Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 25 février 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Prlic est absent]

  5   [L'accusé Petkovic est absent]

  6   [L'accusé Coric est absent]

  7   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  8   --- L'audience est ouverte à 14 heures 13.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

 10   l'affaire, s'il vous plaît.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Bonjour aux Juges. Bonjour à

 12   toutes les personnes en dehors du prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-04-

 13   74-T, le bureau du Procureur contre Prlic et consorts.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue M. Stojic, M. Praljak et M. Pusic. Je salue

 15   également Mmes et MM. les Avocats. Je salue M. le Témoin et tous les

 16   membres du bureau du Procureur, sans oublier toutes les personnes qui nous

 17   aident. Tout d'abord, une courte décision orale concernant la demande

 18   d'ajout de la pièce 2D 2018 sur la liste 65 ter G.

 19   Bon, la Défense Stojic a formulé, le 23 février 2009, une demande

 20   d'ajout sur la liste 65 ter de cette pièce. L'Accusation a répondu

 21   oralement qu'elle ne faisait pas d'objection. La Chambre note que la

 22   Défense Stojic n'a pas suffisamment argumenté sur le caractère essentiel de

 23   la pièce en application de la ligne directrice numéro 8 de la décision du

 24   24 avril 2008.

 25   Néanmoins, et à titre exceptionnel, ou pour les motifs portant sur

 26   l'analyse prima facie de la pièce, la Chambre estime qu'il est dans

 27   l'intérêt de la justice d'autoriser le rajout de cette pièce à la liste 65

 28   ter G de la Défense Stojic. Bon. Donc cette pièce est rajoutée à la liste

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  1   65 ter G.

  2   Deuxième décision orale concernant la demande de temps pour l'Accusation

  3   afin de contre-interroger le témoin ici présent dans le cadre de la venue

  4   de ce témoin selon la procédure 92 ter. La Chambre maintient sa décision

  5   orale qu'elle avait rendue en la matière en indiquant que l'Accusation aura

  6   30 minutes pour contre-interroger ce témoin. Voilà.

  7   Monsieur le Greffier, je crois que vous avez quelques numéros IC à nous

  8   donner.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Un certain nombre de parties ont

 10   donné des listes de documents à faire verser à travers Bruno Pinjuh. Tout

 11   d'abord, la liste fournie par 2D recevra la cote IC 00930. Pour ce qui est

 12   de l'Accusation, il s'agira de la pièce IC 00931. La liste des objections

 13   fournie par l'Accusation recevra la cote IC 00932. Merci.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vous demande de vous lever.

 15   Pouvez-vous nous donner votre nom, prénom et date de naissance, s'il vous

 16   plaît.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je salue toutes les

 18   personnes présentes dans le prétoire. Je m'appelle Ante Kvesic. Je suis né

 19   le 26 mai 1962.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession ou qualité actuelle ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis médecin chirurgien, et dans le même

 22   temps, je dirige la clinique de Mostar. Ça fait déjà sept ans que j'occupe

 23   ce poste.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal ou  bien

 25   c'est la première fois que vous témoignez sur les faits s'étant déroulés

 26   dans l'ex-Yougoslavie ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je me trouve dans

 28   ce Tribunal.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  3   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   LE TÉMOIN : ANTE KVESIC [Assermenté]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Docteur. Vous pouvez vous asseoir.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà quelques brèves explications. Me Nozica a déjà

  9   -- vous allez devoir répondre à des questions que va vous poser Me Nozica.

 10   Après quoi, le Procureur vous contre-interrogera, mais il se peut que

 11   d'autres avocats également vous contre-interrogeront. Les Juges qui sont

 12   devant vous pourront, le cas échéant, vous poser des questions. Après cette

 13   première phase, il y aura une seconde phase qui est liée à une procédure 92

 14   ter intentée par la Défense du général Praljak. Me Kovacic vous posera

 15   quelques questions, et après quoi, le cas échéant, les autres avocats

 16   auront peut-être quelques courtes questions à vous poser, et le Procureur

 17   aura 30 minutes pour vous contre-interroger. Nous allons faire en sorte de

 18   ne pas perdre votre temps parce que nous savons que vous avez des

 19   responsabilités, que vous ne pouvez être là qu'aujourd'hui et que donc nous

 20   allons faire le maximum pour que votre audition se termine aujourd'hui.

 21   Je compte, évidemment, sur les diligences des uns et des autres pour

 22   que nous puissions terminer avec vous aujourd'hui.

 23   Maître Nozica, je vous donne tout de suite la parole.

 24   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à

 25   toutes les personnes présentes dans le prétoire. 

 26   Interrogatoire principal par Mme Nozica :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Kvesic.

 28   R.  Bonjour.

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  1   Q.  Je vous prierais de passer en revue le plus rapidement possible votre

  2   biographie depuis vos années à l'université jusqu'à a période actuelle à

  3   laquelle vous travaillez dans cette clinique à Mostar. Pouvez-vous dire aux

  4   Juges de la Chambre quand vous avez terminé vos études de médecine ?

  5   R.  En 1988, à Rijeka.

  6   Q.  Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre où vous avez été employé en

  7   premier ?

  8   R.  C'était en 1989, début novembre, et j'ai commencé à travailler à Siroki

  9   Brijeg, au dispensaire scolaire de Siroki Brijeg.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire jusqu'à quand vous avez exercé cette fonction au

 11   centre de soins ou au dispensaire scolaire de Siroki Brijeg ? Si j'ai bien

 12   compris vous étiez simple médecin.

 13   R.  Oui, j'étais médecin généraliste et j'avais affaire à des patients qui

 14   étaient des élèves. J'étais de permanence aussi parfois aux urgences, et

 15   cela a duré jusqu'à environ 1991. Après, ce sont les événements de la

 16   guerre qui sont survenus, et cela a influencé le cours de ma vie et je suis

 17   passé à des fonctions qui étaient partiellement militaires. Je suis devenu

 18   finalement médecin militaire, mais en même temps je m'occupais, à cause des

 19   blessés qui arrivaient, je m'occupais d'eux et j'étais en fait une sorte de

 20   mélange de différentes fonctions. J'étais médecin militaire, mais pas

 21   uniquement.

 22   Q. Est-ce quelque chose s'est passé en 1992 au centre de soins de Siroki

 23   Brijeg et est-ce que vous avez pris de nouvelles fonctions ?

 24   R.  Il y a eu un bombardement de la JNA en avril 1992, et nous avons eu

 25   beaucoup de blessés et de morts ces jours-là. C'est alors que cette

 26   institution est devenue à moitié civile et à moitié militaire d'une

 27   certaine façon. Nous sommes devenus une installation médicale de guerre. Je

 28   ne me rappelle pas exactement de la date, mais c'était en avril 1992 que je

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  1   suis devenu directeur de ces services médicaux. C'est alors que ma façon de

  2   travailler a changé, puisque la priorité, l'accent a été tout

  3   particulièrement mis sur les blessés et les soldats. Cela a duré jusqu'à la

  4   fin du mois de septembre.

  5   Q.  Monsieur Kvesic, indépendamment du fait que je tiens compte du temps

  6   dont nous disposons, je vais vous prier de parler plus lentement pour que

  7   tout puisse être versé au compte rendu d'audience.

  8   R.  Entendu.

  9   Q.  Alors vous nous dites que cela a duré jusqu'au mois de septembre 1992,

 10   mais qu'est-ce qui s'est passé alors ?

 11   R.  Le 29 septembre 1992, conformément à l'ordre du Dr Ivan Bagaric et de

 12   la décision du président de l'Herceg-Bosna, M. Mate Boban, j'ai été

 13   transféré à l'hôpital régional de Mostar. Je me suis rendu à Mostar et je

 14   suis devenu commandant de cet hôpital de guerre régional de Mostar.

 15   Q.  C'était une proposition de M. Bagaric ou c'était un ordre ?

 16   R.  C'était une proposition conforme à la décision du président Mate Boban.

 17   J'ai alors eu les documents établissant que j'avais été nommé commandant de

 18   cette institution et je me suis rendu à Mostar.

 19   Q.  Jusqu'à quand restez-vous dans cet établissement, dans cet hôpital de

 20   Mostar ?

 21   R.  Bien, en tant que commandant militaire de cet hôpital de guerre de

 22   Mostar, je suis là-bas jusqu'au 20 janvier 1994. D'une certaine façon, j'y

 23   suis toujours. C'est à ce moment-là, le 20 janvier 1994, que par la

 24   décision du gouvernement de la HZ HB, cet hôpital a été rebaptisé clinique

 25   de Mostar, qui était alors en gestation. Nous avons continué à fonctionner

 26   pendant les années de guerre comme un hôpital civil. Nous avons continué à

 27   traiter des patients qui n'étaient pas des soldats. Mais à partir de cette

 28   date-là, nous nous efforçons de repasser dans un fonctionnement civil, dans

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  1   un fonctionnement propre au temps de paix.

  2   Bien entendu -- c'est Vlado Soljic, qui était ministre de la Défense

  3   à l'époque, et une partie du personnel de l'hôpital, il s'agissait de 150

  4   personnes à peu près qui étaient en charge de parc automobile, mais aussi

  5   du département de la Chirurgie, qui se sont mobilisés pour couvrir le

  6   terrain; en ce qui concerne le personnel chirurgical, les équipes de

  7   chirurgiens, et d'assurer les services nécessaires.

  8   Q.  Je voudrais simplement vous demander de répéter un nom pour qu'il soit

  9   versé au compte rendu d'audience. Quand est-ce que ces événements ont eu

 10   lieu ?

 11   R.  Le 20 janvier 1994, l'hôpital devient hôpital ou clinique en

 12   constitution, en gestation. Je ne suis pas sûr que cela ait été le cas

 13   exactement au même moment, mais c'est le ministre Vladimir Soljic, qui

 14   prend une décision relative à ces personnels de l'hôpital. Il s'agissait

 15   d'environ 150 personnes. 

 16   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Comme les interprètes, je voudrais

 17   vous demander, Docteur Kvesic, de même que Mme Nozica, de ralentir. Je

 18   voudrais également vous demander de faire une pause entre la question et la

 19   réponse afin que l'interprétation soit faite de manière convenable vers les

 20   différentes langues. Donc je vous demanderais de bien vouloir respecter ces

 21   quelques consignes.

 22   Mme NOZICA : [interprétation]

 23   Q.  Vous avez cité cette dates du 20 janvier 1994. Quelle était votre

 24   fonction au sein de cet hôpital à cette date-là ?

 25   R.  Jusqu'au 20 janvier 1994, j'ai exercé la fonction de commandant de

 26   l'hôpital régional de guerre de Mostar. A partir de cette date-là, un

 27   projet démarre en cet hôpital afin de mettre en place une direction civile.

 28   Cela a été fait sur une période de plusieurs mois aux termes de laquelle

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  1   c'est le Dr Zoran Rebac,  chirurgien lui aussi, qui est devenu directeur

  2   civil de cet hôpital. Alors que ma fonction au sein de l'hôpital était de

  3   présider le conseil d'administration de la clinique de Mostar. Il me semble

  4   avoir exercé cela au cours de deux mandats. Entre-temps, je suis aussi

  5   parti à Rijeka me spécialiser en chirurgie pédiatrique.

  6   Q.  Dites-moi quand exactement vous partez vous spécialiser en chirurgie

  7   pédiatrique à Rijeka et quelle est la période correspondant à cette

  8   spécialisation ?

  9   R.  La première partie, je l'ai faite à Mostar, alors qu'en janvier 1995,

 10   je me suis rendu à Rijeka pour poursuivre cette spécialisation à l'hôpital

 11   pédiatrique de Rijeka à Kantrida.

 12   Q.  Jusqu'à quand y restez-vous ?

 13   R.  Jusqu'en 1998, année où j'ai passé l'examen correspondant qui m'a

 14   permis de travailler comme chirurgien spécialisé en pédiatrie à l'hôpital,

 15   de prendre en charge mes fonctions aussi à l'hôpital pédiatrique de Mostar.

 16   Q.  Est-ce qu'après 1998, vous avez exercé d'autres fonctions, et cela

 17   jusqu'en 2001 à peu près ?

 18   R.  Parallèlement à cette spécialisation --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous vois poser des questions qui pour moi n'ont

 20   aucun intérêt. Vous avez juste une heure. Je vois qu'il y a beaucoup de

 21   documents. Allez à l'essentiel, parce que savoir ce qu'il a fait en 1998,

 22   c'est secondaire par rapport à ce qui s'est passé en 1992 et 1993.

 23   Mme NOZICA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie.

 24   Je tiens compte de votre remarque, mais pour moi, il était important, aux

 25   fins de la crédibilité du témoin, de mentionner le fait qu'il a exercé en

 26   chirurgie pédiatrique, qu'il s'est acquitté d'un certain nombre d'autres

 27   fonctions et de tâches et qu'il a été chef du département de la Chirurgie à

 28   la faculté de Médecine.

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  1   Q.  Dites-nous, Monsieur Kvesic, quand est apparu l'hôpital régional de

  2   Mostar ? Nous parlons ici de cet hôpital qui nous intéresse pour la période

  3   de 1992 et 1993 ?

  4   R.  C'est par une décision de l'assemblée municipale de la ville de Mostar,

  5   il me semble que c'était au mois de mai 1992, par cette décision l'hôpital

  6   de Mostar a été déclaré hôpital de guerre. A cette époque, le Dr Milenko

  7   Lugonja a été nommé commandant de cet hôpital militaire de Mostar.

  8   Au mois de septembre, je répète fin septembre 1992, et sur proposition de

  9   l'assistant du ministre de la Défense, M. Ivan Bagaric, le président de la

 10   HZ HB, Mate Boban, m'a nommé en tant que commandant de l'hôpital régional

 11   de guerre de Mostar. C'est à ce moment-là aussi que l'hôpital a été

 12   rebaptisé ainsi, l'hôpital régional de guerre de Mostar.

 13   Q.  Après la création du département de la Défense du HVO de la HZ HB,

 14   avez-vous connaissance du secteur dans lequel cet hôpital régional de

 15   Mostar exerçait ses activités, le secteur dont il dépendait ?

 16   R.  L'hôpital régional de Mostar était rattaché au secteur de la santé

 17   dirigé par le Dr Ivan Bagaric.

 18   Q.  Monsieur Kvesic, au cours du récolement, nous avons discuté de

 19   l'organisation interne du département de la Défense, tout spécialement du

 20   secteur de la santé. Vous avez dit qu'en ce qui concernait cette

 21   organisation, ce n'était pas un domaine que vous compreniez bien, que ces

 22   critères et dispositions juridiques vous étaient quelque peu étrangères.

 23   Nous allons donc sauter le premier document de mon classeur, qui est le

 24   P 02477 - j'espère que vous avez ce classeur auprès de vous - et nous

 25   allons regarder le document suivant. Je demande à M. l'Huissier de vous

 26   assister.

 27   Je voudrais que nous passions au document suivant, le P 3355.

 28   Monsieur Kvesic, il s'agit d'un rapport d'activités du département de

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  1   la Défense pour la période s'étendant de janvier à juin 1993. Je vous prie

  2   de vous reporter à la page 26 dans la version croate, ce qui correspond à

  3   la page 23 en version anglaise. Dites-moi simplement lorsque vous aurez

  4   retrouvé cette page.

  5   R.  Oui, je suis à la page 26.

  6   Q.  Très bien. Alors, c'est ici que commence le rapport d'activités pour la

  7   période mentionnée et correspondant au secteur de la santé, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Il s'agissait du secteur dont dépendait également votre hôpital, comme

 10   nous avons évoqué précédemment, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Regardez la page suivante, page 27, qui correspond à la page 24 en

 13   version anglaise, Il y est dit :

 14   "Dans le cadre du secteur de la santé, l'état-major principal pour les

 15   services médicaux, le service de Soins aux blessés, le service de Contrôle

 16   et d'Inspection, leurs sous services sont actifs."

 17   Etait-ce bien ainsi ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Selon votre meilleur souvenir que vous en avez, c'est ainsi que cela

 20   fonctionnait ?

 21   R.  Oui, on peut le dire ainsi.

 22   Q.  Passez maintenant à la page 36, s'il vous plaît; en version anglaise,

 23   c'est la page 35. Dans le cadre du service de soins aux blessés --

 24   R.  Excusez-moi, je ne pense pas avoir retrouvé la bonne page. J'ai la page

 25   33, puis 37. Il y a peut-être une confusion dans les pages.

 26   Q.  Alors, est-ce que vous pouvez vous reporter, dans ce cas-là, vous

 27   reportez à l'écran. Consultez le document dans sa version électronique

 28   devant vous. Nous avons donc ici le service de soins aux blessés. Est-ce

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  1   que votre hôpital dépendait de ce service ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  En page suivante, page 36, ce qui correspond à la page anglaise numéro

  4   35 - vous allez maintenant la voir s'afficher - nous avons, je cite :

  5   "Mostar, l'hôpital de guerre, fonctionne dans le cadre du centre médical

  6   régional et se trouve à Bijeli Brijeg, qui est rattaché à la réserve." Est-

  7   ce bien l'hôpital dont vous avez parlé ?

  8   R.  Oui. Il était situé à cinq endroits différents en ville. C'est pourquoi

  9   nous avons un bâtiment de réserve qui vient juste d'être achevé. A cette

 10   époque-là, un seul bâtiment était en  fonctionnement. Pendant les

 11   événements de la guerre, nous avions un service de Chirurgie dans deux

 12   endroits, dans le vieux bâtiment en ville et aussi à Bijeli Brijeg dans le

 13   nouvel hôpital de réserve.

 14   Q.  Je vous prie de passer maintenant à la page 37, et le temps que vous le

 15   retrouviez, c'est la page 36 en version anglaise, je vais vous lire un

 16   extrait.

 17   Dans la période couverte par ce rapport, à savoir janvier à juin

 18   1993, il est dit, je cite :

 19   "Le personnel musulman fuit l'hôpital régional de Mostar et nous en

 20   appelons à une interdiction de ce type de comportement. Nous demandons

 21   qu'il soit interdit au personnel médical de partir. Le personnel

 22   chirurgical a été réduit au minimum. Nous recevons l'aide d'une équipe de

 23   Zagreb. A Mostar, nous avons perdu 12 véhicules médicaux, un chauffeur a

 24   été tué et quatre autres ont été blessés."

 25   Monsieur Kvesic, est-ce que la situation correspondait à ce qui est décrit

 26   dans ce rapport ?

 27   R.  Oui, cela est exact. En fait, la situation était même pire encore, mais

 28   les faits qui sont ici rapportés sont exacts. S'il faut des

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  1   éclaircissements, je peux vous les fournir.

  2   Q.  Je vous en prie, allez-y.

  3   R.  Peut-être aux fins d'une meilleure compréhension de la situation dans

  4   son ensemble, l'hôpital de Mostar, avant la guerre, et je compte ici

  5   également le centre de soins, il y avait environ 1 150 employés. Au moment

  6   où j'y suis arrivé, je n'ai trouvé que 385 personnes qui étaient encore à

  7   leur poste à l'hôpital, et cela, en cinq lieux différents, et il était tout

  8   simplement impossible de bien organiser le travail et le fonctionnement des

  9   services. Il s'agissait donc d'une période très étrange. Il n'y avait pas

 10   que des Musulmans qui fuyaient. Il y avait aussi des Croates et des Serbes.

 11   Ceux qui avaient des enfants fuyaient. Je voudrais juste vous donner une

 12   image, une courte anecdote pour ne pas perdre de temps. A l'époque, Mostar

 13   était une ville tellement vide qu'en une année je n'ai vu pratiquement que

 14   cinq ou six véhicules transporter des personnes pour qu'elles puissent se

 15   rendre à leur travail, de Mostar à Siroki Brijeg. Les seuls autres

 16   véhicules étaient des véhicules militaires qui transportaient des soldats.

 17   Q.  Monsieur Kvesic, oui, je voulais vous demander cela pour commencer. Il

 18   n'y avait pas assez de personnel indépendamment des questions

 19   d'appartenance ethnique, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, indépendamment des questions d'appartenance ethnique. A titre

 21   d'exemple, cet hôpital, qui avait deux ailes consacrées à la chirurgie, à

 22   un moment donné s'est retrouvé avec un seul anesthésiste qui était

 23   d'appartenance ethnique musulmane.

 24   Q.  Très bien. Nous allons y revenir.

 25   Mme NOZICA : [interprétation] Mais je voudrais que vous vous reportiez aux

 26   documents relatifs à ce que vous avez déjà évoqué, qui est le 1D 00544.

 27   C'est le document suivant et il devrait se trouver immédiatement derrière

 28   celui que nous venons d'examiner.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi. L'anesthésiste qui était

  2   musulman, je présume qu'il est resté là pendant toute la durée du conflit ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non seulement pendant ces années-là, mais

  4   aujourd'hui encore il y travaille. Si je peux juste préciser, nous avions

  5   de l'aide qui nous était parvenue en provenance de différents hôpitaux; il

  6   s'agissait d'équipes de chirurgiens. Autrement, nous n'aurions pas pu

  7   fonctionner du tout. Vous verrez à partir des documents qu'il y avait

  8   plusieurs milliers de blessés à l'hôpital à cette époque-là.

  9   Mme NOZICA : [interprétation]

 10   Q.  Avez-vous retrouvé le document ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Très bien. Alors dans ce document, nous avons une conclusion proclamant

 13   l'hôpital de Mostar hôpital de guerre datée du 21 mai 1992 et signée par

 14   Jadranko Topic, président du HVO municipal de Mostar. Cette proclamation

 15   intervient avant la création du département de la Défense, n'est-ce pas,

 16   donc le 21 mai 1992, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Document suivant, s'il vous plaît, c'est le 2D 0218. C'est le document

 19   suivant dans votre classeur. Nous allons examiner les documents dans

 20   l'ordre où ils sont placés. Il s'agit de la nomination, le 6 juin 1993, du

 21   Dr Milenko Lugonja, nomination à un poste de commandant de l'hôpital de

 22   guerre. Vous avez dit que c'était M. Mate Boban, le président de la HZ HB,

 23   qui l'avait nommé, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui. Enfin, il a été nommé par le conseil municipal de Mostar, et cette

 25   nomination a été confirmée par M. Boban après que Mostar ait été libérée.

 26   Il me semble que c'était le 5 juin que nous sommes entrés dans Mostar.

 27   Q.  Très bien. Monsieur Kvesic, je voudrais que nous revenions à cette

 28   période qui est après que vous avez été nommé commandant de l'hôpital de

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  1   guerre. Expliquez aux Juges de la Chambre si vous avez participé à la

  2   rédaction d'un certain nombre de dispositions ou de textes en collaboration

  3   avec d'autres employés de l'hôpital. Est-ce qu'il y avait eu des actions de

  4   ce type, avez-vous eu des tentatives de réglementer un certain nombre de

  5   choses dans le contexte chaotique des événements de guerre ?

  6   R.  La situation à l'hôpital et dans la ville, en général, était absolument

  7   dramatique, chaotique. C'était une véritable décomposition de l'ensemble du

  8   fonctionnement des institutions et des services civils. Le système de santé

  9   ne fonctionnait plus du tout, et nous avons essayé de sauver ce qui pouvait

 10   encore l'être. Nous avons essayé d'organiser la vie et le fonctionnement de

 11   l'hôpital afin que les personnes qui étaient le plus durement touchées

 12   puissent être secourues dans notre hôpital.

 13   La situation, d'un point de vue épidémiologique, était également très

 14   préoccupante. Les institutions ne fonctionnaient pas, et par

 15   l'intermédiaire du secteur de la santé, et conjointement avec le Dr Bagaric

 16   et Dr Curic, avec donc d'autres institutions, nous avons essayé de mettre

 17   au point une circulaire indiquant comment les gens devaient être pris en

 18   charge afin qu'ils ne causent pas des contaminations et des épidémies.

 19   C'est une des tentatives qui ont été les nôtres afin d'essayer d'améliorer

 20   la situation. Vous ne devez pas oublier qu'à l'époque, nous ne disposions

 21   que de très peu de personnel suffisamment formé aussi bien dans mon secteur

 22   que dans d'autres.

 23   Je vous prie de m'excuser à cause de la vitesse. Je me laisse quelque

 24   peu emporter.

 25   Q.  Oui, mais je vous prie simplement de ralentir un peu. Nous avons

 26   suffisamment de temps pour ce que nous avons de prévu.

 27   Alors nous parlons du document 2D 00923, n'est-ce pas ? Monsieur le Témoin,

 28   c'est cette circulaire générale concernant les soins de santé à apporter

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  1   aux personnes réfugiées et déplacées ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Seulement un instant, je vous prie.

  4   Vous dites qu'il s'agit d'un texte auquel vous avez travaillé conjointement

  5   avec le Dr Curic, le Dr Bagaric ?

  6   R.  Le Dr Sarac aussi.

  7   Q.  Le Dr Sarac, vous avez dit qu'il s'agissait d'une tentative --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne vous trompez pas de numéro, ce n'est pas

  9   plutôt 2D 2019 ?

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Je m'excuse. Il s'agit du 2D 2019, oui. Merci

 11   Monsieur le Juge. 2019.

 12   Q.  Donc c'est le document que vous avez rédigé dans la -- dans une

 13   tentative d'aménager le domaine en question ?

 14   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ce courrier a circulé. Donc on le

 16   communiquait à tous ceux que nous avions pensé pouvoir trouver de l'utilité

 17   à ces instructions.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Si je puis vous aider, Monsieur le Président,

 19   il s'agit du 2D 00293. Il s'agissait -- il y avait deux documents dans la

 20   pièce, et nous avons séparé les pièces. Donc celui qui se trouve dans le

 21   classeur, c'est le 2D 1019. On peut le trouver sous ces numéros, mais à

 22   l'affichage électronique, le numéro est bon. C'est la raison pour laquelle

 23   on voit deux numéros apparaître, mais c'est bon.

 24   Q.  Monsieur Kvesic, est-ce qu'à l'hôpital régional de Mostar depuis votre

 25   arrivée, et ce qui nous intéresse justement c'est la période couvrant

 26   jusqu'à mi-1994, il y a eu des membres de groupes ethniques différents à

 27   travailler. Alors je vous demande de répondre lentement afin que nous

 28   puissions disposer de votre réponse complète au compte rendu.

Page 37401

  1   R.  C'est avec de la fierté et à haute voix que j'affirme que depuis que je

  2   suis arrivé à la -- aux fonctions de commandant de cet hôpital de guerre à

  3   ce jour, je n'ai jamais licencié personne parce que c'était un

  4   ressortissant d'un autre groupe ethnique. Toutes les personnes que j'avais

  5   trouvées à l'hôpital, à y être employées en 1992, sont restées à

  6   travailler, c'est-à-dire à occuper leur poste respectif.

  7   Malheureusement, il y a des personnes qui sont décédées entre-temps.

  8   Les autres sont toujours à l'hôpital. Ultérieurement, lorsque nous avons

  9   essayé de compléter les -- le personnel, parce que nous avons manqué de

 10   cadres, de personnel, le seul critère que je n'ai pas pris en considérant,

 11   c'était justement l'appartenance ethnique de certaines personnes. J'avais

 12   besoin d'un docteur, et je choisissais le docteur en question. Je ne

 13   voulais pas savoir de quel groupe ethnique il venait, et je le maintiens.

 14   Donc il n'y avait pas que les docteurs, il y avait aussi les infirmières.

 15   Q.  Monsieur Kvesic, est-ce, que pendant cette période de guerre en 1993,

 16   1994, vous avez embauché du personnel de tous les groupes ethniques ?

 17   R.  Absolument. Je vous répète, le critère lors de l'admission, ce n'était

 18   pas l'appartenance ethnique. Donc nous avions compté 385 personnes; à la

 19   fin de la guerre, nous étions à 800 - je n'en suis pas trop sûr, mais à peu

 20   près. Personne n'a été licencié parce que c'était un ressortissant de tel

 21   ou tel autre groupe ethnique.

 22   Je viens d'y penser en 1993, à peu près, suite à une proposition de

 23   la part de mon juriste, nous devions établir des listes, parce qu'il y

 24   avait beaucoup de gens à avoir quitté l'hôpital sans être réapparus;

 25   d'autres, certains ne sont jamais réapparus. En 1993, lorsque nous avons

 26   arrangé la documentation, j'ai signé une centaine de licenciements, et je

 27   suis certain que, parmi ces noms, il y a des noms croates, musulmans et

 28   serbes. Nous avons dû ranger la documentation  -- les fichiers du

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  1   personnel. Certains d'entre eux ont été réadmis une fois revenus à Mostar,

  2   et j'en connais des dizaines de cas de ce genre.

  3   Q.  Alors tirons les choses au clair. Fin 1993, vous dites que votre

  4   juriste vous a mis en garde concernant le fait que des personnes ne

  5   venaient pas au travail.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  En application de la réglementation en vigueur en Bosnie-Herzégovine,

  8   si quelqu'un ne vient pas au travail pendant un certain nombre de journées,

  9   il faut qu'il soit licencié, à moins que d'avoir justifié son absence.

 10   R.  La loi dit que - du moins c'est ce que j'ai pu comprendre - il fallait

 11   avoir cinq journées d'absence injustifiées. Mais là, il y a eu des mois où

 12   pendant lesquels physiquement les gens étaient absents. Nous n'avons pas

 13   touché à l'état des choses parce que nous voulions -- enfin, nous n'avions

 14   pas avec qui travailler donc, mais pour respecter la législation, nous

 15   avons dû remettre de l'ordre dans tout cela. Je précise que, depuis mon

 16   arrivée, pendant quelques mois, nous n'avons pas touché de salaire. Ce qui

 17   fait que, lorsque nous avons commencé à recevoir de l'argent, il a fallu

 18   que l'on distribue les salaires, et c'est la raison pour laquelle dans

 19   l'essentiel -- pour l'essentiel, nous avons procédé à un aménagement de la

 20   documentation.

 21   Q.  Professeur Kvesic, est-ce qu'à l'hôpital où vous avez travaillé, on a

 22   soigné tous les citoyens de Mostar ? En a-t-on amené encore de l'extérieur

 23   de Mostar indépendamment de leur appartenance ethnique ?

 24   R.  Absolument. Ça, absolument. Il n'y a eu aucune différence de fait pour

 25   ce qui est des soins administrés à l'intention de gens qui venaient à

 26   l'hôpital. Les portes étaient ouvertes pour tous, et on soignait

 27   pareillement tous ceux qui avaient besoin d'aide, tous -- et je puis dire

 28   que, pendant les pires des événements de guerre - et je crois que les Juges

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  1   de la Chambre disposent des protocoles de l'hôpital de La Haye de l'époque

  2   - nous n'avons indiqué que le nom, prénom et la date de naissance, ni

  3   l'appartenance ethnique, ni l'appartenance à telle unité ou a l'armée ou --

  4   en termes simples, l'hôpital avait ses portes ouvertes pour tous, autant

  5   que faire se pouvait. Dans le peu -- avec le peu d'effectifs que nous

  6   avions, nous nous sommes efforcés d'aider autant que faire se pouvait.

  7   Q.  Je vous demanderais maintenant de vous pencher sur le document dont

  8   nous avons déjà parlé, et ce, pour tout illustrer par des documents. Je me

  9   réfère au 2D 00968.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  C'est une liste des personnes réceptionnées pendant la guerre. Nous

 12   avons donc ici une liste de 23 noms. J'aimerais que vous puissiez

 13   commenter.

 14   R.  Nous étions très peu nombreux. Nous avions désespérément besoin de

 15   docteurs, et dès qu'il y en avait un qui faisait son apparition, à

 16   condition d'avoir le -- des qualifications nécessaires, nous l'embauchions

 17   tout de suite, sans concours d'embauche. La liste que nous avons ici, je

 18   peux vous la commenter en application des groupes ethniques ou avec

 19   références faites, et tout se passe ici jusqu'au 16 janvier 1995.

 20   Ljubic Bozo, c'est un Croate de Sarajevo; Pero Celina, Croate de

 21   Sarajevo; Benjamin Alfred Markin, c'est un Noir du Ghana, qui est venu et

 22   qui avait travaillé à Jajici.

 23   Q.  Mais ralentissez donc.

 24   Q.  Busic, Dr Ivan Busic, il est venu d'Osijek, lui, c'est un Croate;

 25   Klaric, Dr Miro, lui il est venu de Teslic, un Croate; et on ne voit pas sa

 26   femme, Branka Klaric, Serbe d'origine; on voit Dr Obradovic, Muhamed, il

 27   est radiologiste, c'est un Musulman; ensuite, Dr Dubravka Smajic, je crois

 28   qu'elle est Croate; ensuite, Gordan Galic, un Croate originaire de Tuzla;

Page 37405

  1   Nevenka Planinic, une docteure croate de Tovarnik; Sumanovic, Darinka,

  2   originaire de Djakovo, Croate d'origine; Dragan Divkovic, originaire de

  3   Tuzla, je ne sais pas quelle est son appartenance ethnique.

  4   Q.  Monsieur Kvesic, si vous le permettez, cela risque de nous prendre pas

  5   mal de temps et il me semble que cette liste en dit long pour ce qui est de

  6   la date d'arrivée et pour ce qui est des groupes ethniques. Vous nous avez

  7   indiqué qu'ils étaient de tous groupes ethniques confondus. Alors, qu'est-

  8   ce que signifie, entre parenthèses, admis à nouveau ?

  9   R.  Dans le premier des cas, cet homme est venu pour la première fois à

 10   Mostar et il a commencé à travailler. C'était un psychiatre, il avait

 11   changé d'avis pour des raisons familiales. Il est parti à Rijeka. Il n'a

 12   pas trouvé de travail et il est revenu. Donc dans la même année, on l'a

 13   embauché deux fois. Ensuite, la Dr Mira Besovic avait quitté l'hôpital

 14   avant la guerre puis elle est revenue, me semble-t-il, en 1994, et elle a

 15   été admise. Elle est musulmane, elle a continué à travailler de nos jours

 16   donc. Ce sont des personnes qui avaient travaillé, elles sont parties et

 17   nous les avons réembauchées parce que nous avions besoin d'elles.

 18   Q.  Fort bien. Penchons-nous donc sur le document suivant. 2D 00967. 2D

 19   00967. Il s'agit aussi d'un document qui nous indique que la structure

 20   ethnique des employés à la date du mois de juillet de --

 21   R.  1994.

 22   Q.  Oui, alors avant la guerre, la situation était inverse. Les événements

 23   de guerre ont amené les gens à s'en aller, certains vers Belgrade, certains

 24   vers l'Allemagne, d'autres vers la rive gauche de Neretva qui fonctionne

 25   encore, qui s'appelle l'hôpital de Safet Mujic. Donc on avait pris ce qu'il

 26   y avait sur le marché du travail. On avait embauché ce qu'on pouvait

 27   embaucher.

 28   Je rappelle à ceux qui ne le savaient pas, avant la guerre, en ex-

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  1   Yougoslavie, il y avait cette clé d'embauche qui était celle de

  2   l'appartenance ethnique. Désormais, elle n'existait plus. On s'est efforcé

  3   d'embaucher des gens de bonne qualité qui feraient leur travail pour le

  4   bien-être des patients.

  5   Q.  Pour qu'il n'y ait pas de confusion, vous nous indiquez qu'avant la

  6   guerre, il y avait cette clé ethnique et qu'il fallait y satisfaire avant

  7   la guerre et pendant la guerre, vous avez juste dit que vous cherchiez à

  8   embaucher du personnel --

  9   R.  Sachant travailler.

 10   Q.  Maintenant, vous êtes en train de vous pencher sur la qualité des

 11   cadres que vous embauchez, n'est-ce pas ?

 12   R.  Absolument.

 13   Q.  Alors ici, nous avons un petit tableau qui parle du nombre de personnes

 14   embauchées. Clinique, dispensaire, et cetera. On parle de la structure du

 15   personnel. On dit 152 Musulmans, 58 Serbes, 11 autres et 868 Croates,

 16   n'est-ce pas ? C'était la situation en 1994 ?

 17   R.  Un instant. Oui. C'est cela.

 18   Q.  Penchons-nous sur le document d'après.

 19    Mme NOZICA : [interprétation] 2D 00966.

 20   Q.  Il s'agit de renseignements issus d'un protocole relatif aux patients

 21   soignés. Nous avons ici deux groupes, et ce, il s'agissait -- il s'agit là

 22   de ressortissants du groupe bosnien -- d'ethnique bosnien. Là, nous avons

 23   deux catégories : ceux qui ont été soignés en dispensaire et ceux qui ont

 24   été alités à l'hôpital. Alors, on voit les chiffres par département. On

 25   voit la clinique, chirurgie, oncologie, et cetera.

 26   Alors, Monsieur Kvesic, veuillez indiquer aux Juges de la Chambre de quelle

 27   façon ces chiffres ont été recueillis, qui est-ce qui les a fournis et de

 28   quelle façon a-t-on déterminé quels sont les Bosniens qui ont été soignés

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  1   pendant cette période courant de 1993 à 1994.

  2   R.  Nous avons ici une liste de personnes que nous avons établie suite à

  3   une demande de notre part pour indiquer que l'on a soigné tous les autres,

  4   et on a pris l'exemple des Bosniens. Il s'agit ici d'un registre qui est

  5   établi à partir du registre unique de l'hôpital et il est donné de déduire,

  6   de par le nom et prénom de l'individu, qui était membre ou ressortissant du

  7   groupe ethnique bosnien. Donc il n'y avait pas d'autre façon de le faire

  8   parce qu'il n'y avait que le nom et prénom des personnes admises. C'était

  9   juste pour vous donner une image de l'ouverture de l'hôpital à l'égard de

 10   tout un chacun. J'estime que ces données sont des données techniques et non

 11   pas des renseignements substantiellement importants parce que dans les

 12   journées les plus difficiles, où il était difficile d'y arriver et même

 13   dangereux d'y arriver, l'hôpital est resté ouvert. Je n'ai rien inventé, ça

 14   c'était ainsi avant même que je n'y arrive.

 15   Q.  Fort bien. Je vous prie maintenant de vous pencher sur le 2D 00603.

 16   Puis on verra ensuite le 602. Mais je pense que vous avez cela dans des

 17   classeurs distincts.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Je demanderais l'assistance de M. l'Huissier.

 19   Q.  Nous allons expliquer aux Juges de la Chambre ce que nous avons sous

 20   les yeux à présent. Nous pouvons regarder les deux documents parallèles,

 21   alors 2D 602, les classeurs vont avoir toute leur importance mis côte à

 22   côte. Dans le protocole ou le registre, il est indiqué qu'il s'agit du

 23   registre des patients du département de neuro psychiatrie.

 24   Alors, Monsieur Kvesic, lorsque vous nous avez fourni des renseignements

 25   disant qu'à la neurologie psychiatrie, et ce, pour ce qui est de soins en

 26   dispensaire, et je me réfère au 2D 00966, ils étaient 814 patients du

 27   groupe ethnique bosnien. Pouvez-vous confirmer aux Juges de la Chambre que

 28   ceci est bel et bien l'un des protocoles de l'une des infirmeries ou de

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  1   l'un des dispensaires chargé de la neurologie et psychiatrie ?

  2   On le voit dans le 2D 603, en première page, et ça va du 12 mars 1993

  3   jusqu'à -- alors, je vous réfère, on va au document suivant, le 2D 602. Là,

  4   ce document, tout à la fin, porte la date du 14 mars 1995. C'est l'avant-

  5   dernière page.

  6   Alors, comme il y a eu un registre de tenu à jour, vous avez continué

  7   à tenir à jour le registre jusqu'en 1995. Je vous renvoie à l'avant-

  8   dernière page du 2D 00602.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Alors dites-nous, je vous prie, nous n'avons pas été en mesure de nous

 11   procurer tous les registres, mais tous ces registres, dissent-ils de nos

 12   jours encore à l'hôpital; est-ce qu'on peut procéder à des vérifications

 13   par département comme indiqué ici ?

 14   R.  Je suis absolument certain du fait que la liste que nous avons ici dans

 15   ce document 966 émane du protocole 602. Cela se rapporte au département de

 16   la neurologie et de la psychiatrie. Alors je vous rappelle d'autre part que

 17   les registres de l'hôpital complet et signé par mes soins existent dans ce

 18   Tribunal depuis un grand nombre d'années. Alors ne me posez pas de question

 19   précise, il me semble qu'il s'agit de 1995, pour le procès Naletilic et je

 20   ne sais qui. Donc il y a le protocole entier de cet hôpital de guerre

 21   depuis l'époque qui se trouve ici. La version originale, moi, je l'ai

 22   toujours chez moi. Elle peut être mise à disposition de tout un chacun pour

 23   vérification. J'affirme donc que le tableau que nous avons ici est tout à

 24   fait adéquat et provient du registre qui est en notre possession.

 25   Q.  Merci. Je vous renvoie maintenant au 2D 00965. Alors maintenant on voit

 26   la structure ethnique des employés à la date du 31 juillet 1993, pour ce

 27   qui est de la clinique de Mostar. On s'est penché tout à l'heure sur la

 28   structure ethnique mais c'était pour l'année 1994. Je vais vous le dire

Page 37409

  1   tout de suite, 31 juillet 1994. Or ici, on voit la situation à la date du

  2   31 juillet 1993. Alors il découlerait de ce tableau qu'au total dans tout

  3   le département de la clinique il y avait un total de 496 Croates, 171

  4   Musulmans, voire Bosniens, 66 Serbes et 14 personnes à s'être prononcé

  5   différemment.

  6   Alors, Monsieur Kvesic, est-ce que vous pouvez confirmer que ces

  7   renseignements sont exacts et que c'est vous, en collaboration avec vos

  8   référendaires dans les services du personnel qui avaient tout examiné pour

  9   recueillir ces données ?

 10   R.  Oui, je confirme absolument. Je ne puis que confirmer ce que j'ai fait

 11   comme commentaire tout à l'heure pour le tableau et que nous avons vu il y

 12   a quelques instants. C'est à peu près la même chose. Je vous rappelle que

 13   le 31 juillet 1993, nous avons 747 personnes à travailler pour nous et en

 14   1994, il y en a 1 089. Alors je ne suis pas certain, mais je crois que

 15   c'est les mêmes pourcentages qu'on a eus, et je n'ai jamais analysé à

 16   l'époque, je n'en analyse pas non plus à présent. Mais nous avons essayé de

 17   compléter les effectifs afin que l'hôpital puisse fonctionner normalement.

 18   C'est cela la finalité de ce que je cherche à vous démontrer et je veux par

 19   là, indiquer que nous n'avons pas eu recours à cette clé ethnique dans les

 20   embauches.

 21   Q.  Bien. Je vous réfère maintenant au 2D 00964. Il s'agit d'une liste

 22   d'employés de l'hôpital qui ont été tués pendant la guerre.

 23   R.  Oui, c'est la liste exacte, malheureusement.

 24   Q.  Se trouvent également sur cette liste, des ressortissants du groupe

 25   croate, bosnien, serbe ?

 26   R.  J'essaie de voir là, je ne pense pas qu'il n'y en eu, si Ivan Busic, il

 27   y a eu plusieurs Bosniens et plusieurs Croates, hélas.

 28   Q.  Monsieur Kvesic, partant des réponses que vous nous avez apportées,

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  1   nous avons pu apprendre que vous avez soigné tout patient à arriver chez

  2   vous indépendamment de son appartenance ethnique. Si quelqu'un était amené

  3   d'ailleurs, est-ce que cela était pareil, par exemple les membres de l'ABiH

  4   seraient venus à votre hôpital ont été traités indépendamment de toutes

  5   choses ?

  6   R.  Je répèterais à chaque fois que sans aucune exception nous avons soigné

  7   toutes les personnes qui ont été amenées à notre hôpital.

  8   Q.  Je vous réfère au 00971.

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes seraient gré au témoin de cesser de tousser

 10   dans le micro.

 11   Mme NOZICA : [interprétation]

 12   Q.  Avez-vous retrouvé ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  C'est daté du 19 mars -- 19 février 1994, c'est signé par Ivan Bagaric,

 15   et on dit qu'on vous communique, c'est joint une lettre qui nous est

 16   parvenue du CICR. Nous vous demandons de vous conformer au texte. Il a été

 17   convenu avec le directeur de l'hôpital à Mostar, Docteur Kvesic,

 18   d'acheminer les patients le lundi 21 février 1994 au département de

 19   médecine interne. Alors on vous mentionne, on voit la lettre jointe. On

 20   voit quelques noms et on vous demande de commenter. Malheureusement, il

 21   faut qu'on parle de l'appartenance ethnique de ces patients, et vous

 22   souvenez-vous s'ils ont été admis et alités de façon appropriée ?

 23   R.  Deux choses. A l'époque, compte tenu de la situation sur le terrain et

 24   compte tenu de l'impraticabilité des routes en raison des conflits, on

 25   savait que la FORPRONU, le CICR et les autres véhicules d'organisation

 26   humanitaire internationale acheminaient des personnes depuis les zones qui

 27   étaient dans le trouble. C'était la seule façon d'acheminer les gens. Alors

 28   je suis certain que ceci est exact. On peut vérifier dans le registre mais

Page 37411

  1   je ne l'ai pas fait. Je n'ai aucun doute à ce sujet. Alors pour ce qui est

  2   de la question que vous avez posée, nous au prénom Hasan Vasic, c'est sans

  3   aucun doute un Bosnien, ce sont des gens qui ont été reçus et soignés dans

  4   notre hôpital.

  5   Q.  Nous n'avons pas les noms au compte rendu mais on rectifiera

  6   ultérieurement.

  7   Monsieur je vous réfère au 2D 00566.

  8   R.  J'y suis, 2D 00566.

  9   Q.  Alors on dit qu'il s'agit du 10 septembre 1993, liste des membres de

 10   l'ABiH blessés, envoyés depuis l'hôpital de guerre du HVO de Mostar vers

 11   l'hôpital de Split. Alors, Monsieur Kvesic, ici, nous avons des noms de

 12   membres de l'ABiH, le document est signé par M. Sandrk. On voit dans ce

 13   document qu'il s'agit de membres de l'armée et qu'ils ont séjourné dans

 14   votre hôpital, et que, de là, ils ont été envoyés vers Split. Alors est-ce

 15   que vous pouvez dire, à l'intention des Juges de la Chambre, pourquoi ils

 16   ont été accueillis dans votre hôpital ? Savez-vous que cela s'est bel et

 17   bien passé et pourquoi les a-t-on envoyés vers Split ? Mais soyez lents

 18   afin que l'on consigne ma question ainsi que votre réponse. Vous pouvez y

 19   aller.

 20   R.  Cette liste est tout à fait exacte. Ce sont des gens qui ont été

 21   soignés dans notre hôpital, et en raison de leur état de santé, c'est-à-

 22   dire de la gravité de leurs blessures voire en raison de l'impossibilité

 23   que nous avions de prendre soin d'un aussi grand nombre de personnes,

 24   puisque nous n'avions pas suffisamment de cadre de personnel, nous avions

 25   des salles d'opération qui ont été endommagées du fait de pilonnage. Je ne

 26   sais pas si vous êtes allé à Mostar, mais les fenêtres étaient du côté de

 27   l'emplacement des conflits, c'était à deux rues plus loin. Donc nous nous

 28   sommes efforcés de garder aussi longtemps que faire se pourrait, on prenait

Page 37412

  1   soin d'eux, on intervenait chirurgicalement sur ce qu'il fallait faire dans

  2   l'immédiat, mais ils n'ont pas été les seuls. Nous avons envoyé beaucoup

  3   d'autres personnes à Split pour soins ultérieurs.

  4   Je signale donc que ce sont ici de personnes de façon fortuite qui

  5   étaient de cette origine-là, c'est le Dr Sandrk qui a organisé le

  6   transport. C'étaient des membres de l'ABiH, mais dans mes registres, on

  7   peut voir d'autres noms de Bosniens et autres groupes ethniques partis vers

  8   Split. Nous n'avons jamais eu de problème de ce type et l'hôpital de Split,

  9   Dieu merci, était ouvert pour tout groupe de patients.

 10   Q.  Attendez. Ralentissez un peu parce que nous voulons que sera consigné

 11   ce que vous dites.

 12   R.  L'hôpital de Split réceptionnait tous les patients et prenait soin

 13   d'eux sans exception aucune. C'est une expérience précieuse qui a été la

 14   nôtre. Ce sont des gens -- il y a eu des Médecins sans frontières qui

 15   étaient à notre hôpital de réserve, et nous n'avons jamais eu de problèmes

 16   mis à part quelques cas isolés.

 17   Par exemple, une infirmière qui était Musulmane -- qui est Musulmane et qui

 18   était enceinte et qui devait aller accoucher à Mostar. En raison de la

 19   façon dont le bébé était placé, il a fallu la transporter à Split pour

 20   quelle accouche là-bas. Comme elle n'avait pas de passeport, j'ai donné ma

 21   voiture et mon chauffeur pour la passer -- faire passer clandestinement

 22   jusqu'à Split et cette -- fait un travail de nos jours encore à l'hôpital.

 23   Son fils est à présent en deuxième année du secondaire. Donc on ne pouvait

 24   les envoyer que s'ils avaient un passeport, autrement c'était plus

 25   difficile.

 26   Donc nous avons une liste, par exemple, une liste d'Ibro, Camil,

 27   Senad et tout ça ce sont des prénoms musulmans. Alors chez -- à côté de

 28   certains, il y a AbiH, à côté d'autres, il n'y a rien d'autre enfin rien du

Page 37413

  1   tout. Mais pour nous, cela n'avait qu'aucune espèce d'importance à

  2   l'hôpital.

  3   Q.  Fort bien. 

  4   Monsieur Kvesic, j'ai encore trois documents que je souhaite vous montrer

  5   et je suppose qu'il me reste dix à 15 minutes. Penchez-vous donc sur le 2D

  6   00328.

  7   L'INTERPRÈTE : Les interprètes redemandent à ce que le témoin s'éloigne des

  8   micros lorsqu'il tousse.

  9   Mme NOZICA : [interprétation]

 10   Q.  Alors petite réponse brève, est-ce que, pour les besoins de votre

 11   hôpital, et ce, pour ce qui est de l'hôpital de Mostar Est, dans le courant

 12   de 1993 et 1994, aviez-vous envoyé des médicaments, du sang, du matériel

 13   médical ? Est-ce que ça s'est passé par le biais de l'UNHCR et quel a été

 14   votre coopération avec les médecins du côté est de Mostar ?

 15   R.  Le papier que j'ai entre les mains parle d'un transport de sang avec du

 16   matériel d'infusion vers l'hôpital créé, enfin transport effectué par la

 17   FORPRONU avec leurs véhicules à eux. Très souvent, mais véritablement très

 18   souvent, nous avons communiqué au fil de ces tristes années avec l'autre

 19   hôpital et l'inverse est tout aussi valable. Dans notre hôpital, nous

 20   avions eu un grand entrepôt de médicaments. C'est là qu'arrivaient toutes

 21   sortes de nations depuis tous les Etats du monde. Cet entrepôt était de

 22   libre accès.

 23   On distribuait les médicaments à ceux qui en avaient besoin. L'on

 24   tenait à jour un fichier pour ce qui est des entrées et sorties au même

 25   titre nous sommes restés sans stérilisateur pendant la guerre. C'est un

 26   appareil très important pour ce qui est du département de la Chirurgie et

 27   des dizaines de jours durant, nous avons envoyé le matériel à stériliser de

 28   l'autre côté vers la rive gauche donc pour -- 

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Il doit vous rester six minutes.

  2   Mme NOZICA : [interprétation] Je préférerais m'en tenir à ce que M. le Juge

  3   Trechsel m'avait indiqué, comme quoi j'avais huit minutes, mais je vais

  4   tenir compte, Monsieur le Président, de ce que vous m'indiquez, bien

  5   entendu.

  6   Q.  Monsieur Kvesic, excusez-moi. Vous avez commencé à parler des

  7   stérilisateurs. Je crois que nous sommes dans une course contre la montre à

  8   présent et je vous prierais donc d'en terminer avec cet aspect puis nous

  9   passerons à un autre document.

 10   R.  Je le répète c'est dans l'autre hôpital que nous procédions à la

 11   stérilisation de notre équipement. Je le répète, les hôpitaux ont toujours

 12   coopéré entre eux car, pendant toutes les malheureuses années de ces

 13   événements de guerre, c'est dans mon hôpital uniquement que nous avions

 14   l'équipement nécessaire pour procéder à des dialyses et tous les patients,

 15   qui en avaient besoin, venaient chez nous. Ceux qui provenaient de la rive

 16   gauche ne pouvaient pas être amenés donc ils ont dormi dans l'hôpital en

 17   permanence. Cela est visible d'ailleurs.

 18   Q.  Monsieur Kvesic, nous devons sauter un document à cause du temps dont

 19   nous disposons.

 20   Alors le document 2D 0003. Est-ce que vous pouvez expliquer aux Juges de la

 21   Chambre en quoi consistait cette opération Bura qui est cité dans ce

 22   rapport sanitaire du 8 novembre 1992. J'attire votre attention sur le fait

 23   que dans ce rapport on cite votre nom que vous vous êtes acquitté d'un

 24   certain nombre de tâches. Vous avez apporté du sang de Split et vous avez

 25   apporté votre assistance une fois revenue à Mostar près du vieux pont. Mais

 26   est-ce que vous pourriez nous dire en quoi consistait cette opération Bura

 27   et qui était en conflit avec qui en novembre 1992 ?

 28   R.  Bien. C'était une action conjointe des Serbes et des Croates avec des

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  1   résultats catastrophiques pour les deux parties.

  2   L'INTERPRÈTE : C'était des Croates et des Bosniens d'un côté contre les

  3   Serbes de l'autre. 

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu un très grand nombre de blessés des

  5   deux côtés. J'ai personnellement pris part à cette action de la façon

  6   suivante : c'est à ce moment-là que j'ai eu le plus peur pour ma propre

  7   vie. M. Vojic -- Goran Vojic m'a appelé à 9 heures du soir alors que

  8   j'étais, je participais à des festivités familiales et il m'a informé du

  9   fait que le lendemain matin c'était une opération -- cette opération Bura

 10   qui démarrait avec des milliers de soldats et il précisait qu'il n'avait

 11   que huit poches de sang. J'ai donc emprunté un véhicule de la police de

 12   Siroki Brijeg. Je ne pouvais pas prendre la mienne. J'ai appelé Mme

 13   l'infirmière en chef de l'hôpital de Split et je suis monté en voiture. Je

 14   suis parti à Split et j'ai prie auprès du Dr Herceg 200 poches de sang et

 15   je les ai emmenés au petit matin à Mostar.

 16   Sans avoir allumé mes phares, je suis entré par nuit noire à Mostar.

 17   Je suis donc allé livrer ces poches de sang et lorsque je suis rentré non

 18   pas à Bijeli Brijeg mais à Lovnica, parce que je n'ai pas osé revenir à mon

 19   bureau à Bijeli Brijeg, j'étais trempé de sueur et je pensais que j'allais

 20   mourir de peur. C'est là que j'ai allumé une cigarette et ensuite je suis

 21   revenu à mon travail et je pense que je n'oublierai jamais cette opération

 22   Bura.

 23   Q.  Monsieur Kvesic, vous avez dit qu'il s'agissait d'une opération

 24   conjointe de l'ABiH et du HVO qui a été menée contre les Serbes ?

 25   R.  Tout à fait.

 26   Q.  Est-ce qu'avant cette opération vous avez le souvenir que sur ce

 27   territoire et notamment à Mostar et au sud de Mostar, il y a eu des

 28   pilonnages et cela fréquemment de la part des forces serbes ?

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  1   R.  Il me semble qu'il n'est même pas nécessaire de le mentionner mais

  2   juste une anecdote en provenance de mon hôpital. Aujourd'hui encore on voit

  3   sur le vieux bâtiment du dispensaire, et sur le bâtiment du vieil hôpital,

  4   des centaines et des centaines d'impact de balles. On voit des trous dans

  5   la façade et nous étions pris pour cible. Des façades de l'hôpital montrent

  6   aujourd'hui encore et nous avons eu cette situation dans lesquels un obus

  7   est tombé dans une salle d'opération et nous avons eu beaucoup de chance

  8   car personne n'a été blessé pendant cette opération.

  9   Q.  Pour finir, Monsieur Kvesic, dites-nous simplement la chose suivante :

 10   nous avons vu les conditions dans lesquelles l'hôpital de Mostar Est

 11   fonctionnait. Pourriez-vous dire brièvement aux Juges de la Chambre les

 12   conditions dans lesquelles vous, vous avez travaillé ? Est-ce que votre

 13   chambre était approvisionnée régulièrement en eau, en électricité ? Est-ce

 14   qu'on disposait de salles d'opération fonctionnant normalement ? Quelles

 15   étaient les conditions de travail de votre hôpital en 1992 -- 1993, surtout

 16   et ce jusqu'en début 1994 ?

 17   R.  Nous avions deux sites de chirurgie donc dans le vieux bâtiment de la

 18   chirurgie qui est aujourd'hui est déménagé ailleurs. La situation était la

 19   suivante nous travaillons dans les couloirs, dans les caves de l'hôpital

 20   parfois même à ciel ouvert avec des lampes que l'on a menées, qui n'étaient

 21   pas des lampes suspendues, et c'est dans ces conditions-là que l'on

 22   opérait. C'était des conditions totalement improvisées. Vous avez vu dans

 23   les listes que 35 personnes de mon hôpital ont été blessées. Vous aviez la

 24   liste des morts et je crois qu'il n'est pas nécessaire ici de parler avec

 25   précision concernant les conditions de travail.

 26   Il est évident que, dans le nouveau bâtiment de Bijeli Brijeg, les

 27   conditions étaient meilleures. Il s'agissait d'un bâtiment neuf. C'est à

 28   l'époque qu'il avait été terminé. Concernant l'électricité, il allait très

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  1   souvent et cela la plupart du temps lorsque la situation était la plus

  2   critique. L'électricité était coupée, nous avions donc des groupes

  3   électrogènes, nous avions des réservoirs, des citernes, afin de pouvoir

  4   assure nos besoins. Nous avions une citerne d'eau qui était présente en

  5   permanence le cas d'un incendie devant l'hôpital. Nous étions par moment

  6   dans des conditions tout à fait effroyables à Mostar, je ne dirais pas que

  7   nous étions affamés parce que tout manquait à l'époque mais nous étions

  8   dans des -- nous manquions de tout à vrai dire.

  9   Mme NOZICA : [interprétation] Finalement, je voudrais demander l'aide de

 10   l'huissier un instant. Je voudrais informer les Juges de la Chambre que

 11   nous avons reçu hier seulement un document dont nous estimons qu'il est

 12   important. Je prierais, Monsieur l'Huissier, de le placer sur le

 13   rétroprojecteur.

 14   Nous avons préparé suffisamment d'exemplaires pour Messieurs les Juges. Il

 15   s'agit d'un journal dont nous avons eu connaissance hier. Il me semble

 16   qu'il s'agit de quelque chose s'assez significatif pour être mentionné. Il

 17   s'agit ici d'une grande récompense que la personne que nous avons en face

 18   de nous, le Dr Ante Kvesic a reçu. Il s'agit d'un prix -- il s'agit du

 19   numéro du 20 février 2009 et nous n'avons pas eu la possibilité d'inclure

 20   ce document. Nous demanderons le versement de ce document ultérieurement.

 21   Q.  Maintenant je voudrais demander au témoin, pour finir, alors nous avons

 22   donc reçu ce journal hier et je vais pour finir demander au témoin la chose

 23   suivante : je voudrais juste que cela soit versé au compte rendu. Je n'ai

 24   pas de problème avec l'objection de l'Accusation. Je voudrais juste

 25   demander la confirmation par le témoin.

 26   M. LONGONE : [interprétation] Oui, nous avons une objection. Nous apprenons

 27   qu'ils viennent de le recevoir cet article et ils étaient en train de

 28   changer leur liste aujourd'hui alors que nous n'avons eu aucune information

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  1   concernant ce document.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, il faut que je vous

  4   explique ce qui s'est passé. Il ne s'agit pas d'un nouveau document. Il

  5   s'agit d'un document que nous présentons au témoin afin qu'il nous confirme

  6   que c'est bien de lui qu'il s'agit. Nous proposerons le versement de ce

  7   document ultérieurement, bien sûr, il peut être accepté ou non.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, c'est pour moi personnellement un grand honneur de

  9   pouvoir vous poser la question suivante : vous avez donc reçu -- ce 20

 10   février 2009, vous avez reçu dans le cadre de ce magazine et avec le

 11   patronage de la télévision fédérale de la Bosnie-Herzégovine -- vous avez

 12   reçu ce prix de la personnalité de l'année. Vous avez été proclamé

 13   personnalité de l'année. Est-ce que vous pouvez confirmer cela et

 14   simplement expliquer aux Juges de la Chambre si les candidats, à ce titre

 15   prestigieux, comptaient parmi leurs rangs également des personnes d'autres

 16   appartenances ethniques en provenance de l'ensemble de la Fédération de

 17   Bosnie-Herzégovine ?

 18   R.  Vous me surprenez avec ce document. C'est tout à fait exact. La raison

 19   pour laquelle j'ai été candidat était l'existence d'un projet que mon

 20   équipe et moi-même avons achevé au bout de 18 ans de travail dans l'hôpital

 21   de Bijeli Brijeg, en espace de 18 000 mètres carrés, doté de nouveaux

 22   équipements ont été en fonctionnement et c'est un grand motif de fierté

 23   pour mon équipe et moi-même. En cette soirée, à Mostar, une vingtaine de

 24   personnes ont reçu différents prix. Ce prix -- ces prix comptaient parmi

 25   eux certains qui étaient décidés par les lecteurs. M. Tisic [phon] a été

 26   récompensé également le première ministre lui aussi.

 27   Q.  Alors donc votre travail est reconnu sur l'ensemble du territoire de la

 28   Bosnie-Herzégovine de nos jours et tout particulièrement par

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  1   l'intermédiaire de ce prix sur le territoire de la Fédération de BiH,

  2   n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, on pourrait le dire ainsi.

  4   Q.  Merci beaucoup pour vous réponses.

  5   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, cela conclut mon

  6   interrogatoire principal.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Docteur, juste une petite question.

  8   Je regardais le document P 2253 qui est la liste de tous les blessés tués

  9   qui a été établie le 10 mai 1993 par le secteur de la santé du département

 10   de la Défense. Je vois à la fin les chiffres 120, 162 soldats blessés, 21

 11   Musulmans, 45 civils blessés, 25 Musulmans, 24 soldats croates tués et deux

 12   soldats musulmans tués, et également 12 civils tués dont dix Musulmans.

 13   Puis il y a 11 corps non identifiés à la morgue de Bijeli Brijeg. Bon.

 14   Alors peut-être qu'il aurait été intéressant d'avoir également le même

 15   rapport à la fin de l'année 1993 puisque ça c'est le mois de mai.

 16   Mais ma question est la suivante : les Musulmans qui étaient blessés

 17   et qui étaient soignés dans votre hôpital, je prends, par exemple, les

 18   soldats, quand ils étaient conduits à votre hôpital ils étaient gardés par

 19   d'autres soldats, ou bien ils étaient considérés comme des simples malades

 20   ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Les patients -- les simples patients

 22   ordinaires, parmi eux, j'ai de nombreux exemples dans lesquels on voit que

 23   des membres du HVO et des membres de l'ABiH étaient traités côte à côte

 24   dans la même salle. Nous n'avions absolument aucun type de service de

 25   Sécurité et nous n'avions même pas de portier à l'époque dans les

 26   conditions de la guerre et l'on pouvait entrer très facilement dans

 27   l'hôpital. Il aurait peut-être été préférable que nous ayons pu exercer un

 28   contrôle minimum mais dans les faits l'hôpital était ouvert à tous.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- question complémentaire. Tout le

  2   monde sait comment fonctionne un hôpital soit pour avoir rendu des visites

  3   soit parce que avoir été soi-même hospitalisé, ces Musulmans qui étaient

  4   soignés dans cet hôpital régional, est-ce qu'ils recevaient des visites de

  5   leurs familles ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'avait aucune sorte d'interdiction. Alors

  7   je veux bien croire que certaines personnes n'ont pas été admises soit

  8   parce qu'elles venaient de trop loin, ou parce que cela aurait été

  9   dangereux. Mais je le répète, l'hôpital était absolument ouvert, nous

 10   n'avions aucun régime particulier qui aurait -- ou traitement particulier

 11   concernant tel ou tel groupe. Cela aurait été vraiment bien si la même

 12   chose avait pu être -- si le même fonctionnement avait pu être celui

 13   d'autres hôpitaux également. Nous avons essayé de sauver tous ceux qui

 14   pouvaient être sauvés.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro) -- dans quelques minutes, je n'ai pas

 16   besoin de nombreuses heures pour comprendre. J'ai été très surpris par le

 17   document de M. Topic qui fait de votre clinique à l'époque un hôpital de

 18   guerre. Pourquoi M. Topic intervient à là-dedans ? Ce n'était pas au

 19   département de la Défense de dire que c'était un hôpital de guerre; qu'est-

 20   ce que le président de la municipalité vient jouer ? Pourquoi il joue un

 21   rôle ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, au début de la guerre,

 23   la situation était telle que nous ne disposions pas d'une défense

 24   organisée. C'était les conseils municipaux qui étaient en charge de toutes

 25   les activités existantes. C'est Mostar qui était la localité la plus

 26   importante. Ce n'est qu'après que le département de la Défense et le

 27   secteur de la Santé sont apparus. Je pourrais ici formuler une hypothèse

 28   qui serait la suivante : c'est-à-dire que si le département de la Défense

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  1   avait déjà existé à l'époque, le Dr Rubinja [phon] n'aurait peut-être pas

  2   été nommé directeur. Tout simplement le conseil municipal était le seul qui

  3   fonctionnait et qui prenait des décisions selon sa propre conscience et

  4   selon les conditions telles qu'elle dictait la situation.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- maintenant les autres Défenses pour

  6   le contre-interrogatoire, des trois, y a-t-il des questions ?

  7   Maître Kovacic.

  8   M. KOVACIC : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président, nous

  9   n'avons pas de questions.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas de

 12   questions non plus, et nous remercions M. Kvesic d'être venu.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 14   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La

 15   Défense de M. Coric n'a pas de questions.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 17   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions. Merci, Monsieur

 18   le Président.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 20   Mme TOMANOVIC : [interprétation] La Défense Prlic n'a pas de questions pour

 21   ce témoin.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je pense que le mieux c'est qu'on fasse 20 minutes

 23   de pause et puis après, le Procureur fera son contre-interrogatoire.

 24   --- L'audience est suspendue à 15 heures 32.

 25   --- L'audience est reprise à 15 heures 53.

 26    M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.

 27   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste aux fins de

 28   meilleure planification, nous avons tenu compte de l'indication et du

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  1   conseil que vous avez donné, hier, nous avons pesé le pour et le contre,

  2   les différentes questions techniques et nous sommes parvenus à la

  3   conclusion que nous pouvons utiliser l'article 92 bis pour ce témoin. Comme

  4   nous n'avons pas assez de temps, il n'y aussi aucun intérêt à ajouter

  5   encore à la pression et à l'énervement. Donc je pense que ce serait la

  6   meilleure solution. Je vous remercie.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Bien. Monsieur le Procureur, vous avez la

  8   parole.

  9   Contre-interrogatoire par M. Longone :

 10   Q.  [interprétation] Bonjour Docteur. Je m'appelle Miguel Longone. Je vais

 11   faire le contre-interrogatoire pour le bureau du Procureur. Je voudrais

 12   commencer par vous montrer une vidéo qui a été utilisée avec un autre

 13   témoin, M. Thornberry ici dans ce prétoire. Il s'agit de la pièce P 04296.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   M. LONGONE : [interprétation]

 16   Q.  Merci beaucoup. Monsieur, de quel hôpital s'agit-il ? Quel est cet

 17   hôpital ?

 18   R.  C'était l'hôpital de Bijeli Brijeg où j'étais commandant, de 1992 en

 19   septembre jusqu'en 1994. Bijeli Brijeg était l'un des bâtiments de

 20   l'hôpital. 

 21   Q.  Monsieur, étiez-vous présent ? Cette vidéo date de 1993, M. Thornberry

 22   était présent, lors de la livraison des approvisionnements à cet hôpital;

 23   est-ce que vous étiez présent lors de cette livraison ?

 24   R.  Je n'ai pas remarqué ma propre modeste de présence dans ce bâtiment.

 25   Mais M. Bagaric et Dr Pandza, et Dr Simunovic, le Dr Simunovic qui était

 26   chirurgien de l'hôpital de guerre, étaient présents dans ces images. Je ne

 27   suis pas sûr de me rappeler l'endroit exact où je me trouvais. Ce jour-là,

 28   nous recevions très souvent de l'aide en provenance de différentes

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  1   institutions, de la FORPRONU, de CICR, et je dois ici souligner en raison

  2   de la situation qui prévalait, il y avait aussi l'organisation Merhamet.

  3   Mais je voudrais donc souligner le fait qu'à cause de la situation qui

  4   prévalait, nous recevions cette aide en médicament, en nourriture, en

  5   équipement, et je souhaite profiter de cette brève occasion pour exprimer

  6   mes remerciements à tous ceux qui nous ont aidés ainsi qu'à l'hôpital.

  7   Q.  Merci. Je prends note du fait que vous avez parlé de l'association

  8   Merhamet comme étant un des donateurs, donc l'hôpital HVO, à l'époque, et

  9   vous en avez parlé également de la décision que vous avez faite pour la

 10   Défense de M. Praljak. A l'époque, il s'agit du mois d'août 1993; est-ce

 11   que vous êtes rendu à l'hôpital à l'est de Mostar. Vous aviez dit que vous

 12   coopériez, est-ce que vous vous êtes rendu personnellement là-bas pour les

 13   assister ?

 14   R.  A cette époque-là, je n'étais pas chirurgien. J'avais que des tâches de

 15   direction, j'organisais les choses d'un point de vue logistique afin que

 16   l'hôpital puisse fonctionner. Je ne travaillais pas avec les patients en

 17   tant que médecin. Mais je me suis rendu à plusieurs reprises même assez

 18   souvent après les années de guerre donc dans l'hôpital de Mostar est.

 19   Aujourd'hui encore, je suis toujours ami avec de nombreuses personnes de

 20   cet hôpital, le ministre Omerovic et d'autres.

 21   Q.  Monsieur, vous avez dit que vous êtes rendu à l'hôpital au Mostar

 22   occidental, mais est-ce que vous vous êtes rendu en 1993, en Mostar

 23   oriental vers l'hôpital là-bas ?

 24   R.  Il me semble que c'était quand même en 1994, en 1993, cela a été très

 25   difficile sans l'aide de la FORPRONU et de leurs véhicules blindés. En

 26   1994, c'est avec l'aide des véhicules blindés de la FORPRONU que nous avons

 27   pu emmener notre matériel pour qu'il soit stérilisé. Mais je crois qu'en

 28   1993, c'était physiquement impossible et non pas en raison de mauvaises

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  1   relations entre les personnes, si vous voulez, c'était parce que cela était

  2   terriblement dangereux.

  3   Q.  -- beaucoup de temps. Pour revenir maintenant à la liste que vous avez

  4   préparée, contenant --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi suite à la vidéo. On

  6   vient de voir une vidéo, je n'ai pas entendu exactement le mois où, à votre

  7   hôpital, on livre tous ces médicaments. Mais par contre, j'ai été très

  8   impressionné par le fait qu'on voit dans le véhicule blindé tout le

  9   matériel, du matériel médical qui va être apporté à l'hôpital.

 10   En regardant cette vidéo, je me pose la question de savoir mais est-

 11   ce que la FORPRONU a fait de même avec l'hôpital de Mostar Est ? Parce que

 12   même si la situation à Mostar Est était très délicate, très difficile, avec

 13   le véhicule blindé, ils auraient pu aussi mettre des médicaments et

 14   ravitailler l'hôpital de Mostar Est qui était en grosse difficulté. Alors à

 15   votre connaissance, vos collègues de Mostar est ont-ils été ravitaillés par

 16   la FORPRONU ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions tous ravitaillés grâce à la

 18   FORPRONU et nous utilisions je le répète les véhicules de la FORPRONU afin

 19   de pouvoir transporter l'aide entre la FORPRONU et nous, dans les deux

 20   sens. A l'époque, c'était très dangereux et la FORPRONU et le CICR étaient

 21   les seuls à pouvoir franchir les barrières que nous avions nous-mêmes

 22   créées. Nous avons souvent utilisé leur service pour le transport de

 23   médicament, d'équipement, de nourriture.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne répondez pas à ma question qui était très

 25   précise. Je voulais savoir si l'hôpital de Mostar est avait été ravitaillé

 26   en médicaments, en plasma, en matériel chirurgical, en bombonnes de gaz, en

 27   oxygène, et cetera, c'est cela que je veux savoir. Alors vous le savez ou

 28   vous ne le savez pas ?

Page 37426

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai connaissance de plusieurs cas où c'est à

  2   partir de mon hôpital qu'on a envoyé du matériel médical, des solutions,

  3   différentes solutions et des poches de sang de mon hôpital à direction de

  4   l'autre. Cela n'est pas arrivé qu'une seule fois, et j'en suis tout à fait

  5   sûr. J'ai connaissance et je peux l'étayer par des documents de ce qui

  6   était envoyé à partir de mon -- l'hôpital. 

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Voila quelque chose d'important. A quelle période

  8   vous avez envoyé du matériel médical à l'hôpital de Mostar Est, et

  9   notamment des poches de sang ? C'est en 1993, 1994, quelle est la date

 10   exactement ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas mais j'ai vu dans les documents

 12   que nous avons examinés précédemment l'un de ces documents. Je ne sais pas

 13   à quelle date exactement mais nous pouvons sûrement le retrouver. J'ai tout

 14   à fait la certitude qu'il y a eu des dizaines d'envois de cette nature. Je

 15   ne peux pas maintenant vous dire peut-être quand cela s'est produit mais

 16   croyez-moi vous pouvez interroger à ce sujet le directeur actuel de cet

 17   hôpital qu'il n'y a pas eu de changements depuis. Nous utilisions le

 18   matériel qui était disponible dans les deux hôpitaux et à plusieurs

 19   reprises, des dizaines de reprises nous avons transporté aux moyens de

 20   camions du matériel.

 21   (expurgé)

 22   confirmer puisqu'il dirigeait tout cela. Il dispose de l'enregistrement,

 23   des registres complets de tout cela, de l'équipement et des médicaments qui

 24   ont été envoyés à l'autre hôpital.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien ce que vous envoyez à

 26   l'autre hôpital c'était mis dans les véhicules blindés de la FORPRONU, qui

 27   allaient les amener sur place ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. C'est ce que l'on faisait et

Page 37427

  1   c'était très fréquent.

  2   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission

  3   et aux fins des mesures de protection qui s'appliquent, je voudrais que

  4   l'on ne mentionne pas le (expurgé)

  5   (expurgé), s'il vous plaît. Nous ne

  6   l'avons pas encore au compte rendu d'audience mais il pourra peut-être

  7   apparaître plus tard c'est pour cela que je fais cette remarque. Je

  8   voudrais signaler au --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors c'est une ordonnance pour la page 29,

 10   ligne 23.

 11   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais apporter

 12   mon concours pour ce que le témoin vient juste de dire. Il faisait mention

 13   du document 2D 00328. La date est celle du 25 septembre 1993. Merci.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

 15   M. LONGONE : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur, nous avons parlé de ce document déjà avec le conseil de la

 17   Défense 2 -- 00966. Il s'agit de la liste des patients d'ethnicité

 18   musulmane que vous avez soignés. Vous avez préparé cette liste et vous avez

 19   confirmé au conseil de la Défense que c'était vous qui l'aviez préparé.

 20   Cette question s'est déjà posée ici. Est-ce que vous aviez la compétence

 21   pour mettre en place une liste de patients musulmans fiables basée sur

 22   leurs noms exclusivement ? Vous aviez confiance que votre liste était

 23   exacte et qu'il s'agissait effectivement de Musulmans ?

 24   R.  Je l'ai dit tout à fait clairement et je le répète. Il s'agit d'une

 25   liste des personnes que nous avons pu identifier de façon certaine à partir

 26   de leurs noms et de leurs prénoms. En pratique, cela signifie les choses

 27   suivantes : il est tout à fait possible qu'il y ait eu davantage de

 28   patients bosniens pour la simple raison que de nombreux bosniens portaient

Page 37428

  1   des noms à partir desquels il est impossible de distinguer s'ils sont

  2   Bosniens ou Croates, par exemple, Slatko, Demis, et cetera. 

  3   Alors ceux pour lesquels nous avons une certitude absolue, -- nous les

  4   avons placés dans cette liste et ces chiffres pour nous n'avaient aucune

  5   importance particulière. Mais ce que je peux vous garantir c'est que toutes

  6   ces personnes qui proviennent de nos registres étaient des Bosniens et je

  7   suis tout à fait sûr qu'il y en avait encore davantage.

  8   Q.  Merci. On va regarder une autre pièce qui avait déjà été vue par la

  9   Défense 2 -- 00965. Or on y voit que je ne sais pas si vous l'avez sous les

 10   yeux 2D 00965.

 11   R.  Oui je l'ai.

 12   Q.  On voit, par exemple, chirurgie. Il y a 20 chirurgiens qui étaient des

 13  Musulmans. Il s'agit du 1er juillet 1993. Il y a donc 20 Musulmans de Bosnie

 14   qui sont des chirurgiens et il y a -- et ils sont sous leur brigade

 15   anesthésique qui, selon vous, était une profession extrêmement importante à

 16   l'époque car vous aviez très peu d'anesthésie. Est-ce que vous le voyez ?

 17   R.  Oui. Juste une correction de ce qui a été cité de façon incorrecte, il

 18   ne s'agit pas ici de médecins mais de personnel employé dans le département

 19   de la Chirurgie. Donc parmi ces 51 Croates, il y a peut-être dix médecins

 20   et le reste ce sont des infirmières parmi ces 20 Bosniens qui sont donc

 21   employés c'est un chiffre global. Je ne sais pas combien il y a dans telle

 22   ou telle catégorie professionnelle.

 23   Je le répète au début des affrontements entre Croates et Musulmans,

 24   nous nous sommes retrouvés avec un seul anesthésiste, le médecin, Dr Selma

 25   Jakupovic. Ici ce qui y figure ce sont des techniciens et des assistants de

 26   l'anesthésiste qui, heureusement, étaient encore là. Malheureusement, ils

 27   ont été obligés de travailler de façon totalement indépendante, ce qui

 28   n'aurait pas dû être le cas. Aujourd'hui cela ne pourrait pas nous arriver

Page 37429

  1   mais, à l'époque, c'était ainsi que nous avons été obligés de fonctionner.

  2   Q.  Vous avez également parlé du fait qu'il s'agissait d'un Musulman de

  3   Bosnie, l'anesthésiste c'est ce que vous avez dit dans le cadre de votre

  4   témoignage aujourd'hui.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Si nous regardons ici le 1er juillet 1993, la majorité des membres du

  7   personnel dans votre hôpital étaient des Croates, d'après ce document que

  8   vous avez ici rédigé ?

  9   R.  Oui, la proportion est tout à fait claire.

 10   Q.  Dans l'autre liste qui date de 1994 que nous avons examinée, qui vous a

 11   été montrée par le conseil de la Défense, là aussi la majorité du personnel

 12   de l'hôpital de Mostar était des Croates. Il s'agit de Mostar occidental.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Il y a quelque chose que j'essaie de comprendre dans votre témoignage.

 15   Vous avez dit à la Défense aujourd'hui -- on nous a dit que le document que

 16   nous venons de voir n'allait pas être versé en 92 ter mais vous avez dit

 17   que, quand vous êtes arrivé à l'hôpital, il y avait 385 employés mais qu'à

 18   l'époque il y avait certainement une minorité de Croates. Est-ce que vous

 19   vous en souvenez ? Nous avons vu d'après la pièce P 0335 versée par

 20   l'Accusation que sous le ministère de la Défense, secteur de la santé et

 21   bien beaucoup de Musulmans de Bosnie qui travaillaient dans l'hôpital de

 22   Mostar occidental avaient fui. C'était un rapport qui datait de la première

 23   moitié de 1993, n'est-ce pas ?

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Seriez-vous d'accord pour dire qu'au début de 1992, quand il n'y avait

 26   pas encore de conflits entre les Musulmans et les Croates, il y avait une

 27   majorité de Musulmans de Bosnie qui travaillaient à l'hôpital qui se sont

 28   enfuis du fait de la guerre, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Bien. J'ai dit que le renseignement est exact. A l'arrivée à l'hôpital,

  2   j'avais 385 employés, 70 % à peu près mais j'ai les listes on peut vérifier

  3   c'était des noms croates. Alors qu'est-ce qui s'est passé ? Votre

  4   constatation disant qu'ils étaient partis en raison de la guerre, en partie

  5   je suis d'accord et en partie non. Voilà de quoi il s'agit.

  6   J'ai dit à tout le monde qu'il y avait 1 500 employés à l'hôpital. Vous

  7   imaginez un peu l'établissement. Lorsque je suis arrivé 385, donc c'était à

  8   30 %, moins de 30 %. Alors on a essayé de récupérer ceux qu'on pouvait

  9   récupérer, ceux qui avaient osé revenir en laissant leurs enfants ailleurs.

 10   Parce qu'à l'époque, les gens fuyaient vers dans toutes les directions, les

 11   Croates allaient à Split, Zagreb, les Bosniens allaient à Sarajevo, que

 12   sais-je encore, les Serbes allaient en Serbie ou dans la Republika Srpska.

 13   Enfin c'était terrible, on fuyait où on pouvait. Donc nous et les Bosniens,

 14   lorsque la guerre a commencé et enfin, on avait réussi entre-temps à faire

 15   revenir un certain nombre de personnes. Ceux qui sont à Safet Mujic ou à

 16   l'hôpital de côté, ils étaient chez nous à l'époque. Alors ce jour, il y a

 17   eu terriblement -- enfin, beaucoup de gens qui étaient partis. C'était

 18   terrible. Mais n'oubliez pas qu'eux, en raison du fait qu'il y avait eu des

 19   combats de rue, il fallait organiser des soins de santé à l'intention de

 20   leurs propres soldats. Moi, par exemple, j'ai révoqué Dzudza, Dzemal, le

 21   chef de la psychiatrie; c'est un Musulman, et j'ai mis un autre Musulman à

 22   sa place. Je n'étais pas ami avec Ramo [phon], lui il est parti de l'autre

 23   côté. Maintenant --

 24   Q.  Je suis désolé, je dois vous interrompre parce que nous avons des

 25   contraintes de temps, donc je vous demanderais de vous concentrer sur ma

 26   question. Ma question était de savoir : au début de 1993 vous avez dit très

 27   clairement dans la déclaration que vous avez faite que la minorité du

 28   personnel était des Croates et non pas des Musulmans. Il apparaît

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  1   clairement dans le rapport du secteur de la Santé --

  2   Mme NOZICA : [interprétation] Vous allez comprendre pourquoi je me lève

  3   pour faire objection. La déclaration faite par M. Praljak n'a pas été

  4   versée au dossier. Ça ne peut pas faire l'objet de ce contre-

  5   interrogatoire. L'objet de ce contre-interrogatoire ne peut être que

  6   l'interrogatoire principal qui a déjà été effectué.

  7   M. LONGONE : [aucune interprétation]

  8   Mme NOZICA : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Bien. Attendez.

 10   Monsieur le Témoin -- Maître Kovacic, asseyez-vous.

 11   Monsieur le Témoin, quand vous avez répondu au Procureur, parce que

 12   j'essaie de suivre attentivement pour ne pas faire d'erreur dans la

 13   compréhension, j'ai cru comprendre ceci. Si je ne me trompe, dites tout de

 14   suite que je me suis trompé et comme ça tout le monde gagnera du temps.

 15   J'ai cru comprendre que cet hôpital avait, avant que vous arriviez, avant,

 16   1 500 personnes, médecins, infirmiers, personnels --

 17   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : -- bien. Divers. Quand vous arrivez, vous, que 385,

 19   c'est-à-dire il y en a à peu près 1 200 qui sont partis. Dans les 385, à

 20   votre arrivée, je crois comprendre qu'il y a 70 % de Musulmans. Bon. Le

 21   nombre croate, musulman, serbe, je ne sais quoi, 70 %.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Oui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- et j'ai cru comprendre également que

 24   vous aviez dit qu'en raison des événements, d'autres personnes sont

 25   parties. Nous avons un document qui montre qu'à une certaine époque les

 26   chiffres étaient remontés et qu'à ce moment-là votre hôpital c'est le

 27   document qui est P -- qui est le 20 966, où il y a 496 personnes et que sur

 28   les 496 il y a 171 Musulmans. Donc entre votre arrivée et le moment où vous

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  1   faites ce document vous avez 100 personnes de plus. Mais là on se rend

  2   compte que les Musulmans ne sont plus que 25 %. 25 % enfin moins de 25 %,

  3   23 % par rapport aux chiffres de 496, ce qui veut donc dire qu'entre votre

  4   arrivée et le moment où vous faites ce document, il y a des Musulmans qui

  5   sont partis; est-ce bien la situation ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai présenté les choses telles qu'elles se

  7   sont produites. Je ne veux pas qu'on additionne les chiffres d'avant mon

  8   arrivée et le moment où on en a eu 486, parce qu'il y a eu deux ou trois

  9   processus entre-temps. Il y a eu une nouvelle guerre et un nouvel exode non

 10   seulement de Bosniens mais il y a aussi exode de Bosniens qui vont

 11   travailler dans un autre hôpital qui existe de nos jours encore, donc je

 12   vous le rappelle. La guerre a créé -- a généré un besoin, à savoir qu'ils

 13   aient, eux aussi, un hôpital, et nous, on a cherché qui embaucher. Donc il

 14   fallait qu'on ait des infirmiers, des techniciens, des médecins, des

 15   docteurs, et nous avons essayé de mettre en place l'organisation pour que

 16   ça fonctionne. Nous n'avons pas tenu compte du fait de savoir s'il y avait

 17   plus de Croates ou de Musulmans à être partis. Nous, on cherchait à

 18   compléter -- à embaucher à avoir des postes occupés. Nous n'avons pas

 19   compté 100 ici et 100 là-bas. Moi, je n'accepte pas cette mathématique

 20   parce qu'elle n'est pas exacte. On peut au final additionner combien il y

 21   avait de ceci ou de cela. Mais je le répète, et c'est -- cela peut être

 22   prouvé, j'ai tous les documents qu'il faut. Je n'ai jamais licenciée

 23   personne. La situation, la peur des gens avait fait fuir ces personnes pour

 24   qu'ils soient plus près de ceci ou de cela. Moi, je comprends le docteur

 25   bosnien qui est parti de l'autre côté vers l'autre hôpital parce qu'il y

 26   avait des Bosniens, et si, moi, j'étais Bosnien, je serais probablement

 27   parti moi aussi là-bas. C'est quelque chose qui s'est produit. C'est

 28   malheureusement ce qui s'est passé.

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  1   Ce n'était pas une décision aisée que d'abandonner son appartement

  2   d'un côté et aller d'un autre côté ou partir ailleurs en Croatie ou plus

  3   loin. C'est terrible. Alors je ne veux pas que l'on dise que la cause était

  4   le commandement ou une stratégie quelconque qui visait à garder les Croates

  5   et faire partir les Bosniens. J'insiste sur le fait que ça ne s'est pas

  6   produit parce que ce n'était pas le principe poursuivi. Donc pour ce qui

  7   est des chiffres, je vous prie, de prendre en considération que je

  8   n'accepte pas cette corrélation au niveau des chiffres parce que ça ne

  9   s'est pas produit de la sorte.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

 11   M. LONGONE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Q.  Monsieur, juste deux mots que vous avez dit dans votre déclaration.

 13   Vous avez dit que, si vous étiez Bosnien, vous seriez parti : "Je serais

 14   parti." Vous avez dit : "Si j'étais Bosnien, j'aurais transféré un autre

 15   hôpital dans l'ex." Je vous comprends, Docteur, très bien, très clairement.

 16   Je suis désolé, je dois parcourir ces documents avec beaucoup de

 17   rapidité. Dans le document qui vous a été montré par le bureau du Procureur

 18   P 03355, juin 1993, le secteur de la Santé. Ce rapport, qui a été produit

 19   sous l'autorité de M. Stojic, dit que : "Le ravitaillement médical est

 20   satisfaisant grâce au ravitaillement bien apprécié des Nations Unies."

 21   C'est page 23 de la version anglaise et 26 de B/C/S et il est mentionné

 22   entre parenthèses il y avait un manque de personnels expert médical pendant

 23   cette année, la période de la première partie de 1993.

 24   Dans la page 2 -- page suivante, page 24 de la version anglaise et

 25   page 27 de B/C/S, il est dit :

 26   "Un autre problème majeur était également le manque de personnel médical

 27   expert, en dépit du fait que le personnel médical doit partir de HZ HB, la

 28   diminution de nombre bosnien, il nous manque des chirurgiens et des

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  1   anesthésistes," ceci vous nous l'avez déjà dit auparavant.

  2   Vous avez également dit clairement que si vous étiez Bosnien, Musulman vous

  3   serez déjà parti dans l'autre hôpital. Mais de l'autre côté, comme vous

  4   pouvez le voir ici à la page 25 de la version anglaise, et c'est la page 28

  5   -- en haut de la page 28 dans la version B/C/S, il est dit que : "Tous les

  6   services étaient engagés à leur maximum et opéraient avec un personnel en

  7   nombre limité."

  8   Vous avez parlé des anesthésistes. Le seul qui était un Bosnien "qui,

  9   à votre opinion, est causé par des membres d'ethnie croate qui sont partis

 10   pour la Croatie."

 11   Vous avez donc caché l'ethnicité des Bosniens qui sont partis et pas

 12   des personnes croates ?

 13   M. LONGONE : [aucune interprétation]

 14   M. KOVACIC : [aucune interprétation]

 15   M. LONGONE : [aucune interprétation]

 16   M. KOVACIC : [interprétation] Justement, l'objection. Il faut la

 17   faire avant la réponse, Messieurs les Juges. Avec toute l'attention qui est

 18   due à la chose, si moi, j'avais reçu cette question où il y a au moins

 19   quatre thèses hypothétiques d'avancées, je ne sais pas ce qu'on me pose

 20   comme question. Est-ce que je suis d'accord ? Il y a quatre thèses

 21   d'avancées, alors je propose que le Procureur brise ou démantèle sa

 22   question en A, B, C, D, et alors qu'on lui demande : est-ce que c'est

 23   exact, petit a, petit b, petit c. Parce que c'est incompréhensible, je ne

 24   saurais pas répondre moi-même. Autre chose encore. Il y a une erreur

 25   d'implicite. Le témoin a dit que des gens ont fui --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, votre question était très

 27   longue et je voyais défiler au transcript toutes vos phrases et je me

 28   disais comment le témoin va s'y retrouver ? Alors pour que ça soit clair,

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  1   essayez d'être plus concis dans vos questions pour que le témoin réponde,

  2   puis vous allez de l'avant.

  3   M. LONGONE : [interprétation] Merci, Monsieur.

  4   Q.  Ma question est la suivante : il est dit que le départ de ceux qui sont

  5   d'ethnie croate en 1993 était non justifié, et c'était utilisé par le

  6   département de la Défense de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous êtes

  7   d'accord que c'était non justifié ?

  8   R.  Ce avec quoi je suis d'accord c'est qu'il y a eu des départs et que

  9   l'hôpital s'est trouvé en situation difficile du point de vue des cadres,

 10   du personnel. Alors pour ce qui est des raisons des départs et des

 11   justificatifs, je crois que chaque personne doit voir cela avec soi-même.

 12   Le fait est que l'hôpital ne peut pas fonctionner sans personnel, mais une

 13   infirmière qui n'est pas un militaire et qui a trois enfants et qui décide

 14   de s'en aller, je la comprends. Pour ce qui est des justifications ou

 15   justificatifs, aux autres d'en parler.

 16   Je sais que nous avons eu des carences de personnel constamment, et

 17   je tiens à ce que l'on se penche sur les circonstances dans lesquelles nous

 18   avons eu à intervenir. Il y a eu des semaines et des semaines où les gens

 19   ne quittaient pas leurs postes, ils travaillaient jusqu'à épuisement

 20   complet. Puis ensuite il y a eu apaisement de la situation, les gens

 21   revenaient au travail, et ainsi de suite. Donc c'était quelque chose qui

 22   probablement ne se reproduira - et je l'espère - ne se reproduira plus

 23   jamais.

 24   Q.  Merci beaucoup, Monsieur. Un autre sujet. Dans le même document sur le

 25   secteur de la Santé, à la page 26 et la page 27 ainsi qu'à la page 28, il y

 26   a une référence qui est faite - dans la version en B/C/S, c'est les pages

 27   29 et 30 - de tous les ravitaillements ou des fournitures médicales et la

 28   valeur matérielle des biens, des expéditions que l'hôpital a reçues, le

Page 37437

  1   centre de Santé de Mostar, hôpital de Mostar, le HVO et les services de

  2   Santé médicale. Au numéro 3, vous avez les donations qui, à travers cette

  3   période, dans le secteur de la Santé, y compris votre hôpital, vous avez

  4   parlé, comme dans la vidéo, des donations de la FORPRONU et de l'UNHCR

  5   ainsi que d'autres organisations internationales à tous les hôpitaux du HVO

  6   à cette époque.

  7   Point 6, Monsieur, de ce rapport indique :

  8   "Le travail dans les entrepôts, il est dit très clairement que les

  9   conditions de travail étaient mauvaises à cause de la température où

 10   étaient stockés tous ces médicaments (on parle du stockage où il y avait de

 11   grands espaces mais nous n'avons pas assez de place en même temps pour la

 12   réception des biens)."

 13   En fait, vous avez tellement de biens qui arrivent que vous n'avez

 14   pas assez de place pour les stocker. En fait, vous avez tellement -- vous

 15   avez dit, dans votre déclaration, que déjà en 1993, vous avez des problèmes

 16   avec les médicaments qui n'étaient pas utilisés et donc devaient être

 17   détruits. Dans ce cas, vous voyez qu'il est mentionné -- au point 7, le Dr

 18   Ivo Curic, vous mentionnez dans ce rapport que 100 tonnes de tels matériels

 19   étaient détruites sous sa supervision à l'époque.

 20   Est-ce que vous êtes d'accord avec ce rapport qui vient du secteur de la

 21   Santé ?

 22   R.  Il faut que je vous fasse un commentaire. A priori, je ne serais pas

 23   d'accord et je vais vous dire pourquoi. Tout ceci est exact. Pendant des

 24   années et toute la guerre durant, nous avons fonctionné sur des donations,

 25   de l'assistance du monde entier, d'énormes quantités de médicaments et de

 26   matériels.

 27   Q.  Je vous remercie. Un instant, Monsieur. Je ne veux pas que vous

 28   commentiez, je voulais juste savoir si vous étiez d'accord. Vous avez dit

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  1   que l'information dans ce document était exacte, c'est ce que vous avez --

  2   R.  Non, je n'ai pas dit cela.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Juste un instant, Messieurs les Juges.

  4   Excusez-moi, j'ai attendu que le témoin a répondu. Alors j'aimerais que

  5   l'on fournisse au témoin la possibilité de répondre de façon complète. Si

  6   on ne lui donne pas cette possibilité, je lui fournirai la possibilité dans

  7   les questions complémentaires, mais ce sera déduit sur mon temps. Alors il

  8   y a dix lignes de questions ou 20 lignes de questions et on ne le laisse

  9   pas répondre en deux phrases. Alors ce n'est pas correct vis-à-vis du

 10   témoin.

 11   M. LONGONE : [interprétation] A la ligne 10, on dit que tout ceci est

 12   exact. Je voulais qu'il commente sur autre chose. Mais je voulais tout

 13   simplement demander s'il était d'accord, il a dit que tout ceci est exact.

 14   C'est à la ligne 10 de la page que nous discutons --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas ce que j'ai dit.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi aussi, j'ai écouté ce que vous dites. Si on

 17   détruit 100 tonnes de matériels, il y a quand même un problème. Alors on le

 18   détruit, on le fait exprès ou parce que les produits sont périmés ? Alors

 19   on a un médecin devant nous, il peut peut-être nous dire pourquoi il y a du

 20   matériel qui a été détruit, il y a certainement une raison. Oui, Docteur ?

 21   Oui, allez-y.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, justement c'est au sujet

 23   du tout dernier commentaire du Procureur, j'ai réagi au sujet des 100

 24   tonnes. Je répète. Nous avons reçu énormément de choses et je crois que les

 25   chiffres sont pris dans nos registres. Ce que je ne sais pas c'est où a-t-

 26   on pris le renseignement où l'on aurait détruit 100 tonnes parce que nous

 27   ne l'avons pas cela en Bosnie. Mais je sais que dans ces donations il y a

 28   eu énormément de choses, par exemple, de solutions datant de 1950 et venues

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  1   d'Allemagne. Alors les médias ont suivi la chose pendant longtemps, et ce

  2   que j'accepte c'est qu'en partie le problème c'était qu'on n'avait pas

  3   suffisamment de capacité d'entreposage. Nous avions 3 000 mètres carrés de

  4   bâtiment inachevé où on a entreposé et cela a peut-être pu influer sur la

  5   qualité du stockage.

  6   Je vais vous donner un exemple, c'est une rareté que le témoin ralentisse

  7   lorsque --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez moins vite, Monsieur le Témoin, parce que,

  9   dans ce que vous dites, l'interprète français est extraordinaire, il arrive

 10   à traduire ce que vous dites; mais quand je vois en anglais, la traduction

 11   il manque des choses. Vous avez dit tout à l'heure que vous avez reçu

 12   d'Allemagne des solutions datant de 1950, et dans le texte anglais, ce

 13   n'est pas indiqué. Donc ralentissez.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse. Je vais m'efforcer de le faire.

 15   Alors je dois terminer cette phrase. Alors à un moment donné, nous avons eu

 16   une situation où nous avions une pile de médicaments à jeter, on ne savait

 17   trop quoi en faire, et il fallait procéder à l'incinération. On a trouvé

 18   des tonneaux de 200 litres et on a mis dans du béton, c'est resté longtemps

 19   sous une véranda, une espèce de dalle en béton devant l'hôpital. C'est

 20   devenu un problème écologique, le problème écologique numéro 1, la presse a

 21   fait couler beaucoup d'encore. Mais je ne vais pas être trop long. Donc on

 22   a exporté ces médicaments et on a payé 150 000 marks pour ce qui est du

 23   budget de l'hôpital pour faire ces médicaments, donc c'est comme le dit M.

 24   le Procureur, M. Curic n'a pas pu incinérer 100 tonnes de médicaments. Je

 25   ne sais pas si quelqu'un d'autre l'a fait, mais il ne s'agissait pas de

 26   médicament.

 27   M. LONGONE : [interprétation] 

 28   Q.  C'est un rapport du secteur de Santé du ministère de la Défense, et il

Page 37440

  1   dit que l'entrepôt était utilisé pour stocker les produits expirés - page

  2   27 - on parle de l'Heliodrom.

  3   R.  Excusez-moi, moi, je parle de l'entrepôt dans l'enceinte de l'hôpital à

  4   Bijeli Brijeg. Je ne suis pas au courant d'autres entrepôts parce que cela

  5   ne relevait pas des tâches qui étaient les miennes. Je parle de l'entrepôt

  6   qui se trouvait à l'hôpital et qui était tenu à jour par un pharmacien qui

  7   travaillait chez nous avec d'autres personnes. Alors je vous parle du site

  8   qui était celui de l'hôpital à Bijeli Brijeg jusqu'à la fin.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai été, tout à l'heure, interloqué quand vous avez

 10   parlé des solutions datant de 1950 que les Allemands vous ont envoyées.

 11   Est-ce à dire qu'il y a eu des donations en médicaments qui étaient déjà

 12   périmés qu'on vous a envoyés ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas que ça venait de toutes parts,

 14   mais je ne veux pas que ceci soit un élément à dénigrer, de nature à

 15   dénigrer l'aide que nous avons reçue, parce que s'il n'y avait pas eu ces

 16   donations nous n'aurions pas pu soigner les gens. Parce qu'on n'avait pas

 17   l'argent qu'il fallait. Mais il arrivait à chaque fois dans un camion des

 18   déchets, croyez-moi. Il en était ainsi. Nous, on était plus surpris du tout

 19   de les voir arriver.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Question ultra technique. Si un médicament est

 21   périmé, prenons un antibiotique, par exemple, malgré le fait qu'il est

 22   périmé et que vous n'avez plus de médicament, est-ce que vous pouvez

 23   l'utiliser ou pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est relatif. Quand il s'agit de médicaments

 25   conservés de façon qualitativement bonne, par exemple, quand il s'agit de

 26   comprimés, si le problème est le délai écoulé, si c'est un an de plus, nous

 27   savons que la qualité du médicament a chuté de 20 à 30 % pour ce qui est de

 28   ces effets. Donc en renforçant le dosage, à défaut de mieux, on peut quand

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  1   même faire avec, et on peut utiliser avec ceux qui sont bons. Mais on ne

  2   peut pas le faire avec les sirops, les capsules, mais les comprimés, oui.

  3   Avec prudence bien sûr, et à condition de ne pas avoir le choix.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : En matière de poche de sang, n'est-ce qu'il y a des

  5   dates qui ne peuvent pas être dépassées ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est des réserves de sang, d'un

  7   point de vue technique, il ne faut pas qu'il y ait d'oscillation. Parce que

  8   le sang c'est un organe qui est utilisé sous des conditions strictement

  9   contrôlées et dans d'autres dans certaines conditions, il vaut mieux ne pas

 10   en administrer que d'en administrer, parce que si ce n'est pas bon cela

 11   peut générer toute une série de problèmes et c'est inacceptable. Il ne faut

 12   pas donner du sang qui n'est pas bon, jamais.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

 14   M. LONGONE : [interprétation] Merci beaucoup.

 15   Q.  Vous avez vous-même pris votre serment d'Hippocrate, n'est-ce pas ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   Q.  Je comprends clairement que vous avez fait de votre mieux de le

 18   respecter à travers la guerre et vous avez traité tout patient qui est venu

 19   dans vos mains ?

 20   R.  Absolument.

 21   Q.  Mais vos actions n'ont pas reflété de la politique des autorités de la

 22   HVO, car ils n'ont pas pris ce serment d'Hippocrate, n'est-ce pas ?

 23   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, ceci est incroyable. -

 24   -

 25   M. LONGONE : [interprétation] Oui, c'est incroyable. Puis-je continuer avec

 26   mon explication.

 27   Q.  [aucune interprétation] 

 28   M. KOVACIC : [aucune interprétation] 

Page 37442

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, laissez le Procureur poser sa

  2   question, et puis les Juges, ils verront si la question est tellement

  3   stupide, les Juges en tireront les conséquences.

  4   Bien, Monsieur le Procureur, je ne sais pas ce que vous vouliez démontrer -

  5   - oui, excusez-moi, Monsieur le Procureur, mon micro était débranché. Je ne

  6   sais pas ce que vous vouliez démontrer, ça soulevait une objection de Me

  7   Kovacic, et je voulais dire que si la question est stupide, les Juges en

  8   tireront les conséquences.

  9   M. LONGONE : [interprétation] Merci, Votre Honneur. Ce que je voulais

 10   montrer ici qu'à travers le témoignage du témoin lui-même, en tant que

 11   médecin, je suis tout à fait d'accord avec lui, il a traité tout patient

 12   qu'il soit Musulman, Croate ou de quelle que nationalité qu'il soit ou que

 13   ce soit un soldat, un combattant, non combattant, lui et son personnel sous

 14   son commandement ont traité tout le monde. Il a également mentionné qu'il

 15   n'a jamais licencié qui que ce soit lorsqu'ils ont quitté le poste.

 16   Q.  Dans la réalité c'est que, Monsieur, vous n'avez pas licencié votre

 17   personnel, mais après le 9 mai, la plupart de vos personnels bosniens ont

 18   été arrêtés avec leurs familles et emmenés à l'Heliodrom, n'est-ce pas ?

 19   M. KOVACIC : [aucune interprétation] 

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais le Procureur, il a le droit de poser cette

 21   question, puisque pour le Procureur, il pense qu'après le 9 mai, il y a eu

 22   des arrestations.

 23   M. KOVACIC : [interprétation] -- autrement, si vous voulez m'entendre une

 24   seconde. Il y a une présomption dans la question, à savoir que le Procureur

 25   doit d'abord établir que cette présomption est exacte ou si le témoin est

 26   d'abord au courant de cela, et ensuite poser la question, c'est tout. Si

 27   j'ai tort, j'ai tort. Je suis désolé.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, essayez de vérifier que le

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  1   témoin était au courant. Vous avez été tout de suite au cœur du problème

  2   mais certains préfèrent qu'il y ait démarche préalable.

  3   M. LONGONE : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur, est-ce que vous vous rappelez avoir dit au conseil qu'en mai

  5   1993, votre personnel bosnien était arrêté, emmené à l'Heliodrom; vous vous

  6   souvenez des médecins bosniens qui ont été arrêtés emmenés à l'Heliodrom ?

  7   R.  Je me souviens parfaitement bien de tout ce que j'ai dit --

  8   Mme NOZICA : [hors micro]

  9   L'INTERPRÈTE : Hors micro, Madame Nozica.

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Cette question n'a pas évoquée à

 11   l'interrogatoire principal. Le Procureur est en train de confondre la

 12   déclaration, qui a été recueillie par la Défense de M. Praljak et

 13   l'interrogatoire principal, parce que la question n'a pas du tout été posée

 14   à l'interrogatoire principal. Quoi qu'il soit advenu de cette déclaration

 15   faite par --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais le problème -- le problème c'est qu'il y a un

 17   document que le Procureur va certainement citer, P 20367, qui je pense a

 18   déjà été admis, où dans ce document le Dr que nous avons va intervenir pour

 19   faire libérer quelqu'un, voilà, et c'est ça tout le problème. Donc laissez

 20   au Procureur le soin de mener son contre-interrogatoire et il est important

 21   de savoir pourquoi un anesthésiste avait été arrêté, et pourquoi lui, il

 22   intervient, voilà. 

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ceci est soulevé dans chaque contre-

 24   interrogatoire, il est assez clair que le contre-interrogatoire n'est pas

 25   limité au sujet direct du principal, s'il y a des questions qui peuvent

 26   aider les parties dans ce contre-interrogatoire. Nous l'avons appliqué

 27   lorsque les contre-interrogatoires de la Défense, et nous l'avons appliqué

 28   de façon consistante lorsque c'est le Procureur qui mène son contre-

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  1   interrogatoire. Je suis un peu étonné qu'il faut le répéter pratiquement

  2   toute la semaine.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, excusez-moi, mais je

  4   dois, malgré tout, vous dire la chose suivante. En page 55, ligne 6, il est

  5   dit la chose suivante : le témoin aurait répondu à la question du conseil

  6   de la Défense que les Bosniens, Musulmans bosniens sont partis à

  7   l'Heliodrom. Je suis alors intervenu car cela n'a pas été ma question. Je

  8   n'ai posé aucune question à ce sujet et je sais qu'un témoin peut être

  9   interrogé sur toute une variété de sujets mais simplement voulu dire que

 10   cette question posée par le Procureur n'a pas été posée par moi lors de

 11   l'interrogatoire principal. C'est tout ce que j'ai voulu dire. C'est la

 12   page 55, ligne 6.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : On est d'accord. Le document que j'ai mentionné

 14   c'était P 02367, pas P 2037. Bien.

 15   Alors, Monsieur le Procureur, continuer.

 16   M. LONGONE : [interprétation] Merci.

 17   Q.  Monsieur, vous avez mentionné que vous avez traité tous les employés de

 18   façon égale, selon vous. Monsieur, permettez-moi de vous montrer une petite

 19   vidéo de ce qui se passait le 9 mai, P 04238, pièce P 02157.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. LONGONE : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur après cette introduction qui devrait rafraîchir votre souvenir

 23   quant à ce qui s'est passé le 9 mai, lorsqu'une partie de la population

 24   musulmane d'après ces rapports a subi ce --

 25   Je voudrais maintenant vous montrer la pièce P 02315. Vous voyez ce

 26   document ?

 27   R.  Non, je n'ai pas ce document --

 28   M. LONGONE : [interprétation] -- que l'huissier pourrait m'aider.

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  1   Q.  P 02315. Peut-être se trouve-t-il derrière vous ? Vous pourrez peut-

  2   être le voir sur le prétoire électronique ce document et je suis désolé de

  3   ce contretemps. A la fin de cette page, il s'agit d'un rapport en fait, une

  4   liste du personnel médical de l'hôpital de Mostar et les membres de leurs

  5   familles qui ont été -- qui ont dû fuir leurs appartements. Est-ce que vous

  6   le voyez, Monsieur ? A la fin de ce document, on voit la signature du

  7   commandant de l'hôpital régional, est-ce qu'il s'agit de votre signature ?

  8   R.  Non, c'est la signature du Dr Ante Kresic, mon assistant un pédiatre de

  9   Mostar. Mais, bien entendu, j'ai connaissance de cette liste donc lorsque

 10   les affrontements ont commencé ce matin-là nous avons eu un afflux

 11   effroyable de blessés, un véritable chaos pour ne pas employer des mots

 12   moins élégants.

 13   Par rapport à tout ce flot de personnes, j'ai reçu un certain nombre

 14   -- au milieu de tout ce flot de personnes, j'ai reçu des informations selon

 15   lesquelles certains des employés n'ont pas pu rejoindre leurs postes car

 16   ils ont été emmenés dans certains endroits près de Mostar. J'ai demandé

 17   alors à mon assistant, M. Kresic -- enfin, je lui ai donné l'ordre, lui

 18   était chargé du centre de Santé qui faisait partie de l'hôpital de guerre,

 19   je lui ai demandé de dresser une liste de toutes les personnes qui n'ont

 20   pas pu se rendre à leur travail. Entre-temps, un de mes collègues est venu

 21   me voir car dans le département de la chirurgie des personnes étaient

 22   manquantes aussi. Par rapport à cette liste qui a été faite par le Dr

 23   Kresic, j'ai réagi en demandant qu'on trouve une solution pour que ces

 24   personnes puissent venir -- puissent revenir. Quelques heures après, M.

 25   Rebic est revenu et on a pu voir déjà les premiers véhicules ramenés ces

 26   personnes en quelques jours dans l'espèce de deux jours, ils sont tous --

 27   ils ont tous pu revenir à leur travail. Pour ma part j'ai été à l'hôpital

 28   et j'ai participé aux efforts visant à prendre soin des blessés, donc je ne

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  1   pouvais pas avoir connaissance de tout ce qui se passait mais tout ce qui

  2   était nécessaire a été fait pour que les personnes puissent toutes revenir

  3   à leur poste.

  4   Q.  Monsieur, il est écrit ici -- sur la liste des membres du personnel de

  5   l'hôpital régional de -- Mostar qui ainsi que leurs familles qui ont été

  6   obligés de quitter leurs appartements. Est-ce qu'en tant que commandant,

  7   est-ce que vous avez été à l'origine de cet ordre de façon à ce que ces

  8   personnes doivent quitter leurs appartements ?

  9   R.  Je rejette totalement cette question. Je n'ai certainement pas ordonné

 10   ça. J'ai simplement demandé que l'on ramène ces personnes, qu'on les fasse

 11   revenir. Jamais dans ma vie je n'ai fait ce genre de demande et encore

 12   moins à mon travail. Je n'ai jamais fait rien de tel.

 13   Q.  Je comprends bien. Je suis d'accord avec vous. Est-ce que vous savez

 14   qui était à l'origine de cet ordre qu'il soit obligé de quitter leurs

 15   appartements ?

 16   R.  Je n'en sais vraiment rien. Ce que je sais seulement c'est qu'il y a

 17   une véritable catastrophe qui s'est produite ce jour-là. Il est beaucoup

 18   plus logique pour moi, je parle ici en tant que simple être humain, que

 19   quelqu'un -- qu'ils ont été emmenés pour les mettre -- mis en sécurité et

 20   ne pas mourir dans les rues. Mais c'est ma propre vision de la chose. C'est

 21   un point de vue --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis un peu troublé par le titre. Le titre de ce

 23   document, bien vous nous avez dit que c'était votre adjoint qui a rédigé ce

 24   document et qu'il l'a signé. Très bien. Mais pourquoi il y a un titre

 25   pareil. C'est ça que je n'arrive pas à comprendre. Que des personnes qui

 26   travaillaient à l'hôpital étaient amenées à l'Heliodrom par exemple. Ça

 27   c'est une chose. Mais pourquoi il y a ce titre ? Ça veut dire que vous et

 28   votre collègue, vous saviez qu'ils avaient quitté leurs appartements ou

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  1   même qu'ils avaient été amenés de leurs appartements ? Vous pouvez nous

  2   dire dans votre langue parce que je me méfie des traductions anglaises et

  3   je voudrais que dans votre langue vous m'indiquiez, vous me lisiez le titre

  4   de ce document ? Ça commence par "Spisak." Vous pouvez quand même lire le

  5   titre ?  

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] -- je le peux :

  7   "Liste des employés de l'hôpital régional de guerre du HVO de Mostar

  8   et des membres de leurs familles qui ont été emmenés de leurs appartements,

  9   or de leurs appartements."

 10   Est-ce que je peux juste vous proposer un commentaire de cela ? La

 11   liste a donc été faite par mon assistant. Elle est exacte et elle montre

 12   que les personnes ont été emmenées mais quelles sont aussi revenues.

 13   Pourquoi cela est-il advenu de la sorte ? J'ignore si quiconque parmi vous

 14   a eu l'occasion jamais de se trouver dans une ville qui était touchée

 15   chaque minute par un si grand nombre d'obus où régnait une véritable

 16   panique. Les gens fuyaient leurs appartements -- en pensant de trouver un

 17   abri sûr. A un moment, ils ont été emmenés par quelqu'un, ils ont été mis

 18   dans un camion et ils ont été mis à l'abri de ces bâtiments qui étaient en

 19   flammes. C'est ainsi qu'ils ont été emmenés mais de mon point de vue il est

 20   bien préférable que quelqu'un ait pu emmener ces personnes afin quelles

 21   restent en vie quel que soit le qualificatif que l'on donne à ça plutôt

 22   qu'ils restent là et qu'ils se fassent tuer dans la rue.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Monsieur le Procureur.

 24   M. LONGONE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 25   Q.  Monsieur, nous allons voir ce qui s'est passé --

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Procureur, je voudrais

 27   poser une question concernant votre dernière affirmation. Est-ce qu'il ne

 28   s'agisse pas d'une grande discrimination car le fait que les pauvres

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  1   Croates à Mostar ont été laissés dans cet enfer et ce n'est que les

  2   Musulmans qui ont été sauvé ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous vous reportez à cette même liste il

  4   figure des noms de personnes qui ne sont pas des Bosniens. Par exemple,

  5   Ivan Marinovic. Puis nous avons encore Savo Popovic n'est pas un Musulman.

  6   Il y a Jasna Culjak, qui n'est pas une Bosnienne. Miletic Nedin, non plus.

  7   Je le connais, personnellement, il a un nom qui pourrait prêter à confusion

  8   mais ce n'est pas le cas. Pour ne pas poursuivre encore au-delà, cela veut

  9   dire -- je viens d'en voir encore un. Les gens se rendaient à leur travail.

 10   C'est cela comme ces événements ont commencé à se produire à 7 heures du

 11   matin. Comme je viens de Siroki Brijeg, je --

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup, cela me suffit.

 13   M. LONGONE : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 14   Q.  Dans cette même liste, on voit le nom d'Ahmed Mujic. C'est le numéro 9

 15   sur la liste. Est-ce que vous vous souvenez ce qui est arrivé au Dr Ahmed

 16   Mujic plus tard au mois d'octobre 1993 ? Est-ce que vous savez ce qui lui

 17   est arrivé ?

 18   R.  Je l'ignore.

 19   Q.  La pièce P 05944 maintenant, s'il vous plaît.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Cela ne figure pas.

 21   M. LONGONE : [interprétation] Désolé. Erreur. P 05944 [comme interprété].

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je sais de quoi il s'agit.

 23   M. LONGONE : [interprétation]

 24   Q.  Vous le voyez. Très bien. Il faut garder ce document affiché.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Simplement pour les besoins du

 26   compte rendu parce que le numéro que vous avez donné ne figure pas dans

 27   notre classeur. Est-ce que c'était P 05939 ?

 28   M. LONGONE : [interprétation] C'est bien cela, Monsieur le Juge.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

  2   M. LONGONE : [interprétation] J'ai fait une erreur. J'ai parlé de deux

  3   pièces. La pièce qu'on voit présentement qui porte la cote P 05944. Alors

  4   qu'après je vous montrerai la pièce P 05939.

  5   Q.  Pour ce qui est du premier, vous voyez qu'il y a une protestation --

  6   R.  Excusez-moi, juste très rapidement, la personne née en 1914, le père de

  7   cette dame -- de cette femme médecin qui a été tuée, je ne connais pas ce

  8   monsieur, mais je connais cette femme médecin.

  9   Q.  Je vais néanmoins vous poser des questions. Il s'agit d'une

 10   protestation qui date du 18 octobre 1993, adressée à M. Bruno Stojic,

 11   signée par le Dr Ante Kvesic, à savoir vous-même, et le brigadier général

 12   de brigade Ivan Bagaric. Est-ce que vous reconnaissez votre signature sur

 13   ce document ?

 14   R.  Oui, tout à fait.

 15   Q.  Nous allons maintenant le lire :

 16   "Tôt le matin le 18 octobre 1993, le Dr Slavenka Travjanin et son père ont

 17   été tués dans leur appartement par des personnes non connues. Civils qui

 18   aidaient des gens portant l'uniforme alors que la mère a été blessée. Le Dr

 19   Slavenka Travjanin a passé toute la guerre a travaillé pour le centre de

 20   Dialyse de l'hôpital de guerre du HVO à Mostar" - et vous avez parlé du

 21   centre de Dialyse - "en tant que spécialiste neurologique, elle a donné

 22   l'exemple aux autres personnes dans son travail et dans ses relations avec

 23   ses collègues et ses patients."

 24   Plus tard, on voit, dans cette protestation, que vous avez signée, et que

 25   vous avez envoyée à Bruno Stojic à cette date, il est écrit que :

 26   "Il s'agissait de travailleurs très fiables et loyaux que cet exemple

 27   honteux et vous en avertissant pour la dernière fois que nous ne serons pas

 28   en mesure de réprimer le personnel qu'il s'agisse de Croates ou d'hommes

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  1   Musulmans. Les travailleurs du secteur de Santé et du RRBHVO à Mostar sont

  2   dégoûtés par ce type de terreur qui est infligé sur leurs collègues dans la

  3   ville ce n'est pas la première fois que cela se produit. C'est pour cela

  4   que nous demandons d'urgence des mesures concrètes soient prises."

  5   J'ai une seule question à ce propos, Monsieur : est-ce que ces docteurs,

  6   ces médecins étaient des Musulmans de Bosnie ?

  7   R.  Il s'agit ici de Musulmans.

  8   Q.  J'ai une deuxième question, Monsieur : dans ce rapport, est-ce que vous

  9   reconnaissez, comme vous l'avez dit ici, que ce n'était pas la première

 10   fois qu'on infligeait ces actes de terreur sur les collègues ? Je parle du

 11   mois d'octobre 1993. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que vous avez

 12   écrit à l'époque, Monsieur, oui ou non ?

 13   R.  En principe, je ne réponds jamais par oui ou par non mais je peux peut-

 14   être éclaircir cela ensuite revenir à votre première question. Oui --

 15   Q.  Ma question est de savoir si vous, vous avez rédigé cette protestation;

 16   oui ou non ?

 17   R.  Bien sûr, j'ai écrit cette lettre de protestation.

 18   Mais votre première question n'était pas celle-là.

 19   Q.  Merci beaucoup. Monsieur, pour revenir maintenant au document dont nous

 20   avons déjà parlé, P 02315, et dans cette liste sous médecine interne - une

 21   seconde, s'il vous plaît - vous avez 21, Nevzeta Kreso. Je voudrais que

 22   cette liste soit montrée, à savoir la pièce P 03219. Je me répète P 03219.

 23   Il s'agit d'une demande, mais pas rédigée par vous, qui porte la date du 6

 24   juillet 1993, c'est une demande du Bataillon des Condamnés pour que la

 25   famille du Dr Kreso soit relâchée du centre. Nous en avons besoin afin de

 26   pouvoir nous entretenir ou manipuler avec d'autres Musulmans dans la zone

 27   et ensuite on vous les retournera. Est-ce que vous voyez ceci ?

 28   R.  Je ne sais pas où vous voulez venir. Je n'ai aucun lien avec cela.

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  1   Q.  Est-ce que vous savez que la famille du Dr Kreso avait fait l'objet

  2   d'une arrestation ? Est-ce que vous étiez au courant qu'au mois de juillet

  3   1993 ils ont été arrêtés ? Vous n'étiez pas au courant ?

  4   R.  Mais comment aurais-je pu le savoir ? Je ne suis pas ici un pantin que

  5   vous allez manipuler comme vous le souhaitez. J'ai dressé une liste des

  6   personnes qui ne se sont pas rendues sur leur lieu de travail le 9 mai.

  7   Après cela, je n'ai pas procédé à des enquêtes dans d'autres secteurs. Je

  8   suis resté à l'hôpital pour y faire mon travail, et j'ignore absolument ce

  9   qui se passait dans d'autres domaines. J'ai travaillé à l'hôpital 24 heures

 10   sur 24 - et je répète ce que j'ai déjà dit - ce personnel de l'hôpital, qui

 11   n'est pas revenu sur son lieu de travail, est revenu sur son lieu de

 12   travail. Le Dr Kreso n'était pas employé à l'hôpital et je n'ai absolument

 13   aucune indication, ni connaissance de cela.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, gardez votre calme. Vous n'êtes le pantin

 15   de personne. Vous êtes le témoin de la justice puisque vous avez prêté

 16   serment. La question que tout un chacun peut se poser : quand vous avez un

 17   collègue qui disparaît parce qu'il est arrêté, la question se pose de

 18   savoir qu'est-ce que vous faites pour vous renseigner sur le sort du

 19   collègue. C'est comme si, moi, par exemple, demain le Juge Prandler

 20   disparaît, je vais me demander : où est-ce qu'il est passé ? Je vais

 21   essayer de savoir : qu'est-ce qui lui est arrivé ? Vous voyez donc c'est la

 22   question que je vous pose. Parmi vos collègues, il y en a qui sont

 23   "arrêtés" - entre guillemets - la question se pose de savoir : qu'est-ce

 24   que vous faites pour savoir, un, pourquoi ils ont été arrêtés; et deux,

 25   qu'est-ce que vous faites pour qu'ils reviennent le plus tôt possible pour

 26   continuer leur mission de médecin ? C'est ça la question de fond.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette question, j'y réponds comme dans ma

 28   première réponse. Quand il s'agissait d'employés de mon hôpital, j'ai fait

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  1   tout ce qui était possible et tout ce qui était nécessaire pour que ces

  2   personnes reviennent et tous sont revenus sur leur lieu de travail. Je

  3   regrette que M. le Procureur n'ait pas donné l'occasion d'apporter un

  4   éclaircissement en ce qui concerne le Dr Travjanin car je pense que là, il

  5   faut apporter un éclaircissement. Quand au Dr Kreso, je ne connais pas

  6   cette personne. Il n'était pas à mon hôpital et je ne l'ai jamais rencontré

  7   ni vu. Donc je ne peux pas entreprendre quoi que ce soit concernant

  8   quelqu'un dont je ne sais même pas qu'il a disparu.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Procureur.

 10   M. LONGONE : [interprétation]

 11   Oui, et pour les besoins du compte rendu, le Dr Nevzeta Kreso était dans

 12   l'hôpital, et apparaît au numéro 21 de la liste dans le service de Médecine

 13   interne.

 14   Maintenant je voudrais que vous tourniez votre attention vers la

 15   pièce P 02367.

 16   M. KOVACIC : [interprétation] Je pense que le Procureur devrait aller

 17   jusqu'à la dernière ligne de ce document car il y a un lien avec Bijelo

 18   Polje; et il y a un troisième lieu qui n'a strictement rien à voir.

 19   Donc le témoin a dit : moi je ne connais pas ce Dr Kreso et le Procureur

 20   pense que c'est le même Dr Kreso qui travaillait dans l'hôpital. C'est un

 21   nom très courant. Kreso est un nom extrêmement courant, nous le savons ici,

 22   s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. Est-ce que c'est le même Kreso ?

 23   Est-ce que c'est un autre ? Mais si le Procureur pose la question, on

 24   pourrait le savoir.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, est-ce que ce Dr Kreso, il

 26   travaillerait sous le numéro 21 comme interne est le même que celui qui

 27   figure dans le document ? Essayez d'éclaircir cela avec le témoin ?

 28   M. LONGONE : [interprétation] Je vais laisser les Juges de la Chambre en

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  1   juger --

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Je pense que le Procureur doit faire un

  3   choix. Soit il témoigne, soit il vous demande de tirer des conclusions sans

  4   les faits. Nous sommes ici pour établir les faits et ce sera aux Juges de

  5   la Chambre d'en tirer les conséquences, mais les parties sont là pour les

  6   faits. Est-ce qu'il s'agit là d'un fait ou pas ? Le témoin pourrait aider.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Cet interne, qui s'appelle Kreso, est-ce qu'il

  8   avait été arrêté, ou bien il a continué son travail chez vous à l'hôpital ? 

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je répète concernant la première liste toutes

 10   les personnes sur cette liste sont revenus. Ensuite le Dr Mme Kreso est

 11   partie du service de Médecine interne et je ne l'ai pu jamais revue. Son

 12   mari également, donc je sais qu'il est médecin mais je ne l'ai jamais vu,

 13   et je n'ai pas connaissance qu'ultérieurement au mois de juillet -- et

 14   n'oubliez pas que cette liste que j'ai dressée c'était le 9 mai, et que

 15   c'est des personnes qui ont été emmenées et ensuite sont revenues sur le

 16   lieu de travail. Quant à ce qui s'est passé au mois de juillet, qu'est-ce

 17   qui est arrivé à ce médecin, à cette femme qui ne travaillait plus dans mon

 18   hôpital, je veux dire l'hôpital de la rive ouest, c'était impossible pour

 19   moi de le savoir. Aujourd'hui même, je ne connais pas tous mes

 20   collaborateurs et tous les employés de mon hôpital. Mais ce dont je suis

 21   tout à fait certain, c'est qu'à ce moment-là, c'est-à-dire dans une

 22   situation tout à fait différente et un autre mois, celui du mois de

 23   juillet, vous parlez de cette personne dont je ne peux absolument pas

 24   savoir ce quelle était devenue. Je voudrais qu'on ne mélange pas ici des

 25   pommes et des poires. J'ai ici une liste que j'ai dressée et j'en reste là,

 26   j'en reste à cette liste.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Sur la liste, on voit la pièce P

 28   02303219; dans la référence B/C/S, on fait allusion au Dr Kreso. Est-ce que

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  1   je dois croire qu'il s'agit là d'une femme ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement je ne sais pas si c'est un

  3   homme ou une femme ou s'il y a un couple peut-être de médecins. Je ne le

  4   sais pas. J'ignore donc qui est exactement sur cette liste. Quant à cet

  5   interne, qui se trouvait dans mon hôpital, c'était une femme, c'était Mme

  6   Kreso, donc c'était un médecin marié à ce Kreso mais je ne la connaissais

  7   pas.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis un peu -- peut-être un peu

  9   naïf et je ne connais pas la langue croate, donc j'aurais pu penser qu'il y

 10   aurait une différence entre "Docteur," à savoir un homme, et "Docteura" une

 11   femme; est-ce que je me trompe ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Grammaticalement, c'est exact mais ce qui se

 13   produit souvent dans les listes, c'est qu'on met une abréviation Dr et à

 14   partir de cela on ne peut tirer aucune conclusion, du moins moi je ne le

 15   peux pas.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour une fois, nous n'avons pas

 17   d'abréviation ici. Est-ce que vous connaissez plusieurs docteurs femmes qui

 18   portent ce nom Kreso ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement je ne connais même pas cette

 20   personne-là. Je sais seulement quelle était au service de la Médecine

 21   interne. Je vous rappelle que ce -- il y avait très peu de temps que

 22   j'étais commandant au moment de ces événements et je n'ai pas fait la

 23   connaissance de toutes ces personnes. Je n'ai pas été à Siroki Brijeg à

 24   aucun moment avant d'être nommé commandant.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 26   M. LONGONE : [interprétation] Merci beaucoup.

 27   Q.  Nous allons maintenant passer à la pièce P 02367, cette pièce qui porte

 28   la date de 30 mai 1993, nous en avions déjà parlée. Le document du

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  1   département de la Santé du ministère de la Défense du HVO qui dit qu'il y

  2   avait surtout un manque de chirurgiens et d'anesthésistes dans l'hôpital

  3   pendant toute cette période en 1993. Si on regarde ces demandes, on voit

  4   que le commandant de conseil de la Défense -- du conseil de la Défense

  5   croate de Mostar, l'hôpital du Dr Kreso; vous voyez le document ?

  6   R.  Bien sûr.

  7   Q.  Je vais vous lire la demande.

  8   "Nous vous demandons de relâcher la famille, deux enfants et les

  9   parents du Dr Emir ou Dr Emira Bebanic qui travaille en tant

 10   qu'anesthésiste à l'hôpital du conseil de la Défense de croate pendant cinq

 11   jours sans arrêt."

 12   Donc : "Le chauffeur Hajrudin Begic se rend dans les endroits les

 13   plus dangereux depuis le début de la guerre, donc nous vous demandons la

 14   possibilité pour que lui et sa famille puissent se rendre chez eux, y

 15   compris Safet Mejra et Zejina Hadzic. Le chirurgien, Dr Drace, travaille en

 16   plusieurs endroits depuis le début de la guerre. Donc nous vous demandons

 17   de relâcher sa famille, y compris sa mère, Emina Drace, son frère et sa

 18   sœur, Sanja."

 19   Donc ils voulaient faire relâcher cet anesthésiste qui avait

 20   travaillé pendant cinq jours sans arrêt; vous vous en souvenez ?

 21   R.  Bien sûr que je m'en souviens mais je vais vous prier de prendre

 22   le contexte de la première phrase est de dire de façon précise et exacte,

 23   j'ai demandé à ce qu'une partie de la famille de Dr Bebanic, soit enfin

 24   renvoyée chez elle, parce que ça faisait cinq jours qu'elle travaillait

 25   sans cesse, donc j'en ai profité pour demander à ce qu'elle soit relâchée,

 26   elle n'était pas à l'Heliodrom, elle était tout le temps à l'hôpital. Il y

 27   avait une partie de sa famille qui se trouvait là-bas et j'ai usé de mon

 28   autorité afin que ces gens-là récupèrent des membres de leurs familles, et

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  1   j'en suis fier. Je pense pouvoir le dire dans plusieurs cas de figure ici,

  2   et je crois que c'est ce que j'ai bien dû faire, vous êtes d'accord.

  3   Q.  Monsieur, je suis d'accord avec vous. Il ne faut pas prendre les choses

  4   personnellement. Moi, tout ce que je vous demande c'est, vous avez dit

  5   qu'il fallait les relâcher, mais depuis où, depuis où devait-on relâcher ?

  6   R.  Il est venu me voir déjà en travaillant à l'hôpital pour se plaindre,

  7   parce qu'ils ont dit qu'en ramassant des gens dans la ville, des parties de

  8   leurs familles ont été emmenées je pense à l'Heliodrom. Je n'en suis pas

  9   trop sûr. J'ai juste rédigé une requête, je l'ai signée. Ils ont pris cette

 10   requête, ils l'ont portée aux administrations différentes parce que je ne

 11   sais pas où, moi, je ne les ai pas portés. Ces gens-là ont porté ces

 12   requêtes et il était évident que ça a marché parce qu'ils ne sont plus

 13   revenus me parler de leur problème.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : J'essaie de me mettre à votre place. C'est difficile

 15   mais il faut aussi que les Juges fassent des efforts pour essayer de

 16   comprendre. Vous êtes vous, à l'époque, le responsable de cet hôpital dit

 17   de guerre. Voilà que vous avez un collègue qui s'appelle le Dr Bebanic, qui

 18   apparemment travaille beaucoup puisque en tant qu'anesthésiste comme vous

 19   le dites, il a travaillé cinq jours sans repos. Evidemment, s'il était le

 20   seul anesthésiste --

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Cinq jours, oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Cinq jours, donc il devait être excessivement

 23   fatigué. Le Dr Bebanic doit vous dire à vous, voilà ma famille est arrêtée,

 24   mes enfants et mes parents. C'est quelque chose d'important qu'il vous dit.

 25   Vous, vous faites ce document, très bien, personne ne vous le reproche.

 26   Mais quand il vous révèle que ses enfants sont arrêtés, vous devez vous

 27   demander pourquoi les enfants de ce Dr sont arrêtés. Est-ce que vous avez

 28   appelé quelqu'un au téléphone au département de la Défense pour demander

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  1   des explications ? Qu'est-ce que ça signifie qu'on arrête des enfants d'un

  2   médecin qui travaille à l'hôpital militaire du HVO ? Est-ce que vous l'avez

  3   fait ou bien vous êtes contenté d'un service minima que de faire une

  4   requête par écrit à on  ne sait qui d'ailleurs pour que ces gens-là soient

  5   relâchés ? Est-ce que vous vous souvenez un peu du contexte ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces jours-la et certaines de ces situations,

  7   je vais m'en souvenir tant que je serai vivant, parce que ça ne s'oublie

  8   pas. Alors je n'avais que 29 ans lorsque je suis devenu commandant de

  9   l'hôpital. Je pense que c'est une question liée à l'éducation et à la

 10   culture. Donc je souhaitais une fois la guerre terminée rester dans cet

 11   hôpital en tant qu'employé, en tant que médecin, c'était mon objectif. Vous

 12   avez vu que j'ai réussi à atteindre cet objectif parce que pour dire la

 13   vérité, en ma qualité d'homme, je suis très fier de déambuler dans la ville

 14   de Mostar et au-delà et je n'ai jamais omis d'aider qui que ce soit. Alors

 15   j'ai dit au tout début et je n'ai pas voulu que quelqu'un me comprenne à

 16   tort et à travers, donc je me suis même servi de ma voiture parce que je

 17   n'avais, on n'avait pas beaucoup de véhicules. Donc rien n'était trop

 18   difficile pour moi pour aider les gens, et on peut le vérifier, on peut

 19   poser la question à ces gens-là, quel a été le type d'homme que ce

 20   commandant de l'hôpital militaire, et je suis fier de tout ce que j'ai

 21   fait. Je n'ai donc jamais omis une opportunité, une possibilité d'aider qui

 22   que ce soit.

 23   Alors pour être concret, à savoir si c'est moi qui ai pris en voiture la

 24   docteur en question, c'est possible. Je ne peux pas vous l'affirmer pour

 25   sûr parce que c'était en 1993. J'ai eu un peu oublié, je me suis même

 26   efforcé d'oublier des choses parce que c'était des moments plutôt pénibles,

 27   pour que l'on puisse le colporter tous les jours dans sa mémoire tout

 28   frais. Alors je suis fier de ce que j'ai fait, en tant qu'homme et en tant

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  1   que docteur et je ne pense qu'il y ait un endroit dans ce monde où que ce

  2   soit au globe où je dois baisser la tête. Je suis tout à fait disposé à

  3   répondre à tout ce que vous voulez.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes le commandant de cet hôpital militaire. Un

  5   collègue qui est le Dr Bebanic vous dites : "Mes enfants et mes parents ont

  6   été arrêtés." A ce moment-là, moi, je veux savoir : est-ce que vous avez

  7   téléphoné à vos autorités pour signaler le problème, ou bien vous vous êtes

  8   contenté de faire le service minimum qui est le document qu'on a sous les

  9   yeux ? Parce que, moi, si demain -- si demain mon collègue me dit que ses

 10   enfants ont été arrêtés, je ne pense pas que je ferai le service minimum.

 11   J'essaierai de savoir mais pourquoi on a arrêté les enfants de mon

 12   collègue. Surtout, si j'exerce une fonction d'autorité, c'est ça que je

 13   veux essayer de comprendre.

 14    LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, si maintenant je devais

 15   faire ce que vous vous dites, c'était peut-être un peu trop tard. Je vous

 16   le répète que j'étais commandant de l'hôpital, et dans toute situation à

 17   laquelle je devais faire face, je réagissais parce que je suis de cette

 18   nature-là. Donc je propose que le Dr Bebanic soit convoqué et qu'on lui

 19   pose la question sur le sujet, parce que je suis certain qu'elle pourra

 20   mieux répondre, mieux que moi-même. Je n'ai jamais omis de faire tout ce

 21   qui était possible de faire, jamais.

 22   Autre chose, à plusieurs reprises déjà, vous constatez que des enfants ont

 23   été arrêtés. Mais, moi, je vous dis que ces enfants, on les a mis à l'abri

 24   de la rue. On les a enlevées de la rue parce que, dans la rue, c'était

 25   horrifiant, c'était terrifiant. Nous n'avions pas de jardin d'enfant ou de

 26   site où on pourrait les mettre à l'abri; il fallait les mettre à l'abri là

 27   où on ne tirait pas. Donc dans leur tête, il y a des gens qui ont tout

 28   chamboulé. Mais les enfants n'ont pas été malmenés, ils n'ont pas été

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  1   prisonniers. On les a enlevés des rues d'une ville qui était en feu, en

  2   flamme.

  3   La Dr Bebanic, je vous propose de la citer à comparaître pour qu'elle

  4   vous le dise elle-même.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous le savons. Nous savons que vous avez 29

  6   ans, ce qui peut expliquer aussi beaucoup de choses. Mais dans le document

  7   que vous signiez, vous marquez : "Relâcher." Donc si vous dites "relâcher,"

  8   c'est que ces gens-là, ils ont été arrêtés. Vous voyez ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] On pourrait débattre des variantes

 10   linguistiques. Mais si quelqu'un a été emmené vers un secteur où l'on met

 11   quelqu'un sous protection, ça ne signifie pas qu'il a été en prison. Je ne

 12   suis pas juriste et je ne souhaiterais pas l'être même en vivant une

 13   deuxième vie, mais je ne veux pas autoriser qui que ce soit à commenter mes

 14   agissements de façon à les mettre placer sans dessus dessous. Je répète

 15   que, dans toute situation, j'ai tout fait, j'ai fait tout ce que j'ai pu et

 16   j'ai même dépassé la frontière de ce qui normalement était une chose prévue

 17   pour moi. Il n'a jamais été difficile pour moi de prendre ma propre voiture

 18   et d'aller emmener quelqu'un ou ramener quelqu'un, jamais.

 19   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, excusez-moi, c'est juste une

 20   question de précision. Sur le document que nous avons, je n'arrive pas à

 21   savoir à qui il est adressé, qui est le destinataire de ce document, de

 22   cette lettre de protestation ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme vous pouvez le voir en haut, en en-tête,

 24   on voit que c'est adressé au département à la Défense. C'est le Dr Bagaric

 25   qui a toujours réagi d'une façon analogue à la mienne, nous nous sommes

 26   toujours efforcés d'aider les gens. Au bout de 15 à 16 ans, je ne sais plus

 27   à qui cela a été adressé, ça fait 16 ans que je n'ai plus revu ce document.

 28   M. LE JUGE MINDUA : Il est adressé au département de la Défense parce que

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  1   en fait l'autorité à laquelle vous avez adressé cette lettre de

  2   protestation pouvait être en mesure non seulement de libérer les personnes

  3   en question, si elles en avaient le pouvoir mais aussi de dire les raisons

  4   pour lesquelles les personnes ont été arrêtées ou détenues ou déplacées,

  5   selon le terme que vous préférez. Vous dites qu'après autant d'années, vous

  6   ne vous rappelez plus quelle personne -- quelle autorité exactement vous

  7   avez bien saisie; c'est bien ça ?

  8   R.  Je ne sais vraiment pas quand est-ce que j'ai rédigé ce document. Il

  9   s'est passé 16 ans.

 10   Mais je me souviens de l'arrivée de cette femme docteur. Je sais que nous

 11   avons rédigé ce document. Je crois que c'est mon chauffeur qui l'avait

 12   emmenée là-bas. Il s'est passé 16 ans. Maintenant, si vous me demandiez de

 13   prêter serment, je devrais faire une halte parce que 16 ans c'est long pour

 14   qu'il y ait des événements que l'on s'est efforcé d'oublier.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci beaucoup.

 16   Bien. Monsieur le Procureur.

 17   M. LONGONE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Document P

 18   03064.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. L'interprétation n'a pas fonctionné. Je disais

 20   que nous ferons la pause dans cinq minutes.

 21   M. LONGONE : [interprétation] Sinon, on le voit sur le prétoire

 22   électronique. Monsieur l'Huissier, merci.

 23   Q.  C'est un ordre, 1er juillet 1993, donc presque un mois après le mois de

 24   mai 1993. C'est un ordre et j'aimerais vous le lire :

 25   "Ordre : basé sur la requête de M. Ante Kvesic, commandant de l'hôpital de

 26   guerre et général de Mostar, et afin de fournir l'anesthésie et le sang

 27   pour la transfusion nécessaire, les personnes suivantes ont été

 28   transportées `Zeljko Coric, officier de communication qui va les emmener

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  1   sur leurs lieux de travail :"

  2   Mujo Duric, Zlatko Kazazic, Zlatko Taslaman. Autorisé et approuvé par

  3   Berislav Pusic.

  4   Vous avez dit et c'était mentionné dans le rapport, qu'il y avait besoin

  5   d'anesthésistes. Où étaient ces personnes, Monsieur ? D'où les emmenaient-

  6   on ?

  7   R.  Il s'agit de gens qui travaillent dans mon hôpital et j'ai demandé à ce

  8   qu'ils soient ramenés parce que de façon évidente, ils se trouvaient à

  9   l'Heliodrom. Je répète, donc. Vous avez dit au bout d'un mois. Je ne sais

 10   pas quand est-ce qu'ils ont été emmenés. Ils n'ont pas été emmenés les

 11   premiers jours mais peut-être plus tard. Alors à chaque fois qu'on venait

 12   me dire que l'un des employés de l'hôpital avait été emmené où que ce soit,

 13   je réagissais et je demandais à ce qu'on les ramène. Je dis toujours et

 14   ceci est évident dans le cas concret.

 15   Je ne sais pas à qui j'ai envoyé cette demande parce que je ne vois pas,

 16   puis je n'arrive à m'en souvenir. Mon ardoya [phon] est quelque peu

 17   différemment constitué. J'aimerais que vous retrouviez ma demande pour que

 18   celle-ci soit commandée, non pas cet ordre. Mais ça doit exister

 19   certainement à l'hôpital chez moi.

 20   Q.  Monsieur, malheureusement, je ne l'ai pas avec moi aujourd'hui, mais ce

 21   qui est important ici, c'est à propos de votre demande. Ces personnes qui

 22   étaient à l'Heliodrom étaient libérées en juillet et elles sont retournées

 23   au travail pour fournir l'anesthésie et la transfusion de sang nécessaire.

 24   R.  Inexact. J'ai prié qu'on les relâche. L'ordre a été donné par quelqu'un

 25   d'autre. Moi, j'ai fait une demande. C'est bien ce qui est écrit parce que

 26   "ordre" et "demande," ce n'est pas la même chose comme on a commandé. En

 27   langue croate du moins, c'est le cas.

 28   Q.  Vous souvenez-vous pourquoi ces personnes ont été arrêtées et envoyées

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  1   à l'Heliodrom ?

  2   R.  Je n'en ai aucune idée. Moi, mon intervention est arrivée lorsque j'ai

  3   appris qu'ils n'étaient pas au travail et j'ai demandé à ce qu'on les

  4   relâche. J'ai obtenu à ce qu'ils soient relâchés mais je n'ai pas enquêté.

  5   Comment voulez-vous que je sache pourquoi on a mis quelqu'un sous

  6   investigation ou pourquoi quelqu'un est suspect ou pas ?

  7   Q.  Monsieur, seriez-vous d'accord avec moi que seulement le personnel

  8   médical indispensable qui étaient des Musulmans de Bosnie et qui étaient

  9   arrêtés à l'Heliodrom étaient les seuls qui ont été relâchés pour

 10   travailler dans votre hôpital par raison d'un manque d'anesthésistes,

 11   chirurgiens ou d'autre personnel médical ?

 12   R.  C'est inexact. J'ai demandé à tous ceux que l'on ait parce que, sur la

 13   première liste, les personnes n'étaient pas toutes des Bosniennes. J'ai

 14   demandé tout le personnel de l'hôpital, armée ou que ce soit. A chaque fois

 15   que j'obtenais une information disant qu'il n'était pas là, et je voudrais

 16   que ce soit pris en considération de cette façon-là.

 17   M. LONGONE : [interprétation] J'ai un document de plus avant la pause,

 18   Monsieur le Président, si vous me le permettez. P 02377. P 02377.

 19   Q.  Monsieur, c'est une liste de personnel pour le service d'Ingénierie et

 20   la Maintenance des lieux dont le travail est indispensable pour l'hôpital

 21   militaire régional de Mostar. Vous avez des noms : Emir Disdarevic, Elvir

 22   Selimotic, Sule Drljevic, qui n'était pas là. Il est mentionné : Mirsad

 23   Grebovic, Dzemal Behram. Signé par le Dr Ante Kvesic.

 24   Ces personnes étaient donc au moins indispensables pour le fonctionnement

 25   de l'hôpital, n'est-ce pas ?

 26   R.  Bien sûr. Parce qu'à l'hôpital, il n'y a pas que l'anesthéologie. Il

 27   fallait entretenir les installations de chauffage --

 28   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Je m'excuse de devoir intervenir,

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  1   mais je signale que la traduction du cachet sous le nom de Dr Kvesic, en

  2   anglais, est mauvaise parce que le cachet original dit : "République

  3   Bosnie-Herzégovine, Communauté croate d'Herceg-Bosna, Mostar, hôpital de

  4   guerre régional, secteur de la Santé, département de la Défense."

  5   En version anglaise, on dit qu'il s'agit du cachet de l'administration de

  6   la Police militaire. Je parle de celui du haut de cachet, et je pense que

  7   c'est important de le remarquer. Merci.

  8   M. LONGONE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Merci, Maître.

 10   M. LONGONE : [interprétation]

 11   Q.  Encore une fois, nous avons dit la liste des personnes qui étaient

 12   anesthésistes, des chirurgiens, spécialistes de transfusions de sang et des

 13   ingénieurs qui étaient indispensables pour le fonctionnement de l'hôpital

 14   HVO.

 15   Est-il vrai, Monsieur, que le personnel médical bosnien musulman ont été

 16   relâchés de l'Heliodrom, ils ont été relâchés parce qu'ils étaient

 17   indispensables pour le fonctionnement de l'hôpital HVO ?

 18   R.  C'est absolument inexact. Dans une partie, et je n'arrive pas à m'en

 19   souvenir, par exemple, en gynécologie, il y avait sept personnes portant le

 20   même nom de famille. C'était une famille entière. Il manque la femme

 21   docteur qui n'a pas été emmenée, qui était au travail. Donc j'ai demandé à

 22   ce que tous ces gens soient ramenés et dans tous ces cas de figure, je ne

 23   voulais pas savoir s'ils travaillaient ici ou là. Par exemple, vous avez

 24   gynécologie en premier sur la liste, et vous allez voir que la femme

 25   docteur manque sur la liste, mais elle était de permanence à l'hôpital.

 26   Pour moi, ce qui importait, c'est de savoir que quelqu'un manquait à

 27   l'appel, et à chaque fois que je pouvais le faire, j'aidais.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire la pause.

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  1   Monsieur le Procureur, il vous reste 10 minutes. Pendant la pause, voyez

  2   comment vous allez vous organiser pour que dans les dix minutes, vous

  3   introduisiez des documents que vous n'avez pas abordés encore.

  4   Voilà. Donc nous nous retrouverons dans 20 minutes.

  5   --- L'audience est suspendue à 17 heures 33.

  6   --- L'audience est reprise à 17 heures 57.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, il vous reste dix minutes,

  8   comme je vous l'ai dit.

  9   M. LONGONE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   Q.  Monsieur Docteur, j'aimerais qu'on revienne au document que vous avez

 11   discuté avec le conseil au début de votre témoignage 2D 00566. 2D 00566.

 12   Est-ce que vous l'avez devant vous ce document ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  C'est la liste des membres de l'ABiH blessés qui a été envoyée de

 15   l'hôpital de Mostar à Split et vous avez dit au début de votre témoignage

 16   que certains étaient de l'ABiH et d'autres, non, mais vous avez dit qu'ils

 17   étaient transférés de Mostar à Split pour plus de traitement.

 18   Je voudrais vous demander : connaissez-vous les circonstances, par exemple,

 19   dans lesquelles Saric, Senad, qui est numéro 5 sur cette liste, a été

 20   blessé ? Est-ce que vous vous rappelez ?

 21   R.  Non, je ne peux parler que du diagnostic pour ce qui est de la gravité

 22   des blessures, mais pour ce qui est des sites et des circonstances, je ne

 23   sais vraiment pas. Je le dis parce que tous ces gens-là ont été transférés

 24   vers Split, et ce fait, c'était quelqu'un de grièvement blessé. Nous ne

 25   pouvions pas en prendre soin nous-mêmes, regarder les fractures du bassin,

 26   des vertèbres, puis il est immobilisé donc ce sont des blessés graves. On

 27   les a temporairement soignés afin que leur vie ne soit pas mise en péril et

 28   on les a transférés à Split pour qu'ils soient soignés comme il se devait.

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  1   Alors vous nous avez dit que certains étaient -- et certains n'étaient pas

  2   membres de l'ABiH, mais le titre dit que c'était tous des membres de

  3   l'ABiH. Alors je ne sais pas si des fois il manque des éléments. Ça dépend

  4   de celui qui a inscrit ces noms. Mais c'était des personnes qui étaient

  5   grièvement blessés, nous les avons transportés à Split aux fins de leur

  6   permettre d'être soignés comme il se devait.

  7   Q.  Je vous remercie, Monsieur. J'aimerais vous demander de garder ce

  8   document avec vous, et de vous concentrer sur le suivant qui est lié à ce

  9   document qui est pièce P 03936. Vous le voyez en format électronique ? P

 10   03936. L'avez-vous devant vous, Monsieur ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ce rapport du 4 août 1993, nous voyons que le 5 août ces personnes on

 13   dit que Saric a été transféré donc c'est un document qui date d'un jour

 14   avant 4 août, qui dit que : "Senad Saric, le détenu, a été blessé lorsqu'il

 15   travaillait pour la Brigade d'assaut léger."

 16   Est-ce que vous le voyez ?

 17   Le voyez-vous ?

 18   R.  Mais quelle est votre question ? Que suis-je censé dire ?

 19   Q.  Ma question est de voir que la personne que vous avez mentionnée ici

 20   c'est Senad Saric, les circonstances dans lesquelles il a été blessé.

 21   R.  S'agissant des circonstances je n'en sais rien, je vous l'ai déjà dit.

 22   Nous avons accueilli un patient à l'hôpital, une fois qu'il est arrivé à la

 23   porte de l'hôpital et on a fait avec -- on savait faire avec pour ce qui

 24   est des circonstances je ne peux pas vous commenter, je peux juste émettre

 25   des hypothèses mais je ne sais rien vous dire, rien de plus.

 26   Q.  Monsieur, nous avons toujours ce document 2D 00566. Voyons un autre

 27   patient musulman qui a été transféré le 15 août 1993, Kadus Anija [phon],

 28   il a été transféré le 15 août.

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  1   M. LONGONE : [interprétation] J'aimerais demander que le greffier montre le

  2   document P 04157.

  3   Q.  Ce document est daté du 13 août 1993 où la personne a été transférée le

  4   15 août 1993 pour plus de traitements. Il est dit ici que Nijaz Kladusa

  5   était blessé par l'armée de BH et a été gardé pour le traitement. Nous

  6   allons poursuivre avec un autre document lié à cette liste, le numéro 10 de

  7   cette liste de personnes, que vous avez certifiées qui ont été sévèrement

  8   blessées et ont été transférées à Split. Kurtovic, Mirsad, la pièce P 04668

  9   de l'Accusation, P 04668. C'est un document du 31 août 1993, et le 2

 10   septembre 1993, M. Mirsad Kurtovic a été transféré à Split, et dans le

 11   rapport de M. Stanko Bozic, il est dit qu'il a été blessé lorsqu'il

 12   travaillait en tant que détenu par un tireur embusqué.

 13   Ma question est de savoir si vous vous souvenez si de nombreuses personnes,

 14   ou des Bosniaques qui ont été transférés pour traitement à votre hôpital

 15   étaient des Musulmans qui ont été transférés de l'Heliodrom, ceux qui

 16   étaient transférés avec ces blessures graves.

 17   R.  C'est déjà la dixième fois que je dis deux choses : j'étais commandant

 18   de l'hôpital, et à l'hôpital, on emmenait qui il fallait, et on a pris soin

 19   de tout un chacun. A l'extérieur de l'hôpital, moi, je ne me suis mêlé de

 20   rien. Je ne sais pas vraiment, pas comment et où ces gens-là ont été

 21   blessés. Je l'ai dit une fois, deux fois, dix fois. Je le dirai à chaque

 22   fois parce que cela est ainsi, mon travail ne consistait pas à l'apprendre.

 23   Je n'étais pas à la police, ni l'une, ni l'autre. J'étais docteur qui

 24   cherchait à approvisionner l'hôpital et à faire son travail et nous avons

 25   fait notre travail. Nous n'avons jamais omis de faire tout ce qui était en

 26   notre pouvoir. Enfin je pense que de me poser des questions dont je ne sais

 27   rien vous dire n'est dénué de sens. Ce n'est pas dit dans les documents, je

 28   n'ai pas participé à cette partie-là du travail; moi, j'interviens depuis

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  1   l'arrivée du patient à l'hôpital jusqu'à son envoi vers Split.

  2   Q.  Très bien, Monsieur. Nous allons nous concentrer maintenant sur la

  3   pièce P 00546.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends très bien. Prenons un blessé que vous

  5   avez peut-être opéré, je ne sais pas. Bon, les médecins normalement vont le

  6   voir après, ils vont discuter avec lui comment va son état; est-ce que

  7   l'évolution est positive ? Est-ce que ça se passe bien ? Est-ce qu'il a de

  8   la fièvre ? Puis dans votre métier de médecin, il y a une dimension

  9   psychologique également. Il faut parler avec le malade. Le malade ce n'est

 10   pas un objet. Donc quelqu'un qui est blessé par un tir de sniper et qui est

 11   hospitalisé ou opéré, bon, il va dire oui j'ai reçu une balle; je ne sais

 12   pas d'où ça vient et à ce moment-là le médecin va discuter avec lui. Ça ne

 13   se passait pas comme ça dans votre hôpital ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis absolument d'accord avec vous pour ce

 15   qui est de relevé le moral psychologique d'un patient. Mais on ne va

 16   certainement pas lui améliorer le moral si on lui parle du sniper qui l'a

 17   touché. Il faut qu'il ait la volonté de continuer à vivre et non pas la

 18   perdre parce que, dans la guerre, il y en a beaucoup, qui a reçu des balles

 19   ou des éclats d'obus. Alors je répète et j'émets des réserves pour ce qui

 20   est de ce qui s'est passé là où je n'étais pas. Moi, je ne peux parler que

 21   de ce que j'ai vu, de ce que je sais. C'est ce qui s'est passé à l'hôpital.

 22   Je n'ai jamais rien fait à l'extérieur de l'hôpital. Là, je vous prie de

 23   comprendre que je ne vois pas en quoi même de me faire parler de ce que je

 24   n'ai pas fait. C'est la dixième fois que je dis que je ne le sais pas. J'ai

 25   dit que j'ai travaillé à l'hôpital, je suis disposé à répondre à tout ce

 26   qui concerne l'hôpital pour ce qui est du reste je n'en sais rien.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Si vous ne savez pas, vous ne le savez pas.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Juste une question supplémentaire :

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  1   est-ce que ces patients, vous les aurez vus personnellement, ou est-ce

  2   qu'après tout, vous étiez le commandant de l'hôpital avec ces tâches

  3   administratives énormes ? Dans quelle mesure étiez-vous impliqué dans

  4   l'activité médicale pour ainsi dire ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] L'hôpital comportait deux volets. L'un

  6   consistait à l'approvisionner pour qu'il y ait de quoi à travailler, et de

  7   deux, assurer le personnel qui savait faire. Je vous ai dit que j'étais

  8   médecin en médecine interne et je n'ai pas travaillé avec les patients.

  9   Mais j'étais là pour le soutien logistique pour assurer tout ce qui fallait

 10   pour que les gens puissent travailler. Donc je cherchais à assurer des

 11   vivres pour les patients, pour le personnel sous forme de donation, et

 12   cetera. Nous avions des problèmes. On n'avait pas de carburant. On n'avait

 13   pas de pneus. On n'avait pas d'argent. Donc je m'efforçais de faire

 14   survivre l'hôpital. D'autres personnes étaient chargées du travail avec les

 15   patients, et comme je suis assez vif, j'allais voir les patients, ça

 16   m'intéressait. Mais je n'ai pas travaillé en tant que docteur jusqu'en

 17   1994, date à laquelle je suis retourné vers ma profession où je suis

 18   intervenu dans la chirurgie des enfants, et c'est ce que je fais de nos

 19   jours encore. 

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Procureur, votre temps est quasiment

 22   terminé. Donc posez une dernière question. 

 23   M. LONGONE : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur, nous allons regarder la pièce P 05465 -- P 05465. Il s'agit

 25   d'une lettre qui a été adressée par Stanko Bozic à votre supérieur, Ivan

 26   Bagaric. Vous pouvez voir la date du 29 septembre 1993, et ce concernant le

 27   travail qui est fait à votre hôpital puisqu'il allait être -- en subir les

 28   conséquences. Il donnait des informations concernant le traitement de

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  1   certains détenus qui ont été grièvement blessés ou malades étant donné les

  2   mauvaises conditions de vie. Donc il est demandé que ces personnes puissent

  3   être transférées et traitées à l'hôpital étant donné la visite prochaine du

  4   CICR; sinon, autrement il y aurait une très mauvaise impression donnée de

  5   la prison centrale militaire qui serait mauvais pour les Croates.

  6   Voici ma question : est-ce que vous saviez que les patients musulmans, que

  7   vous traitiez, avaient été blessés pendant les travaux forcés qu'ils

  8   effectuaient à l'Heliodrom ?

  9   R.  C'est déjà la cinquième fois que vous essayez de m'interroger au sujet

 10   de quelque chose que j'ignore, et j'ignore véritablement. Je sais que

 11   chaque fois lorsque quelqu'un avait besoin d'amener un patient à l'hôpital,

 12   il a pu le faire, quelle que soit la provenance de la personne. Mais

 13   concernant les circonstances, je n'en sais rien et je vous en prie de

 14   m'interroger pas sur des événements dont je n'avais absolument aucune

 15   connaissance. Je n'ai jamais été à l'Heliodrom durant toute ma vie et même

 16   après la guerre.

 17   Je le répète, j'étais à l'hôpital et j'avais à peine le temps de

 18   m'acquitter de cette tâche-là, et nous avions la plupart du temps nous

 19   manquions de tout. Je n'avais même pas le temps d'aller voir mes enfants à

 20   la maison. J'essayais de faire mon propre travail au mieux, et j'ignorais

 21   tout de ce qui pourrait être le travail de quelqu'un d'autre, surtout si

 22   c'était un travail qui n'avait rien à voir avec le mien. Quelle que

 23   personne que ce soit qui se soit présenté à l'hôpital, il a été reçu et

 24   traité. Nous n'avons jamais omis de réagir de la façon appropriée.

 25   Malheureusement, nous étions dans une situation où nous avons dû enterrer

 26   certains de nos propres collaborateurs, des techniciens de laboratoire, des

 27   infirmiers et des personnes ont été blessées. Nous avions 6 à 7 000 blessés

 28   à l'hôpital et vous pouvez imaginer quelles étaient les circonstances dans

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  1   lesquelles nous travaillons lorsque le bâtiment avait été endommagé.

  2   Alors vous continuez à m'interroger sur un endroit où je ne me suis jamais

  3   rendu, concernant des événements au sujet desquels j'ignore tout. Je suis

  4   désolé mais c'est tout ce que je peux vous dire.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question de suivi qui ne

  6   doit pas poser de gros problème pour vous. Dans cet hôpital où il y avait

  7   des malades, est-ce que les organisations internationales, Croix-Rouge ou

  8   autres, venaient rendre visite aux malades quels qu'ils soient d'ailleurs,

  9   Croates, Musulmans, Serbes ? Est-ce qu'ils venaient rendre visite ? Est-ce

 10   que l'accès était libre ? Est-ce qu'ils avaient le droit de circuler dans

 11   cet hôpital et est-ce qu'ils avaient des entretiens de manière

 12   confidentielle entre le malade et le visiteur de ces organisations

 13   internationales ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils en avaient la possibilité et, à cet

 15   égard, ils pouvaient procéder exactement comme ils le souhaitaient. Je

 16   répète qu'il n'y avait pas de portière à l'entrée, l'entrée principale qui

 17   donnait sur la rue était ouverte, l'hôpital était ouvert et d'ailleurs les

 18   journalistes aussi trouvaient porte ouverte à l'hôpital. D'ailleurs des

 19   milliers et des milliers de mètres de pellicules sont disponibles, des

 20   images qui ont été tournées par différentes équipes de journalistes, nous

 21   n'avons jamais essayé de restreindre l'accès à qui que ce soit, et je suis

 22   fier de ce que notre hôpital a réussi à faire pendant cette guerre. C'était

 23   absolument ouvert pour tous.

 24    M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il n'y avait pas de gardes qui empêchaient

 25   l'entrée, n'importe qui pouvait rentrer à l'hôpital et voir qui il voulait,

 26   évidemment, dans le cadre des heures réservées aux visites; c'est bien ça ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Veuillez bien croire que, dans notre hôpital,

 28   il était possible d'y entrer à tout moment. Bien sûr à l'exception de la

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  1   nuit pendant laquelle les patients dormaient. Tout d'abord, lorsque les

  2   gens venaient, ils amenaient aussi quelque chose aux patients. Ils leur

  3   ramenaient -- ils amenaient quelque chose pour la personne à qui ils

  4   rendaient visite. Il ne faut pas oublier que notre hôpital fonctionnait

  5   dans des conditions effroyables. Les gens étaient étonnés de voir les

  6   conditions dans lesquelles nous travaillons et le fait que parallèlement

  7   l'hôpital était ouvert, accessible à tous, à tout moment.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica, vous avez des questions

  9   supplémentaires ?

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ce sera très

 11   bref. Je sais que cela est pris sous mon propre temps, donc je

 12   m'efforcerais d'être très brève, pour passer en revue, avec le témoin, deux

 13   sujets. 

 14   Nouvel interrogatoire par Mme Nozica :

 15   Q.  [interprétation] Monsieur Kvesic, je vais vous montrer dans le prétoire

 16   électronique un document que vous n'avez donc pas besoin de chercher, cela

 17   ira plus vite. C'est le document P 05939. Je vais vous rappeler qu'il

 18   s'agit de cette lettre de protestation que vous avez co-signée avec M.

 19   Bagaric, liée à une femme médecin qui était employée chez vous, Mme

 20   Slavenka Travjanin, et son père. Voilà, vous avez le document qui

 21   s'affiche. Je vous prie de me répondre brièvement. Est-ce que ce qui devait

 22   être entrepris, cette protestation émanant de vous l'a été, et est-ce que

 23   vous avez connaissance qu'une enquête ait été ouverte concernant ces

 24   événements, cette affaire ?

 25   R.  Lorsque cette tragédie s'est produite concernant le Dr Travjanin, je

 26   regrette que M. le Procureur m'a interrogé au sujet du nom de son père que

 27   je n'ai jamais rencontré, mais j'ai dit que je ne savais pas qu'il

 28   s'agissait. C'était l'un des pires jours pour notre hôpital car c'était

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  1   l'un de nos meilleurs médecins, un médecin remarquable que les patients

  2   adoraient. C'était une femme magnifique qui travaillait au service de la

  3   Dialyse. Lorsqu'elle a été tuée, le quartier général médical avec M.

  4   Bagaric, nous avons essayé de faire tout ce qui était en notre pouvoir pas

  5   seulement sur courrier mais également de faire des pétitions et nous avons

  6   demandé également au ministre de la Défense d'agir. M. Bruno Stojic a

  7   convoqué des réunions d'urgence afin d'essayer de retrouver ce qui s'était

  8   passé avec Mme Travjanin, et l'assassinat dont elle avait été victime. Je

  9   pense qu'il y a eu une enquête de diligentée mais je ne sais pas qui -- je

 10   ne sais pas si son meurtrier n'a jamais été retrouvé. Je n'avais pas accès

 11   à cette information. Je dois dire que c'était la première fois que je me

 12   suis rendu sur le site d'un cimetière musulman, ultérieurement et que j'ai

 13   tenu donc à cette occasion une oraison funèbre pour le Dr Travjanin.

 14   C'était particulièrement difficile car c'était une femme magnifique

 15   et nous avions énormément de respect pour elle. Nous ne souhaitions surtout

 16   pas qu'une chose pareille puisse encore se produire, et puisse arriver à

 17   qui que ce soit d'autre. Je me souviens qu'il y a eu une réunion d'urgence

 18   convoquée par le ministre et qu'on a demandé au ministère de l'Intérieur et

 19   à la police militaire de procéder à une enquête. Donc je sais qu'elle a été

 20   diligentée mais je ne sais pas si le perpétrateur [phon] a été retrouvé ou

 21   non.

 22   Q.  Je voudrais que l'on en reste à ce document. Je vais vous dire

 23   pourquoi je pose cette question. Vous avez dit quelque chose au sujet d'un

 24   autre document, très semblable, quasiment identique avec le même tampon, le

 25   même numéro de référence -- le numéro d'enregistrement, émanant du même

 26   département, alors c'est le P 02367. A la réponse du Juge Mindua, vous avez

 27   dit qu'il s'agissait d'un document qui avait été adressé au département de

 28   la Défense. Or, il est écrit ici département de la Défense, secteur de la

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  1   Santé, et il est adressé personnellement à M. Stojic, n'est-ce pas, car

  2   l'en-tête dit, n'est-ce pas, qu'un tel document a bien été envoyé ? Vous

  3   êtes d'accord, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Je voudrais maintenant que nous passions à ce qui s'est passé

  6   avec l'enquête même très brièvement. Vous avez ce document dans le classeur

  7   du Procureur, mais peut-être irons-nous plus vite si nous passons par le

  8   prétoire électronique.

  9   Mme NOZICA : [interprétation] Je voudrais que nous reportions au document P

 10   7035.

 11   Q.  Alors je voudrais juste qu'on ait également le numéro de référence du

 12   document, c'est un document qui se trouve dans le classeur du Procureur.

 13   C'est une pièce à conviction et nous avons ici des informations concernant

 14   des actes criminels à HZ HB datés du 4 décembre 1993.

 15   Mme NOZICA : [interprétation] Je voudrais que l'on fasse afficher la page

 16   12 en version anglaise et en version croate, c'est le numéro ERN 0102-9700.

 17   Q.  Alors, Monsieur Kvesic, vous voyez la note qui correspond à la date du

 18   18 octobre, s'il vous plaît; c'est la dernière, et il est dit :

 19   "Jour du 18 octobre 1993, dans la rue Mahe Djikica, au numéro 11, Ahmed

 20   Mujic et sa fille, Slavenka Mujic Travljanin, ont été tués, perpétrateur

 21   inconnu, enquête diligentée."

 22   Est-ce que cela a trait à ces événements ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Très bien. Maintenant je voudrais que nous revenions au document au

 25   sujet duquel le Juge Mindua vous a interrogé. C'est le P 2367. C'est bien

 26   celui-là. Le Juge Mindua vous a demandé : à qui ce document avait été

 27   adressé ? Au compte rendu d'audience, ligne 3 de la page 72, vous avez

 28   répondu : "Qu'il s'agissait du département de la Défense."

Page 37476

  1   Mme NOZICA : [interprétation] Mais je voudrais que l'on descende un peu

  2   dans la version croate, dans l'affichage électronique, afin que le témoin

  3   n'ait pas à le chercher dans la liasse -- ou plutôt, il s'agit de remonter

  4   un peu dans le document.

  5   Q.  Il est dit : département de la Défense, secteur de la Santé. nous

  6   voyons le même numéro d'enregistrement. Alors, Monsieur Kvesic, est-ce que

  7   ce document émane du secteur de la Défense, ou est adressé au secteur de la

  8   Santé du département de la Défense ?

  9   R.  Il émane du secteur de la Santé. Alors je dois dire que je m'y retrouve

 10   assez mal dans toutes ces questions administratives et juridiques en

 11   général dans la vie; par conséquent, il est très facile pour moi de me

 12   retrouver dans une situation de confusion comme ce que nous avons ici

 13   maintenant. Le secteur de la Santé était une partie intégrante du

 14   département de la Défense et nous avons envoyé cette lettre à

 15   l'administration de la police militaire.

 16   Q.  Pour finir, je voudrais vous demander, Monsieur Kvesic, la chose

 17   suivante : M. le Procureur vous a parlé du serment d'Hippocrate, et je

 18   voudrais que vous disiez à présent aux Juges de la Chambre si aucun des co-

 19   accusés ici présents - et je citerai aussi M. Prlic, M. Coric, et M.

 20   Petkovic, qui ne sont pas présents - ou parmi les présents, donc M.

 21   Praljak, M. Pusic, ou M. Stojic; est-ce qu'aucune de ces personnes ne vous

 22   a jamais fait la moindre remarque allant dans le sens que vous ne devriez

 23   pas travailler de la façon qui était votre façon de travailler ? Ou bien

 24   est-ce qu'ils vous soutenaient dans votre façon de travailler, si toutefois

 25   vous aviez des contacts avec eux ?

 26   R.  Oui, tout à fait.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Nozica, à quelle question du

 28   contre-interrogatoire se réfère cette question ? Parce que vous êtes

Page 37477

  1   limitée lors des questions supplémentaires aux points qui ont été soulevés

  2   pendant le contre-interrogatoire et il me semble quant à moi que ce ne soit

  3   pas le cas ici présent.

  4   Mme NOZICA : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, c'est le cas, c'est

  5   lié. Je veux juste vous le rappeler, le Procureur a dit, Vous avez prêté

  6   ces serments d'Hippocrate, mais qu'en est-il de la politique conduite par

  7   les autres. Je ne peux certainement pas me tromper avec cette question.

  8   S'il est nécessaire de vous donner la référence exacte nous vous référerons

  9   à la page exacte, mais mes collègues me soutiennent et le témoin sait de

 10   quoi nous sommes en train de parler et que je ne me suis pas trompée.

 11   Q.  Je voudrais vous demander, Monsieur le Témoin, si vous pouvez nous

 12   confirmer --

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Le Procureur avait en fait --

 14   s'était arrêté avant de finir sa phrase. Je comprends bien ce que vous

 15   entendez là continuez donc.

 16   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Il est assez

 17   important pour moi que la question ait été versée au compte rendu

 18   d'audience, car en tant que telle elle a déjà sa valeur propre. Je voudrais

 19   que le témoin nous donne un éclaircissement.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Les médecins prêtent toujours le serment

 21   d'Hippocrate de façon solennelle, et il travaille tout au long de leur

 22   carrière sous ce serment. Au sein de l'hôpital pendant la guerre, nous

 23   n'avons jamais été dans une situation où nous nous serions vus dire de

 24   travailler de telle façon ou de telle autre par quelqu'un. Nous avons

 25   simplement essayé d'apporter notre aide à toutes les personnes qui en

 26   avaient besoin, et nous n'avons reçu que des compliments pour notre travail

 27   et je pense que nous pouvons en être fiers, et que cela nous le méritions.

 28   Je le répète, que tous côtés, le corps médical a été tout à fait à la

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  1   hauteur de ce que l'on pouvait attendre de lui.

  2   Mme NOZICA : [interprétation]

  3   Q.  Quand vous parlez de ces personnes, Monsieur le Témoin, vous pensez-

  4   vous aux personnes que j'ai citées, j'ai intentionnellement cité six

  5   personnes précises ?

  6   R.  Oui, entre autres. Je pense au ministre de la défense qui a permis

  7   l'utilisation des moyens logistiques complets qui étaient disponibles à

  8   Grude, nous avons reçu des pneus, de la nourriture, l'équipement dont nous

  9   avions besoin, le carburant, et au moment où nous en avions besoin.

 10   L'hôpital recevait de l'aide et du soutien et il avait feu vert absolument

 11   pour faire le travail qui était le sien et de la façon que nous avions

 12   choisi, et à aucun moment personne n'est venu nous dire de travailler d'une

 13   autre façon.

 14   Merci, Monsieur le Témoin.

 15   Mme NOZICA : [interprétation] Ceci conclut mes questions supplémentaires.

 16   M. KOVACIC : [interprétation] Si vous souhaitez cette référence à laquelle

 17   ma consoeur se référait à propos du serment d'Hippocrate, j'ai vérifié.

 18   C'est la page 53, et la question se trouve en ligne 7, et ensuite la

 19   question suivante se trouve en ligne 13 de cette même page. Ma consoeur

 20   avait raison.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 22   Monsieur le Témoin, au nom de mes collègues, je vous remercie d'être venu

 23   apporter votre témoignage à la demande de la Défense Stojic. Je vous

 24   formule mes meilleurs vœux de retour dans votre pays et, bien entendu, la

 25   continuation de votre métier que vous exercez actuellement. Je vous

 26   remercie et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous

 27   raccompagner.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur les

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  1   Juges.

  2   [Le témoin se retire]

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Je crois que M. Stringer et Me Alaburic vont

  4   intervenir, mais avant qu'ils interviennent, pour la semaine prochaine,

  5   nous avons donc deux témoins. Un premier témoin, dont je ne donne pas le

  6   nom, qui est prévu pour deux heures d'interrogatoire principal, il

  7   témoignera lundi et mardi; et le deuxième témoin prévu pour deux heures, il

  8   témoignera mercredi et jeudi. Donc tout ça est bien cadré.

  9   Monsieur Stringer.

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous prie, de bien vouloir m'excuser, M.

 11   Stringer m'a permis juste d'intervenir brièvement.

 12   Messieurs les Juges, je suis un peu préoccupé aujourd'hui car j'ose espérer

 13   que cet événement tragique, qui s'est produit à l'aéroport de Schiphol à

 14   Amsterdam, ne va pas perturber la possibilité qui est celle de notre témoin

 15   de venir -- d'arriver après demain. Je voudrais juste avertir du fait que,

 16   si les moindres difficultés apparaissaient, bien évidemment, j'en avertirai

 17   la Chambre dès que possible.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut espérer que l'aéroport va fonctionner que

 19   donc les vols vont reprendre et votre témoin arrivera. Je ne pense pas

 20   qu'il y ait une inquiétude quelconque à avoir.

 21   Monsieur Stringer.

 22   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   Bonsoir à tout le monde dans ce prétoire. Monsieur le Président, je suis

 24   debout pour demander, au nom du Procureur, la permission de la Chambre pour

 25   pouvoir faire une réponse orale brève à la soumission écrite qui a été

 26   soumise par la Défense. Là, je me réfère à la réponse conjointe de la

 27   requête du Procureur pour exclure les pièces qui ne sont pas pertinentes

 28   offertes par Bruno Stojic -- au témoin de Bruno Stojic et le nom du témoin

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  1   qui va être là mercredi prochain. Je ne veux pas dire son nom.

  2   C'est une réponse à ma soumission qui a été faite par le Procureur la

  3   semaine dernière le 19 qui est liée à ce témoin, ce témoin est prévu pour

  4   témoigner mercredi prochain, et notre demande, et si la Chambre me permet

  5   aujourd'hui de faire une réponse orale et de quelques commentaires pour la

  6   Chambre et la considération de la requête de -- donc le Procureur.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous savez qu'en théorie, la Chambre est hostile à

  8   toutes les répliques parce que bien souvent les répliques n'apportent rien

  9   sinon à faire perdre le temps à tout le monde. Bon. A moins que votre

 10   réplique est tellement importante que vous êtes obligées de la faire.

 11   M. STRINGER : [interprétation] Je ne serais pas debout si je ne pensais pas

 12   être obligé de le faire, Monsieur le Président. Peut-être pour être très

 13   bref -- une simple remarque et en venir à l'essentiel pour dire très, très

 14   rapidement, plus rapidement que je ne l'avais prévu. Voici. Sans entrer sur

 15   le fond, nous mettons en doute la pertinence de ce qui semble être le

 16   témoignage du témoin. Ce que nous dirions en réponse c'est que si la

 17   Chambre et si l'Accusation était encore en possession d'un résumé du témoin

 18   suffisant qui nous permettrait de savoir ce que va dire le témoin sur les

 19   questions qui ont été identifiées par l'Accusation dans sa requête, il ne

 20   serait pas nécessaire pour la Chambre d'attendre que le témoin vienne

 21   témoigner avant de décider si oui ou non son témoignage est pertinent.

 22   C'est ça le principal point de la réponse à savoir que c'est un

 23   préliminaire que nous devons tous attendre que le témoin soit là et qu'on

 24   entende son témoignage avant que la Chambre ne puisse déterminer si celui-

 25   ci est pertinent ou non. L'Accusation rejette cet argument.

 26   Nous pensons que le processus du 65 ter est un processus qui permet à

 27   la Chambre de prendre des décisions quant au temps imparti pour le

 28   témoignage de témoin d'après les résumés et à tout moment peut exclure le

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  1   témoignage si elle estime que le témoignage ne va pas être pertinent.

  2   Nous soumettons par conséquent que, d'après les informations que nous

  3   avons tous à notre disposition concernant ce témoin, la Chambre est en

  4   mesure de prendre une décision quant à la pertinence de ce témoignage

  5   proposé, et que d'ailleurs, elle devrait exclure ce témoignage pour les

  6   raisons que nous avions inclus dans notre requête initiale.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Votre position est enregistrée.

  8   Maître Alaburic.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonsoir, Messieurs les Juges. Bonsoir à

 10   tous et à toutes dans le prétoire.

 11   Aujourd'hui avant le début du procès, le Procureur a rendu -- enfin,

 12   remis une réponse aux écritures de la Défense du général Petkovic pour ce

 13   qui est de la Défense du droit des accusés concernant les éléments de

 14   preuve qui peuvent porter préjudice à sa défense et qui sont présentés par

 15   le témoin d'une autre Défense, et ce, à l'occasion de l'interrogatoire

 16   principal voire encore en répondant aux questions des Juges.

 17   Mais nos collègues de l'Accusation ont présenté une réponse intéressante.

 18   Cela a encouragé le débat pour ce qui est de nouveaux éléments qui n'ont

 19   pas été mentionnés dans notre requête au départ et nous estimons nécessaire

 20   de répondre à la réponse. C'est pourquoi je voudrais présenter une requête

 21   verbale demandant à nous autoriser à répondre et mes collaborateurs

 22   travaillent déjà dessus. Pendant le procès, j'ai remarqué que la Défense de

 23   M. Coric a également présenté une réponse. Nous nous pencherons sur celle-

 24   ci aussi, et si nécessaire de présenter une réponse à cette réponse, je

 25   voudrais que votre décision englobe les deux. C'est la raison pour laquelle

 26   je vous demande à présent de nous autoriser à répondre à ces réponses.

 27   Merci.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors la Chambre, compte tenu de l'intérêt

  2   porté par la Défense Petkovic à ce problème, vous autorise à répondre à la

  3   réponse. Donc c'est avec intérêt que nous vous lirons.

  4   Bien. Tout ayant été dit, comme vous le savez, nous nous retrouverons donc

  5   lundi prochain à 14 heures 15. Je vous souhaite à tous une bonne fin de

  6   journée et à lundi.

  7   --- L'audience est levée à 18 heures 39 et reprendra le lundi 2 mars 2009,

  8   à 14 heures 15.

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