Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 26 novembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  8   Monsieur les Juges, bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-03-67-T, le

  9   Procureur contre Vojislav Seselj.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame la Greffière.

 11   En ce mercredi, je salue en premier lieu les représentants de l'Accusation,

 12   Mme Dahl et M. Mundis. Je salue M. Seselj, et je salue M. le Témoin qui est

 13   à Belgrade et que je voie à l'écran.

 14   Bien. Le contre-interrogatoire va se poursuivre.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, pour ma part.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Je donne la parole à M. Seselj.

 17   LE TÉMOIN : ALEKSANDAR STEFANOVIC [Reprise]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   [Le témoin dépose par vidéoconférence]

 20   Contre-interrogatoire par M. Seselj : [Suite]

 21   Q.  [interprétation] Monsieur Stefanovic, nous allons voir un petit peu ce

 22   qui en est des modes de financement, tout d'abord, du Mouvement chetnik-

 23   serbe, et par la suite du Parti radical serbe. A l'époque, vous étiez au

 24   courant de toutes les activités du parti, et vous devriez être bien placé

 25   pour savoir que personnellement j'ai financé moi-même en 1990 tous les

 26   frais du Mouvement chetnik-serbe ?

 27   R.  Monsieur Seselj, avant cela, je tiens à dire que la torture qu'on a

 28   exercée à mon égard hier avant la déposition, ça s'est poursuivi hier soir

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  1   et dans la nuit. Vers 21 heures 30, devant mon appartement, à la porte, où

  2   il y avait mon épouse et ma belle-mère, la police est arrivée, ou une

  3   parapolice. Je ne sais pas pourquoi parce que jamais il n'y a eu de police

  4   devant ma porte depuis tant d'années que j'y habite, donc ils sont arrivés

  5   hier soir.

  6   Et paraît-il que Borislav Nikolic aurait porté plainte contre moi

  7   pour diffamation. Je ne sais trop quoi. Et une deuxième chose, mon épouse

  8   m'a dit qu'il ne fallait pas que je rentre chez moi, que les choses

  9   devenaient graves. Et j'ai passé la nuit ailleurs. Je ne l'ai pas passée

 10   chez moi.

 11   Le parlement de la République, en deux heures de débat, parce qu'on a

 12   interrompu les débats au bout de deux heures, n'a pas cessé de discuter de

 13   moi, et Tomislav Nikolic aurait demandé à l'Etat et aux organes de l'Etat

 14   de procéder à un examen de mes biens, parce que leur origine est douteuse,

 15   qu'il fallait me confisquer cela, je ne sais trop quoi. Et qu'il aurait

 16   demandé à l'Etat de mettre fin à la déposition des témoins comme moi.

 17   Là, c'est une manière orchestrée de s'en prendre à moi, et je pense que le

 18   procureur de l'Etat ne manquera pas de réagir dans quelques jours. Je ne

 19   sais pas si cela vient de La Haye, ou je ne sais pas d'où, peu m'importe,

 20   ce n'est plus une question de paranoïa.

 21   Vous avez un exemple concret à 21 heures 30 la police se présente devant

 22   chez moi à ma porte, pour m'arrêter. Je ne sais pas si la police ne sait

 23   pas que je témoigne et qu'il y a primauté de La Haye par rapport à nos

 24   tribunaux.

 25   C'est une attaque qui n'est pas du tout appropriée au parlement, lorsqu'on

 26   lance un appel aux organes de l'Etat pour réexaminer je ne sais pas trop

 27   quoi. On voit qu'il y a un accord qui a été passé derrière mon dos.

 28   Voyez-vous, vous pouvez m'arrêter sur-le-champ et me faire emmener, je ne

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  1   sais pas où, mais je me sens bien mal, pire que l'accusé Seselj, ou qui que

  2   ce soit d'autre, vous voyez c'est une --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- sur les discussions au niveau de

  4   votre Parlement, moi, je n'y peux rien, en revanche, concernant ce qui est

  5   arrivé hier soir à 21 heures 30, nous allons demandé aux autorités

  6   compétentes des explications sur ce qui s'est passé. C'est la première fois

  7   que ceci est porté à notre connaissance.

  8   Voilà. Pour me résumer, le Parlement, ils font ce qu'ils veulent. Nous,

  9   nous n'avons rien à dire. En revanche, concernant le fait que la police est

 10   venue chez vous, on va essayer de savoir dans quel cadre.

 11   Monsieur Seselj, continuez le contre-interrogatoire.

 12   M. SESELJ : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Stefanovic, depuis longtemps nous participons à la vie

 14   politique de la Serbie, vous comme moi, et je suppose que ce qui vous

 15   arrive maintenant ne vous étonne pas. Est-ce que c'est quelque chose à quoi

 16   vous vous attendiez lorsque, il y a deux ans, vous avez pris la décision de

 17   refuser la loyauté à Djindjic et à ses successeurs et lorsque vous ne

 18   vouliez pas témoigner contre moi ?

 19   R.  Je n'ai pas à m'attendre à telle ou telle chose. En passant par le juge

 20   Dilparic, par écrit, j'ai informé le Tribunal de La Haye en quelle qualité

 21   je souhaitais venir déposer devant ce Tribunal, et plusieurs choses se sont

 22   produites. Je vais vous énumérer les conséquences.

 23   En l'espace d'une nuit, j'ai perdu une voiture de la valeur de 65 000

 24   Euros, une voiture Touareg vieille de cinq mois. Ce ne sont pas des

 25   criminels, pas des voleurs qui me l'ont prise, je suppose que ce sont des

 26   organes de l'Etat. Je ne vais pas les nommer maintenant. On me l'a volée.

 27   Cette voiture, les papiers de mon entreprise, et on m'a également volé un

 28   appareil. La police n'a pas réagi lorsque j'ai porté plainte, et ça m'a

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  1   permis de savoir que ma supposition était exacte.

  2   Il y a un mois, un mois et demi une injonction à comparaître m'a été

  3   adressée, immédiatement la police criminelle s'est rendue dans mon

  4   entreprise, la police financière ainsi que je ne sais plus quelle police de

  5   l'Etat et une inspection des activités sur le marché. Ils m'ont maintenu

  6   pendant une journée et demie hors de mes activités normales, et je n'ai pas

  7   pu me préparer pour ce témoignage.

  8   Puis une deuxième injonction m'est arrivée vendredi, mais je ne vois pas

  9   d'ailleurs pourquoi il y a eu des injonctions, puisque je n'ai jamais

 10   cherché à fuir mes obligations, tout simplement la police est arrivée dans

 11   mon entreprise et m'a remis cette injonction, et je m'attends à ce qu'il y

 12   ait une avalanche maintenant, uniquement maintenant. Tomislav Nikolic --

 13   excusez-moi, Monsieur Seselj, mais nous en sommes arrivés à un point grave,

 14   c'est de ma vie qu'il en va, ma famille.

 15   Peu importe maintenant qu'il y ait un procès et tout ça contre vous.

 16   Permettez-moi au moins de dire ce qu'il m'arrive. Hier, vous avez passé

 17   sous silence qu'il y a eu une polémique entre vous et moi en tête-à-tête,

 18   lorsque j'ai dit que (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, attendez. Monsieur le Témoin,

 27   vous continuez et je vous arrête. Vous venez de parler de M. Nikolic dans

 28   des termes non acceptables. Vous pouvez le dire sur le plan politique, mais

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  1   ne pas rentrer dans des détails personnels à l'intéressé. On va être obligé

  2   d'expurger cette partie de vos propos.

  3   Je redonne la parole à M. Seselj.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais faire état

  5   devant M. Stefanovic du fait que je ne souhaitais pas parler de ce sujet.

  6   Mais je ne voudrais pas que vous expurgiez le procès-verbal, M. Stefanovic

  7   ne parle pas de ce qu'il a mesuré lui-même, il dit ce qui était scandaleux

  8   dans la presse. Donc n'expurgez pas le compte rendu d'audience, puisque

  9   trop souvent on procède à des expurgations dans cette affaire. Et

 10   véritablement c'est un sujet qui ne m'intéresse pas, je ne vais pas

 11   continuer là-dessus.

 12   M. SESELJ : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Stefanovic --

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, la Chambre a été très claire; pas

 20   de connotation individuelle de nature sexuelle ou sur le comportement des

 21   gens. Vous n'allez pas régler dans cette audience les comptes que vous avez

 22   avec M. Nikolic ou M. Vucic. La Chambre n'a pas à être manipulée.

 23   Et comme mes propos sont retransmis chez vous, au moins ceci est clair.

 24   Donc votre contre-interrogatoire doit se concentrer uniquement sur les

 25   propos du témoin concernant sa déclaration de 2003 et 2006, et sur votre

 26   responsabilité dans les infractions qui vous sont reprochées.

 27   Les mises en cause via ce Tribunal de M. Nikolic et Vucic, il n'en est pas

 28   question. Donc ne prenez pas ce Tribunal comme moyen de régler vos comptes

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  1   dans votre pays.

  2   Nous savons tous que vous aviez eu des responsabilités politiques

  3   importantes, que vous êtes un leader politique d'importance dans votre

  4   pays. Ce n'est pas la peine d'en rajouter. Alors continuez votre contre-

  5   interrogatoire sur les faits concernant le SRS en 1991, 1992, voire 1993.

  6   C'est ça qui nous intéresse.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne comprends pas de quelle manière à travers

  8   ce procès je règle leur compte à Nikolic et à Vucic. Vous me le reprochez à

  9   présent. Ce témoin, je ne l'ai pas préparé. C'est un témoin de

 10   l'Accusation. Ce n'est pas un témoin de la Défense. Il aurait dû être

 11   témoin de la Défense, et personnellement il l'a souhaité. Il a refusé

 12   d'être témoin de l'Accusation, finalement il a été amené ici sous menace.

 13   Mais je n'ai pas préparé ce témoin, et moi aussi je suis étonné d'entendre

 14   ce que dit le témoin. Et vous, vous me reprochez de régler leur compte à

 15   des gens.

 16   Cette nuit, j'ai préparé des questions à poser pendant le contre-

 17   interrogatoire qui n'ont rien à voir avec cela, et je ne vois pas pourquoi

 18   vous me reprochez cela maintenant.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame Dahl.

 20   Mme DAHL : [interprétation] Objection. Le témoin n'est pas ici sous la

 21   contrainte. Il témoigne sur ordonnance de la Chambre de première instance

 22   qui l'a enjoint de déposer devant cette Chambre.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais qui a dit qu'il a été arrêté le témoin ?

 24   Mais quelle objection est-ce qu'on entend là ? Est-ce que j'ai jamais dit

 25   qu'il a été arrêté le témoin ? Mais je ne l'ai pas dit. Pourquoi cette

 26   objection maintenant ?

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, continuez votre contre-

 28   interrogatoire.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Stefanovic, je savais par avance que vous alliez rencontrer

  3   des problèmes très importants, tout comme d'autres témoins qui ont refusé

  4   de venir déposer en tant que témoin de l'Accusation et qui ont demandé de

  5   venir déposer en tant que témoin de la Défense. Je ne suis pas en mesure de

  6   vous aider vu ma place. Je ne peux pas vous aider à régler ces problèmes.

  7   Je ne peux pas vous protéger non plus, mais d'expérience je peux vous dire

  8   que la force de l'opinion est la meilleure protection face à ces problèmes.

  9   Maintenant si vous avez la force de le faire, je vous inviterais à vous

 10   concentrer sur mes questions.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame.

 12   Mme DAHL : [interprétation] M. Seselj donne des informations et des

 13   conseils au témoin au lieu de lui poser des questions relatives à l'acte

 14   d'accusation. Je lui demande de se concentrer sur les questions pertinentes

 15   au cours de son contre-interrogatoire.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, posez vos questions puisque vous

 17   nous avez annoncé que vous alliez lui poser des questions.

 18   M. SESELJ : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Stefanovic, êtes-vous en mesure de répondre à mes questions

 20   concrètes, sinon je renonce à mon contre-interrogatoire d'emblée.

 21   R.  Ecoutez, ce n'est pas tellement important. Même si j'étais en pire état

 22   psychologiquement, physiquement, pire que maintenant, je serais capable de

 23   répondre à toutes les questions, qu'il s'agisse du Procureur, de vous-même

 24   ou de la Chambre qui me les pose. Mais je n'arrive pas à placer une phrase

 25   depuis hier sur ma famille, mes biens, ma tête, mais on ignore, on passe

 26   dessus comme s'il n'y avait pas une chasse à l'homme organisée contre moi.

 27   Au niveau du procureur de la république, ou la police, ou un groupe

 28   informel, parapolice. Je ne sais pas, quelqu'un a organisé cela. Je

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  1   n'arrive pas à placer une phrase hier ou aujourd'hui à ce sujet. On

  2   m'accuse d'être je ne sais pas trop quoi.

  3   Lorsqu'il y a une femme qui se présente à ma porte sans être

  4   annoncée, naturellement que j'étais en état de partir. Et puis la police

  5   qui est arrivée tard le soir. Je n'ai pas le droit d'en parler. Est-ce que

  6   vous voulez savoir pourquoi j'ai quitté le parti ? C'était à cause des

  7   solutions sur le plan du personnel, des cadres. Et là on m'a arrêté

  8   immédiatement quand j'ai commencé à raconter. On me demande de répondre à

  9   des questions, à des choses que je n'ai jamais rédigées, jamais signées.

 10   La moitié de ces signatures ne sont pas à moi. On a simplement scanné

 11   les signatures et on a fait du couper-coller. Il n'y avait pas de

 12   traduction serbe, il n'y avait que le texte en anglais.

 13   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur le Témoin, hier c'est vous qui avez

 14   confirmé vos signatures.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Seselj --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, j'ai signé.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, pour l'intérêt de votre cause,

 18   allez-y.

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Stefanovic, voyons maintenant ce qu'il en est des modes de

 21   financement, tout d'abord du Mouvement chetnik-serbe puis du Parti radical

 22   serbe en 1991 et 1992. 

 23   R.  Oui, très bien, allons-y.

 24   Q.  Je vous ai demandé si vous saviez, dès 1990, même avant de rejoindre le

 25   Mouvement chetnik-serbe collectivement avec votre parti, que c'est

 26   personnellement que j'ai financé moi-même de ma poche toutes les activités

 27   du Mouvement chetnik-serbe ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  Et savez-vous où j'ai trouvé l'argent qui m'a permis de financer cela ?

  2   R.  Oui, je le sais.

  3   Q.  Où cela ?

  4   R.  C'est grâce aux conférences qui ont été tenues en Australie et aux

  5   Etats-Unis d'Amérique pour l'essentiel.

  6   Q.  Vous savez que 97 conférences ont été données par moi au Canada, aux

  7   Etats-Unis, en Australie, en France, en Allemagne, en Suisse, en Grande-

  8   Bretagne en 1989; 97 conférences et deux livres dont je suis l'auteur ont

  9   été publiés, un en Australie et un au Canada ? 

 10   R.  Oui. En partie pendant cette tournée en Europe, j'étais présent.

 11   Q.  C'était la deuxième tournée. On y viendra.

 12   R.  D'accord, d'accord, je vois. Très bien.

 13   Q.  Maintenant je parle de l'année 1989. Est-ce que c'est un fait qui est

 14   incontestable ?

 15   R.  C'est exact.

 16   Q.  Puisque pendant ces années-là nous étions proches, vous savez que tout

 17   ce que j'ai gagné je ne l'ai pas apporté dans ma patrie, j'en ai laissé une

 18   partie en Australie, au Canada et aux Etats-Unis d'Amérique ?

 19   R.  Il me semble qu'environ 100 000 $ sont restés et qu'il en a été

 20   question.

 21   Q.  Je vais être plus précis. Il y a eu des taux d'intérêt et ça a atteint

 22   70 000 $ dans une banque new-yorkaise et ça a été gelé quand je suis arrivé

 23   à La Haye et c'est contrairement à la loi que ça a été, donc ces 42 000 $,

 24   je les ai retirés au Canada au début des années 2000, et dans une banque

 25   californienne en 1998, j'ai retiré 15 000 $ pour terminer la construction

 26   de ma maison à Batajnica.

 27   Vous savez que nous avons fait une tournée en janvier et février 1991 en

 28   Europe occidentale, nous deux ensemble ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Nous avons fait des conférences aux travailleurs immigrés serbes en

  3   Autriche, en Allemagne, en Suisse et en France, et devant l'immigration

  4   serbe de Grande-Bretagne ?

  5   R.  Oui, 29 conférences.

  6   Q.  Ça a duré plus d'un mois, un mois et demi pratiquement pour nous deux ?

  7   R.  44 jours.

  8   Q.  Et on faisait payer l'entrée. On a recueilli des dons pour le Mouvement

  9   chetnik-serbe, on vendait le journal intitulé la "Grande-Serbie", on

 10   vendait mes livres, n'est-ce pas, lors de ces rassemblements et tout cela

 11   allait dans la caisse du parti ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et vous-même, vous avez apporté en grande quantité des cocardes que

 14   vous vendiez, et puisque vous étiez au chômage à l'époque, c'était une

 15   rémunération qui était prévue pour vous ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  A notre retour dans notre patrie, est-ce que vous savez combien

 18   d'argent nous avons apportée ? Si vous ne vous souvenez pas, moi je me

 19   souviens de 47 000 marks allemands, lorsqu'on fait la conversion entre les

 20   différentes devises ?

 21   R.  Oui, je pense qu'il en est ainsi, environ 47 ou 48 000 marks allemands.

 22   Q.  Ce sont les premiers fonds qui nous ont permis de financer en 1992 le

 23   Parti radical serbe ?

 24   R.  Immédiatement après notre arrivée, le 23 février, on a créé le Parti

 25   radical serbe, précisément c'était effectivement ça.

 26   Q.  Vous étiez secrétaire général, votre fonction principale était de

 27   réunir des fonds pour le Parti radical serbe ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Dans le Parti radical serbe, est-ce qu'on tenait compte de tout dinar,

  2   qu'il s'agisse d'entrée ou de sortie de fonds ?

  3   R.  Oui. Puisqu'il n'y avait pas beaucoup d'argent, on faisait très

  4   attention.

  5   Q.  Est-ce qu'on avait deux types de comptabilité, d'une part on avait un

  6   compte officiel du Parti radical serbe à la comptabilité sociale, et puis

  7   nous avions aussi une comptabilité interne portant sur les entrées en

  8   espèce au parti ?

  9   R.  Oui, et moi j'avais droit de signature.

 10   Q.  Oui, vous pouviez gérer cet argent, payer tout ce qu'il fallait payer

 11   pour les besoins du parti ?

 12   R.  Oui, c'est cela.

 13   Q.  Est-il exact de dire que nous étions très rigoureux envers tout un

 14   chacun qui essayait de détourner, ne serait-ce qu'un seul dinar de l'argent

 15   appartenant au parti ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vojin Vuletic, fin 1992, est-ce que vous vous souvenez, il a essayé de

 18   s'approprier 2 000 marks allemands sur les fonds du parti. Il a été

 19   découvert par Ducic, notre secrétaire, et il a fallu qu'il abandonne son

 20   poste et son siège de député également suite à cela ?

 21   R. C'était 2 250 marks allemands apportés par Dobric, un travailleur

 22   immigré de Berlin. Vojin, quand il a pris l'argent, il a effacé avec du

 23   typex [phon] cette mention, cette entrée qui a été consignée. Lorsqu'on a

 24   découvert cela, il me semble qu'il a présenté sa démission tout seul et il

 25   est devenu membre du Parti démocrate. Mais vite par la suite il est tombé

 26   malade et il est parti.

 27   Q.  Vojin Vuletic nous a attaqués dans différents médias une fois qu'il a

 28   quitté le parti ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Dans l'hebdomadaire Knin, à la télévision Politika et dans d'autres

  3   médias ?

  4   R.  Oui, oui. Il est passé dans le Parti démocrate.

  5   Q.  Est-ce que vous vous souvenez que j'ai proposé que l'on ne réagisse pas

  6   du tout suite à ces attaques lancées par Vojin Vuletin parce qu'on savait

  7   qu'il avait des problèmes de santé. Vous vous souvenez que nous n'avons

  8   absolument pas réagi, pas répondu à ces attaques ?

  9   R.  Oui. Oui, je peux confirmer cela, indépendamment de ces attaques, Vojin

 10   Vuletic, quand il a été hospitalisé à l'hôpital municipal, nous deux et

 11   quelqu'un d'autre en notre compagnie, nous sommes allés le voir à l'hôpital

 12   malgré ces attaques.

 13   Q.  Peu après avoir quitté le Parti radical serbe, Vuletic est décédé ?

 14   R.  Non, d'abord il a été hospitalisé, et il est décédé.

 15   Q.  Il avait des problèmes cardiaques, c'est cela ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Vous vous souvenez, plusieurs années plus tard, mes adversaires

 18   politiques, dans des excès de rage, m'ont reproché dans les médias d'avoir

 19   liquidé Vojin Vuletic ?

 20   R.  Oui, je m'en souviens.

 21   Q.  Hier, vous avez parlé de l'assassinat de Pasko Jovic, c'était l'épouse

 22   de Slobodan Jovic ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Slobodan Jovic, est-ce qu'on l'a exclu du Parti radical serbe dès 1993

 25   parce qu'il était soupçonné de manière justifiée qu'il travaillait pour les

 26   Services secrets de Serbie ?

 27   R.  Avant d'arriver au Parti radical serbe, il avait été un agent d'active

 28   de la Sûreté de l'Etat. On l'a envoyé à l'étranger pour procéder à des

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  1   liquidations de notre immigration politique. Lorsqu'il est arrivé au parti,

  2   on ne savait pas cela sur son compte, et lorsqu'on l'a appris - je ne sais

  3   pas si c'était en 1993 - à vrai dire, cet homme avait un passé très

  4   douteux, il était prêt à tout et il n'avait pas véritablement fait d'école,

  5   il a eu un diplôme soi-disant comme quoi il aurait fait des études

  6   universitaires de génie électrique, mais il était prêt à tout.

  7   Mais plus tard, ce que tu ne sais pas, en 2000 -- à partir de 1999 et l'an

  8   200, il a montré sa véritable nature et j'en ai été victime lorsqu'il y a

  9   eu une fête de son parti, je pense que ça s'appelait Parti radical Nikolic

 10   Pasic. En la présence de mes collègues de mon parti, Miloje Mikisevicevic

 11   [phon] et Mladen Bakic, et en la présence d'un grand nombre de personnes de

 12   la Sûreté de l'Etat de Serbie très haut placées, il s'est très mal exprimé

 13   à ton sujet, et à un moment donné, après avoir bu un brandy, il a commencé

 14   à attaquer moi, et j'ai eu du mal à m'en tirer. Il y avait vraiment des

 15   gens de la pègre là-bas.

 16   Q.  On verra ça. Dans le texte rédigé par l'Accusation et pour lequel ils

 17   affirment que vous l'avez signé, il est question de l'assassinat de son

 18   épouse, qui était jeune et jolie, n'est-ce pas, elle avait une librairie

 19   vers Rakovica ?

 20   R.  Oui.

 21   Mais vous savez, j'ai enquêté de manière détaillée pour ce qui est de

 22   ma déclaration.

 23   Q.  Non, vous n'avez pas à répéter ce que vous avez dit hier. Je me

 24   souviens très bien de tout ce que vous avez dit. Ce qui m'importe, la

 25   première fois où Slobodan Jovic, pour lequel nous savons sans aucun doute

 26   qu'il a travaillé pour la Sûreté de l'Etat, pendant le silence électoral,

 27   aux élections présidentielles de 1997, lorsque j'étais candidat qui a pu

 28   continuer au deuxième tour, il a publié dans un quotidien "The Daily

Page 12180

  1   Telegraph", sur une demi-page - ce qui était contraire à toutes les règles

  2   électorales - que c'est moi qui avais tué sa femme. Est-ce que c'est la

  3   première fois qu'il avançait cette affirmation à ce moment-là ?

  4   R.  Je mentirais si je disais que je le savais. Mais je sais que dans le

  5   "Sunday Telegraph" il y a eu un texte qui a été publié, mais je ne sais pas

  6   que ça se soit passé pendant la campagne électorale.

  7   Q.  Si vous n'êtes pas sûr, je ne vais pas m'attarder là-dessus. Avançons.

  8   Monsieur Stefanovic, est-ce qu'on m'a jamais accusé de souhaiter

  9   m'enrichir, d'être un homme avide ?

 10   R.  Il y a d'une part une modération pour ce qui est de la nourriture, et

 11   aussi pour ce qui est de l'argent. Très rarement tu mangeais à l'extérieur,

 12   tu mangeais chez toi.

 13   Q.  Je vivais modestement, c'est ça que cela veut dire ?

 14   R.  Oui, très modestement, sans chercher à avoir des vêtements à part, à

 15   dépenser de l'argent dans des brasseries ou restaurants.

 16   Q.  Et les voitures ou le luxe autre ?

 17   R.  Pour autant que je le sache, non.

 18   Q.  Est-ce que c'est de cette manière-là que j'ai dirigé le parti, qu'on

 19   respecte les règles, qu'on n'utilise l'argent que pour les principaux

 20   besoins du parti ?

 21   R.  Pendant que j'étais là, oui.

 22   Q.  Est-ce que j'étais corruptible, est-ce qu'il était possible de me

 23   corrompre, est-ce que j'ai jamais souhaité m'enrichir ?

 24   R.  Je sais que lorsqu'on tentait de le faire, vous révéliez cela

 25   publiquement.

 26   Q.  Lorsque Zoran Djindjic vous a forcé à donner cette déclaration aux

 27   enquêteurs du Tribunal de La Haye contre moi, de me discréditer

 28   politiquement, à ce moment-là, l'une des formes de ce discrédit politique,

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  1   d'après ses suggestions, c'était aussi de me représenter comme quelqu'un

  2   d'avide, qui préfère l'argent à sa famille ainsi qu'à son parti, c'est bien

  3   cela ?

  4   R.  Ecoutez, il faut voir une chose. C'est le moment-clé de ma déclaration.

  5   Je me rends pour faire cette déclaration contrairement à ma volonté, la

  6   faire devant le Tribunal de La Haye sans savoir ce qui m'attends là.

  7   D'abord, je pensais que ce serait confidentiel ou secret, ou je ne sais pas

  8   trop quoi, et j'ai cherché à résister pendant deux ou trois jours même,

  9   mais ils ont été tellement persistants qu'à la fin j'ai dû céder. La

 10   dernière conversation il y a un témoin, Monsieur le Président m'a demandé

 11   hier s'il y a une trace écrite, mais il y a une trace orale avec M. Batic,

 12   je suis parti, je lui ai parlé, il était ministre à l'époque, j'ai dit mais

 13   pourquoi faites-vous cela, je ne veux pas comparaître devant le Tribunal de

 14   La Haye, pas à cause de Seselj, mais à cause de moi, ainsi je vais fermer

 15   la porte de mon avenir politique, mais je vis de cela, ça fait 20 ans que

 16   je fais de la politique, qu'est-ce que je vais devenir par la suite. Là, il

 17   m'a dit : "Mais mon pote, tu sais que pendant les 20 ou 30 années à venir

 18   nous serons au pouvoir, si Zoran t'a fait des promesse fermes, il n'y a pas

 19   de raison de douter, tu sais quel a été le rôle de Carla Del Ponte; non

 20   seulement pour ce qui est du DOS, mais pour ce qui est des préparatifs pour

 21   le 5 octobre." Finalement, j'ai accepté de me rendre à ces entretiens.

 22   Mais finalement c'est devenu une espèce de ronde sans fin, jeu sans

 23   fin, et ce discrédit, j'allais m'employer à le faire d'une manière

 24   correcte, j'allais utiliser des tactiques politiques.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Dahl.

 26   Mme DAHL : [interprétation] Pourriez-vous rappeler au témoin qu'il est sous

 27   serment et qu'il peut être poursuivi pour faux témoignage, Monsieur le

 28   Président.

Page 12182

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez prêté serment, donc

  2   vous savez mieux que quiconque que vous pouvez être poursuivi pour faux

  3   témoignage. Vous le savez ? Donc, vous dites la vérité, là ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie, expliquez-moi à quel moment

  5   de ma déposition la Procureure doute de la véracité de mes propos. Qu'elle

  6   me l'explique, je vous prie, et je peux m'expliquer.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous l'expliquer.

  8   Dans la déclaration que j'ai sous les yeux, déclaration que vous avez faite

  9   en 2003, puis renouvelée en 2006, vous indiquez que M. Seselj était plus

 10   intéressé par l'argent que la politique. Voilà ce que vous aviez dit.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] La famille est mentionnée aussi dans cette

 12   phrase.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge --

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais la --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais est-ce que j'ai fait cette déclaration

 16   sous serment ?

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit ça, et vous avez rajouté "ou sa

 18   famille," mais ça, c'est secondaire. Ce qui m'intéresse c'est l'argent.

 19   Là-dessus, M. Seselj vous pose des questions sur le financement du Parti

 20   radical serbe, où il a parlé d'après ses questions, que le Parti radical

 21   serbe a été financé par le produit des conférences effectuées par lui dans

 22   le monde entier. Effectivement, nous savons qu'il y a des comptes bancaires

 23   à l'étranger qui peuvent avoir été alimenté par le produit des conférences.

 24   Donc il y a une contradiction fondamentale entre ce que vous aviez

 25   dit en 2003 et réitéré en 2006 et ce que vous dites maintenant. Donc, le

 26   Procureur se lève et vous rappelle que si vous ne dites pas la vérité, si

 27   vous faites un témoignage mensonger, vous pouvez être poursuivi pour faux

 28   témoignage.

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  1   Je vous pose la question, comme vous avez prêté serment, maintenant

  2   vous nous dites la vérité. C'est bien ce que vous nous confirmez ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ce que je dis

  4   aujourd'hui, je l'ai dit sous serment, et ceci correspond à une pleine et

  5   entière vérité. Mais ce que j'ai dit au moment de la déclaration écrite, je

  6   l'ai fait alors que je n'étais pas sous serment. Croyez-moi, c'était toutes

  7   sortes de choses qui étaient destinées à discréditer M. Seselj, et je l'ai

  8   fait pour trois raisons.

  9   Aujourd'hui, sous serment, je dis la vérité. On peut passer en revue

 10   les comptes du SDK, on peut vérifier où sont les cahiers de compte qui

 11   était en possession de M. Vojislav Seselj, où est-ce qu'ils sont

 12   aujourd'hui. L'argent qui était destiné à financer les journaux, les

 13   affiches, les émissions, c'étaient des centaines de milliers de dinars. Je

 14   ne sais pas combien à l'époque, mais ces cahiers de compte existent, les

 15   comptes du SDK existent. Les comptes, les cahiers de compte, les registres

 16   doivent exister aussi où sont-ils.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites que vous dites la vérité.

 18   Très bien. On en prend acte.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.

 21   M. SESELJ : [interprétation]

 22   Q.  Dans ces conditions, je pense que cette question des finances, nous

 23   l'avons épuisée. Mais j'aurais encore quelques petits détails à vous

 24   demander.

 25   Vous rappelez-vous que déjà à l'époque de la création des partis

 26   politiques en Serbie, les partis pro-occidentaux étaient financés à partir

 27   de l'étranger, à partir d'agences gouvernementales et non gouvernementales

 28   diverses ?

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  1   R.  Oui, mais notre parti ne l'était pas.

  2   Q.  Le Parti socialiste et les partis qui lui étaient proches, la Ligue des

  3   communistes, le Parti de gauche yougoslave avaient à leur disposition

  4   toutes ces agences gouvernementales, n'est-ce pas ?

  5   R.  Ils avaient à leur disposition des entreprises à l'intérieur de l'Etat.

  6   Q.  Le Parti radical serbe a-t-il eu à quelque moment que ce soit un

  7   sponsor important qui, par exemple, en un an lui aurait remis une somme

  8   plus importante que 10 000 marks allemands, pour ne prendre un exemple.

  9   Est-ce que vous en avez le souvenir ?

 10   R.  Je sais très bien comment je collectais l'argent, c'était un travail

 11   immense, très pénible qu'on arrivait à peine à parvenir aux objectifs, et

 12   que finalement on avait toujours des dettes. Le financement du journal

 13   Valeka Srbja [phon], les campagnes électorales, les affiches grandes et

 14   petites, ça coûtait 200 000 dinars à l'époque, je m'en souviens. A Studio

 15   B, l'émission pour une seule campagne électorale en 1993, au mois de

 16   décembre, a coûté beaucoup d'argent.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question à lui poser.

 18   Monsieur le Témoin, à l'époque vous étiez secrétaire général du Parti

 19   radical serbe, est-ce à dire que vous aviez un contrôle sur le budget du

 20   Parti radical serbe ? Est-ce que ça rentrait dans votre domaine de

 21   compétence ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, non seulement j'étais habilité à

 23   contrôler les finances, mais j'étais le numéro un pour la collecte

 24   d'argent, donc il fallait que je tienne compte de la trésorerie.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, vous allez voir pourquoi je pose cette

 26   question.

 27   Monsieur le Témoin --

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma signature était la seule signature

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  1   enregistrée au SDK, la seule signature.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : On a eu un témoin qui avait été membre du Parti

  3   radical serbe et qui nous a dit ceci : Je cite de mémoire, parce que je

  4   n'ai pas le transcript et la question me vient à l'instant. Mais comme j'ai

  5   une excellente connaissance du dossier, je peux me permettre de faire une

  6   référence sans avoir le transcript sous les yeux.

  7   Ce témoin avait expliqué qu'il arrivait parfois que le Parti radical serbe

  8   envoie des hommes à lui, des volontaires, pour surveiller des usines. Il

  9   nous a cité la surveillance d'une usine qui avait donné lieu à des

 10   versements ou de sommes au profit du Parti radical serbe.

 11   Comme vous, vous aviez la tenue des comptes, puisque vous venez de me

 12   le confirmer, est-ce que vous vous souvenez à un moment donné que le Parti

 13   radical serbe a reçu de l'argent en provenance d'entreprises dans le cadre

 14   d'une surveillance de cette entreprise par les volontaires du Parti radical

 15   serbe ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Excellente question, Monsieur le Président.

 17   Amenez-moi cet homme ici ou amenez-le à La Haye et je viendrai le

 18   rencontrer pour lui demander pourquoi et sur la base de quoi il raconte ce

 19   qu'il a raconté. En toute responsabilité, je dis que cette histoire est un

 20   pur mensonge et totalement imbécile.

 21   Je suis un homme d'honneur, et je l'ai dit hier et je le répète, je

 22   ne mens jamais. Monsieur le Juge, vous avez face à vous aujourd'hui un

 23   homme qui ne ment jamais.

 24   L'homme dont vous parlez n'a fait que raconter toute une série de

 25   mensonges et de choses irresponsables. J'affirme que dans toute ma vie,

 26   pendant que j'étais membre du Parti radical, je n'ai jamais touché d'argent

 27   d'une entreprise. Mais, volontaires, où est-ce qu'ils ont gardé une

 28   entreprise ? En Slavonie ? Où ça ? Ce que cet homme a raconté, ce n'est pas

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  1   la vérité. Amenez-le ici, confrontez-le à moi, à huis clos, si vous voulez.

  2   M. SESELJ : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Stefanovic, vous rappelez-vous qu'en votre qualité de

  4   secrétaire général du Parti radical serbe, pendant les années où vous

  5   l'étiez, vous avez fait un voyage en Australie, vous y êtes resté un mois

  6   et vous avez collecté des dons destinés au parti ?

  7   R.  Oui, mais je n'y ai pas passé un mois, mais à peu près deux mois et

  8   demi.

  9   Q.  J'avais en mémoire un mois, mais enfin ce n'est pas grave. Vous

 10   rappelez-vous que vous avez rapporté environ 30 000 deutsche marks, marks

 11   allemands, d'Australie.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  C'est ce que vous êtes parvenu à rassembler.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous rappelez-vous la somme la plus importante que vous ayez collectée

 16   durant l'un de vos voyages, durant la campagne électorale de 1993, quand

 17   vous êtes rentré de Berlin ? Vous vous rappelez quelle était la somme que

 18   vous avez remise dans les caisses du parti ? Quel était ce montant ? Je ne

 19   souhaite pas vous poser une question directrice. Quel est votre souvenir

 20   personnel ?

 21   R.  Je sais que j'ai donné tout cet argent - je ne me rappelle pas la somme

 22   exacte - à Tijanic. Mais je me souviens du voyage. Les avions ne volaient

 23   pas. J'ai dû rentrer en autobus et le lendemain la campagne avait commencé

 24   de façon générale un peu partout. Je ne me rappelle pas la somme exacte.

 25   Q.  Je vais vous le rappeler. Vous avez apporté 50 000 marks allemands de

 26   Berlin à ce moment-là. Et nous sommes allés ensemble voir Tijanic à la

 27   chaîne de télévision "Politika", nous sommes allés au studio B également, à

 28   la télévision, nous avons payé ce que nous devions pour les émissions

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  1   auxquelles nous participions. Vous rappelez-vous que c'était l'époque où la

  2   crise était la plus dure en Serbie, l'inflation correspondait à celle de la

  3   République de Weimarkt après le Première Guerre mondiale en Allemagne à

  4   l'époque, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je sais que cet argent que j'ai rapporté n'a pas suffi à payer les deux

  6   émissions télévisées, ou il y avait encore quelques petites choses à payer.

  7   En tout cas, nous avons dû rajouter de l'argent.

  8   Q.  Vous rappelez-vous qu'à la télévision à la chaîne "Politika", ils ont

  9   été ébahis de voir qu'on apportait de l'argent, plusieurs devises : des

 10   marks allemands, des francs français, des francs suisses, des lires

 11   italiennes, des shillings autrichiens, des couronnes danoises, des

 12   couronnes suédoises. Qu'est-ce qu'il y avait encore, des florins

 13   néerlandais et des drachmes grecques. Est-il exact nous avons apporté une

 14   somme qui était en plusieurs devises pour payer cette émission ?

 15   R.  Oui, ce que j'avais en caisse, c'était à peu près ça, si je me souviens

 16   bien.

 17   Q.  Vous et moi, sommes-nous toujours allés à la télévision ensemble pour

 18   payer ces factures ?

 19   R.  Oui, mais c'est moi qui transportais l'argent.

 20   Q.  C'est normal puisque vous étiez responsable de l'argent à l'époque,

 21   n'est-ce pas, vous étiez le plus fiable ?

 22   R.  Cela faisait partie de mes responsabilités.

 23   Q.  Monsieur Stefanovic, nous en avons terminé sur ce sujet.

 24   Donc la première forme de discréditation politique lancée à mon encontre

 25   avec insistance par Zoran Djindjic portait sur ce sujet. Il avait pour but

 26   de m'éliminer de façon définitive de la vie politique en Serbie, n'est-ce

 27   pas ?

 28   R.  Oui. J'ai même fait une proposition personnelle en 2001, parce qu'eux

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  1   n'arrêtaient pas de gémir en disant que le Parti radical serbe nuisait à la

  2   nouvelle et jeune démocratie en Serbie, et cetera. Alors j'ai fait une

  3   proposition, j'ai dit que le procureur général aurait pu mettre à l'amende

  4   le Parti radical serbe. Et à ce moment-là je ne sais plus quel groupe

  5   d'expert juridique a été constitué qui était chargé de rédiger un texte

  6   destiné au procureur, je crois que ce texte a été effectivement rédigé et

  7   qu'on s'y référait à je ne sais trop quel article de la constitution ou je

  8   ne sais quoi. Et à ce moment-là contre mon gré, je vous le dis entre quatre

  9   yeux aujourd'hui, contre mon gré ils ont estimé que cette solution n'était

 10   pas bonne, que vous alliez poursuivre votre activité par d'autres moyens,

 11   que vous continueriez votre action d'opposition par d'autres voies, et

 12   quelqu'un au sommet de l'Etat, je ne sais plus qui, a renoncé à cette idée

 13   que je soutenais, je vous le dis. Et à ce moment-là ils ont choisi d'autres

 14   moyens pour faire cesser votre activité.

 15   Personnellement, j'ai entendu parler d'une autre solution qui consistait à

 16   dire qu'il ne fallait pas toucher au Parti radical serbe, mais qu'il

 17   suffisait de toucher à Vojislav Seselj; puisque certaines organisations

 18   avaient déjà une influence sur le Parti radical serbe. Et il y a cinq ans

 19   déjà, je disais qu'en 1993 --

 20   Il y avait un instructeur qui s'appelait Steven ou Steve, c'était un agent

 21   des services de Renseignements américains qui a été amené par Zoran Korac

 22   jusqu'à son appartement, et avant les élections municipales de Belgrade,

 23   ils ont simulé un scénario. Zoran Korac a fait semblant d'être un

 24   présentateur de télévision, et ce Steve ou Steven, qui était toxicomane et

 25   homosexuel, et qui a été trouvé mort plus tard dans un hôtel, a prétendu

 26   être Bogdanovic, ou Boganovic, je ne sais plus son nom. Nenad Bogdanovic,

 27   je crois. Et ils ont mis en place des soi-disant relations que Vucic aurait

 28   eues avec Bogdanovic.

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  1   A ce moment-là, j'ai fait quelques suggestions, mais ils n'en ont pas

  2   beaucoup tenu compte.

  3   Plus tard, une autre influence des services de Renseignements s'est

  4   manifestée. Au moment où un groupe de membres du Parti radical serbe, ces

  5   députés, sont allés à Strasbourg, au Parlement européen, à ce moment-là,

  6   j'ai eu des renseignements précis quant au moment et au lieu où les

  7   réunions devaient se tenir à Strasbourg. Et M. Nikolic a joué un rôle parmi

  8   ces agents de renseignements à ce moment-là. J'en ai été informé. Donc ce

  9   n'est pas seulement notre service de sûreté publique qui a participé à la

 10   création du nouveau parti de Vucic et de Nikolic.

 11   J'ai été très bien informé de cela. Monsieur Seselj, cela fait déjà

 12   plusieurs années que vous êtes absent de notre pays et de sa vie politique,

 13   vous n'avez pas de renseignements très frais.

 14   Je me rappelle très bien ce qui s'est passé à Pristina. Vous n'êtes pas au

 15   courant du fait que les Etats-Unis et la Russie se sont entendus pour se

 16   partager des zones d'intérêt dans les Balkans. La Russie a reçu la Serbie;

 17   et les Etats-Unis ont reçu le Kosovo. Mais un représentant russe a pris

 18   contact avec l'Allemagne à ce moment-là pour essayer de diminuer son

 19   influence au Kosovo.

 20   Vous savez que le grand amour entre les Etats-Unis et l'Allemagne

 21   dure depuis pratiquement 30 ans, et s'est encore intensifié ces dernières

 22   années de sorte que --

 23   Q.  Ne parlons pas de géopolitique si vous voulez bien en ce moment,

 24   abordons quelque chose de plus concret, car le temps qui m'est imparti est

 25   en train de s'écouler, et je ne crois pas que la Chambre m'accordera un

 26   supplément de temps. Passons à des sujets plus concrets.

 27   Quand est-ce que vous avez appris pour la première fois qu'un acte

 28   d'accusation du Tribunal de La Haye était en cours de rédaction à mon

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  1   encontre ? Vous étiez dirigeant politique, vous étiez au DOS, vous avez

  2   sans doute eu des renseignements à ce sujet.

  3   R.  J'étais membre de la direction suprême du DOS, c'était des gens qui

  4   n'avaient pas d'expérience, qui n'avaient jamais eu d'action parlementaire

  5   par le passé, j'avais de bons contacts avez Zoran Djindjic, le premier

  6   ministre, parce que sa sœur, Slavica, était mariée à un homme de mon

  7   village, dont le patronyme est Filipovic. J'ai rendu visite à son oncle en

  8   Bosnie, et son épouse venait de Valjevo.

  9   Quant à vous, vous savez qu'en 1990, alors que Zoran portait encore une

 10   queue de cheval, une boucle d'oreille et des jeans, nous étions lui et moi

 11   en très bons termes. Pendant longtemps, nous avons été en très bons termes.

 12   Ils se sont opposés à ma proposition, et j'affirme que cette solution

 13   aurait été meilleure parce que le Parti radical serbe aurait été éliminé de

 14   la vie politique depuis plusieurs années. Mais ils ont pris le pouvoir et

 15   ils se sont noyés dans le pouvoir.

 16   Q.  Monsieur Stefanovic, c'était en quelle année ?

 17   R.  En 2002.

 18   Q.  D'accord. C'était déjà pas mal de temps avant que je ne parte pour La

 19   Haye. L'acte d'accusation à mon encontre a été dressé à la mi-2003, à peu

 20   près, et j'ai entendu dire que c'est le 25 janvier 2003 que ce document

 21   avait déjà été préparé.

 22   Est-ce que vous avez entendu avant que je n'en entende parler moi-même

 23   qu'il était question de dresser un acte d'accusation à mon encontre ?

 24   R.  Je crois l'avoir appris en 2002.

 25   Q.  D'accord. J'ai ici un article de presse.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais au représentant du greffe de le

 27   placer sur le rétroprojecteur. J'en ai fait faire des photocopies. C'est un

 28   article de presse et j'ai prévu une photocopie pour chacun des Juges et

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  1   pour les représentants du bureau du Procureur. Il s'agit d'un document que

  2   j'ai trouvé hier à mon retour dans ma cellule, un article qui est tiré du

  3   journal "Vesti" qui paraît à Francfort.

  4   M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Vous savez, n'est-ce pas, qu'à Francfort paraît "Vesti" en langue serbe

  6   ?

  7   R.  Oui, je connais son rédacteur en chef, Vidakovic.

  8   Q.  Ce journal publie les mémoires de Nikolic sous forme de feuilleton

  9   depuis déjà pas mal de temps. Et hier justement, j'ai trouvé l'article du

 10   1er novembre, alors voyons un peu ce que dit Nikolic au sujet du moment où

 11   Zoran Djindjic lui a annoncé qu'un acte d'accusation était en cours de

 12   préparation à mon encontre à La Haye.

 13   Est-ce que M. Stefanovic a la possibilité de voir cet article à Belgrade ?

 14   R.  J'ai un texte sous les yeux. Mais est-ce que c'est l'article qui est

 15   intitulé : "Assassin non condamné qui change d'avis."

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Dahl.

 17   Mme DAHL : [interprétation] Ce n'est pas un document que l'Accusation et

 18   les Juges d'une Chambre peuvent lire car il n'est pas dans une langue de

 19   travail du Tribunal. Et je m'interroge aussi quant à la pertinence des

 20   informations qui y sont contenues -- on peut poser des questions au témoin

 21   et il peut répondre à propos de la connaissance qu'il en a.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, sur la pertinence.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande d'abord que la Greffière me rende le

 24   texte original de façon à ce que je puisse l'utiliser. J'en ai besoin. Ce

 25   document est pertinent car il traite du même sujet que le sujet dont parle

 26   le témoin.

 27   Le témoin parle de l'influence de Zoran Djindjic et de son

 28   intervention dans les différentes activités qui l'ont amené à être témoin à

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  1   charge dans mon procès. Or, dans cet article, il est écrit que Zoran

  2   Djindjic l'a informé du fait qu'un acte d'accusation était en cours de

  3   préparation à mon encontre. Je vais maintenant donner lecture de la partie

  4   pertinente de l'article.

  5   Mme DAHL : [interprétation] Voyons ce que sait le témoin, voyons ce qu'il

  6   comprend des faits repris dans l'acte d'accusation. Je m'oppose à ce que M.

  7   Seselj lise un article de presse au témoin, ce qui donne à ce dernier la

  8   possibilité de faire sien ce que contient cet article. Un contre-

  9   interrogatoire sert à mettre à l'épreuve la connaissance personnelle d'un

 10   témoin, ce n'est pas pour lui donner des informations qu'il va régurgiter.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] D'abord, je ne suis pas soumis aux limites qui

 12   sont imposées au Procureur pendant l'interrogatoire principal. J'ai le

 13   droit, y compris, de poser des questions directrices.

 14   Et c'est hier soir, Monsieur le Président, que j'ai trouvé cet

 15   article. Vous pouvez vérifier au quartier pénitentiaire, c'est hier qu'on

 16   nous a distribué ce journal, 21 novembre. Il est arrivé et il nous a été

 17   distribué hier dans les cellules. La distribution est un peu tardive. J'ai

 18   donc lu le journal. J'ai déchiré la page, que je vous montre, hier soir et

 19   je l'ai apportée ici. Cet article est assez important et je n'aurais pas pu

 20   le soumettre à une date antérieure à celle d'aujourd'hui.

 21   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, vous savez bien que ce n'est pas la

 22   première fois que cette question se pose. L'article est en serbe. Nous,

 23   malheureusement, on ne connaît pas le serbe, donc vous pouvez très bien

 24   poser vos questions sur la base de votre lecture que vous avez faite de cet

 25   article. Et vous cherchez à savoir ce que, sur ces questions, dit le

 26   témoin, mais sans lire l'article.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Seselj, ma collègue vous cadre la

 28   méthode à employer. Vous n'avez qu'à dire au témoin : voilà il y a cet

Page 12194

  1   article qui est paru en Allemagne, telle date, et dans cet article il est

  2   dit ceci, vous synthétisez très vite, et vous lui posez la question.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai le droit, Monsieur le Président, de citer

  4   quelques phrases tirées de cet article. Je n'ai pas l'intention de lire

  5   l'intégralité de l'article.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Citez quelques phrases, mais le plus court

  7   possible pour pas qu'on passe du temps sur un article dont ma collègue

  8   vient de dire que nous n'avons pas la traduction.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce serait impossible que vous l'ayez en

 10   traduction. C'est un cas de force majeure. J'ai indiqué quelles sont les

 11   phrases. C'est signalé dans le texte quelles sont les phrases que j'ai

 12   l'intention de lire.

 13   M. SESELJ : [interprétation]

 14   Q.  Pour commencer, vous voyez l'avant-dernier paragraphe, Tomislav Nikolic

 15   dit que lui et Djindjic entretenaient une amitié particulière, qu'ils

 16   avaient une attitude correcte l'un vis-à-vis de l'autre, et qu'installés au

 17   bar à l'assemblée de la République quand ils ont pris une tasse de thé, il

 18   lui a dit qu'un acte d'accusation était en préparation contre Seselj.Et il

 19   dit que tout de suite après, il m'en a informé, mais je sais que ce n'est

 20   pas vrai. Tomislav Nikolic ne m'a jamais dit que Djindjic l'avait informé

 21   du fait qu'on préparait un acte d'accusation contre moi. Donc Nikolic

 22   confirme qu'il savait par avance qu'on allait dresser un acte d'accusation

 23   contre moi et que c'est Djindjic que le lui avait dit.

 24   Qu'en savez-vous ?

 25   R.  Je pense que Tomislav Nikolic a raison ici, que Cedo ou Djindjic lui

 26   ont dit cela.

 27   Q.  D'abord Cedo, puis Djindjic ?

 28   R.  Oui. Je sais qu'ils ont entretenu une relation spécifique.

Page 12195

  1   Q.  Cela veut dire que Zoran Djindjic préparait le terrain d'ores et déjà à

  2   ce moment-là avant que je ne parte pour La Haye pour prendre le contrôle au

  3   Parti radical serbe ?

  4   R.  Oui. Comme je l'ai déjà dit dans ma déposition, tout le Parti radical

  5   serbe ne devait pas être éliminé. Ils ont dit uniquement Vojislav Seselj

  6   devait être éliminé. C'est ce que j'ai entendu.

  7   Q.  Pour qu'ils puissent s'occuper du parti plus facilement ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous avez entendu que Tomislav Nikolic m'a accusé récemment

 10   d'avoir ordonné le meurtre de sa femme ?

 11   R.  Mais il y a eu quelque chose à Ruma.

 12   Q.  On en a beaucoup parlé dans l'opinion à cause de ces déclarations qu'il

 13   a faites, et on m'a imposé des restrictions pour ce qui est des contacts

 14   par téléphone. Et maintenant Tomislav Nikolic le nie. Il dit qu'il a reçu

 15   une information claire sur un attentat possible, c'est le deuxième

 16   paragraphe, Monsieur le Président. Mais ce n'est pas Vojislav Seselj qui a

 17   préparé cela, mais lui "il est à La Haye, et à La Haye il a dit des choses

 18   si mauvaises à mon sujet ainsi que ses collaborateurs ici, que cela me

 19   permet de savoir à peu près qui pourrait être à l'origine de cette phrase :

 20   'liquidons traître.'" 

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Dahl.

 22   Mme DAHL : [interprétation] Pertinence. Cette question n'a rien à voir avec

 23   ce que sait le témoin.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, de toute évidence, la

 25   déclaration de M. Stefanovic a été conçue pour ternir mon image, pour me

 26   présenter sous le pire angle possible, que j'aurais tué Pasko Jovic, puis

 27   Vuletic. Le Procureur a un autre témoin, ils vont le présenter, puis

 28   Tomislav Nikolic aurait déclaré que j'ai commandité son meurtre. Mais je

Page 12196

  1   n'arrête pas de commander des meurtres et personne ne peut établir un lien

  2   quel qu'il soit entre moi et ces actes. Et maintenant Tomislav Nikolic nie

  3   ici que j'aurais été commanditaire de son meurtre, et on a senti dans le

  4   prétoire que vous étiez convaincu que je l'avais fait.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Veuillez poser la question au témoin.

  6   M. SESELJ : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Stefanovic, est-ce que j'ai jamais été dans les affaires ?

  8   R.  Mis à part la politique, est-ce que le fait d'enseigner à l'université

  9   fait partie d'être dans des affaires ?

 10   Q.  Non. Est-ce que dans le monde capitaliste je m'étais lancé dans des

 11   affaires à un moment donné ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  D'après Zoran Djindjic, une autre manière de me discréditer ça aurait

 14   été d'établir des liens les plus forts possibles entre moi et Milosevic et

 15   Stanisic ?

 16   R.  Oui, et le DB.

 17   Q.  Le service de Sûreté de Serbie. Dans ce qui nous a été donné par le

 18   Procureur ici, soi-disant comme étant votre déclaration, vous dites que

 19   j'étais en très bonne relation avec Slobodan Milosevic et avec les

 20   structures de la Sûreté d'Etat, y compris Jovica Stanisic.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame Dahl.

 22   Mme DAHL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, excusez-moi, mais

 23   je voulais que soit consigné au compte rendu d'audience le fait que le Juge

 24   Lattanzi avait quitté le prétoire et je me demandais s'il serait bon de

 25   faire une pause ou si l'on peut continuer sans elle.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Sans elle, le Règlement le permet.

 27   Continuez, Monsieur Seselj.

 28   M. SESELJ : [interprétation]

Page 12197

  1   Q.  Monsieur Stefanovic, savez-vous à quel moment j'ai rencontré pour la

  2   première fois de ma vie Slobodan Milosevic ?

  3   R.  Est-ce que je peux situer ça dans le temps, ce serait au milieu de

  4   l'année 1992.

  5   Q.  Je vais vous donner l'information précise. Très brièvement, c'était au

  6   Parlement de la République en avril 1992 que nous avons  fait connaissance

  7   et que nous nous sommes serrés la main. Puis en mai 1992, pour la première

  8   fois, Slobodan Milosevic m'a fait venir dans son cabinet. C'est là que j'ai

  9   eu mon premier entretien avec lui. Est-ce que je dis la vérité ?

 10   R.  Oui, mais c'est un entretien officiel, ça portait sur la constitution

 11   du Parlement fédéral.

 12   Q.  Il s'agissait des premières élections fédérales en République fédérale

 13   de Yougoslavie ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous devriez savoir cela, mes adversaires politiques, mes ennemis

 16   politiques, les médias pro-occidentaux ont lancé une campagne virulente

 17   contre moi à plusieurs reprises.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et dans ces campagnes, n'ont-ils pas proféré les pires mensonges et

 20   inventions ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Mais était-ce possible pour moi de répondre à tous ces articles, à

 23   toutes ces informations diffusées à la radio et à la télévision, tout ce

 24   qu'on lançait contre moi ?

 25   R.  Ça aurait été impossible, vous n'aviez pas la possibilité de faire ça.

 26   Q.  Les pires attaques lancées contre moi, est-ce que vous savez que j'ai

 27   rassemblé cela dans des recueils de documents publiés dans mes livres ?

 28   Est-ce que vous savez que par dépit j'ai fait cela ?

Page 12198

  1   R.  Au sein du parti, il y avait Katarina Ducic, sa fille et quelques

  2   autres militants du parti qui tous les jours prenaient des coupures dans

  3   les journaux en rassemblant ces pires attaques.

  4   Q.  Oui. Zorica Zirovic en faisait partie également. Nada Zirovic, je me

  5   corrige. Vous vous en souvenez ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Très bien. Il y avait aussi des accusations faisant état d'activités

  8   criminelles aussi qui ont été lancées ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Mais est-ce qu'on a jamais pu établir un lien entre moi et quelque

 11   activité criminelle que ce soit ?

 12   R.  D'après moi non, je ne sais pas, je n'étais pas au courant du fait que

 13   tu aurais commis des crimes.

 14   Q.  En 1990, vous vous souvenez que j'ai été mis en prison par trois fois

 15   par Milosevic ?

 16   R.  Je ne sais pas, amené ou mis en prison.

 17   Q.  En 1990, en septembre, 15 jours, Padinska Skela, pour avoir manifesté

 18   devant le parlement fédéral.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  20 jours par la suite à cause du rassemblement à la place de la

 21   république, puis 25 jours à cause d'un nouveau rassemblement. Est-ce que

 22   vous vous souvenez, vous êtes venu me voir tous les jours en prison à

 23   Padinska Skela ?

 24   R.  Au bout de ces 25 jours, tu n'as pas voulu sortir pendant cinq jours,

 25   et ils cherchaient à te forcer à sortir. Et tu ne voulais pas, tu voulais

 26   rester jusqu'au bout.

 27   Q.  Mais notre parti n'était pas enregistré pendant que j'étais en prison.

 28   Personnellement, vous avez organisé la collecte de signatures, une pétition

Page 12199

  1   --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez abordé tout à l'heure un point important

  3   par rapport à l'acte d'accusation et j'aimerais bien que le témoin me

  4   confirme cela.

  5   Monsieur le Témoin, dans l'acte d'accusation, il est dit que M. Seselj a

  6  participé à une entreprise criminelle à compter du 1er août 1991 et jusqu'en

  7   décembre -- jusqu'en septembre 1993. M. Seselj vous a posé la question de

  8   savoir à quel moment il a rencontré M. Milosevic. J'ai cru comprendre que

  9   vous aviez dit que c'était à la mi-1992. Pouvez-vous être très précis et me

 10   dire, à votre connaissance, d'après vous, à quel moment M. Seselj a

 11   rencontré feu Slobodan Milosevic ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je serai très précis là-dessus.

 13   Cette première rencontre avec Slobodan Milosevic, j'en sais de la bouche de

 14   Seselj qui m'a dit : "Tu sais, aujourd'hui --" il était député au Parlement

 15   de la république. Milosevic est venu là-bas. Je n'étais pas présent, je

 16   n'étais pas député. Mais d'après ce qu'il a dit, je me souviens qu'il est

 17   venu et qu'il a dit "Pinky a vu Tito," c'était quelque chose qu'on disait

 18   au sujet de Tito, et là il a dit "Aujourd'hui, j'ai vu Milosevic." Jamais

 19   Seselj n'allait voir Milosevic en tête-à-tête. Il emmenait toujours

 20   quelqu'un, un autre membre du parti avec lui, donc pendant les élections, à

 21   un jour près, enfin en mai 1992 il y a eu des élections et il a pris

 22   contact avec quelqu'un pour voir le chef de l'Etat, il fallait que le chef

 23   d'un parti rencontre le chef de l'Etat.

 24   Le 11 juin, je pense, à l'assemblée fédérale, Milosevic est venu. Nous deux

 25   nous étions ensemble l'un à côté de l'autre, Seselj et moi. Milosevic s'est

 26   approché de nous, il est entré dans la pièce et d'abord il est venu lui

 27   dire bonjour à lui, et moi aussi, la première fois, il m'a dit, "Bonjour,

 28   Monsieur Stefanovic." Je pensais qu'il ne me connaissait pas, mais il me

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  1   connaissait. Il connaissait mon nom de famille et ça m'a surpris.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, alors --

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'en sais.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous dites, c'est important.

  5   Si je comprends bien, c'est le 11 juin 1992 que M. Milosevic vous serre la

  6   main et vous appelle par votre nom, et là, vous en êtes étonné. Il serre la

  7   main aussi de M. Seselj. Mais vous qui étiez à l'époque très proche de M.

  8   Seselj, est-ce que M. Seselj avait déjà avant vu Slobodan Milosevic ou bien

  9   c'était la première fois qu'il le voyait ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il l'a vu avant cela. D'après ce qu'il a

 11   raconté, il est venu du Parlement de la république, où il était le seul

 12   député du Parti radical serbe.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand, à quelle date ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas la date, mais avant cela,

 15   quelques mois avant.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelques mois avant. Bon, de toute façon, quand M.

 17   Seselj témoignera, je pourrai lui poser la question.

 18   Bien, continuez.

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Stefanovic, est-ce que vous savez à quel moment j'ai rencontré

 21   Jovica Stanisic pour la première fois ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Voilà, je vais vous rafraîchir la mémoire. C'était au mois de novembre

 24   1992. Il y a eu une session du Parlement de la république, un député du

 25   parti au pouvoir, le Parti socialiste, est venu me voir et il m'a dit, "Le

 26   chef de la Sûreté d'Etat, Jovica, souhaite te rencontrer." J'ai accepté, et

 27   il m'a dit de me rendre devant le bâtiment du Parlement de la république et

 28   que Jovica Stanisic allait venir dans sa voiture. Effectivement, c'est ce

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  1   que j'ai fait, je suis sorti et au bout de quelques minutes j'ai vu arriver

  2   une voiture de luxe avec des verres teintés. La portière arrière s'ouvre,

  3   je monte dans la voiture et Jovica Stanisic me tend la main.

  4   Est-ce que je vous ai relaté notre rencontre ? A ce moment-là, Jovica

  5   Stanisic me dit qu'on prépare un attentat contre moi au Monténégro, et moi

  6   j'avais prévu de lancer une campagne électorale au Monténégro.

  7   R.  Oui. Oui, je m'en souviens. Mon idée était que tu ne devais pas partir

  8   au Monténégro.

  9   Q.  Mais est-ce que vous vous souvenez que de toute manière, je ne pouvais

 10   pas me déplacer parce que j'avais des douleurs terribles dans le dos, les

 11   derniers jours de la campagne je ne pouvais même pas me tenir debout, et le

 12   jour des élections j'ai été opéré de la colonne vertébrale.

 13   R.  Oui. C'était le 19 décision 1992, un dimanche, tôt dans la matinée. Tu

 14   es parti à la clinique de chirurgie neurologique et c'est là que tu as subi

 15   une intervention chirurgicale sur la colonne vertébrale. Je n'ai même pas

 16   pu venir te voir vu toutes les activités que nous avions. Donc je me

 17   souviens du diagnostique et je me souviens de la date de la journée. Est-ce

 18   que c'est exact ?

 19   R.  Je suppose que c'est exact. Et Frenki Simatovic, Frenki, quand est-ce

 20   que je l'ai rencontré pour la première fois ?

 21   R.  Je ne sais pas, je sais que je l'ai rencontré il y a deux ans.

 22   Q.  Je vais vous confier ce secret, c'est en 2003, donc avant que je l'aie

 23   rencontré moi, au moment où Frenki Simatovic a été amené pour la première

 24   fois à la prison de La Haye. Est-ce que vous me faites confiance sur cette

 25   date ?

 26   R.  Oui, Frenki Simatovic m'a dit la même chose. Donc je vous fais

 27   confiance.

 28   Q.  Et ici, on a insinué que vous auriez dit : "Je suis convaincu même si

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  1   je ne peux pas le prouver que Seselj a été l'exécutant des ordres donnés

  2   par Milosevic." Paragraphe 20 de votre prétendue déclaration de 2006; est-

  3   ce que vous avez dit cela aux enquêteurs de La Haye ?

  4   R.  Mais ça c'est tout comme ce qui s'est passé hier aux points 21 et 26.

  5   Je n'ai jamais vu ma déclaration oralement ou par écrit, au moins dix fois

  6   j'ai demandé au Tribunal qu'on me remette cette déclaration, mais je ne

  7   l'ai jamais reçue, je ne l'ai jamais lue, c'est la première fois que je

  8   l'ai vue hier, un ou deux pages dont mes signatures et j'ai vu ces

  9   paragraphes. Mais quand on fait une déclaration, on ne répartit pas sa

 10   déclaration dans les paragraphes. Ce n'est pas quelque chose d'habituel, de

 11   normal. Ça ne relève pas du bon sens.

 12   J'ai lu uniquement hier les paragraphes 21 et 26 dans le document

 13   062436 où il est question de ce que disait Frenki Simatovic, ce qu'il

 14   pensait. Au point 26, il est dit que ton conseiller politique ou militaire,

 15   je ne sais pas quoi, Pr Marjanovic et appelé Mika Sprajc --

 16   Q.   Donc vous niez avoir dit cela aux enquêteurs du Tribunal que

 17   j'étais l'exécutant des ordres donnés par Milosevic ?

 18   R.  Je nie cela.

 19   Q.  Monsieur Stefanovic, aux élections du mois de décembre 1992, le

 20   Parti radical serbe est devenu le deuxième parti politique de Serbie, donc

 21   il était plus fort qu'auparavant ?

 22   R.  72 députés.

 23   Q.  On ne pouvait pas créer le gouvernement ou la république sans

 24   nous; c'est cela ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Vous vous souvenez que vous et moi nous sommes allés négocier avec les

 27   dirigeants du Parti socialiste à leur siège dans cette tour à l'embouchure,

 28   on appelait ça le bâtiment du PC ?

Page 12203

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Milo Minic, Nikola Sainovic, et quelqu'un d'autre nous a accueillis là

  3   ?

  4   R.  Aleksandar Bercejg [phon] et Bata Zivojinovic, ils étaient acteurs, ils

  5   étaient là.

  6   Q.  Ces dirigeants du Parti socialiste nous ont offert d'entrer en

  7   coalition pour former le gouvernement ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous vous souvenez que j'ai toujours refusé toute forme de

 10   coalition. Je leur ai dit, nous les radicaux nous accepterons d'apporter

 11   notre soutien à un gouvernement minoritaire à condition que ce gouvernement

 12   résolve le problème de la crise économique et sorte le pays de la misère

 13   sociale ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Après, est-ce que nous avons apporté notre soutien au gouvernement

 16   minoritaire du Parti socialiste ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Six mois plus tard, nous nous sommes employés à renverser ce

 19   gouvernement parce que l'inflation était encore pire, il y avait encore

 20   plus de misère. La crise économique n'a pas arrêté de se creuser ?

 21   R.  Oui, nous avons commencé à renverser le gouvernement, il y a eu une

 22   attaque très forte de la part du Parti socialiste, c'est-à-dire de la part

 23   du pouvoir sur les radicaux, et dans la presse il y avait plein d'articles

 24   là-dessus. Toutes les maisons d'édition n'arrêtaient de s'en prendre aux

 25   radicaux. Donc il y a eu une véritable avalanche d'attaques contre nous.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, là aussi le point abordé est capital. Donc il

 27   s'agit d'être précis et de ne pas commettre d'erreur.

 28   La déclaration que vous contestez qui a été recueillie en 2003 et en 2006,

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  1   et vous nous avez expliqué pourquoi vous la contestez. Dans cette

  2   déclaration, il est écrit noir sur blanc que Slobodan Milosevic, en quelque

  3   sorte en liaison avec Simatovic et Stanisic, avait contrôlé le Parti

  4   radical serbe. Ceci apparaît au paragraphe 21 et au paragraphe 20. Voilà

  5   qu'on apprend par les questions posées qu'à un moment donné il y a eu une

  6   rencontre avec les membres du Parti socialiste pour qu'il y ait une

  7   alliance avec le Parti socialiste. Vous venez de dire en répondant à M.

  8   Seselj que M. Seselj avait refusé toute alliance. Alors c'est là où il y a

  9   le problème, il jaillit de lui-même.

 10   Si les paragraphes 20 et 21 sont vrais, on ne voit pas pourquoi M. Seselj

 11   se serait opposé à cette alliance. C'est que donc s'il s'oppose lors de

 12   cette réunion, c'est que les paragraphes 20 et 21 ne correspondent pas à la

 13   réalité.

 14   Alors, Monsieur, vous confirmez bien que vous étiez présent lors d'une

 15   rencontre entre M. Seselj, vous et les membres du Parti socialiste pour une

 16   alliance et que M. Seselj a refusé cette alliance ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je vais vous apporter

 18   deux ou trois faits qui peuvent être confirmés par des personnes qui sont

 19   disponibles et vivent à Belgrade.

 20   Je ne sais pas si M. Seselj s'en souviendra, en geste de bonne

 21   volonté, ils nous ont offert des gâteaux, mais il n'y avait pas les gâteaux

 22   qu'ils voulaient apporter, je n'arrive pas à me rappeler quels étaient ceux

 23   qu'ils ont fini par nous offrir, mais il y a un point dont je me souviens

 24   très bien, toi, tu ne sais pas encore aujourd'hui que moi je suis sorti

 25   devant cette pièce, que j'ai été reçu par Zoran Andjelkovic, il était haut

 26   placé dans leur parti à l'époque, il l'est encore aujourd'hui et nous avons

 27   eu un entretien et il a essayé de me convaincre d'exercer mon influence

 28   auprès de toi pour entrer dans un gouvernement de coalition. Malgré tout,

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  1   il a essayé d'une manière ou d'une autre de m'amadouer en me promettant des

  2   postes bien intéressants au sein de ce gouvernement. Je lui ai dit que je

  3   ne voulais pas en parler à part ni secrètement. Je me souviens très bien de

  4   cette conversation, tu as dit à Minic, puisque Minic était mon camarade de

  5   classe et on vient du même coin, si tu acceptes de négocier avec eux, il va

  6   y avoir un courant bien plus dur au sein des radicaux qui ne voudraient pas

  7   en entendre parler, qui ne voudraient même pas soutenir un gouvernement

  8   minoritaire, donc il valait mieux qu'ils acceptent ce que tu leur offrais.

  9   C'est au douzième étage de ce bâtiment du Parti communiste qu'il y a

 10   eu cet entretien, on nous a apporté du coca et des gâteaux, des pâtisseries

 11   et je me souviens qu'il y avait Minic et il y avait aussi Bercejg, un

 12   comédien et Bata Zivojinovic, me semble-t-il, et vis-à-vis il y avait Zoran

 13   Andjelkovic qui a mené cet entretien, mais aujourd'hui tu ne sais encore

 14   pas qu'il y a eu cet entretien. Il a essayé de me convaincre d'entrer au

 15   gouvernement et qu'on allait nous donner des portefeuilles intéressants.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous donnez un luxe de précision avec des

 17   détails comme le gâteau qui semble accréditer l'existence de cette réunion.

 18   A quelle date vous la situez dans votre souvenir, si c'est possible ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'est difficile de vous répondre, Monsieur

 20   le Juge. Vous savez, j'ai une autre approche, je ne me souviens pas de

 21   date, pas de numéro de téléphone, pas de nombre de personnes. Je considère

 22   que cela n'a pas d'importance. Donc si j'ai besoin d'une date, je la note

 23   dans mon agenda ou c'est consigné d'une autre manière, donc je ne mémorise

 24   ni les dates ni les années, c'était peut-être une dizaine, une quinzaine de

 25   jours après les élections. Logiquement, entre, comme nous disons, deux

 26   Noëls, entre le 7 et le 10 ou le 15 janvier 1994.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Monsieur Seselj.

 28   M. SESELJ : [interprétation]

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  1   Q.  Vous souvenez-vous, Monsieur Stefanovic, nous avons présenté une

  2   demande pour que le gouvernement socialiste soit renversé, ce parti a

  3   publié un communiqué qui a été diffusé pratiquement par tous les médias de

  4   Serbie, cela a été lu à plusieurs reprises, et là, il me qualifiait de

  5   criminel de guerre, de fou et d'alcoolique ? Ils disent que je suis un

  6   criminel. Vous vous en souvenez ?

  7   R.  Oui, oui. 

  8   Q.  Ils n'ont jamais pu démontrer que j'étais un criminel de guerre, n'est-

  9   ce pas ?

 10   R.  Oui, c'est ça. Tu as essayé de te rendre à La Haye et de rencontrer

 11   Louise Arbour. Je pense qu'elle était Procureure à l'époque. Je ne sais

 12   plus comment s'appelait cette femme, et j'ai même joué le médiateur en

 13   passant par différentes ambassades européennes à Belgrade, parce que les

 14   Néerlandais ne te permettaient pas de rentrer dans le pays, ne te donnaient

 15   pas le visa.

 16   Q.  Oui, mais justement on me dénonçait en tant que criminel de guerre,

 17   c'est le régime qui le faisait à Belgrade, et j'ai demandé un visa pour

 18   pouvoir me rendre à La Haye aux Pays-Bas.

 19   R.  Justement, c'est ce que je suis en train de dire, c'est exact, et les

 20   Pays-Bas ont refusé de t'accorder un visa.

 21   Q.  S'ils me l'avaient accordé, en 1993 je me serais rendu à La Haye, et

 22   j'aurais dit : "Voilà, me voici, si vous avez quoi que ce soit contre moi,

 23   dites-le."

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  Est-ce que j'ai dit cela par la voie de tous les médias ?

 26   R.  Oui, oui. Je peux ajouter un autre détail. Je ne sais pas si à l'époque

 27   je te l'ai dit, mais je me suis trouvé au club des écrivains, des hommes de

 28   lettres, avec le deuxième secrétaire de l'ambassade allemande à Belgrade,

Page 12208

  1   au dîner. J'ai demandé si on pouvait te donner un visa pour que tu puisses

  2   te rendre également aux Pays-Bas. Il m'a répondu qu'il y avait là une

  3   employée de l'ambassade des Pays-Bas, et ce deuxième secrétaire de

  4   l'ambassade allemande a dit : "Pourquoi faites-vous cela ? Vous n'osez pas

  5   donner un visa à Seselj pour qu'il se rende devant le Tribunal. Nous, les

  6   Allemands, nous sommes prêts à lui accorder un visa." Je ne me souviens pas

  7   ce qu'elle lui a répondu. Je ne sais pas s'il m'a dit quel entretien,

  8   comment s'est poursuivi l'entretien entre eux, mais ça confirme ce que tu

  9   es en train de dire.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est moins le quart. On est obligé de faire la

 12   pause.

 13   Une question logistique. L'audience demain, qui était prévue l'après-midi,

 14   aura lieu le matin à 8 heures 30. Le greffier prendra toutes les mesures

 15   possibles. Cette audience du matin pourra, le cas échéant, nous permettre

 16   d'aller jusqu'à 13 heures 45, en cas de besoin, parce que comme on a

 17   encore, après ce témoin, deux autres témoins, j'ai peur que le temps soit

 18   très court. On aura peut-être besoin du temps, donc on tiendra l'audience

 19   demain à 8 heures 30. Voilà. Ça, c'est pour la logistique.

 20   Nous nous retrouverons dans 20 minutes pour la suite du contre-

 21   interrogatoire.

 22   Je vais demander à Mme la Greffière de me faire le décompte.

 23   Oui, Monsieur Seselj.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Justement, c'est la question que je voulais

 25   poser. Il me reste combien de temps ?

 26   Aussi, Monsieur le Président, bien sûr je peux toujours m'adapter aux

 27   horaires, mais est-ce que le greffe peut, s'il vous plaît, faire en sorte

 28   qu'on me transporte à 8 heures moins le quart. Parce que si ça se passe

Page 12209

  1   avant, il faut que les gardes ouvrent la cellule avant, parce qu'il me faut

  2   45 minutes pour me préparer pour le procès, pour prendre la douche, pour me

  3   raser et tout le reste.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le juriste de la Chambre va faire le

  5   nécessaire. 

  6   Monsieur Seselj, vous avez utilisé une heure dix. Comme vous aviez deux

  7   heures, il vous restera 50 minutes après la reprise. Voilà ce que je vous

  8   dis.

  9   Nous nous retrouvons dans 20 minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.

 11   --- L'audience est reprise à 16 heures 09.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 13   Monsieur Seselj, il vous reste 50 minutes. Je vous donne la parole.

 14   M. SESELJ : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Stefanovic, il y a deux brèves questions qu'il ne faut pas que

 16   j'oublie. Elles ont un rapport avec ce dont nous parlions tout à l'heure.

 17   Les cocardes ont été mentionnées. Vous les portiez sur vous quand nous

 18   sommes allés faire ces voyages de tournée et vous les vendiez. Est-ce que

 19   le Parti radical serbe a, à quelque moment que ce soit, fabriqué ses

 20   propres cocardes chetniks, ou est-ce que, comme n'importe quel citoyen,

 21   nous nous procurions ces cocardes dans les commerces qui se trouvaient le

 22   long de la rue dans le centre de Belgrade ou ailleurs ?

 23   R.  Le Parti radical serbe n'a jamais fabriqué ni des cocardes ni quelque

 24   autre emblème que ce soit. Je les ai achetées personnellement chez un

 25   commerçant privé, chez un certain Indija.

 26   Q.  Savez-vous qui est Nikola Kavaja ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Il est mort récemment. J'ai vu des images de son enterrement. Je vous

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  1   pose la question parce que des membres de la Garde serbe de Vuk Draskovic

  2   en uniforme lui ont rendu des honneurs. Est-ce que vous avez vu ces images

  3   ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Des membres de la Garde serbe, qui portaient un uniforme noir, l'avez-

  6   vous remarqué ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Les volontaires du Parti radical serbe, ont-ils à quelque moment que ce

  9   soit, à quelque moment que ce soit, à quelque moment que ce soit porté des

 10   uniformes noirs ? Je parle bien de n'importe quel volontaire du Parti

 11   radical serbe.

 12   R.  Jamais.

 13   Q.  En êtes-vous sûr ?

 14   R.  Non, jamais.

 15   Q.  Bon. Nous avons évoqué tout à l'heure le renversement du gouvernement

 16   socialiste, et les communiqués qu'ont fait publier les membres du Parti

 17   socialiste contre moi et contre le Parti radical serbe. Vous savez que le

 18   régime de Milosevic a provoqué mon arrestation à plusieurs reprises, n'est-

 19   ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Je vais vous rafraîchir la mémoire. En 1994, c'était la première fois,

 22   ils m'ont condamné à un mois de prison, puis ensuite j'ai été condamné à

 23   trois mois ?

 24   R.  Au total quatre mois dans la prison centrale.

 25   Q.  Oui, en raison de l'incident survenu à l'assemblée fédérale; c'est bien

 26   cela ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Lorsque Markovic, un député fédéral qui était membre de notre parti, a

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  1   jeté un verre d'eau sur le président de l'assemblée, qui l'a expulsé de la

  2   salle, et nous n'avons pas autorisé au service de sécurité de l'assemblée

  3   de l'appréhender à l'intérieur de la salle, donc il y a eu un autre

  4   incident, n'est-ce pas, et nous nous sommes battus avec les policiers,

  5   littéralement ?

  6   R.  Oui, j'ai participé à cela.

  7   Q.  Et j'ai été condamné à quatre mois de prison. J'étais le seul qui a

  8   purgé une peine de prison, n'est-ce pas, parce que j'étais le plus fort,

  9   n'est-ce pas ?

 10   Vous rappelez-vous qu'un groupe de collaborateurs - vous n'étiez pas membre

 11   du parti à l'époque - a été arrêté encore une fois  à Gnjilan en juin 1995

 12   parce que nous avions organisé une réunion publique qui avait été interdite

 13   par le régime, et nous sommes allés tout de même à Gnjilan, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui, et vous avez été jeté en prison.

 15   Q.  Oui. Et puis la police --

 16   R.  -- est intervenue et vous a jeté en prison, et je suis venu vous y

 17   rendre visite.

 18   Q.  J'ai passé deux mois en prison avec mes collaborateurs, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Quand Slobodan Milosevic était au pouvoir, est-ce que qui que ce soit a

 21   attaqué à quelque moment que ce soit Slobodan Milosevic et son épouse, qui

 22   était dirigeante d'un autre parti au pouvoir; est-ce que quiconque l'a fait

 23   plus violemment que moi ?

 24   R.  Non, je ne pense pas. Je sais que vous avez écrit plusieurs livres à ce

 25   sujet. Il y a eu un grand nombre d'émissions et d'apparitions publiques que

 26   vous avez faites, de publications dans les médias, d'articles de presse,

 27   d'émissions à la télévision. J'ai essayé de me rappeler le titre d'un de

 28   vos ouvrages, "Markovic la mégère rouge", je crois que c'était ça.

Page 12212

  1   Q.  Bon. Ces livres, l'Accusation les a en sa possession depuis longtemps.

  2   Le régime est parvenu à m'arrêter uniquement en raison de certains

  3   incidents qui avaient été provoqués mais qui étaient très anodins, n'est-ce

  4   pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que le régime a été informé du fait que j'ai participé à quelque

  7   moment que ce soit à la commission d'un crime quelconque, ou à un crime de

  8   guerre, ou à quoi que ce soit de ce genre ? Est-ce que le régime n'aurait

  9   pas fait tout ce qui était en son pouvoir pour m'arrêter immédiatement si

 10   tel avait été le cas et s'occuper de moi ?

 11   R.  Je pense que oui, en effet.

 12   Q.  Vous rappelez-vous que le Parti radical serbe et Milosevic et son parti

 13   se sont réconciliés en 1998, et à quelle occasion ?

 14   R.  Je n'étais déjà plus membre à ce moment-là, mais je pense --

 15   Q.  La situation au Kosovo-Metohija ?

 16   R.  Oui, la crise du Kosovo, c'est ça, c'est exact.

 17   Q.  Dans votre déclaration écrite, il est écrit : "Milosevic m'a donné les

 18   moyens et les financements nécessaires à l'application de la politique du

 19   régime Milosevic." Est-ce que vous auriez dit ceci aux enquêteurs de La

 20   Haye à quelque moment que ce soit ?

 21   R.  Certainement pas dans ces termes.

 22   Q.  Est-ce que le régime de Milosevic a aidé le Parti radical serbe de

 23   quelque façon que ce soit, soit par voie de financement, soit au niveau des

 24   infrastructures, ou en termes d'organisation ?

 25   R.  Tant que j'en ai été membre, non. Ça, je le sais avec certitude.

 26   Q.  Il est écrit ici dans votre prétendue déclaration écrite que je passais

 27   fréquemment du temps au téléphone à converser avec Radmilo Bogdanovic. Est-

 28   ce que vous auriez été informé du fait ou est-ce que vous avez le souvenir

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  1   que Radmilo Bogdanovic était un permanent très apprécié du Parti socialiste

  2   et qu'il était celui que j'appréciais toujours le plus d'attaquer à partir

  3   d'une quelconque tribune à l'assemblée ?

  4   R.  J'étais en bons termes avec Radmilo Bogdanovic, et je continue à l'être

  5   aujourd'hui. Il est exact que pour une raison ou pour une autre, Radmilo

  6   Bogdanovic a souvent été exposé à vos critiques.

  7   Q.  Au paragraphe 21 de votre déclaration écrite on lit que le Parti

  8   radical serbe a collaboré avec Frenki Simatovic, dirigeant, chef des Bérets

  9   rouges. Est-il exact que vous ayez dit cela ?

 10   R.  J'en ai déjà parlé cet après-midi. Ceci n'a rien à voir avec une

 11   quelconque réflexion ici du bon sens.

 12   Q.  Quand il y a eu des affrontements très graves avec le régime de

 13   Milosevic, j'ai souvent provoqué Jovica Stanisic et Frenki Simatovic, et

 14   cetera, et je m'attendais à ce qu'ils répondent de façon nerveuse, disons.

 15   Est-ce que vous vous en souvenez ?

 16   R.  Oui, il y a eu quelques attaques contre ces deux hommes.

 17   Q.  Je lançais une provocation par voie médiatique et j'attendais leur

 18   réaction que je pensais devoir être nerveuse et dont je pensais qu'elle me

 19   permettrait de l'exploiter politiquement; est-ce que c'est ce qui s'est

 20   passé ?

 21   R.  Oui, précisément ça.

 22   Q.  Et j'ai créé pas mal de confusion de sorte que plus personne ne s'y

 23   retrouvait et ne pouvait savoir ce qui se passait réellement ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que j'étais un maître dans la production d'effets de propagande

 26   ?

 27   R.  Je n'ai jamais rencontré un maître plus grand que vous dans ce domaine,

 28   jamais rencontré quelqu'un qui faisait ça mieux que vous.

Page 12214

  1   Q.  Vous avez dit, c'est écrit ici : "Nous avons collaboré avec des membres

  2   du Grand quartier général de la JNA comme, par exemple, le général

  3   Domazetovic."

  4   Mais vous ne citez pas de date précise quant à cette coopération avec lui,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Je ne sais pas si vous connaissez Domazetovic. J'ai rencontré

  7   Domazetovic uniquement en 2002 ou 2003. Est-ce que vous le connaissez ?

  8   Q.  Je l'ai rencontré tardivement. C'était un homme qui était déjà à la

  9   retraite, mais Ljubisa Petkovic après m'en avoir informé et avoir obtenu

 10   mon accord est allé le rencontrer pour qu'il accepte d'envoyer des

 11   volontaires. Ce n'est pas un secret. Mais vous n'avez pas pu parler de cela

 12   parce que vous n'étiez pas très proche de lui, n'est-ce pas ?

 13   R.  Je n'étais pas en contact avec Ljubisa Petkovic du tout, c'est la

 14   raison pour laquelle je dis maintenant que c'est lui qui aurait dû être

 15   envoyé au Tribunal de La Haye plutôt que vous.

 16   Q.  Qui ça ?

 17   R.  Ljubisa Petkovic.

 18   Q.  Il est déjà à La Haye. Il a été condamné et il est en train de purger

 19   sa peine.

 20   R.  Oui, mais c'est ce qui s'apprêtait à m'arriver aussi parce que le

 21   Procureur affirme la même chose que ce qu'a dit Tomislav Nikolic à la

 22   tribune. Il me dit que je ne dis pas la vérité. C'est quelque chose qui a

 23   été orchestré, et tout ce qu'on peut s'attendre à obtenir de tout ça c'est

 24   une peine de prison.

 25   Ljubisa Petkovic s'en est tiré pas mal. Il a passé quatre mois pas

 26   trop désagréables à La Haye. Il était aidé par les Croates, les Serbes,

 27   toutes sortes de gens, et il s'est fait une place au Parlement en tant que

 28   député. Et moi, je vais me faire tancer. Il a été dit il y a deux heures

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  1   que l'Etat devrait prendre des mesures contre ceux qui témoignent à La

  2   Haye.

  3   Q.  Monsieur Stefanovic, l'Accusation ne peut pas prouver que vous mentez.

  4   L'Accusation ne peut pas prouver que vous mentez parce que tout ce que vous

  5   avez dit jusqu'à présent au cours du contre-interrogatoire est appuyé par

  6   des documents et peut être prouvé comme étant la vérité.

  7   R.  Je dis la vérité en toute sincérité --

  8   L'INTERPRÈTE : Micro, Monsieur le Président.

  9   Votre microphone n'est pas allumé, Monsieur le Président.

 10   Non, Monsieur le Président, la cabine B/C/S/français ne vous entend pas.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Il doit y avoir un problème parce que mon micro est

 12   allumé. Est-ce que la cabine entend ?

 13   L'INTERPRÈTE : Je ne vous entends pas, Monsieur le Président. Ça va.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ça marche.

 15   Monsieur le Témoin, vous venez de dire un petit détail et je me demande si

 16   c'est une erreur de traduction. Vous parliez tout à l'heure de Petkovic.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, l'interprète ne vous

 18   entend pas et me le fait savoir.

 19   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine B/C/S/français, en fait, non, Monsieur le

 20   Président, on ne vous entend pas. Il faudrait peut-être que M. Seselj

 21   éteigne son micro.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous pouvez éteindre votre micro.

 23   Bien. Est-ce que les cabines m'entendent.

 24   L'INTERPRÈTE : Ça va mieux, Monsieur le Président. Merci.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Témoin, vous avez dit un petit

 26   détail qui est passé très vite, mais moi, je me suis dit, y a-t-il une

 27   erreur ou pas. Vous dites que M. Petkovic qui a été condamné à une peine de

 28   prison a été assisté par des Croates et des Serbes, et qu'il a un poste au

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  1   Parlement comme député. M. Petkovic est député maintenant ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je crois qu'il l'est. Je crois qu'il est

  3   député, je ne le sais pas exactement, mais je crois.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Député de quel parti politique ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Le Parti radical serbe.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  7   On continue.

  8   M. SESELJ : [interprétation]

  9   Q.  Puisque vous venez d'aborder ce point, il va falloir que nous nous en

 10   occupions aussi. Etes-vous au courant, Monsieur Stefanovic, que depuis pas

 11   mal de temps Ljubisa Petkovic est revenu au sein du Parti radical serbe ?

 12   R.  Oui. Son nom devait être sur la liste électorale pendant la campagne

 13   électorale pour les élections parlementaires. Oui, effectivement il l'a été

 14   et il a mené campagne.

 15   Q.  Il a pris la parole à des réunions publiques ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  La liste de candidatures a été établie deux mois avant les élections,

 18   n'est-ce pas, à peu près ?

 19   R.  Oui, c'est la loi qui l'impose. Son nom devait figurer sur la liste.

 20   Q.  Les élections ont eu lieu au début du mois de mai ?

 21   R.  Le 12.

 22   Q.  Donc c'est au mois de mars que son nom devait être inscrit sur la liste

 23   des candidats, n'est-ce pas ?

 24   R.  Au plus tard, peut-être même avant.

 25   Q.  Et il a été arrêté à la fin du mois de mai, n'est-ce pas ? Vous vous

 26   rappelez la date de son arrestation ?

 27   R.  Il a été sorti de l'asile de fous à la fin du mois de mai, je crois.

 28   Q.  Ne parlez pas comme ça, Monsieur Stefanovic, ne dites pas qu'on l'a

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  1   sorti de l'asile de fous.

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  Il était à l'hôpital et pas à l'asile de fous; c'est bien ça, Monsieur

  4   Stefanovic, n'est-ce pas ? Ne montrez pas votre intolérance à l'égard de

  5   Ljubisa Petkovic ?

  6   R.  Je ne manifeste pas la moindre intolérance. Je voulais simplement dire

  7   qu'il avait été kidnappé.

  8   Q.  Monsieur Stefanovic, à n'importe lequel d'entre nous il peut arriver

  9   qu'après diverses tortures nous ayons besoin d'aide psychiatrique et ceci

 10   n'a rien de contraire à la morale ou de risible, le fait que quelqu'un qui

 11   se trouve dans une situation de vie difficile et qui a besoin de l'aide des

 12   psychiatres, n'est-ce pas ?

 13   R.  Mais je m'aperçois que vous me comprenez mal dans toute cette histoire.

 14   Il y a eu des articles de presse qui ont paru et encore aujourd'hui les

 15   journaux écrivent à ce sujet. Il y a dans ces articles des mentions qui

 16   sont faites à des tortures, à d'autres formes de sanctions dues à des

 17   criminels siptar, donc ne vous méprenez pas sur le sens de mes propos, je

 18   vous prie. J'étais en train de défendre, si je puis m'exprimer ainsi,

 19   Ljubisa Petkovic par rapport à ce procès qui lui a été imposé par le

 20   Tribunal de La Haye.

 21   Il est vrai qu'il a été amené au bord de la folie et il est tout à

 22   fait normal qu'il demande l'aide des médecins. N'importe qui dans de telles

 23   conditions difficiles a le droit de chercher à recevoir de l'aide.

 24   Vous m'aviez mal compris, mais bon, pas de problème.

 25   Q.  Avez-vous entendu dire que nous avions un député, Dragan Tasic, un

 26   homme très renommé, qui avait terminé ses études de droit à la Faculté de

 27   droit de Montpellier, extrêmement bon juriste, qui connaissait très bien la

 28   langue française et la langue anglaise, et qui a joué un rôle très

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  1   important dans l'équipe qui m'assiste dans le cadre de ma défense ici.

  2   Avez-vous entendu parler de Dragan Tasic, il est mort ?

  3   R.  J'ai entendu parler de lui, mais je ne connais pas cet homme.

  4   Q.  Malheureusement, il a trouvé la mort cet été alors qu'il n'avait que 49

  5   ans, et quand Ljubisa Petkovic est revenu de prison, la direction centrale

  6   de la patrie a décidé que Ljubisa Petkovic devait remplacer Dragan Tasic en

  7   tant que député. Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

  8   R.  C'est la première fois que j'en entends parler.

  9   Q.  Et comme le Parti radical serbe est férocement opposé au Tribunal de La

 10   Haye, la direction centrale de la patrie a estimé qu'il convenait de rendre

 11   tous les honneurs auxquels avait droit Ljubisa Petkovic pour ses actions

 12   héroïques, car même sous le coup d'une peine de prison, il a accepté de

 13   témoigner à charge dans le procès qui m'est intenté; est-ce que c'est bien

 14   ce qui s'est passé ?

 15   R.  Je suis d'accord avec ce que vous dites.

 16   Q.  Très bien. Monsieur Stefanovic, tout autant que je suis opposé à toute

 17   personne manifestant la moindre intolérance à votre égard, je suis

 18   également opposé à toute personne qui manifestera la moindre intolérance à

 19   l'égard de Ljubisa Petkovic.

 20   R.  Non, je n'étais pas en train de manifester de l'intolérance. Vous

 21   m'avez mal compris.

 22   Q.  D'accord. Avançons.

 23   Est-ce que le Parti radical serbe a, à quelque moment que ce soit dans

 24   l'une ou l'autre de ses sections ou par l'intermédiaire du Mouvement

 25   chetnik-serbe, créé des unités à l'intérieur de la Serbie par municipalité

 26   ou communauté locale ? Est-ce que vous auriez à quelque moment que ce soit

 27   entendu parler de cela à l'intérieur de la Serbie ?

 28   R.  Non, cela n'a pas été le cas.

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  1   Q.  Donc lorsque des volontaires étaient envoyés sur le front, ils

  2   arrivaient d'abord à Belgrade, puis allaient à la caserne de Bubanj Potok,

  3   où on leur distribuait des armes et des uniformes et ensuite ils étaient

  4   envoyés sur le front. Et quand ils revenaient, chacun rentrait chez lui à

  5   son domicile, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est ainsi que les choses se passaient.

  7   Q.  Ici dans cette soi-disant déclaration écrite émanant de vous en page 7,

  8   je lis ce qui suit : 

  9   "Je suis en train de décrire la hiérarchie de l'état-major de guerre ainsi

 10   que les unités qui étaient sur le terrain et qui se désignaient sous le nom

 11   de Chetniks."

 12   Est-ce qu'en Serbie il a existé la moindre unité à Lapovo, par exemple, ou

 13   à Gornji Milanovci, ou à Valjevo, ou n'importe où ailleurs, est-ce qu'il y

 14   avait un homme qui commandait une unité basée à Valjevo, par exemple. Est-

 15   ce que ceci existait ?

 16   R.  A quoi serviraient de telles unités, quel aurait été l'objectif

 17   poursuivi par ces unités ? Non, ceci est contraire à la vérité. Il

 18   n'existait pas de groupes organisés de Chetniks sur le territoire de

 19   Serbie, parce que ça n'était pas nécessaire.

 20   Q.  Je vous pose cette question parce que nous avons entendu un témoin à

 21   charge ici dont la déposition a été contestée par moi et qui a prétendu que

 22   nous avions des unités dans toutes les municipalités et que la structure

 23   militaire de ces unités --

 24   R.  Mais quelles unités ?

 25   Q.  Nous n'allons pas poursuivre sur ce sujet. Voyons quelques points à

 26   préciser encore dans le temps qu'il me reste. J'ai pris quelques notes.

 27   Monsieur Stefanovic, au cours de l'interrogatoire principal, vous avez

 28   évoqué un point qui à mon avis est particulièrement important. Vous avez

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  1   déclaré que vous aviez été recruté par le Tribunal pour contacter le Parti

  2   radical serbe et, par l'intermédiaire du parti, me proposer un procès à

  3   Belgrade, en m'offrant une possibilité d'être en liberté provisoire et

  4   condamné à une peine légère de dix ans seulement, et que j'ai rejeté cette

  5   offre. Expliquons ce point plus avant.

  6   D'abord, qui vous a appelé et à qui avez-vous parlé de cela ?

  7   R.  A Bruno Vekaric du Tribunal. Il m'a dit qu'il avait été sollicité par

  8   La Haye pour tenter une prise de contact avec les radicaux, et je lui ai

  9   dit que je pouvais établir ce contact. Je pensais qu'il me serait toujours

 10   très facile de contacter Dragan Todorovic, par exemple, qui est l'un des

 11   dirigeants les plus importants du Parti radical, et je l'ai fait

 12   effectivement. J'ai pris contact avec lui par téléphone et nous avons parlé

 13   ensemble. J'ai déjà dit que je l'ai rencontré à la Pizzeria Atos à Belgrade

 14   et qu'il est arrivé avec quelques minutes de retard. Puis nous sommes

 15   montés en voiture et nous avons pris l'autoroute de façon à ne pas pouvoir

 16   être mis sur écoute par qui que ce soit. Et je lui ai dit ce qu'il en

 17   était.

 18   L'histoire est la suivante. L'histoire, c'était que vous deviez venir pour

 19   vous faire juger par les tribunaux de votre pays, et que vous seriez

 20   condamné à une peine légère puisqu'elle signifierait pratiquement une

 21   libération immédiate à la fin du procès et que ce serait la meilleure

 22   solution pour vous.

 23   Q.  Vous avez dit tout cela à Dragan Todorovic ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et Dragan Todorovic m'a transmis tout ça, et je lui ai opposé un refus

 26   catégorique; c'est bien ça ?

 27   R.  En effet, c'est ce qu'il m'a dit. Dragan Todorovic m'a appelé par

 28   téléphone et il m'a dit : "Rencontrons-nous," donc nous sommes allés au

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  1   même endroit sur la même autoroute, et voilà. Je n'ai pas fait le moindre

  2   commentaire, j'ai simplement entendu ce qu'il avait à me dire. Il me l'a

  3   dit, puis j'ai donné à Bruno le résultat de toutes ces rencontres, il

  4   n'était pas tout seul, il y avait des gens autour de lui. Et ils ont tous

  5   dit quand ils ont entendu ce que je leur annonçais, ils ont tous dit à

  6   haute voix : "Bon Dieu, c'est un fou complet. Pourquoi est-ce qu'il

  7   n'accepte pas cette offre ? Cette solution n'est pas mauvaise pour lui." A

  8   ce moment-là, j'ai dit : "Je ne sais pas. Je ne suis pas son conseiller. Je

  9   ne peux pas décider à sa place. J'ai fait ce que vous m'avez demandé de

 10   faire. J'ai servi d'intermédiaire." Donc je considérais que j'avais joué le

 11   rôle d'un intermédiaire, d'un entremetteur entre lui et le Tribunal,

 12   puisque je travaillais pour le Tribunal le matin et d'une certaine façon je

 13   faisais un autre travail pour lui l'après-midi.

 14   Q.  C'est un porte-parole du Tribunal ou de quoi qui vous a contacté ?

 15   R.  En effet, c'était un représentant.

 16   Q.  Est-ce qu'il y a d'autres personnes à qui vous avez remis des

 17   renseignements de ce genre ?

 18   R.  Je ne me rappelle pas leurs noms, mais je pourrais les retrouver parce

 19   que je connais ces personnes. Elles travaillent au bureau du Procureur,

 20   mais je ne sais pas comment elles s'appellent.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 22   Juges, je demande que vous exigiez de Bruno Vekaric une déclaration écrite,

 23   représentant du tribunal de Belgrade, du tribunal spécial des crimes de

 24   guerre à Belgrade. Je pense que c'est un renseignement très important et

 25   qu'il devrait être prié de mettre tout cela par écrit.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Seselj, est-ce que je peux vous

 27   demander quelque chose ? Est-ce que quelqu'un vous a rapporté ce que je

 28   viens de dire, ce dont nous avons parlé, au nom de Dragan Todorovic ?

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dragan Todorovic m'en a parlé personnellement,

  2   et j'ai refusé cette offre avec la plus grande fermeté parce que je n'ai

  3   jamais été d'accord pour marchander ou quoi que ce soit de ce genre par

  4   rapport à un procès, et je déteste toute personne qui accepte un plaidoyer

  5   de culpabilité avec le bureau du Procureur. Je suppose que ceci est de

  6   notoriété publique, que tout le monde le sait bien.

  7   M. SESELJ : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Stefanovic, après mon départ à La Haye, vous avez participé à

  9   des actions de propagande du régime contre moi, personnellement, et contre

 10   le Parti radical serbe, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pendant votre séjour ici, vous vous êtes exprimé en des termes peu

 13   élogieux à mon encontre et à l'encontre du Parti radical et des radicaux,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  En effet.

 16   Q.  Mais c'était quoi votre intérêt ? Est-ce que c'est ma grève de la faim

 17   qui vous a fait changer d'avis et d'attitude du jour au lendemain, pour que

 18   vous vous proposiez ensuite comme témoin à décharge en contactant mon

 19   équipe de Défense ?

 20   R.  Pas mal de choses m'ont influencé. Ce n'est pas quelque chose qui était

 21   une décision ferme et irrévocable chez moi. Mais quand j'ai vu tout ce qui

 22   se passe, cette farce énorme, après l'incident dont nous venons de parler,

 23   après ce qui s'est passé au sujet d'une offre de procès à Belgrade, et

 24   cetera, et cetera, et bien d'autres choses qui m'ont paru très négatives

 25   aussi, après tout ce qui m'est arrivé à moi de très désagréable, parce que

 26   j'ai été traité ici comme un enfant retardé. Je me rappelle ce jour où le

 27   Procureur, enfin, la dame qui représente le bureau du Procureur, celle qui

 28   est assise en face de vous, a dit : "Bonjour, Monsieur Stefanovic." J'ai

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  1   dit : "Bonjour, Madame." Elle me demande : "Est-ce que vous êtes Chetnik ?"

  2   Je dis : "Oui, je suis Chetnik." Elle dit : "Vous avez de l'honneur et une

  3   morale," et j'ai compris quel était le but de la question, qui était bien

  4   différent de ce que je pensais qu'il était au départ, parce qu'il y a des

  5   gens qui manquent d'éducation et qui disent : "Oui, nous sommes Chetniks.

  6   Nous sommes des gens très particuliers. Nous ne racontons pas de

  7   mensonges," et cetera, et cetera. Il y a des choses qu'on peut dire et des

  8   choses qu'on ne peut pas dire. Mais ma réponse que je lui ai faite c'était

  9   : "Madame le Procureur, je m'occupe de politique, j'ai une action politique

 10   et je ne peux pas être classé dans une quelconque catégorie." Elle a été

 11   très surprise et nous en avons discuté.

 12   Malheureusement, nous n'avons pas la transcription de ces entretiens, pas

 13   le moindre enregistrement de ces conversations, mais il y a eu pas mal de

 14   circonstances spéciales, pas mal de choses qui se sont passées, surtout

 15   quand j'ai vu la campagne lancée par tout l'Occident et par le Tribunal de

 16   La Haye, sous l'impulsion du bureau du Procureur et du Procureur. Par

 17   exemple, l'Etat de Serbie est enfermé dans un ghetto, et c'est sur

 18   l'insistance du Tribunal que nous devrions faire quelque chose, on ne peut

 19   pas faire autre chose. Ils sont incapables de capturer Ratko Mladic, ils

 20   sont incapables de capturer Goran Hadzic, et à moins que nous le capturions

 21   dans les dix années qui viennent, nous serons punis. Qui est-ce qui va nous

 22   punir ? L'Accusation ou les autres nous puniront pendant les 100 ans à

 23   venir, mais il n'y aura pas de négociation. Ils nous traitent comme si nous

 24   étions dans une république bananière.

 25   Ce que j'ai vécu aujourd'hui, je ne l'aurais pas prévu. Je ne pouvais pas

 26   imaginer que quiconque me dirait en face que j'étais un menteur, alors que

 27   je n'ai jamais menti jusqu'à présent.

 28   Mme LE JUGE LATTANZI : Je comprends que vous êtes un politicien, mais ici,

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  1   vous ne pouvez pas vous lancer tout le temps, comme vous êtes en train de

  2   faire pendant ce contre-interrogatoire, vous lancer à faire des

  3   déclarations politiques.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, il y a un élément important --

  5   L'INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur le Président. On ne vous entend pas,

  6   Monsieur le Président.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore une fois, on ne vous entend pas. Les

  8   interprètes ne vous entendent pas, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez dit quelque chose --

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- qui peut être important.

 12   Quand M. Seselj vous a demandé si vous aviez fait une campagne contre lui,

 13   vous avez dit qu'effectivement, vous aviez fait une campagne. Bon. Mais

 14   après quoi, il semble que vous vous êtes décidé à être témoin de M. Seselj,

 15   alors ce point est important. C'est vous-même qui avez décidé d'indiquer au

 16   bureau du Procureur et à la Défense de M. Seselj que vous considériez

 17   maintenant de votre devoir d'être témoin de Défense, ou on vous a forcé la

 18   main pour ce changement de cap ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris votre question, Monsieur le

 20   Président, et je vais vous apporter une réponse tout à fait précise.

 21   Lorsque j'ai fait ma première déposition ici, dans ce bâtiment du Tribunal,

 22   trois étages au-dessus, j'ai dit aux enquêteurs du Tribunal, de manière

 23   expresse, qu'on pouvait se servir de ma déclaration non seulement de la

 24   part de l'Accusation, mais aussi de la part de la Défense. Peut-être que ça

 25   n'a pas été couché sur papier. Vous pouvez demander à M. l'enquêteur qui

 26   était présent. Pendant ce premier entretien, cette première audition, j'ai

 27   dit que ma déclaration, qu'à la fois le Procureur et la Défense pouvaient

 28   s'en servir. Un témoin, c'est un témoin. Ce n'est pas un témoin de la

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  1   Défense ou un témoin de l'Accusation. Du moins, c'est comme ça que je le

  2   comprends dans notre système, dans mon Etat. Il y a des témoins, puis un

  3   témoin c'est toujours un témoin. Il peut être un témoin de l'Accusation

  4   comme un témoin de la Défense. Peu importe.

  5   J'étais prêt à être témoin tant de la Défense que de l'Accusation. Puis par

  6   la suite, mais qui, qui pourrait exercer des pressions sur moi de la part

  7   des radicaux ? Pendant dix ans ils n'ont pas pu le faire. Comment voulez-

  8   vous qu'ils s'y mettent maintenant ? Celui qui s'est enfui avec les

  9   Américains, Vukic et je ne sais pas qui d'autre, mais enfin, qui aurait pu

 10   exercer des pressions sur moi ? Mais tout simplement, j'ai jugé utile de

 11   m'adresser par écrit au Tribunal, et c'est ce que j'ai fait, que ma

 12   conscience est tranquille, et j'ai écrit donc quelles étaient mes

 13   intentions. J'ai informé le Tribunal.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien.

 15   Monsieur Seselj.

 16   M. SESELJ : [interprétation]

 17   Q.  Quand le premier ministre Zoran Djindjic vous a proposé d'avoir un

 18   entretien avec les enquêteurs de La Haye portant sur moi, il y avait

 19   d'autres personnes présentes ?

 20   R.  Pour ce qui est de cet entretien, Vladan Batic, un ministre à l'époque,

 21   était présent. En quittant le bureau de Batic, je lui ai dit : "Mais je ne

 22   sais plus quoi faire." Honnêtement, à ce moment-là, je ne savais même pas

 23   si je devais ou si je n'étais pas obligé de répondre à la convocation du

 24   Procureur, sincèrement. Si j'avais su que ce n'était pas une obligation,

 25   ils auraient pu faire tout ce qu'ils auraient voulu. "Mais tu as demandé

 26   que l'on interdise le Parti radical. Tu les connais le mieux, tu es le

 27   mieux placé. Vas-y, ternis leur image, dénigre-les."

 28   Q.  Vladan Batic était ministre de la Justice à l'époque ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Heureusement, il est en vie. Il pourrait confirmer vos propos ?

  3   R.  Oui, Carla Del Ponte et Batic sont en vie.

  4   Q.  Carla Del Ponte pourrait le confirmer aussi ?

  5   R.  Elle devrait, normalement. Je ne sais pas.

  6   Q.  Carla Del Ponte, vous l'avez rencontrée personnellement ?

  7   R.  Non, non. Au cabinet, chez Djindjic. Je savais qu'il était en très

  8   bonne relation avec Carla Del Ponte, et il m'a dit qu'il me garantissait

  9   que je n'allais jamais devoir comparaître.

 10   Q.  Djindjic, vous a-t-il dit quelles étaient ses raisons pourquoi voulait-

 11   il m'envoyer à La Haye ?

 12   R.  Je vous ai dit il y a une heure il fallait vous éliminer de la scène

 13   politique, pas le parti dans sa totalité, mais toi, personnellement, et

 14   après tout serait acceptable.

 15   Q.  Mais c'était là l'opposition démocrate de Serbie qui est arrivée au

 16   pouvoir en renversant Milosevic en l'an 2000; c'est ça, Djindjic ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Est-ce qu'au somment au plus haut du parti, est-ce qu'ils avaient

 19   l'idée que vous alliez, vous, reprendre le parti si je partais ?

 20   R.  Je pense que c'est Cedo qui était chargé de cela au nom de DOS. Je me

 21   suis plus intéressé aux socialistes, et j'ai réussi à mener à bien ma

 22   mission, comment dirais-je, et j'ai réussi à briser ou à faire scinder le

 23   Parti socialiste. Ivkovic et Baki étaient chargés de cela. Je ne sais pas

 24   si tu te souviens. J'avais la charge du Parti socialiste. Cedo --

 25   Q.  Cedomir Jovanovic ?

 26   R.  Oui, Cedo.

 27   Q.  Très bien. Il y a encore quelques questions concrètes qui se posent.

 28   Paragraphe 26 de votre déclaration, il est dit que le Parti radical

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  1   serbe avait son service de renseignements, sa structure de renseignements,

  2   et que vous connaissiez deux personnes qui travaillaient comme organe du

  3   renseignement militaire. Franchement, je dois vous dire que cela m'a étonné

  4   de voir ici le Pr Jovan Marjanovic, qui est universitaire à la faculté des

  5   sciences politiques, et le général Bozidar Stevanovic, surnommé Mika

  6   Sprajc. Pourquoi est-ce que cela me stupéfait ? Parce que, Monsieur

  7   Stefanovic, vous saviez qu'au sein du conseil politique nous avions

  8   effectivement un groupe d'officiers à la retraite militaire qui faisaient

  9   du renseignement. Est-ce que vous vous souvenez de ce groupe ?

 10   R.  Oui, mais je ne me souviens pas qu'il y avait ces deux. Je ne connais

 11   aucun de ces deux.

 12   Q.  Vous vous souvenez qui l'a été, qui était membre ? Le colonel Milos

 13   Dimitrijevic, vous vous en souvenez, surnommé Stojan pour dissimuler sa

 14   présence ? Stojan, vous vous en souvenez ?

 15   R.  C'est un bon ami à moi. Nous sommes en très bon contact. Miso

 16   Dimitrijevic, je m'en souviens très bien. En 2002, 2003, rue Nemanjema

 17   [phon], il a partagé son bureau avec moi.

 18   Q.  Tous les matins, il m'apportait dans mon cabinet des rapports du

 19   renseignement portant sur les événements politiques de la veille ?

 20   R.  Oui, tout cela, il l'a fait jusqu'à ce que tu te retrouves en prison en

 21   1994. Il a apporté cela à moi un matin, et je l'ai renvoyé, licencié.

 22   Q.  On y viendra. Mais un capitaine de vaisseau, Rade Suljagic, est-ce que

 23   vous vous souvenez de celui-là ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que lui aussi c'était l'un de ces hommes qui me transmettaient

 26   des informations et qui, d'une certaine manière, a été mon conseiller ?

 27   R.  Oui, il venait tous les jours.

 28   Q.  Non, il ne venait pas tous les jours, mais le colonel Milos

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  1   Dimitrijevic venait, lui, tous les jours. Mais ne mentionnons pas les

  2   autres, puisque l'opinion, au sens large, ne les connaît pas. J'ai été

  3   arrêté en 1994, vous vous souvenez, et peu de temps après on a arrêté le

  4   colonel Milos Dimitrijevic aussi ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Vous vous souvenez on l'a détenu pendant quelques jours et c'est la

  7   Sûreté de l'Etat qui l'a gardé en détention ?

  8   R.  Ce n'est pas officiellement qu'on l'arrêtait. Il a été enlevé.

  9   Q.  Mais est-ce que vous vous souvenez, quatre mois après être sorti de

 10   prison, j'ai démantelé notre organe que nous avions au sein du parti, parce

 11   que j'estimais qu'il était contrôlé par la Sûreté de l'Etat et j'ai

 12   commencé à chercher de nouvelles personnes qui pouvaient se charger de ce

 13   type de travail pour le parti.

 14   R.  Oui, je m'en souviens. Je me souviens qu'il y a eu des conversations

 15   portant là-dessus.

 16   Q.  Mais est-ce que vous vous souvenez qu'encore à ce jour personne n'a pu

 17   savoir qui était ces individus et qui est désigné par le nom de code

 18   Laufer. Est-ce que vous savez si c'est une personne ou plusieurs personnes

 19   ? On n'a jamais pu le savoir.

 20   R.  Je ne sais pas.

 21   Q.  Mais vous devriez savoir que j'ai publié plusieurs livres. Laufer

 22   m'informe, Laufer ne m'a pas oublié, le sabot chetnik sur la tête ottoman,

 23   et que là j'ai publié un certain nombre de rapports du renseignement. Vous

 24   vous souvenez que la presse en a parlé en Serbie ?

 25   R.  Oui. Un journaliste m'en a parlé.

 26   Q.  Mais encore aujourd'hui ils ne savent pas qui sont ces agents du

 27   renseignement, qui sont ces individus qui fournissent des renseignements

 28   fiables. Même Tomislav Nikolic l'ignore, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Je suppose qu'il ne le sait pas.

  2   Q.  Jadranko Vukovic, il a cité comme étant soi-disant un intermédiaire

  3   entre moi et ces gens, mais il n'a jamais pu savoir qui sont ces individus.

  4   Donc moi aussi, j'ai appris ma leçon quand il s'agit du renseignement. Ai-

  5   je raison ?

  6   Il me reste combien de temps, Monsieur le Juge ?

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question que je me pose aussi.

  8   Madame la Greffière, il nous reste combien de temps.

  9   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après Mme la Greffière, il vous reste 25 minutes

 11   encore. Je suis un peu surpris, mais il vous reste 25 minutes.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Peut-être que je n'aurai pas besoin

 13   des 25 minutes, mais je ferai de mon mieux pour les utiliser quand même.

 14   M. SESELJ : [interprétation]

 15   Q.  Le Juge Harhoff vous a posé une question hier, et vous sembliez troublé

 16   par cette question. Il vous a posé une question sur le transfert des corps

 17   des volontaires tués du Parti radical serbe. La conclusion que j'en ai

 18   tirée, qu'en fait vous avez été troublé parce que vous ne saviez pas

 19   comment pratiquement cela se faisait; c'est bien cela ?

 20   R.  Il faut voir une chose. Premièrement, on m'a attaqué pour ce QG de

 21   guerre. Cette nuit, j'ai revu l'enregistrement. Croyez-moi, et j'espère que

 22   tu me croiras, que je ne savais pas que c'était la cellule de Crise avant.

 23   Ce matin, j'ai eu une conversation avec des gens. Il y a eu cette histoire

 24   des cercueils et de la guerre. Si vous me posez des questions sur la

 25   chirurgie, je saurais vous en parler davantage peut-être. Je ne suis pas la

 26   personne la mieux placée pour en parler. C'est ça ma réponse. Mais comme il

 27   m'a posé des questions là-dessus, ce n'était pas la confusion dans mon

 28   esprit, c'est que je ne savais pas comment répondre. Je sais qu'il y a eu

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  1   des gens qui se sont fait tuer, qui ont péri, mais je ne sais pas.

  2   Q.  Mais --

  3   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Il faut que vous observiez une pause

  4   entre les questions et les réponses. Prenons, par exemple, votre dernière

  5   question. Elle n'a même pas été traduite, Monsieur Seselj. J'ignore

  6   totalement ce que vous avez demandé. Donc faites en sorte de faire une

  7   pause.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est un suivi par rapport aux questions

  9   que vous avez posées hier, Monsieur le Juge Harhoff. Je souhaite rappeler à

 10   M. Stefanovic que toutes les dispositions nécessaires pour transférer les

 11   corps, c'est la JNA, le service compétent de la JNA qui s'en est chargé.

 12   C'était soit des véhicules sanitaires soit des hélicoptères de la JNA qui

 13   le faisaient. Toutes les funérailles se faisaient aux frais de l'Etat. A

 14   chaque fois, à partir du mois de septembre 1991, il y a eu un peloton, une

 15   section de l'armée qui venait de la garnison du coin. Il y a toujours eu là

 16   la fanfare militaire. Souvent, j'y suis venu, moi, en personne. Il y avait

 17   des représentants du parti. Toujours nous faisions un discours.

 18   M. SESELJ : [interprétation]

 19   Q.  Est-ce que vous vous en souvenez, Monsieur Stefanovic ? 

 20   R.  Personnellement, je n'ai jamais été présent à ces enterrements. Croyez-

 21   moi. Je suppose que tout cela est exact. Tout cela est logique, puisque ces

 22   gens étaient incorporés dans les unités de l'armée de la Yougoslavie et de

 23   la JNA, si cela s'appelait ainsi à l'époque. Mais ça m'a étonné qu'on

 24   insiste que nous avons transféré des gens par ci, par là, que nous les

 25   avons soignés mais je n'étais pas au courant de cela. Je ne sais pas. Et je

 26   vous affirme en toute responsabilité que je ne sais pas comment on a

 27   transféré cela, tout ça, ces cercueils, qui a payé. Je suppose que c'est

 28   logique que ce soit l'armée qui l'ait fait. Il est exact de dire qu'il y

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  1   avait la fanfare militaire, et que lorsqu'il y avait un volontaire qui

  2   périssait il était enterré avec tous les honneurs comme s'il avait été un

  3   militaire de l'armée de Yougoslavie.

  4   Q.  Mais les blessés parmi les volontaires, ils étaient soignés à

  5   l'Académie médicale militaire de Belgrade, vous ne vous en souvenez pas ?

  6   R.  Si, c'est vrai; c'est exact. Ils étaient soignés tout comme les

  7   militaires.

  8   Q.  Et on a reconnu les années de service aux volontaires et ils pouvaient

  9   bénéficier d'une pension d'invalidité, ils y avaient droit ?

 10   R.  Je ne sais pas, mais je suppose que oui, effectivement. Ils

 11   bénéficiaient du même statut que les militaires d'active de l'armée de

 12   Yougoslavie.

 13   Q.  Très bien. Le Juge Harhoff vous a demandé comment on procédait aux

 14   échanges des prisonniers de guerre. Est-ce que vous savez qu'un certain

 15   nombre de volontaires du Parti radical serbe ont été capturés par les

 16   Croates pendant la guerre ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Par exemple, savez-vous que 11 volontaires du Parti radical serbe, en

 19   décembre 1991, ont péri en défendant Masicka Sargovina et qu'un certain

 20   nombre de blessés ont été capturés ?

 21   R.  Dragan Jovanovic, mon camarade a été tué là et Sigma [phon]  et Ducica

 22   [phon] y ont été capturés.

 23   Q.  Mais c'était Dragan Lazarevic, vous vous trompez.

 24   R.  Oui, Dragan Lazarevic.

 25   Q.  C'était notre ami commun. Il était membre de la direction du parti ?

 26   R.  Oui, un lapsus.

 27   Q.  Il était fils unique ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Vous souvenez-vous qui a négocié leur échange ? On les a arrêtés, on

  2   les a mis en prison croate, je pense à Gradiska. On les a torturés en

  3   prison. Et qui a négocié leur échange, vous vous en souvenez ?

  4   R.  Monsieur Seselj, j'étais en Australie à ce moment-là, donc je ne

  5   connais pas tous les détails.

  6   Q.  C'est moi qui vais vous le dire. C'est la JNA qui a négocié l'échange,

  7   et nous, nous n'avions de cesse de les appeler pour intervenir dans le

  8   Grand état-major pour qu'il y ait cet échange, pour qu'il se fasse, mais

  9   vous avez nécessairement appris ça.

 10   R.  J'étais présent plusieurs fois quand toi, personnellement, tu t'es

 11   adressé au chef du Grand état-major, quand tu lui as téléphoné portant sur

 12   d'autres échanges ou je ne sais plus exactement, il fallait sauver

 13   quelqu'un. Il fallait toujours appeler l'armée.

 14   Q.  Très bien. Est-ce qu'il est exact de dire que tous les volontaires du

 15   Parti radical serbe capturés par les Croates ont été échangés à la fin et

 16   qu'aucun n'a jamais été accusé par les autorités croates d'avoir commis un

 17   crime de guerre; est-ce que cela est exact ?

 18   R.  Exact.

 19   Q.  Est-il exact que jamais aucun volontaire du Parti radical serbe venu de

 20   Serbie pour combattre pour la Krajina serbe, pour la Republika Srpska, que

 21   jamais les autorités croates ou musulmanes ne leur ont attribué un crime de

 22   guerre quel qu'il soit ?

 23   R.  Mais ils n'avaient pas de raison de le faire, ce n'était pas possible

 24   de le faire.

 25   Q.  Donc vous confirmez ce que je viens de dire. J'ai été clair ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Expliquez-moi encore une chose. Vous avez dit, même si vous ne vous en

 28   chargiez pas personnellement, comment on envoyait ces volontaires, au fond

Page 12235

  1   vous avez dit la vérité. On les envoyait au siège du parti, puis à la

  2   caserne de Bubanj Potok, puis de la caserne, ils se rendaient au front.

  3   Mais il y a un point qui me semble important ici. Est-ce qu'il y avait

  4   beaucoup d'évolution pour ce qui est des chiffres de ces volontaires. Par

  5   exemple, on avait un homme qui partait comme un volontaire du Parti radical

  6   serbe, restait au champ de bataille un mois, deux mois, trois mois, puis

  7   rentrait chez lui, puis il repartait au front, mais en tant que faisant

  8   partie du groupe des hommes à Arkan ou des Aigles blancs, ou la Garde

  9   nationale ?

 10   R.  Oui, tout à fait. Au parc en face du siège où Seselj les a

 11   raccompagnés, je pense que j'ai déjà dit cela, il ne les encourageait pas à

 12   commettre des crimes, à tuer, à égorger. Non. Il disait : "Allez-y,

 13   protégez." Je ne sais pas ce qui est écrit dans la déclaration, mais je

 14   pense que c'est important.

 15   Q.  Est-ce que vous étiez présent quand je faisais des discours au moment

 16   de leur départ, lorsque je leur disais quel était le comportement approprié

 17   pour un volontaire du Parti radical serbe au le champ de bataille ?

 18   R.  Voilà, justement c'est ce que j'ai exprimé.

 19   Q.  En tant qu'un combattant d'honneur, avec un comportement digne et noble

 20   face aux femmes, aux enfants, aux prisonniers, et cetera. Est-ce que j'ai

 21   répété cela souvent ?

 22   R.  Justement, c'est ce que je viens de dire. C'est ce que je confirme.

 23   J'étais présent.

 24   Q.  En tant que parti, est-ce que nous avons condamné avec fermeté les

 25   crimes, à savoir en particulier les pillages commis par d'autres au champ

 26   de bataille ?

 27   R.  Oui. Tu critiquais souvent. C'était fréquent d'entendre que quelqu'un a

 28   commis quelque part un crime du côté des Serbes.

Page 12236

  1   Q.  Et vous vous souvenez, j'ai attaqué Arkan, les hommes d'Arkan, les

  2   Panthères, la Garde, les Mauser [phon], les Aigles blancs ?

  3   R.  Oui, tout à fait, c'était à ça que je pensais.

  4   Q.  Et il y a un autre point qui m'a sidéré dans cette déclaration que

  5   l'Accusation vous attribue, vous dites que les militaires de la JNA étaient

  6   les plus disciplinés, que les hommes d'Arkan étaient très disciplinés,

  7   tandis que les volontaires du Parti radical serbe n'étaient pas

  8   disciplinés, eux, et qu'ils n'étaient pas des combattants de bonne qualité.

  9   Est-ce que vous avez dit cela véritablement ?

 10   R.  Je l'ai expliqué hier, et je vais le faire encore une fois.

 11   Lorsque je dis "de mauvaise qualité", je ne veux pas dire que ce n'étaient

 12   pas des hommes qui étaient bien, mais ils n'étaient pas formés. Ce

 13   n'étaient pas des officiers, des soldats entraînés et formés, donc

 14   logiquement, normalement, il faudrait qu'ils soient entraînés et formés et

 15   qu'on ne les balance pas à des postes importants. Je ne sais pas ce que

 16   j'ai dit. Je ne sais pas si je le redirais encore aujourd'hui.

 17   Il ne faut pas mélanger les gens simples, les gens issus du peuple

 18   aux côtés des militaires formés dans l'armée, dans la police, il ne faut

 19   pas les mettre à la tête des opérations militaires puisqu'ils ne

 20   connaissaient pas le règlement militaire, les règles sur la protection des

 21   prisonniers, et cetera. Il y a beaucoup de choses.

 22   Je ne voudrais pas parler, Monsieur Seselj, sur ce que le Procureur a

 23   dit, que je fasse des commentaires sur la déclaration, mais en fait j'ai

 24   tout expliqué. Et aujourd'hui ma conscience est tranquille. Encore une

 25   fois, je n'ai pas donné cette déclaration sous serment à ces soi-disant

 26   enquêteurs, et cette déclaration n'a pas incité le Procureur à dresser

 27   l'acte d'accusation contre toi, c'est après que j'ai parlé, donc je

 28   n'aurais pas pu semer la confusion dans leur esprit, quelque chose qui

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  1   aurait eu des conséquences pour eux et sur toi.

  2   Et je n'ai jamais vu ce que j'ai déclaré, parce que là j'aurais dit :

  3   "Oh, je n'ai pas dit ça," parce que ça peut arriver des erreurs. Mais il ne

  4   faut pas nous mettre dans une situation où quelqu'un est privé de liberté,

  5   qu'il paye cela, que quelqu'un dépense des moyens, de l'argent pour des

  6   déclarations mensongères. Si j'avais jamais reçu une déclaration de la part

  7   du Tribunal, de la part du Procureur, j'aurais objecté, j'aurais dit :

  8   "Halte là, je n'ai pas dit ça. Vous n'avez pas bien formulé, vous n'avez

  9   pas bien articulé," et ça aurait été beaucoup plus facile notre tâche

 10   aujourd'hui, et le Président et la Chambre, ce serait beaucoup plus facile

 11   pour eux, ainsi que pour le Procureur, et pour toi, en tant qu'accusé, la

 12   tâche serait plus aisée, et pour moi aussi. Mais je n'ai jamais pu avoir ma

 13   déclaration, et je ne sais pas encore à ce jour ce qui y est écrit. J'ai

 14   une hantise de découvrir ce qui est écrit dedans.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur, on a bien compris ce que vous dites, mais

 16   il y a quelque chose que je ne comprends pas.

 17   Parce que hier on a vu une signature sur une page où c'était écrit que vous

 18   avez relu -- qu'on vous a relu dans votre langue ce qu'il y avait écrit

 19   dans cette déclaration, et là, en bas, il y avait votre signature, que vous

 20   avez confirmée.

 21   Aujourd'hui, je voulais seulement savoir, cela signifie qu'aujourd'hui

 22   maintenant vous êtes en train de dire que vous avez signé quelque chose qui

 23   était faux, une affirmation fausse; c'est cela que vous voulez dire ? Bien.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Madame le Juge, je vais vous l'expliquer

 25   très bien.

 26   Hier et aujourd'hui, je dis que jamais on ne m'a lu la traduction en serbe.

 27   Mme LE JUGE LATTANZI : Vous avez bien expliqué --

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous répondre comme ça. Donc

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  1   jamais on ne m'a lu la traduction.

  2   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc quand vous avez signé l'affirmation qu'on vous

  3   a lue, que vous avez compris que vous affirmez -- signez quelque chose de

  4   faux, une affirmation fausse ? C'est vous qui l'avez signée, c'est vous qui

  5   avez dit que là il y avait votre signature ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais j'ai dit ce qui est écrit avant cela.

  7   C'est ça, c'est ma signature, mais la signature c'est toujours sur la

  8   langue anglaise, le texte en anglais, on ne m'a jamais traduit cette

  9   déclaration, si je peux dire ça.

 10   Est-ce que ça vous satisfait ma réponse, et c'est la vérité, la seule

 11   vérité, la vraie vérité.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il ne doit vous rester que quelques

 13   minutes.

 14   M. SESELJ : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Stefanovic, est-ce que vous seriez au courant ne serait-ce que

 16   d'un cas où les volontaires du Parti radical serbe auraient pris part à des

 17   pillages dans des zones en guerre, et que de manière organisée ils auraient

 18   apporté du butin de guerre en Serbie ? Est-ce que vous seriez au courant

 19   d'un seul cas ?

 20   R.  Non, si jamais ils avaient fait cela, ils auraient été punis d'une

 21   certaine manière publiquement, ils auraient été stigmatisés de la part de

 22   la direction du parti. C'était ça la position du parti.

 23   Q.  Il y a pas mal de gens que nous avons exclus du Parti radical serbe

 24   pour violation des règles de discipline, parce qu'il y a des cas

 25   individuels de vols ou d'inexécution d'ordres ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous vous souvenez, j'étais le seul en Serbie qui a osé en parler

 28   ouvertement, à savoir qui a osé directement attaquer Arkan ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Parce qu'il était tout-puissant en Serbie, n'est-ce pas, Arkan ?

  3   R.  Je peux dire qu'il faisait ce qu'il voulait, et je me souviens de ce

  4   duel télévisé, et j'ai entendu après de la part des caméramans et des

  5   présentateurs qu'ils ont eu peur, ils pensaient qu'il allait sortir son

  6   pistolet et qu'il allait vous tirer dessus.

  7   Q.  Est-ce que vous savez qu'après il a porté plainte contre moi, Arkan ?

  8   R.  Oui, vous lui avez dit qu'il a plus souvent eu une cagoule sur la tête

  9   que vous une chaussette au pied.

 10   Q.  Lorsque je suis arrivé au Tribunal, le juge, 15 minutes avant le début

 11   du procès, a dit que Toma Fila, l'avocat d'Arkan, est arrivé et il a retiré

 12   la plainte d'Arkan contre moi; vous vous en souvenez ?

 13   R.  Oui, je m'en souviens.

 14   Q.  Donc devant le tribunal ils n'ont pas osé me faire face; c'est comme ça

 15   que ça s'est passé ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Monsieur Stefanovic, je suppose que vous savez que Ljubisa Savic,

 18   Mauser, le commandant d'unité paramilitaire des Panthères, était le vice-

 19   président du Parti démocrate de Djindjic ?

 20   R.  Oui, pour la République de Bosnie-Herzégovine.

 21   Q.  Vice-président du Parti démocrate en Serbie et le président de

 22   l'antenne de ce parti en Republika Srpska; est-ce que j'ai raison ?

 23   L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent.

 24   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

 25   M. SESELJ : [interprétation]

 26   Q.  Non, ce n'est pas sur la totalité de la Bosnie-Herzégovine qu'ils ont

 27   agi, uniquement en Republika Srpska; ai-je raison ?

 28   R.  Oui. Au départ, c'était la Bosnie-Herzégovine. Parce que dès 1992,

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  1   Mauser était le président du Parti démocrate pour la Bosnie-Herzégovine.

  2   Là, tu parles de la période où il y a eu la Republika Srpska, après 1995

  3   donc.

  4   Q.  Est-ce que vous savez que le Procureur, dans son acte d'accusation,

  5   m'accuse des crimes commis par Ljubisa Savic, Mauser, paraît-il par le

  6   biais de ma participation à l'entreprise criminelle commune ?

  7   R.  Je ne sais pas concrètement ce qui t'est reproché et pourquoi tu es

  8   accusé. Ça m'étonne.

  9   Q.  J'aurais fait partie de la même entreprise criminelle commune avec

 10   Zoran Djindjic, au lieu d'accuser Zoran Djindjic pour ce qui a été fait par

 11   Ljubisa Savic, Mauser, ils me l'attribuent à moi dans l'acte d'accusation

 12   contre moi.

 13   R.  En 1992, je sais que Ljubisa, Mauser, a créé une sorte de camp, il a

 14   fallu qu'on intervienne. Je ne sais plus qui est intervenu pour que ce soit

 15   démantelé à Bijeljina, et quand il y a eu le conflit, dès le départ il a

 16   commencé à faire des bavures, et nous n'avions aucun point de contact et

 17   rien à voir avec Mauser, aucune coopération, pour autant que je le sache.

 18   Q.  Est-ce que vous savez que d'abord le président du Mouvement chetnik-

 19   serbe puis le président du Parti radical serbe, pour la région de

 20   Semberija, Mirko Blagojevic, à plusieurs reprises s'est opposé aux

 21   persécutions lancées par Mauser de la population musulmane de Semberija,

 22   voire même des Musulmans qui faisaient partie de l'armée serbe ?

 23   R.  Oui, ça je le sais, je suis au courant de ça, c'est exactement comme ça

 24   que ça s'est passé.

 25   Q.  Nous n'allons pas insisté là-dessus parce que le Tribunal de La Haye

 26   est en possession de tous ces documents, de toutes ces déclarations faites

 27   par Mirko Blagojevic à Bijeljina, quand il a pris la défense de la

 28   population musulmane locale.

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  1   Est-ce que vous savez, par exemple, qu'encore aujourd'hui, au sein du Parti

  2   radical serbe de Bijeljina, nous comptons un nombre assez important de

  3   Musulmans ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Y compris des membres de familles très connues musulmanes ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous savez que parmi les volontaires du Parti radical serbe,

  8   il y avait des catholiques serbes, des gens qu'on appelle des Croates, des

  9   Musulmans, des Hongrois, y compris des Albanais ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous rappelez-vous cet exemple d'un Hongrois qui était volontaire du

 12   Parti radical serbe, qui a été tué sur le front, et le curé catholique

 13   romain de Vojvodine a refusé d'organiser des funérailles religieuses parce

 14   que cet homme était membre du Parti radical serbe ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens très bien.

 16   Q.  Vous rappelez-vous de ce voïvode chetnik qui se déclarait voïvode

 17   chetnik albanais, en réalité ? Mujo Bunjaku, c'est comme ça qu'il

 18   s'appelait, et il a reçu un nouveau nom, Oliver Dennis Barrett ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous rappelez-vous que je l'ai promu au titre de voïvode chetnik pour

 21   son courage pendant la guerre ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Savez-vous qu'il y a plus tard été tué à Belgrade ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Savez-vous pourquoi il a été tué ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Je vais vous le rappeler. Vaso Djukanovic et Jozo Vujicic l'ont

 28   assassiné parce qu'il s'était mis en ménage avec la femme, l'épouse de

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  1   Djukanovic.

  2   R.  Oui, oui, c'est vrai, c'est vrai. Il s'était mis en ménage avec son

  3   épouse et je ne sais plus ce qui s'est passé exactement. Mais oui, oui, je

  4   m'en souviens.

  5   Q.  Est-ce que vous êtes au courant du fait que le Tribunal de La Haye a

  6   recueilli des déclarations de témoins qui, en proférant des propos

  7   mensongers, m'ont accusé d'avoir moi, tué Dennis Barrett; est-ce que cela

  8   vous paraît ridicule ?

  9   R.  Moi, ça ne peut que me faire rire.

 10   Q.  Oui, c'est risible, mais malheureusement, je dois me confronter à ce

 11   genre de déclaration.

 12   Vous vouliez dire quelque chose, excusez-moi.

 13   R.  Non, non, tout va bien, tout va bien.

 14   Q.  Alors, avançons. Vous avez envoyé une lettre au bureau du Procureur le

 15   15 mai de cette année 2008. Cette lettre, vous l'avez intitulée information

 16   destinée au Tribunal et plus précisément la Chambre de première instance

 17   chargée de l'affaire Seselj; dans cette lettre, vous demandiez que votre

 18   nom soit retiré de la liste des témoins à charge, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Dans cette lettre déjà, vous disiez qu'on vous avait promis de ne

 21   jamais avoir à vous présenter physiquement dans un prétoire dans le cadre

 22   de la présente affaire et donc la certitude de ne pas avoir à faire le

 23   voyage de La Haye et que Zoran Djindjic vous avait suggéré de ne pas

 24   m'accuser mensongèrement de crimes, mais de me présenter sous un tel jour,

 25   que de toute façon mon image soit tout à fait ternie; vous vous rappelez de

 26   cela ?

 27   R.  Oui, oui, maintenant je m'en souviens.

 28   Q.  Vous dites aussi dans cette lettre que lorsque vous avez fait cette

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  1   déclaration, il y avait un homme qui était assis dans la pièce du début à

  2   la fin de toute cette période et que personne ne vous a dit qui était cet

  3   homme, ni pour quelle raison il se trouvait dans la pièce pendant que vous

  4   faisiez vos déclarations, que cet homme portait un uniforme de camouflage,

  5   avez-vous dit; qu'il avait la peau de couleur blanche, qu'il était assez

  6   petit, très nerveux et très raide dans son comportement. C'est bien ce que

  7   vous avez dit ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Vous rappelez-vous cet homme en uniforme ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Seriez-vous capable de reconnaître l'uniforme qu'il portait, de dire à

 12   quelle armée appartenait cet uniforme ?

 13   R.  Ce n'était pas en réalité un uniforme de camouflage.  C'était -- je ne

 14   sais pas, une espèce d'uniforme de couleur vert à peu près.

 15   Q.  Vous dites dans votre lettre que cet homme a influé de façon très

 16   négative sur vous et qu'il vous a rendu nerveux, qu'il vous faisait peur,

 17   que vous auriez préféré vous éloigner de lui, vous auriez préféré qu'il

 18   quitte la pièce parce que vous ne vous sentiez pas en sécurité, vous aviez

 19   peur de lui ?

 20   R.  Oui, il était assis derrière moi dans mon dos. J'avais l'impression

 21   qu'il était un responsable de la sécurité ou quelque chose comme ça --

 22   enfin des gens que l'équipe de l'Accusation avait mis là parce qu'ils

 23   avaient peur peut-être que je ne risque une attaque physique. Donc j'avais

 24   l'impression qu'il était dans la pièce à cause de ça. Je lui ai demandé,

 25   qu'est-ce que vous faites ici, qui êtes-vous ? J'ai même brièvement parlé

 26   avec cet homme, mais il n'a rien dit qui était une façon de se présenter.

 27   Il ne m'a pas dit qui il était, ni ce qu'il faisait là. Donc je ne connais

 28   pas cette personne, je ne sais rien de lui.

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  1   Q.  Dans votre lettre, vous déclarez que le bureau du Procureur de La Haye

  2   ne vous a jamais dit en quelle qualité vous étiez interrogé, mais que votre

  3   avocat n'était pas autorisé à assister à cet entretien, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact. On n'a pas permis à mon avocat d'assister à

  5   l'interrogatoire, hier non plus. Mon avocat n'a jamais eu le droit d'être

  6   là.

  7   Q.  Alors que selon le système juridique valable en Serbie, on a le droit

  8   d'être accompagné d'un avocat au cours de n'importe quel interrogatoire,

  9   quelle que ce soit l'identité de la personne qui vous interroge, n'est-ce

 10   pas ?

 11   R.  Oui, pas seulement en Serbie, mais dans d'autres pays aussi.

 12   Q.  Vous avez le droit d'être accompagné et assisté d'un avocat, dans notre

 13   pays, en particulier quand on est interrogé par le Procureur ou par la

 14   police ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous leur avez dit, à ce moment-là, que vous confirmiez avoir signé les

 17   déclarations préalables, mais que vous n'avez jamais vu ce qui était dans

 18   ces déclarations; c'est bien ce que vous déclarez dans cette lettre ?

 19   R.  Oui, j'en ai parlé dans mes lettres et dans les déclarations.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, faites venir un technicien, je

 21   ne peux pas travailler comme cela.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Ça marche maintenant.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, votre temps est expiré. Si vous

 24   avez une dernière question, posez-la tout de suite.

 25   M. SESELJ : [interprétation] J'ai encore une question.

 26   Q.  Puisque vous avez dit dans cette lettre, troisième paragraphe à partir

 27   du bas de la deuxième page, que votre témoignage est effectivement un

 28   témoignage sous contrainte car vous n'avez pas pu refuser de témoigner à

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  1   Zoran Djindjic, à l'époque où il a exigé cela de vous, est-ce que le

  2   Tribunal de La Haye vous a demandé de vous rencontrer et de parler de cette

  3   lettre avec vous, une fois qu'il a l'a reçue ? Est-ce qu'on vous a montré

  4   la déclaration écrite rédigée par le bureau du Procureur de façon à ce que

  5   vous puissiez la lire et voir ce que vous y dites effectivement et ce que

  6   vous n'y avez pas dit et tout le reste parce que moi, je suis surpris et

  7   absolument étonné de voir qu'on ne vous a jamais montré ce document. Il y

  8   aurait dû avoir une séance de récolement avant votre déposition dans le

  9   prétoire et pendant cette séance de récolement, on aurait dû vous montrer

 10   la déclaration préalable, la passer en revue avec vous, vous demander si

 11   vous souhaitiez apporter des corrections. Donc est-ce que cela s'est passé

 12   ?

 13   R.  Je vous dis, pour la troisième fois au moins, que rien de tout cela n'a

 14   eu lieu, que c'est la raison pour laquelle j'ai envoyé la lettre au bureau

 15   du Procureur du Tribunal qui est un document envoyé par moi. Je suis sûr

 16   qu'ils ont d'autres documents en leur possession. J'ai envoyé deux ou trois

 17   documents en demandant au bureau du Procureur ou au Tribunal de façon

 18   générale de me soumettre mes déclarations écrites de façon à ce que je

 19   puisse les lire et vérifier ce que j'y avais dit. J'ai demandé aussi qu'on

 20   m'enlève de la liste des témoins à charge parce que ma déclaration n'avait

 21   rien de pertinent. J'ai écrit cela aussi.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de questions.

 23   Merci beaucoup de votre déposition.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] De rien.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Dahl, des questions supplémentaires.

 26   Mme DAHL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 27   Nouvel interrogatoire par Mme Dahl :

 28   Q.  [interprétation] Monsieur Stefanovic, en début d'audience, vous avez

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  1   déclaré que vous aviez regardé le journal d'aujourd'hui, le "Glas Javnosti

  2   ?"

  3   R.  Oui.

  4   Q.  On trouve dans ce journal d'aujourd'hui votre interview, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous vous souvenez des instructions qui vous ont été données

  7   par la Chambre de première instance en fin d'audience, hier ?

  8   R.  Je me souviens des consignes que j'ai reçues. Mais quel est le rapport

  9   entre les consignes que j'ai reçues et votre question ? 

 10   Q.  On vous a dit que vous deviez vous abstenir d'avoir le moindre contact

 11   avec les médias, n'est-ce pas ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je n'ai pas contacté les médias. Cette

 14   interview, je l'ai consentie avant-hier. Je peux vous dire le nom du

 15   journaliste et le lieu. C'était avant-hier, la journaliste de "Glas

 16   Javnosti" m'a interrogé. Nous étions assis dans la cafétéria Atos de

 17   Belgrade que je fréquente souvent et nous y sommes restés entre 15 heures

 18   30 et 17 heures. La journaliste a tout enregistré sur dictaphone, après

 19   quoi elle est rentrée à la rédaction. On m'a dit que cet article paraîtrait

 20   le jour même, le lendemain ou un autre jour. C'est la rédaction du journal

 21   qui le décide.

 22   Moi, je n'étais pas très content de voir justement l'article paraître

 23   aujourd'hui, mais ne vous méprenez pas, je n'ai eu aucun contact avec la

 24   presse. J'ai attendu plus d'une demi-heure la voiture qui venait me

 25   chercher hier; donc à 20 heures 30, j'étais déjà en ville et il aurait été

 26   impossible que je consente une interview pendant au moins une heure parce

 27   que ça m'aurait déjà amené à

 28   9 heures et demie du soir. Donc ne m'imputez pas cela à tort. Cette

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  1   interview, je l'ai faite avant alors que je n'étais sous le coup d'aucune

  2   consigne et que je m'exprimais en voulant parler à l'opinion publique de la

  3   façon la plus simple qui soit.

  4   Ce que vous venez de dire est contraire à la vérité, je vous en prie.

  5   Q.  Vous avez répondu à ma question, Monsieur Stefanovic. Vous aviez dit,

  6   en début d'audience, que vous aviez analysé les signatures se trouvant dans

  7   vos déclarations et d'après le compte rendu d'audience que je cite :

  8   "Ce ne sont pas mes signatures. En fait, ce sont des signatures qui

  9   ont été scannées et qui ont été simplement copiées en langue serbe parce

 10   que quand j'ai fait cette déclaration, il n'y avait pas de traduction en

 11   serbe."

 12   Vous souvenez-vous de ces dires ?

 13   R.  Oui, j'ai dit quelque chose qui ressemble beaucoup à ce que vous venez

 14   de dire. Je n'ai jamais signé de version en serbe du texte. C'est ça ma

 15   réponse. S'il y a une signature, elle n'a rien à y faire. J'ai signé une

 16   version en anglais qui ne m'a pas été ni interprétée, ni traduite, ni lue.

 17   Q.  Je veux m'assurer que nous parlons bien du même document. Je parle de

 18   la déclaration préalable en serbe de 2006. Est-ce que vous parlez de ce

 19   document-là, vous aussi ?

 20   R.  Oui, j'ai contesté l'authenticité de cette déclaration. Il y a pas mal

 21   de choses dans ce document, pour autant que je l'ai vu parce que je ne suis

 22   pas en possession du texte intégral de ma déclaration, je ne sais pas tout

 23   ce qui est écrit dans ce texte. Je viens de la parcourir rapidement, si

 24   c'est le document 0602436, paragraphes 21 et 26 et j'ai déjà dit ce que

 25   j'en pensais hier et aujourd'hui. Donc ce qui est dans ces paragraphes est

 26   totalement inexact et j'affirme en toute responsabilité ne jamais avoir dit

 27   ce qui figure dans ces paragraphes.

 28   Mme DAHL : [interprétation] Je précise à l'attention des Juges que j'ai

Page 12249

  1   obtenu de l'endroit où sont gardés les originaux les originaux signés par

  2   M. Stefanovic à l'encre bleu. Nous avons les versions en anglais comme en

  3   serbe signées et j'aimerais les verser au dossier à l'appui des copies que

  4   vous avez reçues et marquées pour identification. Numéro ERN en serbe,

  5   document en serbe, 0601-2431 et le dernier numéro, c'est 0601-2455. Dans

  6   l'original, en anglais --

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] Pourrais-je avoir les documents en

  8   serbe parce que nous ne les avions pas.

  9   Mme DAHL : [interprétation] Je précise pour le procès-verbal que l'original

 10   en anglais est signé et porte le numéro ERN0601-2396. C'est la première

 11   page. La dernière --

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai sous les yeux votre déclaration en serbe. Et

 13   j'ai sous les yeux votre signature en bleu. Qu'avez-vous à dire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas ce qui est écrit parce

 15   que je ne sais pas ce qui est écrit dans ce document. Je ne l'ai jamais lu.

 16   Ça, je le dis et je l'affirme en toute responsabilité, je n'ai jamais lu ce

 17   document. Je ne sais pas ce qui est écrit dans ce document. Pourquoi est-ce

 18   que vous ne m'avez pas communiqué ce document, je vous en prie ?

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Je demanderais de mettre sous l'ELMO la première

 20   page. Donc on va le regarder sous l'ELMO. Madame la Greffière, mettez ça

 21   sous l'ELMO et on va lui montrer la première page dans sa langue et aussi

 22   la --

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous n'avez pas besoin de le mettre sur le

 24   rétroprojecteur car je ne nie pas que cette signature soit la mienne. Mais

 25   je vous demande simplement : pourquoi est-ce que cette déclaration ne m'a

 26   pas été communiquée puisque je me suis adressé par écrit au bureau du

 27   Procureur pour la demander et je vous redis que je ne l'ai jamais lue. Il y

 28   a pas mal de choses écrites dans ce document que je n'ai pas dites. C'est

Page 12250

  1   ça que j'affirme en toute responsabilité sous serment. Ce n'est pas la

  2   peine de perdre du temps à mettre le document sur le rétroprojecteur. Bien

  3   sûr, c'est ma signature, personne ne peut signer, apposer la signature que

  4   je vois là sauf moi, mais je n'en ai pas le souvenir.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous reconnaissez avoir signé le texte dans votre

  6   langue et le texte en anglais. Vous avez signé les deux versions. Bien, on

  7   a la preuve matérielle.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas le souvenir. Je ne me

  9   rappelle pas ce que j'ai signé. Je ne me rappelle vraiment pas ce que j'ai

 10   signé. La seule chose dont je me souviens, c'est que même si je l'ai signé,

 11   cela ne m'a pas été soumis.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, veuillez donner un numéro pour

 13   la version en B/C/S.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais chaque page, Monsieur le Témoin, est signée,

 15   pas seulement la première.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame, donnez un numéro MFI parce qu'on statuera

 17   sur l'admission définitive.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P656 MFI, Monsieur le

 19   Président.

 20   Mme DAHL : [interprétation] Pour préciser, la dernière page en anglais de

 21   la déclaration signée par le témoin porte le numéro 0601-2430. C'est le

 22   même document qui a été traduit en anglais que l'original en serbe que je

 23   vous avais remis. Voulez-vous voir cette version qui porte aussi la

 24   signature originale du témoin, comme vous voulez, sinon je peux le remettre

 25   dans le coffre.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant la version anglaise, nous l'avions déjà.

 27   On va vérifier l'original. Bien, il y a la signature en bleu, c'est

 28   identique.

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  1   Tenez, vous pouvez remettre dans le coffre l'original en anglais.

  2   Avez-vous d'autres questions, Madame ?

  3   Mme DAHL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ce ne sera pas

  4   long.

  5   Q.  Monsieur Stefanovic, vous venez --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.

  7   Mme DAHL : [interprétation]

  8   Q.  Vous venez de dire aux Juges de la Chambre que jamais vous n'aviez reçu

  9   une copie de votre déclaration que vous auriez pu relire avant votre

 10   déposition, votre audition. Vous ai-je bien compris ?

 11   R.  En effet.

 12   Q.  Niez-vous le fait que nous avions un rendez-vous vendredi dernier, à

 13   Belgrade ?

 14   R.  En effet.

 15   Q.  Nous n'avions pas de rendez-vous; c'est ça que vous dites ?

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Non, non. Il a dit qu'il l'avait effectivement. 

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avions un rendez-vous, mais vous auriez

 18   pu me remettre ce document déjà au mois de mai. C'est depuis le mois de mai

 19   que je le demande.

 20   Mme DAHL : [interprétation]

 21   Q.  Mais je vous ai proposé de vous remettre un jeu complet des

 22   déclarations vendredi dernier, à Belgrade, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, effectivement, mais vous auriez dû rester le samedi et me les

 24   donner le samedi. Le vendredi, je ne pouvais pas venir, c'était la Slava,

 25   la fête de la famille. Vous comprenez, je ne pouvais pas venir recevoir des

 26   documents un jour de Slava.

 27   Q.  Je suis allée à Belgrade pour vous voir, mais vous n'êtes pas venu au

 28   rendez-vous ?

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  1   R.  J'étais obligé d'être absent. Je suppose que ce problème est réglé.

  2   Q.  Vous ne m'avez pas appelé pour me dire que vous ne veniez pas à ce

  3   rendez-vous ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Je vous ai dit que l'officier instrumentaire allait apporter un jeu

  6   complet de documents à votre intention en vue de la préparation à cette

  7   vidéoconférence ?

  8   R.  Je ne comprends pas. Je ne comprends pas. Je ne comprends pas ce que

  9   vous m'avez dit.

 10   Q.  Le greffe dispose d'un jeu complet de vos documents, là où vous êtes en

 11   vue de votre audition, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, exact.

 13   Q.  Vous avez rencontré les enquêteurs du bureau du Procureur en février

 14   2003 ?

 15   R.  Mais ces documents, personne ne me les a soumis.

 16   Q.  Vous avez rencontré les enquêteurs du bureau du Procureur en février

 17   2003, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et vous avez signé une déclaration qui portait la date du 12 février

 20   2003 ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  C'est de cette déclaration que nous avons parlé ici hier et aujourd'hui

 23   ?

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

 25   Juges, Monsieur Stefanovic, j'ai une objection. Il faut que vous gardiez le

 26   silence tant que je n'en ai pas fini avec cette objection.

 27   Dans cette déclaration de 2003, on ne trouve nulle part la signature de M.

 28   Stefanovic. Nulle part. Je parle de la version en langue serbe. Il est vrai

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  1   qu'en dernière page il est toujours écrit "signature". Mais je suppose que

  2   c'est la version anglaise que l'on signe et pas la version en serbe. Pour

  3   la déclaration en version serbe de 2003, Monsieur Stefanovic, il n'y a

  4   aucune signature.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas la peine de nous dire. On le savait

  6   déjà.

  7   Oui, Madame.

  8   Mme DAHL : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Stefanovic, vous êtes resté en contact avec le bureau du

 10   Procureur l'année suivante, n'est-ce pas, en 2004 ?

 11   R.  Oui, sans doute. Je ne sais pas.

 12   Q.  Vous êtes resté en contact avec l'Accusation pendant toute l'année 2005

 13   ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous avez rencontré les enquêteurs du bureau du Procureur début 2006,

 16   en février, au bureau à l'antenne, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Vous avez dit que vous aviez quelques inquiétudes pour ce qui était de

 19   votre sécurité ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous avez dit que vous étiez prêt à témoigner devant ce Tribunal, mais

 22   que vous demandiez des mesures de protection ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Vous avez dit à l'enquêteur que M. Petkovic négociait en vue de devenir

 25   un témoin à décharge ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Vous avez dit à l'enquêteur qu'un garde du corps de M. Seselj essayait

 28   de vous contacter, et que vous avez perçu cette tentative comme étant une

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  1   menace ?

  2   R.  Je ne sais pas de quel garde du corps vous parlez. C'est moi qui étais

  3   gardé, ce n'est pas Seselj.

  4   Q.  M. Panic.

  5   R.  Mais j'étais en contact avec lui. Pourquoi est-ce que j'aurais eu peur

  6   de lui ? Il était en opposition à Seselj, pour autant que je le sache.

  7   Q.  Vous avez dit à l'enquêteur que vous avez rencontré le 19 février 2007,

  8   que M. Panic essayait de vous contacter par téléphone ?

  9   R.  Je ne sais pas ce qu'a écrit le représentant du bureau de l'Accusation,

 10   mais j'avais des contacts réguliers avec M. Panic, qui était en rapport

 11   avec M. Seselj, et je ne vois pas où est le problème. De quoi est-ce que

 12   j'aurais eu peur de sa part ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas intervenu

 14   tout de suite par curiosité parce que je ne voulais vraiment pas empêcher

 15   M. Stefanovic de préciser son avis sur toutes ces questions, mais vous

 16   auriez dû intervenir car les questions qui sont posées en ce moment sont

 17   non autorisées. Ce sont des questions directrices. Or, vous n'avez jamais

 18   mis en marche le processus qui aurait permis de déclarer ce témoin, témoin

 19   hostile, et donc autoriser l'Accusation à poser des questions directrices.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : La question n'est pas si elles sont directrices ou

 21   pas. Il s'agit de savoir pour quelle raison il avait demandé des mesures de

 22   protection et pourquoi il n'en demande plus. C'est tout. Là, il y a un

 23   mystère.

 24   Mme DAHL : [interprétation]

 25   Q.  Veuillez répondre à ma question. Vous avez dit en effet à l'enquêteur

 26   que M. Panic essayait de vous contacter, n'est-ce pas ?

 27   R.  Je n'ai pas dit cela à l'enquêteur. Ça c'est certain. Car il est

 28   impossible que j'aie peur de Panic, ni alors, ni avant, ni aujourd'hui, ni

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  1   jamais, étant donné que Panic se dispute, il est en opposition par rapport

  2   à Seselj depuis 2002 ou 2003, ou je ne sais même plus quand, je n'ai aucune

  3   raison d'avoir peur de Panic. Je ne vois pas pourquoi j'aurais raconté tout

  4   cela. Cela n'est pas vrai.

  5   Deuxièmement, le Juge a posé une question très importante et j'aimerais y

  6   répondre, si c'est possible.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, je vous en prie. Allez-y.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, depuis le tout début, je n'ai

  9   jamais demandé la moindre mesure de protection. Hier, quand je suis arrivé

 10   ici dans ce bureau, on m'a dit que des mesures de protection me seraient

 11   proposées, que je serais protégé. Je ne sais pas comment dire ça. J'ai dit

 12   que je n'en avais pas envie, que je n'avais pas besoin de quelque mesure de

 13   protection que ce soit, que tout ce que je disais était la vérité, et que

 14   je n'avais pas envie de me cacher derrière mes déclarations. Donc je

 15   suppose que vous avez fait enlever les mesures de protection mais je ne les

 16   ai jamais demandées. J'ai vu un document à cet effet avec un numéro 009 et

 17   je ne sais quoi, enfin, comme si j'étais un pseudonyme.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame.

 19   Mme DAHL : [interprétation]

 20   Q.  Vous avez continué à faire preuve de coopération avec le bureau du

 21   Procureur, et ceci, jusqu'au moment où vous avez envoyé cette lettre en mai

 22   2008, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, je vous avais informé avant que j'avais reçu au moins une centaine

 24   de coups de téléphone.

 25   Q.  Le 16 mai 2008, vous avez demandé à être retiré de la liste des témoins

 26   ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  C'était la première fois, ce jour-là, que vous mentionniez un accord

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  1   que vous dites avoir eu avec le premier ministre Djindjic, accord selon

  2   lequel jamais vous n'alliez être témoin dans ce procès ?

  3   R.  Je vous ai dit en 2007, au mois de septembre, qu'il y avait cet accord.

  4   Je vous l'ai dit à vous, personnellement.

  5   Q.  Monsieur Stefanovic, ce que je soumets à votre intention c'est qu'il

  6   s'agit là d'un mensonge. Est-ce que vous le niez ?

  7   R.  Donnez-moi le procès-verbal de cet entretien.

  8   Q.  Vous --

  9   R.  Est-ce que cela existe, le PV de cet entretien ?

 10   Q.  Jamais vous n'avez mentionné le nom de cet homme en ma présence, jamais

 11   auparavant. Est-ce que je ne dis pas la vérité ?

 12   R.  Le nom de qui, excusez-moi ?

 13   Q.  Le nom de M. Djindjic.

 14   R.  J'affirme que oui. Vérifions le procès-verbal de cet entretien que nous

 15   avons eu. Si vous l'avez, vérifions-le.

 16   Q.  Monsieur Stefanovic, lors de cette réunion-là, vous m'avez dit à moi et

 17   à d'autres représentants du bureau du Procureur que les Radicaux faisaient

 18   pression sur des témoins à charge, n'est-ce pas ?

 19   R.  Donnez-moi le procès-verbal pour que je voie ce que j'ai dit. Je ne

 20   peux pas me souvenir de cela. Je suis ému et je n'arrive pas à me souvenir.

 21   Donnez-moi le procès-verbal.

 22   Q.  Nous avons discuté du fait que vous vous alliez être le premier témoin

 23   que nous appellerions au moment du procès.

 24   R.  Je ne me souviens pas de cela.

 25   Q.  Vous avez dit que vous étiez prêt à témoigner, n'est-ce pas ?

 26   R.  Il n'en est pas ainsi, c'est certain, parce qu'à partir de l'été -- je

 27   ne sais pas quand est-ce que le procès a commencé. Le téléphone a sonné

 28   sans cesse. Vous cherchiez à me parler sans arrêt, est-ce que cela est vrai

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  1   ? Je pense que c'est vrai. Et sans arrêt j'essayais de vous faire

  2   comprendre qu'il ne fallait que je vienne au procès. J'ai envoyé des

  3   documents de médecin, des lettres. Je ne sais plus trop ce que je vous ai

  4   envoyé, tout ce que je vous ai envoyé parce que je pensais qu'il n'y avait

  5   pas lieu que je vienne ici.

  6   Q.  Vous avez dit que vous vouliez être un témoin de la Défense ?R.  Oui.

  7   Q.  Et en fait, vous avez accordé un entretien à la presse en octobre 2008

  8   dans lequel vous avez dit que vous étiez toujours membre du Parti radical

  9   serbe ?

 10   R.  Ça, c'est inexact. C'est une mauvaise interprétation dans le quotidien

 11   qui s'appelle "Courier", et ça a semé la confusion. J'ai dit --

 12   Q.  Vous avez dit au journaliste qui est l'auteur de ce reportage qui a

 13   paru dans le journal "Courier" que vous étiez toujours prêt à aider le

 14   parti là et quand vous le pouviez ?

 15   R.  Excusez-moi, je pense que c'est après le conflit entre Nikolic et les

 16   radicaux.

 17   Q.  Vous avez dit que vous aviez toujours votre carte d'affilié dans votre

 18   portefeuille.

 19   R.  Est-ce que quelqu'un veut m'aider ? Oui, je l'ai ici sur moi.

 20   Mme DAHL : [interprétation] Pas d'autres questions, Monsieur le Président.

 21   L'INTERPRÈTE : Le Président est inaudible pour la cabine française --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vérifie que mes propos sont au moins traduits en

 23   anglais, ce qui est le principal.

 24   Je vous remercie d'être venu témoigner. Et je déclare que nous allons

 25   faire un break de 20 minutes. Et, Monsieur le Témoin, vous allez voir avec

 26   le greffier la prise en charge de vos frais pour cette journée.

 27   Nous reprendrons dans 20 minutes et nous aurons un témoin 92 ter qui

 28   bénéficie de mesures de protection, donc il faudra baisser le rideau avant

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  1   et je demande au greffier de faire venir un technicien pour réparer le

  2   micro.

  3   [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence] 

  4   --- L'audience est suspendue à 17 heures 56.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   --- L'audience est reprise à 18 heures 10.

  7   [Audience publique] 

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  9   Bonjour, Monsieur. Nous sommes en audience à huis clos. Vous bénéficiez de

 10   mesures de protection qui consistent en un pseudonyme, ce sera VS-1068. Et

 11   puis, quand on passera en audience publique, votre image sera altérée.

 12   Voilà.

 13   Monsieur, pour vous faire prêter serment, donnez-moi votre nom, prénom, et

 14   date de naissance.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : C'était marqué à huis clos.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel] 

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 21   [Audience publique]

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, ce qu'on vient de me

 23   remettre, je l'ai ici, mais j'attire votre attention sur le fait qu'il ne

 24   s'agit pas d'une déclaration en application du 92 ter, car toutes les

 25   déclarations 92 ter comportent cela dans l'intitulé. Cette mention, c'était

 26   pour ce qui est du témoin précédent et c'est ce qui figure dans la requête

 27   de l'Accusation pour un nouveau témoin en application du 92 ter, or, cela

 28   fait défaut ici. C'est une déclaration de témoin de 2004. J'ai cette

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  1   déclaration ici. Je ne l'ai pas perdue, mais ce n'est pas une déclaration

  2   92 ter.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame le Procureur, cette procédure 92 ter, en

  4   fait, la déclaration, c'était une déclaration qui devait être introduite au

  5   titre de l'article 92 bis ?

  6   Mme PRASAD : [interprétation] Non, 92 ter. Il y a deux déclarations,

  7   déclaration du 18 mars 1995 et 13 juin 2004, portant les numéros ERN 04-

  8   7394 - 04-7404, et 0357-8609 - 8616.

  9   Aux termes de la deuxième décision de la Chambre de première instance 

 10   --

 11   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi la date.

 12   Mme PRASAD : [interprétation] -- on nous a donné l'autorisation  de

 13   présenter ces deux déclarations à la Chambre.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je suis certain, je ne

 15   sais pas pourquoi j'en suis certain, mais j'ai la certitude que vous et vos

 16   collègues n'allez pas autoriser cette déclaration en application du 92 ter.

 17   La première déclaration a été donnée au centre de service de Sécurité

 18   de Bosnie-Herzégovine à Mostar. Cette déclaration a été recueillie par la

 19   police de Bosnie-Herzégovine, puis vous avez la déclaration recueillie par

 20   le Procureur et ce n'est pas le texte intégral, puisque c'est le suivi,

 21   après la déclaration donnée aux autorités bosniennes --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : -- sous votre contrôle. J'ai une déclaration du

 23   témoin en date du 13 juin 2004. Vous avez raison, il y a une autre

 24   déclaration par le ministère de l'Intérieur de la Bosnie-Herzégovine, mais

 25   c'est 18 mars 1995, donc c'est après cela. C'est après. Ce n'est pas celle

 26   du ministère de l'Intérieur que l'Accusation demande. Au titre du 93, c'est

 27   celle du 13 juin 2004.

 28   Madame le Procureur, c'est bien la déclaration du 13 juin 2004 qui est

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  1   l'objet de la procédure 92 ter ?

  2   Mme PRASAD : [interprétation] Monsieur le Président --

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  4   Mme PRASAD : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et  Monsieur

  5   les Juges, nous demandons que les deux déclarations soient versées au

  6   dossier aux termes de l'article 92 ter, conformément à la décision de la

  7   Chambre de première instance. Je vous signale que la déclaration du 13 juin

  8   2004, c'est une déclaration dans laquelle le témoin fournit des

  9   informations supplémentaires, développe, disons, les informations fournies

 10   dans la déclaration de 1995, qu'il a fournie aux services de Sécurité de

 11   Mostar.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : La décision du 27 février de la Chambre, et la

 13   Chambre avait autorisé la procédure pour les deux déclarations, car la

 14   deuxième déclaration, celle faite devant les autorités de la République de

 15   Bosnie-Herzégovine, complétait la première déclaration. Voilà. Donc en

 16   réalité, la procédure 92 ter concerne les deux déclarations; 23 juin 2004

 17   et 18 mars 1995.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, la déclaration de 2004

 19   au bureau du Procureur vient compléter la déclaration donnée aux autorités

 20   musulmanes en 1995. J'attire votre attention sur le fait que c'est sans

 21   précédent qu'une Chambre quelle qu'elle soit devant le Tribunal de La Haye

 22   accepte une déclaration donnée aux autorités serbes, musulmanes ou croates

 23   comme étant une déclaration 92 bis ou ter. En application de 92 bis ou 92

 24   ter, on a accepté uniquement des déclarations données au bureau du

 25   Procureur de La Haye. Or, ces deux déclarations, une aux autorités

 26   musulmanes et une au bureau du Procureur de La Haye, sont considérées comme

 27   étant l'intégralité, une seule déclaration par bureau. C'est impossible, je

 28   pense.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

  2   M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, bonjour.

  3   La pratique des Chambres du Tribunal pénal international a été

  4   effectivement d'accepter le versement au dossier de déclarations, quelle

  5   que soit l'autorité à laquelle ces déclarations avaient été faites, du

  6   moment que les conditions prévues par l'article 92 ter ou l'article 92 bis

  7   aient été remplies. M. Seselj se trompe complètement lorsqu'il déclare que

  8   le Tribunal de La Haye, comme il l'appelle, n'a jamais accepté de

  9   déclarations faites aux autorités serbes, musulmanes ou croates. C'est

 10   complètement faux.

 11   La seule exigence qu'il convient de respecter, c'est que l'article du

 12   Règlement soit respecté. Il n'est nullement requis qu'une déclaration

 13   écrite soit faite à un enquêteur du Tribunal pour qu'elle puisse être

 14   recevable aux termes de l'article 92 bis, 92 ter, ou même 89.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- observation est mentionnée, et à titre personnel,

 16   je tiendrai compte de ce que vous avez dit au moment où la Chambre

 17   délibérera sur l'admission desdites déclarations.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste une phrase et je ne vous dérangerai plus.

 19   Monsieur le Président, c'était la pratique d'un certain nombre de

 20   Chambres de première instance pour ce qui est des déclarations recueillies

 21   par les autorités locales d'appliquer 89(F) pour le versement. Parce qu'il

 22   y est dit que n'importe quelle déclaration peut être acceptée sous

 23   certaines conditions. Mais la pratique de considérer comme une seule

 24   déclaration deux différentes déclarations en application de 92 ter, bien,

 25   cette pratique, je ne suis pas au courant qu'elle existe. M. Mundis devrait

 26   me préciser quelle Chambre a accepté cela et à quel moment.

 27   Nous avons deux déclarations complètement séparées ici. Le Procureur

 28   les traite comme étant une déclaration et vous demande d'accepter cela en

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  1   92 ter. Dans d'autres situations, le Procureur prépare des déclarations à

  2   part 92 ter, fait une compilation de différentes déclarations pour les

  3   fondre en un seul texte. Et là, vous en avez, en fait, deux. Il y a des

  4   contradictions dans ces deux déclarations. Malheureusement, je ne peux pas

  5   attirer votre attention sur ces contradictions puisque comme vous le savez,

  6   a priori, je n'accepte pas ce type de témoignage.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre va délibérer après sur cette question. La

  8   pratique, moi, je ne la connais pas. C'est la première fois que je vois ce

  9   cas, donc la Chambre en délibérera.

 10   Bien. Alors, Madame, - on est en audience publique, donc faites-nous le

 11   résumé des deux déclarations puisqu'il y en a deux.

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 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-il possible que la première partie vous dites

 18   publiquement certains éléments, et après on passera en audience publique --

 19   à huis clos partiel, pour la partie --

 20   Mme PRASAD: [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. Alors, commencez, puis après vous me

 22   dites, je de --

 23   Mme PRASAD : [interprétation] Oui. Oui. Merci, Monsieur le Président.

 24   Le témoin est un Musulman de Bosnie. En 1992, il avait 21 ans au moment des

 25   événements de Mostar.

 26    Le 3 avril 1992, un char a explosé à proximité du camp nord à Zalik,

 27   Mostar. En conséquence de quoi, quelque 500 à 600 personnes dont des

 28   Serbes, des Croates et des Musulmans sont allés se réfugier dans un abri à

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  1   Zalik où ils se sentaient plus en sécurité.

  2   En mai 1992, les Serbes ont pris le contrôle de cette zone et ont

  3   limité les déplacements de tous les non-Serbes.

  4   Le 7 mai, un certain nombre de réservistes sont entrés dans l'abri et

  5   ont choisi dix non-Serbes avant de les emmener. Lorsqu'on les a ramenés,

  6   les prisonniers en question ont informé les autres qu'on les avait emmenés

  7   à la caserne du camp nord où on les avait contraints à s'agenouiller la

  8   tête en bas pendant toute la nuit.

  9   Vers le 19 [comme interprété] mai 1992, un Chetnik est entré dans

 10   l'abri et il a annoncé que d'autres Chetniks arrivaient, avançaient et

 11   qu'il allait commencer à nettoyer Bijelo Polje.

 12   Le 22 mai 1992, un Chetnik, le chef de la police de Zalik¸ est entré

 13   dans l'abri. Il a établi une liste de personnes qui iraient nettoyer la

 14   ville et déblayer les ruines. Les prisonniers ont été contraints de

 15   nettoyer les rues et les déchets à des endroits où il y avait des

 16   pilonnages et où il y avait des tirs, si bien qu'ils étaient en danger de

 17   mort. On les a ainsi utilisés comme boucliers humains.

 18   Le 13 juin 1992, ayant entendu dire qu'on allait miner le camp du

 19   nord, le témoin et plusieurs centaines de personnes se sont réunies dans

 20   l'abri mais le nombre de personnes augmentait, car les Chetniks chassaient

 21   les gens de leurs appartements et les amenaient jusqu'à l'abri. Quelques

 22   Chetniks sont entrés dans l'abri et ils ont exigé que tous les prisonniers

 23   masculins s'alignent à l'extérieur avec leur carte d'identité. Ensuite, on

 24   les a emmenés jusqu'à la caserne du camp nord.

 25   Et de là, le témoin, avec 15 autres détenus, a été transporté dans un

 26   camion jusqu'au bâtiment du cimetière de la ville. Ils ont été enfermés

 27   dans une pièce, ensuite on est venu les chercher un par un pour les

 28   interroger. Ils pouvaient entendre des gémissements, des appels au secours,

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  1   et la plupart des détenus, dont le père du témoin, ne sont jamais revenus.

  2   Le témoin a également été emmené pour être interrogé, et au cours de

  3   cet interrogatoire, il a été passé à tabac. On lui a mis un couteau contre

  4   la gorge et on a appuyé un fusil chargé contre sa tempe. L'un de ceux qui

  5   l'interrogeaient l'a menacé en lui disant qu'il fallait répondre, sinon on

  6   allait lui arracher les yeux et lui couper les oreilles et la gorge. Au

  7   bout de 20 minutes, le témoin a été jeté brutalement dans une pièce où

  8   régnait l'obscurité et où il y avait un grand nombre de personnes qui

  9   avaient été interrogées. J'aimerais demander maintenant le huis clos

 10   partiel, s'il vous plaît.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   Mme PRASAD : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur  le

 17   Président, Madame et Monsieur les Juges, j'ai quelques questions à poser

 18   concernant la déclaration du témoin.

 19   Je vous remercie.

 20   Interrogatoire principal par Mme Prasad :

 21   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez fourni une

 22   déclaration le 18 mars 1995 au ministère de l'Intérieur, aux services

 23   chargés de la Sécurité à Mostar ? 

 24   R.  Oui, je l'ai fait.

 25   Q.  Ensuite, le 13 juin 2004, lorsque vous avez rencontré des représentants

 26   de ce Tribunal, est-ce que vous avez donné une déclaration ?

 27   R.  Oui, je l'ai fait.

 28   Q.  Avez-vous eu l'occasion de revoir la déclaration que vous aviez faite

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  1   dans votre propre langue ?

  2   R.  Ma déclaration, oui, je l'ai revue dans ma langue.

  3   Mme PRASAD : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que  vous

  4   pourriez afficher ou donner une copie sur support papier de la version en

  5   B/C/S du témoin, celle du 18 mars 1995. Oui, nous pouvons d'ailleurs

  6   remettre cet exemplaire au témoin, numéro 65 ter étant 5035B. Il ne

  7   faudrait pas que ces images ou que cette déclaration soient diffusées en

  8   dehors de ce prétoire.

  9   Q.  Veuillez regarder la première page de cette déclaration en B/C/S,

 10   Monsieur le Témoin.

 11   R.  Oui.

 12   Mme PRASAD : [interprétation] Je voudrais vérifier que le  témoin a bien la

 13   déclaration du 18 mars 1995. Je crois qu'il faut lui donner la déclaration

 14   du 18 mars 1995. Merci, Monsieur l'Huissier.

 15   Q.  Veuillez regarder la première page de cette déclaration. Est-ce que

 16   vous reconnaissez la signature qui se trouve en bas de page ?

 17   R.  Oui, c'est ma signature.

 18   Q.  Je vais vous demander de feuilleter cette déclaration pour trouver la

 19   page 11.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous reconnaissez votre signature ?

 22   R.  Oui, je reconnais ma signature.

 23   Mme PRASAD : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que  vous

 24   pourriez remettre la déclaration sur support papier, en anglais comme en

 25   B/C/S, de la déclaration du 13 juin 2004.

 26   Q.  Reconnaissez-vous votre signature qui se trouve à la première page de

 27   la déclaration en anglais ?

 28   R.  Oui, je reconnais ma signature.

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  1   Q.  Je vais vous demander de parcourir cette déclaration et de passer à la

  2   page 7.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que vous y reconnaissez votre signature ?

  5   R.  Oui, je reconnais ma signature.

  6   Mme PRASAD : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je  voudrais

  7   vous signaler que la version en B/C/S de la déclaration du 13 juin 2004 a

  8   été signée par le témoin plus tard, en novembre 2004, le numéro ERN étant

  9   0363-1619 - 0363-1627. Il y a une différence au niveau du numéro ERN et

 10   c'est en application de la décision de la Chambre de première instance.

 11   Q.  Ces deux déclarations prises ensemble sont-elles le reflet fidèle des

 12   souvenirs que vous avez des événements qu'elles

 13   rapportent ?

 14   R.  Oui, cela reflète fidèlement mes souvenirs.

 15   Q.  Si des questions vous étaient posées concernant ces événements

 16   aujourd'hui, est-ce que vous y répondriez comme vous y avez répondu dans

 17   votre déclaration écrite ?

 18   R.  Oui, je donnerais les mêmes réponses.

 19   Mme PRASAD : [interprétation] Nous demandons le versement sous  pli scellé

 20   des deux déclarations préalables du témoin, celle du

 21   18 mars 1995 et celle du 13 juin 2004, à savoir les numéros 5035B et 5035A.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : On va leur attribuer deux numéros MFI parce qu'il

 23   faudra que la Chambre délibère sur l'admission définitive. Deux numéros

 24   MFI.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Les pièces 5035B et A seront ces

 26   numéros MFI : P658 et P659.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Sous pli scellé, Madame, parce que --

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La déclaration de 1995, ce sera la

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  1   pièce P658 et le numéro 5035A, ce sera P659 pour identification.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Mais il faut rajouter, Madame la Greffière,

  3   également sous pli scellé parce que le témoin est protégé.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Toutes deux sous pli scellé, Monsieur

  5   le Président, effectivement.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut penser à tout.

  7   Madame le Procureur --

  8   Mme PRASAD : [interprétation] Si vous me le permettez, j'ai deux questions

  9   à poser au témoin à huis clos partiel.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. On va passer à huis clos partiel, Madame la

 11   Greffière.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 13   Monsieur le Président.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 20   --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le jeudi 27 novembre

 21   2008, à 8 heures 30.

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