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1 Le mercredi 22 avril 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Les accusés Prlic et Coric sont absents]
5 [Le témoin vient à la barre]
6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appeler le numéro de
8 l'affaire, s'il vous plaît.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Messieurs les
10 Juges. Bonjour à tous.
11 C'est l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : En ce mercredi, je salue en premier Messieurs les
13 accusés. Ensuite Mesdames et Messieurs les avocats. Je salue également
14 Monsieur le Témoin. Je salue tous les représentants du bureau du Procureur
15 et toutes les personnes qui nous assistent.
16 Je vais donner la parole à M. le Greffier qui a un numéro IC à nous donner.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agit
18 de la réponse aux objections de l'Accusation aux documents présentés par le
19 témoin Davor Korac. Il sera donné la pièce IC989.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vous invite quand vous
21 répondez aux questions à parler plus lentement que d'habitude parce que les
22 interprètes ont quelques problèmes. Je vous remercie des efforts que vous
23 pourriez faire en ce sens.
24 LE TÉMOIN : IVAN BAGARIC [Reprise]
25 [Le témoin répond par l'interprète]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je vous salue également à
27 nouveau et je vous donne la parole.
28 M. LAWS : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour à tous ceux qui
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1 sont dans ce prétoire et autour.
2 Contre-interrogatoire par M. Laws :
3 Q. [interprétation] Bonjour à vous, Docteur Bagaric.
4 R. Bonjour.
5 Q. Vous nous avez dit lundi que vous étiez médecin mais que vous étiez
6 également un homme politique; est-ce exact ?
7 R. Oui, on peut dire ça comme ça.
8 Q. Bien. Je voudrais vous poser quelques questions relatives à la
9 politique, si vous permettez, et je voudrais commencer par une réunion qui
10 a eu lieu à Tomislavgrad en décembre 1991. N'est-ce pas ? Ce que je
11 voudrais commencer à faire c'est d'abord m'assurer que nous avons bien le
12 bon Ivan Bagaric parce que vous nous avez dit qu'il pourrait y avoir
13 quelqu'un d'autre qui aurait ce nom en Herceg-Bosna à l'époque. Si on
14 commençait par regarder le premier document dans le classeur qui pour les
15 besoins, vous a été donné, c'est-à-dire P00089. Excusez-moi, le classeur
16 numéro 1. Tous les documents sont dans le classeur numéro 1. Ce qui est
17 dans le classeur numéro 2 ce sont des transcriptions des dépositions du Dr
18 Bagaric dans une autre affaire.
19 Si vous voulez bien regarder, Docteur, le P00089, vous allez voir qu'à la
20 première page on voit qu'il s'agit d'une réunion du 27 décembre 1991 qui
21 était présidée par Franjo Tudjman, et si vous passez maintenant à la page
22 20, il y a en fait très peu de pages là parce que nous avons enlevé les
23 pages d'intermédiaire qui ne nous intéressent pas; si vous passez à une,
24 deux, trois, quatre, cinq pages, vous devriez trouver une page qui contient
25 tout en haut un extrait des procès-verbaux ou minutes de la 2e Session
26 régulière de la présidence de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Voyez-
27 vous
28 cela ?
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1 R. Oui.
2 Q. Ce que vous voyez ici, c'est qu'un collègue, M. Kostroman lit les
3 minutes d'une réunion qui a eu lieu à Tomislavgrad le 27 décembre 1991, et
4 au bas de la page il y a une liste des personnes qui ont pris part au
5 débat. Vous voyez cela ?
6 R. Un instant, s'il vous plaît, je ne vois pas à quoi vous vous référez.
7 Vous parlez de Tomislavgrad, un instant.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois cette partie.
10 M. LAWS : [interprétation]
11 Q. Dans la même page, sur la même page pour le B/C/S ou pour l'anglais,
12 vous voyez cette liste de personnes. Une séance présidée par M. Boban. Vous
13 voyez cela, Mate Boban ? Ensuite à trois lignes du bas de la page, nous
14 voyons votre nom, c'est un nom qui est également le vôtre, "Ivan Bagaric."
15 Voyez-vous cela ?
16 R. En effet.
17 Q. Est-ce que c'est vous qui étiez à la réunion de Tomislavgrad en
18 décembre 1991, Docteur Bagaric ?
19 R. J'ai été présent à de nombreuses réunions. J'ignore de quelle réunion
20 il s'agit ici. Il faudrait que je regarde cela d'un peu plus près. Excusez-
21 moi, mais je peux peut-être apporter un éclaircissement, c'est une réponse
22 directe à votre question.
23 Q. Vous pouvez expliquer les choses à un moment donné mais je voudrais
24 simplement d'abord être bien au clair, est-ce que c'est bien vous.
25 Tomislavgrad, c'est bien votre ville, n'est-ce pas ?
26 R. Il me semble que c'est bien mon nom ici puisqu'il est indiqué "Ivan
27 Bagaric". Mais je dois regarder d'un peu plus près de quoi il s'agit afin
28 de voir si je peux reconnaître la réunion en question ou pas.
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1 Q. Je comprends cela, nous allons regarder les choses d'un peu plus près
2 pour ce qui a été dit à cette réunion. Si vous avez le moindre doute pour
3 savoir s'il s'agit de vous ou non, vous pourrez nous le dire. Je voulais
4 être bien au clair sur ce point à savoir si Ivan Bagaric c'est bien vous.
5 N'est-ce pas ? Il y a d'autres noms ici, Dario Kordic, Ante Valenta, Ivan
6 Sarac, vous nous avez dit, en réponse je crois à une question posée par
7 l'un des Juges, que le ministre de la Santé est l'un de vos amis, n'est-ce
8 pas ?
9 M. LAWS : [interprétation] Désolé.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas quelle est votre question.
11 Est-ce que vous êtes en train de me demander si mon nom est Ivan Bagaric,
12 ou si je suis la personne qui a assisté à cette réunion ? On voit le nom,
13 "Ivan Bagaric". Il s'agit probablement de moi. Je ne peux pas vous
14 l'affirmer avec certitude, tant que je n'ai pas vérifié de quelle réunion
15 il s'agit ici. Mais c'est bien le même nom que le mien qui est ici. J'étais
16 présent, Messieurs les Juges, à de nombreuses réunions, peut-être celle-ci
17 est l'une de ces réunions.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je peux essayer d'aider. Monsieur
19 Bagaric, avez-vous connaissance de l'existence d'une personne en
20 Herzégovine qui aurait eu un intérêt à des questions politiques et qui
21 aurait pu participer à une telle réunion, et qui se trouvait avoir le même
22 nom que vous; ou bien n'avez-vous pas entendu parler d'un autre Ivan
23 Bagaric qui aurait pu assister à une telle réunion ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, il y a évidemment un
25 grand nombre d'Ivan Bagaric. C'est un nom et un patronyme qui sont tous
26 deux fréquents. Cependant, à cause des noms que je vois ici citer, je
27 suppose qu'il devrait s'agir de moi. J'ai déjà dit et c'est pour ça
28 également que je dis que je ne comprenais pas tout à fait quelle était la
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1 question de M. le Procureur, parce que j'ai déjà donné la confirmation de
2 cette information.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
4 M. LAWS : [interprétation] Merci beaucoup.
5 Q. Pouvons-nous maintenant passer à une autre page et voir ce dont il est
6 question ici. Au point 1 :
7 "La Communauté croate d'Herceg-Bosna félicite l'ensemble de la population
8 pour avoir atteint un objectif historique qui était la création d'une
9 reconnaissance internationale définitive de la République de Croatie."
10 Voyez-vous cela ?
11 R. Oui, je le vois.
12 Q. Au paragraphe suivant, des félicitations adressées au Dr Tudjman ?
13 R. En effet, oui, je vois tout ça.
14 Q. Et au point 2 :
15 "La Communauté croate d'Herceg-Bosna a une fois encore confirmé la
16 volonté de l'ensemble du peuple croate d'Herceg-Bosna exprimée le 18
17 novembre 1991, à Grude, en prenant la décision historique de créer la
18 Communauté croate d'Herceg-Bosna qui sert de base juridique à l'entrée de
19 ces territoires dans la République de Croatie."
20 R. Oui, je vois cela, Messieurs les Juges. Je me dois également de
21 le commenter. Vous me permettez d'apporter un commentaire à ce que vous
22 m'avez demandé de confirmer. Vous m'avez demandé si je voyais cela ou non ?
23 Q. Il appartient aux Juges d'en décider.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, si vous estimez qu'il n'y a
25 pas lieu de lui poser la question, passez à autre chose.
26 M. LAWS : [interprétation] Je veux être parfaitement mieux là-dessus. Le
27 témoin a demandé la permission de parler, je ne veux pas la lui refuser.
28 C'est aux membres de la Chambre la décision.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous voulez répondre, répondez, mais brièvement.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
3 c'est tout à fait incompréhensible de voir ici cette constatation.
4 Attendez, juste un instant. On prend une décision qui représenterait une
5 base juridique pour l'entrée de ces territoires dans la République de
6 Croatie. Je n'ai jamais au grand jamais été présent à quelque réunion que
7 ce soit au cours de laquelle une décision de cette nature aurait été prise.
8 Je n'ai absolument pas connaissance que cette décision ait été exposée et
9 prise. Un constat de cette nature est une absurdité, une bêtise qui même à
10 l'époque n'était pas prononcée, je suis tout à fait persuadé que nous ne
11 pouvions pas exprimer et adopter ce genre de décision. Je ne me rappelle
12 pas cette conclusion ni précédente d'ailleurs. Cependant, les points
13 précédents sont logiques alors que celui ne l'est pas du tout.
14 Mme NOZICA : [interprétation] Conformément à vos instructions, Messieurs
15 les Juges, je n'ai pas souhaité à intervenir précédemment avant que le
16 témoin ne réponde. Mais je pense qu'il serait bon d'éclaircir la nature de
17 ce document pour le témoin, puisqu'il lui est présenté. On voit à partir de
18 la page précédente que lors de cette réunion, M. le Procureur a commencé
19 avec cela mais il n'a pas tout à fait éclairci, nous avons M. Kostroman qui
20 transmet, fait état de certaines conclusions émanant d'une autre réunion.
21 Il me semble qu'il serait logique de procéder étape par étape, en lui
22 demandant si des conclusions ont été adoptées lors d'une réunion
23 précédente, si elles ont été présentées, et cetera. En fait, il s'agit ici
24 de positions qui sont présentées par M. Kostroman.
25 Il ne s'agit pas de conclusions qui sont adoptées lors de la réunion
26 en question. Je pense qu'on pourrait peut-être préciser au témoin de quoi
27 il s'agit.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
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1 n'ai jamais --
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, l'interprète, vous
3 aviez pu terminer.
4 L'INTERPRÈTE : Je vous remercie, c'est la fin.
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Nozica, vos suggestions sont
6 tout à fait raisonnables, mais maintenant c'est à l'Accusation d'en
7 décider, et de savoir quelles sont les questions qu'elle veut lui poser. Je
8 pense qu'il ne faut pas intervenir dans cela.
9 Mais ce que ce témoin devrait savoir, ce qu'on doit lui dire c'est que ce
10 document ne parle pas nullement d'un vote ou d'un scrutin, d'une décision.
11 Il parle simplement de fondement d'une organisation, qui dans l'opinion qui
12 est exprimée ici, pourrait servir de base juridique à des décisions
13 ultérieures, qui toutefois à l'évidence n'ont pas été prises. Il n'est pas
14 dit qu'elles ont été prises. Il n'y a pas de sens dans ce sens.
15 Excusez-moi, Monsieur Laws, s'il vous plaît. Veuillez continuer.
16 M. LAWS : [interprétation] Je vous suis très reconnaissant.
17 Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges. Il est
18 précisément indiqué qu'une réunion s'est tenue autour de laquelle des
19 conclusions suivantes ont été adoptées. C'est ce qui est dans le compte
20 rendu d'audience. Cela figure au compte rendu, c'est pour ça que je me suis
21 levée. On voit au compte rendu d'audience que les personnes suivantes ont
22 participé à la réunion, parmi lesquelles M. Bagaric est cité, ensuite il
23 est dit : "Sur la base de débat exhaustif et de qualité, les conclusions
24 suivantes ont été adoptées." Cela signifie que ce sont les conclusions qui
25 ont été adoptées par quelqu'un, et c'est pour cela que j'ai suggéré que
26 l'on demande au témoin s'il a assisté à cette réunion ou non, et ensuite
27 que l'on voie quelles sont les conclusions énumérées, du point 1 au point
28 10.
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1 C'est une interprétation du compte rendu d'une réunion à laquelle on a
2 affaire.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- parole, alors posez vos questions.
4 Etant précisé que le témoin vient de nous dire sous la foi du serment que
5 dans son souvenir, jamais le point 2 n'a été discuté ni évoqué.
6 M. LAWS : [interprétation] Oui, nous avons entendu cette réponse.
7 Q. Docteur Bagaric, voyons voir pour le point 10, n'a-t-il jamais été
8 discuté en votre présence ? A la page 24. Pouvez-vous voir le point 10,
9 Docteur ?
10 R. La page 4 ou la page 10 ?
11 Q. Le point 10, à la page 24. Docteur, est-ce que vous voyez ce paragraphe
12 ?
13 R. Le point 4, ça se trouve en page 22.
14 Q. Non, le point 10, à la page 24.
15 R. Oui, c'est cela, merci. On lit que :
16 "La légitimité d'Alija Izetbegovic, président de Bosnie-Herzégovine,
17 pour représenter le peuple croate en public est ainsi révoquée." Et ça
18 poursuit en disant le pourquoi. Est-ce que vous avez connaissance de cela ?
19 R. Excusez-moi. Juste un instant, s'il vous plaît. Oui, c'est à la date du
20 27 décembre 1991. Je ne me rappelle absolument pas d'une telle conclusion,
21 Messieurs les Juges. Cependant, même aujourd'hui je serais disposé à avoir
22 une certaine compréhension par rapport à l'adoption de cette conclusion,
23 car cela intervient à un moment qui se situe après que la partie serbe ait
24 incendié, massacré, et détruit l'ensemble d'un village croate en
25 Herzégovine, et après que l'un des membres de la présidence de la Bosnie-
26 Herzégovine a déclaré que cela n'était pas sa guerre, et qu'il n'avait pas
27 l'intention d'y participer.
28 Or, moi, j'étais l'un des députés du Parlement de Bosnie-Herzégovine, élu
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1 en 1990 aux premières élections multipartites. Et c'est personnellement que
2 j'ai exprimé mon opposition à une telle déclaration, un tel point de vue
3 émanant de M. Izetbegovic, car lui émanait du peuple musulman mais
4 représentait d'une certaine façon l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine.
5 Cependant, à cette époque-là, il ne représentait pas les intérêts croates.
6 Et j'ai exprimé mon point de vue au sein du Parlement de Bosnie-
7 Herzégovine, j'ai de nombreux témoins en ce sens, j'ai interpellé le
8 président Izetbegovic, je lui ai dit, M. le Président, je souhaiterais
9 pouvoir vous percevoir comme étant mon président, mais pour cela il faut
10 que vous représentiez, que vous défendiez également nos intérêts, et
11 cetera.
12 Donc l'une des personnes présentes à cette réunion Frère Ferdo Vlasic, je
13 vois qu'il est cité ici, maintenant je me rappelle qu'il s'agissait d'une
14 réunion de nature informelle, et c'était une personne qui à l'époque
15 communiste, Messieurs les Juges, a fait 18 ans de prison, 18 ans de travaux
16 forcés pour ainsi dire. C'était un Nelson Mandela bosniaque. Il avait fait
17 de la prison avec Alija Izetbegovic. Je lui ai demandé d'entrer en contact
18 avec M. le président à l'époque, M. Izetbegovic, puisque moi-même j'étais
19 l'un des députés qui avait adopté des textes législatifs importants pour la
20 Bosnie-Herzégovine, et je lui ai demandé d'exercer une influence sur --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.
22 M. LAWS : [interprétation] Monsieur le Président, merci.
23 Q. Docteur Bagaric, j'ai attendu patiemment que vous répondiez à la
24 question, mais maintenant nous parlons de choses qui sont très éloignées de
25 cette réunion, et je vous pose la question --
26 R. Cela est étroitement lié. Je dois réagir à cela. C'est inexact.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous, vous estimez que c'est
28 très proche. Le Procureur pense que pour lui ce n'est pas pertinent ou très
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1 éloigné. Attendez de voir les autres questions pour compléter votre
2 position, bien, mais là vous avez fait une longue intervention qui nous
3 permet de bien comprendre la problématique d'ensemble. Nous savons, et nous
4 ne le savions pas, que vous aviez interpellé vous-même le président
5 Izetbegovic au Parlement à Sarajevo, donc c'est au transcript.
6 M. LAWS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Q. Docteur Bagaric, nous allons passer maintenant un petit peu de temps
8 vous et moi cet après-midi et peut-être même demain. Et à la fin on vous
9 donnera la possibilité -- Me Nozica aura la possibilité d'expliquer les
10 choses qui doivent encore être expliquées. On ne vous prive pas de la
11 possibilité de parler. Mais dans l'intervalle, je vais vous poser,
12 j'espère, des questions vraiment claires, et ça va m'aider, et peut-être
13 vous aussi, et si nous pouvions essayer de nous en tenir à des réponses qui
14 correspondent bien à ces questions. Vous êtes d'accord ? Je vous remercie
15 beaucoup.
16 Maintenant, ce document que nous avons examiné, tel que je vous l'ai montré
17 au tout début, il s'agit en fait d'un enregistrement audio qui a été fait
18 le 27 décembre 1991, dans lequel les questions qui ont été discutées lors
19 d'une réunion à Tomislavgrad en décembre, le 23 décembre 1991, et si on
20 regarde la page 19, on peut lire ceci. Si vous regardez au milieu de la
21 page, c'est Mate Boban qui parle, et il dit :
22 "Je voudrais demander qu'il nous soit donné lecture des conclusions et
23 ensuite peut-être évoquer certains points à débattre pour arriver à la
24 vérité de la région elle-même, c'est-à-dire pour la population, plutôt que
25 de donner des opinions ou autre chose."
26 Et M. Tudjman répond :
27 "Bien. Veuillez continuer. Veuillez d'abord vous présenter pour le compte
28 rendu."
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1 A ce M. Kostroman commence à lire. Il se présente, et si on tourne la page
2 on voit qu'il est en train de lire; un extrait du compte rendu, n'est-ce
3 pas ? Et c'est ainsi que ça commencé, vous étiez présent à la réunion
4 lorsque ces questions ont été discutées.
5 Jusqu'à présent, Docteur Bagaric, est-ce que vous êtes d'accord ?
6 R. Vous parlez de la page 19 en croate ? Excusez-moi.
7 Q. Ce que je viens de vous lire est à la page 19 pour le texte croate et
8 au milieu de la page le président Tudjman demande à M. Kostroman de se
9 présenter pour le compte rendu, et il répond :
10 "Je suis Ignac Kostroman, secrétaire de --"
11 R. Tudjman, mais comment cela se peut-il, quel Tudjman ici ?
12 Q. Il s'agit du 27 décembre et c'est une réunion qui est présidée par M.
13 Tudjman à laquelle on donne une lecture d'un procès-verbal de la réunion à
14 Tomislavgrad. Excusez-moi si ça n'a pas été suffisamment clair pour vous
15 jusqu'à maintenant, mais voilà la situation.
16 R. Dieu le Père lui-même ne pourrait pas le comprendre.
17 Q. Docteur Bagaric, je regarde autour de moi je pense que tout le monde
18 comprend et que vous comprenez vous aussi, alors ne perdons pas du temps à
19 faire des hypothèses --
20 Le 23 décembre c'est une réunion à laquelle vous étiez présent, dans
21 laquelle, Docteur Bagaric, les gens étaient en train de donner leur point
22 de vue s'agissant de leurs relations par rapport à Herceg-Bosna et de ce
23 qu'on avait l'intention de faire; c'est bien ça, n'est-ce pas ?
24 R. [aucune interprétation]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour essayer d'aider, parce
26 qu'on a un document qui fait 125 pages, et le Procureur nous a communiqué
27 quelques éléments. Mais tel que je comprends le problème, il y a une
28 réunion le 27 décembre qui est présidée par M. Tudjman, et une délégation
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1 en provenance de la Bosnie-Herzégovine, et cette réunion se tient à Zagreb.
2 Et au cours de cette réunion, mais là je parle sous le contrôle du
3 Procureur, il est fait état d'une réunion qui s'est tenue quelques jours
4 auparavant, le 23 décembre, c'est-à-dire quatre jours avant, à
5 Tomislavgrad, et dans cette réunion vous étiez présent vous le 23 décembre.
6 Et dans cette réunion du 23 décembre, apparemment, il y a plusieurs points
7 qui étaient à l'ordre du jour qui ont été discutés. Voilà comment se
8 présente ce document, qui en réalité est constitué de deux choses, d'une
9 réunion du 27 décembre dans laquelle il y a le compte rendu d'une réunion
10 du 23 décembre.
11 Est-ce que vous comprenez mieux le problème ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. C'était ceci le point
13 obscure, ce qui prêtait à confusion, d'où venait maintenant Tudjman à cette
14 réunion de Tomislavgrad. Je vous remercie de l'éclaircissement.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Voilà. Et dans la réunion du 27 décembre, il y
16 a Tudjman, Boban, et puis peut-être d'autres mais on ne sait pas. Bien, et
17 apparemment, vous n'êtes pas vous à Zagreb le 27 décembre.
18 Monsieur le Procureur, je ne sais pas si j'ai essayé d'aider pour que
19 tout le monde comprenne mieux parce que c'est assez compliqué.
20 M. LAWS : [interprétation] Merci.
21 Q. Docteur Bagaric, vous comprenez la situation et la situation véritable
22 est la suivante : lors de cette réunion, l'intention de Boban et des autres
23 en ce qui concerne l'Herceg-Bosna, a été débattue, n'est-ce pas ? Vous avez
24 participé, vous étiez présent et je vais vous suggérer, je vais vous poser
25 la chose suivante : vous saviez en pleine connaissance de cause quels
26 étaient les buts de Mate Boban et des autres.
27 R. Ma réponse est non parce que vous avez indiqué que M. Boban aurait dit
28 quelles étaient ses intentions. Vous vous êtes servi d'une expression que
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1 je ne comprends pas. Moi j'étais député au Parlement. Par conséquent, en ma
2 qualité de député, j'ai pris part à certaines réunions qui avaient à voir
3 avec l'organisation de la défense du peuple croate à l'époque et pour ce
4 qui est de ces assemblées musulmanes bosniennes. Et ce type de réunions,
5 j'y ai été souvent.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour l'Accusation c'est un point
7 très important ce document parce que c'est dans l'acte d'accusation, c'est
8 dans le mémoire préalable. Le point numéro 2 qui indique noir sur blanc que
9 la Communauté croate de l'Herceg-Bosna confirme en quelque sorte qu'elle
10 veut entrer dans la République de Croatie, et ceci avait été d'ailleurs
11 exprimé le 18 novembre 1991. Vous, apparemment, vous êtes présent à cette
12 réunion. Alors si vous dites que ceci n'a jamais été discuté, là on a un
13 problème parce que le document est faux, ou c'est vous qui mentez ou c'est
14 le document qui est faux.
15 Donc vous comprenez que c'est très important ce que vous dites parce
16 que d'après le document que nous avons, il y a eu une discussion où étaient
17 présents vous-même, Kostroman, Boban, Kordic, et cetera, donc vous étiez
18 beaucoup et cette question qui est capitale pour la thèse du Procureur est
19 inscrite, débattue et adoptée. Et tout à l'heure vous avez dit : non. Alors
20 je me retourne vers vous, êtes-vous sûr que ça n'a jamais été discuté ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai dit que j'ai été à une
22 réunion à Tomislavgrad. Je suppose que c'est celle-là où il y avait aussi
23 ces personnes mentionnées ici. Cependant, je ne peux pas maintenant dire
24 qu'il n'a pas été débattu de chacun des points énumérés ici. Cependant, moi
25 j'ai dit que je ne me souviens pas. J'affirme en toute responsabilité que
26 je ne me souviens pas qu'il soit débattu de ce point-là. Et je ne me
27 souviens encore moins qu'il ait été adopté ce type de conclusion, parce
28 qu'à partir de la position prise et concernant à l'époque ça me semblait
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1 être plutôt stupide et ça c'est la raison pour laquelle j'ai dit que je ne
2 m'en souvenais pas.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Procureur.
4 M. LAWS : [interprétation]
5 Q. Si vous ne vous en souvenez pas, il faudrait que je vous dise que c'est
6 assez gros d'oublier cela, d'être à une réunion avec des collègues
7 politiques et dirigeants qui parlent de l'adhésion à la Croatie et de
8 révoquer l'autorité d'Izetbegovic. Je dois dire que c'est quelque chose
9 d'assez important pour l'oublier.
10 R. Vous avez tort, Monsieur le Procureur, parce qu'il y a deux éléments
11 là. C'est une chose que de révoquer M. Izetbegovic à l'époque pour ce qui
12 est de sa représentativité politique des Croates, et c'est autre chose que
13 de décider d'une annexion. Datant de l'époque, je comprends suite aux
14 événements de Ravno qu'il y ait eu débat au sujet d'un mécontentement
15 relatif à Izetbegovic et un communiqué de ce type, mais je ne me souviens
16 pas qu'il ait été adopté ce type de conclusion. Et je pense qu'on n'a pas
17 débattu de ceci de cette façon-là. J'en suis convaincu devant cette
18 Chambre, devant Dieu le Père. Je ne m'en souviens pas.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Bagaric, je ne
20 sais pas si vous avez entendu et compris ce que je vous ai dit plus tôt
21 aujourd'hui. Si vous vous penchez sur ce texte, ce texte n'est pas une
22 décision d'adhésion à la Croatie. Vous dites qu'aucune décision n'a été
23 prise d'adhérer à la Croatie, et vous avez raison, ce n'est pas ce que dit
24 ce texte. Ce que dit ce texte c'est, nous avons fondé la Communauté croate
25 d'Herceg-Bosna qui constitue une base juridique à partir de laquelle en fin
26 de compte nous pourrions adhérer à la Croatie. Mais ce n'est pas une
27 décision d'adhérer. Si vous tenez compte de ceci, vous conviendrez, vous
28 vous souviendrez que c'est cela qui a été dit.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous avez raison, Monsieur le Juge, mais
2 moi je ne m'en souviens pas du tout, vraiment pas.
3 M. LAWS : [interprétation]
4 Q. Monsieur Bagaric, je vais vous dire la chose suivante : vous saviez
5 pertinemment bien quels étaient les buts de Mate Boban et de l'Herceg-
6 Bosna. Il s'agissait d'objectifs nationalistes et il s'agissait d'adhérer à
7 la Croatie. C'est la vérité pure et simple, n'est-ce pas ?
8 R. Non. Cela signifie en l'occurrence qu'en ma qualité de député, enfin,
9 Mate Boban, ce n'était pas Dieu le Père, intouchable, à qui l'on ne devait
10 rien dire et à qui on ne devait pas s'opposer. Donc cela signifie qu'Ivan
11 Bagaric en sa qualité de député au Parlement de Bosnie-Herzégovine faisait
12 exactement la même chose que ce que vous êtes en train de dire tel que
13 présenté. Mais pour ce qui est d'Ivan Bagaric, ça n'a jamais été comme cela
14 et ça n'a pas été comme cela à l'époque.
15 Est-ce que quelqu'un avait cela à l'esprit, y compris Mate Boban pour
16 ce qui est de mettre cela en œuvre, je ne le sais pas, cela se peut, mais
17 jamais personne n'a présenté la chose à titre officiel. Et jamais,
18 Messieurs les Juges, je n'ai pensé que cela pourrait survenir, tout
19 simplement parce que cela était irréalisable, irréalisable. Je le savais
20 dès lors.
21 Q. Quant à savoir si c'était possible ou non, c'est quelque chose qui de
22 toute manière avait semé un certain émoi parmi la population musulmane qui
23 était considérée comme faisant partie d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?
24 R. Non, non, parce que la partie qui s'est proclamée être l'Herceg-Bosna,
25 c'était la partie qui une fois qu'il y a eu effondrement de l'Etat et
26 lorsqu'il était évident que l'Etat allait s'effondrer, j'y étais, vous n'y
27 étiez pas. On voyait ce qui allait se passer et on défendait ce qu'on
28 pouvait défendre. Donc on a mis en place une espèce d'autonomie aux fins
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1 d'une prise de décisions pour pouvoir organiser la défense, et cela était
2 plutôt conforme à la constitution de l'époque. Pourquoi ? Et là je m'en
3 souviens bien.
4 Vous avez dit que j'étais homme politique, mais je suis en premier
5 lieu médecin. Je veux bien accepter que de ce point de vue-là je suis aussi
6 homme politique. Pour défendre une municipalité, vous aviez le droit de le
7 faire. Si vous en défendiez deux ou cinq vous deviez forcément vous
8 associer, donc ce type d'association était tout à fait légitime et
9 autorisé. Et la décision afférente a été prise par les représentants élus
10 par le peuple. J'ai pris part à un projet de défense d'une partie du
11 territoire de la Bosnie-Herzégovine où les Croates constituaient la
12 majorité, et où il y avait aussi des Musulmans qui vivaient à nos côtés.
13 D'une certaine façon, nous nous sommes opposés à un ennemi qui était
14 disproportionnellement plus fort, ce sont les Serbes. Le conflit des
15 Musulmans et des Croates, c'est un conflit des victimes de l'agression.
16 L'agression a été générée par l'armée serbe, par les Serbes.
17 J'ai vécu la chose, Monsieur le Procureur, ma famille en a pâti, elle
18 a payé le prix. Le frère qu'on a mentionné hier, il est mort en défendant
19 la Bosnie-Herzégovine, entre autres, en sa qualité de volontaire qui était
20 venu de la Croatie ou plutôt de l'Allemagne pour se faire tuer. Comment
21 voulez-vous que j'accepte une telle chose.
22 Q. Nous avons entendu cela, nous en sommes désolés.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez répondu très longuement à la question du
24 Procureur. Mais moi, ce qui m'intéresse, parce que c'est en quelque sorte
25 la première fois que nous avons un parlementaire qui était au Parlement de
26 Sarajevo. Ce que vous venez de dire très longuement, est-ce que ce que vous
27 venez de dire aujourd'hui ça a été dit au Parlement à Sarajevo par vous et
28 par d'autres, et est-ce qu'on a des traces écrites des interventions des
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1 parlementaires sur le sujet que vous venez d'évoquer ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous l'avons toujours dit.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais en tant que député au Parlement à
4 Sarajevo, quand vous intervenez, est-ce qu'il y a un transcript, est-ce
5 qu'il y a un compte rendu de l'intervention quand par exemple vous nous
6 avez dit, j'ai interpellé Izetbegovic. Quand vous lui avez posé la question
7 au Parlement, il a peut-être répondu; est-ce que votre question a été
8 transcrite et sa réponse a été transcrite et est-ce que d'autres
9 parlementaires comme vous ont développé cette thèse que vous venez de
10 développer sur la question de l'Herzégovine ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, Monsieur le Président, je
12 vous remercie de m'avoir donné l'occasion de répondre à une question qui à
13 mon avis est très importante. Il convient de comprendre pour qu'on puisse
14 continuer. Je suis pressé pour ce qui est d'un retour vers mes obligations,
15 mais ceci est plus important que mes obligations ou quoi que ce soit. Je ne
16 suis pas pressé si vous avez le temps de m'entendre.
17 C'était des temps où les Serbes avaient combattu ouvertement la Croatie.
18 Ils avaient frappé Dubrovnik et Vukovar, et ainsi de suite, il était
19 évident qu'il allait y avoir une guerre en Bosnie-Herzégovine. A l'époque,
20 je siégeais au Parlement où siégeait également Alija Izetbegovic, où
21 siégeaient Stjepan Kljujic et Radovan Karadzic. Radovan Karadzic, oui. Je
22 suis sorti devant l'auditoire à un moment, il y a certainement un PV à cet
23 effet, et on a vu, il était évident que la guerre allait commencer, les
24 Serbes se préparaient pour la guerre en Bosnie-Herzégovine. Ils étaient en
25 train de faire ce qu'ils avaient à faire en Croatie, ils étaient en train
26 de préparer la guerre en Bosnie-Herzégovine. C'était évident pour tout un
27 chacun. J'ai dit à peu près, je ne peux pas répéter mot pour mot, vous êtes
28 trois. Kljujic pour représenter les Croates, Alija Izetbegovic qui
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1 représente les Bosniens, et Radovan Karadzic pour représenter les Serbes.
2 Présentez-vous devant les autres et dites-leur qu'il n'y aura pas une
3 guerre.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est longuement répondre, mais ce que je voulais
5 savoir, ma question a été précise, est-ce qu'il y a un transcript des
6 débats au Parlement à Sarajevo. Là, vous dites --
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça se peut.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites ça se peut.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse. Je ne peux pas le savoir. Je ne
10 sais pas si ces PV ont été sauvegardés. Il serait très important de pouvoir
11 se pencher sur ces PV pour voir exactement ce que les uns et les autres
12 disaient au Parlement. Ce que je disais moi, j'en suis fier.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. En tout cas, Monsieur le Témoin, sachez une
14 chose. C'est que la procédure devant ce Tribunal ne relève pas de la
15 compétence des Juges. C'est aux parties d'amener des éléments de preuve au
16 Procureur, à la Défense. Moi, si j'avais mené cette procédure, la première
17 chose que j'aurais faite c'est d'aller consulter les transcripts des débats
18 au Parlement de Sarajevo où il y avait Karadzic, Izetbegovic, vous-même,
19 Kljujic, et cetera, mais ça, je n'ai pas ça sous les yeux.
20 Bien, Monsieur le Procureur, continuez.
21 M. LAWS : [interprétation] Nous allons passer de cette réunion à l'année
22 suivante.
23 Q. Monsieur Bagaric, en septembre 1992, on vous a offert un emploi au sein
24 du ministère de la Défense de l'Herceg-Bosna en tant que responsable du
25 secteur de la santé. D'accord ?
26 R. De quel document parlez-vous ?
27 Q. Nous n'avons pas besoin de document pour cela, 2D 00702. Vous savez que
28 vous avez été nommé en septembre 1992 ?
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1 Mme NOZICA : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Procureur, il n'y a
2 pas de question, je ne veux rien laisser entendre au témoin. Ce n'était pas
3 encore un ministère, c'était un département à la Défense. Il convient
4 d'être précis pour ce qui est de l'appellation des instances à un moment
5 donné. Ce n'était pas au mois de septembre 1992, un ministère.
6 M. LAWS : [interprétation] Toutes mes excuses. Je ne pense pas avoir induit
7 quiconque en erreur, en se faisant.
8 Q. En septembre 1992, Monsieur Bagaric, on vous a sollicité et offert un
9 poste au sein du département de la Défense de l'Herceg-Bosna; est-ce le cas
10 ? Qui vous a offert ce poste, qui vous a parlé ?
11 R. Je m'excuse auprès des Juges. Je ne peux pas répondre de façon si brève
12 ici.
13 J'étais député au Parlement de la Bosnie-Herzégovine, et on m'a
14 proposé bien avant cela de me mettre à la tête de ce service de santé avant
15 qu'on ne le dise ici. Je voulais indiquer hier et avant-hier que nous,
16 médecins, avions créé ces services de santé début 1992. Ce sont les députés
17 qui m'avaient proposé la chose, ceux qui étaient à Sarajevo et dans le
18 local, lorsqu'on s'est efforcé d'organiser la défense de ces territoires.
19 On ne m'a pas proposé la chose, on m'a nommé. Personne n'est venu me
20 proposer quoi que ce soit. Ce que je faisais déjà a été renommé lorsqu'il y
21 a eu des nominations, j'ai été nommé moi aussi à ces fonctions-là. Voilà de
22 quoi on parle.
23 Q. Fort bien, Monsieur Bagaric. Je vais poser la question de manière plus
24 générale. Qui vous a sollicité pour vous offrir un poste, un rôle, un
25 emploi, un poste de responsabilité au sein de l'appareil de l'Etat
26 d'Herceg-Bosna ? Vous comprenez la question, vous étiez docteur, vous étiez
27 député, et quelqu'un d'une certaine manière vous a demandé d'intervenir
28 pour le compte de l'Herceg-Bosna. Qui était-ce ?
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1 R. C'était mes collègues députés qui étaient plus de 40 à Sarajevo. A
2 l'occasion de l'une de nos réunions lorsque nous sommes entretenus et
3 lorsque nous avions compris que la guerre allait commencer. Nous avons
4 commencé à planifier et voir ce que les uns ou les autres pouvaient faire.
5 Comme j'étais médecin, on a dit qu'il serait bon étant donné que j'étais
6 déjà député et médecin que je prenne part à l'organisation pour ce qui est
7 des préparatifs, des blessés, et j'ai accepté.
8 Q. Pourriez-vous répondre à la question, en nous donnant le nom de ceux
9 qui depuis l'Herceg-Bosna vous ont demandé de participer à l'organisation
10 du secteur de la santé, des noms, pas vos collègues; qui était-ce ?
11 R. C'était en premier lieu des médecins, le Dr Ivan Sarac, Marko
12 Frankovic, ensuite un monsieur qui s'appelait Buskovic, dont le prénom
13 m'échappe, c'était également un médecin. Un monsieur qui s'appelait
14 Markovic, qui était également médecin. Ante Bosniak, il était stomatologue,
15 originaire de Citluk. Nevinka --
16 Q. Je vous prierais de marquer une pause. Vous avez donné plusieurs noms
17 ça nous aide. Il s'agit également du Dr Sarac qui était à la réunion de
18 Tomislavgrad de décembre 1991 et comme je l'ai dit est devenu le haut
19 fonctionnaire au département de la santé, mais c'était des personnes qui
20 étaient au même niveau hiérarchique que vous. Qui vous était supérieur
21 hiérarchiquement, qui a pu vous donner ce poste important dont vous nous
22 avez parlé hier ?
23 R. Ce n'était pas un job, c'était une fonction. Je n'ai pas été embauché,
24 je ne touchais pas de salaire. J'ai été --
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur vous pose une question d'ordre
26 technique. Il vous demande qui vous a nommé ou proposé sur ce poste ? Alors
27 vous le savez ou vous ne le savez pas. Si c'est M. Stojic, vous dites, bien
28 c'est M. Stojic.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] A titre formel, je ne m'en souviens pas. Non,
2 ce n'était pas M. Stojic. Pour ce qui est du côté officiel je ne m'en
3 souviens pas. Je sais que M. Mate Boban était aussi l'un des députés au
4 Parlement de Bosnie-Herzégovine. J'ai rencontré Mate Boban au Parlement de
5 la Bosnie-Herzégovine. Probablement était-il présent lui aussi à ces
6 réunions. Par conséquent, de là à savoir si formellement quelqu'un m'avait
7 nommé, mais comme j'ai dit ce n'était pas un job, mais une mission.
8 M. LAWS : [interprétation]
9 Q. Oui, et nous comprenons la différence que vous essayez de décrire. Mais
10 pour faire court, c'est Mate Boban ? Est-ce que ce n'est pas Mate Boban qui
11 vous a offert le travail, point à la ligne ? C'est cela, Monsieur Bagaric ?
12 R. Non. J'étais député sur pied d'égalité avec les autres députés. Par
13 conséquent, cela a découlé de conversations, d'entretiens de députés
14 médecins. Mate Boban ne pouvait pas me le proposer cela puisqu'il n'était
15 pas médecin lui.
16 Q. Monsieur Bagaric, je ne veux vraiment pas m'appesantir là-dessus, mais
17 il ne faut pas être docteur pour nommer quelqu'un qui épaulera Bruno
18 Stojic. Ce n'est pas une réponse raisonnable. Vous êtes un homme
19 raisonnable, Docteur.
20 R. Si vous pouvez être satisfait de ma réponse ça pouvait être Mate Boban.
21 Je ne m'en souviens pas. Ça pouvait bien l'être du point de vue de la
22 nomination officielle, mais de là à savoir comment on en est venu à cette
23 proposition, chose qui est importante.
24 Q. Oui. Mais vous la donnez puis vous la reprenez. Ce n'est pas ça qui
25 m'intéresse. C'est votre nomination. Vous dites, Mate Boban et puis vous le
26 retirez, on perd du temps. Mate Boban vous a donné ce travail et vous a
27 donné du travail parce que vous étiez un homme de confiance qui partageait
28 avec lui de nombreux objectifs d'Herceg-Bosna. C'est la réponse toute
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1 simple, n'est-ce pas ?
2 R. Non.
3 Q. Très bien. Je vais vous dire avant que nous examinions les détails de
4 votre déposition de ces deux dernières journées, je vais vous dire que
5 c'est ce qui sous-tend votre fonction en tant que médecin. Vous êtes
6 médecin, vous êtes également en politique et vous êtes en politique d'une
7 certaine couleur en 1991, 1992 et 1993, en politique loyale, de confiance,
8 proche de Boban et d'autres figures-clés de l'Herceg-Bosna. C'est vous,
9 Docteur Ivan Bagaric, n'est-ce pas ?
10 R. Non. Je n'étais pas loyal vis-à-vis de Mate Boban mais vis-à-vis du
11 peuple qui m'a élu, à savoir les Croates de la municipalité de
12 Tomislavgrad.
13 Q. Lorsque vous avez déposé lundi, et je vais quitter ce sujet, j'y
14 reviendrai à la fin de notre séance de questions et réponses. Lorsque vous
15 avez déposé lundi vous avez dit que lorsque vous vous êtes rendu à Sovici
16 Doljani, vous avez dit qu'à votre grande satisfaction aucun crime n'avait
17 été commis là-bas contre les civils et cela avait été confirmé par les
18 Musulmans auxquels vous aviez parlé. Est-ce que vous vous souvenez avoir
19 donné cette réponse ?
20 R. Je me souviens de la substance de ma réponse. Ai-je précisément utilisé
21 ces termes-là, je n'en suis pas trop sûr. Pourquoi ? Parce que les
22 commandants musulmans nous avaient mis en accusation, moi compris en ma
23 qualité de médecin, disant votre armée a violé des femmes à nous, elle a
24 tué des civils. J'étais marré d'entendre des choses pareilles. Lorsque nous
25 sommes arrivés là-bas on a vu qu'il n'en était pas ainsi. Je ne dis pas
26 qu'il n'y a pas eu un seul civil de tué, je ne le savais pas. Je ne le
27 savais pas à l'époque. Mais les gens qu'on a rencontrés là-bas nous ont dit
28 leur satisfaction, pour ce qui est des représentants musulmans qui étaient
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1 à nos côtés, avec la présence de M. Halilovic, ils n'ont pas eu de
2 remarques à formuler. M. Petkovic qui est présent ici, peut en témoigner,
3 il était là aussi, et nous avons tous été satisfaits de voir que ça ne
4 s'était pas passé comme les gens l'avaient affirmé.
5 Q. Merci. Si vous en êtes d'accord, parce que ma question consistait, à
6 savoir si vous vous souveniez avoir répondu qu'à votre grande satisfaction
7 aucun crime n'avait été commis contre des civils et que les Musulmans
8 avaient confirmé cela. Je pense que nous sommes d'accord pour dire que
9 c'était là le contenu de votre réponse. Ce n'était peut-être pas
10 textuellement votre réponse mais c'était là le sens. Vous avez déposé lors
11 de ce Tribunal en disant exactement la même chose pour Tuta Stela, n'est-ce
12 pas ?
13 R. J'ai déposé dans l'affaire Tuta Stela sur le sujet des circonstances
14 générales. Je ne me souviens pas qu'il ait été concrètement question de
15 cela. Mais si jamais cela a été le cas, je n'ai pu répondre qu'ainsi et en
16 me basant sur ce dont je me souviens. C'est quelque chose que je
17 n'oublierai jamais.
18 Q. On en a parlé lors de votre déposition et vous
19 conviendrez --
20 R. C'est possible.
21 Q. -- que le sens de ce que vous avez dit était le même; vous avez été à
22 Tuta Stela, vous avez été à Sovici, vous avez parlé aux gens et à votre
23 grand contentement vous avez vu qu'il n'y avait pas de plaintes contre le
24 HVO. C'est ça que vous avez dit lundi, et vous avez dit la même chose dans
25 les grandes lignes il y a six ans.
26 R. En effet, c'est possible. Si j'en ai parlé à l'époque je n'ai pu que
27 dire la même chose que ce que je dis aujourd'hui.
28 Q. Depuis le jugement six années se sont écoulées, est-ce que vous êtes
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1 donné la peine d'examiner le jugement pour voir si votre niveau de
2 connaissance des événements de Sovici et Doljani est insuffisant ?
3 R. J'ai dit, Messieurs les Juges, que j'ai déposé au sujet de
4 circonstances générales et non pas au sujet de Tuta ou Stela, car je ne les
5 connaissais pas. Je n'ai déposé sur rien qui aurait eu trait à ma
6 connaissance personnelle de ces personnes.
7 Q. Est-ce que c'était cela ma question ? Regardez la question.
8 R. Vous me l'avez demandé.
9 Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, cher confrère, mais le témoin
10 est précisément en train de répondre à la question de M. le Procureur. Il
11 serait bon et correct de laisser finir notamment sa dernière phrase. Il dit
12 ce sur quoi il a déposé et --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, le Procureur vous a posé une question très
14 précise. Il dit : vous avez témoigné il y a six ans, il y a un jugement qui
15 a été rendu, et il vous demande est-ce que vous avez lu le jugement, et si
16 vous l'avez lu, est-ce que ça modifierait vos conclusions. Donc c'est
17 extrêmement précis.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Mais je
19 n'ai pas lu le jugement en question, et rien ne peut venir altérer ma
20 mémoire, ou plutôt le sentiment qui est le mien qui l'emporte même sur ma
21 mémoire, qui était le mien au moment où je me suis rendu sur place.
22 M. LAWS : [interprétation]
23 Q. Dire que rien ne pouvait modifier vos sentiments à ce sujet --
24 R. Non, je ne dis pas cela.
25 Q. Veuillez, s'il vous plaît, ne pas m'interrompre. Je ne vous interromps
26 pas vous-même quand vous répondez. Alors ce que vous venez de dire, rien ne
27 peut modifier vos souvenirs, vos sentiments, et moi je vais vous demander
28 si des faits historiques ne sont pas susceptibles de modifier la façon dont
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1 vous avez vu les événements à Sovici et Doljani.
2 R. Non. Par conséquent, ce que vous essayez de faire c'est de montrer que
3 je suis quelqu'un qui n'a pas de sentiments ici. Je n'ai pas dit que rien
4 ne peut changer mes sentiments, cela m'a peut-être échappé. Si un crime a
5 véritablement été commis, et que je l'ignorais, je ne peux pas évidemment
6 rester indifférent à cela. Mais ce que j'ai dit c'est que rien ne peut
7 changer ma mémoire des événements de l'époque et le sentiment que j'ai
8 éprouvé à ce moment précis. Ce que j'ai éprouvé à ce moment-là c'était la
9 satisfaction de voir qu'il n'y avait là rien de ce dont les commandants
10 musulmans avaient fait état.
11 Ici, on pèse soigneusement chaque mot, et c'est pour cela et dans l'intérêt
12 du débat que je souhaite répondre à chacune de vos questions. N'essayez pas
13 de me faire dire ce que je n'ai pas dit.
14 Q. Peut-être que plus tard vous aurez la possibilité de vérifier, mais
15 j'ai employé les mêmes mots que vous, pas les miens.
16 Docteur Bagaric --
17 R. Très bien.
18 Q. -- au paragraphe 238, la Chambre de première instance décrit un certain
19 nombre d'événements qui ont eu lieu à Sovici et Doljani. Ils disent que des
20 maisons musulmanes dans le secteur ont été brûlées de façon à s'assurer
21 qu'il n'y aurait pas de retour de la population musulmane. Ils ont dit que
22 des lieux religieux musulmans, tels que des mosquées dans le secteur,
23 avaient été systématiquement détruits. N'est-ce pas ? Et que ceci avait eu
24 lieu, cette destruction -- attendez un instant, s'il vous plaît. La
25 destruction de maisons et la destruction de la mosquée à Sovici avaient eu
26 lieu au moment où vous êtes arrivé avec la mission conjointe les 4 et 5
27 mai.
28 Avez-vous vu des maisons qui avaient été brûlées jusqu'à terre et des
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1 gravats là où les mosquées se trouvaient ?
2 R. Non, Messieurs les Juges, je n'ai pas vu cela. Je suis venu sur place
3 dans un véhicule de la FORPRONU. J'ai été amené sous protection devant
4 cette école où la réunion s'est tenue. Je ne me souviens pas avoir vu quoi
5 que ce soit de cela. Si j'avais vu quelque chose de cette nature, je m'en
6 souviendrais certainement. Par conséquent, ce dont je parle c'est ce que
7 j'ai entendu dire par les personnes qui étaient présentes à cette réunion
8 et ce que j'ai entendu dire par les personnes qui étaient détenues dans
9 cette école, donc les Musulmans qui étaient détenus avec qui nous avons
10 parlé. Ensuite, nous nous sommes assis dans le véhicule de la FORPRONU et
11 nous sommes repartis.
12 Alors est-ce que dans cette zone il y a eu des événements tels que
13 ceux décrits par le Procureur, je ne peux pas le dire. Est-ce que cela
14 s'est produit juste après notre départ, je ne le sais pas non plus. Alors
15 je ne dis pas qu'il n'aurait pas pu se produire là-bas tous ces événements
16 dont le Procureur fait état. Mais lors de cette réunion, je n'ai pas le
17 souvenir que quiconque ait fait état de cela au sens où cela aurait
18 représenté un problème. Je ne me souviens pas non plus que nous ayons vu
19 quoi que ce soit de cette nature.
20 Le plus important pour moi était que les civils qui étaient présents
21 là-bas nous ont dit qu'il n'y avait pas eu de viols massifs, de meurtres
22 d'un grand nombre de personnes, tout ce que nous redoutions de trouver sur
23 place. C'est ce que je peux dire.
24 Q. Les personnes dont vous parliez dans votre dernière réponse, les
25 personnes avec lesquelles vous avez eu une discussion en ce qui concerne
26 des tueries en masse et des viols sur grande échelle, c'étaient des
27 habitants du village de Sovici et Doljani et des alentours qui à ce stade
28 avaient été gardés en captivité dans l'école pendant plus de 15 jours. Est-
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1 ce que vous êtes en train de dire sérieusement qu'il n'y avait aucune
2 plainte, aucun grief concernant le HVO ?
3 Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges, excusez-
4 moi, Monsieur le Procureur. Mais je pense qu'il y a un malentendu au sujet
5 de la réponse précédente du témoin. Car ce dernier a dit que ces personnes
6 précisément ne se sont pas plaintes qu'il y ait eu de nombreux viols et de
7 très nombreux meurtres, et cetera, si bien que je pense que la partie de la
8 question de M. le Procureur où il est dit que le témoin s'est entretenu
9 avec ces personnes au sujet d'un très grand nombre de viols et de meurtres,
10 cela ne correspond pas à la réalité, ce n'est pas ce que le témoin nous a
11 dit et ça n'a pas été le cas.
12 M. LAWS : [interprétation] -- répondre à cela, s'il vous plaît. Nous
13 pourrons vérifier pour ce qui est du lundi de cette semaine, nous allons
14 vérifier le compte rendu. Le témoin a déposé selon lequel la population
15 musulmane de Sovici dans l'école se plaignait de leur côté de ne pas avoir
16 envoyé suffisamment d'aide. Ils se plaignaient du fait que l'armée, l'ABiH,
17 n'avait pas envoyé l'aide qu'ils demandaient et qu'ils voulaient, et pas un
18 mot concernant un grief concernant le HVO. La question est une question
19 juste, je vais donc la répéter, si vous le permettez.
20 Q. Il n'y avait pas de plaintes ou de griefs donc concernant le HVO; est-
21 ce que j'ai bien compris ?
22 R. Il me semble que vous n'avez pas tout à fait bien compris. Si on veut
23 aller jusqu'au bout, je vois ce que vous avez dit. Il ne s'agissait pas de
24 savoir s'ils s'étaient plaints ou pas parce que l'ABiH ne leur aurait pas
25 envoyé d'aide. Mais ils se plaignaient parce qu'ils estimaient avoir été
26 trompés par les commandants de l'armija et de l'ABiH. Dans le sens suivant,
27 j'interprète quelque peu. On leur avait dit, Ne vous en faites pas, passez
28 à l'attaque ou restez en retrait, puis nous, nous allons intervenir. Mais
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1 cette intervention ne s'est jamais produite.
2 Il ne s'agit pas ici d'une aide qui ne serait pas venue lorsque
3 quelqu'un les aurait attaqués. C'est le souvenir qui m'en est resté. J'ai
4 vu que les civils étaient extrêmement mécontents à l'égard des commandants
5 musulmans, à l'égard d'Halilovic, mais je ne me souviens pas qu'ils aient
6 exprimé une insatisfaction concernant quelqu'un d'autre, ou alors peut-être
7 que je n'étais pas présent au moment où ils auraient pu exprimer cela. Mais
8 au moment où j'étais présent, cela n'a pas été le cas.
9 Q. Je vous remercie. Vous venez juste d'exprimer à nouveau le point
10 de vue que je vous présentais dans lequel Me Alaburic a suggéré que ce
11 serait peut-être injuste. Je pense que je peux voir que c'est bien votre
12 point de vue des choses en question par rapport à la question que je vous
13 ai posée, donc que la question n'était pas injuste ou déplacée. Pas de
14 plaintes concernant le HVO, et comme vous venez ici aujourd'hui en 2009,
15 vous dites votre grande satisfaction qu'il n'y ait pas eu de plaintes et de
16 crimes commis contre des civils.
17 Les personnes dont vous avez parlé --
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Je dois objecter à cela. C'est un
19 commentaire, ou est-ce que c'est une déposition, ou est-ce que c'est un
20 résumé ? Je pense que son point de vue était --
21 M. LAWS : [interprétation] Je pense qu'il est en train d'essayer de prendre
22 les différents fils ensemble pour une question extrêmement difficile et
23 complexe, une véritable toile de réponses que le témoin a données.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] Il peut faire cela dans son mémoire final,
25 s'il vous plaît.
26 M. LAWS : [aucune interprétation]
27 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, posez vos questions.
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1 M. LAWS : [interprétation]
2 Q. Les personnes dont vous parliez qui se trouvaient dans cette école
3 étaient des prisonniers du HVO, et par la suite on les a fait monter dans
4 des cars, on les a transférés dans un secteur qui était près de Gornji
5 Vakuf, et je veux vous demander de regarder un document du HVO avec moi,
6 s'il vous plaît. A savoir le P 02372. C'est dans le même classeur, un peu
7 plus loin. Vous avez ce document, Docteur Bagaric ?
8 R. Oui, je le vois.
9 Q. Vous voyez qu'il y a le nom d'un quelqu'un qui s'appelle Marko Rozic,
10 que c'est quelqu'un qui est du bureau de la municipalité de Jablanica, du
11 bureau de la défense, et qu'on dit qu'il s'agit d'une décision. Elle est
12 datée du 13 mai 1993, et au point 1, ça dit :
13 "Tous les biens, meubles et immeubles des Musulmans qui ont émigré seront
14 considérés comme étant des dépouilles de guerre et appartiendront au
15 Conseil de la Défense croate, HZ HB."
16 Vous pouvez voir cela ?
17 R. Oui, je vois ce point particulier.
18 Q. La Chambre de première instance a entendu des dépositions des habitants
19 du village de cette localité qui ont été transférés et qui, quand ils sont
20 revenus, ont vu que leurs biens avaient été pris, leurs propriétés avaient
21 été prises pendant que ceci avait lieu, Docteur, de façon à garantir que la
22 population musulmane ne voudrait pas revenir.
23 La question que je vais vous poser est : ayant vu une partie de ces
24 éléments et de ce document, voulez-vous modifier ce que vous dites de vos
25 sentiments concernant Sovici et Doljani ou est-ce que la position, comme
26 vous l'avez dit tout à l'heure, que rien ne pourrait changer vos sentiments
27 à ce sujet ?
28 Mme ALABURIC : [interprétation] Objection à cette question. Le témoin a dit
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1 extrêmement clairement --
2 Mme NOZICA : [interprétation] Mais, Messieurs les Juges, je vais
3 l'expliquer. Cette façon de conduire le contre-interrogatoire, je dois dire
4 -- excusez-moi, Messieurs les Juges, mais il me semble que j'ai la
5 possibilité de formuler une objection. J'estime que c'était un contre-
6 interrogatoire particulièrement inapproprié. Les conclusions que tire M. le
7 Procureur ont pour but d'irriter le témoin. Si nous souhaitons vraiment que
8 le témoin ne réponde pas aux questions, qu'il soit irrité -- je vois que M.
9 le Juge Trechsel n'approuve pas mon intervention, mais je souhaiterais
10 quand même pouvoir finir.
11 Tout ce qu'il a affirmé dans le sens qu'il ne peut pas modifier ses
12 sentiments et sa mémoire des événements, il l'a expliqué de façon
13 extrêmement claire que ce sentiment qui était le sien lors de cette réunion
14 et ce qu'il a appris lors de cette réunion ne peut être modifié. On essaye
15 de lui suggérer qu'il est indifférent à l'égard de quelque chose qui aurait
16 pu se passer dont il n'aurait pas eu connaissance au cours de cette
17 réunion. Je pense que cela nous montre à quel point il s'agit là d'une
18 façon d'interroger le témoin qui est tout à fait inappropriée, d'où mon
19 objection. Merci.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica, votre intervention est totalement
21 inappropriée pour la raison suivante : le témoin a donné sa position.
22 Depuis le début, il ne change pas. Très bien. On a très bien compris ce
23 qu'il nous a dit.
24 Le Procureur, qui fait son travail, il a une thèse, le Procureur, qui n'est
25 la vôtre, et le Procureur lui met sous le nez un document. Ce document,
26 tout le monde peut le lire. Des Musulmans ont vu leurs maisons confisquées
27 et prises par le HVO. Le Procureur lui dit, regardez ce document, est-ce
28 que ce document modifie la perception que vous avez des événements ? C'est
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1 tout. Lui, il répond, non, ou, je découvre. Voilà, c'est ça le débat
2 contradictoire.
3 Vous, vous faites des objections parce que ça ne vous plait pas. Je vous
4 fais remarquer, Maître Nozica, que pendant les quatre heures que vous avez
5 utilisées, jamais le Procureur ne s'est levé. Il vous a laissé faire votre
6 travail, et vous avez bien fait votre travail. Laissez-lui faire son
7 travail, et les Juges, on verra.
8 Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Bien
9 entendu, j'accepte la position et l'opinion qui sont les vôtres, mais dans
10 ce cas-là il est manifeste que les Juges de la Chambre eux non plus n'ont
11 pas compris ce que nous a déclaré le témoin, c'est ce que j'en conclus. Car
12 le témoin nous a dit, j'ai des sentiments qui se rapportent aux faits et à
13 ce que j'ai entendu lors de cette réunion. Il n'a pas dit que rien ne
14 pouvait modifier ses sentiments s'il existait des faits ou des événements
15 au sujet dont il n'aurait rien entendu ni rien vu, et c'est pour cela que
16 j'interviens. Maintenant on lui pose une question comme est-ce que cela
17 peut changer vos sentiments, alors que ses sentiments ne sont liés
18 exclusivement qu'à ce qu'il a vu personnellement et entendu à l'époque,
19 c'est le sens de mon intervention. Autrement, je ne me serais pas levée, ce
20 que j'ai compris dans la question du Procureur c'est que ce dernier essaie
21 de nous montrer ce témoin sous un jour complètement différent.
22 M. LAWS : [interprétation] Pourrais-je répondre à cela, s'il vous plaît,
23 même brièvement.
24 Pour commencer, je n'essaye absolument pas d'irriter le témoin. Le
25 témoin, à deux reprises devant le Tribunal, a donné une version des
26 événements à Sovici et Doljani qui, selon l'Accusation, est totalement
27 fictive, et nous sommes autorisés à en parler. C'est ce que je fais, et je
28 vais essayer de passer aux événements de mai, si vous le permettez.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que je pourrais être entendu une
2 seconde.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux répondre à la question,
4 s'il vous plaît ?
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que je pourrais être entendu pour une
6 seconde, s'il vous plaît, parce que je pense que le problème, si je peux
7 simplement le résumer, c'est que l'Accusation est en train de qualifier de
8 façon erronée la déposition du témoin et est en train de l'utiliser comme
9 base de façon à formuler sa question suivante, en disant que ceci, si on
10 revient à cela et qu'on écoute bien avec beaucoup de soin et on regarde le
11 compte rendu, c'est exactement -- c'est une technique qui est utilisée par
12 des juristes de la "common law" lorsqu'ils veulent essayer de tendre un
13 piège à un témoin, et ce n'est pas le but de cette procédure. Donc
14 j'apprécierais que mon confrère veuille bien faire très attention de ne pas
15 donner une fausse qualification de la déposition du témoin lorsqu'il fait
16 des résumés et qu'il utilise ça comme une base pour dire la question
17 suivante.
18 M. LAWS : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, même dans l'hypothèse où vous
20 essayeriez de piéger le témoin, vous avez des Juges professionnels devant
21 vous; donc c'est impossible. Je n'entre pas dans ce -- J'écoute la
22 question, j'écoute la réponse, et je regarde la tête du témoin, c'est comme
23 ça que je procède. J'ai des documents sous les yeux.
24 Alors, Monsieur le Témoin, vous êtes docteur, vous êtes député. Vous avez
25 des hautes fonctions. Donc vous comprenez le sens d'une question du
26 Procureur, sous la foi du serment vous avez été avec la FORPRONU à Sovici,
27 avec Halilovic et le général Petkovic. Vous avez été dans cette école, vous
28 avez vu les gens qui étaient là. Vous êtes remonté dans le véhicule et vous
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1 êtes parti. C'est ce que vous nous avez dit, et je recueille votre version.
2 Le Procureur vient de le dire tout à l'heure, il met en cause ce que vous
3 dites. C'est clair.
4 Alors qu'est-ce que vous dites ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas
6 répondu à la dernière question que m'a posée M. le Procureur, ce sont les
7 conseils de la Défense qui ont réagi. Il m'a demandé si maintenant j'aurais
8 un sentiment différent après avoir lu cette décision, et j'ai dit
9 exactement ce que Me Nozica a déclaré. J'ai dit rien ne peut changer la
10 mémoire des événements et les sentiments que j'ai éprouvés sur le moment,
11 il y a tant d'années. Parce que j'avais véritablement peur que ce dont on
12 nous avait accusés se soit réellement passé, car cela aurait été terrible,
13 il y avait des accusions. Nous aurions tué les leurs, ils auraient tué les
14 nôtres, et nous avons vu que cela n'avait pas été le cas.
15 Alors lorsque je vois un ordre comme celui-ci, est-ce que ça a
16 vraiment été comme c'est décrit ici, moi je ne le sais pas, je n'en ai
17 absolument aucune connaissance et je pense que toute personne normale à
18 cette époque-là -- alors je ne sais pas si d'un point de vue militaire
19 cette décision est conforme, je pense que les maisons des personnes ne
20 peuvent être confisquées de cette façon à aucun moment. Il est tout à fait
21 normal que je regrette que de tels événements se soient produits, si cela a
22 bien été le cas.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je souhaiterais faire une
24 observation.
25 Je crois que dans le cours de ces nombreuses objections, et Me Alaburic
26 vient juste de parler à Me Nozica, mais je pense que vous n'avez pas --
27 vous n'insistez pas.
28 Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'estime simplement
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1 que Me Nozica a la priorité puisqu'il s'agit de son témoin. C'est pour ça
2 que je me suis rassise. Et effectivement ce que je souhaitais dire c'était
3 ce que ma consoeur a dit, je n'ai pas besoin de compléter. Merci.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bien. Très bien. Je suis pleinement
5 d'accord avec ce que décide le Président de la Chambre, il y a un point qui
6 à mon avis appelle à une critique de la question du bureau du Procureur, M.
7 Laws, et on la trouve à la page 31-32, et vous avez dit, Monsieur Laws :
8 "Et ceci se faisait, avait lieu, Docteur, de façon à s'assurer ou à veiller
9 à ce que la population musulmane ne veuille pas revenir."
10 Et là je pense que vous allez peut-être un peu au-delà de ce que l'on
11 trouve dans le document et vous donnez une interprétation qui est la vôtre,
12 et ceci n'est pas correct, je pense, de poser la question comme ça au
13 témoin comme si c'était un fait reconnu, accepté.
14 M. LAWS : [interprétation] J'accepte pleinement ce que vous dites, Monsieur
15 le Juge. L'Accusation avait dit que c'était une déduction qui pourrait être
16 tirée.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
18 M. LAWS : [interprétation] Merci.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Veuillez poursuivre.
20 M. LAWS : [interprétation]
21 Q. Au cours du mois suivant, Docteur Bagaric, au mois de mai 1993, un
22 grand nombre d'habitants musulmans de Mostar ont été emmenés de chez eux et
23 placés à l'Heliodrom. Vous le savez, n'est-ce pas ?
24 R. J'ai connaissance de l'Heliodrom.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous ne répondez pas exactement
26 à la question. Parce que la question du Procureur elle est, j'allais dire,
27 fondamentale. Il vous demande, est-ce que vous avez connaissance que des
28 gens ont été emmenés à l'Heliodrom ? Et vous, vous dites, je connais
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1 l'Heliodrom. Or la question était beaucoup plus précise. Il voulait savoir
2 si vous saviez que des gens avaient été amenés à l'Heliodrom. C'est ça le
3 fond de la question.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je savais quelle était la situation finale, à
5 savoir qu'un grand nombre de Musulmans de Bosnie ont été amenés à
6 l'Heliodrom. Dans quelles circonstances exactement, et dans quelles
7 conditions, je n'en ai pas le témoin, et je ne peux pas répondre autrement
8 à cette dernière question qui m'a été posée. Je suis au courant pour
9 l'Heliodrom, au sens où des personnes y avaient déjà été amenées et y
10 étaient présentes. Cela je le sais, c'est un fait.
11 M. LAWS : [interprétation] Si vous me permettez, si on pouvait aller à huis
12 clos partiel pour un moment simplement.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, à huis clos.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos
15 partiel, Monsieur le Président.
16 [Audience à huis clos partiel]
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1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 [Audience publique]
7 M. LAWS : [interprétation]
8 Q. Docteur Bagaric, le Témoin 2D-AB se souvenait du fait que c'était vous
9 qui lui aviez demandé d'aller immédiatement à l'Heliodrom après
10 l'arrestation qui avait eu lieu dans la première partie de mai à Mostar. Il
11 se rappelait que c'était vous, Docteur Bagaric, qui lui aviez dit d'aller
12 là-bas. Est-ce que votre mémoire correspond bien à cela ?
13 R. S'il l'a dit ainsi, je suis d'accord, bien sûr. J'étais en sa compagnie
14 peut-être pas quotidiennement mais très souvent, et nous nous donnions l'un
15 à l'autre non pas des ordres, il n'y avait pas d'ordres donnés entre nous,
16 mais on se passait des instructions, des informations. S'il l'a dit ainsi,
17 c'est que c'était bien le cas.
18 Q. J'aimerais vous demander si vous pouvez nous rappeler comment vous-même
19 vous avez appris qu'un grand nombre de personnes avaient été détenues à
20 l'Heliodrom. Qui vous l'a dit de façon à ce que vous puissiez dire au
21 Témoin 2D-AB qu'il devait se rendre à l'Heliodrom ?
22 R. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'était un événement qu'il
23 était impossible de cacher. Mes confrères médecins étaient au courant. Ils
24 commentaient ces événements. Ça aurait été impossible de ne pas être au
25 courant. Et si on parle bien de la même chose, il s'agissait du début d'un
26 conflit ouvert à Mostar entre les Musulmans et le HVO, c'est un événement
27 majeur à Mostar.
28 Q. Oui, nous comprenons bien cela, mais la situation était la suivante :
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1 les gens avaient été emmenés de chez eux, y compris, comme a pu le voir la
2 Chambre, un grand nombre de médecins emmenés à l'Heliodrom, et il semble
3 que vous auriez dit au Témoin 2D-AB qu'il devait s'y rendre, et vous êtes
4 d'accord qu'il avait probablement raison. Est-ce que vous disiez que
5 c'était simplement des renseignements généraux que vous aviez, en tant que
6 quelqu'un qui se trouvait à Mostar à l'époque, ou est-ce que c'était la
7 position sur laquelle quelqu'un vous avait demandé d'y aller, ou plus
8 exactement, demandé d'envoyer 2D-AB là-bas ?
9 R. Je ne me souviens pas que l'on me l'ait demandé. Mais comme je vous
10 l'ai dit, je répète, c'était un événement de taille. Je ne peux pas être
11 sûr quand est-ce que moi j'y étais, je ne peux pas m'en souvenir au bout de
12 tant d'années. Je crois que j'y suis allé bien plus tard à l'Heliodrom. Il
13 me semble que j'en ai parlé hier ou avant-hier. Là, je ne m'en souviens
14 vraiment pas, Monsieur le Procureur, pour vous dire comment ça s'est
15 produit.
16 Q. Il nous a également dit que lorsqu'il est revenu, et il avait trouvé
17 que c'était en fait une course désagréable, quand il est revenu il vous a
18 dit ainsi qu'à d'autres personnes du secteur santé ce qu'il avait vu; est-
19 ce que vous vous rappelez cela ?
20 R. Là, je ne me souviens pas de ce moment concret, mais je pense avoir eu
21 l'image générale, l'image générale de la situation là-bas pour ce qui est
22 de la nécessité d'intervenir d'une façon ou d'une autre pour ce qui est du
23 suivi de la situation et ainsi de suite.
24 Q. Il se souvient que c'était dans le secteur de la santé après être de
25 retour de l'Heliodrom, il avait dit à des gens, y compris à vous-même, ce
26 qu'il avait vu, des personnes qui étaient très effrayées, des personnes qui
27 ne savaient pas pourquoi elles avaient été emprisonnées, et des personnes
28 qui étaient massivement des Musulmans.
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1 Alors je voudrais, s'il vous plaît, que vous vous replaciez dans ce
2 qui se passait à ce moment-là, s'il vous plaît, Docteur Bagaric, parce que
3 là c'était une tournure d'événements vraiment extraordinaire dans une
4 ville, n'est-ce pas ?
5 R. Je vous l'ai déjà dit cela que c'était le début d'un conflit ouvert à
6 Mostar. C'était un événement de taille, en effet, et c'est une chose que je
7 redoutais tout le temps parce que tout nous indiquait que ça allait
8 malheureusement se passer, et hélas ça s'est passé. Et ceci a été l'une des
9 conséquences de l'événement en question.
10 Q. Mais oui, nous le savons, mais ma question est la suivante : elle est
11 là, c'est qu'il se souvient qu'il racontait aux gens au secteur de la santé
12 ce qu'il avait vu.
13 M. LAWS : [interprétation] Je donne la parole à Me Karnavas.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Peut-être que compte tenu des instructions
15 déjà données par la Chambre faudrait-il que le témoin puisse se voir lire
16 le compte rendu d'audience de manière à ce qu'il puisse bien entendre les
17 termes, et c'est vrai, je ne voulais pas interrompre.
18 M. LAWS : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est l'heure de la pause. Pendant la pause,
20 Monsieur le Procureur, vous aurez l'occasion de revoir la page exacte de ce
21 que 2B a dit, comme ça vous lui direz et tout le monde sera au clair. Bien.
22 Nous allons faire 20 minutes de pause.
23 --- L'audience est suspendue à 15 heures 49.
24 --- L'audience est reprise à 16 heures 12.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Procureur, vous avez dû donc
26 trouver les propos exacts du Témoin 2D-AB, donc vous pouvez peut-être les
27 indiquer à M. Bagaric.
28 M. LAWS : [interprétation] Il s'agit de la page 37 602 du compte rendu
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1 d'audience, c'est une réponse à une question posée par M. le Juge
2 Antonetti, ligne 9, la question commence à 15 :
3 "Lorsque vous avez quitté l'Heliodrom, avez-vous dit à vos
4 supérieurs, je vais à la prison -- je vais à l'Heliodrom, j'ai rencontré
5 des gens que je connaissais, ces gens ne savaient pas pourquoi ils étaient
6 détenus ? Si vous avez dit ça à vos supérieurs, qu'est-ce qu'ils vous ont
7 dit ?"
8 La réponse était :
9 "Bien sûr, je le lui ai dit. C'était mon devoir de le leur dire.
10 Lorsque je me suis rendu là-bas, comme vous le savez déjà, le Dr Bagaric
11 m'a dit de me rendre là."
12 Docteur Bagaric, vous étiez le supérieur du Témoin 2D-AB ?
13 R. Oui, c'est exact.
14 Q. J'espère que nous sommes d'accord à présent. Est-ce que vous corroborez
15 son souvenir selon lequel à son retour de l'Heliodrom il vous a fait
16 rapport au sujet de ce qu'il y avait vu ?
17 R. Je n'ai pas à être d'accord avec ses souvenirs ou pas, si lui il dit
18 que c'était ainsi, je veux bien être d'accord parce que c'est une personne
19 qui a fait à titre professionnel son travail, et c'est une personne avec
20 qui je coopérais de façon très rapprochée. Donc tout ce que cette personne
21 a pu dire, je considère qu'il en a été ainsi ou presque tout à fait ainsi.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, quand j'avais posé la question à ce témoin,
23 j'avais en arrière-plan la situation de vos confrères musulmans et je
24 m'étais dit en lui posant la question, mais sachant qu'il avait des
25 collègues qui avaient été arrêtés, c'était quand même quelque chose
26 d'important.
27 C'est comme imaginons que nous les Juges ici nous apprenions que
28 certains de nos collègues auraient été arrêtés. Donc c'est un événement
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1 colossal qui reste encré dans nos mémoires. Donc quand vous avez su que vos
2 collègues musulmans avaient été arrêtés, c'est quelque chose qui a dû
3 certainement vous frapper, vous et tous les médecins croates, et vous avez
4 dû vous demander mais pourquoi on les a arrêtés ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut que je sois tout à fait précis et
6 sincère. A l'époque, à l'époque rapprochée de ce début mai, je ne suis pas
7 sûr que je savais d'ores et déjà qu'il y avait là-bas des médecins. Si le
8 (expurgé) m'avait dit que si, il devait en être ainsi. Mais moi je ne
9 me souviens pas de ce moment-là.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Nous devons faire une expurgation parce
11 que vous avez dit le nom du témoin. Comme il y avait des mesures de
12 protection, donc, Monsieur le Greffier, faites une ordonnance.
13 Continuez, Monsieur.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'imagine, bien que je ne le sache pas
15 vraiment, que ces collègues qui auraient été détenus, les collègues
16 Stranjak et Hadzic, me semble-t-il. Je ne suis pas sûr du fait qu'ils aient
17 fait formellement partie du HVO ou pas et je ne sais pas dans quelles
18 circonstances cela s'est produit. Mais je sais certainement que ce sont des
19 médecins qui ultérieurement ont été dans ce centre là-bas et avec qui nous
20 avons établi - si on peut s'exprimer ainsi - un travail important parce
21 qu'ils sont restés travailler à l'Heliodrom. Toujours est-il que pour tout
22 médecin, moi compris, c'était quand je l'ai appris, et je ne peux pas dire
23 que précisément à ce moment-là ce n'était pas une chose agréable à
24 apprendre.
25 M. LAWS : [interprétation]
26 Q. Oui, je vais parler des médecins dans un instant, mais je vous posais
27 une question au sujet du moment du retour du Témoin 2D-AB lorsqu'il vous a
28 fait rapport, et vous avez dit que vous ne savez pas très bien, mais que
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1 s'il l'a dit ça devait être le cas, mais vous ne vous souvenez pas de cela.
2 C'est ce que vous avez dit à la page 42 --
3 R. Oui, c'est cela.
4 Q. -- ligne 18.
5 R. Oui.
6 Q. Si vous vous reportez à la liasse, document 2P 021315 [comme
7 interprété]. Est-ce que vous avez ce document ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous pouvez voir qu'il est question du nom d'un de vos collègues dont
10 vous avez déjà parlé, le Dr Ante Kvesic; est-ce que c'est exact ?
11 R. Oui, Ante Kvesic, oui.
12 Q. Le titre du document, liste des employés de l'hôpital régional du HVO
13 de Mostar et de leurs parents qui ont été emmenés de leurs appartements.
14 C'est une liste qui contient 106 noms.
15 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, confrère, ce n'est
16 pas le bon document qu'on a sur le moniteur. Ici on a le 3315, et le
17 Procureur lui il parle du 2315. Donc l'accusé ne voit pas le bon document,
18 on vient d'attirer mon attention et c'est véritablement exact, on a le
19 mauvais document sur le moniteur.
20 M. LAWS : [interprétation] Merci. P 02315. Je pense que le témoin lui
21 dispose du bon document.
22 Q. Est-ce que vous saviez que ces personnes étaient détenues à
23 l'Heliodrom, Monsieur le Témoin ?
24 R. Pour être tout à fait sincère, je ne me souviens pas de cette liste, ce
25 que je sais toutefois c'est que le Dr Kvesic, qui était le directeur de
26 l'hôpital, a assurément tenu compte de tout ceci pour ce qui est de ce qui
27 s'était passé avec les différents individus. Alors bien sûr, ici je ne peux
28 pas savoir lesquels d'entre eux étaient médecins, mais ici on peut voir les
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1 noms, un, deux, donnez-moi un instant, alors de là à savoir qui sont les
2 membres de leurs familles.
3 Alors autre raison pour laquelle je ne peux pas parler de façon aussi
4 déterminée que cela, c'est qu'à l'époque, pour des concours de
5 circonstances, il est certain que le 11 mai je n'étais pas à Mostar. Je
6 crois que j'y étais le 1er mai ou le 5 mai. Mais au moment donné j'étais
7 déjà en voyage.
8 Je crois que ça coïncide avec la période où je suis allé en séjour au
9 Canada, c'était une chose qui avait été concertée et convenue auparavant,
10 la procédure était plutôt compliquée pour ce qui est de la délivrance des
11 visas. J'ai donc passé un certain temps au Canada en concertation avec mes
12 collègues médecins et avec mes supérieurs hiérarchiques afin que le service
13 fonctionne comme il devait. C'est la raison pour laquelle je ne peux pas
14 parler de façon qualifiée de la chose. Mais si le Dr Kvesic a signé cela,
15 c'est qu'il est possible qu'il y ait eu là des familles de médecins qui
16 d'une certaine façon peuvent fort bien avoir été emmenées à l'Heliodrom,
17 mais là, vraiment, je ne sais pas en dire plus.
18 Q. Veuillez m'aider, Docteur Bagaric. Est-ce que vous dites que vous
19 saviez ou que vous ne saviez pas qu'en mai 1993, un nombre important de
20 civils à Mostar ont été arrêtés et emmenés à l'Heliodrom ? Est-ce que vous
21 le saviez en mai 1993 ou est-ce que vous ne le saviez pas, peut-être du
22 fait de votre présence au Canada ou du fait que vous étiez en voyage ?
23 R. J'ai dit que j'étais au courant, bien sûr que si. Je l'avais déjà dit
24 avant, j'avais eu vent de la chose. Mais je me suis penché sur le document
25 qui est daté du 11 mai, donc je n'étais pas sûr.
26 Q. Merci.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Un instant, Docteur Bagaric. Soyez précis. Nous
28 apprenons, parce que moi je ne le savais pas, que vous étiez au Canada au
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1 mois de mai. Alors vous êtes parti au Canada quand et vous êtes revenu
2 quand ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense, et je n'en suis vraiment pas sûr, je
4 pense que c'est vers le 15 que j'y suis arrivé, et j'y suis resté au moins
5 une vingtaine de jours, au moins; mais il se peut qu'il y ait eu quelques
6 jours de plus ou de moins ça et là, mais je crois que c'était bien à cette
7 période-là.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce qui veut dire que le 9 mai, le 10 mai et le 11
9 mai vous étiez dans la région, vous étiez dans la région de Mostar ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me trouvais dans le secteur de Mostar
11 lorsqu'il y a eu ces premiers conflits. Je ne sais pas vous donner la date
12 exacte maintenant. Si ça s'est passé avant le 15 ou quelques jours avant,
13 j'y étais assurément. Mais il me semble que c'était le 9, n'est-ce pas ?
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, quand le 11 mai le Dr Kvesic - excusez-moi
15 la prononciation - fait ce rapport où il apparaît qu'il y a 106 personnes
16 relevant de la famille médicale au sens large qui ont été expulsées de
17 leurs appartements et placées quelque part, et on a plusieurs docteurs, il
18 y a des noms, le 12, le 13, et cetera, c'est quand même un événement
19 important qui touche la communauté médicale. Donc le 11 mai, vous avez dû
20 être informé. Il ne peut pas en être autrement.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai déjà dit que je me
22 souvenais de l'événement au terme de quoi certains médecins et personnels
23 de l'hôpital ont été emmenés. Mais ici on dit Mostar le 11 mai. Alors je ne
24 sais pas si ça s'est passé ce jour-là. Est-ce que le 11 mai on a rédigé le
25 document, enfin comprenez-vous, je ne sais pas vous le dire maintenant,
26 mais je suis au courant de l'événement, c'est sûr.
27 M. LAWS : [interprétation]
28 Q. Au moment où vous en avez été informé, la situation était la suivante.
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1 Le HVO avait emmené des personnes qui n'avaient rien fait, ils les avaient
2 jetées dans une prison un petit peu à l'extérieur de Mostar; est-ce que
3 nous pouvons être d'accord sur cela ?
4 R. Les gens ont certainement été emmenés de chez eux vers l'Heliodrom. Ce
5 n'est pas contesté. C'est ma réponse. Alors oui, excusez-moi, un instant,
6 je ne peux pas entrer dans le détail de la culpabilité ou de la non-
7 culpabilité de ces gens-là, j'imagine qu'il y a certainement eu un grand
8 nombre de personnes à ne pas avoir été coupables de quoi que ce soit, je le
9 suppose.
10 Q. En votre for intérieur, vous n'êtes tout de même pas convaincu,
11 Monsieur Bagaric, que dans cette liste de 106 médecins et leurs familles et
12 autre personnel médical, il y a uniquement des délinquants qui ont été
13 arrêtés ? Vous n'êtes absolument pas convaincu de cela, Docteur, n'est-ce
14 pas ?
15 R. Non, il n'en n'est pas ainsi. Quand je vois ces noms, s'il est exact
16 que Mila, Maja, et tout ça c'est des médecins, mais Safiqa [phon], Azra,
17 Latifa, enfin je veux bien croire que c'étaient des personnes qui ne
18 pouvaient avoir fait de mal, et je le suppose. Mais je ne peux être certain
19 du fait qu'aucune des personnes n'avait fait quoi que ce soit de mal. Je
20 suis au courant de l'événement, pas de celui-ci concrètement, mais je sais
21 qu'il y a eu des cas où des médecins, et je parle en premier lieu de
22 médecins, ont été emmenés au camp ou en prison, ou comment l'appelait-on
23 déjà.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, si comme vous le dites certains pouvaient
25 se voir reprocher quelque chose, mais j'attire votre attention, regardez le
26 32 et le 37. Vous voyez, ce sont des enfants. Comment vous expliquez cela ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'avais pas vu, des enfants, non. Je ne
28 l'avais pas vu, bien sûr. Mais je l'ai déjà dit, Monsieur le Juge, si on a
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1 emmené des femmes, et là on voit des enfants, il est normal que les raisons
2 à cela n'existaient pas, à moins que les raisons ne se soient fondées sur
3 la nécessité de protéger ces personnes en raison des conflits. Si cela
4 était la raison, je peux comprendre dans une certaine mesure, mais je ne
5 peux pas comprendre dans le contexte total, parce que c'est une chose
6 malheureuse que cela ait eu à se produire.
7 M. LAWS : [interprétation]
8 Q. Au cours de cette période, vous rencontriez régulièrement Bruno Stojic,
9 n'est-ce pas ?
10 R. Sincèrement, je ne me souviens pas de l'avoir rencontré régulièrement.
11 Je m'en excuse, mais veuillez m'aider. Le premier jour du conflit était-ce
12 le 5 ou le 6 qu'il y a eu éclatement du conflit au mois de mai ?
13 Q. Je parle explicitement de Bruno Stojic. Je vais vous parler de lui un
14 moment. Vous avez dit à la Chambre que vous le rencontriez lorsque cela
15 était nécessaire. Est-ce que vous avez parlé avec lui des événements qui
16 ont mené à l'incarcération de gens dans l'Heliodrom ?
17 R. A cette période-là, suite à l'événement jusqu'à la date qui est ici, je
18 ne pouvais pas lui en parler parce que je vous ai dit que j'étais déjà en
19 voyage au Canada, comme indiqué. Il est certain que plus tard lorsque je
20 suis revenu, non seulement je me suis entretenu avec Bruno, mais je me suis
21 entretenu avec plein de personnes à ce sujet.
22 Q. Vous étiez de retour en juin et on devait énormément en parler en juin
23 à Mostar, je parle de ces arrestations. L'Heliodrom continuera d'ailleurs à
24 fonctionner comme nous le verrons pendant de nombreux mois après cela. Est-
25 ce que vous avez à un moment ou à un autre parlé avec Bruno Stojic de ce
26 qui se passait et de la raison pour laquelle des gens étaient incarcérés à
27 la prison de
28 l'Heliodrom ?
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1 R. A mon retour, il me semble que ce groupe de personnes avait déjà été
2 relâché pour autant que je m'en souvienne, ou la grande majorité, la
3 plupart d'entre eux avaient déjà été relâchés. Je ne me souviens pas
4 d'avoir eu un entretien à ce sujet avec Bruno Stojic ou avec qui que ce
5 soit d'autre sur ce sujet, parce que j'étais là où j'étais, et il me semble
6 qu'à mon retour à la grande majorité de ces personnes étaient déjà
7 libérées. Suite au premier conflit les choses s'étaient calmées, et la
8 situation n'a plus été aussi dramatique qu'au tout début des conflits.
9 Q. Comme nous en sommes convenus et comme nous le verrons, quelle que soit
10 la situation en ce qui concerne les médecins et leurs familles, l'Heliodrom
11 a continué à fonctionner pendant de nombreux mois, et je vais vous répéter
12 la question pour vous donner une autre occasion d'y répondre. Pendant cette
13 période, avez-vous parlé avec Bruno Stojic de ce qui avait mené à
14 l'incarcération de ces personnes à l'Heliodrom ?
15 R. Votre question porte sur la totalité de la période, entre la création
16 de l'Heliodrom jusqu'au bout ou alors cette phase-ci ?
17 Q. Si c'est la raison pour laquelle j'ai demandé si à un moment ou à un
18 autre vous avez eu cette conversation, j'espère que vous avez bien compris.
19 Laissez-moi terminer pour que les choses soient claires. N'avez-vous jamais
20 eu de conversation avec lui à ce sujet ?
21 R. Je pense que oui, mais mis à part lui je pense avoir eu à en parler
22 avec un grand nombre de personnes, il n'y avait pas que Bruno Stojic. Je
23 dois reconnaître que ce n'était pas souvent, parce qu'on ne se voyait pas
24 souvent, mis à part les réunions collégiales.
25 Q. Qu'est-ce que Bruno Stojic a dit au sujet de la raison pour laquelle
26 ces personnes étaient incarcérées à l'Heliodrom ?
27 R. Je ne peux pas vous interpréter ce que Bruno Stojic a dit, ou ce que
28 j'ai dit, ou ce quiconque a dit. Il me semble que ces entretiens se sont
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1 rapportés à la situation, comme par exemple du point de vue de ce cas
2 concret aux fins d'améliorer les choses, d'influer sur la situation, et je
3 crois qu'il y avait une image générale de la situation sécuritaire si
4 détériorée à Mostar qu'on ne savait plus quelle était la bonne décision à
5 prendre et comment se comporter. Il me semble que c'est dans ce contexte-là
6 que nous nous sommes entretenus dans la mesure dans laquelle j'ai eu à
7 m'entretenir avec quiconque, Bruno Stojic compris.
8 Q. Est-ce que je peux encore une fois essayer de poser la question. Vous
9 nous dites que vous ne pouvez pas vraiment interpréter ses propos, ce que
10 vous avez dit ou les propos de quiconque. Est-ce que vous pouvez nous
11 apporter l'aide quelconque au sujet de ce qu'a dit Bruno Stojic au sujet
12 des raisons pour lesquelles des personnes étaient incarcérées à l'Heliodrom
13 ?
14 R. Je ne m'en souviens pas concrètement. Suite à ces conflits ouverts et
15 l'impossibilité d'exercer un contrôle vis-à-vis de la situation totale sur
16 ce territoire et l'impossibilité de procéder à la protection tant des
17 Croates que des Musulmans, car les hostilités étaient devenues évidentes et
18 les choses allaient de mal en pis. Je ne m'en souviens pas dans le concret.
19 Q. Est-ce que c'est là votre dernière réponse à ma question ?
20 R. Oui, c'est ce que je maintiendrais comme réponse.
21 Q. Est-ce que vous savez qu'il y avait un programme de travaux forcés à
22 l'Heliodrom ?
23 R. Une fois que je suis rentré du Canada, il me semble qu'au bout d'un
24 certain temps je suis allé en personne à l'Heliodrom et j'y ai vu la
25 situation telle qu'elle se présentait. J'ai appris par la suite, notamment
26 à la lecture de rapports de médecins qui travaillaient là-bas et après
27 m'être entretenu avec eux, qu'il y a eu des événements où les détenus
28 étaient envoyés pour accomplir certaines tâches. Mais c'est au bout d'un
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1 certain temps que je l'ai appris, je n'en ai pas été informé de façon
2 directe.
3 Q. Votre collègue, le Dr 2D-AB, a dit à cette Chambre qu'il avait des
4 soupçons au sujet de l'existence d'un programme de travail forcé dont il
5 vous a fait part, il s'agit de la page 37 648 du compte rendu d'audience.
6 Cela concorde avec votre souvenir dont vous venez de nous faire part ?
7 R. Je répète que je l'ai ouï-dire de la part d'un collègue médecin.
8 Je ne sais pas vous dire assurément si c'était lui ou si c'était quelqu'un
9 d'autre. Ces suspicions existaient bel et bien. D'après ce que j'en sais à
10 présent, ça s'est bel et bien produit mais je ne sais pas vous parler de
11 l'ampleur du phénomène, et je n'ai aucun détail à vous relater à ce sujet.
12 Q. Il était préoccupé parce qu'il connaissait la convention de Genève,
13 vous en avez parlé aussi, il savait qu'il s'agissait d'un crime de guerre,
14 il se souvenait d'une conversation au cours de laquelle il avait dit au
15 directeur de l'Heliodrom, Stanko Bozic, d'être prudent car cela constitue
16 un crime de guerre. Qu'avez-vous fait par la suite de ces soupçons ?
17 R. Je le répète. J'étais responsable des services de santé au sein du HVO,
18 donc j'étais chargé de la santé. Je suis une personne qui a ce domaine
19 d'intervention-là, pour ce qui est du service de santé et la mise en place
20 de ce service de santé, je recevais des rapports plus ou moins réguliers,
21 mais j'étais au courant de la chose. Ce dont vous êtes en train de parler,
22 je ne l'ai jamais su, je l'ai appris à posteriori, à savoir lorsqu'il y a
23 eu des gens qui sont allés accomplir des tâches et qui ont été blessés se
24 faisant, puis soignés à l'hôpital de Mostar. C'était une période où
25 pouvaient l'apprendre tous ceux qui devaient l'apprendre.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous poser une question d'ordre technique.
27 Au département de la Défense, dont M. Stojic assurait la
28 responsabilité puisqu'il était le numéro un, est-ce qu'il avait l'habitude
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1 de réunir des personnes sur différents sujets ? Vous-même, en vous faisant
2 venir puis d'autres personnes pour dire, voilà on a tel problème, voilà la
3 situation, par exemple, l'Heliodrom, il y a des détenus, qu'est-ce qu'on
4 fait ? Est-ce qu'il travaillait de cette façon ou bien c'était très
5 compartimenté et vous ne savez pas s'il y avait une politique générale ?
6 Vous ne vous occupiez que de vos 25 personnes, puisque vous nous avez dit
7 hier qu'il y avait 25 personnes, et puis il n'y avait pas de réunions
8 thématiques ou des réunions sur des problèmes très importants; est-ce que
9 vous pouvez nous éclairer sur la façon dont tout cela fonctionnait ? Bien
10 entendu, si M. Stojic témoignait, je lui poserais directement la question.
11 Mais dans l'état, je n'en sais strictement rien, donc moi je vous pose la
12 question.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] A la page 15, pour le compte
14 rendu d'audience, page 51, ligne 22, il y a une coquille assez amusante,
15 parce qu'on dit il n'y avait pas de réunions fanatiques. Le terme est
16 "thématique" en anglais, pas "fanatique" en anglais.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, j'ai parlé de réunions thématiques pas
18 fanatiques, évidemment. Alors, Monsieur le Témoin, et je remercie mon
19 collègue d'avoir vu cela.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Président, je
21 dirais que nous sommes en train de parler d'une période où j'étais rentré
22 du Canada. C'est une période où il y a des hostilités non dissimulées et
23 une guerre qui menaçait d'éclater, je ne me souviens pas d'une réunion
24 quelconque et je ne pense avoir été présent moi-même. Je ne pense pas que
25 l'administration collégiale se soit réunie à ce moment-là, sincèrement,
26 c'était une période de grand chaos. On ne savait pas de quoi allait avoir
27 l'air le lendemain. Chacun dans son segment faisait ce qu'il pensait devoir
28 faire. Comme j'étais chargé du secteur que vous savez, j'étais très occupé
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1 en la matière et je ne me souviens pas véritablement pas d'avoir eu de
2 conversations à ce sujet à l'époque. Je ne pense pas qu'il y ait eu des
3 réunions thématiques pour les nommer ainsi ou alors si oui, moi, je n'ai
4 pas été présent à celles-ci.
5 M. LAWS : [interprétation]
6 Q. Est-ce que vous avez fait part à Bruno Stojic à un moment ou un autre
7 de vos préoccupations quant à l'existence d'un programme de travail forcé à
8 l'Heliodrom ?
9 R. Je reviens à ce constat que j'ai fait un instant. D'une certaine façon,
10 je me suis concentré, dans la plus large mesure, je me suis impliqué dans
11 la fourniture des services médicaux en tant que telle, je me suis préoccupé
12 de la façon dont les personnels médicaux pouvaient contribuer à
13 l'amélioration de la situation. C'est dans ce cadre que j'ai informé M.
14 Stojic des activités que j'avais l'intention d'entreprendre.
15 Q. Pour ceux qui étaient blessés et tués à la suite du programme de
16 travail forcé à l'Heliodrom, il était nécessaire d'avoir des soins
17 médicaux, et vous étiez également brigadier du HVO, or c'était cette même
18 organisation qui utilisait des hommes de l'Heliodrom pour réaliser des
19 tâches dangereuses et mettant en danger la vie de ces hommes.
20 Vous avez eu de tels soupçons, n'aurait-il pas été naturel de votre
21 part de dire à Bruno Stojic, écoutez, je ne sais pas, mais je pense qu'il
22 existe un problème à l'Heliodrom ?
23 R. C'était une époque où nous savions tous que nous avions un
24 problème à l'Heliodrom, un problème dans toutes les dimensions de cette
25 situation, telle qu'elle était. Je reviens à cette question des personnes
26 qui ont été blessées et honnêtement dans cette première --
27 Q. -- le travail forcé des personnes que l'on faisait sortir de
28 l'Heliodrom pour travailler plutôt que de nous dire tous les aspects de la
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1 situation au courant desquels vous êtes -- c'est ça que je vous demande.
2 Pourquoi est-ce que vous n'essayez pas simplement ?
3 R. A aucun moment en tant que médecin, en tant que responsable des
4 services de santé du HVO, je n'ai pas reçu d'information fiable indiquant
5 que cela se soit produit, dans cette période-là.
6 Q. Si vous pourriez maintenant regarder le document qui se trouve dans le
7 classeur devant vous, le P 04352. C'est une lettre qui est datée du 20 août
8 1993, au nom de Stanko Bozic, adressée à Bruno Stojic, et a pour titre
9 "Secret militaire". C'est Stanko Bozic qui a écrit à M. Stojic pour lui
10 dire qu'il y a eu une visite du comité international de la Croix-Rouge, et
11 vous pouvez voir les points qui dit-on seraient en violation des
12 conventions de Genève au sein de l'Heliodrom, numéro 1, "le fait d'envoyer
13 des détenus travailler" et ensuite il est question de la nourriture et des
14 mauvaises conditions.
15 R. Oui, je le vois.
16 Q. Je vais vous poser la question si je puis dire depuis l'autre bout.
17 Est-ce que Bruno Stojic ne vous a jamais dit, Docteur Bagaric, vous avez là
18 des gens de votre section qui vont à l'Heliodrom. Est-ce que vous avez des
19 renseignements concernant le fait d'envoyer des détenus travailler ? N'a-t-
20 il jamais évoqué la question avec vous ?
21 R. Bien entendu que Bruno Stojic était au courant du fait que nos médecins
22 se rendaient sur place à l'Heliodrom, à l'époque si mon confrère (expurgé)
23 excusez-moi, si mon confrère a dit -- excusez-moi. Il va falloir sans doute
24 encore enlever ce que je viens de dire.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, il faut expurger.
26 Continuez, Monsieur Bagaric.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette période-là, la période de sa visite
28 là-bas, puis ultérieurement lorsque je m'y suis rendu aussi, bien entendu
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1 que Bruno Stojic était au courant et que nous avions l'intention, d'une
2 certaine façon dans cette période qui était infernale et horriblement
3 difficile, de procéder à une intervention humanitaire visant à fournir des
4 services de santé dans cette zone. Je pense qu'il le savait et que d'autres
5 le savaient aussi.
6 M. LAWS : [interprétation]
7 Q. Il se peut que ce soit une question d'interprétation, mais je ne suis
8 pas au clair -- assurément, je ne vois pas vraiment ce que vous dites. Ce
9 qu'on lit dans l'anglais c'est :
10 "Pendant cette période lorsqu'il est parti, et plus tard lorsque je suis
11 parti, bien sûr que Bruno Stojic savait cela, et c'était notre intention
12 d'une certaine manière dans ces temps difficiles de faire ce que l'on
13 pouvait comme intervention humanitaire."
14 Pourriez-vous simplement répondre à la question ? Est-ce que vous dites que
15 Bruno Stojic savait ou non qu'il y avait un programme de travaux forcés au
16 sein de l'Heliodrom ?
17 R. Non, je n'ai pas dit cela. La première fois, vous m'avez demandé dans
18 cette dernière question que vous avez posée si nous en tant que médecins,
19 lorsque l'on se pose la question de savoir quelle était l'organisation de
20 ces services de santé à l'Heliodrom, et j'ai répondu que oui, certainement
21 il avait la possibilité d'être au courant.
22 Mais est-ce que Bruno Stojic était au courant de cela et que savait-
23 il exactement avant ce rapport du 20 août, véritablement je ne le sais pas.
24 Je ne sais pas si Bruno Stojic était au courant, s'il savait qu'il y avait
25 des personnes qui étaient forcées de travailler là-bas. Cela je l'ignore.
26 Q. Bien --
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, Monsieur Bagaric, vous avez
28 devant vous la lettre que le directeur de la prison envoie à M. Stojic.
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1 Cette lettre est importante parce qu'elle révèle que M. Bozic se pose des
2 problèmes pour le futur vis-à-vis de ce Tribunal, et il dit, moi je ne
3 tiens pas à être responsable devant le Tribunal. Il conclut en disant qu'il
4 ne faut pas que tout ça en quelque sorte soit reproché un jour au
5 commandement de la prison, au commandement du HVO et dans l'intérêt de
6 "notre peuple".
7 Donc c'est une lettre très alarmante, car elle parle de violations des
8 conventions de Genève, elle indique qu'il y a des détenus qui travaillent à
9 l'extérieur. Alors un document de cette importance, 20 août, vous n'en avez
10 pas entendu parler, ce n'est pas venu à vos oreilles ? Parce qu'un
11 responsable agitait le spectre du Tribunal des mises en cause à venir. Ça
12 ne vous est pas venu aux oreilles ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai répondu à la
14 question de M. le Procureur. J'ai dit que j'ignorais si Bruno Stojic avait
15 été ou non informé de cela avant le 20 août. Mais il est manifeste que si
16 Bruno Stojic a bien reçu cette lettre, à partir du 20 août il en a été
17 informé. Je me référais à la période précédente jusqu'à la date du 20 août.
18 Alors je n'en suis pas sûr ni n'ai la possibilité de savoir ce que
19 Bruno Stojic en savait ou non concrètement. Moi-même, en tant que médecin,
20 c'est après coup que j'ai été informé que des personnes dans le courant de
21 certains travaux ont été blessées. C'était plutôt du point de vue des
22 personnes qui étaient à l'hôpital et qui étaient soignées à l'hôpital.
23 M. LAWS : [interprétation] Tournons la page de ce document, si possible.
24 Une partie de ce que je viens de dire n'a pas été enregistrée, donc c'est
25 de ma faute en fait.
26 Q. Pourriez-vous retrouver simplement la phrase où ça commence par :
27 "Après le départ de la Croix-Rouge, nous n'avons pas été en mesure de
28 porter remède à ces infractions." Vous voyez ces mots ? C'est à environ six
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1 lignes à partir du bas de la lettre. La phrase suivante se lit -- vous avez
2 cela, Docteur Bagaric ?
3 R. Excusez-moi. Mais c'est dans cette lettre du Dr Bozic, n'est-ce pas ?
4 Un instant, s'il vous plaît.
5 Q. "Après le départ de la Croix-Rouge, nous n'avons pas pu remédier à
6 cette situation. Au contraire, un certain nombre de blessés et de tués à
7 cet endroit de travail augmente de jour en jour."
8 Donc je voudrais qu'on revienne à la question que je vous ai posée tout à
9 l'heure. Est-ce que M. Stojic ne vous a jamais dit, Docteur Bagaric, vous
10 avez des gens qui vont aller à l'Heliodrom. Pourriez-vous m'aider pour
11 savoir s'il y a des personnes qui sont blessées et tuées ? Ces personnes
12 qui vont aller à l'Heliodrom sont des médecins, est-ce que nous pourrions
13 peut-être apprendre quelque chose de ce qui se passe. Est-ce que M. Stojic
14 --
15 Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges --
16 M. LAWS : [aucune interprétation]
17 Mme NOZICA : [interprétation] Oui, j'ai une objection sur la forme de la
18 question pour la raison suivante. Le témoin a dit si Bruno Stojic a reçu
19 cette lettre, alors il était au courant. Tout d'abord, il faudrait vérifier
20 ce que le témoin peut savoir concernant cette question, est-ce que Bruno
21 Stojic a reçu ou non cette lettre, et ensuite on pourrait éventuellement
22 continuer. Je voudrais attirer l'attention sur quelque chose qui n'a pas
23 été versé au compte rendu d'audience, en page 56, ligne 9, le témoin dit,
24 "if Bruno Stojic received this paper," "si Bruno Stojic a reçu cette
25 lettre".
26 M. LAWS : [interprétation] Nous n'avons pas la possibilité de lui demander,
27 donc je demande au témoin si Bruno Stojic a jamais évoqué la teneur de
28 ceci. Ça pourrait nous aider sur la question de savoir s'il l'a reçue, et
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1 peut-être que ce serait davantage pertinent pour le procès. A mon avis,
2 c'est une question parfaitement juste à laquelle le témoin peut répondre,
3 s'il veut bien.
4 Q. Est-ce que Stojic lui a jamais dit quoi que ce soit concernant les
5 inspections qui pourrait m'aider pour savoir s'il est vrai que des
6 personnes sont tuées et blessées et qu'il y a du travail forcé à
7 l'Heliodrom ?
8 R. J'ai dit en quelle qualité nos personnels se sont rendu là-bas, et moi-
9 même personnellement parce que je m'y suis rendu. Mais ce au sujet de quoi
10 vous m'interrogez concrètement, je ne m'en souviens pas. Je n'ai pas
11 connaissance que cela ait eu lieu.
12 Q. La raison pour laquelle vos hommes sont allés là-bas est sans aucun
13 lien avec la réponse à ma question qui était ainsi : est-ce que Bruno
14 Stojic a jamais évoqué cette question ? Est-ce que c'est une question
15 difficile à laquelle il faut répondre ? Je vous dis respectueusement que
16 vous êtes capable de nous dire si la vérité est qu'il l'a fait ou que vous
17 ne pouvez pas vous en souvenir, s'il l'a fait.
18 R. J'affirme en toute responsabilité que je l'ignore.
19 Q. Vous ne savez pas si M. Stojic vous a jamais dit, de l'autre côté, il y
20 a un endroit où j'ai entendu dire qu'il y a des personnes qui sont en train
21 d'être tuées et blessées ? Vous ne savez tout simplement pas quelle est la
22 situation ?
23 R. Non, je ne me souviens pas que Bruno Stojic me l'ait dit.
24 Q. La réalité c'est, je vous le dis, c'est quelque chose qui n'était un
25 secret pour personne. C'était quelque chose que l'on savait bien, et
26 c'était quelque chose qui était toléré parce que c'était utile, et ça c'est
27 la vérité, n'est-ce pas ?
28 R. Non. Pour la raison suivante, j'ai dit qu'il s'agissait de quelque
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1 chose dont on avait entendu parler, à savoir que des personnes étaient
2 envoyées pour exécuter des travaux. Mais je l'apprenais avec un certain
3 décalage temporel. Moi-même personnellement je l'apprenais de la part des
4 personnels médicaux employés à l'hôpital de guerre que j'avais l'occasion
5 de rencontrer de temps en temps et qui me disaient que ces personnes
6 étaient soignées.
7 Mais j'ai dit tout à fait clairement ne pas me rappeler que Bruno
8 Stojic m'ait dit de me rendre là-bas car il y avait là-bas des gens qui
9 étaient blessés. Je répète, j'étais à la tête des services médicaux, si
10 quelqu'un quelle que soit sa position, donc qu'il soit soldat, qu'il soit
11 chargé d'un travail quelconque et quelle que soit son appartenance
12 ethnique, notre mission était d'intervenir en tant que service médical. Par
13 conséquent, ça aurait été tout à fait été non pertinent et superflu de sa
14 part de me dire une chose pareille.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : -- permet d'enchaîner sur une question.
16 Je vais prendre un cas X, moi j'aime bien les cas concrets parce que c'est
17 comme ça que tout le monde comprend le problème. Prenons le cas d'un
18 prisonnier qui fait un travail que je ne qualifie pas de forcé, moi, il
19 fait un travail. On le prend de la prison et on le met à l'extérieur, voilà
20 qu'il est blessé, il reçoit une balle et il est conduit à l'hôpital
21 militaire où il va être tout de suite soigné pour un médecin. S'il a pris
22 une balle au niveau du poumon, on va l'opérer, on va extraire la balle, et
23 cetera. Nous savons parce que ça fait des années qu'on est dans cette
24 affaire, donc tous les détails nous les connaissons, nous savons que
25 normalement quand quelqu'un est admis à l'hôpital, il y a son nom sur un
26 registre, il y a la date de son admission, il y a le premier diagnostic qui
27 est fait, et là on dira blessure au thorax par balle. Puis il y a la
28 qualité du bonhomme, alors c'est un soldat, un civil. Si c'est un
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1 prisonnier, normalement on va indiquer "prisonnier". Le médecin qui va
2 l'opérer, parce qu'il faut lui extraire la balle, sait automatiquement
3 qu'il s'agit d'un prisonnier qui a été blessé par balle à l'extérieur de la
4 prison.
5 Cette information, ce médecin ne doit-il pas la faire remonter par la
6 voie hiérarchique pour signaler que lui, en tant que médecin, il a opéré un
7 prisonnier qui normalement est censé être en prison et pas recevoir une
8 balle à l'extérieur ? S'il y a ce type de rapport, vous, en avez-vous eu
9 connaissance ? Parce qu'il n'y a pas eu qu'un seul blessé, il y en a eu
10 plusieurs et il y a eu plusieurs morts. Alors est-ce que vous avez eu ce
11 type de rapport qui est venu à vos oreilles via la voie médicale ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends votre question. L'hôpital de
13 guerre de Mostar qui se trouvait en plein centre-ville et qui prenait soin
14 de ces blessés quels qu'ils soient, tous les blessés, je pense qu'à ce
15 moment-là les médecins qui opéraient une personne donnée ne savaient
16 vraiment pas si cette personne avait été blessée dans telle ou telle
17 circonstance. Car il y avait de nombreux blessés et de nombreuses blessures
18 chez certaines personnes. Pour ce qui me concerne, je passais l'essentiel
19 du temps à Mostar ou alors ailleurs sur le terrain dans l'ensemble de la
20 zone. Mon bureau se trouvait à Mostar.
21 Mais au cours de cette période je ne me rappelle pas avoir jamais
22 reçu directement de rapport sur lequel aurait figuré que telle personne au
23 cours de l'accomplissement de tel travail aurait été blessée. Ce n'est que
24 plus tard, bien plus tard en vérité, que j'ai reçu des rapports de nos
25 médecins qui se sont rendus là-bas. C'est par eux que j'ai appris qu'il y a
26 eu ce type de blessures, mais je l'ai appris à un moment où cela était déjà
27 bien connu.
28 Mais je n'entre pas dans les circonstances dans lesquelles cela avait
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1 pu se produire. Quelqu'un pouvait, par exemple, travailler dans le cadre
2 d'un camp et être blessé car tout cela était une zone de guerre, il pouvait
3 s'agir d'une personne qui aurait été emmenée jusqu'à la ligne de front
4 peut-être pour des travaux ayant trait à la protection d'une ligne ou
5 d'autre chose et être ainsi blessée, mais c'était plus tard que je l'ai
6 appris. Tous ces cas, on a su qu'ils n'étaient pas si fréquents, mais
7 c'était plus tard lorsque tout un chacun pouvait en avoir connaissance en
8 tout cas.
9 M. LAWS : [interprétation]
10 Q. Regardez, s'il vous plaît, maintenant le document P 05465.
11 R. 054 --
12 Q. -- 5465, un peu plus loin dans votre classeur.
13 R. Oui, je l'ai vu.
14 Q. Merci. Il s'agit d'un document qui est daté du 29 septembre 1993. Là
15 encore, on voit le nom de Stanko Bozic. A ce moment-là sur ce document il
16 apparaît comme étant adressé à vous, Docteur Bagaric. Vous voyez votre nom
17 là ?
18 R. Oui, je vois mon nom, et cela me concerne si ce document m'a bien été
19 adressé directement. Enfin, cela est le cas. Mais j'ai déjà eu l'occasion
20 de voir ce document dans ma première déposition. Je ne me rappelle pas
21 directement de ce document, mais je sais exactement de quoi il s'agit et je
22 suis disposé, Monsieur le Président, à commenter ce document. Je pense que
23 c'est très important.
24 Q. Il vous informe, Docteur, du fait que Stanko Bozic a certaines
25 inquiétudes. En particulier, il vous dit qu'il y a des difficultés et des
26 problèmes qu'on rencontre concernant le traitement de certains détenus
27 grièvement blessés et très malades en raison des conditions de détention
28 inadéquates, du matériel insuffisant et du manque de médicaments. Il
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1 voudrait que vous preniez des mesures pour le transfert des malades, et il
2 vous fait remarquer qu'il doit y avoir une visite de la Croix-Rouge, et que
3 c'est un nouveau bon motif pour déplacer ceux qui sont malades et les faire
4 sortir de la prison et les faire admettre à l'hôpital, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, tout cela est indiqué dans ce document, c'est exact.
6 Q. Alors pouvez-vous nous aider sur ce point : qu'est-ce que vous avez
7 pensé quand vous avez reçu cette lettre, que des personnes se trouvant en
8 prison pourraient être grièvement blessées ?
9 R. J'ai déjà dit que nous avons là affaire au 29 septembre. Je parle donc
10 de cette date du 29 septembre. Je me souviens de ce document, je m'en
11 souviens de l'époque de ma première déposition. Excusez-moi.
12 Q. Nous connaissons tous cette date.
13 R. Pardon ? Non, c'est très important ces questions de dates lorsque nous
14 avons parlé du mois de juin, Monsieur le Président, ou le mois de mai ou le
15 mois de juillet. Ce n'est pas la même période. Nous avions affaire à une
16 période de grand chaos. Alors la situation était chaotique en septembre
17 aussi. Mais un certain temps s'était écoulé, et nous étions intervenus à
18 différents égards avant que ce document ne soit émis.
19 Alors M. le Procureur essaie sans doute de me discréditer en tant que
20 témoin. Il fait son travail, mais vous devez savoir qu'avant ce document
21 déjà --
22 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Docteur Bagaric, Témoin, je voudrais
23 vous demander encore une fois comme je l'ai déjà fait de bien vouloir
24 parler plus lentement et d'attendre un petit peu une fois qu'une question
25 est posée avant de commencer à répondre, et cetera. Deuxièmement, tout
26 aussi important, il ne faut pas que vous critiquiez le Procureur qui
27 s'acquitte de sa tâche. Vous devez répondre aux questions. Si vous n'êtes
28 pas satisfait de la forme de la question, à ce moment-là bien sûr vous
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1 pouvez le dire et les membres de la Chambre prendront une décision à ce
2 sujet. Mais là encore je vous dis que comme d'habitude, vous vous êtes
3 exprimé de façon très développée d'une certaine manière, et tâchez de vous
4 concentrer sur les questions proprement dites.
5 Merci.
6 M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Prandler.
7 Q. La question était la suivante : Comment pensez-vous, lorsque vous avez
8 reçu cette lettre, que des personnes qui étaient en prison pourraient être
9 grièvement blessées ?
10 R. Je n'ai même pas dit que j'avais reçu cette lettre. Je n'ai pas
11 confirmé ici mes souvenirs de cette lettre. Je me souviens de cette lettre
12 en raison de l'affaire précédente dans laquelle j'ai déposé. J'ai alors
13 exprimé mon opposition à cette lettre, bien que j'ai de l'estime et du
14 respect pour M. Bozic par rapport à l'accomplissement difficile des tâches
15 qui étaient les siennes à l'époque et des soins qu'il devait accorder aux
16 personnes dont il avait la charge. Mais ce que j'ai dit, c'est que le fait
17 suivant est très important, avant que cette lettre soit envoyée par Bozic,
18 alors que je l'aie reçue ou non, de ce point de vue-là ce n'est pas
19 important. Il est très important de signaler qu'il nous manque deux
20 documents très importants du mois d'août. Avant cette lettre, nous avions
21 fait beaucoup de choses pour fournir des soins médicaux dans le cadre de
22 l'Heliodrom. Il existe deux documents qui montrent la formation de deux
23 équipes. Je vais revenir à votre question. Je comprends, excusez-moi.
24 M. LAWS : [interprétation] Je vais vous demander de m'aider, Monsieur le
25 Président.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bagaric, le Procureur vous interroge sur un
27 document. Je suis équitable, moi, je ne prends pas parti. Je constate qu'en
28 recevant ce document, vous ne pouviez pas en tirer la conclusion que ces
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1 personnes ont été blessées à l'extérieur parce qu'il n'y a aucune mention
2 de travail forcé dans le document. Simplement le directeur de la prison
3 appelle votre attention sur le fait que des détenus sont blessés, il faut
4 les soigner, et curieusement il reprend à l'avant-dernier paragraphe
5 quasiment les mêmes mots qu'il a employés dans la lettre du 20 août. Entre
6 la lettre du 20 août et le 29 septembre, j'ai compté il y a eu exactement
7 148 autres documents en provenance de la prison, puisque là, cette lettre
8 c'est le numéro 722 et la précédente du mois d'août, 774, donc il y en a eu
9 148. Malgré le laps de temps de plusieurs semaines et de 148 documents, il
10 reprend quasiment intégralement la teneur de son précédent courrier où il a
11 alarmé M. Stojic mais il ne parle pas du Tribunal et il ne parle pas du
12 travail forcé. Mais par contre il met l'accent sur la question sanitaire
13 des détenus blessés et il vous demande faire le nécessaire.
14 Alors le Procureur vous pose la question, avez-vous eu connaissance de ce
15 document ? Vous avez répondu en disant, ce document a été évoqué lors de
16 mon autre témoignage, mais nous, ce qui nous intéresse, c'est de savoir si
17 le 29 septembre 1993 dans votre bureau vous avez lu ce courrier.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 29 septembre, non pas août, c'est bien à
19 cette date-là que vous vous référez, Monsieur le Président, le 29 septembre
20 ? Je ne me souviens pas de ce document. Cependant, si vous me le permettez,
21 je souhaite quand même dire une phrase dont je pense qu'elle est très
22 importante.
23 (expurgé) que j'ai souvent cité ici, excusez-
24 moi, était pour moi une source beaucoup plus pertinente que M. Bozic.
25 C'était le cas également des informations qui me provenaient de mes autres
26 confrères médecins lorsqu'il était question des stocks de médicaments et
27 d'équipements médicaux, lorsqu'il était question des soins médicaux en
28 général. Avant cette date, nous avions déjà procédé à une ferme
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1 intervention humanitaire afin de remédier à tous ces problèmes dont se
2 plaint M. Bozic. Avant cette date déjà, nous avons procédé à des transferts
3 de blessés et de malades. Une relation avait été établie entre la prison
4 d'une part et l'hôpital de Mostar. On savait déjà à l'époque qui était
5 chargé de quoi. Si je recevais un rapport du (expurgé) selon lequel un poste
6 médical avait été établi là-bas, et que les personnes soumises à des
7 examens ont été soignées et que cela émanait de médecins, alors que moi-
8 même j'avais ordonné qu'il en soit procédé ainsi, je croyais ce que mes
9 confrères et (expurgé) me disaient. Je n'étais pas très inquiet dans ce cas-
10 là de pouvoir recevoir un rapport de cette nature concernant les soins
11 médicaux, car je savais avec certitude que ces soins étaient fournis et
12 faisaient l'objet d'une surveillance tout à fait ferme.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, il faut expurger le nom
14 du docteur qui apparaît à plusieurs reprises.
15 Bien. Monsieur le Procureur, continuez.
16 M. LAWS : [interprétation]
17 Q. D'après ce que j'ai compris, vous dites que vous n'êtes pas sûr si vous
18 l'avez reçu, nous comprenons cela. Maintenant, regardez s'il vous plaît,
19 les mots que l'on lit trois lignes au dessous de la liste des pièces
20 jointes. Vous pouvez voir une phrase ainsi rédigée :
21 "Je vous prie de nouveau de bien vouloir user de votre influence pour
22 faire en sorte que ce problème soit résolu."
23 Docteur Bagaric, vous ne pouvez pas avec tout le respect que j'ai pour
24 vous, éluder cela. Stanko Bozic vous dit dans cette lettre que des
25 personnes, ainsi qu'à d'autres occasions, des personnes à l'Heliodrom sont
26 blessées, ont besoin de soins et la question que j'ai posée il y a je ne
27 sais pas combien de temps, dans ces circonstances, je vais vous la poser
28 pour vous aider encore.
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1 Pouvez-vous nous aider si après avoir vu cela, et avoir vu le mot "de
2 nouveau", pouvez-vous nous dire si vous saviez --
3 M. LE JUGE ANTONETTI : J'interviens parce que la question du Procureur est
4 formulée de telle façon qu'en terme médical, vous pouvez vous méprendre.
5 Nous avons tous la lettre sous les yeux. Cette lettre fait la
6 distinction entre deux catégories, les détenus blessés et détenus malades.
7 Contrairement à ce que vous dit le Procureur, dans la phrase qu'il vous a
8 citée, on ne parle que des personnes malades, pas des blessés.
9 Alors médicalement est-ce qu'on peut en tirer la conclusion suivante
10 : les personnes blessées ont été traitées, bien soignées, et remises en
11 prison sous surveillance médicale. Par contre les malades, dont on ne
12 connaît pas l'origine des maladies, apparemment quand on voit la lettre, il
13 n'y a peut-être pas le matériel suffisant, les médicaments, et ils demande
14 l'hospitalisation de ces malades. Parce que les blessés viennent de
15 l'hôpital, donc s'ils viennent de l'hôpital, il n'y a pas besoin de les
16 renvoyer à l'hôpital. Mais par contre les malades, eux, il faut peut-être
17 les mettre à l'hôpital. Alors ne doit-il pas y avoir une lecture médicale
18 de cette lettre ?
19 Alors que le Procureur semble prendre en compte les deux aspects,
20 blessés et malades, alors que j'ai l'impression que dans la lettre les
21 blessés qui ont été traités à l'hôpital eux, il n'y a pas nécessité de les
22 renvoyer à l'hôpital, mais par contre les malades, oui. Est-ce qu'il faut y
23 avoir cette lecture ou la lecture du Procureur. Moi, je pose la question.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Pour ce qui est de votre question, qui
25 est tout à fait justifiée, j'essaierai d'être concis.
26 M. Bozic nous dit ici, s'agissant de soigner un certain nombre de blessés,
27 de malades arrêtés, et compte tenu des conditions d'hébergement inadéquates
28 et de la pénurie de médicaments et de matériel à l'époque, je l'affirme en
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1 toute responsabilité devant les Chambres et devant vous, Monsieur le
2 Président, nous avions à fournir non seulement un poste médical mais aussi
3 des lits. Je le pense, je n'en suis pas certain. Nous avions un poste
4 médical, je ne pense pas si déjà à ce moment-là on l'avait mais je pense
5 que si. Je n'en suis pas trop sûr. On avait assuré des soins stationnaires
6 pour ce qui est des prisonniers qui étaient des médecins.
7 Pour ce qui est de certains autres patients hospitalisés, c'était
8 souvent le cas afin que ces médecins à l'intérieur de ce poste, des
9 Musulmans, puissent définir qui parmi les détenus pourraient être soignés à
10 la prison et qui parmi eux devraient être soignés à l'hôpital, je vous
11 l'affirme en toute responsabilité. Il se peut qu'il y ait eu certains
12 petits retards compte tenu de la situation générale mais ils ont fini par y
13 être envoyés. Je sais que je suis intervenu à plusieurs reprises, pas
14 beaucoup de fois mais quelques fois, lorsqu'ils ne pouvaient pas le
15 résoudre au niveau de l'hôpital de guerre et de la prison.
16 D'autre part, lorsqu'il parle ici d'utiliser votre influence, je veux tirer
17 au clair votre attention et c'est ainsi que je vais vous le dire maintenant
18 et pas autrement. Lorsque j'ai reçu cette lettre, ça ne peut être que la
19 première de ces lettres, ça ne peut jamais être la deuxième. Pourquoi ça ne
20 peut pas être la deuxième ? Parce qu'il dit c'est dans l'esprit de la
21 langue croate et nous nous en servons souvent de cette expression lorsque
22 nous rédigeons des courriers. Dans la première partie de son courrier, il
23 dit, je m'adresse à vous par ce courrier dans le souhait de, et cetera,
24 puis il dit, une fois de plus je m'adresse à vous, enfin il s'adresse une
25 fois de plus mais dans le même courrier, il réitère sa demande.
26 Monsieur le Procureur, si c'est le premier courrier que j'ai reçu de
27 Bozic, je réitère une fois de plus ça se rapporte à ce qui a été dit dans
28 notre première partie de la lettre. Cela veut dire que très peu de temps
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1 après on est intervenu pour voir ce qui se passait, bien que je ne suis pas
2 tout à fait certain qu'on ait reçu cette lettre ou alors notre intervention
3 a-t-elle coïncidé avec son courrier. Je ne le sais pas, mais il doit y
4 avoir d'autres documents susceptibles de pouvoir confirmer cela. Je me
5 souviens d'une autre intervention, je ne me souviens pas du courrier.
6 Q. Est-ce que vous pourriez vous reporter au P 05503. Il s'agit d'une
7 lettre écrite par une commission comprenant 2D-AB. A la page 3 du texte
8 anglais on constate quelle est adressée à vous en personne ainsi qu'à Bruno
9 Stojic, et je pense que dans l'une de vos réponses, vous voudriez comparer
10 ou par rapport à Stanko Bozic je préférerais avoir l'information de 2D-AB.
11 Ici sous le titre "Mesures proposées". Au point 4, il est proposé par la
12 commission que les grands malades et blessés soient transférés à l'hôpital
13 de guerre de Mostar du HVO. Est-ce que vous le voyez ?
14 R. Oui, je le vois. C'est un document très important. Je le vois. Est-ce
15 que je peux répondre ?
16 Il s'agit ici non pas d'un courrier d'une commission. C'est la commission
17 qui est constituée par mes gens les plus fiables dont je suis le commandant
18 alors responsable; Dr Curic, Sandrk, et cetera. Si vous comparez ceci avec
19 le courrier précédent où M. Bozic nous dit qu'il est mécontent parce qu'il
20 n'avait pas suffisamment de médicaments, or lui a rédigé cela le 29
21 septembre, si l'on se penche de façon attentive sur ce courrier, je dirais
22 qu'il se peut que l'intervention ait coïncidé fortuitement. Mais il est dit
23 ici que l'infirmerie du centre est bien approvisionnée en médicaments et en
24 matériel, mais moi je faisais plutôt confiance à Curic, Sandrk et Kolak
25 plutôt qu'à Bozic.
26 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Je m'excuse mais j'ai une remarque
27 technique pour ce qui est de ce document.
28 J'ai déjà formulé cette observation et j'ai attiré par écrit
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1 l'attention du Procureur, il s'agit d'une erreur dans la traduction du
2 cachet et on m'a promis qu'il y aurait rectification. Or je vois qu'on se
3 sert une fois de plus du document où il y a une mauvaise traduction de la
4 teneur du cachet. C'est le cachet qui figure en première page. La version
5 anglaise dit qu'il s'agit du département de la Défense, et juste en
6 dessous, administration de la police militaire à Mostar. Or l'original
7 croate laisse voir qu'il s'agit du département à la Défense mais on ne
8 mentionne pas du tout l'administration de la police militaire. On m'a dit
9 que cela allait être rectifié. Je parle de la page de garde.
10 M. LAWS : [interprétation] Je veillerai à ce que l'on se penche sur
11 ce tampon. Est-ce que l'on pourrait s'en tenir à la question des grands
12 malades et blessés qui doivent être --
13 Mme NOZICA : [interprétation] On n'a pas encore posé de question,
14 mais pour que nous nous concentrions j'aimerais qu'on laisse l'opportunité
15 au témoin de finir sa phrase, ou de lui dire d'abord qui était présent à
16 l'occasion de cette visite. Le document précédent date du 29 puis ceci est
17 du 30. C'est le jour d'après. Les données divergent donc il faut qu'on
18 attire l'attention de tout un chacun et si ce n'est pas fait je le ferai
19 aux questions complémentaires.
20 M. LAWS : [interprétation] Avec toutes mes excuses, je marque mon
21 désaccord vis-à-vis de cette objection. On a posé une question très précise
22 au témoin au sujet du point 4, ensuite il a parlé de la composition de la
23 commission et puis du fonctionnement de l'infirmerie. C'est une question à
24 laquelle on peut répondre très facilement.
25 Q. On peut voir dans cette lettre, dans ce rapport, Docteur Bagaric, que
26 votre collègue dont vous respectez la parole vous dit qu'il y a des grands
27 malades et des grands blessés à l'Heliodrom, et je repose ma question de
28 tout à l'heure. Lorsque vous avez obtenu ce rapport, est-ce que vous ne
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1 vous êtes pas dit, mais comment ça se fait qu'il y a des personnes à
2 l'Heliodrom ? Il ne s'agit pas de personnes qui ont été traitées à
3 l'hôpital qui sont venues à l'Heliodrom. Ce sont des personnes qui doivent
4 être hospitalisées. Est-ce que vous ne vous êtes pas posé la question de
5 savoir ce que ces personnes faisaient là ?
6 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse. Il n'y a
7 pas de problème. Je voudrais demander au Procureur où est-ce qu'il voit
8 dans ce paragraphe 4 qu'il y a des gens qui ont été blessés à l'Heliodrom.
9 Est-ce qu'on peut voir cela dans le paragraphe 4 ? Je veux dire qu'on
10 laisse entendre quelque chose dans la question, un élément qui n'existe pas
11 au paragraphe 4.
12 M. LAWS : [interprétation] Ça n'a absolument rien à voir. Ces personnes
13 doivent être hospitalisées et emmenées de la prison. Que ces personnes
14 aient été blessées à l'intérieur ou à l'extérieur de la prison, ce sont des
15 personnes qui doivent être hospitalisées afin d'obtenir un traitement de
16 leurs blessures. Ce sont des personnes qui sont en prison. Je pense que
17 nous sommes tous d'accord pour dire qu'ils ne devraient pas être en prison.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- paragraphe 4, il est indiqué de
19 transférer les malades et les blessés à l'hôpital de Mostar.
20 M. LAWS : [interprétation] Absolument.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. C'est tout ce qu'il y a d'indiqué. Maintenant
22 on peut peut-être penser que les blessés ce sont ceux qui ont été blessés
23 lors du travail à l'extérieur, peut-être mais --
24 M. LAWS : [interprétation] Je ne dis pas que c'est cela qu'il faut
25 comprendre. Ce que je dis c'est que lorsque le témoin a reçu cette
26 information, je pose la question de savoir s'il ne s'est pas demandé
27 pourquoi des personnes ont été blessés alors qu'elles étaient à l'Heliodrom
28 ou bien blessées puis emmenées à l'Heliodrom plutôt qu'à l'hôpital ? C'est
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1 une question juste. Il nous a dit que pour lui les traitements médicaux
2 étaient très bons. Pour nous ces documents démontrent le contraire. A mon
3 sens je peux être autorisé à lui poser cette question et je serais
4 reconnaissant d'y répondre.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, vous pouvez répondre à la question ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ici on ne peut rien voir de ce qu'il est
7 dit ici. Je suis d'accord avec ce que vous venez de dire, mais je suis ici
8 témoin de la Défense, je suis ici pour que vous puissiez rendre une
9 décision correcte un jour ou l'autre.
10 Or si vous le permettez, s'agissant de ce document, j'aimerais
11 relever certains éléments qu'il serait dommage de ne pas bien comprendre,
12 or il est difficile de les comprendre si l'on ne prend pas en considération
13 la situation totale que je connais moi et qui a précédé à ceci. Donc il
14 importe de savoir qu'à l'occasion d'une réunion collégiale qui s'est
15 produite dans le courant de ce mois-là, on s'est entretenu -- et c'est la
16 seule réunion collégiale dont je me souviens où il a été question de cette
17 problématique de l'Heliodrom. Jusque-là, nous, médecins, nous étions déjà
18 intervenus et nous sommes déjà allés constamment là-bas. Donc ceci prouve,
19 Messieurs les Juges, que de façon continue, permanente, nous suivons la
20 situation, exception faite de M. le Dr Curic qui était constamment là-bas
21 et exception faite de ce poste avec des médecins qui étaient à l'intérieur
22 du poste. Donc en sus de cette communication permanente au sujet des
23 malades et de l'hôpital, moi j'envoie ces trois médecins, ce n'est pas à
24 moi qu'ils présentent un rapport pour ce qui est d'un rapport présenté à
25 une personne qu'ils ne connaîtraient pas. Ils savent très bien qui les a
26 envoyés là-bas. C'est moi qui les ai envoyés là-bas partant entre autres de
27 la nécessité d'un suivi permanent de la situation. Eux, ils proposent
28 certaines mesures, et vous pouvez le voir en bas : "Pièces jointes, ordre
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1 du 28 septembre 1993."
2 Donc daté de deux jours avant. Or, cet ordre c'est un ordre émanant de moi
3 qui ai signé cet ordre en personne. Donc ici il y a une instruction
4 importante qui est donnée pour ce qui est de la façon de se comporter. Ils
5 informent tout un chacun du problème. Ils envoient cela au bureau du
6 président, au département à la Défense, à l'état-major général, au secteur
7 de la santé. Ils ont mis "secteur de la santé," pourquoi ? Le bureau des
8 échanges, ça je ne sais pas trop, mais ils ont écrit au directeur du
9 centre. Ils se réfèrent à lui aussi, il a été visité avec eux ceci. Avec le
10 docteur de l'extérieur de la brigade et du Dr Hadzic qui est à l'intérieur,
11 donc Pehar et Hadzic, qui se trouvent au poste. A ce moment-là nous avons
12 eu une surveillance constante vis-à-vis de l'Heliodrom.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Docteur, nous avons un document qui établit que
14 trois médecins font un rapport et disent au point 4 qu'il faut transférer
15 les malades et les blessés. Je suis, par hypothèse, M. Mate Boban, je
16 reçois ce rapport, puisqu'on lui envoie, je vois le point 4, je me dis ça
17 c'est la responsabilité du Dr Bagaric, c'est lui le médecin. Je suis M.
18 Stojic, je reçois cette lettre, je vois le point 4, je me dis c'est une
19 question médicale, ça relève du secteur médical, voilà. Alors qu'est-ce que
20 vous en dites ? Je suis M. Tole du quartier général, je vois que c'est
21 médical, moi ce n'est pas ma compétence, c'était la compétence du Dr
22 Bagaric.
23 Donc vous êtes en première ligne, alors c'est ce que le Procureur veut
24 savoir. Qu'avez-vous fait ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous avons pris ceci en considération,
26 absolument. Je ne peux pas me souvenir dans le concret de tout document
27 pour vous répondre de façon précise, mais j'affirme en toute responsabilité
28 que dans les un jour ou deux qui ont suivi le problème a été résolu. C'est
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1 ma commission à moi et des gens à moi qui ont dit qu'il fallait le faire,
2 mais il n'y a pas que cela, Monsieur le Président. Ils ont écrit tout un
3 tas de choses dans l'objectif de promouvoir la situation au niveau de la
4 santé et nous mettons au courant tout un chacun de la nécessité de le
5 faire.
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Docteur Bagaric, vous êtes ici en
7 tant que témoin, votre travail c'est de répondre aux questions. Est-ce que
8 vous vous souvenez quelle était la question ?
9 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] La question était : est-ce que vous
11 vous êtes posé la question de savoir comment il se faisait qu'il y avait
12 des blessés à l'Heliodrom ? Pourquoi elles étaient blessées ? C'était ça la
13 question. Or, vous tournez énormément autour du pot et vous ne répondez pas
14 à la question. Auriez-vous donc l'extrême amabilité de vous en tenir à des
15 réponses aux questions qui vous sont posées, point à la ligne. Si
16 l'Accusation souhaite en savoir davantage, elle vous posera des questions.
17 M. LAWS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel.
18 Q. Docteur Bagaric, vous nous avez dit que vous auriez réagi dans la
19 journée ou dans les deux jours et le problème aurait été résolu. Est-ce que
20 --
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis un petit peu étonné,
22 Monsieur Laws. Vous avez posé cette question il y a longtemps. Maintenant
23 je demande au témoin de répondre à la question, et plutôt que de laisser
24 répondre à la question --
25 M. LAWS : [interprétation] Excusez-moi.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- vous poursuivez.
27 M. LAWS : [interprétation] Je pensais que vous donniez une instruction pour
28 l'avenir, et je parlais du document suivant.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, non, la question est toujours
2 en souffrance.
3 M. LAWS : [interprétation] Oui, c'est vrai, la question reste sans réponse,
4 et je prie le témoin d'y répondre --
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui.
6 M. STRINGER : [interprétation] -- il peut, bien sûr.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je voudrais répondre.
8 C'est une période où les cas de blessures étaient des cas si fréquents dans
9 toutes les parties de la ville qu'avoir eu des blessures ne pouvait pas
10 être une surprise, ou ne surprenait personne. Le 30 septembre, en outre, on
11 avait presque tous compris que les détenus de temps à autre étaient
12 utilisés, je crois que tout le monde le savait, et étaient donc allés
13 accomplir des travaux autour du centre de détention ou ailleurs, et qu'il
14 tombaient des obus et qu'il pouvait y avoir des cas de blessures ou dans
15 d'autres circonstances. Par conséquent, pour moi il était plus important de
16 déterminer la situation et de remédier aux carences plutôt que de savoir
17 quelle était la nature de la maladie ou des blessures. Il était plus
18 important à mes yeux d'intervenir et d'avoir une approche plutôt médicale.
19 M. LAWS : [interprétation] Est-ce que vous pourriez prendre le document P -
20 -
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Témoin, il y a un point important dans ce
22 document, le point 7, parce que manifestement les membres de la commission
23 ont eu l'intention de vous placer sous tutelle, parce que voyez au point 7.
24 Ils indiquent qu'il fallait informer le département de la Défense des
25 mesures qui seront prises pour le 1er octobre à midi, et ils rajoutent le
26 numéro du fax. Donc cette commission estime qu'il y a des urgences et qu'il
27 faut agir. Vous nous avez dit tout à l'heure, j'ai agi puisque tout a été
28 réglé, alors c'est ça qui est important. Est-ce que vous confirmez avoir
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1 mis en œuvre les recommandations de cette commission ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Au paragraphe 7, on indique un numéro de
3 téléphone qui est celui de mon bureau. C'est mon bureau à moi, oui. On n'a
4 pas laissé ce paragraphe 7 pour l'envoyer au bureau du président Mate Boban
5 pour que lui nous répondre. Nous voulions le mettre au courant du problème,
6 et pour ce qui est de remédier aux problèmes, chacun était chargé de
7 remédier aux siens à son niveau. Lorsqu'il s'agit de la protection
8 sanitaire, bien entendu il y avait cette communication. Nous recevions ces
9 rapports ultérieurement pour ce qui est de savoir ce à quoi il a été
10 remédié, si ça a été réalisé et ainsi de suite, et nous avons donc suivi la
11 situation en permanence.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais, Docteur, est-ce que vous voulez dire par cette
13 réponse que c'était à M. Boban de donner son accord alors qu'il s'agissait
14 quand même de questions médicales ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois reconnaître que je ne le sais pas ça.
16 Nous ne lui avons pas demandé s'il fallait intervenir sur le plan médical
17 ou non. Je ne lui poserais pas la question. Nous intervenions sans poser la
18 question ou sans demander l'autorisation parce que c'était prioritaire, et
19 cet ordre-ci n'a pas été rédigé en concertation avec Boban.
20 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le permettez.
21 Peut-être y a-t-il une traduction erronée de votre paragraphe 7, c'est ce
22 que je conclus de votre question, ou c'est le témoin qui a reçu une
23 mauvaise interprétation dans ses écouteurs, parce qu'ici on dit :
24 "Informer le département de la Défense de toutes les mesures prises."
25 C'est le numéro de téléphone où il fallait informer des mesures qui ont été
26 prises.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est notre téléphone.
28 Mme NOZICA : [interprétation] Nous dans nos écouteurs depuis le français,
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1 on nous a traduit, est-ce que vous avez été informé desdites mesures ? Or,
2 ce paragraphe 7 laisse la possibilité à ceux qui sont censés prendre
3 certaines mesures d'en informer le département de la Défense.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à savoir le Dr Curic qui était chargé au
5 niveau du secteur du suivi de la situation, et c'est notre téléphone de
6 chez nous.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Docteur, à vous suivre, le docteur qui fait
8 le rapport propose des mesures et c'est lui qui doit les mettre en œuvre ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. C'est lui qui est chargé du suivi de
10 la réalisation. Parce que tout ne peut dépendre de nous au niveau du
11 secteur de la santé. Ça dépend aussi de ce médecin au sein de la 3e
12 Brigade. Ça peut dépendre -- que sais-je, de ce directeur parce qu'on dit
13 que le secteur est mal entretenu, laissé à l'abandon. Alors moi je pose la
14 question : comment se peut-il qu'on utilise des détenus pour qu'ils fassent
15 des travaux et que le commandant du camp n'ait pas au moins assuré la
16 propreté de façon adéquate ? C'est là qu'il y a des éléments qui ne sont
17 pas clairs, et du point de vue sanitaire, nous sommes allés au centre pour
18 suivre de façon durable la situation médicale au niveau de ces gens là-bas.
19 J'affirme ici en toute responsabilité devant les Juges de cette Chambre que
20 c'est dans la meilleure des mesures possibles que nos activités ont été
21 couronnées de succès. Je veux bien assumer mes responsabilités pour
22 affirmer que les choses se sont produites telles que je les ai dites ici.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
24 M. LAWS : [interprétation]
25 Q. Merci. Pourriez-vous à présent prendre le document P 05812. P 05812.
26 Une lettre du 11 octobre 1993 adressée à Bruno Stojic, et je vous demande
27 de vous reporter au paragraphe 2. Au bas de la page, sur le nom de Stanko
28 Bozic. Est-ce que vous trouvez ce paragraphe 2 ?
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1 R. Je pense que oui. Mais est-ce que vous pouvez donner lecture de ce qui
2 est écrit.
3 Q. Il est indiqué qu'il existe des blessures, des souffrances importantes
4 chez les détenus :
5 "A. Un nombre important de détenus a besoin d'un traitement ne pouvant être
6 fourni qu'à un hôpital, et nous ne pouvons pas l'assurer."
7 Ensuite il est question du problème du matériel médical et de fournitures
8 médicales.
9 Alors nous allons essayer de faire bref. Est-ce que vous êtes d'accord avec
10 moi pour dire qu'il y a un problème au niveau des personnes de
11 l'hospitalisation, et c'est Stanko Bozic, s'il a raison ?
12 R. Lorsqu'il s'agit de ce segment de la protection sanitaire, je ne dirais
13 pas que cela était très bien, c'était loin d'être très bien. Mais M. Bozic
14 a raison de parler de segment lié à la santé pour dire qu'en sus des deux
15 médecins dans le centre et en sus de tous les médecins de l'extérieur qui
16 pendant cette période nous présentent des rapports pour dire que du point
17 de vue de la protection médicale la situation est sous contrôle et bonne
18 compte tenu des circonstances qui y prévalaient. Bien sûr que cette
19 situation n'était pas au vu du moment présent satisfaisante. Mais eux
20 étaient satisfaits compte tenu des circonstances. D'autre part, le CICR
21 suivait la situation, les activités des médecins et s'entretenait avec les
22 médecins qui étaient des prisonniers et qui étaient chargés de la
23 protection médiale, ils se sont entretenus en tête à tête avec eux, et
24 ensuite avec nos médecins et ce médecin qu'on a mentionné tout à l'heure,
25 il améliorait les mesures à faire prendre. Donc je veux bien croire qu'on
26 pouvait toujours faire mieux.
27 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, je voulais vous poser une
28 question au sujet de ce paragraphe. Le texte anglais, c'est au paragraphe
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1 2, je ne sais pas, mais il y a deux A, et moi je parle du deuxième, il y a
2 une remarque. Je voulais demander au témoin de se reporter à cette
3 remarque, je cite :
4 "Le comité international de la Croix-Rouge a visité le SVZ les 10, 11 et 12
5 août 1993 et a signalé une série d'irrégularités qui constituent également
6 des violations des conventions de Genève."
7 Alors il y a une série de sous points, d'abord le point A :
8 "Utilisation des détenus aux fins de travail."
9 Nous avons déjà parlé du fait de la présence de détenus blessés là-bas,
10 mais l'on ne savait pas par quoi cette blessure avait été causée.
11 Moi je me demande, puisque ce rapport vous a été envoyé -- enfin
12 plutôt à M. Bruno Stojic, mais vous l'avez également reçu, et je me
13 demandais, disais-je, si vous l'aviez lu et si vous aviez fait quelque
14 chose pour assurer que les détenus ne seraient pas utilisés à des fins de
15 travail.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge, mais j'ai
17 sous les yeux un document qui a été adressé à Bruno Stojic. C'est ce qui
18 est indiqué. Dans le document suivant auquel vous vous référiez
19 probablement, ça commence avec le point 2, mais il n'y a pas de page de
20 garde ou de titre. S'agit-il du même document, j'ai l'impression que les
21 pages sont peut-être dans le désordre ou mal disposées ? Excusez-moi un
22 instant. Chez moi, c'est disposé de telle façon que l'on passe du point 1
23 ou point 6, puis 7, 8. Je suis confus à cause de cela. Normalement, la
24 dernière page qui devrait se trouver toute à la fin se trouve en deuxième
25 position, d'où ma confusion.
26 Donc ce document-ci M. Bruno Stojic l'a bien reçu, donc a été adressé
27 à Bruno Stojic et Zarko Tole. Je le répète, c'est la date du 11 octobre,
28 Messieurs les Juges, à ce moment-là beaucoup de temps s'est écoulé à partir
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1 du moment où ce centre de détention ou d'isolement ou cette prison a été
2 mis en place. Donc si tout ce dont fait état M. Stanko Bozic a bien eu
3 lieu, dans ce cas il s'agissait d'événements dont toutes les personnes qui
4 devaient en être informées étaient certainement au courant.
5 Je dois dire qu'en tant que médecin, la tâche qui m'incombait à titre
6 principal était d'organiser la protection médicale au sein du poste médical
7 et de m'assurer que les personnes qui en avaient besoin puissent être
8 amenées à l'hôpital et que tout cela puisse fonctionner. J'affirme cela en
9 toute responsabilité, cela a fonctionné, cela fonctionnait même lorsque je
10 n'étais pas présent sur place parce que l'on savait exactement qui était
11 chargé de quoi et les personnes accomplissaient la tâche qui était la leur.
12 Maintenant, si personnellement je me souviens ou non de la façon dont telle
13 ou telle personne a été blessée, je ne peux pas m'en souvenir. Par contre,
14 ce dont je m'en souviens avec certitude et que j'affirme en toute
15 responsabilité et que j'affirme en toute responsabilité, c'est que dans les
16 circonstances qui prévalaient nous avons créé des conditions tout à fait
17 excellentes pour le travail des personnels médicaux.
18 A une occasion, je me suis entretenu avec l'un des médecins détenus
19 qui m'a dit ouvertement, je cite, nous avons accompli un travail
20 considérable, et il se référait là à nous tous, pas seulement eux, mais
21 nous également.
22 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci. Docteur Bagaric, en même
23 temps je voudrais me référer à un document que nous avons déjà vu et qui
24 vous est adressé par M. Bozic, où il fait référence à la visite prochaine
25 de la délégation du CICR, et par conséquent il vous demande, et ainsi qu'à
26 d'autres collègues, bien sûr, de faire quelque chose pour les blessés. Donc
27 ces documents sont tout à fait liés les uns les autres, et c'est la raison
28 pour laquelle je vous ai posé cette question. Je ne suis pas tout à fait
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1 convaincu que vous ayez d'une certaine manière pris soin à ce moment-là --
2 enfin, je veux dire, pas personnellement vous, mais je veux dire votre
3 service, si vous aviez pris les mesures nécessaires et agi de façon
4 nécessaire pour s'occuper des blessés, mais bien sûr j'ai également noté
5 votre réponse. Je vous remercie.
6 Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi, Messieurs les Juges. Mais je
7 souhaiterais qu'on ne s'aventure pas trop loin, et attirer l'attention que
8 la déclaration du témoin n'a pas été versée intégralement au compte rendu.
9 En lignes 3 et 4 de la page 79, le témoin a dit, ce document est adressé à
10 Bruno Stojic, si toutefois ce dernier l'a bien reçu. Pour moi c'est très
11 important, mais cela n'a pas été versé au compte rendu.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous pouvez me permettre d'éclaircir ce que
13 M. le Juge vient de dire dans l'intérêt de la vérité pleine et entière.
14 La première lettre écrite par Stojic le 29 septembre dans laquelle il
15 dit qu'il n'y a pas suffisamment de médicaments, et cetera, alors que le
16 lendemain même, le 30 septembre, notre commission se rend sur place et
17 passe en revue la situation avec lui, et eux affirment qu'il y a
18 suffisamment de médicaments, et lui-même est présent. Eh bien, j'ai
19 l'impression qu'on a affaire à des lettres type que lui envoyait
20 régulièrement, qui disait qu'il y avait des médicaments ou qu'il n'y en
21 avait pas, en l'espèce il dit qu'il n'y en avait pas. J'ai de l'estime pour
22 cette préoccupation qui était la sienne, mais, Messieurs les Juges, de mon
23 point de vue, il était très important et beaucoup plus important de savoir
24 ce que les médecins eux-mêmes avaient à dire sur le sujet.
25 Autre chose, il a écrit cela le 29 septembre, c'est une chose. Mais entre
26 le 29 octobre et cette seconde date du 11 octobre, il s'est écoulé
27 suffisamment de temps pour que je puisse affirmer avec 100 % de certitude
28 que chaque blessé et chaque malade a été transporté pour être adéquatement
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1 soigné. Alors, est-ce qu'entre-temps il y a eu d'autres personnes qui sont
2 tombées malades ou qui ont été blessées, je ne sais pas, mais même si cela
3 s'était produit, nous sommes certainement intervenus car cette
4 communication permanente dont j'ai parlé avait été établie.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire la pause de 20 minutes.
6 --- L'audience est suspendue à 17 heures 51.
7 --- L'audience est reprise à 18 heures 11.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur le Procureur.
9 M. LAWS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Q. Docteur Bagaric, je vais vous poser quelques très brèves questions. On
11 va essayer de progresser par des réponses par oui ou par non. Ce sera très
12 facile.
13 Est-il vrai que vous n'êtes jamais allé à la prison de Dretelj ?
14 R. Je ne suis jamais allé à la prison de Dretelj.
15 Q. Merci. Est-il vrai que vous n'êtes jamais allé à Gabela ?
16 R. Je ne suis jamais allé à Gabela.
17 Q. Et vous faites la même réponse pour Ljubuski ?
18 R. Même réponse, oui.
19 Q. Mais votre collègue, le Dr 2D-AB est allé à chacune de ces
20 installations, de ces immeubles, n'est-ce pas ?
21 R. Cela correspond à ce que j'ai déjà dit. Nous suivions de façon
22 constante ce qui se passait dans les centres de détention, dans les
23 prisons, et cela de la façon suivante : des médecins appartenant aux unités
24 locales intervenaient régulièrement, et de façon permanente étaient
25 localement mis en place des poses médicaux au sein desquels intervenaient
26 des médecins détenus, et le (expurgé)
27 (expurgé), de la coordination de toutes ces activités, et je recevais
28 régulièrement des rapports émanant de lui, et je m'entretenais également
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1 avec lui et c'est la raison pour laquelle je ne me suis pas rendu moi-même.
2 Q. Oui. Il s'y rendait en sa qualité de membre de votre personnel, votre
3 subordonné, pour rédiger des rapports qui vous étaient adressés, ainsi
4 qu'au secteur chargé de la santé, n'est-ce pas ?
5 R. Il est exact qu'il fournissait des rapports qu'il adressait à plusieurs
6 destinataires. Quant à moi, c'est sur la base de ces rapports que je
7 rédigeais des ordres afin que la situation dont lui estimait qu'il fallait
8 l'améliorer, soit améliorée.
9 Q. Pourriez-vous passer maintenant, s'il vous plaît, avec moi au document
10 P 04756.
11 R. 504 ? Vous pourriez répéter, s'il vous plaît.
12 Q. P 04756.
13 R. Je n'arrive pas à le retrouver. Excusez-moi, Messieurs les Juges, mais
14 est-ce que je peux signaler un élément dont je pense qui est très important
15 et qui m'a échappé. C'est la dernière fois que je vous demanderai cela. Je
16 viens de me rendre compte qu'il y a quelque chose de très important, s'il
17 vous plaît, et cela concerne le document précédent daté du 11 octobre 1993
18 émanant de M. Bozic.
19 M. Bozic écrit ce qu'on a vu, et c'est sur la base de ce rapport que
20 M. le Juge pouvait effectivement conclure qu'il n'avait pas été entrepris
21 quoi que ce soit de significatif. Cependant, moi j'en reste à ce que j'ai
22 dit, à savoir que nous suivions continuellement la situation et nous nous
23 efforcions de l'améliorer.
24 Cependant, au point 2, Bozic indique ce que le CICR a fait, il dit,
25 lorsqu'il a visité le centre, il est dit ce qui est reproché, "le départ
26 des détenus pour exécuter des travaux," la qualité de l'alimentation, et au
27 point 3, les conditions de mise en isolement. Mais aucun de ces trois
28 domaines n'entre dans le champ de compétence du secteur de la santé ni des
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1 médecins qui avaient en charge la mise en œuvre de cela. Cela est très
2 important et je pense que cela devrait être versé également.
3 Ce rapport de la Croix-Rouge confirme que d'un point de vue médical,
4 la situation n'était pas telle que lui la décrivait. Je veux bien croire
5 que c'était difficile pour lui de faire état de tout cela, je comprends sa
6 préoccupation. Merci à vous, Monsieur le Président. Merci beaucoup.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
8 M. LAWS : [interprétation]
9 Q. Puisque vous évoquez ce point, bien sûr, ce n'était pas votre rôle que
10 de nourrir les détenus au sein de la prison du HVO, mais votre section a
11 appris qu'ils étaient nourris de façon inadéquate et qu'ils étaient en
12 train de souffrir de malnutrition à la suite de cela, n'est-ce pas ?
13 R. C'est exact. Ces problèmes-là se sont présentés, et il y a eu un ordre
14 demandant de résoudre cela. Et cela ne relève pas directement des questions
15 de santé, mais cela peut exercer une influence sur l'état de santé. Ça a
16 été envoyé non seulement aux médecins qui étaient présents sur place, mais
17 aussi au directeur de la prison et à toutes les autres personnes qui
18 étaient responsables pour cette question-là. C'était directement l'une des
19 recommandations de notre commission que de procéder à cela et pour autant
20 que je le sache, dans les rapports ultérieurs, on a vu que cette situation
21 à l'Heliodrom s'est significativement améliorée. Bien sûr, de temps en
22 temps il y a eu de nouveau des problèmes, mais pour ce qui concerne
23 l'Heliodrom, la situation était plus ou moins satisfaisante, et cette
24 question a trouvé une solution dans l'ensemble.
25 Q. Nous avons passé beaucoup de temps avec votre collègue 2D-AB sur la
26 question de nourriture. La situation dans d'autres centres, seriez-vous
27 d'accord avec moi pour dire qu'elle était tout simplement épouvantable ?
28 Pour résumer les choses, ne peut-on pas dire cela ?
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1 R. D'après ces rapports, je ne peux pas dire que la situation était
2 épouvantable, mais qu'elle a été insatisfaisante. De temps en temps, on a
3 fait des efforts pour attirer l'attention sur ce problème, pour le résoudre
4 également.
5 Q. Je ne veux pas refaire la même chose que précédemment, mais que quelque
6 chose ne soit pas satisfaisant, ça c'est une chose. Mais les gens étaient
7 réduits à un état physique absolument choquant à la suite de leur détention
8 par le HVO. C'est bien cela, le résultat, n'est-ce pas ? Vous le savez
9 cela, n'est-ce pas, Docteur ?
10 R. J'ai entendu dire effectivement que certains individus étaient très
11 sous-alimentés.
12 Q. Si on regarde maintenant le document P 04756 --
13 M. LAWS : [interprétation]
14 Q. Ça devrait être le document qui est ouvert juste devant vous. Il s'agit
15 là des minutes ou du procès-verbal des départements de la Défense tenus le
16 2 septembre 1993, et Bruno Stojic était présent. Si nous passons au point
17 4, nous voyons que vous y étiez aussi.
18 R. Oui, j'étais présent à cette réunion.
19 Q. Vous avez vu cela brièvement lorsque Me Nozica vous posait des
20 questions. Au point 3, à la page 4 pour le texte anglais et la page 3 pour
21 le texte en B/C/S, nous avons une entrée : "Les prisons militaires sont
22 encore un exemple supplémentaire de très mauvais travail. L'Etat a pris la
23 parole et a dit..."
24 Pouvez-vous voir ces mots ?
25 R. Je vais les retrouver. Continuez, continuez, Monsieur. Je vais
26 retrouver le passage en question.
27 Q. Vous regardez. Bien. Mon opinion c'est que nous avons deux prisons
28 militaires. Est-ce que vous voyez ces mots-là ?
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1 R. Je vois cela.
2 Q. Heliodrom --
3 R. Je vous écoute.
4 Q. "Heliodrom, et la prison militaire de Ljubuski. Quant aux autres
5 endroits où les détenus sont retenus, dont Gabela et Dretelj, je ne les
6 considère pas comme des installations militaires et je refuse
7 personnellement de souscrire au travail de ces institutions."
8 Vous les voyez, ces mots ?
9 R. Oui, je vois cela.
10 Q. Mais votre collègue, le témoin 2D-AB, était allé inspecter ces
11 installations en tant que subordonné et membre du département de la
12 Défense, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, un employé du secteur de la santé du département de la Défense, en
14 effet.
15 Q. Est-ce que ça ne vous a pas frappé comme étant étrange qu'au cours de
16 cette réunion, le chef de ce département disait en fait que ce n'était pas
17 sa responsabilité, que ces gens n'étaient pas de sa responsabilité ?
18 R. Si je puis me le permettre, c'est quand même nécessaire de détailler un
19 petit peu cela. Je ne serai pas long, car je vois que le temps passe vite.
20 Je me rappelle cette réunion, c'était la première fois que
21 j'entendais de quelle façon on faisait une distinction entre ce qui était
22 militaire et ce qui ne l'était pas. Cela rejoint ce que j'ai dit hier,
23 lorsque j'ai dit que je n'avais absolument aucune idée de la distinction
24 qui pouvait exister entre les centres d'isolement, centres de détention,
25 prisons. C'est alors que j'ai commencé à distinguer que l'on avait une
26 prison centrale, et ensuite à Ljubuski nous avions ce président qui pensait
27 à ce moment précis qu'il s'agissait d'un département de la Défense qui
28 aurait été armé et que cela serait tombé sous sa compétence. Pour les
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1 autres centres, il affirme que lui ne sait pas de quoi il s'agit ni qui en
2 est responsable.
3 Cependant, Messieurs les Juges, en tant que médecin, c'est de ce
4 point de vue-là que je parle, il était tout à fait non pertinent de savoir
5 qui a signé l'ordre de mise en place de tel ou tel organe ou institution.
6 Ce qui était important, c'est que nous soyons présents en permanence sur
7 place dans le but d'améliorer la situation en terme de santé.
8 En deux mois, c'est-à-dire à partir d'un moment qui se situe avant
9 cette réunion et puis qui va jusqu'à la fin de l'année, il y a eu plus de
10 20 rapports en ce sens dans le but d'améliorer les situations. M. Stojic ne
11 niait pas l'existence de ces centres, mais essayait de dire qui devrait
12 être officiellement responsable de telle et telle partie, je pense que
13 c'est ainsi qu'il faut l'interpréter.
14 Q. Qui allait être en charge de ces personnes si ce n'était pas lui ?
15 R. Sincèrement, je l'ignore. Dans les circonstances de l'époque telles
16 qu'elles étaient, et lorsque l'on parle de tout cela, il faut toujours
17 avoir ces aspects à l'esprit, à savoir qu'il s'agissait d'une période
18 particulièrement difficile pour laquelle j'affirme, en toute
19 responsabilité, que personne n'était en mesure de contrôler la situation
20 dans son ensemble.
21 C'est ce que j'ai également dit hier ou avant-hier, lorsque j'ai
22 affirmé n'avoir jamais entendu au sein du département de la Défense qu'une
23 telle décision ait été prise ou signée. Je n'ai jamais vu une telle
24 décision. Personne ne l'a jamais portée à ma connaissance. Personne ne m'a
25 demandé non plus mon avis sur le sujet. Ce qui comptait pour moi, c'était
26 d'envisager les zones de responsabilité avec les médecins qui étaient sur
27 le terrain afin d'établir des contacts avec eux et de mettre en place des
28 postes médicaux. Ce qui importait pour moi, c'était de savoir quel centre
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1 de détention appartenait à quelle zone de responsabilité, et qui en avait
2 la responsabilité.
3 Q. Le mois précédent, votre collègue, 2D-AB, s'était rendu à Dretelj, et
4 maintenant la personne qui était le chef de ce département dit qu'il ne
5 prenait pas la responsabilité de cette installation. Est-ce qu'à l'époque
6 ça ne vous a pas frappé comme étant curieux, 2D-AB travaillait pour le
7 compte du département ?
8 M. KARNAVAS : [interprétation] A ce stade je voudrais objecter.
9 Premièrement, il a posé la question, il a répondu. Il a déjà indiqué en
10 tant que médecin qu'il ne savait pas qui était responsable pour les
11 installations. Je crois que la question a été posée et qu'il a répondu.
12 M. LAWS : [interprétation] Si je peux répondre, le point de vue de ce
13 témoin, en tant que médecin, n'est pas vraiment ma question. Ma question
14 c'était ce qu'il pensait quand Stojic a dit a dit que ça n'avait rien à
15 voir avec lui ?
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais il a déjà répondu à cela aussi.
17 M. LAWS : [interprétation] Il n'a pas répondu d'une façon qui soit en quoi
18 que ce soit satisfaisante. Il a parlé d'autres détails et n'a pas répondu à
19 la question directe.
20 M. KARNAVAS : [interprétation] Je laisse cela aux membres de la Chambre
21 d'en décider. Pour autant que je comprenne il a répondu du mieux qu'il le
22 pouvait. Quant à savoir si c'est satisfaisant pour l'Accusation, c'est une
23 autre question.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison, Maître Karnavas, c'est une autre
25 question.
26 Monsieur le Procureur, continuez.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je dois dire que je ne suis pas
28 d'accord avec cette décision. Je pense que le Procureur aurait eu le droit
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1 de poursuivre. Je suppose que je suis en minorité, je dis ça simplement
2 pour le compte rendu.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une erreur entre Juges. On n'interdit pas au
4 Procureur de continuer, si Monsieur le Procureur, vous voulez insister sur
5 le problème, continuez. Je n'ai pas dit le contraire. Mais par contre j'ai
6 hâté ce que disait Me Karnavas.
7 Bien, continuez, Monsieur le Procureur.
8 M. LAWS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Reportez-vous en arrière, Monsieur Bagaric. Vous vous trouviez dans une
10 réunion, il y a ce chef de département qui dit que ces prisons ne le
11 concernent pas du tout. Ça ne vous frappe pas, non ? En même temps, les
12 aspects sur la question que j'ai posée, est-ce que vous pourriez essayer
13 d'y répondre, s'il vous plaît ?
14 R. Tout à fait. Lors de cette réunion, je n'ai rien trouvé d'étrange. Pour
15 les raisons suivantes, d'un point de vue personnel, ça n'avait aucune
16 importance pour moi que de savoir qui était responsable dans tel ou tel
17 centre. Monsieur le Président, lorsque nous étions à cette réunion, je
18 savais déjà que nos médecins et moi-même, même si directement je n'avais
19 pas du tout la responsabilité de cela, nous avions entrepris ces mesures
20 dont j'ai déjà tant parlé. J'avais rédigé personnellement des ordres aux
21 fins qu'il soit procédé à telle ou telle action, à savoir qu'une
22 protection, une surveillance médicale continue soit assurée. Mon collègue
23 et ami, vous savez de qui il s'agit, s'est rendu sur place dans ce cadre-
24 là.
25 C'est lui qui avait la charge d'assurer la protection médicale dans
26 le service épidémiologique dans toutes les unités du HVO et au sein de tous
27 les établissements qui se trouvaient dans la zone de responsabilité de ces
28 unités. Lorsqu'il se rendait sur le terrain auprès d'une brigade par
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1 exemple, il visitait évidemment les établissements qui se trouvaient dans
2 la zone de cette brigade, qu'il s'agisse d'un centre accueillant des
3 réfugiés ou d'un centre de détention. Il contrôlait régulièrement la
4 situation sanitaire avec ses autres confrères.
5 Q. Fort bien. Passons à présent à l'aide humanitaire, vous en avez
6 longuement parlé hier et avant-hier. Je voulais comprendre votre position.
7 Vous nous dites que vous avez aidé Mostar est en fournissant des
8 médicaments, des fournitures ?
9 R. Oui, j'ai dit cela et je l'ai fait à chaque fois que c'était possible.
10 Si j'avais pu le faire plus encore je l'aurais fait. Je suis fort attristé
11 que la proposition que j'ai faite à l'époque n'ait pas été acceptée, car si
12 cela avait été le cas, si l'hôpital de Mostar avait été utilisé comme
13 hôpital commun, je pense que la guerre se serait arrêtée.
14 Q. Nous parcourrons votre position en temps voulu. Vous reprochez aux
15 organisations internationales de ne pas en avoir fait suffisamment pour
16 apporter leur concours ?
17 R. Non, je ne les accuse pas de cela. Au contraire je leur suis
18 reconnaissant, nous avons célébré cela à une occasion où je leur aurais
19 remis un témoignage de reconnaissance, car il s'agissait de personnes qui
20 sont venues chez nous des quatre coins du monde pour nous venir en aide.
21 Quoi qu'ils aient fait, je leur en suis durablement reconnaissant.
22 Cependant je pense que certaines de ces organisations pourraient être
23 beaucoup plus efficaces. Je ne voudrais pas que l'on interprète mal mes
24 propos. Ce que j'ai dit est à comprendre dans le sens d'une amélioration de
25 l'intervention ultérieure de ces organisations.
26 Q. Le terme utilisé c'était "la déception". Vous étiez déçu par les
27 organisations internationales ?
28 R. Peut-être que de temps en temps j'ai été déçu, mais je viens simplement
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1 d'énoncer une affirmation qui est censée la plus proche de la vérité.
2 Q. Vous avez également ajouté c'est à la page 80 du compte rendu
3 d'audience que les Musulmans ne voulaient pas coopérer parce qu'ils
4 n'auraient pas pu à ce moment-là se poser en victimes. Est-ce que vous vous
5 souvenez avoir dit cela ?
6 R. Non, je me souviens de ce que vous êtes en train de mentionner, mais je
7 n'ai pas dit cela. Ce que j'ai dit c'est que je m'interrogeais
8 continuellement parce que je ne recevais aucune réponse de l'autre partie.
9 Lorsque j'interrogeais la FORPRONU, le CICR, je demandais à leur
10 représentant si nous allions faire quelque chose ou pas lorsque je
11 rencontrais ces représentants. Veuillez m'excuser, mais à plusieurs
12 reprises, j'aurais pu rencontrer ces personnes en tant que numéro un chargé
13 de la santé, mais cela ne s'est jamais produit, et je me suis demandé
14 pourquoi. J'ai supposé que ce n'était pas les personnels médicaux, les
15 médecins du côté musulman qui s'opposaient à cela mais quelqu'un au niveau
16 politique plus haut placé. Car si vous acceptiez cela, le message qui était
17 envoyé de par le monde au sujet des Croates serait atténué et les Croates
18 apparaîtraient comme étant moins méchants. Voilà, c'était mon raisonnement.
19 S'agissant de la situation au niveau des Croates en Bosnie-
20 Herzégovine, même maintenant elle n'est pas satisfaisante, encore moins
21 pendant la guerre. C'était loin d'être satisfaisant. Les Croates en Bosnie-
22 Herzégovine, c'est une population qui a été réduite de moitié. On est loin
23 de voir une solution politique au problème existant. S'il s'agissait d'une
24 espèce animale qui aurait été diminuée de moitié --
25 Q. Docteur Bagaric, il faut que je vous interrompe ici. Vous nous
26 parlez de la réduction de la population --
27 R. Je m'excuse.
28 Q. Je vous pose une question au sujet de vos propos, et je vous demande de
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1 confirmer. Une partie de la responsabilité de ce qui s'est passé à Mostar
2 doit être attribuée aux Musulmans eux-mêmes; en substance c'est ce que vous
3 nous dites là, non ?
4 R. Ce n'est pas ce que j'ai dit, je ne l'ai pas dit de la sorte.
5 Q. Quelle est la partie que j'aurais mal comprise ?
6 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est cela que je veux dire. Il déforme le
7 compte rendu, il dit que l'on recevait des ordres d'en haut, il fait des
8 reproches aux responsables, les politiques.
9 M. LAWS : [interprétation] Oui.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Si vous dites les Musulmans, c'est que c'est
11 la même chose, les Croates, Serbes, et cetera. Il y a une grande différence
12 entre la population et les hauts fonctionnaires qui sont les grosses
13 légumes. Je trouve qu'il doit être précis pour avoir une réponse précise.
14 Je ne veux pas que le témoin apparaisse comme cherchant à se dérober. C'est
15 la tactique, et je propose qu'il ait des questions précises.
16 C'est la tactique. Le témoin ne veut pas répondre parce qu'il parle
17 des Musulmans en général. Or, il a parlé des Musulmans au niveau des
18 autorités plus élevées.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : -- ce que vous avez fait, est-ce qu'elle était
20 précise ou elle devait être complétée, parce que Me Karnavas est intervenu,
21 est-ce que vous aviez répondu complètement à la question du Procureur ou il
22 fallait que vous affiniez votre réponse ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que M. l'Avocat a à très juste titre
24 interprété la position qui est la mienne. Enfin le problème c'est là. Je ne
25 peux pas moi blâmer les Musulmans. Je peux blâmer la direction qui à un
26 moment donné a adopté des décisions politiques qui ont eu des conséquences
27 sur le terrain. Et à l'époque, ça s'est répercuté sur deux parties au
28 conflit, à savoir les Croates et les Musulmans. C'est à cet effet que je
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1 l'ai dit, et c'est la raison pour laquelle j'ai dit quand M. le Procureur
2 m'a posé la question, j'ai dit que je ne pensais pas que c'était ainsi et
3 que ce n'était pas tout à fait comme cela.
4 M. LAWS : [interprétation] Je vais essayer de formuler cela d'une manière
5 qui recueille votre approbation.
6 Q. Est-ce que vous dites que quelqu'un ayant une influence politique sur
7 les habitants de Mostar est, quelqu'un qui occupe un tel poste cherchait à
8 créer une situation dans laquelle la population de Mostar est ne serait pas
9 aidée ? Est-ce cela l'effet ?
10 R. Si une partie de Mostar est en train de souffrir, les deux souffrent,
11 mais il y en a une qui souffre davantage. En l'occurrence, nous avions des
12 soins médicaux meilleurs que pour ce qui est de la partie est. Si la partie
13 de l'autre côté le veut et a toutes les possibilités de résoudre le
14 problème et si l'autre partie ne veut pas répondre, là, j'ai dit qu'en
15 l'occurrence, quelqu'un, un homme politique qui était au-dessus de ceux qui
16 étaient dans le problème, a décidé de ne pas réaliser la chose. C'est ce
17 que je voulais dire et je n'ai plus rien d'autre à ajouter.
18 Q. Merci. Je vais pour ce qui nous reste de temps aujourd'hui et demain
19 examiner une thèse tout à fait autre qui est la suivante : c'est que le HVO
20 a créé la situation à Mostar est et a cherché à assurer que ces
21 circonstances restent les mêmes, des circonstances désastreuses mois après
22 mois, et c'est cela que je vous soumets; est-ce que vous comprenez ?
23 R. Je comprends, mais je n'accepte pas. Je ne pense pas que ce soit la
24 vérité ou que ce soit la vérité pleine et entière, parce que la vérité
25 pleine et entière ce serait de dire qu'avant les conflits à Mostar, il y a
26 eu dans la vallée de la Neretva à Konjic un conflit où les Musulmans
27 bosniens ont commis véritablement un terrible crime non seulement à
28 Grabovica mais dans le territoire tout entier, et tout doucement au fur et
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1 à mesure ils avançaient vers Mostar. Donc si maintenant, et là je parle en
2 qualité d'individu qui allait assez souvent et qui attendait chaque journée
3 nouvelle sans savoir si elle vivrait suffisamment longtemps, donc si les
4 forces musulmanes avaient davantage de pouvoir, elles se seraient emparées
5 de Mostar, elles auraient continué vers Capljina et au-delà, parce que
6 leurs hommes politiques l'avaient conçu ainsi et ils n'ont même pas hésité
7 à l'affirmer, à le dire ouvertement. Donc toute la gravité de la situation
8 que vous évoquez, cela a été généré par le conflit, un conflit purement
9 armé qui a été ce qu'il a été. S'il n'y avait pas eu de résistance du côté
10 croate, il se serait produit ce que je viens de dire. Et je regrette que
11 les choses se soient produites, et je pense que point n'est nécessaire d'en
12 parler davantage encore, on se comprend.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je veux intervenir, je fais très
14 attention au temps parce que je veux absolument que demain votre audition
15 soit terminée, mais là vous venez de dire quelque chose que je ne peux pas
16 laisser passer parce que c'est important.
17 Vous dites si les Musulmans avaient pris Mostar, ils auraient pu continuer
18 jusqu'à Capljina, et vous dites ça ne s'est pas fait en raison de la
19 résistance. Est-ce à dire que s'il n'y avait pas eu une résistance des
20 Croates, les forces musulmanes prenaient Mostar et contrôlaient tout le
21 territoire ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'en suis convaincu.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : On verra plus tard les aspects militaires avec le
24 général Praljak lorsqu'il témoignera. J'aurai l'occasion de revenir sur
25 cette question.
26 Monsieur le Procureur, continuez.
27 M. LAWS : [interprétation]
28 Q. Je voudrais parler du blocus, c'est ainsi que je le qualifierais, de
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1 Mostar est, et des difficultés qui existaient pour obtenir de l'aide et de
2 l'approvisionnement à Mostar est. D'accord ? Ce sera le sujet et je
3 commencerai par m'appuyer sur deux documents du classeur de la Défense, le
4 gros classeur que l'on vous a donné lundi, et je vous inviterais à les
5 utiliser pour examiner la situation à Mostar est. Et commençons par le
6 document 2D 00714, la pièce 2D 00714.
7 Et je demande votre aide, Monsieur Bagaric. A la fin du premier paragraphe
8 à la première page, il y a une phrase que je lis :
9 "Lors de la semaine précédente, le dépôt central des médicaments a reçu
10 deux colis précieux d'aide humanitaire…"
11 Est-ce que vous le voyez ?
12 R. Première page ? 2D 714, page 1 ?
13 Q. Page 1. Dans la version B/C/S, 11 lignes à partir du dessus, à gauche
14 vous voyez le chiffre "20 000".
15 R. Oui, je le vois. Je vois.
16 Q. Très bien. Donc lors de la semaine précédente, le dépôt central de
17 médicaments de l'hôpital sur la rive ouest a reçu quatre envois précieux
18 d'aide humanitaire pour une valeur totale de 20 000 deutsche marks ?
19 R. Oui, effectivement, c'est là.
20 Q. Ensuite :
21 "L'approvisionnement en médicaments du HVO, et cetera, est satisfaisant."
22 Est-ce que vous le voyez ?
23 R. Phrase d'après ?
24 Q. La phrase juste avant --
25 R. Oui, oui.
26 Q. C'est la semaine du 7 au 14 [comme interprété] septembre. Ensuite, si
27 vous prenez la pièce à conviction de la Défense 2D 00738, c'est un document
28 dans lequel vous faites rapport à Bruno Stojic sur la semaine du 3 au 10
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1 août, et également matériel médical et réserve de médicaments pour
2 l'hôpital de garde du HVO à Mostar est satisfaisante. Et ensuite la semaine
3 précédente, l'entrepôt central des médicaments du quartier général
4 principal médical de la Communauté croate d'Herceg-Bosna a accepté huit
5 envois précieux de donations pour une valeur approximative de 500 000
6 deutsche marks ?
7 R. Je vois, oui.
8 Q. La situation à présent en ce qui concerne l'accès à Mostar pour
9 l'approvisionnement de l'hôpital sur la rive ouest était telle que si on
10 voulait vous en fournir c'était possible ?
11 R. Mais c'est exact, mais je dois dire ce qui est vrai aux Juges de la
12 Chambre pour ce qui est de ces 500 000 marks, et je l'affirme en toute
13 responsabilité.
14 Après la guerre, j'étais président du conseil d'administration de
15 l'hôpital de Mostar. Sur les 500 000 marks, ici on a inscrit ce que les
16 autres marquaient lorsqu'ils envoyaient les médicaments, mais nous on
17 obtenait sur ces 500 000, au final, on a eu un peu moins de pertes pour
18 détruire ces ordures-là. Je sais que l'hôpital a dépensé énormément
19 d'argent pour que, et c'est documenté, ça a été publié dans les journaux,
20 je ne raconte aucune histoire, je n'invente rien. C'était des médicaments
21 dont les délais de péremption étaient passés et on recevait par exemple des
22 semi-remorques avec des médicaments dont la date de péremption était
23 terminée et ça venait d'Allemagne. Et en plus, il fallait qu'on les
24 remercie ces gens-là. Alors vous ne savez que faire de ces médicaments.
25 Après la guerre, on les a exportés pour les faire brûler et ça nous a coûté
26 très cher, je vous l'affirme en toute responsabilité. Donc ces 500 000, là
27 il y a un grand point d'interrogation pour ce qui est de savoir ce que ça a
28 été. Mais le Procureur a raison de dire que nous étions bien mieux placés
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1 que la partie Est de Mostar, ça c'est notoirement connu.
2 Q. Vous étiez peut-être mécontent du contenu mais ces envois passaient et
3 vous parvenaient sans aucune difficulté, n'est-ce pas ?
4 R. C'était inutilisable, c'est de cela que je parle. En grande majorité,
5 c'était inutilisable, non il n'y a pas eu de problème pour que cela nous
6 parvienne pour ce qui est d'envois de médicaments. Bien, si, il y en a eu
7 quand même, mais c'était beaucoup plus facile.
8 Q. Vous étiez, comme vous le dites, bien mieux positionnés sur la rive
9 ouest que ce n'était le cas sur la rive est ?
10 R. Exact, je suis d'accord.
11 Q. La raison n'en est-elle pas que le HVO contrôlait l'accès à Mostar ?
12 R. Je pense qu'il serait préférable de poser une question et de répondre à
13 la question : est-ce que la cause à cela c'est la guerre ? Je pense que
14 oui, la guerre est la véritable réponse au pourquoi. Par un concours de
15 circonstance, le côté ouest de Mostar avait en arrière-fond une zone
16 profonde sans guerre et la partie est qui se trouvait en face était la
17 ligne de front, et la ligne de front passait par le centre-ville, et dans
18 ces circonstances-là, il était difficile d'accéder à la partie est de
19 Mostar. C'est notoirement connu. Et ça ne dépendait pas seulement du HVO
20 pour ce qui est de pouvoir faire passer les choses, ça dépendait de l'autre
21 partie aussi, de la partie adverse. On était au front.
22 Q. Le HVO pouvait autoriser un convoi d'aide humanitaire à pénétrer son
23 territoire pour se rendre sur la rive Est, ou au contraire interdire cet
24 accès; est-ce que cela est exact ?
25 R. Je ne sais pas. Ça se peut, ça peut être une question à piège, je ne
26 peux pas répondre par un oui ou par un non.
27 Q. Je vous invite à vous reporter à la pièce P qui se trouve dans votre
28 petit classeur et P 024527.
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1 R. Oui.
2 Q. Et l'on trouve là un document du 26 août 1993 intitulé "Communauté
3 croate d'Herceg-Bosna, département de la Défense, administration de la
4 police militaire, Mostar". Est-ce que vous le voyez ?
5 R. Je le vois, oui.
6 Q. Et l'ordre dit cela :
7 "A tous les passages de frontière et sur tout le territoire contrôlé par le
8 5e Bataillon de police militaire, assurer le libre passage et la liberté de
9 circulation des transports de personnels, des journalistes étrangers, des
10 représentants des organisations internationales humanitaires et tous autres
11 citoyens qui ont une autorisation de circuler signée par les personnes
12 suivantes."
13 Ensuite, il y a une liste de noms. Bruno Stojic, M. Bozic, Lukic, Praljak,
14 Petkovic, Tole, numéro 9, vous ?
15 R. C'est de moi qu'il s'agit, c'est mon nom.
16 Q. Oui, et c'est absolument vous là.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Parfois je tiens à être méticuleux.
18 A la page 89, lignes 12 et 13, il y a une cote erronée pour le document. Il
19 n'y a pas de "2", c'est P 04527.
20 M. LAWS : [interprétation] Effectivement. Merci.
21 Q. Monsieur Bagaric, vous êtes l'une des personnes habilitées à autoriser
22 des représentants d'organisations humanitaires à traverser le territoire de
23 l'Herceg-Bosna. En tout cas selon cet ordre, est-ce que c'est vrai ?
24 R. Ça n'en est pas ainsi. Messieurs les Juges, ceci se rapporte -- enfin,
25 ce document je ne l'ai jamais vu auparavant, mais peu importe. J'ai
26 certainement été l'une des personnes compte tenu du fait que j'étais
27 l'homme numéro un en matière de santé et que j'ai souvent prié un tel et un
28 tel pour nous fournir telle et telle chose.
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1 Que veut-on dire par là ? On reçoit des médecins qui viennent d'ailleurs et
2 qui veulent aller par exemple dans un hôpital de guerre, c'était une zone
3 de guerre, et bien entendu on assurait des passages, on sécurisait les
4 passages et on vérifiait l'identité des gens pour savoir qui passait par
5 où. Et comme j'étais souvent à intervenir pour demander des autorisations,
6 j'imagine que les gens m'ont mis sur la liste pour que les nôtres, à savoir
7 les besoins sanitaires, j'aie la possibilité de signer et je l'ai fait.
8 Ici, si vous prêtez attention à la chose, on dit "aux passages
9 frontaliers". Ces passages frontaliers, ce n'était pas la frontière vers
10 Mostar est, mais c'était la frontière vers la République de Croatie. Et
11 c'est une chose importante, donc relève des équipes de chirurgiens, envois
12 de malades, des nôtres, pas de l'hôpital, je veux dire, et ces
13 déménagements de personnes.
14 Enfin, tous ceux qui s'adressaient à moi en personne et que j'étais
15 en mesure d'aider, indépendamment de l'identité de la personne requérante,
16 c'était toujours des individus qui le faisaient. Ce n'était pas si fréquent
17 que cela. Les gens ne s'adressaient pas à moi, parce que souvent c'était
18 insensé que de s'adresser à un médecin, parce que ce n'était pas moi qui
19 étais chargé de la sécurité sur le territoire, j'étais chargé des médecins.
20 Donc c'était dans l'objectif qui visait à assurer des soins médicaux sur ce
21 territoire.
22 Q. Lorsque le HVO souhaitait refuser l'accès de l'aide humanitaire,
23 c'était assez facile. Ils s'abstenaient d'octroyer un permis. C'était là la
24 situation, n'est-ce pas ?
25 R. Je pense que ça ne s'est pas passé ainsi.
26 M. LAWS : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure qu'il
27 est. Je développerai cela demain, mais je pense que le moment est peut-être
28 venu.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Concernant le temps, Monsieur le Procureur, il
2 doit vous rester une heure 40 minutes, quelque chose comme ça. Le greffier
3 va faire le décompte.
4 Monsieur le Témoin, j'ai constaté que vous faites des réponses très
5 longues. Essayez demain, parce qu'on est tous maintenant comptables du
6 temps, d'être plus synthétique dans vos réponses, évitez de partir dans des
7 développements politiques. Bon, je sais que vous êtes un homme politique et
8 vous avez l'art de la parole, mais soyez très concis pour que le Procureur
9 puisse poser une question et vous répondez de manière précise, ce qui
10 permet au Procureur d'enchaîner. Voilà. Donc essayez de faire des efforts.
11 Mais je vous fais totalement confiance pour cela.
12 Je vais donner la parole à mon collègue.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très brièvement. Toutes mes excuses
14 aux parties je devrai m'absenter demain en raison d'obligation
15 universitaire.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Voilà. Alors, Monsieur le Témoin, rassurez-
17 vous, votre audition se terminera demain. On ne jouera pas les
18 prolongations, de toute façon on ne pourra pas. Donc demain le Procureur il
19 lui restera une heure 45. Peut-être qu'il fera aussi des efforts pour
20 réduire le temps, je pense que la Défense de M. Stojic a des questions
21 supplémentaires, elle nous l'a indiqué, mais normalement tout devrais bien
22 se dérouler demain.
23 Donc je souhaite à tout le monde une bonne soirée, et nous nous
24 retrouverons demain à 14 heures 15.
25 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le jeudi 23 avril
26 2009, à 14 heures 15.
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