Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Mercredi 20 novembre 2002.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 3.)

  3   (Audience publique avec mesures de protection.)

  4   (Le Milan Babic est dans le prétoire.)

  5   (Matière relative à la protection du témoin.)

  6  M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff, je comprends

  7   que nous sommes à huis clos partiel pour une question que vous voudriez

  8   soulever.

  9  (Huis clos partiel à 9 heures 4)

 10   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, nous voudrions soulever une

 12   question grave s'agissant de ce témoin, Monsieur le Président. Par le biais

 13   du "programme Outreach" du Tribunal, nous avons reçu des informations selon

 14   lesquelles le nom du témoin a été mentionné dans le rapport quotidien

 15   concernant les personnes importantes, le "VIP News Report"; c'est une

 16   agence de presse qui a son siège à Belgrade. Nous avons préparé

 17   un document à l'intention de chacun et chacune présents dans le prétoire.

 18   (Intervention de l'huissière.)

 19   Page 5 de ce rapport quotidien: on trouve un rapport concernant le

 20   Tribunal de La Haye et la poursuite du procès de Milosevic après la pause.

 21   Et là, on fait référence à des parties du témoignage de ce témoin donné en

 22   public, mais, au troisième paragraphe avant la fin, on dit: "Peter Michael

 23   Muller, représentant juridique du Témoin 36, qui est, d'après les

 24   documents de l'accusation, un accusé lui-même et qui va bientôt être mis

 25   en accusation. Ce Milan Babic est en train de déposer au Tribunal de La

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  1   Haye."

  2   Et au dernier paragraphe, on dit: "Des anciens représentants officiels de

  3   la Krajina qui vivent aujourd'hui à Belgrade disent qu'il est possible

  4   qu'en vertu de l'article concernant la protection, M. C-061 soit Milan

  5   Babic, qui était au moment des événements au Gouvernement de la SAO de

  6   Krajina." (Fin de citation.)

  7   Tout d'abord, nous disons qu'il n'y a pas de document par lequel ce témoin

  8   est accusé par le Bureau du Procureur. Les seuls documents qui existent

  9   sont l'Acte d'accusation où le témoin est mentionné comme un coauteur et

 10   puis il y a aussi ce document, le verdict rendu par un tribunal croate,

 11   qui a été discuté uniquement à huis clos partiel. Le statut du témoin a

 12   fait l'objet aussi d'une discussion à huis clos partiel.

 13   Ceci alarme, inquiète le Bureau du Procureur puisque personne n'a été

 14   informé en dehors du Tribunal par le Bureau du Procureur du statut du

 15   témoin. L'accusation s'inquiète vivement, mais, en plus de cela, elle va

 16   essayer de voir quel est le rapport qui a donné lieu à ces articles dans

 17   la presse, car inévitablement il doit y avoir une source à ces rapports

 18   publiés par l'agence de presse.

 19   Nous allons tirer ceci au clair, mais nous voulions aviser la Chambre de

 20   première instance de l'existence de ce problème. Pour le moment, il n'y a

 21   que des spéculations quant à savoir qui est ce témoin C-36. L'accusation

 22   tient à maintenir l'anonymat quant à la personnalité de l'identité de ce

 23   témoin et nous allons procéder comme nous l'avons fait jusqu'à présent:

 24   nous aurons des moments à huis clos partiel lorsqu'il y a des éléments qui

 25   risquent de dévoiler l'identité du témoin. L'accusation espère que cet

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  1   événement ne va pas dissuader ce témoin de poursuivre sa déposition et

  2   elle espère que le témoin ne craindra pas de dire la vérité.

  3   Voilà tout ce dont voulait parler le Bureau du Procureur.

  4   M. le Président (interprétation): Merci. Je pense qu'une enquête va se

  5   poursuivre et, si vous avez un nouveau rapport à nous faire, vous pourrez

  6   le faire à huis clos.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le

  8   Président.

  9   M. le Président (interprétation): Repassons en audience publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 8.)

 11   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes maintenant en audience publique,

 12   Monsieur le Président.

 13   (Interrogatoire principal du Milan Babic par Mme Uertz-Retzlaff.)

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin. Vous

 15   m'entendez?

 16   Milan Babic (interprétation): Oui.

 17   Question: Hier, nous avions terminé par la discussion concernant une

 18   réunion et nous avions parlé des tentatives d'unification des deux Krajina

 19   et de l'objet des discussions qui avaient eu lieu.

 20   En conclusion, je voudrais simplement vous soumettre deux documents: pièce

 21   352, intercalaire 46 et intercalaire 47.

 22   (Intervention de l'huissière.)

 23   Intercalaire 46: c'est un contrat de coopération passé entre le District

 24   autonome serbe de Krajina et la municipalité de Bosanska Krajina, ceci le

 25   24 juillet 1991. Alors qu'à l'intercalaire 47, on a une déclaration

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  1   d'unification de la communauté des municipalités de Bosanska Krajina et de

  2   la SAO de Krajina, en date du 27 juin 1991.

  3   Inutile de discuter de ces documents dans le détail. Je vous demande

  4   simplement si vous êtes en mesure d'authentifier ces documents. Sont-ce

  5   bien là les documents qui sont à la base des événements que vous avez

  6   décrits?

  7   Réponse: En effet, ces deux documents se rapportent aux événements dont

  8   j'ai parlé. Cela traite de la coopération dont il a été question à Banja

  9   Luka et de la conférence de la déclaration d'unification de Bosansko

 10   Grahovo.

 11   Question: Pour ce qui est de l'unification, ce second document n'est pas

 12   signé. On voit le nom de Kupresanin. Est-ce que ceci tient au fait que M.

 13   Karadzic est intervenu de la façon que vous avez décrite hier?

 14   Réponse: En effet. Karadzic a interdit la chose; il a demandé aux députés

 15   de la Région autonome de Bosanska Krajina de revenir et de voter une fois

 16   de plus contre la déclaration, mais ils ont refusé de le faire.

 17   Question: J'aimerais vous soumettre un troisième document, Monsieur le

 18   Témoin. Dans ce contexte, il s'agit de l'intercalaire 45 de la pièce 352.

 19   (Intervention de l'huissier.)

 20   Il s'agit d'une lettre envoyée par Radovan Karadzic. Dans cette lettre,

 21   nous lisons -je cite-: "En même temps que nos félicitations, recevez

 22   également l'assurance que le Conseil national serbe de Bosnie-Herzégovine

 23   restera l'unité spirituelle, culturelle, politique et étatique, mais

 24   signifiera également l'unité de l'Etat autonome serbe de Krajina et des

 25   autres régions serbes de cette alliance et de cette unité avec la mère

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  1   patrie serbe, au sein d'une Yougoslavie fédérale, démocratique et libre,

  2   quelle que soit sa taille".

  3   Inutile d'en parler. Ce document ne porte pas de date. Pourriez-vous nous

  4   dire à quel moment ce document a été rédigé, envoyé plus exactement? Le

  5   savez-vous à peu près?

  6   Réponse: Cela s'est fait après le 21 décembre 1990.

  7   Question: Comment le savez-vous? Est-ce à cause des félicitations qui sont

  8   adressées?

  9   Réponse: Oui, le 21 décembre, on a proclamé l'existence de cette province

 10   ou Région autonome serbe. En date du 21 décembre justement.

 11   Question: Hier, nous avons parlé de l'objectif poursuivi par la présence

 12   de tous les Serbes en un seul Etat. Vous avez expliqué quelle était la

 13   perception de cette possibilité par Seselj, et vous avez parlé de ce qui

 14   avait été prévu, planifié et de ce qui n'avait pas été mentionné ou évoqué

 15   s'agissant de la population non serbe du territoire.

 16   Qu'est-ce que vous avez vu qui se passait sur le terrain, s'agissant de la

 17   population non serbe dans les SAO de Croatie?

 18   Réponse: Au mois d'août 1991, l'armée populaire yougoslave est entrée en

 19   guerre avec la Croatie, et elle a déployé des activités de combat de façon

 20   à déplacer la ligne de front en direction de la partie adverse, se servant

 21   d'abord de l'artillerie lourde. C'est ce qui a contraint le gouvernement

 22   croate et la population croate à se retirer et quitter ces territoires. De

 23   cette façon, depuis le mois d'août 1991, la JNA a conduit une guerre de

 24   façon à occuper des territoires en faisant en sorte qu'il ne reste pas sur

 25   ce territoire de population croate, ou très peu. Les maisons, les

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  1   installations ont été détruites, tant pendant les combats que par la

  2   suite, les biens ont été pillés et c'est de cette façon-là que les

  3   territoires ont été occupés moyennant le concours des autres formations

  4   armées qui faisaient partie de cette JNA.

  5   Question: A quelles autres formations armées pensez-vous?

  6   Réponse: Il s'agissait des unités de la Défense territoriale, sous le

  7   commandement de la JNA et de la police de la Krajina, ainsi que ce que

  8   l'on désignait "unités de volontaires", placées sous le contrôle des

  9   structures parallèles de la sûreté d'Etat ou de la police de la Krajina,

 10   ainsi que les unités qui étaient commandées par les membres de la sûreté

 11   d'Etat de Serbie.

 12   Question: Où avez-vous vu de telles activités se déployer? Pourriez-vous

 13   nous dire le nom d'endroits où vous avez vu cela se passer?

 14   Réponse: J'ai vu cela sur le territoire de Kijevo, à proximité de Velika,

 15   dans la région de Drnis, dans la région avoisinante d'Obrovac, puis à

 16   proximité de Maslenica, à proximité de Kostajnica, tout près de Glina,

 17   vers Vidusevac puis Petrinja, Slunj et autres localités, dans ces mêmes

 18   régions.

 19   Question: Dans la région de Kostajnica, est-ce que les villages de Dubica,

 20   Cerovljani et Bacin ont été attaqués dans ces conditions, de cette façon-

 21   là?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Et dans la région proche de Plaski, est-ce que Saborsko,

 24   Poljanak et Lipovanic, est-ce que ces villages ont aussi été attaqués de

 25   la même façon?

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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Près de Knin, est-ce que Skabinja, Nadin et Bruska ont été des

  3   villages attaqués de la même façon?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Les villages que nous venons de mentionner, étaient-ce des

  6   villages croates?

  7   Réponse: Oui, croates ou majoritairement croates.

  8   Question: Est-ce que ces villages constituaient ou représentaient une

  9   menace, un danger pour la JNA ou pour les Serbes de la région?

 10   Réponse: Non.

 11   Question: Vous avez dit que diverses formations étaient impliquées. Est-ce

 12   que ces formations sont entrées en action d'une façon particulière; disons

 13   que, si certaines commençaient, d'autres suivaient? Pourriez-vous nous

 14   décrire la façon dont ces attaques étaient menées?

 15   Réponse: Eh bien, tout simplement, d'après ce que j'en sais, il y avait

 16   une règle. A l'occasion des attaques et des combats, il y avait d'abord

 17   les unités de police, des unités de volontaires, à savoir les unités

 18   commandées par la sûreté d'Etat, la DB; ils étaient là pour provoquer,

 19   pour ouvrir le feu à titre sporadique vers des agglomérations. Puis on

 20   ouvrait le feu au mortier et pratiquement, c'était pour provoquer une

 21   réaction. Puis venaient l'armée populaire yougoslave avec l'artillerie et

 22   toutes les structures qui lui étaient subordonnées.

 23   Question: Vous avez parlé de la sûreté de l'Etat. A quelle sûreté de

 24   l'Etat pensiez-vous lorsque vous avez dit que celle-ci était impliquée?

 25   Réponse: Sûreté d'Etat de Serbie.

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  1   Question: Au moment où la JNA s'était ralliée et avait attaqué, qu'est-ce

  2   qui se passait après la prise d'un village?

  3   Réponse: Ce qui arrivait, c'étaient des pillages, des mises à feu.

  4   Question: Et qui étaient les auteurs? Quelles étaient les formations qui

  5   ont participé?

  6   Réponse: Cela a été fait par la JNA également, pendant qu'elle avait

  7   exercé le contrôle sur ces territoires. Notamment, je suis au courant d'un

  8   cas à Drnis. Puis, elle abandonnait ce territoire sans contrôle aucun,

  9   pendant un certain temps. La police n'établissait pas de contrôle du tout

 10   et il s'ensuivait un pillage généralisé.

 11   Question: Qu'a fait la population croate au moment où ces attaques sont

 12   survenues?

 13   Réponse: Elle s'enfuyait.

 14   Question: Est-ce que qu'il y a des gens qui sont restés? Et s'il y a des

 15   gens qui sont restés, que leur est-il arrivé?

 16   Réponse: Il est resté très peu de gens, essentiellement des gens âgés.

 17   Puis il y avait des meurtres individuels qui, le plus souvent, n'étaient

 18   jamais… n'ont jamais été élucidés.

 19   Question: Est-ce qu'il y a des gens qui ont été détenus également?

 20   Réponse: Oui, il y a eu des personnes détenues.

 21   Question: Et ces personnes placées en détention, pendant leur détention,

 22   ont-elles subi des mauvais traitements? Le savez-vous?

 23   Réponse: J'ai entendu des récits au sujet de mauvais traitement, de

 24   harcèlement de gens dans les prisons.

 25   Question: Est-ce qu'il y a des prisons qui ont été créées à Knin même? Et

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  1   savez-vous si, dans ces endroits, dans ces prisons, des gens ont subi des

  2   sévices, des mauvais traitements?

  3   Réponse: Il y avait deux prisons à Knin; l'une d'entre elles avait été

  4   tenue par la police et l'autre par la JNA. J'ai appris qu'il y avait eu de

  5   mauvais traitements; les gens me l'ont raconté notamment dans la prison

  6   qui avait été tenue par la police.

  7   M. Kwon (interprétation): Quand avez-vous appris cela? Quand en avez-vous

  8   entendu parler?

  9   Milan Babic (interprétation): Vers la fin de l'année 1991 ou début 1992;

 10   c'est ce qui m'a été dit par le ministre de la Justice, Risto Matkovic.

 11   Par la suite, en 1993 il y a eu pas mal de récits à sujet provenant de

 12   gens tout à fait ordinaires. C'est la raison pour laquelle M. Risto

 13   Matkovic avait essayé, s'était efforcé de prendre sur soi ou sous son

 14   autorité la prison qui avait été tenue par la police.

 15   M. Kwon (interprétation): Merci.

 16   M. le Président (interprétation): Je voudrais un éclaircissement. Vous

 17   avez dit, Monsieur le Témoin –je regarde si je peux retrouver le passage

 18   concerné-, vous avez dit ceci: après que la population s'est enfuie;

 19   certaines personnes sont restées, surtout des personnes âgées. Mais vous

 20   avez dit qu'il y avait eu "des meurtres individuels de particuliers", puis

 21   vous avez dit ceci "qui, dans la plupart des cas, n'étaient pas élucidés".

 22   (Fin de citation.)

 23   Ceci n'est pas très clair. Que vouliez-vous dire par là, lorsque vous avez

 24   employé le terme "élucidés"? C'est peut-être un problème de traduction qui

 25   s'est posé là, mais tirons ceci au clair, s'il vous plaît.

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  1   Milan Babic (interprétation): Eh bien, l'enquête qui a été conduite n'a

  2   pas abouti à la découverte du coupable de ces meurtres.

  3   M. le Président (interprétation): Fort bien.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, je voudrais que

  5   nous écoutions certaines écoutes qui portent sur ce sujet, mais auparavant

  6   je vous demande ceci, car j'ai oublié: ceux qui sont restés derrière, en

  7   arrière, est-ce que ces personnes âgées ont été expulsées par la force

  8   pour partir dans d'autres territoires qui se trouvaient à l'extérieur de

  9   ce territoire contrôlé par les Serbes?

 10   Milan Babic (interprétation): J'ai ouï dire qu'il y a eu des cas où

 11   certains employés locaux étaient contraints à abriter, à cacher ces gens

 12   et à les protéger contre la DB, à les cacher dans des villages. Et j'ai

 13   ouï dire qu'un groupe a été aidé pour pouvoir quitter la région qui était

 14   sous leur contrôle et passer dans des régions qui étaient sous le contrôle

 15   du gouvernement croate. J'ai appris dans les l'immédiat également qu'il y

 16   a eu des déportations en masse, comme cela a été le cas à Ilok.

 17   J'ai ouï dire aussi que des gens de Kostajnica, des Croates de Kostajnica

 18   ont dû quitter ainsi la région, suite à la prise de ces territoires par

 19   les effectifs serbes.

 20   Question: Vous avez dit que des personnes officielles de ces localités

 21   avaient dû essayer d'abriter ces personnes. Vous avez parlé dans ce cadre

 22   de la police, de la sûreté d'Etat: qu'il fallait les protéger, les mettre

 23   à l'abri de la police et de la sûreté d'Etat. Est-ce là cette structure

 24   parallèle dont vous avez déjà parlé auparavant qui s'était formée autour

 25   de "Frenki" Simatovic et de Milan Martic?

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  1   Réponse: Oui, eux et les gens qui étaient sous leurs ordres, sous leur

  2   protection, qui étaient en connexion, en relation avec eux.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Quels sont ces officiels? Je pense,

  4   Monsieur le Président, qu'il faut passer un moment à huis clos partiel.

  5   (Audience à huis clos partiel à 9 heures 27)

  6   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  7   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation):

  9   Qui vous l'a dit? Quelle personne officielle?

 10   Milan Babic (interprétation): (expurgée)

 11   (expurgée) . Une fois arrivé à

 12   Belgrade, après ces événements, il m'a dit que ces gens qui étaient sous

 13   la protection de "Frenki" ou qui étaient en relation avec celui-ci ont dû

 14   se cacher dans une maison pour ne pas être abattus. Ils ont dû se cacher

 15   (expurgée), mais cela n'a pas suffi; il a fallu les raccompagner

 16   jusqu'à (expurgée) sur des territoires qui étaient sous autorité du

 17   gouvernement croate.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que nous pouvons repasser en

 19   audience publique, Monsieur le Président.

 20   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 28.)

 21   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous allons maintenant diffuser une

 23   partie d'une écoute. Il s'agit de la pièce 353, intercalaire 16.

 24   Nous avons scindé cette écoute en deux parties: il y a une piste 2 qui

 25   nous intéresse, ainsi que la piste n°3. Nous allons maintenant diffuser.

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  1   Il s'agit de la piste n°2.

  2   (Début de la diffusion de la cassette.)

  3   "Premier intervenant (interprétation): Il a vraiment l'intention de fermer

  4   la 2? Il est fou ou quoi?

  5   Deuxième intervenant (interprétation): Oui, il est fou.

  6   Premier intervenant (interprétation): Il faut le tabasser."

  7   (Fin de la diffusion de la cassette.)

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Peut-on transmettre la transcription

  9   de l'écoute au témoin?

 10   Ce segment qui vient d'être diffusé est indiqué en tant que tel dans la

 11   transcription en anglais. Là aussi, nous avons une indication de ce

 12   passage dans la traduction.

 13   Est-ce que nous pouvons essayer de réécouter le passage?

 14   M. Kwon (interprétation): Quel est le numéro de page? Je ne vois pas

 15   d'indication.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Eh bien, le premier segment qui vient

 17   d'être diffusé se trouve à la page 2 et ça commence par: "Où est-ce

 18   qu'il…" et ça se termine par les mots suivants: "Vous avez offert" ou "Tu

 19   as offert ce que moi, je n'aurais jamais offert".

 20   M. le Président (interprétation): Pour que tout le monde soit en mesure de

 21   suivre ce qui se passe, ne serait-ce pas une bonne idée, Madame Uertz-

 22   Retzlaff, de nous montrer les bases de cette écoute? Vous pouvez peut-être

 23   le demander au témoin, puisqu'il a entendu ces voix.

 24   Pourrait-on demander au témoin qui sont ces personnes?

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Eh bien, j'aurais bien voulu qu'il y

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  1   ait d'abord une traduction de cette écoute mais, du fait que c'est pas

  2   possible de traduire, je ne pense pas qu'il soit utile de poursuivre la

  3   diffusion.

  4   En fait, c'étaient des questions apportées pour vous aussi.

  5   Monsieur le Témoin, qui parle?

  6   Milan Babic (interprétation): J'ai reconnu la voix de Radovan Karadzic.

  7   L'autre voix, je ne l'ai pas reconnue.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous allons peut-être poser la

  9   traduction en anglais sur le rétroprojecteur.

 10   M. Kwon (interprétation): Je vais peut-être essayer de vous aider, Madame

 11   Uertz-Retzlaff. Vous avez distribué un classeur séparé pour les écoutes

 12   qui vont être diffusées à l'audience. Mais en fait, l'ordre retenu dans ce

 13   classeur n'est pas le bon. Je pense qu'ici, nous parlons du premier

 14   document?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, nous parlons du second. Nous

 16   avons déjà diffusé le premier extrait. Et en fait, l'ordre de diffusion

 17   est celui qui est repris dans les documents.

 18   M. Kwon (interprétation): Fort bien. Donc c'est le premier document. Ce

 19   qui est fait qu'il y a peut-être une confusion qui s'est ainsi semée dans

 20   l'esprit des interprètes.

 21   Vous allez vérifier, n'est-ce pas?

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Moi, je n'ai pas ce classeur sous les

 23   yeux.

 24   M. le Président (interprétation): Eh bien, essayez de vous le procurer

 25   pendant la pause. De cette façon, nous parlerons bien du seul et même

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  1   document.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En fait, je l'ai sous les yeux

  3   maintenant. Les interprètes devraient avoir copie du document.

  4   (Les interprètes précisent qu'ils ne disposent pas du surlignage; ce n'est

  5   pas indiqué nulle part. )

  6   M. le Président (interprétation): Ne perdons pas davantage de temps.

  7   Le témoin pourra-t-il nous dire qui est le deuxième intervenant dans cette

  8   conversation s'il entend un extrait plus long?

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Connaissez-vous l'identité de l'autre

 10   intervenant, de l'autre orateur, de celui qui parle en plus de M.

 11   Karadzic?

 12   Milan Babic (interprétation): Eh bien, suite à l'entretien que j'ai pu

 13   entendre tout à l'heure et ayant vu la transcription, suite aussi aux

 14   renseignements fournis par l'autre interlocuteur, le deuxième

 15   interlocuteur serait Gojko Djogo, le Président de l'association des Serbes

 16   originaires de Bosnie-Herzégovine à Belgrade.

 17   Question: Vous connaissiez cet homme?

 18   Réponse: Je l'ai rencontré à plusieurs reprises, oui.

 19   Question: Je pense que maintenant, nous allons respecter l'ordre des

 20   transcriptions. Nous sommes maintenant à la page 2; vous la voyez sur le

 21   rétroprojecteur.

 22   On dit -je cite-:

 23   "Premier intervenant: Où est-ce qu'il veut commencer une guerre à

 24   Sarajevo? Est-ce qu'il est fou?

 25   -Deuxième intervenant: Oui. Je pense qu'ils devraient être battus s'ils

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  1   commencent la guerre. Ils vont… Ils vont, ils vont disparaître.

  2   -Premier intervenant: Oui, il y aura beaucoup de sang versé.

  3   -Deuxième intervenant: Oui, ils vont disparaître; les gens vont

  4   disparaître et vont être éliminés de la terre s'ils insistent maintenant.

  5   Leur seule chance, c'était d'accepter ce que nous leur avions offert et

  6   nous leur avons offert trop de choses. Mais ceci…" (Fin de citation.)

  7   Ici, il parle de ceux à qui on a offert quelque chose. De qui s'agit-il?

  8   Réponse: Des Musulmans en Bosnie-Herzégovine, de la population musulmane.

  9   Question: Consultons maintenant la page 6; c'est là que se trouve la

 10   deuxième partie surlignée, indiquée dès lors. Nous allons le placer sur le

 11   rétroprojecteur de façon où je pourrai lire:

 12   "-Oh! mon Dieu, essayons de nettoyer ceci. En une nuit, ils ont tué huit

 13   personnes. Pourquoi est-ce qu'ils n'ont pas, après cette dernière nuit,

 14   attaqué Dubrovnik, mon gars?

 15   -Réponse: Oui, ils les ont tués du côté bosnien. D'abord, huit personnes à

 16   Ravno."

 17   -Est-ce qu'on parle ici de Ravno qui se trouve à Popovo?

 18   -Réponse: Oui, du côté de la Bosnie, de la Bosnie-Herzégovine.

 19   -Question: Et tu sais ce qu'il faudrait faire? C'est une raison

 20   suffisamment bonne pour faire une descente sur Dubrovnik ce soir.

 21   -Réponse de M. Karadzic: Oui." (Fin de citation.)

 22   De quel Ravno parle-t-on ici? Et on parle ici du meurtre de dix personnes.

 23   De quoi s'agit-il? Le savez-vous?

 24   Réponse: C'est une localité en Herzégovine, sur le territoire donc de la

 25   Bosnie-Herzégovine, localité se trouvant à proximité de Dubrovnik. C'est

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  1   là que des combats ont eu lieu et des personnes ont été tuées, des Serbes.

  2   Question: Et maintenant, nous passons à l'extrait suivant indiqué,

  3   surligné, qui commence à la même page.

  4   Réponse: Excusez-moi. Excusez-moi, je me corrige. Je sais qu'il y a eu des

  5   combats, je sais qu'il y a eu des personnes qui ont été tuées, mais je ne

  6   sais pas si elles étaient Serbes ou d'un autre groupe ethnique. Donc

  7   disons que ce sont des personnes qui ont été tuées.

  8   Question: Citation suivante: c'est Radovan Karadzic qui parle:

  9   "-Non, il n'y en a pas. Ils ont poussé des parlementaires et responsables

 10   à suivre cette idée, à savoir qu'il faudrait qu'ils obtiennent un Etat. Et

 11   avec cette idée, ils ont fait peur aux Serbes, comme si les Serbes avaient

 12   fait le moindre mal à qui que ce soit. Et puis, ils ont pris cet

 13   engagement selon lequel, maintenant, il y a ce Milos -comment il

 14   s'appelle…- et puis, il y a cet Izetbegovic, l'engagement qu'il a pris

 15   envers Tudjman et puis Tudjman envers lui. Et puis, l'un encourage

 16   l'autre, vous savez. Et puisqu'il y a cet Izetbegovic qui a promis à

 17   Tudjman toute la Bosnie, il y a Tudjman qui les encourage. Et il lui

 18   promet que les Musulmans vont se soulever contre les Serbes pour

 19   combattre.

 20   -Gojko Djogo: Vous allez à leur mentir un peu plus, à leur donner du lait

 21   et du miel jusqu'à ceci, jusqu'à ce que ce travail soit accumulé, jusqu'au

 22   moment où ils ont déterminé…, jusqu'au moment où ils auront nettoyé le

 23   terrain. Pour toujours.

 24   -Radovan Karadzic: Ah mais non! Et ils doivent savoir qu'il y a 20.000

 25   Serbes autour de Sarajevo. Ce n'est pas normal. Ils vont disparaître et

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  1   Sarajevo sera un creuset, une fournaise où vont mourir 300.000 Musulmans.

  2   Ils ne sont pas normaux. Je ne sais pas. Je vais devoir leur dire

  3   ouvertement maintenant. Ne soyez pas trop sûr de votre chance, elle aura

  4   une fin. Il y a des limites à cela. Il y a 3 ou 400.000 Serbes armés en

  5   Bosnie-Herzégovine. Que pensez-vous? En plus, il y a l'armée, le matériel

  6   technique et tout cela. Que pensez-vous que vous puissiez faire? Faire une

  7   sécession comme la Croatie l'a fait? C'est ce qu'ils ont fait

  8   littéralement. Hier, ils nous ont dit au cours des négociations, je veux

  9   dire à la séance de l'assemblée, que la Bosnie souveraine était une Bosnie

 10   indépendante au cas où la Yougoslavie se terminerait."

 11   Réponse: Eh bien, il s'agit des positions avancées par Alija Izetbegovic,

 12   autrement dit les Bosniens, les Musulmans et l'attitude que Karadzic avait

 13   à leur égard.

 14   Question: Est-ce qu'il y avait effectivement 20.000 Serbes armés autour de

 15   Sarajevo? Le savez-vous?

 16   Réponse: Je ne sais pas exactement combien ils étaient, mais je sais que

 17   les Serbes s'étaient armés autour de Sarajevo.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Me Tapuskovic

 19   souhaiterait intervenir.

 20   M. le Président (interprétation): Maître Tapuskovic?

 21   M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, je pense que nous

 22   avons débattu de la question et je crois que le témoin n'est censé que

 23   reconnaître les voix, il n'est pas là pour commenter ce que quelqu'un

 24   avait pensé en disant telle ou telle chose.

 25   M. le Président (interprétation): Effectivement, le témoin ne peut pas

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  1   imaginer quelles sont les pensées de quelqu'un d'autre. Ça, c'est

  2   quelqu'un d'autre qui doit le dire. Mais il peut déposer à propos de faits

  3   dont il est au courant et qui sont le produit de ce qui a été dit sur

  4   cette cassette.

  5   Poursuivez, Madame Uertz-Retzlaff.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous allons maintenant passer à la

  7   citation surlignée suivante qui se trouve à la page 8 en anglais.

  8   Monsieur Radovan Karadzic y dit ceci: "Nous n'allons pas les forcer à

  9   faire quoi que ce soit, mais ils n'auront aucun moyen de réussite. Je

 10   pense que ceci est clair pour l'armée, pour tout le monde: ça va être un

 11   bain de sang. L'armée ne va pas, disons, utiliser 2 avions, mais va en en

 12   utiliser 20 pour chacune des opérations lancées." (Fin de citation.)

 13   Nous allons maintenant voir une autre citation. Page 10: référence à

 14   Vukovar et à M. Joko. Je pense que ceci se trouve à la page 10.

 15   "-Ce foutu Vukovar est une épine dans le pied. Ce n'est pas important, ils

 16   sont assiégés. Il n'y a plus que quelques rats dans ce trou. Ce qui est

 17   plus important, c'est que la Bosnie soit pleine de soldats. Tu le sais".

 18   (Fin de citation.)

 19   A l'époque, est-ce que la Bosnie était remplie de soldats? Et si elle

 20   l'était, quels étaient ces soldats? De quels soldats s'agissait-il?

 21   Milan Babic (interprétation): C'étaient des soldats de la JNA.

 22   Question: Ce qu'on dit ici à propos de Vukovar, est-ce que ceci cadre bien

 23   avec le souvenir que vous avez personnellement des événements?

 24   Réponse: Oui, je sais que Vukovar a été pendant de longs mois encerclée

 25   par les formations de la JNA et les effectifs qui étaient sous le

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  1   commandement de celles-ci. Et ceci s'est prolongé jusqu'au 18 novembre

  2   1991.

  3   Question: Page 14, on trouve un autre extrait dans lequel on fait des

  4   références à des territoires. Monsieur Joko dit ceci: "Désolé, il devrait

  5   dire que c'est de la stratégie ou c'est stratégique. Vous savez, deux ou

  6   trois villages, comme ils l'ont fait ici. Mon chapeau pour ce qu'ils ont

  7   fait, chapeau bas. Dans cet acte barbare, tout brûlait. Voilà, comme ça

  8   l'histoire est terminée. C'est la fin de l'histoire. Un certain

  9   territoire, celui qui se trouve près de la frontière, un certain

 10   territoire doit être nettoyé". (Fin de citation.)

 11   Savez-vous à quoi ceci renvoie? Au fait, il y a auparavant une autre

 12   citation où il parle de Dubrovnik. Savez-vous à quoi ceci, cette partie-ci

 13   de la conversation renvoie?

 14   Réponse: Aux combats qui se sont conduits autour de Dubrovnik.

 15   Question: Et qui nettoie quoi? Le savez-vous?

 16   Réponse: La JNA s'empare de ces territoires.

 17   Question: Monsieur Karadzic poursuit. Toujours parlant de Dubrovnik, il

 18   dit: "Dubrovnik n'a jamais été croate". Et puis, réponse de Joko: "Eh

 19   bien, pour raccourcir ceci, ou alors pour arrêter si près de Dubrovnik,

 20   pour déterminer, et puis là où ils se sont arrêtés maintenant près du

 21   petit pont près de Cavtat.

 22   Et puis, ils disent: "Voilà, au nord de la rivière Dubrovacka, tuez tout

 23   le monde". Et puis, réponse de Karadzic: "Oui, oui". Joko dit: "Il faut

 24   tuer tout le monde". (Fin de citation.)

 25   A quoi ceci renvoie-t-il? Qui devrait tuer tout le monde et de quelle

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  1   région parle-t-on?

  2   M. le Président (interprétation): Je pense que Me Tapuskovic a raison dans

  3   le commentaire qu'il fait. Je crois qu'il revient aux Juges de déterminer

  4   ceci: le témoin peut parler des choses qu'il sait personnellement, mais

  5   ici il s'agit plutôt d'une interprétation du document.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qui se trouvait à Cavtat à l'époque

  7   pour sécuriser la région qui va jusqu'à Cavtat? Le savez-vous?

  8   Milan Babic (interprétation): La partie adverse pour la JNA était l'armée

  9   du gouvernement croate.

 10   Question: La JNA, où se trouvait-elle à ce moment-là? Nous parlons ici

 11   d'octobre 1991.

 12   Réponse: Elle était sur le territoire autour de Dubrovnik, elle était

 13   disposée là-bas. Cavtat se trouve juste à côté de Dubrovnik. La rivière

 14   Dubrovacka se trouve au nord de Dubrovnik.

 15   Question: Ce sera tout pour ce qui est de cette écoute-ci.

 16   J'aimerais maintenant aborder la suivante. En fait, nous avions prévu au

 17   départ une diffusion partielle de cette écoute. Peut-être qu'on pourrait

 18   essayer une fois de plus de la diffuser.

 19   M. le Président (interprétation): Nous sommes à quel intercalaire, Madame

 20   Uertz-Retzlaff?

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est l'intercalaire 30.

 22   (Intervention de l'huissière.)

 23   Le témoin devrait bénéficier de la transcription BCS. Il faudrait placer

 24   sur le rétroprojecteur l'extrait en question surligné.

 25   A l'attention de la régie, je précise qu'il s'agit de la piste n°4.

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  1   (Diffusion de l'extrait de la cassette de la piste n°4.)

  2   (Les interprètes ne sont pas en mesure de traduire en raison de tout le

  3   bruitage.)

  4   Je pense que c'est inaudible. Il faut y renoncer, je suis un peu surprise

  5   parce qu'au départ la qualité était excellente, du moins...

  6   M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, si nous n'entendons pas

  7   la cassette vidéo comment pouvons-nous faire une véritable comparaison

  8   entre la transcription et la cassette?

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En fait, ce témoin a entendu et

 10   écouté ces écoutes en vue de sa déposition.

 11   Est-ce que vous avez été en mesure d'entendre ces conversations, de les

 12   écouter?

 13   M. Kwon (interprétation): Monsieur le Témoin, avez-vous aidé les

 14   traducteurs à faire la traduction de ces écoutes téléphoniques?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, Monsieur le Juge, le témoin a

 16   écouté les écoutes tout en ayant sous les yeux la transcription en BCS et

 17   il vérifiait si c'était bien à l'écrit le texte qu'il entendait.

 18   Avez-vous été en mesure d'écouter les écoutes téléphoniques, Monsieur le

 19   Témoin, ou est-ce que le son était trop déformé pour que vous puissiez

 20   comprendre? Etes-vous en mesure de le dire?

 21   Milan Babic (interprétation): L'entretien était plus clair lorsque j'ai

 22   pu l'entendre la première fois.

 23   M. le Président (interprétation): Oui, je crois comprendre que les cabines

 24   n'ont pas l'original. Est-ce bien cela?

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Mais elles avaient le CD et tout

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  1   était parfaitement clair, le son était très bon, il n'y avait pas toutes

  2   ces interférences, tout ce bruit.

  3   M. le Président (interprétation): Apparemment, il y a un problème au

  4   niveau du CD. Nous ne pourrons pas perdre davantage de temps, je vous

  5   propose de faire ceci pendant la pause. Madame Uertz-Retzlaff, vous vous

  6   occuperez avec la régie pour voir avec elle en quoi consiste le problème

  7   et nous nous pencherons sur ceci en temps utile.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pourrons diffuser ou essayer de

  9   diffuser une fois de plus ces écoutes à un autre moment.

 10   M. Kwon (interprétation): Vous avez dit aussi qu'il y a une différence au

 11   niveau de la pagination, une différence entre le premier classeur et le

 12   document que nous sommes en train d'examiner. Toute la numérotation est

 13   différente et c'est vrai aussi pour un document spécial.

 14   M. le Président (interprétation): La pagination, c'est important pour

 15   chacun de ces classeurs. Il faut que chaque classeur soit paginé, qu'il y

 16   ait une numérotation, sinon on ne s'y retrouve plus.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Eh bien, nous allons vérifier ce

 18   qu'il en est pendant la pause.

 19   Monsieur le Témoin, vous avez décrit ces événements comme ils se sont

 20   présentés de façon systématique, cette conduite systématique, et vous avez

 21   décrit les régions de Croatie où ce schéma d'opération s'est reproduit.

 22   Est-ce que ce schéma, cette systématicité s'est limitée à la Croatie, à

 23   elle seule, ou est-ce que vous l'avez vu se répéter ailleurs?

 24   Milan Babic (interprétation): D'abord au mois d'août 1992, puis

 25   ultérieurement, au cours des mois et des années qui ont suivi, la même

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  1   chose est arrivée en Bosnie-Herzégovine.

  2   Question: Qu'avez-vous vu? Est-ce que vous vous êtes rendu sur place? Et

  3   si c'est le cas, qu'avez-vous vu?

  4   Réponse: Lorsque je passais par là-bas, j'ai vu des agglomérations

  5   détruites désertées par les Croates et les Musulmans qui y vivaient avant

  6   la guerre.

  7   Question: Et quelles régions avez-vous traversées?

  8   Réponse: J'ai traversé Bosanski Novi, Sanski Most, Prijedor, la région

  9   autour de Banja Luka, puis dans la direction de Brcko, Bijeljina, puis

 10   autour de Zvornik, Han Pijesak et Pale.

 11   Question: Est-ce que M. Milosevic savait ce qui se passait sur le terrain?

 12   Etes-vous en mesure de le dire?

 13   Réponse: Il devait le savoir! Ces services étaient présents. Je

 14   rencontrais là-bas le chef de son service de sécurité.

 15   Question: Monsieur le Témoin, je pense qu'il nous faut passer à huis clos

 16   partiel pour la question suivante.

 17  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 55) [Confidentialité levée par une

 18   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 19   Mme Uertz-Retzlaff : Vous dites avoir rencontré le chef de

 20   la sécurité ou des services de sécurité ou de sûreté de l'Etat là-bas. Qui

 21   avez-vous rencontré et quand?

 22   Milan Babic (interprétation): Jovica Stanisic et "Frenki" Simatovic. J'ai

 23   rencontré Jovica Stanisic vers le mois d'avril, mai 1991 pour la première

 24   fois, donc. Puis je l'ai rencontré en mai 1995 également; il était

 25   ensemble avec Franko Simatovic surnommé "Frenki". Mile Grbic, originaire

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  1   de Bosanski Novi, m'avait dit qu'il était en très bonnes relations et en

  2   très bons contacts avec Jovica Stanisic.

  3   Question: Où avez-vous rencontré Jovica Stanisic et Simatovic? Plus

  4   exactement, commençons pas Stanisic: où l'avez-vous rencontré, cet homme,

  5   en mai 1991? De quel genre de réunion s'agissait-il?

  6   Réponse: Dans l'appartement de Radovan Karadzic; il s'agissait d'une

  7   rencontre dans l'appartement de Radovan Karadzic. Il y avait là encore

  8   Milan Martic et Velibor Ostojic.

  9   Question: Qui est Velibor Ostojic?

 10   Réponse: Il était membre du conseil exécutif du SDS de Bosnie-Herzégovine;

 11   il était ministre de l'Information et, pendant un certain temps, l'un des

 12   proches collaborateurs de Radovan Karadzic.

 13   Question: Cette réunion, à quoi devait-elle servir et qu'avez-vous

 14   discuté?

 15   Réponse: En fait, les entretiens ont été conduits par Karadzic, Stanisic

 16   et Ostojic. Ils étaient en train d'étudier des cartes concernant les

 17   régions où le pouvoir était entre les mains des Serbes et des territoires

 18   où il fallait établir un contrôle ou les placer sous contrôle du SDS.

 19   Question: Pourquoi vous et M. Martic vous trouviez-vous à cette réunion?

 20   Réponse: Martic m'a dit que Jovica Stanisic avait demandé que je vienne.

 21   J'avais plutôt eu l'impression qu'il fallait que nous soyons vus là-bas

 22   parce qu'après cet entretien chez Karadzic, nous sommes allés dans les

 23   locaux du club du SDS à Sarajevo pour dîner. Donc mon impression, c'était

 24   que nous étions simplement là-bas pour être vus, parce que nous n'avons

 25   pas influé de façon notable sur le cours des entretiens; d'ailleurs, on ne

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  1   nous a posé de questions à aucun sujet. Il s'agissait de passer par

  2   Sarajevo, de traverser certaines agglomérations ou certaines cités de

  3   Sarajevo.

  4   Question: Mais vous avez également déclaré que vous aviez rencontré M.

  5   Jovica Stanisic en mai 1995 en Bosnie. Dans quelles circonstances l'avez-

  6   vous fait?

  7   Réponse: Chemin faisant pour aller à Vukovar. Et c'est dans les environs

  8   de Vukovar que l'assemblée de la République serbe de la Krajina s'est

  9   tenue. En mai 1995, nous avons été invités à Bijeljina et puis, j'ai été

 10   raccompagné au centre des services de sécurité dont le siège se trouvait à

 11   Bijeljina. Il y avait là-bas Jovica Stanisic, Franko Simatovic surnommé

 12   "Frenki"; il y avait Radovan Karadzic, il y avait Momcilo Krajisnik et,

 13   avec moi, il y avait Marko Lezajic, le Président du Parlement de la

 14   République de la Krajina serbe. Je ne sais plus vous dire s'il est entré

 15   dans la salle avec moi ou pas, mais je crois qu'il est entré avec moi.

 16   Et on m'avait demandé, en raison du fait au terme duquel Stanisic et

 17   Karadzic avaient eu l'idée d'établir un service de SDK à Vukovar pour

 18   procéder à des paiements fictifs pour équipement et armement, à savoir

 19   armes et munitions que la Republika Srpska s'était procurées en République

 20   fédérale de Yougoslavie.

 21   Question: A-t-on discuté des équipements militaires éventuellement reçus

 22   et de leur date de réception?

 23   Réponse: Non, je ne sais pas exactement s'il s'agissait d'armement ou de

 24   munitions mais, en tout cas, ils parlaient de somme importante. Je ne me

 25   souviens pas exactement de cette somme, mais je me souviens qu'elle était

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  1   importante. Et pour autant que je m'y connaisse un peu sur le plan

  2   financier, je me souviens avoir pensé que cela causerait un certain choc

  3   sur le plan de l'inflation en Serbie, car l'inflation était déjà

  4   importante en Serbie à l'époque. La somme était donc importante.

  5   Quant à la nature des armes, je ne me souviens pas exactement de ce

  6   qu'elle était.

  7   Question: A-t-on discuté de la source de ces armes, de l'usine qui les

  8   fabriquait, puisque vous dites qu'il a été question de la République

  9   fédérale de Yougoslavie?

 10   Réponse: Ils ont parlé de Kragujevac ou de Krusevac.

 11   Question: Kragujevac se trouve-t-elle en Serbie?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: Qui contrôlait les usines de Kragujevac?

 14   Réponse: Ces usines étaient ce qu'on appelait des usines militaires,

 15   utilisées donc par l'armée et qui dépendaient de l'armée, c'est-à-dire

 16   plus précisément du ministère de la Défense yougoslave, donc du

 17   gouvernement yougoslave, des usines à affectation spéciale.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, pourquoi vous a-

 19   t-on demandé de procéder à des paiements fictifs?

 20   Milan Babic (interprétation): C'est Borislav Mikelic qui, à l'époque,

 21   était Premier ministre de la Krajina serbe. Et Stanisic, qui travaillait

 22   dans les services de sécurité serbes, à la sûreté, avait avec lui un

 23   désaccord au sujet de la distribution des dérivés du pétrole. Et peut-être

 24   a-t-il été question de cela entre eux; il était responsable de ce genre de

 25   choses.

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  1   M. le Président (interprétation): Le témoin va devoir être plus clair sur

  2   le nature exacte de l'objet, car, pour l'instant, ce n'est pas clair du

  3   tout.

  4   Quel était ce projet? Pouvez-vous nous expliquer ce projet de façon que

  5   nous le comprenions? Je parle de ce dont il a été discuté.

  6   Milan Babic (interprétation): Ils demandaient par le biais de la

  7   comptabilité publique de Vukovar, donc en territoire de Krajina serbe, que

  8   des documents faux, que de fausses factures soient donc établies à

  9   destination d'usines situées en Serbie et produisant des équipements

 10   militaires. Ces équipements devaient être acquis, achetés à la Serbie par

 11   Karadzic, autrement dit par les autorités, par le pouvoir de la Republika

 12   Srpska.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, pourquoi est-ce

 14   que la Republika Srpska ne pouvait pas tout simplement payer les armes

 15   qu'elle achetait?

 16   Milan Babic (interprétation): Elle ne pouvait pas payer, eh bien, parce

 17   qu'elle n'avait pas assez d'argent. Et elle ne pouvait pas faire ces

 18   fausses factures à partir de la Republika Srpska, car les transactions

 19   commerciales entre la Republika Srpska et la République de Serbie ou la

 20   Yougoslavie avaient été interrompues.

 21   Question: Un embargo était-il imposé à la Republika Srpska à l'époque?

 22   Réponse: La République fédérale de Yougoslavie avait imposé un embargo en

 23   raison des pressions exercées par la communauté internationale. Cet

 24   embargo n'était que théorique, il y avait de nombreux moyens de le

 25   contourner.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

  2   Juges, nous sommes sortis quelque peu de l'ordre chronologique que vous

  3   trouverez dans le résumé de la déposition de ce témoin.

  4   J'indique, pour gagner du temps, que nous sommes en train de discuter du

  5   paragraphe 272 du résumé de la déposition de ce témoin qui traite du

  6   rapport avec les Serbes de Bosnie.

  7   Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez apporté l'aide qui vous était

  8   demandée pour procéder à ces faux paiements?

  9   Réponse: D'abord, je n'avais aucune responsabilité à cet égard et, d'autre

 10   part, cela ne me plaisait pas du tout. Je ne voyais pas pourquoi je serais

 11   intervenu dans tout cela et pourquoi on m'avait demandé cela parce que,

 12   moi, j'étais ministre des Affaires étrangères et Stanisic avait plein

 13   pouvoir sur Vukovar. Je ne me suis pas lancé dans de nombreuses

 14   explications, mais j'ai dit que c'était impossible. Et Krajisnik a

 15   répondu: "Oui, oui, cela peut être fait. Je sais, je suis économiste."

 16   Cependant, moi, je n'ai pas agi. J'ai simplement estimé que cela créerait

 17   un problème d'inflation à l'égard de la Serbie et que nous allions en

 18   subir un choc inflationniste.

 19   Question: Vous avez dit qu'il y avait désaccord entre M. Mikelic et M.

 20   Stanisic en rapport avec des produits pétroliers. La Republika Srpska, à

 21   l'époque, était-elle également aidée par des livraisons de pétrole?

 22   Réponse: Oui. Les services de la sûreté transportaient des dérivés du

 23   pétrole en secret sur la Save, de la provenance de la République de

 24   Krajina serbe.

 25   Question: Depuis où jusqu'à où?

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  1   Réponse: Je sais que la distribution de ces produits pétroliers se faisait

  2   à partir de Mirkovci en Slavonie orientale et que ces produits étaient

  3   ensuite traités à Pancevo, une raffinerie près de Belgrade. J'ai entendu

  4   dire que des achats illégaux avaient lieu, qui étaient donc en infraction

  5   de l'embargo, à savoir des importations de pétrole en Yougoslavie, et que

  6   cette distribution se faisait à partir de la Yougoslavie.

  7   Question: Quel était le problème qui opposait M. Mikelic et M. Stanisic à

  8   cet égard?

  9   Réponse: Il s'agissait de la répartition, donc de déterminer ce qui était

 10   destiné à la Serbie et ce qui était destiné à la Republika Srpska, donc à

 11   la Krajina, parce que Mikelic était habilité de distribuer le pétrole reçu

 12   à Mirkovci et transformé à la raffinerie de Pancevo.

 13   Question: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il y a une erreur au

 14   compte rendu d'audience en anglais, car on voit que c'est M. Krajisnik qui

 15   aurait dit: "Oui, oui, c'est faisable"; or je ne pense pas que ce soit lui

 16   qui ait dit cela.

 17   Monsieur le Témoin, qui a confirmé que ces fausses factures, que ces faux

 18   paiements étaient faisables?

 19   Réponse: C'est Stanisic et Karadzic qui m'ont posé la question à moi,

 20   quand j'ai dit que ce n'était pas faisable c'est Krajisnik qui a accepté,

 21   et il a dit que c'était faisable parce qu'il était économiste.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, merci.

 23   Sur ces questions dont vous venez de parler, je veux parler de la

 24   distribution de ces produits pétroliers, je voudrais vous soumettre deux

 25   documents.

Page 13089

  1   M. le Président (interprétation): Nous sommes toujours à huis clos

  2   partiel. Avons-nous nécessité de demeurer à huis clos partiel?

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons repasser en audience

  4   publique, Monsieur le Président.

  5   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 10.)

  6   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique, Monsieur le

  7   Président.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous aimerions soumettre deux

  9   documents au témoin, pièce à conviction 352, intercalaires 93 et 94.

 10   Le premier document, intercalaire 93, a pour en-tête: "Ministre de la

 11   Défense de la RSK" et porte la date du 2 août 1994. Il est adressé au

 12   président des Républiques. On trouve dans ce document mention de la

 13   situation dramatique du point de vue du carburant dont l'armée a besoin et

 14   des très faibles quantités de carburant que l'armée reçoit effectivement.

 15   Alors, Monsieur le Témoin, à en juger par le sceau et la signature que

 16   l'on trouve sur ce document, je vous demande si ce sceau et cet en-tête

 17   correspondent à ce que vous avez dans votre souvenir?

 18   Milan Babic (interprétation): Oui, même remarque pour la teneur du

 19   document.

 20   Question: Donc il est question de pénurie dans ce document. Je vous

 21   demande qui, en fait, déterminer l'identité de ceux qui allaient recevoir

 22   ces produits pétroliers fournis à la RSK et à la Republika Srpska, le

 23   savez-vous?

 24   Réponse: Jovica Stanisic, Mihajl Kertes et Boro Mikelic, c'étaient ces

 25   trois hommes qui contrôlaient les livraisons de carburant.

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  1   Question: Comment le savez-vous?

  2   Réponse: C'est Boro Mikelic qui m'en a parlé. Radovan Stojicic, dit

  3 "Badza", m'en a parlé également et des gens de Mirkovci m'en ont parlé aussi.

  4   Question: Le deuxième document que je voulais vous soumettre à cet égard,

  5   l'intercalaire 94 donc, est une requête présentée au Président de la RSK

  6   et à d'autres responsables de la RSK en rapport avec la situation au sein

  7   de l'entreprise de Mirkovci connue sous le nom de "Entreprise chargée de

  8   la raffinerie et des ventes du pétrole de Krajina". Ce document porte la

  9   date du 15 juillet 1994 et traite donc également de la distribution

 10   pétrolière et de la distribution de dérivés du pétrole.

 11   Pouvez-vous, je vous prie, commenter à notre intention l'en-tête et la

 12   teneur de ce document?

 13   Réponse: Ce document, comme on le voit au début de la première page,

 14   stipule qui a reçu ces produits à quelle date et le numéro d'enregistré.

 15    Et les signatures sont celles de personnes, d'habitants de Mirkovci.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pouvons-nous passer à huis clos

 17   partiel pour une question?

 18   (Audience à huis clos partiel à 10 heures 14)

 19   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 20   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous figurez dans

 22   ce document dans la liste des personnes censé avoir reçu ce document.

 23   L'avez-vous reçu?

 24   Milan Babic (interprétation): Oui, ce document ainsi que des demandes

 25   orales de personnes de Mirkovci.

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  1   Question: Ces mêmes personnes vous ont-elles informé du rôle joué par

  2   Stanisic et Kertes, en rapport avec la production pétrolière locale?

  3   Réponse: C'est exact, c'est cela.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bien, merci. Monsieur le Témoin,

  5   j'aimerais maintenant que nous revenions sur le sujet dont nous

  6   discutions.

  7   M. le Président (interprétation): Pouvons-nous revenir en audience

  8   publique?

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, oui, Monsieur le Président. Oui.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 15.)

 11   Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, nous sommes en audience

 12   publique.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous avons parlé des événements qui

 14   se sont déroulés. Vous nous avez parlé de la façon dont se déroulaient les

 15   attaques. Vous nous avez dit ce qu'il était advenu de la population non

 16   serbe vivant sur ce territoire. Lorsque vous avez constaté que de tels

 17   événements se déroulaient, vous êtes-vous rendu compte qu'un plan destiné

 18   à la population non-serbe de ces régions était en train d'être appliqué et

 19   que ce projet consistait à s'intégrer à un Etat serbe unique?

 20   Milan Babic (interprétation): S'agissant de la SAO de Krajina, je me suis

 21   rendu compte que tout ceci était la conséquence de cela, de la façon dont

 22   la guerre se développait plutôt que d'un plan particulier. Cependant, à

 23   mon avis, la façon dont la guerre se menait était identique partout où

 24   elle avait lieu. Le même genre de chose s'est passé un peu partout. Et

 25   s'agissant des intérêts du peuple serbe dans la SAO de Krajina, ceux-ci

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  1   étaient contre l'intérêt du peuple serbe en SAO de Krajina. Cela a été une

  2   catastrophe pour la population de la SAO de Krajina comme cela a été une

  3   catastrophe pour la population croate.

  4   Question: Quand vous êtes-vous rendu compte qu'un schéma existait? Quand

  5   est-ce que cela est apparu clairement à vos yeux? Dans quelle période?

  6   Réponse: A peu près en août 1991.

  7   Question: Mais quand est-ce que tout cela a commencé?

  8   Réponse: Cela a commencé en août 1991.

  9   Question: Et…

 10   Réponse: Non, non! Excusez-moi. En fait, ça a commencé plutôt. Ça a

 11   commencé en mai 1991.

 12   Question: Le premier jour de votre déposition, vous avez dit qu'au début

 13   vous pensiez que les Serbes de Croatie étaient en danger, couraient des

 14   risques. Alors, je vous demande si, à l'époque dont vous venez de parler,

 15   en mai 1991 et jusqu'en octobre/novembre 1991, vous continuiez à penser

 16   que les Serbes de Croatie étaient en danger.

 17   Réponse: J'ai continué à penser cela jusqu'au moment où l'armée populaire

 18   yougoslave est entrée dans les combats.

 19   Question: Cet Etat destiné à tous les Serbes, dont vous avez parlé comme

 20   étant l'objectif poursuivi, eh bien, cet objectif a-t-il, à quelque moment

 21   que ce soit, été abandonné jusqu'en 1995, ou bien a-t-il toujours été

 22   poursuivi?

 23   Réponse: L'idée n'a pas été abandonnée, mais l'étendue du territoire

 24   concerné a été révisé.

 25   Question: Par quel biais, par quel moyen a-t-elle été révisée?

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  1   Réponse: Il y a eu pas mal d'événements. Il y a eu aussi des informations

  2   détenues par certains, selon lesquelles le Président Milosevic et Radovan

  3   Karadzic changeaient le plan, à savoir que les territoires serbes de

  4   Croatie pouvaient être laissés sous le contrôle du gouvernement croate et

  5   que le territoire de la Bosnie-Herzégovine pouvait être partagé entre les

  6   Serbes et les Croates, ou plutôt entre la Croatie et la Serbie.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'aimerais qu'à présent nous

  8   abordions un thème différent.

  9   Monsieur le Président, il va nous falloir revenir sur ce sujet néanmoins

 10   dès que nous aurons réglé le problème des écoutes, car nous disposons de

 11   plusieurs écoutes traitant de ce sujet. Mais, pour le moment, je passe à

 12   autre chose.

 13   Monsieur le Témoin, vous avez dit avoir rencontré M. Milosevic en de

 14   nombreuses occasions, mais nous n'avons pas le temps de passer en revue

 15   chacune de ces rencontres. Nous nous voyons contraints de ne discuter que

 16  de quelques-unes de ces rencontres. D'abord, je demande un huis clos partiel

 17   (Audience à huis clos partiel à 10 heures 21)

 18   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 19   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): D'abord, de façon générale, vous avez

 21   dit avoir rencontré M. Milosevic à peu près 30 fois. Lorsque vous le

 22   rencontriez, de quelle façon vous adressiez-vous à lui et de quelle façon

 23   s'adressait-il à vous?

 24   Milan Babic (interprétation): Moi, je l'appelais "Président" ou "Monsieur

 25   le Président" et lui m'appelait par mon nom.

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  1   Question: Ceci a-t-il évolué à quelque moment que ce soit? Est-ce qu'à un

  2   moment ou à un autre, vous êtes devenus plus proches?

  3   Réponse: Non.

  4   Question: Vous l'avez également rencontré en présence de M. Karadzic. En

  5   quels termes est-ce que M. Karadzic s'adressait à M. Milosevic et en quels

  6   termes M. Milosevic s'adressait-il à M. Karadzic?

  7   Réponse: Karadzic s'adressait à lui en l'appelant "Président" également et

  8   Milosevic s'adressait à Karadzic en l'appelant par son nom.

  9   Question: Par son prénom ou son nom de famille?

 10   Réponse: Il l'appelait Radovan.

 11   Question: Quand avez-vous rencontré M. Milosevic pour la première fois? Et

 12   quand l'avez-vous rencontré pour la dernière fois?

 13   Réponse: Pour la première fois, je l'ai rencontré en personne en octobre

 14   1990 et, la dernière fois, le 8 août ou aux environs du 8 août 1995.

 15   Question: Lorsque vous l'avez vu pour la première fois en octobre 1990,

 16   quel a été le sujet de la conversation que vous avez eue avec lui?

 17   Réponse: J'avais été chargé par le Président du Parti démocratique serbe,

 18   M. Raskovic, d'appeler au téléphone M. Milosevic. Il m'avait donné son

 19   numéro. Et je devais demander à M. Milosevic s'il était opposé à l'idée

 20   que le Parti démocratique serbe, qui avait un siège à Knin mais était

 21   également actif en Serbie, donc s'il était opposé à l'idée que ce parti

 22   participe aux élections qui devaient se tenir en Serbie.

 23   Question: Cela signifie-t-il que vous lui avez demandé son avis, son

 24   consentement ou pas?

 25   Réponse: D'une certaine façon, il s'agissait de tester le terrain pour

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  1   voir s'il était opposé à cette idée. Donc oui, il s'agissait de voir s'il

  2   était pour ou contre. En tout cas, j'étais chargé d'obtenir de lui une

  3   assurance de non-opposition.

  4   Question: Avez-vous obtenu cette assurance de non-opposition?

  5   Réponse: Oui. Il a dit: "Eh bien, en Vojvodine, le parti a quelque

  6   influence, donc oui, il peut participer.".

  7   Question: Monsieur le Témoin, lorsque vous l'avez rencontré ce jour-là et

  8   les fois suivantes, lui avez-vous parlé de la situation en Croatie et de

  9   ce qui se passait sur le terrain?

 10   Réponse: Ce sujet était un sujet régulier en on en parlait à chaque

 11   rencontre. Moi, je faisais connaître toujours mes craintes, mon anxiété

 12   par rapport à ce qui risquait de se passer en Krajina et en Croatie.

 13   Question: Comment réagissait-il à ce genre de propos? Comment réagissait-

 14   il lorsque vous lui faisiez savoir ce genre de chose?

 15   Réponse: Il disait qu'il allait toujours nous protéger et que les Serbes

 16   avaient le droit à l'autodétermination et le droit de demeurer dans un

 17   seul et même Etat.

 18   Question: Vous nous avez déjà parlé d'une rencontre avec M. Milosevic au

 19   cours de laquelle des questions financières ont été abordées qui portaient

 20   sur le fonctionnement d'une usine de vis. Lorsque vous avez discuté de

 21   cela avec M. Milosevic, y avait-il d'autres personnes présentes?

 22   Réponse: Djogo Majstorovic, effectivement, était présent. C'était le

 23   secrétaire général du comité exécutif du SDS.

 24   Question: Nous n'allons pas revenir sur le problème financier en tant que

 25   tel mais ce jour-là, en dehors de M. Milosevic, a-t-il été question de

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  1   placer quelqu'un d'autre au poste de dirigeant du parti?

  2   Réponse: Oui, il a dit qu'il faudrait quelqu'un de plus jeune pour

  3   présider le SDS. Et moi, cela m'a fait un peu sourire parce qu'il avait

  4   nommé à ce poste Borisav Jovic qui, en fait, n'était pas tout à fait

  5   jeune.

  6   Question: Monsieur Jovic est plus vieux? Voulez-vous dire qu'il est plus

  7   vieux que M. Milosevic?

  8   Réponse: Oui. En nombre d'années, oui.

  9   Question: Pour quelle raison M. Milosevic a-t-il nommé cet homme au poste

 10   de président du parti? Le savez-vous?

 11   Réponse: Selon la Constitution de la Serbie, puisqu'il était Président de

 12   la République il n'était plus habilité à exercer d'autres fonctions

 13   publiques. Donc officiellement, il fallait que ce soit quelqu'un d'autre

 14   qui dirige le parti. Il fallait, effectivement, que quelqu'un d'autre

 15   dirige le parti, mais c'est moi qui ajoute que ce remplacement n'a été que

 16   formel, officiel.

 17   Question: Voulez-vous dire qu'en fait, il est resté aux manettes sans

 18   exercer la fonction?

 19   Réponse: C'est cela, c'est exact.

 20   Question: Vous avez déjà dit que vous étiez à Belgrade, en janvier 1991,

 21   avez-vous rencontré Milosevic à ce moment-là?

 22   Réponse: Au moins deux fois.

 23   Question: Je vous demande d'abord si vous étiez bien à Belgrade à ce

 24   moment-là?

 25   Réponse: Je sais que je suis allé à plusieurs reprises à Belgrade. Il y

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  1   avait une crise à l'époque liée aux formations paramilitaires de Croatie

  2   et à l'ordre de la présidence yougoslave de désarmer ces groupes. Le

  3   premier jour, Borivoj Rasuo m'a dit que la JNA était en train de préparer

  4   un coup d'Etat et m'a dit de quelle façon il convenait que je me comporte.

  5   Question: Comment deviez-vous vous comporter?

  6   Réponse: Est-ce que nous sommes à huis clos partiel?

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  8   Milan Babic (interprétation): Merci. Il m'a dit d'obéir aux ordres, de

  9   n'opposer aucune résistance, j'ai demandé si on allait m'arrêter; il m'a

 10   dit: "Non, non, on ne va pas t'arrêter, mais n'oppose aucune résistance.

 11   Obéis!"

 12   Et là deuxième fois, je suis allé parce que Mile Grbic et Zika Rakic

 13   m'avaient dit d'aller voir le colonel Djigurski qui était colonel du KOS.

 14   M. le Président (interprétation): J'interromps, parce que je ne suis plus

 15   du tout.

 16   Borivoj Rasuo, qui est-ce? Je ne vois pas ce qu'il a à voir avec tout

 17   cela. Je suppose que c'est lui qui a dit toutes ces choses au témoin. Il

 18   va falloir que vous interrogiez le témoin sur ce point.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président. En fait,

 20   nous avons déjà parlé de lui et du poste qui était le sien. Mais, pour

 21   rappeler tout cela aux Juges de cette Chambre, je vous demande, Monsieur

 22   le Témoin, quelles étaient les fonctions exercées par Borivoj Rasuo à ce

 23   moment-là?

 24   Milan Babic (interprétation): Avant cette période, il était conseiller

 25   expert au centre chargé du marxisme, auprès du comité central de la Ligue

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  1   des communistes serbes, tant que ce centre a existé. Et plus tard, en

  2   1990, il a quitté ce centre et est devenu directeur de l'institut

  3   yougoslave de journalisme. Entre-temps, il a obtenu un poste public, mais

  4   je ne me souviens pas exactement duquel.

  5   Il était en tout cas très proche de Mihajlo Markovic, l'idéologue du SPS,

  6   ainsi que d'autres personnalités politiques. Et en 1994 et 1995, je me

  7   suis rendu compte qu'il était également très proche de Jovica Stanisic. A

  8   ce moment-là, il est devenu un très bon ami à moi; il était originaire de

  9   Knin et venait souvent à Knin. Il apportait à mon attention des

 10   informations de Belgrade. Nous avions le même passé, le même genre

 11   d'éducation et il est devenu mon conseiller politique.

 12   M. le Président (interprétation): Merci.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Depuis quand est-il devenu votre

 14   conseiller politique? Nous parlons bien d'une période qui se situe aux

 15   environs de 1990, n'est-ce pas?

 16   Milan Babic (interprétation): Il est devenu officiellement mon conseiller

 17   plus tard, dans le cours du deuxième trimestre 1991, et ministre des

 18   Affaires Etrangères du gouvernement de la SAO de Krajina, mais à ce

 19   moment-là il était mon conseiller officieux.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez dit qu'il était proche de

 21   Jovica Stanisic. Comment le savez-vous?

 22   Milan Babic (interprétation): En avril 1994, lorsque des entretiens se

 23   sont tenus au sujet de la création du gouvernement de la République de la

 24   Krajina serbe, il y avait un certain nombre de personnes présentes, Brana

 25   Crncevic, Mikelic en particulier, Jovica Stanisic également et puisque

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  1   moi, j'étais représentant d'un parti qui avait un grand nombre de députés

  2   au parlement j'ai proposé Lazar Macura comme ministre des Affaires

  3   étrangères; ensuite, j'ai proposé Borivoj Rasuo. Martic s'est opposé à ces

  4   deux propositions. Et ensuite Jovica a hoché la tête et a dit oui. Puis

  5   Martic a dit: "C'est très bien". Et avant cela, pendant la campagne

  6   électorale à Mirkovci, Rasuo a dit qu'il avait parlé à Stanisic et que je

  7   pouvais l'appeler, mais je ne l'ai pas appelé.

  8   M. le Président (interprétation): Je vais interrompre un instant parce que

  9   nous avons dépassé l'heure de la pause. Et vous avez sans doute un certain

 10   travail à faire au sujet de la cassette.

 11   Vingt minutes de pause.

 12   (L'audience, suspendue à 10 heures 34, est reprise à 11 heures.)

 13   M. le Président (interprétation): Poursuivez.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, l'accusation

 15   va diffuser une écoute un peu plus tard lorsque le contexte des questions

 16   le permettra.

 17   Nous sommes toujours à huis clos partiel, Monsieur le Témoin, et il y a un

 18   point que j'aimerais tirer au clair avec vous.

 19   Vous ai-je bien compris lorsque vous avez dit que c'était Boro Rasuo qui,

 20   en janvier 1991, vous avait dit qu'un coup d'Etat était en préparation et

 21   que vous ne devriez pas vous y opposer? De quel genre de coup d'Etat

 22   parlait-il et qui l'aurait planifié?

 23   Milan Babic (interprétation): Il avait parlé de la JNA pour ce qui est de

 24   la réalisation de ce coup d'Etat. Et dans le contexte de la municipalité

 25   de Knin et ayant été président dans cette municipalité de Knin, il m'avait

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  1   dit que je n'étais pas censé, sur le territoire de la Croatie et en ma

  2   qualité de gouverneur de cette municipalité, fournir de résistance.

  3   Question: Lorsqu'il a parlé de coup d'Etat, s'agissait-il d'un coup d'Etat

  4   contre les autorités croates ou contre qui?

  5   Réponse: Contre les autorités. Il s'agissait d'un changement de pouvoir.

  6   Question: Vous avez également parlé de Mile Grbic et de Zika Rakic. Que

  7   vous ont dit ces deux hommes et qui étaient-ils?

  8   Réponse: Ces deux hommes sont des Serbes originaires de Bosanski Novi. En

  9   1990, au mois d'août, ils avaient véhiculé des armes à l'intention de

 10   Martic à Knin. Et en 1991, ils ont également approvisionné en armes, en

 11   provenance de Serbie, qu'ils avaient obtenues de la part de Jovica

 12   Stanisic pour donc les distribuer sur le territoire de la SAO de Krajina.

 13   Zika Rakic est devenu ministre de l'Intérieur de la Republika Srpska

 14   ultérieurement.

 15   Question: Comment savez-vous que Stanisic participait à ces transferts

 16   d'armes? L'un ou l'autre de ces deux hommes vous en a-t-il parlé?

 17   Réponse: C'est Mile Grbic qui m'a dit ça.

 18   Question: Quels rapports avait-il avec Stanisic, si vous le savez?

 19   Réponse: Leurs rapport étaient proches, c'étaient des rapports d'affaires,

 20   des rapports politiques. Et je crois qu'il avait pratiquement tout le

 21   temps parlé de lui.

 22   Question: Lorsque vous dites "il", parlez-vous de M. Grbic?

 23   Réponse: C'est cela.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En rapport avec cette situation qui

 25   prévalait en janvier 1991, vous avez parlé de ces deux hommes. Que vous

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  1   ont ces deux hommes de la situation, à l'époque?

  2   Milan Babic (interprétation): Ils ont dit qu'ils avaient des informations

  3   en provenance de l'armée disant que l'armée allait intervenir en Croatie

  4   contre le gouvernement croate. Et on a précisé que des renseignements

  5   complémentaires pouvaient être obtenus auprès du colonel Djigurski, un

  6   colonel du KOS à Zemun.

  7   M. le Président (interprétation): Je suis désolé d'interrompre mais,

  8   Madame Uertz-Retzlaff, vraiment, je suis un peu préoccupé quant à la

  9   valeur de ce genre de témoignage. Car nous parlons ici d'informations de

 10   deuxième main et, bien sûr, l'ouï-dire est autorisé au Tribunal, mais il

 11   doit y avoir une limite à ce que nous admettons en la matière. La valeur

 12   de ce genre de relation, de ce genre de narration est en cause. Il est

 13   possible que vous estimiez que ce soit intéressant, mais compte tenu du

 14   temps qui nous nous manque, il faudrait peut-être ne pas y consacrer trop

 15   de temps.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, ce que le

 17   témoin nous dit, c'est comment il a fini par se trouver à Belgrade et

 18   comment il a rencontré M. Milosevic. Ensuite, il parle de ce que M.

 19   Milosevic lui a dit.

 20   M. le Président (interprétation): Très bien, mais avançons.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous parliez de M. Djigurski à

 22   l'instant, membre du KOS. Avez-vous rencontré M. Djigurski en 1991 et vous

 23   a-t-il parlé de cette préparation de coup d'Etat?

 24   Milan Babic (interprétation): Cela avait été une rencontre en janvier

 25   1991, mais il n'avait pas été question de coup d'Etat. Il m'avait parlé

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  1   des relations prévalant au sein du SDS.

  2   Question: Cette fois-là, en janvier 1992, avez-vous également rencontré M.

  3   Milosevic et dans quelles circonstances ceci s'est-il passé?

  4   Réponse: Oui, deux fois.

  5   La première fois, quelqu'un m'a dit -je ne sais plus qui au juste me l'a

  6   dit- en provenance de Belgrade pour ce qui était d'envoyer une demande de

  7   réception chez le Président Milosevic, pour avoir un entretien au sujet de

  8   la crise en Croatie et en Yougoslavie. Aussi suis-je allé là-bas. Il y

  9   avait avec moi Mile Dakic, le vice-Président du Conseil national serbe.

 10   Cette fois-là, nous avons donc eu un entretien.

 11   Une deuxième fois, nous avons eu une entrevue à l'invitation du Président

 12   Milosevic. C'est là qu'il avait dit qu'il ferait arrêter Martin Spegelj,

 13   et qu'il fallait que je reste à Belgrade; qu'il ne fallait pas que je

 14   rentre à Knin pour ne pas occasionner, à l'intention de l'armée et de la

 15   JNA à Knin. Donc je n'étais pas censé être à Knin pour ne pas que le

 16   gouvernement croate m'arrête et pour ne pas compliquer les choses. Donc il

 17   m'a accordé une protection de la police, des services de la sûreté d'Etat

 18   et du service de la sécurité publique à Belgrade.

 19   Question: Cette deuxième rencontre avec M. Milosevic, quand s'est-elle

 20   produite et quand vous a-t-il dit ce qu'il en était de l'arrestation de M.

 21   Spegelj et que vous devriez rester pour des raisons de sécurité?

 22   Réponse: Cela s'est passé vers le 25 janvier 1991.

 23   Question: Vous l'avez rencontré à cette occasion. Est-ce que vous avez

 24   également rencontré des gens venant du secteur de la sûreté et du MUP de

 25   Serbie?

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  1   Réponse: Oui. C'est lui, c'est Milosevic qui m'a dirigé vers Radmilo

  2   Bogdanovic et Jovica Stanisic pour me faire attribuer un service de

  3   protection.

  4   Question: Et ces hommes se trouvaient-ils dans le même bâtiment que M.

  5   Milosevic? Et si ce n'est pas le cas, où étaient-ils?

  6   Réponse: Dans un autre bâtiment, dans la rue Kneza Milosa, dans le siège

  7   du ministère de l'Intérieur, dans ce bâtiment-là.

  8   Question: Et quelles fonctions M. Bogdanovic exerçait-il à l'époque?

  9   Réponse: Ministre de l'Intérieur dans ce Gouvernement de la République de

 10   Serbie.

 11   Question: Quant à M. Stanisic, quel était son poste ou sa fonction?

 12   Réponse: Il avait été l'un des hauts fonctionnaires du service de sûreté

 13   d'Etat de Serbie.

 14   Question: Et est-ce que ces hommes vous ont octroyé la sécurité

 15   nécessaire?

 16   Réponse: Oui, tant le dispositif de sécurité de la sûreté d'Etat, donc

 17   policiers en civil et policiers de la sécurité publique, et ceci, au

 18   niveau de l'appartement que j'avais occupé. J'avais également une escorte

 19   permanente.

 20   Question: Vous avez mentionné l'arrestation de Spegelj. Est-ce que ceci a

 21   été planifié au même moment où cette cassette concernant Spegelj, dont

 22   nous avons déjà parlé, a été diffusée?

 23   Réponse: C'est exact; c'est à cette époque-là, vers le 25 janvier 1991.

 24   Question: Pendant que vous vous trouviez à Belgrade -et vous avez dit être

 25   resté une dizaine de jours-, est-ce que vous avez été autorisé à quitter

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  1   Belgrade ou est-ce que vous avez été obligé de rester?

  2   Réponse: Milosevic m'a dit qu'il ne fallait pas que je quitte Belgrade

  3   sans son autorisation. Par la suite, au bout d'une dizaine de jours ou

  4   plus, Radmilo Bogdanovic m'a appelé et il a fait un signe de la main en

  5   disant: "Rien à faire de tout cela. Rentre chez tes gens, retourne à ton

  6   peuple!" Et c'est ainsi que j'ai quitté Belgrade.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous pouvons

  8   revenir en audience publique.

  9   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 11.)

 10   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'à un moment donné, M.

 12   Bogdanovic a été démis de ses fonctions?

 13   Milan Babic (interprétation): Oui, au mois de mars 1991, après les

 14   manifestations de l'opposition en Serbie.

 15   Question: Et est-ce que M. Bogdanovic a continué à occuper une fonction

 16   après cela? Le savez-vous?

 17   Réponse: Oui. D'après mes souvenirs, il avait exercé plusieurs fonctions

 18   au sein du comité de l'assemblée de Serbie, pour ce qui est du département

 19   de sécurité et au niveau du SPS; c'était devenu une espèce d'officiel dans

 20   une série de services publics.

 21   Question: Etait-il proche de M. Milosevic? Le savez-vous?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Comment le savez-vous? Est-ce qu'il faut, pour entendre votre

 24   réponse, passer à huis clos partiel?

 25   Réponse: Oui.

Page 13105

  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, peut-on passer

  2   à huis clos partiel?

  3   (Audience à huis clos partiel à 11 heures 12)

  4   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  5   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel

  6   Mme Uertz-Retzlaff : Comment savez-vous que cet homme

  7   était proche de M. Milosevic?

  8   Milan Babic (interprétation): Je l'ai rencontré chez M. Milosevic vers le

  9   20 mars 1991; c'était Milosevic qui l'avait fait venir. Cela s'est passé à

 10   l'occasion de l'une de mes rencontres avec le Président Milosevic.

 11   Question: Quel était l'objet de cette réunion du 20 mars? Comment cette

 12   réunion a-t-elle eu lieu, a-t-elle vu le jour?

 13   Réponse: Eh bien, cela s'est fait de la façon suivante: M. Rastovic, le

 14   président de l'assemblée municipale de Donji Lapac, et également vice-

 15   président du conseil exécutif de l'assemblée de Krajina, avait demandé

 16 d'aller voir M. Milosevic pour voir comment il se proposait de nous protéger,

 17   nous, en Krajina. Et Rastovic et moi sommes donc allés chez M. Milosevic.

 18   Question: Et que lui avez-vous demandé, à M. Milosevic?

 19   Réponse: Eh bien, c'est précisément ce que nous lui avons demandé, c'est-

 20   à-dire savoir comment il allait nous protéger. Il avait toujours dit que

 21   la JNA allait nous protéger; puis il y avait eu entre-temps les événements

 22   de Pakrac et autres. Et il a dit, à ce moment-là: "Je me suis procuré pour

 23   vous, en Hongrie, déjà 20.000 armes.".

 24   Je lui ai dit que je ne savais rien de tout cela. Rastovic a également dit

 25   qu'il n'était pas au courant du tout. Nous avons convié ou plutôt appelé

Page 13106

  1   une troisième personne, Janko Cvjetan, qui était venu avec nous mais était

  2   resté devant l'hôtel "Moskva" à Belgrade. Au sein du SDS, il était un

  3   responsable; il était proche de Bogoljub Popovic au niveau du SDS et ils

  4   s'étaient constamment entretenus au sujet d'armes. Nous l'avons donc

  5   appelé chez Milosevic pour qu'il dise s'il en savait quelque chose ou pas.

  6   Janko Cvjetan est arrivé, il a dit également qu'il ne savait rien de tout

  7   cela. Milosevic a proféré un juron…

  8   Question: Je vous interromps. Vous dites que ce M. Janko Cvjetan est

  9   arrivé, qu'il a parlé des armes. Est-ce qu'il a parlé ouvertement de ces

 10   armes ou est-ce qu'il a, pour le faire, utilisé d'autres termes?

 11   Réponse: Tout le monde avait parlé ouvertement d'armes, tant Milosevic que

 12   Cvjetan. C'était la question qui était posée.

 13   Question: Oui. Monsieur le Président et Messieurs les Juges, je tiens à

 14   vous préciser que nous sommes maintenant au paragraphe 124 ainsi qu'au

 15   paragraphe 125 du résumé. Nous avons quelque peu avancé dans le temps.

 16   Quelle a été la réaction de M. Milosevic suite à cette conversation

 17   concernant des armes et suite au fait que vous, vous n'aviez aucune

 18   information à propos de ces armes qu'il avait achetées?

 19   Réponse: Il a marmonné une espèce de juron et puis il a dit: "Ceux-là, les

 20   miens m'ont induit en en erreur", et il est sorti de cette pièce pour

 21   aller voir sa secrétaire. Peu de temps après, Radmilo Bogdanovic et Jovica

 22   Stanisic sont arrivés; il leur a demandé ce qu'il était advenu des armes.

 23   Radmilo Bogdanovic a dit: "Nous avons déjà envoyé 500 armes vers Banija.".

 24   Je lui ai rétorqué que je n'en savais rien du tout. Bogdanovic a dit

 25   alors: "Mais tu n'es pas censé tout savoir!". Milosevic, en souriant, a

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  1   dit: "Si, si, il faut que Milan le sache.". Bogdanovic a fait une espèce

  2   de grimace en tirant une lèvre vers le côté, du style "Ne lui dites quand

  3   même pas tout!". Jovica Stanisic ne disait rien, mais il regardait de

  4   façon sombre. Il avait l'air d'être fâché.

  5   Question: Et est-ce qu'effectivement, plus tard, des armes sont arrivées?

  6   Comment est-ce qu'il y a eu une solution à cette situation?

  7   Réponse: Les armes sont arrivées. Mais j'ai appris que ces armes étaient

  8   arrivées en provenance des entrepôts de la Défense territoriale de Serbie.

  9   Question: Comment l'avez-vous appris?

 10   Réponse: C'est Milenko Zelenbaba qui me l'a dit; c'était l'adjoint de

 11   Martic dans la police de la Krajina. Il m'a emmené vers le village de

 12   Raducici, à proximité de Knin -c'était en mai 1991- et il m'a montré ses

 13   armes. Il y avait des fusils, des mortiers. Et puis il a dit "Braco"

 14   -"Braco" signifiait Mihalj Kertes- et il a dit que celui-ci ouvrait les

 15   entrepôts d'armes à coups de pieds dans les portes de ces entrepôts.

 16   Et en juillet, début août, Mile Grbic m'a dit que ces armes venaient de

 17   Serbie; il m'a montré un dépôt d'armes avec des mortiers.

 18   Question: Revenons à la réunion du 20 mars. Avez-vous discuté d'autres

 19   choses, mis à part les armes? Est-ce que vous, vous avez soulevé d'autres

 20   questions concernant la police?

 21   Réponse: Oui, je m'étais plaint et j'avais dit qu'à mon avis, le

 22   secrétariat à l'Intérieur de la SAO de la Krajina n'était pas suffisamment

 23   qualifié pour faire ce type de tâches.

 24   Il fallait des juristes, des gens qui s'y connaissaient pour accomplir ce

 25   type de travail. Il fallait des instructeurs, des conseillers juridiques

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  1   et on m'a dit qu'avec Milosevic, les choses allaient être arrangées.

  2   Question: Et est-ce qu'il y a eu une résolution, une solution à ce

  3   problème? Laquelle a-t-elle été?

  4   Réponse: Oui, la chose a été arrangée, mais pas de la façon à laquelle je

  5   m'attendais.

  6   Question: Et à quoi vous attendiez-vous? Qu'est-ce qui a été fait en

  7   réalité?

  8   Réponse: Je m'attendais à des conseillers juridiques, des experts qui

  9   travailleraient à l'organisation du secrétariat à l'intérieur de la SAO de

 10   Krajina. Donc il s'agissait d'organiser tous les services qui faisaient

 11   partie des compétences du ministère de l'Intérieur. Toutefois, ce n'est

 12   pas ce qui est arrivé. Il est arrivé des fonctionnaires, des employés de

 13   la sûreté d'Etat à la tête desquels se trouvait Franko Simatovic, surnommé

 14   "Frenki" dans la Krajina. Et ils ont organisé un campement militaire à

 15   Golubic. Et ils ont mis en place, là-bas, des unités paramilitaires, des

 16   formations paramilitaires et ils ont procédé à une surveillance, à un

 17   contrôle des instances de l'intérieur de la Krajina.

 18   Question: Monsieur le Témoin, revenons, si vous le voulez bien, à la

 19   réunion que vous avez eue avec M. Milosevic et nous reviendrons plus tard

 20   à "Frenki".

 21   Avez-vous eu une réunion avec M. Milosevic le 17 février 1991, après votre

 22   retour de Genève?

 23   Réponse: Cela s'est fait avant Genève et après Genève également. Il me

 24   semble qu'il y avait eu deux entrevues, une avant et l'autre après Genève.

 25   Je me souviens qu'il avait parlé de Jovan Raskovic en termes négatifs et

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  1   il a dit 'Révoquez-le".

  2   Question: Est-ce qu'il vous a dit de remplacer Jovan Raskovic?

  3   Réponse: Oui, il me l'a dit à moi; je lui ai rétorqué que c'était

  4   impossible, que l'on ne pouvait pas révoquer Jovan Raskovic. C'était une

  5   espèce d'homme, de tribun du peuple.

  6   Question: Vous avez dit l'avoir vu à deux reprises, avant Genève et après

  7   Genève. Qu'avez-vous fait exactement à Genève? Dites-le afin que les Juges

  8   soient au courant.

  9   Réponse: J'étais le représentant de la communauté serbe mondiale à une

 10   session de la commission chargée des Droits de l'homme et des droits des

 11   minorités nationales. Je ne sais plus si c'était l'appellation exacte,

 12   mais c'était une commission des Nations Unies.

 13   Question: Pourquoi avoir rencontré M. Milosevic avant et après? Est-ce

 14   qu'il avait demandé ces entrevues? Pourquoi?

 15   Réponse: Je ne peux pas m'en souvenir au juste.

 16   Question: Cette discussion à propos de M. Raskovic était-ce avant votre

 17   départ?

 18   Réponse: Cela a eu lieu en février, je pense donc avant. Je n'en suis pas

 19   tout à fait certain.

 20   Question: Pourquoi M. Milosevic voulait-il le remplacement de M. Raskovic?

 21   Réponse: Raskovic s'était opposé à Milosevic, il l'avait même critiqué à

 22   plusieurs reprises. Je sais qu'il avait parlé de l'impuissance de la JNA à

 23   l'occasion d'une réunion à Lapac, oui.

 24   Question: Monsieur le Témoin, cette autre fois, au moment de cette visite

 25   à Genève, après celle-ci, de quoi vous a parlé M. Milosevic?

Page 13110

  1   Réponse: Le sujet principal de ces réunions-là était celui de notre

  2   sécurité et ce qu'il allait advenir des Serbes dans la SAO de Krajina.

  3   C'était ce qui avait donné lieu à tous ces entretiens. Il disait à chaque

  4   fois que nous serions protégés par la JNA, il disait: "Vous avez le droit

  5   de rester en Yougoslavie."

  6   Question: Avez-vous rencontré M. Milosevic au mois de mars 1991, au moment

  7   où il y a eu des manifestations à Belgrade?

  8   Réponse: Oui. Auparavant, j'avais eu une entrevue avec lui, début mars,

  9   concernant les événements à Pakrac.

 10   Question: Oui. Et la conversation a porté sur quoi?

 11   Réponse: Il y a eu un incident à Pakrac, un conflit entre les Serbes et la

 12   police de Croatie avec une intervention de la JNA.

 13   Question: Nous sommes au courant de cet événement. Inutile de nous en

 14   parler, de nous relater l'événement en tant que tel. Mais j'aimerais

 15   savoir de quoi vous avez parlé avec M. Milosevic?

 16   Réponse: Je l'avais appelé au téléphone pour lui demander ce qui se

 17   passait à Pakrac. Il m'a dit: "Ne t'inquiète pas, tout ira bien. Tu peux

 18   aller à Knin."

 19   Question: Est-ce qu'il était informé de ce qui se passait à l'époque à

 20   Pakrac?

 21   Réponse: D'après ce qu'il m'a dit, j'ai cru comprendre que c'était

 22   effectivement le cas.

 23   Question: Mais, en fait, ma question portait sur les contacts que vous

 24   avez eus avec M. Milosevic au moment où il y a eu des manifestations. Est-

 25   ce que vous l'avez vu à ce moment-là? Si c'est le cas, quand l'avez-vous

Page 13111

  1   vu précisément et de quoi s'agissait-il?

  2   Réponse: Oui, pendant ces manifestations, j'ai été appelé par Matkovic,

  3   l'un des haut responsables du SPS. Il s'agissait de venir à un contre-

  4   meeting organisé par le SPS contre l'opposition qui avait organisé ces

  5   manifestations-là. Et comme j'ai évité de venir, on m'avait demandé

  6   d'envoyer une lettre, un message aux participants à ce contre-meeting et

  7   de m'efforcer d'être présent à Belgrade. C'était la raison pour laquelle

  8   j'étais venu à Belgrade. Au bout de plusieurs jours, M. Milosevic m'a

  9   reçu.

 10   Question: Et de quoi avez-vous discuté avec lui?

 11   Réponse: Je me souviens qu'il était très en colère, qu'il avait critiqué

 12   l'opposition et notamment Vuk Draskovic, en disant que "c'étaient des

 13   traîtres et qu'ils oeuvraient contre les intérêts nationaux serbes". Il

 14   avait également affirmé que "Draskovic était de mèche avec Tudjman et

 15   Mesic".

 16   Question: Mais pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous, vous avez été

 17   appelé à Belgrade afin de participer à un contre-meeting ou une contre-

 18   manifestation? Pourquoi?

 19   Réponse: J'étais là à représenter les Serbes de la Krajina. Milosevic

 20   voulait que l'opinion publique sache que les Serbes de la Krajina lui

 21   apportaient leur soutien, et il voulait récupérer le soutien qu'il avait

 22   perdu en Serbie.

 23   Question: Après votre retour de Knin, est-ce que vous avez reçu un appel

 24   téléphonique de M. Milosevic?

 25   Réponse: Le 16 mars, vers midi, entre 11 heures et midi, un coup de fil.

Page 13112

  1   Et il a dit: "Apportez votre soutien à la Yougoslavie". Je lui ai dit:

  2   "Bon!". Mais, c'est tout.

  3   Question: Est-ce qu'il a dit de quelle façon vous étiez censé soutenir la

  4   Yougoslavie?

  5   Réponse: Rien de concret, mais j'ai sous-entendu par là qu'il fallait se

  6   prononcer en faveur du fait de rester au sein de la Yougoslavie.

  7   Question: Pourquoi est-ce que cela a été là votre interprétation? Est-ce

  8   que c'est parce que vous en aviez déjà discuté avec lui? D'où venait cette

  9   perception qui était la vôtre?

 10   Réponse: Oui, c'est partant de ses positions; c'étaient ses positions,

 11   enfin les positions qu'ils avaient exprimées auparavant. C'était la façon

 12   dont j'avais compris les idées en faveur desquelles il s'était employé.

 13   C'est ainsi que j'avais compris les objectifs politiques qui étaient les

 14   siens.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 16   publique, Monsieur le Président.

 17   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 30.)

 18   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous avez agi à l'avenant,

 20   en conséquence en réponse à ses souhaits qui revenaient à soutenir la

 21   Yougoslavie? Qu'avez-vous fait? Pas vous personnellement, mais les

 22   autorités de la Krajina, qu'ont-elles fait?

 23   Milan Babic (interprétation): Le conseil exécutif de la SAO de la Krajina

 24   a adopté une décision consistant à faire sécession à l'égard de la

 25   Croatie; la proposition a été envoyée au Parlement pour adoption et les

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  1   parlements, les assemblées des municipalités l'ont adoptée. Ce qui fait

  2   que la Krajina a fait sécession vis-à-vis de la Croatie et est restée au

  3   sein de la Yougoslavie.

  4   Question: Nous avons trois pièces à cet égard, qui se trouvent toutes dans

  5   le classeur P351. Il s'agit des intercalaires 22, 64 et 65. Je vais

  6   demander qu'on les présente rapidement au témoin.

  7   (Intervention de l'huissière.)

  8   Monsieur le Témoin, le premier document est une décision du 18 mars 1991

  9   de l'assemblée de la municipalité de Knin, modifiant le statut de la SAO

 10   de Krajina pour en enlever les mentions ou références faites de la

 11   Croatie, et pour que celles-ci soient remplacées par "Fédération".

 12   Le deuxième document est du 18 mars 1991, de la même date: "Assemblée de

 13   Knin qui veut faire sécession de la République de Croatie".

 14   Quant au troisième document, c'est un document similaire: il a trait aux

 15   municipalités de Drnis, Sinj et Sibenik. Il porte lui aussi la date du 18

 16   mars 1991.

 17   C'est bien exact?

 18   Réponse: Oui, oui.

 19   Question: Merci. Inutile d'en discuter davantage.

 20   (Intervention de l'huissière.)

 21   Monsieur le Témoin, nous nous trouvons toujours au mois de mars 1991.

 22   Etes-vous au courant du fait que, au cours du mois de mars 1991, Milosevic

 23   et Tudjman se sont rencontrés?

 24   Réponse: Oui.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

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  1   (Audience à huis clos partiel à 11 heures 33)

  2   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  3   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

  4   Mme Uertz-Retzlaff : Comment le savez-vous?

  5   Milan Babic (interprétation): C'est Slobodan Milosevic qui me l'a dit

  6   Et, par la suite, d'autres personnes encore me l'ont confirmé.

  7   Question: Qu'est-ce que M. Milosevic vous a dit? Et quand cette réunion

  8   portant sur ce point a-t-elle eu lieu?

  9   Réponse: Vers la fin du mois de mars 1991. Et en cette occasion-là, il

 10   avait apporté une carte de l'ex-Yougoslavie avec les frontières des

 11   Républiques de l'époque qui étaient portées dessus. Il avait placé la

 12   carte sur la table et, avec l'ongle de son pouce, il avait fait une espèce

 13   de trait vif, comme s'il était en train d'entailler le territoire de la

 14   Bosnie-Herzégovine au niveau de Bihac. Et il a dit: "Tudjman a besoin de

 15   Bihac". Puis, il a ajouté: "Il a besoin aussi d'une route entre Benkovac

 16   et Drnis". Je suis resté pétrifié.

 17   Je n'étais pas en mesure de dire quoi que ce soit. Je n'ai pas réagi.

 18   Question: Pourquoi étiez-vous pétrifié? Qu'est-ce que cela signifiait pour

 19   vous?

 20   Réponse: C'est tout à fait contraire à tout ce qu'il nous disait jusque

 21   là! Il affirmait que la SAO de la Krajina avait le droit de rester en

 22   Yougoslavie. Il disait que la JNA allait la protéger et faire en sorte

 23   qu'elle reste en Yougoslavie. Et de cette façon-là, maintenant, il

 24   devenait évident que cela allait de venir territoire croate avec Bihac. Et

 25   Bihac se trouve entre la SAO de Krajina et les autres parties de la

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  1   Yougoslavie, en direction de Belgrade.

  2   Question: Monsieur le Témoin, je vais demander l'aide de l'huissier pour

  3   vous présenter la pièce 326, intercalaire 11. C'est en fait la carte que

  4   vous-même, vous avez fournie.

  5   Pourriez-vous nous indiquer sur cette carte quelles sont les parties que

  6   M. Milosevic a indiquées, a séparées de l'ongle de son pouce, comme vous

  7   l'avez dit? Pourriez-vous nous le montrer à l'aide du pointeur?

  8   Réponse: Je peux y aller?

  9   Question: Oui.

 10   Réponse: De l'ongle du pouce, il avait fait un trait dans ce sens-là.

 11   Voilà Bihac; ici, c'est la région de Bihac et de la Krajina de Cazin . Et

 12   il a fait une entaille brève, puis il a montré au-dessus.

 13   Question: Oui, pourriez-vous nous le montrer?

 14   Réponse: Et il a dit il a besoin d'une route entre Benkovac et Drnis.

 15   Question: Je vous remercie.

 16   Monsieur le Témoin, est-ce que M. Milosevic a eu une réaction particulière

 17   face à votre réaction, lorsque vous étiez pétrifié?

 18   Réponse: Je ne me souviens pas d'une réaction de sa part.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Nous pouvons revenir en

 20   audience publique.

 21   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 37.)

 22   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, d'autres témoins

 24   nous ont déjà parlé des événements de Plitvice. Il ne sera pas utile

 25   d'aborder ceci dans beaucoup de détails.

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  1   Cependant pourriez-vous nous dire ce qui avait été préparé et planifié?

  2   Est-ce qu'il y avait un poste de police serbe qui était prévu à l'époque

  3   dans la région de Plitvice? Etes-vous au courant?

  4   Milan Babic (interprétation): Oui.

  5   Question: Qui a pris cette décision?

  6   Réponse: Eh bien, cela a été fait par les représentants des autorités de

  7   la Krajina.

  8   Question: Pourquoi avez-vous pris cette décision?

  9   Réponse: Le gouvernement croate avait rendu public son intention de créer

 10   dans la région de Plitvice une municipalité à part pour dissocier cela de

 11   Korenica. C'était la région d'un parc national qui, économiquement

 12   parlant, avait beaucoup d'importance pour la Krajina.

 13   Question: Et qui a été chargé de la création de ce poste de police? Et ce

 14   poste de police a-t-il fini par voir le jour?

 15   Réponse: Le secrétaire du SUP de la SAO de la Krajina, Milan Martic…

 16   Enfin, il n'a pas été établi un poste de police, mais on a disposé là-bas

 17   des hommes armés, des membres de la police et autres, de façon différente,

 18   pas en mettant en place un poste de police.

 19   Question: Est-ce qu'il s'agit une fois de plus de cette structure

 20   parallèle dont vous avez parlé? Est-ce qu'elle était active cette

 21   structure parallèle à ce moment-là?

 22   Réponse: C'est cela.

 23   Question: Est-ce que cette structure s'est trouvée en collision avec la

 24   police croate?

 25   Réponse: Il y a eu conflit armé où des hommes sont morts. Suite à cela, la

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  1   police croate s'est emparée de Plitvice, a pris le contrôle de Plitvice.

  2   Question: Est-ce que la JNA est intervenue?

  3   Réponse: La JNA est intervenue au bout de plusieurs heures, après la prise

  4   du contrôle des forces de police de la Croatie sur Plitvice; elles se sont

  5   réparties entre Plitvice et la localité de Korenica.

  6   Question: Est-ce que la JNA a gardé à ce moment-là le contrôle de la

  7   région?

  8   Réponse: Elle a tenu là une zone sous son contrôle jusqu'à la fin du mois

  9   d'août; en août, elle a chassé la police croate pour occuper carrément le

 10   territoire.

 11   Question: Vous parlez du mois d'août de quelle année?

 12   Réponse: 1991!

 13   Question: Le personnel du MUP de Serbie a-t-il été participant de ces

 14   événements de Plitvice? Le savez-vous?

 15   Réponse: Ils étaient au courant des préparatifs, de là à savoir dans

 16   quelle mesure ils ont préparé la chose eux-mêmes et dans quelle mesure ils

 17   ont pris part à cela, je ne saurais pas vous le dire.

 18   Question: Vous demandez s'ils étaient au courant de ces préparatifs: vous

 19   parlez de "ils" au pluriel. De qui s'agit-il?

 20   Réponse: Les gens de la DB.

 21   Question: Et pensez-vous à une personne en particulier?

 22   Réponse: A ce moment-là, je ne sais plus exactement qui avait été présent

 23   là-bas, mais c'était un homme du groupe qui se trouvait posté là-bas en

 24   permanence.

 25   Question: Je vais demander l'aide de l'huissière pour vous présenter deux

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  1   documents qui reflètent les événements de l'époque.

  2   (Intervention de l'huissière.)

  3   Il s'agit de la pièce 352, intercalaire 36 et intercalaire 35. Il s'agit

  4   d'une décision prise par le conseil exécutif de la SAO de Krajina, en date

  5   du 1er avril 1991, portant sur le fait que la SAO de la Krajina rejoint la

  6   République de Serbie. Et nous avons l'extrait pertinent, l'extrait y

  7   afférent du "Journal officiel". C'est exact?

  8   Réponse: C'est exact.

  9   Question: Qui a rédigé cette déclaration? L'idée, de qui était-ce ? S'il

 10   le faut, nous pourrons passer à huis clos partiel.

 11   Réponse: Le projet a été fait par Borivoj Rasuo.

 12   Question: Est-ce que c'était son idée personnelle, est-ce qu'il avait été

 13   à l'initiative de ce projet? Et si c'est le cas, pourquoi?

 14   Réponse: C'était son initiative à lui, en effet, pour provoquer la Serbie,

 15   provoquer l'intervention de la Serbie.

 16   Question: Intervention? Mais de quelle façon et pour quelle raison?

 17   Réponse: Eh bien, pour que celle-ci s'emploie en faveur de la protection

 18   de cette région et pour la conserver hors de la Croatie, à l'intérieur de

 19   la Yougoslavie.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 21 (Audience à huis clos partiel à 11 heures 44) [Confidentialité levée par une

 22  ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Huis clos partiel.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que ceci a provoqué des

 24   réactions de la part de Belgrade et plus particulièrement de M. Milosevic?

 25   Milan Babic (interprétation): Une réaction très violente de la part de M.

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  1   Milosevic, oui. Il a demandé au téléphone, par le biais de la base

  2   militaire à Bihac et en contactant mon appartement, chez moi, directement,

  3   pour faire un démenti et pour faire en sorte que la décision soit

  4   supprimée, soit révoquée.

  5   Question: Est-ce qu'il vous a avancé une raison qui l'aurait poussé à s'y

  6   opposer? Qu'a-t-il dit?

  7   Réponse: Il a dit qu'il fallait que nous nous prononcions en faveur de la

  8   Yougoslavie et non pas en faveur de la Serbie.

  9   Question: Vous a-t-il dit pourquoi?

 10   Réponse: Il n'a pas été clair; il a juste dit "Yougoslavie, Yougoslavie".

 11   Et pour moi, les raisons étaient claires.

 12   Question: Et quelle était la raison?

 13   Réponse: Pour qu'on ne constate pas la corrélation directe entre lui, la

 14   Serbie et les événements survenus dans la Krajina.

 15   Question: Comment parvenez-vous à une telle conclusion? Sur quoi se fonde-

 16   t-elle?

 17   Réponse: Eh bien, partant d'un grand nombre de conversations, de ce qu'il

 18   disait, de ce qui avait été son concept pour ce qui était de la

 19   réalisation des objectifs politiques qui étaient les siens, eh bien, ce

 20   concept voulait que l'on voie bien que c'est les autres qui voulaient

 21   quitter la Yougoslavie et que la partie, les segments de la Yougoslavie

 22   qu'il avait conçus comme faisant partie de cet Etat nouveau aient l'air

 23   d'être passivement restés au sein de la Yougoslavie et non pas l'air de

 24   s'être déplacés vers la Yougoslavie. Et il avait affirmé que les Serbes

 25   voulaient rester en Yougoslavie, qu'il fallait protéger ces territoires,

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  1   que les peuples avaient le droit à l'autodétermination et que, si les

  2   Croates voulaient s'en aller, eh bien, qu'ils s'en aillent!

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  4   publique.

  5   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 47.)

  6   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, est-ce que les

  8   autorités de Krajina sont revenues sur leur décision et ont pris pour

  9   décision différente, après cette intervention, de rester au sein de la

 10   Yougoslavie?

 11   Milan Babic (interprétation): Suite à des interventions ultérieures, donc

 12   suite à des interventions réitérées, cela a été fait.

 13   Question: Réitérées par qui? Qui est intervenu?

 14   Réponse: Le Président de la République de Serbie, M. Slobodan Milosevic.

 15   Question: J'aimerais maintenant vous présenter un autre document qui

 16   concerne aussi le 1er avril 1991. Il s'agit de la pièce 352, intercalaire

 17   38.

 18   (Intervention de l'huissier.)

 19   Il s'agit ici d'une demande ou plus exactement d'un ordre de mobilisation;

 20   il porte la date du 1er avril 1991. Mais on voit une conclusion qui dit

 21   ceci -je cite-: "Nous demandons au Gouvernement de la République de Serbie

 22   que les forces du ministère de l'Intérieur de la République de Serbie

 23   fournissent un soutien technique et en personnel au SUP de la Région

 24   autonome serbe de Krajina." (Fin de citation).

 25   Est-ce que ceci est en rapport avec ce que vous avez qualifié de

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  1   provocations destinées à la Serbie?

  2   Réponse: Ceci avait été un appel destiné à faire en sorte que la promesse

  3   de la Serbie soit tenue.

  4   Question: Et la situation était-elle à ce point grave à Plitvice pour que

  5   vous, vous ayez ressenti le besoin de faire un appel à mobilisation et

  6   d'entreprendre de telles actions?

  7   Réponse: Oui. La situation était des plus dramatiques, au point où l'on

  8   avait l'impression que le Gouvernement de la Croatie allait s'emparer de

  9   la Krajina tout entière.

 10   Question: Oui. Vous avez mentionné que le personnel du MUP de Serbie se

 11   trouvait déjà sur le terrain; vous avez dit qu'à Plitvice, il y avait une

 12   personne et vous avez parlé de l'arrivée de personnels supplémentaires.

 13   Qui est venu en SAO de Krajina, en avril 1991?

 14   Réponse: Il faut que je dise au préalable qu'il y en avait un que j'avais

 15   vu à Knin, non pas à Plitvice, et ceci avant les événements de Plitvice.

 16   S'agissant de Knin, c'est Jovica Stanisic qui est venu, puis Franko

 17   Simatovic, ainsi qu'un certain "Fica", le capitaine Dragan, et quelques

 18   autres personnes dont je ne me souviens plus des noms.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 20 (Audience à huis clos partiel à 11 heures 51) [Confidentialité levée par une

 21   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Audience à huis clos partiel

 22   Mme Uertz-Retzlaff : Quand avez-vous rencontré "Frenki"

 23   Simatovic la première fois, et dans quelles circonstances?

 24   Milan Babic (interprétation): Début avril 1991. Il avait été amené par

 25   Jovica Stanisic dans mon appartement, pour m'être présenté en sa qualité

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  1   de prétendu expert en matières diverses.

  2   Question: Quel était le lien ou rapport de subordination entre ces deux

  3   hommes? Est-ce que l'un était le supérieur de l'autre, ou est-ce qu'ils

  4   étaient tous les deux sur le même pied?

  5   Réponse: J'ai cru comprendre que Stanisic était le supérieur.

  6   Question: Et que voulait-il obtenir de vous? Pourquoi vous rencontrait-il?

  7   Réponse: Il voulait voir où j'habitais, parce que je venais d'emménager

  8   dans un appartement nouveau; il voulait vérifier si les militaires

  9   n'avaient pas mis des écoutes chez moi, entre autres.

 10   Question: L'armée… Laquelle armée: de Croatie ou la JNA?

 11   Réponse: Enfin, ils avaient à l'esprit la JNA; c'est du moins ce que j'ai

 12   compris.

 13   Question: Pourquoi est-ce que ces hommes suspectaient-ils une telle

 14   activité de la part de l'armée?

 15   Réponse: Eh bien, parce que l'armée avait ce type de service et elle

 16   suivait ce que faisaient les citoyens, notamment des personnalités

 17   publiques.

 18   Question: Quand avez-vous rencontré le capitaine Dragan pour la première

 19   fois?

 20   Réponse: En avril 1991. Dans cette cité des jeunes de Golubici, qui est

 21   devenue par la suite un campement de la police.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 23   publique, Monsieur le Président.

 24   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 54.)

 25   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Cet endroit, quand est-il devenu un

  2   camp et quel type de camp était-ce?

  3   Milan Babic (interprétation): Cela avait été un centre d'entraînement, un

  4   centre de formation de la DB et de la police de la Krajina. C'est là que

  5   s'entraînaient, qu'étaient formées les formations armées qui s'étaient

  6   organisées en tant que police spéciale et détachement de volontaires.

  7   Question: Les personnes qui avaient été formées là, qui avaient reçu une

  8   instruction militaire, elles étaient combien? Il y avait combien de

  9   personnes, à cette époque-là, en formation?

 10   Réponse: Ces formations se faisaient en peu de temps: une dizaine de

 11   jours. C'est du moins ce qu'on m'a communiqué comme information. Et il y

 12   avait là des groupes allant jusqu'à une centaine de personnes.

 13   Question: Et ce camp, il a fonctionné de quel moment à quel moment?

 14   Réponse: Du mois d'avril 1991 jusqu'au mois d'août, toujours 1991. Au mois

 15   d'août, il y en avait un autre de campement, à Vukovic, près de Benkovac.

 16   Et je crois avoir appris qu'il y en avait un autre ou quelque chose

 17   d'analogue à Samarica, mais je ne l'ai pas vu.

 18   Question: A Golubic, il y avait ce camp d'entraînement. Qui en était le

 19   responsable?

 20   Réponse: Branko Simatovic.

 21   Question: Comment le savez-vous?

 22   Réponse: C'est lui-même qui me l'a dit.

 23   Mme Uertz-Retzlaff :Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 24  (Audience à huis clos partiel à 11 heures 56) [Confidentialité levée par une

 25   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

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   1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A quel moment vous a-t-il dit que

  2   c'était lui le responsable?

  3   Milan Babic (interprétation): Dans la première quinzaine du mois de mai

  4   1991, on m'a convoqué pour me déplacer, donc on m'a convoqué à venir au

  5   centre et c'était lui l'hôte là-bas. Il m'a montré ce qu'il faisait au

  6   sein du centre et dans les alentours de celui-ci.

  7   Question: Est-ce qu'ils avaient des champs de tir?

  8   Réponse: Oui, ils avaient des camps d'entraînement au tir entre Golubic et

  9   Strmica, sur la partie droite de la route.

 10   Question: Et est-ce que c'est M. Simatovic qui vous a montré ce périmètre

 11   de tir? Est-ce qu'il vous a donné des explications relatives au matériel

 12   qui s'y trouvait?

 13   Réponse: C'est exact. Après m'avoir montré ce centre dans la cité des

 14   jeunes à Golubic, il m'a emmené vers ce champ d'entraînement au tir. Je

 15   n'ai pas vu les cibles que l'on vise d'habitude, mais j'ai vu une arme qui

 16   ressemblait à un canon ou alors à une grosse mitrailleuse; c'était, je

 17   crois, une mitrailleuse antiaérienne, un canon antiaérien à plusieurs

 18   tubes. Et il m'a dit que c'était avec cela qu'ils avaient tiré sur les

 19   policiers croates à Borovo Selo, au mois de mai 1991.

 20   Question: Vous êtes allé à ce camp de Golubic au mois de mai 1992. Dans

 21   quel état d'organisation se trouvait-il? Est-ce qu'ils avaient des

 22   fichiers ou des dossiers concernant les personnes entraînées? Quel était

 23   le niveau d'organisation? Est-ce que c'était professionnel ou pas?

 24   Réponse: C'est exact. Nikola Manovic, l'adjoint du secrétaire Martic, m'a

 25   montré un registre tenu à jour pour toute municipalité, pour tous ceux qui

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  1   étaient des recrues du centre. Je lui avais demandé s'il y avait des gens

  2   originaires de Knin; il m'a dit: "Bien sûr, certainement." Et il a ouvert

  3   un registre à part, il m'a montré le fichier. Je n'ai pas reconnu les noms

  4   qu'il m'avait montrés. Par la suite, comme il y avait là-bas des hommes en

  5   uniforme avec des armes, disciplinés, dont les cheveux étaient

  6   réglementairement coupés court.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  8   publique.

  9   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 59.)

 10   Mme Anoya (interprétation): Nous y sommes.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que cela veut dire que les

 12   gens venant de toutes les municipalités y recevaient une formation, un

 13   entraînement? Là je parle de toutes les municipalités de la SAO.

 14   Milan Babic (interprétation): Exact.

 15   Question: Et ces hommes ont-ils été dotés d'armes, d'uniformes et d'autres

 16   matériels?

 17   Réponse: Des uniformes et des armes à canon long, pour autant que je le

 18   sache.

 19   Question: Et ces personnes qui ont été instruites dans cet endroit, sont-

 20   elles devenues plus tard des membres de la police ou de la Défense

 21   territoriale ou des deux?

 22   Réponse: Il y avait des membres de la police spéciale et des membres de ce

 23   que l'on appelait les détachements de volontaires. On a ensuite changé le

 24   nom de ces derniers, on les a appelés "Unité de la Défense territoriale".

 25   Mais, de par leur structure, c'est resté les mêmes.

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  1   Question: Vous avez déclaré que M. Simatovic était le responsable du camp.

  2   Quel était le rôle joué par le capitaine Dragan?

  3   Réponse: Instructeur pour la formation. Par la suite, il a avait commandé

  4   l'une de ces unités de la police spéciale.

  5   Question: Est-ce qu'il était le seul instructeur ou est-ce qu'il y avait

  6   d'autres instructeurs?

  7   Réponse: Il y avait plusieurs instructeurs.

  8   Question: Avait-il un adjoint? Et si c'était le cas qui était-il?

  9   Réponse: Il avait des adjoints au sein de cette unité, des espèces de

 10   chefs de section, je ne sais pas s'il avait véritablement un adjoint, mais

 11   il avait des supérieurs de rang quelconque qui lui étaient subordonnés

 12   dans l'unité.

 13   Question: Est-ce qu'il y avait un certain Ciga Simic qui lui était

 14   instructeur et, d'une certaine façon, était aussi commandant d'unité?

 15   Réponse: Pour autant que je le sache, il avait été chef d'un peloton,

 16   d'une section; je ne sais pas s'il était instructeur.

 17   Question: Quels étaient les rapports existant entre le capitaine Dragan et

 18   "Frenki" Simatovic? Est-ce que le capitaine Dragan était un subordonné ou

 19   subalterne de "Frenki"?

 20   Réponse: Subordonné oui, mais leur rapport était plutôt un rapport de

 21   copain, de camarade, mais hiérarchiquement parlant, oui, il était

 22   subordonné.

 23   Question: Et Milan Martic, quel était son rapport de subordination pour

 24   autant qu'il en existe un?

 25   Réponse: Il était réellement subordonné ou sous l'influence des hommes

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  1 appartenant à la sûreté d'Etat de Serbie et Slobodan Milosevic en personne.

  2   Question: Vous avez dit qu'il était, en fait, "subordonné" ou "sous

  3   l'influence de". De qui? A qui était-il subordonné?

  4   Réponse: En instance finale, il était subordonné à Slobodan Milosevic.

  5   Question: Comment le savez-vous?

  6   Réponse: Je le sais compte tenu des rapports que Milosevic avait à son

  7   égard pour l'avoir vu personnellement.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie.

  9   (Audience à huis clos partiel à 12 heures 04)

 10   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 11   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 12   Mme Uertz-Retzlaff : Quand est-ce que vous avez eu la

 13   possibilité de voir la façon dont M. Milosevic traitait M. Martic? Combien

 14   de fois les avez-vous vus ensemble et comment M. Milosevic a-t-il traité

 15   M. Martic à ce moment-là?

 16   Réponse: La première fois que je les ai vus ensemble, c'était au mois

 17   d'août, plus précisément entre le 9 et 10 août, dans la période allant du

 18   9 ou 10 août au 15 ou 16 août 1991, dans le bureau qu'occupait le

 19   Président Milosevic à Belgrade. Et par la suite, je les ai vus à nouveau

 20   entre 1995 1994.

 21   Question: Quand vous les avez vus ensemble, comment M. Milosevic traitait-

 22   il M. Martic?

 23   Réponse: Comme un homme qui est censé l'écouter, comme un homme qui dépend

 24   de lui, comme un homme à lui.

 25   Question: Monsieur Milosevic, par exemple, lui donnait-il des instructions

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  1   ou des ordres?

  2   Réponse: Je sais que, lors de cette rencontre du mois d'août, il avait

  3   demandé à devenir commandant de la Défense territoriale de la SAO de

  4   Krajina. Par la suite, je sais de Martic qu'il lui avait donné instruction

  5   de ne pas accepter le plan de la Z-4 pour la solution du problème

  6   politique et du statut politique de la Krajina, donc le plan proposé par

  7   la communauté internationale. Je sais cela parce que Milosevic m'a dit

  8   personnellement lui avoir donné ce genre d'instructions au sujet des

  9   opérations militaires qui se déroulaient dans la région de Polje,

 10   Livanjsko Polje.

 11   Question: Quand M. Milosevic vous a-t-il dit cela? En quelle occasion?

 12   Réponse: Lorsqu'il a été question de Livanjsko Polje, en avril 1995.

 13   Question: Comment se fait-il que M. Milosevic vous ait parlé de cela?

 14   Réponse: J'ai demandé à rencontrer M. Milosevic en ma qualité de ministre

 15   des Affaires étrangères du gouvernement de la République de Krajina. Je

 16   voulais connaître son point de vue au sujet du plan de la Z-4 et je

 17   souhaitais me plaindre auprès de lui du fait que l'armée de Croatie, donc

 18   le HVO de Bosnie-Herzégovine, également menaçait Knin au-delà de la chaîne

 19   montagneuse Dinara. Donc j'ai emporté avec moi un schéma, une carte

 20   géographique pour lui montrer de quoi il s'agissait.

 21   Question: Oui, et dans ces conditions, comment se sont achevés les

 22   entretiens avec Milan Martic?

 23   Réponse: Milosevic a dit -parce que c'était lors de la conversation avec

 24   Milosevic au mois d'avril et il était question de Martic et du général

 25   Mladic-, Milosevic a pris la carte de mes mains et a montré ce territoire,

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  1   cette espèce d'enfoncement qui avait été créé par les forces croates à

  2   Livansjko Polje; il a montré la direction allant de Glamoc à Dinara, à la

  3   chaîne montagneuse Dinara, en disant: "J'ai déjà dit à Mladic et à Martic

  4   de couper cela en deux".

  5   Donc il leur a montré la ligne qu'il leur avait indiquée pour cet

  6   enfoncement, pour cette fracture.

  7   Question: Avec l'aide de Mme l'huissière, j'aimerais que soit soumise au

  8   témoin la carte. Je parle de l'intercalaire 11 de la pièce à conviction

  9   326, la carte que nous avons déjà vue tout à l'heure.

 10   (Intervention de l'huissière.)

 11   Monsieur le Témoin, est-ce que la région dont vous parlez se trouve sur

 12   cette carte ou auriez-vous besoin éventuellement d'une autre carte?

 13   Réponse: Il est possible de localiser l'endroit sur cette carte, mais on

 14   ne le voit pas très bien. Cette carte n'est pas très lisible.

 15   Question: Eh bien, j'ai ici une version plus réduite de cette carte qui

 16   trouvera sa place sur le rétroprojecteur.

 17   (Intervention de l'huissière.)

 18   C'est la carte des municipalités, elle est plus petite que la précédente.

 19   C'est la pièce à conviction 333.

 20   Vous l'avez sans doute également, Messieurs les Juges.

 21   Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous montrer sur cette carte ce que M.

 22   Milosevic vous a indiqué? Pouvez-vous nous dire de quelles municipalités

 23   il s'agit, puisque sur cette carte ne figurent que les municipalités?

 24   Réponse: Ce sont les municipalités de Livno et de Bosanski Grahovo sur le

 25   territoire de la République de Bosnie-Herzégovine. Les forces croates se

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  1   sont mises en mouvement en novembre et décembre 1994. Elles ont donc fait

  2   une percée à Livansjko Polje dans la direction de Grahovo et se sont

  3   emparé d'une zone en forme angulaire, en forme de coin, aux environs de

  4   Livno. Et Milosevic m'a indiqué qu'il avait dit à Mladic et à Martic de

  5   faire une percée dans cette direction que je vous montre.

  6   Question: Sur le territoire de Bosnie-Herzégovine?

  7   Réponse: Oui.

  8   Question: Mladic et Martic, à l'époque, coopéraient-ils l'un avec l'autre

  9   et participaient-ils ensemble à des opérations militaires?

 10   Réponse: Il y avait là-bas des opérations militaires auxquelles

 11   participaient l'armée populaire yougoslave et la police de la Republika

 12   Srpska. Mais je ne sais pas quels étaient les effectifs des forces de la

 13   SAO de Krajina qui participaient éventuellement également à ces

 14   opérations.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Nous pouvons revenir maintenant

 16   en audience publique.

 17   (Audience publique avec mesure de protection à 12 heures 12.)

 18   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes maintenant en audience publique.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez parlé

 20   d'un autre homme. Etait-ce également un représentant du MUP de Serbie, oui

 21   ou non?

 22   Milan Babic (interprétation): J'ai entendu parler de lui personnellement

 23   comme étant le garde du corps personnel du Président Milosevic.

 24   Question: Quel rôle jouait-il en SAO de Krajina?

 25   Réponse: C'était l'un des instructeurs des services de la sûreté de

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  1   Serbie.

  2   Question: Dans le camp de Golubic ou ailleurs?

  3   Réponse: Ce que je sais, c'est qu'il était instructeur au camp de Golubic.

  4   Question: Vous avez dit que, plus tard, d'autres camps comparables ont été

  5   créés. Qui était responsable du camp de la région de Benkovac, créé dans

  6   la région de Benkovac?

  7   Réponse: Moi, je sais… j'ai entendu parler du capitaine Dragan.

  8   Question: Y avait-il également un endroit du même genre à Kistanje?

  9   Réponse: Ce n'était pas pareil.

 10   Question: Qu'y avait-il à Kistanje?

 11   Réponse: J'appellerai cela: une base privée de "Frenki", pas une base

 12   militaire.

 13   Question: Qu'est-ce qui faisait de cet endroit le siège privé de "Frenki"?

 14   Que trouvait-on à cet endroit?

 15   Réponse: "Frenki" avait comme adjoint quelqu'un qui avait un rapport avec

 16   Kistanje, Goran Starcevic. Je crois que c'était l'endroit où il habitait,

 17   en tout cas dans les environs de Kistanje.

 18   Question: Y avait-il une formation de la police à cet endroit? Qu'est-ce

 19   que vous appelez "une base" ou "un siège"?

 20   Réponse: L'endroit où il séjournait lui-même, ainsi que ses adjoints. Je

 21   n'utilise pas le terme "base" au sens militaire ou policier. Je veux dire,

 22   l'endroit où il se trouvait, où il résidait. En tout cas, c'est ce que

 23   j'ai compris.

 24   Question: Pendant le conflit de Croatie entre l'été et l'hiver 1991,

 25   "Frenki" a-t-il séjourné en permanence en SAO de Krajina?

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  1   Réponse: Pour autant que je le sache, "Frenki" s'est trouvé en SAO de

  2   Krajina deux fois. La première fois, jusqu'au 8 août 1991; et la deuxième

  3   fois, à partir du mois de septembre jusqu'à la fin de l'année 1991.

  4   Question: Je voudrais tirer quelque chose au clair. Un peu plus tôt, vous

  5   avez dit avoir vu "Frenki" en avril 1991 et, maintenant, vous dites: "à

  6   partir du 8 août 1991 à peu près"; vous dites que c'est à partir de cette

  7   date que vous l'avez vu.

  8   Y a-t-il une erreur dans l'année? J'aimerais tirer cela au clair. Quand

  9   est-il venu séjourner en SAO de Krajina?

 10   Réponse: Il est arrivé en avril 1991.

 11   Question: Mais vous avez parlé du 8 août. Quelle est la signification de

 12   cette date? Ou bien, est-ce une erreur?

 13   Réponse: En 1991. C'est la date, le 8 août, la date à laquelle il était

 14   censé quitter la SAO de Krajina. Donc moi, j'ai supposé qu'à partir de

 15   cette date, il n'était plus en SAO de Krajina.

 16   Question: Et quand est-il revenu?

 17   Réponse: Je sais qu'en septembre 1991, il était de nouveau là-bas.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Peut-on dire la même chose du

 19   capitaine Dragan, les mêmes périodes?

 20   Milan Babic (interprétation): Oui. Le capitaine Dragan est parti au début

 21   du mois d'août, le 7 ou 8 août 1991, et il est revenu en novembre.

 22   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, si le moment est

 23   opportun, nous pouvons faire la pause maintenant.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Merci.

 25   M. le Président (interprétation): Suspension pendant 20 minutes.

Page 13133

  1   (L'audience, suspendue à 12 heures 18, est reprise à 12 heures 40.)

  2   M. le Président (interprétation): Veuillez procéder.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

  4   Monsieur le Témoin, nous venons de parler d'un certain nombre de

  5   formations armées qui se situent en dehors de la JNA; nous avons parlé de

  6   la police spéciale et de certaines formations de la police, de la Défense

  7   territoriale, du MUP, du MUP de Serbie. Y avait-il une structure

  8   hiérarchique bien définie reliant tous ces groupes les uns aux autres? Y

  9   avait-il une structure de commandement qui chapeautait tout cela?

 10   Milan Babic (interprétation): Oui.

 11   Question: Quelle était la structure de commandement, la hiérarchie depuis

 12   le sommet jusqu'au niveau des municipalités?

 13   Réponse: Il y avait deux filières de commandement. La première passait par

 14   la présidence de la Yougoslavie, par l'armée populaire yougoslave, par les

 15   unités de la Défense territoriale relevant directement de la Défense

 16   territoriale. Et la deuxième filière de commandement passait par la sûreté

 17   de Serbie, c'est-à-dire par le MUP de Serbie et par des structures

 18   parallèles dans lesquelles on trouvait la police de Krajina, des unités

 19   spéciales, des patrouilles de volontaires et des unités régulières des

 20   groupes de la DB, de la sûreté.

 21   Et Slobodan Milosevic faisait le lien entre ces deux filières de

 22   commandement au sommet; à moins qu'il y ait eu coordination entre elles

 23   sur le terrain, de leur propre initiative, dans l'organisation des

 24   opérations. Mais ces deux filières de commandement existaient de la façon

 25   la plus claire qui soit.

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  1   Question: Y avait-il des opérations communes entre ces structures, la

  2   structure où l'on trouve la JNA et la structure où l'on trouve la police

  3   et les formations de volontaires? Y avait-il donc des actions, des

  4   opérations menées conjointement par ces deux filières de commandement et,

  5   si oui, qui commandait sur le terrain?

  6   Réponse: Depuis le mois d'août 1991, pour ce que j'en sais, il y avait des

  7   opérations conjointes qui étaient commandées par la JNA. La JNA commandait

  8   au MUP au cours des actions.

  9   Question: Vous avez déjà parlé de la structure dans laquelle on trouve la

 10   police et vous avez dit qu'au sommet, on trouvait M. Milosevic. Et vous

 11   avez expliqué ce qui fondait votre opinion à cet égard en citant un

 12   certain nombre de faits.

 13   Pourquoi M. Milosevic, en sa qualité de Président de Serbie, est-il au

 14   sommet de la structure militaire impliquant la JNA? Avez-vous eu des

 15   informations indiquant qu'il occupait bien cette position par rapport à la

 16   JNA?

 17   Réponse: Il était la personnalité politique la plus importante, l'homme le

 18   plus influent, le plus puissant, celui qui était à l'initiative sur le

 19   plan politique. Et par son initiative politique, il commandait à toutes

 20   les autres structures en Serbie et en partie au niveau de la Yougoslavie,

 21   et notamment il commandait à la JNA.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous savez…

 23   M. Robinson (interprétation): Excusez-moi, il y a une question que

 24   j'aimerais poser au témoin.

 25   Monsieur le Témoin, connaissez-vous le concept de commandant en chef?

Page 13135

  1   Milan Babic (interprétation): Oui.

  2   M. Robinson (interprétation): Etes-vous en train de dire que M. Milosevic

  3   était commandant en chef de la JNA?

  4   Milan Babic (interprétation): Oui. Officiellement, c'était la présidence

  5   de la RSFY qui exerçait ce commandement mais, dans la réalité, c'était M.

  6   Milosevic.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Comment M. Milosevic exerçait-il,

  8   dans les faits, son commandement sur la JNA puisqu'il n'était pas

  9   officiellement commandant en chef? Comment exerçait-il ce commandement sur

 10   la JNA?

 11   Milan Babic (interprétation): Il commandait une partie de la présidence

 12   de la RSFY, autrement dit ce qu'il est convenu d'appeler la "présidence

 13   croupion" de la RSFY, à partir de l'été 1991. Il avait une influence sur

 14   le général Kadijevic, le conseiller fédéral à la Défense nationale, ainsi

 15   que sur le général Hadzic, chef d'état-major de la JNA, pour autant que je

 16   le sache.

 17   Question: Sur quoi fondez-vous cette opinion? Avez-vous vu ces hommes

 18   ensemble, ces généraux et Milosevic?

 19   Réponse: Je sais qu'ils étaient ensemble. Milosevic me l'a dit, ainsi que

 20   les membres de la présidence de Yougoslavie.

 21   Mme Uertz-Retzlaff : Huis clos partiel.

 22   M. Kwon : Avant que nous passions à huis clos

 23   partiel, j'aurais une question à poser au témoin.

 24   Monsieur le Témoin, vous avez dit que M. Milosevic contrôlait la

 25   présidence de la RSFY ainsi que certains généraux. Si l'on dit qu'une

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  1   personne exerce un commandement sur d'autres personnes, c'est quelque

  2   chose de différent par rapport au fait de dire que plusieurs personnes ont

  3   le même avis, n'est-ce pas? La présidence de la République fédérale est du

  4   même avis que M. Milosevic: c'est quelque chose de différent.

  5   Alors, où se situe la différence dans le cas qui nous intéresse? Et si

  6   Milosevic contrôlait ces hommes, quels étaient le bâton et la carotte, si

  7   je puis m'exprimer ainsi. Quelle était la conséquence éventuelle d'un

  8   refus d'obtempérer de leur part? Pouvez-vous nous aider sur ce point?

  9   Milan Babic (interprétation): Je sais de la bouche de certains membres de

 10   la présidence de la Yougoslavie, notamment de M. Kostic, qu'à ses yeux,

 11   Milosevic était le chef; Borislav Jovic, président de la présidence, puis

 12   ensuite membre de la présidence, a parlé du même genre de relations avec

 13   M. Milosevic. Lui aussi a dit que Milosevic était à ses yeux une sorte de

 14   supérieur, une autorité en tout cas. Branko Kostic et Bajramovic se

 15   comportaient de la même façon et Milosevic, lui-même, a dit au mois de

 16   juillet -je crois en avoir déjà parlé: il a dit cela à moi et à Karadzic,

 17   il a dit: "Où est-ce que je vais déployer l'armée?"

 18   Donc il se comportait comme un homme qui avait la capacité de déployer

 19   l'armée et ces mots, je les ai entendus de sa bouche. En juillet 1991,

 20   Milosevic m'a convoqué dans son bureau -c'était un autre jour- et lorsque

 21   je suis arrivé, sa secrétaire a dit que le Président était occupé à ce

 22   moment-là. Et puis, Milosevic est sorti et a dit qu'il était en train de

 23   rencontrer les généraux. Je ne me souviens plus si Hadzic ou Kadijevic

 24   étaient présents, s'il m'a dit qu'ils étaient présents, mais j'ai eu cette

 25   impression. J'ai eu l'impression que c'étaient ces deux hommes qui étaient

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  1   avec lui à ce moment-là. Et le 26 août 1991, lors d'une autre visite à

  2   Milosevic -une visite que j'ai faite à Milosevic-, il m'a interrogé au

  3   sujet de Spiro Nikolic, général et commandant du Corps de Knin.

  4   Donc voilà les faits, les connaissances sur lesquelles j'appuie mon avis.

  5   J'ai eu le sentiment qu'ils partageaient la même opinion, comme M. le Juge

  6   vient de le dire, mais pas seulement cela. J'ai eu aussi le sentiment que

  7   M. Milosevic, au sein de ce groupe, était une autorité, une personnalité

  8   dirigeante, un leader. Et s'agissant de Sejdo Bajramovic, de Kostic et de

  9   Borislav Jovic, il avait également des pouvoirs au niveau du parti. Il

 10   avait le pouvoir de les mettre à leur poste ou de les révoquer. Sur la

 11   base d'événements survenus par la suite, en octobre 1991, je sais que

 12   s'agissant de Momir Bulatovic au Monténégro -c'est Branko Kostic qui m'a

 13   dit cela-, il avait également une influence au Monténégro, donc sur

 14   Bulatovic et Djukanovic.

 15   Maintenant, je ne crois pas pouvoir me rappeler d'autres événements précis

 16   aujourd'hui à ce sujet.

 17   M. Kwon (interprétation): Merci.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous n'avons plus besoin d'un huis

 19   clos partiel.

 20   Revenons à "Frenki" Simatovic et à la SAO de Krajina. J'aimerais à cet

 21   égard vous soumettre un document, intercalaire 67 de la pièce à conviction

 22   352. Il s'agit d'un rapport daté du 5 ou 6 août 1991, provenant de la

 23   Région autonome serbe de Krajina; nous voyons inscrit la date du 6 août

 24   1991. Un rapport soumis par un certain nombre de personnes.

 25   Pouvez-vous nous dire quelles sont les personnes qui soumettent ce rapport

Page 13138

  1   et à qui elles le soumettent?

  2   Milan Babic (interprétation): Je ne peux pas le dire exactement, mais je

  3   suppose que ceux qui ont soumis ce rapport étaient des membres de cette

  4   structure du quartier général de la Défense territoriale qui était en

  5   cours de création. Ce document est adressé au commandant suprême de la SAO

  6   de Krajina, au secrétaire du SUP de la SAO de la Krajina, à la sûreté

  7   d'Etat et à "Frenki", "Frenki" étant Franko Simatovic.

  8   Question: Si nous regardons l'en-tête de ce document, est-ce bien l'en-

  9   tête qui était en usage à l'époque? Le genre d'en-tête et le genre de

 10   sceau en usage à l'époque?

 11   Réponse: Oui, c'était bien le sceau qui était utilisé dans cette période,

 12   dans ce genre de documents en tout cas, jusqu'au 30 septembre 1991. L'en-

 13   tête correspond également.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie.

 15   (Audience à huis clos partiel 12 heures 52) [Confidentialité levée par une

 16   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 17   Mme Uertz-Retzlaff : Le commandant suprême de la SAO de

 18   Krajina pour la Défense territoriale, que l'on voit ici en premier sur la

 19   liste des destinataires, s'agit-il bien de vous en l'occurrence?

 20   Milan Babic (interprétation): En tant que Président du gouvernement,

 21   selon la loi votée le 1er août 1991, j'étais censé exercer cette fonction.

 22   Question: Avez-vous reçu ce rapport ou, en tout cas de façon générale, ce

 23   genre de rapports? Les receviez-vous?

 24   Réponse: Oui. Dans une moindre mesure, peut-être jusqu'au 9 août à peu

 25   près. Par la suite, il y a eu une perturbation.

Page 13139

  1   Question: Et savez-vous si M. "Frenki" Simatovic a lui aussi reçu de tels

  2   rapports?

  3   Réponse: Oui, je sais qu'on lui en envoyait.

  4   Question: Vous avez déjà mentionné le fait que la police et les structures

  5   parallèles étaient financées… ou cette structure parallèle était financée

  6   par la Serbie; vous l'avez déjà expliqué. Mais qu'en est-il des frais

  7   occasionnés par le camp de formation, d'entraînement? Qui s'en est chargé

  8   de ces coûts? Et qui a payé les armes qui ont été distribuées dans ce

  9   camp?

 10   Réponse: Tout cela venait du MUP de Serbie, voire de la Serbie, par le

 11   biais de la DB. S'agissant d'une certaine quantité d'uniformes, une usine

 12   locale en a fait quelques-uns.

 13   Question: Vous avez dit, à propos des armes, qu'elles avaient été fournies

 14   par l'intermédiaire d'un certain Braco Mihajl Kertes. L'avez-vous souvent

 15   rencontré, cet homme? Connaissez-vous bien cet homme, ainsi que sa voix?

 16   Réponse: A plusieurs reprises, oui. Peut-être cinq ou six fois. Il a un

 17   timbre assez spécifique. Il tire un peu vers l'accent de la Vojvodine, pas

 18   tout à fait typique de la région de Backa, mais spécifique.

 19   Question: Avez-vous eu l'occasion de le rencontrer dans son bureau? Et si

 20   c'est le cas, ce bureau où se trouvait-il?

 21   Réponse: Oui, je l'ai rencontré le 4 janvier 1992. Ce bureau se trouvait

 22   au-dessus du bureau du Président Milosevic. Et j'ai eu l'occasion de le

 23   rencontrer dans le cabinet du Président Milosevic et de sa secrétaire,

 24   donc à l'étage au-dessous.

 25   Question: Quel était le poste occupé par M. Kertes? Que faisait-il dans le

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  1   bureau du Président Milosevic?

  2   Réponse: Je ne sais pas quelles avaient été ses fonctions officielles à

  3   l'époque. En 1990, auparavant donc, il avait été Président de la

  4   présidence de Serbie. Mais en 1991 et 1992, je ne sais pas vraiment

  5   quelles avaient été les fonctions officielles qu'il avait.

  6   Question: Lorsque vous l'avez rencontré, de quoi parliez-vous avec lui?

  7   Quels étaient les sujets que vous avez abordés ensemble?

  8   Réponse: Dans son bureau, le sujet avait été… Ou plutôt, j'étais convié

  9   par quelqu'un de la présidence, je crois que c'était Jovica Stanisic qui

 10   l'avait fait. Enfin, l'une quelconque de ces personnes. C'était le 4 ou le

 11   5 janvier, juste après le nouvel An.

 12   Question: De quelle année?

 13   Réponse: En 1992. Je suis donc arrivé au bâtiment de la présidence de

 14   Serbie. Et en entrant, on m'a dit d'aller au bureau de Kertes, au-dessus

 15   du bureau de Milosevic. J'y ai trouvé Jovica Stanisic qui était directeur

 16   des services de sûreté d'Etat de Serbie, et un autre homme dont j'ai

 17   oublié le nom, mais un gros gaillard qui ressemblait à "Frenki". Et Kertes

 18   m'avait accusé, en présence des deux autres, pour dire: "Mais pourquoi

 19   faites-vous honte au Président Milosevic? Pourquoi vous opposez-vous au

 20   plan de Vance? Vous n'êtes pas censé faire cela".

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 22   Juges, je vais essayer de tenter une fois de plus la diffusion d'une

 23   écoute téléphonique. Et je vais peut-être vous demander de ne pas utiliser

 24   ce tout petit recueil de documents parce qu'il sème la confusion davantage

 25   qu'autre chose. Par conséquent, je vous suggère la chose suivante.

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  1   Et j'oubliais de vous dire que nous pouvions revenir en audience publique.

  2   (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 58.)

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous propose de vous servir du

  4   classeur des écoutes, et plus précisément l'intercalaire 29 de la pièce

  5   353.

  6   A l'intention de la régie, je précise que c'est la piste n°6.

  7   (Intervention technique.)

  8   Nous allons diffuser l'intégralité de ces écoutes. Il vous sera facile de

  9   suivre la transcription. Le témoin devrait disposer de la transcription en

 10   BCS. Et je vais demander à Mme l'huissière de placer un document sur le

 11   rétroprojecteur, la version en BCS.

 12   (Intervention de l'huissière.)

 13   (Début de la diffusion et de l'interprétation de l'écoute téléphonique.)

 14   "-Karadzic: Allô! Oui, bonjour. Bonjour. Allô! C'est Braco? Radovan

 15   Karadzic, ici.

 16   -Voix de femme: Oui, un moment.

 17   -Karadzic: Vous allez bien, vous?

 18   -Voix de femme: Oui, je vais bien. Je vous ai vu; vous vous êtes fait

 19   couper les cheveux un peu.

 20   (Rires.)

 21   -Karadzic: Oui, oui. Ils avaient préparé quelque chose pour les bonnes

 22   oeuvres.

 23   -Voix de femme: Oui, oui, un ensemble.

 24   -Karadzic: Combien ils vous ont donné?

 25   -Voix de femme: J'ai vu cela à la télévision "Yutel". Il y en a eu pas

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  1   mal. C'est la première fois, dirai-je, que "vous êtes sorti un peu de la

  2   gaine".

  3   -Karadzic: Ah, oui.

  4   -Voix de femme: Voilà la communication.

  5   -Karadzic: Merci. Au revoir.

  6   -Braco: Bonjour.

  7   -Karadzic: Comment vas-tu?

  8   -Braco: Oui, je travaille.

  9   -Karadzic: Il y a beaucoup de travail?

 10   -Braco: Oui.

 11   -Karadzic: Beaucoup de travail, hein!

 12   -Braco: Alors, ce matin je vais beaucoup mieux.

 13   -Karadzic: J'ai discuté avec les gens.

 14   -Braco: Oui, oui.

 15   -Karadzic: Avec ceux qui ont des étoiles.

 16   -Braco: Ah oui! Oui, je leur ai baisé pères et mères.

 17   -Karadzic: Et qu'est-ce que vous pensez que je… bande d'enculés.

 18   -Braco: Mais je vous ai tout dit!

 19   -Karadzic: Oui, oui.

 20   -Braco: J'ai tout dit. C'est ce qui va se passer: convoi et convoi.

 21   -Karadzic: Mais j'ai besoin de ce gros...

 22   -Braco: Oui, oui, oui, j'ai transmis et j'ai appelé un ami, un compatriote

 23   du niveau fédéral. Et là, j'ai besoin de… dans cette métropole, parce que

 24   si tu prends tout l'immobilier dans la métropole, si tu ouvres une

 25   boutique là-bas…

Page 13143

  1   -Braco: Oui, il faut qu'il y ait de la farine, du sel…

  2   -Karadzic: Et vu qu'il y a de la technique délicate, il faut des tas de

  3   choses.

  4   -Braco: Il faut que ce soit complètement équipé, que ce soit comme une

  5   espèce de drugstore.

  6   -Karadzic: Si tu perds la métropole au sens commercial, si tu ne t'empares

  7   pas…

  8   -Braco: C'est clair.

  9   -Karadzic: C'est là que se fait le gros de la bataille. Si tu ne réussis

 10   pas là…

 11   -Braco: Mais c'est clair! Ecoute, les meilleurs emplacements sont les plus

 12   attrayants.

 13   -Karadzic: C'est exact. La zone piétonne, là où les gens circulent…

 14   -Braco: Mais c'est clair. Et quand on passe la peinture, on sait ce qui

 15   est jaune, ce qui est blanc et tout doucement…

 16   -Karadzic: C'est ce qu'il convient de faire. Bon, et à part ça, tu as

 17   l'air d'être de bonne humeur?

 18   -Braco: Oui. Mais samedi, je voulais me suicider.

 19   -Karadzic: Ah oui?

 20   -Braco: Mais c'est difficile! Mais tu ne sais pas combien c'est difficile!

 21   -Karadzic: Oui, oui.

 22   -Braco: Je crois que, sur le plan humain, c'est difficile.

 23   -Karadzic: Oui, oui.

 24   -Braco: Je vois les besoins, je vois tout; il y a, en Vojvodine, de la

 25   farine, du blé, tout.

Page 13144

  1   -Karadzic: Oui.

  2   -Braco: C'est resté là-bas dans les stocks, sans besoins véritables.

  3   -Karadzic: Oui. Et il ne manque rien?

  4   -Braco: Oh, mais, mon Dieu, tu sais, à partir du moment où c'est sur

  5   stock, ça devient cher.

  6   -Karadzic: Oui, c'est clair. L'entreposage coûte cher.

  7   -Braco: Oui.

  8   -Karadzic: Ça renchérit la chose, ça n'a aucune utilité.

  9   -Braco: Oui, en effet.

 10   -Karadzic: Et les souris viennent manger…

 11   -Braco: Tu as parlé avec le patron?

 12   -Karadzic: Non, non, je… Non, pas encore.

 13   -Braco: Et les réserves en matériel, non?

 14   -Karadzic: Non, non, il était pris, alors tu sais…

 15   -Braco: Mais tu sais, tu devrais insister. Insiste!

 16   -Karadzic: Donc en Croatie… en Slovénie et en Slavonie?

 17   -Braco: Oui, je parle pour la Croatie.

 18   -Karadzic: Ah, pour la Croatie?

 19   -Braco: Oui.

 20   -Karadzic: Donc les leurs, ils doivent recevoir, partager les batteries.

 21   -Braco: Ça sera distribué par le HDZ; chacun a une batterie.

 22   -Karadzic: Mais d'où ils tirent toutes ces batteries, ces enculés? (Rires)

 23   -Braco: Je n'en ai aucune idée.

 24   -Karadzic: (Rires) Mais qui les attaquera? Ils sont pas normaux!

 25   -Braco: Mais je ne pense pas qu'il y ait là un cinéma où les uns

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  1   attaquent… C'est beaucoup plus facile avec des batteries que sans.

  2   -Karadzic: Ah bon, ah bon…

  3   -Bravo: Tu savais…?

  4   -Karadzic: Oui. Mais alors, donc, ils attaqueraient quand même?

  5   -Bravo: Oui, ils ont certainement un plan d'élaboré, tu comprends. Alors,

  6   pour voir ce que tu fais, tu as besoin de batteries, de torches.

  7   -Karadzic: Et quand est-ce que vous vous attendriez à la chose?

  8   -Bravo: Le mieux, ce serait Vidovdan.

  9   -Karadzic: Que je leur baise leurs mères!

 10   -Braco: Je crois que ce sera Vidovdan, parce que les Serbes se relâcheront

 11   à ce moment-là.

 12   -Karadzic: Oui, oui…

 13   -Braco: Et ainsi de suite. Mais c'est ce que j'étais en train de vous

 14   raconter tout le temps!

 15   -Karadzic: Il faudrait donner ça aux journaux, il faudrait donner ça aux

 16   journalistes.

 17   -Bravo: Mais c'est ce que je fais! Les Serbes à Vidovdan doivent se

 18   comporter de façon digne et ne pas renoncer à toute chose.

 19   -Karadzic: Oui, oui, oui.

 20   -Bravo: Et ne pas quitter leur famille et ainsi de suite.

 21   -Karadzic: Oui, c'est décourageant. Mais avec les vivres, maintenant ça

 22   devient un peu plus encourageant.

 23   -Braco: Est-ce que tu travailles? Tu es à ton poste de travail?

 24   -Karadzic: Oui, je travaille. Je vais prendre deux ou trois jours de

 25   repos.

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  1   -Braco: Tu vas prendre du repos?

  2   -Karadzic: Oui, je prendrai un peu de repos. Parce que moi, j'ai des

  3   activités politiques, il faut que je me décontracte un peu. La Krajina

  4   veut se dissocier et se réunifier avec l'autre Krajina.

  5   -Bravo: Ah, mon Dieu, ah, mon Dieu!

  6   -Karadzic: Je dois calmer ces fous, là!

  7   -Braco: Mais c'est…

  8   -Karadzic: Mais ils prennent des décisions, puis, après, ils ne savent pas

  9   les appliquer et maintenant, on en est là.

 10   -Braco: Mais, nom de Dieu, ils sont fous ou quoi?

 11   -Karadzic: Mais c'est là pour le cas où quelqu'un quitterait la

 12   Yougoslavie et…

 13   -Braco: Mais c'est clair! A partir du moment où ils seront partis, ce sera

 14   clair.

 15   -Karadzic: Mais oui, tout à fait clair!

 16   -Bravo: Et alors, nous ne savons pas attendre, il ne faut pas attendre.

 17   -Karadzic: Oui, oui.".

 18   J'aimerais poser une question aux interprètes. Je pense qu'il y a un

 19   terme, terme important qui manque. Est-ce qu'il est possible de rediffuser

 20   cette brève séquence?

 21   Monsieur Karadzic dit: "Je vois que tu n'as pas vu le directeur des

 22   réserves des marchandises." Et je pense que là, vous avez raté un mot.

 23   (Les interprètes précisent qu'ils lisent la transcription.)

 24   Nous pouvons nous interrompre ici.

 25   Est-ce que vous avez déjà entendu, écouté cette écoute téléphonique

Page 13147

  1   pendant les conversations et entretiens que vous avez eus ici, à La Haye?

  2   Réponse: Oui.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous reconnaissez les voix

  4   des interlocuteurs?

  5   Milan Babic (interprétation): J'ai reconnu la voix de Radovan Karadzic et

  6   de Braco Kertes.

  7   M. Kwon (interprétation): Excusez-moi, Madame Uertz-Retzlaff, j'ai besoin

  8   d'un éclaircissement de la part des interprètes. Je crois comprendre que

  9   les interprètes ont dit qu'ils lisaient la transcription de la cassette,

 10   donc ils n'interprétaient pas les voix qu'ils entendaient en version

 11   serbe, les interprètes se sont que contentés de lire?

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Et j'ai cru comprendre que les

 13   interprètes allaient vérifier avec les voix.

 14   M. Kwon (interprétation): Parce que, d'habitude, vous ne le faites pas?

 15   M. le Président (interprétation): Je crois qu'il faudra vérifier

 16   convenablement ces cassettes à un moment donné, tôt ou tard, par un organe

 17   indépendant tel que nos services de traduction.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous aurez cette écoute qui fait

 19   partie des pièces à conviction. Et lorsque vous allez entendre ces

 20   cassettes, vous verrez que la qualité est bien meilleur lorsqu'on écoute

 21   la cassette ou le CD; le témoin l'a déjà dit à plusieurs reprises.

 22   Cependant, je pense que le témoin sera en mesure de tirer cet

 23   éclaircissement.

 24   M. le Président (interprétation): Ce que je veux dire, c'est qu'il faudra

 25   faire procéder à une vérification par nos propres services de traduction

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  1   en temps utile.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous nous en chargerons, Monsieur le

  3   Président.

  4   Monsieur le Témoin, j'aimerais vous poser une question; elle porte sur la

  5   teneur même de ce qu'on a entendu sur cette cassette. Nous avons deux

  6   personnes que vous avez reconnues; ces deux hommes parlent de

  7   marchandises, de drugstore ou supermarché; ils parlent ici de batteries ou

  8   éventuellement de lampes torches.

  9   Est-ce effectivement ce qui faisait l'objet d'échanges commerciaux partant

 10   de la Vojvodine vers d'autres endroits de la Yougoslavie? Etes-vous au

 11   courant? Est-ce que vous avez des informations?

 12   Milan Babic (interprétation): Je ne sais pas. Pour moi, à mes yeux, c'est

 13   une conversation qu'il ne faut pas prendre ainsi à la lettre, quoique, en

 14   Vojvodine, effectivement, il y ait de la farine, il y ait du sucre. Mais

 15   là, c'est légèrement codé, dirais-je.

 16   Question: De quoi ces hommes parlent-ils?

 17   Milan Babic (interprétation): Ils sont en train de parler d'armes, chose

 18   dont traitait Kertes.

 19   M. Kay (interprétation): Nous arrivons au même problème que celui sur

 20   lequel nous avons déjà buté lorsque nous avons abordé la question des

 21   écoutes téléphoniques. C'est le problème de l'interprétation que fait le

 22   témoin.

 23   M. le Président (interprétation): Si l'on peut jeter les bases sur

 24   lesquelles il s'est appuyé pour fournir cet avis, nous verrons ce que

 25   celui-ci vaut. Par exemple, s'il a une expérience personnelle, à ce

Page 13149

  1   moment-là, ou s'il a connu une expérience similaire, cela vaut le coup,

  2   mais c'est inutile si ce n'est pas le cas.

  3   M. Kay (interprétation): Nous n'en sommes pas encore là. Difficile de voir

  4   si les bases ont été proprement jetées.

  5   M. le Président (interprétation): Il ne suffit pas que le témoin dise qu'à

  6   son avis, ces gens-là parlent d'autre chose. Ce n'est que son avis et ça

  7   ne restera que son avis tant qu'il n'aura pas étayé cela.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ce témoin a déjà expliqué qu'une

  9   certaine personne lui avait montré des armes; nous en avons parlé à huis

 10   clos partiel. Il a dit que cette personne avait mentionné le fait que ces

 11   armes avaient été reçues par l'intermédiaire de Braco. Et le témoin a

 12   ajouté que Braco…

 13   M. le Président (interprétation): Vous savez, cela c'est une question

 14   d'argumentation. C'est à nous qu'il revient d'en juger. Je ne pense pas

 15   que nous pourrons davantage entendre le témoin sur ce point.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, M. Karadzic dit,

 17   en parlant du directeur des services des marchandises ou des réserves de

 18   marchandises, donc Braco parle de ce directeur. Vous souvenez-vous avoir

 19   déjà discuté de ceci au niveau du Bureau du Procureur? Et est-ce que vous

 20   avez décelé une erreur de traduction lorsque nous avons discuté de ce

 21   passage?

 22   M. le Président (interprétation): Un instant, Madame Uertz-Retzlaff.

 23   Monsieur Milosevic, vous vouliez intervenir?

 24   M. Milosevic (interprétation): Comment peut-on demander au témoin s'il a

 25   retrouvé des erreurs de traduction?

Page 13150

  1   M. le Président (interprétation): Il peut dire s'il a détecté des

  2   reproductions et nous veillerons à ce que ceci soit vérifié. Il peut

  3   donner son avis.

  4   Un instant, Madame Uertz-Retzlaff.

  5   Il peut tout à fait bien dire: "Ecoutez, voilà ce que j'ai entendu. C'est

  6   ceci". Evidemment, la valeur qu'on donnera à ses propos, c'est quelque

  7   chose de tout à fait différent.

  8   Poursuivez, Madame Uertz-Retzlaff.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, M. Karadzic a

 10   fait une remarque portant sur le directeur des réserves de marchandises.

 11   En version BCS, Radovan Karadzic dit ceci: "Je vois. Vous n'avez pas vu le

 12   directeur des réserves de marchandises."

 13   Est-ce que vous retrouvez ce passage, Monsieur le Témoin? Et pourrait-on

 14   placer ce passage une fois retrouvé sur le rétroprojecteur? Est-ce que

 15   vous l'avez retrouvé?

 16   C'est Braco qui répond: "Oui, oui, ne t'en fais pas. Je vais aller voir le

 17   directeur des réserves de marchandises simplement pour voir, tu sais."

 18   C'est vers la fin de la conversation.

 19   Milan Babic (interprétation): Oui, je me rappelle ce passage. Et je crois

 20   avoir commenté en disant que son supérieur n'était pas le directeur des

 21   réserves de marchandises, mais que c'était Slobodan Milosevic. Mais

 22   attendez que je retrouve.

 23   M. Tapuskovic (interprétation): C'est la page 3 de la version serbe.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Maître Tapuskovic…

 25   M. le Président (interprétation): Ne vous adressez pas directement à lui.

Page 13151

  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président.

  2   Ici, on mentionne le directeur à deux reprises. Une fois à la page 3, mais

  3   aussi vers la fin de la conversation. Normalement, ceci devrait se trouver

  4   à l'avant-dernière page.

  5   M. le Président (interprétation): Est-ce que nous avons une copie qu'on

  6   pourrait remettre au témoin, une copie qui aurait déjà une partie

  7   surlignée?

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Madame l'Huissière, veuillez remettre

  9   ce document au témoin. (Intervention de l'huissière.)

 10   Monsieur le Témoin, avez-vous trouvé ce passage où M. Radovan Karadzic

 11   dit: "Je vois. Vous n'avez pas vu" ou "tu n'as pas vu le directeur des

 12   réserves de marchandises"? Est-ce que vous pourriez donner lecture de ce

 13   passage?

 14   M. le Président (interprétation): Ne perdons plus de temps. Montrez le

 15   passage surligné.

 16   Milan Babic (interprétation): Oui, j'ai retrouvé, j'ai retrouvé.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous pourriez lire le

 18   texte dans votre langue et nous allons demander l'interprétation.

 19   Milan Babic (interprétation): C'est à partir de là:

 20   "Ah, ah! Bien. Et chez le chef des réserves de marchandises, tu n'es pas

 21   allé chez lui?

 22   -Réponse: Non, non, ne crains rien. Je vais voir le chef des réserves de

 23   marchandises.

 24   -Réponse: Oui."

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, arrêtez, s'il vous plaît, merci.

Page 13152

  1   Vous le voyez, Monsieur le Président, le mot "là-bas" est absent dans la

  2   version en anglais. Et ceci vient d'être traduit par les interprètes.

  3   M. le Président (interprétation): De toute façon, il faudra veiller à ce

  4   que ceci fasse l'objet d'une bonne traduction, une traduction en bonne et

  5   due forme. Poursuivez.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous n'avons plus besoin de ce

  7   document.

  8   (Intervention de l'huissière.)

  9   Je vais maintenant vous présenter deux documents. Le premier porte la cote

 10   P352, intercalaire 40.

 11   Il s'agit d'une demande formulée par Milan Martic et adressée à Stanisic,

 12   ainsi qu'à Milan Tepavcevic, service de sûreté de l'Etat du MUP, demande

 13   consistant à demander que soient précisées les dépenses.

 14   Je vous demanderais simplement d'examiner le tampon ou cachet, la

 15   signature et aussi l'en-tête.

 16   Est-ce ce type d'en-tête qu'on utilisait et est-ce bien là la signature de

 17   M. Martic?

 18   Milan Babic (interprétation): Oui, l'en-tête et le cachet, oui, mais la

 19   signature n'est pas celle de Martic. On voit ici "pour Martic": c'est donc

 20   quelqu'un qui a signé pour le ministre, mais c'est quelqu'un d'autre qui a

 21   signé, ce n'est pas lui.

 22   Question: L'autre document, c'est l'intercalaire 41 de la même pièce. Là,

 23   c'est une lettre de Nebojsa Pavkovic adressée à M. Stojicic; elle porte la

 24   date du 22 mars 1995 et elle concerne les centres de formation et

 25   d'entraînement.

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  1   Une fois de plus, je vous demanderai de nous parler de l'en-tête, du

  2   cachet et de la signature. Sont-ce là des signes qu'on utilisait à

  3   l'époque?

  4   Réponse: Oui, c'est exact. Pavkovic était l'adjoint. Je n'arrive pas à me

  5   resituer de quoi avait l'air sa signature, mais le reste concorde. Cela

  6   concorde probablement aussi.

  7   Question: C'est une lettre qui est adressée au ministère de l'Intérieur,

  8   au MUP, Radovan Stojicic; et elle porte sur une aide qu'il faudrait

  9   apporter en matière d'entraînement ou d'instruction. Savez-vous s'il

 10   existait ce type de coopération entre le MUP de Serbie et le MUP de la

 11   SAO? Est-ce que ça se poursuivait toujours à l'époque, cette

 12   collaboration?

 13   Réponse: Oui. Cela existait, je ne sais pas exactement de quels gens ils

 14   s'étaient agi.

 15   Question: Merci. 

 16   (Intervention de l'huissière.)

 17   Revenons, si vous le voulez bien, aux réunions que vous avez eues avec M.

 18   Milosevic. Nous avons déjà effleuré la question des référendums menés en

 19   1991. L'assemblée de la SAO a-t-elle organisé, elle aussi, un référendum

 20   au mois de mai 1991?

 21   Réponse: C'est exact.

 22   Question: Et quelle a été la question soumise aux électeurs?

 23   Réponse: Il s'agissait de l'unification de la SAO Krajina à la Serbie et

 24   le fait de rester avec la Serbie et le Monténégro au sein de la

 25   Yougoslavie, de faire partie de ceux qui voulaient sauvegarder la

Page 13154

  1   Yougoslavie. Donc il s'agissait de faire une proclamation pour ce qui

  2   était de notre réunification avec la Serbie. Mais cela a été modifié,

  3   suite à l'intervention du Président Milosevic.

  4   Mme Uertz-Retzlaff : Huis clos partiel, s'il vous plaît.

  5  (Audience à huis clos partiel à 13 heures 22) [Confidentialité levée par une

  6   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous parlez de l'intervention de M.

  8   Milosevic. Qu'entendez-vous par là, quel type d'intervention était-ce?

  9   Milan Babic (interprétation): Il avait demandé que nous nous prononcions

 10   en faveur de la Yougoslavie et non pas en faveur de la Serbie. Il était

 11   donc en colère en raison de ce référendum. Il était en colère parce qu'il

 12   avait entendu dire que nous allions envoyer une commission pour informer

 13   l'assemblée, le Parlement serbe, des résultats de notre vote.

 14   Question: Est-ce que cette fois-là, vous avez parlé, vous personnellement,

 15   avec Milosevic? Et si c'était le cas, ça s'est passé où?

 16   Réponse: Oui, début mai, dans ses bureaux.

 17   Question: Et que voulait-il que vous fassiez? Et est-ce que vous avez

 18   réagi au souhait qu'il a émis?

 19   Réponse: Il s'agissait de se prononcer en faveur de la Yougoslavie. Il a

 20   dit que certains académiciens lui avaient affirmé qu'il fallait m'abattre

 21   parce que j'étais trop têtu, que j'étais une espèce de semeur de troubles

 22   et que je semais la pagaille. Toutefois, je suis parti pour lui dire le

 23   contraire, c'est-à-dire dire ce qui était censé être dit.

 24   Par la suite, je n'arrive plus à me rappeler, mais d'autres personnes

 25   avaient insisté pour que les choses soient complétées davantage encore. Et

Page 13155

  1   c'est ce qui a été fait.

  2   Question: Quelle a été finalement la question soumise aux voix, aux

  3   électeurs?

  4   Réponse: Est-ce que vous êtes favorable à la réunification avec la Serbie

  5   et le fait de rester en Yougoslavie avec d'autres qui souhaitaient oeuvrer

  6   à la sauvegarde de la Yougoslavie? Cela a été donc modifié; en quelque

  7   sorte: il s'agissait de réunification avec la Serbie et du fait de rester

  8   au sein de la Yougoslavie.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 10   publique.

 11   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 24.)

 12   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes de retour en audience publique.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous avons un document portant sur le

 14   référendum. J'aimerais rapidement le montrer au témoin; il s'agit de

 15   l'intercalaire 30, pièces 351. Puis il y a aussi l'intercalaire 32, le 33,

 16   le 35; autant de documents qui portent tous sur le référendum, la décision

 17   de l'organiser, un rapport consécutif à ce référendum, la liste des

 18   municipalités qui ont participé à ce référendum, ainsi qu'une décision

 19   prise par l'assemblée de la SAO Krajina qui désigne un groupe de

 20   parlementaires chargé de présenter les résultats de ce référendum à

 21   l'assemblée nationale de la République de Serbie.

 22   (Intervention de l'huissière.)

 23   Monsieur le Témoin, inutile de discuter de ces documents. Je vous l'ai

 24   soumis uniquement pour que vous voyiez s'ils sont tous bien exacts.

 25   Milan Babic (interprétation): C'est exact.

Page 13156

  1   Question: Dans le dernier document, on mentionne une délégation. Est-ce

  2   qu'elle a été accueillie, reçue par l'assemblée nationale de Serbie?

  3   Réponse: Non, elle a été reçue par Borivoj Petrovic, le vice-président du

  4   parlement, à titre privé; c'est lui qui a offert le dîner.

  5   Question: Et quel a été le résultat de ce référendum? Que s'est-il passé

  6   après celui-ci?

  7   Réponse: Après le référendum, le Parlement de la SAO de Krajina a proclamé

  8   les résultats de celui-ci et, par la suite, il y a eu constitution

  9   nouvelle de la SAO de la Krajina en tant que territoire fédéral faisant

 10   partie de la Yougoslavie.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous avons discuté de la situation

 12   dans laquelle se trouvait la police dans la Krajina, nous avons parlé de

 13   la situation militaire. J'aimerais maintenant

 14    passer à huis clos partiel pour les questions suivantes.

 15   (Audience à huis clos partiel à 13 heures 28)

 16   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 17   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le Gouvernement de la SAO de la

 19   Krajina a-t-il jamais eu un contrôle quel qu'il soit sur Martic ou sur

 20   toute force de police au sein de la SAO de Krajina?

 21   Milan Babic (interprétation): Non, jamais.

 22   Question: Est-ce que vous avez essayé de changer cet état de choses au

 23   cours du printemps 1991? Et si c'est le cas, qu'avez-vous essayé de faire?

 24   Réponse: Vers la fin du mois de mai 1991, je voulais que l'on nomme à la

 25   place de Martic un autre homme au ministère de l'Intérieur, que Martic

Page 13157

  1   devienne ministre de la Défense et que les deux soient tenus responsables

  2   devant le Parlement. L'assemblée, le Parlement a donc élu Martic aux

  3   fonctions de ministre de la Défense et il ne voulait pas lâcher prise,

  4   pour ce qui est de la police. Et le 27 juin 1991, il a contraint les

  5   députés du Parlement à lui restituer le poste qui était auparavant le

  6   sien. Et j'ai ouï dire la chose de la bouche de gens, d'hommes qui étaient

  7   dans l'entourage de "Frenki".

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  9   publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 29.)

 11   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'aimerais maintenant soumettre au

 13   témoin l'intercalaire 54 de la pièce 352.

 14   (Intervention de l'huissier.)

 15   C'est une décision portant formation d'une unité spéciale de la Région

 16   autonome serbe de Krajina, qui doit être appelée la police de Krajina et

 17   qui doit se faire sous l'autorité, sous la tutelle du ministère de la

 18   Défense. On précise les tâches qui reviendront à cette unité. Elle sera là

 19   pour défendre le territoire de la SAO de Krajina et elle sera aussi là

 20   pour régir les affaires intérieures.

 21   Et d'après cette tâche, ici, peut-on penser qu'il s'agit là de tâches

 22   affectées régulièrement à la police ou à la police régulière?

 23   Milan Babic (interprétation): Cela était censé être une police

 24   territoriale, une sorte de gendarmerie; c'était ce que cela était censé

 25   être.

Page 13158

  1   Question: Ça, c'était l'idée?

  2   Réponse: Exact.

  3   Question: Et ici, dans cette décision, on dit précisément que c'est le

  4   ministère de la Défense qui est le ministère de tutelle.

  5   Et ici, j'ai un document suivant: c'est l'intercalaire 55 de la pièce 352;

  6   là, nous avons une décision désignant M. Milan Martic à cette fonction que

  7   vous venez d'évoquer.

  8   Le document suivant sera l'intercalaire 56 du même document; il s'agit là

  9   d'une décision concernant l'élection du ministre de l'Intérieur. Il s'agit

 10   de (expurgée) .

 11   Réponse: C'est exact.

 12   Question: Est-ce que M. Martic était d'accord avec tout ceci, était

 13   d'accord avec la teneur de cette décision au moment où elle a été prise, à

 14   savoir le 29 mai 1991?

 15   Réponse: Ce jour-là, il avait été d'accord, il a prêté serment en qualité

 16   de ministre de la Défense. Mais, le lendemain, il ne voulait plus.

 17   Question: Qui vous a dit que ceci s'était fait sous l'influence de

 18   "Frenki" Simatovic? Qui vous a dit cela? Dans quelles circonstance l'avez-

 19   vous appris?

 20   Réponse: Des gens de la police, des gens du poste de police à Knin. Et

 21   Martic.

 22   Question: Monsieur le Témoin, (expurgée) a-t-il essayé de s'emparer de

 23   ses fonctions à lui?

 24   Réponse: Il a essayé de prendre ses fonctions. Il a nommé des personnes,

 25   il a nommé le chef du poste de police à Knin et l'un des adjoints. Mais,

Page 13159

  1   d'après ce que j'ai ouï dire de la bouche des gens de la police, ceux qui

  2   étaient des hommes de Martic ont déchiré les documents en question et leur

  3   ont ri au nez. (expurgée) n'a plus essayé par la suite.

  4   Question: Je ne pense pas qu'il soit vraiment nécessaire de présenter les

  5   deux documents suivants à ce témoin puisqu'il en a déjà parlé. Il y a la

  6   confirmation de la désignation, le 27 juin 1991, de (expurgée)

  7   (expurgée) 

  8   (expurgée) . Et il y a le ministre de l'Intérieur de la SAO de

  9   Krajina qui est désigné: c'est Milan Martic.

 10   Les hommes politiques de la Krajina ont-ils essayé de prendre le contrôle

 11   de la police au mois d'août 1991?

 12   Réponse: Oui, par le biais de l'organisation de la Défense territoriale de

 13   la SAO de Krajina.

 14   Question: Et qu'est-ce qu'on a fait précisément?

 15   Réponse: Martic a été nommé commandant-adjoint de la Défense territoriale.

 16   Il a appliqué les dispositions législatives aux termes desquelles la

 17   police était censée se subordonner à la Défense territoriale, aux membres

 18   de la Défense territoriale.

 19   Question: Ce n'est pas vraiment la question que je vous ai posée. Je crois

 20   que je vais devoir vous présenter un document: l'intercalaire 62 de la

 21   pièce 352.

 22   (Intervention de l'huissière.)

 23   C'est une décision prise par le gouvernement de la Région autonome serbe

 24   de Krajina, décision en date du 1er août 1991, consistant à abolir les

 25   services de sûreté de l'Etat sur le territoire de la SAO de Krajina.

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  1  Quelle a été la toile de fond de cette décision-ci? Pourriez-vous nous le

  2   dire?

  3   Réponse: La toile de fond, c'était de soustraire le service de sûreté

  4   d'Etat, de se soustraire aux influences de la sûreté d'Etat de Serbie, de

  5   la DB dans la Krajina, et de placer la police sous l'influence du service

  6   de l'Intérieur de la Krajina. En d'autres termes, le ministère de

  7   l'Intérieur était censé se placer sous contrôle du gouvernement. C'était

  8   une tentative du moins.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 10  (Huis clos partiel à 13 heures 37) [Confidentialité levée par une ordonnance

 11   de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A l'époque, M. Stanisic était à

 13   Knin; vous avez discuté de cette mesure avec lui, n'est-ce pas?

 14   Milan Babic (interprétation): Oui, ce jour-là, Stanisic était à Knin. Je

 15   l'ai rencontré. Il m'a demandé, de façon sévère, renfrognée: "Que s'est-il

 16   passé au juste?". Je lui ai dit que le gouvernement avait l'intention de

 17   mettre sur pied une agence nationale chargée de la sécurité. Il a ri

 18   jaune, il a ri de façon moqueuse.

 19   Question: Est-ce que, parallèlement, vous avez essayé d'obtenir le

 20   contrôle des groupes armés qui ne faisaient pas partie de la police? Est-

 21   ce que vous avez essayé d'établir une Défense territoriale contrôlée par

 22   les autorités de la SAO?

 23   Réponse: C'est exact. La Défense territoriale relevait des compétences des

 24   QG municipaux de la TO, et les armes étaient placées sous clé auprès de la

 25   JNA. Je voulais que l'on réunifie la TO au niveau de la Krajina et que

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  1   l'on mette sur pied un QG et que cette Défense territoriale soit placée

  2   sous les ordres et le contrôle du Premier ministre de la SAO de la

  3   Krajina, en sa qualité d'homme numéro 1 de l'exécutif de la Krajina.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  5   publique.

  6   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 38.)

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et je voudrais présenter ce décret au

  8   témoin: il s'agit de l'intercalaire 63 de la pièce 352.

  9   Est-ce qu'ici nous avons un décret concernant les insignes à arborer par

 10   les membres des forces armées, la Défense territoriale et les unités

 11   spéciales de la SAO de Krajina? Est-ce de cela que vous parliez?

 12   Milan Babic (interprétation): Oui.

 13   Question: Est-ce que la TO a, en fait, réussi à devenir un organe

 14   indépendant, une institution indépendante contrôlée par le gouvernement de

 15   la SAO? Qu'est-ce qui s'est passé? Qui s'y est opposé?

 16   Réponse: Slobodan Milosevic a aidé à constituer un QG de la Défense

 17   territoriale, mais celui-ci a été subordonné à l'armée populaire

 18   yougoslave.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A l'époque, est-ce que vous avez eu

 20   aussi un affrontement? Je pense qu'il faudra pour cette question

 21   –excusez-moi, Monsieur le Président- passer à huis clos partiel.

 22   (Huis clos partiel à 13 heures 40)

 23   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 24   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'à l'époque vous avez eu

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  1   aussi un accrochage avec Simatovic et le "capitaine Dragan"? Si c'est le

  2   cas, que s'est-il passé précisément?

  3   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Vers le début du mois d'août,

  4   il me semble vers le 8… le 9… non, plutôt le 8 août, après l'adoption de

  5   ces dispositions légales concernant la mise en place d'une Défense

  6   territoriale et suite à l'adoption de ce document-ci, il avait envoyé un

  7   homme Djoko Majstorovic pour porter l'emblème de la Défense territoriale

  8   au club des entreprises, à la forteresse de Knin où était censé se trouver

  9   le QG de guerre de la municipalité de Knin. Et à l'époque, c'était là que

 10   se trouvait le siège du "capitaine Dragan", de Simatovic et des gens qui

 11   se trouvaient avec eux.

 12   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic?

 13   M. Milosevic (interprétation): Il se peut que je me trompe, mais je

 14   n'entends rien de ce que le témoin dit, et je suis sur le compte rendu

 15   d'audience ce qu'il est en train de raconter. Je crois qu'il a été

 16   question de l'intercalaire 63. Et l'intercalaire 63, c'est une espèce de

 17   décret de Milan Babic  disant de quoi devait avoir l'air l'insigne des

 18   forces armées de la Défense territoriale; il y a là une espèce de drapeau

 19   avec des épées croisées. Et je n'ai pas compris que cela avait fait

 20   l'objet de l'explication qu'il vient de nous donner. Je me trompe peut-

 21   être?

 22   M. le Président (interprétation): Je pense qu'il est passé à autre chose;

 23   il parle d'un accrochage avec Simatovic.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et cet accrochage est provoqué

 25   effectivement par cette pièce, puisqu'on parle là des différents emblèmes

Page 13163

  1   ou autres drapeaux.

  2   M. Milosevic (interprétation): Donc c'est bien la pièce à conviction dont

  3   il s'agit?

  4   M. le Président (interprétation): Oui, c'est en rapport avec cette pièce.

  5   Monsieur le Témoin, poursuivez.

  6   Milan Babic (interprétation): Je m'excuse, sommes-nous à huis clos

  7   partiel?

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  9   Milan Babic (interprétation): Je me suis rendu à cet endroit-là, donc à

 10   la forteresse de Knin, là où il y avait le "capitaine Dragan", Martic,

 11   "Frenki", pour voir ce qui se passait. Parce que le "capitaine Dragan"

 12   avait dit à l'homme qui avait porté ces insignes, que "tant que lui serait

 13   là-bas, Babic ne poserait pas cela là". Et je suis allé voir ce qui se

 14   passait sur place.

 15   Une fois arrivés, les gens qui faisaient partie du QG municipal de la TO

 16   étaient en train de s'en aller; ils m'ont dit que le "capitaine Dragan" et

 17   les gens qui avaient sécurisé cette aire-là leur avait dit de s'en aller.

 18   Alors, je suis allé là-bas, je suis allé vers la salle de réunion parce

 19   qu'on m'avait dit que le "capitaine Dragan" se trouvait précisément à cet

 20   endroit-là, et le "capitaine Dragan" avait une réunion avec l'unité

 21   spéciale à la tête de laquelle il se trouvait. Je suis entré dans la salle

 22   et je me suis assis à ses côtés.

 23   Là, quand j'étais entré, cette place avait été rendue vacante par

 24   "Frenki"; je me suis assis. Personne ne s'est adressé à moi et le

 25   "capitaine Dragan" a continué à parler à ses hommes. Il a dit que la faute

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  1   pour toute chose devait être impartie aux hommes politiques, que lui

  2   allait s'en aller de Knin et qu'il allait les confier à "Frenki"; et que

  3   toutes les questions seraient résolues.

  4   Question: Ce jour-là, avez-vous reçu des menaces de qui que ce soit?

  5   Réponse: Oui. Les hommes du capitaine Dragan m'ont suivi vers le centre de

  6   Golubic, vers la partie de Golubic où devaient se trouver les structures

  7   civiles en cas de guerre, donc à Golubic, et j'étais venu là pour dire aux

  8   hommes de ne pas se disperser.

  9   Les hommes du capitaine Dragan m'ont suivi, ils ont bloqué tout le coin et

 10   ils ont dit: "Mais qui faut-il abattre? Où se trouve cette personne?" Je

 11   me suis enfui de cette aire-là, je suis allé vers le village voisin et, le

 12   lendemain matin, j'ai téléphoné au président Milosevic.

 13   Question: Pourquoi l'avoir appelé? Qu'attendiez-vous de lui?

 14   Réponse: Eh bien, pour lui dire que ces hommes autour de "Frenki" étaient

 15   des fous, étaient des gens qui ne savaient pas ce qu'ils faisaient.

 16   J'étais terrifié, j'avais demandé qu'il retire "Frenki" de la Krajina,

 17   pour être tout à fait concret.

 18   Question: Mais que lui avez-vous dit? Vous dites que vous lui avez dit

 19   qu'ils étaient fous, vous lui avez expliqué ce que ces hommes faisaient,

 20   mais que lui avez-vous dit précisément s'agissant de ce que ces hommes

 21   faisaient?

 22   Réponse: Je ne me souviens pas de lui avoir expliqué le tout, je lui avais

 23   parlé d'appréciations d'ordre général.

 24   Question: Pourquoi avez-vous demandé que soit démis de ses fonctions

 25   "Frenki" alors que vous ne l'avez pas demandé pour le capitaine Dragan?

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  1   Réponse: C'était "Frenki" qui était le chef de ces hommes là-bas, et il a

  2   dit qu'il le ferait.

  3   Question: Vous avez dit que M. Milosevic vous avait promis de le faire.

  4   Est-ce qu'il l'a fait?

  5   Réponse: Mais je n'ai plus vu "Frenki" et je pense que oui. Mais Frenki,

  6   le 26 août 1991, s'en est allé. Milosevic m'a dit que Frenki devrait

  7   revenir vers la Krajina pour remplacer les gens là-bas.

  8   M. Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, peut-on

  9   terminer cette séquence-ci?

 10   M. le Président (interprétation): Oui.

 11   M. Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous dites que, par la suite, M.

 12   Milosevic avait dit que "Frenki" devrait retourner en Krajina.

 13   Quand M. Milosevic a-t-il tenu ces propos et dans quelle circonstance l'a-

 14   t-il fait?

 15   Milan Babic (interprétation): Le 26 août 1991 dans son cabinet. C'est

 16   quelqu'un qui m'a transmis un message de sa part pour venir à une réunion

 17   chez lui; c'est à cette date-là que j'étais chez lui et c'est à ce moment-

 18   là qu'il m'a dit cela.

 19   Question: Est-ce que "Frenki" est rentré en Krajina?

 20   Réponse: Il est retourné là-bas, je l'ai rencontré et j'ai entendu parler

 21   de lui en septembre 1991.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 23   Juges, j'ai terminé les questions relevant de ce passage-ci.

 24   M. le Président (interprétation): Fort bien. L'audience va être levée.

 25   Mais auparavant, d'après mes calculs, je vois qu'il vous reste 4 heures

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  1   45. Sommes-nous en audience publique? Non, revenons en audience publique,

  2   Madame la Greffière.

  3   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  4   (Audience publique à 13 heures 48.)

  5   (Matières relatives à la présentation des témoins.)

  6   M. le Président (interprétation): Nous allons suspendre l'audience d'ici

  7   demain, mais auparavant je tiens à vous préciser, Madame Uertz-Retzlaff,

  8   qu'il vous reste 4 heures et 45 minutes pour ce témoin, donc agissez en

  9   conséquence.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que je peux soulever la

 11   question du temps aujourd'hui ou est-ce que je le fais demain matin? En

 12   effet, je voudrais vous faire une demande.

 13   M. le Président (interprétation): Vous voulez quoi?

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je demande une extension du temps.

 15   M. le Président (interprétation): De combien?

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Deux jours supplémentaires.

 17   M. le Président (interprétation): Mais cela fait encore 8 heures, ça. Nous

 18   allons y réfléchir.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Voulez-vous que je motive ma demande?

 20   En effet, ce témoin est un témoin très particulier, tout à fait spécial.

 21   Et pour le volet croate de l'Acte d'accusation, il sera le seul de son

 22   genre.

 23   Si nous entendons toute la déposition qu'il veut faire, nous pourrons sans

 24   aucun doute écarter des personnes du cercle d'initiés qui étaient de

 25   moindre calibre et qui ne pourraient nous donner qu'une partie plus

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  1   parcellaire de ce que peut nous dire ce témoin-ci.

  2   Je ne suis pas en mesure de vous donner de noms précis de personnes que

  3   nous allons écarter en tant que témoins, je ne peux pas vous le dire très

  4   précisément mais, en ce moment même, l'équipe de l'accusation fait des

  5   vérifications et essaie de faire un tri pour voir qui pourra être rejeté

  6   en tant que témoin potentiel, pour ce qui est des échelons inférieurs

  7   parmi les initiés.

  8   M. le Président (interprétation): Vous pensez à combien de témoins?

  9   Donnez-nous une idée.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pourrai vous le dire demain matin.

 11   M. le Président (interprétation): S'il vous plaît?

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Au moins cinq ou six personnes, au

 13   moins.

 14   M. le Président (interprétation): Fort bien, nous allons y réfléchir.

 15   (Matière relative au calendrier.)

 16   M. le Président (interprétation): Dans l'intervalle, j'aimerais aborder

 17   une autre question générale, elle concerne les séances ou audiences pour

 18   ce trimestre-ci et celui d'après.

 19   Premièrement chose. Apparemment, les dates de la Plénière sont en train

 20   d'être revues. Elles avaient été prévues du 10 au 12 décembre. Est-ce

 21   qu'elles vont être maintenues, je ne sais pas. Ce qui est assez certain,

 22   c'est que nous allons siéger le premier jour de ce qui avait été prévu

 23   comme premier jour de la Plénière, le 10, n'est-ce pas. Le 10? Est-ce

 24   qu'on a certains doutes?

 25   M. Nice (interprétation): Je pensais que c'était le 11, le premier jour de

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  1   la Plénière puisque la dernière audience était le 10.

  2   M. le Président (interprétation): Nous serons sans doute en audience le 11

  3   et, qui sait, nous pourrons peut-être siéger les autres jours.

  4   M. Nice (interprétation): C'est très utile de le savoir.

  5   M. le Président (interprétation): Et sans doute un jour de plus du fait de

  6   ce réaménagement, mais tout ceci doit être confirmé; il se peut que ce ne

  7   soit pas le cas. Il est assez certain que nous siègerons le 11.

  8   Nous avons le 19, c'est une journée un peu à part. Non, le 18.

  9   M. Nice (interprétation): Le mercredi.

 10   M. le Président (interprétation): Le mercredi, s'il est nécessaire, nous

 11   terminerons l'audition d'un témoin.

 12   Mais il serait peut-être raisonnable de réserver cette journée à des

 13   questions administratives et d'autres arguments. Nous avons notamment la

 14   déclaration de Torkildsen, des questions juridiques et puis des questions

 15   générales s'agissant de la poursuite du procès. Nous verrons si nous

 16   pouvons garder cette date pour ce faire.

 17   Enfin, préavis pour les audiences de janvier, la première interruption en

 18   janvier se fera entre le 22 et le 24 janvier. Peut-être que c'est un jour

 19   d'entretien des salles d'audience le vendredi, le 24. Nous verrons.

 20   En tout cas, nous prévoyons une interruption. Et vous aurez un calendrier,

 21   vous aurez tous un calendrier des audiences prévues pour le prochain

 22   trimestre; de cette façon, vous pourrez prévoir en conséquence.

 23   Fort bien, l'audience est suspendue jusqu'à demain matin.

 24   (L'audience est levée à 13 heures 53.)

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