LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE
Devant : M. le Juge Mohamed Bennouna, Juge de la mise en état
Assistée de : Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier
Ordonnance rendue le : 11 mai 2000
LE PROCUREUR
C/
DAMIR DOEN
DRAGAN KOLUNDIJA
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ORDONNANCE RELATIVE À LA REQUÊTE DU PROCUREUR
AUX FINS DE MESURES DE PROTECTION
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Le Bureau du Procureur :
Mme Brenda J. Hollis
M. Michael J. Keegan
M. Kapila Waidyaratne
Le Conseil de la Défense :
M. Vladimir Petrovic, pour Damir Doen
M. Duan Vucecevic, pour Dragan Kolundija
NOUS, MOHAMED BENNOUNA, Juge près le Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 («le Tribunal international»),
VU notre nomination en qualité de juge de la mise en état de lespèce en vertu dune ordonnance rendue le 3 février 2000 par la Chambre de première instance,
VU la requête aux fins de mesures de protection («la Requête») déposée le 24 mars 2000 par le Bureau du Procureur («l'Accusation») par laquelle l'Accusation sollicite des mesures de protection en faveur de deux témoins, le Témoin N et le Témoin J, dont les déclarations étaient au nombre des éléments justificatifs présentés à l'appui de l'acte d'accusation lors de sa demande de confirmation, ainsi que l'autorisation d'expurger lesdites déclarations des informations permettant l'identification de leurs auteurs et de différer la divulgation de ces informations à la Défense jusqu'à 30 ou 21 jours avant le commencement du procès,
VU le «Dépôt de déclarations de témoins à charge» daté du 13 avril 2000 par lequel l'Accusation communiquait au juge de la mise en état copie des deux déclarations de témoin qu'elle souhaitait expurger, accompagnées des propositions d'expurgation,
VU la «Réponse de la Défense à la requête aux fins de mesures de protection» déposée le 14 avril 2000 par la Défense de Damir Doen («le Conseil de Doen») par laquelle la Défense accepte les mesures sollicitées aux paragraphes 3, 4, 8, 10 à 14 de la Requête mais conteste la demande de non-divulgation des coordonnées des témoins à l'accusé et soutient que ces informations devraient lui être divulguées 60 jours au moins avant l'ouverture du procès,
VU la «Réponse de la Défense en opposition à la Requête du Procureur aux fins de mesures de protection» (la «Réponse de Kolundija») déposée le 14 avril 2000 par la Défense de Dragan Kolundija («le Conseil de Kolundija») par laquelle celle-ci avance
1) qu'aucune disposition du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international («le Règlement») n'impose formellement la non-divulgation à l'accusé des informations permettant l'identification des témoins,
2) et que de telles informations sont nécessaires à la Défense pour la préparation de sa cause, en particulier pour corroborer les déclarations des témoins qu'elle a interrogés
et demande la tenue d'une audience à huis clos aux fins de déterminer le bien fondé des mesures de protection sollicitées pour les Témoins J et N,
ATTENDU en outre que la Réponse de Kolundija ne conteste pas les autres mesures de protection sollicitées par l'Accusation,
ATTENDU que nous avons examiné les propositions d'expurgation présentées par l'Accusation,
VU l'article 22 du Statut du Tribunal international («le Statut») et les articles 69 et 75 du Règlement relatifs à la protection des victimes et des témoins,
VU les motifs spécifiques avancés à l'appui des mesures en faveur des Témoins J et N,
ATTENDU que l'Accusation n'a expurgé les déclarations des Témoins J et N que dans le but de protéger leur identité et leurs coordonnées jusqu'à une date plus proche de l'ouverture du procès,
VU les droits de l'accusé tels que définis à l'article 21 du Statut et, en particulier, son droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense,
ATTENDU que les Conseils de Doen et Kolundija peuvent commencer r préparer leur cause et seront en mesure d'examiner r nouveau les déclarations des deux témoins intéressés à une date raisonnable avant le commencement du procès,
ATTENDU que les dispositions de l'ordonnance aux fins de mesures de protection rendue en l'espèce le 19 octobre 1999 ont été étendues aux deux accusés le 10 mars 2000, qu'elles demeurent pleinement en vigueur et s'appliquent à la communication des déclarations des Témoins J et N,
EN APPLICATION des articles 20 et 22 du Statut et des articles 66 A) i), 69, 75 et 79 du Règlement,
PAR CES MOTIFS
FAISONS DROIT à la Requête et ORDONNONS
1) à l'Accusation de communiquer immédiatement aux Conseils de Doen et Kolundija les déclarations expurgées des Témoins J et N telles que présentées au juge de la mise en état et
2) à l'Accusation de communiquer aux Conseils de Doen et Kolundija les déclarations complètes des Témoins J et N, non expurgées à l'exception de leurs coordonnées actuelles, trente jours au moins avant la date fixée pour l'ouverture du procès.
L'Accusation pourra demander, en temps opportun, les mesures de protection supplémentaires qu'elle estime nécessaires pour la comparution des Témoins J et N au procès.
Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.
Le Juge de la mise en état
/signé/
M. le Juge Mohamed Bennouna
Fait le 11 mai 2000
La Haye (Pays-Bas)
[Sceau du Tribunal]