Affaire n° : IT-95-9

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL INTERNATIONAL

Devant :
M. le Juge Theodor Meron, Président

Assisté de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Ordonnance rendue le :
21 janvier 2004

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ORDONNANCE DU PRÉSIDENT RELATIVE À LA DEMANDE DE LIBÉRATION ANTICIPÉE DE SIMO ZARIC

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NOUS, THEODOR MERON, Président du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

Vu la demande de libération anticipée (Application for Early Release), datée du 18 novembre 2003 (la « Demande ») et déposée par Simo Zaric,

ATTENDU que, le 17 octobre 2003, la Chambre de première instance II a rendu son Jugement dans l’affaire n° IT-95-9, Le Procureur c/ Milan Simic et consorts, (le « Jugement »), par lequel elle a condamné Simo Zaric à six (6) ans d’emprisonnement,

ATTENDU qu’en application de l’article 7 de la Directive pratique relative à l’appréciation des demandes de grâce, de commutation de la peine et de libération anticipée des personnes condamnées par le Tribunal international (IT/146, 7 avril 1999) (la « Directive pratique »), le Président du Tribunal international, après consultation de la Chambre ayant prononcé la condamnation et des membres du Bureau, décide s’il y a lieu d’accorder une libération anticipée,

ATTENDU que, selon le Jugement et l’article 101 C) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international (le « Règlement »), qui dispose que la durée de la période pendant laquelle la personne reconnue coupable a été gardée à vue en attendant d’être remise au Tribunal ou en attendant d’être jugée par une Chambre de première instance ou la Chambre d’appel est déduite de la durée totale de sa peine, Simo Zaric a droit à ce que soient décomptés de sa peine les 1558 jours qu’il a passés en détention avant d’être jugé en première instance, et il aura ainsi purgé sa peine le 10 juillet 2005,

ATTENDU qu’aux termes de l’article 28 du Statut du Tribunal international, de l’article 123 du Règlement et de l’article premier de la Directive pratique, lorsqu’un condamné remplit les conditions fixées par le droit en vigueur dans le pays où il purge sa peine pour bénéficier d’une libération anticipée, l’État concerné en informe le Tribunal international, conformément à l’accord relatif à l’exécution des peines qu’il a passé avec celui-ci,

ATTENDU toutefois que Simo Zaric ne purge pas sa peine dans l’un des États signataires de l’accord relatif à l’exécution des peines passé avec le Tribunal international (le ou les « État(s) signataire(s) »), mais qu’il reste en détention au quartier pénitentiaire des Nations Unies,

ATTENDU que la Directive pratique ne précise pas la procédure à suivre pour la libération anticipée d’un condamné purgeant sa peine au quartier pénitentiaire des Nations Unies situé aux Pays-Bas, qui ne sont pas un État signataire,

ATTENDU que les conditions à remplir pour bénéficier d’une libération anticipée doivent s’appliquer de la même façon pour tous,

ATTENDU que, dans certains États signataires, un condamné peut prétendre à une libération anticipée dès qu’il a purgé les deux tiers de sa peine, voire plus tôt dans certains cas, et que la demande de Simo Zaric est recevable puisqu’il a purgé plus des deux tiers de sa peine et peut en conséquence prétendre à la libération anticipée,

VU la nouvelle lettre du conseil de Simo Zaric datée du 18 novembre 2003, faisant suivre des renseignements relatifs à la santé et à la retraite concernant Simo Zaric et sa famille,

VU le mémorandum déposé à titre confidentiel par le Greffe le 18 décembre 2003 (le « Mémorandum confidentiel du Greffe »), qui transmet les informations que le Greffe a réunies conformément à l’article 2 de la Directive pratique,

VU le rapport du 19 novembre 2003 de M. Tim McFadden, Commandant du quartier pénitentiaire des Nations Unies, (le « Rapport relatif à la détention »), dans lequel Simo Zaric est décrit comme un détenu ayant un bon comportement, étant respectueux envers le personnel et la direction du quartier pénitentiaire et se conformant aux règles de détention et aux instructions des gardiens, à l’exception d’un cas qui a été réglé suivant la procédure disciplinaire,

VU le rapport médical du 24 novembre 2003 du docteur Paul Falke, médecin du quartier pénitentiaire des Nations Unies (le « Rapport médical »), indiquant que Simo Zaric est en bonne santé,

VU le mémorandum interne du Bureau du Procureur, en date du 10 décembre 2003, concernant la coopération fournie par Simo Zaric (le « Mémorandum du Procureur »),

VU la lettre émanant de Simo Zaric datée du 18 décembre 2003, par laquelle celui-ci a accusé réception du Mémorandum confidentiel du Greffe, du Rapport relatif à la détention, du Rapport médical, et du Mémorandum du Procureur, confirmé qu’il avait compris ces documents dans leur intégralité et déclaré n’avoir aucune remarque à formuler à leur sujet, et vu, en outre, la lettre du conseil de Simo Zaric datée du 18 décembre 2003, (considérées ensemble comme les « Correspondances de décembre »),

ATTENDU que le Greffe a indiqué que Simo Zaric étant considéré comme sain d’esprit, aucun rapport psychologique ou psychiatrique n’avait été présenté en application de l’article 2 b) de la Directive pratique,

VU l’article 125 du Règlement, auquel renvoie l’article 7 de la Directive pratique, qui énumère certains des éléments à prendre en considération lors de l’examen d’une demande de libération anticipée, dont la gravité de l’infraction commise, la volonté de réinsertion sociale dont fait preuve le condamné, le sérieux et l’étendue de la coopération fournie par celui-ci au Procureur, et le traitement réservé aux condamnés se trouvant dans la même situation, ainsi que d’autres critères énoncés dans des ordonnances antérieures relatives à des demandes de libération anticipée,

VU la gravité des infractions commises par Simo Zaric, telles que décrites dans le Jugement,

ATTENDU que Simo Zaric a exprimé des remords pour les souffrances des victimes, y compris des témoins qui ont déposé lors du procès,

VU la résolution de Simo Zaric de se réinsérer dans la société, son bon comportement au quartier pénitentiaire, son attachement à sa famille et la notoriété qu’il possède au sein de sa communauté,

ATTENDU qu’il est probable que Simo Zaric jouera à sa libération un rôle actif dans sa communauté et contribuera au processus de réconciliation engagé dans son pays d’origine,

ATTENDU que la libération anticipée n’est pas moins justifiée dans le cas de Simo Zaric que dans le cas d’autres détenus qui en ont bénéficié sur décision du Président du Tribunal international,

VU la Demande de Simo Zaric, le Jugement, le Mémorandum confidentiel du Greffe, le Rapport relatif à la détention, le Rapport médical, le Mémorandum du Procureur et les Correspondances de décembre,

ATTENDU que la consultation requise par l’article 7 de la Directive pratique s’est limitée aux membres du Bureau, la Chambre de première instance ayant prononcé la condamnation de Simo Zaric ne pouvant plus être reconstituée,

ATTENDU que nous avons consulté les membres du Bureau et tenu compte de leurs recommandations,

ATTENDU que, dans les circonstances particulières de l’espèce, il est inutile de maintenir Simo Zaric plus longtemps en détention, sauf pour une courte période afin de permettre au Greffe et aux autorités du quartier pénitentiaire des Nations Unies d’organiser convenablement la libération de Simo Zaric et son départ des Pays-Bas,

EN APPLICATION des articles 124 et 125 du Règlement et de l’article 7 de la Directive pratique,

PAR CES MOTIFS,

FAISONS DROIT à la Demande de Simo Zaric, cette décision prenant effet à compter du 28 janvier 2004,

PRIONS le Greffier d’informer les autorités du quartier pénitentiaire des Nations Unies de la présente Ordonnance.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 21 janvier 2004
La Haye (Pays-Bas)

Le Président du Tribunal international
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Theodor Meron

[Sceau du Tribunal]