Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Jeudi 17 octobre 2002.) 

 2   (L'audience est ouverte à 9 heures 06.)

 3   (Audience publique.)

 4   (Le témoin, M. Jovan Dulovic, est dans le prétoire.)

 5   M. le Président (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel?

 6   Mme Anoya (interprétation): Oui.

 7   (Matières relatives aux élements de preuve.)

 8   M. le Président (interprétation): Merci. Nous sommes à huis clos partiel

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23   (Audience publique à 9 heures 11.)

24   M. le Président (interprétation): La Chambre de première instance va

25   entendre uniquement cette partie-ci du témoignage en audience publique

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  1   afin de rendre la décision suivante. Les circonstances entourant la

  2   déposition de ce témoin ayant changé, nous allons entendre le reste de sa

  3   déposition à huis clos.

  4   La Chambre de première instance est convaincue que ceci se fait dans

  5   l'intérêt de la justice. Par conséquent, nous allons maintenant passer à

  6   huis clos.

  7   (Huis clos à 9 heures 12, rendu public sur ordre ultérieur de la Chambre.)

  8   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes maintenant à huis clos.

  9   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome, vous avez la

 10   parole.

 11   Monsieur Milosevic?

 12   M. Milosevic (interprétation): J'ai une objection à formuler.

 13   M. le Président (interprétation): Nous avons rendu une décision et nous

 14   avons décidé que nous n'allions pas recevoir d'argument parce que c'est

 15   une situation des plus graves qui nécessite une intervention immédiate de

 16   notre part.

 17   Monsieur Groome, vous avez la parole.

 18   (Interrogatoire principal du témoin, M. Jovan Dulovic, par M. Groome.)

 19   M. Groome (interprétation): Monsieur Dulovic, hier, nous avions terminé ou

 20   plutôt vous aviez terminé votre déposition de la journée en parlant du

 21   moment où vous aviez quitté non pas Zvornik mais Visegrad, et vous

 22   relatiez des événements au moment où vous avez quitté Visegrad.

 23   Peu de temps après votre départ de Visegrad, est-ce que vous êtes retourné

 24   à Zvornik et est-ce que vous avez essayé une fois de plus de rentrer dans

 25   la ville?

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  1   M. Dulovic (interprétation): Oui.

  2   Question: Pourriez-vous nous dire à quel moment vous avez essayé de le

  3   faire?

  4   Réponse: Cela a eu lieu le 10 mai 1992.

  5   Question: Je vais maintenant vous demander de décrire plusieurs endroits

  6   se trouvant à Zvornik. Pour aider les Juges de la Chambre, je vais

  7   demander qu'on vous présente la pièce 342, à l'intercalaire 4, et je vais

  8   demander que ceci soit placé sur le rétroprojecteur.

  9   (Intervention de l'huissier.)

 10   La régie pourrait-elle faire un plan plus éloigné de la carte; ce qui nous

 11   permettra de voir une partie plus importante de la carte?

 12   Monsieur Dulovic, est-ce qu'on voit sur cette carte un plan approximatif

 13   des rues de Zvornik?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: Je vais maintenant vous demander d'indiquer à l'intention des

 16   Juges où se trouve le pont qui permet de passer de Mali Zvornik à Zvornik.

 17   (Le témoin s'exécute.)

 18   Avant de venir déposer devant la Chambre, est-ce qu'on vous a demandé

 19   d'annoter cette carte en y indiquant plusieurs endroits? Est-ce que vous

 20   avez indiqué où se trouvait le pont et est-ce que vous avez annoté cet

 21   endroit par la mention C4-1?

 22   Réponse: En effet.

 23   Question: Pouvez-vous maintenant dire aux Juges où se trouvait le QG de la

 24   Défense territoriale?

 25   (Le témoin s'exécute.)

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  1   Et quelle mention avez-vous indiqué à cet endroit? Pourriez-vous le dire

  2   aux Juges?

  3   Réponse: C4-2.

  4   Question: Pourriez-vous répéter, Monsieur le Témoin?

  5   Réponse: C4-2.

  6   Question: Pourriez-vous indiquer l'endroit où vous avez eu une réunion

  7   avec un certain Cele? C'est ce que vous avez dit dans votre déposition.

  8   Réponse: C'est par ici, non loin de l'endroit où il y a le marquage.

  9   Question: Pourriez-vous nous dire comment vous avez apposé cette

 10   annotation sur la carte?

 11   Réponse: C'est le C4-2.

 12   Question: Pourriez-vous nous indiquer où se trouvait la briqueterie

 13   "Ciglana"?

 14   Réponse: "Ciglana" se trouve ici.

 15   Question: Et quelle est la notation que vous avez apposée?

 16   Réponse: C4-4.

 17   Question: Est-ce que c'est D4 ou C4?

 18   (L'interprète de la cabine française précise qu'il a entendu le témoin

 19   dire "D".)

 20   Je vais vous demander, Monsieur le Témoin, de répéter. Quelle est la

 21   lettre que vous avez utilisée pour indiquer cet endroit?

 22   Réponse: C.

 23   Question: Pourriez-vous nous indiquer où se trouve Celopek? Il faudra

 24   peut-être déplacer la carte vers la gauche, pour ce faire.

 25   Réponse: Celopek est un peu plus loin que Zvornik; il faut suivre cette

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  1   route-ci, la route qui porte la mention C4-5.

  2   Question: Merci, Monsieur Dulovic.

  3   Je vais demander que l'on garde la carte sur le rétroprojecteur, mais je

  4   ne vais pas poser tout de suite de question à ce propos.

  5   Vous êtes donc retourné à Zvornik, dans la région de Zvornik. Est-ce qu'il

  6   y avait quelque chose de particulier à propos du côté de la Drina, de la

  7   rive de la Drina où se trouve Mali Zvornik?

  8   Réponse: Oui. Du côté de Mali Zvornik, sur le pont, vers le bout du pont,

  9   il y avait des sacs de sable qui étaient amoncelés et il y avait des gens,

 10   certains en uniforme, d'autres en vêtements civils. Et au sommet de cette

 11   pile de sacs de sable, il y avait une mitrailleuse et un soldat qui

 12   pointait son fusil-mitrailleur en direction du côté opposé, à savoir en

 13   direction de la rive musulmane.

 14   Question: Vous nous avez dit que vous aviez vu des personnes en uniforme à

 15   cet endroit. Avez-vous été en mesure de reconnaître, grâce à l'uniforme,

 16   l'unité -ou les unités- à laquelle ils appartenaient?

 17   Réponse: Oui.

 18   Question: Dites-nous comment vous l'avez fait.

 19   Réponse: J'ai pu faire quelque chose ou voir quelque chose, mais certaines

 20   choses, je ne pouvais pas les distinguer. J'ai pu distinguer les uniformes

 21   de police et les uniformes militaires. Par exemple, l'homme qui était

 22   installé à côté de la mitrailleuse était en uniforme militaire de

 23   camouflage.

 24   Question: Ces hommes en tenue de police, est-ce qu'ils étaient de la

 25   République de Serbie?

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  1   Réponse: Oui. C'est ce que m'a dit le soldat avec qui je m'étais entretenu

  2   assez longtemps et qui était l'homme à la mitrailleuse.

  3   Question: Quelle était la raison pour laquelle vous alliez à Zvornik,

  4   cette fois-là?

  5   Réponse: Je voulais voir ce qui se passait à Zvornik, parce qu'il y avait

  6   une importante propagande aux termes de laquelle la population serbe était

  7   menacée et faisait l'objet de crimes et je voulais m'assurer de la

  8   véracité de ces dires parce que ce qu'on disait n'était pas si

  9   convaincant.

 10   Question: Une fois arrivé au pont, est-ce que vous avez remarqué qu'il y

 11   avait à ce moment-là quelque chose de différent au niveau du pont par

 12   rapport à votre visite précédente à Zvornik?

 13   Réponse: Oui, de l'autre côté du pont il y avait un panneau tourné vers le

 14   côté serbe où il y avait une inscription, à savoir Republika Srpska.

 15   Question: Est-ce que vous avez essayé de franchir ce pont?

 16   Réponse: Oui, il n'y a eu aucun problème pour ce faire. Ils m'ont laissé

 17   passer et j'ai traversé le pont. Auparavant, il m'avait donné des

 18   conseils, il m'avait dit que j'y allais à mes risques et périls et ils

 19   m'ont recommandé de ne pas traverser le pont et de ne pas passer du côté

 20   musulman.

 21   Question: Avant de franchir ce pont, est-ce que vous avez eu une

 22   conversation avec la personne qui se trouvait à la mitrailleuse?

 23   Réponse: Oui. Je me suis entretenu avec ce soldat.

 24   Question: Pourriez-vous nous dire en quelques mots ce qu'il vous avait dit

 25   à propos de la situation qui prévalait au pont?

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  1   Réponse: Il m'a dit… En fait, je lui avais demandé de savoir pourquoi la

  2   mitrailleuse était tournée vers l'autre côté alors que là-bas il y avait

  3   cette inscription "Republika Srpska". Et il m'a répondu qu'il se trouvait

  4   sur le pont parce que diverses formations paramilitaires ou autres ont

  5   essayé de se frayer un passage de force par le pont, avec des armes à la

  6   main et des marchandises de contrebande qu'il voulait faire passer de

  7   force en Serbie.

  8   Question: Pour passer du côté bosniaque, du pont vers le côté serbe?

  9   Réponse: Oui, oui.

 10   Question: Est-ce qu'il est arrivé un moment où vous avez fini par

 11   traverser ce pont pour poser le pied sur le côté bosniaque de la

 12   municipalité de Zvornik?

 13   Pourriez-vous nous dire ce que vous avez observé, ce que vous avez fait au

 14   moment où vous êtes arrivé à Zvornik?

 15   Réponse: Dès que j'ai traversé le pont, j'ai aperçu un grand nombre de

 16   personnes.

 17   Pour l'essentiel, c'étaient des gens en vêtement civil mais armés.

 18   Certains portaient des vêtements de camouflage ou une combinaison, à

 19   savoir un blue-jeans en bas, et le haut avec un dessein bariolé, un motif

 20   bariolé. Il y avait des pantalons ordinaires, des fois des bottes, des

 21   fois c'étaient des chaussures de sport, et j'ai compris qu'il ne

 22   s'agissait pas d'une armée régulière. Il s'agissait par exemple du type

 23   d'homme dont j'ai donné la description déjà auparavant.

 24   Question: Hier, vous avez dit dans le cadre de votre déposition que la

 25   première fois où vous vous étiez trouvé à Mali Zvornik vous avez pu voir

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  1   des chars militaires dans la municipalité de Zvornik. Cette fois-là, à

  2   Zvornik, est-ce que vous avez vu des chars également?

  3   Réponse: Oui. Il y avait des chars et des pièces d'artillerie.

  4   Question: Est-ce que vous avez été en mesure de voir si ces pièces

  5   d'artillerie, ces chars étaient utilisés par des membres de l'armée

  6   yougoslave régulière ou plutôt par des membres de ces groupes

  7   paramilitaires que vous venez de nous décrire?

  8   Réponse: Au bout du pont, vers le côté bosniaque, il y avait un char juste

  9   à côté du pont. Sur ce char, il y avait un soldat dont le buste sortait de

 10   la coupole. J'ai échangé quelques phrases avec lui, je ne me souviens plus

 11   de la teneur de notre conversation, ou plutôt de la teneur des quelques

 12   phrases que nous avions échangées et qui n'avaient pas d'importance.

 13   Question: Est-ce qu'à un moment donné vous avez demandé à une des

 14   personnes se trouvant dans la rue de vous amener vers celui qui était

 15   responsable à Zvornik, quelle que soit cette personne?

 16   Réponse: Oui. J'ai demandé cela à plusieurs personnes et on m'a dit tout

 17   de suite… ou plutôt j'avais déjà posé la question et certaines personnes

 18   m'avaient dit, m'avaient dirigé vers le quartier général de Défense

 19   territoriale situé dans l'une des rues du centre ville. Et je me suis

 20   dirigé vers ce que j'avais estimé être le centre ville.

 21   Question: Est-ce qu'ils vous ont donné le nom de la personne qui était

 22   responsable?

 23   Réponse: Oui, oui.

 24   Question: Après cette personne, qui était cet homme?

 25   Réponse: Il m'avait dit de me présenter et de demander Marko Pavlovic.

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  1   Question: Est-ce qu'une quelconque de ces personnes à qui vous avez parlé,

  2   vous a dit si c'était un homme originaire de Zvornik ou s'il était

  3   originaire d'un autre endroit?

  4   Réponse: Non, on m'a dit qu'il s'agissait là du commandant Marko Pavlovic.

  5   J'avais demandé s'il était de là, si c'était un membre de la Défense

  6   territoriale. Et ils m'ont dit que ce n'était pas le cas, que c'était un

  7   homme venu d'ailleurs.

  8   Question: Est-ce que c'est bien ce Marko Pavlovic dont vous avez appris

  9   plus tard qu'il avait un autre nom, à savoir Branko Pavlovic, et vous avez

 10   appris à son propos plus tard qu'il avait été associé à un homme répondant

 11   au nom de Mihalj Kertes?

 12   Réponse: En fait, j'ai appris qu'il s'appelait réellement Branko Popovic,

 13   et plusieurs années par la suite, il m'a confirmé la chose lorsque je me

 14   suis entretenu avec lui dans la ville de Sombor. Il m'a dit qu'il

 15   s'appelait Branko Popovic.

 16   Question: Etes-vous allé parler avec cet homme le 10 mai?

 17   Réponse: Oui, je suis allé le voir dans son bureau. Il y avait aux

 18   environs des hommes chargés de la sécurité, des hommes en armes. J'ai dit

 19   que j'étais journaliste, j'ai montré ma carte de journaliste. On m'a

 20   laissé entrer, j'ai monté un escalier, et en haut j'ai trouvé son bureau,

 21   j'ai pénétré dans son bureau et nous avons parlé ensemble.

 22   Question: Avant de vous interroger au sujet de cette conversation,

 23   j'aimerais que vous décriviez à l'intention des Juges de cette Chambre,

 24   l'aspect général du bureau. Trouvait-on dans ce bureau des cartes

 25   géographiques ou d'autres éléments que l'on peut s'attendre à trouver dans

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  1   un quartier général, un centre de commandement militaire?

  2   Réponse: Cela, je ne l'ai pas remarqué, ou plutôt je ne sais pas, je ne me

  3   rappelle pas. Je n'ai pas fait attention. C'était un bureau tout à fait

  4   normal qui n'avait rien de très différent de quelque autre bureau

  5   administratif que ce soit pour autant que je m'en souvienne.

  6   Question: Pouvez-vous nous dire, je vous prie, quel a été le thème de

  7   l'entretien que vous avez eu avec le commandant Pavlovic?

  8   Réponse: Je lui ai demandé ce qu'il se passait à Zvornik. Il était assez

  9   inquiet, gêné, visiblement effrayé car, comme il me l'a dit un peu plus

 10   tard, il avait eu des problèmes peu de temps avant.

 11   Et il m'a dit ce qui suit: qu'un certain dirigeant d'un groupe

 12   paramilitaire dont on ne connaissait que le surnom qui était "Cele" était

 13   entré dans son bureau pour l'intimider, il avait pris son revolver et

 14   l'avait placé contre sa tête. C'est ce que cet homme m'a dit, tout ce

 15   qu'il m'a dit.

 16   Question: Monsieur Dulovic, pour que tout soit clair: qui a pris un

 17   revolver pour le placer sur la tête de qui? Pouvez-vous nous donner des

 18   noms, je vous prie?

 19   Réponse: "Cele" est entré dans le bureau de Marko Popovic ou plutôt Marko

 20   Pavlovic qui est identique à Branko Popovic, et il a pris un revolver pour

 21   le placer contre la tête de Branko Popovic.

 22   Question: Ce "Cele", faisait-il partie d'une organisation paramilitaire

 23   particulière?

 24   Réponse: Oui, c'était, si on peut utiliser cette expression, un homme de

 25   Seselj, il faisait partie d'une unité de Seselj.

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  1   Question: Le commandant Pavlovic a-t-il dit ce que "Cele" était venu lui

  2   demander? Vous a-t-il dit pour quelle raison "Cele" lui avait placé un

  3   revolver sur la tête?

  4   Réponse: Oui, "Cele" pensait, mais je ne sais pas si c'est exact ou faux,

  5   que le commandant Pavlovic avait quelque chose à voir avec le fait que

  6   "Cele" et ses hommes ne pouvaient pas traverser le pont avec leurs armes

  7   et leurs butins parce que de l'autre côté du pont se trouvaient des

  8   Serbes, des soldats serbes, qui ne permettaient pas le passage à des

  9   hommes en armes et portant un butin.

 10   Question: Le commandant Pavlovic vous a-t-il parlé de conversations

 11   téléphoniques qu'il aurait eues au sujet de cette situation?

 12   Réponse: Oui. Il m'a dit avoir appelé Seselj et Radmilo Bogdanovic et que

 13   Seselj lui avait répondu que "Cele" et ses unités n'étaient plus

 14   contrôlables et qu'il n'avait rien à voir avec cet homme et ses unités.

 15   Ce dont il a parlé avec Bogdanovic, je n'en sais rien, il ne me l'a pas

 16   dit.

 17   Question: Ne vous a-t-il pas dit ce que Bogdanovic lui avait dit ou bien

 18   ne vous a-t-il pas dit non plus ce que lui avait dit à Bogdanovic?

 19   Réponse: Non, non. Bogdanovic à l'époque était retraité mais il avait

 20   encore une très grande influence dans les rangs de la police de la

 21   République.

 22   Question: Le commandant Pavlovic vous a-t-il dit ce que lui avait dit à

 23   Bogdanovic?

 24   Réponse: Il ne me l'a pas dit. Il m'a seulement dit qu'il l'avait appelé.

 25   Question: Un moment est-il arrivé où vous êtes sorti du bureau du

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  1   commandant Pavlovic et où vous avez rencontré le commandant Pavlovic en

  2   personne dans les rues Zvornik?

  3   Réponse: Oui. Peu de temps après, j'ai rencontré "Cele" en compagnie de

  4   deux autres jeunes gens en armes également. Il m'a reconnu parce

  5   qu'apparemment, nous nous étions rencontrés auparavant à Borovo Selo ou

  6   dans un village voisin de Borovo Selo.

  7   Question: Pouvez-vous décrire cette rencontre que vous avez eue avec lui à

  8   cet endroit?

  9   Réponse: C'est moi qui l'ai vu le premier. Ensuite, il m'a remarqué. Nous

 10   allions l'un vers l'autre, donc nous ne pouvions pas ne pas nous

 11   rencontrer. Alors, il s'est arrêté et il m'a salué, il m'a présenté aux

 12   deux hommes qui l'accompagnaient en disant que j'étais le plus grand

 13   journaliste serbe.

 14   Question: A-t-il…?

 15   Réponse: J'ai accepté d'avoir cette conversation avec lui, même si je ne

 16   me rappelais pas exactement qui il était.

 17   Question: Pouvez-vous nous dire comment il était habillé et s'il portait

 18   éventuellement des armes?

 19   Réponse: Il portait un chargeur avec des munitions, des grenades à la

 20   ceinture, un uniforme de camouflage, le couvre-chef serbe avec la cocarde,

 21   une barbe assez longue; voilà ce qui m'a frappé. Et sur les pieds, il ne

 22   portait ni chaussures en cuir ni baskets, mais des espèces de chaussures

 23   de sport faites en tissu, donc quelque chose qui ressemblait à une

 24   chaussure de sport mais qui n'était pas une basket. C'était assez étonnant

 25   car ce qu'il avait aux pieds ne collait pas avec le reste. J'ai pensé

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  1   qu'il avait quelque problème aux pieds.

  2   Question: Avez-vous remarqué s'il portait un couteau?

  3   Réponse: Oui, il portait un couteau assez caractéristique, parce qu'en

  4   haut en la lame, il y avait une couronne.

  5   Question: Sur quelle partie du corps portait-il ce couteau?

  6   Réponse: A la ceinture, sur la hanche droite.

  7   Question: Vous venez de faire un geste pour montrer votre flanc droit,

  8   n'est-ce pas, de la main?

  9   Réponse: Enfin, je ne suis pas sûr que c'était à droite ou à gauche mais

 10   ce qui est certain, c'est que ce couteau était accroché sur la hanche, à

 11   la ceinture, au niveau de la hanche, comme cela se fait d'habitude.

 12   Question: Un moment est-il arrivé où "Cele" vous a emmené quelque part?

 13   Réponse: Oui.

 14   Question: Où ça?

 15   Réponse: Il m'a proposé d'aller déjeuner avec lui dans un restaurant. Nous

 16   étions donc quatre; nous avons tous pris place à bord d'une voiture dont

 17   je me rappelle qu'elle ne portait pas de plaque d'immatriculation, et nous

 18   avons démarré.

 19   Question: L'endroit où il vous a emmené, que vous annoté sur la carte

 20   qu'on vous a montrée, correspond à la notation C4-3, c'est bien ça.

 21   Réponse: Oui, j'ai sauté ce passage. Je n'en ai pas parlé. Mais c'est à la

 22   fin que nous sommes partis dans ce restaurant.

 23   Question: Monsieur Dulovic, les Juges ont une copie du texte que vous avez

 24   sous les yeux. Donc pour le moment, ce qui suffira, je pense, c'est que

 25   vous indiquiez les sigles ou les lettres et les chiffres associés aux

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  1   différents endroits que vous annotés sur la carte.

  2   Réponse: Oui. Il m'a emmené là où se trouvait son unité. C'était une

  3   espèce d'usine, sans doute vraiment une usine -moi, je ne le la

  4   connaissais pas, c'était la première fois que je la voyais-, une très

  5   grande usine qui s'appelait Alhos et c'est là qu'il m'a emmené.

  6   Question: Un moment est-il arrivé, dans cette usine, où "Cele" vous a

  7   emmené dans une pièce particulière pour vous montrer quelque chose qui se

  8   trouvait dans cette pièce?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Pouvez-vous nous dire ce qu'il vous a montré?

 11   Réponse: Il m'a montré son équipement médical, en fait, dans une pièce où

 12   il y avait quelques lits. Et on y trouvait également de nombreux postes de

 13   télévision, des magnétoscopes, des chaînes stéréo et toutes sortes de

 14   matériels de ce genre.

 15   Question: Vous êtes-vous formé une opinion quant au fait de savoir si ces

 16   équipements électroniques étaient neufs ou usagés?

 17   Réponse: La première chose dont je me suis rendu compte, c'est qu'aucun de

 18   ces appareils n'était neuf. Il s'agissait d'appareils usagés; en effet,

 19   aucun d'entre eux n'était emballé dans un carton: ils étaient entassés les

 20   uns sur les autres, sans aucune caisse d'emballage; un peu comme des

 21   livres.

 22   Question: Vous a-t-il également présenté à des femmes qui se trouvaient

 23   là?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: Que vous a-t-il dit au sujet de l'identité de ces femmes?

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  1   Réponse: Il m'a dit que c'était son équipe médicale qui appartenait à son

  2   détachement médical.

  3   Question: D'après vous, cela signifiait quoi?

  4   Réponse: J'ai pensé qu'il fallait que je comprenne qu'il s'agissait

  5   d'infirmières, mais elles ne ressemblaient pas du tout à des infirmières:

  6   elles portaient des mini-jupes très courtes.

  7   Question: Vous a-t-il parlé d'un affrontement qu'il aurait eu avec

  8   quelqu'un au sujet de ces femmes?

  9   Réponse: Oui, oui. Après m'avoir présenté ces infirmières, il m'a dit que

 10   Peja, c'est-à-dire l'adjoint d'"Arkan", qui était également à Zvornik,

 11   donc un jour où il participait à une opération de ratissage du terrain,

 12   Peja aurait donc regroupé toutes ces femmes. Il les aurait placées à bord

 13   d'un autobus et leur aurait fait traverser la Drina pour les amener en

 14   territoire serbe.

 15   Question: Hier, vous nous avez parlé de deux hommes qui répondaient au nom

 16   de Peja et qui étaient associés à "Arkan". Pourriez-vous nous dire auquel

 17   des deux "Cele" faisait référence?

 18   Réponse: Je pense qu'il s'agit du Peja dont le surnom était "Ciganin",

 19   mais je ne me souviens plus exactement aujourd'hui s'il s'agissait de l'un

 20   ou de l'autre de ces deux hommes, parce que j'ai entendu parler de ces

 21   deux hommes, mais je ne les connaissais pas.

 22   Question: Un moment est-il arrivé où vous avez quitté ce quartier général

 23   de "Cele" pour vous rendre dans un autre bâtiment de la ville de Zvornik?

 24   Réponse: Oui. Il a insisté pour que nous allions ensemble jusqu'à la

 25   briqueterie. Moi, je ne voyais pas très bien pourquoi nous y serions

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  1   allés, mais je l'ai suivi.

  2   Question: Pourriez-vous nous dire ce que vous avez vu à votre arrivée dans

  3   cette briqueterie?

  4   Réponse: On m'a dit que la briqueterie était la seule entreprise de

  5   Zvornik qui fonctionnait encore. Et lorsque nous y sommes arrivés, nous

  6   avons vu le produit de cette usine, autrement dit des briques alignées

  7   comme on le fait d'habitude avec des briques. Il m'a emmené dans le bureau

  8   du directeur où nous avons parlé.

  9   Question: Quelle était l'appartenance ethnique du directeur?

 10   Réponse: Très manifestement serbe. Il m'a été présenté comme le directeur.

 11   Question: Pouviez-vous nous dire quel a été le thème de la conversation

 12   que vous avez eue ensemble?

 13   Réponse: Encore aujourd'hui, je n'arrive pas à comprendre la position de

 14   "Cele", mais il m'a parlé de certaines opérations; il m'a dit que cette

 15   usine allait plus tard être très prospère et qu'elle allait contribuer au

 16   développement de Zvornik, un peu comme s'il avait dans cette usine des

 17   intérêts particuliers, des intérêts commerciaux.

 18   Je ne vois pas comment j'aurais pu interpréter autrement ce qu'il a dit au

 19   sujet de cette briqueterie.

 20   Question: En dehors de ce directeur, y avait-il des ouvriers ce jour-là?

 21   En avez-vous vu?

 22   Réponse: Non, non, c'est étonnant. Je n'en ai vu aucun.

 23   Question: Vous rappelez-vous quel jour de la semaine vous êtes allé dans

 24   cette briqueterie?

 25   Réponse: Je ne me rappelle pas le jour de la semaine, mais, plus tard,

Page 11743

  1   nous avons confirmé qu'il s'agissait d'un dimanche.

  2   Question: Vous avez pu le confirmer en regardant un calendrier de cette

  3   année-là, n'est-ce pas?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Une fois que vous avez quitté la briqueterie, "Cele" vous a-t-il

  6   emmené ailleurs?

  7   Réponse: En sortant de la briqueterie, nous sommes allés déjeuner; nous

  8   sommes allés dans ce restaurant où il m'avait dit que nous allions

  9   déjeuner.

 10   Question: Où se trouvait ce restaurant?

 11   Réponse: Si je me souviens bien, il était à peu près à quatre ou cinq

 12   kilomètres de Zvornik.

 13   Question: Vers le nord ou vers le sud de Zvornik?

 14   Réponse: En empruntant la route que je vous montre ici. Donc vers le nord

 15   parce que, si on a le nord ici, le sud là et par là l'est, sur cette

 16   carte, en fait, nous avons longé la Drina, en aval de la Drina.

 17   Question: Avez-vous annoté cet endroit sur la carte de votre main par les

 18   lettres et chiffres C45?

 19   Réponse: Oui. Oui, c'est cette route que je vous montre ici.

 20   Question: Ce quartier de Zvornik est connu populairement sous quel nom?

 21   Réponse: Je ne sais pas. Je l'ai peut-être su, mais j'ai oublié.

 22   Question: Combien de temps a duré ce déjeuner?

 23   Réponse: Plusieurs heures dans mon souvenir. Mais la durée exacte, je ne

 24   saurais pas vous la dire aujourd'hui.

 25   Question: Pourriez-vous nous dire quels ont été certains des sujets

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  1   abordés pendant ce déjeuner dans votre conversation avec "Cele"?

  2   Réponse: C'est surtout lui qui parlait, et il m'a surtout parlé des succès

  3   remportés par son unité dans -ce sont les mots qu'il a utilisés- le

  4   ratissage ou le nettoyage du terrain.

  5   Ce jour-là, je n'avais pas la moindre idée de la signification à accorder

  6   à ces mots nettoyage du terrain, mais je l'ai compris en entendant son

  7   histoire.

  8   Question: Lui avez-vous demandé ce qu'il entendait par les mots "nettoyage

  9   du terrain"?

 10   Réponse: Oui. "Nettoyer le terrain", cela voulait dire: supprimer la

 11   population musulmane du terrain.

 12   Question: Vous a-t-il décrit une telle opération de nettoyage du terrain à

 13   laquelle il avait participé la nuit précédente, à savoir le 19 mai?

 14   Réponse: Oui. Il m'a dit qu'ils avaient nettoyé le terrain toute la nuit,

 15   et qu'ils n'avaient pas tiré une seule balle, mais qu'ils avaient

 16   travaillé sur du froid… à froid. Et j'ai bien compris ce que cela voulait

 17   dire. Et quand il a dit "à froid", il a fait un geste de la main pour

 18   amener sa main jusqu'au couteau qu'il portait à la hanche. Cela, je m'en

 19   souviens très bien.

 20   A ce moment-là, je lui ai dit: "Mais cela concernait tout le monde." Et

 21   j'ai pointé le doigt sur des enfants et il a répondu: "Oui, il faut qu'il

 22   ne revienne jamais."

 23   Cela, je ne l'oublierai jamais.

 24   M. Groome (interprétation): Pour le compte rendu d'audience, j'indique que

 25   vous avez fait un geste de la main en pointant votre doigt à un mètre du

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  1   sol environ. Est-ce ainsi que vous avez indiqué que vous parliez

  2   d'enfants?

  3   M. Dulovic (interprétation): Je pensais à des enfants et il a très bien

  4   compris. Moi, en tout cas, ce que j'ai compris des propos qu'il a tenus en

  5   face de moi, c'est qu'ils ont tué des enfants. Quand il m'a dit: "Il faut

  6   qu'il ne rentre plus jamais, qu'il ne revienne plus jamais."

  7   M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, vous venez de parler…

  8   nous venons d'entendre la date du 19 mai. Moi, jusqu'à présent j'ai pensé

  9   que cette visite à Zvornik s'était déroulée le 10 mai.

 10   M. Groome (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président, vous avez

 11   raison. Je vais demander une correction au témoin.

 12   Monsieur Dulovic, votre visite à Zvornik se situe le 10 mai, n'est-ce pas?

 13   M. Dulovic (interprétation): Oui, oui, c'est ce qui est écrit dans mon

 14   agenda, dans mes notes plutôt.

 15   Question: Donc je me suis trompé lorsque j'ai parlé du 19, c'est bien le 9

 16   mai qu'il vous a dit que cet événement s'est produit?

 17   Réponse: Je ne sais pas, je ne connais pas la date exacte. Je sais

 18   seulement qu'un peu plus haut dans mes notes, il est question du 10 mai.

 19   Question: Avant la fin du déjeuner, "Cele" vous a-t-il demandé d'appeler

 20   un certain nombre de personnes en son nom?

 21   Réponse: Oui. Il m'a demandé si je connaissais Vojislav Seselj. Mais je

 22   lui ai dit que je le connaissais, mais que je ne savais ni où il se

 23   trouvait ni ce qu'il faisait à ce moment-là et que je ne savais pas

 24   comment j'aurais pu entrer en contact avec lui. Alors, il m'a donné deux

 25   numéros de téléphone que j'ai notés; donc un numéro était son numéro à la

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  1   maison et l'autre son numéro au travail.

  2   Question: Assis à la place où vous vous trouvez ici dans ce prétoire,

  3   aujourd'hui, pouvez-vous vous rappeler ces numéros de téléphone?

  4   Réponse: Non, mais j'avais ces numéros quand j'ai parlé de cela pour la

  5   première fois il y a quelques temps. Et j'ai remis l'original de mes notes

  6   dans lesquelles figurent ces numéros de téléphone avec ceux avec qui je

  7   parlais pour enregistrement officiel, si je me souviens bien. Je ne me

  8   rappelle pas ces numéros aujourd'hui; je n'ai même pas essayé de les

  9   mémoriser.

 10   Question: Ces numéros figurent-ils dans la déclaration préalable que vous

 11   avez faite devant des représentants du Bureau du Procureur?

 12   Réponse: Oui.

 13   M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 14   demande à ce que l'on autorise le témoin à se rafraîchir la mémoire en

 15   regardant ces numéros de téléphone dans sa déclaration préalable.

 16   M. le Président (interprétation): Oui.

 17   M. Groome (interprétation): Monsieur Dulovic, j'ai ouvert votre

 18   déclaration préalable en page 9 et je vous demanderai de relire les

 19   paragraphes du bas de la page car j'aimerais ensuite vous interroger au

 20   sujet de ces numéros de téléphone.

 21   Les numéros de téléphone que l'on trouve à ce niveau sont-ils bien ceux

 22   qu'il vous a demandés d'appeler?

 23   M. Dulovic (interprétation): Oui.

 24   Question: L'un de ces numéros est-il le numéro du bureau de Vojislav

 25   Seselj?

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  1   Réponse: Oui. 4448712.

  2   Question: Et son numéro de domicile?

  3   Réponse: 8483428. C'est lui qui m'a dicté ces chiffres.

  4   Question: Merci. Nous allons maintenant vous retirer votre déclaration

  5   préalable.

  6   Quel était le message que "Cele" vous a demandé de transmettre à Vojislav

  7   Seselj?

  8   Réponse: Dans mon calepin, il était écrit –et ce sont des notes que j'ai

  9   écrites de ma main-: "Pejo poursuit "Cele" pour l'arrêter". Et puis, il

 10   était écrit également: "5% de la population de Zvornik va adhérer au Parti

 11   radical" et puis encore, un peu plus loin: "J'attends instructions

 12   complémentaires.".

 13   Question: Avez-vous, à quelque moment que ce soit, appelé M. Vojislav

 14   Seselj pour lui transmettre ce message?

 15   Réponse: Non.

 16   Question: Qui d'autre vous a-t-il demandé d'appeler par téléphone?

 17   Réponse: Si je me souviens bien… Ah, il m'a demandé aussi si je

 18   connaissais Zeljko Raznatovic.

 19   Question: A savoir "Arkan"?

 20   Réponse: Oui, oui, "Arkan". Et pour "Arkan", il m'a aussi écrit… ou

 21   plutôt, il m'a aussi dicté ce que je devais lui transmettre. Il m'a dit:

 22   "Avec tout le respect que je vous dois -donc il lui parlait à lui- Pejo

 23   travaille contre les intérêts serbes.".

 24   Question: Et le Pejo dont vous parlez ici est bien un des collaborateurs

 25   de "Arkan", n'est-ce pas?

Page 11748

  1   Réponse: Oui. Oui, un de ses officiers supérieurs dans les rangs de la

  2   Garde.

  3   Question: Avez-vous transmis ce message, à quelque moment que ce soit?

  4   Réponse: Non.

  5   Question: Un moment est-il arrivé, avant votre départ du secteur de

  6   Zvornik et de Mali Zvornik, où vous avez rencontré une nouvelle fois le

  7   commandant Pavlovic?

  8   Réponse: Oui. Je l'ai vu, je pense, quelques années plus tard; je n'arrive

  9   plus à me situer exactement en quelle année.

 10   Question: Est-ce qu'il vous est arrivé de le revoir, notamment le 10 mai,

 11   avant de quitter Zvornik, cette fois-là?

 12   Réponse: Oui. Je l'ai vu du côté serbe, dans une buvette. Cela s'appelait

 13   "Mali Zvornik" ou "Mali Raj"; j'ai oublié le nom de la buvette, mais ça se

 14   trouvait juste à côté du fleuve. C'était un hôtel, en fait. Je l'ai vu là

 15   le soir et il disait que l'on avait proféré des menaces à l'encontre de sa

 16   famille; il a dit exactement où et quoi, et il a ajouté qu'il devait

 17   d'urgence se rendre à Belgrade. Et, pour autant que je le sache, il y est

 18   allé.

 19   Question: Est-ce que, à un moment donné, vous avez eu une conversation

 20   avec certains des soldats le long de la Drina, en ce qui concerne de

 21   grands oiseaux qui volaient dans le ciel, le 10 mai?

 22   Réponse: Oui. C'est précisément avec l'une des personnes qui se trouvaient

 23   sur le pont, du côté serbe. Il y avait effectivement des aigles qui

 24   tournaient dans le ciel; ils étaient assez nombreux. J'ai remarqué la

 25   chose et je le lui ai dit; il était plutôt surpris. Et il a dit: "Il n'y a

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  1   jamais eu davantage de cadavres à descendre le cours de la Drina que de

  2   nos jours".

  3   Question: Un peu plus tard, est-ce que vous vous êtes rendu compte qu'il y

  4   avait toute une série d'allégations graves concernant les événements qui

  5   s'étaient produits à Zvornik, dans la zone de Celopek, et est-ce que vous

  6   avez commencé à mener une enquête à ce propos?

  7   Réponse: J'ai oublié de dire que depuis ce jour-là… En fait, j'avais cru

  8   que l'autre s'appelait Marko Pavlovic mais Cele m'a indiqué que ce n'était

  9   pas son vrai nom et que l'homme en question était originaire de quelque

 10   localité de la Vojvodine; la chose m'avait intéressé. Puis, lorsque j'ai

 11   écrit sur ce sujet, quelqu'un a téléphoné pour me dire que Marko Pavlovic

 12   était en fait Branko Popovic et qu'il était originaire de Sombor.

 13   Question: Et Sombor se trouve en Vojvodine?

 14   Réponse: Oui, Sombor se trouve en Vojvodine, en effet. J'ai réussi à

 15   établir de façon indubitable cette chose en me rendant à Sombor et j'ai

 16   trouvé Branko Popovic, alias Branko Pavlovic, et je me suis entretenu avec

 17   lui.

 18   Des gens sérieux originaires de Sombor m'ont affirmé qu'il était membre de

 19   la sécurité d'Etat local.

 20   Question: Je voudrais maintenant que vous vous concentriez sur les

 21   événements de Celopek.

 22   En tant que journaliste, n'est-ce pas, vous avez commencé à enquêter sur

 23   ces allégations qui concernaient des événements qui se seraient produits à

 24   Celopek.

 25   Réponse: Oui, oui.

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  1   Question: Pourriez-vous nous décrire, de façon générale, la nature de ces

  2   allégations sur lesquelles portait votre enquête?

  3   Réponse: J'ai fait des enquêtes concernant le massacre de civils à

  4   Celopek, à savoir dans le foyer de la culture ou la maison de la culture.

  5   Elle se trouve juste à côté de la route à Celopek.

  6   Et s'agissant des civils qui se trouvaient à l'intérieur, un dénommé

  7   Vuckovic Dusan, surnommé "Repic" a ouvert le feu dans le tas. Il a abattu

  8   une quinzaine de personnes et en a blessé une trentaine d'autres.

  9   Question: Est-ce que c'est ce même Vukovic dont vous avez dit hier qu'il

 10   faisait partie des "Guêpes jaunes"?

 11   Réponse: Oui, en effet: son frère aîné, Vojin, qui avait été le commandant

 12   de ce qui s'appelait les "Guêpes jaunes", et son frère Dusan surnommé

 13   "Repic".

 14   Question: Vous avez donc mené votre propre enquête sur les événements de

 15   Celopek. Ce faisant, est-ce que vous avez participé à la production d'un

 16   documentaire qui reprenait les événements?

 17   Réponse: Oui. Nous avons enregistré les interviews, à savoir pas

 18   l'entretien avec Dusan, mais l'entretien avec Vojin Vuckovic, le

 19   commandant des "Guêpes jaunes".

 20   Question: Est-ce que vous, en personne, vous avez interviewé Vojin

 21   Vuckovic?

 22   Réponse: Non, c'est un collègue à moi qui y est allé, mais avec une

 23   personne qui tournait, enfin qui était là pour filmer les interviews.

 24   Question: Est-ce que vous, personnellement, vous avez interviewé Vojislav

 25   Seselj dans le cadre de ce documentaire?

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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Avez-vous également interviewé une personne répondant au nom de

  3   Jose Mendiluce?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Au début de la semaine, vous a-t-on demandé de visionner une

  6   cassette vidéo qui était en fait ce documentaire?

  7   Réponse: Oui.

  8   M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  9   peut-on montrer au témoin la cassette vidéo en tant que telle, qui porte

 10   la cote de l'accusation P342, intercalaire 13? Et la traduction se trouve

 11   dans le recueil de textes, que vous avez reçu. Peut-on montrer la cassette

 12   même au témoin?

 13   M. le Président (interprétation): Oui.

 14   M. Groome (interprétation): Je demande simplement à l'huissier qu'il la

 15   remette au témoin.

 16   Monsieur Dulovic, s'agit-il bien ici de la cassette que vous avez

 17   visionnée?

 18   M. Dulovic (interprétation): Oui, je l'ai annotée.

 19   Question: Comment savez-vous que c'est bien celle-là? Est-ce que vous avez

 20   inscrit la date à laquelle vous l'avez vue? Est-ce que vous avez indiqué

 21   la mention C-004 sur cette cassette?

 22   Réponse: Oui. Oui, c'est mon écriture.

 23   M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je pense qu'il est sans

 24   doute préférable de visionner cette cassette au moment où nous parlons

 25   plus précisément de Zvornik. Mais il y a un extrait de 20 ou 30 secondes

Page 11752

  1   qui montre cette interview de M. le Témoin avec Seselj. Peut-être

  2   pourrait-on diffuser cet extrait-là pour le moment?

  3   M. le Président (interprétation): Voyons ce qu'il en est. Nous avons la

  4   transcription; je suppose que celle-ci concerne la totalité de la vidéo

  5   mais, à ce stade, manifestement, ce n'est pas recevable puisque sont

  6   évoquées dans cette transcription des commentaires de témoins, ce qui

  7   n'est pas recevable.

  8   Mais vous, vous demandez pour le moment que soit diffusé l'extrait de

  9   cette interview avec Seselj et que ce soit versé au dossier.

 10   M. Groome (interprétation): C'est à la page 14.

 11   M. le Président (interprétation): Page 14 de la transcription,

 12   effectivement.

 13   M. Groome (interprétation): L'accusation demanderait à la Chambre

 14   d'envisager l'admission de la totalité de la table en tant que

 15   documentaire d'enquête produit par une organisation indépendante, par des

 16   personnes qui n'ont aucun rapport avec le Bureau du Procureur.

 17   Nous comprenons que ceci aura peut-être moins de valeur probante, moins de

 18   poids que les personnes qui donnent ou qui font ces interviews, mais nous

 19   pensons qu'il y a une valeur importante à accorder à ceci dans la mesure

 20   où Vojin Vuckovic est représenté comme un des auteurs des crimes.

 21   M. le Président (interprétation): Il faut étudier la question. En effet,

 22   nous ne considérons pas recevables jusqu'à présent des cassettes où des

 23   gens décrivent ce qui s'est passé, au motif que ce n'est pas là la

 24   meilleure preuve possible. Je me souviens de plusieurs cas où nous avons

 25   déclaré ceci recevable.

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  1   Mais manifestement, ici, lorsqu'on parle de l'entreprise conjointe ou de

  2   cette conspiration, effectivement, s'il y a une personne telle que Seselj,

  3   c'est peut-être recevable. Ce ne sera peut-être pas toujours le cas, à

  4   moins qu'on n'avoue des crimes.

  5   Mais vous demandez uniquement qu'il y ait ce qui est à la page 14?

  6   M. Groome (interprétation): Oui.

  7   M. le Président (interprétation): Et je suppose qu'il faudra examiner la

  8   recevabilité du reste en temps opportun?

  9   M. Groome (interprétation): Permettez-moi de vous dire que cette cassette

 10   montre aussi la région concernée, et ceci pourrait servir de fondement à

 11   la déposition du témoin. Ce serait peut-être utile que les Juges voient

 12   ceci.

 13   M. le Président (interprétation): Oui.

 14   M. Groome (interprétation): Est-ce que, dans ce documentaire, on voit

 15   Celopek, Zvornik et d'autres régions qui sont en rapport avec les crimes

 16   commis à Zvornik?

 17   Est-ce qu'on trouve aussi sur cette cassette certaines images de Vukovar

 18   dont vous avez parlé dans votre déposition? Est-ce qu'on voit dans cette

 19   cassette des régions de Vukovar que vous avez décrites hier?

 20   M. Dulovic (interprétation): C'est cela.

 21   M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je demanderai que cet

 22   extrait de 40 secondes soit diffusé et je poserai quelques questions au

 23   témoin par la suite.

 24   M. le Président (interprétation): Oui, allons-y.

 25   (Diffusion de la cassette vidéo.)

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  1   "-Q: Hier, vous avez dit à la télévision que M. Milosevic était celui qui

  2   avait fourni les armes à vos hommes, qu'il avait participé activement à

  3   tout ceci et qu'il vous avait tourné le dos?

  4   -R: Oui, c'est un fait en 1991 et 1992, Milosevic était un nationaliste,

  5   un dirigeant nationaliste et un patriote à l'époque. Et nous coopérions de

  6   façon étroite avec lui. Lorsque 30.000 volontaires, paramilitaires ont été

  7   envoyés sur les fronts où les Serbes devaient combattre, c'est lui qui a

  8   fourni les armes, les munitions, les vêtements, la nourriture, les

  9   transports. C'est lui qui a permis l'utilisation des installations

 10   militaires et ainsi de suite."

 11   (Fin de la diffusion de la cassette vidéo.)

 12   M. Groome (interprétation): Monsieur Dulovic, nous entendons une voix.

 13   C'est la voix d'un traducteur, manifestement, qui traduit les propos, d'un

 14   interprète qui traduit les propos de M. Seselj.

 15   Je vous pose la question suivante. C'est vous qui avez interviewé M.

 16   Seselj. Est-ce que l'interprétation, la traduction était le reflet fidèle

 17   des dires de M. Seselj au moment où vous l'avez interviewé?

 18   M. Dulovic (interprétation): Il s'agit du Dr Seselj au moment où je

 19   l'avais interviewé. Je ne comprends pas l'anglais pour ma part, mais c'est

 20   en somme ce qu'il m'a raconté parce que cette partie-là avait trait à un

 21   sujet bien déterminé.

 22   Question: Pourriez-vous nous donner la date approximative à laquelle vous

 23   avez interviewé M. Seselj sur cette question?

 24   Réponse: Je ne me souviens pas de l'année; cela doit être marqué sur la

 25   cassette. L'année du tournage, c'était peut-être l'année 1996, je ne sais

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  1   plus, je ne sais pas exactement.

  2   Question: Vous avez posé une question à M. Seselj. Cette question portait

  3   sur le fait de fournir des volontaires, des paramilitaires. Est-ce que

  4   vous pensiez aux volontaires et aux paramilitaires que vous aviez vus

  5   personnellement à Vukovar, à Zvornik et à Visegrad?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Lorsque M. Seselj dit que c'est M. Milosevic qui a fourni 30.000

  8   volontaires paramilitaires et a fourni les armes et les vêtements, est-ce

  9   que par la suite, dans le cadre de l'interview, il a dit que c'était une

 10   exagération? Ou est-ce qu'il est revenu sur ses dires d'une quelconque

 11   façon?

 12   Réponse: Non. Pendant que je m'entretenais avec lui et pendant que je

 13   faisais cette interview, il n'a pas dit qu'il avait exagéré. Il n'a jamais

 14   d'ailleurs démenti ce qu'il m'avait dit du moins pas à moi.

 15   Question: Et lorsque M. Seselj affirme qu'il avait bénéficié de ce soutien

 16   de la part de M. Milosevic, il a reçu ce soutien au cours de quelle

 17   période? C'était bien en 1991 et 1992, n'est-ce pas?

 18   Réponse: Oui. Oui.

 19   M. Groome (interprétation): Il y a donc au moins une partie de ce soutien…

 20   Monsieur le Président, il y a une intervention de Me Tapuskovic.

 21   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 22   Juges, je voulais dire qu'il s'agissait là d'un enregistrement datant de

 23   1996. Vous avez eu un débat assez ample à ce sujet et je ne pense pas que

 24   quiconque puisse se prononcer sur ce qu'une autre personne avait pensé.

 25   Nous avons eu un entretien, un débat à ce sujet et vous avez pris position

Page 11756

  1   concernant les entretiens qui ont eu lieu à ce sujet.

  2   M. le Président (interprétation): Oui, il nous revient à nous de trancher

  3   la question.

  4   M. Tapuskovic (interprétation): Bien sûr.

  5   M. Groome (interprétation): Il y a donc cette question que je vous posais

  6   une partie du soutien dont parle M. Seselj, cela se passe après...

  7   M. le Président (interprétation): Oui, c'est ce que disait Me Tapuskovic.

  8   Je pense que c'est à nous de décider de la question, pas au témoin.

  9   M. Groome (interprétation): Fort bien.

 10   Monsieur Dulovic, j'ai quelques questions à vous poser en ce qui concerne

 11   le rôle joué par les médias, au vu de votre propre expérience de

 12   journaliste à l'époque.

 13   Ma première question sera celle-ci: au cours du conflit, combien

 14   d'articles avez-vous envoyés chaque semaine à "Politika Ekspres", donnez-

 15   nous une idée approximative?

 16   M. Dulovic (interprétation): Cela dépendait des situations, des

 17   événements, mais je m'efforçais d'envoyer chaque jour soit un texte assez

 18   long ou plusieurs informations. Donc à chaque fois que je pouvais le faire

 19   et à chaque fois que j'avais de quoi le faire donc je le faisais.

 20   Question: D'après vous, les articles que vous avez envoyés, étaient-ils le

 21   reflet fidèle des événements que vous avez observés et à propos desquels

 22   vous avez interviewé des gens?

 23   Réponse: Oui.

 24   Question: Est-ce que tous ces articles ont été publiés?

 25   Réponse: Non. La plupart, non.

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  1   Question: S'agissant des articles qui eux ont été publiés, est-ce que les

  2   propos dont vous avez été l'auteur au départ est-ce qu'ils ont été

  3   changés?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Un exemple, s'il vous plaît?

  6   Réponse: Eh bien, à l'occasion du siège de Vukovar, par exemple, je n'ai

  7   jamais mis des mots du genre "oustachi" ou "bojovnik" pour dire

  8   "combattant". Je disais "armée croate" ou "volontaire croate". Or il

  9   arrivait que quelqu'un au sein de la rédaction, l'un des responsables

 10   place des termes "oustachi" ou "bojovnik" à la place des termes que

 11   j'avais utilisés moi-même. La chose ne m'avait pas plus et j'ai réagi,

 12   j'ai demandé à ce que cela ne soit plus fait.

 13   Question: Quelle a été la réponse?

 14   Réponse: Ils m'ont dit que cela n'allait plus arriver.

 15   Question: Est-ce que c'est arrivé de nouveau malgré tout?

 16   Réponse: Non, mais mes textes n'avaient plus été publiés, ni imprimés.

 17   Question: Est-ce qu'il est arrivé un moment, alors que vous aviez un

 18   entretien avec le rédacteur en chef un moment où ce rédacteur en chef a

 19   reçu un appel téléphonique?

 20   Réponse: Oui. Nous étions tous dans cette pièce, dans la pièce où l'on

 21   tient les réunions et le téléphone a sonné. Le rédacteur en chef, Slobodan

 22   Jovanovic, s'est entretenu au téléphone et une fois qu'il a raccroché, il

 23   a dit que nous avions le bonjour de Slobodan Milosevic.

 24   M. Groome (interprétation): Monsieur Dulovic, vous avez été en personne le

 25   témoin de l'entrée de la JNA à Visegrad. Est-ce que par la suite, vous

Page 11758

  1   avez pu voir et lire des reportages portant sur cet événement?

  2   M. Kwon (interprétation): Pourriez-vous nous donner la date à laquelle M.

  3   Milosevic aurait appelé le rédacteur en chef?

  4   M. Groome (interprétation): Oui, Monsieur le Juge. Pourriez-vous nous dire

  5   dans la mesure du possible à quel moment cette réunion a eu lieu?

  6   M. Dulovic (interprétation): Les réunions étaient des réunions

  7   quotidiennes. Il me serait impossible de me souvenir de la date. Tout ce

  8   que je puis dire, c'est que c'était à l'époque où Slobodan Jovanovic avait

  9   été le rédacteur en chef de "Politika Ekspres". Maintenant, de là à savoir

 10   quand est-ce qu'il a été nommé, puis révoqué de ces fonctions-là, je ne

 11   peux pas vous le dire non plus. Je n'avais pas jugé utile de mémoriser ce

 12   renseignement et je n'arrive pas maintenant à m'en rappeler.

 13   M. Kwon (interprétation): Quelle sera l'année? Est-ce que vous vous

 14   souvenez de l'année?

 15   M. Dulovic (interprétation): L'année non plus.

 16   M. Groome (interprétation): Est-ce que vous vous souvenez du moment où

 17   vous avez cessé de travailler pour "Politika Ekspres"?

 18   M. Dulovic (interprétation): Oui. C'était en 1990 et quelque. Je ne sais

 19   plus, j'ai la décision de cessation du rapport de travail, mais je me

 20   souviens très mal des années et des mois si je ne prends pas les notes

 21   adéquates.

 22   Question: Pouvez-vous nous dire si cette réunion a eu lieu pendant le

 23   conflit ou plutôt après le conflit?

 24   Réponse: Après les conflits, je pense.

 25   Question: Revenons, si vous le voulez bien, à Visegrad. Pourriez-vous nous

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  1   dire de quelle façon la presse, les médias ont relaté l'entrée de la JNA à

  2   Visegrad? Pourriez-vous nous dire si, de votre avis, cette façon de

  3   rapporter les événements était exacte?

  4   Réponse: J'ai assisté à l'entrée de ces effectifs, il n'y avait pas eu de

  5   résistance du tout. Les journaux disaient que suite à des combats de

  6   plusieurs heures, des combats violents de plusieurs heures, l'armée avait

  7   finalement pénétré dans la ville.

  8   Question: Est-ce que cela a été le fait uniquement d'un ou deux journaux,

  9   ou est-ce que c'était l'avis généralement propagé par tous les journaux?

 10   Réponse: Oui, dans tous les journaux qui étaient sous l'influence du

 11   régime; c'était l'énorme majorité des médias. Les autres étaient

 12   pratiquement inexistants.

 13   M. Groome (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Dulovic.

 14   Je n'ai plus de question à poser maintenant au témoin, mais permettez-moi

 15   de réagir à votre suggestion d'hier où il s'agissait de faire un bilan, de

 16   faire le point. Et je voudrais énoncer aux fins du compte rendu les

 17   documents pour lesquels nous avons suffisamment établi la base.

 18   M. le Président (interprétation): Oui.

 19   (Matières relatives aux éléments de preuve.)

 20   M. Groome (interprétation): Il s'agit de la pièce de l'accusation 342:

 21   l'accusation demande le versement au dossier de tous les intercalaires de

 22   1 à 13, bien sûr sous réserve des contraintes exprimées par la Chambre.

 23   Et s'agissant de la pièce d'accusation 343, en l'occurrence les cartes, là

 24   nous demandons le versement des intercalaires 1 à 4.

 25   M. le Président (interprétation): Nous allons admettre l'extrait de 40

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  1   secondes de la vidéo; pour le reste de la vidéo, il recevra uniquement une

  2   cote d'identification. Je suis sûr que le Greffe trouvera moyen de le

  3   faire.

  4   Mme Anoya (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

  5   M. le Président (interprétation): Merci.

  6   M. Groome (interprétation): Vous aviez fait une suggestion en ce qui

  7   concerne les cartes. Je m'attends à ce que, dans le cadre du procès, nous

  8   allons demander à d'autres témoins d'annoter la même carte. Permettez-moi

  9   de suggérer ceci: la carte annotée par M. Dulovic pourrait recevoir le

 10   suffixe C4; on l'ajouterait à cette cote. Et lorsque d'autres témoins

 11   viendront déposer à la barre, on ajouterait le même suffixe au même

 12   intercalaire, au même numéro d'intercalaire. Peut-être que ceci, en fin de

 13   compte, vous donnera les mêmes cartes sous la même cote.

 14   M. le Président (interprétation): Oui, nous pouvons agir de la sorte. Ou

 15   plutôt, on va donc donner des initiales; c'est ce que recommande la

 16   Greffière d'audience. De toute façon, nous allons essayer de les garder au

 17   même endroit, ensemble; c'est ce qui compte.

 18   M. Groome (interprétation): Et nous allons peut-être vous donner une

 19   version vierge de toutes les cartes, de toutes les photos; de cette façon,

 20   vous aurez aussi une version non annotée de tous ces documents.

 21   M. le Président (interprétation): Oui, je pense que nous avons tout ce

 22   qu'il faut pour nous, pour le Collège des Juges.

 23   Est-ce que le Greffe a déjà une copie?

 24   Mme Anoya (interprétation): Je n'ai qu'une copie des versions annotées. Je

 25   préfèrerais avoir la version vierge.

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  1   M. le Président (interprétation): Veillez à ce que le Greffe en dispose.

  2   M. Groome (interprétation): Merci.

  3   M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause. Veuillez

  4   être de retour en audience dans 20 minutes.

  5   (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 54.)

  6   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la

  7   parole.

  8   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je tiens à débattre d'abord

  9   de cette question de huis clos à l'occasion du contre-interrogatoire.

 10   En effet, le témoin a témoigné en public pendant toute la journée d'hier,

 11   et par voie de conséquence, mon droit le plus élémentaire est de le

 12   contre-interroger en public, en session publique concernant les choses

 13   dont il a témoigné en session publique. Parce qu'il est évident qu'il

 14   s'agit ici d'une opération médiatique. J'ai souligné à maintes reprises

 15   que vous intervenez dans un espace médiatique et non pas juridique.

 16   Par conséquent, si lui a eu l'opportunité, hier, de témoigner en public

 17   toute la journée, je pense avoir le droit de le contre-interroger

 18   également en public concernant les choses dont il a témoigné hier. Je

 19   précise que je ne l'interrogerai pas en session publique sur les choses

 20   dont il a témoigné aujourd'hui. Ça, on peut le laisser pour un huis clos,

 21   quoique certaines des questions soulevées aujourd'hui, ont été soulevées

 22   hier également, mais on resterait dans le cadre de ce qu'il a déjà dit

 23   hier parce que sinon, il ne saurait être question d'égalité des armes, et…

 24   M. le Président (interprétation): Mais pourquoi, Monsieur Milosevic? C'est

 25   ici effectivement un environnement juridique, judiciaire. C'est nous, les

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  1   Juges, qui sommes saisis des moyens de preuve. Si le public entend ces

  2   moyens de preuve ou pas, peut-être que c'est quelque chose qui doit être

  3   dicté par les impératifs de sécurité dont nous avons déjà parlé. Mais nous

  4   allons voir ce que l'accusation a à dire, et puis nous permettrons au

  5   témoin de s'exprimer sur la question.

  6   M. Groome (interprétation): Difficile d'intervenir sur ce point parce que

  7   je ne sais pas trop ce que pense le témoin. Peut-être pourrais-je vous

  8   demander la possibilité d'intervenir après avoir entendu le témoin? Bien

  9   sûr, ce qui nous concerne en premier lieu, c'est la sécurité du témoin et

 10   de sa famille.

 11   M. le Président (interprétation): Monsieur Dulovic, l'accusé demande

 12   l'autorisation de procéder au contre-interrogatoire en audience publique

 13   pour ce qui est des questions qui ont été évoquées par vous hier, en

 14   audience publique, dans le cadre de votre déposition.

 15   Nous avons décidé que votre témoignage serait entendu à huis clos vu les

 16   menaces proférées à l'encontre de votre femme. Si nous passions en

 17   audience publique, ce serait uniquement à cause de l'oralité des débats,

 18   mais il y a bien sûr les impératifs de sécurité qui doivent prévaloir.

 19   (Les Juges se concertent sur le siège.)

 20   Monsieur Dulovic, après mûre réflexion nous n'allons pas demander votre

 21   avis sur la question. Nous concluons que c'est un sujet sur lequel il

 22   revient à nous, Juges, d'intervenir.

 23   Nous allons rester à huis clos.

 24   Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

 25   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, étant donné le fait que je

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  1   veuille démentir en totalité les dires de ce témoin, et je précise bien en

  2   totalité, je crois qu'il est porté préjudice aux intérêts de la justice

  3   par votre décision de ne pas le faire en public.

  4   M. le Président (interprétation): Nous allons être saisis de votre

  5   contestation. Après tout, c'est nous qui sommes les Juges et personne

  6   d'autre! Ce qui veut dire que les intérêts de la justice ne sont pas mis à

  7   mal. Nous avons déjà rendu notre décision à ce propos.

  8   Voulez-vous commencer votre contre-interrogatoire?

  9   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, vous n'ignorez pas que les

 10   procès à huis clos font partie d'un passé lointain. Et je tiens à le

 11   souligner de façon très nette.

 12   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, soyez conscient de

 13   la gravité des menaces portées contre la famille de ce témoin. Le Tribunal

 14   prend très au sérieux le devoir qu'il a de protéger le témoin.

 15   Commencez votre contre-interrogatoire, et arrêtez de polémiquer, s'il vous

 16   plaît!

 17   (Contre-interrogatoire du témoin, M. Jovan Dulovic, par l'accusé M.

 18   Milosevic.)

 19   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, c'est très bien, Monsieur May.

 20   Monsieur Dulovic, vous avez derrière vous une carrière professionnelle

 21   assez longue, une carrière professionnelle de journaliste. Avez-vous, à

 22   quelque moment que se soit, pris lecture d'une phrase lucide d'un Allemand

 23   renommé à savoir Otto von Bismark qui a dit: "On ment le plus avant les

 24   élections, pendant la guerre et après la chasse." (Fin de citation.)

 25   M. le Président (interprétation): Non, non. Ce n'est pas une question

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  1   pertinente.

  2   M. Milosevic (interprétation): Je pense que ce que nous avons entendu

  3   pendant une journée et demie, ici, démontre bien la pertinence et

  4   l'exactitude de ce dont j'ai déjà donné citation tout à l'heure.

  5   Monsieur Dulovic, vous avez fait deux dépositions: une en octobre 2001 et

  6   une autre cinq ans avant, au mois de mai 1996, c'est bien exact?

  7   M. Dulovic (interprétation): Oui.

  8   Question: Je vais maintenant vous donner lecture de ce qui est dit dans

  9   les deux premières pages de votre déposition de l'année 2001. Ensuite, je

 10   vous poserai des questions à ce sujet.

 11   Je vais sauter les parties qui relatent vos rencontres avec le Bureau du

 12   Procureur, et ainsi de suite. Vous dites: "Début août 2001, à Belgrade, on

 13   a tué un officier de la sécurité d'Etat, hautement gradé, Momir

 14   Gavrilovic. On a longuement parlé de cela en Serbie; on a dit qu'il avait

 15   été tué parce qu'il est allé chez le Président Kostunica et lui a dévoilé

 16   des informations concernant la corrélation entre la sécurité de l'Etat et

 17   la maffia.

 18   Je suis également convaincu du fait que Gavrilovic a été tué parce qu'il a

 19   raconté à Kostunica des faits concernant des maffiosi réputés et leurs

 20   liens avec la sécurité d'Etat, puis concernant les échanges et la

 21   corruption généralisée qui se faisait présente.

 22   Et M. Mihajlovic, ministre de l'Intérieur, a publié, dans une émission de

 23   télévision, les noms de criminels réputés et les liens possibles qu'ils

 24   avaient avec la sécurité d'Etat. Il y avait Sreten Lukic Luka de l'équipe

 25   de Svezdera, puis Ljubisa Buha, surnommé "Cume", le chef du clan de Surcin

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  1   en Serbie.

  2   Dans cette même émission, le chef de la police à Belgrade, Bosko Buha, et

  3   le chef de la police à Novi Sad, le dénommé Knezevic, ont été mentionnés

  4   comme étant des personnes qui avaient des relations avec la maffia. On dit

  5   que Kostunica était devenu complètement fou lorsqu'il a vu ce programme.

  6   Zoran Djindjic, le Premier ministre actuel, et son démocratique avaient

  7   demandé que la note strictement confidentielle soit envoyée au Bureau du

  8   Procureur. Rien n'a été publié avant que Mihaljovic n'ait révélé les noms.

  9   On sait très bien à Belgrade qu'entre Kostunica et Djindjic, il y a un

 10   conflit autour de la sécurité d'Etat et des liens avec la maffia, ainsi

 11   que concernant les liens entre le crime organisé et certains membres du

 12   gouvernement.

 13   La réunion du DOS, dans la nuit du 28 au 29 août 2001, a duré toute la

 14   nuit. Je sais que le sujet de la réunion avait été la sécurité d'Etat et

 15   les liens avec la maffia. Je crois véritablement que la question sera

 16   résolue par des moyens politiques.

 17   Un certain temps après le meurtre de Gavrilovic, j'ai compris que je

 18   l'avais connu. Pendant la guerre en Croatie, en 1991, je l'avais rencontré

 19   à plusieurs endroits dans la région de Vukovar. L'un des endroits où

 20   j'avais rencontré Gravilovic avait été ce centre de formation à Erdut, ce

 21   centre d'entraînement à Erdut; il avait été avec "Arkan". Momir Gavrilovic

 22   s'était présenté comme étant un colonel de la JNA dénommé Peric; il

 23   portait un uniforme de camouflage de la JNA. Cela est arrivé avant la

 24   chute de Vukovar.

 25   Après que Gavrilovic a été tué, ces photographies ont été publiées dans

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  1   les médias et je l'ai immédiatement reconnu comme étant la personne qui

  2   s'était présentée à l'époque comme étant le colonel Peric. C'est à partir

  3   de sources fiables que j'ai appris que des membres de la sécurité d'Etat,

  4   pendant la guerre, avaient travaillé comme instructeurs des membres de la

  5   Défense territoriale et des forces paramilitaires qui souvent n'étaient

  6   pas formées du tout. Ils se trouvaient là-bas pour empêcher le chaos et

  7   pour remettre de l'ordre dans certains endroits où ils avaient travaillé

  8   comme instructeurs."

  9   Puis, plus loin, vous dites…

 10   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je pense qu'il vous

 11   faut poser une question. Je ne vous ai pas encore interrompu, mais vous

 12   êtes censé poser des questions, vous n'êtes pas censé lire des extraits

 13   considérables de la déclaration préalable. Quelle est la question que vous

 14   voulez poser à ce témoin?

 15   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je devrai donner lecture de

 16   quelques passages encore.

 17   Vous parlez ensuite de l'existence de liens entre les membres actuels de

 18   la DB et la maffia. Et "ils ont du beurre sur la tête", comme vous le

 19   dites. Et vous dites qu'Untel dépense 100.000 marks allemands par mois

 20   pour ses gardes du corps, et tout le monde se pose la question de savoir

 21   qui paie cela. On avait parlé de traitements privilégiés du fait du

 22   commerce de cigarettes; vous dites que Zoran Djindjic est une personne

 23   dangereuse, etc.

 24   Et vous estimez qu'il n'y aura pas de danger de putsch militaire parce que

 25   personne n'est assez fort pour le faire. Vous avez également dit que le

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  1   chef de l'état-major, Pavkovic, était un petit homme bagarreur.

  2   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, tout ceci concerne

  3   la politique actuelle et, pour autant que je puisse le juger, ceci n'a

  4   aucun rapport avec l'Acte d'accusation. Je vous demande de poser une

  5   question pertinente.

  6   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je voulais précisément le dire.

  7   Qu'est-ce que tout ceci a à voir avec moi-même? Et est-ce qu'il devient

  8   clair désormais que la partie d'en face fait des intrigues politiques,

  9   vaque à des intrigues politiques et fait des constatations, des

 10   manipulations?

 11   M. le Président (interprétation): Le témoin n'est pas à même de dire ce à

 12   quoi participe le Bureau du Procureur ou pas. Il n'en demeure pas moins

 13   que ceci n'a aucun rapport et est sans aucun intérêt pour ce procès.

 14   Si vous voulez poser une question pertinente à ce propos, libre à vous de

 15   le faire, bien sûr. Cependant, nous n'allons pas tenir compte de ce qui

 16   sera dit. Si vous voulez demander au témoin pourquoi ceci figure dans la

 17   déclaration préalable, faites-le, allez-y.

 18   M. Milosevic (interprétation): C'est précisément ce que je suis en train

 19   de lui demander, Monsieur. Je suis en train de lui demander de quoi il

 20   s'agit. Je demande s'il est clair qu'il s'agit ici de manipulations

 21   politiques et non pas d'un procès.

 22   M. le Président (interprétation): Ce n'est pas véritablement une question.

 23   Monsieur Dulovic, vous venez d'entendre ces passages qui viennent d'être

 24   lus par l'accusé. Il vous demande maintenant comment il se fait que ces

 25   passages figurent dans la déclaration préalable. Pouvez-vous nous aider

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  1   sur ce point puisque, apparemment, ceci est sans le moindre rapport avec

  2   le présent procès? Pouvez-vous nous aider là-dessus ou pas?

  3   M. Dulovic (interprétation): Je l'ai relaté. J'avais l'impression que le

  4   Bureau du Procureur avait été intéressé par ces questions là, donc j'avais

  5   raconté ce que j'ai ouï dire. Maintenant, de là à savoir si cela a quelque

  6   chose à avoir avec l'affaire ici présente, je ne le dirai pas.

  7   M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, ne pensez-vous pas que,

  8   partant de leur impression, les journalistes créent des événements à

  9   l'intention du public et ce, par conviction politique parfois, parfois par

 10   intérêt économique et très souvent au détriment de la vérité même?

 11   M. Dulovic (interprétation): Cela se peut.

 12   Question: Votre collègue qui est venu témoigner avant vous, M.

 13   Anastasijevic, travaille pour le même journal, a soir pour le journal

 14   "Vreme". Savez-vous que dans notre pays, il est une conviction assez

 15   répandue disant que ce journal n'est qu'un service des agences qui ont

 16   oeuvré au démantèlement de la Yougoslavie? Et la rédaction de ce journal

 17   "Vreme" est pratiquement la seule rédaction qui s'efforce de prouver en

 18   totalité la culpabilité des Serbes pour cette guerre; cela ne fait que

 19   confirmer le fait que cette rédaction oeuvre en faveur de ceux qui ont

 20   travaillé au démantèlement de la Yougoslavie?

 21   Réponse: Je ne le sais pas.

 22   Question: Mais est-ce que vous pouvez dire de vous-même que vous êtes un

 23   témoin impartial lorsque vous décrivez les événements survenus sur le

 24   territoire de l'ex-Yougoslavie et lorsque vous venez témoigner ici devant

 25   le Tribunal?

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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Bien. Mais n'est-il pas clair ou n'est-il pas évident que dans

  3   votre témoignage, vous vous référer constamment à des entretiens, à ce que

  4   d'autres vous ont dit? Par conséquent, la plupart de votre témoignage ne

  5   consiste pas en témoignage concernant des faits, mais concernant des

  6   choses dont vous avez entendu parler de la bouche des autres et partant de

  7   vos positions politiques? N'est-ce pas bien là la vérité?

  8   Réponse: Non.

  9   Question: Donc vous avez décrit qu'untel vous a dit ceci, que vous avez

 10   déjeuné avec untel, que vous étiez en présence de dix personnes et qu'à

 11   tel endroit, l'une de ces personnes à dit telle chose… Donc vous parlez de

 12   ouï-dire. Avez-vous vu personnellement un meurtre quelconque? Avez-vous vu

 13   personnellement la perpétration de quelque crime dont il est question ici

 14   et dont vous avez donné description hier et aujourd'hui?

 15   Réponse: Non.

 16   Question: Serait-il exact de dire, Monsieur Dulovic, que vous avez été

 17   collaborateur ou collaborateur des services de sécurité d'Etat?

 18   Réponse: Non.

 19   Question: Serait-il exact de dire que vous avez ramassé, sur les champs de

 20   bataille, des lance-roquettes Zolja et que vous vous étiez vanté du fait

 21   de ne pas savoir vous-même combien de Zolja vous aviez dans votre

 22   appartement?

 23   Réponse: C'est tout à fait inexact, c'est une bêtise.

 24   Question: Monsieur Dulovic, avez-vous, à quelque moment que ce soit, été

 25   prison?

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  1   Réponse: Non.

  2   Question: Vous n'avez jamais été mis aux arrêts?

  3   Réponse: Non.

  4   Question: Est-ce que quiconque a fait obstacle à l'exercice de votre

  5   profession de journaliste?

  6   Réponse: Je n'arrive pas m'en rappeler. Est-ce que vous pouvez me poser

  7   une question plus précise, concernant ce que vous avez à l'esprit?

  8   Question: Mais, de manière générale, vous avez exercé une profession de

  9   journaliste, aussi voudrais-je savoir si quelqu'un dans les pouvoirs

 10   publics, les autorités, avait fait entrave à l'exercice de votre

 11   profession de journaliste. Avez-vous eu à subir des conséquences

 12   négatives, suite à l'exercice du métier que vous faisiez?

 13   Réponse: Eh bien, le plus souvent, le problème pour les journalistes,

 14   c'était que les sources d'information étaient plutôt fermées; c'était

 15   peut-être là le seul obstacle auquel nous ayons eu à faire face.

 16   Question: Je n'ai pas très bien compris quelle a été la finalité de votre

 17   explication, de l'explication que vous avez fournie vers la fin de votre

 18   interrogatoire principal, à savoir que j'avais eu un entretien

 19   téléphonique avec Slobodan Jovanovic, votre rédacteur en chef. Vous avez

 20   dit que cela avait eu lieu après les conflits et ainsi de suite. Donc je

 21   ne vois pas ce qu'il y a à redire.

 22   Vous n'ignorez pas que Slobodan Jovanovic était un haut responsable de

 23   socialiste de Serbie; il avait été à la tête du comité municipal de la

 24   ville de Belgrade pendant un certain temps. Donc est-ce que j'aurais fait

 25   des commentaires sur le fonctionnement du journal ou constatez-vous

Page 11771

  1   seulement que j'avais eu un entretien téléphonique avec le rédacteur en

  2   chef?

  3   Réponse: Oui, j'ai parlé des liens étroits.

  4   Question: Donc, partant de cet entretien téléphonique, vous faites une

  5   appréciation au terme de laquelle j'aurais été en relation étroite?

  6   Réponse: Il n'y a pas que cela; à la 8e session, c'est l'un des hommes qui

  7   avaient été de votre côté.

  8   Question: Bien entendu, j'ai bien précisé qu'il avait été un haut

  9   responsable du Parti socialiste de Serbie à l'époque où cet entretien a eu

 10   lieu.

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Et donc, vous lui reprochez quelque chose; aurait-il perpétré

 13   quelque crime, aurait-il fait quelque chose d'inapproprié?

 14   Réponse: Oui. D'inapproprié.

 15   Question: Qu'y a-t-il d'inapproprié dans ce qu'il a fait?

 16   Réponse: Il a publié dans ces journaux les mensonges les plus immenses, du

 17   style: à Mirkovci, on a retrouvé un tonneau d'yeux serbes qui servaient à

 18   la fabrication de Bourek pour les Oustachis". Ce sont des bêtises des plus

 19   ordinaires, et c'est de la propagande pure et simple.

 20   Question: S'agissant de propagande, vous n'ignorez probablement pas le

 21   fait que la plus grosse propagande a été conduite par les journaux

 22   d'opposition, alors que ceux qui étaient sous le contrôle de l'état,

 23   s'efforçaient d'être modérés. Et vous autres, écriviez tout ce qui vous

 24   venait à l'esprit!

 25   Dites-moi, je vous prie, étant donné que dans votre déposition il est fait

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  1   état des événements à Vukovar, il est fait état de votre séjour là-bas et

  2   -comme vous le dites- il est question de comportements inadmissibles de

  3   violence, pensez-vous qu'un événement puisse être considéré de façon

  4   isolée, en étant arraché du contexte auquel il appartient, comme vous le

  5   faites à l'occasion de votre témoignage?

  6   Réponse: C'est seulement l'un des exemples.

  7   Question: Monsieur Dulovic, je suppose que vous savez vous-même qu'il n'y

  8   a pas de guerre pire que la guerre civile, et que rien ne serait être

  9   amélioré à ce sujet, et ceux qui tiennent à faire du bien, peuvent faire

 10   leur maximum pour mettre un terme à cette guerre et rien d'autre? Est-ce

 11   que vous comprenez cela?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: Et savez-vous que, pendant tout ce temps-là, la politique de la

 14   Serbie avait été de faire mettre un terme à la guerre, à tout prix?

 15   Réponse: Cela avait été un mensonge des plus ordinaires; un mensonge parce

 16   que la Serbie avait conduit une guerre… ou plutôt c'est vous qui aviez

 17   conduit cette guerre.

 18   Question: Monsieur Dulovic, je pense que vous devez savoir que la Serbie

 19   n'était en guerre ni avec la Croatie ni avec la Bosnie-Herzégovine. Vous

 20   avez témoigné du fait que notre police ne laissait passer personne avec

 21   des armes sur le territoire de la Serbie en traversant la Drina. C'est

 22   l'exemple que vous avez donné. Par conséquent, s'il était exact de dire

 23   que c'était des hommes qui étaient envoyés par la Serbie là-bas, il serait

 24   logique que la Serbie leur permette de revenir. Cela est-il logique ou

 25   pas?

Page 11773

  1   Réponse: Cela n'est pas logique.

  2   Question: Vous avez dit qu'en mai 1991 vous avez voyagé dans la Slavonie

  3   et que vous avez vu des soldats s'amonceler à bon nombre d'endroits. Est-

  4   ce que vous savez nous dire pour quelles raisons ces soldats, ces

  5   effectifs, se ramassaient-ils ou se réunissaient-ils ou se réunissaient-

  6   ils là-bas?

  7   Réponse: Je ne sais pas.

  8   Question: En votre qualité de journalistes, avez-vous eu vent des

  9   pressions énormes exercées contre la JNA sur le territoire entier de la

 10   Croatie? Avez-vous eu vent des attaques lancées contre les casernes? Avez-

 11   vous eu vent des meurtres de soldats, et l'impossibilité d'aboutir à un

 12   accord quelconque pour mettre un terme à ces violences?

 13   Réponse: Je n'ai pas vu cela, je ne le sais pas.

 14   Question: Monsieur Dulovic, dans votre déclaration préalable, vous

 15   mentionnez une ligne militaire ou une filière militaire au sein du

 16   ministère de l'Intérieur. Vous précisez que pour ce qui est de cette

 17   "vojna linija", "filière militaire", au sein du ministère de l'Intérieur,

 18   il y avait Zivota Panic, Mihalj Kertes, Jovica Stanisic, Franko Simatovic,

 19   Radmilo Bogdanovic, Radovan Stojicic -c'est tout ce qui est dit ici, en

 20   page 2 de votre première déposition ou de la première de vos déclarations

 21   préalables- et que cela a été mis en place en 1990.

 22   Puis, hier -en fait, la page 1 c'est la page 2-, Monsieur le Témoin,

 23   Monsieur Dulovic, parce que je vous vois feuilleter les pages. Je fais

 24   souvent cette erreur parce que la première page, ici, c'est la page de

 25   garde et c'est à la page 2 que votre déposition commence.

Page 11774

  1   Donc dans la page où on dit "Déclaration du témoin", vers le milieu, on

  2   dit que "Cela a été mis en place en 1990, cette filière militaire, au sein

  3   du ministère de l'Intérieur".

  4   Je vous prie de m'expliquer ce qui suit. Lorsque vous avez été interrogé

  5   hier concernant ces filières militaires, vous avez apporté une explication

  6   disant qu'il s'agissait là de personnes qui avaient fait des études à

  7   l'Académie militaire et qui étaient devenus membres du MUP?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Un petit nombre de ces membres du MUP avaient effectivement fait

 10   des études à l'Académie militaire, mais ce nombre était très petit. En

 11   général, les positions clés étaient occupées par des gens qui avaient fait

 12   des études de droit et des études à d'autres facultés de sciences

 13   sociales.

 14   Mais prenons, par exemple, le fait que Zivota Panic, général, n'a jamais

 15   travaillé au MUP. Il a tout le temps été dans l'armée, il a même été chef

 16   de l'état-major pendant un certain temps, et par la suite il est parti à

 17   la retraite; Mihalj Krtes n'a également pas fait d'études à l'Académie

 18   militaire, c'est un intervenant dans les affaires sociales; Jovica

 19   Stanisic qui a le plus longtemps été chef de la sécurité d'état de Serbie

 20   n'a pas fait du tout ses études à l'Académie militaire; Franko Simatovic,

 21   également; Bogdanovic, non plus n'a pas été à l'Académie militaire;

 22   Radovan Stojicic, non plus.

 23   Donc aucun de ceux-là ne fait partie de l'explication que vous avez

 24   fournie concernant les personnes qui avaient fait des études à l'académie

 25   militaire et qui avait, par la suite, travaillé au sein du MUP. Par

Page 11775

  1   conséquent, ce que vous avez affirmé est bien inexact, n'est-ce pas,

  2   Monsieur Dulovic?

  3   Réponse: Vous avez mal compris. J'ai parlé hier de personnes qui se

  4   trouvaient sur le terrain. Et ici, il est question de ceux qui se

  5   trouvaient au sommet. J'ai souligné que j'ai ouï-dire la chose de la

  6   bouche d'un homme qui était censé savoir.

  7   Question: Donc, si vous avez entendu cela de la bouche de quelqu'un qui

  8   était censé le savoir, la question qui se pose, c'est de savoir si,

  9   effectivement, il le savait puis s'il disait la vérité, et puis, si vous

 10   dites la vérité d'avoir ouï-dire cela.

 11   Donc il y a plusieurs points d'interrogation à poser avant que de faire un

 12   témoignage et de prendre en considération, prendre au sérieux un

 13   témoignage de cette nature. Est-ce que vous êtes conscient de ce fait?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: De la bouche de quel homme, avez-vous entendu cela, Monsieur

 16   Dulovic?

 17   Réponse: Je ne veux pas dire son nom.

 18   Question: Etant donné que ceci est mensonge des plus absolus, je voudrais

 19   que vous m'expliquez comment ils intervenaient? Etant donné qu'il y avait

 20   là une filière militaire, dites-nous comment elle intervenait?

 21   Réponse: Je ne me suis pas aventuré à l'analyser.

 22   Question: Donc, vous affirmez qu'il existait une filière militaire, dans

 23   le cadre d'une déclaration très peu fondée. Mais savez-vous qu'à l'époque,

 24   les Républiques –d'ailleurs, cela a continué par la suite- n'avaient

 25   aucune compétence, n'avaient pas prééminence sur l'armée populaire

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  1   yougoslave? Ou bien était-il possible qu'elles aient une quelconque

  2   compétence en la matière?

  3   Réponse: Je ne sais pas.

  4   Question: Vous ne savez pas?

  5   Réponse: Non.

  6   M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur Dulovic.

  7   M. Robinson (interprétation): Un instant, je vous prie, Monsieur Dulovic.

  8   Je demande aux interprètes s'il est possible de traduire l'expression

  9   "vojna linija"?

 10   M. Milosevic (interprétation): Military line.

 11   M. Robinson (interprétation): Merci.

 12   M. Milosevic (interprétation): Je pensais que c'était ainsi que les

 13   interprètes l'avaient traduit, je n'ai pas regardé le compte rendu sur

 14   l'écran.

 15   Monsieur le Témoin, vous dites qu'en juillet et août 1991, vous étiez à

 16   Borovo Selo, dans les environs immédiats de Vukovar, et vous dites avoir

 17   visité une prison à cet endroit. Vous avez décrit un garde qui vous aurait

 18   montré la façon dont, dans cette prison, les gardes chantaient "Qui dit

 19   cela, qui ment, etc.", et cet autre chant qui traite d'un voïvodat, donc

 20   d'un chef. Ne vous semble-t-il pas que nous sommes là en présence

 21   d'anecdotes que quelqu'un pourrait raconter dans un bar en Serbie?

 22   M. Dulovic (interprétation): Malheureusement, ce n'est pas une anecdote,

 23   c'est la vérité.

 24   Question: C'est ce que vous dites.

 25   Réponse: Non, ce n'est pas ce que je dis; c'est ce que j'ai vu, c'est ce

Page 11777

  1   que j'ai entendu.

  2   Question: Il aurait fallu que quelqu'un d'autre, en dehors de vous,

  3   l'entende également pour qu'il puisse être prouvé que des choses de ce

  4   genre ont existé.

  5   Réponse: Oui, beaucoup l'ont entendu.

  6   Question: Pouvez-vous nous donner le nom d'une personne qui aurait vu ou

  7   entendu cela?

  8   Réponse: Je ne connais aucun nom.

  9   Question: Je vous demanderai alors, bien que je ne croie pas un mot de ce

 10   que vous dites, si vous avez vu, près de cette prison, un quelconque

 11   soldat de la JNA ou, par exemple, un policier de Serbie ou de Yougoslavie?

 12   Réponse: Non.

 13   Question: Combien de temps êtes-vous resté à Borovo Selo? Ou plutôt, pour

 14   commencer, savez-vous ce qui s'est passé à Borovo Selo?

 15   Réponse: J'en ai entendu parler, j'ai entendu des bruits, mais je ne sais

 16   pas.

 17   Question: Vous ne savez pas?

 18   Réponse: Non.

 19   Question: En tant que journaliste qui a passé quelque temps à Borovo Selo,

 20   avez-vous confirmé ce que le ministre de l'Intérieur de Croatie de

 21   l'époque, Josip Boljkovac, a lui-même confirmé; quelque chose qui, sept

 22   ans plus tard, en décembre 1998, a été admis: à savoir que ce sont des

 23   représentants du MUP de Croatie qui ont provoqué l'effusion de sang vécue

 24   à Borovo Selo?

 25   Réponse: Je n'ai jamais entendu parler de cela.

Page 11778

  1   Question: Bien. Savez-vous que Boljkovac lui-même a dit que des

  2   représentants du MUP de Croatie étaient entrés à Borovo Selo, y avaient

  3   provoqué un conflit, avaient arraché le drapeau et des choses de ce genre?

  4   Réponse: Je ne sais rien de tout cela.

  5   Question: Savez-vous que ce même ministre de l'Intérieur de Croatie,

  6   Boljkovac, a dit qu'une attaque au mortier sur Borovo Selo commandée par

  7   Gojko Susak et Vice Vukojevic, avait été la cause de la guerre?

  8   Réponse: Non.

  9   M. Milosevic (interprétation): Ça, vous ne savez pas non plus? Savez-vous

 10   qu'il a été dit que cette attaque avait pour but de rendre impossible la

 11   division pacifique de la Yougoslavie, à savoir qu'il ne s'agissait pas

 12   d'un incident mais bien d'une action, d'une opération préparée...

 13   M. le Président (interprétation): Le témoin a déjà répondu. Aucune raison

 14   de continuer.

 15   M. Milosevic (interprétation): J'interroge le témoin parce qu'il est

 16   journaliste et qu'il s'intéresse à cela. Donc c'est dans "Globus" de

 17   Croatie, en date du 18 mai 1991 que tout ce que je viens de dire a été

 18   publié.

 19   M. le Président (interprétation): Vous pouvez produire ce document en

 20   temps utile à l'intention du Tribunal, mais il ne sert à rien de continuer

 21   à interroger le témoin sur ce point.

 22   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, ce témoin témoigne d'une

 23   petite partie d'un événement qu'il sort de leur contexte, à savoir les

 24   horreurs qui sont arrivées à Vukovar. Je lui demande donc s'il connaît

 25   l'origine du conflit dont il a parlé, s'il sait quelle a été l'intensité

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  1   de ce conflit, combien de victimes ce conflit a fait, de façon à faire la

  2   clarté sur le prétendu rôle de l'armée yougoslave, l'armée populaire

  3   yougoslave, dans ce conflit.

  4   M. le Président (interprétation): Mais alors, posez-lui d'autres

  5   questions. Cela ne sert à rien de l'interroger sur quelque chose dont il

  6   ne sait rien.

  7   M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Témoin, pouvez-vous me dire si

  8   durant votre séjour à Vukovar, à Borovo Selo par exemple, enfin dans cette

  9   région, si durant votre séjour à cet endroit vous avez vu l'armement du

 10   HDZ, c'est-à-dire du parti au pouvoir en Croatie qui a été armé grâce à

 11   des armes mais aussi a reçu de la dynamite destinée à faire sauter les

 12   maisons serbes, les commerces dont les propriétaires étaient des Serbes? A

 13   Borovo Selo, par exemple, là où vous vous êtes trouvé vous-même, ils ont

 14   fait sauter…

 15   M. le Président (interprétation): Permettez au témoin de répondre d'abord

 16   à l'aspect général de la question.

 17   M. Dulovic (interprétation): Je n'étais pas là à ce moment-là, donc je

 18   n'ai pas vu les représentants du HDZ. Je ne sais rien au sujet de ce que

 19   l'accusé est en train de dire.

 20   M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous savez que le restaurant

 21   "Sarajka", dont le propriétaire était Josip Pesic, un Serbe de Borovo

 22   Selo, savez-vous que ce restaurant avait sauté, avait explosé en raison

 23   d'une intervention de ces représentants du HDZ? Je vous demande cela parce

 24   qu'il y a beaucoup de choses dont vous avez parlé dans votre témoignage et

 25   dont vous ne savez rien. Vous n'avez fait qu'en entendre parler.

Page 11780

  1   Réponse: Non, je n'ai pas entendu parler de cela.

  2   Question: Vous dites que vous évitiez d'utiliser le terme "oustachi",

  3   n'est-ce pas, Monsieur?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Savez-vous que les auteurs des crimes perpétrés dans les

  6   environs de Vukovar se dénommaient eux-mêmes, se désignaient eux-mêmes

  7   sous le terme de "Oustachis" et ils en étaient fiers?

  8   Réponse: Je ne sais rien de cela.

  9   Question: Vous n'en avez jamais entendu parler?

 10   Réponse: Non.

 11   Question: Très bien. Vous expliquez qu'en septembre, octobre et novembre

 12   1991, les bombardements étaient incessants sur Vukovar. Combien de temps

 13   êtes-vous resté à Vukovar?

 14   Réponse: Trois mois pratiquement, trois mois pleins.

 15   Question: Savez-vous quelle a été la cause du conflit de Vukovar?

 16   Réponse: Je n'y étais pas au début.

 17   Question: Avez-vous entendu dire qu'une décision était prise en février

 18   1991, qui portait sur le nettoyage ethnique de Vukovar, et que cette

 19   décision a été prise lors d'une réunion d'une section locale du HDZ,

 20   section du HDZ d'un village voisin de Borovo Selo. Est-ce que vous avez

 21   entendu parler de cela? Le village s'appelle Trpinska Cesta.

 22   Réponse: Non.

 23   Question: Avez-vous entendu parler de Mercep Glavas, qui a organisé cette

 24   action sur le territoire de Vukovar?

 25   Réponse: Ces noms me disent quelque chose dans ce contexte, mais je n'ai

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  1   fait qu'entendre des noms.

  2   Question: Très bien. Savez-vous qu'il a été décidé de licencier tous les

  3   Serbes de leur emploi lorsqu'ils avaient des postes importants, qu'il a

  4   été décidé de les intimider, de les forcer à partir et que ceux qui ne

  5   partiraient pas devaient être liquidés selon cette décision prise par

  6   Zagreb? Etes-vous au courant de cela?

  7   Réponse: Non.

  8   M. Milosevic (interprétation): Savez-vous que, dès le mois de février

  9   1991, une section locale du HDZ dans les environs de Borovo Selo a créé

 10   plusieurs sous-sections dans les villages voisins, au mois de mars 1991?

 11   J'ai des informations précises: le 10 mars, cette décision a été appliquée

 12   à Bratsvo et elle a été ensuite appliquée dans d'autres villages des

 13   environs de Borovo Selo. La communauté locale "Unité et fraternité" a donc

 14   pris cette décision dans un village proche de Borovo Selo. Il était

 15   question de liquider les Serbes.

 16   M. Dulovic (interprétation): Non.

 17   M. le Président (interprétation): Je vais arrêter ceci. Il ne sert à rien

 18   de poser ces questions au témoin puisqu'il ne sait rien à ce sujet. Cela

 19   n'apporte rien d'ailleurs à ce procès.

 20   Monsieur Milosevic, vous pourrez en temps utile présenter vos propres

 21   témoins pour présenter ces arguments mais, pour l'instant, dans ce contre-

 22   interrogatoire, nous perdons notre temps.

 23   M. Milosevic (interprétation): J'espère, Monsieur May, que vous me

 24   donnerez au moins suffisamment de temps pour terminer ce contre-

 25   interrogatoire, autant de temps que l'accusation en a eu.

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  1   Monsieur le Témoin, pouvez-vous me dire si vous connaissez, si vous avez

  2   eu connaissance d'une inspection des formations paramilitaires de la

  3   République de Croatie, en mars 1991, dans ce secteur précisément?

  4   M. le Président (interprétation): Je vais arrêter ces questions.

  5   Monsieur Dulovic, est-ce que vous pouvez nous aider sur le point suivant:

  6   savez-vous ce que les Croates faisaient à l'époque, s'ils organisaient des

  7   rencontres d'une sorte ou d'une autre, ou quoi que ce soit en rapport avec

  8   ce sujet.

  9   M. Dulovic (interprétation): Je ne sais rien à ce sujet.

 10   M. Milosevic (interprétation): Savez-vous quoi que ce soit au sujet du

 11   nettoyage ethnique des environs de Borovo Selo, donc des petits villages

 12   constituant les environs de Borovo Selo, qui ensuite s'est étendu à

 13   d'autres secteurs de la municipalité de Vukovar? Avez-vous la moindre

 14   information à ce sujet?

 15   M. Dulovic (interprétation): Non.

 16   Question: Savez-vous que le Dr Rade Popovic, le directeur de l'hôpital de

 17   Vukovar, a été remplacé par Vesna Bosanac? Avez-vous des informations à ce

 18   sujet?

 19   Réponse: Je sais. Oui, j'ai entendu dire que Vesna Bosanac était le

 20   directeur de l'hôpital, mais je n'ai pas entendu ce que vous dites.

 21   M. Milosevic (interprétation): Ne vous paraît-il pas anormal de ne rien

 22   savoir du pogrom vécu par les Serbes et des attaques contre l'armée, alors

 23   que les seules choses que vous savez…

 24   M. le Président (interprétation): Ceci n'est qu'un commentaire; ce sont

 25   des arguments à vous, c'est votre thèse qui consiste à dire qu'il existait

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  1   un programme, une politique particulière. Personne d'autre n'en a parlé

  2   ici. Donc il est absurde d'interroger le témoin pour qu'il critique

  3   quelque chose au sujet de quoi il ne sait rien.

  4   Pourrions-nous avoir des questions que ce témoin pourrait traiter, s'il

  5   vous plaît? Vous pouvez continuer à l'interroger sur l'hôpital et sur ce

  6   qu'il a vu se passer à l'hôpital.

  7   M. Milosevic (interprétation): Nous y viendrons.

  8   Mais, Monsieur le Témoin, savez-vous qu'une grande partie de la population

  9   croate, notamment des femmes, des enfants, des civils, etc., a été évacuée

 10   de Vukovar alors que les Serbes n'ont pas reçu l'autorisation de quitter

 11   la ville?

 12   M. Dulovic (interprétation): Je ne sais pas ce qui a été fait avant, mais

 13   il y avait de très nombreux Croates, des civils à Vukovar qui se

 14   réfugiaient dans les abris en même temps que les Serbes. Je sais cela car

 15   ce sont des Serbes, alors qu'ils étaient ensemble avec des Croates dans

 16   ces caves, dans ces abris; ce sont eux qui me l'ont dit.

 17   Question: Eh bien, il y a plusieurs confirmations de ce fait. Souhaitez-

 18   vous avoir sous les yeux le certificat émis par le ministère de la Défense

 19   nationale de la municipalité de Vukovar? On trouve en bas un sceau avec le

 20   damier; et il est écrit la chose suivante: "Certificat autorisant Petar

 21   Kordo de quitter la ville pour se rendre vers Osijek et Zupanja en

 22   provenance de Vukovar", donc des certificats donnés par les autorités

 23   croates. En l'absence d'un tel certificat, les civils ne pouvaient pas

 24   quitter la ville de Vukovar. Savez-vous cela?

 25   M. Dulovic (interprétation): C'est la première fois que j'en entends

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  1   parler.

  2   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je vous demanderai de jeter un

  3   coup d'œil sur un certificat que je vais verser au dossier en tant que

  4   pièce à conviction et j'en ai d'ailleurs plusieurs autres.

  5   M. le Président (interprétation): Oui, je prierai M. l'Huissier d'aller

  6   chercher ce document.

  7   Monsieur Milosevic, je ne crois pas que le témoin puisse dire beaucoup

  8   plus que ce qu'il a déjà dit sur ce sujet. Il a entendu des Serbes lui

  9   dire qu'il y avait des Croates dans les abris. Mais, enfin, remettons ce

 10   document au témoin pour qu'il l'examine.

 11   (Intervention de l'huissier.)

 12   Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

 13   M. Milosevic (interprétation): Savez-vous puisque vous étiez sur place à

 14   l'époque, savez-vous que le commandement suprême de l'armée yougoslave a

 15   déclaré que "la Croatie avait réalisé tout ce qu'elle avait planifié de

 16   faire, que la Croatie avait perpétré des crimes et s'était livrée à des

 17   persécutions massives de Serbes afin de s'emparer de Vukovar et de ses

 18   environs"? Je suppose que vous vous teniez au courant des événements

 19   puisque vous étiez déjà présent sur les lieux.

 20   M. Dulovic (interprétation): Je ne me rappelle pas cela. Tout ce que je

 21   sais, c'est que j'ai parlé avec des gens sur place, et que dans les abris

 22   il y avait des Serbes et des Croates.

 23   Question: Très bien. Mais savez-vous que jusqu'au début des combats pour

 24   s'emparer de Vukovar, plusieurs milliers de personnes de nationalité serbe

 25   ont été tuées?

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  1   Réponse: Je n'ai jamais entendu parler de cela.

  2   Question: Bien. Mais savez-vous -je suppose que tout le monde était au

  3   courant de cela à l'époque- que le 26 juillet 1991, soit un mois après la

  4   décision de sécession de la Croatie, le Président de la Croatie, le

  5   Président Tudjman, a adopté un décret qui démantelait l'assemblée

  6   municipale de Vukovar?

  7   Réponse: Je ne sais rien de cela.

  8   Question: Savez-vous qu'il y avait beaucoup plus de Serbes que de Croates

  9   qui habitaient dans cette municipalité?

 10   Réponse: Je ne connais pas les pourcentages, mais je sais qu'il y avait

 11   des Croates et des Serbes.

 12   Question: Savez-vous que le HDZ, parti du Président Tudjman à l'époque,

 13   lors des premières élections multipartites en Croatie, a perdu très

 14   largement à Vukovar, donc a été battu à Vukovar parce que les habitants de

 15   la ville ont voté en majorité pour la Ligue des communistes de Croatie et

 16   le Parti démocratique serbe?

 17   M. Dulovic (interprétation): Je ne me souviens pas de cela.

 18   M. Milosevic (interprétation): Vous ne vous souvenez pas de cela?

 19   Savez-vous que la dissolution de l'assemblée municipale et les pressions

 20   exercées…

 21   M. le Président (interprétation): Un instant, un instant. Nous allons nous

 22   consulter entre Juges de la Chambre.

 23   (Les Juges se concertent sur le siège.)

 24   Maître Tapuskovic, vous avez la parole.

 25   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

Page 11786

  1   Juges, si je peux vous apporter mon concours pour cette prise de décision,

  2   mais bien sûr, la décision vous appartient seul.

  3   Pourquoi ce qui est en train d'être discuté est si important? Dans la

  4   déclaration préalable du témoin devant les membres du Bureau du Procureur,

  5   au deuxième paragraphe, M. Dulovic dit la chose suivante –je cite-: "A

  6   partir de mai 1991, en compagnie de deux collègues, nous avons visité les

  7   villes et les villages de Slavonie orientale en observant l'évolution des

  8   événements alors que la région s'approchait de la guerre." (Fin de

  9   citation.)

 10   Le témoin a passé plusieurs mois, donc, en permanence dans cette région.

 11   Donc les questions qui viennent d'être posées portaient sur les événements

 12   survenus dans cette région, dans les villes et les villages que le témoin

 13   ne cessait de parcourir pour y observer les événements. Et bien sûr, il

 14   vous appartient de décider si ces questions sont admissibles ou pas, mais

 15   telle est la raison de leur importance. Comment est-il possible que le

 16   témoin ne sache rien des événements dans ces conditions?

 17   M. le Président (interprétation): Oui, oui.

 18   Très bien, Monsieur Milosevic. Vous disposez du même temps que le

 19   Procureur, soit 4 heures et quart.

 20   M. Milosevic (interprétation): Donc jusqu'au milieu de l'audience de

 21   demain matin?

 22   M. le Président (interprétation): Nous verrons comment les choses

 23   avanceront. Mais c'est le temps dont vous disposez, en effet.

 24   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, mon souhait est de montrer à

 25   quel point il est incroyable que le témoin affirme avoir une connaissance

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  1   parfaite de certains crimes survenus plus tard, alors qu'il affirme ne

  2   rien savoir du tout au sujet des événements qui ont précédé ceux dont il

  3   parle, événements qui ont provoqué le conflit, des massacres, des milliers

  4   de personnes.

  5   M. le Président (interprétation): Il a répondu aux questions; il a répondu

  6   de la façon dont il a répondu. De toute façon, le Procureur n'accepte pas

  7   cette thèse. D'ailleurs, nous pourrions revenir devant le Procureur dans

  8   quelques instants pour éviter de perdre du temps.

  9   Je pense qu'il est inutile de demander à tous les témoins qui viennent ici

 10   si un référendum a été organisé et quel a été le résultat du référendum,

 11   etc.; il devrait être possible de s'entendre sur un certain nombre de

 12   faits, ce qui permettrait de gagner du temps.

 13   M. Nice (interprétation): S'agissant de tout cela, nous n'avons que très

 14   peu de contacts avec les collaborateurs de l'accusé; je le fais remarquer.

 15   M. le Président (interprétation): Non, je sais bien cela, mais je veux

 16   dire…, je parle des questions qui ont été posées au témoin aujourd'hui. Je

 17   ne sais pas si, sur certains faits, il ne serait pas possible…

 18   M. Nice (interprétation): Nous pourrons y réfléchir.

 19   M. le Président (interprétation): Vous pourriez faire le tri et mettre de

 20   côté un certain nombre de questions qui, en général, sont posées à tous

 21   les témoins et sur lesquelles ils devraient être capables de s'entendre;

 22   le référendum, par exemple.

 23   M. Nice (interprétation): Nous y avons réfléchi. Il y a un certain nombre

 24   de choses qui ont été reprises plusieurs fois et les Juges pourraient

 25   demander qu'elles ne le soient plus, qu'elles ne soient plus évoquées.

Page 11788

  1   M. le Président (interprétation): Cela nous aiderait qu'il y ait un accord

  2   sur un certain nombre de faits, de façon à ne pas y revenir avec tous les

  3   témoins. Par ailleurs, il est regrettable que nous ne parlions pas

  4   actuellement en public, parce que cette question d'accord sur un certain

  5   nombre de faits pourrait être discutée en public.

  6   M. Nice (interprétation): Nous y réfléchirons.

  7   (Les Juges se concertent sur le siège.)

  8   M. le Président (interprétation): Oui, réfléchissez à cela, de façon à

  9   gagner du temps.

 10   Monsieur Milosevic, j'ai dit au Procureur qu'il pourrait y avoir accord

 11   sur un certain nombre de faits, ce qui permettrait de revenir sur ces

 12   faits avec tous les témoins.

 13   M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur May, mais je n'ai posé

 14   aucune question au sujet du conflit à ce témoin; je parle du conflit de

 15   Vukovar. Comme je l'ai déjà dit, je n'ai jusqu'à présent posé aucune

 16   question au sujet de conflit de Vukovar à d'autres témoins et je n'ai pas

 17   non plus interrogé ce témoin au sujet du référendum et de questions de ce

 18   genre.

 19   Monsieur Dulovic, comme vous l'avez déjà dit, vous avez entendu dire que

 20   Tomislav Mercep avait commis des crimes très graves alors qu'il dirigeait

 21   ces unités. Bien sûr, vous ne savez rien de ces crimes, mais vous avez des

 22   informations au sujet des crimes commis à Vukovar immédiatement avant ces

 23   événements par la 204e Brigade de la Garde nationale sous le commandement

 24   de Mercep, peut-être?

 25   M. Dulovic (interprétation): Non, je n'ai rien vu de tout cela.

Page 11789

  1   M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez rien vu de ce au sujet de quoi

  2   vous témoignez ici?

  3   M. le Président (interprétation): Non. La question, Monsieur le Témoin,

  4   consistait à vous demander si vous aviez entendu parler des crimes commis

  5   par ce groupe. Nous ne savons pas si ces crimes avaient eu lieu ou pas,

  6   mais ça pourrait nous aider d'entendre ce que vous avez à dire à ce sujet.

  7   M. Milosevic (interprétation): Très bien.

  8   M. le Président (interprétation): Ecoutez, formulons les choses de la

  9   façon suivante: des allégations ont été proférées au sujet d'un groupe

 10   ayant commis des crimes, ou plutôt de Croates ayant commis des crimes dans

 11   la région de Vukovar avant le siège, oui ou non?

 12   M. Dulovic (interprétation): Si je me souviens bien, ces noms me disent

 13   quelque chose. Donc je me souviens d'une ambiance négative. Des bruits

 14   couraient, des allégations couraient selon lesquelles des crimes auraient

 15   été commis, mais je ne dispose d'aucune preuve réelle pour confirmer ces

 16   dires. Il est probable que ces choses ont eu lieu, mais je ne me suis pas

 17   penché sur le passé lorsque je suis arrivé à Vukovar; j'ai commencé à

 18   rendre compte de ce que je voyais et entendais à ce moment-là. Je n'ai pas

 19   étudié les événements passés.

 20   M. Milosevic (interprétation): Très bien. Mais puisque ces événements ont,

 21   en tout état de cause, créé une très grande sensation… Ici, nous voyons

 22   une déclaration faite par Marin Vidic, représentant habilité du

 23   gouvernement croate à Vukovar; c'est une déclaration de 52 pages et je ne

 24   vous lirai qu'une demi-page dans cette déclaration. Vous me direz ensuite

 25   si vous avez entendu parler de ce qui est dit dans cette demi-page. Cette

Page 11790

  1   déclaration, au total, fait 52 pages et j'en demanderai le versement au

  2   dossier.

  3   M. le Président (interprétation): Vous ne la verserez pas au dossier. Vous

  4   pouvez appeler l'auteur de ce texte en tant que témoin, mais vous ne

  5   pouvez pas verser la déclaration au dossier aujourd'hui.

  6   M. Milosevic (interprétation): Très bien.

  7   Ecoutez ce que dit ce représentant habilité de la Croatie pour Vukovar à

  8   la fin de 1991, déclaration de 52 pages de long. Il dit: "L'action pour

  9   Borovo Selo a commencé au mois de juillet; je ne peux pas affirmer

 10   exactement quel jour. Je savais que l'opération aurait lieu et Zadro

 11   Blago, qui dirigeait cette action, nous a informés de cela. Moi, je

 12   faisais partie du secrétariat à la Défense nationale, et Mercep dirigeait

 13   cette action et qui était en contact avec Blago Zadro grâce à un téléphone

 14   Motorola.

 15   Blago Zadro est venu nous voir au secrétariat, aux environs de 22 heures;

 16   il nous a informés que l'action de Borovo Naselje avait été très

 17   fructueuse, qu'il n'y avait eu ni blessés ni morts parmi les représentants

 18   du ministère de l'Intérieur ou les membres de la Garde, que Borovo Naselje

 19   avait été nettoyée de sa population serbe et des Chetniks et que, dans les

 20   champs de maïs, derrière le village, derrière la dernière rangée de

 21   maisons de Borovo Naselje, en direction de Borovo Selo, une cinquantaine

 22   de Chetniks avaient été tués. C'est ce que nous a dit Blago Zadro.

 23   Le chef de la police était présent, il a confirmé cela. J'ai envoyé un

 24   rapport à ce sujet à la cellule de crise d'Osijek et j'ai donc transmis

 25   l'information qui m'avait été fournie par Blago Zadro. Je sais que

Page 11791

  1   Tomislav Mercep a envoyé un rapport à la cellule de crise de Zagreb, au

  2   Président de cette cellule de crise, Josip Manolic; il était ministre de

  3   l'Intérieur.

  4   Cependant, une déclaration a été faite au public dans laquelle les

  5   Chetniks avaient attaqué Borovo Naselje et que les gardes s'étaient

  6   opposés à cela avec succès, que les membres du ministère de l'Intérieur

  7   avait chassé les Chetniks de Borovo Naselje et brisé leurs rangs. La

  8   déclaration de Tomislav Mercep avait été diffusée par la télévision croate

  9   et tout cela était destiné à informer le public.

 10   M. le Président (interprétation): Très bien. Mais je vais interrompre

 11   cette lecture qui n'a absolument aucune utilité. Il ne sert à rien de

 12   poser ce genre de question au témoin, notamment en raison du fait qu'il

 13   est probable qu'il ne sait rien à ce sujet.

 14   Mais, Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous aider au sujet de ces

 15   allégations relatives à une attaque sur Borovo Naselje? Avez-vous la

 16   moindre information au sujet de cette attaque?

 17   M. Dulovic (interprétation): Non, je ne sais rien à ce sujet. J'étais

 18   journaliste. Je suivais les événements au quotidien. Je n'étudiais pas des

 19   textes relatifs à ce qui s'était passé avant. Ce que je m'efforçais de

 20   faire, c'est de donner une image instantanée de ce qui se passait sur les

 21   lieux où avaient lieu les combats.

 22   M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, les questions que je vous

 23   pose sont tout à fait légitimes parce que, dans votre déclaration, vous

 24   affirmez que les Serbes ont attaqué et que les Croates se sont contentés

 25   de se défendre. C'est l'explication que vous fournissez, en donnant une

Page 11792

  1   image tout à fait fausse de la situation. Ici, dans ces 52 pages, nous

  2   avons une déclaration du représentant de Croatie.

  3   Monsieur May, si vous ne voulez pas admettre cette déclaration, c'est

  4   votre affaire. Moi, je vous la propose.

  5   M. le Président (interprétation): Non. Non.

  6   M. Milosevic (interprétation): Bien.

  7   M. le Président (interprétation): Pas pour le moment. Si ce texte devient

  8   admissible à un moment ou à un autre, nous trancherons, mais pour le

  9   moment, nous ne l'admettons pas, à moins que vous ayez une bonne raison

 10   d'en demander le versement au dossier.

 11   M. Milosevic (interprétation): Bien. Bien.

 12   Mais, accepteriez-vous, Monsieur le Témoin, de commenter un document? Bien

 13   sûr, vous n'êtes pas en possession de ce document, mais à partir de ce que

 14   vous avez dit dans votre déposition, vous pourriez le commenter.

 15   Il s'agit d'une lettre officielle adressée, le 18 août 1991, au chef du

 16   Gouvernement de la République de Croatie, au ministère de la Défense, au

 17   ministère de l'Intérieur, avec copie au Président des quatre partis

 18   parlementaires représentés à l'Assemblée croate -et notamment Ivica Racak,

 19   le Premier ministre actuel-, adressée également au Président du HNS, du

 20   HLS, et à Veselica", signée et portant un sceau de la République de

 21   Croatie.

 22   Ce texte se lit comme suit: "La nomination de Tomislav Mercep, en tant que

 23   secrétaire du Secrétariat municipal de Vukovar, est une forme d'usurpation

 24   du pouvoir avec concentration sur une seule personne, des pouvoirs du HDZ.

 25   Commandement à toutes fins utiles des unités présentes sur le terrain,

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  1   constituées d'anciens criminels, et volonté de prise de contrôle sur toute

  2   la municipalité de Vukovar. Rien n'arrête ces hommes, ni la répression,

  3   etc., etc., dans la municipalité".

  4   Et puis, ensuite, on voit un certain nombre de mesures qui ont été

  5   adoptées contre le fait que des perquisitions illégales ont été accomplies

  6   dans des appartements, des pillages ont été commis, confiscation de

  7   véhicules, emprisonnement par la violence d'un certain nombre de

  8   personnes, y compris des exécutions et liquidations".

  9   Ce texte est intitulé "Sécurité publique de la municipalité de Vukovar.

 10   Rapport".

 11   Donc, voilà ce qui est écrit dans ce rapport: il informe tous les organes

 12   responsables de la Croatie, aux différents niveaux, de ce qui se passe et

 13   explique d'où vient la peur généralisée parmi les populations serbe et

 14   croate, en parlant d'exode hors de la ville et de blocus dus à la police,

 15   à la ZNG, aux instances du pouvoir et de l'autorité qui ont conduit à un

 16   état de confusion extrême".

 17   Le texte poursuit en disant que "Tomislav Mercep, sur l'intervention du

 18   ministre de Zagreb, a été démis de ses fonctions en tant que ministre de

 19   l'Intérieur"; information rendue publique dans les médias.

 20   Et puis le texte se poursuit. "Et un peu plus tard, nous voyons qu'il est

 21   stipulé que le chef de la ZNG a été remplacé à son poste et que c'est

 22   l'adjoint de Mercep qui l'a remplacé.

 23   Par la suite, nous voyons qu'un blocus a eu lieu, que plus rien ne

 24   fonctionnait, que la confusion la plus extrême régnait, que la peur

 25   régnait dans la population et que toute la population croate refusait de

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  1   justifier ce genre de comportement et pensait que cela était préjudiciable

  2   pour elle et qu'elle ne souhaitait pas être responsable d'une telle

  3   politique.

  4   Nous considérons que nous pourrons pas régler la situation par recours aux

  5   forces locales. Nous vous prions d'envoyer des personnes compétentes de

  6   toute urgence dans la région". (Fin de citation.)

  7   Donc c'est leur représentant qui parle ainsi de ce que faisait l'Oustachi

  8   Mercep à Vukovar; ces exécutions et tout cela, les arrestations illégales

  9   et la façon dont le chaos a été créé. Nous voyons que 50 personnes ont été

 10   tuées, et le mot "chetnik" est utilisé contre certaines personnes pour la

 11   simple raison qu'ils sont serbes, etc., etc.

 12   M. le Président (interprétation): Vous avez parlé pendant quelques

 13   minutes, plusieurs minutes. Il est temps maintenant que vous posiez une

 14   question.

 15   Monsieur Dulovic, ceci vous a été soumis. Avez-vous la moindre

 16   connaissance au sujet de cette lettre ou de la situation décrite dans

 17   cette lettre?

 18   M. Dulovic (interprétation): C'est la première fois que j'en entends

 19   parler. Quand j'étais sur les lieux, quand l'endroit était toujours

 20   assiégé, j'avais appris qu'à Vukovar, parmi les Croates qui s'y

 21   trouvaient, il y avait certaines divisions, des conflits, des

 22   affrontements, des divergences de vue. Mais je n'en sais pas plus à propos

 23   de cette situation.

 24   M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, je ne vous ai pas posé

 25   une question à propos de la lettre à proprement parler. Ce qui

Page 11795

  1   m'intéressait, c'est d'apprendre de vous –puisqu'il s'agissait d'une

  2   lettre officielle envoyée par des organes officiels croates à des organes

  3   officiels du gouvernement et qui parlait d'événements-, je voulais savoir

  4   de votre part si vous étiez au courant de ces événements, des violences

  5   massives qui avaient été perpétrées du fait que des Serbes avaient été

  6   tués à Vukovar, au cours de l'été 1991? Etiez-vous au courant?

  7   Réponse: Non.

  8   Question: Vous n'étiez pas au courant?

  9   Réponse: Non, parce que Borovo Naselje se trouvait sous compétence croate.

 10   Il y avait un aérodrome et puis on arrivait à Borovo Naselje; je ne savais

 11   pas ce qui s'y passait par conséquent.

 12   Question: Fort bien. Vu la déclaration dont je viens de donner lecture et

 13   vu qu'il y avait des faits notoires à propos de ces violences, revenons

 14   sur ce que vous avez dit hier.

 15   Vous avez dit qu'après la chute de Vukovar, les Serbes de Vukovar, comme

 16   des milliers d'entre eux avaient été tués jusqu'à ce moment-là, avaient

 17   été pillés, détruits. Vous avez dit que les autorités croates avaient un

 18   comportement tout à fait correct envers eux et que ces Serbes n'avaient

 19   aucune critique à formuler à cet égard ni par rapport à tout ce qui se

 20   passait. Et vous, vous affirmez que ce sont les Serbes de Vukovar qui vous

 21   auraient dit cela.

 22   Réponse: Oui, c'est effectivement ce que je déclare. Je dispose de leurs

 23   noms, de leurs prénoms, de leurs adresses. J'ai toutes ces coordonnées. Et

 24   ce sont ces gens qui m'ont relaté ce que j'ai déclaré hier dans le cadre

 25   de ma déposition.

Page 11796

  1   Question: Fort bien. Ces personnes semblent être assez étranges; ou peut-

  2   être que ma citation qui venait de sources croates n'était pas exacte.

  3   Dites-moi, est-ce qu'il vous est arrivé de vous trouver dans la communauté

  4   locale Petrova à Vukovar, Petrova Gora?

  5   Réponse: Non, c'était de l'autre côté de la ville de l'endroit où je me

  6   trouvais.

  7   Question: Je suppose que, lorsque vous êtes arrivé à Vukovar, vous vous

  8   êtes déplacé dans toute la ville. Je ne sais pas exactement dans quels

  9   quartiers vous êtes allé, mais est-ce que vous êtes au courant? Est-ce que

 10   vous pouvez me répondre à cette question?

 11   Réponse: Non.

 12   Question: Est-ce qu'éventuellement, par la suite, vous avez appris que,

 13   dans le cadre de cette Brigade de Mercep, ça a été le premier groupe qui a

 14   été mis sur pied pour se livrer à ces liquidations? Est-ce que vous avez

 15   entendu de cela?

 16   Réponse: Non, et si c'est le cas, ça s'est passé de part et d'autre, du

 17   côté serbe et du côté croate. On parlait du fait que des deux côtés, de

 18   part et d'autre, ces équipes, ces groupes étaient établis, ces unités

 19   étaient constituées afin de se livrer à des liquidations. Manifestement,

 20   il y a eu beaucoup de manipulations en utilisant ce genre de rumeurs.

 21   Question: Je comprends bien votre situation.

 22   Est-ce que vous savez que les premières victimes de ce groupe Mercep ont

 23   été notamment M. Ostojic, Zeljko Ostojic, qui a fait une déclaration aux

 24   organes de sécurité de l'armée yougoslave, en 1990, à propos du fait que

 25   des unités armées avaient été mises sur pied, qu'il y avait ces plans de

Page 11797

  1   Mercep qui visaient à procéder un nettoyage ethnique de la région? Etiez-

  2   vous au courant?

  3   Réponse: Non.

  4   Question: Vous avez passé beaucoup de temps à Vukovar. On avait diffusé à

  5   la télévision un film sur Spegelj; il en a témoigné. Est-ce que vous savez

  6   qu'après la diffusion de ce programme, Ostojic a été tué dans son

  7   appartement à Borovo Naselje, du fait manifestement de son témoignage.

  8   Avez-vous été mis au courant de ceci? Est-ce que personne ne vous en a

  9   parlé?

 10   Réponse: Non, pas du tout.

 11   Question: Donc vous, vous affirmez que, pendant tout votre séjour à

 12   Vukovar, personne dans la population serbe ne s'est jamais plaint auprès

 13   de vous des crimes qui sont perpétrés pendant des mois à Vukovar. Mais

 14   vous, vous vous affirmez ici qu'ils se sont contentés de dire que certains

 15   Serbes fous avaient attaqué des Croates qui se contentaient de se

 16   défendre. C'est bien votre thèse, n'est-ce pas?

 17   Réponse: Pas du tout! Moi, j'ai dit qu'il y avait des combats qui se

 18   déroulaient, des combats qui se poursuivaient.

 19   Question: Fort bien. Je vous soumets ceci: savez-vous quelles étaient les

 20   intentions de l'armée? Etes-vous au courant du fait que la caserne de

 21   Vukovar a subi un blocus? Avez-vous été informé de cela?

 22   Réponse: Oui, j'en ai entendu parler. Elle avait été assiégée, plus

 23   exactement.

 24   Question: Qu'avez-vous entendu dire à propos de cette caserne qui avait

 25   été assiégée, par rapport à ce barrage, ce blocus qui avait été établi

Page 11798

  1   devant la caserne? Qu'avez-vous appris?

  2   Réponse: Eh bien, que cette caserne avait été encerclée par l'armée

  3   croate. J'ai appris qu'il y avait eu des combats et que les soldats

  4   avaient réussi à sortir de la caserne.

  5   Question: Dans votre déclaration préalable, là où vous dites que vous avez

  6   été cité pour comparaître en tant que témoin -et on joint en annexe votre

  7   déclaration: il s'agit là d'un rapport de d'audition; on trouve ceci dans

  8   les documents qui m'ont été remis par la partie adverse-, là, vous dites

  9   "avoir été présent au moment des activités militaires de la JNA qui

 10   visaient à lever le siège de la caserne de Vukovar" -virgule-, ou plutôt

 11   vous poursuivez en disant que cette opération -entre guillemets- "de

 12   libération de Vukovar" -c'est comme cela qu'on l'avait appelée, tout ceci

 13   étant entre guillemets-, vous poursuivez en disant ceci: vous indiquez où

 14   vous habitiez, où vous résidiez, ce genre de choses.

 15   Réponse: Mais il faut d'abord que j'examine tout ceci.

 16   M. Milosevic (interprétation): La page, c'est 0288148. C'est votre

 17   déclaration, au début de celle-ci. Vous avez aussi fait des citations à

 18   partir de la déclaration préalable.

 19   M. Groome (interprétation): Je pense que M. Milosevic fait référence à

 20   l'intercalaire 12, pièces de l'accusation 323. Je demanderais qu'on

 21   remette ce document au témoin.

 22   (Intervention de l'huissier.)

 23   Je m'excuse. Je précise aux fins du compte rendu que je me suis trompé: il

 24   s'agit de la pièce 342 et pas la pièce 323.

 25   M. le Président (interprétation): Intercalaire 12.

Page 11799

  1   M. Groome (interprétation): Oui.

  2   M. le Président (interprétation): Il s'agit de la déclaration fournie au

  3   juge d'instruction?

  4   M. Groome (interprétation): Apparemment, oui. C'est ce document qui est

  5   cité par M. Milosevic.

  6   M. le Président (interprétation): Est-ce que le témoin dispose de ce

  7   document?

  8   C'est l'intercalaire 12.

  9   M. Kwon (interprétation): Premier paragraphe.

 10   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic, poursuivez.

 11   M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, si l'on tient compte de

 12   tout ce qui se passait cet été-là, des milliers de Serbes qui avaient été

 13   tués jusqu'alors et compte tenu de ce que vous avez vous-même qualifié de

 14   siège et de levée de siège de la caserne de Vukovar, pensez-vous vraiment

 15   que l'armée n'aurait pas dû essayer de sauver non seulement ses propres

 16   soldats à Vukovar, mais aussi de sauver d'autres citoyens dont la vie

 17   était en danger, d'un jour à l'autre, et qui avaient disparu dans la

 18   campagne menée par les groupes oustachis? Est-ce que ces gens ou par ces

 19   gens qui s'appelaient "Oustachis"…

 20   M. le Président (interprétation): Posez une question!

 21   M. Milosevic (interprétation): Ma question, la voici: pensez-vous que

 22   l'armée n'aurait pas dû intervenir pour lever le siège de la caserne et

 23   pour empêcher ce massacre de civils à Vukovar, puisque déjà un millier de

 24   personnes avaient été tuées jusque là? Qu'est-ce que vous avez dit?

 25   M. Dulovic (interprétation): Non, je n'ai pas parlé de cela.

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  1   M. le Président (interprétation): Etes-vous au courant des allégations

  2   présentées bien sûr par l'accusé, à savoir qu'il y a eu un massacre de

  3   civils? Je suppose qu'il s'agissait, selon lui, de civils serbes. Avez-

  4   vous entendu parler de cela?

  5   M. Dulovic (interprétation): Non.

  6   M. Robinson (interprétation): Monsieur Milosevic, parlez-vous d'un millier

  7   de Serbes qui auraient été tués, si je vous ai bien compris?

  8   M. Milosevic (interprétation): Oui, d'après les faits, d'après les

  9   chiffres dont je dispose jusqu'alors, jusqu'à ce moment-là, juste après la

 10   proclamation, tout ceci s'est passé pendant l'été 1991, et beaucoup de

 11   choses se sont passées avant l'attaque de Vukovar. Il y avait eu le

 12   blocus, le siège de la caserne bien avant les événements de Vukovar; on

 13   avait coupé l'électricité, l'eau, et la caserne avait essuyé des tirs de

 14   partout afin qu'on montre que l'indépendance croate pouvait être obtenue

 15   par le biais d'une guerre. Même si l'armée, les soldats voulaient quitter

 16   la caserne, ce n'était pas possible. Le témoin a dit ne rien savoir alors

 17   qu'il y a énormément d'éléments de preuve à ce propos. Moi-même, j'en ai

 18   cité quelques-uns de ces éléments à l'appui de ma thèse.

 19   Est-ce que je peux poursuivre ou est-ce que vous voulez qu'on fasse une

 20   pause?

 21   M. le Président (interprétation): Vous avez tout à fait raison, c'est le

 22   moment de faire une pause.

 23   M. Groome (interprétation): Permettez-moi d'intervenir avant la pause.

 24   Apparemment, nous allons poursuivre demain. L'accusation s'inquiète de la

 25   situation très grave qui règne et demande à la Chambre si elle peut

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  1   s'enquérir auprès de la Section des victimes et des témoins pour savoir si

  2   elle peut mener une enquête; on pourra avoir une option de rechange, à

  3   savoir qu'un enquêteur du Bureau du Procureur pourrait parler à M. Dulovic

  4   en présence d'un représentant du Greffe ou des amis de la Chambre. Je ne

  5   voudrais pas qu'on perde trop de temps pour essayer de savoir quelle est

  6   l'origine des menaces proférées contre la famille du témoin.

  7   M. le Président (interprétation): Nous étudierons la question. Nous allons

  8   faire une pause de 20 minutes.

  9   (L'audience, suspendue à 12 heures 18, est reprise à 12 heures 43.)

 10   M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, s'agissant de la

 11   question que vous avez soulevée avant la pause, nous allons autoriser

 12   qu'un enquêteur s'entretienne avec le témoin de la question. Bien sûr, cet

 13   enquêteur ne parlera avec lui que de ce qui s'est passé pendant la nuit ou

 14   hier soir, pas du procès.

 15   M. Groome (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 16   M. le Président (interprétation): Monsieur Dulovic, nous avons déjà dit

 17   que vous n'étiez autorisé à parler à personne de votre déposition, mais vu

 18   les événements qui se sont produits et qui concernent votre épouse, nous

 19   allons autoriser un enquêteur à parler avec vous de ce qui s'est passé.

 20   Veillez à limiter cette conversation à ce seul problème; ne parlez pas de

 21   votre déposition. Mais il pourra, dans ce cadre précis et limité, parler

 22   avec vous.

 23   Monsieur Milosevic, poursuivez, s'il vous plaît.

 24   M. Milosevic (interprétation): Etant donné que vous êtes journaliste,

 25   Monsieur Dulovic, est-ce que vous avez suivi ce qui se passait avec les

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  1   médias à Vukovar? Savez-vous par exemple que le 2 mai, dans cette

  2   atmosphère, ce climat général de pogrom qu'il y avait à Vukovar, il y a eu

  3   la prise par la force de la radio de Vukovar par le HDZ et que Sravomir

  4   Cemet/Zdravko Seremet, membre du conseil municipal du HDZ, a été nommé

  5   nouveau directeur de Radio Vukovar?

  6   Ceci concerne des collègues à vous, d'autres journalistes. Est-ce que vous

  7   étiez au courant?

  8   M. Dulovic (interprétation): Non. Pendant ma présence sur les lieux, Radio

  9   Vukovar était tenue par les Serbes. Il y avait deux femmes journalistes et

 10   un homme.

 11   Question: Moi, je vous demande ce qui s'est passé avant cela.

 12   Réponse: Là, je ne suis pas au courant.

 13   Question: Vous n'êtes pas du tout au courant?

 14   Savez-vous que ce même jour, le 2 mai, il y avait une action coordonnée du

 15   MUP de Croatie qui s'était livrée au nettoyage ethnique de Borovo Selo?

 16   Réponse: Non.

 17   Question: Savez-vous, par exemple, qu'un Croate, le chef de la police de

 18   la Croatie à Osijek –il s'appelait Kir Hajrel-, et savez-vous que ce

 19   Croate était vigoureusement opposé à ce type d'opération oustachi et qu'il

 20   a été tué sur la route menant d'Osijek à Vukovar par ces mêmes hommes de

 21   Mercep, parce que cet homme voulait calmer la situation et il voulait que

 22   ce type d'opération commence?

 23   Réponse: Oui, j'en ai entendu parler, j'ai lu des choses à ce propos.

 24   Question: Eh bien, qu'est-ce que vous savez exactement?

 25   Réponse: Ce que vous venez de dire.

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  1   Question: Et si tel est le cas, en d'autres termes, s'ils tuaient eux-

  2   mêmes leur propre chef de la police parce qu'il s'opposait à ces

  3   opérations, pourriez-vous nous dire quel était le nombre de ces actions et

  4   le degré de danger auquel était exposée la population serbe pendant tout

  5   cet été?

  6   Réponse: Je ne peux pas faire ici d'assertion quelconque.

  7   Question: Savez-vous qu'en octobre et novembre 1991, moment où, selon

  8   vous, il y a eu pilonnage constant de Vukovar, un tiers de toutes les

  9   forces croates accompagnées de mercenaires, de forces mercenaires –que

 10   nous avons vues d'ailleurs dans un extrait-, que ces forces ont attaqué

 11   les Serbes dans la zone de Vukovar, précisément à ce moment-là?

 12   Réponse: C'est la première fois que j'en entends parler, surtout lorsqu'il

 13   s'agit apparemment de mercenaires étrangers.

 14   Question: Est-ce que vous savez que dans la ville même, à l'époque, il y

 15   avait de 6 à 8.000 membres de formations paramilitaires de Croatie qui se

 16   nommaient eux-mêmes "Oustachis"?

 17   Réponse: Je ne suis pas au courant.

 18   Question: Puisque vous n'êtes pas au courant de l'existence de ces

 19   groupes, savez-vous que ces forces, à l'époque -ici je ne veux pas

 20   nécessairement parler de forces croates, parce que c'était simplement le

 21   nom qui avait été donné aux Croates-, mais que ceci avait été le fait de

 22   la 204e Brigade de Vukovar, qu'il y avait la Brigade de Vinkovci, la

 23   Brigade de Zagreb, et qu'il y avait 200 volontaires, 150 mercenaires aussi

 24   et qu'il y avait 400 membres mobilisés du Corps de Garde nationale, des

 25   forces du HOS que je ne connais pas, et qu'il y avait donc ces mercenaires

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  1   étrangers dans des groupes appelés "Kondor", "Chicago", qu'il y avait 150

  2   néo-fascistes et mercenaires? Est-ce que vous avez été informé de ceci?

  3   Réponse: Je n'ai rien appris, que ce soit moi ou mes collègues; c'est la

  4   première fois que j'en entends parler. C'était peut-être le cas, mais je

  5   précise que c'est la première que j'en entends parler, c'est la première

  6   fois que j'entends ces chiffres précis. C'est quelque chose que les

  7   journalistes et les gens ordinaires ne connaissaient pas.

  8   Question: Est-ce que vous savez ou est-ce que vous avez appris plus tard

  9   que Peter Binder, Aleksandar Walter et une autre personne, qui ont été

 10   arrêtés en Autriche, non pas en Slavonie orientale ni en Serbie, mais que

 11   ces gens, vers la fin de 1993, ont révélé qu'ils avaient eux-mêmes

 12   participé à cette guerre? Je parle ici de ces mercenaires, de ces néo-

 13   fascistes.

 14   Réponse: Je ne suis pas au courant.

 15   Question: Ah, tiens, vous n'êtes pas au courant non plus? Mais bon, je

 16   suppose que vous ne contesterez même pas qu'en octobre 1991, l'armée était

 17   partie sur Vukovar et qu'elle avait pour mission de lever le siège de la

 18   caserne? Je suppose que ceci n'est pas contesté?

 19   Réponse: Je ne sais pas.

 20   Question: Savez-vous que la Présidence de la République fédérative

 21   socialiste de Yougoslavie, qui était toujours en exercice à l'époque, et

 22   que la JNA qui était sur tout le territoire du pays ont même demandé la

 23   médiation de la Communauté européenne afin de pouvoir lever le siège et

 24   afin que soit mis un terme à ce massacre? Et c'est seulement après qu'il

 25   est apparu que rien n'allait aboutir. C'est seulement à ce moment-là que

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  1   l'armée a lancé cette offensive pour lever le siège de la caserne?

  2   Réponse: Je ne suis pas du tout au courant de cela, je n'ai aucune

  3   information. Les journaux ne sont pas arrivés jusqu'à Vukovar. La plupart

  4   du temps, il n'y avait pas de courant électrique, pas d'électricité, donc

  5   je n'ai pas eu l'occasion d'entendre parler, même si c'était vrai.

  6   Question: D'accord. Etes-vous au courant de l'offensive généralisée lancée

  7   par le MUP de Croatie et par le Corps de la garde nationale ainsi que par

  8   d'autres formations paramilitaires et dirigée contre toutes les casernes

  9   militaires sur le territoire de la Croatie? Etes-vous au courant de cela?

 10   Réponse: Non, je suis au courant pour ce qui est de la Slovénie, mais pour

 11   le reste je ne sais pas. Oui, effectivement, oui je sais, j'en ai entendu

 12   parler, il y a eu de tels cas.

 13   Question: Auparavant, cet été-là vous étiez à Borovo Selo, n'est-ce pas?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: Est-ce qu'à ce moment-là vous avez établi que le 4 juillet il y

 16   avait eu le premier massacre de Serbes?

 17   Réponse: Je ne me souviens pas. Ceci ne veut pas pour autant dire que ça

 18   ne s'est pas passé, c'est simplement que je ne me souviens pas.

 19   M. Milosevic (interprétation): Dites-moi, êtes-vous au courant du fait que

 20   20 personnes ont été exécutées au Centre médical pour enfants de Vukovar

 21   et que, de nouveau, plus de 20 personnes ont été tuées, exécutées par un

 22   peloton d'exécution à Zelica Ulica?

 23   M. Dulovic (interprétation): Je me suis trouvé dans ces deux rues, mais je

 24   n'étais pas ou courant d'une exécution d'enfants.

 25   M. le Président (interprétation): On a dit ici qu'il y avait eu une

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  1   exécution au Centre médical pour enfants. Ce n'est peut-être pas vrai ou

  2   ce l'est peut-être? En tout cas, c'est ce que suggère l'accusé. Mais en ce

  3   qui vous concerne, Monsieur le Témoin, vous n'en avez pas entendu parler.

  4   Est-ce bien cela, pour autant que ceci se soit produit?

  5   M. Dulovic (interprétation): A propos de 20 enfants.

  6   M. Milosevic (interprétation): Je ne parle pas d'enfant.

  7   M. Dulovic (interprétation): Vous parlez de l'exécution d'enfants.

  8   Question: J'ai dit que 20 personnes ont été exécutées près du Centre

  9   médical pour enfants de Vukovar. Je ne parle pas de l'exécution d'enfants

 10   du tout.

 11   Réponse: Non, je ne suis pas au courant.

 12   M. Milosevic (interprétation): Mais ce Centre médical pour enfants, c'est

 13   un lieu…

 14   M. Robinson (interprétation): Qui étaient ces 20 personnes qui auraient

 15   été exécutées? Quelle était leur appartenance ethnique?

 16   M. Milosevic (interprétation): C'étaient des civils serbes, Monsieur

 17   Robinson. Des Serbes civils.

 18   Monsieur Dulovic, que tout soit clair: ici, nous parlons de tous ces

 19   crimes qui ont été commis dans le courant de l'été et bien avant les

 20   attaques qui avaient pour objectif de lever le siège de la caserne

 21   militaire. Savez-vous ce qui s'est passé le 15 août, au moment où des

 22   soldats ont été attaqués? Des soldats qui n'avaient même pas d'armes, qui

 23   ont été attaqués à proximité de la voie ferrée.

 24   Il y a des renseignements concernant deux Oustachis, c'est comme cela

 25   qu'ils s'appelaient eux-mêmes: Zrinjic et Miljkovic qui ont pris les dents

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  1   d'or qu'avait ce soldat avec un couteau, et puis ils l'ont égorgé. Etes-

  2   vous au courant du type de guerre qui se menait à Vukovar? Est-ce que vous

  3   êtes au courant du degré de cruauté que ceci signifiait?

  4   M. Dulovic (interprétation): Je ne suis pas au courant de cet événement.

  5   S'agissant du degré de cruauté, là j'en ai beaucoup entendu parler. J'ai

  6   lu des articles dans les journaux à ce propos. Par exemple, à Borovo

  7   Naselje, 40 nourrissons ou des bébés serbes de l'âge du jardin d'enfants

  8   ont été abattus et placés dans des sacs en plastique. C'est ce

  9   qu'écrivaient les journaux.

 10   Gulan, mon collègue de "Borba", et moi-même étions sur les lieux, nous

 11   avons essayé de vérifier ces affirmations, mais personne n'a jamais

 12   apporté la moindre once de preuve pour montrer que ceci aurait été vrai.

 13   C'étaient des mensonges que propageaient les médias. Les médias voulaient

 14   simplement insuffler une révolte chez les Serbes afin que ceux-ci partent

 15   au combat. Et il faudrait que je voie des preuves de ces massacres. Mais

 16   il a été prouvé qu'aucun de ces récits qui paraissaient dans tous les

 17   journaux dont on parlait à la radio, à la télévision, eh bien, étaient

 18   autre chose que des mensonges.

 19   M. Robinson (interprétation): J'aimerais mieux comprendre votre thèse,

 20   Monsieur Milosevic. Consiste-t-elle à dire que l'attaque sur Vukovar, au

 21   cours de l'automne, était une réponse en défensive, en réaction aux

 22   attaques dirigées contre les Serbes au cours de l'été?

 23   M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Juge Robinson, la question est

 24   bien plus complexe. Pendant l'été, il a été abattu 1.000 Serbes à Vukovar.

 25   On avait bloqué les casernes. Et le témoin avait également parlé des

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  1   actions déployées par l'armée pour débloquer les casernes au centre de

  2   Vukovar. Cette caserne avait été encerclée, on leur avait coupé

  3   l'électricité et l'eau, et on avait ouvert le feu de toute part en

  4   direction de ces casernes. Par conséquent, des crimes avaient été

  5   perpétrés contre la population civile.

  6   M. Robinson (interprétation): A quel moment l'armée a-t-elle lancé cette

  7   attaque pour débloquer ou lever le siège militaire de cette caserne

  8   militaire? Au cours de quels mois?

  9   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, le témoin peut vous le dire lui-

 10   même. Cela n'a eu lieu qu'au mois d'octobre, d'après ce que je puis voir

 11   dans les informations dont je dispose, et voire même début novembre. Mais

 12   le témoin est là pour nous le dire. Mais ce qui s'est passé dans le

 13   courant de l'été avait précédé ces interventions; autant les meurtres de

 14   soldats, les blocus de caserne et les tueries en masse de civils.

 15   J'y viendrai, Monsieur Robinson. J'ai ici une déclaration écrite qui est

 16   tirée d'un procès en justice d'un témoin Dragutin Guzanski, qui avait été

 17   directeur de l'entreprise communale.

 18   M. Robinson (interprétation): Je crois que je comprends mieux maintenant

 19   la thèse que vous soutenez. Poursuivez le contre-interrogatoire, s'il vous

 20   plaît.

 21   M. Milosevic (interprétation): Laissez-moi juste terminer ce que j'allais

 22   dire, Monsieur Robinson.

 23   Il est en train de raconter ici, étant donné qu'il avait été directeur de

 24   l'entreprise communale, qu'il appartenait à ses attributions de prendre

 25   soin des enterrements, etc. Il a parlé de centaines de Serbes.

Page 11809

  1   Les Croates étaient enterrés au cimetière croate, mais les Serbes avaient

  2   été enterrés au stade dans différentes rues, suite à des ordres émanant

  3   des autorités de Vukovar. Et lui parle de centaines et de centaines. Ça,

  4   c'est une déclaration qui est rédigée à la main; il y dit qu'il n'avait

  5   pas enterré les soldats de l'armée de la Yougoslavie parce...

  6   M. Robinson (interprétation): Mais si je vous ai bien compris, vous allez

  7   aborder ces questions plus tard. Attendons d'avoir cette déposition pour

  8   entendre le reste de votre intervention.

  9   M. Milosevic (interprétation): Mais savez-vous nous dire pourquoi

 10   certaines unités, si l'on ne perd pas de vue tous ces faits-là, et

 11   pourquoi certains volontaires se trouvaient aux alentours de Vukovar ou à

 12   Vukovar même?

 13   M. Dulovic (interprétation): Pour s'emparer de Vukovar et accéder à la

 14   ville.

 15   M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur Dulovic, est-ce que les

 16   raisons dont j'en ai cité quelques-unes sont claires pour vous, à savoir

 17   ces tueries massives, ces enterrements massifs?

 18   M. le Président (interprétation): Vous savez, Monsieur Milosevic, c'est

 19   nous qui allons devoir trancher tout ceci pour savoir dans quel contexte

 20   tout ceci s'est déroulé. Le témoin n'a pas à intervenir là-dessus. Lui, il

 21   parle dans sa déposition de ce qu'il a vu et entendu lui-même. C'est à

 22   nous qu'il reviendra de prendre une décision pour savoir le pourquoi de

 23   tout ce qui s'est passé. Mais ce n'est pas au témoin qu'il revient de

 24   faire.

 25   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, par exemple, savez-vous que, le 20

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  1   août… -par la suite, il y a eu les témoignages de ceux qui avaient fait

  2   cela et qui ont été arrêtés par des autorités militaires- à savoir une

  3   jeune fille, Sladjana Petrovic, au bloc 1A, qui avait 25 ans et qui

  4   portait du lait. Ils disent: "Nous l'avons arrêtée. Nous l'avons frappée,

  5   elle est tombée sur l'herbe; nous lui avons ligoté les mains, nous lui

  6   avons descendu son pantalon, nous avons attaché ses jambes écartées, nous

  7   avons planté des pieux et nous l'avons éventrée depuis le ventre jusqu'à

  8   la gorge parce qu'elle nous avait traités d'"Oustachis". Ensuite, j'ai

  9   découpé sa mâchoire inférieure et je l'ai donnée à Grlic."? Est-ce que

 10   vous avez entendu parler de ces événements?

 11   Et l'autre qui a dit: "J'ai égorgé ce soldat, je l'ai tenu d'une main par

 12   les cheveux et, de l'autre main, je lui ai coupé tout le cou. Et l'autre

 13   m'a aidé pour lui découper la tête en entier."

 14   M. le Président (interprétation): Comment voulez-vous que le témoin puisse

 15   répondre à tout ceci? Abordez une chose à la fois. Comment voulez-vous que

 16   le témoin réponde à cette série de faits? Je pense que ce n'est pas juste

 17   envers le témoin d'agir de la sorte.

 18   Monsieur le Témoin, on vous pose des questions en ce qui concerne des

 19   violences qui se sont produites sur une jeune fille? Etes-vous au courant

 20   de cela?

 21   M. Dulovic (interprétation): Je n'en ai jamais entendu parler.

 22   M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas entendu parler de ce soldat

 23   égorgé, etc.?

 24   Enfin, je suis en train de vous citer quelques exemples, pris au hasard,

 25   parce que j'ai cru comprendre que vous vous serviez d'exemples

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  1   particuliers, et ce que je ne comprenais pas, c'est que vous n'ayez pas

  2   d'exemples à part concernant ce qui se passait et qui était chose notoire

  3   concernant Vukovar et les environs.

  4   Donc, tout ceci, vous n'en avez jamais entendu parler?

  5   Réponse: Non. Je n'ai aucune raison de ne pas en parler, si tant est que

  6   je n'aie jamais entendu parler de la chose.

  7   Question: Savez-vous par exemple que, devant le Tribunal militaire de

  8   Belgrade, il y a eu un procès à l'intention de personnes arrêtées par les

  9   soldats; il s'agissait de personnes qui ont perpétré des crimes, à savoir

 10   des personnes qui ont massacré des gens, qui ont procédé au ratissage de

 11   cette rue Vinogradska, à Vukovar. Vous avez probablement été là-bas?

 12   Réponse: Je pense que ce procès s'est passé à huis clos et cela fait que

 13   je n'ai pas pu le suivre, mais je serais certainement allé assister à ce

 14   procès.

 15   Question: Oui, j'imagine que vous le feriez parce que vous avez

 16   pratiquement passé la majeure partie de votre vie de journaliste en

 17   suivant les procès dans les tribunaux. C'est ce qu'on dit dans l'Acte

 18   d'accusation, c'est ce qu'on dit dans le jugement. Il s'agit de Marko

 19   Filipovic, Zdenko Stefancic, Miro Donato. Ils ont pris Miro Ceric dans la

 20   cave où il y avait le QG de Filipovic, ils l'ont interrogé concernant son

 21   appartenance au Parti démocratique serbe.

 22   Réponse: Mais où tout ceci se passe-t-il?

 23   Question: A Vukovar, à l'occasion de quoi on a mis un pistolet dans la

 24   bouche de Ceric en le menaçant de le tuer: on voulait qu'il avoue. Puis,

 25   ils l'ont fait sortir dans la cour et ils lui ont montré six cadavres

Page 11812

  1   d'hommes et Stefancic a tué Ceric sur les lieux, en tirant huit balles

  2   dans le corps de Ceric.

  3   Est-ce que vous avez entendu quoi que ce soit au sujet des meurtres qui

  4   ont fait l'objet de procès à l'époque?

  5   Réponse: Avez-vous un détail quelconque pour dire où cela est arrivé à

  6   Vukovar? Est-ce que c'est dans une entreprise, à Borovo, ou une précision

  7   de ce genre?

  8   Question: J'ai l'Acte d'accusation tout entier. Ça s'est passé à Vukovar

  9   et c'était à l'occasion de ce ratissage de la rue Vinogradska au sujet

 10   duquel vous avez certainement eu des informations.

 11   Réponse: Je ne sais rien de tout cela. Je sais qu'il avait été question

 12   d'une femme qui avait commis des crimes dans une usine; je ne sais plus si

 13   c'était "Vuteks" ou "Borovo", l'usine de chaussures, mais je ne sais rien

 14   d'autre à ce sujet. Donc ce sont des choses dont j'ai entendu parler.

 15   Question: Ah oui, vous parlez de la femme qui s'appelle Ksenija Ibrica,

 16   appelée "Senka", née en 1967, Ibrica Senka?

 17   Réponse: Je n'arrive pas en m'en souvenir.

 18   Question: Elle avait pris part à l'évacuation de trois personnes non

 19   identifiées vers le Danube, vers les anciens abattoirs où ces civils ont

 20   été liquidés. Et elle en a tué deux elle-même en tirant au pistolet. Par

 21   la suite, les cadavres des personnes tuées ont été jetés dans le Danube

 22   avec le corps d'un membre de la Garde.

 23   Réponse: Je ne sais rien de tout cela.

 24   M. Milosevic (interprétation): Ça, c'est le jugement qui est rendu. Si

 25   vous voulez, je puis, Monsieur May, le verser au dossier; je puis

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  1   facilement le faire, tout comme pour ce qui est du jugement dont j'ai

  2   donné lecture tout à l'heure, mais je n'ai pas l'impression que vous soyez

  3   intéressés par la chose.

  4   M. le Président (interprétation): Y a-t-il une objection?

  5   M. Groome (interprétation): Si nous avons l'occasion de voir ces

  6   documents, s'il s'agit de copies certifiées conformes de jugements rendus

  7   par le tribunal, pas d'objection.

  8   M. le Président (interprétation): Eh bien, qu'on nous remette ce jugement.

  9   M. Milosevic (interprétation): Je vous le donnerai un peu plus tard, parce

 10   que j'ai encore une petite question.

 11   (L'accusé Slobodan Milosevic s'adresse à l'huissier.)

 12   Je vous donnerai cela tout à l'heure.

 13   M. le Président (interprétation): Très bien.

 14   M. Milosevic (interprétation): Laissez-moi conclure. Donc vous ne saviez

 15   rien du tout au sujet du fait que pendant plusieurs mois qui ont précédé,

 16   avant les événements que vous avez décrits à Vukovar, il y a eu

 17   liquidation de Serbes à Vukovar même?

 18   M. Dulovic (interprétation): Non.

 19   Question: Bon. Avez-vous entendu parler du fait que Marin Vidic,

 20   justement, celui qui avait été député du Gouvernement croate pour Vukovar,

 21   dans son journal, indique, au 4 septembre 1991 –et j'ai un renseignement

 22   disant que c'est en page 111-: "Les Serbes sont en ville pour se

 23   débarrasser de tous.".

 24   Avez-vous entendu, donc, parler de l'événement?

 25   Réponse: Non, je n'ai pas eu l'occasion de lire cela.

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  1   Question: Et savez-vous que, parmi ces meurtriers à Vukovar, il y avait

  2   bon nombre de criminels de notoriété: Drazen Gazo, par exemple, qui a été

  3   condamné à plusieurs reprises? Est-ce que vous avez entendu parler de ce

  4   nom? Est-ce que vous avez entendu parler des crimes perpétrés par

  5   l'intéressé?

  6   Réponse: Non, je ne me souviens pas de ce nom ni de ce Drazen Gazo.

  7   Question: Et vous souvenez-vous de quelle façon le propriétaire d'un

  8   restaurant "Grmec" à Borovo Naselje a été tué?

  9   Réponse: Non.

 10   Question: J'ai ici des extraits d'acte judiciaire où il est précisé qu'à

 11   une date non déterminée de l'année 1991 –et il est question, je précise,

 12   du meurtre dans ce restaurant "Grmec"-, certains membres de ladite unité,

 13   de l'unité paramilitaire oustachi, ont jeté des explosifs dans ce

 14   restaurant, propriété de Sucevic Branko, invalide sans jambe, qui a été

 15   tué sur les lieux. Et à une date non déterminée en juillet 1991, dans les

 16   locaux de la protection civile, un certain Milenko de nationalité serbe,

 17   Zuvic Milenko, a été amené, battu, tué et jeté dans le Danube? Savez-vous

 18   nous dire quoi que ce soit à ce sujet? Il s'agit du procès de Zoran Sipos,

 19   encore un membre de ces groupes de meurtriers qui avaient fait la loi dans

 20   Vukovar. Est-ce que vous savez nous dire quoi que ce soit à ce sujet?

 21   Réponse: Non. Je n'affirme pas que cela n'a pas eu lieu, mais je ne sais

 22   rien au sujet de ces choses-là. Je ne pouvais pas le savoir. Vous êtes en

 23   train de mentionner Borovo Naselje. Les journalistes sont entrés à Borovo

 24   Naselje pour la première fois le jour de la chute de Vukovar et j'y étais,

 25   ce jour-là. Et si cela est arrivé, je n'avais pas eu le temps et je n'ai

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  1   pas pu en entendre parler.

  2   Question: Est-ce que vous avez entendu parler des événements du 28

  3   octobre? Cette même unité du même Zoran Sipos a arrêté des civils:

  4   Petranovic Zorana, Miladen Jovic, Radovana Vukicevic, Jovica Leskovac,

  5   Vojo Dekic, et les a contraints à creuser des tranchées là où il pleuvait

  6   des obus, puis, après, ils les ont abattus. Est-ce que vous savez quoi que

  7   ce soit à ce sujet-là?

  8   Réponse: Non.

  9   Question: Ou alors, Nikola Cibaric qui a été tué par le même groupe;

 10   savez-vous quelque chose à ce sujet?

 11   Réponse: Non.

 12   Question: Très bien. Je vous donne lecture de tous ces exemples-là à

 13   partir de documents judiciaires. Ce ne sont pas des journaux, parce que

 14   vous dites que les journaux avaient rédigé des textes à sensation et ce

 15   sont ici des textes de documents judiciaires.

 16   Et avez-vous peut-être entendu parler, parce que là véritablement le cas

 17   est des plus morbides, pendant que vous étiez encore à Vukovar, savez-vous

 18   ce qu'a fait Nikola Pilipovic surnommé "Siptar", qui avait commis des

 19   outrages sexuels sur les soldats morts de l'armée de Yougoslavie, sur les

 20   cadavres des soldats de l'armée de Yougoslavie, qu'il se défoulait dessus?

 21   Réponse: Non.

 22   M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous savez que le général

 23   Spegelj en a parlé dans son livre?

 24   M. le Président (interprétation): Monsieur Groome?

 25   M. Groome (interprétation): Objection. Manifestement, le témoin dit qu'il

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  1   n'a passé que trois mois à Vukovar. Je demanderais à M. Milosevic de

  2   limiter ses questions à ces événements. Bien sûr, il a peut-être le droit

  3   de poser des questions au témoin pour lui demander s'il est courant de cet

  4   événement, mais uniquement au cours de cette période de trois mois. Or,

  5   maintenant il me semble que nous nous lançons dans toutes sortes de

  6   questions où là il n'y a aucun rapport temporel et où le témoin ne peut

  7   pas avoir de connaissances véritablement utiles.

  8   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic.

  9   M. Milosevic (interprétation): Bien, bien. Prenez donc ces documents

 10   judiciaires. Si cela vous intéresse, vous pouvez vous pencher dessus et,

 11   par la suite, il vous appartiendra d'en décider. Les documents judiciaires

 12   complets sont en possession de mes collaborateurs et vous pouvez les

 13   obtenir. Donc vous pouvez obtenir les actes d'accusation, les jugements et

 14   le reste.

 15   (Intervention de l'huissier.)

 16   M. le Président (interprétation): Un instant. Je pense que la marche à

 17   suivre la plus simple serait de verser ces documents au dossier sous une

 18   seule et même cote d'identification. Ces documents recevront donc une

 19   cote, puis il y aura une traduction de ces documents. L'accusation pourra

 20   l'examiner et, si elle a formulé des objections, elle nous en saisira en

 21   temps utile.

 22   Mme Anoya (interprétation): Ceci deviendra la pièce de la défense 54,

 23   c'est une cote d'identification.

 24   M. Milosevic (interprétation): Je tiens à préciser que j'ai gribouillé

 25   dessus pour les besoins des questions que je voulais poser. La version

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  1   sans ces inscriptions manuscrites et annotations de ma part, peut vous

  2   être remise par mes collaborateurs. Parce que là j'ai surligné, souligné

  3   et inscrit certaines questions et ainsi de suite.

  4   Bien. Donc vous n'avez pas lu le livre de Spegelj, non plus?

  5   M. Dulovic (interprétation): Non.

  6   Question: Avez-vous entendu parler des crimes perpétrés par Borislav

  7   Vujkovic et Pero Janjina surnommé "Tromblon"? Avez-vous entendu quoi que

  8   ce soit à ce sujet pendant que vous étiez à Vukovar?

  9   Réponse: Je ne m'en souviens pas.

 10   Question: Très bien, Monsieur Dulovic. Et puisque vous avez traité de ce

 11   que faisaient les tribunaux, savez-vous que Vukovic avait avoué qu'il

 12   avait abattu des soldats non pas seulement à partir des embuscades, mais

 13   qu'il se rapprochait pour tirer à bout portant?

 14   Réponse: J'ai déjà précisé que je n'avais pas de doute que ces choses-là

 15   sont arrivées. Si vous le dites, je veux bien le croire, mais je ne sais

 16   rien au sujet de ces choses-là. Si je le savais, je l'aurais dit. Du

 17   reste, ça s'est passé il y a très longtemps.

 18   Question: Bien, Monsieur Dulovic. Est-ce que le nom "Jastreb" vous dit

 19   quelque chose?

 20   Réponse: Ah oui! Ça, je le sais.

 21   Question: Qui était Jastreb?

 22   Réponse: Jastreb, c'était Mile Dedakovic, le commandant de la défense de

 23   Vukovar. C'est ainsi qu'on l'appelait.

 24   Question: Très bien. Et vous souvenez-vous de son ordre disant à la lettre

 25   ce qui suit. "Qui emprisonne un Chetnik n'a qu'à l'emmener chez lui. Moi,

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  1   je n'en ai pas besoin. Je n'en ai rien à faire."? Tout le monde a

  2   interprété la chose comme quoi les prisonniers devaient tous être abattus.

  3   Réponse: Je ne pouvais pas en entendre parler, parce que c'est une chose

  4   qui s'est passé à l'intérieur de Vukovar. Moi, j'étais à l'extérieur de

  5   Vukovar; pas parmi les Croates, mais parmi les volontaires serbes et les

  6   soldats et autres qui avaient assiégé Vukovar. Comment avais-je pu

  7   entendre parler de cela? Donc entendre parler de ce que Dedakovic avait

  8   donné comme ordre à ses hommes à lui.

  9   Question: Et avez-vous entendu parler d'un nom Zlatko Jankovic qui a tué

 10   un combattant de la Deuxième Guerre mondiale de la guerre de libération

 11   nationale, un invalide qui n'avait pas ses deux jambes?

 12   Réponse: Non.

 13   Question: Avez-vous entendu des noms tels que Marko Filkovic, Kinez,

 14   Zdenko Stefancic, Plavi? Avez-vous entendu parler de ces gens-là?

 15   Réponse: Non, j'ai des noms de personnes avec qui je m'étais entretenu et

 16   qui m'ont dit certaines choses. Mais ces noms-là je ne sais rien au sujet

 17   de ces noms-là.

 18   Question: Bien, Monsieur Dulovic. Mais savez-vous quoi que ce soit au

 19   sujet des explosifs placés sous les maisons serbes? Comme cela a

 20   d'ailleurs été fait par Ante Budimir. Est-ce que ce nom vous dit quelque

 21   chose? Et est-ce que vous savez quoi que ce soit concernant les maisons

 22   serbes que l'on a fait sauter?

 23   Réponse: Non, non.

 24   Question: Prenez, par exemple, le mois de décembre 1993, même le New York

 25   Times, c'est David Binder qui a écrit un texte et qui parle de 10.000

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  1   maisons serbes qu'on a fait sauter à la dynamite en Croatie. Et il a parlé

  2   du nettoyage ethnique de la Croatie des Serbes et en disant que "la

  3   Croatie est le pays le plus pur sur le plan ethnique". Comment lui le

  4   savait, et vous qui étiez sur place ne saviez rien à ce sujet?

  5   Réponse: Peut-être mon collègue a-t-il compté ces maisons-là; moi, je n'ai

  6   pas eu l'opportunité de les compter.

  7   Question: Peut-être avez-vous entendu la déclaration du ministre des

  8   Affaires étrangères de l'époque, M. Granic, qui a dit que l'on avait fait

  9   sauter non pas 10.000 maisons, mais 7.000 maisons; et lui a été d'accord,

 10   au nom du Gouvernement croate, pour dire qu'il y en a eu 7.000 et

 11   qu'aucune enquête n'a été conduite à cet effet?

 12   Réponse: Je n'ai pas écouté ce que disait Granic; jamais.

 13   Question: Et avez-vous entendu parler des noms Miro et Zvonko qui, eux-

 14   mêmes, ont tué une trentaine de personnes au fusil à lunette -Miro et

 15   Zvonko Torolo- dans le courant de ces actions à Vukovar?

 16   Réponse: Non, personne ne m'a parlé de cela.

 17   Question: Et savez-vous quoi que ce soit concernant les mérites d'un

 18   membre du rassemblement de la Garde nationale, un certain Mate Loncar, qui

 19   ne faisait que découper les organes sexuels de ses victimes; et, devant

 20   Jastreb, il a tué plusieurs civils? Est-ce que vous êtes au courant de ces

 21   événements? Est-ce que quelqu'un vous a relaté ces événements, pendant que

 22   vous étiez à Vukovar?

 23   Réponse: Non, non.

 24   Question: Mais vous affirmez que Vukovar a sans cesse été bombardée,

 25   pilonnée, et que les Croates n'ont tiré que pour se défendre contre les

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  1   Serbes?

  2   Réponse: Ça, je l'ai vu.

  3   Question: Et pendant tout ce temps, vous n'avez vu aucun événement qui se

  4   serait passé à Vukovar?

  5   Réponse: Je n'ai pas eu l'opportunité de les voir.

  6   Question: Avez-vous entendu parler d'Ivica Sojic, un commandant à Vukovar,

  7   à savoir ce qu'il avait fait avec son groupe chargé de l'incinération des

  8   cadavres, ou ce que faisait encore un certain Uzovski? Etant donné qu'il y

  9   a là des auditions en audience en justice, et comme vous avez été

 10   journaliste qui avez suivi ces procès, vous êtes-vous intéressé à la

 11   chose?

 12   Réponse: Je n'ai jamais entendu parler de cela. Et il n'y a pas non plus

 13   eu d'informations concernant les procès en cours à l'intention de ces

 14   personnes; on n'a pas précisé non plus où ces procès ont eu lieu.

 15   Question: J'ai ici une déclaration manuscrite de Uzovski. Chacune de ces

 16   pages se trouve être signée.

 17   Il dit: "Ils n'ont pas procédé à l'enterrement des soldats de la JNA parce

 18   qu'ils incinéraient leurs corps. Cela avait été fait par les membres du

 19   rassemblement de la Garde nationale et de la police militaire de la

 20   République de Croatie".

 21   Mais il est précisé que le dénommé Ivan Sojic avait constitué un groupe

 22   particulier, un groupe à part chargé de l'incinération des cadavres des

 23   soldats de la JNA. Et dans sa déposition, il fait état de différents

 24   groupes, 30, 120, 40 et ainsi de suite, à divers endroits, qui ont été

 25   enterrés donc tant au niveau du stade que dans certaines rues, et j'en

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  1   passe.

  2   Savez-vous quoi que ce soit concernant le nombre de personnes abattues et,

  3   comme vous pouvez le constater, enterrées par les soins de ces groupes? Il

  4   y a des dessins des sites de ces cimetières, le site du stade du petit

  5   cimetière, du mini market, donc du petit commerce, de l'hôpital, etc., des

  6   fosses communes?

  7   Est-ce que, Monsieur May, vous êtes intéressé par la déposition de ce

  8   monsieur qui était directeur de l'entreprise communale à Vukovar?

  9   M. le Président (interprétation): Nous allons l'examiner.

 10   M. Milosevic (interprétation): Très bien. Prenez-en possession et

 11   considérez-la.

 12   M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, avez-vous quoi que ce

 13   soit à dire à ce propos?

 14   M. Groome (interprétation): Oui. Nous soulevons une objection au versement

 15   de ce dossier. Nous sommes tout à fait prêts à voir ce monsieur déposer

 16   devant la Chambre et nous devrons bien sûr mener une enquête sur les

 17   allégations qui sont portées ici contre lui. Nous pourrons l'interroger.

 18   (Intervention de l'huissier.)

 19   (Les Juges se concertent sur le siège.).

 20   M. le Président (interprétation): Nous n'allons pas considérer ce document

 21   comme étant recevable. Remettez-le à l'accusé.

 22   Libre à vous, bien sûr, d'appeler ce témoin à la barre, Monsieur

 23   Milosevic.

 24   M. Milosevic (interprétation): Dans votre déposition, en page 3, vous

 25   dites -et je me réfère à l'avant-dernier paragraphe-, vous dites donc que

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  1   les villages serbes n'avaient pas été endommagés, qu'ils étaient intacts.

  2   Et ici, vous avez affirmé hier, en faisant référence à cette déposition,

  3   que certains villages serbes avaient été endommagés mais que les villages

  4   croates ont davantage été endommagés, si j'ai bien pris bonne note de ce

  5   que vous avez dit. Est-ce que vous pourriez nous apporter des précisions?

  6   M. Dulovic (interprétation): Oui. Cela peut-être être relevé de nos jours

  7   encore, si l'on va en voiture à Vukovar. Donc cela dépend d'un village à

  8   l'autre, mais il apparaît avec évidence que les villages croates sont

  9   détruits dans une mesure bien plus grande que cela n'est le cas des

 10   villages serbes, et ces villages se suivent pratiquement l'un l'autre.

 11   Certains villages sont moins détruits, d'autres davantage. Les degrés de

 12   destruction ne sont pas à chaque fois et toujours les mêmes.

 13   Question: Très bien. Et dans le dernier paragraphe de cette page 3, vous

 14   expliquez que vous avez rencontré Veselin Sljivancanin?

 15   Réponse: A Negoslavci.

 16   Question: Vous dites quoi?

 17   Réponse: La première fois, à Negoslavci.

 18   Question: Et vous avez compris que, sur le champ de bataille, il ne

 19   répondait à personne de ce qu'il faisait.

 20   A partir de quoi avez-vous déduit cela?

 21   Réponse: A partir du rapport qu'il avait avec les autres officiers. C'est

 22   l'impression qui avait été la mienne.

 23   Question: Bien. Mais comment pouvez-vous supposer qu'un officier n'est

 24   responsable devant personne?

 25   Réponse: Mais c'est évident, c'est bien noté, c'est bien écrit ici. J'ai

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  1   dit: "sur ce champ de bataille".

  2   Question: Mais dites-moi, étant donné que vous précisez qu'il avait sorti

  3   150 personnes des caves et qu'il avait fait venir des journalistes avec

  4   lui, et qu'il s'agissait pour l'essentiel là de Croates, il y avait aussi

  5   des Serbes, là, n'est-ce pas?

  6   Réponse: Oui, c'est exact.

  7   Question: Qu'est-il arrivé ensuite?

  8   Réponse: Il est arrivé alors une situation où se trouvaient présents tant

  9   des journalistes étrangers que nous-mêmes. Sljivancanin, le commandant

 10   Sljivancanin s'est saisi de son Motorola, a appelé et a parlé… ou a

 11   prétendument discuté avec Mile Dedakovic "Jastreb". Et c'est alors nous

 12   l'avons entendu le dire -je cite-: "Ne laisse pas ces personnes mourir,

 13   mais viens en duel, que nous nous battions l'un contre l'autre, en héros".

 14   Et c'était plus que ridicule!

 15   Question: Enfin, ça, c'est une séquence épique qui, de façon évidente,

 16   voulait dire que c'était honteux que de laisser des civils innocents périr

 17   et que si quelqu'un devait se battre, c'était l'un et l'autre des

 18   commandants en présence. Peut-être était-ce un peu archaïque, mais je ne

 19   vois en quoi cela serait un acte criminel.

 20   Réponse: Cela, personne ne l'a dit. Vous m'avez demandé ce qui s'est passé

 21   et je vous l'ai dit.

 22   Question: Et vous êtes en train d'expliquer que, le 13 novembre, vous

 23   étiez personnellement présent lorsque Miroslav Radic, avec un groupe de

 24   personnes, avec un volontaire expérimenté, s'apprêtait à aller au combat.

 25   Etes-vous sûr qu'il ne s'agissait pas d'une action visant à débloquer des

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  1   casernes ou à sauver des civils?

  2   Réponse: Non, c'était une attaque lancée contre un château d'eau.

  3   Question: Vous avez parlé de Croates là-bas?

  4   Réponse: Je ne les ai pas vus.

  5   Question: Mais pensez-vous qu'il puisse y avoir des civils résidant sur un

  6   château d'eau?

  7   Réponse: Non.

  8   Question: Vous dites que Aleksandar Bojkovski, surnommé "Sasa", vous avait

  9   fait venir pour vous montrer les cadavres de six personnes qui avaient été

 10   membres du Rassemblement de la Garde nationale, et vous constatez que ces

 11   personnes étaient mortes depuis deux ou trois jours de façon évidente.

 12   Réponse: C'était l'évaluation que j'avais faite. Je ne sais pas exactement

 13   de quoi un cadavre peut avoir l'air au bout de deux ou trois jours.

 14   Question: N'entrons pas dans ces détails.

 15   Donc vous avez trouvé louche le fait de ne pas avoir trouvé des armes

 16   autour de ces gens. Pensez-vous qu'il fallait que ces armes restent tout

 17   ce temps autour des cadavres des membres de ce Rassemblement de la Garde

 18   nationale qui avaient été tués au combat?

 19   Réponse: Je n'ai pas dit que j'avais trouvé cela suspect, j'ai juste

 20   constaté. Quand j'ai vu cela, j'ai fait cette constatation.

 21   Question: Mais vous avez dit que, depuis plusieurs jours, ils étaient

 22   morts et qu'à côté d'eux, il n'y avait pas d'arme. Et je suppose que vous

 23   êtes en train de le mentionner parce que vous estimiez que les armes

 24   auraient dû être laissées à côté de ces cadavres?

 25   Réponse: Non, j'ai juste dit qu'il n'y avait pas d'arme à côté d'eux.

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  1   Question: Donc ces membres du Rassemblement de la Garde nationale

  2   n'avaient plus d'armes à leurs côtés au bout de trois jours après leur

  3   mort. Et vous avez dit qu'ils ne portaient pas d'uniforme; et, si j'ai

  4   bien compris votre description d'hier, l'un avait porté un uniforme

  5   quelconque, d'autres avaient manqué de certains éléments ou parties

  6   d'uniforme.

  7   Savez-vous combien de gens ont participé à ces opérations autour de

  8   Vukovar? Et combien de gens il y avait sans uniforme, ayant pris part à

  9   ces opérations?

 10   Réponse: Je ne sais pas et je n'avais aucun moyen de le savoir.

 11   Question: Bien. Dites-moi, je vous prie, vous dites que vous avez écouté

 12   un entretien de Vojislav Seselj et d'un groupe d'officiers: il aurait dit

 13   que cela était un grand examen pour les Serbes, un grand test, il a dit

 14   qu''aucun Oustachi ne saurait sortir vivant de Vukovar", et vous citez que

 15   c'étaient les mots de Seselj. Etes-vous sûr d'avoir entendu cela?

 16   Réponse: Je suis absolument sûr, sans quoi je n'aurais pas noté la chose.

 17   Question: Est-ce que vous voulez dire, Monsieur Dulovic, que vous

 18   inscriviez dans votre carnet de notes seulement des faits? Ou alors, est-

 19   ce que vous faisiez aussi des ébauches d'articles que vous souhaitiez

 20   publier ultérieurement?

 21   Réponse: J'avais plusieurs carnets de notes. Ici, il importait d'entendre

 22   ce que disait le voïvodat.

 23   Question: Bien. Monsieur Dulovic, vous semble-t-il évident le fait que

 24   vous vous êtes efforcé, même dans ce témoignage, d'expliquer de toutes

 25   façons -comme cela est du reste la politique de votre rédaction, de la

Page 11826

  1   rédaction de votre journal, de tous temps- une faute ou une prétendue

  2   culpabilité serbe, sans pour autant parler de ces meurtres en masse, de

  3   ces fosses communes, de ces liquidations de personnes, de ces blocages de

  4   caserne? Ça, vous n'en savez rien?

  5   Réponse: Je n'étais pas là-bas.

  6   Question: Dites-moi, à quelle distance avez-vous prêté cette oreille

  7   attentive aux entretiens de Seselj?

  8   Réponse: Je n'ai pas prêté l'oreille, je n'ai pas été à l'écoute: la porte

  9   était entrebâillée.

 10   Question: Mais dites-moi, en quelle qualité Seselj était-il là-bas?

 11   Réponse: Mais c'est à lui qu'il faut poser cette question.

 12   Question: Si je me souviens bien, il avait été député à l'époque au

 13   Parlement, et il avait été président de son parti, n'est-ce pas?

 14   Réponse: Probable.

 15   Question: Combien de personnes y avait-il à cette réunion?

 16   Réponse: Cinq ou six, à peu près.

 17   Question: Savez-vous les noms de ces personnes.

 18   Réponse: J'en ai donné quelques-uns.

 19   Question: Vous avez donné tous les noms des personnes que vous saviez

 20   donner?

 21   Réponse: Oui.

 22   Question: Vous dites que vous avez vu à Borovo que beaucoup de gens

 23   avaient été détenus dans l'usine de chaussures et qu'il s'agissait de

 24   civils croates, y compris des femmes et des enfants. Vous avez également

 25   vu de grandes quantités d'armes qui avaient été restituées de façon

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  1   évidente. Est-ce que vous êtes en train d'établir une corrélation entre un

  2   grand nombre de personnes avec les armes que vous avez vues au même

  3   endroit?

  4   Réponse: J'établis la corrélation parce que j'étais là lorsqu'ils

  5   sortaient et lorsqu'on les faisait monter dans des autocars. Il y avait là

  6   des soldats et des civils et des femmes.

  7   Question: Bien. Expliquez-moi, s'il vous plaît: qu'est-il arrivé, qu'est-

  8   il advenu de ces gens-là?

  9   Réponse: Ils sont montés dans ces cars et ils sont partis, ont été

 10   emmenés. On ne savait pas, au moment où on les avait emmenés; par la

 11   suite, on nous a dit qu'ils étaient emmenés à Sremska Mitrovica, vers la

 12   prison, mais non seulement vers Sremska Mitrovica. L'information la plus

 13   fraîche à ce sujet dit qu'on les avait emmenés dans une sorte de camp de

 14   détention à proximité de Zrenjanin, dans une cité appelée "Begejci" et

 15   dans une localité qui s'appelle "Stajicevo". On avait mis à part les

 16   civils et, d'autre part, des soldats. Lorsque les recherches seront

 17   terminées, les résultats seront publiés et les premières informations

 18   précisent qu'il y avait eu deux camps de détention à proximité de

 19   Zrenjanin.

 20   Question: Bien. Pour ce qui est des prisonniers, des soldats prisonniers,

 21   je pense, je suppose qu'ils ont été traités comme étant des prisonniers de

 22   guerre?

 23   Réponse: Je ne sais pas.

 24   Question: S'agissant des femmes et des enfants, est-ce que vous êtes en

 25   train de supposer que quelqu'un aurait arrêté ces femmes et ces enfants,

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  1   ou était-ce là une tâche que l'armée avait accomplie aux fins de placer

  2   ces femmes et ces enfants à l'abri pour éviter de les laisser sur un

  3   théâtre de guerre ou un théâtre de combat? Savez-vous si ces gens qui

  4   avaient été logés dans des centres de rassemblement –et je précise qu'il

  5   ne s'agissait pas de camps de détention, mais de centres de

  6   rassemblement-, savez-vous que l'armée n'avait pas disposé de camps de

  7   détention?

  8   Réponse: Je ne sais pas, mais je sais que ces gens avaient été échangés.

  9   Question: Est-ce que vous voulez dire qu'ils ont été confiés à la Croix-

 10   Rouge?

 11   Réponse: Je ne sais pas. Je sais qu'ils ont été échangés contre des

 12   prisonniers serbes; il y a eu un accord de cette nature, un "deal" de

 13   cette nature.

 14   Question: Mais avez-vous quelque renseignement que ce soit relatif à ces

 15   gens qui avaient été soit prisonniers de guerre ou alors installés dans

 16   des camps d'hébergement, des centres d'hébergement, en leur qualité de

 17   civils? Est-ce que vous savez que quelque chose leur serait arrivé?

 18   Réponse: Non, ça, personne ne l'a affirmé.

 19   Question: Bien. Mais vous avez affirmé que vous aviez constaté une

 20   situation anarchique, que tout le monde ouvrait le feu la nuit, que l'on

 21   tirait comme bon semblait à tout un chacun et que, avec deux volontaires

 22   qui étaient ivres, vous avez… Quelle est la partie de la ville que vous

 23   avez visitée?

 24   Réponse: La partie de la ville s'appelle Sajmiste; c'est une partie de la

 25   ville où il y avait uniquement une population serbe, du moins cela était

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  1   valable pour ce qui est de cette rue-là.

  2   Question: Bien. Vous dites qu'un homme, en date du 21 novembre, vous a

  3   relaté que l'on avait tué à Ovcara de 5 heures du soir jusqu'à 1 heure du

  4   matin, pour ne pas répéter tout ce que vous avez dit.

  5   Réponse: Oui, oui.

  6   Question: Je voudrais que nous nous penchions ensemble sur cette

  7   déposition qui est la vôtre, à laquelle vous vous êtes référé hier. Mais

  8   laissez-moi juste retrouver l'endroit.

  9   (Intervention de l'huissier.)

 10   J'imagine que vous n'ignorez pas une chose, à savoir que vous avez été

 11   cité comme témoin mais que les mêmes événements ont fait l'objet

 12   d'enquête, n'est-ce pas, Monsieur Dulovic?

 13   Réponse: Oui.

 14   Question: Et vous dites que des procédures pénales ont été conduites

 15   contre auteur inconnu?

 16   Réponse: Auteurs inconnus, au pluriel.

 17   Question: Oui, vous avez raison, c'est moi qui me suis trompé en utilisant

 18   un singulier.

 19   Donc contre des auteurs inconnus. Et ceci vous permet, vous conduit à

 20   constater que le Tribunal, à savoir le Bureau du Procureur, n'avait pas eu

 21   l'intention d'identifier les vrais auteurs, les véritables auteurs. Est-ce

 22   que j'ai bien compris?

 23   Réponse: Vous avez très bien compris.

 24   M. Milosevic (interprétation): Bon. Et vous dites qu'en fait, et c'est ce

 25   que j'ai cru comprendre hier…

Page 11830

  1   M. le Président (interprétation): Je demande à parler avec le Juriste de

  2   la Chambre.

  3   (Le Président s'entretient avec le Juriste de la Chambre.)

  4   Désolé de vous avoir interrompu, Monsieur Milosevic. Poursuivez, s'il vous

  5   plaît.

  6   M. Milosevic (interprétation): Etant donné que vous êtes un journalisme

  7   expérimenté, j'imagine… puisque vous avez suivi les activités des

  8   tribunaux, j'imagine que l'on conduit des procès contre des inconnus

  9   lorsqu'on n'arrive pas identifier les auteurs de certains crimes.

 10   Vous dites dans la page 4 de cette déposition que "plusieurs années plus

 11   tard, partant de ces descriptions, je suis par hasard arrivé à une

 12   information disant qu'il pourrait s'agir d'un certain Slavisa Pavlovic,

 13   originaire de Smederevo". Vous dites: "Je ne sais pas où se trouve cet

 14   homme, je ne sais pas s'il est en vie et je n'ai pas non plus confirmé que

 15   ces renseignements étaient exacts." (Fin de citation.)

 16   Donc, même dans cette déposition qui est faite en votre qualité, par vous

 17   en qualité de témoin, vous dites que vous ne savez pas si ces

 18   renseignements sont exacts. Vous mentionnez le fait qu'il se pourrait

 19   qu'il s'agisse d'un certain Slavisa Pavlovic, originaire de Smederevo. Or

 20   le procès a été conduit contre des auteurs inconnus et vous participez en

 21   qualité de témoin.

 22   Dans votre témoignage, vous indiquez qu'il se pourrait qu'il s'agisse d'un

 23   certain Slavisa Pavlovic. Donc, avant que vous n'indiquiez qu'il se

 24   pourrait que ce soit untel, avait-il disposé d'un nom ou pas, ou avez-vous

 25   précisé cette possibilité pour ne pas affirmer que cela est exact? Est-ce

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  1   qu'en votre qualité de journaliste expérimenté, n'avaient-ils pas pu

  2   reformuler leur acte d'accusation et dire que c'était un acte d'accusation

  3   à l'encontre de Slavisa Pavlovic plutôt que contre des inconnus, avant que

  4   d'avoir procédé à une enquête?

  5   M. Dulovic (interprétation): Mais votre question?

  6   Question: Mais vous avez dit que l'Etat n'était pas intéressé par le fait

  7   de découvrir….

  8   Réponse: Je n'ai pas mentionné l'Etat!

  9   Question: Peu importe. Vous avez parlé des autorités du tribunal, vous

 10   avez affirmé qu'ils n'étaient pas intéressés par la découverte ou

 11   l'identification de certaines personnes. Donc les autorités judiciaires,

 12   en l'occurrence, ont lancé un procès. Et partant de quoi est-ce que vous

 13   êtes en mesure de déduire que ces autorités, ces mêmes autorités n'étaient

 14   pas intéressées par l'identification de ces auteurs?

 15   Réponse: J'estime qu'à l'époque, à ce moment-là, les autorités ne tenaient

 16   vraiment pas à courir après les criminels, mais que cela était un

 17   subterfuge, une farce. Ce Slavisa Pavlovic dont j'ai parlé ici, lorsqu'il

 18   nous a raconté -et pas à moi seul, nous étions plusieurs- comment les

 19   exécutions à Ovcara se sont déroulées, je lui en ai donné description.

 20   Mais son nom m'a été communiqué par une personne qui était censé savoir la

 21   chose; cette personne était chargée de l'exercice du contrôle, pour ne pas

 22   dire de l'exercice de poursuite judiciaire de criminels, que je n'ai pas

 23   vue à Vukovar mais qui avait été là-bas. Et je l'ai ouï dire de la bouche

 24   du général Aleksandar Vasiljevic qui, au bout d'un certain temps, lorsque

 25   je lui ai raconté cet événement, a déclaré qu'il s'agissait de Slavisa

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  1   Pavlovic originaire de Smederevo.

  2   Je suppose que l'armée devait être au courant, à savoir le Tribunal devait

  3   être au courant s'il voulait sérieusement lancer des poursuites et juger

  4   les auteurs de crimes de guerre. Or il n'y avait pas eu d'intentions

  5   sérieuses dans ce sens de la part des autorités, comme vous le dites.

  6   M. le Président (interprétation): Je vais devoir interrompre, car le

  7   moment est venu de suspendre l'audience.

  8   Monsieur Milosevic, nous pourrons continuer demain matin. Il vous restera

  9   deux heures pour la fin de votre contre-interrogatoire de ce témoin,

 10   compte tenu du temps qui vous a été imparti.

 11   Suspension.

 12   Je vous demanderai, Monsieur Dulovic, de revenir dans ce prétoire, à 9

 13   heures demain.

 14   (L'audience est levée à 13 heures 48.)

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