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1 (Lundi 27 janvier 2003.)
2 (L'audience est ouverte à 9 heures 05.)
3 (Audience publique.)
4 (Le témoin, M. Petar Kriste, est dans le prétoire.)
5 M. le Président (interprétation): Oui, Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la
6 parole.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il faut
8 d'abord que le témoin prononce la déclaration solennelle.
9 M. le Président (interprétation): Effectivement, je vais demander au
10 témoin de prononcer la déclaration solennelle. Je demande à avoir une
11 copie du résumé.
12 Monsieur le Témoin, veuillez prononcer la déclaration solennelle.
13 M. Kriste (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Veuillez vous asseoir,
16 Monsieur.
17 Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la parole.
18 (Interrogatoire principal du témoin, M. Kriste Petar, par Mme Uertz-
19 Retzlaff.)
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le
21 Président, Messieurs les Juges.
22 Bonjour, Monsieur le Témoin. Vous m'entendez?
23 M. Kriste (interprétation): Oui.
24 Question: Veuillez décliner votre identité et nous dire quelle est votre
25 date de naissance?
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1 Réponse: Je m'appelle Petar Kriste. Je suis de Dubrovnik, et je suis né le
2 5 janvier 1936.
3 Question: Vous êtes Croate de nationalité?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Quelle est votre profession, Monsieur?
6 Réponse: Je suis économiste.
7 Question: Est-ce que vous étiez le ministre de la Défense du Gouvernement
8 de Croatie pendant plusieurs mois, en 1990? Pourriez-vous nous préciser
9 pendant quelle période vous l'avez été?
10 Réponse: Oui, je l'ai été à partir du 30 mai jusqu'au 24 août 1990.
11 Question: Etant donné votre formation, vous n'avez pas été militaire de
12 carrière. Pourquoi avez-vous été nommé à ce poste de ministre de la
13 Défense?
14 Réponse: A cette époque, après les premières élections pluripartites, la
15 Croatie est devenue une République démocratique, c'est ainsi qu'elle a été
16 constituée. Et les dirigeants de la Croatie de l'époque pensaient
17 généralement qu'il était normal que ce soit un civil qui occupe ce poste
18 de ministre de la Défense.
19 Réponse: Au moment où vous étiez ministre de la Défense, est-ce que vous
20 vous attendiez à une évolution violente de la situation en ex-Yougoslavie?
21 Réponse: Je craignais personnellement que ceci ne soit le cas ou le risque
22 d'être le cas. Cependant, la Croatie a fait l'impossible pour éviter une
23 telle situation. En outre, après la passation de pouvoir pacifique au
24 niveau des plus hauts dirigeants, la conviction s'est installée qu'il
25 était possible d'éviter la violence.
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1 Question: A quel moment avez-vous été remplacé, et par qui avez-vous été
2 remplacé?
3 Réponse: J'ai été remplacé à ce poste, le 24 août, par le général Spegelj.
4 Question: Y a-t-il eu une raison particulière, à cette époque, à cette
5 mutation, au fait que vous en tant que civil vous avez été remplacé par un
6 général?
7 Réponse: Oui, le 17 août, il y a eu des troubles généralisés, ou plutôt
8 une rébellion dans la région de Knin dans une partie de Lika. Des citoyens
9 d'appartenance ethnique serbo-croate ont érigé des barricades, ont arrêté
10 des véhicules, les ont fouillés, et il y a une rébellion à grande échelle
11 qui a été instituée.
12 Question: Etes-vous resté membre du gouvernement? Et si vous êtes resté
13 membre du gouvernement, quelles fonctions avez-vous occupé?
14 Réponse: J'ai été membre du gouvernement jusqu'au 15 avril 1992, et
15 j'étais ministre du Commerce.
16 Question: Quelle était la situation pour ce qui est de la TO, et surtout
17 des armes de la TO, lorsque vous êtes devenu ministre de la Défense?
18 Aviez-vous un contrôle technique sur ce qui se passait en matière d'armes
19 à l'époque?
20 Réponse: Lorsque j'ai pris mes fonctions, la Défense territoriale avait
21 déjà été désarmée. L'armée yougoslave avait décidé, après le premier tour
22 de scrutin au moment des élections, que la Défense territoriale de
23 Croatie, de Slovénie et de Bosnie-Herzégovine soit désarmée. Ce qui a été
24 fait.
25 La formule était la suivante: on pensait que les entrepôts ou les arsenaux
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1 n'étaient pas en toute sécurité puisque des armes de la TO avaient été
2 dérobées. On pensait qu'il fallait les placer, ces armes, dans des
3 entrepôts plus sûrs sous le contrôle complet de la JNA.
4 Question: Lorsque vous étiez ministre de la Défense, avez-vous suggéré des
5 modifications au niveau de la Défense territoriale? Quelles furent les
6 modifications que vous avez proposées?
7 Réponse: Oui, la Défense territoriale dans le système juridique et
8 constitutionnel de l'époque faisait partie intégrante des forces armées de
9 la Yougoslavie, mais, de fait, cette armée territoriale relevait des
10 ingérences des Républiques. Cette composante territoriale des forces
11 armées faisait partie intégrante des forces armées et, conformément à la
12 Constitution et aux dispositions constitutionnelles tant de la Yougoslavie
13 que de la Croatie, la République en question prenait soin, préparait,
14 organisait et commandait les effectifs de la Défense territoriale.
15 Cependant, lorsque le parti qui a gagné aux élections a pris le pouvoir,
16 le commandant du quartier général de la République de cette TO a refusé de
17 coopérer avec la direction nouvellement élue. Et ma proposition avait été
18 celle de procéder à un remplacement de cette personne et à une solution
19 dans laquelle la TO serait placée dans des cadres juridiques et
20 constitutionnels en vigueur, à savoir placée sous le contrôle de la
21 République de Croatie.
22 Question: Votre suggestion a-t-elle été suivie d'effet?
23 Réponse: Ma proposition n'a pas été acceptée. Le Président Tudjman voulait
24 à tout prix éviter quelque conflit que ce soit, et il s'est efforcé,
25 notamment, d'éviter les conflits avec l'armée populaire yougoslave. C'est
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1 la raison pour laquelle il a rejeté ma proposition, à cette époque-là.
2 Question: Avez-vous tenté de contrôler la question des armes? Avez-vous
3 fait quoi que ce soit, pour ce qui est des armes de la TO?
4 Réponse: Nous avons demandé directement au ministre fédéral de la Défense
5 nationale, M. Veljko Kadijevic, et nous avons demandé aussi la chose par
6 le biais du général Novoselic qui, lui, était commandant de l'état-major
7 de la République de Croatie, pour que les armes soient restituées.
8 Cependant, ces armes-là n'ont jamais été restituées.
9 Question: Pendant la période où vous avez été ministre de la Défense, est-
10 ce que vous, vous avez acheté des armes? Après que M. Spegelj, le général
11 Spegelj vous a remplacé, est-ce que lui a acheté des armes? Et si c'était
12 le cas, quel type d'armes a-t-il acheté?
13 Réponse: Pour autant que je le sache, le ministère de l'Intérieur, pendant
14 que j'étais ministre moi-même, avait demandé aux autorités fédérales des
15 armements complémentaires pour équiper la police, tant pour ce qui est de
16 sa composition régulière que des compositions de réserve. Et ces
17 effectifs-là avaient été quelque peu augmentés. Mais les instances
18 fédérales ont rejeté cette requête-là, tout comme celle pour ce qui est de
19 la restitution des armes. D'après ce que j'en sais -et je n'ai pas pris
20 pas part à la chose directement, ce qui fait que je n'ai pas de
21 renseignements précis à ce sujet-, il a été acheté des quantités d'armes
22 d'infanterie, des armes légères.
23 Question: Savez-vous à quel moment elles ont été achetées?
24 Réponse: Eh bien, cela s'est fait vers l'année 1990.
25 Question: Est-ce que le général Spegelj a fait d'autres suggestions, pour
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1 ce qui est des préparatifs à activer en vue d'avoir une défense efficace?
2 Si c'est le cas, pour ce qui est du Président Tudjman, comment a-t-il
3 réagi face à ces suggestions?
4 Réponse: Ce que je sais, c'est que le général Spegelj avait présenté trois
5 plans de la défense de Croatie. Mais il n'a pas été débattu de ces plans-
6 là aux sessions du Gouvernement, ce qui fait que je n'ai pas
7 d'informations détaillées pour ce qui est du sort connu par ces plans-là
8 ou du sort réservé à ces plans-là. Mais d'après ce que M. Spegelj et
9 d'autres collègues m'ont raconté, le Président Tudjman a rejeté les trois
10 plans de défense proposés par M. Spegelj.
11 Question: Pourquoi les a-t-il rejetés?
12 Réponse: Je pense que les raisons avaient été les mêmes que celles qui
13 l'ont motivé à refuser ma proposition concernant les modifications à
14 apporter au niveau de la Défense territoriale. Il voulait à tout prix
15 éviter la guerre et les conflits, en premier lieu avec l'armée populaire
16 yougoslave.
17 Question: Pendant que vous étiez ministre du Commerce au sein du
18 gouvernement, avez-vous reçu des renseignements selon lesquels il y aurait
19 eu des réunions, des négociations entre M. Tudjman et M. Milosevic en
20 1991?
21 Réponse: Le Gouvernement n'a jamais reçu d'informations officielles de ce
22 genre. Cependant, dans la presse croate, il a été publié un petit
23 communiqué vers la fin du mois de mars 1991, disant que M. Tudjman et M.
24 Milosevic s'étaient rencontrés dans une localité limitrophe entre la
25 Serbie et la Croatie, donc dans une localité sise à la frontière des deux
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1 Républiques.
2 Question: Est-ce que c'est à Karadjordjevo?
3 Réponse: Oui. Par la suite… Je pense que, dans le communiqué, on n'avait
4 pas mentionné Karadjordjevo. Mais par la suite, nous avons appris
5 qu'effectivement, il s'agissait de Karadjordjevo.
6 Question: Avez-vous eu l'occasion de parler brièvement avec M. Susak à
7 propos de cette réunion qui s'est tenue en mars 1991 à Karadjordjevo?
8 Réponse: Non. Je n'ai pas eu d'entretien direct avec M. Susak concernant
9 la conversation en question.
10 Question: Est-ce que vous avez rencontré M. Susak ou est-ce que vous
11 l'avez croisé, à cette époque? Est-ce qu'il vous a dit quelque chose en
12 particulier?
13 Réponse: Juste après cela, peut-être 10 ou 15 jours après, je ne sais pas
14 vous dire au juste, j'ai rencontré M. Susak. Il était d'assez bonne humeur
15 et je lui avais demandé quelles avaient été les raisons de sa bonne
16 humeur; il m'a répondu qu'on avait finalement décidé -je crois que c'est
17 ainsi qu'il s'est exprimé- que l'Herzégovine soit annexée à la Croatie.
18 Sur un plan affectif, je pouvais comprendre la chose parce que M. Susak
19 était originaire de l'Herzégovine et, pour moi, il semblait tout à fait
20 naturel de voir… de le voir se féliciter de voir cette partie de
21 l'Herzégovine faire partie de la République. Mais, d'autre part, cette
22 information m'a troublé.
23 Question: Vous a-t-il donné une indication selon laquelle… pour dire
24 quelle est la personne qui a repris cette décision?
25 Réponse: Non, il ne m'a pas dit qui a pris cette décision; il m'a dit
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1 qu'il venait de "chez le vieux" et que cette décision a été prise. Donc
2 cela ne pouvait être une décision formelle. J'ai cru comprendre qu'il
3 s'agissait plutôt d'un entretien dans un cercle officieux où telle
4 solution a été convenue.
5 Question: Une référence a été faite au chef. Est-ce que l'allusion était
6 faite au Président Tudjman?
7 Réponse: Absolument.
8 Question: A l'époque, est-ce que M. Susak était ministre de l'Emigration?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Etait-il un proche du Président Tudjman?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Avez-vous discuté avec des collègues du sujet qui aurait été à
13 l'ordre du jour des réunions entre Milosevic et M. Tudjman?
14 Réponse: Nous avons tous été surpris par l'information disant que M.
15 Tudjman et M. Milosevic s'étaient rencontrés, et cela a suscité beaucoup
16 d'intérêt. Bien entendu, nous avons discuté de la teneur possible de ces
17 entretiens-là. Et quoi qu'il n'y ait pas eu d'informations ou de
18 confirmation de sources officielles, on disait qu'il pouvait s'agir d'un
19 accord entre la Serbie et la Croatie qui tiendrait compte de certains
20 partages ou de certaines divisions au sein de la Bosnie-Herzégovine.
21 Question: Passons maintenant à Dubrovnik. Avant et pendant la guerre, est-
22 ce que vous vous êtes attaché à savoir ce qui se passait dans la région
23 même de Dubrovnik?
24 Réponse: Oui. Dans le courant de la guerre…, je me suis trouvé à Dubrovnik
25 juste avant le début de la guerre et pendant le début ou les débuts de la
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1 guerre, et deux ou trois fois encore pendant la durée du blocus et de
2 l'occupation des régions autour de la ville même; puis, tout de suite
3 après le retrait de l'armée yougoslave des régions ou des environs de
4 Dubrovnik.
5 Question: Fin septembre, début octobre, est-ce qu'à cette époque-là vous
6 étiez à Dubrovnik? Pourriez-vous, si c'est le cas, nous préciser les
7 dates?
8 Réponse: J'étais à Dubrovnik du 26 septembre au 5 octobre. Oui, oui, c'est
9 à ces dates-là que je me suis trouvé là-bas et c'est à cette époque-là
10 qu'ont commencé des attaques directes et puissantes sur Dubrovnik même.
11 Question: Pourquoi vous êtes-vous rendu à Dubrovnik, le 26 septembre? Est-
12 ce qu'il y avait une raison particulière à cette visite?
13 Réponse: Oui, il y avait une raison particulière. Nous avons obtenu des
14 informations assez fiables disant que des attaques sur Dubrovnik étaient
15 imminentes. Et, compte tenu des effectifs au sujet desquels nous savions
16 exactement quelle était leur importance et leur déploiement -ces forces
17 étant prêtes à s'attaquer à Dubrovnik-, nous avions évalué que nos
18 effectifs à nous étaient tout à fait faibles, insuffisants et qu'il
19 s'agissait de les renforcer, notamment de leur fournir des armes; parce
20 que bon nombre de personnes étaient, à Dubrovnik même, disposées à
21 défendre la ville et la Croatie.
22 Question: Est-ce que le général Marinovic a demandé à obtenir des armes
23 notamment, ou d'autres formes d'appui de la part du Gouvernement de
24 Croatie?
25 Réponse: Le général Marinovic, qui était lieutenant-colonel à l'époque, a
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1 demandé des suppléments d'armes. Il avait envoyé un fax à Zagreb dans ce
2 style; et mes collègues originaires de Dubrovnik m'ont suggéré d'essayer
3 de faire notre possible pour répondre au maximum aux requêtes présentées
4 par le général Marinovic.
5 Question: Le colonel… il était alors colonel, le colonel Marinovic, que
6 vous a-t-il demandé et qu'a-t-il obtenu?
7 Réponse: Je n'ai pas eu d'informations pour ce qui est des listes exactes.
8 Dans le fax, il avait présenté une spécification précise de ce qu'il lui
9 fallait, de ce qui était indispensable à la défense. Mais je sais que mon
10 collègue Jorica et moi-même -qui était député au Parlement et qui est, lui
11 également, originaire de Dubrovnik, il est né à Dubrovnik-, nous n'avons
12 pas fourni le nécessaire. Nous n'avons pratiquement rien fourni comme
13 armes. Nous avons apporté un camion, un semi-remorque d'explosifs et de
14 mines; ce qui était nécessaire aussi. Mais le général Marinovic, lui,
15 était préoccupé par l'absence, la pénurie d'armes d'infanterie et,
16 notamment, d'armes un peu plus lourdes.
17 Question: Et pourquoi n'a-t-il pas obtenu cet armement? Est-ce qu'il n'y
18 avait pas de tels armements, à l'époque? Etait-ce indisponible ou…; le
19 savez-vous?
20 Réponse: La Croatie n'était pas prête à la guerre. J'ai dit, tout à
21 l'heure, que la Croatie voulait éviter à tout prix la guerre. Et à un
22 moment, elle a cru que cela était possible. Et l'on voulait éviter à tout
23 prix les conflits avec l'armée populaire yougoslave; ce qui fait que la
24 Croatie a omis de procéder aux préparatifs indispensables, tout d'abord,
25 pour ce qui est de l'approvisionnement de certaines quantités d'armes ou
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1 pour ce qui est de la fabrication de ces armes dans les usines à sa
2 disposition. Et, lorsque l'attaque sur Dubrovnik a commencé, en Croatie,
3 il n'y avait véritablement pas de quantités d'armes suffisantes pour
4 répondre entièrement aux demandes du général Marinovic. Mon impression
5 -peut-être était-elle suggestive-, c'est que l'on n'avait pas fait non
6 plus ce qui pouvait être fait parce que l'organisation n'a pas été des
7 meilleures en raison de l'absence des préparatifs au préalable, pour ce
8 qui est de cette défense-là.
9 Question: Au moment où vous êtes arrivé à Dubrovnik, qu'avez-vous trouvé
10 comme situation? Combien de personnes y avait-il devant assurer la défense
11 de Dubrovnik? Et de quel genre de personnes s'agissait-il?
12 Réponse: Lorsque je suis arrivé à Dubrovnik, j'ai trouvé là-bas au maximum
13 quelque 300 défenseurs. C'étaient les effectifs de la police normale. Il y
14 avait une petite unité du ZNG. Et le reste, c'étaient des civils ou ceux
15 qui étaient jusque-là des civils qui, suite à ce danger imminent
16 d'attaque, s'étaient présentés pour prendre part à la défense. Alors, ces
17 gens-là étaient assez nombreux, mais nous n'avions pas assez d'armes à
18 leur distribuer.
19 Question: S'agissant de soldats et de policiers de carrière, combien de
20 policiers y avait-il, à peu près? Seriez-vous en mesure de le dire? Et
21 combien de soldats y avait-il, de la Garde nationale? Si vous n'avez pas
22 de chiffres précis en tête, dites-le.
23 Réponse: Je n'ai pas de chiffres précis en tête.
24 Question: Vous avez parlé des citoyens; est-ce que ces citoyens qui ont
25 pris les armes avaient un uniforme?
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1 Réponse: Non. A cette époque-là, non. Dans toute la Croatie, à l'époque,
2 très peu de gens disposaient d'uniforme. Il n'y avait que les policiers
3 qui avaient des uniformes, et une partie des membres de la ZNG, du
4 rassemblement de la Garde nationale. Les jeunes portaient des blue-jeans
5 ou des vêtements civils; et c'est ainsi que se sont battus tous ceux qui
6 avaient réussi à se procurer quelque arme que ce soit, et ils ont pris
7 part à la défense organisée.
8 Question: Vous avez déclaré qu'ils s'étaient portés volontaires. Ils
9 s'étaient effectivement portés volontaires pour défendre la ville ,ou est-
10 ce qu'ils ont été forcés et contraints de le faire? Je parle des jeunes
11 hommes ici.
12 Réponse: J'ai compris. Ils s'étaient présentés de façon tout à fait
13 volontaire, tout à fait bénévole. Et ils s'en étaient présentés beaucoup
14 plus que l'on ne pouvait en recevoir dans nos rangs, parce qu'il n'y avait
15 pas assez d'armes.
16 Question: Je vois. Et de quel type d'armes ces personnes disposaient-
17 elles?
18 Réponse: Essentiellement, c'étaient des armes d'infanterie, des fusils
19 ordinaires, quelques fusils automatiques, des kalachnikovs.
20 Question: Vous avez dit que vous aviez reçu des renseignements à propos de
21 la partie adverse, à propos des effectifs de la partie adverse. En quoi
22 consistaient ces informations? Apparemment, combien y avait-il de soldats
23 de l'autre côté?
24 Réponse: Le général Marinovic, d'après ce qu'il avait été convenu
25 auparavant, est arrivé à Dubrovnik depuis Trebinje, où il était commandant
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1 de la garnison de la JNA à Trebinje. Et il disposait de renseignements
2 exacts pour ce qui est des effectifs orientés ou dirigés contre Dubrovnik.
3 Au tout début, d'après ce qu'il nous a dit, il devait y avoir face à nous
4 quelque 5.000 hommes avec 105 pièces d'artillerie.
5 Ils avaient aussi le soutien d'unités de blindés et de l'aviation venant
6 de Mostar et d'ailleurs, je ne sais trop d'où.
7 Question: Vous êtes-vous rendu dans le village de Brgat avec des
8 observateurs de l'ECMM, le 27 septembre? Et si vous avez effectué cette
9 visite, pourquoi l'avez-vous fait?
10 Réponse: Le 26 septembre, nous sommes arrivés à Dubrovnik, et on nous a
11 dit qu'à la frontière vers le Monténégro et la Bosnie-Herzégovine, il y
12 avait déjà bon nombre d'incidents et qu'en fait l'attaque avait déjà
13 commencé. On a mentionné notamment Konavle et la frontière avec le
14 Monténégro et l'axe en direction de Trebinje. Aussi, avons-nous décidé de
15 nous diriger immédiatement vers Konavle, ce 26, pour voir ce qui s'y
16 passait, notamment vers Molunat parce qu'on nous avait dit qu'une invasion
17 était sur le point d'avoir lieu. C'est pourquoi, ce 26, nous avons pris la
18 route jusqu'à Molunat et nous y avons vu deux bâtiments de guerre de la
19 marine de guerre yougoslave qui n'avaient pas jeté l'encre, mais qui se
20 trouvaient à proximité des rives. Quand nous sommes arrivés près de
21 Molunat, ils ont ouvert des tirs de canon, ils ont ouvert le feu depuis
22 leurs canons en direction de nos véhicules.
23 Puis, sur la route, plus loin, on nous a tiré dessus au mortier, à l'arme
24 d'infanterie. Déjà avant que d'arriver à Dubrovnik, les citoyens du
25 village de Vitaljina ont quitté le village en raison de ce qui se passait,
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1 et ont été installés dans un hôtel à Babetko.
2 Question: Monsieur le Témoin, permettez-moi de vous interrompre. Je ne
3 vous demandais pas autant de détails, en fait.
4 Une question corollaire, est-ce que vous vous déplaciez dans un véhicule
5 civil ou était-ce un véhicule militaire?
6 Réponse: C'était un véhicule civil.
7 Question: Je vous ai demandé ceci: êtes-vous allé dans le village de Brgat
8 avec des observateurs de l'ECMM, et pourquoi cette visite a-t-elle eu
9 lieu?
10 Réponse: Oui, le lendemain, à savoir le 27 septembre, nous avons effectué
11 une visite à Brgat parce qu'on nous avait informés du fait que plusieurs
12 obus avaient déjà été tirés à Brgat. Avec les observateurs de la
13 Communauté européenne, nous sommes allés visiter ce village. Nous avons
14 effectivement trouvé plusieurs maisons légèrement endommagées et une
15 maison complètement détruite. D'après les évaluations des soldats, cela
16 s'était fait à la "Maljutka" tirée depuis Ivanica qui se trouve en Bosnie-
17 Herzégovine, et Brgat se trouve à proximité immédiate de la frontière
18 entre les deux républiques.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de Mme
20 l'Huissière afin que soit présentée la pièce 3367, une carte de l'atlas.
21 Il n'est pas possible de voir ce lieu dit Brgat.
22 Je vais demander au témoin de nous indiquer sur la carte placée sur le
23 rétroprojecteur où se trouve cet endroit.
24 (Intervention de l'huissière.)
25 M. le Président (interprétation): Apparemment, nous éprouvons quelque
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1 difficulté, ou est-ce que cela marche?
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En fait, nous avons déjà annoté
3 Brgat.
4 M. Kriste (interprétation): C'est bien là, Brgat.
5 Question: Est-ce qu'il y a une route qui relie Brgat à Trebinje?
6 Réponse: Oui, Brgat se trouve sur la route allant de Dubrovnik vers
7 Trebinje, et cela se trouve à moins d'un kilomètre de la frontière avec la
8 Bosnie-Herzégovine.
9 Question: Brgat, vous attendiez vous et les défenseurs à subir une attaque
10 venant de cette route?
11 Réponse: Oui, on s'y attendait. L'attaque avait déjà été lancée depuis le
12 côté est, depuis le côté monténégrin, et on s'attendait à ce que cette
13 route-là soit empruntée également parce que c'est pratiquement la seule
14 route entre Trebinje et Dubrovnik. Et, comme je l'ai dit, certaines
15 activités militaires avaient déjà commencé, à savoir plusieurs obus
16 avaient déjà atterri sur ce village quand je suis arrivé là-bas.
17 Question: Est-ce qu'à Brgat même, il y avait déjà une défense croate? Le
18 savez-vous?
19 Réponse: Au moment où nous étions sur place, nous n'avons remarqué aucune
20 formation militaire. Nous n'avons pu que constater ces détériorations. Et
21 les gens de là-bas nous ont dit qu'il y avait eu pilonnage.
22 Question: Je vous remercie.
23 Madame l'Huissière, nous n'aurons plus besoin de cette carte.
24 A cette époque, est-ce que les autorités de Croatie ou la population
25 croate de Dubrovnik et de sa région représentaient un risque quelconque,
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1 un danger quelconque pour les Serbes de la région?
2 Réponse: Il n'y a pas eu de mise en péril des Serbes dans cette région.
3 Qui plus est, dans cette région il n'y avait qu'un pourcentage très faible
4 de Serbes; ils n'étaient que 5%. Ils ont vécu dans des circonstances tout
5 à fait normales. Il n'y a pas eu d'incident, du moins pas d'incident qui
6 se baserait sur ce fait-là.
7 Question: Est-ce que les autorités croates…, est-ce que la population ou
8 la défense croate représentait un danger quelconque pour la JNA à
9 l'époque?
10 Réponse: Aucun danger. Pour deux raisons. Premièrement, parce que la
11 Croatie ne voulait pas de guerre; au contraire, elle voulait éviter cette
12 guerre à tout prix. Deuxièmement, il aurait été ridicule de procéder à
13 quelque activité offensive que ce soit avec le peu d'effectif dont
14 disposait la défense de Dubrovnik.
15 Question: Est-ce que les Croates ont tiré ou ont lancé des pilonnages en
16 direction du Monténégro ou de la Bosnie-Herzégovine? Le savez-vous si
17 c'était le cas?
18 Réponse: Je sais, pour sûr, qu'il n'y a pas eu de pilonnage de ce genre.
19 C'est le contraire qui s'est passé. C'est depuis les régions du Monténégro
20 et de la Bosnie-Herzégovine que l'on a tiré vers Brgat, Zupa, Dubrovacka
21 et d'autres localités.
22 Question: Est-ce qu'il y avait eu des incidents à la frontière opposant
23 des Croates ou les forces croates aux forces monténégrines aux Serbes?
24 Nous parlons ici du 26 et du 27 septembre.
25 Réponse: A cette époque, en régions limitrophes, il y avait très peu
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1 d'effectif à nous. C'étaient essentiellement des effectifs policiers.
2 Ces effectifs n'ont pas ouvert le feu. De fait, ils n'ont pas présenté ou
3 fourni quelque forme de résistance que ce soit. A ce moment-là, l'ennemi
4 était encore invisible, car il tirait depuis l'autre côté de la frontière
5 en direction des régions ou des sites vers Konavle et autres.
6 Question: Lorsque les tirs, les pilonnages ont commencé, est-ce que la
7 population croate a fui les villages dans lesquels elle vivait le long de
8 la frontière?
9 Réponse: Dans ce village de Vitalina, qui se trouve juste à côté de la
10 frontière avec le Monténégro, la population a été évacuée vers Dubrovnik.
11 Et ceci avant même que nous n'arrivions à Dubrovnik nous-mêmes.
12 Mais le 26, lorsque nous sommes arrivés à Konavle, on a pu voir que les
13 gens des autres villages se retiraient. Par grands groupes, ils allaient
14 vers Grude ou Gruda, à proximité de Konavle, pour continuer leur chemin
15 vers Dubrovnik; et il y avait en leur compagnie une dizaine de policiers.
16 Question: Les autorités locales ont-elles essayé de contacter la JNA afin
17 d'éviter une guerre? Inutile de nous donner trop de détails, dites-nous
18 simplement si c'était le cas ou pas.
19 Réponse: Je pense qu'il n'y a pas eu de contact avec les représentants de
20 la JNA. Mais les autorités locales ont contacté les autorités locales de
21 l'autre côté de la frontière, à savoir à Trebinje et à Herzeg-Novi.
22 Question: Ces autorités politiques, ou la JNA que vous venez de
23 mentionner, de la Serbie ou du Monténégro, ont-elles présenté des
24 revendications auprès des autorités de Dubrovnik qui auraient permis
25 d'éviter la guerre? Ont-elles présenté des revendications ou des exigences
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1 précisant ce qu'aurait dû faire la population de Dubrovnik?
2 Réponse: Il n'y a pas eu de déclaration directe de ce genre. Au contraire,
3 on nous affirmait que les choses allaient s'arranger et qu'il n'y aurait
4 pas d'attaque; c'est ce que j'ai cru comprendre partant de ce que nous ont
5 dit les gens qui ont pris part assez contact.
6 Question: Au niveau de l'Etat en Croatie, est-ce que des exigences ont été
7 posées eu égard à Dubrovnik à l'époque? Je m'explique, au niveau
8 d'échanges entre Etats -Yougoslavie, Croatie-, est-ce qu'on a fait des
9 revendications à propos de Dubrovnik auxquelles le Gouvernement de Croatie
10 n'aurait pas obtempéré?
11 Réponse: Il n'y a pas eu d'exigences de cette nature; car, s'il y en avait
12 eues, j'aurais certainement été au courant.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Savez-vous, dès lors, pourquoi
14 Dubrovnik a été attaquée?
15 M. Kriste (interprétation): Dubrovnik a été attaquée dans le cadre d'un
16 plan général d'attaque contre la Croatie, et qui est l'expression d'une
17 politique "Grand Serbe", plan au terme duquel la Yougoslavie était censée
18 être centralisée complètement. Ou autre variante qui devait être acceptée
19 à l'époque: procéder à une modification des frontières de l'époque en
20 Yougoslavie ou plutôt déplacer les frontières de la Serbie vers l'Occident
21 aux fins de faire vivre tous les Serbes dans "un seul et même Etat", comme
22 on avait l'habitude de s'exprimer à l'époque. Il s'agissait de la ligne
23 Virovitica-Karlobag-Karlovac. Dans cette région ou plutôt à l'est de cet
24 axe-là, il y avait Dubrovnik. Donc c'est dans ce contexte que l'on s'était
25 attaqué à Dubrovnik aussi.
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1 Et le fait que cela ait fait partie du plan en question est confirmé par
2 le général Kadijevic dans son livre, qui précise dans quelles unités et
3 sur quels axes on allait attaquer Dubrovnik pour rejoindre les forces
4 sises sur la rivière de Neretva, pour continuer en direction de Split.
5 M. le Président (interprétation): Monsieur Kriste, il y a des éléments
6 repris dans l'ouvrage de M. Kadijevic, mais, outre cela, quelles sont vos
7 autres sources qui vous permettent de dire que cette attaque faisait
8 partie d'un plan plus vaste?
9 M. Kriste (interprétation): En ma qualité d'homme actif en matière
10 politique, avant les événements en Slovénie et Croatie, j'ai suivi tout ce
11 qui se passait sur un plan yougoslave d'une manière générale. Et les
12 requêtes allant en faveur des modifications constitutionnelles, j'entends
13 qu'avant de modifier la Constitution de 1974 en Serbie, on avait limogé
14 les directions de Voïvodine et du Kosovo.
15 On a fait de même au Monténégro. On a supprimé les autonomies en Voïvodine
16 et au Kosovo. On a tout organisé suivant un système de meetings, de
17 rassemblements de masse qui prétextait des dangers qui menaçaient soi-
18 disant les Serbes.
19 M. le Président (interprétation): Excusez-moi de vous interrompre, mais je
20 suppose que ce sont là des questions de notoriété publique qui relèvent de
21 votre expérience, des conclusions que vous, vous avez tirées à partir des
22 événements qui sont produits.
23 Cependant, pourriez-vous être plus précis dans l'assistance que vous nous
24 fournissez? Pourriez-vous nous dire quelles seraient les sources
25 particulières dont vous disposeriez? Est-ce que des gens vous ont dit quoi
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1 que ce soit? Est-ce qu'il y a eu des réunions auxquelles vous avez
2 participé, qui vous ont permis de savoir plus précisément ce qu'il en
3 était de l'existence de tels plans? Est-ce que vous me comprenez? Nous
4 avons besoin d'éléments précis, dans la mesure du possible, sur ce genre
5 de sujet.
6 M. Kriste (interprétation): Je n'ai pas de preuves aussi concrètes. Ce que
7 je puis dire, c'est que nous avons débattu de la chose à des sessions à
8 huis clos au niveau du Gouvernement, et que des avis analogues à celui que
9 j'ai présenté ont été exprimés. Mais je n'ai pas vu de documents de cette
10 nature.
11 M. le Président (interprétation): Vous dites que vous avez discuté de la
12 question. Vous parlez des discussions qui ont eu lieu dans le camp croate,
13 disons, et qui vous ont permis de tirer ces conclusions?
14 M. Kriste (interprétation): Oui, oui, c'est exact.
15 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de Mme
17 l'Huissière pour poser sur le rétroprojecteur la page 137 en version BCS.
18 Page de cet ouvrage écrit par Veljko Kadijevic, et qui s'intitule "Mon
19 avis sur le démantèlement - Une armée sans Etat".
20 Tout d'abord, Monsieur le Témoin, avez-vous lu cet ouvrage auquel vous
21 avez fait référence? Est-ce que vous l'avez lu?
22 (Intervention de l'huissière.)
23 M. Kriste (interprétation): Oui, je l'ai lu. Et j'ai le livre sur moi,
24 ici.
25 Question: Bien. Vous parlez… Ce livre, vous l'avez?
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1 Réponse: Oui, je l'ai.
2 Question: Fort bien. Peut-on placer la version en anglais sur le
3 rétroprojecteur? On trouve un paragraphe dans lequel le général Kadijevic
4 parle de la création, après cette nouvelle Yougoslavie constituée de
5 nations qui désirent être des nations; et il parle aussi de la façon dont
6 la JNA pourrait donner son aide, des idées de principe ou des principes
7 par rapport à la JNA.
8 Je vous fais cette citation: "Ici, il fallait protéger les Serbes de
9 Croatie, de façon à ce que toutes les régions où il y avait une majorité
10 serbe seraient tout à fait libérées de la présence de l'armée croate et
11 des autorités croates pour que la JNA se retire de la Croatie, en veillant
12 tout d'abord à ce que cette tâche mentionnée ci-dessus soit menée à bien,
13 pour veiller à ce qu'il y ait cette transformation, dans tout le pays, de
14 la JNA en une armée de la Yougoslavie à venir qui se concentrerait sur sa
15 structure au niveau national interne".
16 Et aussi, pour ce qui est de sa disposition sur le terrain même, il
17 continue en disant ce qu'il en est des idées de principe. Il dit qu'il
18 faut la défaite totale de l'armée croate si la situation le permet et,
19 dans la mesure où ceci permet de remplir les objectifs poursuivis, il
20 faudrait également un retrait complet de la Slovénie pour ce qui est des
21 forces de la JNA qui demeurent; une conscience absolue du rôle que doit
22 jouer la nation serbe en Bosnie-Herzégovine, et que ceci serait essentiel
23 pour l'avenir de la nation serbe dans sa totalité. On parle aussi de la
24 nécessité d'ajuster la situation en matière d'emplacements des forces de
25 la JNA.
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1 Et vers la fin de la page, on dit ceci: "Les offensives du gros des
2 effectifs de la JNA doivent être reliées à la libération des régions
3 serbes en Croatie et des garnisons de la JNA à l'intérieur même du
4 territoire croate".
5 Vers la fin, on dit qu'il faudrait, pour ce qui est de la Croatie, "la
6 couper suivant l'axe Gradiska-Virovitica, Bihac-Karlovac-Zagreb, Knin, et
7 puis qu'il faudrait bloquer Dubrovnik, séparer Dubrovnik du reste de
8 l'intérieur; et une séparation sur la vallée de la Neretva pour relier les
9 opérations avec les forces qui opèrent le long de l'axe Mostar-Split."
10 (Fin de citation.)
11 Est-ce que vous avez vu la JNA agir conformément à ces idées ou qu'avez-
12 vous se produire exactement?
13 Réponse: La JNA s'est conformée précisément à ce plan-là.
14 Question: Je vous remercie. Ceci suffira.
15 Cependant, revenons à la région de Dubrovnik. Est-ce que cette région a
16 été attaquée, le 1er octobre 1991?
17 Réponse: Oui. Tôt le matin, vers 6 heures, on s'est attaqué au secteur de
18 Dubrovnik, au sens restreint du terme.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les
20 Juges, j'ai omis une chose. Nous aimerions verser ce document en tant que
21 première pièce concernant ce témoin, mais nous n'avons toujours pas de
22 cote. Ceci serait l'intercalaire n°1.
23 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 370.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie.
25 Est-ce que les effectifs de la JNA ont, par la suite, pris le contrôle de
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1 la région entourant la ville de Dubrovnik?
2 M. Kriste (interprétation): Les effectifs de la JNA ont contourné
3 Dubrovnik, l'ont encerclée et bloquée complètement, et sont arrivés
4 presque jusqu'à la Neretva à savoir jusqu'à la frontière où la Bosnie-
5 Herzégovine avait son accès sur la mer, à proximité de la ville de Neum
6 depuis l'axe en provenance du Dubrovnik.
7 Pour ce qui est des autres axes, je ne saurai rien vous dire du tout. Mais
8 la ville même a été brutalement pilonnée, ce premier jour, le 1er octobre
9 déjà. Et dans un premier coup, on a détruit un poste de transformation
10 d'électricité par le biais duquel la région de Dubrovnik s'approvisionnait
11 en énergie électrique. On a détruit les installations d'alimentation en
12 eau et on a détruit les émetteurs-récepteurs; ce qui fait que Dubrovnik,
13 dès les premières heures, s'était trouvée privée d'électricité, d'eau, de
14 téléphone et autres moyens de communication.
15 Question: Monsieur le Témoin, je ne souhaite pas avoir autant de détails
16 en ce qui concerne ces attaques, puisque nous aurons des témoins qui en
17 parleront. Je vous pose des questions précises sur les événements.
18 Au moment où vous vous trouviez sur place, où y a-t-il eu effectivement
19 des combats entre les défenseurs croates et l'armée qui s'opposait à eux?
20 Le savez-vous?
21 Réponse: Dans le courant du tout début de l'attaque, il n'y a pas eu
22 pratiquement de combat du tout; parce que depuis les régions limitrophes,
23 la JNA et les autres effectifs qui l'accompagnaient avaient procédé à des
24 pilonnages puissants depuis leur territoire à eux. Mais du côté de notre
25 territoire, il n'y a pas eu d'ouverture de fait, parce que nous n'avions
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1 pas d'armes appropriées.
2 Par la suite, les attaques se sont surtout concentrées du côté est; et nos
3 effectifs ont résisté autant qu'ils le pouvaient sur l'axe allant vers
4 Herzeg-Novi, à savoir la frontière avec le Monténégro et la région de
5 Dubrovnik.
6 Question: Y a-t-il eu, au début de la guerre, des combats à Brgat? Le
7 savez-vous?
8 Réponse: Pour autant que je sache, ces combats ont eu lieu, mais un peu
9 plus tard.
10 Question: A votre connaissance, est-ce que la JNA a essuyé de lourdes
11 pertes pendant cette période durant laquelle vous vous êtes trouvé là? Je
12 parle ici de la période allant jusqu'au 5 octobre.
13 Réponse: Elle n'a pas eu de grosses pertes.
14 Question: Pendant la prise de contrôle de la région entourant Dubrovnik,
15 est-ce qu'il y a des biens appartenant à des Serbes, des localités serbes
16 qui ont été détruites à desseins croates?
17 Réponse: Oui, des cités ont été délibérément détruites, incendiées; et ce
18 qui n'a pas été détruit a été systématiquement pillé. J'ai eu l'occasion
19 de m'en rendre compte sur la région complète sous l'occupation de l'armée
20 populaire yougoslave, juste après son retrait à Konavle sur le littoral de
21 Dubrovnik, à proximité de Ston et autres localités.
22 Question: Lorsque vous étiez à Dubrovnik, début octobre, est-ce que
23 l'ancienne ville, la vieille ville a été attaquée? Pourriez-vous nous le
24 dire rapidement?
25 Réponse: A cette époque-là, non.
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1 Question: Avez-vous été à Dubrovnik, fin octobre, avec le Président de la
2 RSFY, M. Mesic?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Est-ce qu'il vous a fallu demander une permission pour arriver à
5 Dubrovnik, une autorisation de la part de la JNA de Belgrade?
6 Réponse: Nous ne pouvions pas arriver à Dubrovnik parce que, dans un canal
7 de Miljevo, nous avons été bloqués par la marine de guerre avec cinq ou
8 six bâtiments et nous avons passé la journée entière là-bas en essayant de
9 convenir avec le commandement à Belgrade de laisser passer le convoi en
10 question.
11 Question: Qui a fini par vous autoriser à aller à Dubrovnik?
12 Réponse: S'agissant d'une autorisation explicite, il n'y en a pas eu parce
13 que M. Mesic, qui était -au sens formel- commandant de la marine de guerre
14 aussi, n'a pas réussi à contacter l'amiral Brovet ni qui que ce soit
15 d'autre. Donc après ou au bout d'une journée de séjour dans le canal de
16 Mljet, au bout d'une journée de déplacement ou plutôt d'une nuit de
17 déplacement, tout à fait lentement, nous avons atteint Dubrovnik au matin.
18 Et il n'y a pas eu d'attaque armée contre le convoi; donc une permission
19 tacite avait été donnée.
20 Question: Je ne vous demande pas de détails à propos de cette visite qui
21 n'a bien duré qu'un jour, c'est cela?
22 Réponse: Une journée.
23 Question: Est-ce qu'avec deux autres membres du Gouvernement de Croatie,
24 vous êtes de nouveau allé à Dubrovnik, en novembre 1991, afin de
25 participer à des négociations?
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1 Réponse: Oui, en effet.
2 Question: Je vais demander l'aide de l'huissière pour présenter
3 l'intercalaire 2 de la pièce P370.
4 (Intervention de l'huissière.)
5 Il s'agit d'une décision rendue le 29 novembre 1991 qui consiste à vous
6 dépêcher, vous, le ministre Cifric et le ministre Rudolph, à Dubrovnik. La
7 date était le 30 novembre 1991. On vous donne pour mission d'établir des
8 contacts et de maintenir des contacts avec les organisations
9 internationales, avec le commandement de la JNA. On vous demandait
10 d'organiser le retour de la population qui avait quitté la ville à titre
11 temporaire. Il y avait aussi d'autres missions qui vous étaient données.
12 C'est bien le document qui porte sur votre mission?
13 Réponse: Oui.
14 Question: On fait également référence à la cellule de crise de certains
15 villages, dont la ville de Dubrovnik. Mais de quelle cellule de crise
16 s'agissait-il? Etaient-ce des organes civils ou des organes militaires?
17 Réponse: Les cellules de crise étaient des organes civils et la finalité
18 de leur mise en place était celle d'organiser, dans ces circonstances très
19 difficiles, la vie de la population et de venir en aide, sur le plan
20 logistique, aux effectifs chargés de la défense.
21 Question: Afin de parvenir à Dubrovnik, est-ce que vous deviez, pour ce
22 faire, obtenir l'aval l'autorisation du grand état-major de la JNA et à
23 Belgrade?
24 Réponse: Sans une telle autorisation, il ne nous était pas possible
25 d'accéder légalement; ni par voie terrestre ni maritime.
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1 Question: Et qui vous a donné cette autorisation? Quelle est la personne
2 qui vous l'a donnée, le savez-vous?
3 Réponse: L'amiral Brovet.
4 Question: Est-ce qu'en route vers Dubrovnik, vous avez passé une journée à
5 Split au cours de laquelle vous avez participé à des négociations entre le
6 commandant du district naval militaire de la JNA, le général Nikola
7 Mladenic et les autorités de Split?
8 Réponse: Oui, je crois que c'était bien Mladenic.
9 Question: Et ces négociations portaient-elles sur le retrait de la JNA de
10 la région? En quoi consistaient-elles?
11 Réponse: Oui, cela avait trait au retrait de la marine de la JNA de la
12 région de Split, du port de Lora; c'était un port de la marine de guerre à
13 proximité immédiate de Split. Et il avait été question de la restitution
14 des armes de la Défense territoriale. Ces deux questions-là avaient été
15 liées l'une à l'autre dans les négociations.
16 Question: Est-ce qu'elles ont débouché sur un accord?
17 Réponse: Oui.
18 Question: Après votre arrivée à Dubrovnik, avez-vous assisté à des
19 négociations ou participé des négociations, le 5 décembre à Cavtat?
20 Réponse: Oui.
21 Question: Et, avec vous, il y avait deux autres ministres du Gouvernement
22 croate. Mais qui d'autres étaient présents?
23 Réponse: L'amiral Jokic et un capitaine de frégate, Sofronije Jeremic.
24 Question: A quel titre l'amiral Jokic a-t-il participé à ces négociations?
25 Réponse: Il était représentant du commandement suprême.
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1 Question: A t-il dit?
2 Réponse: C'est ainsi que nous avions préparé les négociations. Et l'accord
3 qui a été signé indique bien, au niveau de la signature, que les
4 négociations avaient lieu entre le Gouvernement croate et le commandement
5 suprême représenté par l'amiral Jokic.
6 Question: Quelle était la raison d'être de la présence du capitaine
7 Jeremic? Est-ce qu'il a vraiment participé de façon active à ces
8 négociations?
9 Réponse: Il n'a pas pris part du tout à ces négociations, il n'a fait
10 qu'être physiquement présent à la réunion.
11 Question: Quelles étaient les exigences posées par votre délégation?
12 Pourriez-vous nous relater comment ont évolué, comment se sont produites
13 ces négociations?
14 Réponse: Nous avions demandé un cessez-le-feu, cessez-le-feu sérieux et
15 long. Puis nous avions demandé de débloquer Dubrovnik et le port de Gruz.
16 Puis, nous avons demandé de remettre en marche les installations
17 électriques et les installations d'approvisionnement en eau potable, afin
18 que la ville -comptant quelque 40.000 habitants- puisse recevoir
19 l'électricité et l'eau. D'une manière générale, nous voulions assurer à la
20 population de la ville des conditions de vie plus appropriées.
21 Question: Et comment l'amiral ou le général Jokic a-t-il réagi? Qu'a t-il
22 dit?
23 Réponse: Le général Jokic a dit que nous pouvions négocier de la chose et
24 du retrait de la JNA vers des lignes un peu plus en arrière mais à
25 condition que tous nos effectifs quittent Dubrovnik; et il avait parlé de
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1 15.000 hommes en disant qu'il s'agissait d'Oustachis et de mercenaires.
2 Question: Quelle fut votre réaction? Relatez-nous l'échange que vous avez
3 eu avec lui.
4 Réponse: Nous ne pouvions pas accepter ce type d'exigence. Tout d'abord,
5 parce qu'il n'y avait pas assez d'effectifs à Dubrovnik; et deuxièmement,
6 le retrait de nos effectifs à nous permettait le libre accès à la JNA vers
7 Dubrovnik. Nous lui avons précisé qu'à Dubrovnik, il n'y avait pas 15.000
8 hommes armés mais qu'il y avait 5.000 hommes bien armés prêts à se battre;
9 ce n'étaient certainement pas des Oustachis ou des mercenaires, mais des
10 citoyens de Dubrovnik qui étaient prêts à défendre leur ville et la
11 Croatie. Nous avons précisé que nous n'allions pas retirer ces effectifs,
12 que nous ne pouvions pas les retirer, parce que l'armée yougoslave allait
13 dans ce cas-là immédiatement entrer dans Dubrovnik.
14 L'amiral Brovet nous avait demandé si nous n'avions pas foi en la parole
15 d'honneur d'un haut officier yougoslave. Nous lui avons dit que non, parce
16 que nous avions eu auparavant un cas analogue. A l'occasion des
17 négociations précédentes où des représentants des autorités municipales
18 avaient pris part à la réunion de Mocici près de Cilipi, l'aéroport de
19 Dubrovnik, la JNA avait promis qu'elle ne s'approcherait pas des lignes de
20 Dubrovnik; et dès que nos négociateurs avaient quitté la réunion, ils
21 n'avaient pas encore quitté Cavtat pour arriver à Dubrovnik, que Cavtat a
22 été prise par la l'armée populaire yougoslave.
23 Jokic s'est arrêté là-dessus, et puis il a posé une autre question:
24 "Pensez-vous que l'armée populaire yougoslave ne dispose pas d'effectifs
25 ou de forces suffisantes pour ce qui est de prendre Dubrovnik en dépit de
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1 la présence de vos forces de défense ou de vos effectifs?". Nous avons
2 répondu en disant: "Oui, vos effectifs sont bien plus importants que les
3 nôtres, mais au final vous n'allez pas le faire parce qu'il faudrait tout
4 d'abord détruire complètement la ville; et vous n'allez pas le faire parce
5 que vous redoutez les réactions de l'opinion publique internationale.
6 Deuxièmement, vous devez forcément compter sur un fait: à savoir toute
7 rue, toute maison détruit se transformerait en bunker, et vous auriez
8 beaucoup de pertes vous-même. Et pour votre opinion publique à vous, vous
9 ne pouvez pas vous le permettre. Aussi sommes-nous sûrs que vous
10 n'accéderez pas à la ville même." (Fin de citation.)
11 Par la suite, il a fait une petite pause et il a proposé des alternatives.
12 Il avait proposé que nos effectifs soient formellement désarmés, qu'il
13 fallait filmer la chose pour l'opinion publique de chez eux, puis que
14 cette même armée rentre à Dubrovnik en passant par les îles de Dubrovnik,
15 la seule voie encore praticable. Puis, il s'agissait de faire un
16 communiqué conjoint disant que nous allions retirer toute l'armée et la
17 désarmer; cela serait publié en Serbie et au Monténégro pour apaiser
18 l'opinion publique serbe et monténégrine. Nous ne pouvions pas accepter la
19 chose non plus parce que nous avions compris qu'il s'agissait là de
20 manœuvres.
21 Question: Témoin, excusez-moi de vous interrompre. Vous venez de relater
22 ses suggestions à lui; mais ce serait donc un simulacre de retrait de la
23 JNA afin que la JNA ne perde pas la face, ou cela revient à dire autre
24 chose?
25 Réponse: C'est à peu près cela. En raison de son opinion publique là-bas,
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1 c'est ce qu'il nous disait; il ne pouvait pas faire de concessions vis-à-
2 vis de notre partie à nous sans atteindre son objectif qui était celui de
3 voir se retirer et se désarmer complètement nos effectifs et leur départ
4 de Dubrovnik. Ils ne pouvaient pas passer outre pour leur opinion publique
5 à eux. Et il a proposé ces alternatives que nous avons cru comprendre
6 comme étant des manœuvres, comme étant une sorte de retrait… faux.
7 Question: Une question supplémentaire. Vous avez mentionné 5.000 personnes
8 qui auraient pu combattre, lutter contre la JNA dans la ville même. Est-ce
9 que vous aviez effectivement 5.000 hommes? Ou pourquoi avez-vous donné ce
10 chiffre?
11 Réponse: Nous n'avions pas ce chiffre-là; nous avions bien moins d'hommes.
12 Nous avions 300, 400, au grand maximum 500 hommes. Mais nous avions parlé
13 de ce chiffre parce que nous ne voulions pas révéler les effectifs exacts,
14 parce que l'armée n'aurait aucune raison de négocier avec nous; sachant la
15 réalité, elle pouvait tout simplement entrer dans la ville. Nous étions
16 donc des négociateurs du Gouvernement croate, nous n'étions pas des agents
17 de renseignement de la JNA et c'est la raison pour laquelle nous n'avons
18 pas fourni de renseignements exacts.
19 Question: Ce jour-là, est-ce qu'on est parvenu à un accord finalement?
20 Réponse: Oui, ce jour-là, nous avons abouti à un accord que nous avons
21 jugé comme étant, somme toute, assez favorable parce qu'il y avait une
22 atténuation du régime d'entrée et de sortie des navires dans le port de
23 Gruz, et il a été convenu de permettre la réparation des installations
24 d'approvisionnement en électricité et en eau. Il s'agissait d'ouvrir des
25 lignes de communication maritime avec les îles à proximité de Dubrovnik
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1 qui n'étaient pas accessibles pendant les quelques journées précédentes,
2 depuis Cavtat à ces îles.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander à Mme l'Huissière de
4 présenter une pièce déjà versée au dossier…
5 M. Kwon (interprétation): Avant que nous n'abandonnions l'intercalaire 2
6 de cette pièce, le témoin pourrait-il nous dire qui est Franjo Greguric? A
7 la fin du document, on fait référence à cette personne. Nous sommes à la
8 deuxième page. Est-ce qu'il était Président du Gouvernement de la
9 République de Croatie?
10 M. Kriste (interprétation): Oui, c'était le Président…, le Premier
11 ministre, le chef du Gouvernement croate.
12 M. Kwon (interprétation): Merci.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez maintenant sous les yeux un
14 autre document, Monsieur le Témoin.
15 (Intervention de l'huissière.)
16 Il s'agit, en fait, de l'accord signé le 7 décembre 1991. Cependant, si
17 vous examinez les articles de cet accord, ceci représente-t-il bien le
18 niveau des négociations auquel vous étiez arrivés le 5?
19 Réponse: Oui, au fond, cela traduit l'accord que nous avons réalisé le 5
20 décembre. Mais ce 5 décembre, à la fin des négociations, M. Jokic ne
21 voulait pas signer le document en question, en affirmant qu'il n'avait pas
22 les attributions nécessaires de la part de son commandement suprême et
23 qu'il lui fallait procéder à des consultations au préalable. Il a donc
24 proposé que nous nous retrouvions le lendemain pour procéder à la
25 signature du document en question.
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1 Question: Vous pouvez laisser ce document sur le bureau pour que le témoin
2 l'examine.
3 Vous êtes rentré à Dubrovnik. En route, est-ce que vous vous êtes dit que
4 vous étiez parvenus à avoir cet accord et que la guerre serait terminée à
5 Dubrovnik?
6 Réponse: Nous étions satisfaits de la teneur de l'accord obtenu. Ce qui
7 nous préoccupait, toutefois, c'est le fait que M. Jokic n'ait pas signé
8 l'accord en question. Nous pensions que l'accord finirait par être signé
9 le lendemain et que cela fournirait des conditions de vie bien meilleures
10 pour la population de Dubrovnik.
11 Question: Vous êtes revenu à Dubrovnik. A votre retour, avez-vous discuté
12 avec le général Marinovic? Que vous a-t-il dit?
13 Réponse: Une fois rentrés à Dubrovnik, nous avons informé la direction
14 locale et le commandant Marinovic de ce que nous avions convenu, et nous
15 les avons informés de ce qui s'était passé lors de cette réunion à Cavtat.
16 Monsieur Marinovic n'a pas partagé notre optimisme parce que, dans la
17 journée, l'on avait remarqué des déplacements de la JNA à Bosanka et
18 Zarkovica et il a dit qu'il redoutait une attaque. Cela a eu un effet sur
19 nous et cela a résulté par une chute d'optimisme de notre part aussi.
20 Question: Y a-t-il eu une attaque dirigée sur Dubrovnik, le 6 décembre,
21 avec un assaut lancé sur les positions croates à partie du mont Srdj, aux
22 toutes premières heures du matin?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Avez-vous suivi ce qui se passait depuis l'hôtel où vous étiez,
25 l'hôtel Argentina?
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1 Réponse: Eh bien, depuis l'hôtel Argentina, dès 6 heures du matin, heure à
2 laquelle l'attaque a commencé, nous pouvions voir que sur la forteresse de
3 Srdj se trouvant sur les auteurs de la ville, il y avait des explosions
4 d'obus et l'on a vu se déplacer des chars. Peu après, le feu a été ouvert
5 en direction de la ville même, y compris l'hôtel où nous nous trouvions et
6 y compris le noyau de la vieille ville.
7 Question: Pendant que se déroulait cette attaque, étiez-vous en contact
8 avec le général Marinovic?
9 Réponse: Oui, nous étions en contact avec le colonel Marinovic.
10 Question: Le colonel Marinovic a-t-il aidé ou essayé d'aider ces hommes,
11 les hommes qui se trouvaient sur le mont Srdj, en tirant depuis des
12 positions qui se seraient trouvées à l'intérieur de la ville?
13 Et si de telles positions existaient, savez-vous où elles étaient?
14 Réponse: Monsieur Marinovic nous a informés de l'attaque à effectif
15 puissant sur la forteresse de Srdj, et il a dit que l'équipage là-bas ne
16 pourrait résister longtemps sans support, sans appui ou aide. Et il a dit
17 qu'il allait essayer de les aider depuis des positions qui n'étaient pas
18 encore occupées dans le secteur de Dubrovnik. Je ne sais pas exactement
19 combien de batteries ou de mortiers ont été déployés par les effectifs de
20 la défense, mais je sais que dans la vieille ville, il n'y avait aucune
21 pièce d'artillerie, ni dans la vieille ville ni dans les environs
22 immédiats de la vieille ville, et pas d'installations militaires du tout.
23 Question: A quel moment a commencé le pilonnage de la vieille ville, et à
24 quel moment s'est-il terminé; le savez-vous?
25 Réponse: Le pilonnage de la vieille ville a commencé vers 7 heures. Cela a
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1 duré de façon intense jusqu'à 1 heure de l'après-midi. Puis cela a repris
2 jusqu'au début de la soirée, mais l'intensité n'était plus la même, elle
3 était moindre.
4 Question: Disposez-vous d'un enregistrement, d'une cassette qui montre ces
5 pilonnages? Et est-ce que c'est images ont été filmées depuis l'hôtel
6 Argentina?
7 Réponse: J'ai cet enregistrement. Je dirais que ce pilonnage de Dubrovnik
8 a été filmé par un amateur, le réceptionniste de l'hôtel Argentina; et
9 j'ai pu le voir tourner ou prendre les vues en question. Il a filmé ce qui
10 se passait à partir de l'endroit où nous observions nous-mêmes ce qui se
11 passait en ville. Ce que l'on voit sur la vidéo, ce n'est pas aussi
12 impressionnant que ce que nous avons pu voir nous-mêmes parce que nous, on
13 a regardé toute la journée, et toutes sortes de projectiles nous
14 survolaient pour atterrir là-bas.
15 Question: Dans quelles circonstances avez-vous obtenu cette cassette? Et y
16 a-t-il d'autres extraits qui s'y trouvent, outre ceux qu'a filmé ce
17 cameraman amateur?
18 Réponse: En sus du pilonnage de la ville sur cet enregistrement,
19 l'enregistrement étant daté du 6 décembre 1991, on voit aussi des vues de
20 la ville après le pilonnage; vues qui ont été prises le lendemain, à
21 savoir le 7 décembre 1991. On voit également quelques vues qui ont été
22 diffusées par la télévision de Belgrade et du Monténégro. Les vues de la
23 ville ont été prises par le même amateur; et les vues enregistrées ou
24 diffusées par la télévision de Belgrade et la télévision du Monténégro
25 étaient rajoutées à ce même enregistrement. Et la télévision de Croatie a
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1 capté les signaux des télévisions de Belgrade et du Monténégro, a
2 enregistré ces vues-là pour les diffuser dans un programme à elle qui
3 s'appelle "TV Izbor", à savoir "choix des télévisions", différent de ce
4 qui a été diffusé par les autres télévisions. Le tout a été diffusé en
5 date du 7 décembre 1991.
6 Question: Dans quelles circonstances avez-vous obtenu cet enregistrement?
7 Qui vous l'a remis?
8 Réponse: C'est un policier, l'un de nos policiers, qui nous escortaient
9 pendant que nous étions à Dubrovnik, qui m'a offert ces enregistrements-
10 là.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, le témoin nous
12 a fourni cet enregistrement, il constitue l'intercalaire 3 de cette pièce.
13 Une transcription des parties que nous souhaitons diffuser est disponible.
14 Un enregistrement, en tant que tel, est assez long: il fait plus de 45
15 minutes; nous voulons nous contenter dans diffuser 5 minutes. Pas la
16 partie où l'on montre les dégâts subis, mais 3 minutes où on voit
17 effectivement le pilonnage, tel qu'il a été filmé depuis l'hôtel
18 Argentina, ainsi qu'un extrait de ce qui a été diffusé à la télévision de
19 Belgrade et à la télévision du Monténégro. Cela fait en tout à peu près 5
20 minutes. Et je me demande si, après cela, nous pourrons avoir la pause.
21 M. le Président (interprétation): Si la diffusion peut se faire
22 maintenant, nous allons voir ces images, et puis nous ferons la pause.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La cassette est prête.
24 Monsieur le Président, il y a des interruptions entre les différentes
25 séquences.
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1 (Diffusion de la vidéo.)
2 C'est la vue que vous aviez depuis l'hôtel, Monsieur le Témoin?
3 M. Kriste (interprétation): Oui, oui.
4 Question: Et savez-vous ce qui est en train de brûler, là?
5 Réponse: Probablement des voitures qui étaient garées au coin. Et là, on
6 voit des bateaux.
7 Question: Est-ce que c'est, en fait, le bateau dont vous vous êtes servi
8 pour les négociations?
9 Réponse: Oui, l'un des deux bateaux a été utilisé pour aller, le jour
10 d'avant, aux négociations de Cavtat. Là, on entend les explosions.
11 Question: Messieurs les Juges, vous voyez ici l'heure qu'il est. L'heure
12 indiquée sur les images, est-ce l'heure exacte à laquelle ces images ont
13 été filmées?
14 Réponse: Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et maintenant, il nous faudrait
16 entendre les voix.
17 (Début de la traduction de la cassette vidéo.)
18 "-Le journaliste: On dit qu'à 20 ou 30 kilomètres de là où vous êtes, est-
19 ce que vous réussissez à le faire?
20 -Réponse: Nous avançons assez vite. Je crois que nous allons aller assez
21 vite. La semaine prochaine, nous prendrons d'autres sites.
22 -La journaliste de télévision de Belgrade: On dit que les formations
23 oustachis et les mercenaires étrangers qui ne tiennent pas du tout à
24 Dubrovnik, détruisent la ville pour accuser la JNA de ces actes de
25 vandalisme, dit-on dans le communiqué du secrétariat à la Défense
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1 nationale.
2 -L'officier (inconnu): La réalisation de ces tâches nécessite une
3 concentration plus grande des effectifs et des effectifs de soutien,
4 notamment d'artillerie, pour exposer le moins possible les combattants au
5 péril, pour briser les effectifs de la ZNG et du MUP sur ces secteurs-là.
6 -Le journaliste: Tout ce que nous voyons n'existe pas, tout cela est monté
7 de toutes pièces. La télévision du Monténégro… toutes les informations
8 disant que la JNA a pilonné Dubrovnik sont pur mensonge et invention, dit-
9 on dans le communiqué des services d'information du secteur la Boka. Dans
10 ses activités, à ce jour, la JNA n'a pas tiré d'obus du tout sur
11 Dubrovnik.
12 -La journaliste (interviewant un officier): On dit que la ville de
13 Dubrovnik a été détruite.
14 -L'officier: On n'a rien pilonné à Dubrovnik, on n'a pas tiré sur
15 Dubrovnik. Ce n'est pas vrai.
16 -Un journaliste (interviewant un autre officier): Est-ce qu'ils essaient
17 de miner la vieille ville?
18 -L'officier: C'est une partie du scénario qui a été mis en place depuis le
19 début, et on est en train de le réaliser. Ils s'efforcent d'accuser la JNA
20 en disant qu'elle n'a aucun respect pour les monuments de la culture ou du
21 patrimoine culturel mondial, comme cela est le cas pour ce qui est de la
22 vieille ville de Dubrovnik. Eh bien, cela a été mis en place et préparé au
23 niveau de la vieille ville. Ils ont placé des…, désigné des sites pour y
24 placer des explosifs et ils ont prétendu que c'est la JNA qui a tiré des
25 obus en direction de la vieille ville.
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1 (Un autre journaliste interviewant un soldat.)
2 -Le soldat: Nous sommes presque arrivés à Dubrovnik. Voilà, derrière cette
3 colline, on peut voir Dubrovnik. Nous nous sommes arrêtés ici et nous
4 n'allons pas de l'avant. Mais s'ils continuent à ouvrir le feu depuis
5 leurs positions, nous allons aller de l'avant. Mais ils sont encerclés, de
6 l'autre côté aussi. Et la ville de Dubrovnik se trouve encerclée. Nous
7 attendons donc des ordres pour aller de l'avant vers eux, pour les
8 désarmer."
9 Voilà pour ce qui est des extraits."
10 (Fin de la traduction de la vidéo.)
11 Je vous remercie, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
12 M. le Président (interprétation): Le moment se prête bien à la pause.
13 Monsieur Kriste, au cours de cette pause et de toute autre pause
14 éventuelle ultérieure, veuillez ne parler à personne de votre déposition;
15 attendez pour ce faire que la déposition soit terminée. Et ceci concerne
16 également les représentants du Bureau du Procureur.
17 Veuillez être de retour à l'audience dans 20 minutes.
18 M. Kriste (interprétation): J'ai parfaitement bien compris.
19 (L'audience, suspendue à 10 heures 35, est reprise à 11 heures.)
20 M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la
21 parole.
22 M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, j'aimerais revenir à la
23 question que j'ai posée au début de l'audience. Je n'ai pas bien compris
24 la réponse du témoin. Est-ce que M. Gregoric était un autre nom pour M.
25 Tudjman parce que le témoin a dit qu'il était président de la Croatie,
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1 n'est-ce pas?
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, chef du gouvernement, Premier
3 ministre.
4 M. Kwon (interprétation): A la fin de l'intercalaire, on lit que M.
5 Gregoric est président du gouvernement. Donc président du gouvernement,
6 c'est différent de président de la république, Président de la Croatie.
7 Pourriez-vous vous expliquer, Monsieur le Témoin?
8 M. Kriste (interprétation): Oui. Gregoric, était chef du gouvernement, il
9 n'était pas président de l'Etat. Ce n'est pas un autre nom pour M.
10 Tudjman.
11 M. Kwon (interprétation): Bien. Cela semble tout expliquer, merci
12 beaucoup.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, compte tenu des
14 contraintes techniques qui pèsent dans ce prétoire, je vous signale que
15 dans la cassette originale qui existe aujourd'hui en copie -les Juges ont
16 une copie à leur disposition-, donc je vous demande si vous pouviez voir
17 sur les images les obus en train de tomber et de frapper les bâtiments? Je
18 vous parle de l'original.
19 M. Kriste (interprétation): Oui, on pouvait les voir.
20 Question: Messieurs les Juges, vous ne pouviez pas le voir dans le
21 prétoire, mais si vous diffusez la cassette, vous verrez que ceci est tout
22 à fait visible.
23 Monsieur le Témoin, d'où venaient ces obus? Quelles étaient les forces
24 terrestres ou autres, qui lançaient ces obus?
25 Réponse: Ce jour-là, il s'agissait des forces terrestres qui agissaient
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1 avec la marine, mais c'étaient avant tout les forces terrestres.
2 Question: Nous avons entendu des officiers faire des commentaires, et l'un
3 d'entre eux dit à la télévision que les représentants de Dubrovnik
4 préparent des mines, qu'ils ont l'intention d'activer pour ensuite les
5 faire passer pour des obus lancés par la JNA. Est-ce que ceci s'est
6 vraiment produit?
7 Réponse: C'est une invention, de la propagande idiote, censé justifier les
8 actes de la JNA à Dubrovnik.
9 Question: A votre connaissance, des pneus ont-ils été incendiés pour
10 donner l'impression que la ville était en feu? Ou bien était-ce la ville
11 qui était incendiée?
12 Réponse: Ce jour-là, la ville était en feu: neuf maisons ont été
13 incendiées et 600 projectiles de nature différente sont tombés sur la
14 ville. Il n'y a pas eu d'incendie de pneus, mais une dizaine d'automobiles
15 garées derrière les remparts de la ville ont été incendiées; et lorsque
16 ces voitures ont flambé, bien entendu, leurs pneus ont flambé également,
17 et des automobiles ont également été incendiées à l'aide d'obus.
18 Question: J'aimerais que l'on soumette au témoin l'intercalaire 4 de la
19 pièce à conviction 370.
20 (Intervention de l'huissière.)
21 Il s'agit d'une carte géographique, d'un plan où l'on voit la vieille
22 ville de Dubrovnik.
23 Monsieur le Témoin, connaissez-vous ce plan? Pouvez-vous nous dire qui est
24 à l'origine de ce plan?
25 Réponse: Je connais ce plan, j'en possède un exemplaire. Ce sont les
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1 services officiels de la municipalité de Dubrovnik qui ont établi ce plan
2 avec l'aide des services correspondants de l'Unesco.
3 Question: Vous venez de dire que neuf bâtiments ont été entièrement
4 détruits. Figurent-ils sur ce plan? Pourriez-vous peut-être utiliser le
5 pointeur pour nous montrer de quelle façon ils sont indiqués sur ce plan?
6 Réponse: Ces bâtiments sont indiqués en noir sur ce plan.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Et les petits triangles que l'on voit
8 sur le plan, qu'indiquent-ils?
9 M. Kriste (interprétation): Ces triangles indiquent les endroits où sont
10 tombés divers projectiles. On voit des triangles et des points ronds, je
11 ne sais pas quelle est la différence entre les deux. Sur mon plan, ces
12 points d'impact sont tous indiqués par des cercles. Il s'agit peut-être
13 ici d'une distinction entre les impacts directs et les dommages causés par
14 des impacts qui ne sont pas des impacts directs.
15 M. Kwon (interprétation): Pourriez-vous demander aux interprètes de nous
16 interpréter la légende, Madame Uertz-Retzlaff?
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Les interprètes pourraient-ils nous
18 dire ce qui est indiqué dans la légende, et quelle est la signification
19 des points ronds et des triangles? Ah! D'ailleurs, on me dit que nous
20 avons une traduction.
21 M. Kwon (interprétation): Je viens de la voir.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, je n'avais pas fait attention.
23 Donc la légende est bien expliquée, y compris en traduction.
24 Monsieur le Témoin, j'ai encore une question à vous poser au sujet de ce
25 plan. Pourriez-vous nous indiquer où se trouve l'endroit dont vous venez
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1 de parler, à savoir l'endroit où étaient garées les voitures, où elles ont
2 été incendiées, à l'extérieur de la ville? Pourriez-vous nous l'indiquer
3 du pointeur?
4 M. Kriste (interprétation): Les parkings se trouvent au nord des remparts.
5 A cet endroit que j'indique ici, il y en a un certain nombre dans cette
6 zone que je vous montre actuellement à l'aide du pointeur.
7 Question: Le témoin a placé le pointeur sur le haut du plan où l'on voit
8 un certain nombre de rectangles à l'extérieur des remparts.
9 Merci beaucoup, Madame l'Huissière. Vous pouvez reprendre le plan.
10 Monsieur le Témoin, combien de personnes ont été tuées ce jour-là, si vous
11 le savez?
12 Réponse: 19 civils ont été tués et 60 à peu près ont été blessés.
13 Question: En dehors de la vieille ville, d'autres zones résidentielles
14 ont-elles été prises pour cible, et notamment des hôtels qui hébergeaient
15 des réfugiés?
16 Réponse: Oui. En fait, toute la superficie de la ville a été prise pour
17 cible par les obus et, entre autres, des bâtiments d'habitation et des
18 hôtels qui hébergeaient des réfugiés. Il y en a eu à peu près… Il y en
19 avait à peu près 15.000, à Dubrovnik.
20 Question: Avez-vous vu des tirs partant de la vieille ville et y avait-il
21 des cibles militaires ou des positions militaires à l'intérieur de la
22 vieille ville?
23 Réponse: Non, il n'y a pas eu de tirs à partir de la vieille ville. Et
24 d'ailleurs, pas seulement à partir de la vieille ville, mais il n'y en a
25 pas eu non plus à partir des abords immédiats des remparts. Depuis l'hôtel
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1 où nous étions, nous n'avons vu aucun point de départ de tir. Or, depuis
2 l'hôtel où nous étions installés, on voyait très bien la vieille ville.
3 Question: La partie croate a-t-elle provoqué les pilonnages? Est-ce la
4 partie croate qui, par ses provocations, a été à l'origine des tirs?
5 Réponse: Non, elle n'a rien provoqué, elle attendait la conclusion d'un
6 cessez-le-feu secret et la signature d'un accord qui avait été mis au
7 point à Cavtat la veille.
8 Question: Au moment des pilonnages, avez-vous joint l'amiral Jokic à
9 plusieurs reprises?
10 Réponse: Oui, dès le début des pilonnages, nous avons essayé d'établir le
11 contact avec l'amiral Jokic. Mais au début, nous n'avons pas réussi à le
12 joindre. Plus tard, nous avons utilisé un téléphone satellitaire, et nous
13 sommes parvenus à le joindre et à discuter avec lui à plusieurs reprises.
14 Question: Quand lui avez-vous parlé pour la première fois, et que lui
15 avez-vous dit, à ce moment-là?
16 Réponse: La première fois que nous avons parlé ensemble, c'était après 8
17 heures du matin et il nous a dit qu'il n'y avait aucun pilonnage, qu'il
18 n'était au courant d'aucun pilonnage.
19 La deuxième fois, une demi-heure ou une heure plus tard, il a dit savoir
20 que des opérations étaient en cours mais que c'était notre partie qui
21 était responsable de ces opérations car, sur le territoire de Zarkovica et
22 de Bosanka, une unité de la JNA aurait été attaquée; nous avons dit que
23 c'était inexact.
24 Lors de notre troisième conversation, il a admis qu'un incident hostile
25 était survenu –ce sont les mots qu'il a utilisés- et il a expliqué les
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1 choses en disant que ce n'était pas le résultat d'un ordre émis par lui.
2 Question: A quel moment a eu lieu ce troisième coup de téléphone,
3 approximativement?
4 Réponse: Peut-être aux environs de midi ou un peu après midi, peut-être à
5 13 heures; je ne saurai pas vous dire avec une très grande précision à
6 quel moment a eu lieu ce coup de fil, mais en tout cas après midi.
7 Question: Avez-vous cru ce qu'il a dit, à savoir qu'il n'avait pas émis
8 cet ordre?
9 Réponse: Nous n'avons pas cru cela, bien sûr, car une opération de cette
10 nature ne peut pas être menée sur la base de l'initiative personnelle d'un
11 commandant; elle ne peut se dérouler qu'en raison d'un ordre venant du
12 commandant suprême, à savoir l'amiral Jokic.
13 Question: Mais lorsqu'il a dit ne pas avoir émis cet ordre, a-t-il parlé
14 de la possibilité d'arrêter cette opération? Avez-vous parlé de cela?
15 Réponse: Oui, nous avons discuté de cela et il a été dit que le cessez-le-
16 feu interviendrait à 11 heures; or l'opération s'est poursuivie après 11
17 heures et ce, jusqu'à la tombée de la nuit. Mais il est vrai qu'à partir
18 de 13 heures, elle était d'une intensité un peu inférieure.
19 Question: Savez-vous où se trouvait l'amiral Jokic lorsque vous l'avez
20 joint le matin à trois reprises, comme vous venez de le dire?
21 Réponse: Nous avons supposé qu'il était quelque part aux alentours de la
22 baie de Kotor, mais nous ne savions pas exactement où il était.
23 Question: Avez-vous essayé de le joindre à Kotor? Est-ce l'endroit où vous
24 avez essayé d'établir la liaison avec lui?
25 Réponse: Nous l'avons cherché un peu partout à Kumbor, à Herceg-Novi et à
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1 Kotor aussi, si je me souviens bien, mais je ne saurais pas vous dire où
2 nous l'avons joint et à partir de quel endroit il nous a appelés, par la
3 suite.
4 Question: Avez-vous tenté de le joindre une autre fois, compte tenu du
5 fait que les pilonnages se sont poursuivis? Vous avez dit qu'après votre
6 troisième conversation, vous vous attendiez à un arrêt des pilonnages.
7 Avez-vous tenté de le joindre une fois de plus, ensuite?
8 Réponse: Plus tard, aux environs de 14 heures, nous avons reçu un message
9 radio dans lequel Jokic nous informait que cette attaque s'était produite
10 malgré eux. Il s'excusait et expliquait que le général Kadijevic avait
11 ordonné une enquête à ce sujet, ainsi que du fait que lui-même devait se
12 rendre à Belgrade; il devrait partir cette après-midi-là et, donc, nous ne
13 pourrions pas nous rencontrer. Or, dans la matinée, nous nous étions donné
14 rendez-vous dans l'après-midi, mais nous n'avions pas pu nous rencontrer
15 en raison du bombardement qui se poursuivait.
16 Question: Je demande l'intercalaire 45 de la pièce 361. J'aimerais qu'on
17 soumette ce document au témoin. Il s'agit d'une pièce qui est déjà versée
18 au dossier.
19 (Intervention de l'huissière.)
20 Monsieur le Témoin, est-ce bien le message, le fax dont vous venez de
21 parler?
22 Il est en anglais. Avons-nous une version en BCS? Non?
23 Très bien. Peut-être pourrait-on placer ce document sur le
24 rétroprojecteur?
25 Vous rappelez-vous, Monsieur, que ce message était en anglais?
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1 Réponse: Je crois que nous avons reçu ce fax en croate. Moi, j'en ai eu un
2 exemplaire en croate. Je ne sais pas si l'original était en anglais et
3 qu'il y a eu traduction par la suite, mais moi je l'ai reçu en croate. Et
4 je reconnais ce document.
5 Question: Le document peut-il être placé sur le rétroprojecteur?
6 (Intervention de l'huissier.)
7 Je prierai les interprètes de bien vouloir lire le premier paragraphe qui
8 commence par les mots: "Votre Excellence ".
9 Je cite: "Votre Excellence, j'exprime mes regrets sincères pour la
10 situation difficile et regrettable qui a été créée, ceci n'est pas le
11 résultat de notre ordre et je n'aurais jamais eu, en tout bon sens, l'idée
12 d'agir de cette façon. Le général Kadijevic vous a envoyé un message, à
13 vous et à l'ECMM à Dubrovnik, dans lequel il est indiqué qu'une enquête
14 énergique sera lancée pour déterminer nos responsabilités et les coupables
15 de cet événement. Dans le même temps, nous nous attendons à déterminer les
16 responsabilités de votre côté et nous vous demandons tout éclaircissement
17 au sujet des circonstances en question". (Fin de citation.)
18 Est-ce bien le message que vous avez reçu?
19 Réponse: Oui, c'est exact.
20 Question: Savez-vous si une enquête a effectivement eu lieu, et si des
21 officiers ont été mis en accusation ou soumis à des sanctions
22 disciplinaires pour des actes commis sans autorisation à Dubrovnik?
23 Réponse: Je ne sais pas si qui que ce soit a été soumis à des sanctions
24 disciplinaires à cause de cela.
25 Question: Après avoir reçu ce fax, si je vous ai bien compris, vous avez
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1 dit que le pilonnage s'était poursuivi mais avec une intensité moindre?
2 Réponse: C'est exact, on le voit d'ailleurs sur les images de la vidéo. Le
3 pilonnage s'est poursuivi jusqu'aux environs de 16 heures car la nuit
4 commençait à tomber mais les bâtiments étaient toujours en feu.
5 Question: Nous avons vu le document qui contient l'accord du 7 décembre
6 1991. Est-ce que les mêmes personnes étaient présentes, à savoir vous, les
7 trois ministres, l'amiral Jokic, ainsi que Jeremic?
8 Réponse: Oui, c'est exact, les mêmes personnes étaient présentes des deux
9 côtés.
10 Question: Avez-vous protesté contre le pilonnage auprès de qui que ce
11 soit?
12 Réponse: Au début de la réunion, l'observateur de la Mission de l'Union
13 européenne a été le premier à protester; et, après lui, nous l'avons fait
14 également.
15 Question: Qu'a répondu l'amiral Jokic?
16 Réponse: L'amiral Jokic a réitéré les affirmations faites la veille, en
17 disant qu'il regrettait ce qui s'était produit mais que ceci n'était pas
18 le résultat d'un ordre émis par lui. Et il nous a également informés du
19 fait qu'il s'était rendu à Belgrade la veille où il avait discuté avec M.
20 Kadijevic, et que, dans la nuit, les représentants de toutes les
21 ambassades occidentales avaient protesté auprès du commandement suprême au
22 sujet du bombardement de Dubrovnik et que M. Kadijevic était très fâché à
23 cause de cela.
24 Question: Après quoi, l'accord a été signé selon les dispositions conclues
25 le 5, c'est bien cela?
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1 Réponse: C'est exact.
2 Question: La JNA a-t-elle filmé les dommages subis par la vieille ville le
3 lendemain, le savez-vous?
4 Réponse: Je sais! A la fin de la réunion que nous avons eue le 7 décembre,
5 M. Jokic nous a demandé de fournir une équipe de tournage de trois ou
6 quatre personnes qui viendraient à Dubrovnik pour constater les dégâts,
7 disant que ceci pourrait aider à l'enquête lancée par le général
8 Kadijevic.
9 Le lendemain, je n'ai pas rencontré ces personnes mais je sais que des
10 personnes sont venues filmer les dommages que l'on pouvait voir dans la
11 vieille ville.
12 Question: L'accord du 7, a-t-il été respecté? Y a-t-il eu arrêt des
13 pilonnages?
14 Réponse: Le 7, dans la soirée, il n'y a pas eu de pilonnage. Pendant une
15 longue période, une tranquillité relative a régné dans la ville. C'est
16 seulement plus tard en 1992 qu'il y a eu, à plusieurs reprises, de
17 nouveaux pilonnages.
18 Question: Quand la JNA, ou plutôt ce qui était devenu à l'époque "la VJ",
19 s'est-elle retirée de la région?
20 Réponse: Au mois de juin ou de juillet -mais il faudrait que je vérifie
21 pour être tout à fait précis-, elle s'est retirée de la partie occidentale
22 de la municipalité et arrivée jusqu'aux abords de Cavtat où elle est
23 restée jusqu'à la mi-octobre 1992. Et finalement, elle a quitté toute la
24 région de Dubrovnik au mois d'octobre 1992.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les
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1 Juges, l'accusation n'a plus de question pour ce témoin.
2 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
3 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Petar Kriste, par l'accusé M.
4 Milosevic.)
5 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Kriste, au début de votre
6 déposition, vous avez expliqué dans quelles conditions vous êtes devenu
7 ministre de la Défense de la République de Croatie après les élections de
8 1990. Vous avez dit qu'en raison du développement de la démocratie, il
9 avait été décidé que le ministre de la Défense soit un civil.
10 Comment est-il possible que ce motif, à savoir le développement de la
11 démocratie, n'ait duré que quelques mois, puisque malgré tout, par la
12 suite, le général Spegelj a bel et bien été nommé à ce poste?
13 M. Kriste (interprétation): J'ai déjà dit qu'au mois d'août 1990 les
14 Serbes de Croatie s'étaient soulevés. A ce moment-là, il a été constaté
15 que les choses n'iraient sans doute pas aussi facilement, comme nous
16 l'espérions et nous le pensions au début, immédiatement après les
17 élections démocratiques.
18 Ce soulèvement a été si important que, dès le début, plus de 20 à 25% du
19 territoire croate a été exclu du contrôle exercé par le Gouvernement de
20 Croatie. Et on s'attendait à ce que ce soulèvement se développe avec le
21 soutien de l'armée yougoslave et de la Serbie.
22 Question: Quelle était la cause de ce soulèvement? Vous avez parlé des
23 événements de Knin, de l'érection de barrages, mais quel a été le
24 précédent de ces événements?
25 Réponse: Avant cela, il y avait eu des meetings à Knin, déjà en 1989 ainsi
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1 qu'au début de 1990. Des meetings qui ressemblait beaucoup à ceux qui
2 s'étaient déjà tenus en Voïvodine et au Monténégro, des meetings où les
3 slogans consistaient à dire: "Ici, c'est la Serbie. Donnez-nous des
4 armes".
5 Question: Mais si… c'est bien ce qui s'est passé, si des meetings de cette
6 nature ont eu lieu? Je parle de la région de Lika, Banija, Kordun, dont je
7 suppose que vous les considérez comme nationalistes, n'est-ce pas?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Dans ces conditions, comment est-il possible que, dans ces
10 territoires -à quelques petites exceptions près, quatre municipalités-, la
11 population serbe a majoritairement voté pour le parti de Racan, le SK de
12 Croatie, la Ligue des communistes de Croatie qui, par la suite, a changé
13 de nom? Vous connaissez le résultat des élections à l'époque, n'est-ce
14 pas; et 21 membres de ce parti pour lequel la grande majorité de la
15 population serbe avait voté en Slavonie orientale, sont devenus membres du
16 Parlement croate par la suite?
17 Réponse: Ceci était une action bien organisée, bien réfléchie, de la part
18 de la Serbie, qui avait pour but de créer tous les obstacles possibles de
19 la part des Serbes de Croatie contre les nouvelles autorités proclamées
20 dans le pays. Les Serbes qualifiaient ces autorités d'autorités oustachis,
21 sans la moindre raison pour ce faire.
22 Question: Très bien. Mais y avait-il une raison pour que les Serbes
23 s'inquiètent, s'agissant des événements qui se déroulaient à l'époque, à
24 savoir cette "révolution des troncs d'arbres" bien connue? Avez-vous des
25 renseignements au sujet de la façon dont les Serbes ont été exclus par la
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1 nouvelle Constitution de la Croatie en tant que peuple constitutif? Je
2 suis sûr que vous connaissez bien tous ces événements; vous étiez ministre
3 du Gouvernement.
4 Et savez-vous si un ordre a finalement été donné de désarmer les policiers
5 qui étaient, pour la majorité, des Serbes, dans ces postes de police?
6 Puisque dans la région, la majorité des Serbes… il était donc logique que
7 la majorité des policiers soient serbes également? Donc les Serbes
8 avaient-ils des raisons d'être émus?
9 Réponse: Il n'y avait aucune cause sérieuse pour une telle émotion. Il est
10 vrai que le libellé de la Constitution a été modifié, mais ce changement
11 n'a rien enlevé, sur le fond, aux Serbes; car dans la nouvelle
12 Constitution, les Serbes sont les premiers qui sont mentionnés comme
13 minorité nationale, et ce, comme d'autres populations de Croatie, dans le
14 respect de la définition des minorités nationales que l'on trouve dans
15 d'autres Constitutions d'autres pays également. Par ailleurs, un niveau
16 d'autonomie élevé leur était assuré au sein des communautés locales.
17 S'agissant maintenant du désarmement des postes de police, je dirai ce qui
18 suit: les postes de police n'ont pas été désarmés dans ces municipalités,
19 mais une grande partie des armes qui étaient disponibles dans ces postes
20 de police a été reprise par le ministère de l'Intérieur. Les Serbes,
21 d'ailleurs, n'étaient pas simplement majoritaires en tant que policiers
22 dans ces régions; au sein du ministère de l'Intérieur, il y avait
23 également une proportion de Serbes bien supérieure à la proportion des
24 Serbes au sein de la population croate.
25 Et je dois dire qu'on constatait la même chose au sein du ministère de la
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1 Défense. Par exemple, lorsque je suis arrivé au ministère de la Défense,
2 j'y ai trouvé 48% de Croates, alors que les Croates constituaient 79% de
3 la population totale à l'époque et qu'il y avait 32% de Croates et 12% de
4 personnes qui se déclaraient yougoslaves. Donc rien n'est arrivé à ces
5 personnes.
6 Question: Mais savez-vous qu'à l'époque, il y a eu licenciement massif de
7 Serbes dans la police, dans les entreprises publiques, y compris dans
8 l'enseignement et les institutions médicales?
9 Réponse: En Croatie -et je crois que l'exemple que je viens de citer
10 lorsque j'ai parlé du ministère de la Défense le montre bien- la situation
11 était assez semblable au ministère de l'Intérieur, les Serbes étaient sur-
12 représentés aussi longtemps que la Yougoslavie a existé.
13 Par conséquent, des changements étaient indispensables. Je considérais
14 personnellement que l'harmonisation, l'équilibrage de la représentation
15 nationale au sein des structures existantes, par rapport à la
16 représentation au sein de la population, était une nécessité. Il fallait
17 que l'emploi illustre la situation réelle, de façon à ce que personne ne
18 soit lésé. Mais, dans certains cas, des mesures ont été prises dont on
19 peut dire ici qu'elles n'étaient pas acceptables. Mais ce n'était pas une
20 raison suffisante pour provoquer la rébellion, le soulèvement des Serbes.
21 C'était simplement une circonstance qui a aidé la police serbe à obtenir
22 le soutien d'un nombre de Serbes très important, dans le cadre de ce
23 soulèvement.
24 Question: Mais la République de Serbie a-t-elle eu une influence
25 quelconque sur la structure de la police, sur les entreprises publiques,
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1 sur le ministère de la Défense dont vous avez hérité après le changement
2 de gouvernement? La Serbie avait-elle une influence sur la situation, de
3 façon générale, ou sur l'état des choses dans la République de Croatie
4 jusqu'à ce moment-là?
5 Réponse: La Serbie n'avait aucune influence directe, mais la situation en
6 Yougoslavie était telle que les Serbes étaient favorisés, et que dans les
7 faits ils étaient sur-représentés partout, donc dans les structures
8 judiciaires, dans les structures sanitaires, dans les grandes entreprises
9 et notamment dans les institutions de la Défense et de la Police.
10 Question: Qui exerçait cette "préférence", puisque c'est le mot que vous
11 avez utilisé?
12 Réponse: C'était le climat général qui prévalait en Yougoslavie à l'époque
13 où la Serbie dominait.
14 Question: Et vous affirmez que la Serbie dominait la Yougoslavie jusqu'au
15 début de 1990?
16 Réponse: C'est exact.
17 Question: Savez-vous qu'au cours de toutes les décennies qui se sont
18 écoulées depuis la guerre, un seul président du gouvernement fédéral, un
19 seul chef du gouvernement fédéral ou plutôt du conseil exécutif fédéral a
20 été serbe, alors que, pendant tout le reste du temps, c'étaient surtout
21 des Croates et parfois des Bosniaques qui occupaient ce poste?
22 Réponse: Les postes clés de l'armée et de la police, des institutions
23 financières représentées à Belgrade étaient tenus tout de même par des
24 Serbes. Maintenant, savoir s'il y a eu davantage de chefs du gouvernement
25 provenant d'une République plutôt que d'une autre, je ne saurais pas vous
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1 le dire.
2 Question: Oui, mais s'agissant de ces institutions primordiales dont vous
3 parlez qui se trouvaient à Belgrade -j'imagine que cela se trouvait à
4 Belgrade; parce que Belgrade était la capitale de la Yougoslavie, et c'est
5 là que se trouvait le siège du gouvernement fédéral, de la banque
6 centrale, le siège de tous les autres ministères aussi-, savez-vous que la
7 structure du gouvernement fédéral ainsi que la structure de la banque
8 centrale et des autres établissements primordiaux se conformaient ou
9 suivaient la structure de la composition ethnique de la Yougoslavie de
10 l'époque?
11 Réponse: Les sommets même, oui, en général. Mais les positions, les postes
12 clés au niveau opérationnel étaient détenus par des hommes originaires de
13 Serbie, et s'agissant de la présidence même de la Yougoslavie qui se
14 constituait de huit membres, de huit représentants des républiques et des
15 provinces, n'intervenaient de la sorte que pendant un certain temps après
16 que vous ayez pris le pouvoir en Serbie. Par la suite, il y a eu une
17 situation très étrange, vous avez procédé à une modification de la
18 Constitution en supprimant de fait l'autonomie de la Voïvodine et du
19 Kosovo, mais vous avez maintenu les représentants de ces provinces au sein
20 de la présidence et au sein des autres instances fédérales. En limogeant
21 le président du Monténégro de l'époque, vous avez obtenu quatre voix au
22 sein de cette présidence de huit hommes.
23 Question: Mais est-ce qu'en Serbie quelqu'un a influé sur les changements
24 intervenus au Monténégro, à l'époque?
25 Réponse: Certainement, oui.
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1 Question: Qui, par exemple?
2 Réponse: L'on sait fort bien comment il y a eu changement d'autorité ou de
3 pouvoir en place au Monténégro. Les Serbes, soi-disant menacés du Kosovo,
4 voyageaient comme un cirque en Yougoslavie, organisaient des meetings,
5 désordres des troubles publics et provoquaient du mécontentement. C'est
6 ainsi qu'ils ont procédé au limogeage des élus, et il est certain que cela
7 ne pouvait pas se faire sans la participation des services secrets parce
8 que des dizaines de milliers de personnes ne pouvaient pas se déplacer par
9 la volonté d'un seul l'homme. Cela ne s'est pas fait spontanément. Il y
10 avait une politique serbe.
11 Question: Comment le savez-vous? Avez-vous des renseignements officiels?
12 Réponse: Vous n'avez pas fait de déclaration certifiée chez le notaire de
13 cette nature, mais cela a été clair, et évident. Vous n'avez rien fait de
14 votre part pour faire cesser ces meetings tout au large de la Yougoslavie,
15 vous les avez, au contraire, soutenus. Et lorsqu'un meeting de cette
16 nature a été prévu à Ljubljana et lorsqu'au retour il fallait que cela se
17 passe à Zagreb, quand les autorités en Slovénie ont interdit la tenue de
18 ce meeting, les autorités serbes ont fait cesser toutes les relations
19 économiques avec la Slovénie et la Croatie et elle a entamé une guerre
20 économique sans merci pour porter atteinte au marché unique, porter
21 atteinte au système monétaire, au système douanier et avant même qu'il y
22 ait une guerre, cela a été la réponse à l'interdiction des meetings, cela
23 a généré une situation cauchemardesque dans toute la Yougoslavie.
24 Question: Mais ne vous souvenez-vous pas du péril encouru par les Serbes à
25 l'époque? Ne savez-vous pas que quelque 40.000 personnes ont quitté le
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1 Kosovo sous menaces, sous meurtres, sous mises à feu de maisons dans le
2 courant des années 1980 à 1990? Ne savez-vous pas qu'ils avaient demandé à
3 toutes les autres ethnies de la Yougoslavie, de la compréhension et de
4 l'aide pour ce qui est des pressions et souffrances auxquelles ils étaient
5 exposés? Vous souvenez-vous?
6 Réponse: Je me souviens de quoi cela avait l'air en Yougoslavie pendant
7 ces années-là. Je sais ce que j'ai dit. Vous dites qu'il y en a eu 40.000
8 de chassés, expulsés; mais personne ne peut organiser 40.000 personnes de
9 façon spontanée. Qu'iraient-ils faire à Novi Sad, à Tito Grad, à
10 Ljubljana, à Zagreb, si ce n'est ce qu'ils avaient fait: à savoir créer le
11 trouble, mettre le désordre partout pour faire chuter les élus de l'époque
12 et faire venir au pouvoir des hommes élus de votre part?
13 Question: Mais ne savez-vous pas qu'il n'y avait que quelques centaines de
14 personnes qui s'étaient déplacées pour dire à la population des autres
15 villes, ainsi qu'aux populations des autres Républiques, dans quelles
16 conditions difficiles ils vivaient? Ils étaient allés demander des
17 manifestations de solidarité. Il n'y a pas eu de violence, il n'y a pas eu
18 de blessés. Et les journaux disaient bien, à l'époque, qu'à l'occasion de
19 ces manifestations on n'avait pas écrasé ne serait-ce qu'une fleur dans
20 les jardins. Donc c'étaient des meetings qui avaient réclamé la solidarité
21 avec les peuples qui avaient souffert sur place. Ne vous souvenez-vous pas
22 de la chose?
23 Réponse: Je me souviens de la chose, mais je sais que c'était de la
24 propagande serbe de l'époque.
25 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur. Je vois qu'à ce point
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1 de vue vous avez votre stéréotype à vous, et ce n'est pas chose habituelle
2 pour un intellectuel, parce que je vois ici que vous avez publié deux
3 ouvrages, deux livres, et ainsi de suite.
4 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, abstenons-nous de ce
5 genre de commentaire, ceci ne mène à rien. Poursuivez, s'il vous plaît.
6 M. Milosevic (interprétation): Dites-moi, je vous prie -et on y viendra
7 aussi à ce volet-, vous avez cité le livre de Kadijevic, vous avez même
8 dit que vous l'aviez sur vous. Ce n'est pas vous qui l'avez citée cette
9 page, c'est la dame qui est en face de moi qui m'en a donné citation.
10 M. Kriste (interprétation): J'ai ce livre sur moi.
11 Question: Quel est le titre de ce livre?
12 Réponse: "La façon dont je vois le démantèlement".
13 Question: Bien. D'après "Ce que je sais de ces temps révolus" .
14 Réponse: Oui, "La façon dont je vois le démantèlement" pour le titre du
15 livre.
16 Question: Monsieur Milosevic, pour autant que je me souvienne de ces
17 temps-là, la JNA n'avait mentionné que deux objectifs qui étaient les
18 siens à l'époque: protéger ceux qui étaient en péril, quelle que soit leur
19 appartenance ethnique; et, deuxièmement, protéger ses propres unités qui,
20 tout au large de la Croatie, se trouvaient être assiégées.
21 Je voudrais que vous me répondiez maintenant. Etant donné que vous êtes en
22 train de parler d'axes Virovitica-Karlobag-Karlovac, puis la vallée de la
23 Neretva et autres, dont aurait parlé Kadijevic, étaient-ce là des
24 déplacements de troupes pour permettre de sortir du siège les unités qui
25 étaient sous blocus dans un grand nombre de villes? Et dans ces mêmes
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1 villes, ces garnisons existaient depuis de décennies durant auparavant. Ou
2 s'agissait-il de prise de territoires au profit d'une quelconque "Grande
3 Serbie"?
4 Réponse: Dans le livre de Kadijevic, on dit qu'il s'agit d'opérations
5 stratégiques d'attaques, qui ont des objectifs déterminés, qui
6 consistaient à couper la Croatie selon les axes indiqués y compris la
7 percée opérée à partir du sud, allant de Trebinje de Herceg-Novi, qui
8 devait donc rejoindre les effectifs sur la Neretva pour continuer vers
9 Split.
10 Je ne sais pas qui est-ce qu'ils libéraient là-bas et qui est-ce qu'ils
11 protégeaient, ces soldats de la JNA, dans la région de Dubrovnik, dans les
12 régions de la Dalmatie et dans tous les autres secteurs.
13 N'oubliez, Monsieur Milosevic, que sur ces territoires libérés où la JNA
14 libérait ou protégeait la population serbe, il vivait en 1991 quelque
15 2.200.000 hommes. Et sur ces 2.200.000, il y avait 1.600 Croates et à peu
16 près 400.000 Serbes.
17 Question: S'agissant de Dubrovnik, pour ce que vous avez dit, on y viendra
18 tout à l'heure.
19 Parce que là, il y a une grosse confusion que l'on fait, Monsieur Kriste.
20 Je ne sais pas si vous êtes conscient de ce fait là ou pas. Je vois que
21 vous avez expliqué que vous n'avez d'abord pas discuté avec les
22 représentants de la JNA, mais que vous aviez négocié avec les dirigeants
23 locaux de l'autre côté de la frontière au Monténégro et en Herzégovine.
24 Puis, la dame d'en face vous a demandé: "Mais quelle avait été l'issue de
25 ces pourparlers avec les autorités au Monténégro et en Serbie". Puis, vous
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1 avez expliqué que c'étaient des entretiens usuels, tout à fait ordinaires.
2 Et je voudrais savoir… ou alors a-t-elle délibérément omis de vous poser
3 la question de savoir si vous avez eu des négociations avec qui que ce
4 soit en Serbie?
5 Réponse: Je n'ai pas dit que j'ai eu des négociations avec les
6 représentants des autorités locales dans le voisinage de Dubrovnik, à
7 savoir en Bosnie-Herzégovine et au Monténégro. J'ai dit que de tels
8 entretiens ont eu lieu entre des représentants de la municipalité de
9 Dubrovnik et leurs homologues, mais j'ai dit qu'il n'y avait pas eu
10 d'exigence directe disant: "Faites ceci ou alors il y aura attaque sur
11 Dubrovnik".
12 Pour autant que je sache, j'ai précisé qu'il n'y avait pas eu de
13 déclaration de ce type.
14 Question: Mais, pour répondre directement à la question que je vous ai
15 posée, est-ce qu'à un moment donné dans ces entretiens vous avez eu
16 l'opportunité de vous entretenir avec l'un quelconque des représentants de
17 la Serbie?
18 Réponse: Personnellement, non.
19 Question: Est-ce qu'une délégation quelconque de Dubrovnik s'était
20 entretenue avec quelque représentant que ce soit de la Serbie?
21 Réponse: Non.
22 Question: Mais pensez-vous qu'il soit proche de la raison ou du
23 raisonnement habituel des gens, que la Serbie n'avait aucune aspiration
24 pour ce qui est de la prise de contrôle de Dubrovnik?
25 Réponse: Cela semble illogique et dépourvu de sens. Mais on sait que, dans
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1 les milieux culturels serbes, Dubrovnik était désignée comme étant
2 l'Athènes des Serbes, et il est certain qu'en fait, l'attaque sur
3 Dubrovnik faisait partie d'un plan plus vaste encore -comme je l'ai dit
4 tout à l'heure- qui avait pour objectif de déplacer les frontières de la
5 Serbie vers l'Occident.
6 Question: Donc, si j'ai bien compris, vous affirmez que la Serbie avait
7 des aspirations pour ce qui était de la prise de territoires au niveau de
8 Dubrovnik, et ainsi de suite?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Mais sur quoi basez-vous cette opinion-là?
11 Réponse: Sur ce qui s'est passé. Parce que l'armée yougoslave, notamment
12 après la guerre en Slovénie, intervenait en collaboration complète avec la
13 direction serbe, ou je dirais plutôt sous-direction, ou sous le
14 commandement direct de vous-même et de Borislav Jovic.
15 Question: Vous parlez de Jovic?
16 Réponse: Oui, Jovic.
17 Question: Mais d'où tenez-vous cette idée au terme de laquelle la Serbie
18 et moi-même étions en mesure de donner des ordres à l'armée populaire
19 yougoslave? Il s'agissait de conflits entre des formations paramilitaires
20 de chez vous et la JNA, et pas entre la Serbie et la Croatie. Le savez-
21 vous? Vous étiez ministre de la Défense quand même?
22 Réponse: Le travail était effectué par la JNA pour votre compte. Et cette
23 JNA, sous le couvert fictif de la protection des Serbes, ou sous couvert
24 d'une formulation plus neutre qui consistait à dire qu'il s'agissait de
25 séparer les parties au conflit, pour prendre position des Serbes insurgés
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1 en Croatie, pour leur donner des armes, pour leur fournir des cadres de
2 commandement, des officiers, en d'autres termes.Et à chaque fois qu'ils
3 étaient en difficulté ou en péril, elle se plaçait devant, face aux
4 effectifs croates, pour les empêcher de réintégrer des territoires ou,
5 plutôt, rétablir la situation telle qu'elle avait été auparavant.
6 Question: Mais vous venez de parler, de mentionner une explication plus
7 neutre encore, ou ce que vous désignez comme étant une explication encore
8 plus neutre encore. N'était-il pas exact… L'armée n'avait-elle pas essayé,
9 tenté de séparer les forces en conflit et, en même temps, de préserver ses
10 propres unités? Parce que ce que vous venez de donner comme citation de
11 Kadijevic…, il avait parlé de sortir ses unités de ces territoires. Si
12 quelqu'un avait l'intention d'occuper des territoires, on n'envisage pas
13 de faire sortir des unités, mais plutôt de les déployer sur ces
14 territoires-là?
15 Réponse: Kadijevic a dit qu'une fois la Croatie brisée, il sortirait ses
16 unités, mais pas de la Croatie tout entière. Il faut comprendre les choses
17 dans le contexte tel qu'il se présente: il envisageait de faire revenir ou
18 de ramener des unités des territoires au-delà de la frontière occidentale
19 envisagée pour la Serbie.
20 Question: Ecoutez, ça ne figure pas dans le livre, vous pouvez me croire
21 sur parole. Je n'ai pas lu ce livre, mais je viens d'entendre ce que vous
22 venez de citer et je vous affirme que vous avez cité à tort et à travers.
23 Mais bon…
24 Dites-moi, maintenant, pour gagner du temps aussi: vous avez précisé que,
25 pour des raisons politiques, vous n'avez pas eu l'opportunité de faire
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1 votre doctorat; quelles étaient ces raisons politiques?
2 Réponse: Cela n'a rien à voir la guerre avec la guerre de 1990. Je faisais
3 partie du Printemps de Croatie, si c'est que vous voulez savoir, si ça
4 vous intéresse. J'ai été persécuté par la police; pendant 18 ans, j'ai été
5 persécuté, de toute façon. Entre autres, on m'a empêché de passer mon
6 doctorat, alors que la procédure était déjà en cours.
7 Question: Mais, en votre qualité de représentant de ce Printemps croate…
8 Et là, j'entends du français, je ne sais pas comment cela se fait… Ah!
9 Oui, j'ai compris.
10 … Qui vous a persécuté en votre qualité de représentant du Printemps
11 croate? C'était la police croate ou c'étaient des Serbes?
12 Réponse: J'ai été persécuté par la police croate. En effet, dans la
13 composition qui était la sienne, à l'époque, mais je dois dire qu'il n'y
14 avait aucune différence entre les Serbes et les Croates; mais cela se
15 situe dans le cadre de la politique yougoslave qui a été précisée à cette
16 session de la Présidence, dans cette malheureuse localité de
17 Karadjordjevo, une fois de plus.
18 Question: Mais bon, écoutez, Karadjordjevo, c'était la villa, la résidence
19 bien connue du Président Tito, et c'est là que s'est tenue la session
20 plénière du comité central. Cette session aurait pu se tenir ailleurs;
21 Karadjordjevo, en sa qualité de localité, n'a rien à voir. Il y a eu des
22 congrès à Brioni, et nous ne pensons pas que Brioni était un site
23 malheureux. Pour ce qui est d'aucun point géographique, nous ne saurions
24 dire que c'est là un point particulièrement malheureux.
25 Mais étant donné que vous avez fait partie du Printemps croate ou du
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1 Maspok, à savoir du mouvement des masses, n'avait-il pas été question d'un
2 mouvement nationaliste, à l'époque, en Croatie, qui visait à faire
3 sécession de la Croatie vis-à-vis de la Yougoslavie, chose qui n'a fait
4 qu'être reprise en continuité au bout de 20 ans? N'est-ce pas vrai?
5 Réponse: Non, ce n'est pas vrai. Ce mouvement des masses ou ce Printemps
6 de Croatie avait des objectifs tout à fait autres qui se sont avérés être
7 pure illusion. L'un des objectifs principaux qui étaient ceux du Printemps
8 croate était de réaliser un socialisme, comme on le disait, à visage
9 humain; et deuxièmement, faire de la Yougoslavie une communauté
10 véritablement égalitaire en droit pour toutes les nations et minorités
11 nationales.
12 Question: Allez-vous dire que la Croatie n'était pas sur pied d'égalité en
13 Yougoslavie?
14 Réponse: Elle était moins sur pied d'égalité que la Serbie. Quoique la
15 Serbie, notamment après la mort du Président Tito, n'ait pas cessé de
16 clamer qu'elle était la plus en péril.
17 Question: Mais cette Serbie n'a-t-elle pas été divisée en trois parties,
18 et toujours sous la tutelle de quelqu'un d'autre? Et est-ce que la Croatie
19 et la Macédoine étaient divisées ou partagées en trois parties, ou la
20 Slovénie encore? Et est-ce que quelque autre République avait été divisée
21 en plusieurs parties?
22 Réponse: La Serbie avait son histoire, son contexte historique, et il y
23 avait des provinces; il était logique d'assurer une certaine autonomie à
24 ces provinces.
25 M. Milosevic (interprétation): Mais ne savez-vous pas que, conformément à
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1 la nouvelle Constitution de Serbie pour laquelle vous dites qu'elle a
2 supprimé l'autonomie, il a continué à y avoir une Province autonome de
3 Voïvodine et une Province autonome de Kosovo et de Metohija? Et je dirais
4 que Kosovo et Metohija s'appelaient ainsi auparavant; puis on a supprimé
5 Metohija; quelqu'un a trouvé qu'il fallait le faire.
6 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, veillez à poser des
7 questions qui sont en rapport avec la déposition du témoin, notamment
8 pendant le moment où il était ministre de la Défense. Nous vous donnons
9 une certaine marge de manœuvre mais là, je pense que vous dépassez les
10 bornes.
11 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur May. Vous avez raison,
12 au fond, car il me faut être rationnel pour ce qui est du temps dont je
13 dispose.
14 Monsieur Kriste, vous avez bien coopéré avec Tudjman depuis la fin des
15 années 1960, si j'ai bien compris les renseignements dont je dispose. Vous
16 étiez rassemblés autour de la Matica Hrvatska; vous avez pris part à ces
17 réunions de Matica Hrvatska, par exemple à Metkovic en 1971, lorsqu'il y a
18 eu une assemblée d'érection d'un monument à Stjepan Radic? Vous étiez les
19 invités principaux, vous-même et Tudjman; c'est bien vrai, n'est-ce pas?
20 M. Kriste (interprétation): Oui, c'est exact.
21 Question: Mais ce n'est pas cela que je vise; c'était une activité
22 politique qui était la vôtre. Vous avez bien connu le Président Tudjman;
23 vous avez bien coopéré, vous avez été son Premier ministre de la Défense
24 dans son gouvernement qu'il a mis sur pied après son arrivée au pouvoir en
25 1990, n'est-ce pas?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Par la suite, vous avez dit qu'en 1989, alors que rien n'était
3 encore arrivé en Yougoslavie, il n'y avait pas eu de secousses, il n'y
4 avait pas eu de remous, et il n'y a pas eu de tensions entre Serbes et
5 Croates notamment, mais en 1989 il avait déjà été envisagé une frontière
6 de la Croatie sur la rivière Drina, donc dans les frontières qui avaient
7 été celles de la création de la Croatie de l'époque, qui avait été
8 l'alliée des Forces de l'Axe pendant la Deuxième Guerre mondiale, donc
9 incorporant le territoire de la Bosnie-Herzégovine, pour faire rétablir la
10 République indépendante de Croatie. C'est bien cela?
11 Réponse: Je n'ai pas dit que Tudjman avait planifié des frontières au
12 niveau de la frontière Drina notamment. J'ai dit que nous avions des
13 conversations, et qu'à l'époque M.Tudjman avait estimé que les Musulmans
14 étaient des Croates et que, compte-tenu de ce fait-là, compte-tenu
15 également des circonstances historiques, il eût été logique d'avoir une
16 frontière à cet endroit-là. Mais M.Tudjman, à aucun moment au niveau
17 opérationnel ou sur le plan politique, n'a entrepris quelque mesure que ce
18 soit pour réaliser ce plan. C'étaient plutôt des réflexions historiques et
19 philosophiques.
20 Question: Donc ce que vous avez tenu, c'étaient des débats ou des
21 réflexions historiques et philosophiques. Mais, dans celles-ci, qui
22 étaient celles des Serbes que vous avez désarmés, que vous avez licenciés,
23 que vous avez maltraités, et qui se souvenaient fort bien de la Deuxième
24 Guerre mondiale et de cette même NDH, de ce même Etat indépendant croate,
25 ils n'avaient pas de réflexions historiques; c'étaient là des criminels,
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1 des assassins, des meurtriers, des bandits, n'est-ce pas?
2 Réponse: C'est vous qui le dites!
3 Question: S'il vous plaît, Monsieur Kriste, voilà votre interview
4 -j'imagine que vous le reconnaissez!- dans un journal qui est de chez
5 vous. Je parle du journal "Nacional", publié à Zagreb. Je n'arrive pas
6 avoir, ici, la date, mais on retrouvera facilement parce que c'est la
7 première page… on retrouvera la date. Vous vous souvenez de cette
8 interview, j'imagine?
9 Réponse: Oui, je m'en souviens.
10 M. Milosevic (interprétation): Bien. Son intitulé… D'abord, vous avez
11 votre photo, vous êtes en train de parler d'un livre intitulé: "Ombrage
12 planant sur la liberté". Et je lis que Tudjman, en 1989, avait planifié
13 une frontière sur la Drina; vous l'avez affirmé à l'époque, maintenant,
14 vous affirmez autre chose. Mais je vais vous donner lecture.
15 Etant donné qu'on fait citation de votre réponse à une question du
16 journaliste, de votre journal de Zagreb, vous dites ce qui suit: "Un peu
17 avant cela, le HDZ avait adressé une proclamation à l'intention du peuple
18 croate où j'ai particulièrement été gêné par une partie".
19 Je fais une parenthèse. Vous êtes donc critique par rapport à cette
20 proclamation. Je ne vous cite pas sous un éclairage négatif.
21 Je continue: "J'ai été dérangé, j'ai été gêné par la partie qui parlait de
22 la Croatie dans ses frontières historiques. J'ai tout de suite compris
23 qu'il s'agissait de la frontière sur la Drina, qui n'a existé seulement
24 que du temps de cet Etat indépendant croate, NDH.
25 J'ai demandé à Tudjman, ce matin-là: 'Penses-tu que les frontières croates
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1 de l'Est devraient se situer sur la Drina?'. Et, sur ce, il a répondu
2 brièvement: 'Oui'. Je l'ai prévenu que cela était impossible parce qu'en
3 BiH -BiH étant la Bosnie-Herzégovine- il n'y a que 18% de Croates. Mais il
4 a rétorqué que tous les Musulmans étaient des Croates; cela était une
5 raison suffisante pour annexer tout un Etat voisin à la Croatie. J'ai été
6 surpris parce que je connaissais bien Tudjman et son attachement passionné
7 à l'idée de la Banovina croate".
8 On vient de me prévenir de ralentir, les interprètes me préviennent de
9 donner lecture plus lentement, donc je vais relire la dernière phrase.
10 "J'ai été surpris parce que je connaissais bien Tudjman et son attachement
11 passionné à l'idée de la Banovina croate". En traduction: Bana croate.
12 Par conséquent, Monsieur Kriste, de quel militantisme serbe êtes-vous en
13 train de parler ici? Parce qu'en 1989 déjà...
14 M. le Président (interprétation): Procédons de façon logique.
15 Il y a d'abord cette citation, Monsieur le Témoin. Vous souvenez-vous de
16 la date à laquelle ceci a été publié, de façon approximative?
17 M. Kriste (interprétation): Cette interview a été publiée, il y a deux ou
18 trois mois.
19 M. Milosevic (interprétation): Le 3 décembre 2002. Voilà, c'est la date
20 qui figure sur toutes les pages de cette revue.
21 M. le Président (interprétation): Fort bien.
22 Ceci étant, on vient de citer un extrait assez long. Voulez-vous apporter
23 un commentaire? Vous pourrez le faire. Ce sur quoi, l'accusé pourra vous
24 poser d'autres questions. Tout d'abord, est-ce que cela traduit bien les
25 propos que vous avez tenus?
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1 M. Kriste (interprétation): Oui.
2 M. le Président (interprétation): Voulez-vous dire quoi que ce soit avant
3 que d'autres questions vous soient posées?
4 M. Kriste (interprétation): Je puis dire seulement une chose: à savoir que
5 ce n'était pas un organe officiel, ce n'était pas une réunion officielle.
6 C'était un entretien où j'ai présenté des vues quelque peu différentes ou
7 des appréciations quelque peu différentes par rapport à celles de
8 M.Tudjman; c'est là que nos opinions ont divergé.
9 M. le Président (interprétation): Oui, poursuivez, Monsieur Milosevic. Que
10 vouliez-vous?
11 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. C'est précisément ce que je
12 demandais au témoin. En effet, ses aspirations sont très claires et nous
13 allons venir aux autres choses un peu plus tard, aux autres domaines.
14 Nous allons revenir aux fonctions que vous avez présentées.
15 Mais de quel militantisme serbe parlez-vous, si l'on tient compte du fait
16 que c'est précisément cette autorité, cette nouvelle autorité croate qui
17 avait pour aspiration de reconstituer l'ancien NDH, Etat indépendant de
18 Croatie, et d'annexer la Bosnie-Herzégovine?
19 M. Kriste (interprétation): Je crois que ceci a fait l'objet d'une
20 interprétation tout à fait erronée, lorsqu'on a voulu dire que les
21 nouvelles autorités voulaient reconstituer le NDH. On a simplement discuté
22 d'un seul l'élément qui concernait une zone frontalière ou une question de
23 frontière.
24 Je voulais souligner autre chose: ce ne sont pas les nouvelles autorités
25 croates de l'époque qui sont concernées, car la Ligue des communistes de
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1 Croatie était toujours au pouvoir à l'époque. Les nouvelles autorités
2 croates n'ont pris aucune mesure concrète qui irait dans le sens de mettre
3 en oeuvre ce type d'idée, pas plus que ceci n'est devenu une partie du
4 programme politique.
5 Question: Mais dites-moi alors ceci, Monsieur Kriste. Nous allons faire
6 une petite digression. Vous dites que les nouvelles autorités croates
7 n'ont jamais pris de mesures agressives ou d'idée agressive à l'encontre
8 de la Bosnie-Herzégovine. Mais savez-vous que les premiers incidents
9 violents, les premiers tirs qui ont été tirés, les premiers assassinats ou
10 meurtres de civils –malheureusement, c'étaient des Serbes- qui se sont
11 produits ont été le fait du rassemblement de la Garde nationale qui avait
12 franchi la frontière, qui était passée de la Croatie en Bosnie-Herzégovine
13 et plus précisément sur le territoire de la municipalité de Bosanski Brod,
14 et avait abattu toute la population civile du village de Sijekovac; et
15 jusqu'alors, il y avait une paix absolue qui régnait en Bosnie-
16 Herzégovine?
17 Etes-vous au courant de la présence de ces formations d'unités de la ZNG?
18 Savez-vous de quelle façon elles se sont emparées du territoire de Bosnie-
19 Herzégovine pour y tuer en masse des civils, ou pour y liquider tout un
20 village serbe dans la municipalité de Bosanski Brod, alors qu'auparavant
21 jamais il n'y avait eu de conflits, d'affrontements ni de tensions
22 ethniques? Rien ne s'était jamais passé dans ce village. C'était la
23 première fois qu'il y avait un conflit sur le territoire de la Bosnie-
24 Herzégovine. Et ceci a été causé par votre propre armée, par le
25 rassemblement de la Garde nationale dans ce territoire de Bosnie-
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1 Herzégovine. Etes-vous au courant de cela?
2 Réponse: C'est la première fois que j'en entends parler, ici-même. Si cela
3 s'était vraiment passé, je suppose que j'aurais été mis au courant
4 auparavant. C'est la raison pour laquelle je considère que ce n'est pas la
5 vérité.
6 Question: D'accord, fort bien. Mais nombreux sont les documents qui
7 portent sur ce fait, beaucoup de témoins qui peuvent en attester. Je n'ai
8 pas tous ces documents sur moi, même si je les ai présentés à l'occasion
9 d'une déposition de témoin ici. Je pense que c'est la 128e Brigade du
10 Corps ou rassemblement de la Garde nationale qui est concerné. On a des
11 certificats de confirmation au moment où ils ont ouvert des bordels, où
12 ils ont arrêté des femmes serbes qui retournaient chez elles pendant la
13 journée, et ainsi de suite.
14 Mais dites-moi, vous étiez un proche associé de M. Tudjman; est-il vrai de
15 dire qu'il s'est basé sur des partis politiques de droite qui fondaient
16 tout leur programme politique sur le passé, sur l'histoire?
17 Réponse: Des partis de droite? Permettez-moi de demander un
18 éclaircissement. Qu'entendez-vous par "partis politiques de droite"?
19 Qu'est-ce que vous entendez par là? Je crois qu'il faut une explication.
20 Là où nous vivons, des politiques ou des partis politiques de gauche ou de
21 droite n'ont pas été définis de façon claire. J'ai dit que ces partis se
22 basaient en partie sur des forces qui s'inspiraient davantage du passé,
23 plutôt que d'avoir une idée très précise, une vision très claire d'une
24 Croatie moderne et démocratique. Mais ceci ne constituait qu'un seul
25 segment, un seul facteur parmi tous les facteurs qui représentaient les
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1 véritables tendances de l'époque.
2 Question: Fort bien. Mais dans cette interview, dont je viens de citer un
3 extrait, vous dites qu'une de ses erreurs a été la suivante, il a fait
4 plusieurs erreurs importantes, dites-vous. Et puis, je vous cite plus
5 précisément, vous dites: "En tout premier lieu, c'est le fait qu'il se
6 soit basé sur des forces politiques de droite dont le programme politique
7 se basait sur le passé".
8 Ce sont vos propres termes, c'est ce que vous avez dit. Je suppose que
9 vous ne contestez pas cela?
10 Réponse: Eh bien, c'est une interprétation assez libre. Je n'ai pas dicté
11 ces termes aux journalistes; moi, j'ai utilisé un libellé des termes qui
12 me semblaient corrects et que je viens de reprendre il y a un instant. Je
13 parle donc des forces qui se tournaient vers le passé, plutôt que de se
14 tourner vers l'avenir, et d'avoir une vision claire de ce que doit être
15 une Croatie moderne et démocratique. Ce n'étaient pas exclusivement là
16 toutes les forces en place, c'était une partie des forces qu'on pouvait
17 trouver sur la scène politique croate.
18 Question: Mais vous avez émis une critique; vous avez dit qu'il aurait été
19 préférable que ceci ne se produise pas? A ce moment-là, rien ne se serait
20 passé, si cela ne n'était pas passé.
21 Réponse: Mais non, Monsieur Milosevic. S'il n'y avait pas eu votre
22 politique, à ce moment-là…
23 Question: Mais ça, c'est la thèse que défend la partie adverse et qui va
24 s'effondrer.
25 Mais est-il vrai de dire que vous avez essayé de séparer, de diviser la
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1 Bosnie? Qui a essayé de diviser la Bosnie? N'est-ce pas là quelque chose
2 que vous avez critiqué?
3 Réponse: C'est vrai, nous avions reçu des renseignements qui sont toujours
4 restés officieux. Et d'après ceux-ci, vous et M. Tudjman vous avez eu des
5 pourparlers sur la possibilité de structurer des relations serbo-croates,
6 avec un devoir de trouver une voie médiane qui permettrait de satisfaire
7 vos intérêts respectifs sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Mais
8 je n'étais pas présent moi-même, je n'ai pas assisté aux discussions que
9 vous avez eues avec lui. Et je n'étais pas là non plus au moment où a été
10 publiée une information officielle que j'aurais pu voir ou qui aurait été
11 accessible.
12 Question: Monsieur Kriste, si vous aviez eu accès à cette information,
13 tout ce que Tudjman aurait pu vous dire, c'était que ma position n'avait
14 cessé d'être celle-ci: c'est que, pour moi, il y avait comme avenir entre
15 les Serbes et les Croates, un avenir de paix, d'amitié et non pas un
16 avenir de conflit, que c'était la clef, la relation clef dans les Balkans.
17 Il savait très bien que j'avais rejeté des offres en vue d'une quelconque
18 alliance à former entre les Musulmans et les Serbes contre les Croates. Et
19 je leur ai expliqué la même chose: que nous ne voulions pas être les
20 ennemis des Croates; au contraire, que nous voulions être des amis, comme
21 nous l'avions été dans le passé et comme nous allions l'être à l'avenir.
22 Mais je reviens sur ce que vous avez dit dans cette interview. L'autre
23 grande erreur, ça a été la guerre avec les Musulmans, les Bosniens; et la
24 tentative visant à séparer, à diviser la Bosnie-Herzégovine. Est-ce bien
25 là ce que vous avez reproché à M. Tudjman, ou est-ce quelque chose dont
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1 vous vous êtes souvenu en décembre 2002?
2 Lorsque vous pensez qu'il a prôné cette politique, vous étiez un ami de
3 longue date, un proche associé et quelqu'un qui, semble-t-il, avait le
4 courage de lui dire son avis. Est-ce que vous lui avez dit, à l'époque,
5 que c'était une erreur de sa part?
6 Réponse: Jamais je n'ai discuté de ces questions avec le Président Tudjman
7 de façon directe. Mais si de telles politiques devaient être appliquées, à
8 mon avis, c'étaient là des politiques erronées.
9 Question: Pourtant, vous avez dit que cette politique avait été appliquée
10 mais qu'elle était erronée. Mais dites-moi: est-il exact de dire que
11 Tudjman tout comme Susak, et vous l'avez mentionné il y a un instant,
12 pensaient tout du moins que l'Herzégovine devrait être annexée à la
13 Croatie?
14 Réponse: C'est là aussi quelque chose dont je n'ai jamais discuté avec M.
15 Tudjman. Cependant, j'ai reçu les informations selon lesquelles ceci a
16 fait l'objet de discussions; et j'ai recueilli ces renseignements dans une
17 conversation informelle avec M. Susak.
18 Question: Autre citation de cette interview accordée à "Nacional": "Gojko
19 Susak vous a convaincu que les dirigeants du SDS avaient décidé de diviser
20 la Bosnie-Herzégovine." (Fin de citation.)
21 Votre réponse -et je vous cite intégralement- est exacte: "En mars 1991,
22 sur les marches de l'assemblée, j'ai rencontré M. Gojko Susak. Il était de
23 bonne humeur. Je lui ai demandé pourquoi. Il m'a répondu: 'Eh bien, je
24 viens d'aller voir le vieux, le chef, et nous nous sommes mis d'accord à
25 l'instant qu'au moins l'Herzégovine devrait être annexée à la Croatie."
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1 (Fin de citation.)
2 Question: C'est ce que vous avez dit il y a un instant?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Mais dites-moi, qu'est-ce que ceci a à voir avec une réunion que
5 j'aurais eue avec Tudjman à Karadjordjevo? Vous avez dit: "Ils ont eu une
6 réunion et ils se sont mis d'accord pour que l'Herzégovine soit ajoutée à
7 la Croatie".
8 Comment pourrait-on avoir une idée sur ce point, alors qu'il n'y a aucun
9 point commun?
10 M. Kriste (interprétation): C'est vous qui savez le mieux ce dont vous
11 avez discuté. Moi, je n'étais pas là à Karadjordjevo, à cette réunion.
12 Mais après, après cette discussion, des rumeurs ont couru selon lesquelles
13 la teneur essentielle de ces discussions portait sur la Bosnie-
14 Herzégovine.
15 M. Milosevic (interprétation): Si ceci vous intéresse...
16 M. le Président (interprétation): Je pense que le moment se prête bien à
17 une pause.
18 Monsieur Milosevic, n'oubliez pas que vous posez des questions, vous
19 n'êtes pas censé déposer; or nous avons entendu des interventions et des
20 déclarations assez longues de votre part.
21 Nous allons maintenant faire une pause de 20 minutes. Après cette pause,
22 vous disposerez d'encore une heure, si vous en avez besoin, pour le
23 contre-interrogatoire de ce témoin.
24 Nous allons siéger jusqu'à 14 heures pour essayer de terminer la
25 déposition de ce témoin aujourd'hui.
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1 M. Milosevic (interprétation): Je crains que ce ne soit pas suffisant,
2 Monsieur May. Je vais vous demander d'avoir l'obligeance de m'accorder
3 éventuellement un peu plus de temps.
4 M. le Président (interprétation): Tout est fonction de l'évolution du
5 contre-interrogatoire et de l'utilisation que vous faites du temps qui
6 vous est donné.
7 Oui, Monsieur Nice?
8 M. Nice (interprétation): J'aurais voulu avoir une ou deux minutes à huis
9 clos partiel avant la fin de l'audience de ce matin.
10 M. le Président (interprétation): Très bien. Pause de 20 minutes.
11 L'audience est suspendue.
12 (L'audience, suspendue à 12 heures 17, est reprise à 12 heures 40.)
13 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
14 M. Milosevic (interprétation): Donc suite à la citation que j'ai faite
15 tout à l'heure et à ce que vous avez dit, sommes-nous en droit de conclure
16 que Tudjman et Susak se sont entendus sur une sécession nationale et la
17 prise de territoires appartenant à d'autres, c'est-à-dire notamment à ce
18 que l'Herzégovine fasse partie de la Croatie?
19 M. Kriste (interprétation): Ils ont très probablement discuté de
20 l'Herzégovine, à en juger par ce que M. Susak m'a dit.
21 Question: Très bien. Mais l'observation que vous avez faite, montre bien
22 ces relations au sein des nouvelles autorités en Croatie à l'égard des
23 Musulmans. Vous avez dit que ce Susak avait déclaré que les unités de
24 Prozor allaient faire mouvement contre les Musulmans et qu'il n'y aurait
25 pas de prisonniers de guerre.
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1 Je vais vous rappeler cette citation de l'interview. Vous parlez de lui et
2 vous dites -je cite-: "Je savais qu'il était au courant, et j'ai dit que
3 Gojko peut faire ce qu'il convient de faire pour apaiser les tensions
4 entre les Musulmans et les Croates. La réponse a été très froide, bien
5 sûr. Une unité très forte, des nôtres, fait mouvement à partir de Prozor
6 et ne fera pas de prisonniers de guerre.é
7 L'interlocuteur répond: "J'ai été stupéfait parce que je me suis rendu
8 compte que Susak me transmettait, en tant que décision officielle, la
9 nouvelle politique croate à l'égard des Musulmans et des Bosniens."
10 Est-ce exact, Monsieur Kriste?
11 Réponse: Oui, plus ou moins. En fait, je n'ai pas authentifié cette
12 interview. C'était une conversation avec un journaliste, mais les mots ont
13 été inscrits par le journaliste.
14 Question: Mais, sur le fond, c'est bien cela?
15 Réponse: Oui.
16 Question: S'agissant de Dubrovnik, l'offensive dirigée par Bobetko n'était
17 pas une opération défensive destinée à lever le siège de Dubrovnik, mais
18 une tentative pour diviser la Bosnie et s'emparer de l'Herzégovine. C'est
19 bien cela?
20 Réponse: Bobetko, un jour, sur le champ de bataille, s'est donc rendu sur
21 les lieux au moment où, selon le plan Vance, la JNA était censée quitter
22 cette partie de la Croatie. Par conséquent, je devais surveiller le
23 retrait des troupes plutôt que de mener une opération de guerre destinée à
24 libérer cette partie de la Croatie; en tout cas, c'est ce que j'avais
25 compris sur la base des réalités de l'époque.
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1 Question: Vous dites très explicitement dans votre interview, et je vais
2 vous citer mot pour mot -je cite-: "En ouvrant le théâtre de guerre au
3 sud, avec des forces très nombreuses sous le commandement de Bobetko, on
4 tentait manifestement de conquérir l'Herzégovine et, en partie, la Bosnie
5 et Dubrovnik?" (Fin de citation.)
6 Réponse: Personne n'aurait pu dire que le but était de conquérir
7 Dubrovnik. Le seul l'objectif pouvait être de libérer Dubrovnik. Donc, oui
8 j'estime que les forces qui étaient présentes sur place étaient présentes,
9 en partie, pour parer à toute éventualité sur le territoire de
10 l'Herzégovine et de la Bosnie centrale. Oui, en tout cas pour la Bosnie
11 centrale.
12 Question: Très bien, mais les événements du théâtre de Dubrovnik devaient
13 donc être pris en considération dans le contexte des actions de l'armée
14 croate. C'est exact, n'est-ce pas?
15 Réponse: Ceci se passait en 1992. Les opérations principales de l'armée
16 populaire yougoslave ont été menées en 1991. L'attaque sur Dubrovnik a
17 commencé le 1er septembre. Et l'occupation de cette région par l'armée
18 populaire yougoslave, par les forces de la Défense territoriale, par les
19 volontaires -je ne sais plus comment ils s'appelaient- venus de la partie
20 serbe de Bosnie-Herzégovine et du Monténégro, montre bien que cela faisait
21 déjà huit mois que toutes ces forces étaient présentes sur les lieux.
22 Question: Mais, puisque vous parlez de cette époque, il ressort de tout
23 cela, puisque la RSFY existait en tant qu'Etat à l'époque, que c'était la
24 seule instance au titre du droit international. La JNA avait le droit
25 d'être l'armée de tout le pays, et donc de la Croatie également; c'était
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1 d'ailleurs son devoir au titre de la Constitution?
2 Réponse: Au titre de la Constitution, elle n'avait pas pour devoir de
3 faire la guerre à certaines personnes et à certains peuples de la
4 Yougoslavie. Elle avait des obligations très différentes, à savoir
5 défendre le pays contre un éventuel agresseur venu de l'extérieur. Et la
6 JNA n'est pas venue à Dubrovnik pour se promener, elle y est venue pour
7 faire la guerre dans le but de s'emparer de certains territoires. Elle a
8 placé ces territoires sous son contrôle contre la volonté des habitants de
9 Croatie et de toute la Yougoslavie.
10 Par ailleurs, au printemps 1992 déjà, la Croatie était reconnue
11 internationalement et donc faisait partie de la communauté internationale.
12 Question: Mais vous parliez de 1991?
13 Réponse: Mais vous, vous parlez de 1992. Bobetko, c'était en 1992.
14 Question: De 1992 aussi, bien sûr. Mais en fonction de ces aspirations
15 vis-à-vis de l'Herzégovine et de la Bosnie centrale, est-il contestable
16 que la JNA avait pour devoir de défendre l'intégrité territoriale et
17 l'état de droit en RSFY en empêchant une guerre civile d'éclater sur le
18 territoire de la RSFY? Ceci est-il exact ou pas?
19 Réponse: Comment, une guerre civile? Personne en Croatie n'a attaqué
20 personne. Pas un seul soldat de Croatie, pas une seule personne portant un
21 fusil n'a franchi, à cette époque, la frontière de la Serbie ou du
22 Monténégro. La guerre se déroulait sur le territoire de la Croatie avec
23 des Serbes qui s'étaient soulevés et qui bénéficiaient de l'aide de
24 l'armée yougoslave, une aide que la JNA leur a apporté constamment. Il y
25 avait aussi là-bas des unités paramilitaires, les gens de Seselj, d'Arkan,
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1 de Dragan, les "Aigles blancs" et je ne sais quoi encore. Tous ces hommes
2 faisaient la guerre en collaboration avec l'armée yougoslave contre le
3 peuple croate sur le territoire croate.
4 M. Milosevic (interprétation): Mais cette brigade de la Garde nationale
5 qui est allée en Bosnie-Herzégovine et qui est responsable d'un massacre à
6 Sijakovac, ce n'est donc pas une formation armée de la Croatie qui a fait
7 cela?
8 M. le Président (interprétation): Le témoin a déjà répondu à cette
9 question, il a dit ne rien savoir à ce sujet. Ce que vous dites n'est
10 qu'une allégation venant de vous.
11 M. Milosevic (interprétation): Bien, mais est-il exact que les unités de
12 la JNA avaient pour devoir de maintenir le contrôle sur leurs
13 installations, sur leurs arsenaux, sur ce que j'appellerais "leur base" à
14 cet endroit?
15 M. Kriste (interprétation): Sur le territoire de Dubrovnik, l'armée
16 populaire yougoslave n'avait aucune installation, aucune base, aucun
17 arsenal; elle n'avait rien. Elle avait simplement, à Kupari, un centre de
18 vacances où vous avez, d'ailleurs, je crois, passé vos vacances aussi.
19 Question: Oui, et pendant de nombreuses années. Il existe une cassette
20 vidéo mais, en raison des contraintes de temps, je la garde pour le témoin
21 suivant. Je vous demande si vous confirmez que, sur ces images, on voit
22 qu'à partir de Dubrovnik on tire sur Zarkovica où il y avait un arsenal,
23 un entrepôt d'armes de la JNA qui saute. Est-ce qu'il n'a pas sauté en
24 raison de tirs venant de Dubrovnik?
25 Réponse: Je ne connais pas cette situation concrète. Mais à Zarkovica,
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1 avant 1991, il n'y avait aucun dépôt d'armes de la JNA. Si ce dépôt
2 existait, il n'a été créé à cet endroit qu'après l'entrée de la JNA sur le
3 territoire de la Croatie, en formation de guerre, avec un certain nombre
4 d'armes et de munitions qui auraient pu être conservées dans ce dépôt.
5 Donc si cela s'est produit, cela ne s'est produit que longtemps après le
6 1er octobre, à savoir donc la date de la première attaque sur Dubrovnik,
7 date à laquelle l'armée populaire yougoslave a encerclé Zarkovica et
8 Bosanka.
9 Question: Est-il exact que les unités de la JNA sur ce territoire étaient
10 composées de représentants d'au moins quatre Républiques de la
11 Yougoslavie?
12 Réponse: Je ne sais pas. Je n'étais pas un cadre, je n'étais pas un
13 dirigeant de la JNA. Tout ce que je sais, c'est qu'en Croatie, notamment
14 après le conflit en Slovénie, les représentants de tous les peuples, y
15 compris de la Serbie, ont commencé à quitter la JNA. Les mères de ces
16 jeunes gens venaient les chercher pour les ramener chez eux et nous leur
17 avons offert protection et conditions appropriées pour leur permettre le
18 retour chez eux. Ils quittaient simplement la JNA de leur propre gré pour
19 rentrer chez eux.
20 Question: Mais savez-vous que la JNA à Mostar, à Capljina et ailleurs,
21 contrôlait donc toute la région près de Slano et des endroits que je viens
22 de citer, et qu'aucune ville n'a été détruite ou endommagée, dans cette
23 région, pendant que la JNA y était présente?
24 Réponse: Je sais que ce qui s'est passé dans la zone de Dubrovnik. Je ne
25 pourrais pas parler de la Bosnie-Herzégovine. Mais la région que vous avez
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1 mentionnée, effectivement, à cet endroit l'armée yougoslave a traversé
2 Slano et elle est arrivée y compris jusqu'à Neum et Bistrik; et tout a été
3 plus ou moins détruit, à ce moment-là. Vous avez parlé de Slano; eh bien,
4 il est difficile de trouver un seul hôtel ou une seule maison debout à
5 Slano, tout a été détruit et rasé.
6 Question: Etes-vous absolument sûr que c'était le fait d'actions de la
7 JNA?
8 Réponse: Absolument. Parce que je me suis rendu le 4 octobre à Slano, et
9 Slano était intacte; or c'est la date à laquelle la JNA y est entrée.
10 Question: Est-il vrai que des dizaines d'années avant ces événements, il y
11 avait des installations qui étaient censées assurer la défense, à partir
12 de la mer, de la ville, et que toute cette structure avait son quartier
13 général à Trebinje, mais que Dubrovnik et ses environs immédiats ne
14 disposaient d'aucune installation de ce genre?
15 Réponse: Oui, c'est précisément ce que j'ai dit; il n'y avait pas
16 d'installations militaires à Dubrovnik ou dans ses environs.
17 Question: Donc on peut qualifier cette zone de "zone démilitarisée",
18 n'est-ce pas?
19 Réponse: Exact.
20 Question: Alors, pourquoi avez-vous militarisé cette zone avec des mesures
21 que vous avez prises à cette époque, puisque des provocations ont été
22 menées contre l'armée qui a essuyé des tirs?
23 Réponse: Il n'y a eu aucune provocation à partir de cette zone contre
24 l'armée. Aucun tir n'a été ouvert contre l'armée à partir de cet endroit;
25 tout ça, ce sont des inventions. Nous avions simplement une petite unité
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1 de la Garde patriotique, avant l'attaque, dans cette région; et
2 malheureusement, après l'attaque, ces forces sont restées dans la zone. Et
3 nous avions aussi la police.
4 Je répète qu'à aucun moment et jamais il n'y a eu attaque ou provocation
5 contre l'armée populaire yougoslave. C'est le contraire qui s'est produit:
6 c'est la JNA qui a attaqué la population; et la population, à ce moment-
7 là, a fait ce qu'elle a pu -qui n'était pas grand chose- pour défendre les
8 citoyens.
9 Question: Connaissez-vous la décision de l'état-major? Moi, j'ai cité le
10 numéro et le titre de cette décision où on lit très clairement: "Ne pas
11 s'emparer de Dubrovnik, ne pas bombarder Dubrovnik à partir de la terre,
12 de l'air ou de la mer"?
13 Réponse: Je ne connais pas cette décision mais ce que je connais, ce sont
14 les faits. Et les faits montrent que l'armée populaire yougoslave a
15 attaqué, qu'elle a pilonné toute la municipalité de Dubrovnik à partir de
16 la terre, de l'air et de la mer.
17 Question: Savez-vous que Dubrovnik était assiégée, à l'époque? Et selon
18 les explications dont nous disposons, après tout nous avons vu aussi des
19 images sur la séquence vidéo que vous avez montrée, donc l'explication
20 c'était que dans toute la Croatie, les casernes de la JNA étaient
21 encerclés, que des soldats étaient tués, qu'il leur était impossible de
22 sortir, qu'il était impossible de les évacuer de ces régions. Etes-vous au
23 courant de cela?
24 Réponse: Ce que je sais, c'est qu'aucune évacuation éventuelle de l'armée
25 yougoslave n'a été empêchée sur le territoire de la Croatie. Au contraire,
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1 à plusieurs reprises, du côté croate, nous avons donné nos hommes pour que
2 les moyens techniques dont disposait l'armée populaire yougoslave en
3 Croatie puissent sortir de la Croatie, au moment où la décision a été
4 prise d'agir dans ce sens, parce qu'elle manquait d'hommes.
5 Et même si certaines casernes avaient été encerclées, est-ce qu'il est
6 normal que la réaction à cela soit d'assiéger une ville où, à l'époque,
7 habitaient 55.000 habitants, tous civils? Est-ce qu'il est normal de
8 frapper cette population sans pitié?
9 Question: Je ne vais pas entrer là-dedans parce que la Serbie n'a rien à
10 voir avec toute cette histoire de Dubrovnik, donc je suis incapable de
11 répondre à votre question.
12 Mais dites-moi, je vous prie, puisque vous-même avez dit ici qu'à la fin
13 de 1990, les armes ont été acquises, donc avant le début du conflit -c'est
14 ce que vous avez dit au cours de l'interrogatoire principal-, ces armes
15 ont-elles été acquises de façon illégale?
16 Réponse: La Croatie avait besoin d'armes pour renforcer sa défense à
17 l'intérieur des frontières dans lesquelles elle considérait être menacée.
18 Avant cela, elle avait été désarmée complètement par l'armée populaire
19 yougoslave. A cet égard, je dois dire que dans les municipalités où les
20 Serbes constituaient la majorité de la population, la JNA n'a pas retiré
21 ses armes à la Défense territoriale, elle les a laissées; et ces armes ont
22 été utilisées au cours du soulèvement, c'est cela qui s'est passé.
23 Par ailleurs, la Croatie était dans l'obligation de renforcer aussi sa
24 police à une époque très marquée par une grande instabilité; époque où il
25 était tout à fait clair qu'à partir de l'Est les troubles se développaient
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1 vers l'Ouest et qu'ils ne manqueraient pas de toucher la Croatie.
2 D'ailleurs, dans une certaine mesure, c'était déjà le cas en Croatie où il
3 y avait ce soulèvement.
4 Donc la Croatie a demandé aux autorités policières et militaires de lui
5 fournir un certain nombre d'armes. Les autorités fédérales ont refusé, de
6 même que ces autorités fédérales ont refusé de rendre à la Défense
7 territoriale en Croatie les armes qu'elle avait achetées elle-même. Donc
8 il n'y avait pas d'autre issue que d'acquérir des armes avec les moyens
9 qui le permettaient… qui étaient les seuls à le permettre.
10 Question: Je vais vous citer une phrase de votre interview, si vous voulez
11 bien. Vous dites -je cite-: "L'histoire, selon laquelle Bobetko aurait
12 libéré le Sud de la Croatie, est inexacte. Il n'a fait qu'accompagner le
13 retrait de ces troupes avec des opérations militaires de plus ou moins
14 grande intensité." (Fin de citation.)
15 Donc la JNA s'est retirée de ces territoires?
16 Réponse: Elle s'est retirée seulement en octobre 1992, donc une année
17 entière après le début de la prise de contrôle et de l'occupation de ce
18 territoire par la JNA, et elle l'a fait sur la base du plan Vance.
19 Question: Donc la JNA a respecté le plan Vance, n'est-ce pas?
20 Réponse: Oui, mais elle s'est retirée un an plus tard en ayant créé des
21 conditions de vie inhumaines dans la région qu'elle avait occupée, région
22 qui est restée détruite, pillée et incendiée.
23 Question: Oui, mais c'était la guerre, c'était une guerre qui n'aurait
24 jamais dû avoir lieu.
25 Vous faisiez partie de ce qu'on appelle "la direction" à l'époque. Vous
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1 dites ici, en réponse à une question qui est la suivante: "Est-ce que
2 vous-même ou d'autres en Croatie ont, à quelque moment que ce soit, violé
3 les lois de la guerre?", vous répondez: "Non. Permettez-moi de répéter que
4 le gouvernement n'a jamais discuté en détail des situations dans
5 lesquelles des crimes de guerre ont été commis. C'est par le biais
6 d'échanges d'informations privés que nous en avons été informés.
7 Cependant, je ne savais pas à quelle échelle ces événements se
8 produisaient, nous ne le savons qu'aujourd'hui." (Fin de citation.)
9 C'est bien exact, n'est-ce pas, vous avez dit cela?
10 Réponse: Oui, il est vrai qu'à l'époque nous n'avions pas d'informations
11 au sujet de ces événements. Plus tard, bien sûr, les médias ont diffusé
12 des informations au sujet de ces événements dans le premier, le deuxième
13 et le troisième secteurs.
14 Bien sûr, il appartiendra à la Chambre de première instance de faire toute
15 la vérité mais je considère que, lorsqu'un crime est commis, quelle que
16 soit la partie responsable de ce crime, elle doit être sanctionnée et
17 punie.
18 J'aimerais ajouter ce qui suit: il est vrai que du côté croate, il n'y
19 avait pas que des saints et des anges, mais vous, Monsieur Milosevic, ce
20 que les vôtres ont fait sur le territoire de Croatie, seul Satan aurait pu
21 le faire.
22 Question: Nous ne parlons pas ici de crimes individuels et, bien sûr, nous
23 sommes d'accord sur le fait que des crimes ont été commis de tous les
24 côtés, cela ne fait aucun doute, c'est un fait.
25 Mais je suis sûr que vous savez qu'en Croatie il n'y avait pas seulement
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1 cet armement illégal, vous en avez parlé pour 1990, mais aussi des
2 formations et des unités paramilitaires?
3 Réponse: Non, il n'y avait pas de paramilitaires en Croatie. Dans le cadre
4 des forces de police, il y avait le Corps de la Garde nationale croate qui
5 était une formation militaire tout à fait légale.
6 Question: Pouvez-vous alors commenter, très brièvement, la décision
7 diffusée dans le Journal officiel n°32, à la date du 6 août 1990, il
8 s'agit du règlement quant au maintien des registres comportant les noms
9 des jeunes volontaires au sein des unités de la défense civile, ce
10 document est signé par vous en tant que ministre de la Défense.
11 Réponse: Oui, je connais cette décision.
12 M. Milosevic (interprétation): J'ai une photocopie qui peut être
13 distribuée dans le prétoire.
14 M. le Président (interprétation): Oui. Qu'il en soit fait ainsi.
15 (Intervention de l'huissière.)
16 M. Kriste (interprétation): Oui, c'est effectivement le règlement sur
17 lequel j'ai apposé ma signature. Mais il ne s'agit pas d'un règlement
18 prévoyant la création de quelques formations paramilitaires que ce soit. A
19 la lecture de ce document, on voit qu'il s'agit d'unités de jeunes
20 volontaires censées agir dans le cadre de la défense civile, et ce, avant
21 tout, pour protéger les habitants contre les incendies qui ont frappé la
22 Croatie cette année-là, comme jamais depuis 1971.
23 M. Milosevic (interprétation): Mais ne considérez-vous pas que ce document
24 prouve bien qu'il était question de créer des formations paramilitaires?
25 Réponse: Il ne s'agit pas de formations paramilitaires. La défense civile
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1 est une organisation tout à fait légale dans le cadre des structures
2 juridiques existant à l'époque, et ces unités n'étaient qu'une partie de
3 la défense civile, elles devaient apporter leur aide dans le cadre exact
4 des attributions qui sont celles de la défense civile.
5 M. Milosevic (interprétation): Puisque nous avons constaté quels étaient
6 les objectifs poursuivis par l'armée croate, comme vous l'avez reconnu
7 vous-même...
8 M. le Président (interprétation): Voulez-vous que ce règlement soit versé
9 au dossier?
10 M. Milosevic (interprétation): Si vous voulez, vous pouvez le faire!
11 M. le Président (interprétation): Puisque nous parlons de cela, je vous
12 demande aussi si vous voulez que l'interview dont vous avez tiré un
13 certain nombre de citations soit versée au dossier également?
14 M. Milosevic (interprétation): Oui, c'est possible. Voilà, je vous donne
15 le journal tout entier.
16 M. Kriste (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
17 j'aimerais ajouter deux phrases de commentaire au sujet de cette
18 interview.
19 M. le Président (interprétation): Un instant, je vous prie.
20 Oui, Monsieur le Témoin.
21 M. Kriste (interprétation): Dans l'opinion publique croate, on sait bien
22 que je suis critique vis-à-vis de certains aspects de la politique du
23 Président Tudjman. Ceci transparaît également à la lecture de l'interview
24 dont nous venons de parler. Ce que je considère erroné dans cette
25 politique a d'ailleurs eu des effets négatifs sur notre façon de nous
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1 préparer à la défense et sur l'évolution ultérieure; je veux parler de la
2 privatisation et de l'évolution qui a marqué les entreprises. Cependant,
3 ceci n'a, en aucun cas, été la cause du début du conflit en Croatie.
4 La Croatie a été attaquée, elle s'est défendue, et pas un seul soldat
5 croate n'a franchi la frontière de la Serbie ou du Monténégro. Et ce qui
6 est un fait, c'est que l'armée populaire yougoslave, ainsi que des
7 formations paramilitaires de Serbie et du Monténégro ont pénétré en
8 profondeur à l'intérieur du territoire croate.
9 M. le Président (interprétation): Avant de poursuivre, nous devons obtenir
10 des cotes pour ces pièces à conviction.
11 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, la revue datée du 3
12 décembre 2002 sera la pièce à conviction de la défense 77, et le document
13 suivant la pièce à conviction 78.
14 M. le Président (interprétation): Très bien.
15 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
16 M. Milosevic (interprétation): Puisque la JNA était la force armée
17 régulière et légale de toute la RSFY, je vous demande si vous êtes en
18 train d'affirmer que des soldats serbes ont pénétré à l'intérieur de la
19 Croatie, si vous affirmez que des unités serbes ont pénétré à l'intérieur
20 du territoire croate, de quelles unités serbes parlez-vous et quelles
21 étaient donc ces unités qui ont pénétré sur le territoire croate?
22 M. Kriste (interprétation): Eh bien, différentes unités de volontaires
23 prétendument. Comme, par exemple, "les Hommes de Seselj", d'Arkan, "les
24 Aigles blancs", les hommes dirigés par le capitaine Dragan, par exemple.
25 Question: Vous considérez ces unités comme des forces régulières de la
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1 Serbie, c'est bien cela?
2 Réponse: Seselj n'a pas empêché ces actions; il n'a pas empêché ses hommes
3 de franchir la frontière et de pénétrer depuis le territoire serbe dans le
4 territoire croate. Bien au contraire, ces unités ont collaboré, agi
5 ensemble avec les unités de l'Armée populaire yougoslave.
6 Question: Mais dites-moi, je vous prie: au vu de ce que nous avons
7 constaté, à savoir les objectifs des forces dont vous dites qu'elles
8 étaient nombreuses, sous les ordres de Bobetko, et qu'elles ont avancé
9 jusqu'à l'Herzégovine et la Bosnie centrale, etc., donc compte tenu de
10 toute cette situation sur le théâtre de la guerre de Dubrovnik et
11 d'Herzégovine, est-ce qu'on peut considérer cela comme un aspect d'une
12 opération plus vaste menée? Ou bien -comment pourrais-je dire- peut-on
13 considérer cela comme des cas isolés qui méritent un traitement spécial en
14 dehors du contexte général de ce qui se passait à l'époque?
15 Réponse: Je crains de ne pas bien avoir suivi votre question.
16 Question: Qu'est-ce qui se passait sur le théâtre des opérations à
17 Dubrovnik et en Herzégovine? Est-ce que c'était simplement une partie
18 d'une opération plus générale qui avait pour but d'occuper l'Herzégovine
19 et de faire une percée vers la Bosnie centrale? Pour toutes ces forces
20 très nombreuses, vous avez dit que les forces sous la direction de Bobetko
21 étaient nombreuses à l'époque.
22 Réponse: Je ne sais pas quelles étaient les missions exactes confiées à
23 ces forces. Ce que j'ai dit était une interprétation libre de ma part.
24 Question: Bien. Pouvez-vous nous donner votre interprétation libre de ce
25 qui suit?
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1 J'ai ici une lettre qui vient du service fédéral du ministère de
2 l'Information. Il y est dit qu'autorisation est donnée de publier une
3 lettre du général Kadijevic adressée à Lord Carrington; et je vais vous
4 lire plusieurs passages de cette lettre. Je cite: "Les unités de la JNA
5 n'attaquent pas la vieille ville de Dubrovnik. Elles ont des ordres
6 explicites de respecter à la lettre les instructions consistant à ne pas
7 ouvrir le feu sur la ville". (Fin de citation.)
8 On me demande de ralentir, je vais ralentir.
9 Deuxièmement -je cite-: "Les effets provoqués par les unités de la JNA
10 dans la région de Dubrovnik sont dus à des actes de provocation de la part
11 des formations armées de la République de Croatie". (Fin de citation.)
12 Troisièmement -je cite-: "L'un des bastions à partir desquels on ouvre le
13 tir sur les unités de la JNA, ce sont les formations armées de la
14 République de Croatie stationnées à Kupari, à savoir à 5 km de Dubrovnik
15 où il y a un certain nombre d'installations militaires qui ont été
16 reprises précédemment et sur lesquelles les formations armées de la
17 République de Croatie ont pris le contrôle afin de lever le siège des
18 installations militaires de Dubrovnik, le 25 de ce mois, pour mener des
19 opérations ultérieures dans cette région". (Fin de citation.)
20 Tout cela est-il exact, ce que dit Kadijevic, dans sa lettre à Carrington?
21 Réponse: Ce que vous venez de lire est inexact. Parce que la JNA a
22 commencé à agir le 1er octobre. Je répète qu'à plusieurs occasions elle a
23 pilonné la ville de Dubrovnik et notamment la vieille ville sans qu'il y
24 ait eu la moindre provocation de la part des défenseurs de la ville.
25 En dehors de cela, à partir de Kupari, je ne sais pas qui aurait pu
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1 attaquer la JNA puisque le territoire de la République de Croatie était
2 déjà soumis à des opérations de guerre.
3 M. Milosevic (interprétation): Bien. Il y avait des installations armées
4 utilisées en temps de paix dont le contrôle avait été repris précédemment?
5 M. Kriste (interprétation): C'étaient des centres de vacances. Et il est
6 tout à fait normal que, lorsque l'armée lance une attaque sur Dubrovnik,
7 les forces en question utilisent toutes les installations, tous les moyens
8 à leur disposition y compris les centres de vacances de Kupari.
9 Maintenant, dans quelle mesure ces installations ont été utilisées, je ne
10 sais pas.
11 M. le Président (interprétation): Un instant.
12 Madame Uertz-Retzlaff?
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, pouvons-nous
14 avoir la date de la lettre? Cela permettra plus facilement au témoin de
15 répondre aux allégations qui lui sont soumises pour dire si elles sont
16 correctes ou pas.
17 M. le Président (interprétation): Quelle est la date de cette lettre,
18 Monsieur Milosevic?
19 M. Milosevic (interprétation): J'ai cité la date, j'ai dit que c'était
20 celle du 26 octobre.
21 Dans la lettre, il est dit que: "Le 26 de ce mois, j'ai envoyé une
22 proposition au Président de la République de Croatie, le Dr Franjo
23 Tudjman, pour demander la démilitarisation de Dubrovnik sous le contrôle
24 de la Communauté européenne". (Fin de citation.)
25 C'est ce qu'il a écrit. Et il ajoute ensuite -je cite-: "Au moment où
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1 j'écris ces lignes, je dispose de l'information selon laquelle les
2 formations armées de la République de Croatie de Vukovar ont ouvert le feu
3 au mortier sur la caserne de la ville et ce, pendant un temps très long."
4 (Fin de citation.)
5 Il poursuit ensuite, en parlant des blessures, du nombre de blessés dans
6 la population, etc.
7 Donc est-ce que cette information est exacte, selon laquelle le secrétaire
8 à la Défense fédérale, le ministre, le général Kadijevic, a envoyé cette
9 lettre à Lord Carrington? Ou bien est-ce qu'il voulait tromper Lord
10 Carrington ainsi que l'opinion publique yougoslave et croate, et tout le
11 monde?
12 M. Kriste (interprétation): Très manifestement, il a trompé tout le monde;
13 parce que le 26 octobre, à savoir 26 jours après le début de l'attaque de
14 la JNA sur Dubrovnik, les actions ont été tout à fait contraires à ses
15 affirmations. Il a attaqué des installations civiles et il a détruit tout
16 ce qui était nécessaire pour assurer une vie normale à la communauté, à
17 savoir à la population civile.
18 Question: Est-il exact -à en juger par ce dont je dispose dans cette
19 information- que la Serbie n'avait rien à voir avec les opérations menées
20 à Dubrovnik? Je vous demande s'il est vrai que les seules cibles
21 existantes, à l'époque, étaient les installations à partir desquelles le
22 feu a été ouvert sur la JNA parce qu'il s'agissait de cibles militaires;
23 ceci est-il exact ou pas, Monsieur le Témoin?
24 Réponse: Ceci n'est pas exact. D'abord, les unités de la JNA ont ouvert le
25 feu avant le moindre tir de la part de nos forces; j'ai dit cela plus tôt
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1 et je le répète: même avant le 1er octobre, à Konavle, Brgat et Komunalac.
2 Et puis, le 1er octobre, la JNA et ses unités ont également lancé des
3 opérations en l'absence d'une quelconque opposition ou résistance de la
4 part des forces croates. Et je répète que la JNA a agi un peu partout;
5 elle a agi contre les quartiers des villes, elle a agi contre des hôtels
6 qui hébergeaient y compris des réfugiés, à Konavle et dans d'autres
7 régions de la Croatie, des réfugiés venant de l'est de la Croatie de la
8 Slavonie orientale notamment, qui étaient donc arrivés à Dubrovnik après
9 avoir fui ces régions.
10 Il n'y avait d'ailleurs pas de cibles militaires à Dubrovnik, à ce moment-
11 là. C'est seulement beaucoup plus tard, lorsque l'armée yougoslave est
12 arrivée très, très près de la ville, qu'éventuellement il est possible
13 qu'il y ait eu un point ou deux qui aient été créés. Mais tout cela,
14 toujours loin des centres habités par la population et loin de la vieille
15 ville. Donc toutes ces allégations sont fausses.
16 Question: Comment expliquez-vous dès lors que le 15 octobre, d'après mes
17 interventions, la JNA ait pénétré dans Cavtat et qu'à Cavtat, personne n'a
18 tiré sur la JNA? Il n'y a pas eu de combat et Cavtat n'a subi aucun
19 dommage; n'est-ce pas vrai?
20 Réponse: C'est exact, Cavtat n'a subi aucun dégât. Mais tous les villages
21 environnants -Zvekovica, Cilipi, Mocici- ont été détruits, rasés. Je l'ai
22 dit et je le répète: Cavtat s'est trouvée dans une situation où l'armée
23 est entrée en se servant d'un stratagème; l'armée avait dit qu'elle
24 n'allait pas aller plus loin que l'aéroport de Cilipi et dès que notre
25 équipe de négociation s'est retirée et est allé à Cavtat pour aller à
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1 Dubrovnik, l'armée est entrée dans Cavtat.
2 Question: Fort bien. Mais dites-moi: ce conflit entre l'armée et vos
3 formations paramilitaires, c'est quelque chose qui est tout à fait en
4 dehors du contexte des événements qui se produisaient en Yougoslavie à
5 l'époque. Vous êtes un homme politique, vous étiez ministre, à l'époque.
6 Y a-t-il une seule décision, une seule procédure, une seule déclaration
7 officielle de la part d'un quelconque organe, des autorités de la RSFY,
8 d'un représentant du Monténégro, République voisine, ou de quelque organe
9 du pouvoir ou structure politique de la RSFY ou du Monténégro, qui aurait
10 nié le fait notoire que Dubrovnik faisait partie de la République de
11 Croatie et qu'il n'y avait aucune prétention territoriale par rapport à
12 Dubrovnik ou par rapport à une autre partie de la Croatie? Qui que ce
13 soit, au niveau de l'Etat fédéral, de la Serbie ou du Monténégro, y a-t-il
14 qui que ce soit qui aurait manifesté des aspirations, quelles qu'elles
15 soient, à l'égard d'un quelconque territoire à l'extérieur de la Serbie ou
16 du Monténégro; ou ici, en l'espèce, à partir de Dubrovnik?
17 Réponse: Il ne se serait pas logique de que telles aspirations soient
18 rendues publiques mais, dans les faits, elles existaient. Et les unités
19 militaires ont exécuté, ont mis en pratique ces aspirations.
20 Question: Est-il vrai que le 21 janvier 1991, bien des mois avant tout
21 ceci, dans le cadre de cette militarisation qui était tout à fait
22 superflue à Dubrovnik, est-il vrai de dire que ce jour-là, une première
23 livraison d'armes, de munitions, est arrivée qui avait été acquise pour
24 répondre aux besoins de vos unités à Dubrovnik?
25 Réponse: Il n'y a aucune arme qui est arrivée à l'aéroport de Dubrovnik;
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1 ça, c'est certain.
2 Question: Et le 24 janvier 1991?
3 Réponse: Je n'ai pas de renseignements à ce propos. Mais s'il y avait eu
4 un arrivage de cette sorte, ces armes se seraient trouvées à Dubrovnik au
5 moment du début de l'attaque.
6 Question: Et le personnel de la municipalité de Dubrovnik a-t-il été
7 formé, le 6 septembre 1991?
8 Réponse: Quelle date?
9 Question: Le 6 septembre.
10 Réponse: Il existait le personnel de la Défense territoriale.
11 Question: Est-il exact de dire qu'il existait tout un plan destiné à poser
12 des mines tout autour de Dubrovnik?
13 Réponse: Il se peut que ce projet ait été mis au point plus tard, bien
14 plus tard, lorsqu'il est devenu apparent qu'il y avait une attaque
15 imminente qui avait été planifiée contre Dubrovnik, lorsque nous avions
16 des preuves tangibles à cet effet.
17 Question: Et de quelles preuves tangibles disposiez-vous? Quelles preuves
18 aviez-vous, quand cette armée puissante qui se trouvait autour de vous n'a
19 pas essayé de capturer la ville, alors qu'elle aurait pu le faire si elle
20 avait voulu?
21 Réponse: Elle a essayé de le faire. La dernière tentative en date de
22 capturer la ville, de s'emparer de la ville, c'était le 6 décembre; mais
23 cette tentative a échoué et comme elle a provoqué des réactions très vives
24 de la part de la communauté internationale, d'autres efforts de ce genre
25 ne sont pas répétés.
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1 Mais je dois dire que toute la zone de Dubrovnik a été saisie par la JNA;
2 la JNA s'en est emparée. La seule partie qui est restée libre et non
3 occupée, ça a été la ville même de Dubrovnik. La ville de Sustjepan
4 jusqu'à l'hôtel Belvédère, cela représente peut-être une dizaine de
5 kilomètres. Pour le reste, le reste de cette zone s'est trouvé sous le
6 contrôle de l'armée qui l'a occupée pendant toute une année.
7 Question: Et quelle en est la raison? Est-ce que la raison, alors que nous
8 nous trouvons dans un centre de réputation touristique mondiale, c'est la
9 formation d'unités armées qui représentaient une menace pour la vie
10 paisible de la population?
11 Réponse: Ces formations ne représentaient aucune menace pour la
12 population?
13 Question: Et quelle était leur intention, alors que personne n'avait
14 l'intention de s'emparer de la ville?
15 Réponse: Et qui vous dit que personne n'avait de telles intentions. Les
16 faits prouvent le contraire. Il y a eu des tentatives en vue de s'emparer
17 de la ville. L'essentiel de ce territoire, en fait, était placé sous le
18 contrôle. On pourrait penser que tout ceci pouvait se produire et semblait
19 plus que probable. Tout comme il était possible de partir de l'idée qu'il
20 allait y avoir une guerre contre la Croatie qui a, effectivement, été
21 déclenchée très peu de temps après, en 1991, et que ceci était destiné à
22 faire se déplacer les frontières de la Serbie vers l'ouest.
23 Question: Vous connaissez la déclaration constitutionnelle de la RSFY du
24 27 avril 1992. Vous savez que celle-ci n'entretenait aucune aspiration de
25 ce genre, que la République fédérale de Yougoslavie n'avait aucunement
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1 d'aspiration envers quelque République que soit après que la Slovénie, la
2 Croatie, la Bosnie-Herzégovine aient été reconnues?
3 Réponse: Oui mais… Non, je ne suis pas au courant de cette déclaration,
4 mais il demeure que, de ces jours-là, 30% du territoire croate s'est
5 trouvé sous le contrôle d'unités paramilitaires, d'insurgés serbes et de
6 l'armée yougoslave.
7 Question: Vous parlez de cette partie du territoire où les Serbes
8 constituaient la majorité?
9 Réponse: Je vous ai déjà dit que les Serbes ne représentaient pas la
10 majorité dans cette zone-là; il y avait davantage de Croates que de
11 Serbes.
12 Question: Mais je ne parle pas Dubrovnik.
13 Réponse: Mais moi aussi, je parle de la totalité de la Croatie. Les zones
14 protégées déclarées par les Nations Unies, eh bien, constituaient une
15 limite qui était hors de portée des autorités croates et elles couvraient
16 pratiquement la moitié de la Croatie, si on voit les zones qui se trouvent
17 entre ces zones protégées, parce qu'en fait elles divisent la Croatie en
18 plusieurs parties.
19 Question: Et dites-moi, qui détermine les confins de ces zones protégées
20 par les Nations Unies? Est-ce que ce sont les Nations Unies qui les ont
21 déterminés?
22 Réponse: Les Nations Unies se sont contentées d'accepter la situation de
23 fait, telle qu'elle se présentait sur le terrain. Les Nations Unies ont
24 maintenu les frontières jusqu'où étaient allés les Serbes, les insurgés,
25 avec l'aide de l'armée et de ses unités paramilitaires.
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1 Question: Et c'est ainsi qu'ont été formées les zones protégées des
2 Nations Unies qui servaient à confirmer la répartition de la population
3 serbe qui était en péril, n'est-ce pas, en Croatie?
4 Réponse: Pas du tout! Ce n'était pas conforme à la réalité du terrain, à
5 la réalité du territoire habité par les Serbes par rapport à la majorité
6 de la population. Je vous l'ai déjà dit: en Croatie, les Serbes même… je
7 sais qu'il y a eu des actes inappropriés commis à titre individuel par des
8 individus; je peux vous dire que les Serbes n'étaient pas en danger, je le
9 dis avec conviction.
10 La politique de la Croatie n'était pas de causer des problèmes ni de
11 mettre en danger qui que ce soit. S'il y avait insurrection, c'était à la
12 suite d'activités déployées par les services secrets, par des agents tels
13 que Seselj et d'autres, qui venaient pour l'essentiel de la Serbie.
14 Question: Fort bien.
15 Monsieur Kriste, alors vous affirmez qu'il n'y a pas eu de militarisation
16 de Dubrovnik avant la survenue de ces événements destinés précisément à
17 provoquer la JNA et à la chasser du territoire de la Croatie?
18 Ecoutez, nous allons voir un extrait, une séquence très brève: c'est
19 quelque chose de très court, un extrait très bref. J'espère que la régie
20 est en mesure de le diffuser, c'est un extrait très court.
21 Si cet extrait n'est pas prêt pour la diffusion…
22 M. le Président (interprétation): Un instant, je pense que cela pourrait
23 être prêt sous peu. Mais poursuivez, Monsieur Milosevic, nous reviendrons
24 à la diffusion de cet extrait par la suite.
25 M. Milosevic (interprétation): Fort bien.
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1 Est-il exact que, le 19 septembre 1991, on a eu un nouvel armement de
2 Dubrovnik alors que Dubrovnik avait déjà été fournie en armes?
3 M. Kriste (interprétation): Il n'y a pas eu d'armement plus tôt ou plus
4 tard. Dubrovnik a réussi à obtenir 300 armes d'infanterie jusqu'au
5 1eroctobre, moment où est intervenue l'invasion. Le 19 septembre, il n'y
6 avait pas eu d'armement, aucune arme n'est arrivée à Dubrovnik.
7 Question: Savez-vous que nous avons ici des preuves fournies par certains
8 témoins venant de votre ville de Dubrovnik, qui ont indiqué les positions
9 occupées par des mortiers, par des canons antiaériens, des positions
10 mobiles à partir desquelles on a ouvert le feu depuis Dubrovnik.
11 Réponse: Mais ça, ça a pu se passer mais seulement après le 1er octobre.
12 Question: Est-il exact de dire que le 29 septembre un ordre a été donné
13 pour qu'il y ait déplacement vers la ligne de séparation, vers la
14 frontière avec le Monténégro qui faisait quelque 700 mètres de long? Et
15 savez-vous qu'au début d'octobre il y a eu une cérémonie à la mémoire des
16 soldats qui avaient été tués sur le Monténégro, car on avait ouvert le feu
17 sur eux depuis le territoire de Croatie? Vous vous souvenez de cela?
18 C'était une réunion de l'assemblée, et les dirigeants du Monténégro ont
19 tenu une séance de travail à cet égard, ceci est passé à la télévision.
20 Réponse: Des soldats yougoslaves ou des Monténégrins ont été tués par des
21 Croates, mais cela ne s'est pas passé à ce moment-là ni plus tard. Peut-
22 être que cela a été publié dans vos journaux, mais n'importe quoi était
23 publié dans vos journaux. Ce qui est certain, c'est qu'il n'y a pas eu
24 d'activité militaire menée par nous le long de cette frontière. Ces
25 activités militaires, elles avaient commencé bien plus tôt, c'est-à-dire
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1 fin septembre, et cela avait été déclenché par le côté du Monténégro.
2 J'ai des amis dans la baie de Kotor, je m'y rends chaque été, personne ne
3 m'a jamais parlé de ce que vous racontez.
4 Question: Ces informations m'ont été confirmées par bien des côtés.
5 Dites-moi, est-il exact de dire que le 30 septembre des lignes de combat
6 militaires ont été établies, qui faisaient 700 mètres de long, qui
7 allaient de Brgat jusqu'au Mont Barbara, et qu'on a ouvert le feu depuis
8 ces positions, et ceci a été le fait de la garde croate, de la police, de
9 civils armés organisés en peloton. Est-ce exact ou pas? Dites-le moi;
10 dites-moi si vous pensez si c'est vrai ou pas; de cette façon, nous
11 pourrons avancer.
12 Réponse: Je ne sais pas ce qu'il en est du déploiement exact de nos
13 forces. Cependant, le 29 septembre, ça c'est la veille de l'attaque menée
14 par l'armée yougoslave contre Dubrovnik, je vous l'ai dit, on s'attendait
15 à cette attaque; nous avions des renseignements dignes de foi que nous
16 tenions d'un homme qui venait de la garnison de Trebinje. Donc nous
17 savions comment les choses évoluaient, puisque ce village de Brgat se
18 trouve sur la route qui va de Trebinje à Dubrovnik. Or si on avait une
19 attaque, on s'attendait à ce qu'elle vienne de là; je n'exclus pas la
20 possibilité que certaines de nos forces aient été déployées dans ce
21 village ou en direction de celui-ci. Cependant, si vous voyez l'ensemble
22 des effectifs que nous nous disposions, ce chiffre que vous mentionnez est
23 tout à fait réaliste.
24 M. Milosevic (interprétation): Puisque ni vous ni moi ne semblons être au
25 courant de cela… Or, ici, j'ai ici une note, l'ordre précis du grand état-
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1 major de la JNA, 1171 du 4 octobre 1991. Il est dit, dans cet ordre, ceci:
2 "Dubrovnik ne doit pas être conquise et il ne faut pas non plus ouvrir le
3 feu sur la ville, que ce soit par des tirs d'artillerie ou par les forces
4 aériennes." Vous connaissez cet ordre?
5 M. Kriste (interprétation): Je ne connais pas cet ordre, mais je connais
6 les faits, puisque j'étais à Dubrovnik le 1er octobre, quatre jours avant
7 que cet ordre ne soit délivré. Je sais que l'armée yougoslave a mené une
8 attaque sur Dubrovnik par air, par terre et par voie de mer. Dans ce
9 contexte, il m'intéresse peu de savoir que quatre jours plus tard, le
10 grand état-major ait pu émettre un tel ordre, puisqu'il y a eu des
11 attaques incessantes sur Dubrovnik à partir du 1er septembre.
12 M. le Président (interprétation): Je vous interromps, Monsieur Milosevic,
13 pour vous dire que cet extrait est prêt pour diffusion. Si vous voulez le
14 faire diffuser, dites-nous d'où vient cet extrait.
15 M. Milosevic (interprétation): Ça a été filmé à Dubrovnik même par leurs
16 gens à eux; et on voit la prise de serment de ces hommes. Vous allez voir
17 ces images et vous pourrez juger de la valeur à leur donner par vous-même.
18 C'est un extrait très court.
19 M. le Président (interprétation): Vous avez reçu cette cassette du
20 Procureur?
21 M. Milosevic (interprétation): Non, ce sont mes associés qui me l'ont
22 fournie.
23 M. le Président (interprétation): Cela a donc été filmé par les Croates?
24 C'est cela que vous voulez dire?
25 M. Milosevic (interprétation): Mais bien sûr! Les Serbes n'étaient pas là.
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1 (Diffusion de la vidéo.)
2 "-Je prête serment, je prête serment par tout ce qui m'est sacro-saint, de
3 m'en tenir au principe oustachi pour réaliser tous les ordres du
4 commandant. Et je garderai le secret, je ne trahirai rien. Je me battrai
5 en bon Oustachi pour la réalisation d'un Etat indépendant croate et je
6 prête serment de défendre la liberté nationale croate dans les rangs
7 oustachis. Si je viole ce serment, j'accepte d'assumer la pleine
8 responsabilité et j'accepte d'avance la peine de mort."
9 (Fin de la diffusion de la cassette.)
10 M. Milosevic (interprétation): Comment pouvez-vous faire des commentaires
11 à ce sujet? Parce que, d'après ce que je vois, cela ne coïncide pas du
12 tout avec les positions que vous avancez dans l'interview que nous avons
13 vue tout à l'heure et...
14 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il vous faut quand
15 même poser des questions qui respectent une certaine équité, parce que
16 vous nous avez montré quelques images de gens qui n'ont pas l'air très
17 militaire et qui font une prestation de serment dans un endroit public,
18 une espèce de café. Vous pouvez demander un commentaire au témoin, bien
19 sûr, mais il faudra que vous nous indiquiez en quoi ceci est pertinent
20 face à la déposition du témoin, en quoi ceci contredit les dires du témoin
21 parce que cela ne m'apparaît pas clairement, je dois vous l'avouer.
22 Maintenant que le témoin a vu ces images, peut-être peut-il apporter un
23 commentaire?
24 M. Kriste (interprétation): Non, je ne peux apporter aucun commentaire. Je
25 n'ai vu cet enregistrement nulle part auparavant. Il est évident qu'il
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1 s'agit là d'un groupe de jeunes gens, mais je ne sais pas où cela a pu
2 être filmé; cela a pu être filmé n'importe où. En tout état de cause, cela
3 ne fait pas partie d'une politique croate quelconque, cela n'était pas un
4 acte solennel de quelque sorte que ce soit.
5 M. Milosevic (interprétation): Mais ce n'est pas le fait de la politique
6 croate; il s'agit d'un serment oustachi.
7 M. Kriste (interprétation): Cela a pu être filmé à Belgrade aussi bien.
8 Question: Oh, bien, très bien! Alors, je n'ai pas besoin de commentaire
9 autre. Si cela est tourné à Belgrade, alors...
10 Réponse: Je n'ai pas dit que cela a été fait à Belgrade, mais cela aurait
11 pu être tourné n'importe où. S'agissant de ces slogans oustachis, en
12 Croatie, il y a essentiellement eu des individus qui étaient secrètement
13 en contact avec les services de renseignement et de contre-renseignement
14 militaires, et on ne s'est servi de cette rhétorique que pour compromettre
15 l'idée de l'indépendance croate.
16 Question: D'après vous, cela devrait être une sorte de montage des
17 services secrets extérieurs à la Croatie, n'est-ce pas?
18 Réponse: Je n'affirme rien de concret. Ce que je dis, c'est que je ne vois
19 en rien que cela ait pu se faire à Dubrovnik et que cela ait pu être le
20 fait d'une instance officielle quelconque.
21 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Donc vous n'êtes pas au courant
22 de l'ordre émis en date du 4 octobre interdisant d'ouvrir le feu?
23 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais vous arrêter
24 là parce que vous avez déjà répété cette question plusieurs fois; et
25 chaque fois, le témoin dit ne pas être au courant. Votre temps est
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1 pratiquement épuisé. Demandez-vous un supplément de temps?
2 M. Milosevic (interprétation): Oui, je demande un supplément de temps.
3 M. le Président (interprétation): Combien de temps voulez-vous?
4 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, écoutez, je vais vous dire…, j'ai
5 encore quelque 40 questions à lui poser, questions que je me suis noté
6 chez moi.
7 (Les Juges se consultent sur le siège.)
8 M. le Président (interprétation): Monsieur Tapuskovic, voulez-vous poser
9 des questions à ce témoin ou pourriez-vous vous en passer pour essayer de
10 terminer l'audition de ce témoin aujourd'hui?
11 M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, je pense qu'il y a
12 beaucoup de choses qui peuvent être d'utilité pour la Chambre. Je ne sais
13 pas quelles sont les questions que va poser M. Milosevic, mais s'il ne
14 pose pas les questions que j'ai en tête, j'aurai besoin d'un peu de temps
15 pour poser ces questions. Mais il me convient d'attendre de voir quelles
16 sont les questions dont va traiter M. Milosevic.
17 Mais il y a des questions qu'il convient de poser, concernant tous les
18 événements à Dubrovnik ou autour de Dubrovnik, et qui sont en corrélation
19 avec le témoignage de ce témoin. Et ceci pourrait vous permettre d'avoir
20 une meilleure vue d'ensemble sur tout le sujet.
21 (Les Juges se consultent sur le siège.)
22 M. le Président (interprétation): Vous disposerez d'un quart d'heure de
23 plus, Monsieur Milosevic.
24 M. Milosevic (interprétation): Un quart d'heure seulement? Bon.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'aimerais aussi vous mentionner le
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1 fait que j'aurai besoin de cinq minutes, parce que je pense qu'il y a une
2 erreur qu'il faut rectifier.
3 M. le Président (interprétation): Je crains qu'il ne faille faire revenir
4 le témoin demain afin qu'il termine sa déposition.
5 Poursuivez, Monsieur Milosevic.
6 M. Milosevic (interprétation): Savez-vous que dès le 8 octobre, à savoir
7 quatre jours après l'ordre mentionné tout à l'heure, il a été procédé au
8 sanctionnement (sic) de membres indisciplinés de la JNA, s'agissant de la
9 même opération?
10 M. Kriste (interprétation): Je ne suis pas au courant.
11 Question: Et serait-il exact de dire qu'en date du 17 octobre, il y a eu
12 des activités assez intenses de la part des forces de Dubrovnik, au
13 mortier, sur les positions de la JNA dans les alentours? Le savez-vous ou
14 pas?
15 Réponse: Non, non, je ne suis pas au courant. Et je ne pense pas que ce
16 renseignement-là soit exact.
17 Question: Et savez-vous dans quel hôtel étaient installés les effectifs
18 des ZNG, à savoir du rassemblement de la Garde nationale et du MUP? Je
19 sais qu'à "Tirenja President", "Revelin Tower", il y a eu des munitions;
20 le saviez-vous?
21 Réponse: Dans les hôtels que vous venez de citer, il y avait notamment des
22 réfugiés, des personnes déplacées.
23 Question: Savez-vous que les commandants de la JNA, par le biais de "Radio
24 Herceg-Novi" que l'on entend très bien à Dubrovnik, ont lancé des appels à
25 l'intention de ceux qui se trouvaient à Dubrovnik pour ne pas qu'ils
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1 ouvrent le feu en direction des membres de la JNA? Et on leur disait que,
2 s'ils ne le faisaient pas, on ne tirerait pas une seule balle dans leur
3 direction?
4 Réponse: Mais, en fait, c'était un appel à la reddition.
5 Question: Mais est-ce que j'ai été clair? J'ai dit que, par le biais de
6 "Radio Herceg-Novi", on avait supplié les gens de ne pas ouvrir le feu en
7 direction de l'armée et que l'on ne tirerait pas une seule balle si on ne
8 tirait pas sur l'armée?
9 Réponse: Mais on n'a pas tiré sur l'armée, jusqu'au moment où l'armée a
10 ouvert le feu vers les forces de la défense. La partie croate n'a fait que
11 répondre, que riposter en défense au feu de la JNA.
12 Question: Mais savez-vous qu'on a ouvert le feu non seulement depuis les
13 alentours de la vieille ville mais depuis la vieille ville aussi; il y
14 avait des camions avec des pièces d'artillerie dessus? vous ne le savez
15 pas?
16 Réponse: Non seulement je n'ai pas connaissance, mais cela n'est pas
17 arrivé. Il n'y a pas eu de camions avec des armes qui aient eu accès à la
18 vieille ville.
19 Question: Mais savez-vous que l'on a ouvert le feu à partir des positions
20 à proximité de l'hôtel Neptune, puis de Medarevo où se trouvaient les ZNG?
21 Et là, il y avait des pièces d'artillerie. Puis, de Lapadska Glavica, on a
22 tiré à l'artillerie. Puis, de Gorica, on a tiré à l'artillerie. De Gradac,
23 de la plage Ploce également, à l'artillerie. Puis, des hôtels Belvédère et
24 Libertas, où se trouvaient installés des membres armés en uniforme et qui
25 faisaient partie des unités paramilitaires croates. Le savez-vous?
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1 Réponse: S'agissant de certaines de ces positions, il a pu y avoir des
2 activités militaires, mais seulement bien plus tard, lorsque l'armée, à
3 savoir la JNA et les unités qui l'accompagnaient, ont fini d'encercler
4 Dubrovnik.
5 Depuis la plage de Ploce, il est certain qu'on n'a pas pu ouvrir le feu.
6 Mais s'agissant des hôtels en question, je puis dire qu'il y avait une
7 unité des nôtres qui se trouvait à l'hôtel Belvédère, parce que c'était
8 notre dernière ligne ou dernier point de défense du côté est de la ville.
9 Question: Mais n'est-il pas exact de dire que, le 14 septembre, à Debeli
10 Brijeg, au niveau du village de Vitaljina, il y a eu des mortiers
11 d'installés par les "Zenga"; et au niveau du village de Prsecina, 200
12 membres du ZNG étaient déployés?
13 Réponse: La défense croate n'avait pas autant de membres dans ses
14 effectifs, donc elle ne pouvait pas les déployer à tous ces endroits, ni à
15 Debeli Brijeg ni ailleurs.
16 Question: Et du côté monténégrin?
17 Réponse: Mais il y avait des effectifs du côté monténégrin.
18 Question: Mais savez-vous que le 23 septembre, les membres du ZNG à
19 Vitaljina ont placé des mortiers et des canons pour provoquer la JNA
20 depuis ces positions-là, en ouvrant le feu en direction du territoire
21 monténégrin, justement?
22 Réponse: Ce renseignement est inexact. Si cela était vrai, j'aurais été au
23 courant. A l'époque, Vitaljina, en raison des attaques lancées depuis le
24 côté est, a été vidée de ses habitants qui sont allés à Babin Kuk.
25 Question: Mais qu'est-il arrivé, le 24 septembre, dans le secteur
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1 d'Ivanica?
2 Réponse: Dans le secteur d'Ivanica, ce jour-là, il n'a pu y avoir que des
3 tirs en direction de Brgat. Parce que je suis arrivé le 26 à Dubrovnik, le
4 26 septembre, n'est-ce pas, et on m'a informé que, depuis Ivanica, on
5 avait ouvert le feu vers Brgat.
6 Le lendemain, j'ai visité les localités de Brgat et Komunalac et j'ai
7 constaté que les choses étaient exactes parce que certains bâtiments
8 étaient endommagés et un bâtiment était complètement détruit à la
9 "Maljutka".
10 Question: Mais ces localités se trouvent sur le territoire de la Bosnie-
11 Herzégovine, Ivanica et Komunalac?
12 Réponse: Oui.
13 Question: Et Ivanica a-t-elle été rasée ou pas?
14 Réponse: Quand?
15 Question: Est-ce que ce sont les Serbes qui l'ont rasée?
16 Réponse: S'agissant d'Ivanica, en 1991, il n'y a pas certainement pas eu
17 d'activités déployées du côté croate et on n'a détruit ni maison ni… ne
18 serait-ce qu'une tuile. Je ne sais pas ce qui s'est passé quand la JNA
19 s'est retirée en 1992.
20 Question: Bien. Mais vous nous dites que vous étiez à Dubrovnik avant que
21 la JNA ne lance ses attaques sur cette région. D'où venaient ces attaques?
22 Réponse: Ces attaques venaient de deux directions: depuis le Monténégro en
23 direction de Konavle, la principale attaque vers la ville même venait de
24 cet axe allant d'Ivanica et par la route au-delà de Dubrovnik, sur les
25 hauteurs de Dubrovnik; et c'est si près de la ville que depuis cette
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1 frontière, on pouvait taper sur la ville avec toute latitude. On pouvait
2 donc taper sur les environs et la ville-même, et c'est ainsi que l'on a
3 détruit les installations communales et que l'on a mis hors fonction les
4 installations qui étaient destinées à l'approvisionnement de la ville en
5 eau et en électricité. Le même jour, les avions ont abattu l'émetteur-
6 récepteur sur la montagne de Srdj, ce qui a interrompu les moyens de
7 communication.
8 Question: Mais ces destructions, c'est la JNA qui les a faites ou est-ce
9 le fait d'autres forces?
10 Réponse: C'était la JNA, avec les volontaires de Vucurevic, probablement.
11 Question: Pourquoi dites-vous: "probablement la JNA"? C'était la JNA?
12 Réponse: La JNA avait procédé à ces attaques. De là à savoir maintenant
13 qui il y avait –encore- à ses côtés à l'occasion de ces attaques, ça, je
14 ne le sais pas.
15 Question: Savez-vous que le commandement des ZNG, avec Spegelj à leur tête
16 -s'agissant du commandement de la Croatie-, il avait été placé au premier
17 plan la nécessité d'éliminer la présence de la JNA de Croatie, donc cela
18 avait été la politique et le plan officiellement avancé par la Croatie. Il
19 s'agit de l'année 1991 et du mois de juillet.
20 Réponse: Oui, il s'agissait de juillet 1991. A l'époque, Spegelj avait
21 présenté un plan de défense de la Croatie. Les détails afférents à ce plan
22 me sont inconnus.
23 Mais je tiens à vous rappeler autre chose: cela se passe un mois après
24 l'attaque de la JNA sur la Slovénie et après l'échec de la JNA; c'est par
25 la suite qu'elle s'est dirigée avec plus de force encore, avec plus de
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1 puissance, sur la Croatie.
2 Question: Mais savez-vous que, s'agissant de l'attaque en Slovénie, la
3 direction slovène elle-même, en ma présence, a affirmé que cela n'avait
4 rien à voir avec la chose, que la Serbie n'était même pas au courant; est-
5 ce que vous le savez?
6 Réponse: Je ne sais pas ce que les dirigeants slovènes ont bien pu vous
7 dire. Ce que je sais, c'est que l'armée yougoslave s'était attaquée à la
8 Slovénie et que la guerre s'est déroulée pendant plusieurs jours, suite à
9 quoi la JNA s'était retirée.
10 Question: Oui, mais ils s'étaient attaqués à des soldats qui n'avaient
11 même pas de munitions dans leurs armes?
12 Réponse: Je ne sais pas le dire.
13 Question: Vous souvenez-vous du fait que la dynamique de ce plan de
14 Spegelj prévoyait des attaques sur les casernes, les aéroports et la prise
15 de toutes les installations militaires dans un délai de quatre jours? Vous
16 souvenez-vous de ce plan-là?
17 Réponse: Au cas où, après la Slovénie, l'armée yougoslave viendrait à
18 attaquer la Croatie, il était tout à fait logique de mettre en place un
19 plan qui permettrait à la partie croate de se procurer les moyens
20 nécessaires pour sa défense. Je tiens à faire remarquer que le plan de
21 Spegelj a été rejeté.
22 Question: Mais c'est ce qui a été effectivement fait dans les faits,
23 quoique le plan n'ait pas été accepté?
24 Réponse: Non, cela ne s'est pas fait ainsi. Certaines casernes ont été
25 prises ultérieurement par la volonté des unités locales, des cellules de
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1 crise. C'était la seule façon de se procurer le matériel qui permettrait à
2 la partie croate de résister, autant que faire se pouvait, à un ennemi
3 bien plus fort tel que la JNA.
4 Question: Vous souvenez-vous de l'accord de Igalo où l'on disait qu'il
5 était impératif pour les forces sur les champs de bataille de se retirer
6 pour garantir un cessez-le-feu, qu'il convenait de désarmer et de
7 congédier les unités paramilitaires ainsi que de démobiliser les
8 compositions de réserve de la ZNG et de faire en sorte que la JNA se
9 retire vers les casernes?
10 Réponse: Je sais qu'il y a eu plusieurs accords. Je ne suis pas au courant
11 de la teneur de tous ces accords, y compris celui d'Igalo; mais ce que je
12 sais, c'est que l'armée yougoslave n'a essentiellement pas respecté les
13 accords obtenus. Elle a toujours, là où il y avait des groupes d'insurgés
14 serbes, encouragé leurs activités respectives; puis elle se plaçait en
15 position ou en formation de combat face aux unités croates qui voulaient
16 rétablir la situation précédente.
17 Question: Monsieur Kriste, j'ai fait auditionner ici un enregistrement
18 d'un entretien entre Kadijevic et Tudjman, où l'on avait insisté sur la
19 nécessité de faire adhérer la Croatie à l'accord signé avec Carrington
20 pour ce qui est de faire cesser les attaques contre les casernes, et
21 notamment l'attaque de Sibenik?
22 Réponse: Monsieur Tudjman a fait confiance, a cru M. Kadijevic qui avait
23 affirmé qu'il n'y aurait pas d'attaques contre la Croatie. Effectivement,
24 il avait entrepris tout ce qu'il pouvait pour entraver toute activité du
25 côté croate, qui pourrait être comprise ou interprétée comme étant une
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1 sorte de préparatif à la guerre. C'est pourquoi, dans le courant de la
2 première moitié de l'année 1991, il n'a été procédé à aucune importation
3 d'armes en Croatie, et l'on a même mis un terme à la fabrication locale
4 d'armements. Malgré tout cela, la Croatie a été attaquée et a subi un bain
5 de sang.
6 M. Milosevic (interprétation): Bien. Mais savez-vous que le secrétaire
7 fédéral à la Défense nationale de l'époque, le général Kadijevic, avait
8 proposé, s'agissant de Dubrovnik, de procéder à une démilitarisation sous
9 le contrôle de la Communauté européenne, donc de faire en sorte que la JNA
10 se retire de là et de permettre des conditions normales de vie, mais la
11 partie croate avait rejeté la chose? Le savez-vous?
12 M. Kriste (interprétation): L'armée yougoslave n'avait rien à faire là-
13 bas, n'avait rien à chercher là-bas, parce qu'à Dubrovnik il n'y avait pas
14 d'effectifs militaires du tout. Et cette histoire relative à la
15 démilitarisation de Dubrovnik, si elle venait de M. Kadijevic, est plutôt
16 ridicule: démilitariser Dubrovnik est une chose qui ne pouvait être faite
17 que par la JNA, parce que c'est elle qui l'avait démilitarisée.
18 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le temps qui vous
19 était imparti est épuisé. Vous pouvez cependant poser une dernière
20 question.
21 M. Milosevic (interprétation): Il m'est très difficile de choisir laquelle
22 des questions qui me reste devrait être posée. Laissez-moi le loisir de
23 jeter un œil. Il me reste quand même un nombre de questions plutôt
24 important.
25 Bien. Ecoutez, je vais vous poser une question concernant les allégations
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1 qui figurent dans le livre du général Bobetko, disant que c'est
2 précisément à Dubrovnik qu'en 20 jours vous avez détruit 18 chars ennemis
3 sans perte aucune de votre côté. C'est ce qui est dit en page 124 de son
4 livre.
5 Puis, en page 125, on dit qu'il a choisi une tactique se résumant au fait
6 de battre, sur le front entier, le segment le plus faible de l'ennemi, à
7 savoir l'infanterie; cela a été fait jour et nuit.
8 Puis, vous nous avez dit qu'il n'avait pas chassé la JNA et qu'il n'était
9 qu'un observateur qui a suivi l'évolution du retrait de la JNA dans
10 l'interview que j'ai citée.
11 Où est donc la vérité, Monsieur Kriste?
12 M. Kriste (interprétation): Je n'ai pas sous les yeux le texte du livre de
13 M. Bobetko; il me serait difficile de dire ce qui est dit à telle ou telle
14 autre page dans son livre. Cependant, tout ce qui a pu se passer, combien
15 de chars ont effectivement été détruits et dans quelle mesure les
16 opérations déployées par ses soins ont été couronnées de succès au sud de
17 la Croatie, ce sont là des choses qui se sont passés dans la deuxième
18 moitié de l'année, à partir du mois de mai 1992 et au-delà. Mais dans la
19 partie la plus difficile de la guerre pour Dubrovnik et pour la Croatie en
20 1991, il n'en a pas été question, il n'a pas été question de pouvoir
21 détruire des effectifs aussi importants du côté yougoslave.
22 M. le Président (interprétation): Il nous faut en terminer.
23 Monsieur Tapuskovic, avez-vous des questions à poser?
24 M. Tapuskovic (interprétation): Messieurs les Juges, Monsieur May, il
25 m'est vraiment difficile d'en finir en quelques minutes.
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1 M. le Président (interprétation): Fort bien. Eh bien, vous les poserez
2 demain matin.
3 M. Nice (interprétation): Est-ce que vous m'accordez quelques minutes à
4 huis clos partiel après le départ du témoin, puisque ceci n'a rien à voir
5 avec lui?
6 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, malheureusement je
7 crains que vous deviez revenir pour quelques minutes demain matin pour
8 terminer votre déposition. Veillez à être de retour demain matin à 9
9 heures.
10 M. Kriste (interprétation): Parfait.
11 M. le Président (interprétation): Veuillez vous retirer.
12 (Le témoin, Petar Kriste, est reconduit hors du prétoire.)
13 Nous passons à huis clos partiel.
14 (Huis clos partiel à 14 heures.)
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8 (L'audience est levée à 14 heures 03.)
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