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1 Le mercredi 29 mai 2013
2 [Jugement]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 10 heures 00.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
8 Monsieur les Juges. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic,
9 Bruno Stojic, Slobodan Praljak, Milivoj Petkovic, Valentin Coric, et
10 Berislav Pusic.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
12 L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, nous ne vous entendons pas.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Là, vous m'entendez ? Bien.
14 Je vais demander aux parties de se présenter.
15 M. SCOTT : [interprétation] Volontiers, Monsieur le Président. Ken Scott au
16 nom du Procureur. Je suis ravi de me retrouver dans ce prétoire en votre
17 compagnie. Merci.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Me Karnavas avec
20 Me Tomanovic et Mme Jurkovic.
21 L'INTERPRÈTE : Mme Nozica, hors micro.
22 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Senka Nozica,
23 avec Karim Khan comme co-conseil et notre assistante.
24 Mme FAVEAU-IVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour
25 la Défense Praljak Nika Pinter et Bozivar Kovacevic.
26 Mme ALABURIC : [interprétation] Vesna Alaburic et Nikola Stewart [phon]
27 avec Amara Misarda [phon]. Merci.
28 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour
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1 la Défense de M. Coric, moi-même Dijana Tomasegovic Tomic; accompagnée de
2 mes collègues.
3 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pour la Défense numéro 6, Me Ibrisimovic,
4 accompagné de mes collègues.
5 M. SCOTT : [aucune interprétation]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre de première instance est aujourd'hui
7 venue pour rendre son jugement dans l'affaire le Procureur contre Jadranko
8 Prlic, Bruno Stojic, Slobodan Praljak, Milivoj Petkovic, Valentin Coric, et
9 Berislav Pusic. Je vais à présent lire un résumé des conclusions de la
10 Chambre. Seul fait autorité le jugement écrit, dont des copies seront à
11 disposition des parties et du public à l'issue de l'audience.
12 La Chambre tient tout d'abord à remercier toutes les personnes qui ont
13 contribué au bon déroulement de ce procès depuis son ouverture le 26 avril
14 2006, et notamment les assistants de la Chambre.
15 Pendant les procès, dont les débats ont pris fin le 2 mars 2011, la Chambre
16 a versé au dossier près de 10 000 pièces et a entendu 145 témoins de
17 l'Accusation, dont six témoins expert, et ce, 61 témoins de la Défense,
18 dont sept témoins expert. Le jugement est un document de 2 629 pages,
19 divisés en six tomes et comprenant quatre annexes et des opinions
20 partiellement dissidentes ou séparées du Juge Trechsel et de moi-même,
21 illustra la complexité de cette affaire.
22 Celle-ci tient en particulier aux allégations contenues dans l'acte
23 d'accusation. En effet, l'Accusation reproche aux six accusés d'avoir
24 participé à une entreprise criminelle commune entre le 18 novembre 1991 et
25 avril 1994 visant à soumettre les Musulmans et autres non-Croates vivant
26 dans les régions du territoire de la République de Bosnie-Herzégovine,
27 revendiqué comme étant le territoire de la communauté, une république
28 croate d'Herceg-Bosna, afin de les en chasser définitivement et de créer un
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1 territoire croate reprenant les frontières de la Banovina croate. Il est
2 reproché aux six accusés d'avoir commis dans huit municipalités et tout un
3 réseau de centres de détention sur une période de près de deux ans et demi,
4 des crimes correspondant à 26 chefs d'accusation.
5 Plus particulièrement, il est allégué que dans le cadre de l'entreprise
6 criminelle commune les accusés ont commis les crimes de persécution, chef
7 1; assassinat, chef 2; viol, chef 4; expulsion, chef 6; transfert forcé,
8 chef 8; emprisonnement, chef 10; et acte inhumains, chefs 12 et 15 en tant
9 que crimes contre l'humanité.
10 Ils sont également accusés d'avoir commis des infractions graves aux
11 conventions de Genève de 1949 que sont les crimes d'homicide intentionnel,
12 chef 3; de violence sexuelle, chef 5; d'expulsion, de transfert, et
13 déportation illégale de civils, chefs 7, 9, et 11; de traitement inhumain,
14 chefs 13 et 16; et de destruction et appropriation de biens non justifiés
15 par nécessité militaire et exécutées sur une grave échelle de façon
16 illicite arbitraire, chefs 19 et 22.
17 Enfin, il leur est reproché d'avoir procédé à des traitements cruels, chefs
18 14 et 17; à du travail illégal, chef 18; à des destructions sans motif des
19 villes et des villages, chef 20; à une destruction ou endommagement
20 délibérés d'édifices consacrées à la religion ou à l'enseignement, chef 21;
21 et à des pillages de biens publics ou privés, chef 23, en tant que
22 violations des lois ou coutumes de la guerre.
23 Concernant la municipalité de Mostar, l'Accusation allègue que les six
24 accusés auraient commis des attaques illégales de civils, chef 24; qu'ils
25 auraient répandu illégalement la terreur parmi la population civile, chef
26 25; et qu'ils auraient procédé à des traitements cruels en assiégeant
27 Mostar est, chef 26, qui sont des violations des lois ou coutumes de la
28 guerre.
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1 Je vais dans un premier temps aborder les conclusions de la Chambre qui
2 concernent les crimes commis par les membres du HVO.
3 Dans la municipalité de Mostar dès 1992, le HVO municipal, aidé du HVO de
4 la Communauté croate d'Herceg-Bosna, a mis en place une politique visant à
5 défavoriser les Musulmans présents dans la municipalité. Les tensions entre
6 Croates et Musulmans se sont accrues tout au long de l'année 1992, et plus
7 particulièrement dans la municipalité de Prozor. Le 23 octobre 1992, le HVO
8 a attaqué la ville de Prozor et ses alentours. Après la prise de contrôle
9 de la ville de Prozor et du village de Paljike à partir du 24 octobre 1992,
10 le HVO a détruit de nombreuses maisons musulmanes et des véhicules dans la
11 ville et incendié une maison et tué deux personnes à Paljike.
12 Le 11 et 12 janvier 1993, les premiers affrontements entre le HVO et l'ABiH
13 ont eu lieu dans la municipalité de Gornji Vakuf. Le 16 janvier 1991 [sic]
14 par un ordre daté de la veille, l'état-major principal du HVO a sommé
15 l'ABiH à Gorjni Vakuf de subordonner ses troupes au HVO. L'ABiH a rejeté
16 cette demande de subordination.
17 Le 18 janvier 1993, le HVO a attaqué la ville de Gornji Vakuf ainsi
18 que plusieurs villages avoisinants. Les affrontements entre le HVO et
19 l'ABiH se sont poursuivis pendant plusieurs jours. Au cours de ces
20 attaques, le HVO a détruit des habitations musulmanes de Gornji Vakuf. Le
21 HVO a lancé plusieurs obus sur le village de Dusa, entraînant la
22 destruction de maisons musulmanes et la mort de sept personnes.
23 Lors de cette même attaque du 18 janvier 1993, plusieurs maisons ont
24 été détruites dans les villages de Hrasnica, Uzricje et Zdrimci. Après la
25 prise de contrôle de ces villages et de Dusa, des soldats du HVO ont mis le
26 feu à des maisons appartenant aux Musulmans. A Hrasnica, Uzricje et
27 Zdrimci, des membres du HVO ont volé des biens appartenant aux Musulmans.
28 Dans les quatre villages, les forces du HVO ont arrêté les femmes, les
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1 enfants, et les personnes âgées, les ont détenus et déplacés de leurs
2 villages vers des territoires contrôlés par l'ABiH. Pendant leur détention,
3 des soldats du HVO ont battu ou menacé certains habitants d'Uzricje, et ont
4 intimidé des habitants de Zdrimci qu'ils ont obligé à réciter des prières
5 chrétiennes devant le Mekteb.
6 A partir du 18 janvier 1993, le HVO a détruit 40 à 60 hommes
7 musulmans à la fabrique des meubles de Trnovaca, situé dans la municipalité
8 de Gornji Vakuf. Certains ont été passés à tabac, et/ou ont subi des abus
9 de la part des soldats du HVO. Par exemple, deux soldats du HVO ont coupé
10 l'oreille de Hasan Behlo, puis piétiné sa plaie. Après une quinzaine de
11 jours de détention, ces hommes musulmans ont été échangés ou déplacés.
12 Au printemps 1993, les tensions entre l'ABiH et le HVO se sont
13 accrues dans les municipalités de Mostar, Prozor, Stolac, et de Jablanica.
14 En avril 1993, le HVO a lancé un nouvel ordre de subordination à l'ABiH
15 dans la municipalité de Jablanica, expirant le 15 avril 1993.
16 Devant le refus de l'ABiH de se soumettre, le 17 avril 1993, le HVO a
17 lancé des attaques dans les municipalités de Prozor, Jablanica. Entre le 17
18 et 19 avril 1993, le HVO a attaqué les villages de Parcani, Lizoperci, et
19 Toscanica dans la municipalité de Prozor, où il a incendié des maisons de
20 Musulmans et tué deux personnes.
21 Le 17 avril, le HVO a pilonné le village de Sovici et de Doljani dans
22 la municipalité de Jablanica. Après les combats, et jusqu'au 23 avril 1993,
23 le HVO a arrêté des soldats de l'ABiH, des hommes musulmans en âge de
24 combattre, des femmes, des enfants, et des personnes âgées de ce village et
25 les a conduits à l'école de Sovici où nombre d'entre eux ont été détenus
26 jusqu'au 5 mai 1993 dans des conditions très difficiles.
27 Les soldats du HVO ont battu et maltraité les détenus dont des
28 femmes, et ont tué quatre soldats de l'ABiH. Certains détenus ont été
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1 forcés à effectuer des travaux sur les positions du HVO. Alors que certains
2 hommes détenus étaient transportés à la prison de Ljubuski le 18 avril
3 1993, des soldats du HVO dont des membres du Bataillon des condamnés les
4 ont gravement passés à tabac et humiliés.
5 A partir du 19 avril 1993, des soldats du HVO ont rassemblé environ
6 400 femmes, enfants, et personnes âgées des villages de Sovici et Doljani
7 dans des maisons de Junuzovici dans la municipalité de Jablanica où ils les
8 ont détenus jusqu'au 4 ou 5 mai 1993, en infligeant des sévices à certains
9 d'entre eux.
10 A la suite d'une délégation conjointe du HVO et de l'ABiH, comprenant
11 notamment Milivoj Petkovic et Berislav Pusic, et plusieurs membres
12 d'organisations internationales, le HVO a déplacé, le 5 mai 1993, les
13 détenus à l'école de Sovici et des maisons de Junuzovici vers Gornji Vakuf.
14 Le 20 avril 1993, dans la municipalité de Jablanica, des membres du HVO,
15 dont Mladen Naletilic, ont détenu plusieurs soldats de l'ABiH dans une
16 ferme piscicole près de Doljani, où il les a sévèrement battus, insultés,
17 humiliés, et menacés de mort. Le même jour dans la municipalité de
18 Capljina, le HVO a arrêté des civils musulmans dont des notables, et les a
19 détenus à la caserne de Grabovina et à la prison de Dretelj.
20 Le 9 mai 1993, le HVO a lancé une attaque d'envergure contre l'ABiH à
21 Mostar, au cours de laquelle il a pris le complexe présidentiel de Vranica,
22 où se trouvait le quartier général de l'ABiH. Au cours de cette opération
23 qui a duré plusieurs jours, des soldats du HVO ont dynamité la mosquée Baba
24 Besir. Les soldats du HVO ont massivement arrêté les Musulmans de Mostar
25 ouest et ont séparé les hommes des femmes, enfants, et personnes âgées. Des
26 hommes appartenant à l'ABiH ont été détenus dans le bâtiment du MUP et à
27 l'institut du tabac, et ils ont été violemment battus. D'autres hommes,
28 appartenant ou non à l'ABiH, ont été détenus et passés à tabac à la Faculté
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1 de génie mécanique. Dix soldats de l'ABiH sont morts des suites de ces
2 violences. Les femmes, enfants, et personnes âgées de Mostar ouest ont été
3 envoyés à l'Heliodrom où ils ont été détenus pendant plusieurs jours avant
4 de pouvoir rentrer chez eux.
5 Toujours à Mostar, entre mai 1993 et février 1994, les soldats du HVO ont
6 systématiquement chassé les Musulmans de Mostar ouest, et plus
7 particulièrement en lançant des opérations d'éviction d'envergure à la mi-
8 mai, mi-juin, et début du mois de juillet, et en septembre 1993. Les hommes
9 étaient placés en détention à l'Heliodrom, et les familles étaient chassées
10 vers Mostar est. Parmi les hommes musulmans ainsi détenus, aucune
11 distinction n'a été faite entre civils et combattants. En juillet 1993, le
12 HVO a brièvement détenu certains de ces hommes à la Faculté de génie
13 mécanique où ils ont été violement passé à tabac. Deux d'entre eux sont
14 morts après avoir été battus toute une nuit.
15 Entre juin 1993 et avril 1994, le HVO a assiégé Mostar est. Pendant cette
16 période, la partie est de la ville, ainsi que le quartier de Donja Mahala à
17 l'ouest, ont fait l'objet d'une attaque militaire du HVO prolongée,
18 comprenant notamment des tirs et des pilonnages intensifs et constants. Ces
19 tris et pilonnages ont fait de nombreux blessés et causé la mort de
20 nombreux civils mais aussi des membres des organisations internationales.
21 Dix mosquées ont également été fortement endommagées ou détruites. Le HVO a
22 entravé et parfois même totalement bloqué le passage de l'aide humanitaire.
23 La population musulmane devait ainsi vivre dans des conditions extrêmement
24 difficiles, privée de nourriture, d'eau, d'électricité et de soins
25 adéquats.
26 Le 8 novembre 1993, dans le cadre d'une offensive, un char du HVO a ouvert
27 le feu durant toute la journée sur le vieux pont, le rendant inutilisable
28 et sur le point de s'écrouler. Le pont s'est effectivement effondré le 9
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1 novembre 1993 dans la matinée. La Chambre a conclu à la majorité, étant
2 moi-même dissident, que si le pont a été utilisé par l'ABiH et constitué
3 par conséquent un objectif militaire légitime pour le HVO, sa destruction a
4 causé un dommage disproportionné sur la population civile musulmane de
5 Mostar.
6 Durant les opérations d'éviction à Mostar, les soldats du HVO ont fait
7 preuve d'une extrême violence. Les Musulmans étaient réveillés en pleine
8 nuit ou au petit matin, frappés et contraints de quitter leurs logements,
9 parfois même en pyjamas. De nombreuses femmes, y compris une jeune fille de
10 16 ans, ont été violées par des soldats du HVO avant d'être obligées de
11 traverser la ligne de front vers Mostar est. Les soldats du HVO ont aussi
12 confisqué les clés des appartements de Musulmans et volé les biens de
13 valeur leur appartenant. Certains soldats utilisaient même des détenues de
14 l'Heliodrom pour piller les appartements des Musulmans chassés.
15 Le HVO a mené des opérations similaires dans d'autres municipalités de
16 l'Herceg-Bosna durant l'été 1993. Dans un premier temps, le HVO a arrêté
17 les hommes musulmans, qu'il s'agisse de soldats musulmans du HVO, de
18 soldats de l'ABiH, ou d'hommes en âge de combattre, et les a placés en
19 détention dans les prisons de Dretelj, Gabela, Ljubuski, et à l'Heliodrom,
20 ou dans d'autres centres de détention où ils ont souvent été victimes de
21 sévices graves. Dans un second temps, le HVO s'est livré à des campagnes
22 d'arrestation massive des femmes, des enfants, et des personnes âgées dans
23 ces mêmes municipalités, puis les a déplacées dans des territoires
24 contrôlés par l'ABiH, parfois après les avoir détenues dans des conditions
25 dramatiques pendant des durées variables.
26 Ceci a été le cas dans la municipalité de Capljina où le HVO a mené une
27 campagne d'arrestation massive d'hommes musulmans à partir du 30 juin et
28 jusqu'à la mi-juillet 1993. A la mi-juillet 1993 environ, les membres du
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1 HVO ont incendié des maisons appartenant aux Musulmans à Bivolje Brdo, ont
2 volé leurs biens, et ont détruit les mosquées de Lokve et de Visici. Entre
3 juillet et septembre 1993, des membres du HVO ont procédé au déplacement
4 aux silos de Capljina ou vers des territoires contrôlés par l'ABiH, des
5 femmes, enfants, et personnes âgées de villages de Domanovici, de Bivolje
6 Brdo, de Pocitelj, et de la ville de Capljina.
7 La Chambre a conclu à la majorité, étant moi-même dissident, que le 13
8 juillet 1993, deux jeunes femmes musulmanes ont été abattues par des tirs
9 du HVO à Domanovici. A Bivolje Brdo, le HVO a tué un homme infirme de 83
10 ans. Quelques jours plus tard, le 16 juillet 1993, des membres du HVO ont
11 participé à l'arrestation de 12 hommes musulmans du village de Bivolje
12 Brdo, les ont tués, et ont brûlé et enterrés leurs corps près de l'ancienne
13 mine de bauxite du village.
14 Les hommes, femmes, enfants, et personnes âgées qui ont été détenus par le
15 HVO entre juillet et octobre 1993 aux silos de Capljina l'ont été dans des
16 conditions très difficiles, dormant à même le sol, sans couvertures, alors
17 qu'il faisait très froid, avec très peu de nourriture et sans installations
18 sanitaires. Le HVO a ensuite transféré ces personnes vers des territoires
19 contrôlés par l'ABiH.
20 Dans la municipalité de Stolac au début du mois de juillet 1993, le HVO a
21 également mené une campagne massive et systématique de désarmement et
22 d'arrestation des membres du HVO, des soldats de l'ABiH et des hommes
23 musulmans en âge de porter les armes, et les a détenus dans les prisons de
24 Dretelj, Gabela, Ljubuski et à l'Heliodrom. Ensuite le HVO s'est livré à
25 une campagne d'arrestations et de détentions et de transferts des femmes,
26 des enfants, et des personnes âgées de la municipalité de Stolac pendant
27 les mois de juillet et d'août 1993.
28 Au cours de ces arrestations, une jeune femme de 17 ans a été abattue par
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1 une rafale de coups de feu par un soldat du HVO. Plusieurs centaines de
2 personnes ainsi arrêtées ont été détenues dans différents lieux, et
3 notamment à l'école d'Aladinici, où les conditions de détention étaient
4 très difficiles. Après avoir été détenus entre quelques jours et quelques
5 mois, certains y ont été détenus jusqu'au mois de novembre 1993, les
6 Musulmans ont été transférés vers Blagaj. En juillet 1993, le HVO a
7 incendié la mosquée Sultan Selim à Stolac, commis des vols dans de
8 nombreuses maisons musulmanes du village de Borojevici, puis y a mis le feu
9 et a volé des biens appartenant à des Musulmans dans le village de Pjesivac
10 Greda.
11 En outre, dès le mois de mai 1993, le HVO a réquisitionné l'hôpital Kostana
12 pour y détenir jusqu'en octobre 1993 des hommes musulmans arrêtés dans la
13 municipalité de Stolac. Cinq d'entre eux sont morts à la suite des passages
14 à tabac et des sévices terribles qui leur ont été affligés par des membres
15 du HVO. D'autres détenus ont subi des maltraitances d'une rare violence et
16 éprouvent encore aujourd'hui des séquelles liées à celles-ci.
17 A Buna, le 14 juillet 1993, des policiers militaires du HVO ont emmené un
18 jeune musulman de 16 ans et son grand-père dans le bâtiment de la police
19 militaire. Ils ont violemment battu le jeune homme à coups de pied et de
20 poing et à l'aide d'un câble électrique. Ils ont ensuite emmené les deux
21 hommes au bord d'un précipice le long de la Neretva et leur ont tiré dans
22 le dos, blessant grièvement le jeune homme et tuant son grand-père.
23 Entre juin et mi-août 1993, le HVO a attaqué une dizaine de villages dans
24 la municipalité de Prozor. Les membres du HVO ont détruit les biens
25 appartenant aux Musulmans et une mosquée à Skrobucani, ont incendié
26 plusieurs maisons à Lug et endommagé des biens appartenant à des Musulmans
27 du village de Podanis/Podonis. Le 19 juillet 1993, des soldats du HVO ont
28 tué trois hommes après les avoir passés à tabac dans le village de Prajine
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1 ainsi que deux hommes et une femme au mont Tolavac.
2 Entre juin et août 1993, le HVO a arrêté des hommes musulmans, dont des
3 mineurs, des personnes âgées et malades dans la municipalité de Prozor et
4 les ont détenus pendant plusieurs semaines dans divers lieux. Le HVO a
5 ainsi détenu pendant plusieurs semaines ces personnes. Le HVO a ainsi
6 détenu entre 400 et 500 hommes musulmans à l'école secondaire de Prozor
7 durant l'été 1993 où ils ont été brutalisés et forcés à effecteur des
8 travaux sur la ligne de front au cours desquels certains d'entre eux ont
9 été blessés ou tués. Le HVO a également détenu des hommes musulmans à
10 l'école Tech et à la caserne de pompier dans le bâtiment Unis, où certains
11 ont été battus. En juillet 1993, des hommes musulmans détenus par le HVO
12 dans le bâtiment du MUP ont été forcés d'exécuter des travaux sur la ligne
13 de front au cours desquels ils ont subi des sévices.
14 Certains détenus ont également subi des sévices, dont des agressions
15 sexuelles. En outre, 11 détenus sont morts sous les balles des soldats du
16 HVO à Crni Vrh le 31 juillet 1993, alors qu'ils étaient attachés les uns
17 aux autres avec des câbles téléphoniques autour du cou et forcé à marcher
18 en direction de l'ABiH dans le but de servir de bouclier humain.
19 Le HVO a également arrêté des hommes, des enfants, et des personnes âgées
20 musulmans dans la municipalité de Prozor, et les a placés en détention dans
21 des maisons à Podgrade, Lapsunj et Duge, où ils ont vécu dans un climat de
22 terreur et dans de très mauvaises conditions, subis de mauvais traitements,
23 des menaces, des vols, et où certaines femmes ont été victimes de sévices
24 sexuels par des membres du HVO, et ce, parfois quotidiennement. Le 28 août
25 1993, le HVO a transféré ces personnes vers les territoires contrôlés par
26 l'ABiH, et a, à cette occasion, tiré sur certaines d'entre elles, causant
27 des blessés.
28 Certaines de ces femmes, enfants, et personnes âgées sont revenus dans la
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1 même municipalité de Prozor peu après. Le HVO les a à nouveau arrêtés et
2 détenus à Duge, où ils ont subi des violences psychologiques et physiques,
3 mais également des violences sexuelles jusqu'en décembre 1993.
4 Lors de la prise de Rastani le 24 août 1993, les soldats du HVO ont abattu
5 quatre hommes alors qu'ils s'étaient rendus. Ils ont ensuite menacé des
6 femmes et enfants qui se trouvaient sur les lieux, et leur ont volé tous
7 leurs biens de valeur. Suite à cela, les femmes et les enfants n'ont pas eu
8 d'autre choix que de rejoindre les territoires contrôlés par l'ABiH.
9 Enfin, dans la municipalité de Ljubuski, en juillet et août 1993, le HVO a
10 recensé, désarmé, et réglementé la circulation des hommes en âge de
11 combattre, puis a procédé à des arrestations massives de centaines d'entre
12 eux et les a emprisonnés à la prison de Ljubuski et à l'Heliodrom. De
13 nombreux logements de Musulmans devenus vacants dans la municipalité de
14 Ljubuski ont ensuite été occupés par des Croates originaires de Bosnie
15 centrale.
16 En parallèle des arrestations massives, le HVO a créé et géré tout un
17 centre de détention pour Musulmans. Ainsi, la police militaire du HVO a
18 créé en juin 1992 un centre de détention dans l'enceinte de l'ancien poste
19 de police de la ville de Ljubuski. Trois mois plus tard, le HVO a ouvert
20 l'Heliodrom, ancien complexe militaire de la JNA, situé au sud de la ville
21 de Mostar, et l'a transformé en centre de détention. Les prisons de Dretelj
22 et Gabela installées dans l'ancienne caserne de la JNA ont commencé à
23 fonctionner à partir d'avril 1993. Le centre de détention de Vojno a, lui,
24 fonctionné au moins entre les mois d'août 1993 et janvier 1994.
25 L'établissement de ces centres de détention a permis au HVO de détenir des
26 milliers de civils et militaires musulmans sans aucune distinction.
27 La Chambre a pu constater, notamment grâce au témoignage d'anciens
28 détenus, que les conditions de détention dans ces centres étaient
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1 particulièrement difficiles. Les locaux n'étaient pas adaptés pour détenir
2 autant de personnes et le surpeuplement s'est fait particulièrement sentir
3 à l'été 1993, suite aux grandes vagues d'arrestations de mai et juillet
4 1993. Les détenus de la prison de Ljubuski avaient à peine de la place pour
5 s'asseoir sur le sol. Ceux de la prison de Dretelj étaient entassés dans
6 des hangars et des tunnels sous terre. Les détenus de tous les centres de
7 détention étaient sous alimentés et les conditions d'hygiène étaient
8 déplorables. Certains n'avaient pas accès à des sanitaires et devaient se
9 soulager dans des récipients de fortune. Ils n'avaient la plupart du temps
10 pas accès à des soins médicaux adéquats pour traiter les maladies résultant
11 de ces conditions insalubres ainsi que des blessures résultant des mauvais
12 traitements qu'ils subissaient de la part du HVO. Certains en garderont les
13 séquelles à vie. La Chambre a noté que les conditions de détention dans les
14 cellules d'isolement de l'Heliodrom et de la prison de Dretelj étaient
15 particulièrement difficiles, manquant d'eau, de nourriture, de sanitaires,
16 et même d'éclairage.
17 Les Musulmans de ces centres de détention ont également souffert de
18 mauvais traitements. Des membres du HVO les ont régulièrement passés à
19 tabac, et leur ont fait subir de très graves sévices. Des membres du HVO
20 ont brûlé des détenus du centre de détention de Vojno avec des cigarettes.
21 Ivica Kraljevic, membre de la police militaire et commandant de la prison
22 de Ljubuski, et deux hommes ont électrocuté un détenu de la prison jusqu'à
23 l'évanouissement. Des personnes venues de l'extérieur, dont des policiers
24 militaires, ont été autorisés, notamment par le commandant de la 1ère
25 Brigade du HVO, à pénétrer dans les prisons de Dretelj et Gabela pour
26 battre des détenus. Bosko Previsic, directeur de la prison de Gabela, a
27 lui-même tué par balle un soldat de l'ABiH. Au moins deux détenus de la
28 prison de Dretelj sont décédés suite à ces mauvais traitements. Des
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1 policiers militaires ont également tué par balle trois détenus en tirant
2 des coups de feu sur les hangars dans lesquels les détenus étaient
3 enfermés. Mario Mihalj, en charge du centre de détention de Vojno, a passé
4 à tabac, puis tué par balle un Musulman détenu dans ce centre. Les membres
5 du HVO ont également régulièrement insulté et humilié les détenus. A la
6 prison de Dretelj, les détenus devaient manger dans des ustensiles qui
7 n'étaient jamais lavés et n'avaient que quelques secondes pour finir leurs
8 maigres rations sous peine d'être punis. Les détenus qui ne mangeaient pas
9 suffisamment rapidement devaient s'allonger sur l'asphalte brûlant et se
10 rouler par terre sans sa chemise. Un détenu de l'Heliodrom a été contraint
11 de lécher son propre sang afin que, je cite, "le sang d'un balija ne reste
12 pas sur le sol des Croates," selon les dires de ces geôliers, membres de la
13 police militaire.
14 Des détenus de l'Heliodrom, du centre de détention de Vojno, et de la
15 prison de Ljubuski ont été contraints d'effectuer des travaux dangereux sur
16 la ligne de front au cours desquels nombre d'entre eux ont été blessés ou
17 tués par des tirs échangés entre l'ABiH et le HVO. Des détenus de
18 l'Heliodrom ont été blessés ou tués alors qu'ils étaient utilisés comme
19 bouclier humain sur la ligne de front.
20 Lorsque la prison de Dretelj a fermé début octobre 1993, des détenus
21 ont été transférés vers d'autres centres de détention, dont la prison de
22 Gabela et l'Heliodrom. Le centre de détention de Vojno a continué à
23 fonctionner jusqu'en janvier 1994. L'Heliodrom et les prisons de Ljubuski
24 et de Gabela ont fermé en avril 1994.
25 A partir de décembre 1993, suite à une décision de Mate Boban, alors
26 président de la République croate d'Herceg-Bosna, de fermer tous les
27 centres de détention, le HVO a vidé ses centres de détention. Il s'assurait
28 que les détenus garantissaient leur départ et de leurs familles de
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1 l'Herceg-Bosna en fournissant des lettres attestant de leur accueil vers un
2 pays tiers. Les détenus étaient alors transférés vers la Croatie dans
3 l'attente d'un départ vers ledit pays tiers. D'autres détenus ont dû
4 rejoindre avec leurs familles des territoires contrôlés par l'ABiH. Enfin,
5 le HVO a utilisé certains détenus dans le cadre d'une politique d'échange
6 avec l'ABiH.
7 Dans la municipalité de Vares située en Bosnie centrale, le HVO s'est
8 attaché à encourager, voire à faire pression sur la population croate afin
9 qu'elle abandonne cette municipalité et se rende en Herceg-Bosna. Le HVO a
10 aussi commis de nombreux crimes contre les Musulmans de la municipalité.
11 Le 23 octobre 1993, des membres du HVO ont procédé à l'arrestation et à la
12 mise en détention des hommes musulmans de la ville de Vares. La majorité
13 d'entre eux étaient détenus au lycée de Vares, puis à l'école de Vares, où
14 les conditions de détention étaient très difficiles et où des membres du
15 HVO les ont battus. Entre le 23 octobre et le 4 novembre 1993, des hommes
16 musulmans ont également été détenus à la prison de Vares-Majdan. Des
17 soldats du HVO leur ont fait subir des violences et humiliation. Un détenu,
18 par exemple, a été forcé de couper sa propre barbe et de la manger.
19 Aux alentours du 3 novembre, les troupes du HVO se sont retirées de la
20 ville de Vares en direction de Kiseljak. Le HVO a donc quitté ces centres
21 de détention aux alentours de cette date, abandonnant les détenus qui ont
22 pu s'identifier pour certains, auprès de la FORPRONU. Avant de quitter la
23 ville de Vares, des membres du HVO ont violé deux femmes musulmanes de
24 Vares. Des soldats du HVO se sont également livrés à des vols dans des
25 magasins et maisons appartenant à des Musulmans.
26 Par ailleurs, les forces armées du HVO ont lancé une offensive sur le
27 village de Stupni Do habité par des Musulmans dans la matinée du 23 octobre
28 1993. Des soldats des unités spéciales Maturice et Apostoli ont fait subir
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1 des viols et sévices sexuels à trois femmes du village. Ils ont également
2 tué 36 personnes, dont trois enfants de 13 ans, 8 ans, et 3 ans, lors de
3 l'attaque. Le village a été entièrement détruit et les villageois ont été
4 dépouillés de leurs biens.
5 La Chambre a constaté que les plus hautes autorités du HVO ont tenté de
6 faire croire à la communauté internationale que des enquêtes sur ces crimes
7 étaient en cours, alors qu'elles n'ont jamais été effectuées. De plus,
8 Ivica Rajic, commandant de troupes du HVO à Vares, a continué à exercer ses
9 fonctions sous un pseudonyme de Viktor Andric et il n'a jamais été enquêté.
10 La Chambre a constaté à la majorité, étant moi-même dissident, que le
11 conflit opposant le HVO à l'ABiH pendant cette période revêtait un
12 caractère international. En effet, les éléments de preuve ont démontré que
13 des troupes de l'armée croate combattaient au côté du HVO contre l'ABiH et
14 que la République de Croatie exerçait un contrôle global sur les forces
15 armées et les autorités civiles de la communauté et puis la République
16 croate d'Herceg-Bosna.
17 La Chambre de première instance, en reprenant les éléments juridiques
18 constitutifs des crimes allégués dans l'acte d'accusation par rapport aux
19 faits prouvés eu égard à chacune des municipalités et chacun des centres de
20 détention, a conclu que les crimes suivants avaient été commis :
21 Les crimes contre l'humanité suivant : persécution pour des raisons
22 politiques, raciales, et religieuses, assassinat, viol, expulsion,
23 transfert forcé en tant qu'actes inhumains, emprisonnement, actes
24 inhumains;
25 Les infractions graves aux Conventions de Genève de 1949 suivantes :
26 homicide intentionnel, violence sexuelle en tant que traitement inhumain,
27 expulsion illégale d'un civil, transfert illégal d'un civil, détention
28 illégale d'un civil, traitement inhumain, destruction de biens non
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1 justifiée par des nécessités militaires et exécutée sur une grande échelle
2 de façon illicite et arbitraire, appropriation des biens non justifiée par
3 des nécessités militaires et exécutée de façon illicite et arbitraire; et
4 Les violations des lois ou coutumes de la guerre, suivantes : traitement
5 cruel, travail illégal, destruction sans motif de villes et de villages, ou
6 dévastation que ne justifie pas les exigences militaires, destruction ou
7 endommagement délibérée d'édifices consacrées à la religion ou à
8 l'enseignement, pillage des biens publics ou privés, et en ce qui concerne
9 spécifiquement Mostar : attaque illégale contre des civils et le fait de
10 répandre illégalement la terreur parmi la population civile.
11 La Chambre a décidé de ne pas traiter le chef 26, traitement cruel, siège
12 de Mostar, pour des raisons détaillées dans le Tome 3 du jugement, et a
13 analysé les faits qui se sont déroulés entre juin 1993 et avril 1994 à
14 Mostar est, en tant que traitement cruel sous le chef 17.
15 Après avoir décrit les conclusions de la Chambre relatives aux crimes
16 commis dans les municipalités et centres de détention compris dans l'acte
17 d'accusation, je vais à présent résumer les conclusions de la Chambre
18 relatives à la responsabilité des accusés visés par l'acte d'accusation.
19 Les accusés sont mis en cause selon tout le mode de participation visé par
20 l'article 7(1) du Statut, y compris la commission par participation à une
21 entreprise criminelle commune, ainsi qu'au titre de la responsabilité du
22 supérieur hiérarchique prévu par l'article 7(3) du Statut. Compte tenu de
23 l'ampleur des crimes reprochés aux six accusés et constatés par le Chambre,
24 celle-ci estime à la majorité, étant moi-même dissident, que l'analyse de
25 leur responsabilité par le biais de leur participation à une entreprise
26 criminelle commune est la démarche juridique qui s'impose. Par conséquent,
27 les autres modes de participation allégués dans l'acte d'accusation ne sont
28 examinés que pour les crimes ne relevant pas de l'entreprise criminelle
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1 commune.
2 La Chambre a donc conclu à la majorité à l'existence d'une entreprise
3 criminelle commune dont l'objectif ultime était la mise en place d'une
4 entité croate reprenant en partie les frontières de la Banovina de 1939
5 pour permettre la réunification du peuple croate. Cette entité croate de
6 BiH devait soit être rattachée à la Croatie suite à la dissolution
7 éventuelle de la BiH, soit devenir un Etat indépendant au sein de la BiH et
8 étroitement liée à la Croatie.
9 La Chambre a conclu, à la majorité toujours, que dès décembre 1991, les
10 dirigeants de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, dont Mate Boban,
11 président de la communauté, puis République, croate d'Herceg-Bosna, et des
12 dirigeants de la Croatie, dont Franjo Tudjman, président de la Croatie,
13 estimaient que pour réaliser l'objectif ultime, à savoir la mise en place
14 d'une entité croate telle que je viens de la décrire, il était nécessaire
15 de modifier la composition ethnique des territoires revendiqués comme
16 faisant partie de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Au moins à partir de
17 fin octobre 1992, Jadranko Prlic, Bruno Stojic, Milivoj Petkovic, et
18 Slobodan Praljak savaient que la mise en œuvre de cet objectif était
19 contraire aux négociations de paix menées à Genève et impliquerait le
20 mouvement de populations musulmanes en dehors du territoire de l'Herceg-
21 Bosna.
22 Les éléments de preuve démontrent qu'à partir de la mi-janvier 1993, les
23 dirigeants du HVO et certains dirigeants croates avaient pour dessein de
24 consolider le contrôle du HVO sur les provinces revendiquées comme croates
25 et de procéder au nettoyage ethnique de ces provinces pour qu'elles
26 deviennent majoritairement ou presque exclusivement croates. L'entreprise
27 criminelle commune a donc été mise en place à partir de mi-janvier 1993. Le
28 HVO a conduit les campagnes militaires, que j'ai décrites précédemment,
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1 dans les provinces qu'il considérait comme croates afin de consolider sa
2 présence. Ces campagnes militaires se sont en effet accompagnées de
3 déplacements de la population musulmane. Le HVO a également organisé le
4 déplacement de la population croate de Bosnie centrale vers l'Herzégovine.
5 Ces déplacements avaient pour but de protéger une partie de la population
6 croate de Bosnie centrale des combats qui se déroulaient dans la région,
7 mais également de renforcer la présence des Croates dans l'Herceg-Bosna, et
8 ce, dans le but d'échanger le rapport de force en faveur des Croates. De ce
9 fait, une partie de la population croate de Bosnie centrale est partie
10 volontairement et d'autres ont été déplacés de force par le HVO.
11 La Chambre estime que les nombreux crimes commis par les forces du HVO
12 contre les Musulmans, de janvier 1993 à avril 1994, suivaient pour la
13 plupart une ligne de conduite manifeste. Dans la majorité des cas, ces
14 crimes commis n'ont pas été commis de façon aléatoire par quelques soldats
15 indisciplinés, ils étaient bien au contraire le résultat d'un plan établi
16 par des membres de l'ECC visant à chasser la population musulmane de
17 l'Herceg-Bosna.
18 La Chambre est convaincue que les membres de l'entreprise criminelle
19 commune assuraient l'encadrement et la coordination des opérations sur le
20 terrain pour réaliser les crimes ci-dessus. Ils ont mis en œuvre un système
21 d'expulsion de la population musulmane vivant sur le territoire de
22 l'Herceg-Bosna qui consistait en des déplacements et/ou mis en détention de
23 civils, de meurtres et de destructions de biens pendant les attaques, de
24 mauvais traitements, et de destructions commises pendant des opérations
25 d'éviction, de mauvais traitements et mauvaises conditions de détention
26 ainsi que l'utilisation généralisée et quasi systématique des détenus sur
27 la ligne de front pour effectuer des travaux et parfois même pour servir de
28 bouclier humain, ainsi que des meurtres et mauvais traitements liés à ces
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1 travaux et ces boucliers, et enfin, des déplacements des détenus de leurs
2 familles hors du territoire de l'Herceg-Bosna suite à leur libération.
3 Ainsi, s'inscrivaient dans le cadre du projet commun de l'entreprise les
4 crimes visés sous les chefs 1, 2, 3, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15,
5 16, 17, 18, 19, 20, 21, 24 et 25.
6 La Chambre relève par ailleurs, qu'au cours des campagnes d'éviction du HVO
7 à l'encontre des Musulmans ou lors de leur détention, des membres du HVO
8 ont également commis d'autres crimes non compris dans l'objectif criminel
9 commun mais qui étaient les conséquences naturelles et prévisibles de son
10 exécution. Il s'agit de vol, de viol, et de violence sexuelle ainsi que
11 certains meurtres durant les campagnes d'éviction ainsi que les meurtres
12 qui étaient la conséquence de mauvaises conditions de détention ou de
13 mauvais traitements dans les centres de détention, et enfin la destruction
14 de mosquées à Sovici et Doljani en avril 1993.
15 Il convient de souligner que la Chambre n'a pas inclus les crimes commis
16 dans la municipalité de Prozor en octobre 1992 dans l'entreprise criminelle
17 commune. La Chambre, telle que je l'évoquerai plus loin, a analysé
18 l'éventuelle responsabilité des accusés pour ces crimes sous l'angle des
19 autres formes de responsabilité prévues par le Statut.
20 Afin de concevoir et réaliser cet objectif criminel commun, un groupe de
21 personnalités croates, comprenant notamment Franjo Tudjman, Gojko Susak,
22 Janko Bobetko, Mate Boban, Jadranko Prlic, Bruno Stojic, Slobodan Praljak,
23 Milivoj Petkovic, Valentic Coric, et Berislav Pusic s'est concerté. Il
24 ressort également de l'ensemble des constatations factuelles et juridiques
25 de la Chambre que les rouages, les structures, et les effectifs du HVO ont
26 été utilisés pour mettre en œuvre les différents aspects de l'objectif
27 criminel commun.
28 Après avoir établi quels étaient l'objectif ultime et l'objectif criminel
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1 commun de l'entreprise, la Chambre a examiné la question de savoir si
2 chacun des accusés avait volontairement participé à l'entreprise criminelle
3 commune, y avait apporté une contribution significative et partageait
4 l'intention de commettre les crimes dans le cadre de la mise en œuvre de
5 l'objectif criminel commun de l'entreprise.
6 Je vais donc examiner le cas de Jadranko Prlic.
7 Du 14 août 1992 jusqu'à la fin d'avril 1994, Jadranko Prlic, en tant que
8 président du HVO, puis président du gouvernement de la République croate de
9 l'Herceg-Bosna, avait d'importants pouvoirs de jure et de facto sur la
10 coordination et la direction des activités du HVO, puis du gouvernement. Il
11 détenait en outre un pouvoir sur les centres de détention du HVO, notamment
12 celui de les ouvrir et de les fermer. Il a enfin joué un rôle-clé dans les
13 relations du HVO de la communauté, puis République, croate d'Herceg-Bosna
14 avec le gouvernement de la Croatie.
15 C'est dans l'exercice de ses fonctions que Jadranko Prlic a élaboré les
16 ultimatums de janvier 1993 et avril 1993 lancés à l'ABiH l'enjoignant à se
17 subordonner au HVO sur le territoire de l'Herceg-Bosna. Ces ultimatums se
18 sont traduits par les campagnes militaires que j'ai précédemment décrites
19 dans les municipalités de Gornji Vakuf, Prozor et Jablanica, qui
20 impliquaient la commission de nombreux crimes à l'encontre de la population
21 musulmane. La Chambre est convaincue que Jadranko Prlic a significativement
22 contribué à la mise en œuvre de ce plan dans ces municipalités en
23 planifiant, facilitant et encourageant les crimes commis par les membres du
24 HVO.
25 Jadranko Prlic a en outre avalisé les arrestations et mises en détentions
26 conduites par le HVO à Mostar dès le 9 mai 1993, et sciemment fermé les
27 yeux sur les opérations de nettoyage ethnique de plus en plus violentes
28 commises durant l'été 1993 à Mostar. Au 30 juin 1993, Jadranko Prlic a de
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1 nouveau fait un appel aux armes des Croates contre les Musulmans, et a
2 accepté les mises en détention en masse des Musulmans opérées par le HVO de
3 manière simultanée et systématique dans plusieurs municipalités considérées
4 comme croates par les dirigeants de la Communauté, et puis République,
5 croate d'Herceg-Bosna. Jadranko Prlic a soutenu la campagne de siège menée
6 par le HVO sur Mostar est, alors que la population musulmane assiégée
7 vivait dans des conditions de vie effroyables sous les tirs et
8 bombardements constants du HVO, Jadranko Prlic a personnellement contribué
9 au blocage de l'acheminent de l'aide humanitaire vers ce secteur de la
10 ville des mois durant.
11 Jadranko Prlic avait par ailleurs connaissance de nombreux crimes commis
12 par les membres des forces armées de la Communauté, puis République, croate
13 d'Herceg-Bosna. Il connaissait ainsi les conditions difficiles dans
14 lesquelles les Musulmans avaient été, par le HVO, détenus dans les prisons
15 de Dretelj, Gabela et l'Heliodrom. Il a cependant justifié les détentions
16 des civils musulmans et nié la réalité de leur situation. Jadranko Prlic a
17 ainsi accepté et encouragé les conditions extrêmement précaires et les
18 mauvais traitements des détenus dans plusieurs centres de détention du HVO.
19 Il a aussi été tenu informé de l'utilisation sur le front de détenus
20 de l'Heliodrom et de Vojno et des sévices subis par ces détenus au cours
21 des travaux sur la ligne de front ou de leur utilisation comme bouclier
22 humain. En omettant d'intervenir alors qu'il en avait la capacité et en
23 restant au pouvoir tout en ayant connaissance des crimes commis, la Chambre
24 considère que la seule conclusion qu'elle puisse raisonnablement faire est
25 que Jadranko Prlic a facilité et accepté la commission de crimes commis
26 contre les Musulmans liés à leur mise en détention systématique par le HVO.
27 Jadranko Prlic a également soutenu la politique d'expulsion des
28 Musulmans détenus avec leurs familles dans des pays tiers via la Croatie et
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1 participé au déplacement quasiment simultané des Croates de Bosnie centrale
2 pour venir peupler les territoires revendiqués de l'Herceg-Bosna. La
3 Chambre estime que la seule déduction qu'elle puisse raisonnablement faire
4 est que Jadranko Prlic avait l'intention de déplacer la population
5 musulmane hors du territoire revendiqué de l'Herceg-Bosna pour y installer
6 des Croates de Bosnie centrale.
7 La Chambre, à la majorité, étant moi-même dissident sur cette forme
8 de responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que
9 Jadranko Prlic a contribué de manière significative à l'entreprise
10 criminelle commune et qu'il a été même l'un des membres principaux. Il
11 ressort en outre de sa contribution qu'il avait l'intention de réaliser
12 l'objectif criminel commun de chasser la population musulmane et de faire
13 connaître les crimes précédemment cités afin de réaliser cet objectif. La
14 Chambre estime en outre que Jadranko Prlic, du fait de son implication dans
15 la mise en œuvre de l'objectif criminel commun et de sa connaissance des
16 faits, pouvait raisonnablement prévoir les crimes de meurtres et sévices
17 sexuels commis pendant les opérations d'éviction des Musulmans de Mostar
18 ouest, de vols commis pendant les opérations d'éviction à Gornji Vakuf,
19 Jablanica et à Mostar ouest, ainsi que des meurtres liés aux détentions à
20 Sovici et de destruction des deux mosquées de Sovici et Doljani. Il a
21 accepté et pris le risque que ces crimes puissent être commis.
22 Je vais maintenant examiner la responsabilité de Bruno Stojic.
23 Du 3 juillet 1993 au 15 novembre 1993, Bruno Stojic, en tant que chef
24 du département de la Défense, détenait d'importants pouvoirs de jure et de
25 facto sur la plupart des composantes des forces armées et de la police
26 militaire de la Communauté, puis République, d'Herceg-Bosna. Il a ainsi
27 commandé et a exercé un contrôle effectif sur les forces armées du HVO
28 ainsi que sur la police militaire, notamment en prenant des décisions
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1 relatives aux opérations militaires qu'il a faites exécuter par la chaîne
2 de commandement et en donnant des ordres au chef de l'administration de la
3 police militaire, y compris des ordres directement liés aux opérations sur
4 le terrain. Bruno Stojic a également pris part à l'élaboration de la
5 politique de défense de la Communauté, puis République, croate d'Herceg-
6 Bosna en participant à de nombreuses réunions décisives du HVO. Il a en
7 outre représenté le HVO dans les négociations de paix au plus haut niveau.
8 Dans le cadre de ses fonctions, Bruno Stojic a facilité les opérations
9 militaires du HVO à Gornji Vakuf en janvier 1993. Il a participé à la
10 planification des opérations militaires du HVO à Mostar le 9 mai 1993 et
11 les jours qui ont suivi. Il a participé à l'organisation et à la mise en
12 œuvre des campagnes d'éviction des Musulmans à Mostar ouest pendant l'été
13 1993. Enfin, il a participé à la planification des opérations militaires de
14 Vares en octobre 1993 et, par conséquent, participé à la commission des
15 nombreux crimes qu'impliquaient ces opérations.
16 Bruno Stojic était informé des crimes commis par le HVO pendant les
17 opérations militaires menées à Gornji Vakuf en janvier 1993 et à Jablanica
18 en avril 1993, des évictions de la population musulmane en janvier [sic]
19 1993 à Capljina, des pilonnages et des attaques menées à l'encontre des
20 membres des organisations internationales ainsi que des mauvaises
21 conditions de vie subies par la population musulmane à Mostar est.
22 Il était également tenu informé du fait que la détention des Musulmans par
23 le HVO n'était pas en conformité avec le droit international dans les
24 prisons de Ljubuski, Dretelj, Gabela et l'Heliodrom.
25 Bruno Stojic a cependant continué à exercer un contrôle effectif sur les
26 forces armées et la police militaire tout au long de son mandat comme chef
27 du département de la Défense. En outre, Bruno Stojic n'a pas fait de
28 sérieux efforts pour mettre fin à la commission des crimes alors qu'il en
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1 avait le pouvoir et le devoir. Il a également essayé de nier sa
2 responsabilité face aux représentants des organisations internationales. La
3 Chambre a estimé que la seule déduction qu'elle puisse faire est que Bruno
4 Stojic a accepté la commission de ces crimes.
5 La Chambre, à la majorité, étant dissident moi-même sur la forme de
6 responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que Bruno
7 Stojic a contribué de manière significative à l'entreprise criminelle
8 commune, contrôlant les forces armées et faisant le lien entre ces
9 dernières et le gouvernement. Il ressort en outre de sa contribution, qu'il
10 avait l'intention de réaliser l'objectif criminel commun de chasser la
11 population musulmane et de faire connaître les crimes précédemment cités
12 afin de réaliser cet objectif. La Chambre estime en outre que Bruno Stojic,
13 en raison de sa contribution à la mise en œuvre de l'objectif criminel
14 commun et de sa connaissance des faits, pouvait raisonnablement prévoir les
15 sévices sexuels infligés lors des opérations d'éviction des Musulmans de
16 Mostar ouest ainsi que les vols commis pendant les opérations d'éviction à
17 Gornji Vakuf en janvier 1993 et dans la municipalité de Mostar à partir du
18 mois de mai 1993. Il a accepté et a pris le risque que ces crimes puissent
19 être commis.
20 Je vais maintenant examiner la responsabilité de Slobodan Praljak.
21 Entre l'automne 1992 et le 9 octobre -- et le 9 novembre 1993, Slobodan
22 Praljak avait d'importants pouvoirs de facto, puis de jure et de facto, sur
23 les forces armées et la police militaire du HVO. En effet, entre l'automne
24 1992 et le 24 juillet 1993, Slobodan Praljak, ayant alors des fonctions au
25 sein du ministère de la Défense de la Croatie, a dirigé les forces armées
26 du HVO, notamment en prenant le commandement de certaines opérations, en
27 donnant des ordres aux unités, et recevant des rapports des commandants sur
28 le terrain, en représentant le HVO dans les efforts pour mettre en place un
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1 commandement conjoint avec l'ABiH, et en commandant certaines unités de la
2 police militaire du HVO. Il a également joué un rôle de médiateur pour
3 apaiser les tensions existant entre les différentes composantes des forces
4 armées du HVO. Puis, entre le 24 juillet 1993 et le 9 novembre 1993,
5 Slobodan Praljak, en tant que commandant de l'état-major principal du HVO,
6 avait un pouvoir de commandement et un contrôle effectif sur toutes les
7 composantes des forces armées du HVO. Il a ainsi pris des décisions
8 relatives aux opérations militaires qu'il a faites exécuter par la chaîne
9 de commandement.
10 Slobodan Praljak a ainsi planifié, facilité, et a été tenu informé des
11 opérations militaires du HVO à Gornji Vakuf autour du 18 janvier 1993. Il a
12 planifié et dirigé les opérations militaires du HVO dans la municipalité de
13 Prozor à partir du 24 juillet 1993. Il a participé à la direction et la
14 planification des opérations du HVO dans la municipalité de Mostar entre le
15 mois de juillet et début novembre 1993, y compris celle du 8 novembre 1993,
16 qui a conduit à la destruction du pont de Mostar. Enfin, il a participé à
17 la planification et la direction des opérations du HVO à Vares en octobre
18 1993. Il a ainsi participé à la commission des crimes qu'impliquaient ces
19 opérations.
20 Slobodan Praljak, en outre, était informé du fait que des membres des
21 forces armées du HVO déplaçaient et mettaient en détention la population
22 musulmane de Prozor de juillet à août 1993. Il savait que des crimes
23 seraient commis dans la municipalité de Mostar, notamment la destruction
24 d'immeubles à Mostar est, y compris les mosquées et le vieux pont, les
25 meurtres, les blessures et les attaques contre les membres des
26 organisations internationales. Il a facilité les meurtres des Musulmans
27 n'appartenant à aucune force armée et la destruction des biens à Stupni Do
28 en octobre 1993.
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1 Slobodan Praljak a cependant continué à exercer ses fonctions jusqu'au 9
2 novembre 1993. Il n'a pas non plus fait de sérieux efforts pour mettre fin
3 à la commission des crimes par les forces armées du HVO. Il a, bien au
4 contraire, nié les crimes commis contre les Musulmans et a facilité
5 l'absence des poursuites contre les auteurs des crimes. Slobodan Praljak a
6 notamment contribué aux efforts du HVO pour dissimuler la responsabilité du
7 HVO dans les crimes de Stupni Do.
8 Slobodan Praljak a, par ailleurs, servi d'intermédiaire entre la Croatie et
9 le HVO afin de réaliser l'objectif criminel de l'entreprise. En effet, de
10 par les fonctions qu'il exerçait au sein du gouvernement croate et au sein
11 du HVO, il a pris connaissance des politiques des plus hauts dirigeants
12 croates à l'égard de l'Herceg-Bosna démontrant, par ailleurs, une volonté
13 de les mettre en œuvre. Dans ce cadre, Slobodan Praljak a transmis des
14 ordres, des communications, et des instructions des dirigeants croates à
15 ceux de l'Herceg-Bosna et a participé à l'obtention auprès de la Croatie
16 d'un soutien militaire en faveur des forces armées du HVO.
17 La Chambre, à la majorité, étant moi-même dissident sur la forme de
18 responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que
19 Slobodan Praljak a contribué de manière significative à l'entreprise
20 criminelle commune. Il ressort en outre de sa contribution, qu'il avait
21 l'intention de réaliser l'objectif criminel commun de chasser la population
22 musulmane et de faire commettre les crimes précédemment cités afin de
23 réaliser cet objectif. La Chambre estime, en outre, que Slobodan Praljak,
24 en raison de sa contribution à la mise en œuvre de l'objectif criminel
25 commun et de sa connaissance des faits, pouvait raisonnablement prévoir que
26 des vols seraient commis lors des opérations d'éviction à Gornji Vakuf en
27 janvier 1993 et lors de l'opération du HVO à Rastani en août 1993 et a
28 accepté et a pris le risque que ces crimes puissent être commis.
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1 Je vais maintenant lire le résumé concernant la responsabilité de Milivoj
2 Petkovic.
3 Entre le 14 avril 1992 et le 26 avril 1994, Milivoj Petkovic avait
4 d'importants pouvoirs de direction et de commandement sur toutes les
5 composantes des forces armées du HVO, d'abord en tant que chef de l'état-
6 major principal du HVO jusqu'au 24 juillet 1993, puis en tant que
7 commandant adjoint dudit état-major jusqu'au 26 avril 1994. Milivoj
8 Petkovic représentait et engageait le HVO dans le cadre de négociations de
9 paix et émettait des ordres de cessez-le-feu. Enfin, il transmettait des
10 ordres et décisions prises par les autorités politiques et gouvernementales
11 de la communauté, puis République, croate d'Herceg-Bosna qui lui étaient
12 transmises via le chef du département de la Défense, Bruno Stojic, et
13 tenait les organes politiques informés de la situation militaire sur le
14 terrain.
15 Milivoj Petkovic a planifié et facilité les opérations militaires dans la
16 municipalité de Gornji Vakuf en janvier 1993. Il a planifié et dirigé les
17 opérations militaires dans la municipalité de Jablanica en avril 1993;
18 empêché l'accès des observateurs internationaux dans les villages de Sovici
19 et Doljani, puis orchestré le déplacement des civils vers Gornji Vakuf. Il
20 a dirigé les opérations militaires dans la municipalité de Prozor en avril
21 et en juin 1993 et planifié les opérations en août 1993. Il a participé à
22 la planification des pilonnages de Mostar est, entravé l'accès des convois
23 humanitaires à la population musulmane de Mostar est, planifié l'offensive
24 sur la vieille ville de Mostar, y compris celle du 8 novembre 1993, qui a
25 conduit à la destruction du pont de Mostar. Il a ordonné le 30 juin 1993
26 l'arrestation d'hommes n'appartenant à aucune force armée dans les
27 municipalités de Mostar, Stolac, et Capljina. Il a planifié les opérations
28 militaires sur la ville de Vares en octobre 1993 et participé à la mise en
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1 place d'une enquête factice au sujet des événements de Stupni Do et des
2 sanctions fictives à l'encontre d'Ivica Rajic. Il a ainsi participé à la
3 commission de crimes qu'impliquaient ces opérations militaires.
4 Milivoj Petkovic savait que de nombreux Musulmans étaient détenus dans les
5 centres de détention du HVO et a ordonné et autorisé le travail des détenus
6 de l'Heliodrom et du camp de Vitina-Otok sur la ligne de front.
7 Milivoj Petkovic a cependant continué à exercer le contrôle effectif sur
8 les forces armées jusqu'au mois d'avril 1994, tout en sachant que ses
9 membres avaient commis et commettaient des crimes. Milivoj Petkovic a
10 continué à diriger et contrôler les unités du HVO, dont le KB, ces ATG, et
11 le régiment Bruno Busic, en sachant qu'ils avaient commis de nombreux
12 crimes. En continuant à les déployer sur le théâtre des opérations ou au
13 moins en ne prenant aucune mesure pour éviter la commission de nouveaux
14 crimes, il a encouragé la commission de crimes subséquents.
15 La Chambre, à la majorité, étant dissident pour ma part sur la forme de
16 responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que
17 Milivoj Petkovic a contribué de manière significative à l'entreprise
18 criminelle commune. Il ressort en outre de sa contribution, qu'il avait
19 l'intention de réaliser l'objectif criminel commun de chasser la population
20 musulmane et de faire commettre les crimes précédemment cités afin de
21 réaliser cet objectif. La Chambre estime, en outre, que Milivoj Petkovic,
22 du fait de sa contribution à la mise en œuvre de l'objectif criminel commun
23 et sa connaissance des faits, pouvait raisonnablement prévoir que des
24 sévices sexuels seraient commis lors des opérations d'éviction de la
25 population musulmane de Mostar ouest entre juin 1993 et février 1994 et
26 lors des opérations militaires dans la ville de Vares fin octobre 1993, que
27 des vols seraient commis lors des opérations d'éviction dans la
28 municipalité de Gornji Vakuf en janvier 1993 et dans la municipalité de
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1 Jablanica en avril 1993, dans la municipalité de Mostar entre juin 1993 et
2 février 1994, et lors des opérations militaires dans la ville de Vares fin
3 octobre 1993, et enfin, que les mosquées de Sovici et Doljani seraient
4 détruites lors des opérations dans la municipalité de Jablanica en avril
5 1993. Il a accepté et pris le risque que ces crimes puissent être commis.
6 Je vais maintenant lire le résumé concernant la responsabilité de Valentin
7 Coric.
8 Entre juin 1992 et le 10 novembre 1993, Valentin Coric, en sa qualité de
9 chef de l'administration de la police militaire, avait un pouvoir important
10 de jure et de facto -- il y a un problème. J'entends pas la traduction en
11 B/C/S. Voilà, c'est bon. Je reprends.
12 Entre juin 1992 et le 10 novembre 1993, Valentin Coric, en sa qualité de
13 chef de l'administration de la police militaire, avait un pouvoir important
14 de jure et de facto sur l'ensemble des unités de la police militaire du
15 HVO. Plus particulièrement, Valentin Coric disposait d'un pouvoir de
16 commandement et de contrôle effectif sur les unités de police militaire,
17 notamment un pouvoir de resubordination desdites unités pour des activités
18 de combat. Il avait la capacité de participer à la lutte contre la
19 criminalité au sein du HVO. Il pouvait contrôler la circulation des
20 personnes et des biens sur le territoire de l'Herceg-Bosna, notamment celle
21 des convois humanitaires. Enfin, il exerçait une autorité importante sur le
22 fonctionnement du réseau de centres de détention du HVO. Lorsque Valentin
23 Coric est devenu ministère de l'Intérieur le 10 novembre 1993, il avait
24 toujours la capacité de participer à la lutte contre la criminalité au sein
25 du HVO et disposait encore d'un pouvoir de contrôler la liberté de
26 circulation des personnes et des biens sur le territoire Herceg-Bosna,
27 notamment celle des convois humanitaires.
28 Dans le cadre de ses fonctions, Valentin Coric a engagé en connaissance de
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1 cause des unités de police militaire dans les opérations d'éviction dans
2 les municipalités de Gornji Vakuf en janvier 1993, Stolac et Capljina
3 durant l'été 1993, à Mostar entre les mois de mai et octobre 1993. Il a
4 ainsi facilité l'arrestation puis la détention des Musulmans de ces
5 municipalités et contribué à la commission pendant ces opérations des
6 crimes que j'ai décrits précédemment.
7 Valentin Coric jouait un rôle-clé dans le fonctionnement du réseau de
8 centres de détention du HVO jusqu'au 10 novembre 1993. Il a contribué à
9 maintenir les milliers de Musulmans en détention dans des conditions
10 difficiles et durant laquelle ils étaient battus, brutalisés et humiliés.
11 Il a régulièrement ordonné ou permis leur utilisation pour effectuer les
12 travaux sur la ligne de front. Par ailleurs, malgré les informations
13 alarmantes qui lui étaient transmises, Valentin Coric n'a rien fait pour
14 empêcher que des détenus de l'Heliodrom ne soient envoyés sur la ligne de
15 front pour y effectuer des travaux, où plusieurs ont été tués et blessés.
16 En août 1993, il a ordonné le départ forcé des Musulmans de la municipalité
17 de Ljubuski du territoire de la BiH en ordonnant leur libération sous la
18 condition de leur départ avec leurs familles à l'étranger via la Croatie.
19 La Chambre, à la majorité, étant dissident moi-même sur la forme de
20 responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que
21 Valentin Coric a contribué de manière significative à l'entreprise
22 criminelle commune. Il ressort en outre de cette contribution, qu'il avait
23 l'intention de réaliser l'objectif criminel commun de chasser la population
24 musulmane et de faire connaître les crimes précédemment cités afin de
25 réaliser cet objectif. La Chambre estime enfin qu'en raison de sa
26 contribution à la mise en œuvre de l'objectif criminel commun et sa
27 connaissance des faits, Valentin Coric pouvait raisonnablement prévoir que
28 des vols seraient commis lors des opérations d'éviction dans les
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1 municipalités de Gornji Vakuf en janvier 1993, que des sévices sexuels et
2 des vols seraient commis lors d'opérations d'éviction à Mostar ouest à
3 partir du mois de mai 1993, et enfin, que des détenus décéderaient en août
4 1993 à la prison de Dretelj suite à des mauvais traitements. Il a accepté
5 et pris le risque que ces crimes puissent être commis.
6 Enfin, je terminerai par la responsabilité de Berislav Pusic.
7 Entre avril 1993 et avril 1994, Berislav Pusic a occupé plusieurs fonctions
8 et a reçu de plus en plus de responsabilités de la part de hauts
9 responsables du HVO. En avril 1993, Berislav Pusic était ainsi officier de
10 contrôle au sein du Département des enquêtes criminelles de
11 l'administration de la police militaire. A partir de mai 1993, il a occupé
12 des fonctions au sein d'une Commission chargée de l'échange des prisonniers
13 et autres personnes, puis est devenu le président de son organe exécutif,
14 le service des échanges, le 5 juillet 1993. Bruno Stojic a également nommé
15 Berislav Pusic à la tête de la Commission chargée des prisons et des
16 centres de détention du HVO le 6 août 1993. Enfin, Berislav Pusic disposait
17 d'un important pouvoir de représentation du HVO auprès de la communauté
18 internationale et des hautes autorités de la Croatie et de la BiH, faisant
19 de lui un acteur majeur dans les négociations relatives aux échanges et à
20 la circulation des personnes.
21 Berislav Pusic avait connaissance des arrestations massives des Musulmans
22 d'Herceg-Bosna, et ce, dès avril 1993, avec celles ayant eu lieu dans la
23 municipalité de Jablanica.
24 Berislav Pusic avait connaissance des conditions très difficiles dans
25 lesquelles les Musulmans étaient détenus dans l'école de Sovici, les
26 prisons de Dretelj, Gabela et Ljubuski, ainsi qu'à l'Heliodrom, et des
27 mauvais traitements infligés aux détenus de l'Heliodrom et du centre de
28 détention de Vojno. La Chambre constate qu'il n'a jamais pris les mesures
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1 nécessaires pour améliorer ces conditions ou faire cesser les mauvais
2 traitements. Ayant continué à exercer ses fonctions au sein du HVO, la
3 Chambre a conclu que la seule déduction qu'elle pouvait faire est que
4 Berislav Pusic avait accepté ces crimes.
5 Berislav Pusic a joué un rôle important dans l'utilisation des détenus de
6 l'Heliodrom pour des travaux sur la ligne de front, étant l'une des
7 personnes habilitées à les autoriser. Il a continué à envoyer des détenus
8 effectuer des travaux sur la ligne de front alors qu'il savait que des
9 détenus y étaient décédés, y étaient également blessés. Berislav Pusic a,
10 par conséquent, contribué à la commission de ces crimes.
11 Lorsque Mate Boban a pris la décision de fermer les centres de détention du
12 HVO, Berislav Pusic a joué un rôle majeur dans l'organisation de la
13 fermeture desdits centres et s'est assuré que les Musulmans quittaient le
14 territoire de l'Herceg-Bosna.
15 Berislav Pusic avait connaissance des destructions dans les villages de
16 Sovici et Doljani en avril 1993 et du déplacement de la population de ces
17 villages vers les territoires contrôlés par l'ABiH fin mai 1993. Il savait
18 également que les populations musulmanes de la municipalité de Capljina et
19 de Mostar ouest étaient déplacées vers les territoires contrôlés par
20 l'ABiH. Il avait connaissance des conditions de vie désastreuses à Mostar
21 et causées par le siège du HVO, et a participé a l'entrave des évacuations
22 humanitaires.
23 Malgré le rôle qu'il avait auprès de différents responsables des centres de
24 détention du HVO mais aussi auprès de hauts responsables du HVO, Berislav
25 Pusic n'a fait aucun effort sérieux pour mettre fin aux crimes qui étaient
26 commis dans les centres de détention ou ceux commis lors des arrestations
27 des Musulmans, ni pour les dénoncer. Au contraire, Berislav Pusic a
28 toujours cherché à esquiver les questions gênantes des représentants des
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1 organisations internationales ou celles de ses homologues musulmans et a
2 donné des informations confuses, voire fausses, à ces représentants et à la
3 presse, cherchant ainsi à humilier ou minimiser les crimes commis par les
4 membres du HVO à l'encontre des Musulmans.
5 La Chambre, à la majorité, étant moi-même dissident sous la forme de
6 responsabilité, est convaincue au-delà de tout doute raisonnable que Pusic
7 a contribué de manière significative à l'entreprise criminelle commune. Il
8 ressort en outre de sa contribution, qu'il avait l'intention de réaliser
9 l'objectif criminel commun de chasser la population musulmane et de faire
10 commettre les crimes précédemment cités afin de réaliser cet objectif.
11 Enfin, la Chambre n'ayant pas retenu les crimes commis dans la
12 municipalité de Prozor en octobre 1992 comme faisant partie de l'entreprise
13 criminelle commune, elle a analysé la responsabilité des accusés en vertu
14 des autres modes de participation allégués dans l'acte d'accusation. Les
15 éléments de preuve versés au dossier ont permis à la Chambre de faire des
16 conclusions uniquement sur la responsabilité de Valentin Coric au titre de
17 l'article 7(3) du Statut. En effet, dès le 25 octobre, Valentin Coric a été
18 informé du fait que des membres de la police militaire avaient volé des
19 véhicules appartenant à des Musulmans. Malgré cette information, Valentin
20 Coric n'a rien fait pour punir les auteurs de ces crimes alors qu'il en
21 avait la capacité et le devoir. Par ailleurs, Valentin Coric a été avisé à
22 la même époque que de nombreuses maisons ont été endommagées lors des
23 combats ayant eu lieu dans la ville de Prozor. Les informations dont
24 disposait Valentin Coric étaient suffisamment alarmantes pour justifier un
25 complément d'enquête sur ces destructions, ce qui n'a pas été fait. Ne
26 s'étant pas déchargé des obligations qui lui incombaient en tant que
27 supérieur hiérarchique, la Chambre a estimé à la majorité, étant moi-même
28 dissident, que Valentin Coric est responsable au titre de l'article 7(3) du
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1 Statut des vols et destructions commis dans la municipalité de Prozor en
2 octobre 1992.
3 Je vais maintenant donner lecture du dispositif.
4 Monsieur Prlic, veuillez vous lever.
5 [L'accusé Prlic se lève]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : En raison des motifs que je viens de résumer, la
7 Chambre, à l'unanimité, vous déclare, Jadranko Prlic, coupable sur le
8 fondement de l'article 7(1) du Statut des chefs 1, 6 à 13, 15, 16, 18, 19,
9 et 21 à 25 de l'acte d'accusation. La Chambre à la majorité, étant moi-même
10 dissident, vous déclare coupable sur le fondement de l'article 7(1) du
11 Statut des chefs 2 à 5 de l'acte d'accusation. En vertu des principes
12 relatifs au cumul de déclarations de culpabilité, la Chambre ne prononce
13 pas de déclaration de culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20 de l'acte
14 d'accusation.
15 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
16 de 25 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
17 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
18 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
19 du Tribunal en attendant que soient prises toutes les dispositions
20 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
21 Vous pourrez vous asseoir.
22 [L'accusé Prlic s'assoit]
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stojic, veuillez vous lever.
24 [L'accusé Stojic se lève]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : En raison des motifs que je viens de résumer, la
26 Chambre, à l'unanimité, vous déclare, Bruno Stojic, coupable sur les
27 fondements de l'article 7(1) du Statut des chefs, 1, 6 à 13, 15, 16, 18,
28 24, et 25 de l'acte d'accusation. La Chambre, à la majorité, étant moi-même
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1 dissident, vous déclare coupable sur le fondement de l'article 7(1) du
2 Statut des chefs 2 à 5, 19, et 21 à 23 de l'acte d'accusation. En vertu des
3 principes relatifs au cumul des déclarations de culpabilité, la Chambre ne
4 prononce pas de déclaration de culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20 de
5 l'acte d'accusation.
6 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
7 de 20 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
8 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
9 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
10 du Tribunal en attendant que soient prises toutes les dispositions
11 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
12 Vous pouvez vous asseoir.
13 [L'accusé Stojic s'assoit]
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, veuillez vous lever.
15 [L'accusé Praljak se lève]
16 M. LE JUGE ANTONETTI : En raison des motifs que je viens de résumer, la
17 Chambre, à l'unanimité, vous déclare, Slobodan Praljak, coupable sur le
18 fondement de l'article 7(1) du Statut des chefs 1, 6 à 13, 15, 16, 18, 19,
19 21, 24, et 25 de l'acte d'accusation. La Chambre, à la majorité, étant moi-
20 même dissident, vous déclare coupable sur le fondement de l'article 7(1) du
21 Statut des chefs 2, 3, 22, et 23, et vous acquitte, à la majorité, étant
22 moi-même dissident, des chefs 4 et 5 de l'acte d'accusation. En vertu des
23 principes relatifs au cumul des déclarations de culpabilité, la Chambre ne
24 prononce pas de déclaration de culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20 de
25 l'acte d'accusation.
26 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
27 de 20 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
28 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
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1 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
2 du Tribunal en attendant que soient prises toutes les dispositions
3 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
4 Vous pouvez vous asseoir.
5 [L'accusé Praljak s'assoit]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Petkovic, veuillez vous lever.
7 [L'accusé Petkovic se lève]
8 M. LE JUGE ANTONETTI : En raison des motifs que je viens de résumer, la
9 Chambre, à l'unanimité, vous déclare, Milivoj Petkovic, coupable sur le
10 fondement de l'article 7(1) du Statut des chefs 1, 6 à 13, 15, 16, 18, 19
11 et 21, 24, et 25 de l'acte d'accusation. La Chambre, à la majorité, étant
12 moi-même dissident, vous déclare coupable sur le fondement de l'article
13 7(1) du Statut des chefs 2 à 5, 22, et 23 de l'acte d'accusation. En vertu
14 des principes relatifs au cumul des déclarations de culpabilité, la Chambre
15 ne prononce pas de déclaration de culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20
16 de l'acte d'accusation.
17 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
18 de 20 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
19 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
20 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
21 du Tribunal en attendant que soient prises toutes les dispositions
22 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
23 Vous pouvez vous asseoir.
24 [L'accusé Petkovic s'assoit]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Coric, veuillez vous lever.
26 [L'accusé Coric se lève]
27 M. LE JUGE ANTONETTI : En raisons des motifs que je viens de résumer, la
28 Chambre, à l'unanimité, vous déclare, Valentin Coric, coupable sur le
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1 fondement de l'article 7(1) du Statut des chefs 1, 6 à 13, 15, 16, 18, 24,
2 et 25 de l'acte d'accusation. La Chambre, à la majorité, étant moi-même
3 dissident, vous déclare coupable sur le fondement de l'article 7(1) du
4 Statut des chefs 2 à 5, 19 et 21, 22, et 23 de l'acte d'accusation. La
5 Chambre, à la majorité, étant moi même dissident, vous déclare coupable sur
6 le fondement de l'article 7(3) du Statut des chefs 15, 16, 19, et 23 de
7 l'acte d'accusation pour les événements criminels ayant eu lieu dans la
8 municipalité de Prozor en octobre 1992. En vertu des principes relatifs au
9 cumul des déclarations de culpabilité, la Chambre ne prononce pas de
10 déclaration de culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20 de l'acte
11 d'accusation.
12 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
13 de 16 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
14 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
15 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
16 du Tribunal en attendant que soient prises toutes les dispositions
17 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
18 Vous pouvez vous asseoir.
19 [L'accusé Coric s'assoit]
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Pusic, veuillez vous levez.
21 [L'accusé Pusic se lève]
22 M. LE JUGE ANTONETTI : En raison de motifs que je vais résumer, la Chambre,
23 à l'unanimité vous déclare, Berislav Pusic, coupable sur le fondement de
24 l'article 7(1) du Statut des chefs 6 à 13, 15, 16, et 18 de l'acte
25 d'accusation. La Chambre, à la majorité, étant moi-même dissident, vous
26 déclare coupable sur le fondement de l'article 7(1) du Statut des chefs 1 à
27 3, 19, 21, 24, et 25. Et vous acquitte, à l'unanimité, des chefs 4, 5, 22,
28 et 23 de l'acte d'accusation. En vertu des principes relatifs au cumul des
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1 déclarations de culpabilité, la Chambre ne prononce pas de déclaration de
2 culpabilité pour les chefs 14, 17, et 20 de l'acte d'accusation.
3 En conséquence, la Chambre, à l'unanimité, vous condamne à une peine unique
4 de 10 années d'emprisonnement à compter de ce jour, sous réserve de la
5 déduction du temps que vous avez déjà passé en détention provisoire. En
6 application de l'article 103(C) du Règlement, vous resterez sous la garde
7 du Tribunal en attendant que ce soient prises toutes les dispositions
8 relatives à votre transfert dans l'Etat où vous purgerez votre peine.
9 [L'accusé Pusic s'assoit]
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Juge Trechsel joint une opinion séparée et une
11 opinion partiellement dissidente au présent jugement.
12 Je joins moi-même une opinion séparée et partiellement dissidente au
13 présent jugement.
14 Je vous remercie. L'audience est levée.
15 --- L'audience est levée à 11 heures 44.
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