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1 Le mercredi 4 mai 2011
2 [Règle 98 bis Jugement]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Merci, Monsieur le Président.
9 C'est le numéro d'affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce mercredi, 4 mai 2011, je salue en premier les représentants éminents
12 du bureau du Procureur qui sont présents pour la lecture de la décision de
13 la Chambre au titre de l'article 98 bis du Règlement. Je salue M. Seselj,
14 je salue également toutes les personnes qui nous assistent, à savoir M. le
15 Greffier, Mme l'Huissier, l'agent de sécurité, ainsi que toutes autres
16 personnes.
17 Je vais aujourd'hui commencer la lecture donc de la décision orale de la
18 Chambre en application de l'article 98 bis, et je continuerai par la
19 lecture d'une opinion partiellement dissidente de moi-même.
20 Nous avons prévu donc l'audience de la matinée, qui va commencer donc
21 maintenant, et qui se poursuivra certainement dans l'après-midi, et pour le
22 cas où je n'aurai pas terminé la lecture, nous continuerions demain après-
23 midi, étant précisé que j'ai plus de 120 pages à lire. Je commence.
24 La Chambre va rendre sa décision orale en vertu de l'article 98 bis
25 du Règlement. La Chambre procèdera dans un premier temps à un rappel de la
26 procédure, elle exposera en second lieu le droit applicable en vertu de
27 l'article 98 bis du Règlement. Elle fera en troisième lieu un rappel des
28 chefs d'accusation et des modes de responsabilité tels qu'ils sont allégués
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1 dans l'acte d'accusation. Elle fera en quatrième lieu un rappel sur les
2 éléments constitutifs des crimes, et exposera le droit applicable à
3 l'incitation comme mode de participation aux crimes. Dans la cinquième
4 partie, la Chambre donnera des exemples d'éléments de preuve dont elle
5 dispose et qui sont suffisants pour étayer à ce stade les allégations de
6 perpétration de crimes telles que mentionnées dans les différents chefs
7 d'accusation. La Chambre examinera en sixième lieu la responsabilité de
8 l'accusé pour avoir incité les crimes allégués dans l'acte d'accusation,
9 par le biais notamment de ses discours.
10 Premièrement, rappel de la procédure. La présentation des éléments à
11 charge par l'Accusation, débutée le 7 novembre 2009, et s'est terminée par
12 l'audition du Témoin Nenad Jovic le 7 juillet 2010. L'Accusation a refusé
13 par la suite de clôturer la présentation de ses moyens à charge tant que la
14 Chambre n'avait pas statué sur l'ensemble de ses requêtes pendantes, dont
15 plusieurs requêtes sollicitant l'audition de nouveaux témoins, et celle du
16 Témoin VS-026, considéré comme indisponible pour raison de santé suite à
17 une première expertise médicale. La Chambre soumettait donc le Témoin VS-
18 026 à une seconde expertise médicale, qui confirmait la première par un
19 rapport enregistré le 26 novembre 2010. Par ailleurs, la Chambre statuait
20 au cours du mois de décembre 2010 sur l'ensemble des requêtes pendantes
21 pouvant avoir un impact sur la procédure 98 bis en rendant 25 décisions.
22 La Chambre devait ensuite attendre le dépôt du rapport d'expertise
23 sur l'authenticité des carnets Mladic enregistrés le 10 janvier 2011, sa
24 traduction en B/C/S et l'expiration du délai de l'accusé pour présenter ses
25 observations avant de pouvoir statuer sur la requête en admission de ces
26 carnets. Lors de l'audience administrative du 18 janvier 2011, l'accusé
27 informait la Chambre qu'il allait ultérieurement présenter ses arguments
28 sur le fondement de l'article 98 bis du Règlement. La Chambre, prenant en
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1 compte le délai nécessaire pour statuer sur les requêtes en reconsidération
2 de cette décision rendue en décembre, enregistrée par l'Accusation entre le
3 28 décembre et le 21 janvier 2011, fixait l'audience 98 bis les 7, 8 et 9
4 mars 2011 par ordonnance portant calendrier du 25 janvier 2011.
5 A l'audience du 7 mars 2011, l'accusé présentait ses arguments oraux
6 en vertu de l'article 98 bis du Règlement. Il reprenait la parole lors de
7 l'audience du 9 mars 2011 afin de répliquer l'Accusation. En particulier,
8 l'accusé conteste avoir commis, ordonné, planifié, aidé et encouragé, et
9 incité à commettre les crimes allégués dans l'acte d'accusation. Il
10 conteste également avoir participé à la commission de ces crimes en tant
11 que membre d'une entreprise criminelle commune. Plus précisément, l'accusé
12 conteste la réalité de certains crimes allégués dans l'acte d'accusation au
13 titre des divers chefs d'accusation, ainsi que la crédibilité de nombreux
14 témoignages et autres éléments de preuve présentés par l'Accusation. Il
15 affirme, en outre, que l'Accusation n'a pas pu présenter d'éléments de
16 preuve sur les discours de Vukovar, Mali Zvornik et Hrtkovci, tels
17 qu'allégués dans l'acte d'accusation, dans la mesure où il n'a pas tenu ces
18 discours.
19 Il soutient par ailleurs que si certains crimes ont pu être commis,
20 il n'y a aucune preuve que ces crimes soient imputables aux volontaires
21 recrutés par son parti, à savoir le Parti radical serbe, qui sera ci-après
22 cité comme le SRS. Il précise qu'en tout état de cause, il ne peut être
23 tenu pour responsable de crimes qui auraient été commis par ces
24 volontaires, l'accusé n'ayant pas été leur supérieur hiérarchique au sein
25 de l'armée de la JNA dans laquelle les volontaires opéraient.
26 En conclusion, l'accusé souligne qu'il est impossible de démontrer
27 au-delà de tout doute raisonnable que des actes criminels lui seraient
28 imputables, et il estime que la Chambre devra, par conséquent, prononce son
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1 acquittement pour tous les chefs d'accusation.
2 L'Accusation répondait aux arguments de l'accusé lors des audiences
3 des 8, 9 mars 2011. Elle a attiré l'attention de la Chambre sur les divers
4 témoignages et éléments de preuve admis par la Chambre, qui ne permettrait
5 pas, selon elle, de prononcer un tel acquittement.
6 II : Le droit applicable en vertu de l'article 98 bis du Règlement.
7 En application de l'article 98 bis du Règlement, à la fin de la
8 présentation des moyens à charge, la Chambre de première instance doit, par
9 décision orale et après avoir entendu des arguments oraux des parties,
10 prononcer l'acquittement de tout chef d'accusation pour lequel il n'y a pas
11 d'éléments de preuve susceptibles de justifier une condamnation. Depuis le
12 8 décembre 2004, date du dernier amendement à l'article 98 bis du
13 Règlement, une Chambre de première instance est uniquement amenée à
14 examiner si l'Accusation a présenté des éléments de preuve permettant
15 d'étayer chaque chef d'accusation dans son ensemble et non pour les
16 différentes accusations constituant ce chef. La modification de l'article
17 98 bis du Règlement a eu pour objet de faciliter la procédure et de
18 garantir une plus grande rapidité du procès. D'une part en passant d'une
19 procédure écrite à une procédure orale, et d'autre part en se concentrant
20 sur les chefs d'accusation dans leur ensemble plutôt que sur chacun des
21 crimes allégués dans le cadre de chaque chef d'accusation.
22 En conséquence, depuis le dernier amendement de l'article 98 bis, la
23 Chambre à la majorité, le Juge Antonetti étant dissident, estime qu'elle ne
24 peut prononcer l'acquittement que d'un chef d'accusation dans son ensemble.
25 Cela correspond d'ailleurs à la pratique suivie postérieurement à la
26 modification de l'article 98 bis du Règlement par les Chambres de première
27 instance, notamment dans les affaires Martic, Mrksic, Prlic et Gotovina.
28 Le fait que la Chambre soit obligée de prononcer l'acquittement d'un
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1 chef dans son ensemble laisse à la Défense la possibilité de ne pas
2 répondre à l'ensemble des allégations contenues dans un chef d'accusation,
3 et pour lesquelles elle considérait que l'Accusation n'aurait pas présenté
4 d'éléments de preuve. Dans le cadre de l'article 98 bis du Règlement, la
5 Chambre doit déterminer s'il existe des éléments de preuve au vu desquels
6 un Juge du fait raisonnable pourrait prononcer une condamnation au-delà de
7 tout doute raisonnable. Il ne s'agit pas à ce stade-ci d'établir si une
8 Chambre prononcerait une condamnation à l'issue du procès mais si elle
9 pourrait le faire. Il convient de souligner qu'au stade de l'article 98 bis
10 du Règlement, la Chambre de première instance effectue un premier examen de
11 l'ensemble des éléments de preuve versés au dossier au cours de la phase de
12 l'accusation afin de savoir si ces éléments seraient susceptibles de
13 justifier une condamnation. Ce premier examen est distinct de celui auquel
14 doit procéder une Chambre de première instance à la fin du procès. En
15 effet, à la fin du procès, une Chambre de première instance doit effectuer
16 une analyse approfondie de l'ensemble des éléments de preuve à charge et à
17 décharge versés au dossier et déterminer le poids qu'il convient de leur
18 accorder.
19 Afin de pouvoir procéder à ce premier examen au stade de l'article 98
20 bis, la Chambre doit tenir compte de tous les éléments de preuve présentés
21 durant la phase de l'Accusation et ne doit opérer aucune sélection parmi
22 eux. Les éléments de preuve en faveur de l'accusé doivent, cependant,
23 n'être utilisés qu'aux fins d'apprécier si un élément de preuve est
24 manifestement dépourvu de toute crédibilité. Il s'ensuit qu'une demande
25 d'acquittement pour un chef d'accusation est accueilli lorsqu'il n'existe
26 pas d'éléments de preuve pour justifier une condamnation ou lorsqu'il
27 existe un ou plusieurs éléments de preuve mais que la Chambre, même en leur
28 accordant une valeur maximale, ne pourrait pas prononcer de condamnation,
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1 en particulier parce qu'il - au singulier et au pluriel - manque
2 manifestement de fiabilité et de crédibilité.
3 La Chambre tient en outre à préciser qu'elle évoquera ci-après des éléments
4 de preuve seulement à titre d'exemple. Le fait que certains éléments de
5 preuve aient été pris en compte pour rendre la présente décision ne
6 signifie pas pour autant que la Chambre les appréciera de la même façon
7 lorsqu'elle rendra son jugement définitif. De même, le fait que certains
8 éléments de preuve ne soient pas évoqués dans la présente décision ne veut
9 pas dire qu'ils ne seront pas examinés et appréciés dans le cadre du
10 jugement final. Par ailleurs, alors même que l'accusé est poursuivi sous
11 diverses formes de responsabilité, il suffit, selon la majorité de la
12 Chambre, le Juge Antonetti, moi-même en l'occurrence, étant dissident, dans
13 le cadre de la procédure de l'article 98 bis du Règlement, d'établir qu'il
14 existe des éléments de preuve soutenant une seule des formes de
15 responsabilité alléguées dans l'acte d'accusation pour rejeter une demande
16 d'acquittement.
17 Dès lors qu'une Chambre tient une des formes de responsabilité au stade de
18 la procédure en vertu de l'article 98 bis du Règlement, cela ne signifie
19 pas qu'elle a en conséquence écarté les autres formes de responsabilité
20 alléguées dans l'acte d'accusation. Ainsi, une Chambre pourrait ensuite,
21 dans le cadre du jugement final, retenir une autre forme de responsabilité
22 non évoquée dans le cadre de la procédure en vertu de l'article 98 bis du
23 Règlement.
24 La Chambre souligne par ailleurs qu'en tout état de cause, il lui
25 appartient de déterminer quelle forme de responsabilité doit, le cas
26 échéant, endosser l'accusé eu égard à l'acte d'accusation et aux éléments
27 de preuve admis, comme cela a déjà été affirmé par le Tribunal au
28 paragraphe 248 du jugement Kvocka.
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1 Enfin, la Chambre tient à préciser qu'il n'existe pas de contradiction
2 entre le rejet d'une requête 98 bis et l'acquittement à la fin du procès.
3 Cela vaut même si la Défense ne présente pas d'éléments de preuve à
4 décharge.
5 Troisième chapitre, rappel des chefs d'accusation et des modes de
6 responsabilité allégués dans l'acte d'accusation.
7 Avant de continuer, je vais ralentir la lecture afin que les interprètes
8 puissent bien traduite. J'ai un œil sur le transcript en anglais et
9 j'entends, en langue serbe, la traduction de mes propos, et pour le moment,
10 tout va bien.
11 Le paragraphe 3, donc rappel des chefs d'accusation et des modes de
12 responsabilité allégués dans l'acte d'accusation.
13 La Chambre rappelle que dans le troisième acte d'accusation modifié déposé
14 le 7 décembre 2007, ci-avant et ci-après intitulé "acte d'accusation",
15 l'Accusation allègue que l'accusé est responsable de crimes sanctionnés par
16 le Statut de ce Tribunal, à savoir des crimes contre l'humanité ainsi que
17 des violations des lois ou coutumes de la guerre.
18 Les allégations exposées dans l'acte d'accusation et pour laquelle l'accusé
19 est poursuivi concernent les neuf chefs d'accusation suivants :
20 Chef 1, la persécution pour des raisons politiques, raciales, ou
21 religieuses en tant que crime contre l'humanité.
22 Chef 4, le meurtre, en tant que violation des lois ou coutumes de la
23 guerre.
24 Chef 8, la torture, en tant que violation des lois ou coutumes de la
25 guerre.
26 Chef 9, les traitements cruels, en tant que violation des lois ou coutumes
27 de la guerre.
28 Chef 10, l'expulsion, en tant que crime contre l'humanité.
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1 Chef 11, le transfert forcé, acte inhumain, en tant que crime contre
2 l'humanité.
3 Chef 12, la destruction sans motif de villages ou dévastation non justifiée
4 par les exigences militaires, en tant que violation des lois ou coutumes de
5 la guerre.
6 Chef 13, la destruction ou l'endommagement délibéré d'édifices consacrés à
7 la religion ou a l'éducation, en tant que violation des lois ou coutumes de
8 la guerre.
9 Chef 14, le pillage de biens publics ou privés, en tant que violation des
10 lois ou coutumes de la guerre.
11 La Chambre précise qu'elle examinera ces chefs en les regroupant selon
12 qu'ils sont allégués en tant que crimes contre l'humanité ou en tant que
13 crimes de guerre.
14 Les faits reprochés à l'accusé dans l'acte d'accusation couvrent les
15 municipalités de Vukovar en Croatie, de Zvornik, Sarajevo, Mostar,
16 Nevesinje en Bosnie-Herzégovine, et de Hrtkovci en Vojvodine, Vojvodine qui
17 est en Serbie.
18 L'accusé est poursuivi sur le fondement de sa responsabilité pénale
19 individuelle en application de tous les modes de responsabilité énumérés à
20 l'article 7, paragraphe (1) du Statut du Tribunal. Pour tous les crimes
21 allégués dans l'acte d'accusation, tels qu'allégués au paragraphe 5 de
22 l'acte d'accusation, qui peut se lire comme suit, alors je vais lire ce
23 paragraphe 5 qui est un paragraphe important :
24 "Vojislav Seselj est individuellement responsable des crimes visés aux
25 articles 3 et 5 du Statut du Tribunal et énumérés dans le présent acte
26 d'accusation, crimes qu'il a planifiés, ordonnés, incités à commettre,
27 commis ou de tout autre manière aidé et encouragé à planifier, préparer, ou
28 exécuter.
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1 "Par le terme 'commettre', le Procureur n'entend pas suggérer que l'accusé
2 ait matériellement commis tous les crimes qui lui sont imputés
3 personnellement. L'accusé ne se voit reprocher d'avoir matériellement
4 commis que d'une part des persécutions en dénigrant directement et
5 publiquement les autres communautés dans les discours qu'il a prononcés à
6 Vukovar, Mali Zvornik, et Hrtkovci, et en appelant à l'expulsion et au
7 transfert forcé dans les discours qu'il a prononcés à Hrtkovci, et d'autre
8 part des expulsions et des actes inhumains, transfert forcé auquel il a
9 appelé dans le discours qu'il a prononcé à Hrtkovci.
10 "Dans le présent acte d'accusation, 'la commission' s'entend notamment de
11 la participation de Vojislav Seselj en tant que co-auteur à une entreprise
12 criminelle commune. Par l'expression 'a incité à commettre,' le Procureur
13 veut dire que les discours, les déclarations, les actes et/ou omissions de
14 Vojislav Seselj ont pesé sur la décision des individus' qui ont commis les
15 crimes allégués."
16 Voici donc intégralement ce paragraphe de l'acte d'accusation.
17 La Chambre rappelle que si l'accusé a contesté sa responsabilité au titre
18 de toutes les modes de responsabilité allégués dans l'acte d'accusation, la
19 présente décision va s'attacher dans un souci d'économie judiciaire à
20 examiner les éléments de preuve relatifs à la responsabilité de l'accusé du
21 point de vue uniquement de l'incitation. En effet, comme la Chambre l'a
22 déjà rappelé, il suffit de l'avis de la majorité, car je suis dissident,
23 dans le cadre de la procédure de l'article 98 bis, d'établir qu'il existe
24 des éléments de preuve soutenant une seule des formes de responsabilité
25 alléguée dans l'acte d'accusation pour rejeter une demande d'acquittement.
26 Cela ne signifie pas, pour autant, que la Chambre ne statuera pas
27 ultérieurement sur les autres modes de responsabilité.
28 Chapitre 4, rappel des éléments constitutifs des crimes et du droit
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1 applicable à l'incitation en tant que mode de participation au crime.
2 S'agissant des éléments constitutifs des crimes, premièrement, la Chambre
3 rappelle en premier lieu que selon les articles 2, 4, et 5 du Statut, tant
4 les crimes de guerre que les crimes contre l'humanité s'inscrivent dans le
5 contexte d'un conflit armé international ou interne.
6 Deuxièmement, la Chambre rappelle, en second lieu, que pour constituer un
7 crime contre l'humanité, les actes d'un accusé doivent s'inscrivent dans le
8 cadre d'une attaque généralisée ou systématique dirigée contre une
9 population civile quelle qu'elle soit. Ces deux adjectifs sont alternatifs
10 et non cumulatifs. L'adjectif "généralisé" renvoie au fait que l'attaque a
11 été menée sur une grande échelle et au nombre de victimes qu'elle a fait,
12 tandis que l'adjectif "systématique" dénote le caractère organisé des actes
13 de violence et l'improbabilité de leur caractère fortuit. C'est à la
14 répétition délibérée et régulière de comportements criminels similaires que
15 l'on reconnaît leurs caractères systématiques.
16 Troisièmement, en ce qui concerne l'actus reus des crimes, il sera examiné
17 ultérieurement par la Chambre dans le cadre des chefs d'accusation allégués
18 dans l'acte d'accusation.
19 Quatrièmement, la Chambre rappelle que la mens rea de chacun des crimes
20 allégués dans le cadre des neufs chefs d'accusation est constituée par
21 l'intention criminelle de l'auteur du crime, sauf pour le crime de
22 persécution, qui nécessite en outre, pour engager la responsabilité d'un
23 accusé, un dolus specialis, à savoir l'intention spécifique de discriminer
24 pour des raisons politiques, raciales, ou religieuses. La Chambre reviendra
25 ultérieurement sur cet aspect dans le cadre de l'analyse du chef
26 d'accusation numéro 1.
27 B, s'agissant à présent du droit applicable à l'incitation en tant que mode
28 de responsabilité.
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1 Pour qu'une Chambre puisse conclure à l'existence d'une incitation à
2 commettre des crimes, elle doit constater que trois conditions sont
3 remplies. Une première condition relative aux actes constitutifs de
4 l'incitation; une condition relative à l'intention de l'instigateur; et
5 enfin, une condition relative au lien entre l'incitation et le crime.
6 Premièrement, en ce qui concerne tout d'abord les actes constitutifs de
7 l'incitation à la perpétration de crimes. La jurisprudence du Tribunal,
8 notamment au paragraphe 27 de l'arrêt "Kordic et Cerkez, a défini
9 "l'incitation" comme le fait, je cite : "De provoquer quelqu'un à commettre
10 une infraction."
11 La jurisprudence du TPIR, notamment au paragraphe 456 du jugement
12 Ndindabahizi, a défini la citation comme le fait de, je cite : "Pousser ou
13 encourager autrui, verbalement ou par tout autre moyen de communication, à
14 commettre un crime dans l'intention qu'il soit commis."
15 Dès lors, comme cela a été énoncé au paragraphe 271 du jugement Oric,
16 pour qu'il y ait un acte matériel constitutif d'incitation, il faut que
17 l'instigateur ait influencé l'auteur matériel du crime en le sollicitant,
18 en le poussant, ou l'emmenant de quelque manière que ce soit à perpétrer le
19 crime. Toutefois, cela ne suppose pas nécessairement que l'instigateur ait
20 été à l'origine de l'idée ou ait conçu le plan initial en vue de commettre
21 le crime. Même si l'auteur principal envisageait déjà de commettre un
22 crime, son passage à l'acte peut découler de la persuasion et de
23 l'exhortation prodiguée par l'instigateur. Plus précisément, en ce qui
24 concerne la manière dont l'auteur principal a été influencé, il n'est pas
25 nécessaire que l'incitation à commettre les crimes visés par le Statut soit
26 directe et publique, comme c'est le cas pour l'incitation directe et
27 publique à commettre le génocide, qui est un crime en soi et non un mode de
28 responsabilité.
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1 Comme cela est indiqué au paragraphe 273 du jugement Oric,
2 l'influence résultant de l'incitation peut s'exercer directement ou par des
3 intermédiaires, et sur un nombre de personnes plus ou moins important,
4 pourvu que l'instigateur ait l'intention voulue. Il n'est pas non plus
5 nécessaire que l'instigateur se trouve sur les lieux du crime, comme l'a
6 affirmé la Chambre d'appel du TPIR au paragraphe 660 de l'arrêt Nahimana,
7 plus connu sous le nom de l'arrêt Media.
8 Deuxièmement, en ce qui concerne ensuite l'intention de
9 l'instigateur. Il convient de démontrer que l'accusé a eu l'intention de
10 provoquer ou d'induire la perpétration d'un crime ou bien qu'il avait
11 conscience de la réelle probabilité qu'à la suite de l'acte d'incitation un
12 ou plusieurs crimes seraient commis, alors seraient commis soit au
13 singulier soit au pluriel. A cet égard, la Chambre d'appel, au paragraphe
14 32 de l'arrêt Kordic et Cerkez, a indiqué que quiconque provoque une autre
15 personne à commettre un acte ou une omission en ayant conscience de la
16 réelle probabilité qu'un crime soit commis au cours de l'exécution de cette
17 intention, de cette incitation, possède l'intention requise pour être tenu
18 responsable sur le fondement de l'article 7(1) du Statut. Il faut
19 considérer le fait d'inciter en ayant conscience de cette réelle
20 probabilité comme l'acceptation du crime qui en découle.
21 La Chambre souligne, toutefois, que s'agissant des crimes allégués
22 aux chefs 4, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14, tels qu'allégués dans l'acte
23 d'accusation, il suffit de prouver que l'accusé avait conscience de la
24 réelle probabilité qu'à la suite de l'incitation un de ces crimes serait
25 commis. En revanche, s'agissant du crime allégué au chef 1, il faut
26 également vérifier si l'accusé avait eu l'intention de provoquer ou
27 d'induire la perpétration de la persécution en tant que crime poursuivant
28 le but spécifique de discriminer pour des raisons politiques, raciales, ou
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1 religieuses.
2 La Chambre souligne, enfin, qu'il convient de faire une distinction
3 entre l'intention et le mobile personnel. Comme l'a affirmé la Chambre
4 d'appel au paragraphe 102 de l'arrêt Krnojelac, l'existence d'un mobile
5 personnel n'empêche pas l'auteur du crime d'être animé de l'intention
6 spécifique requise.
7 Troisièmement, enfin, s'agissant de l'existence d'un lien entre
8 l'incitation et la perpétration du crime. Ainsi que l'a affirmé la Chambre
9 d'appel au paragraphe 27 de l'arrêt Kordic et Cerkez, il n'est pas
10 nécessaire d'apporter la preuve que le crime n'aurait pas été commis sans
11 l'intervention de l'accusé. Il suffit de démontrer que l'incitation a été
12 un élément déterminant du comportement de l'auteur matériel des crimes.
13 De même, au paragraphe 660 de l'arrêt Média, la Chambre d'appel du
14 TPIR a précisé que pour qu'il y ait incitation à commettre un crime, il
15 doit être établi que les actes reprochés ont substantiellement contribué à
16 la commission du crime. Mais, il n'est pas nécessaire que ces actes aient
17 constitué une condition sine qua non de la commission du crime.
18 Par ailleurs, la Chambre d'appel du TPIR, au paragraphe 257 de
19 l'arrêt Semanza, a précisé qu'il n'est pas nécessaire de démontrer que
20 l'accusé exerçait un contrôle effectif sur l'auteur de l'acte criminel.
21 Aux paragraphes 238 et 296 de ce même arrêt, la Chambre d'appel a
22 indiqué qu'il n'était pas non plus nécessaire que l'acte d'accusation fasse
23 état des propos provocateurs exacts tenus par l'accusé ni d'en rapporter la
24 preuve pour qu'une incitation à commettre des crimes soit établie.
25 Enfin, au paragraphe 368 du jugement Nchamihigo, le TPIR a indiqué
26 que la durée de la période écoulée entre l'incitation et la commission d'un
27 acte criminel est aussi un critère pertinent pour déterminer l'attribution
28 substantielle de l'intention à la perpétration d'un crime.
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1 Par conséquent, le lien, entre les actes constitutifs de l'incitation d'une
2 part et les crimes allégués dans l'acte d'accusation d'autre part, peut se
3 déduire d'un faisceau d'indices prenant en considération des éléments tel
4 que, par exemple, la position d'autorité et l'influence exercée par
5 l'accusé sur les auteurs matériels des crimes allégués ou encore la durée
6 de la période écoulée entre l'incitation et la commission du ou des crimes.
7 Cinquième chapitre. La Chambre à la majorité, étant moi-même dissident, va
8 maintenant exposer pourquoi un Juge raisonnable pourrait conclure au-delà
9 de tout doute raisonnable qu'il existe dans la présente affaire, à ce
10 stade, suffisamment d'éléments de preuve permettant d'étayer la commission
11 des crimes allégués dans l'ensemble des neufs chefs d'accusation.
12 La Chambre souligne, à titre préliminaire, que l'accusé n'a pas contesté
13 l'existence d'un contexte de conflit armé pour les crimes allégués aux
14 neufs chefs de l'acte d'accusation. La Chambre relève que l'accusé a même
15 déclaré concernant la guerre en Bosnie qu'il s'agissait à la fois d'une
16 guerre de religion et d'une guerre civile. La Chambre considère, en outre,
17 que les éléments de preuve du dossier font presque tous état du contexte du
18 conflit armé, tant pour les crimes contre l'humanité que pour les crimes de
19 guerre.
20 Alors, (A), en ce qui concerne les crimes contre l'humanité visés aux chefs
21 numéro 1, 10, et 11, la Chambre tient à répondre à l'argument de l'accusé
22 qui conteste que les crimes allégués dans l'acte d'accusation aux chefs 1,
23 10, et 11 aient pu être commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou
24 systématique. La Chambre considère qu'elle dispose au stade de la décision
25 98 bis, de nombreux éléments de preuve qui seront visés plus
26 particulièrement ci-après, qui permettraient à un Juge raisonnable de
27 conclure au-delà de tout doute raisonnable que les crimes allégués au titre
28 du chef 1, relatif à la persécution en tant que crime contre l'humanité et
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1 au titre des chefs 10 et 11 relatifs à l'expulsion et au transfert forcé en
2 tant que crime contre l'humanité s'inscrivaient dans le cadre d'une attaque
3 généralisée contre des populations civiles non-serbes, dans le but de les
4 chasser des territoires de Slavonie, Baranja et Srem occidentale, des
5 municipalités de Zvornik, de la région de Sarajevo, de Mostar, Nevesinje,
6 et de certaines parties de la Vojvodine en Serbie. Il est donc inutile que
7 la Chambre se penche également à ce stade sur la question de savoir si les
8 crimes ont été commis dans le cadre d'une attaque systématique.
9 Deuxièmement, la Chambre va maintenant donner des exemples d'éléments de
10 preuve permettant d'étayer que chacun des crimes allégués aux chefs 1, 10,
11 et 11 de l'acte d'accusation ont été perpétrés et que l'attaque contre les
12 populations civiles non-serbes avaient un caractère généralisé.
13 S'agissant tout d'abord du chef numéro 1, à savoir la persécution en tant
14 que crime contre l'humanité, la Chambre rappelle tout d'abord, comme cela a
15 été affirmé au paragraphe 985 de l'arrêt Média, que le crime de persécution
16 consiste en un acte ou une omission qui introduit une discrimination de
17 fait et qui dénie ou bafoue un droit fondamental reconnu par le droit
18 international coutumier ou conventionnel et qui a été commis délibérément
19 avec l'intention de discriminer pour un motif prohibé, notamment pour des
20 raisons raciales, religieuses, ou politiques; cependant, tout acte de
21 discrimination ne constitue pas un crime de persécution. Les actes sous-
22 jacents de la persécution constitutifs de crime contre l'humanité, qu'ils
23 soient pris isolément ou conjointement avec d'autres actes, doivent en
24 effet présenter le même degré de gravité que les crimes énumérés à
25 l'article 5 du Statut.
26 Par ailleurs, bien que des persécutions impliquent souvent une série
27 d'actes, un acte unique peut suffire à les constituer dès lors que l'acte
28 ou omission est discriminatoire dans les faits et a été commis délibérément
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1 avec l'intention d'exercer une discrimination pour un motif prohibé.
2 Ainsi, comme l'a affirmé la Chambre d'appel dans l'arrêt Kordic et Cerkez,
3 le meurtre, les sévices, les attaques illicites contre des civils et des
4 biens de caractère civil, la détention illégale de civils, la destruction
5 de biens de caractère civil et le pillage peuvent constituer des
6 persécutions assimilables à un crime contre l'humanité lorsqu'ils sont pris
7 isolément ou conjointement avec d'autres actes.
8 Pour établir qu'il y a eu des persécutions constitutifs d'un crime contre
9 l'humanité, il faut, en outre, prouver que l'auteur des actes matériels
10 sous-jacents était animé d'une intention spécifique de discriminer sur la
11 base de motifs prohibés, notamment politiques, raciaux, ou religieux.
12 L'intention discriminatoire requise ne serait être directement déduite du
13 caractère discriminatoire général d'une attaque qualifiée de crime contre
14 l'humanité. Toutefois, la Chambre d'appel, au paragraphe 110 de l'arrêt
15 Kordic et Cerkez, considère que, je cite :
16 "L'intention discriminatoire peut être déduite d'un tel contexte à
17 condition qu'il existe, au regard des faits d'espèce, des circonstances
18 entourant la commission des actes reprochés qui confirment l'existence
19 d'une telle intention."
20 En l'espèce, la persécution alléguée dans l'acte d'accusation avait pour
21 but de chasser les populations non-serbes de certaines régions, à savoir de
22 la Slavonie, de Baranja, et de Srem occidental, des municipalités de
23 Zvornik, de la région de Sarajevo, de Mostar, de Nevesinje, et de certaines
24 parties de la Vojvodine en Serbie.
25 La Chambre note également que les actes sous-jacents de la persécution
26 visée dans l'acte d'accusation correspondent essentiellement au point de
27 vue temporal et géographique aux crimes allégués au titre des autres chefs
28 d'accusation, à savoir aussi bien l'expulsion et le transfert forcé en tant
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1 que crimes contre l'humanité, que le meurtre, la torture, les traitements
2 cruels, la destruction et le pillage des biens protégés par les conventions
3 de Genève, en tant que crimes de guerre.
4 Figurent également au titre des actes sous-jacents de la persécution
5 alléguée dans l'acte d'accusation d'autres actes tels, par exemple,
6 l'application de mesures restrictives et discriminatoires à l'encontre des
7 civils non-serbes et le dénigrement public et direct par des discours
8 prononcés à Vukovar, Mali Zvornik et Hrtkovci, et appelant à la haine des
9 Croates, des Musulmans et des autres populations non-serbes.
10 La Chambre relève que l'accusé rejette l'ensemble des allégations
11 faites sous le chef 1 relatif aux persécutions. Il conteste en particulier
12 les allégations de discrimination religieuse, et affirme par ailleurs qu'il
13 n'a jamais fait de discours à Mali Zvornik en 1992, qu'aucun discours n'a
14 eu lieu pendant la guerre à Vukovar, et enfin que lors de son discours à
15 Hrtkovci dans le cadre de sa campagne électorale, il n'a fait que soutenir
16 l'idée d'échange de populations civiles et le principe de rétorsion. Dès
17 lors l'accusé soutient que les départs des Croates ont eu lieu dans le
18 cadre d'échanges volontaires de biens immobiliers et non dans le cadre
19 d'une campagne de persécution visant à les chasser.
20 L'accusé précise également que dans l'hypothèse où les expulsions et
21 transferts forcés seraient reconnus comme ayant été commis, ces crimes
22 n'atteindraient pas l'intensité nécessaire pour être réprimés au titre de
23 la persécution visée par l'article 5 du Statut.
24 La Chambre ne peut valablement prendre en considération ce dernier
25 argument, qui ne résiste pas à l'examen. A part le fait que sur le
26 caractère généralisé de la persécution des populations non-serbes, la
27 Chambre a reçu beaucoup d'éléments de preuve. La gravité, en particulier
28 des expulsions et transferts forcés, résulte également de façon évidente
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1 des dispositions des conventions de Genève de 1949.
2 En effet, l'article 49 de la Quatrième convention interdit des
3 transferts forcés en masse ou individuels, ainsi que les déportations des
4 personnes protégées hors du territoire occupé, et pour les envoyer vers le
5 territoire de la puissance occupante ou dans celui de tout autre état
6 occupé ou non, quel qu'en soit le motif. Cette disposition est reprise par
7 l'article 85 du Protocole additionnel I aux conventions de Genève pour les
8 conflits armés internationaux, et par l'article 17 du Protocole additionnel
9 II aux conventions de Genève dans le cas d'un conflit armé interne.
10 La Chambre précise, en outre, que dans le Statut, le terme
11 "deportation" en anglais a été traduit par "expulsion" en français, et que
12 ce crime est expressément prévu comme pouvant constituer un crime contre
13 l'humanité à l'article 5, paragraphe (D) du Statut.
14 Or, la Chambre d'appel dans l'arrêt Krnojelac a estimé que le crime
15 de persécution peut revêtir différentes formes. Il peut s'agir de l'un des
16 autres actes constitutifs de crimes visés à l'article 5 du Statut ou l'un
17 des actes constitutifs de crimes visés par d'autres articles du Statut. Il
18 n'est donc pas possible de contester que des expulsions et des transferts
19 forcés peuvent constituer des actes sous-jacents du crime de persécution
20 lorsqu'ils sont commis séparément ou cumulativement avec l'intention
21 discriminatoire requise.
22 S'agissant de l'actus reus, des crimes sous-jacents de la persécution
23 alléguée dans l'acte d'accusation, la Chambre l'analysera dans les
24 développements suivants ayant trait à la commission des crimes visés aux
25 chefs des numéros 4, 8, 9, 10, 11, 12 et 13.
26 Dès lors, la Chambre va maintenant évoquer uniquement et à titre
27 d'exemple quelques éléments de preuve dont elle dispose sur la perpétration
28 de la persécution permettant à un Juge raisonnable, au-delà de tout doute
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1 raisonnable, d'étayer au stade de la décision 98 bis le fait que les
2 auteurs des actes matériels sous-jacents étaient animés de l'intention
3 discriminatoire requise.
4 Avant de continuer, je tiens à indiquer que je vais citer des noms de
5 témoins et des numéros de pièces. Comme il y en a beaucoup, il se peut que
6 par moment au transcript il y a des erreurs sur l'orthographe exacte des
7 noms, voire des numéros. Alors ceci sera corrigé ultérieurement. Car d'une
8 part, le Greffe disposera du document que je suis en train de lire, et
9 vérifiera que les noms et les numéros figurent bien, tels qu'indiqués au
10 transcript. Donc s'il y a des erreurs, elles seront corrigées, ne vous
11 inquiétez pas. Mais je vais m'efforcer de lire lentement.
12 S'agissant de l'existence d'une campagne de persécution à l'encontre
13 des populations non-serbes dans la municipalité de Zvornik, la Chambre se
14 réfère, par exemple, aux Témoins Fadil Banjanovic, VS-1064, et VS-1066 qui
15 attestent de ces faits, et sur la base desquels la Chambre peut déduire
16 l'existence de l'intention criminelle spécifique requise.
17 S'agissant des éléments de preuve relatifs à l'application de mesures
18 restrictives et discriminatoires à l'encontre de civils non-serbes,
19 notamment par des restrictions de liberté de mouvement, des révocations de
20 postes de responsabilité dans l'administration et la police, des
21 licenciements, la privation de soins médicaux ou encore des perquisitions
22 arbitraires pour la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère, à titre
23 d'exemple, aux Témoins VS-1068, VS-1067, aux pièces P658 sous pli scellé,
24 P659 sous pli scellé, P1052 sous pli scellé, qui attestent de ces faits et
25 sur la base desquels la Chambre peut déduire l'existence de l'intention
26 criminelle spécifique requise.
27 S'agissant de la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par
28 exemple, aux Témoins Ibrahim Kujan et Vojislav Dabic, et aux pièces P524 et
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1 P880 sous pli scellé, qui attestent de faits de la même espèce et sur la
2 base desquels la Chambre peut déduire l'existence de l'intention criminelle
3 spécifique requise.
4 S'agissant de la région de Sarajevo, la Chambre se réfère, par exemple, aux
5 Témoins VS-1055 et VS-1111, et à la pièce P1456 sous pli scellé, qui
6 attestent de faits de la même espèce et sur la base desquels la Chambre
7 peut déduire l'existence de l'intention criminelle spécifique requise.
8 S'agissant enfin de la Vojvodine, la Chambre se réfère, par exemple, aux
9 Témoins Aleksa Ejic et Katica Paulic, qui attestent de faits de la même
10 espèce et sur la base desquels la Chambre peut déduire l'existence de
11 l'intention criminelle spécifique requise.
12 S'agissant maintenant des chefs numéro 10 et 11 relatifs aux expulsions de
13 civils non-serbes en tant que crime contre l'humanité et au transfert forcé
14 de ces populations comme acte inhumain en tant que crime contre l'humanité,
15 la Chambre de première instance relève que l'accusé soutient que notamment
16 à Hrtkovci, mais également dans les autres municipalités, les départs des
17 membres de la population non-serbe ont eu lieu dans le cadre d'échanges
18 volontaires de biens immobiliers, laissant le choix à ceux qui le
19 souhaitent de rester sur place. La Chambre note, par ailleurs, que l'accusé
20 a indiqué à la page 16 694 du transcript, que lors de son discours de
21 Hrtkovci, il avait promis que lorsqu'il serait au pouvoir, il procéderait
22 aux échanges de biens et appliquerait le principe de rétorsion.
23 Bien, j'ai attendu parce que l'interprète anglaise a été plus rapide que
24 l'interprète serbe.
25 Sur ce point, il convient de rappeler que selon la Chambre d'appel, au
26 paragraphe 229 de l'arrêt Krnojelac, la Chambre ne peut pas déduire
27 l'existence d'un choix véritable du fait qu'un consentement ait été exprimé
28 dans la mesure où les circonstances peuvent priver ce consentement de toute
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1 valeur. Par conséquent, les éléments de preuve dont dispose la Chambre et
2 qui font état d'un consentement doivent être analysés dans leur contexte,
3 en tenant compte de la situation d'insécurité et de l'atmosphère de peur
4 qui régnait, des menaces et d'autres formes de violence, de la crainte et
5 de la vulnérabilité des personnes concernées. Ainsi, c'est l'absence de
6 choix véritable qui conditionne le caractère illicite de l'expulsion ou du
7 transfert forcé.
8 Dans le cas d'espèce, la Chambre considère comme pertinent le fait que
9 l'accusé tente de justifier le recours à l'expulsion et au transfert forcé
10 des civils non-serbes par le fait qu'il s'agirait de mesures de rétorsion
11 licites en droit international. La Chambre va maintenant donner quelques
12 exemples d'éléments de preuve suffisants sur lesquels elle se fonde pour
13 considérer que les crimes visés aux chefs numéro 10 et 11 ont bien été
14 commis dans les différentes municipalités de l'acte d'accusation.
15 Concernant la municipalité de Vukovar, la Chambre se réfère, par exemple,
16 aux témoignages de l'expert Anna-Maria Radic, de Dragutin Berghofer, et de
17 Vesna Bosanac, et aux pièces P278, P587 sous pli scellé, et P632.
18 Concernant la municipalité de Zvornik, la Chambre se réfère, par exemple,
19 aux témoignages de Fadil Banjanovic, VS-1012, VS-1013, VS-1064, et aux
20 pièces P663, P664, et P665.
21 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre se réfère, par exemple, aux
22 témoignages de Safet Sejdic et à la pièce P463.
23 Pour la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par exemple, aux
24 témoignages de Goran Stoparic et Ibrahim Kujan, ainsi qu'à la pièce P524.
25 Concernant la Vojvodine, la Chambre se réfère, par exemple, aux témoignages
26 d'Aleksa Ejic, VS-1134, VS-061, et aux pièces P537 sous pli scellé et P564
27 sous pli scellé.
28 En ce qui concerne maintenant les crimes de guerre allégués aux chefs
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1 numéro 4, 8, 9, 12, 13, et 14.
2 Premièrement, s'agissant tout d'abord du chef numéro 4, à savoir le meurtre
3 de civils non-serbes en tant que violation des lois ou coutumes de la
4 guerre.
5 La Chambre de première instance relève que l'accusé conteste le
6 meurtre de certaines personnes à Velepromet, et qu'il ne semble pas
7 reconnaître l'existence des crimes allégués pour la municipalité de
8 Zvornik, excepté les meurtres d'une vingtaine d'hommes et de jeunes garçons
9 musulmans et croates de Bosnie pour lesquels l'accusé souligne qu'ils
10 doivent être attribués aux hommes d'Arkan uniquement.
11 La Chambre va donner quelques exemples des éléments de preuve suffisants
12 sur lesquels elle se fonde pour considérer au stade de la procédure 98 bis
13 que le crime de meurtre visé au chef numéro 4 a bien été commis dans les
14 différentes municipalités de l'acte d'accusation.
15 Concernant la municipalité de Vukovar, la Chambre se réfère, par exemple,
16 aux éléments de preuve suivants : concernant l'exécution de non-Serbes par
17 les forces serbes sur un lieu d'exécution situé entre la ferme d'Ovcara et
18 Grabovo, près de Vukovar, le 20 novembre 1991, la Chambre a entendu les
19 Témoins VS-016, VS-007, Emil Cakalic, ainsi que Davor Strinovic. La Chambre
20 dispose également des pièces P609, P611, P615, P782, et P786. Par ailleurs,
21 sur l'évacuation de l'hôpital de Vukovar et l'exécution de certains
22 prisonniers à l'entrepôt de Velepromet, la Chambre a entendu les
23 témoignages de Dragutin Berghofer et de VS-051 et dispose de la pièce P282.
24 Concernant la municipalité de Zvornik, la Chambre se réfère, par exemple,
25 aux éléments de preuve suivants : sur les meurtres commis à la ferme
26 Ekonomija et à l'usine Ciglana, la Chambre a entendu les témoignages de VS-
27 1015 et Fadil Kopic. Par ailleurs, sur le meurtre des Musulmans de Bosnie à
28 l'école technique de Karakaj, la Chambre a entendu le Témoin VS-1012. Sur
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1 le meurtre des détenus à l'abattoir de Gero, la Chambre a entendu le Témoin
2 VS-1066. S'agissant du meurtre des Musulmans de Bosnie commis à la maison
3 de la culture de Drinjaca, la Chambre a entendu le Témoin VS-1064.
4 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre se réfère, par exemple, aux
5 éléments de preuve suivants : sur l'exécution de civils non-serbes tués à
6 Ljesevo dans la municipalité d'Ilijas, la Chambre a entendu le Témoin VS-
7 1111; sur le meurtre de non-Serbes à Zuc dans la municipalité de Vogosca,
8 la Chambre a entendu le Témoin Safet Sejdic.
9 Concernant la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère, par exemple,
10 aux éléments de preuve suivants : sur le meurtre de civils non-serbes au
11 stade de Vrapcici, la Chambre a entendu le Témoin Redzep Karisik et dispose
12 de la pièce P481. Sur l'exécution de civils non-Serbes à la morgue de
13 Sutina, la Chambre a entendu le Témoin Fahrudin Bilic.
14 Enfin concernant la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par
15 exemple, aux éléments de preuve suivants : sur les meurtres d'hommes dont
16 les corps ont été retrouvés à Teleca Lastva, la Chambre a entendu le Témoin
17 VS-1022 et dispose de la pièce P523.
18 S'agissant à présent des chefs numéro 8 et 9, à savoir les tortures et
19 traitements cruels en tant que violation des lois ou coutumes de la guerre
20 pour lesquelles l'Accusation allègue des emprisonnements et des détentions
21 dans des conditions de vie abjecte et inhumaine de civils non-serbes,
22 incluant notamment du travail forcé et des sévices et violence sexuelle.
23 La Chambre de première instance relève que l'accusé conteste les
24 allégations de travaux forcés dans la municipalité de Vukovar. L'accusé
25 reconnaît par ailleurs les allégations de sévice sexuel pour la
26 municipalité de Zvornik mais soutient que ces événements ont eu lieu fin
27 mai et début juin 1992, à savoir selon l'accusé avant que les volontaires
28 du SCP et du SRS ne soient présents dans cette zone, ce qui impliquerait
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1 que l'accusé ne pourrait être tenu pour responsable de ces sévices sexuels.
2 La Chambre va donner maintenant quelques exemples d'éléments de preuve
3 suffisants sur lesquels elle se fonde pour considérer au stade de la
4 procédure 98 bis que les crimes visés aux chefs 8 et 9 ont bien été commis
5 dans les différentes municipalités de l'acte d'accusation.
6 Concernant la municipalité de Vukovar, la Chambre se réfère, par exemple,
7 aux éléments de preuve suivants : s'agissant de l'emprisonnement et de la
8 détention dans des conditions de vie abjecte et humaine de civils non-
9 serbes à l'entrepôt de Velepromet, la Chambre a entendu les Témoins
10 Berghofer et VS-051. Sur l'emprisonnement et la détention dans des
11 conditions de vie abjecte et inhumaine de civils non-serbes à la ferme
12 d'Ovcara, la Chambre a entendu les Témoins Vojnovic et VS-016.
13 Alors je vais arrêter là, parce qu'il faut faire la pause. J'en suis
14 presque à la moitié de la lecture de la décision de la Chambre. Nous allons
15 faire une pause de 30 minutes. Je demande au Greffier de couper la
16 climatisation qui est au-dessus de ma tête, parce que si ça continue, je
17 vais terminer congelé, et je ne pourrai plus parler, mes cordes vocales
18 étant dans de la glace.
19 Nous allons donc faire une pause de 30 minutes.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 23.
21 --- L'audience est reprise à 11 heures 08.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors l'audience est reprise.
23 Je rappelle que je suis en train de lire la partie de la décision orale qui
24 concerne le paragraphe 2, s'agissant des chefs numéro 8 et 9. Voilà, alors
25 je m'étais arrêté à la municipalité de Zvornik.
26 Concernant la municipalité de Zvornik, la Chambre se réfère, par exemple,
27 aux témoignages de Témoins VS-1012, VS-1013, VS-1064, 1065, et dispose des
28 pièces P307, P381 sous pli scellé, et P469 sous pli scellé.
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1 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre se réfère, par exemple, au
2 Témoin VS-1055, et dispose des pièces P455 et P457.
3 Concernant la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère, par exemple,
4 aux Témoins Redzic Karisik et Fahrudin Bilic.
5 Enfin, concernant la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par
6 exemple, aux Témoins VS-1022 et VS-1051.
7 Alors petit (3), s'agissant à présent du crime sous le chef numéro 12, à
8 savoir les destructions sans motif de villages ou dévastation non
9 justifiées par les exigences militaires en tant que violation des lois ou
10 coutumes de la guerre, dont les victimes alléguées étaient des non-Serbes.
11 La Chambre de première instance relève que l'accusé ne se prononce pas sur
12 la réalité de la commission de ces crimes, mais qu'il rejette toute
13 implication des volontaires du SCP/SRS dans lesdits crimes.
14 La Chambre va donner maintenant quelques exemples d'éléments de preuve sur
15 lesquels elle se fonde pour considérer au stade de la procédure 98 bis que
16 les crimes visés au chef numéro 12 ont bien été commis dans les différentes
17 municipalités de l'acte d'accusation.
18 Concernant la municipalité de Vukovar, la Chambre se réfère, par
19 exemple, aux Témoins Dragutin Berghofer, Nebojsa Stojanovic, VS-021, et aux
20 pièces sous pli scellé P268, et aux pièces P278 et 526.
21 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre se réfère, par exemple,
22 aux Témoins VS-1111 et VS-1055.
23 Concernant la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère, par
24 exemple, aux Témoins 92 quater, Zoran Tot, et au Témoin VS-1067, ainsi
25 qu'aux pièces P843, P846, et P1051 sous pli scellé.
26 Enfin, concernant la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par
27 exemple, aux Témoins VS-1051, Ibrahim Kujan et Goran Stoparic, ainsi qu'aux
28 pièces P483 sous pli scellé et P524.
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1 S'agissant maintenant du crime sous le chef numéro 13, à savoir la
2 destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion ou
3 à l'éducation de la population non-serbe en tant que violation des lois ou
4 coutumes de la guerre, la Chambre relève que l'accusé soutient que ces
5 édifices ayant été investis à des fins militaires n'étaient plus protégés
6 par les conventions de Genève. Sur ce point, la Chambre note que l'accusé
7 n'a fait référence au cours de l'audience 98 bis à aucun élément permettant
8 d'étayer ces allégations. La Chambre relève, par ailleurs, qu'il existe des
9 éléments de preuve indiquant que certaines destructions ont eu lieu alors
10 même qu'il n'y avait aucune formation armée dans les environs.
11 La Chambre fait, par exemple, référence au témoignage de VS-1055, qui
12 atteste de ce fait.
13 La Chambre rappelle qu'en tout état de cause, la protection dont
14 bénéficie un édifice consacré à la religion ou à l'éducation ne peut être
15 perdue par la simple présence d'activités militaires ou d'installations
16 militaires aux abords immédiats de celui-ci. En effet, c'est l'utilisation
17 du bien protégé et non son emplacement qui détermine si le bien en question
18 peut perdre sa protection, comme cela a été affirmé à plusieurs reprises
19 devant ce Tribunal, par exemple, au paragraphe 310 du jugement Strugar, au
20 paragraphe 604 du jugement Naletilic, au paragraphe 98 du jugement Martic.
21 La Chambre va donner maintenant quelques exemples d'éléments de
22 preuve suffisants sur lesquels elle se fonde pour considérer au stade de la
23 procédure 98 bis que les crimes visés au chef numéro 13 ont bien été commis
24 dans les différentes municipalités de l'acte d'accusation.
25 Concernant la municipalité de Zvornik, la Chambre a entendu, par
26 exemple, le Témoin expert Andras Riedlmayer, ainsi que les Témoins Asim
27 Alic, VS-037, et VS-038.
28 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre a entendu, par exemple,
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1 le Témoin expert Andras Riedlmayer, ainsi que les Témoins VS-1055 et Safet
2 Sejdic.
3 Concernant la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère, par
4 exemple, au Témoin 92 quater Zoran Tôt, et au Témoin expert Andras
5 Riedlmayer, ainsi qu'aux pièces P843, P1044, P1045, et P1048.
6 Enfin, concernant la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère
7 au Témoin expert Andras Riedlmayer, ainsi qu'aux Témoins Ibrahim Kujan,
8 Vojislav Dabic, et aux pièces P524 et P880 sous pli scellé.
9 S'agissant à présent du chef numéro 14, à savoir les pillages de
10 biens publics ou privés non-serbes en tant que violation des lois ou
11 coutumes de la guerre tels qu'allégués. La Chambre relève que l'accusé ne
12 conteste pas les pillages mais qu'il nie toute implication des volontaires
13 du SCP/SRS et soutient qu'il aurait condamné ces actes. La Chambre va
14 maintenant donner quelques éléments de preuve suffisants sur lesquels elle
15 se fonde pour considérer au stade de la procédure 98 bis que les crimes
16 visés au chef numéro 14 ont bien été commis dans les différences
17 municipalités de l'acte d'accusation.
18 Concernant la municipalité de Vukovar, la Chambre se réfère, par
19 exemple, aux Témoins VS-002, VS-016, VS-027.
20 Concernant la municipalité de Zvornik, la Chambre se réfère, par exemple,
21 aux Témoins VS-1013, VS-038, VS-1105, et aux pièces P68, P362, et P521 sous
22 pli scellé.
23 Concernant la région de Sarajevo, la Chambre se réfère aux Témoins VS-1111,
24 Safet Sejdic, et à la pièce P840.
25 Concernant la municipalité de Mostar, la Chambre se réfère aux Témoins VS-
26 1067, Vojislav Dabic, et aux pièces P880 sous pli scellé, et P1051 sous pli
27 scellé.
28 Enfin, concernant la municipalité de Nevesinje, la Chambre se réfère, par
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1 exemple, aux Témoins Ibrahim Kujan et Vojislav Dabic, et aux pièces P524 et
2 P880 sous pli scellé.
3 Bien. Alors maintenant je vais aller lentement, parce qu'on aborde un
4 chapitre essentiel dans la décision de la Chambre.
5 La Chambre va maintenant examiner dans la sixième et dernière partie de la
6 présente décision la responsabilité de l'accusé au titre de l'incitation.
7 A titre préliminaire, la Chambre tient à répondre à l'argument de l'accusé
8 selon lequel il ne savait pas à l'époque des faits qu'il pouvait être
9 poursuivi pénalement du fait de ses discours, les tribunaux internationaux
10 et leur jurisprudence n'existant pas encore. La Chambre considère que cet
11 argument ne résiste pas à l'examen. En effet, la Chambre estime que
12 l'accusé, titulaire d'un doctorat en droit et ancien assistant à la chaire
13 des sciences politiques de l'Université de Sarajevo, ne pouvait méconnaître
14 à la période visée dans l'acte d'accusation que l'interdiction d'inciter à
15 la discrimination raciale, ethnique, ou religieuse avait été codifiée en
16 droit international en vertu notamment de l'article 7 de la Déclaration
17 universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 et de l'article 20,
18 paragraphe 2, du Pacte international relatif au droit civil et politique du
19 16 décembre 1966. L'article 4(A) de la Convention internationale sur
20 l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre
21 1965 impose, en outre, aux états de déclarer délit punissable les actes
22 d'incitation à la discrimination.
23 L'accusé ne pouvait non plus ignorer que de tels actes avaient été punis à
24 la fin de la Seconde Guerre mondiale. En effet, les discours d'incitation à
25 discriminer pour des motifs raciaux ou politiques avaient été sanctionnés
26 en tant que crimes contre l'humanité devant le tribunal militaire de
27 Nuremberg en 1946 dans l'arrêt Streicher.
28 La Chambre estime donc, par conséquent, que l'accusé était bien conscient
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1 au moment des faits qui lui sont imputés que la criminalisation au niveau
2 international de l'incitation à la haine nationale, raciale, ou religieuse
3 par le biais de propagande ou de tout autre moyen. L'accusé ne pouvait pas
4 non plus ignorer - alors je vais aller lentement parce que c'est, me
5 semble-t-il, très important - que l'ex-République fédérative socialiste de
6 Yougoslavie s'était conformée à l'obligation de réprimer de tels
7 comportements discriminatoires par l'insertion de l'article 134, paragraphe
8 1, dans son code pénal. Ce code avait été adopté par l'assemblée de ce pays
9 lors de la séance du Conseil fédéral qui s'est tenue le 28 septembre 1976,
10 puis publié dans le journal officiel du 8 octobre 1976. Pour ceux que ça
11 intéresse, c'est le numéro 44, et entré en vigueur le 1er juillet 1977.
12 Dans sa première version, lors de son adoption en 1977, l'article 134 du
13 code pénal prévoyait pour l'infraction d'incitation une peine
14 d'emprisonnement maximale de dix ans. La Chambre note que cette disposition
15 a ensuite été modifiée en 1990 pour réduire cette peine à cinq ans
16 d'emprisonnement maximum.
17 La Chambre estime, par conséquent, que l'accusé était conscient au moment
18 des faits qui lui sont imputés de la criminalisation au niveau national de
19 l'ex-Yougoslavie de l'incitation à la haine nationale, raciale, ou
20 religieuse par le biais de propagande ou de tout autre moyen contre les
21 peuples et les nationaux présents sur le territoire de ce pays.
22 Les tribunaux pénaux internationaux et leur compétence ont été créés par le
23 Conseil de sécurité seulement pour remplacer les juridictions nationales
24 dans la répression du génocide, des crimes de guerre, et des crimes contre
25 l'humanité dans une situation d'urgence pour assurer la paix
26 internationale. Le principe de légalité est par conséquent respecté.
27 Pour déterminer si l'accusé peut être tenu responsable de la commission des
28 crimes examinés sous la partie cinq de cette décision, la Chambre doit
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1 analyser les éléments de preuve du dossier et décider si ces éléments
2 permettraient à une Chambre raisonnable de conclure que l'accusé a incité
3 au sens de l'article 7, paragraphe 1 du Statut à la commission des crimes
4 allégués dans l'acte d'accusation. Pour ce faire, la Chambre va analyser
5 les éléments de preuve en sa possession en ce qui concerne chacune des
6 trois conditions de l'incitation ci-avant rappelée, à savoir premièrement,
7 l'existence d'un ou plusieurs actes constitutifs de l'incitation à
8 commettre les crimes allégués dans l'acte d'accusation.
9 Deuxièmement, conscience chez l'accusé de la réelle probabilité que des
10 crimes seraient commis suite à ses actes constitutifs d'incitation, et pour
11 le crime de persécution, son intention de provoquer ou induire la
12 commission de ce crime.
13 Et troisièmement, l'existence d'un lien entre les actes de l'accusé et les
14 crimes commis.
15 La Chambre de première instance tient à souligner, à titre préliminaire,
16 qu'elle n'a pas pu à ce stade trouver que des éléments du dossier étaient
17 manifestement dépourvus de fiabilité ou de crédibilité.
18 Premièrement, en ce qui concerne tout d'abord la première condition
19 relative aux actes constitutifs de l'incitation, l'acte d'accusation visant
20 de façon générale au titre de l'incitation les discours, les déclarations,
21 et les actes et/ou omissions de l'accusé qui ont pesé sur la décision des
22 individus qui ont commis les crimes allégués et la jurisprudence du
23 Tribunal confirmant cette approche, la Chambre de première instance a pris
24 en considération tous les actes imputables à l'accusé qui ont pu peser sur
25 ou de tout autre manière influencer le processus décisionnel à partir
26 duquel les auteurs matériels ont commis les crimes allégués dans l'acte
27 d'accusation. La Chambre a ainsi pris en considération plusieurs actes
28 imputables à l'accusé qui ont pu influencer les auteurs matériels des
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1 crimes allégués dans l'acte d'accusation.
2 Premièrement, la promotion de son idéologie nationaliste par tous les
3 moyens, notamment l'expulsion de non-Serbes, soit directement soit par
4 l'intermédiaire de son parti, le Mouvement chetnik-serbe, SCP, et ensuite
5 le SRS.
6 Deuxièmement, le dénigrement systématique des populations non-serbes.
7 Troisièmement, la dissémination d'un climat de peur parmi les populations
8 serbes et non-serbes.
9 Et quatrièmement, l'encouragement des partisans du SCP/SRS à se porter
10 volontaire, et une fois qu'ils étaient sur le terrain, l'encouragement de
11 ses partisans à réaliser son idéologie nationaliste par tous les moyens.
12 Alors petit (a), s'agissant premièrement des éléments de preuve relatifs à
13 la promotion par l'accusé de son idéologie nationaliste par tous les
14 moyens.
15 La Chambre dispose de plusieurs éléments qui permettraient à un Juge
16 raisonnable de conclure, pour les besoins de la décision 98 bis, que
17 l'accusé a fait la promotion de son idéologie nationaliste et de la Grande-
18 Serbie qui impliquait l'expulsion de non-Serbes, soit directement soit par
19 l'intermédiaire de son parti, le Mouvement chetnik-serbe ou SCP, devenu
20 illégal, et le SRS.
21 La Chambre peut citer la pièce P1278, qui est un article du journal
22 "Politika" en date du 9 juillet 1991, faisant état du fait que l'accusé a
23 été suspendu de la qualité de membre de la Société philosophique de Serbie
24 pour avoir à plusieurs reprises ouvertement prôné la violence et la haine
25 ethnique comme moyen censé réaliser et servir les intérêts du peuple serbe.
26 La Chambre dispose de la pièce P1192, qui est une retranscription d'une
27 conférence de presse du 20 février 1992, donnée par l'accusé, publiée dans
28 l'un de ses livres de la pièce P1293, qui est un article du journal
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1 "Politika" du 2 mars 1992, de la pièce P685 sous scellé, qui est une
2 retranscription de conférence de presse donnée par l'accusé entre le 26
3 mars et le 16 avril 1992 et publiée dans l'un de ses livres, et de la pièce
4 P1324, qui est la retranscription d'une conférence de presse du 5 mars
5 1992, donnée par l'accusé et publiée par l'un de ses livres qui illustre
6 toute la violence des propos de l'accusé qui avait notamment proféré des
7 menaces relatives à la survenance d'un bain de sang en Bosnie.
8 La Chambre peut également citer la pièce P1298, qui comporte notamment un
9 article du journal "Politika" du 27 mars 1992, évoquant d'autres propos
10 violents de l'accusé, notamment menaçant d'une effusion de sang dans de
11 plus grandes proportions si les intégristes musulmans souhaitaient jouer
12 avec le feu.
13 La Chambre peut également citer la pièce P1200, qui contient, entre autres,
14 un article du journal "Borba" du 28 mai 1992, retraçant certains propos
15 violents de la part de l'accusé, notamment lors d'un rassemblement du SRS
16 ayant eu lieu en mai 1992 et au cours duquel l'accusé a résumé les
17 conquêtes territoriales des forces serbes et a insisté sur le fait qu'il
18 fallait encore à faire davantage en "nettoyant" - alors je cite, entre
19 guillemets – la rive gauche de la Drina.
20 La Chambre a en outre en sa possession la pièce P1180, qui est une
21 interview de l'accusé, donnée à la télévision de Novi Sad, juin 1991, et
22 reproduite dans l'un de ses livres au cours de laquelle l'accusé indiquait
23 qu'il disposait de bastions extrêmement puissants au nord-est de la Bosnie.
24 Il déclarait en particulier que le simple fait que dans certains endroits
25 les Croates et les Musulmans ne dormaient pas dans leurs maisons depuis des
26 jours, prouve que le SRS/SCP n'était pas si insignifiant que cela. La
27 Chambre peut également citer le Témoin Nebojsa Stojanovic, qui fait état
28 dans sa déclaration préalable à son témoignage, admis au dossier sous la
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1 cote P526 et P528, du fait que l'accusé considérait qu'il fallait nettoyer
2 ethniquement la Croatie et reconquérir les frontières de la Grande-Serbie.
3 Le Témoin VS-016 a indiqué, page 11 120 du compte rendu d'audience en
4 français, que l'accusé avait déclaré - alors je cite : "Aucun Oustachi ne
5 sortira vivant de Vukovar", lors d'un meeting politique à Vukovar à la mi-
6 novembre 1991, devant le quartier général de la Leva Supoderica.
7 Le Témoin VS-033, pages 5542, 5543 de compte rendu d'audience en français,
8 a indiqué que l'accusé, lors d'une visite sur le terrain, exhorta les
9 volontaires à tuer tous les ennemis. La Chambre peut également faire
10 référence au Témoin Vesna Bosanac, qui indique à la page 11 404 du compte
11 rendu d'audience en français, que l'accusé avait dit à la radio serbe que
12 Vukovar devait tomber et que tous les bâtiments devaient être rasés. Ce qui
13 signifiait, selon elle, que l'accusé a incité les membres des forces serbes
14 à la destruction totale de la ville et leur permettait de donner libre
15 cours à leur volonté de massacrer des civils.
16 La Chambre peut enfin citer le Témoin VS-004 qui, lors de sa
17 déposition page 3 376 du compte rendu d'audience en français, indiquait que
18 les propos de l'accusé étaient inflammatoires et incendiaires.
19 Petit (b), s'agissant maintenant des éléments relatifs au dénigrement
20 systématique des populations non-serbes par l'accusé. La Chambre dispose de
21 plusieurs éléments de preuve qui permettraient à un Juge raisonnable de
22 conclure à ce stade et pour les besoins de la décision 98 bis que l'accusé
23 dénigrait de façon systématique les Croates, les Musulmans et les autres
24 populations non-serbes par le biais de ses discours notamment, en les
25 qualifiant de - je cite - "Oustacha" pour les Croates, "Balija" pour les
26 Musulmans, ces termes étant extrêmement péjoratifs et insultants.
27 S'agissant notamment du dénigrement des populations croates, la Chambre
28 dispose de la pièce P34, qui est une interview de l'accusé donnée au
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1 journal "Politika", dans lequel on peut lire que l'accusé a tenu les propos
2 suivants, alors je cite :
3 "Comment est-on supposé négocier avec les Oustachi ? Est-ce que vous avez
4 vu aujourd'hui qu'il n'y a que des Oustachi dans la population croate ? Des
5 exceptions sont des plus rares."
6 De même, dans la pièce P1194, l'accusé a déclaré qu'il n'y avait que - je
7 cite – "16 bons Croates", c'est-à-dire 10 plus 6, "qui avaient le droit de
8 rester en Serbie." Le reste, il fallait les chasser de la Serbie.
9 La Chambre peut également citer la pièce P298, qui est un reportage de la
10 télévision croate diffusé le 7 novembre 1991, ainsi que la pièce P1201, qui
11 correspond à la retranscription d'un interview de l'accusé pour l'émission
12 de télévision "Politika", diffusée le 12 juin 1992, dans laquelle on voit
13 l'accusé faire référence à Vukovar et à Hrtkovci comme des forteresses
14 oustachi où se trouvaient les pires Oustachi.
15 Autre pièce que la Chambre peut citer, la pièce P1211, qui correspond à la
16 retranscription d'une conférence de presse de l'accusé du 13 janvier 1993,
17 publiée dans l'un de ses livres, dans laquelle l'accusé parle notamment de
18 la Croatie oustacha.
19 Par ailleurs, le Témoin VS-07 évoque dans sa déposition, à la page 6 072
20 du compte rendu d'audience en français, le fait que l'accusé avait utilisé
21 le terme "Oustachi" devant des cadavres de Croates tués lors des combats,
22 et qu'il avait indiqué à ce moment-là qu'il faudrait les brûler pour qu'ils
23 n'empuantissent pas l'atmosphère et ne nous contaminent pas.
24 La Chambre peut également faire référence au Témoin Goran Stoparic, qui a
25 indiqué dans sa déposition à la page 2 338 que l'accusé appelait les
26 Croates, en général, des Oustachi.
27 Enfin, le Témoin VS-2000 peut également être cité, car il évoque aux pages
28 13 994 à 13 995 du compte rendu en français, l'appel à la vengeance de
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1 l'accusé contre les Balija lors du discours de Mali Zvornik en 1992.
2 Bien. Je m'arrête un peu parce que le frigidaire continu à fonctionner.
3 S'agissant maintenant de la dissémination par l'accusé d'un climat de peur
4 parmi la population civile. La Chambre dispose de plusieurs éléments de
5 preuve qui permettraient à un Juge raisonnable de conclure pour les besoins
6 de la décision 98 bis que l'accusé a, par le biais de ses discours,
7 disséminé un climat de peur parmi la population civile. La Chambre dispose,
8 par exemple, de la pièce P153, qui correspond à des documents publiés dans
9 le journal "Velika Srbija", numéro 9 de 1991, et reproduit dans l'un des
10 livres de l'accusé, ainsi de la pièce P179, qui est une vidéo d'un discours
11 de l'accusé en 1991 dans lequel l'accusé fait référence aux nouveaux
12 dirigeants oustachi en Croatie qui pratiquent une nouvelle politique
13 génocidaire contre le peuple serbe.
14 La Chambre peut également citer la pièce P35, qui correspond à un discours
15 prononcé par l'accusé le 4 juin 1991, et dans lequel il a déclaré que,
16 alors je cite :
17 "Tous ceux qui n'ont pas la conscience tranquille ont bien raison d'avoir
18 peur de nous, les Serbes. Ils ont bien raison de nous craindre. Nous, les
19 Serbes, nous avons trop oublié, trop pardonné pendant l'histoire. Nous
20 avons dit aux Croates que si jamais ils se remettaient à se livrer à des
21 activités génocidaires contre le peuple serbe, non seulement nous allions
22 venger chaque victime tombée, mais que nous allions aussi régler nos
23 comptes et les comptes des victimes de la Première Guerre mondiale et de la
24 Seconde Guerre mondiale."
25 Dans la pièce P62, qui est un documentaire diffusé par la BBC intitulé
26 "Mort de la Yougoslavie" diffusé en mars 1995, où on entend l'accusé
27 déclarer :
28 "Nous, Serbes, nous sommes en danger. Les hordes fascistes croates se
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1 lancent à l'assaut des femmes serbes, des enfants serbes. Les hordes
2 fascistes croates sont en train de planifier le génocide des Serbes."
3 La Chambre peut également citer le Témoin Anthony Obserschall qui, lors de
4 sa déposition a indiqué, page 1 999 compte rendu en français, que les
5 termes utilisés à des fins de propagande n'auront pas le même sens et
6 seront utilisés différemment dans les discours nationalistes et dans les
7 discours ordinaires. Il a, en outre, ajouté à la page 2 123 du compte rendu
8 en français, que le contexte est capital à l'interprétation de la
9 déclaration étudiée. Ainsi, selon lui, s'il est permis de prôner la
10 violence dans une situation de paix, ceci est interdit dans un contexte où
11 des civils sont tués.
12 La Chambre peut citer en outre le Témoin VS-061, qui a déclaré lors de sa
13 déposition, page 10 036 du compte rendu en français, avoir entendu dire que
14 lors de son discours à Hrtkovci l'accusé était en faveur de mesures de
15 rétorsion contre les Croates. Ces propos sont corroborés par le Témoin
16 Katica Paulic, qui a déclaré lors de sa déposition, pages 1 104 à 1 109 du
17 compte rendu en français, que lors du discours de l'accusé à Hrtkovci, ce
18 dernier avait indiqué que les Croates et les Hongrois devaient partir et
19 que la foule avait réagi favorablement à ses propos en scandant, je cite :
20 "On vous fera sortir, Oustachi."
21 Selon ce témoin, les non-Serbes n'osaient même plus aller travailler après
22 ce discours.
23 Petit (d), enfin s'agissant des encouragements prodigués par l'accusé aux
24 volontaires du Parti radical serbe à se porter volontaire et une fois
25 qu'ils étaient sur le terrain à réaliser son idéologie nationaliste par
26 tous les moyens. La Chambre de première instance dispose de plusieurs
27 éléments de preuve qui permettraient à un Juge raisonnable de conclure à ce
28 stade que l'accusé a directement encouragé ses partisans à se porter
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1 volontaire et à se battre, par tous les moyens, pour défendre ses idées
2 nationalistes et promouvoir la Grande-Serbie, qui ne pouvait se réaliser
3 que par la commission de crimes, notamment l'expulsion des non-Serbes.
4 La Chambre dispose, par exemple, de la pièce P1074, dans laquelle le Témoin
5 Zoran Rankic indique qu'avant que les volontaires ne partent au front,
6 l'accusé les a encouragés en leur disant : "Soyez des héros." Je répète.
7 Pas "Soyez des zéros." "Soyez des héros, et battez-vous pour la Grande-
8 Serbie."
9 La Chambre peut également citer la pièce P217, qui est une proclamation par
10 l'accusé au titre de voïvode de 16 Chetniks le 13 mai 1993; la pièce P255,
11 qui est une vidéo montrant l'accusé proclamant au titre de voïvode 18
12 Chetniks, le 31 mai 1993; et la pièce P218, qui correspond notamment à une
13 autre proclamation par l'accusé au titre de voïvode de plusieurs Chetniks,
14 le 20 mars 1994.
15 La Chambre dispose également du témoignage de Goran Stoparic, un volontaire
16 du Parti radical serbe, selon lequel aux pages 2 337 à 2 339 compte rendu
17 en français, l'accusé avait rendu visite aux membres de l'Unité Leva
18 Supoderica à Vukovar, en présence des officiers de la 1ère Brigade de la
19 Garde. Selon ce témoin, l'accusé était venu encourager cette unité composée
20 de volontaires du Parti radical serbe, SCP, et Goran Stoparic était heureux
21 de cette visite sur la ligne de front.
22 La Chambre peut également citer le Témoin VS-002, selon lequel aux pages 6
23 556 et 6 557 du compte rendu en français, l'accusé était le seul
24 représentant politique qui soit venu les voir à Vukovar, ce qui lui avait
25 valu une grande reconnaissance auprès des combattants.
26 La Chambre peut enfin citer le Témoin Vesna Bosanac, qui indique à la page
27 11 422 du compte rendu en français, qu'à Vukovar elle a entendu l'accusé
28 encourager les soldats, volontaires ou membres d'autres unités, que
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1 l'accusé était le leader idéologique et que ces gens faisaient ce qu'il
2 disait.
3 Petit (2), en ce qui concerne maintenant la seconde condition de
4 l'incitation relative à la conscience chez l'accusé de la réelle
5 probabilité que des crimes seraient commis suite à ces actes d'incitation
6 s'agissant des crimes visés aux chefs 4, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14 et
7 relative à son intention criminelle de provoquer ou d'induire la commission
8 du crime s'agissant du crime de persécution sous le chef 1. La Chambre
9 dispose de plusieurs éléments de preuve qui permettraient à un Juge
10 raisonnable de conclure que l'accusé a poursuivi sa propagande violente
11 alors même que, (a), il était conscient de l'influence qu'il exerçait sur
12 l'opinion publique serbe en général, sur les sympathisants de son idéologie
13 et sur les volontaires recrutés par le SCP/SRS en particulier.
14 (b) Il était conscient du contexte de guerre dans lequel il évoluait et qui
15 rendait particulièrement dangereux les actes d'incitation auxquels il se
16 livrait.
17 (c) Il était conscient qu'en temps de guerre des crimes sont commis.
18 (d) Il était conscient ou ne pouvait pas ignorer le passé criminel
19 notoirement connu de certains volontaires serbes et donc du risque plus
20 élevé que ces volontaires commettent des crimes de guerre une fois armés et
21 dans un contexte de guerre.
22 (e) Il était conscient de ce qui se passait sur le terrain et du fait que
23 des crimes étaient commis contre des populations civiles dans les zones de
24 combat où les volontaires du SCP/SRS étaient envoyés.
25 (f) Il avait l'intention criminelle d'inciter son auditoire et, en
26 particulier, ses volontaires à persécuter les populations non-serbes pour
27 des raisons politiques et religieuses.
28 Alors (a). S'agissant tout d'abord de la conscience qu'avait l'accusé de
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1 son influence sur l'opinion publique serbe en général, sur les
2 sympathisants de son idéologie et sur les volontaires recrutés par le
3 SCP/SRS. Je vais donc maintenant développer tout ce qui a été dit
4 auparavant, et ça va prendre du temps.
5 Sur ce point la Chambre se réfère, par exemple, à la pièce P1137, qui est
6 une préface écrite par l'accusé le 24 septembre 2002 et publiée dans son
7 livre "L'idéologie du nationalisme serbe." Dans lequel l'accusé déclare,
8 alors je cite entièrement :
9 "Les spectateurs passifs sont tous des combattants potentiels. Il faut
10 simplement les éclairer, leur apprendre, leur donner une indication
11 nationaliste, éveiller leur conscience patriotique et leur inspirer l'amour
12 de la patrie. La propagande se fonde sur le fait qu'une grande majorité de
13 personnes sont naturellement disposées à croire sans discernement tout ce
14 qu'ils lisent, entendent, ou voient à la télévision."
15 Ceci est donc dans le livre de l'accusé.
16 Dans la pièce P1264, qui correspond à des articles du journal "Velika
17 Srbija" en date du 15 août 1990, et reproduit dans un des livres de
18 l'accusé, l'accusé a dit qu'en page 25, alors je cite :
19 "Nous avons maintenant une arme puissante entre nos mains, le journal
20 'Velika Srbija'," ce qui démontre que l'accusé était conscient que la
21 diffusion de son idéologie par l'intermédiaire de ce journal aurait un fort
22 impact dans l'opinion publique serbe et --
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, je suis dans
24 l'obligation d'intervenir ici, parce que nous avons ici des interprètes qui
25 persistent à interpréter faussement, et là, j'ai eu l'occasion d'intervenir
26 lorsqu'il a été dit que nous aurions disposé d'une armée puissante. Vous
27 n'avez pas cité disant que nous disposions d'une armée puissante mais d'une
28 arme puissante. C'est intentionnellement que vous emmenez cet interprète
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1 contre lequel je suis déjà intervenu à plusieurs reprises. Alors, je suis
2 ravi de suivre votre exposé, tout ça me réjouit, mais ici je dois vraiment
3 intervenir parce que cela dépasse les bornes.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je rappelle aux interprètes qu'ils doivent
5 interpréter - je sais que c'est très difficile - le plus près possible et
6 exactement ce que je dis, et donc une arme ce n'est pas une armée, et
7 cetera.
8 Alors je reprends le passage que j'ai lu dans ma langue et qui a fait
9 l'objet d'une intervention pour une question d'interprétation.
10 Alors je relis. Dans la pièce P1264 qui correspond à des articles du
11 journal "Velika Srbija" en date du 15 août 1990, reproduit dans l'un des
12 livres de l'accusé, l'accusé indique, en page 25, alors je cite exactement
13 le texte que j'ai :
14 "Nous avons maintenant une arme puissante entre nos mains, le journal
15 'Velika Srbija'," ce qui démontre que l'accusé était conscient que la
16 diffusion de son idéologie par l'intermédiaire de ce journal aurait un fort
17 impact dans l'opinion publique serbe, en particulier sur les volontaires du
18 SCP, et successivement du Parti radical serbe.
19 Dans la pièce P1220 qui est une interview de l'accusé par un journaliste
20 japonais, en date du 18 mai 1993, reproduit dans un ouvrage de l'accusé. Ce
21 dernier, à la page 2, déclare avoir une grande influence politique en
22 Bosnie, que des milliers de volontaires serbes l'écoutent et qu'il a une
23 influence sur les milliers de combattants serbes et qu'en cas
24 d'intervention militaire étrangère, son influence sera encore plus grande.
25 En page 12 du même document, pièce P1220, l'accusé reconnaît que son
26 parti est très populaire et indique que cela explique sa popularité
27 grandissante, d'autant qu'il dit toujours ce qu'il pense réellement
28 contrairement aux autres hommes politiques.
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1 De même, les extraits vidéo consignés aux pièces P70, P339,
2 illustrent la popularité de l'accusé et l'effet qu'avaient ses discours en
3 général sur son auditoire et en particulier sur ses volontaires.
4 Par ailleurs, la Chambre peut citer les Témoins Nebojsa Stojanovic,
5 paragraphe 6 de sa déclaration préalable admis sous la cote P527; Goran
6 Stoparic, pages 2 442, 2 443 compte rendu en français; VS-016, pages 11
7 120, 11 171, 11 181 compte rendu en français; Aleksa Ejic, page 10 343
8 compte rendu en français; VS-061, page 9 924 compte rendu en français, à
9 la lumière desquels il apparaît que les propos de l'accusé avaient un
10 impact important sur ceux qui les entendaient.
11 Alors, maintenant, je passe au petit (b) s'agissant lentement, me dit
12 la Juge Lattanzi.
13 S'agissant ensuite de la conscience qu'avait l'accusé du contexte de
14 guerre dans lequel il évoluait. Compte tenu des divers éléments de preuve
15 déjà évoqués dans la présente décision, la Chambre ne citera qu'un seul
16 exemple sur cet aspect déjà évoqué situ à propos du contexte conflictuel
17 des crimes. La pièce P1205, qui retranscrit une interview de l'accusé pour
18 la chaîne de télévision Pale, diffusée en septembre 1992, dans lequel
19 l'accusé déclare à la page 4, s'agissant de la guerre en Bosnie, qu'il
20 s'agit à la fois d'une guerre de religion et d'une guerre civile.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais continuer, puis on va faire la pause dans
23 quelques instants.
24 S'agissant -- alors c'est le petit (c) maintenant, s'agissant de la
25 conscience qu'avait l'accusé qu'en temps de guerre, des crimes sont commis.
26 La Chambre ne développera pas ce point puisque l'accusé lui-même ne le
27 conteste pas, il a même admis lors de l'audience 98 bis, pages 16 645, 16
28 658 compte rendu en français.
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1 Petit (d), s'agissant à présent de la conscience qu'avait l'accusé du passé
2 criminel de certains volontaires serbes, et donc du risque plus élevé que
3 ces volontaires, une fois armés, commettent dans un contexte de guerre des
4 crimes parmi ceux visés par l'acte d'accusation.
5 La Chambre dispose d'éléments de preuve qui permettraient à un Juge
6 raisonnable de conclure que l'accusé avait conscience du passé criminel de
7 certains volontaires et ne pouvaient en tout cas les ignorer.
8 A cet égard, la Chambre peut se référer, par exemple, à la pièce P836
9 qui est la déclaration du témoin 92 quater, Matija Boskovic, dans lequel ce
10 témoin mentionne qu'au moment de la guerre, des criminels ont été relâchés
11 et ont rejoint des unités de volontaires.
12 Selon encore le Témoin Zoran Rankic, au paragraphe 35 de la déclaration
13 préalable admise sous la cote P1074, il était de notoriété publique à
14 l'époque des faits que les autorités relâchaient des personnes des prisons
15 et que le quartier général de guerre du Parti radical serbe ne vérifiait
16 jamais si les volontaires que le SCP/SRS envoyait sur le front avaient des
17 antécédents criminels. Selon lui, cela n'avait aucune importance pour
18 l'accusé.
19 Alors je vais faire la pause dans quelques instants. On va faire la pause
20 classique de 20 minutes. On reprendra à 12 heures 30. Il me restera à lire
21 exactement dix pages de la décision. Je commencerai après la lecture du
22 début de mon opinion, et nous nous arrêterons aux environs de 13 heures 30.
23 On fera une pause d'une heure pour permettre à l'accusé et puis à tous ceux
24 qui sont dans cette salle de se restaurer pendant quelque temps, et nous
25 pourrions ainsi reprendre à 14 heures 30, en non stop jusqu'à 19 heures, en
26 espérant peut-être terminer avant, j'en sais rien, la fin de la lecture de
27 mon opinion.
28 A ceci près, que le Juge Harhoff m'a informé que dans l'après-midi, il
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1 serait --
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir ?
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, alors, Monsieur Seselj, vite avant que je fasse
4 la pause.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous m'avez proposé de déjeuner. J'ai pris cela
6 très au sérieux, et je m'attends dans ce cas-là à ce qu'on m'apporte un
7 déjeuner, et non pas ce sac en plastique qu'on ne donnerait même pas à des
8 cochons, ce qui nous est envoyé par le quartier pénitentiaire. Si, par
9 conséquent, vous m'offrez de déjeuner, je m'attends à ce qu'on me propose
10 la même chose que ce que vous, Madame et Messieurs les Juges, et Madame et
11 Messieurs de l'Accusation pourrez consommer au titre du déjeuner. Si ce
12 n'est pas le cas, je renonce à votre offre.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je dois vous dire que la plupart du
14 temps, les trois Juges qui sont là, mais j'aura l'occasion de le redire
15 plus tard, sont dans deux procès, et bien souvent en guise de déjeuner,
16 nous buvons un verre d'eau.
17 Je suspends donc l'audience pendant 20 minutes.
18 --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.
19 --- L'audience est reprise à 12 heures 41.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, alors l'audience est reprise.
21 Tout d'abord, pour des questions administratives, je vous avais dit
22 qu'on ferait une pause d'une heure, mais la pause sera de une heure trente.
23 Deuxièmement, j'ai appris que les interprètes ne peuvent travailler que six
24 heures d'affilée, et que de ce fait, ils ne peuvent pas, pour des raisons
25 liées à leur statut, aller au-delà de six heures. Par ailleurs, en raison
26 des finances de ce Tribunal, dont vous savez tous qu'il va un jour très
27 prochain fermer ses portes, on n'a plus d'équipe d'interprètes
28 supplémentaire. De ce fait, quand nous aurons épuisé les six heures
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1 d'interprétariat, on arrêtera et on continuera demain à partir de 14 heures
2 15, ce qui fait que je vais avoir le temps de terminer les dix pages de la
3 décision, embrayer sur le début de mon opinion. On reprendra en début
4 d'après-midi, et quand il y aura les six heures écoulées, on arrêtera.
5 Alors je vais donc reprendre où j'en étais. C'était à la page -- oui,
6 je m'étais donc -- à la page 40, petit (e).
7 S'agissant enfin de la conscience qu'avait l'accusé de ce qui se
8 passait sur le terrain et des crimes qui étaient commis dans les zones de
9 combat où les volontaires du Parti radical serbe/SCP étaient envoyés.
10 S'agissant tout d'abord de la connaissance qu'avait l'accusé de ce qui se
11 passait sur le terrain. La Chambre peut, par exemple, s'appuyer sur les
12 témoignages de Goran Stoparic, pages 2 337 à 2 340 du compte rendu en
13 français; de Mladen Kulic, page 4 455 compte rendu en français; de VS-002,
14 pages 6 555 et 6 556 du compte rendu en français; de VS-004, page 3 413 du
15 compte rendu français; et de VS-007, pages 6 069 et 6 070 du compte rendu
16 en français, qui relate tous des visites de l'accusé sur le terrain.
17 De même, par exemple, dans la pièce P1207, qui correspond à des
18 interviews de l'accusé en date du 26 novembre 1992, reproduits dans l'un de
19 ses livres; dans la pièce P1204, qui correspond à l'interview de l'accusé
20 de septembre 1992, reproduit aussi dans ses livres, et dans la pièce P1221,
21 qui correspond à un interview de l'accusé du 21 mai 1993, reproduit dans
22 l'un de ces livres, sont décrites trois visites et inspection par l'accusé
23 des unités du SCP/SRS, commandées par les trois voïvodes que je vais citer
24 : Branislav Gavrilovic, Vasilije Vidovic, et le troisième étant Slavko
25 Aleksic.
26 (e) S'agissant à présent de la conscience que l'accusé avait des
27 crimes qui étaient commis dans les zones de combat où les volontaires du
28 SCP/SRS étaient envoyés. La Chambre peut citer, par exemple, le Témoin VS-
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1 033, qui a déclaré aux pages 5 524, 5 525, 5 529, et 5 531 du compte rendu
2 en français, qu'à Vocin, Novacic avait découvert la présence de criminels
3 parmi les volontaires et s'en était plaint à l'état-major de guerre du
4 Parti radical serbe. Ce témoin a, en outre, affirmé que de manière générale
5 Novacic avait des contacts téléphoniques avec les représentants du quartier
6 général de guerre du Parti radical serbe tous les deux ou trois jours, ou
7 bien il se rendait en personne à Belgrade et faisait son rapport
8 directement à l'accusé.
9 La Chambre peut également citer la pièce P1191, qui correspond à une
10 conférence de presse de l'accusé du 23 janvier 1992, et reproduite dans
11 l'un de ses livres dans lequel l'accusé indique que ses volontaires étaient
12 en contact constant avec la direction du SCP/SRS et transmettaient des
13 informations à partir du front. La Chambre estime que les éléments de
14 preuve dont elle dispose pourraient conduire un Juge raisonnable à déduire
15 que l'accusé savait ou ne pouvait ignorer que des crimes étaient commis
16 dans les zones de combat où les volontaires recrutés par le SCP/SRS étaient
17 envoyés. Par conséquent, la Chambre de première instance estime qu'elle
18 dispose d'éléments de preuve suffisants à ce stade qui permettraient à un
19 Juge raisonnable de conclure que l'accusé avait conscience de la réelle
20 possibilité que des crimes seraient commis suite à ces actes constitutifs
21 d'incitation.
22 (f) S'agissant de l'intention de l'accusé de provoquer ou d'induire son
23 auditoire à persécuter des populations non-serbes pour des raisons
24 politiques et religieuses. La Chambre se réfère, tout d'abord, aux éléments
25 de preuve précédemment évoqués dans la présente décision et relatifs au
26 dénigrement systématique des populations non-Serbes par l'accusé, et à ceux
27 relatifs à la promotion par l'accusé de son idéologie nationalisme par tous
28 les moyens. La Chambre fait ensuite référence aux différents éléments de
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1 preuve relatifs à la dissémination par l'accusé d'un climat de peur parmi
2 la population civile. La Chambre estime que l'accusé, par le biais de ses
3 discours, a instillé cette peur dans le but de provoquer les Serbes,
4 volontaires ou civils, à persécuter notamment les Croates pour se défendre
5 de la prétendue politique génocidaire contre le peuple serbe mise en place
6 par les dirigeants croates de l'époque.
7 A cet égard, la Chambre dispose, par exemple, du témoignage de Katica
8 Paulic, qui a rapporté page 11 904 du compte rendu en français, que
9 l'accusé, lors du rassemblement à Hrtkovci le 6 mai 1992, a pris la parole
10 en distinguant les membres serbes de l'audience, d'autres communautés
11 ethniques, et en véhiculant un sentiment anti-croate. Selon ce témoin, à la
12 page 11 905 du compte rendu en français, les propos de l'accusé, diffusant
13 sa perception discriminatoire, ont eu un effet galvanisant sur les
14 personnes de l'auditoire qui ont alors commencé à scander en d'autre :
15 "Oustachi, on vous fera sortir, on vous fera sortir Oustachi." Ensuite
16 Aleksa Ejic indique, à la page 10 343 du compte rendu en français, que la
17 foule ce jour-là ovationnait l'accusé lorsque celui-ci émettait l'hypothèse
18 que les Croates devaient rentrer dans leur belle patrie.
19 La Chambre peut également s'appuyer sur la pièce P748, qui est une
20 note du "Sremska Mitrovica State Security Department Centre", attestant que
21 l'accusé aurait pris la parole alors que la foule était en effervescence et
22 martelait des slogans tels que, alors, je cite : "Oustachi, dehors. Ceci
23 est la Serbie. Il n'y a pas de place pour les Croates en Serbie."
24 La Chambre se réfère également à la déclaration préalable du Témoin
25 Jelena Radosevic, admise sous la cote P580, dans laquelle cette dernière
26 indique que l'accusé était venu à Vocin fin novembre début décembre 1991
27 pour attiser les tensions dans le but d'accélérer les départs des Croates
28 de la ville. La Chambre considère que cette visite de l'accusé s'inscrit
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1 dans le cadre d'une campagne de persécution à l'encontre des populations
2 non-serbes, tels qu'évoqués notamment par les témoignages de Fadil
3 Banjanovic, VS-1064, VS-1066.
4 La Chambre peut également citer la pièce P547 relative au discours de
5 l'accusé à Hrtkovci et reproduit dans l'un de ses livres dans lequel il
6 fait référence aux Oustacha et appelle à l'expulsion des Croates non loyaux
7 car il n'y a pas de place pour eux à Srem. Il continue en déclarant que
8 s'ils ne partaient pas de leur plein gré, ils seront conduits de force dans
9 des bus jusqu'aux frontières du territoire serbe. Ce scénario évoqué par
10 l'accusé implique la participation des volontaires et de la population
11 civile serbe à la réalisation de ce dessein criminel.
12 Enfin, la Chambre a pris note de la pièce P1195, qui est la
13 retranscription d'une interview télévisée de l'accusé, accordée à TV studio
14 diffusée le 8 avril 1992, et qui a été reproduite dans l'un des ouvrages de
15 l'accusé. L'accusé y affirme qu'il n'a jamais rencontré un bon Croate et
16 que les Croates sont les ennemis des Serbes et les pires criminels qui
17 existent.
18 Il utilise à plusieurs reprises le terme dénigrant d'"Oustacha", et
19 proclame que l'expulsion des Croates doit être faite une bonne fois pour
20 toute, car s'ils restaient, la situation s'en trouverait d'autant plus
21 déstabilisée.
22 Je passe maintenant au troisièmement. S'agissant de la troisième
23 condition de l'incitation, à savoir l'existence d'un lien substantiel entre
24 l'incitation et les crimes. La Chambre de première instance dispose
25 d'éléments de preuve qui permettraient à un Juge raisonnable de conclure
26 que l'accusé a exercé une influence déterminante sur les auteurs des
27 crimes, du fait du recrutement et de l'envoi des volontaires par
28 l'intermédiaire du Parti radical serbe/SCP dans les localités dans
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1 lesquelles ils ont alors été à même de commettre les crimes allégués dans
2 l'acte d'accusation, et du fait de son autorité morale considérable sur ses
3 volontaires et sur tous les Serbes partisans de son idéologie nationaliste,
4 dont certains se proclamaient hommes de Seselj ou Chetniks. La Chambre note
5 d'ailleurs sur ce point qu'il existe des éléments de preuve indiquant que
6 le SRS/SCP ne prenait pas le soin d'assurer aux volontaires une formation
7 de combat et aux droits humanitaires avant de les envoyer rejoindre
8 l'armée.
9 La Chambre estime que l'auditoire de l'accusé était plus large et englobait
10 non seulement les volontaires recrutés par le Parti radical Serbe, SCP,
11 mais également tous les sympathisants de son idéologie nationaliste serbe.
12 Cependant, pour des raisons d'économie judiciaire, la Chambre va donner ci-
13 après des exemples d'éléments de preuve permettant d'attester surtout :
14 petit (a), du recrutement et de l'envoi des volontaires sur le front par le
15 SCP/SRS dirigé par l'accusé; petit (b), de l'autorité morale considérable
16 de l'accusé sur ces volontaires; et enfin, petit (c), de la commission des
17 crimes allégués dans l'acte d'accusation par des volontaires recrutés par
18 le SCP/SRS ou des sympathisants de l'idéologie de l'accusé.
19 Donc je vais revoir maintenant en détail petit (a), petit (b), petit (c).
20 Petit (a), s'agissant tout d'abord des éléments de preuve relatifs au
21 recrutement et à l'envoi de volontaires sur le front par le SCP/SRS dirigé
22 par l'accusé.
23 La Chambre peut, par exemple, citer la pièce P1233, qui correspond à
24 un interview de l'accusé à la radio Loznica en date du 10 novembre 1993, et
25 reproduit dans l'un de ses livres dans lequel l'accusé parle de la façon
26 dont il a contribué à l'attaque contre Zvornik. Il déclare, donc je cite
27 les propos de l'accusé :
28 "Vous devez savoir que nos volontaires ont combattu avec l'unité spéciale
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1 du ministère serbe de l'Intérieur et que c'est grâce à cette action de
2 coordination que Zvornik fut libérée à temps."
3 De même, dans la pièce P342, qui est une vidéo de l'interview de l'accusé
4 datant de 1994, l'accusé déclare avoir envoyé au moins 30 000 volontaires
5 armés sur tous les champs de bataille où se bat le peuple serbe.
6 Dans la pièce P30, qui est un extrait du documentaire de la BBC, "Mort de
7 la Yougoslavie", diffusé en mars 1995 dans lequel l'accusé est interviewé,
8 l'accusé déclare, je cite :
9 "En 1991, nous avons commencé à organiser des volontaires, et ce, de façon
10 considérable, et à les envoyer vers les lignes de front qui avaient été
11 déjà établies, notamment en Slavonie orientale."
12 Le recrutement de volontaires par le SCP/SRS et leur envoi sur le
13 front à partir du mois d'octobre 1991 est également évoqué par le Témoin
14 VS-033 qui a précisé lors de sa déposition, à la page 5 505, qu'il avait
15 décidé de se porter volontaire pour le SCP/SRS, qui envoyait des
16 volontaires sur le front. Le témoin a également indiqué que l'inscription
17 comme volontaire entraînait une adhésion automatique au Parti radical
18 serbe.
19 Le Témoin VS-038 a indiqué, aux pages 10 195, 10 196, que le
20 recrutement se faisait par voie de propagande dans les médias où les
21 représentants du Parti radical serbe, notamment l'accusé, appelaient les
22 patriotes à défendre le peuple serbe.
23 Le Témoin VS-1058 a également expliqué dans sa déclaration préalable,
24 admise au dossier sous la cote P1053 sous pli scellé, que début avril 1991,
25 il avait reçu la visite dans le café où il travaillait de plusieurs membres
26 du Parti radical serbe, et que ces hommes l'invitèrent à rejoindre un
27 groupe de volontaires du Parti radical serbe/SCP. Le témoin accepta et
28 décida d'adhérer au Parti radical serbe.
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1 Petit (b), s'agissant de l'autorité morale considérable de l'accusé
2 sur ses volontaires. La Chambre de première instance dispose d'éléments de
3 preuve qui permettraient à un Juge raisonnable de conclure que l'accusé
4 exerçait une influence déterminante sur les volontaires du SCP/SRS envoyés
5 sur le front. Outre les éléments de preuve concernant l'influence générale
6 de l'accusé sur les sympathisants de son idéologie nationaliste et les
7 volontaires recrutés par le SCP/SRS déjà évoqués dans la partie sur la
8 seconde condition de l'incitation, la Chambre peut également citer le
9 Témoin Fadil Kopic qui a déclaré, à la page 5 913 du compte rendu en
10 français, que les volontaires du SCP/SRS considéraient l'accusé comme un
11 dieu.
12 Par ailleurs, la Chambre peut également citer le Témoin VS-002, qui a
13 déclaré, lors de sa déposition devant la Chambre, à la page 6 557 du compte
14 rendu, à propos de l'accusé : "C'était un voïvode serbe. Nous n'aurions
15 jamais refusé ses ordres."
16 Enfin, petit (c), s'agissant de la commission des crimes par les
17 volontaires du SCP/SRS ou des sympathisants de l'idéologie de l'accusé. La
18 Chambre de première instance dispose d'éléments de preuve qui permettraient
19 à un Juge raisonnable de conclure que les volontaires recrutés par le
20 SCP/SRS ont commis les crimes allégués au titre des différents chefs de
21 l'acte d'accusation. Alors donc on va les voir chef par chef.
22 Petit (i), s'agissant du chef 4 relatif au meurtre. La Chambre peut
23 citer, par exemple, le Témoin VS-016, qui a évoqué lors de sa déposition
24 devant la Chambre, à la page 11 137 du compte rendu en français, les
25 meurtres commis à Ovcara par plusieurs volontaires recrutés par le SCP/SRS
26 qu'il a nommément visés. Ou encore le Témoin VS-007, qui a indiqué, aux
27 pages 6 103, 6 104 du compte rendu en français, qu'il a entendu dire que
28 des volontaires recrutés par le SCP/SRS, à savoir le groupe de Kinez et de
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1 Kameni, qui étaient pour la plupart très dangereux et violents, ont
2 participé aux exécutions de civils non-serbes à Ovcara.
3 La Chambre relève que la présence dans la municipalité de Vukovar
4 d'une unité de volontaires du SCP/SRS, sous le commandement de Milan
5 Lancuzanin, alias Kameni, est confirmée par le Témoin VS-002, pages 6 535
6 et 6 536 du compte rendu en français.
7 S'agissant des chefs 8 et 9 relatifs à la torture et au traitement cruel.
8 La Chambre peut, par exemple, citer le Témoin VS-1013, qui relate, à la
9 page 5 240 du compte rendu en français, que Cele, le chef de l'unité des
10 hommes de Seselj, maltraitait et tuait des détenus. La Chambre note que la
11 pièce P217 indique que Cele était un volontaire recruté par le SCP/SRS, qui
12 a reçu le titre de voïvode par proclamation de l'accusé le 13 mai 1993.
13 Le Témoin VS-1013 évoque à la page 5 257 du compte rendu en français, qu'il
14 a entendu dire que les violences sexuelles commises à la maison de la
15 culture de Celopek dans la municipalité de Zvornik avaient été commises par
16 un volontaire surnommé Repic et son équipe.
17 La Chambre relève que le Témoin Asim Alic, pages 7 002 à 7 004, 7 007
18 et 7 022 du compte rendu en français, confirme la présence de volontaires
19 recrutés par le SCP/SRS dans la municipalité de Zvornik, qui avaient tout
20 un équipement militaire ainsi que des pièces d'identité démontrant leur
21 appartenance à la fois au SCP au SRS. Parmi elles, deux frères venant des
22 alentours de Belgrade, portant le nom de Vukovic, et portant le surnom de
23 Repic pour le cadet.
24 (iii), s'agissant des chefs 10 et 11 relatifs à l'expulsion et au
25 transfert forcé en tant qu'acte inhumain. La Chambre fait, par exemple,
26 référence au Témoin Aleksa Ejic, qui relate, à la page 10 382 du compte
27 rendu en français, que Rade Cakmak, qui se présentait comme un membre du
28 Parti radical serbe, a pris part aux actes de violence contre les habitants
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1 Hrtkovci, et s'est installé avec sa famille dans la maison d'un Hongrois.
2 Alors, quatrièmement, s'agissant du chef 12, relatif à la destruction
3 sans motif de villages ou dévastation non justifiée par les exigences
4 militaires. La Chambre peut citer le Témoin VS-1067, qui indique, pages 15
5 287, 15 315, 15 316 du compte rendu en français, ainsi qu'aux paragraphes 7
6 et 8 de sa déclaration préalable admise sous la cote P1051 sous pli scellé,
7 qu'un groupe de 50 à 60 hommes, se présentant comme des membres du Parti
8 radical serbe et comme ayant pour commandant principal, Vojislav Seselj,
9 est arrivé en avril 1992 à Bjelusine, dans la municipalité de Mostar, qu'en
10 avril 1992, ce groupe s'est dirigé vers le village de Topla, situé à un
11 kilomètre et demi de Bjelusine, qu'il a vu que les hommes de Seselj
12 chassaient la population et pillaient les maisons pour les incendier
13 ensuite. La Chambre peut également citer le Témoin 92 quater Matija
14 Boskovic, un volontaire membre du Parti radical serbe, SRS, qui indique au
15 paragraphe 27 de sa déclaration préalable admise sous la cote P836, que son
16 unité brûla certaines maisons dans le village de Dugi Dio, situé dans la
17 municipalité de Zvornik.
18 Cinquièmement, s'agissant du chef 13 relatif à la destruction ou
19 l'endommagement délibéré d'édifices consacrés à l'éducation ou à la
20 religion. La Chambre peut, par exemple, citer le Témoin VS-1055, qui
21 indique aux pages 7 805, 7 810, 7 812, 7 846 du compte rendu en français,
22 que fin mars, début avril 1992, des groupes armés dirigés par Vasilije
23 Vidovic, surnommé Vaske, était présent dans la ville d'Ilijas dans la
24 région de Sarajevo. Ces hommes portaient différents insignes appartenant
25 traditionnellement à l'organisation chetnik; têtes de mort, cocardes,
26 toques, bonnets traditionnel serbe ou sajkaca.
27 Le témoin en a outre reconnu l'insigne du Parti radical serbe sur les
28 couvre-chefs et les subaras des hommes de Vaske. Il a de plus indiqué avoir
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1 entendu dire par les Serbes qui vivaient à Ilijas que Vaske était l'un des
2 responsables de la destruction des édifices religieux de la ville. La
3 Chambre peut également citer le Témoin 92 quater Mujo Dzafic, qui indique
4 au paragraphe 24 de sa déclaration préalable admise sous la cote P840, que
5 Vaske détruisit tous les bâtiments religieux, mosquées, et églises dans les
6 alentours d'Ilijas notamment la mosquée de Stari Ilijas.
7 Sixièmement, s'agissant du chef 14 relatif au pillage de biens
8 publiques ou privés. La Chambre peut, par exemple, citer le Témoin Nebojsa
9 Stojanovic, qui indique aux paragraphes 15 et 16 de sa déclaration
10 préalable admise sous la cote P527, qu'il a assisté au pillage des maisons
11 situées à Desna Supoderica par des volontaires recrutés par le SCP/SRS qui
12 s'amusaient, en outre, à déféquer partout dans les maisons.
13 La Chambre peut également citer le Témoin 92 quater Mujo Dzafic, qui
14 indique au paragraphe 31 de sa déclaration préalable admise sous la cote
15 P840, que peu de temps avant la fin de la guerre, Vaske et ses hommes
16 pillèrent toutes les entreprises d'Ilijas, en prenant notamment du matériel
17 de construction, qu'ils embarquèrent dans des camions. Le témoin a vu Vaske
18 diriger personnellement un camion qui était rempli d'affaires volées.
19 Septièmement, s'agissant du chef 1 relatif à la persécution pour des
20 raisons politiques, raciales ou religieuses. La Chambre se réfère notamment
21 à l'ensemble des preuves évoquées ci-dessus, concernant les autres chefs de
22 l'acte d'accusation qui constituent par ailleurs certains des actes sous-
23 jacents de la persécution qui a été perpétrée pour des raisons politiques
24 et religieuses avec la participation de l'accusé. Il est donc inutile de
25 donner d'autres exemples d'éléments de preuve que la Chambre possède
26 concernant ce chef et qui permet d'établir un lien entre l'incitation et ce
27 crime.
28 Par conséquent, la Chambre considère qu'il existe des éléments de preuve
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1 suffisants qui permettraient à un Juge raisonnable de conclure à ce stade
2 qu'il existe un lien substantiel entre les actes d'incitation de l'accusé
3 et les crimes commis.
4 Alors, conclusion.
5 Au vu de l'analyse des éléments de preuve sur la perpétration des crimes,
6 sur la participation de l'accusé à une telle perpétration par des actes
7 d'incitation et sur le lien entre les crimes et les actes d'incitation de
8 l'accusé, la Chambre considère qu'il existe suffisamment d'éléments de
9 preuve à ce stade, et pour les besoins de l'article 98 bis du Règlement,
10 qui permettrait à un Juge raisonnable de condamner l'accusé au-delà de tout
11 doute raisonnable pour avoir incité à la commission de tous les crimes
12 allégués dans les neuf chefs de l'acte d'accusation.
13 La Chambre à la majorité, étant moi-même dissident, tient à rappeler que
14 cette conclusion la dispense d'examiner à ce stade les autres formes de
15 responsabilité alléguées dans l'acte d'accusation, à savoir la commission
16 matérielle, en particulier de la persécution, des expulsions et des
17 transferts forcés, la participation à une entreprise criminelle commune, et
18 les autres formes de responsabilité prévues par l'article 7, paragraphe 1,
19 du Statut.
20 Par ces motifs et en application de l'article 98 bis du Règlement, la
21 Chambre rejette la requête de l'accusé.
22 Bien. Alors, n'étant pas d'accord avec une partie de la décision
23 majoritaire, je me dois de faire part oralement de ma position. Et compte
24 tenu des problèmes qui vont être évoqués, je m'aiderai en cours de mon
25 exposé de tableaux qui apparaîtront sur les écrans à ma demande, et je
26 remercie par avance M. le Greffier et M. l'Huissier qui me prêteront leur
27 concours.
28 Concernant la méthodologie que j'ai utilisée pour arriver à mes conclusions
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1 personnelles. Auparavant, je tiens à exprimer mes remerciements au
2 stagiaire et à mon assistant de Juge, qui m'ont permis, sur le plan
3 matériel, de dresser les tableaux qui apparaîtront tout à l'heure sur
4 l'écran. Ça a été un travail considérable, car il a fallu examiner les
5 milliers de documents et des dizaines de milliers de pages, ce qui a été un
6 travail considérable, et donc je tiens à les remercier personnellement.
7 Afin d'évaluer les éléments de preuve de l'Accusation, je dois indiquer à
8 titre liminaire que je me suis principalement fondé sur une pièce qui me
9 semble capitale, qui a été admise à la demande du bureau du Procureur et
10 qui figure dans la procédure qui est relative à tous les transcripts de
11 l'audition de l'accusé dans l'affaire Milosevic, audition qui a duré
12 plusieurs jours, et qui fait des centaines de pages. Et donc, ça a été un
13 élément de ma base de travail.
14 De même, j'ai lu et étudié avec attention toutes les décisions rendues par
15 les Chambres concernant les événements s'étant déroulés dans l'ex-
16 Yougoslavie, et ces décisions ont autorité de la chose jugée, et sont donc
17 de notoriété publique, et je ferai état de certaines d'entre elles dans mon
18 opinion. Et pour parfaire le tout, indépendamment des documents, j'ai
19 également consulté certaines requêtes et décisions publiques concernant un
20 certain nombre d'affaires qui étaient pertinentes pour les questions qui
21 nous sont soumises dans le cadre de cette procédure.
22 A la fin de la lecture de mon opinion qui, je le rappelle, fait 73 pages,
23 je remettrai à M. Marcussen et à M. Seselj le document que je vais lire, et
24 à ce document sera annexés les tableaux et ces tableaux récapitulent les
25 témoins, les "exhibits", et cetera, ce qui leur permettra de s'y retrouver.
26 Alors, tout d'abord, je vais suivre un plan, et je demande à M. l'Huissier
27 d'afficher sous l'ELMO le plan qui a été traduit en anglais et dans la
28 langue de l'accusé. Voilà, alors on voit ceci donc en anglais. J'aborderai
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1 donc successivement des propos préliminaires, ensuite la procédure 98 bis
2 relative à l'acquittement. Le troisième chapitre concernera les crimes
3 allégués dans l'acte d'accusation commis en Croatie, en Bosnie-Herzégovine
4 et en Serbie. Le quatrième chapitre concernera la responsabilité pénale
5 individuelle de l'accusé en ce qui concerne la planification, les ordres,
6 l'incitation à commettre, la commission soit au titre de l'entreprise
7 criminelle, formes I, II et III, la commission de crimes de persécution,
8 crimes d'expulsion et de transfert forcés. J'aborderai ensuite l'aide et
9 l'encouragement, qui figurent au point 5, et je terminerai par les charges
10 en produisant deux tableaux récapitulatifs sur les chefs d'accusation qui,
11 de mon point de vue, devraient entraîner l'acquittement partiel de
12 l'accusé, et les chefs d'accusation qui devraient permettre la continuation
13 du procès.
14 Pendant les quelques minutes qui me restent avant la pause, je vais aborder
15 le titre 1, qui sont des propos préliminaires.
16 L'examen des éléments de preuve de l'Accusation en application de l'article
17 98 bis du Règlement s'inscrit dans un contexte particulier eu égard aux
18 autres affaires jugées par ce Tribunal. En premier lieu, il y a une
19 détention provisoire hors norme de l'accusé, qui a été placé en détention
20 le 24 février 2003. Cette détention provisoire depuis plus de huit ans est
21 excessive par rapport aux critères fixés par la Cour européenne des droits
22 de l'homme, et sa prolongation ne doit intervenir que pour des motifs
23 pertinents et suffisants, tels que la complexité de l'affaire, la nécessité
24 de maintenir l'accusé à la disposition de la justice, la prévention du
25 renouvellement de l'infraction. Voir notamment, sur ce point, Cour
26 européenne des droits de l'homme, 29 octobre 2009, Paradysz contre France,
27 ou également la question des pressions sur les témoins. Voir notamment sur
28 ce point, Cour européenne des droits de l'homme, 10 mars 2009, Bykov contre
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1 Russie.
2 En second lieu, il y a eu plusieurs allégations en cours résultant de la
3 violation des noms de témoins protégés ou de pressions exercées sur des
4 témoins.
5 L'impact éventuel de ces allégations sur l'acte d'accusation serait,
6 de mon point de vue, de toute façon nul, car les pressions ou les
7 violations des noms des témoins protégés n'ont pas eu lieu avant la
8 rédaction de l'acte d'accusation. L'acte d'accusation n'a donc pas été
9 pollué par ce type de pressions ou de violations, pour peu qu'elles aient
10 existées.
11 En troisième lieu, il y a une procédure en cours pour outrage à la Cour
12 diligentée à l'encontre de plusieurs membres du bureau du Procureur. De mon
13 point de vue, cette procédure dont nous aurons les conclusions de l'Ami de
14 la Cour, courant octobre 2011 au mieux, peut avoir un effet direct sur
15 l'acte d'accusation pour le cas où des auditions de témoins auraient été
16 viciées par les pressions exercées. Comme un acte d'accusation est basé
17 tant sur des auditions ayant donné lieu à des déclarations versées à la
18 procédure, voire, par exemple, déclarations du Témoin VS-009 du 12 février
19 2003 et 16 juin 2006, que sur des documents, il y aurait donc un impact
20 susceptible d'entraîner la nullité totale ou partielle de l'acte
21 d'accusation.
22 De ce fait, j'estime à mon niveau qu'en tout état de cause, il conviendrait
23 d'attendre le mois d'octobre avant de commencer ultimement la seconde phase
24 du procès en application de l'article 73 du Règlement. Si l'Ami de la Cour
25 concluait à l'absence d'outrage à la Cour et à la mise hors de cause du
26 bureau du Procureur, la présentation des éléments à décharge pourrait alors
27 avoir lieu.
28 Dans le cas contraire, il ne pourrait y avoir début de la
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1 présentation des éléments à décharge avant la purge totale ou partielle de
2 l'acte d'accusation, soit à la demande de l'Accusation en application de
3 l'article 51 du Règlement relatif au retrait d'un acte d'accusation soit à
4 la demande de l'accusé en application de l'article 73 du Règlement. Dans
5 cette hypothèse, l'accusé pourrait saisir la Chambre afin qu'elle rende une
6 décision ou pour obtenir réparation du préjudice subit.
7 En outre, ce cas n'ayant jamais eu lieu et n'ayant jamais été
8 envisagé par le Règlement, j'estime que la Chambre proprio motu, en cas de
9 carence des parties et en application de l'article 85(A) du Règlement,
10 pourrait décider que tous les moyens de preuve ont été produits et entamer
11 la fin de la procédure prévue à l'article 86 du Règlement.
12 Il me reste deux pages et demie. On va terminer à deux heures moins quart.
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25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'oppose absolument à cette demande du
26 Procureur, parce que jamais je n'ai eu de versement de pièce
27 confidentielle. Moi, ça a toujours été public, et ce document public se
28 trouve sur mon site, et ça se trouve également publié dans l'un de mes
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1 livres, et ça ne peut en aucune façon être quelque chose de confidentiel.
2 C'est à moi de décider si ce que j'ai présenté comme pièce ou comme
3 document doit être considéré comme étant confidentiel ou public. Donc je
4 proteste, parce que c'est une manipulation de la part de M. Marcussen.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre délibèrera pour savoir s'il y a lieu à
6 expurgation ou pas.
7 Quoi qu'il en soit, j'indique qu'au stade de la procédure, il n'est pas
8 nécessaire de prendre en compte la possibilité qu'il y ait eu un ou
9 plusieurs faux témoignages. A mon sens, ça ne sera qu'au moment du délibéré
10 final que la question devra être tranchée de manière définitive.
11 Je dois rappeler à cet égard qu'un tout récent arrêt de la Chambre d'appel
12 en date du 1er avril 2001, dans l'affaire Tharcisse Renzaho, a rappelé en
13 son paragraphe 196 que la Défense doit démontrer que le préjudice subit
14 équivaut à une erreur de droit qui invaliderait le jugement. Pour le
15 moment, le Président n'a pas statué et il conviendra d'attendre la
16 décision.
17 Cette requête n'a pas un effet direct ou indirect sur le cours de la
18 procédure 98 bis. Le cas serait tout différent si nous étions au moment du
19 délibéré final.
20 En dernier lieu, cette affaire intervient dans un contexte spécifique, qui
21 résulte du fait que deux Juges constituant la Chambre sont membres d'autres
22 chambres saisies de faits identiques pour certains crimes ou de la même
23 entreprise criminelle commune. Dans ces autres affaires, il y a un certain
24 nombre d'experts de l'Accusation ou de témoins qui auront témoigné dans les
25 trois affaires ou deux au moins, et ce, devant les mêmes Juges. Chaque
26 témoignage doit apprécier sur le plan de la pertinence et de la valeur
27 probante au moment du délibéré final.
28 Compte tenu du fait que l'état d'avancement de ces trois procès n'est
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1 pas le même, il se peut qu'un Juge évalue le témoignage d'un témoin X d'une
2 certaine façon dans un procès et se posera pour lui la question d'évaluer
3 ce témoignage dans un autre procès plusieurs mois après, sans qu'il y ait
4 aucun élément nouveau, lui accordera-t-il alors le même poids. La question
5 de la participation des mêmes Juges à plusieurs procès où les mêmes témoins
6 ont été entendus a été évoquée dans l'affaire Tharcisse Renzaho, précitée
7 dans le cadre de l'examen du second moyen d'appel de l'accusé. Ceci me
8 paraît intéressant pour l'indiquer. La Chambre d'appel a tranché à son
9 niveau aux paragraphes 22 et 23 en disant que :
10 "Une présomption d'impartialité est attachée aux Juges en l'absence
11 de preuve contraire, rejetant ainsi l'argumentation de la Défense selon
12 laquelle le fait que les mêmes Juges aient participé à d'autres procès
13 concernant les mêmes faits et les mêmes témoins avaient violé la
14 présomption d'innocence."
15 A ce stade, je ne peux évaluer, nonobstant la décision de la Chambre
16 d'appel citée ci-dessus, les conséquences directes sur la présente affaire
17 de la participation de mes collègues à d'autres affaires. Ceci ne pourrait
18 être évalué par moi qu'au moment du délibéré final, notamment en ayant, le
19 cas échéant, le point de vue des parties, si elle le juge utile. D'autant
20 plus qu'il convient de signaler ce qui a dû échapper à l'Accusation, que
21 dans l'acte d'accusation concernant l'accusé Seselj, l'entreprise
22 criminelle commune se termine en septembre 1993, avec la mention comme
23 participant de Karadzic, alors même que dans l'acte d'accusation de
24 Karadzic, avec, comme participant, Seselj, l'ECC permanente d'octobre 1991
25 au 30 novembre 1995. Il y a donc une contradiction manifeste qui place le
26 Juge nommé dans ces deux affaires dans une situation particulièrement
27 difficile pour apprécier l'étendue de l'ECC.
28 Sortir de ce dilemme reviendrait alors à attendre la fin concomitante
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1 des trois procès pour ne pas courir ce risque. La stratégie d'achèvement
2 des travaux de ce Tribunal ne permet pas d'allonger à l'infini les procès.
3 D'autant que la détention provisoire de l'accusé est excessive. Dès lors,
4 c'est une question théorique que je me devais de soulever par principe à ce
5 stade du procès, tout en disant, à mon vif regret, que ce procès doit être
6 mené à terme le plus vite possible, alors même que l'application de
7 certaines contraintes juridiques incontournables devrait normalement
8 aboutir à un délibéré final sine die dans l'attente de la fin des procès
9 Karadzic et Stanisic/Zupljanin. Alors on va faire la pause, mais je vais
10 consulter mes collègues sur l'expurgation.
11 Alors la majorité de la Chambre, étant dissidente, a décidé d'expurger la
12 partie indiquée par M. Marcussen.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ceci signifie que M. Marcussen a
14 déclaré qu'une pièce présentée par moi était confidentielle et que la
15 majorité des Juges de la Chambre a accepté la chose ? Madame, Monsieur les
16 Juges, ces écritures de ma part au Président du Tribunal, les avez-vous
17 déclarées comme étant confidentielles, est-ce un droit que vous avez ? Je
18 ne le pense pas, mais ce n'est pas le premier abus de vos fonctions de
19 juge.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : L'affaire -- bon, l'affaire a été tranchée.
21 Alors nous allons arrêter, il nous faut donc une heure et demie. Nous
22 reprendrons donc dans une heure et demie, c'est-à-dire que dans une heure
23 ça sera 3 heures moins quart et une demi-heure, donc on va reprendre aux
24 environs de 3 heures 15.
25 Voilà, donc nous nous retrouverons à 15 heures 15.
26 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures 41.
27 --- L'audience est reprise à 15 heures 20.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
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1 Monsieur le Greffier, pouvez-vous passer à huis clos, quelques instants.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
3 le Président.
4 [Audience à huis clos partiel]
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19 [Audience publique]
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors le chapitre 2 concerne la procédure 98 bis,
21 acquittement. Je ne vais pas revenir sur certains aspects qui ont été
22 longuement développés dans la décision de la Chambre, mais je dois rappeler
23 quelques éléments-clés. Selon le texte ancien, tel qu'amendé le 17 novembre
24 1999, un accusé peut déposer une requête aux fins d'acquittement pour une
25 ou plusieurs des infractions figurant dans l'acte d'accusation dans les
26 sept jours suivant la fin de la présentation des moyens à charge, et dans
27 tous les cas, avant la présentation des moyens à décharge en application de
28 l'article 85(a)(i).
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1 (B), si la Chambre de première instance estime que les éléments de preuve
2 présentés ne suffisent pas à justifier une condamnation pour cette ou ces
3 accusations, elle prononce l'acquittement à la demande de l'accusé ou
4 d'office.
5 L'application par les Chambres de ce texte ancien a donné lieu à des
6 décisions écrites fort longues, parfois avec des opinions dissidentes et
7 saisies de la Chambre d'appel. Cette procédure prenait du temps et était
8 susceptible de retarder le procès. Dans ces conditions, la réforme
9 intervenue en 2004, sous l'impulsion du Président du Tribunal, avait pour
10 objectif d'accélérer la procédure, en la transformant en procédure orale et
11 non plus écrite. Le texte, qui a été adopté le 8 décembre 2004, est le
12 suivant :
13 "A la fin de la présentation des moyens à charge, la Chambre de
14 première instance doit, par décision orale et après avoir entendu les
15 arguments oraux des parties, prononcer l'acquittement de tout chef
16 d'accusation pour lequel il n'y a pas d'élément de preuve susceptible de
17 justifier une condamnation."
18 La procédure de l'article 98 bis du Règlement, en raison de la modification
19 de cet article intervenu en 2004, ne permet pas, dans le cadre de la
20 décision orale et de l'opinion orale, d'entrer dans le détail par des
21 références extrêmement précises, comme cela se faisait antérieurement lors
22 des décisions écrites en la matière.
23 L'impossibilité technique d'aller plus en avant dans la précision m'empêche
24 d'examiner, crime par crime, la question de l'imputabilité à un auteur
25 précis, et à ce stade, je peux uniquement conclure que l'auteur est présumé
26 appartenir aux forces serbes sans autres précisions. Lesquelles forces
27 serbes sont constituées d'unités régulières, de défenseurs locaux, émanant
28 souvent de la Défense territoriale locale, d'éléments venant d'unités
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1 paramilitaires de type hommes d'Arkan, Guêpes jaunes, Abeilles blanches,
2 hommes de Seselj, ainsi que des volontaires sans précision ou des
3 volontaires apparentés à un type de parti politique de type Volontaires du
4 Parti radical serbe.
5 La majorité de la Chambre estime qu'il n'est pas possible d'acquitter
6 partiellement à la lecture du texte. Je suis en total désaccord avec cette
7 interprétation, d'autant que je suis le coauteur avec un autre Juge dudit
8 texte. L'objectif de la réforme n'a jamais été de mettre en place le refus
9 d'un acquittement partiel. Il aurait été paradoxal que le but même de la
10 réforme qui est de gagner du temps, aboutisse à l'effet inverse, du fait
11 même qu'il ne puisse pas y avoir d'acquittement partiel. Il serait tout
12 aussi paradoxal d'obliger l'accusé à introduire des moyens de preuve alors
13 même que pour certains chefs d'accusation ou parties de chef d'accusation,
14 le Procureur n'a présenté aucun élément de preuve ou que l'élément de
15 preuve présenté n'est pas suffisant.
16 Dans ces conditions, j'estime contrairement à la majorité, que la Chambre
17 pouvait acquitter soit partiellement soit totalement l'accusé.
18 Par ailleurs, les versions anglaises et françaises font foi. En français,
19 le fait d'avoir le terme "chef d'accusation" au lieu de celui
20 "d'infraction" sur le plan sémantique revient au même, car un crime est
21 constitutif d'une infraction ou d'un chef d'accusation. Le fait que
22 postérieurement à l'adoption de cet article il n'y a pas eu d'acquittement
23 partiel de prononcé ne signifie pas que ceci soit impossible. C'est parce
24 que les Chambres n'ont pas examiné la question ou ne l'ont pas voulu.
25 La procédure de l'article 98 bis, du fait qu'elle intervient après la
26 présentation des moyens à charge et avant la présentation des moyens à
27 décharge, est très similaire aux requêtes dites "no-case-to-answer" des
28 pays de common law, acquittement pour insuffisance des moyens à charge, la
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1 Défense n'ayant pas lieu de répondre. Bien que le concept sur lequel repose
2 l'article 98 bis du Règlement soit emprunté à la common law, cet article
3 doit être interprété dans le contexte qui est le sien et à la lumière du
4 Statut et du Règlement. Ainsi des divergences peuvent apparaître entre
5 l'application qui est faite au Tribunal et celle qui est faite dans les
6 pays de système "common law", notamment sur la question du critère
7 applicable pour faire droit à une requête en application de l'article 98
8 bis.
9 Le Juge de la Chambre, comme l'a indiqué la jurisprudence constante de la
10 Chambre d'appel depuis l'arrêt de la Chambre d'appel dans l'affaire le
11 Procureur contre Jelisic, doit apprécier si le Juge prononcerait
12 effectivement une condamnation au-delà de tout doute raisonnable au vu des
13 moyens à charge. En effet, la Chambre d'appel a dit ceci, je vais la citer
14 :
15 "L'Accusation soutient qu'en exigeant qu'elle ait établi la culpabilité au-
16 delà de tout doute raisonnable à l'issue de la présentation principale de
17 ses moyens de preuve, la Chambre de première instance a appliqué un critère
18 autre que celui exigé en droit est plus contraignant. De son point de vue,
19 il eut fallu à ce stade rechercher si, au vu des éléments de preuve, s'ils
20 étaient admis, un tribunal raisonnable aurait pu, et non pas dû, déclarer
21 l'accusé coupable. La question n'est pas de savoir si, au vu des éléments
22 de preuve en l'état, l'accusé devrait être déclaré coupable, mais s'il
23 pourrait l'être."
24 La jurisprudence de ce Tribunal concernant la mise en œuvre de
25 l'article 98 bis du Règlement a de manière permanente indiqué que les Juges
26 doivent acquitter si les éléments de preuve présentés par l'Accusation ne
27 permettent pas à un Juge raisonnable au-delà de tout doute raisonnable
28 d'envisager la culpabilité de l'accusé.
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1 Pourquoi la jurisprudence anglo-saxonne a-t-elle éprouvé la nécessité
2 d'accoler l'adjectif "raisonnable" au terme "Juge" ? Par définition, le
3 Juge ne doit pas être déraisonnable, comme il ne doit ni être incompétent
4 ni impartial. Cependant, la jurisprudence common law a bien édicté les
5 termes de "juge raisonnable".
6 De même, pourquoi a-t-on inscrit "au-delà de tout doute raisonnable"
7 ? Au-delà de tout doute raisonnable est le standard exigé en matière de
8 preuve dans un procès pénal de type accusatoire. Cela signifie que les
9 éléments de preuve présentés par l'Accusation doivent prouver, dans la
10 mesure où il ne peut exister de doute dans l'esprit d'un Juge raisonnable,
11 que l'accusé est coupable.
12 La notion de Juge raisonnable renvoie à une fiction juridique, un
13 standard à partir duquel la conduite d'un individu est mesurée. Ce standard
14 est utilisé en common law, en droit de la responsabilité civile surtout,
15 pour déterminer si une violation du "duty of care" a été commise. Il s'agit
16 de l'équivalent de la "notion de bon père de famille". Individu abstrait
17 considéré comme la norme comportementale à partir de laquelle se mesure le
18 comportement d'une personne donnée pour déterminer l'existence ou la mesure
19 d'une éventuelle faute.
20 La notion de Juge raisonnable renvoie donc certainement à un standard
21 de référence à partir duquel est mesurée par l'appréciation par le Juge
22 d'un doute raisonnable. Le contenu de la notion de doute raisonnable dans
23 un procès pénal est par la subjectivité qu'il implique incertain. Cette
24 notion est considérée aux Etats-Unis comme une garantie fondamentale pour
25 les droits de l'accusé, alors qu'elle a quasiment été abandonnée en
26 Angleterre dans le cadre du procès pénal.
27 En principe, lorsqu'un juge éprouve un doute, le doute doit profiter
28 à l'accusé. Les termes "au-delà de tout doute raisonnable" créent, selon
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1 moi, un standard supérieur. Il m'apparaît en effet que le Juge doit être
2 convaincu, sans l'ombre d'une hésitation, que l'accusé, à l'analyse des
3 éléments de preuve, pourrait être déclaré coupable. Ainsi, la jurisprudence
4 de ce Tribunal est très exigeante, et il ne s'agit pas d'effectuer un
5 examen prima facie des éléments de preuve, mais bien un véritable examen au
6 fond avec toute la rigueur applicable dans l'appréciation des éléments de
7 preuve.
8 En un mot, il ne s'agit pas simplement de dire ou constater des
9 faits, mais encore faut-il expliquer pourquoi et quels sont les éléments de
10 preuve probants pour l'Accusation, à charge, qui pourraient permettre, le
11 cas échéant, à un Juge raisonnable d'entrer en voie de déclaration de
12 culpabilité.
13 De même, pour prendre sa décision, la Chambre doit déterminer s'il
14 existe pour chacun des éléments constitutifs des éléments qui, portés à
15 leur valeur maximale, seraient susceptibles de la convaincre au-delà de
16 tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé. Les Chambres de
17 première instance ont eu l'occasion à plusieurs reprises de statuer sur ce
18 genre de requêtes et de prononcer des acquittements partiels. Et dans
19 d'autres cas, les Chambres ont purement et simplement rejeté les requêtes.
20 Concernant l'acquittement partiel, je peux citer la décision du 6
21 avril 2000 dans l'affaire Kordic et Cerkez; la décision du 28 février 2002
22 dans l'affaire Martinovic et Naletilic; la décision du 28 novembre 2003
23 dans l'affaire Brdjanin; la décision du 16 juin 2004 dans l'affaire
24 Slobodan Milosevic; et la décision du 27 septembre 2004 dans l'affaire
25 Hadzihasanovic et Kubura.
26 L'acquittement partiel est en droit possible, car il correspond tant
27 à la lettre qu'à l'esprit de l'article 98 bis. En effet, pourquoi l'accusé
28 devrait-il, dans la présentation de ses éléments de preuve, faire venir des
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1 témoins pour réfuter des éléments à l'appui d'une infraction ? Ainsi, dans
2 l'affaire Slobodan Milosevic, la Chambre a rendu toute une série
3 d'acquittements concernant le volet Bosnie-Herzégovine, constatant d'une
4 part qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve pour certains paragraphes, et
5 d'autre part, que les éléments de preuve présentés étaient insuffisants.
6 Dans une décision récente dans l'affaire Milutinovic et autres, qui a
7 été, elle, rendue après la réforme de 2008, la Chambre de première instance
8 dans sa décision orale a dit, je cite :
9 "Lorsqu'il n'existe pas de preuve pour justifier une condamnation, la
10 demande sera accueillie. Par contre, s'il existe des éléments de preuve
11 mais que la Chambre de première instance, même en leur accordant leur
12 valeur maximum, ne peut prononcer de condamnation, la requête sera
13 également accueillie. Lorsqu'il existe certains éléments de preuve mais
14 qu'ils sont tels que leur valeur, leur faiblesse dépend de la foi accordée
15 à un témoin, et si la Chambre de première instance, ayant procédé à sa
16 propre analyse, pourrait prononcer une condamnation, la demande ne sera pas
17 accueillie."
18 Et de même, la Chambre Milutinovic a fait référence au critère
19 juridique de l'arrêt Jelisic et aux décisions 98 bis rendues dans les
20 affaires Slobodan Milosevic, Mrksic, Martic, et Dragomir Milosevic.
21 L'objectif de l'article 98 bis est particulièrement clair. Il tend à
22 éviter la poursuite d'un procès pour le cas où l'Accusation n'aurait pas
23 suffisamment apporté de preuves de ses allégations, et ce, en l'absence de
24 tout examen de la position de la Défense via ses moyens de preuve déjà
25 évoqués ou à venir.
26 En outre, s'agissant d'une affaire très longue, puisque l'accusé est
27 en détention provisoire depuis plus de huit ans, j'estime que le standard
28 d'examen des éléments de preuve de l'article 98 bis doit être plus exigeant
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1 que dans un cas ordinaire où le procès est mené rapidement, en conformité
2 avec le Statut du Tribunal. En effet, il serait inéquitable de poursuivre
3 un procès alors même que les preuves rapportées seraient insuffisantes, et
4 ce, d'autant que la détention provisoire aurait été très longue et que, par
5 ailleurs, l'Accusation aurait largement eu le temps de peaufiner son
6 enquête puisqu'il est usage au Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie que
7 l'Accusation, pendant le procès, continue son enquête en introduisant,
8 selon son bon vouloir, des éléments de preuve nouveaux, et ce, parfois au
9 dernier moment, comme ceci a été le cas avec les carnets du général Mladic.
10 Je me dois maintenant d'examiner les crimes allégués dans l'acte
11 d'accusation commis en Croatie, en Bosnie-Herzégovine, et en Serbie.
12 Concernant les crimes allégués dans l'acte d'accusation, il
13 m'apparaît que ceux-ci sont, pour certains, établis par les éléments de
14 preuve présentés par l'Accusation, et d'autres ne l'ayant pas été. Je vais
15 présenter dans les annexes qui vont apparaître tout à l'heure sur l'écran
16 les éléments de preuve qui, de mon avis, pourraient permettre à un Juge
17 raisonnable de conclure qu'il y a eu crime au sens du Statut du Tribunal.
18 Pour les crimes commis dans les municipalités, je rappellerai pour
19 chacun d'entre eux les éléments de preuve avancés par l'Accusation, tant
20 dans son mémoire préalable que dans ses observations orales. Je ne vais pas
21 rappeler la position de l'accusé, qui a été détaillée lors de la lecture de
22 la décision majoritaire de la Chambre dans le chapitre 1, rappel de la
23 procédure. En revanche, je me dois de rappeler la position de l'Accusation
24 de façon détaillée en citant les témoins et les documents à l'appui de ses
25 allégations concernant les crimes, et c'est ce que je vais maintenant faire
26 pour les crimes commis en Croatie, Bosnie-Herzégovine, et en Serbie.
27 Dans la mesure où il y a de très nombreuses références, je vais faire
28 apparaître sur l'écran le tableau récapitulatif des éléments de preuve de
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1 l'Accusation. Mais avant cela, je me dois de faire part d'autres éléments.
2 L'examen attentif des éléments de preuve admis et des témoignages
3 entendus par la Chambre pendant la phase de présentation des éléments à
4 charge permettrait à un Juge raisonnable de conclure au-delà de tout doute
5 que les crimes allégués dans l'acte d'accusation ont eu lieu, sans que ceci
6 puisse faire l'ombre d'une contestation, à l'exception de quelques points
7 que je vais indiquer ci-après.
8 Ainsi, il peut être conclu que dans le champ temporel de l'acte
9 d'accusation, allant d'août 1991 à septembre 1993, des actions militaires
10 ont été menées dans plusieurs localités de l'ex-Yougoslavie, notamment en
11 Croatie, en Bosnie-Herzégovine, et en Serbie, et principalement dans les
12 localités de Zvornik, Vukovar, Mostar, Nevesinje, et Bijeljina, dans le
13 cadre desquelles des civils ou des combattants adverses ont été capturés,
14 certains ont été détenus, d'autres ont été maltraités, et un grand nombre
15 ont été exécutés. La liste des victimes citées en illustration de ces
16 crimes se trouve aux annexes 3, 4, 5, 7, 9, 10, et 11 de l'acte
17 d'accusation.
18 Ceci étant dit, concernant les chefs 12 et 13, destruction sans motif
19 de biens publics ou privés, l'Accusation rapporte-elle suffisamment la
20 preuve que les crimes commis aux périodes mentionnées au paragraphe 34 de
21 l'acte d'accusation et dans les localités visées l'ont bien été par les
22 groupes évoluant sur le terrain et relevant de l'autorité de la JNA ou de
23 la VRS, autorités militaires ?
24 Ainsi, concernant les destructions des édifices, si certains d'entre
25 eux ont effectivement été endommagés ou totalement détruits, il n'en
26 demeure pas moins que le rapport de l'expert de l'Accusation, M. Andras
27 Riedlmayer, ne permet pas d'imputer directement ces destructions à un
28 groupe ni de donner des dates exactes. Il apparaît que l'expert s'est basé
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1 sur des documents postérieurs aux événements et sur des clichés pris avant,
2 pendant, ou après les événements. Dès lors, comment conclure que dans une
3 localité donnée une mosquée complètement détruite soit aujourd'hui un
4 parking, n'a-t-elle pas été détruite par la municipalité concernée après
5 les événements pour diverses raisons, et notamment du fait que celle-ci
6 mène à ces ruines.
7 L'expert n'a pas répondu à ce type de préoccupations, et si j'ai des
8 éléments pour conclure que ces édifices ont été endommagés ou détruits, je
9 n'en ai pas suffisamment pour imputer ces destructions ou dégradations à un
10 groupe déterminé ayant agi sous l'autorité directe de l'accusé, telle
11 qu'allégué au paragraphe 34 de l'acte d'accusation, en retenant toutes les
12 formes de responsabilité, y compris la forme 3 de l'entreprise criminelle
13 commune.
14 Je tiens également à ajouter que pour Mostar, les nombreux édifices
15 ont pu être détruits lors du conflit entre les Serbes et les Musulmans et
16 Croates, ou pendant le conflit entre les Musulmans et les Croates, ce qui
17 introduit un élément supplémentaire de doute.
18 Ainsi, concernant les chefs d'accusation 12 et 13 relatifs à la
19 destruction sans motif de biens publics ou privés, il convient en l'état
20 d'exclure, faute d'éléments, les lieux de culte suivants : à Mostar, la
21 mosquée Nesuh Aga Vucjakovic, le monastère franciscain, et le Most Sacred
22 Heart of Jesus.
23 A Nevesinje, la tour de l'horloge islamique, la mosquée de Hadzi
24 Dervis Cucak, la mosquée du marché, et la mosquée de Sinan Dede Efendi.
25 Concernant la municipalité de Zvornik, le Mekted et la mosquée de
26 Gusteri, la nouvelle mosquée de Donji Krizevici, la mosquée de Sravke, et
27 la mosquée de Vitinica.
28 Dans la région de Sarajevo, la mosquée Hadzi Idriz à Hrasno, et
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1 l'église catholique paroissienne de la Sainte Trinité à Novo Sarajevo. Car
2 ne devrons être retenus que des édifices lourdement endommagés. Vous verrez
3 tout à l'heure sur le tableau, cela je vais les caractériser par le sigle
4 LDE, les édifices partiellement détruits, qui seront caractérisés par les
5 lettres PD, ou complètement détruits, par le sigle CD. Toutefois, à
6 l'inverse des crimes de pillage, que je vais développer ci-après, même si
7 en l'état certaines insuffisances décrites ci-dessus existent, la Chambre,
8 pour délibérer, disposera du rapport de l'expert et de certains documents
9 pouvant lui permettre de conclure de façon très précise à la destruction de
10 tel ou tel édifice, et ce, à la date précise, avec une identification
11 précise des auteurs. De ce fait, un Juge raisonnable pourrait conclure à
12 l'existence de ces destructions en l'état.
13 Concernant le chef 14, pillage. L'Accusation rapporte au paragraphe 34 de
14 l'acte d'accusation, que des biens publics ou privés ont été pillés dans
15 les municipalités de Zvornik, la région de Sarajevo, de Mostar, de
16 Nevesinje. Il m'apparaît nécessaire concernant les pillages effectués
17 d'avoir au minimum les éléments de preuve intangibles tels que la liste des
18 victimes des pillages, la description précise des biens pillés, les photos
19 ou constats par procès-verbal des biens, les éléments d'identification des
20 auteurs. Force est de constater que ces éléments de preuve sont dans le cas
21 présent inexistants. Je ne peux donc conclure que des centaines
22 d'habitations ont été pillées à Vukovar, Zvornik, dans la région de
23 Sarajevo, à Vogosca, à Mostar et à Nevesinje.
24 En conséquence, je vais maintenant présenter sur l'écran les tableaux
25 qui comprennent, selon moi, les éléments de preuve pouvant permettre à un
26 Juge raisonnable de constater que les crimes allégués ont été commis de
27 manière certaine. Alors, je demande à l'huissier de mettre d'abord le
28 tableau récapitulatif des éléments de preuve allégués par l'Accusation.
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1 Voilà.
2 Alors vous avez sous les yeux municipalité par municipalité; la
3 colonne "exhibits" qui sont relatifs aux documents qui, selon le Procureur,
4 attesteraient ces crimes. Et dans la colonne "witnesses", les numéros des
5 témoins qui ont déposé sur ces crimes. Voilà, ce tableau général retrace la
6 position du Procureur.
7 Alors je vais rentrer dans le détail maintenant, et je vais demander
8 à M. l'Huissier de présenter l'annexe 1, qui concerne les crimes de
9 Vukovar.
10 Dans cette annexe, il y a dans la colonne de gauche les paragraphes
11 de l'acte d'accusation; ensuite les paragraphes du mémoire préalable; il y
12 a les notes de bas de page qui renvoient à ces paragraphes; et vous avez
13 sur la colonne de droite les témoins et documents qui, de mon point de vue,
14 peuvent établir qu'à Vukovar des crimes ont été commis. Ainsi, pour le
15 paragraphe 16, je ne vais pas rentrer dans le détail, les Témoins VS-011,
16 VS-015. Voilà.
17 Alors je remettrai tout à l'heure à M. Marcussen et M. Seselj ces
18 tableaux, comme ça ils auront l'occasion de vérifier tout ça. Et croyez-
19 moi, ça m'a pris des heures.
20 Annexe numéro 2, pour Vocin. Selon le même principe, vous avez les
21 paragraphes de l'acte d'accusation; les paragraphes du mémoire préalable;
22 les "footnotes"; et les témoins ou documents à l'appui de ce que le
23 Procureur allègue.
24 Nous allons passer à Bijeljina, annexe 3. Donc je ne vais pas lire à
25 chaque fois parce que nous y serions encore là la semaine prochaine. Donc à
26 Bijeljina, voilà les paragraphes de l'acte d'accusation qui évoquent
27 Bijeljina; les paragraphes du mémoire préalable; les "footnotes"; et les
28 témoins ou documents.
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1 Nous allons passer maintenant à Brcko. Pour Brcko, vous avez les
2 paragraphes de l'acte d'accusation; mémoire préalable; "footnotes"; témoins
3 et documents. Et pour Brcko, vous notez principalement que ceci repose sur
4 peu de témoins, et notamment le 1033.
5 Nous passons à l'annexe 5, Bosanski Samac. Alors, là aussi, les
6 paragraphes de l'acte d'accusation; du mémoire préalable; toutes les
7 "footnotes" détaillées; et les témoins ou documents. Et vous notez, par
8 exemple, qu'il y a également une interview de M. Seselj que je mentionne à
9 l'appui du paragraphe 16 de l'acte d'accusation, au paragraphe 86 du
10 mémoire préalable.
11 Zvornik, c'est l'annexe 6. Bien, alors, là, pour Zvornik, nous avons
12 donc, comme c'est assez long, il y a donc deux feuillets. Donc les
13 paragraphes sont à gauche de l'acte d'accusation. Le mémoire préalable
14 c'est de 91, comme vous le voyez, à 94. Et puis toutes les notes de bas de
15 page figurent et, face à Zvornik, la masse des témoins, qui ont déposé et
16 qui ont évoqué Zvornik avec leur numéro, et cetera, et cetera.
17 Tout ça est à votre disposition, et vous verrez ça à tête reposée, ça
18 vous prendra certainement des centaines d'heures.
19 Annexe 7, région de Sarajevo. Paragraphes de l'acte d'accusation,
20 pareil; mémoire préalable; "footnotes"; témoins et documents. Voilà. Et là,
21 vous avez également ce qu'il faut. Nous passons, alors ça c'est la suite de
22 Sarajevo, puisque c'est assez long.
23 Nous passons à Mostar, l'annexe 8. Alors Mostar est condensée sur un
24 feuillet. Dans le mémoire préalable c'est les paragraphes 109 à 116; les
25 notes de bas de page; et tous les témoins qui ont déposé sur Mostar. Il y
26 en a eu plusieurs, et vous avez tous les numéros utiles.
27 Nous passons à l'annexe 9, Nevesinje. Là aussi, ce travail de
28 bénédictin a permis de caractériser tous les paragraphes de l'acte
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1 d'accusation; du mémoire préalable; notes de bas de page; et documents ou
2 témoignages. Et notamment, je fais référence au fameux document P31, qui
3 est l'audition de M. Seselj qui a prêté serment dans l'affaire Milosevic,
4 avec les références aux pages de l'affaire Milosevic, bien entendu, car
5 j'ai lu tout ça.
6 Annexe 10, Hrtkovci. Alors cette localité est importante, vous le
7 savez. Pour cette localité, nous avons donc les paragraphes de l'acte
8 d'accusation; les paragraphes du mémoire préalable 122 à 129, il y a encore
9 un autre feuillet qui suit. Voilà. Et nous avons donc les témoins qui ont
10 parlé. Il y en a plusieurs, et vous avez donc les numéros. Voilà.
11 Alors je vais passer à l'annexe 11. Je vous remercie, Monsieur l'Huissier,
12 qui est très efficace et ça nous permet de gagner du temps.
13 Alors, je vais expliquer à M. Marcussen et à M. Seselj. Ce tableau recense
14 toutes les victimes croates qui, selon l'Accusation, auraient été expulsées
15 ou forcées à quitter la région pour partir en Croatie ou ailleurs. Il y a
16 exactement plusieurs centaines de personnes, il y en a 28 pages.
17 Et sur la colonne de droite, j'enlève toutes les mentions de
18 personnes dont la destination est inconnue. Ainsi le numéro 4, 18, 19, et
19 21. Et puis à la page 2, les 26, 27, 28, 33, 34, 36, 40, 43, 47, et 48.
20 Parce que si pour certains nous avons la certitude qu'ils ont bien
21 été en Croatie et à Zagreb, d'autres, dans le document, il y a marqué
22 "destination inconnue". Donc on ne sait pas s'ils sont partis, s'ils sont
23 partis en raison d'une expulsion au transfert forcé, s'ils sont partis
24 d'eux-mêmes. Donc il y a un doute. De ce fait, je retire de l'annexe 11 les
25 233 personnes, ce qui voudrait dire que, le cas échéant, si M. Seselj
26 devait être déclaré coupable, à ce moment-là, de mon point de vue, on
27 devrait l'acquitter pour les victimes dont les numéros sont sur la colonne
28 de droite, car je n'ai aucun élément pour savoir si celles-ci ont bien
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1 quitté la localité. Car on ne sait pas où elles sont parties.
2 Alors j'en viens à l'annexe 12, qui était ce que j'ai indiqué pour les
3 mosquées, les édifices religieux et catholiques. Alors vous voyez dans la
4 légende, il y a en anglais donc SD, PD, CD, et AB, et chaque lettre
5 correspond à une qualification. Alors j'ai partagé les monuments religieux
6 en deux catégories; les monuments musulmans et les monuments catholiques.
7 Et j'ai listé tous les édifices qui ont été soit lourdement endommagés,
8 c'est la première colonne; soit partiellement détruits, c'est la deuxième
9 colonne; soit totalement détruits, c'est la troisième colonne.
10 Ainsi, à titre d'exemple, vous voyez, par exemple, que le couvent des
11 Sœurs franciscaines ont été lourdement endommagés. Par contre, l'église
12 Saint-Pierre et Paul, XIXe siècle, elle, elle a été partiellement détruite.
13 Et ça c'est pour Mostar.
14 Alors page suivante, c'est Nevesinje. Alors, là, vous voyez pour cette
15 municipalité pour les édifices totalement détruits, ils sont sur la colonne
16 de droite, je les ai donc cités. Et vous voyez, par exemple, que les
17 archives islamiques, elles, ont été totalement détruites.
18 Ensuite Zvornik. Donc ce travail de bénédictin m'a conduit à regarder
19 édifice par édifice, et voilà les conclusions auxquelles je suis arrivé sur
20 la destruction partielle, lourdement ou totalement. Et vous voyez, par
21 exemple, que la mosquée du XVIIIe siècle de Begsuja, elle, elle a été
22 totalement détruite à Zvornik. Bien. Il y a -- et donc ça continue. Cette
23 ville avait un nombre d'édifices religieux très importants.
24 Alors on va passer à la région de Sarajevo. Bien, alors il y a Novi Grad,
25 Novo Sarajevo, et donc là, il est répertorié les édifices.
26 Nous passons à Vogosca. Là aussi, les édifices sont répartis selon l'état
27 des destructions. Et vous avez donc Vogosca et en dessous Ilijas. Il y a
28 encore une liste pour Ilijas. Voilà. Voilà.
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1 Alors tableau suivant. Voilà, nous avons donc vu tous les éléments de
2 preuve pouvant permettre de dire qu'il y a eu des crimes.
3 La question maintenant qui se pose est de savoir à qui les imputer. Pour
4 cela, je suis amené à évoquer le paragraphe 4, la responsabilité pénale
5 individuelle. Les modes de responsabilités. Au paragraphe 130 du mémoire
6 préalable, l'Accusation affirme que la responsabilité pénale individuelle
7 de Vojislav Seselj est mise en cause pour les chefs de l'acte d'accusation
8 selon les formes énumérées à l'article 7(1) du Statut, qui reprend les
9 paragraphes 5 à 14 de l'acte d'accusation.
10 S'agissant de commettre, Vojislav Seselj est poursuivi pour avoir
11 participé à l'ECC et également pour avoir matériellement commis petit (a),
12 les crimes de persécution par le biais de discours appelant à la haine dans
13 le cadre des événements survenus à Vukovar, Croatie, à Zvornik, Bosnie-
14 Herzégovine, Hrtkovci, Vojvodine, Serbie, et petit (b), les crimes
15 d'expulsion et de transfert forcé dans le cadre des événements survenus à
16 Hrtkovci.
17 Alors concernant donc la responsabilité directe de l'accusé, je me
18 dois d'examiner les formes découlant de la responsabilité en suivant le
19 plan suivant : la planification, l'incitation à commettre, le fait
20 d'ordonner, commettre au sein de l'ECC, commission personnelle des crimes
21 de persécution, d'expulsion et de transfert forcé, et en petit (e), le fait
22 d'aider et d'encourager.
23 Par le raisonnement que je vais développer, je vais être amené à
24 conclure de mon point de vue à l'acquittement de l'accusé pour plusieurs
25 modes de responsabilité, comme vous allez le voir.
26 La planification. L'Accusation, au paragraphe 143 du mémoire
27 préalable, soutient que l'accusé a planifié les crimes de persécution, de
28 meurtre, de torture, de traitement cruel, d'expulsion, de transfert forcé,
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1 de destruction sans motif, et de pillage de biens publics ou privés à
2 Vukovar et à Zvornik, chefs 1, 4, 8, 9, et 10 à 14. Paragraphes 15 à 18, 20
3 à 22, 24 et 26, et 26 à 34 de l'acte d'accusation. Et les crimes de
4 persécution, d'expulsion, et de transfert forcé à Hrtkovci, chefs 1, 10, et
5 11, paragraphes 15 à 17, et 31 à 33 de l'acte d'accusation.
6 L'Accusation avance que l'élément moral de la planification des crimes à
7 Vukovar et à Zvornik découle des ses discours incendiaires, du fait qu'il
8 ait approuvé l'envoi dans ces zones de volontaires dont il savait qu'ils
9 s'étaient livrés à des agissements criminels sur les champs de batail.
10 Troisièmement, du fait que les crimes ont effectivement eu lieu.
11 L'Accusation ajoute que pour Hrtkovci, l'état d'esprit de la
12 planification est concrétisé par les déclarations faites par les Témoins
13 VS-015, VS-026, VS-1133.
14 J'estime, en premier lieu, qu'une planification sous-entend au minimum un
15 plan avec des participants et un maître d'œuvre, d'autant qu'à Vukovar
16 l'intervention de la JNA n'a pu avoir lieu qu'à la suite d'une décision à
17 très haut niveau impliquant le commandant militaire et que, dans ce cadre,
18 l'opposant politique en la personne de l'accusé n'avait aucun rôle
19 concernant la planification. Le fait que des volontaires aient été présents
20 à Vukovar ou envoyés à Zvornik ne suffit pas en lui-même à dire qu'il a
21 planifié ou qu'il a été un auteur de la planification.
22 En ce qui concerne Hrtkovci, l'accusé n'a pas planifié lui-même les
23 expulsions ou la campagne de persécution. Il convient d'observer qu'au
24 moment où il prononce son discours, et pour ceux qui l'ont oublié, je le
25 cite de mémoire, le 6 mai 1992, il fait une tournée électorale et ne
26 dispose d'aucuns moyens de contrainte à l'égard de la population civile en
27 qualité éventuelle d'auteur principal de la planification.
28 L'élément moral de la planification ne peut être directement tiré des
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1 discours incendiaires, car il ne peut être tiré un lien suffisant entre des
2 propos qui auraient été tenus à Vukovar, ce qui est loin d'être établi, et
3 une réunion à Mali Zvornik qui, elle, n'a pas eu lieu à la date indiquée
4 par l'Accusation, selon moi.
5 J'estime, en second lieu, que le fait que l'accusé ait approuvé l'envoi de
6 volontaires ne signifie pas qu'il savait que certains d'entre eux allaient
7 commettre des crimes sur le terrain. A cet égard, il conviendrait de faire
8 une distinction dans le temps entre l'envoi de volontaires de manière
9 spontanée, Borovo Selo, et l'envoi de volontaires à la demande de Slobodan
10 Milosevic et dans le cadre légal.
11 De plus, en l'état, il m'apparaît une insuffisance manifeste
12 d'éléments de preuve permettant de démontrer de manière certaine qu'un
13 adhérent du Parti radical serbe a commis quel crime précis. Le fait que les
14 crimes allégués ont eu lieu ne signifie pas pour autant qu'ils étaient
15 auparavant planifiés.
16 Il est allégué dans l'acte d'accusation et le mémoire préalable, à
17 plusieurs reprises, l'existence de volontaires du Parti radical serbe,
18 hommes de Seselj, qui ont participé à la commission de multiples crimes.
19 S'il est exact que plusieurs témoins, soit au sein de leurs déclarations
20 faites au bureau du Procureur soit à l'audience, ont évoqué l'existence de
21 volontaires du Parti radical serbe, hommes de Seselj, il n'en demeure pas
22 moins qu'un Juge raisonnable se doit, pour concrétiser la réalité des dires
23 des uns et des autres, avoir en sa possession deux preuves matérielles
24 irréfutables.
25 Le premier élément de preuve qui, pour moi, doit être irréfutable, ça
26 doit être le livret militaire du volontaire qui porte mention de son
27 affectation à un poste et à une unité militaire, identifié par les
28 initiales VP, suivi d'un chiffre. Il suffit de se reporter au témoignage du
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1 Témoin Goran Stoparic lors de l'audience publique tenue le 15 janvier 2008,
2 transcript page 2 315, où il nous a expliqué tout cela.
3 Le deuxième élément matériel qui, pour moi, doit être irréfutable et
4 qui doit être croisé avec le premier élément est la carte d'adhésion au
5 Parti radical serbe dont disposait chaque adhérent au parti.
6 Faute du croisement entre ces deux éléments, un Juge raisonnable ne
7 pourrait conclure que le volontaire X, affecté à l'unité Y, ayant commis un
8 crime donné, était un volontaire du Parti radical serbe.
9 Qui plus est, les nombreuses auditions des témoins de l'Accusation,
10 les photos et vidéos qui ont été présentées et admises par la Chambre
11 permettent de conclure que chaque combattant était porteur de vêtements
12 très divers, ne permettant pas de caractériser une appartenance à une unité
13 quelconque en l'absence d'écusson ou tout autre signe distinctif
14 répertoriant l'unité. De même, certains d'entre eux portaient la sajkaca,
15 d'autres ne la portaient pas, ou portaient un casque, ou n'avaient ni
16 casque ni sajkaca.
17 Il est certain qu'à l'examen des éléments de preuve admis, chaque
18 volontaire était soumis à une chaîne de commandement militaire qui n'était
19 pas, selon moi, celle du Parti radical serbe.
20 J'estime donc que l'accusé doit être acquitté de ce mode de
21 responsabilité fondé sur la planification.
22 Alors je regarde l'heure. Il doit rester dix minutes. Bon, je crois
23 qu'en dix minutes je vais avoir le temps de lire trois pages, et comme ça,
24 j'aurai fait le tiers de ce que j'ai à dire.
25 Incitation à commettre. La majorité a décidé de n'examiner que ce
26 mode de responsabilité. Alors que moi-même, j'examine tous les modes de
27 responsabilité.
28 L'Accusation, aux paragraphes 146, 147, 148 du mémoire préalable, affirme
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1 en s'appuyant sur plusieurs jugements et arrêts, Kvocka, Kordic, Blaskic,
2 Krstic, Nahimana, Brdjanin, Akayesu, que l'accusé a incité à commettre les
3 crimes de persécution, de meurtre, de torture, de traitements cruels,
4 d'expulsion, de transfert forcé, de destructions sans motif et de pillage
5 de biens publics ou privés à Vukovar et à Zvornik. Chefs 1, 4, 8, 9, et 10,
6 10 à 14, et paragraphes 15 à 18, 20 à 22, 24 et 26, 26 à 34 de l'acte
7 d'accusation. Et les crimes de persécution d'expulsion et de transfert
8 forcés à Hrtkovci, chefs 1, 10 et 11, paragraphes 15 à 17, et 31 à 33 de
9 l'acte d'accusation, par des discours incendiaires qu'il a prononcés quand
10 il a visité ces localités ou d'autres à proximité, comme Mali Zvornik.
11 Concernant les propos tenus par l'accusé à Vukovar, il se trouve que les
12 éléments de preuve produits ne prouvent pas que l'accusé les ait prononcés.
13 En effet, le Témoin VS-027, à l'examen de sa déposition, n'est pas pour moi
14 totalement crédible à mes yeux. D'autant que, par ailleurs, dans le
15 jugement Mrkic, Radic et Sljvancanin, qui a autorité de la chose jugée et
16 auquel tout le monde a accès, il est indiqué au paragraphe 51, je vais lire
17 parce que ça me paraît intéressant.
18 "La Chambre qui se réserve d'y revenir plus en détail dans la suite n'est
19 pas convaincue de la sincérité ou la crédibilité des témoins qui ont
20 rapporté ces propos. Non seulement aucun élément de preuve ne corrobore
21 leurs témoignages, mais les témoignages se contredisent en ce qui concerne
22 la participation de Radic et Sljvancanin à cette réunion. A ce stade, la
23 Chambre indique qu'elle admet que Vojislav Seselj s'est rendu à plusieurs
24 reprises à Vukovar fin octobre et début novembre 1991, mais elle ne peut
25 tenir pour établi, au vu des témoignages recueillis, que Radic et
26 Sljvancanin auraient assisté à la réunion pendant laquelle Seselj aurait
27 fait une telle déclaration."
28 Donc, pour moi, il y a un doute, et le doute doit bénéficier, bien
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1 entendu, à l'accusé.
2 Concernant le discours prononcé à Mali Zvornik, allégué au paragraphe 93 du
3 mémoire préalable, rapporté par le seul Témoin VS-017, cité en note de bas
4 de page 292. Celui-ci ne me paraît pas certain de cette date. Une confusion
5 pouvant naître avec un discours prononcé en août 1990.
6 Concernant le discours prononcé à Hrtkovci le 6 mai 1992, est relaté aux
7 paragraphes 122, 127 du mémoire préalable les dires du Témoin VS-1133,
8 cités en note de bas de page 441, ne me semblent pas crédible, d'autant que
9 le discours dont dispose la Chambre ne fait aucunement mention de ces
10 propos. Pour mémoire, je rappelle les propos allégués par l'Accusation,
11 l'accusé aurait dit qu'il fallait épurer les mariages mixtes entre Serbes
12 et Croates, et que les enfants de ces unions devraient être tués. C'est ce
13 que dit VS-1133, lignes 10 624 et 10 664.
14 Or, ces propos ne figurent pas dans le discours officiel que nous
15 avons. En revanche, le discours prononcé à Hrtkovci par les propos tenus,
16 entre dans le champ des chefs 1, 10 et 11 au titre de l'incitation à
17 commettre des persécutions, des expulsions, et des transferts forcés. Etant
18 précisé qu'à ce stade du procès, il ne peut pas être déterminé si pour les
19 chefs 1, 10 et 11 de l'acte d'accusation, l'accusé Seselj a incité à
20 commettre ou a commis. Car soit il a incité soit il a commis. Il ne peut
21 pas être en même temps, de mon point de vue, incitateur et auteur. C'est
22 l'un ou l'autre. Dès lors, indépendamment de cette question, l'Accusation a
23 présenté suffisamment d'éléments de preuve sur l'incitation à commettre les
24 crimes de persécution, expulsion, et transfert forcé à Hrtkovci. En
25 revanche, il devrait être acquitté des crimes de meurtre, torture,
26 traitement cruel, destruction sans motif et pillage. Etant précisé, que les
27 documents cités par la majorité, P1264, P1259, P1257, P1192, P1293, P0685,
28 P526, P528, P1298, P1200, P1180, P1324, et les auditions des Témoins VS-
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1 016, VS-033, Stojanovic, Bosanac, et VS-004 ne m'apparaissent pas
2 suffisants pour permettre de faire un lien entre les propos incitateurs
3 reprochés et des crimes énumérés aux chefs 4, 8, 9, 12, 13, et 14 de l'acte
4 d'accusation. Dans quelques minutes, je vais terminer. Je me dois également
5 d'évoquer plus en détail les chefs 8 et 9 relatifs à la torture et au
6 traitement cruel. La majorité pour les établir se fonde principalement sur
7 le Témoin VS-1013, concernant les crimes commis à Zvornik.
8 S'il est exact que le chef de l'unité, Cele, maltraitait et tuait des
9 détenus et que celui-ci était un volontaire ayant reçu le titre de voïvode,
10 et que d'autres volontaires dirigés par un surnommé Repic ait commis des
11 tortures et traitement cruel dans la municipalité de Zvornik, ce n'est pas
12 pour autant qu'un Juge raisonnable puisse tirer la conclusion que ces actes
13 ont été commis sur l'incitation de l'accusé Seselj. Il faut pour cela des
14 éléments de preuve irréfutables, comme des documents ou des déclarations,
15 établissant un lien formel entre les crimes et l'accusé.
16 La majorité de la Chambre a constaté qu'il existait des éléments de preuve
17 pour les chefs 8 et 9, au titre d'incitation à commettre pour Vukovar;
18 alors je cite, Berghofer, VS-1051, Vojnovic, VS-016. Zvornik; VS-1012, VS-
19 1013, VS-1064, VS-1065, documents P307, P381, P469. Sarajevo; VS-1055,
20 P455, P457. Pour Nevesinje; VS-1022, VS-1051. Pour Mostar; Karisik et
21 Bilic.
22 Si un Juge raisonnable pourrait en tirer la conclusion qu'il y a eu
23 effectivement des tortures et traitements cruels, il n'en demeure pas moins
24 qu'il n'y a pas d'éléments suffisants permettant de rattacher ces crimes à
25 l'accusé Seselj pour la forme de responsabilité, incitation à commettre. En
26 effet, à titre d'exemple, quels propos tenus ont entraîné dans l'esprit de
27 l'auteur du crime les conditions de vie abjectes et inhumaines de civils au
28 sous-sol de la centrale thermique de Kilavci ? Le Témoin VS-1022 affirme
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1 que ces éléments ont eu lieu, ce que personne ne doute, moi, le premier,
2 mais quelles en sont les raisons, les propos de l'accusé ou tout autre
3 raison ?
4 Donc là aussi, j'ai un doute concernant les chefs 8 et 9 sur
5 l'incitation à commettre.
6 Alors demain, j'aborderai le fait d'ordonner, et je développerai très
7 longuement parce que c'est très compliqué, et vous me pardonnerez par
8 avance, la question de l'entreprise criminelle commune, où je conclurai,
9 autant vous le dire tout de suite, ce qui vous permettra de réfléchir
10 jusqu'à demain, que pour moi, M. Seselj n'appartenait pas à l'entreprise
11 criminelle commune dans lequel il y avait Milosevic, Karadzic, et les
12 autres. Mais tout ceci sera démontré à partir d'un très long développement
13 qui va nous prendre beaucoup de temps demain.
14 Voilà. Alors, là, j'en suis donc à la page 25. Il me reste 50 pages demain.
15 Donc rassurez-vous, demain, on n'ira pas jusqu'à minuit. Sur ce, je
16 souhaite à tout le monde une bonne soirée, et nous nous retrouverons donc
17 demain en continuation de lecture.
18 --- L'audience est levée à 16 heures 49 et reprendra le jeudi 5 mai 2011, à
19 14 heures 15.
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