-il ?

  9   R.  Oui. En 2004, juste avant que nous n'adhérions officiellement à l'Union

 10  européenne le 1er mai 2004, j'ai été nommé ministre des Affaires européennes

 11   en Slovénie où j'ai été un des membres du Conseil des ministres,

 12   responsable des Affaires générales, tout en coordonnant les activités des

 13   ministres du gouvernement slovène lorsqu'il s'occupe des questions

 14   européennes. Je représente le gouvernement slovène au parlement slovène,

 15   nous y cernons les questions essentielles qui nécessitent un accord de la

 16   part de la Slovénie pour des questions européennes.

 17   Q.  Si je comprends bien, cette première page, vous avez été banquier;

 18   pourriez-vous nous dire en quelques mots ce que vous faisiez aussi quand

 19   vous étiez secrétaire d'Etat en finance ?

 20   R.  De 1998 à 2004, là je suis revenu de Washington; j'avais travaillé avec

 21   la Banque mondiale et c'était de retour au pays, j'ai d'abord été chef

 22   d'équipe d'une étude d'analyse de la Novi Ljubljanska Banka. En 1998, je

 23   suis aussi devenu secrétaire d'Etat ou ministre adjoint des finances pour

 24   assigner pour ce qui est du budget public des questions de gestion

 25   publique, en d'autres termes, j'avais la responsabilité de la préparation

 26   du budget du gouvernement central en Slovénie mais aussi du budget d'autres

 27   fonds parafiscaux, par exemple, la retraite, et la santé; et j'ai été aussi

 28   chef de l'équipe de négociations qui entre 1998 et 2000 négociait avec

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  1   l'Union européenne sur les questions d'approbation de la gestion

  2   communautaire en Slovénie, ce qui s'inscrivait dans la démarche d'adhésion

  3   du pays.

  4   Q.  Nous allons ne pas parler de vos activités avec la banque, nous y

  5   reviendrons plus tard. Pourriez-vous nous dire quelques mots du premier

  6   point que l'on voie ici, à la page 3 de votre présentation, lorsque vous

  7   étiez macro économiste ? Je suppose que c'était en Slovénie; pourriez-vous

  8   nous dire en quoi consistaient ces activités ?

  9   R.  J'ai terminé mes études en 1983, par une thèse sur ce qu'on appelait

 10   l'approvisionnement monétaire dans une économie de marché, et j'ai commencé

 11   à travailler dans une équipe. A l'époque, la Banque nationale de Slovénie

 12   faisait partie de du système monétaire fédéral de l'ex République

 13   fédérative socialiste de la Yougoslavie. Entre 1983 et 1991, nous nous

 14   sommes intéressés à ce qui se passait en Yougoslavie. Nous voulions savoir

 15   quelles étaient les réformes qu'il fallait mettre en route si la

 16   Yougoslavie voulait demeurer une société durable sur le plan financier.

 17   Malheureusement, lorsque arriva la fin de l'année 1989, il y avait hyper

 18   inflation, début 1990, il y a eu des réformes lancées par celui qui était

 19   alors premier ministre, M. Markovic mais qui ont échoué. En 1990, j'ai été

 20   nommé membre d'une équipe restreinte dans la Banque centrale avec d'autres

 21   institutions financières à commencer à travailler, à préparer

 22   l'indépendance de la Slovénie. A ce titre, j'ai lancé personnellement

 23   quelques initiatives législatives pour ce qui est de la loi sur la Banque

 24   de Slovénie, sur la nouvelle Banque de Slovénie et sur la masse monétaire à

 25   mettre en circulation pour pouvoir avoir la transition monétaire en

 26   Slovénie.

 27   Q.  Tout ceci c'est peut-être avant l'effondrement de la Yougoslavie ?

 28   R.  Oui. Pratiquement à la veille du référendum qui s'est fait le 23

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  1   décembre 1990, en Slovénie, nous avions préparé à la Banque centrale ainsi

  2   que dans d'autres institutions gouvernementales la législation qu'il

  3   fallait avoir pour que la Slovénie; tout d'abord pour qu'elle puisse

  4   procéder à ce référendum, pour savoir si les Slovènes voulaient un pays

  5   indépendant, et six mois plus tard, nous avions pris des dispositions qui

  6   ont, bien sûr, donné naissance à un pays indépendant, et je fais partie de

  7   cette équipe jusqu'au début du mois d'août 1990.

  8   Q.  Bien. Parlons brièvement de votre expérience au sein de la Banque

  9   mondiale. La raison pour laquelle je garde ça en dernier, c'est que si je

 10   comprends bien, c'est dans votre rapport, dans votre CV, à un moment avec

 11   la Banque mondiale, vous étiez en Bosnie-Herzégovine. Donc pourriez-vous

 12   parler brièvement de votre expérience au sein de la Banque mondiale ?

 13   R.  Bien, à la fin de 1990, début 1991, j'ai participé à un concours à la

 14   Banque mondiale de jeunes cadres de la Banque mondiale où j'ai été élu dans

 15   un groupe de 30 jeunes cadres qui étaient employés auprès de la Banque

 16   mondiale en 1991. J'ai démarré par deux brèves affectations de six mois de

 17   septembre 1991 jusqu'en septembre 1992, une en Tanzanie et l'autre dans le

 18   secteur industriel et énergie du département européen. Dans la deuxième

 19   moitié de 1992 et 1993, j'étais économiste pour l'ex-République yougoslave

 20   de Macédoine. J'ai dirigé une équipe. J'étais chef de projet qui avait pour

 21   tâche, dans le stage de fin de 1992 début 1993, qui préparait le premier

 22   plan de relance économique pour l'ex-République yougoslave de Macédoine où

 23   nous avons, bien évidemment, veillé à ce que l'ex-République yougoslave de

 24   Macédoine devienne membre de la Banque mondiale.

 25   En septembre 1994, le représentant du département européen, M.

 26   Kamandervis [phon] m'a demandé de constituer une petite équipe avec le

 27   responsable de la Banque mondiale en place à Varsovie pour mettre en place

 28   -- nouer des contacts avec des officiels de l'époque de Bosnie-Herzégovine

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  1   car il fallait veiller à ce qu'avant que les autres ex-républiques

  2   yougoslaves deviennent membres de la Banque mondiale, en souhaitait

  3   s'assurer que la Banque mondiale et le FMI mèneraient les travaux

  4   économiques nécessaires afin de permettre à la Bosnie-Herzégovine d'assumer

  5   la place de Bosnie-Herzégovine auprès de la Banque mondiale. J'ai donc fait

  6   partie de l'équipe qui a préparé le terrain économique. En 1995, nous

  7   sommes rendus à de nombreuses reprises, nous avons eu de nombreux contacts

  8   avec les responsables économiques en Bosnie-Herzégovine. En février 1996,

  9   après les accords de Dayton, j'ai organisé la première conférence des

 10   bailleurs internationaux à Sarajevo. J'ai continué à travailler en Bosnie-

 11   Herzégovine pendant six à neuf mois, et ensuite début 1997, je suis revenu

 12   en Slovénie.

 13   Q.  Je crois que c'était en  1994 que vous vous êtes rendu à

 14   Varsovie, premier voyage BiH c'était en 1995, et donc vous avez fait

 15   plusieurs voyages jusqu'en 1996. Avez-vous tiré des conclusions de cette

 16   expérience ?

 17   R.  Les principales conclusions que nous avons tirées à l'époque

 18   résumaient dans ce rapport. Bosnie-Herzégovine vers une reprise économique.

 19   Q.  Donc si on se réfère à un rapport, il faut donc s'assurer que

 20   l'on se réfère à un document. Je crois savoir qu'il s'agit de 1D 02967;

 21   c'est bien ça ? Si vous regardez le dossier, 1D 02967, c'est bien, donc

 22   pourriez-vous évoquer brièvement ce rapport ?

 23   R.  Alors ce rapport est le premier élément d'un travail économique

 24   que la Banque mondiale a préparé. Il s'agit d'une étude de la Banque

 25   mondiale qui a deux objectifs. Il s'agit d'une part de présenter à

 26   l'ensemble de la communauté économique quels étaient les événements

 27   économiques intervenus après que la Yougoslavie cesse d'exister, après que

 28   la guerre a démarré en Bosnie-Herzégovine. En effet, il fallait s'assurer à

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  1   la Banque mondiale que la dette impayée -- ou plutôt, la dette, les encours

  2   en matière de dettes qui étaient dus par la Bosnie-Herzégovine à la Banque

  3   mondiale seraient couverts. Deuxièmement, nous avons travaillé sur ce

  4   rapport avec le Fond monétaire international et les institutions de l'Union

  5   européenne car nous voulions analyser quels seraient les besoins de

  6   reconstruction, poste à la guerre de la Bosnie-Herzégovine.

  7   Q.  Bien. Vous avez indiqué donc vous étiez à Varsovie en 1994, et pendant

  8   votre -- au cours de votre séjour, y avait-il des personnalités de haut

  9   rang qui se rendaient de la Bosnie-Herzégovine pour rencontrer donc les

 10   responsables de la Banque mondiale pour la Bosnie-Herzégovine ?

 11   R.  Oui, à l'époque, nous ne pouvions pas voyager en Bosnie-Herzégovine. Ce

 12   qui était donc le mode de travail habituel pour que la banque effectue son

 13   travail. Aussi nous avons demandé aux autorités, donc j'ai rencontré en

 14   septembre, octobre 1994, pour la première fois, les autorités de la

 15   Fédération de Bosnie-Herzégovine. Nous leur avons demandé de venir nous

 16   voir à la mission de la Banque mondiale. Il y avait l'équipe de la Banque

 17   mondiale, les autorités de la Bosnie-Herzégovine, là, nous avons pu

 18   échanger des opinions. Nous avons étudié les documents qu'ils nous ont

 19   apportés.

 20   Q.  Vous souvenez-vous donc des responsables qui sont rendus de la Bosnie-

 21   Herzégovine s'ils provenaient de la Fédération ou de l'état ?

 22   R.  En effet, bon nombre d'entre eux, par exemple, M. Enes Gotovusa, qui

 23   était haut responsable du secrétariat fédéral pour l'industrie; M. Shefika

 24   Hacizowic [phon], du ministère des Finances; Obrad Piljak et Kasim [phon]

 25   Omicevic, de l'époque de la Banque nationale de la Banque Herzégovine. M.

 26   Neven Tomic nous a également rendu visite, M. Zlatko Bas [phon], M. Petar

 27   Bosnic [phon], de nombreux officiels, et qui sont même citées dans ce

 28   rapport.

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  1   Q.  Bien. Si nous regardons ce document, le 1D 02967, sous le chiffre VII

  2   romain, sous les remerciements, là, nous voyons plusieurs noms, M. Tomic,

  3   et le Dr Jadranko Prlic. S'agit-il de noms auxquels vous faites allusion,

  4   ou qui provenaient -- qui ce sont soit rendus à Varsovie et par la suite

  5   ils ont eu contact avec la Banque mondiale dans la préparation de son

  6   rapport ?

  7   R.  Oui, il s'agit bien d'officiels de la Fédération d'Etat, également du

  8   gouvernement de la République serbe que nous avons rencontrés pendant toute

  9   la phase de préparation de ce rapport. Voilà donc M. Gotovusa, M. Tomic, M.

 10   Prlic, M. Piljak, Belanger [phon],  Nantja [phon] également dans le cadre

 11   de l'équipe de la Banque mondiale. Maintenant figurant également dans

 12   l'ordre alphabétique, il s'agit donc des personnes que nous avons

 13   rencontrées en 1994, 1995 et 1996.

 14   Q.  Bien. Je reviens à une de mes questions précédentes. En 1994, 1995,

 15   1996, lorsque vous vous êtes rendu en Bosnie-Herzégovine et vous avez

 16   participé à l'élaboration de ce rapport avec d'autres, avez-vous

 17   personnellement tiré des conclusions pour ce qui est, par exemple, de la

 18   Fédération ?

 19   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Là, nous

 20   allons lever une objection à tout témoignage qui va en dehors du champ du

 21   rapport d'expert qui a été soumis. Je ne sais pas si le témoin va le faire,

 22   mais il me semble que le conseil demande d'un témoignage qui ne relève pas

 23   du champ du rapport d'expert et je crois qu'il faut effectivement témoigner

 24   sur le rapport.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Je poserais peut-être des questions de

 26   contexte, Monsieur le Président, et si le Procureur souhaite objecter, là,

 27   je répondrai à son objection.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le contexte, allez-y.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Bien.

  2   Q.  Vous avez rédigé ce rapport et à un moment donné il vous a été demandé

  3   d'établir un certain nombre de comparaisons; c'est bien ça ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Nous voyons également, vers la fin de votre rapport, qu'il y a toute

  6   une partie sur les conclusions auxquelles vous êtes arrivé, et dans le

  7   cadre, donc il est question que je vous pose concernant les observations

  8   que vous avez formulées pendant la période 1994, 1995, 1996, dans la

  9   Fédération, celles-ci font-elles partie de votre rapport.

 10   R.  Dans une certaine mesure, oui, car, bien sûr, j'ai -- en préparant mon

 11   rapport, je me suis également basé sur ce rapport, et je me rappelais ce

 12   qui se passait pendant la période 1994, 1995, et à l'époque, bien sûr, nous

 13   nous sommes déplacés donc en Bosnie-Herzégovine à partir du sud, c'est-à-

 14   dire que nous avons atterri à Split, ensuite nous nous sommes rendus par la

 15   route vers la Bosnie-Herzégovine dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine.

 16   Les premières réunions n'ont pas pu se dérouler à Sarajevo, elles se sont

 17   déroulées dans la région de Mostar, Medjugorje, et j'ai pu identifier

 18   l'économie tout à fait dynamique.

 19   Q.  Je vous interromps, pas avant d'aller trop loin. Le rapport dont vous

 20   venez de citer dans l'élaboration du rapport, vous parliez de 1D 02967,

 21   Bosnie-Herzégovine vers une reprise économique; c'est bien cela ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Les observations que je vous demandais de formuler sont-elles contenues

 24   dans ce rapport qui est cité en référence -- des références de votre

 25   rapport ?

 26   R.  Non. L'analyse que j'établis en préparant cette analyse de mesures

 27   économiques, c'est-à-dire que, pendant la période 1994, 1995, 1996, nous

 28   nous ne livrions pas à une analyse très circonstancielle de ce qui se

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  1   passait dans des différentes parties de la Fédération de Bosnie-Herzégovine

  2   car notre objet était de nature différente à l'époque.

  3   Bien sûr, il fallait identifier si la Bosnie-Herzégovine en tant que

  4   telle était viable, de sorte qu'une fois la Banque mondiale reprenne ses

  5   relations financières avec ce pays, on serait assuré à la fois que les

  6   dettes, les nouveaux prêts, les nouveaux prêts pourraient être remboursés

  7   par ce pays. Donc à l'époque nous ne sommes pas livrés à une analyse très

  8   circonstanciée de l'environnement dans différentes parties de la Bosnie-

  9   Herzégovine.

 10   Q.  Bien. Je vous remercie. Mais les questions que je vous pose à présent,

 11   savez-vous -- vous vous êtes prononcé sur celle-ci dans votre rapport, à

 12   savoir ce que vous avez constaté en Bosnie-Herzégovine lorsque vous y êtes

 13   arrivé dans le cadre de la mission de la Banque mondiale ?

 14   R.  Bien sûr, dans le cadre de la mission de la Banque mondiale, il y avait

 15   la mission de la Banque mondiale, et il y avait également la mission du

 16   FMI. Le Fonds monétaire international était davantage accès sur les enjeux

 17   macroéconomiques, alors que nous nous concentrions davantage sur la

 18   capacité du pays à avoir une économie dynamique.

 19   Q.  Je vous demanderais d'écouter ma question et d'essayer d'être le plus

 20   précis possible. Par exemple, si vous regardez les conclusions dans la

 21   partie -- conclusion de votre rapport où vous citez, par exemple, si nous

 22   regardons a la page 188, remarques définitives sur la situation

 23   socioéconomique à la fin de la guerre, 1994, 1996. Donc ensuite à la page

 24   suivante, la situation en 1995, à la page 190, un tableau auquel vous

 25   faites allusion, vous parlez de la zone à majorité musulmane, donc de

 26   Croates. Donc ma question est assez -- est très précise. Lorsque je vous

 27   pose des questions sur ce que vous avez constaté et ce que vous avez vu les

 28   conclusions auxquelles vous êtes arrivé partant de votre expérience

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  1   personnelle en Bosnie-Herzégovine en 1994, figurent-elles dans votre

  2   rapport ?

  3   R.  Elles figurent dans le rapport sur la base des informations qui m'ont

  4   été fournies à l'époque, que nous avons recensées dans le rapport de la

  5   Banque mondiale et dans le rapport de FMI sur le développement économique

  6   récent.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur Stringer --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'aurais une question de suivi à

 10   vous poser. Je regardais le rapport qui figure à la pièce 1D 02967, c'est-

 11   à-dire le rapport de la Banque mondiale sur la reprise économique en

 12   Bosnie-Herzégovine. Ce rapport, j'ai cru comprendre que vous y aviez

 13   participé. Vous étiez de nombreux experts à avoir rédigé ce rapport, ou ce

 14   rapport est le fruit de votre travail personnel ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce rapport est le fruit d'une équipe. Il a été

 16   préparé par une équipe d'économistes de la Banque mondiale. J'étais membre

 17   de l'équipe, et comme c'est le cas pour tous les rapports de la Banque

 18   mondiale, ces rapports sont adoptés, sont approuvés par les patrons, et

 19   c'est indiqué donc à la page VII. Mais j'ai effectivement -- je faisais

 20   partie de l'équipe et j'étais le premier économiste de la Banque mondiale

 21   pour la Bosnie-Herzégovine. Donc en 1994 et début 1995, j'étais donc celui

 22   qui recueillait le plus d'informations. Une fois que nous avons donc

 23   préparé le rapport et nous avons rencontré un groupe de responsables, il y

 24   avait également d'autres collègues qui travaillaient à mes côtés.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, ce rapport de la Banque

 26   mondiale sur la situation économique en Bosnie-Herzégovine rédigé

 27   apparemment a été publié en juin 1996. A votre connaissance, y a-t-il eu

 28   d'autres rapports émanant d'autres institutions, par exemple, la communauté

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  1   européenne, ou d'autres pays, ou bien, à votre connaissance, c'est le seul

  2   rapport exhaustif sur la situation économique en Bosnie-Herzégovine ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Outre l'étude pays de la Banque mondiale, pays

  4   publié en juin 1996, et généralement fait après le rapport a été utilisé

  5   dans le -- du travail en terme de la Banque mondiale. L'autre document

  6   important, très important et de rapport du FMI, développement économique

  7   récent qui a également été cité dans le cadre de mon rapport. Dans mon

  8   rapport, je cite que sous la note en bas de page une, à la page VII en

  9   chiffre romain, il s'agit du rapport sur le développement économique récent

 10   1D 02959. Il s'agit de l'autre rapport important, rapport du FMI 96104.

 11   L'équipe qui préparait le rapport du FMI et l'équipe qui préparait le

 12   rapport de la Banque mondiale ont travaillé ensemble de façon très

 13   approfondie et nous avons également travaillé étroitement avec les

 14   institutions du nord européen, notamment le représentant de la Commission

 15   européenne pendant la période de préparation de la première Conférence des

 16   Bailleurs en février 1996. Mais je ne sais pas si à l'époque parce que la

 17   Bosnie-Herzégovine n'était pas en négociation ou proche de devenir membre

 18   s'il y avait d'autres rapports préparés par d'autre.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si je comprends bien. Le rapport du FMI et le

 20   rapport de la Banque mondiale sont des rapports, à l'époque en 1996, que

 21   l'on peut qualifier de rapports objectifs car ils ont été rédigés par des

 22   institutions mondialement connues et qui font l'objet d'une considération

 23   importante dans les milieux économiques internationaux. De ce fait, si je

 24   comprends bien, ces deux rapports sont frappés d'objectivité ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je serais d'accord avec vous pour dire

 26   qu'il s'agit de rapports objectifs préparés par deux institutions

 27   financières internationales à des fins très claires qui suivent une

 28   approche de rigueur et de travail d'économistes connus pour ces

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  1   institutions.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- il est important de faire préciser

  3   cela.

  4   Maître Karnavas, continuez.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Q.  Monsieur Cvikl, je reviens à ma question de tout à l'heure. Lorsque

  7   vous êtes rendu en Bosnie-Herzégovine dans la période 1994-1996, avez-vous

  8   tiré des conclusions sur la base de ce que vous avez vu à la suite de votre

  9   travail ?

 10   R.  Je faisais partie de l'équipe. Nous avons présenté ces conclusions dans

 11   ce même rapport et nous avons bien entendu vu la façon dont notamment la

 12   Fédération de Bosnie-Herzégovine à l'époque était organisée, la façon dont

 13   elle était préparée nous permettrait à nous en tant que Banque mondiale

 14   d'aller de l'avant à la fois avec l'adhésion et d'offrir des crédits pour

 15   accompagner les mesures de reconstruction après la guerre.

 16   Q.  Bien. Passons donc à la planche suivante qui sera la planche numéro 4,

 17   alors très brièvement, vous avez déjà parlé de la méthodologie dans une

 18   certaine mesure une des premières questions enfin réponse à une des

 19   premières questions, alors je voudrais simplement me concentrer un petit

 20   peu sur la structure de ce rapport et sur cette planche. Nous voyons donc,

 21   nous commençons par le chapitre contextuel donc sur la décentralisation

 22   yougoslave. Pourriez-vous nous dire pourquoi il était nécessaire de

 23   commencer par ce point-là.

 24   R.  Pour préciser donc pour que les économistes et les non économistes

 25   comprennent ce qui se passait en Yougoslavie notamment pendant la période

 26   des années 1970 et 1980, il est très important de présenter quel était le

 27   contexte général, le cadre général dans l'ex-Yougoslavie. Une

 28   caractéristique très importante de la Yougoslavie était qu'il s'agissait

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  1   d'un pays extrêmement décentralisé et cela est caractérisé par un système

  2   budgétaire extrêmement décentralisé ou sur de nombreux petits -- au niveau

  3   des collectivités locales des décisions importantes en matière de dépenses

  4   nationales et sociales se font sous forme de fonds para budgétaires. Donc,

  5   afin d'analyser ce qui se passait par la suite, c'est-à-dire pendant la

  6   période 1991-1994 sur le territoire, j'ai donc analysé et présenté par

  7   l'analyse de l'époque de la constitution yougoslave et son organisation ce

  8   qui se passait sur le plan budgétaire et humanitaire.

  9   Q.  Procédons par étape. Passons, si vous voulez bien, donc à la planche

 10   suivante, la planche numéro 5. La raison pour laquelle je voudrais

 11   parcourir cette planche, c'est qu'avant d'entrer dans le détail du rapport

 12   à commencer par le système de l'ex-Yougoslavie, pour ce qui est de votre

 13   rapport pour ce que vous avez fait dans ce cas précis après avoir étudié

 14   les documents, après les avoir analysés, après avoir rencontré les

 15   différentes personnes, et cetera, êtes-vous parvenu à des conclusions ou

 16   avez-vous tiré des conclusions ? Pouvez-vous, s'il vous plaît, brièvement

 17   nous en faire part ?

 18   R.  Bien. Les principales conclusions présentées dans ma présentation à la

 19   page 5. Ce qui se passait en Bosnie-Herzégovine et ce qui s'est passé dans

 20   les toutes dernières années de l'ex -- de la Yougoslavie de son existence

 21   c'est qu'il y avait une élaboration de politiques économiques très

 22   indépendantes dans les différentes républiques, et malheureusement, donc

 23   les réformes, qui avaient été engagées dans la deuxième moitié des années

 24   80 et qui ont conclu par les réformes Markovic au début 1990, n'ont pas été

 25   couronnées de succès. Ces réformes à l'époque étaient liées à une tentative

 26   de la part de l'Union européenne à inviter ce qui était encore la

 27   Yougoslavie à adhérer à l'Union européenne, et la Yougoslavie avait une

 28   sorte d'accord européen en même temps que l'Autriche et la Finlande. Cinq

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  1   ans plus tard en 1995, la Finlande et l'Autriche sont devenus membres de

  2   l'Union alors que la Yougoslavie cessait d'exister.

  3   Ce que nous avons constaté - et j'ai observé cela de mon poste en Slovénie

  4   - c'est qu'il y avait une dérogation par rapport à l'ancienne Fédération

  5   puisque sur un plan économique, l'ancienne Fédération n'était tout

  6   simplement pas viable, et dans l'ancien environnement on ne pouvait pas se

  7   mettre d'accord qui allait assumer la charge budgétaire des nécessaires

  8   réformes qui devaient être lancées dans le secteur des entreprises et dans

  9   le secteur bancaire.

 10   Donc la guerre a éclaté une fois que la Slovénie et la Croatie et la

 11   République de Croatie sont devenues indépendantes. Alors pourquoi il y a eu

 12   cette indépendance, ça c'est de l'histoire ancienne, mais le principal

 13   point c'est que nous devions faire partie d'un convoi de six républiques

 14   qui progressivement allaient devenir membres de l'Union européenne.

 15   Ce que j'ai vu sur la base des documents, qui m'ont été remis et de

 16   l'analyse, c'est qu'en Bosnie-Herzégovine, la situation était bien entendu

 17   extrêmement difficile. Nous avons vu que la guerre s'est traduite par le

 18   fait que 70 % du territoire était occupé par les agresseurs. Les autorités

 19   du gouvernement central à Sarajevo n'ont pas mis en place les mesures

 20   d'économie indépendance économique que nous avions lancées en Slovénie,

 21   l'émission de nouvelles mesures de monnaie, mettre en place les nouvelles

 22   mesures budgétaires, on s'est donc aperçu qu'au niveau des collectivités

 23   locales, il n'y avait pas de crédits disponibles, de fonds disponibles pour

 24   assurer les services sociaux, enfin tout ce qui est électricité, collecte

 25   de déchets, financement des écoles et des hôpitaux. Donc dans ces

 26   conditions, les collectivités locales ont commencé à agir et, d'après le

 27   rapport, j'ai vu quelles ont commencé par agir de façon semblable, qu'il

 28   s'agissait de la réunion de Tuzla, de Jablanica ou de la zone de Siroki

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  1   Brijeg, ou qu'il s'agisse -- enfin, là aussi, c'était de façon très, très

  2   analogue, et ce que j'ai pu constater également à Zenica.

  3   Pourquoi les collectivités territoriales ont-elles dû agir ? Dans la

  4   constitution yougoslave, il y avait donc un rôle très important dévolu aux

  5   collectivités locales, qui devaient absolument agir afin d'améliorer --

  6   d'accroître la fourniture de biens et de services pour les citoyens, et par

  7   ailleurs, comme nous disons en tant qu'économistes, doivent agir sur la

  8   demande. Donc les collectivités locales agissant avaient l'impression qu'il

  9   y avait une centaine d'économistes qui apparaissaient. Enfin, en Bosnie-

 10   Herzégovine, il y a pratiquement une centaine d'économies locales. Je n'ai

 11   pas étudié la situation dans la Republika Srpska, je ne peux pas dire ce

 12   qui se passait là, mais je me penchais sur -- dans la région en Bosnie à

 13   majorité musulmane ou dans les régions à majorité croate. Il y avait des

 14   actions qui se sont traduites par des douzaines, 20, 30, 40, 50 petites

 15   économies qui apparaissaient -- qui surgissaient partout.

 16   Par la suite, après cela, les autorités, à la fois, les autorités du

 17   gouvernement central et les autorités régionales se sont aperçues qu'il

 18   fallait coordonner tout cela. Il y avait un besoin de coordination pour

 19   veiller à ce que, comme nous disons en termes d'économiques, afin qu'il y

 20   ait des économies d'échelle. Les communautés locales étaient dans une

 21   situation économique différente. Certaines qui ont pu effectivement capter

 22   des recettes budgétaires, puisqu'ils étaient à la frontière ou qu'ils ont

 23   pu effectivement obtenir des revenus de leurs travailleurs à l'étranger,

 24   étaient dans une meilleure situation. Mais il y avait des autorités locales

 25   qui ne pouvaient pas assurer ces services sociaux et ces services

 26   nationaux, donc il fallait une coordination régionale.

 27   Ce besoin, la présidence l'a compris, le président de ce qui était

 28   encore alors la République de Bosnie-Herzégovine et qui a émis un décret

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  1   sur les districts. Si quelqu'un disait : je téléphone, je dis, moi, je ne

  2   comprends pas ce qui se passe dans les collectivités locales, nous allons

  3   procéder à l'organisation, nous allons constituer sept districts qui vont

  4   se charger de coordonner l'activité des collectivités locales.

  5   En 1990, 1991, 1994, l'évolution économique, le développement sur les

  6   territoires dits libres, une fois terminées les activités de guerre, sur

  7   ces territoires libres, les collectivités territoriales locales, quelque

  8   chose devenu après régional, ont commencé à organiser l'économie pour le

  9   bien des citoyens. Dans la dernière de phase de 1993, 1994, on a pu

 10   constater qu'on a commencé à utiliser des outils modernes habituels de

 11   gouvernement, préparation de budgets, activités du secteur financier, du

 12   secteur bancaire, ce qui a permis une normalisation de la vie économique.

 13   Conclusion que vous trouvez à cette planche, lorsque nous sommes arrivés

 14   début 1995 en Bosnie, dans cette fédération, alors que le système

 15   fonctionnait déjà, je vois que ceci partait des initiatives -- des efforts

 16   législatifs qui avaient été faits au cours de la période qui avait précédé

 17   1994 et 1995.

 18   Ma conclusion est donc celle-ci : ce qui s'est passé entre 1991 et 1994,

 19   c'était une réaction des collectivités locales qui se trouvaient dans un

 20   environnement très décentralisé, qui ont essayé d'assumer des fonctions

 21   d'autorité pour s'occuper du bien-être des citoyens pour ce qui est de la

 22   fourniture de l'offre, et aussi de la demande après, de façon à assurer un

 23   développement économique normal, ce que doit faire toute autorité dans

 24   toute économie.

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit beaucoup de choses - et votre réponse

 27   est importante - sur toute une série de facteurs. Moi, ce qui m'intéresse,

 28   c'est le rôle des collectivités locales, qui est au point 5 de votre

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  1   conclusion. Vous nous avez expliqué que la Yougoslavie fonctionnait comme

  2   une collectivité décentralisée. De l'importance possible des collectivités

  3   locales. En tant qu'économiste, vous savez mieux qui quiconque qu'il y a

  4   toujours un couple entre la politique et l'économie. Parfois c'est la

  5   politique qui instrumentalise l'économie, ou parfois c'est l'économie qui

  6   entraîne la politique dans son action politique.

  7   Mais dans le dossier que nous avons, nous, qui doit être appréhendé

  8   par rapport au rôle de collectivités locales, est-ce que votre conclusion

  9   tendrait à dire qu'en Bosnie-Herzégovine, dans les années 1990, 1991, 1992,

 10   1993, voire 1994, le système dépendait uniquement des collectivités locales

 11   et que l'"Etat" - et notamment l'Etat à Sarajevo - était quasi inexistant

 12   et que finalement la vie économique était uniquement fondée sur les

 13   collectivités locales et que ce sont ces collectivités locales, par leur

 14   implication économique, qui en quelque sorte faisaient la politique ?

 15   R.  Ce que je dirais c'est ceci : avec la guerre et en raison du manque

 16   d'actions de la part des autorités du gouvernement central, je n'en ai

 17   parlé qu'à -- de ces cas, il n'y avait pas suffisamment de nouvelles

 18   devises et aussi un manque de reformes claires qui auraient été nécessaires

 19   pour bien encadrer l'économie.

 20   Les autorités du gouvernement central, elles étaient isolées à Sarajevo.

 21   Ces autorités ont émis des décrets. Nous allons peut-être en parler plus

 22   tard pour quelques-uns d'entre eux, mais je ne les ai pas vues agir comme

 23   nous avons fait en Slovénie. En 1991, lorsque nous sommes devenus

 24   indépendants, pour que nous rendions -- pour rendre notre économie slovène

 25   viable, nous avons centralisé certaines des fonctions. Mais en Bosnie-

 26   Herzégovine, cela n'a pas été possible pour des raisons manifestes, à cause

 27   de la guerre. Ce qui veut dire que nous avons tout d'un coup une situation

 28   où au niveau des collectivités locales il y a des besoins, des services que

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  1   le gouvernement doit assurer aux citoyens, mais il n'y a pas de financement

  2   qui vient du gouvernement central. Ce qui veut dire que les autorités

  3   locales ont dû agir, prendre des mesures, et elles se sont mises à inventer

  4   de nouvelles mesures incitatives fiscales pour avoir des recettes fiscales

  5   pour parer aux besoins de la population. C'est ce que j'ai vu à Tuzla,

  6   c'est ce que j'ai vu à Siroki Brijeg, à Prozor. Ces autorités locales ont

  7   pris beaucoup de nouvelles mesures fiscales pour obtenir des recettes

  8   fiscales de façon à répondre aux besoins, à s'occuper des citoyens, et

  9   aussi, c'est un droit donné par la constitution, pour fournir un appui

 10   logistique à la défense.

 11   Ce qui veut dire que les grosses entreprises étatiques, nationalisées de

 12   Sarajevo ont cessé de fonctionner. Il n'y avait plus d'énergie. Il n'y

 13   avait plus de système bancaire actif. Il n'y avait plus de communication,

 14   ce qui veut dire que toutes les grosses entreprises ont fermé les portes.

 15   Ce pays, comment a-t-il survécu économiquement ? C'est que le secteur

 16   privé, au niveau des collectivités locales, a non seulement fourni de

 17   nouveaux emplois, mais aussi a permis par des échanges suffisamment de quoi

 18   manger. Il y avait le système des bailleurs, les réfugiés, les personnes

 19   déplacées, enfin les personnes qui sont quelquefois restées sur le

 20   territoire de cette façon pour avoir de quoi manger. J'ai aussi vu que,

 21   surtout dans la deuxième partie de l'année 1992, lorsque normalement

 22   l'année scolaire devait commencer, ce sont les collectivités locales, les

 23   autorités régionales qui ont fourni les fonds nécessaires à l'ouverture des

 24   écoles qui avaient été fermées pendant les vacances d'été.

 25   Donc il y a des situations où vous avez des collectivités locales qui

 26   ont assumé le rôle que jouait auparavant le gouvernement entre guillemets

 27   central ou par les institutions qui officiellement avaient la

 28   responsabilité du finance public, de façon à répondre aux besoins des

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  1   citoyens.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question pour terminer votre longue

  3   réponse.

  4   A votre avis, ceux qui étaient à la tête de ces collectivités

  5   locales, notamment dans le domaine économique et financier, avaient-elles

  6   ces personnes les compétences, ou bien, c'était de la bonne volonté ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] En tant qu'économiste, je dirais que ces

  8   responsables ont inventé de nouveaux outils pour savoir comment obtenir des

  9   recettes fiscales. Ça ressemblait, ces outils, un peu les mêmes un peu

 10   partout. Donc, oui, je dirais qu'ils étaient compétents. Dans les

 11   collectivités locales avant l'indépendance, ce sont eux qui avaient la

 12   responsabilité, l'organisation des fonctions gouvernementales, ce qui veut

 13   dire que ces gens savaient ce qui se passait. J'ai parlé à certains d'entre

 14   eux, ce qui m'a donné le sentiment que ces gens savaient ce qu'ils

 15   faisaient. Bien entendu, il n'y avait à leur disposition que très peu de

 16   ressources.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation]

 18   Q.  Une précision, je sais que nous allons y revenir plus tard, mais vous

 19   avez dit qu'il n'y avait pas de devise, pas de nouvelles devises qui ont

 20   été émises par la Bosnie-Herzégovine.

 21   Est-ce que vous voulez dire plus jamais la Bosnie-Herzégovine n'a émis de

 22   nouvelles devises, nouvelles monnaies ?

 23   R.  Non, ce n'est pas ce que je veux dire. Ce que je veux dire c'est qu'il

 24   y a eu un retard, quel est le problème qui a occasionné ce retard. Lorsque

 25   la Slovénie, lorsque la Croatie sont devenues indépendantes, en Slovénie,

 26   en Croatie, on a émis une nouvelle monnaie qui a remplacé le dinar

 27   yougoslave qu'on utilisait comme devise pour toutes les transactions avant

 28   en Yougoslavie. Maintenant, le dinar yougoslave, il a été transplanté sur

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  1   une économie beaucoup plus petite en taille, parce que là, en Bosnie-

  2   Herzégovine, on n'en a pas une nouvelle monnaie, ce qui a eu pour effet

  3   qu'il y a eu surplus, il y a eu trop de devises pour trop peu de

  4   marchandises. Il y avait une présence exagérée, excessive de devises pour

  5   très peu de marchandises, hyper-inflation, ce qui veut dire que personne ne

  6   puisse faire confiance à la monnaie yougoslave qui a été remplacée plus

  7   tard par le dinar de Bosnie-Herzégovine mais il y a eu [imperceptible], si

  8   j'ose dire, on a fait trop marcher la planche à billet et il y avait

  9   d'autres devises plus dures, plus solides comme le mark allemand pour

 10   veiller à ce qu'il y ait une unité de mesure objective, par exemple,

 11   qu'est-ce que valait un kilo de pain, un kilo de sucre.

 12   Q.  Question de suivi, en 1994 ou 1995, la première fois que vous êtes allé

 13   en Bosnie-Herzégovine, je ne sais pas si c'était avant Dayton ou après, à

 14   ce moment-là, à ce moment-là, j'insiste est-ce que le dinar bosniaque était

 15   considéré comme une devise dure, une solide porte ?

 16   R.  Oui, lorsque nous sommes allés en Bosnie-Herzégovine, on a dû prendre

 17   de l'espèce, on a dû prendre, par exemple, des deutsche marks pour payer

 18   l'hôtel. Personne ne croyait que le dinar bosniaque était vraiment une

 19   devise convertible à laquelle on peut avoir confiance. C'est seulement plus

 20   tard lorsqu'on a décidé de la convertibilité, ceci manifestement a été

 21   soutenu par les organisations internationales financières, à ce moment-là,

 22   on a commencé à faire confiance à cette monnaie et à l'utiliser dans les

 23   échanges. Mais nous, on utilisait le mark allemand; d'autres, le dollar

 24   américain, mais nous savons qu'à Washington on avait eu du mal à avoir

 25   suffisamment de marks allemands pour aller à Sarajevo.

 26   Q.  Revenons un peu en arrière. Là, peut-être qu'on prend le devant mais

 27   vous avez dit qu'à un moment donné il y a eu un mark convertible et que

 28   ceci avait été soutenu par les organisations financières internationales.

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  1   Pourriez-vous en quelques mots, partant des observations que vous avez

  2   faites et de l'analyse que vous avez réalisée, nous dire dans quelle mesure

  3   le dinar bosniaque avait été soutenu, par qui que ce soit ou par quoi que

  4   ce soit, que ce soit en 1992, 1993 ou 1994 ?

  5   R.  Je ne pense pas qu'il était soutenu. Il n'avait pas vraiment,  la

  6   Bosnie n'avait pas de réserve internationale pas plus que d'autres pays. Ce

  7   qui veut dire que l'argent qui avait été émis a produit une inflation très

  8   élevée -- ou plutôt, que celle-ci était la résultante d'une utilisation

  9   trop libérale de la planche à billet. Et ce qui veut dire qu'elle n'était

 10   pas soutenue, cette monnaie.

 11   Q.  Passons à la planche suivante. Commençons par votre rapport, c'est un

 12   des premiers points que vous abordez dans ce rapport, planche numéro six.

 13   Vous parlez là des caractéristiques que présente l'ex-Yougoslavie.

 14   Pourriez-vous nous en parler? Je sais que vous avez effleuré ce sujet déjà,

 15   mais faites-le rapidement s'il vous plaît pour passer à la planche

 16   suivante.

 17   R. Les caractéristiques de l'ex-Yougoslavie sont expliquées à cette planche

 18   six, le rôle que joue l'état fédéral, le rôle que jouent les collectivités

 19   locales. En fait, c'est un Etat fédéral qui était là, RSFY, mais très peu

 20   rigide. Au niveau de la Fédération, on avait cette monnaie, le dinar

 21   yougoslave mais celui-ci n'était émis que, dans les limites définies, dans

 22   les quantités définies par le système des Banques nationales des

 23   républiques et des provinces moins importantes parce que lorsque la réforme

 24   lancée par Markovic a échoué c'est parce qu'il y a une des républiques qui

 25   a imprimé, qui a émis trop d'argent.

 26   Bien sûr, la fédération  avait la responsabilité de la fixation du

 27   taux de change, les affaires étrangères et le pouvoir le plus important

 28   qu'avait les -- c'est la force militaire yougoslave, l'armée mais aussi la

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  1   production militaire, élément qui était très centralisé. Je vous ai dit que

  2   je travaillais pour la Banque nationale de Slovénie. Il y avait un service

  3   de guerre dans cette banque qui avait la responsabilité de financement de

  4   cette force militaire et la production militaire. Les républiques, quant à

  5   elles, pendant toute l'évolution, pendant tout le développement de la

  6   Yougoslavie dans les années 50, 60, avec aussi la nouvelle constitution de

  7   1974, avaient la responsabilité de tous ces dossiers mais de façon très

  8   particulière. Au niveau des républiques, nous n'avions pas de gouvernement.

  9   Nous n'avions que des ce qu'on appelait des conseils exécutifs avec des

 10   secrétariats pour telle ou telle activité. Il y avait le secrétariat de

 11   l'Education, par exemple, mais les grands enjeux en matière de question,

 12   ils étaient traités au niveau des collectivités locales car celles-ci

 13   avaient la responsabilité de l'application au niveau local de ce qui

 14   s'était décidé au niveau des républiques et de la fédération. Comment est-

 15   ce que ceci se faisait, vous voyez à la planche 7, c'était assez singulier

 16   puisqu'il y avait une décentralisation fiscale ou budgétaire. A la tête des

 17   collectivités locales dans l'ex-Yougoslavie, vous savez qu'il y avait ces

 18   républiques, en moyenne il y avait disons 600 collectivités locales. Dans

 19   chacune d'entre elles, vous aviez pour un service du gouvernement

 20   particulier, prenons l'éducation comme exemple. Pour une organisation de

 21   l'enseignement primaire, on avait créé une communauté d'intérêt

 22   autogestionnaire, deux chambres. Il y avait une chambre d'enseignants qui

 23   fournissait les services éducatifs, mais il y avait aussi une chambre qui

 24   représentait les parents qui eux achetaient pour ainsi dire les services

 25   des Enseignants. C'est là que les décisions se prenaient pour ce qui est

 26   des fonds que devraient consacrer une collectivité locale donnée à

 27   l'enseignement primaire. Lorsqu'on passe à l'enseignement secondaire, on a

 28   un groupe de collectivité qui forme une communauté d'intérêt

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  1   autogestionnaire pour l'enseignement secondaire et supérieur. Par exemple,

  2   en Slovénie, au niveau de l'université, on en a deux, donc on avait une

  3   communauté d'intérêt pour l'enseignement supérieur au niveau de la

  4   Slovénie.

  5   Ce système d'autogestion, ce qu'on a appelé les communautés d'intérêt

  6   autogestionnaire, ce n'était pas simplement pour les services sociaux

  7   c'était applicable aussi au financement des infrastructures. Pour l'eau, la

  8   gestion de l'eau, énergie, les routes, la circulation, il y avait des fonds

  9   d'intérêt autogestionnés [comme interprété] qui avaient été établis et qui

 10   percevaient des recettes d'entreprises, qui avaient besoin des services en

 11   matière d'énergie, C'est ainsi qu'on obtenait des fonds d'investissement et

 12   on faisait payer l'énergie à ces entreprises et c'est ainsi que se créait

 13   un environnement qui a permis le développement du secteur énergétique.

 14   Où est-ce qu'il y a problème ? Quand on a autant de collectivités

 15   locales et quand on a autant de communautés d'intérêt autogestionnaire, on

 16   parle de 5 000 points d'impact, dans l'ex-Yougoslavie, alors qui va décider

 17   de l'utilisation des fonds centralisés. C'est pour ça que l'ex-Yougoslavie

 18   n'était pas viable. C'est pour ça que d'année en année, l'inflation a

 19   grimpé et a fini par une hyperinflation en 1989. C'est pour ça qu'on dit

 20   qu'en dépit du fait que -- comme le dit le haut de la planche 7, la

 21   Yougoslavie était différente des autres économies socialistes, nous n'avons

 22   eu -- le plan central a été remplacé par l'autogestion début des années 50

 23   chez nous, ce n'était pas viable sur le plan économique.

 24   Q.  Je vous interromps. Avant que nous passions à la planche suivante,

 25   d'ailleurs je pense qu'on pourrait s'intéresser au document 1D 02976. C'est

 26   la constitution de l'ex-Yougoslavie, et vous vouliez nous demander, de nous

 27   intéresser à l'article 51 ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  Nous allons le parcourir très rapidement. Dites-nous, pourquoi c'est

  2   important dans le cadre de la problématique que nous abordons ?

  3   R.  Cet article 51 est important pourquoi, il définit, nous parlons ici de

  4   la constitution de la Yougoslavie en 1974; ceci définit la façon dont les

  5   communautés d'intérêt autogestionnaires sont formées de façon à satisfaire

  6   les besoins personnels et collectifs au niveau des collectivités locales.

  7   Ces communautés d'intérêt autogestionnaires, comment étaient-elles

  8   organisées, c'était une organisation tout à fait spéciale, particulière,

  9   qui exprimait -- expliquait comment on avait appliqué la décentralisation

 10   budgétaire en ex-Yougoslavie.

 11   Mais en créant ces communautés d'intérêt autogestionnaires au niveau des

 12   collectivités locales, celles-ci avaient ainsi la possibilité d'assumer,

 13   d'exercer beaucoup des fonctions du gouvernement et des services aussi.

 14   Q.  Vous avez entendu les interprètes de la cabine anglaise nous dire qu'il

 15   fallait faire de pause.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pourquoi est-ce important dans le contexte de votre rapport ?

 18   R.  Pour deux raisons. Pour comprendre tout d'abord pourquoi il y a eu un

 19   effondrement du pays. Mais je pense que c'est encore plus important si l'on

 20   veut comprendre ceci en Bosnie-Herzégovine lorsque les autorités centrales

 21   ne fonctionnaient plus. La connaissance, l'expérience qui avait été

 22   engrangé par les collectivités locales et la responsabilité qu'elles

 23   avaient de veiller à ce que les besoins individuels et collectifs de la

 24   population soient pris en charge c'était une expérience qu'on avait.

 25   Q.  Merci. Je ne sais pas si vous avez autre chose à dire à propos de la

 26   planche 7; sinon, on passe à la suivante.

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  [aucune interprétation]

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- j'aurais une question de suivi parce

  2   que vous abordez des points essentiels pour la compréhension de beaucoup

  3   d'événements qui se sont succédés dans ce dossier, et si j'ai bien compris,

  4   parce que les trois Juges qui sont devant vous ont une connaissance certes

  5   qui s'est établie au cours des dernières années, mais comme vous abordez

  6   des sujets économiques qui sont ardus, il convient d'apporter certaines

  7   précisions.

  8   Lorsqu'un juge occidental aborde les questions de la Yougoslavie, il peut

  9   avoir dans l'idée que la Yougoslavie fonctionnait comme dans un système

 10   centralisateur, un système communiste, or vous venez de nous dire qu'en

 11   1950, il y a eu au niveau de l'ex-Yougoslavie une réforme qui a tendu à

 12   mettre en place une autogestion, et qu'à ce moment-là, la Yougoslavie

 13   fonctionnait sous une forme autogestionnaire, et notamment avec un rôle

 14   accru des collectivités locales et des acteurs locaux. Est-ce que ça

 15   tendrait à dire à ce moment-là que le pouvoir central dans un système

 16   d'autogestion économique a moins de force, et moins de puissance qu'un

 17   système centralisateur ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je serais d'accord avec vous. Ce qui est

 19   certain, c'est qu'en Yougoslavie après disons le moment où se porte à faux

 20   avec Stalin en 1948, on décide de remplacer le système de planification

 21   central par l'autogestion, les autorités centrales par des réformes

 22   politiques économiques ont perdu de leur pouvoir. Moi, en tant que Slovène,

 23   je dirais que c'était aussi dû au fait qu'ils existaient des forces en

 24   Yougoslavie qui faisaient que les républiques et les collectivités locales

 25   avaient besoin de ce pouvoir parce que dans le contexte yougoslave il

 26   n'était pas possible d'avoir simplement les autorités qui siégeaient

 27   uniquement à Belgrade, qui soient vraiment unitaires. La planification

 28   centrale, le remplacement plus exactement la société est une réponse des

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  1   dirigeants de Tito, de façon à veiller à ce que la Yougoslavie existe,

  2   demeure tout en veillant à ce que ce système lui aussi, survive.

  3   Pourquoi était-ce important ? Parce qu'après la Deuxième Guerre mondiale,

  4   nous avons abandonné la planification centrale parce qu'on voulait avoir

  5   une économie monétaire réelle; par exemple, en 1956, on a établi des

  6   banques commerciales. Prenez la Pologne, ça c'est fait 30 ans plus tard.

  7   Prenez aussi la Hongrie, c'est seulement en 1986 qu'on a pu avoir des

  8   banques commerciales où on pouvait y déposer de l'argent, faire des prêts,

  9   des emprunts. Ça on a eu très vite en Yougoslavie, et d'ailleurs, la Banque

 10   mondiale et le FMI ont fourni des fonds à la Yougoslavie dès les années 60

 11   et les années 70. Ce qui veut dire que le système a permis l'activation des

 12   facteurs de productivité, le facteur travail, le facteur capital grâce à ce

 13   système de l'autogestion.

 14   Alors est-ce que c'est viable à terme ? Non. On le sait dans la théorie de

 15   l'économie le concept du conflit qu'il y a intransicquement [comme

 16   interprété] entre le travailleur contrôlant par son comité de travail, les

 17   directeurs dans une entreprise autogestionnaire, et les directeurs qui

 18   doivent quand même épurer les crédits, qui doivent obtenir des profits

 19   pour, disons; les propriétaires. Donc un terme, ce système n'étais pas

 20   viable, il n'en demeure pas moins. La Yougoslavie est surtout dans les

 21   années 60 et 70, c'était une économie en croissance surtout grâce aux

 22   prêts, aux emprunts étrangers qui semblent avoir cessé fin 1997. C'est à ce

 23   moment-là que la crise a commencé, mais le système centralisé soviétique

 24   est différent du système autogestionnaire. Parce qu'on parlait de

 25   socialiste du marché. Pourtant une leçon un peut difficile mais il y avait

 26   des forces du marché qu'il fallait assister.

 27   Autre raison pourquoi est-ce que ça s'est passé en 1948. Dans des systèmes

 28   centralisés avec le plan, nous avons aussi la terre qui est la propriété de

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  1   l'Etat.

  2   On a essayé de faire ça aussi. Le pays était affamé. La famine

  3   sévissait. En ex-Yougoslavie, l'agriculture, la réforme agraire qui fait

  4   quelle n'avait pas marchée, les petits propriétaires ont pu conserver dix

  5   hectares de terre qu'ils ont gérés. Les systèmes de comités de

  6   travailleurs, ça a été la base de socle qui a permis l'érection d'un autre

  7   socialisme autre que celui qu'il y avait, disons, en Union soviétique ou

  8   dans d'autres pays d'Europe de l'est.

  9   Les réformes effectuées dans les années 1980 surtout après la chute du mur

 10   de Berlin, les réformes lancées à ce moment-là, elles étaient, bien sûr,

 11   plus faciles; malheureusement, elles ont entraîné l'effondrement du pays

 12   parce que tout le monde n'avait pas le même avis quant à la façon de gérer

 13   le pays. Il fallait y aller dans l'option unitaire ou la confédération.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oh, combien intéressant. C'est l'heure de faire la

 15   pause. Malheureusement, il faut qu'on arrête.

 16   Nous allons faire une pause de 20 minutes et nous reprendrons dans 20

 17   minutes.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 20   --- L'audience est reprise à 16 heures 07.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'introduire à nouveau le témoin, je vais lire

 22   une décision orale qui concerne la venue d'un témoin la semaine prochaine,

 23   et donc il faut que je la lise dès maintenant.

 24   Décision orale concernant la note d'information déposée par la Défense

 25   Petkovic le 15 décembre 2008. Le 15 décembre 2008, la Défense Petkovic a

 26   déposé une notice informant la Chambre de son intention d'utiliser quatre

 27   heures pour contre-interroger le Témoin expert Davor Marijan, lequel

 28   comparaîtra du 19 au 22 janvier prochain. Dans cette notice, la Défense

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  1   Petkovic prend bonne note de la décision de la Chambre du 11 décembre 2008

  2   par laquelle elle est autorisée à contre-interroger le témoin durant une

  3   heure et 30 minutes. La Défense Petkovic expose cependant qu'elle compte

  4   néanmoins utiliser deux heures et 30 minutes supplémentaires pour contre-

  5   interroger ledit témoin et que ce temps supplémentaire sera déduit du temps

  6   global prévu pour la présentation de sa cause.

  7   Dès qu'il s'agisse d'une notice de nature informative, la Chambre

  8   décide proprio motu de se prononcer sur cette notice en vertu de son

  9   pouvoir et dans son devoir de contrôler les modalités de l'interrogatoire

 10   des témoins et de la présentation des éléments de preuve.

 11   La Chambre rappelle tout d'abord que, par sa décision du 11 décembre

 12   2008, elle a, entre autres, rejeté la demande de l'accusé Petkovic de se

 13   voir allouer quatre heures pour contre-interroger le témoin expert Davor

 14   Marijan au motif que cette demande était excessive.

 15   La Chambre a toutefois décidé qu'une durée d'une heure 30 minutes

 16   serait adéquate en l'espèce pour permettre à la Défense Petkovic de mener à

 17   bien son contre-interrogatoire. La Chambre note enfin que la Défense

 18   Petkovic n'a pas interjeté appel de la décision du 11 décembre 2008.

 19   La Chambre rappelle ensuite que la décision du 24 avril 2008 portant

 20   adoption de lignes directrices pour la présentations des éléments de preuve

 21   à décharge énonce, en ses paragraphes 13 à 17, des règles très précises

 22   concernant l'attribution du temps disponible pour l'interrogatoire et le

 23   contre-interrogatoire des témoins.

 24   Selon cette décision, les équipes de la Défense menant le contre-

 25   interrogatoire disposent ensemble de 50 % du temps alloué pour

 26   l'interrogatoire principal. Or en l'espèce, l'attribution de deux heures et

 27   30 minutes supplémentaires à la Défense Petkovic pour contre-interroger le

 28   témoin expert reviendrait en réalité à permettre à une seule équipe de la

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  1   Défense à bénéficier d'un temps équivalent à celui attribué à la Défense

  2   Stojic qui interrogera ledit témoin, soit quatre heures.

  3   Non seulement une telle répartition du temps serait en totale

  4   contradiction avec les règles énoncées par la décision du 24 avril 2008,

  5   mais encore serait de nature à modifier substantiellement le calendrier

  6   d'audience de la Défense Stojic, ce qui n'est pas admissible.

  7   Pour ces mêmes raisons, la circonstance que la Défense Petkovic informe la

  8   Chambre de son intention d'imputer ce temps supplémentaire sur son propre

  9   temps de présentation des éléments de preuve n'est pas de nature à fléchir

 10   la position de la Chambre sur ce point. En effet permettre automatiquement

 11   aux parties de bénéficier d'un temps supplémentaire substantiel aux motifs

 12   que celui-ci serait déduit du temps global prévu pour la présentation de

 13   leurs propres éléments de preuve reviendrait à permettre que les débats se

 14   prolongent indéfiniment dans le prétoire et contreviendrait aux droits des

 15   accusés à un procès rapide et efficace.

 16   Par conséquent, la Chambre décide proprio motu de ne pas autoriser la

 17   Défense Petkovic à utiliser deux heures et demie supplémentaires pour

 18   contre-interroger le Témoin Davor Marijan. La Défense Petkovic devra donc

 19   conduire le contre-interrogatoire du Témoin Davor Marijan en une heure et

 20   30 minutes. Le cas échéant, la Défense Petkovic pourra appeler ce témoin à

 21   comparaître dans le cadre de la présentation de sa propre cause si elle

 22   demande l'ajout de ce témoin sur la liste 65 ter et si elle accompagne sa

 23   demande des informations requises à l'article 65 ter (G) du Règlement.

 24   Bien. Donc en un mot, la Défense Petkovic aura une heure 30 mais si la

 25   Défense Petkovic tient à utiliser ces deux heures 30 pour poser des

 26   questions à ce témoin, elle le fera venir le moment venu en demandant

 27   l'ajout de ce témoin à la liste 65 ter.

 28   Voilà. Il n'y a pas de problème. Nous allons introduire le témoin.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Nous avons présenté une supplémentaire à la

  2   déclaration du Dr Prlic en réponse au rapport Tomljanovich, comme il

  3   l'avait indiqué dans sa déclaration liminaire qu'il se proposait de faire,

  4   c'était assez circonstancié. M. Stojic y fait objection pour différentes

  5   raisons et l'Accusation y fait objection quand bien même M. Stojic n'a pas

  6   cité d'autre autorité autre que la règle de faire un argument politique,

  7   l'Accusation cite une autorité. Nous souhaitons effectivement avoir la

  8   possibilité de déposer une seule réplique et nous souhaiterions disposer

  9   jusqu'à lundi pour présenter cette réponse qui ne devrait pas dépasser les

 10   quatre, cinq pages pour déposer cela.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous voulez être autorisé à faire une réplique

 12   de quatre ou cinq pages et pour lundi. Bon. Je vais consulter mes

 13   collègues.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Maître Karnavas. La Chambre fait droit à votre

 16   requête. Bien.

 17   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, continuez l'interrogatoire de votre

 19   témoin.

 20   [Le témoin vient à la barre]

 21   M. KARNAVAS : [interprétation]

 22   Q.  Bien, Monsieur Cvikl, avant de passer à la planche suivante, il y avait

 23   un terme qui a rendu perplexe certains des interprètes et éventuellement la

 24   sténotypiste. Vous avez dit qu'il y avait ce conflit entre la direction et

 25   les travailleurs. Vous avez utilisé un vocable, une théorie. Je vous

 26   demanderais de bien vouloir préciser et repréciser ce dont il s'agit, s'il

 27   vous plaît.

 28   R.  Oui. Alors, dans la théorie économique, il y a une firme, Illiryan.

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  1   Q.  Pour l'orthographe, on l'obtiendra par la suite.

  2   Bien. Nous en étions donc à la planche 7; passons à la planche 8, si vous

  3   le voulez bien.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre.

  5   Si le mot décisif -- enfin, le mot précis ne figure pas dans le compte

  6   rendu "Illiryan" -- l'orthographe immédiatement sans quoi ça paraît un

  7   petit peu qu'est-ce que.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Bon. Bon. Ce n'est pas un terme qui m'est

  9   venu à l'esprit.

 10   Q.  Mais effectivement, vous nous l'épelez.

 11   R.  I-L-L-I-R-Y-A-N, Illiryan, la région de ce qui était la partie nord de

 12   la Croatie. C'est un concept qui est connu des économistes, secteur

 13   d'entreprise, où les travailleurs et les patrons partagent la gestion de

 14   l'entreprise et des fruits produits par la société.

 15   Q.  Bien. Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie d'apporter donc cette --

 18   nous remercions les traducteurs d'avoir apporté cela à notre attention.

 19   Q.  Donc passons à la planche 8; nous poursuivons donc avec le rôle connu

 20   de collectivités locales si vous n'avez pas terminé donc d'en dire un mot,

 21   vous souhaitez attirer notre attention sur deux documents spécifiques,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. Alors ce à quoi je souhaitais me référer sur cette planche c'est

 24   tout d'abord l'idée selon laquelle alors qu'il y avait une propriété

 25   sociale en Yougoslavie, il y avait un sentiment général que les ressources

 26   matérielles appartenaient à la population collectivement. Il convient de

 27   noter que, dans le cas du secteur des entreprises, les travailleurs étaient

 28   autorisés à gérer les actifs au sein de leur entreprise pour autant qu'ils

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  1   produisaient des résultats positifs. Il y avait une possibilité dans le

  2   système yougoslave, et là je me réfère à la constitution la Fédération

  3   socialiste de Yougoslavie, 1D 02976, article 130, où il y avait une

  4   possibilité que, dans le cas où les travailleurs dans une entreprise ne

  5   produisaient pas des résultats positifs qu'ils produisaient des pertes en

  6   somme, ils avaient la possibilité -- les collectivités locales avaient le

  7   droit de supprimer les droits d'autogestion de ces travailleurs et ainsi

  8   préserver le bénéfice de la société et la propriété sociale.

  9   Q.  Pouvez-vous nous donner un exemple ?

 10   R.  Oui, je peux vous donner un exemple qui est connu en Slovénie qui est

 11   sans doute connu de l'autre partie de la Yougoslavie. En Slovénie, nous

 12   avons un producteur de produits électroménagers qui est en quelque sorte le

 13   Phillips de Slovénie. En 1985, cette entreprise a rencontré de graves

 14   difficultés en raison d'un fort endettement et essayait d'acheter une

 15   entreprise en Allemagne, elle a donc commencé à susciter des pertes et

 16   l'entreprise ne pouvait plus emprunter auprès des banques, et l'entreprise

 17   serait donc acculée à la faillite.

 18   Toutefois, la communauté locale donc de Velenje, donc qui est la ville où

 19   se situe cette usine, a supprimé -- a aboli les droits d'autogestion des

 20   travailleurs et a désigné un directeur général pour assurer la gestion

 21   provisoire de cette entreprise, et c'est ce que vise cet article 130 de la

 22   constitution. Donc, en deux ans avec les droits d'autogestion abolis des

 23   travailleurs, le nouveau directeur général a pu remettre d'aplomb

 24   l'entreprise, et la société Gorenje Velenje, qui était au bord de la

 25   faillite en 1985, est un des premiers exportateurs slovènes produisant plus

 26   d'un milliard d'euros de biens d'électroménagers et exporte ça partout dans

 27   le monde.

 28   Q.  Vous nous attirez notre attention à 1D 02974. Pouvez-vous nous décrire

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  1   brièvement le contenu de ce document ? Je constate qu'il a été cité par

  2   vous dans votre rapport.

  3   R.  Il s'agit du document sur lequel j'ai un ouvrage. Il s'agit d'un

  4   chapitre qui provient de l'ouvrage publié en 2004, le chapitre rédigé par

  5   M. Gligorou, et à page 16 de cet ouvrage, qui est dans le document, il y a

  6   une explication indiquant qu'il y avait un concept différent de propriétés

  7   en Yougoslavie que la propriété d'Etat. Nous n'avions pas de propriété

  8   d'Etat, mais une propriété sociale. Dans ce même article, l'auteur M.

  9   Gligorou décrivait ce qui se passait au moment des réformes opérées en

 10   Yougoslavie dans la dernière année de son existence et ensuite en Slovénie

 11   pour ce qui est de la propriété. La propriété sociale par le biais des

 12   réformes est devenue une propriété privée.

 13   Q.  Merci. Je crois que ça a été publié par la Banque mondiale; c'est bien

 14   ça ?

 15   R.  En effet. "Slovénie : de la Yougoslavie à l'Union européenne,"

 16   publié par la Banque mondiale, avec de nombreux auteurs. J'ai également

 17   rédigé un rapport sur les questions budgétaires, qui explique pas

 18   simplement l'effondrement de la Yougoslavie en termes économiques, mais

 19   comment un pays qui a quitté la Yougoslavie avec une série de réformes sur

 20   la voie de l'indépendance est devenu un membre à succès de l'Union

 21   européenne. Donc voilà, "Slovénie : de la Yougoslavie à l'Union

 22   européenne."

 23   Q.  A moins qu'il y ait autre chose sur la planche 8, poursuivez.

 24   R.  Oui. La raison pour laquelle j'ai inclus cela et que j'en ai parlé dans

 25   le rapport c'est que le rôle des collectivités locales tel que défini dans

 26   la constitution yougoslave et également la constitution de la république

 27   était très important, de sorte que lorsque la guerre a éclaté en Bosnie-

 28   Herzégovine et que les collectivités locales subitement n'avaient plus la

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  1   possibilité d'obtenir des crédits du gouvernement central, tous ces

  2   pouvoirs se situaient au niveau des collectivités locales et elles ont pu

  3   mettre en œuvre des politiques à la fois agissant sur l'offre et la demande

  4   de ces collectivités locales. Il y avait donc cette faculté de la part de

  5   la collectivité locale qui est donc basée sur la constitution et où les

  6   gens comprenaient leur responsabilité. Ils n'attendaient pas tout

  7   simplement que le gouvernement central agisse.

  8   Q.  Dans quelle mesure, le cas échéant, les élections -- nous savons qu'à

  9   un moment donné, il y a eu des élections. Dans quelle mesure, le cas

 10   échéant, ces élections ont-elles eu un impact sur ce dispositif

 11   d'autogestion qui était partie intégrante du système de l'ex-Yougoslavie ?

 12   R.  J'indique dans le rapport que jusqu'au moment des élections il y avait

 13   on va dire trois personnes essentielles dans la collectivité. Il y avait le

 14   président de l'assemblée locale, le président du conseil exécutif, et il y

 15   avait le président du Parti communiste local. Lorsqu'en Slovénie en avril

 16   1990, et en Bosnie-Herzégovine à la fin de 1991, des élections libres ont

 17   eu lieu, dans chacune de ces collectivités locales, un parti politique l'a

 18   remporté. Donc la personne élue librement président de l'assemblée locale

 19   ou président de la municipalité, cette personne avait beaucoup de pouvoir

 20   puisqu'il disposait d'instruments et également le soutien politique obtenue

 21   lors des élections libres pour agir pour le compte de la société, et ce par

 22   les pouvoirs qui lui étaient conférés par les élections, à faire ce qu'il

 23   fallait faire, dans le pire des cas, protéger l'environnement après la

 24   guerre, prendre les mesures nécessaires pour agir sur l'offre et la demande

 25   de l'économie. Donc ces pouvoirs étaient extrêmement puissants, et les

 26   élections libres ont permis de renforcer ces pouvoirs.

 27   Q.  Bien. Donc rien d'autre sur la planche 8. Nous pouvons donc passer à la

 28   planche suivante.

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  1   R.  Alors, sur la planche 9, je crois avoir expliqué ce qui, sur le plan

  2   macroéconomique, constitue les deux caractéristiques les plus importantes

  3   de la Yougoslavie. Il y avait tout d'abord un système budgétaire

  4   extrêmement décentralisé. Il y a eu de nombreuses décisions prises au

  5   niveau des collectivités locales ou au niveau régional avec différents

  6   impôts. Dans l'ex-Yougoslavie, il y a un impôt fédéral, un impôt

  7   républicain, mais le plus important pour ce qui est de la taille et aux

  8   bénéfices de la population étaient les cotisations spéciales pour financer

  9   les fonds d'intérêt d'autogestion, c'est-à-dire que les gens cotisaient à

 10   partir de leur salaire à ces fonds de gestion pour différents -- enfin,

 11   pour des services d'éducation, santé, et cetera.

 12   Ensuite il y a ce système monétaire décentralisé qui a été mis en

 13   place uniquement en 1994 -- en 1974, et ce système -- les Banques

 14   nationales dans le cadre du système bancaire créées dans chacune des

 15   républiques et des deux provinces autonomes, ces Banques centrales étaient

 16   -- dans la Croatie et dans l'ex-République de Macédoine, ont joué un rôle

 17   important depuis l'indépendance en Bosnie également, mais avec un certain

 18   retard. Deuxième caractéristique, c'est qu'il y avait une sorte de

 19   politique monétaire unifiée, mais laquelle politique devait être approuvée

 20   par le Conseil des gouverneurs de la Banque nationale.

 21   Quel genre de problème a-t-il posé la Banque national de Yougoslavie ?

 22   C'est que cette instance se composait de gouverneurs de républiques et de

 23   provinces autonomes, ce qui veut dire, par exemple, que vous aviez le

 24   gouverneur de la Banque nationale de Macédoine et qui était élu au

 25   parlement de Macédoine, mais qui représentait à la Fédération la Macédoine.

 26   Cette instance avait une responsabilité envers les républiques, mais ce

 27   Conseil des gouverneurs n'a pas bien pu gérer la politique monétaire, ce

 28   qui fait qu'on ait créé de l'inflation parce qu'il y a eu impression de

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  1   monnaie excessive en passant par le système du gouvernement de la Banque

  2   centrale. L'hyperinflation qui a vu le jour en 1989 et les efforts déployés

  3   au début des années 90, premier semestre 90, par Markovic pour mener une

  4   politique plus raisonnable, et tout ceci a été violé par une décision prise

  5   par un des gouverneur de la Banque nationale de république, en l'occurrence

  6   la Banque nationale de la République socialiste de Serbie qui a décidé

  7   d'imprimer trop de devises, et c'est ainsi qu'il y a eu un combat politique

  8   et qui a entraîné la chute de Markovic et de ses réformes.

  9   Alors en conclusion, ce système décentralisé a quelque part empêché la

 10   viabilité du système monétaire en Yougoslavie.

 11   Q.  Une précision, car il est possible que ceci soit évoqué plus tard. Vous

 12   parlez du système fiscal ou budgétaire décentralisé et vous parlez de

 13   "fonds parafiscaux" ou "para budgétaires". Nous avons déjà entendu ce terme

 14   dans ce prétoire, mais pourriez-vous nous expliquer ce que ça veut dire, ce

 15   terme de parafiscalité ?

 16   R.  Disons, dans une situation dans une zone normale, lorsque vous avez une

 17   économie de marché occidental où tournaient les [imperceptible], vous

 18   n'avez qu'un endroit, un lieu où les dépenses gouvernementales devront être

 19   définies. C'est défini dans le budget du gouvernement qui en général est

 20   proposé au parlement qui va l'approuver. Lorsque vous avez un budget

 21   spécial, une enveloppe particulière, celle de l'éducation, de la santé, des

 22   infrastructures routières, enveloppe ou portefeuille budgétaire qui ne se

 23   trouve pas dans le budget général central, on l'appelle budget parafiscal.

 24   Première étape dans la création d'un macro environnement normal, il faut

 25   avoir le contrôle des dépenses dans le cadre du budget. Si vous avez des

 26   budgets parafiscaux, des fonds para budgétaires, il est, bien sûr,

 27   nécessaire d'essayer de les réprimer, de les empêcher.

 28   Dans le système yougoslave de l'autogestion de ces communautés

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  1   d'intérêt d'autogestion, ces fonds autogestionnés -- auto gérés s'étaient

  2   ajoutés en général au budget de la république ou de fédération. Il y en

  3   avait plus de 6 000, dix dans chacune des 600 collectivités locales, ce qui

  4   fait que le pays, on ne pouvait dépenser, ne pouvait financer, ne pouvait

  5   pas en fait savoir exactement ce qui se dépensait. Ce n'est pas ça qui veut

  6   dire un problème, ce système du para budget c'est bien connu en économie.

  7   C'est la question de la gestion des dépenses publiques surtout dans des

  8   pays où vous avez des dépenses qui sont à l'extérieur du budget et qu'il

  9   n'est pas possible de contrôler.

 10   Q.  Je vais vous demander de faire preuve de plus de concision car

 11   nous avons beaucoup de documents à voir.

 12   Je pense que maintenant nous allons passer à la planche 10 --

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une précision. Vous parlez souvent

 14   de communautés ou collectivités locales. Un autre témoin nous a dit qu'il

 15   faut faire la distinction entre les municipalités et les collectivités

 16   locales, lesquelles sont des sous divisions des parties de municipalités.

 17   Alors, vous, comment est-ce que vous utilisez ce terme de "collectivité

 18   locale" ? Est-ce que vous connaissez cette distinction que je viens

 19   d'évoquer ? L'utilisez-vous ou est-ce que vous avez une terminologie

 20   différente ?

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président --

 22   Monsieur le Juge. Si vous me le permettez, ce terme les "communes" plutôt

 23   que "collectivités locales."

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, effectivement, il parlait dans

 25   cette distinction de communes locales.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous regardez la constitution yougoslave et

 27   la façon dont on a traduit ça en anglais, on parle de communauté

 28   sociopolitique. Quand je parle de communauté locale, ce sont des unités qui

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  1   sont plus petites que celles des républiques. Le terme c'est "obstina,"

  2   "obstina." Alors, dans les obstina, il se peut qu'il y ait des sous

  3   divisions que ce soit aussi divisé surtout si dans l'obstina vous avez une

  4   grosse ville. Vous avez, par exemple, l'obstina de Sarajevo qui a des

  5   parties qui la composent, qui sont des parties du tout qui constituent la

  6   communauté ou collectivité locale. Mais, moi, je me sers de ce terme pour

  7   indiquer des parties inférieures à la république et qu'on décrit dans la

  8   constitution comme étant des communautés sociopolitiques. Ça, c'est

  9   l'ancien terme qu'on utilisait, plus tard, en tout cas, à la Banque

 10   mondiale. Nous avons adopté le terme de "local community" sachant que

 11   c'était une entité qui avait une autonomie pour des questions locales.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc si je comprends pour nous,

 13   c'est ce que nous avons appelé municipalité. Vous seriez d'accord avec

 14   cette idée ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 17   Poursuivez, Maître Karnavas.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais c'était parmi les questions que je

 19   voulais poser au témoin pour obtenir des précisions.

 20   Q.  Prenons la planche numéro 10. Je sais qu'après, nous allons voir les

 21   suivants parce qu'il y a un lien entre ces trois pages. Mais ici, il est

 22   fait référence au SDK, service de comptabilité public. On en a souvent

 23   parlé. Peut-être pouvez-vous apporter un commentaire aussi en examinant

 24   certains documents.

 25   R.  Autres caractéristiques très importantes de l'ex-Yougoslavie, c'est que

 26   dans ce pays, l'essentiel des relations économiques entre entreprises ou

 27   entités locales se faisaient sans espèce, c'est-à-dire qu'on n'utilisait

 28   pas d'espèce, d'argent. Comment était-ce fait, c'est en passant par ce

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  1   système ou ce bureau de comptabilité public. Prenez la planche 11, vous

  2   allez y trouver un petit diagramme qui vous explique comment était organisé

  3   ce SDK. C'était une agence et toutes les entités, les personnalités

  4   légales, les entreprises, les municipalités, les collectivités locales,

  5   voire les républiques, les fonds para budgétaires, toutes ces entités

  6   légales disposaient d'un compte, un compte courant auprès de cette agence,

  7   les banques commerciales aussi. Même les Banques centrales avaient un

  8   compte dans cette agence, dans ce SDK, toutes les opérations, toutes les

  9   transactions se faisaient entre les banques avec ces différentes entités.

 10   Ce SDK, par conséquent, il était d'une importance capitale car cette

 11   institution veillait à ce que les transferts de fonds se fassent dans

 12   l'économie. Qui plus est, étant donné qu'en Yougoslavie le système fiscal

 13   était très développé, ce bureau de comptabilité public faisait fonction non

 14   seulement d'un mécanisme de paiement mais aussi de perception d'impôts, de

 15   recettes fiscales.

 16   Le soir, un magasin, un commerce, une entreprise légale amenaient à

 17   l'agence SDK la recette du jour. Un calcul était effectué, ça faisait

 18   autant de recettes ce jour-là, plus taxe à la vente ou sur la valeur

 19   ajoutée, et cet argent était enregistré, c'était vérifié par le SDK mais on

 20   -- c'était mis dans le coffre mais on disait dans les comptes que voilà, un

 21   paiement avait été fait au budget de la république ou de la collectivité

 22   locale avec la taxe appropriée.

 23   Pareil pour les salaires bruts. Ils étaient payés mensuellement. Une

 24   entreprise a mené la liste des salaires bruts. Là où on disait : voilà, les

 25   salaires nets sont versés sur les comptes des personnes concernées dans des

 26   banques commerciales, la différence à savoir les différentes contributions

 27   aux fonds parafiscaux, para budgétaires, la retraite, l'éducation, la

 28   santé, et cetera, tout ceci était aussi versé sur les fonds articulés

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  1   parafiscaux.

  2   Pourquoi ? Lorsque la guerre a commencé, lorsque les services de

  3   télécommunication n'ont plus fonctionné, lorsque ces services SDK ont été

  4   détruits, même s'il y avait eu une activité économique, comme le SDK ne

  5   fonctionnait plus, il n'était plus possible de percevoir la recette

  6   fiscale. C'est pour ça qu'il était important que -- par exemple prenez la

  7   Slovénie, à son indépendance, la Slovénie a dû prendre le contrôle de ce

  8   bureau parce que sûrement elle voulait que se continue l'activité

  9   économique dans un système où on ne passait pas par les [imperceptible]

 10   d'espèce.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je veux m'assurer que j'ai bien

 12   compris. Prenons un exemple simplifié; disons, vous avez une entreprise X,

 13   qui a comme employé le travailleur qui perçoit chaque mois 100. 100 c'est

 14   la somme versée par l'entreprise sur le compte du SDK. Lequel va remettre

 15   au travailleur 72. Cinq seront versés pour le fonds de retraite, le fonds

 16   de santé, le fonds de la défense. Est-ce que c'est comme ça que ça marchait

 17   ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, c'est exactement comme ça que ça

 19   marchait. C'est exactement ce que faisait le SDK. Il l'a fait. Bon pour

 20   tous les travailleurs. Mais effectivement tout se faisait sans passer par

 21   les transactions en espèce, et ça été fait aussi effectivement, et le

 22   travailleur obtenait de l'argent à la banque, 70 %.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ça donne beaucoup de pouvoir de

 24   contrôle aux autorités.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais il y a deux écoles de penser sur les

 26   raisons de la création de ce SDK. C'est que début des années 50, les

 27   pouvoirs publics voulaient savoir ce qui se passait dans les entreprises

 28   publiques. Mais plus tard dans les années 60 et 70, nous sommes passés à

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  1   une économie de marché, et il était vraiment très difficile, très

  2   encombrant, si j'ose dire, d'avoir des systèmes, par exemple, avoir un

  3   compte chèque. Ce système comme on connaît aux Etats-Unis et aussi en

  4   Europe, le SDK c'était très utile, un outil de question économique parce

  5   que personne ne veut transporter de l'argent comptant. Autre fonction,

  6   c'est la perception de recettes fiscales parce que c'était quelque chose

  7   qui se faisait à 100 %. Bon, avec quelquefois des entreprises qui voulaient

  8   payer les salaires nets et retarder un peu l'obligation de payer ces taxes.

  9   Mais, par exemple, la taxe sur la vente, tout ceci était déjà répertorié et

 10   le SDK fonctionnait à l'échelon de toute la Yougoslavie avec des branches,

 11   des succursales, et c'était une composante essentielle au système

 12   décentralisé et économique qui existait encore au moment où éclate la

 13   guerre en Bosnie-Herzégovine. Si on contrôle le SDK important.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup.

 15   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, ce système SDK, est-ce

 17   qu'il s'appliquait également aux fonctionnaires et aux militaires ? Est-ce

 18   qu'à ce moment-là, l'université provenant de Mostar, qui payait le

 19   professeur de la faculté, l'université donc, par un compte au SDK,

 20   créditait une certaine somme, ensuite le SDK envoyait à la banque, par

 21   exemple, du professeur d'université son salaire; est-ce que ça touchait

 22   tous les secteurs d'activité ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] A toutes ce qu'on appelle ces entités légales.

 24   Les universités, ou université de Mostar ou de Ljubljana, en principe, on

 25   recevait des fonds qu'il fallait, bien sûr, et qui venaient dans le fonds

 26   parafiscal pour l'éducation. Cette université avait un compte et s'il

 27   fallait payer ce professeur, le net de son salaire lui était versé, la

 28   contribution pour la retraite, le fonds de retraite des enseignants passait

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  1   par le SDK pour aller au fonds de retraire. Tout se faisait en passant par

  2   ce SDK. Toutes les entités légales avaient chacune un compte dans ce SDK.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question d'ordre technique. Mais dans ce

  4   système il n'y avait pas d'impôt direct; est-ce que les gens payaient des

  5   impôts, ou bien, il y avait des retenus à la source par le SDK ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Les gens payaient des impôts mais il y avait

  7   deux types d'impôt. On n'avait pas de TVA, à l'époque; depuis on l'a, mais

  8   on avait la taxe à la vente. Donc c'est une taxe qu'on prenait sur la

  9   valeur de la marchandise qui est payée le soir. Lorsqu'un commerce qui vend

 10   des marchandises amenait sa recette quotidienne au SDK. Donc le net était

 11   versé à la banque sur le compte qu'avait ce commerce au SDK et la taxe à la

 12   vente elle était versée sur la partie du gouvernement local et central.

 13   Quant aux employés, ils percevaient un salaire, ils avaient un salaire

 14   brut, mais, en principe, ils ne recevaient -- ils avaient l'impression de

 15   ne recevoir qu'un salaire net. La partie d'impôt direct qu'on connaît dans

 16   l'économie de marché qui est progressive, cette assiette étant progressive,

 17   ça c'est devenu bien plus tard. Seuls les salaires les plus gros, par

 18   exemple, là, peuvent subir un impôt direct. Mais c'était les deux

 19   instruments principaux et le SDK, dans une certaine mesure à l'époque,

 20   s'occupait aussi des droits de douane en fonction de l'endroit de la

 21   perception du droit de vente. Une dernière phrase peut-être. Ce SDK pouvait

 22   taxer tout à la source. Donc ce n'est pas comme c'est aujourd'hui en

 23   Slovénie ou aux Etats-Unis, où en fin d'année, on fait une déclaration

 24   fiscale. Non. Mais, non, l'argent il était prélevé mensuellement chaque

 25   fois qu'on payait un salaire.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation]

 28   Q.  A titre d'illustration, je pense que nous avons la planche 12.

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Là, on voit une démarche un peu différente. Dites-nous, d'abord ceci;

  3   quelle est la source de ce qui s'y trouve ?

  4   R.  Je voudrais ici faire référence au document 1D 02972. A la page 43 de

  5   ce document, il y est un rapport du FMI sur la République de Slovénie,

  6   évaluation de la stabilité du système financière plusieurs sujets sont

  7   abordés dont celui des moyens de paiement. Page 43 du dit rapport, on

  8   trouve un résumé de l'évaluation qu'on a fait pour voir comment se faisait

  9   la réforme du système de paiement. Prenons, si vous voulez bien maintenant

 10   la planche 12 de ma présentation. Vous allez voir comment le système de

 11   paiement se présente après l'abolition du SDK. Maintenant vous voyez que

 12   vous avez un individu qui a un compte à la Banque A, si cet individu veut

 13   payer à un autre individu une somme sur le compte à cet autre individu à la

 14   Banque B, il va passer à un système de paiement de Banque centrale. Donc il

 15   n'y a plus de SDK.

 16   Mais ça c'est passé seulement en 1997, 1998 en Slovénie comme dans d'autres

 17   pays, donc ça c'est après l'abolition du SDK. Mais si vous revenez à la

 18   planche 11, vous allez voir le système qui existait au moment où s'effondre

 19   la Yougoslavie lorsque arrive la guerre en Bosnie-Herzégovine, et là, vous

 20   avez que toutes les entités ont un compte au SDK, donc si vous vouliez

 21   soutenir l'essor de l'économie, il fallait recréer, réétablir ou avoir un

 22   système SDK qui fonctionnait. J'ai simplement fait référence à cette étude

 23   du FMI pour vous montrer une comparaison entre les deux systèmes, et

 24   veuillez noter qu'au moment où la guerre a éclaté, le système qui prévalait

 25   c'est celui que vous avez à la planche 11.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne sais pas si les Juges ont des

 27   questions; s'il n'y en a pas, nous pouvons peut-être passer à un autre

 28   sujet.

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  1   Q.  Que nous allons trouver à la planche 13.

  2   R.  Là, je vous montre ce qui se passe en matière de liquidité, comment le

  3   système -- l'ancien système se procurait des liquidités, et puis c'est

  4   important de voir aussi ce qui s'est passé lorsque la guerre éclata. Dans

  5   l'ancien système, puisque tout le monde avait un acompte au SDK, tout se

  6   faisait sans passer par une monnaie sonnante et trébuchante. Mais pour des

  7   petites transactions qu'il fallait faire en monnaie courante, par exemple,

  8   un per diem, ou si quelqu'un se déplaçait, il fallait pouvoir retirer de

  9   l'argent du compte qu'on avait, et pour ça, il faut vraiment de l'argent et

 10   où est-ce que je trouvais les liquidités ? Bien, elles étaient épargnées;

 11   elles étaient engrangées dans les coffres du SDK. La Banque nationale de la

 12   république, par exemple, celle de Slovénie, elle avait un coffre à

 13   Ljubljana, mais si on voulait distribuer de l'argent comptant, il y avait

 14   aussi des coffres dans plusieurs villes, dans les lieux dans les bureaux

 15   des agences locales du SDK, et en général, elles étaient proches et

 16   adjacentes à des banques de marque commerciales.

 17   Dans l'ancien temps, les liquidités étaient fournies par transfert

 18   d'espèces qui passaient du coffre du SDK au coffre de la Banque commerciale

 19   jusqu'au guichet où vous alliez rechercher en tant qu'individu de l'argent. 

 20   Lorsque nous sommes devenus indépendants en Slovénie, nous avons remplacé

 21   les dinars yougoslaves qu'il y avait dans ces coffres du SDK par une

 22   nouvelle monnaie slovène. En Bosnie-Herzégovine, ça s'est fait avec un

 23   certain retard. C'est pour ça que vous avez la planche 13 où je dis que les

 24   nouvelles autorités républicaines lorsqu'un pays devient indépendant

 25   devaient fournir ces liquidités. Si ce n'est pas le cas, ça veut dire

 26   qu'aussitôt vous allez avoir des difficultés dans un environnement

 27   économique ordinaire. Il y a deux choses qui se sont passées en Bosnie-

 28   Herzégovine. D'abord, on a accusé un certain retard da l'impression de --

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  1   et l'émission de cette nouvelle monnaie et puis une fois que la Banque

  2   nationale a émis en Bosnie-Herzégovine un dinar bosniaque, ça s'est fait

  3   dans un contexte d'hyper inflation parce qu'on n'a créé tellement d'argent,

  4   on a émis tellement d'argent, il y a eu une telle circulation monétaire

  5   qu'il y a eu, offre excessive de cette monnaie d'où inflation errée.

  6   Dans de telles conditions des devises parallèles, comme les marks

  7   allemands sont devenus des monnaies actives, le moyen d'échange en tant

  8   qu'unité de valeur.

  9   Q.  Je pense qu'ici à la planche 13, vous vouliez parler tout

 10   particulièrement de deux documents. Le premier c'est le 1D 02974.

 11   R.  Oui. Il s'agit ici du chapitre 6 du livre intitulé : "De la Yougoslavie

 12   à l'Union européenne," et ici l'auteur explique ce qu'il fallait faire pour

 13   établir la souveraineté monétaire d'un pays donné. Regardez ces conclusions

 14   qui se trouvent à la page 94, dernière phrase, page 94, le système établir

 15   par la constitution de 1974 avec sa décentralisation des systèmes bancaires

 16   a facilité l'établissement de la souveraineté bancaire et a permis une

 17   transition sans heurt ou au moins avec moins d'heurt pour la Slovénie et

 18   lui a permis de prendre les mesures qui étaient nécessaires en vue

 19   d'accéder à l'indépendance. Mais ça ce qui s'est fait chez nous en Slovénie

 20   je ne l'ai pas vu se passer au début de l'indépendance en Bosnie-

 21   Herzégovine, il était donc logique qu'une devise parallèle comme le mark

 22   allemand ou d'autres pays avec lesquels vous aviez des échanges ont

 23   commencé à circuler sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 24   Q.  Vous avez une question ?

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, mais je ne dois pas

 26   nécessairement vous interrompre. Je ne sais pas si vous avez une question

 27   de suivi. Je ne voulais pas vous interrompre.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] J'allais passer à un document différent.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est un peu une question entre

  2   parenthèse, mais vous l'avez suscité quand vous avez parlé de banques

  3   privées ? On peut se demander mis à part le SDK ce que faisaient des

  4   banques privées, est-ce que c'était des banques qui donnaient des crédits,

  5   ou est-ce qu'elle aidait aussi des banques d'épargne ? Pourquoi avoir un

  6   compte dans une banque privée plutôt qu'au SDK ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, et nous sommes là avant les

  8   réformes qui ont commencé seulement après l'indépendance, ce n'était pas

  9   des banques privées. C'était des banques qui ont droit, c'était des

 10   entreprises effectivement privées mais qui étaient la propriété de secteurs

 11   d'entreprise. La situation était assez singulière. Vous aviez des banques

 12   commerciales; elles pouvaient faire des emprunts à l'étranger, mais

 13   pourquoi faisaient-elles des emprunts ? C'était surtout pour soutenir les

 14   entreprises dans ce qu'ils avaient besoin. La banque privée classique, on

 15   ne la verra que plus tard.

 16   Ces banques, elles avaient des dépôts. Au cours des dernières années de

 17   l'existence du système yougoslave, ces banques avaient aussi des taux

 18   d'intérêt tout à fait normaux, mais ces taux d'intérêt résultaient surtout

 19   du fait que les gens ne faisaient pas confiance aux banques comme quelqu'un

 20   peu faire confiance à une banque privée ordinaire. Il y avait un peu des

 21   systèmes ponsey, comme on a vu ça maintenant au Madoff. Pourquoi c'était

 22   important ? Parce qu'au moment de l'indépendance, les banques ont rencontré

 23   d'énormes difficultés pas seulement pour ce qui est de la liquidité mais de

 24   la solvabilité et il fallait pouvoir rendre aux épargnants l'argent qu'ils

 25   avaient épargné à la banque.

 26   L'institution la plus puissante en ex-Yougoslavie, permettant à un système

 27   cohérent sur le plan financier, c'était le SDK. Les banques commerciales,

 28   elles étaient utiles pour les transactions internationales, elles étaient

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  1   utiles là où on avait établi un règlement de fonctionnement qui permettait

  2   de créer et d'engendrer des épargnes dans l'économie. Mais fin les années

  3   1980, il y a eu des gros problèmes au niveau des banques - bon, ça c'est

  4   vraiment entre parenthèse - si la Yougoslavie s'est effondrée, c'est aussi

  5   parce que nous avons été incapable de nous mettre d'accord sur la façon de

  6   financer les pertes des banques commerciales. Est-ce que ce serait fait au

  7   niveau de la Fédération, de la république, au niveau local, bon, ça c'est

  8   un débat plus économique mais c'est une des raisons de l'effondrement du

  9   système.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation]

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Maître Karnavas.

 13   Monsieur le Témoin, j'ai une question fondamentale à poser. En règle

 14   générale, quand je pose des questions, je vais toujours au cœur du sujet

 15   parce que j'ai le souci d'économie du temps et qu'on évite d'aller en tout

 16   sens.

 17   Si je comprends bien, ce que vous avez dit tout à l'heure ce rôle

 18   fondamental du SDK car le schéma que vous nous présentez à la page 12 c'est

 19   un système qui résulte de la réforme en 1997. Moi, je reste dans les années

 20   1991, 1992, 1993, et je plonge en Herzégovine. La thèse de l'Accusation est

 21   de dire que dans le cas de l'entreprise criminelle commune les Croates de

 22   l'Herceg-Bosna voire les Croates qui étaient à Zagreb ont transformé la

 23   monnaie, c'est-à-dire le dinar yougoslave voire le dinar de Sarajevo en

 24   dinar croate. D'après l'Accusation, l'unité monétaire qui était légale et

 25   qui circulait était le dinar croate alors que nous étions en Herzégovine

 26   qui relevait de la Bosnie-Herzégovine. Mais avec le système du SDK, est-ce

 27   que le fait de dire demain c'est le dinar croate qui fonctionne, est-ce que

 28   ça a changé quelque chose dans le système fondé sur le SDK ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Selon la compréhension qui est la mienne, les

  2   autorités de l'Herceg-Bosna n'ont pas procédé au remplacement du dinar

  3   bosniaque par le dinar croate. Ils ont permis l'utilisation du dinar croate

  4   à côté de celle du dinar bosniaque, qui était la monnaie officielle. Non

  5   seulement l'utilisation du dinar croate, mais également du mark allemand,

  6   et ultérieurement, le dinar croate est remplacé par la kuna croate.

  7   Pourquoi ont-ils fait cela ? Dans une certaine mesure, cela a été tout à

  8   fait logique. Il s'agissait d'une situation dans laquelle le dinar

  9   bosniaque avait été fourni en excès - et je voudrais ici que nous puissions

 10   nous reporter au document 1D 012959 - il s'agit du rapport du FMI.

 11   A la page 26, note de bas de page 36, nous voyons la chose suivante. A

 12   cette page, donc, on peut voir que dans ce qu'on appelait la zone à

 13   majorité bosnienne, l'inflation était de 773 000 en 1992. Dans la zone à

 14   majorité croate, elle était de 900 % en 1992. Dans la Republika Srpska,

 15   elle était de 73 000 %. Pourquoi est-ce je rappelle cela ? Lorsque vous

 16   êtes dans une situation dans laquelle le dinar bosniaque a été émis en

 17   excès et dans laquelle l'inflation était très élevé, comme nous avons vu,

 18   de nombreux événements ont affecté les taux de change, vous ne pouvez pas

 19   compter sur la confiance de la population; les gens n'avaient pas confiance

 20   en le dinar bosniaque, et la seule autre possibilité qui s'offre à vous,

 21   c'est de permettre l'utilisation d'autres monnaies. Il ne s'agit pas

 22   d'abolir le dinar bosniaque, et nulle part j'ai vu dans le document que

 23   cela aurait été fait. Mais ce qu'ont fait les autorités, c'est de permettre

 24   que les comptes de virement, les comptes auprès du SDK puissent être

 25   libellés, comme il se devait officiellement en dinars bosniaques, mais

 26   qu'ils puissent avoir des sous-comptes dont l'un serait libellé en dinars

 27   croates, et l'autre en marks allemands, tout simplement aux fins des

 28   échanges qui avaient lieu d'une part avec la Croatie, d'autre part avec

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  1   l'Allemagne, et qui nécessitait l'emploi de ces différentes monnaies.

  2   Donc, je ne vois pas ici une façon d'outrepasser la souveraineté monétaire

  3   de la Bosnie-Herzégovine, mais je ne vois ici qu'un moyen utilisé qui est

  4   utilisé afin de soutenir le développement économique dans une situation

  5   d'inflation très élevé.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est liée au taux d'inflation, et on

  7   peut comprendre qu'à ce moment-là on va utiliser la monnaie qui souffre

  8   moins que le dinar de Sarajevo, mais ça n'a pas été abordé jusqu'à présent.

  9   Le SDK est lié à la Banque centrale; vous confirmez cela ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le SDK est effectivement lié à la Banque

 11   centrale de près dans les circonstances normales. Mais selon moi, la Banque

 12   nationale de Bosnie-Herzégovine - et c'est quelque chose que j'ai pu

 13   discuté avec le gouverneur de la Banque nationale de Bosnie-Herzégovine

 14   lorsque je me suis rendu sur le terrain en 1994 et 1995 - n'avait pas le

 15   contrôle sur l'ensemble du territoire, car les bureaux du SDK à Tuzla, par

 16   exemple, agissaient de façon indépendante des bureaux du SDK et des bureaux

 17   de la Banque nationale de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo. J'ai vu la même

 18   chose aussi bien à Travnik qu'à Mostar. Si bien que la Banque centrale

 19   fournirait, dans des circonstances ordinaires, des liquidités aux bureaux

 20   locaux du SDK, aux coffres du SDK, mais cela n'a pas pu être fait. Je ne

 21   sais pas quelle était la part des moyens de disposer ces fonds qui avaient

 22   été fournis par la Bosnie-Herzégovine, et à partir de la discussion que

 23   j'ai eue avec les gouverneurs occidentaux de la Bosnie-Herzégovine, le

 24   contrôle réel de la Banque nationale de Bosnie-Herzégovine sur l'ensemble

 25   du territoire de la Fédération n'est intervenu qu'en 1994. En 1992 et 1993,

 26   les communités locales agissaient de leurs propres chefs, il y a de

 27   nombreux documents que j'ai pu examinés qui ont trait à l'établissement des

 28   taux de change, et des taux de change qui étaient assez différents selon

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  1   les circonstances.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous nous dites sous la foi de serment qu'en

  3   1994, vous avez eu une conversation avec le gouverneur de la Banque

  4   centrale de Bosnie-Herzégovine, qui vous a dit qu'avant 1994 il n'avait

  5   aucun lien ni contrôle des SDK locaux ? C'est bien ce que vous dites ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, et sous serment. J'ai eu cette discussion

  7   à l'époque avec le ministre Omicevic et plus tard avec le ministre

  8   Backovic, et j'ai demandé ensuite une nouvelle fois à M. Backovic, le 21

  9   décembre de l'année dernière lorsque je l'ai rencontré, je lui ai redemandé

 10   à quel moment les autorités ont été en mesure de reprendre le contrôle de

 11   l'ensemble du territoire, et ce qu'il m'a dit c'était que cela était

 12   intervenu en 1994. A l'époque où nous nous sommes rendus en Bosnie-

 13   Herzégovine sur le terrain, donc en 1994 et 1995, les étrangers

 14   n'utilisaient pas le dinar bosniaque parce que l'inflation était très

 15   élevée, et MM. Endor [phon] Backovic et Omicevic, nous ont dit cela, qu'ils

 16   n'étaient pas en mesure d'exercer d'un point de vue monétaire un contrôle

 17   sur l'ensemble du territoire de la République de Bosnie-Herzégovine ou de

 18   la Fédération de Bosnie-Herzégovine car, à mon sens, dans la zone de la

 19   Republika Srpska, le dinar yougoslave a été présent jusqu'au remplacement

 20   de cette monnaie par le mark convertible en 1995.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je peux ajouter une petite

 22   question. En 1994, nous avons assisté à de très nombreux événements dans la

 23   région, est-il possible de savoir si vos interlocuteurs à l'époque avaient

 24   en tête un moment précis ? S'agissait-il du début, avant le mois de mai,

 25   par exemple, ou alors s'agissait-il plutôt de la fin de 1994 ? Peut-être ne

 26   connaissez-vous pas la réponse, et j'en prendrai acte.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons commencé à avoir ces discussions

 28   avec les autorités à l'automne 1994. Tout d'abord, à Varsovie lorsqu'ils

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  1   nous ont rendu visite. Ensuite en 1995, lorsque nous sommes venus en

  2   Bosnie-Herzégovine, à l'époque où les étrangers n'utilisaient pas le dinar

  3   bosniaque. Ce que nous avons trouvé, et nous venions de différentes

  4   régions, c'est que le mark allemand était la monnaie nécessaire pour se

  5   rendre sur place.

  6   Après les accords de Dayton, le mark convertible a été instauré, et tout le

  7   monde a commencé à utiliser cette monnaie.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation]

 10   Q.  Alors, par rapport à ce document que vous avez évoqué, la pièce 1D

 11   02959, il me semble que vous avez attiré notre attention sur une note de

 12   bas de page, la note numéro 36 en page 26, mais je crois que vous nous avez

 13   également signalé l'importance d'un certain nombre de tableaux, le premier

 14   en page 82 et le deuxième en page 102. Est-ce exact ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Si nous pouvions maintenant regarder la page 82 de ce document, et

 17   gardons à l'esprit que nous avons des contraintes en termes de temps.

 18   R.  Alors, la page 82 rend compte de la production industrielle, il s'agit

 19   d'indices de la production industrielle, et il y a un chiffre qui est celui

 20   de 8,6 dans la troisième colonne, qui est le chiffre total. Ce qui signifie

 21   que si nous prenons une base de 100 en 1991, en 1993, cette production est

 22   tombée à 8,6, par rapport à cet indice de 100, c'est-à-dire près de 9 %,

 23   mais une chute de la production industrielle due aux circonstances de la

 24   guerre, cette chute de la production industrielle a été de 91 %.

 25   Q.  Si nous allons à la page 102 maintenant, il y a un autre tableau, dont

 26   je crois que vous souhaitiez que nous l'examinions.

 27   R.  La page 102 montre la part des dépenses rapportées à l'ensemble des

 28   dépenses dans les zones à majorité bosnienne, il s'agit des chiffres pour

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  1   l'année 1994, et si nous pouvions voir la ligne relative aux dépenses

  2   sociales, nous remarquons qu'il y a une différence très importante entre

  3   les 18,2 % des zones à majorité croate, en regard des 8,0 % des zones à

  4   majorité bosnienne, par conséquent, dans les zones à majorité croate, il

  5   était dépensé beaucoup plus de moyens pour les besoins sociaux, et si nous

  6   nous rapportons au sein du même document, à la table numéro 29 en page 100,

  7   nous pouvons y voir qu'en 1994, l'ensemble des recettes fiscales dans la

  8   zone à majorité croate est de 352 millions de deutsche marks, alors que

  9   dans la zone à majorité bosnienne, ce total n'atteint que 47,9 million de

 10   deutsche marks.

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   R.  La raison pour laquelle j'insiste là-dessus est que je voudrais que

 13   nous passions à la planche 14.

 14   Q.  Mais avant cela, est-ce que nous pourrions revenir à la page 102 ? Vous

 15   nous avez indiqué la colonne, dans la colonne de gauche, la mention des

 16   dépenses sociales. Si nous regardons, cependant, la rubrique salaires et

 17   contributions, nous voyons zéro dans la colonne de la zone à majorité

 18   bosnienne, et 11,2 pour la zone à majorité croate, alors que pour la

 19   Republika Srpska on voit 7,8. Est-ce que cela est pertinent par rapport à

 20   notre débat ?

 21   R.  Oui. Cela signifie que dans la zone à majorité croate, en plus du

 22   paiement des retraites, il avait également des paiements de salaires

 23   auxquels il a été procédé, alors que dans la zone à majorité bosnienne, les

 24   salaires n'étaient pas payés et les contributions n'étaient pas payées non

 25   plus pour les employés du gouvernement. Donc d'un point de vue fiscal il

 26   s'agit de deux zones très différentes, et si je peux me permettre, si nous

 27   passons à la page 40.

 28   Q.  [aucune interprétation]

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  1   R.  Pardon. A la planche numéro 14.

  2   Q.  [aucune interprétation]

  3   R.  Lorsque vous êtes en présence d'une situation dans laquelle il n'y a

  4   pas de liquidités qui vous sont fournies par la Banque centrale, lorsque

  5   vous avez une situation économique particulièrement morose, vous n'avez que

  6   deux options à votre disposition pour résoudre les problèmes. La première

  7   est d'imprimer, d'émettre la monnaie correspondant aux liquidités

  8   nécessaires. La seconde est de rechercher de nouveaux moyens de collecter

  9   des recettes fiscales. Ce que j'ai vu, lorsque j'ai examiné le budget de

 10   guerre de la République de Bosnie-Herzégovine, dans lequel pratiquement 95

 11   % des revenus étaient empruntés auprès de la Banque centrale, ce qui

 12   signifie qu'il s'agissait de monnaies émises, imprimées, je pense qu'une

 13   façon beaucoup plus pertinente de gérer l'économie aurait été de collecter

 14   -- de trouver des moyens différents de collecter des recettes fiscales, ce

 15   qui signifie qu'il faut soutenir l'administration fiscale, rétablir les

 16   comptes des bureaux du SDK, et cela a été fait dans la zone à majorité

 17   croate, aussi bien que dans la zone à majorité bosnienne à l'échelon des

 18   collectivités locales.

 19   Q.  Je voudrais que nous revenions en arrière juste quelques instants parce

 20   qu'il me semble que c'est important vous nous avez indiqué que près de 98 %

 21   des revenus du budget avaient été empruntés auprès de la Banque centrale,

 22   ce qui revenait à imprimer la monnaie. Pourriez-vous nous expliquer, et

 23   nous décrire un peu mieux ce que vous entendez par là ? Vous nous avez

 24   parlé précédemment des niveaux de confiance qui pouvaient exister, des

 25   différentes monnaies qui étaient présentes et qui étaient adossées. Pouvez-

 26   vous nous expliquer un peu plus que vous entendez par là ?

 27   R.  Dans le journal officiel de la République de Bosnie-Herzégovine, un

 28   budget de guerre a été publié. Dans ce budget de guerre nous voyons la

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  1   structure de revenus suivante, 98 % des revenus provenaient de la Banque

  2   centrale, c'est-à-dire avaient été imprimés, émis par la Banque centrale

  3   et, bien entendu, dans une telle situation, vous pouvez avoir qu'une

  4   inflation très élevée. Alors qu'à l'échelon des collectivités locales, il

  5   n'existait aucun moyen d'imprimer la monnaie nécessaire, et c'est pourquoi

  6   ces dernières ont commencé à collecter des recettes fiscales de façon

  7   différente.

  8   Q.  Entendu. Cela ressemble à ce que vous nous avez dit de la situation,

  9   tout au moins à Sarajevo, et cela ressemble un petit peu à ce qui se passe

 10   au Zimbabwe, avec Mugabe qui également a eu recours à une inflation massive

 11   pour financer les besoins de sa politique.

 12   R.  Oui, 730,000 % d'inflation en 1992 c'était le résultat de la politique

 13   monétaire des autorités et du fait qu'ils ont imprimé des dinars

 14   bosniaques.

 15   Q.  Entendu. Maintenant, s'il n'y a rien d'autre à ajouter pour la planche

 16   14, pouvons-nous passer à la planche 15 ?

 17   R.  La planche 15 et la planche 16 fournissent des explications quant aux

 18   raisons et à la façon dont l'Etat devrait procéder. Lorsque j'ai examiné

 19   l'ensemble de ces documents, en tant qu'économiste, bien entendu, j'avais

 20   besoin de me placer dans un certain cadre, cadre où vous trouverez la

 21   meilleure explication à la planche 16. Il s'agit d'une planche où nous

 22   trouvons l'illustration 5.2 en provenance du document 1D 02966.

 23   Q.  De quel document s'agit-il ?

 24   R.  Il s'agit d'un ouvrage : "La gestion des dépenses publiques," un

 25   ouvrage de référence pour les pays en transition, édité par Richard Allen

 26   et Tommasi. En page 153 de ce livre, tout comme à la planche 16, nous

 27   trouvons l'explication de ce qui est nécessaire dans un Etat donné afin

 28   d'assurer une gestion normale de l'économie. Il est nécessaire

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  1   manifestement d'établir des liens entre l'économie locale du pays,

  2   l'économie intérieure et l'extérieur. Vous devez vous assurer que dans le

  3   secteur de l'économie réelle, et dans le secteur intermédiaire, les

  4   relations nécessaires existent entre différents secteurs sur le plan des

  5   biens et des services, sur le marché correspondant; et que les ménages

  6   fournissent leur travail alors que les propriétaires fournissent leur

  7   capital afin d'organiser l'économie en fonction des besoins qui se

  8   présentent, que vous pouvez vous assurer également que la collecte des

  9   recettes fiscales se fait de façon adéquate et que le secteur bancaire

 10   fonctionne correctement.

 11   Si tous ces différents secteurs ne sont pas réunis, et ne fonctionnent pas

 12   correctement, il est extrêmement difficile d'entreprendre la normalisation

 13   de la situation économique. Les autorités centrales de Bosnie-Herzégovine

 14   n'ont pas entrepris toutes ces différentes mesures. Elles ont procédé avec

 15   un certain retard, et ces mesures ont été entreprises à l'échelon des

 16   collectivités locales.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] A moins qu'il n'y ait des questions, je

 18   voudrais que nous passions à la page suivante.

 19   Q.  Entendu. Planche numéro 17.

 20   R.  A la planche numéro 17, nous affirmons que sur la base de l'analyse qui

 21   est la nôtre que dans le même temps où la République de Bosnie-Herzégovine

 22   et la Slovénie et la Croatie, étaient internationalement reconnues en tant

 23   qu'Etat souverain, il ne s'agissait pas d'un Etat opérationnel, et cela

 24   bien que la Bosnie-Herzégovine ait été reconnue en même temps, enfin suite

 25   à la reconnaissance de la Croatie et la Slovénie, et cela parce que

 26   l'économie n'était pas viable, il y avait des raisons évidentes à cela :

 27   tout d'abord, les activités militaires sur le terrain; l'incapacité des

 28   autorités centrales à exercer un contrôle en dehors de Sarajevo; la

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  1   difficulté, l'impossibilité de collecter des recettes fiscales; la part

  2   très importante des moyens qui étaient affectés aux besoins de la défense;

  3   et le très faible niveau d'activité économique. Mais compte tenu de tout

  4   cela, il était nécessaire que quelqu'un agisse. Les autorités centrales

  5   ainsi qu'il est présenté au bas de cette planche numéro 17 n'avaient pas

  6   mis en place les mesures douanières nécessaires. L'activité de la Banque

  7   centrale avait été mise en place avec un retard significatif. Les bureaux

  8   du SDK ne fonctionnaient pas, à l'échelle de la Bosnie-Herzégovine tout

  9   comme d'ailleurs ne fonctionnaient pas les autorités fiscales.

 10   Passons à la planche 18 et à la suivante. Sur cette première planche, nous

 11   avons l'explication des résultats de la guerre. Plus de 70 % du territoire

 12   avait été occupé, c'est clair. Le gouvernement de la République de Bosnie

 13   n'avait pas pu établir ce contrôle douanier. Il n'y avait pas de nouvelles

 14   devises, pas de perception fiscale et très peu de contrôle des dépenses

 15   publiques, ce qui veut dire qu'il n'y a pas d'expansion des services

 16   publics, effondrement en fait du système qui avait existé avant la guerre.

 17   J'ai vu des rapports établis par les services économiques et, moi, je

 18   voulais vérifier si ce qui était dit était bien juste. J'ai examiné cette

 19   législation, je voulais voir si tout ceci avait été fait et bien sûr je

 20   n'ai pas trouvé les documents nécessaires et nous nous trouvons face à une

 21   situation où avant la guerre il n'y a pas un système décentralisé, normal

 22   mais qui ne fonctionnait plus. Nous savons pourquoi parce qu'il n'y a plus

 23   des lignes de communication, de liaison routière, ferroviaire, on était

 24   paralysé, paralysie des activités au niveau des collectivités locales.

 25   Q.  Ici, à la planche 18, vous voulez attirer notre attention je pense sur

 26   le document P 00274. C'est le premier document.

 27   R.  Effectivement. Traduction du journal officiel de la République de

 28   Bosnie-Herzégovine dans le préambule, à la première page en traduction,

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  1   c'est le point cinq ou la cinq lignes, la cinquième ligne qui dit que :

  2   l'agresseur refuse d'enrayer son agression et occupe 70 % du territoire. Ce

  3   qui veut dire que c'est la preuve qu'il était impossible pour ce

  4   gouvernement d'agir, qu'il y avait un effet très lourd, des activités

  5   militaires qui expliquaient cette paralysie.

  6   Q.  Nous voyons qu'à la date du 20 juin 1992, c'est la situation qui

  7   prévaut.

  8   R.  Tout à fait, en juin 1992, lorsque les autorités déclarent ou

  9   proclament l'état de guerre.

 10   Q.  Je pense que vous voulez aussi attirer notre attention sur le document

 11   P 00128, je vous mets en garde. N'oubliez quand vous vous écartiez du

 12   micro, les interprètes ne vous entendent pas.

 13   R.  Merci de cette mise en garde c'est pour ça que j'ai mis le document

 14   devant moi.

 15   Q.  P 00128 ?

 16   R.  Effectivement page 32.

 17   Q.  D'accord.

 18   R.  Section E, économie, on y trouve une description de ce qui s'est passé

 19   au début de la guerre. On dit au début de la guerre, dans une certaine

 20   mesure aussi avant la guerre, il y a eu effondrement total du système

 21   antérieur, cessation du taux d'activités, dettes, transactions de

 22   paiements, alors que les télécommunications, les routes, les liaisons

 23   ferroviaires étaient interrompues.

 24   Q.  Je vous demande de ralentir parce que quelqu'un essaie de vous

 25   interpréter.

 26   R.  Avec cette cessation des activités économiques, se tarissent également

 27   les ressources fiscales, les recettes fiscales et tout se tarie alors que

 28   les besoins sont plus grands que jamais en temps de guerre.

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  1   Q.  Pourquoi est-ce que -- y a-t-il autre chose que nous devrions examiner

  2   de plus près ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Passons à la planche suivante, je pense que c'est la planche 19.

  5   R.  Elle vous donne une conclusion sur les résultats de la guerre. Etant

  6   donné que les mesures, que devrait effecteur, mettre en œuvre un Etat

  7   indépendant, n'ont pas été prises, il y a eu paralysie du système

  8   économique. La production économique fut très limitée et puis il n'y avait

  9   pas d'administration fiscale puisqu'au niveau du pays, tout entier il n'y

 10   avait plus de comptabilité publique. Il n'y avait même pas de perception

 11   d'impôt sur le peu d'activité qu'il y avait en économie. Ça eu un effet sur

 12   le système bancaire en 1995 et les banques lorsque nous sommes allés en

 13   Bosnie-Herzégovine, les banques ne fonctionnaient toujours pas à Sarajevo.

 14   Donc effondrement du système de paiement, même s'il y avait un tant soit

 15   peu d'activité économique, ce n'était pas soutenu par les activités

 16   bancaires. J'ai déjà dit les autorités centrales, au niveau bancaire

 17   avaient besoin si elles voulaient un système économique fiable une reprise

 18   des activités économiques, elles devaient avoir un nouvel essor qui est

 19   arrivé bien plus tard après Dayton avec les marks convertibles.

 20   Q.  C'est un mark convertible qui a été émis par les autorités bancaires

 21   centrales, mais qui étaient ces autorités bancaires centrales en Bosnie-

 22   Herzégovine ?

 23   R.  D'après les accords de Dayton, c'était géré par Pieter Nicholls qui

 24   était un étranger un néo zélandais je pense, un Australien.

 25   Q.  Oui.

 26   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs. Permettez-

 27   moi de poser une question, assortie d'une remarque. Cette planche numéro 19

 28   qui nous dit quels sont les résultats de la guerre, deux résultats sur

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  1   deux. On a dit que les mesures que doit prendre un état indépendant n'ont

  2   pas été prises en l'occurrence. Monsieur Cvikl pourquoi est-ce que ces

  3   mesures n'ont pas été prises ? Ce sera ma première question. Par ailleurs,

  4   avez-vous le sentiment qu'il était réaliste de penser qu'il fallait

  5   vraiment prendre ces mesures, vu ce que vous avez dit auparavant à propos

  6   du système bancaire, des problèmes que vous avez évoqués ? Bien souvent

  7   mais surtout en 1992 et 1993, est-ce que le système bancaire ne pouvait pas

  8   fonctionner en raison de la situation qui prévalait dans une partie plus

  9   importante en matière de taille dans le pays en Bosnie-Herzégovine ? Je

 10   pense que le témoin a parlé de Travnik, de Mostar en autres.

 11   Monsieur le Témoin, pensez-vous que pratiquement il était possible de

 12   prendre des mesures, les mesures que devrait prendre comme vous dites,

 13   entre guillemets, un Etat indépendant, ou est-ce que franchement ce n'était

 14   qu'un vœu pieux de la part du gouvernement central ou d'autres entités ?

 15   C'est la question que je souhaite vous poser, mais, moi, je suis Hongrois

 16   et j'écoute vraiment de façon très attentive vos propos parce qu'aussi en

 17   Hongrie, nous avons suivi avec le plus vif intérêt l'évolution financière,

 18   économique dans l'ex-Yougoslavie à l'époque.

 19   Je voulais déjà dire ceci parce que vous avez parlé de la fin de la

 20   famine en Hongrie. Je sais que ça se trouvait dans le compte rendu, vous

 21   avez dit que Hongrie, la famine régnait.

 22   Un instant, Maître Karnavas.

 23   Bon, ici ce n'est pas ma fierté nationale qui me force à prendre la

 24   parole mais c'est plutôt pour dire qu'à Hongrie en 1948, en 1950, la famine

 25   ne sévissait pas. Moi, j'ai vécu cette époque, je la connais par cœur. Je

 26   sais qu'en 1945, début 1946, il y a eu la famine parce que l'armée, elle a

 27   pris tout ce qu'elle a trouvé, puis après, il y a eu le retour en

 28   Allemagne. Puis aussi parce que l'armée a pris ce que les Allemands avaient

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  1   laissé sur place. Donc, c'est vrai qu'à ce moment-là, la faim régnait, mais

  2   pas à l'époque dont vous avez parlé.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je vous présente mes excuses.

  4   Moi, j'ai dit que les gens avaient faim, et on ne parlait pas de la

  5   Hongrie, "Hungry and Hungary". Je pense que c'est là que c'est glissé la

  6   méprise. Je voulais vous expliquer qu'effectivement en 1948, la faim, la

  7   famine en Yougoslavie, c'est parce qu'on avait mis fin à la réforme

  8   agraire. On avait effectivement mis fin à ces mesures qui consistaient à

  9   priver les exploiteurs agricoles de leurs terres, il y a eu des marchés,

 10   bon, la façon dont les travailleurs essaient de trouver à manger. Mes

 11   parents m'ont raconté comment ça s'est passé en 1948.

 12   Quant à votre question, Monsieur le Juge, je l'ai dit aux planches 17 et 19

 13   : je me contente de remarquer que les mesures que devrait prendre un Etat

 14   indépendant n'ont pas été prises. Ce que je dis, qu'à ce moment-là la

 15   Bosnie-Herzégovine avait été reconnu par la communauté internationale, mais

 16   ce n'était pas à un Etat qui fonctionnait, et pourtant les gens devaient

 17   bien survivre. Etant donné qu'on avait un système économique décentralisé,

 18   il était logique que des autorités ont commencé à agir, à prendre des

 19   mesures au niveau des communautés locales parce que Sarajevo était piégée,

 20   était isolée. Sarajevo prenait les mesures législatives que personne

 21   d'autre ne connaissait, ce qui veut dire que les autorités ont pris des

 22   mesures, elles ont agi comme si elles allaient créer des Etats indépendants

 23   pour le territoire qui était le leur. Quand je parle d'Etats indépendants,

 24   je parle de régions économiques qui sont censées négocier avec d'autres. Je

 25   l'ai vu à Tuzla, Zenica, Travnik, Mostar et ailleurs.

 26   Je suis un économiste, et je n'ai pas procédé ici à un jugement, je n'ai

 27   pas essayé de juger si cela était possible ou non, parce que nous étions

 28   dans une situation d'agression militaire. Mais lorsque les activités

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  1   militaires se sont apaisés et que le gouvernement central est resté bloqué

  2   à Sarajevo, il aurait été logique d'un point de vue économique que ces

  3   autorités agissent tout d'abord à l'échelon des communautés locales, et

  4   ensuite à l'échelon régional.

  5   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Témoin,

  6   pour votre réponse, qui me satisfait pleinement.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : La question de mon collègue et votre réponse, qui

  8   s'est fondée notamment sur les tableaux 17 et 19, me permettent de poser la

  9   question que je brûlais de vous poser, mais j'attendais le bon moment. Au

 10   tableau 17, vous indiquez, de manière claire et précise, que la

 11   reconnaissance internationale de la Bosnie-Herzégovine qui avait reconnu

 12   cet Etat, en fait, semblait poser un certain nombre de problèmes liés aux

 13   raisons économiques, et j'ai été très frappé par un document où on se rend

 14   compte que la production industrielle sur une base de 100 est tombée à 8 %,

 15   c'est-à-dire qu'il y avait un collapsus important au niveau économique.

 16   Alors, ma question est la suivante : dans une situation pareille, est-ce

 17   qu'il est logique de reconnaître un Etat qui ne fonctionne pas

 18   économiquement, et à l'appui de ma question, je fais un parallèle avec le

 19   Kosovo. Je sais que la présidence slovène à l'époque a géré le dossier de

 20   la reconnaissance du Kosovo, et est-ce que - mais vous qui êtes un expert -

 21   est-ce que, sur le plan économique le Kosovo actuel, présentait la même

 22   situation que la Bosnie-Herzégovine à l'époque ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse la plus courte serait non. Il y a

 24   des différences, et les différences sont les suivantes : l'Union européenne

 25   et ses membres ont reconnu la Slovénie, la Croatie, et la République de

 26   Bosnie-Herzégovine au même moment. Pour ce qui est de la Slovénie et la

 27   République de Croatie, ces dernières ont entrepris certaines des mesures

 28   dont nous avons parlé. Comme vous le savez, la Slovénie a immédiatement été

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  1   l'objet d'une attaque de la JNA lors d'une guerre qui a duré deux semaines

  2   et à laquelle nous avons été en mesure de mettre en terme. Alors, la

  3   situation au Kosovo n'est pas la même que celle qui prévalait en Bosnie-

  4   Herzégovine en 1991. Je me suis rendu au Kosovo à plusieurs reprises en

  5   tant que membre du parlement, et il existe là-bas une force qui est en

  6   mesure d'empêcher des attaques militaires. Cela n'était pas le cas en

  7   Bosnie-Herzégovine en 1991.

  8   Toutes les forces qui se sont retirées de Slovénie après le 15 octobre se

  9   sont en fait dirigées vers le sud. Et puisque la Bosnie-Herzégovine était

 10   le cas géographique de la production militaire yougoslave, ces unités ont

 11   fini par se retrouver en Bosnie-Herzégovine. C'est pourquoi 70 % du

 12   territoire de la République de Bosnie-Herzégovine s'est retrouvé entre les

 13   mains d'autorités qui n'étaient pas celles de la Bosnie-Herzégovine, alors

 14   que dans le cas du Kosovo, nous avions une situation tout à fait

 15   différente. Nous avons sur place des forces dans une position qui peuvent

 16   empêcher ce type d'événements; des forces de police, la mission LX de

 17   l'Union européenne, mais d'un point de vue économique, est-ce qu'il

 18   s'agissait de la meilleure décision d'un point de vue économique ? Je ne

 19   peux faire de commentaires là-dessus, sur le Kosovo, bien entendu.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Je regarde la montre, il est l'heure de faire la

 21   pause. On reprendra à 18 heures, et il restera à Me Karnavas une heure pour

 22   continuer l'interrogatoire principal.

 23   --- L'audience est suspendue à 17 heures 41.

 24   --- L'audience est reprise à 18 heures 02.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 26   Maître Karnavas.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je vous

 28   propose de passer donc à la planche numéro 20. C'est là où nous sommes

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  1   arrêtés, donc nous pouvons poursuivre assez rapidement.

  2   Bon. Il y a peut-être un micro ouvert, Monsieur le Président.

  3   Q.  [aucune interprétation]

  4   R.  A la planche numéro 20, nous expliquons le genre de mesures qui doivent

  5   être prises afin de renforcer l'économie pour renforcer l'autorité fiscale

  6   et de recettes, rétablir les fonctions du SDK et pour ce faire donc

  7   rétablir le réseau de télécommunication. Ces mesures n'ont pas été mises en

  8   œuvre, c'est-à-dire quelles ont été mises en œuvre au niveau des

  9   collectivités locales. J'ai vu certaines de ces mesures à l'échelle

 10   régionale mises en œuvre dans la région d'Herceg-Bosna, et dans une

 11   certaine mesure, ce que j'ai vu dans la région de Tuzla, Tuzla, par

 12   certaines -- par deux, trois cas d'activités locales qui partageaient, je

 13   dirais l'approche à l'égard donc des réserves stratégiques en place à ce

 14   niveau.

 15   A présent, donc la guerre s'est traduit par une situation extrêmement

 16   difficile et en l'espèce donc les autorités, qui en vertu de la

 17   constitution yougoslave étaient responsables pour les services, donc

 18   devaient agir à la fois au niveau de l'offre et de la demande, et d'après

 19   les documents que j'ai pu voir, les collectivités locales ont agi de la

 20   sorte. Autre chose.

 21   Q.  Pour que nous passons donc à la planche numéro 21.

 22   R.  Alors, à la planche 21, nous expliquons pourquoi il y a eu un

 23   effondrement complet de l'économie. La raison principale est que le secteur

 24   des entreprises a cessé de fonctionner, les hommes ont été appelés sous les

 25   drapeaux, pas d'énergie, l'approvisionnement en matières premières

 26   extrêmement limité et les commerces tout simplement fermés. La raison pour

 27   laquelle la société pour laquelle les gens ont réussi à survivre est

 28   d'abord donc les marchés de denrées alimentaires fonctionnaient pour que la

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  1   guerre donc les agriculteurs ont pu livrer les denrées donc pendant toute

  2   la durée du conflit et le secteur privé a pris la relève. Il y a eu des

  3   centaines d'entreprises très, notamment dans le secteur du commerce, qui

  4   ont donc assuré la fourniture de biens nécessaires à la population. Et donc

  5   ces entreprises et là avec l'aide des bailleurs dans une situation où il y

  6   avait une baisse de 91 % de la production industrielle a donc permis

  7   d'assurer la survie de la population pendant la guerre jusque donc en 1980

  8   -- de 1991 à 1994.

  9   Q.  Donc sur cette planche, vous souhaitez attirer notre attention à 1D

 10   02959.

 11   R.  Oui. Précisément il s'agit du rapport du FMI où nous montrons à nouveau

 12   à la page 11, page 82 ces indices extrêmement faibles montrant donc le

 13   champ de la production industrielle montrant combien la situation était

 14   désastreuse. Donc à la page 82 de ce rapport.

 15   Q.  Donc nous l'avons bien vu. Je crois que l'autre document est le 1D

 16   02967.

 17   R.  Oui. Là, je me réfère à la Bosnie-Herzégovine donc vers la reprise

 18   économique en rapport de la Banque mondiale et je me réfère à la page en

 19   chiffre romain XVII où, au bas du deuxième paragraphe, on trouve une

 20   évaluation effectuée par l'équipe de la banque de l'époque montrant que les

 21   besoins de financement extérieurs étaient de l'ordre de 1,51 milliards de

 22   dollars pour les trois ans. Donc ça c'est une somme colossale car par

 23   rapport au chiffre que nous avons déjà vus c'est pratiquement six à sept

 24   fois supérieurs à l'ensemble des recettes fiscales donc pour le payer.

 25   Alors pour assurer, c'est au deuxième paragraphe de cette page, donc il

 26   s'agit de la dernière phrase de ce paragraphe dont le titre est :

 27   "Reconstruction, priorités et organisation." Bien.

 28   Je pense que nous pouvons même passer à la planche suivante.

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  1   En effet, planche 22 à présent. Là, je résume la politique monétaire,

  2   la Banque nationale de la République de la Bosnie-Herzégovine n'avait pas

  3   mis en œuvre immédiatement les politiques nécessaires puisqu'il y avait

  4   absence d'émission aux fins de monnaie nationale unique que les gens --

  5   auxquels les gens pourraient faire confiance et que les autres devises, le

  6   mark jouait donc une devise parallèle et la convertibilité est intervenue

  7   bien plus tard.

  8   Dans l'intervalle, les collectivités locales ont mis en œuvre les

  9   mesures traditionnelles de l'Etat central. Nous avons vu une situation où

 10   les collectivités effectuaient des mesures qui étaient normalement

 11   réalisées par les Banques centrales --

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation] 

 13   [chevauchement]

 14   50 --

 15   [aucune interprétation]

 16   [intervenants non-identifiés]

 17   L'heure sur le point 2, point 2, la Banque centrale a retardé la mise en

 18   œuvre de la nouvelle devise. Cette nouvelle monnaie donc n'était pas très

 19   bien acceptée. C'était une devise forte, n'est-ce pas ?

 20   It was -- il fallait lui dire qu'il ne s'agissait pas d'une devise forte.

 21   Voilà. Il ne s'agissait pas d'une devise forte.

 22   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Bien.

 24   Q.  Souhaitez-vous donner des exemples ou allons-nous voir des exemples par

 25   la suite concernant ce qui a été fait ?

 26   R.  Nous les verrons par la suite.

 27   Q.  Bien. Poursuivons. Nous passons donc à la planche suivante. Il s'agit

 28   de la planche 23. Alors les planches 23 et 24 expliquent comment la guerre

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  1   a pesé sur le système fiscal puisque ce système national de paiements donc

  2   ne fonctionnait plus, c'est-à-dire qu'il n'y avait plus la possibilité pour

  3   procéder à la collecte de recettes fiscales nationales et donc des fonds

  4   parafiscaux. C'est-à-dire les services qui étaient censés dégager des fonds

  5   pour les services sociaux n'étaient pas opérationnels et puisque dans la

  6   pratique toutes les collectivités locales dont différentes recettes

  7   fiscales étaient mises en œuvre et bien entendu les autorités avaient

  8   réalisé cela soit en obtenant des ressources fiscales ou dans certains cas

  9   -- et c'était -- il y avait un cas très efficace à Tuzla. Ils ont remis des

 10   paquets alimentaires comme moyens de paiement. Au lieu de payer les gens un

 11   salaire, ils leur remettaient un colis alimentaire pour en guise de salaire

 12   donc, par exemple, pour les responsables des services de santé locaux à

 13   Tuzla.

 14   Q.  Donc planche 24. Alors je vous demanderais un tout petit peu plus

 15   lentement puisqu'à mesure que nous avançons dans la soirée les uns et les

 16   autres fatiguent un peu je vous demanderais de bien vouloir ralentir votre

 17   débit. Merci.

 18   Bien. Planche 24 et là j'ai résumé ce qui se passe côté dépenses puisqu'il

 19   n'y avait pas de salaires bruts, il n'y a pas d'activités économiques, donc

 20   pas de salaires bruts, pas de cotisations obligatoires à verser sur les

 21   différents fonds parafiscaux donc santé, pension, éducation et autres fonds

 22   qui aient été, qui avaient pour vocation de financer ces dépenses. Elle

 23   n'avait pas de moyens. Les services donc de santé ne recevaient pas des

 24   fonds par ce système d'autorité centrale. Les écoles, les universités

 25   étaient privées de crédit et restaient fermer ou plutôt ne fonctionnaient

 26   pas sauf intervention de quelqu'un et dans ce contexte je conclus donc la

 27   situation par le dernier point système fiscal où les utilisateurs du

 28   budget, les différentes entités financées à partir du budget ou de fonds

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  1   parafiscaux devenus complètement dépendants de la capacité des autorités ou

  2   des collectivités locales à financer ses dépenses. Ça c'est donc les

  3   résultat de la guerre et le résultat de l'effondrement du système fiscal

  4   décentralisé, l'effondrement de l'activité économique.

  5   Q.  Bien. Passons si vous voulez bien à la planche 25. Votre synthèse,

  6   vous, là, donc votre résumé vous souhaitez effectivement attirer

  7   l'attention à 1D 02964.

  8   R.  Oui. Sur ces planches, je résume en tant qu'économiste quelle était la

  9   situation économique d'ensemble. Le meilleur descriptif figure au 1D 02964

 10   où la municipalité de Ljubuski avait émis le communiqué suivant, à savoir

 11   que l'approvisionnement régulier de l'électricité était interrompu et nous

 12   informons la présente la population qu'il n'y aura pas d'électricité avant

 13   avis -- jusqu'à nouvel ordre pour s'assurer effectivement qu'il y avait un

 14   tableau -- enfin, très -- montrant effectivement que jusqu'en avril 1992,

 15   il y avait plus de l'électricité fournie, quand bien même la Bosnie-

 16   Herzégovine avait soit en énergie thermique ou énergie d'hydro-élecrique à

 17   produire de l'électricité.

 18   Q.  Donc en avez-vous terminé avec votre synthèse ?

 19   R.  Nous pouvons poursuivre. Mais sur ce dernier point, puisque le

 20   gouvernement de la Bosnie-Herzégovine à Sarajevo était incapable de mettre

 21   en œuvre efficacement les mesures les collectivités locales ont agi de

 22   manière indépendante. Comme nous le présentons dans la partie suivante du

 23   rapport et dans la planche qui suit, ceci s'est passé de la même façon

 24   qu'il s'agisse de zones à majorité musulmanes ou croates.

 25   Q.  Bien. A moins que sur ce -- à moins que vous n'ayez des questions de la

 26   part des Juges, nous pouvons passer à des situations plus concrètes avec la

 27   planche suivante qui est donc la planche 26, activités des collectivités

 28   locales. Alors les collectivités locales doivent agir pour deux raisons :

Page 35203

  1   tout d'abord, elles doivent agir pour se défendre mais une fois qu'elles se

  2   défendent contre les attaques de l'agresseur elles doivent rétablir les

  3   conditions économiques fondamentales. Dans ce contexte, puisque les

  4   autorités centrales n'étaient pas actives, les autorités locales sont

  5   devenues les éléments-clés pour le gouvernement national, la gouvernance

  6   nationale dans leurs zones respectives. Elles avaient donc un pouvoir de

  7   par la constitution, donc pour agir sur de nombreuses questions. Je me

  8   réfère à 1D 02994 qui est donc la constitution de la République socialiste

  9   de Bosnie-Herzégovine. A la page 91, on trouve au chapitre 7, article 262,

 10   qui expliquait quelles étaient les responsabilités de la municipalité qui

 11   était en charge d'assurer les conditions pour le travail et les conditions

 12   de vie des citoyens. Dans ce contexte, les autorités locales ont agi comme

 13   cela est prévu dans la constitution, mais là je me réfère à un autre

 14   document qui est le document 1D 0247 à 2047 [comme interprété]. Il s'agit

 15   du document émis le 1er août 1992 par la présidence de la République de

 16   Bosnie-Herzégovine adoptant le décret de loi sur l'application de la loi

 17   sur le financement des besoins sociaux généraux. Dans ce décret de loi,

 18   dans la partie II en chiffre romain, enfin section 2, le financement des

 19   fonctions et tâches des communautés sociales lors de menace imminente de

 20   guerre et en cas de guerre. A l'article 2, il est expliqué quels besoins

 21   sociaux généraux doivent être couverts pendant la guerre et au cours de la

 22   guerre. Tout d'abord, donc le financement des forces armées --

 23   INTERVENANT NON-IDENTIFIÉ : Je voudrais demanderais de parler plus

 24   lentement donc c'est quand même un point important à assimiler.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc article 2, qui commence par définir

 26   quelles sont les priorités qui doivent être financées lors d'une menace

 27   imminente de guerre et pendant la guerre. Tout d'abord, le financement des

 28   forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine, deuxièmement, le

Page 35204

  1   travail de la présidence et autres organes administratifs, troisièmement,

  2   il s'agit de sécuriser et maintenir les réserves de produits de base,

  3   quatre ressources additionnelles des municipalités -- ça poursuit -- cinq,

  4   soutien financier aux familles et aux personnes, et cetera.

  5   Mais je voudrais également me référer donc à la page suivante à

  6   l'article 3, qui définit que tous ces besoins -- les besoins donc cités à

  7   l'article 2 seront financés à partir du budget et lequel budget et si après

  8   évoqué comme étant donc le budget de guerre. Donc le décret émis par la

  9   présidence donc à donner aux communautés politiques sociales la capacité à

 10   mettre en place un budget de guerre.

 11   Pourquoi est-ce important ? A l'article 3, le budget de

 12   Guerre est défini. A l'article 2, quels sont les priorités et les besoins.

 13   A l'article 20, je me réfère à l'article 20, qui est donc sous le romain

 14   III, donc communautés politiques sociales. Et l'article 20 cela est défini

 15   -- il est défini qu'au cours d'une menace imminente de guerre et pendant

 16   l'état de guerre, la communauté politique peut déterminer de nouvelles

 17   sources de ressources, de revenus, et abolir les ressources existantes.

 18   Par conséquent, la présidence donnait autorité aux communautés locales pour

 19   passer de nouvelles mesures législatives en quelque sorte en vertu

 20   desquelles de nouvelles recettes fiscales pourraient collectées. Ces

 21   nouvelles ressources auraient à être versées au budget de guerre afin de

 22   financer également ce qui était stipulé dans le décret présidentiel, à

 23   savoir les besoins de défense et répondre aux besoins de leur population

 24   donc sur leur propre territoire.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation]

 26   Q.  Un autre détail. A l'article 30, s'il vous plaît, que vous avez

 27   commenté. Il est dit, et vous avez donné quelques exemples, augmenter,

 28   diminuer, ou abolir les taux de taxation, diminuer la taxation, exempter de

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  1   taxe à certains contribuables, et cetera. Est-ce qu'il s'agit ici

  2   d'activités qui étaient normalement à la charge de l'Etat, ou des

  3   communautés locales ?

  4   R.  Il s'agit là d'activités qui étaient normalement du ressort de l'Etat.

  5   L'Etat était celui qui au nom de -- en vertu des pouvoirs qui lu conférait

  6   la constitution, accorde à certains contribuable de exemptions. La

  7   présidence de la République de Bosnie-Herzégovine c'est rendue compte

  8   qu'elle n'était plus en mesure de le faire et qu'elle avait par conséquent

  9   à transférer, à déléguer cette fonction étatique à l'échelon des

 10   municipalités locales ou des communautés sociopolitiques selon la

 11   constitution bosniaque qui était donc Ocina [phon] ou des municipalités.

 12   Q.  Entendu. Nous voyons donc que cela a été fait en août 1992, n'est-ce

 13   pas ?

 14   R.  Oui, c'est exact. Lorsque j'examinais certaines activités particulières

 15   je n'étais pas surpris qu'ils aient procédé à tout cela, bien que cela ait

 16   été ressort des compétences normales qui reviennent normalement à un Etat.

 17   Q.  Entendu.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] A moins qu'il n'y ait d'autres questions de

 19   la part des Juges de la Chambre, je voudrais qu'on passe à la planche

 20   suivante.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, il y a un article important qui

 22   n'a pas été cité qui va dans votre sens, qui me semble être l'article 8 qui

 23   -- voir et manière claire que des ressources complémentaires ou

 24   additionnelles peuvent provenir des municipalités. Ce qui tendrait à

 25   montrer que lorsque l'état n'arrive pas par son budget national à faire

 26   face aux dépenses budgétaires en matière de budget dû à une situation de

 27   guerre, à ce moment-là, il y a un recours aux municipalités. Est-ce que

 28   vous confirmez que l'article 8 va dans ce sens ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, l'article 8 dit que le budget de guerre

  2   doit fournir les ressources additionnelles à partir des municipalités afin

  3   de financer leurs besoins. Mais lorsque j'ai regardé le budget de guerre de

  4   1992, je n'ai pas vu du côté des dépenses ces ressources additionnelles qui

  5   auraient pu être fournies.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] S'il n'y a pas de questions supplémentaires

  7   par rapport à cette planche, je voudrais que nous passions à la planche

  8   numéro 27, n'est-ce pas ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est bien ça.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation]

 11   Q.  Entendu, alors passons à la planche 27.

 12   R.  Dans cette planche, j'explique quel type de mesures économiques ont été

 13   prises par les collectivités locales. J'ai commencé par les mesures macro

 14   économiques, bien entendu, par cas, il s'agissait bien entendu d'équilibrer

 15   l'offre et la demande.

 16   Deuxièmement, elles ont procédé en vertu de ce décret que nous venons juste

 17   de commenter à l'établissement d'un nouveau système fiscal. Elles ont

 18   repris à leur compte les services publics qui étaient normalement du

 19   ressort du gouvernement central. Ensuite au dernier point, j'ai résumé dans

 20   cette planche le type de mesures qui ont été prises. Il y avait en fait

 21   quatre groupes de mesures différentes, les mesures visant à assurer la

 22   défense, les mesures macro économiques, les mesures de nature micro

 23   économiques et les mesures visant à assurer la fourniture des services

 24   normalement du ressort des gouvernements. J'ai donc examiné ces différentes

 25   mesures et je les ai groupées en fonction des critères qui sont

 26   habituellement adoptés par les économistes comme ça est indiqué au dernier

 27   élément, dernier point de cette planche.

 28   Q.  Entendu. Je comprends qu'il y a  un certain nombre de documents que

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  1   vous souhaiteriez que nous examinions. Je crois que le premier d'entre eux

  2   est le 1D 03000 qui est cité dans votre rapport, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui. Il s'agit d'une décision prise par la municipalité de Ljubuski

  4   portant établissement d'une Commission chargée de définir le taux de change

  5   du dinar yougoslave par rapport aux autres devises. Cela est une fonction

  6   qui revient normalement à la banque centrale.

  7   Q.  Nous voyons qu'il s'agit d'une mesure du 24 avril 1992, c'est plutôt

  8   tôt, n'est-ce pas ?

  9   R.  En effet.

 10   Q.  Document suivant alors le 1D 00786.

 11   R.  Oui. Il s'agit d'une décision de la cellule de Crise de la municipalité

 12   de Jablanica. Je voudrais ici préciser qu'il s'agit d'un nouveau document

 13   qui n'a pas été cité dans mon rapport. J'ai reçu ce document le week-end

 14   dernier en me préparant. Il s'agit d'une décision du 13 mai 1992 visant à

 15   former un groupe de travail afin de rédiger tous les documents nécessaires

 16   permettant de surmonter les problèmes apparus dans le fonctionnement du

 17   système de transaction et du système fiscal et en matière de politique

 18   monétaire. Là encore, nous voyons que les mesures prises dans l'une des

 19   communautés locales, celle de Jablanica sont des mesures qui suppléent à

 20   des fonctions pries normalement en charge par l'Etat.

 21   Q.  Entendu. Maintenant si nous passons au document suivant dont je crois

 22   également qu'il s'agit d'un nouveau document que vous avez vu récemment. Il

 23   s'agit du 1D 02337.

 24   R.  Oui, il s'agit d'un document du 7 juillet émis par la municipalité de

 25   Siroki Brijeg, ayant trait au contrôle des mouvements de marchandises sur

 26   le territoire de la municipalité. Dans l'article 1, il est dit que le

 27   contrôle de l'entrée et la sortie des marchandises, de toutes les

 28   marchandises sur la zone de la municipalité de Siroki Brijeg entrent dans

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  1   le champ du service d'Inspection compétent avec l'assistance de la police

  2   civile et militaire. Cela signifie que la municipalité de Siroki Brijeg

  3   établit des points de contrôle afin d'assurer le contrôle de la zone

  4   économique qui est la sienne. Il s'agit d'un nouveau document mais c'est

  5   l'un de ces nouveaux documents qui m'ont été fournis le week-end dernier et

  6   qui confirme que nous avons là affaire à l'une de ces mesures

  7   macroéconomiques classiques qu'une entité économique classique aurait à

  8   prendre.

  9   Q.  Entendu. Passons au document suivant, 1D 02523.

 10   R.  Encore une fois, il s'agit d'un document émanant de la municipalité de

 11   Siroki Brijeg daté du 27 octobre 1992. Il y est question des taux de

 12   change. Ces taux de change sont définis, et dans l'article 3, il est dit

 13   que, pour les paiements effectués en marks allemands, le taux de change

 14   doit être fixé au dessus du taux qui était à l'époque celui fixé par la

 15   Banque nationale de Croatie pour le taux de change entre le deutsche mark

 16   et le dinar croate. Il est recommandé un taux de 5, supérieur. Là encore,

 17   il s'agit d'une mesure qui relève normalement de l'Etat et qui est prise à

 18   l'échelle de la communication locale.

 19   Q.  Entendu, document suivant, 1D 02984. Là encore il s'agit d'un nouveau

 20   document.

 21   R.  En effet, c'est un document émanant d'une autre municipalité, lorsque

 22   j'ai achevé ce report, j'ai reçu une véritable montagne de documents mais

 23   ce document-ci, je l'ai lu le week-end dernier. Il s'agit d'un document

 24   dont l'article 2 définit un taux unique de taxation et de prélèvement se

 25   montant à 80.6 % des paiements nets en argent liquide et en nature. Donc

 26   nous voyons ici qu'il s'agit de définir les ressources fiscales prélevées

 27   sur des paiements que ce soit en liquidité ou en nature. Nous voyons à

 28   l'article 4 qu'il s'agit ici d'assurer les ressources pour les fonctions

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  1   qui normalement échoient à un gouvernement central, un gouvernement central

  2   d'un Etat que ce soit en matière d'éducation, de santé ou autres.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, j'ai

  4   une question d'ordre technique. Est-ce que ces documents sont sur votre

  5   liste 65 ter.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, laissons.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, en effet, mais seulement

  8   certains d'entre eux ne sont pas --

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Ils sont nouveaux pour M. Cvikl.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais ce n'est pas le cas pour nous.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] En effet, je vous remercie d'avoir soulevé

 12   ce point.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation]

 17   Q.  Maintenant à l'article 4 que vous venez juste commenter, nous avons ici

 18   un exemple de ce que vous évoquez au sujet des para fonds, des fonds

 19   parafiscaux.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  e document suivant, 1D 03018.

 22   R.  Oui, il s'agit d'un document daté du 27 octobre 1993, émanant de la

 23   municipalité de Travnik. Travnik était dans une situation très difficile à

 24   la mi-1993, et avait établi un programme. Je voudrais attirer votre

 25   attention sur les points 3 et les points 3 et 6 de ce programme. Donc le

 26   point 3 concerne la définition du taux de change du dinar. Cela se trouve à

 27   la page 1D 070654, 1D 57-0654, on voit que cette municipalité a décidé quel

 28   devrait être le taux de change pour les mener convertible. Ce qui est

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  1   intéressant c'est qu'elle définit le taux de change brut entre le deutsche

  2   mark et le dollar, mais évidemment définir qu'un deutsche mark devrait

  3   valoir 100,000 dinars bosniaques. Deuxièmement, je voudrais aussi

  4   mentionner au point 6 qui concerne les affaires courantes.

  5   Donc au point 6, la municipalité a entrepris ce que j'appellerais de

  6   prendre des mesures économiques mais la conclusion se trouve en page 1D 57-

  7   0655 et l'on y voit qu'une certaine requête émanant d'une usine d'allumette

  8   a reçu une réponse favorable. Il est dit que cette usine devrait opérer

  9   selon telle et telle condition. Il s'agit là encore d'une mesure typique de

 10   l'Etat qui est aussi prise dans les circonstances de la guerre par la

 11   communauté locale.

 12   Q.  Vous devez ralentir un tout petit peu, s'il vous plaît. Je

 13   voudrais également m'assurer que le compte rendu d'audience est correct.

 14   Quels sont les chiffres auxquels vous vous référez ?

 15   La dernière partie que vous avez mentionnée au point 8, je crois, les

 16   affaires courantes, paragraphe 8 et vous avez évoqué cette section-là,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui. C'est exact puisque ce document ne comprend pas de pagination,

 19   j'ai utilisé les indications qui se trouvent à l'angle intérieur droit.

 20   Q.  Entendu. Si nous passons au document suivant 1D 0 --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document qu'on vient de voir il a un intérêt

 22   parce que ce n'est pas un document qui émane du HVO mais c'est un document

 23   qui émane d'une municipalité sous contrôle des Musulmans puisque Travnik

 24   est -- fait partie de la Bosnie-Herzégovine sous contrôle donc Musulmans.

 25   Quand nous constatons le contenu de ce document, on se rend compte que la

 26   municipalité musulmane fait exactement comme la municipalité croate à

 27   savoir l'intervention sur le taux de change et également sur l'appareil

 28   économique puisqu'on voit, par exemple, des fixations de prix concernant

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  1   l'huile, et d'autres produits : le sucre, le café, et cetera.

  2   Est-ce que vous vous étiez rendu compte que c'était une municipalité de

  3   l'autre camp ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai examiné l'ensemble de ces

  5   documents et notamment ceux relatifs à Tuzla pour lequel je savais bien

  6   qu'il s'agissait d'une municipalité sous contrôle musulman, j'ai d'abord

  7   été surpris de la similarité entre les mesures prises lorsque j'ai reçu ces

  8   documents de Travnik confirmant encore une fois qu'en Bosnie centrale la

  9   situation, une situation analogue s'était présentée et que des mesures

 10   semblables avaient été prises à Jablanica. Cela n'a fait que confirmer les

 11   conclusions qui étaient les miennes après avoir examiné toute la

 12   documentation et avoir eu les discussions que j'ai pu avoir. Ce qui

 13   mettrait donc qu'indépendamment du fait qu'il s'agissait d'une zone à

 14   majorité musulmane ou croate, les mesures prises avaient été similaires.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation]

 16   Q.  Si nous passons au document suivant qui est le 1D 02977, émanant encore

 17   une fois de Travnik ?

 18   R.  Oui. Ici je voudrais signaler qu'il y a eu une réunion du conseil

 19   exécutif de la municipalité de Travnik. L'ordre du jour indique la date du

 20   20 décembre 1993. Et je voudrais revenir sur deux points de cet ordre du

 21   jour. Au numéro 5, les débats concernant le programme de mesures portant

 22   sur un système de collecte des recettes plus efficaces et le numéro 8, les

 23   affaires courantes.

 24   Q.  Entendu. Procédons page par page.

 25   R.  Je voudrais que nous passions d'abord à la page 4 puisque ce document

 26   est paginé. A la page 4, il y a une section 85 et au milieu, nous trouvons

 27   les conclusions suivantes : les programmes de mesures visant à un collecte

 28   plus efficace des recettes et par la présente à adopter.

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  1   Au point 2, le comité exécutif par la présente charge

  2   l'administration municipale des revenus de préparer une liste des

  3   obligations en cours et cela a été demandé suite en tant qu'obligation

  4   suite au décret qui avait été pris concernant les communautés

  5   sociopolitiques. Mais je voudrais aussi passer à la page 5.

  6   Q.  Auparavant, soyons très prudent. Vous avez fait référence à une loi,

  7   celle que nous avons déjà vue ?

  8   R.  Oui. Décret de loi portant application de la loi de financement des

  9   organisations générales sociales. C'était le document 1D 02047.

 10   Q.  Donc est-ce que nous avons ici un exemple de municipalité qui prend des

 11   mesures soit en vertu des nouveaux pouvoirs qui lui ont été conférés; c'est

 12   ça ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Partie suivante.

 15   La partie suivante, c'est vrai on nous engueule un peu là parce que nous

 16   nous sommes chevauchés.

 17   R.  Oui.

 18   Prenons la page 5 de ce document 1D 02977. A la page 5, bas de fin de cette

 19   page, nous trouvons les conclusions et qui parlent du traitement des

 20   factures. C'est intéressant cette conclusion, très intéressant parce

 21   qu'elle résulte d'une situation difficile. La conclusion a été adoptée

 22   disant que la recommandation de la succursale du SDK de Travnik accepte par

 23   la présente de prendre en charge les factures de Bosnie-Herzégovine dans

 24   les dénominations suivantes 10, 25, 50, et 100 dinars de Bosnie-Herzégovine

 25   à concurrence de 28,000 unités de 100, 2 millions 800,000. Ce sont donc 2

 26   millions 800,000 dinars.

 27   On voit en total 45,000 unités qui représentent 3 millions 300,000

 28   dinars qui suffiraient pour effectuer les paiements des retraites à

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  1   verser."

  2   Donc il semblerait qu'on créé de l'argent dans la municipalité de

  3   Travnik pour payer les retraites.

  4   Q.  Un instant parce que nous voulons être sûr que nous avons bien compris.

  5   Quand vous dites : créer de l'argent, qu'est-ce que vous voulez dire ?

  6   R.  A l'évidence, ils avaient des dinars papier mais ils vont leur donner

  7   une valeur supérieure pour être sûr que les retraites sont payées.

  8   Q.  Mais c'est la fonction de qui ?

  9   R.  Normalement c'est une fonction qu'assume la banque centrale.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Moi aussi, j'ai trébuché sur ce

 11   terme en anglais quand on dit traiter "process bills;" qu'est-ce qu'on veut

 12   dire ici par "process" en anglais ? Est-ce que c'est imprimé ? Vous voulez

 13   dire qu'on a simplement émis un cachet et qu'on l'a apposé sur des

 14   factures. C'est ça ? Et qu'on a dit que ça valait 100 et qu'on en a fait

 15   28,000. Est-ce que vous avez une idée de ce qui s'est fait en pratique ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Voici comment je comprends les choses. C'est

 17   ce qui se fait en temps général en temps d'inflation. On va en fait donner

 18   plus de valeur aux factures, aux --

 19   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûre s'il s'agit de factures ou de

 20   billets de banque. Normalement c'est facture.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Prenez le haut de la page 6. On y trouve une

 22   déclaration du comité exécutif qui dit ceci, je cite : "Le comité exécutif

 23   a averti une fois de plus que le service des postes, les téléphones, les

 24   services publics, la compagnie de l'électricité de Travnik, que ces

 25   sociétés doivent accepter ou doivent payer, ou réunir leurs droits en

 26   acceptant des factures."

 27   Vous voyez, qu'ici on ne faisait pas confiance au niveau des

 28   entreprises des collectivités locales aux factures en dinar, ce qui veut

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  1   dire que le comité exécutif dit qu'effectivement même la compagnie de

  2   l'électricité de Travnik n'accepte pas ces factures dinar. Nous sommes ici

  3   en pleine inflation, hyper inflation, au milieu de l'année 1993, et c'est

  4   pour ça que je vous parlais de confiance. C'est pour ça qu'on peut dire que

  5   la banque centrale ne contrôlait pas cet endroit.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être que la traduction que nous

  7   avons ici sur papier n'est pas les meilleures. Pour vous, qu'est-ce que ça

  8   veut dire, est-ce que ça veut dire que les services des PTT sont avertis

  9   qu'ils ne doivent pas accepter des factures en dinar ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. On leur dit qu'il faut qu'elles

 11   acceptent. Avant, ces services n'acceptaient pas les factures en dinar.

 12   Donc le comité exécutif leur dit que lorsqu'on va percevoir les droits il

 13   faut accepter les factures en dinar.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation]

 16   Q.  Effectivement, je pense qu'il y a une précision à apporter suite à une

 17   des questions posées par le Juge Trechsel. Vous disiez qu'on donnait une

 18   valeur supérieure à l'argent en y posant une estampille. Est-ce que vous

 19   pourriez utiliser ce nouvel argent dans une autre municipalité, et quelle

 20   serait sa valeur à ce moment-là, la valeur que cet argent avait à Travnik,

 21   la valeur qu'avait donnée la municipalité de Travnik ?

 22   R.  Sans doute que non, parce qu'on prend que la valeur nominale. Mais si

 23   ce billet porte l'estampille de la municipalité de Travnik pour dire que ce

 24   n'est pas 1 000 dinars, mais 10 000, il se peut que Tuzla n'accepte pas.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Un instant, il y a un problème de traduction. Le

 26   terme "bill" en anglais, a été traduit par "facture". J'ai un doute. Je me

 27   demande si cet article ne fait pas référence à du papier monnaie, parce que

 28   si la facture est libellée en dinar BH, à ce moment-là par quelle opération

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  1   miraculeuse la facture se trouve transformée au niveau des montants ? Est-

  2   ce les billets de banque qui passent à une valeur faciale plus importante,

  3   ou les factures émises par les postes ou n'importe quelle compagnie ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je suis quelqu'un d'une banque centrale.

  5   En américain, on parle de bill pour le dollar américain. Mais en Europe on

  6   parle de la "Bank note".

  7   M. KARNAVAS : [interprétation]

  8   Q.  Il ne faut pas faire la confusion avec "bill" étant facture.

  9   R.  Oui, c'est pour ça qu'ici quand on dit "bill" il faut lire "bank note."

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voyez bien que j'ai bien fait d'intervenir.

 11   Donc ici "bill", il faut le comprendre comme "bank note," comme "argent" ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait. Oui, je vois en croate qui est

 13   dit -- enfin, excusez-moi, je lis le croate, je devrais dire le B/C/S, et

 14   c'est "novcanica", et "novcanica" c'est bien un billet de banque.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation]

 16   Q.  Le document suivant, 1D 02980. J'espère que nous pourrions terminer

 17   rapidement l'examen des quatre derniers documents.

 18   R.  Il s'agit d'une décision de la municipalité de Tuzla qui veut établir

 19   des commerces hors taxe de façon à faire venir davantage de marchandises

 20   sur le territoire. C'est précisé à l'article 1 et à l'article 2 ainsi que

 21   l'article 3 de ce document 1D 02984.

 22   Q.  Est-ce que normalement c'est une fonction qui est du ressort des

 23   municipalités ou de l'Etat ?

 24   R.  Normalement c'est le ministère des Finances de l'Etat qui s'en charge.

 25   Q.  1D 002444 [comme interprété], nous sommes toujours à la municipalité de

 26   Tuzla.

 27   R.  Ordre de décembre 1992 émis par l'assemblée de Tuzla pour dire qu'il

 28   faut payer les taxes de guerre en devise étrangère ou tout paiement

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  1   obligatoire. La collectivité locale de Tuzla ne faisait pas confiance aux

  2   dinars de Bosnie-Herzégovine, qui était déjà sorti à l'époque, je pense.

  3   Ici au premier article, on dit que : "Toutes les entités, toutes les

  4   personnes légales et juridiques sont obligées de payer une certaine somme

  5   d'argent en devise étrangère. Qu'on planifie de taxe de guerre ou impôt de

  6   guerre, 20 % de cette taxe est payée. Ici, on devrait payer en devise

  7   étrangère ou si on paie en espèce, à ce moment-là la taxe serait de 15 %",

  8   comme le dit le troisième paragraphe de ce premier article.

  9   Q.  On voit à l'article 2, qui prévoie quelques exemptions.

 10   R.  Oui. Exemptions à l'article 2. Même en cas d'importation de

 11   marchandises qui devraient être remises au directoire du rationnement, là,

 12   à ce moment-là c'est exempt de taxe.

 13   Q.  Fort bien. Par rapport au premier article, vous venez de décrire les

 14   activités, est-ce que normalement elles sont, disons, du ressort de l'Etat

 15   ou est-ce que c'est normal que ce soit une municipalité qui s'en charge ?

 16   R.  Normalement, c'est quelque chose qui relève du pouvoir de l'Etat. Mais

 17   ceci a été fait vu les conditions de guerre, ce sont les autorités locales

 18   elles-mêmes qui s'en chargent. Et j'en ai parlé avec la présidence, j'ai

 19   demandé pourquoi la présidence l'avait fait, parce qu'on pourrait croire à

 20   première vue que ceci peut servir aux profiteurs, ceux qui profitent de la

 21   guerre.

 22   Q.  Vous avez discuté avec qui ?

 23   R.  Avec le ministre Beslagic quand je suis allé en Bosnie-Herzégovine le

 24   20 décembre 2007. Je l'ai rencontré --

 25   Q.  Et quelles étaient ses fonctions à l'époque ?

 26   R.  M. Beslagic est celui qui est en fait l'auteur de ce document qu'il a

 27   émis en décembre 1992, et pendant ma visite j'ai demandé la raison d'être

 28   de cet ordre, il m'a expliqué ceci : pour faire venir des biens, des

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  1   marchandises dans le pays, dans la communauté locale de Tuzla, il avait

  2   aussi encouragé, stimulé les activités des négociants, il avait prélevé

  3   cette taxe spéciale de 20 % pour la communauté.

  4   Q.  Document suivant, 1D 03021.

  5   R.  C'est une décision du conseil de la Défense croate de Grude, on dit le

  6   23 août 1993, qui définit en son article 2 que les obligations matérielles

  7   incombant aux citoyens de Grude qui travaillent à l'étranger seront

  8   établies, et il s'agit ici de personnes qui sont titulaires d'un visa

  9   permanent, et c'est fixé à 200 marks allemands pour les hommes, et à 100

 10   pour les femmes, en d'autres termes, on a imposé une obligation fiscale aux

 11   citoyens de façon à financer les besoins du projet et de la municipalité de

 12   Grude.

 13   Q.  Dernier document concernant cette planche, 1D 03019. Je pense qu'ici

 14   c'est Zenica qui est concerné.

 15   R.  Oui, c'était un nouveau document. On a la date du 13 septembre 1993, et

 16   ce document concerne la fourniture de moyens permettant d'acquérir des

 17   moyens matériels techniques répondant aux besoins des forces armées de la

 18   République de Bosnie-Herzégovine. Article 4, il est dit que les obligations

 19   des entreprises privées seront définies en fonction du type d'activités

 20   économiques officielles pour ces activités qui constituent la majorité des

 21   activités, et on dit qu'il faudrait payer 1 000 ou 2 000 ou 4 000 marks

 22   d'une taxe spéciale afin de répondre aux besoins de ces municipalités.

 23   Q.  C'est important pourquoi ?

 24   R.  Parce qu'en fait ici on a pris des mesures destinées à percevoir des

 25   fonds, des crédits demandés aux entreprises privées pour répondre aux

 26   besoins de la municipalité de Zenica. Là aussi, normalement c'est une

 27   fonction qui revient à l'état et qui est ici entre les mains des

 28   entreprises des collectivités locales.

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  1   Q.  Est-ce que, ici, ce sont des exemples illustratifs, n'est-ce pas, des

  2   documents que vous avez examinés pour parvenir ou qui vous font parvenir

  3   aux conclusions qu'on trouve à la planche 27 ?

  4   R.  Tout à fait. C'est là en bas de planche que j'explique quelles sont les

  5   mesures prises, puis vous avez à la planche 28 -- Q.  On ne va pas examiner

  6   la planche 28 parce qu'on n'aura pas le temps. Je voulais simplement

  7   terminer la planche 27.

  8   R.  Cette planche, je vous montre les types de mesures destinées à soutenir

  9   l'effort de défense, à lancer des mesures économiques pour mieux contrôler

 10   les recettes fiscales, pour prendre le rôle que joue normalement la banque

 11   centrale, puis les mesures microéconomiques pour soutenir le secteur

 12   économique qui normalement sont autant de prérogatives de l'état. Alors

 13   qu'ici, effectivement, c'est le fait des collectivités locales.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Le moment se prête parfaitement à la fin de

 15   l'audience. Je pense que nous pourrons aborder un nouveau sujet demain.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, vous avez utilisé deux heures et 17

 17   minutes, donc je vous donne ceci pour votre information.

 18   Monsieur le Témoin, vous reviendrez demain pour l'audience à 14 heures 15,

 19   puisque nous sommes d'après-midi. D'ici là, bien entendu, aucun contact

 20   avec quiconque, y compris la presse pour faire part de vos commentaires sur

 21   les questions et réponses. Voilà ce que je tenais à vous dire.

 22   Je souhaite à tout le monde une bonne soirée, et j'aurai le plaisir de vous

 23   revoir demain à 14 heures 15.

 24   --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mardi 13 janvier

 25   2009 à 14 heures 15.

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