Affaire n° : IT-03-67-AR72.1

LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Theodor Meron, Président
M. le Juge Fausto Pocar
M. le Juge Mohamed Shahabuddeen
M. le Juge Mehmet Güney
Mme le Juge Inés Mónica Weinberg de Roca

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
31 août 2004

LE PROCUREUR

c/

Vojislav SESELJ

___________________________________

DÉCISION RELATIVE À L’APPEL INTERLOCUTOIRE CONCERNANT L’EXCEPTION PRÉJUDICIELLE D’INCOMPÉTENCE

___________________________________

Le Bureau du Procureur :

Mme Hildegaard Uertz-Retzlaff
M. Daniel Saxon

L’Accusé :

Vojislav Seselj

Le Conseil d’appoint :

M. Aleksandar Lazarevic

1. L’Accusation a déposé le présent acte faisant appel d’une décision de la Chambre de première instance qui confirmait en partie l’exception préjudicielle soulevée par l’accusé Vojislav Seselj (« Seselj ») pour incompétence et vices de forme de l’acte d’accusation1. Par sa décision du 29 juillet 2004, un collège de trois juges de la Chambre d’appel a estimé que l’appel pouvait être interjeté de droit puisqu’il répondait aux exigences de l’article 72 A) du Règlement.

2. En appel, l’Accusation soutient que la Chambre de première instance a commis une erreur de droit en jugeant que la compétence du Tribunal en matière de crimes contre l’humanité qui auraient été commis en Voïvodine (République de Serbie) est subordonnée à l’existence d’un conflit armé en Voïvodine2. L’Accusation affirme que l’erreur de droit commise par la Chambre de première instance tient à une interprétation erronée de l’expression « commis au cours d’un conflit armé » figurant à l’article 5 du Statut du Tribunal3.

3. Dans l’acte d’accusation qu’elle a établi contre Seselj, l’Accusation a fait valoir ce qui suit : « Pendant toute la période couverte par le présent acte d’accusation, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine étaient le théâtre d’un conflit armé. Il existait un lien entre ce conflit armé et les crimes présumés commis en Croatie, en Bosnie -Herzégovine et dans certaines parties de la Voïvodine, en Serbie ». Dans la Décision attaquée, la Chambre de première instance a estimé que la responsabilité pénale, au sens de l’article 5 du Statut, pour des actes allégués par l’Accusation, est subordonnée à l’existence d’un conflit armé en Voïvodine à l’époque des faits. Ayant invité l’Accusation à préciser ses conclusions invoquant l’existence d’un conflit armé en Voïvodine, la Chambre a conclu : « Si l’Accusation décide de ne pas invoquer l’existence d’un conflit armé en Voïvodine, il lui faudra supprimer dans l’Acte d’accusation tous les chefs qui se rapportent à cette région. Si elle tient à conserver ces chefs d’accusation, il lui faudra établir l’existence d’un conflit armé à l’époque des faits »4. La Chambre n’a donné aucune autre raison à l’appui de sa décision.

4. En appel, l’Accusation affirme que la Chambre de première instance a commis les erreurs de droit suivantes :

a) La Chambre a appliqué un critère incorrect et indûment restrictif à l’exercice de la compétence pour les accusations basées sur l’article 5 du Statut.

b) L’expression « commis au cours d’un conflit armé », à l’article 5 du Statut, peut faire l’objet de deux interprétations en droit, l’une et l’autre plus larges que celle retenue par la Chambre de première instance. Au sens le plus large, l’expression « commis au cours d’un conflit armé » signifie simplement pendant une période d’hostilités sur le territoire de l’ex-Yougoslavie. À défaut, cette expression signifie que les crimes ont été commis sur le territoire d’une partie au conflit en ex-Yougoslavie pendant la période du conflit, et rien de plus.

c) Ayant appliqué un critère incorrect et indûment restrictif à l’exercice de la compétence pour les accusations basées sur l’article 5 du Statut, la Chambre de première instance a versé dans l’erreur en estimant que cet article ne pouvait s’appliquer aux crimes présumés commis en Voïvodine que si, au moment des faits, un conflit armé y existait. La Chambre a commis une autre erreur en invitant l’Accusation à établir l’existence d’un conflit armé (c’est-à-dire d’hostilités ou de combats) en Voïvodine, si elle entendait maintenir les accusations basées sur l’article 5 du Statut concernant les crimes commis en Voïvodine5.

5. L’Accusation affirme qu’il est bien établi qu’aucune disposition du droit international coutumier ne prévoit que les crimes contre l’humanité doivent avoir été commis au cours d’un conflit armé. Elle soutient au contraire que l’existence d’un conflit armé est une exigence relative à l’exercice de la compétence qu’impose le Statut du Tribunal. À ce titre, il s’agit dans le présent appel d’une question d’interprétation du Statut. Dans l’Arrêt Tadic, la Chambre d’appel a dit que cette exigence était satisfaite dès lors qu’était prouvée l’existence d’un conflit armé à l’époque et sur les lieux où les crimes ont été commis. Aucun autre lien n’est exigé entre les actes de l’accusé et ce conflit armé6. Dans l’Arrêt Kunarac, la Chambre d’appel a dit que le Statut exige que soit « prouvée l’existence d’un conflit armé et […] établi qu’il existait un lien objectif du point de vue géographique et temporel entre les actes de l’accusé et le conflit armé »7. Sur la base de ces précédents, l’Accusation affirme qu’il suffit d’établir si un conflit armé existait à l’époque et sur les lieux des faits.

6. Pour déterminer le sens de l’expression « à l’époque et sur les lieux des faits , l’Accusation affirme qu’il faut se fonder sur les déclarations interprétatives des membres du Conseil de sécurité des Nations Unies lors de l’adoption du Statut du Tribunal. L’Accusation soutient, comme l’a relevé la Chambre d’appel dans l’Arrêt Tadic concernant l’exception préjudicielle d’incompétence8, que les déclarations de membres du Conseil de sécurité qui n’ont fait l’objet d’aucune contestation peuvent être considérées comme une interprétation faisant autorité des dispositions pertinentes du Statut9. À la réunion du Conseil de sécurité tenue avant l’adoption du Statut du Tribunal, les déclarations prononcées par plusieurs membres semblent indiquer que, selon leur interprétation, l’article 5 du Statut s’applique aux actes énumérés dans cet article lorsqu’ils ont été commis durant une période de conflit armé sur le territoire de l’ex-Yougoslavie dans le cadre d’une attaque systématique ou généralisée contre une population civile10. À la lumière des déclarations prononcées à cette réunion, l’Accusation avance que l’exigence relative à l’exercice de la compétence imposée par l’article 5 du Statut devrait être interprétée comme nécessitant la preuve que des hostilités étaient en cours sur le territoire de l’ex-Yougoslavie à l’époque où les crimes visés par cet article ont été commis, et non la preuve qu’un conflit armé était en cours à l’endroit précis où lesdits crimes auraient été commis11.

8. À défaut, l’Accusation invoque le critère défini dans l’Arrêt Tadic concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, dans lequel la Chambre d’appel a indiqué que « le champ temporel et géographique des conflits armés internationaux et internes s’étend au-delà de la date et du lieu exacts des hostilités », et que « [l]e droit international humanitaire s’applique dès l’ouverture de ces conflits armés et s’étend au-delà de la cessation des hostilités jusqu’à la conclusion générale de la paix ; ou, dans le cas de conflits internes, jusqu’à ce qu’un règlement pacifique soit atteint. Jusqu’alors, le droit international humanitaire continue de s’appliquer sur l’ensemble du territoire des États belligérants ou, dans le cas de conflits internes, sur l’ensemble du territoire sous le contrôle d’une Partie, que des combats effectifs s’y déroulent ou non »12. L’Accusation soutient que, même si la Chambre d’appel ne s’est pas penchée spécifiquement sur l’applicabilité de ces mêmes principes à l’article 5 du Statut, il n’y a pas lieu de donner à l’expression « conflit armé » une interprétation plus restrictive dans cet article13. Sur la base de cette interprétation, l’Accusation affirme que, s’agissant de crimes contre l’humanité, l’article 5 du Statut exige seulement de montrer que les crimes en question ont été commis dans le cadre d’un conflit armé. L’Accusation soutient que le paragraphe 12 de l’acte d’accusation établi contre Seselj, qui invoque l’existence d’un lien entre la situation de conflit armé sur le territoire de l’ex-Yougoslavie et les crimes contre l’humanité commis en Croatie, en Bosnie-Herzégovine et en Voïvodine, répond largement au critère juridique.

9. Dans sa réponse, Seselj soutient que cinq conflits armés pratiquement indépendants les uns des autres ont eu lieu pendant la période soumise à la compétence ratione temporis du Tribunal. Il avance que chacun de ces conflits s’est déroulé indépendamment des autres et qu’il n’existe aucune connexion entre eux, que ce soit par leur nature ou le moment où ils se sont produits14. Il affirme qu’il n’y a jamais eu de conflit armé en Voïvodine, ni de lien territorial ou temporel entre cette dernière et l’un quelconque des conflits armés qui se sont déroulés sur le territoire de l’ex-Yougoslavie15. Seselj dit que le conflit armé en Croatie « a pris fin en 1992 » à la suite de la mise en œuvre du « Plan Vance », et que, l’Accusation n’étant pas en mesure de prouver l’existence d’un conflit armé en Croatie à l’époque des événements présumés s’être produits en Voïvodine, elle « s’efforce de créer un lien artificiel avec le conflit armé en Bosnie-Herzégovine, malgré le fait que cette dernière était à l’époque un État indépendant, reconnu par la communauté internationale, qui ne portait aucun intérêt aux différends entre la Serbie et la Croatie qui étaient sans rapport avec sa population ou son territoire »16. En conclusion, Seselj affirme également qu’« il est absolument impossible d’établir un quelconque lien géographique ou temporel objectif entre les crimes qui auraient été commis en Voïvodine et le conflit armé »17, étant donné qu’il n’y avait à l’époque des faits aucun conflit armé, que ce soit en Voïvodine, en Serbie ou dans l’ensemble de la République fédérale de Yougoslavie 18.

10. Les arguments avancés par Seselj dans sa réponse sont des questions de fait qui seront tranchées par la Chambre de première instance en sa qualité de juge du fait. La seule question qui se pose à la Chambre d’appel est celle de savoir si la Chambre de première instance s’est méprise dans son interprétation de l’exigence relative à l’exercice de la compétence qu’impose l’article 5 du Statut. Il s’agit là d’un point de droit qui, en toute logique, précède la question de savoir si, une fois définie la portée juridique de cette exigence, l’Accusation peut y satisfaire sur le plan factuel.

11. Dans sa réplique à la réponse de Seselj, l’Accusation examine les arguments factuels présentés. Dans sa décision confirmant que l’appel est recevable de droit en application de l’article 72 du Règlement de procédure et de preuve, la Chambre d’appel a indiqué qu’elle n’examinerait pas la réplique de l’Accusation, celle-ci ayant été déposée (d’après la date indiquée par le Greffe) avec 7 jours de retard, et l’Accusation ayant omis de demander une prorogation de délai et de fournir une explication ou une raison valable pour ce retard. L’Accusation a maintenant déposé devant la Chambre d’appel une requête lui demandant d’examiner sa réplique en arguant d’un motif valable19. Dans sa requête, l’Accusation fait valoir que, bien que sa réplique ait été déposée au Greffe dans les délais prescrits, il est d’usage au Greffe de ne pas déposer officiellement les documents de l’espèce avant leur traduction dans la langue de Seselj. Le Greffe a confirmé que tel est bien l’usage et que la requête de l’Accusation avait été déposée dans les délais. Il est regrettable que le Greffe n’ait pas fourni ces explications au moment où la Chambre d’appel les avait demandées. Étant maintenant convaincue que la réplique de l’Accusation a été déposée dans les règles, la Chambre d’appel l’a prise en considération dans le présent recours.

Analyse

12. La Chambre d’appel convient qu’il s’agit en l’espèce d’une question d’interprétation du Statut. Comme l’a indiqué la Chambre d’appel dans l’Arrêt Tadic concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, le Statut du Tribunal devrait être interprété à la lumière de son objet et de son but20. L’article premier du Statut du Tribunal définit les compétences ratione loci et ratione temporis du Tribunal, lequel est « habilité à juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 ». En établissant le Tribunal, le Conseil de sécurité avait pour objet, comme l’indique sa résolution 808 (1993 ), de mettre fin aux violations généralisées du droit international humanitaire, de traduire en justice les personnes qui en portent la responsabilité, et de contribuer à la restauration et au maintien de la paix sur le territoire de l’ex-Yougoslavie. En formulant l’article 5 du Statut du Tribunal et en imposant une nouvelle exigence relative à l’exercice de la compétence, à savoir que les crimes contre l’humanité doivent avoir été commis dans le cadre d’un conflit armé, le Conseil de sécurité entendait limiter la compétence du Tribunal aux crimes liés au conflit armé en ex -Yougoslavie. À la réunion du Conseil de sécurité à laquelle le Statut du Tribunal a été adopté, les membres qui s’étaient penchés sur le champ d’application de l’article 5 du Statut ont bien précisé que celui-ci englobait les actes criminels systématiques ou généralisés commis à l’encontre de la population civile sur le territoire de l’ex-Yougoslavie au cours d’un conflit armé21.

13. Comme l’exprime la jurisprudence du Tribunal, l’article 5 du Statut exige, au regard de la compétence, l’existence d’un conflit armé à l’époque et sur les lieux visés par l’acte d’accusation, mais il ne prescrit aucun lien matériel entre les actes de l’accusé et le conflit armé22. Bien que cette interprétation donne peu d’indications sur le sens de l’expression « à l’époque et sur les lieux visés par l’acte d’accusation », la jurisprudence du Tribunal portant sur l’application de l’article 5 du Statut suggère une interprétation large. Par exemple, il n’est pas exigé qu’une attaque dirigée contre une population civile soit liée au conflit armé. Comme l’a dit la Chambre d’appel dans l’Arrêt Tadic : « Les deux notions — “attaque contre une population civile” et “conflit armé” — doivent être distinctes, bien que de toute évidence, aux termes de l’article 5 du Statut, la première puisse prendre place dans le cadre du deuxième »23. De même, l’interprétation que donne ci-dessus la Chambre d’appel Tadic de l’application du droit international humanitaire, dans lequel s’inscrit l’article 5 du Statut, va dans le sens d’une interprétation large de l’exigence relative à l’exercice de la compétence, à savoir qu’un crime contre l’humanité doit avoir été commis au cours d’un conflit armé.

14. La Chambre d’appel n’admet pas que l’exigence relative à l’exercice de la compétence énoncée à l’article 5 du Statut impose à l’Accusation de prouver qu’un conflit armé existait dans l’État (ou la région) de l’ex-Yougoslavie dans lequel le crime visé dans cet article aurait été commis. Il peut arriver qu’un conflit armé soit en cours dans un État et que des civils d’une des parties belligérantes résidant dans un autre État deviennent les victimes d’une attaque systématique et généralisée déclenchée par ce conflit armé. L’article 5 du Statut exige seulement que l’Accusation prouve qu’un conflit armé présente un lien suffisant avec le crime reproché à l’accusé en vertu de cet article. Si elle n’est pas tenue, suivant la jurisprudence du Tribunal, d’établir un lien matériel entre les actes de l’accusé et le conflit armé, l’Accusation doit cependant établir un lien entre le crime spécifique visé par l’article 5 du Statut et le conflit armé. En conformité avec l’objet et le but du Statut du Tribunal, l’exigence relative à l’exercice de la compétence — à savoir que les crimes visés par l’article 5 doivent avoir été commis au cours d’un conflit armé — impose à l’Accusation de prouver que la population civile a été soumise à une attaque systématique ou généralisée alors qu’un conflit armé se déroulait en Croatie et/ou en Bosnie-Herzégovine. La question de savoir si l’Accusation peut établir ce lien en l’espèce pour des crimes contre l’humanité commis en Voïvodine est une question de fait à trancher au procès.

15. Par ces motifs, il est fait droit à l’appel introduit par l’Accusation, et la Décision attaquée rendue par la Chambre de première instance est annulée.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 31 août 2004
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre d’appel
____________
Theodor Meron

[Sceau du Tribunal]


1 - Prosecution’s Appeal from the Decision on Motion by Vojislav Seselj Challenging Jurisdiction and Form of the Indictment, 18 juin 2004 (le « Mémoire d’appel »).
2 - Mémoire d’appel, par. 1.
3 - Ibid., par. 3.
4 - Décision relative à l’exception préjudicielle soulevée par Vojislav Seselj pour incompétence et vices de forme de l’acte d’accusation, 3 juin 2004 (la « Décision attaquée »), par. 39 et 40.
5 - Mémoire d’appel, par. 12.
6 - Le Procureur c/ Tadic, affaire n° IT-94-1-A, 15 juillet 1999, par. 249 à 251.
7 - Le Procureur c/ Kunarac, affaire n° IT-96-23, IT-96-23/1-A, 12 juin 2002, par. 83.
8 - Le Procureur c/ Tadic, affaire n° IT-94-1-72, Arrêt relatif à l’appel de la Défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 2 octobre 1995, par. 88.
9 - Mémoire d’appel, par. 20.
10 - Procès-verbal verbatim provisoire de la 3217e réunion, Document des Nations Unies S/PV.3217 (25 mai 1993).
11 - Mémoire d’appel, par. 25.
12 - Mémoire d’appel, par. 30.
13 - Mémoire d’appel, par. 32.
14 - Mémoire d’appel, par. 32.
15 - Ibid., par. 2.
16 - Ibid., par. 3.
17 - Ibid.
18 - Ibid.
19 - Prosecution’s Explanation of Good Cause and Request for Consideration, 11 août 2004 (la « Requête »).
20 - Le Procureur c/ Tadic, Arrêt relatif à l’appel de la Défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, affaire n° IT-94-1-AR72, 2 octobre 1995, par. 88.
21 - Procès-verbal verbatim provisoire de la 3217e réunion, Document des Nations Unies S/PV.3217, 25 mai 1993.
22 - Arrêt Kunarac, par. 83 ; Arrêt Tadic, par. 249 et 251.
23 - Arrêt Tadic, par. 251.