Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 27 novembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 8 heures 34.

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, pouvez-vous appeler le numéro

  6   de l'affaire, s'il vous plaît ?

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges.

  8   Bonjour à tous et à toutes.

  9   Affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame la Greffière.

 11   Bien. En ce jeudi 27 novembre 2008, je salue M. Mundis, M. Dutertre et

 12   leurs collaborateurs et collaboratrices. Je salue M. Seselj ainsi que Mme

 13   la Greffière, M. l'Huissier, toutes les personnes qui nous assistent.

 14   Nous avons un témoin qui est prévu qui est la disposition de la Chambre.

 15   J'ai cru comprendre, Monsieur le Procureur, que vous aurez besoin

 16   d'une heure grosso modo.

 17   M. DUTERTRE : Je pense que je peux faire l'exercice dans 50 minutes,

 18   peut-être faudra-t-il la dépasser.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Très bien. Donc, M. Seselj aura donc le

 20   même temps pour le contre-interrogatoire, ce qui permettra, après lorsqu'on

 21   aura terminé avec ce témoin, à la Chambre d'évoquer quelques décisions

 22   rendues ou à rendre afin d'informer M. Seselj de l'état de la situation

 23   compte tenu des délais liés au traduction des décisions qui peuvent prendre

 24   plusieurs jours et donc autant faire que possible le maximum pour que les

 25   uns et les autres aient le maximum d'éléments d'information à leur

 26   disposition.

 27   Nous allons introduire le témoin et je demande à M. l'Huissier

 28   d'aller le chercher.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire] 

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. 

  3   Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de naissance.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Ljubisa Vukasinovic. Je suis né

  5   le 15 août 1954.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, une profession actuelle, et si

  7   oui, laquelle ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis officier. J'ai un grade de colonel. Je

  9   suis à la retraite depuis 2006. Je suis dans les affaires, c'est lié à ma

 10   profession, à savoir la sécurisation d'installation.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mon Colonel, avez-vous déjà témoigné dans des

 12   procès sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie ? Si oui,

 13   devant quel tribunal et pour quelle affaire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai témoigné trois fois à Belgrade, dans

 15   le procès d'Ovcara. Ce sont les procès réitérés en 2003, 2004, me semble-t-

 16   il, et en 2007. J'ai fait des déclarations auprès d'un juge d'instruction à

 17   Novi Sad en 2003, me semble-t-il. En 1998, j'ai fait une première

 18   déclaration auprès du procureur militaire de Belgrade, et j'ai fait une

 19   déclaration -- ou plutôt, j'ai témoigné en tant que témoin de la Défense

 20   dans le procès Milos Sljivancanin à La Haye en 2006.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous avez déjà témoigné à La Haye dans le

 22   procès dit de Vukovar en 2006, et vous étiez le témoin de qui ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Du commandant Sljivancanin.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : A Ovcara, vous étiez témoin de l'Accusation ou de la

 25   Défense ? 

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais le témoin de l'Accusation suite à la

 27   plainte au pénal déposée contre [imperceptible].

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Si je comprends bien, vous avez été témoin de

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  1   l'Accusation dans le procès de Belgrade sur les événements d'Ovcara, et

  2   témoin de la Défense ici pour le commandant Sljivancanin dans l'affaire

  3   dite de Vukovar. Bien, ça me permet de vous poser la question suivante.

  4   Monsieur, pendant ces dernières années, est-ce qu'à un moment donné, des

  5   personnes sont intervenues auprès de vous pour témoigner en faveur d'un tel

  6   ou d'un tel, ou bien personne n'est intervenu sauf lorsqu'on vous a demandé

  7   de rencontrer les Procureurs ou les avocats des Défenses ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette période depuis mon témoignage qui a

  9   eu lieu en 2006, personne ne m'a contacté de la part du bureau du

 10   Procureur. Pour ce qui est maintenant du fait d'être témoin de

 11   l'Accusation, je l'ai appris de la bouche du général Delic, un collègue à

 12   moi qui est à la retraite aussi, et il m'a contacté et il m'a dit : "Est-ce

 13   que tu le sais ?" Alors je lui ai dit que je ne le savais pas. Il m'a dit

 14   que je serais témoin de l'Accusation, et il m'a montré son numéro

 15   d'identification, son numéro de matricule, et il m'a prévenu de la

 16   nécessité de me prononcer à ce sujet. Nous nous sommes entretenus, et je

 17   lui ai dit que je n'en avais pas connaissance, et partant de là, j'ai dit

 18   que je ne voulais pas être témoin de l'Accusation. Suite à une initiative

 19   de sa part, j'ai fait une déclaration que j'ai fait viser par un tribunal,

 20   et ça a été communiqué ici.

 21   Ensuite il y a eu une pause, et vers le mois d'août de cette année-ci, j'ai

 22   été re-contacté. Ce collègue m'a re-contacté pour me dire que j'étais

 23   encore sur la liste des témoins de l'Accusation et qu'il faudrait que je

 24   fasse une nouvelle déclaration. Alors j'ai re-rédigé une déclaration, j'ai

 25   visé cela au tribunal et je l'ai envoyée ici.

 26   En dépit de cette intervention, pour la première fois, j'ai reçu une

 27   convocation de la part d'un tribunal municipal à Belgrade vers le mois de

 28   septembre. C'est un coursier qui m'a apporté cela, et où il était dit là

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  1   qu'il fallait que je me présente au bureau du Procureur du Tribunal de La

  2   Haye à Belgrade. C'était un vendredi, me semble-t-il, au mois de septembre.

  3   Alors je me suis présenté à ce bureau, on m'a reçu, je me suis entretenu

  4   avec Paulo, puis il y a eu une petite interview, et on m'a demandé si je

  5   voulais témoigner pour l'Accusation. J'ai refusé et j'ai dit pourquoi je ne

  6   voulais pas ou je ne voudrais pas être témoin de l'Accusation. Ça a pris

  7   fin de la sorte, et il m'a dit qu'il fallait que je vienne au cas où les

  8   Juges de la Chambre auraient une demande à cet effet. J'ai dit que, dans le

  9   cas d'une injonction, j'accepterais parce que je sais quelles sont les

 10   sanctions encourues.

 11   En d'autres termes, il y a quelques jours, on m'a demandé de venir,

 12   la convocation est venue de la part des Juges de la Chambre de première

 13   instance, et me voici ici. C'est ainsi que ça s'est passé.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, vous avez bien fait de venir.

 15   Une question complémentaire. Vous aviez témoigné pour le bureau du

 16   Procureur à Belgrade; pourquoi ne pas témoigner pour le bureau du Procureur

 17   à La Haye ? Pourquoi avoir indiqué au Procureur que vous ne vouliez pas

 18   témoigner pour lui, puisque vous avez déjà témoigné pour un Procureur ? Il

 19   y a une raison ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] La raison principale c'est que je ne vois pas

 21   de rôle à jouer dans ce procès contre le Dr Vojislav Seselj parce que

 22   j'avais ces moyens à l'époque dans l'intérêt de la Défense de mes

 23   officiers, de mon unité.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, excusez-nous de

 25   vous interrompre, mais il y a eu un petit problème technique. Est-ce que

 26   vous pourriez reprendre le début de votre réponse ?

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous avais demandé : pour quelle raison aviez-

 28   vous accepté de témoigner pour le Procureur à Belgrade et pourquoi ne pas

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  1   témoigner pour le Procureur ici ? Alors vous aviez commencé à répondre, et

  2   il y a eu un problème technique, alors répondez.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse était la suivante : j'ai commencé à

  4   témoigner à Belgrade parce que c'était la défense des positions et des

  5   principes qui relevaient de l'intérêt de mon unité et de mes officiers à

  6   moi. Donc j'étais une partie, un segment dans le procès, je défendais ma

  7   propre unité et ses propres officiers, dans ce procès-ci je ne vois pas de

  8   place et de rôle où je pourrais contribuer à ce procès contre le Dr

  9   Vojislav Seselj. Parce que, moi, je n'ai eu aucun contact avec Vojislav

 10   Seselj, je ne le connaissais pas.

 11   Parce qu'à l'époque, j'étais un officier. J'avais un rang de commandant.

 12   J'étais à l'extérieur de tout parti, et lui, il était un dirigeant de parti

 13   à la tête donc d'un parti et un intervenant dans la politique. Je n'ai donc

 14   aucun intérêt à témoigner contre le Dr Vojislav Seselj, je ne vois pas ma

 15   place dans ce procès.

 16   Il n'y a pas d'autre raison.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Vous avez donné votre argument.

 18   Monsieur le Procureur, vous êtes debout pour --

 19   M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président, Madame le Juge, Monsieur le Juge.

 20   Deux points très brièvement. Est-ce que M. Vukasinovic peut préciser

 21   lorsqu'il parle du général Delic ? S'il s'agit de Rasim Delic ou Bozidar

 22   Delic ?

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, c'est quel Delic et il y a plusieurs Delic,

 24   plusieurs généraux ? Voilà c'est lequel ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait du général Bozidar Delic.

 26   Excusez-moi de l'avoir omis.

 27   M. DUTERTRE : Je ne veux pas interrompre --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Non, non, allez-y. Non, parce que mon collègue m'a

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  1   rappelé qu'il faut qu'il prête serment --

  2   M. DUTERTRE : Oui, tout à fait.

  3   On peut le faire prêter serment et je --

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, mais --

  5   M. DUTERTRE : Sur le point de -- sur la question de la présentation

  6   volontaire du témoin dans la Chambre aujourd'hui comme témoin de

  7   l'Accusation - et je me réfère à ce qu'il a indiqué - il y a eu

  8   effectivement un entretien en septembre, le 12 septembre 2008 avec M.

  9   Vukasinovic, qui a été enregistré, et M. Seselj a eu copie de cela. La

 10   question qui a été posée à M. Vukasinovic, je cite, était la suivante : "In

 11   case the office of the Prosecutor --"

 12   [interprétation] "Au cas où vous seriez appelé à comparaître, à

 13   témoigner par le bureau du Procureur en tant que témoin dans le procès

 14   Seselj, que feriez-vous ?"

 15   [en français] Alors je reprends parce que le début est : "In case the

 16   office of the Prosecutor with court."

 17   [interprétation] "Au cas où vous seriez appelé par le bureau du

 18   Procureur."

 19   "As a witness in --"

 20   [interprétation] "En tant que témoin dans le procès intenté contre M.

 21   Seselj, qu'est-ce que vous faites ?"

 22   [en français] La réponse était la suivante : M. Vukasinovic indiquait

 23   : "It's no problem."

 24   [interprétation] "Pas de problème," a dit M. Vukasinovic. Je

 25   répondrais à la citation à comparaître, mais je pense que ce sont des

 26   dépenses inutiles car j'ai déjà dit tout ce que je savais."

 27   M. DUTERTRE : -- tout à fait clair.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, attendez. Je vais d'abord

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  1   poser la question au colonel.

  2   Vous confirmez bien que le 12 septembre 2008, le Procureur vous a demandé

  3   si vous pouviez témoigner dans le procès Seselj, et vous avez répondu ce

  4   qu'il a lu tout à l'heure, à savoir que pour vous, il n'y aurait pas de

  5   problème, mais vous ne voyez pas l'utilité ? Vous confirmez cela ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ce jour-là au mois de septembre, j'étais

  7   au bureau du Procureur de La Haye à Belgrade, et il y a d'autres raisons

  8   que j'ai avancées --

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont du mal à entendre le témoin.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Les interprètes ont du mal à vous entendre.

 11   Oui, parlez plus fort.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le 12, j'étais au bureau du Tribunal de

 13   La Haye, et c'est exact que j'ai dit que mon intervention en guise de

 14   témoin a été dénuée d'utilité et j'ai avancé les raisons pour lesquelles je

 15   ne souhaitais pas témoigner. Je ne suis pas contre.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, M. Vukasinovic a

 18   été interviewé par les enquêteurs de La Haye le 26 novembre 2002. Le bureau

 19   du Procureur de La Haye avait planifié de faire en sorte que M. Vukasinovic

 20   soit témoin dans l'affaire Mrksic, Radic, Sljivancanin. Ensuite le bureau

 21   du Procureur a renoncé au témoignage de M. Vukasinovic.

 22   Lorsque le bureau du Procureur de La Haye a renoncé au témoignage de M.

 23   Vukasinovic, la Défense du colonel Veselin Sljivancanin s'est adressée à

 24   lui pour lui proposer d'être témoin de la Défense. En sa qualité d'individu

 25   qui a fait une déclaration auprès du bureau du Procureur, suite à

 26   renonciation de la part de ce bureau du Procureur il était devenu témoin de

 27   la Défense.

 28   Jusqu'au mois de septembre de cette année-ci, jamais le bureau du Procureur

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  1   de La Haye en aucune façon ne lui a-t-il laissé entendre qu'il l'avait

  2   envisagé comme témoin dans le procès diligenté à mon encontre. Ça fait six

  3   ans que son nom figure sur la liste des témoins. Entre-temps, M.

  4   Vukasinovic a fait deux déclarations auprès de mes collaborateurs et il a

  5   été explicite, il a dit qu'il souhaitait être témoin de la Défense et s'est

  6   prononcé sur certaines circonstances. Vous avez ces déclarations et

  7   lorsqu'il a fait ces déclarations auprès de mes collaborateurs au mois de

  8   septembre, il y a les enquêteurs du bureau du Procureur de La Haye,

  9   l'Accusation donc et on lui a demandé d'être témoin de l'Accusation. Moi,

 10   je trouve qu'on arrache les témoins de la Défense.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, j'ai effectivement sous les yeux la

 12   déclaration que vous aviez faite le 16 au 26 novembre 2002, il est indiqué

 13   à la fin, il était donc indiqué semble-t-il à la fin que cette déclaration

 14   avait été recueillie en vue de vous faire témoigner dans le procès de

 15   Vukovar, bien.

 16   Puis le Procureur ne vous a pas fait venir dans le procès de Vukovar, si

 17   j'ai bien compris; la Défense du commandant Sljivancanin est intervenue

 18   auprès de vous pour témoigner, c'est ce que vous avez fait. Si je comprends

 19   bien aussi, les collaborateurs de M. Seselj vous ont demandé de leur

 20   fournir des déclarations.

 21   Alors sur ce point très précis, les collaborateurs de M. Seselj vous ont

 22   appelé à quelle date à peu près à votre connaissance ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] La première fois que j'ai rencontré le général

 24   Delic, vers le 18, c'est dit dans la déclaration, du 17 au 18 décembre

 25   2007, chez lui dans son bureau. C'est en décembre 2007, disais-je, la

 26   première fois. C'est là qu'on s'est entretenu et en août 2008, j'ai rédigé

 27   ma deuxième déclaration suite à une nouvelle rencontre dans son bureau au

 28   parlement de Serbie.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc en septembre 2007, vous avez rencontré le

  2   général Delic et en août 2008 vous avez fait la déclaration. Si je

  3   comprends bien c'est en septembre 2008 que le bureau du Procureur vous a

  4   contacté. Si je comprends bien enter 2002, le mois de novembre 2002 et le

  5   mois de septembre 2008, le bureau du Procureur n'a eu aucun contact avec

  6   vous.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

  9   M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président. On peut refaire tout un

 10   historique des contacts avec le présent témoin qui est dans la Cour

 11   aujourd'hui, et donc on pourrait passer au témoignage. Maintenant je veux

 12   rebondir sur un commentaire de M. Seselj, qui parle du fait que le parquet

 13   arrache des témoins à la Défense. Ce n'est absolument pas le cas. On peut

 14   être témoin de la Défense dans une affaire, témoin du parquet dans une

 15   autre.

 16   En tout état de cause, il y a eu avec M. Vukasinovic au moins un

 17   contact entre 2002 et 2008, puisqu'il a été contacté en février 2005,

 18   notamment à propos de son témoignage. Ensuite il a clairement indiqué qu'il

 19   viendrait pour le parquet, ainsi je l'ai cité.

 20   Je dois à nouveau revenir sur le fait que page 7, ligne 5, la

 21   question qui lui était posée, 12 septembre 2008, enregistrée n'est toujours

 22   pas reflétée dans le transcript, c'était si le parquet vous appelle. Dans

 23   le transcript au jour d'aujourd'hui, ce n'est toujours pas le cas. On

 24   parlait bien, c'était bien précis : "Si le parquet vous appelle, qu'est-ce

 25   que vous allez faire ?" La réponse était, je cite de mémoire : "Il n'y a

 26   pas de problème, je répondrais à leur sommation."

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur, ceci était à titre

 28   préliminaire pour éclairer d'un point de vue administratif votre venue.

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  1   Alors maintenant je vais vous faire prêter serment --

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, j'explique au témoin. Moi, ce qui

  4   m'importe, Monsieur, c'est que vous témoignez sur ce qui s'est passé à

  5   Vukovar. C'est ça le principal pour moi. C'est pour cela que je vais vous

  6   faire prêter serment maintenant.

  7   Oui, Monsieur Seselj, que vouliez-vous rajouter ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au sujet de ce que M. Dutertre vient de dire,

  9   le témoin c'est un officier professionnel, ce n'est pas un juriste. Il ne

 10   connaît pas les finesses en matière de droit, notamment pour ce qui est du

 11   droit lié à la procédure. Il a été contacté par le bureau du Procureur à

 12   Belgrade. Vous savez que le bureau du Procureur à La Haye c'est un

 13   véritable épouvantail aux yeux des gens à Belgrade.

 14   Il a fait deux déclarations au profit de ma Défense. On lui demande

 15   s'il veut venir. Il dit, "je vais venir," et puis il voulait préciser tout

 16   à l'heure, il avait conscience des conséquences qu'aurait un refus de sa

 17   part. Donc il avait par exemple connaissance du fait qu'il pouvait être

 18   arrêté comme Ljubisa Petkovic que sais-je encore. Pour éviter toute

 19   sanction, il dit : "Bon, pas de problème, je vais venir." Mais il n'avait

 20   pas son avocat à côté de lui à l'occasion de cette interview et personne ne

 21   lui a dit ce qu'il pouvait ou ne pouvait pas faire. Il aurait très

 22   simplement pu dire, "je ne veux pas m'entretenir avec vous," s'il leur

 23   avait claqué la porte, le bureau du Procureur ne pourrait lui faire. Mais

 24   lui, il ne savait pas qu'il pouvait faire de la sorte, donc il est venu ce

 25   témoin. Depuis août à ce jour, je crois que la Défense n'a eu aucun contact

 26   avec lui. On n'a pas fait pression contre lui quand on a appris qu'il

 27   allait venir, on n'a pas essayé à le convaincre de ne pas venir, chose

 28   qu'il aurait pu faire.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est d'ailleurs pour ça que je lui avais posé

  2   la question au départ pour savoir dans quelle circonstance il aurait pu

  3   être contacté ou pas.

  4   Bien, alors on va terminer sur ce chapitre, oui, Monsieur le

  5   Procureur.

  6   M. DUTERTRE : [hors micro] -- une brève remarque et peut-être rapidement en

  7   "private session" mais vous jugerez après de l'opportunité de lever la

  8   "closed session" c'est plus dans l'intérêt du témoin je dis ça, mais

  9   j'aimerais rebondir sur ce qui a été dit un instant.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je rappelle à tout le monde que moi, ce qui

 11   m'intéresse c'est ce qui s'est passé à Vukovar; tout le reste c'est à des

 12   années de lumière de moi.

 13   Madame la Greffière, audience à huis clos.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 15   Monsieur le Président.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je demande que

  7   cette partie-là des débats qui se déroule à huis clos partiel soit ouverte

  8   au public. Il n'y a aucune raison de cacher cela au public.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Témoin, il y a une partie de ce

 10   que vous aviez dit -- le 12 septembre 2008 qui a été tenu à huis clos. Vous

 11   voyez un inconvénient à ce que ça soit public ou pas ? C'est vous qui

 12   décidé.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] On peut diffuser cela. Il n'y a pas de

 14   problèmes. Mais je vais demander à M. le Procureur de citer toutes mes

 15   raisons, là il en cite une. J'ai cité trois ou quatre raisons pour

 16   lesquelles je ne souhaitais pas témoigner, donc il ne faut pas qu'il cite

 17   uniquement cette dernière, ça n'a pas de sens.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Dites-nous les trois raisons, dites-nous les trois

 19   raisons.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] La première raison comme que l'ai dit, j'étais

 21   témoin de la Défense dans l'affaire contre Veselin Sljivancanin, et dans

 22   cette affaire, j'ai dit tout ce que je pouvais dire au sujet de ma place et

 23   du rôle que j'ai joué dans le cadre des événements qui ont à voir avec

 24   l'évacuation des prisonniers depuis l'hôpital jusqu'à Ovcara, donc je ne

 25   peux que réitérer ce que j'ai déjà dit. Maintenant ce que je pourrais dire

 26   c'est uniquement la même chose que j'ai déjà dite, donc il n'y a rien de

 27   neuf que je pourrais dire. 

 28   Deuxièmement, j'ai dit que j'ai été à ce moment-là témoin de la Défense,

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  1   maintenant j'ai changé de rôle en tant que témoin de l'Accusation, je pense

  2   que ça n'a aucun - comment dirais-je - aucun sens, être une fois témoin de

  3   la Défense puis témoin de l'Accusation sur la même question.

  4   Puis, troisièmement, j'ai dit que le témoignage c'est exact, témoigné en

  5   tant que témoin de l'Accusation dans la ville où je vis. Comme je suis

  6   officier de carrière qui a un certain statut, une certaine renommée, ce

  7   n'est pas bien de venir déposer en tant que témoin de l'Accusation.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Vukasinovic, nous avons

  9   suffisamment développé toutes ces questions, votre convocation par

 10   l'Accusation ou par la Défense, et cetera. Je vous rappelle qu'une fois que

 11   vous avez prononcé la déclaration solennelle, vous êtes un témoin qui

 12   dépend de ce Tribunal, de cette Chambre et la seule chose que nous

 13   attendons de vous c'est que vous disiez la vérité au mieux de votre

 14   connaissance, que vous répondiez de manière précise aux questions qui vous

 15   sont posées par l'Accusation et par la Défense, et que vous le fassiez en

 16   disant la vérité. Ce que je vous dis c'est qu'une fois que vous avez

 17   prononcé la déclaration solennelle, peu importe que vous soyez un témoin de

 18   la Défense ou de l'Accusation.

 19   Vous comprenez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, je comprends cela, mais ça ne

 21   pose aucun problème à mes yeux. Je ne vois pas pourquoi il y a tous ces

 22   débats maintenant à ce sujet, je suis venu.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien. Avançons donc.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je me dois de vous

 25   informer d'une chose, le Procureur, Max Moore, dans l'affaire Mrksic, Radic

 26   et Sljivancanin, à l'intention de M. Ljubisa Vukasinovic, pendant le

 27   contre-interrogatoire, lui a dit comme suit, et je cite le compte rendu

 28   d'audience : "Je vous soumets que vous êtes un vaurien de tout premier

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  1   ordre qui est en réalité venu ici pour protéger non seulement vous-même

  2   mais d'autres personnes et pour donner une déposition --"

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- que l'interprète a manqué. Relisez

  4   là ce qu'a dit M. le Procureur dans ce procès.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] "Je vous soumets que vous êtes un vaurien de

  6   tout premier ordre qui est venu ici en réalité pour protéger non seulement

  7   vous-même mais d'autres également et pour faire un témoignage qui

  8   correspond à leurs intérêts."

  9   Voilà ceci nous informe sur ce que pense le bureau du Procureur sur le

 10   colonel Ljubisa Vukasinovic qui est un homme d'honneur.

 11   Alors une chose comparable s'est produite dans l'affaire Limaj et consorts.

 12   Les trois Albanais qui ont été jugés pour crimes de guerre, deux des

 13   principaux ont été acquittés et puis dans le procès contre Slobodan

 14   Milosevic aussi, un témoin serbe, un policier est venu et il a témoigné au

 15   sujet des crimes commis par Limaj et consorts. Ensuite le Procureur à un

 16   moment pendant l'audience a soumis à M. Milosevic : "Voilà nous avons un

 17   tel qui pourrait être intéressant pour M. Milosevic et donc nous

 18   l'informons qu'il peut s'entretenir avec lui s'il souhaite le citer en tant

 19   que témoin de la Défense." Ensuite M. Milosevic a eu un entretien avec cet

 20   homme. Il était chef du poste de police de Prizren, je pense, je ne me

 21   souviens pas exactement de son nom, mais l'information est exacte. Il a été

 22   témoin de la Défense de M. Milosevic et Jeffrey Nice, pendant le contre-

 23   interrogatoire, a utilisé les mêmes arguments que la Défense Limaj a

 24   utilisé --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- l'affaire Milosevic ça n'a aucun

 26   intérêt. Par contre ce que vous avez dit dans les propos de M. le Procureur

 27   dans le procès de Vukovar, cela ça peut être pertinent. Mais j'aurais

 28   quelque chose à dire.

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  1   Monsieur le Procureur, que vouliez-vous dire ?

  2   M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président. Je -- ce que ça peut me faire

  3   remarquer c'est que ça déjà, ça déjà relevé de la "cross-examination" tout

  4   cela.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord.

  6   M. DUTERTRE : Et je pense que, et c'est une remarque qu'a fait le Juge

  7   Harhoff, ce que je voulais faire il m'a devancé, effectivement le témoin

  8   est là pour dire la vérité.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 10   M. DUTERTRE : Donc je ne vois pas où il a la difficulté à cet égard.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 12   M. DUTERTRE : Je sollicite qu'on commence "l'examination-in-chief."

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais vous faire prêter serment mais suite à cela

 14   que j'ignorais totalement est-il exact, Monsieur le Témoin, que dans le

 15   procès de Vukovar le représentant du bureau du Procureur vous a traité de

 16   vaurien ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est vrai. C'est la traduction qui m'a

 18   été remise après par mon avocat et je l'ai reçu et j'ai reçu des excuses

 19   avant le deuxième tour des entretiens. J'ai les excuses à huis clos.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, oui.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai quelque chose à ajouter, Monsieur le

 22   Président.

 23   Le Procureur n'a pas vraiment présenté ses excuses. En fait les avocats de

 24   la Défense l'ont attaqué, et d'une certaine façon par la suite, il a essayé

 25   d'atténuer ce qu'il avait dit, mais il n'a pas explicitement demandé

 26   "pardon." J'ai lu l'intégralité du compte rendu d'audience. M. Vukasinovic

 27   n'a peut-être pas eu tout cela.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

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  1   Alors, Monsieur, lisez le -- vous voyez, j'avais bien fait de commencer

  2   l'audience à 8 heures 30 parce que ça fait déjà 40 minutes que nous sommes

  3   là et vous n'avez pas encore lu votre serment, mais maintenant vous allez

  4   le lire. Alors lisez-le.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  6   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  7   LE TÉMOIN : LJUBISA VUKASINOVIC [Assermenté]

  8   [Le témoin répond par l'interprète] 

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors asseyez-vous, Monsieur. Je crois,

 10   asseyez-vous.

 11   Je crois que ma collègue avait deux questions à vous poser.

 12   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc, Monsieur le Témoin, maintenant que vous avez

 13   prêté serment, je m'attends que vous diriez la vérité. Donc je voulais

 14   seulement que vous nous précisiez deux petites choses.

 15   Vous avez parlé -- vous avez évoqué des déclarations, deux déclarations qui

 16   auraient été certifiées devant un Tribunal, peut-être vous vous référez au

 17   fait que la signature a été certifiée et que vous les avez envoyées au

 18   Tribunal. A qui les avez-vous envoyées, s'il vous plaît ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces déclarations je les ai faites certifier au

 20   4e Tribunal municipal de la nouvelle Belgrade. Je les ai faites certifier

 21   donc mon nom, mon prénom, c'est ce qu'on fait devant les tribunaux chez

 22   nous. Un exemplaire est déposé au tribunal et les autres exemplaires

 23   m'appartiennent. J'ai remis ça au général Bozidar Delic et sa Défense,

 24   c'est-à-dire la Défense de M. Seselj quand ils se sont rendus ici, et ils

 25   les ont apportées, je suppose. Moi-même je n'ai pas envoyé par la poste.

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci de cette précision.

 27   L'autre précision que je voudrais de vous se réfère à la déclaration rendue

 28   au Procureur, à l'équipe du Procureur. Peut-être je me trompe, mais j'avais

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  1   compris que vous avez dit qu'au moment de la déclaration de novembre 2002,

  2   on vous aurait, l'équipe du Procureur vous aurait dit que vous deviez

  3   témoigner ou être disponible pour témoigner pour l'affaire Sljivancanin, et

  4   donc que vous ne vous attendiez pas de devoir témoigner pour/ou dans

  5   l'affaire Seselj. Est-ce que j'ai bien compris ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] En 2002, comme vous le dites, j'ai donné une

  7   déclaration sur les événements de Vukovar. C'était il y a longtemps, il n'a

  8   pas été question à ce moment-là de venir déposer. J'ai fait une déclaration

  9   portant sur les événements de Vukovar et c'était pour que cette déclaration

 10   puisse être utilisée devant le Tribunal international, c'est ce qui est

 11   écrit dans la déclaration à la fin. Mais il n'est pas dit contre qui. Puis

 12   quand le procès a commencé, je suis devenu témoin de la Défense.

 13   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci de cette précision. C'est ce que je

 14   m'attendais de vous. Merci.

 15   Encore une petite précision de ma part. Parce que vous avez dit deux ou

 16   trois fois que vous n'avez rien de nouveau à nous dire, vous devez savoir

 17   qu'ici la preuve se réalise surtout en audience, donc même si vous n'avez

 18   rien de nouveau à nous dire par rapport à ce que vous avez déjà dit, il y a

 19   une raison que vous soyez revenu témoigner dans cette affaire.

 20   Merci.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- quelques éléments d'information.

 23   Vous allez donc, mais comme vous avez l'habitude, vous savez maintenant

 24   comment ça se passe.

 25   Le Procureur va vous poser des questions, à partir d'une déclaration que

 26   vous avez faite, et peut-être vous présentera-t-il des documents. Les Juges

 27   qui sont devant vous seront certainement amenés à vous poser des questions,

 28   compte tenu du rôle que vous aviez au sein de la JNA. L'accusé, M. Seselj,

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  1   qui se trouve à votre gauche, dans le cadre du contre-interrogatoire vous

  2   posera également des questions. Après cela, peut-être que le Procureur vous

  3   posera des questions supplémentaires.

  4   Donc normalement si chacun joue bien son rôle, l'audience doit se passer

  5   dans les meilleures conditions possibles et tout ça dans le but de la

  6   manifestation de la vérité, ce qui nous importe à tous.

  7   Monsieur le Procureur, je vous donne la parole.

  8   M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.

  9   Interrogatoire principal par M. Dutertre :

 10   Q.  [interprétation] Mon Colonel, abordons maintenant le terrain de ce que

 11   vous savez, de ce que vous avez vu, et c'est ce qui intéresse la Chambre

 12   principalement aujourd'hui.

 13   Première question, et c'est votre -- je dirais votre "personal background,"

 14   première question : où étiez-vous de septembre à novembre 1991 ? Le

 15   transcript dit "1992," j'ai dit 1991.

 16   R.  Le rôle que j'ai joué, j'étais officier dans la Brigade de la Garde, et

 17   j'ai été déployé dans la section de sécurité au sein de cette brigade

 18   j'étais assistant du commandant j'étais chargé des affaires relatives à

 19   l'état-major et à la sécurité, vers le 1er septembre je me suis trouvé à

 20   l'école de formation du commandement de l'état-major, c'était une formation

 21   de deux ans. Le 15 septembre, cette formation a été interrompue. Je me suis

 22   présenté à la Brigade de la Garde, et je suis parti le 20 septembre avec la

 23   Brigade de la Garde pour mener à bien la levée du siège de la caserne de

 24   Vukovar et pour libérer Vukovar des forces paramilitaires appartenant aux

 25   autorités croates. C'est le début, donc le 29 septembre, je me suis trouvé

 26   à Vukovar.

 27   Après --

 28   Q.  Si je peux vous arrêter là, parce qu'on a un temps limité. Je vais vous

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  1   poser des questions sur lesquelles vous pourrez rebondir.

  2   Jusqu'à quelle date précise êtes-vous resté à Vukovar avec la Brigade des -

  3   - ?

  4   R.  Je suis revenu le 24 novembre de Vukovar à Belgrade 1991.

  5   Q.  Entendu.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas très bien compris.

  7   Le Procureur vous demande : "Vous êtes resté à Vukovar, jusqu'à quand ?"

  8   Alors vous dites : "Je suis retourné." Nous, ce qui nous importe c'est de

  9   savoir, dans l'exercice de votre mission militaire, vous êtes resté jusqu'à

 10   quelle date à Vukovar ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 23, j'y étais. Le 24, j'ai pris la route

 12   pour revenir à Belgrade.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc jusqu'au 23 novembre 1991, vous étiez à

 14   Vukovar. Vous avez pris la route le 24, pour Belgrade. Bon, au moins c'est

 15   clair.

 16   M. DUTERTRE :

 17   Q.  Date d'arrivée et date de départ ne sont pas forcément la même chose.

 18   Quel était, mon Colonel, votre supérieur hiérarchique direct à Vukovar ?

 19   R.  A Vukovar, pendant une période j'étais placé sous le commandant de

 20   Veselin Sljivancanin, du 29 septembre jusqu'au 4 novembre 1991, j'étais son

 21   officier opérationnel à l'organe de Sécurité. Le 4 novembre 1991, le

 22   commandant du 1er Bataillon de la Police militaire est tombé malade, et

 23   Mrksic m'a placé commandant du 1er Bataillon de la Police militaire, et

 24   j'étais en même temps le commandant du poste de commandement Negoslavci. A

 25   partir de ce moment-là le 4 novembre jusqu'au 23 novembre, j'étais placé

 26   sous le commandement de Mrksic.

 27   Q.  C'est très clair. J'ai fini avec cette description générale de vos

 28   activités entre septembre et novembre. Je vais maintenant m'intéresser à un

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  1   jour particulier, ma question est la suivante : où êtes-vous allé le 20

  2   novembre 1991, au matin ?

  3   R.  Le 20 novembre 1991, à 6 heures du matin, j'ai reçu une mission du

  4   commandant Sljivancanin de prendre des autocars et de me rendre dans le

  5   secteur de l'hôpital. Donc le 20, à 6 heures du matin.

  6   Q.  Entendu. Donc je comprends que vous arrivez à 6 heures du matin le 20

  7   novembre 1991 à l'hôpital de Vukovar. Pourquoi vous demandait-on de venir

  8   avec des bus, quel était le but de venir avec des bus à l'hôpital ce jour-

  9   là ?

 10   R.  Veselin Sljivancanin m'a confié cette mission de prendre des autocars

 11   pour évacuer les capturés à l'hôpital de Vukovar vers la caserne de

 12   Vukovar.

 13   Q.  Entendu. Qui avez-vous vu en dehors des prisonniers enfin des personnes

 14   qui étaient dans l'hôpital, qui avez-vous vu parmi les forces serbes

 15   présent à l'hôpital ce matin-là ?

 16   R.  C'étaient les forces de la Défense territoriale de Vukovar, on ne peut

 17   pas parler de forces serbes. C'était la Défense territoriale de Vukovar,

 18   les forces, enfin à l'époque comment dirais-je c'était un groupe de

 19   personnes qui se sont trouvées à la caserne, enfin à l'hôpital qui était

 20   présent à l'hôpital. Il y avait là leur commandant, le commandant, c'est-à-

 21   dire Miodrag Vujovic, Stanko Vujanovic, Milan Lancuzanin, Kameni. C'étaient

 22   leurs chefs de section qui étaient présents avec un groupe de leur

 23   combattant. Et, le commandant Sljivancanin naturellement était là et il y

 24   avait d'autres officiers de mon unité.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur aborde un point très important et donc

 26   il s'agit d'avancer avec précaution.

 27   Vous êtes le commandant du 1er Bataillon de la Police militaire. Vous avez

 28   la mission d'aller chercher d'après ce que vous dites des prisonniers à

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  1   l'hôpital. C'est donc la mission militaire qui vous est confiée. En tant

  2   qu'officier de la JNA, qui à l'époque était une armée connue et qui faisait

  3   l'admiration de nombreuses autres armées, avez-vous au niveau des moyens

  4   militaires pris le nombre de policiers militaires suffisants pour cette

  5   opération ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après mes estimations, il y en avait

  7   suffisamment compte tenu du fait que je n'avais pas une longue distance à

  8   traverser entre la caserne et l'hôpital, c'est très près, deux à trois

  9   kilomètres.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aviez combien de policiers militaires avec

 11   vous, combien ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] 12, 12 policiers militaires dont deux dans

 13   chaque autocar, et, dans la caserne, il y avait une Compagnie de Police

 14   militaire.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, 12 policiers militaires pour garder combien de

 16   prisonniers, qu'est-ce qu'on vous avait dit, il y avait combien de

 17   prisonniers ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, je ne le savais. Je ne savais

 19   pas leur nombre, mais quand je suis arrivé j'ai vu qu'il y en avait pas

 20   mal.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Comment exécuter une mission alors même qu'on n'a

 22   pas les données afférentes à cette mission ? Vous me dites à ce moment-là,

 23   je ne savais pas. Imaginez qu'on vous dit d'aller prendre des prisonniers,

 24   ils sont 3 000, c'est impossible avec 12, et là, vous me dites je ne savais

 25   pas. N'y a-t-il pas là une erreur à votre niveau ?

 26   Vous êtes là pour dire la vérité, s'il y a eu des erreurs, dites-le. 

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, le chiffre exact je ne le savais

 28   pas, c'est vrai. Mais il était déterminé, ce n'est pas moi qui ai choisi

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  1   les autocars ou les soldats, c'est la logistique, la brigade qui a tout

  2   organisé. Moi, j'ai juste réceptionné ces autocars avec les soldats et je

  3   suis arrivé là où on m'a donné l'ordre d'aller.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait combien d'autocars ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Six autocars, deux policiers dans chacun et il

  6   y avait mon Pugh, mon véhicule.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc la logistique de la brigade fait venir six

  8   autocars et vous, sans connaître le nombre de prisonniers vous décidez de

  9   mettre deux policiers par autocar.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ça.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors on peut continuer puisque

 12   maintenant on a une base solide.

 13   M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   Juste une précision, page 21, ligne 18, le transcript comporte un

 15   accent circonflexe, enfin plusieurs, je suppose que ça va être complété

 16   ensuite. Mais de la réponse que j'ai entendue en français dans mes

 17   écouteurs, le témoin a indiqué que Lancuzanin, Kameni étaient présents à

 18   l'hôpital. Ce n'est pas encore dans le transcript, j'imagine que ça

 19   apparaîtra ensuite. Mais je le précise parce que j'ai une question de

 20   suivi.

 21   Q.  Mon Colonel, vous avez indiqué les noms de trois personnes présentes à

 22   l'hôpital, Miroljub Vujovic, Stanko Vujanovic, et Kameni. Pour les

 23   identifier quel était votre degré de connaissance de ces gens

 24   antérieurement; est-ce que vous aviez eu des contacts professionnels avec

 25   eux ?

 26   R.  Je ne peux pas dire que je les connaissais vraiment bien, mais je ne

 27   peux pas non plus dire que je ne les connaissais pas du tout. Il nous est

 28   arrivé de nous voir pendant que j'étais officier opérationnel, pendant que

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  1   je faisais le tour des détachements d'assaut parce qu'il était dans le 1er

  2   Détachement d'assaut avec le commandant Sljivancanin pendant les réunions

  3   d'information du 1er Détachement d'assaut, le soir lorsqu'on planifiait les

  4   activités à venir, je voyais Lancuzanin.

  5   Q.   Et --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, mon Colonel, vous venez de donner un petit

  7   détail qui me semble important. Vous avez dit lorsqu'on planifiait les

  8   opérations à venir, la veille. Alors cette opération, d'aller prendre les

  9   prisonniers à l'hôpital de Vukovar, avait-elle fait l'objet d'une réunion

 10   de planification ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je n'étais pas présent à la réunion

 12   d'information, parce que -- mais je suppose que oui, oui, ça a fait l'objet

 13   de la réunion d'information chez le commandant Mrksic.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, vous, vous n'étiez pas présent. Est-il normal,

 15   parce que si je vous pose la question c'est que je connais les règles de la

 16   JNA. Est-il normal que dans une opération militaire d'envergure que le

 17   commandant du Bataillon de la Police militaire ne soit pas présent dans les

 18   réunions préparatoires ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas normal mais je vais vous

 20   expliquer pourquoi je n'étais pas présent, parce que le commandant du

 21   bataillon en l'occurrence était malade, je le remplaçais donc j'étais

 22   davantage l'organe de sécurité. Donc à ce moment-là, le commandant ne m'a

 23   pas convoqué. Mais avant cela, mon prédécesseur, il était présent à la

 24   réunion d'information mais moi je n'y étais pas parce qu'il a dû estimer

 25   que j'étais en train de m'acquitter de manière temporaire d'une autre

 26   fonction. Mais le commandant Sljivancanin a je suppose reçu pour mission de

 27   m'engager moi.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, là au moins on est précis.

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  1   Sachez que tout ce que vous dites passe au travers évidemment de la grille

  2   des règles militaires de commandement.

  3   M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président, c'est peut-être un

  4   problème de traduction.

  5   Q.  Page 24, ligne 3, vous indiquez, général Lancuzanin. C'est une erreur,

  6   vous avez dit général ou c'est autre chose ?

  7   R.   C'est Milan Lancuzanin, il s'agit d'une erreur.

  8   Q.  Merci. Donc vous indiquez que vous avez vu Kameni à ces réunions

  9   s'agissant des deux autres personnes dont on discutait, Miroljub Vujovic et

 10   Stanko Vujanovic, vous les aviez vus à ces réunions également ?

 11   R.  Je les voyais moins, mais il m'est arrivé de les voir. Je n'étais pas

 12   tout le temps là-bas. J'y allais de temps à autre seulement, lorsque j'y

 13   allais je les ai vus.

 14   Q.  Est-ce que --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors la question du Procureur amène inévitablement

 16   une question des Juges.

 17   Dans ce type de réunions, où le commandant de la Défense territoriale est

 18   présent, tous ceux qui sont présents à ce type de réunions, est-ce que ça

 19   signifie en termes militaires et c'est au militaire que je m'adresse, que

 20   toute la réunion, toute l'opération est sous commandement exclusif

 21   militaire ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le commandant du Détachement d'Assaut a

 23   organisé les réunions ce soir, et il a convié tous ses subordonnés, ses

 24   chefs de sections et autres, et le responsable de la TO qui faisait partie

 25   de ces effectifs, ils venaient tous et c'est là qu'on déterminait les

 26   activités de combat et le planning des opérations à conduire le lendemain

 27   et chacun avait sa propre mission. 

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

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  1   M. DUTERTRE :

  2   Q.  Mon Colonel, ce matin-là, vers 6 heures du matin le 20 novembre 1991 à

  3   l'hôpital, comment décririez-vous le comportement de Vujanovic, Vujovic,

  4   Kameni et de leurs soldats ?

  5   R.  Ce matin lorsque je suis arrivé, il y avait déjà un groupe de

  6   prisonniers venus de la caserne qu'on avait déjà fait sortir. C'était donc

  7   une rampe face à l'entrée de l'hôpital et il y avait un muret et ils

  8   étaient alignés par deux ou par trois -- c'était un groupe assez important

  9   de personnes. Il y avait la guérite d'accueil et à droite non loin de

 10   l'autocar il y avait cet autre groupe membre de la TO de Vukovar avec ses

 11   propres responsables, ses propres chefs.

 12   Lorsque j'ai commencé à faire monter les gens à bord d'autocars, ils

 13   interjetaient des choses, ils faisaient du bruit, ils proféraient des

 14   menaces, mais disons qu'il n'y a pas eu de véritable ambiance agressive.

 15   C'était plutôt verbal comme attaque.

 16   Q.  Entendu. Est-ce que vous souvenez des menaces qui étaient proférées,

 17   par exemple ?

 18   R.  Bien, pour l'essentiel, c'était des menaces qu'on adressait à des gens

 19   qu'on reconnaissait parmi ces gens, et il y avait des gens qui leur

 20   devaient quelque chose ou qui étaient des adversaires, des gens qui leur

 21   avaient fait du mal au mois de juillet et août, parce que personne ne le

 22   mentionne en juillet et août les forces croates ont commis des crimes vis-

 23   à-vis de la population serbe. Dans les combats, il y a eu, bien sûr, des

 24   gens qui ont péris, et ceux-là avaient commencé à reconnaître des gens qui

 25   leur avaient fait du mal. Lorsque ceux-ci ont été capturés, probablement

 26   ont-ils voulu leur faire savoir qu'ils allaient se venger ou les tabasser,

 27   ils voulaient leur faire peur, ils les injuriaient. C'était peut-être ou

 28   probablement leur intention, l'idée qu'ils avaient eue. Nous, on avait

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  1   contrôlé la chose à ce moment-là. Il n'y a pas eu d'attaques devant

  2   l'hôpital. Par la suite, il y a eu des choses qui se sont intensifiées

  3   ailleurs.

  4   Q.  Je comprends que vous faites monter les prisonniers dans les bus, enfin

  5   les personnes qui étaient à l'hôpital dans les bus plus exactement. Une

  6   fois les prisonniers chargés dans les bus, ces personnes qui étaient à

  7   l'hôpital, où êtes-vous allé ?

  8   R.  J'ai fait monter des gens à bord de trois cars, ces personnes, et à

  9   l'hôpital il y avait un tri en cours. C'est avec ces trois autocars que je

 10   me suis dirigé vers la caserne, bien sûr. C'est dans la caserne que j'ai

 11   organisé, dans l'enceinte de la caserne que je les ai laissés et que j'ai

 12   organisé des effectifs de sécurité, j'avais une Compagnie de la Police

 13   militaire avec des blindés de transport de troupes et eux avaient pour

 14   mission la sécurisation des prisonniers en attendant que je revienne avec

 15   un groupe suivant.

 16   Alors, si vous voulez, je peux vous raconter qu'il y avait un membre

 17   de, un groupe de membres de la TO qui était déjà arrivé et qui se trouvait

 18   sur place déjà.

 19   Q.  On va revenir à cette question. Bon. Vous partez avec trois bus au "JNA

 20   barracks." A ce moment-là, donc il y a des gens de la TO qui étaient là.

 21   Vous dites déjà là, ils venaient d'où ces gens de la TO ?

 22   R.  Bien, c'est les gens qui avaient fait modifié, enfin qui avaient

 23   modifié leur déplacement. Quand je suis parti, ils m'ont suivi, c'est les

 24   mêmes gens qui étaient rassemblés devant l'hôpital, qui se sont rassemblés

 25   dans la caserne, c'était les mêmes combattants de la Défense territoriale

 26   de Vukovar.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : A ce stade, il y a un double problème, Monsieur,

 28   vous avez constaté le fait que les gens de la TO étaient excités puisqu'ils

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  1   avaient insulté les prisonniers, et que ça pouvait dégénérer. Vous

  2   constatez que les gens de la TO suivent.

  3   Alors, dans votre esprit, est-ce que comme vous n'aviez pas participé à la

  4   réunion du commandement la veille, les gens de la TO étaient-ils missionnés

  5   pour cela, ou bien vous aviez la conviction qu'ils n'avaient rien à faire

  6   sur les lieux ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon opinion c'est de dire que probablement

  8   n'ont-ils pas eu de missions de confier. Je ne peux pas affirmer mais

  9   pendant que nous, nous étions là, ils ne pouvaient rien à faire à ces gens.

 10   Ces gens étaient absolument placés sous protection.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais voyant le climat, pourquoi vous n'avez pas

 12   appelé des renforts car je présume que vous avez des moyens de

 13   communication. Pourquoi vous n'avez pas appelé le commandement pour

 14   demander des renforts ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en n'avais pas besoin, j'avais une

 16   Compagnie de la Police militaire et une Compagnie de la Police militaire

 17   dans la caserne de Vukovar était là pour sécuriser les trois autobus.

 18   J'avais des effectifs énormes déjà.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, reprenons, il y a donc les policiers

 20   militaires dans les bus, mais vous dites également que la Compagnie de la

 21   Police était sur les lieux, c'est-à-dire ils étaient combien, eux ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Une Compagnie de la Police militaire comptait

 23   à l'époque 65 soldats.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pourquoi ne leur avez-vous pas demandé au 65

 25   d'aller dégager les gens de la TO en leur demandant d'aller ailleurs ?

 26   Pourquoi ça n'a pas été fait cela ? Ils étaient combien ces excités de la

 27   Défense territoriale ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous expliquer. La Compagnie de la

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  1   Police militaire se trouvait à la caserne de Vukovar mais elle avait des

  2   missions au sein de la caserne. Il y avait au total 65 soldats. C'était les

  3   forces de sécurité de la caserne et il y avait peut-être en réserve 15 à 20

  4   soldats. Aisément la caserne était, il y avait des murs autour. On ne

  5   pouvait pas les faire sortir, les jeter dehors. Ils étaient 30 ou 40. Il y

  6   aurait eu un conflit si on avait essayé de les vider. Alors ils étaient

  7   debout, ils ne pouvaient rien n'entreprendre vis-à-vis des prisonniers.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous dites : ils ne pouvaient rien

  9   entreprendre. Bon. Très bien.

 10   M. DUTERTRE : Oui. Cette question du nombre je voulais poser, c'est chose

 11   faite.

 12   Q.  Donc vous quittez l'hôpital avec trois bus. Vous arrivez au "JNA

 13   barracks," où il y a 30 à 40 membres de la Défense territoriale. Quel était

 14   leur attitude à ces membres de la Défense territoriale qui vous avaient

 15   suivi de l'hôpital ?

 16   R.  C'était similaire ou analogue à ce qui avait eu devant l'hôpital. Ils

 17   gesticulaient. Ils injuriaient, ils exprimaient leur colère. Certains

 18   voulaient entrer, mais ils ne pouvaient pas le faire. C'est comme ça que ça

 19   se passait. Ils ne pouvaient pas parce que les portes s'étaient fermées.

 20   Les gens étaient à l'intérieur des bus, donc ils ne pouvaient rien faire

 21   d'autre si ce n'est verbalement les engueuler. En reconnaissant des gens

 22   qui leur devaient quelque chose, ils réagissaient, ils réagissaient vis-à-

 23   vis de certains, des individus dans les bus, pas de tout le monde. Donc

 24   cette colère, ces injures, ils brandissaient aussi des armes qu'ils avaient

 25   à la main, au poing, mais il n'y a pas eu d'attaque véritable.

 26   Q.  Entendu. Question de terminologie. Quand vous dites "la Défense

 27   territoriale," est-ce que vous, votre esprit, ça inclut Petrova Gora ou

 28   Petrova Gora et Leva Supoderica ? Est-ce que vous pouvez clarifier ce point

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  1   ?

  2   R.  Oui. C'était les mêmes personnes originaires de la ville de Vukovar.

  3   Ils s'étaient répartis en groupes parce que Petrova Gora et Leva

  4   Supoderica, ce sont des appellations géographiques, c'est lié à l'endroit

  5   où ils vivaient, ces gens. C'est ainsi qu'ils ont appelé leur détachement,

  6   mais c'est le même groupe de gens qui faisaient partie de la TO de Vukovar.

  7   A l'exception du fait que le commandant du Détachement Petrova Gora c'était

  8   Stankovic, puis après c'était Milan Vujovic, et Leva Supoderica, son chef

  9   était Milan Lancuzanin. Mais c'est tous les mêmes gens de la même localité,

 10   ils avaient juste appelé leurs détachements par le nom de quartier.

 11   Q.  A ce moment-là, quand vous arrivez, parmi ces 30, 40 hommes, qui

 12   pouvez-vous identifier ? De qui vous vous souvenez qui était présent au

 13   "JNA barracks" ?

 14   R.  J'ai vu Milivoj Vujovic parmi ces gens. Milan, je ne l'ai pas vu dans

 15   la caserne, Milan Lancuzanin, je vous dire. Milivoj Vujovic, lui, je l'ai

 16   vu.

 17   Q.  Est-ce qu'à un moment ou à un autre, vous retournez à l'hôpital, et

 18   pourquoi ?

 19   R.  Oui, je suis retourné à l'hôpital. Pourquoi ? Parce qu'une estafette

 20   m'a fait parvenir une liste de la part du commandant Sljivancanin, qui

 21   voulait que je ramène une vingtaine de personnes à l'hôpital, et il fallait

 22   donc que je les retrouve à bord des autocars, et que je les fasse sortir et

 23   que je les ramène. On m'a donné un bus, et j'ai essayé de retrouver ces

 24   gens. J'allais de l'un à l'autre de ces autocars, j'interpellais. Je les ai

 25   trouvés donc. Là, il y au un peu de problèmes en effet quand je voulais les

 26   mettre à bord d'un bus. Enfin on m'a créé des difficultés. J'ai quand même

 27   réussi à les mettre à bord de ce bus, et je les ai ramenés à l'hôpital, le

 28   commandant Sljivancanin, avec le personnel de l'hôpital avec des membres de

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  1   la Défense de la TO, Milan Lancuzanin était là, Milivoj Vujovic et Stanko

  2   Vujanovic, ils étaient les deux là, ils étaient en train de débattre de ces

  3   gens-là. Probablement ces gens-là étaient-ils innocents, et suite à

  4   intervention de la part de l'hôpital, enfin du personnel de l'hôpital, et

  5   de leurs entretiens ils les ont relâchés, pas tous. Mais une quinzaine a

  6   été relâchée, remis en liberté, ils n'auraient pas été participants aux

  7   activités de combat, mais c'était des gens qui s'étaient trouvés à

  8   l'hôpital sans pour autant avoir été combattants. Le commandant

  9   Sljivancanin les a relâchés.

 10   Q.  J'ai deux questions de suivi à votre réponse. La première question est

 11   : vous indiquez que quand vous rassemblez cette vingtaine de personnes,

 12   vous dites : "On m'a créé des difficultés." Qui est "on" et quelle

 13   difficulté ? Ensuite j'aurais une deuxième question de suivi.

 14   R.  On m'a créé des difficultés enfin c'était les membres de la TO qui

 15   étaient présents parce qu'ils ont pensé qu'on allait tous les ramener. Ils

 16   demandaient : où est-ce que vous allez et est-ce que vous les emmenez ? Ils

 17   voulaient savoir où est-ce qu'on allait emmener ces 20 personnes. Alors

 18   j'ai dit que je les ramenais là-bas. Probablement étaient-ils mécontents de

 19   ce fait, ils ont réagi donc de la façon dont ils ont réagi. En poussant des

 20   gueulades, des injures, proférant des injures. Même, moi, j'ai été

 21   bousculé, mais nonobstant de ce fait on a quand même réussi à les ramener à

 22   l'hôpital.

 23   Q.  Entendu. Merci, mon Colonel. A l'hôpital, vous avez indiqué qu'il y a

 24   eu une discussion entre Vujovic, Vujanovic, Lancuzanin et le commandant

 25   Sljivancanin. Quelle était la position -- la prise de position de Vujovic,

 26   Vujanovic et Kameni par rapport à ces 20 prisonniers ? Qu'est-ce qu'ils

 27   disaient à Sljivancanin ?

 28   R.  Par ce que j'ai pu remarquer -- je ne peux pas vous donner tous les

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  1   détails, mais je veux me rectifier. Il n'était pas commandant encore

  2   Sljivancanin, il était chef de la sécurité; on laisse ce terme de

  3   "commandant" toujours présent, or il n'était pas encore commandant, il

  4   était chef de la sécurité. Alors ils n'approuvaient pas la libération de

  5   ces gens, et le commandant Sljivancanin les a consultés, et une fois qu'on

  6   les a ramenés. Il a consulté le personnel de l'hôpital pour vérifier s'il

  7   en était véritablement ainsi, si ces gens méritaient d'être relâchés. On

  8   lui a confirmé la chose, et ils ont mis sur la balance leur autorité, il a

  9   donc pris en considération ce fait-là, et il a accepté qu'ils soient

 10   relâchés.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, il apparaît ce que je n'avais

 12   pas eu à l'esprit jusqu'à présent que parmi les prisonniers, au sens large

 13   de l'hôpital, il y a donc un groupe d'une vingtaine de personnes dont les

 14   noms figuraient sur une liste, qui ont été relâchées. Donc ils sont partis

 15   librement, si je vous écoute bien. Alors est-ce à dire que vous qui meniez

 16   l'opération qui avait été ordonnée par ailleurs, les autres qui restaient

 17   comme prisonniers étaient des personnes à qui on pouvait reprocher quelque

 18   chose ? Puisque si je comprends bien, les "innocents" - entre guillemets -

 19   les 15 ou 20 on les fait partir, et les autres "les coupables" - entre

 20   guillemets - on les garde. Est-ce que, dans votre esprit, vous vous êtes

 21   dit cela ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas la conclusion qu'on peut en

 23   tirer. S'agissant de ces individus, il y a eu une intervention au nom -- le

 24   nom -- ce n'est pas Sljivancanin qui les a inventés. C'est les gens de

 25   l'hôpital qui ont donné cette liste. Pour les autres, il n'y a pas eu

 26   d'intervention. Justement il s'agissait de déterminer la chose par la

 27   suite, savoir s'il y a des responsables, quelles sont leurs

 28   responsabilités, qui est-ce qui a combattu parmi eux; ce n'est qu'ensuite

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  1   que les autres -- tous les autres ont été placés dans une situation

  2   indéfinie. Ils n'étaient ni coupables ni innocents. Il fallait déterminer

  3   leur identité et leur rôle dans les opérations de Vukovar, parce que le

  4   fait est que bon nombre d'entre eux qui ne voulaient pas se rendre et ils

  5   avaient l'opportunité -- ils avaient eu l'opportunité de le faire. Ils se

  6   sont changés et ils sont allés à l'hôpital et ils voulaient se sortir de

  7   Vukovar, partir de Vukovar sous le couvert du fait d'être civils.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- par des témoins que nous avons eus

  9   et par des documents. Nous savons que ceux qu'on a retrouvés à Ovcara, il y

 10   avait parmi eux des mineurs. Mais je dis de mémoire 1975, l'un en 1976,

 11   1977, il y avait des mineurs, et il y avait aussi des employés de

 12   l'hôpital. Or, ce que vous dites à la limite, on pourrait penser que ceux

 13   qui ont été relâchés c'étaient des gens qui n'avaient rien à voir. Alors

 14   comment vous expliquez qu'on a pu retrouver parmi les victimes des mineurs

 15   et des employés de l'hôpital, qui eux n'étaient pas des combattants ?

 16   Comment ça peut arriver ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ignore, Monsieur le Président. Je ne sais

 18   pas s'il y a eu des mineurs. D'après moi, c'étaient tous  des personnes

 19   entre 25 et 35 ans, je ne sais pas, enfin je n'ai pas connaissance du fait

 20   qu'il y ait eu des mineurs et non plus du personnel de l'hôpital. Je ne

 21   suis pas rentré dans ce type de considération. Je n'ai pas eu le temps. Je

 22   les ai acceptés, je les ai fait monter à bord de bus, je n'ai pas fait de

 23   tri moi. Je ne peux pas affirmer ce que vous êtes en train de dire, je ne

 24   peux pas vous le confirmer non plus.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 26   Monsieur le Procureur.

 27   M. DUTERTRE : Je ne sais pas quand vous voulez faire la pause ?

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans dix minutes.

Page 12315

  1   M. DUTERTRE : Je ne préfère ne pas perdre de temps avec des questions de

  2   traduction, mais là je suis obligé de revenir.

  3   J'avais posé la question de savoir quelle était la position de Kameni,

  4   Vujovic et Vujanovic concernant certains prisonniers. Page 32, ligne 14 du

  5   transcript aujourd'hui, la réponse telle qu'elle apparaît sur le transcript

  6   est :

  7   [interprétation] "De toute façon, ils étaient favorables à l'idée de la

  8   libération de ces personnes."

  9   [en français] Je crois, je ne suis pas sûr, je crois avoir entendu

 10   l'inverse en français, ils n'étaient pas en faveur.

 11   Q.  Est-ce que, mon Colonel, vous pouvez répéter votre réponse ?

 12   R.  Oui, ils proposaient que ces gens-là soient relâchés. Ils s'employaient

 13   en faveur de leur relâchement.

 14   M. DUTERTRE : Le doute est levé.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors Kameni, Vujovic et Vujanovic, ils

 16   étaient pour qu'on relâche ceux de la fameuse liste ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 19   M. DUTERTRE :

 20   Q.  Une fois que cela se passe, que faites-vous ? Vous restez à l'hôpital,

 21   vous partez quelque part ?

 22   R.  Quand ça a pris fin, s'agissant du reste qui attendait déjà, du reste

 23   des prisonniers, ils avaient monté à bord de deux bus et un troisième qui

 24   était à moitié vide. Il en restait cinq ou six, et on a pris la même

 25   direction pour aller à la caserne de Vukovar.

 26   Q.  Entendu. Une fois arrivée à la caserne, quelle heure était-il

 27   approximativement ?

 28   R.  Dans mes témoignages, j'ai dit qu'il devait être vers 10 heures, pour

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  1   ce qui est du premier groupe. Pour ce qui est du deuxième groupe, pour ce

  2   qu'on me posait la question, je dirais qu'il était vers midi.

  3   Q.  Entendu. Vous revenez vers midi au "JNA barracks" avec les bus

  4   restants, trois bus si je ne me trompe pas, et que constatez-vous alors ?

  5   R.  J'ai constaté à ce moment-là que les bus que j'avais laissés avec le

  6   premier groupe à la caserne n'y étaient plus. J'ai demandé au chef de la

  7   Compagnie de la Police militaire qui en assumait la responsabilité, j'ai

  8   dit, où sont les autobus avec les prisonniers, il m'a dit que le

  9   commandement avait donné l'ordre de les transporter. Un officier serait

 10   venu à bord d'un blindé de transport de troupes pour les emmener à Ovcara.

 11   Le commandant a donné donc l'ordre que : "Tu ailles avec le deuxième groupe

 12   aussi vers Ovcara."

 13   Q.  Merci.

 14   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, sur la question de la -- j'ai procédé

 15   à une petite recherche entre-temps, sur la question de la position de

 16   Vujovic, Kameni et Vujanovic par rapport aux 20 prisonniers, j'aimerais

 17   éventuellement rafraîchir la mémoire du témoin par rapport à une

 18   déclaration qu'il a faite en 2007, devant un tribunal à Belgrade, et savoir

 19   s'il confirme cela. Mais je n'ai pas de traduction en anglais donc c'est

 20   une traduction très approximative que j'aie en anglais, une sorte de résumé

 21   mais on pourra lire la version en B/C/S.

 22   Q.  Il semble que vous ayez indiqué que Vujovic était bien à l'hôpital --

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. J'exige qu'on place sur le

 24   rétroprojecteur ce document, parce qu'il est inadmissible que le Procureur

 25   possède à des interprétations.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je présume que --

 27   M. DUTERTRE : J'ai la version mais très très annotée, elle a été --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Je présume que vous faites référence à la pièce qui

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  1   est son audition par le Président du Tribunal, c'est ça.

  2   M. DUTERTRE : Oui, mais peut-être pour des questions de temps, à cause de

  3   cela, je vais préparer une version "clean" sans ni quoi que ce soit, sans

  4   couleur et effectivement M. Seselj a raison, c'est bien de placer

  5   l'original, et quand ça sera trouvé, je le ferai. Je reviendrai à cela plus

  6   tard.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors peut-être que le mieux c'est de faire la

  8   pause. Comme ça pendant la pause, vous allez préparer tout cela. Comme il

  9   est quasiment 10 heures, alors on fait une pause de 20 minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 9 heures 58.

 11   --- L'audience est reprise à 10 heures 23.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

 13   Monsieur le Procureur, vous aviez préparé le document.

 14   M. DUTERTRE : En fait, Monsieur le Président, faux problème. C'était un

 15   problème de traduction du B/C/S vers l'anglais. Il n'y a rien à rafraîchir

 16   du point de vue de la mémoire du témoin. On peut laisser ce point.

 17   Est-ce que je peux savoir le temps qu'il me reste, Monsieur le Président ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Madame la Greffière.

 19   Bien. Vingt minutes.

 20   M. DUTERTRE :

 21   Q.  Mon Colonel, vous avez indiqué, avant la pause, qu'on vous avait dit

 22   d'aller à Ovcara. J'imagine avec les trois bus restant. Est-ce que c'est ce

 23   que vous avez fait ?

 24   R.  Oui. Mes trois autocars restant avec lesquels j'étais, je les ai

 25   emmenés à Ovcara.

 26   Q.  C'était un ordre que vous aviez reçu ?

 27   R.  Oui, c'est l'ordre que j'ai reçu de manière indirecte. L'ordre du

 28   commandant qui m'a été transmis par mon chef de compagnie, Predojevic,

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  1   Mladen.

  2   Q.  Vers quelle heure êtes-vous arrivé à Ovcara, mon Colonel ?

  3   R.  A Ovcara je suis arrivé je suppose vers 13 heures, 13 heures 30. Je ne

  4   suis pas certain. Mais à partir de, entre 13 et 13 heures 30.

  5   Q.  Quand vous êtes arrivé, est-ce que les trois premiers bus dont vous

  6   aviez pris la charge le matin à l'hôpital étaient déjà là ?

  7   R.  Oui. Les trois premiers autocars que j'avais emmenés tôt le matin, ils

  8   étaient déjà là-haut, ils étaient vides, les prisonniers avaient été placés

  9   dans le hangar.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire ce que vous avez vu dans le hangar ?

 11   Quelle était la situation ?

 12   R.  Je me suis approché du hangar de ce bâtiment où je suppose nos

 13   commandants avaient prévu de les placer, j'ai vu que les autocars étaient

 14   vides et je me suis étonné de voir les autocars. Je me suis demandé : où

 15   étaient les gens ? Quand je me suis rapproché, j'ai vu un petit groupe 30,

 16   40 personnes devant le hangar qui passait. Je suis descendu de l'autocar,

 17   je suis entré dans le hangar et là j'ai vu qu'il y avait un mélange des

 18   prisonniers et des membres de la TO. Donc le hangar était ouvert et à

 19   l'intérieur il y avait des membres de la TO.

 20   Q.  Quel était l'état des prisonniers dans le hangar ?

 21   R.  Eux, ils étaient disposés, comme le hangar était plus grand, par

 22   groupes et il y avait des blessures. On pouvait voir des blessures et par

 23   moment il y avait des flaques de sang et sur leurs visages il y avait la

 24   peur, des blessures, du sang, et il y a eu de la violence physique.

 25   Q.  Lorsque vous entrez dans le hangar, est-ce que les membres des TO

 26   présents exerçaient des violences physiques ?

 27   R.  Oui, mais en petits groupes, très petits groupes. La majorité était

 28   devant le hangar, il y avait un petit groupe, une dizaine, quinzaine à

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  1   l'intérieur et là ils avaient des entretiens, des conversations et ils

  2   chassaient dans le hangar certains individus et quand ils m'ont vu ils se

  3   sont arrêtés.

  4   Car quand je suis entré j'ai crié : "Mais que se passe-t-il, que

  5   fait-on ? Arrêtez." A ce moment-là, à l'intérieur, devant le hangar, j'ai

  6   vu M. Vujovic, et tout de suite je me suis dit qu'il fallait que je

  7   m'adresse à lui pour avoir de l'aide et pour qu'on mette dehors ces membres

  8   du hangar pour pouvoir garantir au deuxième groupe l'entrée.

  9   Q.  Est-ce que je comprends bien que les violences s'exerçaient

 10   devant M. Vujovic, lui-même ?

 11   R.  Oui, oui. Ça c'est tout à fait ça, M. Vujovic était présent et à ce

 12   moment-là il n'a pas réagi face à ces membres qui commettaient des actes de

 13   violence.

 14   Q.  Entendu. Je reviens un tout petit peu en arrière mais c'est volontaire.

 15   Quand vous arrivez, est-ce que et donc je ne parle pas du moment où vous

 16   entrez dans le hangar, quand vous arrivez avec vos trois derniers bus

 17   autocars à Ovcara, est-ce que vous constatez la présence d'officiers de la

 18   JNA présents sur place ou non ?

 19   R.  Oui. J'ai vu le lieutenant-colonel Panic qui était le chef de l'état-

 20   major, je l'ai vu juste quelques secondes. Je l'ai aperçu, le j'ai

 21   réprimandé et il est reparti. J'ai vu des soldats de la police militaire,

 22   de la 80e Brigade de Kragujevac donc les policiers étaient là sur place et

 23   je n'ai vu personne d'autres.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, l'instant était critique puisque vous

 25   êtes témoin de mauvais traitements sur les prisonniers. Dans cette

 26   situation, les règles de commandement de la JNA, n'est-ce pas l'officier le

 27   plus élevé en grade qui doit avoir le contrôle de la situation ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, hélas l'officier le plus haut gradé s'est

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  1   écarté, s'est éloigné.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors qui était l'officier le plus élevé qui devait

  3   avoir le contrôle ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette situation devait être contrôlée par le

  5   commandant de la 80e Brigade car c'était sa zone de responsabilité. Puisque

  6   ses policiers étaient là, c'est ce qui m'a montré que quelqu'un l'avait

  7   déjà informé et qu'il avait préparé la police militaire pour sécuriser le

  8   hangar. Donc c'était sa mission et il y avait le changement d'axe, caserne

  9   Ovcara, j'ai été surpris. Pour moi c'était un axe tout à fait inconnu, et

 10   quand j'ai vu des policiers, donc de nouveaux policiers, j'ai compris qu'au

 11   niveau du commandement, on s'était déjà mis d'accord et que ce problème

 12   était déjà réglé. Je veux dire pour ce qui est du transfert, c'était déjà

 13   un accord.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors attendez. Vous dites que la situation devait

 15   être contrôlée par le commandant de la 80e Brigade. Bien. Alors redites-moi

 16   le nom du commandement de la 80e Brigade ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était le lieutenant-colonel Vojnovic qui

 18   commandait la 80e Brigade de Kragujevac, Milorad Vojnovic.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais lui il n'était pas là ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'est pas nécessairement présent partout.

 21   Il a ses organes, ses subordonnés, mais c'était sa zone de responsabilité.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il n'était pas présent. Vous, si je comprends

 23   bien, au niveau du grade, dans le bâtiment vous êtes l'officier le plus

 24   gradé.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, j'avais le grade de commandant et

 26   il y avait le lieutenant-colonel Panic. Il était le chef de l'état-major,

 27   deuxième homme après le commandant Mrksic il était présent, donc c'était

 28   lui le plus haut.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'était le colonel Panic qui était présent qui

  2   avait le commandement. Vous dites le colonel Panic s'en va, donc vous, vous

  3   êtes encore dans le hangar et je présume qu'il y a des membres de la TO qui

  4   doivent continuer à se livrer à des mauvais traitements ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je suis là.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si je prends maintenant les règles de

  7   commandement de la JNA. Est-ce que vous ne deviez pas intervenir ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais naturellement, je suis intervenu. J'ai

  9   empêché les mauvais traitements en engageant précisément mes connaissances,

 10   mon autorité et en utilisant les soldats qui étaient sur place et leurs

 11   commandants. Je les ai menacés, je les ai mis -- j'ai arrêté les mauvais

 12   traitement et je les ai mis dehors.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Ah, alors vous dites que vous avez arrêté des

 14   mauvais traitements et vous les avez mis dehors. Vous avez mis dehors les

 15   gens de la Défense territoriale ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc les prisonniers sont restés dans le bâtiment.

 18   Les gens de la Défense territoriale étaient dehors et les policiers

 19   militaires, vous les avez positionnés autour du bâtiment ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, c'est ça, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous leur avez donné l'ordre de faire feu

 22   si quelqu'un voulait entrer à l'intérieur ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas-là, je ne pouvais pas donner un

 24   tel ordre puisque je n'étais pas leur supérieur mais je leur ai dit d'agir

 25   conformément aux règlements de la police militaire, ils étaient en charge

 26   et ils devaient empêcher que des personnes qui n'avaient rien à voir à

 27   l'intérieur rentrent.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez géré le mieux possible la situation. Mais

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  1   à ce moment-là, est-ce que vous aviez, vous, des moyens de communication

  2   avec votre commandement ? Est-ce que vous aviez un Motorola ? Est-ce que

  3   vous avez un radio, des appareils permettant de communiquer avec le

  4   quartier général et avec le colonel Mrksic immédiatement ou pas ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, j'avais un Motorola mais je

  6   n'étais pas en contact avec le commandement parce que j'avais l'intention

  7   d'arrêter les mauvais traitements de remettre de l'ordre et de repartir

  8   immédiatement au commandement.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais dans une situation comme celle-là, ne

 10   deviez-vous pas en tant qu'officier appeler immédiatement le colonel Mrksic

 11   ou son adjoint au commandement pour faire un compte rendu de la situation,

 12   les informer des mesures que vous aviez prises, pourquoi ça n'a pas été

 13   fait à ce moment-là ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, je n'avais pas le temps, je ne

 15   pouvais pas me pencher sur ces questions-là parce que l'essentiel c'était

 16   d'empêcher les mauvais traitements qu'ils ne se poursuivent. Donc c'est ça

 17   qui m'a motivé tout d'abord. Le commandant il demande, il cherche toujours

 18   des solutions, il demande d'abord : "Qu'est-ce que t'as entrepris ?" Et

 19   après, il demande : "De quoi as-tu besoin ?" Si je l'avais appelé sur-le-

 20   champ, il m'aurait dit : "Mais pourquoi m'appelles-tu puisque tu n'as rien

 21   fait ?" Donc dans l'armée, il y a un niveau de responsabilité d'abord où il

 22   faut faire quelque chose et ensuite si tu estimes que cela est nécessaire,

 23   tu t'adresses au supérieur. Donc c'est la raison pour laquelle j'ai tardé

 24   un petit peu. Je ne pouvais pas réagir tout de suite dans le sens où vous

 25   venez de me le suggérer.

 26   Puis la deuxième raison c'est parce que mon supérieur, il était là, et il

 27   est parti. J'ai supposé qu'il était parti comme le deuxième -- le numéro 2,

 28   parce que tout cela s'est produit en sa présence avec le premier groupe où

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  1   il y a le plus de sévices donc je suppose, c'est ce que j'ai supposé qu'il

  2   allait en parler au commandant, qu'il allait lui dire ce qui se passait.

  3   Donc c'est la raison pour laquelle je ne voudrais pas m'adresser au

  4   commandant tout de suite.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme nous avons la chance, j'allais dire que vous

  6   étiez en même temps commandant de la police militaire, ne fallait-il pas à

  7   ce moment-là ordonné une enquête pour savoir qui avait commis les excès sur

  8   les prisonniers afin de les sanctionner. Est-ce que ça rentrait dans vos

  9   attributions ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez raison. Je ne pouvais pas énumérer

 11   les gens tout de suite, avoir les noms, prénoms, mais j'ai entrepris des

 12   mesures là-dessus. Le commandant, cette question ne m'a pas été posée par

 13   le Procureur, je pense qu'il va la poser, le commandant Mrksic je l'ai

 14   informé immédiatement vers 15 heures 50, je l'ai informé. Je lui ai dit

 15   quelle a été la situation là-bas et j'ai dit que j'ai empêché que les

 16   mauvais traitements ne se poursuivent et je lui ai dit que ça pouvait se

 17   répéter et qu'il fallait prendre des mesures pour renforcer les mesures de

 18   sécurité pour qu'on sécurise complètement sur le plan des activités

 19   policières le bâtiment pour que les militaires ne puissent pas s'approcher

 20   du bâtiment. Lui, il m'a dit : "Vous pouvez disposer."

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'est au transcript.

 22   A 15 heures 30, vous informez le colonel Mrksic de la situation. Vous lui

 23   indiquez que des prisonniers avaient été maltraités et qu'il fallait

 24   renforcer la sécurité, et en réponse le colonel Mrksic vous dit : "Vous

 25   pouvez vous en aller."

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 28   Monsieur le Procureur.

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  1   M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.

  2   Q.  Mon Colonel, vous indiquez que vous prenez un certain nombre de

  3   mesures. Qui d'autre parmi les membres de Petrova Gora et de Leva

  4   Supoderica dont vous connaissez les noms; avez-vous reconnu à Ovcara

  5   pendant que vous y étiez, le 20 novembre 1991 ?

  6   R.  Je ne peux que reconnaître leur chef. Il y avait surtout M. Vujovic qui

  7   était sur place et pendant quelque temps il m'a aidé, il y avait Kameni

  8   très brièvement, je l'ai vu et il y avait Stanko Vujanovic, donc les trois.

  9   A un moment donné, ils se sont trouvés à Ovcara, mais je ne peux pas vous

 10   dire exactement pendant combien de temps ils sont restés mais je peux vous

 11   dire que Vujovic était là pendant le plus long temps. Pendant que j'étais

 12   là, pendant tout ce temps, il était là également mais tous les trois sont

 13   venus.

 14   Q.  Vers quelle heure, vous-même, êtes-vous parti, mon Colonel, d'Ovcara ? 

 15   R.  Je suis parti entre 15 heures et 15 heures 30, 3 heures et demie.

 16   Q.  Entendu. Quand vous partez, les membres de Petrova Gora et Leva

 17   Supoderica étaient toujours là où ils avaient fait; est-ce que vous pouvez

 18   nous dire s'il était toujours là quand vous partez ?

 19   R.  Oui, ils étaient là. Mais en partie, il s'était, il s'était déjà

 20   éloigné. Il y en avait moins je dirais sur les 30, 40, peut-être quand je

 21   suis parti d'Ovcara il y en avait peut-être une quinzaine, une vingtaine. 

 22   Q.  Est-ce que vous avez vu de vos y eux les autres repartir ?

 23   R.  Oui, j'ai vu qu'il y avait des hommes qui partaient puisque c'était

 24   plat et je les ai vu partir vers des bâtiments derrière Ovcara. J'ai vu des

 25   petits groupes s'éloigner.

 26   Q.  Entendu. Ils passaient derrière des bâtiments derrière Ovcara. Vous

 27   avez indiqué au colonel Mrksic ce qui se passait. C'est une question que je

 28   voulais poser, c'est clair. Quand avez-vous eu connaissance du massacre des

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  1   prisonniers d'Ovcara ?

  2   R.  C'est ce que j'ai appris, comment vous dire exactement, le lendemain,

  3   ou peut-être le jour d'après le 21, ou le 22, je pense que c'était assez

  4   vite, le 21 ou le 22 c'était dans la matinée ou dans les heures de la

  5   matinée. Lorsque je passais la responsabilité du poste de commandement

  6   puisque la brigade se préparait pour rentrer, et l'un de mes assistants est

  7   venu me souffler à l'oreille ce qu'on racontait dans le village. Il m'a dit

  8   qu'il a entendu dire qu'il n'avait plus les gens là-bas qu'ils ont disparus

  9   et qu'ils ont probablement été liquidés. C'est ce qu'il m'a dit. J'ai pris

 10   ça avec des réserves. Je n'étais pas convaincu. Ça ne me semblait pas

 11   tellement évident que ça aurait pu se passer. Par la suite, je lui ai

 12   demandé : "Est-ce que c'est sérieux ce que tu me dis ?" Et il m'a dit :

 13   "Oui, oui, j'ai entendu raconté cela dans le village."

 14   Donc tout simplement à vrai dire, je ne pouvais pas vraiment réagir suite à

 15   son histoire. Je n'ai pas prêté tellement attention à ce qu'il me disait.

 16   Je me disais que c'était des rumeurs. Qu'est-ce que je n'aurais pas supposé

 17   qu'une telle chose pouvait se produire.

 18   Q.  Un dernier point. Vous indiquez que Kameni était là brièvement, c'est

 19   page 44, ligne 21. Qu'est-ce que vous entendez par là ? Vous l'avez vu

 20   brièvement. Vous l'avez vu partir ? Est-ce que vous pouvez clarifier ?

 21   R.  Je l'ai vu, mais pendant peu de temps, une période brève.

 22   M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président. Je n'ai pas d'autres

 23   questions.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, bon, vous apprenez le 20 ou le 21, cette

 25   rumeur, et je crois comprendre que vous ne faites rien vous-même après ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Dans les jours qui ont suivi ou dans les mois

 28   qui ont suivi, est-ce que le commandement militaire a ordonné ce qu'on

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  1   appelle : une enquête de commandement ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : A quel moment vous, vous avez été convoqué par une

  4   autorité quelconque pour témoigner sur les événements ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1998, pour la première fois. J'ai témoigné

  6   devant le tribunal militaire.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors en 1998, le tribunal militaire, lequel ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Belgrade. Le tribunal militaire de Belgrade.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Et le tribunal militaire de Belgrade, il y avait un

 10   procès contre qui?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Contre des inconnus, auteurs inconnus.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez été entendu par un juge

 13   d'instruction ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le colonel Gojovic. Il est général

 15   aujourd'hui.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc il a dû vous poser les mêmes questions

 17   que je vous pose.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. On peut trouver la déclaration que j'ai

 19   faite là-dessus, et après il y a eu une accalmie jusqu'à ce que le procès

 20   s'ouvre pour l'affaire Ovcara. Là, naturellement, on a donné des

 21   déclarations au procureur contre maintenant des personnes identifiées.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Un petit détail là qui a échappé. Quand vous

 23   quittez le bâtiment, la situation étant régulée puisque les membres de la

 24   TO sont à l'extérieur du bâtiment, les policiers, ceux qui étaient venus

 25   avec vous, ils repartent avec vous les policiers militaires ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mes policiers sont partis avec moi parce

 27   que c'est la police militaire de la 80e Brigade de Kragujevac qui s'en est

 28   occupé.

Page 12328

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc ce sont les autres qui sont restés présents,

  2   ceux de Kragujevac ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ça.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Quand vous faites votre rapport au colonel

  5   Mrksic, et qu'il vous dit : bon, vous pouvez partir. Quelle impression

  6   avez-vous eu ? Il allait faire le nécessaire, ou vous n'en savez rien ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous raconter ce que j'ai pensé

  8   puisque c'est ainsi que vous m'orientez. C'est véritablement ce que je me

  9   suis dit. Ce que je ne comprenais pas en connaissant mon commandant c'était

 10   qu'il réagisse ainsi suite à quelque chose de très sérieux que je lui ai

 11   dit, une observation, un rapport, un compte rendu lorsque je sais que la

 12   situation n'a pas été tel pendant toute la durée de nos activités. Ce

 13   n'était pas quelque chose qui se produisait, que le commandant ne réagisse

 14   pas suite à un rapport négatif, donc normalement il devait me donner pour

 15   mission de résoudre cela. Donc je me suis posé la question et l'idée m'est

 16   venue que c'était un accord entre eux.

 17   Mais après j'ai fait le lien, à cause que j'ai appris qu'il y a eu une

 18   réunion du gouvernement et c'est au Baranja Slavonie Srem avec Hadzic et le

 19   colonel Panic était là, notre représentant, donc j'ai compris que justement

 20   on a discuté d'eux, donc Hadzic a dit à Mrksic qu'ils ont mis sur pied,

 21   enfin c'est par la suite, excusez-moi, je vous raconte ça mais c'est à

 22   posteriori que j'ai entendu tout ça. Après je suis arrivé à la conclusion

 23   qu'on a pris la décision qu'on a donné l'ordre de leur remettre les

 24   prisonniers, qu'ils étaient sous leur responsabilité, qu'ils avaient des

 25   organes d'autorité et qu'ils allaient les juger devant les tribunaux, et

 26   cetera. Je pense que Hadzic a trompé notre commandant donc le commandement

 27   lui a fait confiance, lui a cédé l'autorité, enfin la responsabilité et

 28   après on a réglé le compte à ces gens contrairement à toutes les lois.

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  1   Donc c'est ce que je me suis dit par après quand j'ai réfléchi à tous ces

  2   éléments, je me suis dit ce n'était pas normal qu'ils réagissent face à une

  3   telle situation.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si je synthétise ce que vous voulez dire,

  5   c'est une hypothèse mais bien entendu vous avez le droit de faire cette

  6   hypothèse.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ça.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après vous, Goran Hadzic et le colonel Mrksic et

  9   le colonel Panic s'étaient mis d'accord pour la garde des prisonniers qu'il

 10   devait y avoir eu un accord entre les uns et les autres. Et que donc peut-

 11   être mais c'est une hypothèse que vous formulez quand vous vous rendez

 12   compte de cela, vous pensez peut-être que le colonel Mrksic à ce moment-là

 13   va re répercuter l'information sur Goran Hadzic ou sur le commandant de la

 14   Défense territoriale dans le cadre de l'accord. C'est une hypothèse mais

 15   vous n'en n'avez pas la certitude ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est ce que je suppose. Je

 17   suppose qu'il y a eu des décisions que j'ignore.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Quand Goran Hadzic sera ici on pourra lui

 19   poser la question, encore faut-il qu'il soit là. Bien. Donc ça c'est une

 20   hypothèse et donc ce qui d'après vous expliquerait que le colonel Mrksic

 21   n'a rien fait.

 22   Dernière question. Je crois comprendre que dans l'armée en général,

 23   donc toutes les armées du monde, mais surtout à l'époque de la JNA qui

 24   était une armée très réputée, les officiers font des rapports écrits sur

 25   les événements. Alors ma question : avez-vous fait un rapport écrit sur

 26   l'événement ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas fait de rapport par écrit parce

 28   que c'est oralement que j'avais fait rendu compte au commandement et

Page 12330

  1   Sljivancanin je l'ai informé le soir de tous les événements. Je n'ai pas

  2   rédigé un rapport. Ils ne me l'ont pas demandé. Je pense que c'était

  3   suffisant pour cette partie-là des événements, là où j'ai pris part, et

  4   j'estime que lorsque je les ai informés qu'il n'y avait pas lieu. S'ils me

  5   l'avaient demandé, je l'aurais rédigé. Vous pensez qu'il y a dû y avoir un

  6   accord

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Si, par hypothèse, le colonel Mrksic n'était

  8   pas d'accord avec ce que vous dites, à savoir que lui n'a pas été informé,

  9   que diriez-vous ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandant du Groupe opérationnel sud,

 11   qu'il n'en soit pas informé, je pense que c'est impossible.

 12   Deuxièmement, c'est lui qui a modifié l'axe du groupe. Le groupe

 13   normalement aurait dû se trouver à Vukovar et de la caserne de Vukovar

 14   aller à Sremska Mitrovica. C'était ça la substance de la mission, le

 15   changement de l'axe c'était sa décision et tous les problèmes se sont créés

 16   là où il a déplacé l'action.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 18   Monsieur Seselj, vous avez 50 minutes.

 19   Mais attendez je crois que mon collègue a aussi des questions. Je n'ai pas

 20   fait attention.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

 22   Mon Colonel, j'aimerais que vous nous expliquiez un petit peu ce qu'il en

 23   est du contrôle effectif sur les membres des deux divisions ou des deux

 24   sections de la Défense territoriale présentes à la ferme d'Ovcara, à savoir

 25   Leva Supoderica et Petrova Gora, parce qu'il me semble avec le recul que si

 26   votre supposition se révèle, corresponde à la vérité, à la réalité, à

 27   savoir qu'auparavant il y avait eu un accord conclu entre les autorités

 28   locales et les commandants des forces de la JNA présente dans la région

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  1   selon lesquels les prisonniers qu'on avait été cherchés à l'hôpital de

  2   Vukovar pour les enfermer dans le hangar à la ferme d'Ovcara pour que ces

  3   prisonniers donc à un moment donné soit remis à la Défense territoriale.

  4   Voilà l'accord auquel vous avez fait allusion. C'est ce que vous supposez.

  5   Vous pensez qu'il y a dû y avoir un accord entre les forces de la JNA et

  6   les autorités locales aux termes duquel les prisonniers devraient être

  7   remis à la Défense territoriale.

  8   D'après ce que moi j'ai compris, Mon Colonel, cela voudrait dire que si au

  9   bout du compte les prisonniers avaient été remis à la Défense territoriale,

 10   à ce moment-là, ces prisonniers pouvaient connaître un sort terrible, il

 11   pouvait leur arriver des choses atroces. Mais à ce moment-là, la JNA

 12   pourrait dire : "On n'est pas responsable, on n'est pas impliqué là-dedans.

 13   C'est pas nous." Voilà le dilemme que je distingue ici dans toute cette

 14   affaire.

 15   C'est pourquoi j'aimerais vous reposer la question, j'aimerais que vous

 16   nous expliquiez qui, précisément, exerçait un contrôle effectif sur les

 17   volontaires de la Défense territoriale, et ai-je raison de penser que pour

 18   la JNA il était clair que si les membres de la Défense territoriale

 19   commettaient des exactions, à ce moment-là, la JNA ne pouvait en être tenue

 20   responsable ? Est-ce que j'ai bien compris ? Quelle était la relation

 21   existant entre les hommes de la TO et les dirigeants de la JNA ?

 22   Je voudrais vous rappeler que dans votre déclaration à un moment donné,

 23   vous avez parlé de Leva Supoderica, de Petrova Gora, de ces unités de la

 24   Défense territoriale qui se sont séparées de la JNA et ont mis en place

 25   leur propre QG, page 6 de votre déclaration de 2002. Donc, on voit déjà là,

 26   qu'il y avait une séparation entre la Défense territoriale d'un côté et la

 27   JNA de l'autre, il y avait peut-être coopération entre ces deux

 28   organisations, mais pour ce qui est du contrôle exercé sur leurs membres

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  1   respectifs, les choses étaient plus complexes.

  2   Je ne sais pas si ma question est suffisamment claire, mais j'aimerais que

  3   vous nous expliquiez comment on percevait les choses à ce moment-là.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Fort bien. Je vous remercie. Ce que je peux

  5   vous dire, ce que je pense, c'est que personne de la JNA ne le savait. Si

  6   Mrksic avait su que ceci se produirait, il aurait fait quelque chose. Mais

  7   je ne pense pas que quiconque ait supposé qu'un tel crime puisse être

  8   commis. Et très probablement, c'est là une erreur que d'avoir laissé

  9   échappé à tout contrôle les choses, et qu'il arrive qu'un groupe de

 10   personnes viennent à éliminer 220 ou 230 personnes. Alors je crois que

 11   c'est quelque chose de grave et personne n'y a prêté attention, et c'est

 12   malheureusement.

 13   Deuxièmement, le commandant des forces de la TO, je ne sais pas vous dire

 14   qui c'était. Je crois que les trois étaient d'une certaine façon à disposer

 15   de leur propre groupe, le commandant en chef, là, je ne pourrais pas vous

 16   répondre, vraiment. Mais avec la chute de Vukovar, je ne sais pas si dans

 17   les ordres ça a été donné avec Mrksic, et la chute de Vukovar et la fin des

 18   opérations de Vukovar, les deux unités qui ont été rajoutées ont

 19   probablement été dissociées, parce qu'avec la fin des opérations, je

 20   suppose qu'il y ait eu des déplacements libres d'individus qui échappaient

 21   à tout contrôle. Ils sont sortis de nos rangs, ils n'étaient plus sur notre

 22   commandement. Personne n'avait le contrôle. Ils avaient déjà l'air d'être

 23   un groupe qui était libéré de notre contrôle. Ils n'étaient pas non plus

 24   sous la coupe du commandant de ce Détachement d'assaut, alors est-ce que

 25   l'on a donné l'ordre pour qu'ils se dissocient du contrôle et des unités ?

 26   Mais leur comportement laisse entendre qu'ils étaient pendant deux ou trois

 27   jours hors contrôle et autorité des Unités de la JNA, et je crois que cette

 28   façon de se comporter, à savoir que la JNA ne considérait pas responsable,

Page 12333

  1   étant donné que les combats étaient terminés. Chacun s'apprêtait à

  2   continuer ces missions. La brigade devait revenir. La 82e devrait prendre

  3   la zone de responsabilité, le gouvernement disait une chose, les

  4   comportements sur place étaient autre chose. Il s'est produit quelque chose

  5   que personne ne pouvait imaginer. Nous autres, hommes intelligents et

  6   censés, nous ne pouvions pas imaginer que chose pareille pourrait se

  7   produire.

  8   Je pouvais supposer qu'on tabasse quelqu'un, qu'on tue un homme mais

  9   qu'on tue tous ces gens-là, personne ne pouvait l'imaginer. Ce manque cette

 10   irresponsabilité de la part des dirigeants au sommet, enfin pour ce qui est

 11   du commandant Mrksic, je pense qu'il n'a pas bien jaugé de la situation. Je

 12   ne sais pas trop, je ne puis que supposer, il n'a pas, il ne s'attendait

 13   pas à ce que cela puisse se produire. Il a pensé que la TO et le

 14   gouvernement territorial allaient faire leur travail, ils allaient

 15   enquêter. Je ne sais pas s'il a donné un ordre. Il faut voir entre Mrksic

 16   et le lieutenant-colonel Vujanovic qui a assumé la responsabilité, qui est-

 17   ce qui a donné l'ordre de retirer les effectifs. C'est là qu'il y a un

 18   vide. Il y a eu un retrait des effectifs et les hommes de la TO ont pris

 19   ces gens et se sont comportés comme eux l'entendaient. C'est en gros la

 20   façon dont je comprends, ou je considère que ça s'est produit. Je ne sais

 21   pas s'ils ont su que telle chose se préparait. Je pense que personne n'a su

 22   que telle chose allait se produire. Je pense que pas même les trois

 23   commandants locaux ne savaient qu'ils allaient exécuter, fusiller toutes

 24   ces personnes. Je ne le crois pas, enfin ça se peut, mais je ne crois pas.

 25   Parce que lors de la conduite des combats, ils étaient de très bons

 26   combattants, notamment à Leva Supoderica, M. Milan Lancuzanin a contribué

 27   au détachement d'assaut qui était le nôtre à ce que les combats soient

 28   conduits avec succès, et grâce à eux, justement chose normale d'ailleurs

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  1   c'est leur droit et obligation parce qu'ils vivaient dans cette ville, ils

  2   connaissaient la ville, ils connaissaient les rues. Ils ont grandement aidé

  3   nos jeunes soldats qui combattaient là, qui étaient venus de toute la

  4   Yougoslavie. Ils étaient venus, nous avions des Croates, des Musulmans, des

  5   Macédoniens, des Serbes, il y avait toute structure ethnique dans la JNA,

  6   dans les rangs de la JNA à l'époque. Il y a des combats, des soldats de

  7   Croatie qui sont morts dans les combats de notre côté de Bosnie, enfin de

  8   Slovénie, non parce qu'ils étaient déjà, ils s'étaient déjà séparés.

  9   La situation était fort complexe. On n'a pas analysé la substance

 10   après tous ces graves combats, ces lourds combats. A la fin des opérations,

 11   il y a eu une omission de faite, et c'est ce qui s'est produit.

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Ce que vous venez

 13   de dire était extrêmement important, lorsque vous parlez du contrôle au

 14   cours des quelques jours qui ont suivi la chute de Vukovar.

 15   Une précision, ma question concerne l'attitude des membres de la Défense

 16   territoriale à l'égard des prisonniers alors que ceux-ci se trouvaient

 17   encore dans les autocars à la caserne, et puis plus tard lorsque vous, vous

 18   êtes arrivé avec la deuxième partie des prisonniers à la ferme d'Ovcara.

 19   Ceci semble laisser entendre que les membres de la Défense territoriale

 20   étaient tout à fait très agressifs, est-ce qu'on ne l'a pas dit à

 21   Sljivancanin -- à Mrksic plus exactement ? Je veux dire Sljivancanin le

 22   savait, je reconnais, c'est assez paradoxal que Mrksic ne savait pas à quel

 23   point les choses pouvait dégénérer. Mais il aurait pu recevoir des

 24   informations parlant de l'attitude très agressive des membres de la TO ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il a reçu des informations probablement

 26   de la part de son chef d'état-major qui était présent. La question est

 27   celle de savoir s'ils veulent reconnaître ou pas. Il a dû recevoir des

 28   informations de la part de Vojnovic. Il a reçu des informations de ma part,

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  1   il a eu pas mal d'information.

  2   Cet officier qui a pris en charge le premier groupe, ça figure dans le

  3   rapport de l'un de ces responsables, c'était un homme du commandement. On

  4   ne veut pas dire qui c'était, c'est lui qui les a pris en charge. Il était

  5   venu avec la mission de prendre en charge ce premier groupe à moi pour les

  6   transporter à Ovcara. Parce que le chef de la compagnie a déclaré qu'il y a

  7   eu un officier du commandement à bord d'un blindé de transport de troupes,

  8   il les transportait, il m'a dit : "Allez-y aussi, le commandant est là-

  9   bas."

 10   Il n'y a pas donc de choses qui ne sont pas claires. Moi, je ne comprends

 11   pas une chose parce que ma première mission m'a été confiée de la part de

 12   Sljivancanin pour ce qui est de les prendre depuis la caserne pour

 13   organiser un transport vers Mitrovica. C'était la mission qu'on m'avait

 14   confiée. Après on a tout modifié, on a changé les directions. Je crois

 15   qu'on doit forcément savoir à qui revient la responsabilité de ce qui s'est

 16   passé.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas

 18   d'autres questions à vous poser, mon Colonel.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : Une petite question. Monsieur, est-il possible - et

 20   je m'excuse mais je vous demande plutôt votre impression sur les faits -

 21   est-il possible qu'au lieu de ne pas savoir, les commandants de la JNA

 22   avaient peur de l'agressivité particulière des exécuteurs de ce massacre ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pense pas qu'ils aient eu peur. Ecoutez,

 24   c'était un petit groupe, c'étaient des combattants ordinaires, des citoyens

 25   de Vukovar, du cru. Ils ont probablement reconnu des gens que -- mais un

 26   commandement ne peut avoir peur d'un groupe de soldats quel qu'il soit. Je

 27   ne crois pas moi. Croyez-moi que si moi quand j'étais seul, tout seul, j'ai

 28   réussi à les maîtriser, à contrôler. J'ai empêché en risquant ma vie, je ai

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  1   les vidés, je les ai fait sortir. Allons donc, quand vous voulez faire

  2   quelque chose, quand vous voulez résoudre un problème, il y a probablement

  3   des gens qui ont peur mais je ne pense pas que le commandement, l'un et

  4   l'autre ait eu peur. Ça, je n'y crois pas.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc selon vous on pouvait les contrôler ? On aurait

  6   pu les contrôler ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument, absolument.

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : En répondant à la question de mon collègue, vous

 10   avez dit un élément qui me semble capital. Vous l'aviez dit tout à l'heure

 11   mais j'étais en train de réfléchir à la portée de ce que vous avez dit, et

 12   là, je me rends mieux compte de cet élément.

 13   Vous avez dit que la mission que vous aviez à l'origine c'était de prendre

 14   les prisonniers de la caserne et de les amener à Mitrovica. Mitrovica étant

 15   le lieu où on met les prisonniers. Ça, c'était la mission qui vous avait

 16   été confiée. De manière mystérieuse ceci a été changé. C'est peut-être là

 17   la clé de ce qui s'est passé. C'est ce que vous semblez sous entendre.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais pourquoi suis-je arrivé à cette

 19   conclusion ? Parce que la décision prise par Mrksic lors du rapport que

 20   j'ai présenté, c'était la mission que Sljivancanin m'a confiée, c'était la

 21   toute première des décisions. L'autre est survenu entre-temps après que le

 22   gouvernement de la SAO de la Krajina, enfin Slavonie, Baranja, et Srem

 23   occidental ait siégé, et entre-temps, ils ont siégé ces gens du

 24   gouvernement. Donc dans ce laps de temps de 12 heures, il y a eu changement

 25   de direction et on les a emmenés à Ovcara. Je crois qu'il y a une

 26   corrélation là, pour ce qui est du changement de la décision qui a été

 27   adoptée ou prise par le commandant en personne. C'est ainsi que j'établis

 28   la corrélation parce que toutes ces activités se produisent, et le

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  1   changement survient suite à cette session du gouvernement de la Baranja,

  2   SAO de la Slavonie occidentale, et Srem.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme tout le monde, on essaie de comprendre

  4   pourquoi il y a eu l'exécution de tous ces prisonniers. On cherche des

  5   raisons qui ont pu conduire à cela.

  6   Pendant ces combats qui ont duré quand même un certain temps à

  7   Vukovar, d'après vos estimations à vous, combien de soldats de la JNA mais

  8   tout confondus ont été tués ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après certaines estimations, en provenance

 10   de ma Brigade de la Garde, il y a eu 64 soldats et officiers de tués, mais

 11   pour ce qui est du Groupe opérationnel sud, environ mille soldats auraient

 12   péri.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant votre brigade, 64 soldats et officiers

 14   ont été tués, et concernant le Groupe opération sud, il y aurait eu mille

 15   soldats et officiers tués, grosso modo.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] A peu près.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant les membres de la Défense territoriale,

 18   c'est-à-dire les locaux, renforcés par des volontaires, mais les locaux, à

 19   votre connaissance, combien ont été tués ? Sur les milles tués, il y en

 20   combien ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Là, je ne sais pas vous le dire, parce que ce

 22   type d'information c'est une instance qu'il les a recensés. Il y a eu

 23   probablement des gens du cru avoir été tués, je ne peux pas vous donner de

 24   chiffre. Quelque serait le chiffre il serait inexact, je ne connais pas ces

 25   détails. Ils étaient dans les premières lignes de combat. Ils ont sûrement

 26   péri parce qu'ils ont constamment participé au combat. Une partie était

 27   tuée à nos côtés. Une partie d'entre eux étaient tués avant que nous

 28   n'arrivions.

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  1   Personne ne veut parler des victimes dans la population serbe de Vukovar au

  2   fil des mois de juillet et août. Il y avait pendant ces mois-là des

  3   dizaines et des dizaines de cadavres qui étaient -- qui allaient au gré des

  4   flots comme des troncs d'arbre qui flottaient dans la rivière, dans le

  5   Danube. Il y a eu beaucoup de gens qui ont été tués à Vukovar, des Serbes

  6   qui ont été ensevelis dans des dépôts à ordures, à déchets. Il y avait

  7   20000 Serbes qui vivaient à Vukovar. Quand les opérations de combat, il y

  8   avait 20000 personnes qui sont sorties. Vous croyez qu'ils sont partis

  9   parce que c'était bien pour eux ? Croyez-moi, les forces paramilitaires

 10   croates, pendant les mois de juillet et août, commis de tels crimes dans

 11   Vukovar, que c'est une chose à prouver. Alors qu'on prouve les méfaits de

 12   ce malheureusement et triste personnage de Mercep. Mercep c'est quelqu'un.

 13   Il va falloir qu'on enquête. Mais on sait nous autres que c'est un grand

 14   criminel. L'autre commandant, Jastrep [phon], à la tête du HDZ, lui c'était

 15   un officier qui était des nôtres à l'époque. Ils savent parfaitement bien

 16   ce qu'ils ont fait eux pour ce qui est des préparatifs des massacres.

 17   Pourquoi Vukovar a-t-il été vidé ? Il a été vidé parce que les Serbes ont

 18   fui, et les Croates ont fui aussi, parce qu'ils ont vu qu'il allait y avoir

 19   une guerre. Les forces croates ont bloqué notre caserne là-bas, et ont

 20   interrompu pour nos soldats et ont coupé l'eau, l'approvisionnement en

 21   électricité, l'arrivée du pain, les fournitures de pain. Ils ont tiré

 22   dessus, et ils les ont pilonnés aux mortiers, croyez-moi que c'était

 23   terrible, et vous voyez que les témoins de Croatie disaient que tout allait

 24   bien et que c'était un miracle ou une chose surprenante de voir les choses

 25   se produire de la sorte. Mais c'est pour ces raisons-là qu'il y a eu

 26   vengeance, qu'il y a eu volonté, qu'il y a eu [imperceptible] de le faire

 27   colère de la part de certaines personnes qui ont perdu des être chers qui

 28   étaient membres de leurs familles. Ils voulaient se venger. Ils voulaient

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  1   se venger parce qu'ils les ont pris cette fois-là. Ce n'est pas

  2   chevaleresque, je suis certain, ce n'est pas un comportement militaire,

  3   mais les gens qui sont dans cette situation sont aveuglés. Il suffit qu'ils

  4   soient dix ou 15 comme ça, c'est dangereux, ils vont faire ce genre de

  5   chose, ils vont faire ce qu'ils ont fait. Ils vont peut-être le regretter

  6   par la suite, mais croyez-moi que c'était pénible, que c'était difficile et

  7   dure.

  8   Parce que là où il y a des combats -- une guerre, c'est ce que les soldats

  9   détestent. On croit que les soldats aiment la guerre. Ce n'est pas vrai,

 10   c'est la partie la plus difficile de notre métier. Il faut qu'on prenne en

 11   considération ce déferlement de haine. Le terrain a été préparé d'avance,

 12   et les gens ont voulu rendre l'appareil. C'est tout. La monnaie de leur

 13   pièce.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci d'avoir fait cette réponse longue, qui permet

 15   d'appréhender certains éléments.

 16   Vous avez dit mille soldats, tout confondus, par contre c'est votre réponse

 17   qui m'amène à vous poser cette question. A votre connaissance, la

 18   population civile serbe, d'après vous, y aurait-il -- quel est le chiffre

 19   des tués parmi cette population, je dis bien, civile serbe de manière

 20   empirique ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il y avait des personnes âgées,

 22   des personnes plus exténuées qui étaient restées chez elles pour garder

 23   leurs maisons, et il doit y avoir une centaine de civils du groupe ethnique

 24   serbe avoir été tués; en général c'était des personnes âgées.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez parlé des exactions des paramilitaires en

 26   juillet et août. A votre connaissance, combien de personnes auraient été

 27   tuées par ces paramilitaires croates ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après nos informations, c'est entre 300 et

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  1   400 personnes. Comme ils sont à la recherche de leurs morts, les Serbes

  2   pareillement sont nombreux à ne pas avoir retrouvé les leurs.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Seselj, vous avez donc 50 minutes.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous m'aviez promis une heure, Monsieur le

  5   Président.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : On ne va pas chipoter pour dix minutes. Alors je

  7   vais --

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aurais besoin de plus d'une heure.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- pour savoir si on vous donne dix minutes de plus.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors la Chambre, qui a délibéré, compte tenu du

 12   sujet évoqué, donne donc à M. Seselj une heure.

 13   Contre-interrogatoire par M. Seselj :

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, à la condition que vos questions

 16   soient bien centrées sur les sujets qui préoccupent la Chambre, et dont les

 17   questions de la Chambre ont bien délimitées le champ. Il ne s'agit pas

 18   d'avoir du temps supplémentaire pour partir tout azimut.

 19   Oui, Monsieur le Procureur.

 20   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, est-ce qu'on peut attirer l'attention

 21   du témoin et de la Défense sur le fait de parler lentement pour que le flot

 22   des questions et des réponses ne se chevauchent pas.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur le Témoin, comme vous parlez la langue

 24   de M. Seselj, écoutez la question posée par M. Seselj, attendez un petit

 25   peu avant de répondre, et puis répondez, parce que les interprètes parfois

 26   ont du mal. Donc écoutez bien la question, vous répondez, ensuite quand

 27   vous aurez répondu, lui, il doit aussi attendre, et cetera; sinon, on perd

 28   le fil.

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  1   Monsieur Seselj, allez-y.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vais poser uniquement

  3   des questions qui relèvent de l'intérêt de ma Défense.

  4   M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Vukasinovic, je vous prie, de répondre le plus brièvement

  6   possible parce que j'ai beaucoup de questions à vous poser. Très souvent

  7   j'aimerais que vous répondiez par "oui" ou par "non."

  8   D'après ce que j'en sais, vous avez fait l'école de guerre, à savoir

  9   l'école de la Défense nationale ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que vous avez réussi à votre examen de général ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Quel a été votre sujet défendu pour ce qui est donc de votre mémoire

 14   aux fins d'accéder au grade de général ?

 15   R.  La défense en tant qu'activités des services chargés de la Défense.

 16   Q.  Est-ce que pendant votre intervention à l'armée vous avez été chargé de

 17   la sécurité ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Vous avez été commandant de la localité de Negoslavci au sein de ce

 20   Groupe opération sud, vous devriez savoir que la Brigade de la Garde, dès

 21   le 18 novembre, lors de la libération de Vukovar, a entamé ces préparatifs

 22   pour retourner à Belgrade, n'est-ce pas ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Est-ce que, dans le cadre de ces préparatifs pour revenir à Belgrade,

 25   la Brigade de la Garde avait d'abord organisé l'acheminement des

 26   volontaires, non seulement du Parti radical serbe mais la totalité des

 27   volontaires pour ce qui est des ramener chez eux, le 18, 19, et 20

 28   novembre, en autobus pour les envoyer en Serbie.

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  1   R.  Oui, ce que je veux dire ici seulement c'est qu'il n'y a pas de termes

  2   englobant les volontaires à Seselj et les autres. C'étaient tous des

  3   volontaires, ce n'était pas marqué sur leur front, volontaire d'untel ou

  4   d'untel, c'étaient tous des volontaires qui étaient venus de Belgrade, et

  5   le dire que c'étaient des hommes à Seselj ou des hommes à Vuk Draskovic; je

  6   crois que, pour nous, à l'armée on n'avait pas fait la distinction.

  7   Q.  Regardez, mon Colonel, vous limitez vos réponses, vous savez que mon

  8   temps est milité. Donc les 18, 19 et 20, on a commencé à les acheminer en

  9   autocar chez eux.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que ce Détachement Leva Supoderica ne se ramenait qu'aux gens de

 12   Vukovar qui étaient membres de la TO de Vukovar ?

 13   R.  Je crois qu'à 90 % des cas, c'était vrai.

 14   Q.  Alors vous avez dit qu'il y a eu toute sorte de volontaires. Saviez-

 15   vous si les volontaires du Parti radical serbe étaient uniquement acheminés

 16   vers ce Détachement de Leva Supoderica ?

 17   R.  Je ne le sais pas, mais il me semble que d'après les récits qui ont

 18   couru, enfin, pas à titre officiel, je ne suis pas au courant à titre

 19   officiel. Mais il me semble que c'est bien le cas.

 20   Q.  Avez-vous l'information disant que, le 19 novembre, Marin Bilic,

 21   surnommé Bili, qui était l'homme de confiance du gouvernement croate pour

 22   Vukovar, et Vesna Bosanac, directrice de l'hôpital, ont été amenés à

 23   Negoslavci ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce qu'ils ont rencontré là-bas le général Aleksander Vasiljevic ?

 26   R.  Ça, je ne le sais pas.

 27   Q.  Le capitaine de l'époque est devenu colonel par la suite, Borko

 28   Karanfilov; c'est bien son nom ?

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  1   R.  Borce.

  2   Q.  Borce Karanfilov a déclaré devant un tribunal à Belgrade pour confirmer

  3   aussi au procès de Mrksic, Radic et Sljivancanin, que le général Aleksandar

  4   Vasiljevic était au poste de commandement de Negoslavci et qu'il a pris

  5   part comme il l'a dit à l'interrogatoire de Marin Bilic et de Vesna Bosanac

  6   ?

  7   R.  S'il le dit, je crois bien que c'est vrai.

  8   Q.  Aux côtés de Aleksandar Vasiljevic, il y avait le colonel qui est

  9   devenu général, Simeon Tumanov. C'était son adjoint6

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Saviez-vous que Vesna Bosanac, déjà à ce moment-là disposait de liste

 12   des personnes qu'on avait trouvées à l'hôpital de Vukovar et qui ont été

 13   acheminées à Negoslavci ?

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 15   M. DUTERTRE : -- mais clairement on voit que quand il y a une double

 16   question on ne sait pas à quoi répond le témoin quand il dit "oui." On a

 17   est-ce que le général Tumanov était avec lui, et en même temps, il était

 18   son adjoint. Alors qu'on répond "oui," on répond oui à l'adjoint ou oui il

 19   était avec lui. Il faut distinguer les questions.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Seselj quand votre question est à

 21   composante multiple, quand le témoin répond oui, on ne sait pas oui, à

 22   quelle composante. Alors essayez plutôt de serrer vos questions de telle

 23   manière que le oui se rapporte à un élément très précis.

 24   M. SESELJ : [interprétation]

 25   Q.  Je vous ai demandé Monsieur Vukasinovic, si vous saviez que Vesna

 26   Bosanac a apporté à Negoslavci une liste de tous les noms des personnes qui

 27   se sont trouvées à l'hôpital de Vukovar au moment de la libération de

 28   Vukovar.

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  1   R.  Je ne l'ai pas vue mais j'ai entendu dire qu'elle avait une liste.

  2   Q.  Est-ce que vous avez entendu dire qu'alors on a procédé à une

  3   concertation sur cette liste avec Aleksandar Vasiljevic et Simeon Tumanov

  4   pour savoir quel sera le sort de ces gens, lesquels seront prisonniers,

  5   libérés, dépêchés dans les hôpitaux croates à bord de véhicules sanitaires,

  6   et cetera ?

  7   R.  Je ne suis pas au courant de cela.

  8   Q.  Très bien. Nous allons avancer. Est-ce que vous savez que ces

  9   entretiens se sont prolongés et que Vesna Bosanac et Marin Bilic, Bili,

 10   sont restés passés la nuit au poste de commandement à Negoslavci ?

 11   R.  Oui, ils ont passé la nuit là-bas, c'est exact.

 12   Q.  Vesna Bosanac, elle a passé la nuit dans le lit du colonel Nebojsa

 13   Pavkovic; est-ce que c'est vrai ?

 14   R.  Ça, je ne sais pas. Je ne suis pas au courant.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : On va expurger

 16   M. DUTERTRE : Je crois qu'il y a une connotation qui est - c'est peut-être

 17   un problème de langue - mais je préfère que la connotation soit --

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, je vous en prie -- mais pourquoi est-ce

 19   qu'on doit expurger ? Le colonel Pavkovic n'était pas au poste de

 20   commandement à ce moment-là. Il était ailleurs, sa chambre était vide,

 21   libre, son lit était vide, on a changé la literie et c'est là que Vesna

 22   Bosanac a passé la nuit. Donc c'est le plus haut niveau d'installation

 23   qu'on aurait pu dire, c'est ce que j'ai appris ici, en prison. C'est

 24   Pavkovic qui me l'a dit, personnellement. Il n'était pas là, il n'a pas

 25   passé la nuit à son poste, au poste de commandement, à  son bureau. On a

 26   changé les draps et on l'a traitée de la meilleure façon possible de cette

 27   manière-là. Donc je ne vois pas pourquoi on devrait expurger, j'en ai marre

 28   de ces expurgations.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, votre question pouvait laisser

  2   planer un doute. Vous avez éclairci le doute, à savoir que le colonel

  3   Pavkovic n'étant pas là, Mme Bosanac a été logée dans sa chambre, très

  4   bien.

  5   Continuez.

  6   M. SESELJ : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Vukasinovic, est-ce que vous savez que le général Vasiljevic,

  8   le 20 novembre, a pris tout l'argent qui se trouvait à la banque de

  9   Vukovar, qu'il a tout emporté. Il y avait plusieurs millions de marks

 10   allemands, de devises, il a tout emporté à Belgrade ?

 11   R.  Ce que je sais, Monsieur Docteur Seselj, on a confisqué à Vukovar à la

 12   poste, je ne sais pas deux ou trois sacs avec de l'argent en dinar. Une

 13   somme importante de devises étrangères, argent pris aux gens, c'était au

 14   commandement. Je ne sais pas de quelle somme, cet argent qui a été transmis

 15   --

 16   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu les noms.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] -- mais il y a eu une commission, il y avait

 18   Karanfilov, Karan [phon] et Zoran Montijovic [phon] et ça a été remis à une

 19   banque, je ne sais pas quelle banque.

 20   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûr des noms.

 21   M. SESELJ : [interprétation]

 22   Q.  Il fallait remettre cela au service militaire de la banque centrale de

 23   Yougoslavie ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  On n'a pas remis ce qu'on aurait dû remettre conformément à la loi ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Très bien. Lorsque vous êtes parti à la retraite, vous étiez colonel

 28   d'active de la sécurité militaire, vous aviez une pièce d'identité qui vous

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  1   habilitait à faire certaines choses ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Ces attributions spécifiques correspondent à ce qu'a la Sûreté de

  4   l'Etat et la police militaire ?

  5   R.  La Sûreté d'Etat.

  6   Q.  Lorsque vous avez pris la retraite, vous avez dû restituer cette carte

  7   d'identité ?

  8   R.  Oui, et maintenant je suis zéro.

  9   Q.  Mais cette question est importante pour moi.

 10   R.  Oui, j'ai tout restitué, il ne me reste plus. Il ne me reste plus qu'un

 11   grand rien.

 12   Q.  Vous connaissiez un officier de la sécurité qui était mis à la retraite

 13   le 1er janvier 1991, un officier chargé de la sécurité, Bogdan Vujic ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Le 1er janvier 1991, lorsqu'il a rendu sa carte d'identité avec les

 16   attributions spécifiques, il était censé la rendre, il était tenu de la

 17   rendre ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Trois colonels à la retraite, Slavko Tomic, Bogdan Vujic, et Bogoljub

 20   Kijanovic, ils ont été réactivés et c'est en uniforme avec un véhicule

 21   officiel qui sont arrivés à Vukovar, dans la nuit du 19 au 20 novembre;

 22   vous le savez ?

 23   R.  Oui, ils sont venus.

 24   Q.  Habituellement on fait cela, on réactive des colonels de la sécurité

 25   militaire, même s'ils ont plus de 60 ans ?

 26   R.  Une telle décision, je pense qu'il n'y avait pas lieu de faire cela.

 27   L'INTERPRÈTE : L'autre partie de la réponse, inaudible.

 28   M. SESELJ : [interprétation]

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  1   Q.  Le secrétaire fédéral devait normalement prendre ces décisions ?

  2   R.  Oui, sans lui, ça n'était pas possible.

  3   Q.  Mais est-ce que vous savez que le secrétaire fédéral n'a absolument pas

  4   pris cette décision de les réactiver ?

  5   R.  Non, je ne sais pas.

  6   Q.  Vous ne savez pas. Vous êtes à la retraite et vous êtes officier de

  7   réserve maintenant ?

  8   R.  Oui, je suis à la retraite mais je n'ai pas encore reçu mon

  9   affectation.

 10   Q.  Jusqu'à quel âge vous serez aussi officier de réserve ?

 11   R.  Jusqu'à ce que j'ai 65 ans.

 12   Q.  Donc Slavko Tomic qui avait plus 65 ans à l'époque, il n'était pas

 13   officier de réserve, d'après le règlement militaire ?

 14   R.  Son service dans l'armée s'arrête, il peut être déployé en la

 15   protection civile.

 16   [chevauchement]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- vite les uns et les autres, parce

 18   que les interprètes signalent à nouveau qu'ils ont du mal, et parfois il y

 19   a des trous. Donc ça ne sert à rien, Monsieur Seselj, que vous vouliez

 20   faire mettre en évidence un élément si la réponse n'est pas actée.

 21   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, un point sur la manière de poser des

 22   questions. On nous dit qu'untel avait plus de 65 ans, dans ces -- et est-ce

 23   qu'ils le savaient -- enfin, il y a une supposition, ou il y a quelque

 24   chose à prouver, entre-temps. Je pourrais faire beaucoup d'objections, mais

 25   si on veut d'abord prouver ce point de façon certaine, on produit un

 26   document ou on demande au témoin quel âge avait -- est-ce qu'il sait quel

 27   âge il avait. Enfin, on procède à beaucoup de suppositions ici, et donc --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Monsieur, arrêtez. Bon, mais

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  1   indépendamment de l'objection technique du Procureur, les trois colonels

  2   réactivés - entre guillemets - leur âge ne leur permettait pas d'être

  3   réactivés.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas quel était leur âge. Ils

  5   semblaient en force -- être bien. Ils n'avaient pas l'air vieux.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais on peut être très bien et malheureusement avoir

  7   dépassé la limite d'âge. Bien.

  8   Monsieur Seselj.

  9   M. SESELJ : [interprétation]

 10   Q.  Je suppose que vous savez que Slavko Tomic, le colonel Slavko Tomic,

 11   avait fait de la résistance pendant la Seconde Guerre mondiale; le savez-

 12   vous ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Mais le Procureur a présenté d'autres témoins qui nous ont donné ces

 15   informations, nous avons ça au compte rendu d'audience. C'est des témoins

 16   de l'Accusation, je ne cite pas leurs noms, certains ont bénéficié de

 17   mesures de protection. Mais je me permets de rappeler ce détail au

 18   Procureur.

 19   Donc, Monsieur, vous avez dit qu'il n'était pas possible de réactiver les

 20   colonels à la retraite sans que le secrétaire fédéral, c'est-à-dire le

 21   ministre fédéral, Veljko Kadijevic, qui est un général, en prenne la

 22   décision.

 23   R.  C'est cela.

 24   Q.  Si je vous disais qu'il n'y a absolument aucun document portant la

 25   trace de leur réactivation, même pas avec la signature d'Aleksandar

 26   Vasiljevic, est-ce que cela vous étonne ?

 27   R.  Alors c'est contraire à la loi.

 28   Q.  C'est contraire à la loi. Très bien.

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  1   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Il n'y a aucune pause entre les

  2   questions et les réponses.

  3   M. SESELJ : [interprétation]

  4   Q.  Si je vous disais qu'au moment de cette réactivation, on n'a absolument

  5   pas précisé leur nouveau contrat -- le nouvel emploi ? Normalement, ils

  6   reprenaient leur service avec l'armée.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que ça aussi, c'est contraire à la loi ?

  9   R.  Oui, parce que lorsqu'on réactive un officier, là encore il hérite ses

 10   droits qu'il avait comme officier d'active. Donc il a un poste militaire,

 11   et cetera.

 12   Q.  Pendant ce mois de réactivation, ces trois colonels - et ils ne

 13   figurent sur aucun bulletin de paie - est-ce que ça aussi c'est contraire à

 14   la loi ?

 15   R.  Oui, tout à fait. Absolument, c'est contraire à la loi.

 16   Q.  Si je vous disais que dans leur livret militaire, on n'a absolument pas

 17   apporté cette mention de leur réactivation, ça aussi c'est contraire à la

 18   loi ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Si je vous disais que dans leur dossier individuel, il n'y a aucune

 21   trace de leur réactivation, et ça a été constaté par mes collaborateurs à

 22   Belgrade en contact direct avec le conseil chargé de coopérer avec le

 23   Tribunal de La Haye, ils ont reçu les informations de l'armée; est-ce que

 24   ça aussi c'est contraire à la loi ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Tout cela aurait dû être inscrit dans leur dossier individuel ?

 27   R.  C'est exact, même des mentions sur leurs déploiements, leur service sur

 28   le terrain. Tout.

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  1   Q.  Si -- à Sremska Mitrovica, là où on a organisé un camp pour les

  2   prisonniers de guerre à la prison, est-ce qu'on leur a donné l'ordre de se

  3   rendre à Sid tout d'abord et ensuite à Vukovar pour s'acquitter d'une

  4   mission spécifique ? Est-ce que c'est contraire à la loi qu'il n'y ait

  5   aucune trace écrite de leur départ vers Sid, Vukovar et cette mission

  6   qu'ils ont due mener ?

  7   R.  Il y a peut-être un ordre d'Aleksandar Vasiljevic, puisque c'est lui

  8   qui les engage, de leur affectation, quelle unité, quel commandement, en

  9   quoi consiste la mission.

 10   Q.  Mais avec certitude, nous savons qu'il n'y a aucune trace écrite de

 11   cela. Ce n'est pas contestable, c'est un fait incontesté dans ce procès, je

 12   ne peux pas vous dire grâce à quoi. Mais est-ce que c'est contraire à la

 13   loi s'il n'y a aucune trace écrite ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Très bien. Est-ce qu'il est contraire à la loi si on leur a donné

 16   l'ordre -- s'ils se sont rendus le 19 au soir à Vukovar et s'ils ont passé

 17   toute la nuit à Vukovar, et le lendemain, certains d'entre eux se sont

 18   rendus à l'hôpital de Vukovar, d'autres au bâtiment de Velepromet, et puis

 19   ils sont partis à Ovcara au moins pour deux d'entre eux, il est certain,

 20   Slavko Tomic et Bogoljub Kijanovic qui se sont trouvés à Ovcara. Bogdan

 21   Vujic, ça c'est encore discutable. Donc, et que vers minuit, le 20, donc

 22   lorsque les exécutions à Ovcara ont commencé, ils sont de retour à Sremska

 23   Mitrovica --

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- vous allez tellement vite qu'au

 25   compte rendu, on n'a pas le "dispatching" des trois colonels. Alors si

 26   c'est important pour vous qu'on sache quel colonel était à l'hôpital, quel

 27   colonel était à Velepromet et quel colonel était à Ovcara, il faut peut-

 28   être que ça soit au transcript. Donc, regardez le texte, vous verrez que ce

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  1   n'est pas mentionné. Nous, après, les Juges, on ne pourra pas utiliser cela

  2   si ce n'est pas écrit.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, c'est après une longue

  4   pause que j'ai enfin un témoin compétent, un expert, un militaire, un

  5   officier de renom, s'il avait été témoin de ma Défense, j'aurais prévu au

  6   moins trois heures pour lui. Comme c'est quelqu'un qui connaît beaucoup de

  7   choses, même s'il y a des points qu'il ne connaît pas directement, au moins

  8   il sait les expliquer. Vous devez comprendre aussi que je me précipite pour

  9   lui poser toutes les questions que je souhaite lui poser parce que je n'ai

 10   qu'une petite heure pour l'interroger.

 11   Mais enfin, je vais répéter.

 12   Q.  Par conséquent, nous avons déjà établi ici qu'ils se sont trouvés à

 13   Vukovar, que Bogdan Vujic s'est trouvé à l'hôpital de Vukovar, qu'il s'est

 14   trouvé à Velepromet, qu'au moins Slavko Tomic et Bogoljub Kijanovic se sont

 15   trouvés à Ovcara cette nuit-là, à Ovcara. Ça, on l'a établi ici.

 16   Ma question est la suivante : est-il possible, après cette mission

 17   spéciale, qu'ils ne fassent pas rapport au commandement, à leur chef

 18   direct, Aleksandar Vasiljevic ? Est-ce que c'est contraire à la loi s'il

 19   n'y a pas eu de compte rendu ?

 20   R.  Premièrement, leur séjour, si cela est exact, à Ovcara, tard ce jour-

 21   là, ce n'est pas clair, pourquoi se sont-ils trouvés là. Ça, je l'apprends

 22   de vous maintenant; alors, c'est tout à fait contraire à la loi,

 23   absolument, puisque c'est Aleksandar Vasiljevic qui les a engagés, c'est un

 24   échelon au-dessus de nous tous. Ce type d'observations, qu'ils ne couchent

 25   pas ça sur papier, qu'ils ne fassent pas rapport, c'est un travail -- c'est

 26   de l'amateurisme et c'est contraire à la loi.

 27   Q.  Vous êtes officier de sécurité militaire, vous connaissez la pratique

 28   dans votre service. Est-ce que c'était habituel que vous meniez à bien une

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  1   mission en empruntant un om de code ? Bogdan Vujic, partout à Vukovar, il

  2   se présentait comme colonel Branko. Lorsqu'il a auditionné des prisonniers

  3   à Sremska Mitrovica, là encore, il s'est présenté comme colonel Branko.

  4   Est-ce que c'est quelque chose que vous faisiez habituellement dans votre

  5   service ?

  6   R.  Non. En tant qu'officier, je n'ai pas besoin de me servir d'un

  7   pseudonyme. C'est lorsqu'on travaille avec un agent avec qui on coopère

  8   qu'on le fait.

  9   Q.  Donc il n'avait aucune raison de cacher son identité. En tant que

 10   colonel de la JNA, il pouvait toujours décliner son identité; c'est bien

 11   cela ?

 12   R.  Oui. C'est la règle de base de se présenter par son nom et son prénom

 13   parce qu'il n'y a pas de raison -- il n'y a pas lieu -- il n'y a pas besoin

 14   d'utiliser un nom de code -- ou un pseudonyme.

 15   Q.  Très bien. Allons de l'avant.

 16   En plus de ces trois colonels, il y avait là aussi un groupe d'officiers de

 17   sécurité qui sont arrivés de la première région militaire; vous le savez ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Le général Mile Babic était-il parmi eux ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Le général Jerko Crmaric ? Il est Croate et il était l'adjoint du

 22   commandant chargé de la logistique.

 23   R.  Je ne sais pas ce qu'il en est de lui. Je sais que c'était ça sa

 24   fonction et il nous est arrivé d'avoir des problèmes sur le plan de la

 25   logistique.

 26   Q.  Est-ce que vous savez s'il y a eu un colonel en uniforme de l'armée de

 27   l'air qui aurait été chargé du transport des prisonniers ?

 28   R.  Non.

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  1   Q.  Très bien. Dites-moi si vous savez que le 19 novembre, peu avant que le

  2   général Vasiljevic n'arrive, le colonel Sljivancanin ait reçu un télégramme

  3   de sa part et que dans ce télégramme, le général Vasiljevic lui ordonne

  4   d'avoir un maximum de prisonniers de guerre qui seront transportés à

  5   Sremska Mitrovica pour faire l'objet d'échange, pour être échangés à un

  6   très grand nombre de membres de la JNA capturés par les Croates ?

  7   R. Ça, oui, je suis au courant de ça, et j'ai vu personnellement ce

  8   télégramme.

  9   Q.  Très bien. Allons de l'avant.

 10   Donc, les officiers de la sécurité avaient pour mission de faire en sorte

 11   qu'il y ait le plus grand nombre de ces prisonniers qu'on amènera à Sremska

 12   Mitrovica; c'est bien ça ?

 13   R.  Oui. Pendant tout ce temps depuis le début des combats, c'est ce que

 14   nous avons essayé, c'était ça le message reçu du commandement -- du cabinet

 15   du ministre fédéral chargé de la Défense, donc disons qu'il y avait

 16   beaucoup de soldats, beaucoup de familles en Croate capturés et qu'il

 17   fallait faire en sorte qu'il y ait un maximum de prisonniers pour pouvoir

 18   procéder à l'échange. C'était ça la mission principale, avoir un maximum

 19   d'individus pour les échanger. Donc justement, on a mis l'accent là-dessus.

 20   Tous ces gens, on les prenait en charge, et on les préparait, donc un grand

 21   nombre de personnes, 1 500 personnes se sont trouvées à Sremska Mitrovica

 22   envoyés du secteur de Vukovar pour l'échange.

 23   Q.  Parmi ces gens que le général Vasiljevic a essayé de libérer dans les

 24   prisons croates, il y avait un grand nombre d'officiers et de

 25   collaborateurs civils, il y avait des groupes Opéra et Labrador ?

 26   R.  Pour ce qui est des réseaux de collaborateurs ou d'agents, je ne

 27   voudrais pas en parler, mais je sais qu'un grand nombre de nos officiers

 28   ont été capturés et de leur famille.

Page 12356

  1   Q.  Certains faisaient partie de ces réseaux, vous le savez comme moi je le

  2   sais.

  3   R.  Mais le réseau a été complètement brisé.

  4   Q.  Oui. Est-ce que vous savez que les membres de ce groupe ont organisé la

  5   pose de la bombe au cimetière juif à Zagreb et le bâtiment de la communauté

  6   juive pour qu'on attribue cela au régime de Tudjman ?

  7   R.  Je ne suis pas au courant de cela. J'en ai entendu parler mais je sais

  8   pas où est la vraie vérité.

  9   Q.  Mais vous avez au moins ce que vous avez appris dans la presse, tout

 10   comme moi ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Dans les médias ?

 13   R.  Oui, dans la presse.

 14   Q.  Très bien. Cette réponse-là aussi me satisfait tout à fait.

 15   Alors, dites-moi maintenant, le problème-clé, ici, c'était : on vous a

 16   confié une mission avec six autocars, vous deviez transporter les

 17   prisonniers de guerre de l'hôpital vers la caserne, et de là-bas à Sremska

 18   Mitrovica; c'est bien ça ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Ce qui vous a sidéré, c'est qu'à votre retour de l'hôpital, vous avez

 21   vu que trois autocars avaient déjà été dépêchés à Ovcara et vous, on vous a

 22   transmis l'ordre de faire pareil avec vos trois autocars restants, les

 23   amener à Ovcara ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Mais absolument, il n'y avait aucune logique à cela, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, pas de logique.

 27   Q.  Vous ne pouvez pas voir de lien logique entre l'ordre de télégramme du

 28   général Vasiljevic ni avec la pratique, telle qu'elle a été jusqu'à présent

Page 12357

  1   dans la JNA ?

  2   R.  A ces moments-là, je ne voyais pas la logique. Maintenant, c'est facile

  3   de voir la logique.

  4   Q.  Très bien. Alors, établissons des liens logiques. Alors, était-il

  5   possible que la JNA remette un groupe de prisonniers, exactement 200, aux

  6   autorités civiles de la Région autonome serbe Slavonie orientale, Baranja

  7   et Srem occidentale, puisqu'on sait que cette région autonome n'était pas

  8   quelque chose de structuré au sein de l'ordre constitutionnel de la

  9   Fédération yougoslave ? Etait-ce possible que la JNA leur remette à eux ses

 10   prisonniers ? D'après le règlement, était-ce possible ?

 11   R.  La JNA, d'après les règlements, ne devrait pas remettre ses prisonniers

 12   ainsi. Elle devrait respecter la procédure, donc si c'est encore dans sa

 13   zone de responsabilité et c'était le cas. Elle devait normalement les

 14   emmener à Sremska Mitrovica.

 15   Q.  Surtout, la JNA ne pouvait remettre à personne 200 prisonniers sans

 16   qu'il y ait de trace documentaire. Normalement, il devait y avoir un accusé

 17   de réception avec la liste des noms, des prénoms et tous les renseignements

 18   personnels de base; c'est ça qui devait les accompagner ?

 19   R.  Oui, vous avez raison, parce que lorsque les organes de la Police

 20   militaire et les services de Sécurité mènent à bien une mission sans que le

 21   commandement s'en mêle, c'était ça la procédure. Donc la police militaire

 22   escorte les prisonniers, dresse une liste peut-être au début ou pendant le

 23   transport et puis, c'est obligatoire au moment de l'arrivée à la prison, on

 24   remet les prisonniers conformément à la liste dressée.

 25   Q.  Très bien.

 26   R.  Avec les objets personnels.

 27   Q.  Est-ce que l'une des tâches de base de la sécurité militaire est

 28   d'évacuer et de prendre en charge en toute sécurité les prisonniers de

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  1   guerre ?

  2   R.  Non. La mission de base de la sécurité militaire est de faire du

  3   contre-renseignement ou contre-espionnage, et là, vous avez une mission de

  4   la police militaire. Techniquement parlant, elle est subordonnée aux

  5   organes de Sécurité.

  6   Q.  Je n'ai pas dit "mission principale" mais j'ai dit "une des missions

  7   principales" de la sécurité militaire. Alors, maintenant, avec cette

  8   correction, est-ce que vous me répondez par l'affirmative ?

  9   R.  Une des missions, oui, on peut dire ainsi.

 10   Q.  Oui, mais c'est tout à fait ce que j'ai dit. Alors, le fait même

 11   qu'après la libération, à Vukovar on ait mis sur pied le QG du lieu, est-ce

 12   que cela signifie que la JNA n'a pas estimé que les organes civils de

 13   pouvoir étaient capables de fonctionner normalement dans ce secteur ?

 14   R.  Cela sort de mon domaine de compétence, mais si vous voulez avoir mon

 15   opinion, j'estime que ce n'était pas possible.

 16   Q.  Mais je vous demande, vous êtes colonel, vous êtes expert. Dites-nous,

 17   si la JNA avait estimé que les autorités civiles étaient capables de

 18   s'acquitter de toutes leurs obligations, la JNA n'aurait pas établi un

 19   commandement du lieu, de la ville; n'est-ce pas ? D'après le règlement

 20   militaire de la JNA, pour être plus clair, un commandement d'une ville,

 21   d'un lieu est mis sur pied lorsqu'on parle d'une ville libérée, en

 22   attendant que les autorités civiles ne soient capables de se charger de

 23   l'exercice du pouvoir; est-ce que j'ai raison ?

 24   Je -- vous regardez l'écran.

 25   R.  Mais je le regarde parce que la traduction est encore en cours.

 26   Q.  Mais c'est pas la traduction, c'est la transcription. Vous entendez

 27   l'interprétation et la transcription a toujours un petit retard. Mais

 28   éteignez ça, cela vaut mieux.

Page 12359

  1   R.  Mais justement, je fais ça pour ne pas faire ce dont on nous a averti

  2   pour faire des pauses.

  3   Donc c'est exact. Dans une ville libérée, un secteur libéré, une

  4   localité, une agglomération, le commandement existe jusqu'à ce que tous les

  5   organes de pouvoir ne sont établis -- les organes de pouvoir civil, et à

  6   partir du moment où ils sont là, les militaires sortent et remettent le

  7   pouvoir.

  8   Q. Le savez-vous ? Avant la libération de Vukovar, on a établi le

  9   commandement de la ville qui comprenait Ovcara et deux villages dans les

 10   environs, et le colonel Vojnovic était le commandant du lieu avant de

 11   devenir le commandant de la ville ?

 12   M. DUTERTRE : Il pourrait y avoir une date, un document ? La question

 13   est vague et elle n'est supportée par aucun élément. J'aimerais bien que M.

 14   Seselj précise.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, concernant la date, le

 16   colonel Vojnovic qui est devenu commandant; pouvez-vous nous dire à quelle

 17   date, d'après vous ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, avant la

 19   libération de Vukovar, avant le 18 novembre. Mais peu importe à quel

 20   moment, est-ce que c'est important ? Le 17, le 12, le 1er, mais peu importe.

 21   Je n'en ai rien à faire. Mais il était commandant du lieu et ça comprenait

 22   Ovcara, et après, sur ordre de Mile Mrksic, il est devenu commandant de

 23   Vukovar, le 22 ou le 23 novembre. Je ne sais pas exactement la date.

 24   Q.  Est-ce que j'ai raison, Monsieur Vukasinovic ?

 25   R.  Attendez un instant. Le lieutenant-colonel Vojnovic, le commandant de

 26   la 80e Brigade de Kragujebvac, lui il a reçu pour zone de responsabilité

 27   Ovcara, Jakobovac, Grabovo, et je ne sais pas s'il y a Sutin ou pas, je ne

 28   suis pas sûr. Dans cette zone de responsabilité, il a ses unités

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  1   subalternes, des commandants, des bataillons, des batteries, et cetera, et

  2   son poste de commandement de base peut être à Jakobovac, Grabovo, à Sutin,

  3   peu importe, mais il a la responsabilité de l'ensemble de la zone de

  4   responsabilité.

  5   Q.  Est-ce que vous savez que le commandement du commandant Vojnovic est

  6   dans la maison jaune près d'Ovcara, c'est qu'on a appelé maison jaune ?

  7   R.  Oui. Oui, je connais cette maison jaune.

  8   Q.  Très bien. Eteignez, s'il vous plaît, cette transcription. Vous

  9   gaspillez mon temps.

 10   L'INTERPRÈTE : [inaudible] Interruption.

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro] -- soit clair, il faut en plus que de

 12   traduire, il faut aussi transcrire. Donc il faut attendre. Il a raison de

 13   regarder. Il n'y a rien qui comparait ne soit pas la transcription. Je vous

 14   assure.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Comment voulez-vous que je pose toutes mes

 16   questions en une heure, Madame Lattanzi ? Je ne vois pas. Je vais faire de

 17   mon mieux, mais je ne vais pas -- je ne sais pas comment je vais y arriver.

 18   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro] -- besoin de répondre, de commenter les

 19   -- ce que même les Juges disent, je comprends que vous n'avez pas le temps.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Donc je suis la branche sur laquelle

 21   je suis assis.

 22   Q.  Monsieur Vukasinovic, est-ce que vous savez que le --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- je ne sais pas où vous voulez

 24   arriver; que voulez-vous nous démontrer ? Tout à l'heure, vous avez parlé

 25   de ces trois colonels qui ont été réactivés. Moi, ça m'a paru intéressant.

 26   Je me suis dit pour quelle raison. Puis vous les avez laissés, et là, vous

 27   embrayez sur autre chose. Alors peut-être que ce que vous vouliez dire va

 28   réapparaître maintenant, mais si ce n'est pas le cas, je dois vous dire à

Page 12361

  1   quoi ça servait de parler de ces trois colonels.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une conception de

  3   mon contre-interrogatoire. S'il vous plaît, dites-leur de ne pas m'envoyer

  4   l'interprétation anglaise.

  5   C'est comme si délibérément vous cherchez à me provoquer. Soudain dans le

  6   casque, j'ai la traduction anglaise de mes propres propos. Je ne souhaite

  7   pas entendre cela. Donc j'ai une vision, j'ai une structure de mon contre-

  8   interrogatoire, on le saura à la fin. Faites-moi confiance, ce sera mené à

  9   la perfection si j'y parviens dans ce temps limité.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ecoutez, on va entendre le suspens. Continuez.

 11   M. SESELJ : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Vukasinovic, est-il exact de dire que le gouvernement de la

 13   Slavonie orientale, de la Baranja et du Srem occidental n'était qu'une

 14   improvisation politique purement cela donc et qu'elle n'avait pas de

 15   système judiciaire à ce moment-là ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-il exact de dire que ce gouvernement, même s'il l'avait souhaité,

 18   s'il se voyait confié cette mission, n'était pas en mesure d'organiser des

 19   procès réguliers à ces prisonniers ?

 20   R.  Je ne peux vous dire que mes impressions. Il me semble que, pendant ces

 21   premiers temps, nous n'étions pas encore partis et eux, ils n'avaient pas

 22   encore mis sur pied un gouvernement; je pense que ce n'était pas possible.

 23   Q.  Très bien. Monsieur Vukasinovic, vous venez de dire à l'instant quelque

 24   chose qui m'a étonné un petit peu, à la libération de Vukovar, que tout de

 25   suite sur le champ, les Unités de la Défense territoriale ont quitté, se

 26   sont détachés des rangs de la Brigade de la Garde. Mais l'expert militaire

 27   de l'Accusation nous a montré des documents à un moment donné nous montrant

 28   qu'il y a un ordre --

Page 12362

  1   M. DUTERTRE : [hors micro] -- j'aimerais qu'il soit très clair que le

  2   témoin a dit que c'était probable. Vous parlez de probabilité. Donc là, si

  3   on cite le témoin, j'aimerais que l'on cite dans le texte. Je peux

  4   retrouver cet élément, mais je crois bien que c'est le mot "probable."

  5   C'est page 52, ligne 20 du transcript d'aujourd'hui, si j'ai bonne mémoire,

  6   "probablement dissocié." Ce n'est pas la même chose.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes d'accord, Monsieur le Témoin ? D'accord.

  8   Bien.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit "probablement." Parce que je n'étais

 10   pas sûr. Je l'ai dit parce que je voyais qu'ils allaient et venaient, sans

 11   ordre, ils étaient désoeuvrés, et c'est partant de là que je l'ai compris,

 12   mais il faut qu'il y ait un ordre lorsqu'une unité quitte ses effectifs.

 13   M. SESELJ : [interprétation]

 14   Q.  Mais leurs effectifs étaient diminués du fait du départ des volontaires

 15   donc cela fait que chacune des unités ne pouvaient compter plus de 30 à 40

 16   hommes; ai-je raison de le dire ?

 17   R.  Justement c'est ce que j'ai dit.

 18   Q.  Ici l'expert de l'Accusation a apporté un document, qui est un ordre

 19   émanant du colonel Mrksic disant que les Unités de la Défense territoriale

 20   étaient censées être resubordonnées et être placées sous les ordres de la

 21   80e Brigade motorisée. Puisque cela faisait de la logique, enfin avait de

 22   la logique, puisqu'une brigade partait de Vukovar et ces attributions

 23   étaient reprises par la 80e Brigade motorisée ?

 24   R.  Oui, cela est logique.

 25   Q.  Bon. Maintenant, le colonel Vojnovic, il était lieutenant-colonel à

 26   l'époque, est devenu commandant par un ordre -- suite à un ordre du

 27   commandant de la ville Vukovar, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Ce colonel Vojnovic, et sur quelle condition --

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   M. DUTERTRE : Je ne veux pas interrompre vraiment, ce n'est pas pour

  4   embêter mais le document dit c'est P41. Il y a une date précise. Est-ce que

  5   ça peut être montrer au témoin, est-ce que là on parle un peu sans savoir

  6   de date, on ne sait pas vraiment de quoi on parle ? C'est une suggestion à

  7   M. Seselj, sans faute de quoi je --

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] On en a fini avec ce document. Le document vous

  9   l'avez dans le dossier, pourquoi voulez-vous qu'on s'occupe du document ?

 10   On va de l'avant. C'est vraiment pour moi une perte de temps, et pourquoi

 11   voulez-vous créer la façon dont je me comporterais dans mon contre-

 12   interrogatoire ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- pour éviter que les Juges se livrent

 14   à des spéculations à savoir quel document, il aurait été plus intéressant

 15   que vous disiez : "Voilà il y a un document évoqué par l'expert du

 16   Procureur, la pièce P41," qui dit que, et puis vous embrayez.

 17   Continuez.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai aucun assistant,

 19   moi. Comment voulez-vous que je retrouve toutes ces références, et que

 20   j'établisse les corrélations ? Vous voyez que je suis submergé de papier.

 21   Je ne peux pas tout faire, je vais vers la substance des choses.

 22   M. SESELJ : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Vukasinovic, ma question suivante se lit comme suit : tous à

 24   Vukovar savaient qu'un groupe de prisonniers a été emmené vers Ovcara. Ça a

 25   été vu par les journalistes étrangers. Il y avait des observateurs

 26   étrangers, et même Vance c'était trouvé ce jour-là à Vukovar, n'est-ce pas

 27   ?

 28   R.  Cyrus Vance était à Vukovar le 19.

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  1   Q.  Bon, souhaite. Entre le 20 et le 21, il y a eu les exécutions dans la

  2   nuit, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Tout Vukovar savait que des prisonniers ont été exécutés. Les rumeurs

  5   ont couru très vite, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Comment se peut-il que le nouveau commandant de la ville, le colonel

  8   Milorad Vujovic, n'entreprenne rien pour enquêter ce cas d'exécution ?

  9   Absolument rien, or il était le seul autorisé à le faire. Etait-ce là un

 10   comportement contraire à la loi ?

 11   R.  Etant donné que le commandant qui était commandant de la ville et qu'il

 12   était commandant de la zone où ça s'est produit, je crois que c'était la

 13   personne la plus censée à assumer des responsabilités pour en informer et

 14   entreprendre des mesures.

 15   Q.  Vous êtes bien d'accord avec moi pour dire qu'il n'a rien entrepris ?

 16   R.  Pour autant que je le sache, non.

 17   Q.  Sous son commandement, il a été procédé à l'assainissement du terrain

 18   sur le territoire de Vukovar. On a récupéré les cadavres des personnes

 19   tuées. On a déterré les personnes qu'on avait ensevelies dans des tombes

 20   improvisées et toutes ces personnes ont été enterrées au cimetière de

 21   Vukovar, n'est-ce pas ? Il s'agissait de quelque plus de 900 personnes; le

 22   saviez-vous ?

 23   R.  Ça, je ne le sais pas.

 24   Q.  Bon, l'assainissement du terrain a englobé tous les sites où les gens

 25   ont été inhumés à titre temporaire, exception de cette fosse commune

 26   d'Ovcara. Personne ne s'est approché de celle-ci; est-ce contraire à la loi

 27   ?

 28   R.  Oui, c'est contraire à la loi; s'il n'y a pas assainissement du terrain

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  1   et suite à l'assainissement du terrain, il faut rédiger un rapport.

  2   Q.  Dites-moi - et vous l'avez déclaré dans l'interrogatoire principal -

  3   vous avez trouvé étrange que le colonel Mrksic ait paru bizarre lorsque

  4   vous lui avez dit ce qui s'était passé à Ovcara. Cela signifie qu'il n'a

  5   pas réagi de la façon dont vous attendiez à ce qu'il réagisse le

  6   connaissant, le connaissant bien, n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Est-ce que cela ne signifie pas qu'à ce moment-là, il s'était trouvé

  9   là-bas une autorité plus grande que celle du colonel Mrksic ? Ai-je raison

 10   de dire cela, donc vous tous, officiers chargés de la sûreté, et non pas

 11   seulement officiers de la Sûreté, mais autres officiers aussi aviez observé

 12   avec un grand respect et de la peur le général Vasiljevic ?

 13   R.  Docteur Seselj, ce n'est pas ce que je dirais. Peut-être certains

 14   avaient-ils peur mais nous, officiers subalternes n'avions pas peur du

 15   général Vasiljevic. Mais j'ai trouvé bizarre le comportement de Mrksic

 16   parce que je savais que c'était un officier de grande valeur et qu'il était

 17   censé réagir au quart de tour, comme on dirait.

 18   Q.  Bien. Le fait que les prisonniers aient été exécutés entre le 20 et le

 19   21 novembre, et que les premières enquêtes à Belgrade aient été entamées

 20   qu'en 1998, une fois que cette affaire a pleinement été mise à jour

 21   lorsqu'on a procédé à des exhumations, exhumations faites par des

 22   intervenants étrangers où les médecins légistes croates et serbes n'ont

 23   fait que les aider; alors est-ce que cela ne dit pas que quelqu'un a

 24   délibérément essayé de passer sous silence le crime de Ovcara ?

 25   M. DUTERTRE : [hors micro]

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette situation de secret où personne n'a rien

 27   entrepris est assez symptomatique et nous dit qu'il y a des actions

 28   invisibles, clandestines qui voulaient faire en sorte que ça ne se sache

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  1   pas. Je ne sais pas vous dire qui a investigué tout ceci mais personne

  2   n'osait en parler.

  3   M. SESELJ : [interprétation]

  4   Q.  Donc quelqu'un voulait à tout pris passer cela sous silence. Ce n'est

  5   pas une spéculation c'est évident, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est évident il y a eu volonté de passer sous silence ces graves, il

  7   doit y avoir des responsabilités d'assumées et il s'agit là quand même de

  8   200 personnes. C'est une grosse responsabilité, et probablement y a-t-il eu

  9   une politique qui visait à ne pas faire de vague. Mais il y a des indices

 10   qui le disent, oui.

 11   Q.  Quand finalement sous la pression de l'opinion publique on a entamé des

 12   enquêtes, sous la direction du général Gojovic qui se trouvait colonel à

 13   l'époque, n'était-il pas évident que le général Gojovic a de toutes les

 14   manières possible avait empêché qu'à l'occasion des activités d'enquête

 15   l'on ne vienne à mentionner le nom du général Vasiljevic et du général

 16   Simeon Tumanov; est-ce que cela ne vous a pas paru évident puisque vous

 17   avez été entendu sur ce sujet ?

 18   R.  Oui, j'ai donné une déclaration en signant mon nom et prénom. Ça, je

 19   l'ignorais. Mais dans ma déclaration faite ultérieurement auprès de

 20   l'administration chargée de la Sécurité, M. Branko -- ou plutôt le colonel

 21   Branko - je n'arrive plus maintenant à me souvenir de son nom de famille -

 22   a insisté, lorsque j'ai fait cette déclaration, de tout ramener à moi et à

 23   Veselin Sljivancanin et qu'on entende que nous étions les seuls titulaires

 24   de la mission. Alors j'ai dit qu'il n'en était pas ainsi parce que s'il

 25   faut dire la vérité, il faut que toutes les personnes qui étaient au

 26   courant des événements et qui étaient présentes qui ont dirigé ou

 27   commandaient les choses soient mises à jour. Il ne faut pas que ce soit

 28   seulement Sljivancanin et moi qui ayons la responsabilité de la chose.

Page 12368

  1   Q.  Donc ils ont sacrifié Mrksic --

  2   R.  Branko Gajic, je viens de me souvenir de son nom.

  3   Q.  Ecoutez ma question, répondez par oui ou non. Donc il y avait quelqu'un

  4   de plus haut placé qui voulait que l'on sacrifie --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez tellement vite que, moi, j'ai du mal à

  6   saisir parce que c'est très important ce que vous dites, et vous passez

  7   d'un élément à un autre et surtout la question de la date est importante.

  8   Tel que je comprends, le colonel Branko vous fait une audition,

  9   Monsieur le Témoin. Il semble - d'après ce que je comprends, parce que

 10   comme M. Seselj va très vite - il faut lire entre les lignes. Le colonel

 11   Branko semble vous suggérer en quelque sorte comme on dit dans ma langue de

 12   porte et de chapeau, c'est-à-dire que vous et le commandant Sljivancanin

 13   acceptiez cette responsabilité, et à ce moment-là, vous vous n'êtes pas

 14   d'accord et vous le dites à ce colonel Branko.

 15   C'est comme ça s'est passé ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je crois que vous avez rajouté, c'est alors

 18   qu'ils ont décidé de sacrifier le colonel Mrksic ou quelque chose comme ça.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il ne s'agit pas d'une politique de

 20   sacrifice des uns ou des autres. Il fallait dévoiler les faits et dire ce

 21   que les uns et les autres ont fait. On ne peut pas tout ramener à

 22   Sljivancanin ou à Vukasinovic, il faut aller du haut jusqu'au soldat le

 23   plus bas, le moins gradé. Donc il faut aller du haut jusqu'au tout dernier

 24   simple troufion qui était là-bas, qui a fait quoi, qui a vu quoi, qui a

 25   entendu quoi. Donc la situation sera claire. Parce que si on exclut untel

 26   ou untel, on pourrait croire de Sljivancanin a tout imaginé tout seul et

 27   qu'il a fait tout seul, ça n'a rien à voir avec la réalité des faits.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, combien de temps

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  1   ai-je encore à ma disposition ? Je vous prie de nous le dire.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : J'allais vous le dire. Il vous reste 24 minutes,

  3   mais il vous faut faire la pause. Alors le mieux, on fait la pause, ça vous

  4   permettra dans les 24 minutes qui restent --

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : -- de demander la date de votre entretien avec le

  6   colonel Branko ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a eu une interruption, je n'ai pas

  8   compris.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] On ne nous a rien traduit de ce que vous avez

 10   dit, Madame Lattanzi.

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : [hors micro] -- de votre entretien avec le colonel

 12   Branko, s'il vous plaît.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'était en novembre 1996.

 14   M. SESELJ : [interprétation]

 15   Q.  Donc le colonel Bogdan Vujic, en 1996, était engagé ou utilisé pour

 16   faire passer cela sous silence. Pourquoi lui, en sa qualité de retraité,

 17   autrement serait-il à envoyer ou s'entretenir avec vous, parce qu'il a été

 18   envoyé à la retraite après ?

 19   R.  Il s'agit ici de Branko Gajic.

 20   Q.  Bon, Branko Gajic, soit.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors on va faire la pause de 20 minutes et on

 22   reprend à 12 heures 30.

 23   --- L'audience est suspendue à 12 heures 10.

 24   --- L'audience est reprise à 12 heures 30.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

 26   Monsieur Seselj, vous avez la parole.

 27   M. SESELJ : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Vukasinovic, en votre qualité d'officier des services de

Page 12370

  1   sécurité militaire, j'imagine que vous avez dû tout le temps savoir que sur

  2   le territoire de Vukovar il y a un important nombre d'agents du

  3   renseignement étrangers qui se disaient être agents humanitaires,

  4   représentants étrangers de telle et telle organisation, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. C'était des informations qui étaient à la disposition de mon chef

  6   de service.

  7   Q.  Etant donné que ces agents du renseignement étranger avaient une

  8   couverture officielle du point de vue de leur statut d'agents humanitaires

  9   ou de représentants internationaux, quand bien même l'auriez-vous voulu,

 10   vous ne pouviez pas contrecarrer leurs activités, n'est-ce pas ?

 11   R.  La protection du contre-renseignement au niveau des unités englobait ce

 12   segment-là, à savoir combattre les activités du renseignement de la partie

 13   adverse. Mais nous nous concentrions davantage sur les activités du contre-

 14   renseignement des paramilitaires croates parce qu'ils menaçaient davantage

 15   nos unités que les représentants des autres pays. Je crois qu'il eut été

 16   prétentieux que de considérer que cela constituerait une menace pour nous.

 17   Les renseignements recueillis par leurs soins avaient de l'importance pour

 18   eux, mais notre organisation et nos missions à nous consistaient notamment

 19   à vaquer à ce qui concernait Vukovar et à tous les problèmes qui pouvaient

 20   mettre en péril nos unités et nos commandements, nos installations, et

 21   cetera. 

 22   Q.  Bien. Donc eux, ce n'était pas votre priorité à vous. Mais le rapport

 23   du renseignement a eu des conséquences politiques de taille pour ce qui est

 24   du comportement des gouvernements occidentaux, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je n'ai pas lu les rapports afférents et je ne pourrais pas porter de

 26   jugement.

 27   Q.  Bon. Allons de l'avant.

 28   Ne saviez-vous pas en votre qualité d'officier du renseignement,

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  1   n'étiez-vous pas au courant du fait que ces agents du renseignement croates

  2   avaient tué plus de 150 civils serbes dans le secteur de Gospic ?

  3   R.  Ça je le sais, parce que Toma Strelja, un de nos officiers, a été

  4   capturé. Il était commandant d'une garnison.

  5   Q.  Saviez-vous que s'agissant de ce crime, il a été su de l'opinion

  6   publique occidentale et c'est ce qui a fait hésiter les gouvernements --

  7   certains gouvernements occidentaux qui avaient déjà décidé de reconnaître

  8   l'indépendance de la Croatie ?

  9   R.  Ça ne je ne peux pas en parler. Je ne suis pas au courant de ces

 10   évaluations politiques. Cela se peut mais --

 11   Q.  Vous ne savez pas. Moi, je n'insiste pas. Je vais de l'avant.

 12   R.  Non, ce n'est pas. Ça n'a pas fait l'objet de mes préoccupations.

 13   Q.  Or, d'après tous les renseignements disponibles dans ce procès qui sont

 14   non contestés, j'imagine, il a été tué à Ovcara 207 prisonniers de guerre;

 15   sept ont été relâchés et on a exécuté et fusillé exactement 200 personnes.

 16   Alors en votre qualité d'agent de renseignement, ce chiffre de 200 fusillés

 17   n'est-il pas symptomatique ? C'est tout rond comme chiffre et ces assez

 18   élevé comme chiffre, comme si quelqu'un avait donné l'ordre : "Fusillez-en

 19   200," et ceux qui ont fusillé n'ont voulu en fusiller pas un seul de plus,

 20   et ils ont relâché les sept restant, n'est-ce pas ? 

 21   R.  Moi, je ne sais pas.

 22   M. DUTERTRE : [hors micro]

 23   M. SESELJ : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Vukasinovic.

 25   R.  Je ne sais pas exactement combien on en a fusillés.

 26   Q.  Le Procureur, les Juges de la Chambre et moi-même le savent, donc c'est

 27   hors de doute. Il y en a eu 200 de fusiller, dont sept ont été relâchés. Ce

 28   sont des faits qui ne sont pas contestés dans ce procès.

Page 12372

  1   R.  Moi, je sais combien j'en ai transporté quand j'ai fait ma déclaration,

  2   et --

  3   Q.  Ne perdons pas notre temps.

  4   R.  Mais on en a relâché d'abord 15, puis vous me dites maintenant qu'il y

  5   en a encore sept.

  6   Q.  Les 15, c'est ceux que vous avez relâchés à la caserne, mais à Ovcara,

  7   on en a relâché sept. Il y a eu des Croates qui l'ont confirmé ici,

  8   personne ne l'a mis en doute. Des documents montrent les constats médico-

  9   légaux le montrent avec participation d'experts serbes, et cetera, et

 10   cetera. Bon. Donc le chiffre de 200 n'est pas contesté. Est-ce que cela se

 11   trouve être indicatif ou pas en soi en votre qualité d'agent du

 12   renseignement ?

 13   R.  Le chiffre est grand pour ce type de chose. Abattre 200 personnes c'est

 14   terrible. Alors pourquoi juste 200 tout rond, oui, c'est indicatif.

 15   Q.  Bien. Saviez-vous que s'agissant d'un échange de prisonniers de guerre

 16   croates installés à Sremska Mitrovica et de prisonniers capturés et tenus -

 17   - et gardés dans des prisons croates avec des civils, des officiers qui

 18   avaient fait partie des réseaux de renseignement Opera et Labrador, ce a eu

 19   lieu déjà début décembre et c'est Aleksandar Vasiljevic en personne qui, en

 20   compagnie de prisonniers croates, et Vesna Bosanac, se serait déplacé par

 21   avion à l'aéroport de Zagreb. Aleksandar Vasiljevic en personne, le saviez-

 22   vous cela ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Vous ne le saviez pas. Bien. J'espère que ceci est ainsi un

 25   renseignement non contesté pour le Procureur parce que le Procureur doit

 26   disposer de ce type de renseignement, d'information. Aleksandar Vasiljevic

 27   a voyagé en personne là-bas.

 28   Monsieur Vukasinovic, il me semble que, dans votre déclaration, vous avez

Page 12373

  1   dit qu'aucun membre de la JNA n'a été exécutant direct du crime à Ovcara.

  2   Malheureusement, je dois vous démentir. Il y en a eu au moins un. Il

  3   s'appelle Spasoje Petkovic, et son surnom est Stuka. Avez-vous entendu

  4   parler de lui ? C'était un soldat qui a fait son service militaire

  5   ordinaire dans la Brigade de la Garde ?

  6   R.  Lorsque j'ai fait ma déclaration, j'ai été convaincu de la chose;

  7   cependant, voyez-vous, on peut imaginer qu'il y a toujours un renégat, un

  8   seul soldat, un militaire du groupe au capitaine Radic qui a pu se sortir

  9   de ce rang, enfin s'extraire des rangs de son unité et participer à la

 10   chose. Enfin son nom ne m'aurait jamais rien dit.

 11   Q.  Bon. Je vais brièvement vous dire quelles sont mes informations

 12   finales, définitives, qui vous feront comprendre à vous et aux Juges de la

 13   Chambre pourquoi toutes les questions que j'ai posées précédemment.

 14   Les Croates ont abattu des civils à Gospic. Il y a eu danger de voir les

 15   forces occidentales ne pas, enfin les puissances occidentales ne pas

 16   reconnaître l'indépendance des Croates. Or, on -- Aleksandar Vasiljevic

 17   s'efforce de procéder à des échanges pour ce qui est de faire libérer des

 18   gens qui le compromettent directement en raison des affaires Opera et

 19   Labrador. Alors les Croates lui imposent une condition : "Exécute 200

 20   prisonniers croates, fusille 200 prisonniers croates pour que nous ayons un

 21   moyen de propagande contre les Serbes." Peut-être ne lui ont-ils pas

 22   expliqué. Il a arrangé la chose avec Vesna Bosanac pour savoir quels sont

 23   les Croates de l'hôpital de Vukovar qui sont les plus facilement

 24   sacrifiables. Souvent des criminels, des pauvres gars, des gens qui d'après

 25   leurs critères avaient le moins de valeur qui soit, et on fusille ces

 26   prisonniers, les agents de l'information occidentaux, les journalistes

 27   informent de l'exécution de ces prisonniers. Il y a l'effet de propagande à

 28   l'encontre du peuple serbe et ça accélère la reconnaissance de

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  1   l'indépendance croate. C'est en personne Vasiljevic qui va à Zagreb pour

  2   récupérer ses collaborateurs des opérations Opera et autres.

  3   Que pensez-vous de mes conclusions en votre qualité d'officier chargé de la

  4   sécurité ?

  5   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, avant que le témoin réponde,

  6   j'aimerais indiquer que c'est une question complexe, quelle est spéculative

  7   et qu'il revient à la Défense d'établir des faits et ensuite de faire

  8   valoir ses thèses dans sa "closing brief." Donc, j'objecte à cette

  9   question. Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la question vous êtes posée. Qu'est-ce que

 11   vous répondez ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une question fort complexe. Là, je suis

 13   d'accord avec M. le Procureur. Mais à l'époque -- à l'époque où, moi,

 14   j'étais là-bas, j'étais à un niveau pas assez élevé, dirais-je, et les

 15   évaluations, les réflexions ultérieurement effectuées, pour ce qui est des

 16   interventions d'Aleksandar Vasiljevic, mais je ne pourrais pas dire ni

 17   "oui" ou "non." Je préfère rester neutre parce que je ne suis pas en mesure

 18   d'établir la corrélation entre tous ces éléments. Je respecte votre

 19   personne et vos activités, mais je ne peux pas vous confirmer cela

 20   littéralement, tel que présenté par vos soins.

 21   M. SESELJ : [interprétation]

 22   Q.  Fort bien. La réponse est satisfaisante parce que j'ai l'impression que

 23   vous êtes un témoin tout à fait correct.

 24   Monsieur Vukasinovic, est-ce que du côté serbe, pendant toute la durée de

 25   la guerre entre la Krajina serbe et la Croatie, je dis bien du côté serbe,

 26   il y aurait eu un terrible -- plus grave de commis que celui d'Ovcara; le

 27   savez-vous ? Y aurait-il un crime de plus grave que celui qui a été commis

 28   à Ovcara, et je répète, par les Serbes ?

Page 12375

  1   R.  Je crois que c'est le seul crime du côté des Serbes qui sort de

  2   l'habituel. Une fosse de 200 personnes, c'est le seul crime que l'on puisse

  3   reprocher à la JNA. Ce n'est pas la JNA, mais elle a, disons, laissé faire

  4   parce qu'il n'y en a pas eu d'autres.

  5   Q.  Il y a eu des crimes individuels, des crimes groupés, mais c'était plus

  6   des individuels, un crime de cette envergure pendant cette période-là, il

  7   n'y en a pas eu.

  8   R.  Je crois que là où il y a eu intervention de la JNA, c'est plutôt

  9   exceptionnel, du côté des secteurs où il y a eu présence de la JNA.

 10   Q.  Je ne dis pas de la Serbie, je dis de la Krajina serbe.

 11   R.  Oui, c'est assez exceptionnel pour la Krajina serbe.

 12   Q.  Est-ce que ce crime a apporté un grand préjudice aux intérêts

 13   politiques serbes ?

 14   R.  D'abord, ça a nui à la Brigade de la Garde, qui est une brigade avec

 15   une tradition de haut niveau, ce sont des officiers de grande renommée, et

 16   ensuite, cela a, bien sûr, nui à l'"establishment" de la République de

 17   Serbie.

 18   Q.  On a un colonel qui est devenu général, Mile Mrksic, à qui on a

 19   reproché une tentative de coup d'Etat militaire lorsqu'il a arrêté

 20   Kadijevic, et il ne sait plus que faire de lui, puis ils ont négocié, et

 21   puis ça n'a rien donné. Est-ce que vous avez ouï-dire de la chose ?

 22    R.  J'en ai entendu parler, mais je crois que c'est un peu -- enfin, je

 23   n'y ai pas participé, mais je crois que s'il avait arrêté Kadijevic, non,

 24   non, ce n'est pas vrai.

 25   Q.  Ecoutez, Mile Mrksic est ici et il m'a raconté les détails. Je n'ai pas

 26   le temps de tout vous raconter, mais peu importe. Ensuite, le colonel

 27   Sljivancanin, médiatiquement, à l'époque de ces opérations de Vukovar, a

 28   été la personne la plus exposée dans les médias, à la télé, dans les

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  1   journaux.

  2   R.  C'est pour ça qu'il a assumé des responsabilités.

  3   Q.  Donc, étant donné qu'il a été exposé médiatiquement, il était

  4   facilement sacrifiable, il n'a pas occupé de grosses fonctions, parce que

  5   chef de la sécurité, ce n'est pas une fonction éminente.

  6   R.  Il n'était pas commandant du tout. C'est ce que j'ai essayé --

  7   Q.  Vous avez un expert militaire qui s'y connaît. Moi, je vous comprends.

  8   Je vous demande à ce que les Juges vous comprenne. Allons de l'avant.

  9   Le commandant Radic était, à l'époque de la guerre, capitaine de

 10   première classe. On sait qu'il est intervenu sur le plan opérationnel avec

 11   Petrova Gora et Leva Supoderica, donc les trois les plus  propices à être

 12   sacrifiés ont été sacrifiés. Pourquoi, de votre avis, aucun autre officier

 13   de la JNA n'est venu répondre de ce crime ? Aleksandar Vasiljevic n'en a

 14   pas répondu. Il était, ce jour-là, à Vukovar. Il était chef de la sécurité

 15   militaire. Il a au moins dû répondre pour avoir passé ce crime sous

 16   silence, n'est-ce pas ?

 17   M. DUTERTRE : -- le transcript, c'est très difficile à suivre.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous allez trop vite et il y a des trous.

 19   Bien, continuez.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais ralentir un peu, mais ayez la bonté, si

 21   je manque de cinq ou six minutes, veuillez me les accorder. Parce que je

 22   vais prochainement finir, mais je vous demande de ne pas perdre cette

 23   nécessité de vue.

 24   Q.  Alors, de votre avis, en votre qualité de colonel de ce service

 25   militaire de la sûreté, vous êtes quelqu'un qui a réussi à l'examen pour

 26   être général, et c'est un -- cet examen pour être général, c'est

 27   l'équivalent d'un doctorat ?

 28   R.  Oui, je suis doyen en formation des sciences militaires, mais je vais

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  1   répondre à la question que vous avez posée.

  2   Il y a une théorie qui se fait jour, à savoir que le service militaire de

  3   la sécurité est responsable de tout, tout comme Sljivancanin et ses

  4   officiers, c'est la thèse qu'on a voulu -- qu'on a cherché à prouver. Mais

  5   je crois qu'il y a un haut niveau de responsabilité pour ce qui est du

  6   général Aleksandar Vasiljevic, il se soutire habilement des responsabilités

  7   qui sont les siennes. Et il faudrait qu'on le fasse le dire et qu'on le

  8   place sur une sellette, comme c'est le cas pour moi, pour répondre à des

  9   questions. Et il est indicatif pourquoi capitaine Radic, capitaine de

 10   première classe, parce qu'on l'a défendu, et lui n'a rien à voir --

 11   Q.  Il n'a rien à voir --

 12   R.  Il a été libéré. J'ai une haute estime pour les Juges de la Chambre qui

 13   ont décidé de la sorte. Le capitaine Radic a été mis là probablement parce

 14   que les forces croates avaient beaucoup de problèmes. Parce que c'était un

 15   officier très bon, il s'est tr`se bien battu. On savait que le capitaine

 16   Radic et M. Milan Lancuzanin, Kameni, étaient les plus à redouter, au

 17   niveau des attaques. Ils leur ont brisé les ailes, et les Croates voulaient

 18   que ces officiers courageux et capables soient éliminés après la guerre --

 19   écartés après la guerre, de l'armée, et qu'ils répondent de tout ceci. Ils

 20   ont mis Sljivancanin, mais, lui, il n'a été exposé que médiatiquement. Je

 21   ne pense pas qu'il ait assumé des responsabilités, et le fait qu'ils aient

 22   été condamnés --

 23   Q.  Non, non, n'allez pas plus loin.

 24   R.  -- et Radic n'est coupable de rien.

 25   Q.  Là, je suis d'accord avec vous. Vous avez dit que Milan Lancuzanin,

 26   Kameni, vous l'avez brièvement vu à Ovcara. Si je vous dis, et mes

 27   renseignements découlent de ce qu'il a dit au procès de Belgrade. Il est

 28   venu à Ovcara pour essayer de sortir des amis à lui qui étaient parmi les

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  1   200 prisonniers, mais il n'a pas réussi. Est-ce que, pour vous, cela semble

  2   être probable ?

  3   R.  Oui, ça c'est probable, ils avaient tous des amis à eux et ils ont

  4   probablement essayé de les sortir de là. Ça, je veux bien le croire.

  5   Q.  N'est-il pas évident qu'il y a procès à Belgrade à l'encontre d'un

  6   groupe de vrais exécutants, parce qu'il y a eu de vrais exécutants, mais il

  7   y a aussi eu des gens qui n'étaient pas des exécutants mais qu'on a ajouté

  8   pour aboutir à l'accomplissement d'un objectif politique; cela ne vous

  9   semble-t-il pas être évident ?

 10   R.  Je ne suis pas juge, je n'ai pas conduit ce procès, mais je pense

 11   personnellement que Milan Lancuzanin n'y a pas participé en personne.

 12   Q.  Bien, merci. Savez-vous pour ses collaborateurs, Kinez, Ceca, Katic ?

 13   Je ne vais pas tous les mentionner.

 14   Q.  Ceca, je connais très bien. J'ai fait sa connaissance parce qu'il a été

 15   blessé et je lui ai donné un moyen de transport pour aller à l'hôpital,

 16   puis il est revenu, il a restitué le véhicule, c'est comme ça que l'on a

 17   fait connaissance. C'était un bon combattant. Par la suite, il a été

 18   inculpé au Tribunal, mais je pense que --

 19   Q.  Mais avez-vous identifié chez lui des affinités au crime ?

 20   R.  non, pas lui.

 21   Q.  Et les autres ?

 22   R.  Les autres, je ne sais pas.

 23   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 24   M. DUTERTRE : On demande l'appréciation du témoin en tant qu'expert

 25   psychiatre, enfin, encore une des multiples questions sur lesquelles on

 26   peut objecter.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : L'appréciation que vous faites, c'est uniquement

 28   basé sur une connaissance que vous aviez de la personne ?

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit d'un officier des services de

  2   Sécurité, Monsieur le Président, avec beaucoup d'expérience.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, dans la mesure du possible, dans le cadre

  4   de cette situation de combat, j'ai rencontré Ceca, comme je vous ai dit, il

  5   était blessé, il est arrivé avec un véhicule au poste de commandement.

  6   C'était -- je ne les laissais pas partir facilement avec un laissez-passer

  7   à l'extérieur de la ville, ils partaient, ils prenaient le véhicule et il y

  8   avait des pillages. Donc, je ne veux pas. Donc, là, j'ai donné le véhicule

  9   parce que j'ai vu qu'il était blessé. Donc, de toute urgence, j'ai organisé

 10   les transports et à son retour de l'hôpital, il est venu me remercier et il

 11   m'a dit que j'étais ferme et que j'aurais pu mettre sa vie en péril. Je lui

 12   ai dit, mais non, pas du tout, lorsque j'ai vu que tu étais blessé, je t'ai

 13   laissé sortir. Mais il y en a beaucoup qui abuse de ce service de véhicules

 14   et ils sortent, ils font des choses qui sont pas autorisées.

 15   Donc, nous avons eu un contact, une conversation, ça m'a permis de le

 16   connaître et par la suite, il m'est arrivé de le voir plus souvent et j'ai

 17   considéré que c'était un homme calme.

 18   Q. Il me reste combien de temps, s'il vous plaît ?

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière. Quatre minutes.

 20   M. SESELJ : [interprétation] D'accord.

 21   Q.  Monsieur Vukasinovic, on vous a auditionné les 16 et 26 novembre 2002,

 22   quel a été le rôle joué par le colonel Srecko Borisavljevic présent pendant

 23   votre audition. Pourquoi était-il présent ?

 24   R.  Le colonel n'était pas présent. C'est un colonel du --

 25   Q.  Non, s'il vous plaît, mentionnez pas l'autre nom. Dites-moi

 26   L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent.

 27   Q.  Srecko Borisavljevic --

 28      R.  Non, Mojsilovic -- le colonel Mojsilovic.

Page 12381

  1   Q.  On reviendra à Mojsilovic, mais vous dites que Borisavljevic n'était

  2   pas présent.

  3   R.  Il était présent mais il attendait son tour après moi.

  4   Q.  Mais il était pas présent pendant votre audition ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Il était pas dans la même pièce ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Pour une raison qui m'échappe, le Procureur sur la page de garde de

  9   votre déclaration --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bloquez-là. Bien, continuez.

 11   M. SESELJ : [interprétation]

 12   Q.  Pour une raison qui m'échappe, sur la page de garde de votre

 13   déclaration, le Procureur dit que Srecko Borisavljevic était présent

 14   pendant l'entretien avec vous. Alors pourquoi est-ce que le Procureur le

 15   dirait-il ici ?

 16   R.  Mais je vous le dit, pendant mon entretien avec Djuro, Vladimir,

 17   l'enquêteur il y avait moi, Mojsilovic, l'interprète croate, Marijan.

 18   Q.  Marijan Franjic et Paolo Pastore-Stocchi, bien connu ?

 19   R.  Oui. Srecko n'était pas là. Borisavljevic.

 20   Q.  Très bien. Je n'ai pas vu, jusqu'à présent, qu'il y ait cette pratique-

 21   là lorsqu'on auditionnait les témoins potentiels, si on leur dit que

 22   c'étaient des suspects potentiels, ils venaient accompagnés d'un avocat;

 23   dans le cas contraire, ils étaient seuls. Uniquement les employés du

 24   Tribunal étaient présents, et c'est la première fois, maintenant, que je

 25   trouve cette information disant que quelqu'un d'autre était présent. Ici,

 26   on dit que c'est le colonel Mijailo Mojsilovic qui était présent. Il est

 27   officier de la sécurité également ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  D'où vient sa présence ? Quelle en est la raison ?

  2   R.  Le colonel Mojsilovic, il était l'organe de Sécurité au centre des

  3   Ecoles supérieures militaires et il faisait partie de notre équipe chargée

  4   de travailler avec le TPIY. Donc il est venu comme mon appui, mon soutien

  5   pour suivre mes réponses et s'il y avait quelque chose qui n'était pas

  6   exact, de corriger; donc, sinon, il se taisait et regardait.

  7   Q.  Mais, Monsieur, vous êtes un officier compétent, formé. Vous avez un

  8   niveau de docteur es sciences mais enfin, pourquoi est-ce que Mojsilovic --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : La présence de ce colonel est à quelle page, là ?

 10   Parce que je suis en train de chercher cela dans --

 11   M. SESELJ : [interprétation] Première page, première page en bas, dernier

 12   paragraphe. Mijailo Mojsilovic. On dit pas "colonel" ici mais je sais que

 13   c'est un colonel puisque je le sais, j'en sais des choses, moi.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Permettez-moi de préciser, aux fins

 15   du procès-verbal, attirer votre attention sur ce qui me paraît être une

 16   erreur à la page 99, ligne 23 du compte rendu d'audience. Ici, on donne le

 17   nom du "colonel Vasiljevic", je ne pense pas que ce soit là ce qu'a dit le

 18   témoin.

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  Mojsilovic, colonel Mijailo Mojsilovic. Il était présent pour

 21   surveiller vos propos?

 22   R.  Le colonel Mojsilovic, d'un point de vue formel, juridique, quel a été

 23   effectivement son rôle. Mais véritablement, qu'est-ce qu'il a fait --

 24   Q.  D'après ce que j'ai appris, il avait pour mission de surveiller de

 25   manière très étroite ce que vous alliez dire et de faire un rapport là-

 26   dessus.

 27   R.  Mais justement, c'est ce que j'ai dit. Il était là et il écoutait ce

 28   que je disais. Il n'y a pas eu besoin qu'il intervienne et c'est comme ça

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  1   que ça s'est terminé.

  2   Q.  Oui, et je vais vous dire une chose de plus. Il est colonel des

  3   services de Sécurité et en tant que tel, il a été l'une des personnes

  4   chargées de missions --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Je regarde la version en anglais, je ne vois pas la

  6   trace de ce que vous dites.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le dernier nom sur la liste des personnes

  8   présentes, Mijailo Mojsilovic. C'est la déclaration de 2002, les 16 et 26

  9   novembre.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Seselj, la première page. Nous avons

 11   le nom du témoin, sa date de naissance, il parle serbe et albanais. Il y a

 12   la date 16 et 26 novembre. Ceux qui interviewent, il y a Vladimir Djuro,

 13   Paolo Pastore-Stocchi et il y a le nom de l'interprète. C'est tout ce qu'on

 14   a, nous.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il vous manque quatre lignes. En serbe, vous

 16   avez ça, les noms de toutes les personnes présentes pendant l'entretien

 17   d'information. Srecko Borisavljevic, c'est ce colonel.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que je ne l'ai pas et --

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Caché, Monsieur le Président. Ils vous cachent

 20   bien des choses. Regardez le texte en serbe.

 21   M. DUTERTRE : Je crois, Monsieur le Président, il y a aucun doute là-

 22   dessus, le texte en serbe mentionne cela.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais, moi, le texte en serbe, je ne l'ai pas.

 24   M. DUTERTRE : Je confirme que la page 1

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que le nom est là, sur la --

 26   M. DUTERTRE : Alors, je vais le prendre. C'est ERN 0115-2261. Je ne

 27   comprends pas ce qui est marqué mais je vois bien le nom, dans la version

 28   qui est communiquée à l'accusé, donc il a l'information donnée par le

Page 12384

  1   parquet. Le nom Mojsilovic.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pouvez nous communiquer le texte en B/C/S ?

  3   M. DUTERTRE : Naturellement, Monsieur le Président. Je profite du fait que

  4   j'ai le micro pour dire que quand certaines personnes sont toujours des

  5   fonctionnaires d'un pays, en tout cas, je parle de la Serbie, il est

  6   parfois proposé aux autorités lorsqu'on demande à les entendre, à ce qu'un

  7   autre fonctionnaire soit présent. C'est une pratique qui existe.

  8   Voilà.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je voudrais regarder le texte en B/C/S.

 10   M. SESELJ : [interprétation]

 11   Q.  Officiellement, il était ici en tant que secrétaire d'une commission du

 12   ministère fédéral de la Défense et des forces armées de Yougoslavie chargé

 13   de la coopération avec le TPIY. C'était ça sa qualité officielle ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Très bien.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que vous pouvez photocopie peut-être mon

 17   exemplaire si le Procureur ne veut pas vous le donner.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais regarder avec le texte du Procureur.

 19   M. DUTERTRE : J'entends M. Seselj qui dit qu'on ne veut pas le donner,

 20   c'est pas une question de ne veut pas. Arrêtez de --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Procureur, je veux que ce soit au

 22   transcript. Effectivement, dans la version B/C/S, il y a les mentions de

 23   ceux qui ont assisté et apparaît ce Srecko Borisavljevic. Mais dans la

 24   version anglaise que la Chambre a et que je peux mettre -- et d'ailleurs,

 25   je vais le mettre sous l'ELMO, pour que tout le monde le sache, ça n'y est

 26   pas, mais celui-ci, mettez ça sur l'ELMO.

 27   Oui, mettez ça -- non, non, sous l'ELMO là-bas, que tout le monde

 28   soit témoin. Bien. Donc vous voyez que dans la version anglaise il n'y a

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  1   pas ces mentions. Voilà.

  2   M. DUTERTRE : [hors micro] -- car le complément de quoi mais --

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que j'en pense, Monsieur le Président, c'est

  4   que c'est une preuve plus que suffisante pour qu'un certain nombre de

  5   sanctions soient prononcées à l'égard du Procureur.

  6   M. DUTERTRE : Monsieur le Président --

  7   [La Chambre de première instance et le conseil de l'Accusation se

  8   concertent]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va comparer, on va mettre le texte en B/C/S

 10   sous l'ELMO, comme ça on verra la comparaison.

 11   Les pièces judiciaires doivent être identiques. Alors c'est peut-être une

 12   erreur.

 13   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, je ne sais pas ce qui s'est passé. Je

 14   n'ai absolument rien moi-même. Ce qui est certain c'est que la version

 15   serbe, comportant le nom du colonel en question, a été communiquée à

 16   l'accusé. Donc les droits de la Défense ont été parfaitement préservés.

 17   Pour le reste, pourquoi ça n'y est pas dans la traduction, je ne fais pas

 18   les traductions moi-même. Je ne suis pas -- le parquet reçoit des

 19   documents. C'est malheureux, je ne peux pas donner une explication, pour

 20   voir chercher éventuellement.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien. Bien, alors rendez au Procureur son

 22   document.

 23   Monsieur le Témoin, ça m'amène à vous poser une question. Quand vous avez

 24   été témoigné devant le bureau du Procureur, est-ce que l'armée de votre

 25   pays vous a dit : "Allez témoigner, mais on va envoyer un observateur" ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'étais au centre de formation, à notre

 27   centre du renseignement, j'y enseignais, et notre chef de la direction de

 28   la sécurité il m'a donné l'autorisation d'aller faire une déclaration. Ace

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  1   Tomic il était à la tête de notre direction, c'est un général et c'était

  2   mon supérieur. Après, j'ai dû me présenter à Mojsilovic, c'est ce qu'on m'a

  3   dit, pour qu'il m'accompagne pour que lui soit l'individu présent pendant

  4   l'entretien, parce que lui aussi fait partie de l'organe de Sécurité, il

  5   travaille dans ce secrétariat, cette Commission chargée de la Coopération

  6   avec le TPIY, et voilà tout ça, ça m'a semblé naturel. Je ne me suis pas

  7   posé la question. Le fait est que c'est ainsi qu'il est venu.

  8   M. SESELJ : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Vukasinovic, Ace Tomic ou Mijailo Mojsilovic ou une tierce

 10   personne, est-ce qu'il vous aurait donné des suggestions, des instructions

 11   sur ce que vous deviez dire, sur de quoi vous deviez parler ? Est-ce qu'on

 12   vous a donné des instructions avant de vous rendre à cet entretien ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Vous n'en avez pas reçu. Monsieur Vukasinovic, n'est-il pas évident que

 15   ce rôle de superviseur de Mijailo Mojsilovic qui était officier chargé de

 16   la sécurité, que son rôle était que tout s'arrête avec ces trois noms de

 17   personnes sacrifiées, Mrksic, Radic, Sljivancanin, et que la question de

 18   Milorad Vojnovic, Aleksandar Vasiljevic, Simeon Tumanov et de bien d'autres

 19   personnes que leurs noms ne soient pas remis en question; est-ce que ça

 20   vous a semblé évident ?

 21   R.  Je pourrais être d'accord avec vous, mais je ne pourrais pas dire que

 22   c'est certain qu'il en a été ainsi. Logiquement, ça pourrait être cela,

 23   parce que je pense que Mojsilovic est un homme qui a des capacités

 24   moyennes.

 25   Q.  Mais, moi, je le connais depuis Sarajevo, encore, Monsieur Vukasinovic.

 26   Il était capitaine de première classe à l'époque. Il a un petit peu circulé

 27   à la faculté de droit. Je suppose qu'il a voulu s'inscrire mais il ne l'a

 28   pas fait, mais il a été chargé d'autres missions aussi là-bas d'espionner

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  1   un petit peu ce que racontaient les professeurs. A l'époque aussi, il a été

  2   collaborateur le plus proche du général Aleksandar Vasiljevic à Sarajevo

  3   encore à l'époque ?

  4   R.  Je suppose que c'est ça.

  5   Q.  Je l'ai rencontré au cabinet d'un professeur universitaire, Milan

  6   Tomic, professeur de la faculté de droit. C'est par hasard que je l'ai

  7   rencontré là-bas, et c'était l'homme d'Aleksandar Vasiljevic à Sarajevo. Ce

  8   ne serait pas un indice, Monsieur Vukasinovic ?

  9   R.  Je pense que vous avez raison là-dessus. Mojsilovic c'est un type

 10   d'homme qui n'a pas de principe, et il pouvait seul ce type d'homme pouvait

 11   être proche d'Aleksandar Vasiljevic qui les dirigeait très bien.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie. C'est avec beaucoup d'honneur

 13   et honnêtement que vous avez témoigné.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- ce que je voulais dire, parce qu'Il

 15   faut être juste avec tout le monde.

 16   Je reviens à la mention de celui qui était présent, dans la traduction

 17   anglaise, ça n'y est pas, mais ça c'est acquis. Mais en revanche, le

 18   Procureur avait communiqué à la Chambre le texte en B/C/S. Mais moi comme

 19   je travaille en anglais, je n'ai pas été regardé le texte en B/C/S faisant

 20   confiance au texte anglais.

 21   M. DUTERTRE : Monsieur le Président, je viens de me rendre compte d'une

 22   chose. Je crois que ça a vidé la question. On vient de me communiquer en

 23   fait une traduction qui comporte cette fois l'ERN, et dans cette traduction

 24   en anglais que je peux remettre à la Chambre, le nom y est. Donc je pense

 25   qu'il y a eu un mauvais envoie c'est un "draft" qui a dû être envoyé à un

 26   moment donné, ou enfin je ne sais pas. Et en tout état de cause, l'accusé

 27   avait l'information donc a rien --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. --

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  1   M. DUTERTRE : -- n'a -- c'est clair.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Sarajevo, que vous

  3   vérifiez ça sur le champ, le numéro ERN de cette version en anglais, où la

  4   donnée figure, est-il identique au numéro sur la version anglaise, où

  5   l'information fait défaut. Ça c'est un problème encore plus grave. Si nous

  6   avons deux documents différents qui comportent le même numéro en anglais,

  7   alors c'est une catastrophe, alors il faut arrêter tous les membres du

  8   bureau du Procureur.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre verra ça autrement plus tard.

 10   Monsieur le Procureur, avez-vous des questions supplémentaires à poser ?

 11   L'INTERPRÈTE : Le micro du Président.

 12   M. DUTERTRE : Ce qu'il y a c'est que -- ce qui a été envoyé c'était une

 13   version sans ERN. C'était une erreur. La version qu'on vient de me

 14   communiquer qui a l'ERN est bien l'identique au B/C/S. Alors bon il y a eu

 15   un problème technique, je crois c'est pas plus que cela.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La version que la Chambre a eue il n'y avait

 17   pas de numéro ERN. Ça c'est vrai.

 18   Bien. Questions supplémentaires.

 19   M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président.

 20   Nouvel interrogatoire par M. Dutertre :

 21   Q.  Page 55, ligne 25 aujourd'hui, vous avez souvent parlé des membres de

 22   Petrova Gora et de Leva Supoderica, en disant qu'il y avait des gens du

 23   cru, vous saviez, n'est-ce pas, Colonel, qu'il y avait des volontaires

 24   envoyés à Vukovar ?

 25   R.  Oui, bien sûr, que je le sais. Mais nous, ça c'était un problème

 26   d'organisation et de mobilisation des officiers qui sont chargés de cela.

 27   Croyez-moi, ça ne m'intéressait pas, les volontaires de quel parti

 28   politique ils sont venus, mais il y avait des volontaires de Belgrade, mais

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  1   très peu, ils n'étaient pas très nombreux, qui ont fait partie de ces

  2   détachements, Petrova Gora, mais nombreux d'entre eux sont partis également

  3   plus tard, donc parmi ceux qui ont fait des combats c'était des gens du

  4   cru.

  5   Q.  Vous saviez qu'il y avait des volontaires dans l'Unité de Leva

  6   Supoderica ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Entendu. Page 52, ligne 20, vous indiquez, c'est un problème qu'on a

  9   évoqué, que Petrova Gora et Leva Supoderiva avaient probablement été

 10   dissociés de la Brigade des Gardes après la chute de Vukovar vers le --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, le témoin a répondu, et en

 12   anglais, il y a un "no verbal response." Il faudrait que --

 13   M. DUTERTRE : Ah, oui, ça m'a échappé.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : -- qu'il complète.

 15   M. DUTERTRE :

 16   Q.  Monsieur Vukasinovic, est-ce que vous pouvez nous préciser si vous

 17   saviez qu'il y avait des volontaires dans l'Unité Leva Supoderica ?

 18   R.  Oui, il y en avait.

 19   Q.  Entendu. Donc je reviens à ma question suivante, page 52, ligne 20,

 20   vous dites que Petrova Gora et Leva Supoderica avaient probablement été

 21   dissociés de la Brigade des Gardes après la chute de Vukovar.

 22   J'aimerais à ce propos qu'on affiche la pièce P41.

 23   Monsieur Vukasinovic, en haut à gauche, est-ce que vous pouvez me dire la

 24   date du document ?

 25   R.  A 0600, 21 novembre 1991.

 26   Q.  Pouvez-vous me dire qui a signé ?

 27   R.  Ça a été signé par le commandant Mile Mrksic.

 28   Q.  Est-ce que vous confirmez que ce document indique que Leva Supoderica

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  1   et Petrova Gora doivent être re-subordonnés à la 80e Brigade.

  2   R.  Oui, c'est ce qui est régi ici, la question de resubordination, donc

  3   sort de la composition de la Brigade de la Garde et rentre dans l'autre

  4   brigade. Donc c'est un document qui est valable, c'est en vigueur. Moi,

  5   j'ai compris que c'est dès le 20 qu'ils étaient sortis parce qu'ils étaient

  6   détachés parce que vu leur comportement, c'est ce que j'ai compris.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, le 21, ils sont re-subordonnés à

  8   juste parce que je vois 12 "PMBR/12K."

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est la 12e Brigade motorisée

 10   d'Infanterie du 12e Corps d'armée.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, donc le 21 novembre, l'Unité Leva Supoderica

 12   est re-subordonnée à cette Unité du 12e Corps, 12e Brigade, c'est ça ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous avez raison.

 14   M. DUTERTRE :

 15   Q.  Pouvez-vous confirmer que le même document indique que la TO de Vukovar

 16   doit être re-subordonnée à 80e MTBR ? Paragraphe 4.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Donc ça signifie que ces deux unités, Petrova Gora et Leva Supoderica

 19   existaient toujours jusqu'à cette date et étaient encore sous le

 20   commandement de la Brigade des Gardes, jusqu'au 21 ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Vous savez, est-ce que vous savez si parmi les volontaires de M.

 23   Seselj, il y avait des gens qui venaient uniquement de Belgrade ou il y

 24   avait aussi des gens qui étaient locaux, autrement dit, est-ce que les

 25   supporters, enfin les partisans de M. Seselj à Vukovar étaient à la fois

 26   des locaux et des gens qui venaient d'ailleurs ?

 27   R.  Je vous ai dit pour ce qui est de cette question, cette question

 28   d'appartenance au parti politique, c'est quelque chose que connaît M.

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  1   Seselj. Moi, pendant la guerre, les combattants ils ne portent pas ça

  2   inscrit au front. Il y a des gens qui vous disent : "Je suis un partisan de

  3   Seselj" par exemple, ou "j'ai été envoyé par--" mais je ne peux pas vous

  4   affirmer d'une manière catégorique combien il y avait, de quelle personne,

  5   de quelle catégorie.

  6   Mais pour les individus qui arrivaient, ils étaient répartis dans les

  7   deux unités de la TO, Leva Supoderica et Petrova Gora, parce qu'ainsi ils

  8   pouvaient agir mieux que si on les affectait à des unités régulières, parce

  9   qu'ils n'auraient pas pu s'orienter là-dedans. Il valait mieux qu'on les

 10   mette dans des unités comparables. Alors combien il y en avait, dans quelle

 11   catégorie, vous savez moi, à l'époque, je me pose cette question, j'étais

 12   l'organe chargé de la Sécurité à l'époque, que je me demande de quel

 13   secteur d'activité politique ils venaient, non, c'était absurde.

 14   Quand on parlait d'insigne vous ne pouvez pas d'après ça dire que

 15   c'est un homme à Seselj, parce qu'ils portaient tous des cocardes, toute

 16   sorte, même les militaires réguliers qui sont cachés un petit peu portaient

 17   des cocardes. C'était l'appartenance nationale, ça a commencé à perdre --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : En vous écoutant je regardais l'ordre, et je me suis

 19   rendu compte de quelque chose. Cet ordre signé par le colonel Mrksic, le 21

 20   novembre, en réalité met en application un ordre du 20 novembre qui venait

 21   du 1er District militaire. Est-ce que vous me confirmez cela ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qui est écrit, mais je ne suis pas au

 23   courant.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc l'ordre du 1er District militaire du 20

 25   novembre, numéro 115-151, je présume quand il y a un ordre militaire il est

 26   d'application immédiate.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'armée à partir de la signature du

 28   commandant, il est d'application.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce qui voudrait dire en termes militaires que le 21

  2   novembre, à 00 heure 01 seconde, l'Unité Leva Supoderica était subordonnée

  3   au 12e Corps, 12e Brigade ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, c'est ça.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est ça, en termes militaires. Comme l'exercice

  6   militaire est un exercice très précis, il n'y a pas de marge d'incertitude.

  7   Monsieur le Procureur.

  8   M. DUTERTRE :

  9   Q.  Est-ce que vous confirmez que le paragraphe numéro 1, dit bien :

 10   [interprétation] "Au cours du 21 novembre 1991, au cours de la journée du

 11   21 novembre 1991, retirer l'Unité Leva Supoderica, retirer cette unité et

 12   l'envoyer à la 12e BMBR" ?

 13   R.  Oui, donc c'est la journée du 21, c'est la journée où il y a des

 14   réaffectations des unités, détachements, séparation, donc pendant toute

 15   cette journée cette activité se poursuit, et elle doit se terminer à 24

 16   heures.

 17   Q.  Donc ce n'est pas 00 seconde, le 21, que ça se passe; on est bien

 18   d'accord ?

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes d'accord que le 21 novembre, ça commence à

 20   00 heure 01 seconde ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est pendant la journée qu'on a donné

 23   l'ordre, Monsieur le Président, mais pas de nuit, peut-être dans la

 24   matinée, pendant la journée.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement le matin. Normalement l'heure

 26   doit être indiquée, c'est une erreur.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre regardera l'ordre 115-151.

 28   M. DUTERTRE :

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  1   Q.  Donc cette resubordination doit arriver pendant le cours de la journée,

  2   je reviens à la question du départ des volontaires.

  3   Est-ce que vous avez assisté aux réunions sur organisation du retour des

  4   volontaires ?

  5   R.  Je n'étais pas présent, je n'ai jamais été présent aux sessions du

  6   commandement. C'était la décision prise du commandant. De temps à autre, je

  7   recevais des missions de la part du commandant en personne et pendant

  8   longtemps, j'ai été commandant des Unités de Police militaire, donc le

  9   commandant n'avait pas vraiment de problèmes avec moi. J'agissais toujours

 10   conformément à l'esprit de la loi et des règlements, des ordres, par

 11   exemple, on demandait : Préparer les unités pour se mettre en mouvement

 12   vers Belgrade." Quand je voyais un tel ordre, je savais très bien ce qu'il

 13   fallait que je fasse. La zone de responsabilité, le poste de commandement,

 14   je devais remettre à qui de droit et donc il n'allait plus m'appeler, me

 15   convoquer à des réunions pour me dire la Défense territoriale ce n'était

 16   pas de ma responsabilité.

 17   Q.  Entendu. Que savez-vous du détail concret des mesures décidées pour le

 18   retour des volontaires ?

 19   R.  Je ne sais pas. Je n'étais pas présent. Je ne faisais pas partie de ces

 20   activités.

 21   Q.  Entendu. Sur la situation à Vukovar et les exactions commises comme

 22   vous l'avez indiqué dans votre témoignage par les Croates - page 58 -

 23   aujourd'hui, deux questions de suivi.

 24   Est-ce qu'il est exact que la Brigade des Gardes et les forces, qui

 25   servent, de manière générale, du Groupe OG "South," avaient une supériorité

 26   militaire par rapport aux Croates à Vukovar ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais qu'est-ce que ceci vient à voir avec les

 28   questions complémentaires ? Il n'y a jamais été question de suprématie ni à

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  1   l'interrogatoire principal ni au contre-interrogatoire. C'est dénué de

  2   sens.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je peux vous répondre, Monsieur.

  4   Du point de vue des pièces d'artillerie, du point de vue du nombre des

  5   effectifs, les activités d'attaques doivent toujours avoir -- être avoir un

  6   ratio de trois pour un, donc celui qui se défend doit être moins nombreux

  7   en effectif que ceux qui attaquent. Donc ceux qui attaquent doivent avoir

  8   trois fois plus de moyens et d'effectifs que ceux qui se défendent. C'est

  9   la règle qui est toujours en vigueur. Alors pour ce qui est des effectifs,

 10   il y avait suprématie mais vous avez une autre situation. Vous attaquez une

 11   agglomération qui est défendue par des forces qui viennent de cette

 12   localité et vous attaquez avec des unités qui ne connaissent pas la

 13   structure de la ville, les conditions, la situation géographique, les

 14   installations, la disposition des choses, donc c'est indicatif. Oui,

 15   numériquement nous étions plus forts mais nous étions plus faibles parce

 16   que nous ne connaissions pas la ville. Nous étions en train d'attaquer,

 17   nous étions à découvert, eux ils sont organisés un système de défense avec

 18   des abris et ils ont eu beaucoup de faciliter à nous porter des pertes,

 19   très, beaucoup de faciliter.

 20   M. DUTERTRE : J'aimerais discuter de la pièce et c'est la question des

 21   exactions croate. La pièce 65 ter 985 et allez --

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, j'ai une autre

 23   observation, et objection. Parce que tous ces documents le Procureur aurait

 24   dû les montrer à l'occasion de son interrogatoire principal pas maintenant

 25   parce que s'il avait montré cela à l'interrogatoire principal, j'en aurais

 26   parlé moi-même au contre-interrogatoire.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le cadre des questions supplémentaires, il peut

 28   faire état d'un document déjà admis à la preuve de la question qu'il va

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  1   poser.

  2   M. DUTERTRE : Je peux vérifier à l'instant s'il est admis ou non --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- alors si ce n'est pas admis vous pouvez le

  4   présenter mais uniquement sur la crédibilité.

  5   M. DUTERTRE : Bien. Alors je vais passer à une autre question, Monsieur le

  6   Président.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors passez à une autre question.

  8   Je vous rappelle qu'on joue les prolongations.

  9   M. DUTERTRE : Je vais vite.

 10   Q.  Il y a eu la question qui a été soulevé de la tentative de cacher les

 11   choses, et le nom de M. Vasiljevic est cité. A part un entretien que vous

 12   avez eu avec un certain M. Branko, quel élément concret pourriez-vous vous

 13   baser pour affirmer l'existence d'une action concertée par M. Vasiljevic et

 14   d'autres de vouloir cacher des choses qui se seraient passées à Vukovar en

 15   relation avec Ovcara ?

 16   R.  J'ai un exemple typique. Quand j'ai fait cette déclaration, puisque

 17   vous me posez la question, je vais vous dire ce qui m'a animé. Quand j'ai

 18   fait ma déclaration auprès de M. Branko Gajic qui était colonel et qui est

 19   général à la retraite maintenant lorsque je suis arrivé à Ovcara et quand

 20   j'ai dit que j'y ai trouvé le lieutenant colonel Panic qui m'a dit : "On ne

 21   va pas mettre ça, on ne va pas élargir le cercle. Est-ce qu'on ne doit pas

 22   faire tache d'huile ?" Moi, j'ai insisté, j'ai dit que : "Lieutenant-

 23   colonel Panic était présent." J'ai insisté pour que ce soit consigné au

 24   compte rendu. Partant de là, j'ai tiré la conclusion qui était la celle de

 25   dire qu'il voulait tout ramener à Sljivancanin, moi-même et quelques autres

 26   instances chargées de la sécurité pour dire qu'on avait fait tout cela

 27   selon notre bon vouloir pour en arriver là où on est arrivé.

 28   Partant de ce moment où j'ai mentionné le lieutenant-colonel Panic, il m'a

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  1   dit : "Non, on ne va pas le mettre lui, on ne va pas faire tache d'huile,

  2   on ne va pas élargir le cercle parce qu'ils vont faire venir l'un et

  3   l'autre." J'ai donc tiré de là la conclusion que l'intention était celle de

  4   s'entretenir avec moi pour que je ramène le cercle à quelques personnalités

  5   seulement et qu'on en finisse.

  6   Q.  [hors micro] -- vous n'avez pas répondu. En dehors de votre entretien,

  7   cette conversation avec M. Branko, le colonel Branko quels éléments

  8   concrets existent sur lequel vous pouvez vous baser pour affirmer

  9   l'existence d'une action concertée de M. Vasiljevic et autres pour cacher

 10   des choses en lien avec Ovcara ? 

 11   R.  Bien. Je pense que les choses sont claires. Le général Vasiljevic ne

 12   savait pas ce qui se passait à Ovcara, mais lui en sa qualité de chef de

 13   l'administration de la sécurité, c'est lui qui donnait les ordres aux

 14   instances subalternes pour, par exemple, enquêter sur ce qui s'était passé

 15   et recueillir toutes les informations, c'est lui qui n'a pas fait démarrer

 16   cette action et je le connais. C'était quelqu'un de très agile lorsqu'il

 17   fallait surmonter des problèmes. Mais s'agissant d'Ovcara en termes

 18   simples, il a même déclaré qu'il a ouï-dire de la bouche d'un capitaine de

 19   cette 80e Brigade que ça s'était produit. Mais attendez, si vous voulez

 20   écoutez, je vous en prie, pour quelqu'un qui est à la tête de la sécurité,

 21   c'est inadmissible.

 22   Je pense donc que cette inactivité, ce manque d'engagement de sa part se

 23   trouve être très bizarre et cela me fait douter de la chose que quelqu'un

 24   avait souhaité que les choses restent tel quel. Alors quand vous vous

 25   penchez sur le fait de voir toutes les instances se taire et, bien sûr le

 26   niveau le plus bas, l'instance la plus basse, la moins importante, va se

 27   taire aussi, ça me semble logique.

 28   Q.  Vous avez indiqué que le fait qu'il y avait eu des exécutions à Ovcara

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  1   c'était su tout de suite et vous avez également indiqué que la Brigade des

  2   Gardes n'est partie que le 24, préparatif le 23 novembre 1991. Pourquoi

  3   est-ce que la hiérarchie et le commandant de la Brigade des Gardes, qui

  4   commandait la région, n'ont pas lui-même diligenté une enquête ?

  5   R.  Je ne peux pas vous répondre. Il faut poser la question au commandant

  6   c'est lui la personne la plus haut placée au niveau des responsabilités. La

  7   question est intéressante mais, moi, je n'ai pas de réponse à vous donner.

  8   Là aussi, il y a une "dissimulation," dissimulation du problème survenu en

  9   raison de la responsabilité de tout un chacun probablement.

 10   M. DUTERTRE : Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vais vous remercier d'être

 12   venu à la demande du bureau du Procureur, d'apporter votre témoignage aux

 13   événements qui se sont déroulés à Vukovar. Je vous remercie au nom de mes

 14   collègues et je vous souhaite un bon retour dans votre pays. Je vais

 15   demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner à la porte de la

 16   salle d'audience. 

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également, Monsieur le

 18   Président, et les autres Juges ainsi que vos collaborateurs. Je remercie

 19   l'Accusation et la Défense.

 20   [Le témoin se retire] 

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors pour la semaine prochaine, il y a trois

 22   témoins programmés, VS-029, VS-016, et M. Sulejman Tihic; c'est bien ça,

 23   Monsieur Mundis ?

 24   M. MUNDIS : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

 25   Permettez-moi de signaler, et j'en aviserai l'accusé, comme la

 26   Chambre, si nous avons une mise à jour. Il se peut que le Témoin VS-29 ne

 27   soit pas disposition pour mardi. Nous examinons la situation de près, il se

 28   pourrait que nous n'ayons pas de réponse avant lundi. Mais dès que je sais

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  1   quelque chose, soyez assurés que je vous le ferai savoir.

  2   Pour ce qui est de Témoin VS-016, il est certain que ce Témoin 034 sera --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- autre, c'est VS-1016. J'avais dit 1016, pas 016.

  4   C'est une erreur au transcript.

  5   M. MUNDIS : [interprétation] Oui. Pour ce qui est de VS-1016, ce témoin

  6   pourra témoigner la semaine prochaine, ce sera vrai aussi pour le président

  7   Tihic.

  8   Mais puisque j'ai la parole, permettez-moi simplement d'indiquer que M.

  9   Dutertre quitte le Tribunal, que c'était la dernière journée qu'il passait

 10   au Tribunal et que je voulais le remercier pour sa participation.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors au nom de mes collègues, je vais également

 12   souhaiter à M. Dutertre un autre avenir professionnel, puisqu'il quitte le

 13   bureau du Procureur, donc c'est certainement pour aller ailleurs. Nous lui

 14   souhaitons donc nos meilleurs vœux dans sa nouvelle activité. A titre

 15   personnel, je regrette que quelqu'un qui parlait français quitte ce

 16   Tribunal. Rares sont les personnes au bureau du Procureur qui parle

 17   français. Pour une fois qu'il y en avait un, il s'en va. Bien. Mais peut-

 18   être sera-t-il remplacé; on ne sait pas.

 19   M. DUTERTRE : Je vous remercie de ces très aimables mots, Monsieur le

 20   Président, ainsi que M. Mundis. J'en suis très touché. Je voulais remercier

 21   à la fois l'ensemble des personnes qui participent à nos audiences, sans

 22   lesquelles nous ne pourrions pas fonctionner. Je salue tout

 23   particulièrement la Chambre, je prends congé de M. Seselj, et je dois

 24   souligner que ça a été à la fois un honneur et un plaisir de participer à

 25   l'équipe du parquet sous la direction de M. Daryl Mundis et de Mme Dahl et

 26   d'intervenir devant votre Chambre, un honneur et un plaisir. Je souhaite

 27   que vos débats continuent du mieux possible.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Dutertre.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux dire quelque chose ?

  2   J'ai deux choses à dire maintenant, Monsieur le Président, et après j'aurai

  3   des points administratifs que j'ai préparés à l'avance.

  4   Alors d'abord, pour ce qui est du départ de M. Dutertre --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Il nous reste dix minutes, donc il faudra

  6   tout boucler en dix minutes.

  7   Alors allez-y.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] -- prendra moins d'une demi-minute.

  9   Pour ce qui est de M. Dutertre et de son départ, je pense que maintenant,

 10   le bureau du Procureur se trouve être affaibli. Parce qu'ils étaient une

 11   dizaine à intervenir dans cette affaire, et il n'y a plus que neuf contre

 12   moi tout seul, et je voudrais qu'ils complètent leurs rangs parce qu'ils ne

 13   peuvent pas s'en sortir avec moi, pas même quand ils sont dix, et encore

 14   moins quand ils sont moins nombreux.

 15   Deuxièmement, je voudrais savoir combien de temps vous avez prévu pour le

 16   Témoin Tihic et pour le Témoin 1016 afin que je sache, moi aussi, me

 17   préparer en conséquence. C'est très important, étant donné que Tihic a été

 18   décalé. Il n'était pas prévu pour la semaine prochaine, et il faut que je

 19   me prépare pendant le week-end. Je n'ai pas autre façon de faire.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- dans l'après-midi. Immédiatement, il

 21   faut qu'on revoie tout cela. Nous vous indiquerons cela. Etant précisé

 22   qu'il y a une incertitude sur VS-029, mais vous en serez avisé dans les

 23   heures qui viennent.

 24   Bien. Alors, je vais demander à Mme la Greffière de passer à huis clos.

 25   Parce que je voulais donner à M. Seselj connaissance d'une décision et

 26   d'une décision à venir.

 27   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 28   Monsieur le Président.

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  1   [Audience à huis clos partiel]

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 10   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mardi 2 décembre

 11   2008, à 8 heures 30.

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