Page 16372
1 Le mardi 21 septembre 2010
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 13.
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci. Oui, bonjour.
8 Monsieur le Juge, affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
10 En ce 21 septembre 2010, je salue en premier les éminents représentants du
11 bureau de l'Accusation. Je salue M. Seselj, je salue également tout le
12 personnel qui nous assiste, et j'associe également dans mes salutations les
13 assistants qui assistent à leur première audience.
14 Nous avons plusieurs points à l'ordre du jour de cette audience
15 administrative. Tout d'abord, je veux dire deux décisions orales. L'une
16 doit être lue à huis clos, et je demande à M. le Greffier de passer à huis
17 clos pendant quelques instants.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
19 le Président.
20 [Audience à huis clos partiel]
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 16373
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 [Audience publique]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Décision sur la requête orale de l'Accusation en
12 admission des déclarations préalables de Zoran Rankic.
13 Saisie de la requête orale de l'Accusation présentée lors de l'audience du
14 12 mai 2010 visant à l'admission de trois déclarations préalables du témoin
15 de la Chambre Zoran Rankic, anciennement
16 VS-017 : à savoir, une première déclaration en date du 13 juin et 18 et 19
17 septembre 2006, portant le numéro 65 ter 7540; une seconde déclaration en
18 date du 17 et 18 octobre 2006, portant le numéro 65 ter 7541; et une
19 troisième déclaration en date du 1er au 10 novembre 2006, portant le numéro
20 65 ter 7542.
21 Vu l'article 89(C) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal en
22 vertu duquel la Chambre peut recevoir tout élément de preuve pertinent
23 qu'elle estime avoir valeur probante; attendu que ces déclarations ont fait
24 l'objet d'un examen pendant le contre-interrogatoire du témoin par
25 l'Accusation en vue de mettre en évidence les contradictions entre ces
26 déclarations écrites et la déposition du témoin devant la Chambre; attendu
27 que l'accusé ne s'est pas exprimé sur l'admissibilité de ces déclarations
28 écrites spécifiques, attendu que la Chambre estime que les déclarations
Page 16374
1 préalables dont l'admission est demandée sont pertinentes pour évaluer la
2 crédibilité du témoin, car elle se rapporte aux faits allégués dans l'acte
3 d'accusation; attendu que ces déclarations ont été recueillies avec
4 l'assistance de l'interprète dûment qualifié et agréé par le greffe du
5 Tribunal, attendu que le Témoin Zoran Rankic a signé ses déclarations en
6 B/C/S et a attesté de leur contenu; attendu que la Chambre estime, par
7 conséquent, que ces déclarations présentent des indices suffisants de
8 fiabilité et de valeur probante prima facie; attendu que la Chambre
9 rappelle qu'elle considère qu'une distinction fondamentale existe entre
10 l'admissibilité d'éléments de preuve et le poids qui leur sera accordé dans
11 la détermination de la culpabilité de l'accusé, au stade actuel de la
12 procédure, la Chambre ne fait aucune évaluation définitive de la
13 pertinence, de la fiabilité et de la valeur probante des éléments de preuve
14 concernés. Cette détermination n'aura lieu qu'à la fin du procès et à la
15 lumière de l'ensemble des éléments de preuve introduits par les parties
16 aussi bien à charge qu'à décharge.
17 Par ces motifs, en application de l'article 89 (C) du Règlement, ordonne le
18 versement au dossier des documents 65 ter 7540, 7541, et 7542, ordonne que
19 le greffe assigne un numéro de pièce à conviction à chacun de ces
20 documents.
21 Alors, Monsieur Seselj, je vais, dans un premier temps, évoquer trois
22 sujets, ensuite je vous donnerai la parole. Et le Procureur aura la parole,
23 étant précisé que nous devrons terminer impérativement l'audience à midi,
24 parce que l'accusé a une obligation en début d'après-midi.
25 Monsieur Seselj, nous ne nous sommes pas vus depuis quasiment deux mois,
26 parce que d'une part il y avait les vacations judiciaires, et d'autre part,
27 j'ai eu énormément de difficulté à avoir une date d'audience en septembre,
28 du fait que les salles d'audience étaient encombrées par d'autres procès et
Page 16375
1 du fait que mes deux collègues sont pris également dans deux autres procès.
2 Ce qui, à mon niveau, me pose une série de problèmes. Et c'est une raison
3 pour laquelle le Juge Harhoff n'est pas présent aujourd'hui, étant pris par
4 l'autre affaire. Mais néanmoins, compte tenu du fait qu'il fallait qu'on se
5 voie, le Juge Harhoff nous a donné son consentement à ce qu'on tienne
6 l'audience en son absence.
7 Pendant les vacances, Monsieur Seselj, j'ai chaque jour demandé si la
8 requête dite du carnet Mladic vous avait été traduite. A la fin du mois
9 d'août, quand je suis revenu, il m'a été dit que la requête n'avait
10 toujours pas été traduite. Prenant mon courage à deux mains, j'ai alors
11 saisi le greffier en personne pour lui demander des explications. Il m'a
12 répondu en me disant que compte tenu des effectifs présents au service de
13 traduction, compte tenu des vacances, et compte tenu des priorités
14 accordées à l'affaire Karadzic et à l'affaire Tolimir, il a été décidé de
15 traduire ces écritures qu'après les écritures Karadzic et Tolimir. C'est
16 dans ces conditions que vous avez eu récemment dans votre langue les
17 écritures traduites.
18 Le même problème va se poser prochainement. Car également, suite à la
19 requête Bar Table, c'est-à-dire la requête visant à l'admission de
20 documents, le Procureur a fait de nouvelles écritures à la suite de la
21 demande de la Chambre, et ces écritures doivent également vous être
22 traduites. Bien. Tout ça pour vous dire que nous sommes très dépendants du
23 service de traduction, ce qui peut expliquer certains retards.
24 L'autre sujet est un sujet crucial qui concerne votre état de santé. Comme
25 vous le savez, Monsieur Seselj, la Chambre a ordonné une expertise en
26 demandant à plusieurs spécialistes de vous examiner, notamment un
27 cardiologue.
28 Il y a quelques jours, j'ai reçu un courrier alarmant d'un de vos proches
Page 16376
1 dont je ne vous dirai pas le nom, car je ne sais pas s'il a envoyé ce
2 courrier avec votre consentement ou sans votre consentement. Mais votre
3 proche s'alarmait de la situation concernant votre état de santé. Et il a
4 joint à son courrier un document médical qu'il a été recueillir auprès d'un
5 éminent cardiologue serbe, qu'il a joint à sa lettre. Dès que j'ai eu
6 connaissance de ce courrier, j'ai fait une réponse à votre proche pour lui
7 dire, un, que j'avais pris l'essence de son courrier et que j'ai adressé
8 immédiatement le document médical à l'expert qui a été désigné par la
9 Chambre.
10 En lisant la presse serbe, je me suis rendu compte que votre état de
11 santé a également été évoqué lors d'un récent meeting tenu au centre Sava
12 de Belgrade, réunissant 4 000 personnes, dont plusieurs parlementaires
13 russes en provenance de la Duma. Et au cours de cette réunion, votre état
14 de santé a été évoqué, certains ayant fait un lien avec ce qui était arrivé
15 à M. Milosevic.
16 A titre personnel, je ne veux pas me retrouver dans cette situation.
17 Donc je ferai tout pour vous maintenir en bonne santé. J'attends avec
18 impatience le retour de l'expertise diligentée en matière médicale. Et en
19 matière de procédure pénale, fut-elle procédure internationale, les
20 problèmes sont toujours les mêmes.
21 Il y a une série de questions qui se posent, la première est la
22 suivante : est-ce que l'état de santé du détenu est compatible avec la
23 détention ? L'expert doit répondre à cette question. Car si l'état de santé
24 n'est pas compatible, on se trouve dans une situation où se pose la
25 question de l'interruption du procès dans l'attente du rétablissement du
26 malade. C'est donc une décision très importante qui doit être prise selon
27 ce que dira l'expert.
28 A titre personnel, il y aura plusieurs possibilités. La première
Page 16377
1 consistera à éventuellement nommer un nouveau collège d'experts réunissant
2 des spécialistes mondiaux incontestables, et je ne serais pas du tout
3 opposé à ce que ce collège soit constitué d'un expert russe, d'un expert
4 français et d'un expert serbe qui pourraient répondre à la question
5 fondamentale : l'état de santé est-il ou non compatible avec une détention
6 ?
7 La deuxième question subséquente est celle-ci : si l'état de santé
8 est compatible avec la détention, est-ce que son état de santé nécessite
9 des soins et lesquels, voire une intervention
10 Chirurgicale; et si oui, quelle intervention chirurgicale ? En fonction
11 évidemment des réponses, la question pourrait se poser de savoir où
12 pourrait avoir lieu cette intervention.
13 A partir de ces questions qui sont fondamentales, un juge raisonnable
14 peut rendre des décisions assurant à la fois l'intérêt de la justice, qui
15 passe par la continuation des procès, et la sauvegarde maximale du détenu
16 au point de vue médical.
17 Pour me résumer, dès que nous aurons le rapport de l'expert, la
18 Chambre prendra toutes les mesures nécessaires répondant à la situation
19 médicale.
20 Le troisième sujet concerne l'indigence. La Chambre va rendre
21 prochainement une décision sur cette question. Nous sommes en train de la
22 finaliser, et elle devrait être enregistrée dans les prochains jours. Je
23 fais le vœu, et mes collègues certainement le même vœu que moi, nous
24 espérons que grâce à cette décision le greffier puisse trouver les remèdes
25 à la situation actuelle.
26 Je vais terminer également par un autre sujet qui me tient à cœur,
27 qui est la question de la procédure pour outrage en cours suite à la
28 plainte que vous avez adressée à l'encontre du bureau du Procureur.
Page 16378
1 Comme vous le savez, la Chambre a décidé de nommer un ami de la Cour
2 pour gérer votre plainte. A ce jour, nous n'avons pas eu encore la
3 désignation de cet ami de la Cour. Le greffe semble rencontrer d'énormes
4 difficultés à trouver la personne idoine remplissant un certain nombre de
5 critères, avec un critère que le greffe doit prendre en compte, à savoir
6 que cet ami de la Cour ne peut être en aucun état de la nationalité
7 italienne, française ou danoise. Donc le greffier est à la recherche de
8 l'oiseau rare, et j'espère qu'il trouvera quelqu'un.
9 Sur ce sujet, je tiens à indiquer de manière publique, pour qu'il n'y
10 ait pas de méprise, qu'à titre personnel j'ai été amené, il y a quelques
11 temps, à la suite du livre de Mme Carla Del Ponte dans lequel elle me
12 citait nommément, et prenant en compte le fait qu'une interprète avait fait
13 une certaine déclaration, j'ai estimé que je devais, au titre de l'article
14 15(A), me récuser. J'ai donc adressé ma lettre de récusation au Président
15 du Tribunal. Le Président du Tribunal n'a pas donné suite à ma lettre
16 estimant, selon son analyse juridique, qu'avant d'être saisie, la présente
17 Chambre devait modifier la décision antérieure prise par la Chambre III
18 sous sa présidence. Vu cette position, la Chambre actuelle a donc pris une
19 décision modifiant la décision antérieure de la Chambre III
20 ami de la Cour la charge d'instruire votre requête initiale.
21 Il est clair pour moi - et je le dis pour enlever toute ambiguïté - que
22 lorsque l'ami de la Cour aura terminé son travail, que dans l'hypothèse où
23 il conclurait à une situation où il y a nécessité de dresser un acte
24 d'accusation, automatiquement, je me récuserai à nouveau au titre de
25 l'article 15(A). En revanche, si l'ami de la Cour concluait au fait qu'il
26 n'y avait pas d'éléments permettant de dresser un acte d'accusation, à ce
27 moment-là, la question ne se posera pas.
28 Pour me résumer, nous attendons donc que le greffier désigne l'ami de la
Page 16379
1 Cour, que celui-ci fasse son travail, qui, de mon point de vue, sur le plan
2 technique, risque de prendre beaucoup de temps, et quand nous aurons le
3 rapport de l'ami de la Cour, il sera temps d'en tirer les conséquences.
4 Voilà donc les différents points que je voulais, à titre personnel,
5 évoquer. Je vais maintenant donner la parole à ma collègue qui peut aussi
6 faire valoir son point de vue.
7 Mme LE JUGE LATTANZI : Non, je ne ferai pas valoir mon point de vue, à part
8 seulement sur le fait que certaines choses qui ont été dites étaient
9 confidentielles, et donc je ne partage pas la responsabilité pour cela.
10 Merci.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, vous avez donc entendu
12 les deux lectures des décisions. Vous avez également entendu ce que j'ai
13 dit sur plusieurs sujets. Qu'avez-vous, en ce qui vous concerne, à nous
14 dire ?
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, de mon côté, j'ai
16 préparé une dizaine de questions que je voulais aborder aujourd'hui, compte
17 tenu du fait qu'il s'est écoulé presque deux mois et demi depuis notre
18 dernière entrevue. Mais je vais d'abord me pencher sur les questions que
19 vous avez abordées vous-même, et certaines de ces questions coïncident avec
20 ce que j'avais préparé à l'avance. Donc on gagnera du temps.
21 En avançant les explications pour ce qui est de la décision prise par la
22 Chambre pour ce qui est de verser au dossier les déclarations du témoin
23 Zoran Rankic, vous avez dit dans votre exposé de motifs que je ne m'y étais
24 pas opposé. Cependant, je tiens à vous rappeler que je me suis opposé à
25 plusieurs reprises, de façon générale, dans ce prétoire, à ce que quelque
26 déclaration préalable que ce soit vienne à être versé au dossier. Cette
27 pratique n'est connue ni par le droit anglo-saxon ni par le droit
28 continental. En Angleterre, et en Amérique, et en France, et en Italie,
Page 16380
1 cela ne peut se faire, à savoir qu'une déclaration recueillie par le
2 procureur ou recueillie par la police soit versée au dossier en tant
3 qu'élément de preuve.
4 Il y a un principe de témoignage viva voce, un principe de procédure
5 verbale et directe, et j'estime que cette décision de la Chambre se trouve
6 être contraire au droit, mais ce n'est pas la seule à l'être. Je suis
7 stupéfait par la réponse apportée par le greffier pour ce qui est du fait
8 d'avoir insisté afin que me soient traduites et communiquées les requêtes
9 de l'Accusation et les parties pertinentes du prétendu journal de Ratko
10 Mladic, et la réponse consistant à dire que la priorité était accordée aux
11 affaires Karadzic et Tolimir.
12 Avec tout le respect qui est dû au rôle historique du Dr Radovan
13 Karadzic et du général Zdravko Tolimir, j'estime que c'est une violation
14 brutale de certains principes de droit élémentaire parce que ma détention
15 provisoire dure depuis huit ans. La détention de M. Tolimir dure depuis
16 trois ans et la détention de M. Karadzic, un peu plus de deux ans. Dans
17 toutes les variantes possibles, la priorité aurait dû être attribuée au
18 procès qui est diligenté contre moi et pas à un autre procès, quel qu'il
19 soit. Je suis en train de battre des records du point de vue de ma
20 détention, pour ce qui est d'un temps ininterrompu de détention. Alors,
21 suite à huit années de détention sans qu'il y ait de jugement de rendu et
22 sans qu'il y ait eu achèvement de la présentation des éléments à charge par
23 l'Accusation, si cela ne constitue pas une sonnette d'alarme pour les
24 instances du Tribunal, que ce soit les instances judiciaires ou
25 administratives, alors point n'est utile de se poser la question,
26 d'apporter quelque commentaire que ce soit.
27 Donc il y a un intérêt politique en jeu, qui veut que Karadzic et
28 Tolimir soient condamnés au plus vite, et c'est la raison pour laquelle on
Page 16381
1 accorde la priorité à la traduction, aux préparatifs, et on les épuise au
2 quotidien par le procès qui est diligenté. Et ici, il s'est avéré, en
3 l'occurrence, qu'il n'est point possible d'apporter un jugement de
4 condamnation qui soit tant soit peu raisonnable, et on fait traîner la
5 procédure.
6 Alors, pour ce qui est des carnets Mladic, je me suis préparé en
7 particulier pour ce point-là, parce que j'estime que c'est un élément
8 crucial dont il convient de débattre aujourd'hui.
9 Et il est trois problèmes principaux qui se posent tout de suite.
10 D'abord, je n'ai pas reçu les carnets complets par les soins de
11 l'Accusation, mais seulement des parties qu'on estime pertinentes pour
12 l'affaire qui nous intéresse. Alors, premièrement, je vous ai déjà fait
13 savoir que --
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen, pouvez-vous nous dire si le
15 bureau du Procureur a envoyé les 3 500 pages du carnet Mladic à M. Seselj ?
16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame la Juge, ce
17 thème a été abordé lors de notre dernière audience administrative. Et à
18 l'époque, nous avons expliqué que la totalité des carnets étaient
19 disponibles sur le système EDS et, par conséquent, l'accusé peut les
20 obtenir. Ceci est mentionné dans ce que nous avons soumis.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, vous vous souvenez
22 probablement d'une décision que vous avez rendue en tant que Juge de mise
23 en état, qui a été confirmée par la Chambre dès qu'elle a été créée, et qui
24 disait que le Procureur était tenu de me communiquer la totalité des
25 documents à charge et à décharge, en version papier et en langue serbe.
26 Donc rien d'autre ne se trouve être rendu accessible à ma personne. Ce
27 qu'on m'a communiqué, c'est une centaine de pages, à peine des prétendus
28 carnets de Mladic. Mais j'aimerais en parler aussi, parce que le Procureur
Page 16382
1 ne procurera probablement jamais les 3 600 pages ni les transcriptions des
2 enregistrements des différentes interviews et conversations qui ont été
3 saisies aussi.
4 D'abord, dans l'opinion publique, on met en doute ouvertement
5 l'authenticité de ces carnets. Moi, je vous ai apporté ici un exemplaire de
6 --
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Marcussen.
8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pour que l'on traite la question de la
9 transcription des enregistrements, tous les documents ont été transcrits et
10 les documents ont été mis à disposition par le truchement de l'EDS, donc
11 tout ceci est disponible.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai demandé au greffier de cette Chambre,
14 avant l'audience d'aujourd'hui, de vous photocopier six pages de texte d'un
15 hebdomadaire très en vue en Croatie qui s'appelle "Globus." C'est le numéro
16 1 017 daté du 4 juin 2010. Sur la page de garde, vous pouvez voir le
17 célèbre général serbe, Ratko Mladic, et il est dit : "Globus enquête, les
18 carnets de Mladic où une grande supercherie." Les hommes politiques et les
19 graphologues de Croatie, de Bosnie-Herzégovine, et de Serbie aussi mettent
20 en doute l'authenticité, comme le disent les Croates, que ces écritures de
21 ce sanguinaire, parce qu'ils l'appellent ainsi, parce que les seuls Serbes
22 bons pour les Croates ce sont les Serbes morts ou ceux qui ne font que
23 ramper comme des vers de terre. Mais l'article abonde en arguments pour ce
24 qui est des raisons pour lesquelles --
25 Mme LE JUGE LATTANZI : Un moment, s'il vous plaît.
26 Vous avez tout le droit de contester l'authenticité des carnets Mladic,
27 mais, s'il vous plaît, par d'autres documents, d'autres moyens, pendant
28 qu'on fera l'audience on s'occupera de ces carnets, et pendant votre
Page 16383
1 contre-interrogatoire, si ce sera le cas, ou par écrit pour vous opposer à
2 la requête qu'on va vous traduire, mais pas maintenant sur la base de
3 journaux qui sont -- en tout cas ont été donnés au Juge Président, aussi à
4 moi, mais j'ai refusé parce que je ne lis pas le serbe, c'est en serbe.
5 Donc vous parlez de choses dont on doit croire à vos mots. Donc je
6 regrette, mais je ne pense pas qu'on puisse perdre du temps pour cela
7 aujourd'hui.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, je ne partage pas --
9 Attendez, Monsieur Seselj. Je ne partage pas le point de vue de ma
10 collègue, parce que la Chambre doit se prononcer sur les dix carnets
11 Mladic, doit-elle les admettre ou les rejeter. Il y a une question
12 fondamentale, qui est l'authenticité des dix documents. Et sur ce point,
13 même si moi, je ne connais pas le B/C/S, à partir de documents que vous
14 nous mettez sous les yeux, je vois que quelqu'un, certainement un expert
15 graphologue, a analysé l'écriture du carnet et l'a comparée à des
16 documents. Donc moi qui ai l'habitude des faux et usage de faux, je suis
17 attentif à ce que je vois sous les yeux. Donc comme nous sommes trois, mais
18 que nous ne sommes plus que deux et que la voix du Président est
19 prépondérante lorsqu'on est deux, je vous demande de continuer.
20 Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai encore quelque chose à ajouter quand même : que
21 ces documents ne font pas partie du dossier, donc on ne peut pas regarder
22 ces documents sans les admettre dans le dossier quand ils seront traduits
23 si on décidera de les admettre.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors continuez votre démonstration technique.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je veux vous faire savoir c'est qu'il
26 n'y a aucune raison d'admettre la demande formulée par le Procureur pour ce
27 qui est du versement au dossier de ces carnets et pour présenter des
28 témoins improvisés, alors je ne vais pas attendre, Madame Lattanzi, que
Page 16384
1 vous décidiez de le verser au dossier, entendre les témoins, ensuite le
2 contester. Je ne vais pas contester l'opinion --
3 Mme LE JUGE LATTANZI : -- pas compris. Peut-être qu'on ne m'a pas traduit,
4 mais je ne crois pas, parce que les traducteurs ils font très bien leur
5 travail. Peut-être vous ne voulez pas entendre. J'ai dit que vous avez tout
6 le droit de contester l'authenticité, et quand vous arrivera la requête
7 traduite, vous nous donnerez oralement ou par écrit tous vos arguments, et
8 aussi avec des documents qu'on puisse lire, contrôler, lire en anglais, en
9 français, dans une des deux langues du Tribunal, mais pas en B/C/S. Pour
10 nous, malheureusement, on ne peut pas. Donc je disais cela, vous avez tout
11 le droit. Qu'est-ce que vous pensez, que je pense et je prétends que vous
12 n'ayez pas le droit ? Vous avez pleinement le droit.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Madame Lattanzi, j'ai déjà obtenu tout ce que
14 le Procureur avait envisagé de me faire remettre, et j'ai cru comprendre à
15 partir des écritures de l'Accusation qu'ils n'ont plus rien à me
16 communiquer, et je suis en train de me prononcer verbalement, et je ne veux
17 plus vous écriture. J'en ai marre d'écrire pour rien. Je veux me prononcer
18 verbalement, et j'espère que vous allez avoir la patience de m'entendre. Si
19 ce n'est pas le cas, on peut se séparer, puis un point c'est tout.
20 Mme LE JUGE LATTANZI : -- mais je dois aussi avoir les éléments à l'appui
21 de votre prétention qu'on n'admette pas, de votre demande qu'on n'admette
22 pas ces documents. Vous devez nous donner les éléments, et ça c'est pas les
23 éléments dont on pourra tenir compte. Je regrette, on ne peut pas.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, que voulez-vous que je fasse, que je
25 m'arrête maintenant ?
26 Mme LE JUGE LATTANZI : La parole, c'est le Président qui vous la donne.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, moi, ce qui m'intéresse c'est sur
28 le plan technique, êtes-vous en mesure de nous apporter des éléments nous
Page 16385
1 permettant de conclure que les carnets n'émanent pas de la main de M.
2 Mladic ? Voilà, c'est ça qui m'intéresse. Alors je suis d'autant plus
3 intéressé --
4 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Que je suis d'autant plus intéressé que
6 j'ai appris que le fils de M. Mladic a participé à la réunion que votre
7 parti politique avait organisée à Belgrade. Alors, vous avez peut-être des
8 éléments d'information de première main permettant de dire que ce carnet ne
9 vient pas du papa.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je ne veux pas m'aventurer à en parler.
11 Moi, je veux vous faire savoir le fait que de façon très sérieuse il y a
12 des contestations liées à l'authenticité de ces carnets dans l'opinion
13 publique. Et j'en ai fini avec cela. Donc c'est contesté.
14 Ce que je n'ai pas terminé c'est ce qui suit : le Procureur demande dans
15 cette documentation à ce que l'on entende deux témoins à l'improviste.
16 C'est un ex-collaborateur à Mladic qui, pratiquement, n'a pas été mis en
17 accusation, il est le seul à ne pas avoir été mis en accusation pour ce qui
18 est de l'état-major, parce que pratiquement tout son état-major ici est à
19 La Haye, lui non. Il a déjà témoigné, il a peut-être témoigné
20 clandestinement ou de façon protégée, et je ne vais pas donner son nom.
21 Alors, le Procureur veut le faire venir ici pour qu'il reconnaisse ici
22 l'écriture à Mladic en sa qualité d'expert, parce qu'il aurait été assis à
23 côté de Mladic pendant qu'il écrivait. On ne peut pas le faire, cela. Mis à
24 part le fait que c'est quelqu'un que j'ai rencontré deux ou trois fois dans
25 ma vie, et à chaque fois il était ivre. Alors cet homme ne peut pas
26 témoigner de l'authenticité des carnets de Mladic. Il peut dire que Mladic
27 à toute réunion a pris des notes, ça oui. Mais moi, je ne veux pas rentrer
28 dans le fait de savoir si c'est authentique comme carnet ou pas, pour le
Page 16386
1 moment. Mais ce que je conteste c'est que le Procureur puisse faire venir
2 quelqu'un qui aurait été présent à des réunions afin que celui-ci témoigne
3 et dise reconnaître l'écriture de Mladic. Qui peut reconnaître l'écriture
4 de Mladic, si ce n'est pas un expert graphologue, qui dira ça c'est un
5 échantillon authentique de l'écriture à Mladic, ce n'est pas contesté du
6 tout, et ça ce sont les prétendus carnets, et partant de là je tire telle
7 conclusion. Donc ce serait là un témoignage qui pourrait être admissible et
8 non pas un collaborateur ivre de Mladic qui dirait : Oui, c'est certain.
9 Alors, il pourrait même dire : Oui, sur mon honneur, c'est cela. Mais c'est
10 ridicule, voyons.
11 Alors, à quel tribunal peut-on faire cela, ou alors une employée du
12 greffier ou du bureau du Procureur qui démontrerait, parce que je crois
13 qu'on pourrait dire son nom, mais il vaut mieux ne pas le mentionner pour
14 ne pas que vous expurgiez le compte rendu. Alors, elle aurait, depuis
15 Belgrade, proposé à venir témoigner. Or, je pense que ce n'est pas sérieux,
16 vous ne pouvez pas accepter cela. Moi, je suis en train de débattre de la
17 chose sur le point de procédure, aujourd'hui, et j'essaie de vous expliquer
18 pourquoi il convient de rejeter les requêtes présentées par l'Accusation.
19 Mais si vous n'acceptez pas ce que je suis en train de dire, et que vous
20 acceptez la demande faite et formulée par l'Accusation, il se peut que je
21 ne participe même pas aux débats, aux audiences.
22 Alors, ici, le Procureur est en train d'avancer plusieurs fragments
23 issus de ces prétendus carnets à Mladic qui devraient être versés au
24 dossier dans cette affaire. Et elle dit :
25 "Une session élargie de la présidence de la RSFY, datée du 1er
26 février, Ranko Kostic aurait pris la parole pour parler de la protection à
27 long terme de la population serbe. Et le Procureur dit jusque-là, la ligne
28 du front s'étire tout le long des territoires ethniques serbes. Et le
Page 16387
1 Procureur dit que cela confirme qu'il y a modification des objectifs de la
2 JNA, et que la direction militaire et civile avait parlé des objectifs des
3 Serbes dans un Etat. Mais c'est complètement imbécile. Il n'y a pas d'autre
4 terme pour qualifier la chose.
5 Deuxièmement, la réunion avec Krajisnik, Adzic, et un groupe de
6 généraux originaires de la Bosnie-Herzégovine, où Karadzic expliquerait les
7 objectifs stratégiques qui seraient les leurs, et il dirait qu'elles
8 avaient défini les lignes de démarcation de Bosnie-Herzégovine, suivant les
9 lignes ethniques, un Etat pour tous les Serbes, une création d'une armée
10 unifiée pour les Serbes, et cetera. Il s'agit du 6 mai 1992. Mais en quoi
11 cela me concerne-t-il ? Quel rapport cela a-t-il avec l'espèce, le fait
12 qu'ils se soient rencontrés quelque part et qu'ils aient discuté, et le
13 fait que Mladic, éventuellement, ait consigné des notes lors de cette
14 réunion ? Ensuite, réunion entre Karadzic, Krajisnik et Vucirevic [phon],
15 lors de laquelle Krajisnik énumère des objectifs stratégiques. Il en est
16 question aussi, qu'en ai-je à faire ?
17 Alors, là où je suis cité, c'est lorsqu'on parle de la réunion du
18 commandement de la 2e Région militaire. C'était le général Kukanjac qui
19 présidait cette réunion qui s'est tenue le 9 mai 1992, soi-disant. Et lors
20 de cette réunion, le Procureur affirme qu'un participant aurait reconnu que
21 le général Momcilo Perisic était en train de détruire Mostar, alors qu'en
22 réalité, c'est le général Kukanjac qui s'exprime, et soi-disant, Mladic
23 consigne des notes. Mais Mladic consignerait : Je ne comprends pas comment
24 Perisic serait en train de détruire Mostar et pour quelle raison. Donc il
25 exprime ses doutes, comment se fait-il que Perisic soit en train de
26 détruire Mostar ? Et qui aurait affirmé cela et comment aurait-on appris
27 cela ? Alors, vous savez, grâce à une autre affaire, que le général
28 Perisic, à chaque fois qu'il prenait pour cible Mostar, utilisait une
Page 16388
1 liaison téléphonique ou une liaison radio pour informer la partie adverse
2 que tel ou tel objectif serait pris pour cible. Par ailleurs, le général
3 Perisic n'a même pas été mis en accusation à La Haye pour ces faits-là. Or,
4 le bureau du Procureur se fonde sur ce que dit le général Kukanjac, donc je
5 vais m'abstenir d'ajouter la moindre qualification puisqu'il est décédé il
6 y a trois ans. Mais le Procureur tire la conclusion suivante, à savoir que
7 quelqu'un aurait reconnu la destruction par Perisic de Mostar. Or ce qu'il
8 dit là, c'est je ne comprends pas comment il est possible que Perisic soit
9 en train de détruire Mostar, quelqu'un dit cela, mais comment fait-il, et
10 ce n'est pas ce qu'il a fait. Il est certain qu'il a pris pour cible
11 certaines installations, qu'il a détruites, mais il n'a pas dévasté Mostar.
12 Donc le bureau du Procureur ment.
13 Et il ajoute encore la chose suivante : on cite le fait que des hommes de
14 Seselj auraient participé à l'attaque lancée contre Mostar. Voilà ce qui
15 figure dans les documents que j'ai reçus, qu'on m'a communiqués. Alors,
16 est-ce que le Procureur peut peut-être m'aider pour m'indiquer où cela
17 figure. Je n'ai retrouvé ça nulle part, dans aucune page. J'ai de nouveau
18 examiné, à deux ou trois reprises dans ma cellule le jeu complet de
19 documents, je ne retrouve cela nulle part. Or nous savons qu'en l'espèce,
20 il a été répété à plusieurs reprises qu'une unité de volontaires du Parti
21 radical serbe représentant à peu près l'effectif d'une compagnie, sous le
22 commandement de Denis Baret, a été à Mostar sous le commandement de
23 Perisic. C'était une unité d'infanterie qui ne pouvait donc rien détruire,
24 car elle ne disposait pas de pièces d'artillerie, et d'ailleurs aucun acte
25 d'accusation n'a été dressé à ce sujet. Et ces événements ne figurent pas
26 non plus dans l'acte d'accusation dressé contre moi, parce que l'Accusation
27 a retenu contre moi des événements dans la vallée de Mostar après le
28 retrait de la JNA, après le départ du général Perisic, et vous avez vu ce
Page 16389
1 qu'il en a été de ces chefs d'accusation.
2 Passons à la suite, point numéro 5, rapport matinal du commandant pour
3 Nevesinje. On voit que les dirigeants serbes locaux maintenaient des
4 contacts et assuraient une coordination avec la direction de la Republika
5 Srpska en Bosnie-Herzégovine. On trouve Vukan Bratic [phon], le président
6 de la municipalité de Nevesinje, le général Perisic, et d'autres noms. Donc
7 ça correspond au 11 mai 1992. Mais en quoi ceci peut-il être versé ? C'est
8 la période du 11 mai, lorsque Perisic est encore au commandement. Il se
9 retire ensuite le 19 mai. Mais quelle importance cela a-t-il ? Il est
10 normal que les organes civils et les organes militaires coopèrent entre
11 eux. Il y a toute une série de questions pour lesquelles ceci est
12 indispensable. Mais on demande le versement sans le moindre fondement.
13 Sixième point, la date du 6 juin 1992, consultation concernant la situation
14 politique et militaire en Bosnie-Herzégovine. On parle ici de la pertinence
15 de cette note, parce que des consultations se seraient tenues entre les
16 dirigeants municipaux et les autorités militaires sur le territoire de la
17 Romanija. On parle du nettoyage de certaines localités, Bratunac,
18 Srebrenica, Vogosca, et cetera. Mais dans toute une série d'affaires qui se
19 sont déroulées ici, il s'est avéré que le nettoyage du terrain, cela
20 signifiait le fait de mettre à l'écart les membres des unités armées
21 ennemies, et jamais on n'a utilisé dans la terminologie militaire le terme
22 de nettoyage dans le sens d'un nettoyage ethnique. Le "nettoyage ethnique"
23 est une formulation de nature politique qui n'est apparue que plus tard, et
24 qui a été introduite par ceux qui critiquaient la situation telle qu'elle
25 se présentait sur le terrain. Donc pourquoi ceci devrait-il être versé au
26 dossier ? Alors, un imbécile a déclaré là-bas qu'à Bratunac, dans la
27 municipalité de Bratunac, il n'y avait plus de Musulmans et que la ville
28 était complètement libérée. En quoi cela me concerne-t-il ? Quel rapport
Page 16390
1 Bratunac a-t-il avec l'acte d'accusation dressé contre moi ? Et cet
2 imbécile de Bratunac, qui aurait déclaré ça à une réunion, quel rapport
3 cela a-t-il ? Qui sait de qui il pouvait s'agir ? Peut-être était-ce
4 Deronjic. Qui sait ? Ça n'a pas le moindre rapport encore une fois.
5 Le point numéro 7 maintenant. Le 30 juin 1992, soi-disant, le général Ratko
6 Mladic aurait consigné des notes lors d'une réunion tenue avec les
7 représentants de la municipalité de Zvornik. Le Procureur dit, allègue que
8 ceci viendrait étayer la mise en œuvre d'une entreprise criminelle commune
9 en Bosnie orientale. Il ressortirait de ces notes que les autorités locales
10 serbes auraient participé à cela, on énumère : le président du SDS, le
11 président de la municipalité, la Défense territoriale, le MUP de Serbie,
12 Pavlovic, les unités militaires, les hommes d'Arkan, les hommes de Seselj,
13 et cetera. Mais je ne vois pas où il est possible de retrouver quoi que ce
14 soit des éléments avancés par l'Accusation.
15 Lors de cette réunion, il est survenu qu'un fonctionnaire municipal de
16 Zvornik, et non pas un fonctionnaire du MUP de Serbie, qui s'appelait Marko
17 Pavlovic - en fait, il s'agit de Branko Popovic ou l'inverse, parfois je
18 perds un peu le fil de tous ces détails - a, en fait, fait des louanges des
19 hommes de Seselj et d'Arkan pour ce qui était de leur participation au
20 combat visant à la libération de Zvornik. Alors, qu'y a-t-il ici de
21 controversé, pour ce qui est de la participation des hommes de Seselj à ces
22 opérations ? Ils ont participé à cela, et tout le monde leur en a su gré.
23 Vous avez entendu le colonel Dacic, le commandant de brigade, qui a
24 félicité les volontaires du Parti radical serbe comme des hommes
25 disciplinés et compétents. Le lieutenant-colonel Stupar a été à leurs côtés
26 lorsqu'ils ont libéré des positions-clés en ville. Il n'y a là rien de
27 controversé. Alors, qu'est-ce que cela a à voir avec une entreprise
28 criminelle commune ? Quant à tout le reste qui pourrait être considéré
Page 16391
1 comme étant des éléments compromettants concerne des événements ultérieurs
2 survenus aux mois de mai, juin ou juillet. Quel rapport ai-je avec le
3 moindre de ces événements ? Est-ce que quelqu'un a chassé les Musulmans de
4 Kozluk ou bien sont-ils partis de leur propre chef ou sous certaines
5 pressions ou pour d'autres
6 raisons ? Je ne sais pas, mais ça n'a pas le moindre rapport avec moi. Les
7 volontaires du Parti radical serbe étaient partis de là-bas depuis
8 longtemps déjà.
9 Quant aux unités paramilitaires qui sont évoquées, et elles ont elles aussi
10 été stigmatisées lors de cette réunion, chacun des participants à cette
11 réunion parle des unités paramilitaires. Le Procureur dit - voyez la page 4
12 - je cite : "On parle surtout de Zuco, celui qui était à la tête de l'unité
13 paramilitaire des Guêpes jaunes." Et effectivement, on le cite. Mais
14 ensuite, le Procureur ajoute, je cite : "Zuco, que le Parti radical serbe
15 avait dépêché à Zvornik en provenance de Belgrade." Et jamais au moment de
16 la réunion ou pendant cette dernière on ne cite cela, et jamais personne
17 n'établit lors de cette réunion le moindre lien entre l'unité de Zuco et le
18 Parti radical serbe. Il s'agit d'une falsification pure et simple qui est
19 le fait du bureau du Procureur.
20 Point numéro 8. Le 8 novembre 1992, soi-disant, le général Mladic aurait
21 tenu une réunion avec les commandants de corps d'armées, et le Procureur
22 dit que cela serait pertinent pour ce qui est du déploiement des
23 volontaires du Mouvement chetnik-serbe et que cela viendrait confirmer le
24 rapport d'un témoin expert, du Témoin Theunens. Mais où parle-t-on de
25 volontaires du Mouvement chetnik-serbe et du Parti radical serbe ? Je ne
26 vois aucun de leurs noms mentionné sur aucune des pages correspondant au
27 compte rendu de cette réunion. Personne lors de cette réunion n'a parlé
28 d'eux.
Page 16392
1 Alors, voyons si le Procureur peut confirmer quoi que ce soit à cet
2 égard.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous sommes au point 8. Il en reste cinq. Il
4 vaudrait peut-être mieux que vous, si vous voulez répliquer, de le faire
5 après que de couper ses propos. Qu'est-ce que vous vouliez dire ?
6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame le Juge,
7 j'allais dire que ceci devient une procédure assez bizarre, parce que
8 l'accusé semble me poser des questions à moi pendant qu'il parle. Je peux
9 répondre plus tard, je le ferai volontiers, mais je pense que la réponse
10 sera générale, donc ce n'est pas nécessaire de revenir sur les cinq
11 derniers points, mais je peux fort bien attendre.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Seselj.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous en sommes maintenant au
14 point 9.
15 Le 28 mai 1993, réunion avec la direction de la RSFY de la Yougoslavie et
16 de la Serbie-et-Monténégro, le Procureur dit qu'il ressortirait de ses
17 notes que la Serbie et la RSFY auraient continué à soutenir les Serbes de
18 Bosnie-Herzégovine, et après que la JNA s'est retirée officiellement de la
19 Bosnie-Herzégovine. Mais il n'y a rien d'anormal ici. Qu'est-ce que le
20 bureau du Procureur a découvert de nouveau ou d'exceptionnel, ici ? Tous
21 les Serbes aujourd'hui sont fiers, en dehors d'une poignée de traîtres, du
22 fait que la Serbie leur soit venue en aide. Et il est affirmé ici qu'il y
23 aurait des différends qui seraient apparus entre Seselj et d'autres
24 dirigeants politiques. Mais qu'est-ce qu'on peut, en fait, vérifier de
25 cela, qu'est-ce qui est visible dans ces notes ? Rien, en fait. On se
26 contente de citer l'un des participants à cette réunion en répétant les
27 propos qu'il aurait tenus selon lesquels un Anglais, un Britannique, serait
28 parvenu à la conclusion que l'objectif du plan Vance-Owen serait, en fait,
Page 16393
1 d'empêcher la création d'une Grande-Serbie, rien de plus que ça. Et donc
2 quelqu'un cite ces propos, et le bureau du Procureur transforme cela en une
3 thèse selon laquelle quelqu'un aurait indiqué de façon indubitable que la
4 direction serbe travaillait à la réalisation des objectifs de cette
5 entreprise criminelle commune alléguée, alors que personne n'a déclaré
6 ceci. Dobrica Cosic, qui préside cette réunion, en page 178, dit la chose
7 suivante, je cite, que : "Le plan Vance-Owen représente la stratégie de
8 l'Occident, et que la conférence de Londres a deux objectifs :
9 premièrement, empêcher la création d'une Grande-Serbie et l'unification du
10 peuple serbe; deuxièmement, empêcher la création d'un Etat musulman." C'est
11 l'estimation faite par Dobrica Cosic pour ce qui est des objectifs des
12 ennemis occidentaux, mais personne ne parle de la création d'une Grande-
13 Serbie comme étant un objectif serbe. Il s'agit encore une fois d'une
14 falsification grossière de la part de l'Accusation, qui ne saurait rester
15 non sanctionnée. A la fin, Dobrica Cosic dit, et Mladic soi-disant
16 consigne, je cite : "Seselj peut nous causer des problèmes. Je ne veux pas
17 suggérer qu'il va conquérir la Serbie." Alors, peut-être que Dobrica Cosic
18 a effectivement dit que je représentais un problème pour eux, mais qu'est-
19 ce qu'on peut conclure d'autre de cette déclaration ? La date est celle du
20 28 mai 1993.
21 Le Parti radical serbe s'oppose alors énergiquement au plan Vance-Owen et à
22 toute acceptation de ce dernier, alors s'il est exact que Cosic ait déclaré
23 ceci, il est probable que j'aie représenté un problème pour eux. Mais Cosic
24 nuance son propos. Il dit qu'il ne pense pas que je vais, arme au poing,
25 prendre le contrôle de la Serbie. Mais on peut voir que la police secrète
26 là-bas m'attribuait toutes sortes de choses, on peut le voir dans le
27 dossier de police qui me concerne et qui a été publié, mais je ne pense pas
28 avoir jamais eu l'intention de provoquer le moindre bain de sang en Serbie.
Page 16394
1 Et voilà ce qu'avance donc le Procureur à mon encontre.
2 Ensuite, on a la réunion avec le président Milosevic en date du 8 juillet
3 1993. Le bureau du Procureur dit, je cite, que : "La note suivante prouve
4 que les autorités de l'Etat serbe fournissaient un soutien continu aux
5 autorités serbes de Bosnie-Herzégovine, y compris au MUP." Mais jusqu'au
6 moment où la République de Serbie a décrété un blocus à l'encontre de la
7 Bosnie-Herzégovine, elle a apporté son soutien et son aide. Et pourquoi ne
8 l'aurait-elle pas fait ? Parce que tout l'Occident et la Croatie
9 apportaient la leur, et nous, nous aurions dû rester les bras croisés et ne
10 pas venir en aide à nos frères en Bosnie. Qu'est-ce que le Procureur arrive
11 à prouver en avançant ceci ? Rien d'autre que son propre dilettantisme.
12 Alors mon médecin m'a interdit de boire de l'eau, malheureusement, donc je
13 vais devoir ralentir un petit peu.
14 Point numéro 11. 24 septembre 1993, réunion avec le président Milosevic. Le
15 Procureur avance que cette note témoignerait d'une rupture des relations
16 entre Milosevic et Seselj au second semestre 1993. Milosevic qualifierait
17 Seselj de traître. Mais qu'est-ce qui est ici pertinent au regard de l'acte
18 d'accusation ? Vous vous rappelez, je n'en doute pas, de la façon dont, à
19 l'époque, je qualifiais publiquement Milosevic. Lors de ces réunions à huis
20 clos -et je ne l'apprends qu'a posteriori - la façon dont il s'exprimait à
21 mon sujet, tenait de tels propos, alors que je ne lui laissais pas le
22 moindre doute à l'époque, parce que toutes les attaques auxquelles je
23 pouvais me livrer contre lui, je le faisais publiquement. Donc qu'est-ce
24 que cela vient étayer du point de vue du Procureur ? La thèse de Milosevic
25 du 24 septembre 1993 selon laquelle je serais un traître. C'était au moment
26 où, de façon tout à fait publique, à l'assemblée fédérale, j'ai avancé des
27 éléments de contexte concernant la tentative de putsch opérée contre les
28 autorités légitimes des Serbes à Banja Luka. Ensuite, on a assisté à ce
Page 16395
1 conflit entre le Parti radical serbe et le Parti socialiste de Serbie qui
2 s'est prolongé pendant des années. Qu'est-ce qui est pertinent ici ?
3 Absolument rien.
4 Point 12. 21 décembre 1993, réunion avec le colonel Gusic concernant la
5 situation dans la vallée de la Neretva. Quel rapport ceci a-t-il avec moi ?
6 Qui cite-t-on à ce moment ? Ceci sort du cadre temporel de l'entreprise
7 criminelle commune alléguée à laquelle j'aurais soi-disant participé. Le
8 bureau du Procureur a posé la limite temporelle au mois de septembre 1993
9 avec ce conflit particulièrement intense entre le Parti socialiste de
10 Serbie et le Parti radical serbe que certains ont voulu présenter comme un
11 conflit de personnes en Milosevic et moi-même. Alors, qu'est-ce qu'on
12 arrive à étayer ainsi ? Absolument rien.
13 13 octobre 1994, ce qui n'a absolument aucun rapport avec moi.
14 Une réunion avec Nedeljko Bubalo, notes détaillées concernant la situation
15 en République de Serbie, par endroits on parle de Milosevic et de l'Etat de
16 Serbie-et-Monténégro. Le bureau du Procureur dit dans cette note, on cite
17 nommément qu'au deuxième semestre 1993, Bolivar Stanisic, [inaudible], et
18 le chef de l'administration du MUP serbe ainsi que Milan Spago devaient
19 assurer l'approvisionnement en armes. Il s'agit d'une preuve claire, parce
20 que Petkovic était encore mêlé à l'approvisionnement en armes par
21 l'intermédiaire du MUP de la République de Serbie en 1993. Il est ici
22 montré que des contacts étaient maintenus entre le Parti radical serbe et
23 le Mouvement chetnik-serbe et le MUP de Serbie. Seselj devait être informé
24 de ces contacts et de ces accords.
25 Mais ici, il n'y a pas la moindre trace du fait que Ljubisa Petkovic ait
26 participé à un approvisionnement en armes; un approvisionnement, peut-être,
27 mais un approvisionnement en armes, rien ne le montre. Et Ljubisa Petkovic
28 a été exclu de façon tout à fait éclatante du Parti radical serbe fin 1993,
Page 16396
1 ensuite il s'est lancé dans un certain nombre d'activités, et c'est
2 possible, mais des activités avec lesquelles le parti n'avait pas le
3 moindre lien. Si je me rappelle bien, il a été exclu vers fin octobre, nous
4 sommes entrés ouvertement en conflit avec Milosevic au mois de septembre
5 1993. Et ici, qu'est-ce que nous avons à l'appui de ce qu'avance
6 l'Accusation ? Rien.
7 Voilà, j'ai énuméré ces 13 points de la façon dont le Procureur estime
8 avoir réussi à trouver des éléments à charge dans les soi-disant carnets de
9 Mladic. Alors, Madame le Juge, Monsieur le Président, est-ce qu'il ne vous
10 semble pas que le bureau du Procureur sous-estime quelque peu votre
11 professionnalisme et votre intelligence en procédant ainsi, ainsi que votre
12 capacité à mener ce procès à son terme ? Il s'agit ici d'un abus pur et
13 simple de la procédure. Plutôt que de voir le Procureur et moi-même prendre
14 des positions en application de l'article 98 bis dès le mois de juillet
15 afin que vous puissiez prendre une décision, on persiste à perdre du temps.
16 En l'espèce, on arrivera bientôt à la fin de la huitième année de ma
17 détention provisoire. Et je vous repose la question que vous avez une fois
18 rejetée ou peut-être même deux fois, cette thèse qui était la mienne : est-
19 ce qu'ici, nous assistons au déploiement d'une véritable doctrine de l'abus
20 de procédure ? Est-ce que nous avons ici une preuve que c'est cette
21 doctrine que nous voyons se dérouler sous nos yeux ?
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je vous ai laissé développer les 13
23 points, mais je vous indique --
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste encore un détail.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors allez-y, puis je vais reprendre la parole.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici nous avons un exemplaire d'un autre
27 hebdomadaire quotidien en vue, le journal, "Nacional." C'est le numéro 759
28 du mois de juillet 2010. C'est un supplément. Donc j'ai remis cela à tout
Page 16397
1 un chacun. J'ai demandé au greffier de bien vouloir photocopier l'éditorial
2 de Srecko Jurdana qui, semblerait-il, a eu la possibilité de prendre
3 connaissance un peu plus en détail du contenu des soi-disant carnets de
4 Mladic, et cela me sert de preuve m'indiquant que le Procureur ne m'a
5 absolument pas communiqué quoi que ce soit de ce qui figure dans les
6 carnets de Mladic qui pourrait être à décharge. Ici, il est question de
7 rencontrer Jahorina entre les représentants et présidents serbes et
8 croates, il est question du fait que les Croates auraient ouvertement
9 demandé un accord concernant un échange de population, à savoir que les
10 Croates de Vojvodine déménagent en Croatie et que les Serbes de Croatie
11 déménagent en Vojvodine, et cetera, et tout ceci se serait passé
12 probablement vers 1993. Or, vous savez quel est le nombre des éléments de
13 preuve que j'ai présentés indiquant que l'Eglise catholique a participé
14 directement à cet échange et bien que les autorités croates travaillaient à
15 cela et que jamais le moindre individu ou la moindre famille croate n'ont
16 été chassés de Serbie, mais qu'il a toujours été question d'échanges de
17 propriétés, et nous voyons ici que c'était la politique officielle de la
18 Croatie que d'aller en ce sens. Or, cette partie des soi-disant carnets de
19 Mladic, le Procureur ne souhaite pas me les communiquer, et grâce aux
20 journaux que certains généraux croates veulent bien me fournir ici, je suis
21 en mesure de suivre également ce qui se dit dans la presse croate,
22 malheureusement pour le bureau du Procureur, je peux suivre ce qui s'y dit.
23 Voilà, j'en ai fini pour ce qui est des soi-disant carnets de Mladic. Je
24 réponds à la requête de l'Accusation en demandant à la Chambre de première
25 instance de ne pas faire droit à la requête de l'Accusation, parce qu'il
26 n'y a absolument aucun fondement à ce que ces extraits des soi-disant
27 carnets de Mladic soient versés au dossier, tout comme il n'y a pas non
28 plus de fondement à ce que des témoins soient cités à comparaître à
Page 16398
1 l'improviste, des témoins qui ne savent même pas ce sur quoi ils vont
2 déposer.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Aujourd'hui, nous sommes le 21 septembre 2010. Selon
4 la Règle de procédure concernant les carnets Mladic, vous aviez jusqu'au 16
5 septembre 2010 pour faire valoir vos observations. Nous n'avons rien eu par
6 écrit.
7 Alors, vous êtes intervenu tout à l'heure, et je vous ai laissé la parole
8 alors que ma collègue était plutôt d'un avis à vous couper le micro. J'ai
9 pris en compte le fait que ça faisait deux mois et demi qu'on ne s'est pas
10 vu, que vous aviez peut-être des raisons à nous expliquer pourquoi vous
11 intervenez cinq jours trop tard alors que c'était le 16, date ultime où
12 vous deviez envoyer vos écritures, et vous ne m'avez rien dit. Alors
13 comment expliquez-vous que vous avez tardé de cinq jours ?
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout d'abord, Monsieur le Président, j'ai des
15 difficultés avec l'écriture en général.
16 Deuxièmement, c'est vous qui avez soulevé cette question des carnets de
17 Mladic, et j'ai tiré profit de cela. Peut-être ai-je un peu exagéré.
18 Troisièmement, la Chambre de première instance a toujours la possibilité de
19 proroger le délai qui court, vous avez la possibilité de le faire, vous
20 pouvez également ne pas le faire. C'est entre vos mains. Mais j'ai fait
21 état de tout ce que j'avais à dire concernant les soi-disant carnets de
22 Mladic, et la décision vous appartient entièrement.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, alors, Monsieur Marcussen, est-ce que vous
24 voulez répliquer sur les 13 éléments ?
25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vais le faire, Monsieur le Président,
26 mais j'essayerai de présenter des observations plus générales. Je pense que
27 je suis en mesure de le faire.
28 Je voulais simplement relever que l'accusé a commencé à 9 heures 42 et
Page 16399
1 qu'il a terminé à 10 heures 25, ce qui veut dire qu'il a consacré plus
2 d'une demi-heure à la présentation d'arguments à l'audience alors qu'il
3 aurait dû, à notre avis, les soumettre par écrit et qu'il n'aurait pas
4 ainsi abusé du temps consacré à cette audience administrative.
5 Qu'a-t-il dit, au fond, aujourd'hui ? Il a fait un amalgame entre
6 l'explication fournie par l'Accusation pour montrer en quoi les documents
7 sont pertinents, amalgame entre cette explication et le contenu des
8 extraits dont on a demandé le versement, donc il a l'annexe à la requête en
9 indiquant qu'on ne mentionne pas des documents à verser. C'est vrai en
10 partie, mais ce qu'il ne comprend pas c'est que nous avons expliqué la
11 pertinence en plaçant aussi ces documents dans leur contexte.
12 Et plusieurs fois, il a témoigné à propos d'événements de l'époque.
13 Il n'est pas autorisé à le faire. Puis il dit des choses qu'on saurait
14 d'autres affaires. C'est sans aucune pertinence au regard de la requête.
15 De façon plus générale, l'accusé ne semble pas tenir compte du fait
16 qu'on a demandé le versement de ces documents, parce qu'ils sont pertinents
17 eu égard à l'entreprise criminelle commune alléguée dans l'acte
18 d'accusation, nous l'avons décrit clairement dans la requête. Alors il
19 qualifie nos arguments d'idiots ou imbéciles, des choses de ce genre, donc
20 soit il a mal compris ou il devrait plutôt présenter ses arguments par
21 écrit plutôt que de lancer de telles insultes à l'audience.
22 Il a parlé du contenu des éléments versés au dossier, mais il les
23 déforme souvent. Regardez, par exemple, le point 7, Madame le Juge et
24 Monsieur le Président, s'agissant de l'extrait concernant Zvornik. Il a dit
25 que c'était sans intérêt, qu'il y avait des choses qu'il contestait, mais
26 au fond, ce qu'il n'a pas évoqué c'est la note mentionnant ce qu'a dit
27 Branko Grujic à la réunion, ce qui est le sujet de l'extrait. C'est très
28 important pour prouver une entreprise criminelle commune en l'espèce et
Page 16400
1 aussi pour les faits incriminés; plus précisément Divic et Kozluk et
2 l'expulsion des non-Serbes qui étaient restés dans la zone après la prise
3 de ces lieux. Et Grujic dit : Nous avons réussi à mettre en œuvre la
4 décision de la présidence de coloniser Divic et Kozluk. C'est Karadzic qui
5 dit qu'il faut expulser les non-Serbes et installer des Serbes dans ces
6 régions. Alors si ce n'est pas pertinent, Monsieur le Président, je ne sais
7 plus ce qui est pertinent en l'espèce.
8 C'est ainsi que je terminerai ma réponse assez brève aux longues
9 explications fournies par l'accusé.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais être très bref. Je sais que l'heure est
11 venue de prendre la pause, mais je ne vais pas prendre plus d'une minute.
12 Mais en quoi cela me regarde-t-il ce qui s'est passé après ? D'abord,
13 Branko Grujic, il est vivant. Vous pouvez l'entendre, et non pas de façon
14 superficielle lire une interprétation erronée de ce qu'il a dit. D'abord,
15 Branko Grujic se plaint ici tout le temps contre Zuco Crni et le capitaine
16 Dragon, il ne mentionne nulle part le Parti radical serbe et les
17 volontaires du Parti radical serbe. Et les problèmes pour ce qui est de
18 Divic, Kozluk et des autres localités ça a commencé fin mai en cours du
19 mois de juin et juillet, avant qu'il n'y ait intervention de l'unité
20 spéciale du MUP de la Republika Srpska. Les problèmes sont survenus un mois
21 après le retrait des volontaires du Parti radical serbe de Zvornik. Les
22 volontaires se sont retirés le 26 avec les unités de la JNA alors que les
23 problèmes sont survenus fin mai, à partir du 26 mai ou une date autre. Mais
24 c'est cela la substance. Le Procureur ne sait pas ce qu'il a écrit.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons -- je pensais que c'était terminé.
26 Oui, Monsieur Marcussen.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je me sens forcé, après ce qui vient d'être
28 dit par l'accusé, de rappeler que même s'il avait raison - et il n'a pas
Page 16401
1 raison en disant que les volontaires n'ont pas participé à ces événements -
2 mais même si c'était vrai, ça demeure un élément de preuve pertinent eu
3 égard à l'entreprise criminelle commune. Je le répète pour que l'accusé
4 sache très bien quelle est la thèse que nous défendons.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons donc faire la pause de 20 minutes. Nous
6 reprendrons aux environs de 11 heures moins 10, puis nous irons à midi, il
7 faudra arrêter à midi pile.
8 Alors dans 20 minutes.
9 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.
10 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
12 Monsieur Seselj, vous avez la parole, car je crois qu'il reste encore
13 quelques sujets à évoquer.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crains fort que je ne vais pas avoir le
15 temps d'englober la totalité des sujets qu'il nous reste.
16 Ici vous avez abordé le sujet de mon état de santé. Vous vous souviendrez
17 probablement du fait qu'il y a deux ans et demi j'ai eu des problèmes de
18 foie. Mon pouls est assez accéléré à présent, je vais donc ralentir mon
19 débit. Il y a eu dix, voire 15 analyses de sang qui ont montré que cinq
20 enzymes au niveau du foie se trouvaient être perturbés, les résultats
21 sortaient des limites du normal. Et j'avais abordé le sujet à plusieurs
22 reprises. Il n'y a pas eu d'intervention médicale. Certains médecins ont
23 essayé d'expliquer cela par le fait que j'étais obèse. Mais je ne suis pas
24 obèse. Et si mon cholestérol est toujours normal et mes triglycérides ont
25 toujours été dans le cadre de la normalité, je n'ai pas eu de diabète, et
26 cetera. Donc j'ai compris quelle pouvait être la cause de cet
27 empoisonnement graduel. J'ai commencé à manger des vivres en conserves et
28 des denrées sèches, et le foie s'est amélioré. Ça fait un an que je n'ai
Page 16402
1 plus aucune difficulté avec le foie. Je ne peux pas être plus concret pour
2 ce qui est des sources. Je n'ai pas de preuve, les doutes sont dans mon
3 cerveau, et j'ai réagi, j'ai commencé à manger des vivres en conserves, et
4 bien que ce soit considéré comme étant très peu sain, les boîtes de
5 conserve, bien, moi, ça m'a aidé à améliorer la situation au niveau du
6 foie.
7 Mais à peine cela a-t-il pris fin que j'ai commencé à avoir des problèmes
8 avec le cœur, ça fait un an et quelques, tachycardie et arythmie, et ça n'a
9 fait que croître. Au fur et à mesure, ça a commencé à générer des problèmes
10 accrus. Les médecins ont modifié les médicaments qu'on m'administrait. J'ai
11 pris régulièrement ce qu'ils m'avaient préconisé. Et jamais dans mon sang
12 ils n'ont trouvé de traces d'un produit chimique qu'ils n'auraient pas
13 prescrit eux-mêmes, mais la situation n'a fait que se détériorer.
14 Vous avez reçu récemment un faux rapport d'un médecin auxiliaire de la
15 prison qui ne m'a même pas examiné. Il a présenté la situation de façon
16 tout à fait fausse.
17 On en est arrivé vendredi passé à me soumettre à des électrochocs dans
18 l'hôpital de Bronovo, électrochocs au niveau du cœur, sous narcose. J'ai eu
19 cinq traitements à l'électrochoc. Ça n'a pas marché, exception faite du
20 fait que je sois devenu une personnalité choquante. On dit que j'étais déjà
21 une personnalité choquante, et d'autres disent que je ne le suis devenu que
22 récemment. Mais ça c'est un aspect que je confie au bureau du Procureur
23 pour ce qui est d'une clarification. Il va falloir qu'on le refasse demain,
24 après-demain, je ne sais trop. Mais il y a des indices qui disent qu'on
25 s'apprête à le faire.
26 On envisage pour ce qui me concerne la première quinzaine du mois d'octobre
27 pour ce qui est d'une ablation, l'intervention chirurgicale appelée
28 ablation. Donc on va passer par l'artère de la jambe pour faire passer
Page 16403
1 jusqu'au cœur un laser pour essayer de brûler des nerfs au niveau du cœur.
2 Ils disent qu'on va peut-être incinérer le centre de l'amour dans le cœur,
3 et il ne restera que la haine vis-à-vis du Tribunal, de l'OTAN, de l'Union
4 européenne et, bien entendu, à l'égard de la totalité des traîtres serbes.
5 Mais on verra bien ce qu'il en sera et je ne sais pas si on connaîtra
6 l'aboutissement.
7 Mais qu'y a-t-il ici d'indicatif en particulier ? Par le biais de mon
8 conseiller juridique, Boris Aleksic, j'ai essayé d'entrer en contact avec
9 le Dr Zdravko Mijajlovic, qui, l'an passé, a rédigé un rapport d'expert sur
10 60 pages, l'an passé. Vous l'avez déjà d'ailleurs reçu, ce rapport, et j'ai
11 été assez satisfait de son travail, parce que c'est quelqu'un de sérieux
12 qui a abordé la chose de façon sérieuse, et il a présenté la situation
13 telle qu'elle l'est. Alors, cette fois-ci, le Dr Mihajlovic n'a pas pu
14 donner son opinion parce que ça lui a été interdit par son commandant, un
15 certain Miodrag Jevtic, qui se trouverait être un général à la tête de
16 l'Académie médicale militaire de Belgrade, momentanément, lui, il lui
17 aurait interdit de donner son opinion. Il a dit que le Tribunal de La Haye
18 doit d'abord lui envoyer la documentation à lui en sa qualité de directeur
19 de ce centre. Et j'ai, en passant, appris que ce Miodrag Jevtic était
20 membre d'une association américaine des chirurgiens en temps de guerre.
21 Je vois déjà la toile de fond, donc j'interdis à ce que tout document soit
22 envoyé vers l'académie médicale militaire pour ce qui est de mon état de
23 santé ou d'engager qui que ce soit en provenance de cette académie médicale
24 militaire à mon sujet.
25 Ce qui constitue le plus gros des problèmes à mes yeux, c'est ce que
26 vous avez dit vous-même, Monsieur le Président, c'est que la question qui
27 se pose, c'est une interruption du procès. Alors, je m'y oppose de façon
28 absolue. D'abord, la durée de ce procès a dépassé la mesure du raisonnable
Page 16404
1 il y a longtemps déjà. Une détention provisoire de cinq ans a déjà
2 outrepassé toutes les mesures du raisonnable. Le procès dure trois ans, et
3 le bureau du Procureur n'a pas encore terminé avec la présentation de ses
4 éléments à charge. Et si on se penche sur le tout de façon rationnelle, on
5 aurait pu tout faire en un an et demi. Dans ce procès, il y a constamment
6 eu des facteurs de ralentissement. On a fait durer les choses pour telle ou
7 telle autre raison, mais toutes les raisons étaient dénuées de sens. Aucune
8 des raisons avancées n'a justifié une interruption du procès, et en termes
9 simples, c'est devenu insoutenable.
10 Alors, s'agissant de ce procès, il faut bien qu'on en sorte d'une
11 façon ou d'une autre. Les patrons du Tribunal de La Haye, les Américains et
12 les Anglais, le savent, la CIA aussi, et le MI-6 aussi. Nous, Serbes, nous
13 appelons cela la "mi sest", parce que "mi" ça veut dire "nous." Alors,
14 comment en sortir ? Tout le monde a compris, l'opinion publique juridique
15 du monde a compris qu'il n'y a aucun élément pour ce qui est de prononcer
16 une peine en condamnation. Alors, si on ne peut rendre une condamnation, il
17 faut faire traîner les choses encore un peu et attendre que l'accusé meure,
18 et éventuellement l'aider et lui donner un coup de pouce. De quelle façon,
19 je ne sais. Je suis en train de me poser la question, et mes amis et moi ne
20 pouvons connaître le fond de la façon dont on procède.
21 L'année passée, on m'a soumis à des examens sur des instruments
22 bizarres où, de façon artificielle, on a accéléré mon pouls. Après cela,
23 mon état de santé s'est détérioré. C'est ce que j'ai pu remarquer, pour ma
24 part. Alors, la tachycardie et l'arythmie ça peut occasionner soit un
25 infarctus, soit une [inaudible] cérébrale. Qu'est-ce que ça va donner, je
26 ne sais.
27 Mais je suis contre l'interruption du procès quelle qu'en soit la
28 raison. Je voudrais qu'une chose soit consignée au compte rendu de façon
Page 16405
1 officielle. Si je meurs, j'interdis toute autopsie. Personne n'a le droit
2 de le faire pour quelque raison que ce soit.
3 Alors, j'ai très soif, mais on m'a interdit l'eau, parce que
4 prétendument il ne faut pas qu'on en prenne avant les électrochocs. Il ne
5 faut ni manger ni boire quelques heures avant. Alors, c'est ce qui se
6 rapporte à mon état de santé.
7 Pour ce qui est maintenant de l'indigence, du paiement des coûts,
8 vous avez abordé cette question, Monsieur le Président --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : -- terminer avec votre état de santé. Vous
10 venez de nous donner une information que la Chambre ignorait totalement, à
11 savoir que vous allez prochainement subir une intervention chirurgicale ici
12 même. Attendons donc de manière confiante les résultats de cette
13 intervention.
14 La Chambre, comme je l'ai indiqué, attend aussi le rapport de
15 l'expert, qui a dû intégrer les données nouvelles, à savoir les
16 électrochocs que l'on vous faits pour réguler les battements du cœur, puis
17 cette intervention. Je présume qu'il nous rendra un rapport complet. Mais
18 si la Chambre a des doutes, elle a toujours, comme je l'ai dit tout à
19 l'heure, la possibilité de demander à un panel d'experts d'autres
20 expertises, car nous ferons tout pour que vous soyez soigné de la façon la
21 mieux appropriée à votre état.
22 Maintenant, vous voulez aborder la --
23 Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai une question.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
25 Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, je voulais seulement savoir si vous
26 avez donné votre consentement écrit pour les électrochocs et l'intervention
27 que vous allez avoir en octobre.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vendredi, on m'a emmené parce que c'était
Page 16406
1 urgent, m'a-t-on dit. Je ne me suis pas opposé à cela. Et le fait de ne pas
2 avoir donné une approbation écrite, ça ne veut pas dire que cela s'est fait
3 contre ma volonté. Je ne savais pas auparavant comment la chose se passait.
4 C'est comme dans les films, quand vous réanimez quelqu'un. Mais tout se
5 fait sous narcose, ce qui fait que je n'ai rien senti du tout, mais ça n'a
6 pas porté de fruits après cinq électrochocs, et je pense que c'est un
7 maximum autorisé.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, sujet suivant.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le sujet suivant que vous avez entamé c'est
10 l'indigence ou les frais du procès.
11 J'ai reçu un courrier du greffier adjoint. Et bien qu'une décision ait été
12 rendue de façon solennelle, rejetant mes demandes de paiement des frais
13 occasionnés, j'ai reçu un nouveau courrier disant qu'ils allaient
14 réexaminer la question, mais le greffier adjoint, Ken Roberts, me demande à
15 moi de me prononcer, et il dit : J'apprécierais votre opinion sur le degré
16 de complicité qu'il faudrait attribuer à l'affaire dans la phase préalable
17 partant des critères énumérés ci-dessous. Et il y a six critères. Vous
18 savez que toutes les affaires ont été réparties en trois catégories, de par
19 leur complexité. La plus complexe, c'est la troisième catégorie, et c'est
20 là qu'on paie le plus les conseils de la Défense. Et une Défense en
21 troisième catégorie, c'est payé deux fois plus que, par exemple, la
22 catégorie numéro 1. Et ce courrier aussi prouve le comble d'insolence.
23 Parce qu'il y a plusieurs années déjà que le greffe a jugé que mon procès
24 faisait partie de la catégorie 3, et vous avez pu vous rendre compte de sa
25 complexité indépendamment du fait de réussir pour ma part ou pas. On m'a
26 reproché des délits qui n'existaient pas à l'époque où cela a été commis,
27 par exemple, le délit au pénal du discours de la haine. Donc il y a une
28 catégorisation de mise en place. D'autre part, ils ont mis une troisième
Page 16407
1 catégorie pour payer le premier des avocats en stand-by, Aleksandar
2 Lazarevic; puis Van Den Spoel, le deuxième des conseils; puis l'avocat
3 qu'on m'a imposé, David Hooper et sa petite amie, O'Shea. Donc ils ont tous
4 été payés en catégorie 3. Et maintenant, le greffier adjoint me demande
5 quelle est mon opinion pour ce qui est de la catégorie qu'il faudrait
6 m'attribuer. Qu'ai-je fait ? Rien. Je ne veux pas répondre à des questions
7 aussi stupides. Et dernièrement, je réponds de moins en moins au courrier
8 d'une teneur similaire, d'où qu'il vienne.
9 Mais je dois dire une fois de plus une chose : on doit me communiquer des
10 renseignements, quel est le montant versé à tous ces conseils pour ma part,
11 pendant la période où ils ont été engagés. Sans cela, je ne veux pas
12 discuter du paiement éventuel de ma Défense. Deuxièmement, il faut qu'on
13 nous communique la totalité des renseignements pour ce qui est du coût payé
14 par le Tribunal de La Haye à la Défense, dans chacune des affaires, depuis
15 le début des activités de ce Tribunal. Et ici, à la va-vite, ils ont bâclé
16 la chose pour ce qui est de M. Karadzic et M. Tolimir, alors ils leur
17 paient quelque chose de misérable, à la petite cuillère. Non, ça ne passera
18 pas chez moi.
19 Et troisièmement, il faut qu'on paie rétroactivement la totalité depuis la
20 première journée de mon arrivée au Tribunal, et pas à partir d'aujourd'hui,
21 pour la Défense. Lorsque les Juges de la Chambre ont décidé de payer ma
22 Défense, en 2007, le greffier a compris qu'il fallait, à partir de ce
23 moment-là, commencer à payer. Et on a demandé à l'un de mes conseillers
24 juridiques quel était son numéro de compte. Moi, j'ai mis un terme à cette
25 démarche de façon immédiate. Il faut qu'on définisse un budget de la
26 Défense. Il faut que ce budget soit comparé avec le budget du Procureur
27 pour voir combien le Procureur a engagé d'individus dans mon procès,
28 combien dans cette affaire il y a eu de frais d'engagés. Ensuite, partant
Page 16408
1 de ces comparaisons, tirer des conclusions. Bien sûr, étant donné que je me
2 défends moi-même, alors il faudra, bien sûr, déduire le montant pour le
3 conseil principal, mais le reste du montant doit être versé aux membres de
4 l'équipe de ma Défense. S'il y a 40 000 euros de payés d'une Défense de
5 troisième catégorie pendant la durée du procès, alors pour ce qui est du
6 salaire éventuel d'un avocat, il faut compter 20 000, étant donné que je
7 suis mon avocat, il ne faut pas ces 20 000, mais les 20 000 restants, j'en
8 ai besoin pour mes conseils afin qu'ils soient payés. Et chacun d'entre eux
9 a des preuves disant qu'ils ont été engagés dans cette étendue-là. Il y a
10 des écritures, il y a des déclarations préliminaires de faites, des
11 déclarations tout court, il y a des données pour ce qui est de ce qui m'a
12 été servi comme renseignements pour mes contre-interrogatoires. Donc tout
13 ceci est étayé par un travail concret. Il n'y a pas possibilité de payer
14 quelqu'un alors qu'il n'a rien fait. Pour ce qui est maintenant des 50 %
15 qui sont dus au fait que je me sois défendu moi-même, mais les 50 %
16 restants doivent être attribués à ma Défense, ou il n'y aura pas de
17 présentation d'éléments à décharge par les soins de la Défense.
18 Ensuite, j'ai préparé quelques autres questions que je voudrais parcourir
19 rapidement pour vous dire que je me prononce à leur sujet.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder les autres questions concernant la
21 Défense, bon, comme vous le savez, la Chambre va rendre une décision, mais
22 de manière incidente, comme je lis tous vos écrits afin que rien ne
23 m'échappe, comme vous vous en doutez, j'ai eu la surprise de constater sur
24 des écritures concernant une procédure de récusation que je n'évoque pas,
25 mais j'ai vu que dans la liste de votre équipe, vous aviez rayé Mme Raguz.
26 Y a-t-il une raison ?
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, elle a cessé
28 d'intervenir dans l'équipe de ma Défense de sa propre initiative depuis le
Page 16409
1 mois de mai. C'est de son propre gré qu'elle l'a décidé. Je ne sais pas
2 quels ont été ses motifs. Elle ne s'est jamais adressée à moi pour m'en
3 avancer les raisons. Depuis le mois de mai, elle n'intervient plus dans
4 l'équipe de ma Défense. Depuis là, je n'ai plus eu de contacts du tout avec
5 elle.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas de commis à l'affaire dans
8 l'affaire.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous anticipez sur la question que j'allais vous
10 poser. C'était de savoir si vous l'aviez remplacée, et vous me dites non,
11 vous n'avez pas actuellement de "case manager."
12 Bon, très bien. On en prend acte. Continuez.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je vais probablement la remplacer
14 bientôt. Je vais probablement nommer une commis à l'affaire ou un commis à
15 l'affaire dans l'affaire d'outrage, par exemple, Nemanja Sarovic, pour être
16 mon conseiller, et dans l'affaire au principal. Mais j'ai des problèmes
17 avec le greffier, là aussi, parce que quand j'ai dit que mon conseiller et
18 mon commis à l'affaire dans l'affaire d'outrage, j'ai demandé à ce qu'il me
19 rende visite, le greffier a interdit un contact privilégié avec Nemanja
20 Sarovic et Dejan Mirovic [phon], qui est un maître ès droit, a refusé de
21 façon démonstrative de venir lui aussi. Et à ce moment-là, je n'ai pu
22 rencontrer qu'un conseiller juridique, M. Boris Aleksic. Et là donc il y a
23 un problème en suspens pour ce qui est du conseiller juridique. Zoran
24 Krasic est le chef de l'équipe aidant à ma Défense, parce que vous avez
25 rendu une décision disant qu'il ne pouvait pas participer aux sessions où
26 il y a débat à huis clos partiel, et ça, je ne veux pas être d'accord, je
27 ne serai jamais d'accord. Zoran Krasic doit être mis sur un pied d'égalité
28 pour ce qui est des conseillers juridiques, et il doit être entre des
Page 16410
1 égaux, et ils doivent pouvoir bénéficier de la possibilité d'avoir des
2 contacts privilégiés avec moi. Du reste, il est au courant de tout ce qu'il
3 y a de confidentiel dans ce procès. Il n'y a rien de confidentiel qui ne
4 lui aurait pas déjà été communiqué. Très probablement, vais-je donc prendre
5 les conseillers juridiques dans l'une et l'autre des affaires, ce qui fait
6 qu'au principal, les conseillers juridiques seront Zoran Krasic, Boris
7 Aleksic et Dejan Mirovic, et le commis à l'affaire sera Nemanja Sarovic
8 probablement. Je vous en tiendrai au courant dans les journées qui
9 viennent, j'attends de terminer mes consultations avec les intéressés.
10 Voulez-vous que je poursuive avec les autres questions ?
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais me prononcer pour ce qui est de la
13 requête qui a été qualifiée de confidentielle, datée du 20 juillet, par
14 laquelle le Procureur demande à ce qu'on élargisse sa requête antérieure
15 pour ce qui est de la liste des témoins. Je ne vais pas mentionner la
16 teneur de la requête, je ne veux pas mentionner de noms du tout, mais je
17 dirais ici que le Procureur réclame ici qu'on entende des employés du
18 bureau du Procureur, et il demande aux Juges de la Chambre des
19 éclaircissements pour ce qui est des positions issues d'une décision rendue
20 précédemment.
21 Alors, moi, je m'oppose à cette requête, parce que j'estime qu'il n'y a
22 aucune raison de voir le Procureur présenter désormais devant les Juges de
23 la Chambre des employés de ce bureau du Procureur pour confirmer la
24 véracité ou la prétendue véracité des déclarations de témoins qui ont
25 contesté ce que le bureau du Procureur avait avancé comme étant venu de sa
26 part. Le bureau peut le faire dans une procédure d'outrage au Tribunal, si
27 procédure d'outrage il y a, parce que je pense qu'il devrait y en avoir
28 une, étant donné qu'il y a tant d'éléments de preuve qui sont accumulés.
Page 16411
1 Il y a une autre des écritures du 11 août, mais qui m'a été communiquée le
2 18, qui demande à ce qu'on accepte les déclarations de Milan Babic en
3 application du 92 quater. Alors, moi, je répète, une fois de plus, que je
4 m'y oppose parce que Milan Babic s'est suicidé, parce que de la part du
5 bureau du Procureur de ce Tribunal, il a été amené dans une situation sans
6 issue, et non pas parce que son témoignage et ses propos véridiques ou non
7 aient découlé de ce que le bureau du Procureur avait prouvé. Il a un jour
8 terminé son témoignage, il était censé revenir le lendemain pour continuer,
9 et dans la nuit entre les deux journées, il s'est pendu. Et nous avons des
10 déclarations de son épouse disant que la famille avait été maltraitée suite
11 à des promesses qui disaient qu'on les mettrait à l'étranger, qu'ils
12 seraient sécurisés, et cetera, et cetera.
13 Ici, le 8 septembre -- donc je me prononce dans les délais impartis, on m'a
14 communiqué un document de l'Accusation du 26 mars 2010. Alors ici, le
15 bureau du Procureur explique quelles sont les raisons d'audition à huis
16 clos. Et là, il y a de la rhétorique dénuée de sens, c'est du vide. Quand
17 vous vous penchez sur les éléments de preuve, vous verrez que dans bon
18 nombre de cas, il y a des articles de presse qui ont été pondus à des
19 occasions différentes, il y a des extraits de livres à moi, d'interviews
20 que j'ai accordées, et ainsi de suite. Alors, bien qu'on ait fait la chose
21 dans certaines affaires, je ne pense pas que ces documents puissent être
22 versés de la sorte au dossier. On ne peut pas piétiner le principe de la
23 présentation verbale des éléments de preuve. Tout élément de preuve versé
24 au dossier doit, dans le prétoire même, être entendu, il faut que
25 l'intitulé soit présenté ici. Le bureau du Procureur demande la chose, je
26 m'y oppose ou je suis d'accord, pour tout document. Même s'il y a un
27 million de documents, il faut qu'un million de fois on en donne lecture, on
28 donne la lecture de l'intitulé du document, mais de la sorte, non, on ne
Page 16412
1 peut pas le faire. On peut le faire dans des affaires dans le civil, anglo-
2 saxon ou continental, peu importe, mais dans une procédure pénale, nulle
3 part dans un monde civilisé, on ne peut procéder au versement de documents
4 au dossier de la sorte, et encore moins parce que la quantité est énorme.
5 L'Accusation a objecté à l'acceptation des décisions des juridictions
6 nationales, mais je m'oppose à ceci, parce que la Chambre a la possibilité
7 de consulter les décisions d'autres tribunaux, et ce n'est pas seulement le
8 cas devant ce Tribunal d'ailleurs, et il est toujours possible d'y
9 objecter.
10 L'Accusation a demandé qu'on interroge ses propres employés, qu'on enquête.
11 Puisque c'est encore une fois confidentiel, je ne vais pas donner lecture
12 du titre de ce document qui m'a été communiqué le 8 juillet, et évidemment,
13 je m'y oppose; le document confidentiel du 28 juin à présent, où on demande
14 que le témoin 026 fasse l'objet de versements a posteriori d'un certain
15 nombre de documents, je m'oppose également à cela. Madame le Juge, Monsieur
16 le Président, vous êtes certainement au courant que j'ai communiqué au
17 Président du Tribunal une nouvelle plainte au pénal comprenant une
18 déclaration du Témoin 026 que je vous ai également communiquée, déclaration
19 qui a été traduite en anglais. Qu'est-ce que cela permet de voir ?
20 Premièrement, le Témoin 026 se trouve véritablement dans un état de santé
21 assez mauvais, mais pas suffisamment mauvais pour l'empêcher de déposer. Il
22 aurait pu déposer. Le problème, c'est qu'on a essayé de procéder à une
23 intervention qui l'a empêché. Il y a quelques jours, il a subi une nouvelle
24 intervention, nous avons pris contact avec lui. Et très récemment donc la
25 Chambre a renoncé à le citer à comparaître, mais nous avons reçu une
26 nouvelle déclaration de sa part que nous avons incluse dans le cadre de
27 cette demande d'ouverture d'une procédure pour outrage que nous avons
28 communiquée à tous. Donc il était à notre disposition, et il nous a
Page 16413
1 informés qu'il avait même demandé par écrit à être entendu.
2 Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, une question, s'il vous plaît.
3 Donc vous êtes en contact avec ce témoin, et donc vous pensez qu'il est
4 maintenant, après cette autre intervention, il est quand même à même de
5 témoigner ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est la position qu'il a prise. Je n'ai
7 pas été personnellement en contact avec lui, ce sont mes conseillers
8 juridiques qui ont longuement discuté avec lui.
9 Et d'ailleurs, ses nouvelles déclarations résultent également de ces
10 entretiens. Il insiste même pour déposer. Il indique avoir donné de fausses
11 déclarations dans une autre affaire antérieure. Il cite tous les cas de
12 fausses dépositions dont il s'agit. Je ne vais pas citer le nom de
13 l'affaire, parce que le Procureur va bondir. Vous savez de quoi il s'agit.
14 Mme LE JUGE LATTANZI : Je vous remercie.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous abordez le cas de VS-026, et
16 je vous en remercie. C'est effectivement un cas pendant actuellement. Pour
17 mémoire, je rappelle que la Chambre a décidé d'en faire un témoin de la
18 Chambre.
19 Deuxièmement, il s'est avéré qu'il y avait donc des problèmes d'ordres
20 médicaux. La Chambre a commis un expert qui a conclu de manière catégorique
21 que son état de santé ne lui permettait pas de témoigner.
22 Ultérieurement, nous avons eu effectivement, comme vous venez de le dire,
23 un courrier de sa part disant qu'il voulait témoigner. A-t-il par miracle
24 recouvré une santé flamboyante, peut-être. Les médecins font des miracles.
25 Mais on n'a pas fourni par un document quelconque un nouveau certificat
26 disant qu'il était apte à témoigner.
27 Mais en plus, vous venez de rajouter un autre élément, à savoir qu'il
28 a eu une intervention récente, ce que j'ignorais. Alors, moi, j'attends de
Page 16414
1 voir les documents médicaux, mais que ça soit clair, il n'est pas question
2 pour moi, une seconde, de faire courir un risque quelconque à un témoin, un
3 risque de santé majeur. Si un expert me dit : il ne peut pas, pour moi, il
4 ne peut pas.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, hier, le médecin
6 de la prison, Dr Falke, est venu me voir et a insisté pour qu'aujourd'hui
7 je ne vienne pas dans le prétoire. Il est venu me voir après les heures de
8 travail au Tribunal hier, et moi, malgré son conseil, je suis venu. Donc
9 les médecins peuvent faire preuve davantage de prudence que les
10 circonstances ne l'exigent, mais ce témoin aurait pu déposer par
11 vidéoconférence. Nous avons eu des cas dans lesquels des témoins ont été
12 entendus par vidéoconférence, qui ont déclaré avoir une phobie de vol par
13 avion, alors qu'on savait pertinemment qu'ils avaient fait des voyages
14 intercontinentaux. Donc ici, nous avions un témoin qui aurait pu déposer
15 par vidéoconférence, et j'aurais accepté, bien que précédemment je me sois
16 toujours opposé aux dépositions par vidéoconférence parce que j'estimais
17 qu'il s'agissait d'un abus. Mais dans les circonstances telles que celle-
18 là, où on doit s'adapter de cette façon-là, j'aurais accepté. Il aurait pu
19 avoir un médecin assis à ses côtés qui aurait été à même d'interrompre sa
20 déposition à tout moment si son état venait à se détériorer.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Deux choses.
22 Premièrement, vous nous dites qu'hier le médecin de la prison vous a dit
23 qu'il ne fallait pas venir. Je constate -, et je tiens que ça soit au
24 transcript - première nouvelle. Le médecin aurait très bien pu nous envoyer
25 un mail en nous disant : Attention. Rien, rien du tout. Je suis un peu
26 étonné.
27 Ceci étant dit, concernant la vidéoconférence, nous avions soumis la
28 question à l'expert à l'époque, il était en possession de tous les
Page 16415
1 éléments. On lui a donné tous les éléments d'information, et la conclusion
2 était catégorique. Alors, sauf miracle --
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, j'ignore qui est cet expert. Mais le
4 médecin hier m'a suggéré de ne pas venir, estimant que d'être dans le
5 prétoire me causait trop de stress, et je lui ai expliqué pendant une
6 dizaine ou quinzaine de minutes que je me sentais très bien dans le
7 prétoire. Il est vrai que parfois Mme Lattanzi hausse quelque peu le ton en
8 s'adressant à moi, mais personne ne crée de stress dont je souffrirais. Le
9 stress est dû à certaines conditions de détention, à la longue durée de
10 cette même détention, qui sait quels sont tous les facteurs en jeu. S'il
11 n'y a pas de causes organiques à la détérioration de mon système
12 cardiovasculaire, comme pourrait l'être la présence de triglycérides, de
13 cholestérol, ou d'un taux de sucre important, on procède à d'autres
14 recherches. On utilise peut-être des électrochocs, mais en tout cas, je
15 n'ai pas fait l'objet d'un diagnostic précis. Je ne renoncerais pour rien
16 au monde à ma place dans ce prétoire. Véritablement, cela n'est pas la
17 cause d'un stress important pour moi. Peut-être parfois je vous donne
18 l'impression d'être très énervé, mais je vous prie de bien vouloir croire
19 que ce n'est pas le stress qui est à l'origine de cela. Parfois je dois
20 prendre une position un peu plus ferme pour défendre mes droits, ou je dois
21 peut-être parfois m'opposer au comportement inadmissible de certains
22 avocats qui accompagnent ici leurs clients et qui ont un comportement
23 inadmissible. Mais ce n'est pas le prétoire qui est à l'origine de cela.
24 Quelles sont les causes possibles, je l'ignore, il faudrait le déterminer.
25 Mais ce n'est certainement pas le prétoire, et c'est la raison pour
26 laquelle j'ai insisté pour venir aujourd'hui. Le Dr Falke a cédé face à mes
27 arguments. Vous pouvez vérifier auprès de lui, j'imagine qu'il vous
28 confirmera ce que je viens de dire.
Page 16416
1 Alors, juste encore deux ou trois choses que je souhaite pouvoir présenter.
2 Il n'en reste pas beaucoup. En fait, il y a encore une seule question que
3 je souhaite soulever.
4 Madame le Juge, Monsieur le Président, le 14 septembre, j'ai reçu une
5 lettre de la part de M. Marcussen, qui représente le bureau du Procureur.
6 Il dit me communiquer les déclarations de cinq témoins conformément à la
7 décision du 4 juillet 2006 de la Chambre concernant les modes de
8 communication. Alors puisque votre nom, me dit le Procureur, est cité dans
9 cette déclaration, et que la Chambre a décidé, dans sa décision portant sur
10 la deuxième requête de l'Accusation, donc décision du 27 août 2010
11 concernant la non-communication des noms et autres informations
12 susceptibles d'identifier certains témoins, a autorisé le bureau du
13 Procureur à communiquer des versions expurgées des éléments
14 d'identification personnelle. Mais je souhaite vous présenter ici à quel
15 degré ceci a été expurgé, pour vous poser la question de savoir ce que je
16 peux faire. Quelle utilité puis-je avoir d'un document qui a été expurgé à
17 ce point ? Qui peut avoir la moindre utilité d'un tel document ? Voyez par
18 vous-même. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de rendre ceci à
19 l'Accusation ici, dans ce prétoire. Si parmi les huissiers quelqu'un peut
20 avoir l'amabilité de prendre cette liasse et de la remettre à M. Marcussen
21 pour que lui-même s'en serve, parce que moi, je ne m'en servirai pas.
22 Je pense avoir présenté tout ce que j'avais préparé pour aujourd'hui.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
24 Monsieur Marcussen, est-ce que l'Accusation a également, comme l'accusé,
25 des points à faire valoir ? Je vous laisse la parole.
26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Simplement quelques questions, Monsieur le
27 Président.
28 Je commencerai peut-être par le dernier point évoqué par l'accusé. Les
Page 16417
1 déclarations ont été communiquées sous forme expurgée sur ordonnance de la
2 Chambre. Si l'accusé n'en veut pas, peut-être peut-il me les restituer,
3 avec l'aide de l'huissier, de cette façon le document ne traînera pas dans
4 le prétoire. Je pense que l'accusé ne veut pas de ces déclarations, parce
5 qu'elles sont tout à fait sans intérêt pour cette affaire. Il y a bien son
6 nom qui est mentionné, mais c'est tout. Donc je viens de les recevoir,
7 c'est très bien.
8 S'agissant du Témoin VS-26, l'accusé va bientôt recevoir la traduction
9 d'une requête, mais il semblerait qu'il y a un accord entre les deux
10 parties quant à savoir ce qu'on peut faire de ce témoin. Je voulais
11 simplement le dire à l'accusé. Il va peut-être vouloir voir s'il y a un
12 accord, il pourra répondre par écrit pour avoir sous peu une décision de
13 votre part.
14 Et une dernière chose, c'était simplement une précision que je cherchais,
15 c'est quelque chose qui a été dit à la page 8 du compte rendu
16 d'aujourd'hui, en début d'audience. J'aurais voulu une précision pour
17 savoir quelle serait la procédure que vous, Monsieur le Président, vous
18 penseriez nécessaire pour vous disqualifier, pour vous récuser. Peut-être
19 que le compte rendu n'est pas clair, mais nous ne comprenons pas tout à
20 fait. Est-ce que cette question se pose en l'espèce, ici, dans ce procès,
21 ou bien par rapport à la procédure d'outrage éventuelle qu'il y aura.
22 Merci.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois intervenir, Monsieur le Président,
24 avant que vous ne répondiez, de la même façon que le Procureur me coupe
25 souvent.
26 Moi, j'ai tout de suite compris. Vous annoncez une éventuelle récusation de
27 vous-même dans l'affaire en outrage à l'encontre du Procureur et des
28 enquêteurs du bureau du Procureur, si jamais on en vient à déterminer
Page 16418
1 qu'une telle affaire doit être diligentée. Donc j'ai immédiatement compris
2 alors que le Procureur, lui, n'a pas compris, ce qui vous permet d'avoir
3 une idée immédiate de la différence de niveaux intellectuels qui creuse un
4 fossé infranchissable entre nous.
5 Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur Seselj, vous ne devez pas dire cela. Quand
6 même, il y a aussi un problème peut-être de traduction parce que c'est deux
7 langues différentes, mais en tout cas, vous ne pouvez pas faire ces
8 appréciations ici.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Marcussen, j'étais clair. Si je
10 m'étais récusé pour l'affaire, je n'aurais pas le plaisir d'être ici
11 aujourd'hui et de vous voir, car je ne serais plus dans l'affaire quelle
12 que soit la position du Président du Tribunal [inaudible]. Un Juge qui se
13 récuse n'a aucune marge de manœuvre. En revanche, comme je l'ai indiqué,
14 c'est au transcript et M. Seselj l'a bien compris, lui, je me suis récusé
15 de la procédure pour outrage à la Cour en expliquant les raisons. J'ai
16 indiqué que j'attendais le rapport de l'ami de la Cour, dans le cas où il y
17 aurait des éléments permettant l'édiction d'un acte d'accusation. A ce
18 moment-là, j'adresserai mon courrier au Président pour me récuser de la
19 procédure pour outrage.
20 Mais soyons clairs, Monsieur Marcussen. Comme l'a dit l'accusé, il y a un
21 mauvais génie qui plane, qui retarde sans arrêt cette affaire. On en voit
22 les conséquences; une détention provisoire de près de huit ans, un état de
23 santé de l'accusé qui se dégrade au fil du temps. Il peut arriver à un
24 moment donné que je décide de ne plus participer à ce type de procédure,
25 car comme le fait le Statut, j'ai l'obligation morale, et vous aussi, vous
26 avez l'obligation morale. Il faut que le procès soit rapide. C'est ce que
27 nous dit le Statut. C'est une règle, c'est une contrainte. Il n'y a aucune
28 raison de retarder le cours de la justice. Mais si un mauvais génie plane
Page 16419
1 en retardant le cours, un juge conscient doit se poser la question. Donc
2 pour le moment, je garde le cap, j'attends sereinement le rapport de cet
3 ami de la Cour, encore faut-il qu'il soit désigné. Ça fait plusieurs mois
4 que nous attendons, et nous n'avons toujours rien. Ça peut paraître
5 incroyable à l'extérieur, mais voilà la situation. Bien sûr, il est
6 difficile de trouver un ami de la Cour qui a un profil de compétence
7 d'enquête, de droit international, d'accusation, de droits de la défense,
8 bien sûr, mais parmi les dizaines de milliers, voire centaines de milliers
9 de juristes dans le monde, il y en a peut-être un. J'avais à un moment
10 donné, je peux vous le dire, pensé à un juge qui n'a pas de travail
11 actuellement, le Juge Garzon. Pourquoi pas ? Car cet ami de la Cour, en
12 plus, ou d'autre, doit être totalement disponible. Il ne s'agit pas de
13 faire une enquête à la petite semaine là. Il faut une disponibilité totale.
14 Ce qui fait que peut-être certains qui ont pu être démarchés ont pu dire :
15 Non, moi, je ne peux pas, parce que j'ai un autre travail. Donc vous voyez,
16 c'est très complexe. Mais parmi les milliers de juristes éminents qui
17 existent dans le monde, on peut peut-être en trouver un.
18 Pour tout vous dire, Monsieur Marcussen, au début, quand il y a eu cette
19 plainte, ce que je voulais faire moi-même, c'était de faire moi-même
20 l'instruction de la plainte. La Chambre III
21 suis conformé à la décision de la Chambre III
22 fait les investigations qui s'imposaient, il y a longtemps que ça aurait
23 été terminé. Voilà ce que je voulais dire. Donc pour me résumer, il n'y a
24 pas d'ambiguïté.
25 La procédure d'outrage en cours et la récusation ne concernent que la
26 procédure à l'outrage, comme d'ailleurs, je m'étais récusé pour toutes les
27 autres procédures d'outrage déposées par l'Accusation à l'égard de
28 l'accusé, et j'avais expliqué pourquoi. Voilà, j'espère que vous avez bien
Page 16420
1 compris.
2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que je peux obtenir une précision,
3 si vous me le permettez.
4 Je crois que compte tenu de ce qui a été dit, je voudrais demander
5 aux Juges de la Chambre s'ils pensent que l'Accusation a retardé le cours
6 de ce procès dans cette affaire.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas dit cela. Je dis simplement que M.
8 Seselj est ici depuis plusieurs années. Voilà. Chacun en tirera les
9 conclusions qu'il voudra.
10 Avez-vous d'autres sujets, Monsieur Marcussen ?
11 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, il est quasiment midi, et il faut
13 que vous partiez, je le sais. Il est très difficile de vous dire quand on
14 va se revoir. La Chambre doit prendre plusieurs décisions, notamment le
15 carnet Mladic, comme vous le savez, la décision concernant la requête dite
16 Bar Table en admission d'éléments de preuve. Il faudra qu'elle tranche
17 également la question de VS-026. Mais il se peut que tout ceci ait été
18 rendu [inaudible], mais encore quelques espoirs d'avoir une audience 98
19 bis. Je ne me désespère pas.
20 J'attends également avec sérénité que chacun prenne conscience des
21 problèmes qui se posent au fil du temps et qui ne peuvent que s'accroître.
22 Par ailleurs, la Chambre, pour débloquer la situation de rendre cette
23 décision concernant le financement de votre Défense - et je crois que là il
24 y a quelques avancées positives [inaudible] la lettre que vous a envoyée le
25 greffier Cette lettre, il faudra l'examiner à l'aune de la décision que
26 nous allons rendre. Donc la situation est grave, mais pas désespérée. Il y
27 a une possibilité que dans quelque temps on entame les audiences 98 bis. Et
28 pour cela, la Chambre fait le maximum, et vous pouvez en être convaincu.
Page 16421
1 Donc vous serez informé de la prochaine audience, en fonction des décisions
2 à rendre. Bien entendu, au nom de mes collègues, je vous souhaite un prompt
3 rétablissement.
4 L'audience est levée.
5 --- L'audience administrative est levée à 11 heures 48.
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28