Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 11 février 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  8   toutes les personnes présentes dans le prétoire.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et

 10   consorts. Merci, Messieurs les Juges.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 12   En ce jeudi, je salue en premier MM. les accusés, je salue Mmes et MM. les

 13   avocats, je salue tous les membres du bureau du Procureur, et je salue

 14   également toutes les personnes qui nous assistent.

 15   Je vais d'abord lire une décision orale de la Chambre.

 16   Décision orale relative à l'attribution du temps en vu de la comparution du

 17   général Milivoj Petkovic.

 18   Le 28 janvier 2010, la Défense Praljak a demandé à pouvoir disposer d'un

 19   temps global de deux heures pour contre-interroger Milivoj Petkovic. Par

 20   ailleurs, la Défense Stojic et la Défense Coric ont chacune prié la

 21   Chambre, dans deux demandes déposées le 5 et le 9 février 2010,

 22   respectivement, à disposer d'une heure supplémentaire, en plus du temps

 23   qu'ils leur seraient alloués par la Chambre, en vertu de la ligne

 24   directrice numéro 5 de la décision du 24 avril 2008, pour contre-interroger

 25   Milivoj Petkovic. La Défense Petkovic a indiqué qu'elle ne s'opposait pas

 26   aux demandes de la Défense Praljak et de la Défense Stojic dans deux

 27   réponses déposées le 5 et 8 février 2010, respectivement.

 28   Le 9 février 2010, l'Accusation a également déposé une réponse aux demandes

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  1   de la Défense Praljak et de la Défense Stojic, dans laquelle elle prie la

  2   Chambre, en premier lieu, de modifier cette pratique en matière de

  3   répartition du temps d'audience lors de la comparution des témoins à

  4   décharge. Elle s'oppose en second lieu aux demandes de la Défense Praljak

  5   et de la Défense Stojic.

  6   En dernier lieu, dans l'hypothèse où la Chambre déciderait de faire droit

  7   aux deux demandes, elle prie la Chambre de lui accorder du temps

  8   supplémentaire pour contre-interroger Milivoj Petkovic, à savoir au moins

  9   50 % du temps global accordé aux équipes de la Défense pour leur contre-

 10   interrogatoire.

 11   Le 10 février 2010, la Défense Petkovic a indiqué qu'elle s'opposait à la

 12   demande de temps supplémentaire de l'Accusation, ainsi qu'une modification

 13   des lignes directrices en matière de répartition du temps lors du contre-

 14   interrogatoire des témoins à décharge. La Chambre constate que les autres

 15   parties n'ont pas déposé de réponse aux demandes des Défenses Praljak,

 16   Stojic et de l'Accusation.

 17   Par ailleurs, en raison du dépôt tardif de la demande de la Défense Coric,

 18   la Chambre n'estime pas nécessaire d'attendre les éventuelles réponses des

 19   parties sur cette demande.

 20   Après avoir examiné les positions des parties, la Chambre constate qu'au vu

 21   du résumé 65 ter de la déposition à venir de l'accusé Petkovic, rien ne

 22   justifie une augmentation du temps alloué à chacune des parties, au titre

 23   de la décision du 24 avril 2008, pour mener à bien leur contre-

 24   interrogatoire respectif. En conséquence, la Chambre décide de rejeter les

 25   demandes de la Défense Stojic, de la Défense Praljak, de la Défense Coric

 26   et de l'Accusation.

 27   La Chambre décide donc de répartir le temps d'audience comme suit : La

 28   Défense Petkovic disposera de six heures pour mener son interrogatoire

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  1   principal de Milivoj Petkovic. L'Accusation disposera de six heures pour

  2   mener son contre-interrogatoire. Les équipes de la Défense Prlic, Stojic,

  3   Praljak, Coric et Pusic, disposeront d'un temps global de trois heures,

  4   soit 36 minutes chacune, à se répartir entre elles. La Chambre rappelle

  5   toutefois que les équipes de la Défense peuvent s'accorder entre elles sur

  6   la répartition de ces trois heures et les prie par la même occasion d'en

  7   informer la Chambre, le cas échéant.

  8    Bien. Monsieur le Greffier, vous avez des numéros à nous donner.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous

 10   remercie.

 11   Quelques parties ont soumis des listes de documents à verser par le

 12   truchement du Témoin 4D-AA; la liste présentée par D4 aura le numéro IC

 13   011070; la liste de D3 aura le numéro IC 11071; et la liste présentée par

 14   l'Accusation aura le numéro IC 011072.

 15   Merci, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Par ailleurs, la Chambre a été saisie le 10

 17   février 2010 d'une demande d'ajout sur la liste 65 ter de documents qui

 18   figurent dans l'annexe. La Chambre demande donc aux parties, à l'Accusation

 19   et autres Défenses, de nous faire connaître dans la journée leur position

 20   sur cette demande d'ajout de 16 documents. Voilà.

 21   Je crois, Maître Alaburic, que vous aviez quelque chose à nous dire.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour.

 23   Je dois reconnaître que je n'ai rien à vous communiquer en guise

 24   d'informations, mais je tiens à vous remercier de la décision qui est

 25   rendue, et nous nous félicitons de commencer aujourd'hui. Mais je crois que

 26   M. Scott s'était levé parce qu'il aurait quelque chose à dire.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 28   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président et bonjour à vous,

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  1   Messieurs les Juges et toutes les personnes présentes d le prétoire.

  2   Je peux donner la position de l'Accusation sur le statut de ces pièces

  3   maintenant. Je suis heureux de pouvoir dire, compte tenu de certains

  4   échanges et des écritures sur d'autres sujets, l'Accusation ne s'oppose pas

  5   à ces derniers. En ce qui concerne l'Accusation, ces documents peuvent être

  6   ajoutés. Merci.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, nous allons donc faire venir le général

  8   Petkovic.

  9   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mon Général, j'espère que le micro fonctionne.

 11   Pour les besoins, donc, du transcript, tout d'abord, je vous resalue à

 12   nouveau. Je vous demande de me donner votre nom, prénom, date de naissance.

 13   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour

 14   à tous et à toutes dans le prétoire.

 15   Je m'appelle Milivoj Petkovic. Je suis né le 11 octobre 1949 à Sibenik,

 16   République de Croatie.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci. Comme aux autres témoins, je vous

 18   demande de nous dire quelle était votre profession ou qualité.   

 19   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je suis

 20   actuellement à la retraite. Mais toute ma carrière durant, j'ai été

 21   militaire. Mon dernier poste a été celui d'inspecteur en chef de l'armée de

 22   la République de Croatie.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Mon Général, avez-vous témoigné devant un

 24   tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie ? Si

 25   c'est le cas, dites-nous devant quel tribunal et à l'occasion de quelle

 26   affaire.

 27   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai témoigné

 28   devant ce Tribunal dans deux affaires. La première, c'est l'affaire Blaskic

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  1   et l'autre, c'est Kordic et Cerkez.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Dans l'affaire Blaskic, vous étiez témoin

  3   de l'Accusation, de la Défense ou de la Chambre ?

  4   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, dans les deux

  5   affaires en question, j'ai été le témoin de la Chambre.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire le serment.

  7   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

  8   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN : MILIVOJ PETKOVIC [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 12   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Général, mes informations vont être

 14   très réduites, car ça ne sera que la troisième fois que vous serez assis à

 15   cette place, et donc vous savez parfaitement comment tout cela se passe.

 16   Qui plus est, ça va faire plusieurs années que vous suivez les débats au

 17   sein de cette salle d'audience et donc il n'y a aucun mystère pour vous.

 18   Donc, de ce fait, vous allez devoir répondre aux questions posées par votre

 19   avocate, Me Alaburic. Puis après quoi, je crois que ce sera moi qui vous

 20   poserai après des questions. Puis les autres avocats des autres Défenses et

 21   M. le Procureur, M. Scott, en l'espèce, je crois, feront le contre-

 22   interrogatoire. Puis, certainement, Me Alaburic reprendra la parole pour

 23   les questions supplémentaires. Tout ceci devrait nous prendre quelques

 24   semaines.

 25   Voilà ce que je voulais vous dire et je vous souhaite donc à nouveau la

 26   bienvenue.

 27   Maître Alaburic, je vous cède la parole.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Une fois de

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  1   plus, je dis bonjour à tous et à toutes. Messieurs les Juges, je vous

  2   réitère mes salutations. Je réitère mes salutations aux collègues de

  3   l'Accusation, notamment M. Scott. Je salue tous mes collègues et consoeurs

  4   de la Défense et toutes les personnes qui sont présentes ici.

  5   Alors je tiens à vous informer, Messieurs les Juges, du fait que la Défense

  6   du général Petkovic, à savoir le collègue, Nicholas Stewart, nous n'allons

  7   pas contacter notre client désormais pendant son audition, pas même

  8   lorsqu'il sera interrogé au principal. Donc, notre communication avec le

  9   général Petkovic ne se ramènera qu'à des questions techniques, au cas où il

 10   aurait besoin d'un document ou d'une assistance technique quelconque. A

 11   chaque fois qu'il y aura communication de ce type, j'informerai la Chambre

 12   afin que vous voyiez tout à fait au courant des communications que nous

 13   aurions échangées avec le général.

 14   Interrogatoire principal par Mme Alaburic :

 15   Q.  [interprétation] Mon Général, bonjour.

 16   R.  Bonjour.

 17   Q.  Parcourons brièvement quelques données pertinentes pour ce qui est de

 18   votre CV. Vous savez quelle est la procédure, je vais donner lecture de ces

 19   renseignements. Vous allez soit les confirmer soit les rectifier s'il y a

 20   erreur quelque part.

 21   Alors, Général, vous avez dit que vous êtes né le 11 octobre 1949. Vous

 22   êtes né à Sibenik, en République de Croatie?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pour ce qui est de votre formation, il convient d'indiquer aux Juges de

 25   la Chambre ce qui suit. Vous avez fait un lycée pédagogique, une école

 26   pédagogique, puis une académie militaire de l'armée de terre, à Belgrade,

 27   c'est à Belgrade que vous avez fait vos études entre 1968 à 1972. Vous avez

 28   effectué une spécialisation en matière de lance missile et de lutte anti-

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  1   blindée en 1976, puis en 1979, vous avez fait un stage d'enseignant aux

  2   écoles militaires de Sarajevo. Vous avez en 1983 terminé votre formation à

  3   l'école de commandement d'état-major de la JNA. En République de Croatie,

  4   vous avez été participant à trois ateliers relatifs au fonctionnement des

  5   commandements d'état-major de l'OTAN, et lesdits ateliers ont été organisés

  6   par des officiers à la retraite de l'armée des Etats-Unis d'Amérique.

  7   Est-ce que ceci est bien exact, mon Général?

  8   R.  Tout à fait exact, oui.

  9   Q.  Pour ce qui est de votre carrière, il importe de dire encore ce qui

 10   suit --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avions entendu un témoin dont je ne dirais pas

 12   le nom, puisqu'il était protégé qui nous avait dit qu'il avait fait aussi

 13   une formation avec des généraux américains. Alors quand il m'a dit cela, je

 14   me suis dit : est-ce que c'était une formation initiée par les Etats-Unis

 15   d'Amérique, dans le cadre d'une coopération avec la Croatie, ou bien

 16   c'était une organisation privée qui avait recruté des anciens officiers

 17   américains pour vendre - entre guillemets - une formation à tous ceux qui

 18   voulaient faire cette formation ? Alors cette formation que vous avez eue

 19   dans les trois ateliers, dans quel cadre était-elle organisée?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, cela a été organisé au

 21   niveau des deux ministères de la Défense, celui de la République de Croatie

 22   et celui des Etats-Unis d'Amérique. L'école en question, formée par ces

 23   généraux à la retraite était dirigée par le général Vuono, et elle a fourni

 24   ses services un peu partout dans le monde. Mais le contrait n'a pas été

 25   conclu directement avec l'école en question mais avec le ministère du pays

 26   concerné. C'est ce qui fait que le général Vuono et son équipe ont

 27   travaillé pendant toute une série d'année en République de Croatie. Ils ont

 28   commencé par l'armée, enfin les soldats de la garde et ils ont formé les

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  1   militaires et les unités de l'armée, et ensuite au niveau du commandement

  2   supérieur il y a eu des activités déployées avec des niveaux supérieurs en

  3   matière de commandement, à partir du niveau de brigadier et au-delà.

  4   Indépendamment du fait de savoir si c'était quelqu'un qui commandait une

  5   brigade, qui était à l'état-major d'une zone opérationnelle ou à l'état-

  6   major en tant que tel, c'est ainsi que cela a été organisé. Le même groupe

  7   - si vous le permettez, je dirais pour la Bosnie-Herzégovine - ce même

  8   groupe, dirigé par le général Vuono dans un programme qui s'appelait

  9   "équiper et former" après la signature des accords à Dayton, a été

 10   sollicité pour fournir ce type de service à l'intention des officiers de

 11   l'AbiH, c'est-à-dire l'armée de la Fédération seulement, pour être plus

 12   précis.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste pour terminer, pouvez-vous me dire à quelle

 14   date exacte vous avez commencé cette formation, dans le cadre de la

 15   signature d'un accord entre la République de Croatie et les Etats-Unis

 16   d'Amérique ? A quel moment avez-vous commencé votre formation ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, ce stage en République de

 18   Croatie a commencé ou, semble-t-il, en 1976. C'était même peut-être en 1974

 19   -- non, je me rectifie; j'ai dit "1976," il faut entendre 1996. C'était les

 20   tout débuts, les tout débuts qui ont entamé avec la formation des unités

 21   subalternes, et ensuite ça a été -- on a enchaîné avec des officiers de

 22   niveau supérieur, tel que proposé par le commandement et accepté par le

 23   groupe. Moi, j'ai été adjoint au groupe en 1996. Comme on avait proposé

 24   plusieurs thématiques, j'ai choisi trois matières qui concernaient les

 25   activités des commandements et des états-majors de certaines structures de

 26   l'OTAN. Ça a duré pendant sept jours, voire dix jours.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être que le général Praljak, pourrait-il

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  1   rectifier la date ?

  2   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je n'ose pas suggérer quoi que ce soit,

  3   mais je crois que M. Petkovic dit à deux reprises "1996." Je demanderais

  4   d'essayer de se rappeler avec plus de précision la date à laquelle ces

  5   généraux ont commencé à exercer leur travail -- effectuer leur travail en

  6   Croatie. Merci.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, j'ai commencé en 1996. Eux, ils avaient

  8   commencé en 1994, c'était le tout début. Il y a eu intervention de

  9   structures différentes, et moi, j'ai participé à la dernière, au dernier

 10   des volets, et j'avais jugé que cela me suffirait.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Si j'ai posé la question de la date, c'est que

 12   pour moi, ça avait une importance.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : -- avait été terminée alors que vous avez déjà posé

 14   une question. Vous rappelez qu'il faut faire les pauses et le général

 15   Petkovic parle au maximum de la vitesse tolérable. Si vous pouvez ralentir

 16   un tout petit peu, les traducteurs vous seront reconnaissants.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Général Petkovic, essayez d'être moins

 18   rapide.

 19   Je voulais dire que, si je posais cette question de date, c'est que pour

 20   moi, il y avait une importance, et là, je découvre que cette formation a

 21   commencé en 1994. Vous, vous l'avez faite en 1996, mais ils ont commencé en

 22   1994; est-ce qu'ils ont commencé cette formation en 1994, alors même qu'il

 23   y avait encore le conflit entre le HVO et l'ABiH ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, en 1994, moi, je n'étais

 25   pas présent à ce stage. Le 5 août 1994, j'ai quitté le HVO, et il y a eu un

 26   premier déplacement de ma part dans ce stage, ce qui s'est passé en 1996.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors dernière question. Je ne vais pas

 28   m'attarder. Peut-être que vous ne pouvez pas répondre. Si vous ne savez

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  1   pas, dites : Je ne sais pas.

  2   Quand vous avez commencé votre stage en 1996, qui était donc un stage

  3   officiel puisque c'était un accord de deux gouvernements. A votre

  4   connaissance, est-ce que le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique a fait

  5   un choix parmi les stagiaires croates ou ils ont accepté tous ceux qui

  6   étaient candidats au stage sans que les Américains fassent un choix ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, le choix a été fait par

  8   les représentants du ministère de la Défense de la République de Croatie,

  9   et c'est pourquoi une partie d'entre nous, qui avait déjà fait des écoles

 10   militaires au sein de la JNA, nous n'avons joint les rangs de ceux qui

 11   faisaient ce stage que plus tard. On avait dit qu'on avait jugé que le tout

 12   début, on n'en avait pas tout à fait besoin pour ce qui est donc des

 13   niveaux que je qualifierais de subalternes. Par conséquent, la République

 14   de Croatie -- voire son ministère de la Défense, son état-major, partant

 15   d'un planning de développement pour ce qui est de ces cadres en matière de

 16   commandement a procédé à la désignation des individus qui iraient suivre

 17   ces stages.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation]

 20   Q.  Quelques mots encore au sujet de votre carrière, mon Général.

 21   Vous avez travaillé pour l'armée populaire yougoslave. Vous avez été en

 22   Slovénie entre 1972 à 1979, puis vous avez été muté à Zadar, où vous étiez

 23   à une école militaire entre 1979 et 1991, et vous y avez travaillé à la

 24   formation du personnel d'artillerie. Le dernier grade que vous avez obtenu

 25   au sein de la JNA a été celui de lieutenant-colonel. Vous avez quitté

 26   l'armée populaire yougoslave en juillet 1991, et le 1er août 1991, partant

 27   d'une décision relative à une cessation de fonctions, vous cessez d'être

 28   officier de la JNA à titre officiel. Puis vous passez dans les rangs de

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  1   l'armée croate, vous coopérez avec l'armée croate depuis le 26 juillet 1991

  2   en votre qualité de volontaire. J'ai dit juillet, c'est bon. Alors nous

  3   avons dit que le 1er août 1991 à titre officiel vous quittez la JNA, et

  4   vous devenez formellement commandant de la défense de Sibenik, et ce,

  5   d'abord partant d'un contrat avec le ministère de l'Intérieur de la

  6   République de Croatie, et à partir du 1er décembre 1991 -- du 1er novembre,

  7   avec le ministère de la République de Croatie.

  8   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont mal entendu la date.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation]

 10   Q.  J'ai dit le 15 novembre 1991, vous êtes affecté au commandement de la

 11   zone opérationnelle de Split pour ce qui est de l'accomplissement de tâches

 12   opérationnelles. Le 14 avril 1992, vous êtes affecté à Grude, qui se trouve

 13   en Bosnie-Herzégovine, pour faire partie du commandement d'un poste de

 14   commandement avancé du front sud, et vous êtes commandant adjoint de M.

 15   Janko Bobetko. A partir de ce moment-là, vous vous trouvez sur le

 16   territoire de la Bosnie-Herzégovine, et vous y restez jusqu'au 24 juillet

 17   1993, en votre qualité de chef d'état-major du HVO. Suite à cela, jusqu'au

 18   9 novembre 1993, vous êtes commandant adjoint de l'état-major principal du

 19   HVO, à savoir l'adjoint du général Praljak. Après cela, à partir donc du 9

 20   novembre 1993 jusqu'au 26 avril 1994, vous êtes adjoint du chef d'état-

 21   major principal du HVO, M. Ante Roso, puis à compter du 26 avril 1994

 22   jusqu'au 5 août 1994, vous vous trouvez être chef d'état-major du HVO.

 23   Puis vous quittez le territoire de la Bosnie-Herzégovine, vous rentrez dans

 24   les rangs de l'armée croate. A partir du 1er novembre 1994, vous êtes

 25   affecté aux fonctions de chef d'état-major du district militaire d'Osijek.

 26   Au bout de six mois, vous êtes affecté aux fonctions de commandant adjoint

 27   du district militaire d'Osijek. Après cela, après le 23 mars 1996 jusqu'au

 28   3 janvier 2003, vous êtes commandant du district militaire de Ston, dont le

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  1   siège se trouve à Dubrovnik. A partir du 3 janvier 2003 jusqu'au mois

  2   d'avril 2004, vous exercez des fonctions d'inspecteur en chef chargé de la

  3   défense de la République de Croatie. Vous êtes mis à la retraite en juillet

  4   2004, et vous aviez un grade de général de corps d'armée de la République

  5   de Croatie; est-ce que ceci est exact ?

  6   R.  C'est tout à fait exact. Juste un petit rectificatif. A titre officiel,

  7   j'ai quitté la JNA le 1er août, parce que c'est à cette date-là que j'ai

  8   reçu une décision de signée par la JNA. Le fait que j'ai quitté quelques

  9   jours avant c'était leur bonne volonté. Ils m'ont dit, Quitte la caserne et

 10   attend le titre officiel pour sa réception. Donc j'ai quitté la JNA un peu

 11   avant que la cessation officielle, c'était peut-être une espèce de

 12   récompense.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Je tiens à rectifier le dernier grade de

 14   l'armée croate, ligne 5, la dernière des lignes -- des grades, vous étiez

 15   général de division de l'armée croate. C'est bon, maintenant c'est bien

 16   consigné.

 17   Q.  Alors, Général - vous venez de me corriger encore une fois - vous avez

 18   beaucoup insisté sur ce point lorsque nous avons parcouru ensemble votre

 19   biographie, donc ce moment où vous quittez la JNA et que vous obtenez une

 20   décision en ce sens. Mais pourquoi avez-vous insisté sur cet aspect

 21   officiel de votre départ de la JNA et sur l'obtention de ce document

 22   officiel ?

 23   R.  Messieurs les Juges, comme j'ai dit, après huit ans de service, j'avais

 24   déjà le droit de quitter la JNA en étant tout à fait en règle, le contrat

 25   que j'avais signé avec la JNA comprenait une scolarisation à deux reprises.

 26   Ce n'est qu'au terme de huit ans de service que j'ai acquis le droit de

 27   quitter la JNA; cependant, je suis resté et j'ai encore tenu pour ainsi

 28   dire jusqu'en 1991. J'aurais pu déposer une requête avant, mais je suis

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  1   resté jusqu'en 1991. C'est l'année, bien sûr, où la Slovénie et la Croatie

  2   ont essayé de sortir de la fédération yougoslave. La Croatie était déjà

  3   confrontée à un moratoire de trois mois. Le centre d'Entraînement

  4   d'artillerie où je me trouvais a commencé à procéder à un transfert de

  5   certains de ses éléments hors de la garnison de Zadar le 22 juin pour des

  6   raisons de sécurité. L'école des officiers de réserve où je suis retourné a

  7   elle aussi été transférée pour des raisons de sécurité en direction de la

  8   garnison de Benkovac, qui ensuite s'est trouvée à être le centre de la

  9   rébellion en Croatie. Donc vous pouvez imaginer ce que ressent l'armée --

 10   ou plutôt, dans une ville comme celle de Zadar à majorité croate, le

 11   sentiment d'insécurité qui était celui de l'armée pour qu'elle soit amenée

 12   à se déplacer jusqu'à Benkovac. D'autres éléments de ce centre

 13   d'Entraînement étaient sur le point d'être transférés à Sarajevo. C'était

 14   la première option, et si c'était impraticable, Belgrade devait être la

 15   seconde option de transfert.

 16   Pour moi, tout à fait concrètement, il est devenu tout à fait clair qu'il

 17   n'y aurait aucune négociation concernant une réorganisation en Croatie.

 18   Etant Croate né en Croatie, oui, mes parents s'y trouvaient également, il

 19   était pour moi inimaginable de quitter la Croatie pour partir avec la JNA

 20   en Macédoine ou ailleurs. Les événements qui ont ensuite marqué l'opinion

 21   publique croate, comme, par exemple, les événements de Plitvice, ou des

 22   insurgés serbes, sont sensés avoir attaqué les forces de l'ordre croate,

 23   ensuite les événements de Borovo Solo. Mais, là encore, c'est la JNA qui

 24   était derrière les événements qui se sont déroulés, on s'est rendu compte

 25   après que ce n'était pas des volontaires ni des insurgés serbes qui étaient

 26   les instigateurs mais bien la JNA, comme dans le cas de Plitvice.

 27   Suite à tout cela, à Zadar, nous avons posé la question de savoir pourquoi

 28   la ligne de chemin de fer Zadar, Benkovac, Knin, Gracac, Zagreb avait été

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  1   bloquée et pourquoi la JNA ne levait pas le blocage qui avait été imposé

  2   sur cet axe ferroviaire majeur. Nous avons alors reçu la réponse suivante,

  3   on nous a dit qu'il ne nous revenait pas de réfléchir sur ce genre de

  4   sujet, qu'il y avait cet organe au sein de l'état-major qui était le SSNO,

  5   qui allait prendre une décision en temps voulu.

  6   Q.  Général, je voudrais simplement vous prier d'abréger peut-être un peu

  7   cette partie nous n'aurons pas le temps d'aborder tous les aspects.

  8   R.  Très bien. Alors la JNA en fait qui était cantonnée à la Garnison de

  9   Zadar a quitté son cantonnement pour être transférée hors de Croatie, c'est

 10   ça l'essentiel, moi, cela ne me convenait pas. Je n'étais pas né en Bosnie-

 11   Herzégovine, mais en Croatie, et sans la Croatie ne pouvait plus cette

 12   Yougoslavie dans laquelle j'avais vécu. Donc je ne voulais pas aller vivre

 13   ailleurs, je ne pouvais pas fuir, la recommandation du secrétaire fédéral

 14   était que ceux qui voulaient partir, ceux qui voulaient quitter la JNA

 15   pouvaient le faire, et c'est ce que j'ai fait. J'ai considéré que c'est ce

 16   que j'avais à faire et j'ai même été escorté par mon commandant jusqu'à la

 17   sortie.

 18   Q.  Alors, Général, jusqu'à la fin des années '80, jusqu'à ce moment-là

 19   est-ce que vous étiez satisfait de votre vie et de votre travail au sein de

 20   la JNA ?

 21   R.  Messieurs les Juges, j'étais tout à fait satisfait, c'était absolument

 22   certain. Les soldes n'étaient pas très importantes, mais elles étaient

 23   certainement plus importantes que les salaires des employés du secteur

 24   public ou même privé d'ailleurs. Moi, j'ai pu obtenir un appartement après

 25   trois mois d'attente, alors que certains attendaient cinq ans. J'ai pu

 26   changer ensuite d'appartement au moment où j'ai monté en grade, et les

 27   circonstances étaient plutôt favorables, c'était ma vocation que j'avais

 28   choisie, mais est arrivé un moment où j'ai tout simplement dû me séparer

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  1   d'une armée telle que celle-là, une armée yougoslave telle que celle-là.

  2   Q.  Général, vous nous avez dit, qu'en 2003 vous avez été affecté au poste

  3   d'inspecteur général des armées et de la République de Croatie. Alors est-

  4   ce qu'il s'agissait là d'une promotion, Général, dans le cadre d'une

  5   carrière militaire ou non ?

  6   R.  Compte tenu de tout ce que j'avais déjà fait précédemment en République

  7   de Croatie, c'était une promotion dans ma carrière. En disant cela, je

  8   voudrais juste préciser que j'ai quitté le HVO avec cette image de chef

  9   d'état-major, et que je suis arrivé en tant qu'homme numéro trois dans une

 10   zone opérationnelle de la HV, on m'a tout simplement dit que je n'avais pas

 11   le choix, que j'avais été le chef d'état-major du HVO, et que maintenant je

 12   pouvais être le numéro trois dans une zone opérationnelle, et que je

 13   pouvais accepter ou refuser. J'ai accepté, et après quelques années, donc

 14   j'ai continué mes activités.

 15   Q.  Qui était le ministre de la défense à l'époque ?

 16   R.  C'était M. Gojko Susak.

 17   Q.  En 2003 ?

 18   R.  En 2003, c'était Mme --

 19   Q.  Zeljka Antunovic ?

 20   R.  Oui, Zeljka Antunovic, du Parti SDP. Il y avait également eu M. Radas,

 21   du gouvernement de la coalition avant elle.

 22   Q.  Alors quand vous dites "le Parti du SDP," ce sont les sociaux

 23   démocrates, n'est-ce pas

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Qui était le président de la République de Croatie à ce moment-là en

 26   2003 ?

 27   R.  C'était M. Stipe Mesic, qui partira dans quelques jours, me semble-t-

 28   il.

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  1   Q.  Général, est-ce que vous vous considérez comme un militaire de métier ?

  2   R.  Oui, absolument, je remplis tous les critères exigibles d'un soldat,

  3   d'un militaire de métier.

  4   Q.  Alors dites-nous votre position personnelle, Général; est-ce que la

  5   qualité du travail d'un militaire de métier peut dépendre du programme

  6   politique du parti au pouvoir ? De telle façon, que vous serez, par

  7   exemple, un bon soldat ou un bon officier si ce sont les chrétiens

  8   démocrates qui sont au pouvoir, mais on déclarera que votre travail est de

  9   mauvaise qualité le jour où les sociaux démocrates arrivent au pouvoir ?

 10   Que pensez-vous de cette approche ?

 11   R.  Messieurs les Juges, seule la façon dont vous travaillez et vos

 12   compétences et vos connaissances déterminent la qualité de votre travail;

 13   cependant, si le parti, qui arrive à un moment donné au pouvoir, souhaite

 14   formuler telle ou telle évaluation, c'est autre chose. Il y a eu également

 15   des cas où on a utilisé des logiciels informatiques pour envoyer toute une

 16   série de personnes, pour sélectionner et envoyer à la retraite toute une

 17   série de personnes dans un processus de réduction d'effectifs en Croatie.

 18   Je dois dire que la sensibilité ou l'affinité politique des uns ou des

 19   autres a joué un rôle certain dans la sélection par ce logiciel

 20   informatique. Quand je parle de "logiciel informatique," c'est un

 21   euphémisme, bien sûr.

 22   Q.  Alors quand on parle d'un militaire de métier, est-ce qu'il doit

 23   effectuer son travail de façon professionnelle indépendamment du parti au

 24   pouvoir ?

 25   R.  Absolument, quelqu'un qui veut travailler sérieusement doit procéder de

 26   cette façon, indépendamment du parti qui est au pouvoir. Quant à la façon

 27   dont il sera jugé ou évalué, là encore, on peut trouver différents

 28   critères.

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  1   Q.  Général, quel est votre point de vue, quant aux buts de l'action des

  2   forces armées? Est-ce que c'est aux pouvoirs civils de les déterminer, ou

  3   bien l'armée elle-même peut-elle déterminer quels sont les objectifs qui

  4   doivent être les siens ?

  5   R.  Messieurs les Juges, il est tout à fait évident que ce sont les hommes

  6   politiques qui déterminent les objectifs que l'armée elle doit exécuter,

  7   mettre en œuvre.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant vos états de service, j'ai deux questions

 10   à vous poser. La première question : Quand vous étiez officier dans la JNA,

 11   étiez-vous membre du Parti communiste yougoslave ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je suis devenu

 13   membre de la Ligue des Communistes en deuxième année d'Académie militaire,

 14   et pour tout vous dire, j'ai dit que j'ai quitté la JNA mais j'ai omis --

 15   j'ai oublié de dire que j'ai également quitté la Ligue des Communistes;

 16   c'était pratiquement automatique. Donc pendant quasiment toute ma carrière,

 17   mis à part les deux premières années à l'Académie militaire en tant que

 18   cadet, j'ai été membre de la Ligue des Communistes, donc, pendant 22 ans.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez été membre de la Ligue des

 20   Communistes, vous l'avez été par idéologie, ou bien c'était un mode

 21   obligatoire ? Si on voulait faire carrière, on ne pouvait pas atteindre

 22   certains grades si on n'était pas membre du Parti communiste yougoslave ?

 23   Alors est-ce que vous l'avez fait parce que vous ne pouviez pas faire

 24   autrement ou pour des considérations idéologiques ?

 25   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 26   Juges, je peux vous fournir l'explication suivante : En arrivant à

 27   l'Académie militaire, vous êtes suivi. On remarque si vous êtes un bon

 28   élève ou pas, et le parti est représenté, il est présent dans votre

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  1   peloton, dans votre promotion, dans toutes les structures. Vous ne pouvez

  2   rien faire sans que cela ne soit avalisé par le parti. Lorsque vous arrivez

  3   au terme d'une formation d'un mois, vous procédez à une analyse de cette

  4   formation. Il est normal que ce soit analysé par les structures de

  5   commandement. Mais le parti intervient aussi en la matière, parce qu'il

  6   participe à la formation et il effectue également une analyse du

  7   comportement de ses membres pendant la formation, d'une part et d'autre

  8   part, de la façon dont ceux qui sont membres du parti ont influencé ceux

  9   qui n'en étaient pas membres dans l'accomplition [comme interprété] de leur

 10   mission.

 11   Il était impossible de se livrer à la moindre tâche dans la vie des unités

 12   sans que le parti y trouve sa place. Le parti intervenait toujours, si bien

 13   que dans certains domaines, on a trois niveaux différents qui interviennent

 14   pour exactement la même chose. Donc, la structure elle-même, son

 15   commandement et le parti. Alors, il y avait aussi la structure des

 16   Jeunesses socialistes fédérales, qui étaient présentes au sein des forces

 17   armées. A la fin, par exemple, de ma première année de l'Académie

 18   militaire, le parti intervenait et émettait une évaluation quant à mon

 19   succès, à ce que j'avais réussi à atteindre comme niveau, donc le parti

 20   était omniprésent.

 21   Deuxièmement, du point de vue de votre carrière, il était très important

 22   que vous soyez au sein du parti, que vous en soyez membre. Si vous étiez

 23   puni par le parti au point que vous en soyez exclus, il était possible de

 24   continuer à travailler au sein de la JNA, mais une chose était absolument

 25   certaine : Même si vous continuiez à travailler pendant cinq ans, vous

 26   n'auriez plus aucun avancement et vous seriez mis dans un placard, en fait.

 27   Les sanctions, en fait, imposées par le parti étaient considérées comme

 28   beaucoup plus lourdes que les sanctions disciplinaires. Donc, en fait,

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  1   c'était le parti qui déterminait en définitive votre avancement. Vous ne

  2   pouviez pas devenir commandant de division sans être membre de la Ligue des

  3   Communistes, même commandant de bataillon, d'ailleurs. Vous pouviez devenir

  4   commandant de compagnie parce qu'il était possible de le devenir en n'étant

  5   pas encore membre. Les structures du parti tenaient le raisonnement que

  6   vous étiez encore jeune. Mais ensuite, on vous incitait à devenir membre,

  7   lors des réunions.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question. Quand vous avez quitté le HVO,

  9   vous avez dit que vous êtes retourné, donc dans l'armée croate, et on vous

 10   a affecté au numéro 3 dans une zone opérationnelle. J'ai cru comprendre -

 11   mais peut-être je me suis trompé - au travers de vos propos, une forme de

 12   dépit, peut-être lié au fait qu'ayant exercé une fonction de haut

 13   commandement au sein du HVO, vous auriez pu vous attendre à avoir un poste

 14   au moins similaire alors que, là, vous vous trouvez numéro 3. Vous précisez

 15   également, par ailleurs, qu'à l'époque, le ministre de la Défense était M.

 16   Susak.

 17   Alors, pouvez-vous me dire si cette affectation était une forme de non

 18   prise en compte de votre fonction au sein du HVO ? Car ayant été volontaire

 19   au HVO, l'armée croate n'avait pas à tenir compte de ce que vous aviez

 20   fait, ou était-ce une forme de sanction ou une autre raison ? Est-ce que

 21   vous pouvez nous dire votre sentiment personnel sur cette affectation ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 23   non, je n'aurais pas tendance à considérer cela comme une sanction, pas du

 24   tout, ni comme une façon de minorer ce que j'avais fait. A l'époque, la

 25   Croatie avait déjà un grand nombre de ses propres commandants, ses

 26   généraux, qui avaient été présents pendant toute la durée de la guerre en

 27   Croatie. Il n'aurait pas été juste, indépendamment du fait que j'avais été

 28   chef d'état-major, eh bien, il n'aurait pas été juste que je prenne la

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  1   place de quelqu'un d'autre. Je suis tout à fait satisfait que le ministre

  2   de la Défense d'alors et le chef d'état-major d'alors m'aient donné cette

  3   possibilité. Alors on m'avait proposé une autre option qui aurait été de

  4   prendre la direction d'une école militaire. Mais il y avait là quelqu'un

  5   qui était seulement à deux ans de son départ à la retraite, et donc après

  6   trois ou quatre ans de service dans ce poste, on ne souhaitait pas faire

  7   partir cette personne et c'était très bien comme ça. Donc j'ai accepté le

  8   poste de chef d'état-major au sein de la Région militaire d'Osijek parce

  9   qu'on m'avait dire quelle serait l'évolution professionnelle là-bas.

 10   Mon premier adjoint est parti, en fait, pour rejoindre le bureau de la

 11   présidence de la République, et on a dit également à ce moment-là que le

 12   commandant d'état-major partirait pour rejoindre le ministère de la

 13   Défense. Donc pendant une courte période de temps, j'ai été commandant du

 14   district militaire, mais je devais devenir commandant du district militaire

 15   mais ça ne s'est pas passé ainsi. Le commandant est resté un peu plus loin

 16   et, entre-temps, il y a eu une réorganisation de l'armée croate; une

 17   nouvelle région militaire a été mise en place dans le sud de la Croatie, la

 18   Région numéro 4. On m'a proposé soit d'attendre que le poste du

 19   commandement à Osijek soit réaffecté et que je puisse recevoir ce poste,

 20   soit de partir à Dubrovnik. Donc en ma qualité de Dalmate, j'ai accepté de

 21   partir à Dubrovnik. J'y ai établi une région militaire.

 22   Ensuite, après sept ans de service à ce poste, en raison d'une nouvelle

 23   réorganisation de l'armée croate, j'ai aboli cette région militaire, et à

 24   cet égard, je suis détenteur d'un record puisque j'ai été commandant de

 25   région militaire pendant sept ans. Je n'avais aucune objection quant au

 26   fait d'être commandant de Région militaire à Dubrovnik. C'est une région

 27   magnifique et je n'aime pas les grandes villes comme Zagreb. Donc,

 28   j'apprécie plus la tranquillité, et lorsqu'on m'a propose de devenir

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  1   inspecteur général de l'armée croate, il ne me restait plus que deux ou

  2   trois ans avant de partir à la retraite. J'ai donc accepté de prendre ce

  3   poste. Je suis resté jusqu'à mon arrivée ici, à Scheveningen, sans la

  4   moindre fonction officielle.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  6   Maître Alaburic. 

  7   Mme ALABURIC : [interprétation]

  8   Q.  Général, est-ce que, dans une société organisée, la société civile, le

  9   pouvoir civil doit exercer un contrôle sur l'armée ?

 10   R.  Le pouvoir civil est celui qui contrôle les forces armées. En tant

 11   qu'inspecteur général des armées en République de Croatie, je n'étais pas

 12   subordonné aux chefs des armées mais au ministre de la Défense, qui fait

 13   partie intégrante du gouvernement croate. On considère donc que cette

 14   structure est de nature civile. Je n'étais pas subordonné au commandant

 15   militaire suprême, et je n'entrais pas dans la catégorie des personnels,

 16   considérés comme membres des forces armées. Donc j'étais à la tête d'une

 17   section, d'un département qui faisait intégralement partie du pouvoir

 18   civil, à savoir du gouvernement de la République de Croatie. Donc d'une

 19   façon tout à fait concrète, c'était la branche civile du pouvoir qui

 20   exerçait un contrôle sur les forces armées.

 21   Q.  Alors si nous essayons de généraliser maintenant un petit peu,

 22   indépendamment de la situation en Croatie, est-ce que vous considérez qu'il

 23   est normal de façon générale que ce soit le pouvoir civil qui contrôle les

 24   forces armées ?

 25   R.  Absolument. Ce serait une situation particulièrement dangereuse que de

 26   voir les forces armées exercées elles-mêmes leur propre autocontrôle.

 27   L'armée ne servira à rien dans ce cas-là, et encore moins dans l'autre cas

 28   où ce serait les forces armées qui exerceraient un contrôle sur les

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  1   autorités civiles.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai écouté avec attention la question et avec

  3   encore plus d'attention votre réponse. Si je comprends bien, vous dites que

  4   le ministère de la Défense en Croatie était contrôlé par les autorités

  5   politiques civiles, et que donc s'il y a une action militaire, elle est

  6   sous contrôle de l'autorité politique.

  7   A l'époque des évènements liés à l'acte d'accusation, le président

  8   était M. Tudjman, général de son état, mais président de la République de

  9   Croatie; est-ce à dire que tout ce qu'il a pu faire et tout ce que la HV a

 10   pu faire a toujours été de votre point de vue contrôlé par le pouvoir

 11   politique civil ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le

 13   commandement Suprême des forces armées dispose de ses propres attributions

 14   au sein du système de commandement, et en tant que tel, il ne peut pas être

 15   contrôlé; cependant, tous les autres de l'armée sont soumis au contrôle du

 16   pouvoir civil, si bien qu'en Croatie, c'est le gouvernement qui a pris

 17   cette décision d'une réduction des effectifs de la HV. Ce n'est pas le

 18   commandement Suprême des forces armées qui a pris cette décision, c'est le

 19   gouvernement croate, qui se fondant sur les possibilités laissées par le

 20   budget et les évaluations qu'il avait faites à l'époque, a pris donc cette

 21   décision de réduction d'effectifs au sein des forces armées : dans un

 22   premier stade de 30 %, puis il y a eu une deuxième réduction de 20 %

 23   supplémentaire et ainsi de suite. Cette décision de réduction d'effectifs

 24   et d'autres décisions ont été prises par le ministère de la Défense.

 25   L'état-major principal n'était qu'une branche opérationnelle qui devait

 26   mettre en œuvre dans certains délais ce type de décision, par exemple, de

 27   réduction de tant et tant % des effectifs des forces armées.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais affiner ma question, qui pour moi est

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  1   importante. D'ailleurs quand je pose une question, sachez que c'est

  2   toujours important après ces quatre années de procès.

  3   Si l'armée croate intervient en République de Bosnie-Herzégovine, est-ce

  4   que cette intervention, d'après vous, relève de la compétence exclusive du

  5   commandant suprême, en l'espèce à l'époque, le président Tudjman, ou bien

  6   cette intervention devait être autorisée par les autorités civiles,

  7   gouvernement, parlement, peuple, par les voies des élections ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  9   vous répondrais avec encore plus d'attention.

 10   L'armée croate avec ses composantes n'est pas intervenue en Bosnie-

 11   Herzégovine, à savoir, elle n'a pas déployé ses unités armées qui font

 12   partie de son organigramme. Elle n'a pas mis sur pied une structure de

 13   commandement pour diriger cela. Au départ, l'armée croate, à savoir c'est

 14   le moment ou je les rejoins également, a dépêché un groupe d'officiers pour

 15   qu'ils se chargent d'organiser, de préparer, de mettre sur pied les forces

 16   présentes en Bosnie-Herzégovine, les forces qu'on a pu trouver sur place.

 17   Puis pendant la guerre, il en a déjà été question ici, il y avait des

 18   forces effectivement qui faisaient partie de l'armée croate, mais il s'agit

 19   là de volontaires. Leur voie hiérarchique, en fait, se termine au niveau de

 20   l'état-major principal du HVO. Leur voie hiérarchique n'a rien à voir avec

 21   le commandement opérationnel le plus proche en Croatie, voire encore moins

 22   au commandement central basé à Zagreb.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dû noter dans ma question que

 24   j'avais commencé ma question en disant si - en anglais "if," donc c'était

 25   une hypothèse, et vous --

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez répondu en disant -- si j'ai bien

 28   compris votre réponse, vous affirmez que l'armée croate n'est pas

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  1   intervenue en République de Bosnie-Herzégovine; c'est bien ce que vous

  2   dites ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai dit, car lorsque je me

  4   penche sur la question de l'armée croate, à ce moment-là, j'essaie

  5   d'envisager tous les éléments constitutifs de son organigramme, de sa

  6   structure. Pour moi, à mes yeux, les 100 ou les 150 hommes qui vont se

  7   rendre en Bosnie-Herzégovine n'en font pas partie. Qui plus est, à 99 %, il

  8   s'agit là de citoyens de la Bosnie-Herzégovine qui ont pris part au combat

  9   en République de Croatie, et qui maintenant reviennent en Bosnie-

 10   herzégovine. Donc c'est une toute autre chose, à mon sens, que lorsque l'on

 11   parle de la Croatie et de l'armée croate.

 12   Je dois préciser qu'en octobre, nous avions 10 000 - je ne sais pas le

 13   chiffre exact - 10 000 hommes originaires de Bosnie-Herzégovine  pour

 14   lesquels on considérait qu'ils étaient absents à titre -- qui s'étaient

 15   excusés. En fait, le HVO aurait pu s'ils avaient été un peu plus actifs,

 16   aurait pu se doter ou de deux ou trois brigades, composés de ses

 17   volontaires prêts à se rendre au champ de bataille. Donc si on parle de

 18   l'armée croate, il faut l'envisager dans son ensemble. Elle peut

 19   s'acquitter d'un certain nombre de missions, elle a une tête et une queue,

 20   comme on dit. Elle a des unités, elle a sa structure de comblement.

 21   Puis puisque nous en parlons, la partie qui s'est trouvée dans la partie

 22   frontalière de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine, ils se sont rendu,

 23   en respectant tous les principes de la guerre, parce qu'ils sont venus

 24   s'opposer à une armée qui constituait une unité en République de Croatie en

 25   son sud, et en Bosnie-Herzégovine, c'était le Groupe opérationnel 2 de la

 26   JNA, commandé par le général Strugar, en Herzégovine, commandé par le

 27   général Perisic en partie, et en Croatie, à partir de Dubrovnik jusqu'à

 28   Neum, les amiraux Zec et Jokic, je pense.

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  1   Donc c'était une armée, l'armée qui s'était emparée d'une zone

  2   opérationnelle et stratégique comprenant la Bosnie et la Croatie, et c'est

  3   de là qu'elle attaquait la Croatie. Donc vu cette situation, à certains

  4   endroits, l'armée croate a pénétré -- a empiété sur le territoire de

  5   Bosnie-Herzégovine pour ainsi dire, mais de manière tout à fait justifiée,

  6   et ce n'était qu'en novembre jusqu'au 6 décembre 1991. Le 6 décembre 1991,

  7   de manière définitive, lorsque l'armée croate s'est emparée d'une quinzaine

  8   de kilomètres de ligne de front au sud de Stolac, on appelle cette région

  9   les Stolovi, c'était notre "OG-2," vous vous en souviendrez. A ce moment-

 10   là, les forces de la JNA ne sont pas parvenues à l'emporter sur la défense

 11   de la République croate qui, jusqu'à ce moment-là, se défendait uniquement

 12   sur cette tranche très étroite de République de Croatie, où elle avait dans

 13   son dos depuis la République de Bosnie-Herzégovine les forces de la JNA qui

 14   venaient donc l'attaquer. Donc c'est uniquement parce que, nous, on a

 15   compris qu'il convenait de rallonger cette zone de dix kilomètres vers la

 16   Bosnie-Herzégovine puisque ce sont les mêmes forces en Croatie et en

 17   Bosnie, on a pu mettre fin à cela, et là, ils n'ont pas pu prendre Neum. On

 18   les a arrêtés. Ils n'ont pas pu rentrer dans la vallée de la Neretva.

 19   Pendant plusieurs mois, ils sont restés arrêtés là et puis en 1992, on les

 20   a repoussés vers Dubrovnik, et puis on les a chassés en octobre de cette

 21   année vers la Yougoslavie de l'équipe, c'est-à-dire le Monténégro.

 22   J'espère qu'il y aura d'autres questions qui porteront là-dessus.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y aura d'autres questions. En tout cas, merci

 24   pour cette réponse qui, sauf erreur de ma part, me permets de constater que

 25   vous dites que l'armée croate est intervenue sur une distance de dix

 26   kilomètres en raison de l'action de la JNA, mais que, le 6 décembre 1991 -

 27   vous êtes très précis - il faut considérer que l'armée croate a cessé son

 28   action et donc, n'a pas participé à une action militaire en République de

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  1   Bosnie-Herzégovine, dans ce que vous définissez dans toutes ses

  2   composantes.

  3   Bon. Est-ce bien résumé votre position ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le 6 décembre, je dois

  5   préciser que l'armée croate arrêtait l'avancée de la JNA depuis Stolac en

  6   passant par un secteur qu'on appelle "Stolovi," vers Metkovic et vers la

  7   Neretva, et le long du littoral adriatique en passant par Neum, vers la

  8   vallée de la Neretva. Donc, le 6 décembre, les forces de la JNA ont été

  9   arrêtées de manière définitive le long de cet axe.

 10   Et plus jamais, non seulement n'ont-ils pas franchi la ligne mais en

 11   mai 1992, par une offensive menée par l'armée croate, on les a repoussés

 12   vers le sud, l'extrémité sud de la République de Croatie et je pense que

 13   c'était le 15 octobre que la communauté internationale est intervenue.

 14   Votre pays, le général Morillon, et il a présidé les négociations entre les

 15   généraux Strugar et Bobetko à bord d'un navire, et ils se sont mis d'accord

 16   pour donner la possibilité à la JNA de se replier vers les arrières de

 17   Dubrovnik. L'armée croate allait s'arrêter, le temps qu'ils se replient.

 18   Puis la communauté internationale, soi-disant pour garantir la sécurité de

 19   la frontière, a envoyé des observateurs militaires le long de la frontière

 20   avec le Monténégro, la Yougoslavie de l'époque et la presqu'île de

 21   Prevlaka, et j'ai eu l'honneur, moi-même, en tant que commandant qui est

 22   arrivé là en 1996, que je coopère avec ces observateurs militaires. Certes,

 23   eux, ils se rendaient dans leur commandement, et moi, je ne pouvais pas me

 24   rendre chez eux parce qu'eux, ils étaient basés sur un territoire placé

 25   sous le mandat de la FORPRONU et un général croate n'avait pas le droit de

 26   mettre le pied sur ce territoire.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, pour être très précis, à

 28   quelle date exacte la HV, avec drapeaux, écussons, plaques

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  1   d'immatriculation des véhicules, soldats, a repassé la frontière de la

  2   République de Bosnie-Herzégovine ? A quelle date exacte ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] L'armée croate, c'est vers la fin du mois de

  4   novembre 1991, après la chute de la localité de Slano et de la localité de

  5   Smokovjani et celle de Visocani, elle était plus en mesure de se défendre

  6   puisqu'on l'a attaquée sur le flanc de Bosnie-Herzégovine. Donc elle a

  7   déployé une partie de ses forces, à ce moment-là, jusqu'à dix kilomètres

  8   au-delà de sa frontière pour couvrir cette zone vers Stolac, puisque la JNA

  9   l'a attaquée depuis Stolac.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, vous êtes un spécialiste, et mes questions

 11   sont extrêmement précises. Donc essayez d'y répondre de manière très

 12   précise.

 13   Ma question, elle était la suivante : D'après vous, à quelle date exacte la

 14   HV a refranchi la frontière de la République de Bosnie-Herzégovine ? Voilà.

 15   Vous savez ou vous ne savez pas.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois vous dire que, pendant la deuxième

 17   quinzaine du mois de novembre 1991 - je ne sais pas la date exacte, là - je

 18   n'arrive pas à me rappeler la date car le 15 novembre, je suis arrivé dans

 19   la zone opérationnelle de Split, et puis quelques jours plus tard, enfin,

 20   le 6 décembre, je me suis rendu sur le terrain, là où les forces de la JNA

 21   ont été arrêtées.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, si je comprends ce que vous dites, le 1er

 23   janvier 1992 - je prends cette date au hasard - le 1er janvier 1992, vous

 24   affirmez qu'il n'y avait plus en République de Bosnie-Herzégovine, dans ses

 25   limites résultant de la Fédération yougoslave, un soldat de l'armée de la

 26   République de Croatie ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai

 28   dit que, dans cette partie sud, c'est dans la deuxième moitié du mois de

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  1   novembre 1991 qu'elle est entrée, et elle y est restée jusqu'au mois de mai

  2   1992. A ce moment-là, depuis ses positions, elle a lancé une contre-

  3   offensive contre la JNA dans la direction de Dubrovnik, donc en libérant ce

  4   secteur. Puis dans cette partie-là, il y a eu des endroits où on est rentré

  5   de l'ordre de 300 mètres ou un kilomètre en fonction de la topographie du

  6   terrain, au-delà, pour pouvoir installer une ligne pour le flanc pour

  7   arrêter les attaques qui venaient de l'Herzégovine orientale, c'est-à-dire

  8   de Bosnie-Herzégovine. Car l'armée croate, comme elle attaquait le long de

  9   sa frontière, elle essuyait des attaques de l'armée serbe et de la JNA

 10   enfin avant qu'elle ne se replie sur le flanc depuis la Bosnie-Herzégovine.

 11   Donc il a fallu qu'elle s'oriente de cette manière-là, le général Beneta en

 12   a parlé. Il s'y est trouvé le long du champ de Popovo, puis jusqu'aux

 13   pentes qui surplombent Dubrovnik.

 14   La partie serbe a toujours souligné que l'armée croate devait se replier de

 15   cette partie du territoire de Bosnie, et le 6 avril 1993, il y a eu des

 16   négociations à Sarajevo, on nous a fait venir nous trois commandants de

 17   Bosnie. Le général Cervenko est venu en tant que représentant de l'armée

 18   croate pour s'entretenir avec Mladic, et il lui a dit, Lorsque vous vous

 19   serez replié de là-bas, nous aussi -- par moment il y avait 100 mètres, par

 20   moment 200, 300 mètres le long de cette tranche, nous nous replierons

 21   également.

 22   Telle a été la situation, moi, j'étais parti de là-bas jusqu'aux accords de

 23   Dayton. Après Dayton, on a vu arriver dans ce secteur où s'était trouvée

 24   l'armée croate, on a vu arriver les militaires du HVO qui étaient désormais

 25   une armée légale en Bosnie-Herzégovine. Donc vers le champ de Popovo, on a

 26   vu se déployer les militaires du HVO, et l'armée de la République de

 27   Croatie n'était plus déployée dans cette partie du territoire.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Une correction du compte rendu d'audience

  2   qu'il vaut mieux adresser, Monsieur le Président, pour éviter des

  3   malentendus.

  4   Q.  Mon Général, le compte rendu d'audience dit que vous seriez resté

  5   jusqu'au Dayton; mais qu'est-ce que cela veut dire ?

  6   R.  Dans cette partie frontalière en direction de Dubrovnik, donc cette

  7   bande très étroite vers Dubrovnik, l'armée croate est restée déployée aux

  8   positions qui par moments rentraient sur le territoire de Bosnie-

  9   Herzégovine jusqu'aux accords de Dayton, et à ce moment-là, on a déployé

 10   sur ce territoire le HVO qui était l'armée légale de la Fédération de

 11   Bosnie-Herzégovine. A partir de ce moment-là, l'armée croate n'était plus

 12   là, elle s'est contentée de garder ses frontières.

 13   Je voudrais vous dire qu'en 1996, au mois de juin, j'ai été commandant et

 14   j'ai démobilisé les 1 000 derniers militaires de l'armée croate et j'ai

 15   remis la frontière.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Petkovic, grâce à vos réponses qui sont

 17   maintenant très précises, je crois comprendre que l'armée croate est restée

 18   dans une zone frontalière qui pouvait faire 100, 200 ou 300 mètres. On ne

 19   va pas mesurer.

 20   Elle est donc restée dans cette zone frontalière jusqu'aux accords de

 21   Dayton, puis après les accords de Dayton, l'armée croate a quitté les lieux

 22   et a été remplacée par le HVO; c'est exact ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, c'est exact. Je pense

 24   qu'après le HVO, il y a eu les forces du MUP qui sont arrivées, parce que

 25   Valentin Coric je l'ai croisé là-bas. Il était chef du MUP de cette région

 26   administrative. De l'autre côté de la frontière, il déployait les Unités de

 27   la Police civile, donc de manière définitive, on a résolu le problème, à ce

 28   moment-là. Il y avait la police civile du côté croate et la police civile

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  1   du côté de la Bosnie-Herzégovine.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, jusqu'aux accords de Dayton, la communauté

  3   internationale savait que vous étiez là dans cette zone frontalière, et

  4   qu'ils ont essayé avec les Serbes et les Musulmans de régler ce problème.

  5   Mais manifestement il n'a été réglé qu'après les accords de Dayton ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il

  7   était impossible d'obtenir des garanties de la part de l'armée de la

  8   Republika Srpska. Voyez-vous, il était impossible de savoir certainement ce

  9   qu'ils allaient faire, à ce moment-là, car il n'y avait là que ces pentes

 10   où on se défendait, et dès qu'on était partis on est directement dans la

 11   mer. Il n'y a aucune profondeur de terrain.

 12   Je dois dire que, lorsque l'armée yougoslave à la mi-octobre 1992 a

 13   dû se replier conformément aux termes de l'accord, ils sont venus à l'idée

 14   de laisser l'armée de la Republika Srpska se déployer dans ce secteur, même

 15   si c'est sous l'égide du général Morillon qu'un accord a été passé. Mais le

 16   général Bobetko a compris leurs intentions, il est arrivé avant eux sur

 17   cette partie de la frontière. Comme ils étaient en bons termes avec lui ils

 18   sont revenus vers Trebinje. Puis la JNA et les volontaires de Serbie à

 19   partir de ce moment-là se sont redéployés vers Nevesinje-Bileca, et

 20   maintenant qu'ils ont perdu la situation sur le littoral, ils ont essayé de

 21   revenir sur la rivière Neretva. Vous savez, on n'a pas arrêté de parler de

 22   cette opération Bura, mais personne n'a dit quelle était la raison de cette

 23   opération.

 24   C'est de Serbie et du Monténégro que vous avez les forces qui sont

 25   redéployées en Herzégovine orientale au moins pour récupérer la vallée de

 26   la Neretva maintenant qu'ils n'ont plus l'accès à la mer, en fait ils

 27   voulaient s'emparer de l'accès à la mer en s'emparant de ce territoire dans

 28   la République de Croatie, et c'est la raison pour laquelle il y a eu Bura,

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  1   il fallait que l'on attaque ces forces qui étaient en préparation, il y

  2   avait très peu de volontaires à ce moment-là en Herzégovine orientale.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation]

  4   Q.  Voyez-vous qu'il n'est pas facile de ralentir, mon Général.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Précisez-nous : suite à la question du président, donc dans cette

  7   partie frontalière de Bosnie-Herzégovine, l'armée croate s'y est trouvée

  8   même après la signature de l'accord de Washington.

  9   R.  Oui.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Correction au transcript. Je ne suis pas général.

 11   Donc je corrige.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Il paraît que l'erreur ne vient pas de moi,

 13   je présente mes excuses si tout cela c'était de ma faute.

 14   Q.  Donc c'est après les accords de Washington. La présence de l'armée

 15   croate dans cette partie frontalière de Bosnie-Herzégovine, pour la partie

 16   musulmane, est-ce que constitue un problème ?

 17   R.  Non, Monsieur le Président, ce n'était pas un problème du tout.

 18   D'autant que lorsqu'on voit la directive de Sefer Halilovic, l'on voit

 19   qu'il souhaite opérer une jonction entre les forces de l'armée en Bosnie-

 20   Herzégovine avec les forces de l'armée croate pour s'emparer de Nevesinje,

 21   Bileca et Trebinje ensemble, et dans la partie occidentale, en passant par

 22   Livno pour pouvoir avancer vers Grahovo. Donc dans sa directive, il opère

 23   une jonction sur son flanc droit, la République de Croatie, ses hommes, ses

 24   effectifs, et compte sur leur appui pour pouvoir s'emparer de ce secteur de

 25   Nevesinje et Bileca-Trebinje. Donc c'était la directive aux fins de la

 26   défense de la République de Bosnie-Herzégovine. Nous l'avons vue, mais nous

 27   ne l'avons pas étudiée de manière approfondie. Il cite l'accord de

 28   coopération qui évoquait la coopération frontalière entre les deux Etats.

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  1   Q.  Général, pourriez-vous nous citer la date de ce document qui émane de

  2   Sefer Halilovic, directive aux fins de la défense ?

  3   R.  Je pense que c'est le mois de septembre 1992. Mais je pense que nous

  4   pourrons consulter le document s'il le faut pour voir la date exacte.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Je précise, il s'agit du document 4D1240,

  6   je précise aux fins du compte rendu d'audience. Il ne figure pas dans notre

  7   série de documents. La date du document est celle du 10 septembre 1992.

  8   C'est une pièce versée au dossier.

  9   Q.  Vous avez également évoqué, Général, l'accord d'Amitié et de

 10   Coopération; pourriez-vous préciser de quel document il s'agit, et quelle

 11   est la date où cet accord a été signé ?

 12   R.  La signature a eu lieu en juillet 1992. Le 21 -- peut-être le 21

 13   juillet 1992, c'est un accord bilatéral entre la République de Bosnie-

 14   Herzégovine et la République de Croatie. Avant cela, on avait juste échangé

 15   les déclarations de bonnes intentions, puisque le président Izetbegovic ne

 16   pouvait pas sortir de Sarajevo, donc lors de son premier déplacement, il

 17   s'est rendu à Zagreb pour signer cet accord d'Amitié et de Coopération.

 18   Qui, en son point 8, je pense, a évoque l'existence d'un ennemi commun,

 19   l'attaque menée sur la Croatie depuis le territoire de Bosnie-Herzégovine -

 20   et on parle de coopération frontalière entre les armées de ces deux Etats?

 21   Je précise que je suis devenu membre des forces armées de Bosnie-

 22   Herzégovine au terme de cet accord, parce que le HVO a été reconnu comme

 23   partie intégrante des forces armées de Bosnie-Herzégovine.

 24   Q.  Nous reviendrons à cela à la fin de mes questions. Une question

 25   d'ordre, Général, et je m'adresse à vous en tant qu'officier de carrière.

 26   Un militaire de carrière, où situe-t-il, trace-t-il la limite du respect

 27   d'un ordre ? A partir de quel moment, est-ce que vous pouvez refuser

 28   d'exécuter un ordre ?

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  1   R.  A tout moment, si de manière consciente cela vous inciterait à

  2   commettre une infraction, si je suis capable de l'entendre ainsi, et si la

  3   personne qui donne l'ordre est consciente de la teneur de cet ordre.

  4   Q.  Vous avez apporté ici des éléments qui entraîneraient de nouvelles

  5   questions, mais je vais plutôt laisser cela de côté et abordons le premier

  6   sujet de notre interrogatoire, à savoir votre arrivée en Bosnie-

  7   Herzégovine. Nous nous étions mis d'accord sur cela.

  8   Mes collègues me préviennent que le moment de la pause est venue.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez aborder ce premier sujet, autant faire

 10   tout de suite la pause. Bien, nous allons faire donc 20 minutes de pause.

 11   --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.

 12   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 14   Maître Alaburic, vous avez la parole.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Mon Général, nous venons de consommer 27 minutes de notre temps; donc,

 17   je demanderais d'être concis, et je vous demande également de ralentir un

 18   peu votre débit parce qu'il serait dommage de ne pas tout consigner au

 19   compte rendu comme vous l'avez dit.

 20   Alors, en répondant aux questions de M. le Juge Antonetti, vous avez

 21   expliqué relativement pas mal de choses au sujet des circonstances de votre

 22   déplacement vers la Bosnie-Herzégovine, et c'est ce qui fera l'objet de la

 23   thématique que nous aborderons à présent. Je crois que nous pouvons tout de

 24   suite nous pencher sur une carte, ce sera plus simple.

 25   Je demande à ce qu'on nous montre 4D 2024. Mon Général, je ne sais pas si

 26   vous avez vos classeurs devant vous.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Puis-je vous demander, quand il y a un document

 28   nouveau - je ne sais pas, puisque j'ai découvert tout à l'heure vos trois

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  1   tomes - quand il y a un document nouveau qui n'a pas encore été admis,

  2   dites-le-nous. Dites que c'est un document nouveau, et à ce moment-là --

  3   enfin, moi, en ce qui me concerne, je vais y prêter une attention encore

  4   plus grande.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, à chaque fois, dans

  6   le classeur, les documents, on vous les marque avec deux couleurs de

  7   collants, en jaune et en orange; jaune, c'est les pièces qui n'ont pas de

  8   statut de pièces à conviction, et orange, ce sont des pièces à conviction.

  9   Je crois que les choses sont claires, et il n'y aura pas d'erreurs. En bas

 10   du document, on indique quel est son statut; si c'est une pièce à

 11   conviction, on a une inscription.

 12   Q.  Alors, je vous demande, Monsieur, de vous pencher sur ce premier

 13   document, l'avez-vous sous les yeux ?

 14   R.  Oui, je l'ai.

 15   Q.  Vous pouvez voir cela sur votre écran aussi. Alors, Général, dites-

 16   nous, avez-vous connaissance de cette carte ?

 17   R.  Oui, Messieurs les Juges, je connais cette carte. C'est moi qui l'ai

 18   tracée en personne.

 19   Q.  Général, veuillez nous indiquer, qu'est-ce que nous montre exactement

 20   cette carte ?

 21   R.  Messieurs les Juges, sur cette carte, ce que je cherchais à vous

 22   montrer, c'est le lien qu'il y avait entre la zone opérationnelle, c'est-à-

 23   dire la République de Croatie où il y avait une zone opérationnelle à part,

 24   et le territoire libéré de la Bosnie-Herzégovine. Si vous le permettez, je

 25   proposerais de fournir des commentaires pour ce qui est des annotations que

 26   j'ai faites.

 27   Q.  Mon Général, j'aimerais que nous ne relations pas ce que la carte nous

 28   montre déjà, parce que c'est déjà bien expliqué en légende. Mais j'aimerais

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  1   que sur l'écran, vous nous montriez -- vous montriez aux Juges de la

  2   Chambre pour qu'ils puissent le voir, eux, cette partie sud de la Croatie,

  3   puisque vous dites que la partie sud de la Croatie était occupée et que

  4   cette armée croate devait forcément entrer dans une partie du territoire de

  5   la Bosnie-Herzégovine aux fins de défendre la République de Croatie.

  6   Veuillez nous indiquer quel est le territoire dont il s'agit ici.

  7   R.  Oui, certes.

  8   Q.  J'aimerais qu'on donne au général de quoi marquer sur l'écran ce qui

  9   constituera la teneur de mes questions.

 10   R.  Je ne sais pas si vous le voyez ici. Mais je parle de ce secteur, je

 11   vais le marquer en bleu, je vais mettre un numéro "1" à côté.

 12   [Le témoin s'exécute].

 13   Alors, au numéro 1, ici, la partie en rouge qui est indiquée ici,

 14   c'est la partie sud de la République de Croatie qui a été occupée par

 15   l'armée populaire yougoslave, avec une partie de l'armée de Republika

 16   Srpska venue de la Bosnie-Herzégovine. Le point rond, ici --

 17   [Le témoin s'exécute].

 18   C'est la ville de Dubrovnik qui était bloquée, mais la ville n'était

 19   pas prise par la JNA. Plus à l'ouest - on a du mal à voir ici - c'est la

 20   ligne de front jusqu'à laquelle les forces de la JNA et de l'armée de la

 21   Republika Srpska ont pu s'emparer de la partie sud de la République de

 22   Croatie. C'est juste avant la frontière de la Bosnie-Herzégovine et celle-

 23   ci, c'est l'endroit où il y a Neum, qui va -- qui débouche sur la mer.

 24   C'est ici qu'on a stoppé la JNA et les effectifs de la Republika Srpska.

 25   Q.  Mon Général, mettez un numéro 2 à cette frontière où on a stoppé la JNA

 26   et une partie de la VRS.

 27   R.  [Le témoin s'exécute]

 28   Q.  Général, veuillez nous expliquer, quand nous disons, dans ce prétoire-

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  1   ci, que ce territoire de la Croatie du sud et le voisinage de la Bosnie-

  2   Herzégovine qui n'était pas occupé constituait un front de combat unifié,

  3   qu'est-ce que cela veut dire ? Veuillez nous cerner ce que vous entendez

  4   par front unifié.

  5   R.  [Le témoin s'exécute].

  6   Ceci serait ce front unifié où intervenait le Groupe opérationnel 2

  7   de l'armée de Yougoslavie. Cela englobait le territoire entier de la

  8   Bosnie-Herzégovine de l'est, puis la partie occidentale du Monténégro;

  9   c'était, donc, là que les unités de la JNA étaient stationnées, au

 10   Monténégro, et cela englobait la partie conquise de la République de

 11   Croatie. Donc, ça fait un trou unifié où il y a intervention de la part

 12   d'effectifs qui sont uniques, à savoir ceux de la JNA. Il s'agit des mêmes

 13   effectifs qui ont occupé la République de Croatie.

 14   C'est ce qu'on qualifie de territoire opérationnel et stratégique

 15   unifié. La JNA s'est servie du terme de "théâtre de combat," et sur ce

 16   territoire-là, il y avait les forces du Groupe opérationnel 2 avec le Corps

 17   d'armée de l'Herzégovine, de Titograd, et ainsi de suite.

 18   Q.  En répondant à la question de M. le Juge Antonetti, vous avez dit, que

 19   l'armée croate a stoppé l'avancée de la JNA vers la fin de 1991. Vous avez

 20   mentionné le mois de décembre 1991. Est-ce que c'est là un événement ou la

 21   période d'événements que vous avez désigné ici en apposant un numéro 2 ?

 22   R.  Oui. Si vous voulez, je peux ajouter, quoiqu'il puisse être difficile

 23   de le voir, je pourrais peut-être indiquer par une petite flèche l'endroit

 24   où on a stoppé l'offensive de la JNA.

 25   [Le témoin s'exécute].

 26   Cela s'est fait le long de la République de Croatie et le long des

 27   effectifs qui se trouvaient latéralement à attaquer le territoire de la

 28   République de Croatie depuis la Bosnie-Herzégovine.

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  1   Q.  Quand vous parlez de "de flancs," veuillez nous indiquer une flèche.

  2   R.  [Le témoin s'exécute]

  3   Q.  Veuillez mettre un numéro 3. Ce numéro 3, donc, va désigner une attaque

  4   de flancs effectués par la JNA et les forces serbes de la Bosnie-

  5   Herzégovine contre la République de Croatie, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, ça vient du territoire de la Bosnie-Herzégovine.

  7   Q.  Veuillez nous indiquer la date d'aujourd'hui. Veuillez signer et on

  8   est, je précise, le 11 février 2010.

  9   R.  [Le témoin s'exécute]

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je demanderais un numéro IC pour

 11   cette carte.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, pour éviter que votre document soit

 13   rejeté, vous avez dessiné cette carte en mettant des couleurs, et cetera.

 14   Ça correspond à une situation en quelle année exactement, quel mois ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, cette situation, je

 16   vais l'indiquer ici --

 17   [Le témoin s'exécute].

 18   C'est le 6 décembre 1991.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Quand je regarde cette carte, et si je fais

 20   une erreur, n'hésitez pas à me corriger - vous avez toute latitude en la

 21   matière - si je comprends bien, en décembre 1991, la JNA, au niveau du

 22   Groupe opérationnel 2, mène une action visant à occuper toute la zone que

 23   vous avez cerclée en bleu, avec également l'intention de prendre Dubrovnik,

 24   que vous avez entouré par un petit rond. Ce qui voudrait dire que s'ils

 25   avaient mené à bien leur opération militaire, toute cette zone et la zone

 26   côtière auraient été sous influence et contrôle de la JNA, ce qui aurait eu

 27   pour effet d'amputer une partie du territoire de la République de Croatie

 28   qui longe cette zone côtière; est-ce bien cela ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Juge, vous avez

  2   raison. J'ajouterais seulement le fait que dans cette situation ici, les

  3   forces de la JNA sont sorties sur la Neretva et avaient placé sous leur

  4   contrôle la partie est de la ville de Mostar. Moi, j'ai tracé ici une ligne

  5   parce que ça sous-entend la rivière Neretva. Ils se trouvaient sur la

  6   Neretva, et ils avaient sous contrôle la partie est de la Neretva et la

  7   partie sud de la République de Croatie.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Général Praljak, il vaudrait mieux que vous

  9   n'interveniez pas parce que c'est le général Petkovic qui témoigne, et

 10   toute précision ou toute modification pourront être apportées au moment du

 11   contre-interrogatoire de la Défense Praljak, sauf s'il y a une erreur telle

 12   -- mais je ne pense pas que là, au jour d'aujourd'hui il y ait une erreur.

 13   Bien. Alors, Maître Alaburic, vous -- attendez. Il y a mon collègue qui

 14   veut intervenir.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Petkovic, je ne comprends

 16   pas toujours exactement. Vous nous avez présenté cette carte et vous avez

 17   apporté des commentaires, et cette carte semble représenter une situation à

 18   un moment donné, à savoir le 6 décembre 1991. La manière dont cette carte a

 19   été tracée montre les parties en jaune, à savoir Herceg-Bosna, la partie

 20   sud-est, et puis, vous avez la partie côtière également, qui est en rose;

 21   d'après la légende de cette carte, il s'agit de régions qui sont déjà

 22   occupées par les forces serbes. Mais en même temps, vous avez tracé deux

 23   cartes qui vont dans la direction du sud-ouest. Mais je ne comprends pas.

 24   Si ce territoire le long de la côte est déjà occupé par les forces serbes

 25   et par la VRS, pourquoi aurait-on prévu des opérations dans cette zone ?

 26   Peut-être que vous pouvez m'expliquer ceci.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, on m'a demandé d'indiquer

 28   l'axe de déplacement. Comme il y a eu prises successives de ces

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  1   territoires, les flèches que j'ai apposées disent qu'au mois d'octobre

  2   1991, il y a eu un début de conquête du sud de la Croatie, on est passés

  3   par ce secteur rouge, et en même temps, on est venus du flanc qui se trouve

  4   en haut; c'est ainsi que les choses se sont produites ou déroulées jusqu'au

  5   6 décembre 1992 -- 1991, lorsque tout ce territoire est devenu un ensemble

  6   occupé. Bien entendu, à ce moment-là, il n'y a plus d'activités latérales.

  7   Les flèches se rapportent au mois d'octobre 1991, c'est là qu'il y a eu un

  8   départ, un démarrage. La date que j'ai indiquée ici se trouve être la date

  9   où tout est passé sous le contrôle de la JNA pour ce qui est de la

 10   République de Croatie. La majeure partie de la Bosnie a été prise par la

 11   VRS parce que prétendument, au mois de mai 1991, partant d'une résolution

 12   des Nations Unies, il y a eu un début de retrait de la JNA depuis ce

 13   territoire-là -- non, non, c'est en 1992 que la JNA a commencé à se

 14   retirer.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Je veux m'assurer que vous

 16   confirmez ce que j'ai envisagé, à savoir que ce n'est pas totalement

 17   correct d'inscrire cette date du "6 décembre 1991" pour la totalité de

 18   cette carte, parce qu'en fait, les flèches avec le numéro 3 font référence

 19   à une période antérieure, à savoir lorsqu'il y avait des combats pour

 20   atteindre la zone côtière, n'est-ce pas ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça a commencé à la mi-octobre 1991. Il y a eu

 24   une attaque de flanc; puis, une deuxième; puis, une troisième, et ça se

 25   passait jusqu'au 6 décembre. Et là, les attaques ont cessé, ont été

 26   stoppées.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, vous demandez un numéro IC ?

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le

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  1   permettez, quelques mots encore seulement au sujet de cette carte.

  2   Q.  Soyons précis, Mon Général. Cette date se rapporte à la situation telle

  3   qu'elle se présentait pour ce qui est du territoire de la République de

  4   Croatie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Exact.

  6   Q.  Est-ce que ce jour-là, le territoire en question de la République de

  7   Croatie qui était indiqué en rose ici se trouvait être occupé par l'armée

  8   populaire yougoslave et les effectifs serbes ?

  9   R.  Tout à fait exact.

 10   Q.  A cette date-là, à savoir le 6 décembre 1991, la République de Bosnie-

 11   Herzégovine est un état unifié, il n'y a pas de territoires occupés

 12   proprement dits ?

 13   R.  Oui, c'est un territoire unifié qui fait partie de la Yougoslavie. Ce

 14   n'est pas un territoire occupé que j'ai tracé. Moi, j'ai dessiné, en

 15   terminologie militaire, un territoire qui est sous-entendu par la notion de

 16   théâtre de combats.

 17   Q.  Maintenant, si on ne parle que de l'Etat de Bosnie-Herzégovine et du

 18   territoire qui est peint en orange, et le reste du territoire qui n'a pas

 19   été colorié à titre complémentaire, pour lequel vous avez dit que c'était

 20   un territoire libéré, que diriez-vous de ce partage effectué au niveau de

 21   la Bosnie-Herzégovine? C'est valable pour quelle période de temps au juste

 22   ?

 23   R.  C'est valable pour le mois d'avril 1992.

 24   Q.  Alors, mon Général, quand nous disons "territoire libre," de quel

 25   territoire parlez-vous au juste ? Territoire libre en Bosnie-Herzégovine ?

 26   R.  Oui, exactement, territoire libre en Bosnie-Herzégovine. Sur cette

 27   carte, on n'a rien tracé du tout. La carte est restée à cet endroit-là,

 28   telle qu'elle était au départ.

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  1   Q.  Mais qui est-ce qui contrôle ce territoire-là ?

  2   R.  Ces territoires, alternativement, ont vu des déplacements de l'armée de

  3   Bosnie-Herzégovine et du HVO, voire de la Défense territoriale du HVO, peu

  4   importe comment on l'appellera.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Fort bien. Je voudrais maintenant un numéro

  6   IC pour cette carte, s'il-vous-plaît.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, mais je

  8   suis à nouveau perplexe.

  9   Je fais référence à la page 42, ligne 9. La question qu'on vous a posée,

 10   c'était :

 11   "Ce jour-là, c'est-à-dire, le 6 décembre 1991, la République de Bosnie-

 12   Herzégovine était encore un état dans toute son intégrité, c'est-à-dire

 13   qu'il n'y avait pas de territoires occupés ?"

 14   Vous avez répondu par l'affirmative.

 15   Mais si je regarde cette carte, Stolac est dans la zone en orange, et

 16   d'après la légende, cela signifie qu'il s'agit d'une zone occupée par les

 17   forces serbes et de la VRS. Vus avez dit que ceci fait référence à avril

 18   1992. Est-ce qu'il y a encore une autre période qui est représentée par

 19   cette carte ou est-ce que vous vous corrigez -- à savoir que la Bosnie-

 20   Herzégovine n'était pas du tout occupée le 6 décembre ? Ça ne peut pas être

 21   les deux cas de figure à la fois ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, le 6 décembre 1992, la

 23   Bosnie-Herzégovine -- 1991, excusez-moi. Pour ce qui est du territoire en

 24   jaune pour la Bosnie-Herzégovine, elles ont connu un déploiement des forces

 25   de l'armée populaire yougoslave, qui sont parties de la Croatie, et celles

 26   qui avaient quitté avant cela la République de Slovénie, mais cela demeure

 27   le territoire de la Yougoslavie. A la date de la proclamation de

 28   l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine, le territoire en rose s'agissant

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  1   de la Bosnie-Herzégovine devient également un territoire occupé.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que les zones en rose ne

  3   font pas partie de la Bosnie-Herzégovine. Elles font partie de la Croatie

  4   sur cette carte. Mais il semble que vous --

  5   [chevauchement]

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] S'il vous plaît, ne m'interrompez

  7   pas. Ce n'est pas parce que c'est impoli - je ne me vexe pas si facilement

  8   - mais les interprètes ne vont pas être en mesure de tout interpréter, donc

  9   il faut pratiquer des pauses entre nos questions et nos réponses. Peut-être

 10   que moi aussi je n'applique pas toujours cette règle, et si c'est le cas je

 11   m'en excuse. 

 12   Donc le résultat de cet échange est le suivant, à savoir que vous devez

 13   corriger la déclaration que vous avez faite à la page 42, lignes 9, 10, 11

 14   et 12, et d'après cette déclaration, vous disiez que le 6 décembre la

 15   République de Bosnie-Herzégovine, mis à part le fait que cette République

 16   n'existait pas en tant que telle, était en fait un Etat avec toute

 17   l'intégrité de ses frontières et n'avait pas été occupée; est-ce exact, ou

 18   alors la carte n'est pas exacte?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact, exact, c'était un Etat intégral. Pour

 20   ce qui est de ce territoire en jaune, il y a eu déploiement des unités de

 21   la JNA qui étaient sorties de la Croatie et qui avaient quitté avant cela

 22   la Slovénie. A la date de la proclamation de l'indépendance de la Bosnie-

 23   Herzégovine, ça se passe en avril 1992, et lorsqu'il y a eu déclaration

 24   partant de laquelle la JNA était une armée ennemie, ces territoires en

 25   jaune dans cette forme-ci deviennent pour ce qui est de la Bosnie-

 26   Herzégovine des territoires occupés pour elle aussi.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne vais pas insister, mais je

 28   dois dire que cela me laisse perplexe.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, permettez-moi d'en

  2   terminer avec mon travail au niveau de cette carte, et les choses

  3   deviendront tout à fait claires, là je vous en prie véritablement.

  4   Q.  Alors cette date, 6 décembre 1991, ça se rapporte à ce que vous nous

  5   avez indiqué au niveau du 1, 2 et 3 sur cette carte, n'est-ce pas?

  6   R.  Exact.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Maintenant je demanderais qu'on donne un

  8   numéro IC pour cette carte, et que l'on reprenne la même carte mais sans

  9   les annotations, pour parler de la date du mois d'avril 1992.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez un numéro IC.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, j'ai

 12   encore besoin de la carte pour quelques secondes.

 13   Madame Alaburic, vous dites le 6 décembre, les points 1, 2, 3 ont été pris,

 14   mais jusqu'à présent le général avait accepté que concernant ma question

 15   portant sur le numéro 3 que ça ne faisait pas référence au 6 décembre, mais

 16   à une période antérieure au 6 décembre. Je ne suis pas satisfait quand vous

 17   dites que nos observations constituent un obstacle à votre interrogatoire

 18   principal, parce qu'il y a des contradictions et les Juges de la Chambre se

 19   doivent de préciser cela. Je suis désolé d'avoir contribué à cette

 20   confusion.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi. Procédons dans l'ordre.

 22   Messieurs les Juges, le problème c'est que mes minutes sont comptabilisées

 23   quand vous posez des questions, et je ne vais pas avoir le temps de poser

 24   toutes les questions que je voudrais poser. Mes analyses montrent que

 25   pendant 20 ou 25 % du temps il faut que je le dépense pour ce qui est des

 26   questions de suivi posées par les Juges, or, cela m'entrave dans le

 27   fonctionnement normal que j'avais envisagé de suivre.

 28   Q.  Le point 3, Mon Général, ici montre les axes d'intervention qui se sont

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  1   soldés par une occupation à la date du 6 décembre 1991; est-ce que c'est

  2   bien cela?

  3   R.  C'est cela.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on donne un

  5   numéro IC pour cette carte, et qu'une carte propre, la même, soit remise

  6   sur les écrans.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : On va donner un numéro, mais j'ai une question à

  8   poser. Alors donnez un numéro d'abord. 

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit donc de la version annotée qui

 10   sera la pièce 4D 02024 et ce sera la pièce IC 01173. Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 12   Général Petkovic, vous avez donc, à partir de cette carte, indiqué, d'après

 13   vous, comment étaient positionnées au 6 décembre 1991 la JNA et les forces

 14   serbes. Vous nous avez donc donné un luxe de détails en la matière, et tout

 15   ceci est au transcript. Vous avez précisé, sur demande de votre avocate,

 16   que la JNA avait pris position dans les zones côtières en octobre. Vous

 17   avez indiqué le chiffre 3. Très bien.

 18   Simplement, au point de vue maintenant du langage utilisé, car en tant que

 19   juriste, je dois veiller à tout cela. Quand on parle de zones occupées, le

 20   terme "occupées" ça a une connotation juridique. Or, sauf erreur de ma

 21   part, le 6 décembre 1991, internationalement, il y avait une Fédération

 22   yougoslave constituée de plusieurs républiques socialistes membres de cette

 23   Fédération, et que donc l'armée populaire yougoslave, JNA, en décembre

 24   1991, alors même que la République de Croatie n'a pas été reconnue

 25   internationalement ni la République de Bosnie-Herzégovine socialiste; est-

 26   ce que je fais une erreur en disant que l'armée populaire yougoslave s'est

 27   déployée dans les zones appartenant au territoire de l'Etat yougoslave? Je

 28   dis le terme "déployée," et non pas "occupé."

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, c'est exactement ce que

  2   l'on pourrait dire si l'on se penche strictement sur l'intervalle de temps

  3   qui sépare ce moment et la proclamation de l'indépendance de la Croatie,

  4   c'est-à-dire le 15 janvier 1992.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc en termes militaires, il faut utiliser le

  6   mot "déployée" ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand vous déployez en combattant, ce n'est

  8   pas considéré comme du "déploiement." Parce que quand on déploie, c'est

  9   dans des temps de paix, et qu'on se départe tout doucement. Là, on dit ici

 10   on déploiera telle unité, là-bas on déploiera telle autre. Mais si depuis

 11   la frontière vous êtes partis vous battre sur ce territoire, ce n'est pas

 12   un déploiement, Messieurs les Juges. Indépendamment du fait de considérer

 13   que la Croatie fait encore officiellement partie de la Yougoslavie, la JNA

 14   a procédé à des activités offensives à l'égard de forces qui se trouvaient

 15   sur ce territoire-là, c'étaient pour l'essentiel des forces de police de la

 16   République de Croatie. Par conséquent, il n'y a pas eu déploiement

 17   pacifique comme il y a déploiement en temps de paix pour ce qui est d'une

 18   armée. Elle a commencé à déployer des activités de combat, indépendamment

 19   du fait de savoir que c'est encore un territoire appartenant à un seul et

 20   même Etat, encore.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous comprends bien. Pour bien préciser cette

 22   notion, je vais prendre un exemple.

 23   Imaginons - c'est une hypothèse d'école - qu'aujourd'hui en République de

 24   Croatie il y a une partie du territoire où il y a des problèmes, et le

 25   nouveau président, qui s'appelle, sauf erreur de ma part, Ivo Josipovic,

 26   décide que l'armée croate va se positionner dans ces territoires, où il y

 27   aurait une agitation des événements. Est-ce qu'à ce moment-là, d'après

 28   vous, l'armée croate se déploie ou occupe ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] L'armée croate se déploierait à cet endroit-

  2   là. Mais si elle intervenait en combattant, elle placerait ce territoire

  3   sous contrôle militaire. Donc déployer c'est pacifiquement intervenir pour

  4   prévenir quelqu'un ou mettre en garde, et intervenir militairement c'est

  5   résoudre les questions ou les aspects qui ne vous arrangent pas. Donc tout

  6   Etat a le droit de déployer des effectifs sur son propre territoire. Mais

  7   lorsque vous intervenez militairement et que vous incendiez Konavle [phon]

  8   en entier et vous faites jusqu'au 6 décembre ce qui s'est fait avec

  9   Dubrovnik, ce n'est pas un déploiement d'effectifs dans l'esprit

 10   d'activités entreprises par une armée en vue d'un déploiement. C'est tout à

 11   fait autre chose. La JNA n'est pas venue pour se déployer à huit ou dix

 12   sites sur cette partie sud de la Croatie, mais elle a conduit des combats

 13   pendant plusieurs mois en se servant du territoire de la Croatie et en se

 14   servant du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Alors on pourra dire que le

 15   15 janvier, lorsqu'il y a eu proclamation de l'indépendance et que la JNA y

 16   est restée, elle est devenue une force d'occupation à partir de la notion

 17   de force déployée sur ces territoires.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation]

 19   Q.  Mon Général, je voudrais que vous vous concentriez sur un fait. Le 15

 20   janvier 1992, y a-t-il eu déclaration de l'indépendance à ce jour ou est-ce

 21   que c'est le jour où la Croatie a été reconnue internationalement ?

 22   R.  Ce jour-là, elle a connu une reconnaissance internationale. Mais c'est

 23   vers le mois de novembre qu'elle --

 24   Q.  Au mois d'octobre, vous voulez dire ?

 25   R.  Oui, mois d'octobre. Elle a vu se terminer une période moratoire de

 26   trois mois.

 27   Q.  Quand vous parlez d'un moratoire de trois mois, qu'est-ce que cela

 28   signifie ? Quand est-ce que la Croatie a en fait proclamé son indépendance,

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  1   et qu'est-ce que cela veut dire que ce "moratoire" ?

  2   R.  Je crois que c'est au mois de juin que la Croatie a proclamé son

  3   indépendance, et alors, suite à une incitation de la part de facteurs

  4   internationaux prétendument pour faciliter l'apport de solutions au

  5   problème, il y a eu un gel de la situation sur le terrain pendant trois

  6   mois.

  7   Q.  Quand vous dites le mois de "juin," vous parlez de quelle année ?

  8   R.  De 1991.

  9   Q.  Est-ce qu'à ce moment-là, les présidents des différentes républiques de

 10   l'ex-Yougoslavie, suite à une proposition émanant de la communauté

 11   internationale, ont oui ou non convenu que les décisions relatives à la

 12   proclamation de l'indépendance de la Slovénie et Croatie soient gelées sur

 13   trois mois, aux fins d'aboutir à un accord ?

 14   R.  Exactement, exactement.

 15   Q.  Alors, à titre officiel, quelle est la date de l'indépendance de la

 16   République de Croatie ? Est-ce que c'est le 8 octobre ?

 17   R.  Oui, le 8 octobre est officiellement la date de la proclamation de

 18   l'indépendance de la République de Croatie.

 19   Q.  Par conséquent, depuis quand la République de Croatie est-elle un Etat

 20   indépendant ?

 21   R.  Depuis le 8 octobre 1991.

 22   Q.  Est-ce que l'armée populaire yougoslave, sur le territoire  de la

 23   République de Croatie au mois de décembre 1991, peut être considérée comme

 24   une armée d'occupation ?

 25   R.  Absolument.

 26   Q.  Fort bien.

 27   R.  Oui, là il y a eu une confusion et je m'en excuse. Le 8 octobre, à la

 28   date de la proclamation de l'indépendance de la Croatie, il y a eu début

Page 49326

  1   d'une attaque au sud de la Croatie; en 1991.

  2   Q.  Alors revenons maintenant à cette même carte, et dites-nous, Général,

  3   ce qu'il en est de la situation telle qu'elle se présentait en avril 1992.

  4   Donc avril 1992.

  5   Est-ce que ces parties du territoire de la République de Croatie qui

  6   figurent en couleur rose sur cette carte, et nous ne parlons ici que du

  7   territoire inclus dans la zone opérationnelle de Split, ces territoires

  8   donc sont-ils occupés par la JNA, respectivement par les forces des Serbes

  9   de Croatie ?

 10   R.  Oui, c'est exact.

 11   Q.  Au mois d'avril 1992, ce territoire ici indiqué en couleur jaune est-il

 12   sous le contrôle de la JNA et des forces des Serbes de Bosnie-Herzégovine ?

 13   R.  Oui. C'est bien le territoire contrôlé par la JNA et la VRS.

 14   Q.  Alors, Général, dites-nous : à présent, si, au début du mois d'avril

 15   1992, vous aviez des indications concernant les plans de combat de la JNA

 16   et des forces des Serbes de Bosnie ? Si vous disposiez d'informations en ce

 17   sens, pourriez-vous nous indiquer ce qu'il en était sur cette carte ?

 18   R.  Les forces de la JNA et des Serbes de Bosnie-Herzégovine, au mois

 19   d'avril 1991 --

 20   Q.  1992 ?

 21   R.  Oui, 1992, ont commencé à mettre en œuvre un plan qui avait été décidé

 22   précédemment et qui était le suivant : Donc à partir de la partie

 23   occidentale, Livno, Tomislavgrad, Kupres --

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait venir en aide au

 25   général en lui fournissant le bon type de stylo ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors je vais indiquer par une flèche un axe

 27   vers la vallée de la Neretva, et par une seconde flèche, un autre axe en

 28   direction de la frontière et de Split.

Page 49327

  1   [Le témoin s'exécute]

  2   Mme ALABURIC : [interprétation]

  3    Q.  Alors pouvez-vous apposer un numéro 1 pour cette partie du plan

  4   d'invasion ?

  5   R.  [Le témoin s'exécute]

  6   Alors deuxième partie du plan, il s'agissait d'opérer une percée en

  7   direction de la République de Croatie vers Metkovic, Makarska à partir de

  8   la vallée de la Neretva, puis selon un second axe il s'agissait d'opérer

  9   une jonction avec les forces venues de la partie occidentale, donc

 10   Tomislavgrad, Kupres, Livno.

 11   [Le témoin s'exécute]

 12   Q.  Alors indiquez, s'il vous plaît, le chiffre 2.

 13   R.  [Le témoin s'exécute]

 14   Q.  Dites-nous : à quelle période correspondent ces différents éléments ?

 15   R.  Il s'agit du mois d'avril de 1992.

 16   Q.  Alors, Général, si jamais ces plans avaient été mis en œuvre avec

 17   succès, que serait-il advenu de la République de Croatie ?

 18   R.  Au sud de Split, la République de Croatie aurait été occupée, tout

 19   comme était occupé l'extrême sud de la République de Croatie, donc toute la

 20   partie au sud de Split se serait trouvée occupée par la JNA et les forces

 21   serbes.

 22   Q.  Est-ce que, dans cette partie du territoire de la Bosnie-Herzégovine,

 23   la partie libre du territoire de la Bosnie-Herzégovine jouxtait celui de la

 24   République de Croatie ? Est-ce que cela aurait perduré ?

 25   R.  Non, ce territoire aurait été également coupé et du nord de Mostar

 26   jusqu'à Posusje, nous aurions eu une enclave en fait complètement encerclée

 27   en Bosnie centrale, sans le moindre contact avec les frontières d'un autre

 28   Etat, et sans accès à d'autres Etats.

Page 49328

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas d'autres

  2   questions concernant cette carte. Mais peut-être que vous, vous en aurez.

  3   Si ce n'est pas le cas, je souhaiterais demander qu'on attribue une cote

  4   IC.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez une cote IC à cette

  6   carte.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La deuxième

  8   version annotée de la pièce 4D 02024 aura le numéro IC 01174. Merci,

  9   Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Petkovic.

 11   Successivement on vient de voir deux cartes, où vous avez expliqué le

 12   positionnement de la JNA et des troupes sur le terrain. Comme je présume

 13   que votre avocat va demander l'admission de ces deux cartes, pouvez-vous me

 14   dire, d'après vous, en quoi ces cartes sont pertinentes pour comprendre la

 15   situation militaire résultant de l'acte d'accusation ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, sur la base de l'acte

 17   d'accusation qui a été dressé et de cette affirmation consistant à dire que

 18   l'armée de République de Croatie était intervenue dans les événements en

 19   Bosnie-Herzégovine, il est possible de dire que cette carte est plus que

 20   pertinente.

 21   La situation en République de Croatie est intimement liée à cette situation

 22   unique en son genre prévalant en République de Bosnie-Herzégovine. Cette

 23   zone indiquée en couleur rose comme étant une zone occupée en République de

 24   Croatie n'a pas été prise -- ou plutôt, il a été pris sur -- pour des

 25   raisons d'ordre moral et psychologique en raison de la relation privilégiée

 26   avec la Bosnie-Herzégovine, la défense était fondée sur une résistance

 27   opposée à la JNA et aux forces serbes.

 28   Mais alors à partir d'avril 1992 et au-delà, c'est ce qui correspond au

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  1   numéro 1, il y a eu la libération de la partie orientale de la Neretva

  2   jusqu'à Stolac, et on a également assisté à l'adoption de cet accord

  3   d'Amitié et de Coopération. Il y a eu reconnaissance de cette nécessité

  4   d'une coopération militaire dans les zones frontalières, comme ça figure au

  5   point 4, car on a relevé que la Bosnie-Herzégovine était attaquée, mais

  6   également le fait que la Croatie était désormais exclusivement attaquée

  7   depuis le territoire de la Bosnie-Herzégovine, or le gouvernement de la

  8   Bosnie-Herzégovine, cette dernière venait de proclamer son indépendance

  9   quelques jours plus tôt à peine, ne disposait pas des effectifs militaires

 10   qui lui auraient été nécessaires pour empêcher ces attaques dirigées contre

 11   la République de Croatie depuis son propre territoire par les forces serbes

 12   donc.

 13   Par conséquent, ces événements, de la première partie de 1992, nous montre

 14   qu'il n'y avait absolument aucune présence intentionnelle de la Croatie en

 15   vue d'assurer la moindre conquête, mais ce que cela nous montre ce sont les

 16   efforts d'assurer une défense conjointe sur les zones frontalières entre la

 17   République de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est une question que je vous pose et que je ne

 19   vous reposerai plus. Mais qui me paraît peut-être la question la plus

 20   importante.

 21   Pour comprendre l'acte d'accusation, est-ce qu'il faut ne regarder que le

 22   conflit entre le HVO et l'ABiH, ou faut-il regarder ce conflit en intégrant

 23   également les Serbes ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges, si

 25   l'on examine le cas de la Bosnie-Herzégovine, et si on se limite aux

 26   affrontements entre le HVO et l'ABiH, on aura une vue tout à fait

 27   incomplète. Il est impossible d'exclure le reste des affrontements et le

 28   contexte des affrontements dans son ensemble en Bosnie-Herzégovine. Ces

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  1   affrontements doivent être absolument pris en compte, on ne peut pas se

  2   contenter de les mettre à l'écart et dire qu'on va s'intéresser uniquement

  3   aux affrontements entre l'ABiH et le HVO. Pourquoi ? Parce que comme nous

  4   l'avons vu sur la carte on a d'un côté les Serbes, avec leurs propres

  5   agissements, les zones qu'ils conquièrent, et d'autre part, il y a l'ABiH

  6   et certains effectifs de la HV qui aident à opposer une résistance à

  7   l'agression serbe et à éviter qu'il y ait enclavement complet de la Bosnie-

  8   Herzégovine, à partir de laquelle donc les attaques sont lancées contre la

  9   République de Croatie.

 10   Donc tout cela est lié, et il est absolument impossible de mettre de côté

 11   le facteur serbe, parce que si ce facteur n'avait pas été présent, il n'y

 12   aurait pas eu la moindre nécessité de mettre en place des opérations de

 13   défense conjointe entre le HVO et l'ABiH, et cetera. Nous nous serions

 14   contentés sur le terrain d'attendre l'issue des négociations. Il n'y aurait

 15   pas eu d'affrontement.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Alors poursuivons, Général. Nous allons sauter une des cartes qui

 19   figure dans le classeur, reporte-vous au document P 162 à présent, il

 20   s'agit d'un ordre du 16 avril 1992, émanant du commandant Janko Bobetko, et

 21   portant sur la mise en place d'un poste de commandement avancé à Grude pour

 22   le front sud.

 23   Alors, Général, cet ordre a-t-il le moindre rapport avec cette carte que

 24   nous avons annotée pour le mois d'avril 1992 ?

 25   R.  Oui, absolument, et ce, en raison de la situation qui prévalait. C'est

 26   pour cette raison qu'on procède à la formation de ce poste de commandement

 27   avancé à Grude, parce que, en raison du niveau d'organisations inférieures

 28   de ces effectifs qui sont présents en Bosnie-Herzégovine, ce poste de

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  1   commandement prend en charge cette tâche d'organisation et y compris

  2   l'organisation des lignes, et des combats qui étaient menés contre la JNA

  3   et la VRS, et c'est uniquement pour cette raison d'ailleurs que le poste de

  4   commandement avancé de Grude a été créé.

  5   Q.  Passons au document suivant, le P 163. Il s'agit également d'un ordre

  6   du commandant Janko Bobetko concernant la composition de ce poste de

  7   commandement avancé à Grude, et vous figurez au numéro 1, Général, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Oui. Monsieur les Juges, nous avons maintenant, dans ce document, la

 10   mise en œuvre concrète de cet ordre. Nous avons les noms des personnes qui

 11   font partie de ces postes de commandement avancés, 11 personnes qui

 12   devaient prendre en charge cette situation, ainsi que les opérations qui

 13   devaient se dérouler dans cette zone aux mois d'avril, mai, et juin 1992.

 14   Q.  Alors, Général, quand êtes-vous vous-même arrivé sur le territoire de

 15   la Bosnie-Herzégovine ?

 16   R.  J'y suis arrivé le 14, au soir.

 17   Q.  Quel mois, le 14 de quel mois ?

 18   R.  Le 14 avril 1992. Cela a été officiellement enregistré comme étant le

 19   15. Moi, dans ma propre documentation, j'inscris toujours la date du jour

 20   où je suis vraiment arrivé, c'est-à-dire le 14. Mais, officiellement, cela

 21   a été enregistré comme le 15 avril 1992.

 22   Q.  Alors, en arrivant en Bosnie-Herzégovine, Général, est-ce que vous vous

 23   attendiez à trouver sur place une forme ou une autre d'état-major principal

 24   du HVO ou d'autres forces des Croates et des Musulmans ? En fait, à quoi

 25   vous attendiez-vous ?

 26   R.  J'avais des indications selon lesquelles existait un état-major. Je ne

 27   savais pas sous quelle forme il se présentait, mais je savais que cet état-

 28   major commandait les forces du HVO du 4 au 10 avril dans les combats menés

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  1   par le HVO contre la JNA et les forces serbes à Kupres. Alors, je

  2   m'attendais à trouver cet état-major en place, mais je ne les ai jamais

  3   rencontrés, en fait, sur le terrain parce que l'homme qui était à la tête

  4   de cette structure et d'autres également étaient partis quand je suis

  5   arrivé.

  6   J'ai été surpris en arrivant de voir qu'au sud de cette ligne Prozor-

  7   Jablanica, c'est donc une partie très importante du territoire de

  8   l'Herzégovine centrale et orientale, j'ai été surpris de voir que les

  9   autorités et le pouvoir central ne disposaient d'aucun commandement

 10   opérationnel, d'aucune unité en dehors du Bataillon indépendant à Mostar.

 11   J'ai été totalement surpris de voir cela. Je m'attendais à trouver au moins

 12   deux ou trois brigades ou des détachements de la Défense territoriale;

 13   cependant, il n'y avait personne.

 14   Q.  Mais alors, Général, que pouvait-on trouver des structures de la

 15   Herceg-Bosna sur ce territoire au moment de votre arrivée ?

 16   R.  Messieurs les Juges, si vous m'interrogez au sujet de ce jour précis,

 17   je dois vous dire que j'avais beaucoup de mal à m'y retrouver et que je ne

 18   savais rien à ce moment précis. Ce n'est qu'après le 20 avril, après les

 19   combats à Livno, que j'ai discuté un peu avec Jozo Maric. Il était à la

 20   tête de la municipalité de Grude. C'était un enseignant, et il m'a alors

 21   expliqué ce que c'était que la Herceg-Bosna, l'organisation des Croates

 22   pour assurer la défense, la situation telle que, disait-il, prévalait dans

 23   les municipalités. Moi, je lui ai alors demandé ce qu'il en était de Boban

 24   et des autres, et j'ai demandé qui d'autre il y avait. En fait, on a pu me

 25   citer le nom de personne d'autre. Tout remontait à lui au HDZ, à la

 26   présidence, et il y avait autour de lui deux ou trois personnes dans un

 27   hôtel à Grude et c'était tout.

 28   Alors, moi, je m'attendais que, pendant les dix premiers jours, il serait

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  1   possible de voir au moins une quinzaine de personnes mais voilà ce qu'il en

  2   était. Il était assez seul dans ces locaux où il se trouvait et je n'ai pas

  3   pu prendre connaissance de ses structures et je n'ai pas vu concrètement de

  4   quoi il s'agissait, je n'ai pas pu voir ce que c'était jusqu'au jour 19 au

  5   mois d'août 1992.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est importante et elle mérite qu'on

  7   s'y attarde.

  8   Si je comprends bien, le 16 avril 1992, vous allez au poste de commandement

  9   avancé à Grude parce qu'il va y avoir des combats avec les Serbes. Vous

 10   arrivez sur place et vous dites : Je croyais qu'il y avait un quartier

 11   général du HVO, vous rencontrez personne. Vous voyez pas l'ombre d'un HVO

 12   quelconque. Puis, ultérieurement, après les combats de Livno, vous discutez

 13   avec M. Maric, qui vous parle du HVO et qui vous dit, Il y a Mate Boban.

 14   Alors, quand je vous ai écouté, j'ai l'impression que vous, avant le 16

 15   avril 1992, Sarajevo n'aviez eu aucun contact avec Mate Boban ou tous ceux

 16   du HVO et que, là, vous découvrez que ça existe après ces combats. C'est ça

 17   que vous nous dites ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce

 19   n'est pas exactement cela.

 20   A la fin du mois de mars 1992, lorsque accompagné d'une équipe de la zone

 21   opérationnelle de Split, je me suis rendu en visite dans ce territoire,

 22   alors nous avons vu la partie du territoire marquée en rose, là où les

 23   attaques des Serbes ont été arrêtées. Je me suis trouvé dans un hôtel à

 24   Metkovic et j'ai rencontré Mate Boban de la façon suivante : Mon assistant

 25   à la logistique au sein de la zone opérationnelle est entré. Il m'a salué

 26   avec un de ses hommes ou plutôt, avec quelqu'un d'autre. Ils se sont

 27   salués, ils se sont embrassés et il m'a présenté la personne en question.

 28   Il m'a dit : C'est M. Boban. Il m'a présenté, moi, donc, voilà M. Petkovic,

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  1   qui est un commandant opérationnel de notre zone. Ils se sont assis.

  2   En fait, cet assistant à la logistique qui était avec moi était

  3   directeur d'un grand complexe hôtelier à Split, et Mate Boban était, lui,

  4   directeur d'une société commerciale à Imotski, et ils ont discuté entre

  5   eux. En fait, ils faisaient des affaires ensemble. C'est comme ça qu'ils se

  6   connaissaient, et le frère de Boban, à l'époque, était dans la logistique

  7   au sein de la marine, et ça a été là ma première rencontre avec Mate Boban.

  8   Cela a duré à peu près une heure.

  9   Il a été question de savoir quelle était la situation. On se demandait si

 10   Neum allait tomber ou non et ce qui allait se produire. Par ailleurs, je

 11   lui ai demandé de nous dire quel type de force se trouvait déployée le long

 12   de la Neretva, de Capljina à Mostar, et quelles étaient les forces sur

 13   lesquelles nous, en Croatie, nous pouvions nous appuyer comme des forces

 14   qui pourraient éventuellement garantir notre sécurité. Il m'a répondu à un

 15   moment donné. Il m'a dit :

 16   "Toi, tu es celui qui a commandé la défense de Sibenik. Il serait bon

 17   que tu puisses venir nous aider, que tu puisses venir voir cette

 18   organisation qui est la nôtre et ce dont nous disposons."

 19   J'ai répondu que ce n'était pas un problème pour moi de venir pour

 20   deux ou trois jours afin de voir comment ils étaient organisés et qu'il

 21   serait bon pour moi que je puisse rencontrer deux ou trois de leurs hommes

 22   qui étaient au courant de la façon dont les choses étaient organisées, et

 23   lui, il a insisté. C'est comme ça que tout a commencé. Il a insisté. Il m'a

 24   dit :

 25   "J'aimerais que tu viennes."

 26   Mais je ne suis pas parti, à ce moment-là, et c'était la première

 27   fois où nous nous sommes rencontrés.

 28   A l'époque, nous ne parlions ni de la Herceg-Bosna ni de rien d'autre. Lui

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  1   se contentait de me dire que les Croates s'étaient organisés selon les

  2   municipalités en fonction des possibilités des uns et des autres de façon

  3   différente, mais qu'il n'y avait pas là le type d'organisation qu'il

  4   conviendrait peut-être de mettre en place. Il était donc à la recherche de

  5   quelqu'un d'expérimenté et puisque, moi, j'avais été au sein de la zone

  6   opérationnelle de Sibenik, il était intéressé par mon éventuelle venue, et

  7   les choses en sont restées là.

  8   Après trois à cinq jours, trois hommes -- trois de leurs hommes sont

  9   arrivés, qui travaillaient dans le cadre de la défense. Ils ont apporté des

 10   informations concernant la localisation du HVO.

 11   Ensuite mon contact suivant a été une conversation téléphonique lorsqu'il y

 12   a eu une attaque dirigée contre Kupres. Je crois que c'était le 4 avril

 13   1992. C'est alors qu'il a demandé de l'aide auprès de la zone

 14   opérationnelle et nous n'avons pas pu lui répondre positivement, nous

 15   n'avons pas pu nous engager. Nous nous sommes contentés de dire que nous

 16   allions suivre la situation pour voir comment les choses allaient se

 17   développer.

 18   Voilà quels ont été mes premiers contacts avec M. Boban en 1992. Nous avons

 19   fait connaissance pendant cette heure où nous étions assis autour d'une

 20   même table, à Metkovic, dans cet hôtel.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le document qu'on a sous les yeux, les 11

 22   personnes qui sont nommées, je vois au numéro 7, il y a un civil qui

 23   s'appelle Bruno Stojic; est-ce que c'est le même Bruno Stojic que nous

 24   avons ici, et si c'est le même, qu'est-ce qu'un civil vient faire dans ce

 25   poste de commandement avancé ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 27   oui c'est exact. M. Bruno Stojic figure au numéro 7. Il est cité comme

 28   civil. Il avait en fait la charge de la partie logistique, au sein de ce

Page 49337

  1   poste de commandement avancé. Parce que pour autant que je le sache, peu de

  2   temps ou plutôt pendant un certain temps déjà avant cela, il avait pris en

  3   charge des tâches d'ordre logistique qui tombaient sous le coup de cet

  4   état-major, qu'il l'ait été très présent ou pas. Tous les autres que nous

  5   voyons ici, en dehors de la dernière personne qui figure sur la liste, sont

  6   ceux qui étaient considérés comme membres de l'état-major. Ils étaient tous

  7   membres de l'état-major, mais les commandants de cet état-major, eux ne

  8   sont jamais revenus sur place.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce civil, Bruno Stojic, qui s'occupait de la

 10   logistique, vous le connaissiez déjà ou vous l'avez rencontrée en avril

 11   1992?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai fait sa connaissance qu'à ce

 13   moment-là. En dehors de la personne qui figure au numéro 2, Jure Zadro,

 14   dont j'ai fait la connaissance fin mars ou début avril, et de Zarko Keza,

 15   dont j'avais fait la connaissance à Zadar, parce que c'étaient ces deux

 16   personnes que Boban avait envoyé à Ploce pour qu'ils exposent la situation

 17   telle qu'elle prévalait en Bosnie-Herzégovine, et bien en dehors de ces

 18   deux hommes, je ne connaissais aucun des autres. Je dois aussi mettre à

 19   part le numéro 11, parce que c'était un soldat de l'armée croate, donc je

 20   le connaissais.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation]

 22   Q.  Alors lorsque vous êtes arrivé en Bosnie-Herzégovine, si nous mettons

 23   de côté les officiers de la JNA qui travaillaient sur place et que vous ne

 24   connaissiez pas, est-ce qu'il y avait qui que ce soit là-bas en Bosnie-

 25   Herzégovine que vous connaissiez déjà? Est-ce que vous aviez des parents?

 26   Est-ce que vous aviez des partenaires commerciaux, quiconque qui vous

 27   aurait été proche ?

 28   R.  Non, Messieurs les Juges, je n'avais personne en Bosnie-Herzégovine, et

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  1   dans ma carrière militaire, pour ce qui concerne la Bosnie, j'avais

  2   l'occasion d'aller à Sarajevo, à Kalinovik et j'ai traversé Sarajevo pour

  3   me rendre à Mostar où j'ai passé 15 minutes à la gare routière avant de

  4   poursuivre mon chemin. Donc cela résume l'expérience que j'avais de la

  5   Bosnie-Herzégovine, alors même que j'avais passé 23 ans au sein de la JNA,

  6   années de formation comprises.

  7   Q.  Général, lorsque vous vous êtes rendu en Bosnie-Herzégovine, est-ce que

  8   vous y êtes arrivé avec une conception qui aurait été la vôtre de

  9   l'organisation interne de l'état de Bosnie-Herzégovine?

 10   R.  Ma propre conception, à vrai dire je ne réfléchissais pas à la moindre

 11   idée d'une organisation de ce type-là, et personne -- je n'étais pas censé

 12   le faire et personne ne me demandait mon avis. Mais j'ai entendu dire que

 13   les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine discutaient. Mon opinion était que

 14   la meilleure solution serait que ces trois hommes parviennent à un accord

 15   et qu'ils acceptent ce que la communauté internationale, à la fin de 1991

 16   leur proposait déjà, fin 1991, début 1992. Alors déjà ces négociations, ces

 17   discussions s'efforçaient de s'orienter vers une solution pour la Bosnie-

 18   Herzégovine.

 19   Mais en dehors de cela, ma position était la suivante, je savais que

 20   trois peuples vivaient en Bosnie-Herzégovine. Ma position était que chaque

 21   peuple de Bosnie-Herzégovine, indépendamment de sa représentation numérique

 22   devait disposer des mêmes droits. A ces conditions-là, j'estimais qu'il

 23   s'agirait d'un état bien organisé. Tout ce qui s'écarterait de ce principe,

 24   je considérais que ce ne serait pas une bonne solution, parce que la partie

 25   qui se verrait mise en minorité, et ne verrait pas ses droits respectés.

 26   Mais en dehors de cela, j'estimais qu'ils pouvaient se mettre d'accord

 27   comme ils le souhaitaient, si les trois représentants des trois peuples

 28   avaient signé un accord et s'ils avaient proclamé un royaume de Bosnie-

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  1   Herzégovine, je leur aurais tiré mon chapeau, et j'aurais salué le roi en

  2   question, à condition qu'ils aient respecté ce principe.

  3   Q.  Dites-nous, Général : si je vous ai bien compris, l'objet d'un

  4   accord entre les représentants des trois peuples constitutifs de Bosnie-

  5   Herzégovine, à vos yeux, en tant que militaire de carrière ce serait

  6   acceptable, voire même qu'ils se mettent d'accord sur la -- que l'état

  7   devienne un royaume ?

  8   R.  Oui, tout à fait, absolument. Tout cela est acceptable, à

  9   l'époque et aujourd'hui.

 10   Q.  Très brièvement, mon Général, puisque nous avons déjà évoqué

 11   l'évolution des opérations de combat, est-ce qu'on est parvenu à arrêter

 12   les activités de combat de la VRS près de Tomislavgrad ou non ?

 13   R.  Si. C'était en avril 1992, le 24, on a lancé une grande opération

 14   de grande ampleur de la VRS et de la JNA qui était là encore à l'époque. En

 15   principe, sur la ville de Livno et la municipalité de Livno, mais aussi

 16   contre la municipalité de Tomislavgrad.

 17   Q.  Dites-nous : à ce moment-là, quelle est la priorité pour Janko

 18   Bobetko ?

 19   R.  Pour Janko Bobetko, la première chose ou plutôt la chose très

 20   importante était d'arrêter Livno, ne pas accepter la chute de Livno ou de

 21   Tomislavgrad. Donc c'est la raison pour laquelle il y a eu l'ordre pour les

 22   villes de Livno et de Tomislavgrad de fortifier les villes entièrement à

 23   l'intérieur. On a bloqué les rues avec des camions, on a tracé des chemins

 24   de frise en béton. A tout prix, le général Bobetko voulait mettre fin à

 25   l'attaque serbe sur Livno. Parce que cela lui aurait permis d'arrêter

 26   l'avancée en Herzégovine vers la Neretva et Mostar, et par là même, il

 27   allait empêcher toute éventuelle attaque vers le sud, vers Split, au sud de

 28   Split, en République de Croatie.

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  1   Q.  Dites-nous, Général : compte tenu de cette situation, vu ces

  2   circonstances, pourrait-on envisager la libération de Dubrovnik d'ores et

  3   déjà et de la partie occupée de la Croatie du sud ?

  4   R.  Non, non c'était hors de question. On ne pouvait pas amorcer la

  5   libération de Dubrovnik et de la partie que nous avons vue sur la carte,

  6   tout en exposant ses arrières, Split, Makarska, ça aurait été voué à

  7   l'échec. Donc il fallait absolument sécuriser la situation, éliminer toute

  8   éventuel facteur qui aurait eu un impact, et après avancer vers Dubrovnik.

  9   Q.   Général, vous avez cité plusieurs localités, vous avancez trop

 10   vite on ne les a pas consignées au compte rendu. Lorsque vous dites dans

 11   les arrières, il faut sécuriser la situation dans les arrières, alors vous

 12   pensez à quoi, quel territoire?

 13   R.  Alors pour ce qui est de la Croatie, à l'exclusion de la ville de

 14   Split, je pense à Makarska, à Ploce, tout ce secteur jusqu'à Metkovic, la

 15   vallée jusqu'à Metkovic.

 16   Q.  Dites-nous : qu'est-ce qui a été lancé comme action afin de

 17   libérer pendant cette période-là ? Nous parlons de mai, juin 1992.

 18   R.  Donc on s'est d'abord occupé de la situation à Livno et Tomislavgrad,

 19   il a fallu sécuriser le front, et il y a eu l'échec, la défaite de la VRS

 20   et de la JNA. A partir de ce -- à ce moment-là, le général Bobetko a

 21   apprécié la situation et il a estimé qu'au moment où la JNA - donc c'est le

 22   mois de mai - où la JNA, d'une certaine manière, commence à quitter le

 23   territoire de Bosnie-Herzégovine, de passer l'autorité à des forces

 24   locales, et ceux qui faisaient partie de la JNA mais qui maintenant restent

 25   au sein des forces locales, donc ça a été un moment où il y avait une

 26   ouverture, une possibilité d'agir, lancer une offensive, libérer cette

 27   espace, ce territoire avant qu'ils ne s'organisent.

 28   Q.  Alors en un mot, quel est le territoire qui était libéré ?

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  1   R.  On a libéré la rive est de la Neretva de la ville de Capljina, la ville

  2   de Mostar, l'est de Mostar, Bijelo Polje, le plateau de Dubrava, et la

  3   municipalité de Stolac. Pas toute puisqu'il y avait des parties que nous

  4   n'avons pas pu libérer.

  5   Q.   Prenons le document suivant, P 279.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, à bien vous écoutez. A partir des documents

  7   que nous voyions, je crois comprendre ceci : Les forces serbes occupent la

  8   région de Dubrovnik, ce qui pour les Croates cause un gros problème. En

  9   termes militaires, le général Bobetko fait une action militaire pour

 10   concernant les secteurs de Mostar, Bijelo Polje, le plateau Dubrava,

 11   Stolac, et cetera, prendre position afin de permettre à l'armée croate au

 12   niveau de la zone de Dubrovnik mettre en difficulté la JNA, et que donc au

 13   mois d'avril 1992, il y a une opération militaire dirigée contre les

 14   Serbes. C'est ce que je crois comprendre de ce que vous dites.

 15   Mais dans l'acte d'accusation, que vous avez dû lire, vous savez que le

 16   Procureur indique que vous faisiez partie d'une entreprise criminelle

 17   commune avec le général Bobetko, et qu'en réalité, cette entreprise

 18   criminelle commune avait pour but : soit de prendre le contrôle de

 19   municipalités par une épuration ethnique, et cetera, et cetera. Je n'entre

 20   pas dans les détails, et que partant de là, on peut penser qu'en 1992, le

 21   poste de commandement avancé à Grude fait partie de tout ce plan.

 22   Alors même que vous nous donnez là une explication de nature militaire.

 23   Alors pour mon résumé, vous, vous nous dites que l'armée  croate, qui agit

 24   en avril 1992, n'a que pour but que d'exercer une action militaire à

 25   l'encontre des Serbes, et que si je comprends bien votre raisonnement, la

 26   question de la République de Bosnie-Herzégovine, des Musulmans, n'est pas

 27   une question -- la question majeure de cette action.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est précisément

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  1   cela.

  2   Une fois qu'on a libéré la rive est de la Neretva, M. Izetbegovic a

  3   proclamé l'état d'urgence en Bosnie-Herzégovine, et en fait les 70

  4   kilomètres de Capljina à Bijelo Polje lui ont été offerts en cadeau par

  5   nous, et les quelques kilomètres vers Stolac. C'est le plus grand

  6   territoire en 1992, 1993 à avoir été libéré en Bosnie-Herzégovine face à la

  7   VRS et la JNA dont les vestiges étaient encore sur place.

  8   Après ces événements, le général Bobetko a poursuivi l'action sur le

  9   territoire de la République de Croatie en direction de Dubrovnik, il va

 10   libérer le sud de la République de Croatie, et le HVO, dans sa majeure

 11   partie, et à l'époque, on avait déjà mis sur pied la 1ère Brigade de Mostar

 12   de l'ABiH, donc se charge de sécuriser la ligne de front dans les

 13   territoires nouvellement libérés.

 14   Puis j'ajoute, en juillet 1992, le général Bobetko évacue une partie de

 15   l'armée croate de ce territoire et il les déploie vers Dubrovnik. Il ne

 16   reste que le fameux Groupe tactique 2, pendant trois mois, les uns ou les

 17   autres on les a eus entre nos mains.

 18   Puis j'ajoute. Après ces opérations menées dans le sud donc concrètement en

 19   Herzégovine de l'est, donc la Bosnie-Herzégovine, c'était des offensives de

 20   libération et puis à l'ouest il y a eu la défense, après cela Izetbegovic

 21   et Tudjman se sont rencontrés et ont signé cet accord bilatéral d'amitié et

 22   de coopération. Je suis convaincu que le président Izetbegovic ne serait

 23   pas rendu à Zagreb s'il l'avait l'intention qu'on menaçait ou qu'on avait

 24   occupé la Bosnie-Herzégovine, il n'allait pas signer un accord d'amitié et

 25   de coopération.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation]

 27   Q.  Général, d'après vos informations, l'engagement de l'armée croate, à ce

 28   moment-là, sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, cachait-il la moindre

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  1   hostilité contre la République de Bosnie-Herzégovine ?

  2   R.  Non, aucune, aucun événement d'hostilité. D'ailleurs, les Musulmans ont

  3   pris part à ces actions avec les Croates de l'armée croate et avec les

  4   Croates du HVO. Donc tous les hommes aptes à combattre ont pris les armes

  5   et ont pris part à cette action. Les Musulmans et il y en avait 30 % dans

  6   les rangs du HVO à prendre part à ces actions. Ils auraient pu dire : Mais

  7   non, on ne peut pas faire la guerre avec vous.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous voyez la difficulté que peut avoir un juge

  9   international. Si nous avions eu devant nous les documents de l'état-major

 10   croate, les documents concernant toutes les opérations menées sous le

 11   commandement du général Bobetko, sur la thèse que vous développez, à savoir

 12   la question de Dubrovnik, peut-être qu'un juge raisonnable aurait mieux

 13   compris la situation ayant tout devant lui. Malheureusement, comme je l'ai

 14   déjà dit, nous n'avons que ce que l'on nous donne, ce que le Procureur

 15   introduit, ce que la Défense introduit, et à partir de là, il faut qu'on

 16   vous pose des questions, des questions extrêmement compliquées, très

 17   délicates, alors même qu'il nous manque des pièces.

 18   Pour tout vous dire, Général Petkovic, dans ce type d'affaire où il y a des

 19   opérations militaires, de mon point de vue, nous devrions avoir tous les

 20   documents concernant l'armée croate tous les documents concernant la JNA

 21   puis la VRS, et tous les documents concernant l'ABiH. De mon point de vue,

 22   l'examen de tous ces documents devrait révéler la vérité. Mais si on a des

 23   embryons de documents, une partie de la vérité, une partie des faits il est

 24   très difficile de s'y retrouver. Donc c'est pour ça parfois je vous pose

 25   des questions très longues, parce que j'essaie de combler certains vides.

 26   Parce que je me rappelle que la question de Dubrovnik avait été évoquée

 27   tout au début du procès par le général Praljak, et à ce moment-là, il y

 28   avait eu des objections de l'Accusation. Alors, je n'ai pas très bien saisi

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  1   toute la problématique, et là, en vous écoutant, je comprends un peu mieux.

  2   Mais évidemment, j'aurais encore un peu mieux compris si j'avais sous les

  3   yeux toutes les pièces concernant l'état-major de l'armée croate, toutes

  4   les pièces concernant la JNA, puis après, le général Mladic, et cetera.

  5   Malheureusement, je n'ai pas tout ça.

  6   Donc, vous m'excuserez que parfois, mes questions sont longues, mais

  7   j'essaie de découvrir, et parfois, c'est très compliqué. Bien.

  8   Maître Alaburic.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  Général, le document P279, s'il vous plaît. Prenons-le.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Je viens

 12   d'observer, c'est la deuxième fois que M. Praljak envoie un message à Mme

 13   Alaburic qui n'est pas son conseil. La communication est possible entre un

 14   accusé et son conseil, mais pas entre un accusé et d'autres conseils.

 15   M. STEWART : [interprétation] Nous avons un problème à ce niveau-là. En

 16   fait, il n'y a aucune restriction à ce niveau. Le général Praljak a tout à

 17   fait la possibilité de le faire. Il peut le faire par le truchement de son

 18   conseil ou il peut également nous communiquer ce message directement. Il

 19   n'y a rien dans le Règlement ou dans les principes énoncés ici qui nous

 20   empêche de cela. Dans la mesure où ceci est fait avec politesse, il

 21   pourrait nous communiquer cela.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois que ceci devrait passer par

 23   le truchement de son conseil.

 24   M. STEWART : [interprétation] Peut-être qu'en pratique, ça pourrait se

 25   faire, mais nous restons sur notre position à moins qu'il y ait des

 26   implications de sécurité, et ceci est, bien sûr, totalement différent,

 27   Monsieur le Juge. Il a tout à fait le droit de le faire, et c'est ce que je

 28   continuerai à avancer. Nous aimerions avoir une décision à ce sujet parce

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  1   que c'est notre position très ferme à ce sujet. Et si les Juges de la

  2   Chambre veulent avoir une décision à ce sujet, nous aimerions que ceci se

  3   fasse soit de manière unanime, soit à la majorité.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] La Chambre va délibérer à ce sujet.

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je souscris

  6   entièrement à ce que vient de dire mon éminent confrère représentant à la

  7   Défense du général Petkovic. 

  8   Au passage, je me permets de vous rappeler qu'il s'agit là d'un problème

  9   que nous rencontrons sans arrêt, un problème de communication avec les co-

 10   accusés. La Défense du général Praljak en a parlé. A chaque fois qu'il

 11   convient de relever une erreur de compte rendu, de transcript, de poser une

 12   question, la question est de savoir : Est-ce que le général Praljak doit

 13   s'adresser à l'huissier, qui est présent dans le prétoire, qui prendra un

 14   bout de papier et qui me le transmettra, que j'aurai examiné, transmettrai

 15   à Me Alaburic. Ecoutez, je pense que c'est totalement inutile. Il n'y a

 16   aucun interdit qui pèse sur la communication entre les co-accusés et les

 17   conseils, y compris les conseils qui ont d'autres clients à défendre. Bien

 18   entendu, il faudra que la Chambre motive sa décision, si jamais elle décide

 19   d'imposer des interdits là-dessus. Je vous remercie et nous nous y

 20   conformerons.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite m'exprimer sur la question.

 22   Là, le général Petkovic souhaite prendre la parole.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne voudrais pas rentrer là-dedans. Je

 24   voudrais répondre à votre question précédente.

 25   Vous avez dit ici, pourvu que vous ayez eu entre les mains toute la

 26   documentation. Une bonne partie est déjà au dossier et puis, nous avons

 27   tous les documents relatifs à la libération de la rive et de la Neretva, de

 28   la date du début jusqu'à la date de la fin. Egalement, nous avons montré

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  1   ici deux ou trois ordres du général Perisic, c'est-à-dire de l'armée de

  2   Yougoslavie, donc je pense que seul l'ordre du 28 mai n'est pas encore

  3   versé au dossier, mais nous pourrions les ranger et les soumettre.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] S'agissant de la communication, je pense

  5   que la question est importante, et c'est une bonne chose, je pense, que le

  6   Juge Trechsel ait soulevé la question pour que nous puissions préciser les

  7   choses. Je peux dire quel est mon avis personnel.

  8   Il m'est arrivé d'apporter un bout de papier directement au général Praljak

  9   pour lui rafraîchir la mémoire ou lui rappeler un point important, à mon

 10   sens, et je le faisais parce que je pensais que, si j'agissais sur la base

 11   d'un accord avec plusieurs autres conseils de communiquer librement et

 12   l'accord faisant qu'on ne devait pas nécessairement passer par le

 13   truchement du conseil du destinataire, donc on considérait qu'on pouvait

 14   communiquer directement; et c'était mon avis.

 15   Si sans l'aval du conseil concerné, on entamait une communication avec le

 16   client en question, je ne penserais pas que ce serait conforme à notre

 17   éthique. Mais si la Chambre prend la décision que nous ne pouvons que

 18   communiquer entre confrères et consoeurs, je me conformerai à la décision

 19   de la Chambre et je présenterai mes excuses pour toute communication

 20   directe que j'ai pu avoir dans le passé avec les co-accusés.

 21   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Oui, je crois que nous pouvons

 22   remercier les contributions de Me Stewart et de Me Alaburic. Comme ceci a

 23   été mentionné, la Chambre va délibérer sur cette question et rendra sa

 24   décision. Je vous remercie.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce serait peut-être bon également

 26   d'entendre ce que le Procureur a à dire.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous savez, jusqu'à présent, je suis toujours

 28   Président de la Chambre. Donc, il m'importe de donner la parole à M. Scott.

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  1   Alors, j'allais, Monsieur Scott, vous demander : Quel est votre point de

  2   vue ?

  3   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   J'allais attendre un petit peu, étant donné que ceci vraiment relève

  5   d'activités au sein du prétoire. Mais étant donné que tout le monde a pris

  6   la parole, le Procureur se doit également dans ces circonstances de

  7   formuler quelques observations en la matière.

  8   Je dis ceci avec quelques réticences, mais étant donné ce qui a été soulevé

  9   ce matin et certains éléments qui ont été faits dans les plaidoyers au

 10   cours des derniers jours, je dois noter que l'Accusation a soulevé à

 11   plusieurs reprises que ses relations sont amicales. Il s'agit

 12   d'interrogatoires principaux amicaux, et lorsque la Défense proteste que

 13   nous sommes tous des unités et qu'ils ont leurs propres intérêts

 14   individuels, ceci, en fait, ne semble pas vraiment aller dans le même sens.

 15   Je comprends tout à fait leur droit à coopérer dans une certaine mesure. Je

 16   pense que ceci relève du bon sens. Mais en même temps, je voudrais

 17   consigner au compte rendu d'audience que si la Chambre va délibérer, c'est

 18   en fait un peu comme si Ml Praljak donnait note en disant : "Posez une

 19   question à ce sujet," et ce n'est pas vraiment l'indépendance qu'on

 20   souhaiterait.  

 21   M. STEWART : [interprétation] En fait, je crois qu'il faut faire très

 22   attention à ce que vient de dire M. Scott parce que, sur le principe, il

 23   soutient notre position, c'est évident. En fait, il a une légère doléance

 24   où il se plaint quelque peu sur ce que nous avons présenté dans certaines

 25   écritures, mais en fait, sur le principe, il soutient notre position et ne

 26   dit rien qui laisserait penser que sur le principe, ceci nous empêcherait

 27   d'avoir ce type de communication entre nous, et ceci est très clair d'après

 28   ce qu'il vient de nous dire.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Si je puis réagir sur les questions de

  2   relation entre les confrères, je pense que mes collègues pourraient

  3   confirmer ce que je vais dire.

  4   A chaque fois que j'ai pu remarquer qu'il y avait une erreur dans la

  5   présentation d'un document du côté de l'Accusation, j'ai envoyé un e-mail

  6   aux collègues de l'Accusation pour les en avertir pour qu'on n'ait pas à

  7   les en avertir en public et pour éviter toute situation embarrassante. Je

  8   pensais que ça, c'était -- ça relevait de -- disons de la solidarité entre

  9   les confrères et les consoeurs, mais cela ne signifie pas que mon client ne

 10   doit pas bénéficier de tous les droits, comme s'il n'y avait pas d'autres

 11   co-accusés en l'espèce.

 12   Quant à la remarque disant que le général Praljak me suggérerait des

 13   questions, je pense que M. Scott n'aurait pas pu avoir ça à l'esprit parce

 14   qu'il sait que je n'ai pas besoin qu'on me suggère des questions.

 15   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vais pas

 16   m'attarder là-dessus. Je voudrais répondre à ce que Me Stewart a dit. Avec

 17   tout le respect que je lui dois, je n'aime pas qu'il considère mes

 18   commentaires comme en fait des plaintes. J'ai simplement fait des

 19   informations étant donné que la Chambre allait se prononcer sur ce sujet --

 20   M. STEWART : [interprétation] J'ai utilisé le terme "whinge," en anglais,

 21   et j'aurais pu utiliser un autre terme pour parler de plainte. C'est un

 22   point tout à fait légitime, à savoir que ceci a été une plainte en

 23   utilisant, cette fois c'est le terme "complaint," en anglais, et n'a pas

 24   été --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- l'heure quasiment de faire la pause.

 26   Les Juges vont délibérer, puis au retour de la pause, on vous dira la

 27   position de la Chambre.

 28   --- L'audience est suspendue à 12 heures 27.

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  1   --- L'audience est reprise à 12 heures 47.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre va donc rendre sa décision

  3   concernant la communication entre un accusé et d'autres avocats.

  4   La Chambre dit qu'un accusé ne peut adresser tout type de communication

  5   qu'à son avocat, et celui-ci appréciera s'il convient qu'il doit restituer

  6   l'information aux autres avocats, qui informeront, eux-mêmes, leurs

  7   clients. En un mot, si M. Praljak a quelque chose à faire savoir aux autres

  8   avocats, il l'adresse à son propre avocat, et c'est pour ça qu'on a mis

  9   quelqu'un à la disposition pour transmettre les messages, et puis son

 10   avocat verra comment il va faire pour informer ses autres collègues. Voilà.

 11   Bien. Vous avez compris, Monsieur Praljak ?

 12   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, j'ai compris

 13   votre décision et, bien entendu, elle est définitive et elle vous

 14   appartient. Mais à chaque fois que je devrais remettre un message que

 15   j'estimerais important du point de vue de la présentation de choses

 16   précises pour que des décisions précises soient rendues, je demanderais une

 17   interruption du procès pour que mes avocats reçoivent en toute quiétude le

 18   message, puissent lire celui-ci, l'étudier, et ensuite, posément remettre

 19   ceci à l'autre équipe de conseils qui devra disposer de quelques minutes de

 20   temps pour en prendre lecture.

 21   Soit dit en passant -- enfin, la décision est rendue, je dois m'y

 22   conformer, certes. Mais malheureusement, je remarque, et si vous le

 23   permettez, si la Chambre le permet, j'aimerais dire que, de plus en plus,

 24   cette Chambre rend des décisions qui vont grandement au détriment de

 25   l'exactitude et l'équité de ce procès, et on sent déjà quelles vont être

 26   les positions prises par la suite. Je vais, donc, devoir me prononcer sur

 27   les opinions qui sont les miennes pour ce qui est du conflit qui est

 28   survenu entre les Juges pour ce qui est de l'étude de certaines questions

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  1   militaires, pourquoi est-ce qu'il n'y a pas d'expert militaire, parce que

  2   mes connaissances en matière militaire sont assez grandes, et cetera, et

  3   cetera.

  4   Merci.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Praljak.

  6   Bien. Donc, à l'avenir, vous passez à vos avocats vos observations; et

  7   puis, eux, ils verront -- voilà. Comme ça on n'aura pas ce type de

  8   problème.

  9   Alors, on va continuer, Maître Alaburic.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Général, on espère, cette fois-ci sera la bonne. On va retourner à ce P

 12   279.

 13   Mon Général, il s'agit d'un document qui porte votre signature et qui est

 14   intitulé : "Allocution introductive." Alors, est-ce que --d'abord, dites-

 15   nous : est-ce que c'est vous qui avez rédigé ce texte ?

 16   R.  Messieurs les Juges, ce texte est rédigé par trois personnes, moi-même

 17   et deux de mes collaborateurs.

 18   Q.  Veuillez nous indiquer de quel service faisaient partie ces

 19   collaborateurs.

 20   R.  Messieurs les Juges, il n'y avait pas beaucoup de services à l'époque.

 21   Mais c'était Zarko Keza qui était, sans interruption, l'officier chargé du

 22   renseignement. M. Zadro qui était l'aîné, c'était l'homme chargé des

 23   transmissions à ce moment, mais c'était le plus haut gradé par rapport aux

 24   autres, et il avait fait partie des rangs de la JNA.

 25   Q.  Général, dites-nous, si c'est vous qui avez tenu ce discours liminaire.

 26   R.  Non, le discours liminaire tel que présenté ici n'a pas pu être fait

 27   parce qu'on n'a pas transmis la bonne information concernant ce qu'on

 28   souhaitait entendre à l'occasion de cette réunion.

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  1   Q.  Mais dites-nous : qu'aviez-vous estimé devoir être votre rôle lors de

  2   cette réunion ?

  3   R.  Lorsque l'information est arrivée à moi, je me suis dit que j'étais

  4   censé être la personne à diriger les travaux de la réunion en entier, et

  5   que j'étais -- enfin, j'avais la liberté de choisir les thèmes. C'est ainsi

  6   que l'information relative au préparatif de ces réunions m'est parvenue.

  7   Q.  Veuillez nous indiquer avec qui cette réunion était censée se tenir,

  8   qui était censé y assister ?

  9   R.  Lors de cette réunion, il devait y avoir la présence de M. Boban, le

 10   général Bobetko, et les commandants de trois -- enfin, trois ou quatre

 11   commandants de QG municipaux du HVO le long de la Neretva. Il devait y

 12   avoir deux ou trois hommes à mes côtés, zone opérationnelle du sud-ouest,

 13   donc, trois ou quatre personnes. Ça aurait donné à peu près 35 ou 40

 14   personnes, en tout et pour tout.

 15   Q.  Est-ce qu'Arif Pasalic était censé être présent en sa qualité de

 16   commandant de cette Unité de l'ABiH à Mostar ?

 17   R.  Oui, une délégation, la délégation de Mostar, avait prévu M. Pasalic en

 18   sa qualité de commandant de bataillon.

 19   Q.  Dites-nous : quand est-ce que vous avez appris que cette réunion ne

 20   serait pas ce que vous aviez pensé que cela devait être ?

 21   R.  Cette réunion a commencé, me semble-t-il, vers 4 heures de l'après-midi

 22   à Medjugorje. Entre 1 heure et 2 heures, il y a eu l'arrivée du général

 23   Bobetko. Il est arrivé après les entretiens avec Boban, et il est venu chez

 24   moi où il y avait le poste de commandement avancé, et il m'a demandé si

 25   j'étais prêt pour la tenue de la réunion.

 26   Sur le mur, il y avait une grande carte de suspendue à l'échelle de 1

 27   pour 25.000, et j'ai dit : Mon Général, la carte est ici, tout est bien

 28   tracé, on va finir de retaper la partie écrite du document. Lorsque cette

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  1   partie textuelle est arrivée, le général s'est penché dessus et il m'a dit

  2   : Mais tu crois vraiment que je vais me mettre au premier banc et que tu

  3   serais chargé de la conduite de la réunion. Qui c'est qui te l'a dit ? Je

  4   lui ai répondu : Ecoutez, celui que vous m'avez envoyé m'a ainsi transmis

  5   les choses. Alors il m'a dit : C'est une réunion de militaires, les civils

  6   ne m'intéressent pas. Ils ont M. Boban pour discuter de choses civiles.

  7   Moi, je n'ai pas plus d'une demi-heure pour m'y attarder. Puis, il s'est

  8   penché sur le détail et à partir du numéro 2, il a dit : Ça et au-delà, ce

  9   n'est pas nécessaire d'en débattre. Notamment, parce qu'à ce moment-là, le

 10   HVO n'avait aucune espèce de documents, on ne pourrait pas parler de soin,

 11   d'organisation au niveau des brigades, alors que le HVO n'a adopté aucune

 12   espèce de documents en la matière.

 13   Q.  Quel a été, en réalité, votre rôle effectif à cette réunion ?

 14   R.  Il y a eu une décision de prise qui a été celle de dire que je serais

 15   le premier à prendre la parole pour brosser la situation militaire sur le

 16   territoire à l'est de la rivière Neretva, y compris Stolac, Capljina,

 17   Mostar est, c'est-à-dire, la ligne de front face à l'armée de la Republika

 18   Srpska, et ce, de façon à montrer sur la carte par où passaient les

 19   positions et donner exactement le nombre de soldats, dire de quel groupe

 20   ethnique ils faisaient partie. Je devais donner le nombre de chars et je

 21   devais aussi donner des évaluations pour ce qui est de savoir quelle est à

 22   peu près la force des effectifs serbes face à nous. C'était à peu près la

 23   mission qui était censée être la mienne lors de cette réunion.

 24   Q.  Veuillez nous indiquer si vous l'avez dit de tête, comme on le dirait,

 25   ou est-ce que vous aviez un texte de pré rédigé?

 26   R.  Le papier que vous avez ici, lorsque Bobetko a dit qu'il n'y a pas à

 27   débattre de tout ceci, j'ai pris tout simplement la carte avec moi, je l'ai

 28   placée dans cette pièce - j'avais une espèce de pointeur en bois - et je me

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  1   suis mis devant la carte pour expliquer pendant à peu près 35 minutes la

  2   situation telle qu'elle se présentait.

  3   Q.  Est-ce que vous pouvez, mon Général, nous expliquer un fait, à savoir

  4   que ce document ne dispose pas d'un numéro de remise en mains propres?

  5   R.  Je ne peux pas dire qu'il a été rejeté ce document, mais lorsque

  6   l'autre a dit que ce n'était pas nécessaire de le mettre -- enfin, de le

  7   jeter en procédure, nous ne l'avons pas pris en considération en tant que

  8   tel.

  9   Q.  Mon Général, est-ce qu'à l'occasion de cette réunion, vous auriez eu

 10   l'occasion de voir le général Beneta ?

 11   R.  Oui, il y avait le général Beneta, et il y avait encore quatre

 12   individus du QG municipal de Capljina. A leur tête, il me semble, il y

 13   avait un monsieur -- un certain monsieur Luburic.

 14   Q.   Mon Général, veuillez nous dire ce qui, aux yeux du général Bobetko, à

 15   ce moment-là, était la chose la plus importante?

 16   R.  Le général Bobetko a présenté deux conclusions. La première : Il avait

 17   demandé par écrit, d'abord de ma part, il me semble qu'il y avait une

 18   dizaine de commandants de QG municipaux du HVO, et il voulait que nous

 19   garantissions que la ligne face aux Serbes soit si sûre, sécurisée à tel

 20   point qu'aucune force serbe ne serait capable de la percer pour opérer une

 21   sortie sur la Neretva. C'est la première mission qu'il voulait que je

 22   prenne sur moi, moi et les chefs des QG municipaux. A la fin, je lui ai

 23   signé la chose. Il m'a dit, je tiens cela par écrit et je te prends au mot.

 24   Si vous le permettez, la deuxième conclusion qui était la sienne, c'était

 25   de nous demander de nous pencher -- pour ce qui est du reste des effectifs

 26   croates, il a dit qu'il devait les retirer. Il a dit, trouver les moyens

 27   d'intégrer là des militaires du HVO. Il nous a dit de prélever une partie

 28   des effectifs pour les entraîner à des fins d'activité offensive, aux fins

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  1   d'être prêt, car au cas où il y aurait des organisations des forces serbes,

  2   il faudrait pouvoir mettre la chose à profit.

  3   La troisième mission confiée par ses soins, était celle de maintenir un

  4   lien ferme entre les positions en Herzégovine et les positions de l'armée

  5   de Croatie à la frontière ou le long de la frontière face à Dubrovnik, afin

  6   qu'entre ces lignes, il n'y ait pas de percée d'opérée par autrui.

  7   Donc, c'étaient les conclusions principales qu'il voulait que nous

  8   prenions ou que nous adoptions.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

 10   l'intention de poser d'autres questions au sujet de ce document. Si vous en

 11   avez, vous-même --

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, Monsieur, j'ai -- Général Petkovic, j'ai une

 13   question parce que j'ai une grille d'analyse qui est la situation au mois

 14   de juin 1992, et en juin 1992, la République de Bosnie-Herzégovine est

 15   reconnue internationalement, et donc est un Etat, et vous savez mieux que

 16   quiconque qu'un Etat a une armée. Voilà que ce jour-là, vous faites une

 17   réunion, tel que ça apparaît dans le document, avec le général Bobetko, il

 18   y a des hommes politiques municipaux et des commandants du HVO de certaines

 19   unités. Puis vous avez dit, si j'ai bien compris, qu'il y avait également

 20   Pasalic. Comme le dit le document, vous exposez la situation. Votre

 21   intervention est très structurée. Et en lisant ce document, je me rends

 22   compte que le HVO a, grosso modo, 1 000 hommes. Vous détaillez les

 23   effectifs par localité. Par exemple, Mostar, 3 500 à 3 700. Vous dites que

 24   tout ça, ça ferait -- enfin, 10 000 hommes, excusez-moi, c'est 10 000, et

 25   que tout ça, ça fait une division. Vous rajoutez même qu'il y a le HOS qui

 26   a assisté avec 80 à 100 personnes.

 27   Vous faites une proposition - c'est au paragraphe 3 - en vous fondant

 28   sur l'exemple de l'Unité professionnelle, Bruno Pusic, et en disant qu'il

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  1   faut professionnaliser l'armée, et notamment, donner un statut aux soldats

  2   du HVO. Ça, c'est au point 4. 

  3   Alors, ce document, il peut avoir deux lectures. Comment se fait-il

  4   qu'alors même qu'il y a un état qui est la République de Bosnie-

  5   Herzégovine, à aucun moment, dans votre intervention, vous dites qu'il faut

  6   qu'il y ait une armée professionnelle sous bannière de la République de

  7   Bosnie-Herzégovine, et cetera, et cetera, vous ne le dites à aucun moment ?

  8   Pourquoi ça n'a pas été évoqué ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, ceci se passe en juin

 10   1992. La présidence de la République de Bosnie-Herzégovine, au moment

 11   donné, n'a organisé aucune force sur ces territoires-là, exception faite de

 12   ce Bataillon autonome de "Mostar," et nous lui avons consacré l'attention

 13   qui lui était due.

 14   Deuxièmement, dans les autres documents précédents de la part du

 15   ministre de la Bosnie-Herzégovine, il a été dit que les conscrits devaient

 16   se présenter dans les départements municipaux chargés de la défense pour

 17   être inscrits là-bas, aux fins de la création d'unités, et le HVO a réagi à

 18   la chose et a procédé de la sorte.

 19   Au moment donné, ici, je n'ai aucun officier de l'armée de Bosnie-

 20   Herzégovine, exception faite de ce Bataillon autonome, aucune brigade de

 21   l'armée de la Bosnie-Herzégovine ou autre unité qui serait dans le

 22   voisinage pour que je puisse concerter celle-ci sur quelque point que ce

 23   soit et convenir de quoi que ce soit. Par conséquent, il n'y a que le HVO.

 24   Il y a une partie de l'armée croate qui a aidé à libérer ce territoire face

 25   à l'armée de la Republika Srpska, et à ce moment-là, d'abord, je ne sais

 26   pas ce qu'il y a de -- plus au nord pour ce qui est de ce qui est organisé

 27   par la présidence de la Bosnie-Herzégovine. D'autre part, dès qu'il y a eu

 28   un appel à la mobilisation publique, et lorsqu'il y a eu proclamation d'un

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  1   état de guerre par le président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, par

  2   ce fait-là, moi et les autres qui avaient combattu jusque-là, nous étions

  3   proclamés ou déclarés être des effectifs faisant partie de l'armée de

  4   Bosnie-Herzégovine, parce que s'ils n'avaient pas compté sur nous, il

  5   aurait créé des effectifs auxquels il commanderait. Ils ne l'ont pas fait.

  6   Je suppose probablement que c'est parce qu'ils s'étaient dits qu'il s'était

  7   créé pas mal d'unités sur ce territoire-là.

  8   Si vous vous souvenez bien des documents datant de la fin du mois de

  9   mai, le président Izetbegovic créait des régiments, des brigades, et tout

 10   qu'il passe en Bosnie centrale, à Bihac, et cetera, alors que, sur notre

 11   territoire à nous, il n'y a rien. Donc, à mes yeux, il avait accepté que le

 12   HVO était ce qu'il était et qu'il était organisé d'ores et déjà sur ces

 13   territoires-là.

 14   D'autre part, si mes souvenirs sont bons, dans ce document, je n'ai nulle

 15   part non plus mentionné l'Herceg-Bosna. Moi, j'étais un individu qui était

 16   venu il y a deux mois sur le territoire et ce que l'on m'avait suggéré, je

 17   voulais bien l'accepter. J'en prenais bonne note, et j'ai déjà dit que les

 18   points 2, 3 et 4, c'étaient mes réflexions à moi qui n'étaient pas

 19   destinées à la réunion. Ces points-là avaient été mis de côté pour des

 20   temps meilleurs. Je ne pouvais pas parler de professionnalisation sans pour

 21   autant avoir quelque document que ce soit qui dirait ce qu'il faudrait

 22   faire, quels seraient les fondements législatifs et autres. Donc, j'ai tout

 23   mis de côté. Mais, à ce moment-là, j'avais mis des réflexions sur papier en

 24   comparaison avec ce qui avait été fait en Croatie. Je n'ai donc pas

 25   mentionné la Bosnie-Herzégovine, mais il me semble que je n'ai pas

 26   mentionné non plus l'Herceg-Bosna.

 27   Deux, il n'y a pas eu les responsables des municipalités à être venus. On

 28   m'avait dit qu'ils viendraient, les maires, mais ils sont pas venus, et

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  1   donc c'était ce qu'on avait sur place. Moi, qui étais chargé d'une partie

  2   de cette opération-là, nous étions censés tous participer à la défense de

  3   la Bosnie-Herzégovine.

  4   Au final, je dirais que nous avons reçu des fleurs de lys en or le 7

  5   [imperceptible] de l'année 1992 de la part de Halilovic, bien que Halilovic

  6   ne m'ait jamais félicité pour ce qui est de ce fait.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, tout à l'heure, avant qu'on voit ce

  8   document, je dois vous dire que j'avais écouté attentivement la

  9   démonstration que vous aviez faite sur la question de l'action menée par

 10   l'armée croate pour la zone de Dubrovnik. Vous avez expliqué en long et en

 11   large qu'est-ce qu'il fallait faire, ce que vous aviez fait avec succès

 12   puisque vous avez pu libérer, comme vous l'avez dit, des territoires.

 13   Bien. J'avais bien ça en tête. Voilà que je vois ce document qui vient

 14   quelques semaines après et qui ne semble pas dire la même chose. Car, comme

 15   vous le voyez, regardez au petit 1, vous dites qu'il y a eu une offensive

 16   dans la zone sud-est du HVO avec l'assistance considérable de l'armée

 17   croate. Moi, en vous écoutant tout à l'heure, j'avais l'impression que

 18   c'était l'armée croate qui était venue parce qu'il y avait rien d'autre que

 19   vous face aux Serbes et voilà que, dans ce document, on découvre qu'il y a

 20   des forces du HVO qui ont participé à la bataille avec l'assistance de

 21   l'armée croate. Il y a le mot "assistance," alors que j'avais cru

 22   comprendre tout à l'heure que c'était l'armée croate pour sauvegarder ses

 23   propres intérêts qui était intervenue. Là, il me semble qu'il y a une

 24   contradiction. Alors, vous pouvez la lever, cette contradiction ? 

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux le faire, Monsieur le Juge.

 26   Peut-être qu'il serait bon d'afficher à nouveau la carte correspondante ?

 27   Le territoire dont il s'agit est un territoire frontalier de la République

 28   de Croatie. Vous avez entendu le général Beneta. La HV se trouvait

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  1   précisément dans la zone frontalière se situant donc entre la République de

  2   Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine. Une zone, donc, d'une

  3   largeur de sept ou dix kilomètres par endroits.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Pour nous, Messieurs les Juges, juste

  5   afficher cette carte 4D2024 pour que le général puisse montrer exactement

  6   de quoi il s'agit, s'il vous plaît. Merci.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, je vais essayer de vous montrer la

  8   façon dont cela s'est produit.

  9   Voilà. Selon cet axe que je trace, le long de la frontière avec la

 10   République de Croatie, s'est déplacée la HV. Tout ce qui se situe au nord

 11   de cette indication que je porte, cela a été couvert par le HVO. C'est le

 12   HVO qui s'est déployé, et c'est à peu près sur cette ligne que je viens de

 13   tracer en pointillés que nous avons opéré une percée.

 14   Donc, c'est ce que dit Beneta. Le long de la frontière, à partir de Stolac

 15   et plus au sud, il y a eu des éléments dans la partie sud, des éléments de

 16   la HV qui se sont déplacés et au nord de Stolac, du côté de Bregava et plus

 17   au nord, ce sont des éléments du HVO, donc à partir de Mostar, qui ont

 18   avancé. Le Bataillon autonome, disons de l'ABiH pour ne pas parler de la

 19   Défense territoriale, y a également participé, et ils ont opéré une

 20   jonction.

 21   Alors, avec votre permission, lorsque la HV et le HVO ont opéré cette

 22   percée sur la ligne que j'ai tracée, on est dans une situation à partir de

 23   laquelle la HV, l'armée croate peut manœuvrer plus facilement pour se

 24   diriger vers Dubrovnik parce que son flanc gauche est complètement

 25   sécurisé. Donc une partie des forces serbes a été repoussée de la frontière

 26   serbe. Il y a des effectifs importants qui assurent la protection de ce

 27   flanc gauche et les forces de la VRS ne peuvent plus menacer ce flanc

 28   gauche, ce qui créé une marge de manœuvre importante pour la HV, afin que

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  1   cette dernière puisse se diriger vers Dubrovnik.

  2   C'est cela qu'il fallait pouvoir garantir. Il fallait sécuriser cette

  3   ligne et assurer la sécurité du flanc gauche et éviter à tout prix que ces

  4   forces adverses puissent revenir vers la Neretva en suite attaquer les

  5   arrières. Donc, c'était là la finalité de cette opération conjointe le long

  6   de la zone frontalière du HVO et de la HV. Alors, ensuite en juillet mais

  7   en rapport avec l'opération du mois de mai, il y a eu abandon de cette

  8   partie du territoire par la HV, qui s'est contentée de rester dans la zone

  9   frontalière au sens strict pendant encore un certain temps.

 10   Donc, le 13 juillet, le général Bobetko a donné un ordre exigeant

 11   l'évacuation de la HV, de l'armée croate, et demandant que les effectifs du

 12   HVO soient envoyés à la place, demandant également que la HV soit envoyée

 13   en direction de Dubrovnik parce que c'est là-bas que sa présence était

 14   nécessaire.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : On va donner, attendez, un numéro IC. Puis, mon

 16   collègue va avoir plusieurs questions.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La troisième

 18   carte, qui est le document 4D 02, cette carte aura la cote numéro IC 1175.

 19   Merci, Messieurs les Juges.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je n'ai qu'une question à propos de

 21   ce document, Monsieur Petkovic.

 22   Nous n'avons pas besoin de la carte pour cela. Ceci se trouve à la page 3

 23   en croate : "Profesionalizacija Vojske," au point 3. Au premier point, la

 24   question est soulevée : Quel territoire serait couvert par une telle armée

 25   professionnelle ? L'ensemble du territoire ? Le terme utilisé ici, est

 26   "prostor," et non pas "teritori," comme cela est employé la première fois.

 27   L'ensemble du territoire ou simplement une partie du territoire ?

 28   Je souhaite que vous nous expliquiez aux Juges de la Chambre ce que

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  1   vous entendiez par là, "l'ensemble du territoire."     

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, lorsque j'ai préparé et

  3   rédigé ce document, j'avais uniquement à l'esprit ce territoire

  4   correspondant aux dix municipalités le long de la rivière Neretva. Donc,

  5   les municipalités de Grude, Citluk, Siroki Brijeg, Mostar, Capljina,

  6   Stolac, Neum, Ravno. Je ne suis pas sûr d'avoir -- de les avoir toutes

  7   citées. Mais ce que j'avais à l'esprit c'était que, sur la zone

  8   correspondante, il conviendrait de disposer d'une unité professionnelle,

  9   alors s'agirait-il d'un régiment ou d'une brigade, la question était

 10   ouverte mais c'était uniquement pour ce territoire-là.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Vous avez peut-

 12   être oublié Siroki Brijeg.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge, effectivement.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ceci répond parfaitement à ma

 15   question. Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dernière question, Général Petkovic.

 17   Au cours de cette réunion, vous avez dit qu'il y avait le général Pasalic,

 18   mais il y avait peut-être d'autres Musulmans, je ne sais pas, peut-être;

 19   peut-être pas. Mais le général Pasalic, qui vous écoute parler d'Unités

 20   professionnelles, d'une armée professionnelle, bien, tout ça peut aller

 21   dans son sens. Mais vous, vous êtes un colonel de l'armée croate, et il

 22   aurait pu se dire, Mais pourquoi il s'occupe d'une autre armée future ?

 23   Parce qu'il y a une République de Bosnie-Herzégovine, c'est peut-être à la

 24   présidence de s'en occuper. Pourquoi, lui, colonel de l'armée croate, il

 25   s'occupe de cela ? Personne ne vous a fait d'observation.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Messieurs les Juges, il n'y a pas eu de

 27   commentaire en ce sens. Vous avez ici un document écrit qui aborde ce point

 28   mais il n'en a pas du tout été question lors de la réunion. Comme je l'ai

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  1   dit, on a laissé complètement de côté tout ce qui était au point 2 et au-

  2   delà. Alors, par ailleurs, le commandant, le chef d'état-major de Pasalic

  3   était originaire de Serbie, si bien que pour lui comme pour Pasalic, la

  4   Bosnie était quelque chose de -- il n'y avait pas de lien direct avec la

  5   Bosnie, parce que Halilovic, par ailleurs, n'était pas citoyen, lui, non

  6   plus de Bosnie-Herzégovine. Il était originaire du Sandzak, où il est né,

  7   donc c'est dans la République socialiste de Serbie. Mais personne n'aurait

  8   eu la moindre objection à une aide qui aurait été apportée. Je pense qu'il

  9   était bien informé quant à la structure de son bataillon, de sa brigade, et

 10   cetera, et de ce qu'il devait au HVO.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- vous venez devant ces élus

 12   municipaux; est-ce que vous avez connaissance de la situation politique

 13   locale ? Est-ce que vous avez connaissance sur les répartitions ethniques ?

 14   Aviez-vous connaissance du recensement de 1991 ? Avez-vous connaissance des

 15   problèmes délicats de Mostar ? Est-ce que vous aviez connaissance de tout

 16   cela, ou bien vous en aviez pas ? Vous êtes intervenu en simple militaire

 17   qui a mené une tâche à bien et qui fait des propositions pour que cette

 18   tâche militaire soit conduite par d'autres ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'avais une certaine idée de

 20   la situation dans ces différentes municipalités. C'est ainsi que je savais

 21   qu'à Grude se trouvait une population quasiment à 100 % Croates. Je

 22   connaissais également la victoire du parti croate aux élections légales à

 23   Siroki Brijeg ainsi qu'à Citluk, la majorité absolue des Croates qui s'y

 24   trouvait, et la victoire donc du parti des Croates aux élections.

 25   Pour ce qui est de Ljubuski je n'étais pas tout à fait certain des

 26   pourcentages mais je savais qu'il y avait une majorité absolue de Croates

 27   sur place aussi et j'étais au fait de la victoire du Parti croate aux

 28   élections.

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  1   Pour Capljina je savais que la situation était telle qu'il y avait

  2   une majorité un peu moins importante de Croates. Alors je crois qu'il y a

  3   eu une coalition entre le HDZ et le SDA.

  4   A Neum, il y avait pratiquement 100 % de Croates, alors je ne suis

  5   pas absolument sûr, peut-être 95 %, je ne connais pas tous les villages qui

  6   tombent dans le territoire de la municipalité de Neum.

  7   A Stolac il n'y avait à l'époque aucune autorité organisée, et pour

  8   autant que je le sache, il y avait aussi bien des Serbes et que des Croates

  9   et des Musulmans avant la guerre. A ce moment précis, il n'y avait plus que

 10   des Croates et des Musulmans qui restaient. Cependant, ils ne disposaient

 11   pas d'une autorité élue. Alors à Mostar il y a eu un partage du pouvoir

 12   entre le HDZ et le SDA, je crois qu'il y avait aussi une certaine

 13   proportion de Serbes qui étaient restés, mais donc il y a eu ce partage du

 14   pouvoir entre le SDA et le HDZ, et je sais également qu'une décision avait

 15   été prise de confier la défense au HVO.

 16   Quant à la composition de la population dans l'ancienne municipalité

 17   de Mostar, je crois que le pourcentage des Croates était un peu plus élevé

 18   que celui des Musulmans, les Serbes étaient en troisième position et

 19   représentaient peut-être la moitié du nombre tant de Croates que de

 20   Musulmans.

 21   Voilà ce qu'il en était à peu près des informations des données que j'avais

 22   pu collecter en deux mois et sur lesquelles je me suis fondé; cependant,

 23   cela ne me limitait pas particulièrement ni n'entravait mon action parce

 24   que tous les Musulmans qui souhaitaient se battre venaient au HVO,

 25   rejoignaient le HVO, les unités étaient pluriethniques.

 26   Pour tout vous dire, alors on entendait parler de Herceg-Bosna parfois mais

 27   personne n'y faisait particulièrement attention à l'époque. L'objectif

 28   principal c'était de vaincre les Serbes et puis après on verrait bien.

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  1   Donc cette année 1992, Messieurs les Juges, il n'y a pas eu le

  2   moindre obstacle, du moins sur cette partie de l'Herzégovine. A l'époque,

  3   je ne sais encore rien de concret sur la Bosnie centrale ni ne m'y suis

  4   rendu, et je n'avais d'ailleurs pas non plus les attributions qui

  5   m'auraient permis d'aller m'intéresser à ce qui se passait également en

  6   Bosnie centrale.

  7   Alors si je reviens à Keza, qui a aidé à la rédaction de ce point

  8   particulier, il est question de ce point particulier de cet adjectif de

  9   Croates parce qu'on a rajouté -- on parlé d'autorités croates. Mais à ce

 10   moment-là, ce n'était pas important de dire qu'il s'agirait d'autorités

 11   croates ou autres, ensuite les choses ont changé, mais à ce moment-là, je

 12   me fondais sur les éléments que j'avais pu collecter sur ce que je savais,

 13   je le consignais et j'acceptais également ce que les uns et les autres

 14   avaient pu proposer et rédiger sans engager toute une discussion à ce

 15   sujet.

 16   Il était tout à fait impossible de prétendre que Mostar, par exemple,

 17   serait croate au sens qu'il n'y aurait pas de Musulman. C'était absurde.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Un document il se lit, et puis il sera interprété

 19   après par les Juges. Le Procureur il interprète. Moi, je vois au point 4,

 20   alors vous dites que c'est Keza, qui a rédigé alors peut-être qu'il n'a pas

 21   fait très attention, et que vous, vous avez repris. On a quatre points, 1,

 22   2, 3, 4. Le point 4, il y a marqué:

 23   "D'établir des règles croates sur toutes les municipalités."

 24   Alors quand on lit ça, on a bien l'impression que toutes les municipalités

 25   de la zone doivent être régulées par des textes mais des textes croates,

 26   alors même qu'on sait qu'il y aussi des Musulmans ou des Serbes.

 27   Alors est-ce une erreur de plume ? Est-ce une intention ou ça a échappé à

 28   tout le monde ?

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  1   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je peux intervenir pour une

  2   question. C'est le contrôle, n'est-ce pas ? "Rule" n'est pas peut-être

  3   traduit correctement pas "règle," et peut-être que les interprètes

  4   souhaitent confirmer ou me contredire.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Regardez dans votre langue. Quel est le mot qui

  6   a été employé ? Il y a peut-être, comme le dit mon collègue, au niveau

  7   sémantique, un terme qui a été utilisé. Voilà.

  8   Pouvez-vous lire le 4 ? Comme ça, on aura tout de suite la vision.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je lis :

 10   "Etablir le pouvoir croate dans toutes les municipalités."

 11   Au point 4.

 12   Est-ce que je peux préciser ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez. Vous allez préciser.

 14   Dans votre langue qui a été traduite en français - et les interprètes sont

 15   excellents - il y avait marqué :

 16   "Etablir le pouvoir croate dans toutes les municipalités."

 17   Voilà quelle a été la traduction dans ma langue. Donc ça va au-delà.

 18   C'est qu'il y a un véritable pouvoir croate. Donc, ma question est la même

 19   : Est-ce que c'est une erreur dans la rédaction par Keza ? Il n'a pas vu

 20   les implications ? Ou ça traduit une volonté ? Ou il y a une autre

 21   explication ? Moi, je ne sais pas.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si

 23   l'on examine le point 4, il se lit comme suit :

 24   "Dans toutes les municipalités."

 25   Mais si on regarde d'un peu plus près, de quelles municipalités s'agit-il ?

 26   Puisque ces municipalités, elles ont déjà un pouvoir. Depuis 1991, le

 27   pouvoir y était établi. Ils avaient déjà le HVO au niveau municipal. Enfin,

 28   peu importe comment ça a été baptisé. Donc, d'après cela, ça signifierait

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  1   qu'à Neum, Ravno, Capljina, Ljubuski, Citluk, nulle part il n'y a

  2   d'autorité, de pouvoir. Mais partout il y en a, en fait. Donc, ce point ou

  3   ces points s'appliquent uniquement à la municipalité de Stolac. C'est le

  4   seul endroit où il n'y a pas de pouvoir. Donc, il y a une discordance entre

  5   ce texte et la réalité sur le terrain puisque toutes ces municipalités ont

  6   des autorités locales, sauf Stolac. C'est le cas depuis 1991. On a pu le

  7   voir depuis le début de ce procès, comment il y eu évolution de ce pouvoir

  8   vers le pouvoir du HVO, là où le HVO s'est trouvé dans ces municipalités,

  9   et cetera.

 10   Donc, le pouvoir existe, et ce point 4 est, en fait, en discordance avec ce

 11   qu'il y avait sur le terrain. Donc dans une dizaine de municipalités, il

 12   n'y aurait pas de pouvoir d'après cela. La seule, en fait, à laquelle ça

 13   s'applique, c'est Stolac. Toutes les autres, c'est bien avant mon arrivée

 14   dans le secteur, dans cette contrée qu'on y a établi les autorités locales

 15   après les élections de 1990 en Bosnie-Herzégovine. La seule à en être

 16   dépourvue, c'est la municipalité de Stolac. Puis vous avez pu voir, à

 17   l'issue de cette réunion, le général Beneta a dit qu'il y a eu une cellule

 18   de Crise croato-musulmane et qu'après un mois, un mois et demi, il y a eu

 19   transfert de pouvoir de la cellule de Crise, et donc la municipalité s'est

 20   dotée du pouvoir, à ce moment-là.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Petkovic, en vous écoutant,

 22   on a l'impression que cela semblait inévitable, à savoir que les autorités

 23   seraient croates. Mais c'était peut-être le problème à savoir d'établir un

 24   pouvoir croate alors qu'auparavant, à Stolac, il n'y avait pas, en fait, de

 25   pouvoir croate et il n'y avait pas de majorité musulmane claire dans la

 26   population.

 27   Je crois que c'est ce que le Président, ici, essayait de vous poser comme

 28   question.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, mais je suis en

  2   train de m'exprimer au pluriel. J'ai précisé qu'à ce moment-là, seule la

  3   municipalité de Stolac n'a pas d'organe de pouvoir. Donc, le 26 juin 1992,

  4   seule la municipalité de Stolac n'a aucun organe de pouvoir.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Je corrige tout de suite. Le général n'a

  6   pas dit qu'il n'y avait pas d'autorité, de pouvoir croate, a dit qu'il n'y

  7   avait pas d'organe de pouvoir, du tout.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc j'ai dit que, sauf la municipalité de

  9   Stolac, toutes les autres municipalités avaient des organes de pouvoir qui

 10   avaient été établis bien avant mon arrivée, Monsieur le Juge Trechsel.

 11   Donc pourquoi est-ce que l'on lit cela au pluriel ? Je ne sais pas.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. On comprend ce que vous dites. Mais vous

 13   n'êtes pas juriste ni rédacteur, mais vous nous dites, le 4 s'appliquait à

 14   Stolac. Très bien. Je n'ai pas de raison de ne pas vous croire. Mais si ça

 15   s'applique à Stolac, pourquoi ne pas dire d'établir à Stolac un pouvoir

 16   avec toutes les composantes politiques de la municipalité ? SDA, HDZ, et

 17   cetera. Pourquoi ne pas dire cela ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il

 19   ne m'appartient pas de me pencher sur ça. Je me trouve confronté au fait

 20   que l'armée vient de libérer Stolac, et qu'on ne peut pas opérer une

 21   passation de pouvoir. Il n'y a aucune instance pour leur passer le pouvoir.

 22   C'est une erreur, ce pluriel, ici. En fait, il faudrait parler uniquement

 23   de Stolac, parce qu'il n'y a rien à changer à Grude, à Capljina ou

 24   ailleurs, où il y a des instances de pouvoir. Donc cela s'applique à

 25   Stolac, uniquement, mais je vous ai dit, ça a été imprimé. On a examiné et

 26   on l'a laissé de côté. Donc, en fait, personne ne s'est plus demandé ce

 27   qu'il y avait dedans. Donc, je précise : Toutes les municipalités ont des

 28   instances de pouvoir, sauf Stolac, et ce sont des instances légalement

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  1   élues.

  2   Quant à savoir quelle était la répartition des députés, ça, je ne sais pas.

  3   Dans 75 % de ces municipalités, les Croates étaient la majorité.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites : Il y a une erreur. Le pluriel a

  5   été employé alors qu'on aurait dû employer le singulier parce que ça

  6   concernait Stolac. Très bien. C'est au transcript.

  7   Maître Alaburic, il nous reste dix minutes.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation]

  9   Q.  Ce document, on en a donné lecture, à cette réunion ou pas ?

 10   R.  Non, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. On n'a pas lu ce

 11   document. On n'a pas pu le faire. Il est resté à Grude et la réunion s'est

 12   tenue à Medjugorje.

 13   Q.  Vous nous avez dit, Général, qu'à la rédaction du document ont

 14   participé Keza, Zadro ainsi que vous-même et que Janko Bobetko a lu ce

 15   document; est-ce exact ?

 16   R.  Oui, c'est exact.

 17   Q.  Mis à part vous quatre, y avait-il qui que ce soit qui était au courant

 18   de l'existence de ce document et qui en a pris connaissance ?

 19   R.  Non. Sauf la dame qui l'a dactylographié.

 20   Q.  Très bien. Dites-nous, Général : est-ce que vous vous rappelez la date

 21   de libération de Dubrovnik ?

 22   R.  Pendant la première moitié du mois d'août, on a levé le siège, 1992, en

 23   fait, la ville est toujours restée libre, mais on a levé le siège et on a

 24   pu rétablir la communication avec la partie occidentale de la municipalité.

 25   Q.  Je vous remercie de cette précision. Prenons le document suivant P 479.

 26   C'est une invitation lancée par Janko Bobetko à des hommes se trouvant en

 27   Herceg-Bosna, afin de préciser la situation en Herzégovine.

 28   Est-ce que vous êtes au courant de ce document ?

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  1   R.  Oui, je connais ce document. J'ai été présent à cette réunion, et j'ai

  2   été chargé de rendre compte sur un certain nombre de points lors de cette

  3   réunion. En fait, les points 1, et 1.1 sont des points dont j'étais chargé.

  4   Q.  En automne 1992, c'est à ce moment-là que Janko Bobetko n'est plus en

  5   mission dans la partie sud du champ de bataille lié à la Bosnie-

  6   Herzégovine?

  7   R.  Oui, c'est ce qu'on pourrait dire. On pourrait dire que Janko Bobetko

  8   se charge jusqu'à ce moment-là de la libération de ces toutes petites

  9   portions de la Croatie qui n'avaient pas été libérées, et puis après, il

 10   part pour Zagreb.

 11   Q.  Vous avez précisé que vous étiez, vous avez reçu le lys d'or et que

 12   vous n'avez pas été félicité par Halilovic. Il n'est jamais venu vous

 13   serrer la main.

 14   R.  Oui, ils me l'ont remis. Ils m'ont dit que c'était d'une reconnaissance

 15   d'un rôle important joué à la défense de la Bosnie-Herzégovine, ça m'était

 16   remis par M. Galic en la présence de M. Kljuic, Siber, deux, trois ou

 17   quatre officiers du rang inférieur.

 18   Q.  Vous avez dit : "Eux, ils ont expliqué;" qui sont les "eux" ?

 19   R.  M. Ganic, qui était le vice premier ministre -- le vice président de la

 20   présidence de Bosnie-Herzégovine; et Stjepan Kljuic, qui étaient membre de

 21   la présidence de la Bosnie-Herzégovine, qui représentaient le peuple

 22   croate; et puis Stjepan Siber, bien entendu, qui était le commandant

 23   adjoint -- ou plutôt, l'adjoint du chef de l'état-major de l'ABiH.

 24   Q.  Dites-nous : la décision de remettre ces décorations revenait de la

 25   présidence, ou d'une autre instance ?

 26   R.  Ils ont dit que c'était la présidence de Bosnie-Herzégovine qui

 27   remettait cette distinction.

 28   Q.  [aucune interprétation] 

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  1   M. SCOTT : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Mais je ne pense pas

  2   que l'on ait vu sur le compte rendu d'audience une date, et ceci a été

  3   soulevé à plusieurs reprises.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Ce sera ma question suivante.

  5   M. SCOTT : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Puisque je procède étape par étape, j'ai estimé qu'il était important

  8   dans un premier temps d'éclaircir ce que c'est cette déclaration. Alors

  9   quand vous a-t-on remis le lys d'or?

 10   R.  A la réunion du 7 octobre 1992, de la présidence de Bosnie-Herzégovine,

 11   à Sarajevo.

 12   Q.  Général, quel était l'Etat que vous défendiez alors?

 13   R.  La Bosnie-Herzégovine. Il n'y avait pas d'autre Etat.

 14   Q.  Alors en 1993, lorsque vous étiez sur le territoire de Bosnie-

 15   Herzégovine, quel était l'Etat que vous défendiez alors?

 16   R.  Un seul et même Etat, celui qui existait alors, la Bosnie-Herzégovine.

 17   Q.  Lors de la première moitié de l'année 1994 ?

 18   R.  Là encore, le seul Etat existant est celui de Bosnie-Herzégovine.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à l'heure, j'avais bien entendu le fait que

 20   vous aviez eu le lys d'or. J'attendais pour revenir à là-dessus. Mais

 21   maintenant, grâce à M. Scott, on sait que vous l'avez eu le 7 octobre 1992,

 22   donc la date est très précise. Mais de mémoire, quand il y a une

 23   décoration, il y a donc un décret, et je présume que dans le décret qui a

 24   été pris pour vous donner cette décoration, il n'a pu être pris que par le

 25   président de la présidence, à savoir M. Izetbegovic. A ce moment-là, vous

 26   l'avez eu, vous ce décret qui a été publié dans la gazette officielle

 27   normalement?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

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  1   sur le plan administratif, je ne sais pas comment ils s'y sont pris. Mais à

  2   la fin de notre réunion, ils sont venus me voir, tout d'abord, et puis ils

  3   sont venus voir les cinq de mes hommes, ils nous ont remis les lys. Ils

  4   m'en ont donné un, ils me l'ont confié pour que je le remette à M. Boban,

  5   et il y avait un cadeau d'artisanat traditionnel islamique et j'ai remis

  6   cela à M. Boban.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors M. Boban a eu aussi le lys d'or ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, ils m'en ont confié pour M. Boban,

  9   et puis il a reçu en plus un cadeau. C'est un objet d'artisanat. Vous savez

 10   les artisans traditionnels islamiques qui travaillent dans le quartier,

 11   l'ancien quartier de Sarajevo, quelque chose.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand on reçoit une décoration, c'est en récompense

 13   de services rendus. En l'espèce, quels étaient les services rendus ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 15   lors de la réunion de la présidence de Bosnie-Herzégovine, M. Ganic a

 16   remercié le HVO de tout ce qui à partir du mois d'avril 1992 jusqu'à ce

 17   moment-là était fait pour défendre la Bosnie-Herzégovine. Surtout il a

 18   souligné l'importance de l'opération de libération de la rive est de la

 19   Neretva, y compris les villes de Stolac, et cetera, et il a présenté ses

 20   excuses, M. Ganic, du fait que de leur côté on n'en a pas suffisamment

 21   parlé devant l'opinion de Bosnie-Herzégovine. Je dois dire que, moi,

 22   j'étais un peu fâché que cela n'ait pas été fait, et il a dit, nous avons

 23   suffisamment de temps pour corriger cela.

 24   A la fin, on a prévu pour le 12 octobre une nouvelle réunion avec la

 25   FORPRONU. M. Kljuic m'a demandé s'il pouvait m'inviter à cette réunion, à

 26   la place de la FORPRONU, et j'ai dit à M. Kljuic, si, si tout à fait, nous

 27   allons venir. Le 12 octobre, je suis venu, donc j'étais présent alors que

 28   ceux qui m'avaient convié à la réunion n'étaient pas là. Donc j'ai dit au

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  1   général Morillon, continuez de faire comme de par le passé, il vaut mieux

  2   que ce soit vous qui envoyez les convocations.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Une correction, s'il vous plaît. La

  4   première fois, le témoin a également parlé du 12 octobre, la même date,

  5   tandis que page actuelle, ligne 10, il serait question du mois de décembre.

  6   Je voudrais éviter un malentendu.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si

  8   nous avons un petit peu de temps, nous atteindrons peut-être le mois de

  9   décembre. La convocation suivante pour une réunion à Sarajevo --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous aurons le temps la semaine prochaine, puisqu'on

 11   va, il est l'heure de terminer.

 12   Nous continuerons donc la semaine prochaine, et donc nous reprendrons

 13   l'audience lundi, à 14 heures 15. Je remercie toutes les personnes.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le lundi 15 février

 16   2010, à 14 heures 15.

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