Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Vendredi 6 décembre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 03.)

3 (Audience publique avec mesures de protection.)

4 (Le témoin C-061 est dans le prétoire.)

5 (Questions relatives aux mesures de protection du témoin.)

6 M. le Président (interprétation): Maître Mueller, vous vouliez vous

7 adresser aux Juges?

8 M. Mueller (interprétation): Merci beaucoup, Messieurs les Juges.

9 Au nom de mon client, j'aimerais faire une déclaration. Mon client vous

10 demande, par mon intermédiaire, d'annuler l'ordonnance de non-divulgation

11 dans ce procès. Mon client veut témoigner publiquement et il est prêt à

12 vous fournir l'explication nécessaire à cet effet, pour autant que vous

13 souhaitiez l'entendre.

14 M. le Président (interprétation): Oui, merci. Est-ce que nous voulons

15 entendre l'explication?

16 Oui. Monsieur le Témoin, si vous voulez-vous exprimer brièvement…

17 M. Mueller (interprétation): Voulez-vous que ce soit moi ou mon client?

18 M. le Président (interprétation): Eh bien, ce qui est le plus commode.

19 Puisque c'est vous qui avez déjà la parole, vous pouvez poursuivre, Maître

20 Mueller.

21 M. Mueller (interprétation): Merci.

22 M. Kwon (interprétation): Apparemment, il y a quelque difficulté à suivre

23 le serbe.

24 M. le Président (interprétation): Veuillez commencer, Maître Mueller. Tout

25 est réglé.

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1 M. Mueller (interprétation): Il y a quatre raisons avancées par mon client

2 à cet effet, et ceci explique également pourquoi mon client a pris cette

3 décision maintenant et n'a pas pris une telle décision auparavant.

4 Voici la première raison avancée par mon client: au cours des dernières

5 semaines, M. Milosevic a accusé mon client et lui a reproché diverses

6 choses, mais ceci s'est fait surtout à huis clos partiel. Mon client pense

7 que le public est intéressé et a le droit d'être informé, d'être mis à

8 jour, s'agissant des arguments avancés par mon client en réponse à ceux de

9 M. Milosevic.

10 La deuxième raison est celle-ci: "Au cours de ma déposition -dit mon

11 client-, la presse, les médias se sont immiscés et ont pratiquement révélé

12 mon identité en faisant des références directes. Et ceci a connu une telle

13 escalade que ma photo, des informations personnelles telles que ma

14 biographie, mon nom complet et mon nom sous le pseudonyme de C-061, tout

15 ceci a été publié dans les médias".

16 M. le Président (interprétation): Apparemment, les problèmes persistent au

17 niveau de l'interprétation. Poursuivons. Il y a apparemment un problème,

18 du fait de la coupure de courant.

19 Nous ne savons pas si l'accusé est en mesure de lire le compte rendu

20 d'audience. Je m'excuse auprès des amis de la Chambre; nous n'allons pas

21 recommencer l'audition du témoin mais essayons d'entendre ces explications

22 jusqu'à la fin.

23 Maître Mueller (interprétation): Ça a été jusqu'à ce point que l'opinion

24 publique belgradoise et les médias belgradois ont, dans l'intervalle, été

25 informés de l'identité de mon client.

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1 Troisième raison: mon client dit avoir parlé avec sa famille de cette

2 question, et que ça a été un processus très long qui s'est échelonné sur

3 plusieurs semaines, ces dernières semaines. Sa famille avait peur que soit

4 dévoilée son identité; sa famille a connu beaucoup de peurs ces derniers

5 temps, nous le savons, peut-être grâce à la déposition qu'il a faite

6 jusqu'à présent. Effectivement, il y a eu des menaces proférées contre lui

7 et sa vie était menacée. Il y a toujours des menaces qui pèsent sur les

8 membres de sa famille, sous une forme ou une autre, à ce jour. Ce

9 processus a duré très longtemps, de consultation au sein de la famille et

10 hier soir, finalement, la famille a marqué son accord pour que son

11 identité soir révélée.

12 Quatrième raison, et non des moindres aux yeux de mon client: il prend la

13 décision de révéler publiquement son identité. A son avis, c'est très

14 important, c'est une contribution importante pour qu'il y ait

15 réconciliation entre les différents peuples de l'ex-Yougoslavie, si son

16 opinion est effectivement exprimée publiquement et si la vérité telle

17 qu'il la voit est révélée.

18 M. le Président (interprétation): Merci.

19 M. Robinson (interprétation): J'aimerais demander au témoin si l'un des

20 facteurs avancés par son conseil, pour ce qui est de sa décision de

21 révéler son identité, a trait aux menaces apparemment persistantes à

22 l'encontre des membres de sa famille. Je ne vois pas, dans ce contexte,

23 comment ceci pourrait trouver remède si l'identité du témoin est révélée

24 publiquement; ou est-ce que c'est plutôt le dernier facteur avancé, le

25 facteur de la réconciliation qui est le plus important pour lui et qui le

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1 pousse, l'encourage à prendre la décision qu'il a prise? Est-ce que c'est

2 ce dernier facteur qui est le facteur prédominant?

3 Témoin C-061 (interprétation): Messieurs les Juges, je pense qu'à

4 l'extérieur de ce prétoire, le Tribunal continuera à déployer des mesures

5 de protection à l'égard de ma famille.

6 M. Robinson (interprétation): Je vous remercie. Je comprends.

7 M. le Président (interprétation): Fort bien. La requête est accordée. Les

8 mesures de protection vont être levées.

9 (Audience publique.)

10 Monsieur Babic, vous avez déposé une requête aux fins de lever les mesures

11 de protection qui vous avaient été accordées au départ. Cette requête est

12 accordée. Maintenant, nous nous adressons à vous par votre nom.

13 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je crois avoir compris que

15 vous aviez précisé qu'il me restait 2 heures et 15 minutes pour

16 aujourd'hui?

17 M. le Président (interprétation): C'est exact. Il est maintenant 9 heures

18 et quart, à peu près.

19 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Milan Babic, par l'accusé M.

20 Milosevic.)

21 M. Milosevic (interprétation): Bien. Nous allons reprendre là où nous nous

22 étions arrêtés.

23 Nous nous étions arrêtés à la localité de Kijevo. Vous avez expliqué que

24 ce jeune homme qui a été abattu, Pecer Vaso, avait pris part à des

25 échanges de tirs entre un groupe du côté serbe et ces membres du

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1 "Redarstvo", tel qu'on l'a désigné, ou Rassemblement de la garde

2 nationale, qui se trouvait à Kijevo.

3 Mais tous les renseignements et tous les témoignages concordent pour dire

4 le contraire, à savoir qu'il n'y a pas eu d'échange de coups de feu, il

5 n'y a pas eu de coups de feu tirés du côté serbe et que Vaso Pecer a été

6 tué pendant qu'il gardait des moutons, à proximité de cette localité de

7 Kijevo.

8 Vous souvenez-vous de cela? Est-ce exact ou pas?

9 M. Babic (interprétation): J'ai parlé des connaissances premières que

10 j'avais eues. Et nous avons d'abord obtenu des informations disant que feu

11 Vaso Pecer, à Polaca, a été tué en sa qualité de simple citoyen par la

12 police ou par quelqu'un de Kijevo. Par la suite, j'ai personnellement pris

13 part à la commémoration à l'occasion de l'événement. Cela a eu lieu le 2

14 mai 1991.

15 Par la suite, des informations sont parvenues à moi; elles étaient autres.

16 J'en ai parlé également. Le feu Pecer se serait trouvé sur les flancs de

17 la montagne Kozjak avec un groupe de personnes qui se dirigeait pour

18 ouvrir le feu en direction de Kijevo. Et j'ai dit qu'il n'a pas été

19 déterminé de quelle façon exactement il est mort. Il y a une enquête de

20 conduite, mais je ne sais pas comment il a été tué. Mais cela s'est fait

21 le 2 mai 1991.

22 Question: Bien. Mais étant donné que cet incident avait suivi une logique,

23 la logique du meurtre d'un jeune homme innocent qui gardait ses moutons,

24 serait-il exact de dire que c'est précisément l'incident qui a affecté

25 tout un chacun? C'était un incident très grave, car jusqu'à ce moment, il

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1 n'y avait pas eu d'incident de cette nature et cela a fait que les

2 citoyens, après les funérailles de ce Vaso Pecer, se sont organisés pour

3 lancer une attaque spontanée contre Kijevo. Et la JNA a empêché la chose.

4 Donc, en raison de cette réaction affective, on a empêché une nouvelle

5 effusion de sang?

6 M. Babic (interprétation): Je sais qu'il y a eu une très forte révolte et

7 beaucoup d'émotion chez les gens de Knin et de Polaca. J'ai vu des gens

8 qui avaient des armes, qui étaient originaires de Polaca, qui voulaient y

9 aller; on les a empêchés. Et la JNA ne voyait pas la chose d'un bon oeil

10 du tout.

11 C'est ce qui a donné lieu à une autre réaction pour ce qui est de la JNA.

12 Jusque là, la JNA s'était trouvée présente entre Polaca et Kijevo. Cet

13 événement-là a rendu la présence du Corps de Knin accentuée parce que le

14 Corps de Knin a fait sortir des unités blindées.

15 Question: Mais est-il clair une chose, à savoir que la JNA a empêché une

16 nouvelle effusion de sang suite à cet événement? Est-ce qu'il apparaît

17 clairement de ce que vous venez de nous dire, que la JNA avait un rôle de

18 séparation entre les parties au conflit, n'est-ce pas, ainsi que cela

19 s'est passé?

20 Réponse: Eh bien, les événements de Plitvice, de Borovo Selo, de Tepljuh,

21 événements dont j'ai parlé, et suivant les modalités suivies pour vous

22 relater ces récits, eh bien, il découle que le fait que la JNA était là

23 pour séparer les citoyens serbes et les Croates dans la Krajina.

24 M. Milosevic (interprétation): Donc ce que nous constatons ici est tout à

25 fait contraire au schéma que vous avez expliqué au départ. Nous venons de

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1 constater que l'on avait tué un jeune homme qui était en train de garder

2 ses moutons, puis qu'après ses funérailles, il y a eu une manifestation de

3 révolte, il y a eu une tentative de lancer, d'entamer un nouveau conflit

4 qui a été empêché par l'armée. L'armée a donc séparé les parties en

5 conflit.

6 Et vous aviez parlé d'un schéma aux termes duquel quelqu'un essayait

7 d'engendrer le conflit.

8 M. le Président (interprétation): Un instant. Vous venez de présenter

9 plusieurs allégations.

10 Monsieur Babic, êtes-vous d'accord avec la façon ou la version des

11 événements, du début de cet événement, que présente l'accusé? Vous devez

12 avoir l'occasion d'exprimer votre avis sur cette question.

13 M. Babic (interprétation): Je ne suis pas d'accord avec la façon dont il

14 le dit parce que le fait de susciter des incidents était délibéré,

15 délibérément occasionné par des membres de la DB et de la police et ce,

16 aux fins de susciter les conflits armés entre les Serbes et les Croates;

17 en d'autres termes, entre la police de la République de Croatie et la

18 Garde nationale croate d'une part et les forces serbes d'autre part. Et

19 cela avait amené le déplacement de la JNA sur ces territoires. Ce n'est

20 donc pas de la façon dont M. Milosevic le présente que cela s'est passé.

21 M. Milosevic (interprétation): Mais les structures parallèles telles que

22 vous les désignez n'ont-elles pas alors organisé le meurtre de Vaso Pecer,

23 donc pour susciter un incident qui conduirait au déplacement de l'armée

24 vers ces territoires; c'est ce que vous affirmez?

25 M. Babic (interprétation): J'affirme que les structures parallèles

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1 originaires de Golubic se sont rendues vers Kijevo et ont ouvert le feu à

2 plusieurs reprises aux fins de provoquer les effectifs du MUP de Croatie,

3 afin que cette police de Croatie intervienne et que la JNA intervienne par

4 la suite. J'ai expliqué donc, dans le cas de Vaso Pecer, les circonstances

5 qui m'étaient connues.

6 Question: Donc cela signifierait que ces formations armées qui étaient

7 mises sur pied là-bas par les soins des paramilitaires croates étaient

8 innocentes, n'y étaient pour rien? C'est Vaso Pecer le coupable; il est

9 coupable d'avoir été tué, et il a été tué pour qu'il y ait prétexte de

10 s'attaquer aux formations paramilitaires du rassemblement de la Garde

11 nationale; c'est ce que vous expliquez?

12 Réponse: Dieu ait son âme, à Vaso Pecer. Je vous ai dit ce que je savais

13 au sujet de son décès. Et ce que je sais aussi, c'est que la DB et la

14 police serbe de la Krajina avaient procédé à des provocations à l'égard du

15 MUP et de la police de Croatie aux fins de susciter les conflits et aux

16 fins d'inciter la JNA à se mêler de tout ce qui se passait, comme vous

17 l'avez dit.

18 Question: Bien. Ecoutez, quand on parle de faits, j'imagine que nous

19 devrions être plus précis. On ne saurait dire "oui, il y a eu provocation

20 et l'armée est intervenue". Serait-il exact de dire que le MUP de Croatie,

21 ces jours-là, avait procédé à des interventions dans les villages, à des

22 fouilles, à des raids ou perquisitions de villages habités essentiellement

23 par des Serbes?

24 Réponse: Ce qui s'est passé est la chose suivante: nous avons le cas

25 d'Otisic et nous savons que, par exemple, le poste de police de Sinj, la

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1 police croate, a procédé à une inspection du village d'Otisic; elle a

2 recherché des armes et elle avait terrorisé la population. Je dirai que

3 cela avait été là un incident qui a été suscité par la police croate et

4 qui a beaucoup bouleversé la population serbe et notamment les habitants

5 du village d'Otisic. C'était la raison pour laquelle je m'étais adressé à

6 vous pour que la JNA protège ce village d'Otisic.

7 Par la suite, ce que j'ai appris, entre autres, c'est qu'un groupe de

8 personnes originaires d'Otisic avait procédé à des provocations; ils

9 avaient placé des explosifs au niveau de la route, au niveau des poteaux

10 électriques et ont fait des choses analogues; c'est ce que j'ai appris,

11 par la suite, pour ce qui est de l'origine des incidents à Otisic. C'est

12 ce qui m'a incité, moi, à m'entretenir avec vous le 26 août 1991 en vous

13 demandant de faire intervenir la JNA. Et vous aviez dit, à ce moment-là:

14 "Mais comment cela n'est-il pas encore réglé?". Par la suite, j'ai appris

15 que la JNA et les unités sous son commandement s'étaient attaquées à

16 Kijevo et ont continué vers le village d'Otisic et de Maljkovo.

17 Question: Est-ce que vous accusez la JNA d'avoir fait cela, de vous avoir

18 défendus?

19 Réponse: Ce n'est pas ce que j'ai dit; j'ai dit ce qui était arrivé.

20 Question: Justement, j'ai présenté les faits. On a perquisitionné le

21 village d'Otisic; ils avaient emmené trois villageois, puis ils ont tué un

22 villageois du nom de Dusan Gargenta. C'est bien cela qui s'est passé? Les

23 autres étaient emmenés à la prison de Split?

24 Réponse: Je sais au sujet d'Otisic. Je ne sais pas ce qui s'est passé avec

25 les autres.

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1 Question: Donc vous savez ce qui s'est passé avec les gens, mais vous ne

2 savez pas qu'il y a eu un mort?

3 Réponse: Je sais, pour ce qui est d'Otisic, qu'il y avait eu beaucoup de

4 panique et un grand émoi.

5 Question: Mais ce sont encore les Serbes qui ont donné naissance à cet

6 incident, puis ils ont péri dans le même incident; c'est ainsi que vous le

7 voyez?

8 Réponse: J'ai ouï dire que la police croate avait fait ça sans aucune

9 raison, pour ce qui est d'Otisic. Et je crois avoir appris que ces gens,

10 là-bas, n'étaient pas innocents non plus.

11 Question: Donc les gens qui se sont fait arrêter et la personne qui s'est

12 fait tuer sont coupables d'avoir été arrêtés et d'avoir été tués?

13 Réponse: Je vous ai dit ce que je savais à ce sujet.

14 Question: Je crois que vous savez maintenant les choses autrement qu'à

15 l'époque; c'est ce qu'il me semble. Mais savez-vous qu'à Velika, les

16 policiers croates avaient maltraité, malmené des Serbes; ils avaient mis

17 le feu à des maisons et votre beau-père, Bozo Skrbic, s'est fait tuer à

18 cette occasion-là; c'est vrai ou pas?

19 Réponse: Quelques jours avant cela -je crois que c'était vers le 26 août-,

20 la police croate...

21 M. Milosevic (interprétation): Mais écoutez, répondez à la question! Oui

22 ou non? N'apportez pas d'explication!

23 M. le Président (interprétation): Mais laissez le temps au témoin de

24 répondre. Vous avez énuméré plusieurs choses, donnez-lui l'occasion de

25 répondre. Et puis, vous posez des questions à propos de divers incidents,

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1 aussi.

2 Allez-y, Monsieur Babic.

3 M. Babic (interprétation): D'après ce que j'ai pu savoir, ce que j'ai pu

4 apprendre, à l'époque et par la suite, la police croate, le MUP de Croatie

5 à Velika ainsi que la Garde croate, l'unité de la Garde croate qui se

6 trouvait à Velika à l'époque, ont bloqué les sorties vers Civljani en

7 direction de la municipalité de Knin. Les habitants ne pouvaient plus

8 franchir cette ligne-là. Et vers les villages de Kosora et Civljani, il y

9 avait une unité de la JNA.

10 En date du 26 ou plutôt du 27 août 1991, je suis arrivé à Knin, dans la

11 matinée. Par la suite, dans la journée, je suis allé vers Civljani, et

12 j'ai appris de la bouche de ma belle-mère que mon beau-père avait été tué

13 par la police croate le jour d'avant, le jour précédent, au soir.

14 M. Milosevic (interprétation): Mais dites-moi: est-ce que votre beau-père

15 avait provoqué la police croate et avait fait quelque chose de mal, pour

16 se faire abattre?

17 M. Babic (interprétation): Ils ont dit que les officiers de la JNA qui se

18 trouvaient à Zukanovici, vers Civljani, ce jour-là, donc le 27 août, par

19 liaison radio, ils ont entendu des conversations entre la police et la

20 Garde croate. Ils ont entendu qu'un ordre avait été donné pour ce qui

21 était de pendre tous les miens. Il y avait le père et la mère de mon

22 épouse, il y avait ma mère et ma grand-mère. Mon beau-père a été tué ce

23 jour-là, ma belle-mère s'est enfuie, ma mère s'est enfuie et la maison a

24 été incendiée.

25 Question: Donc vous avez entendu qu'il y avait un ordre de pendre tous les

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1 vôtres. Votre beau-père a été tué, le reste de la famille s'est enfui et

2 ce sont eux les fautifs, et c'est la partie serbe qui est coupable de

3 l'incident survenu, n'est-ce pas?

4 Réponse: De quelle partie parlez-vous?

5 Question: Etant donné que vous avez parlé de Kijevo et des combats en

6 1991, veuillez me préciser comment vous avez pu déclarer, le 29 août 1991,

7 pour le quotidien "Politika", qu'aucune sorte d'effectifs originaires de

8 la République de Serbie n'ont pris part à la libération de Kijevo, de

9 Velika et ainsi de suite, et ainsi de suite dans l'interview que vous avez

10 accordée. Comment cela a-t-il pu se faire?

11 Réponse: Je ne sais pas si j'avais mentionné les effectifs originaires de

12 Serbie. Mais le fait est que, dans les combats à Kijevo, la JNA y a pris

13 part, la police de Krajina et la Défense territoriale de Cetina.

14 Question: Mais dites-moi, s'il vous plaît: est-il exact d'affirmer que les

15 effectifs de la 113e Brigade de la ZNG ont bloqué les entrepôts de la JNA

16 et ont fait irruption dans les bâtiments de la JNA dans une localité

17 appelée Manojlovac? Ils ont posé des explosifs au niveau de la voie de

18 communication traversant Kijevo pour empêcher ou entraver complètement la

19 communication, le trafic entre Knin et Sinj. C'est bien ainsi que cela

20 s'est passé?

21 Réponse: Manojlovac se trouve du côté opposé.

22 Question: Je parle de tout à fait autre chose.

23 Réponse: Je ne sais pas comment s'appelait l'Unité de la ZNG à Drnis, mais

24 à Kijevo il y avait la police du MUP de Croatie, alors que la ZNG se

25 trouvait à Vrlika; j'ai appris la chose à Drnis. Et pour ce qui est de

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1 Manojlovac, je ne sais pas du tout ce qui s'est passé.

2 Question: Mais a-t-on posé des explosifs au niveau de la voie de

3 communication? Est-ce qu'on a bloqué le trafic?

4 Réponse: Je ne sais pas s'il y avait eu un blocage du trafic ou pas. Je

5 sais qu'il y avait une voie de communication en traversant Kijevo et je

6 sais que l'on pouvait passer par Kijevo; la JNA pouvait se déplacer. Et

7 même moi, une ou deux fois, je suis passé dans un véhicule de la JNA par

8 la localité de Kijevo, en compagnie du colonel Djukic.

9 Question: Donc tout le temps, la JNA pouvait circuler?

10 Réponse: Je ne sais pas si cela avait été bloqué ce jour-là, je n'y étais

11 pas.

12 Question: Vous n'y étiez pas. Mais serait-il exact de dire que, le 16

13 août, la ZNG et le MUP du village de Kijevo, Vrlika, du village de

14 Maovica, ont lancé des attaques contre la JNA sur toutes les collines et

15 sur Kosovska Greda, dans l'objectif de détruire et de s'emparer de blindés

16 de transport de troupes et de chars?

17 Réponse: Il y a eu des conflits à Civljani. Je pense que cela a commencé

18 le 26. Pour ce qui est du 16, je ne suis pas sûr.

19 Question: Nous avons constaté tout à l'heure que les unités du 9e Corps de

20 la JNA était à Vrlika, Polaca, et ceci pour dissocier le MUP de Croatie et

21 les effectifs serbes. C'est vrai ou faux?

22 Réponse: Les unités de la JNA étaient déployées à Polaca, en effet, et se

23 trouvaient à Civljani et Kosori; et je m'attendais à ce que ces unités

24 soient déployées vers Otisic également.

25 Question: Ils avaient établi une zone tampon pour qu'il n'y ait pas de

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1 conflit, n'est-ce pas?

2 Réponse: Je vous ai dit de quelle façon les unités de la JNA sont sorties

3 sur le terrain. Elles étaient sorties pour ne pas permettre qu'il y ait

4 des conflits, mais les conflits ont été engendrés par la DB et la police,

5 et cela avait été le prétexte qui a servi à la JNA pour quitter les

6 casernes.

7 Question: Ce sont donc les Serbes qui ont suscité les conflits pour que la

8 JNA sorte et fasse en sorte que le MUP de Croatie et les ZNG soient

9 séparés des effectifs serbes?

10 Réponse: C'est vous qui avez donné naissance à ce type d'intervention.

11 Question: Mais serait-il exact de dire que les membres du MUP de Croatie

12 ont, sans raison aucune, ouvert le feu en direction de la JNA qui avait

13 essayé de créer une zone tampon? C'est vrai ou pas?

14 Réponse: Je vous ai dit ce que je savais, à savoir que le conflit opposant

15 les citoyens croates, le MUP et le siège des casernes, la police croate et

16 les membres de la ZNG a connu une escalade à partir du début janvier 1991

17 et jusqu'en août 1991. A ce moment-là, c'est devenu une guerre ouverte.

18 Question: Est-il exact de dire que c'est seulement après ces attaques, que

19 les forces du 9e Corps ont commencé des engagements, surtout pour lever le

20 barrage des routes?

21 Réponse: J'ai entendu dire la chose suivante, à savoir qu'il y a eu un

22 siège, des barrages; j'en ai déjà parlé ici, dans ce prétoire. Un homme

23 qui a péri, qui était originaire de Cetina, dont on a dit qu'il était mort

24 suite à des sévices infligés par la police croate de Sibenik, a été

25 enterré. Son corps a été exhumé; ils voulaient le transporter à Cetina, et

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1 c'est à ce moment-là qu'il y a eu un barrage de la route. C'est dans ce

2 cadre qu'il y avait eu un grand rassemblement des citoyens devant la

3 caserne du 9e Corps. C'est pour cela qu'il y a eu un barrage. Il y avait

4 donc une existence partielle des barrages.

5 Pour ce qui est du conflit qui s'est déroulé le 26 août, j'ai appris ceci:

6 tout d'abord, j'ai pensé que le barrage des routes avait provoqué

7 l'attaque déclenchée par la JNA. Cependant, j'ai entendu deux rapports

8 différents à propos de cet événement.

9 Il y a eu d'abord un rapport le 25 dans la soirée. On m'a demandé d'aller

10 vous voir à Belgrade; après, on m'a dit d'aller à Golubic. C'est là que

11 j'ai vu un groupe de personnes originaires de Lapac qui déchargeaient

12 quelque chose et emmenaient ce quelque chose dans l'entrepôt où il y avait

13 un centre de formation de la DB et de la police. J'ai eu le sentiment,

14 j'ai eu l'impression que j'ai vu le président de la municipalité. J'ai

15 demandé à quelqu'un qui était là ce qui se passait. On m'a répondu qu'il y

16 avait un peloton de mortiers de Lapac qui allait être déployé vers Kijevo.

17 C'est un premier rapport que j'ai reçu.

18 Par la suite, j'ai entendu la chose suivante: un groupe de Cetina aurait

19 d'abord ouvert le feu sur Kijevo. Etait-ce là un groupe de la TO, un

20 groupe de civils ou des gens de la Krajina, je ne sais pas exactement. Il

21 y a eu riposte depuis Kijevo et c'est à ce moment-là seulement que la JNA

22 a déclenché cette attaque. Mais ce qui s'est passé, c'est que les forces

23 croates -est-ce que c'étaient les gens de la ZNG ou pas, je ne sais pas-,

24 mais apparemment, il y a eu panique dans la population des gens de

25 Jezevici. Grâce à l'intervention rapide de ce Corps, ils ont réussi à

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1 défendre cette route; c'est ce que j'ai appris par la suite à propos de

2 ces événements.

3 Question: Vous opérez donc une distinction entre ce que vous saviez à

4 l'époque, et ce que vous auriez entendu plus tard. Ce que vous saviez plus

5 tard, vous venez de le répéter et ceci coïncide d'ailleurs avec mes

6 affirmations à moi.

7 Maintenant, vous nous dites que, par la suite, plus tard, vous avez

8 entendu une version différente des événements?

9 Réponse: J'ai reçu plus de détails par la suite.

10 Question: Je suppose qu'eux aussi, à l'époque, ils savaient qu'ils

11 allaient lever le barrage de ces routes, comme vous, vous le saviez à

12 l'époque aussi. Ce que vous dites maintenant, en fait, c'est le fruit de

13 votre imagination: vous venez de le concocter de toutes pièces, n'est-ce

14 pas?

15 Réponse: Si vous dites que le barrage a été levé sur ces routes de la

16 façon que vous venez de décrire, ceci s'est fait de telle façon que toute

17 la population croate a pris la fuite devant la JNA, que Kijevo aurait été

18 détruite par l'artillerie et que la JNA, avec ses unités de chars et

19 d'artillerie, serait passée par Kijevo vers Vrlika, serait arrivée vers

20 Otisic, serait passée par Maovica, Maljkovo et Laktaci, pour aller vers

21 Dabar.

22 Question: Fort bien, mais évoquons ces faits assez rapidement. Est-ce que

23 vous savez qu'il n'y a aucun membre du MUP de la Croatie qui a participé à

24 cette action?

25 Réponse: Je vous ai dit ce que je savais s'agissant des participants. Je

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1 sais que Zelenbaba et Martic sont entrés plus tard dans Kijevo. Etait-ce

2 après l'arrivée de la JNA, je ne sais pas trop. Ce que j'ai entendu dire

3 -et je l'ai vu d'ailleurs à la télévision- c'est que Martic et Milenko

4 Zelenbaba retiraient les inscriptions du MUP et qu'ils les piétinaient.

5 Ceci a été montré à la télévision de Belgrade.

6 Question: Mais ça, c'est autre chose. Est-ce que vous savez que Martic et

7 les membres de la police ne sont entrés à Kijevo qu'après ces policiers

8 croates, qui étaient au nombre de 800, ont pris la fuite. Et c'était un

9 petit village: vous le savez, n'est-ce pas?

10 Réponse: Je ne sais pas à quel moment Martic est entré dans Kijevo.

11 Question: Puisque vous avez décrit l'utilisation des chars pour capturer

12 Kijevo, savez-vous que, dans cette opération consistant à lever les

13 barrages routiers, il n'y a pas eu une seule perte?

14 Réponse: Ce que je sais effectivement, c'est qu'un ou deux membres de la

15 ZNG de Croatie ont été enterrés aux abords de Vrlika, à Djordjevic

16 exactement. Quelqu'un a été enterré à (inaudible); mais je ne sais pas

17 exactement.

18 Question: Je vois. Donc quelqu'un vous a dit qu'une ou deux personnes

19 avaient été enterrées et moi, j'ai des informations selon lesquelles il

20 n'y a pas eu de pertes au moment où ces barrages routiers ont été levés à

21 Kijevo, qu'il y a eu 60 personnes qui ont été capturées, mais libérées

22 immédiatement après, parce que le but n'était pas d'arrêter ou de tuer qui

23 que ce soit, mais de lever le barrage routier. Etes-vous au courant de

24 cela?

25 Réponse: On m'a dit ce que je vous ai dit.

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1 Question: Donc ce que vous savez, c'était "En général", "Bon, j'ai entendu

2 dire plus tard", "Quelqu'un m'a dit"; c'est ce genre de choses?

3 Réponse: Ce jour-là, je vous ai rendu visite à Belgrade et je n'étais pas

4 présent à Knin ou dans la région. Je n'y étais que le lendemain.

5 Question: Vous n'avez de cesse de vous référer au fait que vous avez

6 effectué des visites pour venir me voir à Belgrade et qu'elles furent très

7 fréquentes, mais nous avons vu qu'au moment où nous avons discuté du plan

8 Vance, au cours de l'automne 1991, que… En fait après, c'est seulement en

9 1993 que vous êtes venu me rendre visite en tant que membre d'une

10 délégation assez importante. Et puis ce fut le cas également en 1994 et

11 1995. Finalement, il n'y a donc eu qu'une visite par an; et vous donnez

12 sans cesse l'impression que vous étiez sans arrêt à Belgrade.

13 Réponse: Eh bien, d'octobre 1990 à septembre 1991, je vous ai rencontré

14 quelque 25 fois à Belgrade.

15 Question: Fort bien, Monsieur Babic, ce sont des affirmations de votre

16 part, rien d'autre.

17 Donc vous n'êtes pas au courant du fait qu'il n'y a pas eu de pertes à

18 Kijevo? Vous ne savez pas que 60 hommes ont été capturés, mais libérés

19 immédiatement? Vous ne savez rien à ce propos?

20 Réponse: Je vous ai dit ce que je savais.

21 M. Milosevic (interprétation): Donc ce que je dis n'est pas exact?

22 M. Babic (interprétation): Je sais qu'il y a des gens qui ont été

23 capturés.

24 M. le Président (interprétation): Il ne le sait pas, il l'a dit. Mais

25 passons. Continuons.

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1 M. Milosevic (interprétation): Je pense qu'il sait pertinent tout cela,

2 mais il refuse tout simplement de dire quoi que ce soit qui serait

3 favorable pour les Serbes. Mais avançons rapidement.

4 Vous nous avez raconté plusieurs contre-vérités à propos de Drnis. Est-il

5 exact de dire qu'à Drnis, il y a pratiquement 80% de Croates?

6 M. Babic (interprétation): Oui.

7 Question: Est-il exact de dire que le HDZ est sortir vainqueur des

8 élections et puis, après avoir assis son pouvoir, a introduit la terreur,

9 l'intimidation et a provoqué des incidents avec les Serbes, la population

10 serbe et la JNA?

11 Réponse: Le HDZ a remporté les élections à Drnis en mai 1991; et j'ai déjà

12 parlé des événements qui se sont produits au poste de police de Drnis au

13 mois d'août 1990. Ante Bujas a donné un ordre à un groupe de policiers de

14 la localité, qui étaient aussi bien des Croates que des Serbes, visant à

15 enlever les hommes au barrage de Kosovo Klanac et de se diriger vers

16 Drnis. Les policiers ont refusé de le faire; du coup, ils se sont

17 dispersés. J'ai dit aussi qu'il y avait plusieurs communautés locales à

18 Drnis qui avaient rejoint la municipalité de Knin. Je vous ai déjà dit ce

19 que je savais à propos de Drnis.

20 Question: Est-il vrai de dire qu'après la formation de la 113e Brigade de

21 la Garde nationale, il y a eu des attaques sur les casernes et les

22 entrepôts de la JNA à Drnis et à Sibenik?

23 Réponse: Je ne connais pas les détails concernant le siège des casernes

24 autour de Drnis. Mais, effectivement, il y avait à cet endroit des

25 entrepôts et arsenaux.

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1 Et je sais ce qu'il en est du siège de Sibenik. Le général Djukic m'en a

2 parlé, il m'a parlé de son intention de lever le siège de Sibenik en

3 passant par Drnis.

4 Question: Etes-vous informé du fait qu'il y avait un siège du village de

5 Vukovic et de Trobunje? Est-ce que vous savez qu'il y avait le

6 commandement de la Brigade motorisée qui avait été aussi assiégé, et qu'il

7 y avait un centre de relais radio, il y avait un entrepôt à Manojlovac?

8 Vous n'êtes pas au courant de tous ces barrages et sièges de casernes, et

9 du fait qu'il y a eu effraction dans ces différents entrepôts?

10 Réponse: Je sais qu'il y a eu des sièges d'installation de la JNA et qui

11 étaient le fait des forces croates. Je n'ai pas de détails à ce propos

12 pour ce qui est de Drnis et des environs. Ce que je sais, c'est que la

13 garnison de Sibenik avait été assiégée; je sais exactement où ceci se

14 trouve. Mais pour ce qui est du type de siège, je ne suis pas exactement

15 au courant.

16 Je sais simplement que le général Vukovic m'a demandé s'il y avait

17 quelqu'un qui avait un plan de la ville de Sibenik, parce qu'il voulait y

18 aller pour lever le siège de la garnison là-bas. Mais il a dit en passant

19 que "Drnis était un peu comme une verrue sur l'appareil génital féminin",

20 un peu comme une blessure pour lui. Et je n'en sais pas plus.

21 Question: Mais ceci ne vous intéressait pas, n'est-ce pas, tous ces

22 événements? D'après votre déposition, vous n'étiez qu'un observateur

23 passif?

24 Réponse: Non, j'étais présent à Tepljuh, quand Orlovic a dit qu'il y avait

25 des groupes qui avaient été détachés; il y avait des groupes au-dessus de

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1 Tepljuh qui avaient été perturbés. J'y suis allé pour voir cela de mes

2 yeux, mais il n'y avait pas eu de tirs: c'était simplement des incidents.

3 Il y avait aussi un train blindé, le train de "Frenki" qui est arrivé. Il

4 y a eu des troubles. Et par la suite -je ne sais pas si c'était le

5 lendemain ou quelques jours plus tard-, je suis venu à Miocic et le

6 général Djukic était déjà en action. J'ai été jusqu'à son véhicule de

7 combat blindé; il donnait des ordres à son artillerie qui ouvrait le feu

8 sur Petrovo Polje. C'est ce que j'ai vu.

9 Question: Puisque la JNA était une zone tampon sur cette ligne, est-il

10 vrai qu'on a ainsi empêché des conflits dans le village de Tepljuh au

11 début d'août 1991?

12 Réponse: Je ne sais pas exactement ce qu'il en est pour le mois d'août,

13 mais je sais qu'il y a eu un déploiement devant Tepljuh en direction de

14 Petrovo Polje. C'est la ligne de villages qui avaient rejoint Knin;

15 auparavant, elle faisait partie de la municipalité de Drnis, entre Tepljuh

16 et les villages croates. Et en septembre, il y a un événement que je vous

17 ai décrit, un événement.

18 Question: Vous vous souvenez combien de temps ces petits groupes de la JNA

19 ont été bloqués, par exemple pour ce qui est du centre de Promin, qui a

20 été tout à fait bloqué? Il y a eu aussi un hélicoptère qui devait

21 transporter des produits de première nécessité, des vivres et qui a été

22 abattu; il a été abattu par des unités paramilitaires. Le pilote, un

23 certain Brkic, a été tué. Etes-vous au courant de cela?

24 Réponse: Je suppose qu'il y a eu un barrage, mais je n'en sais pas plus.

25 Question: Est-il exact qu'il y a eu des négociations de cessez-le-feu,

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1 qu'un accord a été signé et qu'il y a eu un repli organisé de ces unités

2 depuis Sibenik et Sinj?

3 Réponse: Je sais qu'il y a eu plusieurs fois des pourparlers. Au mois

4 d'août –je l'ai déjà dit-, la JNA s'est rapprochée de Sinj, du village de

5 Maljkovo et s'est rapprochée de Drnis. Ces villages, je les ai déjà

6 mentionnés; là, je suis au courant.

7 Et puis en septembre, début septembre, la JNA a progressé et s'est

8 rapproché de Sinj, du village de Hrvaci. Vers la fin du mois de septembre,

9 le Corps de Knin, ou plutôt le général Djukic a capturé l'essentiel de la

10 municipalité de Drnis; il est passé par la ville de Drnis et a établi la

11 ligne dans le village de Zitnic.

12 Et dans la région de Zadar, j'ai entendu aussi ceci de la part du général

13 Vukovic; il était là pour lever le siège de Zadar, de la caserne de Zadar;

14 ceci s'est passé début octobre. Je sais effectivement que le général

15 Vukovic, commandant du 9e Corps, a déplacé son poste de commandant vers

16 Zemunik et que Zadar était sous le tir nourri des unités de la JNA, que

17 c'est de cette façon que le 9e Corps s'est approché de la municipalité de

18 Zadar ou, plutôt, que les autorités de cette municipalité ont marqué leur

19 accord pour lever le siège des casernes et qu'un accord a été signé à cet

20 effet.

21 Après cela, il y a eu des négociations ou des incidents -je ne sais

22 exactement- en ce qui concerne la levée du siège de la caserne de Sibenik.

23 Donc d'abord, ça a commencé par Zadar puis ça a été Sibenik. Et la

24 garnison de Sinj a commencé à se retirer. C'est donc parti de Zadar et de

25 Sibenik. Ceci s'est poursuivi pendant plusieurs mois, jusqu'à la fin à peu

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1 près de 1991.

2 Question: Je vois. Donc l'armée est intervenue uniquement ponctuellement

3 dans deux endroits pour lever le siège de casernes, pour retirer les

4 membres, les unités et servir de zones tampons afin d'éviter des conflits

5 entre la ZNG et les forces serbes de la région. Est-ce que ceci n'est pas

6 clair?

7 Réponse: Oui. Et elle déployait aussi ses forces sur le territoire de la

8 SAO de Krajina, mais aussi dans des régions qui n'en faisaient pas partie

9 comme la ville de Drnis, Krumine, Promina, Maljkovo et d'autres villages

10 autour de Zadar, de Skabrnja, pour n'en mentionner que quelques-uns.

11 Question: Est-ce qu'il y a un doute quelconque sur le fait que tout ceci,

12 c'était le territoire de la RSFY, que l'armée était en train de se

13 déployer dans un territoire qui était son territoire de compétence,

14 légalement parlant? Et qu'est-ce que ceci a à voir avec le territoire de

15 la SAO de Krajina? Elle levait le siège de garnison à Zadar, à Sibenik,

16 alors que ceci n'avait jamais été une partie de la SAO de Krajina, mais

17 l'armée s'y était trouvée pendant 50 ans, n'est-ce pas?

18 Réponse: J'ai dit que la JNA avait levé le siège de ces casernes, qu'elle

19 s'était placée autour de la SAO de Krajina, dans un territoire qui n'était

20 pas une partie de la SAO de Krajina, ce qui veut dire qu'ils prenaient

21 position dans d'autres zones également. La SAO avait décidé de faire

22 sécession par rapport à la Croatie, de rester en Yougoslavie. Elle était

23 constituée en tant que territoire fédéral de la RSFY, d'après nos

24 convictions. Et jusqu'à ce moment-là, la SAO a fait partie du territoire

25 de la RSFY.

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1 Cependant, dans les parties que j'ai mentionnées où il y avait présence de

2 la JNA et activité de la JNA, présence active donc, ceci n'était pas le

3 territoire de la SAO de Krajina. Pour ce qui est du mois d'octobre et du

4 mois de novembre, des mois qui s'en sont suivis, il est devenu de

5 notoriété publique, à partir du 18 octobre, que la Croatie avait déclaré

6 que le moratoire de trois était arrivé à terme et puis qu'après, elle

7 pouvait être indépendante. Et ceci a été exactement fait.

8 Ici, je ne suis pas un arbitre; je parle simplement de faits qui se sont

9 produits.

10 Question: Oui, je parle des faits. Donc pendant toute cette opération de

11 retrait de l'armée de ces facilités (kia) où le siège avait été levé, on a

12 enlevé l'équipement, est-ce que vous vous souvenez des attaques dirigées

13 contre la voie ferrée entre Zagreb et Belgrade? Savez-vous qu'il y a eu

14 des camions de l'armée à Karlovac et à Banja Luka?

15 Il y a eu des attaques, notamment, sur cette voie ferrée allant de Zagreb

16 à Belgrade, au moment où tout un train militaire avait été l'objet

17 d'attaques de la part de la ZNG croate, ce qui veut dire que l'armée se

18 retirait de zones où le siège avait été levé et sortait, en fait, du

19 territoire croate. Est-ce que vous vous souvenez de ça? Il y a eu des

20 incidents, sur cette ferrée Zagreb-Belgrade, où une escorte militaire

21 avait été enlevée du train pour être emmenée dans une direction inconnue,

22 avec pillage de l'équipement militaire, du matériel… Est-ce que vous vous

23 souvenez de tout cela? Est-ce que vous savez qu'il y avait une escalade

24 des sentiments à propos de la JNA?

25 Réponse: Je vous en ai parlé, de ces tentatives de déblocage. Je vous ai

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1 parlé des déblocages à Varazdin, à Bjelovar et j'ai parlé aussi du cas que

2 vous venez de mentionner tout à l'heure pour ce qui est de ce train qui

3 avait transporté des équipements militaires en provenance de Zagreb, la

4 JNA se retirant. Je crois en avoir déjà parlé. J'en ai entendu parler et

5 j'ai vu personnellement le retrait, le départ des officiers, de leurs

6 familles, de la région du 5e Corps d'armée, à savoir Zagreb, en direction

7 de l'aéroport de Bihac. J'ai vu des colonnes d'officier avec leurs

8 familles, leurs meubles; ils attendaient leur tour pour embarquer sur des

9 wagons de transport et pour être évacués de la là-bas.

10 Question: Est-ce que vous vous souvenez de la lettre, à l'époque, de

11 l'adjoint au ministre fédéral à la Défense, l'amiral Stane Brovet qui

12 était, lui, slovène? En date du 31 août 1991, il avait envoyé un courrier

13 au Premier ministre Franjo Grigoric, en Croatie; il avait parlé des

14 attaques, il avait parlé du pillage de la propriété de la JNA par les

15 membres des formations, des effectifs armés du rassemblement de la Garde

16 nationale et autres. Vous souvenez-vous de cela? La chose était publique,

17 quand même.

18 Réponse: Je ne me souviens pas de la lettre, mais je sais qu'il y avait eu

19 des intrusions dans les appartements d'officiers: on avait vidé des

20 familles d'officiers de leurs appartements, et ainsi de suite. On en a

21 parlé.

22 Question: Mais serait-il exact de dire que dans tous ces conflits armés

23 entre les effectifs armés de la Krajina avec les effectifs de la ZNG et le

24 MUP, les unités de la JNA, avant que d'être attaquées, elles-mêmes n'ont

25 joué qu'un rôle de séparation entre les forces en conflit; vrai ou faux?

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1 Réponse: Les unités de la JNA s'étaient, d'après ce que je sais, déployées

2 depuis le début du mois de mars, conformément aux raisons avancées

3 officiellement, à savoir séparer les forces en conflit. Mais à l'origine,

4 il y avait la DB de Serbie et la police serbe de la Krajina d'une part, et

5 la police croate et la ZNG.

6 Question: Oui. Mais souvenez-vous du communiqué officiel du secrétariat

7 fédéral à la Défense nationale du 28 juillet 1991 où il est dit que tous

8 les cas où les unités de la JNA se sont vues contraintes à riposter en

9 ouvrant le feu en direction des effectifs de la ZNG ont été communiqués à

10 l'opinion publique. Il est des preuves évidentes disant que les unités de

11 la JNA n'ont été, en aucun cas, les premières à ouvrir les feux; et les

12 membres de la JNA, les membres de leurs familles sont sans cesse exposés à

13 des provocations brutales, à des pillages de leurs biens, à des mauvais

14 traitements et, pour finir, à des attaques à main armée. Vous en souvenez-

15 vous?

16 Réponse: Je vous ai parlé de ce que j'ai appris pour ce qui est de

17 l'escalade des conflits armés, des ouvertures ou des échanges de feu

18 mutuels. Et le plus souvent, c'étaient des tirs ouverts en provenance de

19 la Krajina, de la police et de la DB, en direction de la police de

20 Croatie. La police de Croatie ripostait. Alors, les effectifs de la police

21 de la Krajina et les unités de volontaires s'attaquaient au mortier à la

22 partie croate, puis la partie croate ripostait. Et là, la JNA venait

23 intervenir, ouvrait un feu d'artillerie. Cela s'est passé à partir du mois

24 d'août 1991.

25 Question: Mais est-ce que cela signifie qu'il n'est pas exact de dire

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1 qu'il est des preuves irréfutables aux termes desquelles les unités de la

2 JNA n'ont jamais été les premières à ouvrir le feu, mais qu'elles ont

3 ouvert le feu uniquement aux fins de se protéger, une fois attaquées

4 seulement? C'est un mensonge?

5 Réponse: Je vous ai dit ce que j'en savais, j'ai dit ce que je savais à ce

6 sujet.

7 Question: Mais dans ce même communiqué, s'agissant des événements bien

8 connus du 6 mai à Split, jusqu'au 25 juillet, là où ils avaient lynché le

9 malheureux soldat et où ils avaient fait des manifestations contre

10 l'armée, il y a eu 126 cas de violence à l'égard de la JNA et des biens de

11 la JNA. Il y a eu 22 attaques à main armée contre la JNA, il y avait 11

12 cas d'ouverture de feu en direction des casernes et des installations

13 militaires, et 36 cas d'infraction à la loi. Donc tout cela a été

14 publiquement présenté à l'opinion publique yougoslave.

15 Est-ce que vous affirmez en ce moment-ci que tout cela est inventé de

16 toutes pièces?

17 Réponse: Je vous dis ce que j'ai dit déjà devant ce Tribunal, à savoir que

18 suite aux événements du 2 mai, notamment après les événements de Borovo

19 Selo, il y a eu une grande escalade, une grande intolérance et même une

20 haine de suscitée à l'égard de la population, de l'armée, de la police et

21 du Gouvernement croate. Et s'agissant du rôle de la JNA, dans les

22 conflits, je crois avoir dit que j'ai suivi l'évolution de l'opinion

23 publique en Croatie, présentée par les médias croates. J'ai dit que,

24 pendant des jours et des jours, on a enterré les policiers croates tués;

25 il y avait eu des manifestations de commémoration et des protestations de

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1 l'opinion publique.

2 A Split, les conflits ont connu une escalade entre la JNA et la population

3 de là-bas. Il y a eu un citoyen qui a sauté sur un blindé de transport de

4 troupes et qui a étranglé un jeune soldat de la JNA. A ce moment-là, il y

5 a même eu un soldat de la JNA qui a été tué. Là, l'escalade s'est

6 accentuée.

7 Il est arrivé un moment où, en Croatie, il devait avoir un référendum pour

8 savoir si les citoyens de la Croatie étaient favorables à un Etat croate

9 souverain, ou en faveur du fait de rester en Yougoslavie. Je crois que

10 tous ces événements ont fait que la majorité des citoyens croates ont opté

11 pour un Etat croate souverain et indépendant.

12 Question: Mais ne découle-t-il pas de ce que vous êtes en train de nous

13 dire, que ce sont les gens de la Krajina qui s'étaient attaqués à la

14 Croatie et non pas le régime chauviniste croate qui s'était attaqué aux

15 Serbes?

16 Réponse: Je vous ai parlé de façon précise des connaissances que j'avais

17 concernant le début des conflits. Il y a eu d'abord des conflits

18 politiques en 1991.

19 Question: Ecoutez, répondez brièvement; je ne peux pas tout le temps

20 écouter vos discours à ce sujet. Je vous ai posé une question précise: ce

21 sont les gens de la Krajina qui se sont attaqués à la Croatie; est-ce ce

22 que vous affirmez, oui ou non?

23 Réponse: Je vous ai dit comment les conflits ont commencé.

24 M. Milosevic (interprétation): Mais dites-moi, vos collaborateurs les plus

25 proches, le président de l'assemblée municipale, David Rastovic et Sergej

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1 Veselinovic, dirigeants de ces assemblées municipales, étaient vos

2 collaborateurs les plus proches, oui ou non?

3 M. Babic (interprétation): Rastovic était président de l'assemblée

4 municipale de la Dalmatie du Nord et de Lika, il avait été vice-Président

5 du Conseil national serbe, et il était Président du Conseil provisoire de

6 la SAO Krajina; il a été l'un des fondateurs de ce parti, avec Jovan

7 Raskovic.

8 M. le Président (interprétation): N'avait-il pas été l'un de vos

9 collaborateurs les plus proches? C'est la question qu'on vous a posée.

10 M. Babic (interprétation): C'étaient mes camarades politiques, mes amis

11 politiques, des gens qui partageaient mes opinions jusqu'à la date du 29

12 mai 1991. Puis, nous nous sommes séparés sur le plan politique; ils sont

13 devenus une faction et j'étais membre d'une autre faction, qui était

14 proche du Premier ministre Starevic, de Martic. Ils étaient proches de

15 "Frenki". Je puis donc dire une chose, c'est qu'ils étaient ses

16 collaborateurs, ses amis politiques jusqu'à la mise en place de ce

17 gouvernement en mai 1991.

18 M. Milosevic (interprétation): Bien. Mais ils vous ont rédigé une lettre.

19 Je voudrais que vous répondiez à certaines questions qui sont posées dans

20 cette lettre, que ces deux-là ont écrite et qu'ils ont signé chacun de

21 leur propre main. Ils disent: "Nous espérons que tu n'ignores pas que le

22 Parti démocratique serbe porte un préfixe national parce qu'on s'attendait

23 à un conflit politique au niveau national entre les Serbes et les Croates,

24 pas parce que quelqu'un de Serbie l'avait souhaité, mais parce que, par

25 son programme nationaliste, exclusiviste, le HDZ l'avait imposé".

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1 M. Babic (interprétation): J'ai dit qu'il y avait un conflit politique

2 entre le SDS et le HDZ, à savoir entre les représentants politiques du

3 peuple serbe et les représentants du peuple croate, et que vous vous êtes

4 immiscé dans ce conflit.

5 Question: Eh bien, ils disent tout à fait le contraire: "Ce que tu es en

6 train de témoigner en disant que quelqu'un de Serbie y a pris part, nous

7 pouvons le comprendre, parce que tu ne le sais pas, tu n'y as pas pris

8 part. Par la suite, tu es tombé dans un SDS qui a été constitué à partir

9 de la Ligue des communistes de Croatie". C'est vrai ou faux?

10 Réponse: S'ils disent que j'ai fait intrusion dans le SDS, je pourrais

11 dire que c'est le 17 février 1990, à l'assemblée constituante; j'en ai

12 fait partie parce que j'avais été proposé pour être membre du comité

13 principal de ce parti, après le bref discours d'introduction que j'y ai

14 fait.

15 Question: Bon, mais ils disent encore: "Tu sais bien que les meetings du

16 Parti, que nous avons tenus tout au large de la Krajina, en attirant

17 l'attention de la population sur les fantômes oustachis, qui menacent leur

18 destinée, tu sais que personne n'a influé sur la chose en provenance de

19 Serbie. Là, à ce sujet-là, tu te tais." (Fin de citation.)

20 C'est ce qu'ils te disent dans cette lettre. En a-t-il été ainsi ou pas?

21 Réponse: J'ai pris la parole dans les meetings s'agissant des événements

22 en 1990 et j'ai dit, avec beaucoup de précision, ce qui s'est passé à ce

23 Tribunal.

24 M. Milosevic (interprétation): Et ils disent: "Et nous, soussignés…"

25 M. Robinson (interprétation): Est-ce que vous pouvez nous donner la date

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1 de la lettre au sujet de laquelle vous êtes en train de parler?

2 M. Milosevic (interprétation): Je viens de l'obtenir. En l'écoutant,

3 c'étaient ses collaborateurs les plus proches et ils lui répondent, ils

4 lui ont répondu.

5 M. Robinson (interprétation): C'est maintenant qu'ils sont en train de lui

6 répondre?

7 M. Milosevic (interprétation): Je viens de le recevoir par fax. Je n'en ai

8 jamais reçu autant. J'ai tout un tas, un monticule de lettres de gens de

9 la Krajina au sujet de votre témoin-là, votre témoin dont vous pouvez être

10 fier!

11 M. Robinson (interprétation): Je crois que votre affaire sera renforcée,

12 appuyée si vous citez à la barre tous ces gens-là pour venir témoigner en

13 votre faveur, à décharge. Le poids que la Chambre peut attacher à ce type

14 de témoignage ne saurait être grand, à moins que vous ne renforciez la

15 force probante de ces témoignages en citant ces témoins à la barre.

16 M. Milosevic (interprétation): Je vous remercie de votre conseil, Monsieur

17 Robinson. Il est certain que les lettres envoyées, par des gens qui les

18 signent d'ailleurs, sont des lettres provenant de gens qui sont disposés à

19 venir témoigner ici. Là, on voit bien qu'il s'agit d'un montage de toutes

20 pièces, fait d'une façon de profane.

21 M. le Président (interprétation): Vous ne pouvez pas faire de commentaires

22 de ce type en parlant de façon de procéder de novice ou de profane. Vous

23 pouvez poser des questions appropriées.

24 M. Milosevic (interprétation): Bien. "Et nous t'admirions à l'époque pour

25 ce qui est de tes propriétés de rhétoricien, lorsque tu nous disais quels

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1 étaient les périls qui menaçaient la population et qui provenaient des

2 autorités croates oustachis nouvellement élues. Nous t'admirions à

3 l'époque."

4 M. le Président (interprétation): C'est un commentaire que vous faites.

5 M. Milosevic (interprétation): "Mais ne te souviens-tu pas du fait que les

6 pouvoirs officiels de Serbie, et ce, par le biais des généraux de la

7 Krajina avaient appuyé le parti SDP de Racan, et c'est la raison pour

8 laquelle le SDS n'a pas pris le pouvoir dans toutes les municipalités

9 serbes? Comment peux-tu parler de complot pour ce qui est de la

10 réalisation d'un programme national serbe de quelque nature que ce soit";

11 ce sont là leurs propos, à eux.

12 M. Babic (interprétation): Mais quelle est la question?

13 Question: Ce sont eux qui posent la question. "N'est-il pas vrai de dire

14 que tu te souviens que les autorités officielles de l'époque avaient

15 apporté leur soutien au parti SDP de Racan?"

16 Réponse: Vous ne l'avez pas soutenu, si je m'en souviens bien.

17 Question: Mais c'est eux qui vous écrivent! C'est eux qui…

18 Réponse: Vous n'avez pas du tout appuyé Racan, ça je m'en souviens très

19 bien.

20 Question: Je n'ai rien affirmé moi-même.

21 Réponse: S'agissant de ce groupe de généraux à la retraite, généraux de la

22 Lika, j'en ai entendu parler. J'ai ouï dire que, pendant la campagne

23 préélectorale en 1991, ils se baladaient en hélicoptère pour soutenir

24 l'option de gauche, à savoir l'option de la Ligue des communistes de

25 Croatie, le parti de Racan comme vous le désignez ici.

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1 Question: Oui, en effet. Et ils disent: "Nous ne voulions pas que Tudjman

2 nous passe la corde au cou, et nous savons œuvrer au travers des organes

3 de l'assemblée municipale à la tête de laquelle tu te trouvais et au

4 travers du Conseil national serbe. Tu sais très bien que personne de

5 Serbie n'a pris part à la chose".

6 C'est ce qu'ils vous écrivent.

7 Réponse: J'ai parlé avec précision de ces événements. Je ne vous ai

8 mentionné pour la première fois que, lors du déplacement vers Kupari, et

9 j'ai parlé de la première rencontre du 11 août 1991, j'ai dit qu'à

10 l'assemblée constituante du SDS je me souvenais qu'il y avait des invités

11 de Serbie. Il y avait Kosta Cavoski qui était un invité, mais je ne sais

12 pas quels étaient les autres, et je ne sais pas d'ailleurs où se situe

13 votre question.

14 Question: Ils disent: "C'était notre combat à nous contre les autorités

15 nationalistes croates, notre résistance pour ce qui est de la privation du

16 peuple serbe et de ses droits, de ses droits constitutionnels?

17 Réponse: Oui, il y avait eu combat politique de notre part, mais avec des

18 garanties de votre part pour ce qui est de la défense de notre lutte

19 politique par la JNA.

20 Question: Mais ils vous disent encore: "N'avons-nous pas deviné

21 publiquement nous-mêmes leur intention de nous priver de notre statut de

22 peuple constitutif en Croatie et n'avons-nous pas entrepris des démarches

23 politiques pour combattre cette intention?"

24 Réponse: J'ai parlé de notre combat politique. J'ai parlé de notre

25 intention de nous opposer aux modifications de la Constitution de la

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1 République socialiste de Croatie. Nous étions contre ces modifications et

2 nous étions contre l'adoption et la promulgation d'une nouvelle

3 Constitution en Croatie; Constitution qui ne reconnaîtrait pas le droit du

4 peuple serbe à la constitutionalité.

5 J'avais dit que nous étions favorables à la défense et la définition de

6 ses droits du peuple serbe dans la Constitution croate, au travers de la

7 reconnaissance de l'existence de régions autonomes de Croatie. Nous avions

8 même appelé la chose "zupanja". David Rastovic s'était opposé au terme de

9 "zupanja", "province" en traduction. Mais je crois bien me souvenir que

10 j'avais proposé que cela s'appelle "région autonome serbe" ou "zupanja

11 serbe"; et lui, était en colère parce que j'avais utilisé le terme de

12 "zupanja" (terme croate pour dire "province" précise l'interprète).

13 Question: Mais moi, je ne vous pose pas cette question.

14 Est-ce que ce que ces deux-là ont écrit est exact ou pas? Et ils ont

15 signé. Ils disent encore: "Je ne pense pas que tu aies pu oublier les

16 nuits que nous avons passées au centre d'information à Knin, et nos

17 courageux déplacements vers les barricades. C'est par ta présence que tu

18 as encouragé nos gens de la Krajina, nos voisins, nos villageois qui t'ont

19 fait confiance, sans réserve aucune. As-tu vu à ce moment-là des gens de

20 Serbie?"

21 Réponse: S'agissant des barricades, j'ai dit comment ces barricades

22 étaient survenues; et leur fonction avait été de sécuriser la tenue du

23 référendum.

24 Question: Mais y avait-il quelqu'un originaire de Serbie là?

25 Réponse: Sur les barricades?

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1 Question: Oui. Est-ce quelqu'un venant de Serbie a mis en place ces

2 barricades?

3 Réponse: Moi, je ne vous ai pas vu sur les barricades.

4 Question: Avez-vous vu qui que ce soit de Serbie?

5 Réponse: Je n'ai pas dit avoir vu quiconque venant de Serbie.

6 Question: Nous avons eu des témoins à ce sujet ici.

7 Réponse: Laissez-moi terminer. J'ai vu Jovica Stanisic avec Milan Martic

8 en mai 1991; et Martic l'a présenté en disant que c'était quelqu'un du MUP

9 de Serbie, en août 1990.

10 Question: Mais est-ce que quelqu'un du MUP de Serbie n'avait pas le droit

11 d'être ami de quelqu'un d'autre, de collaborer avec lui? Est-ce que ça

12 c'est suspect automatiquement? Est-ce que c'est insupportable,

13 inacceptable?

14 Réponse: Eh bien, Martic était inspecteur, ce n'était pas un ministre.

15 Question: Qu'avez-vous à dire au passage suivant dans leur lettre –je

16 cite-: "Le conseil de la défense que tu accuses d'être un pouvoir

17 parallèle, c'est quelque chose que tu as mis en place jusqu'à la mise en

18 place de la Défense territoriale". (Fin de citation.)

19 Réponse: Ce n'est pas exact. Ce soi-disant état-major -enfin, moi, je n'ai

20 jamais entendu parler le terme de "conseil" mais d'"état-major"-, il a été

21 mis en place dans le village de Padjane, le 18. Non! Pardon, le 16. Un

22 instant, je vous prie. Non, le 18 août 1991, suite à l'initiative de

23 Branko Perica, Zelenbaba, Opacic et Martic.

24 Question: Mais ne nous donnez pas des explications. Ils disent que c'est

25 vous qui avez mis en place cet organe.

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1 Réponse: Au début, j'y étais. Puis ensuite, je suis parti avec le conseil

2 de la municipalité de Knin pour une réunion avec le responsable de la

3 police à Sibenik, Anto Bujas. J'étais avec Bujac au poste de police de

4 Knin.

5 Lors de cette réunion, il a demandé que l'on donne son accord à cette

6 proposition, à savoir que 30 policiers de nationalité croate viennent au

7 poste de police pour améliorer la répartition des nationalités. Je ne suis

8 pas resté jusqu'à la fin. Je ne sais donc pas comment la réunion s'est

9 terminée. Je sais que cet état-major a été mis en place. Je suis allé à

10 Golubic où l'on m'invitait. Il a dit: "Dites-nous qui va occuper quel

11 poste." J'ai répondu en plaisantant: "Vous pouvez être le chef. Jovo

12 pourra s'occuper des activités politiques, et Dusan Zelenbaba pourra

13 s'occuper des services de santé. Je suis sûr qu'il connaît très bien ce

14 type de fonction." A ce moment-là, Zelenbaba a dit: "Mais je n'ai jamais

15 fini mon service militaire." On a rigolé. Tout cela était fait sur le ton

16 de la plaisanterie. C'était censé être un groupe qui devait coordonner

17 l'organisation des barricades. Au bout d'un certain temps, cela s'est

18 transformé en camp militaire. Cela ne me plaisait pas du tout. Ils

19 disaient que j'avais établi cela, et que c'était une sorte d'état-major

20 qui dépendait de moi. J'ai demandé à Raskovic de mettre un terme à cette

21 organisation, lors d'une réunion du SDS. Cela a été suivi d'effet

22 s'agissant de cet état-major. Maintenant, en ce qui concerne le conseil de

23 la résistance nationale, je n'y ai pas participé, d'aucune manière. Il

24 s'agissait d'une organisation complètement illégale et j'ai dit aux

25 personnes dont je savais qu'elles étaient membres de ce conseil, qui

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1 provoquaient des incidents, faisaient des annonces diverses et variées à

2 la radio de Knin, qui ont contribué à troubler l'ordre public, à entraîner

3 une situation de chaos… Comme l'a dit plus tard M. Raskovic, l'objectif de

4 tout cela était la mise en place d'un état d'urgence. J'ai donc dit à tous

5 ces gens qu'il ne fallait pas faire cela.

6 Question: Mais vous êtes trop détaillé dans vos réponses. Essayez d'être

7 bref. Vous dites que c'est vous-même qui avez mis en place cet organisme.

8 Eux disent que ce n'est pas vrai, que vous n'étiez pas là au début de la

9 réunion, et qu'ensuite, vous êtes parti. Est-ce qu'ils mentent?

10 Réponse: En fait, il s'agit de deux institutions, de deux organes. L'un

11 d'eux était l'état-major mis en place lors de la réunion de Pacani, la

12 réunion du parti, et l'autre organisation était le conseil de la défense

13 nationale qu'eux ont mis en place et auquel je n'ai nullement participé et

14 dont j'ai demandé qu'il soit démantelé.

15 Question: Ils écrivent la chose suivante: "Pourquoi tu nous insultes en

16 mentant? Nous luttions ensemble pour le droit élémentaire qui était le

17 nôtre de pouvoir vivre." Apparemment, maintenant, vous vous présentez

18 comme ayant voulu défendre la paix contre eux, qui étaient des extrémistes

19 nationalistes.

20 Réponse: Je dis ce qui se passait. J'étais à la tête d'une lutte

21 politique, que j'ai explicitée en détail ici. Je peux continuer si cela

22 était nécessaire.

23 Question: Vous dites qu'en fait, ce que vous aviez à l'esprit différait de

24 ce que vous disiez. Est-ce que vous vouliez rester en Croatie?

25 Réponse: Je voulais obtenir l'autonomie de la Croatie. J'espérais que la

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1 Croatie resterait au sein de la Yougoslavie. C'est pour cela que je me

2 suis battu. C'est ce que j'ai déclaré. J'ai dit que j'estimais que le

3 démantèlement de la Yougoslavie était, pour moi, comme si on m'avait

4 démembré. J'ai parlé en détail de ce qui s'est passé ultérieurement.

5 M. Milosevic (interprétation): Maintenant, vous témoignez publiquement.

6 L'opinion publique va être en mesure de prendre connaissance de

7 l'intégralité de votre déposition et des enregistrements où l'on vous

8 entend parler aux enquêteurs, aux représentants de la partie adverse.

9 L'opinion publique sera en mesure de se rendre compte de quoi il s'agit.

10 Vos collaborateurs les plus proches disent, je cite: "N'est-ce pas une

11 insulte au peuple serbe de la Krajina, ancien ami, n'est-ce pas une

12 insulte de dire que tu étais manipulé par quelqu'un, que tu étais un homme

13 politique débutant, comme si nous n'avions pas eu une mémoire collective

14 de l'Etat fasciste oustachi, en disant qui a manipulé nos pères qui ont

15 subi le pogrom oustachi en 1941."

16 M. le Président (interprétation): Inutile de se lancer dans des algarades

17 de nature politique. Si vous avez des faits précis à présenter au témoin,

18 vous pouvez le faire. Mais lui faire part de vos positions politiques ou

19 de positions politiques de tiers n'a strictement aucun intérêt.

20 M. Milosevic (interprétation): Bien. Ensuite, ils disent: "Mais, au nom du

21 ciel, qu'est-ce que cela à voir avec la Serbie?"

22 M. le Président (interprétation): Non, je vous interromps. Soit vous avez

23 des questions dignes de ce nom à poser au témoin, soit on met un terme au

24 contre-interrogatoire. Cette lettre contient des questions qui n'ont rien

25 à faire ici ou qui n'ont aucune pertinence.

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1 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May.

2 Il faut se dépêcher. Je vais sauter un certain nombre de questions, parce

3 que je crois que nous avons maintenant déterminé la manière dont l'attaque

4 contre la JNA a eu lieu. On a parlé du blocus de la caserne, etc..

5 Est-ce que vous êtes d'accord que l'armée, en le payant par son

6 humiliation, une humiliation sans précédent, a évité d'avoir recours aux

7 moyens les plus énergiques pour mettre un terme au blocus? Vous

8 connaissiez la nature des négociations?

9 Réponse: A ma connaissance, la JNA utilisait les moyens les plus violents,

10 radicaux à sa disposition, artillerie et aviation y compris.

11 Question: Ils ont fait appel aux avions pour défendre les transports

12 attaqués. Ce que vous dites est un mensonge pur et simple. Vous dites

13 qu'ils ont eu recours aux ressources les plus radicales. Mais est-ce que

14 vous savez que de nombreux membres de la JNA ont vécu dans des conditions

15 inacceptables du fait du blocus? Est-ce que vous en avez connaissance?

16 Réponse: Je sais que les conditions de vie étaient déplorables, et j'ai eu

17 pris connaissance d'une conversation entre Hadzic et Mladic, que Mladic

18 m'a laissé entendre au moment de la prise du pont de Maslenica. On parlait

19 des conditions de vie très difficiles au sein de la garnison.

20 Question: A Maslenica, Djakovo (phon.), bien d'autres endroits encore, ils

21 se sont rendu sans lutter, sans se battre et, à Osijek, Sibenik, Karlovac,

22 Gospic et d'autres lieux, la résistance a été plus énergique. Ils se sont

23 battus jusqu'au bout, jusqu'au moment où le blocage a pris fin?

24 Réponse: Je sais que les forces de Tudjman ont pris la plupart des

25 garnisons en Croatie.

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1 Question: Est-ce que vous connaissez le commandant Tepic?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Bjelovar, c'est le seul endroit où, suite à des combats

4 extrêmement violents qui ont duré toute la journée, la caserne est tombée.

5 Le commandant Tepic a trouvé la mort dans l'honneur, tout comme le

6 commandant de la brigade blindée. On a vu se dérouler une attaque violente

7 contre la garnison qui, elle, n'avait attaqué personne. Est-ce que c'est

8 vrai ou pas?

9 Réponse: C'est vrai. D'ailleurs le commandant Tepic a été proclamé héros.

10 Question: Est-ce que vous savez que, parallèlement à tous ces événements,

11 dès 1990 et 1991, il y a eu des exemples de nettoyage ethnique au cours

12 desquels la population serbe a été contrainte de partir, et a pris la

13 route de la Serbie? Vous savez que l'on a vu des centaines de milliers de

14 réfugiés. Est-ce que vous savez quand cela s'est passé?

15 Réponse: En 1991, la Yougoslavie existait encore. Je sais qu'en 1991, en

16 particulier en été, lorsqu'il y a eu en Slavonie orientale des conflits

17 armés, on a vu beaucoup de réfugiés.

18 J'ai été moi-même au village de Vajska, sur la rive du Danube qui se

19 trouve en Vojvodine, et j'ai vu de mes yeux un très grand nombre de

20 réfugiés qui étaient logés à l'école à Vajska, et ils sont allés également

21 dans d'autres régions de la Serbie.

22 Question: Vous étiez Premier ministre, à l'époque. Est-ce que vous savez

23 que 100.000 Serbes ont fui la Croatie, suite à des actes de terreur sans

24 précédent, actes d'assassinat, arrestations, disparitions?

25 Réponse: J'ignore s'il s'agit de 100.000 personnes mais, en tout cas, je

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1 sais qu'effectivement un grand nombre de gens sont partis de Slavonie. Et

2 c'est le premier exode important auquel on ait assisté après le retrait de

3 la JNA, un exode important des Serbes au cours de l'automne 1991.

4 Question: Bien. Savez-vous que même le "New York Times", en 1993, par la

5 plume de David Binder, a parlé de dizaines de milliers… ou plutôt de

6 10.000 maisons serbes qui avaient été dynamitées; il a parlé de

7 l'expulsion des Serbes de Croatie, de la Krajina qui était, du point de

8 vue ethnique, la région la plus pure d'Europe; ils ont dit qu'il y avait

9 des centaines de milliers de maisons qui avaient été dynamitées?

10 Réponse: A l'époque, je faisais partie d'un grand nombre de Serbes qui ont

11 quitté cette région.

12 Question: Moi, je parle des maisons qui ont été dynamitées en 1993, pas en

13 1995. Ne mélangez pas tout!

14 Est-ce que vous savez quoi que ce soit à ce sujet? Il l'a écrit en 1993.

15 Mais est-ce que vous savez ce qui s'est passé à Zadar? Est-ce que vous

16 savez ce qui s'est passé, dans d'autres endroits que vous avez mentionnés,

17 que les maisons étaient dynamitées, des maisons où il y avait des familles

18 entières?

19 Réponse: Eh bien, on a parlé d'une famille serbe du nom de Zec qui a été

20 assassinée à Zagreb.

21 Question: Est-ce que vous êtes en train d'essayer de minimiser ces

22 dizaines de milliers de familles touchées, à la seule famille Zec? Bien

23 entendu, c'est un événement tragique. Moi, je vous parle de dizaines de

24 milliers de maisons qui ont été dynamitées en 1991.

25 Réponse: Je ne sais pas exactement. Mais en tout cas, à cette époque, il y

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1 avait des dizaines de milliers de réfugiés venant de la Slavonie orientale

2 où la JNA assurait auparavant le contrôle. Et la municipalité de Slavonska

3 Pozega a été le théâtre d'incendies criminels; des maisons ont été

4 incendiées, des maisons dont les habitants avaient été expulsés par les

5 autorités croates, des villages qui se trouvaient du côté ouest de

6 Slavonska Pozega en 1991. J'ai dit que, pendant l'été 1991, un grand

7 nombre de personnes en Slavonie orientale ont traversé le Danube.

8 M. Milosevic (interprétation): Ne perdons pas de temps. Mais est-ce que le

9 "New York Times" était influencé par cette structure parallèle dont vous

10 ne cessez de nous rebattre les oreilles?

11 M. le Président (interprétation): Il ne peut pas répondre.

12 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Babic, est-ce qu'il ne vous semble

13 pas que vous êtes un petit peu trop zélé dans cette attaque que vous menez

14 contre la structure parallèle? Est-ce qu'il ne vous semble pas que l'on

15 peut voir facilement le trou dans ce puzzle, avec cette attaque dont vous

16 nous parlez au sujet de la structure parallèle pour confirmer la véracité

17 de vos propos? Est-ce que tout ce que vous nous racontez ne sent pas la

18 fabrication de toutes pièces?

19 M. Babic (interprétation): La vérité, c'est la vérité. Moi, je vous dis ce

20 que je sais.

21 Question: Mais que dites-vous de tous les enregistrements dont on a parlé

22 pendant votre interrogatoire principal, ou plutôt les enregistrements de

23 l'interrogatoire principal, par la partie adverse? Et il y est indiqué

24 que, lors de vos auditions précédentes, vous avez dit telle ou telle

25 chose. Est-ce que vous étiez en train de faire une répétition générale de

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1 votre déposition? Combien de temps avez-vous passé à vous préparer à votre

2 déposition?

3 Réponse: S'agissant de ma déclaration, je peux vous dire que je l'ai

4 donnée conformément aux procédures idoines, et je n'ai commencé à faire ma

5 déclaration qu'au moment où on a commencé à enregistrer en vidéo et en

6 audio tout ce que je disais.

7 Auparavant, j'avais eu des contacts avec les enquêteurs du Bureau du

8 Procureur du Tribunal, des contacts de cinq à dix minutes. Ensuite, j'ai

9 demandé à bénéficier d'une audition et on a fixé la date de cette

10 audition. C'était l'essentiel, c'était la teneur de nos conversations, de

11 nos contacts avant que je ne fasse ma déclaration même. Il n'y a pas eu ma

12 préparation. Je n'ai parlé à personne de ce que j'allais dire, y compris

13 avec les représentants du Tribunal.

14 Question: Les exemples de Drnis, Kijevo, etc., que vous évoquez et au

15 sujet desquels la dame en face vous a posé des questions, vous ont permis

16 de donner des explications au sujet d'un système ou de ce qui s'était

17 passé, provocations de l'armée, expulsion des Croates, etc., etc. Tous ces

18 événements, Drnis, Kijevo, Oborovo, Obrovac, Kostajnica, Plaski, Skabrnja,

19 Rupe, Nadin, Slunj, Ogulin, Saborsko, Petrinje, Sisak, Korenica, Dubica,

20 tout ça… On a reçu des informations au sujet de tous ces lieux, mais c'est

21 complètement contradictoire avec tout ce que vous dites pour étayer l'Acte

22 d'accusation complètement erroné dont on parle ici.

23 Réponse: Moi, je parle de ce qui s'est passé à l'époque.

24 Question: Est-ce que vous ne voyez pas bien que ce que vous saviez à

25 l'époque, c'était une chose, et que ce que vous avez appris plus tard,

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1 c'en est une autre?

2 Réponse: J'ai toujours obtenu des informations en me rendant moi-même sur

3 place ou en obtenant des informations tout de suite après les événements.

4 Et mes informations émanent de diverses sources.

5 M. Milosevic (interprétation): …

6 (Interruption du Président.)

7 M. le Président (interprétation): Je vous interromps, Monsieur Milosevic,

8 car le moment est venu de faire une pause. Pause de 20 minutes.

9 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 53.)

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, les interprètes

11 demandent que vous, aussi bien que le témoin, vous ralentissiez; de cette

12 façon, les interprètes pourront interpréter vos propos correctement.

13 Souvenez-vous ce que j'ai dit dès le départ: veillez à ménager des pauses

14 entre les questions et les réponses.

15 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May, mais je vois que je

16 n'ai plus qu'une heure à ma disposition. Je m'efforcerai de tenir compte

17 des interprètes.

18 Monsieur le Témoin, je vous ai cité toutes ces localités et, d'après les

19 renseignements dont je dispose, les choses disent tout à fait autre chose

20 que ce que vous dites, dans votre schéma à vous.

21 Pouvez-vous nous dire, avez-vous des connaissances a posteriori qui

22 porteraient sur toute une série d'autres crimes perpétrés et que vous êtes

23 en train de contester actuellement?

24 Je vais vous en citer quelques-uns au hasard: le 22 août 1991, le ZNG et

25 le MUP de Croatie sont passés par les villages serbes de la Banija,

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1 Civljani, Cakali, Kinjacka, Bestrma, Plinski Kut, Plinska Greda, Brdjani.

2 Ils ont tiré en direction de tout ce qui bougeait, ils ont tué plusieurs

3 dizaines de personnes. Le savez-vous ou ne le savez-vous pas?

4 M. Babic (interprétation): Je vais dire ce que vous avez dit au sujet du

5 schéma qui était le mien. J'ai dit qu'il s'agissait là de connaissances

6 que j'avais de la façon dont vous conduisiez la guerre. Je sais comment

7 vous avez introduit la JNA dans votre guerre et je sais comment vous avez

8 réalisé vos objectifs politiques.

9 M. Milosevic (interprétation): Je vous ai posé une question concrète.

10 Laissez tomber vos discours, mon Dieu!

11 M. le Président (interprétation): Arrêtez! Un à la fois, s'il vous plaît.

12 M. Milosevic (interprétation): Répondez à ma question concrète.

13 M. Babic (interprétation): C'était la première partie de la question que

14 vous aviez posée à laquelle j'ai répondu. Deuxièmement, je voudrais dire

15 qu'il y a eu beaucoup de personnes de tuées au village de Kinjacka où les

16 effectifs croates ont tué un grand nombre de Serbes à Kinjacka.

17 Question: Mais à Sisak, qui ne fait pas partie de la Krajina, qui était

18 sous autorité croate, vous souvenez-vous qu'en été ou automne 1991, il a

19 été liquidé plusieurs dizaines de personnes de nationalité serbe, et des

20 dizaines de corps n'ont toujours pas été retrouvés? Les gens ont été tués

21 dans leur maison, dans la rue, à leur poste de travail. Le plus souvent,

22 ils étaient emmenés vers des cites préparés d'avance pour y être liquidés.

23 Est-ce que vous savez nous dire quelque chose au sujet de Sisak?

24 Réponse: Je ne sais pas combien de personnes ont été tuées à Sisak, mais

25 je sais qu'un grand nombre de personnes ont fui la ville de Sisak. Il y a

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1 eu beaucoup de réfugiés. J'ai connu quatre dirigeants du Parti

2 démocratique serbe qui avaient fui Sisak pour venir dans la région de la

3 Banija.

4 Mais dites-nous, n'est-il pas vrai de dire qu'à Pakrac, qu'à Poljana, il y

5 a eu des liquidations en masse de Serbes? Cela a commencé le 9 octobre

6 1991. Et Marino Selo?

7 Réponse: J'ai entendu parler des événements de Marino Selo et de Pakracka

8 Poljana. Je sais que les effectifs armés de la Croatie ont perpétré des

9 crimes sont des Serbes à ces endroits-là.

10 Question: Etes-vous au courant de ces petits camps de la mort qui ont été

11 mis en place: Ribarska, Koliba, Stara Ciglana, au niveau de Pakracka

12 Poljana?

13 Réponse: J'ai entendu parler de Pakracka Poljana et de Marino Selo.

14 Maintenant, pour ce qui est des autres localités, je ne suis pas au

15 courant.

16 Question: Mais savez-vous combien de centaines de Serbes ont été tués là?

17 Réponse: J'ai ouï dire qu'un grand nombre de Serbes y ont été tués.

18 Question: Et serait-il exact de dire qu'à Gospic également -et là, vous

19 parlez de façon erronée des événements du 10 septembre 1991, à savoir que

20 c'est là qu'il y a regroupement du ZNG et du MUP autour de la caserne et

21 des installations militaires à Kaniza. Ils ont débranché l'eau,

22 l'électricité et le téléphone, et ils ont commencé à tuer les soldats qui

23 se trouvaient à l'extérieur de la caserne; et puis depuis l'hôpital et

24 depuis le clocher de l'église, ils ont tiré: ils ont tué Miodrag Ostojic,

25 Dusko Masinjanic (phon.), six soldats ont été grièvement blessés par ces

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1 tirs en direction de la cour de la caserne?

2 Réponse: Je me souviens des événements de l'époque. Plusieurs officiers

3 ont raconté que les femmes d'officiers ont été pendues à des crochets par

4 les officiers de l'armée croate; c'était arrivé à Gospic. Je sais ou j'ai

5 entendu dire qu'il y avait eu des meurtres de Serbes à Gospic; ils ont été

6 enterrés autour de Gospic. Il y a des enquêtes et des procès en Croatie

7 actuellement.

8 Question: Savez-vous que, dans le bâtiment de Globnica où des membres du

9 MUP et de la ZNG ont fait irruption: il y avait Matija Marte, appelé

10 "Ivan", Zigic Zeljko, Petri Miroslav qui ont emmené et liquidé plusieurs

11 dizaines de personnes de nationalité serbe?

12 Réponse: Je m'excuse. Où avez-vous dit que cela s'est passé?

13 Question: Cela s'est passé à Gospic.

14 Réponse: Je ne suis pas au courant de détails concrets. Ce que je sais,

15 c'est qu'il y a eu des événements de cette nature. Je vous ai déjà dit ce

16 que j'ai ouï dire.

17 Question: Savez-vous que le 25 décembre, en deux journées, de Gospic et

18 Karlobag on a emmené 123 personnes de nationalité serbe pour les liquider?

19 Réponse: Je vous ai dit déjà que j'ai entendu parler à l'époque, et par la

20 suite aussi qu'un grand nombre de Serbes ont été persécutés et tués à

21 Gospic par des effectifs croates.

22 Question: Et vous souvenez-vous des événements où, en patrouillant sur la

23 terre à personne, sur le secteur de Siroka Kula, les membres de la JNA et

24 de la TO ont retrouvé les corps calcinés de 15 hommes et de 9 femmes?

25 Réponse: Oui, j'ai eu vent de ce cas. Je ne sais pas exactement quand j'ai

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1 entendu parler de la chose, mais je sais que j'en ai entendu parler.

2 Question: Et à Karlovac, que vous mentionnez à tort et travers pour ce qui

3 est du cours des événements, est-il exact de dire que, le 25 septembre, on

4 a stoppé des véhicules et on a abattu un nombre de soldats? Vous en

5 souvenez-vous?

6 Réponse: Oui, je me souviens de l'événement sur le pont de Korana, moment

7 où les effectifs croates ont arrêté un groupe de réservistes originaires

8 de Kordun, qui se rendaient vers la caserne Logoriste, une caserne à

9 proximité de Karlovac. C'est là qu'ils les ont abattus sur le pont même.

10 Un homme a pu s'enfuir, en a réchappé.

11 Question: Il a sauté dans la rivière, n'est-ce pas?

12 Réponse: Il a sauté dans la rivière, et il a écrit des récits à ce sujet.

13 J'ai lu ces récits.

14 Question: Puis ils ont tiré les jambes, ils les ont égorgés, ils leur ont

15 coupé les oreilles, ils les ont mutilés. Le tout a été fait sur ce pont?

16 Réponse: Oui. J'ai lu les textes écrits par cet homme-là. Il avait dit

17 qu'il y en avait trois qui étaient couchés sur le sol, qu'ils ont été

18 liquidés un par un, et lui a pu s'enfuir en sautant dans le fleuve et en

19 nageant.

20 Question: Vous souvenez-vous des événements de Paolin Dvor de Osijek. Les

21 habitants de Paolin Dvor n'avaient pas pris les armes parce qu'ils avaient

22 obtenu des garanties de la part des villages voisins disant qu'il ne leur

23 arriverait rien. Cependant, quand les effectifs de la police sont arrivés

24 là, dans ces villages-là, ils ont tous été installés dans deux maisons; et

25 dans la nuit du 11 au 12 décembre, ils ont été liquidés, tous autant

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1 qu'ils étaient, dans la maison au n°51. Le matin, il n'y avait ni morts ni

2 vivants, il n'y avait que du sang dans toute la maison.

3 Vous souvenez-vous de cela?

4 M. Babic (interprétation): Je ne me souviens pas de cet événement.

5 M. Milosevic (interprétation): Et Dara Vojanovic est le seul, la seule

6 personne dont on a retrouvé le cadavre, les autres n'ont jamais été

7 retrouvés.

8 M. le Président (interprétation): Le témoin ne peut pas déposer à ce

9 propos. Il ne le sait pas.

10 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur May, les enquêteurs de la

11 partie adverse en 2002 ont retrouvé les cadavres de 18 personnes disparues

12 de Paolin Dvor à un emplacement appelé Rizvan.

13 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais devoir vous

14 interrompre. Vous posez des questions à ce témoin, et lui il n'est en

15 mesure de parler dans sa déposition que de ce qu'il sait, des choses qui

16 doivent être pertinentes pour nous. Vous pourrez appeler vos témoins le

17 moment voulu, inutile de lui poser des questions, à ce témoin, lorsqu'il

18 ne sait rien.

19 M. Milosevic (interprétation): Compte tenu de ce qui passait dans la

20 Slavonie occidentale, avec le grand exode des Serbes en provenance de la

21 Slavonie occidentale, comment pouvez-vous dire ce que vous avez raconté

22 ici?

23 M. Babic (interprétation): Je ne comprends pas votre question.

24 Question: Comment pouvez-vous justifier les autorités croates, alors que

25 vous êtes au courant de l'exode de la Slavonie occidentale et vous savez

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1 qu'il y a eu tous ces crimes que je viens de vous citer? Est-ce par des

2 informations ultérieures que vous avez eu la conviction que les Serbes

3 sont fautifs également?

4 Réponse: Je n'ai attaqué personne. Je ne culpabilise personne. A quoi

5 pensez-vous, pour être concret?

6 Question: Serait-il exact de dire que des dizaines de milliers de Serbes

7 sur des tracteurs et des chariots ont quitté Pakrac et d'autres localités,

8 Podravska Slatina où ils étaient majoritaires?

9 Réponse: Il est exact de dire que lorsque la JNA a commencé à se retirer

10 de cette région-là, j'ai écouté les récits de ces gens-là. Il y a eu des

11 rumeurs qui ont couru; ils avaient dit que l'armée croate, les Oustachis

12 étaient en train d'égorger à gauche et à droite. Je ne sais pas ce qui

13 s'est passé exactement ça et là, mais pour ce qui est du retrait de la

14 JNA, des dizaines de milliers de Serbes ont fui, ont quitté leur

15 territoire, ont déménagé de leur maison.

16 Question: Ce n'est pas en raison des crimes qui étaient perpétrés, mais

17 j'ai posé une question à l'un de vos collègues, à un témoin protégé, et je

18 lui ai demandé s'il savait que 193 agglomérations ont été ethniquement

19 purifiées. Il a dit alors que le chiffre n'était pas exact, il a parlé de

20 163 agglomérations. A ce moment-là, 52.000 et quelques Serbes ont quitté

21 leur logis. On parle d'un chiffre de 70.000 en réalité. Etes-vous au

22 courant de la chose?

23 Réponse: Je suis en train de dire que je sais que des dizaines de milliers

24 de gens de la Slavonie occidentale ont fui suivant les modalités dont j'ai

25 parlé, donc ont accompagné le retrait de la JNA. Je puis vous fournir mon

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1 opinion et je dirai que c'est également l'une des conséquences de votre

2 politique, tant à l'égard des Serbes que des Croates.

3 Question: Fort bien, Monsieur Babic.

4 Serait-il exact de dire que le 3 avril 1992, à Novo Skalik l'armée croate

5 s'est attaquée à un village serbe -ce village serbe qui n'était que serbe-

6 et il n'y a personne dans ce village, tout le village a été anéanti?

7 Réponse: Quelle date?

8 Question: Le 3 avril 1992, ce village de Novo Skalik n'existe plus. Il n'y

9 a ni maisons ni habitants?

10 Réponse: Je sais que l'armée croate avait traversé la rivière Cikola et

11 s'est emparée du village Novo Skalik, ce seul village serbe sur le plateau

12 de Miljevac.

13 Question: Et ils l'ont rasé?

14 Réponse: Je sais qu'il n'y a plus d'habitants. Je ne sais pas s'ils ont

15 été chassés ou abattus, les villageois. Je sais, que dans une action de

16 l'armée croate, dans leur avancée vers le plateau de Miljevac en 1992, il

17 est tombé plusieurs dizaines de membres de la Défense territoriale de la

18 Krajina. Ces gens étaient originaires de Dalmatinsko Kosovo, du côté de

19 Knin. C'était la deuxième percée effectuée par l'armée croate, vers ce qui

20 avait été appelé "les zones roses", à savoir les territoires qui n'étaient

21 pas sous la protection des Nations Unies, des forces des Nations Unies et

22 qui en vertu du plan de Vance, que vous avez accepté, ce n'étaient pas des

23 territoires protégés par les forces de paix des Nations Unies.

24 Question: Oui, mais vous n'allez pas tout de même pas contester le fait

25 que cette attaque traître, dans ces zones roses, qui étaient tout de même

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1 des zones où l'on n'était pas censé voir arriver ou survenir des

2 événements de nature conflictuelle, le tout s'était passé sous les yeux de

3 la Forpronu?

4 Réponse: Je dis que ces régions n'étaient pas des secteurs sous la

5 protection, parce que vous ne vouliez pas procéder à des modifications du

6 plan de Vance et faire de ces zones, des zones protégées. Ce n'est

7 qu'ultérieurement que ces régions-là, ces secteurs-là ont été appelés

8 "secteurs de couleur rose". Ils ont été appelés ainsi aux fins de trouver

9 une sorte de modèle ou de modalité de fonctionner entre le Gouvernement de

10 la Krajina et la partie croate pour faire en sorte que le pouvoir et

11 l'autorité croates exercent son autorité sur ses territoires.

12 Question: N'est-il pas exact de dire que les Serbes tués ont été jetés

13 dans des fosses, et après cela a été enseveli de débris de toutes sortes

14 pour dissimuler les traces des crimes commis.

15 Réponse: Il a été découvert un grand nombre de victimes jusqu'au moment de

16 l'attaque de ce plateau de Miljevac effectué par les forces croates. Il a

17 été retrouvé des corps d'un grand nombre de membres et de réservistes de

18 l'armée serbe de la Krajina, un certain nombre de corps n'ont jamais été

19 retrouvés.

20 Question: Vous êtes en train de déformer les événements de Maslenica du

21 21, 22 janvier 1993, date à laquelle l'armée croate a attaqué la RSK au

22 sud, en provenance de Zadar sur l'axe, Benkovac, Obrovac, Sinj, Vrlika.

23 Réponse: De quelle déformation d'événements parlez-vous?

24 Question: N'est-il pas exact de dire que, ce 22 janvier, l'armée croate a

25 attaqué la RSK au sud, en provenance de Zadar, sur l'axe Benkovac,

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1 Obrovac, Sinj et Vrlika?

2 Réponse: De quelle déformation d'événements parlez-vous?

3 Question: Mais n'est-il pas exact de dire que, ce 22 janvier, l'armée

4 croate s'était attaquée à la RSK depuis le sud, en provenance de Zadar,

5 sur l'axe Benkovac-Obrovac et en provenance de Sinj, en allant vers

6 Velika? C'est exact ou pas?

7 Réponse: Il y a eu deux attaques de l'armée croate qui se sont suivies. La

8 première attaque s'est faite dans le secteur du pont de Maslenica, de

9 Ravni Kotari; en d'autres termes, le long de la route nationale de

10 l'Adriatique. C'est alors que les effectifs croates ont pris une partie

11 des territoires, à savoir une partie des secteurs qui étaient sous

12 protection des Nations Unies, mais qui n'ont toutefois pas été

13 démilitarisés.

14 Le prétexte à l'attaque avait été le suivant, à savoir qu'on n'avait pas

15 réalisé les accords pour ce qui est de l'ouverture des voies de

16 communication bleues qui étaient prévues par le gouvernement de la

17 Krajina, avec votre soutien. Je ne sais pas pourquoi vous n'avez pas

18 réalisé ce qui avait été convenu; ça, je ne le sais pas.

19 Question: Vous voulez dire: pourquoi vous n'avez pas vous-même réalisé

20 cela?

21 Dites-moi, s'il vous plaît: serait-il exact de dire le contraire, tout à

22 fait le contraire, à savoir que ce n'est qu'une fois attaqués là où ils

23 étaient censés être protégés par la Forpronu que les gens de la Krajina

24 ont sorti des dépôts leurs armes lourdes, aux fins de pouvoir se protéger

25 des attaques lancées contre eux, alors que la Forpronu ne les défendait

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1 pas?

2 Réponse: Ce qui est exact, Monsieur Milosevic, c'est que vous n'avez pas

3 respecté le plan que vous avez signé. Il n'a pas été procédé à la

4 démilitarisation, il n'a pas été créé et mis en place une police mixte, et

5 les Croates ne sont pas rentrés sur ces territoires. Donc l'armée croate,

6 il est vrai, a attaqué ce secteur à la date que vous avez citée.

7 Question: Très bien. Dites-moi, je vous prie: pour ce qui est de la poche

8 de Medak au sud et au sud-est de Gospic, est-ce que cela avait été une

9 attaque en traître au bout de 18 mois de protection des forces de paix des

10 Nations Unies? Les gens ne s'attendaient à aucune attaque; pendant 18

11 mois, ils avaient été sous la protection d'autrui et il y a eu une attaque

12 sur Divoselo, Citluk, Pocitelj, aux chars, aux forces blindées et à

13 l'artillerie?

14 Réponse: Le fait est que l'armée croate, dans ce secteur, a perpétré un

15 crime massif contre des populations civiles. Dans ces attaques, il y a eu

16 un grand nombre de morts dans l'armée serbe de la RSK et ces territoires-

17 là… Ou plutôt, cet événement est survenu dans une situation de conflit

18 ouvert, en 1993, entre la RSK et l'armée croate.

19 Ce territoire-là avait également été placé sous la protection des forces

20 de paix des Nations Unies. Mais le fait est que ce secteur n'a pas été

21 démilitarisé non plus; vous ne l'avez pas démilitarisé, en vertu du plan

22 Vance que vous avez imposé à la Krajina. Et le fait est qu'il y a eu là un

23 conflit armé entre l'armée et la police croate d'une part, et l'armée

24 serbe de la RSK d'autre part.

25 Question: Mais n'est-il pas vrai que la population avait foi en la

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1 protection de la Forpronu, que l'attaque les avait pris par surprise et

2 qu'il y a eu des crimes inouïs?

3 Réponse: Monsieur Milosevic, je dois dire que je regrette davantage la

4 perte de ces vies que vous-même. Mais le fait est qu'il y a eu un conflit

5 entre l'armée de la RSK et l'armée croate. Il est vrai qu'en janvier, il y

6 a eu ce conflit; en janvier 1993, j'entends.

7 Question: Mais vous souvenez-vous du rapport écrit du général Jean Cot qui

8 avait été commandant de la Forpronu à l'époque? Et ce rapport du 19 mai

9 1993, après l'inspection de ces villages, il dit –je cite ce rapport-: "Je

10 n'ai retrouvé aucun signe de vie, ni d'hommes ni de bêtes, dans plusieurs

11 villages que nous avons traversés. La dévastation est complète,

12 systématique et intentionnée, délibérée". Vous souvenez-vous de ce

13 rapport?

14 Réponse: Monsieur Milosevic, cela est tout à fait exact; cela correspond à

15 la même image, aux mêmes traces laissées par la JNA et autres effectifs

16 que vous commandiez en 1991 sur certains secteurs de la Croatie.

17 Question: Je vous pose des questions à ce sujet et votre répétition

18 permanente des accusations n'apporte pas de réponse à la question que je

19 vous pose. Moi, je vous pose des questions, il vous appartient de répondre

20 à ces questions.

21 Réponse: Je vous parle de la façon dont Franjo Tudjman avait conduit la

22 guerre en 1993 et 1995 contre la population serbe dans la Krajina. Ce sont

23 les mêmes modalités que celles que vous avez suivies par le biais, par

24 l'intermédiaire de la JNA dans votre guerre contre le peuple croate en

25 1991.

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1 Question: Et serait-il possible de dire que ces crimes perpétrés dans

2 toutes ces opérations, par exemple "Eclair", "Tempête" et tout le reste,

3 l'armée a-t-elle fait… Vous voulez dire que c'est moi… et que l'armée a

4 fait cela contre les Croates en 1991?

5 Quels sont, dites-nous, ces territoires croates qui ont été vidés de

6 Croates? Quels sont ces Croates qui ont été abattus de la sorte? Donc

7 quels sont les événements qui traduiraient l'intervention de la JNA contre

8 les territoires croates? Quels sont ces territoires?

9 Réponse: En 1991, et j'ai été précis en le disant, s'agissant de ce qui a

10 été fait par les formations armées de la JNA sous votre commandement, en

11 1991, j'ai mentionné les villages de Kijevo…

12 Question: Mais à Kijevo, personne n'est mort!

13 Réponse: J'ai mentionné Drnis, j'ai mentionné la région de Benkovac,

14 Maslenski Most, le pont de Maslenica…

15 Question: Mais savez-vous que la JNA...

16 Réponse: Permettez-moi de terminer! Vous m'avez posé une question, je veux

17 terminer. Saborsko, Slunj, Kostajnica, aux alentours de Vitusevac… J'ai

18 mentionné, devant ce Tribunal, toutes ces agglomérations et localités

19 détruites sous votre commandement, en 1991.

20 Et en 1995, dans les opérations "Eclair" et "Tempête" dans la SAO de

21 Krajina, les formations armées de la Croatie ont fait exactement la même

22 chose avec la population civile.

23 M. Milosevic (interprétation): Donc vous comparez le déblocage des routes

24 à Kijevo, où il n'y a pas eu de morts, le déblocage de la route au travers

25 de Saborsko parce que vous n'aviez pas de voie de communication. Et nous

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1 avons entendu ici un participant qui a pris part à cette opération de

2 Saborsko…

3 M. le Président (interprétation): Vous ne posez pas de question, Monsieur

4 Milosevic; de nouveau, vous polémiquez. Si vous avez des arguments à

5 présenter, présentez-les à nous. Mais ici, ce n'est pas une question digne

6 de ce nom.

7 M. Milosevic (interprétation): Bien, bien. Mais donc, pour vous, tout ça

8 c'est la même chose que "Eclair", opérations "Eclair" et "Tempête", et la

9 centaine de milliers de Serbes qui ont été chassés de chez eux?

10 M. le Président (interprétation): Mais c'est précisément ce que je voulais

11 vous dire: ce n'est pas ça qu'il faut faire. Passez à une autre question.

12 M. Milosevic (interprétation): Bien. Serait-il exact de dire que, dans les

13 négociations de Nikolic, on avait ouvert l'autoroute et vous l'avez

14 refermée? Et les Croates en ont profité pour s'en servir de prétexte et

15 faire intervenir des chars pour rouvrir l'autoroute?

16 M. Babic (interprétation): L'autoroute a été bloquée par Milan Martic.

17 Question: Donc c'est Milan Martic qui l'a fait, pas vous?

18 Réponse: Il était Président de la RSK. Et moi, à l'époque, j'étais

19 ministre des Affaires étrangères.

20 Question: Et ne vous souvenez-vous pas de la Résolution 994 du 17 mai

21 1995, par laquelle le Conseil de sécurité a exigé de la Croatie de se

22 retirer des zones qui étaient placées sous la protection des forces de

23 paix des Nations Unies et qu'on en était arrivé là, à vrai dire, sans

24 sanction à l'égard de la Croatie, bien entendu, mais c'est même le Conseil

25 de sécurité des Nations Unies qui a dû intervenir. Vous en souvenez-vous?

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1 Réponse: Je crois avoir dit que le représentant civil des Nations Unies

2 s'était entretenu avec moi à ce sujet à l'époque. Toutefois, la Croatie

3 exigeait l'exercice de son contrôle sur le territoire de Okucani, pris par

4 l'opération "Eclair".

5 Question: Dites-moi, combien de morts y a-t-il eu dans cette opération

6 "Eclair" et "Tempête". Et combien de personnes ont-elles été chassées de

7 chez elles?

8 Réponse: Je ne me souviens pas, je ne saurais pas vous dire de chiffre

9 précis. Je sais qu'il y a eu des dizaines de milliers. Dans l'opération

10 "Tempête", il a été chassé, il y a eu des personnes déplacées. Je crois,

11 d'après mes informations, je crois qu'il s'agissait entre 200 et 240.000

12 Serbes d'expulsés dans cette opération "Tempête".

13 Question: Bien. Alors ne traitons pas de cela plus longtemps, parce qu'il

14 apparaît avec évidence que vous avez une approche qui est la vôtre à ces

15 événements.

16 Maintenant que nous sommes en session publique et nous pouvons le faire,

17 je crois pouvoir dire qu'après cette opération "Tempête", vous êtes venu

18 me voir pour avoir un entretien qui, d'après vous, n'a duré que quelques

19 minutes; au préalable, vous êtes allé voir Mirko Marijanovic. D'après ce

20 que je vous aurais dit, les réfugiés seraient envoyés vers le Kosovo.

21 Réponse: Vous avez dit que vous alliez en installer 100.000 au Kosovo et

22 qu'un grand nombre, à savoir le reste, pouvait aller dans le Republika

23 Srpska. Quand je vous ai demandé si nous pouvions aller dans la Slavonie

24 orientale, vous avez dit: "Non, non, pas pour le moment".

25 Question: Ce n'est pas vrai. Mais je vais vous poser des questions

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1 afférentes aux faits.

2 Savez-vous qu'en Serbie, après l'opération "Tempête" et compte tenu de

3 tout ce qui s'est passé dans la Republika Srpska, sur le territoire de la

4 Bosnie-Herzégovine, il y avait 1.000.000 de réfugiés en tout et pour tout?

5 Réponse: D'après les connaissances que j'en ai eues et d'après les

6 évaluations que j'ai pu faire, il y en a eu entre 800.000 et 1.000.000.

7 Question: Un million.

8 Réponse: On a estimé à 800.000 le nombre des réfugiés après les événements

9 du Kosovo. Et donc il se peut qu'il y ait eu entre 800.000 et 1.000.000 de

10 réfugiés en Serbie et en Vojvodine.

11 Question: Mais quelle guerre au Kosovo? Moi, je parle de l'opération

12 "Tempête".

13 Réponse: Après l'opération "Tempête", il y en avait 600.000 et 800.000.

14 Question: Donc, mais au total, 1.000.000 de réfugiés en Serbie. Et savez-

15 vous qu'au total, s'agissant du Kosovo, donc au total s'agissant du

16 Kosovo, en tout et pour tout, il n'y a eu que 10.000 réfugiés?

17 Réponse: Je sais qu'il n'y avait pas de possibilité pour installer un tel

18 nombre de personnes.

19 Question: Bien entendu qu'il n'y avait pas de possibilité d'installer un

20 tel nombre de personnes, mais je vous parle de moyenne. Par rapport à un

21 total, cela ferait 1% des réfugiés au total de Serbie qui sont allés au

22 Kosovo, et que le Kosovo constitue 10% du territoire de la Serbie. Donc il

23 y a eu nettement moins de réfugiés partis du Kosovo qu'ailleurs. Ce sont

24 là des choses que vous savez ou que vous ne savez pas?

25 Réponse: C'est pour cela que j'ai été surpris, parce que vous avez dit au

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1 préalable que vous alliez en envoyer 100.000 au Kosovo.

2 Question: Attendez. Est-ce que vous êtes allé voir Marijanovic? Est-ce

3 qu'il n'a pas dit qu'il allait accueillir tous ces réfugiés?

4 Réponse: Permettez-moi de répondre, permettez-moi de répondre. Il a dit ce

5 qui suit: il a dit qu'on accueillerait tous ceux qui viendraient en

6 Serbie, mais que, tout d'abord, chez leur famille, on ne pouvait recevoir

7 que ceux qui étaient dans un premier lien de parenté: frère, parent,

8 enfant; tous les autres seraient escortés par la police pour être placés

9 sous le contrôle d'un quartier général constitué par Jovica Stanisic,

10 Badza, le ministre de la Circulation et des Communications, et qu'ils

11 seraient logés en Serbie. C'était votre plan.

12 Question: Il vous a mentionné le Kosovo ou pas?

13 Réponse: Il ne m'a pas dit où ils seraient logés, mais il a dit de quelle

14 façon ils seraient logés.

15 Question: Est-il logique que, quand vous recevez 250.000 personnes, qu'il

16 y ait un QG et que les gens soient installés tout au large de la Serbie,

17 qu'on ne peut pas tous les installer à Belgrade? Cela ne vous semble pas

18 logique, non?

19 Réponse: Ce que je sais, c'est que vous aviez interdit que les gens

20 descendent de l'autoroute pour entrer dans Belgrade.

21 Question: Mais il y avait déjà un nombre énorme de réfugiés à Belgrade?

22 Réponse: D'après ce que j'en sais, un grand nombre de personnes pouvaient

23 s'installer à Belgrade, chez des membres de leur famille. Les gens ne

24 pouvaient quitter leur colonne qu'en fuyant, qu'en quittant les colonnes

25 en cachette, car la police les empêchait.

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1 Question: Mais n'est-il pas logique de voir le gouvernement, le quartier

2 général chargé des réfugiés d'essayer de répartir ces réfugiés de façon

3 uniforme dans la Serbie? Parce que la Serbie n'est pas si grande pour

4 pouvoir installer tous ces gens-là dans une seule ville.

5 Réponse: Mais moi je sais que vous avez empêché l'installation de ces gens

6 à Belgrade.

7 M. Milosevic (interprétation): Mais il y en avait déjà trop à Belgrade! Et

8 alors, il est vrai que la police avait escorté ces colonnes, mais ne

9 savez-vous pas…

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je dois mettre un

11 terme à cette polémique. Le témoin vous a répondu dans la mesure de ce

12 qu'il sait. Libre à vous, bien sûr si vous le souhaitez, de présenter des

13 témoins à cet effet, mais le témoin ne peut pas aller beaucoup plus loin.

14 M. Milosevic (interprétation): Vous nous avez expliqué ici, Monsieur le

15 Témoin, que je voulais installer des réfugiés au Kosovo suivant un plan

16 secret, qui aurait été le mien. Je vais vous remontrer le Journal officiel

17 de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, pas de la Serbie

18 mais de la Yougoslavie, qui porte la date du 9 février 1990, à savoir

19 époque où la Yougoslavie était une et entière, époque où le président de

20 la présidence était Janes Drnovcet (phon.), et où le Parlement fédéral

21 avait une Chambre des Républiques et une Chambre fédérale; époque où cette

22 Chambre fédérale de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, en

23 1990, avait adopté des conclusions, qui ont été publiées au Journal

24 officiel de la Yougoslavie et où il est dit ce qui suit; il est question

25 du Kosovo.

Page 14029

1 On dit que "le trouble règne parmi la population, auprès des Serbes et des

2 Monténégrins, notamment, où l'on voit ces gens quitter le Kosovo de façon

3 accrue et qu'il faut prendre des mesures pour assurer la sécurité

4 personnelle et la sécurité des biens de cette population-là."

5 Il est question également de "faire obstacle aux activités agressives des

6 séparatistes et terroristes albanais". Tout cela est dit en 1990, par

7 l'assemblée de la République socialiste fédérative de Yougoslavie. Il est

8 question des "activités déployées dans la continuité par les terroristes

9 et séparatistes albanais aux fins de dissocier le territoire du Kosovo de

10 la RSFY". Et ainsi de suite, ainsi de suite.

11 Et il est adopté des conclusions. On dit que "c'est là un document

12 démocratiquement adopté par tous les intervenants" et il y a "un programme

13 de mesures et activités au niveau yougoslave pour stopper le départ des

14 Serbes et des Monténégrins du territoire de la Province socialiste

15 autonome du Kosovo, aux fins de faire revenir ceux qui l'ont déjà quittée

16 et de permettre l'installation de tous ceux qui veulent s'installer,

17 travailler et vivre au Kosovo".

18 Donc de quel plan qui serait le mien, pour ce qui est du Kosovo, parlez-

19 vous?

20 M. le Président (interprétation): Je ne me souviens pas du tout qu'on

21 aurait parlé d'un plan secret. Cependant, nous allons poser cette question

22 au témoin.

23 Monsieur le Témoin, d'après vous, avez-vous compris qu'il existait une

24 espèce de plan secret consistant à réinstaller des gens au Kosovo?

25 M. Milosevic (interprétation): ...

Page 14030

1 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Laissez le

2 temps au témoin de terminer et laissez-lui la possibilité d'apporter un

3 éclaircissement.

4 M. Babic (interprétation): Messieurs les Juges, je pense que, dans le

5 courant de mon témoignage, je n'ai pas parlé de la chose ainsi. Il me

6 semble qu'auparavant, avec les enquêteurs peut-être, j'ai mentionné la

7 connaissance que j'avais de l'existence d'un plan du Gouvernement serbe

8 pour ce qui est du retour de 100.000 réfugiés, mais je n'ai pas parlé de

9 "plan secret" ou de "plan confidentiel". J'ai parlé de mes souvenirs

10 afférents à la population, à l'hébergement des réfugiés. Et je crois

11 m'être remémoré, à un moment donné, qu'il avait été question de telles

12 choses dans les médias. Je n'ai pas parlé d'un plan secret.

13 Je sais qu'on avait parlé d'un plan, de l'existence d'un plan du

14 Gouvernement de la Serbie, un plan de la Serbie disant que quelque 100.000

15 Serbes devaient venir habiter au Kosovo. On parlait de gens qui revenaient

16 vers le Kosovo, de gens qui avaient déjà quitté le Kosovo et qui étaient

17 censés revenir.

18 M. Milosevic (interprétation): Mais là, je vous parle du programme de

19 mesures et d'activités pour mettre un terme au départ des Serbes et des

20 Monténégrins, au retour accéléré de ceux qui avaient quitté le Kosovo et

21 qui voulaient vivre, s'installer et travailler au Kosovo.

22 Je voudrais que ce document soit versé au dossier; c'est un programme

23 yougoslave qui a été adopté par le Parlement fédéral de Yougoslavie. Je ne

24 veux pas que l'on manipule, que l'on continue à manipuler les témoins qui

25 vont venir comparaître devant cette Chambre.

Page 14031

1 M. le Président (interprétation): Ce n'était pas un bon commentaire à

2 faire à l'égard de ce témoin.

3 Voulez-vous le versement de cette pièce?

4 M. Milosevic (interprétation): Oui, oui.

5 Savez-vous combien il y avait de camps pour Serbes sur le territoire de la

6 Croatie? Je vais vous rafraîchir la mémoire. Savez-vous qu'il y avait 221

7 camps pour les Serbes? Il y en avait 3 à Varazdin, 3 à Vikovci. Il y en

8 avait 3 à Bjelovar. Il y en avait 2 à Glina, 1 à Vrgin Most. Il y en avait

9 sur Goli Otok. A Vrhpolje, il y en avait 1. Il y avait en 221 camps pour …

10 M. Babic (interprétation): Je sais qu'à Bjelovar, notamment après

11 l'opération "Eclair", un grand nombre de camps avaient été créés par les

12 autorités croates qui y avaient placé les détenus serbes. En Slavonie

13 aussi.

14 M. le Président (interprétation): C'est un document long; je suis sûr

15 qu'il y a beaucoup d'autres événements qui sont évoqués qui n'ont rien à

16 voir avec ce procès. Est-ce qu'on peut demander la traduction des trois

17 premières pages uniquement? Est-ce que ceci suffirait?

18 M. Milosevic (interprétation): Mais vous pouvez faire traduire tout le

19 document, et ceci vous montrerait que la totalité de la Yougoslavie a pris

20 des mesures pour s'opposer aux "intentions -comme il est dit ici- des

21 terroristes et des séparatistes albanais". Et ceci, dès 1990.

22 M. le Président (interprétation): Mais est-ce que l'entièreté du document

23 porte sur la question ou est-ce qu'il aborde d'autres questions également?

24 M. Milosevic (interprétation): C'est simplement un programme portant sur

25 le Kosovo; il n'y a rien d'autre.

Page 14032

1 M. le Président (interprétation): Un instant, nous allons lui donner une

2 cote et puis le document sera traduit.

3 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de la défense 68.

4 M. Milosevic (interprétation): Savez-vous qu'il existe une association

5 d'anciens détenus créée en 1991, avec Petar Fjodorov à sa tête?

6 M. Babic (interprétation): Oui, je suis au courant.

7 Question: Il dit qu'en fait, ces camps pour Serbes ont été créés dès avril

8 1991; est-ce exact? Dites simplement oui ou non.

9 Réponse: Je ne me souviens pas de faits ni de chiffres concrets pour ce

10 qui est de 1991.

11 Question: Il dit qu'on suppose que 5.000 personnes, des femmes et des

12 enfants, ont été détenus en Croatie. Est-ce exact ou pas?

13 Réponse: Je sais qu'il y a eu détention de personnes, mais je n'ai pas de

14 chiffres précis.

15 Question: Il dit qu'en septembre, ils lui arrivaient de la "Légion noire"

16 et que ces membres ont affiché un comportement brutal: les gens ont été

17 battus. Il y a eu toutes sortes de choses.

18 Réponse: Je ne connais pas cette "Légion noire". Je connais celle de la

19 Deuxième Guerre mondiale.

20 Question: Il y a eu à Sisak 400 femmes et enfants emprisonnés dans cette

21 localité; le savez-vous?

22 Réponse: Je n'ai pas de chiffres précis.

23 Question: Et à Split, 39 anciens soldats de la JNA, à Lora plus

24 exactement, ont été tués?

25 Réponse: Je sais qu'à cette prison de Lora, un nombre important de

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1 personnes ont été tuées, ont subi des sévices de la part de l'armée et de

2 la police croate qui commandaient la prison de Lora. Je sais aussi que

3 certains détenus, je les connaissais, j'ai leurs noms; et la Forpronu est

4 intervenue en vue de leur libération.

5 Question: Savez-vous que les détenus ont déclaré qu'ils avaient eu

6 l'oreille coupée, qu'ils avaient été torturés à l'électricité, qu'ils

7 avaient dû se manger les oreilles coupées les uns des autres, que des

8 parties de leurs membres avaient été coupées? J'ai plusieurs déclarations

9 de la part de ces détenus; je n'ai pas eu le temps de les lire.

10 Est-ce que ce type de déclarations vous intéresse?

11 Réponse: J'en ai entendu parler et ça m'intéresse effectivement.

12 Question: Est-il exact, par conséquent, de dire que les autres faits sont

13 corrects?

14 Réponse: Je viens de vous entendre, d'entendre tout ce que vous avez

15 énuméré.

16 Question: Savez-vous qu'il y a des rapports de médecins montrant qu'une

17 personne a été dépiautée, écorchée vive; qu'on les a en fait écorchés

18 qu'ils étaient vivants?

19 Réponse: Ça, je ne sais pas.

20 Question: J'ai un rapport judiciaire, un rapport d'un tribunal portant sur

21 l'examen physique de détenus à Lora. Et ceci nous montre qu'ils ont dit

22 que "Tomo Djujic et Perisic, les directeurs, s'étaient vengés sur nous en

23 nous infligeant des sévices à l'électricité. Ils avaient placé des

24 électrodes sur nos oreilles, électrodes reliées à des transformateurs se

25 trouvant sur la table; et ceci avait provoqué vraiment des douleurs

Page 14034

1 incroyables. Je pensais que les yeux allaient me sauter du visage". Voilà

2 ce qui est écrit.

3 Savez-vous qu'il y a beaucoup d'exemples de ce genre? Des gens avaient été

4 torturés à Lora; Dusko Jelic, un réserviste, a trouvé la mort du fait de

5 ces sévices. Donc vous avez entendu parler de la prison de Lora?

6 Réponse: Oui, et je connais personnellement ceux qui étaient de Civljani

7 et de Poljani, qui avaient été mis en prison en 1994 dans le cadre de

8 l'opération "Tempête" et avaient été emprisonnés à Lora. J'ai entendu

9 parler d'autres personnes.

10 Question: Je peux vous rafraîchir la mémoire, je peux vous fournir toute

11 une liste de ces cas, mais je réserve ceci pour plus tard. J'ai une liste

12 de personnes ayant disparu à la prison de Lora. Mais il nous faut nous

13 presser.

14 Est-il exact de dire qu'en fin d'après-midi du 2 août 1995, vous avez

15 établi à partir du bureau du gouvernement, à la place Terazije, des

16 contacts avec un membre de votre délégation qui se trouvait aux

17 négociations de Genève?

18 Réponse: Le 3? Vous avez parlé du 3 août? Oui, j'ai parlé à Novakovic et

19 Milivoje Vojnovic.

20 Question: Est-il vrai qu'un de vos ministres était avec vous?

21 Réponse: Je ne me souviens pas.

22 Question: Et Mile Bosnic, est-ce qu'il était avec vous?

23 Réponse: Mais il se trouvait souvent avec moi; je ne sais pas s'il y était

24 cette fois-là.

25 Question: Fort bien. Est-il exact de dire qu'un membre de la délégation de

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1 la RSK était à l'autre bout du fil depuis Genève et qu'il vous a dit que

2 la délégation de Genève avait été accueillie par un représentant de la CIA

3 et qu'on lui avait dit que, le lendemain, lors des négociations avec la

4 Croatie, il ne fallait rien accepter?

5 Réponse: J'ai appris le lendemain qu'il y avait deux hommes -et je pense

6 que c'est Milivoje Vojnovic qui me l'avait dit-, que deux hommes avaient

7 essayé de faire pression pour que nous n'acceptions pas ces pourparlers.

8 Je ne me souviens pas d'un de ces noms; je sais que l'autre: c'était

9 l'ambassadeur de la Yougoslavie aux Nations Unies à Genève. L'autre homme

10 avait un surnom, mais Vojnovic m'a dit qu'en fait il travaillait pour la

11 CIA; et il a dit, lui aussi, qu'il ne fallait pas accepter l'accord.

12 Question: Fort bien. Dites-moi, à moi et au public se trouvant dans la

13 galerie du public et surtout, là, pensez aux Serbes qui suivent les

14 débats, dites-nous quelle était la tâche que devait remplir le

15 représentant de la CIA à Genève, ce représentant de la CIA qui a

16 rencontré, a accueilli la délégation de la RSK au moment où vous étiez en

17 train de parler à l'ambassadeur Albright, à Belgrade?

18 Réponse: Moi, j'ai parlé à l'ambassadeur Albright à Belgrade, mais la

19 veille. Nous avons parlé du plan Z-4, du nouveau mandat qui allait être

20 donné à la Forpronu; nous avons parlé de la situation qui prévalait dans

21 la poche de Bihac et de l'ouverture des routes, ce jour-là. Et vous dites

22 qu'il y avait un agent de la CIA mais, en fait, ils se sont rencontrés

23 seulement en privé. On a dit qu'il était de la CIA, ce Vojnovic.

24 Question: Je ne dis pas que Vojnovic était un agent de la CIA; ce n'est

25 pas de cela que je parle.

Page 14036

1 Réponse: Mais ce n'est pas de cela que je parle! Je vous dis ce que m'a

2 dit Vojnovic à propos de Milivoje Vojnovic, à propos des négociations qui

3 se poursuivaient à Genève. Moi, c'est de cela que je parle.

4 Question: Pourriez-vous nier, démentir en public, ici, le fait que vous

5 saviez, à ce moment-là, que l'administration Clinton soutenait l'armée

6 croate dans le cadre de l'opération "Tempête"? Et je ne parle pas

7 simplement d'un soutien verbal, mais aussi d'un soutien logistique.

8 Réponse: L'ambassadeur des Etats-Unis, Peter Galbraith, qui était

9 l'ambassadeur à Belgrade, m'a dit qu'il avait le soutien du Gouvernement

10 américain pour ce plan Z-4 et pour ce dont nous discutions. Je ne suis pas

11 au courant de tout le reste dont vous parlez.

12 Question: Mais quoi? Nous aurions marqué notre accord au plan Z-4? Qui a

13 marqué cet accord?

14 Réponse: A l'occasion de la réunion, j'ai marqué mon accord à ce plan Z-4

15 qui était proposé par Peter Galbraith, ambassadeur américain à Zagreb.

16 C'est lui aussi qui était le médiateur avec Tudjman. Il m'a dit qu'il

17 bénéficiait du soutien de son Gouvernement, que c'était un bon plan pour

18 la Krajina serbe et que lui, agissait en tant que médiateur entre le

19 Gouvernement de la Krajina et le Gouvernement de la Croatie, en

20 l'occurrence M. Tudjman, pour que soit appliqué ce plan Z-4 en Krajina.

21 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Il ne me reste plus qu'à peu

22 près 12 minutes; de ce fait, je vais uniquement parler de certaines des

23 écoutes téléphoniques, même s'il est certain que certaines de celles-ci

24 ont été confectionnées de toutes pièces parce qu'ici, apparemment,

25 Karadzic m'appelle "Slobo"; or, jamais, il ne m'a appelé en m'appelant

Page 14037

1 "Slobo". Et puis, on parle d'un certain "Ram"; je ne sais pas à quoi cela

2 fait référence.

3 Ici, nous parlons de l'écoute qui figure à l'intercalaire 44. C'est une

4 conversation entre Radovan Karadzic et Slobodan Milosevic, enregistrée le

5 23 novembre 1991.

6 Il me demande si une certaine réunion s'est bien passée. Je lui réponds en

7 disant: "Oui, oui, ça s'est bien passé". Ce sur quoi je cite apparemment…

8 et là, je cite la conversation que vous avez, vous, présentée ici. Je dis:

9 "Je pense que cet homme-là, ce Babic, c'est un porc".

10 Et puis, un peu plus bas, là, on fait référence à Marc Goulding, qui

11 semble être un Anglais tout à fait correct. Là, je vous cite des extraits

12 de cette écoute. Il m'a dit, il m'a répondu qu'il avait eu des discussions

13 avec M. Babic hier -et puis il y a trois petits points- qui dit que ces

14 municipalités sont menacées et que lui n'est pas menacé, qu'il n'a besoin

15 de personne.

16 Karadzic dit: "Ah, ah, je vois."

17 Et moi, je dirais: "Il n'a besoin de personne, mais 'Franja' devrait le

18 démettre et ces gens devraient être abattus. Je pense que c'est un

19 salaud".

20 Et je dis que je ne veux pas en parler parce qu'il est inutile de parler

21 de cartes maintenant, que maintenant il faut établir des principes et la

22 question des cartes, c'est une question factuelle.

23 Le fait auquel on fait allusion ici, c'est de savoir où les gens dont on

24 discute habitent -c'est le libellé utilisé par l'ambassadeur-; les

25 territoires où vivent les Serbes seront les territoires protégés.

Page 14038

1 Et puis, à l'intercalaire 45, on a un enregistrement du 11 décembre.

2 Que voulez-vous?

3 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez une question à

4 poser à propos de l'intercalaire 44? Si c'est le cas, posez-lui une

5 question. Sinon, il ne sert à rien de faire ces références.

6 M. Milosevic (interprétation): Mais je cite une phrase de chacune de ces

7 trois conversations et c'est seulement après que je poserai ma question.

8 M. le Président (interprétation): Mais vous avez évoqué plusieurs

9 questions. Et pendant que le témoin garde tout ceci à l'esprit, il

10 faudrait lui poser une question, ou tout du moins qu'il dispose d'une

11 copie de l'intercalaire 44, pièce 353.

12 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Babic, comprenez-vous clairement

13 qu'à l'époque, je comprenais, moi, de façon très claire, que vous, vous

14 aidiez Tudjman et que vous aviez un radicalisme véhément, mais que ceci

15 était contraire aux intérêts de la population serbe de la Krajina?

16 M. Babic (interprétation): Je demandais la protection de la JNA, c'est

17 notoire, bien connu. Je voulais la protection de la JNA jusqu'à la

18 solution politique qu'il fallait trouver. Vous faites une évaluation des

19 faits, et ce que vous dites à mon propos révèle davantage de choses à

20 votre propos qu'au mien.

21 M. Milosevic (interprétation): Nous avons une deuxième écoute à

22 l'intercalaire 45 et là, apparemment, je dis que cet homme est un idiot.

23 M. le Président (interprétation): Est-ce que le témoin dispose du document

24 figurant à l'intercalaire 45?

25 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

Page 14039

1 M. Milosevic (interprétation): Et là, je dis: "Je pense qu'il aide Tudjman

2 à dessein, qu'il lui donne l'excuse ou une excuse par rapport à la

3 situation qui prévaut, à savoir les violences perpétrées contre les

4 Serbes". Un peu plus loin, le texte dit ceci: "Il faut que l'on dise

5 publiquement que nous sommes favorables à ceci, il faut que ceci

6 apparaisse clairement. C'est la preuve la plus patente que nous sommes en

7 faveur de la paix." (Fin de citation.)

8 Par conséquent, vous saviez que je pensais dès l'automne 1991 et que je

9 pense aujourd'hui que vous, en fait, vous aidiez Tudjman en lui

10 fournissant une excuse pour ce qu'il faisait aux Serbes à l'époque?

11 M. Babic (interprétation): Si vous faites référence à ce plan, et au fait

12 que moi j'aurais servi d'excuse à Tudjman, je vais vous dire ceci.

13 C'est Tudjman qui a accepté ce plan, sans nous demander quoi que ce soit

14 et vous aussi. Ce plan a été imposé à la population de la Krajina, et

15 vous, vous êtes à l'origine de l'agression de Tudjman contre la Krajina.

16 Question: Bien, nous allons être en mesure de facilement expliquer de quoi

17 il retourne.

18 Voici une autre conversation dont je vais citer des extraits pour montrer

19 très clairement que cela a toujours été ma position, et on vous cite comme

20 étant un de mes proches associés, il faut donc que tout le monde sache

21 clairement de quoi il retourne. Je parle ici du document se trouvant à

22 l'intercalaire n°20, le dernier numéro de référence est le 05.

23 Première phrase -je cite-: "Je ne sais pas si quelqu'un peut lui dire

24 quelque chose pour ce qu'il se calme ou bien il faudrait le limoger, parce

25 qu'il va faire des dégâts considérables. C'est tout ce qu'il faut faire".

Page 14040

1 (Fin de citation.)

2 Ensuite, la conversation se poursuit de la manière suivante -je cite-:

3 "Leur seul atout, le seul atout dont il dispose c'est Milan Babic, parce

4 que vous faisiez ce que vous faisiez"; ça c'est une conversation avec

5 Karadzic, il essaie de vous faire accepter le plan Vance.

6 Il a estimé que c'était la meilleure solution. Ensuite, je dis: "Je

7 n'aurais jamais pu imaginer qui était l'atout de Tudjman et c'était lui.

8 Réponse: En 1991, vous avez entraîné le peuple serbe dans une guerre

9 atroce. Vous n'avez pas protégé le peuple serbe. Vous avez fait honte au

10 peuple serbe, vous avez causé le malheur du peuple serbe et du peuple

11 croate également.

12 Question: Moi, je vous donne des faits, Monsieur Babic. Vous, si cela vous

13 chante, vous pouvez faire des discours que l'on peut lire dans les

14 journaux, avec lesquels vous avez des contacts.

15 Moi, ce que je viens de vous lire, c'est ce que vos collaborateurs les

16 plus proches disent. L'opinion publique pourra se faire une opinion de ce

17 qui est vrai, de ce qui est faux.

18 M. Babic (interprétation): Moi, cela fait dix jours que je donne des faits

19 et rien que des faits ici, Monsieur Milosevic.

20 M. Milosevic (interprétation): Etant donné que vous vivez au jour le jour

21 et que vous ne vous intéressez qu'à vos intérêts personnels, est-ce que

22 vous comprenez bien que la Croatie devra de nouveau donner au peuple serbe

23 le statut de peuple constitutif, car la Krajina n'a pas duré plus

24 longtemps que la commune de Paris?

25 M. le Président (interprétation): La Krajina a duré plus longtemps que la

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1 commune de Paris. Inutile de parler de la politique contemporaine. Il vous

2 reste cinq minutes. Cela ne sert à rien de parler de la vie politique

3 actuelle.

4 M. Milosevic (interprétation): Ici, j'ai une pile de documents que vous

5 avez communiqués. Je n'ai pas le temps de les passer en revue.

6 Vous avez accusé Martic d'avoir contrôlé les prisons à Knin. Vous avez dit

7 que dans ces prisons les Croates étaient torturés, victimes de mauvais

8 traitements. Moi, je n'ai connaissance de personne qui ait été torturé.

9 D'après toutes les déclarations que j'ai reçues -ceci a été confirmé par

10 certains des témoins et je les ai moi-même cités-, les Croates vivaient

11 sur un plan d'égalité à Knin, ils occupaient diverses fonctions, divers

12 postes. Dans un des documents que vous avez amenés, on trouve un ordre,

13 ici, selon lequel Osman Vukic un policier de Zadar, pouvait être libéré,

14 il avait été arrêté à Knin. Cet ordre a été immédiatement suivi d'effet,

15 signé par le Premier ministre, Milan Babic. Si bien que vous aviez la

16 possibilité d'ordonner la libération de certaines personnes. Alors

17 pourquoi est-ce que vous accusez Martic, si c'était la Croatie que vous

18 aviez à cœur et non pas... et si ce n'était pas simplement des paroles en

19 l'air? Vous auriez pu libérer cet Osman Vukic. Pourquoi ne les avez-vous

20 pas tous libérés s'il y avait effectivement des gens qui étaient torturés,

21 victimes de mauvais traitements, puisque vous avez le pouvoir de le faire?

22 M. le Président (interprétation): Quelle est la question? Ou plutôt,

23 Monsieur Babic, vous voulez répondre?

24 M. Babic (interprétation): J'en ai déjà parlé. Il n'était pas habituel que

25 le Premier ministre s'occupe lui-même de faire libérer quelqu'un qui était

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1 emprisonné, mais à trois reprises quelqu'un est intervenu auprès de moi de

2 Zadar et de Sibenik, il s'agissait de médecins. J'ai demandé au MUP de

3 Knin ce qu'il fallait faire. Ils m'ont demandé de signer un document. Il

4 ne s'agissait pas là de la procédure habituelle, parce que c'était la

5 police qui était chargée du fonctionnement des prisons. Ils y avaient

6 détenu des prisonniers pendant longtemps, et ensuite ils les ont échangés

7 contre des policiers emprisonnés venant Krajina.

8 M. Milosevic (interprétation): Mais pourquoi vous utilisez tout le temps

9 la troisième personne du singulier, alors que vous devriez utiliser la

10 première personne du pluriel. Vous étiez responsables de ce qui s'est

11 passé.

12 Réponse: Je parle des faits, je parle de ce que je savais à l'époque.

13 Question: Vous parlez de la police de Martic, c'était la police de la

14 Krajina, est-ce qu'il avait une police privée?

15 Réponse: C'était votre police.

16 M. Milosevic (interprétation): Fort bien, Monsieur Babic.

17 M. Kwon (interprétation): Est-ce qu'il s'agit de l'intercalaire 68: est-ce

18 à cela que vous faites référence?

19 M. Milosevic (interprétation): Connaissez-vous Petar Enstikovac? Est-ce

20 que vous connaissez un dénommé Petar Enstikovac?

21 M. Babic (interprétation): Si vous parlez d'un enseignant, je le connais

22 effectivement; c'est un professeur.

23 M. Milosevic (interprétation): Lui aussi a envoyé un document, une

24 déclaration; il accepte que cela soit utilisé dans le cadre de la défense.

25 Il vous demande la chose suivante: aujourd'hui, tous les Serbes dignes de

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1 ce nom sont soit en prison, soit sous terre. Il vous demande la chose

2 suivante: ...

3 M. le Président (interprétation): Non, ceci est inacceptable. S'il y a des

4 faits concrets et si vous souhaitez poser des questions qui en découlent,

5 c'est possible. Mais vous ne pouvez pas poser des questions sur la base

6 d'observations, de commentaires faits dans des courriers.

7 M. Milosevic (interprétation): Puisque tout était de ma faute, je vous

8 demande d'écouter ce qui a été dit dans cet ordre.

9 Est-il exact que sans même avoir demandé Milan Martic, vous l'avez nommé

10 commandant adjoint de la Défense territoriale et vous vous êtes proclamé

11 vous-même commandant? Est-ce exact?

12 J'ai ici l'ordre relatif à la nomination du commandant adjoint de la

13 Défense territoriale de la Krajina, Milan Martic. D'après mes

14 informations, vous ne lui avez jamais même demandé si vous pouviez le

15 nommer à ce poste. Vous avez agi avec beaucoup d'arrogance, vous avez pris

16 des décisions sur tout et n'importe quoi, en faisant ce que vous vouliez,

17 et maintenant vous accusez Martic qui, contrairement à vous, est un homme

18 bien.

19 M. Babic (interprétation): Il est vrai que je l'ai nommé à ce poste, et il

20 est vrai qu'il a accepté d'être nommé à ce poste.

21 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Je vais vous poser une autre

22 question.

23 M. le Président (interprétation): De quel intercalaire s'agit-il?

24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Intercalaire 55. Quant au document

25 précédent, il se trouve effectivement à l'intercalaire qui nous a été

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1 communiqué par M. le Juge Kwon.

2 Mme Anoya (interprétation): Il s'agit de la pièce 352.

3 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous en êtes

4 pratiquement arrivé à votre dernière question. Mettons que vous en ayez

5 encore une ou deux.

6 M. Milosevic (interprétation): Ici, un document qui est adressé à moi-

7 même, fin janvier 1991. Je n'ai pas ici le numéro de l'intercalaire, mais

8 le numéro ERN est le suivant: 02172108; il s'agit d'une lettre écrite par

9 vous-même et adressée à moi.

10 Vous dites: "Suite à la conversation, etc., etc., etc. -je passe

11 l'introduction et je reprends la lecture-, à l'occasion des négociations

12 entre les représentants des Républiques et, en particulier, la

13 conversation qui doit avoir lieu entre vous-même et les représentants de

14 la Croatie, pour discuter de l'organisation future de l'Etat, nous vous

15 demandons de recevoir une délégation du Conseil national serbe, car nous

16 souhaitons vous informer des points de vue de la population serbe qui vit

17 en République de Croatie, dans la région de la Krajina serbe. Nous vous

18 serions reconnaissants de bien vouloir nous recevoir avant le 25 janvier

19 de cette année. Signé par le Premier ministre, le Dr Milan Babic".

20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit de l'intercalaire n°34

21 extrait de la pièce à conviction n°352.

22 M. Milosevic (interprétation): Dans ce document, vous me demandez donc ce

23 qu'il faut faire. A la fin janvier 1991, vous me demandez de recevoir une

24 délégation de votre Conseil national. Je dis "votre" conseil, parce que

25 vous étiez président de ce conseil, parmi toutes les fonctions que vous

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1 avez occupées pendant ces cinq ans en Krajina, cette trentaine de

2 positions que vous avez occupées, et vous voulez me présenter vos

3 positions en prévision des négociations qui allaient avoir lieu. Parce

4 qu'à l'époque, les Présidents des Républiques discutaient de l'avenir de

5 la Yougoslavie. Est-ce qu'il n'y a donc pas ici une contradiction

6 flagrante avec tout ce que vous nous avez dit au sujet de conversations

7 secrètes, de discussions, etc.? Quand on regarde cette lettre, la façon

8 dont elle est rédigée, cette demande qui m'est faite de bien vouloir

9 recevoir le Conseil national serbe à la fin janvier 1991. Il s'agit de la

10 cinquième ou de la sixième réunion qui a lieu après cette lettre.

11 Réponse: J'en ai déjà parlé.

12 Question: Puisque je n'ai plus de temps à ma disposition, je vais me

13 contenter de vous poser une dernière question. Les Serbes de la Krajina,

14 vers qui pouvaient-ils se tourner pour chercher de l'aide face aux dangers

15 qu'ils étaient exposés, y compris le danger qu'ils couraient dans leur

16 propre chair, dans leur vie? Et vers qui d'autre auraient-ils pu se

17 tourner que vers la Serbie?

18 Réponse: Vous étiez l'homme en qui tout le monde avait confiance. Moi,

19 j'avais confiance en vous. Vous êtes celui qui nous a persuadés de la

20 justesse de vos points de vue.

21 M. Milosevic (interprétation): Mais ma question à moi c'est: à qui d'autre

22 auraient-ils pu s'adresser, sinon à la Serbie? Etait-ce un secret que la

23 Serbie vous avait aidés? Est-ce un secret que vous avez révélé ici? Nous

24 vous avons aidés dans tous les domaines pour que vous puissiez survivre,

25 vous-même, dans le cadre de votre politique, tout le temps: votre

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1 politique, votre attitude vis-à-vis de Tudjman, etc. Mais tout cela, c'est

2 du passé.

3 M. le Président (interprétation): On va vous répondre, Monsieur Milosevic.

4 Monsieur Babic, la question que vous pose l'accusé -et je vous demanderai

5 de bien vouloir y répondre- est la suivante: vers qui d'autre auriez-vous

6 pu vous tourner à l'époque, qui d'autre que lui? Voilà l'argument qu'il

7 nous présente.

8 M. Babic (interprétation): Personne d'autre. Nous nous sommes simplement

9 adressés à lui, il a promis de nous protéger, il nous a protégés. Ensuite,

10 il a remis cela en question.

11 M. le Président (interprétation): Non, non. Il faut que nous en terminions

12 maintenant. Je passe donc la parole à M. Tapuskovic.

13 M. Milosevic (interprétation): Laissez-moi au moins poser une dernière

14 question!

15 La lutte pour la liberté ne sera jamais rejetée dans le passé. Je vous

16 laisse une liste des noms de 5.000 hommes de la Krajina, avec les noms,

17 dates de naissance, etc.; cela vous rafraîchira sans doute la mémoire.

18 Quant à vous, Messieurs, je souhaiterais vous offrir un livre, qui est en

19 anglais et en serbe, un livre qui évoque le génocide contre les Serbes de

20 1941 à 1945, ainsi que de 1991 à 1992. Si vous parcourez ce livre, vous

21 comprendrez un peu ce que vous êtes en train de faire, et ce dont nous

22 parlons ici.

23 M. le Président (interprétation): Ces documents se verront attribuer une

24 cote, deux cotes différentes, pour la liste d'une part, et pour le

25 pamphlet d'autre part. Ces documents ne vont pas être tout de suite versés

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1 au dossier; nous écouterons les objections éventuelles de l'accusation et

2 ensuite, nous statuerons pour décider s'il convient ou non de verser ces

3 documents au dossier.

4 Mme Anoya (interprétation): La liste se voit attribuer la cote D69, cote

5 aux fins d'identification. Même chose pour le livre, qui se voit attribuer

6 la cote aux fins d'identification D70.

7 M. le Président (interprétation): Oui. Maître Tapuskovic?

8 (Question de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, M. Milan Babic.)

9 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

10 Monsieur Babic, je vais faire de mon mieux, dans le cadre de ce contre-

11 interrogatoire au nom des amici de la Chambre, je vais faire de mon mieux

12 pour ne traiter que des faits ainsi que des éléments de preuves qui ont

13 déjà été présentés dans ce prétoire. Je vais vous demander un certain

14 nombre de précisions également.

15 Je commence donc par ce que vous nous avez déclaré le 19 novembre 2002;

16 ceci figure à la page 12.976 du compte rendu d'audience. Vous avez dit la

17 chose suivante -je vous cite-: "Après la formation de la République

18 fédérale de Yougoslavie en avril 1992, par le biais de Lilic, Slobodan

19 Milosevic contrôlait toutes les institutions fédérales".

20 Je souhaiterais préciser un certain nombre de questions par ordre

21 chronologique, pour aider les Juges de la Chambre. En premier lieu, je

22 souhaiterais savoir la chose suivante: est-il exact que le 27 avril 1992,

23 la République fédérale de Yougoslavie a été créée? Est-il exact qu'à

24 partir du 27 avril 1992 jusqu'au 15 juin 1992, le poste de Président de

25 cet Etat était tenu par Marko Kostic? Si vous ne vous souvenez pas des

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1 dates, ce n'est pas grave.

2 M. Babic (interprétation): Je me souviens que le premier Président élu par

3 l'Assemblée de la RFY était Dobrica Cosic, qui remplissait ces fonctions.

4 Question: Savez-vous si c'était Branko Kostic ou pas?

5 Réponse: Je l'ignore.

6 Question: Maintenant, nous en venons aux élections. Le 15 juin, le

7 Président élu était Dobrica Cosic et il a occupé ce poste jusqu'au 1er

8 juin 1993. Ensuite, pendant une période assez brève en juin, c'est Milos

9 Radulovic puis Lilic, du 25 juin 1993 jusqu'en juin 1997. Donc, pendant la

10 période au cours de laquelle se sont déroulés les événements de la Krajina

11 et la période couverte par l'Acte d'accusation, de 1991 jusqu'à juin 1992,

12 Lilic n'occupait aucune position, aucun poste au niveau fédéral?

13 Réponse: Si j'ai bien compris, vous nous parlez de la République fédérale

14 de Yougoslavie. Vous avez évoqué Lilic en parlant de la République

15 fédérale de Yougoslavie. Donc il est évoqué dans ce contexte.

16 Question: Certes, mais il n'occupait aucun poste d'autorité jusqu'en 1993?

17 Réponse: En 1993, il y a eu la guerre en Krajina; en 1994, en 1995.

18 Question: Moi, ce que je vous dis, c'est qu'il n'occupait aucun poste, au

19 niveau fédéral, pendant la guerre en Krajina?

20 Réponse: J'ignore si, à l'époque, il y avait des contacts ou des liens ou

21 pas.

22 Question: En tant que Président de l'Etat?

23 Réponse: Moi, je vous parlais de la République fédérale de Yougoslavie,

24 pas de la RSFY. Est-ce que j'ai parlé de Lilic dans le contexte de la RSFY

25 ou de la RFY?

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1 Question: Vous avez dit qu'à partir de 1992, Slobodan Milosevic contrôlait

2 toutes les institutions par le truchement de Lilic.

3 Réponse: J'ai dit qu'il contrôlait les institutions fédérales par le

4 truchement de Lilic également, qui n'était pas le Président mais qui était

5 l'un des présidents de la République fédérale de Yougoslavie.

6 Question: Ne perdons pas de temps. En 1992, Lilic n'était pas le

7 commandant suprême des forces armées, il n'était pas Président du pays? Il

8 ne l'était pas, n'est-ce pas?

9 Réponse: Non, pas en 1992. Mais c'est à ce moment-là que la République

10 fédérale de Yougoslavie a été mise en place et j'ai parlé de Lilic dans ce

11 contexte-là.

12 Question: Merci. Ne nous appesantissons pas sur cette question plus

13 longtemps. Mais jusqu'à ce moment-là, jusque la mise en place de la

14 République fédérale de Yougoslavie, la présidence fédérale faisait office

15 de commandement suprême, n'est-ce pas?

16 Réponse: La Présidence de la RSFY était le commandement suprême des forces

17 armées de la RSFY en vertu de la loi. Et j'ai dit que, s'agissant de cette

18 présidence tronquée, il y avait, à la tête, Slobodan Milosevic.

19 Question: Mais attention, la présidence tronquée, à la période la plus

20 critique, en mars 1992, ne pouvait pas intervenir comme vous le précisez.

21 Parce que si vos souvenirs sont bons, au mois de mars on ne pouvait pas

22 prendre de décision s'agissant de la prise de mesures à l'encontre des

23 forces paramilitaires, parce qu'à l'époque la présidence était complète,

24 n'est-ce pas?

25 Réponse: J'ai dit qu'au mois de mars, Monsieur Tapuskovic, il y a eu des

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1 modifications et que c'est vers la fin du mois de mai 1991 que l'Assemblée

2 fédérale avait constaté qui étaient les nouveaux membres élus de la

3 Présidence de Yougoslavie: Branko Kostic, Sajdo Bajramovic…

4 Question: Ecoutez, Messieurs les Juges, je voudrais que le témoin réponde

5 précisément aux questions. J'ai demandé si, en ce mois de mars 1991, la

6 présidence était oui ou non complète. La voix du Serbe de Bosnie à la

7 présidence de la Yougoslavie avait été déterminante, pour ce qui est de la

8 prise ou non-prise de mesures à l'encontre des unités paramilitaires;

9 c'est vrai ou faux?

10 Réponse: C'est exact. La présidence n'a pas pris de mesure à l'encontre de

11 ces effectifs-là.

12 Question: Nous n'allons pas revenir là-dessus. Mais à partir du mois de

13 mars jusqu'au mois de décembre, à savoir jusqu'à ce qu'il n'ait

14 démissionné au sein de la Présidence de la RSFY, Mesic a fait obstruction

15 aux activités de la Présidence, oui ou non?

16 Réponse: Vous avez parlé d'une période assez longue; je ne peux pas

17 répondre par oui ou par non. Il a été élu après obstruction à cette

18 présidence de la RSFY. Je ne sais pas jusqu'à quand il est resté président

19 de cette Présidence, mais jusqu'à la proclamation de l'indépendance de la

20 Croatie.

21 Question: Non, il a démissionné en décembre de cette année-là. Mais n'a-t-

22 il pas fait obstruction à l'intervention de la JNA, oui ou non?

23 Réponse: Je ne sais pas comment Mesic s'était comporté. Ce que je sais…

24 Question: Non, non, merci. C'était le premier sujet que je voulais aborder

25 avec vous.

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1 Je voudrais passer à un sujet tout à fait autre. Il s'agit là d'un

2 document, et je voudrais que l'on prépare le document en question. Il

3 s'agit de l'intercalaire 1 de la pièce 352, à savoir la première pièce à

4 conviction qu'on a présentée dans ce prétoire. Cela concerne le programme

5 du Parti démocratique serbe.

6 Dans la première journée de votre interrogatoire principal, vous avez

7 confirmé qu'au mois de février 1990, le 17 février 1990, on a créé le SDS.

8 Ce n'est que trois jours après la date, à savoir le 14 février 1990, où le

9 Sabor de Croatie a adopté les amendements à la Constitution légalisant le

10 parti pluripartite?

11 Réponse: C'est exact.

12 Question: Donc vous auriez été le premier parti à être créé après ces

13 modifications constitutionnelles?

14 Réponse: Je crois que le HDZ a été le premier.

15 Question: Donc vous êtes tout de suite devenu un haut responsable de ce

16 parti?

17 Réponse: C'est exact.

18 Question: Le programme de ce parti dont il est question dans ce document,

19 alors que vous étiez là-bas, vous l'avez appuyé depuis le début, n'est-ce

20 pas?

21 Réponse: Oui.

22 Question: A t-il été l'expression de l'esprit, de la volonté, des souhaits

23 du peuple serbe?

24 Réponse: C'était le programme politique du Parti démocratique serbe.

25 Question: Dans la première phrase de ce programme, il est dit que vos

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1 intérêts seraient défendus pour le mieux par le truchement d'une

2 démocratisation générale du pays?

3 Réponse: Oui.

4 M. Tapuskovic (interprétation): Je voudrais que vous ayez quand même ce

5 programme sous les yeux aux fins de pouvoir vous poser des questions. Je

6 voudrais que vous me confirmiez certains éléments de ce programme pour me

7 dire si cela a été effectué ainsi ou pas. Je parle donc de la pièce 352,

8 intercalaire 1.

9 Vous avez donc ici dit, en répondant à l'une des questions du Procureur...

10 M. Kwon (interprétation): Un instant, Monsieur Tapuskovic, nous ne

11 parvenons pas à trouver le document en question, plutôt le passage auquel

12 vous faites référence à l'intercalaire n°1. Veuillez, s'il vous plaît,

13 vérifier si c'est bien cela.

14 M. Tapuskovic (interprétation): Ecoutez, je parle de la traduction

15 anglaise et je me réfère à la page 11. Je vais essentiellement traiter de

16 ce chapitre 3, qui traite de fédéralisme démocratique.

17 Monsieur Babic, ici, vous avez opté en faveur d'un aménagement de la

18 Yougoslavie de type fédéral?

19 M. Babic (interprétation): Oui, c'était l'option que nous avions défendue.

20 M. Kwon (interprétation): Je m'excuse, Monsieur Tapuskovic, mais n'est-ce

21 pas plutôt la pièce 351 plutôt que la pièce 352?

22 M. Tapuskovic (interprétation): C'est la première des pièces à conviction

23 présentées ici, je crois que c'est bien la 352. Oui, oui, c'est la pièce à

24 conviction 351, je m'excuse. Je parle de l'intercalaire 1 de la pièce 351.

25 C'est ce que j'ai entre les mains.

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1 Monsieur le Témoin, je vous demande de prêter attention de ce qui est dit

2 en page 18, au point 18; en version serbe, c'est la page 11, en fait, vers

3 le milieu de la page; en version anglaise, il s'agit du point 18 en page

4 18.

5 Il est dit: "L'armée reste l'armée yougoslave, son caractère fédéral sous-

6 entend un commandement au niveau fédéral, ainsi qu'une protection de sa

7 part du système politique fédéral". C'est bien cela?

8 M. Babic (interprétation): Oui, c'est cela.

9 Question: Plus loin, dans le même chapitre -et je me réfère à la page 12

10 de la traduction anglaise-, il est dit à un endroit ce qui suit et cela

11 faisait partie du programme: "Nous sommes pour l'égalité en droit des

12 citoyens, telle que proclamé par le système monopartite, parce que, dans

13 ce système, un citoyen slovène avait autant de voix que cinq Serbes." Est-

14 ce bien ce qui est dit dans votre programme?

15 Réponse: Je me souviens de cela, mais je n'arrive pas à le retrouver.

16 M. Tapuskovic (interprétation): Au chapitre 3.

17 M. Milosevic (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, il y a une erreur au

18 compte rendu d'audience. On dit exactement le contraire; on y lit: "Nous

19 ne sommes pas favorables…"

20 M. Tapuskovic (interprétation): La traduction de ce que j'ai dit n'est pas

21 bonne.

22 (Les interprètes demandent que M. Tapuskovic devrait parler plus

23 lentement.)

24 M. Milosevic (interprétation): Ils n'ont pas réussi à vous comprendre.

25 M. le Président (interprétation): Ceci ne nous fait pas avancer.

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1 De toute façon, le moment est venu de faire une pause. Nous y reviendrons,

2 nous reviendrons à ce sujet après la pause.

3 Pause de 20 minutes donc.

4 (L'audience, suspendue à 12 heures 20, est reprise à 12 heures 41.)

5 M. le Président (interprétation): Monsieur Tapuskovic, poursuivez.

6 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Messieurs les Juges. Je vous

7 demande de me comprendre: Mlle Higgins a eu un décès dans la famille, mon

8 assistant est parti, je suis resté seul avec tous ces papiers. Je vais

9 donc m'efforcer pour ma part d'y aller de la façon la plus directe

10 possible.

11 Monsieur Babic, j'attire l'attention des Juges sur le fait qu'il s'agit de

12 la page 12 de la version anglaise, je me réfère au premier paragraphe de

13 cette pièce à conviction. Comme je vous l'ai dit, c'est le 351/1, à savoir

14 intercalaire 1. Ce qui était contesté au niveau de l'interprétation, est

15 la chose suivante: "nous ne sommes pas favorables à ce type d'égalité en

16 droit", et non pas "nous sommes favorables".

17 La chose suivante qui est dite dans ce programme, et qui a un certain

18 poids à mes yeux, vous me direz lequel. Je cite: "Nous sommes favorables

19 au principe "un citoyen égal un vote". C'est bien le principe que vous

20 défendiez?

21 Réponse: C'est exact.

22 Question: Ce principe "un citoyen, un vote" dans le courant ou au fil de

23 l'histoire de la Yougoslavie dans son ensemble, a été un problème; à

24 savoir depuis 1918 et surtout après 1941, le problème avait été celui

25 d'avoir plus de la moitié ou près de la moitié de la population de la

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1 Yougoslavie qui était d'origine ethnique serbe?

2 Réponse: Ce principe: "un homme égal une voix", devait se réaliser tant au

3 niveau des Républiques que de la Fédération, ce principe d'"un citoyen, un

4 vote". Je suis d'accord, mais qu'est-ce que vous posez comme question? Je

5 n'ai pas compris la question.

6 Question: Est-il exact de dire qu'en Yougoslavie, il y a toujours eu à peu

7 près une moitié de la population qui était d'appartenance ethnique serbe?

8 C'est exact?

9 Réponse: Non, ce n'est pas exact, les Serbes étaient majoritaires.

10 Question: Les Serbes étaient donc plus nombreux?

11 Réponse: Dites-moi, de quelle période vous parlez? Quelles sont les

12 données statistiques auxquelles vous vous référez?

13 Question: Je vous parle de l'année, par exemple 1945 et de la suite.

14 Réponse: La population serbe avait la majorité, ce n'était pas la moitié,

15 plus de la moitié.

16 Question: Bien, merci. Il s'agissait plutôt d'une appréhension qui disait

17 que la Grande Serbie découlerait de ce vote "un citoyen, une voix".

18 Réponse: Nous avons parlé du principe démocratique fondamental dans une

19 société démocratique, à savoir "un citoyen égal un vote".

20 Question: Mais moi, je vous ai demandé autre chose.

21 Réponse: Je n'ai pas compris votre question.

22 Question: Eh bien, c'est aussi une réponse. Est-ce que votre programme dit

23 que vous étiez favorable à une autre attitude à l'égard des provinces pour

24 ce qui est du réexamen du statut des provinces?

25 Réponse: C'est ce qui est dit.

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1 Question: On dit dans votre programme que les hommes puissants de ce

2 système monopartite communiste ont transféré dans la Yougoslavie de

3 l'après-guerre les postulats du système soviétique?

4 Réponse: C'est exact.

5 Question: Par la suite, on dit: "C'est par l'intermédiaire de ces hommes

6 puissants, de ce système monopartite du parti communiste que les provinces

7 sont devenues ce qu'elles sont devenues, à savoir des Etats.

8 Réponse: C'est ce que dit le programme.

9 Question: C'est la raison pour laquelle de nos jours, il y a effusion de

10 sang, de nos jours encore, dit-on, n'est-ce pas?

11 Réponse: Ecoutez, laissez moi retrouver, je me souviens du passage

12 approprié mais je n'arrive plus à le situer.

13 Question: Serait-il exact de dire que tout ceci a été reproduit par la

14 construction de 1974, et que de fait, il a été mis en place par cette

15 constitution, huit Etats dont deux se trouvaient sur le territoire de la

16 Serbie. Factuellement, c'était bien ce que l'on avait?

17 Réponse: Oui, à peu près comme cela.

18 Question: Merci. Les fonctions fédératives, de ces Etats, à savoir le

19 droit de veto, était également quelque chose qui perturbait complètement

20 les choses?

21 Réponse: A peu près, c'est cela.

22 Question: C'est ce qui avait mis en place des fondements pour la

23 désintégration, le démantèlement de la Yougoslavie?

24 Réponse: S'agissant d'appréciation politique et d'après la situation

25 factuelle que vous avez mentionnée, les Républiques avaient un haut niveau

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1 de compétence. Maintenant, je ne sais pas ce que vous entendez par

2 "fondement pour le démantèlement"?

3 Question: Mais c'est ce qui s'est passé à la fin, le droit à la sécession

4 était devenu prédominant dans cette constitution-là.

5 Réponse: C'est exact. Laissez-moi vous dire: le droit à la session a été

6 traduit par certaines Républiques ou interprété par certaines Républiques

7 comme étant le droit des Républiques.

8 Question: Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Je vous ai demandé si le

9 principe était prédominant. Je ne vous ai demandé qui veut faire sécession

10 Je vous ai demandé si ce droit à l'autodétermination jusqu'à la sécession

11 était devenu prédominant ou pas? Est-ce que les créateurs… le Dr Kardelj,

12 qui avait été le créateur de cette Constitution, était revenu à la période

13 où la Slovénie avait considéré la Yougoslavie comme étant un véhicule ou

14 une façon de transiter vers l'indépendance.

15 Réponse: Monsieur Tapuskovic, ce sont là des faits historiques, mais je ne

16 sais pas si c'est ainsi que les choses ont été traitées.

17 Question: Ma question est la suivante: cette Constitution avait fait du

18 territoire de la Serbie un vote impossible pour ce qui est du "un citoyen,

19 une voix", étant donné les droits de veto de la Vojvodine et du Kosovo. Ce

20 principe d'"un citoyen, un vote" pouvait-il aboutir à quoi que ce soit sur

21 le territoire de la Serbie? C'est la question que je vous pose.

22 Réponse: Je vous ai dit que ce principe devait se réaliser au niveau des

23 provinces et de la République. Mais il y avait un mécontentement

24 manifesté, à savoir le SDS avait partagé l'opinion politique prévalent en

25 Serbie, à savoir, elle avait affirmé qu'il n'était pas une bonne chose

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1 pour la Serbie que les provinces de Serbie bénéficient de ce statut.

2 Question: Vous donc avez estimé que le Kosovo devait avoir tous les droits

3 autonomes mais pas le droit à un Etat?

4 Réponse: Oui, c'était la position de notre partie.

5 Question: Ce que je voudrais savoir maintenant c'est si dans la Krajina,

6 au cours de ces 50 ans, à savoir depuis 1945 à nos jours, vous avez été

7 favorable à l'obtention d'une autonomie culturelle, politique et autre,

8 chez vous?

9 Réponse: Je suis né en 1956.

10 Question: Oui mais en tant qu'homme qui avait vécu, vous devriez être au

11 courant de ces choses fondamentales?

12 Réponse: Les Serbes étaient favorables à la mise en œuvre au travers des

13 institutions de la République et ce notamment, par l'intermédiaire de

14 cette association culturelle "Prosjet", favorable à ce type de solution,

15 de programme qui est devenu celui du parti du SDS.

16 Question: Merci. Je voudrais que nous revenions à une conversation

17 interceptée, celle entre Dobrica Cosic et Radovan Karadzic; il s'agit de

18 la pièce 353. Je crois qu'il n'est point nécessaire de rechercher la pièce

19 en question, parce que ce que je vais lire a fait l'objet du Procureur à

20 l'intention du témoin Babic.

21 Radovan Karadzic dit: "Les faiseurs de cartes ont fait la variante la plus

22 honnête où nous avons 61,3% du territoire".

23 Cosic dit: "Ah, ah, donc c'est maintenant 61,3?".

24 Karadzic répond: "Mais, en fait, de par nos droits historiques, nous

25 devrions bénéficier de 70%.".

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1 Je ne vais pas vous demander d'interpréter quelque conversation que ce

2 soit; j'estime que les Juges vont les évaluer dans leur intégralité. Mais

3 je voudrais savoir si, s'agissant de ceux dont il est question ici entre

4 Karadzic et Cosic, donc ma question est la suivante: la propriété privée

5 n'est-elle pas un droit inaliénable de tout homme? Dans certains pays,

6 c'est sacro-saint, la propriété privée.

7 Réponse: Mais notre programme politique s'était employé en faveur de cela,

8 justement.

9 Question: Et les cadastres chez nous –et je ne vais pas me servir de

10 termes réguliers-, les extraits du cadastre n'étaient-ils pas preuve

11 incontestable disant que telle terre appartient à untel, et la maison se

12 trouvant sur cette terre-là appartenait également à untel? Donc lorsqu'on

13 dispose d'un extrait du cadastre, cela était une preuve de propriété?

14 Réponse: Oui, c'était une preuve de propriété sur des biens immobiliers.

15 Question: Savez-vous qu'en Bosnie-Herzégovine, quelque 70% des terres

16 étaient en propriété privée de citoyens du groupe ethnique serbe?

17 Réponse: J'ai entendu dire la chose de la bouche de Krajisnik et de

18 Karadzic.

19 Question: Et vous ne le savez pas?

20 Réponse: Plus ou moins.

21 Question: Mais étant donné que vous avez occupé les fonctions que vous

22 avez occupées, savez-vous au moins nous dire, sur les 17.200 km² de la

23 Croatie, quelle est la partie des terres dans la Krajina qui se trouvaient

24 en propriété privée de citoyens serbes?

25 Réponse: D'après les évaluations dont nous disposions, il y avait plus de

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1 12% des terres qui étaient en propriété des Serbes; c'étaient à peu près

2 les données que nous avions récupérées et qui avaient été acceptées.

3 Question: Sur le territoire de quoi?

4 Réponse: De la Krajina.

5 Question: Mais Krajina, Lika, Banija, Kordun?

6 Réponse: Nous n'avons pas traité de cette question.

7 Question: Mais hier, vous avez dit que vous ne saviez pas combien

8 d'habitants il y avait au juste dans le territoire de la Krajina.

9 Réponse: Attendez. Attendez. Doucement! Qu'est-ce que je n'ai pas dit

10 exactement?

11 Question: Vous n'avez pas su dire exactement combien d'habitants la

12 Krajina avait; en répondant à une question qui vous a été posée, vous avez

13 dit "500 et quelque".

14 Réponse: Ah non, Monsieur Tapuskovic, j'ai parlé des résultats du

15 recensement; à savoir, j'avais parlé des citoyens, du nombre de citoyens

16 qui étaient venus se prononcer sur l'autonomie des Serbes. Cela s'est tenu

17 du 19 août au 2 septembre 1990. J'ai dit que les Serbes de Croatie, les

18 Serbes de Yougoslavie et les Serbes de l'étranger étaient venus se

19 prononcer; c'est ce que j'ai dit.

20 Question: Le problème, c'est que vous ne le savez pas. Vous vous êtes

21 employé en faveur du respect de bon nombre de droits de ces gens sur ces

22 territoires; vous étiez à la tête d'un Etat, à un moment donné, mais vous

23 ne saviez pas au juste, selon les cadastres, combien de terres dans la

24 Krajina étaient en propriété privée de Serbes?

25 Réponse: Nous n'avons pas compté.

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1 Question: Justement. Merci.

2 Je vais revenir maintenant au programme. Vous avez dit, dans ce programme,

3 en répondant à l'une des questions du Bureau du Procureur, que l'obstacle

4 principal à la mise en place de la démocratisation politique avait été la

5 prédominance d'un parti, à savoir le Parti communiste.

6 Réponse: C'est ce qui figure au programme.

7 Question: Oui, je parle du programme.

8 Réponse: C'est exact.

9 Question: Combien de temps avez-vous passé dans la Ligue des communistes?

10 Réponse: Je suis devenu membre de la Ligue des communistes lorsque j'étais

11 en troisième année de secondaire, donc c'était dans le courant de l'année

12 1973.

13 Question: En décembre, n'est-ce pas? Donc ça fait quand même assez

14 longtemps?

15 Réponse: J'étais d'abord dans les Jeunesses communistes, puis dans la

16 Ligue des communistes. Donc jusqu'en février 1990.

17 Question: Serait-il exact de dire qu'à plusieurs mois de cela, avant cela,

18 vous avez fait partie du congrès, vous avez été délégué au congrès de la

19 Ligue des communistes? Mais là n'est pas la question. Ce parti n'a pas été

20 brisé par des blocs d'opposition; ce parti a été brisé par ses propres

21 membres?

22 Réponse: Je n'ai pas parlé de bris de la Ligue des communistes; j'ai dit

23 que la Ligue des communistes de Croatie avait modifié le statut du parti

24 et j'avais voté, moi, contre la modification du statut mais ces

25 modifications ont été adoptées par la majorité. Je ne sais pas ce que vous

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1 me demandez.

2 Question: Je pose la question de l'intercalaire 78 parce qu'on en a parlé

3 hier. Il s'agit du 352/2. Cela figure dans les documents qui ont été

4 présentés par le Bureau du Procureur et cela n'a pas été versé au dossier.

5 Je tiens à dire que cette loi vous a été montrée, la loi que vous avez

6 promulguée, signée, vous, en votre qualité de Président. Donc c'est vous

7 qui l'avez adoptée ou promulgué le 9 janvier 1992, vous l'avez signée. Il

8 s'agit d'une loi portant interdiction de fonctionnement et d'intervention

9 de tous les mouvements, ligues, partis communistes sur le territoire de la

10 RSK.

11 S'il vous plaît, si vous avez promulgué cette loi, expliquez-moi pourquoi

12 vous avez été membre de ce parti, donc seulement un an après avoir cessé

13 d'être membre de ce parti, vous interdisez aux gens le droit de se

14 rassembler autour d'une idée, quelle qu'elle soit? C'est une idée, donc,

15 que vous interdisez. Et vous adoptez, vous promulguez une loi interdisant

16 absolument l'existence de ce parti. Vous avez, pendant vingt ans, été

17 membre de ce parti, puis vous adoptez une loi interdisant à des personnes

18 de se rassembler autour d'une idée; pouvez-vous nous expliquer?

19 Réponse: J'ai expliqué hier que cela avait la forme d'une loi, mais

20 c'était un acte politique, un document politique qui avait pour visée

21 d'établir des distances par rapport à l'égard de la politique de Slobodan

22 Milosevic.

23 Question: Donc vous interdisez les activités du Parti communiste seulement

24 un an après la cessation de votre affiliation?

25 Réponse: Je vous parle d'un acte politique.

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1 Question: Merci. Mais est-ce que tous les ex-membres de la Ligue des

2 communistes sont ensuite devenus hauts responsables dans les nouveaux

3 Etats? Bon nombre d'entre eux sont devenus présidents de ces Etats tout de

4 suite, dès la création de ces Etats, et certains autres sont devenus de

5 hauts fonctionnaires de ces Etats, et bon nombre de personnes qui avaient

6 été membres de la Ligue des communistes sont restés à la tête de ces

7 Etats?

8 Réponse: Certains sont devenus réformistes et sont restés à ces mêmes

9 fonctions; et certains sont restés conservateurs, comme Slobodan

10 Milosevic.

11 Question: Et Gligorov, Kucan, pour ne pas mentionner les autres.

12 N'oublions pas.

13 Je voudrais que vous me répondiez, parce que je crois que cela a trait à

14 la question de crédibilité. Lorsque vous avez répondu hier aux questions

15 posées concernant l'argent, les 146.000 et quelques dollars, vous avez dit

16 que vous ne vous souveniez pas de la chose, vous ne vous souveniez pas

17 d'avoir reçu cet argent.

18 Réponse: Oui, j'ai dit que je ne me souvenais pas de la chose.

19 Question: Je ne sais pas si vous pourrez me répondre, si vous vous

20 souvenez, oui ou non, de la procédure, du procès qui avait été intenté

21 contre vous, quoique cela n'ait pas été fait de façon publique, compte

22 tenu de vos fonctions?

23 Réponse: Je ne m'en souviens pas du tout.

24 Question: Merci. Dans les conversations interceptées concernant

25 l'arrestation de Milan Martic, et c'est à cette occasion-là que nous en

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1 avons entendu le plus, tout ce qui s'était passé dans ces conversations

2 interceptées l'on visait notamment à empêcher un incident?

3 Réponse: Oui, on avait tout fait pour libérer Martic.

4 Question: Mais pour qu'il n'y ait pas d'incident à ce sujet, n'est-ce pas?

5 Parce que la population s'était révoltée, les gens s'étaient rassemblés?

6 Réponse: On avait tout fait pour que Martic soit libéré; c'était la

7 finalité.

8 Question: C'était donc plus important que le fait d'éviter les incidents,

9 ou les incidents ont-ils été évités par la suite? Y a-t-il eu des

10 incidents?

11 Réponse: J'ai parlé de la finalité de ces conversations.

12 Question: Oui, mais la question est de savoir si vous êtes en mesure

13 d'interpréter cela vous-même; il appartiendra au Tribunal de décider à ce

14 sujet. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si, dans ces 50 conversations

15 interceptées, vous avez oui ou non entendu qui que ce soit donner des

16 ordres à quelqu'un?

17 Réponse: J'ai entendu Slobodan Milosevic donner des ordres à Karadzic.

18 Question: Quel ordre?

19 Réponse: Il a donné l'ordre d'organiser des meetings et des...

20 Question: Non, non, mais je vous pose des questions concernant les ordres

21 qui auraient été donné concernant la Krajina.

22 Réponse: Répétez, s'il vous plaît.

23 Question: Avez-vous entendu quiconque… Je ne mentionne pas Slobodan

24 Milosevic; j'ai dit: dans ces 50 conversations interceptées, avez-vous oui

25 ou non entendu quiconque donner des ordres au commandement suprême de

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1 faire quoi que ce soit?

2 Réponse: Sous la forme d'un ordre au commandant suprême? Non, je n'ai rien

3 entendu de cette nature.

4 Question: Merci. Maintenant, je vais vous poser des questions portant sur

5 des faits de notoriété publique. A mon avis, après cela, j'aurai une

6 question à vous poser.

7 Est-il vrai de dire que, le 2 juillet 1990, l'assemblée de Slovénie a

8 adopté une déclaration de souveraineté de cet Etat de Slovénie?

9 Réponse: A peu près vers cette époque. Je ne me souviens pas de la date.

10 Question: Veuillez confirmer le fait: est-il vrai que, le 23 décembre, il

11 y a eu un plébiscite en Slovénie, au cours duquel 80% de la population

12 s'est prononcée en faveur de l'indépendance?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Et puis, le 31 janvier, l'Assemblée de Slovénie a adopté une

15 charte déclarant qu'elle allait commencer un processus de dissociation par

16 rapport à la Yougoslavie?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Et puis Drnovcet (phon.) a informé la présidence et, le 18 mai

19 1991, l'assemblée de Slovénie a adressé une déclaration à l'Assemblée de

20 la RSFY portant dissociation ou sécession de la Yougoslavie, au plus tard

21 le 26 juin?

22 Réponse: C'est à peu près exact, mais je ne me souviens pas de la date

23 précise.

24 Question: Et puis, la Slovénie a adopté une résolution portant sécession

25 d'avec la Yougoslavie. Après quoi, il y a un référendum qui s'est tenu

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1 dans la République. Et le 25 juin, la Croatie ainsi que la Slovénie ont

2 proclamé dans les faits leur indépendance?

3 Réponse: Je pense que la Croatie l'a fait le 30 juin.

4 Question: Fort bien. Est-ce que ces mesures ont entraîné la désintégration

5 de la Yougoslavie?

6 Réponse: Il s'agit là de lois qui ont rendu ou qui ont fait de la Croatie

7 et de la Slovénie des Etats indépendants prêts à entrer en confédération

8 avec d'autres pays qui auraient été prêts à participer à cette entreprise.

9 Réponse: Mais cela s'est passé plus tard. D'abord, ils ont proclamé leur

10 indépendance. La question d'une éventuelle association entre ces Etats est

11 quelque chose qui intervient plus tard. Laissons cela de côté pour le

12 moment.

13 Nous avons maintenant la page 13.011 du compte rendu d'audience, lignes 16

14 à 21.

15 Vous dites qu'il y a eu des discussions à propos de rapports futurs à

16 instaurer en Yougoslavie et que ceci a été une discussion intensive

17 portant sur deux options possibles, la première étant celle-ci: il y a une

18 démarche politique, prônée par la Serbie; la deuxième étant prônée par la

19 Croatie et la Slovénie qui visait à la sécession? Vous avez dit ceci

20 plusieurs fois, n'est-ce pas?

21 Réponse: Oui.

22 Question: S'il y a eu une telle évolution, à savoir qu'il y a eu

23 proclamation de l'indépendance, l'adoption de toutes ces mesures

24 juridiques et de tous ces documents, est-ce que la discussion portant sur

25 ces questions était terminée et qu'à partir de la fin du mois de juin il

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1 n'y avait plus de discussion de ce genre?

2 Réponse: Au mois de juin -et ceci vers le début du mois-, suite à

3 l'intervention de la Communauté européenne et de l'Accord de Brioni, les

4 décisions prises par la Slovénie et la Croatie ont été suspendues pendant

5 une période de trois mois.

6 Question: Ce n'est pas là-dessus que porte ma question. Je parle de ces

7 mesures et actes juridiques qui sont le fait de la Croatie et de la

8 Slovénie. Est-ce que cela ne revenait pas à dire que la discussion était

9 terminée en ce qui les concernait, qu'ils en avaient discuté, qu'ils

10 avaient mis en oeuvre leurs décisions et qu'ils avaient proclamé leur

11 indépendance, et qu'il n'y avait plus rien à discuter?

12 Réponse: A ma connaissance, elles ont insisté pour que soit reconnue leur

13 indépendance.

14 Question: Je vous remercie. Si c'est le cas et vu l'interprétation que

15 vous avez faite d'une conversation entre Karadzic et Slobodan Milosevic

16 -il s'agit de la page 13.046 du compte rendu du 19 novembre-, vous avez

17 dit ceci. Il s'agit là de conversations qui remontaient aux mois de

18 juillet et août, donc postérieures à toutes ces discussions et

19 postérieures à ce qu'avaient fait la Croatie et la Slovénie.

20 Vous avez dit ceci, qu'il y avait un plan visant à ce que la Slovénie et

21 la Croatie soient forcées à quitter la Yougoslavie, causant ainsi la

22 désintégration de l'Etat.

23 "Comment auraient-ils pu fomenter de tels plans?", c'est ainsi que vous

24 avez interprété la conversation-ci, à ce moment-là, si ces documents

25 légaux avaient été adoptés, si les décisions avaient été prises. Et

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1 quelqu'un a dit: "Ils nous tirent dans le dos! Que pouvons-nous faire? On

2 ne peut pas continuer à coexister vu ces conditions".

3 Réponse: La procédure de proclamation de l'indépendance, le fait que la

4 Slovénie et la Croatie ont quitté la Yougoslavie, ce processus a commencé

5 en janvier 1991 et il s'est poursuivi de la façon dont nous avons déjà

6 parlé.

7 Question: Oui, mais nous avons déjà dit que ça s'était terminé au mois de

8 juin, qu'au mois de juin, c'était déjà fini. Or ces écoutes interviennent

9 toutes, toutes interviennent plus tard. Pourquoi quelqu'un fomenterait-il

10 un plan forçant quelqu'un à partir, alors que ce quelqu'un a déjà décidé

11 de partir et est indépendant?

12 Réponse: Mais ceci se passait au moment des événements antérieurs à cela.

13 Question: Fort bien. Maintenant, nous prenons la pièce 351, intercalaire

14 64.

15 Même avant cela, sans procédure préalable, le 18 mars 1991, vous, vous

16 avez pris une décision, vous avez signé une décision pour que Knin fasse

17 sécession par rapport à la Croatie. Quelle est la taille de Knin? Comment

18 auriez-vous pu faire cela?

19 Réponse: Cette décision a été prise suite aux décisions prises par le

20 conseil exécutif de la SAO de Krajina, le 16 mars 1991, et la décision a

21 en fait été suscitée par la conversation téléphonique que j'avais avec M.

22 Milosevic. Il nous avait demandé de soutenir la Yougoslavie et cela

23 voulait dire qu'il fallait rester au sein de la Yougoslavie, conformément

24 à son option à lui. Il fallait donc se séparer de la Croatie, il fallait

25 rester en Yougoslavie et il fallait laisser partir la Croatie.

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1 Question: Vous l'avez déjà dit dans le cadre de votre déposition: vous

2 avez dit que Milosevic n'était pas au courant et qu'il s'était même

3 opposé.

4 Réponse: Je vous ai dit comment j'interprétais son souhait, sa requête de

5 soutenir la Yougoslavie.

6 Question: Et vous avez fait sécession, alors qu'il ne vous l'a pas

7 demandé. Vous avez dit explicitement qu'à ce propos, toutes les décisions

8 prises le 1er avril 1991, au moment de la sécession de la totalité de la

9 Krajina par rapport à la Croatie, que tout ceci n'avait pas été soutenu

10 par lui?

11 Réponse: Cette décision a été prise suite à une conversation téléphonique

12 avec M. Milosevic et sa demande visant à ce que nous soutenions la

13 Yougoslavie. C'est de cette façon que nous avons manifesté ce soutien à la

14 Yougoslavie, son option pour le maintien des Serbes en Yougoslavie et pour

15 le départ de la Croatie.

16 Question: Mais est-ce qu'il s'est opposé à cela, au moment où il a appris

17 que vous aviez pris cette décision? Est-ce qu'il y a eu des protestations

18 du fait de son comportement?

19 Réponse: Il ne s'est pas du tout opposé à cette décision portant

20 sécession. Il s'opposait à cette unification avec la Serbie. Il voulait

21 parler de la Yougoslavie.

22 Question: Vous avez dit, ces derniers jours, qu'il n'avait pas marqué son

23 accord, mais peu importe. Laissons passer cela.

24 Nous parlons ici de cette période qui va jusqu'en mai 1991. Pendant cette

25 période, est-ce que la JNA était déployée de façon normale sur la totalité

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1 du territoire?

2 Réponse: Jusque quand?

3 Question: Disons jusqu'au début 1991?

4 Réponse: Jusqu'au début 1991, je n'ai rien remarqué de particulier,

5 d'activités particulières ou inhabituelles.

6 Question: Et au cours de cette période de 50 ans, jusqu'en 1991, est-ce

7 qu'il y a eu une quelconque occupation par la JNA sur le territoire de la

8 Yougoslavie ou est-ce que c'était l'armée régulière?

9 Réponse: La JNA était la force armée de la RSFY.

10 Question: Dites-moi, pouvez-vous me dire ceci: est-ce que vous savez que

11 le 27 juin 1991, la TO de Slovénie avait attaqué la JNA sans avis

12 préalable, sans avertissement, et est-ce qu'il y a eu mort de 50 soldats?

13 Est-ce bien exact?

14 Réponse: Je sais qu'il y a eu intervention de la JNA, suite à la demande

15 du commandement général, afin que le siège qui était imposé aux postes-

16 frontières soit levé; et il y a eu des affrontements armés avec les forces

17 de la TO de Slovénie. Des tirs ont été ouverts sur les soldats armés, mais

18 je n'ai pas d'informations plus précises.

19 Question: Est-ce que ceci n'a pas été suivi d'attaques, d'occupation de

20 casernes, aussi bien en Slovénie qu'en Croatie?

21 Réponse: C'est comme ça que s'est produit le conflit armé entre la JNA et

22 les forces armées en Slovénie. Quant à la Croatie, je l'ai déjà dit, le

23 conflit, lui, il a commencé à partir du mois de janvier 1991.

24 Question: Je voudrais maintenant donner lecture de deux documents à votre

25 intention, pour autant que j'aie suffisamment de temps. J'aurais, en fait,

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1 beaucoup plus de documents à aborder. Ce sont deux documents que vous avez

2 signés, qui sont des ordres que vous donnez.

3 L'un de ces ordres a déjà été versé au dossier; c'est l'intercalaire 38 de

4 la pièce 352/2. Quant à l'autre, il n'a pas été versé au dossier, mais il

5 s'agit de l'intercalaire 37 de la pièce 352/2.

6 Ordre en date du 1er avril 1991. Vous dites ceci: "Ordre: effectuer la

7 mobilisation le 1er avril -c'est ce que vous dites-; il faut mobiliser la

8 Défense territoriale de la SAO de Krajina et il faut que des unités de

9 volontaires défendent la liberté de tous les citoyens et protègent

10 l'intégrité territoriale.". C'est le premier point.

11 Deuxième point, et c'est la seule chose qu'a lue le Procureur: "Nous

12 exigeons de la part du Gouvernement de la République de Serbie que les

13 forces du ministre de l'Intérieur de la République de Serbie fournissent

14 tout l'appui technique et en personnel au SUP de Krajina.".

15 Voilà l'ordre que vous donnez; ce sont les conclusions que vous tirez,

16 n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui. J'ai déjà apporté un commentaire à ce document.

18 Question: Oui, vous avez commenté les conclusions, mais pas l'ordre?

19 Réponse: Mais cet ordre était le fruit des événements de Plitvice.

20 Question: Mais ce qui n'a pas été versé au dossier, c'est l'intercalaire

21 37. Le même jour, là, vous formulez une requête, en date donc du 1er avril

22 1991. Et ici, vous n'écrivez à personne qui se trouve en Serbie, mais bien

23 à la Présidence de la RSFY, au commandement, à l'état-major du

24 commandement de la JNA, au SUP fédéral et à d'autres organes fédéraux

25 compétents et vous leur demandez avec vigueur ceci: d'abord, qu'il y ait

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1 application urgente et complète de la décision de la Présidence de

2 Yougoslavie pour le repli complet des forces de l'agresseur et des forces

3 terroristes du MUP, de la soi-disant République de Croatie et du

4 territoire de la SAO de Krajina, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui. Ceci s'est fait en rapport avec la promesse faite par Jovic

6 et Milosevic selon laquelle la JNA allait protéger les Serbes de Krajina.

7 Question: Pourquoi ne pas l'avoir dit dans la requête adressée à la

8 Serbie, alors qu'ici vous écrivez à la Présidence de la RSFY, n'est-ce

9 pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et c'est ce que vous avez dit aussi dans votre audition, celle

12 que vous avez eue ou l'interview avec Grubac, le 18 janvier. Je ne peux

13 pas mettre la main dessus pour le moment, mais vous dites la même chose

14 dans cet entretien. Et vous avez également parlé de forces terroristes et

15 de forces de l'agresseur à partir du mois de janvier?

16 Réponse: C'était une figure de style, c'est comme ça, c'était une

17 métaphore qu'on utilisait pour parler les uns des autres. Je vous ai déjà

18 dit quelle était la terminologie utilisée entre nous et les Croates.

19 Question: Certes. Mais au point 2 de cette requête, vous dites ne rien

20 savoir des victimes ou des pertes subies par les Serbes; alors qu'ici vous

21 dites, au point 2, qu'il faut rendre immédiatement ou restituer les

22 cadavres et les blessés.

23 Réponse: La situation était difficile, complexe. On avait dit qu'il y

24 avait eu des pertes, à Plitvice notamment, et des personnes disparues.

25 Question: Oui, mais là, vous faites une requête et vous la signez à partir

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1 de données non vérifiées ou est-ce que vous disposez, pour prendre cette

2 décision et pour exiger la restitution des corps, vous devez avoir des

3 informations fiables?

4 Réponse: Ces informations, je les tenais de gens de Korenica.

5 Question: Donc vous n'avez pas de connaissances directes?

6 Réponse: Je me suis trouvé sur les lieux et on m'a dit ce qui s'était

7 passé.

8 Question: Avez-vous vu un seul corps?

9 Réponse: Il y avait un Serbe de tué et aussi un policier croate.

10 Question: Mais ici, on parle de corps au pluriel, de cadavres au pluriel.

11 Mais poursuivons.

12 Point 3, demande n°3. Vous demandez, par l'intervention de la Croix-Rouge

13 de Yougoslavie et par l"intermédiaire du SUP fédéral -je le répète: du SUP

14 fédéral-, vous demandez que tous les citoyens détenus et tous les membres

15 du SUP de Krajina soient libérés.

16 Combien y a-t-il de détenus?

17 Réponse: Je ne sais pas si c'est vrai. Je sais que Hadzic a été arrêté à

18 Plitvice, à l'époque.

19 Question: Plus loin, à la page 3064 du compte rendu d'audience, vous

20 poursuivez en disant ceci: "La JNA a commencé la guerre avec la Croatie au

21 mois d'août, mais le conflit a commencé au mois de mai.".

22 Or, ici, dans ces ordres, vous faites référence à certaines demandes qui

23 étaient les vôtres afin d'obtenir l'aide et l'assistance d'institutions

24 fédérales?

25 Réponse: Jovic et Milosevic avaient promis de nous protéger; c'est à cela

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1 que ça se rapporte.

2 Question: A la page 13046, vous dites qu'il y avait un plan consistant à

3 ce qu'une partie de la Croatie occupée par la JNA et se trouvant sous le

4 contrôle des Serbes, pour que cette partie reste en Yougoslavie. Pensez-

5 vous à la Krajina ?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Mais est-ce que la vérité n'est pas autre? De ce temps-là,

8 l'armée n'avait rien occupé; l'armée était, au contraire, assiégée?

9 Réponse: Mais vous pensez à quelle période?

10 Question: A quelle période pensez-vous?

11 Réponse: A la période la plus difficile.

12 Question: Mai, juin, juillet, août, septembre, octobre.

13 Réponse: Je vous ai parlé avec précision de l'escalade et de l'utilisation

14 qu'on a faite de la JNA. J'en ai parlé de façon précise.

15 Question: Ici, on parle d'occupation. A un moment, nous avons lu cette

16 requête qui demandait à ce que soient enrayées les activités des

17 organisations terroristes.

18 Réponse: Quand j'ai donné ma réponse, je vous ai demandé à quelle période

19 vous pensiez.

20 Question: Mais vous avez fait cette demande en avril. Est-ce qu'il y avait

21 une guerre, à ce moment-là, déjà? )

22 Réponse: J'ai dit que Milosevic avait promis de protéger, de soutenir

23 notre lutte politique. Cela se passait déjà au mois d'août 1990. Il avait

24 dit la même chose lors de nos réunions.

25 Question: Je dois me dépêcher.

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1 Est-ce que vous avez refusé à trois reprises le plan Carrington? Vous avez

2 eu des pourparlers avec Wijnaendts, tout ceci en 1991; chaque fois

3 Milosevic, vous a dit d'accepter et chaque fois vous avez refusé ce plan.

4 Réponse: Il y a eu trois discussions avec Milosevic.

5 Question: Vous l'avez déjà dit.

6 Réponse: Deux portaient sur la même chose, une troisième était différente.

7 Question: Pourquoi ne pas avoir accepté ces recommandations?

8 Réponse: Deux fois il nous a dit qu'il fallait accepter le plan

9 Carrington, et une fois il nous a dit qu'il fallait rejeter. Parce que

10 ceci: il avait dit qu'il y avait un statut spécial sur le sol yougoslave

11 et ceci était contraire au plan Carrington.

12 Question: Vous dites qu'il vous avait dit à deux reprises d'accepter ces

13 propositions et vous ne l'avez pas fait. Est-ce qu'il y avait une

14 structure parallèle qui vous forçait à l'accepter?

15 Réponse: A l'époque, il y avait une structure parallèle: "Frenki" menait

16 une campagne contre moi, il me traitait de traite.

17 Question: Ne parlons pas de cela. Est-ce que "Frenki" vous a dit de ne pas

18 accepter ce plan?

19 Réponse: "Frenki" était la structure parallèle.

20 Question: Est-ce que "Frenki" vous a dit de ne pas accepter le plan?

21 Réponse: Slobodan Milosevic nous a dit d'accepter. J'ai dit ici dans ce

22 prétoire que je n'étais pas d'accord.

23 Question: C'est ce que je voulais entendre.

24 Qu'en est-il du Conseil national serbe en décembre 1991? Est-ce qu'il a

25 prononcé la Republika Srpska, l'Etat de cette façon?

Page 14076

1 Réponse: Ce n'était pas le Conseil national serbe, mais l'Assemblée de la

2 SAO de Krajina s'est prononcée "constitutionnelle".

3 Question: Est-ce que Milosevic s'est opposé à cela?

4 Réponse: Je n'ai pas entendu cela. Au cours d'une conversation

5 téléphonique, il m'a traité de "collègue" de façon ironique, sarcastique

6 quand il m'a appelé pour participer à une réunion le 31.

7 Question: Ensuite, avez-vous insisté pour faire la liaison entre le reste,

8 la Slavonie, Baranja, le Srem occidental, pour que cela forme un seul et

9 même tout? Avez-vous fait cette demande auprès de la communauté

10 internationale?

11 Réponse: Ce qui s'est passé, c'est la chose suivante: le 19 décembre, la

12 SAO de la Krajina a été proclamé République serbe de la Krajina, et

13 ensuite la Slavonie orientale et la Slavonie occidentale ont pris la

14 décision de s'annexer la République serbe de la Krajina.

15 Question: S'agissant du plan Vance-Owen, est-ce que Milosevic vous a dit

16 d'accepter? Est-ce que vous avez refusé?

17 Réponse: Le plan Vance-Owen n'avait rien à voir avec la Krajina, cela

18 s'appliquait à la Bosnie-Herzégovine.

19 Question: Moi, je vous parle du plan Vance-Owen.

20 Réponse: Et moi, je vous dis que cela n'avait rien à voir avec la Krajina.

21 Question: Oui, mais ce plan Vance, est-ce qu'il a insisté pour que vous

22 l'acceptiez?

23 Réponse: Milosevic a non seulement insisté pour qu'on l'accepte, mais il a

24 imposé l'agrément à ce plan.

25 Question: Vous-même, vous y étiez opposé?

Page 14077

1 Réponse: J'y étais opposé, comme je l'ai déjà expliqué.

2 Question: Ceci m'amène donc à ce qui m'intéresse au plus haut point. Je

3 pense que cela intéressera également la Chambre de première instance,

4 c'est la chose suivante: est-ce que vous avez refusé ce plan Vance

5 justement parce que vous refusiez toute démilitarisation, vous étiez

6 opposé à ce que la JNA se retire de la zone?

7 Réponse: Exactement.

8 Question: Avez-vous insisté pour que la ligne de démarcation se trouve au

9 niveau de la frontière entre la Krajina et Croatie?

10 Réponse: Les forces de maintien de la paix des Nations-Unies devaient se

11 déployer le long de la ligne verte.

12 M. Tapuskovic (interprétation): (Hors micro.)

13 M. le Président (interprétation): Votre micro s'est éteint.

14 M. Tapuskovic (interprétation): Vous avez déclaré qu'un jour Milosevic

15 vous a dit où l'armée devait être déployée. Maintenant, je vois que vous-

16 même insistiez pour que la frontière, la ligne de délimitation se trouve

17 entre Croatie et la Krajina, faute de quoi vous ne donneriez pas votre

18 autorisation à la signature de ce plan.

19 M. Babic (interprétation): Vous déformez mes propos. Milosevic a dit où

20 l'armée serait déployée à la mi-juillet 1991 et, pendant les discussions

21 relatives au plan Vance, j'ai demandé à ce que la JNA reste là où

22 Milosevic l'avait déployée.

23 Question: Oui, mais bien que l'on vous ait demandé d'être d'accord, est-ce

24 que ce n'était pas…, c'était dans l'intérêt de tous que cet accord soit

25 signé pour la guerre se termine, vous avez refusé la signature?

Page 14078

1 Réponse: Que voulez-vous dire par là?

2 Question: Vous avez refusé le plan.

3 Réponse: Pour des raisons de sécurité, j'en ai déjà parlé à l'envi, ici

4 même.

5 Question: Est-ce que l'assemblée de Krajina a accepté le plan?

6 Réponse: L'assemblée de la Krajina a accepté le plan après la décision du

7 Conseil de sécurité d'envoyer des forces de maintien de la paix, et

8 l'assemblée municipale de Knin, que je présidais le 12 et 13 mars, a

9 accepté le déploiement des forces de maintien de la paix de l'ONU sur son

10 territoire.

11 Question: Après ceci, est-ce qu'avec la partie de l'assemblée qui ne

12 souhaitait pas accepter le plan Vance, est-ce qu'avec ces membres-là de

13 l'assemblée vous avez-vous pris la décision d'organiser un référendum?

14 Réponse: La décision relative à la tenue d'un référendum a été prise le 12

15 février 1992, et le Conseil de sécurité le 20 et 22 février a pris sa

16 décision.

17 Question: Certes, mais vous souhaitiez qu'il y ait un référendum afin

18 d'empêcher l'adoption du plan Vance-Owen?

19 Réponse: Non, je voulais savoir quelle était l'opinion de la population.

20 Ceci se passait avant la décision du Conseil de sécurité des Nations-Unies

21 afin d'envoyer des forces de maintien de la paix en Krajina.

22 Question: Je ne sais pas si j'aurais le temps de vous poser toutes mes

23 questions, il va falloir que j'en oublie certaines.

24 Je m'intéresse au plan Z-4. Ceci se trouve à l'intercalaire 104, pièce

25 352. Il s'agit d'un document qui vient de l'ambassade du Royaume-Uni. Nous

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1 l'avons déjà examiné. Est-ce que vous avez le document sous les yeux?

2 C'est un document qui est rédigé en langue anglaise.

3 Réponse: On m'en a donné lecture dans le Bureau du Procureur.

4 Question: S'agissant de ce plan, je voudrais savoir si vous avez eu deux

5 conversations avec Slobodan Milosevic, vous l'avez dit vous-même

6 d'ailleurs. Vous avez dit, si je me réfère au compte rendu d'audience page

7 13.242; vous avez donc déclaré lui avoir parlé pour la première fois au

8 sujet de ce plan en avril. Vous dites que Slobodan Milosevic vous a dit

9 que ce plan était un plan valable, mais qu'il y avait certains problèmes

10 mineurs qui se posaient s'agissant du territoire autour de Slunj?

11 Réponse: Il a dit que le plan était un bon plan, et que Slunj devait être

12 divisé verticalement.

13 Question: La deuxième fois que vous lui avez parlé de cela, c'était dans

14 la nuit du 2 ou 3 août?

15 Réponse: Le 3 août, vers 11 heures du matin.

16 Question: S'agissant de ces conversations avec lui, avez-vous informé

17 Galbraith de vos conversations avec Milosevic?

18 Réponse: La conversation que j'ai eue le 3 avec Milosevic a eu lieu après

19 ma discussion avec M. Galbraith. Je me suis entretenu avec M. Galbraith

20 dans l'après-midi du 3. Il m'a demandé si je m'étais décidé, si j'avais

21 fait une déclaration. J'ai répondu que oui; et voilà en quoi consistait ma

22 conversation téléphonique cet l'après-midi du 3 août.

23 Question: Vous ne lui avez pas dit de ce qui avait été dit par Milosevic

24 en avril, à savoir que c'était un bon plan? Vous ne l'avez pas dit à M.

25 Galbraith?

Page 14080

1 Réponse: Pour vous dire la vérité, Galbraith a dit que Milosevic était

2 l'adversaire le plus important à ce plan.

3 Question: Point 4 du document: M. Galbraith dit que vous-même avez déclaré

4 que Martic et Milosevic étaient opposés au plan.

5 Vous n'avez pas dit à Galbraith ce que M. Milosevic vous avait dit, à

6 savoir que ce plan était un bon plan. Ce que l'on peut lire, ici, dans ce

7 document, c'est que Martic et Milosevic étaient opposés au plan, et que

8 vous n'aviez rien contre cela?

9 Réponse: Absolument. Je pensais que Milosevic n'avait pas été entièrement

10 franc dans la conversation que j'ai eue avec lui en avril.

11 Question: Vous avez parlé avec Galbraith le matin, et vous lui avez

12 déclaré que vous alliez rendre la question publique; avant, vous parleriez

13 à Milosevic. Mais, une fois encore, vous n'avez pas dit que Milosevic

14 avait apporté son accord calmement.

15 Réponse: Je n'ai pas parlé de ce que m'avait dit Milosevic plus tard dans

16 cette conversation téléphonique.

17 Question: Pourquoi n'avez-vous dit à personne, à partir du mois d'avril,

18 que Milosevic avait dit que ce plan était un bon plan, à savoir un plan

19 qu'il convenait d'accepter?

20 Réponse: Je ne me souviens pas avoir gardé le secret sur la chose.

21 Question: Pourquoi n'avez-vous pas insisté sur ce point dans vos

22 conversations avec Galbraith?

23 Réponse: J'ai dit à Galbraith que Milosevic devait donner son accord,

24 surtout quand il s'agissait de la mise en place des forces autour de la

25 poche de Bihac. L'armée se trouvait là, l'armée de la RSK. Il y avait le

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1 MUP, la DB, tous les participants, tous les intervenants. C'était surtout

2 pour la poche de Bihac que j'ai dit à Galbraith que l'on ne pouvait pas

3 aller de l'avant sans l'accord de Milosevic.

4 Question: Voyons ce qu'il nous dit au paragraphe 4 du document. Vous

5 dites: "Martic et Milosevic y étaient opposés." Est-ce bien ce que vous

6 avez dit? Est-ce bien ce que vous pensiez?

7 Réponse: Martic a déclaré que M. Milosevic était opposé à même tenir

8 compte de ce plan.

9 Question: Ce n'est pas à ma question. Vous avez dit à Galbraith ce qui

10 figure ici, à savoir que Milosevic était opposé à ce plan. Alors que cette

11 même nuit vous aviez parlé avec lui, qu'il vous avait répondu "oui, mais

12 calmement, sans incident, essayez de régler la question."

13 Or, vous n'avez pas dit qu'en avril il vous avait dit que ce plan était un

14 bon plan, qu'il avait donné son accord?

15 Réponse: Il y a une différence entre ce que Milosevic a dit. Quand il a

16 dit "calmement" -et je pense que les interprètes ont traduit le terme

17 "mirno", qui veut dire "sans panique"-, cela voulait dire "lentement",

18 c'est la première traduction, mais cela voulait dire en fait "doucement".

19 Il y avait donc une différence entre l'opinion de Milosevic et ce qu'il a

20 dit quand il a dit "mirno", c'est-à-dire "doucement, calmement". Je vois

21 bien la différence. En fait, je vois bien quand il s'en tient à son

22 opinion ou pas.

23 M. Tapuskovic (interprétation): Peut-on m'accorder deux ou trois minutes

24 de plus, s'il vous plaît?

25 M. le Président (interprétation): Oui.

Page 14082

1 M. Tapuskovic (interprétation): Dans ces conditions, je vais essayer de

2 traiter de certains documents, un peu plus vite que prévu. J'ai ici une

3 liste que j'ai réalisée moi-même, je souhaiterais en remettre un

4 exemplaire à la Chambre de Première instance afin de faciliter la

5 compréhension. Il s'agit de 54 décisions, et chacune de ces décisions

6 était signée par Babic, des décisions prises entre juillet et décembre

7 1991. Parmi ces décisions, on trouve deux ordres relatifs à la

8 mobilisation, ainsi qu'un ordre dans lequel il remet en liberté des

9 personnes, sans qu'il y ait eu pour autant décision d'un quelconque

10 tribunal dans ce sens.

11 Je voudrais qu'il soit bien clair et j'attire votre attention sur cela,

12 Messieurs les Juges, je voudrais qu'il soit bien compris qu'entre juillet

13 et décembre 1991, 54 décisions ont été prises par M. Babic, 54 décisions

14 qui ont trait au fonctionnement de la Défense territoriale. J'ai ici la

15 liste de ces décisions et j'ai même une liste en anglais, avec les numéros

16 de référence. Je vais vous remettre des exemplaires pour tout le monde.

17 (Intervention de l'huissière.)

18 J'ai un petit peu de mal à m'y retrouver moi-même mais… Bien. Nous avons

19 ici une décision, intercalaire n°25, pièce 352/1, il s'agit d'un ordre en

20 date du 2 août 1991, un ordre signé par Milan Babic, et les autres

21 décisions sont semblables. Il dit: "Je suis, conformément à la loi en

22 vigueur, le commandeur de toutes les forces et le président de la Krajina,

23 Milan Babic." C'est signé par lui-même.

24 Ensuite, il y a un autre ordre à l'intention du commandant de la Défense

25 territoriale: "Les commandants locaux de la Défense territoriale sont

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1 désignés par le Premier ministre, Milan Babic, le chef de la Défense

2 territoriale." J'imagine que ces ordres, vous les avez pris de manière

3 autonome, indépendante. Ou a-t-on exercé des pressions sur vous?

4 M. Babic (interprétation): Non, j'ai rendu ces ordres de manière tout à

5 fait libre.

6 Question: La structure parallèle n'a rien à voir avec cela?

7 Réponse: La structure parallèle, c'est autre chose. Je l'ai déjà expliqué.

8 Question: Est-ce que "Frenki" est intervenu là-dedans?

9 Réponse: Non.

10 Question: Maintenant, nous passons à un autre document, document 162,

11 l'ordre de mobilisation, qui fait toujours partie de la pièce à

12 conviction. Ensuite, nous avons un autre ordre, aussi ayant trait à la

13 mobilisation en date d'août. Est-ce que c'est vous qui avez donné cet

14 ordre?

15 Réponse: Pouvez-vous donner lecture du libellé, s'il vous plait? Je

16 pourrais alors vous répondre.

17 Question: Il s'agit d'un ordre en date du 26 octobre 1991, rédigé en

18 serbe. En tout cas, cet ordre a trait à la mobilisation, relativement à

19 l'ordre reçu de l'ambassade de l'Etat yougoslave. Vous avez pris cet ordre

20 vous-même?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Toutes ces décisions, vous les avez donc prises vous-même en

23 toute connaissance de cause, de manière complètement indépendante?

24 Réponse: Mais donnez-moi le titre de chacune d'entre-elle et je pourrai

25 vous répondre.

Page 14084

1 Question: Je n'ai pas le temps mais toutes ces décisions étaient signées

2 par vous-même?

3 Réponse: C'est exact.

4 Question: Vous nous dites avoir parlé avec Slobodan Milosevic au sujet de

5 questions financières, la première fois en 1990, quand vous avez parlé de

6 l'usine Viga. A l'époque, il n'y avait pas de guerre, rien de tel. C'était

7 une usine de vis. Vous avez demandé la somme de 60 millions pour sauver

8 cette usine. Est-ce qu'il ne s'agissait pas là de l'application du

9 principe de solidarité qui existait en Yougoslavie, à savoir que si

10 quelqu'un était en difficulté, si une des Républiques était en difficulté,

11 il fallait que les autres viennent à la rescousse. Ce principe ne

12 s'appliquait-il pas à l'époque?

13 Réponse: Il s'agissait de soutien à l'intention de la municipalité de

14 Knin.

15 Question: Merci.

16 Conversation suivante: en 1993, dans le cadre d'une délégation, vous avez

17 évoqué à nouveau des questions financières: est-ce exact?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Maintenant, ce n'est pas vraiment une question, mais je

20 souhaiterais me livrer à l'exercice suivant: je souhaiterais montrer à la

21 Chambre de première instance un document et je souhaiterais attirer votre

22 attention sur la chose suivante. J'aimerais que les Juges prennent cela en

23 compte.

24 Je n'ai pas été en mesure de le faire pendant l'interrogatoire principal,

25 je n'ai pas voulu interrompre constamment les débats, mais je souhaiterais

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1 maintenant attirer votre attention, Messieurs les Juges, sur le point

2 suivant, car c'est important. Je pense que s'agissant de tous les

3 documents financiers ayant trait à la période suivant juin 1992, je pense

4 donc que la Chambre devrait procéder à l'évaluation de ces documents.

5 Quel est le rapport de tout cela avec les événements qui ont eu lieu

6 jusqu'en juin? Vous-mêmes, Messieurs les Juges, serez en mesure d'y

7 répondre. Mais vous pouvez vous rendre compte que ces documents, pour la

8 plupart et à deux exceptions, ces documents émanent d'une période qui a

9 suivi la période de juin 1992. Ce sont des documents ultérieurs, c'est-à-

10 dire que le conflit qui est visé à l'Acte d'accusation n'avait plus cours

11 à ce moment-là, quand ces documents ont été émis. Il y a seulement deux

12 documents qui sont datés d'une période antérieure: celui du 10 février

13 1992, pour la somme de 380.000 dinars; document 352, intercalaire n°16:

14 ceci a trait aux événements qui ont eu lieu à Glina. Ces documents n'ont

15 pas été utilisés, mais il ressort de ces documents qu'on a demandé une

16 aide financière pour que l'argent utilisé à Glina, sur les comptes

17 bancaires, puisse être utilisé.

18 Réponse: Pour le MUP?

19 Question: Oui, pour le MUP aussi. Mais, en tout cas, c'était une somme

20 d'argent qui se trouvait déjà sur place, une somme qui s'élevait à 380.000

21 dinars. Est-ce exact?

22 Réponse: On dirait.

23 Question: Le document suivant est le document 352, intercalaires n°5 et 6.

24 Dans ce document, on ne parle pas de fonds perçus, mais d'un programme

25 d'assistance qui va être mis en place à l'avenir. Et l'accusation a fait

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1 un calcul et constaté que ceci était équivalent à 92 millions de

2 deutschemarks et qu'il s'agit de fonds de demande d'assistance, de demande

3 d'aide, et que ceci a trait à une période qui court après juin, avant et

4 après juin.

5 Réponse: Mais de quels documents parlez-vous?

6 Question: Je vous parle de documents de nature financière, aux termes

7 desquels vous demandez une aide.

8 Réponse: Oui, on a demandé de l'aide financière.

9 Question: Avez-vous la preuve que 92 millions de marks vous aient jamais

10 été remis? Est-ce que cette somme de 92 millions a été perçue en Krajina?

11 Réponse: Je n'ai aucun document pour le prouver.

12 Question: Disposez-vous de documents prouvant qu'il a été fait droit à ces

13 demandes et que cette somme de 92 millions de deutschemarks vous a été

14 versée?

15 Réponse: Les documents que j'avais, je vous les ai remis.

16 Question: Pour finir, je souhaiterais aborder un dernier sujet. Vous avez

17 parlé lors de votre déposition, page 13.002, et, dans la pièce 352,

18 intercalaire 26, vous avez donc parlé du fait que les médias en Serbie

19 avaient monté en épingle les événements, et que vous aussi, vous aviez été

20 le jeu des médias; et que, très souvent, vous aviez fait reposer votre

21 opinion sur ce qui était rapporté par les médias?

22 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)

23 Mais l'influence des médias, de la presse, de la télévision de Zagreb ont-

24 ils influé en quelque sorte sur ce que vous avez décidé ou ce que vous

25 voulu faire?

Page 14087

1 Réponse: Oui.

2 Question: Et qu'est-ce qui a influé davantage?

3 Réponse: Les médias de Serbie.

4 Question: S'agissant maintenant de la modification de la Constitution

5 concernant le retrait des droits aux Serbes, cela vous a moins perturbé

6 que le fait de voir ce que les médias racontaient?

7 Réponse: J'ai parlé de la façon dont les médias avaient parlé de la chose

8 en Serbie. Moi-même et l'opinion publique chez nous avions davantage cru

9 les médias de Serbie.

10 Question: Est-ce donc que vous accordiez davantage d'attention à ce qui se

11 passait dans la Krajina, dans la Croatie ou en Yougoslavie, que ce que

12 vous avez pu lire dans la presse?

13 Réponse: Mais à la presse aussi.

14 Question: A quoi avez-vous davantage prêté attention?

15 Réponse: Je ne peux pas vous donner de précision maintenant.

16 Question: Vous avez dit avoir fait l'objet de pressions, que vous avez

17 accepté leur rhétorique et que vous avez fini par réfléchir comme eux.

18 Réponse: Moi, j'ai parlé de personnes concrètes, d'événements concrets et

19 de rhétorique concrète.

20 Question: Merci. S'agissant du rejet du plan Vance, étaient-ce là vos

21 positions à vous ou étaient-ce les positions exprimées par Rasuo?

22 Réponse: C'étaient mes positions également. J'avais adopté ces positions

23 comme si c'étaient les miennes.

24 Question: Ce que vous avez adopté, vous l'avez donc signé?

25 Réponse: Oui, je l'ai adopté et maintenu.

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1 Question: Dans la lettre qui vous a été envoyée par Mirko Marijanovic?

2 Réponse: J'ai déjà répondu dans quelles circonstances je l'ai fait. On

3 m'avait demandé de déclarer que la Yougoslavie n'était pas coupable et

4 c'était, si vous voulez, une condition pour que les réfugiés soient admis

5 en Serbie.

6 Question: Ce qui était dit dans la presse n'était pas vrai?

7 Réponse: J'ai dit ce que j'ai incorporé dans ma lettre dans ma déclaration

8 quant à ce que Marijanovic m'avait demandé de faire.

9 Question: Mais s'agissant des victimes serbes sur la route vers la Serbie?

10 Réponse: Ça, c'est exact.

11 Question: Vous avez dit ce qui est arrivé quand ils sont arrivés en

12 Serbie. Vous avez prétendu qu'on voulait les faire partir au Kosovo, mais

13 qu'est-il arrivé à ces gens-là, quand ils voyageaient vers la Serbie?

14 Combien de gens ont péri?

15 Réponse: Beaucoup. Beaucoup. Il y a eu beaucoup de morts sur la route. Il

16 y avait des pénuries d'eau, des pénuries de vivres. Les gens ont vécu

17 longtemps. Il y avait des barrages partout. Mladic avait posé des barrages

18 sur Vrbas.

19 Question: Mais je vous ai demandé ce qui s'est passé sur l'autoroute,

20 lorsque vous avez parlé des bombardements des colonnes de réfugiés?

21 Réponse: C'est la colonne de Topusko qui a été bombardée. Cette colonne a

22 été bombardée notamment au niveau de Bosanski Petrovac.

23 Question: Combien de morts y a-t-il eu?

24 Réponse: J'ai entendu dire qu'il y avait plusieurs morts.

25 Question: Encore une petite question et nous en aurons fini. Vous avez

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1 longuement parlé ici de bon nombre de sujets, mais vous n'avez

2 essentiellement rien vu: tout cela, ce sont des informations qui ne

3 faisaient que parvenir jusqu'à vous?

4 Réponse: Non, ce n'est pas exact. J'ai parlé de choses que j'avais vues

5 et, très souvent, j'ai vu bon nombre d'événements que j'ai décrits. J'ai

6 précisé les événements que j'avais vus, quels sont les événements au sujet

7 desquels on m'a informé et dont j'ai entendu parler par la suite.

8 Question: Mais avez-vous été sur le champ de bataille? Est-ce que vous

9 avez participé à des conflits? Est-ce que vous avez pu voir ce qui s'est

10 passé?

11 Réponse: J'ai dit que j'avais assisté aux événements de Korenica, puis à

12 Miocic, au moment où le colonel -comment s'appelait-il- Djukic a commandé

13 à l'artillerie pour ce qui est de Petrovo Polje. Et j'étais à Peruca, mais

14 je n'ai pas été à proximité des unités et des combats.

15 Question: Mais est-ce que vous avez personnellement pris le commandement?

16 Réponse: Non, non.

17 M. Tapuskovic (interprétation): Merci.

18 (Questions relatives à l'ordre de présentation des témoins.)

19 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous nous avez

20 dit que vous auriez besoin d'une demi-heure pour poser vos questions

21 supplémentaires?

22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est exact.

23 M. le Président (interprétation): Il faudra donc attendre lundi matin.

24 Monsieur Babic, je suis désolé, mais il va vous falloir attendre encore

25 lundi pour en terminer avec votre déposition.

Page 14090

1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'ai deux questions techniques à

2 évoquer.

3 M. le Président (interprétation): Est-ce que cela a trait à M. Babic?

4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Premièrement, cela a trait à ce

5 qu'a dit M. Milosevic au sujet du témoin; il a dit que les enregistrements

6 de l'audition des témoins allaient être rendus publics. Ce n'est pas exact

7 parce qu'il n'y a qu'une infime partie de ces enregistrements qui ont été

8 versés au dossier. Je souhaiterais donc dire que l'intégralité de

9 l'audition de M. Babic, en tant que suspect, ne sera pas communiquée

10 publiquement.

11 M. le Président (interprétation): Il appartiendra à la Chambre d'en

12 décider. Nous allons y réfléchir.

13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Deuxième chose: il s'agit de l'ordre

14 de comparution des témoins, la semaine prochaine. Nous souhaiterions

15 pouvoir terminer l'audition de tous les témoins venant de l'étranger et

16 placer M. Blewitt en fin de liste et non pas au début.

17 M. le Président (interprétation): Si j'ai bien compris, il sera là

18 uniquement produire un certain nombre de documents. Ces documents ont-ils

19 déjà été versés au dossier?

20 M. Kwon (interprétation): Le document 350 ou 315.

21 M. le Président (interprétation): Donnez-nous des informations quand il

22 viendra.

23 M. Milosevic (interprétation): Etant donné que vous avez dit que vous

24 alliez vous pencher sur la question concernant la publication de la teneur

25 des enregistrements, je voudrais que vous ne perdiez pas de vue le fait

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1 que les dernières déclarations faites au sujet de ce courrier, et les

2 réponses aux questions données à Me Tapuskovic diffèrent grandement de ce

3 qui figure aux enregistrements concernant quoi j'avais posé des questions.

4 Parce que, là-bas, il est dit que Rasuo lui avait écrit une lettre avec

5 laquelle il n'était pas d'accord. Maintenant, il vient de nous dire qu'il

6 était d'accord et qu'il avait rédigé la chose lui-même.

7 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il s'agit là d'une

8 question sur laquelle il conviendra de statuer. Nous allons réfléchir à la

9 partie de la déclaration qui devra être versée au dossier. D'ordinaire,

10 c'est l'intégralité de la déclaration qui est versée au dossier. Vous

11 aurez à nous présenter vos arguments la semaine prochaine.

12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Cela ne nous gêne pas que

13 l'intégralité de la transcription de cet enregistrement soit versée au

14 dossier. Je vous signale simplement que cela fait à peu près 1.000 pages.

15 Pour l'instant, ce document n'a pas été versé au dossier. C'est pourquoi

16 je suis intervenu à ce sujet.

17 M. le Président (interprétation): Fort bien, nous allons délibérer à ce

18 sujet. Nous nous retrouverons lundi à 9 heures. Une requête a été

19 présentée aux fins de mesures de protection, requête présentée par

20 l'accusation et nous allons faire droit à cette requête aux fins de

21 mesures de protection.

22 L'audience est suspendue jusqu'à 9 heures.

23 Je vous demande, Monsieur Babic, de revenir lundi et nous en terminerons,

24 ce jour-là, avec votre déposition.

25 (L'audience est levée à 13 heures 50.)