Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 18 janvier 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  8   tous dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur

  9   contre Prlic et consorts. Je vous remercie.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 11   En ce lundi, 18 janvier 2010, je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les

 12   avocats, tous les membres du bureau du Procureur présents, ainsi que toutes

 13   les personnes qui nous assistent. Nous allons avoir un témoin qui est prévu

 14   six heures en interrogatoire principal, ce qui va entraîner trois heures

 15   pour les autres Défenses, six heures pour l'Accusation; ce qui veut dire

 16   que ce témoin témoignera sur deux semaines.

 17   Par ailleurs…

 18   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Par ailleurs, je voudrais indiquer que la Chambre va

 20   rendre une décision écrite sur la demande formulée la semaine dernière de

 21   commencer l'audition du témoin Petkovic à compter du 11 février. Donc, il y

 22   a une décision écrite qui va être rendue, et cette décision fait droit à la

 23   demande de M. le Procureur.

 24   Par ailleurs, je remercie la Défense de M. Coric de nous avoir adressé un

 25   calendrier prévisionnel pour le mois de mars pour ces témoins qui

 26   comparaîtront à compter du 22 mars. Mais du fait qu'il y aura l'audition de

 27   M. Petkovic à compter du mois de févier, du 11 février, il y a la

 28   possibilité d'un décalage pour le premier témoin qui est prévu initialement

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  1   le 22 février.

  2   Par ailleurs, dans cette décision écrite, la Chambre va inviter la Défense

  3   Petkovic à faire venir, début février, le témoin que nous n'avons pu

  4   entendre la semaine dernière, et celui-ci pourrait donc ultimement venir

  5   dans le créneau ainsi libéré, entre le 1er et le 11 février, et la Chambre

  6   invite la Défense Petkovic à faire le nécessaire pour que ce témoin puisse

  7   être auditionné avant la venue du général Petkovic.

  8   Oui, Maître, pour M. Coric.

  9   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président, il y a

 10   peut-être une erreur de traduction ou du compte rendu d'audience. Nous

 11   avons demandé le 22 février, et non pas mars. Par conséquent, tout est

 12   décalé, soit plus tard en février, soit début mars.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à fait, vous avez entièrement raison. Dans

 14   votre calendrier prévisionnel, c'était le 22 février. Donc, il y aura un

 15   décalage automatique.

 16   Je profite de cela pour dire à la Défense de M. Coric que la Chambre ne

 17   siègera pas le 19, 20, 21, et 22 avril. Donc, faites en sorte de ne pas

 18   mettre de témoins durant ces quatre jours.

 19   Je crois que M. le Greffier a deux numéros IC à nous donner.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. Deux parties ont présenté

 21   leurs listes de documents à être versées par le truchement du témoin Maric.

 22   La liste présentée par 4D recevra la cote IC 01157 et la liste présentée

 23   par le bureau du Procureur recevra la cote IC 1158. Je vous remercie.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci, Monsieur le Greffier.

 25   Monsieur Scott, est-ce que vous avez quelque chose à nous dire ?

 26   M. SCOTT : [interprétation] Oui, tout à fait, Messieurs les Juges. Bon

 27   après-midi, Monsieur le Président, bonjour à tous. Je vous remercie de me

 28   donner la parole. Tout d'abord, je tiens à dire -- bon, je ne voulais pas

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  1   m'acharner sur ce point, mais je remercie la Chambre de première instance

  2   de nous avoir donné un peu plus de temps dans son ordonnance écrite à

  3   propos du témoignage de M. Petkovic. Nous vous remercions.

  4   Je tiens à remercier d'avoir, cela dit, à prendre votre temps sur un

  5   point de procédure, mais je pense que c'est absolument essentiel, au vu des

  6   circonstances. J'avais préparé copie de différents éléments tels que nous

  7   avons reçus de la Défense Petkovic ce week-end. Je pense que vous les avez

  8   aussi, d'ailleurs. Je les ai donnés au Greffier. Si je pouvais vous les

  9   montrer sur le rétroprojecteur.

 10   Je vais demander à M. l'huissier de m'aider.

 11   Monsieur le Président, Monsieur les Juges, en ce qui concerne le

 12   témoin suivant, je pense qu'il n'y a pas de demande de mesures de

 13   protection, nous allons pouvoir utiliser son nom, je pense. Mais comme vous

 14   le savez, le 24 avril 2008, cette Chambre de première instance a fait

 15   adopter certaines lignes directrices à propos de la présentation des

 16   éléments de preuve. Au paragraphe 28 de cette décision que vous avez à

 17   l'écran, il est cité :

 18   "Les parties présentant le témoin doivent fournir aux autres parties

 19   et à la Chambre la liste de tous les éléments de preuve qu'ils ont

 20   l'intention de présenter dans le cadre du témoignage de ce témoin deux

 21   semaines avant l'audition du témoin."

 22   Donc, le 4 janvier de cette année, donc 2010, l'Accusation a reçu de

 23   la part de la Défense Petkovic un tableur -- enfin, un tableau de pièces

 24   reprenant tous les éléments de preuve qui allaient être présentés; il y a

 25   190 documents sur cette liste, dans ce tableau. Vous avez copie du tableau

 26   tel qu'il nous a été présenté donc -- cette liste que nous avons reçue,

 27   cette liste de 190 documents, le 4 janvier; donc, là, le délai de deux

 28   semaines est à peu près respecté. On a respecté les lignes directrices de

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  1   la décision du 24 avril 2008.

  2   Mais au cours du week-end -- pendant le week-end, à partir de samedi

  3   midi, il me semble, l'Accusation a reçu une nouvelle liste de 160 pièces,

  4   vous le voyez, d'ailleurs, sur le rétroprojecteur, sur ces 160 pièces, à

  5   partir des 190 documents qui avaient été -- qui, elles, obéissent aux 15

  6   jours, donc, sur ces 190 documents, il n'y en a que 29 qui sont sur la

  7   liste, la nouvelle liste, la liste des 160. Donc, il n'y a que 29 documents

  8   sur 190 qui sont toujours les mêmes et qui ont été présentés avec 15 jours

  9   d'avance. Donc, 131 documents, le solde de 29 plus 131, 160, nous ont été

 10   donnés samedi après-midi, il y a deux jours.

 11   L'Accusation comprend bien et ne soulèvera pas ce point, s'il s'agissait de

 12   réduire une liste pour qu'elle soit moins étoffée, là, ça ne nous gênerait

 13   pas, et nous serions d'accord aussi, si on ajoutait deux ou trois nouvelles

 14   pièces qui auraient pu intervenir récemment, lors du récolement du témoin,

 15   par exemple. Ça peut arriver; donc, on convient que c'est arrivé, ça nous

 16   est arrivé à nous aussi. Et si c'était le cas, bien sûr, je n'aurais pas

 17   demandé la parole. Mais ici, c'est complètement différent. Il s'agit d'une

 18   nouvelle liste, elle est toute nouvelle, en fait. On avait 190 documents,

 19   au départ, avec le délai des 15 jours, mais le samedi avant, deux jours

 20   avant l'audience du témoin, on a une nouvelle liste, parfaitement nouvelle.

 21   Sur 160 documents, il n'y en a que 29 qui faisaient partie de la

 22   liste des 190. Donc, c'est une liste complètement nouvelle. Bien sûr,

 23   depuis deux semaines, nous essayons de nous préparer pour vous aider et

 24   pour pouvoir contre-interroger le témoin correctement, et pour vous donner

 25   toutes les informations dont vous avez besoin. Nous nous sommes préparés

 26   sur la base des 190 documents que vous avez communiqués. M. Kruger et

 27   d'autres personnes du bureau du Procureur ont lu tous ces documents; or,

 28   maintenant, on vient de nous présenter une nouvelle liste qui n'a plus rien

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  1   à voir, et qui comporte 160 documents, il n'y en a que 29 qui faisaient

  2   partie de l'ancienne liste.

  3   Ceci est en violation flagrante de la décision de la Chambre du 24

  4   avril 2008. C'est parfaitement inéquitable en ce qui concerne l'Accusation,

  5   et cela n'aidera absolument pas la Chambre de première instance. Cela

  6   n'aide personne, et nous considérons que cette pratique est parfaitement

  7   inacceptable. Je voulais attirer votre attention sur ce point. Je sais que

  8   ce témoin va être auditionné pendant deux semaines, mais au moins la

  9   moindre des choses, pour l'Accusation -- nous comprenons bien que notre

 10   contre-interrogatoire ne va pas commencer tout de suite, mais en tout cas,

 11   nous ne voulons absolument pas commencer notre contre-interrogatoire avant

 12   lundi prochain, au vu des nouvelles circonstances. Cela sera sans doute le

 13   cas. Mais sachez qu'on n'a été prévenu deux jours -- même pas deux jours

 14   ouvrables, deux jours avant l'audition de ce témoin. Donc, nous demandons à

 15   commencer notre contre-interrogatoire lundi, au plus tôt.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, j'ai écouté ce que m'a dit M. Scott

 17   et, comme lui, je suis un peu surpris. Alors, qu'est-ce que vous nous dites

 18   ?

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 20   bonjour à toutes et à tous. Monsieur le Président, je tiens à dire la chose

 21   suivante à ce sujet : les faits énoncés par mon confrère Scott sont vrais.

 22   Je me permets de rappeler que cela s'est produit plus d'une fois pendant la

 23   présentation des moyens de l'Accusation, et également pendant la

 24   présentation des moyens des autres Défenses, qu'il y ait des ajouts sur la

 25   liste des documents ou qu'on informe les parties de l'espèce de nouveaux

 26   faits qui feront l'objet de la déposition du témoin. Le Procureur, pendant

 27   sa présentation des moyens, nous a informés de nouveaux faits qui seront

 28   abordés par leurs témoins dix minutes avant qu'on entre dans le prétoire.

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  1   La Défense du général Petkovic n'a jamais protesté d'aucune manière à

  2   cause de cela, en estimant qu'elle aura suffisamment de temps à sa

  3   disposition, pendant l'interrogatoire principal, de procéder à nouvelles

  4   recherches pour pouvoir contre-interroger au sujet du nouveau fait. Je suis

  5   entièrement d'accord avec mon confrère, M. Scott, pour dire

  6   qu'effectivement, il s'agirait là d'un phénomène relativement drastique

  7   pour ce qui est de ce nouveau témoin, mais nous avons prévu un

  8   interrogatoire principal d'une durée de six heures, deux fois plus que les

  9   autres témoins et d'une certaine manière, par conséquent, on est en droit

 10   de s'attendre à ce qu'il y ait une augmentation proportionnelle du nombre

 11   de documents abordés.

 12   Mais un point me semble essentiel, à savoir sur la liste de

 13   documents, on ne voit apparaître aucun ou pratiquement aucun, j'attends que

 14   mon commis à l'affaire m'en informe plus précisément, aucun document qui ne

 15   constituerait déjà une pièce à conviction. Tous les documents, en d'autres

 16   termes, sont déjà des pièces à conviction, en grande partie, des documents

 17   de l'Accusation; pour le reste, les documents de la Défense de Petkovic qui

 18   figurent sur des listes depuis plusieurs mois, si ce n'est depuis plusieurs

 19   années. Ce sont les documents qui ont fait l'objet des propos liminaires de

 20   la Défense Petkovic, et pendant nos propos liminaires, nous avons été très

 21   clairs, nous avons annoncé que les sujets qui sont abordés pendant nos

 22   propos liminaires feront l'objet de la déposition de tous les témoins ou

 23   pour le reste, certains de nos témoins.

 24   J'estime par conséquent, Monsieur le Président, que la Défense du

 25   général Petkovic n'a aucunement porté préjudice pour ce qui est des

 26   capacités de l'Accusation de se préparer pour le contre-interrogatoire.

 27   Premièrement, il s'agit de documents que nos confrères de l'Accusation

 28   connaissent sans doute bien; s'ils ne les connaissent pas, ils devraient

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  1   les connaître. Deuxièmement, ce témoin est prévu pour un interrogatoire

  2   principal d'une durée de six heures, mes confrères de la Défense prendront

  3   la parole avant l'Accusation; donc, il est tout à fait probable que le

  4   contre-interrogatoire de l'Accusation ne commence que lundi. Quoi qu'il en

  5   soit, si mes confrères estiment qu'il leur est nécessaire, néanmoins, de

  6   bénéficier d'un temps supplémentaire pour examiner les documents qui

  7   constituent déjà des pièces à conviction qu'ils ont eu l'occasion de voir

  8   pendant la présentation de leurs moyens, dans ce cas-là, je ne m'opposerais

  9   pas à ce que leur contre-interrogatoire ne commence que lundi. Si, par ces

 10   modifications, nous avons porté préjudice ou créé du travail supplémentaire

 11   à qui que ce soit, je le regrette. Mais je dois dire également que je suis

 12   d'avis que toutes les parties de l'espèce peuvent utiliser, à tout moment,

 13   les documents qui constituent déjà des pièces à conviction en l'espèce. Si

 14   j'ai fait une erreur là-dessus, je vous présente mes sincères regrets. Si

 15   vous vous attendez à des explications supplémentaires, je suis à votre

 16   disposition.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a tout lieu de penser que vu les six

 18   heures, vu les trois heures, vu les questions des Juges, l'Accusation ne

 19   commencera pas avant lundi prochain.

 20   Donc, a priori, M. Scott ne devrait pas avoir de problème

 21   particulier. Mais simplement, je fais remarquer, mais à titre personnel,

 22   que 190 plus 160, ça fait 350 documents, ce qui est énorme. Il y a même des

 23   affaires ici qui ont été jugées où il n'y avait pas autant de documents

 24   admis, et là, pour un seul témoin, il y a 350 documents. C'est colossal.

 25   J'observe qu'un grand nombre de ces documents ont déjà été vus, ont déjà

 26   été commentés avec d'autres témoins, ce qui fait qu'en théorie, le

 27   Procureur n'aura guère de difficultés pour ses questions, puisque la quasi-

 28   totalité de ces documents sont connus de lui, mais il y a quand même 350

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  1   documents.

  2   Maître Alaburic, moi, je suis un peu étonné, parce que j'ai exercé

  3   les fonctions de M. Scott et les vôtres, donc je sais comment on travaille.

  4   Je suis un peu étonné que vous faites une première liste de 190 documents,

  5   et puis après, vous en rajoutez 160. Alors que quand on prépare la venue

  6   d'un témoin, on doit voir tout dans ses multiples facettes. Et là,

  7   manifestement, vous avez rajouté 160 documents, après avoir fait une

  8   première liste. C'est un peu étonnant, mais quoi qu'il en soit, comme M.

  9   Scott nous a dit qu'il ne veut poser ses questions qu'à partir de lundi

 10   prochain, vu le timing, je pense que ça sera le cas.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : Je ne suis pas sûr si le calcul qu'a fait notre

 12   Président -- si j'ai bien compris le Procureur, nous avons 160 documents,

 13   c'est-à-dire la liste des 160 remplace la liste des 190. Est-ce que j'ai

 14   mal compris ? La deuxième liste reprenant 29 des documents à la liste

 15   originale et 160 documents que vous vouliez présenter, vous avez laissé

 16   tomber; est-ce que j'ai bien compris ?

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic ?

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, puisque M. Trechsel

 19   parlait en français, j'écoutais la traduction. Oui, vous avez tout à fait

 20   raison. L'ancienne liste comportant 190 documents a été remplacée par la

 21   nouvelle ne comportant que 160 documents. Nous avons l'intention de

 22   présenter ces 160 documents uniquement au témoin, et d'expérience et compte

 23   tenu du fait qu'il s'agit de documents qui ont été vus à multiples reprises

 24   dans le prétoire, nous estimons que cela est possible sans problème.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 26   Mais Maître Alaburic, si je comprends bien avec les calculs savants, en

 27   réalité, comme le dit le Procureur sur son document, il y a 131 nouveaux

 28   documents qui n'étaient pas sur la première liste où il y avait 190

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  1   documents ?  

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui. Il en est ainsi, Monsieur le

  3   Président. Mais sur les 131 documents, je précise qu'environ une centaine

  4   constituent déjà des pièces à conviction depuis de nombreux mois.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  6   Ce qui veut dire que si on additionne les deux listes, il y aurait eu 350

  7   documents, mais en réalité, vous allez en utiliser que 160, dont 131 sont

  8   des documents nouveaux par rapport à la première liste. Voilà. Bien.

  9   Monsieur Scott.

 10   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je ne

 11   vais pas m'acharner sur ce point. Bon, finalement, les circonstances vont

 12   peut-être être plutôt heureuses, fort heureusement, puisque nous avons

 13   beaucoup de temps devant nous, ça --

 14   Mme PINTER : [interprétation] Nous n'avons pas d'interprétation. Excusez-

 15   moi, Monsieur Scott. Les accusés n'ont pas de traduction, pas

 16   d'interprétation.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Madame Pinter.

 18   Pouvez-vous m'entendre ?

 19   Je vous remercie, Maître Pinter.

 20   Donc je reprends. Finalement, les choses vont peut-être prendre un tour

 21   heureux. En effet, nous avons demandé un certain remède à notre problème,

 22   mais du fait du temps que le témoin va prendre en interrogatoire principal

 23   et contre-interrogatoire de la Défense, on fera droit à notre demande. Tant

 24   mieux, tant mieux. Mais je tiens à corriger une chose, cela dit. Je crois

 25   que je n'ai pas bien expliqué un point à la Chambre, je voudrais le dire.

 26   En ce qui concerne ce fameux tableau que je vous ai montré, les points en

 27   jaune, les éléments en jaune sont les éléments qui ont été ajoutés; et en

 28   rouge, c'est ceux qui ont été enlevés de la première liste. Les points qui

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  1   sont en blanc sont ceux qui restent à partir de la liste originale. Donc en

  2   jaune, vous avez les 131 nouveaux documents.

  3   Et quand on regarde rapidement la liste, on voit avec le code couleur

  4   que pour l'Accusation et aussi pour la Chambre, on obtient une liste qui

  5   est parfaitement différente que celle qui nous avait été présentée il y a

  6   15 jours.

  7   J'aimerais répondre à un autre point de ce qu'a dit Mme Alaburic. Chaque

  8   fois que l'on soulève ce problème, la réponse est toujours la même. De

  9   toute façon, l'Accusation a ces pièces en main depuis très longtemps, elle

 10   devrait les connaître par cœur, et cetera, et cetera. Ils ont toujours la

 11   même réponse.

 12   Monsieur le Juge Antonetti, comme vous l'avez dit, il y a des

 13   dizaines de milliers de documents en l'espèce, et vraiment, c'est des

 14   dizaines de milliers. Et je suis très fier de l'équipe de l'Accusation. Il

 15   est vrai que nous connaissons assez bien nos documents, je les connais

 16   assez bien. Mais sachez que je ne les ai pas en tête, pas ces 10 000 tous

 17   en tête, bien sûr que non. De plus, l'Accusation a le droit à sa liste.

 18   Elle n'est pas censée deviner lesquels vont être choisis parmi les 10 000

 19   ou les 100 000. Non. Absolument pas. Nous avons une décision que vous avez

 20   rendue le 24 avril 2008 qui exige qu'une liste nous soit communiquée.

 21   Donc même si Mme Alaburic veut se lever pour dire : Mais certains des

 22   documents viennent de l'Accusation, certains ont déjà été présentés,

 23   certains sont versés au dossier, et cetera, nous ne sommes pas là pour

 24   faire des devinettes et pour deviner lesquels vont être choisis par la

 25   Défense pour l'interrogatoire de ce témoin. Je vous remercie de m'avoir

 26   accordé tout ce temps.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout le monde s'est exprimé.

 28   Maître Karnavas, je crois que vous vouliez dire quelque chose.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. J'aimerais ajouter quelque chose, un

  2   point assez mineur, d'ailleurs. Je comprends bien l'Accusation, mais je

  3   comprends aussi le point de vue de la Défense. Cela dit, quand on obtient

  4   une liste, on l'imprime, quelqu'un doit l'imprimer. Quelqu'un doit

  5   numéroter tous ces documents. Il nous faut les lire. Et chaque fois qu'on

  6   obtient une nouvelle liste, un ou deux jours avant, il faut quand même

  7   qu'on ait quelqu'un de notre équipe qui travaille le week-end pour

  8   republier tous ces documents, pour réimprimer tous ces documents, et c'est

  9   l'un de nous deux, nous ne sommes que deux ici. Et l'un de nous doit aussi

 10   relire ces documents. Il est vrai qu'on connaît bien nos propres documents,

 11   qu'on connaît les documents de l'Accusation, mais cela est une charge de

 12   travail supplémentaire, quand même, qui est assez énorme. Je comprends bien

 13   qu'en ce qui concerne la Défense, quand il y a quelqu'un de nouveau qui

 14   arrive, il a un œil neuf, il voit les choses un peu différemment. Donc il y

 15   a des raisons légitimes qui demandent à modifier un peu ça. Mais je pense

 16   qu'on perd trop de temps dans ces points de procédure. Et j'aimerais

 17   vraiment si, d'une manière ou d'une autre, les parties - y compris nous-

 18   mêmes, d'ailleurs - un d'eux arrivait à limiter les heures passées

 19   vainement à discuter de points de procédure. Là, on a déjà dépensé 20

 20   minutes à pratiquement rien.

 21   Premièrement, bon, je ne veux absolument pas faire de grand discours, bien

 22   sûr, mais c'est assez frustrant d'être ici. Sachez que j'ai dû travailler

 23   tout le week-end pour lire tous ces documents. Moi non plus, je ne suis pas

 24   très content de cet état de fait. Bon, il est difficile, bien sûr, de

 25   présenter une cause. Je comprends très bien les difficultés de Mme

 26   Alaburic.

 27   Précédemment, vous nous avez dit qu'en avril, il y aurait plusieurs jours

 28   où vous ne siégeriez pas. Je ne sais pas si vous avez envisagé la

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  1   possibilité, mais enfin, en tout cas, pour les catholiques et les

  2   orthodoxes, Pâques va tomber le 3 avril. Ceux d'entre nous qui sont

  3   pratiquants gardent ça à l'esprit. Et normalement, dans la religion

  4   orthodoxe, on passe toute la semaine pour fêter Pâques. Donc j'aimerais

  5   savoir si à un moment ou un autre, vous allez envisager de nous donner un

  6   peu de temps de libre. Certains d'entre nous voudraient rentrer chez nous

  7   pour fêter Pâques. Merci.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va réfléchir à votre demande.

  9   On va introduire le témoin.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Dans l'intervalle, après avoir

 11   délibéré avec le Président, je tiens à dire une chose. La Chambre de

 12   première instance fait droit à la demande présentée par M. Scott, et

 13   l'Accusation ne commencera son contre-interrogatoire que lundi, à moins que

 14   jeudi ils nous disent : Finalement, nous sommes prêts, nous pouvons

 15   commencer, bien sûr.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.

 17   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Pouvez-vous me donner votre nom,

 19   prénom et date de naissance, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Radmilo Jasak. Je suis né le 13

 21   octobre 1967.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession ou qualité actuelle ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] En ce moment, je suis officier des forces

 24   armées de la République de Croatie. Je suis chef du département chargé du

 25   soutien des finances et du budget au sein de l'école militaire croate.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et quel grade avez-vous ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis brigadier dans l'armée croate. J'ai

 28   terminé, pour ce qui est des études civiles, une faculté de mécanique. Puis

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  1   j'ai fait l'école militaire de commandement et de l'état-major, puis j'ai

  2   fait un stage de l'administration stratégique et de l'administration des

  3   ressources humaines.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mon Colonel, est-ce que vous avez déjà

  5   témoigné dans un procès concernant les faits survenus dans l'ex-

  6   Yougoslavie, ou bien c'est la première fois que vous témoignez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je témoigne.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN : RADMILO JASAK [Assermenté]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pouvez vous asseoir.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mon Colonel, quelques explications de ma part

 16   afin que l'audience se déroule de la meilleure façon possible. Vous allez

 17   répondre à des questions que Me Alaburic, que vous avez dû rencontrer ce

 18   week-end, va vous poser. Elle vous présentera des documents, il y en a à

 19   peu près pour le moment 160. Une fois qu'elle aura terminé, les autres

 20   avocats qui représentent les intérêts des autres accusés auront également

 21   plusieurs heures pour vous poser des questions, trois en l'espèce. Une fois

 22   que ceci sera terminé, à partir de lundi prochain, le Procureur, qui se

 23   trouve à votre droite, vous posera des questions dans le cadre de son

 24   contre-interrogatoire, et il aura le même temps que Me Alaburic. Les quatre

 25   Juges qui sont devant vous vous poseront des questions à partir des

 26   documents. Donc quand quelqu'un évoquera un document, peut-être qu'on

 27   interviendra, pas à chaque fois mais parfois nous posons des questions à

 28   partir des documents.

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  1   Comme vous êtes officier supérieur, vous savez l'importance d'être

  2   synthétique et précis. Donc essayez d'être très précis dans les réponses

  3   que vous allez apporter aux questions. Si vous ne comprenez pas une

  4   question, n'hésitez pas à demander à celui qui vous la pose de la

  5   reformuler, même si c'est un Juge, parce qu'un Juge peut aussi se tromper,

  6   et si vous découvrez dans la question des éléments faux, n'hésitez pas à le

  7   dire. Vous allez témoigner pendant deux semaines, vu le temps nécessaire,

  8   ce qui veut dire qu'à partir d'aujourd'hui, vous n'avez plus aucun contact

  9   avec la Défense du général Petkovic ni avec le Procureur ou les autres

 10   avocats jusqu'à la fin de votre témoignage, qui interviendra la semaine

 11   prochaine. Soyez également discret dans les relations que vous pouvez avoir

 12   avec autrui. Bien entendu, vous pouvez dire aux membres de votre famille

 13   vos impressions, mais ça ne doit pas sortir du cercle familial.

 14   J'attire aussi votre attention sur la particularité de cette procédure. La

 15   Défense, représentée par Me Alaburic, vous posera des questions neutres.

 16   Mais le Procureur aura le droit, lui, de vous poser des questions très

 17   engagées, très directrices, en vous demandant, par exemple, si vous êtes

 18   d'accord avec lui. Si vous êtes pas d'accord avec lui, vous dites non, puis

 19   vous attendez la suite de la question. Bien souvent, on a eu des incidents

 20   entre les témoins et le Procureur, parce que les témoins ne comprenaient

 21   pas que le Procureur remette en cause ce que déclarait le témoin. Mais ça,

 22   c'est le rôle du Procureur. Et donc, vous écoutez la question du Procureur.

 23   Si vous êtes d'accord avec lui, vous dites oui, si vous êtes pas d'accord,

 24   vous dites non puis vous attendez qu'il vous pose des questions suite à vos

 25   réponses. Parce que le Procureur, il est dans un rôle qui n'est pas le même

 26   que la Défense.

 27   Voilà ce que je voulais vous dire. Si à un moment donné, vous vous sentez

 28   pas bien - ça peut arriver - levez la main et dites que vous vous sentez

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  1   mal. Nous faisons des pauses toutes les heures et demie, pauses de 20

  2   minutes afin de changer les bandes audio, puis également de vous reposer.

  3   Parce que vous allez voir, au bout de 15 jours, vous allez en sortir

  4   totalement épuisé, car c'est très fatiguant de répondre pendant des heures

  5   et des heures à des questions. Mais la procédure veut que cela soit comme

  6   cela. Donc soyez en forme, dormez bien et écoutez bien les questions. Voilà

  7   ce que je voulais vous dire.

  8   Maître Alaburic, vous avez la parole.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

 11   vos instructions.

 12   Interrogatoire principal par Mme Alaburic :

 13   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, bonjour.

 14   R.  Bonjour.

 15   Q.  Vous avez déjà indiqué qu'elle est, enfin, une partie de votre CV. Il

 16   reste quelques détails à donner. On a entendu votre date de naissance. Je

 17   vais poursuivre dans cette même lancée. Je vous prie de prêter une oreille

 18   attentive à ce que je dirai et confirmer la justesse ou l'erreur que

 19   j'aurai commise. Alors, vous nous avez dit que vous êtes né le 13 octobre

 20   1967 à Imotski, en Croatie. Vous avez résidé en Bosnie-Herzégovine. De par

 21   votre formation, vous êtes ingénieur en mécanique, diplômé. Et vous avez

 22   également fait une école de commandement de l'état-major à Zagreb, et ce,

 23   pendant la période allant de septembre 1993 à août 1994. Vous nous avez

 24   précisé les stages que vous avez effectués. Je vais donc donner quelques

 25   renseignements pour ce qui est de votre carrière.

 26   Fin 1994, vous participez à l'organisation de la défense de Mostar,

 27   et vous êtes membre du HVO depuis sa création en avril 1992. Jusqu'au 15

 28   juin 1992, vous avez été commandant adjoint d'un bataillon, ensuite

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  1   jusqu'au mois d'octobre 1992, commandant d'un bataillon du HVO.

  2   R.  Juste un petit rectificatif. Le 16 mai, pas le 16 juin -- le 15 juin.

  3   Q.  Bon. J'ai dû me tromper en écrivant.

  4   Alors, jusqu'au 16 mai, vous avez été commandant adjoint, puis par la suite

  5   commandant, et ce, jusqu'à octobre 1992. Par la suite, en votre qualité

  6   d'intervenant du VOS au sein de l'état-major du HVO, vous y intervenez

  7   jusqu'à août 1993. Puis pendant la période juillet-août, vous êtes sis dans

  8   le secteur nord. C'est la zone opérationnelle de l'Herzégovine du sud-est,

  9   en d'autres termes, la région de Mostar. Puis vous passez à des études à

 10   Zagreb, et par la suite vous êtes embauché par l'armée croate. En 1994, au

 11   mois d'août, vous vous trouvez dans le secteur opérationnel du théâtre sud

 12   de l'armée croate. A partir du mois de mai 1995, vous êtes commandant

 13  adjoint chargé des effectifs et du personnel dans le secteur de Ston. Le 1er

 14   août 2000, vous arrivez à Zagreb, vous commencez à travailler au ministère

 15   de la Défense, à la tête du département de tout ce qui relève de la

 16   technique et technologie. Au mois d'octobre 2004, vous vous chargez des

 17   fonctions de chef de département au sein de l'inspectorat de la Défense. Le

 18   1er mars 2006, vous êtes chef du département de l'informatique et de la

 19   logistique à l'école militaire. Et le 1er octobre 2007, vous êtes à assumer

 20   les fonctions du département de l'université militaire croate pour ce qui

 21   est du soutien, des finances et du budget. Et comme vous nous l'avez dit,

 22   vous êtes brigadier ou colonel de l'armée croate.

 23   Monsieur Jasak, est-ce que ces données sont bien exactes ?

 24   R.  Oui.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai écouté le CV évoqué par Me Alaburic, donc je

 26   constate que vous avez rejoint l'armée croate au mois d'août 1994 et que

 27   donc, aujourd'hui, vous êtes brigadier ou colonel ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge.

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15   versions anglaise et française

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que l'armée croate a pris en compte dans le

  2   calcul de votre ancienneté les années que vous avez exercées dans le HVO,

  3   ou bien quand vous avez été dans l'armée croate en août 1994, est-ce que

  4   vous avez commencé, point de vue de votre ancienneté, à zéro ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous êtes dans le vrai. J'ai recommencé à

  6   zéro. Dans mon livret de travail, je suis considéré comme étant embauché le

  7   4 août 1994.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, l'armée croate n'a pas pris en compte votre

  9   passé militaire dans le HVO. C'est ce que je voulais savoir, et vous me le

 10   confirmez. Merci.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je voudrais avoir quelque précision

 12   sur votre poste. Vous êtes le responsable du Département de

 13   l'administration et des finances, est-ce que cela signifie que vous

 14   enseignez la matière à proprement parler de l'administration des finances

 15   ou est-ce que vous êtes le responsable de l'administration et des questions

 16   financières au niveau de ce collège ? Est-ce que vous êtes enseignant ou

 17   est-ce que vous êtes administrateur ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je suis chef du département

 19   chargé du soutien, des finances et du budget. Quand on parle de soutien,

 20   peut-être la notion la plus proche pour vous, ce serait de dire

 21   "logistique". Nous sommes à œuvrer en matière d'organisation liée à la

 22   logistique pour toutes les écoles militaires relevant de l'université

 23   militaire croate, c'est ce que j'administre.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation]

 26   Q.  On vous a demandé si vous enseigniez ou si vous étiez administrateur.

 27   En bref, ce serait quoi que vous répondriez ?

 28   R.  Je ne suis pas en train d'enseigner. J'administre.

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  1   Q.  Monsieur Jasak, veuillez nous indiquer ce qui suit : quelle est la date

  2   que l'on considère comme étant celle du début de la guerre en Bosnie-

  3   Herzégovine ?

  4   R.  C'est le 18 septembre 1992.

  5   Q.  Qui est-ce qui a reconnu cette date comme étant celle du début de la

  6   guerre ?

  7   R.  Ça été reconnu par les autorités de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire la

  8   Fédération de Bosnie-Herzégovine.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la traduction française, on a dit 18 septembre

 10   1992. Alors, ou c'est le traducteur français qui s'est trompé ou c'est le

 11   traducteur anglais. Quelle année ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était en 1991.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation]

 14   Q.  Que s'est-il produit ce jour-là ?

 15   R.  Ce jour-là, sur le territoire de l'Herzégovine, dans les environs de

 16   Mostar, il est arrivé des unités de l'armée yougoslave, ou pour être plus

 17   précis les Corps d'Uzice et de Podgorica, donc des effectifs à eux

 18   renforcés par des unités serbes.

 19   Q.  Et le nom de Ravno, ça vous dit quelque chose ?

 20   R.  Oui, ça me dit quelque chose. C'est un village dans la partie est de

 21   l'Herzégovine, où il y avait une majorité de la population croate. Ce même

 22   village, au mois d'octobre 1991, a pratiquement été rasé par lesdites

 23   unités qui sont arrivées sur le terrain.

 24   Q.  Dites-nous quelle est la date qu'on considère comme étant celle de la

 25   fin de la guerre en Bosnie-Herzégovine ?

 26   R.  La fin de la guerre en Bosnie-Herzégovine est considérée comme ayant eu

 27   lieu à la signature des accords de Dayton, le 23 décembre 1995.

 28   Q.  Si je fais bien l'addition des mois, ça signifierait que la guerre en

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  1   Bosnie-Herzégovine, d'après les données officiellement reconnues par les

  2   autorités de la Bosnie-Herzégovine, a duré 51 mois, c'est-à-dire quatre ans

  3   et quelque mois. Est-ce que c'est bon comme calcul ?

  4   R.  Je pense que c'est bon comme calcul.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Mon Colonel. On ne va pas rentrer dans le

  6   détail du calcul, mais vous avez dit que l'armée yougoslave est arrivée

  7   dans la zone de Mostar avec les Corps Podgorica et Uzice renforcés par des

  8   unités de volontaires serbes. Vous avez dit en 1991. Mais en 1991, est-ce

  9   que la Yougoslavie existait toujours en tant qu'Etat international reconnu

 10   ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, elle existait, Monsieur le Juge.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce donc à dire que les Serbes sont arrivés

 13   sur le territoire de la République socialiste

 14   fédérative ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Jasak, dites-nous, cette date qu'on a évoquée, d'après la

 19   législation en vigueur de nos jours en Bosnie-Herzégovine, est-ce bien la

 20   date officielle du début de la guerre ?

 21   R.  Oui, c'est la date officielle du début de la guerre.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, à cet effet, je voudrais

 23   me référer à un document de la Défense de M. Stojic, qui est déjà devenu

 24   une pièce à conviction dans ce procès, à savoir le 2D 1183, où l'on a, de

 25   la sorte, défini le début et la fin de la guerre. Le document n'est pas

 26   dans le registre. C'est déjà une pièce à conviction. Je n'ai pas

 27   l'intention de le faire examiner en particulier. Si vous voulez, on peut le

 28   faire afficher, mais je voulais vous indiquer que ça a été défini par cette

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  1   loi, et je vous ai indiqué le document en question. Mes questions à venir

  2   n'auront aucun lien direct avec cet aspect-là.

  3   Q.  Monsieur Jasak, nous avons dit que la guerre a officiellement duré 51

  4   mois. Essayons de nous pencher sur la façon dont ont évolué les relations

  5   entre les parties musulmane et croate en Bosnie-Herzégovine. En 1991, est-

  6   ce que les parties musulmane et croate collaboraient ou est-ce qu'elles

  7   étaient hostiles l'une à l'autre ?

  8   R.  En 1991, la partie croate et la partie musulmane coopéraient l'une avec

  9   l'autre. Il n'y avait pas d'hostilités.

 10   Q.  Veuillez nous indiquer quelle était la situation telle qu'elle se

 11   présentait en 1992.

 12   R.  En 1992, la partie croate et la partie musulmane ont également coopéré.

 13   Q.  Nous savons désormais, Monsieur Jasak, qu'il y a eu des conflits entre

 14   l'ABiH et le HVO en 1992. Ça, vous en êtes au courant, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, je suis au courant du fait qu'il y a eu des escarmouches qui

 16   étaient surmontées dans un délai de 24 heures.

 17   Q.  Bien. Que nous diriez-vous pour l'année 1993 sur le même sujet,

 18   coopération, voire hostilités ?

 19   R.  Pour l'essentiel, on peut constater que la coopération était en vigueur

 20   jusqu'au mois de mars 1993. Ensuite, il y a eu des hostilités, en

 21   particulier à compter du 30 juin 1993.

 22   Q.  Est-ce que vous pouvez répéter la date, parce qu'elle a été erronément

 23   consignée ?

 24   R.  Le 30 juin 1993.

 25   Q.  Bien. Alors, ces hostilités entre l'ABiH et le HVO étaient-elles de

 26   règle sur tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine ou

 27   pas ?

 28   R.  Non, ce n'est pas le cas.

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  1   Q.  Quand nous disons le territoire à libérer de la Bosnie-Herzégovine,

  2   quel est le territoire que nous avons à l'esprit ?

  3   R.  C'est le territoire qui est placé sous le contrôle des forces croates

  4   et musulmanes, à savoir le HVO et l'ABiH.

  5   Q.  Est-ce que vous savez nous dire jusqu'à quand durent les hostilités

  6   entre le HVO et l'ABiH ?

  7   R.  Les hostilités ont duré jusqu'à la signature des accords de Washington.

  8   Q.  Vous souvenez-vous de la date de la signature de cet

  9   accord ?

 10   R.  Mars 1994.

 11   Q.  Si maintenant nous devions résumer, Monsieur Jasak, pour dire que des

 12   conflits entre le HVO et l'ABiH sont survenus pendant la majeure partie de

 13   cette période couverte par la guerre, que diriez-vous ?

 14   R.  Non, il n'y a pas eu des conflits qui s'étiraient sur toute la durée de

 15   la guerre; sur une partie moindre.

 16   Q.  Pendant 20 ou 23 % de la période de guerre au total ?

 17   R.  Ça vous donne à peu près un an.

 18   Q.  Monsieur Jasak, dites-nous encore, en guise d'introduction, qu'est-ce

 19   que le VOS ?

 20   R.  Le VOS, c'est le service du Renseignement militaire de l'état-major du

 21   HVO.

 22   Q.  A quels types d'activités vaque le VOS ?

 23   R.  Il recueille des renseignements au sujet des effectifs de l'ennemi.

 24   Q.  Si vous deviez de façon simple expliquer à quelqu'un la différence

 25   entre le SIS et le VOS, que diriez-vous ?

 26   R.  Le VOS, c'est un service qui s'occupe de la collecte des informations

 27   au sujet de l'ennemi à l'extérieur. Et le SIS, c'est un service qui

 28   consacre ses activités à une problématique interne au sein des forces

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  1   armées.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez expliquer aux Juges de quelle façon vous avez

  3   recueilli vos informations au sein du VOS ?

  4   R.  Suivant des modalités qui sont celles de toutes les armées qui

  5   existent, il s'agit d'activités opérationnelles et des activités de

  6   reconnaissance. Il s'agit aussi des activités électroniques, d'analyse de

  7   ce que publient les médias. Ce serait, pour l'essentiel, cela.

  8   Q.  Quand vous évoquez les activités "électroniques", est-ce que vous

  9   pouvez être plus précis ?

 10   R.  C'est une collecte de la totalité des informations qui circulent sur

 11   les ondes, donc tout ce qui est accessible. Et on procède à des analyses et

 12   on se sert de ces renseignements pour nos besoins.

 13   Q.  En termes simples, c'est de l'écoute ?

 14   R.  C'est ce qu'on peut qualifier par ce terme, oui.

 15   Q.  Veuillez nous dire si ces activités englobent aussi les écoutes de

 16   téléphones fixes ou pas ?

 17   R.  Non. La téléphonie fixe, on ne peut procéder à des écoutes que par des

 18   relais de transmission radio. On met sur écoute que les émetteurs.

 19   Q.  Quelles sont les services de Renseignements en Herceg-Bosna qui étaient

 20   chargés des écoutes de la téléphonie fixe ? Qui est-ce qui pouvait

 21   prononcer ou décider d'une telle mesure ?

 22   R.  Je ne sais pas qui est-ce qui pouvait en décider en temps de paix, mais

 23   dans tous les pays démocratiques du monde, en général, cela relève des

 24   compétences des services civils. Cela fait partie de ce qui est considéré

 25   relever des activités ou des compétences du ministère de l'Intérieur.

 26   Q.  Est-ce que vous vous êtes occupé de tâches analytiques au sein du VOS ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Quel est le --

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Le sujet des écoutes téléphoniques m'intéresse au

  2   plus haut point, parce qu'on a vu un certain nombre de documents qui

  3   étaient le résultat d'écoutes téléphoniques, d'où mon intérêt. J'ai bien

  4   compris que le VOS avait vocation à s'occuper des forces extérieures; le

  5   SIS, de l'intérieur. Et vous avez dit que nous faisions des activités

  6   opérationnelles, la reconnaissance, surveillance des médias électroniques.

  7   Dans les écoutes, dans la recherche de renseignements de nature

  8   électronique, pendant cette période - je rappelle que vous témoignez sous

  9   serment, donc vous devez dire toute la vérité - est-ce que vous avez mis

 10   sous écoute les organisations internationales, les observateurs de la

 11   Communauté européenne qui, bien souvent, étaient logés dans des hôtels ou

 12   des bâtiments faciles à mettre sous écoute, ou les gens de la FORPRONU,

 13   notamment le Bataillon espagnol qui avait des moyens de communication soit

 14   sécurisés, soit non sécurisés. Est-ce que vous avez surveillé tous ces

 15   gens-là ? 

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons pas mis ce genre de personnes sur

 17   écoute, parce qu'aucune information de ce type, je n'en ai vu au sein du

 18   service de Renseignements pour ce qui est des informations parvenues. Et

 19   là, je peux en être sûr, parce que les gens intervenant en matière

 20   d'instruments d'écoute ne parlaient pas les langues étrangères.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien. Dans les surveillances

 22   électroniques, je présume que vous écoutiez les conversations de l'ABiH.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous écoutiez également les conversations

 25   de la Republika Srpska, de la VRS, pour être plus précis ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vos écoutes ont remonté aux plus hauts

 28   dirigeants tant de l'ABiH que de la VRS ? A titre d'exemple, est-ce que M.

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  1   Halilovic était écouté, M. Delic, le célèbre général Mladic, et puis

  2   d'autres ? Est-ce que ces gens-là étaient sous écoute ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] On plaçait sous écoute tout ce qui faisait

  4   l'objet de communication, donc tout ce qu'on pouvait intercepter. On

  5   procédait à l'analyse et on envoyait cela au siège, et puis après on

  6   faisait des rapports suite à des analyses menées.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites : On écoutait tout ce qui était possible.

  8   Mais est-ce que vous écoutiez également, non pas les militaires de l'ABiH,

  9   mais les hommes politiques, ceux qui n'étaient pas militaires, mais civils,

 10   et qui étaient des hommes politiques ? Prenons un exemple, le Dr Karadzic,

 11   par exemple, est-ce que les hommes politiques étaient écoutés par vos

 12   propres services ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous venez de mentionner M. Karadzic, et puis

 14   les individus hauts placés. De toute évidence, ils sont protégés, ils

 15   étaient protégés par des moyens de transmissions qui ne nous étaient pas

 16   accessibles. Mais le service se procurait un maximum d'informations sur le

 17   terrain. Donc ce n'était pas des écoutes sur une longue distance.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Jasak, excusez-moi, je ne m'y connais absolument pas dans le

 21   domaine technique. Je vais vous poser une question. Lorsqu'on vous placez

 22   quelqu'un sur écoute, vous avez la possibilité d'écouter un individu en

 23   particulier ou tout simplement vous interceptez une conversation qui se

 24   déroule à un moment donné, puis après vous essayez de savoir qui étaient

 25   les interlocuteurs ?

 26   R.  On ne suivait pas des individus concrets. En fait, on suivait ce qu'on

 27   pouvait attraper à un moment donné sur les ondes, puis au moment des

 28   activités de combat ou lorsqu'on s'attendait à ce qu'il y ait des activités

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  1   de combat, parce que c'est à ce moment-là qu'on renforçait les écoutes.

  2   Donc grâce aux conversations, on pouvait supposer de qui il s'agissait,

  3   même si les interlocuteurs ne se présentaient pas, et à ce moment-là on

  4   notait probablement untel ou untel, puis lorsque les gens se présentaient

  5   on savait de qui il s'agissait.

  6   Q.  Quelle était la manière de procéder si vous aviez la sensation que la

  7   conversation était pertinente alors que les interlocuteurs ne s'étaient

  8   présentés et les circonstances ne vous permettaient pas de les identifier,

  9   que faisiez-vous à ce moment-là ? 

 10   R.  A ce moment-là, on disait à telle heure il y a eu un entretien entre

 11   les personnes A et B, puis on précisait que le groupe qui a procédé à des

 12   écoutes est arrivé à cette information-là, puis on savait de quelle région

 13   il s'agissait, de quel endroit il s'agissait à peu près.

 14   Q.  Ce que vous êtes en train de nous dire me paraît différer

 15   considérablement des moyens qui étaient ceux de la police secrète civile,

 16   enfin, la possibilité qu'a la police de placer sur écoute les téléphones

 17   des particuliers. Ai-je raison de conclure qu'il y a une grande différence

 18   ?

 19   R.  Oui, vous avez raison, parce que là, c'étaient des moyens de

 20   communications sur des ondes courtes, mais sans protection. C'est là qu'il

 21   y avait des entretiens entre les commandements hauts placés ou bien des

 22   ultras courtes.

 23   Q.  Monsieur Jasak, vous procédez à l'analyse de l'ensemble des

 24   informations accessibles, à ce moment-là vous rédigez des rapports. Comment

 25   se présente le fruit de votre travail ?

 26   R.  Premièrement, vous voulez là parler de nos activités électroniques ou

 27   toutes les activités prises en somme ?

 28   Q.  Toutes les activités prises en somme. S'il y a des différences, dites-

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  1   nous ce qui en est des uns comme des autres.

  2   R.  Il n'y a pas vraiment de différence. Mais lorsqu'on avait procédé à des

  3   opérations par des moyens électroniques, s'il n'y a rien de pertinent, on

  4   ne communique pas au siège, et s'il y a des choses pertinentes, on le

  5   communique au siège.

  6   Q.  Ralentissez, s'il vous plaît.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, Me Alaburic vous pose une question

  8   intéressante en vous demandant comment vous faisiez des synthèses de cela.

  9   Donc elle avait à l'esprit qu'il y avait certainement une coordination de

 10   tous les renseignements. Vous avez répondu en ce sens. J'ai entendu tout à

 11   l'heure que vous aviez dit : Nous faisions des activités opérationnelles.

 12   Et quand vous avez dit ça, je me suis demandé si vous aviez des agents à

 13   l'intérieur de l'ABiH, voire à l'intérieur de la VRS, qui étaient des

 14   agents à vous et qui vous fournissaient des renseignements de première

 15   main, alors même que ceux auprès de qui ils étaient placés ne savaient pas

 16   qu'ils travaillaient pour vous. Est-ce que vous aviez ce type également

 17   d'activités, à savoir vous pénétriez l'ennemi en ayant au sein même des

 18   forces ennemies des agents de liaison ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] On n'avait pas de ce type d'activités. Lorsque

 20   je parle d'activité opérationnelle, là j'ai à l'esprit nos unités qui

 21   avaient leurs personnels sur le terrain, et c'est sur le terrain qu'ils

 22   pouvaient se procurer des informations, et c'est en passant par les zones

 23   opérationnelles qu'on passait les informations à l'état-major principal, au

 24   VOS où on procédait à l'étude analytique. Et lorsqu'il y avait des éléments

 25   pertinents, on les faisait figurer dans nos rapports.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite réagir suite au compte rendu

 27   d'audience, Monsieur le Président.

 28   Q.  Monsieur Jasak, au début de votre réponse, il y a eu un moment qui

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  1   n'était pas clair, et c'est la raison de l'erreur. Donc aviez-vous des

  2   taupes dans l'"armija" et dans la VRS ?

  3   R.  Non, nous n'avions pas de taupes ni dans l'une ni dans l'autre.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous n'aviez pas des taupes, c'est le

  5   B.A.BA [phon] du métier ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'étions pas suffisamment évolués,

  7   développés pour pouvoir avoir une telle chose.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation]

 10   Q.  Tout de même, il vous est arrivé d'obtenir des éléments d'information

 11   de quelqu'un qui était proche de la VRS ou de l'ABiH ?

 12   R.  Mais ce type d'information, c'est ce qui arrivait du terrain, mais par

 13   quel moyen, ça, je ne le sais pas. Je ne sais pas comment on s'est procuré

 14   ce type d'information.

 15   Q.  Vous nous avez précisé la manière de procéder pour rédiger des rapports

 16   au centre d'activités électroniques. J'aimerais savoir maintenant s'il y

 17   avait des rapports qui synthétisaient l'ensemble des rapports venus du

 18   terrain ?

 19   R.  Oui, il y avait des rapports du VOS.

 20   Q.  Dites-nous, quelle est la dynamique de ces rapports ?

 21   R.  C'est une fois par jour; si besoin se faisait sentir, plusieurs fois

 22   par jour on rédigeait un tel rapport.

 23   Q.  Pourriez-vous nous dire à qui on adressait ces rapports ?

 24   R.  En règle générale, ces rapports étaient adressés au président de la

 25   Communauté croate d'Herceg-Bosna, au chef du département de la défense, au

 26   chef du Grand état-major, et à tout autre individu pour lequel on estimait

 27   que ça lui serait utile, et cela, à titre occasionnel.

 28   Q.  Dans les unités du HVO, y avait-il également le VOS ?

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  1   R.  Oui, ça existait.

  2   Q.  Dites-nous, l'état-major principal, était-ce un organe indépendant,

  3   autonome, ou faisait-il partie d'un organe plus large ?

  4   R.  L'état-major principal faisait partie du département de la défense.

  5   Q.  Monsieur Jasak, nous avons eu l'occasion de voir le plan du bâtiment,

  6   bâtiment situé à Mostar, qui hébergeait l'état-major principal, c'était au

  7   rez-de-chaussée du bâtiment. Vous ai-je montré ce plan dont l'auteur est un

  8   témoin, Bozo Peric ?

  9   R.  Oui, vous me l'avez montré.

 10   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle est la superficie du rez-de-chaussée de

 11   ce bâtiment, à peu près ?

 12   R.  A peu près 150 à 200 mètres carrés.

 13   Q.  Et l'état-major principal, est-ce qu'il s'est servi de locaux dans le

 14   bâtiment voisin ?

 15   R.  Dans le bâtiment voisin, il n'y avait là qu'une seule pièce dont on

 16   s'est servi, qui était un centre de transmissions pour la réception et les

 17   missions de rapports. Et là, on avait une radio pour envoyer par paquets

 18   nos messages et on avait deux hommes qui travaillaient par relève, deux par

 19   relève.

 20   Q.  A présent, dites-nous, Monsieur Jasak, imaginons que quelqu'un soit

 21   basé à Vitez et qui souhaite envoyer des informations à l'attention de Mate

 22   Boban, le commandant suprême, et ce, par paquets par radio. A ce moment-là,

 23   qui réceptionne ce message arrivé de Vitez ?

 24   R.  Ce sont ces hommes qui font partie de service de transmissions et qui

 25   sont chargés de recevoir et d'émettre des messages par paquets par radio.

 26   Q.  Donc il s'agit de l'état-major principal basé à Mostar ?

 27   R.  Oui, c'est cela.

 28   Q.  Et le sceau, quel serait le cachet que l'on verrait sur ce message

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  1   arrivé de Vitez ?

  2   R.  Ce serait le cachet de réception qui était utilisé par eux.

  3   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé de demander la parole. Mais à

  4   moins d'avoir fait une erreur, il me semble qu'il y a une erreur de

  5   traduction dans la réponse, peut-être les deux d'ailleurs. A la ligne 21,

  6   en page 31, j'ai cru comprendre que la question était la suivante :

  7   Monsieur Jasak, quelqu'un de Vitez, par exemple, voulait envoyer par radio,

  8   par paquets quelqu'un, Mate Boban, le commandant suprême, qui recevrait ce

  9   message à Vitez ? Ensuite à la question suivante, Mme Alaburic dit : Au QG

 10   de Mostar, n'est-ce pas ?

 11   Donc il y a une erreur, puisque c'était Vitez avant et maintenant on parle

 12   de Mostar. Je pense qu'il y a une erreur.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Je remercie mon confrère, il a tout à fait

 14   raison. Nous parlons d'un message envoyé de Vitez adressé à Mate Boban, et

 15   on n'a pas défini où était basé Mate Boban. Donc M. Scott a tout à fait

 16   raison de réagir. Je lui en suis reconnaissante.

 17   Q.  Donc ma question est la suivante : donc c'est par paquets à l'état-

 18   major principal qu'on aurait reçu ce message à Mostar, et j'aimerais savoir

 19   quel est le tampon qu'on trouverait sur ce message parvenu de Vitez ?

 20   R.  Mais c'est le tampon de réception qui était utilisé par les gens qui

 21   travaillaient au centre de transmissions, le même tampon que pour tous les

 22   autres documents.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, Me Alaburic parle du présupposé que

 24   tous les messages qui partaient à Vitez pour M. Boban passaient par l'état-

 25   major. Et vous, vous répondez en ce sens. Mais à votre connaissance, est-ce

 26   que M. Mate Boban avait lui, personnellement, un système de réception, ou

 27   du terrain on pouvait lui envoyer directement à lui par paquets ou par fax

 28   un message sans pour autant que l'état-major principal soit au courant ? Je

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  1   présume, pour compléter ma question, que M. Mate Boban devait avoir un

  2   numéro de fax. Alors est-ce qu'à votre connaissance il pouvait avoir de

  3   l'information directement sans que l'état-major principal soit au courant

  4   ou le département de la Défense, ou bien ça devait automatiquement passer

  5   par l'état-major principal ou le département de la Défense ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque Me Alaburic m'a

  7   posé cette question, je l'ai comprise de la manière suivante : imaginons

  8   que quelqu'un souhaite envoyer quelque chose de Vitez à Mate Boban, donc

  9   par paquets par radio, quel serait le tampon ? Bien, ce serait le tampon du

 10   poste qui l'a réceptionné, le message. Et de la manière dont j'ai compris

 11   sa question, elle ne m'a pas demandé si tous les messages arrivaient, mais

 12   certainement pas. Seulement si quelqu'un adressait un message, ce message

 13   arrivait et avait le tampon de réception du poste, donc il avait cette

 14   dénomination, son code. Et à un moment donné on disait état-major principal

 15   du HVO, comme pour qui que ce soit, quel que soit le destinataire.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous répondez pour partie à ma question, et je vous

 17   en remercie. Mais je vais prendre un exemple très précis, très concret.

 18   L'unité de Tuta, Naletilic, est-ce qu'il pouvait, lui, envoyer directement

 19   son rapport à M. Mate Boban sans que l'état-major ou le département de la

 20   Défense soit au courant ? Voilà, c'est très technique, très précis, et très

 21   important.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Suite à cette question que vous me posez, je

 23   vous dirais que certainement qu'il avait la possibilité de l'envoyer, parce

 24   que c'est par l'état-major principal qu'on passait des informations à

 25   l'attention directement de Mate Boban puisqu'il avait son bureau. Mais pour

 26   ce qui est d'information par paquets par radio, tout ce qui arrivait à ce

 27   poste avait ce tampon de réception,  le même.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous dites c'était possible, mais vous rajoutez

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  1   que néanmoins ça devait passer par l'état-major principal. C'est ce que je

  2   comprends de votre réponse.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Vous m'avez posé une question

  4   hypothétique, ou plutôt, Me Alaburic m'a posé une question hypothétique, et

  5   j'ai répondu. Si quelqu'un envoie un message de Vitez vers un destinataire

  6   concret radio, mais on pouvait envoyer à n'importe lequel poste, n'importe

  7   où.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors en termes techniques, une unité X, je prends

  9   Tuta - parce que pour moi c'est important de prendre cet exemple - il fait

 10   un compte rendu d'une opération mais il veut faire ce compte rendu

 11   uniquement à Mate Boban. Il ne veut pas que M. Petkovic ou M. Praljak ou M.

 12   Stojic soit au courant. Est-ce que technique il a les moyens de le faire ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais je n'ai entendu dire qu'un rapport quel

 14   qu'il soit, destiné à Mate Boban, ait été envoyé par M. Tuta en passant par

 15   l'état-major principal. Je suppose qu'il avait ses moyens s'il souhaitait

 16   lui adresser un rapport, parce que jamais aucun rapport de M. Tuta, je n'ai

 17   vu à l'état-major principal.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, cela sera tout à

 19   fait clair. Permettez-moi de poser la question.

 20   Q.  Monsieur Jasak, laissons de côté les messages par paquets par radio, je

 21   pensais qu'on connaissait très bien tous les autres moyens de transmissions

 22   et que seul ce moyen devait nous intéresser, mais laissons. Voyons

 23   maintenant les contacts Tuta-Boban.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé, Madame Alaburic. Mais puisque

 25   nous passons à autre chose, je pense que c'est important, et j'aimerais

 26   donc faire une observation à ce propos. Peut-être Mme Alaburic peut nous

 27   aider, elle dit qu'elle reviendra sur le sujet. Mais je pense que jusqu'à

 28   présent nous n'avons établi les bases permettant à ce témoin de répondre à

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  1   ce type de questions. On ne sait pas si jusqu'à présent on a entendu une

  2   description extrêmement générale de ses fonctions, rien de plus. Bon, il

  3   était vaguement relié à l'état-major principal, vaguement relié au service

  4   de Renseignements, il était en relation avec l'état-major principal

  5   d'octobre 1992 à août 1993. On ne sait pas du tout ce qu'il faisait. On ne

  6   sait même pas s'il sait fonctionner une machine de communications radio par

  7   paquets. On ne sait même pas s'il a déjà vu une machine de ce type. On lui

  8   pose toutes sortes de questions, mais nous considérons vraiment que jusqu'à

  9   présent les bases n'ont pas été établies permettant de dire que ce témoin

 10   peut répondre à ces questions. C'est de l'ordre des spéculations, rien de

 11   plus.

 12   Si vous me permettez de terminer mes commentaires. Ça me rappelle le

 13   commentaire du Juge Trechsel à propos du dernier témoin que nous avons eu

 14   la semaine dernière qui, soi-disant, savait tout ce qui se passait en

 15   Herceg-Bosna au niveau de l'artillerie. Ce n'est pas possible. Or, ici

 16   jusqu'à présent, le témoin nous a donné aucune base permettant de nous

 17   affirmer qu'il peut en toute connaissance de cause nous fournir cette

 18   information. Je vous remercie.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, tenez compte de ce que vient de

 20   dire M. Scott. Je partais du présupposé qu'il avait cette connaissance,

 21   mais le Procureur en doute. Alors, essayez de clarifier cela.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, tout à fait. C'est ce que je m'apprête

 23   à faire, Monsieur le Président.

 24   Q.  Voilà. Nous avons parlé des moyens de transmission en général. Prenons

 25   maintenant un cas de figure, une hypothèse, Tuta et Boban, pour que ce soit

 26   plus simple et plus clair. Imaginons que Tuta et Boban souhaitent

 27   communiquer, leur était-il possible de se rencontrer et de communiquer

 28   verbalement et d'échanger des éléments, d'émettre des commandements, et

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  1   cetera, ou toute autre chose ?

  2   R.  Mais c'était tout à fait possible. Je ne vois pas qui les en aurait

  3   empêchés.

  4   Q.  D'accord. Dites-moi maintenant, si Tuta souhaitait envoyer un message

  5   par écrit à M. Boban, pouvait-il passer par coursier ou par estafette ?

  6   R.  Oui, c'était possible. Il pouvait faire cela.

  7   Q.  Et cette communication par estafette, était-ce confidentiel et direct,

  8   en règle générale ?

  9   R.  En règle générale, c'est la communication par estafette qui est la plus

 10   confidentielle qui soit.

 11   Q.  Si M. Tuta souhaitait se mettre en contact avec M. Boban, pouvaient-ils

 12   se parler par téléphone ?

 13   R.  Oui, c'était possible pour eux.

 14   Q.  Si maintenant Tuta souhaitait envoyer une lettre à M. Boban, pouvait-il

 15   le faire par la poste ?

 16   R.  Oui, pourquoi pas ? Il pouvait le faire.

 17   Q.  Si Tuta souhaitait envoyer une lettre par fax à M. Boban, est-ce que

 18   cela lui était possible ?

 19   R.  Oui, cela lui était possible, et je ne vois pas pourquoi pas.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, donc il me semble --

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais on a utilisé

 22   des pigeons voyageurs à un moment ou à un autre aussi il y a très longtemps

 23   quand même dans l'armée. Mais est-ce que vous avez utilisé des pigeons

 24   voyageurs ? Sachez que j'habite tout près du centre de pigeons voyageurs de

 25   l'armée suisse, donc peut-être pour les jeunes dans le prétoire ça paraît

 26   un peu bizarre, mais ce sont des choses qui existaient.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je n'ai pas entendu parler

 28   qu'on se soit servi de pigeons.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation]

  3   Q.  Par conséquent, Monsieur Jasak, vous venez de nous dire qu'on pouvait

  4   communiquer directement, de vive voix, par téléphone, en passant par

  5   estafettes, par fax. Alors, dites-nous, s'il vous plaît, qu'est-ce qui vous

  6   permet de nous apporter ces réponses ? D'où tenez-vous des informations sur

  7   les moyens de communication en Herceg-Bosna ?

  8   R.  Mais n'importe quels deux individus peuvent communiquer de ces

  9   manières-là.

 10   Q.  Mais ces moyens de communication que nous venons d'évoquer, le

 11   téléphone, le fax, est-ce que cela existait ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Très bien. Alors, voyons maintenant ce qui est en de cette forme de

 14   communication qui --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, vous dites que c'était possible. Mais

 16   M. Scott a fait tout à l'heure une observation très pertinente. Il voulait

 17   savoir comment le savez-vous. Je vais prendre un exemple. Prenez le

 18   président Obama, et puis les liens qu'il peut avoir avec un général en

 19   Afghanistan. Tout le monde peut se dire, comme vous, ils communiquaient par

 20   téléphone ou par fax, mais ils pouvaient avoir aussi une ligne

 21   particulière. Et c'est ça qu'on veut savoir. Comment le savez-vous ? Est-ce

 22   que c'est une réflexion que vous faites et vous donnez la réponse, ou bien

 23   vous savez parfaitement que MM. Mate Boban et Tuta pouvaient communiquer

 24   par des estafettes ? Parce qu'on vous l'a dit, vous avez vu l'estafette ?

 25   C'est ça que nous voulons savoir. C'est pour ça que M. Scott est intervenu,

 26   parce qu'il voulait avoir confirmation des connaissances que vous avez.

 27   Alors, vous répondez aux questions de Me Alaburic, parce que ça vous tombe

 28   sous le bon sens ou bien vous aviez des informations extrêmement précises ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Me Alaburic m'a posé

  2   une question hypothétique. Cela leur était-il possible ? Je ne vois pas

  3   pour quelle raison non. Mais en même temps, je n'ai pas d'information sur

  4   leurs communications.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, vous dites : Je n'ai pas d'information. Alors,

  6   je vais affiner votre réponse. A votre connaissance, au sein du HVO, est-ce

  7   que le commandant suprême du HVO, qui était M. Mate Boban, avait-il, par

  8   exemple, un téléphone satellitaire, et une unité comme celle de Naletilic

  9   pouvait avoir aussi un téléphone satellitaire, ce qui permettait aux deux

 10   de communiquer entre eux directement ? Vous le savez ou vous ne le savez

 11   pas ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

 13   d'information à ce sujet.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation]

 16   Q.  Donc, envoi de messages par paquets par radio, je voulais tirer un

 17   point au clair --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, Madame Alaburic,

 19   mais j'aimerais apporter une correction au compte rendu. A la page 37,

 20   ligne 5, on dit ou on semble dire, en ce qui concerne les pigeons : je les

 21   ai vus partir. Non, je les ai vus partir, je les ai vus souvent. Et je n'ai

 22   pas parlé non plus -- enfin, il y a des erreurs dans le compte rendu en

 23   anglais en ce qui concerne mes propos, et j'espère qu'ils seront corrigés.

 24   Désolé de cette interruption.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Tout cela est fort sympathique, je dois

 26   dire. Continuons.

 27   Q.  Monsieur Jasak, voyons ce qui en est des envois par paquets par radio.

 28   Imaginons que quelqu'un soit basé à Vitez, et je regrette d'avoir mentionné

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  1   des noms, et cela nous a embrouillé dans les aspects factuels, donc toutes

  2   mes questions seront hypothétiques. Imaginons quelqu'un à Vitez qui

  3   souhaite envoyer un message au commandant suprême Boban. Il sait que Boban

  4   se trouve à Grude. Alors, ce message, pouvait-il l'envoyer par paquets à

  5   l'adresse de la Brigade de Grude ?

  6   R.  Oui, il pouvait le faire.

  7   Q.  Si cette personne de Vitez estimait que Mate Boban se trouvait à Mostar

  8   ou ne savait pas où se trouvait Mate Boban et aurait décidé d'envoyer quand

  9   même à Mostar, où le message de Vitez arrive-t-il ?

 10   R.  Ce message arrive au centre des transmissions de l'état-major

 11   principal, c'est l'endroit où sont recueillis tous les messages.

 12    M. SCOTT : [interprétation] Messieurs les Juges, je suis gré de revenir à

 13   ceci, mais je n'ai pas l'impression que nous ayons vraiment avancé. Le

 14   témoin ne nous a pas donné vraiment d'éléments supplémentaires sur la base

 15   du bon sens. Il est possible que durant la Deuxième Guerre mondiale, il y

 16   avait probablement des communications téléphoniques en Allemagne. Je ne

 17   savais pas, mais c'est un genre d'avis, et nous n'avons pas vraiment

 18   d'information qui nous laisse penser qu'il a vraiment vu exactement quels

 19   étaient les moyens complets concernant les moyens de communication du HVO.

 20   Et il n'a pas vraiment dit sous serment que c'étaient les moyens de

 21   communication dont disposait l'état-major général. Je pense qu'il faudrait

 22   qu'il y ait vraiment une base plus concrète pour présenter ces différents

 23   éléments.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

 25   cette observation se trouve au niveau suivant. Si deux individus se parlent

 26   au téléphone, est-ce que chacun d'entre eux dispose d'un appareil

 27   téléphonique ? Or, j'ai estimé que c'était une chose notoirement connue que

 28   le fait que ces messages par paquets pouvaient être envoyés par colis radio

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  1   par celui qui en dispose, donc qui dispose d'un paquet et d'une radio de ce

  2   type, et l'autre peut recevoir s'il dispose d'une radio de ce type. Ça me

  3   paraît évident.

  4   Q.  Monsieur Jasak, si je suis dans le tort et s'il faut avoir des

  5   connaissances spécialisées pour pouvoir affirmer ou pour pouvoir savoir qui

  6   est-ce qui peut et d'où envoyer des messages par paquets radio, et est-ce

  7   que ces messages peuvent être réceptionnés que par paquets radio,

  8   j'aimerais que vous nous expliquiez un peu.

  9   R.  Ces messages par paquets radio ne peuvent pas être envoyés que d'un

 10   endroit qui dispose d'un émetteur radio par paquets et reçus là où il y en

 11   a un autre. Par conséquent, toutes les unités du HVO, depuis le niveau de

 12   brigade et au-delà, disposaient d'une transmission par radio et paquets et

 13   ne communiquaient que de la sorte. Donc, notre service de Renseignements

 14   militaires utilisait ces transmissions radio à l'état-major qui étaient

 15   utilisés --

 16   Q.  Ralentissez donc un peu.

 17   R.  -- donc, le VOS se servait de ces paquets radio pour réceptionner et

 18   envoyer ces rapports. Ces transmissions par paquets radio étaient utilisées

 19   par la totalité des effectifs de l'état-major et du département de la

 20   Défense. Donc, toutes les informations arrivaient là, et s'agissant de

 21   cela, nous recevions au quotidien et nous envoyons tous les jours des

 22   rapports par ces mêmes transmissions paquets radio.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause, parce que c'est 3 heures 50.

 24   On va faire 20 minutes de pause.

 25   --- L'audience est suspendue à 15 heures 49.

 26   --- L'audience est reprise à 16 heures 13.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Jasak, juste une minute ou deux au sujet de ces transmissions

  2   par paquets radio, parce qu'on a perdu pas mal de temps là-dessus. On a vu

  3   dans votre CV que, s'agissant du ministère de la Défense de la République

  4   de Croatie, vous étiez chef du département chargé de la technique et des

  5   technologies. On a vu qu'à l'école militaire, vous étiez à la tête du

  6   département chargé de l'informatique. Nous savons que vous êtes ingénieur

  7   diplômé en mécanique. Nous pourrions donc en tirer la conclusion que vous

  8   vous y connaissez quand même en technique; c'est bien exact ?

  9   R.  C'est exact.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Colonel, approchez-vous des micros, parce que les

 11   interprètes nous ont dit qu'ils ont du mal à vous entendre. Donc, essayez

 12   d'être plus près du micro. Merci.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit, C'est exact.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation]

 15   Q.  Donc, vous vous y connaissez en matière de technique. Est-ce que vous

 16   vous y connaissez en matière de transmissions aussi ?

 17   R.  Oui, je m'y connais.

 18   Q.  Est-ce que vous avez vu les transmissions par paquets radio dans votre

 19   vie ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous savez comment ça fonctionne ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que par transmissions radio, vous, au sein du VOS, vous receviez

 24   des rapports en provenance du terrain ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce qu'au sein du VOS vous avez envoyé des rapports ou quoi que ce

 27   soit d'autre par écrit, et ce, par le biais de transmissions par paquets ?

 28   R.  Au quotidien, ne serait-ce qu'une fois par jour.

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  1   Q.  Une question maintenant --

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre,

  3   mais je vais vous présenter une requête qui est ma requête habituelle, à

  4   savoir que vous devez ménager des pauses entre vos questions et vos

  5   réponses. Merci.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge, de

  7   votre avertissement. Je m'excuse en mon nom et au nom du témoin.

  8   Q.  Monsieur Jasak, s'agissant de ce dispositif de transmissions par

  9   paquets radio qui se trouve à l'état-major principal, il y a des écrits qui

 10   arrivent destinés au président de l'Herceg-Bosna, M. Mate Boban. Ce

 11   courrier, il va vers qui d'abord, à partir de la pièce où il y a le

 12   récepteur des messages radio et le destinataire ?

 13   R.  Ce courrier va vers son destinataire, au bureau de Mate Boban.

 14   Q.  C'est direct ?

 15   R.  C'est direct.

 16   Q.  Bien. Passons à un autre sujet.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, si vous avez d'autres

 18   questions au sujet de ces transmissions radio par paquets, posez-les;

 19   sinon, on continue.

 20   Q.  Alors, Monsieur Jasak, dites-nous, je vous prie, quelque chose au sujet

 21   de l'organisation de la défense de la ville de Mostar. Est-ce que vous

 22   pouvez d'abord nous dire quand est-ce que ces activités liées à la défense

 23   de Mostar et à l'organisation de la défense s'agissant de Mostar ont

 24   commencé ?

 25   R.  L'organisation de la défense de Mostar a commencé en fin de 1991 au

 26   travers de la mise en place de gardes villageoises, du moins ce qu'on

 27   appelait ainsi.

 28   Q.  S'il s'agit d'une ville, c'est des gardes citadines ?

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  1   R.  Certes.

  2   Q.  Et ces groupes-là, ont-ils été rassemblés sous la tutelle d'une

  3   instance quelconque des autorités de Mostar ?

  4   R.  Ça a été organisé sous la coupe du QG de Crise de Mostar. Au début,

  5   c'était organisé rien qu'au niveau des communautés locales. Par la suite,

  6   cela a été placé sous la coupe du QG de Crise.

  7   Q.  Ces groupes de défense avaient-ils à voir avec le HVO, qui a été créé

  8   au mois d'avril 1992 ?

  9   R.  Oui. Ces groupes de défense ont permis de créer ultérieurement le HVO.

 10   Q.  Veuillez nous indiquer si le HVO avait été organisé suivant un principe

 11   territorial ?

 12   R.  Oui. Le HVO s'est vu organiser suivant des principes territoriaux et

 13   qui se résumaient à des QG municipaux.

 14   Q.  Veuillez nous indiquer ce que c'était que la mission de ces QG

 15   municipaux ?

 16   R.  Leur mission consistait à défendre leurs propres municipalités.

 17   Q.  Est-ce que ces QG municipaux du HVO étaient destinés à la défense des

 18   territoires d'autres municipalités également ?

 19   R.  Ils n'étaient destinés qu'à la défense uniquement de leurs propres

 20   territoires, ou de la défense de la municipalité elle-même. C'était le cas

 21   au début.

 22   Q.  Veuillez nous préciser si ces QG municipaux du HVO, à un moment donné,

 23   se sont vus réorganisés en brigades ?

 24   R.  Fin 1992, on les réorganise en pratique sous forme de brigades

 25   municipales là où la municipalité pouvait créer une brigade. Et là ça ne

 26   pouvait pas être le cas, la brigade était constituée à partir de plusieurs

 27   municipalités.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

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  1   M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous prie de

  2   m'excuser pour cette interruption. Mais je vais devoir revenir au principe

  3   que j'ai soulevé précédemment. Je devrais dire à la Chambre de première

  4   instance et au conseil, et je le fais de manière plus régulière, parce que

  5   je vois que l'on a un peu perdu ce fil d'Ariane. Lorsque le témoin dépose,

  6   il doit fournir une fondation. Est-ce qu'il s'est déjà rendu dans une

  7   cellule de Crise ? Est-ce qu'il s'est rendu dans une cellule de Crise dans

  8   une municipalité, avant de dire quels étaient les rôles des cellules de

  9   Crise dans toutes les municipalités pendant cette période donnée, puisque

 10   c'est ce qu'il prétend avancer à l'heure actuelle. Est-ce qu'il s'est déjà

 11   rendu dans une cellule de Crise ? Est-ce qu'il était membre d'une cellule

 12   de Crise; si oui, dans quelle municipalité ? Quelles étaient les pratiques

 13   adoptées ? Quelles étaient les politiques de cette municipalité ? Il s'agit

 14   de généralisations, il s'agit également de conjectures sans fondation - il

 15   y en aura peut-être plus tard - mais pour l'instant, il n'y a aucune base à

 16   ce qu'il avance ici. Avec tout le respect que je dois au témoin, je crois

 17   qu'il faut qu'il fournisse la base de ce qu'il avance.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, vous lui avez posé la question,

 19   j'ai eu envie de poser les questions que M. Scott vient soulever. Le témoin

 20   dit que le HVO était organisé selon le principe territorial. Mais je

 21   pensais que vous alliez lui dire : comment le savez-vous ? Qu'est-ce qui

 22   vous permet de le dire ? Et puis, vous ne dites rien et vous continuez.

 23   Donc, on se demande est-ce qui sait ça comme ça ou a-t-il une connaissance

 24   personnelle très précise du fonctionnement d'un quartier général de crise,

 25   parce que vos questions touchent au cœur même de la création du HVO, au

 26   cœurs même de la notion d'entreprise criminelle commune, et cetera. Alors,

 27   peut-être qu'il faut lui demander comment savez-vous ça et approfondir, ce

 28   qui éviterait à M. Scott de redire ce qu'il a déjà dit.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que

  2   l'objection formulée par M. Scott, mon éminent confrère, est tout à fait

  3   infondée, parce que s'il avait suivi attentivement la partie CV du témoin,

  4   il aurait pu constater que toutes mes questions découlent de ce que le

  5   témoin nous a dit avoir fait en fin 1991 jusqu'au mois d'octobre 1992, où

  6   il est arrivé à l'état-major. Donc, pour ce qui est de la biographie de ce

  7   témoin, on a dit qu'à partir de la fin 1991, il participe à l'organisation

  8   de la défense de Mostar et il est membre du HVO à partir de sa création,

  9   c'est-à-dire avril 1992. On dit aussi qu'il était commandant adjoint d'un

 10   bataillon du HVO dans Mostar. Et puis, on précise qu'il est devenu, à un

 11   moment donné, commandant de ce bataillon du HVO à Mostar. Donc, tous ces

 12   faits-là sont énoncés au début du PV d'aujourd'hui pour ce qui est de la

 13   biographie de ce témoin, et je crois que cela constitue fondement pour les

 14   questions que je pose.

 15   Et si mon éminent confrère, M. Scott, estime qu'il n'a pas suffisamment

 16   d'information appropriée ou de connaissance appropriée pour répondre, je

 17   lui conseille de contre-interroger pour désavouer les réponses apportées

 18   par le témoin aux questions que j'ai posées.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai écouté

 21   attentivement les questions et les réponses -- la déclaration qui commence

 22   à la page 45, ligne 19, et qui continue sur le reste de la page 46. Nous

 23   avons entendu ce que l'on dit sur les bataillons du HVO et sur la défense

 24   du HVO. Mais avec tout le respect que je dois aux différents protagonistes

 25   du prétoire, je ne vois pas vraiment la base de cette expérience à la

 26   cellule de Crise. Il ne s'agit pas d'un témoin expert, il ne s'agit pas de

 27   quelqu'un qui a préparé un rapport et qui va donner une opinion d'expert

 28   sur certaines structures ou certains processus.

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  1   Avec tout le respect que je dois au témoin -- et je ne vais pas être en

  2   concurrence avec les commentaires de l'autre partie à ce procès. Avec tout

  3   le respect que je dois à ce témoin, je ne l'ai jamais rencontré avant cela,

  4   au moment où nous parlons, il avait 26 ans et il avait affaire avec des

  5   éléments de renseignement au sein du HVO entre octobre 1992 et août 1993.

  6   Ensuite, il s'est rendu à Zagreb et il a subi une formation supplémentaire.

  7   Mais nous n'avons aucune base quelle qu'elle soit, c'est mon argument, pour

  8   qu'il puisse nous dire comment fonctionnaient les cellules de Crise.

  9   Merci, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aviez 26 ans à l'époque, même peut-être 24,

 11   peut-être même moins. Pour certains, à 24 ans, ils sont déjà maréchals

 12   d'empires, mais vous, vous ne faites pas partie de l'armée napoléonienne,

 13   donc on peut se poser la question de savoir si vous pouvez apprécier, sur

 14   le plan politique, la création du HVO. L'avocate dit, Oui, mais il était

 15   commandant de bataillon. Ce n'est pas parce qu'on est commandant de

 16   bataillon qu'on a une connaissance politique. Alors, la question que les

 17   Juges, parce qu'on va devoir évaluer votre crédibilité, quand vous dites

 18   que le HVO s'est créé sur le principe territorial, vous pouvez nous

 19   expliquer comment vous le savez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, oui, je puis le faire. La

 21   ville de Mostar se composait de communautés locales. Dans l'une de ces

 22   communautés locales, qui s'appelait Zahum, le secteur de Balinovac, ça se

 23   trouve à l'entrée même de Mostar, la population s'est auto-organisée. Tout

 24   ce que nous connaissions, nous l'avons intégré à des gardes nocturnes pour

 25   que n'arrive pas ce qui s'est produit à Ravno.

 26   Donc, c'est un secteur tout à fait spécifique, il y a moins de 100

 27   mètres à vol d'oiseau d'où l'armée yougoslave et les volontaires serbes

 28   avaient campé leurs positions. C'est dans le secret que nous avions

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  1   organisé les choses au niveau de cette communauté locale. C'est d'une façon

  2   analogue que s'étaient organisés d'autres collègues au sein d'autres

  3   communautés locales qui, par la suite, se sont mués en bataillons du HVO de

  4   Mostar, et ceux-là ont été placés sous l'autorité du QG municipal. Donc, ce

  5   n'est que territorialement que ça s'est fait, Balinovac, Ilici, Cim, Bijelo

  6   Polje, Krusevo, Jasenica, et ainsi de suite, selon les différentes

  7   communautés ou municipalités. Ce qui fait que la municipalité de Mostar,

  8   lorsque le HVO a été créé, a disposé de neuf bataillons autonomes et de

  9   quatre compagnies autonomes.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors moi, je n'y vois plus clair, parce que vous

 11   avez eu vous-même l'expérience. Vous dites que des unités se sont

 12   constituées. Vous citez le cas de Balinovac, parce que vous étiez un

 13   acteur, donc vous étiez participant à cette création, et que par la suite,

 14   neuf bataillons autonomes ont rejoint le HVO.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge. C'est suivant

 16   ce principe territorial et par communautés locales que ça s'est fait. Par

 17   la suite, elles ont rejoint les rangs du QG municipal sur le même

 18   territoire, la municipalité de Mostar.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et concernant le fonctionnement du QG

 20   municipal, quelle connaissance vous avez ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je peux vous dire, c'est que ces QG

 22   municipaux donnaient des instructions pour essayer de coordonner le tout

 23   afin que ces bataillons agissent de concert lorsque créés suivant le

 24   principe territorial.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président --

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Maître

 27   Alaburic, mais je voudrais préciser certains points concernant la base des

 28   connaissances du témoin.

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  1   Monsieur Jasak, vous avez dit à plusieurs reprises "nous avons fait ceci",

  2   "nous avons fait cela". Qu'entendez-vous par "nous" ? Est-ce que vous

  3   pourriez peut-être expliquer à cette Chambre de première instance pourquoi

  4   vous vous êtes rendu à Mostar et ce qui s'y est passé ? Vous êtes devenu

  5   membre de quoi ? Quel était votre rôle, vos fonctions ? Parce que nous

  6   sommes un peu dans l'inconnu ici.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, je suis arrivé à Mostar

  8   en 1987 pour faire des études à la faculté de mécanique. A cette époque-là,

  9   j'ai habité sur le territoire de la communauté locale qui s'appelle Zahum.

 10   Du fait de l'arrivée des réservistes yougoslaves en 1991, il y avait parmi

 11   eux des collègues à moi du groupe ethnique serbe, venus du territoire de

 12   Nevesinje et de Gacko. Ce sont des gens que j'ai eu l'occasion de voir en

 13   1991, portant l'uniforme, ils étaient venus à la faculté.

 14   Alors, c'est en plus des événements de Ravno, voire donc des collègues à

 15   moi, qui ont fait leurs études avec moi, dans les uniformes de l'armée qui

 16   a commis ce qui a été commis. Chez moi, cela a généré une nécessité qui

 17   était celle de rejoindre les rangs de ceux qui allaient se défendre contre

 18   un tel ennemi.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, si je comprends bien, en 1987,

 20   vous avez 20 ans, puisque vous êtes né en 1967. Vous faites vos études à la

 21   faculté mécanique, et vous aviez des collègues, des amis, étudiants comme

 22   vous qui, d'après ce que je dois comprendre, étaient Serbes. Quand, en

 23   1991, la JNA est arrivée, vous avez vu arriver vos "amis serbes", qui eux

 24   habitaient à Nevesinje et Gacko, qui ont rejoint comme volontaires les

 25   unités de la JNA. C'est cela que vous nous dites ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, vous m'avez fort bien

 27   compris.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous ai bien compris. Ces volontaires qui

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  1   ont rejoint la JNA, ils venaient de Serbie ou de République de la Bosnie-

  2   Herzégovine socialiste ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ils étaient venus de la

  4   République de Bosnie-Herzégovine.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois qu'on a interrompu le

  7   témoin lorsqu'il répondait à ma question. Vous avez relaté de manière

  8   intéressante les événements qui se sont produits au départ, mais vous avez

  9   dit également que vous vouliez faire quelque chose pour défendre Mostar

 10   contre la JNA et contre les Serbes, je suppose. Est-ce que vous pourriez

 11   nous dire ce que vous avez fait, qui vous avez contacté, et quelles sont

 12   les étapes que vous avez prises ensuite ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'habitais à proximité de la maison de feu mon

 14   commandant Tihomir Misic. J'avais fait sa connaissance, et c'est de la

 15   sorte les choses ont commencé. En termes simples, c'est dans la maison que

 16   les gens s'entretenaient, avec ceux à qui ils faisaient confiance, sur la

 17   nécessité de s'organiser afin que l'on ne connaisse pas un sort analogue à

 18   celui de Ravno. C'est donc ainsi, sans armes, qu'en 1991, sous le mont Hum

 19   ainsi qu'à proximité du cimetière de Maslenica, on a montré des gardes pour

 20   veiller à ce que sur les collines avoisinantes il n'y ait mouvement

 21   d'effectifs vers notre localité, et éviter que ne survienne quelque chose

 22   de mal pour ce qui est de la population du cru.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 24   Maître Alaburic, c'est à vous.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 26   Q.  Monsieur Jasak, veuillez nous dire si c'est de la sorte qu'en fin 1991

 27   il y a eu organisation seulement de la part des Croates ou ce n'est pas le

 28   cas ?

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  1   R.  Se sont organisés de la sorte rien que les Croates, c'est-à-dire les

  2   Croates étaient les titulaires de l'organisation mise en place. Il y avait

  3   un grand nombre de Musulmans d'un côté, des Musulmans qui étaient venus de

  4   là, du même territoire.

  5   Q.  Parce que vous nous avez dit que ces groupes, par la suite, sont

  6   devenus le HVO au mois d'avril, date à laquelle il y a eu création du HVO,

  7   ces soldats musulmans étaient-ils à vos côtés au sein du HVO à ce moment-là

  8   ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Veuillez nous indiquer ce qui suit : maintenant, nous avons déjà un HVO

 11   en place. Est-ce que vous avez été organisés en tant qu'armée

 12   professionnelle avec obligation d'être disponible 24 heures sur 24, ou est-

 13   ce que vous vous êtes organisés autrement ?

 14   R.  Nous ne pouvions pas être organisés en tant qu'armée professionnelle 24

 15   heures sur 24, on a fonctionné par relèves. Les soldats, lorsqu'ils

 16   n'étaient pas à la ligne de front, ils étaient à proximité, dans leurs

 17   maisons ou dans celles des maisons où il y avait des gens à eux, c'est-à-

 18   dire les caporaux. Les caporaux savaient -- chaque caporal savait où

 19   étaient ces hommes et ils pouvaient donc très vite les rassembler.

 20   Q.  Au mois d'octobre 1992, lorsque vous étiez commandant du bataillon du

 21   HVO mentionné déjà auparavant, est-ce que vous étiez organisés par relèves

 22   ou pas ?

 23   R.  Pendant que j'étais commandant, le bataillon a fonctionné de façon

 24   organisée par équipes, par relèves.

 25   Q.  Monsieur Jasak, est-ce que vous savez nous dire ce que c'est que des

 26   unités militaires professionnelles aptes à intervenir en cas de manoeuvre ?

 27   R.  Oui, je le sais.

 28   Q.  Veuillez nous le dire, alors.

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  1   R.  Il s'agit là d'unités qui peuvent procéder à des activités d'attaques à

  2   l'extérieur du territoire dont elles proviennent.

  3   Q.  Dites-nous, les soldats faisant partie de ce type d'unités sont-ils ou

  4   étaient-ils utilisés 24 heures sur 24 ou pas ?

  5   R.  La règle veut que ce soit le cas.

  6   Q.  Monsieur Jasak, étant donné vos expériences et vos connaissances qui

  7   sont celles d'un officier, si vous souhaitiez organiser une armée, armée

  8   essentiellement de nature défensive, est-ce que vous auriez plus d'unités

  9   territoriales ou manoeuvrables ?

 10   R.  S'il faut se défendre, ce sont des unités territoriales qu'il nous

 11   faut.

 12   Q.  Et si vous --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à l'heure, tout au début, je pensais que Me

 14   Alaburic vous aurait posé la question, puis elle ne vous a pas posé la

 15   question. On découvre au fil de vos réponses que vous faisiez vos études à

 16   la faculté de mécanique, puis vous avez rejoint le HVO parce qu'il y avait

 17   création d'une unité territoriale. Bon. Ça, je peux comprendre. Mais ce que

 18   vous ne nous avez pas dit, pourquoi à l'époque vous n'êtes pas parti en

 19   Croatie pour entrer dans l'armée croate ? Vous n'allez le faire qu'en 1994.

 20   Donc si vous êtes resté, vous êtes resté pourquoi. Pour défendre la ville

 21   de Mostar ? Pour défendre les Croates ? Pour défendre ce qu'animait M. Mate

 22   Boban ? Pour défendre votre maison ? Moi, je sais pas. Pour quelle raison

 23   vous êtes resté ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, en 1991, j'étais en

 25   train de faire mes études à la faculté de Mostar, et j'ai vu tout cela. Et

 26   je suis resté avec ces gens, puisque mes parents vivent encore à ce jour en

 27   Bosnie-Herzégovine, donc je suis resté pour défendre la Bosnie-Herzégovine,

 28   les Croates et les Musulmans de Bosnie-Herzégovine parce que nous étions

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  1   organisés ensemble. Et en 1994, j'ai rejoint l'armée croate dû à un

  2   concours de circonstances parce que je n'ai pas réussi à trouver un

  3   logement à Mostar. Je me suis marié à l'époque, j'ai eu un enfant. Et comme

  4   ma situation financière était précaire, si je restais chez moi, ma sœur

  5   n'avait pas où dormir, n'avait pas de lit. Donc je suis parti de Zagreb, je

  6   me suis installé à Dubrovnik, et j'ai été logé dans un hôtel.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] En fait, je comprends la très grande erreur

  8   que j'ai faite au tout début, Monsieur le Président.

  9   Q.  Monsieur le Témoin, vous venez de nous dire que votre foyer familial se

 10   situe en Bosnie-Herzégovine. Et en fait, nous avions dit que vous étiez né

 11   en Croatie à Imotski. Alors expliquez-nous la différence.

 12   R.  Mais je suis né à Imotski, puisque le village de Sovici, où mes parents

 13   résident encore, fait partie de la municipalité de Grude en Bosnie-

 14   Herzégovine. Puisqu'il n'y avait pas de maternité dans notre municipalité,

 15   ma mère est venue en Croatie, à Imotski, pour me mettre au monde. Et en

 16   tant que bébé, elle est rentrée à la maison, j'ai été rapporté par elle à

 17   Sovici. Donc c'est ainsi que j'ai vécu jusqu'en 1994 en Bosnie-Herzégovine.

 18   Q.  Donc vous étiez citoyen de Bosnie-Herzégovine. Depuis votre naissance,

 19   c'est là que vous étiez scolarisé, pendant le primaire, le secondaire ?

 20   R.  Oui, tout à fait. J'ai fait l'école primaire à Sovici. Et l'école de

 21   lycée technique de Grude et la faculté de mécanique à Mostar.

 22   Q.  Et pour que ce soit tout à fait clair, de quelle Sovici nous parlons ?

 23   De Sovici près de Grude ou Sovici près de Jablanica ?

 24   R.  Sovici, municipalité de Grude.

 25   Q.  Très bien. Reprenons nos unités territoriales et propres à manœuvrer.

 26   Je souhaite que nous examinions le document P907. C'est un projet de

 27   rapport pour l'année 1992. L'auteur en est le chef de l'état-major

 28   principal. Nous avons déjà eu l'occasion à de nombreuses reprises de voir

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  1   ce document. Pour commencer, examinons le point 3.

  2   Monsieur Jasak, au point 3, nous voyons que l'état-major, à la fin de

  3   l'année 1992, compte 30 % de recomplètement et le commandement de la zone

  4   opérationnelle de l'Herzégovine du sud-est, basée à Mostar, a 95 % de

  5   recomplètement. Alors, Monsieur Jasak, d'expérience et de connaissances,

  6   est-ce que vous seriez en mesure de nous commenter ces chiffres ?

  7   R.  Oui, je suis en mesure de le faire, puisqu'à l'époque je me trouvais à

  8   Mostar. Ainsi, l'état-major principal avait 30 % de recomplètement. La

  9   raison en est que le Conseil de Défense croate accusait un très grand

 10   déficit sur le plan des effectifs à des échelons supérieurs. Si on

 11   cherchait à avoir 100 % de recomplètement au niveau du commandement

 12   Suprême, c'est à des niveaux inférieurs qu'on affaiblirait les structures

 13   de commandement et on ne serait pas en mesure de mener des actions de

 14   combat et de défense.

 15   Q.  Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il était important d'avoir des

 16   hommes placés dans des commandements à des échelons inférieurs ?

 17   R.  C'était très important, et la raison en est qu'on ne voulait pas

 18   permettre aux forces de la Republika Srpska de retourner et de revenir à

 19   Mostar. Donc c'était essentiel pour pouvoir défendre les habitants de

 20   Mostar.

 21   Q.  Monsieur Jasak, d'après vos connaissances, d'après votre expérience, si

 22   ce sont avant tout les actions de défense qu'on souhaite mener, est-ce

 23   qu'il est nécessaire de bien connaître la situation qui prévaut sur le

 24   terrain et avoir la possibilité de réagir rapidement suite à des actions

 25   menées par l'adversaire ?

 26   R.  Pour pouvoir avoir du succès au niveau de la défense, il est très

 27   important de bien connaître le terrain. Les commandants de ces unités

 28   étaient donc des gens du cru.

Page 48486

  1   Q.  Dites-nous, ce type de mission de défense, est-ce qu'on est plus propre

  2   à les mener à bien si on est un commandement du coin, du cru, ou bien est-

  3   ce qu'un Grand état-major qui gère la totalité du territoire sera plus apte

  4   à le faire ? Bien. Je voudrais corriger le compte rendu d'audience. Je n'ai

  5   pas dit la population locale, j'ai dit le commandement. Merci.

  6   R.  Mais il ne fait aucun doute que c'est un commandement local qui sera

  7   plus à même à bien s'acquitter de cette mission, parce tous ces hommes

  8   connaissent les problèmes de chacun d'entre eux. Donc au moment où on a

  9   rédigé ce rapport, à ce moment-là, on fonctionnait essentiellement grâce à

 10   des accords qu'on passait et grâce à la persuasion.

 11   Q.  Monsieur Jasak, on n'a pas compris de quel commandement vous avez

 12   parlé.

 13   R.  Le commandement local, c'est ce que j'ai dit.

 14   Q.  Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît, il y a toujours une erreur.

 15   R.  Le commandement local.

 16   Q.  Dans la suite du rapport, après avoir passé en revue les différentes

 17   brigades du HVO par municipalités, il est dit qu'en tout 45 000 hommes se

 18   trouvent dans les unités du HVO, et que dans les unités professionnelles on

 19   en compte 855. Alors ces chiffres, que vous permettent-ils de conclure,

 20   Monsieur Jasak, le HVO était-ce une armée défensive ou non ?

 21   R.  Exclusivement défensif, c'était ça la nature du HVO.

 22   Q.  Prenons la phrase écrite à la main. Il est dit que par la création des

 23   brigades on a rayé tous les états-majors municipaux, ce qui a permis de

 24   rehausser la qualité du commandement, et cela a augmenté la mobilité des

 25   unités. Pourriez-vous nous dire à quel moment il y a eu cette

 26   restructuration des états-majors municipaux en brigades ?

 27   R.  Cela se situe fin 1992. C'est à ce moment-là que les états-majors

 28   municipaux ont été restructurés pour donner naissance à des brigades.

Page 48487

  1   Q.  A la fin du rapport, il est dit qu'en créant ces forces armées en HZ

  2   HB, le peuple croate s'est défendu soi-même et a pu défendre la majeure

  3   partie des Musulmans. Alors maintenant, j'aimerais connaître votre avis

  4   personnel. Monsieur Jasak, estimiez-vous que le HVO défendait tant la

  5   population croate que la population musulmane ?

  6   R.  J'estimais que le HVO défendait à la fois la population croate et

  7   musulmane ainsi que tous les autres peuples sur ce territoire, tous les

  8   peuples qui n'avaient pas une attitude hostile vis-à-vis de nous.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Colonel, je reviens sur la question des chiffres. A

 10   la page 56, ligne 2, mon collègue, le Juge Trechsel avait abordé ce

 11   problème. Mais moi, je veux être clair parce que ça me paraît important.Il

 12   y a dans les éléments de preuve un document émanant du général Petkovic,

 13   lui-même, qui indique qu'il y avait 85 officiers, 85. Alors est-ce que ce

 14   nombre de 85 doit se comprendre comme 85 officiers qui vont diriger les 45

 15   000 membres du HVO, ou bien ces 85 officiers parmi les professionnels, qui

 16   sait, au nombre de 900 ou 850 mais qu'il y avait aussi d'autres officiers

 17   eux, non professionnels. Alors mon souci est de savoir, quand le général

 18   Petkovic dit qu'il y avait 85 officiers, est-ce qu'il englobe tous les

 19   officiers du HVO, ou bien uniquement les officiers

 20   professionnels ? Etant précisé que dans ce cas, vous, vous ne seriez pas un

 21   officier professionnel car vous n'avez pas fait l'école ad

 22   hoc ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il s'agit

 24   ici de 85 officiers et 91 sous-officiers, et le reste des soldats, ce sont

 25   les professionnels en tout. Ce sont les chiffres donc pour l'unité de

 26   professionnels. Et les 85 officiers, ce n'était pas des officiers

 27   instruits, ils s'étaient simplement trouvés dans cette unité

 28   professionnelle. Il y en avait qui étaient formés, mais très peu d'entre

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  1   eux dans l'ex-JNA, qui étaient passés de la JNA, puis très peu qui avaient

  2   fait les écoles d'officiers de réserve de la JNA.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour que je comprenne bien, vous, vous êtes dans le

  4   chiffre 85 ou vous n'y êtes pas ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne figure pas parmi les 85, puisque je

  6   ne faisais pas partie de l'unité professionnelle.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous ne figurez pas dans le chiffre. Très bien.

  8   A votre avis, cette armée du HVO, de 45 000 hommes, il y avait, d'après

  9   vous, combien d'officiers, à savoir officiers professionnels et officiers

 10   non professionnels, il y en avait combien ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, il n'y avait pas d'officiers

 12   pour qui on pourrait dire que c'était leur occupation principale, qui

 13   étaient employés et qui avaient un livret de travail. Tous ces gens,

 14   c'étaient des volontaires. Parmi ces officiers, dans ces 45 000 hommes, le

 15   chiffre que l'on lit ici, là, vous avez la population du cru, et des gens

 16   qui se sont distingués et ont montré qu'ils étaient capables de diriger.

 17   Ils avaient peut-être 50 ou 100 hommes au départ, sous eux, ils se sont

 18   montrés capables et courageux, on leur a confié des postes d'officiers. Ce

 19   n'étaient pas des gens qui avaient fait des écoles, ils se sont montrés sur

 20   le tas.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous ne répondez pas, mais ma dernière

 22   question va vous permettre de répondre. Sur les 45 000, le corps

 23   d'encadrement qui normalement dans une armée ce sont les officiers, voire

 24   les sous-officiers, le corps d'encadrement était constitué de combien de

 25   personnes, 100, 200, 500, 1 000, combien de personnes encadraient le soldat

 26   de base ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Les soldats étaient encadrés par leurs

 28   commandants qui, pour certains, sont devenus officiers. Par exemple,

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  1   j'étais officier, mais je n'étais pas un officier sorti d'école. J'étais

  2   commandant et officier, et j'étais à la tête d'un bataillon, mais je

  3   n'avais pas fait d'école militaire. Mais comme je me suis distingué pendant

  4   la guerre, après la mort de Tihomir Misic, j'ai été nommé à son poste.

  5   Donc, je peux vous raconter ma propre expérience. Mais très peu d'hommes

  6   étaient instruits, ils venaient de l'ex-JNA, et ils se sont trouvés dans

  7   nos unités, mais très peu. C'étaient des hommes qui, pour le reste, se sont

  8   distingués sur le terrain.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Je dois en conclure que vous ne pouvez pas répondre

 10   exactement à ma question. Vous pouvez parler de votre cas personnel, mais

 11   moi, quand je veux savoir s'il y a 100, 500 ou

 12   1 000 officiers, vous ne pouvez pas me répondre de manière précise. J'en

 13   prends note.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aimerais savoir si tout s'est

 15   passé correctement lors de passage. Lorsque le Président de la Chambre vous

 16   a posé des questions à propos des 45 000 hommes, page 58, ligne 10 -- non,

 17   il s'agissait d'une question qui avait été posée plus haut. Page 58, ligne

 18   2, ainsi que la ligne suivante. Vous dites :

 19   "Vous voyez ce chiffre de 45 000 personnes, c'étaient des personnes

 20   qui venaient du terrain, qui avaient montré qu'ils avaient des qualités de

 21   chefs et qui avaient sous leurs ordres dix, 50 ou 100 hommes dès le

 22   départ…" et cetera.

 23   Donc, au départ, on parle de 45 000 hommes, et ensuite, vous nous

 24   dites qu'il y avait des chefs qui avaient sous leurs ordres une centaine

 25   d'hommes de leurs hommes. En fait, c'est une erreur là. Je pense qu'il y a

 26   une erreur de traduction peut-être ou une erreur dans votre réponse. Qui

 27   sont ces personnes qui viennent du terrain, qui sont-ils exactement ? A qui

 28   faisiez-vous allusion lorsque vous avez parlé de ces personnes ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, les 45 000 hommes

  2   comprennent les officiers, les sous-officiers et les soldats. Les

  3   officiers, c'étaient des commandants et des membres du commandement des

  4   brigades, membres du commandement des bataillons. Ce sont eux qui ont été

  5   placés à la tête des compagnies et des sections. Imaginons une section qui

  6   a 30 ou 35 hommes, elle avait un chef de section qui était un officier,

  7   mais ce n'était pas un officier sorti de l'école militaire. Il s'est montré

  8   bon sur le terrain et on a jugé qu'il était capable d'agir sur le plan

  9   territorial, qu'il était capable de commander une unité et de préserver une

 10   ligne qui lui a été confiée. Donc, il pouvait s'acquitter de cette mission,

 11   et donc il était considéré comme officier.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. C'est clair

 13   maintenant. Mais je pense que la référence aux cadres a été perdue à un

 14   moment ou à un autre.

 15   Mais regardez à nouveau le document qui nous intéresse. Le brigadier

 16   Petkovic ici fait rapport de la chose suivante : 855 membres des unités de

 17   l'armée professionnelle, 85 officiers, 91 sous-officiers et 607 soldats de

 18   base. Lorsqu'on ajoute tout cela, on arrive à 846 hommes. Donc, je pense

 19   que le calcul est un peu rapide ou superficiel en tout cas. Vous pouvez

 20   nous expliquer pourquoi on arrive à ces chiffres ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, dans l'original, le dernier

 22   chiffre se lit mal, 670 et quelques. Donc, je vais faire l'addition. Je

 23   vais essayer.

 24   Disons, si ce dernier chiffre était un neuf, l'addition serait bonne.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui. Certes, mais ça ne ressemble

 26   pas du tout à un neuf, ça ressemble plutôt au bas d'un huit. Enfin, c'est

 27   sans doute une négligence. D'après vous, il faut lire le document de la

 28   façon suivante : les 855 sont composés de 670 et quelques soldats de base,

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  1   91 sous-officiers et 85 officiers.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela, Monsieur le Juge.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation]

  5   Q.  Document suivant, s'il vous plaît, 4D 1463. C'est une information du

  6   chef de la direction du SIS à l'adjoint du ministre de la défense chargé de

  7   la sécurité. Par cette information qui date du mois de janvier 1994, et

  8   nous savons où vous vous trouviez à ce moment-là, je vais vous interroger

  9   au sujet de la période que vous avez passé au HVO. Donc, on annonce une

 10   protestation pacifique de la part des soldats qui demandent des

 11   explications sur leurs soldes, sur les bulletins de paie et sur le statut

 12   de la ville de Mostar. Nous sommes en janvier 1994, et nous sommes ici face

 13   à des protestations de soldats. Est-ce que cela s'est déjà produit à un

 14   moment où vous étiez dans les rangs du HVO ?

 15   R.  Oui, ce type de situations s'est produit.

 16   Q.  Comment avez-vous procédé pour régler ? Est-ce que vous avez donné des

 17   ordres et est-ce que vous avez forcé les gens à se conformer à des ordres

 18   ou bien est-ce que vous avez procédé d'une autre manière ?

 19   R.  Dans ce type de situations, il y avait une seule possibilité, à savoir

 20   se rendre parmi les hommes et leur parler et chercher à les persuader que

 21   leur manière de faire n'est pas la bonne.

 22   Q.  Dites-nous, les commandants militaires essayaient-ils de procéder par

 23   la recherche d'accord et par la persuasion, je parle là des commandants du

 24   HVO ?

 25   R.  Jusqu'au mois d'octobre 1992, donc où j'étais commandant de bataillon,

 26   il m'est arrivé de faire face à ce type de situations. La seule chose qui

 27   était possible à ce moment-là, c'était de leur parler, de chercher à les

 28   convaincre, à les persuader de se mettre d'accord. Et puis, j'ai entendu

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  1   dire de la part de mes camarades qui sont restés à occuper des postes de

  2   commandements après mon départ, qu'ils ont rencontré des situations

  3   comparables.

  4   Q.  De ce point de vue, que pourriez-vous nous dire ? Au sein du HVO, en

  5   réalité, était-il possible de commander de manière efficace ?

  6   R.  Non. Au sein du HVO à l'époque, il n'y avait pas la possibilité de

  7   commander efficacement.

  8   Q.  4D 1328 à présent, s'il vous plaît.

  9   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je pense que le témoin a soulevé un

 10   point important lorsqu'il a dit, et je le cite :

 11   "Au sein du HVO à l'époque, il n'y avait pas de possibilité d'exercer un

 12   véritable commandement efficace."

 13   Bien sûr, la question était assez générale, question de Me Alaburic, de ce

 14   fait la réponse était aussi assez vague. Mais est-ce que l'on peut en

 15   déduire qu'au cours de toute cette période, donc pendant toutes les années

 16   où le témoin se trouvait là-bas, peut-on en déduire qu'il n'y avait pas de

 17   possibilité d'exercer un commandement effectif ? J'aimerais savoir si votre

 18   réponse s'applique uniquement à une période de temps bien précise ou à la

 19   totalité du temps que vous avez passé au sein du HVO ? Donc, si vous voulez

 20   faire référence à un moment bien précis, faites-le nous savoir.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé. Je présente mes excuses au Juge

 22   Prandler, mais j'aimerais quand même savoir quelle est la base sur laquelle

 23   se fonde le témoin pour répondre. Je suis tout à fait d'accord avec ce que

 24   vient de nous dire d'ailleurs M. le Juge Prandler. Et là, il était plus

 25   rapide que moi pour une fois.

 26   Mais j'aimerais savoir exactement sur quoi se base le témoin. En

 27   fait, il était uniquement commandant de bataillon à un niveau local. Il

 28   avait 23 ou 24 ans, pas plus. Je le respecte, certes, mais je pense qu'il

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  1   nous donne des généralisations un peu importantes par rapport à sa position

  2   qui était quand même assez subalterne. Je me rappelle tout à fait la

  3   discussion qu'a eue le Juge Trechsel avec le témoin de la semaine dernière

  4   qui disait qu'il pouvait parler au nom des officiers du HVO.

  5   Donc, je m'excuse auprès du Juge Trechsel d'avoir interrompu, mais

  6   j'aimerais, avant qu'il réponde à la question, savoir exactement sur quoi

  7   le témoin se base pour nous donner ses réponses. Si j'étais un jeune

  8   officier comme cette personne, à 24 ans, je ne pense pas que je pourrais

  9   dire que le commandement du HVO en Herceg-Bosna n'a jamais pu exercer un

 10   contrôle efficace. Ça me permet quand même une généralisation un peu

 11   abrupte, un peu rapide.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 13   j'estime que mon estimé confrère, M. Scott, a réagi d'une manière qui

 14   m'incite à réagir à mon tour. Penchons-nous sur ses réactions

 15   d'aujourd'hui, et nous verrons bien qu'il n'y a rien là-dedans qui fait

 16   partie des objets légitimes de ses réactions. Ici, il fournit son point de

 17   vue et ses arguments.

 18   Mais je me permets de signaler que lorsque j'objecte pour la

 19   troisième fois suite à des questions du Procureur, on me reproche de faire

 20   obstacle à la bonne administration de la justice et on me précise que les

 21   Juges professionnels devant lesquels je m'exprime maîtrisent bien la

 22   situation. En somme, on me dit, Madame Alaburic, arrêtez de vous comporter

 23   ainsi. Et j'estime que nous sommes arrivés au point où il convient de

 24   préciser à l'intention de M. Scott, de ses droits et ses obligations, et

 25   s'il a une objection dans ce cadre-là, qu'il le fasse, et il n'y a pas lieu

 26   de présenter des arguments en long et en large, puisque nos Juges

 27   professionnels comprennent parfaitement les objections.

 28   Par ses interventions étendues, il cherche peut-être à faire

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  1   obstruction à mon interrogatoire principal, et je lui signale d'emblée que

  2   je vais pas perdre les nerfs, je sais très bien ce que je veux demander à

  3   ce témoin.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak.

  5   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  6   Juges, c'est un commandant qui commande un bataillon, je tiens à le

  7   préciser. C'est une unité plus importante, et ce n'est pas un grade de

  8   sous-officier, c'est un grade d'officier supérieur celui de commandant. Et

  9   c'est une partie d'une brigade, donc d'une grande unité. Donc, M. le

 10   Procureur s'est mal exprimé lorsqu'il a dit qu'il s'agit là d'un sous-

 11   officier. Ce n'est pas exact.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je serai rapide, Monsieur le Président. Une

 14   base -- je ne souhaite pas faire d'obstruction, absolument pas, et je pense

 15   qu'au cours des trois ans et demi, vous avez bien remarqué. Je ne veux pas

 16   faire d'obstruction, mais ce qui m'intéresse, c'est le Règlement de

 17   procédure et de preuve. Alors, je pense que M. -- je n'ai pas à dire ce qui

 18   se passe au Royaume-Uni, mais je pense qu'un témoin, lorsqu'il témoigne,

 19   doit nous donner les bases sur lesquelles il se fonde pour parler. Je crois

 20   que c'est la base, c'est le premier cours que l'on apprend en droit, en

 21   fait. Il faut avoir une connaissance quelconque et personnelle pour qu'on

 22   puisse établir une base. Enfin, pour en revenir à l'objection du conseil,

 23   aux Etats-Unis, on dirait que c'est une objection basée sur le manque de

 24   base. C'est tout.

 25   M. STEWART : [interprétation] Je peux vous dire exactement ce qui se passe

 26   maintenant au Royaume-Uni, car aux Etats-Unis, ce n'est pas tout à fait

 27   pareil. Mais ce qui est important, c'est que M. Scott a passé presque une

 28   page de transcript à faire des plaidoiries, plaidoiries qu'il devrait faire

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  1   dans le cadre de son mémoire en clôture. D'après lui, il considère que le

  2   témoin n'est pas crédible, parce qu'il n'a pas l'autorité suffisante. Peut-

  3   être, c'est ce qu'il pense. Regardez ce qu'il a dit, relisez ses mots. Je

  4   pense qu'il devrait dire tout cela dans le cadre de son contre-

  5   interrogatoire s'il considère que le témoin n'avait pas assez d'autorité à

  6   l'époque ou le témoin manque d'expérience, et cetera. Il n'aura qu'à le

  7   faire valoir dans le cadre de son contre-interrogatoire. Là, il utilise les

  8   objections à mauvais escient.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Je voudrais répondre rapidement, parce que là

 10   on met un peu la charrue avant les bœufs quand même, me semble-t-il. Avant

 11   que le témoin ne puisse témoigner, il faut savoir sur quelles bases il se

 12   fonde pour parler. Pourquoi un témoin viendrait-il, que ce soit dans un

 13   système romano-germanique ou dans un autre système, pourquoi un témoin

 14   viendrait déposer pendant des heures pour finalement que l'on sache, Oui,

 15   ça fait trois jours que je parle, mais en fait, il n'y a aucune base. Tout

 16   ce que j'ai dit n'a aucune base. Non, il faut commencer par le

 17   commencement. Il faut établir la base, et ensuite, on passe des heures à

 18   discuter de ceci. Et je fais une objection sur la base du manque de

 19   fondement. Rien de plus.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, de

 22   répliquer à cette objection formulée par M. Scott. Je vais être très

 23   personnelle. J'ai un sentiment que mon confrère, M. Scott, n'est pas

 24   suffisamment concentré et qu'il ne suit pas l'interrogatoire au principal,

 25   parce qu'une fois qu'on a montré ce document au témoin, on lui a posé une

 26   question qui est celle de savoir si des situations similaires, lorsqu'il

 27   fallait organiser quelque chose aux soldats, c'était le cas lorsqu'il

 28   faisait partie du HVO à l'époque encore. Et le témoin a dit qu'il y a eu

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  1   des situations où il a fallu convaincre les gens, se concerter, et le fait

  2   de rien que de donner des ordres n'aurait pas porté de fruit sinon. Et là,

  3   le dilemme ne se pose pas. Donc, je demanderais à M. Scott de lire cette

  4   partie du PV, et je crois qu'il n'y aura aucun malentendu entre nous.

  5   Alors, de là à savoir si ça nous convient ou si ça ne nous convient

  6   pas cette réponse du témoin, ça, c'est une question qui nécessite des

  7   analyses plus grandes.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est vous qui avez la solution. Quand la Défense

  9   vous pose une -- vous m'entendez ? Mon Colonel, je disais que c'est vous

 10   qui avez la solution. Quand Me Alaburic vous pose une question, de deux

 11   choses l'une : ou vous pouvez répondre à sa question ou vous ne pouvez pas.

 12   Si vous ne pouvez pas, vous lui dites : Je ne peux pas parce que votre

 13   question est trop générale, je suis dans l'incapacité de répondre. Mais si,

 14   en revanche, vous pouvez répondre, à ce moment-là, dites par le menu, par

 15   le détail pourquoi vous pouvez répondre. Parce que vous étiez sur place,

 16   parce que vous avez eu connaissance de l'événement, du document, vous avez

 17   connu un événement similaire pour témoigner que vous êtes compétent et

 18   capable de répondre à la question. Ce qui évitera après aux Juges de vous

 19   poser des questions pour essayer d'y voir beaucoup plus clair.

 20   Donc, c'est vous qui avez la solution. En fonction de vos réponses, le

 21   Procureur fera pas d'objection parce qu'il comprendra que vous connaissez

 22   la question. Par exemple, quand il y a eu les questions sur les

 23   communications par paquets, si vous aviez dit à ce moment-là : Les

 24   communications par paquets, je les connais parce qu'en tant que commandant

 25   d'un bataillon, je les ai utilisées. C'était terminé. Tout le monde savait.

 26   Ou vous dites : En tant que commandant d'un bataillon, j'avais X hommes

 27   sous mon autorité, donc je sais de quoi je parle. Et à ce moment-là, tout

 28   le monde sait qu'on a face à nous un commandant de bataillon. Parce que la

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  1   difficulté, c'est que nous savions qu'à l'époque vous aviez 24 ans.

  2   Maintenant, vous en avez beaucoup plus, hélas, mais vous êtes colonel, et

  3   on peut se demander si les connaissances que vous avez maintenant viennent

  4   des connaissances postérieures ou antérieures, et ce qui nous intéresse,

  5   nous, c'est de savoir à l'époque ce que vous saviez, ce que vous avez fait.

  6   Est-ce que vous avez compris ce que je vous demande ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je suis tout à fait

  8   conscient de tout ceci. Et je peux expliquer davantage encore. J'ai dit au

  9   sujet de ce document qui est-ce qui figure, que j'avais des problèmes

 10   similaires dans mon unité à moi lorsque je la commandais, cette unité. Et

 11   je peux dire que cette unité avait plus de 400 soldats et qu'elle tenait

 12   l'une des lignes les plus longues dans Mostar au début de la guerre. Ce qui

 13   signifie qu'il s'agissait de l'entrée de la ville de Mostar, en venant de

 14   Siroki Brijeg sur les hauteurs d'Ilici, depuis Hum, jusqu'au vieux pont, y

 15   compris le vieux pont de Mostar. C'était la ligne la plus longue à l'époque

 16   des combats contre l'armée de la Republika Srpska en 1992.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous nous dites, moi, en 1992, je

 18   commande 400 hommes et nous sommes face à la VRS et notre ligne de front

 19   allait jusqu'au vieux pont partant de la localité dont je ne peux pas vous

 20   donner le nom mais qui est Ilici, je crois. Voilà. Donc vous étiez à la

 21   tête d'une unité de 400 hommes et vous avez face à vous les Serbes, et ça

 22   allait jusqu'au vieux pont ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Bien. On y voit plus clair, mais peut-être que

 25   Me Alaburic aurait dû vous faire préciser cela, ce qui aurait évité des

 26   interventions, tous azimuts.

 27   Oui, Monsieur Prlic.

 28   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] J'ai une phrase simplement à dire. Je

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  1   n'ai pas entendu la question du Juge Prandler.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, c'est ce que je voulais

  3   rappeler. Je crois que le témoin devrait répondre à la question du Juge

  4   Prandler, et mon collègue aura peut-être l'amabilité de répéter sa

  5   question, ensuite j'aimerais poser une question moi-même.

  6   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci à tous, y compris M. Prlic. Je

  7   n'ai plus devant moi la partie du compte rendu d'audience pertinente, mais

  8   ma question est la suivante : j'aimerais savoir sur quelle base le témoin

  9   déclare qu'il n'y avait pas de contrôle efficace au sein du HVO à cette

 10   époque. Le Juge Antonetti a mentionné le fait que nous connaissons, à

 11   savoir qu'il était commandant d'une unité de 400 hommes et qu'il avait été

 12   donc recruté, et cetera. Mais il faudrait, je pense, déterminer les raisons

 13   pour lesquelles le témoin déclare qu'il n'y avait pas de contrôle efficace

 14   au sein du HVO durant la période où il était commandant de ce bataillon.

 15   C'est ma question.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, si vous me permettez

 17   de vous le rappeler, comme vous n'aviez pas le PV, le compte rendu sous les

 18   yeux. Nous étions en train de parler de commandement, et non pas de

 19   contrôle.

 20   M. STEWART : [interprétation] Nous avons le compte rendu, donc j'aimerais

 21   savoir si on ne pourrait peut-être pas relire au témoin la question qui a

 22   été posée. Parce que la question au départ avait été très claire, mais j'ai

 23   la question que vous avez posée à l'écran.

 24   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, merci, Maître Stewart. J'ai

 25   également la question devant moi.

 26   M. STEWART : [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Et je vais donc répéter ce que j'ai

 28   dit au départ.

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  1   "Est-ce que l'on peut partir du principe que durant toute la période et

  2   durant toutes les années où le témoin a été présent, est-ce qu'il pense

  3   qu'au sein du HVO il n'y avait pas vraiment la possibilité d'exercer un

  4   commandement efficace ? Est-ce que ceci est valable pour toute la durée, ou

  5   est-ce que cela ne portait que sur une période plus courte durant laquelle

  6   il n'y avait pas de

  7   contrôle ?"

  8   Voilà donc la question que j'avais posée. Et maintenant c'est au témoin de

  9   répondre à cette question.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, pendant toute la période

 11   de temps où j'étais dans ce HVO il en a été ainsi. J'ai précisé aussi que

 12   j'ai eu ce type d'expérience en particulier dans mon bataillon. Je peux

 13   approfondir, étoffer. Par exemple, en 1992, au mois de septembre, les

 14   soldats se sont rassemblés au centre culturel. Ils ont demandé à ce que

 15   vienne leur commandant. Ils voulaient s'entretenir avec lui pour savoir

 16   pourquoi il n'y avait pas ceci ou il n'y avait pas cela, les problèmes

 17   qu'ils rencontraient. Moi, je n'avais pas d'autre choix que d'y aller et de

 18   m'entretenir avec eux. Je leur ai dit : Ecoutez, les gars, il faut que nous

 19   nous défendions. Parce que si l'ennemi entre dans la ville, il n'y aura

 20   rien, nous ne serons pas parmi les vivants. Et si j'avais donné l'ordre de

 21   faire ceci ou cela, ça n'aurait rien donné. Mon unité se serait décomposée,

 22  au contraire. Par la suite dans cette période courant jusqu'au 1er septembre

 23   1993, lorsque j'étais sur place en m'entretenant avec mes collègues qui,

 24   par la suite, ont commandé ces bataillons-là, j'ai appris qu'il y avait eu

 25   des problèmes similaires. Et c'est de là que viennent les connaissances qui

 26   sont les miennes.

 27   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Jasak. Je

 28   ne suis pas convaincu, je dois dire, que cet exemple précis que vous venez

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  1   de soulever et que vous avez expliqué constitue une base suffisante pour ce

  2   commentaire général ou cette réponse générale consistant à dire que durant

  3   toutes les années durant lesquelles vous avez combattu ou vous avez officié

  4   en Bosnie-Herzégovine ou en Herzégovine, il n'y avait aucun contrôle réel

  5   réalisé par le HVO. Et je ne veux pas prononcer de jugement quant à votre

  6   position, mais je dois dire que je ne suis pas convaincu que durant ces

  7   années il n'y avait pas du tout de contrôle efficace. Ça aurait été un

  8   désastre pour le HVO dans son ensemble si votre déclaration s'avérait

  9   exacte. Bien sûr, tout dépendra de la suite de cette déposition, et je m'en

 10   arrête là pour l'instant.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Scott a voulu tester votre connaissance. Voilà un

 12   document, 4D 1328, qui est daté du 22 décembre 1993. A l'époque celui qui

 13   est le chef d'état-major c'est Ante Roso. Ce n'est plus le général

 14   Petkovic, ce n'est plus le général Praljak. C'est M. Roso. Ce colonel Ante

 15   Saskor, que je ne connais pas, que j'ai jamais vu, envoie une lettre de

 16   démission. Quand un colonel démissionne, c'est que l'affaire est grave,

 17   donc il faut essayer de savoir pourquoi il démissionne. Il développe trois

 18   arguments : il est incapable et fatigué. Bon. C'est vrai on peut

 19   démissionner parce qu'on est incapable et fatigué. Ça arrive. Mais plus

 20   intéressant pour moi, c'est le paragraphe numéro 2, où là il fait mention

 21   de l'existence des autorités locales et d'un groupe informel d'hommes de

 22   pouvoir qui empêchent en quelque sorte la brigade et son commandant à faire

 23   leur tâche. Et au paragraphe 3, il va un peu plus loin dans le détail en

 24   estimant que ce groupe d'hommes ce sont des profiteurs de la guerre et

 25   qu'il y a des rivalités locales.

 26   Alors pour rejoindre la question de mon collègue sur le commandement,

 27   moi, ce qui est important est de savoir si vous avez rencontré, vous, dans

 28   l'exercice de votre commandement, les mêmes obstacles que l'on voit dans ce

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  1   document, à savoir qu'une autorité municipale locale empêche un officier

  2   d'exercer sa tâche. C'est ça qui est important. Parce que ce document

  3   montre qu'il y a un problème. Vous n'étiez pas là la semaine dernière, mais

  4   la semaine dernière il y a un document également qui montre que plusieurs

  5   officiers ont manifesté le fait qu'il y avait des problèmes au sein du HVO,

  6   et donc quand je mets en corrélation ce document avec le document qu'on a

  7   vu la semaine passée, je peux peut-être en tirer une conclusion provisoire

  8   que l'exercice du commandement n'était pas chose aisée, nonobstant ce que

  9   peut en penser mon collègue, mais ça, cela n'engage que lui, moi, cela ne

 10   m'engage pas.

 11   Alors comme vous, vous étiez un acteur du terrain, est-ce que la

 12   situation décrite, vous l'avez vécue ou bien vous n'en savez rien, et à ce

 13   moment-là vous dites à Me Alaburic : Moi, je ne peux pas répondre sur ce

 14   document.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, s'agissant de ce

 16   document, s'il le faut je peux être plus concret. J'ai vécu des choses

 17   similaires. Par exemple, on parle d'hommes puissants au niveau du cru. Mais

 18   ces hommes puissants au niveau du cru, ce n'est pas forcément des membres

 19   de l'autorité municipale. Ça peut être des patrons variés, patrons de café,

 20   qui disposent de moyens financiers considérables.

 21   Et moi, j'ai eu à connaître chose semblable. J'ai eu un problème de

 22   cette nature en 1992 au niveau du bataillon. Il n'y avait pas suffisamment

 23   d'uniformes, et les uniformes qu'on avait étaient plutôt usés. En termes

 24   simples, puisqu'on avait mobilisé dans les rangs du bataillon, un patron

 25   pour se venger, il s'est procuré pour 15 hommes des uniformes américains,

 26   qui étaient les plus modernes de l'époque. Il leur a fourni de la bière, un

 27   barbecue, c'était la grande fête générale. Lorsqu'ils sont revenus dans

 28   l'unité, en plus ils avaient des lunettes de soleil, comme des m'as-tu-vu,

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  1   ça eu une influence négative sur les autres. Parce que les autres étaient

  2   sur la ligne, ceux-ci qui venaient d'arriver l'ont un peu été, puis un peu

  3   ne l'ont pas été. Comment avez-vous fait pour les équiper de la sorte. Donc

  4   ça a constitué une difficulté majeure, en attendant que je réussisse à

  5   convaincre les autres, pour dire que indépendamment de la qualité des

  6   uniformes qu'ils avaient reçus, qu'il fallait qu'ils les enlèvent.

  7   Autre exemple. Un autre collègue à moi qui fait partie de ces unités,

  8   de nos jours encore, lorsqu'on l'a proposé aux fonctions de commandant

  9   d'une brigade, ils s'étaient rassemblés là, enfin, il était venu là des

 10   gens d'un autre village pour dire qu'à la tête de cette brigade à eux, il

 11   fallait qu'il y ait un commandant issu de leur village. Peu importe de

 12   savoir que l'intéressé avait eu une école d'officiers de réserve de la JNA

 13   et que le premier, celui qu'il voulait avait un peu plus que les classes

 14   primaires de l'école primaire. Donc c'est à peu près ce que je pourrais

 15   vous dire en guise d'illustration.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous

 17   prie de m'excuser. Monsieur le Témoin, au départ vous nous avez dit qu'il

 18   n'était pas possible d'exercer un commandement efficace au sein du HVO.

 19   Maintenant, vous venez de nous parler d'une anecdote où vous avez dit aux

 20   soldats de ne pas utiliser des uniformes qu'ils ne devaient pas porter, et

 21   vous y êtes arrivé, donc cela signifie qu'il y avait, en fait, un

 22   commandement efficace, n'est-ce pas ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ce n'était pas un

 24   commandement effectif, c'était le fruit d'une longue session de discussions

 25   et de tentatives de les convaincre. Si j'avais donné l'ordre tout

 26   simplement, je suis sûr que ces soldats, je ne les aurais plus revus du

 27   tout.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Jasak, dites-nous maintenant, qu'est-ce que vous pouvez faire

  3   s'agissant d'un soldat au sujet duquel vous auriez, par exemple, dit :

  4   Enlève cet uniforme, mets-en un autre. Et s'il dit non et s'il s'en va,

  5   qu'est-ce que vous pouvez faire ?

  6   R.  Je peux le démobiliser, mais de ce fait il se trouverait récompensé.

  7   Les autres pourraient penser : Mais pourquoi est-ce que je ne ferais pas

  8   chose semblable, pour ne pas avoir à aller à la première ligne de front ?

  9   Q.  Mais dites-nous, si vous aviez quand même décidé de démobiliser

 10   quelqu'un, est-ce qu'à sa place il vous était facile de mobiliser quelqu'un

 11   d'autre ?

 12   R.  Très difficile à faire, parce qu'il y a eu une mobilisation générale,

 13   et on avait ce qu'on avait. Il y en a eu pas mal qui ont fui l'obligation

 14   militaire pour aller vers le littoral ou vers des pays tiers.

 15   Q.  Je remercie M. le Juge Antonetti d'avoir procédé à l'interrogatoire

 16   pour ce qui est du 4D 1320, je n'ai donc plus besoin de poser des questions

 17   supplémentaires au sujet de ce document, et je vous renvoie maintenant au P

 18   3642.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est 4D 1328.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, 1328, c'est cela,

 21   c'est probablement une erreur de ma part.

 22   Q.  Document suivant 3642. Il s'agit une fois de plus d'un rapport du chef

 23   d'état-major. A présent cela se rapporte à la première moitié de 1993, et

 24   on pourra voir dans quelle mesure la situation a évolué. Monsieur le

 25   Témoin, si vous n'avez pas d'information et d'expérience, dites-le

 26   clairement. Dites clairement que vous ne pouvez pas commenter telle ou

 27   telle partie. Ma première question est la suivante, il est question de

 28   conflit entre les forces musulmanes et le HVO, en Bosnie centrale et dans

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  1   la vallée de la Neretva. A présent le chef d'état-major dit, je cite :

  2   "C'est avec certitude que nous pouvons affirmer que les membres des

  3   unités du HVO n'ont pas généré ces conflits."

  4   Monsieur Jasak, en votre qualité d'agent du VOS, étant donné la

  5   totalité des informations dont disposait le VOS, est-ce que vous pouvez

  6   nous dire si cette phrase est juste, exacte ou pas ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Ma question suivante --

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Mon client veut me dire quelque chose, mais

 10   je n'ai pas très bien compris.

 11   Q.  Ma question. D'après, pour ce qui est de ce rapport - et pour vous,

 12   Monsieur Jasak, il s'agit de la page 2, paragraphe 2 -, on dit - je ne vais

 13   pas vous poser de questions au sujet de la Bosnie centrale, parce que vous

 14   nous avez dit que vous avez procédé à des études analytiques pour ce qui

 15   est de l'Herzégovine du sud-est. Alors, on dit :

 16   "En Herzégovine, l'ennemi a maîtrisé le secteur de l'axe Jablanica-Dreznica

 17   et la rive gauche de la Neretva, depuis Dreznica jusqu'à la partie sud de

 18   Mostar."

 19   Alors, d'après ce que vous en savez, en votre qualité d'agent du VOS, pour

 20   ce qui est de l'Herzégovine du sud-est, est-ce que cette constatation est

 21   exacte ou pas ?

 22   R.  Cette constatation est exacte.

 23   Q.  Est-ce que vous savez nous dire quelle est à peu près la longueur du

 24   territoire évoqué ici ?

 25   R.  Ça fait un peu plus de 30 kilomètres, disons, 35 kilomètres.

 26   Q.  Bien. Alors, dans cette partie-ci du rapport, avant-dernier passage de

 27   ce volet, on évoque une partie X, Y. Alors, est-ce que vous pouvez nous

 28   dire de qui il peut s'agir ?

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  1   R.  La partie X, Y, c'est l'armée de la VRS.

  2   Q.  J'aimerais que vous commentiez cette partie-ci du rapport, il est donc

  3   constaté que pour le moment, l'approvisionnement des unités du HVO en

  4   besoins militaires ou en ressources militaires, pour ce qui est des

  5   localités mentionnées ci-dessus, on passe par le territoire de la Republika

  6   Srpska. Comment, Monsieur Jasak, si cette armée de la Republika Srpska,

  7   c'est précisément l'ennemi ?

  8   R.  Ceci s'est produit dans les moments les plus difficiles pour le peuple

  9   croate. Je peux notamment parler de Konjic, parce qu'il s'agissait du

 10   secteur Turija, Zabrdje, Zaslivlje, lorsque nous sommes restés complètement

 11   encerclés. Pour soigner et sortir les blessés, on passait par la partie X,

 12   Y, c'est-à-dire la partie du territoire tenu par l'armée de la Republika

 13   Srpska.

 14   Q.  Dites-nous, est-ce que les Croates avaient voulu ou ont dû coopérer

 15   avec la Republika Srpska à cet effet ?

 16   R.  C'était la seule manière de faire pour préserver la vie de la

 17   population là-bas ou pour éviter qu'ils ne se retrouvent dans des camps.

 18   Q.  A d'autres endroits, quelle a été l'attitude du HVO vis-à-vis de

 19   l'armée de la Republika Srpska, était-ce un allié ou un ennemi ?

 20   R.  L'armée de la Republika Srpska était un ennemi.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que le

 22   moment est venu de faire la pause. Est-ce que l'on pourrait faire une pause

 23   ? Il nous reste encore des choses à voir sur ce document.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. On va faire 20 minutes de pause.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.

 26   --- L'audience est reprise à 18 heures 00.    

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation]

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  1   Q.  Reprenons ce même document, Monsieur Jasak, au point 4, qui s'intitule

  2   les problèmes. Voyons ce qu'à la mi-1993 l'état-major principal considère

  3   comme étant un problème. Je ne peux pas aborder l'ensemble des points, mais

  4   prenons, par exemple, le paragraphe 4.2. L'on fait état de :

  5   "Un manque sur le plan des unités professionnelles et mobiles

  6   capables de mener des actions d'attaque et des actions spéciales. Les

  7   unités existantes ont essuyé des pertes importantes. Elles ont été

  8   décimées, peut-on dire."

  9   Donc, nous sommes à la mi-1993 et vous êtes toujours dans les rangs du HVO,

 10   Monsieur Jasak ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dites-nous, sur le plan du nombre des hommes professionnels et de leurs

 13   unités, est-ce qu'il y a eu un changement à la fin de l'année 1992 ?

 14   R.  Rien de spécial.

 15   Q.  Vous voulez dire qu'il n'y a pas eu de modification particulière ?

 16   R.  Oui, c'est cela.

 17   Q.  En d'autres termes, c'est toujours à peu près le même nombre d'hommes ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Point 4.4, le problème dont on fait état, c'est :

 20   "Une déstabilisation du système de commandement et de la

 21   coordination, participation entre les zones, unités dans le cadre des zones

 22   et des zones avec l'état-major principal du HVO…"

 23   Alors, Monsieur Jasak, est-ce que vous pourriez nous commenter cette

 24   constatation dans ce point, est-ce que vous avez des connaissances vous

 25   permettant de le faire ?

 26   R.  Dans les documents que nous avons vus, on voyait la même chose et rien

 27   de particulier n'a changé sur ce plan.

 28   Q.  Prenons le point 4.5. L'on évoque :

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  1   "Des manquements sérieux sur le plan du commandement et en

  2   particulier le manque de professionnalisme au niveau des groupes, des

  3   compagnies, des bataillons, des brigades, et pour être tout à fait franc,

  4   au niveau des zones état-major du HVO également."

  5   Alors, dites-nous, est-il exact de dire qu'il n'y avait pas suffisamment

  6   d'officiers, de sous-officiers instruits et professionnels ?

  7    R.  Oui, c'est tout à fait exact.

  8   Q.  Monsieur Jasak, lorsque nous parlons "d'officier", cela ne signifie pas

  9   nécessairement que c'est quelqu'un qui a fait des écoles militaires pour

 10   devenir officier ?

 11   R.  Oui, tout à fait. Lorsque nous parlons "d'officier", ce n'est pas

 12   nécessairement quelqu'un qui a un diplôme de deuxième cycle. Il n'est pas

 13   nécessaire qu'il soit sorti d'une école militaire.

 14   Q.  Mais qu'est-ce qui permet alors à un tel individu de devenir un

 15   officier ? Qu'est-ce qui lui a permis d'obtenir un grade ?

 16   R.  Il a obtenu cela sur la base de ce qu'il a montré comme étant ses

 17   qualités sur le terrain dans l'organisation du HVO et qui a fait ses

 18   preuves dans la guerre jusqu'à ce moment-là.

 19   Q.  Voyons le point 4.6, je cite :

 20   "On s'attend à ce que l'armée du HVO résolve tout sur le plan militaire et

 21   sur le champ de bataille. C'est une attente légitime, et il s'agit bien là

 22   d'un devoir de l'armée. Mais cette armée organisée de manière moderne, bien

 23   équipée sur le plan technique et avec un système de commandement bien sur

 24   pied, cette armée, nous ne l'avons toujours pas.

 25   "Afin de la créer, les autorités doivent faire bien davantage à tous

 26   les échelons et cela doit constituer leur objectif premier."

 27   Par rapport à ce que vous avez vu dans le HVO, est-ce que seriez d'accord

 28   avec cette constatation que l'on trouve ici ?

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  1   R.  Oui, je pourrais accepter cette appréciation, et je suis d'accord avec

  2   ce qui est écrit ici.

  3   Q.  Essayons d'approfondir un petit peu ce problème du système de

  4   commandement. D'après les informations et les connaissances du VOS, les

  5   unités sur le terrain, est-ce qu'elles informaient de manière exhaustive et

  6   régulière de ce qui se produisait sur le terrain ?

  7   R.  Pour ce qui est du VOS, pour ce qui est des rapports que nous

  8   recevions, nous avions nos hommes au niveau plus élevé, au niveau des zones

  9   opérationnelles, qui nous envoyaient régulièrement leurs rapports.

 10   Q.  Pour le moment, ce qui m'intéresse surtout ce serait le contenu de ces

 11   rapports. S'agit-il de rapports adressés à des commandants des brigades,

 12   des zones opérationnelles, de l'état-major principal ? Et est-ce que les

 13   informations qui étaient contenues dans ces rapports étaient exactes et

 14   complètes quant à la situation qui prévalait sur le terrain ?

 15   R.  Pour ce qui est des rapports qui provenaient du terrain, on a rencontré

 16   des problèmes là-dedans.

 17   Q.  Les commandements et les échelons supérieurs, est-ce qu'ils ont donné

 18   des instructions sur la nature des rapports, de la structure des rapports

 19   pour autant que vous le sachiez ?

 20   R.  Oui. On a fourni des instructions, mais c'était un problème. En fait,

 21   ce qui posait problème c'était le niveau de formation des gens qui devaient

 22   rédiger ces rapports. Ils n'avaient pas les diplômes, la formation

 23   nécessaire.

 24   Q.  Et dans la partie finale de ce rapport, le rapport se lit comme suit :

 25   "En fait, d'après ce que l'on voit dans la pratique, l'armée devient

 26   privatisée. Toutes municipalités, toutes villes et villages ont leur

 27   'propre' armée. Donc il n'est pas possible de déplacer une armée municipale

 28   de la zone de la municipalité", et cetera.

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  1   D'après ce que vous avez pu voir au sein du HVO, est-ce que cette

  2   appréciation est exacte ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Y avait-il des municipalités qui, sur le plan financier, sur le plan de

  5   la logistique apportaient un soutien à leurs brigades locales ?

  6   R.  Oui, il y a eu de telles municipalités.

  7   Q.  Alors vous êtes quelqu'un du renseignement, un analyste. Dites-nous, le

  8   fait que l'on fournisse des moyens, la logistique à une brigade, est-ce que

  9   cela n'ouvre pas la voie à ce qu'au niveau du pouvoir local les gens

 10   puissent avoir une influence sur cette

 11   brigade ? Qu'est-ce que cela vous permet de dire ?

 12   R.  Mais tout à fait, cela ouvre la voie à cela, et j'ai déjà cité un

 13   exemple à ce titre. Lorsqu'il s'agissait de nommer un commandant de brigade

 14   on disait : Bien, il ne vient pas de notre village, peu importe ses lettres

 15   de créance. Et dans d'autres municipalités où une brigade était composée,

 16   par exemple, de plusieurs localités, lorsqu'une municipalité ne pouvait pas

 17   constituer ses propres brigades, enfin, la chose était très importante de

 18   savoir qui allait être le commandant de quelle municipalité, et là, ça

 19   posait des problèmes comparables.

 20   Q.  D'accord. 3D 793 à présent.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : On a tous regardé ce document P 3642 qui est daté du

 22   22 juillet 1993. Comme vous le savez, vous ne le savez pas, le 22 juillet

 23   1993, le général Praljak a remplacé le général Petkovic à la tête de

 24   l'état-major. C'est donc peut-être un document testament qui décrit au chef

 25   du département de la Défense, M. Stojic, la situation.

 26   Quand on lit ce document on s'aperçoit que la situation est assez

 27   problématique. Il y a plusieurs problèmes. Et dont l'un, qui est indiqué au

 28   dernier paragraphe, c'est que pour le général Petkovic il y a des armées

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  1   privatisées, chaque municipalité a quasiment sa "propre armée". Donc il

  2   semblerait que c'est un constat assez grave que fait le général Petkovic du

  3   fait qu'il ne peut pas exercer son commandement. D'ailleurs vous voyez au

  4   point 4.4, il dit que le système de commandement est interrompu parfois.

  5   Donc il décrit cette situation.

  6   Vous, en tant qu'analyste du VOS, est-ce que sur le terrain vous avez

  7   ressenti cette situation, et comment avez-vous vécu le changement de

  8   commandement entre le général Petkovic et le général Praljak, ou bien ça

  9   vous est totalement passé au-dessus de la tête ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le point 4.4, le

 11   système de commandement mis en péril. J'étais au courant de cela. Je savais

 12   que cette situation s'est produite. Je pense qu'il s'agissait de la zone

 13   opérationnelle du sud-est de l'Herzégovine et de la Brigade de Ljubuski.

 14   Mais s'agissant de l'arrivée du général Praljak à la tête de l'état-major

 15   principal, je n'ai pas ressenti de changement particulier, à cela près que

 16   le général Praljak était un peu plus énergique lorsqu'il émettait des

 17   ordres que le général Petkovic.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans ce document il est fait état de la troisième

 19   partie XY. On voit dans ce document qu'il y a des achats de matériels, de

 20   munitions, en petites quantités, mais ça existe. Le général Petkovic dit

 21   que cette troisième partie représente un puzzle politiquement. Alors vous

 22   qui étiez sur le terrain, est-ce que vous saviez qu'il y avait parfois des

 23   accords avec la partie serbe alors même qu'on se tirait mutuellement

 24   dessus, mais de temps en temps on se mettait d'accord pour certains points,

 25   et notamment le passage de troupes, l'achat d'armes, et cetera ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est des

 27   activités avec l'armée de la Republika Srpska, les seules informations que

 28   j'ai ont à voir avec Konjic, Turija, Zabrdje, et Zaslivlje, là où il y a eu

Page 48514

  1   des problèmes, et rien pour le reste.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous ne saviez pas qu'il pouvait y avoir des

  3   accords avec la VRS, vous ne le savez pas ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant d'accords particuliers passés avec

  5   la VRS, non, je ne sais pas.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. C'est ce que je voulais savoir.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation]

  8   Q.  Dites-nous, Monsieur Jasak, les accords passés sous l'égide de la

  9   FORPRONU et la communauté internationale, les accords où la partie serbe a

 10   pris part également, à savoir l'armée de la Republika Srpska, M. Martic ?

 11   R.  S'agissant de ces accords-là, oui, j'en ai entendu parler, mais eux ils

 12   ont été passés sous l'égide. D'après ce que j'ai compris, Monsieur le Juge,

 13   il voulait m'interroger sur ce rapport du général Petkovic. Donc j'étais au

 14   courant des accords entre les parties belligérantes, les trois.

 15   Q.  3D 793 à présent. Il est toujours question du commandement et du

 16   contrôle efficace. C'est le document du 7 novembre 1993. Nous avons là les

 17   conclusions adoptées à l'issue d'une réunion avec les commandants

 18   militaires. Voyez-vous, Monsieur Jasak, dans la signature, s'agit-il de

 19   commandants des brigades du HVO et des zones opérationnelles ?

 20   R.  Il s'agit là des commandants des zones opérationnelles, des brigades et

 21   d'autres officiers de haut rang.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le transcript, on a vu tout à l'heure un

 23   document de démission du colonel Ante Saskor, et nous voyons le nom d'Ante

 24   Saskor parmi ceux qui étaient à cette réunion. Voilà, c'est au transcript.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, très simplement, je

 26   peux vous expliquer cela. La démission de M. Saskor date du 22 décembre

 27   1993, or là, nous avons une réunion qui se situe à peu près un mois avant,

 28   donc il est pleinement en fonction.

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  1   Q.  Monsieur Jasak, dites-nous, s'agit-il là des officiers du plus haut

  2   rang au sein du HVO, si on laisse de côté les membres de l'état-major

  3   principal qui n'étaient pas à la réunion ou qui ne figurent pas dans cette

  4   liste ?

  5   R.  Il s'agit là des officiers les plus haut placés de Tomislavgrad et de

  6   Mostar, de ces deux régions militaires.

  7   Q.  Si à l'issue d'une telle réunion ces conclusions sont adoptées,

  8   pourrait-on dire que ces hommes ont agi en connaissance de cause ? Est-ce

  9   qu'ils connaissent la situation sur le terrain ou non ?

 10   R.  Parmi les hommes dont les noms figurent ici, nous avons les gens les

 11   plus compétents, qui connaissent mieux la situation qui prévaut sur le

 12   terrain.

 13   Q.  Prenez le point 6 de ces conclusions. Il y est dit qu'il faudrait

 14   mettre sur pied une seule et unique voie de commandement. Alors, vous avez

 15   reconnu les noms, vous connaissez certains d'entre ces hommes, y a-t-il

 16   quoi que ce soit qui vous permettrait de penser que ces gens ne savent pas

 17   ce qu'ils sont en train de dire ?

 18   R.  Je n'ai aucune raison de douter, de ne pas faire confiance à ces gens.

 19   Q.  Prenons le document suivant, P 3314 --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, des questions de suivi sur ce

 21   document que tout le monde connaît, puisque l'on a évoqué à maintes

 22   reprises. Vous-même, vous saviez que des officiers de haut rang s'étaient

 23   réunis le 7 novembre et qu'ils avaient formulé neuf propositions à M.

 24   Boban, au parlement, au gouvernement et à l'état-major ? Vous le saviez ou

 25   vous ne le saviez pas ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je vois, c'est absolument ça, c'est

 27   qu'il donne ce type d'instructions.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais à l'époque, ma question c'était à

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  1   l'époque, "on the ground" comme disent les anglo-saxons, à l'époque, est-ce

  2   que vous étiez au courant que des officiers s'étaient réunis et avaient

  3   rédigé ce document à destination des autorités politiques ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je savais qu'ils s'étaient réunis et qu'ils

  5   avaient rédigé ce document.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais j'aimerais que

  7   vous répondiez plus précisément à la question. Vous dites, Je le sais, oui.

  8   Mais on aimerait savoir si à l'époque vous étiez au courant de cette

  9   réunion. A l'époque, avant ou au plus tard le 7 novembre 1993 ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant et le jour même, je ne le savais pas,

 11   mais je l'ai appris en l'espace d'une semaine après qu'ils s'étaient

 12   rencontrés. Je ne connaissais pas le contenu exact, mais je savais qu'ils

 13   avaient évoqué de grands problèmes auxquels ils étaient confrontés et

 14   qu'ils avaient mis ça dans un document.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une deuxième question à vous

 16   poser, si vous me permettez. Point numéro 6, il n'y a que six mots, c'est

 17   très laconique :

 18   "Etablir une seule ligne de commandement."

 19   Qu'est-ce que ça signifie exactement ? Expliquez-le, si vous le pouvez.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne peux pas savoir à ce

 21   moment-là exactement ce qu'ils avaient à l'esprit.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, avec justesse, vous nous dites

 23   que vous ne pouvez pas le savoir à l'époque. Mais maintenant, avec le recul

 24   de 15 ans, précédemment d'ailleurs, est-ce que vous pourriez nous expliquer

 25   ce que cela peut bien signifier, ce point numéro 6, établir une seule

 26   chaîne de commandement ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, exactement pour cette

 28   phrase-là, je ne peux pas vous dire ce qu'elle signifiait. Mais l'on voit

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  1   très clairement qu'il y avait un problème au niveau de la voie de

  2   commandement, que cette voie de commandement ne fonctionnait pas de manière

  3   optimale.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne peux pas être d'accord avec

  5   vous, il n'est pas écrit qu'il convient de rétablir la chaîne de

  6   commandement. On dit juste qu'il faut qu'il n'y ait qu'une seule chaîne de

  7   commandement. Alors, les explications qu'on vous demande, c'est pourquoi il

  8   y aurait plusieurs chaînes de commandement. Je pense que je ne vais pas

  9   insister puisque vous avez dit que vous ne savez pas.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, je m'adresse à vous qui étiez --

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] L'accusé pourrait-il -- je ne vous

 12   donne pas la parole, Monsieur Praljak, je vous demande de ne pas faire de

 13   gestes et de communiquer avec qui que ce soit. Vous pourriez influencer le

 14   témoin, et ce n'est pas du tout la procédure appropriée.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, regardez-moi --

 16   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] C'est moi qui ai convoqué cette

 17   réunion. Il s'agit là de mon attitude, mon point de vue et mes conclusions.

 18   J'étais à la place du témoin pendant je ne sais pas combien de temps, et il

 19   en va de ma vie maintenant --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, l'interruption du général Praljak a

 21   pour effet d'anéantir la question que j'allais poser, mais je vais vous

 22   poser la question quand même. Moi, quand je vois ce document, j'essaie de

 23   le replacer dans la chronologie de l'époque. Parce que après quasiment

 24   quatre ans de procès, un Juge aussi modeste soit-il doit être à même de

 25   pouvoir replacer un document dans la chronologie politico-militaire de

 26   l'époque. Je vois ce document, 7 novembre 1993. Je sais, par ailleurs, que

 27   le général Praljak a quitté ses fonctions de commandant du HVO. J'essaie de

 28   voir s'il y a un lien entre ces deux événements.

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  1   Ce document est le départ du général Praljak, car quand on lit ce document,

  2   on voit qu'il y a, de la part de plusieurs officiers de haut rang, la mise

  3   en cause d'un commandement, voire de l'existence de plusieurs lignes de

  4   commandement, et cetera, et que l'autorité politique suprême, à savoir M.

  5   Boban, découvrant qu'il y a un problème, règle le problème en remplaçant

  6   son chef d'état-major par la nomination d'Ante Roso. Voilà que le général

  7   Praljak bondit et dit : C'est moi qui ai organisé cette réunion. Ça, c'est

  8   son point de vue. Il aurait mieux fait de se taire et de me laisser poser

  9   la question et d'attendre votre réponse.

 10   Alors, vous, au sein du VOS, vous aviez la mission de faire des analyses,

 11   que je suppose, pertinentes. Est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir un

 12   lien entre cette réunion d'officiers avec les neuf conclusions et le départ

 13   du général Praljak ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas me

 15   lancer dans des conjectures. Quant au VOS, il faisait porter ses analyses

 16   sur l'ennemi. A l'époque où ce document a été généré, cela faisait deux

 17   mois que j'étais déjà à Zagreb pour suivre une formation --

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Erreur de traduction. Le témoin a dit qu'il

 19   ne pouvait pas se lancer dans des conjectures. Donc, la phrase telle

 20   qu'elle a été formulée, en fait, constitue une erreur totale

 21   d'interprétation. Le témoin a dit qu'il ne voulait pas se lancer dans des

 22   conjectures et que le VOS analysait l'ennemi. Mais si vous voulez, le

 23   témoin peut répéter sa réponse.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est très clair, Monsieur le Témoin. Vous dites

 25   qu'au mois de novembre, ça faisait deux mois que vous étiez à Zagreb et que

 26   vous ne pouvez apporter une quelconque réponse à ma question. Mais je vous

 27   en remercie. C'est au moins très précis.

 28   Maître Alaburic, mais je crois que le Juge Mindua --

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  1   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, moi, c'est la forme de ce document

  2   qui m'intéresse. Evidemment, je pense que vous n'êtes pas parmi les

  3   signataires, mais je voudrais savoir : la liste des commandants et des

  4   officiers que nous voyons à la deuxième page, c'est juste une liste de

  5   participants à la réunion ou bien c'est la liste des signataires de la

  6   lettre ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne sais pas si c'est tout

  8   simplement la liste des participants ou la liste des signataires. Je vous

  9   ai dit que j'étais au courant de l'existence de cette réunion, parce qu'il

 10   s'agissait d'un grand nombre d'officiers. Parce que le week-end, je

 11   rentrais de mes études, je rentrais sur le terrain, dans le coin, mais je

 12   n'ai pas vu ce document et je ne sais pas qui l'a signé.

 13   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup. Alors, évidemment --

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge. De nouveau,

 15   l'on ne voit pas consignée la réponse du témoin au compte rendu d'audience.

 16   Q.  Monsieur Jasak, je vous invite à répéter. Les interprètes disent qu'ils

 17   n'ont pas compris votre réponse. Pourriez-vous, s'il vous plaît, la

 18   répéter.

 19   R.  Je ne sais pas parmi ces noms lesquels sont les signataires. Je ne sais

 20   pas non plus si toutes ces personnes étaient présentes à la réunion. Mais

 21   je vous ai dit que j'étais au courant de l'existence de cette réunion,

 22   parce que je rentrais chez moi le week-end, de mes études, je voyais du

 23   monde, et je sais qu'ils avaient rédigé une lettre pour évoquer la

 24   problématique. Mais je ne savais pas ce qu'il y avait dedans.

 25   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup. Moi, ce document, il

 26   m'impressionne. Evidemment, vous n'êtes pas juriste, vous êtes ingénieur.

 27   Parce que dans plusieurs droits militaires dans de nombreux pays, la

 28   réclamation collective est sévèrement sanctionnée dans les forces armées.

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  1   Alors, je me pose la question si ce document n'est pas une preuve du manque

  2   de discipline ou de la rébellion qui couvait au sein du HVO, si je

  3   considère que c'est une réclamation collective. Qu'est-ce que vous en

  4   pensez ? Est-ce que je suis à côté ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je serais d'accord avec vous

  6   s'il s'agissait d'une mutinerie dans le cadre d'un système bien en place.

  7   Mais vu le système que nous avions à ce moment-là en Herceg-Bosna et au

  8   sein du HVO, je ne dirais pas qu'il s'agissait d'une mutinerie.

  9   M. LE JUGE MINDUA : En fait, c'est une armée qui fonctionnait un peu selon

 10   le modèle civil. Allait se battre celui qui voulait, répondait aux

 11   supérieurs celui qui désirait en faire autant; c'est ce que vous voulez

 12   dire ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, pour ce qui est de l'armée,

 14   la plupart de ceux qui sont énumérés ici n'ont pas été formés pour exercer

 15   des fonctions d'officiers, comme cela est le cas d'une scolarisation dans

 16   les autres Etats, où il y a l'armée qui dit, Tu exécutes un ordre et si tu

 17   n'es pas content, tu te plains après. Donc, ceci, je le comprends dans une

 18   certaine mesure, parce qu'ici, s'agissant de ces individus, il était resté

 19   quelque chose du système antérieur, où les gens se concertaient.

 20   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation]

 23   Q.  Quand vous parlez des temps antérieurs, est-ce que vous parlez de

 24   l'autogestion, Monsieur ?

 25   R.  Oui, c'est ce que l'on pourrait dire, en effet.

 26   Q.  Bien que vous ayez eu 26 ans à l'époque, dites-nous, auriez-vous

 27   remarqué parmi vos soldats ce type de mentalité, disons, autogestionnaire,

 28   le droit d'obtenir une information pour ce qui est des événements

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  1   pertinents ou le droit de participer à la prise de décisions ?

  2   R.  Je pense l'avoir quelque peu mentionné plus tôt. Lorsque j'ai été

  3   convié à venir, en termes pratiques, c'était pour que nous nous mettions

  4   d'accord. Pourquoi irions-nous là-bas, pourquoi ce n'est pas quelqu'un

  5   d'autre qui irait là-bas ? Donc, il ne vous restait plus qu'à rencontrer

  6   ces soldats et leur expliquer pourquoi les choses étaient ainsi; parce que

  7   sinon, le système se serait désintégré.

  8   Q.  Dites-nous, ces soldats avec qui vous vous êtes entretenu, lorsqu'ils

  9   n'étaient pas de relève, que faisaient-ils ?

 10   R.  Quand ils n'étaient pas de relève, ils vaquaient aux activités pour

 11   lesquelles ils étaient qualifiés. Certains étaient dans l'agriculture,

 12   d'autres avaient un métier quelconque en matière d'artisanat.

 13   Q.  Donc, ils étaient plombiers, mécanos ?

 14   R.  Oui, ce type de métiers. Cela dépendait de leur formation.

 15   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, P 3314. Il s'agit d'un document

 16   où je ne serais intéressée que par la circonstance qui suit : ces soldats

 17   et civils quittent Kostajnica. Et dans ce rapport, il est fait état du fait

 18   que l'armée ne veut pas obéir aux ordres de qui que ce soit. Les

 19   commandants de Kostajnica n'exerçaient aucun contrôle à l'égard de l'armée.

 20   Alors, Monsieur Jasak, est-ce que lors de vos récolements, il vous a été

 21   donné la possibilité de lire ce rapport ?

 22   R.  Oui, j'ai eu l'occasion de le lire.

 23   Q.  Et ce type de situations, l'avez-vous rencontré en personne ou est-ce

 24   que vous avez eu à connaître plus de détails au sujet de situations de ce

 25   genre ?

 26   R.  J'ai appris qu'il y a eu ce type de situations à se produire lorsqu'on

 27   perdait des positions et lorsque l'armée devait se retirer, se replier. Et

 28   là, en termes simples, il n'y avait pas d'autorité à même de leur dire quoi

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  1   que ce soit.

  2   Q.  Est-ce que dans ce contexte, dans ce contexte concret vous vous

  3   souviendriez de la chute d'un secteur et impossibilité de ce fait de

  4   contrôler l'armée ?

  5   R.  Ecoutez, là, on évoque Kostajnica. C'est sur le territoire de la vallée

  6   de la Neretva.

  7   Q.  Et la chute de Jajce, comment ça s'est passé ?

  8   R.  La situation était très semblable. A la chute de Jajce, des collègues

  9   sont venus à Tomislavgrad, et ils disaient que c'était la faute des autres.

 10   Mais c'était à chaque fois le cas lors de la chute d'une position, les gens

 11   étaient frustrés. D'abord du fait d'avoir vu leurs maisons brûlées, d'avoir

 12   dû quitter leurs maisons, d'avoir dû tout abandonné. Ce n'était pas des

 13   soldats professionnels. C'étaient des gens ordinaires, des gens le plus

 14   ordinaire possible.

 15   Q.  Penchons-nous sur le document suivant 3D 1099. Le chef de la Brigade,

 16   Stjepan Radic, s'adresse à son supérieur, au commandant de la zone

 17   opérationnelle de Mostar. Nous sommes en décembre 1993. Vous n'êtes pas au

 18   HVO. Mais prenons ceci comme cas de figure pour illustrer un phénomène. Et

 19   vous avez un chef qui écrit à son supérieur ceci, il dit :

 20   "Au sujet de votre ordre daté du 5 décembre 1993, je vous informe de ce qui

 21   suit : D'où vient cette audace et ce courage que de donner des ordres ?

 22   Pour pouvoir correspondre avec toi, je devrais redescendre sur le plan

 23   intellectuel et moral à ton niveau. Espèce de crétin."

 24   Monsieur Jasak, compte tenu de vos connaissances et de votre expérience,

 25   pourriez-vous commenter ce document du point de vue des modalités de

 26   communication dans la filière de commandement. C'est un chef de brigade qui

 27   s'adresse à un commandant de zone opérationnelle.

 28   R.  On voit clairement ici qu'il y a perturbation de la chaîne de

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  1   commandement et de contrôle. Et suite à la rédaction d'un tel courrier, il

  2   n'y a plus aucune possibilité de coopérer. Si ce type de chose venait à se

  3   produire dans un système bien organisé, lorsqu'un ordre était donné, ce

  4   type de comportement se verrait sanctionner de la peine la plus stricte.

  5   Q.  Monsieur Jasak, est-ce que vous auriez des informations personnelles au

  6   sujet d'animosités entre différents commandants faisant partie d'une

  7   filière de commandement censés aussi coordonner leurs activités ?

  8   R.  Je n'ai pas d'information personnelle de ce type pour ce qui est

  9   d'avoir eu entre différents commandants ce genre de chose, chacun roulait

 10   sur ses propres roues, ça arrivait aussi, comme on dit.

 11   Q.  Penchons-nous sur un document suivant 4D 1298. Il est question d'un

 12   rapport du SIS daté du mois de septembre 1993, portant sur la population et

 13   les militaires de la municipalité de Livno. Entre autres, on dit que

 14   l'Herceg-Bosna ne les intéresse pas beaucoup, et ils seront manifestement

 15   préoccupés par leur municipalité, donc leur patriotisme ne va pas au-delà

 16   des limites de la municipalité et au-delà de cela ils ne ressentent pas le

 17   besoin d'aller se battre. Ils sont très marris par le fait d'avoir à

 18   envoyer 120 de leurs soldats ailleurs. Ils ne sont pas d'accord pour ce qui

 19   est de déplacer leurs pièces d'artillerie vers des champs de bataille,

 20   parce qu'ils affirment que ceci réduit le pouvoir de tir de leur

 21   artillerie, et ce, en concurrence de 40 %, et ils protestent pour ce qui

 22   est de la mobilisation de leur machine pour la construction de routes

 23   ailleurs. Et ils disent que si on ne leur ramène pas ces machines ils ne

 24   seront pas en mesure d'entretenir 200 kilomètres de voies de montagnes pour

 25   la première ligne de front. Tout le matériel et l'armement sont considérés

 26   comme étant la propriété de Livno et que par aucune espèce d'ordre ils ne

 27   seraient être transférés vers d'autres théâtres de bataille. Mme Alaburic

 28   répète ce qu'elle a déjà dit parce qu'elle l'a dit trop vite. Je rectifie

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  1   le nom de la localité, page 93, ligne 3, ce n'est pas Skopje, mais

  2   Uskoplje.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, je me demande s'il

  4   n'y a pas une petite erreur. Je vois sur le rapport, à la page 92, lignes

  5   24 et 25 : Ils ne sont pas vraiment intéressés par la Bosnie-Herzégovine.

  6   Mais si je regarde le document, là je vois HB dans les deux langues. Est-ce

  7   que ça serait plutôt l'Herceg-Bosna plutôt que la Bosnie-Herzégovine ?

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

  9   Juge, et j'ai d'ailleurs dit "Herceg-Bosna."

 10   Q.  Monsieur Jasak, vous êtes un agent du renseignement, vous recevez ce

 11   type de rapport et vous êtes censé tirer des conclusions. Que diriez-vous

 12   de la possibilité ou des possibilités de l'état-major pour ce qui est de

 13   donner des ordres à l'attention de cette brigade à Livno ?

 14   R.  Ici on aurait un problème, c'est évident, parce que l'état-major était

 15   censé donner des ordres par le biais de la zone opérationnelle. Et ce que

 16   l'on constate ici, à savoir qu'une chose qu'on a déjà dite, les armées,

 17   voire les brigades municipales sont là, et on voit que ces gens ne sont pas

 18   du tout disposés à aider le voisin à éteindre l'incendie. Ils sont plutôt

 19   portés à attendre que leur propre maison ne prenne le feu, et ce n'est que

 20   là qu'ils demanderaient à éteindre l'incendie.

 21   Q.  Bon. Dites-nous, Monsieur Jasak. En 1992, pour l'essentiel, vous étiez

 22   au sein d'unité, et en 1993 vous étiez à l'état-major. Est-ce que pour

 23   cette période vous avez des informations quelles qu'elles soient portant

 24   sur des opérations militaires, voire actions militaires planifiées et

 25   réalisées sous le commandement de l'état-major principal du HVO ?

 26   R.  Pour ce qui est des opérations militaires et des ordres venus de

 27   l'état-major principal, je ne sais qu'il y a eu qu'un ordre qui disait :

 28   Défendez-vous avec ce que vous avez. Comme vous le savez, vous le pouvez.

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  1   Pour ce qui est d'activités d'attaques, je suis au courant d'une seule

  2   opération organisée au mois de novembre 1992, opération qui était appelée

  3   Bura.

  4   Q.  Penchons-nous maintenant sur le 2D 12 --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, Mon Colonel, de manière

  6   successive on vient de voir trois documents, où ces documents concernent la

  7   Brigade Stjepan Radic, la Brigade Petar Kresimir IV, et la Brigade Cikota,

  8   tout ceci au mois de septembre à décembre. Ces trois documents témoignent

  9   de problèmes au sein de ces brigades. On pourrait faire cet exercice avec

 10   d'autres brigades, comme on a vu tout à l'heure avec le document de cette

 11   réunion du 7 novembre. La situation semble assez sérieuse au niveau du

 12   commandement. Il y a des insultes, il y a des insubordinations, il y a des

 13   mises en cause des autorités politiques. Et je suis convaincu, en regardant

 14   d'autres documents, on pourrait aussi multiplier des exemples. Bon, vous, à

 15   l'époque, vous étiez plus là, puisque vous étiez à Zagreb. Mais pendant

 16   l'époque où vous avez exercé votre commandement de bataillon ou vos tâches

 17   diverses, est-ce que vous avez senti qu'il y avait un problème de

 18   commandement ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque j'étais

 20   commandant d'un bataillon, la concertation, les discussions avec les

 21   commandants de compagnies, pour ce qui est de savoir ce qu'on allait faire,

 22   comment on allait le faire, c'était quelque chose considéré comme étant

 23   normal. Parce que moi-même, je n'avais pas à l'époque de connaissances

 24   particulières en matière de commandement. L'ordre voulait -- ou le

 25   commandement voulait à ce que l'on se mette d'accord sur ce qu'il convenait

 26   de faire, en termes simples. Au-delà de ceci, rien ne pouvait fonctionner.

 27   Dire à l'époque à quelqu'un qu'il devait le faire, cela n'aurait généré que

 28   de la révolte, et on n'aboutirait pas à l'objectif poursuivi. Parce que

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  1   convaincre des gens qui, pendant longtemps, se sont vus positionnés à une

  2   première ligne de front, qui n'ont eu que très peu de repos, et qu'il

  3   fallait pour eux revenir une fois de plus sur la ligne de front, on ne

  4   pouvait le faire qu'en essayant de les concerter.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Jasak, partant de ce qui a été dit jusqu'à présent, il

  8   découlerait le fait que le HVO c'était une armée de guerre, une armée créée

  9   en temps de guerre; est-ce que c'est bien exact ?

 10   R.  Pour ce qui est du HVO, du Conseil croate de la Défense, ça s'est créé

 11   pendant la guerre, ça s'est créé à partir de rien, et on pourrait

 12   considérer que c'est une armée de guerre.

 13   Q.  Est-ce que pendant votre formation scolaire au sein des structures

 14   militaires et lors de vos contacts avec les représentants des armées

 15   étrangères de l'OTAN, et cetera, auriez-vous eu à entendre dire combien de

 16   temps il faut pour organiser une armée compte tenu des chaînes de

 17   présentation de rapports, des chaînes de commandement, des possibilités de

 18   mise en place d'un contrôle ? Vous a-t-on dit combien de temps faudrait-il

 19   pour obtenir une armée ne serait-ce que tant soit peu organisée et efficace

 20   ?

 21   R.  J'ai eu l'occasion de rencontrer ce type de représentant. Et pour ce

 22   qui est de système organisé au maximum, ça n'était pas moins de quatre ans

 23   à envisager pour avoir un système de commandement, de contrôle tel

 24   qu'existant dans les démocraties modernes.

 25   Q.  Merci. C'était l'un des sujets qu'il importait d'évoquer pour ce qui

 26   est de la création du HVO, et c'est pour cela que je vous ai posé ma

 27   question. Nous avons parlé de l'opération Bura. Penchez-vous sur le 2D

 28   1295. Il s'agit d'un ordre d'opération, Bura, 15 novembre 1992. Et je

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  1   rectifie le numéro, ici. Le D 1295. C'est bon, maintenant.

  2   Je voudrais que vous nous commentiez une partie de cet ordre. Au paragraphe

  3   5 de l'ordre en question, on détermine les missions de la Brigade de

  4   Mostar. A quelle armée appartient cette Brigade de Mostar ?

  5   R.  La Brigade de Mostar fait partie de l'ABiH.

  6   Q.  Est-ce que l'action Bura ou l'opération Bura a été réalisée en

  7   coopération avec les effectifs de l'ABiH ? 

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci. Monsieur Jasak, dites-nous, est-ce que le HVO était une force

 10   armée uniquement croate, donc composée uniquement de Croates ?

 11   R.  Non. Le HVO était, enfin, ses unités, l'unité du HVO était composée de

 12   Croates et de Musulmans, et autres, qui étaient disposés à résister à

 13   l'armée de la Republika Srpska.

 14   Q.  Mais est-ce que dans votre bataillon il y avait aussi des Musulmans ?

 15   R.  Oui, il y en a eu. Et il y en a eu aussi à exercer des fonctions de

 16   commandement fort élevées.

 17   Q.  D'après ce que vous en savez, Monsieur Jasak, est-ce que quiconque

 18   aurait interdit à l'un quelconque des Musulmans souhaitant devenir soldat

 19   du HVO de le faire ou de le devenir ?

 20   R.  Je n'ai pas d'informations de ce type, mais je ne pense pas que cela

 21   ait jamais été le cas. Parce que tous ceux qui voulaient se battre contre

 22   l'armée de la Republika Srpska étaient les bienvenus.

 23   Q.  Dites-nous, les soldats du HVO appartenant au groupe ethnique musulman

 24   étaient-ils discriminés en fonction de quelque critère que ce soit ? Donc

 25   salaire inférieur, séjours prolongés à la ligne, moins de congés, ou quoi

 26   que ce soit d'autre ?

 27   R.  Absolument pas --

 28   M. SCOTT : [interprétation] Veuillez m'excuser. J'espérais ne pas devoir

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  1   réintervenir, mais encore une fois, nous revenons à des questions qui

  2   obligent le témoin à entrer dans des conjectures. La question à la ligne 8,

  3   page 97 : "Selon vous, Monsieur le Témoin, est-ce que quelqu'un pouvait

  4   empêcher un Musulman qui souhaitait devenir membre du HVO de le faire ?" Il

  5   n'y a aucune base, mise à part la connaissance personnelle. Il en va de

  6   même pour la deuxième question, à savoir : "Dites-nous si les soldats du

  7   HVO d'appartenance musulmane faisaient l'objet de discrimination sur tel ou

  8   tel

  9   critère ?"

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut terminer parce que c'est l'heure.

 11   Quand vous avez abordé cette question, vous aviez auparavant demandé au

 12   témoin s'il y avait des Musulmans sous son commandement. Il a répondu :

 13   "Oui." Et c'est à partir de cette base qu'il fallait aborder les autres

 14   sujets, ce qui aurait évité que M. Scott se lève. Parce que peut-être

 15   avait-il une connaissance, déjà, commander 400 personnes dont on ne sait

 16   pas combien de Musulmans, peut-être que vous auriez pu lui demander. Puis

 17   vous auriez progressé, comme dit Me Karnavas, "step by step".

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est justement au

 19   pas à pas que je suis allée. Quoi qu'il en soit, je ne vais pas éviter les

 20   interventions de mon éminent confrère, M. Scott, parce que j'ai le

 21   sentiment qu'il ne suit pas attentivement les questions qui sont posées.

 22   J'ai déterminé qu'il a été commandant d'une unité militaire, j'ai établi

 23   que dans cette unité il y avait des Musulmans, et j'ai posé ma question qui

 24   était celle de savoir quelles étaient ses connaissances pour qu'il nous les

 25   donne. Je ne lui pose pas des questions sur des faits, objectifs qui serait

 26   valable sur un secteur très vaste. Je lui ai demandé si lui avait eu des

 27   informations personnelles pour savoir si quelqu'un aurait été discriminé.

 28   Il peut avoir des informations individuelles en sa qualité de commandant,

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  1   d'habitant de Mostar, de personne qui a fait des études à Zagreb et qui

  2   aurait contacté pas mal de gens. Donc, il y a un million de sources

  3   possibles. Je pense que ma question a été absolument correcte et que

  4   l'intervention de mon confrère, M. Scott, était tout à fait infondée. Et

  5   s'il avait suivi attentivement, il ne l'aurait pas formulée, son objection.

  6   Alors, est-ce que nous allons en terminer pour maintenant ou est-ce que je

  7   peux passer à un des groupes de questions ?

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : On va terminer pour maintenant, parce que c'est

  9   quasiment 7 heures. Vous avez utilisé une heure et 31 minutes, donc il vous

 10   reste quatre heures et 29 minutes.

 11   Monsieur le Témoin, vous reviendrez demain pour l'audience qui débutera à

 12   14 heures 15. En revanche, prenez vos dispositions, mercredi, l'audience

 13   aura lieu, elle, à 9 heures du matin. Jeudi, l'audience aura lieu à 14

 14   heures 15. Donc vous avez pris note de tout cela. Demain, 14 heures 15;

 15   mercredi, 9 heures; jeudi, 14 heures 15. Voilà. Et d'ici là, bien entendu,

 16   vous n'avez aucun contact avec quiconque, à l'exception de votre famille.

 17   Maître Alaburic.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste une petite

 19   observation pour ce qui est du compte rendu. C'est de ma faute, je n'ai pas

 20   réagi à temps. Le document que nous avons utilisé est le P 3314, et c'est

 21   un document sous pli scellé. Donc, j'aimerais que l'on prenne ce fait en

 22   considération. Merci.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, le document P 3314 est

 24   sous pli scellé.

 25   Je souhaite à tout le monde une bonne fin de soirée.

 26   --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le mardi 19 janvier

 27   2010, à 14 heures 15.

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