1   (Mercredi 26 février 2003.) 

  2   (Comparution initiale de Vojislav Seselj.)

  3   (L'audience est ouverte à 13 heures 20, sous la présidence du Juge

  4   Schomburg.)

  5   (Audience publique.)

  6   M. le Président (interprétation): Bonjour.

  7   Je demanderai à Madame la Greffière de citer le numéro de l'affaire.

  8   Mme Anoya (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Il s'agit de

  9   l'affaire IT-03-67-I, le Procureur contre Vojislav Seselj.

 10   M. le Président (interprétation): Merci. Je demande aux parties de se

 11   présenter.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Du

 13   côté de l'accusation, Daniel Saxon, avocat, l'assistante, Kimberley

 14   Fleming, et, pour ma part, je m'appelle Hildegard Uertz-Retzlaff.

 15   M. le Président (interprétation): Merci. Du côté de la défense, je vois

 16   qu'il n'y a pas de conseil de la défense.

 17   M. Seselj (interprétation): J'ai décidé de me défendre moi-même.

 18   M. le Président (interprétation): Je vais vous donner la parole dans un

 19   instant, mais j'étais en train de dire que j'ai reçu, il y a quelques

 20   minutes, votre lettre traduite en anglais, dans laquelle vous nous

 21   informez du fait que vous avez décidé de vous défendre vous-même, au cours

 22   du procès que -je cite-: "Nous préparons pour vous", comme vous le dites.

 23   Vous poursuivez, en disant –je cite-: "J'insiste pour que vous me

 24   soumettiez personnellement tous les documents du Tribunal et tous les

 25   documents de l'accusation, et que ces documents me soient communiqués


  1   exclusivement en langue serbe". Nous avons donc reçu ce courrier, et nous

  2   reviendrons sur la question du conseil de la défense ultérieurement.

  3   Monsieur Seselj, vous avez décidé de vous présenter directement à La Haye,

  4   en provenance de Belgrade, afin de réfuter les allégations retenues contre

  5   vous.

  6   Ces allégations sont contenues dans l'Acte d'accusation, daté du 15

  7   janvier 2003, qui a été révisé et confirmé par un autre Juge de ce

  8   Tribunal, le 14 février 2003.

  9   Monsieur Seselj, après votre arrivée à La Haye, vous avez été arrêté,

 10   c'était le lundi 24 février 2003, et le même jour, vous avez été

 11   transporté jusqu'au quartier pénitentiaire des Nations Unies. Le motif de

 12   cette arrestation, c'est le fondement juridique que je vais citer à

 13   présent, à savoir l'existence d'un mandat d'arrêt, daté du 14 février 2003

 14   à votre encontre, émis par un Juge permanent de ce Tribunal. Le Président

 15   de ce Tribunal a affecté la présente Affaire à la Chambre de première

 16   instance II hier, et je préside cette Chambre.

 17   En cette qualité, Monsieur Seselj, j'aimerais vous poser plusieurs

 18   questions. Les premières questions seront posées à des fins

 19   d'identification et n'ont rien à voir avec l'Affaire notamment, rien à

 20   voir avec les charges retenues contre vous. Je vous demanderai d'avoir la

 21   gentillesse de décliner votre nom, et votre prénom, pour le compte rendu

 22   d'audience.

 23   M. Seselj (interprétation): Vojislav Seselj.

 24   M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Pouvez-vous également

 25   donner les prénoms de vos père et mère?


  1   M. Seselj (interprétation): Nikola et Danica.

  2   M. le Président (interprétation): Quelle est votre date de naissance?

  3   M. Seselj (interprétation): Le 11 octobre 1954, à Sarajevo.

  4   M. le Président (interprétation): Quelle était votre profession, avant

  5   votre arrivée aux Pays-Bas?

  6   M. Seselj (interprétation): Je suis docteur es-sciences juridiques,

  7   professeur à l'université, et membre du Parlement de la République et du

  8   Parlement fédéral.

  9   M. le Président (interprétation): Merci. Quel était votre dernier lieu de

 10   résidence? Je vous demande l'adresse exacte.

 11   M. Seselj (interprétation): Belgrade, Batajnica, rue Bosanski Odred 36.

 12   M. le Président (interprétation): Je vous demande enfin si vous êtes marié

 13   et si vous avez des enfants?

 14   M. Seselj (interprétation): Je suis marié et j'ai quatre fils.

 15   M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Seselj.

 16   Votre comparution, aujourd'hui, se situe dans le cadre d'une comparution

 17   initiale devant ce Tribunal, prévue par l'Article 62 du Règlement de

 18   procédure et de preuve du Tribunal. Ceci peut sembler une simple formalité

 19   mais, en tant que juriste, vous connaissez l'importance d'une telle

 20   audience qui, dans une certaine mesure, donne le pas de la procédure dans

 21   son ensemble.

 22   Et la présente procédure se fonde sur les raisons suivantes: l'accusation

 23   a demandé à un Juge de ce Tribunal de confirmer l'Acte d'accusation émis à

 24   votre encontre, sur la base des premiers éléments de preuve, rassemblés en

 25   votre absence.


  1   Dans le même temps, une requête a été présentée pour l'émission d'un

  2   mandat d'arrêt, qui constitue la base de votre privation de liberté.

  3   Normalement, la partie opposée -à savoir dans le cas présent, vous-même,

  4   Monsieur Seselj- a le droit d'être informée de l'existence de ce mandat

  5   d'arrêt à l'avance, car il est impossible d'entendre une personne

  6   recherchée, avant cette étape importante. Aujourd'hui, vous aurez la

  7   possibilité de contester l'Acte d'accusation émis à votre encontre, ainsi

  8   que votre privation de liberté.

  9   Pour que chacun comprenne bien ce qui se passe, permettez-moi de vous

 10   donner les informations suivantes, avant que ne soit lu l'Acte

 11   d'accusation.

 12   Monsieur Seselj, c'est votre droit de garder le silence. Ce droit est

 13   inscrit à l'Article 14, paragraphe 3-g), du Pacte des Nations Unies sur

 14   les droits civils et politiques.

 15   Rien ne peut être conclu à votre désavantage, dans le cas où vous gardez

 16   le silence. Les seules conclusions qu'il est permis de tirer sont évoquées

 17   à l'Article 62-iv) du Règlement de procédure et de preuve, où il est

 18   disposé que "si l'accusé ne dit pas de quelle façon il va plaider lors de

 19   sa première comparution ou d'une comparution ultérieure, le juge est

 20   habilité à décider, au nom de l'accusé, que celui-ci plaidera coupable ou

 21   non coupable".

 22   Mais, en même temps, je dois vous lancer un avertissement, tout ce que

 23   vous direz dans ce prétoire peut être utilisé contre vous à titre

 24   d'éléments de preuve. Et, en toute justice, je suis tenu de vous informer

 25   de l'autre côté de cette médaille.


  1   En général, dans tous les prétoires du monde, une coopération

  2   substantielle donne lieu à certains avantages. Au cas où votre affaire

  3   n'en arrive pas au prononcé d'une sentence, votre coopération, en tout

  4   état de cause, permettra d'accélérer la procédure, ce qui est un avantage.

  5   Au cas -et j'insiste bien sûr le fait que c'est seulement dans ce cas-là-,

  6   donc au cas où il y aurait prononcé de sentence, une coopération

  7   substantielle de cette nature plaidera grandement à en votre faveur.

  8   Monsieur Seselj, avez-vous compris cette première partie de mes

  9   avertissements?

 10   M. Seselj (interprétation): J'ai bien compris.

 11   M. le Président (interprétation): Merci. Nous en arrivons maintenant à la

 12   deuxième partie.

 13   L'Article 45 de notre Règlement de procédure et de preuve prévoit, aux

 14   paragraphes A) et G), les choses suivantes. Paragraphe A) –je cite-:

 15   "Chaque fois que l'intérêt de la justice l'exige, un conseil est commis

 16   d'office pour représenter un suspect ou un accusé qui n'a pas les moyens

 17   de le rémunérer." (Fin de citation.)

 18   Et au paragraphe G) nous lisons ce qui suit: "Tout suspect ou accusé

 19   choisissant de mener sa propre défense est tenu d'en notifier le Greffe

 20   par écrit dans les plus brefs délais."

 21   Apparemment, vous avez opté pour la deuxième solution. Néanmoins, il est

 22   de mon devoir de souligner, en conclusion, que vous êtes toujours habilité

 23   à bénéficier de l'aide d'un conseil choisi par vous qui, sans aucun doute,

 24   vous facilitera votre défense, compte tenu notamment de l'extrême

 25   complexité des questions juridiques qui se poseront.


  1   Vous connaissez bien le droit, évidemment. Mais, comme vous le savez

  2   aussi, il vous faut vous plier aux règles d'une procédure et d'un exposé

  3   de preuves qui est une série de règles hybrides, issues en majorité du

  4   système de common law. Et moi-même, provenant d'un système de civil law,

  5   je connais les problèmes supplémentaires que toutes ces questions

  6   juridiques posent. Il ne fait aucun doute -et je n'ai aucun doute à ce

  7   sujet- que vous avez toute l'éloquence nécessaire et toutes les capacités

  8   rhétorique pour vous exprimer sur les faits. Mais, dès lors qu'il est

  9   question de droit, il peut être dans votre intérêt de bénéficier de l'aide

 10   d'un conseil de la défense.

 11   Je me permettrai à présent de vous demander si, éventuellement, vous

 12   auriez l'intention de revenir sur votre décision ou si, éventuellement,

 13   vous avez besoin d'un certain délai pour vous prononcer de façon

 14   définitive quant à la nécessité dans laquelle vous vous trouveriez

 15   éventuellement de bénéficier de l'aide –et j'insiste sur le mot "aide",

 16   car c'est bien de cela qu'il s'agit-, de l'aide donc d'un conseil de la

 17   défense.

 18   M. Seselj (interprétation): Ma décision de me défendre moi-même est

 19   définitive. Il se peut que je prenne un adjoint, un assistant juridique

 20   qui ne comparaîtra jamais en mon nom dans ce prétoire; il ne se présentera

 21   pas dans ce prétoire. Je me réserve, en d'autres termes, l'exclusivité de

 22   la comparution en prétoire en ma qualité d'accusé. Je n'ai pour autant pas

 23   la nécessité d'engager un conseil ou un adjoint.

 24   Et il convient, il appartient maintenant à l'accusation de présenter ses

 25   éléments de preuve. Je me réserve le droit de décider, par la suite, s'il


  1   convient de prendre un assistant ou de demander une assistance.

  2   M. le Président (interprétation): Merci bien.

  3   Pour le moment, il n'y a pas dans ce prétoire de conseil de la défense,

  4   donc il est peut-être difficile pour vous d'intervenir. Je vous demande si

  5   vous avez bien reçu le Règlement de procédure et de preuve datant du 12

  6   décembre 2002?

  7   M. Seselj (interprétation): Oui, je l'ai reçu. J'ai reçu tous les

  8   documents juridiques pertinents, sauf le texte de la Résolution 827 du 25

  9   mai 1993 et le texte de la Résolution 995 du 8 novembre 1994. Quand je

 10   parle de Résolutions, j'entends Conseil de sécurité des Nations Unies. Je

 11   demande que cela me soit communiqué afin que la documentation mise à ma

 12   disposition soit complète.

 13   M. le Président (interprétation): Bien entendu, vous recevrez dès que

 14   possible les documents que vous venez de demander.

 15   En application du Règlement de procédure et de preuve, vous êtes en droit

 16   de recevoir ces documents dans votre langue. Pour le moment

 17   malheureusement, contrairement aux dispositions du Règlement, vous n'avez

 18   reçu ces documents qu'en anglais, mais vous êtes autorisé à les recevoir

 19   en serbe.

 20   J'aimerais maintenant que soit donnée lecture des charges contenues dans

 21   l'Acte d'accusation du 15 janvier, sans les annexes.

 22   M. Seselj (interprétation): J'insiste sur la lecture complète de l'Acte

 23   d'accusation, conformément aux dispositions de l'Article 62.

 24   M. le Président (interprétation): Bien entendu. Vous avez le droit

 25   d'exprimer cette exigence. L'Acte d'accusation sera donc lu intégralement,


  1   à l'exception des annexes.

  2   L'accusation a-t-elle des observations à formuler?

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, Monsieur le Président.

  4   M. le Président (interprétation): Eh bien, je propose que nous commencions

  5   par la première partie, ainsi que par l'Annexe I. Et avant d'entendre la

  6   lecture de l'Annexe II, je demande au Procureur si le fait de donner

  7   lecture du nom des victimes présumées dans la présente affaire pose le

  8   moindre problème. Enfin, pour le moment, nous en sommes à la première

  9   partie.

 10   Madame la Greffière, je vous demande de lire lentement.

 11   Mme Anoya (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

 12   (Lecture de l'Acte d'accusation.)

 13   "Le Procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, en

 14   vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l'Article 18 du Statut du

 15   Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, accuse Vojislav Seselj

 16   de crimes contre l'humanité et de violations des lois ou coutumes de la

 17   guerre, comme exposé ci-après.

 18   L'accusé Vojislav Seselj, fils de Nikola Seselj, est né le 11 octobre 1954

 19   à Sarajevo, en République de Bosnie-Herzégovine. Il est diplômé de la

 20   faculté de droit de l'Université de Sarajevo. Il est titulaire d'une

 21   licence, d'une maîtrise et d'un doctorat qu'il a obtenus respectivement en

 22   1976, 1978 et 1979. Il a été assistant à la chaire de sciences politiques

 23   de l'Université de Sarajevo de 1981 à 1984.

 24   Bien que communiste dans un premier temps, Vojislav Seselj critique

 25   ensuite le régime communiste en ex-Yougoslavie et, au début des années


  1   1980, il noue des relations étroites avec un groupe de Serbes

  2   nationalistes. En 1984, reconnu coupable d'"activités contre-

  3   révolutionnaires", il est condamné à une peine de huit ans

  4   d'emprisonnement. À la suite d'une remise de peine prononcée par la Cour

  5   suprême de la République socialiste fédérative de Yougoslavie ("RSFY"), il

  6   est libéré en 1986.

  7   Une fois libéré, Vojislav Seselj s'installe à Belgrade et continue à

  8   militer pour une politique nationaliste. En 1989, il part aux États-Unis

  9   où il rencontre Momcilo Djujic, Président du "Mouvement des Tchetniks du

 10   monde libre" qui, le jour de la commémoration du 600e anniversaire de la

 11   bataille du Kosovo, le nomme "Vojvoda" tchetnik, titre honorifique qui

 12   signifie "duc" ou "commandant". Après sa nomination, Vojislav Seselj

 13   parcourt les États-Unis, le Canada, l'Australie et l'Europe occidentale

 14   afin de réunir des fonds pour financer ses activités nationalistes. Le 23

 15   janvier 1990, Vojislav Seselj prend la tête du Mouvement serbe pour la

 16   liberté et, le 14 mars 1990, il forme une alliance avec Vuk Draskovic, un

 17   autre Serbe nationaliste, et fonde le "Mouvement du renouveau serbe"

 18   ("SPO").

 19   En juin 1990, Vojislav Seselj fonde le "Parti du renouveau national

 20   serbe", rebaptisé par la suite "Mouvement tchetnik serbe", lequel

 21   recueille près de 100.000 voix lors des élections de décembre 1990. Peu de

 22   temps après, le "Mouvement tchetnik serbe" est frappé d'interdit par les

 23   autorités de la RSFY. Le 23 février 1991, Vojislav Seselj est nommé

 24   Président du "Parti radical serbe" (le "SRS") nouvellement formé. En juin

 25   1991, il est élu député à l'Assemblée de la République de Serbie. Lors de


  1   campagnes électorales et de rassemblements quasi quotidiens, il exhorte

  2   les Serbes à s'unir et à combattre les "ennemis héréditaires" de la

  3   Serbie, à savoir les populations d'origine croate, musulmane et albanaise

  4   qui se trouvent sur les territoires de l'ex-Yougoslavie. D'autres faits

  5   historiques et politiques pertinents sont exposés à l'Annexe I du présent

  6   acte d'accusation.

  7   -Responsabilité pénale individuelle; Article 7-1) du Statut du Tribunal

  8   Vojislav Seselj est individuellement pénalement responsable des crimes

  9   visés aux articles 3 et 5 du Statut du Tribunal et énumérés dans le

 10   présent acte d'accusation, crimes qu'il a planifiés, ordonnés, incité à

 11   commettre, commis, ou de toute autre manière aidé et encouragé à

 12   planifier, préparer ou exécuter. Par le terme "commettre", le Procureur

 13   n'entend pas suggérer que l'accusé ait perpétré physiquement les crimes

 14   qui lui sont imputés personnellement. Dans le présent Acte d'accusation,

 15   on entend par "commettre" la participation de Vojislav Seselj à une

 16   entreprise criminelle commune. Par l'expression "a incité à commettre", le

 17   Procureur entend suggérer que les discours, les déclarations, les actes

 18   et/ou omissions de Vojislav Seselj ont pesé sur la décision des individus

 19   qui ont commis les crimes allégués.

 20   Vojislav Seselj a participé à une entreprise criminelle commune qui avait

 21   pour but de forcer, par des crimes tombant sous le coup des articles 3 et

 22   5 du Statut du Tribunal, la majorité des non-Serbes, notamment des

 23   Musulmans et des Croates, à quitter de façon définitive environ un tiers

 24   du territoire de la République de Croatie ("Croatie"), de vastes portions

 25   du territoire de la République de Bosnie-Herzégovine, et certaines parties


  1   de la Voïvodine, en République de Serbie ("Serbie"), afin d'intégrer ces

  2   régions dans un nouvel État dominé par les Serbes. Les territoires de la

  3   Croatie qui étaient concernés englobaient les régions dénommées par les

  4   autorités serbes la "SAO de Krajina" (Région autonome serbe de la

  5   Krajina), la "SAO de Slavonie occidentale" et la "SAO de Slavonie, de la

  6   Baranja et du Srem occidental" (après le 19 décembre 1991, la SAO de

  7   Krajina a reçu l'appellation de RSK ("République de la Krajina serbe"); le

  8   26 février 1992, la "SAO de Slavonie occidentale" et la "SAO de Slavonie,

  9   de la Baranja et du Srem occidental" se sont jointes à la RSK, ainsi que

 10   la "République de Dubrovnik/Dubrovacka republika/". Les régions concernées

 11   en Bosnie-Herzégovine englobaient Bosanski Samac et Zvornik.

 12   Les crimes énumérés dans le présent Acte d'accusation s'inscrivaient dans

 13   le cadre de l'objectif assigné à l'entreprise criminelle commune, et

 14   Vojislav Seselj avait la connaissance et l'intention nécessaire pour la

 15   commission de chacun des crimes. A défaut, les crimes énumérés aux chefs

 16   d'accusation 1 à 9 et 12 à 15 étaient la conséquence naturelle et

 17   prévisible de la réalisation de l'objectif de l'entreprise criminelle

 18   commune, et Vojislav Seselj avait conscience que de tels crimes étaient

 19   l'aboutissement possible de la réalisation de l'entreprise criminelle

 20   commune.

 21   L'entreprise criminelle commune susmentionnée a vu le jour avant le 1er

 22   août 1991 et s'est poursuivie au moins jusqu'en décembre 1995. Vojislav

 23   Seselj a participé à l'entreprise criminelle commune jusqu'en septembre

 24   1993, lorsqu'il est entré en conflit avec Slobodan Milosevic. Vojislav

 25   Seselj a travaillé avec plusieurs individus à la réalisation de l'objectif


  1   de l'entreprise criminelle commune. Chaque participant ou coauteur à

  2   l'entreprise criminelle commune y a joué un rôle qui lui était propre et

  3   qui a largement contribué à la réalisation de l'objectif général de

  4   l'entreprise.

  5   Parmi les individus qui ont pris part à cette entreprise criminelle

  6   commune se trouvaient notamment: Slobodan Milosevic, le général Veljko

  7   Kadijevic, le général Blagoje Adzic, le colonel Ratko Mladic, Jovica

  8   Stanisic, Franko Simatovic alias "Frenki", Radovan Stojicic alias "Badza",

  9   Milan Martic, Goran Hadzic, Radovan Karadzic, Momcilo Krajisnik, Biljana

 10   Plavsic, Zeljko Raznjatovic alias "Arkan" et d'autres membres de l'Armée

 11   populaire yougoslave, à savoir la "JNA", renommée ensuite Armée

 12   yougoslave, "VJ", de la Défense territoriale serbe nouvellement créée en

 13   Croatie et en Bosnie-Herzégovine, de l'armée de la Republika Srpska

 14   Krajina, à savoir la "SVK", et de l'armée de la Republika Srpska, à savoir

 15   "VRS", ainsi que les TO de Serbie et du Monténégro, les forces de police

 16   serbes locales, de la République de Serbie et de la Republika Srpska -les

 17   "forces du MUP"-, y compris celles de la sûreté de l'État, à savoir la

 18   "DB" du Ministère de l'intérieur de la République de Serbie, et les forces

 19   de la police spéciale serbe de la SAO de Krajina et de la RSK appelées

 20   communément la "Police de Martic", les "Marticevci", "Police de la SAO de

 21   Krajina"… ainsi que des membres des forces paramilitaires serbes,

 22   monténégrines, serbes de Bosnie et de Croatie et des unités de

 23   volontaires, notamment les "Tchetniks" ou les "Seseljevci" -appellation

 24   traduite en français par les "hommes de Seselj"-, désignées collectivement

 25   sous l'appellation de "forces serbes", et d'autres personnalités


  1   politiques de la RSFY ou RFY, de la République de Serbie, de la République

  2   du Monténégro ainsi que des dirigeants des Serbes de Bosnie et de Croatie.

  3   En sa qualité de Président du SRS, Vojislav Seselj était une personnalité

  4   politique de premier plan en RSFY/RFY pendant toute la période couverte

  5   par le présent acte d'accusation. Il a ouvertement cautionné une politique

  6   visant à réunir "tous les territoires serbes" dans un État serbe homogène.

  7   Il a défini la ligne dite de Karlobag-Ogulin-Karlovac-Virovitica comme

  8   frontière de l'ouest de ce nouvel État serbe -qu'il appelait la "Grande

  9   Serbie"- et qui englobait la Serbie, le Monténégro, la Macédoine et de

 10   vastes portions de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine.

 11   Vojislav Seselj, agissant seul et de concert avec d'autres participants à

 12   l'entreprise criminelle commune, a pris part à celle-ci des façons

 13   suivantes:

 14   a) il a participé au recrutement, à la formation, au financement, à

 15   l'approvisionnement et à l'encadrement des volontaires serbes apparentés

 16   au Parti radical serbe, généralement appelés "Tchetniks" ou Seseljevci.

 17   Ces unités de volontaires ont été créées, financées et équipées pour

 18   apporter leur concours à l'exécution de l'entreprise criminelle commune,

 19   en commettant des crimes sanctionnés par les Articles 3 et 5 du Statut du

 20   Tribunal;

 21   b) par ses discours virulents diffusés par les médias et prononcés en

 22   public ou lors de visites rendues aux unités de volontaires et à d'autres

 23   forces serbes en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, il a incité ces forces

 24   à commettre des crimes sanctionnés par les Articles 3 et 5 du Statut;

 25   c) il a ouvertement cautionné et encouragé la création, par la violence,


  1   d'une "Grande Serbie" sur un territoire homogène regroupant toutes les

  2   régions mentionnées dans le présent Acte d'accusation, et a ainsi

  3   activement participé à la propagande de guerre et à la diffusion de la

  4   haine contre les non-Serbes;

  5   d) il a publiquement appelé à l'expulsion des civils croates hors de

  6   certaines parties de la Voïvodine en Serbie, et a par là même incité ses

  7   partisans et les autorités locales à mener une campagne de persécution

  8   contre la population croate locale;

  9   e) il a participé à la planification et à la préparation de la prise de

 10   contrôle des villages dans les deux SAO de Croatie et dans les

 11   municipalités de Bosanski Samac et de Zvornik en Bosnie-Herzégovine, et au

 12   déplacement forcé ultérieur de la majorité de la population non serbe hors

 13   de ces régions;

 14   f) il a contribué à fournir un soutien financier, matériel, logistique et

 15   politique nécessaire à la prise de contrôle de ces régions. Avec l'aide de

 16   Slobodan MiloSevic, il a obtenu le soutien des autorités serbes locales et

 17   des Serbes vivant à l'étranger, auprès desquels il a récolté des fonds,

 18   œuvrant ainsi à la réalisation du but de l'entreprise criminelle commune;

 19   g) il a recruté des volontaires serbes apparentés au Parti radical serbe

 20   et les a endoctrinés à coup de propos discriminatoires à l'égard des

 21   autres ethnies, de sorte qu'ils ont contribué au déplacement forcé de la

 22   population non serbe hors des territoires convoités en commettant les

 23   crimes rapportés dans le présent Acte d'accusation, faisant montre d'une

 24   violence et d'une brutalité exceptionnelles.

 25   Vojislav Seselj a délibérément et sciemment participé à l'entreprise


  1   criminelle commune, en partageant l'intention des autres participants à

  2   cette entreprise ou en ayant conscience des conséquences prévisibles de

  3   leurs actes. À ce titre, il est individuellement pénalement responsable de

  4   ces crimes en application de l'Article 7-1) du Statut du Tribunal, de même

  5   qu'il est responsable, en vertu du même Article, d'avoir planifié,

  6   ordonné, incité à commettre, commis ou de toute autre manière aidé et

  7   encouragé à planifier, préparer ou exécuter ces crimes.

  8   -Allégations juridiques générales.

  9   Pendant toute la période couverte par le présent Acte d'accusation, la

 10   Croatie et la Bosnie-Herzégovine étaient le théâtre d'un conflit armé. Il

 11   existait un lien entre ce conflit armé et les crimes présumés commis en

 12   Croatie, en Bosnie-Herzégovine et dans certaines parties de la Voïvodine,

 13   en Serbie.

 14   Pendant toute la période couverte par le présent Acte d'accusation,

 15   Vojislav Seselj était tenu de se conformer aux lois ou coutumes régissant

 16   les conflits armés.

 17   Les actes et omissions qualifiés de crimes contre l'humanité

 18   s'inscrivaient dans le cadre d'une offensive généralisée ou systématique

 19   dirigée contre les populations civiles non serbes, notamment croates et

 20   musulmanes, dans de vastes portions de la Croatie, de la Bosnie-

 21   Herzégovine et de la Voïvodine, en Serbie.

 22   -Accusations.

 23   -Chef 1: Persécutions.

 24   Du 1er août 1991 environ jusqu'en septembre 1993 au moins, Vojislav

 25   Seselj, agissant seul ou de concert avec d'autres personnes, connues et


  1   inconnues, participant à l'entreprise criminelle commune, a planifié,

  2   ordonné, incité à commettre, commis ou de toute autre manière aidé et

  3   encouragé à planifier, préparer ou exécuter les persécutions visant les

  4   populations civiles non serbes, notamment croate et musulmane, des

  5   territoires de la SAO de Slavonie occidentale et de la SAO SBSO (Slavonie,

  6   Baranja et Srem occidental), des municipalités de Bosanski Samac et de

  7   Zvornik en Bosnie-Herzégovine, et de certaines parties de la Voïvodine, en

  8   Serbie.

  9   Durant toute cette période, les forces serbes, composées d'unités de la

 10   JNA (et par la suite de la VJ), d'unités serbes de la TO locale qui ont

 11   ensuite formé l'armée de la RSK (la "SVK") et l'armée de la Republika

 12   Srpska (à savoir la "VRS"), d'unités de la TO venant de Serbie et du

 13   Monténégro, d'unités de la police serbe locale ou du MUP de la République

 14   de Serbie, et d'unités volontaires et paramilitaires, comprenant des

 15   volontaires recrutés et/ou poussés par Vojislav Seselj, ont attaqué et

 16   pris le contrôle de villes et de villages dans les régions susmentionnées.

 17   Après s'être assuré la maîtrise du terrain, les forces serbes, en

 18   collaboration avec les autorités locales serbes, ont mis en place un

 19   système de persécutions destiné à chasser de ces régions la population

 20   civile non serbe.

 21   Ces persécutions ont été menées pour des raisons politiques, raciales ou

 22   religieuses et ont pris diverses formes:

 23   a) l'extermination ou le meurtre de nombreux civils non serbes, notamment

 24   croates et musulmans, y compris des femmes et des personnes âgées, dans la

 25   municipalité de Vukovar et les villages de Vocin, Hum, Bokane et Kraskovic


  1   en Croatie, ainsi que dans les municipalités de Bosanski Samac et de

  2   Zvornik en Bosnie-Herzégovine, tel qu'il est décrit plus en détail aux

  3   paragraphes 18 à 23;

  4   b) l'emprisonnement et la détention prolongés et fréquents de nombreux

  5   civils non serbes, notamment croates et musulmans, dans des centres de

  6   détention situés en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, y compris dans les

  7   camps de détention situés à Vukovar, à Vocin et dans les environs, ainsi

  8   qu'à Bosanski Samac et à Zvornik, tel qu'il est décrit plus en détail aux

  9   paragraphes 24 à 26;

 10   c) l'instauration et le maintien de conditions de vie inhumaines pour les

 11   civils non serbes, notamment croates et musulmans, détenus dans les

 12   centres susmentionnés;

 13   d) les tortures, sévices et meurtres répétés commis à l'encontre des

 14   civils non serbes, notamment croates et musulmans, détenus dans les

 15   centres susmentionnés;

 16   e) les travaux forcés prolongés et fréquents imposés aux civils non

 17   serbes, notamment croates et musulmans, détenus dans ces centres ou

 18   assignés à résidence à Vukovar, Vocin, Bosanski Samac et Zvornik. Les

 19   travaux forcés consistaient à creuser des tombes, à assurer le

 20   ravitaillement des forces serbes en munitions, creuser des tranchées, et à

 21   effectuer d'autres travaux manuels sur les lignes de front;

 22   f) les violences sexuelles infligées par les forces serbes aux civils non

 23   serbes, notamment croates et musulmans, lors de leur arrestation ou

 24   pendant leur détention dans les centres susmentionnés;

 25   g) l'application de mesures restrictives et discriminatoires à l'encontre


  1   des civils non serbes, notamment croates et musulmans, plus

  2   particulièrement à Vocin en Croatie, à Bosanski Samac et à Zvornik en

  3   Bosnie-Herzégovine, et dans certaines parties de la Voïvodine, en Serbie.

  4   Ces mesures comprenaient, entre autres, les restrictions à la liberté de

  5   circulation, la révocation des titulaires de postes de responsabilité dans

  6   l'administration locale et la police, les licenciements, le déni d'accès à

  7   des soins médicaux adéquats et les perquisitions arbitraires au domicile

  8   de ces personnes;

  9   h) les tortures, sévices et vols commis contre des civils non serbes,

 10   notamment Croates et Musulmans.

 11   i) l'expulsion ou le transfert forcé de dizaines de milliers de civils non

 12   serbes, notamment croates et musulmans, hors des régions énumérées ci-

 13   dessus, ainsi que de certaines parties de la Voïvodine, en Serbie.

 14   j) la destruction délibérée de maisons, d'autres biens publics et privés,

 15   d'établissements culturels, de monuments historiques et de lieux de culte

 16   des populations civiles croates, musulmane et autres dans les

 17   municipalités de Vukovar et Vucin, en Croatie et dans les municipalités de

 18   Bosanski Samac et Zvornik en Bosnie-Herzégovine.

 19   Par sa participation à ces actes, Vojislav Seselj s'est rendu coupable de:

 20   -Chef 1: Persécutions pour des raisons politiques, raciales ou

 21   religieuses, un crime contre l'humanité, sanctionné par les articles 5-h)

 22   et 7-1) du Statut du Tribunal.

 23   -Chefs 2 à 4: Extermination et meurtre

 24   Du 1er août 1991 ou vers cette date jusqu'en juin 1992 à Vukovar sur le

 25   territoire de la SAO SBSO et à Vocin sur le territoire de la SAO de


  1   Slavonie occidentale, du 1er mars 1992 ou vers cette date jusqu'en

  2   septembre 1993 au moins dans la municipalité de Zvornik en Bosnie-

  3   Herzégovine, et du 1er avril 1992 ou vers cette date jusqu'en septembre

  4   1993 au moins dans la municipalité de Bosanski Samac en Bosnie-

  5   Herzégovine, Vojislav Seselj, agissant seul ou de concert avec d'autres

  6   personnes connues et inconnues participant à l'entreprise criminelle

  7   commune, a planifié, ordonné, incité à commettre, commis ou de toute autre

  8   manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter

  9   l'extermination et le meurtre de civils non serbes, notamment croates et

 10   musulmans.

 11   -Croatie

 12   -La SAO de Slavonie occidentale

 13   Dès le début du mois d'août 1991, les forces serbes, dont les unités de

 14   volontaires appelées les "hommes de Seselj", avaient pris le contrôle de

 15   Vocin. En novembre 1991, Vojislav Seselj s'est rendu sur place et s'est

 16   adressé aux volontaires. Les discours de Vojislav Seselj ont incité les

 17   unités de volontaires, en particulier les "hommes de Seselj", à incendier

 18   les maisons appartenant aux citoyens croates et à tuer les civils croates

 19   des villages de Vocin, Hum, Bokane et Kraskovic, et ce jusqu'au retrait de

 20   ces forces de la région, le 13 décembre 1991. Ces hommes se rendaient de

 21   maison en maison, tuant toute personne rencontrée sur leur passage,

 22   faisant au total 43 victimes civiles. Certaines des personnes qui ont

 23   réussi à se cacher ont pu survivre à ces massacres. Le nom des victimes

 24   figure à l'Annexe II du présent acte d'accusation.

 25   -La SAO SBSO – Vukovar


  1   En novembre 1991, alors que les forces serbes tentaient de prendre le

  2   contrôle de Vukovar, Vojislav Seselj s'est rendu dans la ville et a

  3   publiquement annoncé qu'aucun Oustachi ne sortirait vivant de Vukovar",

  4   incitant par ces propos aux meurtres de Croates. Le 20 novembre 1991 ou

  5   vers cette date, dans le cadre de la campagne générale de persécution, les

  6   forces militaires serbes, dont des membres de la JNA et de la TO ainsi que

  7   des unités volontaires et paramilitaires, placées sous le commandement, le

  8   contrôle et l'influence de la JNA, la TO de la SBSO et d'autres

  9   participants à l'entreprise criminelle commune, y compris des volontaires

 10   recrutés et/ou poussés par Vojislav Seselj, ont, après avoir pris le

 11   contrôle de la ville, chassé de l'hôpital de Vukovar environ 400 Croates

 12   et autres non-Serbes, dont 300 environ ont été transportés à la caserne de

 13   la JNA, puis à la ferme Ovcara, située à cinq kilomètres environ au sud de

 14   Vukovar. Là, des membres des forces serbes ont battu et torturé les

 15   victimes pendant des heures. Le soir du 20 novembre 1991, les soldats ont

 16   transporté les victimes par groupes de 10 à 20 personnes jusqu'à un lieu

 17   d'exécution éloigné, situé entre la ferme Ovcara et Grabovo, où ils les

 18   ont abattues. Environ 255 non-Serbes de l'hôpital de Vukovar ont ainsi

 19   péri. Leurs corps ont été jetés dans un charnier.

 20   Après la prise de Vukovar par les forces serbes le 18 novembre 1991, plus

 21   d'un millier de civils se sont rassemblés dans l'entrepôt de Velepromet.

 22   Certains s'y étaient rendus contraints par les forces serbes, d'autres

 23   avaient, de leur plein gré, choisi de s'y réfugier. Au 19 novembre 1991, 2

 24   000 personnes environ s'étaient entassées dans l'entrepôt. La JNA

 25   considérait quelque 800 d'entre elles comme prisonniers de guerre. Au soir


  1   du 19 novembre 1991, et peu de temps après que la JNA eut commencé le

  2   transfert des prisonniers de guerre présumés vers le centre de détention

  3   de Sremska Mitorovica en Serbie, les forces serbes, y compris des

  4   volontaires recrutés et/ou poussés par Vojislav Seselj, ont sélectionné

  5   certaines personnes qu'elles ont séparées du reste des prisonniers de

  6   guerre présumés. Les personnes sélectionnées ont été emmenées hors de

  7   l'entrepôt de Velepromet et abattues. Les corps de certaines victimes ont

  8   été transportés à la ferme Ovcara où ils ont été jetés dans un charnier;

  9   les corps de six autres victimes ont été laissés gisant sur le sol,

 10   derrière l'entrepôt.

 11   -Bosnie-Herzégovine

 12   -Zvornik:

 13   En mars 1992, Vojislav Seselj a prononcé un discours lors d'un meeting

 14   organisé à Mali Zvornik, localité située en face de Zvornik, sur l'autre

 15   rive de la Drina. À cette occasion, Vojislav Seselj a déclaré: "Mes frères

 16   tchetniks, et je m'adresse surtout à vous qui êtes sur l'autre rive de la

 17   Drina, vous, les plus braves d'entre tous. Nous nous apprêtons à nettoyer

 18   la Bosnie de ces infidèles et à leur montrer le chemin qui les ramènera

 19   vers l'est, là où est leur véritable place." Ces propos ont ainsi incité à

 20   la persécution des non-Serbes de Zvornik. En avril 1992, les forces

 21   serbes, dont les volontaires appelés "hommes de Seselj" et "Tigres

 22   d'Arkan", ont attaqué et pris le contrôle de la ville de Zvornik et des

 23   villages voisins. Pendant cette attaque, les forces serbes ont tué de

 24   nombreux civils non serbes. Le 9 avril 1992 ou vers cette date, des

 25   membres de l'unité d'Arkan ont exécuté une vingtaine d'hommes et de jeunes


  1   garçons musulmans et croates de Bosnie de la ville de Zvornik. Au

  2   lendemain de cette prise de contrôle, les non-Serbes ont été fréquemment

  3   victimes de détention, de sévices, de tortures et de meurtres. Entre avril

  4   et juillet 1992, des centaines de civils non serbes ont été détenus à

  5   Zvornik ou dans les environs, dans l'usine de chaussures "Standard",

  6   l'usine "Ciglana", la ferme Ekonomija, l'immeuble Novi Izvor et la maison

  7   de la culture de Celopek. Le 12 mai 1992 ou vers cette date, les forces

  8   serbes, dont le chef d'une unité des "hommes de Seselj", ont battu à mort

  9   un détenu du nom de Nesib Dautovic dans la ferme Ekonomija. Au cours du

 10   mois de mai 1992, les forces serbes ont tué deux hommes non serbes détenus

 11   dans l'immeuble Novi Izvor. Entre le 1er et le 5 juin 1992, les forces

 12   serbes ont tué plus de 150 hommes musulmans de Bosnie à l'école technique

 13   de Karakaj. Entre le 7 et le 9 juin 1992, les forces serbes ont tué plus

 14   de 150 détenus dans les locaux de l'abattoir de Gero. Entre le 1er et le

 15   26 juin 1992, elles ont aussi tué plus de 40 hommes non-serbes détenus à

 16   la maison de la culture de Celopek.

 17   -Bosanski Samac:

 18   En avril 1992, les forces serbes, dont les volontaires appelés les "hommes

 19   de Seselj", ont attaqué la ville de Bosanski Samac et les villages voisins

 20   avant d'en prendre le contrôle. Au lendemain de cette prise de contrôle,

 21   des centaines de non-Serbes ont été fréquemment détenus, frappés et

 22   torturés dans le bâtiment du quartier général de la police ("SUP"), dans

 23   le bâtiment de la Défense territoriale (la "TO"), dans les écoles

 24   primaires et secondaires, ainsi que dans l'entrepôt d'une coopérative

 25   agricole de Crkvina, située au sud-ouest de la ville de Bosanski Samac, et


  1   des dizaines de personnes ont été tuées. Le 7 mai 1992 ou vers cette date,

  2   deux chefs d'une unité des "hommes de Seselj" ont abattu 18 hommes et

  3   jeunes garçons dans l'entrepôt de l'exploitation agricole de Crkvina.

  4   Par sa participation à ces actes, Vojislav Seselj s'est rendu coupable de:

  5   -Chef 2: Extermination, un crime contre l'humanité, sanctionné par les

  6   articles 5-b) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  7   -Chef 3: Assassinat, un crime contre l'humanité, sanctionné par les

  8   articles 5-a) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  9   -Chef 4: Meurtre, une violation des lois ou coutumes de la guerre,

 10   reconnue par l'article 3-1)a) commun aux Conventions de Genève de 1949 et

 11   sanctionnée par les articles 3 et 7-1) du Statut du Tribunal.

 12   -Chefs 5 à 9: Emprisonnement, torture, autres actes inhumains et

 13   traitements cruels.

 14   D'août 1991 à septembre 1992, Vojislav Seselj, agissant seul ou de concert

 15   avec d'autres personnes connues et inconnues participant à l'entreprise

 16   criminelle commune, a planifié, ordonné, incité à commettre, commis, ou de

 17   toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter

 18   l'emprisonnement dans des conditions inhumaines de civils non serbes,

 19   notamment musulmans et croates, vivant dans les territoires énumérés ci-

 20   dessus.

 21   Les forces militaires serbes, composées d'unités de la JNA (et par la

 22   suite de la VJ), d'unités de la TO croates et serbes de Bosnie qui ont

 23   ensuite formé l'armée de la RSK (la "SVK") et l'armée de la Republika

 24   Srpska (la "VRS"), et d'unités volontaires et paramilitaires, notamment

 25   des volontaires recrutés et/ou poussés par Vojislav Seselj, agissant en


  1   collaboration avec la police locale et les autorités locales serbes, ont

  2   capturé et placé en détention des centaines de civils non serbes,

  3   notamment croates et musulmans, dans les centres de détention de courte et

  4   longue durée énumérés ci-dessous:

  5   a) L'entrepôt de Velepromet à Vukovar dans la SAO SBSO, géré par la JNA,

  6   comptant 1 200 détenus environ en novembre 1991;

  7   b) La ferme Ovcara près de Vukovar dans la SAO SBSO, gérée par la JNA,

  8   comptant 300 détenus environ en novembre 1991;

  9   c) Le sous-sol du bâtiment de la banque à Vocin, comptant plusieurs

 10   détenus en octobre 1991;

 11   d) Le "Lager Sekulinci" près de Vocin, comptant trois détenus en août

 12   1991;

 13   e) L'usine de chaussures "Standard", l'usine "Ciglana", la ferme

 14   Ekonomija, l'immeuble Novi Izvor et la maison de la culture de Celopek à

 15   Zvornik en Bosnie-Herzégovine, comptant des centaines de détenus entre

 16   avril et juillet 1992;

 17   f) Les bâtiments du SUP et de la TO, les écoles primaires et secondaires

 18   de Bosanski Samac, ainsi que l'entrepôt de la coopérative agricole de

 19   Crkvina près de Bosanski Samac en Bosnie-Herzégovine, comptant des

 20   centaines de détenus entre avril et septembre 1992.

 21   Dans ces centres de détention, les conditions de vie étaient abjectes et

 22   les détenus subissaient des traitements inhumains, la surpopulation, la

 23   famine, le travail forcé, des soins médicaux insuffisants, ainsi que des

 24   mauvais traitements physiques et psychologiques systématiques, notamment

 25   des tortures, des sévices et des violences sexuelles.


  1   Par sa participation à ces actes, Vojislav Seselj s'est rendu coupable de:

  2   -Chef 5: Emprisonnement, un crime contre l'humanité, sanctionné par les

  3   articles 5-e) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  4   -Chef 6: Torture, un crime contre l'humanité, sanctionné par les articles

  5   5-f) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  6   -Chef 7: Actes inhumains, un crime contre l'humanité, sanctionné par les

  7   articles 5-i) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  8   -Chef 8: Torture, une violation des lois ou coutumes de la guerre,

  9   reconnue par l'article 3-1)a) commun aux Conventions de Genève de 1949 et

 10   sanctionnée par les articles 3 et 7-1) du Statut du Tribunal;

 11   -Chef 9: Traitement cruel, une violation des lois ou coutumes de la

 12   guerre, reconnue par l'article 3-1)a) commun aux Conventions de Genève de

 13   1949 et sanctionnée par les articles 3 et 7-1) du Statut du Tribunal.

 14   -Chefs 10 et 11: Expulsion, transfert forcé

 15   Du 1er août 1991 environ au mois de mai 1992 dans les SAO de Croatie et de

 16   RSK, du 1er mars 1992 environ à la fin septembre 1993 en Bosnie-

 17   Herzégovine, et en mai 1992 dans certaines régions de Voïvodine, en

 18   Serbie, Vojislav Seselj, agissant seul ou de concert avec d'autres

 19   personnes connues et inconnues participant à l'entreprise criminelle

 20   commune, a planifié, incité à commettre, commis, ou de toute autre manière

 21   aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter l'expulsion ou le

 22   transfert forcé de civils non serbes, notamment croates et musulmans, hors

 23   de leur domicile légal à Vukovar (SAO SBSO) en novembre 1991 et à Vocin

 24   (SAO de Slavonie occidentale) en novembre et décembre 1991, dans la

 25   municipalité de Zvornik en Bosnie-Herzégovine entre mars 1992 et septembre


  1   1993, dans la municipalité de Bosanski Samac en Bosnie-Herzégovine entre

  2   avril 1992 et septembre 1993, et dans certaines régions de Voïvodine, en

  3   Serbie, notamment dans le village de Hrtkovci en mai 1992.

  4   Pour atteindre cet objectif, les forces serbes, composées d'unités de la

  5   JNA (et par la suite de la VJ), d'unités de la TO locale croates et serbes

  6   de Bosnie qui ont ensuite formé l'armée de la RSK (à savoir la "SVK"), et

  7   l'armée de la Republika Srpska (à savoir la "VRS"), d'unités de la TO

  8   venant de la République de Serbie et du Monténégro, d'unités volontaires

  9   et paramilitaires, notamment les "Aigles blancs" et l'unité "Dusan Silni",

 10   ainsi que de volontaires recrutés et/ou poussés par Vojislav Seselj, en

 11   collaboration avec des unités de la police serbe locale, ont investi des

 12   villes et des villages croates et bosniaques et ont contraint les

 13   habitants à rendre leurs armes, y compris les fusils de chasse pour

 14   lesquels ils possédaient un permis. Elles ont ensuite attaqué les villes

 15   et les villages ou s'en sont emparé, y compris lorsque les habitants

 16   avaient obtempéré. Ces attaques visaient à obliger la population à fuir.

 17   Après avoir pris le contrôle des villes et des villages, les forces serbes

 18   prenaient parfois dans une rafle les civils non serbes, notamment croates

 19   et musulmans, qui s'y trouvaient encore pour les déplacer ensuite, par la

 20   force, dans des secteurs de Croatie ou de Bosnie-Herzégovine non contrôlés

 21   par les Serbes, ou dans d'autres secteurs hors de Croatie ou de Bosnie-

 22   Herzégovine, en particulier en Serbie et au Monténégro. En d'autres

 23   occasions, les forces serbes ont, en collaboration avec les autorités

 24   serbes locales, pris des mesures restrictives et discriminatoires à

 25   l'encontre de la population non serbe et ont mené une campagne de terreur


  1   destinée à la chasser. Par la suite, les non-Serbes qui étaient encore là

  2   ont, pour la majorité, finalement été expulsés de chez eux ou transférés

  3   de force.

  4   En mai 1992, Vojislav Seselj s'est rendu en Voïvodine pour rencontrer des

  5   membres du SRS. Vojislav Seselj leur a donné l'ordre de se mettre en

  6   rapport avec les non-Serbes et de les menacer de mort s'ils ne quittaient

  7   pas la région. Le 6 mai 1992, Vojislav Seselj a prononcé un discours

  8   incendiaire dans le village de Hrtkovci, en Voïvodine. Et, durant cette

  9   allocution, il a appelé à l'expulsion des Croates du secteur et cité des

 10   noms d'habitants croates qui devaient partir en Croatie. Suite à ce

 11   discours s'est déclenchée à Hrtkovci une campagne de nettoyage ethnique

 12   dirigée contre les non-Serbes, en particulier contre les Croates. Au cours

 13   des trois mois suivants, de nombreux non-Serbes se sont fait harceler,

 14   menacer de mort et intimider, ce qui les a forcés à quitter le secteur.

 15   Les Serbes ont pillé les maisons des Croates et les ont occupées. Souvent,

 16   les familles serbes qui avaient été déplacées en provenance d'autres

 17   régions de l'ex-Yougoslavie occupaient les maisons des non-Serbes qui

 18   avaient été contraints de partir.

 19   Par sa participation à ces actes, Vojislav Seselj s'est rendu coupable de:

 20   -Chef 10: d'expulsion, un crime contre l'humanité, sanctionné par les

 21   articles 5-d) et 7-1) du Statut du Tribunal;

 22   -Chef 11: d'actes inhumains (transfert forcé), un crime contre l'humanité,

 23   sanctionné par les articles 5-i) et 7-1) du Statut du Tribunal.

 24   -Chefs 12 à 15: Destruction sans motif, pillage de biens publics ou privés

 25   et attaques illégales contre des biens civils


  1   Du 1er août 1991 environ au mois de mai 1992, dans les SAO de Croatie et

  2   de RSK, du 1er mars 1992 environ à la fin septembre 1993 dans la

  3   municipalité de Zvornik en Bosnie-Herzégovine, et du 1er avril 1992

  4   environ à la fin septembre 1993 dans la municipalité de Bosanski Samac en

  5   Bosnie-Herzégovine, Vojislav Seselj, agissant seul ou de concert avec

  6   d'autres personnes connues ou inconnues participant à l'entreprise

  7   criminelle commune, a planifié, ordonné, incité à commettre, commis, ou de

  8   toute autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer ou exécuter la

  9   destruction sans motif et le pillage de biens publics et privés

 10   appartenant à des Croates, Musulmans et autres non-Serbes, actes qui

 11   n'étaient pas justifiés par les exigences militaires. Ces destructions

 12   délibérées et sans motif, ainsi que ces pillages, comprenaient notamment

 13   le pillage et la destruction d'habitations et d'édifices religieux et

 14   culturels, et ont eu lieu dans les villes et villages suivants:

 15   -SAO SBSO: Vukovar (des centaines de maisons détruites);

 16   -SAO de Slavonie occidentale: Vocin et Hum (des dizaines de maisons et une

 17   église catholique détruites);

 18   -Bosnie-Herzégovine: Bosanski Samac (des centaines de maisons et une

 19   mosquée détruites) et Zvornik (des centaines de maisons et des dizaines de

 20   mosquées détruites).

 21   Par sa participation à ces actes, Vojislav Seselj s'est rendu coupable de:

 22   -Chef 12: Destruction sans motif de villages ou dévastation non justifiée

 23   par les exigences militaires, une violation des lois ou coutumes de la

 24   guerre, sanctionnée par les articles 3-b) et 7-1) du Statut du Tribunal;

 25   -Chef 13: Destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la


  1   religion ou à l'éducation, une violation des lois ou coutumes de la

  2   guerre, sanctionnée par les articles 3-d) et 7-1) du Statut du Tribunal;

  3   -Chef 14: Pillage de biens publics ou privés, une violation des lois ou

  4   coutumes de la guerre, sanctionnée par les articles 3-e) et 7-1) du Statut

  5   du Tribunal."

  6   (Fin de lecture.)

  7   M. le Président (interprétation): Merci.

  8   Je vous demanderai de vous interrompre quelques instants, Madame la

  9   Greffière, car il nous faut respecter les droits des personnes qui aident

 10   la Chambre dans son travail, et notamment ceux des interprètes; c'est la

 11   raison pour laquelle ne pouvons pas procéder plus longtemps que 90 minutes

 12   d'affilée.

 13   Il est déjà prévisible que nous ne parviendrons pas à conclure la lecture

 14   de l'intégralité de l'Acte d'accusation pendant ces 90 minutes, c'est la

 15   raison pour laquelle il nous faut respecter à présent une pause.

 16   M. Seselj (interprétation): J'insiste...

 17   M. le Président (interprétation): Après cette pause de 30 minutes, nous

 18   poursuivrons la lecture de l'Acte d'accusation, qui sera lu intégralement

 19   comme vous l'avez exigé, Monsieur Seselj.

 20   M. Seselj (interprétation): Oui, mais j'ai quelques observations à

 21   formuler concernant la traduction, et je voudrais que ces observations

 22   soient éliminées dans le courant de la pause parce qu'il est bon nombre de

 23   propos que je ne comprends pas.

 24   Je n'ai jamais entendu parler du terme "délibéré"; je ne sais pas ce que

 25   veut dire "général". Je ne sais pas ce que veut dire "tocka", à savoir


  1   "point". Et on a répété plusieurs fois les termes. On a parlé de "Srem

  2   occidental": j'imagine que cela sous-entend une notion géographique. Je ne

  3   sais pas où se trouve cela, je ne sais pas ce que signifie "obrana" ou

  4   "obrane", "défense". Je ne sais pas ce que signifie "Suradnja".

  5   M. le Président (interprétation): Je me permets de vous interrompre,

  6   Monsieur Seselj. Je comprends très bien cela, nous avons souvent des

  7   problèmes liés à la traduction précise de certains termes, cela n'a rien

  8   d'exceptionnel. Nous devrons revenir sur ce point plus tard, après la

  9   pause et après que lecture sera donnée, sur votre exigence, de

 10   l'intégralité de l'Acte d'accusation. Nous pourrons donc revenir sur cette

 11   question après.

 12   L'audience est levée jusqu'à 14 heures 50.

 13   (L'audience, suspendue à 14 heures 20, est reprise à 14 heures 51.)

 14   M. le Président (interprétation): Je demanderais à Madame la Greffière de

 15   continuer la lecture de l'Acte d'accusation et, plus précisément, de

 16   l'Annexe I, intitulée "Faits historiques et politiques additionnels".

 17   Mme Anoya (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

 18   "-Croatie.

 19   Dans la perspective des élections de 1990, a été fondé à Knin, le Parti

 20   nationaliste démocratique serbe, à savoir le SDS, qui militait pour

 21   l'autonomie, puis la sécession des régions croates à majorité serbes.

 22   Vojislav Seselj était en relation avec les dirigeants du SDS. Il a assisté

 23   à des réunions du SDS et pris part à des manifestations politiques

 24   organisées par ce parti.

 25   Le 25 juillet 1990, un groupe de dirigeants du SDS a créé le Conseil


  1   national serbe, en adoptant une déclaration sur l'autonomie et le statut

  2   des Serbes en Croatie et sur la souveraineté et l'autonomie de la nation

  3   serbe.

  4   Le 30 juillet 1990, l'assemblée constituante du Conseil national serbe a

  5   décidé d'organiser un référendum qui confirmerait l'autonomie de la nation

  6   serbe en Croatie.

  7   Le 17 août 1990, les Serbes présents à Knin ont érigé des barricades après

  8   que le gouvernement croate a déclaré le référendum illégal.

  9   Entre le 19 août et le 2 septembre 1990, les Serbes de Croatie ont

 10   organisé un référendum sur la question de la souveraineté et de

 11   l'autonomie serbe en Croatie. Le référendum a eu lieu dans les régions de

 12   Croatie à majorité serbe, et ne pouvaient y prendre part que les électeurs

 13   serbes. Les Croates qui vivaient dans les régions concernées ne pouvaient

 14   y participer. Une majorité écrasante des votants s'est prononcée en faveur

 15   de l'autonomie serbe. Le 30 septembre 1990, le Conseil national serbe a

 16   proclamé l'autonomie de la population serbe dans les territoires ethniques

 17   et historiques sur lesquels elle vivait, qui se trouvaient à l'intérieur

 18   des frontières de la République de Croatie, entité fédérée de la RSFY

 19   (République socialiste fédérative de Yougoslavie).

 20   Le 21 décembre 1990, les Serbes de Croatie ont annoncé, à Knin, la

 21   création d'une "Région autonome serbe", à savoir la SAO de Krajina, et

 22   proclamé leur indépendance vis-à-vis de la Croatie.

 23   Le 7 janvier 1991, le conseil national serbe de la Slavonie, de la Baranja

 24   et du Srem occidental, à savoir de la SBSO, a été créé à Sidski Banovci.

 25   Tout au long du printemps 1991, des conflits ont opposé les Serbes armés


  1   aux forces de police croates.

  2   En mars 1991, le conflit s'est intensifié, lorsque des affrontements ont

  3   éclaté à Pakrac et Plitvice. Le 31 mars 1991, à Plitvice, un autocar

  4   transportant des policiers croates a été attaqué par des Serbes, et

  5   d'autres affrontements ont eu lieu. La JNA a déployé des troupes dans la

  6   région et lancé un ultimatum à la police croate, pour que cette dernière

  7   se retire de Plitvice. Vojislav Seselj et certains de ses volontaires, ont

  8   pris part aux événements qui se sont déroulés à Plitvice, dans la SAO de

  9   Krajina. Il s'est présenté aux officiers de la JNA comme un "vojvoda". Il

 10   a tenu des discours nationalistes extrémistes incitant la population

 11   locale à affronter la police croate.

 12   Le 1er avril 1991, le conseil exécutif de la SAO de Krajina a adopté une

 13   résolution prévoyant son rattachement à la République de Serbie. Elle a

 14   simultanément reconnu pour sienne la Constitution et les lois de cette

 15   dernière, ainsi que le système juridique et constitutionnel de la RSFY, et

 16   a décidé d'appliquer les lois et règlements de la Serbie sur tout son

 17   territoire.

 18   A la fin d'avril 1991, des Serbes locaux armés assistés d'hommes de Seselj

 19   et d'autres volontaires serbes, ont érigé des barricades dans le village

 20   de Borovo Selo, près de Vukovar. Le 1er mai 1991, ces Serbes armés ont

 21   pris en otage un certain nombre de policiers croates qui avaient été

 22   envoyés sur place pour rétablir l'ordre dans le village. Le 2 mai, la

 23   police croate, à Osijek, a envoyé un groupe plus important de policiers

 24   fortement armés à Borovo Selo, pour libérer les otages. Ces policiers sont

 25   tombés dans une embuscade dressée par les Serbes locaux armés, aidés par


  1   les hommes de Seselj et d'autres volontaires serbes. L'affrontement a fait

  2   12 morts et 20 blessés parmi les policiers croates.

  3   Le 12 mai 1991, un référendum a été organisé dans la SAO de Krajina et en

  4   SBSO, au sujet du rattachement de ces régions à la République de Serbie et

  5   de leur maintien au sein de la Yougoslavie, avec la Serbie, le Monténégro

  6   et les autres membres qui souhaitaient préserver la Yougoslavie. Les

  7   électeurs ont voté 99,8% en faveur du rattachement.

  8   Le 19 mai 1991, la Croatie a organisé un référendum: la population s'est

  9   prononcée à une majorité écrasante pour l'indépendance de la Croatie vis-

 10   à-vis de la RSFY. Le 25 juin 1991, la Croatie et la République de Slovénie

 11   ont proclamé leur indépendance. Le même jour, la JNA a entrepris de mettre

 12   fin à la sécession de la Slovénie.

 13   Le 25 juin 1991, la "Grande Assemblée nationale de la SBSO" a été formée à

 14   Backa Palanka, en Serbie, lors d'une réunion à laquelle assistaient des

 15   représentants de tous les villages serbes de la SBSO. La Grande Assemblée

 16   nationale a décidé que la SBSO devait être constituée en SAO et se séparer

 17   de la Croatie. Goran Hadzic, jusqu'alors Président du Conseil national

 18   serbe, a été élu Premier ministre.

 19   La Communauté européenne a tenté de jouer un rôle de médiateur dans le

 20   conflit. Le 8 juillet 1991, a été conclu un accord, aux termes duquel la

 21   Croatie et la Slovénie acceptaient de suspendre la mise en œuvre de leur

 22   indépendance jusqu'au 8 octobre 1991. Le 15 janvier 1992, la Communauté

 23   européenne a finalement reconnu la Croatie en tant qu'Etat indépendant.

 24   Le 18 juillet 1991, la Présidence fédérale, avec l'appui des gouvernements

 25   serbe et monténégrin et l'appui du général Kadijevic, a voté le retrait de


  1   la JNA de Slavonie acceptant ainsi sa sécession et la dissolution de la

  2   RSFY.

  3   Les Serbes de la région de la Krajina, de Slavonie orientale et de

  4   Slavonie occidentale ont commencé à bénéficier d'un soutien de plus en

  5   plus marqué de la part du gouvernement serbe et de la JNA.

  6   Dès le mois d'août 1991, la Défense territoriale serbe locale, des

  7   volontaires et des forces de police de ces régions étaient approvisionnés,

  8   entraînés et, en partie, dirigés par la JNA, et par des responsables du

  9   MUP serbe. Durant le mois d'août et le mois de septembre 1991,

 10   d'importantes régions de Croatie sont passées sous contrôle serbe suite à

 11   des opérations menées par des forces militaires serbes, au nombre

 12   desquelles figuraient notamment "les hommes de Seselj", "les Aigles

 13   blancs" et des forces de la police.

 14   Pendant cette période, Vojislav Seselj a constamment incité l'opinion

 15   publique à participer à l'effort de guerre. Il s'est rendu à des lignes de

 16   front à de nombreuses reprises et a tenu des réunions avec les dirigeants

 17   serbes locaux. Dans les régions de la Krajina de la Slavonie, de la

 18   Baranja et du Srem occidental occupées par les Serbes, les Croates et les

 19   autres populations non-serbes ont été systématiquement chassées, et ces

 20   zones ont été intégrées aux diverses régions autonomes serbes évoquées

 21   plus haut. La JNA est restée déployée dans les endroits passés sous le

 22   contrôle des insurgés serbes aidant ainsi ces derniers à conserver les

 23   positions acquises.

 24   Le 13 août 1991, les membres de la Présidence du SDS de Slavonie, qui

 25   étaient originaires de Slavonie occidentale, ont tenu une réunion durant


  1   laquelle ils ont décidé de créer la région autonome Serbe, à savoir la SAO

  2   de Slavonie occidentale. La répartition ethnique de la population fut le

  3   critère utilisé pour délimiter le territoire de cette région. Les

  4   municipalités incluses dans la SAO étaient celles dont les représentants

  5   étaient présents lors de la réunion du Comité régional du SDS évoquée ci-

  6   dessus: Pakrac, Daruvar, Grubisno Polje, Podravska Slatina, Okucani; ainsi

  7   que des parties des municipalités de Slavonska Pozega et de Orahovica.

  8   Dans ces zones, les Serbes représentaient au moins 50 % du total de la

  9   population.

 10   En août 1991, des forces serbes dirigées par la JNA ont lancé des

 11   opérations contre des villes de Slavonie orientale et les ont occupées.

 12   Les Croates et les autres populations non-serbes de ces secteurs ont été

 13   expulsés par la force. Fin août, les forces serbes ont assiégé la ville de

 14   Vukovar. A la mi-octobre 1991, toutes les autres villes de Slavonie

 15   orientale, à majorité croate, avaient été prises par les forces serbes à

 16   l'exception de Vukovar. Les non-Serbes subissaient un régime d'occupation

 17   brutale marqué par les persécutions, les meurtres, les tortures et

 18   d'autres actes de violence. Une grande partie de la population non-serbe a

 19   finalement été tuée ou expulsée par la force des zones occupées.

 20   Le siège de Vukovar s'est prolongée jusqu'au 18 novembre 1991, date à

 21   laquelle la ville est tombée aux mains des forces serbes. Au cours de ces

 22   trois mois de siège, la ville a, en grande partie, été détruite par les

 23   bombardements de la JNA et des centaines de personnes ont été tuées.

 24   Lorsque les forces serbes ont quitté la ville, elles ont tué des centaines

 25   de Croates. Dans les jours qui ont suivi la chute de la ville aux mains


  1   des Serbes, la plus grande partie de la population non-serbe de la ville a

  2   été chassée.

  3   Le 23 novembre 1991, à Genève, Slobodan Milosevic, le secrétaire fédéral à

  4   la Défense nationale, Veljko Kadijevic et Franjo Tudjman ont conclu un

  5   accord sous les hospices de l'envoyé spécial des Nations Unies, Cyrus

  6   Vance. Cet accord prévoyait le retrait des forces croates encerclant les

  7   casernes de la JNA, ainsi que celui des forces de la JNA de Croatie. Les

  8   deux parties se sont engagées à ce que les unités placées sous leur

  9   commandement, leur contrôle ou leur influence politique, observent un

 10   cessez-le-feu immédiat en Croatie. Elles se sont également engagées à

 11   veiller à ce que toutes les unités paramilitaires ou irrégulières

 12   associées à leurs forces observent, elles aussi, le cessez-le-feu.

 13   Le 19 décembre 1991, la SAO de Krajina s'est proclamée République serbe de

 14   Krajina, à savoir RSK, avec Milan Babic comme premier Président. Le 26

 15   février 1992, la SAO de Slavonie occidentale et la SAO de la SBSO, à

 16   savoir de la Slavonie, de la Baranja et du Srem occidental, ont décidé

 17   unilatéralement de s'y rattacher.

 18   En application du plan Vance, trois zones protégées par les Nations Unies,

 19   à savoir la Krajina, la Slavonie occidentale et la SBSO, ont été créées

 20   dans des zones occupées par les Serbes, lesquelles étaient découpées en

 21   quatre secteur, sud, nord, ouest et est. Le plan Vance prévoyait le

 22   retrait de la JNA de Croatie, le retour des personnes déplacées dans les

 23   zones protégées des Nations Unies et la démilitarisation de ces dernières.

 24   Bien que la JNA se soit officiellement retirée de Croatie, en 1992, une

 25   grande partie de son armement et de ses effectifs est restée dans les


  1   zones sous contrôle serbe et a été remise à la police de la RSK. Les

  2   personnes déplacées n'ont pas été autorisées à retourner chez elles et les

  3   quelques Croates et autres non-Serbes qui étaient restés dans les zones

  4   occupées par les Serbes, ont été expulsés au cours des mois et des années

  5   qui ont suivi.

  6   Les territoires occupés par les Serbes en RSK sont restés sous contrôle

  7   serbe jusqu'au début du mois de mai et au début du mois d'août 1995

  8   respectivement. Les autorités croates ont repris le contrôle de la

  9   Slavonie occidentale au début du mois de mai 1995, au cours de l'opération

 10   "Eclair". Début août 1995, les dirigeants politiques et militaires serbes

 11   ont abandonné la plus grande partie du territoire croate suite à une

 12   puissante opération croate. A la faveur de cette opération connue sous le

 13   nom de "Opération Tempête", la Croatie a repris le contrôle de la quasi-

 14   totalité du territoire de la RSK. Les zones restées sous contrôle en

 15   Slavonie orientale, dans la Baranja et le Srem occidental ont été

 16   réintégrées pacifiquement à la Croatie en 1998.

 17   -Bosnie-Herzégovine:

 18   En novembre 1990, des élections pluripartites ont été organisées en

 19   Bosnie-Herzégovine. A l'échelon de la République, le SDA, à savoir le

 20   parti des Musulmans de Bosnie, a remporté 86 sièges à l'assemblée. Le SDS,

 21   pour sa part, à savoir le parti des Serbes de Bosnie, en a remporté 72

 22   contre 44 pour le HDZ, parti des Croates de Bosnie.

 23   L'idée maîtresse du programme politique du SDS, tel que formulé par ses

 24   dirigeants, dont Radovan Karadzic, Momcilo Krajisnik et Biljana Plavsic,

 25   était l'union de tous les Serbes au sein d'un seul Etat. Le SDS voyait,


  1   dans la sécession de la Bosnie-Herzégovine vis-à-vis de la RSFY, une

  2   menace contre les intérêts des Serbes.

  3   Le résultat des élections de novembre 1990 signifiait qu'à terme, le SDS

  4   ne serait pas en mesure de maintenir, par des moyens pacifiques, la

  5   République de Bosnie-Herzégovine au sein d'une Yougoslavie de plus en plus

  6   dominée par les Serbes. En conséquence, les Serbes de certaines régions de

  7   Bosnie-Herzégovine à majorité serbe ont commencé à s'organiser en

  8   structures régionales formelles qu'ils appelaient "Association de

  9   municipalités". L'Association des municipalités de Krajina bosniaques,

 10   basée à Banja Luka, s'est constituée en avril 1991.

 11   A partir de l'automne 1991, la JNA a amorcé le retrait de ses troupes de

 12   Croatie. Des forces placées sous le contrôle de la JNA ont commencé à se

 13   redéployer en Bosnie-Herzégovine, le plus souvent dans des secteurs où il

 14   n'y avait ni garnison ni installation de la JNA.

 15   La guerre se prolongeant en Croatie, il devenait de plus en plus

 16   vraisemblable que la Bosnie-Herzégovine aussi se déclarerait indépendante

 17   vis-à-vis de la RSFY. Le SDS, comprenant qu'il ne pourrait maintenir la

 18   Bosnie-Herzégovine au sein de la RSFY, a entrepris la création d'une

 19   entité serbe distincte à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine. De

 20   septembre à novembre 1991, plusieurs régions autonomes serbes ont été

 21   formées, certaines sur la base des associations de municipalités

 22   susmentionnées.

 23   Le 12 septembre 1991 la création de la région autonome serbe d'Herzégovine

 24   a été proclamée.

 25   Le 16 septembre 1991 l'assemblée de l'Association des municipalités de


  1   Krajina bosniaque a proclamé la création de la région autonome de Krajina.

  2   Dès le 21 novembre 1991 les régions autonomes serbes comprenaient la

  3   région autonome de Krajina, la SAO d'Herzégovine, la SAO de Romanija-

  4   Bihac, la SAO de Semberija et la SAO de Bosnie septentrionale.

  5   Lors de la réunion du conseil du SDS qui s'est tenue le 15 octobre 1991,

  6   il a été décidé de créer une assemblée distincte appelée "l'Assemblée des

  7   Serbes de Bosnie-Herzégovine" pour servir les intérêts du peuple serbe.

  8   Le 24 octobre 1991, l'Assemblée des Serbes de Bosnie-Herzégovine, dominé

  9   par le SDS, a décidé d'organiser un référendum parmi les Serbes de Bosnie-

 10   Herzégovine pour qu'ils se prononcent sur le maintien ou non au sein de

 11   l'Etat commun de Yougoslavie avec la Serbie, le Monténégro, la Région

 12   autonome serbe de Krajina, la SAO de Slavonie occidentale et la SAO de

 13   Slavonie orientale de la Baranja et du Srem occidental.

 14   Les 9 et 10 novembre 1991 les Serbes de Bosnie ont organisé le référendum.

 15   Les résultats ont montré qu'une majorité écrasante des Serbes de Bosnie

 16   souhaitaient le maintien au sein de la Yougoslavie.

 17   Le 11 décembre 1991 l'Assemblée des Serbes a demandé à la JNA de protéger

 18   par tous les moyens disponibles comme "parties intégrantes de l'Etat de

 19   Yougoslavie" les territoires de Bosnie-Herzégovine dans lesquels les

 20   Serbes et d'autres citoyens avaient été appelés à se prononcer par

 21   référendum sur la question du maintien au sein d'un Etat yougoslave

 22   commun.

 23   Le 9 janvier 1992, l'Assemblée des Serbes de Bosnie-Herzégovine a adopté

 24   une déclaration proclamant la naissance de la République serbe de Bosnie-

 25   Herzégovine. Le territoire de cette République y a été décrit comme


  1   incluant les territoires des régions et districts autonomes serbes et

  2   d'autres entités ethniquement serbes de Bosnie-Herzégovine, y compris les

  3   régions où la population serbe est restée minoritaire à la suite du

  4   génocide dont elle a été victime lors de la Deuxième Guerre mondiale et

  5   comme faisant partie de l'Etat fédéral yougoslave.

  6   Le 12 août 1992, la République serbe de Bosnie-Herzégovine a été

  7   rebaptisée pour s'appeler désormais "Republika Srpska".

  8   Du 29 février au 2 mars 1992, la Bosnie-Herzégovine a organisé un

  9   référendum sur l'indépendance. A l'appel du SDS, la majorité des Serbes de

 10   Bosnie-Herzégovine a boycotté le scrutin. Une majorité s'est dégagée lors

 11   de ce référendum en faveur de l'indépendance.

 12   Le 27 mars 1992, la création de la République serbe de Bosnie-Herzégovine

 13   a été officiellement proclamée à Pale.

 14   A compter de mars 1992, les forces serbes régulières et irrégulières ont

 15   pris le contrôle de certaines régions de la Bosnie-Herzégovine, y compris

 16   celles citées dans le présent Acte d'accusation.

 17   Le 6 avril 1992, les Etats-Unis d'Amérique et la Communauté européenne ont

 18   officiellement reconnu la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat indépendant.

 19   Le 27 avril 1992, la Serbie et le Monténégro ont proclamé la naissance

 20   d'une nouvelle République fédérale de Yougoslavie en tant qu'Etat

 21   successeur de la République socialiste fédérative de Yougoslavie.

 22   Le 15 mai 1992, dans sa Résolution 7.52, le Conseil de sécurité de

 23   l'organisation des Nations Unies a exigé la fin immédiate de toutes

 24   ingérences extérieures de la part des unités de la JNA et leur retrait de

 25   Bosnie-Herzégovine, leur soumission aux autorités de cette République ou


  1   leur démantèlement et désarmement.

  2   Vojislav Seselj s'est rendu en Bosnie-Herzégovine avant le conflit armé et

  3   durant celui-ci pour soutenir le moral des troupes. En octobre 1991 il a

  4   rendu visite aux soldats serbes regroupés à Trebinje, en prévision de

  5   l'attaque de Dubrovnik. En mai et août 1992, il s'est respectivement rendu

  6   à Gacko et à Zvornik. En mai 1993, il a fait un discours à Banja Luka.

  7   En septembre 1993, suite à un désaccord avec Slobodan Milosevic, M. Seselj

  8   a remis en cause l'autorité de celui-ci et a appelé à voter une motion de

  9   "défiance" contre le gouvernement de Serbie. Entre octobre et novembre

 10   1993, en Serbie les volontaires tchetniks de Vojislav Seselj ont été

 11   arrêtés par dizaines et accusés de crimes de guerre et d'autres crimes."

 12   M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

 13   Je ne vois pas d'objection du côté de l'accusation à ce que l'on poursuive

 14   avec la lecture de l'Annexe II, n'est-ce pas?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En effet, Monsieur le Président.

 16   M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, je vous demanderai

 17   donc de donner lecture lentement de l'Annexe II, à savoir la liste des

 18   victimes de Vocin, Hum, Bokane et Kraskovic, en rapport avec le paragraphe

 19   19 de l'Acte d'accusation que nous avons sous les yeux.

 20   Mme Anoya (interprétation): Très bien, Monsieur le Président.

 21   (Pour la transcription, se référer à l'Annexe II.)

 22   M. le Président (interprétation): Merci. C'est l'Annexe III dont il sera

 23   donné lecture à présent, qui porte sur les noms des victimes de l'hôpital

 24   de Vukovar, en rapport avec le paragraphe 20 de l'Acte d'accusation.

 25   (Pour la transcription, se référer à l'Annexe III.)


  1   M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, merci beaucoup pour

  2   avoir lu à haute voix cette liste de 255 noms. Et, pour chacun comprenne

  3   bien de quoi il est question, la liste de ces victimes est à relier au

  4   paragraphe 20 de l'Acte d'accusation, où nous lisons ce qui suit -je

  5   cite-: "Le soir du 20 novembre 1991, les soldats ont transporté les

  6   victimes par groupe de 10 à 20 personnes jusqu'à un lieu d'exécution

  7   éloigné situé entre la ferme d'Ovcara et Grabovo où ils les ont abattus.

  8   Environ 255 noms serbes de l'hôpital de Vukovar ont ainsi péri, leurs

  9   corps ont été jetés dans un charnier". (Fin de citation.)

 10   Selon l'accusation, M. Seselj est individuellement pénalement responsable

 11   de ses actes.

 12   Je vous demande à présent, Madame la Greffière, de donner lecture des noms

 13   des victimes abattues dans les locaux de Velepromet à Vukovar.

 14   Mme Anoya (interprétation): Nous poursuivons donc avec l'Annexe IV "Liste

 15   des victimes abattues dans les locaux de Velepromet à Vukovar", paragraphe

 16   21.

 17   (Pour la transcription, se référer à l'Annexe IV.)

 18   M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

 19   Vient ensuite la lecture de l'Annexe V "Les victimes abattues dans la

 20   maison de la culture de Celopek à Zvornik", en rapport avec le paragraphe

 21   22 de l'Acte d'accusation.

 22   (Pour la transcription, se référer à l'Annexe V.)

 23   M. le Président (interprétation): Maintenant, veuillez donner lecture des

 24   noms des victimes dont les noms figurent à l'Annexe VI.

 25   (Pour la transcription, se référer à l'Annexe VI.)


  1   M. le Président (interprétation): Monsieur Seselj, puis-je vous demander

  2   si vous avez reçu l'Acte d'accusation, copie papier, dans une langue que

  3   vous comprenez?

  4   M. Seselj (interprétation): Oui, j'ai reçu cet Acte d'accusation dans une

  5   langue que je comprends, mais il y a toute une série de problèmes

  6   terminologiques. On m'a donné plusieurs termes et moi, je ne comprends que

  7   la langue serbe. Pour vous indiquer quels sont les problèmes

  8   terminologiques, je dirai...

  9   M. le Président (interprétation): Mais laissez-moi vous interrompre

 10   quelques instants.

 11   Vous ne savez probablement pas que nous avons parfois des problèmes

 12   d'interprétation. Parfois, cela découle du problème ou du fait que

 13   certains mots ont plusieurs significations. Des fois, les problèmes

 14   surviennent du fait qu'un terme en langue croate a une signification

 15   différente du même terme en langue serbe.

 16   Nous avons adopté comme procédure la chose suivante: au cas où il y aurait

 17   des problèmes de traduction, vous avez toute liberté, toute latitude de

 18   contacter le OLAD, le bureau chargé…, l'unité chargée de ces questions-là.

 19   Et avec l'assistance de l'unité chargée des traductions, nous pouvons

 20   procéder aux vérifications. Aussi pourra-t-il être déterminé quelle est la

 21   signification exacte que vous entendez par tel ou tel terme. Donc je vous

 22   demanderai de vous adresser par écrit à l'intention du Tribunal pour ce

 23   qui est des problèmes découlant de l'interprétation et de la traduction,

 24   donc de l'interprétation orale ou de la traduction écrite.

 25   Nous sommes conscients du fait qu'il n'est point de doute que l'unité de


  1   traduction par écrit et d'interprétation par voie orale s'efforce, pour sa

  2   part, de faire le travail au mieux qu'elle sait le faire. Mais il est

  3   parfois impossible d'aboutir à une entente pour la signification précise

  4   de chaque terme dans l'une ou l'autre langue. Aussi vous demanderai-je de

  5   contacter le département concerné par écrit, pour les problèmes

  6   d'interprétation. Mais je crois qu'en principe, vous avez compris l'Acte

  7   d'accusation.

  8   M. Seselj (interprétation): Ecoutez, je vais vous donner un exemple

  9   flagrant. Dans l'Acte d'accusation, on dit que je m'étais, de façon

 10   négative, exprimé à l'intention de païens. Les "païens", cela veut dire

 11   qu'on a plusieurs divinités. Mais dans la langue serbe, on dit "pogan"; ça

 12   veut dire…

 13   M. le Président (interprétation): Excusez-moi, je suis contraint de vous

 14   interrompre. Je croyais vous avoir déjà expliqué que le lieu où nous

 15   trouvons aujourd'hui n'est pas le lieu adapté pour la discussion de ce

 16   genre de détails.

 17   Bien entendu, ces détails sont importants à vos yeux, mais nous sommes ici

 18   pour discuter de l'intégralité de l'Acte d'accusation. Et la seule

 19   question qui se pose ici, en ce moment, consiste à déterminer si vous avez

 20   pleinement compris la teneur de l'Acte d'accusation. Je vous demande de

 21   répondre par oui ou par non.

 22   M. Seselj (interprétation): Pour autant que j'aie pu le comprendre, je

 23   comprends que vous voulez me condamner, d'ores et déjà; mais je voudrais

 24   comprendre la teneur de l'Acte d'accusation. Et il faut que je puisse me

 25   défendre.


  1   Donc, pour que je puisse me défendre, il faut que l'Acte d'accusation soit

  2   aménagé comme il se doit. Il ne faut pas que je fasse cela par écrit à

  3   l'intention du département concerné, mais il faut que vous vous adressiez

  4   au département. Si vous avez des problèmes avec les interprètes, ce n'est

  5   pas mon problème à moi.

  6   M. le Président (interprétation): Je crois que nous résoudrons ce

  7   problème.

  8   Bien entendu, nous rejetons ces insinuations. Il appartient à la Chambre

  9   de première instance, d'après vous, de vous condamner, alors que le seul

 10   objectif poursuivi par la Chambre de première instance consiste à

 11   s'approcher le plus près possible de la vérité.

 12   Nous savons tous que la vérité n'existe pas sur terre, mais nous entendons

 13   les deux parties et c'est seulement après les avoir entendues que nous

 14   déterminerons sur la base de faits, et de faits destinés à nous permettre

 15   de nous approcher le plus près possible de la vérité. Nous nous

 16   prononcerons donc dans notre activité qui consiste à administrer la

 17   justice. Il vous sera permis, comme cela est le cas de façon générale, de

 18   réfuter si vous le souhaitez les allégations contenues dans l'Acte

 19   d'accusation.

 20   Je dois vous informer qu'en application de l'Article 62 de notre Règlement

 21   de procédure et de preuve, vous disposez d'un délai de 30 jours à partir

 22   de la date de votre comparution initiale pour déclarer de quelle façon

 23   vous allez plaider: coupable ou non coupable pour chacun des chefs

 24   d'accusation.

 25   Pourquoi ce délai de 30 jours? Eh bien, en application de l'Article 66 du


  1   Règlement qui se lit comme suit: "Sous réserve des dispositions de

  2   l'Article 53 et de l'Article 69 du Règlement, le Procureur est tenu de

  3   communiquer à la défense, dans une langue comprise par l'accusé et dans un

  4   délai de 30 jours -je souligne donc un délai de 30 jours- à compter de la

  5   comparution initiale de l'accusé, des exemplaires des documents à l'appui

  6   de l'Acte d'accusation et les documents ayant permis de confirmer cet Acte

  7   d'accusation ainsi que toutes les déclarations préalables obtenues par le

  8   Procureur de l'accusé."

  9   Mais si vous le souhaitez, en application de l'Article 62, paragraphe

 10   iii), nous vous informons de ce qui suit: "L'accusé peut immédiatement

 11   dire de quelle façon il plaide sur un ou plusieurs des Chefs

 12   d'accusation."

 13   Je vous demanderai donc si vous êtes prêt à déterminer la façon dont vous

 14   allez plaider par rapport aux charges qui sont retenues contre vous ou, si

 15   tel n'est pas le cas, si vous préférez le faire dans un délai de 30 jours?

 16   M. Seselj (interprétation): Je vais déclarer de quelle façon je plaide

 17   dans un délai de 30 jours si, entre-temps, le Procureur m'a expliqué

 18   quelle est la signification de certains termes que je ne connais pas, qui

 19   figurent dans ce cet Acte d'accusation. A moins que le Procureur n'agisse

 20   de la sorte, je ne pourrai pas me prononcer. J'accorde donc au Procureur

 21   un délai de 30 jours pour qu'il m'explique la signification de ces termes.

 22   Dès que ces termes seront clairs à mes yeux, je dirai de quelle façon je

 23   plaide.

 24   M. le Président (interprétation): Pour que tout soit clair dans ce

 25   prétoire, des limites de temps sont imposées par la Chambre de première


  1   instance et pas par l'une ou l'autre des parties. Donc si vous avez le

  2   moindre problème, il vous appartient de décrire ces problèmes liés à la

  3   traduction. Vous pourrez le faire par écrit, comme cela est prévu dans le

  4   Règlement. Si vous ne le faites pas, nous nous retrouvons exactement dans

  5   la situation d'aujourd'hui dans 30 jours. Et dans ce cas, comme je l'ai

  6   déjà dit, il vous appartiendra de vous prononcer sur votre façon de

  7   plaider. Si vous de ne dites pas de quelle façon vous allez plaider, ce

  8   seront les Juges qui détermineront à votre place et pour chacun des Chefs

  9   d'accusation.

 10   Donc une nouvelle fois, je vous repose la question: souhaitez-vous vous

 11   prononcer sur votre plaidoyer aujourd'hui ou souhaitez-vous le faire dans

 12   un délai de 30 jours?

 13   M. Seselj (interprétation): Je vous ai dit: dans un délai de 30 jours.

 14   Donc aujourd'hui, vous ne pouvez rien décider du tout. Dans un délai de 30

 15   jours, je plaiderai. Je ne suis pas pressé dans ce procès. Je ne comprends

 16   pas pourquoi vous seriez pressé. Je crois que vous m'avez reproché en

 17   quelque façon d'avoir demandé la lecture de tout l'Acte d'accusation mais,

 18   moi, j'ai la nuit entière pour la lecture de cet Acte d'accusation dans

 19   son intégralité.

 20   Si vous le permettez, j'aurai quelques observations d'ordre procédurier à

 21   formuler.

 22   M. le Président (interprétation): Pour le moment, nous devons respecter

 23   l'Article 62 du Règlement, c'est-à-dire procéder dans l'ordre que prévoit

 24   ce Règlement. Je me rends bien compte que vous souhaitez vous prononcer

 25   sur votre plaidoyer de façon avertie, c'est-à-dire en ayant pris


  1   connaissance de tous les documents à l'appui de l'Acte d'accusation, donc

  2   une audience sera prévue dans un délai de 30 jours.

  3   Par ailleurs, il existe un certain nombre de règles obligatoires, comme

  4   vous le savez sans doute, du droit international public. Il nous faut

  5   donc, à présent, discuter de la privation de liberté qui vous a été

  6   imposée, Monsieur Seselj. Je suis tenu aujourd'hui de décider si, oui ou

  7   non, cette privation de liberté va être durable. Bien entendu, il vous est

  8   possible de contester la légalité de votre arrestation.

  9   Souhaitez-vous élever des objections aujourd'hui même ou bien, comme c'est

 10   courant devant ce Tribunal, vous vous réservez le droit de déposer une

 11   exception préjudicielle après avoir pris connaissance des documents à

 12   l'appui de l'Acte d'accusation, c'est-à-dire à une date ultérieure?

 13   M. Seselj (interprétation): J'ai quelques objections à formuler dès

 14   aujourd'hui. Pour ce qui est d'une remise en liberté éventuelle, je tiens

 15   à préciser que je ne suis pas arrêté, je suis arrivé de mon propre gré.

 16   Deuxièmement, il n'est aucun gouvernement qui serait à même de fournir des

 17   garanties pour moi. Je ne dépose donc pas de requête aux fins d'être remis

 18   en liberté, étant donné qu'il n'est point de gouvernement qui fournirait

 19   de garanties au cas où je serai remis en liberté provisoire. La question

 20   n'est donc pas d'actualité.

 21   Maintenant, si cela est admis, je souhaiterais que vous m'autorisiez à

 22   vous présenter quelques objections de caractère mineur ou moindre.

 23   M. le Président (interprétation): Nous devons poursuivre. Je n'oublie pas

 24   que vous avez des objections mineures, comme vous les avez qualifiées

 25   vous-même, à présenter. Je dois vous demander si vous souhaitez que telle


  1   ou telle personne soit informée de votre privation de liberté, votre

  2   épouse par exemple. Et je dois vous demander également de quelle façon il

  3   est possible de vous contacter au quartier pénitentiaire de Scheveningen.

  4   M. Seselj (interprétation): Ils savent tous que je suis en prison, donc

  5   point n'est nécessaire de contacter qui que ce soit.

  6   M. le Président (interprétation): Merci. Eh bien, dans ce cas, nous en

  7   arrivons à la deuxième question que je dois vous poser: à savoir

  8   souhaitez-vous que le Tribunal informe votre consulat ou votre ambassade

  9   au sujet de la privation de liberté qui vous est imposée et ce, en

 10   application de l'article 36 de la Convention de Vienne?

 11   M. Seselj (interprétation): Non, je ne souhaite aucun contact avec le

 12   Consulat de ce que l'on appelle "la Serbie et le Monténégro". J'estime,

 13   pour ma part, qu'en Serbie et au Monténégro il y a, au pouvoir, des

 14   mafieux et des criminels, et je ne veux pas de contacts, quels qu'ils

 15   soient, avec eux.

 16   M. le Président (interprétation): Très bien. Merci de ces

 17   éclaircissements. C'est tout à fait votre droit. Compte tenu des mots

 18   prononcés par vous, dans un échange entre vous-même et le Tribunal, il est

 19   désormais possible au Greffe de ce Tribunal de prendre les mesures

 20   nécessaires pour que la Serbie et le Monténégro soient informés qu'il n'y

 21   aura aucune tentative de votre part pour établir un contact avec cet Etat.

 22   Etes-vous d'accord avec cela?

 23   M. Seselj (interprétation): Oui.

 24   M. le Président (interprétation): Très bien. Nous en sommes donc arrivés

 25   au terme de l'application de l'Article 62 du Règlement.


  1   Je demanderai au Procureur s'il a des observations à formuler, notamment

  2   au sujet de la procédure de communication de pièces?

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous

  4   communiquerons les éléments prévus selon les obligations qui sont les

  5   nôtres, en application de l'Article 66-A) du Règlement.

  6   M. le Président (interprétation): Très bien. Et bien entendu, il n'est pas

  7   nécessaire pour vous de le demander. Ces documents vous seront communiqués

  8   dans une langue que vous comprenez. Vous souhaitiez, n'est-ce pas, émettre

  9   certaines observations?

 10   M. Seselj (interprétation): En effet, j'ai été exposé à une torture

 11   physique et à de mauvais traitements parce que, suite à la sortie de la

 12   prison, on m'a mis un gilet pare-balles qui pèse 20 kilos. Je crois que

 13   c'est là une mesure de torture interdite par le droit international. Je

 14   n'ai pas besoin d'un gilet pare-balles. Personne n'a besoin de protéger ma

 15   vie. Et j'ai dû entrer à quatre pattes dans un véhicule pour arriver ici.

 16   Dans un monde civilisé, s'il y a un danger quelconque, on se procure un

 17   véhicule blindé. Je ne suis pas arrivé ici pour trimbaler dans La Haye des

 18   gilets pare-balles! Je suis venu ici pour être jugé. Je ne puis donc

 19   supporter ce type de mesure et je vous demande de la supprimer. Personne

 20   ne m'a menacé et il n'y aucun danger, pour ce qui me concerne, à mon

 21   égard.

 22   M. le Président (interprétation): Merci. La Chambre de première instance

 23   se prononcera sur ce point.

 24   Avez-vous une deuxième observation aujourd'hui?

 25   M. Seselj (interprétation): J'ai quatre choses à vous donner; je vous ai


  1   dit la première.

  2   Deuxièmement, je proteste parce que, par les médias, par certaines chaînes

  3   de télévision, j'ai été informé du procès d'aujourd'hui. Ce n'est qu'à 11

  4   heures aujourd'hui que l'on m'a informé officiellement de la chose, alors

  5   que les télévisions ont publié la chose dès hier. Je crois devoir être la

  6   première des personnes informées et, au moins quelques jours à l'avance,

  7   pour avoir le temps de me préparer. Je ne veux pas que les médias soient

  8   informés avant moi.

  9   M. le Président (interprétation): Si c'est bien ce qui s'est passé, il ne

 10   fait aucun doute qu'il s'agit d'une erreur mais, au vu des documents que

 11   j'ai sous les yeux, je dirai que vous avez dû être informé hier, déjà, de

 12   la date de cette audience.

 13   Etant juriste vous-même, vous comprendrez bien qu'il existe une obligation

 14   garante du respect des Droits de l'homme que vous comparaissiez rapidement

 15   devant un juge. Et lorsque le mot "rapidement" est utilisé, sa

 16   signification vient de la jurisprudence du comité des Droits de l'homme,

 17   article 9, paragraphe 3 du Pacte concerné.

 18   C'est exactement ce qui a été fait aujourd'hui. Vous avez donc eu,

 19   aujourd'hui, la possibilité de formuler vos objections. Et si vous n'avez

 20   été informé de votre comparution qu'aujourd'hui, des recherches, des

 21   vérifications seront faites mais, dans ce cas, c'est une erreur. Ce n'est

 22   pas un comportement adapté.

 23   Avez-vous autre chose à dire?

 24   M. Seselj (interprétation): Il existe le problème des visas. Je voudrais

 25   être visité par des membres de la famille, des amis proches et,


  1   éventuellement, des conseils juridiques. Mais il est un problème qui fait

  2   obstacle, parce que c'est le gouvernement néerlandais qui approuve la

  3   délivrance de ces visas. Donc c'est le gouvernement néerlandais qui est

  4   habilité, en fait, à décider qui peut me rendre visite ou pas. J'exige

  5   donc que ce soient les Nations Unies qui me délivrent des visas ou

  6   délivrent des visas à l'intention des personnes qui vont me rendre visite.

  7   Et le fait de déterminer qui a le droit de me rendre visite dépend du

  8   Tribunal et non pas du gouvernement néerlandais.

  9   M. le Président (interprétation): Nous sommes tout à fait d'accord.

 10   Jusqu'à présent, aucun problème ne s'est posé de ce point de vue. Et au

 11   cas où un problème surgirait, nous vous prions d'en informer le Tribunal

 12   qui se chargera de le résoudre car, en application de l'accord de siège

 13   concernant le pays hôte, il est sans aucun doute de votre droit de

 14   recevoir les personnes dont vous souhaitez avoir la visite. Donc ceci ne

 15   devrait pas constituer un problème.

 16   Avez-vous autre chose à ajouter?

 17   M. Seselj (interprétation): Je dois encore dire quelque chose au sujet du

 18   point précédent.

 19   Ce que je ne puis supporter, c'est l'idée de voir le gouvernement

 20   néerlandais approuver quoi que ce soit. Ce Tribunal est ex-territorial, la

 21   loi est ex-territoriale. Donc ce que je ne supporte pas, c'est que l'on

 22   demande au gouvernement néerlandais quelque visa que ce soit. Dans ce cas-

 23   là, je devrais renoncer aux visites de certains membres de la famille ou

 24   de certains amis mais je ne veux pas me permettre que le gouvernement

 25   néerlandais soit à même de décider de la chose.


  1   Je soulève la question en sa qualité de problème juridique.

  2   M. le Président (interprétation): Vous êtes tenu au respect des règles du

  3   droit international. Il existe avec les Pays-Bas un accord de relations

  4   avec le pays hôte, et les Nations Unies déploient tous les efforts

  5   nécessaires pour que les procès soient équitables et, en en même temps,

  6   rapides.

  7   Bien entendu, vous avez droit à recevoir des visites mais, compte tenu du

  8   fait que ce Tribunal réside sur le territoire des Pays-Bas, il appartient

  9   aux responsables du gouvernement néerlandais de délivrer ces visas. Je

 10   vous engage donc à respecter les règles et, dans ce cas, vous obtiendrez

 11   satisfaction, à savoir que les personnes dont vous souhaitez la visite

 12   vous rendront visite.

 13   Arrivons-en maintenant, si vous le voulez bien, à votre dernier point.

 14   M. Seselj (interprétation): Dans mon pays, il est coutumier que les juges,

 15   les procureurs et les employés d'un tribunal portent des vêtements civils,

 16   normaux, décents. Je suis très frustré quand je vois que les Juges sont

 17   vêtus de vêtements bizarres, en noir et rouge et les procureurs en noir et

 18   en blanc. Cela me fait penser à l'inquisition de l'Eglise catholique. Je

 19   puis difficilement supporter la chose sur le plan psychologique. Je crois

 20   pouvoir exiger que vous soyez vêtus de façon décente, parce que je crois

 21   savoir qu'il n'y a aucune règle prescrivant que vous soyez vêtus de la

 22   sorte; du moins, je n'ai pas connaissance d'une règle de cette nature,

 23   quelle qu'elle soit.

 24   M. le Président (interprétation): Ces règles existent; nous vous les

 25   communiquerons. Mais il vous faut bien accepter que vous êtes, ici, devant


  1   un Tribunal international créé par le Conseil de sécurité des Nations

  2   Unies dans le but de maintenir la paix dans l'ex-Yougoslavie. Et tout

  3   tribunal, toute Cour de justice, où qu'elle se trouve dans le monde, a le

  4   droit de décider de la façon dont les personnes qui y travaillent seront

  5   vêtues.

  6   C'est la plénière de ce Tribunal qui a pris la décision en la matière et,

  7   en application de cette décision, il est obligatoire pour toute personne

  8   présente dans le prétoire de porter les vêtements que vous voyez. Ceci

  9   s'applique aussi bien aux représentants du Bureau du Procureur qu'aux

 10   juristes présents dans le prétoire. Ceci s'applique aux conseils de la

 11   défense et aux Juges.

 12   J'en arrive maintenant au dernier point que nous aborderons lors de la

 13   présente audience.

 14   Vous connaissez la signification de l'expression "le droit d'être

 15   entendu". Il est fort possible que la Chambre de première instance, ex

 16   officio, soulève la question de savoir si, dans l'intérêt de la justice,

 17   un conseil de la défense vous sera assigné ou pas.

 18   Souhaitez-vous commenter, formuler un commentaire, sur ce point?

 19   M. Seselj (interprétation): Sous aucune condition je n'accepterai que vous

 20   m'attribuiez, ex officio, un conseil de la défense. J'estime que cela

 21   limiterait ma possibilité de me défendre. Dans ce prétoire, personne en

 22   mon nom, ne saurait prendre la parole et me défendre de ce qui constitue

 23   la teneur de l'Acte d'accusation. Ce serait une mise en scène de procès et

 24   cela n'aurait aucune signification que de faire un procès.

 25   Si l'on m'assure des conditions normales, j'aurai un conseiller juridique,


  1   j'aurai un assistant, mais je ne veux pas qu'il y ait de simulacre de

  2   procès et je veux me défendre moi-même. J'estime avoir le droit pour ce

  3   faire, et je me réfère à l'Article 21.

  4   M. le Président (interprétation): Je vous remercie pour cette déclaration

  5   tout à fait claire. La Chambre de première instance délibèrera à ce sujet.

  6   Nous sommes maintenant arrivés au terme de la présente audience.

  7   (L'audience est levée à 16 heures 18.)

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