Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Lundi 2 décembre 2002.) 

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 30.)

  3   (Audience publique avec mesures de protection.)

  4   (Le Milan Babic est dans le prétoire.)

  5   M. le Président (interprétation): Nous commençons avec un peu de retard en

  6   raison de problèmes liés à des travaux au quartier pénitentiaire. Nous

  7   demanderons qu'à l'avenir, le début de l'audience puisse se faire à 9

  8   heures du matin.

  9   Pour le reste de la journée d'aujourd'hui, nous aurons les pauses

 10   habituelles, mais nous continuerons à travailler et nous poursuivrons

 11   l'audience jusqu'à 14 heures pour rattraper le temps perdu.

 12   Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

 13   (Contre-interrogatoire du Milan Babic par l'accusé M. Milosevic.)

 14   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, avant l'interruption du week-

 15   end, nous parlions du rapport du commandement du 9e Corps d'armée. Je

 16   pense que ce document peut être lu en audience publique sans nuire à vos

 17   mesures de sécurité destinées au témoin, car je me contenterai de demander

 18   au témoin si ce qui est écrit dans ce document est exact ou pas. Je ne lui

 19   demanderai aucun autre détail.

 20   M. le Président (interprétation): Peut-être pourrait-on me rappeler où je

 21   peux trouver ce document? Les Juges disposent-ils de ce document? Je crois

 22   me rappeler que c'était un rapport.

 23   M. Milosevic (interprétation): Il s'agissait d'un rapport émanant du

 24   commandement du 9e Corps d'armée en date du 20 février 1992, qui traitait

 25   de la situation en Krajina, du référendum et d'autres questions de ce

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  1   genre. C'est un rapport très volumineux, mais je me contenterai d'en

  2   extraire quelques passages pour demander au témoin de me répondre de la

  3   façon la plus simple qui soit: par oui ou par non, simplement.

  4   M. le Président (interprétation): Très bien. Nous verrons comment cela

  5   ira, mais veuillez commencer à poser vos questions.

  6   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je vais commencer par une citation

  7   très brève de la première page du rapport où il est question du fait que

  8   le référendum va se tenir, qu'il aura un rapport avec le plan de paix des

  9   Nations Unies.

 10   Au point 1, il est indiqué que ce rapport devrait être adopté ainsi que

 11   les propositions, recommandations du gouvernement de la République serbe

 12   de Krajina, et qu'il devrait se conformer aux grandes orientations du plan

 13   Vance, et ce intégralement.

 14   Nous en arrivons à la phrase qui suit -je cite: "L'idée et les concepts de

 15   Babic et de Vance indiqués dans le tract -la plupart des électeurs ne sont

 16   pas entièrement informés des évolutions récentes- nous amènent à une

 17   situation où, à première vue, lorsqu'on regarde ce tract, les électeurs

 18   ont tendance à rejeter la version B et à soutenir entièrement la première

 19   version.

 20   Par ailleurs, tous les habitants de Krajina préconisent sans condition la

 21   paix et l'arrivée des Casques bleus. Donc les tracts relatifs au

 22   référendum trompent la population, car elle ne sait plus ce qu'il faut

 23   croire."

 24   Ma question à l'intention du témoin est la suivante: ceci est-il exact ou

 25   pas?

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  1   Milan Babic (interprétation): La situation, à la fin de novembre 1991,

  2   puis en décembre et en janvier, et même en février de l'année suivante,

  3   était que les positions avaient été rendues publiques, positions du

  4   gouvernement et de l'assemblée de la RSK, mais avant tout du gouvernement.

  5   Et l'assemblée de la SAO de Krajina avait également fait connaître ses

  6   positions s'agissant du plan de paix Cyrus Vance et de ce qui devait y

  7   être amendé.

  8   Le référendum était prévu, mais il n'a pas été organisé réellement en

  9   raison des obstructions émanant des autorités, obstructions dues à vous.

 10   Les commandements des unités de la JNA ont également fait obstruction.

 11   Ce sont des exemples bien connus qui aboutissent au fait que le commandant

 12   de la brigade n'a pas permis le développement du plan Cyrus Vance avec

 13   explication complète au sujet des modifications prévues.

 14   M. le Président (interprétation): Avant que vous ne poursuiviez, ce

 15   document a été retrouvé. Il s'agit de la pièce à conviction D59, qui n'a

 16   pas encore été traduite.

 17   Allez-y, Monsieur Milosevic.

 18   M. Milosevic (interprétation): Dans les tracts qui ont été distribués, il

 19   est dit dans le passage dont je viens de donner lecture, il est signalé

 20   que ces tracts ne faisaient que créer la confusion dans l'esprit des

 21   électeurs qui ne savaient plus que penser. Donc la question que je vous

 22   pose est la suivante: est-ce que ce que je viens de vous lire est exact ou

 23   pas?

 24   Vous dites que l'armée et les autorités de Belgrade ont fait obstruction.

 25   Quelle est la situation exacte?

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  1   Milan Babic (interprétation): La population n'a pas pu discuter de cette

  2   question publiquement. Elle n'a pas pu discuter dans ces conditions ni

  3   faire connaître son point de vue au sujet du plan.

  4   Question: Très bien. Vous avez dit il y a un instant que vous connaissiez

  5   les positions du gouvernement et de l'assemblée.

  6   Cependant, dans ce même rapport en page 2, nous lisons ce qui suit -je

  7   cite: "A Glina, le 16 février", c'est-à-dire 4 jours avant la publication

  8   du rapport -je poursuis la citation- ", une réunion de l'assemblée de la

  9   RSK s'est tenue sous la présidence de Mile Paspalj." (Fin de citation.)

 10   Je suppose qu'il était président de l'assemblée à l'époque.

 11   Je reprends la citation: "Cette réunion a décidé de relever Milan Babic de

 12   ses fonctions de Président de la République et de ne pas voter la

 13   confiance au gouvernement de Krajina dans son intégralité."

 14   Ceci s'est passé quand le gouvernement de Krajina a refusé d'adopter le

 15   plan Vance. Ceci est-il exact?

 16   Réponse: La première assemblée qui a discuté de cette question, je veux

 17   parler des positions gouvernementales vis-à-vis du plan Vance, s'est tenue

 18   le 8 décembre 1991, à Glina, sous la présidence de Milan Paspalj. C'est

 19   seulement une partie de l'assemblée qui s'est réunie et non pas tous les

 20   représentants.

 21   Question: Très bien. Mais il est dit ici que cette réunion a eu lieu en

 22   présence de 85 députés, dont 74 étaient favorables à la décision, 8 contre

 23   et 3 se sont abstenus. Est-ce exact ou pas?

 24   Réponse: Il y a différents rapports qui citent des nombres de députés

 25   présents différents, ainsi que des résultats différents s'agissant du

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  1   vote.

  2   Question: Les renseignements à ce sujet diffèrent: c'est bien cela?

  3   Donc les renseignements au sujet de cela diffèrent: c'est bien cela? Il y

  4   a d'autres rapports?

  5   Réponse: Oui, il y a également d'autres informations à ce sujet.

  6   Question: Ensuite, nous lisons qu'à 18 heures 55, à la radio serbe de

  7   Knin, du fait que la réunion s'est achevée à 18 heures 30, donc 15 minutes

  8   après la fin de la réunion, une annonce a été diffusée à la radio serbe de

  9   Knin et une conservation téléphonique a eu lieu avec le Dr Milan Babic,

 10   dans laquelle il déclare que la réunion de Glina s'est tenue illégalement

 11   sur la base d'instructions reçues de Belgrade.

 12   Qu'en était-il exactement?

 13   Réponse: J'ai entendu que, le 9 février, lorsque Kostic et Hadzic étaient

 14   présents, il a été proposé que Babic soit remplacé. Puis, Branko Kostic a

 15   déclaré: "Attendez que nous partions!".

 16   Question: Je ne comprends pas ce que cela signifie le fait qu'il vous ait

 17   dit d'attendre qu'il parte. Sans doute ne voulait-il pas se mêler de vos

 18   affaires intérieures.

 19   Mais dites-moi donc, cette partie du rapport que j'ai citée est-elle

 20   conforme aux faits qui ont eu lieu par la suite –je cite: "Milan Babic

 21   fait tout ce qu'il peut pour conserver le pouvoir en Krajina. Quand il a

 22   constaté qu'il n'aurait pas l'appui de l'assemblée, il a pris une décision

 23   sommaire consistant à créer de nouvelles municipalités dans les villages

 24   dans lesquels il avait des représentants qui lui étaient fidèles.

 25   Un fait qui le prouve particulièrement, est le fait que, dans des lieux

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  1   importants de la RSK qui, jusqu'à la réorganisation des municipalités dans

  2   les années 60, étaient des chefs-lieux, donc des endroits où la "Udba" de

  3   Kistanje avait des représentants, nous voyons de nouvelles communautés

  4   locales créées."

  5   Il parle de l'article 87 de la Constitution de la RSK, qui permettait de

  6   convoquer une réunion de l'assemblée. Ceci a-t-il été fait ou pas?

  7   Réponse: Ce qui s'est passé, au mieux de mes souvenirs, c'est qu'il y

  8   avait des zones en rose, des zones donc qui se trouvaient hors des

  9   dispositions prévues par le plan Vance dans les structures politiques à

 10   créer par la suite. Les points de vue des uns et des autres ont été

 11   entendus. Donc les nouvelles municipalités créées dans la région de Velika

 12   et jusqu'à Vrhovine ont été créées dans ces conditions.

 13   Il est vrai que des discussions ont eu lieu au sujet de la création

 14   éventuelle de la municipalité d'Udbina. Pour autant que je le sache, M.

 15   Babic a fait ce qu'il pouvait sur le plan politique, s'agissant de cela.

 16   Question: Très bien, mais il est dit ici que la politique des cadres

 17   consistant à mettre des gens qui lui obéissaient un peu partout, lui

 18   revient à la figure comme un boomerang en ce moment; le meilleur exemple

 19   étant la situation de Mile Paspalj qui, en tant que Président de

 20   l'assemblée, une fois le remplacement par Babic de Velibor Matijasevic;

 21   donc Mile Paspalj revient à la surface parce qu'il pensait que toutes ces

 22   manipulations pouvaient échouer.

 23   Ceci est-il exact ou pas?

 24   Réponse: Mile Paspalj est arrivé au poste de président de la SAO, car il

 25   avait été proposé pour diriger le conseil régional du SDS de Banija et de

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  1   Kordun. Mile Paspalj était président du conseil régional du Parti

  2   démocratique serbe de Banija et de Kordun; c'est de ce poste qu'il a pris

  3   les fonctions de président de l'assemblée de Krajina le 21 novembre 1991.

  4   Le 2 février 1992, j'ai eu le sentiment y compris qu'il était allé chez

  5   Milosevic pour obtenir des modifications du plan Vance-Owen, après

  6   intervention de Budimir Kosutic. En effet, le 31 janvier, lors d'une

  7   séance élargie de l'assemblée, le 1er février en fait, il a prôné l'idée

  8   que le gouvernement et l'assemblée de la SAO de Krajina devait changer

  9   d'avis; il a continué à affirmer cela le 2 février. Selon les informations

 10   dont je dispose, il était sous l'influence de Budimir Kosutic.

 11   Selon mes renseignements, il avait au préalable discuté de cela en secret

 12   avec Milosevic.

 13   M. Milosevic (interprétation): Mais ce qui suit est-il exact?

 14   Il est écrit que "par ses actions, Milan Martic prouve sa loyauté aux

 15   principes établis au début des événements de Knin en août 1990 et que

 16   c'est dans l'intérêt de la population qu'il souhaite que les Casques bleus

 17   arrivent dès que possible pour que la paix revienne. Par conséquent,

 18   Martic soutenait l'arrivée urgente de la mission de paix des Nations Unies

 19   et le déploiement des Casques bleus, ainsi en fait que la création de

 20   conditions susceptibles de ramener la paix dans la région."

 21   Ceci est-il exact ou pas? Répondez-moi par oui ou non.

 22   Réponse: Milan Martic appuyait la politique de Slobodan Milosevic.

 23   M. Milosevic (interprétation): Très bien. Il appuyait la politique

 24   consistant à préconiser l'adoption du plan Vance-Owen et l'arrivée des

 25   Casques bleus, ainsi que la restauration de la paix. Ceci est-il exact ou

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  1   pas?

  2   Mais dites-moi ce qui suit…

  3   M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre.

  4   Milan Babic (interprétation): En décembre et début janvier, Martic s'est

  5   opposé à l'application complète du plan Vance-Owen et a adopté les

  6   positions de la SAO de Krajina qui demandait des amendements à ce plan.

  7   Par la suite, sur intervention de Slobodan Milosevic, il a accepté

  8   l'application du plan Vance-Owen dans toutes ses dispositions et sans

  9   modification, sans conditions par conséquent, comme l'avait accepté dès le

 10   départ Slobodan Milosevic.

 11 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Vous rappelez-vous la déclaration

 12   que vous avez faite, le 18 janvier 1992, à la télévision finlandaise?

 13   (Mme Uertz-Retzlaff s'est levée.)

 14   M. le Président (interprétation): Huis clos partiel?

 15   (Mme Uertz-Retzlaff fait un signe affirmatif de la tête.)

 16   (Huis clos partiel à 9 heures 45)

 17   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 18    M. Milosevic: Ma question est la suivante: est-il exact

 19   -étant donné que nous sommes à huis clos partiel, je peux vous le

 20   demander- que vous vous êtes employé, au moyen de ce rejet du plan Vance-

 21   Owen, à vous présenter comme une victime du régime et que vous pensiez

 22   pouvoir mobiliser l'opinion en Serbie en faveur de vos positions, avec

 23   l'aide d'un certain nombre de partis d'opposition, dans le but de

 24   déstabiliser le gouvernement de Belgrade à partir de cette position

 25   adoptée par vous, qui était une position de victime, et d'opposition en

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  1   Krajina?

  2   Milan Babic (interprétation): Que j'étais une victime de votre dictature

  3   est un fait exact. Cependant, dans ce contexte, celui dont vous parlez,

  4   donc contexte lié au plan Vance, la priorité devait aller à la sécurité,

  5   sécurité pour l'avenir de la population de Krajina.

  6   Question: Très bien. Vous avez écrit cette fameuse lettre dans laquelle il

  7   n'est pas question de sécurité, mais dans laquelle on trouve toutes sortes

  8   de qualificatifs très durs, très critiques à mon égard en raison du fait

  9   que je proposais l'adoption du plan Vance. Je pense que vous vous souvenez

 10   très bien de cela.

 11   Donc le gros de la lettre ne met pas l'accent sur la sécurité, mais sur

 12   des questions plus politiques. Vous rappelez-vous cela?

 13   Réponse: Cette lettre avait pour but de mettre l'accent sur mes positions,

 14   en premier lieu, eu égard à l'implication, à l'intervention des forces de

 15   paix des Nations Unies. C'était notre priorité.

 16   M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, je ne vais pas vous relire votre

 17   lettre, mais jetons-y tout de même un coup d'œil. Vous dites que Boro

 18   Rasuo a écrit la lettre en votre nom, ou plutôt un projet…

 19   M. le Président (interprétation): Que la lettre soit remise au témoin.

 20   (Intervention de l'huissière.)

 21   Je pense qu'il s'agissait de l'intercalaire 92, mais je peux me tromper.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Intercalaire 79.

 23   M. le Président (interprétation): Intercalaire 79. Très bien. Que ce

 24   document soit remis au témoin.

 25   (Intervention de l'huissière.)

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  1   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, si je puis vous

  2   aider, à l'intercalaire 79 on trouve des articles de presse et à

  3   l'intercalaire 80, on trouve la lettre. L'intercalaire 79 est un

  4   intercalaire où l'on trouve des articles de presse relatifs à la lettre et

  5   à l'intercalaire 80, on trouve la lettre en tant que telle.

  6   M. le Président (interprétation): Très bien. Que l'on remette au témoin

  7   l'intercalaire 80.

  8   (Intervention de l'huissière.)

  9   Monsieur le Témoin, ce qui vient de vous être dit, c'est que cette lettre

 10   que l'on trouve à l'intercalaire 80, dont vous êtes l'auteur, ne met pas

 11   l'accent sur la question de la sécurité. Pouvez-vous commenter cette

 12   observation?

 13   Milan Babic (interprétation): Oui. Au troisième paragraphe de cette

 14   lettre que j'ai signée, il est indiqué: "Je tiens à tirer parti de cette

 15   occasion qui m'est imposée pour vous dire, ainsi qu'à l'opinion publique

 16   en général, de la façon la plus claire qui soit, quelles sont mes

 17   positions, tout en désapprouvant vos allégations arbitraires selon

 18   lesquelles je serais opposé à la paix, favorable à la guerre, et selon

 19   lesquelles ma position trouve son origine dans mon désir de pouvoir et de

 20   prestige politique." (Fin de citation.)

 21   M. le Président (interprétation): Oui, mais pouvez-vous nous dire en quoi

 22   ce paragraphe met l'accent sur la sécurité?

 23   Milan Babic (interprétation): Il est question d'un délai de six mois; ça,

 24   on le trouve au paragraphe 4.

 25   Dernière phrase –je cite-: "Pour poursuivre leur mandat au-delà des six

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  1   mois en question, une nouvelle décision du Conseil de sécurité est

  2   nécessaire, ainsi que l'agrément préalable de toutes les parties au

  3   conflit et, dans le cas précis, ceci inclut également la Croatie." (Fin de

  4   citation.)

  5   Donc ceci est l'expression de nos craintes quant au fait qu'après un

  6   mandat de six mois des forces de paix, celui-ci puisse ne pas être

  7   poursuivi, et que donc la sécurité soit mise en danger.

  8   M. le Président (interprétation): Oui.

  9   M. Milosevic (interprétation): Y a-t-il d'autres aspects de sécurité

 10   abordés dans cette lettre qui comporte cinq pages?

 11   Milan Babic (interprétation): Ensuite, j'explique vos positions où il est

 12   question du front, bien sûr. Après quoi, il est question une nouvelle fois

 13   de la durée du mandat des Casques bleus et ensuite, au cas où la sécurité

 14   serait en danger et que la JNA intervienne, il est dit que cette

 15   intervention devrait pouvoir être qualifiée d'agression.

 16   M. Milosevic (interprétation): Vous pouvez lire tout le texte si vous le

 17   voulez, mais vous ne trouverez rien d'autre. Ceci était destiné à

 18   discréditer le gouvernement de Belgrade et donc moi personnellement; et

 19   vous avez, dans ce but, mené une campagne intensive.

 20   Mais j'aimerais que nous revenions à cette interview que vous avez

 21   accordée à la télévision finlandaise.

 22   On le trouve, dans la version anglaise, Messieurs les Juges, sous le

 23   numéro de référence RO30-4565.

 24   Donc nous sommes à la date du 18 janvier, c'est ce qu'on lit dans le

 25   texte.

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  1   "Belgrade, Dr Milan Babic, Président de la République de la SAO de Krajina

  2   nie avoir rencontré le Président de Serbie Slobodan Milosevic". Dans ses

  3   explications, Babic déclare que cette lettre a gelé ses relations avec

  4   nous, car il pense que "nous avons le devoir d'appliquer les résolutions

  5   qu'il adopte et qu'il nous impose". Monsieur Babic ajoute qu'il ne cherche

  6   pas à établir le contact avec Milosevic et qu'il espère que "Milosevic va

  7   s'excuser pour la façon dont il m'a traité en tant que Serbe, en tant que

  8   Président de la République serbe de Krajina. C'est à lui qu'il appartient

  9   de réagir le premier".

 10   (L'interprète indique que tout cela a été lu en anglais par M. Milosevic.)

 11   Je saute ensuite quelques passages. Et puis -je cite-: "Il exprime

 12   également le soupçon que le Président serbe a conclu des accords qui ne

 13   lui sont pas favorables"; M. Babic estime que "des décisions ont été

 14   prises pour les Serbes de Krajina qui ne leur sont pas favorables et qui

 15   ont été prises à leur place. Par conséquent, nous devons dire clairement

 16   qu'il ne jouit pas de ce droit", ajoute M. Babic.

 17   Je suppose que vous vous rendez bien compte...

 18   (Mme Uertz-Retzlaff se lève.)

 19   M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff?

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il ne s'agit pas encore d'une pièce à

 21   conviction, Monsieur le Président. C'est un document qui fait partie des

 22   pièces communiquées en application de l'Article 68 du Règlement.

 23   M. le Président (interprétation): Oui.

 24   Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

 25   M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Témoin, savez-vous que Cyrus

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  1   Vance a insisté pour que la Serbie accepte ce plan et qu'il n'avait pas le

  2   sentiment que la Serbie pouvait intervenir en votre nom. C'est lui qui

  3   exprimait son point de vue positif vis-à-vis de ce plan et qui a investi

  4   toute son influence politique aux fins de faire adopter ce plan; c'est-à-

  5   dire qu'il a usé de l'influence dont il jouissait auprès des habitants de

  6   la République serbe de Krajina pour faire adopter ce plan.

  7   Etes-vous au courant de cela ou pas?

  8   M. le Président (interprétation): Avant que vous ne répondiez, Monsieur le

  9   Témoin, puisque cette interview vous est attribuée, vous pourriez peut-

 10   être en dire quelques mots. Si vous n'êtes pas d'accord avec des propos

 11   qui vous auraient été attribués, vous pouvez éventuellement le dire. Donc

 12   traitez de cela d'abord, je vous prie; après quoi, vous pouvez répondre à

 13   cette question relative à la Serbie.

 14   Y a-t-il donc quelque chose, pour commencer, que vous souhaiteriez ajouter

 15   au sujet de l'interview? Ou êtes-vous d'accord avec ce qui a été cité?

 16   Milan Babic (interprétation): J'ai donné pas mal d'interviews, je m'en

 17   souviens, donc ce qui vient d'être lu peut être conforme à ce que je

 18   disais à l'époque.

 19   M. le Président (interprétation): Très bien.

 20   M. Milosevic (interprétation): Bon!

 21   M. le Président (interprétation): Un instant. Que le témoin réponde à ce

 22   que vous venez de dire au sujet de l'insistance de Cyrus Vance pour

 23   obtenir l'accord de la Serbie vis-à-vis du plan.

 24   Le saviez-vous ou pas?

 25   Milan Babic (interprétation): Nous savions que Milosevic, Tudjman et

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  1   Kadijevic avaient accepté le plan et que Milosevic souhaitait que nous

  2   acceptions la même version du plan que celle qui avait été acceptée par

  3   eux. Je me souviens qu'après un mois ou un mois et demi de discussion au

  4   sujet du plan, M. Cyrus Vance a fait savoir à New York, par les médias,

  5   que Milan Babic était opposé à cela et que, par conséquent, Slobodan

  6   Milosevic devait régler le problème avec Milan Babic.

  7   M. Milosevic (interprétation): S'agissant du fait qu'il y avait un

  8   problème entre Milan Babic et Slobodan Milosevic, je pense que Cyrus Vance

  9   avait raison et que Babic constituait effectivement un problème pour toute

 10   la population de la République serbe de Krajina et de la Serbie. Je pense

 11   que, par son extrémisme, il a provoqué de très graves désagréments. Je

 12   suppose que vous n'allez pas nier cela dans vos déclarations?

 13   Milan Babic (interprétation): Babic est arrivé au poste qu'il a occupé,

 14   poste qui était un poste public, par des élections, donc par des moyens

 15   légitimes.

 16   M. Milosevic (interprétation): Bien.

 17   Milan Babic (interprétation): Et il a exercé ses fonctions dans le cadre

 18   qui a été mis à sa disposition légalement, donc avec l'appui public.

 19   M. le Président (interprétation): Laissez finir le témoin, puisque les

 20   allégations qui lui sont soumises sont des allégations assez graves.

 21   Ce qui est dit, c'est qu'il constituait un problème pour toute la

 22   population de la République serbe de Krajina et de la Serbie en raison de

 23   son extrémisme, qu'il a provoqué des problèmes graves.

 24   Monsieur le Témoin, quelle est votre réponse à cela?

 25   Milan Babic (interprétation): Tout d'abord, je pense que je n'avais pas

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  1   été extrémiste. Je n'ai fait qu'assumer mes fonctions publiques, étant

  2   sous-entendu des positions présentées par l'opinion publique elle-même, et

  3   je me suis proposé d'exprimer les avis de l'opinion publique, avis dont

  4   dépendait ma fonction politique entre autres. Et j'étais arrivé à cette

  5   fonction politique, en suivant une procédure électorale, donc après des

  6   élections.

  7   S'agissant des positions au sujet du plan Vance, j'avais obtenu l'appui de

  8   l'assemblée de la SAO de Krajina et une partie de l'assemblée de la

  9   République de Krajina serbe. Et j'avais obtenu l'appui de quelque 10.000

 10   participants à un meeting de soutien à ces positions-là. Entre autres, le

 11   2 février 1992, il y avait eu 5.000 personnes qui s'étaient rassemblées.

 12   J'avais, en effet, voulu vérifier les positions que j'avais exprimées en

 13   les présentant à un référendum pour voir si l'opinion publique allait être

 14   d'accord avec ou pas. Le référendum n'a pas pu se tenir parce que sa tenue

 15   a été empêchée par des personnes qui étaient sous l'influence de Milosevic

 16   dans la Krajina.

 17   Et en 1993, en ma qualité de candidat aux présidentielles, dès le premier

 18   tour, d'après les résultats de ce premier tour, j'ai eu plus de la moitié

 19   des votes; plus, donc, que tous les autres candidats ensemble. Les

 20   élections ont été réitérées, puis reportées de façon illégale afin que le

 21   favori de M. Milosevic, à savoir Milan Martic, finisse par gagner à ces

 22   élections.

 23   J'estime que, s'agissant de ma politique, j'avais bénéficié du soutien de

 24   l'opinion publique et des électeurs dans la Krajina. Je ne pense pas que

 25   cette position-là ait été extrémiste mais, partant de mes positions

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  1   actuelles, j'estime qu'elle avait été ethno-égoïste et je vois les choses

  2   autrement qu'à l'époque. Et c'est avec donc l'intelligence que j'ai

  3   actuellement que je puis affirmer que je n'aurais pas conduit cette

  4   politique, à l'époque; c'était la politique des divisions nationales, des

  5   divisions ethniques, des conflits interethniques et du séparatisme.

  6   M. Milosevic (interprétation): Et c'est ainsi que j'avais conduit vos pas

  7   pendant que j'étais en train de passer mes vacances à Kupari, n'est-ce

  8   pas?

  9   M. le Président (interprétation): Je pense que ce type de débat ne nous

 10   mènera à rien. Vous n'avez pas besoin de répliquer.

 11   Monsieur Milosevic, veuillez passer à la question suivante.

 12   M. Milosevic (interprétation): Mais vous apparaît-il clairement que, outre

 13   le fait que l'appui de la Serbie au plan de Vance, mis à part, (sic) ce

 14   plan de Vance ne pouvait pas être appliqué sans un appui de votre part à

 15   vous; c'est vrai ou pas? Aviez-vous conscience de la chose ou pas? Saviez-

 16   vous qu'il n'allait pas être appliqué et qu'il n'allait pas pouvoir être

 17   adopté par le Conseil de sécurité si vous n'étiez pas tombés d'accord?

 18   Milan Babic (interprétation): Nous étions l'une des parties qui étaient

 19   sollicitées pour ce qui est de se prononcer en faveur ou pas de ce plan.

 20   Et nous avions formulé des objections, des remarques; il y avait des

 21   chances, pour ce qui est de procéder à des modifications de ce plan et il

 22   a été modifié en partie, parce que nous avions été conviés à nous

 23   prononcer nous-mêmes.

 24   Question: Oui, mais est-ce que nous pouvons tirer au clair une chose, à

 25   savoir que ce plan-là ne pouvait pas être appliqué sans votre approbation?

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  1   Et l'assertion au terme de laquelle j'avais usurpé le droit de décision en

  2   votre nom n'est pas exacte, parce que je ne pouvais pas décider en votre

  3   nom. J'avais pu décider d'appuyer ce plan et d'essayer d'exercer mon

  4   influence politique à votre égard pour faire en sorte que vous l'acceptiez

  5   vous-même.

  6   Réponse: Vous l'aviez accepté en votre nom, vous étiez partie au conflit.

  7   Vous aviez gardé une armée sur un territoire qui avait dû être

  8   démilitarisé. C'est là la raison principale. La deuxième des raisons,

  9   c'est que vous vouliez nous contraindre à nous mettre d'accord nous aussi.

 10   Question: Monsieur C-061, la Serbie n'a pas été partie au conflit en

 11   Croatie. La Croatie avait été en conflit avec la JNA et pas avec la

 12   Serbie. La Serbie n'a jamais été partie au conflit en Croatie, mais nous y

 13   arriverons un peu plus tard.

 14   Par conséquent, avons-nous tiré au clair le fait suivant: c'est que vous

 15   aviez, à l'époque, parfaitement conscience de la nécessité de décider

 16   vous-mêmes et, de notre part, nous avions en effet exercé une influence

 17   politique pour faire en sorte que vous acceptiez ce plan; oui ou non?

 18   Réponse: Il est vrai que nous étions censés, nous aussi, nous prononcer au

 19   sujet de ce plan; nous étions conviés à prononcer notre position. Et vous

 20   étiez tombé d'accord dès le début.

 21   Question: Bien. Je ne conteste pas du tout le fait d'avoir soutenu ce plan

 22   Vance et j'ai fait, pour ma part, tout ce que je pouvais. Et quand vous

 23   dites que vous avez pris part à la décision, je voudrais que vous vous

 24   penchiez sur cette interview, parce que vous aviez déployé toute une

 25   campagne, à l'époque. C'est R030-4566, daté du 20 janvier à Belgrade.

Page 13633

  1   On dit que "La mission de l'ONU est condamnée à l'échec, sans notre

  2   approbation, a dit Milan Babic, Président de la République de la Krajina

  3   serbe dans une interview publiée dans l'édition d'aujourd'hui de la

  4   'Borba'.". Je précise que "Borba" était un journal au niveau fédéral, de

  5   haut niveau.

  6   On dit ensuite: "Il est certain que le Conseil de sécurité des Nations

  7   Unies et le Secrétaire général des Nations Unies n'allaient pas accepter

  8   d'envoyer des effectifs, des forces sur nos territoires et ceci, sans

  9   l'approbation de notre part", dit Babic.

 10   Donc il apparaissait clairement, à vos yeux, que sans votre approbation à

 11   vous, la chose ne pouvait pas se faire. Et c'est probablement pour cette

 12   raison-là que l'assemblée de la RSK, et non pas des gens de Belgrade quels

 13   qu'ils soient, qui a décidé, comme cela a été rapporté dans ce rapport et

 14   qui a été reproduit, ce 16 février, pour ce qui est de l'acceptation du

 15   plan Vance. Et l'acceptation du plan Vance avait été faite par les

 16   instances compétentes de l'Assemblée de la Krajina serbe. C'est vrai ou

 17   pas?

 18   Réponse: Après la campagne que vous avez conduite.

 19   M. Milosevic (interprétation): Mais ma campagne avait été…

 20   M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Il faut

 21   laisser le temps et la possibilité au témoin de répondre. Parce que si

 22   vous lui soumettez des éléments d'interview, effectivement, il faut lui

 23   laisser le temps de le faire et puis, vous aborderez des questions

 24   subsidiaires.

 25   Monsieur le Témoin, vous avez entendu les allégations qui ont été

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  1   formulées à propos de cette interview. Est-ce que vous acceptez le fait

  2   qu'elles seraient correctes ou pas? Ça, c'est la première question qui

  3   vous est posée.

  4   Milan Babic (interprétation): J'étais personnellement conscient du fait

  5   que nous aussi, nous étions censés apporter notre approbation, notre

  6   soutien, s'agissant de ce plan en effet, étant donné que la présidence ou

  7   ce qui restait de la présidence de la RSFY, et Slobodan Milosevic avaient

  8   compétence. En d'autres termes, là, le commandement des formations armées

  9   dans la Krajina -étant donné que ce sont eux qui commandaient la JNA- et

 10   par l'intermédiaire de cette dernière, ils avaient commandé la Défense

 11   territoriale également. Puis, ils avaient commandé la police de la Krajina

 12   en passant par le biais des structures parallèles. Donc, au cas où la JNA

 13   se serait retirée de la Krajina, il serait resté les structures armées de

 14   la Défense territoriale, et Milosevic, par le biais de la JNA, ne serait

 15   plus à même d'exercer ses positions de commandement ou ses fonctions de

 16   commandement.

 17   Question: Je ne comprends pas ce que cela à avoir, ces explications

 18   nébuleuses qui ne veulent rien dire du tout par rapport à ce que je viens

 19   de vous citer. Ecoutez, soyons précis! Voyons ce qui est écrit dans cette

 20   interview.

 21   Je cite: "Nous trouvons le concept de participation des forces des Nations

 22   Unies comme étant inacceptable. Au terme de quoi le territoire de la

 23   Krajina ainsi que la Slavonie de l'Est et de l'Ouest se trouveraient sous

 24   protection de l'ONU comme étant des territoires croates. Tudjman,

 25   Kadijevic et Milosevic… Tudjman et Kadijevic sont arrivés à un accord

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  1   concernant la position de certaines positions qui semble être identique

  2   par rapport aux propositions faites à la Conférence de La Haye concernant

  3   le statut spécial au sein de la Croatie, a été ajouté par Babic" (Fin de

  4   citation.)

  5   Par conséquent, vous avez tiré ou ouvert le feu de toutes armes -je parle

  6   au sens figuré, en terminologie politique- en disant que cela a été contre

  7   les intérêts de la Krajina. Et vous dites, ici, pourquoi vous avez

  8   repoussé ce statut spécial proposé à la conférence internationale, et vous

  9   aviez conduit une campagne à Knin contre les autorités de Serbie, moi y

 10   compris, en disant que nous étions en train de vous pousser vers

 11   l'acceptation d'un statut spécial, oui ou non?

 12   Réponse: Il y a deux choses à savoir dans la substance du plan: on parlait

 13   de démilitarisation et on parlait de territoires au sein de la Croatie. Et

 14   le pouvoir croate, le Président Tudjman avait dit que dès l'arrivée des

 15   Nations Unies, il allait établir son pouvoir; et il avait déjà nommé des

 16   personnes qui allaient exercer les pouvoirs ou l'autorité croate sur ses

 17   territoires. C'est ce qui a résulté par les opinions que j'ai formulées

 18   par la suite.

 19   Et le Secrétaire général des Nations Unies avait tenu compte de nos

 20   commentaires et de nos remarques dans la présentation de son rapport au

 21   Conseil de sécurité. Dans son rapport, il avait été indiqué que sur ces

 22   territoires-là on n'allait pas appliquer les lois croates mais la

 23   législation qui avait été en vigueur sur le territoire jusque-là.

 24   M. Milosevic (interprétation): Ceux qui ont œuvré pour ce qui est de la

 25   mise en place de ce plan savent pertinemment bien qu'il a été adopté tel

Page 13636

  1   que convenu. Je voudrais que vous nous disiez maintenant si, oui ou non,

  2   on vous a fourni l'explication en précisant que les délais impartis

  3   étaient conformes au délai habituel prévu par le Conseil de sécurité des

  4   Nations Unies et que ces mandats allaient être prorogés en attendant la

  5   solution de la question.

  6   Donc le délai pour ce qui est de l'affectation des forces de paix des

  7   Nations Unies, comme je vous l'avais expliqué à plusieurs reprises moi-

  8   même, en prêtant foi à ce que Cyrus Vance disait -et il disait la vérité-

  9   à savoir que ce mandat allait être prorogé autant de fois que nécessaire.

 10   Et cela est bien vrai ou pas?

 11   Milan Babic (interprétation): Il y a deux éléments, là également. Tout

 12   d'abord, il avait été prévu à l'occasion des entretiens au début, tout au

 13   départ, qu'il s'agirait de six mois, d'un délai qui était susceptible

 14   d'être prorogé. Nous avions exprimé notre appréhension en disant que le

 15   délai était trop court. Les effectifs de paix ont obtenu un mandat initial

 16   d'un an.

 17   Deuxièmement, lorsqu'il est question du plan de Vance, la communauté

 18   internationale n'avait pas encore reconnu la Croatie comme Etat

 19   indépendant. Et au mois de janvier, un grand nombre de pays, j'entends 15

 20   janvier, un grand nombre de pays de la communauté européenne -j'en ai déjà

 21   cité quelques-uns- ont reconnu la Croatie comme Etat indépendant. Notre

 22   appréhension était la suivante, à savoir que la Croatie, en sa qualité de

 23   membre des Nations Unies, pouvait faire obstruction à la prorogation de ce

 24   délai ou à la prolongation du mandat des forces de paix des Nations Unies

 25   avant que l'on ne trouve une solution pour ce territoire.

Page 13637

  1   M. le Président (interprétation): Je vais devoir vous interrompre un

  2   instant.

  3   Monsieur Milosevic, vous avez fait référence à deux documents. D'abord,

  4   l'interview avec une chaîne de télévision finlandaise le 18 janvier, et

  5   puis il y a un autre document, cette interview publiée dans "Borba", le 20

  6   janvier. Voulez-vous verser ces pièces au dossier?

  7   M. Milosevic (interprétation): Certainement.

  8   M. le Président (interprétation): Fort bien. Faisons-le dès maintenant. Il

  9   y a des traductions disponibles. Je vais éventuellement demander au Greffe

 10   de leur accorder une cote distincte pour chacun de ces documents.

 11   Un instant, s'il vous plaît. Attendons que cela soit fait.

 12   Mme Anoya (interprétation): Le document en date du 18 janvier portera la

 13   cote D60. S'agissant du document qui porte la date du 20 janvier, ce sera

 14   la pièce D61.

 15   M. Milosevic (interprétation): J'utilise les papiers que j'ai obtenus par

 16   vos bons soins. Mais s'agissant de ces interviews et de ces attaques-là,

 17   il y en a eu une multitude dans toute la presse, et dans tous les médias.

 18   Mais, allons quand même de l'avant, et ce, en suivant la même interview.

 19   Et on dit: "En faisant un commentaire suite à l'évolution la plus récente

 20   de ce qui s'est passé s'agissant des rapports et relations entre la

 21   Krajina et la Serbie, Babic a indiqué, a fait référence au fait qu'il y a

 22   une insatisfaction, une déception manifeste parmi beaucoup de personnes

 23   qui pensent que la République de la Krajina serbe ainsi que le peuple

 24   serbe ont été abandonnés par la Serbie et par le peuple serbe de Serbie".

 25   "J'ai l'impression, il me semble, que les sentiments du peuple serbe de

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  1   Serbie ne correspondent pas à la lettre de M. Milosevic", dit Babic.

  2   Par conséquent, vous vous êtes efforcé d'une certaine façon à mobiliser

  3   l'opinion publique, partant de sentiments de solidarité, et vous avez

  4   essayé de manipuler en vous servant de ces sentiments pour déstabiliser

  5   les pouvoirs en Serbie?

  6   Milan Babic (interprétation): Eh bien, le fait est que vous nous

  7   abandonniez; c'est ainsi que j'ai compris la chose. Vous aviez jusque-là

  8   fait tout ce que vous aviez pu pour garder le contrôle, pour conduire la

  9   guerre, pour nous faire rester en Yougoslavie. Vous avez installé une très

 10   grande haine entre le peuple serbe et le peuple croate. Ensuite, vous

 11   vouliez vous en aller et nous abandonner. Ceci est exact.

 12   Maintenant, pour ce qui est de la polémique politique et de la

 13   terminologie utilisée, cette terminologie a été celle qu'elle a été.

 14   Question: Il n'est donc pas contesté que j'avais insisté pour que vous

 15   vous rendiez à Paris et ailleurs pour négocier aux fins de trouver une

 16   solution pacifique. Il n'est pas contesté non plus le fait que je vous

 17   avais proposé d'accepter les solutions avancées par la Conférence de La

 18   Haye. Il n'est pas contesté non plus qu'à la fin, j'ai réussi à faire en

 19   sorte que l'assemblée de la Krajina accepte le plan Vance; mais c'est moi

 20   la personne qui vous avait encouragé pour mettre en place, pour installer

 21   de la haine entre les Serbes et les Croates, moi qui étais à Belgrade,

 22   n'est-ce pas?

 23   Réponse: C'est vous qui avez conduit la guerre, et c'est ainsi que vous

 24   aviez installé la haine des Croates à l'égard des Serbes.

 25   M. Milosevic (interprétation): (En riant.) Nous reviendrons à ce type de

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  1   faits un peu plus tard.

  2   Je voudrais que vous nous parliez maintenant au sujet de cette interview

  3   finlandaise où vous avez affirmé la chose suivante, en induisant l'opinion

  4   publique dans l'erreur: "Babic a dit qu'il n'y avait pas de désaccord au

  5   sein du gouvernement de la Krajina. En répondant aux questions portant sur

  6   le soutien de Milosevic en Krajina, il a dit que c'était un soutien tout à

  7   fait négligeable."

  8   Par conséquent, vous vous êtes efforcé de convaincre l'opinion publique en

  9   disant que vous réussirez certainement à rejeter ce plan de paix. Ce sont

 10   là deux interviews seulement qui ont été accordées à cette époque-là.

 11   Et vous affirmez ou continuez d'affirmer que la lettre avait été écrite

 12   par Rasuo et les interviews pour ces télévisions, pour la télévision

 13   finlandaise et "Borba" ont été rédigées par Rasuo?

 14   Réponse: Non.

 15   Question: Où se trouve la différence entre votre lettre de tout à l'heure

 16   que vous avez citée, où vous avez cité une seule position neutre et vous

 17   avez affirmé que c'était vous qui l'aviez rédigée? Pourquoi alors avez-

 18   vous essayé de prendre des distances par rapport à la lettre que vous avez

 19   rédigée vous-même?

 20   Réponse: Je n'ai pas pris de distance par rapport à celle-ci.

 21   M. Milosevic (interprétation): Eh bien, très bien!

 22   Je ne sais pas s'il est indispensable de rester à huis clos partiel?

 23   M. le Président (interprétation): Revenons en audience publique.

 24   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 22.)

 25   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

Page 13640

  1   M. Milosevic (interprétation): Alors, partant de ces événements, je

  2   voudrais que nous en revenions au Dr Jovan Raskovic, Président de ce Parti

  3   démocrate serbe et fondateur de ce Parti démocratique serbe.

  4   J'imagine qu'il n'est pas contesté le fait que le Pr Raskovic avait été un

  5   psychiatre de grande renommée, n'est-ce pas? C'est bien vrai, n'est-ce

  6   pas?

  7   Milan Babic (interprétation): Oui, c'était un médecin, un académicien

  8   très connu.

  9   Question: Et qui plus est, par ses œuvres scientifiques en sa qualité de

 10   psychiatre, il s'était élevé…, je dirais qu'il était devenu membre de

 11   l'Académie des sciences. C'était donc là une personne des plus connues

 12   pour ce qui est des psychiatres, avec une réputation mondiale. Ce n'est

 13   pas chose contestée, n'est-ce pas?

 14   Réponse: Où est votre question?

 15   Question: Pardon?

 16   Réponse: Où est la question?

 17   Question: Est-il contesté d'affirme que le Pr Jovan Raskovic, en sus

 18   d'avoir été un homme tout à fait intègre et d'avoir été un homme qui

 19   s'était efforcé de résoudre les choses de façon pacifique, avait également

 20   été une personne très connue, très compétente et très célèbre en sa

 21   qualité de psychiatre?

 22   Réponse: Pour autant que je le sache, c'était un médecin très apprécié,

 23   ainsi qu'un académicien.

 24   M. Milosevic (interprétation): Et serait-il exact de dire qu'à plusieurs

 25   reprises, il avait souligné qu'il avait remarqué chez vous des éléments de

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  1   schizophrénie narcissoïde?

  2   M. le Président (interprétation): Je pense que ceci est tout à fait

  3   inadéquat, c'est hors de propos. Je pense que c'est un commentaire. Et un

  4   commentaire assez bon marché qui plus est. Votre question suivante, s'il

  5   vous plaît.

  6   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, c'est une question des plus

  7   appropriées à la lumière des questions dont nous avons débattu à huis clos

  8   partiel, parce que seule une personnalité avec de telles

  9   caractéristiques...

 10   M. le Président (interprétation): Non, non, vous n'êtes pas un psychiatre.

 11   Vous êtes censé poser des questions. Je doute que vous puissiez appeler

 12   des témoins à la barre à ce propos. J'en doute vivement. Je pense que

 13   cette question n'est adéquate pour personne, que ce que soit vous qui la

 14   posiez ou quelqu'un d'autre. Je pense que c'est une pique, une pointe en

 15   dessous de la ceinture.

 16   M. Milosevic (interprétation): Bien. Spécifions la question.

 17   Pensez-vous que des qualités de cette nature, qui sont les vôtres,

 18   pouvaient avoir une influence quelconque?

 19   M. le Président (interprétation): Cette question-ci est hors de propos. Je

 20   viens de statuer. Passez à autre chose.

 21   M. Milosevic (interprétation): Très bien. Je suppose que vous n'allez pas

 22   autoriser non plus la question que j'allais poser. Mais pouvons-nous, à ce

 23   sujet-là, entendre seulement le commentaire partant de cet entretien

 24   intercepté, donc l'écoute?

 25   Je vais vous rappeler la chose. Je ne vais pas fouiller dans tous les

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  1   papiers que j'ai ici, mais c'est l'écoute interceptée où le témoin devait

  2   aller à une entrevue très importante, une entrevue capitale, pour ce qui

  3   est des intérêts du peuple qu'il représentait et il ne l'a pas fait rien

  4   que parce que...

  5   (Mme Uertz-Retzlaff se lève.)

  6   M. le Président: Huis clos partiel.

  7  (Huis clos partiel à 10 heures 27) [Confidentialité levée par une ordonnance

  8   de la Chambre] Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  9   M. Milosevic (interprétation): Donc il avait refusé d'aller à l'étranger à

 10   une réunion parce que l'on n'avait pas traité avec suffisamment de

 11   considération, en sa qualité de Premier ministre ou Président de l'Etat…

 12   enfin, indépendamment de la fonction qu'il occupait à l'époque. Donc il

 13   s'agissait non seulement d'une susceptibilité exagérée, mais d'une

 14   irresponsabilité extrême à l'égard des personnes qu'il représentait, parce

 15   qu'il s'agissait là d'une conférence de paix. Et c'est là la conversation

 16   interceptée à laquelle je fais référence.

 17   Milan Babic (interprétation): Mais quelle est la question?

 18   M. Milosevic (interprétation): Mais la question que je pose, c'est celle

 19   de savoir si cette question-là, cette question afférente au prestige, au

 20   traitement, l'emporte ou devait l'emporter par rapport à la nécessité

 21   d'aller négocier; donc cette question de prestige et de traitement pour

 22   savoir comment on allait se comporter à l'égard d'un chef de gouvernement

 23   ou d'un chef de l'Etat, devrait l'emporter sur la nécessité de continuer à

 24   négocier et de parvenir à la paix?

 25   Milan Babic (interprétation): Ce que je puis dire, c'est la chose

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  1   suivante…

  2   M. le Président (interprétation): Avant que vous ne répondiez, je pense

  3   qu'il nous faut une référence.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit de l'intercalaire 15 dans

  5   le classeur reprenant les écoutes.

  6   M. le Président (interprétation): Merci.

  7   Maintenant, vous pouvez répondre.

  8   Milan Babic (interprétation): Il s'agissait de la chose suivante, ma

  9   position politique avait été la suivante: la SAO de Krajina devait être

 10   représentée comme une partie sur pied d'égalité dans la conférence sur

 11   l'ex-Yougoslavie et non pas à la sous-commission chargée des minorités

 12   nationales; c'est de cela qu'il s'agissait et non pas de prestige

 13   personnel.

 14   M. Milosevic (interprétation): Les gens qui occupaient des fonctions

 15   dirigeantes ont-ils eu raison de dire qu'après la Conférence de La Haye,

 16   l'intéressé a convoqué une réunion du gouvernement de la Krajina, et ce

 17   gouvernement était composé de cadres essentiellement originaires de Knin?

 18   Donc vous avez convoqué une session du gouvernement, vous étiez en colère

 19   contre moi et vous leur disiez…, vous étiez furieux contre moi et vous

 20   leur disiez, à vos collaborateurs du gouvernement de la Krajina, que

 21   c'était moi qui vous contraignait à accepter ce statut spécial pour la

 22   Krajina. Et vous disiez que je ne cherchais qu'à me débarrasser de vous et

 23   à vous laisser, vous abandonner en Croatie, chose que vous n'alliez jamais

 24   accepter.

 25   Est-ce que c'est une citation correcte que j'ai faite des dires de vos

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  1   collaborateurs et des membres de la direction et du gouvernement de la

  2   Krajina, à l'époque? En a-t-il été ainsi ou pas?

  3   Milan Babic (interprétation): Il y avait eu deux approches différentes de

  4   votre part à mon égard et à l'égard de la présentation de nos positions

  5   politiques à la Conférence de La Haye. L'une de ces positions ou l'une de

  6   ces attitudes est celle du 20 octobre où vous cherchiez à nous contraindre

  7   à accepter les documents de La Haye.

  8   Par la suite, votre attitude a été quelque peu différente, à savoir les

  9   quatre points que vous aviez proposés ne s'intégraient pas dans les

 10   documents de La Haye, s'agissant de ce qui avait été prévu pour ma

 11   troisième rencontre avec M. Wijnaendts. Je ne puis comprendre maintenant à

 12   l'occasion de quoi vous êtes en train de faire ces commentaires ou de

 13   présenter des assertions de ce type.

 14   M. le Président (interprétation): L'heure de la pause est maintenant

 15   dépassée. Nous allons ménager une pause maintenant. Nous pourrons revenir

 16   à l'examen de ces documents par la suite.

 17   Pause de 20 minutes.

 18   (L'audience, suspendue à 10 heures 35, est reprise à 10 heures 55.)

 19   Mme Anoya (interprétation): Nous reprenons à huis clos partiel, Monsieur

 20   le Président, Messieurs les Juges.

 21   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

 22   M. Milosevic (interprétation): Ne confondons pas les deux questions

 23   relatives au plan Carrington d'une part, car il y a ce deuxième aspect qui

 24   est relatif à l'allocution que j'ai prononcée à la conférence de La Haye,

 25   allocution dans laquelle je me suis opposé aux tentatives destinées –et ce

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  1   sont les mots que j'ai utilisés- à ce que la Yougoslavie soit démantelée

  2   par un coup de plume. Donc je m'opposais au démantèlement de la

  3   Yougoslavie et ceci n'a rien à voir avec la Krajina et son statut spécial

  4   que vous demandiez. Donc vos collaborateurs disent: il était furieux

  5   contre moi parce que je le forçais à accepter le statut spécial; selon

  6   lui, je souhaitais simplement me débarrasser de lui et le laisser en

  7   Croatie, ce qui n'était pas acceptable. Est-ce bien cela?

  8   Milan Babic (interprétation): Jusqu'au 20 octobre, vous nous avez forcés

  9   à accepter le statut spécial que l'on trouvait dans le document de la

 10   conférence de La Haye. Et le 23 octobre, vous m'avez dit que nous devrions

 11   accepter un statut spécial sur le territoire yougoslave.

 12   Question: Ceci est inexact, mais poursuivons. Continuons à voir ce que

 13   disaient vos collaborateurs de l'époque. Ils disaient -je cite-: "Aucun

 14   d'entre nous ne commentait tout cela car nous avions du respect pour M.

 15   Milosevic et nous pensions que le projet était sans doute bon –il est

 16   question ici du statut spécial. Donc nous considérons que c'est Babic lui-

 17   même qui a pris la décision de rejeter le statut spécial au nom du

 18   gouvernement". Ceci est-il exact ou pas?

 19   Réponse: Non, ceci est inexact. J'ai toujours consulté le gouvernement. Et

 20   en fait, je n'ai pas rejeté le statut spécial; il a toujours été dit que

 21   les débats à ce sujet allaient se poursuivre.

 22   Question: Mais je vous interroge en ce moment au sujet de ce qu'ont

 23   affirmé ces personnes, des personnes qui sont prêtes à venir ici témoigner

 24   à ce sujet. Ces collaborateurs disaient: "Il s'est proclamé commandant de

 25   la Défense territoriale de la SAO de Krajina en dehors de toute décision

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  1   gouvernementale, puisque le gouvernement ne s'est même pas réuni. Et Milan

  2   Martic, il l'a nommé, à son insu, commandant adjoint.". Ceci est-il exact

  3   ou pas?

  4   Réponse: Non.

  5   Question: Eh bien, j'ai ici la décision signée par vous qui nomme Milan

  6   Martic commandant adjoint de la Défense territoriale.

  7   Réponse: Ceci s'est fait sur la base d'une autorisation du Premier

  8   ministre, en application de la loi sur la Défense nationale de la

  9   République de Serbie relative au Gouvernement de SAO de Krajina en date du

 10   1er août 1991, décision prise donc à cette date d'appliquer la loi en

 11   vigueur sur le territoire de la SAO de Krajina. Et bien sûr, il était

 12   d'accord avec cela, avec cette nomination.

 13   Question: Est-il exact que le colonel Pero Trbojevic, à l'automne 1991, a

 14   été contraint par vous à prendre le commandement de la Défense

 15   territoriale de Lika, dans le cadre de la mobilisation décrétée du jour au

 16   lendemain dans la municipalité de Gradacac et de Donji Lapac, aux fins

 17   d'expulser tous les Croates armés et désarmés de Gradacac et ce, jusqu'à

 18   Gospic ou plutôt Medak? Ceci est-il exact ou pas?

 19   Réponse: Non. J'ai déjà parlé de cela, j'ai dit et expliqué comment le

 20   colonel Trbojevic était arrivé, comment s'était passée la mobilisation au

 21   sein de la 1ère Brigade légère ou plutôt de la 1ère Brigade de la Défense

 22   territoriale, comme on l'appelait à l'époque. Donc j'ai lancé un appel à

 23   l'intention de la population pour qu'elle accepte la mobilisation au sein

 24   de cette Brigade.

 25   Question: Mais ici, les choses sont expliquées différemment. Il est dit

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  1   que la JNA avait l'intention de dégager l'entrepôt, le dépôt d'armes de

  2   Medak qui était un dépôt, donc situé non loin de Medak, parce que vous

  3   étiez très précis, vous vouliez que les gens de Gospic soient mieux

  4   entraînés, vous estimiez qu'ils n'étaient pas bien entraînés, à l'époque.

  5   Et c'est à ce moment-là que des policiers croates se sont enfuis et

  6   qu'avec vos volontaires, vous avez mis le feu à tous ces villages dont le

  7   plus grand est Lovenac (phon.). C'est bien ça, n'est-ce pas?

  8   Réponse: Non.

  9   Question: Et c'est ainsi que vous vous êtes emparés de Sveti Rok?

 10   Réponse: Non.

 11   Question: Et vous avez décrété que cette opération était un de vos succès

 12   personnels; est-ce exact ou pas?

 13   Réponse: Non.

 14   Question: Ce qui est dit également, à savoir que s'agissant de Momcilo

 15   Djujic et de l'organisation tchénique "Chicago", en 1990, vous avez voté

 16   personnellement une loi qui introduisait une interdiction de travail du

 17   parti communiste, à l'époque?

 18   Réponse: Le 7 janvier 1992, un décret a été voté, que j'ai signé en ma

 19   qualité de Président de la République serbe de Krajina, et qui interdisait

 20   le Parti communiste ainsi que toutes les organisations et les structures

 21   communistes sur le territoire serbe de Krajina. Et ceci, pas pour les

 22   raisons que vous dites, mais parce qu'il s'agissait de prendre une

 23   position politique nette. Nous pensions que c'était une manière pour nous

 24   de nous écarter, de nous distinguer de vous et de votre politique.

 25   Question: Très bien. Donc vous dites que vous vouliez vous distinguer de

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  1   la Serbie à ce moment-là et que c'est en raison de cela que vous avez agi

  2   de la sorte? Ceci est en contradiction importante avec ce qui s'est passé

  3   par rapport à la République de Serbie lorsque vous dites que vous suiviez

  4   les ordres et les instructions de Serbie. Cependant, il ne s'agissait pas

  5   d'une loi, mais d'un décret?

  6   Réponse: Oui, c'était un décret qui a été promulgué…

  7   Question: C'est exact. C'est exact. Vous avez tout à fait raison. J'ai ici

  8   ce texte, donc: "En application de l'article 78, le Président de la RSK

  9   met en vigueur une loi destinée à interdire le travail, etc., etc., ainsi

 10   que le fonctionnement des partis communistes, organisations et réunions du

 11   Parti communiste sur ce territoire". Et puis, dans le reste du texte, on

 12   lit que ces activités politiques sont interdites. "Article 2: la loi entre

 13   en vigueur immédiatement".

 14   Donc il y a deux articles à cette loi. C'est vous personnellement qui

 15   l'avez proposée et qui l'avez mise en vigueur. Vous avez donc pris sur

 16   vous des pouvoirs législatifs?

 17   Réponse: En m'appuyant sur l'article général de la Constitution de la RSK,

 18   interprété par des experts selon lesquels il était légal d'agir de la

 19   sorte sur le plan politique. Donc les dispositions légales étaient

 20   respectées, mais c'était un point de vue politique.

 21   Question: Et est-il vrai que vous proclamez le Pr Raskovic… vous le

 22   traitez de "traître", qui collabore avec Tudjman dans le seul but de

 23   négocier, de discuter avec lui au sujet d'une solution pacifique, pour

 24   vous débarrasser de Jovo Raskovic, n'est-ce pas?

 25   Réponse: Non. Lorsque le Pr Raskovic négociait avec Tudjman, j'étais en

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  1   très bons termes avec lui et j'ai dit qu'il existait effectivement une

  2   fraction qui lui était opposée et qui a commencé à polémiquer avec lui. Le

  3   premier problème que j'ai eu avec le Pr Raskovic s'est situé le 17 février

  4   1991 eu égard à l'organisation du Parti démocratique serbe; en fait, un

  5   débat a commencé au sujet des changements prévus dans la structure du

  6   parti et dans les positions à adopter vis-à-vis des conseils régionaux,

  7   s'agissant de l'application de la Constitution. Donc, jusqu'à ce moment-

  8   là, je ne me rappelle pas qu'il y ait eu quelque débat public que ce soit.

  9   Question: Très bien. Donc vous dites ne pas avoir mené campagne pour

 10   compromettre le Pr Raskovic, eu égard aux rencontres qu'il avait avec le

 11   Président Tudjman?

 12   Réponse: Il y a des gens qui l'ont fait, mais pas moi.

 13   Question: Mais s'agissant de ce qui s'est passé à Dubica, pourquoi blâmez-

 14   vous Milan Martic, alors que vous savez très bien que cet acte est dû à

 15   des criminels du SDS, comme ceci est rapporté par vos collaborateurs de

 16   l'époque?

 17   Réponse: Je ne sais pas qui était l'auteur de cet acte. Moi, ce que j'ai

 18   dit, correspondait à ce que je savais.

 19   Question: Savez-vous qu'à cette époque, Milan Martic n'avait pas pris le

 20   moindre contrôle de ces régions et qu'à Dubica, au SDS, votre homme était

 21   Mile Misljenovic, un facteur. C'est cela ou pas?

 22   Réponse: De quel événement particulier parlez-vous?

 23   Question: Je parle des événements survenus à Dubica.

 24   Réponse: J'ai dit exactement ce que je savais au sujet de ces événements.

 25   Question: Eh bien, on n'en a pas l'impression à voir ce que vos

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  1   collaborateurs affirment.

  2   Est-il exact qu'avant les affrontements de Kiev, près de Knin, vous n'avez

  3   cessé d'exercer des pressions sur le commandement du Corps d'armée, donc

  4   sur le général Spiro Ninkevic et Ratko Mladic, et que votre village,

  5   Kukor, le village où vous êtes né, était encerclé, selon ce que vous

  6   disiez, et que cela exigeait une attaque pour libérer le secteur? Est-ce

  7   exact ou pas?

  8   Réponse: Je vous ai déjà parlé de cela.

  9   Question: Quand je vous ai demandé pourquoi lancer une telle attaque, est-

 10   il vrai qu'on m'a répondu à l'époque qu'il fallait libérer Kumrovec?

 11   Réponse: Quand j'ai parlé des événements de Kotlic et de Vrlika, vous avez

 12   dit que tout était déjà réglé à cet égard et, le lendemain, j'ai appris

 13   que l'attaque contre Kijevo avait commencé.

 14   Question: Vous avez donc appris ce qui se passait alors que vous étiez là-

 15   bas à ce moment-là?

 16   Réponse: Le 26, j'étais chez vous, la veille ou plutôt le jour de

 17   l'attaque. Je suis arrivé la veille au soir à Belgrade, j'ai été convoqué

 18   chez vous et, le jour de l'attaque, j'étais chez vous dans votre cabinet.

 19   Nous avons parlé de "Frenki", de Spiro Nikolic et des problèmes dans les

 20   environs de Vrlika. Et vous avez fait un certain nombre de commentaires.

 21   Ceci est bien connu. Comme ce que vous ce que vous avez dit au sujet de

 22   "Frenki", disant qu'il fallait qu'il soit en Krajina parce que c'était un

 23   homme bien. Et vous m'avez interrogé au sujet de Spiro Nikolic et j'ai

 24   répondu que c'était un homme acceptable, que je n'avais rien contre lui.

 25   Cela s'est passé le jour où la JNA, avec toutes les unités sous son

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  1   commandement, a lancé l'attaque sur Kijevo.

  2   Question: Est-il exact que personne n'est mort durant cette attaque?

  3   Réponse: Je ne sais pas exactement quel est le nombre de blessés ou de

  4   morts. Je ne dispose pas de ces renseignements.

  5   Question: Je lis ici que "Lors de l'attaque de Kijevo, personne n'a trouvé

  6   la mort et que la police croate avait au préalable tué un jeune homme

  7   répondant au nom de Vaso Pecer, quelques jours avant l'attaque, dans un

  8   village des environs".

  9   Réponse: Vaso Pecer est mort le 2 mai 1991, lors d'incidents entre la DB

 10   et la police de Golubic. Cela s'est passé en mai 1991, alors que la JNA a

 11   attaqué Kijevo, le 26 août 1991.

 12   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, pourrais-je lire en audience

 13   publique un démenti envoyé par Marko Dobrijevic, secrétaire du Parti

 14   démocratique serbe et directeur d'une entreprise communale de Knin pendant

 15   la guerre, député également de la dernière assemblée, lors de sa dernière

 16   session -je parle de l'assemblée serbe de Krajina-, démenti signé par lui.

 17   Ce démenti stipule qu'il est d'accord pour que ses propos soient rendus

 18   publics au cours du procès qui m'est intenté. Il fait mention de C-061 et

 19   aucun nom propre ne figure dans le texte.

 20   Mais je suppose que vous souhaiterez comme moi que j'interroge le témoin à

 21   ce sujet, ce que j'aimerais faire dans le cadre de débats publics.

 22   J'aimerais donc pouvoir lire ce démenti en public, si vous m'y autorisez,

 23   avant de demander au témoin de faire des commentaires.

 24   M. le Président (interprétation): Vous pouvez soumettre ce texte au

 25   témoin.

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  1   Vous ne pouvez pas verser au dossier ce document, pour les raisons que

  2   vous connaissez. Vous devez laisser le témoin répondre aux diverses

  3   allégations éventuellement faites dans le texte; ça, il n'y a aucun doute

  4   à ce sujet.

  5   Quant au fait de savoir si cela peut se passer en audience publique, à

  6   condition que rien ne permette d'identifier le témoin, c'est possible.

  7   Mais à aucun moment, il ne faut que le témoin risque d'être identifié.

  8   Dans des cas de ce genre, il faudra passer à huis clos partiel. Mais vous

  9   pouvez commencer en audience publique.

 10   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 11.)

 11   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique, Monsieur le

 12   Président.

 13   M. Milosevic (interprétation): J'ai ici la déclaration qui a faite durant

 14   le témoignage du Milan Babic, déclaration envoyée par Marko Dobrijevic,

 15   député de la dernière assemblée de la République serbe de Krajina, ancien

 16   directeur d'une entreprise communale de Knin avant la guerre, secrétaire

 17   du SDS. Il signe ce texte avec son nom et son prénom, et dit ce qui suit

 18   dans le cadre de la déposition qui est faite, en ce moment, dans ce

 19   prétoire. Je cite…

 20   M. le Président (interprétation): Que cette personne souhaite que ceci

 21   soit lu en public ou pas, n'a pas d'importance. Ce qui est pertinent,

 22   c'est que vous pouvez donner lecture au témoin de propos qui contredisent

 23   les siens. C'est cela qui est pertinent, et non pas ce que la personne

 24   souhaite faire de ce document. Veuillez procéder.

 25   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je pense qu'il est dans

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  1   l'intérêt de la vérité que lecture soit faite de cette déclaration. Quant

  2   au témoin, il répondra à mes questions après que ce que texte aura été lu

  3   par moi, si vous m'y autorisez.

  4   M. le Président (interprétation): Vous n'allez pas lire cette déclaration

  5   car ce n'est pas une pièce à conviction, mais ce que vous pouvez faire,

  6   c'est soumettre des portions de ce texte au témoin pour lui demander ses

  7   commentaires. Il faut que le témoin puisse commenter ces portions du texte

  8   au fur et à mesure. Vous ne pouvez pas lui soumettre ce document comme

  9   étant une pièce à conviction. Veuillez, maintenant, soumettre au témoin

 10   des portions de ce document, si vous le souhaitez.

 11   M. Milosevic (interprétation): Dans cette déclaration, il est stipulé que

 12   tout ce que le témoin faisait à l'époque était mal fait et qu'aujourd'hui,

 13   il en accuse des tierces personnes à La Haye. Le témoin prétend n'avoir

 14   jamais rencontré certaines personnes; alors qu'aujourd'hui, il les blâme

 15   pour des choses qui n'existent que dans son esprit. Voilà ce qui est dit.

 16   Vous avez parlé de Jovica Stanisic dont vous n'avez entendu parler qu'à la

 17   télévision. Savez-vous que Jovica Stanisic s'était marié à une femme de

 18   Javrsak, près de Knin et qu'il venait rendre visite à ses beaux-parents

 19   avant la guerre et pendant la guerre? Ceci est-il exact ou pas?

 20   Milan Babic (interprétation): J'ai vu Jovica Stanisic pour la première

 21   fois chez vous, en 1990, puis en janvier 1991. Je l'ai vu chez vous, dans

 22   votre Cabinet, en mars 1991. Je l'ai rencontré chez lui, dans son bureau,

 23   en mars 1991 ou en février, et je crois l'avoir rencontré encore à de

 24   nombreuses autres reprises; ce que j'ai dit devant ce Tribunal.

 25   Quant au fait que Jovica Stanisic était marié à Javrsak, il me l'a dit

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  1   dans le café-restaurant "Seher", en août 1991, lorsqu'il m'a présenté à sa

  2   femme et lorsqu'il a dit que le capitaine Dragan lui devait de l'argent

  3   qui venait des services de la sûreté d'Etat, qu'il était parti avec cet

  4   argent.

  5   Question: Et qu'il venait rendre visite à ses beaux-parents pendant la

  6   guerre et avant la guerre, ceci est-il exact ou pas?

  7   Réponse: Je n'en sais rien.

  8   M. Milosevic (interprétation): Il est dit ici que, dans votre imagination

  9   malade, toute personne venant de Serbie était envoyée par la sûreté d'Etat

 10   de Serbie.

 11   M. le Président (interprétation): Vous n'avez pas besoin de répondre à

 12   cette question, Monsieur le Témoin, il s'agit simplement d'une allégation.

 13   M. Milosevic (interprétation): L'auteur de ce document dit ce qui suit, et

 14   c'est ce qui est écrit, Monsieur C-061 -je cite-: "Toutes les structures

 15   que tu appelles 'des structures parallèles' ont été créées par toi. Le

 16   quartier général de Golubic a été créé par toi, et à l'insu de tous, tu as

 17   décrété l'état de guerre le 17 août 1990." Ceci est-il exact ou pas?

 18   Milan Babic (interprétation): Le quartier général de Golubic, qui a été

 19   créé en 1990 et a fonctionné pendant un certain temps à Golubic, donc créé

 20   au mois d'août et ayant fonctionné jusqu'à septembre de cette année, a

 21   résulté d'une décision prise lors d'une séance du Parti démocratique serbe

 22   présidée par Raskovic et tenue le 18 août 1991. Dusan Zelenbaba, Branko

 23   Peric et Milan Martic, ainsi que d'autres ont siégé au sein de ce quartier

 24   général. C'est en août 1990 que ce quartier général a été créé et j'en ai

 25   déjà parlé ici dans ce prétoire; l'état de guerre ayant décrété à Knin en

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  1   août 1990.

  2   Question: Mais l'auteur de ce document dit: "C'est pour dissimuler tes

  3   responsabilités que tu es tombé à bras raccourcis sur la journaliste

  4   Snezana Abramovic, lorsque tu as gravement critiqué la Fédération."

  5   Cette journaliste travaillait à Radio Knin. Ceci est-il exact ou pas?

  6   Réponse: Non, je n'ai jamais fait mention du nom de cette femme.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, nous entrons

  8   dans de nombreux détails et je pense qu'il faudrait passer à huis clos

  9   partiel.

 10   M. Milosevic (interprétation): Je ne pense pas qu'il soit indispensable de

 11   parler de cela à huis clos partiel.

 12   M. le Président (interprétation): Si vous pensez que des éléments, que

 13   vous allez mentionner, risquent de permettre l'identification du témoin,

 14   nous devons passer à huis clos partiel. Mais pour le moment, poursuivez en

 15   audience publique.

 16   M. Milosevic (interprétation): L'auteur de ce document dit: "Tu as menti,

 17   tu blâmes la Serbie et sa direction pour la création d'un gouvernement

 18   parallèle en Krajina, alors que toutes les nominations, c'est toi qui

 19   malheureusement les a faites à ta propre initiative." Ceci est-il exact ou

 20   pas?

 21   Milan Babic (interprétation): La création des structures de Krajina, la

 22   composition de ces structures, l'action de ces structures, j'en ai déjà

 23   parlé devant ce Tribunal dans ma déposition.

 24   M. Milosevic (interprétation): Pour autant que j'aie pu le remarquer,

 25   lorsque je vous ai demandé d'énumérer le nom ne serait-ce que de quelques

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  1   personnes de Serbie, vous avez réussi à citer le nom de quatre personnes

  2   qui d'ailleurs ne pouvaient pas se trouver là-bas car elles travaillaient

  3   à Belgrade à l'époque.

  4   M. le Président (interprétation): Nous avons déjà parlé de cela, nous

  5   n'avons pas besoin d'y revenir.

  6   M. Milosevic (interprétation): Bon. Pour éviter que la partie adverse

  7   demande un huis clos partiel, je parlerai des éléments complémentaires qui

  8   risquent de permettre l'identification du témoin un peu plus tard. Mais je

  9   lis ce qui suit dans ce même document: "Tu sais que lorsque tu affirmes

 10   que des Croates ont été expulsés de Knin, il s'agit de mensonges. Il est

 11   vrai que ces personnes ont répondu à l'invitation de Tudjman et ont quitté

 12   la Krajina.

 13   Mon chauffeur, par exemple, a été engagé en 1993, c'est-à-dire en pleine

 14   guerre avec la Croatie. Il s'appelle Andrija Butkovic.

 15   Bosiljka Curko, qui était employée à la municipalité de Knin, a quitté

 16   Knin sur invitation de Tudjman. Je lui ai demandé personnellement de

 17   rester. Je lui ai proposé, si elle avait peur de quelqu'un, de venir vivre

 18   dans ma famille, elle et toute sa famille. Elle m'a dit que ce n'était pas

 19   ça le problème, que d'autres partaient et qu'elle partait également. Au

 20   moment de son départ, elle a salué tout le monde et m'a remis une

 21   bouteille de whisky et, bien sûr, nous nous sommes embrassés en nous

 22   disant adieu.

 23   Pendant toute la guerre, jusqu'en 1995, le réservoir principal d'eau douce

 24   de Knin, était gardé par Stipe Gambiroza, un Croate, qui apportait

 25   également de la nourriture à l'école maternelle de Knin pendant toute la

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  1   guerre.

  2   Ceci est-il exact ou pas?

  3   Milan Babic (interprétation): J'ai parlé de tout cela. J'ai dit tout ce

  4   que j'en savais. Tout ce que je savais à ce sujet, je l'ai dit devant ce

  5   Tribunal.

  6   M. Milosevic (interprétation): Bon! Lors de la compétition destinée à

  7   récompenser la personne qui avait le mieux décoré son balcon à Knin, des

  8   récompenses ont été distribuées qui se montaient à 100.000, 200.000 et

  9   300.000. Les deux premiers prix ont été gagnés par des femmes croates, et

 10   le troisième par une femme serbe. Tout ceci a été annoncé à Radio Knin.

 11   Alors, de quelle expulsion parlez-vous? Je vous pose moi, Monsieur le

 12   Témoin, la même question que celle qui figure dans ce démenti.

 13   M. le Président (interprétation): Avez-vous eu connaissance de ce concours

 14   du balcon le mieux fleuri?

 15   Milan Babic (interprétation): Je ne m'en souviens pas, Monsieur le

 16   Président.

 17   M. le Président (interprétation): Est-il exact qu'il y a des Croates qui

 18   sont restés à Knin ou pas?

 19   Milan Babic (interprétation): Oui, il y en a. Il y en a, je les connais.

 20   Ma voisine Baba Kaja est restée; d'ailleurs, c'est elle que je

 21   mentionnerais en premier. Il y en a eu d'autres dont je ne vais pas citer

 22   les noms maintenant.

 23   J'ai parlé des souffrances importantes vécues par les Croates de Kijevo

 24   lorsque la JNA a attaqué le village à l'arme lourde. J'ai parlé de la

 25   misère de la tragédie qu'a été l'expulsion des Croates en 1993 hors de

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  1   Vrpolje.

  2   J'ai dit que les Croates se sentaient mal dans la région de Knin à ce

  3   moment-là en raison des affrontements et des divergences politiques, et

  4   j'ai parlé notamment des événements survenus en avril 1991.

  5   M. le Président (interprétation): Vous n'avez pas besoin de reparler de

  6   tout cela. La question que je vous posais consistait simplement à vous

  7   demander si des Croates étaient restés.

  8   Monsieur Milosevic, vous pouvez procéder.

  9   M. Milosevic (interprétation): C'est très bien. C'est parfait. Car la

 10   citation suivante du document que je suis en train de discuter est un

 11   démenti de ce que vous venez de dire précisément -je cite: "S'il en était

 12   ainsi, est-ce que les Croates de Knin auraient signé en 1996, donc après

 13   l'opération "Tempête", une pétition demandant le retour des Croates à

 14   Knin? Malheureusement, M. Curko qui a remis la pétition en question au

 15   Parlement de Croatie a été attendu par des membres du HDZ et passé à

 16   tabac. Ceci est-il exact ou pas?

 17   Milan Babic (interprétation): Je ne connais pas les détails mais je sais

 18   que de nombreux Serbes de Knin regrettaient le départ des Serbes et ont

 19   exprimé leur désir de rentrer.

 20   Question: Je poursuis -je cite: "Dans le village de Rupe, dans lequel des

 21   civils croates ont été tués, selon les témoins, chacun sait qu'il ne

 22   s'agit que de pures inventions. Ces civils sont restés, et sont partis en

 23   même temps que les membres de l'armée, les membres de la JNA. Un habitant

 24   de Rupe qui a rejoint sa famille à Sibenik, en étant autorisé à le faire,

 25   bien sûr, a déclaré après son arrivée à Sibenik que les Serbes ne lui

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  1   avaient rien fait du tout. Bien au contraire, qu'ils lui avaient donné des

  2   vivres dont il manquait à l'époque, et il a été tué par des Croates de

  3   Sibenik."

  4   Maintenant, je ne vais pas lire ce qui, dans ce texte, vous concerne

  5   personnellement.

  6   Réponse: S'agissant de cet événement particulier, j'ai parlé du procès qui

  7   avait été intenté à l'époque contre les auteurs de crimes. Je me souviens

  8   qu'un groupe d'hommes avaient été jugés dans cette affaire. Il me semble

  9   que l'un d'entre eux avait été tué à Rupe ou dans les environs, et que ces

 10   hommes s'étaient vengés sur leurs voisins croates, qu'ils les avaient

 11   tués, et que c'était cela qui avait été la cause du procès. C'est dans ce

 12   contexte que j'ai parlé de toute cette affaire.

 13   Question: Mais vous avez sans doute confondu!

 14   Réponse: J'ai dit que je ne savais plus très bien si l'assassinat avait eu

 15   lieu à Rupe ou à Ervenik et je me suis corrigé. Je me souviens très bien.

 16   Question: Vous ne vous souvenez même pas du lieu où ce dont vous avez

 17   parlé dans votre déposition se serait passé?

 18   Réponse: Je me souviens qu'un assassinat, qu'un meurtre avait eu lieu, que

 19   ces personnes avaient tué des voisins à elles et que c'est la raison pour

 20   laquelle elles ont été jugées.

 21   M. Milosevic (interprétation): La question est posée dans ce texte:

 22   pourquoi ne témoignent-ils pas au sujet de ces 10.000 civils portés

 23   disparus qui sont sortis de l'armée croate et de ces instructeurs

 24   américains qui sont restés à Knin pour témoigner de crimes qu'aucun esprit

 25   humain ne peut même supporter de concevoir?

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  1   M. le Président (interprétation): Ce n'est pas une question au témoin, il

  2   ne peut pas répondre à cette question. C'est un commentaire que vous citez

  3   et qui sort de cette lettre.

  4   M. Milosevic (interprétation): Dobrijevic déclare que le SDS a été créé

  5   près de Lika, lieu où durant la Deuxième Guerre mondiale des crimes

  6   oustachis ont eu lieu avec l'aide de Hitler lorsque l'Etat indépendant de

  7   Croatie a commis ces crimes.

  8   M. le Président (interprétation): Non pertinent. Veuillez avancer!

  9   M. Milosevic (interprétation): Est-ce bien l'endroit où le SDS a été créé,

 10   Monsieur C-061?

 11   Milan Babic (interprétation): Le 27 janvier 1990, la télévision de

 12   Belgrade a montré l'académicien Raskovic qui annonçait la création du

 13   parti serbe en Croatie. Plus tard, à Kuk près de Lapac -lieu où les

 14   Oustachis ont assassiné des Serbes de la région en 1941-, j'ai entendu de

 15   la bouche de participants à cette réunion fondatrice, qu'un rituel assez

 16   bizarre, un rituel religieux avait été appliqué lors de la création du

 17   Parti démocratique serbe.

 18   M. Milosevic (interprétation): Je poursuis la lecture –je cite-: "Je me

 19   demande d'où viennent toutes ces inventions. Il parle dans son témoignage

 20   de régions où il n'a jamais mis le pied, et tout cela caché par un écran".

 21   M. le Président (interprétation): Ce sont des commentaires sans aucune

 22   utilité. Alors, veuillez avancer, Monsieur Milosevic, parce que le temps

 23   qui vous est dévolu est bientôt épuisé. Veuillez poursuivre, je vous prie.

 24   M. Milosevic (interprétation): Dans ce cas, ici je vais essayer d'abréger

 25   au maximum. Dobrijevic dit ici, et il y a beaucoup d'explications qui sont

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  1   pertinentes pour ce témoin, il dit ceci: "J'écris ceci au nom des enfants

  2   abattus de Konavlje, au nom de ceux de Jasenovac".

  3   M. le Président (interprétation): Ce sont des questions qui n'ont pas lieu

  4   d'être. Quoi qu'il fasse, ceci est sans aucun intérêt pour la Chambre de

  5   première instance. Libre à vous de poser des questions pertinentes qui

  6   seraient de nature à contredire la déposition du témoin, mais je ne pense

  7   pas que vous puissiez ici reprendre les excès qui se trouvent être de la

  8   plume de l'auteur de cette lettre. Ceci n'a aucun intérêt pour nous.

  9   M. Milosevic (interprétation): Mais ce n'est pas n'importe qui ici. C'est

 10   un des plus proches associés du présent témoin; c'est lui qui a fait ce

 11   "salto mortale", ce saut périlleux, pour des questions qui sont bien

 12   connues.

 13   M. le Président (interprétation): Vous pourrez fort bien appeler à la

 14   barre le témoin en temps utile, mais dans l'intervalle, tout ce qu'on peut

 15   faire, c'est soumettre à ce témoin des questions qui seraient pertinentes

 16   et qui seraient de nature à contredire ce qu'il a dit dans le cadre de sa

 17   déposition. Mais parlez de faits et non pas de choses qui sont vraiment

 18   des insultes.

 19   M. Milosevic (interprétation): Ce ne sont pas des insultes si l'on montre

 20   qu'il y a eu des contre-vérités. Mais puisque nous sommes en audience

 21   publique, je ne vais pas aborder ici des détails qui seraient de nature à

 22   permettre l'identification de ce témoin.

 23   Voici donc ma question suivante, qui est fondée sur ce qui s'est dit au

 24   cours de ces journées d'audience et aussi en partie sur ce que je viens de

 25   lire, qui se fonde aussi sur ce que vous avez dit aux enquêteurs, Monsieur

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  1   le Témoin. Il apparaît que vous aviez quelque chose à l'esprit, que vous

  2   faisiez autre chose et que vos dires étaient une troisième chose.

  3   Vous l'avez dit: vous prôniez la paix, vous promouviez la vie à

  4   l'intérieur de la Croatie. Mais dites-moi, est-ce que vous m'avez dit à

  5   moi ou à quiconque en Serbie, en quoi consistaient vos efforts en vue de

  6   la paix? Parce que ni moi ni qui que ce soit d'autre n'aurait pu saper ces

  7   efforts qui étaient les vôtres en vue de la paix. Au moment où on le sait,

  8   encore à ce jour aujourd'hui, ni moi ni personne d'autre en Serbie -ni

  9   d'ailleurs en Krajina, pour dire la vérité- n'était au courant de vos

 10   efforts de paix. Dites-moi donc, s'il vous plaît.

 11   M. le Président (interprétation): Je pense qu'il faut passer à huis clos

 12   partiel.

 13   Mme Anoya: Nous sommes maintenant à huis clos partiel.

 14   (Huis clos partiel à 11 heures 32)

 15   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 16   M. le Président: Monsieur le Milan Babic, ce fut une question assez

 17   longue que celle qui vient de vous être posée, ou plutôt en commentaires.

 18   Pourriez-vous résumer ceci en posant une question plus courte, Monsieur

 19   Milosevic?

 20   M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous, vous m'avez dit à moi ou à

 21   quiconque d'autre en Serbie ou en Krajina, est-ce que vous avez jamais dit

 22   ou soumis une idée concernant le moindre effort de paix qui aurait été le

 23   vôtre?

 24   Milan Babic (interprétation): La dernière fois, ça a été le 8 août 1995.

 25   C'est à ce moment-là que j'ai fait une proposition, mon accord avec le

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  1   plan Z-4 et avec les autres éléments de la conversation que j'avais eue

  2   avec M. Galbraith. Et je demandais votre soutien. Auparavant, je vous

  3   avais déjà parlé de ce plan Z-4; nous avions discuté aussi avec Borislav

  4   Jovic. En août 1990, nous avions parlé des questions relatives à la

  5   sécurité et nous avions parlé d'un règlement politique, vu la crise qui se

  6   présentait à l'horizon. Et lui, il a soutenu nos propositions en votre nom

  7   puisque vous, vous exerciez une influence sur lui; et vous lui avez dit

  8   que vous alliez soutenir notre lutte politique et que la JNA allait

  9   soutenir ou protéger notre lutte politique. Vous avez donné des

 10   instructions quant aux modalités adoptées pour la tenue d'un référendum

 11   politique. Vous avez indiqué quelle serait la base légitime. Vous avez dit

 12   qu'il y avait une loi qui était préparée permettant l'autodétermination

 13   des nations, que c'était un modèle tout à fait légitime, et que nous

 14   soutenions. Nous l'avions soutenue, nous avions soutenu votre modèle parce

 15   que nous croyions que c'était un soutien ou une proposition légitime qui

 16   allait permettre de restaurer la paix sur le territoire de l'ex-

 17   Yougoslavie.

 18   Question: Mais pourquoi est-ce que vous impliquez la JNA alors qu'il n'y

 19   avait pas, en 1992, de conflit et que le rôle de la JNA, à l'époque,

 20   n'était pas quelque chose d'un intérêt plus contemporain? Est-ce que vous

 21   ne faites pas toute cette interprétation parce que vous avez établi que,

 22   par hasard, par coïncidence, il y avait plusieurs personnes qui étaient en

 23   congé en même temps?

 24   Est-ce que ce n'est pas là la preuve de votre narcissisme, si vous

 25   m'envoyiez un message pour me dire que je dois vous recevoir et moi, je

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  1   vous dis qu'il y a quelqu'un de la Présidence de la RSFY qui devrait vous

  2   recevoir et que vous en concluez que j'avais un état-major militaire, une

  3   réunion de l'état-major militaire pour décider qui devait vous recevoir et

  4   qu'il fallait une conférence au sommet pour savoir quelle serait la

  5   décision à prendre?

  6   Réponse: Ici, je ne présente pas d'interprétation. Je ne construis rien du

  7   tout, parce que je dis uniquement ce que je sais.

  8   Question: Mais Pozderac était en congé; parallèlement, il était membre de

  9   la Présidence pour la Bosnie-Herzégovine. C'était un Musulman. Il se peut

 10   que lui aussi, je l'aie consulté pour savoir si je devais recevoir Milan

 11   Babic ou si c'était plutôt quelqu'un de la Présidence qui devait le

 12   recevoir. Il y a aussi quelque 3.000 autres personnes qui étaient en congé

 13   à ce moment-là. Qui sait, qui sait combien de ces personnes auraient été

 14   consultées pour savoir s'il fallait recevoir ou pas M. Milan Babic?

 15   Réponse: Moi, je vous dis ce que je sais. C'est vous qu'on allait voir, et

 16   pas les 3.000 autres.

 17   Question: Non, non. Vous n'êtes pas venu me voir, vous êtes venu voir

 18   Jovic.

 19   Réponse: C'est par Vucetic (?) que nous vous avons contacté.

 20   Question: Nous aurons l'occasion d'en discuter par la suite.

 21   Dans ce document qui est de la main de Dobrijevic, que vous ne voulez pas

 22   lire au moment de l'audience en public, il est dit ceci: "Parmi les

 23   nombreuses fonctions que vous vous êtes attribuées, les gens vous

 24   appelaient "le petit Tito"; ils disaient "le petit Tito": ils faisaient

 25   bien sûr allusion à notre ancien Président. J'explique au cas où vous ne

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  1   sauriez pas ce que cela veut dire dans notre langue. Et on dit que "des

  2   experts en statistiques de l'époque ont fait le décompte de 32 fonctions

  3   que vous avez exercé; les plus importantes étant président du Conseil

  4   national, Président de la République, chef du gouvernement, président

  5   d'une municipalité, président du Parti démocratique serbe."

  6   Est-il exact de dire que vous avez exercé toutes ces fonctions?

  7   Réponse: Je vous l'ai déjà dit ici dans ce prétoire, j'ai parlé de toutes

  8   les fonctions que j'ai occupées. Peut-être pas de toutes, je ne sais pas.

  9   Suivant l'époque, j'ai occupé des fonctions particulières: j'ai été

 10   président de la municipalité pendant quelque quatre ans; j'ai été

 11   président du comité municipal du SDS; j'ai été président du conseil

 12   national à partir du 31 juillet 1990 jusqu'au 28 février 1991 à peu près,

 13   moment où ce conseil a cessé d'exister; j'ai été président de la RSK à

 14   partir du 19 décembre 1991 jusqu'au 16 février 1992.

 15   Est-ce que vous m'avez posé une question à propos d'autres fonctions?

 16   Question: A en juger par tout ce que je sais, ces postes ou fonctions ont

 17   été des fonctions successives, pas exercées simultanément. Si vous avez

 18   été pendant quatre ans président de la municipalité de Knin, vous avez été

 19   aussi été président du SDS en même temps, simultanément?

 20   Réponse: J'étais président de l'assemblée municipale de Knin; ça a été ma

 21   fonction la plus longue. Cette fonction a coïncidé avec divers autres

 22   postes ou fonctions pendant un certain temps.

 23   J'ai été chef du gouvernement à partir du 29 mai 1991, et ceci jusqu'au 19

 24   décembre 1991. C'est à ce moment-là que ce poste a été occupé par le vice-

 25   président qui a fait fonction. J'ai été président de l'assemblée

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  1   municipale de Knin et président du comité municipal du SDS pendant le plus

  2   longtemps.

  3   Question: Donc chef du gouvernement jusque fin 1991, vous avez été

  4   Président de la République et c'est après que vous êtes redevenu président

  5   du gouvernement, président du SDS. Il y a un instant, vous avez déclaré

  6   que vous avez toujours respecté des procédures tout à fait légales pendant

  7   l'ensemble de votre carrière politique.

  8   Est-il donc incontesté que personne ne vous a nommé à ces différentes

  9   fonctions? Je veux dire personne de Serbie. Est-ce que cela, tout du

 10   moins, c'est incontesté?

 11   Réponse: J'ai été élu à mon poste par des citoyens, à ces fonctions

 12   publiques; je pense à celles de président de la municipalité, président du

 13   conseil exécutif, Premier ministre, Président de la République et, à ce

 14   dernier poste, j'ai été remplacé par l'intervention de la Serbie. Et du

 15   fait du poste que j'avais dans le parti, ce sont les organes du parti qui

 16   m'ont élu: j'ai été élu président du conseil national par les membres du

 17   dit conseil, qui avait à sa tête Raskovic qui était membre de ce conseil;

 18   Jovan Raskovic était président de ce conseil.

 19   Question: Vous avez donc été élu par l'électorat. La pression que j'aurais

 20   exercée a eu pour seul effet de vous remplacer à certaines fonctions. Ce

 21   sont des pressions de ma part ou de Belgrade, comme vous voulez. Et la

 22   raison, c'était en fait votre rejet du plan de paix?

 23   Réponse: Vous vous êtes servi de mon refus d'adopter le plan Vance pour me

 24   remplacer et vous avez placé à mon poste Markovic, Mihajlo Markovic, en

 25   1991; il a dit qu'il s'était servi du plan Vance pour se débarrasser de

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  1   Babic; puis il s'est tout rendu compte de ce qu'il avait dit.

  2   Question: Donc le plan Vance a été rejeté et il a fallu l'intervention des

  3   forces des Nations Unies pour remplacer Babic?

  4   Réponse: C'est ce que Markovic m'a dit, à peu près un an plus tard: le

  5   conflit que j'avais eu avec vous a été utilisé pour me démettre de mes

  6   fonctions.

  7   Question: Mais c'était une question de sympathie ou d'antipathie

  8   personnelle; ce n'était pas une raison objective, je suppose.

  9   Mais dites-moi, puisque vous n'aviez pas peur, vous n'étiez pas du tout

 10   effrayé par ces actes radicaux dont parlent vos associés. Et même dans la

 11   déclaration que vous avez faite aux enquêteurs, vous avez dit que vous

 12   étiez devenu un ethno-égoïste et que vous étiez rempli de vanité et que

 13   vous aviez négligé la souffrance des autres; tout ceci a été enregistré.

 14   Comment aurais-je pu, moi ou qui que ce soit d'autre, vous influencer

 15   vous, un homme qui était dépassé par la vanité, la peur, l'amour qu'il

 16   avait pour lui-même et le souhait de faire plaisir -ce sont des choses que

 17   vous avez vous-même dites-, alors que vous auriez dû consacrer votre

 18   énergie à résoudre les problèmes des gens que vous représentiez?

 19   Réponse: Quant à la peur, je vous l'ai dit, au début de mars 1991 les

 20   Croates nous menaçaient, nous étions en péril, les Croates essayaient

 21   d'instiller la peur chez nous.

 22   Après l'affaire Spegelj, vous nous avez effrayés avec les Oustachis, en

 23   parlant de "génocide". Vous m'avez fait croire que l'autodétermination des

 24   peuples allant jusqu'à la session, c'était une voie légitime. Vu

 25   l'autorité que vous aviez, vu que je vous croyais, j'étais convaincu que

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  1   c'était la bonne façon de faire, qu'il y avait ce droit à

  2   l'autodétermination, c'est quelque chose que j'acceptais de votre part.

  3   C'est ainsi que je suis entré dans ce cercle vicieux, cet état

  4   d'ethnocentrisme qui s'était emparé de moi et dont je n'ai pas pu me

  5   débarrasser avant 1995.

  6   Question: Est-ce que, maintenant, vous mettez en doute le droit qu'ont les

  7   peuples à déterminer leur propre sort, le droit à l'autodétermination?

  8   Réponse: A l'époque, la Yougoslavie se composait de peuples qui exerçaient

  9   leurs droits dans le cadre des Républiques qui étaient des éléments

 10   constitutifs de la République fédérale et aussi à partir de choses, au

 11   niveau fédéral, qui devaient fédérer, à savoir la constitution de la

 12   Yougoslavie.

 13   Vous nous avez expliqué et vous nous avez convaincus de ce que les gens

 14   avaient le droit de quitter la Yougoslavie s'ils le voulaient, et que les

 15   frontières administratives au sein de la Yougoslavie ne pouvaient pas être

 16   les frontières qui déterminaient cette division. Vous avez, vous, déclaré

 17   que les frontières existantes et qui étaient les plus importantes, étaient

 18   celles qui étaient déterminées par voie de référendum. Borislav Jovic a

 19   expliqué que l'unité de base était la municipalité et qu'après un

 20   référendum portant sur l'autodétermination des peuples, les municipalités

 21   d'une République qui décidait de quitter la Yougoslavie pouvaient partir

 22   et que celles qui voulaient rester le pouvaient au sein de la Yougoslavie.

 23   Borislav Jovic a expliqué que c'était là votre position. C'est précisément

 24   cette option-là qui nous a menés à la guerre et a provoqué la détresse et

 25   le malheur de tous les peuples de Yougoslavie.

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  1   M. Milosevic (interprétation): Ce n'est donc pas la sécession violente qui

  2   a été le fait de la Slovénie, de la Croatie ou de la Bosnie qui aurait

  3   causé la guerre, c'est plutôt le droit à l'autodétermination des peuples.

  4   C'est bien ce que vous dites? Je dois vous demander ceci: est-ce que c'est

  5   vous qui avez provoqué cette situation?

  6   Milan Babic (interprétation): La guerre a été provoquée par la position

  7   que vous avez adoptée.

  8   M. le Président (interprétation): Répondez un à la fois. Le tour est venu

  9   au témoin de répondre.

 10   Milan Babic (interprétation): La guerre a été causée par votre façon de

 11   faire. C'est vous qui avez provoqué la guerre parce que vous vouliez vous

 12   emparer de certaines parties du territoire de la République qui, d'après

 13   vous, devaient rester au sein du nouvel Etat que vous étiez en passe

 14   d'établir, et ceci par des moyens violents, en utilisant la JNA et

 15   d'autres formations armées que vous contrôliez.

 16   L'explication que vous avez avancée, c'était le droit à

 17   l'autodétermination, mais vous n'avez pas respecté ce droit. Vous avez

 18   mené la guerre précisément sur ces territoires qui n'étaient pas des

 19   territoires où il y avait une majorité de Serbes, où les peuples ne

 20   s'étaient pas prononcés en faveur de la Yougoslavie.

 21   M. le Président (interprétation): Maître Tapuskovic?

 22   M. Tapuskovic (interprétation): Je pense que ce sont des questions

 23   d'importance capitale, qui ne sont pas de nature à révéler l'identité du

 24   témoin. Nous estimons que tout ceci doit se dire en audience publique

 25   parce que, de l'avis des amis de la Chambre, ce sont des éléments de la

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  1   déposition du témoin qui doivent être entendus en public.

  2   M. le Président (interprétation): Le problème, c'est qu'il y a un risque

  3   de voir l'identité du témoin révélée ici.

  4   Monsieur Milosevic, y a-t-il des éléments qui sont de nature à révéler

  5   l'identité du témoin ou pouvons-nous repasser en audience publique?

  6   M. Milosevic (interprétation): C'est le témoin qui a, en fait, ouvert

  7   cette porte qui nous mène vers une question qui nécessite sans aucun doute

  8   un huis clos partiel, parce qu'il inverse les choses et il surestime son

  9   intelligence et ses connaissances. Ce qui prouve, une fois de plus…

 10   M. le Président (interprétation): Restons à huis clos partiel, n'abordez

 11   pas cela maintenant. Quelle est votre question suivante?

 12   M. Milosevic (interprétation): Vous dites vous repentir, avoir honte de

 13   votre participation à ces événements et vous dites, maintenant, des choses

 14   qui sont diamétralement opposées à ce que vous nous disiez lorsque nous

 15   parlions des questions de paix et de guerre.

 16   Milan Babic (interprétation): Je regrette. Je ressens du repentir pour le

 17   fait que j'ai accepté de devenir un ethno-égoïste, pour avoir accepté

 18   votre thèse selon laquelle il faudrait une séparation entre les peuples de

 19   l'ex-Yougoslavie. De cette façon-là, à cause de cela, je suis resté

 20   convaincu pendant longtemps de la justesse de tous les actes entrepris par

 21   les Serbes en vue de leur autodétermination. Mais vous, vous avez souillé

 22   même vos propres thèses.

 23   Oui, je regrette d'avoir accepté cette politique, de l'avoir fait mienne,

 24   de l'avoir trouvée bonne. C'est vrai, je suis désolé et je regrette

 25   d'avoir été égoïste à l'époque. Je le regrette parce que, maintenant, je

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  1   suis tout à fait convaincu que ceci a été la cause essentielle de tout ce

  2   qui s'est passé, surtout vu la façon dont vous vous êtes comporté. Cela a

  3   vraiment été horrible!

  4   Question: Fort bien. Mais je pense que vous pourriez répondre à cette

  5   question-ci en audience publique. Je vous la pose et je vous laisse le

  6   soin de juger.

  7   Il n'est pas contesté que vous vous repentiez. Vous dites que vous avez

  8   toujours été un avocat de la paix mais, si c'est le cas, pourquoi n'être

  9   pas rentré à Knin parce que les autorités de Knin vous accueilleraient à

 10   bras ouverts vu tous les efforts que vous avez déployés en vue de la paix?

 11   Vous avez dit que vous aviez toujours la paix dans le cœur et dans

 12   l'esprit mais pas sur les lèvres.

 13   Réponse: Vous nous avez dit et vous nous avez convaincus de la nécessité

 14   de faire la guerre avec la Croatie. Le peuple croate a souffert, et

 15   puisque les gens ne pouvaient pas se venger de vous, ils se sont vengés

 16   sur quelqu'un d'autre.

 17   M. Milosevic (interprétation): Est-ce que je peux poser la question en

 18   audience publique, Monsieur May?

 19   M. le Président (interprétation): Laquelle?

 20   M. Milosevic (interprétation): Celle que je viens de poser.

 21   M. le Président (interprétation): Non, ce n'est pas possible. Cette

 22   question révélerait l'identité du témoin.

 23   M. Milosevic (interprétation): D'accord, d'accord. Si c'est le cas,

 24   revenons en audience publique et je ne vais pas poser de questions

 25   personnelles.

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  1   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 52.)

  2   M. Milosevic (interprétation): Pouvons-nous noter votre affirmation selon

  3   laquelle la guerre en Yougoslavie n'a pas été causée par la sécession

  4   violente d'abord de la Slovénie, puis de la Croatie et, pour finir, par

  5   celle de la Bosnie-Herzégovine? Elle n'aurait même pas été posée par une

  6   sécession illégale, mais elle aurait été plutôt la conséquence d'une

  7   interprétation du droit des peuples à l'autodétermination?

  8   Milan Babic (interprétation): Pour autant que je m'en souvienne, le

  9   conflit armé, la guerre en Slovénie a commencé au moment où la République

 10   de Slovénie a pris le contrôle des postes-frontières.

 11   Question: Ne parlons pas de la Slovénie. Je me contente de vous demander

 12   ceci: est-ce que la guerre a été causée par la sécession violente de ces

 13   Républiques ou par le droit des peuples à l'autodétermination?

 14   Réponse: Elle a été causée par vous, cette guerre; par le fait que vous

 15   avez créé des incidents parce que vous avez impliqué la JNA dans le

 16   conflit et par le fait que vous avez dirigé la JNA contre la République de

 17   Croatie en imposant des souffrances au peuple croate, mais aussi au peuple

 18   que vous avez forcé à la guerre.

 19   Question: Ceci n'est pas de nature à vous identifier. Vous avez dit, il y

 20   a un instant, que ceci s'était produit parce qu'il y avait le droit des

 21   peuples à l'autodétermination. Mais dites-moi, avez-vous lu la

 22   Constitution de la Yougoslavie qui a existé pendant toute l'existence de

 23   la Yougoslavie? Est-ce que vous savez que, d'après cette Constitution, les

 24   peuples de Yougoslavie s'étaient unis pour créer la Yougoslavie en se

 25   servant de leur droit à l'autodétermination? Ici, on parle des gens, des

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  1   peuples, et pas des Républiques.

  2   Réponse: Mais je pense que c'est bien ce que dit la Constitution.

  3   Question: Qu'est-ce que ça veut donc dire, d'invoquer le droit des peuples

  4   à l'autodétermination? C'est un droit qui est le droit de chacun des

  5   citoyens. Qu'est-ce que cela veut dire? Que c'est à cause de ce droit

  6   qu'il y aurait la guerre, plutôt qu'à cause de la sécession opérée

  7   violemment par d'autres Républiques qui ne voulaient pas rester?

  8   Réponse: La Yougoslavie, si j'ai bien compris, se compose de Républiques.

  9   Je ne suis pas un avocat ou un juriste compétent ou qualifié pour

 10   interpréter la Constitution, mais la Constitution dit également que les

 11   gens, les peuples exercent leur droit au niveau de la République et qu'au

 12   niveau de la Fédération, ils exercent ce droit par le biais des

 13   Républiques.

 14   Question: Mais puisque vous n'êtes pas un expert en questions

 15   constitutionnelles, je ne veux pas tirer parti de votre ignorance en la

 16   matière, mais vous avez dit que j'avais pour thèse de séparer les peuples.

 17   Quiconque a lu le moindre de mes discours aurait tiré une conclusion tout

 18   à fait opposée. Moi, j'ai dit que, d'après moi, la Yougoslavie, c'était la

 19   meilleure solution possible pour tous les peuples de Yougoslavie, la

 20   Yougoslavie dans laquelle ils vivaient ensemble, sur pied d'égalité, et

 21   moi j'ai toujours prôné le maintien de la Yougoslavie.

 22   Est-ce que ce n'est pas le cas, Monsieur le Témoin 061, Monsieur Croatie

 23   61?

 24   Réponse: Vous vouliez dire que les Serbes de Croatie et les Serbes de

 25   Bosnie-Herzégovine devraient avoir le droit de rester en Yougoslavie, du

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  1   moins dans le type de Yougoslavie que vous étiez en train de réorganiser;

  2   ça, c'était votre position publique. Mais ce que vous avez fait, en fait,

  3   c'est que dans les zones où il y avait des Serbes -non seulement en

  4   majorité mais en minorité- vous avez créé des incidents, ce qui fait que

  5   vous avez dû appeler la JNA pour que soient maintenus ces territoires par

  6   le recours à la violence à l'intérieur de ces Etats, sans tenir compte de

  7   la majorité qui existait dans ces territoires. En créant des incidents, en

  8   menant la guerre, vous avez attisé la flamme de la violence et vous avez

  9   incité la Slovénie et la Croatie à ne plus faire partie de cet Etat de

 10   Yougoslavie, de cet Etat que vous étiez en train de créer. C'est comme ça

 11   que j'ai compris les choses.

 12   Question: Mais ce n'est pas comme ça que les gens ont vu les choses. Mais

 13   ce que vous voyez comme explications, vu les circonstances dans lesquelles

 14   vous vous trouvez aujourd'hui, ne sont pas étonnantes. Mais soyons un peu

 15   plus précis, s'agissant de vos accusations et de ce que vous avez concocté

 16   comme histoire selon laquelle les Serbes auraient été exposés à toutes

 17   sortes de dangers en Croatie.

 18   Pendant l'interrogatoire principal, vous avez fait des affirmations -je

 19   pense que nous avons même vu un extrait d'une séquence concernant Spegelj

 20   et ceci était aussi une fabrication de toutes pièces-, on avait affirmé

 21   que c'était une espèce de propagande utilisée par le Secrétariat fédéral à

 22   la Défense nationale pour inciter aux affrontements et au conflit, mais ce

 23   n'était que de la propagande pure et simple.

 24   Alors, dites-moi, répondez-moi à ceci: savez-vous que des armes, si c'est

 25   là quelque chose de monté de toutes pièces, savez-vous quelles ont été les

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  1   armes utilisées pour tirer sur la JNA en Croatie et sur les Serbes en

  2   Croatie?

  3   Réponse: J'ai dit, au sujet de ce film avec Spegelj, deux choses: à savoir

  4   que j'ai ouï dire, d'une part, que Spegelj avait démenti certaines

  5   assertions, certaines allégations faites dans ce film à son sujet; et

  6   d'autre part, j'ai également précisé -je puis le faire une fois de plus- à

  7   savoir que ce film avait fait un effet, avait eu un impact terrible sur le

  8   peuple serbe, notamment dans la Krajina serbe et à Knin. Parce que dans ce

  9   film, on disait explicitement que le gouvernement croate allait égorger

 10   les Serbes de Knin, qu'il allait abattre les officiers de la JNA, tuer

 11   leurs épouses, et que ça allait être un vrai abattoir, une boucherie. Et

 12   c'est ce qui a engendré une hostilité terrible à l'égard du gouvernement

 13   croate. Et le gouvernement croate et ses unités spéciales, les unités de

 14   la Garde, se sont effectivement servis de vraies armes contre les

 15   effectifs armés de la JNA, à savoir contre les formations qui se

 16   trouvaient placées sous son contrôle.

 17   Question: Donc cela avait été, en somme, une campagne de propagande visant

 18   à terroriser les Serbes, ou s'était-il agi là de la présentation par les

 19   soins du ministère de la Défense de l'époque, ministère fédéral de la

 20   Défense, des dangers qui menaçaient en raison de l'armement illicite qui

 21   se faisait et en raison des menaces, en raison de cette vague de

 22   nationalisme survenue en Croatie aux fins d'aboutir à une sécession par la

 23   force?

 24   Réponse: Cette désinformation ainsi placée avait engendré l'hostilité du

 25   peuple serbe à l'égard du gouvernement croate.

Page 13676

  1   M. Milosevic (interprétation): Bien. Etant donné que la partie adverse n'a

  2   tiré qu'un segment hors de son contexte, s'agissant de film, et qu'on n'a

  3   pas entendu dans sa totalité, on avait fixé l'image et laissé passer la

  4   voix, je vais maintenant vous présenter ce même film présenté par la

  5   partie adverse, mais je vous présenterai un autre extrait bref présentant

  6   des parties différentes qui, en tout et pour tout, ne vont pas durer plus

  7   de deux minutes. Je vais vous demander, donc, d'avoir l'amabilité de nous

  8   le faire passer.

  9   M. le Président (interprétation): Mais seulement quand nous aurons la

 10   cote.

 11   M. Milosevic (interprétation): C'est le film de Spegelj.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est la pièce 352, intercalaire 170.

 13   M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant avoir la

 14   diffusion de cet extrait.

 15   M. Milosevic (interprétation): La même nuit où il y a eu cet entretien de

 16   tout à l'heure, on a vu les armes et les munitions destinées à l'armée

 17   terroriste du HDZ à 2 heures du matin, le 20 octobre, passer la frontière,

 18   notre frontière à nous.

 19   Ici, vous voyez cette importation illicite des armes en provenance de

 20   Hongrie. Maintenant, vous allez voir la totalité de l'enregistrement de

 21   Spegelj.

 22   (Diffusion de la vidéo.)

 23   "-Spegelj: Il y a dans le 5e District militaire 9.000 officiers?

 24   -Autre intervenant: Oui.

 25   -Spegelj: Il s'agit d'officiers, de musiciens de l'armée, je n'en sais

Page 13677

  1   rien. Ils sont 9.000. Il y a 18.000 soldats. Sur le territoire du 5e

  2   District militaire en Slovénie, toute la Croatie et une partie de la

  3   Bosnie, nous avons quelques 80.000 hommes armés de Kalachnikov et il y a

  4   au moins 10.000 d'entre eux qui sont armés.

  5   L'armée, ici, n'a rien à chercher. On la coupera en petits morceaux. Le

  6   problème, c'est de vous protéger, vous deux, mais pas contre l'armée,

  7   plutôt vous protéger des autres. Qu'ils aillent se faire foutre! Que

  8   chaque officier soit couvert avec cinq hommes à Verovitica et ils seront

  9   tous abattus à domicile, encore. Et nous allons vous donner une liste. Les

 10   autres, vous allez avoir la liste plus tard!

 11   Je dois vite vous dire, concernant ces mecs-là à Verovitica, qu'ils

 12   mettent de côté quelqu'un ou qu'ils ne mettent pas de côté quelqu'un…

 13   -Autre intervenant: Je sais que…

 14   -Spegelj: Il n'en est pas question! Personne ne doit arriver vivant

 15   jusqu'aux casernes. Personne. Disons qu'il faut que nous fassions ici, un

 16   convoi dans la rue, un soldat, n'importe qui, un coursier, une jeep…"

 17   (Fin de la diffusion de la vidéo.)

 18   M. Milosevic (interprétation): Il s'agit d'un bref extrait, ce sont des

 19   enregistrements vidéos originaux qui ont été pris par -comme on l'a

 20   précisé- les services de renseignements militaires. Et sans aucun doute,

 21   Spegelj était en train de dire…, il a fait l'objet d'un procès à Zagreb

 22   par la suite, d'ailleurs; et vous avez vu, dans la première partie, cette

 23   importation illicite d'armes en provenance de Hongrie avec les listes de

 24   chargement, la documentation afférente pour ce qui est de son importation.

 25   Dans l'une de vos déclarations -je ne vais pas identifier l'entretien que

Page 13678

  1   vous avez eu parce qu'on va me demander encore un huis clos partiel-, vous

  2   avez donc affirmé, à un endroit, que je vous avais armé moyennant

  3   importation d'armes en provenance de Hongrie, alors que la Yougoslavie

  4   toute entière sait parfaitement bien qui est-ce qui a importé des armes de

  5   Hongrie et qui est-ce qui s'est armé en provenance de Hongrie.

  6   Répondez-moi, s'il vous plaît, si vous avez à quelque moment que ce soit

  7   obtenu des armes en provenance de Hongrie?

  8   Milan Babic (interprétation): A partir du 20 avril 1991, vous avez

  9   affirmé que vous aviez acheté 20.000 armes en Hongrie; ce qui m'avait paru

 10   étrange et ridicule parce que l'opinion publique avait été informée des

 11   fournitures d'armes en provenance de Hongrie pour les besoins du

 12   gouvernement croate.

 13   Par la suite, j'ai compris que vous n'aviez pas importé d'armes de

 14   Hongrie, mais que vous aviez fourni des armes à partir des dépôts d'armes,

 15   des arsenaux d'armes de la Défense territoriale de la Yougoslavie.

 16   Question: Justement, c'est ce qui me paraissait complètement insensé que

 17   d'affirmer que la Serbie allait acheter des armes en Hongrie.

 18   Deuxièmement, vous avez oublié que vous avez déclaré auparavant que vous

 19   vous étiez procuré des armes en provenance des dépôts de la Défense

 20   territoriale de la Krajina et des dépôts d'armes de la TO en Bosnie

 21   occidentale. Vous avez même précisé le nom du lieutenant-colonel qui avait

 22   à sa disposition un dépôt d'armes à proximité de Bihac. Vous l'avez oublié

 23   déjà?

 24   Réponse: J'ai dit que les Serbes de la Krajina se sont armés en provenance

 25   de deux sources. L'une de ces sources avait été la DB de Serbie, en

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  1   provenance de Serbie, et l'autre était la JNA et ses dépôts sur le

  2   territoire de la Krajina.

  3   Question: Vous affirmez donc que vous n'avez pas dit que vous vous étiez

  4   procuré ces armes en provenance des dépôts d'armes de la Défense

  5   territoriale en Krajina et en Bosnie, et que vous avez obtenu cela en

  6   provenance de la Serbie et de la JNA de Yougoslavie?

  7   Réponse: J'ai mentionné l'aéroport de Bihac. Cet aéroport de Bihac se

  8   trouve en partie sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, et pour son

  9   autre partie sur le territoire de la Croatie, à savoir de la Krajina.

 10   Maintenant, de là à savoir où se trouvait exactement Svetevo (phon.), je

 11   ne sais le faire, mais je sais qu'il y avait deux provenances d'armes, de

 12   sources d'armes: il y avait les dépôts d'armes de la Krajina, et l'autre

 13   était des dépôts d'armes en Serbie, à Grahovo.

 14   Question: Donc vous ne vous êtes pas procuré des armes en provenance de

 15   dépôts de la Krajina ou de la Défense territoriale de Bihac, mais vous

 16   vous êtes approvisionné en provenance de la JNA et notamment en Serbie?

 17   C'est bien ce que vous nous dites?

 18   Réponse: La JNA a fourni des armes, d'après ce que je sais et pour être

 19   tout à fait concret, à la région de Bihac, de Sveti Rok, et le Corps de

 20   Knin a distribué des armes, mais je ne sais d'où.

 21   Question: Mais n'avez-vous pas organisé des manifestations devant le siège

 22   du Corps de Knin en demandant que l'on vous distribue des armes, et

 23   l'armée avait refusé de vous donner des armes? C'est bien ce qui s'est

 24   passé?

 25   Réponse: Les manifestations en face devant le siège du Corps de Knin ont

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  1   eu lieu en janvier 1990. Elles se sont faites à l'occasion d'incidents

  2   survenus dans la région de Vrlika, suite à l'arrestation de plusieurs

  3   personnes par la police croate. Ces manifestations se sont donc faites

  4   devant le siège du Corps de Knin au sujet du blocus des passages entre

  5   Knin et Cetina, à l'occasion des funérailles d'un homme qui est décédé ou

  6   qui a été tué dans des circonstances qui sont demeurées obscures, à

  7   Sibenik. Il devait être enterré à Cetina.

  8   Maintenant…

  9   M. Milosevic (interprétation): Mais ce que j'ai à l'esprit, c'est la

 10   partie du rapport que nous avons lue à huis clos partiel, ici. Je crois

 11   comprendre que nous sommes toujours en session publique, n'est-ce pas?

 12   M. le Président (interprétation): Oui, nous sommes en audience publique.

 13   Restez-en à ce que vous pouvez faire en audience publique.

 14   M. Milosevic (interprétation): Donc je ne perds pas de vue le fait que

 15   nous sommes en audience publique.

 16   Par conséquent, la partie du rapport qui fait partie de la documentation

 17   de la partie adverse et dont j'ai fait citation au sujet des activités qui

 18   étaient les vôtres, où il est précisément fait état de ces activités-là,

 19   activités qui ont donné lieu à des réactions de la part du général Mladic,

 20   cela s'est donc fait de manière tout à fait correcte et conformément à la

 21   réglementation régissant le service dans l'armée. Il est question dans ce

 22   rapport-là qu'il avait fait son possible pour entraver ces distributions.

 23   Milan Babic (interprétation): Il a été question de plusieurs rapports

 24   présentés par Mladic. Ici, je crois que c'était un rapport présenté au 2e

 25   District militaire de Sarajevo. Mais je ne sais pas à quel rapport vous

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  1   vous référez.

  2   Question: Mais, pour ne pas retourner à huis clos partiel, je voudrais en

  3   finir avec le sujet Spegelj, du moins.

  4   S'agissait-il d'une falsification, ce que vous avez vu, où Spegelj disait

  5   "qu'il avait 80.000 hommes armés de Kalachnikovs, et qu'il avait cité

  6   plusieurs milliers d'officiers de la JNA qu'il fallait abattre afin que

  7   personne d'entre eux n'arrive vivant jusqu'à la caserne de son

  8   affectation"? Et ainsi de suite, ainsi de suite. Vous avez pu voir ici

  9   quelques extraits.

 10   Est-ce là de la falsification? Est-ce là de la propagande de la part du

 11   ministère fédéral de la Défense? Ou, comme vous dites, de la propagande de

 12   ma part? Parce que moi, j'ai vu ces enregistrements en même temps que

 13   vous, mais, de façon évidente, il ne s'était pas agi là d'un

 14   enregistrement falsifié ou monté de toutes pièces. Est-ce que vous

 15   affirmez que c'est encore un montage?

 16   Réponse: A l'époque, nous avons tous cru que c'était la vérité et que nous

 17   allions connaître un véritable pogrom pour ce qui est du peuple serbe face

 18   au gouvernement croate. Moi, j'ai dit que Spegelj avait démenti et que le

 19   Gouvernement croate avait démenti ouvertement, publiquement certaines

 20   citations de ce film. Maintenant, de là à savoir si c'est une

 21   falsification, un montage ou autre chose, je n'en sais rien. Je ne sais

 22   pas comment cela a été fait. J'ai parlé de l'influence que cela a eu sur

 23   les Serbes à Knin et à Krajina.

 24   M. Milosevic (interprétation): Mais là, s'agissant de Spegelj, on n'a pas

 25   parlé de Knin du tout et vos assertions à vous disant que, dans le film à

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  1   Spegelj, on avait monté des menaces de la bouche de Spegelj pour les

  2   Serbes de Knin, ce n'est pas vrai.

  3   Milan Babic (interprétation): Je ne sais pas si c'est Spegelj ou

  4   Boljkovac qui l'avait dit, mais je sais que l'entretien a eu lieu entre

  5   Spegelj et Boljkovac.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, ce que M.

  7   Milosevic vient de dire n'est pas exact. Ici, nous avons diffusé un

  8   extrait dans lequel quelqu'un fait référence à Knin et dit que "des gens

  9   devraient être abattus".

 10   M. le Président (interprétation): Je ne m'en souviens pas, mais je suis

 11   sûr que vous pourrez nous renvoyer au passage pertinent.

 12   Poursuivez, Monsieur Milosevic.

 13   M. Milosevic (interprétation): Bon. Considéreriez-vous donc que ces

 14   événements sur le plateau de Miljevac, sur le pont de Maslenica, à Ravni

 15   Kotor, Perucac, Maslenicki, Borovo Selo, Medacki Dzep, la poche de Medak,

 16   Gospic, Pakrac, Petrinja, Vukovar; ensuite "Eclair", "Tempête", tout cela,

 17   c'est des falsifications? Ou alors, comme vous avez l'habitude de le dire,

 18   le produit de mon imagination?

 19   M. le Président (interprétation): Ce n'est pas là une question

 20   raisonnable. Comment ceci pourrait-il être des falsifications? Inutile

 21   d'énumérer toute une série d'événements pour ensuite poser une question à

 22   leur propos. Reformulez votre question et concentrez-la sur une chose à la

 23   fois.

 24   Que vouliez-vous poser comme question au témoin? Après cela, nous allons

 25   faire une pause.

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  1   M. Milosevic (interprétation): Ce que je voulais lui poser comme question,

  2   c'est celle de savoir comment il peut se permettre d'affirmer que les

  3   Serbes en Croatie avaient été troublés par la propagande provenant de

  4   Belgrade, et non pas par les événements réels qui sont survenus, par les

  5   arrestations, par les meurtres, par les discriminations, par les

  6   licenciements, par les pressions et tout ce qui leur arrivait sous

  7   l'impact de ces nouvelles autorités croates, à partir du moment de leur

  8   entrée en scène, et même avant, dans cette vague de nationalisme qui avait

  9   déferlé sur la Croatie?

 10   Milan Babic (interprétation): Les Serbes avaient été terrorisés par les

 11   intentions du Gouvernement croate, par les intentions telles que vous les

 12   aviez présentées, ces intentions-là j'entends. Deuxièmement, en raison des

 13   incidents que vous aviez orchestrés et par les réactions du Gouvernement

 14   croate à ces événements; puis, par la guerre que vous aviez conduite et

 15   par la peur des représailles suite aux événements survenus pendant cette

 16   guerre.

 17   M. le Président (interprétation): Bien. Nous allons maintenant faire une

 18   pause. Il est passé midi et quart.

 19   Oui, Monsieur Nice?

 20   M. Nice (interprétation): Petite question d'intendance, Monsieur le

 21   Président. La liste des témoins signifiée la semaine dernière a dû subir

 22   une légère modification parce qu'il y aura des témoins qui ne seront pas

 23   disponibles. D'ici à la fin de l'audience d'aujourd'hui, une lettre

 24   modifiée sera disponible pour l'accusé.

 25   Il serait utile de savoir si nous aurons le temps d'avoir des témoins

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  1   vendredi. Si c'est le cas, nous pourrons veiller à ce que vous ne perdiez

  2   pas de temps en appelant un autre témoin à la barre.

  3   M. le Président (interprétation): Merci. Nous allons maintenant faire une

  4   pause de vingt minutes.

  5   (L'audience, suspendue à 12 heures 20, est reprise à 12 heures 43.)

  6   M. le Président (interprétation): Oui?

  7   M. Milosevic (interprétation): J'imagine que nous sommes encore en

  8   audience publique, Monsieur le Président?

  9   M. le Président (interprétation): Oui.

 10   M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Témoin, dans la déposition, la

 11   déclaration que vous avez faite aux enquêteurs du Tribunal, vous avez

 12   indiqué à plusieurs reprises que vous aviez fait de libres

 13   interprétations. C'est ce que j'ai pu constater à plusieurs reprises sur

 14   les cassettes des enregistrements.

 15   Milan Babic (interprétation): Oui, je répondais à des questions.

 16   Question: Parlant des libres interprétations que vous avez faites, est-ce

 17   que cela signifie que vous n'avez pas bonne souvenance ou des souvenirs

 18   précis concernant des événements d'il y a 12 ans?

 19   Réponse: J'ai parlé de choses dont je me souvenais avec précision, et j'ai

 20   parlé d'observations qui étaient les miennes, d'observations ultérieures.

 21   J'ai donc parlé des points de vue que j'avais adoptés mais, suite au recul

 22   dans le temps qui s'est opéré depuis, on m'avait demandé en premier lieu

 23   de parler de choses dont je me souvenais et qui dataient de cette époque-

 24   là.

 25   Question: Très bien. Vous affirmez que c'est moi qui ai commandé la JNA.

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  1   Savez-vous qui était le commandant suprême de la JNA en ces années 1990 et

  2   1991? Puis, on ira par la suite de l'avant.

  3   Réponse: Sur un plan formel et juridique, le commandant suprême devait

  4   être la présidence de la RSFY, mais j'ai toutefois compris qu'à partir du

  5   mois de juillet 1991 c'était vous qui aviez pris en charge le commandement

  6   suprême quant à la JNA. Vous commandiez, de fait, cette JNA par le biais

  7   de cette présidence tronquée de la RSFY. J'ai cru comprendre que vous

  8   aviez des contacts directs avec le grand état-major général de l'armée

  9   yougoslave, avec les généraux Kadijevic et Adzic.

 10   Réponse: Kadijevic et Jovic.

 11   Question: Kadijevic et Jovic?

 12   Réponse: Non, non, je m'excuse: Kadijevic et Adzic.

 13   Question: Mais savez-vous que, avant que je ne vienne à ces fonctions, il

 14   y avait un cadre de commandement dans l'armée, et ces gens qui avaient

 15   abouti à ces grades élevés, qui étaient devenus généraux, colonels et

 16   ainsi de suite, il y avait tout un personnel qui constituait la structure

 17   militaire de l'armée?

 18   Réponse: Oui, mais quelle est votre question?

 19   Question: Toutes ces structures dont vous avez parlé, avaient été mises en

 20   place avant que je n'arrive à mes fonctions.

 21   Réponse: Pour autant que je le sache, le général Kadijevic, en 1990, avait

 22   été secrétaire fédéral à la Défense nationale. Je sais qu'en 1991, le

 23   général Adzic avait été le chef du grand état-major de la JNA. Le

 24   Président de la Présidence était Borislav Jovic. Il est devenu président

 25   en 1990 et il l'est resté jusqu'en mai 1991. Puis Sejdo Bajramovic, lui,

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  1   avait été élu là.

  2   Question: Nous n'avons pas à mentionner toutes ces dates.

  3   Réponse: Branko Kostic a été élu au mois de mars et il a été adopté comme

  4   membre de la Présidence fin mai 1991. Tous ces gens-là, depuis mai 1991,

  5   Branko Kostic, Borislav Kostic, Jugoslav Kostic, Sejdo Bajramovic étaient

  6   membres de la Présidence de la Yougoslavie; ils avaient constitué cette

  7   présidence tronquée parce que les autres membres de la présidence

  8   n'avaient plus participé aux activités, au travail de la présidence.

  9   D'abord, le président de la Présidence n'avait plus pris part aux

 10   activités de cet organe, puis les représentant d'autres républiques par la

 11   suite. C'était ce qui avait constitué le commandement suprême de la JNA.

 12   Question: Etant donné ces membres de la présidence de Yougoslavie, savez-

 13   vous nous dire si vous êtes au courant du fait qu'il y avait eu des

 14   districts militaires? Et dans trois districts militaires, les commandants

 15   étaient des Croates. Il y avait Spegelj, Lukesic et il n'y avait qu'un

 16   seul district commandé par un Serbe, un certain général Avramovic.

 17   L'aviation et la défense antiaérienne, c'était également un Croate qui se

 18   trouvait à la tête; c'était Anton Tus. Vous vous souvenez de la chose?

 19   Réponse: Je me souviens de cela mais je ne me souviens pas de toute chose.

 20   Je ne savais pas qui était à ces fonctions auparavant. Je ne connaissais

 21   pas tout le monde. J'ai connu Raseta, le commandant du Corps de Knin, le

 22   commandant du Corps de Zagreb. Je sais que, dans le Corps de Knin, il y

 23   avait un certain Trajcevski, un Macédonien. Il y avait un Slovène qui

 24   était à la tête du quartier général et d'autres commandants. Le commandant

 25   de l'artillerie était croate mais, en 1991, c'étaient tous des Serbes à

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  1   ces positions.

  2   Question: Mais savez-vous qu'à partir du moment où il y a eu sécession

  3   armée de la Slovénie et Croatie, le district militaire de Zagreb était

  4   couvert par la Slovénie, et il y avait un général qui s'appelait Kondrad

  5   Kolsec et qui était slovène?

  6   Réponse: Ce que je sais, je l'ai appris par les médias.

  7   Question: Moi, je vous demande qui était le commandant du 1er District

  8   militaire à Belgrade, le plus grand des districts militaires? C'était

  9   Alexander Spirkovski, un Macédonien, n'est-ce pas?

 10   Réponse: Ce que je sais, c'est que le général Spirkovski avait été,

 11   pendant un certain temps, commandant à Knin. Je sais qu'il a, par la

 12   suite, occupé des fonctions à Belgrade. Mais de là à vous dire quelles

 13   fonctions, je ne le sais pas, je l'ignore.

 14   Question: Savez-vous que l'aviation de guerre et la défense antiaérienne,

 15   après Anton Tus, c'était encore un Croate, Zvonko Zuljevic, qui est même

 16   devenu commandant?

 17   Réponse: J'ai entendu parler de ces deux généraux par les médias. Je ne

 18   sais pas à quelle époque ils ont commencé à exercer ces fonctions.

 19   Question: Mais savez-vous que Kadijevic, Brovet, Adzic et les autres que

 20   nous avons cités jusque-là n'étaient pas des cadres originaires de Serbie,

 21   du tout?

 22   Réponse: Je sais. J'ai ouï dire que le général Kadijevic était né à

 23   Imotski et que le général Adzic était originaire de l'Herzégovine me

 24   semble-t-il.

 25   Question: Mais vous semble-t-il logique et normal que ce n'était pas moi

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  1   qui avais placé ces hommes-là à ces fonctions importantes au sein de

  2   l'armée de Yougoslavie, ou plutôt de l'ex-Yougoslavie, la JNA?

  3   Réponse: Vous m'avez demandé, en 1991, où il fallait que vous répartissiez

  4   l'armée, où vous deviez répartir l'armée. Donc vous étiez placé en tant

  5   que commandant de cette armée.

  6   Question: Mais ce n'est pas vrai!

  7   Réponse: Oh, si, c'est vrai!

  8   M. Milosevic (interprétation): Vous pouvez affirmer à présent toute chose,

  9   tout ce que vous voulez, dire "ceci était vrai" ou "ceci n'a pas été

 10   vrai", mais il est certain que je ne pouvais pas répartir les effectifs de

 11   l'armée. Il est toute une série de fonctions au sein de l'armée qui

 12   avaient été occupées par des gens, par des personnes avant que je n'aie

 13   été élu moi-même.

 14   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais devoir vous

 15   interrompre. Le témoin a fait sa déposition; vous contredisez les éléments

 16   qu'il a présentés, vous dites qu'il n'a pas dit la vérité. Inutile de

 17   revenir sur les dires du témoin pour essayer de faire valoir votre point

 18   de vue. Vous pourrez, en temps utile, citer des témoins à la barre, mais

 19   il revient à la Chambre de déterminer où se trouve la vérité. Je pense

 20   qu'il n'est pas très utile de polémiquer avec le témoin pour lui dire

 21   qu'il ne dit pas la vérité.

 22   M. Milosevic (interprétation): Très bien.

 23   Serait-il exact de dire que, dès cette année 1990, le Président de la

 24   Présidence avait été un Slovène, Janez Drnovsek?

 25   Milan Babic (interprétation): Jusqu'au 15 mars 1990, je crois que c'était

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  1   bien Drnovsek qui était Président de la Présidence. Je le sais par les

  2   médias, je l'ai su par les médias.

  3   Question: Et en 1991, date à laquelle vous affirmez que c'était moi qui

  4   étais commandant, il y avait une Présidence où, aux côtés de Drnovsek, il

  5   y avait Stipo Mesic, n'est-ce pas?

  6   Réponse: Au mois de mai ou jusqu'à la fin mai, donc je ne sais plus

  7   exactement quelle date, mais mai, juin, le Président de la Présidence

  8   avait été Borisav Jovic. Et, suite à la crise due aux élections des

  9   membres de la Présidence de Yougoslavie, c'était Stipe Mesic jusqu'en

 10   1991, date… jusqu'en automne, je crois, date à laquelle il a cessé d'être

 11   membre de la Présidence, à savoir jusqu'au moment où la Croatie a accédé à

 12   l'indépendance.

 13   Question: Bien. Mais savez-vous qu'il y avait un secrétaire fédéral à la

 14   Défense nationale qui était Veljko Kadijevic, à l'époque dont nous parlons

 15   -et c'était un homme qui était un cadre originaire de Croatie-, au

 16   commandement de l'armée?

 17   Réponse: S'agissant du secrétaire fédéral à la Défense, M. Veljko

 18   Kadijevic, je suis au courant. Je l'ai rencontré fin novembre, début

 19   décembre 1991. Il avait affirmé à ce moment-là que la JNA, s'agissant du

 20   plan de Vance et le retrait de la JNA de Croatie, allait… donc que cette

 21   JNA allait respecter la décision politique qui serait prise.

 22   Question: Il vous a bien dit… Et savez-vous que pendant toute cette année

 23   1991, il y a eu de fortes provocations, des mauvais traitements à l'égard

 24   d'individus, d'unités de la JNA, et à l'égard d'installations de la JNA en

 25   Croatie? Donc je ne parle pas de la Krajina en tant que cas isolé, mais je

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  1   parle de la Croatie dans son ensemble.

  2   Réponse: La crise a commencé en janvier 1991, suite à la décision prise

  3   par la présidence de la RSFY de désarmer les unités paramilitaires en

  4   Croatie, suite aussi à la publication de l'affaire Spegelj dans les

  5   médias; c'est donc là qu'ont commencé des arrestations. Les établissements

  6   de la JNA qui en avaient la compétence avaient lancé des actes

  7   d'accusation et avaient commencé des procès pour ce qui est de certains

  8   responsables du gouvernement de Croatie. Je crois qu'il y en avait deux de

  9   jugés, et Spegelj n'avait pas été accessible aux instances de justice.

 10   C'est par la suite qu'ont commencé des manifestations en Croatie contre la

 11   JNA. Plus tard encore, il y a eu des blocages de casernes. Et au mois

 12   d'août a commencé une guerre ouverte entre la JNA et les formations armées

 13   mises sur pied par le gouvernement croate.

 14   Question: Mais savez-vous quelles avaient été les tentatives de la

 15   Présidence de la RSFY pour mettre un terme à cette escalade? Par exemple,

 16   à une session en juin… une session le 22 juillet, à laquelle avait assisté

 17   Tudjman, où on avait demandé que l'on cesse les inimitiés et les

 18   hostilités?

 19   Réponse: Je sais qu'il y a eu cessation des hostilités qui a été convenue.

 20   Il y avait une commission, présidée par Branko Kostic, et les membres de

 21   cette commission se sont rendus en Croatie, dans la Krajina et en

 22   Slovénie, pour faire respecter le cessez-le-feu.

 23   Question: Mais savez-vous qu'il y a eu un rassemblement de la Garde

 24   nationale qui a occasionné un incident à Dalj en 1991, au mois d'août?

 25   Réponse: Je sais qu'il y a eu des combats à Dalj. Je ne sais pas comment

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  1   les choses se sont passées au juste là-bas.

  2   Question: Mais le rassemblement de la Garde nationale n'avait-il pas été

  3   une unité paramilitaire, une unité illicite?

  4   Réponse: C'était une formation armée de la République de Croatie.

  5   Question: Mais savez-vous que Vladimir Seks, qui était président de la

  6   cellule de crise pour la Slavonie et la Baranja, avait informé l'opinion

  7   publique qu'il avait coupé l'eau, l'électricité et le reste aux unités de

  8   la JNA?

  9   Réponse: Je suis au courant de ces événements. Il n'y a pas que Seks qui

 10   en a parlé, d'autres en ont parlé également au niveau des autorités

 11   croates, et c'est ce qu'il faisait.

 12   Question: Mais serait-il exact de dire que les unités, les installations

 13   de la JNA avaient été exposées constamment à des provocations et à des

 14   attaques armées?

 15   Réponse: D'abord, il a été mis en place des blocus. Puis, les conflits… Je

 16   ne sais pas pour tous les établissements ou pour toutes les institutions,

 17   mais je crois savoir qu'il y avait des installations de bloquées à

 18   Sibenik, à Zadar, à Sinj, à Split. Ce sont les médias qui ont raconté les

 19   événements de Varazdin, de Bjelovar. Puis, il y a des films de télévision

 20   pour ce qui est des premiers blocus, puis les manifestations autour des

 21   casernes à Zagreb.

 22   Question: Très bien, très bien. Mais n'apparaît-il pas avec évidence -et

 23   là, vous venez de mentionner toute une série de villes tout au large de la

 24   Croatie-, n'apparaît-il pas, et avec évidence, que cette coupure

 25   d'approvisionnement à l'intention des casernes et des installations

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  1   militaires, pour ce qui est de l'eau, de l'électricité, des vivres, et que

  2   ces attaques permanentes ont remis en question la survie physique,

  3   l'existence physique des membres de la JNA?

  4   Réponse: Il y avait eu des blocus, mais je ne sais pas quelle avait été la

  5   situation véritable au niveau des casernes. Ce que je sais, c'est qu'ils

  6   avaient été sous blocus, à l'époque; ils étaient assiégés.

  7   Question: Pensez-vous que les unités de la JNA s'étaient trouvées

  8   contraintes d'essayer de se soustraire à ces blocages et de répondre aux

  9   attaques qui étaient lancées contre elles?

 10   Réponse: Pour autant que je le sache, certaines unités de la JNA se sont

 11   aventurées à des opérations de déblocage des casernes, comme cela a été le

 12   cas à Zadar, puis à la garnison de Sibenik et celle de Sinj. La JNA a

 13   publié ces renseignements. Il s'agissait donc d'opérations lancées dans le

 14   territoire de la Croatie et il s'agissait là d'opérations contre la Garde

 15   croate qui ont été expliquées par les besoins de déblocage de ces

 16   garnisons. Mais le reste, je ne sais pas comment ça s'est passé.

 17   Question: Mais estimez-vous que les explications disant qu'il fallait

 18   lever le siège des garnisons étaient une bonne explication, ou est-ce que

 19   c'était une explication montée de toutes pièces, inventée de toutes

 20   pièces?

 21   Réponse: Cela a été l'explication avancée par la JNA.

 22   Question: Mais savez-vous qu'en fin de compte, c'est en novembre 1991 que

 23   toute une série de casernes avaient été assiégées en Croatie, et, une fois

 24   qu'il y a eu des conflits, il a été signé un accord à Igalo, pour ce qui

 25   est de la cessation des hostilités et concernant la nécessité pour tout un

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  1   chacun de mettre un terme à toute action armée, pour pouvoir se mettre à

  2   table et pour trouver une solution à l'amiable en présence de Lord

  3   Carrington. Cela s'est passé en novembre 1991 à Igalo.

  4   Réponse: Je crois savoir qu'il y a eu beaucoup d'accords pour ce qui est

  5   de la cessation des hostilités. A Sarajevo aussi, il y en a une à laquelle

  6   vous avez pris part. Il y avait eu aussi des accords de Genève qui ont été

  7   mentionnés à l'époque. Il y avait aussi l'accord afférent au plan Vance

  8   qui sous-entendait une cessation des hostilités.

  9   Question: Mais l'accord du mois de novembre est intervenu avant que ces

 10   questions ne se posent, à savoir le lien avec le plan Vance.

 11   Maintenant, j'aimerais vous diffuser un enregistrement sonore, ce que

 12   vous, vous appelez "une écoute téléphonique", simplement pour que vous

 13   voyiez dans quelle mesure ceci corrobore l'exactitude de mes propos. La

 14   régie a cet enregistrement; qu'elle le diffuse.

 15   Il s'agit d'une conversation entre le Président d'alors de la Croatie,

 16   Franjo Tudjman, et le secrétaire fédéral à la Défense nationale, à savoir

 17   le général Kadijevic.

 18   (Début de la diffusion de la cassette vidéo.)

 19   (Les interprètes précisent qu'ils ne disposent pas du texte et que le son

 20   est malheureusement très mauvais.)

 21   "-Kadijevic: Ils essaient toujours de blâmer quelqu'un d'autre pour ce qui

 22   a été fait par lui.

 23   -Tudjman: Est-ce qu'il est possible d'établir la paix ou pas?

 24   -Kadijevic: Si je peux être arrêté d'ici à 10 heures, et aussi, s'il est

 25   possible de lever le siège des casernes d'ici à midi; si tout ceci est

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  1   fait, après cela, nous pourrons continuer ce que nous avons commencé à

  2   Igalo demain. Et si ce n'est pas fait, cela veut dire que nous ne pourrons

  3   plus nous contacter.

  4   -Tudjman: Tu sais, ce que nous devrions peut-être faire, c'est essayer de

  5   le faire avant de nous réunir par télécopie pour confirmation, à cause de

  6   la Croatie, d'une trêve par écrit, je veux dire par là un accord qui

  7   traitera l'armée d'une façon qui rassérène les autorités croates

  8   souveraines et qui est aussi dans l'intérêt de l'armée.

  9   -Kadijevic: Est-ce que cela veut dire, Franjo, que tu mets les choses

 10   secondaires à la première place et vice-versa?

 11   -Tudjman: Non, nous nous sommes mis d'accord avec Carrington pour ce qui

 12   est de l'ordre à suivre. Et si nous ne sommes pas d'accord, eh bien, ceci

 13   va interrompre toute conversation ultérieure.

 14   -Kadijevic: Et que va-t-il se passer si nous n'y parvenons pas?

 15   -Tudjman: Qu'est-ce que vous voulez dire "si nous n'y parvenons pas"?

 16   -Kadijevic: Si les choses empirent à Sibenik, moi, je peux garantir que

 17   pas une seule balle ne sera tirée. Nous avons un ultimatum jusqu'à 10

 18   heures; il faut qu'il y ait cessez-le-feu. Et, s'il y a levée du siège,

 19   nous pourrons d'ici à midi ou à 12 heures, nous pourrons continuer notre

 20   conversation demain. Il faut trouver une solution si tu es d'accord, si tu

 21   n'es pas capable de le faire. Sinon, ce sera la catastrophe.

 22   -Tudjman: Bien sûr, bien sûr.

 23   -Kadijevic: Sinon, ce sera la catastrophe.

 24   -Tudjman: Absolument, absolument. C'est la dernière tentative.

 25   -Kadijevic: Oui, oui, oui. Je vais donc faire cette dernière tentative

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  1   avant de tout arrêter.

  2   -Tudjman: Il faut faire savoir ce qu'il en est.

  3   -Kadijevic: Dites qu'il ne faut pas qu'une seule caserne tombe, il ne faut

  4   pas que l'armée tombe. Cela ne se passera pas. Le jour qui suit sera le

  5   jour de la vérité.

  6   -Tudjman: Veljko, je vais faire tout ce que je peux.

  7   -Kadijevic: Il faut qu'il y ait cessation des coups de feu en trois

  8   endroits différents et, avant midi, il faut qu'ils nous donnent de l'eau,

  9   des vivres, des laissez-passer, tout ce qu'il nous faut. Le lendemain,

 10   nous nous assiérons autour d'une table et tout sera discuté ouvertement.

 11   Tout. Ouvertement. Si cela n'est pas possible, nous reviendrons sur nos

 12   pas.

 13   -Tudjman: Qu'est-ce que cela veut dire?

 14   -Kadijevic: Eh bien, cela veut dire que nous en reviendrons à la situation

 15   antérieure. Mais je crois néanmoins que, autour d'une table, nous pourrons

 16   trouver une solution. Si je ne croyais pas en cela, je ne discuterais même

 17   pas avec toi et je ne l'aurais pas fait déjà trois fois. Je crois que cela

 18   sera possible.

 19   -Tudjman: Allez, on essaie!

 20   -Kadijevic: Bon. On essaie et on espère que tout ira bien, mais il faut

 21   que ce qui se passe à Sibenik s'arrête. Il faut ordonner le cessez-le-feu

 22   à Sibenik. Et si cela n'est pas fait, alors, je ne sais pas quoi te dire;

 23   fais comme tu veux, mais celui qui n'accepterait pas ça serait pire que

 24   Spegelj, qui est la cause de tout ça. Crois-moi. Si tu ne me crois pas,

 25   c'est comme tu veux.

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  1   -Tudjman: Mais ce n'est pas que lui, il n'y a pas que lui. Tout est comme

  2   ça.

  3   -Kadijevic: Oui, mais tu m'as dit toi-même qu'il y en avait d'autres qui

  4   participaient.

  5   -Tudjman: Comment?

  6   -Kadijevic: Tu m'as dit qu'il y en avait d'autres qui participaient à

  7   cette discussion. Moi, je ne rentre pas dans ces détails.

  8   -Tudjman: Oui.

  9   -Kadijevic: Quand il est parti, je savais qu'il ne reviendrait pas, mais

 10   on ne doit pas le servir sur un plateau.

 11   -Tudjman: Donc on peut en conclure que c'est l'opinion générale?

 12   -Kadijevic: Bon. Bah, écoutez, si vous voulez faire la guerre, je vous en

 13   prie? Moi, tout ce que je demande, c'est le cessez-le-feu; rien d'autre

 14   que ce que nous avons signé. Rien d'autre.

 15   -Tudjman: Bon.

 16   -Kadijevic: Moi, je fonctionne dans ce sens et toi, tu peux éventuellement

 17   trouver une autre façon de sortir de tout ça.

 18   -Tudjman: Bon.

 19   -Kadijevic: Je t'en prie. Avant 10 heures, arrêt des coups de feu, cessez-

 20   le-feu absolument. Et fais en sorte que les gens puissent vivre sans

 21   manquer d'eau et d'autres choses, parce que, si ce n'est pas le cas, alors

 22   il n'y a pas de possibilité de survie. Absolument, on ne peut pas accepter

 23   que des gens meurent dans ces conditions, parce que si cela est le cas,

 24   alors vraiment, je ne peux pas..

 25   -Tudjman: Eh oui.

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  1   -Kadijevic: Et Anto Markovic?

  2   -Tudjman: Ah! Anto Markovic, ça c'est un dangereux.

  3   -Kadijevic: C'est un fils de pute! Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises:

  4   il faut les descendre ces deux-là, et ensuite on pourra continuer parce

  5   que le nom joue un rôle. Lui n'était pas là-bas, il n'a pas signé.

  6   Personne n'a rien à voir avec lui.

  7   -Tudjman: C'est ça, c'est bien.

  8   -Kadijevic: Bon, faisons comme cela."

  9   (Fin de la diffusion de la cassette vidéo.)

 10   Les interprètes: Nous n'avions pas le texte. Le son était inaudible.

 11   M. le Président (interprétation): Un instant. Je remercie les interprètes

 12   pour avoir tenté d'interpréter ce passage extrêmement difficile.

 13   Autre chose, c'est une cassette qui n'a pas encore été présentée, n'est-ce

 14   pas?

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, Monsieur le Président.

 16   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, est-ce que vous en

 17   demandez le versement au dossier?

 18   (M. Milosevic fait un signe affirmatif de la tête.)

 19   M. le Président (interprétation): Elle a été diffusée? Très bien. Quelle

 20   est la cote dans l'ordre des pièces à conviction?

 21   Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, il s'agira de la pièce

 22   à conviction de la défense numéro D62.

 23   M. le Président (interprétation): Veuillez procéder, Monsieur Milosevic.

 24   M. Milosevic (interprétation): Donc il ne fait aucun doute que cette

 25   conversation a eu lieu après les pourparlers, les négociations au sujet

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  1   d'un accord de cessez-le-feu avec Lord Carrington. Il ne fait aucun doute…

  2   Est-ce indubitable, Monsieur C-061?

  3   Milan Babic (interprétation): Je n'ai pas participé à la discussion de

  4   cet accord.

  5   Question: Bien. Mais, enfin, est-il indubitable que cette conversation

  6   porte sur le fait que les casernes de la JNA étaient assiégées de façon

  7   générale en Croatie, et qu'il est question dans cette conversation des

  8   rapports entre la Croatie et la JNA?

  9   Réponse: A entendre cette conversation, on ne peut conclure qu'une chose:

 10   c'est qu'il est question du fait qu'une caserne est assiégée, et il s'agit

 11   précisément de la caserne de Sibenik.

 12   Question: Mais il est question également d'autres casernes. Il est

 13   question du fait que les casernes sont assiégées et que, l'une après

 14   l'autre, elles se voient privées d'électricité, d'eau, qu'elles sont

 15   assiégées, qu'on ne peut plus s'approvisionner en vivres, etc.

 16   Ce qui est demandé, c'est de la lever. Et, comme vous pouvez le constater,

 17   le général Kadijevic ne demande qu'une chose, c'est le respect de l'accord

 18   conclu avec celui qu'il désigne comme étant le vieux Lord Carrington, si

 19   sage! Est-ce bien cela ou pas?

 20   Réponse: Il me semble que c'est bien la teneur de cette conversation.

 21   Question: Mais en ressort-il clairement que le général Kadijevic estime

 22   que toute solution est préférable à la solution de la guerre et qu'il

 23   demande la levée du siège des casernes? Est-ce que vous avez entendu cela?

 24   Réponse: Oui, j'ai entendu Kadijevic parler en ce sens sur cette cassette.

 25   Question: Avez-vous entendu Kadijevic garantir que "pas un seul coup de

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  1   feu ne serait tiré et qu'il fallait que l'on cesse de tirer sur les

  2   soldats"? Est-ce que vous avez entendu dire cela de la bouche de

  3   Kadijevic?

  4   Réponse: Je l'ai entendu dans cette cassette.

  5   Question: L'avez-vous entendu dire que "dès que le cessez-le-feu

  6   interviendrait, une solution serait trouvée autour d'une table"? Avez-vous

  7   entendu cela?

  8   Réponse: J'ai entendu toute la conversation.

  9   Question: Alors, qui est-ce qui s'investit en faveur de l'arrêt des

 10   hostilités et de la paix?

 11   Réponse: Ce que je sais concrètement, c'est que les événements survenus en

 12   rapport avec la levée du siège des casernes, notamment le général Vukovic,

 13   je l'ai entendu me dire comment il a obtenu la levée du siège des casernes

 14   et comment il a obtenu que les soldats de la JNA puissent s'extraire de

 15   Zadar. Ça, je suis au courant concrètement.

 16   Question: Avez-vous entendu combien de fois, lorsque les soldats sortaient

 17   des casernes, on leur a tiré dessus?

 18   Réponse: Je ne suis pas au courant de cela.

 19   Question: Nulle part, ni en Croatie ni en Bosnie, vous n'avez jamais

 20   entendu parler de ce qui s'est passé à Sarajevo, à Tuzla ou ailleurs,

 21   lorsque les soldats qui sortaient des casernes se faisaient tirer dessus

 22   alors qu'ils sortaient normalement de ces casernes pour partir.

 23   Réponse: J'ai entendu deux choses à ce sujet. Une fois, il était question

 24   -il me semble- d'un convoi qui transportait par trains des

 25   approvisionnements et des équipements militaires, et ce convoi a été

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  1   empêché de poursuivre sa route par les autorités croates. La deuxième

  2   fois, c'est le général Kukanjac qui, à la télévision, a parlé d'un autre

  3   incident en rapport avec le départ du 2e Corps d'armée. Donc dans un cas,

  4   il s'agissait de Sarajevo, et dans l'autre, d'un autre endroit.

  5   Question: Parlons donc de ces événements puisque vous en parlez, vous

  6   appelez ça "un témoignage".

  7   Est-il vrai qu'en 1990 et 1991, le Premier Ministre yougoslave était Ante

  8   Markovic, un Croate?

  9   Réponse: Je sais cela.

 10   Question: Et que Veljko Kadijevic, que nous avons entendu sur cette

 11   cassette, était ministre de la Défense de son gouvernement?

 12   Réponse: Veljko Kadijevic était Secrétaire fédéral à la Défense.

 13   Question: Savez-vous qu'en 1992 le Premier ministre yougoslave était Milan

 14   Panic, donc celui qui s'opposait à moi?

 15   Réponse: Dans l'opinion, on disait que c'est vous qui l'aviez placé à ce

 16   poste.

 17   Question: Mais vous savez qu'il s'opposait à moi politiquement et qu'à

 18   l'époque il était soutenu par le président de la RSFY de l'époque, qu'il

 19   s'était présenté contre moi en tant que candidat à la présidence de la

 20   Serbie en 1993?

 21   Réponse: Ça, ça s'est passé plus tard. Mais, selon les déclarations qu'on

 22   entendait à l'époque, il s'était opposé à vous sur les problèmes de la

 23   paix; il était favorable à la paix, et c'est sur ce sujet que vous vous

 24   êtes opposés politiquement.

 25   Question: Bon! Eh bien, restons-en à vos affirmations.

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  1   Réponse: J'affirme l'avoir entendu dire à l'époque. On en parlait à

  2   l'époque et on le lisait dans les médias. Je n'ai aucune information

  3   personnelle à ce sujet.

  4   Question: Si vous ne savez rien de personnel à ce sujet, je ne vois pas

  5   comment quelqu'un de sérieux peut affirmer quelque chose en rapport avec

  6   un sujet sur lequel il n'a pas de connaissance personnelle. Mais, enfin,

  7   je vous pose la question suivante.

  8   Le gouvernement de la Serbie, les ministères fédéraux, on voit quelles

  9   sont les personnalités en poste, etc.. Et dans ces conditions, quel

 10   rapport la Serbie pouvait avoir avec, par exemple, les employeurs de

 11   l'armée yougoslave? Quel rapport la Serbie pouvait-elle avoir avec le

 12   déplacement d'une personne qui était mutée à un autre poste?

 13   Vous avez y compris présenté un document, une espèce de papier dans lequel

 14   il est question d'une femme qui travaillait dans votre bureau et qui a été

 15   envoyée en tant que civile travailler temporairement à l'école de santé

 16   des armées où elle aura un rapport avec des blessés ou des soldats touchés

 17   en Krajina.

 18   Quel rapport tout cela peut-il avoir avec une quelconque prise de décision

 19   en Serbie pour muter une femme qui travaillait dans votre bureau, et lui

 20   donner un emploi à l'école de santé des armées? Quel rapport avec tous les

 21   papiers que vous avez soumis ici?

 22   Réponse: Il y a deux choses. D'abord, à partir de 1991, j'ai compris,

 23   parce que vous m'avez dit que vous étiez le commandant en chef de la JNA,

 24   donc l'état-major était composé de la défense nationale et des dirigeants

 25   de la JNA. A l'époque de l'ex-Yougoslavie, vous étiez membre du conseil

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  1   suprême de la défense de la République fédérale yougoslave. De facto, vous

  2   étiez le dirigeant au sein de ce conseil, étant entendu qu'il y avait

  3   aussi Lilic qui vous obéissait au doigt et à l'œil, et à un certain

  4   moment, si je ne m'abuse, Bulatovic également.

  5   Question: (Hors micro.)

  6   Réponse: Apparemment, non. Et c'est la raison pour laquelle vous l'avez

  7   révoqué.

  8   Question: (Inaudible.) …Lilic est devenu résident de la République

  9   yougoslave.

 10   Réponse: Après Dobrica Cosic, quand vous l'avez révoqué.

 11   Question: Savez-vous que c'est en 1993 qu'il a pris son poste?

 12   Réponse: C'est lorsque vous avez révoqué Dobrica Cosic.

 13   Question: Je ne parle pas de la révocation de Dobrica Cosic. Je dis que le

 14   mandat de Lilic a duré jusqu'au milieu de l'été 1993, quatre ans donc, le

 15   mandat de Lilic en tant que Président de la République fédérale

 16   yougoslave, de 1993 à 1997?

 17   Réponse: C'est exact.

 18   Question: Donc Dobrica Cosic était président jusqu'à la mi-1993, cet homme

 19   dont vous dites qu'il m'obéissait au doigt et à l'oeil. Tous ces

 20   événements dont vous avez parlé se déroulent avant 1993, lorsque soi-

 21   disant je commandais à l'armée.

 22   Réponse: Vous m'avez interrogé au sujet de la période où existait la

 23   République socialiste fédérative de Yougoslavie et au moment où existait

 24   la République fédérale yougoslave.

 25   Question: Je vous interroge au sujet de la période allant de 1990 à la mi-

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  1   1993. Je vous demande donc dans cette période, d'une part, RSFY, d'autre

  2   part, RFY, comment et dans quelle condition je commandais l'armée?

  3   Réponse: En tout cas, c'est l'impression que j'ai eue en vous écoutant.

  4   C'est ce que j'ai cru comprendre des propos que vous avez tenus devant

  5   moi.

  6   Question: D'après ce que vous dites, c'est moi qui vous ai expliqué que

  7   j'avais une influence sur le grand quartier général; c'est bien cela?

  8   C'est ce que vous affirmez?

  9   Réponse: Vous avez posé un certain nombre de questions. En fait, c'étaient

 10   des constatations. La première constatation que vous avez faite était la

 11   suivante: jusqu'en juillet 1991, et y compris en 1990 et donc en 1991,

 12   vous avez dit devant moi que la JNA allait nous défendre, allait défendre

 13   notre droit à demeurer au sein de la Yougoslavie, que nous pouvions nous

 14   prononcer en faveur de la Yougoslavie, que la JNA était garante de cela.

 15   En juillet 1991, vous vous êtes demandé où la JNA devait être déployée,

 16   donc à partir de ce moment-là, vous avez démontré que, dès lors, vous

 17   pouviez commander à l'armée, que vous commandiez à l'armée à partir de ce

 18   moment-là.

 19   S'agissant de la présidence yougoslave, elle était en partie empêchée de

 20   fonctionner. En fait, il y avait huit membres de la Présidence au sein de

 21   cette Présidence yougoslave et, à partir du mois d'octobre, il n'y en

 22   avait plus que quatre. La JNA a participé aux combats armés. En d'autres

 23   termes, elle est entrée en guerre contre la Croatie au mois d'août et,

 24   jusqu'à ce moment-là, selon les décisions de la Présidence ou sur décision

 25   personnelle de Borislav Jovic, en tout cas, c'est ce qu'il a dit à un

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  1   certain moment. Il a dit qu'il avait, y compris, pris personnellement la

  2   décision de l'engagement de la JNA à Pakrac, lorsque la présidence

  3   yougoslave a pris cette décision.

  4   En tout cas, à partir du mois de juillet, avec Jovic, Kostic, Bajramovic,

  5   vous étiez la direction suprême de la JNA, et Kadijevic et les autres

  6   dépendaient de votre commandement suprême. C'est de cette façon que

  7   fonctionnait la JNA à l'époque.

  8   Question: Monsieur C-061, vous savez sans doute à quel point cette

  9   présidence était bloquée, précisément parce qu'elle se partageait en

 10   quatre membres d'un côté et quatre membres de l'autre et ne pouvait

 11   prendre aucune décision.

 12   Réponse: Cette présidence a pris une décision au sujet de l'existence d'un

 13   état imminent de guerre. Je ne sais pas combien de membres de la

 14   présidence ont donné leur accord à cela, mais cette décision était une

 15   décision prise légalement au début du mois d'octobre 1991. Elle a eu des

 16   conséquences en termes de dispositions légales et de possibilités de

 17   commandement. Il a été décidé, désormais, que quatre membres de la

 18   Présidence pouvaient légalement donner des ordres à l'armée populaire

 19   yougoslave, même en l'absence de l'accord des quatre autres. Et vous étiez

 20   le chef de ces quatre hommes.

 21   M. Milosevic (interprétation): Vous savez bien qu'il s'agissait, à

 22   l'époque, de pressions exercées par les grandes puissances et d'une époque

 23   où la Yougoslavie était absolument épuisée. Vous savez également,

 24   s'agissant de ce que vous dites quant au fait que j'aurais commandé

 25   l'armée, que j'aurais bien voulu le faire. Nous aurions pu éviter la

Page 13705

  1   guerre.

  2   Milan Babic (interprétation): C'est vous qui avez décidé où seraient

  3   déployées les troupes de la JNA à partir d'octobre 1991.

  4   M. le Président (interprétation): Je vais vous interrompre. Le témoin a

  5   expliqué comment il est arrivé à la conclusion qu'il a tirée. Je ne crois

  6   pas qu'il soit utile de répéter sans cesse les mêmes choses; c'est à nous

  7   qu'il appartient de nous prononcer au sujet des éléments de preuve.

  8   M. Milosevic (interprétation): Très bien, très bien.

  9   Monsieur le Témoin, je pense que vos explications, à en juger par

 10   l'enregistrement des entretiens que vous avez eus avec les enquêteurs du

 11   Bureau du Procureur, ainsi qu'avec cette dame qui est assise en face de

 12   moi, je parle des explications fournies par vous au sujet de la façon dont

 13   le général Mrksic a été nommé au commandement de l'armée serbe de Krajina,

 14   donc je pense que toutes ces explications démontreront sans difficulté le

 15   grand nombre de contradictions et les grandes divergences entre vos

 16   déclarations personnelles ici et ces réponses. Bien d'autres éléments le

 17   démontreront également.

 18   M. le Président (interprétation): Si vous souhaitez avancer une thèse

 19   particulière, vous pouvez le faire. Apparemment, c'est un point qu'il

 20  conviendrait de traiter à huis clos partiel mais vous n'êtes pas autorisé à

 21  proférer des généralisations du genre de celles que vous venez de proférer.

 22  Si vous voulez dire quelque chose de précis, et je crois qu'il faudrait le

 23  faire à huis clos partiel, vous le pouvez. Huis clos partiel, je vous prie.  

 24  (Huis clos partiel à 13 heures 24)

 25  [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

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  1   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

  2   M. Milosevic (interprétation): Eh bien…

  3   M. le Président (interprétation): Que souhaitez-vous dire exactement au

  4   témoin? Car, pour le moment, vous avez dit des choses si générales

  5   qu'elles n'ont guère d'utilité.

  6   M. Milosevic (interprétation): Sommes-nous à huis clos partiel?

  7   M. le Président (interprétation): Oui, en effet.

  8   M. Milosevic (interprétation): Le témoin, ici même, durant

  9   l'interrogatoire principal, a donné une version de la prétendue rencontre

 10   qui se serait déroulée chez moi, en rapport avec la nécessité de trouver

 11   un nouveau commandant pour l'armée populaire yougoslave. Et à présent,

 12   vous allez voir quelle était la teneur de sa première déclaration, très

 13   brève. Ensuite, vous verrez quelle est la teneur de sa deuxième

 14   déclaration, vous verrez comment les choses se sont passées et, ensuite,

 15   je lui poserai quelques questions à ce sujet.

 16   Je demande que l'on diffuse l'enregistrement audio; il s'agit de

 17   l'enregistrement audio où l'on trouve la déclaration du Milan Babic avec

 18   les représentants du Bureau du Procureur.

 19   Il parle de la présence prétendue de Vlade Mikelic en tant que ministre

 20   des Affaires étrangères, il parle du ministre de l'Information présent

 21   également, dont aucun n'avait de responsabilité en matière de questions

 22   militaires et il dit que ces deux hommes sont venus me voir pour décider

 23   qui commanderait l'armée serbe de Krajina. Vous verrez comment les choses

 24   se sont passées.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Peut-on avoir la date de cet

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  1   enregistrement de façon à retrouver la transcription?

  2   M. le Président (interprétation): Très bien. On diffuse le passage.

  3   M. Milosevic (interprétation): Le 19 février.

  4   (Diffusion de l'enregistrement.)

  5   "-Je n'aurai pas de déclaration très ferme à faire à ce sujet mais dans

  6   une interprétation libre, je dirais que Mikelic est allé voir Milosevic

  7   avec un texte préparé à l'avance, donc un discours au sujet de la

  8   situation. Et, bien sûr, il a donné lecture du texte assez long de ce

  9   discours, de cette espèce d'analyse. Je ne me rappelle pas exactement ce

 10   qu'il a dit mais, en tout cas, il s'agissait d'une intervention très

 11   longue, très fouillée. Donc je ne me souviens pas exactement de ce qu'il y

 12   avait dans cette espèce d'analyse ou de discours qu'il a fait.

 13   Mais ce que j'ai retenu, c'est la scène suivante: il y a eu un moment où

 14   Milosevic a dit: 'Un instant, je vous prie". Et il s'est dirigé vers le

 15   bureau où se trouvait sa table de travail. Il s'est donc absenté un

 16   moment, peu de temps, si je me souviens bien; je dirais qu'il s'est agi

 17   d'une minute ou deux, je ne peux pas être plus précis. En tout cas, bon,

 18   il est sorti de la pièce et il est resté absent quelques instants. Il est

 19   ensuite revenu et a dit quelque chose du genre que le commandant ou le

 20   nouveau commandant, en tout cas c'était ce qu'il voulait dire, serait Mile

 21   Mrksic. Et plus tard, plusieurs années plus tard, il y a deux ans sans

 22   doute, j'ai discuté de cet événement avec (expurgée) .

 23   -Enquêteur: Avant de parler de cela, j'aimerais que l'on parle de la

 24   réunion.

 25   -Témoin: Mais c'est en rapport avec la réunion.

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  1   -Enquêteur: J'aimerais qu'on en termine avec la réunion en tant que telle.

  2   Que s'est-il passé d'autre lors de cette réunion?

  3   -Témoin: Je ne me rappelle rien d'autre, rien de particulier. Ah…

  4   Simplement, à notre sortie, je me souviens de la présence de Goran Hadzic,

  5   et je ne crois pas qu'il ait participé aux étapes antérieures même s'il

  6   était présent. Je crois qu'il était présent à cette réunion parce qu'il

  7   n'y a pas d'autre occasion où j'aurais pu le voir. Il a dit: 'Monsieur le

  8   Président, est-ce que je peux parler avec vous quelques minutes?". Et,

  9   bon, nous sommes tous sortis dans le hall, et lui est resté derrière

 10   quelques instants; après quoi il est sorti aussi, derrière nous. Voilà

 11   quels sont mes souvenirs de cette scène, de cette réunion.

 12   -Enquêteur: Mais Milosevic, au cours de la réunion, vous a-t-il dit avoir

 13   parlé avec quelqu'un au sujet du choix de Mrksic?

 14   -Témoin: C'est ça que je voulais dire. Je ne me souviens pas qu'il ait dit

 15   cela.

 16   -Enquêteur: Bon… Après la réunion, Mile Mrksic a-t-il pris le commandement

 17   de l'armée?

 18   -Témoin: Oui. L'assemblée a confirmé sa nomination à la fin du mois de

 19   mai. Maintenant, quelle a été toute la procédure? Je ne m'en souviens pas

 20   exactement.

 21   -Enquêteur: Bon.

 22   -Mme Uertz-Retzlaff: J'ai une question. Pourquoi est-ce que vous étiez

 23   présent à cette réunion puisque vous n'avez rien à voir avec les questions

 24   militaires?

 25   -Témoin: Non, mais j'étais ministre des Affaires étrangères! C'est Mikelic

Page 13709

  1   qui a composé la délégation et…

  2   -Mme Uertz-Retzlaff: Lorsque la délégation s'est rendue à cette réunion,

  3   est-ce que vous aviez, vous, une proposition personnelle à soumettre au

  4   sujet de cette nomination?

  5   -Témoin: Je ne me souviens pas personnellement que quelqu'un ait parlé de

  6   cela.

  7   -Mme Uertz-Retzlaff: Quant M. Milosevic a dit: "Il faudrait que Mile

  8   Mrksic prenne le commandement", est-ce que l'un d'entre vous a répondu en

  9   disant: "Nous avons une objection: nous pensons qu'il faudrait que ce soit

 10   quelqu'un d'autre!"?

 11   -Témoin: Je ne me souviens pas. Sans doute. Je ne sais pas, je ne sais

 12   pas. Ah oui! Après cela, mais pas après la réunion. Enfin, c'est chez

 13   Martic que j'ai entendu quelque part, un jour, mais je ne me souviens ni

 14   où ni quand. En tout cas, c'était après cette réunion que j'ai entendu ça.

 15   J'étais avec d'autres personnes.

 16   Je ne me rappelle pas exactement, mais j'ai entendu dire que Jovica

 17   Stanisic est allé parler au général Celeketic de cela. J'ai entendu dire

 18   ça quelque part, mais aujourd'hui, je ne peux pas me rappeler exactement.

 19   Simplement, je me souviens qu'après la réunion, quelqu'un a dit ça quelque

 20   part, un jour. Je veux dire: ça m'a paru intéressant en tant que donnée,

 21   en tant qu'information. Mais où j'ai entendu dire cela et qui me l'a dit

 22   exactement, ça, vraiment, je ne m'en souviens pas exactement aujourd'hui.

 23   -Enquêteur: Quand vous êtes allé à cette réunion, Mikelic a-t-il proposé

 24   un nom pour cette nomination au poste de commandant?

 25   -Témoin: Je ne m'en souviens pas. Je ne saurais le dire.

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  1   -Enquêteur: Vous ne vous souvenez pas s'il a été question d'autres noms?

  2   -Témoin: Non, non, non. Je crois que cela n'a pas été le cas. C'est pour

  3   ça que j'ai voulu dire ce que j'ai dit tout à l'heure: (expurgée) ,

  4   plus tard, m'a parlé du moment où ils avaient décidé… En fait, où la

  5   Yougoslavie avait décidé que Mile Mrksic devait être commandant.

  6   -Enquêteur: Pouvez-vous répéter cela?

  7   -Témoin: (expurgée) 

  8   (expurgée), il m'a dit que Milosevic

  9   avait mentionné, évoqué le Conseil suprême de défense, que ce serait au

 10   sein du Conseil suprême de défense que cette candidature, cette

 11   proposition aurait été faite. Je pense qu'il parlait du Conseil suprême de

 12   défense de la Yougoslavie. Je pense qu'il disait que c'est au sein de ce

 13   Conseil suprême de la défense qu'il a été décidé de proposer Mrksic au

 14   poste de commandant de l'armée, mais moi, je ne me souviens pas de cela.

 15   -Mme Uertz-Retzlaff: Mrksic est-il originaire de Krajina?

 16   -Témoin: J'ai entendu dire qu'il était originaire de Kordun. Est-ce qu'il

 17   est né à Kordun ou est-ce que ses parents sont originaires de Kordun? Je

 18   n'en sais rien."

 19   M. Milosevic (interprétation): Cela suffit. Nous n'avons pas besoin de

 20   poursuivre la diffusion; vous avez la cassette.

 21   "-Mme Uertz-Retzlaff: Quelles étaient ses fonctions exactes? Faisait-il

 22   partie de l'armée yougoslave?

 23   -Témoin: On racontait qu'il faisait partie de l'armée yougoslave, mais je

 24   ne sais pas quand on disait cela à son sujet. Est-ce que c'était à ce

 25   moment-là ou ultérieurement? Je n'en sais rien.

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  1   -Mme Uertz-Retzlaff: L'armée n'avait-elle pas de candidat apte à remplir

  2   ces fonctions?

  3   -Témoin: (Haussant les épaules.) Je ne sais pas. Non. Enfin, le Conseil

  4   suprême de défense de la Krajina aurait sans doute pu, en théorie,

  5   discuter de cela. Est-ce qu'il en a discuté ou pas? Je n'en sais rien. Je

  6   ne faisais pas partie de cet organe.

  7   -Mme Uertz-Retzlaff: Et Celeketic était-il également membre de l'armée

  8   yougoslave?"

  9   (Fin de la diffusion de la vidéo.)

 10   M. le Président (interprétation): Apparemment, ils sont en train de passer

 11   à un autre sujet. Nous pouvons donc interrompre la diffusion.

 12   M. Milosevic (interprétation): Nous reviendrons sur ce sujet mais je pense

 13   que, compte tenu des questions que j'ai à poser à ce témoin au sujet de

 14   cette cassette, il doit être possible de les entendre en audience publique

 15   car on ne verra pas les images de la cassette.

 16   M. le Président (interprétation): Mais la cassette a été diffusée à huis

 17   clos partiel, donc toute référence ou mention des réponses du témoin

 18   faites dans le cadre de cet enregistrement risque de permettre de

 19   l'identifier.

 20   Nous allons nous consulter entre Juges.

 21   (Les Juges se concertent sur le siège.)

 22   Après mûre réflexion, je pense qu'il n'y a aucun secret quant au fait

 23   qu'il y a eu une audition. Si je me souviens bien, le seul élément plutôt

 24   confidentiel, c'est l'identité du témoin.

 25   Par conséquent, c'était la raison pour laquelle ces séquences avaient été

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  1   diffusées à huis clos partiel.

  2   C'est bien cela, n'est-ce pas, Madame Uertz-Retzlaff? Il n'y a pas de

  3   raison qui pourrait être invoquée pour que ces questions ne soient pas

  4   posées en audience publique, pour autant qu'elles ne dévoilent pas

  5   l'identité du témoin?

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ce qui ne doit pas être identifié,

  7   c'est qu'il s'agissait d'une audition de suspect puisque ceci a fait

  8   l'objet de discussion à huis clos partiel. C'était l'audition d'un

  9   suspect.

 10   M. le Président (interprétation): Oui, on peut faire référence à une

 11   audition avec le Bureau du Procureur.

 12   Vous avez entendu ce que je viens de dire, Monsieur Milosevic? Aucune

 13   référence qui soit de nature à révéler l'identité du témoin, pas plus

 14   qu'il ne faut dire qu'il s'agissait d'une audition avec l'accusation.

 15   M. Milosevic (interprétation): Oui, il faut que j'y fasse référence.

 16   M. le Président (interprétation): Oui, mais simplement en tant

 17   qu'audition, sans plus de détail. Ce que vous ne pouvez pas dire, c'est

 18   que c'était l'audition d'un suspect. Voilà ce qu'il faut éviter de dire.

 19   Revenons maintenant en audience publique.

 20   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 42.)

 21   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes maintenant en audience publique.

 22   M. Milosevic (interprétation): Après la diffusion de cet enregistrement de

 23   l'audition, est-il clair que la délégation ou plutôt que les membres de la

 24   délégation, que la structure de cette délégation n'était pas conforme avec

 25   le sujet allégué auquel vous faites référence?

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  1   Milan Babic (interprétation): Le Premier ministre était membre du Conseil

  2   suprême de la Défense de Krajina; et ceci n'a pas figuré dans

  3   l'enregistrement, mais il avait sa propre proposition quant au

  4   commandement de l'armée serbe de la RSK: il s'agissait de (expurgée). Cela

  5   a été mentionné, mais très rapidement.

  6   Question: Ce n'est pas ce que je vous demande maintenant. Nous reviendrons

  7   à cette partie-là, mais maintenant nous revenons pour mettre en exergue

  8   ces contradictions qui ont été les vôtres. Est-ce que vous avez relevé

  9   cela par hasard?

 10   Vous-même, en personne, vous parlez d'un long discours fait par le chef de

 11   votre délégation qui avait la composition que nous savons, n'est-ce pas?

 12   Il y a eu une longue allocution de sa part?

 13   Réponse: Oui.

 14   Question: Et vous, vous dites que vous ne vous souvenez plus de ce à quoi

 15   ceci renvoyait mais que, d'après vos présomptions, il a abordé beaucoup de

 16   questions essentielles pour la vie économique, politique, publique de la

 17   Krajina, de la coopération avec la Serbie.

 18   Réponse: A ce moment-là, les priorités dont on a discuté c'étaient les

 19   événements de la Slavonie occidentale, l'opération "Eclair", l'exode de la

 20   population, la question de l'armée de la RSK qui pouvait faire face à

 21   l'armée de Croatie, c'est surtout de cela qu'on a parlé.

 22   Question: Vous avez dit, il y a un instant, qu'il ne vous était pas

 23   possible de vous souvenir du tout de ce qui avait été dit lors de cette

 24   allocution que vous avez dite très longue. Je parle ici de l'allocution

 25   faite par le chef de votre délégation.

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  1   Réponse: J'ai dit que c'étaient les priorités qui avaient été discutées à

  2   l'époque.

  3   Question: Ce que vous, vous considériez être des priorités indirectement?

  4   Réponse: Oui, parce que cela a été le seul sujet évoqué lors de cette

  5   réunion.

  6   Question: Fort bien. Est-ce qu'il apparaît clairement, d'après cette

  7   audition, que vous m'avez posé une question et que cette question

  8   consistait à savoir si je savais quoi que ce soit à propos de ce

  9   commandant récemment désigné de l'armée serbe de Krajina?

 10   Réponse: Je ne comprends pas votre question.

 11   Question: Vous avez demandé si je savais qui allait être désigné, parce

 12   que ceci ne relevait pas de votre compétence. C'était normalement de la

 13   compétence du Président de votre République, de la République, ou plutôt

 14   de votre Conseil suprême de la défense et du Président de votre

 15   République, n'est-ce pas?

 16   Réponse: Pour autant que je sache, en rapport avec cet événement, dans sa

 17   présentation, le Premier ministre n'a mentionné qu'un nom, celui du

 18   général Mile Novakovic.

 19   Question: Moi, je parle de la totalité de votre audition, et tout au long

 20   de cette audition vous n'avez jamais mentionné ceci. Ce que vous avez dit,

 21   c'est que je vous ai dit d'attendre et que je suis allé parler au

 22   téléphone dans mon bureau comme si j'allais prendre des renseignements

 23   auprès de quelqu'un qui était censé être au courant de ces questions.

 24   Réponse: Je vous ai dit ce que je savais concrètement des événements.

 25   Question: Fort bien. Moi, je vous ai dit d'attendre, je suis allé dans mon

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  1   bureau pour poser une question, pour m'enquérir parce que vous m'avez posé

  2   une question à laquelle je ne pouvais pas répondre personnellement. J'ai

  3   donc été chercher des renseignements.

  4   Réponse: C'est vous qui avez déterminé que c'était le général Mile Mrksic

  5   qui allait être le général, le nouveau commandant de l'armée de la RSK.

  6   Question: Eh bien, si vous le saviez mieux que moi, allons-y! Mais passons

  7   à autre chose.

  8   Est-ce que vous avez remarqué qu'on vous a d'abord demandé -et c'est la

  9   dame assise en face de moi qui l'a fait- si vous aviez une proposition à

 10   faire, quelle qu'elle soit, n'est-ce pas? Et vous avez dit: "non".

 11   Réponse: Je ne me souvenais pas de tous les détails.

 12   Question: Mais moi, je voulais simplement savoir ce que nous avons tous eu

 13   l'occasion de voir, il y a un instant. L'enquêteur vous a alors demandé si

 14   vous avez discuté de l'une quelconque de ces propositions avant la

 15   réunion. Et là, une fois de plus, vous avez répondu par la négative.

 16   Une fois de plus, la dame assise en face de moi vous a demandé si vous, en

 17   Krajina, vous n'aviez personne susceptible d'être un candidat; et là, une

 18   fois de plus, vous avez répondu par la négative?

 19   Réponse: Je ne sais pas.

 20   Question: Oui, vous avez dit que vous ne saviez pas. On vous a donc posé

 21   la question trois fois dans le cadre de cette audition. On vous a demandé

 22   si vous aviez un candidat, si vous en aviez discuté, si des noms avaient

 23   été mentionnés, et chaque fois, à chacune de ces trois questions, vous

 24   avez dit non, que vous ne le saviez pas, qu'aucun nom n'avait été

 25   mentionné, que vous ne saviez pas s'il y avait un candidat ou pas, etc.

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  1   Réponse: C'est par la suite que je me suis souvenu du nom.

  2   M. Milosevic (interprétation): Nous y arriverons dans un instant. Nous

  3   allons voir cette partie de l'enregistrement et nous verrons aussi dans

  4   quelles circonstances vous vous êtes souvenu de ce nom. Mais ça, c'est une

  5   autre paire de manches!

  6   Maintenant, vous avez poursuivi en disant que vous avez entendu dire par

  7   quelqu'un -je ne peux pas citer le nom de cette personne- qu'en fait, ceci

  8   s'était passé à cette réunion du conseil suprême de la Défense, par la

  9   Défense de la Yougoslavie. Et à l'occasion de cette réunion, puisque moi

 10   je suis membre de ce Conseil suprême de la Défense, est-ce que nous

 11   pouvons partir du principe que j'étais au courant et que je ne devais pas

 12   aller obtenir ces informations, que je ne devais pas aller téléphoner à

 13   quelqu'un pour savoir qui c'était?

 14   M. le Président (interprétation): C'est ce qui s'est passé, d'après les

 15   dires du témoin, mais vous pourrez nous donner les explications en temps

 16   utile, si vous le voulez.

 17   Mais aidez-nous sur ce point: dans cette partie de l'audition, on n'a pas

 18   fait mention de… vous n'avez pas fait mention de Novakovic. Vous avez dit

 19   qu'il n'y avait pas deux candidats. Maintenant, si vous voulez donner une

 20   explication de la raison pour laquelle vous avez dit cela, vous devriez

 21   pouvoir le faire.

 22   M. Milosevic (interprétation): Pour gagner du temps, je vais...

 23   (Le Président interrompt M. Milosevic.)

 24   … eh bien, je vais vous montrer un extrait où vous voyez exactement

 25   comment ceci s'est passé. Et j'aurai une réponse pour vous, sur la base

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  1   des dires du témoin.

  2   M. le Président (interprétation): Mais laissez le temps au témoin de

  3   répondre! Vous avez posé une question, il doit pouvoir y répondre.

  4   Pour autant que vous le vouliez, Monsieur le Témoin, est-ce que vous

  5   pouvez nous donner une explication brève?

  6   Milan Babic (interprétation): A ce moment-là, lorsqu'on m'a posé la

  7   question, je ne me suis pas souvenu de tous les détails; je me suis

  8   uniquement souvenu des éléments principaux, des événements principaux.

  9   M. le Président (interprétation): Oui?

 10   M. Milosevic (interprétation): Pouvons-nous conclure qu'on vous a demandé

 11   trois fois cela au cours de cette audition? Deux fois, c'est la dame

 12   assise en face de moi qui vous a posé la question. Et la troisième fois,

 13   c'était un enquêteur qui vous a demandé s'il y avait eu des propositions,

 14   si des propositions avaient été discutées, s'il était possible qu'on ne

 15   trouve pas une solution idoine en Krajina, s'il vous fallait vraiment

 16   aller à Belgrade?

 17   Et, chaque fois, vous avez répondu par la négative, vous avez dit "non,

 18   non, non" et puis, "je ne me souviens pas", n'est-ce pas?

 19   Milan Babic (interprétation): Je ne faisais pas partie des structures qui

 20   prenaient décision sur des questions de ce genre; pas à ce stade-là.

 21   Question: Donc vous n'en faisiez pas partie?

 22   Réponse: Pas à ce moment-là.

 23   Question: Vous ne savez même pas si Mile Mrksic était de Krajina? Vous

 24   avez dit que c'était peut-être le cas?

 25   Réponse: On disait qu'il était né à Kordun, qu'il était originaire de

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  1   Kordun. Mais ce que cela voulait dire, je ne sais pas. Etait-il né lui-

  2   même à Kordun ou est-ce ses parents qui étaient nés à Kordun?

  3   Question: Moi, je suis originaire de Pozarevac; cela veut dire que je suis

  4   né à Pozarevac, et pas que quelques-uns de mes parents sont nés là. Je

  5   suis natif de Pozarevac; ça veut dire que j'y suis né.

  6   Savez-vous qu'il est né à Vrgin Most, ou plutôt dans la municipalité de

  7   Vrgin Most, qu'il a fait l'école primaire, qu'il a fait son école

  8   secondaire à cet endroit et qu'il est seulement parti de la République de

  9   Croatie au moment où il était à l'Académie militaire, tout comme personne

 10   qui était inscrite à l'Académie militaire puisqu'elle était à Belgrade?

 11   Donc au moins, il était en Yougoslavie, dans la Yougoslavie de l'époque,

 12   celle dans laquelle Mrksic a vécu. Donc non seulement il était originaire

 13   de la région, mais il y a vécu jusqu'au moment où il en est parti pour

 14   aller faire des études supérieures à l'Académie militaire; et c'était une

 15   profession qu'il avait choisie, c'était un homme de Krajina.

 16   Réponse: Je ne connaissais pas ces détails.

 17   M. Milosevic (interprétation): Fort bien, vous ne connaissez pas ces

 18   détails. Mais maintenant, vous dites avoir d'autres détails dont vous ne

 19   pouviez pas vous souvenir.

 20   La deuxième partie de cette conversation qui s'est tenue le même jour va

 21   maintenant être abordée, mais je voudrais attirer votre attention sur le

 22   fait que vous allez voir ceci tout au début et que c'est un récit tout à

 23   fait différent qui est donné après une interruption, pour le déjeuner.

 24   Maintenant, nous allons entendre donc une histoire différente, un récit

 25   différent, après qu'il eut reçu des instructions de la part de cette

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  1   personne qui va lui donner quelques lignes directrices. Revenons à ceci.

  2   M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant revenir sur ces

  3   allégations et voir ce qu'il en est.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je soulève objection quant à la façon

  5   dont… qui est présentée ici, comme si j'avais donné des instructions au

  6   témoin pour lui dire ce qu'il avait à nous dire.

  7   M. le Président (interprétation): Diffusons cet extrait.

  8   Huis clos partiel. En temps utile, le témoin pourra répondre de ces

  9   allégations.

 10  (Huis clos partiel à 13 heures 53) [Confidentialité levée par une ordonnance

 11   de la Chambre] Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 12   (Début de la diffusion de la cassette.)

 13   "Reprise à 14 heures 22…"

 14   M. Milosevic (interprétation): Excusez-moi d'interrompre, excusez-moi,

 15   mais j'avais demandé que la deuxième séquence diffusée soit celle qui

 16   commence à 12 heures 49; 12 heures 49 et pas 14 heures 22.

 17   Vous voyez l'heure inscrite à l'image, à l'écran, en haut à gauche? Nous

 18   devrions voir 12 heures 49. C'est simplement indicatif, par rapport à ce

 19   que j'ai dit tout à l'heure. Et cela prendra très peu de temps car entre

 20   les deux tranches horaires, entre celle des dernières images de tout à

 21   l'heure et les premières de maintenant, il y a eu la pause déjeuner.

 22   Je sais, le technicien a du mal, il a l'air de beaucoup chercher, mais en

 23   fait c'est très simple car l'image que je demande se situe à peine une ou

 24   deux minute après la dernière de tout à l'heure. Entre les deux, il y a eu

 25   la pause déjeuner.

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  1   M. le Président (interprétation): Oui, en effet. Mais il l'a trouvé.

  2   (Reprise de la diffusion et de la traduction de la cassette.)

  3   "-Il est à présent 12 heures 49. Nous allons faire la pause.

  4   -Enquêteur: Il est à présent à peu près 14 heures 22, le mardi 19 février

  5   2002. Nous venons d'avoir une pause déjeuner et, Monsieur Babic, je suis

  6   dans l'obligation de vous rappeler une nouvelle fois les avertissements

  7   qui vous ont déjà été faits. Je vous demande d'ailleurs si vous avez des

  8   questions à poser?

  9   -Témoin: Non.

 10   -Enquêteur: J'aimerais que nous revenions à présent à la question de la

 11   Slavonie occidentale.

 12   Souhaitez-vous dire quelque chose, compte tenu des mots qui viennent

 13   d'être prononcés par M. Mueller?

 14   -Témoin: J'aimerais ajouter quelques mots au sujet de ma rencontre avec le

 15   Président Milosevic, c'est-à-dire de ce que je disais tout à l'heure.

 16   Lorsque j'ai parlé d'une rencontre avec M. Milosevic, chez lui, en mai

 17   1995, il m'est revenu ensuite une des questions que vous m'avez posées.

 18   Vous m'avez demandé, en effet, si les gens de la Krajina avaient une

 19   proposition à faire quant à la meilleure candidature pour le poste de

 20   commandant en chef de l'armée serbe de Krajina et, entre-temps, je me suis

 21   souvenu; et je peux dire maintenant qu'effectivement, il y a eu un nom qui

 22   a été proposé: Borislav Mikelic a demandé à Milosevic que Mile Novakovic

 23   soit nommé au poste de commandant, donc soit le nouveau commandant; le

 24   général Mile Novakovic. Milosevic a fait une observation négative au sujet

 25   de cet homme et a interrompu la conversation à ce sujet.

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  1   Et puis, il y a une deuxième chose que je voudrais dire. Nous avons déjà

  2   parlé, dans la partie précédente de mon audition…"

  3   (Fin de la diffusion de la cassette.)

  4   M. Milosevic (interprétation): Cela n'a plus aucun rapport avec ce qui

  5   nous intéresse.

  6   M. le Président (interprétation): Arrêt de la diffusion.

  7   Monsieur Milosevic, vous avez encore une ou deux minutes. Et si vous avez

  8   l'intention de dire que ce témoin a, d'une façon ou d'une autre, reçu des

  9   instructions préalables, il convient que vous le fassiez.

 10   Nous allons maintenant revenir eu audience publique.

 11   (Audience publique avec mesures de protection à 14 heures.)

 12   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique, Monsieur le

 13   Président.

 14   M. le Président (interprétation): Merci.

 15   Vous avez la parole.

 16   M. Milosevic (interprétation): Dans les images de cette audition, est-ce

 17   que nous sommes en mesure de voir qu'il y a donc eu après un certain temps

 18   une pause déjeuner, et qu'après cette pause déjeuner l'enquêteur demande à

 19   son interlocuteur, c'est-à-dire au témoin Croatie-061, s'il a encore

 20   quelque chose à dire, s'il a des remarques à faire. Ce à quoi le témoin

 21   répond que ce n'est pas le cas. Ensuite, nous voyons sur les images son

 22   conseiller juridique lui rappeler qu'il devrait dire quelque chose, qu'il

 23   a oublié ce qu'il fallait qu'il dise. Je ne vais pas prononcer le nom de

 24   son conseil juridique, mais jusqu'à présent, c'est le seul témoin dans la

 25   présente affaire qui a dans le prétoire la compagnie de son conseil

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  1   juridique pendant sa déposition.

  2   M. le Président (interprétation): Veuillez avancer.

  3   M. Milosevic (interprétation): A ce moment-là, le témoin, dans la séquence

  4   vidéo, déclare qu'il s'est rappelé; autrement dit, pendant la pause

  5   déjeuner, il s'est tout à coup souvenu de quelque chose qui a fait l'objet

  6   de trois questions et de trois réponses, réponses consistant à dire qu'il

  7   ne se souvenait pas qu'il n'y avait pas de proposition. Et tout d'un coup,

  8   il se souvient qu'en fait…

  9   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous avons déjà vu

 10   tout cela. Pourquoi n'en arrivez-vous pas au fait?

 11   M. Milosevic (interprétation): Mais le fait, c'est que ses deux

 12   déclarations sont totalement contradictoires, Monsieur May, que le témoin

 13   ici…

 14   M. le Président (interprétation): La question qui se pose, c'est dans

 15   quelles conditions le témoin en est arrivé à faire sa deuxième

 16   déclaration. C'est cela, la question intéressante.

 17   M. Milosevic (interprétation): Je suppose. Et d'ailleurs j'interroge le

 18   témoin à ce sujet, c'est la question que je lui pose. Je suppose qu'il en

 19   est arrivé à dire cela parce qu'entre-temps, il a été averti, il a été

 20   admonesté: on lui a dit qu'il n'avait pas répondu ce qu'il était censé

 21   répondre, qu'il n'avait pas bien répondu à deux questions posées par la

 22   dame qui est assise en face de moi et à une troisième posée par un

 23   enquêteur, qu'il a dit "non" alors qu'il aurait dû se rappeler qu'il

 24   aurait dû dire "oui" et qu'il aurait fallu qu'il se rappelle de dire qu'il

 25   avait proposé un nom.

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  1   Maintenant, sur les images, après la pause déjeuner, nous voyons son

  2   conseil juridique lui dire qu'il aurait dû se rappeler tout cela; et tout

  3   d'un coup, il répond qu'il se souvient, oui, oui, parce que sa mémoire a

  4   été tellement rafraîchie pendant la pause déjeuner, qu'il peut proposer

  5   une deuxième histoire, une histoire différente...

  6   M. le Président (interprétation): Laissez répondre le témoin.

  7   Monsieur le Témoin, vous avez entendu ce qui vient d'être dit. Vous pouvez

  8   répondre à la question.

  9   Milan Babic (interprétation): D'abord, l'enquêteur m'a demandé si j'avais

 10   quelque chose à ajouter. Il parlait des droits qui m'avaient été lus, de

 11   mes droits. C'était à cela qu'il faisait référence. C'est le premier

 12   point.

 13   Deuxième point, la réponse que j'ai faite en disant que j'avais quelque

 14   chose à ajouter par rapport aux réponses déjà faites aux questions

 15   précédentes était exacte parce que, lorsque ce sujet a été abordé, j'ai

 16   d'abord eu une image visuelle. J'ai une mémoire visuelle très intense au

 17   sujet de ces événements. J'ai donc raconté en premier lieu ce qui m'est

 18   venu à l'esprit sous forme visuelle, une image très nette des événements.

 19   Et par la suite, je me suis souvenu d'autres détails qui ont marqué ma

 20   mémoire autrement que visuellement, et j'ai fait part de ces détails. Il

 21   n'y a pas d'avertissement, il n'y a pas eu d'instruction, il n'y a pas eu

 22   d'accord sur ce qu'il fallait que je dise. J'ai simplement dit ce que

 23   j'étais censé dire, à savoir ce qui m'est revenu en mémoire.

 24   M. Milosevic (interprétation): S'agissant de cette séquence vidéo et des

 25   séquences vidéo liées aux auditions faites par le Bureau du Procureur, il

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  1   y en a un très, très grand nombre; elles pourront servir de preuve de

  2   l'existence d'un faux témoignage et, d'ailleurs pas seulement en rapport

  3   avec ce témoin mais…

  4   M. le Président (interprétation): …Vous avez entendu la réponse du témoin,

  5   cela n'a rien à voir avec ce que vous dites. Le témoin a déclaré qu'il

  6   s'était souvenu.

  7   L'heure de la suspension est arrivée.

  8   Madame Uertz-Retzlaff, si le témoin n'a rien contre, il faut que toute

  9   disposition soit prise pour permettre le versement au dossier de cette

 10   séquence vidéo. Apparemment, cela a été fait. Monsieur Milosevic,

 11   souhaitez-vous demander le versement au dossier de ces séquences vidéo? La

 12   pièce D59?

 13   Mais il y a une chose que je voudrais dire, la pièce D59 est une pièce à

 14   conviction liée à une date particulière. Je suppose que la séquence

 15   d'aujourd'hui devrait être distinguée grâce à l'ajout de la lettre A, à

 16   côté de D59. Oui, faisons-en la pièce D59. Remplacez D59 par D57.

 17   M. Milosevic (interprétation): Certainement, Monsieur May, mais je demande

 18   également que vous entamiez une procédure…

 19   M. le Président (interprétation): Non.

 20   M. Milosevic (interprétation): …pour que ces éléments puissent constituer

 21   les fondements d'une démonstration de faux témoignage.

 22   M. le Président (interprétation): Non, non, non. Nous avons entendu ce que

 23   vous avez dit mais nous avons également entendu ce qu'a dit le témoin à

 24   son sujet. Nous avons entendu ses explications. Il nous appartiendra de

 25   nous prononcer quant au fait de savoir si ces explications sont valables

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  1   ou pas. Mais il n'est aucunement question d'entamer une procédure pour

  2   faux témoignage.

  3   Merci beaucoup. Cette séquence a été versée au dossier sous la forme de la

  4   pièce à conviction D57-A, conservée sous scellés.

  5   Madame Uertz-Retzlaff ?

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'ajoute

  7   simplement que c'est la première partie de la séquence et qu'il y en a une

  8   deuxième que nous fournirons demain.

  9   M. le Président (interprétation): Très bien, elle constituera un ajout à

 10   la pièce D57-A, puisqu'il s'agit de la même audition.

 11   Nous allons suspendre, mais avant cela, j'ai une ou deux questions

 12   administratives à régler.

 13   Maître Tapuskovic, avez-vous d'autres questions à poser à ce témoin?

 14   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 15   Juges, j'avais l'intention de soulever cette question demain matin. Je

 16   voulais vous dire que, cette fois-ci, je souhaiterais vraiment disposer du

 17   temps nécessaire -bien sûr, c'est vous qui déciderez- mais j'ai le

 18   sentiment qu'ici, en l'occurrence, je ne dois pas être placé dans une

 19   situation où, même si je fais de mon mieux pour opérer une sélection et ne

 20   retenir que les questions vraiment d'importance professionnelle, ici, je

 21   voudrais que l'on ne me force pas à agir. Je ne sais pas combien de temps

 22   me sera nécessaire mais je crois avoir besoin d'un tiers de journée.

 23   M. le Président (interprétation): Vous pensez à une heure et quart, à 75

 24   minutes en tout?

 25   M. Tapuskovic (interprétation): Je ferai de mon mieux pour terminer dans

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  1   le temps qui m'est imparti, mais vu l'importance que revêt ce témoignage,

  2   je pense avoir le droit à ce temps et que vous me donniez peut-être un peu

  3   plus.

  4   M. le Président (interprétation): Nous verrons ce qu'il en est.

  5   Madame Uertz-Retzlaff, nous pensons que l'accusation devra avoir un témoin

  6   prêt à intervenir vendredi. Nous vous demanderons également, vu la

  7   longueur de cette déposition-ci, de limiter vos questions supplémentaires

  8   à un minimum.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que je n'aurai pas besoin de

 10   plus d'une demi-heure.

 11   M. le Président (interprétation): Eh bien, c'est à ce type de temps que

 12   nous pensions.

 13   Nous allons lever l'audience, elle reprendra demain.

 14   (L'audience est levée à 14 heures 09.)

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