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1 Le jeudi 23 avril 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Les accusés Coric et Prlic sont absents]
5 [Le témoin vient à la barre]
6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
8 l'affaire.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. C'est
10 l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
12 En ce jeudi, je salue en premier MM. les accusés. Je salue Mmes et MM. les
13 avocats. Je salue tous les représentants du bureau du Procureur et toutes
14 les personnes qui nous assistent. Je salue, bien entendu, -- [hors micro]
15 La pause interviendra aux environs de 16 heures. Nous ferons donc 20
16 minutes de pause. On reprendra après à 16 heures 20, ce qui devrait nous
17 permettre de terminer à 18 heures, s'il y a des questions supplémentaires.
18 Voilà. Monsieur le Procureur.
19 M. LAWS : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour. Bonjour à tous
20 dans cette salle et autour de cette salle d'audience.
21 LE TÉMOIN : IVAN BAGARIC [Reprise]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 Contre-interrogatoire par M. Laws : [Suite]
24 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Bagaric.
25 R. Bonjour.
26 Q. Nous allons reprendre les documents que nous regardions hier, à savoir
27 le P 04527. Nous étions en train d'examiner ensemble les noms des personnes
28 qui avaient la possibilité d'autoriser le passage et la liberté d'aller et
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1 venir normalement, les membres d'organisations humanitaires.
2 Nous vous avons vu au numéro 9. Nous avons vu les noms de certains des
3 accusés. Et au numéro 3, Ivo Lucic, un homme qui se trouvait également à la
4 réunion de Tomislavgrad dont nous avons parlé au tout début de mon
5 interrogatoire d'hier en décembre 1991. Vous rappelez cela ?
6 R. Vous voulez parler de la réunion ?
7 Q. Oui. Ivo Lucic, c'est celui qui était au numéro 3 et il se trouvait
8 également à cette réunion sur laquelle nous avons passé un certain temps,
9 la réunion de Tomislavgrad.
10 R. Bien, je me souviens de la réunion, celle où j'étais présent. Mais je
11 ne suis pas certain de la présence d'Ivo Lucic, du moins, je ne me souviens
12 pas, moi, de la présence d'Ivo Lucic.
13 Q. Ecoutez, je ne veux pas prendre du temps pour vérifier cela maintenant.
14 Nous avons le document et le compte rendu le montrera.
15 Au numéro 8, Veso Vegar était le chef de l'administration pour les
16 questions d'information et de propagande; c'est bien cela ?
17 R. Je ne sais pas si c'est exact, mais il était chargé d'un département
18 qui était lié aux communications avec le public, dans ce sens.
19 Q. Merci. Je voudrais vous poser des questions le concernant parce que
20 vous rappelez-vous lorsque nous avons regardé un document qui vous a été
21 montré par Me Nozica, ce document dans lequel l'ABiH vous écrivait pour
22 vous demander de l'aide ?
23 M. LAWS : [interprétation] C'est notre document 2D 00122. Excusez-moi,
24 peut-être qu'on pourrait le présenter à l'écran, 2D 0122.
25 Q. Il s'agit d'une lettre d'Arif Pasalic que nous avons déjà vue datée du
26 9 juin et qui semble avoir fait que vous avez envoyé une certaine quantité
27 de médicaments à la rive est, rive orientale. Vous rappelez-vous cela ?
28 Est-ce que vous pourriez regarder le premier paragraphe du texte où la
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1 lettre dit ceci, je cite :
2 "Considérant que par les médias vous avez annoncé la coopération médicale
3 et l'aide apportée aux blessés et aux personnes malades, nous vous
4 adressons par conséquent ceci."
5 Pouvez-vous nous aider même un tout petit peu sur ce point, Docteur
6 Bagaric. Cette lettre semble suggérer que le HVO, peut-être que le
7 personnel médical du HVO à qui c'est adressé, mais certainement au HVO,
8 avait annoncé par les médias qu'ils allaient aider la partie adverse. Est-
9 ce que c'est bien ce qui se passait en juin 1993 ?
10 R. Le 9 juin, et moi j'en ai parlé de ce document et j'ai dit
11 qu'auparavant nous avions proposé de l'aide à la rive est, et j'imagine que
12 c'est une réponse à l'offre que nous avions déjà présentée au sujet de la
13 coopération dont j'ai parlé déjà.
14 Q. Docteur Bagaric, hier, je ne vous critique pas en quoi que ce soit,
15 mais vous et moi avons passé peut-être plus longtemps à traiter de certains
16 sujets que ce n'était nécessaire et le Président du Tribunal vous a demandé
17 hier d'essayer de répondre aux questions. La question que je vous pose
18 maintenant est celle-ci : lorsque nous voyons où Arif Pasalic écrit que
19 quelqu'un de votre côté a fait des annonces aux médias concernant le fait
20 d'apporter de l'aide et une coopération médicale, ce que je vous demande
21 c'est si ceci a eu lieu à ce moment-là en 1993, pour le compte du HVO, des
22 annonces ont été faites dans les médias en ce sens. Je ne vous demande pas
23 une question qui pourrait avoir sa réponse dans la réponse que vous avez
24 faite mais --
25 R. Oui. Le 9 juin, je ne peux pas vous dire si ça a été publié à ce jour,
26 mais j'imagine que les médias ont dû diffuser nos témoignages de bonne
27 volonté et dispositions à établir une coopération, et c'est là qu'il a
28 répliqué avec cette demande.
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1 Q. Je vous remercie. Pourriez-vous aussi nous aider, nous éclairer, étant
2 l'une des personnes qui se trouvaient à Mostar pour traiter de cette
3 question, si Veso Vegar lui-même s'est occupé d'annonces de ce genre ?
4 R. Je pense, enfin je ne sais pas cela. Je suppose que ça s'est passé sans
5 que Veso Vegar soit impliqué pour être diffusé à la radio ou aux radios
6 parce que le côté occidental et le côté est de Mostar avaient leurs propres
7 stations radios.
8 Q. Bien. Merci. Maintenant, je vais vous poser cette question et je vais
9 vous demander d'y réfléchir et vous nous direz ce que vous en pensez : au
10 cours de l'été 1993, l'aide, l'aide médicale, l'aide humanitaire était
11 devenue un problème politique, une question politique. Qu'en pensez-vous,
12 que pensez-vous de cela, Docteur Bagaric ?
13 R. J'en ai parlé hier pour dire qu'en effet, dans une certaine mesure, la
14 partie est, à savoir la direction musulmane n'avait pas répondu à l'appel
15 adressé par nous pour ce qui est des ordres avancés par nos soins. Et j'ai
16 considéré que c'était une question politique, que ça venait de ce niveau-là
17 ou du commandement, et c'est de là que venaient les ordres pour que les
18 choses ne soient pas réalisées. C'est ce que je voulais dire.
19 Q. Merci. Et c'était devenu une question politique, un problème politique
20 pour le HVO aussi, n'est-ce pas ?
21 R. Je pense, je suis convaincu même que ça n'a jamais été une question où
22 le HVO aurait pris la même position que la partie adverse pour ce qui est
23 du cas dont on parle. Je pense que la réponse n'a pas été positive, non.
24 Q. La communauté internationale faisait des représentations, des
25 remontrances dans différents endroits, un certain nombre d'endroits, mais
26 c'était en se sens que Mostar est devait être aidée, devrait recevoir une
27 aide, et vous, le HVO, et ceux qui exerçaient un contrôle sur Mostar, vous
28 étiez au courant de cela, n'est-ce pas, et vous subissiez des pressions,
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1 n'est-ce pas ?
2 R. Personnellement, je n'ai été soumis à aucune pression et je ne puis
3 parler qu'en mon nom parce que les personnes qui s'étaient adressées à moi
4 du côté de la communauté internationale pour ce qui est d'un transport de
5 blessés, pour ce qui est d'activités individuelles autant que je pouvais le
6 faire, j'ai aidé.
7 Et, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, parce que je me suis
8 adressé aux généraux qui sont présents ici et aux responsables du
9 département de la Défense lorsque j'avais besoin d'aide, j'ai bénéficié
10 d'un soutien pour qu'il y ait réalisation des activités d'assistance. Pour
11 ce qui est d'autres requêtes, je ne sais rien vous dire d'autre.
12 Q. Bien. Moi, je vais vous dire que des pressions s'exerçaient à la fois
13 localement et au niveau international, et je vais vous demander de regarder
14 avec moi ce document P 05080.
15 C'est une autre transcription de la présidence, et cette transcription
16 indique que Mate Boban se trouve au palais présidentiel de Franjo Tudjman
17 le 15 septembre 1993, et la délégation de la République de Croatie
18 d'Herceg-Bosna est saluée, et il lui souhaite la bienvenue, et il dit,
19 c'est le président Tudjman, que la Croatie subit des pressions, des
20 pressions officielles de l'Union européenne dans son ensemble ainsi que
21 d'états individuellement. Nous allons voir les sujets dans un instant.
22 "Au cours des 14 derniers jours, j'ai reçu au moins cinq ou six notes
23 officielles de l'Union européenne, des Etats-Unis d'Amérique, de la France
24 et de l'Allemagne. Tous demandent que nous fassions autant de concessions
25 possibles aux Musulmans, et tous nous menacent de sanctions à cause des
26 Croates en Bosnie-Herzégovine.
27 "Ils ont même été jusqu'à nous envoyer un avertissement qu'ils
28 supprimeraient notre statut d'hôte spécial, d'invitée spécial à l'assemblée
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1 du Conseil européen."
2 Puis ces mots-ci :
3 "Dans de tel, il est clairement dit pour vos camps et convois humanitaires,
4 et ainsi de suite, jusqu'au premier endroit."
5 Vous pourrez voir cela ?
6 R. Oui, je le vois.
7 Q. Ça, c'est un compte rendu de ce que M. Tudjman dit à la délégation
8 d'Herceg-Bosna. Il leur dit qu'il subit de très fortes pressions à cause du
9 fait qu'un grand nombre de pays différents de l'Union européenne sont très
10 occupés, en particulier en ce qui concerne les camps dont nous avons parlé
11 hier et en ce qui concerne les convois humanitaires. Je voudrais vous poser
12 la question suivante : est-ce que la situation n'est pas que les pressions
13 de ce genre, telles que relayées par Tudjman à Boban, est allée jusqu'à
14 Mostar et que de temps à autre, bien entendu, on a laissé passer un peu
15 d'aide ? C'est bien la situation, n'est-ce pas ?
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
17 je m'excuse à vous et à mon confrère. Je voudrais indiquer un point que Me
18 Karnavas a évoqué hier. Pour supprimer la totalité des faits et pour poser
19 des éléments factuels pour poser ces questions, il y a établissement d'une
20 corrélation entre le 2D 122, le document de Bruno Stojic datant du mois de
21 juin 1993, puis des événements de l'été 1993, et la troisième question
22 établit la corrélation avec le mois de septembre 1993. Or, les Juges savent
23 pertinemment bien qu'à la fin 1993, il y a eu un point de rupture pour ce
24 qui est des relations avec l'ABiH et le HVO. Si on néglige ce qui s'est
25 passé à ce moment-là, et présentait ce qui s'est passé en été qui établit
26 la corrélation avec juin, ne doit pas être forcément exact. Je voudrais
27 donc que ce soit consigné au compte rendu, et il convient d'intervenir en
28 ce sens.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas la peine de le dire. Les Juges en sont
2 parfaitement informés. Si cela, vous voulez le mettre en évidence, quand il
3 vendra pour vous, vous pourriez revenir sur cette question. Là, on a perdu
4 trois minutes pour rien. Continuez, Monsieur le Procureur.
5 M. LAWS : [interprétation] Avant de le faire, pourrais-je dire
6 respectueusement, bien entendu, c'est un argument qui pourrait être
7 présenté, mais, en fait, ça ne suggère pas du tout que ma question soit
8 impropre. Je parle de pressions qui sont exercées, et le témoin comprend
9 pleinement cela ainsi, que la Chambre de première instance saisit
10 entièrement tout l'historique de cela, et les intérêts peut-être qu'il y a
11 d'aller de l'avant. Je voulais simplement dire cela.
12 Q. Maintenant, Docteur Bagaric, à Mostar est --
13 R. Excusez-moi. Vous venez dire que j'ai certainement compris, mais
14 excusez-moi, qu'est-ce que j'étais censé comprendre ?
15 Q. A vrai dire, je répondais à une interruption faite par l'un des
16 conseils, et je vais donc maintenant continuer en vous posant des questions
17 maintenant, Docteur Bagaric.
18 La position, la situation à Mostar est, Docteur Bagaric, c'était une
19 situation qui était très, très, très mauvaise en ce qui concerne le sort
20 des civils. Nous ne sommes pas en désaccord là-dessus, ou le sommes-nous ?
21 M. KOVACIC : [interprétation] J'ai une observation, une objection. Pour ce
22 qui est de cette question, il faut exactement qu'on dise quand. Nous sommes
23 tous les jours témoins ici du fait que le conflit se déroule à une cadence
24 accélérée, comme au cinéma, et que les caractères changent de façon
25 diamétralement opposée au printemps --
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Le document sur lequel s'appuie le Procureur sur les
27 pressions internationales, c'est une réunion du 15 septembre 1993. Donc, la
28 réponse est dans le document. A quoi ça sert d'intervenir ? Bien sûr que la
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1 question est par rapport au 15 septembre 1993, pas par rapport au mois de
2 janvier.
3 M. LAWS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Pourrait-on essayer de progresser, Docteur Bagaric. La situation était
5 de temps à autre en ce qui concerne le moment où les civils de Mostar est
6 étaient séparés de tout, isolés de tout. De temps à autre, le HVO
7 autorisait le passage de matériel ou de denrée. Et avant qu'il y ait des
8 interruptions de qui que ce soit, je parle de la situation telle qu'elle
9 existait au mois de juin 1993, et ce, jusqu'en avril de l'année suivante.
10 C'était bien la situation, Docteur Bagaric ?
11 R. A l'époque, personne ne se sentait trop bien dans Mostar, et personne
12 n'était bien ni du côté est ni du côté ouest. On était moins bien du côté
13 est. Mais en Bosnie centrale en entier, c'était le cas là où il y avait des
14 Croates. Donc c'était une période où, du fait des activités de combat, bien
15 entendu, la situation était loin d'être bonne.
16 Q. La situation était que de temps à autre vous leur envoyiez des
17 médicaments et d'autres denrées, mais que ce n'était pas suffisant, pas
18 suffisant pour modifier en quoi que ce soit la situation à Mostar est.
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais commencer à objecter parce que
20 l'hypothèse c'est qu'il n'y avait pas suffisamment.
21 Où est la base de cela -- il dit -- je demande la question de savoir s'il y
22 avait suffisamment. Où est la base pour parler de cela, alors qu'il y avait
23 de l'aide partout ?
24 M. LAWS : [aucune interprétation]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous intervenez à contretemps. Le Procureur dit
26 c'est sa thèse. Il y avait, concernant les médicaments, il n'y en avait pas
27 assez parce que le HVO bloquait, et cetera. Ça, c'est la thèse du
28 Procureur. Laissez le témoin répondre. Le témoin va dire : Je ne suis pas
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1 d'accord. Laissez-le. Ce qu'il dira a beaucoup plus de poids que ce que
2 vous, vous allez dire.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Il peut poser la question pourvu qu'il y ait
4 une base. Mais quand il n'y a pas de base, de fondement, à ce moment-là
5 c'est purement hypothétique.
6 M. LAWS : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE ANTONETTI : La base, c'est l'acte d'accusation. Tout est dans
8 l'acte d'accusation et dans le mémoire préalable. C'est là-dessus que le
9 Procureur s'appuie. Il n'invente pas les questions. Il pose les questions à
10 partir de ce qu'il a en tête, l'acte d'accusation et son développement dans
11 le mémoire préalable. Donc du coup, il soumet le témoin la question.
12 M. LAWS : [interprétation] Nous perdons beaucoup de temps. Me Karnavas
13 avait déjà dit qu'il n'y avait pas de base. Hier, j'ai regardé les deux
14 documents, 2D 00714 et 2D 00738, dans lesquels ce témoin décrit la position
15 en ce qui concerne les médicaments à l'hôpital de Mostar ouest comme étant
16 satisfaisante, et ça c'est la situation. Ce n'est pas faux. Nous l'avons
17 regardé. Je ne vais pas y revenir encore une fois. Je ne vais pas prendre
18 davantage de temps sur ce point.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Veuillez continuer.
20 M. LAWS : [interprétation]
21 Q. Bien. A un moment donné, voyons donc certaines choses que vous avez
22 faites et certaines choses qui ont été suggérées. Regardons le document P
23 02782.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous n'avez pas répondu
25 néanmoins à la question du Procureur, parce que Me Karnavas a interrompu.
26 Le Procureur a une thèse sur l'histoire de l'approvisionnement en
27 médicaments. Qu'est-ce que vous dites, vous : vous êtes d'accord avec ce
28 qu'il dit ou vous n'êtes pas d'accord ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Etant donné que les organisations
2 internationales, telles que le CICR et les Nations Unies, passaient
3 régulièrement, pour autant que je sache, du côté est de Mostar, ou ils y
4 allaient très souvent, et que du côté est ils ne nous parvenaient pas de
5 demandes de médicaments, j'ai supposé à l'époque qu'ils n'avaient pas de
6 besoin ou pas de nécessité particulière pour ce qui est de se faire fournir
7 des médicaments. C'est mon opinion, parce que nous n'avons plus reçu de
8 requêtes pour ce qui est des médicaments et du matériel médical. Ça, je
9 vous l'affirme en toute responsabilité, plus jamais par la suite.
10 M. LAWS : [interprétation] Pourrait-on voir le document P 0282 [comme
11 interprété], s'il vous plaît, qui est déposé sous pli scellé.
12 Q. Dans ce rapport, nous pouvons voir -- excusez-moi. Nous pouvons
13 voir que l'auteur parle du côté oriental, du côté est, au point numéro 3.
14 Il a eu des contacts avec l'hôpital qui se trouve du côté est et on lui a
15 fourni une liste de médicaments et de denrées qui sont nécessaires
16 d'urgence. Et je cite :
17 "Nous avons fait en sorte, auprès du côté occidental, l'hôpital du côté
18 ouest, d'obtenir demain, demain matin, des médicaments."
19 Vous avez vu cela avec Me Nozica.
20 "Les services sanitaires du HVO ont promis de s'occuper d'une partie
21 de ce matériel, oxygène, et cetera, si le côté est veut bien fournir les
22 bonbonnes vides et les payent (50 bonbonnes, ou bouteilles, valent 2 000
23 deutsche marks)."
24 Puis alors, une partie de l'offre que vous faisiez à ce moment-là
25 était :
26 "Ils ont à nouveau offert de s'occuper de tous les blessés, Musulmans
27 et Croates, y compris les personnes du côté est."
28 Vous pouvez voir cela ?
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1 R. Oui, je le vois.
2 Q. Pouvons-nous maintenant tourner la page, et voir la conclusion que les
3 observateurs de la Communauté économique européenne avaient à ce moment-là,
4 au point 6 : "Evaluation." Vous voyez cela ?
5 R. Je vois.
6 Q. "Pour le moment, le transport des blessés du côté est au côté ouest est
7 totalement impossible en raison des tireurs isolés. Si l'hôpital du côté
8 est ne reçoit pas le matériel et les médicaments nécessaires, il va être
9 fermé."
10 N'est-ce pas ? Puis nous avons continué :
11 "Hier, le nettoyage ethnique sur la rive ouest, pour ce qui est des
12 familles musulmanes par le HVO, s'est poursuivi. De forte protestation
13 devrait être exercée."
14 Donc, c'était le point de vue de cet homme, de cette personne, que l'offre
15 que vous faisiez était quelque chose qui était tout simplement impossible,
16 parce que les gens ne voulaient pas aller à l'est de crainte de se faire
17 tirer dessus par des tireurs isolés; c'est bien cela ? C'était la façon
18 dont il appréciait la situation. C'était la situation, en fait, sur le
19 terrain à Mostar est, telle que vous l'avez vue, comme vous comprenez
20 qu'elle était en juin 1993. Etait-ce bien cela ?
21 R. Je répète qu'au mois de juin, tant du côté est que du côté ouest de
22 Mostar, c'était une situation de guerre, et personne ne pouvait garantir à
23 qui que ce soit telle ou telle autre chose. Mais je maintiens ce que j'ai
24 dit, à savoir que la proposition ou l'offre que nous avions fait, Monsieur
25 le Président, Messieurs les Juges, pour ce qui est de l'hôpital, si vous
26 vous en souvenez, nous avions proposé que la Croix-Rouge internationale
27 vienne dans notre hôpital, que la FORPRONU protège l'hôpital et qu'on fasse
28 de l'hôpital une zone ex-territoriale. Si ça avait été fait, il n'y aurait
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1 pas eu de victimes, et tous ceux qui auraient été amenés auraient été
2 soignés dans des conditions de sécurité la plus complète. Je ne sais pas
3 pourquoi personne n'y a répondu.
4 Mme NOZICA : [interprétation] Excusez-moi. Je voulais juste dire pour que
5 cela rentre au compte rendu d'audience que je n'ai pas présenté ce document
6 au témoin ni ne l'ai interrogé à ce sujet, bien que mon confrère le dise.
7 Je souhaite que ça soit versé au compte rendu.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Nozica.
9 M. LAWS : [interprétation] Tout à fait d'accord avec cette correction.
10 Toutes mes excuses.
11 Q. Examinons le prochain document qui est également sous pli scellé et qui
12 aborde le thème dont vous avez parlé, P 02923. Il s'agit d'un autre rapport
13 de la Mission d'observation de la CE du 24 juin 1993, et qui, au point 5,
14 fait état d'une discussion que vous avez eue avec les observateurs de la CE
15 au sujet d'une proposition d'échange de médecins avec l'hôpital de la rive
16 est. Est-ce que vous voyez cela ?
17 R. Oui, je le vois.
18 Q. Selon ce document, quelqu'un, pas vous, avait proposé un échange de
19 médecins avec l'hôpital du côté est, et vous avez dit non, que ce ne serait
20 pas accepté :
21 "…tant que nous n'avons pas réalisé la liberté de circulation des
22 médecins du HVO qui doivent travailler dans des hôpitaux de l'ABiH à
23 Travnik, Konjic et Zenica."
24 Est-ce que vous voyez cela ?
25 R. Oui, je vois ce qui est écrit ici.
26 Q. Merci. Ensuite, vous proposez une autre option qui est la proposition
27 dont vous avez parlé selon laquelle un hôpital distinct devrait être créé
28 qui puisse aider tout le monde, n'est-ce pas ? Ouvrir l'ancien hôpital de
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1 Mostar, utiliser l'ancien hôpital pour tout le monde, Musulmans, Croates,
2 et cetera, sous surveillance internationale. C'est cela votre proposition,
3 n'est-ce pas ?
4 R. Messieurs les Juges, il s'agit d'un document particulièrement
5 important, et je voudrais que vous me permettiez de le commenter très
6 brièvement, car c'est très important.
7 Au point 3, il est écrit :
8 "M. Ivan Bagaric, adjoint du responsable des services médicaux." Donc,
9 j'étais adjoint, et je ne me rappelle pas de cette réunion tout à fait
10 concrètement. Mais cela m'étonnerait que je n'y ai pas été présent. Nous
11 avions des contacts assez quotidiens avec les représentants de la
12 communauté internationale. Je veux bien croire que c'était bien moi qui
13 étais présent là, puisque ce document est signé. Mais ce qui est important
14 pour moi, c'est ce qui est au point 5. On y lit : Bagaric a déclaré que
15 cela ne serait pas accepté tant que la liberté de mouvement ne serait pas
16 assurée pour les médecins du HVO. Mais ici, en toute responsabilité,
17 j'affirme qu'il est impossible que j'aie prononcé une telle phrase.
18 Qu'aurais-je pu dire à ce moment-là ? Lorsque nous avons proposé que
19 nos médecins en provenance de la rive occidentale se rendent sur la rive
20 orientale, personne n'a accepté d'y aller. Personne n'a voulu s'y rendre,
21 pas même les médecins musulmans, les médecins qui étaient des Bosniens.
22 Eux-mêmes ne voulaient pas y aller. C'est pourquoi Ivan Bagaric, au cours
23 de la guerre, n'a jamais forcé quiconque à faire quoi que ce soit. Je n'ai
24 jamais fait cela.
25 Il est vrai que j'ai émis cette demande en raison du manque de
26 personnel médical, en raison du manque de médecins. Je vous avais dit déjà
27 que les Musulmans et les Bosniens disposaient d'un beaucoup plus grand
28 nombre de médecins à Zenica, à Tuzla, à Sarajevo, car il s'agissait de
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1 centres médicaux très importants. Alors que de notre côté, je parle ici des
2 médecins, nous leur demandions de pouvoir sortir de ces zones-là, or les
3 Bosniens ne le permettaient pas.
4 Moi, j'ai demandé au CICR de permettre à ces personnes de sortir, car
5 en ce cas-là nous aurions reçu une aide importante; or les Bosniens
6 n'auraient rien perdu par la même occasion. Ici, se trouve également la
7 proposition que j'ai émise allant dans le sens de l'établissement d'un
8 hôpital en plein centre-ville. Mais en toute responsabilité, j'assume ici
9 qu'il ne peut absolument pas s'agir d'ouvrir un hôpital, comme c'est
10 indiqué. Pour quelle raison ? Car cet hôpital a déjà été ouvert, il existe
11 déjà. C'est un hôpital où nous avons travaillé pendant toute la durée de la
12 guerre, et cela sur la ligne même du front. C'était là même le cœur de la
13 proposition que j'ai faite. Si nous y travaillons, les autres peuvent y
14 travailler aussi. Si nous soignons nos patients là-bas, les autres peuvent
15 le faire avec les leurs aussi. Si nous garantissons les conditions de
16 travail pour nos médecins, alors la communauté internationale peut le faire
17 également, conformément à ma proposition.
18 Merci, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
20 M. LAWS : [interprétation]
21 Q. La personne avec laquelle vous étiez en contact à ce sujet a déposé
22 devant cette même Chambre et s'appelle M. Van den Grinten, un officier
23 néerlandais. Vous souvenez-vous de lui ?
24 R. Je ne me souviens pas de lui, mais s'il a déposé, je suis évidemment
25 disposé à croire qu'il s'agit bien de ce document et que c'est de cela
26 qu'il s'agit. C'est tout à fait possible, mais je ne me souviens pas de
27 cette personne.
28 Q. En ce qui concerne votre proposition de créer un hôpital commun pour
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1 les deux parties, il a dit que cette proposition n'était pas réaliste. Pas
2 réaliste, c'est ce qu'il a dit. Je cite à partir du compte rendu
3 d'audience, la page 21 168.
4 R. Je peux très brièvement commenter cela ? C'est très important.
5 Q. Bien entendu. Vous pouvez.
6 R. Je sais qu'il est tout à fait possible que cette personne ait déclaré
7 cela, et qu'il ait fait ce commentaire-là, et émis ce rapport. Je sais
8 également qu'il y a longtemps, un homme a dit qu'on lui a dit de se
9 retourner et puis quelqu'un lui a tiré dans le dos et l'a tué. Je sais que
10 la personne qui a décidé d'organiser la première mission sur la lune, on
11 lui a également dit que c'était pas possible. Alors, peut-être que moi
12 aussi j'étais fou, mais c'était parce que j'étais un petit peu en avance.
13 J'étais sur la ligne de front.
14 Et je m'excuse pour la nature des propos que j'ai pu tenir hier
15 lorsque nous avons parlé de politique. Mais je parle de choses que je
16 connais, je sais de quoi je parle. Et ce que j'ai dit devant les Juges de
17 cette Chambre, je l'ai dit en toute responsabilité. C'était une évaluation
18 particulièrement mauvaise de la part de cet officier.
19 Q. [hors micro] -- de front et qu'il était impossible de le sécuriser.
20 R. Non, excusez-moi, non, Monsieur. Messieurs et Madame les Juges, c'est
21 précisément là qu'est le problème. Si cette proposition avait été acceptée,
22 nous aurions joui d'une sécurité pleine et entière là-bas, car la partie
23 bosnienne n'aurait plus pu la prendre pour cible. Vous savez à quoi
24 ressemble la rive est. Si vous prenez le rapport de M. Goldstein, il était
25 membre de l'organisation internationale pour la prévention contre la guerre
26 nucléaire, organisation qui a été récompensée par le Prix Nobel. Il a donc
27 décrit l'apparence de cet hôpital et vous verriez à quel point cet hôpital
28 avait été complètement, enfin, quasiment complètement détruit. Les
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1 hostilités, si la proposition avait été acceptée, auraient immédiatement
2 cessé pendant un certain temps. La situation aurait changé. J'avais le
3 soutien de M. Stojic et des généraux ici présents dans ce sens. Mais
4 l'autre partie s'y est opposée et --
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne veux pas intervenir pour ne pas perdre de
6 temps. Mais j'ai noté qu'hier et aujourd'hui, vous mettez principalement,
7 vous, l'accent - c'est la première fois que nous entendons cela - sur le
8 fait que d'après vous, si on avait réglé le problème médical, les
9 hostilités se seraient arrêtées. Et vous, vous liez tous les enchaînements
10 au fait qu'on n'ait pas trouvé une solution pour le problème médical.
11 C'est une thèse qui peut être vraie, mais nous ne l'avons pas entendu
12 de personne. C'est vous qui nous le dites. Vous avez peut-être raison, je
13 ne dis pas que vous avez tort. Mais c'est intéressant ce que vous dites.
14 Bien. Je voulais que ça soit inscrit au transcript pour qu'on saisisse
15 parfaitement ce que vous essayez de développer.
16 Monsieur le Procureur.
17 M. LAWS : [interprétation] Merci.
18 Q. Tournez la page dans ce document. Examinez la toute dernière phrase de
19 la dernière page sous le titre "Evaluation."
20 "Nous estimons que le HVO n'est pas disposé à s'occuper d'aide humanitaire
21 pour la rive orientale."
22 N'est-ce pas ? Un moment, un moment --
23 R. De quel document s'agit-il ?
24 Q. Ce même document que nous avons vu, où il est question de votre
25 proposition d'un hôpital commun. Sur ce même document. C'est le P02923.
26 R. 2923. C'est ça ?
27 Q. C'est cela.
28 R. Excusez-moi.
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1 Q. Pas de problème. C'est toujours difficile de s'y retrouver. Je parle de
2 la dernière page de ce document que nous venons d'examiner. Et il y a une
3 phrase sur laquelle je souhaite attirer votre attention à la fin de ce
4 document. Donc la toute dernière phrase de la dernière page de ce document,
5 est-ce que vous avez cela ?
6 R. Je l'ai trouvée.
7 Q. Et je cite :
8 "Nous estimons que le HVO n'est pas disposé à s'occuper de l'aide
9 humanitaire pour la rive orientale."
10 Est-ce que vous voyez cela ?
11 R. Oui, je vois cela. C'est manifestement ce qui est écrit, là. Cependant,
12 j'ignore sur quelles bases il est parvenu à cette conclusion.
13 Q. Je vais vous dire --
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la traduction, je vois le terme anglais "we
15 think." Dans la traduction française, l'interprète a traduit "Nous
16 estimons." Alors, il y a une nuance entre "Nous pensons" et "Nous
17 estimons." Quand nous pensons, c'est une hypothèse. Quand nous estimons,
18 c'est une conclusion à partir d'une situation. Alors, le terme anglais "We
19 think", dans quel sens le rédacteur a écrit cela ? Est-ce qu'il a dit "Nous
20 pensons" à titre d'hypothèse, ou "Nous concluons" à titre d'estimation ?
21 Voilà. Alors, je voulais que ça soit au transcript pour éviter toute
22 interprétation divergente.
23 M. LAWS : [interprétation] Je vais vous aider de la façon suivante. A la
24 page 21 055 du compte rendu d'audience, le témoin a dit quelque chose. M.
25 Stringer a posé une question, et il dit cette phrase à la ligne 6. Et
26 alors, M. Stringer à la ligne 6 disait dans cette phrase, ou dit dans cette
27 phrase que :
28 "Nous pensons que le HVO n'est pas disposé à s'occuper, et cetera."
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1 Et la réponse c'est :
2 "Pour les mêmes raisons que j'ai expliquées. J'ai expliqué qu'avec
3 une telle proposition, cela signifie que vous n'avez pas véritablement la
4 volonté de résoudre le problème sur le plan local."
5 Et je pense que M. Bagaric a compris cette explication.
6 R. Excusez-moi, mais je ne comprends pas. Je ne comprends pas cette
7 explication car elle est illogique. Excusez-moi, sincèrement.
8 Q. Je vais formuler les choses différemment. Lorsque les gens avaient
9 besoin d'aide à Mostar est, vous avez proposé, vous avez dit qu'ouvrir un
10 nouvel hôpital n'aiderait personne à obtenir de l'aide de quelque nature
11 que ce soit. C'est ça la situation, parce que ce n'était pas réaliste, et
12 vous avez utilisé la comparaison que quelqu'un veut se rendre sur la lune,
13 mais ça dépend de la technologie que vous avez, de l'époque à laquelle vous
14 vivez. Donc, dire cela en été 1993 était irréaliste.
15 Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Président,
16 avec votre permission, juste une objection car mon confrère, M. Laws,
17 utilise ce concept de "nouvel hôpital", or le témoin nous a dit à plusieurs
18 reprises qu'il s'agissait d'un établissement déjà existant, d'un hôpital au
19 sein duquel des patients étaient déjà soignés, et que l'objet de la
20 proposition était de transformer cet établissement déjà existant en hôpital
21 commun. Je voulais juste apporter cette correction. Merci.
22 M. LAWS : [interprétation]
23 Q. Vous avez compris, Docteur Bagaric. Votre proposition n'était pas de
24 nature à aider quiconque. Il était impossible que les deux parties créent
25 un hôpital de ce type et le dire n'allait aider personne, n'est-ce pas ?
26 R. Je suis totalement en désaccord avec cela. Je ne me lancerai plus dans
27 des justifications pour que l'on ne perde pas de temps.
28 Q. Très bien. Je vais vous demander à présent de prendre le document P
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1 04346. C'est un autre document sous pli scellé qui fait état d'une réunion
2 entre la mission d'observation de la CE et Bozo Raguz. Est-ce que vous le
3 connaissiez ?
4 R. M. Bozo Raguz, je ne le connais pas et il ne représentait absolument
5 rien d'un point de vue aussi bien militaire que politique, à mon sens. Je
6 ne connais pas cette personne. Je pense que cette personne n'existe pas et
7 qu'il y a ici erreur sur le nom et le prénom.
8 Q. Il existe. C'est un officier de liaison du HVO et dans les autres
9 documents que nous avons, l'on évoque son grade de colonel, si ça peut vous
10 aider. Mais en tout état de cause, imaginons, partons du principe qu'il y a
11 quelqu'un qui répond à ce nom, qui semble avoir été professeur de
12 mathématiques avant la guerre, et semble souhaiter apporter son aide et à
13 donner une leçon d'histoire à la personne qu'il a rencontrée à Mostar. Il
14 avait également quelque chose à dire sur la question de l'aide humanitaire
15 et je voulais savoir si vous avez entendu des membres du HVO tenir de tels
16 propos à Mostar lors de l'été, automne, hiver 1993.
17 Si vous vous reportez à la page 2 du B/C/S, également page 2 de
18 l'anglais au point (d).
19 Est-ce que vous avez trouvé ce paragraphe ?
20 R. Oui, je l'ai trouvé.
21 Q. Sur les convois humanitaires, il a dit que M. Prlic était à présent
22 responsable de la politique et ensuite :
23 "…comment peut-on permettre à de l'aide humanitaire d'être acheminée
24 vers l'agresseur ?"
25 Vous voyez cela ?
26 R. Oui, je vois ce qui est écrit ici.
27 Q. De toute apparence, c'est un officier de liaison du HVO qui exprime un
28 point de vue très différent du vôtre. Est-ce que vous êtes d'accord ?
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1 R. Excusez-moi, Messieurs les Juges, mais je ne peux vraiment pas
2 commenter ni ce document au sujet duquel j'ignore tout ni ce que cette
3 personne aurait soi-disant déclaré. En ce qui me concerne, Bozo Raguz, je
4 ne suis pas au courant de son existence. Il n'existe pas. Je ne crois pas
5 qu'il y ait pu y avoir quelqu'un qui aurait été chargé là-bas d'une mission
6 importante et dont je n'aurais pas eu connaissance. Je ne me rappelle
7 vraiment pas du moindre Bozo Raguz. Et ensuite il affirme que Prlic aurait
8 soi-disant déclaré une telle chose. Mais je pense que Prlic est
9 suffisamment intelligent pour ne pas proférer de telles bêtises pendant la
10 guerre.
11 Q. Vous voulez dire suffisamment intelligent pour ne pas dire quelque
12 chose aussi stupide que cela. Dans quel contexte est-ce que vous voulez
13 dire cela ?
14 R. Ce que je veux dire, c'est qu'un convoi humanitaire au sein d'opération
15 de soutien à la population civile représentait quelque chose dont nous
16 aussi nous avions besoin en Bosnie centrale. Les Musulmans en avaient
17 besoin du côté est, et il s'agissait d'un sujet en matière duquel il n'y
18 aurait absolument pas eu d'opposition s'il y avait eu accord des deux
19 parties. Cela aurait été dans un bénéficie mutuel. Or malheureusement, cela
20 n'a pas été le cas. Je m'excuse. Nous n'avons pas le temps. J'aurais pu
21 vous expliquer comment nous étions organisés. Nous avions ce chemin blanc,
22 ce convoi humanitaire à destination de la Bosnie centrale qui a été
23 organisé afin d'empêcher que les Croates disparaissent purement et
24 simplement de Bosnie centrale. D'un point de vue militaire, ils ne
25 pouvaient plus tenir leurs positions. Nous avons donc organisé un convoi
26 afin de leur venir en aide, mais également pour attirer l'attention du
27 monde sur les conditions difficiles et malheureuses dans lesquelles ils
28 vivaient là-bas. Et c'est la même chose que l'on trouvait du côté est de
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1 Mostar avec les Bosniens et les Musulmans, à ceci près que pour les
2 Croates, personne n'était au courant; alors que de deux côtés, il y avait
3 des souffrances.
4 Q. [Hors micro] -- avec vos propos selon lesquels vous nous dites que les
5 deux parties ont souffert. Excusez-moi de vous dire que nous le savions.
6 Mais vous disiez à la ligne 15 que Prlic était suffisamment intelligent
7 pour ne pas dire quelque chose d'aussi stupide. Qu'est-ce que vous voulez
8 dire par cela, dire qu'il était suffisamment intelligent pour ne pas dire
9 quelque chose d'aussi stupide ?
10 R. Je pense qu'il est idiot de mettre des entraves à un convoi. On parle
11 ici d'un convoi humanitaire, donc d'une opération de soutien à la
12 population civile, et je pense que c'est de cela qui est bête, stupide.
13 Q. Bien sûr, nous n'allons pas disconvenir de cela mais les sentiments
14 exprimés par M. Raguz, dont vous doutez de l'identité et des sentiments
15 exprimés par lui, vous l'avez déjà dit --
16 R. Je n'ai jamais entendu parler de lui.
17 Q. Vous dites : "Comment peut-on permettre à l'aide humanitaire d'être
18 acheminée chez l'agresseur", est-ce que c'est un sentiment dont vous aviez
19 entendu parler, que vous avez entendu exprimer où que ce soit par n'importe
20 quel membre du HVO ?
21 R. Excusez-moi. Mais est-ce que vous pourriez répéter la question, je n'ai
22 pas compris. Je n'étais pas assez concentré, excusez-moi.
23 Q. Bozo Raguz - vous n'avez jamais entendu parler de lui - exprime l'idée
24 --
25 R. Jamais.
26 Q. Effectivement nous en sommes d'accord. Vous n'en avez jamais entendu
27 parler, mais ça ne veut pas dire qu'il n'existe pas.
28 Il estime que c'est une erreur de permettre, de laisser passer l'aide
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1 humanitaire chez l'agresseur. Comment cela était-il possible ? Et je
2 voudrais savoir si la situation était telle que c'était une idée
3 généralisée, une opinion généralisée auprès des membres du HVO en ce qui
4 concerne Mostar est ?
5 R. Est-ce que c'était un point de vue qui était un point de vue général au
6 sein du HVO du côté est de Mostar ? Je ne comprends pas. Je pense que vous
7 avez demandé si c'était le point de vue général du HVO à l'égard du côté
8 est de Mostar.
9 Q. Oui, c'est bien cela.
10 R. Je ne suis pas sûr de bien comprendre ce dont il s'agit, mais je crois
11 que cette affirmation attribuée à quelqu'un que moi je ne connais pas ne
12 peut pas être considérée comme pertinente ici et être généralisée à
13 l'ensemble du HVO. C'est le seul commentaire que je peux faire car je n'ai
14 pas la moindre idée à ce sujet.
15 Q. Ce sera aux Juges de trancher pour savoir si c'est pertinent. La
16 question qui vous est posée consiste à savoir si c'est un avis que vous
17 avez entendu exprimer par les membres du HVO que vous connaissiez, que vous
18 côtoyiez au quotidien à Mostar est.
19 M. LAWS : [interprétation] Moi, j'ai posé la question plusieurs fois. S'il
20 y avait une vraie objection, elle aurait été formulée plus tôt. Est-ce que
21 le témoin pourrait répondre et à ce moment-là, on donnera la parole au
22 conseil de la Défense; parce que sauf votre respect, parfois le témoin
23 s'oriente à partir de ce qui a été dit par les conseils. Ce n'est pas une
24 manière correcte de procéder. Pour le moment, j'ai été très patient. Je lui
25 laisse cette dernière occasion de répondre à la question. Monsieur le
26 Président, je vous invite à lui demander de répondre.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, attendez Maître Nozica, que le témoin
28 réponde. La question, elle n'est pas compliquée. Vous pouvez répondre.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que ce n'était pas le point de vue le
2 plus répandu. Il y a certainement eu des personnes qui avaient leur propre
3 raison, leur propre frustration, qui avaient subi des pertes et qui ont
4 conçu une grande hostilité envers l'autre partie, mais ce n'était pas le
5 point de vue dominant.
6 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, je
7 voulais simplement attirer l'attention sur la ligne 21 et la ligne 22 de la
8 page 23 du compte rendu d'audience, car cela nous montre que le témoin a
9 déjà répondu exactement de la même manière dont il vient de le faire à
10 cette question.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je pense qu'il faut peut-être
12 passer à un autre sujet. Mais, je tiens à appeler votre attention, Monsieur
13 le Procureur, sur l'interprétation que vous donnez aux propos de M. Raguz,
14 tels qu'ils figurent dans le document au paragraphe (d) du petit (2) sur
15 les activités politiques. Indéniablement, M. Raguz dit que M. Prlic a en
16 charge la politique. Donc ça, c'est un élément. Et Raguz rajoute, et, le
17 "we", le nous, il ne dit pas c'est Prlic, il dit nous; nous, c'est peut-
18 être lui, les Croates, Prlic, on ne sait pas. Vous êtes bien d'accord ?
19 M. LAWS : [interprétation] Tout à fait d'accord.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Le "we" peut englober Prlic, peut englober Raguz,
21 mais peut englober d'autres. Voilà.
22 M. LAWS : [interprétation] Tout à fait d'accord. Il ne s'agissait pas du
23 tout que j'essayais d'épingler Prlic. Ici, le témoin a d'ailleurs dit que
24 Prlic n'était pas suffisamment stupide pour dire quelque chose de ce type à
25 ce moment-là.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Le témoin a également dit que Prlic n'était
27 pas de type de personne à avoir ce point de vue.
28 M. LAWS : [interprétation] Il faudrait que vous vous reportiez au compte
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1 rendu pour voir ce qui a été dit.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] A partir du moment où vous caractérisez le
3 témoignage, à ce moment-là, moi aussi je le caractérise, parce que c'est
4 cela qu'a dit le témoin.
5 M. LAWS : [interprétation] Mais je pense que ce n'est pas --
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde est d'accord pour considérer que le
7 "we", le "nous" peut englober différentes personnes sans qu'on sache
8 exactement qui. Ça, tout le monde est d'accord là-dessus.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] En général, je suis assez d'accord,
11 Président. Mais je voulais indiquer clairement, peut-être que ça aiderait
12 si les interprètes lisaient ou si le témoin lisait en croate ce paragraphe
13 (d) qui dit que M. Prlic est désormais chargé de -- Je voudrais vous
14 demander, Monsieur Bagaric, de lire en croate le paragraphe (d), à ce
15 moment-là, on demandera aux interprètes d'interpréter ce passage en suivant
16 le texte original en croate.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Au (d):
18 "Au sujet des convois humanitaires, il a dit que M. Prlic était désormais
19 chargé d'une position à prendre à ce sujet 'pour le comment permettre le
20 passage des convois humanitaires à l'intention des agresseurs'."
21 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, ici l'original c'est
22 ce qui est dit en anglais et non pas ce qui est en croate. Il faut faire la
23 différence. En anglais, il y a "vous, nous" et en croate, il n'y a pas
24 cela. Donc il faut prendre lecture de l'anglais. Excusez-moi.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Le texte qui fait foi, c'est le texte anglais.
26 Bien, Monsieur le Procureur, passez à autre chose.
27 M. LAWS : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
28 Q. Nous pouvons laisser maintenant ceci, Docteur Bagaric. La situation à
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1 Mostar est, nous en sommes d'accord, était très mauvaise, très mauvaise qui
2 causait des souffrances. Nous ne sommes pas en désaccord sur ce point.
3 R. Moi, je n'ai pas été du côté est de Mostar, jamais. Cependant, je sais
4 que ça a été plutôt dur, pénible. Ça n'a été agréable pour personne. Et il
5 en allait de même pour Mostar en entier. Ce n'était pas peut-être pareil,
6 mais c'était dur pour tout le monde.
7 Q. Les conditions sur place ont été réalisées, vous dirais-je, comme étant
8 le résultat des actes du HVO qui ont expulsé des Musulmans de la rive
9 ouest. Vous êtes d'accord avec cela ?
10 R. Il y a deux affirmations que vous êtes en train de faire. D'abord, je
11 vais répondre aux deux. D'abord, vous avez dit --
12 Q. Le simple fait d'expulser des Musulmans de la rive ouest. Vous êtes
13 d'accord, ça a eu lieu, n'est-ce pas ?
14 R. C'est arrivé suite à la guerre, au combat, suite à cet enfer, et ça
15 s'est passé du côté est aussi pour ce qui est des Croates. Donc, ce qui
16 s'est passé d'un côté s'est passé de l'autre, malheureusement; et dans tout
17 Mostar, s'était mauvais pour tout un chacun. C'est la raison pour laquelle
18 il fallait mettre un terme à la guerre.
19 Mme NOZICA : [interprétation] Je suis me sens très mal à l'aise pour ce qui
20 est de faire cela pour la première fois de ma vie dans un prétoire, et ça
21 fait une demi-heure que je me retiens. Je demanderais à mon confrère, M.
22 Scott, je vois une communication, je vois des sourires, un rire à chaque
23 réponse du témoin, et je crois que ce n'est pas correct de placer le témoin
24 dans une situation. Je me suis sentie mal à l'aise pour ce qui est de
25 réagir, mais je vois ce type de communication par signes et je crois qu'il
26 faudrait y mettre un terme. Dans le cas précédent, je crois que c'était M.
27 Scott qui avait interrogé le témoin, c'est quelqu'un qui a du tempérament,
28 qui a réagi de façon plutôt mouvementée lorsque je l'ai interrogé moi-même
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1 --
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez qu'à me regarder. Ne regardez personne,
3 écoutez avec vos oreilles les questions, et comme ça il n'y aura aucun
4 problème.
5 Bien. Monsieur le Procureur.
6 Monsieur Bagaric, regardez-moi. Ne regardez pas M. Scott.
7 M. LAWS : [interprétation]
8 Q. Ayant expulsé les Musulmans de l'ouest vers l'est, les HVO ont fait le
9 nécessaire pour que les itinéraires d'approvisionnement soient coupés.
10 Etes-vous d'accord avec cela ?
11 R. Je ne suis pas d'accord. Ça s'est passé du fait de la guerre.
12 Q. Puis ils ont pilonné sur ces gens sur ce secteur. C'est ça la vérité,
13 n'est-ce pas ? Ils ont déployé des tireurs contre ces gens, n'est-ce pas ?
14 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je voudrais demander à l'accusé de
15 ne pas faire des commentaires à haute voix. S'il veut s'exprimer, il peut,
16 si M. Praljak veut parler.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous aurez l'occasion d'intervenir
18 longuement là-dessus, donc ce n'est pas la peine à ce stade de dire quoi
19 que ce soit. Le Procureur soutient cette thèse. Vous, vous en tenez une
20 autre. Donc ce n'est pas la peine d'aller engager un débat maintenant.
21 Alors même que dans quelques jours, vous serez face à moi, et à ce moment-
22 là tout ceci réapparaîtra. Qui plus est, c'est un médecin qui témoigne.
23 Peut-être que les aspects militaires et autres le dépassent aussi. Voilà.
24 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge
25 Antonetti. Je ne voulais pas élever une objection. Vous savez que lorsque
26 j'ai posé des questions, j'ai, avec beaucoup d'attention, essayé de
27 délimiter les choses pour ce qui est des questions à poser aux uns ou aux
28 autres.
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1 Or, ici le médecin est censé apporter des explications au sujet des
2 snipers et est censé expliquer si quelqu'un a expulsé quelqu'un d'autre ou
3 pas.
4 Alors ça n'a pas été évoqué à l'interrogatoire principal. Cet homme-
5 ci ne saurait avoir quelque idée que ce soit de la chose.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, continuez.
7 M. LAWS : [interprétation]
8 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant revenir là où nous avions commencé,
9 c'est-à-dire le fait que vous êtes un homme politique et un médecin. Je
10 vais vous demander de regarder le document P 06379 dans le classeur qui est
11 devant vous.
12 R. Oui.
13 Q. Voici un extrait du journal officiel du 3 novembre 1993, et la décision
14 de nommer une commission pour enquêter sur les crimes de guerre dans le
15 territoire de la République croate de l'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, je vois ce document.
17 Q. Bien. Est-ce que j'ai compris que vous disiez que vous n'étiez pas sûr
18 si Ivan Bagaric, au numéro 6, si c'était bien vous, ou y ayant réfléchi
19 maintenant, est-ce que vous savez ?
20 R. Je me suis penché sur la question, Monsieur le Procureur. Mais on dit
21 ici Ivan Bagaric, alors si c'est dit ici, ce n'est dit que sur le papier.
22 Jamais personne ne m'a remis un document à cet effet, et jamais je n'ai
23 participé aux travaux de quelque commission de ce type que ce soit.
24 Personne ne m'a d'ailleurs mis au courant de l'existence de cette
25 commission, et ici, devant ces Juges de la Chambre, je l'affirme en toute
26 responsabilité. Si je puis vous aider, si vous me permettez de le faire, je
27 dirais de quoi il peut s'agir.
28 On voit Ivan Bagaric. Il y a un collègue à moi qui s'appelle Ivan Sarac, et
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1 très souvent on nous a confondus. On était proches. Nous sommes tous deux
2 médecins, et nous avons tous deux été députés au parlement de Sarajevo. Lui
3 était chargé de la santé publique. Moi, j'étais chargé de la santé
4 militaire. On a coopéré. Il se peut qu'il y ait eu une erreur de frappe
5 ici. Par conséquent, là je n'en sais vraiment rien. Enfin, c'est la
6 première fois. Je l'ai déjà vu auparavant, mais je l'ai vu pour la première
7 fois quand je suis venu ici. Je ne l'ai pas vu auparavant, et je vous le
8 répète à présent une fois de plus.
9 Q. Au numéro 9, il y a M. Kostroman. C'est l'homme qui, nous l'avons vu,
10 faisait le procès-verbal de cette réunion à Tomislavgrad que nous avons
11 examinée hier à partir de 2 heures et quart, quelqu'un que vous connaissiez
12 depuis longtemps.
13 R. Non, il n'en est pas ainsi. Je ne connaissais pas M. Kostroman de
14 longue date et je ne le connaissais pas bien. Il n'aurait pas signé ce PV,
15 ni à l'époque ni à présent. C'était une bêtise. Même si c'est de Kostroman,
16 c'est quand même une bêtise, si tant est que cela venait de lui.
17 Q. C'était là donc une commission qui avait été constituée pour enquêter
18 sur des crimes contre des Croates, et elle ne s'intéressait qu'à des crimes
19 contre les Croates, n'est-ce pas ?
20 M. KARNAVAS : [interprétation] J'objecte à cela, Monsieur le Président. Il
21 est en train de dire qu'il n'avait pas vu le document et qu'il ne savait
22 rien concernant cette commission, qu'il n'avait pas participé à la
23 commission. Donc maintenant le fait de poser des questions à ce sujet,
24 c'est une absurdité, une perte de temps.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Ou vous avez des éléments qui permettent de
26 contredire ce que dit le témoin, le témoin a répondu à Me Nozica en disant
27 qu'il n'était pas du tout au courant de cette commission, qu'il n'en avait
28 jamais entendu parler, et qu'il a découvert ce document. Donc ou vous avez
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1 des éléments qui vous permettent de dire il ment, et à ce moment-là vous
2 les lui montrez, ou vous passez à autre chose.
3 M. LAWS : [interprétation] Indépendamment du fait que son nom s'y trouve
4 ainsi que quelqu'un qui est au numéro 9 qui était quelqu'un qu'il
5 connaissait sur le plan politique pendant plus de deux ans, indépendamment
6 du fait que je n'ai rien pour démontrer qu'il s'agit bien de lui, nous
7 faisons valoir que c'est une base parfaitement suffisante pour nous de dire
8 -- enfin, qu'on peut lui demander, lui poser des questions comme si c'était
9 lui.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, s'il a dit qu'il n'en
11 savait rien, quel est le but de poser la question à ce moment-là ? Il n'y a
12 pas que cela, mais en fait c'est allé très loin par rapport à ce que dit le
13 document. Comment est-ce qu'il pourrait faire des commentaires à ce sujet ?
14 C'est une absurdité. Dans aucun prétoire -- je pense on autoriserait ceci,
15 par exemple, au Royaume-Uni. Ce n'est certainement pas autorisé aux Etats-
16 Unis, et nous avons un système de "common law." C'est tout à fait absurde.
17 M. LAWS : [interprétation] Ce n'est pas du tout une absurdité. Si j'ai un
18 document avec le nom de Michael Karnavas dessus, je peux demander à M.
19 Michael Karnavas certaines questions. Je n'aurais pas à y renoncer dès
20 qu'il aurait dit : Ça n'est pas moi. Sinon -- sinon, les Procureurs --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde est d'accord vous pouvez poser des
22 questions parce qu'il y a le nom sur ce document qui montre qu'il faisait
23 en droit partie de la commission. Maintenant, la question se pose : a-t-il
24 participé à des réunions de cette commission ? Il a dit non. Je vais vous
25 donner un autre exemple.
26 Il y a un Juge de ce Tribunal qui il y a quelques semaines a été élu Juge à
27 la Cour pénale internationale, et ce Juge n'a pas été installé à la Cour
28 pénale internationale. Ce n'est pas parce qu'il y a un nom sur un document
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1 que pour autant l'intéressé a pris ses fonctions. Lui, peut-être que son
2 nom c'est certainement lui d'ailleurs, qui est sur ce document, mais s'il
3 n'a pas été dans une réunion de cette commission, qu'est-ce que vous voulez
4 qu'il dise de plus ? A moins que vous ayez des documents, et à ce moment-
5 là, montrez-les.
6 M. LAWS : [interprétation] Bien sûr, je vais suivre ce que vous dites,
7 Monsieur le Président, mais le juge en question évidemment serait au
8 courant de sa nomination. Ceci est publié au journal officiel avec d'autres
9 noms, donc il s'agit là de quelqu'un que le témoin connaît. Tout ce que je
10 voudrais c'est examiner avec lui s'il s'agit bien de lui ou non. Nous en
11 avons déjà parlé hier, et il y avait quelques doutes sur le point de savoir
12 s'il était là à Tomislavgrad.
13 Mme NOZICA : [interprétation] Je m'excuse. Mais la question a été celle de
14 savoir si l'objectif de la commission était d'enquêter sur les crimes de
15 guerre commis à l'égard des Croates. Alors comment voulez-vous qu'un homme
16 sache quel est l'objectif d'une commission s'il n'est pas intervenu dans
17 cette commission ? C'est ça la question, c'est pour cela qu'on est
18 intervenus, et depuis c'est devenu dénué de sens. On peut connaître cette
19 personne-là, mais on peut en connaître d'autres.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous aviez eu connaissance de ce document
21 paru à la gazette officielle ? Voilà, c'est tout.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. C'étaient des temps durs. Je
23 n'ai pas vu de gazette officielle en Herceg-Bosna. Je ne l'ai pas réétudiée
24 non plus, je vous affirme en toute responsabilité que jamais on ne m'a
25 remis ce document. Ici, probablement est-il question d'un autre homme si
26 tant est que cette commission a bel et bien existé. Mais moi, personne ne
27 m'a jamais mis au courant et je vous l'affirme pour sûr ici. Je n'ai pas
28 non plus été membre de cette commission, je n'en ai jamais entendu parler.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
2 M. LAWS : [interprétation]
3 Q. Bien. Alors je quitte cette question de la commission, Docteur Bagaric.
4 Mais voyons si vous pouvez nous aider sur ce point, je voudrais reprendre
5 la question de votre rôle en politique : en juin 1994, le 11 juin 1994,
6 n'est-il pas vrai que vous faisiez partie d'une délégation de Croates de
7 Bosnie qui devait rencontrer Franjo Tudjman pour discuter des accords de
8 Washington ?
9 R. Je pense que j'y suis allé. De quelle date avez-vous parlé là ?
10 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens juste à dire
11 une chose, les dates évoquées par le Procureur ne sont pas dans le cadre
12 temporel de l'acte d'accusation. Alors là je crois qu'on sort carrément du
13 sujet.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous connaissons cette objection depuis longtemps.
15 Continuez, Monsieur le Procureur.
16 M. LAWS : [interprétation] Ce témoin n'est accusé de rien dans l'acte
17 d'accusation, j'espère que c'est bien clair que j'examine sa carrière
18 politique. Excusez-moi.
19 Q. Vous faisiez partie de cette délégation dans laquelle on a discuté des
20 accords de Washington parmi les Croates de Bosnie et en discutant avec le
21 président Tudjman; c'est bien cela ?
22 R. Messieurs les Juges, j'étais député au parlement de Bosnie-Herzégovine,
23 et le président Tudjman a une fois invité la totalité des députés, tous les
24 gens qui étaient susceptibles d'influer sur l'évolution des choses du point
25 de vue des accords conclus. Je ne sais pas si c'est celui-là dont parle le
26 Procureur. Qu'on me montre le document, et je vous dirai tout de suite si
27 j'y étais ou pas.
28 Q. Votre réponse est tout à fait suffisante. La situation est celle-ci :
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1 vous aviez une carrière politique qui s'occupait de l'Herceg-Bosna depuis
2 1991 jusqu'à 1994; c'est bien cela ?
3 R. Ce n'est pas exact. J'ai eu une carrière politique à compter de 1990 et
4 jusqu'en 1998 pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, et pendant une
5 partie du temps j'ai fait ce que j'ai fait, comme je vous l'ai dit. J'ai
6 accompli des missions au sein des structures lorsque la République croate
7 d'Herceg-Bosna existait là-bas, et j'ai contribué. Mais bon, je ne vais pas
8 en parler. Je ne veux pas être trop long.
9 Q. Oui. D'une façon générale je ne pense pas que nous soyons en
10 désaccord. Vous faisiez partie de l'appareil politique de l'Herceg-Bosna
11 pendant la période qui nous intéresse. Peut-être avant, peut-être après,
12 mais pour ce qui est de la période qui nous intéresse, vous êtes là et vous
13 faites partie des affaires politiques de l'Herceg-Bosna et de l'appareil
14 politique. Vous êtes d'accord avec cela ?
15 R. Ni oui ni non. Je ne peux pas dire que je l'étais. Je ne me sentais pas
16 faire partie intégrante de la politique parce que j'étais dans l'armée, je
17 vaquais aux soins à apporter aux blessés. Je ne faisais pas de politique.
18 Mais officiellement, oui, je l'étais. Personne ne m'a révoqué de mes
19 fonctions de député parce qu'il n'y a pas eu de nouvelles élections entre-
20 temps. Donc à l'occasion des premières élections en 1990, je le suis
21 devenu.
22 Q. En même temps, comme vous l'avez dit, vous vous occupiez des blessés,
23 des malades et des personnes qui sont décédées, sans aucun doute, qui
24 étaient à vos soins.
25 R. Non. Je ne me suis pas occupé de ceux qui sont morts. Je ne me suis pas
26 occupé du tout de ces morts. Je m'en excuse.
27 Q. Des patients --
28 R. Ce n'est pas le travail --
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1 Q. Nous ne pouvons pas être d'accord sur tout, Docteur Bagaric, mais
2 soyons d'accord sur ce point : vous vous occupiez des blessés et des
3 malades. Ça vous suffit si je ne parle pas de ceux qui sont "morts" ? Vous
4 vous occupiez des blessés et des malades.
5 R. Indirectement, oui. Je n'ai pas soigné les gens moi-même. J'ai mis en
6 place l'organisation qui s'est occupée de ceci. Moi je n'ai pas soigné des
7 gens, quoique j'étais médecin. Mais je ne savais pas quand le faire.
8 Q. Le système qui vous permettait de les traiter c'était le même système
9 que celui qui faisait accroître leur nombre, n'est-ce pas, dans les camps à
10 Mostar est et à Sovici, les trois secteurs sur lesquels vous avez témoigné
11 ?
12 R. Non, il n'en est pas ainsi.
13 Q. Vous-même, Monsieur, vous saviez quelle était la situation et vous
14 l'avez acceptée. C'est la vérité, n'est-ce pas ?
15 R. Non. Je savais que la situation était pénible, que c'était la guerre et
16 que mon peuple et la Bosnie-Herzégovine tout entière étaient en danger; et
17 en ma qualité de député au parlement de Bosnie-Herzégovine, j'ai accepté de
18 participer à l'organisation de la défense de l'Etat et du peuple; et je
19 l'ai fait tout le temps.
20 Q. L'Etat que vous assistiez était, à votre connaissance, en train de
21 commettre des crimes contre les gens, n'est-ce pas ? Vous saviez que
22 c'était le cas dans les camps, vous saviez que c'était à Mostar est, et
23 vous avez continué à jouer votre rôle politique néanmoins, n'est-ce pas ?
24 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous intervenez au moment même où le témoin doit
26 répondre à une question que le Procureur est en droit de poser. Je ne
27 comprends pas pourquoi vous vous levez pour dire cela. Laissez le témoin
28 répondre. C'est dans votre intérêt. Parce que vous vous levez, ensuite en
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1 lisant le transcript on aura l'impression que vous avez influencé la
2 réponse. Laissez-le répondre. C'est ça que je ne comprends pas. Pourquoi
3 vous vous levez, à moins qu'il y ait une erreur quelconque ?
4 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, alors je suis dans
5 l'erreur de façon évidente. Je me suis dit que vous alliez intervenir vous-
6 même parce que mon confrère m'a dit tout à l'heure lorsque je suis
7 intervenue on m'avait dit que ce témoin n'était pas un accusé. Mais
8 penchez-vous sur la question qu'il vient de poser. Si on peut poser des
9 questions de ce type à un témoin, alors moi je m'excuse, je me suis
10 trompée.
11 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous permettez --
12 M. LE JUGE ANTONETTI : D'abord, le Procureur n'a pas dit que lui a commis
13 des crimes. Il lui a dit : "A votre connaissance, des crimes ont été
14 commis." Voilà, c'est ce qu'il dit. Il ne dit pas que lui il a participé,
15 enfin à moins que -- Monsieur le Procureur, qu'avez-vous voulu -- reposez
16 votre question.
17 M. LAWS : [interprétation] Elle a été posée. Mais il n'y sera jamais
18 répondu parce que c'est une question qui ne plaît pas à la partie adverse,
19 donc il ne va pas y avoir de réponse. Le témoin a maintenant --
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je veux répondre.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin va répondre.
22 M. LAWS : [interprétation] Nous la lirons avec beaucoup de soin.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin va répondre.
24 Maître Nozica.
25 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse. Mais je
26 vous prie de vous pencher sur la façon dont on a posé la question au
27 témoin. Si au témoin on pose la question de savoir qu'il n'était pas cela,
28 mais vous étiez du côté qui a commis des crimes et vous avez poursuivi à le
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1 faire -- et si ce n'est pas exact ce que je viens de répéter, je veux bien
2 être sanctionnée, mais je pense que le témoin vient d'être mis en
3 accusation par la question posée. Je le maintiens. Il peut répondre, bien
4 sûr, il n'écoute pas de toute façon ce que nous avons dit. Il veut
5 répondre, c'est mon obligation, c'est moi qui ai cité à comparaître ce
6 témoin et j'ai l'obligation de le dire.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.
8 Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai une intervention juste au sujet d'un
9 mot de M. Laws en page 35, ligne 23. La question commence par -- je vais
10 donner lecture en anglais :
11 "Et l'Etat que vous aidiez était…"
12 Alors moi j'objecte au niveau du mot "Etat," parce qu'on s'attend à ce que
13 ce témoin confirme que l'Herceg-Bosna était considéré comme un Etat.
14 Ensuite on va se servir de cela comme élément de preuve pour dire que
15 c'était un Etat dans un Etat et que l'on tire les choses au clair.
16 M. KOVACIC : [interprétation] Je voulais juste dire la même chose que ma
17 consœur Alaburic. Mais si vous remontez dans le compte rendu, vous voyez le
18 Procureur en page 35, ligne 23, demande, "et l'Etat que vous étiez en train
19 d'aider --" alors juste avant aux lignes 18 à 22, le témoin a expliqué que
20 c'était la guerre et que son peuple en Bosnie-Herzégovine, et il parle de
21 son mandat de député au sein de la République de Bosnie-Herzégovine. Ses
22 mots sont clairs, il parle de la Bosnie-Herzégovine, et le Procureur met
23 les choses sens dessus dessous.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- en face de nous, oui, vous devriez intervenir;
25 mais on a quelqu'un qui a fait des études, qui est parlementaire, qui a eu
26 des responsabilités, il comprend la question et il va y répondre. Alors
27 répondez.
28 M. KOVACIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. C'est pour
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1 apporter une explication, je l'ai dit pour le témoin parce qu'on le place
2 dans une position de personne piégée. Je ne mets pas en doute le fait que
3 vous ayez tous compris de quoi il en retourne, ça j'ai compris cela.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, répondez.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque nous parlons du fait d'être député,
6 j'ai tout le temps dit que j'étais député en République de Bosnie-
7 Herzégovine, c'était une république. En application des accords de Dayton,
8 ce n'est plus la république mais ça s'appelle Bosnie-Herzégovine. Quand
9 j'ai parlé de mon peuple, j'ai parlé de la Bosnie-Herzégovine tout entière,
10 de qui que ce soit qu'il puisse bien s'agir.
11 Quand on a organisé les choses, on l'a fait, Monsieur le Président,
12 lorsqu'il y a agression ouverte de la part des Serbes, et lorsque Croates
13 et Bosniens nous avons ensemble organisé une résistance. Plus tard,
14 lorsqu'il y a eu des conflits et des victimes entre nous qui,
15 malheureusement, ont été des conflits fatals et qui ont comporté des
16 conséquences graves, je n'ai contribué en rien à cela. Au contraire. J'ai
17 contribué à ce qu'il y ait moins de souffrance et moins de mal. On a
18 organisé des services sanitaires qui ont aidé tout le monde, indépendamment
19 de leur appartenance ethnique et où y travaillaient des professionnels
20 indépendamment de leurs appartenances ethniques. Lorsqu'il s'agit des camps
21 ou des prisons, là j'affirme en toute responsabilité devant les Juges,
22 s'agissant de ces prisons et de ces camps, il y avait des médecins de
23 chargés concrètement, moi je n'étais pas chargé de la chose dans le
24 concret; mais lorsque nous avons vu qu'ils n'étaient pas préparés, comme
25 d'ailleurs beaucoup de gens n'ont pas été préparés à des événements aussi
26 exceptionnels, alors on a fait venir des gens qui savaient faire ce
27 travail. On a organisé des équipes au sein de ces centres. Nous avons
28 apporté notre soutien depuis l'extérieur. C'est une fois de plus de façon
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1 responsable de mes propos que je dis ici que nous avons fait de notre mieux
2 pour empêcher qu'il y ait des victimes massives dans ces camps parce que
3 les haines étaient très puissantes et très fortes. Nous avons donc empêché
4 qu'il y ait des meurtres en masse, qu'il y ait des victimes en grand
5 nombre, et je l'affirme en toute responsabilité de mes propos. Donc cela a
6 été le mérite du service de santé. Si la chose s'était poursuivie, j'aurais
7 aidé davantage encore pour que les souffrances connaissent une fin au plus
8 tôt. Je ne vois pas en quoi j'ai fait quoi que ce soit d'erroné.
9 Mme ALABURIC : [interprétation] Une petite intervention au compte rendu,
10 Monsieur le Président. D'après ce que j'ai pu voir, les interprètes ont
11 plus ou moins très bien interprété ce que le Dr Bagaric a dit. Il y a une
12 carence toutefois page 39, ligne 9, où il a parlé de ces événements, et
13 avec les évolutions, le témoin a dit "inattendues," et je crois
14 qu'"inattendues" c'est un mot très important pour ce qui est de jauger les
15 choses correctement dans ce procès.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez donc répondu à la
17 question du Procureur. On est bien d'accord ou pas ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
19 M. LAWS : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions. Merci, Docteur
20 Bagaric.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Procureur. Nous allons faire 20
22 minutes de pause et nous reprendrons pour les questions supplémentaires.
23 --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.
24 --- L'audience est reprise à 16 heures 15.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica, je vous donne la parole.
26 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Nouvel interrogatoire par Mme Nozica :
28 Q. [interprétation] Monsieur Bagaric, je vais aborder plusieurs sujets,
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1 mais le premier d'entre eux sera le suivant, il s'agit de cette proposition
2 que vous avez évoquée qui était la vôtre, à savoir qu'avec l'aide de la
3 communauté internationale on transforme cet hôpital du côté est en --
4 R. Du côté ouest.
5 Q. -- oui, du côté ouest, que cet hôpital soit transformé en hôpital
6 commun où seraient soignés et traités tous les patients et tous les malades
7 provenant aussi bien du côté est que du côté ouest.
8 Alors je vous prie de bien vouloir une fois encore expliquer pour les
9 Juges de la Chambre où se trouvait cet hôpital du côté ouest de Mostar, à
10 quelle distance il se trouvait de la ligne de front la plus proche ?
11 R. Cet hôpital auquel je me référais et que vous évoquez maintenant se
12 trouvait peut-être à quelques centaines de mètres, 200 ou 300 mètres, voire
13 moins par rapport à la ligne de front la plus proche; alors à ceci près que
14 cet établissement disposait d'autres bâtiments qui, si la proposition avait
15 été acceptée, auraient pu être utilisés également. Donc il s'agit d'un
16 hôpital où l'activité n'a jamais cessé pendant toute la durée de ce conflit
17 fort malheureux.
18 Q. Cela rejoint ce qui devait être ma deuxième question. Cet hôpital n'a
19 jamais cessé de fonctionner pendant toute la durée des affrontements,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Monsieur Bagaric, est-ce que cet hôpital soignait tous les citoyens et
23 tous les soldats indépendamment de leur appartenance à tel ou tel groupe
24 ethnique ? Est-ce que tous avaient accès à ces soins pendant la durée de la
25 guerre ?
26 R. Jamais au cours de la guerre je n'ai entendu dire que quelqu'un se
27 serait vu refuser des soins au motif qu'il aurait appartenu à une autre
28 communauté ethnique ou religieuse. L'hôpital offrait ses soins à tous. Je
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1 pense que s'il s'était passé quelque chose qui se serait écarté de cela,
2 j'en aurais entendu parler. C'est pour ça que j'affirme qu'à mon sens cela
3 ne s'est jamais produit.
4 Q. Monsieur Bagaric, vous avez dit que l'hôpital avait été constamment la
5 cible de pilonnages. Alors attendez un peu. Je veux vous amener étape par
6 étape à ce à quoi je souhaite en venir. Nous avons encore un peu de temps,
7 et je crois qu'il y a plusieurs questions auxquelles vous n'avez pas pu
8 répondre comme vous le souhaitiez. Alors pouvez-vous nous dire quelle était
9 la situation à la fin de la guerre ?
10 R. Puisque cet hôpital se trouvait dans cet environnement-là, il est tout
11 à fait logique qu'il ait été la cible de pilonnages, je ne peux pas dire
12 ici de quel type de pilonnage il s'est agi exactement, mais il y a eu des
13 destructions importantes, et cela a duré pendant toute la durée des
14 affrontements. A la fin de la guerre -- Je sais que nous posions des bâches
15 en plastique aux fenêtres pour remplacer les verres. Il y avait des traces
16 à la fin de la guerre sur le bâtiment.
17 Q. Monsieur Bagaric, le Président de la Chambre vous a interrogé
18 concernant cette affirmation qui était la vôtre, à savoir que si
19 conformément à cette proposition que vous avez faite à plusieurs reprises
20 cet hôpital avait été transformé en hôpital commun qui aurait soigné des
21 patients provenant aussi bien du côté est que du côté ouest, et si cet
22 hôpital avait reçu la protection des forces internationales et avait été
23 placé sous le contrôle des organisations internationales, qu'il aurait
24 exercé une influence, pour rester nuancé, il aurait une influence sur le
25 cours de la guerre. Mais, Monsieur le Président, le Juge Antonetti a dit
26 que c'était la première fois qu'il entendait cela dans ce prétoire, et il
27 vous a demandé d'expliquer pourquoi vous estimiez que cette proposition
28 aurait été en mesure d'exercer une influence sur le cours de la guerre.
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1 R. Si cela s'était produit, cela aurait tout d'abord constitué un signe
2 adressé à tous, aussi bien aux Croates qu'aux Musulmans, aux Bosniens, à
3 savoir que l'on travaille le plus sérieusement du monde à faire cesser la
4 guerre.
5 Deuxièmement, dans cette éventualité c'est le recours même au service de
6 cet hôpital situé dans une position aussi délicate, qui aurait rendu
7 nécessaire l'arrêt des hostilités dans cette zone. Cela signifie qu'au
8 minimum on aurait eu une diminution conséquente des combats qui se
9 déroulaient à cet endroit. Selon moi, si cela avait été plus ou moins
10 accepté, je pense que cela aurait constitué un point de départ à partir
11 duquel on aurait pu construire cette confiance, et je pense que cela aurait
12 eu des conséquences positives également pour ce qui concerne la Bosnie
13 centrale. Car je le répète, comme cela était le cas à Nova Bila, la Bosnie
14 centrale était dans une position très difficile, aussi difficile que
15 l'était Mostar est, d'une certaine façon. Peut-être même cette position
16 était peut-être encore plus difficile, car les patients étaient installés
17 dans une église. C'était un accueil qui était tout à fait inapproprié, et
18 ils ne bénéficiaient pas du même type de soutien de la part de la
19 communauté internationale. Bien sûr, ils recevaient aussi une forme d'aide,
20 mais je pense que la partie est de Mostar faisait l'objet d'une attention
21 et d'une surveillance plus importante.
22 Q. Monsieur Bagaric, lors du contre-interrogatoire effectué par mon estimé
23 confrère, nous avons entendu la thèse qu'il a avancée, à savoir que cette
24 aide que vous avez proposée à l'hôpital à Mostar est, c'était le résultat
25 de pression politique. Nous avons vu de façon tout à fait indubitable dans
26 les documents que vous avez fourni cette assistance et cette aide.
27 Nous avons eu toute une série de documents, mais ma première question
28 est la suivante : cette aide n'a-t-elle même pas dépassé largement ce que
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1 nous avons pu voir dans les documents que nous avons été en mesure de
2 collecter ?
3 R. Oui. Je suis persuadé que cette aide a même été plus importante ce que
4 nous avons pu voir. Cependant, quelque importante qu'ait été cette aide,
5 elle a été significative, bien sûr, mais d'un point de vue symbolique. Elle
6 n'était pas telle qu'elle aurait pu régler le problème de la partie est de
7 Mostar. Cependant, la signification de ce geste était bien plus importante.
8 Il n'avait rien à voir avec des pressions internationales.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de suivi. De mémoire, malheureusement
10 je n'ai pas pris les documents ni les références exactes, mais il me semble
11 qu'à l'hôpital de Mostar est il y avait des Croates qui ont été soignés,
12 notamment des Croates qui avaient été faits prisonniers et ils étaient donc
13 soignés par le corps médical de Mostar est. Est-ce que vous le saviez, cela
14 ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il me semble que cela a été le cas de
16 temps en temps, de temps à autre, notamment en ce qui concernait des
17 prisonniers qui se sont retrouvés à l'hôpital. Ils ont certainement été
18 traités à l'hôpital, soignés. Je me souviens d'une occasion lors de
19 laquelle nous nous sommes enquis auprès du HCR
20 laquelle se trouvaient certains de nos prisonniers. On nous a informés
21 alors que pour ce prisonnier particulier, qui était un des nôtres, il
22 n'avait pas assez de poches de sang, et c'est alors que nous avons envoyé
23 une quantité assez importante de poches de sang afin qu'il puisse être
24 transfusé. Sur la base de cette information, par exemple, je sais de façon
25 certaine qu'ils avaient parmi leurs patients des Croates également.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question de suivi, toujours de mémoire,
27 comme j'ai une bonne mémoire qui ne me trompe pas. Il y avait un médecin
28 dans cet hôpital de Mostar est qui habitait à Mostar ouest, et il avait une
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1 carte d'identité qui lui permettait de traverser, en quelque sorte, la
2 ligne de front. Donc, il quittait Mostar ouest, il allait travailler à
3 l'hôpital, il revenait à Mostar ouest, ainsi de suite.
4 Vous le saviez ça ou pas ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois reconnaître, Monsieur le Président,
6 que je n'étais pas informé de cela. Si cela se produisait, c'était
7 certainement occasionnel, car il y a eu des périodes où cela aurait été
8 extrêmement difficile à mettre en œuvre. Mais je sais qu'il y a eu des
9 médecins qui, par exemple, se trouvaient, en quelque sorte, du côté ouest
10 mais ont continué à travailler du côté est. Et je sais qu'il y a certains
11 de mes confrères, lorsque j'ai travaillé à Sarajevo au ministère de la
12 Santé après la guerre, je sais qu'avec moi, au sein du ministère, il y a eu
13 des confrères qui ont travaillé avec moi et qui m'ont raconté qu'une équipe
14 de Sarajevo, une équipe médicale, venait en aide à cet hôpital. Donc il y
15 avait une certaine communication, si bien vers nous que vers le nord, mais
16 cette communication était limitée.
17 Mme NOZICA : [interprétation]
18 Q. Monsieur Bagaric, nous avons évoqué cette aide dont vous avez dit
19 qu'elle était tout à fait réelle, mais vous dites aussi avec modestie
20 qu'elle était de nature symbolique. Est-ce que vous pouvez expliquer pour
21 les Juges de la Chambre ce qu'il en était de l'hôpital de Nova Bila ? Il
22 était encerclé, mais encerclé par qui ? De quelles forces armées, très
23 brièvement ?
24 R. Par l'ABiH. L'encerclement était total et exclusivement exercé par
25 l'ABiH.
26 Q. Quels hôpitaux de taille significative, hôpitaux de l'ABiH se
27 trouvaient à proximité de l'hôpital de Nova Bila ?
28 R. Il me semble que c'est une question très importante. L'hôpital de Nova
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1 Bila, Messieurs les Juges, se trouvait sur le territoire de Nova Bila, qui
2 appartient, qui dépend de la municipalité de Travnik, Travnik qui disposait
3 déjà depuis un certain nombre d'années d'un grand hôpital, un hôpital très
4 moderne qui avait déjà été établi à l'époque de l'ex-Yougoslavie, à une
5 distance de peut-être une vingtaine de kilomètres. Je ne peux pas en être
6 sûr. Peut-être même moins.
7 Q. Est-ce que la ville de Zenica se trouvait aussi à proximité et
8 disposaient-ils déjà d'un hôpital avant la guerre, et cet hôpital était-il
9 sous le contrôle de l'ABiH ?
10 R. C'est exact. Zenica est une ville importante, et l'hôpital de Zenica,
11 lui aussi, était peut-être distant de l'hôpital de Novi Bila, d'environ une
12 demi-heure de route. C'était un hôpital de taille très importante, un
13 centre hospitalier avec un personnel médical et un nombre de médecins très
14 important.
15 Q. Est-ce que les médecins de ces deux hôpitaux ont fourni des poches de
16 sang, des médicaments ? Est-ce qu'ils ont accepté des patients provenant de
17 Nova Bila de la même façon que vous, vous avez procédé avec les patients
18 venant de Mostar est ?
19 R. Je ne peux ici répondre ni oui ni non. Je n'ai pas connaissance que se
20 soit produit un tel cas.
21 Q. Si je vous ai bien compris, vous n'avez pas connaissance qu'ils aient
22 jamais fourni une assistance ou une aide de ce type, n'est-ce pas ?
23 R. Oui, c'est bien ce que j'ai dit. Je pense à cet hôpital de Nova Bila.
24 Q. Oui, en effet. C'est au sujet de quoi je vous interrogeais. Selon le
25 souvenir que vous en avez, quelle était la situation des autres enclaves;
26 Zabrdje, Kiseljak, Turija ?
27 R. Zepce.
28 Q. Zepce.
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1 R. Chacune de ces enclaves à sa façon avait sa propre histoire fort
2 malheureuse. Pour ce qui est des services médicaux, je sais avec certitude
3 que ces derniers étaient assurés de façon extrêmement rudimentaire, car le
4 nombre de médecins était particulièrement insuffisant, sans même parler des
5 médecins spécialistes.
6 Q. Je vais poursuivre avec ces questions, et je voudrais m'excuser auprès
7 des Juges de la Chambre car suite aux questions de mon confrère, je vais
8 demander l'affichage dans le prétoire électronique d'un certain nombre de
9 documents que nous avons déjà tous eu l'occasion de voir. J'ai préparé
10 certains autres documents hier dont j'ai compris que nous allions en avoir
11 besoin.
12 Il a été dit, Monsieur Bagaric, hier, au sujet de cette assistance que vous
13 avez pu fournir, que cela aurait été le résultat de pressions politiques
14 exercées sur la Croatie. Mon confrère s'est exprimé de façon précise, que
15 cela se serait produit à partir du mois de juin et au-delà.
16 R. Je pense qu'il est important de dire la chose suivante : bien sûr que
17 la Croatie s'efforçait d'une façon ou d'une autre de faire cesser ce
18 conflit. Cela était également dans l'intérêt de la Croatie. Cependant,
19 c'est en toute responsabilité que j'affirme ici devant vous, Messieurs les
20 Juges, devant mes confrères et devant Dieu en fin de compte, que cela n'a
21 absolument rien à voir avec quelque forme de pression que ce soit. Je parle
22 ici de ce soutien, de cette aide que nous avons fournie et de l'aide que
23 nous souhaitions également fournir.
24 Q. Ce que vous venez de dire, Monsieur Bagaric -- si nous nous reportons
25 maintenant aux documents. Reportez-vous à l'écran, s'il vous plaît, les
26 documents que nous avons passés en revue lors de votre interrogatoire
27 principal. Nous allons les afficher très brièvement. Tout d'abord, le 2D
28 00318. Il s'agit de l'une de ces notes d'information.
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1 R. Excusez-moi, je ne le vois pas.
2 Q. Attendez un peu. Cela va s'afficher. Je souhaite cependant avancer,
3 donc écoutez-moi simplement. Il s'agit d'un communiqué public qui est signé
4 par vous, signé par Ivan Bagaric, ainsi que le Dr Nusret Dzeko. Voilà. Vous
5 le voyez maintenant. Cela porte la date du 23 avril 1993.
6 R. En effet.
7 Q. Même dans le cadre de la thèse du Procureur, il n'y avait pas de
8 pressions politiques à ce moment-là. Or, nous voyons dans ce document, on
9 voit que vous vous efforciez à ce moment-là d'apporter une solution commune
10 à ces différents problèmes; ai-je raison ?
11 R. Oui, absolument. Il s'agit ici de la suite de cette histoire remontant
12 à la fin de 1992, lorsque je m'efforçais d'établir des communications avec
13 l'autre partie. La seule personne à qui j'avais accès à ce moment-là,
14 c'était M. Dzeko, le responsable des services médicaux du 4e Corps d'armée.
15 Je lui ai demandé qu'on organise cette réunion et qu'à cette occasion nous
16 déclarions que nous autres, personnel médical, nous ne souhaitions pas
17 participer à la guerre, que nous ne soutenions pas cette dernière et que
18 nous demandions que les victimes de ces agressions, les Croates tant que
19 les Musulmans, fassent tout ce qui était en leur pouvoir pour que ce
20 conflit ne continue pas, et s'il devait continuer que nous demandions que
21 le personnel médical et les médecins continuent à travailler ensemble et à
22 venir en aide à tous, indépendamment de leur appartenance ethnique.
23 Q. Monsieur Bagaric, reportez-vous maintenant au document 2D 00319. Avant
24 son affichage à l'écran, je vais vous rappeler qu'il s'agit là de cet ordre
25 que vous avez émis au terme duquel vous déterminez l'équipe chirurgicale
26 qui devra intervenir à l'hôpital de Jablanica, et ce, après les
27 affrontements avec l'ABiH sur ce territoire. Vous en souvenez-vous ?
28 R. Oui.
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1 Q. Il va s'afficher maintenant, juste pour que nous soyons sûrs qu'il
2 s'agit bien de cela.
3 R. Oui, je sais de quoi il s'agit.
4 Q. En effet. Nous avons ici également un document du mois de mai 1993.
5 Cela également se trouve bien en avant la période à laquelle se réfère mon
6 confrère.
7 R. Oui, avant les affrontements à Mostar, mais après les affrontements --
8 ou plutôt, les victimes croates à Konjic, à Trusina, je pensais à
9 Kostajnica, à Sajonica [phon], à Busce [phon], à Trusina et d'autres
10 localités. C'était après ces événements. A ce moment-là, on pouvait
11 toujours se rendre à Jablanica.
12 Q. Comme on le voit, c'était au mois de mai 1993, donc avant l'été, n'est-
13 ce pas, avant l'été 1993 ?
14 R. Oui.
15 Q. Je dois juste procéder à une correction. Pour la page 47, ligne 8 du
16 compte rendu d'audience, il faut lire la référence 2D 00318 et non pas 138,
17 bien que nous ayons vu à l'affichage le bon document. Maintenant, je
18 voudrais que nous reportions au document P 02291. Je vous rappellerais
19 qu'il porte la date du 11 mai 1993, et qu'il s'agit d'une approbation pour
20 l'envoi de poches de sang par l'intermédiaire du Bataillon espagnol. Vous
21 nous avez dit qu'il s'agissait d'une aide envoyée à l'intention de
22 l'hôpital de Mostar est, n'est-ce pas ?
23 R. Oui. Bien qu'avec la distance qui m'en sépare aujourd'hui, je ne peux
24 pas être absolument certain s'agit-il peut-être précisément de ce que j'ai
25 évoqué tout à l'heure. En tout cas, je ne peux pas dire exactement de quoi
26 il s'agit, mais c'est ce que nous avons sous les yeux.
27 Q. Monsieur Bagaric, nous aurons l'occasion de voir encore un envoi de
28 poches de sang et nous verrons à ce moment-là.
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1 R. Dans ce cas-là, ce n'est pas de cela qu'il s'agit. C'est un autre
2 envoi.
3 Q. Juste pour que vous ne m'induisiez pas en doute, il s'agit bien d'un
4 envoi de poches de sang pour l'hôpital de Mostar est, n'est-ce pas ? C'est
5 ce que vous avez dit lors de votre interrogatoire principal, dans la
6 première phrase ?
7 R. Oui, je vois. Je vois que c'est bien le cas.
8 Q. Très bien. Monsieur Bagaric, reportez-vous au 2D 00455, s'il vous
9 plaît. Mon estimé confrère vous a présenté ce que M. Tudjman aurait déclaré
10 lors d'une réunion tenue le 15 septembre. Il aurait parlé de pression
11 politique et il a affirmé que vous auriez fait cela sous une pression
12 politique.
13 R. Quel 15 septembre ?
14 Q. Le 15 septembre 1993. C'est ce que M. le Procureur a dit.
15 R. Excusez-moi, mais je pense que cela ne pouvait concerner que l'année
16 1994.
17 Q. Monsieur Bagaric, ayez un peu confiance en moi, afin de ne pas être
18 obligé de demander de nouveau l'affichage de ce document. C'est quand même
19 de l'année 1993 qu'il s'agit ici. Mais je vous prie d'examiner cette
20 demande que vous envoyez le 16 septembre, à savoir un jour après. Il y est
21 dit, et la dernière phrase est particulièrement significative pour moi,
22 vous demandez qu'une "aide soit fournie à la partie bosnienne pour ce qui
23 est du traitement des civils, notamment des femmes et des enfants, dans
24 l'hôpital de guerre de Mostar et dans les hôpitaux du HVO."
25 Donc il ne s'agit pas ici de l'idée d'un hôpital commun, mais vous proposez
26 que des gens soient soignés à l'hôpital de Mostar, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Monsieur Bagaric, si cela a été fait comme le résultat de pression
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1 politique, comment peut-on concilier ça avec la dernière phrase, je cite :
2 "Nous faisons cela pour une et une seule raison, à savoir pour une
3 raison de nature humaine. Nous vous demandons de bien vouloir nous donner
4 aucune connotation politique à cela."
5 Alors si vous aviez fait les choses sous une pression politique, est-ce
6 qu'il n'y aurait pas été logique d'essayer d'exploiter cela et de le
7 présenter d'un point de vue politique ?
8 M. LAWS : [interprétation] C'est une question directrice.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Essayez d'être très neutre.
10 Mme NOZICA : [interprétation] Je vous prie de bien vouloir m'excuser cher
11 confrère, mais je vous demande également de bien vouloir débrancher votre
12 micro. Je vais reformuler ma question, bien entendu.
13 Q. Est-ce que cette dernière phrase dans votre requête avait une
14 connotation politique et appelait à la possibilité de placer cela dans un
15 contexte politique ?
16 R. Je ne souhaite pas ici y passer trop de temps, mais il n'y avait ici
17 aucune arrière-pensée politique ni aucune pression politique. Je voudrais
18 bien savoir quelle a été la réunion concernée qui se serait tenue à Zagreb.
19 Je n'ai été à aucune réunion à Zagreb en 1993. J'ai été à Zagreb en 1994,
20 après la signature des accords de Paix de Washington.
21 Q. Monsieur Bagaric, oubliez cette réunion. Le Procureur vous a montré le
22 document relatif à une réunion qui s'est tenue entre M. Boban et M. Tudjman
23 le 15 septembre 1993. Si vous souhaitez vous y reporter, c'est le document
24 P 05080 qui vous a été présenté lors du contre-interrogatoire. Attendez un
25 petit peu. Vous m'avez posé une question, donc je vais vous répondre.
26 Il a été cité que M. Tudjman aurait déclaré que des pressions
27 politiques importantes étaient exercées sur la Croatie et c'est en rapport
28 avec cela que mon confrère vous a interrogé en vous demandant si c'était en
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1 raison de ces pressions politiques s'exerçant à l'été 1993 et au-delà que
2 vous aviez fourni une aide et proposé une aide ainsi que nous le voyons sur
3 la base de ces documents. Est-ce que c'est plus clair pour vous maintenant
4 ?
5 R. Oui, mais j'avais confondu les deux choses. Je pensais que M. le
6 Procureur se référait à une réunion à laquelle j'aurais participé moi.
7 Alors, pour ce qui est de cette réunion entre Boban et Tudjman, je ne l'ai
8 jamais apprise. Je n'ai jamais été mis au courant ni n'ai reçu
9 d'instruction émanant de qui que ce soit allant en ce sens.
10 Q. Très brièvement encore deux documents sur ce même sujet, donc ce que
11 vous avez fait ensuite. C'est le 2D 00333. Il s'agit de cet ordre émanant
12 de vous afin que l'on envoie une ambulance à Mme Sally Baker, aux fins du
13 transport de blessés de Mostar est. Alors encore une fois, nous voyons que
14 c'est la date du 15 septembre 1993, le même jour que cette réunion que nous
15 avons évoquée; donc il était même techniquement impossible que vous ayez pu
16 être au courant concernant cette réunion, n'est-ce pas ?
17 R. Cela n'a rien à voir avec cette réunion car nous avons préparé cela
18 avec Mme Sally Baker bien avant. Cela a duré des jours et des jours.
19 Q. Veuillez vous référer maintenant au document 2D 00328. Il s'agit encore
20 d'un de ces documents que nous avons examinés précédemment.
21 C'est ce document confirmant que l'on fournit un certain nombre de
22 poches de sang au service de transfusion de l'hôpital de guerre. Et vous
23 l'avez confirmé, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Monsieur Bagaric, vous avez déjà répondu à cela, mais je voudrais que
26 ce soit très clair. Est-ce que pour ce qui est de fournir une aide ou
27 fournir des propositions alternatives d'aide à l'intention de vos confrères
28 de Mostar est, est-ce que cela a jamais été lié à des raisons politiques ou
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1 à des pressions politiques ?
2 R. Non, jamais personne n'a exercé des pressions politiques en ce sens sur
3 moi, et je n'ai jamais fait cela d'un point de vue politique. Tout ce que
4 j'ai fait, je l'ai fait en tant que médecin impliqué dans ces événements
5 comme je le faisais avant la guerre.
6 Q. Je voudrais que nous passions maintenant à la question des centres de
7 détention et que vous repreniez le classeur qui contient mes documents.
8 Nous allons examiner d'abord par ordre chronologique le document 2D 0754
9 qui est un rapport.
10 R. Oui, je vois.
11 Q. Monsieur Bagaric, nous voyons dans ce rapport qu'à la prison
12 d'instruction militaire centrale de l'Heliodrom, une inspection a été
13 effectuée suite à une conversation téléphonique avec Stanko Bozic, le
14 directeur de cet établissement.
15 Monsieur Bagaric, pouvez-vous confirmer que c'était là la façon dont
16 fonctionnait ce service chargé du suivi épidémiologique et des maladies
17 infectieuses, c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'ils recevaient un appel ou
18 une invitation, ils se rendaient sur place et faisaient le nécessaire ?
19 R. Oui, en effet. Il y avait déjà des médecins là-bas sur place mais
20 lorsqu'il fallait intervenir du point de vue de médecins spécialistes,
21 avoir une intervention plus large, c'est alors que nous entrions en jeu, et
22 cela en fournit précisément un exemple.
23 Q. Entendu. Je vous demande cela, Monsieur Bagaric, en raison de ce
24 document qui vous a été présenté par l'Accusation pour lequel que vous avez
25 dit que vous ne saviez pas si vous l'aviez reçu de M. Stanko Bozic ou non.
26 Nous y reviendrons. Mais maintenant nous allons nous reporter au document P
27 04145.
28 C'est votre première requête. Je vous l'ai déjà montrée.
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1 Il en a longuement été question pour ce qui est de la façon dont
2 devaient être transportés les malades et les blessés de l'Heliodrom. Alors,
3 j'attire votre attention sur le dernier alinéa. Ici vous dites :
4 "Tant que nous ne résoudrons pas la question de l'ambulance pour
5 l'Heliodrom, se servir des véhicules de la zone opérationnelle de
6 l'Herzégovine du sud-est et hôpital de guerre Mostar."
7 Est-ce que vous savez nous dire s'il en a été fait de la sorte ?
8 R. Oui, c'est ce qu'on a fait. Mon déplacement au Canada passait en
9 corrélation avec l'approvisionnement en ambulance que nous n'avions pas,
10 parce que la Communauté croate avait fait des offres pour ce qui est de
11 nous venir en aide, mais cette aide n'est venue qu'en fin d'année. Et nous
12 avons toujours manqué de véhicules. Et tout le temps, ça a été, si vous
13 voulez, là où le bât blessait. Alors, on en a toujours manqué. On ne
14 pouvait pas résoudre le problème et la proposition émanait des médecins de
15 l'unité pour ce qui est de la façon dont on devait résoudre le problème.
16 C'est cela.
17 Q. Pour les besoins du suivi, pouvons-nous tirer une conclusion qui est
18 celle de dire que c'est le 12 août 1993 ici ?
19 R. Oui.
20 Q. Je vous renvoie maintenant à un document dans mon classeur rose. C'est
21 le 2D 412. Monsieur Bagaric, c'est un ordre daté du 28 septembre 1993,
22 n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Cela sera repris souvent. Mme Nika Pinter vous a demandé si ce document
25 a été transféré à l'état-major principal et vous avez dit que non et on
26 voit que non; n'est-ce pas ?
27 R. C'est cela.
28 Q. Bon. Alors dans le temps --
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1 R. Si vous permettez très brièvement.
2 Q. Allez-y.
3 R. Messieurs les Juges, ici dans la traduction en anglais, et je l'ai
4 remarqué avant, on dit : "Suite au constat effectué et aux ordres donnés…"
5 et puis il y a un point interrogation. Or, il faut que l'on mette le 18
6 août. C'est un ordre provenant du 18 août et là, on voit un point
7 d'interrogation. Je crois que cela devrait être corrigé. C'est tout.
8 Q. Monsieur Bagaric, vous verrez que dans la version croate, on ne voyait
9 pas très bien la date. Mais si c'est vous qui le dites, je veux bien qu'on
10 rectifie le document et nous vous en sommes reconnaissants. Donc c'est 18
11 août.
12 Passons maintenant au 5465, P 5465. L'avez-vous trouvé ?
13 R. Oui.
14 Q. Il s'agit d'un courrier au sujet duquel vous avez dit que vous ne
15 saviez pas si vous l'aviez bel et bien reçu. Alors, Monsieur Bagaric, un
16 jour avant ceci votre ordre a été donné --
17 R. Oui, je crois que c'était le 28, oui; donc un jour avant.
18 Q. Oui.
19 Q. Il s'agit de résoudre le problème du transport des malades et des
20 blessés qui est réglé en application du document daté du 18 août. C'est le
21 document P 4145, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Bien. Alors, pour savoir si on vous a communiqué ce document ou pas,
24 penchons-nous sur le suivant et j'entends là le P 5503.
25 R. Oui.
26 Q. Juste un jour après ce courrier émanant de M. Bozic pour lequel on a
27 dit qu'on ne savait pas si vous l'aviez reçu, il a été procédé à une
28 inspection par cette commission constituée de trois membres.
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1 R. Oui.
2 Q. Et il y avait M. Stanko Bozic de présent.
3 R. Exact.
4 Q. Est-ce que dans ce document on voit quelque part M. Bozic en train
5 d'indiquer quoi que ce soit en corrélation avec le document que lui avait
6 envoyé, ou prétendument envoyé et que vous aviez reçu ou pas reçu. Alors,
7 est-ce qu'il y a quelque élément que ce soit qui en parlerait ?
8 R. Donnez-moi un moment. Il n'y a que cette partie quand on parle de
9 "blessés graves et des malades qui devaient être transférés vers l'hôpital
10 régional." Et je crois que c'est la seule chose qui est mentionnée. Pour ce
11 qui est du reste, c'était déjà résolu et on n'a pas constaté la présence du
12 problème.
13 Q. Alors, Monsieur Bagaric, cette façon de transférer les malades a-t-elle
14 réglée en application de votre ordre datant du mois d'août, et est-ce que
15 ça s'est passé ainsi jusqu'à ce jour ?
16 R. Pour autant que je puisse le savoir à présent, et d'après le sentiment
17 que j'en ai gardé de l'époque, ça été résolu entre l'hôpital et la zone
18 opérationnelle. Moi, on venait me voir si les choses ne fonctionnaient. Si
19 les choses marchaient, moi je n'étais pas mis au courant.
20 Q. Comme notre éminent confrère vous l'a montré hier, c'est un document
21 qui a été envoyé à plusieurs adresses, ainsi qu'à l'état-major. Alors, ma
22 consoeur vous avait posé des questions pour ce qui est de savoir si cet
23 ordre avait été communiqué à l'état-major. N'est-il pas dit que dans les
24 pièces jointes à ce document il y avait également cet ordre émanant de vous
25 daté du 28 septembre 1993 ?
26 R. C'est ce qu'on dit.
27 Q. Bien. Alors, penchons-nous encore un peu sur cette page une, et je vous
28 dirai pourquoi. On a vu plusieurs documents adressés à Bruno Stojic, et on
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1 y viendra tout à l'heure. Mais là, dans l'original, au sujet de
2 l'intervention de ma consoeur qui est intervenue au sujet du cachet mal
3 traduit. Là, non, on a bien traduit. Ce n'est pas celui-là. Mais le cachet
4 de réception, est-ce que c'est bien le HVO département de la Défense à
5 Mostar qui a réceptionné, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Donc on voit que c'est réceptionné par le département à la Défense.
8 Le Procureur a insisté sur ce courrier quand il a été question des blessés.
9 Et j'attire à cet effet, votre attention sur un document que vous avez ici,
10 à savoir le P 05035. Il s'agit d'un rapport de la délégation espagnole --
11 R. Vous avez dit quel numéro ?
12 Q. 5035, ça devrait être le suivant.
13 R. Oui, c'est le cas.
14 Q. J'attire votre attention sur le paragraphe 7, c'est la visite au camp
15 de détention de l'Heliodrom. Les documents qu'on a pu voir jusqu'à présent
16 sont datés de la fin septembre 1993, or celui-ci est du 14 septembre 1993.
17 Et à cet effet, j'attire votre attention sur le paragraphe 7 notamment le
18 passage où il dit qu'il y a deux infirmeries. C'est l'avant-dernier
19 paragraphe en page 6. On y dit que :
20 "Il y a deux infirmeries comportant un médecin chacune et plusieurs
21 infirmiers. Et il n'y a pas de problèmes en matière de santé."
22 R. Je m'excuse. Page quoi en Croate ?
23 Q. Page 6, paragraphe 7, avant-dernier paragraphe.
24 R. Oui, je le vois.
25 Q. Alors, on dit qu'il y a deux infirmeries avec un médecin chacune, et
26 plusieurs infirmiers et qu'il n'y a pas de problèmes en matière de santé.
27 C'est bien ce qui a été constaté au compte rendu ?
28 R. Oui.
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1 Q. Bien. Merci. Monsieur Bagaric, aviez-vous connaissance du fait que dans
2 la structure militaire on aurait envoyé des équipes de médecins pour
3 résoudre les problèmes survenus au niveau de la prison militaire centrale à
4 l'Heliodrom ainsi qu'à Gabela et Dretelj ?
5 R. Moi, je dois reconnaître que je ne comprends votre question.
6 Q. Saviez-vous que d'autres équipes de médecins, en sus de celles que vous
7 avez contactées vous-même, étaient intervenues pour examiner les
8 prisonniers, les détenus à Gabela, Dretelj et à l'Heliodrom ?
9 R. Il y avait là-bas des médecins qui se trouvaient à l'intérieur même des
10 prisons, qui étaient des détenus. Il y avait des médecins qui venaient de
11 l'extérieur, depuis ces brigades qui couvraient le territoire en question
12 et du district militaire, puis il y avait des médecins, ou je dirais, pas
13 non des médecins mais le Dr Ivan Curic qui était, lui, un spécialiste et
14 qui était responsable de ce département et qui était le pilier supportant
15 tout le reste.
16 Q. Je vous renvoie maintenant au P 3197.
17 R. J'y suis.
18 Q. Il s'agit d'un ordre émanant de M. Nedjeljko Obradovic daté du 3
19 juillet 1993, et on y dit :
20 "Dans l'objectif d'assurer les soins médicaux à l'intention des
21 prisonniers, premièrement créer tout de suite une commission médicale pour
22 les soins, les examens, et les propositions relatives au traitement à faire
23 suivre aux détenus des prisons de Gabela, Dretelj et à l'Heliodrom de
24 Mostar, et ce, comme suit :
25 "Après avoir examiné les prisonniers, les plus malades et ceux qui, d'après
26 vous, devraient être relâchés ou envoyés pour soin ultérieur, fournir un
27 argumentaire par écrit et s'adresser avec une requête à mon intention.
28 Deuxièmement, pour l'exécution de cet ordre, ce sera tenu responsable le
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1 chef des services de santé de la 1ère et 3e Brigade du HVO."
2 Alors, est-ce que ce sont ces personnes, ces médecins au sujet desquels
3 vous avez dit qu'ils avaient également été chargés de soins médicaux ? Mais
4 ici, il y a également une commission médicale qui est évoquée.
5 R. Oui. Ces médecins sont concernés, mais je dois admettre que ce
6 document, je ne l'ai jamais vu jusqu'à présent.
7 Q. Monsieur Bagaric, je ne vous le demande pas, cela. C'est déjà une pièce
8 à conviction. Je ne vous demande pas de confirmer l'authenticité, mais de
9 nous dire si ça se rapporte ?
10 R. Oui, ça se rapporte à ces médecins-là.
11 Q. C'est tout. Merci. D'après ce que je puis voir, le compte rendu c'est
12 bloqué. Non, il est reparti. J'essaie de suivre.
13 Alors, Monsieur Bagaric, je me propose de vous montrer à présent deux
14 documents qu'on vous a montrés au contre-interrogatoire, et ce, pour vous
15 poser des questions brèves. Le P 4352, d'abord. Ça devrait être le document
16 d'après.
17 R. Oui, j'y suis.
18 Q. Le 4352, ai-je dit.
19 R. Je le vois.
20 Q. Là, je crois qu'on nous a montré le mauvais document à l'affichage
21 électronique. Oui, il vient.
22 Alors, vous avez parlé de ce document suite à des questions du Procureur.
23 Moi, je vous poserais des questions brèves.
24 R. Oui, allez-y.
25 Q. Est-ce qu'il y a un cachet de réception ?
26 R. Non, non, il n'y en a pas ici.
27 Q. Hier, vous nous avez dit que si Bruno Stojic avait reçu ce document, et
28 moi, je vais à présent vous demander : vous êtes-vous entretenu à quelque
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1 moment que ce soit avec Bruno Stojic et vous a-t-il, à quelque moment que
2 ce soit, donné des informations qui se rapporteraient à ce document-ci ?
3 R. Non, jamais. Moi, je ne suis pas au courant de ça.
4 Q. Directement vous demanderais-je, savez-vous si Bruno Stojic a reçu ce
5 document ?
6 R. Moi, je ne peux pas le savoir du tout.
7 Q. Document d'après, je vous prie, P 5812. L'avez-vous trouvé ?
8 R. Oui.
9 Q. Je vais vous répéter ma question. Y a-t-il un cachet de réception du
10 département à la Défense ?
11 R. Non, il n'y en a pas ici.
12 Q. Vous êtes-vous entretenu au sujet de quoi que ce soit laissant entendre
13 que M. Bruno Stojic a reçu ce document ?
14 R. Je n'ai pas d'information à ce sujet. Je ne le sais pas.
15 Q. Pour que les choses soient tout à fait claires suite à une insistance
16 de la part de mon client, je vous demande pour qu'on soit tout à fait sûrs
17 qu'on se penche sur un document qui est le P 5503 pour voir de quoi a l'air
18 ce cachet de réception du département de la Défense. Il s'agit du document
19 parlant de cette équipe de trois membres.
20 R. Oui, oui, je l'ai trouvé.
21 Q. Monsieur Bagaric, revenons maintenant au document de tout à l'heure, le
22 5812. Hier vous nous avez parlé de ce document. Vous avez dit que vous n'en
23 saviez rien, mais vous avez commenté certains détails de ce document.
24 R. En effet.
25 Q. Monsieur Bagaric, vous avez aussi dit que ce n'est qu'à la réunion
26 collégiale du département de la Défense du 2 septembre que vous avez
27 entendu parler d'une différence entre les prisons militaires, n'est-ce pas,
28 et -- est-ce que je peux terminer ?
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1 R. Allez-y.
2 Q. Et les centres où l'on a gardé en détention des prisonniers de guerre ?
3 Enfin, vous ne saviez pas faire d'autres différences; vous ai-je bien
4 compris ?
5 R. Oui.
6 Q. J'attire votre attention. Indépendamment du fait qu'il n'y ait pas de
7 cachet disant que M. Stojic a bel et bien reçu ce document, je vous renvoie
8 quand même au paragraphe 3 pour ce qui est de ce que M. Bozic nous dit. Le
9 caractère non solutionné du SVZ, à savoir la prison militaire centrale,
10 pour ce qui est des attributions de la personne chargée de cette prison, et
11 on dit que cette prison ne saurait être organisée à partir de deux unités
12 organisationnelles mais que cette prison était censée fonctionner comme une
13 entité organisationnelle unique.
14 Alors, Monsieur, cette prison militaire centrale c'était une prison pour
15 les membres du HVO qui auraient commis des délits au pénal ? Donc c'était
16 une prison militaire classique; le saviez-vous ?
17 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas être précis ou répondre parce que je
18 l'ignore.
19 Q. Je ne vais pas m'y attarder.
20 M. le Juge Antonetti vous a posé une question hier que je trouve
21 importante. Quand on vous a montré un document pour ce qui est de
22 l'incarcération de médecins après le 9 mai 1993, le Juge Antonetti vous a
23 demandé comment vous aviez perçu la chose. Je vais vous demander quelles
24 ont été les informations directement obtenues par vous pour ce qui est des
25 comportements des médecins qui étaient de l'autre côté, c'est-à-dire des
26 médecins bosniens qui étaient de ce côté et qui sont passés de l'autre
27 côté. Avez-vous eu une expérience à ce sujet et est-ce que vous pouvez le
28 dire aux Juges brièvement ? Est-ce qu'il a été question aussi de savoir si
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1 un médecin pouvait mériter d'être arrêté ? Alors je ne veux pas dire qu'ils
2 l'ont mérité, loin de là, mais est-ce qu'il y a eu des situations qui
3 étaient caractéristiques ?
4 R. Avez l'autorisation des Juges, je vais juste dire une phrase et je
5 répondrai à votre question. Avec votre autorisation, une petite
6 observation. Je pense que les témoins qui témoignent pendant plus de deux
7 jours, trois jours et plus, ce serait chose utile pour tout un chacun de
8 créer une façon automatique de procéder à une correction automatique des
9 citations erronées.
10 Parce que quand la nuit je me remémore ce que j'ai dit, je devrais avoir
11 l'occasion en ma qualité de témoin de rectifier le tir. Pour ce qui est de
12 ce document cité par Mme Nozica, je rectifie un peu ce que j'ai dit hier ou
13 l'autre jour. J'imagine que la plupart de ces gens-là n'avaient aucune
14 culpabilité.
15 Le Procureur m'avait demandé s'ils étaient coupables. Alors je
16 rectifie un peu le tir parce que je n'ai pas vu le document. Je n'ai pas vu
17 les noms. Je n'ai pas vu le document où il était question d'un enfant.
18 Ayant dit que personne n'était coupable avant qu'on ne le prouve et
19 notamment, en l'occurrence, il ne peut y avoir culpabilité de femmes et
20 d'enfants. C'est clair.
21 Mais pour ce qui est de la question -- la question que vous venez de poser,
22 je ne peux pas parler moi de noms, et je ne le veux pas. Ce sont des
23 médecins, des collègues. Mais je sais cependant que bon nombre de personnes
24 s'étaient plaintes d'un médecin qui était à la tête de toute une région et
25 sous le commandement de qui, d'après des nôtres, il a été commis beaucoup
26 de crimes. Je ne peux pas l'affirmer moi, mais j'en ai entendu parler, et
27 j'ai appris qu'un médecin, un collègue à nous qui était membre du HVO, dans
28 la nuit ou plutôt le jour où il y a eu ce retournement d'armes vis-à-vis
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1 des collègues, il y en a un qui a arrêté son collègue médecin croate. Pour
2 autant que je le sache, le tout s'est bien terminé. Donc ce collègue qui a
3 été mis aux arrêts a survécu. Il ne lui est rien arrivé. Mais toujours est-
4 il qu'on l'avait mis aux arrêts quand même.
5 Q. Monsieur Bagaric, je ne vais pas insister sur ce point, lorsque vous
6 avez parlé du premier médecin, de quel territoire s'agissait-il ?
7 R. Il devait s'agir de Bijelo Polje. Vous parlez du premier. C'était
8 Konjic et le territoire qui se situe entre Sarajevo et Mostar.
9 Q. Donc le premier était de Konjic et l'autre dont vous avez parlé était
10 de Bijelo Polje, n'est-ce pas ?
11 R. Je pense que si.
12 Q. [aucune interprétation]
13 R. Je m'excuse, mais je n'ai pas d'élément de preuve personnellement. Je
14 sais seulement qu'il en a été question à l'époque.
15 Q. Monsieur, je ne m'attends pas à ce que vous présentiez des éléments de
16 preuve, mais je vais vous montrer un document qui peut constituer un
17 élément de preuve. Le 2D 857, c'est le tout dernier du classeur. L'avez-
18 vous trouvé ?
19 R. Oui.
20 Q. Ici il s'agit d'une demande portant nécessité de diligenter une
21 enquête, c'est daté du mois de juillet 1993. Vous avez un acte
22 d'accusation, et au premier alinéa on parle de Samir Kreso, n'est-ce pas ?
23 Alors penchons-nous ensemble sur la page 3 de ce document. Je tiens à vous
24 rappeler qu'on dit à la première page que c'était un médecin membre de la
25 2e Brigade du 1er Bataillon du HVO.
26 Alors on ne va pas tout lire, mais dans l'acte d'accusation il est
27 dit que ce monsieur, à la date du 30 juin 1993, dans la maison de Zlatic,
28 Dragan, a pris Rajic --
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1 L'INTERPRÈTE : Inaudible.
2 Mme NOZICA : [interprétation]
3 Q. -- suite à quoi il l'a blessé après l'avoir arrêté pour l'emmener et
4 mettre le feu à sa maison.
5 Enfin, je crois que tout le monde peut prendre lecture de la chose.
6 Alors, Monsieur Bagaric, moi je n'affirme pas et je ne veux pas dire que
7 vous connaissez l'homme ou que vous avez été au courant de l'événement,
8 mais c'était un docteur qui était membre du HVO et qui suite à cela, à la
9 date du 30 juin est passé du côté de l'ABiH et qui a fait ce qu'il a fait
10 comme le dit cet acte d'accusation.
11 R. C'est ce que dit le texte en question, mais moi je ne sais
12 vraiment pas si ça s'est passé ainsi ou pas.
13 Q. Bien. Je me propose maintenant d'en terminer avec mes questions
14 complémentaires pour ce qui est de la façon dont a procédé mon confrère et
15 évoquer à cet effet certains aspects politiques.
16 Nous avons souvent entendu dans ce prétoire lorsqu'on a montré un
17 document de conclusion de cette réunion où il a été question de dire que de
18 telles conclusions n'ont jamais été adoptées et au terme de quoi M.
19 Izetbegovic aurait affirmé que "Ce n'était pas notre guerre à nous."
20 Comme vous êtes témoin oculaire des évènements, vous étiez à Sarajevo
21 et ailleurs, comment la chose a-t-elle été perçue par la population croate,
22 et pourquoi y a-t-il eu une telle réaction violente de la part de la
23 population croate, et quand est-ce que cette déclaration a bien pu être
24 faite ?
25 R. M. Izetbegovic a dit cela en sa qualité de président de la présidence
26 ou membre de la présidence, donc en tant que représentant de la Bosnie-
27 Herzégovine. En sa qualité de président de la présidence, il représentait
28 également les Croates de la Bosnie-Herzégovine.
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1 Il l'a dit à l'époque de l'agression lancée contre la République de
2 Croatie, et en réalité, c'était une offense et c'était aussi un message à
3 l'intention de la population croate de la Bosnie-Herzégovine; cela a
4 notamment eu un triste écho parce que je pense, je ne l'affirme pas, mais
5 je pense ça a suivi l'attaque du village de Ravno, Messieurs les Juges, qui
6 est un village à majorité croate dans la région de Dubrovnik, mais sur le
7 territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et où véritablement c'est d'un
8 génocide qu'il peut être question, parce que tous les habitants d'un
9 hameau, et ils étaient assez nombreux, ont été tués. Il y avait sept
10 vieillards et veilles femmes. C'est ce qui s'est passé. J'ai eu ouï-dire
11 qu'il y a eu des interprétations différentes qui ont une autre connotation.
12 Mais c'est une chose très, très pénible et ça a été mal perçu par les
13 Croates, notamment ceux de la Bosnie-Herzégovine.
14 Q. Mon éminent confrère M. le Procureur vous a dit que vous avez à partir
15 de 1991, et là vous avez rectifié le tir et vous avez dit 1990, effectué
16 des fonctions politiques. Est-ce que vous avez d'abord été député au
17 parlement de la Bosnie-Herzégovine, de la République de Bosnie-Herzégovine
18 ? On va commencer dans l'ordre.
19 R. En ma qualité de jeune médecin, par un concours de circonstances,
20 compte tenu des menaces de guerre à l'occasion de ces premières élections
21 libres, j'ai été élu député au parlement de la Bosnie-Herzégovine, oui, en
22 effet.
23 Q. C'était une fonction politique, n'est-ce pas ?
24 R. C'est exact, c'est une fonction politique.
25 Q. Vous avez dit qu'à partir du mois de mars 1991 vous rejoigniez les
26 rangs --
27 R. 1992.
28 Q. -- vous rejoigniez les rangs de ce QG principal chargé de la santé ?
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1 R. Oui.
2 Q. Là vous devenez son chef, puis vous devenez ministre adjoint, et vous
3 intervenez comme médecin ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Donc vous n'êtes pas homme politique à ce moment-là ?
6 R. Mon mandat n'a pas pris fin, mais je n'ai plus fait de politique. J'ai
7 préparé dans le cadre de la défense une protection médicale et je suis
8 intervenu en tant que médecin, donc depuis mon élection en 1990,
9 j'intervenais à l'établissement de santé de Tomislavgrad. J'y effectuais un
10 stage de travaux pratiques.
11 Q. Monsieur Bagaric, j'essaie de déterminer quelles ont été vos fonctions
12 après la signature des accords de Washington. C'est alors que vous avez été
13 élu ministre adjoint chargé de la santé au sein de la Fédération de Bosnie-
14 Herzégovine, n'est-ce pas ?
15 R. Oui. Après avoir fait ma spécialisation en matière de santé publique,
16 j'ai travaillé à Sarajevo en tant que ministre adjoint de la Fédération de
17 Bosnie-Herzégovine et j'étais chargé de l'organisation, de la protection
18 médicale.
19 Q. Vous avez travaillé à Sarajevo ?
20 R. Oui.
21 Q. Est-ce que vous avez rencontré des collègues qui ont fait partie des
22 rangs de l'ABiH ?
23 R. Très souvent.
24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à ce qu'il y ait un peu de
25 pause entre les deux parce que sinon ils vont jouer au ping-pong et nous on
26 est la balle.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite, et les interprètes s'énervent.
28 Donc ralentissez et attendez avant de répondre.
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1 Mme NOZICA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais le témoin a
2 un tempérament qui fait qu'il a tendance à ne pas attendre que je termine
3 ma question.
4 Q. Je vais reformuler et je vous demande d'attendre. Monsieur Bagaric,
5 quel accueil vous a-t-on réservé en tant que médecin qui avait passé les
6 années de la guerre au sein du HVO ? Quel accueil vous a-t-on réservé parmi
7 vos collègues à Sarajevo, eux qui à cette époque-là avaient été au sein de
8 l'ABiH ? Est-ce que vous avez été accueilli correctement, est-ce que les
9 gens avaient de l'estime pour vous ? Est-ce qu'on vous respectait, est-ce
10 que vous êtes toujours traité de la même manière ?
11 R. Oui, j'ai fait mes études à Sarajevo et j'ai fait la connaissance de
12 nombreux confrères, et lorsque je suis retourné là-bas après la guerre, je
13 dois dire à ma satisfaction qu'aucun d'entre eux, bien qu'à certains
14 moments des affrontements en Bosnie-Herzégovine nous nous soyons trouvés de
15 deux côtés différents, aucun d'eux ne m'a attaqué ni n'a eu d'objection à
16 mes travaux. Tous m'ont dit qu'ils avaient entendu parler des tentatives
17 qui avaient été les miennes afin d'agir de façon positive. C'est ainsi que
18 les choses se sont présentées. J'ai toujours aujourd'hui des contacts avec
19 certains d'entre eux. Je pense qu'il y a notamment le cas d'un homme qui
20 habite aujourd'hui aux Etats-Unis dont j'ai des nouvelles à l'occasion de
21 Noël ou de Pâques, régulièrement, qui m'envoie une carte de vœu à ces
22 occasions. Il y a de nombreuses autres personnes qui sont dans la même
23 situation, et je les respecte également car en ces périodes difficiles ils
24 ont traité et soigné des patients.
25 Q. Merci beaucoup, Monsieur Bagaric. Cela conclut mon contre-
26 interrogatoire.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bagaric, au nom de mes collègues, je tiens
28 à vous remercier d'être venu à la demande de M. Stojic apporter votre
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1 concours à la manifestation de la vérité. Je formule mes meilleurs vœux de
2 retour dans votre pays; et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir
3 vous raccompagner à la porte de la salle d'audience.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Veuillez
5 m'excuser d'avoir souvent parlé un peu trop vite et peut-être un peu trop,
6 merci d'avoir eu la patience dont vous avez fait preuve.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de lever l'audience, je voudrais m'adresser à
8 Me Kovacic et à M. Praljak. Je me suis plongé dans les 24 classeurs que
9 vous avez fournis avec la liste des pièces en vue du témoignage de M.
10 Praljak et de la venue de vos témoins, et j'ai constaté que beaucoup de
11 documents n'étaient pas traduits. Est-ce que lorsque M. Praljak utilisera
12 les documents et vos témoins nous aurons les traductions, Maître Kovacic ?
13 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, tous les documents qui
14 seront utilisés lors de la déposition du général Praljak seront traduits,
15 du moins il était prévu qu'ils le soient selon notre calendrier et cela
16 devrait être le cas. C'est quotidiennement que notre équipe ajoute des
17 traductions dans le système e-court. Si ces dernières ne sont pas
18 disponibles au jour d'aujourd'hui, cela ne signifie pas qu'elles ne le
19 seront toujours pas dans quatre ou cinq jours. Or, comme vous le savez, la
20 déposition du général Praljak durera un certain temps.
21 Nous n'utiliserons pas de documents qui n'ont pas encore été traduits
22 sauf dans le cas où il s'agirait de quelque chose qui revêtirait une
23 importance cruciale. Auquel cas, nous recourrons à l'original. Comme vous
24 le savez, nous avons des possibilités limitées en matière de traduction et
25 nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour faire diligence.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic, comme je prépare depuis très
27 longtemps l'audition de M. Praljak, j'ai constaté le problème suivant :
28 Lorsqu'il a témoigné dans l'affaire Naletilic et lorsqu'il a répondu au
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1 contre-interrogatoire mené par M. Scott en personne, il a indiqué lorsque
2 deux documents lui ont été présentés, que ces documents étaient des faux.
3 Alors moi, à titre personnel, je vous serais gré de me fournir et de
4 fournir évidemment à mes collègues si ça les intéresse une liste des
5 documents qu'à votre niveau vous estimez que ce sont des faux.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Excusez-moi.
7 Nous n'avions pas prévu de préparer une liste à part de documents de
8 ce type. Il y en a quelques-uns, y compris les deux que vous venez de
9 mentionner, Monsieur le Président, je m'en souviens. Mais cela ne pose
10 aucun problème. Nous pouvons dresser cette liste, car il s'agit en tout et
11 pour tout de quelques documents dont nous pensons qu'il s'agit de faux,
12 pour être tout à fait franc. Vous vous souvenez certainement des écritures
13 que nous avons déposées en liaison avec un de ces documents, et il en sera
14 question également indubitablement.
15 Pour autant que je puisse m'en souvenir, à ce moment précis il y en aura
16 quelques-uns tout au plus. Nous pourrons en dresser une liste à part.
17 Peut-être que le général Praljak s'en souvient d'ailleurs mieux.
18 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Lorsque
19 l'on dit "quelques documents," "deux ou trois," j'ai toujours un peu de mal
20 à intégrer cela. Lorsqu'on dit deux ou trois c'est une chose, alors il y a
21 un, deux ou trois documents. Pour autant que je m'en souvienne, et je pense
22 que je m'en souviens, lors de ce débat M. Scott m'a présenté un document
23 assez rapidement, je peux dire que j'ai affirmé plus ou moins à la lettre,
24 Ce n'est pas mon style, ce n'est pas ma façon de m'exprimer, ce n'est pas
25 mon écriture, ce n'est pas ma signature. Bien que cela se soit passé assez
26 rapidement, aujourd'hui encore je me souviens de la signature et bien que
27 la personne qui ait rédigé ce document se soit efforcée d'imiter mon
28 écriture. La lettre R dans le patronyme Praljak avait été écrite d'une
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1 façon incurvée qui diffère de la façon dont moi je l'écris. Donc ça c'est
2 un faux.
3 Un autre faux dont je me souviens est un document où l'on voit que le 8
4 novembre 1993, dans la soirée, j'aurais inscrit mon approbation à la
5 requête de M. Mijo Jelic pour ce qui est de lui fournir des prisonniers aux
6 fins d'exécution de certains travaux.
7 Moi, en tant que général, je n'aurais jamais apposé ma signature
8 sous celle de M. Mijo Jelic. C'est l'un des documents de ce type, c'est un
9 faux. Je n'ai jamais approuvé la demande de quiconque allant dans le sens
10 d'envoyer des gens pour exécuter des travaux en général, et encore moins
11 sur les lignes de front; et moi je montrerai où je me trouvais le 8
12 novembre 1993 et au-delà, donc le 8 et le 9, un jour après mon départ de
13 cette zone.
14 Pour autant que je le sache, il y a deux faux. Je prie simplement que l'on
15 indique avec précision le nombre de documents dont il s'agit, puis nous
16 vérifierons.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans l'hypothèse où il y aurait des documents qui
18 seraient des faux, je dis dans l'hypothèse, comment se ferait-il alors que
19 ces documents qui ont été trouvés dans les archives de Zagreb, les archives
20 officielles, se seraient trouvés dans les archives officielles ? Est-ce
21 qu'à votre niveau vous avez mené une enquête ? Vous avez essayé de
22 comprendre comment on a pu introduire ce type de documents ?
23 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, bien sûr, nous allons
24 justifier cela très en détail dans notre mémoire en clôture, dans le cadre
25 de la Défense nous exposerons les faits nécessaires. Mais je peux vous dire
26 ici la substance de cette histoire.
27 Comme vous le savez certainement, et l'Accusation est tout à fait au
28 courant de cela, les documents du HVO de la HZ HB et de la HR HB sont
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1 arrivés d'une façon qui, jusqu'à présent, n'a été confirmée par personne.
2 Mais il est un fait que ces documents sont arrivés en République de
3 Croatie, si je vous dis peut-être maintenant en quelle année je vais peut-
4 être me tromper. Mais c'est vers la fin des années 1990. L'Accusation a
5 entrepris début 2000, et les équipes de la Défense juste après également,
6 ont entrepris d'avoir accès à ces documents et l'ont obtenu. Cela s'est
7 étendu pendant une certaine période de temps.
8 Mais ce qui compte c'est la chose suivante, on ne sait rien de précis
9 en dehors de rumeurs et de spéculations, mais pour autant que je le sache,
10 il n'y a toujours aucune preuve montrant le lieu où se trouvaient ces
11 quelques dizaines de milliers de documents entre la signature des accords
12 de Dayton et leur apparition à Zagreb.
13 Il me semble que c'est à au moins deux reprises que le Procureur dans
14 ce prétoire, et il a également versé un document à une occasion, c'est donc
15 à plusieurs reprises qu'il a avancé qu'en Bosnie-Herzégovine comme en
16 Croatie il y aurait eu des conspirations notamment au sein des services de
17 Renseignement. Bien entendu, je n'en sais rien et je n'ai pas l'intention
18 d'essayer de prouver qu'il y en ait eu ou pas. Bien entendu, il y a eu des
19 groupes d'individus et des individus au cours de toutes ces années entre
20 1994 et 2000 qui s'attendaient à être l'objet de poursuites. Il y en avait
21 qui avaient leurs intérêts propres pour dissimuler certains éléments ou
22 pour ajouter certains éléments. Je ne peux pas dire quoi que ce soit de
23 plus sur ce sujet, car je ne peux rien prouver en la matière.
24 Mais il y a un fait que j'ai l'intention de prouver. Peut-être que
25 vous l'aurez remarqué, il existe une déclaration signée et assermentée du
26 directeur d'alors des archives nationales de Zagreb d'où il ressort la
27 chose suivante, à savoir que les documents dont vous décidez ici de
28 l'authenticité ne sont pas authentiques simplement parce qu'ils portent le
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1 sceau des archives nationales. Cela ne suffit pas. Ce sceau ne fait que
2 confirmer la chose suivante, à savoir que ce document a été retrouvé dans
3 le contingent des documents émanant de la HZ HB aux archives nationales à
4 Zagreb, et qu'il a fait là-bas l'objet d'une copie. Quant à la question de
5 savoir si ce document est véritablement authentique, et la question de
6 savoir de quelle façon il est arrivé jusqu'aux archives, cela est inconnu,
7 et bien entendu nous en parlerons lors de l'exposé des moyens à décharge.
8 Il y a encore quelques détails sur lesquels je ne souhaiterais pas
9 m'étendre maintenant. Mais nous en tenons évidemment compte.
10 Il y a aussi un aspect juridique. C'est lors de notre mémoire
11 préliminaire déjà et lors des débats à une seconde reprise, nous avons
12 avancé un argument auquel il n'a jusqu'à présent pas été répondu, et qui
13 est le suivant : Puisque les deux parties à ces débats manipulent
14 littéralement plusieurs dizaines de milliers de documents, ce que vous
15 savez bien puisque acceptez le versement de bon nombre d'entre eux. Les
16 deux parties ont à manipuler des copies de documents qui sont parfois des
17 copies de seconde, troisième, cinquième ou dixième main. Si l'une
18 quelconque des parties au procès met en cause l'authenticité d'un document
19 donné, selon moi, et c'est également un point de vue qui est en accord avec
20 de nombreuses juridictions nationales, il faudrait produire l'original du
21 document contesté. Tant que nous sommes d'accord pour dire qu'une copie
22 déterminée d'un document donné est une copie authentique, il n'y a pas de
23 problème. Mais il s'agit tout de même d'une procédure au pénal, et si l'une
24 des parties déclare que ce document donné est un faux pour telle et telle
25 raison, alors l'autre partie devrait se voir demander de produire
26 l'original.
27 Dans l'écriture qui a été mentionnée précédemment où nous avons remis en
28 cause l'authenticité des documents qui ont été cités à l'instant par le
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1 général Praljak, ce document où il aurait apposé sa signature sous celle
2 d'une autre personne, nous avons fourni un exemple montrant comment on
3 procède à ce genre de falsification et à quel point cela est facile.
4 Si bien que ma position est la suivante, et je le répète, les documents qui
5 sont remis en question devraient faire l'objet d'une demande adressée à
6 l'autre partie lui demandant de produire l'original, et vice versa. Si
7 l'autre partie remet en question l'authenticité d'un document ou d'une
8 copie, nous, nous efforcerons d'en démontrer la véracité, l'authenticité
9 avec le concours du témoin, et si nous pouvons, nous produirons l'original.
10 Je vous remercie.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : -- arrêter le débat à ce stade. Nous aurons peut-
12 être l'occasion d'aborder les documents contestés lorsque vos témoins ou le
13 général Praljak témoignera.
14 Monsieur Praljak, de manière très courte, qu'est-ce que vous vouliez nous
15 dire ?
16 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge
17 Antonetti, je vous prie de bien vouloir -- en ce qui concerne la façon dont
18 ces documents sont arrivés aux archives nationales, la façon dont ils ont
19 été archivés. Je vous prie, de bien vouloir m'interroger, me poser des
20 questions à ce sujet, car j'ai ultérieurement travaillé à la constitution
21 des archives de l'armée croate après mon retour au mois de novembre, et je
22 sais très bien la façon dont on peut désigner quelque chose comme étant
23 matériaux d'archives et un --
24 M. KOVACIC : [interprétation] Je voudrais que l'on insiste ici sur la
25 distinction entre les archives nationales croates qui sont une source, la
26 source principale aussi bien pour l'Accusation et pour la défense. Et
27 l'autre archive que le général Praljak vient d'évoquer qui a également été
28 utilisée comme source de documents, même si cela concerne un nombre de
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1 documents moins importants, il s'agit d'une autre institution qui est celle
2 des archives militaires de la République de Croatie, et je voudrais que
3 l'on ne confonde pas ces deux institutions.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Nozica, la semaine prochaine, il y a donc le
5 témoin qui est prévu, deux heures d'interrogatoire principal, une heure
6 pour les autres Défenses, deux heures pour le Procureur.
7 Mme NOZICA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie.
8 Le témoin est arrivé, c'est le témoin qui avait des problèmes de santé la
9 dernière fois. Je n'ai pas encore pu le rencontrer, il vient d'arriver
10 aujourd'hui -- ou il doit arriver aujourd'hui. Et donc dès que nous le
11 pourrons nous procéderons au récolement afin qu'il soit prêt lundi.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : S'il n'y a plus de questions, je vais donc lever
13 l'audience, et nous nous retrouverons donc lundi à 14 heures 15.
14 --- L'audience est levée à 17 heures 33 et reprendra le lundi 27 avril 2009
15 à 14 heures 15.
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