Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Lundi 25 novembre 2002.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 12.)

  3   M. le Président (interprétation): Quelques questions d'intendance tout

  4   d'abord.

  5   Madame Uertz-Retzlaff, nous avons été informés du fait que la plénière va

  6   désormais avoir lieu les 12 et 13 décembre, deux des journées qui avaient

  7   été prévues au départ, mais il n'y aura pas de plénière le 11. Par

  8   conséquent, nous pourrons siéger ce jour-là.

  9   Nous gardons à l'esprit le temps qui a été perdu. Bien sûr, nous allons

 10   pouvoir avoir audience le 18, journée que nous avions réservée pour des

 11   questions d'intendance. Il se peut que nous ayons à terminer tel ou tel

 12   témoignage à ce moment-là et, lorsque nous nous serons rapprochés de cette

 13   date, nous verrons si nous devons siéger cet après-midi-là. Je pense que

 14   les parties auront suffisamment de temps pour une audience si nécessaire.

 15   Oui, Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.

 16   (Interrogatoire principal du Milan Babic par Mme Uertz-Retzlaff.)

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin.

 18   M'entendez-vous?

 19   Milan Babic (interprétation): Oui, je vous entends.

 20   Question: Monsieur le Témoin, vous avez déjà décrit le schéma d'attaque.

 21   Vous avez déjà décrit les formations militaires présentes dans cette

 22   région-là.

 23   Maintenant, j'aimerais aborder avec vous la question suivante: que pouvez-

 24   vous nous dire à propos de crimes qui furent commis dans les lieux cités

 25   dans l'Acte d'accusation?

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  1   Parlons tout d'abord de la région de Kostajnica et, en particulier, des

  2   villages de Cerovljani, Dubica et Bacin.

  3   Vendredi, vous avez dit qu'il y avait eu des combats dans cette région

  4   jusqu'au mois de septembre 1991. Vous aviez auparavant déclaré que vous

  5   aviez observé vous-même ces combats du côté bosniaque de la rivière.

  6   Vous aviez déjà mentionné le fait que vous vous êtes déplacé dans la

  7   région en novembre 1991, quand vous alliez à Petrinja et que vous aviez vu

  8   des villages croates, ou des villages où il y avait des Croates qui

  9   vivaient, détruits, la population étant partie.

 10   Vous avez déjà parlé d'un quartier général militaire à Samarica.

 11   Voici la question que je vous pose: c'était quel genre d'installation?

 12   C'était le quartier général ou le siège de quelle structure?

 13   Réponse: A Samarica, il y avait un commandement du groupe opérationnel de

 14   la JNA chargé de la Banija et de Kordun. Ce commandement-là avait été le

 15   commandement militaire chargé de cette région-là. Il y avait aussi le

 16   commandement de la 7e Division de la Banija ainsi que des unités spéciales

 17   de la police. Oui, c'est cela.

 18   Question: Messieurs les Juges, nous avions réussi à préparer des

 19   organigrammes des formations militaires présentes sur le terrain à

 20   l'époque. Je vais demander l'aide de l'huissière pour soumettre au témoin

 21   ces organigrammes qui font trois pages.

 22   Sur une de ces pages, vous avez la structure de la TO, Défense

 23   territoriale; l'autre vous montrera le groupe opérationnel de la JNA que

 24   vient de mentionner le témoin; le troisième sera une carte qui vous montre

 25   où se trouvent ces différents endroits.

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  1   Une première chose, Monsieur le Témoin: si vous examinez le premier

  2   organigramme ou tableau, il faudra que je vous le lise en anglais. On dit:

  3   "Zone opérationnelle - Création de ces zones dans la zone de SAO de

  4   Krajina". Et cela montre simplement la structure de commandement avec le

  5   Premier ministre au sommet, le camp d'état-major de la TO avec le général

  6   Djujic et, bien sûr, vous l'avez dit, il y a eu une mutation. Puis, vous

  7   avez les trois zones opérationnelles: la première pour la Dalmatie et

  8   Lika, la deuxième pour Slunj et la troisième zone pour Kostajnica,

  9   Petrinja et Sisak.

 10   Est-ce que ceci est exact? Est-ce que ce tableau est exact pour ce qui est

 11   de la TO?

 12   Réponse: Il faut ajouter en plus de Slunj, Vojnic et Vrgin Most. Et, sous

 13   Petrinja, il convient d'ajouter encore Glina, ainsi que Dvor na Uni. Le

 14   reste est conforme à ce qui figure sur l'organigramme.

 15   Question: Je vous remercie.

 16   Et si vous examinez maintenant la deuxième page, vous avez ici le groupe

 17   opérationnel de la JNA, Banija, Kordun, Lika après octobre 1991. On montre

 18   ici déjà le quartier général de Samarica, son commandant Milan Maric.

 19   Puis, vous avez les différentes sections: 2e et 3e Zones opérationnelles

 20   de la TO avec le colonel Vujaklija, la 5e Région militaire et ses unités

 21   de la JNA, la division de Lika et la Brigade de Loznica de Serbie, que

 22   vous avez mentionnée, et puis son unité de police spéciale de Krajina.

 23   Puis, vous avez ici les différentes… notamment la division de Banija

 24   attachée à la Défense territoriale et ces unités de la JNA qui ne sont pas

 25   spécifiées, lesquelles sont rattachées à la 5e Région militaire. Est-ce

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  1   que ceci est exact?

  2   Milan Babic (interprétation): On dit "Groupe opérationnel Banja et

  3   Kordun, ainsi que Lika". Le commandant était Spiro Nikolic au mois de

  4   novembre. Je ne sais pas exactement à partir de quelle date il avait été

  5   commandant.

  6   Puis, je ne suis pas sûr que Lika avait fait partie de ce groupe

  7   opérationnel. Je sais qu'il y avait là le commandement de la 6e Division

  8   de la Lika. C'est là que les choses se sont présentées. Oui, il en a été

  9   ainsi.

 10   En plus de la Brigade de Loznica, il faut ajouter la brigade de Sabac,

 11   puis la Brigade de Vojvodina, originaire de Serbie, puis les unités de

 12   parachutistes en provenance de Nis.

 13   Question: Ces parachutistes de Nis, est-ce qu'ils avaient un nom, une

 14   appellation particulière?

 15   Réponse: C'était une unité spéciale des parachutistes. Je ne sais pas

 16   exactement si on l'appelait ainsi ou pas.

 17   Question: Est-ce qu'on peut mettre ceci sur le rétroprojecteur?

 18   (Intervention de l'huissière.)

 19   Merci. La troisième page: Madame l'Huissière, pourriez-vous placer la

 20   troisième page, la carte, sur le rétroprojecteur?

 21   (Intervention de l'huissière.)

 22   Il s'agit en fait d'une carte qui montre la 5e Région militaire, puis la

 23   Région militaire navale, ainsi que les emplacements dont nous avons déjà

 24   parlé jusqu'à présent. Si vous l'examinez, Monsieur, pensez-vous que cette

 25   carte soit exacte?

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  1   (Le témoin examine la carte.)

  2   Réponse: La frontière entre ce District naval et le 5e District se

  3   trouvait quelque part par ici; il suivait l'axe que je suis en train de

  4   montrer. La Lika faisait partie du 5e District et la Dalmatie du Nord

  5   faisait partie du District militaire navale.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie.

  7   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, on dit qu'il

  8   s'agit de l'intercalaire 120. Où se trouve cette pièce?

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Eh bien, l'intercalaire 120, c'était

 10   en fait la création des zones opérationnelles ainsi que leur composition

 11   avec les trois Districts ou Régions militaires. Mais ici, il faudra donner

 12   une autre cote à cette pièce, puisqu'il s'agit d'une pièce tout à fait

 13   nouvelle. C'est simplement une référence qui est faite au document dont

 14   nous avons discuté.

 15   M. le Président (interprétation): Oui, quelle sera la prochaine cote?

 16   On propose un intercalaire 171 de la pièce 352; cela ne fait pas trop de

 17   différence, je pense.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, ce serait

 19   bien.

 20   M. le Président (interprétation): Fort bien.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez mentionné la 7e Division de

 22   Banija, ainsi que M. Bogdan Vajagic, qui en était le commandant jusqu'en

 23   septembre 1991. Savez-vous qui en était le commandant en octobre ou en

 24   novembre 1991?

 25   Milan Babic (interprétation): Cet homme s'appelait Bogdan Vajagic. Cette

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  1   division a été restructurée pour devenir une formation de défense

  2   territoriale, mais, de par sa teneur, elle est restée tout à fait la même.

  3   Question: Vous avez également mentionné le fait que des unités spéciales

  4   de la police étaient également présentes; ce sont ces unités qui étaient

  5   attachées à la structure parallèle.

  6   Et fin octobre ou novembre 1991, qui, personnellement, se trouvait là,

  7   présent? Quel était le commandant, une personne de commandement qui venait

  8   de la structure parallèle se trouvant sur le terrain?

  9   Réponse: Cette personne s'appelait Borojevic; il avait été commandant de

 10   cette unité spéciale de la police. Borojevic.

 11   Question: Est-ce que des unités de volontaires ou des unités

 12   paramilitaires se trouvaient également dans cette région de Kostajnica,

 13   unités qui auraient été attachées au quartier général de Samarica?

 14   Réponse: Je ne le sais pas.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 16  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 25) [Confidentialité levée par une

 17  ordonnance de la Chambre] Mme Anoya:Nous sommes à huis clos partiel.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous été personnellement au

 19   quartier général de Samarica et, si c'est le cas, quand l'avez-vous fait?

 20   Pourquoi y êtes-vous allé?

 21   Milan Babic (interprétation): Vers la mi-novembre 1991, alors que je

 22   séjournais à Petrinja, j'ai été convoqué par le général Spiro Nikolic,

 23   pour ce qui était de venir à Samarica en visite. Je n'ai pas pu y aller

 24   pour des raisons de sécurité; en fait, je n'étais pas sûr de ce qui se

 25   passait, de ce qu'il y avait là-haut. On m'avait informé qu'il y avait des

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  1   formations très variées et que des meurtres étaient survenus, des choses

  2   pareilles.

  3   Question: Et est-ce que vous aviez des craintes pour votre propre

  4   sécurité?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Vous mentionnez ces unités, ces personnes qui étaient déployées

  7   là. Est-ce que c'étaient des personnes qui s'opposaient à votre politique

  8   ou pourquoi est-ce que vous aviez des craintes pour votre sécurité

  9   personnelle?

 10   Réponse: Il y a sans cesse eu un conflit entre les structures parallèles

 11   de la DB et de la police, d'une part, et d'une partie du conseil régional

 12   du SDS; c'était un conflit politique. Une partie de ce conseil régional du

 13   SDS m'a apporté son soutien et critiqué, en parallèle, ces unités et

 14   Martic.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Audience publique, s'il vous plait.

 16   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 27.)

 17   M. Kwon (interprétation): Le témoin pourrait-il nous indiquer où se trouve

 18   Samarica sur cette troisième feuille?

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous venez d'entendre la question de

 20   M. le Juge, Monsieur le Témoin: pourriez-vous y répondre?

 21   Milan Babic (interprétation): Certainement. Samarica, c'est une colline

 22   qui se trouve au point de rencontre des territoires de Douar na Uni, de

 23   Kostajnica et de Petrinja. Voilà, ici.

 24   (Le témoin montre sur la carte.)

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le témoin montre l'inscription

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  1   "Banija", dans la région de Banija. Ce n'est pas une carte suffisamment

  2   précise pour montrer l'endroit exact.

  3   Je vous remercie.

  4   M. Kwon (interprétation): Donc c'est à proximité de Petrinja?

  5   Milan Babic (interprétation): C'est entre Kostajnica et Petrinja.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Lorsque vous vous êtes trouvé dans la

  7   région au mois de novembre, est-ce que vous avez vu les villages de

  8   Dubica, Cerovljani et Bacin? Et si c'est le cas, quel aspect avaient ces

  9   villages s'agissant des destructions qui y furent commises?

 10   Milan Babic (interprétation): Ces villages ont été anéantis.

 11   Question: Est-ce que, dans ces villages, il y avait des églises? Est-ce

 12   que ces églises étaient détruites également?

 13   Réponse: Je ne sais pas au juste. Je suis arrivé à Kostajnica, en

 14   provenance de Petrinja, et j'ai vu ces villages par la suite, bien plus

 15   tard. Ces villages ont été complètement détruits et la population les

 16   avait quittés.

 17   Question: Les Croates qui habitaient dans ces villages, est-ce qu'ils

 18   avaient représenté une menace pour les Serbes de la région, en octobre

 19   1991?

 20   Réponse: Non, les combats se sont terminés vers la mi-septembre, avant la

 21   mi-septembre.

 22   Question: Vous avez déjà dit que vous aviez entendu dire qu'il y avait des

 23   meurtres. Est-ce que vous avez été informés du fait que 120 Croates de ces

 24   trois villages avaient été tués en octobre 1991?

 25   Réponse: Je n'ai pas reçu ce type d'information. L'information qui m'est

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  1   parvenue était différente et elle m'est parvenue vers 1994/1995.

  2   Question: Quelles sont les informations que vous avez reçues?

  3   Réponse: J'ai ouï dire de la bouche de certaines personnes originaires de

  4   Dubica que l'on s'était vengé à Bacin pour l'année 1941.

  5   Question: J'aimerais maintenant passer à la région de Korenica, Ogulin, et

  6   en particulier à Saborsko, Poljanak et Lipovanic; ce sont des villages.

  7   Vous avez déjà parlé du camp d'instruction de Slunj, et de Bulat qui était

  8   l'officier responsable de ce camp. Savez-vous quels étaient les corps de

  9   la JNA qui étaient actifs dans cette région, fin octobre jusque mi-

 10   novembre 1991?

 11   Réponse: Là-bas, il y avait un commandement qui se trouvait à Mukinje et à

 12   ce centre d'entraînement. On m'a dit que c'était le centre opérationnel de

 13   la 6e Division de la Lika et des unités qui se trouvaient en corrélation

 14   avec ce qui était subordonné. J'ai aussi ouï dire qu'il y avait là une

 15   brigade de Vojvodina qui était active, des membres des unités de

 16   parachutistes de Nis, et la Défense territoriale originaire de cette

 17   région. Il y avait là-bas le Corps de Rijeka également.

 18   Maintenant, de là à vous dire où se trouvait le niveau le plus élevé du

 19   commandement, je ne sais pas le faire. Mais si c'était là le poste avancé

 20   du commandement du Corps de Rijeka, il devait forcément y avoir des

 21   supérieurs, des gradés de haut niveau.

 22   Question: Monsieur le Témoin, est-ce que le 1er Corps de la Brigade légère

 23   des Partisans était dans la région?

 24   Réponse: La 1re Brigade légère des Partisans se trouvait sur le territoire

 25   de la municipalité de Gracac et sur une partie de la municipalité de

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  1   Gospic, à proximité de Saborsko. Et sur les hauteurs, je crois qu'il

  2   devait y avoir la 5e Brigade autour de Lika.

  3   Question: Parlons rapidement de cette 1re Brigade légère des Partisans.

  4   Qui en était le commandant?

  5   Réponse: Le colonel Trbojevic.

  6   Question: Est-ce que c'était un officier de la JNA?

  7   Réponse: Le colonel Petar Trbojevic, oui, c'était un officier de la JNA

  8   qui a été envoyé là en septembre 1991 aux fins de mettre sur pied cette

  9   1re Brigade légère des Partisans.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander un huis clos partiel

 11  très bref, l'espace de deux questions.

 12  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 34) Confidentialité levée par une

 13   ordonnance de la  Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que vous avez effectivement

 15   rencontré le colonel Trbojevic? Et si c'est le cas, dans quel cadre?

 16   Milan Babic (interprétation): Au moins deux fois. La première fois, quand

 17   il est venu de Belgrade; j'ai été convoqué au commandement du Corps de

 18   Knin par le général Vukovic et on m'a présenté le colonel Trbojevic. On

 19   m'a dit qu'il allait devenir le commandant de la 1re Brigade légère des

 20   Partisans. On avait également attiré mon attention sur le fait que des

 21   gens refusaient d'être mobilisés dans cette brigade sous cette

 22   appellation-là; et on m'avait demandé de faire appel à ces gens pour se

 23   mobiliser. C'est la raison pour laquelle on m'avait fait rencontrer le

 24   colonel Trbojevic. J'ai dit que j'allais le faire si la brigade allait

 25   s'appeler Brigade de la Défense territoriale. Et en effet, par la suite,

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  1   lorsqu'ils avaient communiqué avec nous, ils appelaient cela 1re Brigade

  2   de la TO, alors que, dans leurs communications à eux, c'était désigné

  3   comme étant la 1re Brigade légère de partisans.

  4   Question: Est-ce que cela veut dire que cette brigade avait collaboré avec

  5   le Corps de Knin, puisque vous avez mentionné le général Vukovic?

  6   Réponse: C'est exact.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de

  8   l'huissière pour présenter au témoin l'intercalaire 161, ainsi que

  9   l'intercalaire un 162 de la pièce 352.

 10   M. Kwon (interprétation): Est-ce que nous devons rester à huis clos

 11   partiel, Madame Uertz-Retzlaff?

 12   (Signe négatif de la tête de Mme Uertz-Retzlaff.)

 13   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 14   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 36.)

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous examinons maintenant les deux

 16   documents, Monsieur le Témoin.

 17   Est-ce qu'ils portent sur la mobilisation dont vous venez de parler, ordre

 18   de mobilisation en date du 26 octobre 1991, l'autre document étant

 19   également un ordre de mobilisation pour la même journée?

 20   Milan Babic (interprétation): C'est exact.

 21   Question: Dans le premier document, on fait référence à un ordre de

 22   mobilisation délivré par la présidence de la RSFY en date du 4

 23   octobre1991. Est-ce là la raison pour laquelle il y a eu ordre de

 24   mobilisation?

 25   Réponse: Oui. Ce document a trait à ce fait-là. L'autre aussi.

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  1   Question: Je vous remercie. Je crois que cela suffit; inutile de discuter

  2   davantage de la question.

  3   (Intervention de l'huissière.)

  4   S'agissant de la région de Plitvice et des villages de Saborsko, Poljanak

  5   et Lipovanic, est-ce que l'état-major municipal de la TO de Koronica

  6   couvrait cette région? Et si c'est le cas, qui en était le commandant au

  7   mois d'octobre 1991?

  8   Réponse: Cela avait fait partie des attributions de ce quartier général de

  9   la TO de Korenica. Et le commandant de ce quartier général municipal était

 10   le lieutenant-colonel Milos Cvijeticanin.

 11   Question: C'était un officier d'actif de la JNA? Le savez-vous?

 12   Réponse: Il avait été actif à Zadar auparavant.

 13   Question: Est-ce qu'il y avait du personnel de la DB de Serbie qui était

 14   actif dans la région? Le savez-vous?

 15   Réponse: Oui, après août 1991, la base de la DB de la Serbie, la base de

 16   "Frenki" se trouvait à Korenica.

 17   Question: Est-ce que cela veut dire que "Frenki" était là en personne ou

 18   qui était responsable de ces sections?

 19   Réponse: On m'a dit qu'il y avait là-haut les hommes de la DB. Et j'ai

 20   personnellement pu rencontrer "Frenki" auparavant déjà.

 21   Question: Vous avez déjà mentionné l'unité de parachutistes de Nis: est-ce

 22   que ces parachutistes ont un uniforme particulier?

 23   Réponse: Ils portaient des bérets rouges.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pouvons-nous passer à huis clos

 25   partiel l'espace de deux questions?

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  1  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 41) [Confidentialité levée par une

  2  ordonnance de la Chambre] Mme Anoya: Nous sommes à huis clos

  3  Mme Uertz-Retzlaff : Vous avez dit qu'ils étaient présents

  4   là aussi en octobre/novembre 1991. Comment le savez-vous?

  5   Milan Babic (interprétation): Ils sont restés là-bas jusqu'à février

  6   1992, mais de là à vous dire à partir de quel moment ils se sont trouvés

  7   là-bas, je ne saurais le faire. Ils étaient là-bas pendant les activités

  8   de combat. Je me trouvais à l'usine SIT, près de Udbina, à l'occasion de

  9   la création de cette municipalité de Udbina, dans le quartier général du

 10   colonel Milivojevic. Et l'un des membres de ces unités de paras était venu

 11   en uniforme de combat; il portait des gants sans doigts, des mitaines. Il

 12   m'a dit bonjour et m'a offert un béret rouge. Il a dit de ne pas me

 13   coiffer de ce béret rouge, toutefois parce qu'il n'était porté que par des

 14   gens qui avaient prêté serment de mourir s'il le fallait. Et j'ai porté ça

 15   chez moi, j'ai mis ce béret dans une armoire en me disant qu'il devait

 16   être maudit.

 17   Question: Monsieur le Témoin, cette personne qui vous a parlé et qui

 18   faisait partie de l'unité des parachutistes, est-ce qu'elle vous a dit où

 19   il y avait eu des combats, où ils avaient été engagés dans des combats?

 20   Est-ce que cette personne vous a dit quoi que ce soit?

 21   Réponse: Il se trouvait dans la région de Vrhovine. Je ne sais pas

 22   exactement.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Audience publique, s'il vous plaît.

 24   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 43.)

 25   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience en audience publique.

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Octobre 1991. Est-ce que Saborsko,

  2   Poljanak et Lipovanic, ces villages, étaient-ils entourés de villages

  3   serbes?

  4   Milan Babic (interprétation): Oui.

  5   Question: A l'époque, est-ce que ces villages représentaient une menace

  6   pour les Serbes de la région?

  7   Réponse: Non.

  8   Question: Savez-vous à quel moment ces villages ont été attaqués?

  9   Réponse: Des combats ont eu lieu là-bas vers le 17 novembre ou la mi-

 10   novembre 1991. Donc, c'est vers la mi-novembre 1991 que ces combats aux

 11   alentours de Slunj ont eu lieu.

 12   Question: Avez-vous reçu des informations selon lesquelles, à partir de la

 13   fin octobre jusqu'au 12 novembre, des Croates des villages croates avaient

 14   été tués dans ces trois villages? Avez-vous reçu des informations à ce

 15   propos, quelles qu'elles soient?

 16   Réponse: (Pas de traduction.)

 17   Question: Avez-vous entendu parler de cela plus tard? Avez-vous reçu des

 18   informations à ce propos plus tard?

 19   Réponse: Je l'ai vu plus tard. En 1994, j'ai vu que ces villages ont été

 20   détruits et qu'ils ont été désertés, à savoir qu'il n'y avait plus

 21   personne là-bas.

 22   Question: Passons maintenant à la 3e Région, celle de la Dalmatie du Nord

 23   avec Skabrnje, Nadin et Bruska; et nous pensons plus particulièrement au

 24   mois de novembre jusqu'au mois de février, novembre 1991-février 1992. Ces

 25   villages que je viens de mentionner se trouvent-ils tous dans la

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  1   municipalité de Benkovac ou dans ce qu'on a appelé la région serbe de

  2   Zadar?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Qui était le président de la municipalité de Benkovac à cette

  5   époque-là, c'est-à-dire de novembre 1991 à février 1992?

  6   Réponse: Zdravko Zecevic.

  7   Question: Est-ce que cet homme avait un rapport quelconque avec "Frenki",

  8   Martic ou d'autres personnes  de cette structure parallèle?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Est-ce qu'il y avait une cellule de crise à Benkovac? Le savez-

 11   vous?

 12   Réponse: Oui, il y avait une cellule de crise à Benkovac.

 13   Ce quartier général n'était pas une structure prévue par les statuts de la

 14   municipalité. Cela avait été mis sur pied sur l'initiative des autorités

 15   locales de Benkovac.

 16   Question: La police de Martic faisait-elle partie de la cellule de crise?

 17   Réponse: Oui, il y avait des représentants de la municipalité, des

 18   autorités civiles, de la police de la TO, en d'autres termes, de toutes

 19   les structures qui étaient celles de la région de Benkovac.

 20   Question: Est-ce que la JNA faisait partie de la cellule de crise?

 21   Réponse: Je ne sais pas.

 22   Question: Vous avez déjà dit que le capitaine Dragan avait un centre

 23   d'entraînement dans la région de Benkovac. Est-ce que le capitaine Dragan

 24   était présent en novembre 1991? Le savez-vous?

 25   Réponse: Il venait là-bas en novembre 1991, oui.

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  1   Question: Quant à "Frenki", est-ce que lui aussi se trouvait dans la

  2   région, en novembre 1991?

  3   Réponse: Je ne sais pas où se trouvait "Frenki" à ce moment-là.

  4   Question: Concernant la police de Martic dans la région, en novembre 1991,

  5   savez-vous quel était l'homme qui en avait la responsabilité, dans cette

  6   région-là de Benkovac?

  7   Réponse: Il y avait la police normale et la police spéciale. Le chef de la

  8   police spéciale était Goran Opacic.

  9   Question: Etes-vous au courant du fait que ce Skabrnje et Nadin ont été

 10   attaqués en novembre 1991?

 11   Réponse: Il y a eu des combats là-bas, en effet, mais je ne sais pas sur

 12   quels sites exactement.

 13   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour présenter aux témoins

 14   deux pièces. La première est l'intercalaire 164 de la pièce 352; l'autre,

 15   c'est l'intercalaire 75 de la même pièce.

 16   (Intervention de l'huissier.)

 17   Nous examinons la première pièce: c'est en fait une note concernant des

 18   combats à propos de l'utilisation de l'armée et de Martic dans les

 19   villages croates de la municipalité de Benkovac, ceci en septembre 1991.

 20   Monsieur le Témoin, c'est un document préparé par les autorités croates. A

 21   la deuxième page, on trouve une citation -je cite-: "Conformément à

 22   l'ordre du colonel Mladic, les terroristes de Martic ainsi que des

 23   réservistes militaires pénètrent par la force dans les maisons, dévalisent

 24   ces maisons et prennent tout ce dont ils ont besoin pour détruire le

 25   reste". (Fin de citation.)

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  1   Est-ce que ceci s'est passé dans cette région-là, comme l'indique le texte

  2   de cette note? Etes-vous au courant de cela?

  3   Réponse: Oui, c'est bien ainsi que cela s'est passé.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'ai ici un deuxième document, un

  5   rapport du quartier général de la SAO de Krajina en date du 17 septembre

  6   1991.

  7   M. le Président (interprétation): Revenons au document précédent, Madame

  8   Uertz-Retzlaff.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

 10   M. Kwon (interprétation): Est-ce que le premier document, c'est

 11   l'intercalaire 165?

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): 164.

 13   M. le Président (interprétation): Tirons ceci au clair. C'est donc

 14   l'intercalaire 164.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est en fait un document fourni par

 16   les autorités de Croatie.

 17   Je voulais simplement me pencher sur la teneur de ce document avec le

 18   témoin pour lui demander si les attaques décrites ici, avec vols et

 19   destructions, ont effectivement eu lieu dans la région. C'était la raison

 20   pour laquelle je soumettais ce document au témoin.

 21   M. le Président (interprétation): Oui.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le document suivant se trouve à

 23   l'intercalaire 75. Il s'agit d'un rapport du QG de la SAO de Krajina en

 24   date du 17 septembre 1991. Si vous examinez le sceau et l'en-tête, est-ce

 25   que vous pouvez nous dire si ce sont là des éléments authentiques?

Page 13404

  1   Milan Babic (interprétation): Oui.

  2   Question: Ce Petar Maglov, quel était le poste qu'il occupait? Le savez-

  3   vous?

  4   Réponse: Je n'arrive pas à m'en souvenir exactement.

  5   Question: Dans ce document, mention est faite de l'état-major de la TO de

  6   Benkovac, à la première page. On parle aussi d'un ordre donné par Milan

  7   Martic. Point n°2, on dit: "Veillez à ce qu'un train blindé aille de la

  8   gare du Kosovo vers l'endroit proche de Tepljuh, et pour qu'il ouvre un

  9   feu nourri sur la région de Siveric".

 10   De quel train parlait-on ici?

 11   Réponse: C'est le train que "Frenki" a fait faire à la gare. C'était un

 12   train de combat, blindé.

 13   Question: Et qui avait la responsabilité de ce train? Savez-vous qui

 14   commandait ce train?

 15   Réponse: Il s'appelait Guska.

 16   Question: Et ce Guska, avait-il un lien quelconque, est-ce qu'il faisait

 17   partie de ces structures parallèles? A qui était-il subordonné?

 18   Réponse: A "Frenki" et à Martic.

 19   Question: S'agissant des villages de Skabrnja et Nadin, est-ce que ces

 20   villages constituaient une menace pour les Serbes ou pour la JNA, les

 21   Serbes de la région et la JNA, en novembre 1991?

 22   Réponse: Pas les Serbes, mais cela mettait en danger les effectifs de la

 23   JNA à l'aéroport de Zemunik.

 24   Question: Et de quelle façon est-ce qu'ils compromettaient les flancs de

 25   ces unités de la JNA? Est-ce qu'en novembre 1991, il y avait des unités de

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  1   l'armée croate dans ces villages?

  2   Réponse: Je ne sais pas exactement. Ce que je sais c'est que le général

  3   Vukovic avait dit qu'avant l'hiver, il fallait égaliser les lignes de front

  4   où étaient affectés ces soldats; c'est le général Vukovic qui l'avait dit.

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît,

  6   pour une question.

  7   (Audience à huis clos partiel à 9 heures 55)

  8   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  9   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, à qui le général

 11   Vukovic a-t-il dit cela et pourquoi l'a-t-il dit?

 12   Milan Babic (interprétation): Il me l'a dit dans son bureau au

 13   commandement du 9e Corps, à Knin. En effet, il m'avait demandé de venir et

 14   il avait montré une carte où il y avait la région de la Dalmatie du Nord.

 15   Il avait sollicité de ma part de lui indiquer quelles étaient les

 16   agglomérations serbes dans la région, en allant de Sibenik vers Knin-

 17   Sibenik-Benkovac. Et je lui ai indiqué la chose.

 18   Dans la région de Benkovac, les choses ne peuvent pas être déterminées de

 19   façon précise. Il y a des régions assez mixtes et, d'autre part, il y a

 20   des villages serbes et croates, mais en alternance. Et je lui ai à peu

 21   près montré comment cela se faisait. Et on voyait que la ligne zigzaguait.

 22   Alors, il a dit: "Oh la la!". Il a fait un signe de la tête, et il a dit

 23   qu'il ne pouvait pas attendre l'hiver, il fallait bien qu'il rectifie,

 24   qu'il rende rectiligne la chose plutôt que de zigzaguer. Donc il avait

 25   voulu ou souhaité établir une ligne droite de disposition de ces effectifs

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  1   dans ce secteur.

  2   Question: Skabrnja et Nadin, est-ce que c'étaient des villages qui

  3   empêchaient d'avoir cette ligne droite?

  4   Réponse: Oui, d'une certaine façon. En direction de cette ligne, il y

  5   avait ce segment de Zemunik, et les unités du 9e Corps constituaient une

  6   sorte de percée, une sorte de clou planté vers l'avant. Alors que Skabrnja

  7   était vers l'arrière.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  9   publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 58.)

 11   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Savez-vous à quel moment les villages

 13   de Skabrnja et Nadin ont été attaqués? Et comment s'est passée l'attaque,

 14   quelles sont les forces qui se sont engagées dans ce combat?

 15   Milan Babic (interprétation): Par la suite, je l'ai su. Je n'étais pas

 16   immédiatement au courant du fait qu'il s'agissait de Skabrnja et de Nadin.

 17   En novembre 1991, des unités de la JNA ont pris part, et également des

 18   unités coordonnées par la cellule de crise de Benkovac. Donc il y avait là

 19   des unités de la TO et de la police qui se trouvaient sur le secteur de

 20   Benkovac.

 21   Question: Avez-vous reçu des informations selon lesquelles des civils

 22   croates avaient été assassinés au cours de cette attaque?

 23   Réponse: Ce n'est que par la suite que j'ai appris que cela a

 24   effectivement été le cas.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

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  1  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 59) [Confidentialité levée par une

  2   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos

  3   Mme Uertz-Retzlaff : Qui vous a informé et que vous a dit

  4   la personne qui vous avait informé?

  5   Milan Babic (interprétation): (expurgée)

  6   (expurgée)

  7   (expurgée)

  8   (expurgée) . Il m'avait dit que l'on avait

  9   été à Skabrnja pour rectifier, pour rendre les lignes droites. Et il a dit

 10   que Goran Opacic avait pris part à l'attaque, mais au début seulement; par

 11   la suite, il est parti. Il m'a dit cela pour des raisons personnelles.

 12   Parce que, au mois de juin 1992, Goran Opacic m'avait malmené

 13 personnellement,et cela avait peut-être été la raison pour laquelle (expurgé)

 14   (expurgée) avait mentionné en particulier son nom à lui.

 15   Question: Voulez-vous dire que Goran Opacic vous a maltraité, vous

 16   personnellement, ou (expurgée) ?

 17   Milan Babic (interprétation): Non, c'est Goran Opacic qui m'a fait subir

 18   un certain nombre de sévices, à moi ainsi qu'à d'autres membres du conseil

 19   régional du SDS de Krajina à Benkovac.

 20   Question: En quelle occasion vous a-t-il fait subir des sévices et que

 21   vous a-t-il fait exactement?

 22   Réponse: Le 30 juin 1992, alors qu'à Bratiskovci, un village qui dépendait

 23   de la municipalité de Sibenik à Knin, il m'a dit qu'il ne fallait pas

 24   croire ce que disait M. Milosevic. Et lorsque, lors de cette réunion, j'ai

 25   montré ce qu'il voulait donner à la Croatie en mars 1991 -donc je parlais

Page 13408

  1   de Bihac et de la route Benkovac-, deux ou trois jours après cela, Goran

  2   Opacic et ses hommes m'attendaient à Benkovac et ont fait ce qu'ils

  3   pouvaient pour me liquider physiquement.

  4   Question: J'aimerais tirer au clair un point, Monsieur le Témoin: qui a

  5   dit qu'il ne fallait pas croire ou faire confiance en ce que disait M.

  6   Milosevic?

  7   Réponse: C'est moi qui ai dit cela lors de la réunion de Bratiskovci.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bien, Monsieur le Témoin. Nous

  9   pouvons revenir en audience publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 02.)

 11   Question: Ce Goran Opacic dont vous venez de parler avait-il un surnom?

 12   Réponse: "Klempo", voilà comment on l'appelait.

 13   Question: Etait-il proche de Milan Martic?

 14   Réponse: Oui, il était proche de lui, c'était un de ses intimes.

 15   Question: J'aimerais maintenant que nous parlions de Bruska. Vous avez

 16   déjà parlé de Bruska et vous avez dit que vous vous y êtes rendu. Je vous

 17   demande si, en décembre 1991, il y avait des combats dans ce village ou

 18   aux environs?

 19   Réponse: Je ne me souviens pas.

 20   Question: Savez-vous que des civils ont été tués dans le village de

 21   Bruska, le 21 décembre 1991, et savez-vous dans quelles conditions cela

 22   s'est passé?

 23   Réponse: J'ai entendu parler de cela plus tard. Ce qui s'est passé, c'est

 24   que Goran Opacic, accompagné de quelques hommes, a lancé une grenade dans

 25   une maison abritant un certain nombre d'habitants. Les Croates qui se

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  1   trouvaient dans cette maison, ainsi qu'un facteur serbe qui les

  2   accompagnait, ont trouvé la mort à cette occasion.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie, pour

  4   une question.

  5  (Audience à huis clos partiel à 10 heures 04) [Confidentialité levée par une ordonnance

  6   de la Chambre] Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qui vous a apporté cette information?

  8   Témoin C-61 (interprétation): (expurgée), il me semble.

  9   Question: Quand vous a-t-il donné cette information?

 10   Réponse: Il y a un an ou un an et demi.

 11   Question: Les habitants croates de ces villages, des villages de Skabrnje

 12   et Bruska, sont-ils revenus dans leurs villages avant l'opération

 13   "Tempête", si vous le savez?

 14   Réponse: Non.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 16   publique.

 17   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 05.)

 18   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avec l'aide de Mme l'huissière,

 20   j'aimerais vous soumettre l'intercalaire 166 de la pièce 352.

 21   (Intervention de l'huissière.)

 22   Il s'agit d'un document émanant du ministère de l'Intérieur, en date du 28

 23   septembre 1992, qui comporte une signature et un sceau.

 24   Je vous demande d'abord si vous pouvez apporter vos commentaires au sujet

 25   de l'en-tête, du sceau et de la signature.

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  1   Milan Babic (interprétation): Ce document comporte la signature de

  2   quelqu'un qui a signé au nom de Martic, sans doute un des commandants des

  3   unités spéciales de la police.

  4   Question: Et le sceau est-il bien conforme au sceau qui était en usage à

  5   l'époque?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Dans ce document, on trouve une référence à ce qui suit -je

  8   cite-: … J'ai du mal à lire ces mots. Excusez-moi, Monsieur le Président.

  9   Je cite: "Nous disposons d'informations certaines quant au fait que,

 10   durant les journées des 29 et 30 septembre 1992, une émigration forcée de

 11   la population est planifiée pour Bruska; Novi Grad et Prigrada". (Fin de

 12   citation.)

 13   Un peu plus bas, nous lisons les mots suivants -je cite-: "Nous vous

 14   informons que nous serons contraints d'empêcher par la force des arrivées

 15   sur le territoire de la République serbe de la Krajina." (Fin de

 16   citation.)

 17   Savez-vous si quelque chose s'est passé à ce moment-là, en septembre 1992,

 18   en rapport avec un retour de la population?

 19   Réponse: Je sais que des gens ont parlé de cela et que, selon eux, le

 20   gouvernement empêchait le retour des Croates. Mais je ne sais pas

 21   exactement de quelle façon précise cela devait se faire.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Je n'ai plus besoin de ce

 23   document.

 24   M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, qui a traduit ce

 25   document? Cela m'intéresse, compte tenu de la forme de ce document. Est-ce

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  1   que cette traduction a été faxée?

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est une traduction que nous avons

  3   reçue des Nations Unies.

  4   M. Kwon (interprétation): De la Forpronu?

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, de la Forpronu. Je ne suis pas

  6   sûre de qui l'a traduit, mais je suppose que ce n'est pas nous.

  7   M. Kwon (interprétation): Pourriez-vous nous dire si les documents

  8   précédents manuscrits, qui ont été soumis au témoin, avec le même numéro

  9   d'intercalaire correspondent aux mêmes conditions?

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Juge, il s'agit ici d'un

 11   mémo de la Forpronu traitant de la situation qui a été annexée à la

 12   déclaration du ministère de Martic.

 13   Quant à la deuxième partie de votre question, je ne saurais y répondre.

 14   C'est une lettre relative à la coopération et envoyée à la Forpronu et au

 15   comité de l'Etat.

 16   M. Kwon (interprétation): Oui, en effet, c'est ce qu'on lit dans ce

 17   document.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Juge.

 19   Monsieur le Témoin, vous venez de parler de Dubrovnik et des combats qui

 20   se sont déroulés à Dubrovnik. Vous avez parlé de l'objectif poursuivi dans

 21   cette région. Je vous demande si les Serbes de Bosnie avaient un objectif

 22   particulier s'agissant de la région environnante de Dubrovnik? Avez-vous,

 23   à quelque moment que ce soit, eu une conversation portant sur ce sujet?

 24   Milan Babic (interprétation): Leur but était de faire, d'obtenir une

 25   sortie sur la mer pour la Republika Srpska, au sud de Dubrovnik.

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  1   Question: Comment le savez-vous? Les avez-vous entendu parler de cela?

  2   Avez-vous, à quelque moment que ce soit, entendu une conversation à cet

  3   égard?

  4   Réponse: C'est par Biljana Plavsic que j'ai entendu dire que la Republika

  5   Srpska devait obtenir une sortie sur la mer dans les régions, dans la zone

  6   de ce que l'on appelle les rochers de Konavljanske Stijene.

  7   Question: Quand avez-vous entendu dire cela, en public?

  8   Réponse: Oui, elle a dit cela en public en 1994, en 1995. Je ne me

  9   souviens plus exactement.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 11   Juges, lorsque nous avons parlé des écoutes téléphoniques relatives à

 12   l'arrestation de Martic, il y en avait une que je n'ai pas soumise au

 13   témoin et j'aimerais le faire maintenant. Il s'agit de l'intercalaire 37

 14   de la pièce 353 qui regroupe les écoutes téléphoniques.

 15   Monsieur le Témoin, avez-vous écouté, entendu une conversation interceptée

 16   entre Radovan Karadzic et Momcilo Krajisnik, si vous vous en souvenez?

 17   Milan Babic (interprétation): Je m'en souviens, oui.

 18   Question: Connaissez-vous bien la voix de M. Krajisnik?

 19   Réponse: Je la connais bien, je l'ai entendue à plusieurs reprises; il a

 20   cet accent de Sarajevo et des intonations assez personnelles.

 21   Question: Je ne souhaite pas entrer dans les détails au sujet de ce

 22   document. Cela n'est pas nécessaire, merci.

 23   Monsieur le Témoin, au vu d'un certain nombre de documents, nous avons

 24   constaté que vous avez eu connaissance de la création de tribunaux civils

 25   et militaires dans la SAO de Krajina et en RSK et nous avons également

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  1   constaté que la RSK a demandé un transfert de personnel travaillant dans

  2   les tribunaux militaires en direction de la VJ. Est-ce que cela signifie

  3   que les tribunaux militaires fonctionnaient dans les années 1991 à 1995 en

  4   Krajina?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Avez-vous connaissance du fait que des crimes de guerre commis

  7   contre les non-Serbes de la région aient fait l'objet d'enquêtes par les

  8   autorités judiciaires et se soient conclus par des condamnations?

  9   Réponse: Non, à part un groupe d'hommes qui ont fait l'objet d'une enquête

 10   et qui étaient liés à Ervenik pour des événements survenus à Rupe, je

 11   pense en 1993.

 12   Question: De quel groupe parlez-vous exactement? Qui a été condamné et

 13   pourquoi?

 14   Réponse: Il s'agissait d'un groupe de soldats de la Krajina serbe

 15   originaires d'Ervenik. Ils ont été arrêtés pour avoir tué des civils dans

 16   la région de Rupe, et condamnés. Mais je ne sais pas exactement quelle a

 17   été l'issue du procès.

 18   Question: A quel groupe ethnique appartenaient les victimes de ces crimes?

 19   Réponse: Ils étaient Croates.

 20   Question: Vous avez déjà parlé des pillages qui ont eu lieu après les

 21   attaques.

 22   Réponse: Excusez-moi. A moins que certains d'entre eux aient été tués à

 23   Rupe et qu'ils aient ensuite tué des Croates habitant ce village; c'est

 24   peut-être comme cela que les choses se sont passées.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous nous avez

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  1   déjà parlé des pillages qui ont eu lieu après les attaques contre des

  2   villages croates. Et j'aimerais maintenant passer à huis clos partiel pour

  3   vous poser une question à ce sujet.

  4   (Audience à huis clos partiel à 10 heures 15) [Confidentialité levée par une

  5   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous est-il

  7   arrivé de parler à Branko Kostic, membre de la Présidence de la RSFY au

  8   sujet des pillages?

  9   Milan Babic (interprétation): Oui, le 31 décembre 1991, dans les locaux

 10   de la présidence yougoslave à Belgrade.

 11   Question: De quoi avez-vous parlé?

 12   Réponse: Eh bien, nous attendions l'arrivée de Borislav Jovic et, pendant

 13   ce temps, il a raconté une blague, une plaisanterie. Il m'a demandé si je

 14   savais ce qu'était un gilet pare-balles monténégrin; il a expliqué que

 15   cela consistait à avoir un jambon fumé devant et un jambon fumé derrière.

 16   Il a montré sa poitrine et son dos en disant que "les Monténégrins étaient

 17   comme ces jambons pour constituer les plaques protectrices d'un gilet

 18   pare-balles et que les réservistes de Konavle supportaient de cette façon

 19   les tirs".

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 21   publique.

 22   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 17.)

 23   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez déjà

 25   parlé de deux lieux de détention à Knin, et j'aimerais vous demander

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  1   quelques détails complémentaires à ce sujet.

  2   Je vous demande si des Croates ont été maintenus en détention dans une

  3   partie de l'ancien hôpital de Knin?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Cet ancien hôpital de Knin se trouvait où exactement à Knin; par

  6   rapport au bâtiment du gouvernement et à la caserne de la JNA?

  7   Réponse: Entre le commandement du 9e Corps d'armée et le bâtiment du

  8   gouvernement.

  9   Question: Cela signifie-t-il que tous ces endroits étaient très proches

 10   les uns des autres?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Qui dirigeait ce centre de détention et dans quelle période ce

 13   bâtiment a-t-il fonctionné en tant que centre de détention?

 14   Réponse: C'est la police qui dirigeait cet établissement et ce bâtiment a

 15   fonctionné en tant que prison pendant pas mal de temps; je ne sais pas

 16   exactement à partir de quand, mais je pense peut-être au milieu de l'été

 17   1991 et cela a duré jusqu'à la fin de 1992. Plus tard, cette prison a été

 18   reprise par le ministère de la Justice. Et Ilija Tauz est arrivé, il a

 19   introduit des gardiens professionnels et le centre de détention a déménagé

 20   dans l'autre aile de l'ancien hôpital, qui est donc devenue une prison

 21   officielle.

 22   Question: Combien de civils ont été détenus dans ce lieu et combien de

 23   combattants, combien d'hommes, combien de femmes? Le savez-vous?

 24   Réponse: Les personnes détenues étaient des membres des forces de police

 25   et des forces armées croates qui avaient été faits prisonniers et, plus

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  1   tard, j'ai entendu dire qu'il y avait également quelques Croates civils.

  2   Question: Combien de Croates ont été maintenus en détention à cet endroit

  3   et pourquoi?

  4   Réponse: Je ne sais pas exactement pourquoi, quelle était la qualité de

  5   ces personnes, mais je pense qu'il y en avait des dizaines.

  6   Question: Savez-vous combien de temps ces prisonniers ont été maintenus en

  7   détention en ce lieu et dans quelle période de temps exactement?

  8   Réponse: Je ne sais pas exactement, mais je pense qu'il doit s'agir de

  9   1991, l'automne 1991.

 10   Question: Je vous parle en faite des détenus. Quelle était la durée de

 11   leur détention en ce lieu? Combien de semaines, combien de mois, combien

 12   de jours, le savez-vous?

 13   Réponse: Je ne sais pas exactement parce qu'il y avait des échanges à ce

 14   moment-là, donc ils étaient maintenus en détention jusqu'au prochain

 15   échange.

 16   Question: Vous avez dit que chacun savait que les prisonniers subissaient

 17   des sévices en cet endroit. De quels sévices s'agissait-il et qui en était

 18   la cause?

 19   Réponse: Les gardiens qui étaient des policiers. Plus tard, on m'a même

 20   dit qu'ils faisaient entrer en ce lieu des habitants de l'extérieur pour

 21   qu'ils infligent des sévices aux détenus.

 22   Question: Quand vous dites "des gens qui venaient de l'extérieur", quelle

 23   était l'appartenance ethnique des victimes?

 24   Réponse: Croate.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie.

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   1   Mme Anoya : Nos sommes à huis clos partiel.

  2   (Audience à huis clos partiel à 10 heures 21)

  3   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  4   Mme Uertz-Retzlaff : Monsieur le Témoin, vous avez dit que

  5  certains prisonniers ont fait l'objet d'échanges. Je vous demande donc si

  6  vous, personnellement, vous avez eu la moindre participation à ces échanges?

  7   Milan Babic (interprétation): Au début du mois de septembre 1991, lorsque

  8   M. l'Ambassadeur Wijnaendts est arrivé; après la signature de l'accord qui

  9   permettait aux observateurs de la Communauté européenne d'entamer leur

 10   travail, il a demandé, en toute bonne foi, s'il pouvait emmener avec lui

 11   un groupe de prisonniers croates. Je me suis donc adressé à Nikola

 12   Amanonic des forces de police, pour voir si la requête de M. Wijnaendts

 13   pouvait être satisfaite. Il voulait emmener ces prisonniers en hélicoptère

 14   et une liste de prisonniers a donc été présentée dans laquelle on trouvait

 15   les noms des détenus emprisonnés dans cette prison. J'ai remis cette liste

 16   à M. l'Ambassadeur Wijnaendts. Ceci s'est passé devant le bâtiment du

 17   parlement de Knin. Donc nous étions tous là, debout devant le bâtiment, à

 18   l'extérieur. L'ambassadeur a pris un stylo et a inscrit un cercle autour

 19   de certains noms sur la liste, indiquant le nombre de prisonniers qu'il

 20   pouvait emmener avec lui. Voilà ce qui s'est passé ce jour-là et c'est de

 21   cette façon que j'ai participé à cela.

 22   Question: Combien de personnes avaient leur nom sur cette liste et de

 23   quelles personnes s'agissait-il?

 24   Réponse: Je ne sais pas. Je pense qu'il s'agissait de policiers ou de

 25   gardes croates qui avaient été faits prisonniers. Et puis, il y a eu une

Page 13418

  1   autre fois; en fait, il y a eu deux occasions supplémentaires, en juillet,

  2   août. Je ne me souviens pas exactement quand, mais en tout cas un jour

  3   Spiro Nikolic m'a appelé pour qu'ensemble, nous demandions à Martic de

  4   libérer un policier croate de la prison, qui était recherché par la police

  5   croate de Sibenik. Et puis une autre fois, j'ai reçu une demande

  6   personnelle qui m'a été transmise par le chef de Zadar, enfin un médecin

  7   de Sibenik qui me demandait s'il était possible d'obtenir la remise en

  8   liberté d'un policier de Zadar détenu dans la prison de Knin. Donc voilà

  9   les occasions de ce genre auxquelles j'ai participé personnellement.

 10   Question: Avec l'aide de Mme l'huissière, j'aimerais soumettre au témoin

 11   l'intercalaire 168 de la pièce 352.

 12   La question que je vous pose, Monsieur le Témoin, est la suivante: il

 13   s'agit ici d'un ordre datant du 25 juillet 1991, qui porte sur la remise

 14   en liberté d'Osman Vikic de Zadar. Je vous demande si ceci concerne bien

 15   les remises en liberté dont vous venez de parler?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Lorsque vous regardez ce nom, vous pensez qu'il s'agit d'un nom

 18   croate?

 19   Réponse: D'après le nom, je dirais qu'il s'agit sans doute d'un Musulman.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci.

 21   M. Kwon (interprétation): Monsieur le Témoin, est-il nécessaire d'avoir un

 22   document signé par le Premier ministre pour obtenir la remise en liberté

 23   d'un prisonnier? Etait-ce une pratique en vigueur à l'époque?

 24   Milan Babic (interprétation): Non, mais, pour une raison particulière que

 25   je ne connais pas, il a été demandé au Premier ministre de donner son

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  1   accord pour la remise en liberté de ce prisonnier. Un jour, M. le Ministre

  2   Martic a dit qu'il avait commis une erreur en agissant de la sorte à la

  3   demande du Premier ministre et de Nikolic et qu'il le regrettait. Et cette

  4   déclaration est parue dans la presse.

  5   M. Kwon (interprétation): Merci.

  6   Milan Babic (interprétation): Je vous en prie.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous devons demeurer à huis clos

  8   partiel.

  9   Monsieur le Témoin, durant les événements de 1991, vous occupiez une

 10   position politique importante au sein de la SAO de Krajina et vous

 11   dirigiez également la Défense territoriale.

 12   M. le Président (interprétation): Je demande au juriste hors classe de

 13   s'approcher quelques instants.

 14   Veuillez poursuivre, Madame Uertz-Retzlaff.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 16   Monsieur le Témoin, vous avez également dit qu'au mois d'août 1991,

 17   lorsque la JNA a commencé à agir, vous avez constaté ce qu'il advenait de

 18   la population croate. Quels ont été les sentiments que cela a suscités

 19   chez vous à l'époque? Que ressentiez-vous par rapport à ce qui se passait?

 20   Milan Babic (interprétation): J'avais le sentiment que tout cela n'était

 21   pas bon, y compris pour les Serbes, que tout cela était mauvais et que

 22   cela allait compromettre tous les principes politiques pour lesquels les

 23   Serbes s'étaient battus jusqu'à ce moment-là.

 24   Question: Vous avez dit que vous étiez, en quelque sorte, un porte-parole

 25   de la Krajina. Vous avez y compris montré cet article où on vous appelait

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  1   "le chancelier de la Krajina", et vous avez dit que, lorsque vous vous

  2   adressiez à la population, elle vous écoutait.

  3   Pourquoi ne vous êtes-vous pas opposé, de façon plus véhémente, à ce qui

  4   se passait? Pourquoi avez-vous continué à exercer les fonctions qui

  5   étaient les vôtres?

  6   Réponse: Eh bien, ce qui m'intéressait au premier plan était le destin de

  7   mon peuple. Je suis devenu égocentrique. Ethnocentrique également, si je

  8   puis m'exprimer ainsi. D'une certaine façon, je prenais plaisir à exercer

  9   mes fonctions politiques au service de mon peuple, et j'ai fait de mon

 10   mieux pour remplir ces fonctions en faisant ce que les gens attendaient de

 11   moi et en disant ce que les gens attendaient de moi. Donc je me suis

 12   retrouvé, d'une certaine façon, dans un cercle vicieux dont il m'a été

 13   très difficile de sortir. Je pensais tout de même qu'à la fin, après la

 14   guerre, une solution serait trouvée, une solution politique qui réglerait

 15   la situation. Et j'ai peut-être un peu oublié les autres.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 17   Juges, c'était la dernière question que je souhaitais poser à ce témoin.

 18   J'en ai, en fait, terminé plus rapidement que je ne le pensais.

 19   M. le Président (interprétation): Oui, nous revenons en audience publique.

 20   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 28.)

 21   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique, Monsieur le

 22   Président, Messieurs les Juges.

 23   M. Kwon (interprétation): Pourquoi, Madame Uertz-Retzlaff, ne faites-vous

 24   pas répéter au témoin sa dernière réponse en public?

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A quoi pensez-vous?

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  1   M. Kwon (interprétation): A votre dernier commentaire.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ah! Au fait que nous en avons

  3   terminé? Oui, effectivement.

  4   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, l'accusation en a terminé avec

  5   les questions qu'elle a à poser à ce témoin, en fait, plus rapidement que

  6   prévu.

  7   M. le Président (interprétation): Bien, le moment est venu de la pause.

  8   Monsieur Milosevic, le contre-interrogatoire commencera après la pause.

  9   Vingt minutes de pause.

 10   (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 59.)

 11   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, avant que vous ne

 12   commenciez, il y a une question de procédure qu'il faut aborder à huis

 13   clos partiel. Nous allons passer à huis clos partiel.

 14   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 15  (Audience à huis clos partiel à 11 heures)

 16   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 17   M. le Président : Voici ce qui se passe, ceci a été

 18   mentionné par le Greffe: le témoin bénéficie d'une déformation de la voix

 19   via le microphone; par conséquent, le Greffe doit débrancher votre micro

 20   après que vous ayez terminé une question. Il faut donc qu'il y ait

 21   interruption avant la réponse du témoin. Par conséquent, il faudra ménager

 22   des pauses entre les questions et les réponses. Je vous demande

 23   d'essayer de poser les questions les plus concises possible de ce fait.

 24   Quant au témoin, je vais lui demander qu'il laisse une pause après que la

 25   question aura été posée par l'accusé. Il faut qu'il laisse une pause, ce

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  1   qui permet au Greffe, ou à la représentante du Greffe, de débrancher le

  2   micro. Cela ne semble pas difficile mais cela va l'être car, vous, vous

  3   allez comprendre tout de suite la question, Monsieur le Témoin, et vous

  4   allez tenir à y répondre tout de suite puisque vous parlez la même langue.

  5   Mais veuillez garder ce que je viens de dire à l'esprit et de ménager une

  6   pause entre la question et la réponse.

  7   Nous pouvons revenir en audience publique.

  8   Mme Anoya (interprétation): Audience publique.

  9   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 01.)

 10   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, veuillez garder à

 11   l'esprit ceci: toute question susceptible de divulguer l'identité du

 12   témoin doit être posée à huis clos partiel. Péchez plutôt par excès de

 13   prudence de ce côté-là. Vous avez la parole, Monsieur Milosevic.

 14   (Contre-interrogatoire du Milan Babic par l'accusé M. Milosevic.)

 15   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, on m'a communiqué le texte de

 16   l'audition de ce témoin pour ce qui est de la partie de l'enregistrement

 17   vidéo.

 18   Je voudrais, dès le début, montrer l'un de ces nouveaux enregistrements

 19   vidéo. Le premier de ces enregistrements suffira.

 20   M. le Président (interprétation): Voyons ce que c'est parce qu'il s'agit

 21   ici maintenant d'enregistrement de ces auditions?

 22   M. Milosevic (interprétation): Oui. C'est la partie de ses entretiens avec

 23   la dame qui est assise en face et l'enquêteur.

 24   Par la suite, je voudrais lui poser des questions pour qu'il fasse des

 25   commentaires à ce sujet.

Page 13423

  1   M. le Président (interprétation): Oui, si l'on a pu établir quelle était

  2   cette piste, ou cet enregistrement, il faudra que ce soit à huis clos

  3   partiel, comme le dit la Greffière, du fait de la déformation des traits

  4   du visage.

  5   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

  6   (Audience à huis clos partiel à 11 heures 02)

  7   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  8   M. le Président : Oui, je demande la diffusion de cet extrait vidéo.

  9   (Diffusion de la vidéo.)

 10   "-Témoin C-61: A ce sujet, je voudrais dire la chose suivante: toujours,

 11   de jour en jour, je n'ai pas manqué de réagir. J'avais donc des réactions

 12   quotidiennes occasionnées par ce qui se passait à l'extérieur. Et cela a

 13   témoigné de l'intérêt de témoigner par les Serbes au titre quotidien; les

 14   Serbes de la Krajina. Et dans mes discours publics, je ne visais qu'à une

 15   chose: à savoir que, pour les Serbes de la Krajina, en Croatie notamment,

 16   il s'agissait d'assurer une position qui serait la bonne, qui serait un

 17   statut convenable et non pas la guerre, les meurtres et les souffrances.

 18   A cet effet, j'ai fait des déclarations. L'une de ses déclarations a été

 19   retransmise par la presse le 21 août 1991. Et cela concerne la volonté

 20   notre volonté qui consistait à préserver la paix dans le secteur de

 21   Kijevo, chose dont j'ai déjà parlé.

 22   Dans ma deuxième déclaration, qui a été reprise par la presse le 29 août

 23   1991, où j'avais dit que nous ne voulions pas d'effusion de sang entre les

 24   populations serbe et croate. Et j'avais précisé que nous ne voulions

 25   prendre possession ou nous emparer de quelque village croate que ce soit!

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  1   Et nous ne voulions prendre aucune partie du territoire croate!

  2   Pour finir, je crois avoir déjà mentionné auparavant, en m'entretenant

  3   avec le représentant de la communauté internationale, à savoir M.

  4   Galbraith, et j'ai précisé que j'étais favorable à une solution pacifique

  5   pour ce qui est du statut de la Krajina, en vertu ou conformément aux

  6   propositions de la communauté internationale, dans le sens où cette

  7   Krajina resterait sur le territoire de la Croatie".

  8   (Fin de la diffusion et de la traduction de la vidéo.)

  9   M. le Président (interprétation): Oui.

 10   M. Milosevic (interprétation): Ça va au-delà. Ce sont là des extraits de

 11   la cassette. Cela va durer quand même assez longtemps, mais je préfère

 12   poser quelques questions. Je crois que ce serait peut-être préférable de

 13   voir la cassette dans son intégralité.

 14   M. le Président (interprétation): Fort bien.

 15   M. Milosevic (interprétation): Maintenant, si vous me le permettez

 16   j'aimerais passer à un autre sujet et dire quelques phrases encore. Cela

 17   concerne le sujet que nous avons déjà vu ici.

 18   (Reprise de la diffusion vidéo et de sa traduction.)

 19   Il s'agit du document qui porte un numéro, le n°63. Ce document est

 20   adressé au commandement de la 3e Zone opérationnelle.

 21   "-J'en ai déjà parlé. Et dans ce contexte, je voudrais ajouter autre

 22   chose.

 23   -L'enquêteur: Je vais vous interrompre. Alors, pour qu'il soit bien clair,

 24   il s'agit d'une référence qui est la nôtre, MB63. Et le numéro, c'est le

 25   207-7948.

Page 13425

  1   -Milan Babic: Je voulais donc dire la chose suivante à ce sujet. Il est

  2   certain que c'est moi qui ai signé ce document. Mais si je n'avais pas

  3   signé le document, quelqu'un d'autre l'aurait signé certainement. Et je

  4   voulais juste préciser pourquoi l'on m'avait mis cela sous le nez pour me

  5   demander de signer. Et j'aimerais être tout à fait clair à ce sujet: ça,

  6   c'est encore l'œuvre des structures parallèles à Milosevic dans la

  7   Krajina, et cela avait pour objectif de me compromettre, à savoir de

  8   compromettre les intentions que j'avais de résoudre, de façon pacifique,

  9   les choses avec les autorités croates. Donc on cherchait à faire de moi ou

 10   à me présenter comme étant un menteur, comme étant une personne qui

 11   s'employait en faveur de la guerre et non pas en faveur de la paix, dans

 12   une situation comme celle-là à l'époque. Cela avait été un acte visant à

 13   me compromettre et à me présenter comme étant une personne opposée à la

 14   paix, opposée au plan de M. Vance.

 15   Ce que je voulais donc dire, c'est qu'à mon avis, ce document me

 16   compromet, à mon avis, de nos jours encore! Et je sens bien que c'est un

 17   document qui me compromet à présent aussi. Il me présente sous un

 18   éclairage tout à fait différent du bon et il présente, de façon erronée,

 19   les intentions qui étaient les miennes. Mon intention avait été de

 20   résoudre les problèmes politiques sans avoir à faire recours à la force.

 21   Et j'étais favorable à la coexistence des peuples serbe et croate sans

 22   qu'il y ait conflit.

 23   C'est ce que je voulais préciser et je vous remercie de m'en avoir fourni

 24   l'opportunité."

 25   (Fin de la diffusion de la cassette vidéo et de la traduction.)

Page 13426

  1   M. Milosevic (interprétation): On a sauté des passages.

  2   (Reprise de la diffusion vidéo et de sa traduction.)

  3   -L'enquêteur: Monsieur [Babic], je voudrais vous poser une question

  4   concernant ce que vous avez mentionné il y a quelques minutes de cela.

  5   Vous avez dit que, le 29 août 1991, en disant que vous ne vouliez pas

  6   qu'il y ait effusion de sang -c'est en ce sens que vous avez dit quelque

  7   chose-, eh bien, j'ai ici un texte publié par le journal "Politika", ce

  8   texte porte la date du 29 août 1991. Je pense que ce qui est écrit ici

  9   constitue le résumé de l'article publié par le journal.

 10   Il me semble donc, comme je viens de le dire, qu'il s'agit d'un résumé,

 11   mais on dirait que Milan Babic aurait déclaré que les parties sud de la

 12   SAO de Krajina sont presque entièrement sous le contrôle de personnes

 13   armées. Et ceci après la libération de Kijevo, Vrnjika, Otisic et autres

 14   localités, par les forces armées de la Krajina. On ajoute ensuite qu'il

 15   n'y a pas eu de participation aux opérations d'unités en provenance de

 16   Serbie et on dit que les Serbes ne renonceront à aucune modalité pour ce

 17   qui était de leur droit à la défense de leur indépendance.

 18   Puis, on ajoute que vous avez déclaré que la Krajina ne saurait rester au

 19   sein de la Croatie, quand bien même la Croatie demeurerait dans le cadre

 20   de la Yougoslavie. Vous souvenez-vous de cela?

 21   -Milan Babic (interprétation): Je me souviens que j'avais dit que nous

 22   n'avions aucune prétention à l'égard de la Croatie et que nous n'avions

 23   aucunement l'intention de nuire à la population croate.

 24   -L'enquêteur: Quand vous avez dit que la presse avait reproduit vos

 25   déclarations, c'est bien l'interview dont nous parlons?

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  1   -Milan Babic: J'ai retrouvé la chose chez mon ami et j'essaie de me

  2   remémorer la chose. Je vérifiais ce qu'a dit la presse.

  3   -Mme Uertz-Retzlaff: Est-ce que vous voulez nous remettre ce document?

  4   Est-ce que c'est bien là l'article?

  5   Monsieur [Babic], je n'ai pas compris ce que vous aviez dit au moment où

  6   vous avez dit que moi, en tant qu'homme politique de la région, je voulais

  7   parvenir à un accord dans le cadre de la Croatie avec les Croates.

  8   A partir de quel moment approximativement avez-vous eu ce plan?

  9   -Milan Babic: Eh bien, on pourrait dire que cela avait été l'intention

 10   que j'avais de le faire et cela se situe au début du mois de septembre

 11   1991, époque à laquelle, avec M. Jerko Vukas, président de la municipalité

 12   de Slunj, et c'est avec lui que j'avais convenu de la tenue d'une réunion

 13   avec le Gouvernement croate et le Sabor de Croatie.

 14   Donc, c'est à l'époque, le 10 septembre, que nous avions signé un accord

 15   et j'ai fourni dans les documents une copie de l'accord en question,

 16   accord où il a été arrêté la nécessité de résoudre toute question

 17   litigieuse en passant par les institutions en place.

 18   -Mme Uertz-Retzlaff: N'abordons pas trop de détails et ne soyons pas

 19   perturbés par les détails. Vous dites que, depuis septembre 1990, vous

 20   vouliez résoudre ce problème à l'intérieur de la Croatie, mais alors

 21   pourquoi avez-vous adopté autant de décisions qui consistaient à annexer

 22   la SAO de Krajina vers la Serbie?

 23   -Milan Babic: J'ai dit que c'était là des réactions au quotidien par

 24   rapport à des événements extérieurs. Et s'agissant de certains de ces

 25   événements, nous en avons déjà parlé. J'ai précisé à plusieurs reprises

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  1   qu'il avait été mis en place une structure parallèle, et cette structure

  2   parallèle a influé de façon notable sur les événements. Ces structures

  3   parallèles disposaient d'un monopole pour ce qui est des autorités ou de

  4   la force de frappe, à savoir la police, la sûreté d'Etat, et il y a eu en

  5   même temps des menaces proférées à l'intention de la population.

  6   J'ai déjà parlé du film qui a été diffusé par la télévision de Belgrade

  7   concernant Martin Spegelj et les annonces d'attaque. C'est là quelque

  8   chose qui avait semé la crainte tant au niveau de la population qu'au

  9   niveau des représentants politiques. Nous étions terrorisés. Il s'agissait

 10   d'amener Milosevic à se prononcer en public, de façon ouverte, et à dire

 11   quelle est clairement sa position aux fins de ne pas lui permettre de

 12   manipuler les populations et de ne pas leur insuffler des espoirs erronés,

 13   de faux espoirs. Et j'ai parlé des réactions qui se sont faites au

 14   quotidien par rapport aux événements survenus, par rapport à cette

 15   ambiance de terreur et après le début des conflits.

 16   L'opportunité suivante, pour ce qui était de résoudre notre statut en

 17   Croatie, avait été la tenue de ces conférences internationales. Et une

 18   fois de plus, Milosevic et ses hommes ont recours à des moyens analogues.

 19   Il m'arrivait de retrouver chez Borivoj Rasuo où j'habitais, lorsque la

 20   conférence a commencé, donc face à cet appartement-là, en grandes lettres

 21   rouges, en majuscules rouges: "Babic, le traître". Et il a dit que c'était

 22   un policier, qui était son voisin, qui avait fait cette inscription-là.

 23   Question: (Inaudible)

 24   Réponse: Rasuo avait dit cela.

 25   Question: (Inaudible)

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  1   Réponse: Je vous ai déjà dit que "Frenki", au poste de police de Knin,

  2   avant mon déplacement vers la première séance de préparation à Paris,

  3   avant la Conférence de La Haye, donc "Frenki" avait alarmé autour de soi

  4   et avait dit que j'étais un traître. Et il y avait une ambiance publique

  5   de mise en place. Milosevic, Borislav Jovic, Simovic, (expurgée)

  6   (expurgée), puis Branko Kostic et les autres, pour

  7   ne pas les citer tous. Donc un grand nombre de personnes en Serbie ayant

  8   occupé des fonctions importantes avaient contribué à la mise en place de

  9   ce climat en Serbie et ont, par voie de conséquences, généré une position

 10   d'expectative au niveau des gens de la Krajina, pour ce qui est de leur

 11   droit naturel qui serait celui de rester dans le cadre de la Yougoslavie

 12   et de faire de la chose une option. A un moment donné, je n'ai plus pu

 13   supporter cette ambiance et ces pressions. Je m'étais enfui, je ne suis

 14   pas allé assister à cette réunion préparatoire de Paris.

 15   Donc personnellement, j'étais entre le marteau de l'opinion publique

 16   établie ou mise en place par Milosevic et les médias en Serbie, et

 17   l'enclume qui était constituée par les pressions personnelles contre moi;

 18   en faisant de moi un traître à la nation serbe. Et, à ce moment-là, à

 19   l'époque de la Conférence de La Haye…"

 20   (Interruption de l'enregistrement)

 21   M. le Président (interprétation): Vous en avez encore, Monsieur Milosevic?

 22   M. Milosevic (interprétation): Oui.

 23   (Reprise de l'enregistrement et de la traduction.)

 24   "-Milan Babic: Donc, c'est pour vous dire quelles étaient les pressions,

 25   quelle était l'ambiance qui prévalait et comment est-ce qu'on pouvait

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  1   fonctionner, de façon raisonnable, en tant comme politique.

  2   -Mme Uertz-Retzlaff: Monsieur le Témoin, je ne comprends toujours pas

  3   votre position par rapport à ce qui était vos plans ou votre plan?

  4   Vous dites qu'en septembre 1990, vous aviez pour intention et pour plan de

  5   résoudre les problèmes de façon interne à l'intérieur de la Croatie?

  6   -Milan Babic: Oui.

  7   -Mme Uertz-Retzlaff: Arrive alors une période où il y a des affrontements

  8   et au moment où des conflits éclatent.

  9   Est-ce que je comprends bien? Vous aviez toujours ce plan ou est-ce que

 10   vous l'avez abandonné pendant un certain temps?

 11   -Milan Babic: Cela se trouvait dans mon cœur et dans mon esprit, mais

 12   cela n'a pas toujours été dans ma bouche.

 13   -Mme Uertz-Retzlaff: En automne 1991, vous vouliez à nouveau parler et

 14   négocier avec les Croates: est-ce bien ce que vous avez dit?

 15   -Milan Babic: Et puis une occasion s'est présentée par l'intermédiaire de

 16   la communauté internationale. J'ai déjà mentionné ce qu'étaient ces

 17   relations ou rapports, comment ils ont évolué.

 18   L'erreur que j'ai peut-être commise, c'est de ne pas avoir suffisamment de

 19   courage et de ne pas avoir pris cette mesure publique. Mais c'étaient mes

 20   point faibles, mes faiblesses.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ne parlons pas maintenant de vos

 22   faiblesses."

 23   (Interruption de la cassette.)

 24   (Reprise de la cassette.)

 25   "-Mme Uertz-Retzlaff: Et si l'on parlait maintenant de 1991?

Page 13431

  1   -Milan Babic (interprétation): Voici ce que je voulais dire: Tudjman ne

  2   voulait pas avoir de réunion publique, de réunion qui aurait été publique

  3   ou rendu publique. Vous voyez, il a suggéré que cette réunion ait lieu;

  4   j'ai accepté cette suggestion, mais l'idée, c'était que ce ne soit pas…,

  5   ma condition était que ce soit rendu publique, mais je n'ai pas reçu de

  6   réaction à ce propos.

  7   Nous avons, à ce moment-là, proposé également cette solution

  8   constitutionnelle par laquelle la Krajina resterait dans le cadre de la

  9   Croatie en tant que région, Région de la Krajina, Région ou District de la

 10   Krajina. C'est la raison pour laquelle ils m'ont appelé chef de la région,

 11   directeur de la Zupa. Il y a même Biljana Plavsic qui m'a appelé "chef de

 12   district", à savoir la personne qui veut que la Krajina devienne un

 13   district de la Croatie, une région de la Croatie.

 14   -Mme Uertz-Retzlaff: Mais vous passez d'une année à l'autre, ça me rend la

 15   tâche très difficile. Si je vous ai bien compris, en 1990, vous étiez

 16   énergiquement en faveur d'une Région autonome de la Krajina au sein de la

 17   Croatie?

 18   -Milan Babic: C'était le cas officiellement, jusqu'à la fin du mois de

 19   mai 1991.

 20   -Mme Uertz-Retzlaff: Et puis, vous avez abandonné cette idée et vous ne

 21   l'avez jamais reprise; c'est bien cela?

 22   -Milan Babic: Vous voyez, il n'y avait pas de possibilité de reprendre

 23   cette question et de la poursuivre ouvertement. J'étais vraiment limité

 24   par les circonstances qui étaient créées tout autour de nous. La Croatie

 25   affirmait publiquement que la Serbie se servait abusivement de la Croatie

Page 13432

  1   pour poursuivre ses propres objectifs publiquement.

  2   -Mme Uertz-Retzlaff: Oui, mais vous venez de dire à l'instant "qu'il avait

  3   créé une structure parallèle en Krajina, qu'il avait sapé mon plan". C'est

  4   ce que vous avez dit. Mais vous n'avez pas expliqué ce que vous vouliez

  5   dire.

  6   -Milan Babic: Oui, j'en suis convaincu!

  7   -Mme Uertz-Retzlaff: Mais je ne comprends pas. Comment aurait-il pu le

  8   faire?

  9   -Milan Babic: …"

 10   (Interruption de la diffusion vidéo.)

 11   M. le Président (interprétation): Peut-on interrompre un instant la

 12   diffusion? Merci.

 13   Oui, Madame Uertz-Retzlaff?

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je viens tout

 15   juste de trouver la transcription de cette audition. Je viens de constater

 16   que, dans la cassette qu'on nous diffuse à l'instant, il y a deux phrases

 17   qu'on a coupées, qu'on a abandonnées, et quelque part ceci modifie les

 18   dires du témoin.

 19   M. le Président (interprétation): Quelles sont ces deux phrases, Madame?

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La Croatie annonçait directement

 21   qu'en fait "la Serbie se servait abusivement de la Krajina à des fins

 22   publiques".

 23   Et puis j'ai demandé au témoin: "Mais est-ce que ce n'est pas la vérité?".

 24   Le témoin a répondu: "Oui, mais moi, ce que je veux dire, c'est la façon

 25   dont Milosevic et les autres ont abusé de la Krajina, des gens et des

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  1   institutions".

  2   Et voilà ce qui a été dit par le témoin, mais ceci a été coupé.

  3   M. le Président (interprétation): En temps utile, ces extraits devront

  4   être versés au dossier. Vous aurez bien sûr l'occasion et l'opportunité de

  5   vérifier si tout est exact ou pas.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Mais il y a eu d'autres

  7   interruptions. Et, à l'instant, je viens uniquement de trouver ceci dans

  8   la masse des transcriptions.

  9   M. le Président (interprétation): Poursuivons la diffusion.

 10   Intervenez un à la fois. D'abord, Maître Tapuskovic, qu'est-ce qu'il y a?

 11   M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, je voudrais juste

 12   attirer votre attention sur une chose. Je suis d'accord, en effet, sur la

 13   nécessité d'apprécier toute chose dans le contexte complet. Mais, depuis

 14   quelques jours, nous écoutons des écoutes interceptées, et l'on a extrait

 15   juste une ou deux phrases.

 16   Maintenant, si l'on veut se pencher sur toute transcription, sur tout

 17   document dans son ensemble, je suis d'accord pour le faire. Mais la

 18   complainte qui a été faite ou présentée par l'accusation, c'est la

 19   nécessité de se référer à deux phrases manquantes. Mais je tiens à

 20   signaler que la méthode utilisée pour ce qui est des écoutes est tout à

 21   fait autre.

 22   M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Nous aurons

 23   l'intégralité de ces extraits qui sera versée au dossier; nous pourrons

 24   ainsi nous-mêmes constater ce qui est véritablement dit.

 25   Oui, Monsieur Milosevic?

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  1   M. Milosevic (interprétation): Là, les abréviations sont faites pour nous

  2   faire gagner du temps, parce que le fait sur lequel insiste la dame qui

  3   est assise en face de moi n'a pas été omis; cela ne concerne pas ce que

  4   dit le témoin. C'est vos enregistrements, ce n'est pas mes

  5   enregistrements. C'était donc pour gagner du temps. Il n'y avait aucune

  6   intention de sauter quoi que ce soit; je voulais juste montrer de quelle

  7   façon ce témoin a témoigné, rien d'autre. Et après, je me propose de lui

  8   poser des questions.

  9   M. le Président (interprétation): Fort bien. Une fois terminée la

 10   diffusion de cet extrait, la cassette telle qu'elle est diffusée va être

 11   versée au dossier. Il est certain que ceci sera fait forcément sous pli

 12   scellé. Par la suite, nous allons également verser au dossier la

 13   transcription. Il faut garder ceci dans certaines limites.

 14   Oui, Monsieur l'avocat, veuillez intervenir. Et puis, il faut poursuivre.

 15   M. Muller (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Par souci

 16   d'équité et pour sauvegarder les droits de mon client qui est le témoin,

 17   qui est supposé dire ici la vérité, toute la vérité et rien que la vérité,

 18   je pense qu'il faudrait au moins aviser le témoin du fait que, maintenant,

 19   il est en train d'entendre des extraits d'une cassette. Ce qui n'a pas été

 20   fait.

 21   M. le Président (interprétation): Il vient de l'entendre et ne perdons pas

 22   de temps. Il n'y a pas d'inégalité pour le moment.

 23   Encore une chose: Madame Uertz-Retzlaff, dites-nous, si vous le pouvez,

 24   quel est le document auquel on fait référence? On mentionne ici un ordre

 25   adressé à la 3e Zone opérationnelle et signé de la main du témoin. Est-ce

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  1   que c'est une pièce à nous ou pas?

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le premier document, c'est en fait

  3   l'intercalaire 143 de la pièce 352. On fait, ici, référence à la structure

  4   de commandement dans la 3e Zone opérationnelle. Cependant, le tout premier

  5   document mentionné dans l'audition est un document dont nous ne demandons

  6   pas le versement. Si M. Milosevic veut y faire référence, il faudra que ça

  7   devienne une nouvelle pièce.

  8   M. le Président (interprétation): Fort bien, mais je vous ai posé une

  9   question précise à propos de l'ordre. C'est donc la pièce 352 et c'est

 10   l'intercalaire 142? Fort bien. Eh bien, passons à la diffusion de ce qui

 11   reste éventuellement de la cassette.

 12   M. Milosevic (interprétation): Alors, j'ai cru comprendre que je

 13   mentionnais quelque chose. Or moi, je ne mentionne rien du tout. Je ne

 14   fais que montrer ce que le témoin a déclaré. Pour le moment, je n'ai rien

 15   mentionné moi-même du tout.

 16   M. le Président (interprétation): Non, non, ce que l'accusation a dit,

 17   c'est que, si vous voulez demander le versement du document mentionné dans

 18   la cassette, vous pourrez demander ce versement et vous recevrez une cote

 19   pour ledit document, une nouvelle cote.

 20   Mais poursuivons la diffusion, s'il vous plaît.

 21   (Reprise de l'interprétation de la vidéo.)

 22   "-Milan Babic: En septembre 1990, nous avons stabilisé la situation dans

 23   la région de Knin. Après une période d'instabilité, et lorsque nous avons

 24   également fait ces déclarations à propos de la paix, du fait de ramener la

 25   paix, et lorsque nous avons entrepris certaines activités, deux choses

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  1   sont apparues à la surface. Tout d'abord, il y a eu ce Conseil de

  2   résistance national s'opposant au fait que les Serbes soient sous le joug;

  3   et cela a été un long titre, c'était appelé surtout de façon raccourcie le

  4   "Conseil de résistance national". C'était une organisation illégale. Et ce

  5   que j'ai par la suite reconnu dans la DB, c'est-à-dire que les gens

  6   travaillaient en fait dans la DB, les gens de là. Même les Allemands ont

  7   remarqué que ce vide avait été comblé par les gens du Conseil de la

  8   résistance national.

  9   Il y a eu, comme deuxième élément, les troubles, le conflit qui a éclaté

 10   dans la Banija. Je ne sais pas qui est à l'origine de ce conflit.

 11   Les Serbes accusaient le gouvernement croate et le gouvernement croate

 12   accusait les Serbes rebelles, la Serbie, tandis que les Serbes de la

 13   Banija accusait le gouvernement croate. Mais je me souviens que Raskovic

 14   m'avait désigné et qu'il avait dit que c'était la bonne chose à faire; et

 15   il avait ajouté qu'il y avait un troisième élément qui souhaitait le

 16   conflit.

 17   Donc, les deux premiers facteurs, c'étaient nous et le gouvernement croate

 18   puis, il a mentionné ce troisième facteur ou élément qui souhaitait le

 19   conflit. A ce moment-là, il devait savoir quelque chose de plus que moi.

 20   -Mme Uertz-Retzlaff: Vous parlez de cette organisation illégale du Conseil

 21   national de la résistance, vous dites que c'était mentionné de membres de

 22   la DB. Vous parlez de la DB de Serbie ou de la DB locale?

 23   -Milan Babic: Oui, des gens du coin, des gens qui habitaient Knin: Dusan

 24   Orlovic, Dule, il y avait aussi un certain Vitas et d'autres qui se

 25   trouvaient là.

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  1   A un moment donné, Dusan Orlovic était le chef officiel de la DB de

  2   Krajina, mais je lui ai dit qu'en fait j'avais vu que son chef, son boss,

  3   c'était Jovica Stanisic. Je me fondais sur les discussions que j'avais

  4   eues au mois d'août 1991.

  5   -Mme Uertz-Retzlaff: Oui, mais, Monsieur le Témoin, ne nous égarons pas.

  6   Vous dites que, pendant que vous vous recherchiez la paix, d'autres

  7   factions cherchaient la guerre. Vous faites état du Conseil national de la

  8   résistance, vous dites qu'il y avait des éléments dans la Banija et puis

  9   vous mentionnez une tierce partie mentionnée, elle, par Raskovic.

 10   Alors, comment pouvez-vous dire que c'est Milosevic? Comment M. Milosevic

 11   s'intègre t-il dans ce décor, dans cette situation?

 12   -Milan Babic: Mais vous voyez, si vous demandez quelle est sa place dans

 13   cette situation, au début, moi, je ne savais pas trop où il s'intégrait.

 14   Cependant, par la suite, j'ai compris qu'il y avait une hiérarchie, un

 15   système: Vitas, Orlovic, Martic, Stanisic, ils mènent sans aucun doute à

 16   Milosevic. Stanisic mène à Milosevic qui n'était pas là indépendamment.

 17   C'est comme ça que je vois la structure.

 18   Milosevic… Il y a une déclaration portant sur l'acceptation du plan Vance

 19   et l'acceptation de la présence des forces des Nations Unies. Il y a une

 20   discussion et Radovan Karadzic a apporté un soutien presque agressif à

 21   Milosevic. Il s'est comporté de façon agressive envers moi. Nikola

 22   Koljevic n'était pas agressif, même s'il a affiché une position favorable

 23   à Milosevic.

 24   Puis Milosevic m'a remis une feuille de papier. Moi, je suis allé dans une

 25   autre pièce où j'étais censé écrire ce communiqué, cette déclaration. Ce

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  1   que j'ai fait. J'ai écrit à peu près une page de texte. Je crois qu'il a

  2   pris un crayon et il a dit la chose suivante, Milosevic; c'est Milosevic

  3   qui a dit cela: "Je ne vais pas biffer les passages, mais je vais

  4   souligner les parties à omettre". Il a donc souligné pratiquement tout le

  5   texte. Et ce qui restait, c'était en fait la phrase où il disait que nous

  6   acceptions le plan de paix.

  7   Vous savez, j'ai émis une protestation un peu tacite ou explicite. Je

  8   n'étais pas d'accord avec ce qu'il avait fait. Et il a répondu en

  9   réagissant de la manière suivante; il a dit: "Mais tu es vraiment têtu!

 10   Têtu! Obstiné". Il me disait souvent ça, il me disait souvent que j'étais

 11   têtu et il utilisait la phrase en anglais qui est : "Tu es un fauteur de

 12   troubles", "trouble maker".

 13   Il a utilisé cette expression de "fauteur de troubles" en mai 1991; c'est

 14   à ce moment-là qu'il a dit qu'en fait, je devrais être tué. C'est lui qui

 15   a dit que des académiciens auraient dit que je devrais être tué.

 16   -Mme Uertz-Retzlaff: En mai 1991?

 17   -Milan Babic: Oui, c'est à ce moment-là qu'il a dit qu'on devrait me

 18   tuer. Mais cette fois-là, il ne l'a pas dit.

 19   -Mme Uertz-Retzlaff: Est-ce que c'était une boutade? Ou est-ce que, pour

 20   vous, c'était quelque chose de sérieux qu'il disait?

 21   -Milan Babic: Pour moi, c'était une véritable menace. Vous savez, il

 22   voulait dissimuler le fait que c'était en fait une menace. Il ne m'a même

 23   pas offert de café, vous savez. Il avait une attitude assez hostile. Mais,

 24   à mon avis, pendant que j'étais là et qu'on attendait Jovic, Branko Kostic

 25   parlait au général Krstic. On attendait l'arrivée de Jovic, donc Branko

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  1   Kostic parlait au général Krstic au téléphone. En fait, Kostic demandait

  2   s'il y avait quelque chose à signer. Je ne me souviens plus s'il y avait

  3   d'autres membres de la présidence qui étaient présents. Je me rappelle sa

  4   présence à cause de ce qui s'est passé au téléphone, de cette conversation

  5   téléphonique. Mais moi, j'ai parlé avec Jovic.

  6   -Mme Uertz-Retzlaff: Oui, vous parlez de Jovic. Essayez de vous remémorer

  7   les dires qui furent les siens.

  8   -L'enquêteur: Il n'est pas nécessaire de savoir ce que vous pensiez, mais

  9   plutôt ce que vous vous êtes dit, vous et lui.

 10   -Milan Babic: D'abord, il a montré le plan, le texte.

 11   -Mme Uertz-Retzlaff: Mais lui, c'est Jovic?

 12   -Milan Babic: Oui, Jovic m'a montré le texte.

 13   -L'enquêteur: Et c'était le plan de quoi? Du plan Vance-Owen?

 14   -Milan Babic: Oui.

 15   -L'enquêteur: D'accord.

 16   -Milan Babic: Et j'ai dit: "Mais il n'y a rien de neuf dans tout cela!";

 17   voilà ce que j'ai dit, moi. Et lui, il a répondu, de façon arrogante,

 18   hautaine: "Et est-ce qu'il y a quelque chose de neuf chez toi? Chez toi,

 19   rien de nouveau!". Et moi, j'ai dit: "Non".

 20   L'impression principale de cette réunion que j'ai retiré de cette réunion,

 21   c'est cela. Pour le reste, je ne me souviens pas d'autre chose. Je me

 22   souviens de son attitude, de son arrogance.

 23   -L'enquêteur: Au moment où vous aviez eu cette réunion, il était bien

 24   connu ou il savait bien que vous vous opposiez au plan Vance? Est-ce bien

 25   cela?

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  1   -Milan Babic: Oui. Oui! En effet. Il a dit: "Est-ce qu'il y a quelque

  2   chose de nouveau chez toi?". Et quand il a dit ça, il voulait savoir si

  3   j'avais changé d'avis. De façon générale, je n'étais pas opposé. De façon

  4   générale, j'étais plutôt favorable, j'acceptais le plan.

  5   -L'enquêteur: (Question inaudible.)

  6   -Milan Babic: Oui, oui, il savait que j'avais quelques commentaires, des

  7   observations à faire. C'est dans ce sens-là qu'il m'a demandé s'il y avait

  8   quelque chose de neuf chez moi. Moi, j'ai campé sur ma position. Je

  9   maintiens mes commentaires.

 10   -L'enquêteur: Qu'a-t-il répondu?

 11   -Milan Babic: (Inaudible.)

 12   -L'enquêteur: J'aimerais maintenant vous poser une question, puis je

 13   reviendrai là-dessus et je préciserai.

 14   Tout d'abord, est-il vrai que vous étiez un des éléments causant la

 15   discorde? Ou que c'était là un des aspects de la discorde entre ce que

 16   vous vouliez, et ce que M. Milosevic et les autres voulaient?

 17   -Milan Babic: Non, ça ne portait pas là-dessus.

 18   -L'enquêteur: Je vais être plus précis. Voici ce que j'examine comme

 19   document et ce que je lis, il porte le numéro ERN 00543260. C'est une

 20   traduction officieuse et il est dit qu'il s'agit d'un texte de M. Milan

 21   Babic en réponse à Slobodan Milosevic, texte qui a été reproduit dans le

 22   magazine "Politika", numéro du 12 janvier 1992.

 23   -Milan Babic: Oui.

 24   -L'enquêteur: Avez-vous envoyé une lettre à M. Milosevic vers cette date?

 25   -Milan Babic: Une lettre a été écrite par Rasuo et moi, je me suis

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  1   contenté de signer ce texte. Il s'agissait de Boro Rasuo. Pendant qu'il

  2   préparait cette lettre, il mettait différentes choses.

  3   -L'enquêteur: Mais cette lettre, quel qu'en soit l'auteur, elle est partie

  4   avec votre signature, n'est-ce pas?

  5   -Milan Babic: Oui.

  6   -L'enquêteur: Etait-ce une expression de ce que vous souhaitiez qui

  7   correspondait à la réalité?

  8   -Milan Babic: Non.

  9   -L'enquêteur: Dans ces conditions, pourquoi avez-vous écrit cela?

 10   -Milan Babic: Parce qu'en public, c'était l'opinion exprimée par

 11   Milosevic. Il était considéré en public que l'opinion partageait ce point

 12   de vue. Donc cette lettre était censée être écrite pour être offerte à

 13   l'opinion formée par lui. C'est ce que recherchait l'auteur de cette

 14   lettre.

 15   -Enquêteur: Oui, mais quelle est la différence entre le contenu de cette

 16   lettre et ce que vous pensiez? Vous rappelez-vous le contenu de cette

 17   lettre? Je ne dispose pas ici de la copie originale en BCS?

 18   -Milan Babic: Eh bien, d'abord le plan Vance n'était pas un accord de

 19   paix, c'était un accord relatif à la sécurité.

 20   -L'enquêteur: Oui.

 21   -Milan Babic: Et ce plan laissait de côté à peu près un quart du

 22   territoire de la Krajina peuplé par des Serbes. Et les dispositions de ce

 23   plan traitaient avant tout du territoire, c'est-à-dire des régions qui

 24   devaient être protégées par les forces de paix.

 25   J'ai montré pour ma part à Milosevic et à Jovic quelles étaient les

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  1   régions qui ne seraient pas protégées. Mais eux n'ont pas voulu en

  2   discuter. Et à ce moment-là, j'ai exprimé un point de vue très ferme dans

  3   lequel j'insistais sur la nécessité de tracer une ligne verte, autrement

  4   dit une ligne de démarcation entre les différentes forces en présence.

  5   En fait, j'ai fait cela parce que c'était un moyen de protéger tous les

  6   territoires habités par des Serbes. Je ne pouvais pas accepter une

  7   situation dans laquelle un grand nombre de personnes allaient rester sans

  8   protection, car cela m'aurait fait courir le risque d'être ensuite tenu

  9   responsable de leur situation.

 10   -L'enquêteur: Eh bien, je vais, dans ces conditions, vous poser une

 11   question: lorsque vous avez écrit cette lettre, était-ce à votre avis une

 12   lettre politique ou une lettre exprimant vos sentiments personnels?

 13   -Milan Babic: Politique.

 14   -L'enquêteur: Mais je lis rapidement cette lettre à l'instant et, voyez-

 15   vous, je ne vois rien dans cette lettre qui traite de territoires qui

 16   resteraient sans protection en application de ce plan.

 17   -Milan Babic: Il est question de ligne de démarcation entre les forces en

 18   présence. Donc la nécessité d'établir cette ligne de démarcation implique

 19   un déploiement des forces en présence qui impliquerait dans la réalité la

 20   protection de tous nos territoires.

 21   -Mme Uertz-Retzlaff: Monsieur [Babic], je lis cette lettre et j'y trouve

 22   des formulations, des libellés très radicaux, notamment lorsqu'il est

 23   question des Croates. Nous lisons les mots "agresseurs croates-néonazis".

 24   Dans cette lettre, vous dites également que, si le plan Vance devait être

 25   appliqué, cela serait une façon de permettre le génocide des Serbes.

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  1   Vous dites contester le fait que la Krajina fasse partie de la Croatie.

  2   Vous dites ne pas souhaiter être désarmés.

  3   A la lecture de cette lettre, on peut avoir l'impression que vous êtes

  4   beaucoup plus radical que M. Milosevic lui-même.

  5   -Milan Babic: Non, non, cela n'avait rien à voir avec mes sentiments. Ce

  6   n'est pas cela que je pensais.

  7   -Mme Uertz-Retzlaff: Mais vous avez signé cette lettre?

  8   -Milan Babic: Je pensais aux questions concrètes et aux aspects liés à la

  9   sécurité.

 10   Vous savez, il y avait les tensions, les pressions exercées qui nuisaient,

 11   qui détournaient l'attention. Mais je n'étais pas un radical, je n'étais

 12   pas plus radical que Milosevic parce que, le 26 février, par le biais de

 13   l'assemblée de Borovo Selo, Milosevic a introduit la Constitution et les

 14   lois yougoslaves sur le territoire de Krajina. Des documents existent qui

 15   peuvent le prouver.

 16   Or, à l'époque de la publication de cette lettre, ni la Constitution ni

 17   les lois yougoslaves n'étaient en vigueur sur le territoire de la Krajina.

 18   -Mme Uertz-Retzlaff: Monsieur [Babic], la dernière fois, vous nous avez

 19   remis un grand nombre de documents et certains de ces documents indiquent

 20   précisément cela.

 21   -Milan Babic: Dans la pratique, concrètement, le 26 février, il a occupé

 22   la Krajina. Jusqu'à cette date, il exerçait son contrôle sur la police,

 23   sur l'armée; il exerçait son influence sur les entreprises par le biais de

 24   la vie économique, mais, le 26 février, il a parachevé l'occupation

 25   politique y compris de la région: il a pris le pouvoir dans les faits, en

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  1   Krajina. Et toutes ces réalités ont détourné l'attention de ce qui était

  2   tout à fait fondamental et m'ont présenté sous un jour plus radical que je

  3   ne l'étais en réalité. Mais, dans la réalité, les choses étaient très

  4   différentes.

  5   -L'enquêteur: Bien, nous avons déjà parlé de cela il y a quelque temps,

  6   lorsque nous avons discuté des réunions du mois d'octobre.

  7   -Milan Babic (interprétation): Oui, oui, mais un instant, je vous prie.

  8   Donnez-moi quelques minutes pour que je lise le texte et que je voie s'il

  9   y a quelque chose que je n'ai pas vu.

 10   -L'enquêteur: A l'époque où vous avez déclaré qu'il avait introduit les

 11   lois yougoslaves en Krajina; quand est-ce que c'était? En février, n'est-

 12   ce pas? Le 26 février 1992?

 13   -Milan Babic (interprétation): Oui.

 14   -L'enquêteur: A ce moment-là, dites-moi si le Gouvernement croate exerçait

 15   son contrôle sur cette région de Krajina?

 16   -Milan Babic (interprétation): Non, à partir du 19…

 17   -L'enquêteur: Oui ou non?

 18   -Milan Babic (interprétation): Non.

 19   -L'enquêteur: Donc, si j'ai bien compris ce que vous avez dit, vous dites

 20   qu'à partir de ce moment-là, la Krajina a fait partie de la Yougoslavie?

 21   -Milan Babic: Non, pas tout à fait.

 22   -L'enquêteur: Mais alors, qu'en était-il? La Krajina est devenue quoi à ce

 23   moment-là?

 24   -Milan Babic: Officiellement, la Krajina est devenue une région

 25   distincte, une région autonome.

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  1   -L'enquêteur: Mais faisait-elle partie?

  2   -Milan Babic: Dans la réalité, elle faisait partie de la Yougoslavie.

  3   -L'enquêteur: Mais alors, qu'est-ce que vous vouliez exactement?

  4   -Milan Babic: Le 19 décembre, nous nous sommes séparés de la Yougoslavie.

  5   -L'enquêteur: Un instant, s'il vous plaît. J'aimerais que nous parlions de

  6   la géographie, de la dynamique physique des changements géographiques.

  7   Le 26 février 1992, selon vos propres dires, Milosevic a fait en sorte que

  8   la Krajina serbe fasse désormais partie de la Yougoslavie. Alors, si l'on

  9   essaie de comprendre ce qui s'est passé sur le plan politique et qu'on

 10   remonte aux événements de 1990 et aux événements qui en ont découlé, est-

 11   ce que tout cela ne correspond pas en fait à ce que les Serbes,

 12   représentés par vous qui étiez leur Président, souhaitaient.? Puisque vous

 13   étiez la partie serbe de Croatie, est-ce que vous ne souhaitiez pas un

 14   divorce avec la Croatie pour faire partie de la Yougoslavie ou de la

 15   Serbie en fonction de l'époque dont on parle?

 16   -Milan Babic: Non, pas tout le monde.

 17   -L'enquêteur: Mais le Gouvernement de la SAO de Krajina?

 18   -Mme Uertz-Retzlaff: Permettez-moi de vous poser une question, Monsieur

 19   [Babic].

 20   Vous avez déclaré que, le 19 décembre, vous avez en Krajina décidé ne plus

 21   faire partie de la Yougoslavie?

 22   -Milan Babic: Nous avons déclaré notre autonomie, donc nous avons cessé

 23   d'être une partie de la Yougoslavie.

 24   -Mme Uertz-Retzlaff: Oui, mais dans le même temps, selon la lettre écrite

 25   par M. Rasuo, vous disiez que vous ne vouliez pas faire partie de la

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  1   Croatie non plus. Alors, qu'est-ce que vous vouliez: une indépendance

  2   complète, être quelque chose comme Monaco, par exemple? Qu'est-ce que vous

  3   vouliez?

  4   -Milan Babic (interprétation): C'est assez simple. La Croatie avait déjà

  5   été reconnue par un certain nombre d'Etats, en tant qu'Etat indépendant; à

  6   partir du 23 décembre: l'Allemagne, puis d'autres ensuite, n'est-ce pas,

  7   l'avaient reconnue. Et la position de la communauté internationale au

  8   cours des conférences sur l'ex-Yougoslavie est devenue tout à fait claire

  9   à partir du 18 octobre 1990. Elle consistait à déclarer qu'il ne fallait

 10   aucune modification des frontières des anciennes Républiques de la

 11   Yougoslavie. Donc il était tout à fait clair, aux yeux de tous, que la

 12   Krajina devrait trouver sa place au sein de la Croatie. Mais compte tenu

 13   qu'il y avait eu conflit armé, qu'il y avait séparation institutionnelle

 14   et toutes sortes de choses, des positions très radicales ont vu le jour

 15   sur le plan officiel. Et vis-à-vis de cette position de la communauté

 16   internationale, enfin de cette nouvelle position, non, enfin peut-être pas

 17   nouvelle, mais en tout cas de cette position claire de la communauté

 18   internationale, j'ai compris et nous avons compris qu'il nous fallait

 19   avancer progressivement. Ce qui n'a rien à voir avec Monaco.

 20   La Krajina est donc devenue une entité. Nous lui avons donné le nom de

 21   "République serbe de Krajina". Ce qui en a fait une entité nous permettant

 22   de discuter avec la Croatie, avec la communauté internationale, avec

 23   toutes les instances qui s'intéressaient à la question, donc de discuter

 24   avec toutes ces instances, notre situation à venir.

 25   Et moi, je pensais effectivement à ce moment-là que, sans aucun doute, il

Page 13447

  1   fallait que la Krajina devienne une entité politique allant avec la

  2   Croatie, d'une façon ou d'une autre, bien sûr.

  3   A partir du 18 octobre, lorsque, lors de la 2e Conférence plénière sur

  4   l'ex-Yougoslavie, les positions qui ont été avancées ont été avancées, la

  5   perspective réaliste ne pouvait être que celle-là. Mais il fallait, à tout

  6   prix, sortir de la situation que je qualifierais par cette grande

  7   confiance de l'opinion publique vis-à-vis des positions exprimées par

  8   Milosevic. A cet instant-là, nous nous sommes donc trouvés dans ce que

  9   j'appellerai "une situation, une position intermédiaire"; intermédiaire

 10   entre une Yougoslavie, quelle qu'elle soit, et la Croatie désormais

 11   indépendante. Mais en dehors du fait que la presse à l'époque écrivait

 12   tout et n'importe quoi; cela ça doit être clair.

 13   Ce que je proposais en fin de compte, c'est que les Nations Unies prennent

 14   le contrôle des instances civiles en Krajina. Donc j'allais dans un sens

 15   qui aurait peu à peu permis à la communauté internationale de trouver une

 16   solution, mais tout cela, sans grand bouleversement dans l'opinion

 17   publique, sans traumatisme, et puis surtout finalement sans une vengeance

 18   quelconque de la part de Milosevic. Donc c'était une manière progressive

 19   et tranquille d'aller peu à peu vers une solution au sein de la Croatie.

 20   Mais je vous ai déjà dit qu'à partir de ce moment-là, à partir de

 21   l'initiative que j'ai proposée eu égard à une administration civile

 22   confiée aux Nations Unies, c'est-à-dire à cette espèce de protectorat, à

 23   partir aussi du plan Vance, une campagne maléfique a commencé qui a été

 24   menée, y compris par ceux qui se présentaient comme mes collaborateurs les

 25   plus proches. Et cette campagne a attiré l'attention sur quelque chose de

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  1   tout à fait différent, c'est-à-dire sur des prises de position radicales,

  2   et ni moi ni les institutions de Krajina n'avons eu la force suffisante

  3   pour trouver le moyen de sortir de tout cela de façon pacifique.

  4   Je dois admettre qu'une fois de plus, je me suis trouvé enfermé dans cet

  5   environnement étouffant qui avait été créé. Quand l'assemblée municipale

  6   de Knin -et je vous ai déjà parlé de cela- a décidé d'accepter le

  7   déploiement des forces de paix, c'est à ce moment-là que les premiers

  8   coups de feu ont été tirés dans mon appartement. Tout ce que j'essaie de

  9   vous expliquer, c'est le climat réel, l'atmosphère qui régnait réellement

 10   à l'époque.

 11   -Mme Uertz-Retzlaff: Monsieur, ce que vous nous dites à l'instant est

 12   absolument contraire à ce que nous lisons dans la lettre que j'ai ici sous

 13   les yeux.

 14   -Milan Babic: Peut-être.

 15   -Mme Uertz-Retzlaff: Comment pouvez-vous expliquer cela?

 16   -Milan Babic: Eh bien, je ne peux pas l'expliquer autrement qu'en disant

 17   que je n'avais l'appui de personne, à part de ceux qui m'étaient

 18   véritablement les plus proches; et je n'ai donc pas eu la force

 19   nécessaire. J'ai déjà dit que ces personnes ont refusé de soutenir l'idée

 20   que je défendais, à savoir la création d'un protectorat des Nations Unies

 21   pour la Krajina.

 22   -L'enquêteur: Monsieur [Babic], sauf le respect que je vous dois, lorsque

 23   vous dites que vous n'aviez pas la force suffisante, le pouvoir suffisant,

 24   etc., vous avez tout de même passé trois jours à la présidence à discuter

 25   du plan Vance devant les personnalités les plus puissantes de Yougoslavie.

Page 13449

  1   Vous ne vous êtes pas présenté comme un homme qui avait peur de dire les

  2   choses ou de faire les choses à l'époque?

  3   -Milan Babic: Je n'avais pas peur d'eux, mais j'avais peur de la fureur,

  4   de la colère de la population dans ses réactions éventuelles face au plan

  5   Vance.

  6   Comment est-ce que j'aurais pu me présenter devant eux en disant que

  7   j'étais celui qui avait protégé et défendu Knin, mais qui n'avait ni

  8   protégé ni défendu la population. Cela aurait provoqué des désirs de

  9   vengeance. Je parle donc de la responsabilité que j'avais vis-à-vis de la

 10   population.

 11   J'ai déjà dit, Madame Hildegarde, ce que je ressentais: c'était une

 12   crainte existentielle par rapport à ma survie". (Fin de traduction.)"

 13   M. le Président (interprétation): En sommes-nous arrivés à la fin de la

 14   diffusion, Monsieur Milosevic?

 15   M. Milosevic (interprétation): Hors micro. (Propos inaudibles.)

 16   (Suite de la diffusion et interprétation.)

 17   "-L'enquêteur: Franchement, s'agissant de cette lettre, nous y voyons des

 18   réponses de votre part qui sont tout à fait contraires à un grand nombre

 19   d'éléments que nous avons notre disposition.

 20   -Milan Babic: Je parle en m'appuyant sur ce que j'ai à l'esprit et dans

 21   le cœur, le plus franchement du monde.

 22   -L'enquêteur: Nous allons maintenant passer à un sujet tout à fait

 23   différent.

 24   -Milan Babic: Devrai-je ajouter quelque chose à ce que j'ai déjà dit?

 25   -L'enquêteur: Non, vous n'avez rien à ajouter, mais je vous parle

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  1   simplement parce que mon sentiment personnel -mais peut-être n'ai-je pas

  2   raison-, mon impression personnelle, c'est que vous avez un peu déformé

  3   certaines de vos réponses.

  4   Et, comme je vous l'ai déjà dit, le problème qui se pose, c'est qu'il faut

  5   que vous vous demandiez à vous-même s'il convient que vous répondiez à une

  6   question ou pas. Et lorsque vous décidez qu'il convient de répondre, il

  7   faut que vous soyez le plus honnête possible et que vous répondiez en vous

  8   fondant sur vos souvenirs et surtout ce dont vous souvenez.

  9   -Milan Babic: C'est précisément ce que je fais au mieux de mes capacités,

 10   mais ce que je vous dis, c'est ce que j'avais à l'esprit, ce que j'avais

 11   dans le cœur et ce que ma bouche a dit." (Fin de la vidéo.)"

 12   M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause à présent.

 13   Lorsque nous rentrerons dans le prétoire, dans 20 minutes, nous

 14   discuterons à huis clos partiel du sort à réserver aux pièces à conviction

 15   de l'article de "Politika", les décisions, etc.

 16   (L'audience, suspendue à 12 heures 30, est reprise à 12 heures 53.)

 17   M. le Président (interprétation): Huis clos partiel pour quelques

 18   questions à traiter.

 19   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 20   M. le Président (interprétation): La cassette doit obtenir une cote et il

 21   faut bien sûr que la transcription de la vidéo soit annexée à la cassette.

 22   J'espère qu'elle sera disponible.

 23   Normalement, je crois que ce sont des cotes de la défense qui sont données

 24   à ce genre de document.

 25   Mme Anoya (interprétation): La prochaine pièce de la défense est la pièce

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  1   D57 dans l'ordre.

  2   M. le Président (interprétation): Très bien.

  3   Madame Uertz-Retzlaff, pouvez-vous nous aider sur le point suivant?

  4   Quand avons-nous une chance d'obtenir la transcription de cette vidéo?

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous pouvons

  6   vous fournir une transcription de la partie diffusée demain, mais, si vous

  7   le souhaitez, vous pouvez obtenir la transcription complète sur cédérom

  8   notamment.

  9   M. le Président (interprétation): Restons-en à l'extrait diffusé pour le

 10   moment, mais si le reste devient disponible plus tard...

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il serait bon, si M. Milosevic

 12   souhaite diffuser d'autres séquences vidéo, qu'il informe les responsables

 13   du prétoire un jour à l'avance en disant à quel moment il s'apprête à

 14   demander la diffusion de ces cassettes, ce qui permettrait à la

 15   transcription d'être immédiatement disponible. Cela faciliterait le

 16   travail de chacun.

 17   M. le Président (interprétation): Très bien.

 18   Autre question: l'ordre dont il a été question tout à l'heure est

 19   l'intercalaire 143, si j'ai bien compris -en tout cas, c'est ce que m'a

 20   dit Mme la Greffière-, et non 142, n'est-ce pas?

 21   (Signe affirmatif de Madame Uertz-Retzlaff.)

 22   Et l'article de "Politika"? Je crois que son versement a été demandé au

 23   dossier, mais peut-être pourriez me rappeler quelle est sa cote?

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): L'article de "Politika" ainsi que les

 25   deux lettres annexées correspondent à l'intercalaire 79 de la pièce 352.

Page 13452

  1   M. le Président (interprétation): Bien. S'il n'y a plus rien à dire au

  2   sujet de la cassette, nous pouvons repasser en audience publique.

  3   (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 54.)

  4   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à nouveau en audience publique.

  5   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, afin de vous aider à

  6   préparer la suite de vos contre-interrogatoires, nous avons décidé de vous

  7   dire de combien de temps vous allez disposer. Vous avez à votre

  8   disposition 20 heures pour le contre-interrogatoire. Vous n'êtes pas, bien

  9   sûr, obligé d'utiliser l'intégralité de ce temps. Et je vous rappelle

 10   qu'une heure et demie a déjà été utilisée ce matin avec la diffusion de la

 11   cassette.

 12   Nous siégeons aujourd'hui jusqu'à 14 heures.

 13   Donc vous pouvez poursuivre le contre-interrogatoire jusqu'à 14 heures

 14   aujourd'hui et je vous rappelle, à vous-même ainsi qu'au témoin, la

 15   nécessité de ménager une pause entre les questions et les réponses pour

 16   rendre le travail des interprètes possible. Vous avez la parole.

 17   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, il me semble que le temps que

 18   vous m'avez octroyé est un peu plus court que celui qui a été utilisé par

 19   le Procureur lors de l'interrogatoire principal.

 20   Par ailleurs, vous insistez sur la nécessité de ménager des pauses, ce qui

 21   fera perdre un peu de temps et je pense, personnellement, qu'il n'est pas

 22   opportun que vous limitiez mon temps.

 23   M. le Président (interprétation): Votre temps n'est pas limité, mais

 24   veuillez procéder; vous avez pas mal de questions à traiter.

 25   M. Milosevic (interprétation): Bien. Je viens donc de diffuser dans ce

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  1   prétoire ce qui n'est qu'à peu près la moitié du grand nombre de séquences

  2   vidéo qui ont été diffusées durant votre interrogatoire principal,

  3   Monsieur, "Croatie 61". J'aurais pu d'ailleurs choisir d'autres extraits.

  4   Nous avons vu sur la séquence qui vient d'être diffusée que la dame qui se

  5   trouve en face de moi y compris vous dit que ce que vous êtes en train de

  6   dire est totalement contraire à ce que vous aviez dit précédemment. Ceci

  7   est-il exact ou pas?

  8   Milan Babic (interprétation): Je ne comprends pas votre question.

  9   Question: Je vous demande si vous avez constaté, il y a quelques instants,

 10   que la dame qui est en face de moi, à savoir la personne qui vous a

 11   interrogé au cours de votre interrogatoire principal y compris, vous dit

 12   que ce que vous êtes en train de dire est totalement contraire aux

 13   éléments dont dispose l'accusation. Je suppose que vous avez vu cela?

 14   Réponse: Pourriez-vous être plus concret, plus précis?

 15   Question: Pour être beaucoup plus concret et beaucoup plus précis, il

 16   faudrait que je demande un huis clos partiel, ce que je ne souhaite pas

 17   faire.

 18   Donc je vous demande en audience publique si vous vous rappelez ce que je

 19   viens de dire qui correspond aux images que nous avons vues il y a

 20   quelques instants.

 21   Réponse: Au cours de ces entretiens, j'ai dit la vérité qui correspondait

 22   au meilleur de mes souvenirs.

 23   Question: Mais avez-vous remarqué que l'enquêteur, que l'on voyait

 24   d'ailleurs sur les dernières images de la séquence diffusée il y a

 25   quelques instant, vous faisait savoir que ce que vous étiez en train de

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  1   dire ne correspondait pas aux éléments dont dispose l'accusation et qu'il

  2   avait l'impression que vous déformiez un peu les choses. C'est bien cela?

  3   -Réponse: Pour autant que je me souvienne, l'enquêteur m'a demandé de ne

  4   parler que de ce que j'avais entendu personnellement ou vu de mes yeux, et

  5   ne m'a pas demandé de dire ce que je pensais dans mon cœur ou ce que je

  6   pensais dans mon esprit.

  7   M. Milosevic (interprétation): Mais dites-moi, compte tenu du fait que la

  8   personne qui vous a interrogé au cours de l'interrogatoire principal tout

  9   comme l'enquêteur que nous voyons dans la séquence vous rappelaient

 10   l'aspect contradictoire de ce que vous disiez par rapport aux éléments

 11   dont dispose l'accusation, comment se fait-il que, depuis cinq jours et

 12   demi, ce que vous avez dit corresponde si bien aux éléments à la

 13   disposition de l'accusation?

 14   M. le Président (interprétation): Ceci n'est pas une question à poser au

 15   témoin. Le témoin a fourni des réponses et c'est à nous qu'il appartient

 16   de juger de la qualité de ses réponses.

 17   M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur May, très bien.

 18   Monsieur le Témoin, vous dites que votre objectif était d'assurer une vie

 19   dans l'harmonie et la tranquillité à la population de Krajina avec les

 20   autres habitants de Croatie dans les frontières de la République de

 21   Croatie. C'étaient, selon ce que vous affirmez, les positions qui étaient

 22   les vôtres, n'est-ce pas?

 23   Milan Babic (interprétation): J'affirme qu'en 1990, il n'y avait qu'une

 24   seule option politique pour la SAO de Krajina et qu'en 1991, cette option

 25   était devenue différente; alors qu'en 1992, l'option disponible était

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  1   redevenue semblable à celle de 1990.

  2   M. Milosevic (interprétation): Mais serait-il exact de dire ou pas que

  3   vous avez effectivement déclaré -chose que nous avons pu voir dans cet

  4   enregistrement vidéo et je crois que vous avez dit la même chose à

  5   l'occasion de l'interrogatoire principal- à savoir que, depuis le début

  6   même, et comme nous avons pu le voir lorsque vous vous êtes interrogé, on

  7   reprend la chose au compte rendu d'audience, à savoir qu'en 1990 déjà,

  8   vous vous étiez efforcé d'assurer une vie harmonieuse dans le contexte ou

  9   au sein de la République de Croatie. C'est vrai ou pas?

 10   Milan Babic (interprétation): En 1990, nous nous efforcions, en notre

 11   qualité de communauté de municipalités, à savoir la SAO de Krajina, de

 12   nous faire attribuer une autonomie politique au sein de la Croatie et cela

 13   dépendait notamment de la position de la Croatie au sein de la

 14   Yougoslavie. Etant donné que la Croatie était en fédération avec la

 15   Yougoslavie, la teneur de cette autonomie politique serait différente;

 16   cela équivaudrait à une autonomie culturelle. Mais maintenant, si elle ne

 17   faisait plus partie de la Yougoslavie, ce serait une autonomie culturelle

 18   et politique dans le contexte de la Croatie. C'était ce qui prévalait

 19   comme option en 1990.

 20   M. le Président (interprétation): (Hors micro.)

 21   M. Milosevic (interprétation): Mais on vous a entendu dire que vous-même,

 22   depuis le début de l'année 1990, vous vous étiez efforcé de résoudre la

 23   question de la vie harmonieuse des uns et des autres au sein de la

 24   République de Croatie. Et pour autant que j'aie pu l'entendre et le voir

 25   sur cet enregistrement vidéo, vos explications disent que ce que vous

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  1   aviez au cœur et à l'esprit -et vous avez même fait les gestes en montrant

  2   les différents emplacements de ces propos- ne se trouvaient pas sur vos

  3   lèvres. Ce n'est pas ce que vous disiez.

  4   Réponse: En 1991, j'ai expliqué dans le détail comment la SAO de la

  5   Krajina avait opté en faveur du fait de rester au sein de la Yougoslavie.

  6   En 1991, j'avais accepté votre conception à vous, à savoir faire en sorte

  7   que la SAO de Krajina et les Serbes avaient le droit de demeurer au sein

  8   de la Yougoslavie.

  9   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, afin de ne pas permettre

 10   l'identification de ce témoin, je ne me propose pas de dire de quoi il

 11   s'était agi concrètement, mais, à titre interne, je puis dire qu'il s'agit

 12   là d'un article du journal "Politika". Et je voudrais demander au témoin

 13   s'il a une explication pour nous dire comment cet article a été publié. Je

 14   précise que c'est l'article que vous avez annoté comme étant le n°63.

 15   Il découlerait donc de cela une assertion aux termes de laquelle votre

 16   déposition ne serait pas votre déposition, mais qu'elle aurait été servie

 17   comme étant la vôtre. C'est bien l'explication que vous avez donnée?

 18   Réponse: A quel article vous référez-vous, concrètement parlant?

 19   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, vous avez dit que c'était celui

 20   auquel vous attribuiez un numéro, le n°63.

 21   Milan Babic (interprétation): Est-ce que le service concerné peut me

 22   fournir le document en question afin que je sache exactement duquel il

 23   s'agit?

 24   (Intervention de l'huissière.)

 25   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le n°63, c'est un

Page 13457

  1   décret qui porte sur les insignes. Est-ce à cela que vous pensiez?

  2   M. Milosevic (interprétation): J'avais à l'esprit ce qu'il disait à

  3   l'occasion de son interrogatoire face à l'enquêteur et au représentant de

  4   la partie adverse; chose qu'il a mentionnée lui-même et qu'eux ont

  5   mentionné comme étant le n°63.

  6   M. le Président (interprétation): Un instant. Je ne pense pas que ce soit

  7   le 63, je pense que c'est le 79. Donnez ce document portant

  8   la cote 79 au témoin, mais ne le placez pas sur le rétroprojecteur.

  9   (Intervention de l'huissière.)

 10   M. le Président (interprétation): Oui, le témoin dispose du texte.

 11   Quelle était votre question, Monsieur Milosevic?

 12   M. Milosevic (interprétation): Je ne comprends pas comment quelqu'un

 13   d'autre pouvait-il signer si lui n'avait pas signé. Je ne comprends pas

 14  l'explication qu'il a donnée.

 15   M. le Président : Je pense qu'il est préférable de passer à huis clos

 16   partiel pour aborder cette question.

 17  (Huis clos partiel à 13 heures 09)

 18  [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 19   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 20   M. Kwon (interprétation): Je pense que M. Milosevic pense à l'intercalaire

 21   130. Est-ce bien cela, Madame Uertz-Retzlaff?

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense qu'il renvoie à

 23   l'intercalaire 143: c'est un décret.

 24   M. le Président (interprétation): Moi, j'ai l'article de "Politika" et je

 25   pense que c'est de cela qu'on parle à l'intercalaire 79.

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  1   Monsieur Milosevic, est-ce que vous pourriez nous donner de nouveau votre

  2   référence? Nous veillerons à trouver ce texte pour nous assurer que nous

  3   avons tous le même document?

  4   M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)

  5   Nous sommes à huis clos partiel, n'est-ce pas?

  6   M. le Président (interprétation): Oui, nous sommes à huis clos partiel. Il

  7   nous faut savoir quel est ce document précisément.

  8   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, ce qui m'intéressait, c'était de

  9   voir le document présenté à l'occasion de l'exposé auquel nous avons

 10   assisté au niveau de la bande vidéo, où le témoin dit que "si lui n'avait

 11   pas signé, quelqu'un d'autre l'aurait fait"; et l'enquêteur a désigné cela

 12   comme étant la pièce 63. Moi, j'avais souhaité voir le document en

 13   question.

 14   M. le Président (interprétation): D'abord, ce que l'enquêteur avait dit,

 15   c'était une référence à d'autres documents. S'agissant du document dont

 16   semble parler l'accusation, c'était l'intercalaire 79: c'était un article

 17   de "Politika" qui faisait référence à une réponse fournie par le témoin à

 18   M. Milosevic, en date du 12 janvier. Il se peut que l'original soit

 19   ailleurs.

 20   M. Kwon (interprétation): Si je peux aider les parties, je dirai ceci: le

 21   document auquel M. Milosevic fait référence est un document qui donne

 22   l'ordre, l'établissement de la 3e Zone opérationnelle, qui est signé de ce

 23   témoin. Je me souviens que ce témoin avait dit que "s'il ne l'avait pas

 24   signé, ce document, c'est quelqu'un d'autre qui l'aurait signé". Est-ce

 25   bien exact?

Page 13459

  1   Milan Babic (interprétation): Monsieur le Juge, pour autant que je m'en

  2   souvienne, tous les documents relatifs à la mise en place de la zone

  3   opérationnelle ont été signés par mes soins. J'avais précisé qu'il

  4   s'agissait d'une conception aux termes de laquelle il s'agissait de mettre

  5   en place une Défense territoriale de la SAO de Krajina.

  6   M. Milosevic (interprétation): Etant donné que nous sommes à huis clos

  7   partiel, je puis poser la question. Et je tiens à dire qu'une fois de

  8   plus, je ne comprends pas.

  9   Est-ce que vous avez, en qualité de Président, été en même temps

 10   commandant de la Défense territoriale de la SAO de Krajina, oui ou non?

 11   Dites-moi juste oui ou non.

 12   Réponse: Partant de la décision d'application de la loi de la Republika

 13   Srpska, le Président de la SAO de Krajina était censé être un commandant…

 14   le Premier ministre de la SAO de Krajina devait être le commandant civil,

 15   alors que le commandant militaire était censé être le commandant de ce

 16   grand état-major de la SAO de Krajina.

 17   Question: Est-ce que vous étiez commandant de la TO de la SAO de Krajina?

 18   Et en cette qualité-là, avez-vous signé, oui ou non, tous les documents de

 19   celle-ci?

 20   Réponse: Oui. Juridiquement, oui. Sur le territoire de la République serbe

 21   de SAO de Krajina, le Premier ministre de la Krajina était censé exercer

 22   ces fonctions comme prescrit par la loi.

 23   Question: Mais est-ce que vous avez exercé ces fonctions, oui ou non?

 24   Réponse: Dans la partie normative, en effet. Donc il s'agissait d'actes

 25   juridiques formels pour ce qui est de la constitution de cette région.

Page 13460

  1   Question: Mais vous n'avez pas eu à faire réellement, mais c'est juste à

  2   titre juridique formel que vous avez exercé ces fonctions?

  3   Réponse: J'avais été censé avoir quelque chose à voir avec cette fonction,

  4   mais vous avez rendu la chose impossible.

  5   Question: Fort bien. Ce que je ne comprends pas alors, étant donné que

  6   nous en parlons de cette loi relative à la Défense territoriale: je crois

  7   que vous avez expliqué ici que la loi portant défense a été appliqué sur

  8   le territoire de la Krajina, et ce, en faisant en sorte d'obtenir le texte

  9   de cette loi par fax en provenance de mon cabinet.

 10   Réponse: Nous avons appliqué cette loi et sommes partis de la loi

 11   afférente à l'application des actes juridiques de Serbie, là où le

 12   gouvernement de la SAO de Krajina a décidé de faire en sorte que cette loi

 13   de la Serbie soit appliquée sur son territoire. Et j'ai fait en sorte de

 14   me procurer le texte de loi en provenance de votre cabinet; je l'ai déjà

 15   expliqué.

 16   Question: Et le Juge Kwon vous a demandé de savoir si vous aviez eu à

 17   votre disposition des modalités autres de vous procurer ces textes de

 18   lois. Et vous avez, pour votre part, expliqué que le texte de la loi se

 19   trouvait chez moi pour signature et, pour faire vite, vous aviez demandé

 20   que la chose vous soit envoyée par fax, aux fins de ne pas attendre la

 21   publication du Journal officiel. Est-ce que j'ai bien compris?

 22   Réponse: Oui, c'est exact. Et j'ajouterai que vous, vous deviez être au

 23   courant de celui-ci.

 24   Question: Donc, bien. Mais si le texte était pour signature chez moi,

 25   c'est qu'il n'avait pas encore été publié. Vous l'avez obtenu de mon

Page 13461

  1   cabinet par fax.

  2   Réponse: J'ai obtenu une information disant que l'Assemblée, le Parlement

  3   avait adopté cette loi et que vous l'aviez signée, et que son texte se

  4   trouvait chez vous.

  5   Question: Alors, constatons plusieurs faits, si vous le voulez bien. Cette

  6   décision qui a été adoptée par le Gouvernement de la Krajina serbe, pour

  7   ce qui est de l'application de la loi afférente à la défense de la

  8   République de Serbie pour ce qui est du territoire de la SAO de Krajina

  9   -et là je me réfère à un papier, à un document qui porte une cote qui est

 10   02172185-, cette décision a été adoptée en date du 1er août 1991. Là, la

 11   chose n'est pas contestée; c'est marqué dessus.

 12   Réponse: Je n'ai pas compris.

 13   Question: La décision afférente à l'application de la loi de Serbie sur le

 14   territoire de la SAO de Krajina a été adoptée le 1er août 1991. La date

 15   est marquée dessus.

 16   Réponse: Oui.

 17   M. Milosevic (interprétation): Et votre lettre, à savoir votre décision

 18   pour ce qui est de l'application de la loi portant défense de la

 19   République de Serbie, sur le territoire de la SAO de Krajina, a été

 20   adoptée le 2 août, chose qui a suivi la décision prise en date du 1er

 21   août. Et dans ce document-là, il est dit: "…portant de la loi afférente à

 22   l'application des actes juridiques et des textes de loi sur le territoire

 23   de la République de Serbie, sur le territoire de la Krajina et ainsi de

 24   suite." Donc là, il s'agit de faits incontestés: 1er août et 2 août.

 25   Je vais vous prier maintenant de vous pencher sur votre pièce à

Page 13462

  1   conviction. Cette pièce commence à la page 02162149, il s'agit là d'une

  2   copie de la gazette officielle, à savoir le "Journal officiel" de la

  3   République de Serbie.

  4   M. le Président (interprétation): Nous allons avoir la cote.

  5   M. Kwon (interprétation): C'est l'intercalaire 24.

  6   M. le Président (interprétation): Oui, la pièce 352?

  7   M. Kwon (interprétation): Effectivement, la pièce 352.

  8   (Intervention de l'huissière.)

  9   M. Kwon (interprétation): Pouvez-vous apporter confirmation de

 10   l'exactitude de la cote?

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est l'intercalaire 23 de la pièce

 12   352. C'est le "Journal officiel": la décision du 1er août 1991.

 13   M. Kwon (interprétation): D'après moi, c'est l'intercalaire 24.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En fait, il y avait deux documents

 15   qui étaient repris ensemble.

 16   (Intervention de l'huissière.)

 17   M. Kwon (interprétation): Monsieur Milosevic, c'est la raison pour

 18   laquelle la Chambre de première instance recommande que vous disposiez

 19   d'un associé dans le prétoire, pour que vous puissiez plus facilement

 20   mener votre contre-interrogatoire. Il faut, pour ce faire, que vous

 21   présentiez à un témoin les documents exacts. Réfléchissez davantage à la

 22   question.

 23   M. Milosevic (interprétation): Monsieur Kwon, je pense qu'il suffit, pour

 24   ce qui est de la reconnaissance d'un document, de citer le numéro de votre

 25   page, le numéro qui est imprimé par vos soins. Donc il n'est pas difficile

Page 13463

  1   de retrouver cette page-là. Je crois que cela vous est beaucoup plus

  2   facile que pour moi-même, avec tous ces papiers que j'ai ici.

  3   Donc pour ne pas nous attarder davantage et pour ne pas perdre notre temps

  4   de façon inutile…

  5   M. le Président (interprétation): Avançons. Est-ce que vous vouliez la

  6   décision ou le "Journal officiel"? C'est le "Journal officiel" que vous

  7   vouliez faire examiner par le témoin ou plutôt la décision?

  8   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, le témoin peut l'examiner. Vous

  9   pouvez en faire de même. Vous n'avez pas besoin de vous faire traduire la

 10   date quand même!

 11   M. le Président (interprétation): Eh bien, nous allons voir ce que cela

 12   donne; nous allons voir si nous avons le bon document.

 13   M. Milosevic (interprétation): S'il vous plaît! Pour ne pas perdre la

 14   finalité de la chose, je tiens à dire que nous avons constaté que cette

 15   loi de la SAO de la Krajina a été adoptée en date du 1er août. Maintenant,

 16   j'attire pour ma part votre attention sur le fait que cette gazette

 17   officielle, ou plutôt ce "Journal officiel" de la République de Serbie a

 18   été publié le 27 juillet, donc cinq jours avant. Et au début, s'agissant

 19   du décret proclamant la mise en vigueur de la loi, il est constaté que

 20   j'ai signé ce décret le 18 juillet. Donc, si j'ai signé ce décret le 18

 21   juillet et que la loi a été imprimée le 27 juillet, est-il suffisamment

 22   clair d'indiquer que le témoin n'avait nullement besoin de faire en sorte

 23   que ce journal qui est distribué, qui est reçu par tout cabinet d'avocat

 24   dans le pays, lui soit communiqué en provenance de mon cabinet, par fax.

 25   Milan Babic (interprétation): Je puis expliquer.

Page 13464

  1   M. le Président (interprétation): Oui, s'il vous plaît.

  2   Milan Babic (interprétation): D'abord, ce document, ce "Journal officiel"

  3   où on a publié la loi portant défense de la République de Serbie, je me

  4   suis procuré cela l'an passé et je l'ai communiqué aux représentants de

  5   l'accusation, du Bureau du Procureur pour lui montrer à quoi avait trait

  6   cette décision du 1er août. A l'occasion des interrogatoires et des

  7   interviews devant ce Tribunal, j'ai déjà précisé que le texte de loi

  8   m'avait été communiqué par fax, le texte de loi, le texte de la loi publié

  9   au niveau du "Journal officiel". Et je voulais fournir le Journal officiel

 10   pour montrer quel était le texte que nous avions appliqué dans la SAO de

 11   Krajina à partir du 1er août 1991.

 12   Maintenant, de là à savoir si le "Journal officiel" avait été publié ou

 13   pas, je ne le savais pas. Je savais que ce texte de loi était pour

 14   signature chez vous, qu'il se trouvait au cabinet et j'ai demandé au

 15   cabinet de m'envoyer ce texte par fax, comme je l'ai déjà dit.

 16   M. Milosevic (interprétation): En répondant à l'une des questions du Juge

 17   Kwon, celle de savoir si vous aviez d'autres modalités pour vous procurer

 18   ce texte de loi, vous avez dit que cela se trouvait pour signature chez

 19   moi et vous avez pu voir que je l'ai signé le 18 juillet. Et le 27

 20   juillet, cela se trouvait dans les points de vente, cinq jours avant que

 21   vous n'adoptiez votre propre loi. Chose qui est tout à fait incontestable.

 22   Donc vous avez mentionné tous ces faits pour souligner que des

 23   instructions étaient venues de moi-même pour ce qui est de l'application

 24   de la loi en question.

 25   Mais il est chose notoire que vous n'avez pas eu la possibilité d'adopter

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  1   des lois à vous et que vous avez systématiquement adopté des lois de

  2   Serbie. C'est vrai ou pas?

  3   Réponse: C'est exact. Mais, s'agissant de la façon dont j'ai obtenu cette

  4   loi, il est exact aussi qu'on m'avait dit que cette loi se trouvait dans

  5   votre cabinet. D'autre part, je voulais que vous soyez informé de la

  6   chose.

  7   Question: Bien. Mais est-ce que c'est moi qui vous ai prévenu, dès le mois

  8   de janvier 1992, du fait qu'il ne fallait pas faire en sorte que vous ayez

  9   l'air de convenir de vos décisions et de toute chose que vous faite avec

 10   la direction de la Serbie? Et n'ai-je pas informé les citoyens de la

 11   Krajina qu'ils devaient savoir que cela n'était pas vrai?

 12   Réponse: Vous aviez écrit une chose analogue dans votre lettre. Mais, pour

 13   ce qui est de la loi, votre recommandation avait été la suivante: à savoir

 14   qu'il valait mieux copier les lois de Serbie et les publier comme étant

 15   les nôtres, plutôt que de les proclamer comme étant des lois de Serbie

 16   mises en vigueur sur le territoire de la SAO de Krajina.

 17   Question: Mais est-ce que cela signifie alors que notre position avait été

 18   qu'il ne fallait pas que vous appliquiez des lois de Serbie sur le

 19   territoire de la Krajina?

 20   Réponse: Non, mais de les proclamer comme nous appartenant, comme étant

 21   les nôtres, chose que nous avons essentiellement faite par la suite.

 22   Question: Mais est-il exact de dire que, pour les choses que vous n'avez

 23   pas eu le temps de faire, pour les lois que vous n'avez pas eu le temps

 24   d'adopter vous-même, vous avez copié des lois de Serbie? Vrai ou faux?

 25   Réponse: La décision, pour ce qui est de l'application des textes

Page 13466

  1   juridiques de la Serbie sur le territoire de la SAO de la Krajina, a été

  2   adoptée le 29 mai 1991; cela s'est fait parce que la Krajina avait

  3   supprimé la législation de la Croatie, exception faite des textes

  4   législatifs qui n'étaient pas contraires à la réglementation de la Krajina

  5   et aux textes législatifs de la RSFY. Et c'est la raison pour laquelle

  6   nous avions eu besoin de compléter nos textes de loi. Nous en avons

  7   discuté, je vous en ai informé au mois de mai et vous avez dit qu'il

  8   valait mieux que nous copiions les lois de Serbie et les publiions en tant

  9   que nôtres plutôt que de les proclamer telles quelles, pour montrer qu'il

 10   s'agit bien des lois de Serbie.

 11   Question: Cela n'a rien à voir avec la réalité, mais peu importe. Je vous

 12   ai demandé de savoir si, oui ou non, j'avais précisément été la personne

 13   qui avait prévenu les gens de la Krajina en disant que vous ne disiez pas

 14   la vérité lorsque vous affirmiez que vous vous concertiez avec la

 15   direction de la Serbie?

 16   Réponse: J'ai déjà dit déjà parlé devant ce Tribunal ou j'ai plutôt parlé

 17   devant ce Tribunal des questions sur lesquelles nous nous opposions. Je

 18   leur ai parlé des aspects sur lesquels vous aviez insisté et des aspects

 19   sur lesquels j'avais insisté moi-même; et je pense que cela a constitué

 20   l'une des parties les plus grandes de mon témoignage devant ce Tribunal.

 21   Question: Bien. Mais dites-moi, je vous prie, découle-t-il de votre

 22   témoignage que c'est moi qui décidais de toute chose? C'est bien cela?

 23   Réponse: Mais quelle est la question?

 24   Question: Vous avez affirmé dans votre témoignage que c'est moi qui avais

 25   décidé de toute chose.

Page 13467

  1   Réponse: J'ai témoigné en disant que vous vous trouviez au sommet des

  2   structures de commandement de la JNA et des structures parallèles au

  3   niveau de la Krajina. J'en ai témoigné, j'ai témoigné du fait selon lequel

  4   votre objectif avait été celui de faire vivre tous les Serbes dans un même

  5   Etat. Vous aviez dit que la JNA allait nous protéger. Vous avez dit que

  6   nous avions le droit de rester en Yougoslavie.

  7   Question: Je ne vous ai pas posé de question de ce genre. J'ai dit qu'il

  8   découlait de votre témoignage que tous m'obéissaient, sauf vous. C'est

  9   bien ce que vous avez dit?

 10   Réponse: J'ai parlé de choses, de périodes, de faits où nous vous

 11   obéissions, et de choses où nous ne vous obéissions pas.

 12   Question: Donc il découlerait que vous avez obéi, mais que notre conflit

 13   avait été, je dirais, minime parce que j'avais insisté, dites-vous, "qu'il

 14   fallait adopter la solution pacifique pour ce qui est de l'adoption du

 15   plan de Vance"; et vous avez insisté pour ce qui est du rejet de ce plan. 

 16   Réponse: Moi, je vous ai obéi sur bien des questions et bien des aspects;

 17   j'en ai déjà parlé ici.

 18   Question: Bien. On y viendra à ces questions-là tout à l'heure ou plus

 19   tard.

 20   N'est-il pas vrai que je vous avais averti du fait que le rejet de ces

 21   propositions remettait en cause les intérêts les plus élémentaires du

 22   peuple serbe, n'est-ce pas?

 23   Réponse: C'est de cette façon que vous vous étiez exprimé lorsque vous

 24   avez écrit ou rédigé cette lettre à l'intention du public et de moi-même.

 25   Question: Ne vous ai-je pas prévenu du fait que rejeter ce plan signifiait

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  1   l'interruption de la perte des victimes, l'interruption du fil des

  2   événements où il y aurait beaucoup de victimes parmi la population civile?

  3   Réponse: Je crois que vous avez parlé de la chose.

  4   Question: Ne vous avais-je pas dit que l'initiative des Nations Unies

  5   avait pour objectif la préservation de la paix?

  6   Réponse: Je pense que cela figure également dans votre lettre.

  7   Question: Ne vous ai-je pas dit que votre position négative était un acte

  8   des plus irresponsables? Je crois que c'est dit dans votre lettre

  9   également.

 10   Est-ce que je vous ai dit que les gens ne devraient pas subir de sacrifice

 11   du fait de la dissimulation des hommes politiques. Je crois que c'est dit

 12   dans votre lettre également.

 13   Mais dites-moi, s'il vous plaît, vers la fin de cet enregistrement, vous

 14   donnez une explication qui coïncide avec la dernière partie de votre

 15   interrogatoire principal. Vous y dites que vous, vous faisiez ce que vous

 16   n'aviez pas eu l'intention du fait des craintes que vous aviez pour votre

 17   existence.

 18   Mais je vais vous rappeler: vers la fin de l'enregistrement que nous avons

 19   tous vu, vous dites qu'il y avait tout autour de vous une atmosphère

 20   terrible, étouffante, que vos associés avaient d'autres avis, que les gens

 21   étaient d'un avis différent et que vous deviez dire ce que vous aviez dit

 22   parce que vous aviez des craintes pour votre propre vie, n'est-ce pas?

 23   Réponse: Nous craignions d'être laissés sans protection. Nous avions peur

 24   que la Croatie se venge sur nous pour la guerre que vous vous aviez menée…

 25   Que vous, vous alliez sortir de la guerre, mais que c'est nous qui allions

Page 13469

  1   payer ce prix.

  2   Question: Fort bien. Nous y reviendrons plus tard. Mais, pouvons-nous nous

  3   mettre d'accord sur le fait que vous avez expliqué pourquoi vous avez dit

  4   ce que vous n'aviez pas à l'esprit, à savoir que ce qui vous poussait,

  5   votre motif, c'était la peur.

  6   Réponse: Je ne comprends pas concrètement votre question.

  7   Question: Si j'ai bien saisi l'explication que vous avez fournie pour

  8   expliquer que vous aviez dit ce que vous ne vouliez pas dire, vous avez

  9   dit que vous étiez poussé par la peur que vous aviez s'agissant de votre

 10   propre vie?

 11   Réponse: J'en ai parlé de façon précise. Je ne pense pas comprendre

 12   pourquoi vous faites une déclaration aussi générale.

 13   Question: Mais l'enquêteur vous a demandé pourquoi vous aviez dit ce que

 14   vous n'aviez pas l'intention de dire. Vous avez dit que vous étiez motivé

 15   par la crainte s'agissant de votre vie personnelle.

 16   Réponse: Je le répète, l'enquêteur m'a dit de ne parler que des faits et

 17   pas de mes émotions, de mes sentiments.

 18   Question: Fort bien. Nous avons entendu ce que vous avez dit. Alors

 19   répondez à ma question: si vous avez dit ce que vous n'aviez pas

 20   l'intention de dire et si la raison de la façon dont vous avez agi, la

 21   raison en était la peur, aujourd'hui, est-ce que vos propos sont motivés

 22   aussi par le même motif, à savoir la peur?

 23   Réponse: J'ai prêté serment devant ce Tribunal de dire la vérité, toute la

 24   vérité et rien que la vérité. J'affirme qu'il n'y a qu'une seule et même

 25   vérité et je suis toujours prêt à dire toute la vérité s'agissant des

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  1   choses dont je dois témoigner devant ce Tribunal.

  2   Et pas seulement à propos de ce qui était en partie des réactions

  3   politiques ou des avis biaisés; je suis prêt à tout dire ici, toute la

  4   vérité à propos des faits, des opinions qu'il y avait, des sentiments,

  5   même de la peur.

  6   Question: Fort bien. Et à en juger d'après vos propos, dans une tentative

  7   visant à faire accepter le plan Vance, j'étais en faveur ou j'ai poussé à

  8   la guerre alors que vous, en rejetant ce plan Vance, vous étiez en faveur

  9   de la paix. Est-ce que cela que vous voulez expliquer?

 10   Réponse: Lorsque je m'entretenais avec les enquêteurs, c'était de façon

 11   rétroactive. Je parlais des événements qui s'étaient déroulés auparavant.

 12   Vous, vous avez induit en erreur la population de Krajina, la communauté

 13   internationale, disant que vous vouliez la paix. Vous avez en fait imposé

 14   le plan Vance à la population de Krajina. Vous l'avez adopté. Vous avez

 15   accepté ce plan et vous l'avez imposé à la population de Krajina, mais en

 16   fait vous l'avez violé et vous n'avez pas respecté ce plan.

 17   M. Milosevic (interprétation): Nous reviendrons à cela. Je pense, Monsieur

 18   May, qu'il n'est plus nécessaire de poursuivre à huis clos partiel.

 19   M. le Président (interprétation): Effectivement. Passons en audience

 20   publique.

 21   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 36.)

 22   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 23   M. Milosevic (interprétation): Sommes-nous d'accord, Monsieur May? Je

 24   pense qu'il faudrait tout du moins essayer de travailler le plus possible

 25   en audience publique.

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  1   Sommes-nous d'accord pour dire qu'il faut déduire de vos propos que vous

  2   avez vraiment aimé le rôle politique que vous jouiez? Vous avez dit que

  3   vous pouviez survivre politiquement, uniquement si vous disiez ce qu'on

  4   attendait de vous autour de vous, n'est-ce pas?

  5   Milan Babic (interprétation): J'ai aimé ce rôle politique qui était le

  6   mien à certains égards. Il me fallait respecter l'opinion publique dans le

  7   cadre de mes actions politiques.

  8   Question: Donc vous vous étiez actif parce que vous trouviez ce rôle

  9   politique attrayant et vous avez fait des choses avec lesquelles vous

 10   n'étiez pas d'accord du fait que vous étiez attiré par ce rôle politique?

 11   Réponse: Pas du tout. Ce fut de temps à autre ma motivation.

 12   Question: Oui ou non?

 13   Réponse: En règle générale, non, mais cependant, ce motif est intervenu de

 14   temps à autre et pour des raisons particulières.

 15   Question: Est-ce que cela veut dire que vous, vous avez joué ce rôle

 16   politique uniquement parce que cela signifiait un certain pouvoir. Quels

 17   seraient les autres motifs qui vous auraient poussé à faire des choses

 18   avec lesquelles vous n'étiez pas d'accord?

 19   Réponse: Non. J'ai joué ce rôle politique parce que j'étais convaincu que

 20   ceci pouvait contribuer à un meilleur avenir pour la population, pour le

 21   bien public, pour le bien-être général.

 22   Question: Donc c'était dans l'intérêt du public, pour le bien général et

 23   public. Est-ce que c'était pour cela que vous vous prononciez dans un sens

 24   contraire à votre avis, avis que vous présentez ici?

 25   Réponse: Je n'ai pas agi, je n'ai pas parlé de façon contraire à mes

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  1   convictions, mais plutôt en conformité avec la pratique politique: pouvoir

  2   traduire dans la réalité et de quelle façon traduire dans la réalité ses

  3   convictions politiques.

  4   Question: D'après ce que j'ai pu juger et les explications que vous avez

  5   fournies, vous dites qu'il se peut que vous ayez mal saisi la distinction

  6   entre les choses, qu'il y ait eu une certaine confusion, que vous avez

  7   peut-être oublié certaines choses, mais, de toute façon, dans cette

  8   dernière séquence, vous vous excusez même du fait d'une telle possibilité?

  9   Réponse: Dans les auditions que j'ai eues, j'ai dit ce que j'avais à dire

 10   et ce dont je me souvenais. Mais, vers la fin de cette audition, j'ai dit

 11   que j'avais des choses à ajouter que je n'avais pas encore dites.

 12   Question: Bien, bien. Mais, dites-moi, qu'est-ce qui vous a poussé à agir

 13   comme vous l'avez fait? Est-ce que vous avez été poussé par ce que vous

 14   avez appelé ce "pragmatisme politique"? Est-ce que vous vouliez, parmi les

 15   citoyens de la Krajina, donner l'impression que vous coordonniez vos avis

 16   avec les dirigeants de la Serbie lorsqu'il s'agissait de vos décisions et

 17   des positions que vous avez prises?

 18   Réponse: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

 19   Question: Eh bien, partons du principe le fait que j'ai expliqué que ce

 20   n'était pas le cas aux citoyens de la Krajina. Bon, je n'ai pas fait ça

 21   pour rien. Ou est-ce que j'avais un motif quelconque?

 22   Réponse: Vous avez cherché, vous, à tromper la population de la Krajina.

 23   Vous avez essayé de jouer de leur destin.

 24   Question: Vous voulez dire que je jouais avec les citoyens de la Krajina?

 25   Pourquoi?

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  1   Réponse: Pour réaliser vos plans qui étaient maximalistes en 1991, puis

  2   vous les avez revus à la baisse; et dans ce cadre-là, vous avez manipulé

  3   l'opinion publique et les gens de la Krajina aussi.

  4   Question: C'est peut-être une projection de ce que vous, vous faisiez

  5   précisément avec l'opinion publique en Krajina pendant toute cette

  6   période. Surtout lorsqu'on replace ceci dans le contexte des explications

  7   que vous fournissez aujourd'hui, lorsque vous parliez de vos intentions.

  8   Dès 1990, vous disiez que vous vouliez résoudre tous les problèmes dans le

  9   cadre de la République de Croatie, vrai ou faux?

 10   Réponse: En 1991, nous avons accepté vos concepts pour la résolution de la

 11   crise sur le territoire de la Yougoslavie qui était que tous les Serbes

 12   restent dans un seul et même Etat.

 13   Question: Monsieur le Milan Babic, nous allons arriver à cela en temps

 14   utile. Mais, puisque vous en parlez, je suppose que vous savez qu'avec

 15   l'existence de la Yougoslavie, en fait depuis 1978, cette Yougoslavie

 16   exprimait l'intérêt de tous les Slaves du Sud. Et vous savez que les

 17   Serbes vivaient en fait dans un seul et même Etat, pas en 1991 ni en 1992,

 18   mais depuis 1918, en d'autres termes depuis la fin de la Première Guerre

 19   mondiale. Est-ce que vous êtes conscient de cela?

 20   Réponse: Pourriez-vous reprendre la question?

 21   Question: Est-ce que vous savez que tous les Serbes vivaient dans un seul

 22   et même Etat depuis la fin de la Première Guerre mondiale, en 1918?

 23   Réponse: Je suis conscient des faits historiques. Je sais qu'en 1918, un

 24   Etat a été constitué avec les Serbes, les Croates et les Slovènes, de

 25   façon à ce que la Serbie et le Monténégro soient unis et que l'Etat

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  1   provisoire des Serbes, des Slovènes et des Croates a été ensuite appelé

  2   "Royaume de Yougoslavie". En 1939, avec le Royaume de Yougoslavie, la

  3   Banovina de Croatie a été établie et, par les décisions du Mouvement de

  4   libération national, du Parti communiste en 1945, la fédération a été

  5   établie. C'était la Fédération des Républiques de Yougoslavie.

  6   Question: Est-ce que vous vous souvenez que, même dans la déclaration que

  7   vous avez rédigée -je ne sais plus comment s'appelait ce document portant

  8   sur la réunification de la Republika Srpska et de la Republika Srpska-

  9   Krajina, c'est précisément dans ce document que vous relatez les causes

 10   historiques de cette vie dans un seul et même Etat. Ce qui nous renvoie à

 11   1918, et non pas à 1990 ou 1991. Est-ce que ce ne sont pas là des faits

 12   historiques irréfutables?

 13   Réponse: Ce concept que vous preniez et que nous avons accepté en 1990 et

 14   1991, pendant la désintégration de la Yougoslavie, c'est le concept selon

 15   lequel les gens de Yougoslavie avaient le droit à l'autodétermination

 16   jusqu'à la sécession. Et vous avez préparé une loi selon ces idées.

 17   M. Milosevic (interprétation): Vous avez fait référence à M.…

 18   M. Muller (interprétation): Oui, excusez-moi.

 19   M. Milosevic (interprétation): J'ai failli prononcer le nom, mais je ne

 20   l'ai pas fait intentionnellement.

 21   M. le Président (interprétation): Poursuivez. Oui, Monsieur Muller?

 22   M. Muller (interprétation): Est-ce que je peux demander maintenant une

 23   brève pause? J'aimerais avoir une brève conversation avec mon client.

 24   M. le Président (interprétation): Nous sommes sur le point de lever

 25   l'audience, de toute façon. Voyons quelle était la question. Nous allons

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  1   passer à huis clos partiel, si nous n'y sommes pas encore.

  2   M. Muller (interprétation): Nous ne sommes pas à huis clos partiel.

  3   (Audience à huis clos partiel à 13 heures 45)

  4   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

  5   Mme Anoya : Nous y sommes.

  6  M. le Président (interprétation): Nous sommes désormais à huis clos partiel.

  7   Maître Muller, est-ce que vous vouliez soulever une question auprès des

  8   Juges de la Chambre?

  9   M. Muller (interprétation): Je ne voulais pas en parler avec vous, mais

 10   avec mon client.

 11   M. le Président (interprétation): Pourquoi ne pas aller parler directement

 12   avec votre client, puisque nous n'avons plus que cinq minutes d'audience?

 13   M. Muller (interprétation): Je le voudrais, mais je voudrais discuter avec

 14   mon client de quelque chose de tout à fait privé, qui n'est pas à discuter

 15   avec qui que ce soit dans ce prétoire ni avec l'opinion publique. Deux

 16   minutes suffiraient.

 17   M. le Président (interprétation): Mais vous savez, nous sommes sur le

 18   point de terminer l'audience. Nous ne voulons pas perdre davantage de

 19   temps. Est-ce que vous ne pouvez pas aller près de votre client et lui

 20   dire ce que vous avez à lui dire?

 21   M. Muller (interprétation): Mais vous savez, moi, je ne parle pas le

 22   serbe, donc c'est un peu difficile.

 23   Permettez-moi de faire une suggestion.

 24   M. le Président (interprétation): Oui.

 25   M. Muller (interprétation): Si mon client préfère poursuivre jusqu'à la

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  1   fin de l'audience d'aujourd'hui, je serai d'accord, bien entendu.

  2   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur le Milan Babic, est-ce

  3   que vous êtes prêt à poursuivre pendant encore dix minutes disons?

  4   (Le Milan Babic fait un signe affirmatif.)

  5   Milan Babic (interprétation): Oui.

  6   M. Muller (interprétation): Je ne demande plus d'interruption. Je vous

  7   remercie, Monsieur le Président.

  8   M. le Président (interprétation): Nous sommes toujours à huis clos

  9   partiel. Monsieur Milosevic, soyez prudent.

 10   M. Milosevic (interprétation): Puisque nous sommes à huis clos partiel,

 11   Monsieur May, je vais poser quelques questions supplémentaires. Je suis

 12   sûr que, pour ces questions, vous me demanderiez de passer à huis clos

 13   partiel de toute façon.

 14   J'aimerais vous rappeler ceci: manifestement, vous vous êtes présenté de

 15   façon fausse, erronée; vous vous êtes caché derrière mon nom pendant

 16   toutes ces années. Moi, je n'affirme pas ça, j'affirme ce que j'ai affirmé

 17   à l'époque. Ces conversations interceptées, notamment celles qu'il y a eu

 18   entre moi et Radovan Karadzic, qu'on trouve à la page 02129072, en date du

 19   1er novembre 1991. Là, il a été noté…

 20   M. le Président (interprétation): Oui.

 21   M. Milosevic (interprétation): …il a été noté que j'aurais dit à M.

 22   Radovan Karadzic, à votre propos, ceci: "Ce que Babic a fait est

 23   déshonorant, il est honteux de voir ce qu'il a dit, à savoir que le

 24   gouvernement serbe aurait essayé de le convaincre".

 25   Est-il exact de dire que tous les propos que vous avez tenus ici, vous les

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  1   avez tenus pour essayer de vous exonérer de la responsabilité que vous

  2   devez endosser pour la gravité du destin des Serbes, surtout sur le

  3   territoire de la Krajina?

  4   Milan Babic (interprétation): Ce que j'ai dit précisément, lors de la

  5   conférence du 31 octobre 1991, c'est ceci: "Les échelons supérieurs du

  6   pouvoir ont fait pression sur nous pour que nous acceptions les textes de

  7   La Haye". Je n'ai pas parlé de vous ni du gouvernement. Un des

  8   journalistes m'a demandé quels étaient ces échelons, ces niveaux

  9   supérieurs de la hiérarchie. Lorsqu'on sait qu'il n'y a qu'un sommet, eh

 10   bien, je me suis tu, je n'ai bien sûr pas mentionné votre nom.

 11   S'agissant de ma responsabilité, je suis prêt à être sanctionné pour ma

 12   responsabilité. Je ne suis pas venu ici pour me débarrasser de la

 13   responsabilité qui serait la mienne.

 14   Question: Fort bien.

 15   Mais, par votre déclaration, vous avez consciemment accusé tous les

 16   dirigeants serbes de la RSK, à toutes fins utiles, et vous voulez reporter

 17   le blâme sur eux pour vous débarrasser de votre responsabilité?

 18   Réponse: Moi, je n'ai accusé personne, je me suis contenté de dire toute

 19   la vérité comme je la connais, je ne voulais pas en fait blâmer qui que ce

 20   soit d'autre. Je voulais simplement présenter les faits tels qu'ils se

 21   sont produits. Il ne m'incombe pas de juger ou d'accuser qui que ce soit.

 22   M. Milosevic (interprétation): N'est-il pas un peu grotesque qu'un homme,

 23   qui a été un Premier ministre d'une république, un chef de gouvernement,

 24   décrive des événements en tant qu'observateur comme s'il regardait par

 25   l'autre bout de la lorgnette et non pas en tant que protagoniste, en tant

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  1   que quelqu'un qui a donné des ordres, en tant que figure politique

  2   principale de ce territoire pendant toute une série d'années, surtout au

  3   cours de la période particulièrement cruciale dont nous parlons.

  4   Milan Babic (interprétation): Mais quelle est la question que vous posez?

  5   Vous faites des observations, mais quelle est votre question?

  6   M. le Président (interprétation): Nous allons peut-être vouloir entendre

  7   une réponse. Quelle était la question? Eh bien, je vais vous la répéter,

  8   Monsieur le Témoin.

  9   Vous avez déposé comme si vous vous n'aviez pas été participant, mais

 10   plutôt un simple observateur de ces événements. Si on vous laissait

 11   entendre cela, qu'est-ce que vous répondriez?

 12   Milan Babic (interprétation): J'ai présenté ces observations en tant

 13   qu'acteur des événements, mais aussi en tant que témoin des événements.

 14   M. Milosevic (interprétation): D'accord.

 15   Dites-moi tout d'abord ceci: quand notre première rencontre a-t-elle eu

 16   lieu?

 17   Milan Babic (interprétation): Cela s'est passé en octobre, je ne sais

 18   plus exactement. C'était au cours de l'automne 1990.

 19   Question: Bien. Octobre 1990.

 20   Pourquoi nous sommes-nous rencontrés? Pourquoi êtes-vous venu me voir?

 21   Réponse: Excusez-moi, mais est-ce que nous sommes en audience publique ou

 22   à huis clos partiel?

 23   Question: Nous sommes à huis clos partiel.

 24   Réponse: Raskovic, président du SDS, voulait que je voie si le SDS, qui

 25   avait son siège à Knin et dont il était président, devait participer aux

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  1   élections en Serbie. Je ne sais pas…

  2   Question: Est-ce que nous avons discuté d'autres sujets, mis à part celui-

  3   là?

  4   Réponse: Cette fois-là?

  5   Question: Oui.

  6   Réponse: Je ne me souviens pas.

  7   Question: Donc il n'y a pas eu d'autre sujet en octobre: vous m'avez posé

  8   une question pour savoir ce que je pensais et pour savoir si je

  9   participais aux élections.

 10   Quelle fut notre rencontre suivante?

 11   Réponse: Oui, et cette fois-là vous avez dit aussi: "Où étiez-vous?

 12   Pourquoi n'êtes-vous pas venu plus tôt?"

 13   Question: Fort bien. Ne prenons pas les détails pour savoir si on a pris

 14   le café ou pas. On a discuté à d'autres occasions.

 15   Quelle fut notre rencontre suivante?

 16   Réponse: C'est au moment où vous et Raskovic, vous rentriez d'Amérique. Je

 17   crois que c'est au mois de novembre.

 18   Question: De quoi avons-nous parlé à ce moment-là?

 19   Réponse: C'était surtout une discussion entre vous et M. Raskovic sur la

 20   façon d'évaluer le résultat des élections et quels étaient les concepts

 21   fondateurs de la société.

 22   Question: Donc on a parlé des élections. Et après?

 23   Réponse: Et pour parler aussi des concepts politiques.

 24   Question: Quelle fut notre rencontre suivante?

 25   Réponse: Ce fut en décembre 1990.

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  1   Question: Exact, mais n'allons pas plus loin. Tenons-en-nous là.

  2   Nous nous sommes rencontrés une première fois. Vous m'avez posé une

  3   question à propos des élections en octobre. Et puis, vous dites qu'il y en

  4   a eu une en novembre, on a parlé de la même chose. Puis, on s'est retrouvé

  5   en décembre.

  6   Dites-moi ceci, est-il exact de dire que vous, le 17 février 1990, en

  7   l'occurrence huit mois avant notre toute première rencontre, lors de

  8   l'assemblée constitutive du SDS qui s'est faite devant 8.000 personnes à

  9   la gare ferroviaire de Knin, que vous, vous aviez été choisi dans un

 10   cercle restreint, avec (expurgée), Cvijeticanin, Raskovic, Opacic et

 11   d'autres, n'est-ce pas exact?

 12   Réponse: Je n'ai pas tout à fait répondu à votre question précédente. Nous

 13   avons eu des rencontres, pas personnellement mais nous avons eu des

 14   contacts au mois d'août, par l'intermédiaire d'un médiateur et, en fait,

 15   cela a été notre première rencontre même si cela n'a pas été un tête-à-

 16   tête, nous sommes passés par un médiateur, Slobodan Vucetic.

 17   Question: Qu'est-ce que vous voulez dire, un médiateur?

 18   Réponse: Moi, j'ai appris que vous aviez appelé pour me parler, moi

 19   j'étais occupé à une réunion, que vous vouliez me soumettre quelques

 20   problèmes, et par l'intermédiaire de quelqu'un, j'ai dit qu'il vous

 21   fallait contacter les organes de la Yougoslavie puisque ceci n'avait rien

 22   à voir avec la Serbie.

 23   Réponse: On m'a dit que vous et le Président de l'Etat de la Yougoslavie,

 24   le secrétaire fédéral de la Défense nationale, vous vous trouviez à une

 25   réunion, ce qui voulait dire que c'était une position commune qui était

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  1   adoptée et qu'il fallait trouver une solution en nous adressant au

  2   président de la présidence, Borislav Jovic, pour qu'il nous dise comment

  3   nous pouvions être protégés.

  4   Question: Mais, Monsieur le Milan Babic, est-ce que vous savez que moi,

  5   j'ai passé les vacances d'été à Kupari. Et j'ai passé dix étés à Kupari;

  6   cet été-là aussi, j'étais à Kupari.

  7   Réponse: Je sais ce qu'il en était cet été-là, je ne sais rien pour ce qui

  8   est des autres étés.

  9   Question: Vous dites que, cinq mois avant de me rencontrer, le 17 mai,

 10   vous aviez été nommé président de l'assemblée municipale de Knin?

 11   Réponse: C'était le 23 mai.

 12   Question: Avez-vous été élu président du comité de la Dalmatie du Nord et

 13   de Lika le 27 juin de cette année-là?

 14   Réponse: Pas le 7 juillet, c'était au mois de juin; c'étaient deux jours

 15   plus tard.

 16   Question: Bien.

 17   Est-il exact que, le 31 juillet, vous avez été élu président du conseil

 18   national à Srb?

 19   Réponse: C'est exact.

 20   Question: Et c'est à cette assemblée de Srb où il y avait 100 Serbes

 21   venant de la Croatie?

 22   Réponse: Cela s'est passé à Knin; ce n'était pas à Srb cette assemblée du

 23   Sabor.

 24   Question: Et c'était quand cette assemblée du Sabor? C'était le 25 juillet

 25   1990, c'est bien cela?

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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Donc c'était avant notre rencontre.

  3   Dites-moi, lors de ce meeting du SDS, est-ce qu'une déclaration a été

  4   adoptée sur l'autonomie et la souveraineté des Serbes en Croatie?

  5   Réponse: C'est le Sabor ou l'assemblée de Srb qui l'a fait; c'est là que

  6   la déclaration d'autonomie a été adoptée.

  7   Question: Fort bien.

  8   Et qu'en est-il de la direction de votre parti? Est-ce qu'en fait, elle

  9   voulait sortir de l'autonomie de la RSFY ou pas?

 10   Réponse: Dans notre déclaration, on précisait quelles étaient les

 11   ramifications d'une telle autonomie. Il y avait notamment comme

 12   conséquences précisément celles qui ont été définies.

 13   Question: Est-il exact de dire que, cette fois-là, on avait dit que, si la

 14   Croatie restait dans la Fédération, dans la RSFY, il faudrait l'autonomie

 15   culturelle de cette région avec l'utilisation du cyrillique, de la langue

 16   serbe, ainsi que l'autonomie culturelle des médias, des différentes

 17   institutions culturelles, la radiotélévision?

 18   Réponse: Aussi pour la communauté des municipalités régionales et locales,

 19   donc on parlait d'un auto-gouvernement, d'une autogestion; c'était

 20   l'option pour la Fédération.

 21   Question: N'est-il pas exact de dire que vous aviez envisagé de nouveaux

 22   pouvoirs dans un cadre confédéral, que vous vouliez des formes supérieures

 23   d'autonomie, politique et autres?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: N'est-il pas exact de dire que, le 21 décembre, vous avez

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  1   accepté d'être le président de l'exécutif de la SAO de Krajina?

  2   Réponse: En tant que président de la présidence provisoire de la

  3   communauté des municipalités de Dalmatie du Nord et de Lika, j'ai accepté

  4   de devenir président de cette présidence parce que celle-ci a eu un rôle

  5   exécutif dans la SAO de Krajina même.

  6   Question: D'accord.

  7   Pour ceux qui ne le savent pas, est-il exact de dire que le conseil

  8   exécutif est synonyme de gouvernement et que cela voulait dire ça dans

  9   toutes les Républiques, et dans la Yougoslavie qui avait un conseil

 10   confédéral ou un conseil fédéral qui était un conseil exécutif. N'est-ce

 11   pas exact?

 12   Réponse: D'après les concepts qui prévalaient dans l'ex-Yougoslavie, le

 13   conseil exécutif est un conseil exécutif de l'assemblée, ce qui veut dire

 14   qu'il y a une séparation des pouvoirs: exécutif-législatif. C'est une

 15   question de linguistique, en fait, mais il y a une différence au niveau de

 16   la substance, du fond. Ce qui veut dire que le gouvernement a plus de

 17   pouvoir que les organes exécutifs, que le conseil exécutif notamment.

 18   Question: Fort bien.

 19   Cela a changé en Yougoslavie au moment où ce n'était plus appelé le

 20   conseil exécutif. Est-ce que, le 29 mai, vous êtes en fait devenu Premier

 21   ministre du gouvernement de la Krajina serbe?

 22   Réponse: C'est exact.

 23   En vertu de la loi constitutionnelle, le statut de la SAO de Krajina a été

 24   proclamé loi constitutionnelle, le conseil exécutif du gouvernement et, du

 25   même coup, celui qui était président de cet organe est devenu président du

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  1   gouvernement.

  2   M. Milosevic (interprétation): Toutes les explications que vous donnez

  3   semblent dire que tout ce qui s'est passé, c'était un peu en parallèle

  4   avec votre volonté, que c'était presque automatique. Est-ce que vous avez

  5   cette impression-là aussi?

  6   Milan Babic (interprétation): Ici, nous avions affaire à une procédure

  7   légale, mais toute la décision politique pour poursuivre avait été

  8   nécessaire auparavant.

  9   M. le Président (interprétation): Je pense qu'il est l'heure de suspendre.

 10   Je voulais aborder une question en audience publique.

 11   M. Nice (interprétation): J'aimerais aussi demander quelque chose à la

 12   Chambre, mais il serait utile que l'accusé dise à la Chambre….

 13   (Audience publique avec mesures de protection à 14 heures 01.)

 14   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 15   M. Nice (interprétation): Il y a 17 heures 30 qui sont réservées pour le

 16   contre-interrogatoire. Est-ce que l'accusé pourrait nous dire s'il va

 17   utiliser toutes ces heures parce que cela voudrait dire qu'il y aura en

 18   fait poursuite du contre-interrogatoire jusqu'à la fin de la semaine

 19   prochaine.

 20   S'il veut prendre moins de temps il faudra prévoir un témoin pour la

 21   semaine prochaine. S'il veut utiliser la totalité de ce temps, cela veut

 22   dire que nous n'aurons pas besoin d'un témoin avant cinq jours plus tard,

 23   puisqu'il y aura une pause. Ce sera utile pour savoir ce qu'il en est.

 24   Je sais que ce n'est pas facile à dire de la part de l'accusé, mais il

 25   serait peut-être utile que l'accusé vous dise d'ici à demain s'il est

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  1   susceptible d'utiliser tout le temps qui lui est accordé.

  2   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous venez

  3   d'entendre cette question. Vous voulez peut-être réfléchir à la question?

  4   M. Milosevic (interprétation): J'ai déjà dit, Monsieur May, que mon

  5   impression à moi, c'est que ce temps devrait être réexaminé par vos soins.

  6   J'ai certes l'intention d'utiliser tout le temps que vous mettrez à ma

  7   disposition.

  8   M. le Président (interprétation): Nous n'allons pas approfondir la

  9   question. L'accusation a entendu la réponse.

 10   Et je dis à l'attention du public que nous avons bien sûr ici un témoin

 11   protégé, que vous n'êtes censé véhiculer à personne quelque information

 12   que ce soit susceptible de révéler son identité.

 13   L'audience reprendra demain à 9 heures.

 14   (L'audience est levée à 14 heures 02.)

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