Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 11 décembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 8 heures 32.

  5   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour Madame, Messieurs les Juges.

  9   Bonjour à tous dans le prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-03-67-T, l'Accusation contre Vojislav Seselj.

 11   Je vous remercie.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce jeudi 11 décembre 2008, je salue tous les

 13   représentants de l'Accusation, Mme Dahl, Mme Biersay ainsi que leur

 14   collaboratrice. Je salue M. le témoin, je salue M. Seselj ainsi que toutes

 15   les personnes qui nous assistent.

 16   Les questions de M. Seselj vont donc commencer et je donne la parole à M.

 17   Seselj.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai envisagé quelques

 19   instants à la fin - j'espère qu'on aura le temps - je me propose de

 20   démarrer tout de suite le contre-interrogatoire. Je peux poser ou évoquer

 21   les questions que j'avais en souffrance tout de suite, si vous préférez. Si

 22   vous insistez, je le fais tout de suite.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaut mieux que vous fassiez votre contre-

 24   interrogatoire, puis les questions en souffrance après.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

 26   LE TÉMOIN : JOVAN GLAMOCANIN [Reprise]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   Contre-interrogatoire par M. Seselj :

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  1   Q.  [interprétation] Monsieur Glamocanin, lorsque vous avez décidé d'être

  2   témoin de la Défense, vous avez fait plusieurs déclarations auprès de mes

  3   conseillers juridiques, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Dans l'une de ces déclarations, c'est de façon détaillée que vous avez

  6   décrit la première dépression exercée à votre encontre pour témoigner

  7   faussement contre moi. Cette pression a été exercée par Zoran Djindjic,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Vous avez également dit que vous avez été contacté au téléphone par un

 11   homme s'étant présenté appartenir à son cabinet, un dénommé Markovic, et il

 12   vous aurait dit que Djindjic voulait s'entretenir avec vous ?

 13   R.  Exact.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez ces déclarations jointes à mes

 15   écritures d'il y à trois mois.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame Biersay.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir la

 18   date de la déclaration, cela pourrait peut-être nous aider.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais certainement. Il s'agit de la déclaration

 20   du 11 août 2008. Vous l'avez dans le jeu de déclarations joint à mes

 21   écritures faisant requête visant à la protection des témoins de la Défense.

 22   Ça a été traduit en anglais, du reste.

 23   Q.  Vous y avez d'abord indiqué que vous avez été surpris, ensuite, vous

 24   indiquez que vous aviez accepté l'entretien et que l'entretien a fait

 25   l'objet d'un rendez-vous à Kosutnjak, n'est-ce

 26   pas ?

 27   R.  Oui, dans la forêt de Kosutnjak. Ce n'est pas ce qu'on avait prévu

 28   comme rendez-vous. On avait prévu que je me déplace vers Belgrade devant le

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  1   Parlement fédéral et qu'on aille voir Zoran Djindjic. Je ne savais pas à ce

  2   moment-là où est-ce que l'entretien allait avoir lieu.

  3   Q.  Mais le terrain de Kosutnjak, c'est quoi comme

  4   installation ?

  5   R.  Ce n'est pas des installations. On s'est promené.

  6   Q.  C'était dans la nature ?

  7   R.  Oui. C'est une jolie partie de la ville.

  8   Q.  Vous connaissiez Zoran Djindjic ?

  9   R.  Je ne l'ai jamais rencontré moi, pour ma part, mais c'était une

 10   personnalité publique.

 11   Q.  Vous l'avez vu à l'assemblée.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Alors il vous a salué là-bas comme si vous étiez une vieille

 14   connaissance à lui ?

 15   R.  Exact.

 16   Q.  Afin que je ne pose pas de question directrice et pour que ce soit plus

 17   convaincant, dites-nous ce que Zoran Djindjic vous a dit dès le départ ?

 18   R.  Zoran Djindjic a dit qu'il fallait stabiliser la nouvelle autorité qui

 19   était soutenue par l'Occident, que l'Occident était disposé à investir de

 20   gros sous en Serbie, et que c'était la seule issue possible pour la Serbie.

 21   Mais pour ce qui est de consolider le pouvoir en Serbie il y avait un

 22   obstacle sérieux, c'est le Dr Vojislav Seselj et le Parti radical serbe. Et

 23   il fallait donc contrecarrer Vojislav Seselj et il fallait marginaliser le

 24   Parti radical serbe. Une fois que ceci serait réalisé, le pouvoir en Serbie

 25   serait stable. Et il a dit que, comme tous les autres, que le Dr Vojislav

 26   Seselj était beaucoup plus dangereux que Slobodan Milosevic, et que le

 27   Parti radical serbe était plus dangereux pour ce qui était d'une politique

 28   pro-occidentale que le Parti socialiste de Serbie.

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  1   Q.  Et il avait raison là, tout à fait, n'est-ce pas ?

  2   R.  Il a eu raison, parce que vous, en votre qualité d'homme politique et

  3   de leader, vous êtes plus conséquent en matière de politique. Vous

  4   conduisez votre politique partant d'un programme, de vos visions, partant

  5   de vos convictions personnelles, et partant du fait que vous êtes entré en

  6   politique pour faire quelque chose pour votre peuple, et non pas pour

  7   piller l'Etat comme le font les structures du pouvoir allant de Djindjic

  8   jusqu'à nos jours.

  9   Q.  Et l'Occident, ce qui le dérange c'est la politique prorusse du Parti

 10   radical serbe, n'est-ce pas ?

 11   R.  Absolument.

 12   Q.  Vous l'a-t-il dit ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et il savait que vous étiez en conflit avec moi et avec le Parti

 15   radical serbe pendant plusieurs années ?

 16   R.  Oui, il a voulu mettre ceci à profit, il a voulu se servir de moi pour

 17   vous contrecarrer, vous et le Parti radical serbe. Alors probablement

 18   voulait-il que je vous raconte des histoires qu'il me suggérerait de

 19   raconter, et qu'il me donnerait des instructions, et que par la suite je

 20   vivrais bien.

 21   Q.  Est-ce qu'on a mentionné des crimes de guerre commis par moi ou les

 22   volontaires du Parti radical serbe ?

 23   R.  Non, pas concrètement. Il n'a pas été question d'événements de guerre.

 24   Il a été question de la politique du Dr Vojislav Seselj, et de son

 25   idéologie; et il a dit que c'était en fait une idéologie de guerre, et que

 26   cette idéologie et cette politique gênaient grandement l'Occident, et que

 27   cette politique et idéologie devaient être contrecarrées.

 28   Q.  Cela signifie-t-il qu'il avait eu des arguments fermes pour me

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  1   disqualifier moi-même et le VSRS ?

  2   R.  D'après moi, il n'avait pas eu d'arguments très solides. Mais il avait

  3   besoin d'hommes qui serviraient une politique imaginaire en présentant des

  4   éléments de preuve qui sont inexistants, qui sont faux. C'est comme ça que

  5   j'ai compris.

  6   Q.  Donc il fallait me disqualifier sur le plan moral avec des choses

  7   inventées de toutes pièces, des données fausses ?

  8   R.  Certainement, et peut-être même plus que cela.

  9   Q.  Mais ce n'est pas la première fois que le régime en Serbie a essayé de

 10   me discréditer de façon analogue ?

 11   R.  C'est ce qu'a fait le régime de Slobodan Milosevic déjà.

 12   Q.  A plusieurs reprises, non ?

 13   R.  Oui, à plusieurs reprises.

 14   Q.  Et que lui avez-vous dit ?

 15   R.  Je lui ai dit que je ne pouvais pas aller contre mes convictions, que

 16   j'avais eu des conflits avec Voljislav Seselj et la direction du SRS, mais

 17   que je ne pouvais pas aller contre mes convictions, que je ne pouvais pas

 18   prendre part à une telle campagne ou à de tels agissements, que ce n'était

 19   pas acceptable pour moi, et je ne voulais pas -- enfin, je n'étais pas

 20   entré en politique pour être homme politique à tout prix. Je suis entré en

 21   politique partant de mes convictions personnelles et partant d'une

 22   nécessité psychique et morale que je ressens et qui est celle d'aider mon

 23   peuple.

 24   Q.  Et comment a réagi Djindjic ?

 25   R.  Il a réagi de façon assez mouvementée. Quel patriotisme ? Quelles

 26   convictions ? Il faut travailler pour l'Etat, en faveur de l'Etat. Laisse

 27   tomber tout cela, vois comment tu vas vivre, comment tu vas survivre. Je

 28   sais que tu as une retraite fort modeste, tu en mérites plus et tu pourrais

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  1   en avoir plus. Et il a demandé à ce que je le contacte au plus tard dans

  2   une semaine pour que nous convenions d'une coopération.

  3   Q.  L'avez-vous contacté au bout d'une dizaine de jours ?

  4   R.  Non. Bien qu'il soit décédé, je crois que c'était un voyou, un simple

  5   voyou, un criminel. Je le considère comme étant une personnalité sans

  6   crédibilité aucune, ne méritant pas d'être à la tête d'un gouvernement de

  7   quelque Etat que ce soit.

  8   Q.  Qu'est-il arrivé lorsque vous avez refusé de le contacter ?

  9   R.  Après cela le 7 mai, on m'a appréhendé, on m'a ramené dans le siège de

 10   la police spéciale. Il y a des gens qui ont dit qu'ils appartenaient à la

 11   Sûreté de l'Etat, et ils m'ont interrogé sans arrêt pendant 20 heures.

 12   Q.  Sur quoi ont-ils insisté ?

 13   Q.  Ils ont insisté pour prouver que j'avais reçu des

 14   pots-de-vin. Ils avaient montré une cassette ou un CD où j'aurais donné à

 15   des collaborateurs à moi, dont des députés, des documents destinés à des

 16   activités pré-électorales ou je leur donnais de l'argent. Nous en notre

 17   qualité de parti nous avions de l'argent, et c'était l'époque précédant les

 18   élections. Les élections, elles, ont eu lieu en septembre, et ça, ça s'est

 19   produit -- enfin, cette rencontre que j'ai eue avec ces collaborateurs-là

 20   s'est produite fin juillet. Nous voulions nous préparer en temps utile pour

 21   les élections, en vue des élections.

 22   Q.  Mais dites-nous, vous ont-ils fait chanter pour le cas où vous

 23   n'accepteriez pas de collaborer contre moi, vous seriez poursuivi semble-t-

 24   il dans la justice ?

 25   R.  Oui. Pas tous, parmi ceux qui m'ont interrogé, mais quelques-uns

 26   d'entre eux. Je pense qu'il y en avait un notamment qui devait être leur

 27   responsable.

 28   Q.  Mais l'un de ces agents, a-t-il dit quelque chose à votre épouse, cette

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  1   fois-là, lorsqu'ils ont fouillé votre appartement et lorsqu'ils vous ont

  2   arrêté ?

  3   R.  Oui. Cet agent, lorsqu'ils attendaient devant pour m'arrêter le premier

  4   jour, je crois, c'était le 7, c'était le jour après maslava, maslava de ma

  5   famille, du saint protecteur de ma famille. J'étais absent, ils sont

  6   rentrés dans l'appartement à trois. Après on a appris que c'était le chef

  7   du cabinet du chef de la Sûreté de l'Etat de Serbie. Il a dit qu'ils

  8   étaient là sur ordre direct de Zoran Djindjic, et qu'ils étaient venus pour

  9   m'appréhender. Ils ont dit aussi -- enfin, les gens de la Sûreté de l'état

 10   ont dit la même chose. Ceux qui à Pancevo, au bout de deux jours, sont

 11   venus fouiller l'appartement de ma belle-mère à Pancevo. Eux aussi ont dit

 12   que cela a été directement demandé par Zoran Djindjic, et cela leur aurait

 13   été dit par le chef de leur secteur de la Sûreté de l'état pour Pancevo.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Glamocanin, pourriez-vous,

 15   s'il vous plaît, pour le compte rendu, nous dire à quelle date vous avez

 16   reçu le premier appel de M. Djindjic ? Ensuite pouvez-vous nous dire quand

 17   vous l'avez rencontré ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ça s'est passé mi-avril. Je

 19   ne me souviens pas de la date exacte, mais je sais que ça s'est produit

 20   vers la moitié de la journée. Le dénommé Markovic m'a dit que je serai

 21   contacté ce jour et qu'on me dirait quand est-ce que je serais reçu par M.

 22   Djindjic. Il n'a pas appelé le même jour, mais le lendemain à 11 heures. Et

 23   il a pris rendez-vous pour l'après-midi vers 16 heures.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Quelle année ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] 2001, dès qu'il est arrivé au pouvoir --

 26   enfin, dès que ce nouveau pouvoir a fait échouer Slobodan Milosevic et a

 27   fait péricliter son pouvoir.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation] 

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Mais le pouvoir de Djindjic ou son gouvernement a été créé en janvier

  3   2001, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et les élections ont eu lieu fin décembre 2000 ?

  6   R.  Exact.

  7   Q.  Et c'est là que Zoran Djindjic est devenu premier

  8   ministre ?

  9   R.  Exact.

 10   Q.  Et c'est là qu'il y a tout de suite eu conflit violent entre le parti

 11   au pouvoir et la coalition au pouvoir et

 12   l'opposition ?

 13   R.  Oui. Ils ont dénigré -- ou plutôt ils ont abusé du Parti radical serbe

 14   qui avait suivi les résultats des élections et qui a informé conséquemment

 15   l'opinion publique des résultats.

 16   Q.  Mais vous souvenez-vous du fait qu'à ce moment-là au parlement ça été

 17   plutôt mouvementé. On a essayé de nous empêcher de parler, de présenter nos

 18   opinions depuis la tribune. On nous a sortis, on a vidé, la police nous a

 19   portés pour nous vider, pour nous sortir du parlement ?

 20   R.  C'est exact, je m'en souviens.

 21   Q.  Et tout cela avait été une campagne pour faire taire le Parti radical

 22   serbe ?

 23   R.  J'ai compris qu'ils avaient eu le pouvoir, mais ils ont compris qu'il y

 24   avait beaucoup de problème pour ceux qui essaient de mettre un pouvoir en

 25   place et pour conduire avec succès les affaires de l'état. Donc ils ont

 26   voulu faire taire le seul parti qui était disposé à se battre jusqu'au bout

 27   pour la vérité.

 28   Q.  Vous souvenez-vous du fait que les responsables du régime à Djindjic

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  1   m'avaient accusé publiquement d'avoir eu des affaires criminelles, que

  2   j'avais abusé de mes fonctions de vice-premier ministre, et cetera ?

  3   R.  Je m'en souviens.

  4   Q.  Ont-ils trouvé une seule preuve pour leurs accusations si graves ?

  5   R.  Pour autant que je m'en souvienne, ils n'ont pas trouvé, ils ne

  6   pouvaient pas trouver.

  7   Q.  Y a-t-il eu une plainte au pénal quelle qu'elle soit à mon encontre,

  8   parce que j'aurais en ma qualité de vice-premier ministre, signé une

  9   décision du gouvernement pour qu'une partie de l'argent du budget destiné à

 10   aider aux gens qui ont été victimes d'un tremblement de terre, parce qu'il

 11   fallait aider les gens qui ont été victimes d'inondations, de grandes

 12   inondations en Serbie centrale ?

 13   R.  Je m'en souviens.

 14   Q.  Et après ils ont laissé tomber cette plainte au pénal,

 15   non ?

 16   R.  Je ne sais pas trop, mais je sais que ça n'a rien donné du tout, cette

 17   plainte. Il n'y a pas eu de suite.

 18   Q.  Mais il y a eu bien d'autres dépôts de plainte au pénal pour délit

 19   verbal ?

 20   R.  Ça, oui, il y en a eu.

 21   Q.  Parce que je m'étais attaqué au ministre, au premier ministre. Je les

 22   avais accusés de bon nombre d'affaires. Vous en souvenez-vous ?

 23   R.  Je m'en souviens fort bien, car dès le début même de la création, la

 24   mise en place de ce nouveau pouvoir en Serbie, j'ai indiqué qu'il

 25   s'agissait de personnes ou de personnalités ayant eu ou s'étant procuré des

 26   richesses de façon douteuse. Et il n'y a pas longtemps un hebdomadaire en

 27   Serbie a parlé de la déception du chef de la CIA américaine pour ce qui est

 28   des titulaires du nouveau pouvoir en Serbie. En fait, cet homme a critiqué

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  1   ses collaborateurs qui ont fait venir en Serbie des criminels et des

  2   incapables. Et cela a compromis la politique mise en place par l'occident.

  3   Q.  Vous souvenez-vous du fait que le Congrès américain a publié de façon

  4   tout à fait officielle, que pour le coup d'Etat, pour faire tomber

  5   Milosevic en Serbie, les Américains avaient investi 150 millions de dollars

  6   ?

  7   R.  Je m'en souviens.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, vous parlez trop vite, les interprètes ont

  9   du mal à prendre note de ce que vous dites. Alors ralentissez.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens du fait qu'il en ait été

 11   question, Monsieur Seselj, j'ai oublié le chiffre qui a été évoqué. Mais

 12   s'agissant de chiffres, je vais parler de votre position de président du

 13   Parti radical serbe. Et c'est là une chose que je sais pour sûr; les

 14   Américains, en passant par leurs services de Renseignements, ont donné 100

 15   000 dollars à Tomislav Nikolic et à Vucic, et les grands patrons en Serbie

 16   ont donné encore 300 millions d'euros à cette fin.

 17   M. SESELJ : [interprétation]

 18   Q.  Je dois vous dire sincèrement que ce chiffre me semble être

 19   fantastique.

 20   R.  Non, il n'est pas fantastique.

 21   Q.  Je ne suis pas très porté à le croire.

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : -- il serait -- cela se serait passé quand, ces

 23   choses que vous dites à propos des Américains ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui concerne Tomislav Nikolic, ça s'est

 25   produit cette année-ci --

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : -- concerne pas.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Fort bien. Je vais alors répondre de façon

 28   expresse aux questions posées par M. Seselj.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Ne savez-vous pas que les Américains, à partir de 1990, ont financé

  3   l'opposition pro-occidentale en Serbie ?

  4   R.  Je le sais, parce que c'est surtout Draskovic qui a pris part à tout

  5   cela.

  6   Q.  Et le Parti démocratique aussi ?

  7   R.  Oui, le Parti démocratique, mais juste une aile, une fraction

  8   constituée par Kosta Cavoski, Marko Jankovic, et Vojislav Kostunica et

  9   autres n'y ont pas participé.

 10   Q.  Ils ont aussitôt quitté le Parti démocratique, n'est-ce

 11   pas ?

 12   R.  Oui, tout comme le Parti socialiste a été quitté par bon nombre de

 13   socialistes qui ont été fondateurs de ce parti, des hommes qui étaient

 14   intègres, qui avaient des convictions, et qui étaient favorables à un Parti

 15   socialiste moderne, et à profil européen. Ils ont quitté eux aussi le Parti

 16   socialiste, et ce parti a été pris en charge par des criminels pour

 17   l'essentiel.

 18   Q.  On arrive à mai 2003, et vous êtes convoqué au bureau de Belgrade du

 19   Tribunal de La Haye ?

 20   R.  Je pense que c'était 2004. Si vous dites que c'était en "2003" --

 21   Q.  Mais votre déclaration évoque l'année 2003.

 22   R.  Je n'en sais trop rien, je pense que c'était en 2004, mais cela ne

 23   change rien à la substance. D'abord j'ai été contacté par La Haye, de la

 24   part d'un Philip Petrovic, c'est lui qui m'a mis en corrélation avec une

 25   personne du bureau du Procureur, dont le nom m'échappe. Avec la traduction

 26   de M. Petrovic, il m'a dit que je devais entrer en contact ou en

 27   coopération avec la mission du bureau du Procureur à Belgrade et qu'il

 28   s'agissait pour moi de faire une déclaration. Et quand j'ai demandé dans

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  1   quelle qualité étais-je censé faire une déclaration, en tant qu'accusé ou

  2   témoin, ils n'ont pas dit, ils m'ont dit : "Peu importe, vous êtes obligé

  3   de coopérer." Et ça s'est produit le 4 mai, juste avant Masava [phon].

  4   Et une dizaine de jours plus tard, ou je ne sais trop combien de journées

  5   au juste, j'ai été contacté par le Tribunal de La Haye, le dénommé Paolo

  6   Stocchi, en passant par le biais d'un interprète, qui m'a fait savoir que

  7   je devais venir aux bureaux du Tribunal de La Haye à Dedinje. J'y suis allé

  8   le jour convenu, et j'y ai passé quatre jours.

  9   Q.  Ici on dit que deux hommes ont participé, Philippe Oberknezev et Paolo

 10   Pastore-Stocchi, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je ne sais pas comment s'appelait cet autre. Il s'était présenté comme

 12   étant un Français d'origine russe.

 13   Q.  Mais Philippe Oberknezev parlait-il le serbe ?

 14   R.  Non. Du moins il ne le montrait pas.

 15   Q.  Et il ne montrait pas non plus ses origines serbes ? Il affirmait avoir

 16   été d'origine russe ?

 17   R.  Il a dit qu'il était Français d'origine russe.

 18   Q.  Avez-vous entendu parler de Milos Oberknezevic ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Vous êtes une personne instruite. Lorsque Pavelic, avec le reste des

 21   Serbes orthodoxes dans les frontières de l'Etat indépendant croate, avait

 22   souhaité créer une Eglise orthodoxe croate, il a pris l'évêque démoguène

 23   [phon] russe pour être patriarche et Milos Oberknezevic était l'homme

 24   numéro deux. Il était protoérarche [phon]. Vous en souvenez-vous ?

 25     R.  Je me souviens de ce type d'activité déployé par Ante Pavelic et les

 26   Oustachi.

 27   Q.  Bon. Je n'ai aucune preuve pour dire que le Philippe Oberknezev est un

 28   descendant de Milos Oberknezevic, mais comme c'est un nom de famille plutôt

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  1   rarissime, ne pensez-vous pas que c'est un renseignement symptomatique ?

  2   R.  Je veux bien.

  3   Q.  Ce renseignement symptomatique, rangeons-le un peu de côté.

  4   Alors, vous dites, ça a duré quatre heures, combien d'heures par jour ?

  5   R.  De 9 heures à 5 heures, jusqu'à 6 heures du soir même.

  6   Q.  Donc huit à neuf heures par jour ?

  7   R.  Oui. Le quatrième jour, ça a été un peu plus court, mais les autres

  8   journées, c'était un horaire de travail plein et entier, même plus.

  9   Q.  Au total, ça faisait plus de 30 heures, n'est-ce pas ?

 10   R.  Exact.

 11   Q.  Et après ces entretiens épuisants, vous n'attendiez qu'une chose, que

 12   ça prenne fin ?

 13   R.  Bien sûr, parce que Paolo Stocchi m'avait laissé entendre que je

 14   continuerais à être interrogé.

 15   Q.  C'est là que vous avez signé ce qu'ils vous ont dit de signer en

 16   anglais ?

 17   R.  Exact.

 18   Q.  Et vous nous avez dit hier qu'ils ne vous ont pas du tout lu cela en

 19   serbe ?

 20   R.  Ils n'ont pas lu, et je n'ai pas demandé. Je ne voulais qu'une chose,

 21   c'est que ça prenne fin au plus tôt.

 22  (expurgé)

 23   affirme vous avoir relu cela en langue serbe.

 24   R.  Je ne me souviens pas si elle s'appelait Dana, en fait.

 25   Q.  Cela m'importe peu. Mais ce qui importe, c'est qu'elle n'ait pas lu

 26   cela pour vous, son nom importe peu.

 27   Dites-nous, dans ces entretiens, Stocchi et Oberknezev avaient insisté

 28   notamment sur ma disqualification morale, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui, c'est exact. Je les ai convaincus très rapidement du fait que

  2   j'ignorais tout crime de guerre, que je n'ai pas été au champ de bataille,

  3   que je n'ai pas participé à la guerre, et que je ne savais rien au sujet de

  4   crimes de guerre --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay.

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons que le

  7   nom de l'interprète soit expurgé. Car je crois que c'est une information

  8   sensible à Belgrade, c'est ce qu'on vient de me dire en tout cas.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais --

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça n'a rien de sensible ou de délicat à

 11   Belgrade, il n'est guère nécessaire d'expurger. Aucun employé du Tribunal

 12   de La Haye n'a eu de problèmes personnels à Belgrade.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : -- collègues.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors on va, après délibération des Juges,

 16   expurger le nom qui ne sert à rien dans le problème. Et il est donc décidé

 17   d'enlever à la ligne 24, page 14 --

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Voyez-vous le problème, Madame, Messieurs les

 19   Juges ? Vous expurgez un nom, et au compte rendu on expurge. Là n'est pas

 20   le problème. Mais l'enregistrement vidéo, le greffier enlève toute une

 21   partie. Il n'enlève pas que le nom, le greffier enlève tout un segment, et

 22   l'opinion publique est privée d'une bonne partie du procès. C'est la raison

 23   pour laquelle je m'oppose tant à ces expurgations.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour l'expurgation, c'est une ordonnance que je

 25   signe et le nom est biffé. Il n'y a que ça qui sort. Tout le reste, reste.

 26   Donc vous me dites qu'on enlève plus, je vais le vérifier, mais normalement

 27   il y aura le nom qui sort et tout le reste reste.

 28   Bien. Continuez.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Ce que je vois ici c'est que pour l'essentiel il s'agissait de me

  3   compromettre sur deux bases; premièrement, en passant par des accusations

  4   portant sur des grandes sommes que je me serais procurées par des moyens

  5   illicites, et l'accusation que j'étais lié à de nombreux meurtres ?

  6   R.  C'est vrai.

  7   Q.  Vous avez mentionné comment en 1992 et 1993, nous avions un certain

  8   nombre de sponsors, mais je pense aussi que vous seriez d'accord avec moi

  9   pour dire que c'étaient des sommes pas très importantes ?

 10   R.  Oui, la chose la plus importante, c'était cette citerne remplie de

 11   carburant.

 12   Q.  Mais vous vous souvenez peut-être qu'en 1992, 1993 et les années qui

 13   ont suivi, la Serbie et la République fédérale de Yougoslavie étaient

 14   placées sous les sanctions ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens.

 16   Q.  Vous vous souviendrez qu'il n'y avait pas de carburant aux stations

 17   d'essence ?

 18   R.  Je m'en souviens.

 19   Q.  Et il a fallu qu'on se débrouille pour chaque bidon d'essence pour nous

 20   déplacer en Serbie, pour mener à bien notre campagne électorale ?

 21   R.  Je m'en souviens.

 22   Q.  Vous avez mentionné cette entreprise dirigée par Petar Vujasinovic ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Ce qui m'a étonné ici, c'est que vous avez dit qu'il était dans

 25   l'export-import ?

 26   R.  Il essayait.

 27   Q.  Mais cette entreprise, elle n'importait et n'exportait

 28   rien ?

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  1   R.  Non.

  2   Q.  Mais il s'adressait à des commerçants plus importants qui géraient des

  3   quantités plus importantes de carburant pour obtenir quelques litres

  4   d'essence ?

  5   R.  Oui, je suis d'accord.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Monsieur Seselj, vous allez tellement vite

  7   que le sténotypiste ne peut pas suivre. Et donc du coup, il arrête tout.

  8   Bien. Continuez.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais en une heure faire un maximum parce

 10   que je n'ai pas beaucoup de temps, et c'est quasiment de manière

 11   inconsciente que j'accélère. Je n'en suis pas conscient.

 12   M. SESELJ : [interprétation]

 13   Q.  Vous avez dit hier que Stocchi a insisté en disant que je disposais de

 14   biens dont la valeur se montait à 50 millions de dollars américains ?

 15   R.  Il a souligné cela, pour moi ça semblait fantastique.

 16   Q.  Monsieur Glamocanin, où est-ce que pourraient se trouver ces biens

 17   d'une telle valeur ? Si ce sont des biens immeubles, on ne peut pas les

 18   cacher, n'est-ce pas ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Parce que ce sont des valeurs énormes en argent et en valeurs

 21   immobilières ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Sur des comptes bancaires, est-ce qu'on pourrait dissimuler cela ?

 24   R.  Non, comme accusé à La Haye --

 25   Q.  Mais toutes les transactions bancaires on peut facilement les suivre,

 26   les connaître ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et si cela est une somme qui se présente en espèces, vous savez

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  1   qu'aujourd'hui les billets de banque les plus importants sont ceux d'une

  2   valeur nominale de 100 dollars ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Il n'y a pas de billets de banque plus importants que

  5   cela ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Pendant 50, 60 années, il y a eu des 5 000 dollars, 10 000 dollars en

  8   billets de banque ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Mais il n'y en a plus. Donc ce serait 500 000 billets de banque de 100

 11   dollars que je posséderais ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et si on répartissait ça par 100 billets de banque, dans des liasses,

 14   ce serait 5 000 liasses ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et pour que ces 5 000 liasses puissent être placées dans des mallettes

 17   habituelles, si 100 rentreraient dans une mallette, il faudrait 50

 18   mallettes ?

 19   R.  Vous avez fait un bon calcul.

 20   Q.  Donc il faudrait une petite camionnette pour transporter cela, de trois

 21   tonnes et demie au moins. Donc il s'agit de quelque chose qui semble tout à

 22   fait invraisemblable. Et il n'empêche qu'ils ont insisté pour que cela soit

 23   consigné dans votre déclaration. Pourquoi ?

 24   R.  Parce que par tous les moyens ils voulaient m'impliquer dans leurs

 25   agissements contre vous, ils voulaient vous représenter comme étant un

 26   homme qui est porté à la criminalité, qui est un homme violent, qui ne peut

 27   pas faire de la politique.

 28   Q.  Puis vous voyez qu'il est écrit ici aussi que mon épouse, Jadranka

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  1   Seselj, possède une société d'import-export. Est-ce que vous savez, au

  2   moment où elle m'a épousé, Jadranka, elle a été licenciée immédiatement

  3   dans l'entreprise où elle travaillait ?

  4   R.  Je ne sais pas, Monsieur Seselj, je ne sais pas quelles sont les

  5   activités professionnelles de votre épouse.

  6   Q.  Mais si elle avait une entreprise, je suppose que quelqu'un aurait pu

  7   se procurer des documents là-dessus ?

  8   R.  Mais ils auraient brandi cela à tous les partis d'opposition, ainsi que

  9   le Parti socialiste pendant qu'il était au pouvoir. Ils auraient brandi

 10   cela.

 11   Q.  A moins que c'est en secret que mon épouse est active dans les

 12   affaires, et Paola Stocchi aurait appris cela ?

 13   R.  Je pense que votre épouse est une femme d'honneur, elle n'aurait jamais

 14   fait quelque chose à votre insu, contrairement à un accord avec vous.

 15   Q.  Mais le Procureur de La Haye voudrait que je me mette à douter de mon

 16   épouse et que je m'inquiète du profit qu'elle tire de ses activités ?

 17   R.  Mais le Procureur de La Haye cherche tous les moyens de ternir votre

 18   image et c'est contraire aux intérêts du peuple serbe.

 19   Q.  Mais vous voyez maintenant ces accusations comme quoi j'aurais tué,

 20   premièrement, on m'a accusé de la part du Parti démocratique, comme quoi

 21   j'aurais tué Vojin Vuletic, puis Slobodan Jovic, comme quoi j'aurais tué

 22   son épouse Paska, puis je ne me souviens plus exactement qui on m'a accusé

 23   d'avoir tué, le voïvode chetnik Oliver Dennis, que je respectais beaucoup,

 24   et cetera ?

 25   R.  Je sais que Vojin Vuletic était un homme malade et qu'il est décédé

 26   suite aux causes de sa maladie. C'est quelqu'un que je fréquentais. Pour ce

 27   qui est de Paska Jovic maintenant, cette histoire a été lancée et attisée

 28   par son époux, Slobodan Jovic. Slobodan Jovic, c'est quelqu'un qui a exercé

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  1   une telle pression sur nous tous qui le fréquentaient pour que nous

  2   finissions par croire que son affirmation est vraie, à savoir que M. Seselj

  3   a été impliqué dans cela.

  4   A l'époque, j'étais à la tête du Club des députés qui collaboraient avec le

  5   Parti socialiste, c'est-à-dire avec le gouvernement de la République

  6   fédérale de Yougoslavie. A l'époque, il y avait le ministre de l'intérieur

  7   de la RFY, Vukasin Jokanovic, et j'ai demandé qu'il s'adresse à Slobodan

  8   Milosevic, ce que la police en savait de cette affaire. Et Vukanovic, lors

  9   de l'entretien que nous avons eu dans son cabinet, je pense que c'était en

 10   1995, il a été tout à fait explicite en disant que Vojislav Seselj et le

 11   Parti radical serbe n'avaient rien à voir avec cela. Mais cela n'a pas été

 12   suffisant pour Slobodan Jovic, il a fallu qu'on aille ensemble voir le

 13   ministre de l'Intérieur de l'époque, Zoran Sokolovic, ministre serbe. Il

 14   nous a donné les noms des trois individus qui, à ce moment-là, faisaient

 15   l'objet d'enquête eu égard à l'assassinat de Paska Jovic. Bien entendu, par

 16   la suite l'opinion a pu apprendre qu'il s'agissait d'un homme qui, par

 17   ailleurs, était un criminel et un pervers.

 18   Q.  S'il vous plaît, mais lorsqu'on lance de tels mensonges dans l'opinion,

 19   mais est-ce qu'il y a eu des gens qui ont prêté foi à cela ou qui ont

 20   estimé que c'était simplement la presse à scandale qui lançait cela ?

 21   R.  Les gens sérieux n'ont pas cru.

 22   Q.  En fait, ça n'a fait qu'améliorer la popularité du Parti radical serbe

 23   ?

 24   R.  Oui, tout à fait, puisque la conclusion logique suite à des

 25   affirmations aussi nébuleuses, c'était que c'était une campagne sale lancée

 26   contre Vojislav Seselj et le Parti radical serbe.

 27   Q.  Est-ce que vous vous souvenez --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, juste une question de suivi très

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  1   courte.

  2   M. Seselj vous pose des questions sur toute une série de crimes. Je suppose

  3   que dans votre pays il y a eu des enquêtes sur ces crimes. Je sais, et nous

  4   le savons, qu'il y a des juges d'instruction de qualité qui travaillent

  5   dans votre pays. Et ils ont dû faire leurs investigations sur ces crimes.

  6   A votre connaissance, les auteurs des crimes ont-ils été identifiés, ont-

  7   ils été jugés, ont-ils été condamnés ? Et à votre connaissance, dans toutes

  8   ces affaires, est-ce qu'à un moment donné la justice serbe a mis en cause

  9   M. Seselj ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Une enquête a été diligentée. J'ai  pu m'en

 11   assurer, des jugements ont été prononcés contres les coupables, les auteurs

 12   de ces crimes. Jamais le nom du Pr Vojislav Seselj n'a été mentionné dans

 13   le cadre de l'enquête ou pendant le procès. Il n'a pas fait l'objet --

 14   enfin, il n'y avait pas de raison, puisque les organes de poursuite et la

 15   police ont rapidement pu identifier les suspects, et pendant l'enquête et

 16   pendant le procès et le jugement, le jugement définitif, on a su qui est le

 17   coupable, et on a prononcé sanction contre lui dans toutes les affaires

 18   mentionnées par M. Seselj.

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  Vous souvenez-vous comment nous, les radicaux serbes, pendant la

 21   deuxième moitié de l'année 1993, comment nous sommes entrés en conflit avec

 22   Slobodan Milosevic et le Parti socialiste, et comment ce conflit virulent

 23   s'est poursuivi pratiquement jusqu'à la fin de l'année 1997 ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens bien. J'y ai pris part. Slobodan Milosevic, en

 25   passant par les médias, la télévision et d'autres, il vous a attribué, à

 26   savoir le régime de Slobodan Milosevic, et tous ceux qui étaient au pouvoir

 27   dans son régime et qui faisaient lancer sa propagande, ils vous ont

 28   attribué toutes sortes d'agissements négatifs et ils ont obstrué la

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 27  

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  1   possibilité que vous et le Parti radical serbe, que vous répondiez à ces

  2   accusations.

  3   Q.  Est-ce qu'il y a eu jamais de manière plus violente, plus brutale pour

  4   attaquer Slobodan Milosevic et son épouse Mira Markovic, que moi ? Est-ce

  5   que il y a jamais eu quelqu'un qui aurait employé des propos plus graves ?

  6   R.  Jamais personne n'aurait osé réfléchir ainsi, encore moins de

  7   s'exprimer ainsi. Il y a eu certaines accusations de vous, une certaine

  8   citation, c'est un propos de vous. Je m'en souviens encore aujourd'hui.

  9   Q.  Il y en a également dans les titres de mes livres.

 10   R.  Oui, il y en a.

 11   Q.  Mais est-ce que par les titres de mes livres, j'ai déjà montré ce que

 12   je pensais de ceux qui étaient puissants et qui étaient à l'apogée du

 13   pouvoir ?

 14   R.  Oui, vous disiez toute la vérité, et sans aucune crainte.

 15   Q.  Et le régime de Milosevic, est-ce qu'il aurait pu trouver quoi que ce

 16   soit pour me compromettre ? S'il avait pu le faire, est-ce qu'il l'aurait

 17   utilisé pour me régler mon compte définitivement ?

 18   R.  Oui, il l'aurait utilisé, et pour lui, vous étiez l'adversaire

 19   politique très grave.

 20   Q.  Par trois fois ils m'ont mis en prison, une première fois à cause d'un

 21   incident à l'assemblée fédérale. Une deuxième fois à cause d'un incident à

 22   l'assemblée fédérale, et une troisième fois, à cause d'un rassemblement

 23   interdit à Gnjilane ?

 24   R.  C'est ça.

 25   Q.  Donc pendant cette période-là, allant de 1993 à 1997, par trois fois je

 26   me suis retrouvé en prison uniquement pour avoir fait de la politique ?

 27   R.  C'est cela.

 28   Q.  Jamais il n'y a eu aucune activité criminelle ?

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  1   R.  Jamais.

  2   Q.  Puis la fois d'après, les enquêteurs du Tribunal de La Haye, en

  3   septembre 2006, vous demandent de vous rendre dans leurs locaux ?

  4   R.  Oui, ils me l'ont demandé, mais je n'ai pas souhaité m'y rendre. Et

  5   Paolo Stocchi a dit à ce moment-là qu'un des représentants du bureau du

  6   Procureur allait se rendre là à l'endroit que j'aurais indiqué.

  7   Q.  Etait-ce Dan Saxon ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et une femme qui l'accompagnait ?

 10   R.  Oui, une dame qui s'est présentée en disant qu'elle était

 11   de Nouvelle-Zélande.

 12   Q.  Et c'était dans votre appartement, d'après votre déclaration, et

 13   c'est votre déclaration du 19 novembre 2007, pour que le Procureur puisse

 14   suivre; donc d'après ce que vous en dites, il a insisté pour que le Pr

 15   Seselj soit représenté de telle manière devant le Tribunal de La Haye pour

 16   l'éliminer politiquement, et comme quoi je pouvais y contribuer

 17   considérablement.

 18   R.  Oui, c'est cela.

 19   Q.  Et vous dites, il a insisté lorsqu'il a vu que je ne pouvais rien

 20   lui dire concernant l'accusation pour crimes de guerre ?

 21   R.  Oui, c'était la même thèse que celle du feu Zoran Djindjic. Lui

 22   aussi disait que le nouveau gouvernement devait se stabiliser, que la seule

 23   issue pour la Serbie c'était un pouvoir pro-occidental, qu'il fallait

 24   contrecarrer ceux qui s'y opposaient, et que le principal opposant à cette

 25   politique pro-occidentale était Vojislav Seselj et le Parti radical serbe,

 26   qu'il fallait contrecarrer son activité. Et j'ai eu la sensation que Dan

 27   Saxon cherchait plutôt à s'intéresser et à mettre en place la politique

 28   américaine et la politique de la CIA qu'il n'exerçait son rôle judiciaire.

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  1   Il est fonctionnaire de certaines structures américaines et que

  2   véritablement --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Je comprends que ce témoin est formé

  5   en tant qu'homme de loi, en tant que juriste. Je voudrais que la Chambre

  6   lui rappelle qu'il y a possibilité que des accusations de faux témoignage

  7   soient portées contre lui et dans quelles circonstances ceci pourrait se

  8   produire.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous êtes juriste. Vous aviez

 10   bien ça en tête. Bon. Vous témoignez sous serment. Vous avez prêté serment.

 11   Donc vous savez quelle est la portée du serment. Vous relatez une rencontre

 12   avec un enquêteur et un membre du bureau du Procureur, où celui-ci vous

 13   aurait dit qu'il fallait mettre M. Seselj hors du circuit politique. Donc

 14   vous dites ça sous serment ? On est bien d'accord ? C'est sous serment que

 15   vous dites ça ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Sous serment, et le serment m'oblige à dire la

 17   vérité.

 18   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais en même temps, Monsieur le Témoin, vous

 19   confirmez que vous avez signé de votre main une déclaration faite à Saxon,

 20   à Stocchi, dans laquelle vous disiez tout autre

 21   chose ? Vous confirmez que vous avez signé cela ?

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, excusez-moi

 23   de vous interrompre, Madame le Juge, une précision : cette déclaration, qui

 24   porte le numéro de la liste 65 ter, je pense, 7427, c'est celle signée en

 25   2003. C'est la seule que le témoin a jamais signée pour le Procureur --

 26   pour le bureau du Procureur. Eu égard à cette déclaration, M. Saxon n'a pas

 27   du tout participé à cette réunion.

 28   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci, Madame le Procureur.

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  1   Donc vous avez signé une déclaration faite aux enquêteurs, Paolo Stocchi,

  2   et vous l'avez signée, vous avez dit que vous confirmiez ce qui était écrit

  3   là. Et vous avez aussi signé une déclaration où l'interprète certifie qu'on

  4   vous a lu en serbe tout ce qui était écrit, lu, traduit de l'anglais. Cette

  5   déclaration, vous avez signée. On l'a ici.

  6   Vous confirmez cela, que vous avez signé ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai signé, mais je vous ai dit en

  8   subissant quelle pression. Et ça ne m'a pas été traduit, et cette

  9   déclaration est en anglais, elle n'est pas en serbe et je ne comprends pas

 10   l'anglais.

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : Mais vous avez signé que la déclaration vous a été

 12   traduite en serbe. Donc vous avez signé un faux ? Vous confirmez cela ici

 13   aujourd'hui ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça ne m'a pas été traduit. La déclaration ne

 15   m'a pas été traduite. Je le maintiens, et c'est ça la vraie vérité.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je poursuis ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur Glamocanin, même si on vous a lu cette déclaration en serbe,

 21   vous n'aviez aucun moyen de contrôler si le traducteur vous a tout lu ?

 22   R.  Je ne pouvais pas le faire.

 23   Q.  Donc vous étiez à la merci de l'interprète ou du traducteur pour qu'il

 24   modifie la teneur du texte, pour qu'il coupe des éléments, si on lui a

 25   donné l'instruction de le faire ?

 26   R.  Oui, c'est le quatrième jour de mes entretiens avec les enquêteurs de

 27   La Haye que j'ai signé la déclaration et c'est l'interprète qui a rédigé

 28   cette déclaration pendant les trois jours qui ont précédé.

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  1   Q.  Vous avez la sensation que le cinquième, sixième, septième ça se serait

  2   poursuivi si vous ne l'aviez pas signé ?

  3   R.  Oui, tout à fait.

  4   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Glamocanin et Monsieur

  5   Seselj, une fois de plus, vous vous chevauchez. Il est impossible dès lors

  6   que les Juges comprennent la conversation que vous avez. Vous êtes tous

  7   deux des juristes. Tous deux vous savez comment ceci marche. Vous pourriez

  8   vous en sortir mieux, faites une pause entre les questions et les réponses.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, prenez note de ce que vient de

 10   dire mon collègue, qui est très important.

 11   Je reviens à ce point essentiel. Vous témoignez sous serment, donc a priori

 12   ce que vous dites est vrai, sauf faux témoignage, mais tout le monde le

 13   sait.

 14   J'ai votre déclaration signée en anglais. Bien entendu, la déclaration dans

 15   votre langue n'est pas signée. En tout cas, je ne l'ai pas. La déclaration

 16   fait exactement 19 pages, la vingtième page est la dernière page où vous

 17   indiquez qu'on vous a lu les 20 pages dans votre langue.

 18   Si on a lu dans votre langue 20 pages, il faut au moins - je sais pas - une

 19   heure peut-être pour lire dans votre langue les 20 pages de manière lente

 20   pour que vous compreniez. Alors la question est ultra simple : est-ce que

 21   l'interprète dont je ne dis pas le nom a lu les 20 pages en commençant par

 22   le premier mot qui est : "Mon nom est Jovan Glamocanin. Je suis Serbe…," et

 23   cetera ? Est-ce qu'elle a lu les 20 pages ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors --

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc le document en anglais, on vous l'a donné

 28   et vous l'avez signé, paraphé, dans la foulée ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors évidemment, si la Chambre l'estime utile, il y

  3   a une façon très facile d'élucider le problème. Il suffit d'entendre

  4   l'interprète.

  5   Continuez, Monsieur Seselj.

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Excusez-

  7   moi, Monsieur Seselj. Je précise pour le procès-verbal, nous demandons que

  8   la déclaration qui a fait l'objet de beaucoup de discussions reçoive au

  9   moins une cote d'identification MFI. Il s'agit de la pièce 65 ter 7427.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, attribuons un numéro MFI à cette déclaration.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P 688 MFI. Merci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Seselj, continuez.

 13   M. SESELJ : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Glamocanin, vous êtes un juriste, vous avez une expérience,

 15   vous avez travaillé pendant de longues années. Dans le système de la

 16   justice serbe, une déclaration signée par un citoyen dans une langue qu'il

 17   ne comprend pas, est-ce qu'elle peut avoir une valeur quelconque ?

 18   R.  Non, cette déclaration ne peut avoir aucune valeur. La déclaration doit

 19   se faire dans une langue que le signataire connaît bien.

 20   Q.  Très bien. Vous avez décrit ici comment, le 16 septembre 2006, vous

 21   avez vu arriver dans votre appartement Mme Christine Dahl avec Paolo

 22   Stocchi, un interprète et deux policiers ?

 23   R.  Monsieur Seselj, c'était le 15 novembre 2007.

 24   Q.  2007 ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Très bien. Et vous expliquez ici que vous aviez eu un entretien, et que

 27   pendant ce temps-là un des policiers est allé dans la chambre de votre

 28   fille, qu'il s'est installé devant l'ordinateur et qu'il a cherché ce qui

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  1   se trouvait sur le disque dur ?

  2   R.  C'est cela.

  3   Q.  Paolo Stocchi vous a même dit que votre fille se rendait souvent sur

  4   internet la nuit ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Ce qui vous a permis d'arriver à la conclusion que les enquêteurs de La

  7   Haye ou la police serbe vous surveillaient ?

  8   R.  En disant cela, Paolo Stocchi m'a tout montré.

  9   Q.  Ils vous ont dit que vous alliez être arrêté et emmené de force à La

 10   Haye si vous ne vouliez pas témoigner ?

 11   R.  Oui, Mme Dahl et Paolo Stocchi m'ont exposé toutes les mesures, tous

 12   les moyens à leur disposition pour me forcer à venir déposer devant la

 13   Chambre.

 14   Q.  Le 27 février --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Un moment, Monsieur Seselj.

 16   Monsieur le Témoin, vous mettez en cause l'enquêteur du bureau du Procureur

 17   en disant qu'il est allé à l'ordinateur pour voir ce qu'il y avait dans le

 18   disque dur. C'est grave, ce que vous dites. Vous savez que techniquement ça

 19   peut être vérifié. Comment vous, vous n'avez pas pensé à demander à un

 20   avocat d'entamer une procédure pour qu'un expert indépendant analyse le

 21   disque dur pour démontrer qu'à telle heure, telle minute, telle seconde, il

 22   y a eu ouverture d'un fichier ou d'une recherche ? Ça ne vous est pas venu

 23   à l'idée ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça ne m'est pas venu à l'esprit. Quant à

 25   l'ordinateur de ma fille, c'est un policier serbe, c'est pas M. Stocchi qui

 26   s'en est servi. M. Stocchi a simplement dit que la nuit, notre fille

 27   utilisait souvent internet pendant longtemps.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'était le policier serbe qui était présent qui

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  1   a ouvert l'ordinateur ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le policier serbe qui est venu avec

  3   l'équipe, Mme Dahl était à la tête de cette équipe. Il est venu tout

  4   d'abord seul dans l'appartement, il a dit qu'il fallait tout d'abord qu'il

  5   fouille l'appartement et qu'ensuite Mme Dahl allait venir et les autres.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous qui êtes un éminent juriste, quelle était la

  7   base légale pour un policier serbe premièrement de pénétrer dans votre

  8   appartement, et deuxièmement d'avoir accès à

  9   l'ordinateur ? Il y a une base légale ou pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que pour

 11   procéder à une fouille, un policier doit avoir un mandat de perquisitionner

 12   du tribunal. Mais je ne voulais pas refuser d'avoir un entretien avec Mme

 13   Dahl, elle est Procureure, elle est venue de loin, de La Haye, elle est

 14   venue pour s'entretenir avec moi. J'avais accepté de lui parler dans mon

 15   appartement, je ne voulais pas refuser l'entretien avec Mme Dahl et M.

 16   Stocchi quand ils sont arrivés au pied de chez moi, devant l'immeuble où se

 17   situe mon appartement. Indépendamment de ce manquement par l'arrivée du

 18   policier serbe, je voulais néanmoins avoir cet entretien avec eux pour leur

 19   montrer que véritablement, je ne pouvais pas être témoin de l'Accusation et

 20   qu'il n'y avait aucune raison que je sois témoin de l'Accusation.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 22   Monsieur Seselj, poursuivez. Il vous reste 23 minutes.

 23   M. SESELJ : [interprétation]

 24   Q.  Le 27 février 2008, vous avez donné une nouvelle déclaration à mes

 25   collaborateurs, et là vous décrivez comment ce jour-là, à 15 heures 50,

 26   vous avez vu arriver dans votre appartement par la force une Slovène ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Vous n'avez pas bien écrit son nom ici, mais moi non plus je ne m'en

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  1   souviens pas, mais peu importe. Elle, elle est arrivée en tant que l'amie

  2   de la Cour ?

  3   R.  Elle, elle est arrivée d'une manière bizarre. Elle n'avait pas annoncé

  4   par téléphone son arrivée, d'aucune autre manière.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Par excès de prudence, peut-être pourrions-

  6   nous passer à huis clos partiel ?

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vois pas ce qu'il y a à cacher. Bien.

  8   Monsieur le Témoin, la Chambre, quand on a été saisi de tous ces problèmes,

  9   on a désigné un ami de la Cour et la Chambre a pris le soin de trouver une

 10   professionnelle, quelqu'un qui a l'habitude des enquêtes. C'était cette

 11   dame que la Chambre a désignée qui devait faire l'enquête, et nous

 12   attendions que dans le cadre de la rencontre avec cette dame, vous

 13   fournissiez toute explication utile. Elle avait donc le mandat de la

 14   Chambre de procéder à une enquête et de vous poser des questions sur ce qui

 15   était arrivé.

 16   Nous sommes, nous, tout à fait neutres. Il y a deux parties. Il y a

 17   le Procureur et la Défense. Chacun allègue de ce qu'il veut, mais comme

 18   nous avons la responsabilité de juger, on doit vérifier tout ce qui est

 19   allégué. C'est dans ce contexte que nous avions demandé à cette dame de

 20   venir et de procéder une enquête. Elle avait la mission de vous dire que

 21   dans le cadre de la décision de la Chambre, elle voulait vous rencontrer

 22   pour vous poser toute une série de questions. Voilà. Je voulais vous dire

 23   cela en toile de fond pour que vous sachiez bien quel était le contexte.

 24   Monsieur Seselj, continuez.

 25   M. SESELJ : [interprétation]

 26   Q.  Je voudrais, Monsieur Glamocanin, que vous décriviez aux Juges de la

 27   Chambre de quelle façon cette femme a fait irruption dans votre

 28   appartement. Je ne vais pas vous poser des questions directrices. Je vous

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  1   laisse parler comme vous l'entendez.

  2   R.  Elle n'a pas annoncé son arrivée ni au téléphone ni d'une autre façon.

  3   Elle a tout simplement sonné à la porte de chez moi. J'ai ouvert. Elle

  4   s'est présentée, et elle a dit de prime abord qu'elle cherchait Jovan

  5   Glamocanin et qu'il fallait qu'elle s'entretienne.

  6   Je lui demandé qui elle était. Elle a dit Ana Marhajn ou un truc de

  7   ce genre, quelque chose de tout à fait similaire. Alors j'ai demandé : "De

  8   quoi avons-nous à parler ? Je ne vous connais pas." Elle a dit : "Il faut

  9   qu'on parle." J'hésitais à la laisser entrer. Elle, elle est entrée. Elle

 10   n'a même pas attendu que je la convie à entrer. Elle est entrée. Elle a dit

 11   qu'elle était Ana Marhajn, qu'elle était Slovène, et qu'elle était amie du

 12   Tribunal de La Haye, amie de la Cour. Quand elle a dit ça, je l'ai mis à la

 13   porte, parce que si elle était venue au nom du Procureur ou d'une instance

 14   quelconque du Tribunal, j'ai raisonné de la sorte, mais je n'avais pas le

 15   temps de raisonner à ce point-là, mais pourquoi viendrait-elle comme cela,

 16   pourquoi entrerait-elle comme une espèce de commando ? Je ne pouvais pas

 17   accepter cette façon de faire et je l'ai fait sortir de chez moi.

 18   Mme LE JUGE LATTANZI : Témoin, mais elle vous a dit qu'elle venait comme

 19   amicus curiae. Donc vous êtes suffisamment instruit pour comprendre qu'elle

 20   n'était pas l'amie du Procureur.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Elle n'a rien dit au sujet des Procureurs.

 22   Elle n'a pas mentionné le Procureur du tout. Mais quel type d'amie de la

 23   Cour peut-elle être ? Si elle avait annoncé son arrivée, si elle avait

 24   expliqué les choses, j'aurais accepté, si elle s'était comportée de façon

 25   cultivée et civilisée. M. Saxon, Mme Christine Dahl avaient convenu une

 26   rencontre. Pourquoi faire irruption en tant que commando ?

 27   Je ne suis pas un criminel. Je ne cache rien. Je ne suis pas en

 28   situation de conflit. Pourquoi ferait-on irruption chez moi, dans mon

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  1   appartement ? Je sais qu'on peut entrer dans un appartement conformément à

  2   la loi, conformément à la constitution, en concertation avec moi ou avec un

  3   mandat de perquisition; pas autrement.

  4   M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Dans vos déclarations, il est dit que suite à votre réaction, elle a

  6   commencé elle aussi à vous menacer. Elle parlait le serbe ?

  7   R.  Oui. Elle parlait le serbe avec un accent slovène, il est vrai, mais

  8   elle a dit : "Tu verras bien quand tu sera arrivé à La Haye."

  9   Q.  Donc elle a tout de suite dit "tu." C'était quand même malpoli, non ?

 10   R.  Oui, sa conversation avec moi a été plutôt brève et s'est résumé un

 11   conflit. Ça n'a pas été civilisé du tout ni normal.

 12   Q.  Est-ce que vous avez continué à lui dire "vous" ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et elle, pour se disputer avec vous, elle vous a tutoyé ?

 15   R.  Oui. Elle s'est comportée de la sorte.

 16   Q.  Bon. Dans cette déclaration du 11 août de cette année-ci, vous évoquez

 17   un détail, à savoir que vous avez trouvé bizarre que Stocchi et son

 18   collègue aillent se renseigner sur un tas de choses au niveau du Parti

 19   radical serbe et de moi-même, et ils avaient souhaité présenter le SRS

 20   comme étant une organisation criminelle avec une structure

 21   organisationnelle des plus strictes ?

 22   R.  Oui, avec des éléments de violence au sein du parti, de fortes

 23   composantes de violence, avec toutes sortes de détails, moult détails qui

 24   n'avaient rien à voir avec l'enquête, les nécessités de l'enquête ou de

 25   l'acte d'accusation. Ils étaient sortis de ce cadre.

 26   Q.  Et lorsque énervé comme vous l'étiez, vous les aviez prévenus du fait

 27   que ce comportement était inadéquat, et quand vous avez demandé s'ils

 28   venaient de la CIA lorsqu'ils posaient ces questions, comment ont-ils réagi

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  1   ?

  2   R.  Stocchi a dit qu'il n'était pas de la CIA et que s'il devait travailler

  3   pour un service de Renseignements, il travaillerait pour son service de

  4   Renseignements italien. L'autre a dit : "Pourquoi êtes-vous contre la CIA ?

  5   La CIA, c'est une force de percussion de l'Occident. Pourquoi ?"

  6   Q.  J'en tire une conclusion, à savoir que pour eux, tout est positif en

  7   Occident et tout est négatif à l'Orient.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay. 

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir une

 10   référence chronologique en ce qui concerne cette discussion qui aurait eu

 11   lieu avec l'enquêteur ?

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : -- préciser dans le temps ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça s'est passé pendant ces quatre journées

 14   d'interrogatoire qui ont été effectuées à Belgrade.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : -- une de ces quatre journées, à la moitié, à la fin

 16   ? Quand ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Vers la moitié de ces interrogatoires. Je

 18   crois que c'était le deuxième jour.

 19   M. SESELJ : [interprétation]

 20   Q.  On vous a laissé entendre à l'occasion de cet entretien principal de

 21   quatre jours que vous, Maja Gojkovic et moi-même, à Novi Zednik, avons eu

 22   une réunion avec le chef de la police de Subotica, un dénommé Milan

 23   Jerenkic, et que c'est là-bas que nous avions convenu d'établir des listes

 24   de liquidation de Croates au service des services croates. C'est allé si

 25   loin que cela ?

 26   R.  Exactement, c'est de ça qu'ils ont parlé. Ils ont demandé à ce que je

 27   me prononce. Alors, à l'époque et même maintenant, je n'ai pu dire que je

 28   n'ai jamais participé à ce type de réunion, pas plus que je n'étais au

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  1   courant de la confection de certaines listes de personnes à liquider à

  2   Subotica.

  3   Q.  Et vous, à cette occasion-là, Paolo Stocchi vous dit - et là je cite

  4   votre déclaration que : "Vojislav Seselj est dangereux pour les autorités

  5   nouvelles en Serbie, que Vojislav Seselj gêne et il faut que la Serbie ait

  6   un pouvoir pro-occidental. Stocchi, à plusieurs reprises, dit que Vojislav

  7   Seselj était bien pire que Slobodan Milosevic."

  8   Quand on parle de Stocchi, il faut que je souligne que pendant ces

  9   entretiens, il a dit beaucoup de choses offensantes et dénigrantes. En ma

 10   qualité de personne ou de personnalité, je ne pouvais pas accepter. J'ai

 11   dit que Vojislav Seselj était un démocrate, qu'il n'était pas commode pour

 12   ses collaborateurs, et qu'il diffamait ses adversaires politiques. Il

 13   voulait que je confirme la chose à La Haye; est-ce exact ?

 14   R.  Oui, c'est exact. S'agissant de vous-même, il vous a qualifié

 15   conformément à ce que m'avait dit Zoran Djindjic, et conformément à ce que

 16   ultérieurement j'ai eu à entendre lors des entretiens.

 17   Q.  Saxon vous a dit la même chose que Stocchi. Alors je cite une fois de

 18   plus votre déclaration, à savoir que :

 19   "Vojislav Seselj était un grand péril, c'était le plus grand des périls

 20   pour les autorités nouvelles en Serbie. Saxon a dit également que le

 21   concept de Grande Serbie défendu par Vojislav Seselj est une option de

 22   guerre et que Vojislav Seselj constituait un danger pour la paix dans les

 23   Balkans."

 24   Est-ce exact ?

 25   R.  C'est bien exact.

 26   Mme LE JUGE LATTANZI : Témoin, l'équipe du Procureur est venue vous

 27   rencontrer pour parler de politique avec vous, pas d'enquête ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame Lattanzi, la première partie de cet

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  1   entretien a eu pour sujet les crimes de guerre et l'acte d'accusation à

  2   l'encontre de M. Vojislav Seselj. J'ai assuré M. Saxon que je ne savais

  3   rien au sujet de crimes de guerre éventuels de la part de M. Seselj, pas

  4   même de discours de haine. M. Saxon a pris cela en considération. M. Saxon

  5   a des manières, c'est agréable de discuter avec lui. Nous avons créé une

  6   belle ambiance pour cet entretien. J'ai voulu lui dire que je n'étais

  7   l'ennemi d'aucun peuple au monde, et que nous pouvons nous entretenir sur

  8   tout, mais que je ne pouvais pas être témoin de l'Accusation contre le Dr

  9   Vojislav Seselj.

 10   Par la suite on a parlé politique, et il a dit qu'il était représentant ou

 11   défenseur de la politique américaine, qu'il était là pour mettre en œuvre

 12   la politique américaine. J'ai même conclu du fait qu'il était attaché à

 13   cette politique et qu'il était peut-être employé par des services de

 14   Renseignements américains. Lorsque je lui ai dit, il a fait un sourire, il

 15   a souri. Il a dit : "Pourquoi pas ?" Alors à ce moment ou pendant cet

 16   entretien, nous avons parlé de politique et c'est de façon violente qu'il a

 17   été favorable à la politique américaine.

 18   Si vous le permettez, je vais vous dire quelle a été ma conclusion

 19   principale dans cette conversation, à savoir que c'était des Américains.

 20   Ils sont tous très préoccupés par la politique de leur gouvernement, cette

 21   politique de cow-boy. Vous savez, ils perçoivent cette politique comme le

 22   grand fermier : "Tu me donnes ta terre ou je vais brûler ta maison, je vais

 23   te tuer et je vais emmener ta femme et tes enfants." Mais ce ne sont pas

 24   des façons de se comporter dans le monde, il faut respecter un peu les

 25   autres Etats et les autres peuples. Les autres peuples ont aussi des

 26   intellectuels, ils ont aussi leurs traditions, leurs propres valeurs, et on

 27   peut s'asseoir et essayer de se concerter. Mais dans le respect des acquis

 28   des différentes civilisations, des systèmes judiciaires européens, anglo-

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  1   saxons, peu importe.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre audition a duré quatre jours puisqu'on en a la

  3   preuve matérielle. Vous commenciez le matin, ça durait l'après-midi, et ça

  4   duré donc quatre jours. A midi, vous déjeuniez avec eux ou bien chacun

  5   partait de son côté ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Personne n'a pris son déjeuner, c'était

  7   permanent. Il est vrai que parfois on papotait plus librement, mais je vous

  8   ai déjà dit, j'ai eu des émotions qui ont fait surface lorsque j'ai vu que

  9   je m'entretenais avec un Italien tout à fait typique. Et je me suis souvenu

 10   des récits de ma mère disant qu'un officier italien m'avait arraché des

 11   bras d'un Oustachi lorsque j'avais 1 an. C'était dans le village natal de

 12   ma mère où on avait fui Banja Luka. Cet officier italien m'avait arraché

 13   des mains d'un Oustachi qui voulait me transpercer avec une baïonnette.

 14   Donc  je suis très enclin à l'égard des Italiens, je leur suis

 15   reconnaissant. Mais quand j'ai vu Paolo Stocchi, et quand j'ai vu que

 16   c'était un Italien typique, c'est un peu de façon émotionnelle et affective

 17   que j'ai réagi. C'était comme si c'était un peu le neveu de l'officier

 18   italien qui m'avait sauvé la vie, et il y a eu un entretien tout à fait

 19   libre. Mais Paolo Stocchi s'est mieux débrouillé que moi dans cette

 20   conversation. C'est lui qui posait des questions et il apportait des

 21   réponses. Il a accompli la tâche suivant la façon qui l'arrangeait et qui

 22   abondait dans le sens d'accuser le plus possible le Dr Vojislav Seselj,

 23   alors que je n'avais aucune espèce ni d'arguments ni d'éléments de preuve à

 24   l'encontre du Dr Vojislav Seselj, pas plus que je n'ai fait de déclaration

 25   en ce sens.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous êtes quelqu'un qui a fait des études, qui

 27   est juriste et qui a quand même quelques connaissances en matière de

 28   procédure, les 20 pages qui étaient censées récapituler tout ce que vous

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  1   avez dit, là vous auriez dû  relire dans votre langue ce que M. Stocchi,

  2   même s'il était très sympathique, ce qu'il avait pu écrire, puisque c'est

  3   lui qui rédige, mais il rédige à partir de ce que vous avez dit. Donc vous

  4   auriez dû contrôler et ça vous ne l'avez pas contrôlé. C'est ce que je

  5   crois comprendre de vos propos.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas contrôlé. Il a dicté, et le

  7   quatrième jour, je vous l'ai dit de quelle façon j'ai signé.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 10   J'avais l'impression que M. Seselj avait dit qu'il lisait quelque chose à

 11   partir de la déclaration de février 2008, lorsqu'il a décrit les

 12   similarités, enfin les conversations allégées qui auraient eu lieu entre le

 13   témoin et M. Saxon ou le témoin et M. Pastorre-Stocchi. Mais je pense qu'il

 14   se trompe. Pourrait-il, s'il vous plaît, nous dire exactement d'où il tire

 15   sa citation ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le 11 août 2008, c'est la date de la dernière

 17   déclaration que j'ai citée, 11 août. Peut-être me suis-je trompé, mais je

 18   ne pense pas, lorsque je l'avais dit la première fois, je veux dire.

 19   Alors, il me reste encore un peu de temps, n'est-ce pas ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Enfin, pas beaucoup de minutes, mais allez-y.

 21   Il vous reste 15 minutes.

 22   M. SESELJ : [interprétation]

 23   Q.  La première fois que j'ai pris lecture de votre déclaration - et je

 24   vais vous le dire sincèrement, Monsieur Glamocanin - je me suis tout de

 25   suite dit que c'était votre déclaration à vous, partant de renseignements

 26   qui sont absolument faux. Et je ne pense pas que dans la plus grande des

 27   colères ou de l'aversion que vous pourriez ressentir à mon égard, vous

 28   puissiez dire quelque chose pareil.

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  1   Il est dit ici qu'il y apparaît clairement que j'étais en contact avec

  2   Radmilo Bogdanovic qui, pendant la guerre, était ministre de l'Intérieur de

  3   Serbie. Radmilo Bogdanovic a été ministre de l'Intérieur jusqu'en mars

  4   1991. Suite aux manifestations du 9 mars, il a présenté sa démission. Est-

  5   ce que vous vous souvenez du fait qu'à une conférence de presse organisée

  6   au sein du Parti radical serbe, j'avais réclamé sa démission ?

  7   R.  Je me souviens du fait que vous ayez réclamé sa démission. Pour ce qui

  8   est de cette rencontre de Radmilo Bogdanovic, vous en avez eu des

  9   rencontres, j'en ai eu aussi. Radmilo Bogdanovic était quelqu'un de

 10   communicatif et de très spirituel. C'était le président de la Chambre des

 11   républiques ?

 12   Q.  Non, je vais vous rectifier. Il était vice-président. Le président,

 13   lui, c'était un Monténégrin. Radmilo Bogdanovic a été vice-président de

 14   cette Chambre du parlement fédéral ?

 15   R.  Oui, c'était quelqu'un de très actif. On l'a rencontré souvent. Le

 16   rencontrer était agréable. C'étaient des rencontres amicales qui

 17   n'engageaient en rien, qui n'impliquaient aucune réflexion politique.

 18   Q.  Ce qui m'a paru incroyable, c'est au paragraphe 120, voir que vous

 19   aviez prétendument déclaré que votre fils, Srdjan, avait quitté les rangs

 20   du Parti radical serbe et qu'il me détestait, parce que je ne me battais

 21   que pour le pouvoir alors que lui voulait se battre contre le régime à

 22   Milosevic. Ne savez-vous pas, Monsieur Glamocanin, que mes relations avec

 23   votre fils sont restées sincèrement amicales même lorsque vous avez quitté

 24   vous-même le Parti radical serbe et qu'il était venu dans le parti, au

 25   gouvernement de Serbie, lorsque j'étais vice-premier ministre ?

 26   R.  Je sais qu'il vous a écrit une lettre amicale et qu'il a toujours

 27   nourri beaucoup de respect à votre égard.

 28   Q.  Ne savez-vous pas, Monsieur Glamocanin, que lorsque j'ai été arrêté par

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  1   le régime de Milosevic en 1994, vous et moi avons été en conflit, et votre

  2   fille est venue prendre la parole à une assemblée de protestation organisée

  3   aux fins de m'apporter un

  4   soutien ?

  5   R.  Oui, elle est intervenue contre moi pour vous accorder un soutien.

  6   Q.  Avez-vous déclaré comme ce soit que votre fils, Srdjan, me détestait ?

  7   R.  Non, il ne vous déteste pas.

  8   Q.  Ne savez-vous pas que votre fils Srdjan a été volontaire du Parti

  9   radical serbe au front ?

 10   R.  A deux reprises, au moins.

 11   Q.  Et il a commandé des volontaires ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  A-t-il été membre du groupe de volontaires encerclé en 1992 vers le

 14   mois d'avril 1992, encerclé à Hrasno, et qu'ils ont eu du mal à se sortir

 15   vivants ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Et en juin de cette année j'ai déclaré que votre fils méritait d'être

 18   un voïvodat chetnik, mais que parce que son père était haut responsable du

 19   parti, nous ne voulions pas lui accorder ce titre de voïvodat ?

 20   R.  Je m'en souviens.

 21   Q.  Est-ce vrai ?

 22   R.  Oui, c'est vrai.

 23   Q.  Est-ce que c'est le journal "Nedeljni Telegraf" de 1994 ? Le Procureur

 24   peut se procurer cela.

 25   R.  Certes.

 26   Q.  Je vois ici au paragraphe 124 qu'ils étaient très intéressés par le

 27   fait de savoir où se trouvaient les archives du Parti radical serbe, n'est-

 28   ce pas ?

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  1   R.  Oui. Ils voulaient savoir toute une série de choses, chose qui ne fait

  2   pas partie du domaine d'activité --

  3   Q.  Mais vous savez que le régime à Milosevic et la police secrète aussi

  4   s'efforçaient grandement à se procurer nos archives pendant les années où

  5   nous avons été en conflit violent, et ils n'ont jamais réussi ?

  6   R.  Le régime à Milosevic se servait de méthodes policières patentées. Ils

  7   se servaient aussi du service de la Sûreté de l'Etat et ce service a été

  8   hérité de la période communiste, service qui a œuvré à discréditer toutes

  9   les personnes éprises de liberté.

 10   Q.  Ne savez-vous pas que pendant ces conflits ardus, j'avais dans le cadre

 11   du parti, créé un groupe de personnes qui étaient chargées de travailler

 12   dans l'information et dans le renseignement pour me procurer des

 13   renseignements justement au quotidien, et ce, pour toute utilité éventuelle

 14   ? Vous souvenez-vous d'un dénommé Stojan ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens.

 16   Q.  Vous vous souvenez de son nom ?

 17   R.  Je sais. Mais je sais que ça avait été créé, mais ce n'est pas une

 18   chose où j'ai été familiarisé avec.

 19   Q.  Mais ne saviez-vous pas que j'avais eu contact avec plusieurs dizaines

 20   de milliers de documents confidentiels que personne n'a jamais pu retrouver

 21   ?

 22   R.  Je veux bien le croire, parce que vous êtes quelqu'un de très précis,

 23   méticuleux, et vous ne laissez rien au hasard. Vous pensez à l'avenir.

 24   Q.  Ils ne peuvent pas retrouver cela dans mon appartement, pas plus que

 25   dans les bureaux du parti ou ailleurs.

 26   Ne savez-vous aussi que j'ai publié plusieurs livres, avec des documents

 27   confidentiels, mais j'ai fait le tri. Les documents les plus importants, je

 28   ne les ai pas publiés. Le livre --

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Savez-vous qu'à l'étranger on m'a proposé de grosses sommes d'argent

  3   pour leur confier ces archives, et j'ai refusé ?

  4   R.  Ça, je ne le sais pas.

  5   Q.  Et bon nombre de ces documents seront hors portée de l'opinion

  6   publique, et bien des secrets seront emportés dans la tombe avec moi. De

  7   toute façon, j'ai décidé de le faire ainsi.

  8   Alors, Monsieur Glamocanin, j'ai été également surpris par ce que vous avez

  9   expliqué à l'interrogatoire principal, à savoir que Stocchi vous aurait

 10   imposé une partie pour en faire partie intégrante de votre déclaration, la

 11   partie qui se rapporte à Petar Panic. Vous avez bien connu Petar Panic ?

 12   R.  Oui, je l'ai connu, c'était votre garde du corps.

 13   Q.  Il l'a été pendant trois ou quatre ans ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Il a été aux premières lignes de front avec moi ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Avez-vous entendu parler du fait que Petar Panic ait été impliqué dans

 18   des activités criminelles ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  C'était quelqu'un qui était connu comme bagarreur, il aimait se

 21   bagarrer, il provoquait des bagarres, des rixes. Mais il a été plusieurs

 22   fois en prison mais rien que pour des rixes, n'est-ce pas ?

 23   R.  C'était quelqu'un qui ne suscitait pas beaucoup de sympathie.

 24   Q.  Il aimait se battre ?

 25   R.  Oui, il aimait se battre.

 26   Q.  Mais il était courageux, il ne fuyait pas le danger ?

 27   R.  Ça, c'est sûr.

 28   Q.  Alors comment voulez-vous qu'ici on puisse dire à son égard qu'il avait

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  1   contrôlé les dealers dans les rues qui faisaient la conversion d'argent à

  2   l'époque dans les rues ?

  3   R.  A l'occasion de cette conversation avec Stocchi, il avait souligné

  4   qu'il s'était entretenu avec feu Slobodan Jovic. Et il a dit, qu'entre

  5   autres, Slobodan Jovic avait emporté des papiers chez l'ambassadeur

  6   anglais, l'ambassadeur de la Grande-Bretagne et qu'il s'était entretenu

  7   avec M. Stocchi, et que c'est un grand dommage que M. Jovic soit mort,

  8   parce qu'on aurait pu apprendre bien des choses importantes pour la vérité.

  9   Mais je ne pense pas que M. Jovic, du reste je suis certain que M. Jovic

 10   ait pu disposer de preuves sérieuses ou valables contre vous.

 11   Q.  Vous souvenez-vous du fait que le marché des devises dans la rue

 12   Fransuska, la rue de la France, c'était tenu à l'ordinaire par des

 13   Albanais, c'était entre les mains des Albanais ?

 14   R.  J'en ai entendu parler mais je ne savais pas trop.

 15   Q.  Mais que voulez-vous que Petar Panic ait eu à voir avec les Albanais

 16   qui faisaient de la contrebande de monnaie étrangère ?

 17   R.  Je n'en sais rien.

 18   Q.  Dans l'interrogatoire principal, vous avez mentionné plusieurs cas de

 19   départ, de l'abandon, de ces conflits au Parti radical serbe, et vous avez

 20   été partie prenante dans un de ces conflits assez violents; et vous avez

 21   mentionné le cas de Tomislav Nikolic et d'Aleksandar Vucic, pour ce qui est

 22   donc d'un changement de politique à 180 degrés pratiqué par eux, n'est-ce

 23   pas ?

 24   R.  Oui, c'est exact. Vucic dit maintenant qu'il ne s'était jamais employé

 25   en faveur d'une Grande-Serbie. Tomo Nikolic souligne constamment la

 26   nécessité d'intégration européenne, et on sait ce qu'il racontait avant, à

 27   savoir que ces intégrations étaient lointaines, éloignées et que --

 28   Mme LE JUGE LATTANZI : Les positions de M. Vucic et Nikolic actuelles ne

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  1   sont pas pertinentes à notre affaire.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Madame Lattanzi, c'est intéressant parce

  3   que M. Glamocanin, dans son interrogatoire principal - et vous n'êtes pas

  4   intervenue à ce moment-là - a déclaré que c'est justement ces deux hommes-

  5   là qui sont la raison principale pour laquelle il était entré en conflit

  6   avec moi et qu'il avait quitté le Parti radical serbe en 1994.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y avait pas qu'eux --

  8   Mme LE JUGE LATTANZI : -- le mettre dans le contexte où cela est arrivé en

  9   1994; pas en ce qui concerne les positions de ces deux hommes, de ces deux

 10   personnes, leurs positions actuelles.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez été impatiente. Vous n'avez pas voulu

 12   attendre l'endroit où je voulais, ou le point où je voulais en venir. Je

 13   voulais d'abord rappeler à M. Glamocanin le fait que ces deux hommes-là

 14   avaient été des nationalistes serbes virulents et qu'ils étaient défenseurs

 15   de ce concept de la Grande-Serbie.

 16   Q.  N'est-ce pas, Monsieur Glamocanin ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et maintenant vous avez mentionné ce facteur argent comme moyen de

 19   soudoyer les hommes politiques pour modifier leurs positions politiques,

 20   modifier leurs options politiques. Alors en votre qualité de personne qui a

 21   de l'expérience d'homme politique et d'intellectuel, est-ce que l'argent

 22   est toujours le facteur déterminant ? Est-ce qu'il y a eu des chantages

 23   vis-à-vis d'hommes politiques, si des services secrets avaient ou

 24   disposaient de choses compromettantes à leur sujet ?

 25   R.  Monsieur Seselj, j'ai vécu ce type de tentative pour ce qui est d'être

 26   soudoyé et ça s'est passé en 1995. Feu Zoran Todorovic m'a convoqué à ce

 27   moment-là et m'a proposé un million de marks pour faire passer le Club de

 28   députés que j'avais créé, une fois que j'ai quitté le Parti radical serbe,

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  1   pour le faire passer, ce Club de députés pour qu'il fasse partie de la

  2   gauche yougoslave unie et de la "Jul," et en récompense il me proposait un

  3   million de marks.

  4   Q.  Je contesterais le chiffre très important que vous avez mentionné à

  5   l'instant en parlant de ces deux hommes, puisque ce qui m'importe ici,

  6   c'est que les services secrets, qu'ils soient serbes ou étrangers, pendant

  7   toutes ces années ont cherché à rassembler des éléments comprometteurs à

  8   l'égard des hommes politiques pour les faire chanter et pour agir

  9   idéologiquement sur eux pour qu'ils changent d'orientation, que ce soit en

 10   1990, 1991, 1992, 1993 ou pendant toutes ces années. Rappelez-vous le

 11   retournement idéologique de Vuk Draskovic. De 180 degrés, il a modifié sa

 12   position, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, c'est comme ça que cela s'est passé. J'ai vu la coopération de Vuk

 14   Draskovic selon cet axe dénué de principes en 1990 avec Slobodan Milosevic.

 15   A l'époque, j'étais à la tête du mouvement que j'ai mentionné, et

 16   nous cherchions un moyen de nous mettre d'accord avec l'organisation de

 17   Novi Pazar pour organiser un rassemblement unique serbe en rassemblant des

 18   représentants des Serbes de tous les pays serbes pour établir quel est le

 19   dénominateur commun de nos intérêts nationaux. Slobodan Milosevic s'est

 20   opposé à ce type d'accord de tous les Serbes, parce qu'il a toujours

 21   souhaité être le numéro un et celui qui allait orchestrer l'activité visant

 22   à satisfaire les intérêts nationaux serbes. Il s'est mis d'accord avec Vuk

 23   Draskovic pour qu'il s'en charge et pour nous éliminer politiquement. Vuk

 24   Draskovic a passé cet accord, et à ce moment-là j'ai eu des entretiens avec

 25   l'ex-adjoint - ou je ne sais plus s'il était à la tête de la Sûreté d'Etat

 26   de Serbie, Janackovic, et c'est lui qui m'en a parlé quand il nous est

 27   arrivé de nous rencontrer à Novi Pazar pour parler de ce grand

 28   rassemblement. Donc au lieu de faire preuve d'un esprit de construction

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  1   pour se doter, lors d'un rassemblement général, d'une politique généralisée

  2   pour tous les Serbes, Vuk Draskovic était subitement devenu le grand ami de

  3   Slobodan Milosevic alors qu'il avait été son grand ennemi précédemment. Et

  4   d'après M. Janackovic, à partir du moment où il a dépensé les sommes très

  5   importantes qu'il avait reçues, il s'est tourné vers une autre source.

  6   Q.  Et M. Glamocanin ? Peut-être que ce sera ma dernière question. Je

  7   vous demande --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce sera la dernière question, parce que le

  9   temps va être terminé. Donc posez votre dernière question.

 10   M. SESELJ : [interprétation]

 11   Q.  Que pensez-vous, Monsieur Glamocanin ? Pour quelle raison jamais

 12   personne n'a pu me faire chanter, moi, jamais personne n'a pu me forcer à

 13   changer d'idéologie, d'orientation politique, de politique du Parti radical

 14   serbe ? Pourquoi jamais personne n'a pu me faire céder à un chantage, même

 15   ici devant le Tribunal de La Haye ?

 16   R.  Monsieur Seselj, sur ce point, j'ai mon opinion. Voilà comment

 17   j'envisage ces choses : Vladan Batic, en particulier, au Parlement serbe,

 18   insiste souvent sur le fait qu'il n'y a rien d'émotionnel dans la vie

 19   politique, tout est rationnel. Mais vous savez, si c'est sans grand amour

 20   porté à leur peuple, à leur pays, les droits de l'homme, l'humanité, le

 21   souhait pour le bien-être de l'humanité entière, si c'est sur ces bases-là

 22   qu'on s'engage dans la vie politique, cette politique ne peut pas porter de

 23   fruits, ne peut pas être quelque chose de constructif ou de bon pour le

 24   peuple. Ça ne peut être que quelqu'un d'égoïste qui se sert de la politique

 25   pour ramasser un maximum de richesses pour lui-même, le maximum de pouvoir.

 26   Et voilà, c'est ce qui se passe en Serbie aujourd'hui.

 27   Vous, vous êtes un homme qui est entré dans la vie politique mû d'un grand

 28   désir d'apporter quelque chose à son peuple. Et je respecte uniquement ce

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  1   type d'homme politique. Hélas, chez nous, en Serbie, dominent aujourd'hui

  2   les égoïstes, qui après, se transforment en criminels et en serviteurs

  3   d'autres Etats, et aujourd'hui ce sont des serviteurs des pays occidentaux.

  4   Q.  Je vous remercie, Monsieur Glamocanin.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Biersay, je suis un peu étonné, parce que

  6   vous avez fait savoir que vous voulez poser des questions supplémentaires.

  7   A ma connaissance, d'après les pratiques suivies devant ce Tribunal, quand

  8   il y a un témoin de la Chambre, chacune des parties pose des questions et

  9   on arrête là. Pourquoi voulez-vous des questions supplémentaires ?

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Ce n'est peut-être pas nécessaire, Monsieur

 11   le Président, pour autant que M. Seselj apporte une précision s'agissant de

 12   la déclaration obtenue par la Défense, que ce témoin a donnée à la Défense.

 13   Il m'a donné des numéros de page d'un livre écrit en cyrillique dans lequel

 14   se trouvent certaines déclarations faites par ce témoin. La question que

 15   j'avais est celle-ci : s'agissant des allégations formulées à propos du

 16   programme politique qu'auraient proposé, apparemment, aussi bien M. Saxon

 17   que M. Pastorre-Stocchi, la déclaration d'août 2008, est-ce la seule qu'a

 18   fournie ce témoin dans laquelle se retrouvent ces affirmations ou est-ce

 19   que il y a d'autres déclarations données à la Défense ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Mme Biersay pose une très bonne question.

 21   Vous avez expliqué ce que l'enquêteur du bureau du Procureur vous a dit

 22   lors des conversations. Et alors, ce qu'elle veut savoir, elle, est-ce que

 23   ça se réfère bien à la date précise du mois d'août 2008 ou à d'autres dates

 24   ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sujet a été évoqué pendant les entretiens

 26   avec M. Paolo Stocchi et avec son collègue pendant les quatre jours où nous

 27   avons eu des entretiens, où ils m'ont interrogé, et pendant les entretiens

 28   avec M. Saxon, un peu moins. On a juste évoqué brièvement cette question

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  1   lorsque Mme Christine Dahl était présente. Elle, ce qui la préoccupait,

  2   c'était l'acte d'accusation contre M. Seselj.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors M. Stocchi, c'était en 2003. Monsieur Saxon,

  4   ça devait être au mois d'août 2008 alors, je présume, Madame Biersay ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec M. Saxon, j'ai eu un entretien le 16

  6   septembre 2006.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : 16 septembre 2006 -- 16 septembre 2006.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Le témoin présente désormais des

  9   affirmations en ce qui concerne M. Saxon et M. Pastorre-Stocchi. Est-ce que

 10   ça se trouve simplement dans la déclaration d'août 2008 ? Donc pas dans

 11   celle de septembre 2007, pas non plus dans celle de février 2008, mais

 12   uniquement après qu'il ait rejoint les rangs du SRS en mars 2008.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que vous avez dit sur les propos que M. Stocchi

 14   vous aurait tenus en 2003 et les propos que M. Saxon vous aurait tenus en

 15   septembre 2006, est-ce que cela figure dans la déclaration que vous avez

 16   donnée aux collaborateurs de M. Seselj; est-ce que ça figure dedans ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout cela peut s'y lire, et une partie des

 18   questions de ce contexte, c'est aussi la partie où M. Stocchi a dit qu'il

 19   collaborait de manière intense avec des hommes placés au pouvoir qui est en

 20   place aujourd'hui en Serbie, en particulier avec M. Sutanovac, qu'ils se

 21   mettaient d'accord sur tout.

 22   Mme LE JUGE LATTANZI : Vous en avez parlé déjà très longtemps,  très --

 23   oui, longtemps. Maintenant, on voulait savoir si ces accusations envers M.

 24   Stocchi et M. Saxon, vous les avez mises seulement dans la déclaration du

 25   mois d'août 2008 ou aussi dans la déclaration de novembre 2007 faite aux

 26   collaborateurs de M. Seselj. On veut savoir cet aspect-là procédural, pour

 27   ainsi dire, pas le contenu. Le contenu, on en a parlé beaucoup.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Madame le Juge, mais tout figure dans cette

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  1   déclaration signée. Maintenant, je ne peux rien y séparer,   extraire,

  2   lorsque j'ai décrit la conversation avec M. Stocchi. J'ai exposé là ces

  3   affirmations, et aussi lorsque j'ai parlé de la conversation avec M. Saxon.

  4   Mais nous avons une déclaration qui reprend le tout où tout cela figure.

  5   C'est la dernière déclaration qui est une déclaration globale qui englobe

  6   toutes ces conversations avec Paolo Stocchi et avec M. Saxon, et avec --

  7   Mme LE JUGE LATTANZI : -- août cette dernière à laquelle vous vous référez

  8   ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je m'en souviens bien.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, le 19 novembre

 11   2007, vous trouverez dans cette déclaration, à la page 71 du livre, c'est

 12   là que Dan Saxon insiste pour qu'on représente Seselj de telle manière

 13   devant le Tribunal de La Haye pour qu'il soit politiquement éliminé, et que

 14   "moi, je pouvais y contribuer considérablement." C'est la déclaration de

 15   2007. Vous avez toutes ces déclarations dans --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 17   Madame Biersay, la réponse à votre question est dans les écritures de M.

 18   Seselj, parce que je les aies sous les yeux grâce aux diligences de la

 19   juriste de la Chambre. Elle m'a communiqué la requête de M. Seselj quand il

 20   avait demandé les mesures de protection. Dans la déclaration qu'il a fait

 21   aux collaborateurs de M. Seselj, effectivement, il y a un passage

 22   concernant les propos que M. Saxon aurait dits. Donc je vous invite à

 23   regarder, puisque je l'ai sous les yeux. Voilà, c'est à la page 57. Bien.

 24   Ça vous convient, Madame Biersay ? Il suffit de regarder la requête, qui a

 25   été traduite en anglais, d'ailleurs.

 26   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je vais maintenant vous

 28   remercier puisque votre audition vient de se terminer -- enfin, j'allais

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  1   vous remercier, mais j'ai totalement oublié que mon collègue avait quelques

  2   questions à vous poser, alors je ne peux pas vous libérer.

  3   On va faire la pause de 20 minutes et on reprendra parce que j'ai mon

  4   collègue qui a des questions.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Moi aussi j'ai des questions.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : J'avais totalement occulté cela, donc je vous prie

  7   de m'en excuser.

  8   Nous faisons une pause de 20 minutes et nous revenons dans 20 minutes.

  9   --- L'audience est suspendue à 10 heures 13.

 10   --- L'audience est reprise à 10 heures 36.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 12   Les Juges ont quelques questions à poser.

 13   Questions de la Cour :

 14   M. LE JUGE HARHOFF : Merci.

 15   [interprétation] Monsieur Glamocanin, contrairement à ce que beaucoup

 16   semblent penser, et éventuellement aussi contrairement à ce que vous, vous

 17   pensez, et ce qui est certain, c'est que c'est contraire à ce que M. Seselj

 18   semble penser, ce Tribunal, la présente Chambre de première instance, ne

 19   traduit pas en justice la nation serbe. Nous n'avons aucun préjudice à

 20   l'égard de la nation serbe, ni à l'égard de la nation croate, pas plus qu'à

 21   l'égard de la nation de Bosnie-Herzégovine d'ailleurs, ou de toute autre

 22   nation. J'ajouterai que nous ne nous livrons pas à la moindre tentative de

 23   condamner ceux qui ont fait la guerre dans les Balkans. Si nous sommes ici,

 24   c'est uniquement et exclusivement à une seule fin, c'est pour poursuivre

 25   ceux qui sont présumés responsables des crimes commis pendant la guerre,

 26   notamment les crimes commis contre des innocents civils qui n'ont pas du

 27   tout participé aux hostilités et qui dès lors étaient protégés par les

 28   conventions de Genève.

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  1   La justice n'est pas mieux desservie, ce n'est pas non plus dans l'intérêt

  2   de la nation serbe de nier, d'essayer d'échapper à la responsabilité qu'on

  3   encourt si, effectivement, de tels crimes ont été commis, si des crimes ont

  4   été commis par des membres des forces armées serbes, par des volontaires.

  5   Je pense que dans l'intérêt même de la nation serbe, pour la paix dans

  6   votre pays, il est dans l'intérêt supérieur de tous de veiller à ce que ces

  7   crimes soient sanctionnés et que leurs auteurs soient punis par la peine

  8   qui s'impose. C'est dans cet esprit que je voudrais vous poser quelques

  9   questions. 

 10   Je ne sais pas si vous avez cette déclaration préalable sous les

 11   yeux. Si ce n'est pas le cas, nous pourrons l'afficher en écran.

 12   En effet, je voulais attirer votre attention sur ce que vous semblez avoir

 13   dit au paragraphe 102. Il se trouve à la page 15 en anglais.

 14   Est-ce qu'on peut montrer le paragraphe 102 en serbe. Peut-on montrer ce

 15   paragraphe au témoin.

 16   Oui, Madame Biersay.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 18   J'ai un exemplaire sur support papier, au cas où ce serait plus

 19   facile pour le témoin.

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, donnez-lui donner la version en

 21   serbe.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Version B/C/S d'une part, et la version en

 23   anglais.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous en prie.

 25   Monsieur Glamocanin, je vais vous demander de faire une lecture silencieuse

 26   du paragraphe 102.

 27   R.  C'est en anglais.

 28   Vous voulez que j'en donne lecture ou est-ce que je réponds ?

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Non. Je voulais simplement que vous

  2   le lisiez pour vous-même. Inutile d'en donner lecture.

  3   Mais dans ce paragraphe, Monsieur Glamocanin, vous semblez laisser entendre

  4   que M. Seselj a motivé les volontaires à tuer et à battre l'ennemi. Vous

  5   avez ajouté, ceci : Il ne m'a jamais dit que les volontaires chetniks

  6   devaient tuer des civils sur le front.

  7   R.  C'est exact. Cette déclaration ne va pas dans ce sens-là. Cette

  8   déclaration dit que les volontaires doivent combattre l'ennemi, et

  9   l'ennemi, ce n'est pas le peuple croate ou le peuple musulman; l'ennemi,

 10   c'est la partie armée de l'armée croate et des unités paramilitaires, et de

 11   même du côté musulman, qui se livrent à des actes ennemis, qui se livrent à

 12   des meurtres, assassinats sur le peuple serbe. Les volontaires, ils

 13   s'engagent contre cet ennemi.

 14   Cette déclaration, elle ne concerne pas du tout les civils, les civils qui

 15   ne font pas partie des activités de guerre. Les déclarations prononcées,

 16   les discours, étaient tout à fait réalistes. Je ne me souviens pas qu'on

 17   ait cité cette donnée devant ce Tribunal, à savoir dès la fin de l'année

 18   1990, par exemple, il y avait un camp sur le mont Igman où on formait les

 19   Moudjahiddines venus du Proche-Orient.

 20   Par ailleurs, ce que vous avez dit dans votre laïus, avant de me poser la

 21   question, je peux vous dire que le peuple serbe est de plus en plus

 22   convaincu que vous menez ce procès de la manière qu'il faut, que vous êtes

 23   d'une grande intégrité, et que vous allez prendre en compte tous les

 24   éléments avant de vous prononcer. Vous allez prendre en compte tous les

 25   faits valables, que vous avez une grande compétence dans le domaine

 26   juridique, que vous respectez les principes de la loi.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je suis content de l'entendre,

 28   Monsieur Glamocanin, mais je voudrais revenir à votre déclaration

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  1   préalable. Au paragraphe 102 plus exactement, en effet, tout en étant

  2   d'accord avec l'idée que vous avez exprimée selon laquelle il ne faut pas

  3   prendre les civils pour cibles pendant un conflit armé, ce n'est pas tout à

  4   fait ce que vous dites au paragraphe 102, car j'ai l'impression que ce que

  5   vous dites dans ce paragraphe, c'est que M. Seselj ne vous a jamais dit, à

  6   vous, à vous, que les volontaires chetniks devaient tuer des civils sur le

  7   front.

  8   Aussitôt, une question s'impose, vient à l'esprit, quand vous exprimez cet

  9   avis dans votre déclaration préalable : Est-ce que M. Seselj vous a dit

 10   qu'il avait donné l'ordre aux Chetniks de ne pas tuer de civils ?

 11   R.  Oui, c'est ce qu'il a toujours eu le soin de souligner, M. Seselj. Je

 12   vous ai dit de quelle manière on envoyait les volontaires rejoindre les

 13   unités de la JNA. Cela se passait de la manière suivante : souvent on les

 14   amenait à l'église pour qu'ils prêtent serment en disant qu'ils ne vont

 15   combattre que de manière chevaleresque, sans violer aucune règle. Dans ce

 16   sens-là, ce sens profondément moral, M. Chetnik s'est adressé aux

 17   volontaires lors de ce grand rassemblement à Belgrade. En fait, j'ai

 18   assisté à deux rassemblements de ce type, où M. Seselj a souligné les

 19   grandes traditions de l'armée serbe et du Mouvement chetnik, à savoir de ne

 20   pas tuer les faibles et les impuissants, de bien traiter les civils.

 21   Je saisis l'occasion, puisque j'ai déjà parlé d'un changement dans

 22   l'opinion du peuple serbe à l'égard de cette Chambre du Tribunal, je

 23   souhaite vous dire qu'il s'est produit ce que tous les Serbes bien

 24   intentionnés souhaitaient. C'est M. le Président Antonetti, qui suscite de

 25   grandes sympathies parmi les Serbes, vu comment est dirigé ce procès avec

 26   tous les soins portés sur les droits de l'accusé, le peuple serbe retrouve

 27   la confiance et pense que les Français sont nos amis, comme

 28   traditionnellement nous avions l'amitié entre ces deux peuples.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Nous pourrons y revenir à cela quand

  2   je serai à la fin des questions que j'ai à vous poser. Il y a une chose que

  3   je souhaite établir ici. Je voudrais savoir si vous déclarez ici, dans le

  4   cadre de votre audition, que vous avez entendu M. Seselj dire aux

  5   volontaires alors qu'il les préparait au départ pour la ligne du front,

  6   est-ce que vous lui avez entendu dire aux volontaires qu'ils ne devaient,

  7   en aucune circonstance, tuer des civils innocents ? Est-ce que vous

  8   pourriez le vérifier ou est-ce que vous n'en avez pas un souvenir très net

  9   ?

 10   R.  Je peux confirmer cela de manière tout à fait claire. J'étais présent

 11   lors de ces rassemblements, lorsque le Pr Vojislav Seselj s'adressait aux

 12   volontaires avant qu'ils ne rejoignent les rangs des unités de la JNA.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Ceci soulève deux petites

 14   questions avant de passer à autre chose. Première question : savez-vous si

 15   ces discours ont été enregistrés, si on peut en voir des vidéos ? Est-ce

 16   qu'on peut voir ce qu'il a dit à cette occasion, à ce genre d'occasion;

 17   est-ce possible ?

 18   R.  Je ne sais pas. Ça ne faisait pas partie de mes attributions. M. Seselj

 19   doit le savoir.

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous demande simplement parce que,

 21   vous savez, il se peut que vous le saviez si on avait enregistré ces

 22   discours.

 23   Deuxième question avant de passer à autre chose, c'est la question de

 24   l'ordre. Est-ce qu'à votre avis M. Seselj était en mesure de donner des

 25   instructions, même de donner des ordres aux volontaires quant à la façon

 26   dont ils devaient livrer bataille une fois sur le front ?

 27   R.  Il en a parlé dans ses discours lorsqu'il saluait les volontaires, et

 28   lors de chaque rassemblement il soulignait la tradition de l'esprit

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  1   chevaleresque serbe. Il insistait sur le fait que nous étions, en fait, un

  2   seul et même peuple, avec les Croates et les Musulmans, et qu'un jour cette

  3   affirmation deviendra réalité.

  4   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Glamocanin, vous n'avez de

  5   cesse de revenir à la question de dire que M. Seselj a exhorté les

  6   volontaires à faire montre de chevalerie serbe. Ce n'est pas la même chose

  7   tout à fait que de dire qu'ils n'ont pas le droit d'attaquer ni de tuer des

  8   civils innocents. C'est pour ça que je vous repose ma question, simplement

  9   pour m'assurer que je vous ai bien compris : est-ce que M. Seselj,

 10   lorsqu'il s'adressait aux volontaires, disait spécifiquement qu'il parlait

 11   des civils, il ne parlait pas simplement de l'esprit chevaleresque serbe,

 12   mais qu'il parlait des civils et qu'il a dit à ses volontaires de ne jamais

 13   tuer de civils ? Il faut que ceci soit très clair. Vous êtes un homme de

 14   loi. Je vous demande d'être précis dans la réponse que vous allez me

 15   donner. 

 16   R.  Je serai précis.

 17   M. le Professeur Seselj disait que nous ne devions pas nous comporter comme

 18   nos adversaires, comme les Oustachi. Que nous ne devions pas tuer des

 19   civils ou des impuissants. En tant que voïvode chetnik : "Je vous interdis

 20   de faire cela. Vous devez défendre l'honneur de la tradition serbe." C'est

 21   ce qu'il disait dans ses discours. Je me souviens d'une occasion où il nous

 22   a donné lecture de toutes ces conventions sur les règles de la guerre, la

 23   convention de Genève et les autres.

 24   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 25   Monsieur Glamocanin, passons au paragraphe suivant de votre déclaration, le

 26   paragraphe 103. Je vous demande de le relire.

 27   Dans cette partie-ci de votre déclaration préalable, vous semblez suggérer

 28   que M. Seselj avait bien conscience de l'effet que ces discours faisaient

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  1   sur les volontaires qui allaient partir au front, et qu'il était conscient

  2   des conséquences qu'auraient ses discours incendiaires, parce que c'est un

  3   homme brillant, intelligent, et qu'il savait ce qu'il disait, ce qu'il

  4   faisait. Si on fait une lecture simple de cette déclaration que vous faites

  5   ici, est-ce que ceci suggère que M. Seselj savait bien qu'en parlant comme

  6   il l'a fait, de façon très haute en couleur, de façon très inspirée, il

  7   savait que certains de ces volontaires allaient être tellement survoltés

  8   une fois sur le front qu'il était possible qu'ils commettent des crimes.

  9   Quelle serait votre réaction ? Là, je prends vraiment au premier degré

 10   votre déclaration.

 11   R.  Vous savez, de la manière dont je le vois, et j'en suis certain, c'est

 12   que M. Seselj voulait faire appel à l'esprit chevaleresque dans l'esprit de

 13   chacun des volontaires. Il voulait qu'ils soient de véritables combattants

 14   pour la liberté de leur peuple, et non pas qu'ils agissent dans un esprit

 15   de revanche et de vengeance. Il disait toujours dans ses discours que nous

 16   ne devions pas nous comporter comme nos adversaires, comme les Oustachi,

 17   nous ne devions pas tuer des impuissants et des civils. Il souhaitait

 18   éveiller la volonté de combattre et de s'attaquer à ceux qui tuaient,

 19   abattaient le peuple serbe. Il ne faisait pas appel à un sentiment de

 20   vengeance ou à un sentiment destructif. C'est ce qu'il mettait toujours en

 21   exergue.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous nous dites, dès lors,

 23   qu'effectivement le fait que l'ennemi a commis des crimes contre les civils

 24   serbes, que cette question a été discutée, a été soulevée par M. Seselj.

 25   Est-ce qu'on en a discuté, est-ce que cette question a aussi été soulevée

 26   au sein du parti dirigeant du parti

 27   SRS ?

 28   R.  Mais vous savez, l'ensemble des activités visait à envoyer des

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  1   volontaires, sur la base des souffrances des Serbes, dans la région de

  2   Vukovar. Nombre de civils ont été tués et chassés et avant cela aussi, en

  3   Slavonie occidentale. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de crimes commis du

  4   côté des Serbes, mais je suis certain que pour l'essentiel c'était commis

  5   par des Serbes de ces régions. Vous avez un homme à qui on a tué un enfant

  6   ou une mère ou un père. Il ne se contrôle plus. C'était sur cette base-là

  7   que tout le malheur s'est produit, donc sur le plan local, dans la

  8   population locale. Nous n'avons pas envoyé des volontaires de Serbie pour

  9   tuer des civils ou des impuissants, mais pour défendre nos compatriotes

 10   dans ces contrées de la Croatie, ensuite en Bosnie-Herzégovine.

 11   Comment ne pas envoyer des volontaires en Bosnie-Herzégovine alors que,

 12   comme je l'ai déjà dit, à la fin de 1990 vous avez déjà un camp de

 13   Moudjahiddines, ceux avec des turbans noirs, avec des sabres, avec leur

 14   tenue, leur robe ? Ça, c'était terrible. Vous savez ce qui a été le plus

 15   atroce ? On a vu des Serbes enchaînés, emmenés à Sarajevo. Mais c'était des

 16   temps très malheureux, un concours de circonstances très malheureuses où il

 17   a fallu qu'on sauve notre peuple.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous l'ai déjà dit, Monsieur

 19   Glamocanin, je n'ai aucune objection quant à l'idée d'envoyer des

 20   volontaires sur la ligne de front, et je suis sûr que les forces armées

 21   serbes et que les volontaires serbes ont été très braves pendant la guerre.

 22   Mais je le répète, la question qui se pose ici ce n'est pas de savoir s'il

 23   était correct ou pas de mener ces guerres. La seule question qui se pose

 24   ici, c'est de savoir comment on va traiter les crimes dont on sait

 25   désormais qu'ils ont été commis dans ce procès comme dans d'autres dont a

 26   connu ce Tribunal. Nous avons reçu vraiment amplement d'éléments de preuve

 27   qui montrent que des deux côtés il y a eu des civils innocents qui ont été

 28   torturés, qui ont été tués.

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  1   Il y a un instant - d'ailleurs vous l'avez confirmé en disant que vous

  2   acceptez le fait que du côté serbe on a commis des crimes aussi - mais vous

  3   avez ajouté que si des Serbes ont commis des crimes sur des Croates ou des

  4   Musulmans, il est certain que ce ne sont pas les volontaires qui ont commis

  5   ces crimes. Vous vous souvenez avoir dit cela ?

  6   R.  Je m'en souviens.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Parmi les dirigeants du SRS, est-ce

  8   qu'on a discuté du fait s'il était possible que certains volontaires

  9   auraient commis des crimes ? Est-ce qu'on n'a jamais posé la question ? Je

 10   vous la pose parce que je suis curieux, je veux d'abord savoir si vous avez

 11   discuté de cette possibilité, et je veux savoir aussi ce que vous auriez

 12   fait si on avait porté à votre connaissance pendant la guerre,

 13   qu'effectivement des crimes avaient été commis par des volontaires serbes.

 14   Comment auriez-vous réagi ? Est-ce que vous auriez pris des mesures pour

 15   essayer de veiller à traduire ces personnes en justice, en tout cas pour

 16   les chasser du SRS, est-ce qu'on aurait fait quelque chose ?

 17   R.  Ils seraient certainement expulsés du parti si tant est que c'étaient

 18   des membres du Parti radical serbe, et ils auraient été biffés de la liste

 19   des volontaires. Et je suis certain qu'ils auraient été mentionnés auprès

 20   des autorités de la JNA, ensuite de la police. Nous ne voulions pas avoir

 21   de souillures sur notre parti pour voir des volontaires à nous commettre

 22   des crimes.

 23   Je ne peux pas affirmer qu'il n'y a pas un seul volontaire à avoir

 24   commis de crime, mais je ne peux pas non plus affirmer qu'il y ait eu des

 25   crimes de commis par l'un quelconque d'entre eux. Mais je vous affirme que

 26   ce type de mesures aurait certainement été pris à leur encontre.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] C'était exactement pour cela que je

 28   vous ai posé la question. Je voulais savoir s'il y avait un principe qui

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  1   existait au sein du SRS, selon lequel si jamais des choses avaient été

  2   faites, il y aurait des sanctions. Et visiblement il y en avait. C'est ce

  3   que vous avez dit, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact. Nous ne voulions pas nous affirmer en tant que parti sur

  5   des crimes, mais nous voulions être affirmés du point de vue de la défense

  6   de notre peuple, connaître une affirmation de la bonne façon.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

  8   Glamocanin.

  9   Dans le paragraphe suivant, c'est-à-dire le paragraphe 104, vous semblez

 10   suggérer que le fait de faire la guerre - et c'est d'ailleurs repris dans

 11   les paragraphes 105 et 106 - vous semblez dire que ce problème de la guerre

 12   était quelque chose qui, à votre avis, devait d'abord être accepté par la

 13   communauté internationale. Je ne vous comprends pas très bien lorsque vous

 14   dites cela. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire par cela ?

 15   R.  Vous avez dit quels paragraphes, excusez-moi.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Les paragraphes 104, 105 et 106 de

 17   votre déclaration. Veuillez, s'il vous plaît, en prendre connaissance

 18   rapidement. Vous semblez dire dans ces paragraphes qu'à l'époque l'idée

 19   générale était qu'il ne fallait pas faire la guerre à moins que cette idée

 20   soit acceptée par la communauté internationale ?

 21   R.  Par là, M. Seselj voulait dire que nous ne devions pas conduire une

 22   guerre contre le droit des autres peuples, c'est dans le cadre de ce qui

 23   constitue le droit du peuple serbe et des autres peuples qu'il convient de

 24   se situer. Donc nous avions le droit de défendre notre peuple, mais non pas

 25   conquérir la Croatie ou la Bosnie-Herzégovine pour en faire des terres

 26   serbes. Il faut dissocier cette question du concept de la Grande-Serbie. La

 27   Grande-Serbie, c'est un concept prévoyant une phase évolutive, des

 28   centaines d'années peut-être, ça, ce sont des circonstances de guerre, et

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  1   M. Seselj a bien englobé les choses. La Serbie est entrée en conflit avec

  2   la communauté internationale, mais c'est le moins du monde que c'est la

  3   faute de la Serbie. Nous en avons quand même subi des conséquences graves,

  4   ce Tribunal-ci est la résultante de notre conflit avec la communauté

  5   internationale et de la politique dénuée de principes de la part de la

  6   communauté internationale.

  7   Et le Dr Seselj voit le problème de la bonne des façons, c'est-à-dire

  8   qu'il convient de conduire la guerre pour la défense du peuple serbe

  9   uniquement.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie de votre réponse.

 11   Je ne souhaite pas me lancer dans un grand débat avec vous à propos

 12   de politique, parce que ce n'est pas la raison qui nous a réunis ici, mais

 13   il y a quelque chose qui m'a étonné dans ce que vous venez de dire. Vous

 14   avez dit que d'un côté vous ne voulez en aucun cas empiéter sur les droits

 15   d'une autre nation, mais que d'un autre côté, vous dites que vous étiez là

 16   pour lutter pour la cause serbe et pour obtenir la terre serbe. Ça me

 17   paraît un peu contradictoire ces deux affirmations.

 18   Mais je ne veux pas qu'on se lance dans un grand débat politique, mais

 19   j'aimerais juste vérifier si ces propos sont bien les vôtres, c'est bien ce

 20   que vous avez dit ?

 21   R.  Monsieur le Juge, nous n'avons pas créé la République de la Krajina

 22   serbe, nous radicaux. C'est le peuple serbe qui l'a créée dans cette

 23   région. Et le peuple serbe dans cette région a considéré que c'était la

 24   seule façon de préserver la vie de cette population serbe. Nous n'avons

 25   fait qu'aider notre population. Que la population serbe ait eu raison,

 26   l'expulsion de la population serbe de Croatie le prouve. On parle de 200

 27   000, 300 000, mais croyez-moi bien que c'est 500 000 serbes qui ont quitté

 28   la Croatie du fait de la politique conduite par Franjo Tudjman et ces

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  1   autorités nouvelles en Croatie. Ils ont eu peur de Paraga qui,

  2   publiquement, avait présenté un programme qui s'appuyait sur le programme

  3   de la République indépendante de Croatie de Pavelic, à savoir un tiers

  4   devait être catholicisé, un tiers devait être tué et un tiers expulsé.

  5   C'est ce que redoutait le peuple serbe. Et il a créé cette République de la

  6   Krajina Serbe que nous avons aidée, nous autres, radicaux, ainsi que l'Etat

  7   de Serbie. En Bosnie-Herzégovine, les Serbes de là-bas ont créé une

  8   Republika Srpska que nous avons également été aider. Nous, les radicaux,

  9   n'avons pas créé cela.

 10   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Monsieur Glamocanin, ensuite au paragraphe 107, vous dites : "J'avais peur

 12   que Seselj soit préparé à faire de la Serbie une victime." Je pense qu'en

 13   effet, M. Seselj nous l'a confirmé à plusieurs reprises, en effet, les

 14   Serbes sont finalement les victimes de tout cela. Donc vous nous confirmez

 15   que vous aviez peur que Seselj soit préparé à faire de la Serbie une

 16   victime ? Pourquoi aviez-vous si peur ? Est-ce que c'était une position

 17   erronée, est-ce que c'est vrai, en revanche ? Est-ce que vous étiez

 18   d'accord avec lui ou quoi ?

 19   R.  Les Serbes ont été la victime de toutes ces circonstances, en effet,

 20   circonstances qui se sont instaurées sur ce territoire de l'ex-Yougoslavie,

 21   parce que les Serbes étaient présents dans cinq républiques et dans deux

 22   provinces, et avec le démantèlement de la Yougoslavie, les Serbes se sont

 23   vus brisés. Ils sont restés sans un Etat commun, donc il convenait de

 24   rechercher des solutions favorables pour les Serbes aussi, et bon nombre de

 25   solutions préconisées par la communauté internationale en bonne partie se

 26   faisaient au détriment des Serbes.

 27   Je ne sais pas quel a été le fond de ma réflexion ici, mais en tout

 28   état de cause, le Dr Seselj a toujours été favorable à la défense de la

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  1   population serbe, il n'a pas été favorable à une défense qui conduirait au

  2   génocide de ce peuple serbe. Il était favorable à la défense de la

  3   République de la Krajina serbe et de tout le reste, mais lorsque cette

  4   République de la Krajina serbe a périclité, nous n'avons pas envoyé des

  5   volontaires pour aller se battre contre les Croates.

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais m'assurer que je vous ai

  7   bien compris. Je vous ai demandé pourquoi vous avez dit, dans votre

  8   déclaration, que vous aviez peur que Seselj pourrait vraiment utiliser

  9   cette image de victime ?

 10   R.  Je n'arrive pas à me souvenir ce que j'avais eu à l'esprit. Ceci me

 11   semble plutôt étrange. Mes réflexions ne sont pas allées dans ce sens, à

 12   savoir que Seselj aurait été prêt à sacrifier la Serbie.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : Deux petites questions.

 16   Vous nous avez parlé, en répondant au Juge Président de cette Chambre, des

 17   rapports du Parti radical serbe, de Seselj en particulier -- M. Seselj en

 18   particulier, avec M. Karadzic et M. Milosevic hier. Je voudrais savoir si

 19   vous en savez quelque chose à propos des rapports entre M. Seselj et Arkan.

 20   R.  Pour autant que je le sache, et c'est l'opinion que je défends moi-

 21   même, c'est que M. Seselj n'a pas eu beaucoup de respect pour M. Arkan, la

 22   seule chose de valable chez Arkan c'était sa disponibilité pour ce qui

 23   était de défendre le peuple serbe. Mais à dire vrai, je n'ai pas droit de

 24   vue pour ce qui est des activités de M. Arkan pendant la guerre.

 25   Mme LE JUGE LATTANZI : Donc il y avait un but commun poursuivi par M. Arkan

 26   et le Parti radical serbe, les volontaires d'Arkan et les volontaires du

 27   Parti radical ?

 28   R.  Madame Lattanzi, on ne pouvait pas coopérer avec Arkan. Arkan était une

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  1   personne exclusiviste. Il ne voulait que commander, il voulait commander

  2   l'armée et les unités de volontaires. Bien sûr, nous, nous n'acceptions pas

  3   cela. Nos volontaires ont été envoyés là-bas pour se soumettre à la

  4   discipline et à la structure intégrale au programme et aux campagnes

  5   militaires de la JNA. Arkan, lui, était différent. Il voulait commander aux

  6   officiers. On le sait, c'est un cas notoirement connu d'avoir eu vent des

  7   menaces qu'il avait proférées à l'égard de généraux. C'était certes un

  8   homme courageux, il avait instauré une très grande discipline et un ordre

  9   strict au sein de ses unités à lui. Mais c'était un grand individualiste,

 10   pour le moins qu'on puisse dire.

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : Oui, je comprends cela, que dans les opérations

 12   militaires, il y avait ce commandement peut-être.

 13   Mais ici dans notre affaire, on n'a pas une responsabilité de commandement.

 14   Donc je me référais seulement au plan, au programme qui était derrière, aux

 15   activités, indépendant de comment les activités étaient conduites par les

 16   volontaires d'Arkan ou par les volontaires de M. Seselj -- excusez-moi, du

 17   Parti radical serbe. Le but que j'ai compris de votre réponse à ma première

 18   question, le but était commun.

 19   R.  Le but était commun seulement du point de vue de la défense du peuple

 20   serbe en Croatie et dans les autres régions où le peuple serbe était

 21   menacé, mais nous n'avions aucune coopération au niveau des partis avec

 22   Arkan ou à quelque autre niveau de coopération que ce soit.

 23   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci. Encore une petite dernière précision.

 24   Vous nous avez dit hier ou aujourd'hui, je ne me rappelle pas, que vous

 25   êtes allé au printemps dernier de cette année, de votre propre initiative,

 26   auprès du Parti radical serbe pour rentrer dans les rangs du Parti radical

 27   serbe. Bien. Maintenant, je voulais

 28   savoir : je ne pense pas que c'est vous qui vous êtes proposé comme

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  1   candidat député régional. Quelqu'un du Parti radical serbe -- de la

  2   direction du Parti radical serbe vous a proposé cela. Est-ce que vous

  3   pourriez nous dire qui spécifiquement du Parti radical serbe vous a proposé

  4   cette candidature ?

  5   R.  Personne ne m'a rien proposé. A l'occasion d'entretien avec le

  6   président du comité départemental de Pancevo, c'est avec lui que je me suis

  7   entretenu, et nous sommes arrivés ensemble à une conclusion qui était celle

  8   de dire que je devrais m'engager en faveur de la réalisation du programme

  9   de ce Parti radical serbe. A l'occasion de cette conversation, j'ai dit que

 10   je considérais que ce programme du Parti radical serbe et sa politique,

 11   indépendamment de la scission qui est intervenue entre-temps, comme étant

 12   le seul programme, aux côtés du programme du Parti du Dr Vojislav

 13   Kostunica, qui était susceptible de conduire à une politique de

 14   rétablissement de la Serbie, parce que la Serbie est dans une situation

 15   très difficile.

 16   Par exemple - et je vais vous donner deux exemples - à Nis, il n'y a que 70

 17   000 personnes qui ont un emploi. Il y a 40 000 personnes qui n'ont pas

 18   d'emploi. Et en application du programme adopté dans la municipalité de

 19   Nis, en 2009, il restera sans travail 15 000 personnes. Donc ceux qui ont

 20   un emploi seront au même nombre que ceux qui n'ont pas d'emploi. Ça fait 50

 21   %. Combien de jeunes il y a sans travail, c'est catastrophique. 

 22   INTERVENANT NON IDENTIFIÉ : [interprétation] Deuxième exemple --

 23   Madame, je vous en prie. Un autre exemple.

 24   Mme LE JUGE LATTANZI : Je vous pose des questions, vous devez répondre à

 25   ces questions, s'il vous plaît. Une petite précision seulement, et c'est

 26   tout. Qui est le président du Parti radical serbe de Pancevo ? Est-ce que

 27   vous pourriez nous donner son nom ?

 28   R.  Le président de ce comité départemental, c'est Petar Jojic, un avocat,

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  1   un collègue, un ami, une connaissance avec qui je me suis entretenu souvent

  2   et que je rencontre tous les jours. Mais la décision, c'est moi qui l'ai

  3   prise. Ce n'est pas Petar Jojic qui a eu à me convaincre. Le temps des

  4   tentatives de persuader quelqu'un est, il y a longtemps, révolu.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie aussi.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame Biersay.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous remercie.

  9   L'Accusation demande le versement de la déclaration qui porte une cote MFI

 10   à l'heure actuelle, le MFI 688.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre délibèrera sur la question.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : On va délibérer.

 14   Oui, Monsieur Seselj.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] On ne peut verser au dossier une déclaration

 16   qui aurait prétendument été accordée aux enquêteurs de La Haye parce que le

 17   témoin a témoigné viva voce. Avec un témoignage viva voce, il n'est pas

 18   question de verser au dossier sa déclaration.

 19   Deuxièmement, le témoin lui-même a contesté l'authenticité de sa

 20   déclaration et il a dit à plusieurs reprises ici même qu'on ne lui a pas lu

 21   la teneur de cette déclaration avant qu'il ne la signe. Le témoin a aussi

 22   contesté la teneur concrète de cette déclaration à plusieurs endroits.

 23   C'est pourquoi, si l'on s'en tient aux principes en matière de droit,

 24   ceci ne saurait être versé au dossier. Si vous avez l'intention

 25   d'enfreindre de façon flagrante les principes, vous pouvez verser ceci au

 26   dossier tout comme bien des choses encore.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Comme je l'ai dit, la Chambre délibérera

 28   sur cette question.

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  1   Monsieur Mundis. Pour la Chambre, le témoignage est terminé.

  2   M. MUNDIS : [interprétation] Je n'ai que deux observations à faire,

  3   Monsieur le Président, et on peut les faire soit en présence du témoin,

  4   soit une fois le témoin sorti du prétoire.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  6   Je vais d'abord remercier M. le Témoin d'être venu à la demande de la

  7   Chambre. Donc je formule mes meilleurs vœux pour votre retour dans votre

  8   pays, et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous

  9   raccompagner.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de ces vœux.

 11   [Le témoin se retire]

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

 13   M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   L'Accusation, en ce qui concerne le dernier point soulevé par M. Seselj,

 15   l'Accusation considère qu'il y a des motifs tout à fait corrects et

 16   raisonnables pour admettre la déclaration et la verser au dossier. Ensuite,

 17   on ne peut absolument pas dire que d'admettre cette déclaration serait une

 18   violation du Règlement de procédure et de preuve. Il y a une jurisprudence

 19   qui existe en ce qui concerne l'admissibilité des témoignages écrits,

 20   surtout lorsque le témoin était là en prétoire et qu'il a subi

 21   interrogatoire et contre-interrogatoire.

 22   Maintenant, avant que nous n'ayons le témoin suivant, j'aimerais aborder un

 23   point très rapidement, les allégations faites par M. Glamocanin en ce qui

 24   concerne les interviews et en ce qui concerne les membres du bureau du

 25   Procureur qui ont recueilli ces dépositions.

 26   L'Accusation rejette catégoriquement toute allégation de ce type --

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

 28   M. MUNDIS : [interprétation] Je tiens à terminer, s'il vous plaît, Monsieur

Page 12974

  1   Seselj, laissez-moi terminer. Laissez-moi terminer. Laissez-moi terminer.

  2   Laissez-moi terminer.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, non, non.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, Monsieur Seselj, laissez M. Mundis

  5   parler et vous répliquerez.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Quand le Procureur me coupe la parole, vous ne

  7   me dites pas, "Laissez l'accusé terminer, puis vous répliquerez." Monsieur

  8   le Président, dès que le Procureur se lève, vous m'interrompez.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, bien souvent quand vous intervenez,

 10   je vous laisse intervenir. Donc il se trouve que là, le Procureur veut dire

 11   quelque chose suite à ce qu'a dit le témoin. Libre à lui de dire ce qu'il a

 12   à dire, puis vous direz certainement une réponse.

 13   Alors Monsieur Mundis, je rappelle que nous avons un témoin qui attend,

 14   donc allez vite.

 15   M. MUNDIS : [interprétation] Je serai bref, je serai bref. Mais je vous

 16   remercie de me rendre la parole.

 17   Donc l'Accusation rejette catégoriquement ces allégations qui ont été

 18   faites par ce témoin en ce qui concerne la façon dont les déclarations ont

 19   été recueillies. L'Accusation, sans penser à ce qui risque de se passer à

 20   l'avenir, est tout à fait prête à présenter devant la Chambre tout témoin

 21   ou toute personne qui a été impliquée dans le recueil de cette déclaration,

 22   M. Saxon, M. Pastore-Stocchi, toute personne travaillant pour le bureau du

 23   Procureur peut venir se présenter à la Chambre. On est prêt pour cet après-

 24   midi. Il y a d'ailleurs des prétoires qui sont libres, si vous le voulez.

 25   Cela dit, étant donné qu'il y aura peut-être des témoins par la suite qui

 26   vont soulever le même type d'allégations, nous sommes toujours prêts à ce

 27   que toutes ces personnes qui sont mises en compte pourraient leur permettre

 28   de se présenter devant la Chambre pour s'expliquer.

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  1   Je tiens à dire que, de toute façon, l'Accusation se réserve le droit

  2   d'ajouter ce type de témoins à sa liste de témoins, les personnes qui ont

  3   recueilli les déclarations, si nous pensons en fin de compte qu'il faut

  4   absolument que ces moyens de preuve soient présentés devant la Chambre de

  5   première instance afin que vous sachiez bien ce travail qui a été fait par

  6   le bureau du Procureur.

  7   Donc ces personnes sont disponibles, on peut les citer cet après-midi

  8   si vous voulez, on peut les citer plus tard. Nous prendrons toutes les

  9   mesures nécessaires pour que ces personnes soient entendues par la Chambre

 10   de première instance si vous considérez que cela serait utile ou si nous

 11   avons l'impression que vous allez porter du crédit à ce qu'a dit le témoin.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je vous donne la parole. Comme vous

 13   voyez, la Chambre laisse parler le Procureur ou vous laisse parler, ou

 14   vice-versa. Donc vous avez la parole.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que M. Mundis a présenté jusqu'à présent est

 16   dénué de sens à part entière, du point de vue juridique. Il nous propose

 17   ses collaborateurs comme étant des autorités morales ou professionnelles

 18   indéniables.

 19   Alors il y a plus d'un mois, j'ai présenté deux plaintes au pénal et il y a

 20   eu un complément pour ce qui est de certaines personnes faisant partie du

 21   Procureur, y compris des représentants du bureau du Procureur du prétoire

 22   et autres enquêteurs, en présentant toute une série d'éléments de preuve

 23   pour ce qui est de leur comportement contraire au droit. Mon initiative

 24   pour ce qui est d'un outrage au Tribunal n'a pas été acceptée. Je ne vais

 25   pas interpréter maintenant la décision lue par les Juges de la Chambre,

 26   mais à l'occasion de l'audition du témoin il a été dit que ce type de

 27   questions serait débattu. Les Juges de la Chambre ont eu à l'esprit la

 28   citation de témoins à décharge qui en parleraient, et nous avons vu que

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  1   même les témoins de l'Accusation indiquent qu'il y a eu ce type de

  2   comportement. Ce n'est pas le premier des témoins de l'Accusation qui en

  3   parle.

  4   Le premier des témoins de l'Accusation que vous avez cité à comparaître,

  5   Goran Stoparic, a dit ici que pour ce qui est de sa déclaration ou sa

  6   prétendue déclaration, il a été inséré des passages qu'il n'a jamais

  7   proférés, bien que cela n'ait pas été un témoin qui serait bien intentionné

  8   à mon égard, au contraire. Il a dit qu'il n'avait aucune idée au sujet de

  9   la façon dont cela pouvait figurer, ce type de déclaration où j'aurais, par

 10   exemple, salué, par exemple, à la Hitler au stade des gens qui s'étaient

 11   rassemblés là-bas à un meeting.

 12   D'abord, il y a une pratique qui est standardisée, à savoir on rédige

 13   d'abord en anglais, puis on donne lecture verbalement, et ce n'est

 14   qu'ultérieurement que c'est traduit en serbe et que le témoin n'a jamais eu

 15   l'occasion de voir cette version serbe. Si quelqu'un m'avait donné lecture

 16   de 20 pages, je ne pourrais pas me concentrer non plus. Bien que je me

 17   considère supérieur intellectuellement à tous les témoins de l'Accusation,

 18   je ne peux pas me concentrer pour suivre de façon tout à fait attentive la

 19   lecture de 20 pages. Les gens sont des gens qui sont des types audio ou des

 20   types visuels. Rares sont les gens qui peuvent retenir tout ce qu'ils ont

 21   vu. Je suis visuel, moi, il faut que je lise pour que je puisse me

 22   concentrer sur un texte plus long. Qui parmi vous pourrait écouter

 23   attentivement la lecture de 20 pages ? Pas un seul d'entre vous. Donc c'est

 24   la raison pour laquelle les professeurs à l'universitaire ne donnent pas

 25   lecture. Ils parlent de leur tête, et ils ont toute une série de méthodes

 26   bien établies pour ce qui est de garder l'attention de l'auditoire. Il y a

 27   de l'humour, des anecdotes, des exemples concrets, et ainsi de suite. Qui

 28   est-ce qui est capable d'écouter 20 pages de façon attentive au bout de

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  1   quatre heures d'interrogatoire ? Non, qu'est-ce que je dis, pas quatre

  2   heures, quatre jours de huit heures par jour. Personne n'est capable de le

  3   faire. Vous voulez qu'on verse cela au dossier. Ce n'est la preuve de rien

  4   du tout, d'absolument rien du tout.

  5   Je n'ai rien contre que le Procureur cite à comparaître tous ses employés

  6   ici, mais je suis catégoriquement contre que l'on rallonge, ne serait-ce

  7   qu'une d'heure, le temps mis à la disposition de l'Accusation, parce que

  8   l'Accusation jusqu'à présent a gaspillé, et comment a gaspillé, le temps

  9   qui lui a été mis à disposition en citant des témoins à comparaître alors

 10   qu'ils n'avaient rien à voir avec l'acte d'accusation.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc M. Mundis a dit sa position; vous avez répondu.

 12   La Chambre verra ce qu'il convient de faire.

 13   Comme je l'ai indiqué, il y a un témoin. Comme vous le savez, ça sera le

 14   dernier témoin de ce mois. Alors j'ai cru comprendre ce matin, Monsieur

 15   Seselj, que vous aviez quelques questions à soulever. Alors je préfère que

 16   vous les souleviez maintenant que de telle façon qu'après nous nous

 17   occupions uniquement du témoin. Alors je vous donne la parole.

 18   Après quoi, nous ferons une pause de dix minutes parce qu'il faut

 19   changer la bande, donc on fera une courte pause.

 20   Alors je vous donne la parole.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame, Messieurs les Juge, je pense qu'il

 22   s'agit d'un problème très important. Nous aurons 27 jours de pause. Vous

 23   avez convoqué une audience pour le 8 janvier pour continuer le procès.

 24   Ma situation est la suivante : cela fait deux mois et demi que je n'ai plus

 25   aucune coopération avec mes conseillers judiciaires. J'ai improvisé le

 26   contre-interrogatoire de nombre de témoins en ces deux mois et demi. Je ne

 27   m'en plains pas, je me félicite des résultats de mon contre-interrogatoire

 28   même improvisé. Mais tenez compte du fait qu'il m'est indispensable de

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  1   collaborer avec mes conseillers juridiques. Il faut que je les rencontre au

  2   moins une fois avant la reprise des débats, il faut qu'ils me transmettent

  3   des documents, des informations. Depuis tout ce temps, ils ont continué de

  4   travailler de manière impliquée. Il me faut des éléments d'information

  5   récents, il me faut des déclarations nouvelles.

  6   D'après ce que j'en sais, le greffier s'est adressé au Président du

  7   Tribunal, comme il l'avait annoncé dans sa lettre, lui demandant son

  8   explication, ses instructions pour savoir comment appliquer la décision de

  9   la Chambre. Soi-disant, il m'aurait autorisé à recevoir des messages par

 10   fax et à communiquer avec un collaborateur. Mais cela ne me suffit pas.

 11   Aujourd'hui, j'ai envoyé une lettre au greffier, et je l'informe dans cette

 12   lettre qu'avec mes trois, Zoran Krasic, Zlavko Jerkovic et Boris Aleksic,

 13   mes trois collaborateurs juridiques, et avec Marina Raguz, ma commis à

 14   l'affaire, que je souhaite les voir les 22 et 23 décembre, je souhaite les

 15   recevoir à ce moment-là. Il me faut deux journées entières d'entretien avec

 16   eux pour mettre à plat les documents avec eux. S'il vous plaît, tenez

 17   compte du fait que si la question du financement de ma Défense n'est pas à

 18   régler, je ne vais pas présenter des éléments à décharge. Nous aurons

 19   immédiatement le dépôt du mémoire final en clôture. J'ai demandé à mes

 20   conseillers de s'y appliquer. Plusieurs centaines de pages sont prévues

 21   d'après la jurisprudence que je connais, et je vais me préparer à présenter

 22   une plaidoirie. Donc il me faut coopérer, collaborer avec ces gens.

 23   Donc donnez l'ordre, s'il vous plaît, au greffier que les 22 et 23,

 24   sans encombre, je puisse recevoir ces gens de manière confidentielle,

 25   qu'ils puissent me remettre tous les documents rassemblés. Je vais leur

 26   remettre à mon tour des documents et, ce qui m'est le plus important, les

 27   DVD leur seront remis pour qu'ils puissent transcrire tout sur papier, il

 28   me faut utiliser les feuilles. Je ne peux rien faire sur la base des DVD

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  1   par rapport aux débats déjà --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce que tout ce que vous dites est

  3   immédiatement lu dans les bureaux du greffier, donc ils sont au courant.

  4   Nous comprenons que vous demandez que vos collaborateurs, Jerkovic,

  5   Aleksic, Krasic et Mme Raguz, viennent vous voir les 22 et 23 décembre.

  6   Comme c'est le greffier qui paye les billets d'avion, c'est à lui de voir.

  7   Ça, ce n'est pas compétence de la Chambre.

  8   Concernant M. Aleksic, le greffier vous a demandé d'indiquer le numéro de

  9   téléphone pour que ça soit la ligne privilégiée. Alors ça a été fait, ça

 10   n'a pas été fait, je n'en sais strictement rien. C'était à vous de donner

 11   le numéro de téléphone à M. Aleksic.

 12   La Chambre, elle est d'avis que vous devez continuer à avoir un lien avec

 13   vos collaborateurs. Se pose néanmoins un problème pour M. Krasic dans la

 14   mesure où les informations confidentielles ne peuvent pas lui être

 15   envoyées. En revanche, lui peut vous envoyer tout ce qu'il peut vous

 16   communiquer, voire même vous rencontrer. Donc du point de vue de la

 17   Chambre, il n'y a pas de problème technique sur le fait que vous pouvez

 18   voir ces personnes énumérées.

 19   La Chambre constate que vous n'avez eu aucune difficulté lors des contre-

 20   interrogatoires de tous les témoins, car vous avez une excellente

 21   connaissance de l'ensemble du dossier.

 22   Nous ne savons pas, au mois de janvier, comment vous allez pouvoir

 23   continuer à contre-interroger si vous n'avez pas d'autres moyens, d'autant

 24   qu'il y a un programme qui vous a été communiqué.  Il reste quelques

 25   semaines avant que nous reprenions nos audiences en janvier, ça va

 26   permettre d'une part à vous de bien vous préparer, ça va permettre au

 27   greffier de voir qu'est-ce qu'il peut faire pour que l'exercice même de la

 28   Défense puisse s'exercer dans les meilleures conditions.

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  1   Voilà, c'est tout ce que je peux vous dire à ce jour.

  2   Oui, Monsieur Seselj.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, mais quel document, quel

  4   texte juridique ordonne que Zoran Krasic ne puisse pas avoir un droit de

  5   regard sur des documents confidentiels ? Qu'est-ce qui lui interdit de

  6   consulter les documents confidentiels ? Le greffier m'a interdit d'avoir

  7   des contacts avec lui sans être surveillé, mais le Procureur demande qu'on

  8   lui interdise --

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- consulte la Juriste de la Chambre.

 10   [La Chambre de première instance et la Juriste se concertent]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors comme il y a des dizaines, voire des centaines

 12   de décisions qui sont rendues, il est parfois très difficile d'avoir dans

 13   la seconde la réponse à toutes les décisions.

 14   La Chambre a rendu au mois de novembre une décision que vous avez

 15   eue, dans laquelle MM. Krasic et Jerkovic n'ont plus accès aux informations

 16   confidentielles. Donc cette décision, vous l'avez eue et ça a une

 17   conséquence --

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Jamais je n'ai reçu cette décision.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. C'est le greffier qui a pris cette décision.

 22   C'est le greffier qui a pris la décision. Voilà, donc MM. Krasic et

 23   Jerkovic n'ont plus accès aux informations confidentielles, mais la

 24   décision du greffier était fondée sur une décision antérieure de la

 25   Chambre. Alors je vous demande de regarder à nouveau tout cela. Voilà.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, jamais je n'ai reçu une

 27   telle décision. Le greffe a mis fin à mon droit de communiquer sans

 28   encombre avec mes collaborateurs juridiques. Je ne peux pas les appeler par

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  1   téléphone, par téléphone qui n'est pas surveillé en principe, et rien

  2   d'autre. Il a refusé de subvenir à leurs frais pour se rendre la dernière

  3   fois ici. Le Procureur se met maintenant à demander l'interdiction d'accès

  4   à ces gens à des documents confidentiels.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : En tout cas --

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Seselj, précisons de quoi

  7   nous parlons.

  8   M. le Greffier a décidé de retirer ce privilège avait été donné auparavant

  9   à M. Krasic ainsi qu'à M. Vusic [comme interprété]. Il a pris cette

 10   décision pour de nombreuses raisons, dont des allégations d'intimidation

 11   aux témoins, entre autres. Une fois ce privilège retiré, M. Krasic et M.

 12   Vucic [comme interprété] n'ont plus le droit de recevoir des documents

 13   confidentiels qui concernent votre procès. C'est uniquement M. Aleksic qui

 14   est autorisé à recevoir ces documents confidentiels, qui est votre conseil

 15   privilégié, et c'est le seul que vous avez.

 16   Permettez-moi d'ajouter ceci : il y a une autre implication, ceci veut dire

 17   que quand M. Krasic vient vous voir à La Haye avec M. Aleksic et Mme Raguz,

 18   seul M. Aleksic a le droit d'avoir une conversation qui ne soit pas

 19   supervisée avec vous. Les deux autres -- en tout cas M. Krasic, car je

 20   pense que vous avez encore le droit de voir Mme Raguz sans que ce soit

 21   supervisé. Mais on a retiré cet avantage à M. Krasic, donc il doit vous

 22   rencontrer comme si c'était un visiteur ordinaire; donc il doit être

 23   supervisé.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon collègue vient de vous expliquer la situation,

 25   et je vous renvoie, Monsieur Seselj, à la lettre du 28 novembre 2008 que le

 26   greffier vous a envoyée dans votre langue. J'ai la lettre dans votre

 27   langue, où il expliquait que compte tenu des allégations en cours, MM.

 28   Jerkovic et Krasic ne pouvaient donc plus recevoir des informations

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  1   confidentielles. Et que donc lui, il ne reconnaissait plus un accès

  2   privilégié de vos -- de ces deux conseillers. Voilà, c'est dans la lettre

  3   du greffier.

  4   Vous pouvez contester cela à nouveau, soit auprès du Président, puisque

  5   c'est une décision administrative du greffier. Mais comme vient de vous le

  6   dire mon collègue, il y a au moins deux personnes que vous pouvez voir sans

  7   problème, c'est M. Aleksic et Mme Raguz.

  8   Voilà ce que je voulais vous dire.

  9   C'était le sujet que vous vouliez évoquer.

 10   Comme on était dans ces sujets, comme vous le savez, nous reprendrons les

 11   audiences le jeudi 8 janvier, si je ne me trompe, à 9 heures, donc nous

 12   ferons 9 heures - midi 30, ensuite nous reprendrons à 14 heures 30 - 17

 13   heures, puis vendredi également, étant précisé que nous avons un témoin

 14   viva voce qui est prévu trois heures pour l'Accusation, trois heures pour

 15   vous, donc nous continuerons vendredi, ensuite il y a un 92 ter. Voilà le

 16   programme.

 17   Je suis obligé de faire une pause technique à cause du changement de bande.

 18   Nous reprendrons à midi et à ce moment-là nous allons introduire le témoin

 19   qui bénéficie de mesures de protection. Donc il faut que M. l'Huissier

 20   baisse les rideaux, introduise le témoin pour qu'on évite de perdre du

 21   temps.

 22   Donc nous nous retrouvons à midi.

 23   --- L'audience est suspendue à 11 heures 44.

 24   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 25   --- L'audience est reprise à 12 heures 04.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, nous allons passer en audience

 27   à huis clos pendant quelques instants.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

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  1   le Président.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : M. le Procureur, faites le résumé.

 17   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Le témoin est Musulman de Bosnie. Il

 18   habitait Bosanski Samac. Cette ville comptait entre 3 000 et 4 000

 19   habitants dont environ 2 000 étaient de confession musulmane.

 20   Ce témoin est originaire d'une famille aisée. Il a travaillé comme garçon

 21   de café dans un restaurant, ou serveur dans un restaurant de la localité,

 22   et ceci lui a permis de voir comment a évolué la situation dans le village.

 23   Au début de l'année 1992, ce témoin s'est rendu compte que certains de ses

 24   voisins faisaient leurs bagages, prenaient leurs effets, manifestement

 25   s'apprêtaient à quitter leurs domiciles. Lorsque ce témoin a demandé à l'un

 26   d'entre eux où il partait, la réponse qui lui a été donnée c'est qu'il

 27   partait à la campagne un certain temps.

 28   Dans la nuit du 16 avril 1992, ce témoin travaillait au restaurant. Il n'y

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  1   avait que quelques clients ce soir-là, ce qui était vraiment une chose

  2   inusitée. Il n'y avait parmi les clients aucun Serbe. Alors plutôt que de

  3   fermer le restaurant vers minuit, voire plus tard comme il le faisait

  4   d'habitude, le restaurant était déjà fermé vers 11 heures du soir.

  5   Dans la nuit, entre 2 et 3 heures du matin, ce témoin a entendu des coups

  6   de feu venant de la ville. Il est sorti pour voir ce qui se passait. C'est

  7   alors qu'il a vu un grand nombre de véhicules militaires qui partaient dans

  8   toutes les directions. Le lendemain matin, il a vu des véhicules militaires

  9   et bon nombre de soldats portant l'uniforme de la JNA en ville.

 10   A la Radio Bosanski Samac, qui avait déjà été rebaptisée Radio Srpski

 11   Samac, il a été dit que les autorités serbes avaient pris le contrôle de la

 12   ville de Samac et que tout allait bien se passer. Des gens ont été appelés

 13   plusieurs fois à livrer leurs armes. Il leur a été dit qu'ils ne seraient

 14   pas maltraités. Mais les Croates et les Musulmans que les Serbes

 15   soupçonnaient d'avoir distribué des armes avant le début du conflit, ces

 16   personnes ont été aussitôt arrêtées.

 17   Le 18 avril 1992, les habitants non-Serbes de Bosanski Samac ont reçu

 18   l'ordre, par la Radio Srpski Samac, de se présenter le lendemain matin,

 19   vers 8 heures, au bâtiment de la Défense territoriale. Ceux qui n'allaient

 20   pas se présenter seraient tués sur le champ, a-t-il été dit. Dans ce

 21   bâtiment de la TO, les habitants non-serbes de Bosanski Samac se sont

 22   entendus dire qu'ils devaient se livrer à des travaux forcés, le lendemain.

 23   De plus, ils ont reçu l'ordre de porter un ruban, un bandeau blanc et

 24   qu'ils ne pouvaient pas se déplacer dans la rue en étant plus que deux,

 25   s'ils étaient non-Serbes.

 26   Le lendemain matin, le témoin et les autres non-Serbes de la ville

 27   sont allés au bâtiment de la TO. Ils sont allés au bâtiment de la TO et ils

 28   portaient tous des rubans blancs. Alors qu'ils attendaient à être inscrits,

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  1   ils ont entendu des hurlements qui venaient de prisonniers se trouvant à

  2   l'intérieur du bâtiment.

  3   Au cours des jours qui ont suivi, le témoin et son frère ont dû faire

  4   des travaux forcés, ils ont dû nettoyer la ville, ils ont dû ramasser des

  5   bris de verre, nettoyer des armes. Ils ont aussi été forcés à creuser des

  6   tranchées et à porter des sacs de sable. En une occasion, il s'est trouvé

  7   vraiment pris en plein échange de tirs.

  8   Un jour, ce témoin a vu Sulejman Tihic, un juriste de formation et un

  9   homme politique local, qui balayait la rue devant le poste de police. Les

 10   Serbes se sont moqués de lui et l'ont humilié, parce que lui, homme

 11   instruit, maintenant il devait faire ce genre de basses besognes.

 12   Le 5 mai 1992, le témoin a été arrêté et amené au poste de police où

 13   aussitôt il a été brutalisé par coups de matraque et d'autres moyens par

 14   Stevan Todorovic et d'autres, Stevan Todorovic étant chef de police. On lui

 15   a demandé s'il avait de l'argent, on a voulu avoir sa voiture. On lui a

 16   demandé aussi, en plus, on lui a dérobé ses bijoux en or. Et à la fin,

 17   quand il était ensanglanté, il a été enfermé dans une cellule avec 13

 18   autres Croates et Musulmans. Tous étaient dans un état épouvantable,

 19   ensanglantés, affamés, épuisés.

 20   Le lendemain, deux hommes appelés Lake et Nisa sont venus pour

 21   l'interroger. Ils ont commencé à le rouer de coups. Ils ont exigé qu'il

 22   donne son argent, de l'or; ils l'ont tailladé au cou et aux oreilles, et

 23   Lake a menacé de lui couper les doigts. Ils lui ont

 24   dit : "Tu veux vraiment avoir un Etat musulman au cœur de l'Europe. Ce sera

 25   jamais."

 26   Les jours suivants, différents membres des gardes serbes ont continué

 27   de façon incessante à brutaliser le témoin et d'autres détenus. Le témoin a

 28   été frappé à la tête et à d'autres parties très sensibles du corps, et il

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  1   en souffre encore aujourd'hui. Sa mâchoire a été cassée, il a perdu des

  2   dents. Et un jour, il a subi des sévices sexuels également.

  3   Et quand une délégation de la Croix-Rouge est arrivée vers le milieu

  4   du mois de mai 1992, les prisonniers qui avaient été le plus battus ont été

  5   séparés et enfermés dans des cellules de l'autre côté du couloir. Les

  6   détenus restants ont reçu des couvertures, et quand on leur a posé des

  7   questions, quand la Croix-Rouge a posé des questions, ils n'ont osé rien

  8   dire quant à la réalité de leurs conditions de détention.

  9   Ce témoin et d'autres détenus ont été contraints de participer au

 10   pillage systématique de biens appartenant à des non-Serbes à Bosanski Samac

 11   et aussi alentour. Le 7 juin 1992, alors qu'ils étaient en train de piller

 12   la maison d'un médecin non-Serbe aisé, il a vu une jeune fille croate de 17

 13   ans être violée par environ 10 soldats serbes. Lorsque le témoin est rentré

 14   au poste de police, il a été battu par Lugar, le commandant du Parti

 15   radical serbe, qui s'est servi pour le brutaliser de toutes sortes

 16   d'objets. Il portait une chaîne faite de doigts d'enfants et conduisait une

 17   voiture qui avait été volée à un propriétaire musulman aisé, propriétaire

 18   d'un restaurant de la ville. Alors qu'il était couvert de coups par Lugar,

 19   celui-ci a utilisé toutes sortes d'outils pour le frapper. Par exemple, il

 20   a utilisé une grosse clé à molette pour le frapper, notamment à la tête et

 21   à d'autres parties sensibles de son corps, notamment sa tête et son sexe.

 22   Et pour le frapper au dos, pour lui casser le dos, Lugar l'a soulevé et l'a

 23   jeté sur ses genoux. Il lui a enlevé quatre dents en utilisant une pince.

 24   Il lui a cassé plusieurs dents avec une arme automatique. Et le témoin a dû

 25   être transporté à l'hôpital local où il dû rester pendant un mois, étant

 26   donné son état épouvantable.

 27   A l'hôpital, il a vu d'autres Croates et Musulmans qui avaient subi

 28   des blessures graves de la part de membres des forces serbes dans les

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  1   différents camps prisons de Bosanski Samac. L'un des deux -- Lugar a

  2   également participé à des passages à tabac pour lesquels il a utilisé des

  3   armes, il a donné des coups de pied. Et il a aussi sauté plusieurs fois sur

  4   l'estomac, il s'est jeté de tout son poids sur ce détenu. Un ancien voisin

  5   à lui a succombé quelques jours plus tard de ses blessures dans ses bras.

  6   Lorsque le témoin a été relâché de l'hôpital ou a pu sortir de

  7   l'hôpital le 8 juillet 1992, il était ramené au poste de police où il dû

  8   réparer des voitures. Quelques jours plus tard, il a été emmené par les

  9   gardes vers un village proche pour aller chercher des pièces de rechange,

 10   en tout cas --

 11   L'INTERPRÈTE : Ralentir un peu.

 12   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'ai terminé.

 13   Il a vu l'arrivée d'un groupe de personnes dans un camion. Et le témoin a

 14   vu que Lugar emmenait un homme âgé qui faisait partie de ce groupe et l'a

 15   tué au pistolet.

 16   Mme LE JUGE LATTANZI : Voulez-vous ralentir, s'il vous plaît.

 17   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'ai fini, Madame le Juge.

 18   Je voudrais numéro -- il faudra passer à huis clos partiel. C'est ce

 19   qu'on me rappelle. Est-ce --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Passons à huis clos partiel.

 21   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez

 22   montrer le --

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 24   le Président.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 11   [Audience publique]

 12   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourrions-nous avoir

 13   à l'écran la pièce 2250 de la liste 65 ter.

 14   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qu'on voit à l'écran, s'il vous plaît.

 15   R.  Nous voyons ici la cour de la police, c'est-à-dire du camp, on voit les

 16   garages où nous étions, entre autres, appelés à travailler et à dormir.

 17   Q.  S'agit-il de l'endroit où Lugar vous a roué de coups ?

 18   R.  Oui, précisément là où vous voyez la Golf blanche. Je pense que c'est

 19   une Golf, au milieu. Précisément à cet endroit.

 20   Q.  Ces mauvais traitements ont eu lieu à l'extérieur ?

 21   R.  Oui.

 22   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'aimerais demander le versement de cette

 23   pièce au dossier.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Un numéro pour cette photographie, s'il vous plaît,

 25   Monsieur le Greffier.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document recevra la cote P692.

 27   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Le dernier document que j'aimerais aborder

 28   avec le témoin porte la cote 1734 de la liste

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  1   65 ter. Je voudrais que ce document s'affiche, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Il ne faut pas que le document apparaisse à

  3   l'extérieur.

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Nous pouvons aussi donner une copie papier

  5   au témoin.

  6   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire de quoi il s'agit et si vous

  7   vous souvenez de ce document.

  8   R.  Oui, je me souviens de ce document. C'est une attestation qui atteste

  9   que j'ai fait l'objet d'un échange le 5 novembre; c'est le 6 novembre 1992

 10   que l'attestation a été délivrée.

 11   Q.  Est-ce qu'il y est aussi écrit que vous avez été arrêté avant d'être

 12   relâché ?

 13   R.  Oui. Il est écrit ici que j'avais été placé en détention de la part des

 14   Serbo-Chetniks à Bosanski Samac et le jour où j'ai été échangé.

 15   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais demander

 16   le versement de cette pièce au dossier.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Un numéro pour ce certificat.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P693. Je vous

 19   remercie.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Il conviendrait que ce soit sous pli

 21   scellé.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Sous pli scellé.

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'en ai terminé avec mon interrogatoire

 24   principal.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, je n'ai juste qu'une question.

 26   Questions de la Cour :

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été maltraité. Ça ne fait pas l'ombre d'un

 28   doute. C'est simplement ceux qui vous ont maltraité, car dans la chaîne de

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  1   responsabilité nous devons savoir qui a agi comme cela.

  2   Si je comprends bien, ce fameux Lugar, vous nous avez dit, il avait des

  3   insignes des Loups gris. C'est ça que vous m'avez dit en répondant aux

  4   questions du Procureur. Vous confirmez bien ?

  5   R.  Oui, il était Loup gris et pendant quelque temps, il portait aussi des

  6   insignes des Aigles blancs. D'après ce que j'ai entendu dire, ils étaient

  7   des Loups gris, mais il est arrivé qu'il porte un uniforme avec l'emblème

  8   des Aigles blancs.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : En avril 1992, au moment où il y a les faits qui

 10   commencent, vous, vous êtes arrêté le 5 mai 1992. Avril, mai, juin 1992 -

 11   c'est toujours la même question que je vous pose, puisque je l'ai posée

 12   tout à l'heure - y avait-il dans cette localité le Parti radical serbe en

 13   tant que parti politique qui avait pignon sur rue ou peut-être pour vous

 14   aider, il y avait ce qu'on appelait des Chetniks ? Vous pouvez nous les

 15   décrire.

 16   R.  Pour ce qui est de la situation politique, je ne saurais pas vous en

 17   parler, mais il me semble avoir entendu dire qu'il y avait le Parti radical

 18   serbe. Mais pendant la guerre elle-même, pendant que j'étais dans le camp,

 19   pour ainsi dire, il m'est arrivé souvent de travailler à l'extérieur et

 20   souvent, j'ai vu des membres des Chetniks qui s'appelaient, eux-mêmes, ils

 21   se disaient Chetniks. Je les ai vus. C'est la raison pour laquelle j'ai

 22   mentionné M. Bozic parce que je savais qu'il était un radical. Alors, est-

 23   ce que le parti existait, j'ai entendu dire que oui, mais je ne pourrais

 24   pas vous donner l'information exacte.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant M. Bozic, comment saviez-vous qu'il était

 26   membre du Parti radical serbe ? Comment vous le saviez ?

 27   R.  Parce que sa fille, Georgina, elle-même, elle était membre du Parti

 28   radical. J'avais été camarade d'école avec elle avant et il m'est arrivé de

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  1   l'apercevoir un jour en uniforme de camouflage avec un fusil automatique

  2   près du camp et c'est elle qui m'a dit qu'elle était membre du Parti

  3   radical. Après, j'ai appris que son père lui aussi était membre du Parti

  4   radical. Il me semble avoir entendu dire par la suite, plus tard, qu'il

  5   était toujours membre du Parti radical à Samac.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : La fille qui est en uniforme de camouflage, c'est à

  7   quelle période vous l'avez vue, quelle année, quel mois ?

  8   R.  C'était au début, quand on m'a capturé. Je ne saurais pas vous dire la

  9   date, je n'oserais pas vous dire la date, mais c'était vers le début, quand

 10   on m'a placé en détention. C'était en mai à peu près, à partir du 5 mai à

 11   un moment.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Là, elle, elle était en tenue de camouflage, cette

 13   fille ?

 14   R.  Elle était en uniforme de camouflage. Elle avait un béret, un couvre-

 15   chef.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Elle avait un béret. Bien.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Témoin.

 18   Dans votre déclaration, vous expliquez aussi qu'à un moment donné, un

 19   certain nombre de prisonniers avec qui vous vous trouviez ont été condamnés

 20   par erreur afin que dans le cadre de l'échange, on puisse échanger un

 21   criminel endurci contre deux Serbes, par exemple, dans le cadre des

 22   échanges Croates et Musulmans contre Serbes. Vous nous dites qu'en ce qui

 23   vous concerne on vous a condamné à 25 ans dans ce but même de faire

 24   augmenter votre valeur, si je puis dire, dans le cadre des échanges.

 25   J'aimerais savoir si vous avez jeté les yeux sur ce faux jugement qui vous

 26   a été infligé ?

 27   R.  Non, je ne l'ai pas vu. J'ai dit cela dans une de mes déclarations

 28   antérieures. Je n'ai pas vu ces jugements et cela s'est produit à

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  1   Bijeljina. A Bijeljina Batkovic, je ne m'y suis pas rendu, mais j'ai

  2   entendu dire qu'on m'a condamné à 25 ans et j'ai entendu dire que nous, les

  3   civils, à qui on a imputé des choses faussement attribuées, des choses

  4   comme quoi on aurait été des soldats contre le peuple serbe et de cette

  5   manière-là, ils faisaient monter notre prix pour la raison suivante, au

  6   moment de l'échange, ils disaient, par exemple, ils pouvaient dire : "Nous

  7   en avons un" - je ne sais pas - "qui a été au front," pour pouvoir en

  8   sortir un maximum de leurs prisonniers dans l'échange.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je comprends. Comment avez-vous eu

 10   vent de cette condamnation à votre encontre ?

 11   R.  Je pense que c'est Goran Blagojevic qui me l'a dit plus tard parce que

 12   lui, à ce moment-là, il me semble qu'il a été juge à Bijeljina ou quelque

 13   chose de cet ordre. Il a travaillé auprès du tribunal à Bijeljina.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cette condamnation et cette peine

 15   étaient censées avoir été prononcées par le tribunal à Bijeljina ?

 16   R.  Oui.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à ma collègue. Bien. Monsieur,

 19   votre témoignage vient de se terminer. Au nom de mes collègues et en mon

 20   nom personnel, nous vous exprimons toute notre compassion pour les

 21   blessures qui vous ont été occasionnées par les mauvais traitements. Nous

 22   espérons, malgré les séquelles que vous avez, que ces moments terribles de

 23   votre existence vont s'éloigner au fil du temps. Mais nous comprenons bien

 24   que ça peut être très difficile; en tout cas, sachez que nous vous avons

 25   écouté. Je vous remercie d'être venu, même si le fait d'évoquer cela a pu

 26   être pour vous un moment délicat.

 27   Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner. Mais ne

 28   bougez pas parce que comme nous allons terminer l'audience, ce n'est pas la

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  1   peine de baisser les rideaux.

  2   Je crois que l'audience de ce jour est terminée.

  3   Monsieur Mundis.

  4   M. MUNDIS : [interprétation] Je tenais à confirmer le programme en ce qui

  5   concerne les témoins à venir. Je peux vous donner les chiffres : le VS-65

  6   et le VS-1087.

  7   Je tenais aussi à vous dire et à mettre au compte rendu qu'après les

  8   vacances judiciaires, dans la semaine du 27 janvier 2009, en application au

  9   programme précédent, le Témoin VS-37 déposera. Ensuite, le 3 février, ce

 10   sera le Témoin VS-1066. Ce sont deux témoins qui ont des mesures de

 11   protection, et les communications ont été faites un peu tardivement suite

 12   aux décisions de la Chambre de première instance. Les communications se

 13   feront pendant les vacances judiciaires, je voulais que ce soit écrit au

 14   compte rendu. En ce qui concerne les mesures de protection, si jamais

 15   l'accusé ou ses associés, d'une manière ou d'une autre, enfreignent les

 16   mesures de protection, sachez que l'Accusation prendra toutes les mesures

 17   nécessaires en application à l'article 77 du Règlement ou tout autre

 18   article applicable du Règlement de procédure, s'il y a infraction à ces

 19   mesures de protection. Je le dis, parce que les communications se feront

 20   pendant les vacances judiciaires, mais dans très peu de temps.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 22   Comme c'est notre dernière audience de l'année -- oui.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] M. Mundis vient de menacer de mesures très

 26   fermes qui seraient prises par le Procureur, j'ai une question. Les mesures

 27   fermes, elles seraient aussi fermes que celles de par le passé ou elles

 28   seraient plus fermes que les précédentes ?

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Il s'agit d'un débat théorique. Le Procureur dit que

  2   si jamais il y a des problèmes en conformité avec le Règlement, il

  3   demanderait des mesures. Mais pour moi, c'est tout à fait théorique. Je

  4   n'ose pas penser une seconde qu'il y aura quelque chose en la matière.

  5   C'est tout ce que le Procureur nous a dit. Vous avez compris, tout le monde

  6   a compris.

  7   Comme je disais, c'est notre dernière audience de l'année. Nous nous

  8   retrouvons début janvier, comme je l'ai indiqué. D'ici là, je vous souhaite

  9   à tous une bonne continuation, de travailler et de bien se préparer pour

 10   les audiences qui reprendront début janvier.

 11   Je vous remercie.

 12   --- L'audience est levée à 13 heures 00 et reprendra le jeudi 8 janvier

 13   2009, à 9 heures 00.

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