Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 24 août 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à

 10   tous.

 11   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T le Procureur contre Prlic

 12   et consorts.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce lundi 24 août 2009, je salue M. Praljak, je

 14   salue M. Pusic qui est revenu, M. Petkovic, M. Stojic et M. Prlic. Je salue

 15   Mmes et MM. les avocats et je salue M. Stringer qui mène actuellement le

 16   contre-interrogatoire. Et je n'oublie d'associer également dans mes

 17   salutations tous ceux qui nous aident.

 18   Monsieur Stringer, je vous donne la parole.

 19   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à tous, bonjour aux avocats de

 23   la Défense et à tous dans le prétoire.

 24   Contre-interrogatoire par M. Stringer : [Suite]

 25   Q.  [interprétation] Général, bonjour.

 26   R.  Bonjour, Monsieur Stringer.

 27   Q.  Général, la semaine dernière, nous regardions la pièce P 04142.

 28   Vous n'avez pas votre classeur avec vous, à ce que je vois.


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  1   Je voudrais demander à l'huissier, s'il vous plaît, de bien vouloir vous le

  2   donner. Il s'agit donc du document, classeur liste 5. C'est le deuxième

  3   classeur qui nous intéresse à l'heure actuelle, le petit classeur. Il

  4   s'agit de la pièce 04142, pièce de l'Accusation.

  5   R.  C'est peut-être dans le deuxième classeur, le gros classeur. Je ne le

  6   trouve pas, en tout cas.

  7   Mme PINTER : [interprétation] C'est dans le gros classeur. C'est le dernier

  8   document du gros classeur.

  9   M. STRINGER : [interprétation] C'est peut-être le dernier document du gros

 10   classeur. Donc il s'agit de la pièce P 4142.

 11   Q.  Je vois que vous l'avez trouvé. Donc pour résumer ce que nous

 12   avons dit précédemment, il s'agit du programme d'instruction des recrues du

 13   HVO qui a été publié peu de temps après que vous ayez pris le commandement

 14   de l'état-major principal; c'est bien cela ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  La semaine dernière, alors que nous parlions de ce document, nous nous

 17   sommes penchés sur le document portant sur l'éducation au patriotisme,

 18   l'éducation à la patrie. Je voudrais vous poser des questions à propos des

 19   différents sujets qui tombent dans ce cadre. J'aimerais poursuivre cette

 20   discussion.

 21   Donc dans la version dans votre langue, il s'agit de trouver la page

 22   dont l'ERN se termine par 0839 qui correspond à la page 14 de la version en

 23   anglais. Vous l'avez trouvé ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Nous avons parlé de certaines de ces sections, on ne va pas revenir sur

 26   ce que nous avons déjà dit. Mais maintenant, j'aimerais que nous passions

 27   au bas de la page, que nous passions en revue les différents sujets. Je

 28   parle maintenant de la page 16 en anglais, il s'agit du numéro 1, ensuite


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  1   du numéro 2 portant sur les demandes de la Grande-Serbie en ce qui concerne

  2   les territoires croates. Puis, le sujet numéro 3, histoire du peuple croate

  3   et des territoires croates. Il s'agit de la page 17 dans la version en

  4   anglais.

  5   Donc nous parlions du sujet numéro 3 lorsque nous avons fait la

  6   pause. Il s'agit du programme d'instruction des recrues du HVO qui s'occupe

  7   de façon active d'opérations militaires dans le territoire de la HZ HB, en

  8   tout cas à ce moment-là, c'est-à-dire à la fin de l'été 1993. On voit qu'il

  9   est fait un grand de nombre de références au peuple croate, à la culture

 10   croate, à l'histoire croate dans cette zone. Mais il n'y a aucune référence

 11   en revanche aux autres nations, aux autres peuples qui habitaient cette

 12   région de la communauté croate d'Herceg-Bosna. Il n'y a aucune référence

 13   aux Musulmans, il n'y a même aucune référence non plus aux Serbes.

 14   R.  Non, je ne suis pas d'accord avec vous, Monsieur Stringer. Le point 1,

 15   par exemple, n'est qu'une introduction à l'histoire avec l'historique des

 16   villes et les demandes serbes sur les territoires croates. Il y a des

 17   détails à propos de nombre de livres portant sur ce sujet. Ensuite on parle

 18   du peuple croate, il y a des informations sur le peuple croate. C'est

 19   impossible d'étudier l'histoire des Croates si on n'étudie pas l'histoire

 20   des autres peuples qui cohabitaient avec eux. Au sujet numéro 3, par

 21   exemple, il est écrit de façon explicite, le terme "Yougoslavie" est

 22   employé.

 23   Q.  Bien. Passons maintenant à la page suivante, au sujet suivant, le sujet

 24   numéro 4 que l'on trouve à la page 18 de l'anglais. Le sujet numéro 4 est

 25   intitulé "Rôle et importance de l'Eglise dans la vie du peuple croate. Donc

 26   ce programme d'instruction des recrues du HVO comprend le baptême des

 27   Croates, le fait qu'il faut accepter le Pape comme étant l'autorité morale

 28   et spirituelle supérieure, la lutte pour la langue croate, la contribution,


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  1   les martyrs et les saints croates, et cetera, et cetera.

  2   Il est donc assez évident si on se base sur cet aspect même du sujet

  3   du programme que le HVO, votre HVO n'est pas une force laïque, que c'est

  4   une force armée qui est religieuse et qui a en tout cas une inclinaison

  5   religieuse assez forte, une inclinaison vers l'Eglise catholique qui plus

  6   est.

  7   R.  Non, c'est absolument faux, Monsieur Stringer. Ici, on parle certes du

  8   baptême des Croates qui sont arrivés dans cette région au VIIIe et IXe

  9   siècle. On parle aussi du rôle du Pape, Pape qui doit être accepté comme

 10   étant autorité supérieure et cela remonte au Xe ou XIe siècle, en tout cas,

 11   en ce qui concerne les Croates. Donc c'est de l'histoire, rien d'autre que

 12   de l'histoire. Tout pays européen occidental, quand on étudie son histoire,

 13   on doit se pencher sur la religion. Par exemple, le Chevalier de la St

 14   Barthélemy ne peut pas être interprété si on ne sait rien entre la relation

 15   entre les Ignauts [phon], les Catholiques et le Pape. Ici, il est fait

 16   référence aux Bogomiles, par exemple.

 17   Q.  Oui, à la fin, en effet, de ce sujet, il y a un dernier alinéa intitulé

 18   "Autres influences religieuses," vous nous avez parlé des Bogomiles; il y a

 19   aussi référence aux religions musulmanes et orthodoxes; religions donc des

 20   Serbes et des Musulmans. Mais cela dit, ce programme a pour but

 21   d'endoctriner les soldats du HVO pour en faire des combattants chrétiens,

 22   des combattants catholiques, qui plus est, alors que les autres religions

 23   n'ont pas vraiment d'utilité, en ce qui concerne le HVO, donc elles sont

 24   parfaitement neutres en ce qui concerne le HVO ?

 25   R.  Non, absolument pas, c'est faux. C'est en Croatie que la première

 26   mosquée a été construite dans les Balkans et ce lors de la Deuxième Guerre

 27   mondiale. Mais on ne peut pas dire cela en ce qui concerne les Croates. Il

 28   y a les 28 livres qui sont cités ici, c'était juste pour corriger certaines


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  1   erreurs qui étaient propagées dans l'histoire.

  2   Q.  Nous allons en venir à la bibliographie dans une minute. Maintenant, en

  3   ce qui concerne ce programme d'instruction, cela semble quand même indiquer

  4   qu'une recrue du HVO sera instruite, enfin, on exigera de lui qu'il accepte

  5   le Pape comme étant l'autorité spirituelle et morale supérieure. Donc on

  6   lui demande d'accepter la religion catholique.

  7   R.  Non, absolument pas, ce n'est pas du tout clair. Il s'agit uniquement

  8   de données historiques. Quand on étudie l'histoire, on doit étudier les

  9   faits, les faits historiques. Donc ce n'est pas comme ça qu'il faut

 10   interpréter les choses. Accepter le Pape en tant qu'autorité suprême, pour

 11   ce qui est de l'Eglise catholique, cela remonte au Xe siècle, c'est comme

 12   ça depuis le Xe siècle.

 13   Q.  Oui, mais ce n'est pas ce que je voulais vous dire. Moi ce que je vous

 14   dis c'est que le HVO et les conscrits du HVO devaient accepter le Pape

 15   comme étant l'autorité morale et spirituelle supérieure, n'est-ce pas ?

 16   C'est ainsi qu'on les instruisait ?

 17   R.  Non, non, ce n'est pas correct, ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai.

 18   Dès le départ, la Croatie a été un Etat laïc et la HZ HB est une

 19   organisation laïque aussi. Ici, il s'agit de sauver la Bosnie-Herzégovine.

 20   Mais enfin, ce que vous avez dit, on n'y voit référence nulle part.

 21   Q.  Très bien. Je vais quand même poursuivre. Page 19, maintenant, de

 22   l'anglais, il y est fait référence à l'Herceg-Bosna et la Croatie comme

 23   étant une seule entité. On en a déjà parlé d'ailleurs. C'était un problème

 24   qui a été soulevé par le Président de cette Chambre tout d'abord, ensuite

 25   j'y suis revenu, nous nous y sommes attardés longuement la semaine

 26   dernière. Je ne vais donc pas y revenir.

 27   Néanmoins, il faudrait peut-être regarder la bibliographie suggérée

 28   que l'on peut trouver à la page 20. Je ne vais pas passer cette liste en


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  1   revue, mais je vous affirme, une fois de plus, que le message semble

  2   simple. Le soldat croate -- non, je me reprends. Le soldat du HVO est un

  3   soldat, en tout cas, en ce qui concerne votre propre HVO, va être un soldat

  4   croate qui connaîtra bien la culture croate, l'histoire croate, le rôle que

  5   les Croates ont joué dans cette région et c'est un HVO qui exclut tout

  6   autre groupe, toute autre religion, comme l'Islam, qui exclut donc les

  7   Musulmans. Le HVO est censé être une force armée exclusivement orientée

  8   vers la Croatie et les Croates, n'est-ce pas ?

  9   R.  Non, c'est faux. Au point 5, il est fait référence à la guerre en

 10   Croatie et à la guerre en Bosnie-Herzégovine, donc à deux Etats. Donc sur

 11   les champs de bataille croates, on disait aux soldats qu'il s'agissait bien

 12   de deux Etats. Bien sûr, il y avait un lien stratégique entre ces deux

 13   guerres. Ça, on en a parlé, certes. Mais, Monsieur Stringer, je ne

 14   comprends absolument pas sur quoi vous vous basez pour tirer ces

 15   conclusions. Moi, je ne suis pas du tout d'accord avec vos conclusions,

 16   elles sont fausses.

 17   Q.  Bien. Vous n'êtes pas d'accord avec moi lorsque je vous dis que votre

 18   vision du HVO telle que vous l'avez établie dans ce programme d'instruction

 19   est un HVO qui exclut totalement la participation de non-Croates et qui

 20   exclut donc la possibilité d'une force armée multiethnique. Pour vous, il

 21   s'agira d'une force monoethnique et rien de plus, rien d'autre ?

 22   R.  Non, absolument pas. Cela n'a jamais été le cas en ce qui concerne le

 23   HVO. Et toutes les informations que vous avez eues démontrent bien que

 24   c'était la seule force armée multiethnique sur le territoire de la Bosnie-

 25   Herzégovine.

 26   Q.  Oui, mais pas en ce qui concerne le territoire de la communauté croate

 27   d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?

 28   R.  Lorsque je parlais du HVO, c'était que, où qu'il se trouve, c'était une


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  1   force armée multiethnique, du départ jusqu'à la fin. Bien sûr, un petit peu

  2   moins après que l'ABiH ait lancé l'attaque qu'elle a lancée. Donc elle a

  3   trahi la cause, si je puis dire. Mais il n'a jamais perdu son caractère

  4   multiethnique et ce partout. Partout où il y avait le HVO, ce HVO était

  5   ouvert aux Musulmans, tout comme aux Serbes d'ailleurs.

  6   Q.  Très bien, nous y reviendrons. Néanmoins, dans toute la zone opérative

  7   de l'Herzégovine du nord-ouest et du sud-est, il n'y avait absolument aucun

  8   Musulman dans les rangs du HVO en août 1993; ils avaient tous été arrêtés,

  9   on les avait désarmés suite aux ordres donnés par votre prédécesseur, le

 10   général Petkovic, n'est-ce pas ?

 11   R.  Il y avait moins de Musulmans dans les rangs du HVO après leur

 12   traîtrise le 30 juin ou un peu avant d'ailleurs, au moment de leurs

 13   préparatifs qui ont amené cette trahison. Mais ce n'est pas du fait du HVO,

 14   c'est parce qu'ils ont été trahis, le plan a été trahi le 30 juin. Les

 15   Musulmans dans le HVO -- enfin pas tous, mais certains ont attaqué le HVO

 16   par l'arrière. Ils ont désarmé les soldats et ont capturé les territoires

 17   qui jusque là ils étaient en train de défendre conjointement.

 18   Q.  Bien. Passons maintenant au chapitre suivant de ce programme

 19   d'instruction intitulé : "Le soldat au sein des forces armées de la HZ HB."

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Un instant.

 21   Général Praljak, le Procureur a mis l'accent sur la question

 22   religieuse, l'influence de l'Eglise catholique, et on voit dans la liste,

 23   page 18 en anglais, le rôle d'un dénommé Alojzije Stepinac. Comme vous le

 24   savez, il était cardinal à Zagreb, il a été déclaré martyr et béatifié par

 25   le Pape, mais en 1946 les autorités yougoslaves l'avaient fait condamner

 26   comme ayant collaboré avec les Oustachi. C'est de notoriété publique. Alors

 27   le fait de le citer dans un document à destination des soldats qui, a

 28   priori, n'ont pas de religion marquée, même s'ils sont majoritairement


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  1   catholiques, n'était-ce pas créer un signal ? Pourquoi une référence à ce

  2   cardinal ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour son autorité morale, principalement. J'ai

  4   traversé la vie et les œuvres de ce cardinal. Au cours de la Deuxième

  5   Guerre mondiale, je sais quelle était son attitude, ce qu'il a fait après

  6   aussi. Il a été empoisonné en prison et il en est mort. Son garde était M.

  7   Manovic, M. Manovic qui a témoigné ici. C'était lui qui l'a gardé lorsqu'il

  8   était en prison. Ensuite, il a été canonisé. Du fait de son attitude morale

  9   qu'il avait exprimée au Tribunal, il a toujours dit que sa conscience était

 10   claire, bien sûr, et je répète cela devant ce Tribunal, je ne vais pas me

 11   comparer bien sûr avec le cardinal, bien sûr que non. Mais c'était du fait

 12   de son attitude, et c'est d'ailleurs pour cela que je voulais faire

 13   référence à cette autorité morale. Au point 7, il est bien écrit qu'il faut

 14   être tellement dévoué qu'il faut avoir une attitude morale correcte, qu'il

 15   faut obéir et qu'il faut être en faveur de la paix, de la démocratie, de la

 16   liberté, et cetera. C'est un texte que j'applique parfaitement et je suis

 17   parfaitement d'accord avec ce texte. Il ne s'agit absolument pas

 18   d'endoctrinement religieux, absolument pas.

 19   Vous voyez sur la liste des bibliographies qu'il y a toutes sortes de

 20   personnes. Dusan Bilandzic, qui était un communiste, il est inclus. Le

 21   livre de Bilandzic qui était un communiste, donc s'il avait été un

 22   idéologue on n'aurait pas pu faire référence à lui au sein du HVO.

 23   Enfin, je ne veux pas y revenir.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous c'était une autorité morale. Bien. Le

 25   Procureur vous l'a signalé, mais il n'a pas insisté.

 26   On voit également que vous avez évoqué le rôle des autres religions;

 27   Bogomiles, Islam, religion orthodoxe. A votre connaissance, qui instruisait

 28   les soldats de l'existence de ces autres religions ? Vous faisiez venir des


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  1   imams, des religieux orthodoxes pour expliquer cela ? Qui enseignait ces

  2   autres religions ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est les professeurs d'histoire qui s'en

  4   occupaient. Il n'y avait pas de théologiens, de professeurs venant

  5   d'Eglises, ni de l'une ni de l'autre d'ailleurs. Non, tous les instructeurs

  6   étaient des laïques. C'était des professeurs, des universitaires, enfin des

  7   professeurs d'histoire, et c'est eux qui s'en occupaient. Mais lorsqu'un

  8   sujet est abordé, par exemple, lorsqu'on parle de l'histoire de France, il

  9   faut parler bien sûr de la relation avec les Allemands et avec les

 10   Espagnols, on ne peut pas dire on va uniquement étudier l'histoire de

 11   France ou l'histoire de l'Espagne, et cetera. Lorsqu'on étudie l'histoire

 12   d'un pays, il faut toujours étudier les relations qu'a un pays avec un

 13   autre. En ce qui concerne l'Eglise catholique, les églises ont toujours

 14   joué un très grand rôle dans la création des Etats modernes. Il ne s'agit

 15   absolument pas d'endoctrinement, rien du tout, absolument pas. C'était fait

 16   pour préserver la culture et la langue d'un pays, un bastion, absolument

 17   pas. Il fallait étudier un peu de tout. Il n'y avait absolument aucun homme

 18   de robe qui faisait l'instruction dans le cadre des séminaires organisés

 19   dans les académies militaires.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Très bien.

 21   Monsieur Stringer. 

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je peux aller un peu  plus loin.

 23   Vous avez dit que l'Eglise, l'Eglise en général a toujours joué un

 24   rôle extrêmement important dans l'histoire de tous les Etats modernes.

 25   Veuillez un petit peu nous expliquer ce que vous voulez dire par là. Quelle

 26   importance a joué l'Eglise en ce qui concerne les Bosniaques et les Serbes.

 27   Parce que ce que vous racontez est tout à fait convaincant en ce qui

 28   concerne les Croates, mais qu'en est-il des Serbes et des Musulmans, et des


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  1   Bosniens en tout cas ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] La situation était identique pour eux,

  3   Monsieur le Juge Trechsel. Quelle que soit la façon dont on aborde les

  4   choses, la conquête ottomane est partie de l'est vers l'ouest, et la

  5   religion est arrivée du fait de la conquête. Les personnes ont été

  6   converties ensuite du fait de cette conquête, et ceci a duré des siècles,

  7   jusqu'au XIXe siècle. Je peux vous donner des preuves. Il y a eu des

  8   conversions à Mostar encore et à Dreznica au XIXe  siècle. Après la fameuse

  9   bataille du Kosovo, lorsque les Turcs ont battu les Serbes, un grand nombre

 10   de Serbes ont quitté cette région et sont partis en Hongrie. Sous

 11   Carnojevici, ils se sont retirés sur les territoires hongrois. Ensuite, ils

 12   se sont enfuis vers l'ouest, et ce pendant des trois siècles. Ils

 13   n'arrêtaient pas --

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'essaie de vous interrompre parce

 15   que là vous digressez, vous ne répondez absolument pas à ma question.

 16    Tout ce que vous nous avez dit, le fait qu'une personne était convertie à

 17   l'Islam, vous parlez de ce qui est arrivé aux Serbes, vous nous dites que

 18   tout ceci est l'œuvre principalement de l'Eglise catholique, puisque c'est

 19   cette Eglise qui est d'une importance essentielle dans la création de tous

 20   les Etats; c'est cela ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, non, je

 22   ne peux pas vous expliquer quatre siècles d'histoire en trois phrases. Je

 23   ne peux pas tout résumer. La conversion, c'était le fait des Ottomans. Ils

 24   emmenaient les enfants au --

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous ne répondez pas à ma question.

 26   Cela me suffit.

 27   Maintenant, Monsieur Stringer, vous pouvez reprendre.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas quelle est votre question.


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  1   Evidemment, ce n'est pas l'Eglise catholique qui a converti qui que ce

  2   soit. Ce sont les Ottomans qui ont demandé la conversion, qui ont obligé à

  3   la conversion d'orthodoxes et de catholique d'ailleurs. C'est ainsi qu'on a

  4   eu des Musulmans en Bosnie-Herzégovine. D'autres personnes sont arrivées

  5   d'Istanbul pour servir et avoir des fonctions administratives et lorsque

  6   l'empire est tombé, ils sont rentrés chez eux.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Cela ne contribue absolument pas à

  8   éclaircir la situation.

  9   Monsieur Stringer, veuillez reprendre, s'il vous plaît.

 10   M. STRINGER : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Oui, je voudrais que nous revenions à quelque chose que vous avez dit

 12   lorsque vous répondiez à l'une des questions du Président de la Chambre.

 13   En ce qui concerne le rôle de l'Eglise, il a dit que c'était parfois le

 14   seul bastion permettant de préserver la culture et la langue de certaines

 15   personnes ou d'un certain peuple dans un territoire précis, donc c'est ce

 16   qui a été étudié. Ça se trouve en haut de la page 11 du transcript

 17   d'aujourd'hui. Vous nous parliez du rôle qu'avait joué l'Eglise catholique

 18   pour préserver la culture et la langue. J'imagine que là vous faites

 19   allusion bien sûr à la langue et à la culture croate. Lorsque vous nous

 20   dites tout cela, lorsqu'on lit tous les textes, l'on voit bien finalement

 21   que le HVO devait lui aussi joué ce même rôle. Donc les forces armées

 22   avaient un rôle à jouer et c'était de préserver la culture et la langue

 23   croate dans ces territoires croates auxquels il est fait référence dans ce

 24   programme d'instruction, n'est-ce pas ?

 25   R.  Monsieur, mais nous ne sommes pas une tribu pour que le HVO soit appelé

 26   à sauvegarder la langue croate. D'une certaine manière, je trouve votre

 27   question offensante, mais j'y répondrai puisque je suis tenu d'y répondre.

 28   Nous ne sommes pas une tribu, nous sommes un peuple, un peuple qui


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  1   possède déjà sa langue. Je vous parle d'une histoire difficile, pénible,

  2   qui s'étend sur des siècles. Malheureusement, nous sommes appelés à en

  3   parler en trois ou quatre minutes. Des questions, on a du mal à les

  4   comprendre, donc il m'est difficile d'y répondre. Les Croates, à ce moment-

  5   là, ils avaient leur langue et elle s'appelait la langue "croate."

  6   Q.  Je vais reformuler ma question. Je sais que ce sujet peut être

  7   délicat. Nous en avons parlé, pas seulement vous mais d'autres également

  8   parlaient de la situation démographique qui change, du pourcentage des

  9   Croates qui diminue dans les différentes parties de Bosnie-Herzégovine.

 10   Vous en avez parlé vous aussi de ce qui a été votre objectif, à savoir de

 11   créer une zone autonome croate où la population croate serait majoritaire.

 12   Donc si on garde à l'esprit ces deux éléments, Monsieur Praljak, Général,

 13   est-ce qu'on peut se mettre d'accord sur le fait que vous pensiez que le

 14   HVO serait une force armée appelée à protéger et à renforcer, à consolider

 15   cette zone autonome croate dont vous parliez, ce serait un moyen de

 16   préserver la langue croate et la culture croate dans les territoires où

 17   existerait la HZ HB ?

 18   R.  L'option politique a évolué, à commencer par le plan Cutileiro. Il y a

 19   eu des propositions pour l'essentiel qui ont été avancées par la communauté

 20   internationale. Il y a eu des entretiens, et je ne vais pas en reparler

 21   puisque nous avons répété cela à de nombreuses reprises. Je ne vois pas ce

 22   qu'on serait appelé à défendre. Nous possédons cette culture. En tant que

 23   peuple, nous faisons partie d'un certain cercle culturel, nous parlons une

 24   langue qui a un nom, une appellation, comme tous les peuples. Les Croates

 25   ont donné un nom à leur langue. Je ne vois pas vraiment -- je ne suis pas

 26   d'accord avec vos thèses qui sont inexactes. Mais je ne vois pas ce que je

 27   pourrais répondre à votre question, puisque de la manière dont vous les

 28   poser, on aurait la sensation que ça constitue un crime de faire partie


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  1   d'un peuple, de combattre pour la liberté d'un Etat et tous les autres

  2   également qui vivent dans ces contrées, là où les Croates ont décidé de se

  3   défendre l'arme à la main, pour se défendre soi-même et d'autres également

  4   à défaut de tout autre possibilité, sur le plan international ou hélas de

  5   la part du pouvoir complètement isolé à Sarajevo qui avait d'autres options

  6   face à cette occupation serbe.

  7   Donc compte tenu de la situation, le HVO a fait la seule chose correcte

  8   qu'il pouvait faire. Il a protégé tout ce qu'il a pu protéger, il a

  9   combattu l'agression, il a préservé la Bosnie-Herzégovine --

 10   Q.  Je vous remercie, Général. Passons brièvement au chapitre suivant en

 11   bas de la page 22 où il est question des "militaires de la HZ HB." C'est en

 12   bas de la page 22. Je vais parcourir rapidement les pages 23 et 24. Dans

 13   votre version, vous aurez ERN 0843, les quatre derniers chiffres.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous restez toujours à la question religieuse, parce

 15   que comme mes collègues, on essaie de comprendre l'importance de la

 16   religion.

 17   Comme vous le savez, vos avocats ont dû vous dire que quand la Chambre

 18   s'est déplacée, on est allés sur la colline de Hum où se trouve cette

 19   grande croix au-dessus de Mostar, et nous étions là avec vos avocats et

 20   tous les avocats ici présents, et de cet emplacement nous regardions

 21   Mostar. Etant sur place, je me posais la question de savoir : quel pouvait

 22   être l'impact de cette croix sur la mentalité d'un Musulman de Mostar qui

 23   voyait au-dessus de sa tête cette croix ? Comment pouvez-vous nous

 24   expliquer l'équilibre qui pouvait exister entre les uns et les autres de

 25   confessions différentes et notamment au travers d'un document comme celui

 26   que vous avez signé ? Comment arriver à ce qu'il y ait un équilibre dans

 27   toutes ces religions ? Et en un mot, est-ce que ce document va dans le sens

 28   d'un équilibre ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] La croix date d'après la guerre sur la colline

  2   de Hum, Monsieur le Président, comme on a détruit de nombreux édifices

  3   religieux pendant la guerre. Pour autant que je sache, il y a 1 000

  4   édifices appartenant à l'Eglise catholique qui ont été soit gravement

  5   endommagés soit détruits pendant la guerre en question. J'ai apporté des

  6   documents à l'appui et cela peut être facilement vérifié. Je ne vois pas à

  7   quoi ça servirait qu'on se sente gêné par cette croix. Je ne vois pas

  8   pourquoi. Puis vous avez je ne sais pas combien de nouvelles mosquées à

  9   Mostar. Je ne vois pas qui se trouverait offensé par cela. Je pense que 20

 10   nouvelles mosquées ont été construites à Sarajevo, des centaines en Bosnie-

 11   Herzégovine. Bien sûr, une aide colossale a été apportée par l'Arabie

 12   saoudite, par le Koweït, et cetera. On en a parlé. Je ne dis pas c'est

 13   quelque chose dont on parle aujourd'hui, mais les édifices réservés à la

 14   religion et une église orthodoxe est en train d'être construite dans la

 15   vieille ville, très, très grande, sur une colline qui se situe à l'opposer

 16   du mont Hum. Si on commençait à calculer de cette manière, je ne vois pas

 17   où ça nous mènerait. Vous avez trois religions à Sarajevo, chacune a ses

 18   propres édifices religieux. Je ne vois pas à quoi ça servirait de débattre

 19   de cela, est-ce que les Musulmans sont gênés par le fait qu'on hisse une

 20   croix ou l'inverse. Il ne resterait plus rien à la Bosnie-Herzégovine avec

 21   ce raisonnement.

 22   Et puis je répète pour ce qui est des sujets qui sont abordés ici, ces

 23   sujets sont tout à fait innocents sur le plan de la doctrine. Il n'y a rien

 24   dedans, c'est un aperçu historique qui a été rédigé par des professeurs qui

 25   ne sont pas des religieux. C'est une bibliographie tout à fait régulière,

 26   rien de mal là-dedans. Et encore une fois, je souscris aujourd'hui à cela

 27   et je le fais avec fierté, parce qu'il n'y a aucun mal là-dessus sur le

 28   plan de l'éthique, l'honnêteté, ce qu'on y prêche, sur le plan technique,


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  1   tout est correct.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

  3   M. STRINGER : [interprétation]

  4   Q.  P 01788, nous ne reprendrons pas le document, mais c'est un document

  5   que nous avons déjà examiné. Et on y trouve le PV d'une réunion de Bosnie

  6   centrale. Il y a vous, M. Coric et d'autres personnes présentes à cette

  7   réunion. Ce que vous dites dans ce document - mais là je paraphrase, c'est

  8   évident puisque je ne l'ai pas sous les yeux - vous dites quelque chose qui

  9   va dans le sens suivant : voilà comment nous allons faire. Nous allons

 10   défendre ce qui nous appartient, et ceux qui n'aiment pas cela sont libres

 11   de partir. Et nous retrouvons cette même approche ici lorsque vous parlez

 12   du HVO, Général, l'on voit que vous ne cherchez pas à établir un équilibre,

 13   comme l'a dit le Président Antonetti. Il n'y a pas d'équilibre dans ce

 14   document d'instruction. Il n'y a pas de souhait de prendre des dispositions

 15   pour que les différentes cultures, les différentes religions, les

 16   différents groupes ethniques qui pourraient, qui le souhaitent peut-être,

 17   prendre la défense des territoires de la communauté croate, n'est-ce pas

 18   vrai ? L'intention du HVO, votre vision des choses c'est de ne pas avoir un

 19   équilibre. Seulement les catholiques croates vous intéressent. N'est-il pas

 20   vrai de dire cela ?

 21   R.  Monsieur Stringer, ce n'est pas vrai. Vous m'avez reposé la même

 22   question X fois. Où est-ce que cela est écrit ? Montrez-le-moi. Ce n'est

 23   pas exact. Vous ne pouvez pas, pendant la Seconde Guerre mondiale, à

 24   l'armée américaine dire : Apprenons Mozart, Beethoven, Goethe, à quel point

 25   ils sont fantastiques et excellents. On apprend l'histoire américaine, à ce

 26   moment-là. Et on essaie de ternir l'image de l'ennemi. On emploi des

 27   termes, je ne vais pas vous les citer, si je vous citais les termes pour

 28   qualifier l'ennemi à l'époque. Nous sommes une armée tout à fait civilisée,


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  1   de ce point de vue-là. Vous auriez pu lire des articles en France, ou les

  2   rapports d'Hemingway, ou ses réflexions sur les Allemands après la Deuxième

  3   Guerre mondiale. Mais de quoi parle-t-on ? C'est la guerre. Il n'y a pas de

  4   propagande ici. C'est tout à fait civilisé comme texte par rapport à

  5   d'autres peuples qui se sont trouvés dans des situations identiques.

  6   Et ce que vous dites que j'ai dit, non, ça a été noté par un homme

  7   comme quoi ça aurait été mes propos, et c'était quelqu'un d'à peine lettré.

  8   Très certainement il ne peut pas transmettre toute la subtilité de mes

  9   propos, même ici on ne peut pas l'interpréter. Comment voulez-vous que lui,

 10   il le capte. Je n'ai pas dit cela de cette manière.

 11   Q.  C'est la thèse de l'Accusation sur la base de ce document. Je

 12   vous l'ai soumise, donc je ne pense pas qu'il nous appartient de poursuivre

 13   le débat là-dessus. Donc je vais passer au chapitre suivant.

 14   R.  Je ne suis pas d'accord.

 15   Q.  En bas de la page 23 et page 24, nous voyons le programme des

 16   militaires du HVO. Il semblerait que c'est l'instruction de base, la

 17   formation de base. On enseigne aux soldats comment ils doivent se comporter

 18   en tant que soldats. Nous voyons les différents sujets, les droits et

 19   obligations des membres des forces armées, l'armée, la discipline, et ça

 20   continue; crimes contre les forces armées. Et nous pouvons examiner

 21   certains de ces titres, de ces chapitres. Mais seriez-vous d'accord avec

 22   moi, Général, pour affirmer qu'il n'est pas fait référence ici aux droits

 23   de la guerre ? Donc il n'y a pas de sujet spécifique. Et en fait, ce que je

 24   vais affirmer à votre intention c'est que dans l'ensemble de ce programme

 25   d'instruction, il n'y a pas de droit humanitaire international.

 26   R.  Cela n'est pas exact. Parmi les devoirs des membres du HVO, pour ce qui

 27   est de la responsabilité morale des membres au point 1, point 6, point 7,

 28   crimes contre les forces armées, pas contre le HVO mais contre n'importe


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  1   quelle force armée, donc chacune de ces parties. Et puis il y a eu des

  2   séminaires spécifiques où on a porté à la connaissance de chacun des

  3   militaires les fondements du droit international.

  4   Q.  Mais le fait est que dans ce manuel d'instruction expressément et

  5   explicitement, rien ne parle du droit de la guerre. Donc il y a des

  6   références, il y a des références qui sont faites aux crimes contre les

  7   forces armées. Mais par exemple, ça pourrait correspondre à un refus

  8   d'accepter la mobilisation ou un manquement à la discipline lorsqu'on sort

  9   l'arme en ville, lorsqu'on n'a pas le droit de le faire. Donc là encore,

 10   ouvertement dans ce document, explicitement, rien ne parle du droit de la

 11   guerre. On ne forme pas les hommes à cela; n'est-ce pas exact ?

 12   R.  Ce n'est pas exact. Les droits fondamentaux et les devoirs des membres

 13   du HVO parlent de ce que vous venez de mentionner, à savoir le port d'arme,

 14   la discipline, et cetera. Les actes criminels contre les forces armées, ce

 15   n'est certainement pas le fait de porter une arme lorsqu'on est en

 16   permission, mais tout simplement on aborde la question de la responsabilité

 17   morale. C'est plus vaste que la responsabilité pénale en application du

 18   droit international de la guerre.

 19   Q.  Donc vous êtes en train de nous dire, Général, qu'en fait, vos

 20   conscrits ont reçu un enseignement qui était plus étendu, plus général, qui

 21   ne ciblait pas spécifiquement certains sujets qui concernent le conflit

 22   armé ou le droit de la guerre. Et puis vous évoquez des questions de

 23   morale. Je suppose que, par exemple, cela pourrait comprendre le fait qu'il

 24   ne faut pas incendier les propriétés appartenant à des civils lorsque cela

 25   ne constitue pas une cible militaire légitime. Je ne vois pas explicitement

 26   en quoi on aborde ici le droit international humanitaire. Le simple fait de

 27   leur dire de se comporter correctement moralement, est-ce que cela recouvre

 28   cela ?


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  1   R.  Monsieur, le droit de la guerre en fait également partie, donc je n'ai

  2   pas dit exclusivement. On en a parlé exclusivement, non, je dis

  3   inclusivement. On a parlé de cela et de cela, donc des sujets plus

  4   spécifiques et des sujets plus généraux. Donc tout simplement, vous avez

  5   choisi des sujets qui n'évoquent pas spécifiquement ce que vous vouliez

  6   qu'ils évoquent et ça vous permet de tirer la conclusion qu'on n'en a pas

  7   parlé du tout, et ce n'est pas exact.

  8   Q.  Oui, Général.

  9   R.  Et on a vu cela évoqué précédemment.

 10   Q.  Page 28 de la version anglaise, c'est le sujet suivant. Donc c'est dans

 11   votre programme sur ceux qui suivent l'instruction. Page 0845. Nous avons,

 12   page 28, la case qui comporte tous ces sujets pertinents. Et là encore on a

 13   les sujets de base pour les nouveaux soldats. Et ici on ne voit pas de

 14   droit de la guerre non plus. Vous êtes d'accord avec moi ?

 15   R.  Monsieur, mais c'est un tout autre sujet, une toute autre partie dont

 16   il s'agit ici, à savoir comment opère une unité, s'il faut enseigner à

 17   quelqu'un le salut, les positions, le garde à vue, et autres, comment il

 18   s'alignera ou creusera une tranchée. Mais vous ne pouvez pas, dans ces

 19   chapitres, aborder les sujets qui vous intéressent. Ce sont des choses bien

 20   sûr distinctes.

 21   Q.  Très bien, je l'admets. Simplement, j'essaie de préciser où dans ce

 22   programme le droit international humanitaire ferait l'objet de

 23   l'enseignement. Je veux dire, c'est clair que les nouveaux soldats il faut

 24   bien leur enseigner d'autres choses. Et puis nous avons les armes, les

 25   pièces d'infanterie, et les exercices de tir, pages 30 et 31 en anglais.

 26   Bien sûr, ce sont des sujets tout à fait nécessaires et légitimes dans le

 27   cas d'une instruction. Vous êtes d'accord pour dire que le droit

 28   international humanitaire ne fait pas partie de cette section non plus ?


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  1   R.  Bien sûr. Si on cherche à enseigner à quelqu'un le tir, pendant qu'on

  2   lui enseigne cela, pendant l'entraînement, on ne parle pas de droit

  3   humanitaire. On en parle avant, après, en parallèle dans les salles, là où

  4   on aborde ce type de sujet. Je ne comprends pas votre question.

  5   Q.  Très bien. Page 38 en anglais, page 0850 dans la version originale.

  6   Général, vous avez ici une liste de sessions de formation tactique. Nous

  7   avons toute la série de 29 sujets. Nous pourrions nous pencher sur tout

  8   cela mais nous n'allons pas le faire. Ce qui a particulièrement attiré mon

  9   attention c'est le 22, "Combat en zones habitées," parce que c'est évident

 10   que des questions de droit humanitaire sont liées à cela. Page 58 en

 11   anglais, page 0858 dans votre texte, Général. Numéro 22, point 22 : "Combat

 12   en zones habitées."

 13   Et là encore, on a le déplacement dans les zones habitées, les

 14   caractéristiques du combat, déplacements à l'intérieur des bâtiments, les

 15   positions à l'intérieur des bâtiments. Donc il n'est pas fait référence aux

 16   civils ici, Général. On mesure que le droit international exige lorsque les

 17   civils sont présents dans les zones où il y a risque de combat ou un combat

 18   est en cours. Donc vous êtes d'accord, il n'y a pas de référence au droit

 19   humanitaire international ici ?

 20   R.  C'est inexact. Là, on leur enseigne à protéger des soldats, à s'emparer

 21   d'une maison ou d'un immeuble d'où on tire. Ça fait partie d'une

 22   instruction tactique. Monsieur Stringer, c'est identique dans l'armée

 23   américaine. Lorsque vous procédez à une formation tactique, on n'évoque pas

 24   le droit ou des dilemmes moraux de combat en situation où il y a des

 25   civils, nulle part dans la doctrine américaine. Ça n'est bien résolu non

 26   plus parce que c'est la quadrature du cercle. Il est important à la fois de

 27   conquérir quelque chose et d'autre part de ne pas porter un tort aux

 28   civils. Alors ce qui se passe dont nous sommes témoins, à savoir


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  1   aujourd'hui des victimes des dégâts collatéraux immenses. Et je pense que

  2   tout le monde présent dans ce prétoire en sait au moins autant que moi.

  3   Q.  Bien entendu, c'est clair, Général, et ce sont des sujets de formation

  4   tout à fait légitimes. Mais ce que je vous soumets c'est qu'il y a des

  5   questions tout à fait complexes qui ont à voir avec le droit international

  6   humanitaire lorsqu'il s'agit de combat en zones habitées. Est-ce que vous

  7   êtes d'accord avec moi pour dire que cela ne figure pas dans cette partie

  8   du programme ?

  9   R.  Non, nous ne pourrions pas nous mettre d'accord. C'est la partie

 10   d'enseignement tactique, et puis à un autre moment ces mêmes hommes ont

 11   reçu un enseignement sur ce que vous êtes en train de dire, à savoir la

 12   conduite sur le terrain. Et je vous ai dit dix fois pour ce qui est du HVO

 13   à Mostar pendant que moi j'étais sur le terrain. Par rapport à la

 14   légitimité des cibles que nous avions face à l'ennemi, nous avons fait

 15   preuve d'un comportement tout à fait civilisé, bien au-delà des exigences

 16   du droit international sur ce plan et sur le plan positif, j'entends.

 17   Q.  Je pense que vous m'avez répondu. Donc vous dites que la formation sur

 18   le plan du droit international humanitaire c'est quelque chose qui se

 19   faisait ailleurs, à un autre moment. Vous voulez dire qu'il y a eu un

 20   enseignement séparé réservé à cela et que cela n'est pas contenu dans ce

 21   programme d'instruction que nous sommes en train d'examiner ?

 22   R.  Monsieur, c'est contenu dans ce programme d'instruction. Je vous ai dit

 23   où, seulement pas au moment où on procède à une instruction tactique où on

 24   enseigne à quelqu'un à ramper, à tirer, à couvrir un camarade d'arme. C'est

 25   l'instruction tactique et tout militaire doit recevoir ce type de

 26   formation. Donc il n'y a que ça qu'on lui enseigne à un moment donné.

 27   Q.  Très bien.

 28   R.  Et pendant que j'étais sur place, vous avez vu la proposition de la


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  1   Croix-Rouge même au moment des intensités les plus fortes. Nous avons mené

  2   des séminaires supplémentaires sur le droit international humanitaire. On a

  3   repris ce sujet.

  4   Q.  Andrew Pringle, vous vous en souviendrez, est venu déposer en tant que

  5   témoin expert en l'espèce, Général ?

  6   R.  Oui, je me souviens de ce monsieur.

  7   Q.  La pièce suivante, P 09549. Je pense que c'est la première pièce dans

  8   le classeur suivant. Général, le paragraphe 47, s'il vous plaît, du rapport

  9   du général Pringle. Dans votre version en croate, page 20, page 13 dans

 10   l'original en anglais. Voilà ce que dit le général Pringle dans ce

 11   paragraphe 47. Je ne pense pas que la première partie est sujette à

 12   controverse. Il dit :

 13   "Les soldats et en particulier lorsque sur le champ il va y avoir un

 14   conflit, devraient être formés pour savoir comment se comporter à l'égard

 15   des civils et des prisonniers de guerre, et ils doivent connaître leurs

 16   obligations par rapport aux droits de la guerre. C'était reconnu au sein du

 17   HVO et c'est ce qui ressort du programme réservé à l'instruction des

 18   militaires. L'instruction obligatoire comprenait les sujets comme

 19   'soldats', 'prisonniers de guerre', 'comportement à l'égard des prisonniers

 20   de guerre, la fouille des prisonniers', 'la capture des prisonniers, des

 21   militaires ou des officiers, la capture de l'ennemi'. Et le respect des

 22   conventions de Genève et du droit international de la guerre a été

 23   recommandé au niveau le plus élevé de la HZ HB." Et là il se réfère dans

 24   une note en bas de page au décret portant sur les forces armées. Et le

 25   général Pringle dit :

 26   "Je n'ai vu aucune référence dans les documents qui m'ont été soumis

 27   par le Procureur, aucune référence eu égard à l'obligation de faire porter

 28   à la connaissance des militaires leurs obligations juridiques et leurs


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  1   obligations par rapport aux droits de la guerre."

  2   Et il parle de règlements de la JNA tout à fait détaillés qui

  3   auraient pu servir de référence pour ce genre d'instruction.

  4   Donc nous voyons ici, Général, dans cette note de bas de page

  5   précédente, 4 142, que l'un des documents qu'il a eu à sa disposition est

  6   ce même programme d'instruction que nous venons d'examiner. Donc le général

  7   Pringle, après l'avoir étudié, arrive à la conclusion qu'on ne cherche pas

  8   à former les militaires pour qu'ils connaissent leurs obligations

  9   juridiques ou leurs responsabilités conformément aux droits de la guerre.

 10   Donc est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que c'est quelque

 11   chose qu'il faut chercher ailleurs, mais que cela n'est pas contenu ici ?

 12   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, je dois absolument

 13   élever une objection ici à la suite de la question posée par M. Stringer

 14   puisque le document que nous avons vu il y a quelques instants c'est le

 15   document -- en fait, il y a un point dans le document, c'est le paragraphe

 16   21 que M. Stringer n'a pas montré au général Praljak et c'est là que l'on

 17   parle du comportement envers les prisonniers ou les détenus. Ce point

 18   s'appelle : ratissage du terrain et combat en forêt, comment se comporter

 19   avec les personnes arrêtées, blessées et tuées. Donc si on montre au

 20   général un document, les conclusions du témoin expert, M. Pringle, et si on

 21   pose ce type de question, il serait plus juste de lui montrer également le

 22   point 21 où l'on parle explicitement de ce type de chose, c'est-à-dire à

 23   savoir de quelle façon se comporter avec les détenus et les blessés et

 24   ainsi de suite.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me permettez

 26   également une petite objection, au point 24 du document que nous avons

 27   analysé ensemble il y a quelques instants, on parle de l'emprisonnement des

 28   officiers soldats ennemis et il y a d'autres mentions sur le document. Et


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  1   en réalité, c'est également une objection de l'équipe de Défense du général

  2   Petkovic.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais laisser M. Stringer répondre aux objections.

  6   Il semblerait, Monsieur Stringer, que d'après la Défense, il y a des

  7   mentions explicites dans le document sur le traitement des prisonniers.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Je peux répondre, Monsieur le Président.

  9   J'ai remarqué que l'un des accusés voulait dire quelque chose. Je ne sais

 10   pas si le général Petkovic voulait ajouter quelque chose, voulait prendre

 11   la parole.

 12   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble

 13   que le général Praljak a oublié dans tout ceci quels étaient les processus

 14   de formation, d'instruction des soldats. Le titre de ce document est

 15   "Instruction de base". Il faudrait demander au général Praljak si par la

 16   suite on suit une instruction particulière et si elle se termine avec une

 17   instruction commune. Donc il y a trois types d'instruction alors que nous

 18   n'avons qu'un document, le premier document qui parle de la première.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais puisque personne ne me pose la question,

 20   je ne peux pas répondre, je ne peux ajouter rien de plus que la question

 21   qui m'est posée.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Le général Petkovic fait remarquer, je dois vous

 23   dire que je n'avais pas constaté qu'en réalité ce document c'est une

 24   instruction de base, ce qui n'exclut pas qu'il y a eu d'autres formations

 25   plus spécialisées dans tel ou tel domaine. Alors y en a-t-il eu d'autres et

 26   en réalité ce document est en lui-même réducteur car il y a d'autres

 27   formations ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Ce n'est pas ainsi réellement


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  1   puisque c'est un peu -- enfin vous avez entendu qu'il y a également deux

  2   autres types d'instruction comme vous l'avez entendu déjà, Monsieur le

  3   Président, Messieurs les Juges, et le général Pringle a vu des documents

  4   qui lui avaient été montrés par l'Accusation. Moi j'ai apporté ici des

  5   documents qui portent sur une instruction non interrompue et continue,

  6   enfin qui découle du droit de guerre. Les livres sur le droit de guerre

  7   sont très épais. Il y a un très grand nombre de lois qu'on ne pouvait

  8   absolument pas ignorer, la position des pays, la bataille navale, et

  9   cetera. Donc nous avons pris de ces manuels la partie qui se rapportait à

 10   ce qui nous intéressait, la partie qui intéressait les soldats du HVO,

 11   c'est-à-dire de quelle façon se comporter avec un prisonnier, de quelle

 12   façon se comporter avec un soldat blessé, quel est le comportement dans un

 13   cadre d'une guerre. Donc il y a des centaines de livres que j'ai montrés

 14   ici, ces petits livrets qui avaient été remis aux personnes qui ont suivi

 15   ces institutions et même les personnes qui n'avaient pas suivi

 16   d'instruction. On a remis ces petits livrets et on travaillait de façon

 17   quotidienne avec ce genre de livrets, dès qu'il y avait une pause d'une

 18   demi-heure on abordait ces questions. C'est la raison pour laquelle j'en

 19   parle justement. Nous, nous prenons une partie et nous disons, Si c'est

 20   ainsi alors rien d'autre.

 21   Non, ce n'est pas comme ça. C'était une des fonctions, mais s'il

 22   s'agissait également d'une fonction de base, une formation spécialisée.

 23   C'est tout.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après le général Petkovic, il y aurait eu d'autres

 25   formations, et que les sujets que vous ne voyez pas dans le document,

 26   notamment le droit international humanitaire, auraient pu être évoqués lors

 27   d'autres formations. Voilà.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui et dans ce document on parle également du


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  1   droit international humanitaire. On en parle dans ce document.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde a bien compris.

  3   Oui, Maître.

  4   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le

  5   Président. Je voudrais, excusez-moi, je me suis levée avant vous, juste

  6   quelques instants, je vous prie.

  7   Il me semblerait que le problème principal se trouve ici. Je viens de

  8   vérifier la version en langue anglaise à partir du paragraphe 47, donc il

  9   s'agit de la conclusion de M. Pringle. Je vois que la version anglaise

 10   correspond tout à fait à la version croate et dans la version anglaise,

 11   nous voyons dans une phrase, après la phrase qui a été lue par le

 12   Procureur, où on voit :

 13   "Les soldats, surtout lorsqu'une guerre approche, doivent être formés

 14   de quelle façon se comporter envers les civils et les prisonniers de guerre

 15   et ils doivent savoir qu'elles sont leurs obligations conformément aux lois

 16   et coutumes de la guerre."

 17   Dans la phrase qui suit, le témoin expert Pringle dit : "Le HVO le faisait,

 18   acceptait ce type de comportement, tout comme il est clair de par le

 19   programme d'instruction créer pour les soldats." On fait référence à une

 20   note en bas de page 34 par la suite dans laquelle on parle de la pièce

 21   04042, et c'est justement le programme d'instruction que nous avons examiné

 22   avant ce document-ci.

 23   Par la suite, on lit : "La partie obligatoire de l'instruction portait sur

 24   ceci : le soldat en tant que prisonnier de guerre; le comportement envers

 25   les prisonniers de guerre; l'enquête faite sur les prisonniers de guerre;

 26   le fait de faire prisonniers des ennemis officiers; et de quelle façon se

 27   comporter envers les prisonniers. Par la suite il y a une phrase qui

 28   continue, mais ce n'est pas important.


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  1   Ce que je voulais dire c'est que ce que je viens de lire maintenant -

  2   c'est la conclusion de M. Pringle au point 47 - c'est contradictoire, car

  3   si dans un premier temps il fait appel à la note en bas de page 34 et s'il

  4   avait trouvé que l'on respectait les conventions de Genève, et par la suite

  5   je crois qu'il fait une conclusion telle qu'il l'a faite au paragraphe 47,

  6   je crois que le problème n'est pas chez M. Praljak mais chez M. Pringle.

  7   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Le texte dit ce qu'il dit, moi j'ai une autre lecture de ce texte.

  9   Nous pouvons lire le rapport Pringle et ses conclusions, si vous le

 10   souhaitez, après avoir fait référence aux documents, il dit qu'il ne trouve

 11   pas de référence dans ce document au fait qu'il est nécessaire de faire

 12   suivre une formation de soldats d'après les obligations juridiques. Si vous

 13   regardez le programme de M. Praljak, justement j'allais lui montrer le

 14   programme d'instruction, il a parlé d'une formation tactique, comment se

 15   comporter en situation tactique lorsqu'on ne parle pas vraiment

 16   particulièrement du droit international humanitaire. Mais en réalité, ce

 17   que nous n'avons pas dans ce document, dans tout le document, il n'y a pas

 18   de référence spécifique indépendante quant à la formation et au droit

 19   international humanitaire. C'est simplement une question secondaire, cela

 20   fait partie d'une certaine formation tactique, on dit, Entre autres, si

 21   vous combattez dans un bâtiment, voilà de quelle façon vous comporter. Donc

 22   nous avons tous les documents, nous pouvons tirer nos propres conclusions à

 23   la lecture de ces documents, Monsieur le Président, mais voilà c'est

 24   simplement notre thèse. C'est la thèse que nous avançons.

 25   Le général a dit qu'il y avait d'autres formations qui avaient été

 26   offertes. La Chambre de première instance peut accepter ce témoignage,

 27   cette déclaration, ceci eu égard à d'autres éléments de preuve reçus, mais

 28   de la façon dont j'ai présenté ma question au général, je crois qu'il n'y a


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  1   qu'une référence oblique à ce document.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, les Juges en tireront  leurs

  3   conclusions, mais un point accessoire.

  4   En 1992, 1993, nous savons qu'il y a la présence de la communauté

  5   internationale, nous l'avons vu par de multiples documents. Donc tous ces

  6   conflits se déroulent sous le regard des étrangers. Dans une situation de

  7   cette nature, l'autorité de commandement que vous incarniez vous à partir

  8   du 27 juillet 1993, ne doit-elle pas expliquer aux soldats qu'il faut faire

  9   très attention, car une bavure, des dommages collatéraux risquaient d'être

 10   amplifiés par la communauté internationale. D'où la nécessité de bien

 11   respecter les conventions internationales et de faire particulièrement

 12   attention au droit de la guerre. Alors est-ce que ce type de discours a été

 13   tenu auprès de vos soldats ? Parce qu'il est vrai que le rapport de M.

 14   Pringle dit qu'il n'a pas vu dans le document qu'on a vu des références,

 15   mais il ne conclut pas formellement parce qu'il fait référence au document

 16   de la JNA de 1988 en la matière.

 17   Donc il laisse sous-entendre que peut-être tout ceci a dû être

 18   expliqué aux soldats. Moi, je n'en sais rien. Je n'étais pas soldat du HVO,

 19   donc je suis incapable de dire ça. Mais je me demande si vous-même et vos

 20   officiers qui vous entouraient n'expliquaient pas aux soldats de faire très

 21   attention, parce qu'il y a le Bataillon espagnol, il y a le Bataillon

 22   britannique, il y a la Mission européenne, il y a la presse internationale,

 23   et que tout ça allait être décortiqué. Est-ce que vous-même et vos

 24   officiers sont intervenus, indépendamment du document qui est incomplet,

 25   pour leur dire, Attention, il y a des textes, il y a des comportements et

 26   si jamais vous commettez des erreurs, il risque d'y avoir des effets

 27   négatifs sur le HVO ? Est-ce que vous leur avez dit cela ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas de cette façon-là. Je n'aurais


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  1   pas dit, Ne faites pas ceci, ne commettez pas d'erreurs parce que le

  2   Bataillon espagnol ou français se trouve ici ou là, cela ne m'intéressait

  3   pas. Moi je leur disais qu'il fallait avoir une responsabilité morale,

  4   d'avoir un honneur. Je leur ai parlé du droit de la guerre car ils ne

  5   peuvent pas se comporter ainsi car ce sont des êtres humains, pas parce

  6   qu'un journaliste est là et pourrait en faire un rapport, non, ce n'était

  7   pas notre position. Même s'il n'y avait absolument personne, ce ne sont pas

  8   ces autres personnes qui étaient présentes, le regard international

  9   m'importait peu. Je vous ai donné les documents justement où j'expliquais

 10   les lois, je disais, Vous n'aurez pas d'amnistie parce que vous êtes des

 11   soldats croates, vous serez encore plus regardés. Je leur ai expliqué ce

 12   qui serait puni encore plus. Ce n'est pas parce que les Américains sont là,

 13   puisque cela ne m'intéressait pas non plus de toute façon. Mais parce qu'il

 14   s'agissait d'hommes, il s'agissait de soldats, parce qu'il ne fallait pas

 15   se comporter ainsi. Il ne fallait pas faire les choses qu'ils n'ont pas le

 16   droit de faire, et ceci se faisait d'après la loi. Cela se faisait de façon

 17   continue, systématiquement. Pour ce qui me concerne, j'attirais leur

 18   attention sur ces faits de façon quotidienne.

 19   Lorsqu'on parle des points qui ont été abordés dans ce document,

 20   lorsqu'on parle de l'honneur, de la droiture, c'est encore plus que ce qui

 21   est prescrit par le droit international humanitaire. Maintenant, leur dire

 22   de quelle façon on se comporte lorsqu'on fait la guerre sur la mer, c'est

 23   complètement ridicule. Nous nous sommes concentrés sur les parties de la

 24   guerre qu'ils rencontreront. Ce n'était pas important de leur apprendre de

 25   quelle façon est-ce qu'il faut, je ne sais pas, tirer sur un barrage ou

 26   faire autre chose, ou est-ce que le commandant d'une division peut prendre

 27   une décision qui ne correspond pas au droit international humanitaire. Non,

 28   il n'était pas nécessaire de faire une instruction aussi large, mais ils


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  1   avaient appris tout ce qu'ils devaient savoir sur la partie pertinente. Et

  2   pas parce que les Français sont là, mais parce que c'est ainsi qu'il

  3   fallait qu'ils se comportent.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer.

  5   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Q.  Mon Général, je voudrais vous demander de passer à la page 15 de votre

  7   version du rapport Pringle, s'il vous plaît. J'aimerais attirer votre

  8   attention sur un texte qui se trouve dans les paragraphes 38 et 39.

  9   Ici, le général Pringle parle de climat, de l'atmosphère au sein du

 10   commandement, et au paragraphe 38, il dit :

 11   "Un commandant, par le biais de sa personnalité, de son style de

 12   commandement et de son comportement général, a une influence très

 13   importante sur le moral, sur le sens de la direction et la performance de

 14   ses officiers, ses commandants subordonnés. Tout commandant de n'importe

 15   quelle nationalité qui influencerait son personnel était mauvais. Le climat

 16   ou l'ambiance au sein du commandement est fait de la façon suivante : le

 17   commandant qui est le commandant supérieur le plus d'influence est là, plus

 18   c'est mieux. Les commandants supérieurs sont ceux qui mettent le ton pour

 19   le commandement. L'ambiance au sein du commandement est un sujet qui est

 20   très souvent discuté dans les manuels de doctrine militaire afin de pouvoir

 21   encourager les commandants d'avoir une influence sur leur subordonnés afin

 22   de pouvoir faire en sorte que l'ambiance au sein du commandement soit bien

 23   faite, qu'il y a un bon climat."

 24   Ensuite il poursuit et il aborde dans le paragraphe suivant certains textes

 25   que vous-même vous avez rédigés dans votre programme, P 04142, que nous

 26   avons abordé aujourd'hui, et il cite la page 69 de la version en anglais de

 27   votre propre rapport, Mon Général, page 0864 de la version en croate, la

 28   version originale, et votre programme de formation dit ceci :


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  1   "Un commandant qui est bon et qui est capable est caractérisé par une

  2   connaissance des buts objectifs et tactiques et de l'habilité de commander.

  3   Un commandant, par la façon dont il communique avec ses hommes, son

  4   apparence et son comportement influent sur la création d'une image dans

  5   l'esprit des membres des unités sur lesquels il a autorité, à savoir qu'il

  6   s'agit d'un commandant qui est fiable et capable."

  7   Mon Général, j'aimerais maintenant parler de votre comportement et de

  8   l'ambiance au sein du commandement que vous imposiez dans le cadre de vos

  9   échanges avec vos subordonnés. Je voudrais que vous preniez d'abord la page

 10   P 01162. Il s'agit de la pièce P 01162 du 16 janvier 1993, Mon Général. Je

 11   vais parler maintenant de Gornji Vakuf. Je vais l'aborder peut-être plus en

 12   détail plus tard dans la semaine. Voici, pour commencer, le rapport du

 13   colonel Siljeg, zone opérationnelle nord-ouest. Il envoie ce rapport à

 14   l'état-major principal ainsi qu'à la zone opérationnelle Herzégovine au

 15   sud-est. Comme nous le savons tous, à 20 heures le 16 janvier 1993, la

 16   situation dans Gornji Vakuf était très tendue.

 17   Mon Général, si je me souviens bien de par votre témoignage, vous êtes

 18   arrivé sur les lieux dans cette zone - ce n'est peut-être pas Gornji Vakuf

 19   même, c'était peut-être Prozor - mais de toute façon vous êtes arrivé dans

 20   la zone, je crois que c'était dans la soirée du 15 ou peut-être le 16

 21   janvier. Est-ce que je me trompe ?

 22   R.  Non, vous avez raison, je crois que c'était dans la nuit entre le 15 et

 23   le 16 janvier, ou peut-être très tôt dans la matinée du 16 janvier,

 24   effectivement, à Prozor, Rama, c'est là que je suis arrivé.

 25   Q.  Très bien. Merci. Donc vous étiez à Rama. Et le 16 janvier à 20 heures,

 26   vous étiez à Rama, n'est-ce pas, vous étiez à Prozor ?

 27   R.  Oui, tout à fait.

 28   Q.  Et vous étiez en contact avec le colonel Siljeg ?


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  1   R.  Oui, j'avais des contacts avec lui, partiellement, si vous voulez.

  2   Q.  Est-ce qu'il se trouvait également à Prozor, Rama, ou était-il ailleurs

  3   ?

  4   R.  Je ne sais pas, Monsieur. Je ne sais plus. Je sais qu'il parcourait

  5   toujours la route de Prozor vers Gornji Vakuf assez souvent. Il y avait des

  6   pourparlers qui se passaient là-bas qui avaient lieu avec l'ABiH et il y

  7   avait également des représentants de la partie anglaise des forces de la

  8   FORPRONU.

  9   Q.  Merci beaucoup. Mon Général, pour revenir maintenant au texte

 10   précédent, il s'agit ici du rapport du général Pringle. En parlant de votre

 11   propre programme, pour ce qui est du style de commandement, j'aimerais vous

 12   demander quelle était votre position, à savoir quelles étaient les diverses

 13   positions que vous teniez à l'époque lorsque vous êtes arrivé à Prozor le

 14   16 janvier 1993. Mon Général, à l'époque, si je ne m'abuse, vous étiez le

 15   ministre adjoint de la Défense pour la République de Croatie ?

 16   R.  C'est exact.

 17   Q.  Et vous étiez également membre de la VONS, c'est-à-dire c'est le

 18   Conseil de sécurité nationale et de Défense de la République de Croatie ?

 19   R.  Oui, c'est tout à fait exact, donc VONS.

 20   Q.  Et vous étiez général de division de l'armée croate, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, tout à fait.

 22   Q.  Vous êtes arrivé à Gornji Vakuf après y avoir été envoyé par le

 23   président Tudjman afin de calmer la situation ?

 24   R.  Oui, c'était à la demande de M. Tudjman et de M. Izetbegovic. Tous les

 25   deux m'ont demandé d'essayer de calmer la situation, essayer d'apaiser le

 26   conflit qui venait de commencer quelques jours avant. Je crois que c'était

 27   quelques jours avant, le 11 février 1993.

 28   Q.  Ce document du colonel Siljeg en réalité fait référence à quelque chose


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  1   dont vous venez de parler. Il s'agissait de pourparlers qui avaient lieu

  2   entre le HVO et l'ABiH. A l'examen du bas de la page en anglais, à la page

  3   2, il dit que dans la soirée du 16, lui et le colonel Andric ont eu des

  4   négociations avec les représentants de l'ABiH, et il n'y avait pas eu de

  5   résultats. Par la suite, on dit :

  6   "A moins qu'il n'y ait d'accord, Gornji Vakuf et les bastions du sud seront

  7   pris et nos lignes seront renforcées."

  8   Voyez-vous cela, Mon Général ? C'est l'avant-dernier paragraphe du

  9   document. Est-ce que vous le voyez, Mon Général ?

 10   R.  Oui, oui, je vois ce texte, effectivement.

 11   Q.  D'accord. Pourriez-vous, je vous prie, nous donner lecture à haute voix

 12   de la phrase qui suit. C'est le dernier paragraphe de ce rapport.

 13   R.  Voilà, j'en donne lecture :

 14   "Le général Praljak leur a dit qu'ils seraient écrasés s'ils n'arrêtent pas

 15   avec leurs actions ou activités et s'ils n'acceptaient pas les décisions du

 16   gouvernement de la HZ HB."

 17   Q.  Puisque nous parlons du style de commandement et de l'ambiance au sein

 18   du commandement, je crois qu'il est très important d'être très précis

 19   lorsqu'on utilise les mots. Pour être tout à fait juste envers vous, je

 20   voudrais vraiment m'assurer que les propos qui ont été interprétés ici, vos

 21   propos, sont vraiment interprétés de façon tout à fait correcte.

 22   Mon Général, on a eu les paroles "annihilated" en anglais, "écrasé". Bien

 23   sûr, c'est ce qu'on nous a dit en anglais. Mais en fait votre message c'est

 24   qu'ils seraient écrasés, ils seraient repoussés, et par la suite

 25   l'interprète nous a donné le mot "écrasé". Est-ce que vous êtes d'accord

 26   avec ce message que vous avez envoyé à l'ABiH ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Ici on dit que le général Praljak a envoyé un message aux représentants


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  1   de l'ABiH; est-ce que c'est exact ?

  2   R.  Praljak s'est entretenu avec Siljeg. Siljeg a certainement ajouté

  3   quelque chose que je n'ai pas dit. Dans le jardon militaire, "vous serez

  4   écrasés" peut dire plein de choses, ce qui n'a rien à voir, bien sûr, avec

  5   les civils. Mais lorsque je dis "écrasé," ça n'a rien à voir avec la

  6   logique qui existait là-haut, et ceci n'a rien à voir avec le paragraphe

  7   que vous venez de lire. Si les pourparlers sont sans résultats, ce n'est

  8   que les bastions sud qui seraient pris et nos lignes seraient renforcées.

  9   Voilà, c'est ça le résultat s'il n'y a pas d'entente ou d'accord. Lui, il

 10   ajoute quelque chose d'autre : Ils seront écrasés. Non, ils ne seront pas

 11   écrasés. C'est tout à fait clair. C'est tout à fait clair ce qui allait se

 12   passer. Donc le HVO était censé seulement par une défense active --

 13   Q.  Mon Général, Mon Général, vous devez répondre aux questions que je vous

 14   pose. Je ne veux pas vous permettre d'élaborer trop longuement sur les

 15   questions.

 16   Ce que vous venez de nous dire c'est que quel que soit le message qui vous

 17   est attribué, votre message était que vous avez donné un message à Siljeg,

 18   et que Siljeg a par la suite transmis ce message à l'ABiH, n'est-ce pas ?

 19   R.  Non, ce n'est pas exact. Je me suis entretenu avec Siljeg et on disait

 20   de quelle façon on pouvait interrompre cette action qui avait déjà

 21   commencé.

 22   Q.  Il était tout à fait clair, Mon Général --

 23   R.  Mais attendez, laissez-moi parler --

 24   Q.  Non, Mon Général, je vais vous demander d'être précis. Ici, on lit que

 25   vous avez envoyé un message. Est-ce que Siljeg nous dit la vérité ici ?

 26   Est-ce qu'il y avait un message qui provenait de vous et qui était envoyé à

 27   l'ABiH, oui ou non, ou est-ce que ce rapport est simplement un faux rapport

 28   ou mal interprété ?


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  1   R.  Ce rapport n'est pas précis. Il est certain que je me suis entretenu

  2   avec Siljeg et avec Andric déjà avant lorsqu'ils s'étaient rendus aux

  3   pourparlers lorsque j'étais là-haut en décembre. Je leur ai dit : Parlez,

  4   parlez, parlez, parlez et essayez de faire en sorte qu'ils se déplacent des

  5   positions qui placent le HVO dans une situation sans issue. Mon message

  6   était à Siljeg : Dis-leur, Siljeg, de se pousser, de bouger de ces

  7   positions après que cette action soit interrompue. Ceci et rien d'autre.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour gagner du temps, je pense qu'il y a peut-être

  9   un élément qui échappe à la compréhension. Dans le rapport du colonel

 10   Siljeg, nous sommes le 16 janvier. Vous savez, le 16 janvier 1993, il y a

 11   les allégations d'ultimatum du 15 janvier, et là quand je vois la phrase

 12   qui est au-dessus du terme "nos forces." Il y a "nos forces," et à ce

 13   moment-là le colonel Siljeg explique : Nous commençons des opérations plus

 14   intenses sur les mouvements des ennemis et le regroupement des forces de

 15   l'ABiH.

 16   En termes militaires, quand je lis cela - si je me trompe vous me le direz

 17   - j'ai l'impression que le colonel Siljeg, constatant que l'ennemi, c'est-

 18   à-dire l'ABiH, fait des mouvements, regroupe ses forces, estime qu'il y a

 19   lieu à ce moment-là d'intervenir, et que dans ce canevas, vous auriez

 20   envoyé un message comme quoi s'ils n'acceptaient pas les décisions de la HZ

 21   HB, il fallait à ce moment-là les annihiler ou je ne sais quoi.

 22   Apparemment, il y a peut-être un problème de traduction. Donc dans le

 23   scénario, il y aurait, d'après ce document, je ne sais pas si c'est vrai ou

 24   c'est faux, mais en premier, l'ABiH qui bouge, qui fait des mouvements, qui

 25   se regroupe, et le HVO qui réagit. Dans ce canevas, vous, vous intervenez

 26   en lançant un message que le colonel Siljeg mentionne. En termes

 27   militaires, ça s'est passé comme le colonel Siljeg le décrit, à savoir

 28   c'est l'ABiH qui fait le mouvement et vous, vous intervenez, ou c'est le


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  1   contraire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, je dois

  3   répéter une fois de plus, après avoir passé énormément de temps, nous avons

  4   passé beaucoup de temps pour déterminer vraiment ce qui s'était passé, nous

  5   avons essayé de vous démontrer que l'ABiH était en train de creuser, de

  6   s'enterrer dans toutes les positions autour de Gornji Vakuf. Cela avait

  7   commencé depuis quelques mois, les positions que nous tenions auparavant

  8   avec l'ABiH à 20 kilomètres à peu près de Raduski Kamen. Il s'agit d'une

  9   élévation. Andric et Siljeg, à ma demande, ont commencé des pourparlers

 10   avec l'ABiH pour s'assurer qu'ils arriveraient à déplacer ces bastions. On

 11   a vu des photographies de ces bastions. On les a vues avec l'officier

 12   britannique d'un bataillon bien précis. On a vu quelles étaient les

 13   positions qui étaient tenues sur les élévations autour de la ville et en

 14   ville aussi qu'ils occupaient. Cet ultimatum a aussi fait l'objet d'un

 15   accord avec Izetbegovic. Je l'ai amené à Mostar le 15. Izetbegovic l'a

 16   autorisé. Il fallait faire quelque chose, mais après il a changé d'avis.

 17   Donc je me suis rendu là-bas pour essayer de trouver une solution. Je n'ai

 18   pas réussi à trouver de solution, mais je ne voulais pas mettre fin à la

 19   tentative du HVO qui était de déplacer, de déloger l'ABiH des positions

 20   qu'elle occupait. Au vu des positions qu'ils occupaient, ils auraient pu

 21   détruire le HVO. Il y avait des négociations à Genève en cours. Un cessez-

 22   le-feu avait fait office d'un accord. Et nous avons réussi à empêcher

 23   l'entrée dans Gornji Vakuf, et évidemment les choses se sont calmées. Voilà

 24   le contexte.

 25   Donc quand on est écrasé, en termes militaires, ça veut dire qu'on est

 26   terminé. Ça veut dire qu'on est annihilé, qu'on est anéanti. Je n'emploie

 27   pas ce type de termes. Mais c'est M. Siljeg qui les emploie. Lui, c'est un

 28   militaire. Il l'emploie déjà comme militaire. Mais le fait est que l'ABiH


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  1   avait lancé une opération, avait envoyé une brigade vers Prozor. Il y a un

  2   grand nombre de documents qui la montre d'ailleurs, qui montre quelle était

  3   la situation à l'époque et nous les avons d'ailleurs passés en revue.

  4   Mais au point précédent, voyons quel est l'objectif même du HVO. S'ils ne

  5   veulent pas se battre avec nous contre les Serbes, nous, on doit reprendre

  6   les bastions qu'ils tenaient autour de la ville, l'ABiH. Nous avons besoin

  7   de ces bastions. Mais ils avaient interrompu toute communication vers la

  8   Bosnie centrale, ils avaient pris ces bastions, et dans la soirée le

  9   conflit s'est arrêté. Ils ont été vaincus en termes militaires. Ils n'ont

 10   pas réussi à rentrer dans Gornji Vakuf. J'ai réussi à les arrêter, arrêter

 11   tous ces jeunes. C'était mon style de commandement, si vous voulez parler

 12   de mon style. Il est vrai qu'un général a le droit de traiter de ce type de

 13   sujet. Il existe en effet un style de commandement et il y a un grand

 14   nombre de documents qui montrent comment j'ai traité les gens, d'ailleurs.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez répondu longuement. M. Stringer reviendra

 16   peut-être certainement tout à l'heure après la pause, parce qu'il est

 17   l'heure de faire la pause.

 18   Donc nous allons faire une pause de 20 minutes.

 19   --- L'audience est suspendue à 15 heures 52.

 20   --- L'audience est reprise à 16 heures 16.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 22   Monsieur le Procureur, vous avez la parole.

 23   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Q.  Avant la pause, nous regardions la pièce P 01162. Avant de revenir à

 25   cette pièce, j'ai besoin de vous demander un petit éclaircissement à propos

 26   de quelque chose que vous nous avez dit à plusieurs reprises.

 27   Vous avez fait référence à une décision de la HZ HB. Je crois que

 28   vous nous avez dit, si j'ai bien compris, qu'à un moment ou à un autre, le


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  1   15 janvier vous avez rencontré Alija Izetbegovic, et il était d'accord avec

  2   vous en ce qui concerne le texte de la décision -- enfin l'Accusation

  3   appelle ce texte un ultimatum. Donc il était d'accord avec vous sur le

  4   libellé de ce texte sur la resubordination, en tout cas, le 15 janvier,

  5   lorsque vous l'avez vu. Vous voyez à quelle réunion je fais allusion, celle

  6   que vous avez eue avec Izetbegovic le 15 janvier ?

  7   R.  Non. M. Izetbegovic n'a pas du tout été d'accord avec cette décision,

  8   mais cette décision a quand même été adoptée. Cette décision avait été

  9   rédigée avec Izetbegovic et avec certains hommes du ministère de la

 10   Défense, en tout cas, avec son ministre de la Défense, Bozo Rajic. Ça,

 11   c'était les 13 et 14 janvier, donc les pourparlers ont eu lieu les 13 et

 12   14, ils se sont étalés sur deux jours, pas pendant la totalité de ces deux

 13   jours, bien sûr.

 14   Q.  Mais où ont eu lieu ces pourparlers ?

 15   R.  Je crois que c'était à l'hôtel Esplanade, si je me rappelle bien, à

 16   Zagreb.

 17   Q.  Vous avez dit qu'Alija Izetbegovic était présent. Il y avait aussi Bozo

 18   Rajic et d'autres personnes qui accompagnaient M. Izetbegovic. Pourriez-

 19   vous nous dire qui représentait le côté croate?

 20   R.  Je suis certain que j'étais là, en tout cas, pour une partie des

 21   pourparlers, et Gojko Susak, lui, assistait à l'autre partie de la réunion.

 22   Je ne peux pas exactement vous dire à quelle partie j'ai participé, quels

 23   sont les termes qui ont été proposés par qui. Il y avait un grand nombre de

 24   réunions qui avaient eu lieu. Mais je suis pratiquement certain que c'est

 25   une réunion qui s'est tenue à Zagreb à l'hôtel Esplanade. Quant à savoir

 26   qui il y avait, je n'arrive pas à me rappeler du nom de tous les

 27   participants.

 28   Q.  Donc ces pourparlers ont eu lieu au cours des 13 et 14 janvier, et vous


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  1   avez assisté à certaines de ces réunions mais pas toutes; c'est bien cela ?

  2   R.  Oui, en effet. Si je me souviens bien, en tout cas, je suis certain que

  3   j'étais là le 14. Quant à savoir si déjà le 13 au soir les réunions avaient

  4   commencé, je n'en sais rien. Je me souviens du 14, il y a aussi eu une

  5   réunion le 15 au matin, je m'en souviens. Je suis allé voir Izetbegovic et

  6   Franjo Tudjman au palais présidentiel à Zagreb, parce que le texte était

  7   prêt et il avait fait l'objet d'un accord, il avait été approuvé, et il est

  8   devait être annoncé; le ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine, Bozo

  9   Rajic, devait l'annoncer. Donc je l'ai emmené avec moi à Mostar.

 10   Q.  A quelle heure avez-vous quitté Zagreb pour aller à Mostar ? Pourriez-

 11   vous nous dire à quel moment de la journée vous êtes parti, si vous vous en

 12   souvenez ?

 13   R.  Pas à midi, 10 heures, 11 heures, je ne sais pas. En tout cas, c'était

 14   avant midi, en fin de matinée. Je ne m'en souviens pas vraiment.

 15   Q.  Donc vers quelle heure avez-vous dû arriver à Mostar, environ à quelle

 16   heure ?

 17   R.  Dans la soirée. Il fait nuit assez tôt. Je ne peux pas vous dire

 18   l'heure exacte et la durée du trajet; ça, je ne peux pas vraiment vous le

 19   dire.

 20   Q.  Lorsque vous avez quitté Zagreb, vers 10 heures ou 11 heures du matin,

 21   le 15, vous dites que vous aviez avec vous le texte, le texte qui a fait

 22   l'objet d'un accord; c'est bien cela, vous l'emportiez avec vous ?

 23   R.  Oui, je l'ai emporté.

 24   Q.  Y avait-il des signatures apposées sur ce texte ?

 25   R.  Ils se sont mis d'accord sur le texte, mais c'était à Bozo Rajic de

 26   signer ce texte. Ça avait fait l'objet d'un accord.

 27   Q.  Mais qui a signé le texte pour les Musulmans de Bosnie ?

 28   R.  Je n'ai pas dit qu'il avait fait l'objet d'une signature du côté des


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  1   Musulmans de Bosnie. J'ai dit qu'on s'était mis d'accord, qu'il avait fait

  2   l'objet d'un accord dans sa totalité, et c'est Bozo Rajic qui devait

  3   l'annoncer et qui devait le signer. Enfin, c'est lui qui devait apposer sa

  4   signature en premier et ensuite les autres suivraient.

  5   Q.  Donc vous êtes en train de dire qu'il y avait eu un accord oral sur ce

  6   texte.

  7   R.  Oui, en fin de compte, tout le monde s'est mis d'accord sur ce texte.

  8   Enfin, disons que je sais que M. Izetbegovic était d'accord; ça, j'en suis

  9   sûr.

 10   Q.  Vous étiez là lorsqu'il a approuvé le texte ?

 11   R.  Oui, à l'hôtel Esplanade, le 14, lorsque les pourparlers se sont

 12   terminés. Il a dit d'accord, c'est d'accord.

 13   Q.  Nous y reviendrons lorsque nous parlerons de Gornji Vakuf plus en

 14   détail.

 15   Maintenant, revenons-en à ce document P 01162. Voici ce que je vous affirme

 16   et ce que j'avance. Vous avez déjà beaucoup parlé de ce texte et je ne

 17   pense pas que nous puissions être d'accord sur vos propos, mais je vais

 18   quand même vous présenter notre thèse. En fait, le colonel Siljeg a fait un

 19   rapport parfaitement fidèle dans ce rapport qu'il a envoyé à l'état-major

 20   principal. Vous avez envoyé un message à l'ABiH en leur disant qu'ils

 21   seraient écrasés ou anéantis ou brisés s'ils n'acceptaient pas les

 22   décisions prises par la HZ HB. Voilà ce que nous avançons. Et votre message

 23   leur a été envoyé lorsque vous êtes arrivé à Prozor ou après votre arrivée

 24   à Prozor le 16 janvier; n'est-ce pas ?

 25   R.  Absolument pas. Ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées. La

 26   question n'était pas d'accepter la décision. Il fallait qu'ils arrêtent les

 27   opérations et qu'ils se retirent des lignes. C'était tout.

 28   Q.  Général, la HZ HB à laquelle on fait référence ici, c'est la décision,


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  1   décision de lancer cet ultimatum, c'est-à-dire une décision où la HZ HB

  2   exigeait que les unités de l'ABiH, dans les cantons du plan Vance-Owen 3, 8

  3   et 10, devaient se resubordonner au HVO. C'est cela, n'est-ce pas ?

  4   R.  La décision dit ce qu'elle dit. Il ne s'agissait en aucune façon d'un

  5   ultimatum. Il s'agissait d'un accord conjoint. Le but de cet accord était

  6   d'éviter un conflit entre l'armée, l'armija et le HVO -- enfin, pas des

  7   conflits, mais des escarmouches, des provocations incessantes de la part de

  8   l'ABiH. C'est ça qu'on voulait éviter. Ils considéraient que c'était les

  9   seuls qui avaient droit à la Bosnie-Herzégovine et qu'ils avaient été

 10   empêchés par les Chetniks et les Oustacha. Mais quand ils avaient besoin

 11   d'armes, ils étaient d'accord avec nous, et puis lorsqu'il fallait qu'ils

 12   reprennent certains territoires, là, dans ce cas-là, ils nous considéraient

 13   comme des Oustacha.

 14   Q.  Bien. Pour en revenir au premier problème, c'est-à-dire le style de

 15   commandement, nous avons quelqu'un qui arrive avec un grade très élevé qui

 16   est général dans l'armée croate et qui fait partie du cercle intime du

 17   président Tudjman. Le climat qu'il a créé est le suivant : il leur dit que

 18   s'ils n'acceptent pas une décision politique de la HZ HB, ils vont être

 19   écrasés et cela va aboutir à un climat dans lequel le HVO va devoir faire

 20   quelque chose rapidement si jamais l'ABiH refuse d'accepter les décisions

 21   de la HZ HB; n'est-ce pas ?

 22   R.  Non, absolument pas. Ce n'est pas le cas. Tout d'abord, on le voit dans

 23   certains de mes documents, on voit bien quel est mon style, comment j'écris

 24   et mon style de commandement, premièrement. Ensuite, il ne s'agissait

 25   absolument pas d'une décision prise par la HZ HB. Il fallait juste que

 26   l'ABiH arrête de se montrer agressive envers le HVO. Donc l'ambiance que

 27   j'avais créée c'est une situation où, de par de mon autorité, j'ai réussi à

 28   exercer le pouvoir qui m'avait été donné depuis Genève par le général


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  1   Petkovic et par Mate Boban et par Izetbegovic pour essayer de mettre un

  2   terme aux hostilités. Donc ce climat, de ce fait, a été créé. On n'a pas

  3   tiré avantage de cette situation pour prendre le contrôle de Gornji Vakuf.

  4   Donc le style de commandement a été créé, puisque les tranchées qu'ils

  5   avaient creusées ont été rebouchées; on le voit d'ailleurs dans un grand

  6   nombre de documents venant de la communauté internationale.

  7   Q.  Non, mais en fait, vous aviez été envoyé là pour essayer de calmer le

  8   jeu. Mais en fait, vous avez envoyé un message de ce type, message bien

  9   connu de tous et relayé par votre subordonné, le général Siljeg; et de ce

 10   fait, plutôt que de calmer le jeu, le résultat était complètement l'opposé.

 11   R.  M. Siljeg n'a pas relayé correctement mes termes. Il a employé ce mot

 12   "annihiler", "briser", "écraser". C'était un terme de militaire, c'est du

 13   jargon militaire. En revanche, ce qui est vrai c'est que jusqu'à ce que

 14   l'ordre ne vienne d'arrêter les hostilités, j'étais d'accord pour que le

 15   chef d'état-major adjoint, M. Andric et M. Siljeg, qui sont des généraux à

 16   une étoile, ils étaient d'accord pour qu'ils mènent une opération militaire

 17   visant à libérer leurs forces qui risquaient d'être totalement encerclées

 18   par les Chetniks et par l'ABiH. Donc je ne peux pas être d'accord avec

 19   vous. Je ne peux pas être d'accord avec votre interprétation des faits,

 20   l'interprétation que vous essayez de mettre au compte rendu de cette

 21   affaire.

 22   Q.  Très bien. Regardons un autre document. Pour en revenir à ce style de

 23   commandement et à cette ambiance de commandement qui est créée par vous-

 24   même, il s'agit de la pièce 10936.

 25   Je sais que vous dites que ce document est un faux, qu'il n'est pas

 26   authentique, que ceci n'est pas votre signature, qu'il n'y a pas votre

 27   signature apposée sur ce document. Nous n'allons pas l'étudier, en fait,

 28   nous allons plutôt regarder la pièce 2280. Mais cette pièce 10936 comprend


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  1   trois documents qui ont trait à un même ordre, un ordre que vous avez donné

  2   par lequel vous avez ordonné au colonel Siljeg dans la zone opérationnelle

  3   nord-ouest de l'Herzégovine de :

  4   "S'ils ne s'arrêtent pas, allez-y comme vous le voulez. Pilonnez à

  5   l'artillerie ou avec tout ce qui vous tombe sous la main. Pulvérisez tout."

  6   Nous avons ce document sous différentes versions, à différentes étapes de

  7   sa rédaction, tout d'abord manuscrit. Il s'agit de la pièce 2280. D'après

  8   vous, d'ailleurs, c'est un faux. Ensuite, nous avons ce même document en

  9   brouillon mais portant le cachet de l'état-major du HVO daté du 10 mai

 10   1993. Et là, nous y trouvons un terme manuscrit "Brada", ça fait référence

 11   à vous-même -- enfin, c'est ce que j'avance, en tout cas. Ensuite, nous

 12   l'avons sous forme électronique, sous forme de communication par paquet.

 13   Malheureusement, l'exemplaire est très peu lisible, il n'a pas été traduit

 14   totalement parce qu'il n'est pas assez lisible. Donc là encore, il y a

 15   toujours le cachet du HVO, de l'état-major principal du HVO, même date, 10

 16   mai 1993, et d'autres références, numéro "Broj".

 17   Donc ça nous montre que vous avez donné le feu vert au général Siljeg

 18   de tout raser. C'est votre ordre. C'est vous qui avez donné cet ordre ?

 19   R.  Je crois qu'on m'a déjà posé des questions à propos de cet ordre

 20   lorsque j'ai déposé dans l'affaire Martinovic-Naletilic. Je ne sais pas

 21   quoi vous répondre. Quelconque qui connaît mon écriture ou a lu mes ordres

 22   sait que ça n'a rien à voir avec moi. L'écriture n'est pas la mienne, la

 23   signature n'est pas la mienne, même le style écrit n'est pas du tout le

 24   mien. La méthode non plus n'a rien à voir avec moi. On n'a pas besoin d'une

 25   analyse bien pointue pour voir que ce n'est pas un document que j'ai écrit.

 26   Toute analyse de mes lettres montre bien que je n'ai absolument rien à voir

 27   avec ce document. Je n'ai aucune intention de savoir comment vous avez

 28   obtenu ce document. Ça ne m'intéresse pas. Ça n'a rien à voir avec moi.


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  1   C'est tout ce que je puis dire. Or si vous l'affirmez que ça a à voir avec

  2   moi --

  3   Q.  Je vous avance que c'est exactement votre façon de vous exprimer. Vous

  4   employez ces termes, les termes incendiaires. Vous les avez déjà utilisés

  5   ici en prétoire. Lorsque vous dites "rasez tout," "rasez tout," c'est

  6   exactement comme ça vous parlez et c'est exactement le type d'instruction

  7   que vous avez données au colonel Siljeg.

  8   R.  Je me suis exprimé à propos de ces documents. Je n'ai plus de

  9   commentaire à faire à ce propos. Je ne ferai aucun commentaire. Vos

 10   commentaires sont parfaitement absurdes, à mon avis. Ce n'est pas si

 11   simple, les choses ne sont pas si simples.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur vous montre ce document qui, pour lui,

 13   est une pièce à conviction qui va à l'appui de sa thèse. Vous, vous dites :

 14   J'ai déjà répondu, je n'ai plus rien à dire. Quelque chose comme ça. Très

 15   bien. Mais pour tâcher de nous convaincre qu'il s'agit d'un faux document,

 16   il faut apporter des éléments à notre attention. Il ne faut pas se

 17   contenter de dire, J'ai déjà répondu. Je sais que vous avez déjà répondu.

 18   Mais là, le Procureur, il est au cœur de sa démonstration, car vous avez

 19   constaté que M. Stringer pratique de manière extrêmement professionnelle et

 20   donc il démontre, par toute une série d'arguments et de documents, et dans

 21   sa démonstration il y a ce document. Alors ou vous expliquez qu'il s'agit

 22   d'un faux document parce que vous voyez le numéro de référence, la date, 10

 23   mai, Mostar, rappelez-vous ce que je faisais, et cetera, Brada, moi, oui,

 24   on me surnommait Brada, mais je n'avais pas l'habitude de signer -- je ne

 25   sais pas. Si vous ne dites rien, qu'est-ce qu'il y aura dans le transcript

 26   ? Parce que les secrets de fabrique, vous les connaissez. Ce n'est pas un

 27   secret. Que font les Juges ? Ils regardent les transcripts, ils regardent

 28   les documents, ils regardent ce que disent l'accusé ou ses avocats, puis


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  1   ils balancent, ils mettent tout ça dans la balance et ils arrivent à une

  2   conclusion. Voilà, c'est comme ça que ça se passe. Donc quand vous, vous

  3   dites, J'ai déjà répondu, passons à autre chose, bon, c'est vous qui faites

  4   ce choix.

  5   Vous avez compris ? C'est un document important pour le Procureur. Si vous

  6   le contestez, il faut apporter à ceux qui vont juger la valeur de ce

  7   document des éléments comme quoi, effectivement, c'est un document qui est

  8   faux, qui est venu pour les besoins. Je n'en sais rien.

  9   Je redonne la parole au Procureur.

 10   M. STRINGER : [interprétation]

 11   Q.  Je comprends bien que certaines observations ont été faites par le

 12   Président de la Chambre, mais je vais vous montrer un autre document quand

 13   même qui a trait à celui-ci. Voici ma proposition : avec l'accord du

 14   Président de la Chambre, je voudrais que nous regardions l'autre document

 15   et ensuite vous pourrez faire tout commentaire qui vous vient à l'esprit.

 16   La pièce suivante est la pièce P 09769 en date du 10 mai 1993. Demande

 17   urgente d'action émanant du commandant Siljeg et envoyée au département de

 18   la Défense du HVO et au HVO de la HZ HB à Mostar. Dans la partie centrale -

 19   passage qui m'intéresse - c'est en majuscules, il est écrit :

 20   "Appelez l'ABiH pour leur lancer un ultimatum. Leur dire qu'à moins qu'ils

 21   arrêtent l'attaque sur Klis et Boksevica, je vais employer l'artillerie

 22   pour raser tout Jablanica.

 23   "Ils sont tranquilles à Jablanica et on ne peut pas leur tirer dessus. Mais

 24   ils nous attaquent et je demande une réponse urgente."

 25   Ce document porte le cachet de l'état-major principal du HVO, 10 mai 1993,

 26   20 heures 25. Voici ce qui m'intéresse. Vous avez un numéro

 27   d'enregistrement strictement confidentiel 01-432, en haut à gauche de l'en-

 28   tête. Voilà ce qui m'intéresse.


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  1   Maintenant, revenons au document précédent, le 10936. Ce document 10936 est

  2   la réponse à la demande strictement confidentielle 01-432, et dans ce

  3   document, Général, vous dites à Siljeg de "les pilonner à l'aide de

  4   l'artillerie ou avec n'importe quoi qui vous tombe sous la main, et de tout

  5   rasé."

  6   Donc Siljeg a fait une demande urgente, et on sait que votre réponse c'est

  7   un document légitime du HVO, document où vous avez employé justement ces

  8   termes où vous répondiez au colonel Siljeg, n'est-ce pas ?

  9   R.  Monsieur le Président, le Juge Antonetti, je me suis répété plusieurs

 10   fois. Chaque fois qu'on me montre ce document, je répète toujours la même

 11   chose : il ne s'agit pas de mon écriture, ni sur le premier ni sur le

 12   deuxième document. Ce n'est pas ma signature. Ce n'est pas mon style

 13   d'écriture, parce que ça apparaîtrait aussi dans les autres documents que

 14   j'ai bel et bien signés.

 15   Je suis arrivé à Mostar le 11 mai. J'ai expliqué exactement le temps que

 16   j'y ai passé, ce que j'y ai fait, quand je suis parti. Je n'ai aucune idée

 17   de qui, pourquoi, comment on a préparé ce document. Je ne sais pas comment

 18   ce document est arrivé dans ce dossier. Je n'en ai aucune idée. Je ne peux

 19   pas vous donner d'information supplémentaire à propos de ce document. J'ai

 20   demandé à ce que l'on envoie ce document à un graphologue pour qu'il soit

 21   analysé pour prouver si c'est mon nom qui y est écrit. Ils pourraient la

 22   comparer avec ma propre écriture, mais c'est totalement superflu. Ça n'a

 23   absolument rien à voir avec mon écriture. Je n'ai rien à dire à propos de

 24   ce document, rien de plus sauf que je n'ai rien à voir avec ce document. Ce

 25   n'est pas mon écriture, ce n'est pas ma signature, ce n'est pas mon style.

 26   Q.  Général, mais que vous l'ayez rédigé de votre propre main,

 27   matériellement, ça, c'est une chose, mais il s'agit bien de vos propos, des

 28   propos que vous avez peut-être dictés à quelqu'un d'autre. Vous avez


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  1   approuvé ces mots, et en fin de compte, c'est passé par le système de

  2   l'état-major principal du HVO, ça a été communiqué à Siljeg par paquet avec

  3   votre nom. C'est comme ça que ça s'est passé, même si vous ne l'avez pas

  4   rédigé vous-même.

  5   R.  Mais j'aurais au moins signé, Monsieur le Procureur. Encore que

  6   quelqu'un d'autre l'ait couché sur papier, mais j'aurais signé ce texte.

  7   D'ailleurs, la question qui se pose est de savoir où j'étais à ce moment-là

  8   ? Si dans une montagne de faux documents qui ont été infiltrés ici par

  9   différents services secrets -- je vous affirme que je n'ai rien à voir avec

 10   cela, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Je n'ai rien à ajouter à

 11   ce sujet, et voyez ce que vous allez en faire vous-mêmes.

 12   Q.  Général, seriez-vous d'accord avec moi pour confirmer que ce document P

 13   10936, à savoir la réponse à Siljeg est un ordre contraire à la loi,

 14   l'autorisation lui est donnée de se servir des pièces d'artillerie sans

 15   opérer des distinctions entre des cibles civiles et non civiles ? Cela

 16   n'est-il pas vrai ?

 17   R.  Mais il n'est pas question de cibles ici. Il n'en est pas fait mention.

 18   Dans ces situations, même si sur le terrain on y met un ordre, on dit :

 19   Détruits des tranchées ou des bunkers, mais là, il n'y a rien qui doit être

 20   attaqué par lui. Qu'est-ce qui doit être attaqué, que doit être détruit

 21   véritablement ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas la liste de vos témoins sous la main,

 23   malheureusement. Il me semblait qu'avait été envisagé à un moment donné la

 24   venue du colonel Siljeg. Si le colonel Siljeg témoignait, il aurait

 25   expliqué à qui il a adressé ce document, car le document P 9769 est très

 26   clair. Il demande l'autorisation d'utiliser l'artillerie, puisque, en

 27   rétorsion, semble-t-il, il a l'intention de raser, en quelque sorte,

 28   Jablanica. Donc comme le sujet dépasse ses compétences, il s'adresse au


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  1   niveau supérieur. Alors moi je ne sais pas si Siljeg viendra ou ne viendra

  2   pas. S'il ne vient pas, il aurait pu faire une lettre en réponse à votre

  3   avocat en disant qu'il a eu connaissance de ce document P 9769. Il confirme

  4   par retour de courrier que son interlocuteur ce n'était pas le général

  5   Praljak. Mais indépendamment de cela, le 10 mai, le commandant du HVO, ce

  6   n'est pas vous.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Puis, par ailleurs, Monsieur le Président

  8   Antonetti, le Procureur a eu un entretien prolongé qui s'étend sur trois ou

  9   quatre classeurs avec Siljeg. Siljeg ne sais pas qui lui a donné cet ordre.

 10   Ce n'est pas la question qui se pose. La question est de savoir qui l'a

 11   envoyé. Et dans ce document, ce n'est pas à moi qu'il s'adresse. Il n'écrit

 12   pas, Praljak, réponds-moi. Ce qu'il écrit, c'est -- je ne sais pas. Il

 13   écrit à l'état-major principal. Et pour autant que je le sache, je suis

 14   arrivé le 11, Petkovic n'était pas là, il était en Bosnie centrale pour

 15   assister à des négociations. Je ne sais pas du tout qui a envoyé ça. Si M.

 16   le Procureur avait voulu amener Siljeg comme son témoin, il aurait fallu

 17   qu'il le cite pour qu'il conforte sa thèse. Mais vous voulez que je défende

 18   mon innocence ici. C'est sans arrêt qu'on me le demande. Non, que le

 19   Procureur prouve que c'est bien mon écriture, ma signature sur les deux

 20   documents, que ça m'a été adressé, cette question de Siljeg. Pourquoi

 21   voulez-vous que je me défende ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous l'avez déjà dit, c'est au Procureur de le

 23   prouver, tout le monde est d'accord. Mais indépendamment de cela, on a un

 24   document que vous contestez. On le sait. Mais là, vous venez de dire

 25   quelque chose. Vous dites, M. Siljeg, il y a trois classeurs ou quatre où

 26   il a été auditionné certainement comme témoin ou suspect, je ne sais pas,

 27   et dans lesquels vous semblez dire qu'on lui a posé les questions. Alors

 28   vous avez une meilleure connaissance que moi de tous ces documents, parce


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  1   que comme vous le savez, les documents échappent au contrôle des Juges,

  2   donc je n'ai pas eu à connaître de ce qu'a pu dire le colonel Siljeg. Mais

  3   dans votre souvenir, qu'est-ce que le colonel Siljeg a dit au Procureur

  4   quand on lui a posé des questions sur ce document ? Qu'est-ce qu'il a dit,

  5   si vous vous en souvenez ? Parce que moi, si j'avais contrôlé des

  6   documents, j'aurais la réponse, mais comme je ne contrôle pas les

  7   documents, il n'y a que vous qui pouvez me répondre.

  8   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre,

  9   Monsieur le Juge, Monsieur Praljak. Vous parlez tous les deux sans ménager

 10   une pause. Vous parlez rapidement et maintenant nous avons un problème pour

 11   ce qui est du deuxième paragraphe. Les propos sont attribués au témoin,

 12   alors que ça a été dit par le Président.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Le Juge Prandler a raison. Rien ne lui échappe. La

 14   ligne 3, page 52, c'est moi qui parle et ce n'est pas vous. Alors je vais

 15   reprendre.

 16   Vous avez dit tout à l'heure que le colonel Siljeg a été entendu par le

 17   bureau du Procureur il y a trois ou quatre classeurs. Alors, vous, vous

 18   avez une bonne connaissance de l'affaire. Puisque vous dites qu'il y a eu

 19   trois ou quatre classeurs, je présume que vous avez dû lire ce qu'a dit le

 20   colonel Siljeg. Qu'est-ce qu'il a dit à propos de ce document, dans votre

 21   souvenir, parce que moi, je ne sais pas ce qu'il a dit, parce que je ne

 22   contrôle pas la communication des documents.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, je n'arrive

 24   pas à me souvenir qu'on ait posé des questions là-dessus, sur ce sujet, à

 25   M. Siljeg, même s'il y a plusieurs années de cet entretien qui a été un

 26   entretien très long. J'espérais qu'il allait être cité par le Procureur

 27   comme son témoin et non pas qu'on nous cite comme des témoins certains

 28   généraux, des pompiers et j'en passe. Donc je ne me souviens pas qu'il ait


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  1   été question de cela. D'ailleurs, la logique des choses me fait douter de

  2   l'éventualité d'une réponse pertinente par Siljeg, il n'aurait pas pu

  3   répondre. Si jamais il a reçu quelque chose, il peut dire que c'est arrivé,

  4   que c'est moi.

  5   Mais c'est le 11 que je suis arrivé à Mostar; je n'y étais pas le 10.

  6   D'ailleurs, je m'attends à ce que ce soit le Procureur qui citera Siljeg

  7   pour étayer cette thèse. Ce n'est pas à moi de le faire.

  8   Il faut que je me défende contre quelque -- s'il vous plaît, je conteste,

  9   je rejette entièrement ce document, dans sa totalité. En fin de compte,

 10   qu'il y ait une analyse graphologique. Si j'avais été là, pourquoi est-ce

 11   que je n'irais pas signer les documents rédigés par quelqu'un d'autre ? Ça

 12   m'est arrivé. Je ne vois pas comment vous les --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : On a deux documents. Vous constatez dans le premier

 14   document, le P 1969, qu'il y a un timbre d'enregistrement. Donc ce timbre,

 15   ce document a été enregistré à

 16   20 heures 25, le 10 mai, et il a un numéro 2640. Le deuxième document qui

 17   vous est, par le Procureur, imputé, il a été enregistré, lui, le même jour,

 18   apparemment, à 21 heures 25, et il porte le numéro 2641. Quand on regarde

 19   les deux tampons, on peut peut-être penser que celui qui enregistre les

 20   deux documents est le même individu parce que l'écriture semble être

 21   identique.

 22   Vous dites que le deuxième document "Brada" est faux. Ça voudrait

 23   donc dire que le premier document est faux aussi ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais vous voyez que c'est quelqu'un qui

 25   a la même écriture qui est à l'origine de ce texte; ni l'un ni l'autre

 26   n'ont rien à voir avec moi. Vous avez un en-tête Siemens sur un document.

 27   Je ne sais pas. Comment voulez-vous que je réponde ? Quel Siemens ? D'où ça

 28   vient ? Le premier n'a pas de Siemens, le deuxième a un Siemens. Le HVO


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  1   avait un en-tête, je ne suis pas le commandant. Je ne sais pas.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez des avocats qui vous défendent. Moi, je ne

  3   sais pas, mais un avocat qui fait son travail, il est au courant, d'après

  4   vous, qu'il y a un faux. Le B.A.-BA du travail, ça serait à ce moment-là

  5   d'envoyer une lettre à M. Siljeg en disant : Voilà, il apparaît que vous

  6   aviez envoyé le 10 mai un document sous le numéro 01432. Bien que ces faits

  7   remontent à très longtemps, vous souvenez-vous avoir fait un rapport de

  8   situation demandant l'intervention de l'artillerie ? Et votre avocat envoie

  9   à Siljeg une copie dudit document. Siljeg regarde le document, il se

 10   souvient, il ne se souvient pas. S'il ne se souvient pas, il dit : Non, je

 11   ne suis pas en mesure de vous répondre, ou bien il se souvient

 12   parfaitement, et il répond en disant : Je n'ai jamais envoyé ce document ou

 13   j'ai envoyé ce document. C'est comme ça qu'il faut travailler.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, Siljeg envoie

 15   son document à l'état-major principal. Il peut dire: O.K., je l'ai envoyé.

 16   Mais il n'y a aucun lien entre ça et la réponse qui n'a rien à voir avec

 17   moi. Je suppose que Siljeg est à Rama, et cet homme qu'il envoie de Mostar

 18   ou qui a rentré ces documents, ces faux documents, il se trouve à Mostar.

 19   Donc même si Siljeg le disait, ça n'a rien à voir avec ce document, car

 20   Siljeg est à Rama, donc quelqu'un qui envoie --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : En admettant que le colonel Siljeg ait envoyé ce

 22   document, lui, à l'époque, il doit savoir quel est l'officier de permanence

 23   au commandement. Donc théoriquement --

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Comment voulez-vous qu'il sache ?

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-être qu'il ne le sait pas. Alors il peut dire :

 26   Je ne peux rien dire ou bien je me souviens que c'était le lieutenant, le

 27   capitaine, je ne sais quoi. Voyez auprès de lui. C'est comme ça qu'on fait

 28   une enquête.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais il n'est pas en communication par

  2   téléphone avec celui de permanence. Il a envoyé par paquet, il ne sait pas

  3   qui est à l'autre bout, qui va le réceptionner. Il a reçu une réponse que

  4   quelqu'un a soufflé, quelqu'un a glissé contre moi. Ce sont deux hommes qui

  5   sont à deux points distants et qui communiquent par paquet. Qui a envoyé ?

  6   Est-ce qu'il l'a envoyé ? Comment est-ce que c'est parvenu avec deux

  7   signatures ? Brada et Slobodan Praljak, et ça n'a rien à voir ni avec Brada

  8   ni avec Slobodan Praljak. Moi, je l'ignore, je ne sais pas comment c'est

  9   arrivé. Qu'on remette ça à un graphologue, s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Kovacic.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Peut-être que je peux contribuer à ce débat.

 12   Avec tous mes respects, je ne suis pas d'accord avec le conseil implicite

 13   que vous avez donné sur les démarches à faire par la Défense. Nous avons

 14   étudié ces documents, nous nous y sommes penchés. Nous nous sommes adressés

 15   par un mémo technique à la Chambre pour préciser lesquels parmi les

 16   documents sont des faux à notre avis. Nous avons fourni cela avant le début

 17   de la déposition de M. Praljak. Donc nous maintenons toujours la même

 18   position, à savoir qu'il s'agit d'un faux. C'est la conclusion à laquelle

 19   nous sommes arrivés depuis le moment de nos préparatifs à la Défense, en

 20   sachant de quel procès il s'agira, en sachant où repose la charge de la

 21   preuve, nous savions que le Procureur sera tenu de démontrer l'authenticité

 22   du document à partir du moment où nous aurons posé cet argument.

 23   Il a posé sa question à l'accusé Praljak, il a obtenu une réponse. Il

 24   aurait pu poser sa question à un témoin X, Y, ou procéder à une analyse

 25   graphologique. Est-ce qu'il l'a fait ou ne l'a pas fait ? Ça, c'est son

 26   problème, donc le problème du Procureur. Donc le témoin répond que ce

 27   document n'est pas authentique.

 28   Un deuxième point, Monsieur le Président, et c'est très important et il me


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  1   semble que ça a été l'une des raisons pour lesquelles nous avons renoncé à

  2   nous pencher davantage là-dessus, donc P 1936. Dans ces deux documents

  3   manuscrits et le troisième qui serait un document envoyé par paquet, il n'y

  4   a aucune attestation d'origine sur ces documents. Ils ne viennent pas des

  5   archives croates, ne comportent pas le cachet des archives croates.

  6   Autrement dit, quelqu'un a fourni cela au bureau du Procureur ou bien

  7   quelqu'un a glissé cela dans un jeu de documents qu'ils ont reçu des

  8   organes de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ou de Croatie. Bien entendu,

  9   nous ne pourrons pas le savoir.

 10   Les documents, pour ce qui est d'un seuil minimum que vous avez déterminé,

 11   vous, en tant que Chambre, donc pour avoir du moins, à prima facie,

 12   l'authenticité d'un document, ce premier seuil n'est pas atteint parce que

 13   nous n'avons pas d'attestation de l'authenticité du document.

 14   Et vous avez déjà en l'espèce, avant cela, ce document aurait été

 15   signé de la main du général Praljak. P 280 aurait été la première cote. Et

 16   maintenant, la première page comporte la cote P 10936, vous avez pris une

 17   décision pour rejeter ce document précisément parce que vous ne pouviez pas

 18   confirmer l'authenticité.

 19   Vous avez entendu les réponses du témoin, c'est lui qui dépose. Moi,

 20   je ne suis pas en train de témoigner, déposer. Donc avec tous mes respects,

 21   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la Défense a pris une décision

 22   raisonnée qu'il n'y a pas lieu de citer Siljeg ou de présenter d'autres

 23   pièces à l'appui. La charge de la preuve repose sur le Procureur, c'est à

 24   eux donc d'étayer leur thèse. Ils affirment, Praljak, c'est toi qui as

 25   écrit cela; Praljak le nie. Et le Procureur ne peut pas non plus confirmer

 26   l'authenticité du document.

 27   Monsieur le Président, à moins qu'il apporte des preuves fermes à

 28   l'appui de l'authenticité, premièrement qu'il démontre l'origine du


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  1   document; avant cela, j'estime qu'il n'y a pas lieu de perdre son temps là-

  2   dessus dans ce prétoire après avoir entendu la réponse du témoin.

  3   Je vous remercie.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, allez-y, Monsieur Praljak, on vous attend.

  5   [Le témoin quitte la barre] 

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaut peut-être mieux que vous parliez en présence

  7   de M. Praljak. On va attendre.

  8   [Le témoin vient à la barre] 

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Stringer, je vous donne la parole.

 10   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   La position de la Défense est claire et ils n'ont jamais changé de

 12   position. Ils ont toujours affirmé qu'il s'agissait d'un faux et nous

 13   comprenons tout à fait que la charge de la preuve revient à l'Accusation.

 14   C'est nous qui présentons le document et nous devons démontrer à la Chambre

 15   qu'il s'agit d'un document authentique, et nous pensons que nous l'avons

 16   fait. C'est justement en partie ce qui est en train de se passer ici. La

 17   décision revient à la Chambre. La Chambre décidera s'il s'agit d'un

 18   document authentique ou non. Et l'Accusation estime que les indices ne

 19   manquent pas pour le démontrer. Tout d'abord, nous avons les cachets de

 20   l'état-major principal du HVO, les cachets qui, à notre sens, démontrent

 21   qu'il s'agit d'un document authentique au sein de l'état-major principal --

 22   M. KOVACIC : [interprétation] Excusez-moi --

 23   M. STRINGER : [interprétation] J'aimerais terminer. J'aimerais pouvoir

 24   terminer.

 25   M. KOVACIC : [interprétation] Mais vous êtes en train de faire votre

 26   réquisitoire. Moi, j'ai soulevé une question de procédure, et cela,

 27   directement pour répondre à M. le Président. A présent, vous présentez vos

 28   arguments, mais vous pouvez faire cela dans votre mémoire final.


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  1   M. STRINGER : [interprétation] Mais on a contesté l'authenticité du

  2   document. Mon confrère dit que ce document n'est pas authentique, que c'est

  3   manuscrit, que ce n'est pas l'écriture de son témoin, qu'il faut signaler

  4   d'où provient ce document. Monsieur le Président, je suis en train

  5   d'affirmer qu'il y a des éléments opposés qui démontrent l'authenticité du

  6   document. Nous avons les cachets, nous avons la série des numéros qui se

  7   suivent. Prenez le cachet de l'état-major principal dans 9769, document de

  8   Siljeg. Donc ça, c'est le document 2640, si vous vous penchez sur le

  9   cachet. Et puis, dans le document Praljak, c'est 2641. Donc c'est à 20

 10   heures 45 qu'arrive le document, le document de Praljak. C'est une heure

 11   plus tard ou à peine une heure plus tard, à 21 heures 25. Vous avez toute

 12   une série d'indices qui nous démontrent l'authenticité. Vous avez donc les

 13   numéros de référence, le numéro de référence de réception de Siljeg, le

 14   numéro de référence d'envoi de Praljak, avec le 432. Donc nous estimons,

 15   Monsieur le Président, qu'il y a suffisamment d'indices qui nous montrent

 16   l'authenticité, mais la décision définitive revient à la Chambre.

 17   Pour ce qui est de la source du document, tous ces documents

 18   proviennent d'une seule et même source, les archives du HVO; et nous avons

 19   reçu cela, les documents se suivant. Donc il y a une séquence faisant

 20   partie du classeur 12, numéro 696, et ça a été obtenu par le bureau du

 21   Procureur des archives de l'Etat de Croatie le 13 septembre de l'an 2000.

 22   M. KOVACIC : [interprétation] C'est tout à fait impossible. Le Procureur

 23   peut décrire dans ces livres, comme il l'entend, l'entrée des documents,

 24   mais en l'espèce, vous vous en souviendrez, et également dans d'autres

 25   affaires, le Procureur a cité les témoins pour présenter sa méthodologie.

 26   Et moi aussi, en application 92 bis, je citerai un témoin qui décrira la

 27   méthodologie. Si un document provient des archives croates, et c'est le

 28   seul endroit où on a trouvé des documents du HVO, c'est-à-dire la HZ HB, à


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  1   ce moment-là, le document doit comporter nécessairement le petit cachet

  2   rond, signe des archives dans les premières années, et plus tard, il

  3   devient carré. Donc un petit tampon carré.

  4   Monsieur le Président, je me permets de rappeler que vous vous êtes adressé

  5   aux Défenses. Je ne sais plus si c'était à l'intention du Procureur, mais à

  6   l'intention des Défenses, vous avez refusé un grand nombre de documents

  7   précisément parce que ces documents ne provenaient pas d'archives, c'est-à-

  8   dire que vous avez accepté comme authentiques nombre de documents pour

  9   lesquels vous avez dit, les archives sont la source, les archives non

 10   contestables. Alors si l'enquêteur du bureau du Procureur s'est procuré ces

 11   documents d'une autre manière avant que les documents ne soient remis aux

 12   archives, à ce moment-là, le Procureur doit préciser où ces documents ont

 13   été repérés et faisant partie de quelle documentation. Est-ce que c'est une

 14   agence, une autorité qui leur a remis ces documents ? Est-ce que c'est de

 15   manière indirecte ou est-ce que ça a été prélevé dans des archives

 16   originales, ou là où se sont retrouvées à la fin des archives de l'Etat ?

 17   Donc il n'y a pas d'authenticité ici. Le Procureur ne peut pas nous

 18   affirmer : cela figure dans mes livres. Ce n'est pas suffisant.

 19   Et juste une phrase pour terminer, juste une phrase, si je peux.

 20   Dans l'affaire Cerkez-Kordic, le Procureur a cité quatre témoins afin

 21   de prouver l'authenticité d'images de ce qu'on a appelé les transcriptions

 22   présidentielles -- enfin, manque d'authenticité de ces extraits, et le

 23   témoin Prelec a raconté comment on a prélevé des documents dans un premier

 24   temps, dans un tout premier temps, des archives. Après, la méthodologie a

 25   été changée. Mais ça doit comporter un cachet.

 26   Merci.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un petit détail. Vous avez raison, le document

 28   P 9769, il y a un petit cachet, il y a un petit cachet dans la version


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  1   B/C/S. Par contre, dans le document signé "Brada", manuscrit, moi, je ne

  2   vois pas de cachet. Il n'y a pas de petit cachet.

  3   M. STRINGER : [interprétation] Oui, je suis d'accord, Monsieur le

  4   Président. C'est tout à fait manifeste de savoir si ce document comporte un

  5   cachet ou non et je n'ai rien à ajouter.

  6   L'Accusation a présenté ses arguments --

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- Continuez vos questions.

  8   M. KOVACIC : [interprétation] Juste un mot, Monsieur le Président.

  9   Nous ne contestons pas l'authenticité de la pièce P 9769. Il y a

 10   nombre de ce document. Après tout, ce document semble être en ordre. Il

 11   comporte un cachet. Mais les seuls que nous contestons ce sont les deux

 12   autres qui seraient, paraît-il -- enfin, les trois documents de Praljak

 13   ainsi que le document par paquet. Nous les contestons parce qu'il n'y a pas

 14   d'authenticité, pas de cachet des archives.

 15   Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On continue.

 17   M. STRINGER : [interprétation]

 18   Q.  Général, P 04235, le document suivant. C'est toujours le sujet du style

 19   de commandement qui nous intéresse. Je sais que nous avons déjà vu cela

 20   pendant votre déposition. Je ne pense pas que vous contestiez son

 21   authenticité. Ai-je raison de dire cela ? C'est un de vos documents; 16

 22   août 1992, c'est la date qui est sur le document Prozor.

 23   R.  C'est exact, c'est mon document.

 24   Q.  Et cela date du moment où vous commandiez l'état-major principal, le 16

 25   août, c'est bien cela ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Donc vous envoyez cela de Prozor, vous envoyez cela à l'état-major

 28   principal du HVO et également à Tomislavgrad, au commandement de la zone


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  1   opérationnelle de l'Herzégovine du nord-ouest.

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Général, dans ce document, vous procédez à une évaluation, une

  4   appréciation des différentes unités du HVO, leurs effectifs. Je ne vais pas

  5   répéter tout cela, ça fait partie de la liste. Et vous dites, vers la fin

  6   de la page 2 en anglais, qu'il faut déduire 10 % pour différentes raisons,

  7   blessés, et cetera, et personnes épuisées. Et vous dites, c'est uniquement

  8   Filipovic qui a une unité capable de mener une attaque de bonne qualité, et

  9   puis en anglais on lit uniquement, Merde.

 10   Alors, Général, vous étiez très frustré à ce moment-là, mais si nous

 11   parlons du style de commandement, même si les choses ne se passent pas très

 12   bien pour le HVO sur le plan militaire en Herceg-Bosna, lorsque le

 13   commandant de l'état-major principal, et en particulier lorsque c'est

 14   quelqu'un qui vient du gouvernement croate, de l'armée croate, qui a le

 15   parcours qui est le vôtre, écrit cela et l'envoie à la zone opérationnelle

 16   et l'état-major principal, le message qu'on envoie est celui du moins d'un

 17   manque de professionnalisme flagrant. Est-ce que cela n'est pas vrai ?

 18   R.  Non, je ne suis pas du tout d'accord. Si j'ai vu des gens qui jurent

 19   c'est certainement dans les armées américaines. Mais dans des conditions de

 20   guerre, toute armée jure, dit des jurons. Mais lorsque vous parlez des

 21   zones opérationnelles, je n'ai pas envoyé tout ceci aux zones

 22   opérationnelles et je l'ai envoyé à une seule zone opérationnelle et à

 23   l'état-major principal à Mostar, donc qu'à des officiers supérieurs, je me

 24   le suis envoyé à moi-même, c'est vrai, parce que j'ai voulu voir combien

 25   d'effectifs nous avions effectivement, car il y avait plusieurs sous-

 26   listes, diverses listes, et cetera. Donc je voulais m'assurer que dans une

 27   telle situation dans laquelle il y a 21 unités, il est certain que 21

 28   unités ne peuvent pas composer 2 100 soldats, par exemple, ce qui veut dire


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  1   100 soldats par unité.

  2   Q.  Je m'excuse de vous interrompre. Je ne conteste pas les données qui

  3   figurent dans les documents. Mais vous êtes commandant de l'état-major

  4   principal, Mon Général. Il n'est pas professionnel pour vous d'employer un

  5   langage comme celui-là dans des documents que vous envoyez à l'état-major

  6   principal et dans les zones opérationnelles, n'est-ce pas ? N'est-il pas

  7   inapproprié d'employer ce type de langage ?

  8   R.  Oui, tout à fait. C'est tout à fait humain d'utiliser ce genre de

  9   langage dans de telle situation, oui. Alors je me défends en disant ceci,

 10   c'est le type de langage qu'on peut trouver dans divers rapports, pire

 11   encore. Je maintiens ce que j'ai dit. Je sais exactement dans quelle

 12   situation je me suis trouvé. Je sais exactement ce que cela voulait dire.

 13   C'était, Merde, voilà il faut survivre, et comment voulez-vous que l'on

 14   survive, je ne le sais pas, aucune idée. C'est moi qui était resté là avec

 15   toutes ces unités, je devais courir d'une unité à l'autre avec tous mes

 16   sous-officiers, je devais tirer le maximum de ces hommes même si

 17   l'offensive était très imminente, l'offensive musulmane, je ne vois

 18   absolument rien de mal là-dedans. La langue militaire n'est absolument pas

 19   établie comme étant comme ceci ou comme cela, c'est un langage militaire,

 20   on peut employer ce type de mots si on veut.

 21   Q.  Mon Général, je voulais vous demander de nous parler maintenant des

 22   propos qui sont contenus dans votre ordre qui a été émis en rapport avec

 23   les événements qui ont eu lieu à Vares en octobre 1993. Nous l'avons dans

 24   le classeur, mais c'est un document bien connu.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder l'autre document, moi, je me situe

 26   sur un autre plan.

 27   Monsieur Praljak, là il y a une liste des unités et des soldats. Je

 28   constate que dans la zone Prozor-Gornji Vakuf il y a 4 424 personnes. Dont


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  1   apparemment 10 % hors service pour diverses raisons. Disons qu'il y aurait

  2   globalement 4 000 personnes. Alors moi je me pose une autre question. Est-

  3   ce qu'avec 4 000 -- je vous ai déjà posé cette question, mais je reviens

  4   toujours.

  5   Est-ce qu'avec 4 000 soldats on peut attaquer l'ABiH ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Même pas dans un rêve, Monsieur le Président

  7   Antonetti. Sauf que vous avez mal calculé. Je dis 10 %, c'est ceci, mais je

  8   vous affirme la chose suivante, les hommes qui restaient de Jajce n'étaient

  9   plus en mesure de combattre, ils étaient absolument épuisés. Il y avait

 10   également une unité de Sebesic que l'ABiH avait prise. Donc il avait 40 %

 11   des hommes de Sebesic qui avaient des troubles psychologiques, ils n'en

 12   pouvaient plus. Une partie de Grude avait fui, Bugojanci aussi, et il y

 13   avait des volontaires de la 5e Brigade de Garde de l'armée croate, il ne

 14   restait plus que 130 soldats d'infanterie. Monsieur le Président, Monsieur

 15   les Juges, voici le document authentique du terrain, lorsque j'étais déjà,

 16   je ne peux pas dire que j'étais désespéré, mais presque, on perdait le

 17   territoire. Et Filipovic comptait 38 hommes et eux aussi étaient partis.

 18   Donc il restait 15 Garazis [phon], là eux n'étaient pas là. Donc moi je

 19   n'avais pas plus de 2 100 à 2 200 soldats à ce moment-là. Je parle trop

 20   rapidement. Oui, excusez-moi.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez 2 000 à 2 100 soldats, et avec ces

 22   soldats, si je comprends bien, il fallait faire face aux Serbes et face à

 23   l'ABiH ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout à fait exact, de Raduski Kaman

 25   à gauche, que 40 à 50 kilomètres, il fallait maintenir ces lignes avec ces

 26   hommes. Si vous avez vu les effectifs dont l'ABiH disposait, avec lesquels

 27   elle a attaqué, il était très difficile, ces hommes étaient au bord du

 28   désespoir psychologique et physique, au bord d'un épuisement total


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  1   physique, et nous avons réussi tant bien que mal.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur le Procureur.

  3   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je crois que ça n'a pas été traduit. Ce

  4   que M. Praljak a dit n'a pas du tout été traduit. J'ai entendu, "à 50

  5   kilomètres," alors que cela ne fait pas partie du compte rendu d'audience.

  6   La meilleure façon serait peut-être de demander à M. Praljak de répéter ce

  7   qu'il avait dit.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous avez dû dire des choses très

  9   rapidement qui n'ont pas été au transcript. Il semblerait que vous avez dit

 10   à 50 kilomètres, ça n'est pas dans le texte. Qu'est-ce que vous avez dit ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Le groupe des hommes qui restaient, les 2 100

 12   à 2 200 hommes défendaient la ligne de 50 à 60 kilomètres au moins, c'était

 13   une ligne de défense de 50 à 60 kilomètres.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, les 2 100 ou 2 200

 15   personnes que vous aviez sous votre commandement, puisqu'on est au mois de

 16   d'août, ils avaient à défendre une ligne de front qui faisait 60 kilomètres

 17   de long, au moins.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, 50 à 60 kilomètres, certainement.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Et à votre connaissance, les Musulmans, ils étaient

 20   combien eux ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Au moins 1 par rapport à 5, ou 1 par rapport

 22   6.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, très rapidement. La

 25   raison pour laquelle ce document est analysé c'est à cause de ces deux

 26   derniers mots, vous nous avez dit que c'était également habituel et que

 27   d'autres armées employaient ce type de langage également. Est-ce que vous

 28   avez des exemples d'un ordre du commandement Suprême ou d'un ordre émanant


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  1   de généraux, de généraux chefs d'état-major qui employaient ce type de

  2   langue. Vous nous avez dit que c'était habituel. Je me demandais si vous

  3   aviez un exemple à nous donner.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas dit que c'était habituel.

  5   J'ai dit que ce n'était pas inhabituel d'employer ce type de propos dans

  6   toutes les armées du monde. Chez moi ce n'était pas habituel, mais cela

  7   démontrait simplement une situation particulièrement difficile. En fait, il

  8   n'y avait presque plus d'armée, si vous voulez, et c'est une réponse. J'ai

  9   demandé et je voulais savoir quels étaient les effectifs dont nous

 10   disposions.

 11   Mais si vous voulez, Monsieur le Juge Trechsel, je peux chercher et

 12   je peux vous trouver différents exemples, Patton, par exemple, giflait ses

 13   hommes s'il pensait qu'ils ne se battaient pas ou s'ils faisaient semblant

 14   de ne pas pouvoir se battre. Il y a eu également des généraux de Napoléon

 15   qui se livraient à toutes sortes de langages de ce type, et pour l'armée

 16   russe aussi.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez parlé de gifles et une

 18   fois vous avez déclaré dans ce prétoire, hypothétiquement, que vous ayez pu

 19   donner des coups à quelqu'un. Je ne vais plus poser d'autres questions.

 20   C'est à vous, Monsieur Stringer.

 21   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel.

 22   Q.  Passons maintenant au document suivant. Il s'agit du document P 06028.

 23   Le document porte la date du 23 octobre 1993, document qui émane du poste

 24   de commandement avancé de l'état-major principal du HVO à Citluk. Le

 25   document a été destiné à diverses personnes, comme nous pouvons voir,

 26   Kiseljak et Vitez et un grand nombre d'officiers, bien sûr, l'état-major

 27   principal, Petkovic, Mario Brodera, Ivica Rajic, Kordic, Blaskic. Le

 28   document porte sur la solution du problème à Vares. Mon Général, nous en


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  1   avons déjà parlé, et vous dites ici :

  2   "Essayez de résoudre la situation à Vares, ne montrez pas de merci.

  3   Trouvez des personnes qui sont prêtes à se livrer à cette tâche."

  4   Mon Général, un peu plus tôt dans votre déposition, le 23 juin de cette

  5   année, vous avez dit que vous aviez rédigé l'original de ce texte et que

  6   vous l'aviez envoyé seulement au général Petkovic et que vous n'avez pas

  7   donné d'autre ordre à d'autres personnes qu'à Petkovic. Vous avez dit à la

  8   page 41 870 :

  9   "La chose est très simple, je n'ai pas écrit à Rajic ou à la Brigade

 10   de Bukovac ou à qui que ce soit d'autre. Je n'ai pas donné d'ordre à ces

 11   personnes, jamais à la Brigade de Bobovac ou à Brigade de Rajic. J'ai en

 12   revanche écrit au général Petkovic le document original après avoir reçu un

 13   très grand nombre de rapports quant au désordre à Vares, telle la

 14   contrebande et ainsi de suite. Il y a eu d'autres rapports envoyés quant à

 15   ces situations. Il y a eu cinq ou sept rapports. Ce n'est qu'à ce moment-là

 16   que j'ai répondu et j'ai écrit au général Petkovic, je n'ai écrit qu'à lui.

 17   En écrivant à Petkovic, je lui ai dit, 'Faites en sorte que la situation

 18   soit réglée à Vares et ne montrez aucune pitié.'"

 19   Mon Général, ce document 6028, vous ne vouliez pas donner ces

 20   conclusions au général Praljak, vous aviez l'intention de distribuer ce

 21   texte aux autres personnes, tels des hommes de la Brigade Josip Jelacic et

 22   Ivica Racic et à d'autres personnes qui sont montrées ici, n'est-ce pas ?

 23   Vous n'aviez pas l'idée d'envoyer ce document qu'à Petkovic, votre

 24   intention était que ce document soit envoyé et parvienne à un très grand

 25   nombre de personnes ?

 26   R.  Non, ce n'est absolument pas vrai. Ici vous avez la signature du

 27   général Matic, donc mon document original, le général Matic l'avait lu et

 28   l'a envoyé à ces personnes. Ce n'est pas un ordre, mais la conclusion de la


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  1   situation à Vares et comment résoudre la situation à Vares. Je ne sais

  2   vraiment pas pourquoi je leur enverrais, moi, un document sur la résolution

  3   du problème à Vares. Mais pour être tout à fait clair, je n'ai rien contre

  4   le fait que ce document ait été envoyé à d'autres personnes. Ce n'est pas

  5   moi qui ai eu l'intention d'envoyer ce document à d'autres personnes, mais

  6   pourquoi pas ? Si la situation à Vares prévalait telle qu'elle était, sans

  7   voir qui est le frère de qui, qui est lié avec qui par des liens de

  8   parenté, qui fait de la contrebande avec qui, et cetera. Ce n'est pas un

  9   ordre. C'est tout à fait logique que je m'adresse à mon adjoint, Petkovic

 10   devait dire : Résous la situation, trouve des gens, bien sûr des hommes

 11   croates, et enlève ces gens, débarrasse-toi de ces personnes. Mais ça

 12   aurait pu être envoyé à Blaskic, ça aurait pu être envoyé à qui il voulait

 13   parce que c'est une position que j'avais prise, qui était la mienne.

 14   Q.  Très bien. Ce sont vos propos. Je sais que c'est le général Matic

 15   qui a envoyé ce texte, mais c'est bien vos propos à vous, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est tout à fait exact, ce sont mes propos et j'aurais dit

 17   la même chose aujourd'hui : Résous la situation, enferme-les, débarrasse-

 18   toi d'eux. Ça suffit.

 19   Q.  Mais vous ne dites pas : Arrêtez ces gens. Vous ne dites rien d'autre

 20   que : Ne montrez aucune pitié. En réalité, ce que vous dites ici, Mon

 21   Général, c'est que vous laissez le tout ouvert à interprétation, c'est-à-

 22   dire que toute personne voyant ceci veut dire qu'ils ont la possibilité et

 23   l'habilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour résoudre la

 24   situation à Vares, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non, non, ce n'est pas ça. Lorsqu'on dit "sans merci, sans pitié," ceci

 26   veut dire complètement autre chose. Cela a trait à la loi. S'il faut

 27   arrêter ces personnes, il faut les arrêter; s'il faut les enfermer,

 28   enfermez. Si vous pensez que chez nous le mot pitié veut dire couper la


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  1   tête ou bien faire autre chose, vous auriez dû voir dans mes documents ce

  2   type de propos, dans mes actions, mais je n'ai jamais agi de la sorte. Vous

  3   ne pouvez trouver nulle part ce type de comportement de ma part. Ce que je

  4   voulais dire c'est que ça suffit avec la contrebande, ça suffit avec la

  5   discipline, ça suffit avec leur façon de se comporter, Débarrasse-toi

  6   d'eux, résous la situation sans pitié.

  7   Q.  Mon Général, je vais vous interrompre, ce document n'indique même pas

  8   qui doit faire l'objet de cette situation qui doit être résolue parce que

  9   vous dites : Débarrassez-vous d'eux, résolvez la situation.

 10   R.  M. Petkovic est sur le terrain. Il a connaissance du document tout

 11   comme moi. Il connaît la situation et c'est tout. C'est vrai, il sait

 12   exactement à quoi on fait allusion ici. C'était tout à fait clair pour lui,

 13   c'était clair comme de l'eau de roche, même si ce n'était pas la première

 14   fois qu'on en avait parlé des documents qui venaient de Vares, quant aux

 15   problèmes qui avaient eu lieu avec les commandants de la Brigade à Loskovic

 16   [phon]. Il avait absolument connaissance de tout ce qui se passait et c'est

 17   tout à fait vrai que j'en avais ras-le-bol de cette situation.

 18   Q.  Très bien. Mais le HVO avait d'autres problèmes à l'époque, n'est-ce

 19   pas, mon Général ? Le HVO avait un très grand nombre de problèmes avec

 20   l'armée de Bosnie-Herzégovine et les Musulmans qui étaient à Vares; est-ce

 21   que ce n'est pas également vrai ?

 22   R.  Non, Monsieur. Moi je ne fais allusion qu'aux Croates, ici, je veux

 23   dire trouver les personnes qu'il faut arrêter, qu'il faut arrêter leur

 24   comportement. C'est aux Croates que je fais allusion.

 25   Q.  Pourriez-vous nous montrer où voit-on dans cet ordre que ces propos

 26   n'ont trait qu'aux Croates ?

 27   R.  Si vous voulez écarter quelqu'un de ses fonctions sans pitié et qu'en

 28   même temps il faut trouver des personnes qui sont prêtes à faire cela, et


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  1   si en même temps vous enlevez quelqu'un du HVO, alors qui voulez-vous que

  2   l'on trouve à sa place ?

  3   Q.  Mais le fait est que ce document ne porte pas sur les Croates. On ne

  4   dit pas ici, il faut démettre les personnes de leurs postes, il faut

  5   écarter des personnes croates. Non, c'est simplement un ordre qui laisse

  6   terrain à interprétation et toute personne recevant cet ordre émanant de

  7   vous en tant que commandant de l'état-major principal, on peut interpréter

  8   cet ordre de la façon dont on le veut, n'est-ce pas ?

  9   R.  Absolument pas. S'il faut trouver des personnes qui sont prêtes à faire

 10   quelque chose, s'il s'agit du HVO, alors à ce moment-là il n'y a qu'une

 11   interprétation logique : il faut trouver des Croates qui sont prêts à

 12   s'occuper de ceci afin de résoudre la situation de Vares, que les gens

 13   qu'il faut démettre de leurs fonctions ont apporté, cette situation qui

 14   existe à cause de ces personnes qui occupent ces postes. Si vous voulez

 15   interpréter les choses de façon différente, alors à ce moment-là je passe à

 16   côté de toute logique. Je n'ai jamais interprété les choses de cette façon-

 17   là. Cette interprétation ne peut être qu'une, si vous respectez la logique.

 18   Mais si vous ne respectez pas la logique, à ce moment-là, vous pouvez faire

 19   ce que vous voulez avec ces propos.

 20   Q.  Le moment où la contrebande -- vous nous parlez de la contrebande, mais

 21   le moment dans lequel vous ancrez ceci est assez difficile. Vous dites que

 22   vous avez reçu un très grand nombre de rapports quant à la contrebande ou

 23   toutes sortes d'activités illicites à Vares, et cela ne vous convenait pas.

 24   Vous étiez insatisfait avec certaines personnes au sein du HVO qui

 25   faisaient partie du gouvernement civil et, en revanche, vous prenez cette

 26   date-ci, le 23 octobre, et c'est à ce moment-là que vous voulez vous

 27   pencher sur le problème de contrebande. Je trouve cela très difficile à

 28   croire, eu égard à tout ce qui se passait à Vares au même moment.


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  1   R.  Monsieur, vous sautez des documents-clés, vous tirez certaines choses

  2   hors contexte, vous pouvez affirmer ce que vous voulez à ce moment-là. J'ai

  3   envoyé ce document, puisqu'à l'époque, d'après les rapports que j'avais

  4   reçus, Duznovic était déjà arrêté et le commandant de la brigade avait déjà

  5   été démis de ses fonctions ou il avait démissionné. C'est à ce moment-là

  6   que c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le verre, mais vous n'avez

  7   pas montré le document, justement, vous évitez le document principal parce

  8   que votre souhait n'est pas de trouver la réalité mais de gagner à tout

  9   prix. Trouvez le document original que j'ai envoyé et vous verrez ce qui

 10   est écrit sur ce document. Et Monsieur le Juge Antonetti m'a déjà posé des

 11   questions à ce sujet.

 12   Q.  Très bien. Mon Général, permettez-moi d'attirer votre attention sur le

 13   document suivant. Nous allons maintenant avancer dans le temps. De nouveau,

 14   nous avons un document qui est à vous et qui porte la cote P 06051. C'est

 15   un document qui est écrit par l'officier de permanence du nom de Zorinko

 16   Bosniak, et il est au commandement de la Brigade Ban Jelacic à Kiseljak à 4

 17   heures du matin le 24 octobre 1993. Le colonel Rajic est à Vares à ce

 18   moment-là; n'est-ce pas, Mon Général ?

 19   R.  Non, je ne le sais pas.

 20   Q.  Ce document parle du commandement de la Brigade à Kiseljak et il est

 21   envoyé à la Brigade de Bobovac à Vares, et le document est envoyé

 22   personnellement au colonel Rajic, n'est-ce pas ?

 23   R.  C'est ce qui est écrit ici.

 24   Q.  Cet officier de permanence informe Rajic de certaines communications

 25   qui ont eu lieu du côté XY. Maintenant, est-ce que vous êtes d'accord, Mon

 26   Général, que cette référence à XY porte sur les forces armées serbes ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Très bien. Et cet officier de permanence dit au colonel Rajic qu'il a


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  1   reçu les informations suivantes, il a dit :

  2   "Nous avons reçu des informations sur le général de brigade Slobodan

  3   Praljak disant que les activités continues qui ont été exécutées au cours

  4   des trois derniers jours à Gornji Vakuf, et nous avons occupé Bistrica,

  5   Oglavak, Brenovac, et ensuite nous nous sommes déplacés, et par la suite

  6   nous avons reçu l'ordre sur Vares : 'La situation à Vares doit être résolue

  7   ne montrant aucune pitié envers qui que ce soit. Il faut trouver des hommes

  8   capables ou qui sont à la hauteur de la situation.'"

  9   Donc, Mon Général, ce que nous voyons ici ce sont vos propos qui descendent

 10   le long de la chaîne de commandement et qui disent quels traitements

 11   doivent être accordés à ces personnes, et ce sont vos propos à vous, à

 12   travers le commandement de la Brigade de Kiseljak, cet ordre descend le

 13   long de la chaîne de commandement jusqu'à la Brigade de Bobovac, qui se

 14   trouve à Vares, jusqu'aux officiers, tel le colonel Rajic, et en fait cela

 15   devient un document -- vos propos maintenant sont envoyés aux personnes qui

 16   se trouvent au niveau de Zorinko Bosniak, qui est un officier opérationnel

 17   à un niveau très subalterne à son bureau à 4 heures du matin.

 18   Donc, est-ce que vous êtes d'accord, Mon Général, que vos propos concernant

 19   Vares, indépendamment de ce que vous vouliez dire lorsque vous les avez

 20   proposés, descendent le long de la chaîne de commandement et sont

 21   disséminés à un nombre de personnes qui sont présentes à Vares ?

 22   R.  Vous parlez d'un ordre, je dis que ce n'est pas un ordre. Ce que j'ai

 23   envoyé n'a jamais été un ordre. Vous dites que c'est selon mes souhaits, et

 24   ce n'est pas vrai non plus. Je n'ai fait qu'envoyer deux phrases au général

 25   Petkovic. Ce n'est pas un ordre. Mon souhait est clair comme de l'eau de

 26   roche, mais chaque souhait clair comme de l'eau de roche peut être

 27   interprété par quiconque de toutes sortes de façons. Comme ici lorsqu'ils

 28   disent, Résolvez la situation à Vares sans pitié et trouvez les personnes


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  1   qui sont à la hauteur de la tâche. Encore une fois, si un officier

  2   subalterne a quelque doute à savoir de la façon dont il a compris cet

  3   ordre, il doit demander au commandement de lui expliciter cet ordre.

  4   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on passer à

  5   huis clos partiel, s'il vous plaît, pour quelques instants ?

  6   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, pourrais-je simplement

  7   dire quelque chose très brièvement.

  8   Je demanderais au Juge Trechsel de vérifier le compte rendu d'audience

  9   pendant la pause, bien sûr, pas maintenant, mais vos derniers propos qui

 10   ont été consignés au compte rendu d'audience à la page 67, ligne 10. J'ai

 11   l'impression qu'il y a quelque chose qui cloche. Soit c'était

 12   l'interprétation qui n'a pas été bien faite ou bien vous aviez mal compris

 13   la réponse de M. Praljak. Je vous demanderais, Monsieur le Juge, avec tout

 14   le respect que je vous dois, de bien vouloir vérifier ce que vous avez dit.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- Monsieur le Greffier.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel. Merci.

 17   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   M. STRINGER : [interprétation]


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  1   Q.  Nous avons étudié ce dernier document concernant Vares. Pour en

  2   terminer avec ce sujet, nous parlions des mots que vous employiez, "ne

  3   montrez aucune pitié" ou lorsque vous employez des mots, "merde", enfin.

  4   Donc l'Accusation déclare que vous avez donné le feu vert, en fait, au

  5   colonel Siljeg de raser Jablanica, ce qu'il voulait faire, dans le document

  6   précédent. Donc vous employez parfois tous ces termes très crus. Il y a

  7   aussi les termes que vous avez employés dans le document de janvier 1993

  8   portant sur Gornji Vakuf où vous avez dit qu'il fallait annihiler, raser,

  9   écraser la ville. Quand on emploie des termes aussi enflammés, aussi

 10   incendiaires, on peut s'attendre au pire ensuite, n'est-ce pas, les soldats

 11   que vous commandez demandent que l'on soit précis, et ils avaient besoin

 12   d'un commandant qui communiquait avec eux de façon professionnelle et qui

 13   agissait aussi de façon parfaitement professionnelle, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je ne comprends pas votre question. Vous avez parlé de cinq documents,

 15   certains dont je conteste l'authenticité, d'autres employant des termes

 16   utilisés par Siljeg. Je vous ai bien dit que c'était des mots qu'il avait

 17   employés, que je n'employais pas moi-même. Donc, en revanche, pour ce qui

 18   est des deux autres mots utilisés, je maintiens ce que j'ai dit, sur la

 19   liste des hommes, ce sont des mots que j'ai employés, mais le sens était

 20   parfaitement contraire. Si vous considérez qu'il s'agit de mots

 21   incendiaires, les mots que j'ai envoyés à Petkovic, peut-être, mais en tout

 22   cas, le sens est parfaitement contraire au sens que vous leur donnez à

 23   vous.

 24   Je voulais que l'on puisse éviter ce qui est finalement arrivé là-bas. J'ai

 25   dit à Petkovic : Remplacez-les, faites ce que vous devez faire, agissez, ne

 26   vous occupez pas de ceci ou de cela.

 27   Je ne suis absolument pas d'accord avec ce que vous m'avez dit. Je vous ai

 28   donné des explications sur tous les mots que j'ai employés. Vous pouvez


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  1   continuer à insister sur l'interprétation que vous voulez donner à ces

  2   mots, sachez que j'ai répondu à toutes vos questions, et je ne suis pas

  3   d'accord avec vous.

  4   Q.  Donc, les ordres tels qu'ils sont reflétés dans ce document sont au

  5   niveau de professionnalisme requis ainsi qu'au niveau de légitimité qui est

  6   nécessaire et qui doit être celui d'un commandant de votre niveau ?

  7   R.  Lorsque j'ai donné ces deux ordres, que j'ai fait ces commentaires --

  8   lorsque j'ai fait ces deux ordres ou ce commentaire, je n'ai jamais donné

  9   d'ordre de ce type. Vous dites que c'est un ordre, mais il n'y est pas

 10   écrit "ordre" sur le document, on ne voit pas le mot "ordre" où que ce

 11   soit. Où avez-vous lu le mot "ordre" dans le document de Petkovic ? Ce

 12   n'est pas un ordre. Vous dites sans cesse que c'est un ordre, un ordre,

 13   vous pouvez le répéter 100 fois, ce n'est pas un ordre. Ce n'était pas un

 14   ordre.

 15   A de nombreuses reprises, des témoins ont témoigné à ce propos. Moi aussi,

 16   d'ailleurs, je l'ai abordé. J'ai toujours agi de façon extrêmement

 17   professionnelle. J'ai pris des mesures draconiennes pour éviter le manque

 18   de discipline. Parfois, il fallait risquer sa vie pour résoudre des

 19   problèmes, il fallait utiliser un peu de force, mais c'était pour éviter

 20   que des crimes soient commis. C'a été fait à plusieurs reprises, à de

 21   nombreuses reprises.

 22   Q.  Et le langage employé dans ce que vous avez envoyé à Vares, que ce soit

 23   un ordre ou pas, ou une consigne, ou une demande, en tout cas, c'a été

 24   interprété par les personnes sur le terrain qui l'ont reçu comme étant un

 25   ordre ?

 26   R.  Même s'ils l'avaient interprété comme étant un ordre, ils auraient dû

 27   l'interpréter tel qu'il a été écrit : Remplacer les idiots, les imbéciles,

 28   ceux qui causent tous ces ennuis pour qu'on puisse résoudre la situation de


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  1   façon militaire et adéquate. Remplacer tous ces Croates qui sont à

  2   l'origine de cette situation si désagréable, et ceci concernait le système

  3   organisationnel et militaire, la structure même, le fait que les lignes

  4   étaient mal défendues, le système était mal organisé.

  5   Q.  Mais dans ce dernier document, il y a écrit : Ne montrez aucune pitié.

  6   Il n'y a absolument rien qui parle d'idiots, d'imbéciles ou de remplacement

  7   de qui que ce soit; tout ce qui est écrit, c'est résolver la situation à

  8   Vares et ne montrer aucune pitié.

  9   R.  Monsieur Stringer, à qui ? Si j'avais dit : Trouve des hommes, alors,

 10   j'aurais dit : Bon, remplace ces imbéciles et trouve des hommes à la

 11   hauteur de la situation. Mais bon --

 12   Mme PINTER : [interprétation] Je dois ici soulever une objection concernant

 13   la question posée par M. Stringer. Pourrait-on, s'il vous plaît, montrer le

 14   document au général, le document manuscrit du général ? On l'a déjà entendu

 15   à plusieurs reprises dans ce prétoire nous dire de la façon dont les choses

 16   se sont déroulées. Donc, pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir le document

 17   manuscrit à l'écran, et ensuite nous pourrons répondre aux questions, parce

 18   que si on ne parle que de cette phrase et qu'on l'interprète comme étant un

 19   ordre, la Chambre de première instance ne saura pas exactement ce qui s'est

 20   passé et n'aura pas une bonne idée de ce qui s'est véritablement passé et

 21   ne pourra pas comprendre quel était le véritable message envoyé au général

 22   Petkovic.

 23   M. STRINGER : [interprétation] Nous avons vu les autres documents. Ce qui

 24   m'intéresse, c'est plutôt le document qui a été envoyé par le biais de la

 25   chaîne de commandement. Je crois qu'on a épuisé le sujet, quand même, lors

 26   de l'interrogatoire principal du général ainsi que du fait des questions

 27   posées par le Président de la Chambre. Je ne vois pas pourquoi en revenir

 28   au document manuscrit, le premier document. Ce qui m'intéresse, moi, c'est


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  1   la chaîne de commandement, et savoir comment ce jargon a pu avoir une

  2   influence sur les personnes sur le terrain.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre avocate dit il faudrait qu'on montre à l'écran

  4   le manuscrit où vous aviez écrit cette phrase. Vous en avez besoin ou pas ?

  5   Si vous en n'avez pas besoin, vous continuez à répondre aux questions.

  6   C'est vous qui témoignez, ce n'est pas votre avocate. Vous avez besoin du

  7   texte ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Vous m'avez déjà

  9   posé des questions à propos de ce document, vous l'avez déjà vu, c'est très

 10   clair. Je ne pourrais que me répéter, et l'Accusation se répètera sans

 11   doute et répétera sa thèse, et moi, je répondrai toujours de la même façon.

 12   M. STRINGER : [interprétation]

 13   Q.  Nous allons donc maintenant peut-être passer à autre chose, et je vais

 14   vous poser des questions à propos de l'état-major principal du HVO à partir

 15   du 24 juillet 1993, pour essayer de savoir exactement comment cet état-

 16   major fonctionnait, en tout cas, quelle était sa structure.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Avant que la question ne soit posée,

 18   Monsieur le Président, sachez que je suis assis ici et je me sens obligé de

 19   faire une observation pour la Chambre de première instance : lorsque le

 20   conseil d'un accusé, même un accusé aussi brillant que le général Praljak,

 21   se lève et fait une observation, comme ce que Mme Pinter vient de faire, je

 22   considère donc qu'un document devrait être remontré pour être juste envers

 23   son client et envers le compte rendu, la pratique n'est pas de demander au

 24   témoin ce qu'il en pense, parce que le témoin n'est peut-être pas dans la

 25   position adéquate pour comprendre exactement les tenants et les

 26   aboutissants de cette question ou de l'objection soulevée, donc je pense

 27   qu'il serait plus utile en fait de répondre au conseil et non pas de

 28   demander au témoin s'il a l'intention ou s'il sent qu'il a besoin ou non de


Page 43744

  1   voir ce document.

  2   Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Le conseil peut avoir le document. Le Procureur a

  4   dit, je passe à autre chose, donc le débat est clos. Si le Procureur avait

  5   continué on aurait enregistré votre objection mais M. Stringer est passé à

  6   autre chose.

  7   Mme PINTER : [interprétation] Pour le compte rendu, je tiens à dire la

  8   chose suivante, sachez que vous n'avez pas vu le document dont on a parlé

  9   aujourd'hui toute la journée. Vous avez vu une copie en fait du document,

 10   et rien d'autre. Le document avec l'écriture originale de M. Praljak, vous

 11   n'avez pas vu celui-là.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé. J'ai dit que je n'en n'avais

 13   pas besoin, mais j'en avais assez. Ça fait des heures qu'on en parle, on

 14   essaie d'avancer, et à mon avis -- des choses parfaitement stupides parce

 15   que le texte est clair comme de l'eau de roche à mon avis, très

 16   franchement, on verra bien après tout. J'en ai absolument assez de parler

 17   de tout ça. Ce message au général Petkovic était quand même clair comme de

 18   l'eau de roche.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Je suis désolé, mais moi aussi je dois

 20   prendre la parole, mais ce, pour une autre raison. J'attendais que

 21   l'Accusation ait terminé ses questions à propos de ce sujet et de leur

 22   contexte. Pour ce qui est du contexte de tout cela, en commençant par

 23   exemple par le témoin expert M. Pringle, ensuite les documents que nous

 24   avons vus en ce qui concerne aussi tous ces sujets. J'aimerais dire très

 25   clairement que le compte rendu le reflète, que l'acte d'accusation n'a pas

 26   été amendé, il ne me semble pas quand même. Dans l'acte d'accusation on

 27   parle de ce document, de ce message envoyé par Praljak à Petkovic, et on en

 28   parle mais dans un contexte bien différent. Les questions qui ont été


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  1   posées au témoin nous posent un dilemme en fait. L'Accusation est-elle en

  2   train d'établir une base lui permettant ensuite d'avancer que Praljak --

  3   enfin j'exagère un peu, mais que Praljak agissait de façon imprudente

  4   lorsqu'il s'est autorisé à employer ce type de jargon, ce type de mots crus

  5   dans les documents, et de ce fait il a plus ou moins incité ses subordonnés

  6   à penser d'une certaine façon ?

  7   On a commencé avec le général Pringle, mais le fait qu'il aurait créé

  8   un climat de commande tel que cela serait arrivé -- ça c'est des

  9   insinuations en tout cas de l'Accusation, cela fait deux heures déjà que

 10   l'Accusation insinue tout cela dans le cadre de son contre-interrogatoire.

 11   On insinue que M. Praljak a employé ces termes très crus pour envoyer un

 12   message à ses hommes, et pour les inciter à se conduire de façon

 13   parfaitement illégale ?

 14   Lorsqu'on suit la série de questions qui ont été posées au témoin, je

 15   crois qu'on a l'impression que l'Accusation est en train d'accuser M.

 16   Praljak de nouveaux méfaits, mais ce n'est absolument pas le cas, je tiens

 17   à le dire, l'acte d'accusation n'a pas été amendé, il me semble.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après -- vous allez répondre, mais d'après ce que

 19   j'ai compris, j'essaie de synthétiser.

 20   Vous avez pris plusieurs exemples où M. Praljak, par des mots écrits,

 21   par des documents, aurait potentiellement, si je comprends bien, pu ne pas

 22   créer ce climat de commandement que l'expert M. Pringle développe dans son

 23   rapport. Cet expert dit qu'il faut qu'il y ait un bon climat pour que le

 24   commandement puisse bien s'exercer. Au travers d'un certain nombre

 25   d'exemples, posez la question à M. Praljak pour savoir si le fait de dire

 26   un gros mot, le fait de dire telle ou telle chose n'avait pas d'effet sur

 27   les soldats. Est-ce que c'est ça que vous avez voulu démontrer ?

 28   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais que je


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  1   soumettais la thèse qui est celle de l'Accusation au témoin pendant la plus

  2   grande partie de cette journée, si personne ne l'a comprise, alors j'ai

  3   vraiment mal travaillé.

  4   Quelle est la cause de l'Accusation, que par la voie de documents et

  5   d'ordres et le langage employé par le général Praljak dont nous avons

  6   parlé, il a créé un style de commandement ou ses subordonnés se sentaient

  7   libres de commettre des crimes et d'approuver des crimes ou de regarder de

  8   l'autre côté et tolérer des crimes. Donc c'est ça notre cause.

  9    Est-ce que je peux juste ajouter, je ne comprends pas les observations

 10   faites par le conseil de la Défense. Je n'ai pas à expliquer cela au

 11   conseil de la Défense à chaque fois qu'ils ont des questions qui se posent

 12   pendant le contre-interrogatoire. Ils ont des questions supplémentaires

 13   qu'ils peuvent utiliser après. Je ne suis pas ici pour répondre aux

 14   questions de la Défense, et ils ne soulèvent pas d'objection, simplement

 15   ils demandent des précisions, mais je ne suis pas là pour leur fournir des

 16   précisions. Normalement, je ne devrais pas être tenu de le faire.

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Avec tous mes respects, Monsieur le

 18   Président, bien entendu que je ne m'attends pas à ce que l'Accusation, et

 19   je ne peux pas leur demander cela non plus, qu'ils m'expliquent leurs

 20   séries de questions et la finalité de leurs questions. Je n'ai nullement

 21   l'intention de le faire et j'en assure mon collègue. Mais il vient de

 22   redire des propos qui m'inquiètent.

 23   La cause de l'Accusation est la suivante : "Les documents, les

 24   ordres, le langage du général Praljak lui ont permis de créer un style de

 25   commandement dans lequel ses subordonnés se sont sentis libres de commettre

 26   des crimes ou d'approuver des crimes."

 27   Nous avons factuellement [phon] une nouvelle description dans l'acte

 28   d'accusation. Par ailleurs, c'est une nouvelle forme de responsabilité


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  1   pénale de culpabilité. Nous n'avons pas cette insinuation dans l'acte

  2   d'accusation, ces chefs d'accusation exprimés de cette manière-là, ou je

  3   n'arrive pas à me le rappeler.

  4   Et, mon estimé confrère ne m'a pas apporté une réponse qui me satisfait, je

  5   dois dire. Il ne dit pas ce ne sont pas les nouveaux chefs d'accusation. Ou

  6   bien, c'est ce qu'il me doit me dire ou le rejeter. Quand il me parle du

  7   contre-interrogatoire, quand il me dit, je ne suis pas tenu d'expliquer mon

  8   contre-interrogatoire, bien sûr que non. Mais qu'il réponde à ma question :

  9   est-ce que ce sont des nouveaux chefs d'accusation ? Oui ou non.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, ce sont de nouveaux chefs

 11   d'accusation ou bien ce sont des chefs d'accusation qui sont déjà contenus

 12   dans l'acte d'accusation ?

 13   M. STRINGER : [interprétation] Il s'agit d'éléments de preuve de valeur

 14   probante très importante, et cela a à voir avec la responsabilité de

 15   supérieur hiérarchique au titre des articles 7(1) et 7(3) du Statut du

 16   Tribunal. C'est notre position.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience je n'ai pas

 19   reçu une réponse, donc je suis en droit d'estimer qu'il n'y a pas de

 20   nouveaux chefs d'accusation. Tout simplement pour éviter des problèmes,

 21   dans quelques mois l'Accusation rédigera dans leur mémoire final pourquoi

 22   Praljak est responsable de telle ou telle chose. Je veux simplement être

 23   certain qu'il n'y a pas de nouvelle forme de responsabilité pénale.

 24   Merci.

 25   M. STRINGER : [interprétation] Tout à fait, nous allons rédiger dans

 26   notre réquisitoire que ce langage employé par lui dans ses ordres crée un

 27   style de commandement qui, en dernière instance, engage la responsabilité

 28   pénale du général au titre de l'article 7(1) et 7(3) pour des crimes qui


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  1   sont allégués à l'acte d'accusation. Je veux dire là, il n'y a pas de

  2   nouveaux faits incriminés, nous parlons de Vares, nous parlons de raser

  3   tout au sujet des événements qui se situent après le 9 mai à Jablanica.

  4   Puis nous avons Gornji Vakuf en janvier. Donc, est-ce qu'il y a de nouveaux

  5   sites où ont été commis des crimes qui ont été ajoutés; non. Tout cela a à

  6   voir avec la responsabilité du général engagé auprès des articles 7(1) et

  7   7(3), et c'est ce qui lui est reproché à l'acte d'accusation.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour être bien clair, au paragraphe 17(3), il est

  9   écrit ceci :

 10   "Slobodan Praljak a participé à la commission de crimes et

 11   d'atteintes par les forces du HVO contre les Musulmans de Bosnie, il a

 12   incité à les commettre, les a facilités, les a encouragés et les a

 13   tolérés."

 14   Donc, ce que vous dites rentre au paragraphe 17(3) que je viens de

 15   lire.

 16   M. STRINGER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Cette

 17   partie-là de l'acte d'accusation suit les dispositions de l'article 7(1) et

 18   peut-être de 7(3) pour ce qui est du fondement engagé au titre de l'article

 19   7, fondement de la responsabilité pénale. C'est la raison pour laquelle ces

 20   questions sont pertinentes.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas une nouvelle forme de responsabilité,

 22   c'est déjà inclus. C'est ce qu'on doit retirer comme conclusion ?

 23   M. STRINGER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 24   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si cet argument est ce

 25   que mon estimé confrère vient de dire, s'il s'agit de cette forme-là sur le

 26   plan factuel et sur le plan de la responsabilité engagée, j'espère qu'on

 27   pourra suivre correctement. Si mon estimé confrère pense bien ce qu'il

 28   vient de nous exprimer comme étant sa position, à savoir qu'il n'y a rien


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  1   de neuf là, que c'est contenu dans la formulation que vous avez lue, à ce

  2   moment-là, j'en appelle à la jurisprudence, l'affaire Kupreskic, chambres

  3   d'appel, et si je ne me trompe pas, Kvocka ou Krnojelac également - parce

  4   que je n'ai pas préparé cet argument. Ce n'est pas un reproche suffisamment

  5   spécifique de la manière dont cela a été présenté par mon estimé confrère,

  6   ce n'est pas suffisamment spécifié pour que la Défense puisse se défendre,

  7   parce que nulle part dans l'acte d'accusation, d'aucune manière il n'est

  8   expliqué que Praljak, en rédigeant des documents militaires en s'exprimant

  9   librement aurait incité ces hommes à commettre des crimes. C'est une base

 10   factuelle qui doit exister dans l'acte d'accusation pour dresser un chef

 11   d'accusation, et d'après la pratique qui est la nôtre, la jurisprudence,

 12   notre acte d'accusation devrait le compromettre. De la manière dont ça

 13   vient d'être dit, ce n'est pas suffisamment spécifié. Notre statut exige

 14   que de manière détaillée l'accusé connaisse la teneur de l'acte

 15   d'accusation, c'est un nouveau détail. Je suis satisfait que cela figure

 16   désormais dans notre compte rendu. L'Accusation nous dit que ce ne sont pas

 17   de nouveaux chefs d'accusation, mais si, ce sont de nouveaux chefs

 18   d'accusation.

 19   M. KHAN : [interprétation] Nous avons passé pas mal de temps déjà là-

 20   dessus. Avec tous mes respects, il me semble que, Monsieur le Président,

 21   c'est vous qui avez bien résumé la situation et que M. le Procureur a

 22   accepté ce que vous avez dit. Il me semble que le mieux serait que dans les

 23   réquisitoires et les plaidoiries, les deux parties s'expriment là-dessus et

 24   que la décision revienne à la Chambre dans son jugement. Bien entendu, on

 25   pourra la contester en appel mais du moins, à mon sens, il ne me semble pas

 26   utile de passer plus de temps qu'on en a déjà passé là-dessus à ce stade.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde a bien compris, dans vos écritures,

 28   vous expliciterez cela. Le Procureur reviendra là-dessus, et la Défense se


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  1   fondera sur les arrêts pertinents rendus en la matière, et les Juges en

  2   décideront.

  3   Bien. Monsieur Stringer.

  4   M. STRINGER : [interprétation]

  5   Q.  Général, le 6 mai 2009, c'est de manière générale que vous avez décrit

  6   ce que je qualifierais de répartition de tâches, entre vous et d'autres, à

  7   partir du moment où vous êtes entré en fonction en tant que commandant de

  8   l'état-major principal, le 24 juillet. J'ai juste quelques questions à vous

  9   poser là-dessus pour m'assurer que j'ai bien compris ce que vous avez dit.

 10   Je vais me permettre de me référer au compte rendu d'audience qui reprend

 11   votre déposition.

 12   Vous dites : 

 13   "A ce moment, les commandants, moi-même, Petkovic et d'autres, il nous a

 14   fallu aller sur le terrain, nous absenter de nos bureaux."

 15   Et puis, plus loin, vous dites :

 16   "J'ai compris, et ce sera étayé par d'autres témoins, que notre problème

 17   principal serait l'attaque par l'ABiH en provenance d'Uskoplje et Rama, et

 18   que cela signifierait une défaite totale pour le HVO, donc je me suis rendu

 19   là-bas."

 20   Puis, dans la suite du texte, vous dites :

 21   "Dans la zone de Mostar et dans le sud, la responsabilité devrait revenir

 22   au chef de l'état-major principal."

 23   Donc, le général de brigade Tole. Et puis, je cite :

 24   "Le général Petkovic allait se focaliser sur le fait d'éviter la chute de

 25   Kiseljak, de Vares, et de la Bosnie centrale."

 26   Donc, juste pour préciser ce que j'ai bien compris. Pendant que vous étiez

 27   commandant de l'état-major principal du HVO, vous étiez l'officier le plus

 28   haut placé dans la structure du HVO et vous étiez le commandant. Mais je


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  1   voudrais m'assurer d'avoir bien compris autre chose. Il y avait une sorte

  2   de répartition des tâches géographiques entre vous, le général Petkovic, le

  3   général de brigade Tole, d'après ce que l'on voit ici; est-ce que c'est

  4   exact ?

  5   R.  Oui, nous avions un accord interne. En fait, je l'avais demandé, et

  6   cela, parce que lorsque vous avez une situation plus chaotique, vous avez

  7   moins de possibilités de gérer la situation, la possibilité de prétendre

  8   que vous êtes véritablement une armée, que vous êtes véritablement un état-

  9   major, ça mènerait droit à la catastrophe. Dans une autre situation, le

 10   commandant ne peut pas diriger depuis un bureau, compte tenu de la

 11   puissance de l'ABiH dans leur attaque, l'état des unités du HVO, l'état des

 12   transmissions. Et donc, nous avons eu un entretien bref. Tole est arrivé un

 13   peu plus tard, mais en principe, c'était le général Petkovic et moi-même,

 14   surtout. Nous avons entendu des témoins déposer sur l'axe principal qui

 15   devait être celui de Gornji Vakuf. Je suis allé là-bas pendant des jours et

 16   des mois pratiquement, j'ai combattu là-bas et le général Petkovic avait

 17   des obligations avec la FORPRONU, des négociations. Bien sûr, il y a eu une

 18   certaine répartition, comme j'ai dit, et je vous ai expliqué pour quelle

 19   raison il en a été ainsi.

 20   Q.  Pièce 3D01281, s'il vous plaît. Dans votre classeur normalement, vous

 21   devriez pouvoir trouver cela, 3D 01281. C'est l'une de vos pièces.

 22   R.  Oui, je l'ai trouvée.

 23   Q.  C'est d'un article du magazine "Le Soldat croate." Vous en avez parlé

 24   dans le cadre de votre interrogatoire principal, et il s'agit du 8 mai

 25   1992. Est-ce que vous l'avez trouvé, Mon Général ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Lorsque vous avez parlé de ceci, vous avez parlé de vos activités pour

 28   ce qui est de l'éducation du personnel de l'armée croate sur les lois de la


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  1   guerre. Ce magazine contient, en fait, un résumé utile, à mon avis. Comme

  2   on le voit ici à la page 2, on résume les lois de base quant à l'emploi de

  3   la loi internationale lors de situations de conflit. Est-ce que vous l'avez

  4   ? C'est à la page 0532 de votre version.

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Si je puis, si vous voulez.

  6   Au compte rendu d'audience, on a mal indiqué le chiffre 1821. Le

  7   chiffre exact est le 3D 1281. C'est 3D 1281.

  8   M. STRINGER : [interprétation] Je suis vraiment désolé si j'ai mal cité les

  9   chiffres. En fait, la cote de ce document, c'est la cote 1281.

 10   Q.  Mon Général, nous voyons ici dans cette case le texte qui parle des

 11   règles de base concernant les lois internationales et applicables en

 12   situation de guerre. Il n'est pas nécessaire de passer en revue tous ces

 13   points un par un. Mais en reconnaissant qu'il s'agit d'un survol, est-ce

 14   que vous seriez d'accord avec moi pour dire que ce sont des règles

 15   générales, c'est un énoncé de règles qui doivent être appliquées -- enfin,

 16   les règles qui sont appliquées dans le cadre de conflits armés lorsqu'il

 17   s'agit de personnes se livrant à des activités de combat, de quelle façon

 18   est-ce qu'on traite les civils capturés, ainsi de suite ?

 19   R.  Oui. Tout de suite, lorsque je suis arrivé en tant qu'adjoint du

 20   ministre, lorsque j'ai accédé à ce poste, c'était l'un des premiers

 21   séminaires sur les lois de la guerre. Comme vous le voyez ici, ici, on

 22   énumère aussi un certain nombre de règles, les règles de base, les règles

 23   les plus importantes qui ont trait à cette activité.

 24   Q.  Très bien, merci. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire

 25   que ces règles-là s'appliquaient à vous chaque fois que vous étiez en

 26   position de commandement, lorsque vous aviez une autorité de commandement

 27   pour ce qui est de votre commandement sur les troupes du HVO ?

 28   R.  Oui, dans son ensemble, oui. Et même plus, même au-delà de tout ceci.


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  1   Q.  Lorsqu'on parle ici de cette division de tâches, lorsque vous étiez

  2   principalement responsable de la région de Prozor-Gornji Vakuf et que le

  3   général Petkovic s'occupait de la région de la Bosnie centrale, seriez-vous

  4   d'accord avec moi, Mon Général, qu'en réalité, ces règlements-là

  5   s'appliquaient à vous, à savoir que d'après ces règlements, vous aviez la

  6   responsabilité en tant que commandant de l'état-major principal du HVO,

  7   même si quelque chose se passait dans l'une des zones de responsabilité qui

  8   appartenaient au général Petkovic, vous avez la responsabilité donc pour

  9   l'ensemble des territoires ?

 10   R.  Dans le sens où la responsabilité est prescrite par la loi, oui,

 11   j'avais la responsabilité, même là-bas. Mais si, lorsqu'on parle de

 12   responsabilité, si on l'interprète de façon très large, à ce moment-là, je

 13   suis responsable exactement de ce que prescrit la loi sur la loi de la

 14   guerre, c'est-à-dire la façon de donner des ordres, l'instruction, si j'ai

 15   caché quelque chose, est-ce que j'ai dit tout ouvertement, oui.

 16   Effectivement, oui, j'accepte tout type de responsabilité telle qu'elle a

 17   été interprétée d'après la loi de la guerre. Mais, bien sûr, il est vrai

 18   que si j'avais la possibilité de savoir et même lorsque je présumais

 19   certaines choses, tel envoi à l'église, et cetera, donc je faisais bien au-

 20   delà, j'essayais de faire bien au-delà de ce qui faisait partie de mes

 21   responsabilités.

 22   Q.  Très bien, merci, Mon Général, mais je vais vous poser la question

 23   d'une autre façon, cela sera peut-être plus clair. Vous n'étiez pas exempté

 24   de vos obligations seulement par le fait que le général Petkovic s'occupait

 25   d'une autre partie du théâtre des opérations ?

 26   R.  Oui, c'est exact. Si quelque chose se passait dans le cadre d'une

 27   omission qui aurait été la mienne, tout ceci aurait été tout comme c'était

 28   inscrit si moi j'étais le chef de l'état-major principal. Et de par là, une


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  1   certaine responsabilité m'incombe, responsabilité que j'accepte, et

  2   exactement comme cette responsabilité est décrite dans les livres qui

  3   parlent de la loi de la guerre et tout comme c'est régi par les lois de la

  4   guerre dans l'armée américaine ou toute autre armée.

  5   Q.  D'accord, merci. Nous avons parlé de la Bosnie centrale, région dont

  6   s'occupait le général Petkovic, qui était sous son commandement, mais ceci

  7   s'appliquait également sur les zones telles Mostar et sur la région qui se

  8   trouvait au sud de Mostar, et je crois que c'est le général Tole qui

  9   s'occupait de cette région-là, n'est-ce pas ?

 10   R.  J'ai déjà répondu à cette question, mais si vous voulez, je vais donner

 11   une nouvelle réponse. Le général est un général, c'est le chef d'une zone

 12   opérationnelle. Si vous pensez qu'un homme peut connaître toutes les

 13   informations dans des conditions pareilles, peut maîtriser tout -- enfin,

 14   voilà, je vais répéter. D'après tout ce qui --

 15   Q.  Mon Général, je vous interromps. Je vais essayer de poser la question

 16   de la même façon que tout à l'heure. Pour ce qui est de la municipalité de

 17   Mostar et les unités du HVO qui étaient déployées dans la région de Mostar

 18   et au sud de Mostar, vous n'étiez pas exempt de l'application de la loi

 19   internationale humanitaire simplement parce que vous, vous occupiez d'une

 20   autre région qui était Prozor et Gornji Vakuf ?

 21   R.  Oui, c'est exact.

 22   Q.  Bien. Alors passons maintenant au document P 00911.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Je suis désolé de vous

 24   interrompre, Monsieur Stringer, mais puisque vous êtes en train d'aborder

 25   un nouveau document, je me permets de le faire. Voilà.

 26   Pour répondre à Me Kovacic à la question qu'il m'avait posée quant à un

 27   passage du compte rendu d'audience dont il avait fait référence et qu'on

 28   trouve à la page 67, lignes 10 à 12.


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  1   Je crois que le compte rendu d'audience est grosso modo exact. Il

  2   faudrait mettre un point après : "Vous avez parlé du fait de gifler

  3   quelqu'un." Point. Et pour le reste, ici, "devant ce Tribunal," il faudrait

  4   voir une virgule. Alors, ce qui se lit ensuite devrait être suivi par une

  5   virgule. Mais en fait, ce que j'ai dit là, c'est peut-être un peu plus

  6   concret, si vous voulez, au compte rendu d'audience, je fais référence à

  7   l'audience du 4 mai, page 39 481, lignes 4 à 6, où M. Praljak a dit :

  8   "Pour ce qui est des membres de mes propres troupes, à plusieurs

  9   reprises je jurais, je criais, des fois au-delà d'un comportement civilisé

 10   normal. Il m'arrivait également de frapper certaines personnes."

 11   Voilà, c'est à ceci que je faisais référence. J'espère que cela vous

 12   convient comme réponse.

 13   M. KOVACIC : [interprétation] Tout à fait. Je vous remercie, Monsieur le

 14   Juge. Justement, je pensais que c'est à cela que vous faisiez allusion,

 15   mais la façon dont c'était écrit, ce n'est pas comme ça, mais on aurait pu

 16   interpréter vos propos comme si, au moment où vous aviez fait votre

 17   commentaire, que vous auriez compris que la gifle que le général Patton

 18   avait donné à quelqu'un au cours de la Deuxième Guerre mondiale, ce n'était

 19   pas très bien clair. Donc maintenant, j'ai compris que vous faisiez

 20   référence à un autre événement.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Je vous remercie

 22   de m'avoir donné la possibilité de préciser ceci.

 23   Excusez-moi, Monsieur Stringer, de vous avoir interrompu. 

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, deux questions.

 25   Dans le cadre de ce qu'avait dit le général Petkovic tout à l'heure sur les

 26   formations des soldats, quand je regarde le document sur le "Soldat

 27   croate," ce document, il est émis au niveau de l'armée de la République

 28   croate. Mais à votre connaissance, est-ce que ce document était porté à la


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  1   connaissance des soldats du HVO ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Justement, le

  3   document a été montré, et lorsque IPD a été un témoin et qu'il a témoigné

  4   ici, c'est un document dans lequel on voit : "On n'a plus de soldats

  5   croates," ou "On arrive à un très petit nombre de soldats croates."

  6   Justement, il y a un autre témoin à qui j'ai posé la question, les livrets

  7   qui avaient été faits avec une croix rouge avaient été envoyés au HVO et

  8   chaque soldat avait ces livrets-là. Pour ce qui est du "Soldat croate," ça,

  9   c'était une publication qui était distribuée sans frais à toutes les

 10   personnes, à tous les niveaux.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, vous dites que cette publication était

 12   distribuée sans frais. La page, la première page montre que le prix c'est

 13   100 dinars. Pourquoi il y avait marqué cela ? Pourquoi il y a "100 HRD" ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que dans les kiosques, pour la

 15   population.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour la population qui voulait l'acheter, ils

 17   la paient. Très bien. Donc ce document est diffusé parmi les soldats, et

 18   vous dites que les soldats du HVO l'ont. Alors, celui du mois de mai 1992,

 19   quand on tourne la page et on tombe sur la page 4, on voit qu'il y a eu un

 20   séminaire organisé par la Croix-Rouge internationale, puisqu'il y a

 21   l'emblème, et dans un grand rectangle, il y a sept règles juridiques

 22   portées à la connaissance des soldats; est-ce vrai ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait, Monsieur le Président. Et

 24   vous voyez ici à la fin, vous verrez dans l'annonce au média, la Croix-

 25   Rouge nous avait dit qu'il voulait faire la même chose pour l'ex-armée

 26   yougoslave.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Dois-je comprendre que le soldat de base même le

 28   plus inculte, mais au moins celui qui sait lire, voit par exemple au point


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  1   7 que les parties au conflit doivent distinguer entre la population civile

  2   et les combattants ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait juste. Tous les soldats

  4   n'ont pas seulement -- enfin, grâce aux livrets qui ont été distribués à

  5   chaque soldat du HVO et de la HV.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question, mais le Procureur y reviendra

  7   demain parce qu'il est quasiment 19 heures. Vous avez dit quelque chose qui

  8   m'a vivement intéressé, mais vous l'avez déjà dit avant, mais je n'étais

  9   pas intervenu attendant que tout ça mûrisse dans mon esprit, mais qu'en

 10   réalité vous vous étiez partagés la responsabilité en trois, Tole, Petkovic

 11   et vous, chacun ayant une zone. Moi, je me suis dit, c'est peut-être

 12   intéressant au niveau de l'article 7.3. Alors, je ne sais pas ce que le

 13   général Petkovic pense de ce que vous avez dit, mais vous nous confirmez

 14   que tous les trois, vous vous êtes partagés. M. Stringer vous a dit, mais

 15   même si vous avez partagé, est-ce à dire que vous assumiez votre propre

 16   responsabilité de supérieur hiérarchique ? Vous avez dit, oui. Alors, votre

 17   avocat a peut-être un autre point de vue, c'est une affaire assez complexe.

 18   Mais donc par un accord verbal entre Tole, Petkovic et vous, vous vous êtes

 19   répartis les zones géographiques ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Petkovic s'était également

 21   entretenu avec la FORPRONU, avec des membres de la Bosnie-Herzégovine. Il

 22   avait continué ses activités. Et deuxièmement, il est certain que c'était

 23   sur moi qu'incombait la responsabilité, c'est-à-dire si j'avais omis de

 24   réagir immédiatement, si j'avais su ce que Petkovic, Tole ou quelqu'un

 25   d'autre avait fait, et bien sûr, tous les autres. 

 26   Dans les conditions dans lesquelles nous nous trouvions, avec les moyens de

 27   communication que nous avions, avec la guerre qui faisait rage, si on

 28   pouvait me montrer que j'ai omis de me plier à quelque règle que ce soit de


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  1   la loi de droit international humanitaire, je suis tout à fait prêt à

  2   prendre toute responsabilité, à subir toute responsabilité.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 19 heures passées déjà de plusieurs minutes,

  4   donc je m'excuse auprès des interprètes.

  5   Comme vous le savez, nous sommes d'après-midi, donc nous reprendrons

  6   notre audience demain à 14 heures 15. Je souhaite à tout le monde une bonne

  7   fin de soirée.

  8   [Le témoin quitte la barre] 

  9   --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mardi 25 août 2009,

 10   à 14 heures 15.

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