Affaire n° IT-03-67-PT

Le Procureur c/ Vojislav Seselj

DÉCISION

LE GREFFIER,

VU la décision du 11 décembre 2003 (la « Décision ») relative aux privilèges dont M. Vojislav Seselj (« l’Accusé ») bénéficie en matière de communication au quartier pénitentiaire des Nations Unies (le « Quartier pénitentiaire »), qui ordonnait la mise en œuvre de certaines mesures pour une période de « trente (30) jours à compter de la Décision, période au terme de laquelle [celle-ci] sera reconsidérée […] »,

VU la décision rendue par le Greffier le 29 décembre 2003, qui qualifiait les agissements de l’Accusé de « violation flagrante de la Décision », et interdisait « toute communication téléphonique entre l’Accusé et les tiers, à l’exception des communications avec son conseil juridique (le cas échéant) et des représentants diplomatiques ou consulaires » pendant une période « qui prendra fin à la date d’expiration de la Décision (10 janvier 2004) »,

VU la décision du Greffier adjoint, déposée le 9 janvier 2004, qui prévoyait « pour une nouvelle période de trente (30) jours à compter du 10 janvier 2004, période au terme de laquelle la […] Décision sera reconsidérée », « d’interdire, sauf autorisation expresse du commandant du Quartier pénitentiaire, toute communication entre l’Accusé et des tiers, à l’exception des communications avec son conseil juridique (le cas échéant) et des représentants diplomatiques ou consulaires »,

VU les décisions du Greffier adjoint déposées respectivement le 9 février 2004 et le 9 mars 2004, qui prévoyaient pour une nouvelle période de trente (30) jours à compter de la date indiquée, « d’interdire, sauf autorisation expresse du commandant du Quartier pénitentiaire, toute communication entre l’Accusé et des tiers, à l’exception des communications avec son conseil juridique (le cas échéant), des représentants diplomatiques ou consulaires et sa famille immédiate, sous réserve que les conversations avec sa famille soient écoutées en temps réel dans les conditions fixées par le commandant du Quartier pénitentiaire »,

RAPPELANT que dans la Décision, il était dit, entre autres, que « si l’on met en balance les droits de l’Accusé de communiquer avec des tiers et de recevoir des visites et le droit du Tribunal de remplir effectivement son mandat et ses fonctions, la situation particulière de l’Accusé nécessite pour l’heure d’ordonner des mesures indispensables si l’on veut éviter que l’exercice illimité du droit de communiquer avec des tiers et de recevoir des visites n’aboutisse à une couverture médiatique potentiellement néfaste »,

RAPPELANT ÉGALEMENT que, dans l’analyse des facteurs susceptibles de contrecarrer le mandat du Tribunal, dans le contexte des élections législatives en Serbie, il a été tenu compte dans la Décision de ce que « les médias ont largement relayé le fait qu’une personne devant, comme l’Accusé, répondre de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, puisse participer aisément à la campagne en cours pour les élections législatives en Serbie »,

ATTENDU que les élections présidentielles en Serbie doivent avoir lieu le 13 juin 2004,

ATTENDU qu’il est probable que le parti politique et les partisans de l’Accusé tentent de faire en sorte qu’il soit impliqué directement ou indirectement dans des activités politiques liées aux élections présidentielles du 13 juin 2004,

ATTENDU que tout battage dans des médias relayant largement le fait que l’Accusé puisse participer aisément à une campagne pour des élections présidentielles en Serbie compromet l’exécution du mandat du Tribunal de contribuer à la restauration et au maintien de la paix en ex-Yougoslavie,

ATTENDU que l’Accusé a une attitude de défi vis-à-vis de la Décision et des décisions rendues ultérieurement en ce qui concerne ses privilèges en matière de communication,

ATTENDU, EN PARTICULIER, que le 6 avril 2004, lorsque le commandant du Quartier pénitentiaire s’est renseigné sur la position de l’Accusé à l’égard des mesures concernant les privilèges dont il bénéficie en matière de communication au Quartier pénitentiaire, la réponse de l’Accusé a révélé qu’il était peu enclin à coopérer pour ce qui est desdites mesures et du Règlement portant régime de détention des personnes en attente de jugement ou d’appel devant le Tribunal ou détenues sur l’ordre du Tribunal (le « Règlement sur la détention préventive »),

ATTENDU que l’équilibre entre les droits de l’Accusé de communiquer avec des tiers ou de recevoir des visites et le droit du Tribunal de remplir effectivement son mandat et ses fonctions, doit être apprécié dans la perspective des élections présidentielles du 13 juin 2004 et d’après l’attitude de l’Accusé telle que signalée ci-dessus,

ATTENDU, PAR CONSÉQUENT, que les circonstances particulières de l’espèce nécessitent toujours l’imposition de mesures visant à éviter que l’exercice illimité du droit de communiquer avec des tiers et de recevoir des visites n’aboutisse à une couverture médiatique potentiellement néfaste,

DÉCIDE, en application des articles 60 et 63 du Règlement sur la détention, et pour une nouvelle période de trente (30) jours à compter du 10 mars 2004, période au terme de laquelle la présente décision sera reconsidérée :

d’interdire, sauf autorisation expresse du commandant du Quartier pénitentiaire, toute communication entre l’Accusé et des tiers, à l’exception des communications avec son conseil juridique (le cas échéant), des représentants diplomatiques ou consulaires et sa famille immédiate, sous réserve que les contacts avec sa famille soient surveillés en temps réel dans les conditions fixées par le commandant du Quartier pénitentiaire ;

que les mesures actuellement appliquées aux communications écrites soient maintenues, et que les règles en vigueur au Quartier pénitentiaire concernant la réception et l’envoi du courrier soient respectées.

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Le Greffier
Hans Holthuis

[Sceau du Tribunal]

Le 8 avril 2004
La Haye (Pays-Bas)