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1 Le vendredi 29 août 2003
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je demande au témoin de prononcer la
7 déclaration solennelle.
8 LE TÉMOIN : TÉMOIN B-1054.
9 [Le témoin répond par l'interprète]
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
11 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci beaucoup, vous pouvez vous
13 s'asseoir.
14 Monsieur Groome, à vous la parole.
15 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, avant de commencer
16 l'interrogatoire de ce témoin, j'aimerais aborder une question
17 administrative en quelques instants, et à huis clos partiel, s'il vous
18 plaît.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
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16 [Audience publique]
17 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, en vertu d'une
18 ordonnance de la Chambre de première instance, datant du 13 juillet 2003,
19 accordant au Procureur les mesures demandées le 30 juillet 2003 --
20 l'ordonnance datée du 30 juillet 2003, et pas du 13 juillet 2003. Donc, en
21 vertu de cette ordonnance, faisant droit à la requête de l'accusation quant
22 au témoignage de B-1054, dans le procès contre Mitar Vasiljevic, affaire
23 numéro 98-32, le Procureur aimerait officiellement demander le versement au
24 dossier d'un classeur contenant les comptes rendus d'audience de ce procès,
25 ainsi que les pièces à conviction du témoignage du témoin B-1054. Je fais
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1 remarquer que les intercalaires 2, 7, 8 et 9 de ce classeur sont des pièces
2 à conviction qui ont été conservées sous pli scellé dans le procès
3 précédent, et donc nous demandons que la même mesure soit adoptée à
4 présent.
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, il convient d'accorder à ce classeur
6 le prochain numéro des pièces à conviction.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction
8 522, Monsieur le Président.
9 M. GROOME : [interprétation] Je vous demanderais Madame le témoin,
10 d'examiner l'intercalaire 2 du classeur. Il s'agit du document où l'on
11 trouve le pseudonyme qui a été utilisé pour s'adresser à vous lors du
12 procès où vous avez déjà témoigné.
13 Q. A savoir, B-1054, Madame B-1054. Est-ce que bien votre nom que l'on
14 voit sur cette pièce à conviction ?
15 R. Oui.
16 Q. Merci. Madame B-1054, la Chambre est en possession de votre témoignage,
17 et des pièces à conviction utilisées lors de votre précédente déposition
18 dans l'affaire Vasiljevic. Je ne vous demanderai pas de poursuivre, de
19 continuer dans la même ligne que votre témoignage précédent. Je vous
20 demande simplement de tirer au clair un certain nombre de points, et de
21 résumer les principaux aspects de cette déposition. Dans le cadre de votre
22 déposition sous serment, vous avez dit que le 10 juin 1992 des combats ont
23 éclaté dans votre village Koritnik, situé au nord de Visegrad, et que un
24 certain nombre de maisons de Musulmans ont été prises pour cibles des tirs.
25 Peu après le début des combats, vos voisins Serbes vous ont envoyé ainsi
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1 qu'aux autres membres de la communauté musulmane un message. Puis-je vous
2 demander de dire à la Chambre quel était le contenu de ce message.
3 R. Ce message était que nous devrions quitter notre village parce que
4 notre (expurgé)nous a dit que le nettoyage ethnique était en
5 cours, et qu'il fallait partir.
6 Q. Votre témoignage se poursuit, vous dites que la majorité des Musulmans
7 de votre village s'est rassemblée le lendemain avec tout ce qu'ils
8 pouvaient emporter, et ont quitté la ville en direction de Visegrad. Vous
9 avez ensuite décrit une rencontre qui s'est produite à Kafur, avec
10 plusieurs Serbes armés qui se sont demandés s'il convenait de vous tuer ici
11 où en ville. Vous avez continué en parlant de votre arrivée dans la ville
12 aux environs de 3 heures ou 4 heures de l'après midi, et des tentatives
13 faites par vous pour accéder à la Croix rouge, et de ce qui s'est passé
14 devant l'hôtel Visegrad. Vous avez ensuite dit comment, pendant environ une
15 heure, on vous a dit qu'il convenait de vous rendre dans la rue Pionirska,
16 dans un quartier musulman qui venait d'être abandonné. Vous avez parlé de
17 votre arrivée à cet endroit, du fait que vous vous êtes abritée dans la
18 maison d'un certain M. Memic. Et je voulais maintenant vous poser quelques
19 questions au sujet de ce qui s'est passé dans cette maison de M. Memic.
20 Puis-je vous demander d'abord, combien de personnes il y avait dans le
21 groupe dont vous faisiez partie, et quelle était sa composition ?
22 R. Lorsque nous sommes arrivés devant l'hôtel, un policier serbe nous a
23 dit d'aller dans la rue Pionirska, nous sommes donc arrivés devant la
24 maison de M. Memic. Nous faisons partie d'un groupe de 70 personnes
25 environ, principalement composé de personnes âgées, d'enfants, et de jeunes
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1 filles. Nous nous sommes abrités de la pluie. Nous nous sommes changés.
2 Certains ont bu du thé, d'autres du café, et entre temps Mitar Vasiljevic
3 et Milan Lukic se sont arrivés, ainsi que Sredoje Lukic et Milan Susnjar.
4 On nous a dit qu'il fallait nous installer dans une pièce. Milan Lukic,
5 quand il est arrivé, nous a mis un chiffon sur la table, et a dit qu'il
6 fallait nous mettions dans ce chiffon tout ce que nous possédions, à
7 savoir, les bijoux, l'argent, et cetera. C'est ce que nous avons fait, et
8 Milan Susnjar, surnommé Laco, nous a forcé à nous rendre dans une autre
9 pièce et il nous a fait mettre nus. Il nous a forcé à danser, à nous plier,
10 à bouger dans tous les sens, en avant, en arrière.
11 Et après cela nous nous sommes rhabillés, et ils ont emmené Jasmina
12 Kurspahic, et Jasmina Vila. Je ne sais pas où on les a emmenées. Lorsqu'on
13 a posé des questions à ce sujet, ils ont refusé de répondre, et lorsqu'ils
14 sont revenus, ils n'ont pas voulu nous dire ce qui leur était arrivé à ces
15 deux femmes.
16 Q. Est-il arrivé un moment où des membres du groupe ont été, où le groupe
17 a été forcé de quitter cette maison pour se rendre dans une maison voisine
18 qui appartenait à la famille Omeragic ?
19 R. Après tout cela, après tous ces mauvais traitements, Milan Lukic était
20 à la porte de la maison de Jusuf Memic, et Vasiljevic était au niveau de
21 l'autre maison, et on a été escorté jusqu'à la maison d'Omer Memic. A la
22 fin, on a été obligé d'y rester.
23 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s'est passé dans la maison
24 d'Omeragic ?
25 R. Quand on est arrivé dans la maison d'Omeragic, les tapis étaient déjà
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1 pleins de carburant, d'essence qui avait été versé sur les tapis et ils ont
2 mis le feu. Ils ont mis le feu à nous. Parmi nous, il y avait un bébé de
3 deux jours. Les enfants hurlaient. Les femmes, les vieillards essayaient
4 d'aider. Moi, j'étais juste au côté de la fenêtre. J'ai fait passé, j'ai
5 jeté mon fils de 13 ans par la fenêtre et je l'ai suivi quelques minutes
6 plus tard. J'étais blessé au bras gauche, à la jambe gauche. Je me suis
7 jetée dans le petit ruisseau qu'il y avait tout près et j'y ai passé trois
8 jours et trois nuits.
9 Q. Dans ce ruisseau ou dans ce canal, est-ce que vous avez vu ce qui est
10 arrivé aux gens qui sont restés dans la maison ?
11 R. On n'était pas loin. On était à une cinquante de mètres. Donc, j'ai
12 entendu les cris, les plaintes, les hurlements, toute sorte de choses
13 absolument insupportables. Quand je repense à tout cela, je fais des
14 cauchemars et j'ai mal. J'ai mal. C'est vraiment tout à fait pénible. C'est
15 très douloureux.
16 Q. Pouvez-vous estimer le nombre de personnes qui sont mortes dans cette
17 maison, cette nuit-là ?
18 R. Il y avait nous qui étions de ce village et puis les gens du village
19 voisin qui nous ont rejoint. Et au total, nous étions à peu près 70 en
20 ajoutant ceux qui se trouvaient déjà dans la maison quand nous sommes
21 arrivés. Moi, je dirais 70, 75 peut-être même davantage. Je n'ai pas compté
22 parce que --
23 Q. Combien de membres de votre famille immédiate sont morts cette nuit-
24 là ?
25 R. Six membres de ma famille sont morts cette nuit-là à commencer par ma
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1 belle-mère.
2 Q. Une fois que vous avez jeté votre fils par la fenêtre de cette maison,
3 est-ce que vous avez pu le suivre et apprendre s'il a survécu ou pas ?
4 R. Je n'ai pas eu de nouvelles de lui pendant cinq ans, et cinq ans plus
5 tard, nous nous sommes retrouvés à Zenica après la chute de Zepa. Pour moi,
6 cela a vraiment été un traumatisme. Il avait 13 ans quand je l'ai perdu de
7 vue et le revoir cinq ans après.
8 Q. Votre fils savait-il que vous aviez survécu cette nuit-là, pendant les
9 cinq années où vous ne vous êtes pas vus ?
10 R. Non. Il ne le savait pas. Il n'avait aucune nouvelle de moi et je
11 n'avais aucune nouvelle de lui.
12 Q. Pouvez-vous, je vous prie, décrire en quelques mots, à l'intention des
13 Juges de cette Chambre, les blessures que vous avez subies ?
14 R. Cette nuit-là pendant que j'étais dans la canalisation, j'étais blessé
15 au bras gauche, à la jambe gauche et lorsque j'ai fini par arriver à
16 l'hôpital de Gorazde, j'allais très mal. Et les blessures que j'avais ont
17 été envahies par les vers.
18 Q. Finalement, après avoir quitté Visegrad, est-ce que vous avez appris
19 qu'un autre crime du même genre avait été commis contre des Musulmans dans
20 une maison de Visegrad ? Je ne vous demande pas, bien sûr, des détails au
21 sujet de cet événement.
22 R. Oui, 80 personnes environ ont été brûlées vives par le même groupe
23 d'hommes et les victimes étaient toujours des civils, des personnes âgées,
24 des enfants en un autre lieu.
25 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres
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1 questions. Si la Chambre se souvient de ce dont il a été questions,
2 Monsieur Milosevic a demandé à poser à un témoin entendu précédemment, des
3 questions au sujet de Visegrad et un troisième témoin viendra aujourd'hui
4 pour parler du même sujet en nous donnant les informations personnelles
5 qu'il a à ce sujet. Ce témoin ne peut pas parler de cet autre événement.
6 Donc, je n'ai plus de questions à lui poser dans le cadre de
7 l'interrogatoire principal.
8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez entendu ce
9 qu'a dit le Procureur. Ce témoin ne sait rien des événements dont vous avez
10 parlé avec d'autres témoins mais un autre témoin sera entendu dans quelque
11 temps bientôt, et vous pourrez l'interroger à ce sujet.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je comprends que ce témoin n'est pas au courant
13 de l'événement évoqué par M. Groome, mais dans sa déclaration décrite, elle
14 dit être au courant de la présence de certaines unités d'Uzice, or ces
15 unités ont un lien avec l'événement en question. Donc, c'est de façon
16 indirecte que j'interrogerai le témoin au sujet de cet autre événement déjà
17 évoqué par M. Groome.
18 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
19 Q. [interprétation] Madame le Témoin 1054, vous avez fait deux
20 déclarations devant les représentants du bureau du Procureur. La première,
21 les 12 et 13 février 1998, et la seconde, le 15 juin 2000, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. En dehors de ces deux déclarations, vous avez également fait une
24 déclaration devant les représentants du ministère de l'Intérieur de Bosnie-
25 Herzégovine à Zenica, plus précisément devant les représentants du Centre
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1 des services de sécurité, le 14 août 1995. Donc, trois ans avant votre
2 première déclaration au Tribunal.
3 R. A Zenica, je n'ai fait aucune déclaration.
4 Q. L'important, ce n'est pas de savoir si vous avez fait cette déclaration
5 à Zenica ou devant les représentants de ce entre lui-même situé à Zenica
6 mais en tout cas, j'ai votre déclaration sous les yeux. (expurgé)
7 (expurgé)
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11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Passons à huis clos partiel.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
13 [Audience à huis clos partiel]
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1 [Audience publique]
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Madame 1054, auriez-vous l'amabilité de lire cette déclaration que je
4 vais vous faire remettre et de me la rendre ensuite car j'en ai besoin.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai quelques observations à faire au
6 sujet de cette déclaration, Monsieur le Président.
7 Cette déclaration a été reçue du Procureur. Et j'en ai un exemplaire, moi-
8 même, qui étais destiné à me permettre de me préparer aux questions que
9 j'aurais à poser mais on pourrait peut-être utiliser mon exemplaire de
10 façon à ce que celle de l'accusé ne fasse pas d'aller-retour.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Que cette déclaration soit remise au
12 témoin, et existe-t-il une traduction anglaise à notre intention, Monsieur
13 Groome ?
14 M. GROOME : [interprétation] Je viens de l'envoyer chercher, Monsieur le
15 Président.
16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci.
17 Madame le Témoin B-1054, je vous demanderais de jeter un coup d'œil à ce
18 document. Il vient d'être dit que c'est une déclaration que vous avez
19 faite. Je ne me souviens plus très bien quand, mais en tout cas, devant les
20 représentants du Centre d'enquêtes de Zenica. Reconnaissez-vous ce
21 document ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois ma signature mais je ne me souviens
23 pas d'avoir fait une déclaration devant qui que ce soit à Zenica. En 1995 ?
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Madame 1054, le fait que le mot Zenica soit écrit sur ce document ne
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1 signifie pas que vous vous êtes rendu à Zenica pour faire cette
2 déclaration. Il est probable que vous l'ayez faite devant un représentant
3 du Centre de sécurité de Zenica qui serait venu vous voir. On lit dans ce
4 document, je cite : "Déclaration faite par -- recueillie par des personnes
5 habilités," et on voit deux signatures. Puis, ensuite il y a le texte et
6 votre signature avec les mots, je cite : "Déclaration faite par le
7 Témoin 1054." On voit bien votre prénom et votre patronyme à cet endroit,
8 n'est-ce pas ? Pouvez-vous confirmer qu'il s'agit de votre signature ?
9 C'est bien votre signature, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, oui, c'est ma signature. Mais vraiment, une déclaration faite par
11 moi en 1995, je ne suis pas au courant.
12 Q. Je ne prétends rien de certains. Je ne dis pas que cette déclaration a
13 été recueillie à Zenica ou ailleurs, parce que je ne connais pas les
14 aspects techniques liés à tout cela. Je souhaitais simplement établir qu'il
15 s'agissait de votre signature. Et avançons, si vous le voulez bien, pour
16 aller plus vite. En page 2, de votre déclaration du 12 février 1998, au
17 troisième paragraphe, je parle maintenant de la déclaration que vous avez
18 faite devant les représentants du Tribunal. Vous dites que la tension à
19 Visegrad, était déjà sensible en 1991, au moment où des barricades ont été
20 élevées. Et vous dites qu'en 1992, des combats ont commencé. C'est bien
21 cela, n'est-ce pas, Madame ?
22 R. Oui. C'est ainsi que ça s'est passé, en effet.
23 Q. Bien. Dites-moi qui est-ce qui a érigé des barrages routiers. Et entre
24 qui et qui y a-t-il eu des conflits à Visegrad dans les forages ?
25 R. Les barrages routiers ont été érigés par nos voisins serbes, afin que
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1 nous ne puissions pas nous rendre en ville, et afin que nous ne puissions
2 pas sortir, ce genre de chose.
3 Q. Dites-moi, je vous prie : Entre qui et qui y a-t-il eu des combats --
4 combats dont vous avez parlé ?
5 R. Nos voisins serbes se sont attaqués au village musulman. Il voulait
6 nous faire peur pour nous obliger à fuir nos maisons, nos domiciles et pour
7 pouvoir piller et emporter tout ce qui avait
8 là-bas. Nous avons donc été attaqués, nous, en notre qualité de Musulmans.
9 Q. Bien. Mais quand vous dites "combats", cela sous-entend deux parties en
10 présence et pas une seule.
11 R. Les voisins serbes ont été armés. Je ne sais pas qui est-ce qui les
12 armés. Ils nous ont attaqués. Il n'y a pas eu deux parties. Alors s'il y a
13 eu deux parties, mais l'autre partie a été attaquée et a été tout à fait
14 innocente. Elle n'était pas prête à cela. Elle ne s'attendait pas à cela.
15 Q. Bien. M. Groome a mentionné une chose. Il a demandé de ne pas vous
16 poser de questions au sujet d'autres événements; cependant, je voudrais
17 quand même savoir, si vous le savez qui étaient les frères Sabanovic Murat
18 et Avdija ?
19 R. Des hommes comme tous les autres. Ce ne sont pas des animaux.
20 Q. Ça, je le suppose. Je n'ai pas affirmé telle chose pour ma part.
21 R. Ce sont des gens, des hommes qui ont dû se battre pour sortir ce peuple
22 qui se trouvait du côté droit de la Drina, pour pouvoir donc nous sortir de
23 là ou alors nous laisser abattre pour que nous descendions la Drina, le
24 cours de la Drina, les eaux de la Drina.
25 Q. Mais est-ce qu'ils vous ont aidé à vous sortir de là-bas ?
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1 R. Ils ne m'ont pas aidé, mais ce sont des gens qui se sont battus pour
2 sauver toute la région de la paroisse, à savoir, cette région et tous ces
3 villages musulmans. S'il l'on excepte les Serbes, il n'y avait pas de
4 Croates chez nous à Visegrad. Dans d'autres localités si, mais chez nous,
5 non.
6 Q. Bon. Si l'on excepte Murat et Avdija Sabanovic pour lesquels vous avez
7 dit, qu'ils s'étaient battus pour vous aider, et vous sauver, combien de
8 gens y avait-il avec eux ?
9 R. Ils ne se sont battus le fusil à la main. Ils nous ont sauvés, mais je
10 ne pense pas qu'ils aient eu des armes pour se battre.
11 Q. Ils n'ont pas eu d'armes ?
12 R. Non.
13 Q. Avez-vous, à part eux, parce que vous semblez les connaître ceux-là,
14 connaissez-vous Dervisevic, Nedzad -- Ibrahim Dervisevic ?
15 R. Non.
16 Q. M. Ferid [phon] ?
17 R. Non.
18 Q. Zakija Jamuk [phon] et Medo Kulovic ?
19 R. Non.
20 Q. Puisque vous avez confirmé que vous connaissiez les frères Sabanovic,
21 savez-vous que, dès le mois de juillet 1991, ces
22 gens-là ont détruit le monument à Ivo Andric ?
23 R. Je ne sais pas, je n'étais pas à Visegrad.
24 Q. Vous n'avez pas entendu parler de la destruction de ce monument de Ivo
25 Andric ?
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1 R. Non.
2 Q. Vous savez qui était Ivo Andric ?
3 R. C'était le monument d'un homme.
4 Q. Mais savez-vous qui était l'homme dont le monument a été détruit ?
5 R. C'était un grand homme.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non. Quelle est la pertinence de
7 ceci avec le fait que des civils aient été incendiés, brûlés, et qu'ils
8 étaient 70 à être brûlés. A quoi servent ces provocations -- des
9 provocations de cette sorte ?
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne vois pas la pertinence. Monsieur May, la
11 destruction à l'intention de Ivo Andric, un écrivain et le seul prix Nobel
12 yougoslave-serbe par surcroît, fait partie du contexte de la guerre civile
13 qui a eu cours sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Et cela illustre
14 le contexte des événements qui ont duré tout ce temps-là. Et cela ne
15 justifie certainement pas le fait que des personnes aient été brûlées. Cela
16 ne justifie nullement brûlées vives. Cela ne justifie nullement quelque
17 crime que ce soit. Mais cela parle du contexte dans lequel les faits sont
18 survenus et le contexte des conflits survenus qui ont été des conflits sur
19 des bases ethniques. Le monument d'Ivo Andric a été détruit parce que
20 celui-ci était Serbe. Cela ne s'est pas fait parce que -- pour une autre
21 raison. C'était un grand écrivain. Je viens de préciser que c'était le seul
22 prix Nobel de tous les écrivains que nous avons eu sur le territoire de
23 l'ex-Yougoslavie.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Cela peut et ne peut -- peut -- ne peut
25 pas être cela, mais le témoignage de ce témoin porte sur des événements
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1 particuliers. Et si vous avez des questions à ce sujet-là, peut-être
2 pourrait-elle vous répondre ? Donc elle s'efforcera de faire de son mieux.
3 Mais lui, vous pouvez lui poser des questions sur les tensions dans la
4 région, mais cela ne semble pas être pertinent. Et cela n'a rien à voir
5 avec les événements auxquels dont elle a témoigné. C'est là la difficulté,
6 Monsieur Milosevic.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne pense pas, pour ma part, que j'ai besoin
8 de me défendre à ce sujet-là concernant l'événement en particulier.
9 Q. Est-ce que quiconque originaire de Serbie aurait quoi que ce soit à
10 voir avec les événements.
11 R. Mais nos voisins étaient Serbes. C'est eux qui nous ont attaqués. Je
12 n'ai pas dit moi-même qu'il était venu des gens de Serbie. C'étaient des
13 voisins serbes.
14 Q. Donc la Serbie a à voir avec cet événement par le simple fait que ces
15 gens-là étaient des Serbes, qu'ils aient été voisins de chez vous, vos
16 voisins.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est pas au témoin de répondre à ce
18 type de question. Nous allons traiter de la chose au moment venu. Ce que le
19 témoin peut dire, et vous pouvez lui poser des questions à ce sujet, c'est
20 ce qui a pris part à ces événements. Et elle a dit que c'étaient des
21 voisins serbes.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais puisque c'est un témoin ici, il faut bien
23 que je lui pose la question, Monsieur May. Indépendamment du fait que vous
24 rameniez les choses à un événement seulement extrait de son contexte. Le
25 témoin, lui, a parlé du fait qu'avant l'attaque lancée contre -- sur le
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1 village, il y avait dans la région, des unités du corps d'où j'étais.
2 Q. Je crois que vous l'avez mentionné, Madame le Témoin 1054, n'est-ce pas
3 ?
4 R. Il est certain qu'il y a eu des unités d'où j'étais à Visegrad. Ils
5 étaient sous plein d'équipement de combats. Mais ce n'est pas eux, qui ont
6 brûlé vives des personnes. Je n'ai pas dit cela.
7 Q. Justement, je voulais vous poser la question suivante. Savez-vous que
8 c'est précisément Murat Sabanovic que vous connaissiez, et un nombre
9 d'accompagnateurs assez important se sont emparés des installations de la
10 centrale hydroélectrique de Visegrad, et cela a été rapporté par tous les
11 journaux. On a même entendu en public la conversation qui s'est passée et
12 il avait menacé de faire sauter la centrale hydraulique qui aurait -- chose
13 qui aurait occasionné une tragédie dans la région du lit de la Drina, tant
14 au niveau de la Bosnie que de la Serbie. Et il y aurait eu des dégâts pour
15 ce qui est d'un grand nombre de villages musulmans et d'un grand nombre de
16 villages serbes, donc cela aurait été un grand malheur qui aurait eu pour
17 conséquences des effets négatifs incommensurables vu que cela aurait
18 nettoyé tout ce qui se trouvait en aval du barrage.
19 R. Ce n'est pas exact.
20 Q. Ah, très bien. Je voulais justement vous poser la question, étant donné
21 que nous avons entendu la conversation qui s'est passée entre l'intéressé
22 et ses responsables à lui se trouvant à Sarajevo --le chef à lui à
23 Sarajevo. Ne savez-vous pas que l'armée qui est venue là pour mettre --
24 rétablir l'ordre et pour empêcher qu'une tragédie de cette envergure ne
25 survienne parce qu'il y aurait eu des milliers et des milliers de
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1 victimes ?
2 R. Pour ce qui est de l'armée, pour ce qui est du rétablissement de
3 l'ordre, ce n'est pas vrai. Il y a eu des gens qui s'étaient réfugiés, qui
4 étaient revenus parce qu'ils y avaient crû, mais ils ont péril par la suite
5 en grand nombre. Maintenant, pour ce que vous dites, au sujet de Sabanovic
6 Murat, je n'ai pas entendu parler de cela. Je n'étais pas avec eux et je ne
7 sais pas du tout ce qui s'est passé.
8 Q. Vous venez de nous dire que, lorsque l'armée était arrivée, des gens
9 étaient retournés ?
10 R. Oui. Il y a eu beaucoup de gens qui avaient quitté les environs de la
11 ville et, lorsque l'armée est arrivée, on nous a fait savoir que le Corps
12 d'armée Uzice était arrivé. On nous a dit cela par des porte-voix, et la
13 population et les hommes étaient rentrés. Mais, jusque là et après cela, la
14 Drina était pleine de cadavres qui étaient portées par ses eaux.
15 Q. Mais ne vous a-t-on pas dit que le Corps d'Uzice avait fait savoir que
16 les gens étaient en sécurité tant qu'ils seraient là ?
17 R. Ce n'est pas exact, mais je crois que quelqu'un d'autres pourra parler
18 du fait que la situation était sécurisée ou pas. Je sais seulement que
19 c'est la raison pour laquelle bon nombre de personnes étaient revenues.
20 Q. Mais vous ne savez pas qu'ils aient été arrivés pour rétablir l'ordre,
21 pour qu'il n'y ait pas de conflits et pour empêcher que des conflits ne
22 surviennent ?
23 R. Je ne sais pas. Quelqu'un d'autres en parlera, quelqu'un qui connaîtra
24 mieux que moi les détails de la chose.
25 Q. Bien. Mais vous avez tout à fait précise dans la déclaration que vous
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1 avez faite. Vous dites, au paragraphe 4, au début de votre déclaration, ce
2 qui suit : "Mon village a été attaqué par mes voisins, mais pas par le
3 corps d'Uzice ?"
4 R. Je n'ai pas dit que c'était le Corps d'Uzice qui nous avait attaqués,
5 mais il avait été complice de nos voisins, des Serbes qui vivaient à nos
6 côtés dans la région de Visegrad.
7 Q. Vous voulez dire qu'il y avait des unités du Corps d'Uzice sur le
8 territoire de Visegrad ?
9 R. Oui, à cette époque-là, lorsque des Serbes sont venus, oui, c'est
10 certain.
11 Q. Et vous ne comprenez pas pour quelle raison ils se sont trouvés là ?
12 R. Je ne le comprends pas. Quelqu'un d'autres vous apportera des
13 explications à ce sujet.
14 Q. Bien. Avez-vous pour votre -- vous concernant des renseignements sur
15 quelques crimes que ce soient perpétrés par l'un quelconque des membres du
16 Corps d'Uzice ?
17 R. Je n'en ai pas moi-même, mais peut-être d'autres en ont.
18 Q. Ecoutez, moi je vous pose la question à vous, si vous n'en avez pas
19 arrêté nous là ?
20 R. Je n'en ai pas. Peut-être quelqu'un d'autres sera vous en dire
21 davantage.
22 Q. Bien. Etant donné que vous avez dit que ce sont vos voisins à vous qui
23 s'étaient attaqués à vous, je suppose que vous devez connaître les noms de
24 tous ces voisins qui ont lancé une attaque sur votre village, n'est-ce
25 pas ?
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1 R. Oui. Vous voulez que je vous les énumère ?
2 Q. Non, pas en ce moment-ci. On y reviendra. Vous avez dit en paragraphe
3 6, page 2, de votre déclaration : "Que tous les jeunes hommes avant
4 l'attaque qui avaient fui le village pour fuir vers la forêt ?" C'est bien
5 ce que vous avez dit ?
6 R. Oui. Ils s'étaient abrités pour ne pas être capturés et pour ne pas
7 être torturés, comme cela s'est passé dans d'autres endroits.
8 Q. Fort bien. Donc ils s'étaient enfuis vers la forêt, mais est-ce qu'ils
9 savaient qu'il allait y avoir une attaque et est-ce la raison pour laquelle
10 est qu'ils s'étaient abrités ?
11 R. Ils se sont enfuis lorsqu'il l'attaque a été lancée parce qu'il y a eu
12 toute une pluie de balles qui les a suivis dans leur fuite vers la forêt.
13 Q. Avez-vous entendu parler d'Ahmed Sejdic ?
14 R. Non.
15 Q. Fort bien. Avez-vous entendu quoi que ce soit au sujet des barrages
16 routiers érigés par les Musulmans et aussi de la mobilisation des membres,
17 y compris des citoyens, des villageois de votre village, sous son
18 commandement à lui ?
19 R. Je n'en sais rien.
20 Q. Vous ne savez rien.
21 R. Non, absolument rien.
22 Q. Je ne vois pas dans votre déclaration qu'il ait été fait mention de
23 votre époux. Je ne vais pas mentionner son nom parce que vous êtes un
24 témoin protégé ici, pour ne pas donc permettre votre identification. Mais,
25 est-ce que lui a fui vers la forêt avec les autres hommes ?
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1 R. Oui. Ils se sont abrités. Ne pense pas, Monsieur Milosevic, qu'ils
2 avaient des armes et qu'ils ont fui avec des armes. Ils ont fui les mains
3 vides pour chercher abri et nous non plus, nous ne savions pas où est-ce
4 que -- ce qui fallait nous abriter parce que, de toute part des cieux et
5 d'ailleurs, il nous tombait dessus des balles et des projectiles.
6 Q. Dites-moi en cette date du 10 juin, lors de cette attaque perpétrée,
7 comme vous le dites, par vos voisins : y a-t-il eu à l'occasion de la même
8 attaque des blessés ou des morts parmi les villageois ?
9 R. Vous parlez des Serbes ?
10 Q. Non, moi je vous pose une question au sujet de l'attaque lancée sur
11 votre village. Vous dites que le village a été attaqué le 10 juin ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce qu'il y a eu des blessés à l'occasion de l'attaque du village ?
14 R. Il n'y a pas eu de blessés. Ils ont fait irruption dans le village. Ils
15 ont demandé où étaient les hommes et ils ont commencé à fouiller les
16 maisons et emporter ce qu'ils trouvaient.
17 Q. Vous avez connu les gens qui ont fait irruption ?
18 R. Oui. Bien sûr, c'était des voisins avec qui on avait vécu pendant 30
19 ans. Comment voulez-vous que je ne les connaisse pas.
20 Q. Fort bien. Etait-ce des gens de votre village ou du village voisin ?
21 R. Du Corps ethnique du village voisin, de mon village à moi et dans ces
22 villages à -- c'était les villages voisins, puis il y avait l'Uzice enfin.
23 Que vais-je vous énumérer ?
24 Q. J'ai crû comprendre dans le paragraphe 2, de cette page de votre
25 déclaration -- j'ai crû comprendre que ces Serbes, vos voisins qui ont pris
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1 part à l'attaque en question, avaient cherché les hommes qui vivaient dans
2 votre village. C'est bien cela, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Combien de gens vivaient-ils au total à Koritnik avant l'éclatement des
5 conflits ?
6 R. Je ne les ai pas compté, mais il devait y avoir 80 maisons dans ce
7 hameau qui était des maisons musulmanes.
8 Q. Combien d'hommes y a-t-il eu qui ont abandonné le village à l'occasion
9 de l'attaque ?
10 R. Ils n'auraient pas fui, mais il est venu un voisin qui est venu d'un
11 autre village et il pleurait. Je ne vais pas le nommer. C'était un jeune
12 homme serbe et il nous a dit :
13 "Ecoutez -- écoutez, voisins, enfuyez-vous, allez-vous-en parce que, si on
14 vous capture, tout -- si vous veniez à être capturés, vous seriez -- vous
15 serez exécutés."
16 Q. Je n'insiste pas pour que vous me nommiez ce voisin et je crois que
17 cela ne s'est pas fait à huis clos partiel. Au tout début, vous avez
18 indiqué qu'il est arrivé un certain Grujic, Dusan Grujic, et il vous a dit
19 qu'un nettoyage ethnique était en cours et qu'il fallait que vous vous en
20 alliez ? C'est bien ce que vous avez dit ?
21 R. Oui.
22 Q. Alors, et c'est bien ce qu'il a dit : "Nous sommes en train de procéder
23 à un nettoyage ethnique et allez-vous-en." ?
24 R. Oui, c'est certain c'est ce qu'il a dit.
25 Q. Fort bien. Fort bien, Madame 1054.
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1 En paragraphe 8, de la page 2, vous avez dit que deux ou trois jours après
2 l'attaque, ils sont revenus et ils ont encerclé le village. C'est bien ce
3 que vous avez dit, n'est-ce pas ?
4 R. Encerclez à nouveau.
5 Q. Oui. Vous avez dit que, deux ou trois jours après l'attaque, ils sont
6 revenus dans le village.
7 R. Ils n'ont pas encerclé, ils sont venus nous dire de quitter nos
8 maisons, ils sont venus en plein milieu du village.
9 Q. Très bien. Je voulais juste rafraîchir votre --
10 Vous avez dit ce qui suit : "Deux ou trois jours après, ils sont revenus et
11 ils ont encerclé le village. Ils nous ont, une fois de plus, dit qu'il
12 fallait que nous restituions nos armes et que les hommes devaient se
13 rendre. En cette occasion-là, il est venu dans le village." Puis, vous
14 énumérez : Milorad Lipovac, Ciro et Dusan Grujic. Dusan avait dit qu'un
15 nettoyage ethnique était en cours et qu'il fallait que nous nous en
16 allions. Il a dit qu'il nous emmènerait à Kladanj et que nous habiterions,
17 que nous nous installerions là-bas. Ils nous ont dit de prendre de quoi
18 manger pendant deux jours et il ne nous a pas malmené, ni verbalement, ni
19 physiquement.
20 Par conséquent, ils sont revenus, n'est-ce pas après cette attaque ? Parce
21 que vous dites : "Deux ou trois jours plus tard, ils sont revenus."
22 R. Mais, c'est ce que vous m'avez posé comme question tout à l'heure.
23 Q. Je vous pose cette question parce que dans la transcription de votre
24 témoignage qui a été évoqué par M. Groome, et en répondant à une question
25 de leur côté, cherchant à savoir si les gens étaient revenus au bout de
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1 deux ou trois jours après cette attaque, en page 1423 de la transcription
2 en ligne 3, vous avez répondu : "Ils ne sont plus jamais revenus au
3 village. Ils n'ont pas osé revenir." C'est ce que vous avez dit. C'est ce
4 qui figure dans la transcription.
5 Alors je voudrais maintenant que vous me disiez où est la vérité ? Ce qui
6 figure dans la déclaration où il est dit qu'ils sont revenus ou cette
7 transcription que je viens de vous citer disant qu'ils n'étaient jamais
8 revenus et qu'ils n'avaient pas osé revenir.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un moment. Un moment. La transcription
10 dit ce qui suit : "Est-ce qu'à un moment donné les soldats sont revenus
11 pour encercler le village ? Ils sont venus pour chercher mais nous étions
12 en train de nous cacher dans les bois." Et la question était : "Est-ce
13 qu'ils sont venus pour vous dire que vous deviez quitter le village ?" Donc
14 et ça continu ainsi. Donc, voilà le passage complet de cette transcription.
15 Oui, allez-y, Madame le Témoin 1054. Vous voulez ajouter quoi que ce soit à
16 ce qui y figure ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Bien. Indépendamment du fait qu'ils soient revenus ou pas, dites-moi
20 qu'est-ce qu'ils ont pillé. Vous avez déclaré auparavant que le village
21 avait été pillé. Vous l'avez dit avant.
22 R. Tout ce qu'ils pouvaient prendre et emporter, ils l'ont pris et
23 emporté. Ils ont emmené le bétail et ils l'ont fait devant nous. Ils ont
24 chargé sur des tracteurs et remorques, des téléviseurs, et cetera.
25 Q. Mais avant cela, dans votre déclaration, vous avez dit qu'avant cela,
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1 le village a été pillé. Comment ont-ils pu le piller deux fois ?
2 R. Pas deux fois. Une fois lorsque nous nous apprêtions à partir. Ce
3 voisin, Dusan Grujic, est venu nous dire qu'il y avait un nettoyage
4 ethnique en cours et ce même jour. Ils sont venus avec des tracteurs et des
5 remorques pour embarquer nos affaires.
6 Q. Mais avant cela, y a-t-il eu des pillages ?
7 R. Non, pas avant cela mais ils cherchaient à nous faire peur, à nous
8 faire quitter le village.
9 Q. Bien. Donc avant cela, il n'y a pas eu de pillage, Madame 1054 ?
10 R. Oui, c'est bien comme cela que ça s'est fait.
11 Q. Alors pourquoi, dans votre déclaration, avez-vous dit au paragraphe 3
12 de celle-ci, ce qui suit : "Avant l'attaque, il est venu dans mon village,
13 le Corps d'Uzice, qui a pillé et volé dans mon village. Je ne sais pas
14 quelle date que c'était mais c'était avant le 10 juin 1992." Alors pourquoi
15 avez-vous accusé les soldats du Corps d'Uzice ? Pourquoi avez-vous affirmé
16 qu'ils vous avaient pillé ?
17 R. J'en ai parlé mais je crois que pour ce qui est des pillages effectués
18 par le Corps d'Uzice, peut-être quelqu'un pourra vous fournir davantage
19 d'explications.
20 Q. Mais écoutez-moi, je lis votre déclaration, pas celle de quelqu'un
21 d'autre. Vous avez dit vous-même que des gens du Corps d'Uzice ont pillé
22 votre village avant le 10 juillet 1992. Ce n'est pas vrai, n'est-ce pas ?
23 R. C'est vrai mais on vous fera savoir quand est-ce qu'ils sont venus, ce
24 qu'ils ont fait et tout le reste.
25 Q. Mais oui, mais ça ne concorde pas avec ce que vous venez de nous dire.
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1 Vous dites que c'est après le 10 juin qu'on est venu vous piller. C'est ce
2 que vous avez dit.
3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin a déjà répondu à votre
4 question. Allez de l'avant, je vous prie.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. En page 2, l'homme que vous avez mentionné, à savoir, celui qui vous a
8 dit, il s'appelle Dusan Grujic. J'ai noté son nom. Il vous a dit que le
9 nettoyage ethnique était en cours et qu'il fallait que vous nous en alliez.
10 Est-ce qu'il portait un uniforme cet homme-là ou était-il en civil ?
11 R. Il portait un uniforme.
12 Q. Donc, il portait un uniforme ?
13 R. Oui.
14 Q. Et quand il vous a dit qu'un nettoyage ethnique était en cours, avez-
15 vous compris de quoi il s'agissait ? Est-ce que vous saviez ce que c'était
16 qu'un nettoyage ethnique ?
17 R. D'après ce que j'ai pu comprendre et nous tous qui étions là, nous
18 avions compris qu'il ne fallait pas que nous existions là-bas et que nous
19 vivions ensemble, avec eux, comme avant.
20 Q. Bon. Donc, c'est ce terme-là qu'il a utilisé. Il a dit qu'ils étaient
21 en train de procéder à un nettoyage ethnique ?
22 R. Je ne pense pas l'avoir inventé moi-même. Je crois que c'est lui qui a
23 utilisé ce terme.
24 Q. Mais ils ne vous ont pas malmené ? Ils ne vous ont pas maltraité en
25 disant que c'était un nettoyage ethnique qui était en cours ?
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1 R. Lui et Milorad Lipovac, pas ces deux-là. Mais nous avons souffert tous
2 les maux lorsque nous sommes descendus dans la ville.
3 Q. Mais moi, je ne vous ai pas posé de questions à ce sujet-là. Je vous
4 parle du village. Ils sont venus et ils vous ont dit qu'il y avait un
5 nettoyage en cours ?
6 R. Oui, et ils ont demandé les clés de la maison à Aisa Kurspahic.
7 Q. Et vous leur avez obéi et vous avez quitté le village ?
8 R. Et bien, sous pression, il fallait bien obéir. On ne quitte pas sa
9 maison si on n'est pas obligé de le faire.
10 Q. Mais ils ne vous ont pas malmené, ils ne vous ont pas menacé, ils n'ont
11 pas tiré sur vous, ils n'ont pas frappé quiconque ?
12 R. Non. Ce jour-là, on n'a pas tiré. Mais avant cela, ils ont lancé une
13 attaque et il fallait bien s'en aller.
14 Q. Bien. Avez-vous informé, de quelque façon que ce soit, votre époux du
15 fait de quitter votre maison et l'avez-vous informé de l'endroit où vous
16 alliez ?
17 R. Je n'ai pas à l'informer. Nos voisins ont tous été informés de la
18 nécessité de s'en aller. Ils nous ont dit qu'il fallait que nous partions
19 tous. Donc, ce n'était pas à titre individuel qu'on nous a informé.
20 Q. Mais avez-vous revu votre époux à partir du moment où l'attaque a été
21 lancée sur Koritnik et le moment où vous avez quitté le village ?
22 R. Oui, bien sûr qu'on l'a vu. Tous étaient dans le village, dans les
23 maisons.
24 Q. Donc, il s'était d'abord enfui vers la forêt, puis ils sont revenus
25 lorsque l'attaque était terminée, lorsqu'elle a pris fin, n'est-ce pas ?
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1 N'est-ce pas, Madame 1054 ?
2 R. Oui, c'est comme ça que ça s'est fait, que ça s'est passé.
3 Q. Dites-moi, je vous prie. Dans votre déclaration, celle que vous avez
4 faite auprès de la police, que nous vous avons montré tout à l'heure, vous
5 n'y faites pas état d'une attaque quelconque en date du 10 juin sur
6 Koritnik. C'est bien vrai, n'est-ce pas ?
7 R. Je ne le mentionne pas ?
8 Q. En effet.
9 R. Mais tu vois bien que tu peux lire dans le texte qu'il y a eu une
10 attaque.
11 Q. Moi, je parle de la déclaration que vous avez faite en 1995. A aucun
12 endroit, vous ne mentionnez aucune attaque sur Koritnik. Vous dites : "Il
13 est venu quelques Serbes locaux, à savoir, Lipovac Milorad, Grujic Dusan,
14 et Milorad Djuric," et ils vous auraient informé de la nécessité de
15 déménager de là. C'est ce qui est dit dans la déclaration que vous avez
16 faite, dans celle-ci. C'est bien cela, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Et que veux-tu maintenant ?
18 Q. Parce que dans votre déclaration faite auprès des enquêteurs, vous ne
19 parlez pas de Dusan Djuric; mais vous parlez de Dusan Grujic et de Ciro
20 Grujic. Or, dans la première déclaration, vous parlez de Lipovac Milorad,
21 de Djuric Dusan et de Milorad Djuric. Par conséquent, vous êtes en train de
22 mentionner des noms tout à fait différents, d'hommes différents dans deux
23 déclarations. L'une auprès, au fait, de la police et l'autre auprès des
24 enquêteurs.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pour être tout à fait équitable à l'égard
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1 du témoin, elle -- il convient de dire qu'elle a mentionné un nom
2 particulier et elle l'a mentionné aujourd'hui. Mais si cela peut être d'une
3 assistance quelconque à qui que ce soit, cela doit l'être pour la Chambre
4 de première instance. Mais elle a dit dans sa déclaration, et je suis en
5 trains de lire celle du 12 et 13 février, qu'elle n'était pas à la maison
6 lorsque le village a été attaqué, puis qu'elle a décrit ce qui c'est passé.
7 Puis elle dit que deux ou trois jours plus tard, il est venu -- il est
8 revenu des soldats. Et qu'ils ont dû se rendre, puis on leur a dit de
9 quitter le village. Et l'homme qu'elle a cité a dit qu'un nettoyage
10 ethnique était en cours. C'est ce qu'elle a dit. Maintenant, pour ce qui
11 est des détails, bien sûr, il convient de préciser que ça c'est passé il y
12 a plus de dix ans.
13 Continuez, Monsieur Milosevic.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, vraiment, je ne veux pas vous
15 reprocher le fait que vous ne parliez pas la langue serbe. On ne suppose
16 pas que vous devriez la connaître cette langue, mais dans la déclaration
17 que j'ai cité, elle parle de Dusan Djuric et de Milorad Djuric, surnommé
18 Cinda. C'est ainsi que commence la déclaration. Et celui-ci les a informé
19 du nettoyage ethnique. En cours dans la déclaration faite auprès des
20 enquêteurs de ce Tribunal, elle parle d'un certain Grujic. Donc, il y a
21 deux noms de famille tout à fait différents. Djuric, ça commence avec un D,
22 puis un J, et cetera, alors que Grujic commence par les lettres que vous
23 pouvez lire dans le texte. Donc nulle part dans cette déclaration ou dans
24 ces deux déclarations, elle ne parle de personne -- des mêmes personnes.
25 Elle parle de personnes différentes. Or, elle dit, ce sont les gens qui
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1 sont venus. Ce n'est pas quelque chose de marginal ici. C'est une question
2 qui est afférente à la crédibilité du témoin et à l'exactitude de ces
3 déclarations.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] La traduction pose peut-être problème
5 mais en traduction, en anglais, on a le nom que le témoin a mentionné tout
6 du long.
7 Oui, Monsieur Groome, qu'en est-il ?
8 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas la
9 traduction de cette déclaration. Je pourrais la recevoir en urgence et vous
10 pourrez vous la réceptionner lundi.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je parlais de la déclaration, au
12 préalable, recueillie par le bureau du Procureur et qui fait référence à ce
13 point. Mais, il nous faudrait effectivement la déclaration de Zenica.
14 M. GROOME : [interprétation] Mais vu les événements tout à fait
15 traumatisant qui s'ensuivirent et tout ce qui c'est passé par la suite --
16 là c'est à peu près --
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'est quelque chose de tout à fait
18 abstrait ?
19 M. GROOME : [interprétation] Abstrait, effectivement. Cependant, vous
20 recevrez, Messieurs les Juges, ces déclarations.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous recevrons un exemplaire de cette
22 déclaration qui sera versée au dossier. Il nous faudra nous prononcer sur
23 le contexte dans lequel se fait la totalité de la déposition et de voir
24 quelle importance il faut accorder à cette différence.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je voulais dire c'est qu'ici dans cette
Page 25624
1 déclaration, on mentionne des noms tout à fait différents.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais bien sûr. Ce ne sera pas toujours le seul
3 et même homme puisque ce n'est pas le seul et même homme qui est toujours
4 venu dans notre village pour nous maltraiter, pour nous chasser de nos
5 maisons.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Fort bien. Et bien, si c'est l'explication que vous fournissez, nous
8 pouvons poursuivre puisque vous, vous ne faites pas du tout mention d'un
9 quelconque Djuric ou d'un certain qu'on aurait surnommé Ciro. Vous avez
10 parlé de Thendo [phon] et vous dites qu'il s'appelle Milorad Djuric.
11 R. Oui, c'est le surnom donné à cet homme, Ciro.
12 Q. Milorad Djuric Ciro, c'est lui qui était là ?
13 R. Tout à fait.
14 Q. Et la déclaration que vous avez faite aux enquêteurs, vous dites qu'il
15 s'agit de Dusan Grujic ?
16 R. Oui, oui, Dusan Grujic. Il est venu nous dire qu'il y allait avoir un
17 nettoyage ethnique et qu'il nous faudra repartir. Tous ces gens ce sont des
18 voisins. Inutile de me convaincre de quoi que ce soit. Je les connais ces
19 gens, je les ai tous vus.
20 Q. Fort bien. Je ne veux plus m'attarder là-dessus.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puisque vous avez dit, Monsieur May, que vous
22 alliez verser au dossier cette déclaration, inutile dès lors d'en discuter
23 davantage avec le témoin.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, nous allons maintenant demander une
25 cote pour cette déclaration. Nous demandons à recevoir un exemplaire.
Page 25625
1 Monsieur Tapuskovic [sic], est-ce que vous avez un exemplaire. Nous allons
2 veiller à ce que le témoin en ait un. Oui, oui, pas de problème. Il y aussi
3 un exemplaire pour l'Accusation.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs le Président, j'ai deux
5 exemplaires supplémentaires.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Nous allons donner à ce
7 document, la prochaine cote de la Défense. Nous avons déjà reçu un
8 exemplaire, je vous remercie.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce de la Défense
10 176.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je précise que dans le paragraphe
12 précédent, le témoin a déclaré que Ciro c'est le surnom de Radomir Djuric.
13 M. GROOME : [interprétation] Puis-je demander le dépôt de ce document sous
14 pli scellé.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est important, au fond, de voir qui est venu
17 dans leur village, qui étaient les gens du village ou dans ce village,
18 puisqu'on fait des références diverses, différentes pour des événements
19 différents.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Vous êtes venue à Visegrad et vous dites avoir là, rencontré d'abord
22 quelques Serbes qui se demandaient s'ils devaient vous tuer ou vous laisser
23 entrer à Visegrad. C'est bien ce que vous dites, n'est-ce pas ?
24 L'INTERPRÈTE : La réponse du témoin est inaudible.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Et puis vous avez rencontré quelques Serbes, ils se sont demandés si
2 vous deviez être autorisés à entrer dans Visegrad ou s'ils fallaient vous
3 tuer ?
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je demande que le micro du témoin soit
5 branché. Il l'est maintenant.
6 Fort bien.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Et puis rien ne c'est passé. Ils se sont demandés s'ils devaient vous
9 tuer ou pas et puis ils vous ont laissé entrer dans la ville ?
10 R. Ils ne nous aient pas laissé partir. Ils nous auraient tué sur place.
11 Ils nous auraient jeté dans la Drina et ils seraient servis de ce
12 bulldozer. Mais Milorad Lipovac ne les a pas autorisés. Il nous a dit : "Et
13 bien, laissez-les entrer en ville, emmenez-les en ville plus exactement, et
14 puis baisez-les comme vous voulez." Excusez-moi pour les termes utilisés.
15 Q. Fort bien, Madame 1054. Vous êtes restée chez un certain Medic, enfin,
16 vous êtes passée d'une maison à une autre, mais ce n'est pas très
17 important, n'est-ce pas ?
18 R. Un groupe de gens que nous étions s'est servi de la maison de Medic,
19 l'autre est allé devant la maison de Nisan [sic]. Et puis la pluie est
20 tombée, nous avons été surpris par la pluie.
21 Q. Oui, j'ai déjà entendu dire ça.
22 R. Si vous avez entendu ça, pourquoi me le demandez une fois de plus ?
23 Q. Ce n'est pas là-dessus que portait ma question. Vous avez dit -- vous
24 parlez de ces gens de Milan Lukic, de Sredoje Lukic, de Milan Susjnar,
25 surnommé Laco ?
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1 R. Oui.
2 Q. Dans votre déclaration de Zenica en 1995, vous dites que se trouvait
3 dans la cour un certain Bosko Djuric. Avec lui, c'était un chauffeur de
4 taxi, c'est ça ?
5 R. Oui, c'est certain, il était présent aussi au moment où ils nous ont
6 confisqué notre argent, nos bijoux, notre or, ils nous dépouillaient de
7 tout. Il était là aussi.
8 Q. Mais pourquoi ne l'avoir pas mentionné dans cette déclaration ?
9 R. Mais, je l'ai mentionné. Il se peut que j'aie été un peu -- que la
10 confusion ait régné dans mon esprit à cause de tout ce qui j'ai été à
11 réponse.
12 Q. Je comprends. Mais vous mentionnez -- est-ce que vous les connaissiez
13 tous personnellement : Milan Lukic, Sredoje Lukic et Susjnar. Est-ce que
14 vous les connaissiez personnellement ?
15 R. Mais c'était eux aussi nos voisins. Milan Susjnar, il habite tout près
16 de Greben et, quand j'allais au travail, je passais devant chez lui. Milan
17 Lukic et Sredoje Lukic, ils sont de Rujiste. Alors, comment voulez-vous que
18 je ne les connaisse pas ? J'ai passé 40 ans à Visegrad.
19 Q. Et que faisaient-ils comme métier ?
20 R. Sredoje, il travaillait dans la police.
21 Q. Sredoje Lukic, c'est un policier ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous avez relaté des événements, est-ce qu'à ce moment-là, il était
24 toujours policier ou est-ce qu'il était de nouveau civil ? Est-ce qu'il
25 était dans une tenue quelconque ?
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1 R. Il portait la tenue de la police, mais ce n'était pas la tenue que les
2 policiers portaient auparavant. C'était un uniforme sombre, avec une espèce
3 de petit drapeau à la manche, ainsi que sur la casquette.
4 Q. Ce qui veut dire c'est que tous ces trois hommes, que vous mentionnez,
5 étaient des gens que vous connaissez bien, et il ne peut pas y avoir le
6 moindre doute, quant à leur identité ?
7 R. Ça c'est tout à fait certain.
8 Q. Est-ce qu'ils ont un rapport quelconque avec les Lukic -- ou le Lukic
9 qu'on soupçonnait d'avoir attaqué des civils à Strbci -- de les avoir
10 tués ?
11 R. Mais, bien sûr, qu'il y a un rapport évident entre eux, et cet
12 incident.
13 Q. C'était la même personne ?
14 R. Ce n'était quelle personne d'autre ?
15 Q. Si c'est bien ce même homme, savez-vous qu'en Serbie, il est recherché
16 précisément pour ce qui s'est passé à Strbci -- en rapport avec les crimes
17 qui furent commis à Strbci ?
18 R. Je ne sais pas s'il est recherché, mais je sais que c'est bien lui.
19 Q. Fort bien. Si je me souviens bien, il a même été arrêté.
20 R. Ça je ne sais pas.
21 Q. Mais pour ce qui de ces événements de Strbci, ce n'était pas quelque
22 chose qui était connue à l'époque, n'est-ce pas, que vous ne saviez pas au
23 moment où vous avez fourni cette déclaration en 1995 ? Là vous affirmez que
24 Milan et Sredoje Lukic cette fois-là ont violé Jasmina Zuban et Ifeta
25 Kurspahic ?
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1 R. Ils les ont emmenées -- ces femmes sont revenues dans un état
2 abominable. Ils ne les ont pas violées pendant que j'étais là sur les
3 lieux, donc je ne peux pas vous le dire effectivement, mais ces femmes ont
4 dû prendre des médicaments.
5 Q. Je voulais simplement tirer ceci au clair parce qu'il y a une
6 différence spectaculaire entre vos dires de ce moment-là, et ce que vous
7 dites maintenant. Je vous demande d'examiner cette déclaration. Vous dites
8 et là je cite cette déclaration que vous avez fournie à la police de
9 Bosnie-Herzégovine :
10 "Ces jeunes femmes et ces femmes qu'ils emmenaient ont été violées. Ils ont
11 violé Ismeta Kurspahic et la dénommée Zuban, Jasmina Zuban."
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, il n'y a rien dans tout ceci.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Passons à huis clos partiel.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
15 Monsieur le Président.
16 [Audience à huis clos partiel]
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17 [Audience publique]
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Vous poursuivez, et vous dites que Lukic vous a fouillé dans la maison
20 de Jusuf Memic ?
21 R. Oui, au moment où il a pris notre argent et les bijoux que nous avions.
22 Q. Vous dites, dans cette déclaration, que vous lui avez remis votre
23 argent ?
24 R. Oui. Nous l'avons tous fait. Nous lui avons tout donné. Il a jeté un
25 chiffon sur la table et il a dit : "Mettez-y tout ce que vous avez, argent
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1 et bijou.
2 Q. Dans la déclaration que vous avez faite au centre de sécurité, vous le
3 dites également, n'est-ce pas ? Combien d'argent a-t-il obtenu de vous ?
4 R. Il le sait. Il sait combien d'argent il a pris. De toute façon, il a
5 ramassé tout un sac.
6 Q. Mais vous, en personne, combien lui avez-vous donné ?
7 R. Plus de 2 000 marks allemands, mis à part les bijoux.
8 Q. Cependant, dans le cadre de votre déposition, vous avez dit avoir donné
9 plus de 2 000 marks. Mais dans la déclaration, dans la déposition que vous
10 avez fait ailleurs, pour laquelle nous avons le compte rendu d'audience,
11 ligne 10 de la page 1424, vous dites -- lorsqu'on vous pose cette question,
12 vous dites que vous aviez pris un peu d'argent et vos papiers avec vous ce
13 jour-là, le 14 juin. D'où venaient tous ces bijoux ?
14 R. Mais on avait tous des bijoux. C'était vrai de moi, mais aussi
15 d'autres, et, bien sûr, que nous avons tout emporté. On n'a pas laissé tout
16 ça sur place quand on est parti.
17 Q. Fort bien. Vous avez fourni cette déclaration aux enquêteurs, page 5,
18 paragraphe 2. Vous y dites que, vers 8 heures du soir, Lukic vous a amené à
19 la maison d'Amer -- d'Adem Omeragic. C'est bien cela ?
20 R. Oui. Milan Lukic, Sredoje Lukic, ainsi que Mitar Vasiljevic, ils
21 étaient là au moment où on nous a chassés d'une maison vers une autre.
22 Q. Page 2, paragraphe 4, de la déclaration faite au centre de Sécurité, en
23 1995, vous dites ceci :
24 "Au moment où nous sommes tous entrés, ils ont verrouillé la porte puis ils
25 sont revenus avec un dispositif incendiaire qui a commencé à s'enflammer
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1 aussitôt." Vous dites que : "Lukic a tiré une rafale au sol à la sortie
2 pour empêcher les gens de s'échapper."
3 R. Il était impossible que quiconque échappe puisqu'il y avait des flammes
4 au seuil de la porte.
5 Q. Examinez la déclaration faite, trois ans plus tard, aux enquêteurs.
6 Page 6, paragraphe 1, vous dites ceci :
7 "Nous étions dans la pièce depuis environ 30 minutes au moment où
8 Vasiljevic et les deux Lukic sont revenus dans la maison. Je les ai vus
9 très clairement. Ils ne sont pas entrés dans la pièce, mais ils ont ouvert
10 la porte. Et j'ai vu que Milan Lukic a placé une bombe sur -- au sol, une
11 bombe qui a une mèche, et la flamme consomme la mèche avant de provoquer
12 l'explosion. J'ai vu Milan Lukic qui tenait cette bombe en main et j'ai vu
13 qui l'a placée sur le sol. Les gens étaient assis. J'ai vu Milosevic Lukic,
14 et Sredoje et Mitar qui étaient debout à côté de lui."
15 R. Oui, non, il était près de la porte, debout.
16 Q. Pour ce qui est de cet incident, est-ce que vous avez fait une
17 déclaration à un homme, Mustafa Sacirovic, surnommé "Mule", qui était
18 ensuite inclus dans l'ouvrage écrit par Naser Oric, "Les accusations de
19 Srebrenica".
20 R. Je ne sais pas qui est cet homme.
21 Q. Pourtant, ceci se trouve à l'intercalaire 8. Ce sont les documents que
22 m'a remis M. Groome, qui vous interrogeait.
23 M. GROOME : [interprétation] C'est en fait le document précédent.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Obtenons un exemplaire pour le témoin.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas qui a présenté ce document.
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1 M. GROOME : [interprétation] Oui. C'était déposé sous pli scellé. C'était
2 le compte -- le compte rendu d'audience de la déposition précédente du
3 témoin.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous voulez poser quelle question,
5 Monsieur Milosevic ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, elle dit, Mme le Témoin, à page 114, de la
7 version en anglais, 1186734 [sic] -- je vais abréger.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. "D'abord, ils ont allumé quelque chose qui ressemble à du gaz à la
10 porte et les flammes se sont propagées dans la pièce où nous étions." C'est
11 bien comme ça que ça s'est passé, Madame 1054 ?
12 R. Mais bien sûr. Les gens ont commencé à sursauter -- à sauter plus
13 exactement. Il y a deux personnes dont je ne connais pas le nom, et ces
14 hommes sont allés en dessous de la fenêtre et ont tiré sur les gens qui
15 essayaient de sauter, pour les empêcher de sauter.
16 Q. Est-ce qu'on parle ici d'une grenade avec un -- une -- avec une
17 goupille. Mais de quoi parle-t-on ? On parle de gaz ou plutôt d'une
18 grenade ?
19 R. Vous savez qu'il y avait les tapis dans -- des tapis dans la pièce qui
20 était déjà imprégnée d'une certaine -- imbibée d'un liquide. Je ne sais pas
21 ce que c'était, si c'était du carburant où un autre combustible. Je ne sais
22 pas. Je n'ai pas dit que c'était du gaz, mais je sais que les tapis étaient
23 de quelque chose qui permettait de s'enflammer immédiatement.
24 Q. Et comment est-ce que cet incendie a commencé ? Est-ce qu'il y a eu du
25 gaz, est-ce qu'il eu une grenade ou est-ce que le feu a pris d'abord à ces
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1 -- est-ce que c'était de l'essence qui se trouvait sur ces tapis qui en
2 étaient imprégnés. Comment est-ce que le feu a commencé ?
3 R. Je ne sais pas comment ça s'est passé, mais, vous savez, quand il
4 suffit qu'on lance une allumette pour que le feu prenne. Vous savez comment
5 ça se passe.
6 Q. Mais ici vous parlez d'une grenade, d'une espèce de détonateur.
7 R. Il y avait quelque chose d'autre à l'entrée -- à la porte pour empêcher
8 que les gens ne s'échappent.
9 Q. Mais dans la déclaration faite au centre de Sécurité, vous dites que
10 Lukic a tiré une rafale au sol pour empêcher que les gens ne s'échappent.
11 Alors que, dans la déclaration faite aux enquêteurs, vous vous contentez de
12 dire qu'il avait une grenade et que les deux autres étaient équipés d'un
13 fusil ?
14 R. Cette espèce de grenade a été lancée avant la rafale. Et quand ils ont
15 tiré vers la fenêtre, ce n'était pas une rafale, c'étaient des tirs isolés,
16 individuels.
17 Q. Pourtant, c'est toujours la conclusion qui règne. En effet, au
18 paragraphe 2, de la page 6, de cette déclaration faite aux enquêteurs, vous
19 dites qu'il y a deux personnes, (expurgé), qui sont -- ont
20 sauté par la fenêtre au moment où il y eu explosion de cette grenade. Donc
21 il y a eu une explosion. Il y a eu des tirs ?
22 R. J'ai dit, il y a un instant, que je ne voulais pas vous dire qui était
23 -- avait sauté par la fenêtre.
24 Q. Pourtant, tu donnes ces noms, mais ce qui compte ici, ce qui est
25 important, c'est que vous me disiez que quelqu'un a sauté par la fenêtre au
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1 moment où il y a eu l'explosion ?
2 R. C'est bien cela.
3 Q. Est-ce qu'il y a eu l'explosion d'une grenade, ou est-ce qu'il y a eu
4 du gaz qui a explosé, ou est-ce qu'il y avait une -- un tapis qui était
5 imbibé d'essence. Qu'est-ce qui s'est passé ?
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Dites-nous une dernière fois, Madame le
7 Témoin, dans l'intérêt de l'accusé, ce qui s'est passé, puis nous passerons
8 à un sujet différent.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Au moment où cette femme a sauté par la
10 fenêtre, moi, j'ai jeté mon fils par la fenêtre aussi. Deux minutes plus
11 tard, j'ai sauté moi-même. J'ai été blessé à mon bras gauche et à la jambe
12 gauche.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Auparavant, au moment où on a lancé cet
14 engin explosif dans la pièce, vous avez expliqué qu'on avait aspergé le
15 tapis d'un liquide. Qu'est-ce qui s'est passé au moment où cet engin a été
16 posé ou jeté dans la pièce ? Pourriez-vous nous le dire en quelques mots ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, cet engin était posé devant la porte.
18 Au moment où il y avait -- au cas où la mèche qui brûlait finalement, ça
19 fini par exploser, mais le feu s'est propagé dans la pièce. Le feu a pris
20 au tapis et, à ce moment-là, Lukic a tiré une rafale. Il était en dessous
21 de la fenêtre pendant que les gens sautaient pour les empêcher de sauter.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation]
23 Q. Oui, mais vous expliquez que quelqu'un a sauté par la fenêtre. Vous ne
24 voulez pas donner le nom de ces personnes et puis vous dites qu'il y a eu
25 explosion de cet engin. Par la suite, vous dites ceci :
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1 "Je me suis demandé que faire en l'espace de quelques minutes et, à ce
2 moment-là, j'ai été touché par un des fragments et j'ai été brûlé par la
3 flamme."
4 R. Oui.
5 Q. Comment est-ce qu'un éclat peut vous toucher plusieurs minutes après
6 l'explosion de cet engin ?
7 R. Il y a eu ricochet, sans doute, de cet éclat, du coup venant du fusil.
8 C'est passé par la fenêtre et c'est arrivé dans ma jambe.
9 Q. Donc, je vois. L'éclat, qui vous a touché trois minutes après
10 l'explosion, c'est plutôt une balle qui a fait ricochet, qui est passé par
11 la fenêtre et qui a fait ricochet contre le mur. C'est cela que vous voulez
12 dire ?
13 M. GROOME : [interprétation] Il est impossible que le témoin connaisse
14 l'origine de cet éclat.
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je pense que ce type de détail ne nous
16 aide pas -- pas du tout. Monsieur Milosevic, vous avez maintenant bénéficié
17 de plus d'une heure. L'heure est venue de faire la pause. Est-ce que vous
18 demandez davantage de temps pour interroger ce témoin ? Avez-vous beaucoup
19 plus de questions à lui poser ?
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas beaucoup plus, mais il me faudrait un peu
21 plus de temps quand même, Monsieur May. Et je suis d'accord avec M. Groome
22 que, vu les circonstances, il est difficile pour quiconque de voir tout de
23 façon précise, mais -- et le témoin a sans doute peine à dire qu'elle sait
24 exactement par qui elle a été ou qui l'a prise pour cible si c'était
25 vraiment Milan Lukic. Je suis d'accord avec M. Groome. Dans un tel état de
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1 panique, il est difficile de voir tous les détails.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je l'ai vu parfaitement, Monsieur
3 Milosevic.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons faire la pause. Voici ce que
5 nous allons faire. Vous aurez dix minutes de plus.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que ceci suffira. Je vous remercie.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pause dès lors. Madame
8 B-1054, ne parlez à personne de votre déposition tant qu'elle n'est pas
9 terminée. Ceci s'applique également aux représentants du bureau du
10 Procureur.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
13 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Continuez, je
15 vous prie.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Madame 1054, concernant les blessures qui ont été les vôtres et dont
18 vous avez parlés tout à l'heure, vous nous avez fourni une fiche de sortie
19 de l'hôpital. J'ai une copie, ici.
20 R. Oui, en effet.
21 Q. Je voudrais vous poser quelques questions à ce sujet-là. Partant de ce
22 qui figure dans cette fiche de sortie et vous nous dites que vous avez été
23 blessé au bras et à la jambe gauche et que vous avez eu des brûlures au
24 bras gauche. Et dans ce qui est dit dans la fiche de sortie -- feuille de
25 sortie, je suppose que Messieurs May, Kwon et Robinson, compte tenu de leur
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1 profession respective, parle bien le latin. Or, il est dit ici, je parle de
2 diagnostic, le premier parle, "d'une blessure par état de balle dans la
3 région, dans le secteur de l'épaule". C'est ce qui est dit, "una slapitaria
4 jonas brak," [phon] mais c'est l'épaule de toute façon. La deuxième, c'est
5 une fracture multiple au-dessus du coude. C'est tout à fait différent de ce
6 que vous nous avez décrit comme blessures.
7 Je voudrais que vous me disiez, à cette fin, pour finir et au final comment
8 cette blessure, d'éclats de balle, située au niveau de l'épaule et comment
9 vous avez eu cette fracture au niveau du bras, au-dessus du coude ?
10 R. Je n'ai eu de blessures qu'ici. Si tu veux voir, c'est visible ici et
11 au-dessus du genou de la jambe gauche. J'ai eu une blessure par balle, la
12 balle a traversé la jambe, et voilà c'est ici que ça s'est passé, et au
13 niveau du bras c'est ici.
14 Q. Dans votre déclaration faite auprès du centre de sécurité de Zenica --
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suppose que cette feuille de sortie a été
16 versée comme élément de preuve au dossier, Monsieur May. Si ce n'en est pas
17 le cas, je voudrais qu'elle soit versée au dossier.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment, avant que d'aller de
19 l'avant, Monsieur Groome, avez-vous ce document pour ce qui est donc de
20 cette feuille de sortie ?
21 M. GROOME : [interprétation] Oui, nous l'avons.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-être, pourrions-nous la produire ici
23 et lui donner une cote.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ajoutons ce sera une cote de la Défense.
25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 177,
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1 Messieurs les Juges. Merci.
2 M. GROOME : [interprétation] Mais je suggérais que la pièce à conviction
3 soit versée sous pli scellé, pour ne pas identifier le témoin.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, sous pli scellé en effet.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Vous nous avez dit que vous avez passé en tout et pour tout à l'hôpital
7 22 jours, à Gorazde.
8 R. Oui, 22 jours. Je n'ai pas compté au juste, peut-être serais-je restée
9 plus longtemps, mais il n'y avait plus de places.
10 Q. Bien, on dit 22 jours, mais dans la feuille de sortie, on indique que
11 vous y avez passé exactement 10 jours, du 23 juin au 1992 au 3 juillet
12 1992.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore, Messieurs les Juges, que cela soit
14 traduit ou pas, cette feuille de sortie nous montre clairement les dates en
15 question. Et ces dates sont très lisibles.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Comment expliquez-vous, Madame, cette divergence ? S'agissait-il d'une
18 erreur ?
19 R. Il n'y a pas d'erreur. Il y a des médecins qui m'ont accueilli à
20 Gorazde, peut-être pourraient-ils vous expliquer eux-mêmes, mieux que moi-
21 même.
22 Q. Certes, mais c'est ce qui est dit ici, vous n'avez pas passé à
23 l'hôpital plus de 22 jours, mais 10 jours un peu pour tout.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin vous a répondu.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, le témoin a donné une réponse. Il n'y a
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1 pas de doute qu'elle ait répondu, mais il y a des divergences, des
2 différences entre ces réponses.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Madame 1054, encore un petit sujet a tiré au clair : D'après ce que je
5 vois, partant des documents sous mes yeux, les enquêteurs du Tribunal vous
6 ont montré des photographies d'une dizaine d'hommes, pour que vous
7 identifiiez les visages des gens qui ont pris part aux événements dont vous
8 avez parlé, n'est-ce pas ?
9 R. Pas une dizaine, mais de ceux qui sont accusés pour ces événements.
10 Q. Bon, mais moi, je me suis penché sur les documents qui m'ont été
11 confiés par les soins de M. Groome. Vous avez déclaré dans la déclaration -
12 - la déclaration de témoin, dans celle qui est plutôt brève, où l'on a
13 rectifié à la main le 21 juillet 2001," et on parle- là de l'ERN 0108792,
14 "L'enquêteur m'a montré une dizaine de photographies," c'est vous qui le
15 dites, et sur les photographies on "a apposé des numéros allant de 1 à 10."
16 Dans le paragraphe suivant, on dit ce qui suit : "On m'a demandé si je
17 reconnaissais l'un quelconque de ces hommes, et j'ai répondu par
18 l'affirmative. J'ai dit que je reconnaissais l'homme numéro 4. C'est Mitar
19 Vasiljevic, je le connaissais. C'était un garçon de café, il travaillait à
20 l'hôtel."
21 R. Oui, j'en ai déjà parlé dans mes déclarations précédentes que j'ai
22 signées auparavant.
23 Q. Puis vous dites : "Je ne sais pas qui sont."
24 R. Oui, Mitar, je l'ai bien connu et j'ai reconnu sa photo tout de suite.
25 Q. Certes, et puis vous dites par la suite, je ne sais pas qui sont les
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1 hommes sur les autres photographies.
2 R. Ce que je ne sais pas, je ne vais pas en parler. Mais lui, je l'ai
3 reconnu, et j'ai confirmé.
4 Q. Certainement.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Maintenant, je voudrais vous demander, Monsieur
6 May, étant donné que ce témoin-ci s'est vue confier une dizaine de
7 photographies, elle n'a reconnu que le dénommé Vasiljevic, je voudrais que
8 vous demandiez à M. Groome si possible de se prononcer sur l'identité des
9 autres neuf personnes qui sont sur les photos, parce que j'aimerais savoir
10 si parmi ces neuf autres, il y aurait l'une quelconque des autres personnes
11 mentionnées par le témoin, et qui aurait été reconnu à l'époque des
12 événements, lorsque ces événements sont survenus.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons demander au Procureur de le
14 faire. Mais nous allons lui demander de le faire si possible par écrit.
15 M. GROOME : [interprétation] Je vais expliquer à présent si la Chambre veut
16 bien l'entendre.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
18 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une
19 procédure d'identification qui a visé à établir dans quelle mesure le
20 témoin a été capable d'identifier des auteurs de crime à l'époque des
21 événements. Et la seule photographie qui a quoique ce soit avoir avec les
22 événements, est celle de Mitar Vasiljevic, au numéro 4. Les autres
23 photographies, sont des photos de personnes qui n'ont rien à voir avec les
24 événements de Visegrad, en quelle qu'occasion que ce soit.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien.
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1 Autre chose à demander, Monsieur Milosevic ?
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être une autre question.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Madame 1054, même si les choses étaient passées comme vous dites
5 qu'elles se sont passées, je voudrais que vous me disiez si dans la
6 description que vous avez fournie de ces événements, il y a eu ou pas des
7 gens de la JNA, ou de la Serbie? C'est bien ce que j'ai cru comprendre.
8 R. Je n'ai pas dit qu'à ce moment-là, il y avait quiconque de la JNA à cet
9 endroit-là.
10 Q. Donc, vous connaissiez tous les hommes dont vous avez parlés, et ce
11 sont tous des hommes originaires du village voisin ?
12 R. Oui.
13 Q. Merci.
14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges. Je
16 vous demanderais une chose, pour qu'il n'y ait pas de malentendu, et pour
17 que l'on ne pense pas que je conteste qu'il n'y ait eu ces victimes en tant
18 que victimes ? Je voudrais donc dire pour qu'il n'y ait pas de malentendu,
19 que je n'ai pas traité de ces questions. Cela n'a pas été mon objectif, et
20 ça n'a pas été mon objectif à présent. Mais je voudrais que les juges de la
21 Chambre, se penchent sur la page 3, paragraphe 4, de la transcription
22 anglaise, ou plutôt de la version anglaise, de cette déclaration de ce
23 témoin, parce que c'est par là que j'aimerais commencer.
24 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
25 Q. [interprétation] Madame le Témoin, je voudrais que vous penchiez sur la
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1 page 3, de votre déclaration, celle que vous avez faite auprès des
2 enquêteurs de ce Tribunal en 1998. Voila ce que vous avez déclaré : "En
3 suivant la route jusqu'au bâtiment de la Croix rouge, nous sommes passés à
4 côté du bâtiment du SUP. Grujic et Lipovac nous ont dit d'aller au bâtiment
5 de la Croix rouge. Grujic et Lipovac sont entrés dans le bâtiment du SUP et
6 ils sont restés." C'est bien ainsi que ça s'est passé, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Alors, est-ce que ce qui figure à la phrase suivante est exacte :
9 "C'est ainsi que nous avons continué notre chemin jusqu'au bâtiment de la
10 Croix rouge, sans escorte, sans accompagnateur. Mais là-bas, il y avait
11 personne étant donné que c'était un dimanche."
12 R. Oui, en effet.
13 Q. Puis vous avez rencontré des policiers qui vous ont injurié.
14 R. Oui.
15 Q. Mais dans la dernière phrase de ce passage, vous dites : "Ils ne nous
16 ont pas gardés, mais ils allaient et venaient à nos côtés." Ils n'ont pas
17 eu d'intervention, ils ne nous ont rien demandé.
18 R. Non. Dans la rue devant l'hôtel, nous étions sous les tilleuls, et ils
19 nous ont injuriés, ils nous ont insultés, en effet. Et l'un des policiers
20 que nous ne connaissions pas, nous a demandé où est-ce que nous allions.
21 Alors nous on nous a fait venir là et nous ne savions pas du tout où il
22 fallait aller.
23 Q. Après, vers la moitié du paragraphe suivant, vous dites que vous avez
24 emprunté la rue principale de Nova Mahala [sic], en direction de ces
25 maisons, à savoir des maisons de Jusuf Memic, et de Mujo Memic, vous n'avez
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1 pas eu d'accompagnateur, d'escorte de la police serbe. Donc vous êtes allés
2 là-bas ?
3 R. Oui. Ils nous ont dit : "Allez-y en toute en liberté. On ne vous
4 toucheras pas à vous, installez-vous là-bas."
5 Q. Bien. Et en page 5, il faut arrivé dans cette maison où ce que vous
6 avez décrit est arrivé. Vous nous indiquez qu'au soldat n'était resté pour
7 vous garder. Vous avez même expliquez que vous aviez trop peur pour vous en
8 allez de là. C'est bien ce que vous avez dit ?
9 R. Pourquoi voulez-vous qu'on nous garde ? Ils nous ont installé là
10 puisqu'ils sont venus nous pillés par la suite, ils sont venus nous brûler
11 vifs. Qui voulez-vous qu'il y ait à nous garder, Mitar Lukic et Mitar
12 Vasiljevic ?
13 Q. Je comprends. Donc jusqu'à la maison des événements, il ne s'est passé
14 rien d'inhabituel ?
15 R. Non, pas sur le chemin.
16 Q. Bien. Je voudrais que vous vous penchiez sur la déclaration du 14 août
17 1995, donc celle qui a précédé la déclaration de tout à l'heure qui, elle,
18 a eu lieu, s'est faite en 1998. Et d'après ce que vous dites dans celle-là,
19 je me réfère à la page 3. Je vous demande donc de voir comment ça s'est
20 passé.
21 "Lorsque nous sommes arrivés devant la Croix rouge de Visegrad, il est
22 arrivé des policiers serbes. J'ai reconnu (expurgé)
23 (expurgé) Ils nous ont emmenés jusqu'au pont de la Drina -- le
24 pont sur la Drina."
25 Puis, vous dites :
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1 "J'ai vu quelque 150 hommes, femmes et enfants que les Chetniks chassaient
2 vers le pont et un Chetnik âgé, barbu était en train de les égorger, alors
3 que deux autres les jetaient dans l'eau."
4 C'est ainsi que ça s'est passé ? Donc vous avez décrit en 1995 que vous
5 aviez vu tout cela sur chemin faisant.
6 R. Oui, Monsieur. Ça s'est passé ainsi. Je n'ai plus les nerfs de repasser
7 tous ces détails, de revivre cette peur parce que des camions citernes
8 étaient emmenés sur le pont de Drina pour laver le sang qu'il y avait.
9 Q. Mais comment se peut-il qu'en 1998, vous n'ayez pas parlé de cela et
10 que vous n'ayez pas évoqué cela parce que vous avez été témoin dans une
11 autre affaire devant ce même Tribunal. C'est terrible si ça s'est passé
12 ainsi. Il y est impossible que vous n'ayez pas mentionné une chose aussi
13 terrible que celle-ci auprès du Procureur lorsque vous avez été interrogé.
14 R. Ecoutez, Monsieur, j'ai omis de dire bon nombre de choses. Cela me fait
15 trop mal. Cela me fait souffrir que d'évoquer de tout cela. Je ne peux pas
16 évoquer, à chaque fois, tout cela, mais ça s'est passé effectivement ainsi.
17 Q. Mais, attendez, vous nous avez décrit que vous avez été non accompagnée
18 lorsque vous avez fait ce chemin. Vous avez expliqué au Procureur --
19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin nous a fourni son explication.
20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais elle ne nous a pas expliqué
21 concernant ce qu'elle vient de nous raconter.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez, ne polémisez pas. Cela ne nous
23 aide pas. Vous avez évoqué les divergences et il nous appartiendra
24 d'accorder une signification à cela ou pas. Vous avez fait votre devoir.
25 Avez-vous d'autres questions ?
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président. Je ne
2 comprends pas votre colère. J'essaie seulement de vous aider et il vous
3 appartiendra de faire confiance à ce témoin.
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous n'allez pas vous adresser à la
5 Chambre dans ces termes. Cela n'est pas approprié à un conseil de votre
6 nature. Je vous demande de vous souvenir de votre position. Vous êtes censé
7 aider la Chambre de première instance. Le témoin a fourni une explication
8 pour ce qui est de ces divergences et allez de l'avant.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis en train d'essayer de vous aider
10 et je n'essaie pas de faire autre chose.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ne continuez pas à me rétorquer de la
12 sorte. Je vous demande de poser les questions suivantes que vous avez à
13 poser.
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous demande quelques instants parce
15 que je dois vraiment retrouver mes esprits après ce qui vient d'être dit.
16 Q. Voilà ce que vous avez décrit dans vos déclarations du 12 et 13 février
17 de l'année 1998 lorsque vous avez parlé ce qu'on vécu les deux jeunes
18 filles. Cela figure au dernier paragraphe de la page 4. Vous avez décrit le
19 fait que ces jeunes filles avaient été emmenées et, au retour, les
20 vêtements étaient en règle, mais l'expression de leur visage avait changé.
21 R. J'ai parlé tout à l'heure de Jasmina Vila. J'ai dit qu'elle avait été
22 mordue sur le visage et ailleurs et, à ce moment-là, elles ont changé leurs
23 expressions, mais elles n'ont pas voulu parler de ce qu'on leur avait
24 demandé à l'occasion de l'interrogatoire. Elles n'ont rien voulu dire.
25 Q. Ecoutez, vous nous avez alors parlé de deux jeunes filles et vous
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1 n'avez relevé rien d'inhabituel si ce n'est le changement d'expressions de
2 leurs visages. Mais dans une affaire précédente, vous avez parlé de trois
3 personnes -- pas de deux personnes, mais de trois personnes et vous avez
4 dit autre chose. Vous avez dit que ces deux ou trois personnes, une fois
5 revenues, avaient les boutons arrachés de leurs vêtements, que leurs
6 vêtements étaient déchirés et cela figure à la page 1441 de la
7 transcription de cette affaire. Et vous avez vu des traces de morsures sur
8 leur peau. Et vous avez également affirmé qu'on les avait emmenées -- puis
9 qu'on les avait ramenées au bout d'un certain temps. Il y a là une
10 divergence entre ceci et ce que vous avez dit le 28.
11 R. Pour ce que vous dites des boutons arrachés, c'était une jeune fille
12 qui ne voulait pas de déshabiller et c'étaient les femmes qui avaient
13 arraché ses boutons pour lui enlever ses vêtements à elle.
14 Q. Je voudrais que vous m'expliquiez à présent sur ce que vous avez dit
15 dans votre déclaration auprès du service de Sécurité en date du 14 août.
16 Vous avez indiqué que ce qu'elles avaient vécu -- elles l'avaient vécu dans
17 une pièce voisine et que vous avez entendu des cris et des cris à l'aide et
18 que, par la suite, vous aviez pu constater ce qui leur était arrivé. Donc
19 ce sont là trois explications différentes. Expliquez-nous maintenant.
20 R. Dans la pièce voisine parce que la maison de Jusuf Memic était une
21 grande maison. Je ne sais plus combien de pièces il y avait. Je ne sais pas
22 où est-ce qu'on les avait emmenées jusqu'où -- où est-ce qu'on les avait
23 déshabillées ou est-ce qu'on avait pris l'argent. Ça ne s'est pas passé
24 tout au même endroit. Si je vous relatais tout ce que j'ai vécu et si ce
25 que je traversais, je devrais prendre des comprimés, des calmants et on
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1 devrait me lier les mains. Donc j'ai abrégé tout ce qui s'est passé. Je
2 crois qu'après tout ce qui s'est passé avec moi, même les Juges ici se
3 mettraient à gémir de douleurs.
4 Q. Moi, je voudrais que vous nous lisiez ce qui s'est passé au niveau des
5 événements dans cette maison et les explications à apporter par le même
6 témoin dans ces dires auprès des enquêteurs du Tribunal et auprès des
7 enquêteurs de l'établissement déjà cité.
8 Je voudrais que vous nous expliquiez une autre chose. Ce n'est qu'au bout
9 de cinq ans que vous avez compris que votre enfant était encore vivant.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez, Monsieur Tapuskovic, permettez-
11 nous -- à nous de nous pencher sur ce que vous essayez de nous dire. Est-ce
12 que vous essayez de nous dire que le témoin, ici présent, ne nous raconte
13 pas la vérité, que cet événement avec les civils brûlés vifs n'a pas eu
14 lieu ? C'est ce que vous essayez de nous dire ?
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, ce n'est pas à moi de
16 décider si cela est vrai. C'est à vous d'évaluer si les témoignages sont
17 valides ou pas. Il ne m'appartient pas à moi.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Mais quelle est la finalité de
19 ce que -- penchons-nous sur ce que vous êtes en train de nous dire. Vous
20 avez attiré notre attention sur certaines divergences, certaines
21 contradictions entre les descriptions des événements faites par ce témoin,
22 à moins que vous n'affirmiez pas que cette maison -- que ce témoin n'ait
23 pas été dans cette maison et que cette maison n'ait pas été brûlée et qu'il
24 n'y ait pas eu de nombres de victimes qu'il y a eu. Je ne vois pas, dans le
25 cas contraire, quelle est la finalité de votre démarche. Sur quoi voulez-
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1 vous que nous apportions une décision dans cette affaire ?
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Vraiment, je pense que vous devriez
3 entreprendre ce que vous pensez -- entreprendre à mon égard, mais ça fait
4 40 ans que je suis avocat -- je me pose des questions partant desquelles il
5 vous appartiendra d'évaluer si certaines -- certains témoignages sont
6 conformes à la vérité ou pas. Donc il y des divergences. C'est à vous
7 d'apprécier si le témoin dit la vérité ou pas. Je crois, et je suis peut-
8 être persuadé, que vous allez véritablement évaluer les dires de tout un
9 chacun.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais nous le savons. Nous vous demandons
11 de vous pencher sur la chose et de nous expliquer en quoi réside l'utilité
12 des contradictions que vous avez constatées dans son récit -- dans ses
13 récits. Pour ce qui est des descriptions totales des événements fournis par
14 le témoin, l'accusé n'a pas contesté le fait que le témoin ait été dans
15 cette maison, que cette maison a été brûlée et que les personnes -- des
16 personnes aient été brûlées vives. Maintenant, pour ce qui est d'autres
17 détails, cela ne nous semble pas être d'une très grande importance. Il ne
18 nous semble que ce témoin est en train de ne pas nous dire la vérité. Je
19 voudrais que vous réfléchissiez aux questions que vous souhaitez poser, non
20 pas parce qu'il y ait des contradictions ou des divergences, mais pour que
21 nous voyions la finalité de ce contre-interrogatoire.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai une objection. Je dirais que jamais
23 personne en Serbie n'a entendu parler de cet
24 événement-là. C'est tellement incroyable qu'il faut forcément que l'on ait
25 entendu parler de gens brûlés vifs dans des maisons. Cela ne s'est pas
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1 passé à l'autre bout du monde. Ça s'est passé dans une république voisine.
2 Par conséquent, qu'est-ce que cela veut dire quand vous dites que je n'ai
3 pas contesté ? Faut-il --
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien, fort bien.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, puis-je dire encore
6 autre chose.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment. Parlez l'un après
8 l'autre. Il me semble que l'accusé conteste que l'événement n'ait jamais eu
9 lieu.
10 Maître Tapuskovic, continuez avec vos questions, mais ne nous prenez pas
11 trop de temps.
12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bien sûr, que je ne prendrai pas trop de
13 temps, Monsieur le Juge May. Voyez-vous, le témoin a parlé d'un autre
14 événement. Elle a dit qu'elle vient de ouïe dire.
15 Q. Mais Madame le Témoin, page 7. Avant la liste que vous avez fournie,
16 vous avez déclaré ce qui suit : "Après cela, dans une maison de Bikavac, il
17 a été hébergé 80 personnes, dont (expurgé).
18 Je ne l'ai pas vue, mais j'ai ouïe dit que, de cette maison, il y a eu
19 beaucoup de cris qu'on a entendus et qu'on a pu sentir l'odeur de --
20 provenant -- nauséabonde provenant de Bikavac."
21 Est-ce que vous êtes également témoin d'une autre -- du crime perpétré dans
22 un autre endroit. A savoir, 80 personnes brûlées à Bikavac ?
23 R. Mais, Monsieur, Bikavac et Nova Mahala, ce n'est pas à des kilomètres
24 l'un de l'autre. Il y a peut-être cinq minutes de l'un des sites à l'autre.
25 Il y a eu 80 personnes de brûlées vives et, puisque vous affirmez que cela
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1 n'est pas vrai, il appartiendra à cette éminente Chambre de se pencher et
2 de constater si cela est vrai.
3 Q. Expliquez comment -- expliquez-nous comment cette liste d'un tel nombre
4 de victimes a été rédigée ? Je ne mets pas en doute le fait que ces
5 personnes soient mortes, mais d'où viennent les noms et prénoms qui
6 figurent ici ? Est-ce que l'on a d'abord découvert les corps de ces gens-là
7 comme étant des victimes de tel événement, ou est-ce que vous avez cité des
8 noms de personnes sans savoir si c'était véritablement les personnes qui
9 ont péri ?
10 R. Dans la maison d'Adem Omeragic, il y a tous les noms qui sont écrits
11 dessus. Pour ce qui est de Bikavac, je ne les ai pas comptés, mais Zehra,
12 qui a survécu -- cette jeune fille, qui a survécu, a pu dire qui il y a eu
13 là-bas. Mais pour ce qui est de là où j'étais, il y a tous les noms et
14 prénoms des personnes là-bas.
15 Q. Juste une question. Cinq ans plus tard, votre enfant est revenu. A Dieu
16 plaise qu'il y ait d'autres qui reviennent. Il se peut qu'il y ait d'autres
17 personnes qui aient survécu. Partant de quoi pourrons-nous être certains
18 ici que ce sont là, bel et bien, des personnes qui sont mortes ?
19 R. Mais il eut fallu que mon fils également ?
20 Q. Dieu me garde. Ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire.
21 R. J'ai d'abord jeté, par la fenêtre de cette maison en feu, mon fils.
22 Deux ou trois minutes après, j'ai sauté après lui. J'ai été blessée au bras
23 gauche et à la jambe gauche. J'ai pensé que j'allais mourir. Je ne sentais
24 plus ces parties-là de mon corps. Quelques instants plus tard, j'ai repris
25 mes esprits et j'ai constaté que j'étais blessée au bras et à la jambe. Et
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1 ce n'est pas un mensonge. Mais tout à l'heure, ce que M. Milosevic a dit, à
2 savoir qu'en Serbie, on n'a jamais entendu parler de ces mises à feu, il
3 n'a qu'à aller voir à Potocari ce qui s'est passé, et je crois qu'il n'a
4 peut-être pas entendu parler de Potocari non plus.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. Je m'excuse
6 s'il y a eu un malentendu, mais je pense que cela ne sort pas de l'esprit
7 de la lettre de ce qui figure aux attributions des amis de la Chambre.
8 C'est à vous d'évaluer les dires des témoins et je crois qu'il a fallu
9 mettre en exergue tout cela et il appartiendra à la Chambre de décider de
10 la véracité de ces choses-là.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il appartiendra à la Chambre de dire ou de
12 décider…
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bien, bien. Nous allons continuer et
14 aller de l'avant. A vous, Maître Groome.
15 M. GROOME : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas d'autres
16 questions à poser, mais, si vous pensez au demeurant qu'il faudrait
17 apporter des éclaircissements au sujet de Jasmina Vila et sur ce que
18 l'accusé et M. Tapuskovic ont dit à ce sujet, nous pourrions fournir
19 d'autres éléments de preuve à qui serait en mesure de prouver qu'elle a été
20 -- qu'elle a subi des violences sexuelles de la part de Milan Lukic à
21 plusieurs reprises, et nous pouvons fournir d'autres documents concernant
22 cet incendie et les autres questions soulevées.
23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Juste un moment que je consulte mes
24 collègues.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic et Maître
2 Tapuskovic, lorsque vous contre-interrogez pour rechercher des
3 contradictions dans une déclaration, et que vos contre-interrogatoires sont
4 orientés vers un objectif qui consiste à démontrer que tel ou tel incident,
5 en fait, n'a pas eu lieu, et qu'un témoin invente les faits, vous devriez
6 le dire très clairement au témoin. Il ne suffit pas de contre-interroger à
7 la recherche de contradictions lorsque M. Milosevic a contre-interrogé et
8 qu'il recherchait des contradictions. J'ai dit moi-même qu'il n'était
9 possible de contre-interroger de façon que, si M. Milosevic dise qu'à son
10 avis, l'incident n'avait pas eu lieu, il convient de le dire clairement au
11 témoin. Il faut lui dire qu'il invente pour voir quelle sera sa réponse, et
12 éviter tout malentendu. Parce que cette -- c'est un mode de contre-
13 interrogatoire qui est issu de la "Common Law" et, dans la "Common Law",
14 c'est de cette façon que l'on pratique. Il importe de dire clairement au
15 témoin ce que l'on pense, autrement dit, qu'il mentir, qu'il invente, qu'il
16 crée le récit, qu'il relate de toute pièce de façon à ce qu'il n'y ait pas
17 de malentendu, et que le témoin puisse équitablement répondre.
18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous n'avons pas besoin d'entendre
19 d'éléments de preuve au sujet de cette question secondaire dont il vient --
20 qui vient d'être abordée, mais le témoin devrait avoir la possibilité de
21 répondre aux suggestions qui sont faites.
22 Madame le Témoin B-1054, vous avez entendu ce débat. Vous avez entendu ce
23 que M. Milosevic vient de laisser entendre, à savoir qu'il n'a jamais
24 entendu parler de tout cela. Par conséquent, cela ne se serait pas passé.
25 Alors, vous avez la possibilité -- vous devriez avoir la possibilité de
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1 répondre parce qu'en effet, ce qui vient d'être dit c'est que vous n'avez
2 pas dit la vérité au sujet de ce qui s'est passé dans cette maison -- de
3 l'endroit où se trouvaient ces personnes et de la façon dont elles ont été
4 tuées. Il est donc
5 sous-entendu que vous n'avez pas dit la vérité. Vous devriez avoir la
6 possibilité de répondre. Ceci s'est-il passé réellement ou pas ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
8 ceci s'est réellement passé, mais M. Milosevic ne l'admet pas. Il n'admet
9 pas qu'il y a eu incendie, que nous avons été tués, mais c'est la vérité,
10 ceci est certain. Lorsqu'il prétend que ceci n'est pas vrai, qu'il n'est
11 pas vrai que des gens aient été brûlés vifs dans cette maison et que j'ai
12 survécu, alors comment est-ce que toutes ces personnes, qui ont été tués à
13 Potocari, auraient pu l'être ? D'où viennent toutes ces tombes et toutes
14 ces fosses communes ?
15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Madame le Témoin B-1054. Ceci
16 met un terme à votre déposition devant le Tribunal. Je vous remercie d'être
17 venue pour témoigner. Vous pouvez maintenant vous retirer, mais je vous
18 demanderais simplement d'attendre quelques instants que les stores soient
19 baissés.
20 [Le témoin se retire]
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons réentendre à présent le
22 témoin précédent.
23 Ce témoin n'est pas protégé, n'est-ce pas ?
24 Mme BAUER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Donc on peut lever les stores dès qu'il
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1 se trouvera quelqu'un pour le faire dans le prétoire.
2 Mme BAUER : [interprétation] Le nom du témoin est
3 Josip Josipovic.
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir Monsieur.
6 Mme BAUER : [interprétation] Monsieur le Président, nous en avons terminé
7 avec l'examen du résumé de la déposition de ce témoin hier, donc le moment
8 est venu pour M. Milosevic de procéder au contre-interrogatoire.
9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
10 LE TÉMOIN: Josip Josipovic [Reprise]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai reçu hier la déclaration écrite
13 relativement longue de M. Josip Josipovic et je la suivrai dans l'ordre,
14 mais, au préalable, et exceptionnellement, je voudrais citer ce qui se
15 trouve tout à fait à la fin de la déclaration écrite de M. Josipovic. Je
16 n'ai reçu cette déclaration en serbe qu'hier. Avant la date d'hier, je
17 l'avais en version anglaise. Donc je peux vous dire qu'il s'agit de la fin
18 de la déclaration en anglais numéro ERN 01067675 et le texte se poursuit en
19 page 76, s'agissant des deux derniers numéros. Mais je vais faire lecture
20 de ce passage à partir de la version serbe.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Si vous souhaitez interroger le témoin au
22 sujet de sa déclaration écrite, il faudrait qu'il dispose d'une version de
23 cette déclaration dans sa langue. Ah, il l'a sous les yeux, bien.
24 Est-ce que vous pouvez nous donner un numéro de paragraphe ?
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Trente-six.
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1 Mme BAUER : [interprétation] Il s'agit de la deuxième déclaration du
2 témoin, Monsieur le Président.
3 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Paragraphe 36.
5 Allez-y Monsieur Milosevic.
6 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :
7 Q. [interprétation] Donc, Monsieur Josipovic, dans toute votre déclaration
8 écrite, vous relatez un certain nombre d'événements liés aux conflits et
9 impliquant les relations entre les différents éléments de la population,
10 qui étaient mixtes et composés de Serbes, de Croates et de Musulmans,
11 n'est-ce pas ?
12 R. De Serbes et de Croates uniquement.
13 Q. Fort bien. Et puis vous parlez d'assassinats, de massacres, dans les
14 villages de Bacin, Hrvatskia Dubica, Predore, Tanac, Visnjica, Cerovljanin,
15 n'est-ce pas ? C'est bien cela, Monsieur Josipovic ?
16 R. C'est exact, Monsieur Milosevic.
17 Q. Merci beaucoup. Et bien maintenant, je vais donner lecture de ce
18 paragraphe 36, que l'on trouve dans votre déclaration écrite où vous dites
19 en toute responsabilité, ce qui suit, je cite :
20 "Je pense que le -- les massacres survenus dans les villages de Bacin,
21 Hrvatska Dubica, Predore, Tanac, Visnjica et Cerovljanin ont été ordonnés
22 par Stevo Radunovic et Momcilo Kovacevic. Ils étaient commandants et
23 donnaient leurs ordres aux Serbes de la région. Je sais que Milan Martic
24 est arrivé plusieurs fois de Knin pour rencontrer Radunovic et Kovacevic.
25 Un jour où nous rassemblions le bétail, j'ai entendu les gardes prononcés
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1 le nom de Milan Martic et dire qu'il était arrivé à bord de l'hélicoptère
2 que nous avons vu. J'ai entendu les gardes dire que cet hélicoptère devait
3 atterrir à Zivaje. Radunovic et Kovacevic ont été relevés de leurs
4 fonctions lorsque la JNA et la police militaire de la JNA ont pris en main
5 la région. Je pense que leur licenciement a résulté d'une décision prise
6 par Martic. Je pense que les ordres de tuer les gens de la région ont été
7 donnés par Radunovic et Kovacevic lorsque la JNA et la police militaire ont
8 pris le contrôle de la région. Les pillages et les incendies de maisons ont
9 cessé."
10 Donc ces personnes, que vous considérez responsables tout au long de votre
11 déclaration écrite, ont été relevées de leurs fonctions en raison d'une
12 décision prise par Martic lorsque la JNA et la police militaire sont
13 arrivées. Et vous dites vous-même que, lorsque la JNA et la police
14 militaire ont repris en main la région, les pillages et les incendies ont
15 cessé.
16 Alors, Monsieur Josipovic, ceci n'indique-t-il pas que la JNA a fait tout
17 ce qu'elle pouvait pour faire cesser la violence et assurer la sécurité aux
18 citoyens de la sécurité des propriétés, des biens ?
19 R. Pourriez-vous répéter votre question ? Je ne l'ai pas comprise ?
20 Q. Compte tenu de ce que vous avez lu dans votre déclaration écrite, je
21 vous demande si vous propos ne confirment pas le fait que là, où l'armée
22 populaire yougoslave est arrivée, elle a garantit la sécurité des citoyens
23 et empêché les affrontements ?
24 R. Oui, parce qu'elle avait des différents avec la population locale, avec
25 les Serbes et Chetniks. Et pour prendre pouvoir, c'est ainsi qu'elle a agi.
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1 Q. Et bien, je suppose qu'elle a agi de la façon dont vous avez décrite.
2 Elle était même en différent avec les forces paramilitaires serbes afin de
3 faire cesser le conflit entre vous et elles, ces forces paramilitaires,
4 n'est-ce pas ? C'est pour cela qu'elle est intervenue ?
5 R. C'est exact. Et avant cela, elle les avait aidé en leur donnant des
6 armes et tout le reste. Lorsqu'ils ont perdu le contrôle, qu'ils ne
7 pouvaient plus tenir, ils ont pris des mesures pour arrêter ce qui avait
8 été fait.
9 Q. Mais lorsque vous parlez de prises de pouvoir dans le secteur, vous
10 parlez des gens que vous avez identifiés comme responsables et qui ont été
11 démis de leurs fonctions sur décision de Milan Martic.
12 R. C'est mon avis. C'est ce que je pensais à l'époque.
13 Q. Mais qui d'autres auraient pu les démettre de leurs fonctions
14 puisqu'ils faisaient partie de l'armée serbe de Krajina ? Qui d'autres que
15 la police de la Krajina ?
16 R. Le chef de l'ancienne JNA.
17 Q. Moi, je me réfère à votre déclaration, Monsieur. C'est vous qui avez
18 dit qu'ils avaient démis de leurs fonctions par Martic. Mais revenons aux
19 questions que j'ai à vous poser dans l'ordre chronologique. Au début de
20 votre déclaration écrite, vous dites qu'avant les élections, les rapports
21 étaient tout à fait normaux entre les Serbes et les Croates de Hrvatska
22 Dubica, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Et dans ce même paragraphe, vous dites qu'après les élections, les
25 Croates ont obtenu une majorité écrasante et qu'immédiatement après, ils
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1 ont créé le Corps de la Garde nationale, n'est-ce pas ?
2 R. Non. Ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas eu le temps de surligner les
4 documents que j'ai reçus hier, Monsieur May. J'ai simplement fait des
5 annotations dans le texte anglais.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Il est écrit dans cette déclaration écrite, je cite : "Hrvatska Dubica
8 était une petite ville dont la population était mixte avec une faible
9 majorité de Croates. Après les élections de l990, le HDZ a obtenu une
10 majorité importante et peu de temps après, les Croates ont créé la Garde
11 nationale connu sous le nom de Zenga. Zenga avait une structure militaire.
12 Les Serbes disposaient de la Défense territoriale qui était une force de
13 réservistes de la JNA existant depuis de nombreuses années. Les Croates,
14 qui appartenaient à la Défense territoriale l'ont quitté en 1990 après les
15 élections. Avant les élections, il y avait des relations normales entre les
16 Croates et les Serbes du village.
17 "A partir du moment où la Zenga a été créée, les relations entre les Serbes
18 et les Croates du village ont changé. La méfiance est apparue et plus
19 personne ne s'est senti en sécurité."
20 Et le texte se poursuit.
21 Je vous ai posé la question tout à l'heure au sujet des Croates après les
22 élections à l'issu desquelles ils avaient obtenu une majorité écrasante. Je
23 vous ai demandé si ce n'est peu de temps après qu'ils ont créé le Corps de
24 la Garde nationale, une structure militaire. Vous m'avez répondu que ce
25 n'était pas le cas et je viens de vous citer vos propres propos à ce sujet,
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1 dont les choses se sont-elles passées ainsi ou pas ?
2 R. Après l'éclatement de l'ex-Yougoslavie, les Croates souhaitaient
3 l'indépendance, donc il était tout à fait normal qu'ils créent un pouvoir
4 croate et une armée croate.
5 Q. Je ne vous demande pas, Monsieur Josipovic, ce qui était normal à votre
6 avis. Je vous interroge simplement en rapport avec ce que vous avez dit au
7 sujet de 1990. Vous avez dit, en 1990, immédiatement après les élections,
8 que vous aviez créé une formation paramilitaire, à savoir, le Corps de la
9 Garde nationale. Vous ne lui donnez pas ce qualificatif. La décision vous
10 appartient à ce sujet. Mais je me permettrais de souligner que vous avez
11 créé le Corps de la Garde nationale qui était une structure militaire
12 immédiatement après les élections. C'est bien cela, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, Monsieur Milosevic. Et si la Croatie avait perdu la guerre, il
14 s'agirait d'une unité paramilitaire. Mais la Croatie a gagné la guerre.
15 Elle a obtenu son état et la reconnaissance de cet état. Par conséquent, ce
16 n'est plus une police ou une armée paramilitaire.
17 Q. Il est de notoriété publique que cela s'est passé dans les conditions
18 que l'on sait et que la reconnaissance vous a été accordée. Mais en tout
19 état de cause, lorsque les choses dont nous parlons se sont passées en
20 1990, la situation était bien différente.
21 Monsieur Josipovic, avant cette période, vous faisiez votre service
22 militaire au sein de la JNA, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Vous savez, fort bien, ce que signifient les termes structures
25 militaires, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Donc, en 1990, le Corps de la Garde nationale s'est créé en tant que
3 branche armée d'un parti, n'est-ce pas ?
4 R. Ce n'est pas ainsi que je décrirais les choses. C'était l'armée d'un
5 parti.
6 Q. Bien. Est-il exact qu'à l'époque, la Croatie était une république qui
7 faisait partie de la RSFY existant encore à l'époque où vous avez créé le
8 Corps de la Garde nationale ?
9 R. Oui. Elle en faisait partie, mais elle souhaitait faire sécession par
10 rapport à l'ex-Yougoslavie.
11 Q. Vous dites que les Serbes disposaient, à l'époque, de la Défense
12 territoriale qui était une force de réservistes de la JNA.
13 R. Oui, c'est exact.
14 Q. Dans le passage que j'ai cité, il est indiqué qu'un peu plus loin dans
15 le texte que j'ai cité -- il est indiqué un peu plus loin qu'il n'existait
16 de Défense territoriale serbe, mais qu'il était
17 du devoir et que c'était un droit de tous les citoyens de la RSFY, donc de
18 tous les habitants de la région, de faire partie de la Défense territoriale
19 et que celle-ci se composait de Serbes et de Croates, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Mais lorsque le Corps de la Garde nationale a commencé à se créer, les
22 Croates ont commencé à abandonner la Défense territoriale pour entrer dans
23 les rangs du Corps de la Garde nationale, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, puisqu'ils n'avaient plus confiance en la Défense territoriale.
25 Q. Les Serbes de la région de Hrvatska Dubica, possédaient-ils une
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1 quelconque armée à l'époque -- une armée à eux ?
2 R. Oui.
3 Q. Quel genre d'armée ?
4 R. Les bandes de Chetniks.
5 Q. Il y a un instant, vous avez déclaré qu'il existait -- que la Défense
6 territoriale existait, qui appartenait à tous les citoyens et que les
7 Croates l'avaient abandonnée pour passer dans les rangs du Corps de la
8 Garde nationale ?
9 R. Dans l'ex-Yougoslavie -- l'ex-Yougoslavie appartenait à tous les
10 citoyens et tous les citoyens passaient par la Défense territoriale, mais,
11 au moment où tout s'est démantelé et compte tenu de l'évolution de la
12 situation, il était normal que les Croates n'estiment plus opportun pour
13 eux de faire partie de la Défense territoriale ou de la JNA.
14 Q. Que voulez-vous dire par "ne juge plus opportun" ?
15 R. Il ne souhaitait plus faire partie de la Défense territoriale ou de la
16 JNA.
17 Q. Est-ce que quelqu'un les a chassés, expulsés de la JNA ?
18 R. Oui, ils étaient menacés et en danger.
19 Q. Connaissez-vous quelqu'un qui ait été expulsé de la JNA parce qu'il
20 était Croate ?
21 R. Je ne sais pas, non.
22 Q. Vous dites en page 7, paragraphe 2, de votre déclaration, qu'à partir
23 du moment où la Zenga a été créée, la méfiance est apparue au sein de la
24 population de Hrvatska Dubica ?
25 R. C'est exact.
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1 Q. Et que pendant la nuit les Serbes traversaient la rivière Una pour
2 passer la nuit en Bosnie et revenir chez eux le lendemain matin. C'est bien
3 cela ?
4 R. Oui. Le soir ils partaient parce qu'ils avaient peur. Ils partaient
5 donc sur l'autre rive de la rivière Una et puis pendant -- tant qu'il
6 faisait jour, ils revenaient chez eux où ils se sentaient en sécurité comme
7 les Serbes qui passaient la nuit à Hrvatska Dubica.
8 Q. Donc, ils partaient pendant la nuit pour éviter la liquidation de nuit
9 et ils passaient la nuit du côté bosniaque et pendant la journée, ils
10 revenaient travailler parce que c'étaient des paysans, n'est-ce pas, des
11 agriculteurs qui s'occupaient de leurs fermes ?
12 R. Oui, c'est exact. Ils revenaient rejoindre la JNA, leurs chars, leurs
13 obusiers aussi, pour ouvrir le feu sur les leurs, sur les Serbes, parce
14 qu'ils souhaitaient avoir des informations.
15 Q. M. Josipovic, est-ce que vous êtes en train d'essayer de nous dire même
16 si vous avez dit des choses un peu différemment dans votre déclaration
17 écrite que certains Serbes passaient de l'autre côté de la rivière Una
18 pendant la nuit, pour dormir en Bosnie, et ouvrir le feu sur les leurs, sur
19 les Serbes, de l'autre côté de la rivière ?
20 R. Oui, c'est ce que je dis, Monsieur Milosevic, parce que c'est ce que je
21 dis depuis le début. Lorsque des Serbes partaient de l'autre côté de la
22 rivière Una, ceux qui restaient dans le village, on leur disait de se
23 cacher dans la cave ou ailleurs parce que ceux qui avaient traversé la
24 rivière pouvaient tirer sur eux et sur nous, et sur toute la population. Et
25 dans certains cas, lorsqu'un Serbe était blessé, il était tout à fait
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1 logique qu'eux disent que c'étaient les Croates qui avaient tiré.
2 Q. Fort bien. Mais vous avez, après les élections, immédiatement après,
3 créé le Corps de la Garde nationale. Les Serbes s'enfuyaient la nuit pour
4 dormir en Bosnie parce qu'ils avaient peur d'être tués pendant la nuit et
5 maintenant vous nous dites que des Serbes traversaient la rivière pour
6 ouvrir le feu sur les leurs, sur les autres Serbes qui étaient restés dans
7 le village, donc, de l'autre côté ?
8 R. C'est exact.
9 Q. Je vois. C'est donc ce que vous prétendez. Fort bien. Fort bien. De
10 quoi les Serbes avaient-ils peur ceux qui traversaient la rivière pour
11 aller dormir de l'autre côté en laissant leurs domiciles sans protection.
12 R. Il faudrait que vous leurs posiez la question à eux.
13 Q. Fort bien. Monsieur Josipovic, au paragraphe 8, page 2, vous dites que
14 la situation s'est spectaculairement modifiée après que la Défense
15 territoriale, c'est-à-dire, les Serbes aient arrêté huit hommes parmi
16 lesquels vous en connaissiez deux : Tomislav Mateljak et Predreg Vucicevic,
17 n'est-ce pas ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Mateljak était Croate, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Et Vucicevic ?
22 R. Il était Croate à l'époque et il l'est toujours aujourd'hui.
23 Q. Je n'ai pas de doute s'il était Croate à l'époque, qu'il le soit encore
24 aujourd'hui. Comme vous le dites vous-même Mateljak à l'époque commandait
25 le Corps de la Garde nationale, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-il exact également que vous saviez à l'époque et donc que vous
3 savez toujours aujourd'hui que Mateljak était un délinquant ?
4 R. Je ne savais pas cela à l'époque. Je savais simplement qu'il ne vivait
5 pas avec ses parents et que sa grand-mère l'avait élevé parce qu'il n'avait
6 pas ses parents.
7 Q. En page 1, de votre déclaration, au dernier paragraphe -- et j'ai sous
8 les yeux la version anglaise, que je cite donc -- vous dites, je cite : "Je
9 considère -- je considérais Mateljak comme un délinquant."
10 Et, un peu plus loin, vous dites :
11 "C'était un bon à rien. Il vivait dans une petite maison en ruines de
12 Cerovljanin, mais une fois que le HDZ a été créé, il est du jour au
13 lendemain quelqu'un de très puissant et de très riche. Je sais qu'il était
14 chômeur avant la guerre."
15 Donc c'est vous qui avez dit cela, Monsieur Josipovic, et c'est sur la base
16 de ce que vous avez dit que ceci a été écrit dans cette déclaration. Alors,
17 comment se fait-il qu'aujourd'hui vous disiez que vous ne saviez pas qu'il
18 était délinquant alors que vous avez demandé que l'on écrive qu'il était un
19 bon à rien et un délinquant. Moi, je n'ai jamais entendu parler de
20 Majeljak, ni de vous d'ailleurs, avant de recevoir votre déclaration
21 écrite.
22 R. Ceci n'est pas vrai, je n'ai pas écrit cela. J'ai simplement fait une
23 déclaration en donnant mon avis.
24 Q. Fort bien. Mais je suppose que ceux qui ont pris des notes l'ont fait
25 sur la base de ce que vous disiez ?
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1 R. Oui. Ils ont noté ce que je disais.
2 Q. Fort bien. Cela me suffit dans ce cas qui a écrit physiquement ces
3 mots. Ceci importe peu. Ce qui est important est que c'est votre opinion
4 qui a été consignée par écrit ?
5 R. Oui, c'est mon opinion.
6 Q. Donc M. Mateljak est devenu commandant du Corps de la Garde nationale
7 locale et, comme vous le dites, il est devenu tout d'un coup quelqu'un de
8 très puissant et de très riche à partir du moment où le HDZ s'est créé.
9 Comment expliquez-vous cela ?
10 R. J'explique cela en disant que les autorités de l'époque avaient sans
11 doute besoin de personnes comme lui.
12 Q. C'était, vous l'avez dit vous-même, un délinquant, un bon à rien, et
13 cetera ? Alors, tout cela signifie-t-il que les Serbes avaient peur d'une
14 unité armée, commandée par une personne comme cet homme, à savoir, un
15 délinquant ? Ils avaient peur d'une unité commandée par quelqu'un comme
16 Mateljak et qu'ils avaient raison d'avoir peur, qu'il était normal que les
17 Serbes aient peur d'un groupe armé sous le commandement d'un tel
18 délinquant, même à votre avis. C'est bien cela, n'est-ce, pas Monsieur
19 Josipovic ?
20 R. Non. On ne peut pas dire que cette peur était justifiée.
21 Q. Donc, leur peur n'était pas justifiée en dépit de ce que vous avez dit,
22 vous-même, des faits que vous avez énoncés vous-même ?
23 R. Il n'avait aucune raison d'avoir peur, indépendamment du fait que je
24 considérais cet homme comme je le considérais, indépendamment du fait qu'il
25 était un homme correspondant à ce que j'ai dit.
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1 Q. Donc il s'est comporté de la façon que vous avez décrite. Il était
2 l'homme que vous avez décrit et il était responsable d'une formation armée
3 et, cependant, à votre avis, les Serbes n'avaient aucune raison de craindre
4 une formation armée commandée par un tel homme ?
5 R. En effet. Je n'ai pas dit que c'était un meurtrier ou un criminel.
6 Q. Mais dites-nous, s'il vous plaît, dans quelle mesure les Serbes
7 étaient-ils réellement terrorisés par un délinquant, tel que Mateljak.
8 R. Il n'était soumis à aucune sorte de terreur.
9 Q. Rien de négatif n'a été fait à leur encontre ?
10 R. Non, absolument rien.
11 Q. Vous dites que Vucicevic, le deuxième homme dans ce groupe d'hommes
12 arrêtés que vous connaissiez, a été plus tard relevé de ses fonctions,
13 quant à Mateljak. Vous signalez qu'il réussi à s'enfuir. Ça c'est en page
14 3, paragraphe 2, de votre déclaration.
15 R. Oui.
16 Q. Ces deux hommes donc n'ont rien provoqué, n'ont rien fait de mal, bien
17 que l'un ait été, d'après vous, un délinquant, et l'autre une nouvelle
18 recrue du MUP de Croatie ?
19 R. En effet. Mais j'apporte simplement une petite nuance, en disant que à
20 la télévision on a vu ce que les Chetniks serbes et les troupes de la JNA
21 lui ont fait.
22 Q. Tous dans le même sac, les Serbes, les Chetniks, la JNA, que lui ont-
23 ils fait ?
24 R. Je ne le sais pas encore avec certitude, je ne sais pas exactement qui
25 était Chetnik, qui faisait partie de la JNA, qui faisait partie de la
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1 Défense territoriale, qui appartenait aux hommes de Martic et qui était
2 sous le commandement de l'ex JNA.
3 Q. Puisque vous n'avez pas encore de certitude à ce sujet, j'espère que
4 vous comprenez qu'à l'époque, c'était le plus grand chaos qui régnait.
5 R. Oui, mais il y avait des commandants à toutes ces formations.
6 Q. Qui étaient les commandants ?
7 R. Je ne l'étais certainement pas moi-même. Si ce n'est pas vous, moi en
8 tous les cas je ne l'étais pas.
9 Q. Je vous en prie, Monsieur Josipovic. Mais dites-moi ce que Vucicevic
10 faisait avant de devenir chef du MUP de Croatie ?
11 R. Je ne sais pas.
12 Q. Dans le paragraphe suivant, paragraphe 3, de la page 3, vous dites que
13 ce que vous appelez les Serbes de la région étaient actifs. Vous dites bien
14 qu'il s'agit dans tous les cas de Serbes de la région, et vous dites qu'ils
15 portaient l'uniforme vert olive de la JNA, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, c'est exact.
17 Q. Je vous parle maintenant en tant que -- parce que je sais que vous avez
18 fait votre service militaire, et je vous demande si tous les membres des
19 forces de réserve de la JNA, ou en tout cas la majorité d'entre eux,
20 indépendamment de la république dans laquelle ils résidaient, Serbie,
21 Bosnie, Croatie ou autre, était tenue de porter cet uniforme. S'ils ne
22 portaient pas cet uniforme, ils n'avaient pas le droit de rejoindre les
23 rangs de leur unité, n'est-ce pas, parce que on leur remettait cet
24 uniforme ?
25 R. Certains portaient cet uniforme, d'autres pas. Moi je ne sais pas, moi
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1 je ne l'ai pas porté, on ne m'en pas remis un.
2 Q. Vous avez fait votre service militaire, n'est-ce pas ? Vous étiez
3 conscrit ?
4 R. Non.
5 Q. Mais vous n'aviez pas d'affectation de guerre dans les rangs de la
6 Défense territoriale, dans la Défense de réserve ?
7 R. Je pense que j'avais eu d'affectation dans les rangs de la force de
8 réserve.
9 Q. Fort bien, mais ceux qui étaient que réservistes, en tant que membres
10 de la Défense territoriale, possédaient un uniforme. Ils possédaient cet
11 uniforme parce qu'ils avaient, à un certain moment, fait partie de la JNA
12 ou de la Défense territoriale. Ils portaient donc l'uniforme de la JNA,
13 n'est-ce pas ?
14 R. Oui, c'était l'uniforme de la JNA.
15 Q. Et lorsque le conflit a éclaté, ils se sont contentés de revêtir
16 l'uniforme qu'ils avaient chez eux, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, je ne vois pourquoi ils mettraient ces uniformes puisque vous
18 dites que les Croates et les Musulmans avaient ces uniformes-là. Alors je
19 ne vois pas pourquoi les Croates ne mettraient pas ces uniformes-là ?
20 Q. Peut-être parce qu'ils avaient une attitude de différente à l'égard de
21 la JNA, et de la Yougoslavie en général, et je ne voudrais pas pour ma part
22 généraliser, Monsieur Josipovic. Il y a eu bon nombre de Croates qui
23 faisaient partie de la JNA, dans le courant de cette année 1990. Très
24 certainement, ils ont même occupé des postes clé. Ils ont vu dans cette
25 JNA, vous devez certainement le savoir vous-même.
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1 R. Oui, en effet.
2 Q. Dans le paragraphe 3, page 3, de votre déclaration, vous indiquez en
3 sus du fait que des Serbes étaient des Serbes de la localité. Vous précisez
4 que c'était des voisins à vous et vous indiquez même leur nom et prénom.
5 C'étaient des gens que vous connaissiez, Monsieur Josipovic, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que l'un quelconque d'entre ces gens-là qui était membre de la
8 JNA ?
9 R. Non.
10 Q. Hier, lorsque vous avez été interrogé, vous avez précisé que certains
11 d'entre eux étaient des gens de la localité, et que d'autres étaient venus
12 de Bosnie-Herzégovine. C'est bien ce que vous avez dit ?
13 R. Oui, c'est cela.
14 Q. Ceux qui sont venus de Bosnie-Herzégovine, je suppose que c'étaient là
15 des gens qui étaient venus du côté -- d'autre côté de la Una, donc de
16 régions très proches. Ils n'étaient pas venus de très loin.
17 R. Ils en venaient même de Serbie.
18 Q. Mais vous n'avez mentionné personne de Serbie, qui avez-vous vu en
19 provenance de Serbie ?
20 R. Il y beaucoup de choses que je n'ai pas mentionnées, pour ce qui est de
21 la procédure ou de la façon dont les choses se sont passées.
22 Q. Pouvez-vous me donner au moins un nom et prénom de l'un d'entre eux,
23 qui aurait été originaire de Serbie ?
24 R. Non, je n'ai pas pu connaître ces noms, mais il y en a eu plusieurs qui
25 se sont vantés d'être venus de Serbie, et d'avoir été à Vukovar. Ils
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1 disaient qu'ils étaient venus se venger pour rendre des dettes, des sois
2 disant dettes de la Deuxième guerre mondiale, et ceci à mon encontre.
3 Q. Donc, vous n'êtes pas en mesure de me donner quelque nom que ce soit.
4 R. Et même si je l'avais connu ce nom-là, je ne pourrais m'en rappeler à
5 présent.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je voudrais tirer quelque chose au clair.
7 A quel moment avez-vous rencontré, où êtes-vous tombé sur ce couple qui se
8 vantait être originaire de Croatie, et qui dit qu'il y avait eu implication
9 à Vukovar ? Apparemment, ça s'est passé à quel moment ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'occasion de mon emprisonnement. Ça doit
11 situer à peu près vers le mois d'octobre 1991.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Donc en octobre 1991 ?
14 R. Oui.
15 Q. Comment en octobre pouvait-il dire qu'ils ont été à Vukovar ? Vous
16 n'ignorez pas que la chute de Vukovar se situe vers la fin de novembre
17 1991.
18 R. Je ne sais pas. C'est ce qu'ils ont dit et ils sont vantés de l'avoir
19 fait.
20 Q. C'est ce qu'ils vous ont dit.
21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je voudrais que tout soit bien précisé.
22 Le siège a commencé au mois d'août 1991, il aurait été impossible que
23 quelqu'un parle de Vukovar à l'époque. Bien sûr, la chute, les éléments de
24 preuve l'ont montrée ne s'est faite qu'au mois de novembre, mais le témoin
25 n'est en mesure de parler que de ce qu'il a vu ou entendu.
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May. Je ne sais pas si cela
2 avait bien pu être et ce qui s'était passé à Vukovar du coté serbe jusqu'au
3 mois d'octobre. De la part de la JNA, jusqu'au mois d'octobre, ça vous le
4 savez très bien, puisque vous avez suivi ces événements.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Vous nous avez dit que, sur leur manche, ils portaient tous des
7 inscriptions "SAO Krajina", c'est bien cela ?
8 R. Oui, ça dépendait des uns ou des autres, et cela dépendait des façons
9 dont les gens se procuraient ces emblèmes ou ces inscriptions. D'autres
10 portaient des cocardes et des inscriptions de Chetnik, c'est ce qu'ils
11 portaient comme inscription, et comme emblème.
12 Q. Vous avez parlé d'un certain Sarac qui avait précisé qu'il était
13 originaire de Bosanska Dubica.
14 R. Des environs de Bosanska Dubica.
15 Q. Mais Bosanska Dubica, c'est de l'autre côté de la Una, face à la
16 localité de Dubica croate, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Y a-t-il un kilomètre qui sépare Dubica croate et Bosanska Dubica ?
19 R. Non.
20 Q. Donc, il n'y a pas -- il n'y a même pas un kilomètre ?
21 R. Il y a juste la largeur de la rivière Una.
22 Q. Donc quand vous dites que -- qu'il s'agit de gens de la Bosnie-
23 Herzégovine, c'est plutôt des voisins immédiats ?
24 R. Précisons à propos de voisins. Il y en a qui sont venus de plus loin,
25 il y en a qui étaient venus de Prijedor, de Banja Luka, de Nezdad.
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1 Q. Bien, bien.
2 R. Et tous les environs allant entre -- enfin se situant entre Banja Luka
3 et Dubica croate ?
4 Q. Mais tout cela se trouve plus ou moins de là ?
5 R. Près non, certaines localités se trouvent à 80 kilomètres.
6 Q. Bien. Monsieur Josipovic, allons de l'avant. Le deuxième homme que vous
7 mentionnez, et qui n'a été également pas originaire de Dubica, c'était
8 quelqu'un de soi disant originaire de Vukovar. C'est ce que vous avez
9 mentionné ?
10 R. Oui. Il s'était vanté. Il avait dit que son frère est mort à Vukovar,
11 qu'il est resté sans frère depuis Vukovar et qu'il est venu à Dubica pour
12 venger son frère défunt parce qui avait, lui, été tué par des Oustachi à
13 l'occasion des combats de Vukovar.
14 Q. Donc, c'était un Serbe de Vukovar qui avait fui Vukovar. Ce n'était pas
15 quelqu'un originaire de Serbie.
16 R. D'après ce que je crois savoir, il a dit qu'il était de Serbie et que
17 son frère s'était battu dans les environs de Vukovar. Il a dit qu'il avait
18 perdu son frère là-bas et je crois probable que l'un et l'autre étaient de
19 Serbie. Je n'ai pas dit moi-même, qu'ils étaient originaires de Vukovar.
20 Q. Mais vous avez dit que vous avez rencontré cet homme-là au mois
21 d'octobre. Bon.
22 R. Je ne sais pas exactement quand est-ce que je l'ai rencontré, mais je
23 dirais que cela se situe au mois d'octobre, peut-être la fin du mois
24 d'octobre. Je ne faisais pas la distinction entre les journées, les nuits,
25 les mois, les années. Et je n'en sais rien.
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1 Q. Bien, bien. Monsieur Josipovic, ce détail n'a pas sa nécessité d'être.
2 Vous indiquez, au paragraphe 4, qu'il a donné l'ordre d'enterrer une
3 vieille femme croate qui est morte de faim parce que personne n'avait prêté
4 attention à elle.
5 R. D'après ce que j'en sais, elle est décédée de faim parce que je n'ai
6 pas vu de blessures sur elle. Je ne pense pas qu'elle ait péri par balles.
7 Q. Mais y a-t-il quoi que ce soit de mauvais à ce que cet homme ait donné
8 l'ordre d'enterrer une femme qui était décédée ?
9 R. La seule chose négative c'est le fait que lorsque nous avons creusé une
10 fosse pour enterrer cette vieille femme, pendant que nous étions dans le
11 trou, il mettait le canon de son fusil dans notre bouche et il nous
12 frappait de la crosse de son fusil. Et il nous demandait, si nous voulions,
13 qu'il nous abatte sur le champ pour que nous restions dans le trou illico,
14 ou plutôt fallait-il ensevelir d'abord la vieille femme.
15 Q. C'est ce que vous dites, actuellement, mais je vois que vous êtes sain
16 et sauf. Donc, vous n'avez pas été tué dans cette fosse que vous avez
17 creusée.
18 R. Oui. Parce que nous avons dit que nous voulions rester en vie et que
19 nous allions juste enterrer cette vieille femme. Nous lui avons demandé de
20 ne pas nous tuer.
21 Q. Monsieur Josipovic, combien de temps avez-vous passé dans le
22 rassemblement de la Garde nationale ?
23 R. Quelque deux mois, à peu près.
24 Q. Si j'en juge d'après la déclaration que vous avez faite, vous n'êtes
25 pas devenu membre des ZNG, à titre bénévole.
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1 R. Non. Ce n'est pas le cas. Je n'ai pas été la personne appropriée, à
2 leur avis.
3 Q. Qui est-ce qui vous a recruté contre votre gré dans les rangs du Corps
4 de la Garde nationale ?
5 R. Je me suis présenté moi-même parce que je devais le faire, et je ne
6 pouvais pas trouver de travail. Et la seule façon de rester dans ma société
7 et ne pas me faire licencier par celle-ci, c'était de rejoindre les rangs
8 du Corps de la Garde nationale. Et ce sont eux qui m'ont donné une
9 attestation qui m'a permis de travailler.
10 Q. Où travailliez-vous ?
11 R. A Sisak, dans les chemins de fer croates, ceux qui avaient été les
12 chemins de fer yougoslave auparavant.
13 Q. Donc, vous n'auriez pas conservé votre emploi, si vous n'étiez pas
14 devenu membre du Corps de la Garde nationale. Vous auriez été licencié ?
15 R. Oui. J'aurais été licencié. Je ne pouvais pas voyager pour aller au
16 travail et tout était assiégé. Il y avait une guerre en cours, et la seule
17 façon pour moi de faire c'était de rejoindre les rangs du Corps de la Garde
18 nationale pour conserver mon emploi.
19 Q. Vous dites :
20 "Fin juin 1991, mon frère, mon cousin, Dragan, Mico Coric et moi-même
21 sommes allés A Kutina. Nous n'étions pas membres du HDZ, et nous n'avons
22 pas voulu nous battre contre qui que ce soit. Nous sommes restés dans un
23 hôtel à Kutina. La police croate nous a retrouvés là, et nous ont tirés de
24 là pour nous ramener à Hrvatska Dubica. Ils nous ont dit qu'il fallait
25 rejoindre le Corps de Garde nationale appelé Zenga."
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1 En d'autres termes, c'est la police de Kutina qui vous a donné les
2 instructions pour ce qui est de rejoindre les rangs du Corps de la Garde
3 nationale et, en outre, vous n'avez pas pu conserver votre emploi, si vous
4 ne l'aviez pas fait. C'est bien cela ?
5 R. C'est exact. Après avoir libéré Dvor na Uni et Kostajnica, nous avons
6 fui ces régions. Nous avions peur de la guerre et de toutes les activités
7 belligérantes, donc nous avons suivi le reste de la population et sommes
8 allés à Kutina, pour nous installer à l'hôtel.
9 Q. Bon. Mais dites-moi, serait-il exact de dire qu'au QG des Zenga, vous
10 avez été -- vous avez reçu des armes, vous avez d'abord été admis puis on
11 vous a donné des armes et on vous a envoyé au pont entre la Dubica croate
12 et la Dubica bosnienne ?
13 R. Oui. Plus tard.
14 Q. Mais sur ce pont, avez-vous fait partie de la police croate qui a
15 fouillé toutes personnes qui traversaient pour voir si les gens portaient
16 des armes ?
17 R. Oui, c'est bien le cas.
18 Q. Et c'est là que vous avez été passés sous le commandement direct de ce
19 dénommé, Tomislav Mateljak, n'est-ce pas ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Dites-moi, je vous prie, Monsieur Josipovic, combien de combattants y
22 avait-il à ce moment-là sous les ordres du dénommé Mateljak ?
23 R. Je n'en sais rien.
24 Q. Vous ne savez pas quel était le nombre des soldats dans l'unité qui
25 était la vôtre ?
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1 R. Non. Je n'avais pas de droit de vue de cela.
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le moment est venu de faire une pause.
3 Monsieur Josipovic, veuillez revenir dans ce prétoire dans vingt minutes.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement.
5 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.
6 --- L'audience est reprise à 12 heures 41.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Poursuivez, Monsieur Milosevic.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Josipovic, page 4, paragraphe 1 de votre déclaration, vous
10 déclarez que Mateljak vous a donné un fusil à lunettes, un fusil de tireur
11 d'élite. Puisque vous avez été formé en cette capacité, n'est-ce pas, dans
12 la JNA ?
13 R. C'est exact. J'étais tireur d'élite dans la JNA, et Mateljak m'a
14 effectivement donné un fusil; la version de fusil de chasse de ce type
15 d'arme.
16 Q. Mais cette arme vous a été reprise très peu de temps après cela, n'est-
17 ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Dites-moi, comment s'appelait le membre de la police croate qui vous a
20 donné l'ordre de tirer sur les Serbes qui observaient les faits dans votre
21 direction, sur l'autre rive de la rivière ?
22 R. Je ne sais pas.
23 Q. Vous étiez censé tiré sur des Serbes, n'est-ce pas, en vertu de cet
24 ordre ? Est-ce que ces Serbes avaient ouvert le feu ou ils ne faisaient que
25 faire des observations ?
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1 R. Ils faisaient des observations, et ils tiraient.
2 Q. Je vois que vous aviez pour ordre de tirer sur des personnes qui
3 étaient des observateurs de ce qui se passait de votre côté.
4 R. Je suppose que oui. C'est comme ça que j'ai compris l'ordre.
5 Q. Page 4, paragraphe 2, vous déclarez, que quelques jours plus tard, vous
6 aviez été informé du fait que la maison d'un des Serbes de votre village,
7 de Stojan Bekic, était en feu ?
8 R. Oui.
9 Q. Puis, vous êtes allé dans votre village pour voir ce qui s'y passait.
10 Dites-moi, qui a incendié la maison de Stojan Bekic ?
11 R. Je ne sais pas.
12 Q. Fort bien. Vous ne faites même pas état, dans votre déclaration
13 préalable, de la personne qui a incendié la maison. Mais vous dites que des
14 villageois vous ont dit que des hélicoptères de la JNA avaient atterri à
15 proximité de la maison de cet homme.
16 R. Non. Pas à proximité de la maison de ce monsieur, mais d'une autre
17 maison dans le village.
18 Q. Donc, de votre village. Donc, ça n'avait rien à voir avec la maison de
19 Stojan Bekic qui a été incendiée ?
20 R. Je ne sais pas qui a incendié cette maison, mais sans doute qu'il n'y
21 avait pas de liens entre les deux événements.
22 Q. Donc, cette maison avait été incendiée simplement parce que c'était la
23 maison d'un Serbe ?
24 R. Je ne sais pas qui a mis le feu. Je ne sais pas qu'elle était la raison
25 de l'incendie. Je ne sais pas si c'était parce que c'était la maison d'un
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1 Serbe. Il m'était impossible de poser ce genre de question.
2 Q. Fort bien. Est-ce que vous avez été le témoin oculaire de l'arrivée de
3 ces hélicoptères de la JNA, à quelque moment que ce soit ?
4 R. Oui. Je suis venu au village une fois ou deux pour rendre visite à mes
5 parents. Et ça s'est passé à ce moment-là.
6 Q. Cette fois-là, comme vous le dites, les villageois vous ont dit que les
7 hélicoptères avaient déchargé des armes, transporté en camion, et c'était
8 un camion de la société Elektra qui avait acheminé ces armes vers Zivaja,
9 notamment. Et aussi vers Sas ?
10 R. Oui.
11 Q. C'est ce que vous ont dit ces villageois ?
12 R. Oui. C'est ce qu'ils ont pensé. Plus tard, j'ai été vérifié de mes
13 propres yeux.
14 Q. Vous dites que vous avez appris ce qui s'était passé. Et que voulez-
15 vous dire par là ?
16 R. Et bien, l'hélicoptère a atterri dans les bois, le long de la route, où
17 il y avait des véhicules et des véhicules utilitaires de faibles cylindrés.
18 J'ai vu qu'on déchargeait des armes. J'ai vu tout ce qui s'est passé. Et
19 d'ailleurs, ça se passait derrière l'hélicoptère et puis ces armes, elles
20 ont été embarquées dans les véhicules.
21 Q. Mais vous n'avez pas vu l'endroit où ces armes ont été emmenées ?
22 R. Je sais dans quelle direction ces armes ont été emmenées. C'était vers
23 ces villages que j'ai mentionnés.
24 Q. Et qu'est-ce que vous avez vu comme armes ?
25 R. J'ai vu des armes automatiques. Parce que les Serbes qui étaient venus
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1 chercher ces armes, ont ouvert les caisses et ont pris les meilleures armes
2 pour eux-mêmes; les armes qui étaient nouvelles. Le reste, ils l'ont
3 embarqué dans ces véhicules. C'est à ce
4 moment-là, que j'ai pu voir quel était le contenu de ces caisses et
5 c'étaient des armes.
6 Q. Il y en avait combien, à peu près ?
7 R. Il y avait quatre ou cinq véhicules qui étaient remplis d'armes. Disons
8 50, de 50 à 70 caisses.
9 Q. Parlez-moi de ce train. Vous avez mentionné un train venant de Novska.
10 On a ouvert le feu depuis ce train. On a tiré sur des Serbes, avec des
11 canons de 50 et 60 millimètres.
12 R. Oui. Ce train utilisait bien sûr la voie de chemin de fer, qui allait
13 vers Bosanska Dubica. Moi, je passais dans les parages. Je transportais en
14 camion des vivres pour le village. Je me suis arrêté pour bavarder avec
15 certains amis, et je leur ai demandé ce que ce train faisait là.
16 Ses amis m'ont répondu : "Mais bien sûr qu'ils tirent sur les Serbes. Ils
17 se défendent parce que Dubica est tombée et est maintenant occupée par des
18 Serbes." Ils protégeaient donc les personnes et les effectifs qui battaient
19 en retraite.
20 Q. Et vous, vous avez vu quand on a tiré de ce train ?
21 R. Non, non, moi je n'ai vu que le train.
22 Q. Et vous avez vu les armes qui se trouvaient dans ce train ?
23 R. Oui, c'étaient des armes qui avaient peut-être été confectionnées dans
24 un atelier, de fabrication mécanique, cinq ou six mortiers, mais qui
25 n'étaient pas complètement dotés de leur équipement. Il y avait un homme
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1 qui tenait cette arme alors qu'un autre tirait. Les autres, ils plaçaient,
2 ils servaient l'arme, ils posaient les projectiles dans le tube. Et puis,
3 ils avaient improvisé une espèce de visée. C'était vraiment ridicule comme
4 équipement.
5 Q. Fort bien. Est-il exact de dire que les forces croates au cours de la
6 nuit allant du 13 au 14 septembre 1991 ont détruit le pont reliant Bosanska
7 et Hrvatska Dubica ?
8 R. C'est exact. Ce pont a été détruit pour empêcher la JNA de franchir la
9 rivière. On ne voulait pas que la JNA arrive avec ses véhicules blindés et
10 ses armes.
11 Q. Qui a donné l'ordre de détruire ce pont ? Le savez-vous ?
12 R. Non.
13 Q. Si j'ai bien compris, à lire votre déclaration, le lendemain, le 15
14 septembre vous avez été arrêté ?
15 R. Exact.
16 Q. Connaissez-vous toutes les personnes qui ont été arrêtées ce jour-là en
17 même temps que vous ?
18 R. Oui.
19 Q. Combien de personnes ont-elles été arrêtées ce jour-là ?
20 R. Tous ceux qui se trouvaient dans le village ont été arrêtés. On était
21 peut-être dix.
22 Q. Hier, vous avez parlé de huit personnes.
23 R. Oui, j'ai dit huit, mais enfin, huit ou dix, ça ne fait pas beaucoup de
24 différence. Je n'ai pas fait le décompte.
25 Q. Qui a procédé à ces arrestations, à la vôtre notamment ?
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1 R. C'est l'armée serbe, la JNA, les hommes de Martic, la TO. Je ne sais
2 qui. Je ne sais pas.
3 Q. Vous parlez de la TO de votre village ?
4 R. La TO était présentée comme étant de mon village mais je ne sais pas
5 qui commandait.
6 Q. Connaissez-vous les hommes qui vous ont arrêté ?
7 R. Seulement certains.
8 Q. Donc, ils vous connaissaient et vous, vous les connaissiez ?
9 R. Oui.
10 Q. Vous avez fait une déclaration le 5 décembre 1992 dans la municipalité
11 de Hrvatska Kostajnica, vous dites là que ce jour-là, vous aviez été
12 arrêté, que vous l'aviez été par les Chetniks de la localité, Vaso
13 Paukovic, un certain Rajko, un Mico Tepic ?
14 R. Oui, c'est le nom des personnes que je connaissais. J'ai mentionné les
15 noms des gens que je connaissais. Je n'ai pas mentionné, bien entendu, le
16 nom de ceux que je ne connaissais pas.
17 Q. Est-il exact de dire que vous avez été interrogé à propos des armes que
18 vous déteniez et des positions où s'étaient trouvés les ZNG, les Zenga ?
19 R. Exact. C'est exact là aussi. Mais avant, ils nous ont emmené quatre ou
20 cinq d'entre nous pour que nous leur servions de boucliers humains, ils
21 voulaient aller vers la Sava dans une mission de reconnaissance pour voir
22 où se trouvaient les positions du MUP croate et de l'armée croate. Et cette
23 fois-là, ils nous ont demandé, combien il y avait d'effectifs croates,
24 combien de policiers croates, ce genre de chose. Moi, j'ai dit qu'au moment
25 où nous sommes arrivés près de la rivière Sava :
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1 "Vous pouvez le voir vous-même, vous voyez la longueur du village, trois
2 kilomètres, trois kilomètres et demi. Vous avez une idée de la population
3 du village. Vous voyez combien de personnes il y avait." Moi, je ne le
4 savais pas.
5 Q. J'ai cru comprendre que dans ce village, pour ce qui est de la
6 population locale, il n'y a que Mico Coric et vous-même qui avez été
7 arrêtés ?
8 R. C'est vrai. Après le retour de cette mission de reconnaissance parce
9 que, je vous le répète, nous avions servi de boucliers humains. Les autres,
10 on les a laissés tranquilles. Mais nous, ils nous ont emmenés. Ils les ont,
11 eux et les autres, ils les ont emmenés mais plus tard.
12 Q. Page 6, deuxième paragraphe de votre déclaration au préalable, vous
13 dites que pendant votre captivité vous avez été obligé de réparer le pont.
14 Je suppose que c'est le pont entre Bosanska Dubica et Hrvatska Dubica ?
15 R. Exact.
16 Q. Est-il exact de dire qu'outre vous-même qui aviez été fait prisonnier,
17 il y a aussi des Serbes de la localité qui ont réparé le pont ?
18 R. Oui. Des personnes qui avaient été condamnées.
19 Q. Mais ceux-là avaient aussi été arrêtés ?
20 R. Je ne sais pas s'ils avaient été arrêtés, placés en détention pour
21 effectuer des travaux forcés.
22 Q. Mais vous dites que c'est des condamnés ?
23 R. Oui, c'est de cette façon-là que je les appelle. C'est le nom que
24 j'utilise pour les désigner.
25 Q. Dans votre déclaration, celle faite à Hrvatska Kostajnica, vous dites
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1 que Antun Knezevic et Zeljko Abaza de Bacin ont été tués pendant votre
2 détention à la vieille école de Dubicanka [phon] à Hrvatska Dubica.
3 R. Exact.
4 Q. Pourtant dans votre déclaration, celle que vous avez fournie aux
5 enquêteurs du Tribunal, vous ne semblez mentionner nulle part la façon dont
6 ces personnes ont été tuées ?
7 R. Je ne sais pas, c'est peut-être une erreur qui s'est glissée. Mais je
8 crois qu'il doit y avoir une explication qui a été donnée pour ces
9 assassinats et tout le reste.
10 Q. Dans la déclaration fournie aux enquêteurs, est-ce que vous avez
11 mentionné que Abaza -- Knezevic avait été égorgé comme vous le dites dans
12 la déclaration de décembre 1992 ?
13 R. Quant à savoir s'ils l'ont égorgé ou tué autrement, lorsqu'ils nous ont
14 obligés d'embarquer les corps, lorsque nous sommes arrivés, la première
15 chose que j'ai remarquée, c'est qu'il avait été égorgé. Il avait la gorge
16 tranchée.
17 Q. Mais vous n'avez pas été là au moment où ils ont été tués, vous ne
18 savez pas qui sont les auteurs ?
19 R. C'est vrai. Je n'ai pas vu qui les a tués, de quelle façon ça c'est
20 fait. Mais après avoir repris connaissance, parce que sans doute, que ces
21 hommes avaient été tués après que je me sois évanoui. J'avais été frappé à
22 la tête avec une barre métallique. Je suis tombé. Je me suis écroulé. J'ai
23 perdu connaissance et à partir de ce moment-là je ne sais plus ce qui s'est
24 passé. Mais quand je suis revenu à moi, ils ont versé de l'eau froide sur
25 nous. A ce moment-là, j'ai vu ce qui était arrivé à ces hommes.
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1 Q. Vers Noël, vous étiez en prison ?
2 R. Exact.
3 Q. Qui administrait, qui contrôlait la prison ?
4 R. A mon avis, c'était la JNA qui avait succédé à la TO, aux gens de la
5 localité. Ils se sont contentés de remplacer la TO et les gens de la
6 localité. Donc, la JNA a pris le contrôle et remplacé la TO.
7 Q. Donc, je vois. Au moment de l'arrivée de la JNA, elle les a remplacés
8 et ça c'est en rapport avec le paragraphe que je citais au départ parce
9 qu'au moment où la JNA est arrivée, il n'y a plus eu de mauvais
10 traitements ?
11 R. C'est vrai. A ce moment-là, après leur arrivée, il n'y a plus eu de
12 mauvais traitements, plus de sévices.
13 Q. Est-il exact de dire que c'est sur l'insistance des Serbes ou du Serbe
14 Bekic dont la maison avait été incendiée, quand dans votre village, donc
15 c'est à ce moment-là que vous avez été transféré à Prijedor [sic] et 25
16 jours plus tard, vous avez été emmenés à Banja Luka, n'est-ce pas ?
17 R. Je préférerais ne pas en parler.
18 Q. Avez-vous une raison particulière pour vouloir garder le silence ?
19 R. Oui.
20 Q. Voulez-vous en parler à huis clos partiel ?
21 R. J'ai dit que je ne voulais pas en parler. Je ne veux pas mentionner M.
22 Stojan Bekic.
23 Q. Fort bien, je n'insiste pas. Est-ce que qui que ce soit vous a infligé
24 de mauvais traitements à Prijedor et à Banja Luka ?
25 R. Non. Tant qu'on n'a pas su qui j'étais, ce que je faisais. Mais dès
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1 qu'ils ont appris cela, j'étais dans la caserne, dans un dortoir où se
2 trouvaient des personnes qui avaient été condamnées, qui avaient pris la
3 fuite, notamment, depuis Novska et de Lipik, et on a commencé à parler, on
4 s'est dit qui on était, d'où on venait, ce qu'on faisait, c'est comme ça
5 qu'ils ont appris que j'étais un Croate et quel était mon métier, ce que
6 j'avais fait.
7 Q. Et avant, ils ne le savaient pas au moment de votre arrestation ?
8 R. Non, non, personne ne le savait, aucun des officiers ne savaient que
9 j'étais tel ou tel homme. Voilà la raison. Ils ne savaient pas, non plus,
10 pourquoi j'étais arrivé à la caserne de Prijedor. Plus tard, lorsqu'ils ont
11 découvert mon identité, mes activités, j'ai été transféré dans la salle des
12 gardes, là, c'était une espèce de salle de détention militaire pour les
13 soldats, là, j'ai été intimidé. Ils ont essayé de me faire peur mais je
14 n'ai pas reçu de coups, on ne m'a pas touché.
15 Q. Au cours des événements que vous relatez, est-ce que vous n'avez jamais
16 eu l'occasion de voir un soldat, un officier de la JNA maltraiter qui que
17 ce soit ?
18 R. J'ai bien vu des soldats de la JNA. Je n'ai pas été maltraité à
19 Prijedor. Enfin, non, Il n'y a pas eu de mauvais traitements, il y a eu des
20 menaces. A huis clos, souvent, ils frappaient à la porte avec leurs
21 matraques ou avec leurs ceintures ou en ce genre de bêtises.
22 Q. Donc, ils frappaient sur la porte de détention ?
23 R. Oui, là où j'étais en détention.
24 Q. Mais au moment de l'arrivée de la JNA, tous les actes d'incendies, de
25 pillages, toutes ces actions illégales ont cessé, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui. On pourrait le dire plus ou moins. On pourrait dire que les
2 autorités étaient arrivées.
3 Q. Le 7 et le 8 [sic] mars 2002, vous avez fourni une déclaration
4 supplémentaire aux enquêteurs du Tribunal, n'est-ce pas ?
5 R. Je ne m'en souviens pas.
6 Q. Vous ne vous souvenez pas de cette déclaration supplémentaire ?
7 R. Non. Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.
8 Q. Attendez que je retrouve ce document.
9 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
10 Mme BAUER : [interprétation] Ceci fait partie du jeu de documents en
11 application du 92 bis, effectivement. Et le numéro ERN est 02167694.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne retrouve pas cette page qui porte ce
13 numéro-là.
14 Quoiqu'il en soit, il y a une déclaration supplémentaire faite.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. A peu près un an après la première ?
17 R. Sans doute que oui.
18 Q. Au début de cette déclaration supplémentaire, vous dites l'avoir fait
19 spontanément. Pourriez-vous me donner une explication. Est-ce que c'est
20 vous qui avez décidé de la fournir ou est-ce qu'on vous l'a demandé ?
21 R. C'est moi qui ai pris la décision d'ajouter cette déclaration car la
22 première fois qu'on m'a demandé de faire une déclaration pour le Tribunal
23 de La Haye, je travaillais et je n'avais pas beaucoup de temps. Par
24 conséquent, je voulais le faire le plus vite possible. Et je voulais aussi
25 que la déclaration soit la plus brève possible. Je voulais en terminer le
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1 plus vite possible. C'est cela que je voulais dire.
2 Q. Fort bien. Mais dites-moi, dans cette première déclaration, au
3 préalable, vous ne mentionnez pas que ces personnes que vous accusez de
4 cela, notamment, Radunovic, vous ne dites pas que ces personnes [sic]
5 auraient agi sur des ordres venant de Mile Martic. Je serais même plus
6 précis, paragraphe 36, première citation que j'ai faite et qui vient de la
7 première déclaration. Il apparaît clairement que Mile Martic a remplacé ces
8 deux hommes, n'est-ce pas ?
9 R. Mais c'était ce que voulait faire Mile Martic. Sans doute, ces deux
10 hommes ont-ils été remplacés. Mais ils ne voulaient pas l'être et donc, je
11 ne pense pas qu'il y soit parvenu, Martic.
12 Q. Mais vous avez dit, vous-même, que c'est lui qui les avait limogés.
13 R. Oui, mais après ils sont revenus au poste un ou deux jours plus tard.
14 Q. Je vois. Ils les ont révoqués de leurs postes et puis ils ont réoccupé
15 ce poste quelques jours plus tard ?
16 R. Oui.
17 Q. Donc, ils ne travaillaient pas sous ces ordres ? Ça c'est certain,
18 n'est-ce pas ?
19 R. Je ne sais qui leur donnait des ordres, Martic ou la JNA.
20 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de voir Mile Martic ?
21 R. Non, pas en personne.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous devez terminer
23 car vous avez dépassé le temps qui vous était imparti.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Je vais terminer.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Je ne comprends parce que vous avez fourni cette déclaration
2 complémentaire au moment où j'avais déjà été mis en accusation par ce
3 Tribunal. Et qui a pris l'initiative de ceci ?
4 R. Je ne sais pas. En tout cas, je l'ai fait spontanément, de mon plein
5 gré.
6 Q. Oui, vous insistez pour le dire. Mais dites-moi, est-ce que vous avez
7 fourni cette déclaration en guise d'interprétation libre ou est-ce
8 quelqu'un vous a, au récit, sans questions, ou est-ce que quelqu'un vous a
9 posé des questions ?
10 R. Mais bien sûr que des questions m'ont été posées auxquelles j'ai
11 répondu.
12 Q. Donc, ils vous ont posé des questions et vous avez répondu.
13 R. Oui. Mais j'ai dit que je n'avais pas eu assez de temps pour la
14 première déclaration, j'avais très peu de temps à ma disposition à ce
15 moment-là. Il ne m'a pas été possible de tout dire dans cette première
16 déclaration. Je n'ai pas pu décrire tout ce qui m'était arrivé au cours de
17 ces cinq mois parce que j'avais pu me libérer de mon travail pendant une
18 heure seulement.
19 Q. Et dans cette première déclaration, vous dites qu'ils agissaient sur
20 les ordres de Milan Martic et puis que c'était
21 Milan Martic qui les avait révoqués.
22 R. Oui.
23 Q. Je vous remercie, Monsieur Josipovic.
24 R. C'est moi qui vous remercie.
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci. Je serai très bref.
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1 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :
2 Q. [interprétation] Monsieur Josipovic, permettez-moi d'attirer votre
3 attention sur les paragraphes 12 et 13 de votre déclaration. Je ne sais pas
4 si j'ai mal entendu. Là, vous parlez du mois de juin 1991. Est-ce que vous
5 avez trouvé cet endroit dans votre déclaration ?
6 Vous parlez du mois de juin. Et au paragraphe 13, vous dites ceci : "On
7 nous a dit d'aller au QG pour y faire rapport."
8 R. Oui.
9 Q. Alors, je ne sais pas si on vous a posé une question à ce propos.
10 Apparemment, on vous aurait donné de veilles armes et 48 [sic] fusils au
11 cours de mois de juin.
12 R. Je ne comprends pas tout à fait votre question.
13 Q. Est-ce que vous avez obtenu ces armes au mois de juin ?
14 R. Non. Parce qu'il n'en était pas question.
15 Q. Pourtant ici, ici vous dites que vous avez reçu des fusils.
16 R. Oui. Mais c'étaient des fusils de chasse.
17 Q. Donc, ce n'étaient pas des M48 ?
18 R. C'était peut-être un fusil de chasse qui avait été transformé en M48.
19 Q. Ici, vous dites n'avoir pas reçu d'uniforme. Et vous dites : "Je
20 pense que tous les membres du HDZ avaient des uniformes à ce moment-là."
21 Est-ce que ça veut dire qu'il y avait aussi des civils qui avaient été
22 armés, outre les personnes qui faisaient partie du HDZ, en juillet ?
23 R. Non. Peut-être, ceux qui étaient un peu plus actifs, qui étaient plus
24 proches du HDZ. Bien sûr, ils avaient du matériel, des armes, des
25 uniformes, tout ça.
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1 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges pourquoi cela était nécessaire en
2 juin ?
3 R. Je ne sais pas.
4 Q. Fort bien. Paragraphe 17, page suivante, vous dites ceci : "Puis,
5 Mateljak a donné l'ordre d'évacuer la population civile d'Hrvatska Dubica
6 et des villages environnants. Cet ordre émanant du président Tudjman. Les
7 civils avaient très peur, et ils sont tous partis." C'est bien ce que vous
8 avez dit ?
9 R. Oui. Je le répète. La raison en était que la police croate, l'armée
10 croate, les membres du ZNG n'avaient pas suffisamment d'hommes pour
11 défendre Hrvatska Dubica. Et donc, les gens devaient partir, se replier. Et
12 le peu d'effectifs qu'ils avaient, étaient là uniquement pour assurer le
13 départ, la retraite de la population civile jusqu'à l'arrivée de la JNA.
14 Q. [aucune interprétation]
15 R. Des ordres avaient été donnés pour que les civils partent parce que
16 l'armée croate, la police croate ne parvenaient plus à tenir les lignes de
17 défense.
18 Q. Mais est-ce que c'étaient des Croates qui avaient quitté la région
19 suite à ces ordres ?
20 R. Oui. Il y avait des Croates. Il y avait quelques Musulmans. Il y avait
21 aussi des Serbes.
22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.
23 Nouvel interrogatoire par Mme Bauer :
24 Q. [interprétation] Monsieur Josipovic, M. Milosevic vous a posé une
25 question à propos de la révocation par Martic de Radunovic et de son
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1 collègue. Est-ce que vous, vous étiez présent au moment où il y a eu
2 révocation de ces deux hommes ?
3 R. Au moment où Martic a voulu licencier ces deux voyous, il n'a pas osé
4 venir en personne à Hrvatska Dubica pour le faire. A la gare ferroviaire de
5 Hrvatska Dubica, c'est là que ça m'a été dit, ils ont dû arrêter et puis il
6 a été amené à Zivaja. C'est là que se trouvait le QG de la JNA; non, non,
7 de la TO. Enfin, de la police, de l'armée, de Martic. Je ne sais plus. En
8 tout cas, c'était là les instructions qui avaient été données, à ce moment-
9 là, à Zivaja. Je ne sais pas -- on avait dit qu'il fallait remplacer les
10 deux hommes de Hrvatska Dubica.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May.
12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je fais objection aux questions par Mme Bauer.
14 J'ai ici, la version en anglais. Et le témoin l'a dit très clairement :
15 "C'était la décision de Martic, de licencier ces deux hommes." Ceci n'est
16 pas contesté. C'est tout à fait clair d'après ce qu'a dit ce témoin. Martic
17 a révoqué les personnes qui ne respectaient pas les règles, les règles qui
18 faisaient partie de l'état de droit. Et je crois que ceci, milite en faveur
19 de Martic. Et c'est seulement, je voulais montrer au cours de la deuxième
20 déclaration de ce témoin qu'il dit, qu'apparemment, il y aurait eu des
21 instructions données dans ce sens par Martic.
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce qui compte, c'est la déposition faite
23 ici par le témoin. Ce qui compte, ce ne sont pas les questions de
24 l'Accusation, ni les vôtres. Voilà ce qu'il a dit à propos de Martic et
25 c'est de cela que nous allons tenir compte.
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1 Le Greffier pourrait-il s'approcher de moi.
2 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai. C'est vrai, Monsieur Milosevic.
4 Mais Momcilo Kovacevic et Radunovic n'ont pas eu de problèmes tant qu'ils
5 ont obéi à Martic. Mais dès qu'ils ont échappé à son contrôle, Martic les a
6 révoqués parce qu'ils avaient acte de désobéissance et d'arrogance. C'est
7 pour ça qu'il les a révoqués. Et c'est pour ça que je vous ai donné mon
8 avis. J'ai dit que c'est sans doute, fort probablement la raison pour
9 laquelle il les a révoqués.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Poursuivez, Madame Bauer.
11 Mme BAUER : [interprétation]
12 Q. A ce moment-là, étiez-vous en détention ?
13 R. Oui.
14 Q. Qui vous a parlé de cette révocation de Radunovic et de Kovacevic ?
15 Quelles sont les personnes qui vous l'ont dit ?
16 R. Ce sont des membres de la JNA qui me l'ont dit. C'était l'armée de la
17 JNA.
18 Q. Est-ce qu'ils vous ont donné également les raisons et est-ce que vous
19 avez précisé ces raisons dans un addendum fait à ces deux déclarations
20 préalables qui sont les vôtres; addendum que vous avez ajouté donc, il y a
21 deux mois environ ?
22 R. Oui.
23 Q. Pourriez-vous en quelques mots, nous expliquer la raison pour laquelle
24 les soldats serbes vous ont dit qu'il fallait révoqué Radunovic et
25 Kovacevic ?
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1 R. C'est parce qu'ils avaient fait preuve de désobéissance et sans doute
2 parce qu'ils avaient tué des civils. Une autre raison, c'est que Zeljko
3 Abaza et Antun Knezovic, ils n'auraient pas dû les tuer. Puisque ces
4 hommes, apparemment, devaient faire l'objet d'un échange.
5 Q. Le président du SDS local, a-t-il eu quelque chose à voir avec cela ou
6 avez-vous entendu parler du fait qu'il aurait eu quelque chose à voir avec
7 cela ?
8 R. Oui. Le président du SDS, Jovo Misljenovic, avait eu des affrontements
9 avec Kovacevic, ce Milojica, c'était son surnom et son prénom, c'était
10 Momcilo et avec Radunovic. Des menaces avaient été proférées et ils avaient
11 tiré sur sa maison, une fois. Il a réussi à ce moment-là, à sortir de chez
12 lui. Il a quitté le village, par la suite, pour aller à Knin et il a dit à
13 Martic ce qu'était la réalité de la situation sur le terrain. Et je pense
14 que c'est, lorsque Momcilo Kovacevic et Stevo Radunovic, je pense que c'est
15 à ce moment-là que Momcilo Kovacevic et Stevo Radunovic ont été démis de
16 leurs fonctions.
17 Q. Vous avez dit en deuxième lieu, en répondant aux questions de M.
18 Milosevic au sujet de Mateljak, qu'à l'époque, vous ne saviez pas qu'il
19 s'agissait d'un délinquant, d'un voyou. Est-ce que vous vous êtes fait
20 cette opinion en revanche, par la suite ?
21 R. Oui. Par la suite, c'est cela.
22 Q. Et vous avez dit également que vous ne le considériez pas comme étant
23 un meurtrier. Alors, pourquoi est-ce que vous le considériez comme un
24 délinquant ?
25 R. Moi, je considère que c'est un délinquant, un voyou parce que c'est
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1 quelqu'un qui n'a pas d'honneur, pas de parole.
2 Q. Au paragraphe 8 de votre première déclaration, est-ce que vous
3 expliquez certains -- est-ce que vous donnez davantage d'explications au
4 sujet du comportement de M. Mateljak, après la guerre ?
5 R. Je ne comprends pas bien la question. Pourriez-vous la répéter.
6 Q. Bien sûr. Au paragraphe 8 de votre déclaration écrite, vous avez le
7 paragraphe 8, de votre déclaration écrite ?
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce qu'à ce paragraphe, vous expliquez pour quelle raison vous
10 considériez que M. Mateljak était un voyou ?
11 R. Je le considérais comme un voyou, à l'époque. Et d'ailleurs, c'est
12 toujours mon opinion aujourd'hui, parce que c'était un voleur. Je le dis en
13 raison du poste qu'il a obtenu après la guerre; celui de maire de la ville
14 de Hrvatska Dubica et tout le reste. Et grâce à cela, il a pu se faire
15 construire une grande et belle maison.
16 Q. Qu'a-t-il volé ?
17 R. Je ne sais pas exactement. Je ne saurais pas dire ce qu'il a volé, mais
18 je considère que c'est un voleur; quelqu'un de malhonnête. Et à mes yeux,
19 tous les voleurs, tous les délinquants sont des gens malhonnêtes.
20 Mme BAUER : [interprétation] Merci beaucoup.
21 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Josipovic, ceci met un terme à
23 votre déposition. Je vous remercie d'être venu devant le Tribunal pénal
24 international pour témoigner. Vous pouvez maintenant vous retirer.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, merci.
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1 [Le témoin se retire]
2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Groome, quel est le témoin
3 suivant ?
4 M. GROOME : [interprétation] Oui Monsieur le Président, le témoin suivant,
5 est le témoin B-1505, et il bénéficiera de mesures de protection. Donc, il
6 faudra quelques mesu -- quelques minutes pour les mettre en place.
7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous lèverons la séance dans peu de
8 temps. Donc, je ne pense pas que nous irons bien loin dans ce début de
9 déposition. Mais nous pouvons au moins commencer.
10 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, il est tout à fait prêt
11 à rester ici pendant le week-end.
12 Monsieur le Président, pendant que l'on procède à quelques préparatifs dans
13 le prétoire, j'aurais deux points administratifs à aborder au sujet de ce
14 témoin. S'agissant des mesures de protection, le témoin 1505, a accepté
15 qu'on ne lui accorde pas la déformation de la voix. Donc, ça c'est une
16 mesure de protection qui n'est plus nécessaire. Et puis deuxième point, ce
17 matin, nous pensons qu'il y a eu confusion entre deux pièces à conviction;
18 une pièce à conviction qui sera utilisée dans quelques instants -- dans
19 l'audition qui vient, et qui est une vidéo, a été enregistrée aux fins
20 d'identification. Car elle a déjà été utilisée dans l'audition d'un autre
21 témoin. Peut-être, les Juges pourraient-ils revoir leurs notes, et lundi
22 matin je pourrai leur parler de la meilleure manière technique de régler
23 cette petite confusion qu'il y a eu entre cette pièce et une autre.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Groome, y a-t-il une raison
2 particulière pour laquelle, le témoin ne prononcera pas la déclaration
3 solennelle, ou bien voulez-vous nous en parler ?
4 M. GROOME : [interprétation] Cela ne pose pas de problème, Monsieur le
5 Président. Tout va bien.
6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Que le témoin prononce la déclaration
7 solennelle. Pouvez-vous lire les mots qui sont inscrits sur le carton qui
8 vous est remis, Monsieur.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Merci beaucoup, vous pouvez vous asseoir.
12 LE TÉMOIN : TÉMOIN B-0505.
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'il
15 conviendrait que nous commencions à huis clos partiel, car il sera question
16 de certains éléments tirés de l'arrêt en appel.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien. Passons à huis clos partiel.
18 [Audience à huis clos partiel]
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16 [Audience publique]
17 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
18 suite à l'ordonnance rendue par la Chambre le 30 juillet de cette année, la
19 requête du Procureur quant à l'admission, quant au versement au dossier du
20 compte rendu d'audience de la déposition du Témoin 1505 dans l'affaire
21 Mitar Vasiljevic, affaire 98-32 a été admise. Le Procureur donc, demande le
22 versement au dossier de ces comptes rendus d'audience, ainsi que de la
23 feuille sur laquelle figure le pseudonyme accordé à ce témoin.
24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Une cote, s'il vous plaît.
25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction
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1 523, Monsieur le Président.
2 M. GROOME : [interprétation]
3 Q. Monsieur le Témoin, intercalaire 2, de la pièce à conviction 523 de
4 l'Accusation, elle a été placée sur le bureau devant vous. Je vous
5 demanderais d'y jeter un coup d'œil et de voir si votre nom figure à la fin
6 de ce document, en haut de la page.
7 R. Oui.
8 Q. Monsieur, la Chambre est en possession du compte rendu d'audience de
9 votre première déposition devant ce Tribunal dans l'affaire Vasiljevic. Je
10 ne vais pas vous demander de reproduire ce témoignage, mais j'ai quelques
11 questions précises à vous poser quant à des éléments qui ont un lieu plus
12 direct avec la présente affaire. Ma première question est la suivante. Du
13 mieux de votre mémoire, pouvez-vous nous dire si -- quand le Corps d'Uzice
14 de l'armée populaire yougoslave est arrivé dans la ville de Visegrad ?
15 R. D'après moi, dans mon souvenir, le camp d'Uzice est arrivé à Visegrad,
16 le 15 mai ou plutôt, excusez-moi, le 15 avril 1992.
17 Q. Est-ce que vous qualifieriez l'arrivée du Corps d'Uzice de significatif
18 quant à l'image globale du déploiement de ce Corps d'Uzice ?
19 R. Oui. Et je peux le décrire.
20 Q. Avant l'arrivée du Corps d'Uzice dans la ville, est-ce que vous aviez
21 vu des paramilitaires serbes à Visegrad ou dans des bâtiments de la ville ?
22 R. Avant l'arrivée du Corps d'Uzice, je n'ai pas vu de gens de cette sorte
23 en ville.
24 Q. Où en avez-vous vu pour la première fois ?
25 R. La première fois que j'en ai vu, c'était à peu près dans la même
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1 période que celle où est arrivé la JNA. Donc, quand on a vu arriver la JNA,
2 j'ai vu des paramilitaires.
3 Q. Peu après l'arrivée de la JNA à Visegrad, avez-vous eu une conversation
4 avec un capitaine de cette armée, qui s'appelait Vukosavljevic ?
5 R. Oui.
6 Q. Pourriez-vous, je vous prie, résumer à l'intention des Juges de cette
7 Chambre, la conversation que vous avez eue avec lui.
8 R. Oui. J'ai eu plusieurs conversations avec le capitaine Vukosavljevic.
9 Et la première de ces conversations a porté sur ce qui suit. Il m'a dit
10 qu'il avait été transféré de façon inattendue de Macédoine à Visegrad pour
11 intégrer son unité et que, dans les médias ainsi que dans les magazines
12 diffusés parmi les soldats, il avait entendu parler de Visegrad. Nous avons
13 discuté ensemble quatre ou cinq heures. Et à la suite de cette
14 conversation, il m'a dit de façon très claire, qu'il avait, avant son
15 arrivée à Visegrad, eu une image tout à fait déformée de la situation dans
16 cette ville. Parce qu'il avait acquis le sentiment que les Serbes de
17 Visegrad étaient victimes d'un génocide, que les Musulmans égorgeaient les
18 gens, que les enfants étaient brûlés vifs. Enfin, des choses qui allaient
19 dans -- qui faisaient partie de -- des choses dans cet ordre d'idée. Mais
20 suite à la conversation que nous avons eue ensemble, et suite à la
21 conversation que nous avons eue avec -- au sujet de ces policiers serbes
22 capturés dont les images avaient été diffusées, il m'a dit que l'idée qu'il
23 se faisait de la situation était complètement fausse et que maintenant, il
24 avait une idée beaucoup plus exacte de ce qui s'était passé avant son
25 arrivée à Visegrad.
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1 Q. Une fois que la JNA est arrivée dans la ville, avez-vous été convoqué à
2 une réunion au quartier général de la JNA ?
3 R. Oui.
4 Q. Et vous aviez été convoqué pour rencontrer qui ?
5 R. Je n'étais pas le seul à être convoqué. Il y avait aussi le président
6 de l'assemblée municipale de Visegrad, le président du conseil exécutif et
7 moi. Et cette invitation provenait directement du colonel Ojdanic qui
8 commandait le Corps d'Uzice. Donc, il nous avait demandé à venir dans une
9 caserne toute proche de Visegrad pour discuter des problèmes qui avaient
10 cours en ville. Et nous sommes allés à cette réunion. Nous avons rencontré
11 le colonel Ojdanic. Nous avons discuté de la situation en ville et de ce
12 qu'il aurait fallu faire pour stabiliser les choses. Donc, c'est dans ce
13 sens que s'est déroulée la discussion.
14 Et puis, j'ajoute que nous avons eu deux réunions dans cette même caserne.
15 Q. J'appelle maintenant votre attention sur la deuxième réunion. Vous
16 êtes-vous rendu à cette deuxième réunion, seul ou accompagné d'autres
17 personnes ?
18 R. Je me suis rendu seul à cette deuxième réunion, parce que ceux qui
19 étaient présents à la première réunion avec moi, n'ont pas pu ce jour-là,
20 arriver physiquement jusqu'au lieu de la réunion; c'est-à-dire, cette
21 caserne qui était non loin de la ville et qui s'appelle Uzamnica. Alors
22 donc, j'y suis allé. C'était un peu en dessous de la ville.
23 Q. Excusez-moi. Je vous interromps, mais j'appelle votre attention sur le
24 moment qui a immédiatement précédé votre arrivée dans la caserne
25 d'Uzamnica. Est-ce que vous avez dû attendre un petit peu avant d'y
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1 arriver ?
2 R. Oui. Moi, j'y suis allé. Les autres n'étaient pas encore arrivés. Donc,
3 je suis entré dans le bureau du commandant local de la caserne, qui
4 s'appelle, le capitaine Boro. Et je me suis assis. J'ai attendu que
5 commence la réunion dont je pensais qu'elle allait être à peu près
6 semblable à celle de la veille. Et il y avait là, deux ou trois officiers
7 assis à table. Moi, je me suis assis non loin d'eux. On s'est juste salué,
8 bonjour, bonjour sans se présenter parce que, personne ne jugeait que ce
9 fût nécessaire. Il s'est écoulé quelques minutes, peut-être une dizaine de
10 minutes. Après quoi, deux autres officiers ont pénétré dans ce bureau. Ils
11 avaient à la main, une carte géographique de la ville de Visegrad. Ils ont
12 placé cette carte sur la table et ils ont entamé, entre eux, une
13 conversation qui portait sur cette carte et sur le déploiement des unités
14 de l'armée qui était, à ce moment-là, à Visegrad.
15 Comme j'étais dans la pièce, tout à fait naturellement, je me suis
16 intéressé au sujet de leur conversation, et un des officiers qui avait
17 apporté la carte géographique était en train de montrer un certain nombre
18 d'emplacements sur la carte aux autres hommes, en disant à peu près ce qui
19 suit : "Ici, tout est propre, et c'est l'unité telle et telle qui se trouve
20 là. Et puis là, là aussi tout est propre. C'est telle et telle unité qui
21 est stationnée à cet endroit."
22 Et finalement, c'est toute la longueur de la Drina qu'il a parcouru en
23 indiquant les diverses localités. Et puis finalement, il a dit : "Demain,
24 nous allons nettoyer ce secteur-là." Et il montrait du doigt un endroit
25 dont je savais avec certitude qu'il s'y trouvait au moins, trois ou quatre
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1 milles Musulmans.
2 Q. Avançons progressivement, si vous le voulez bien. Les lieux qu'il
3 montrait au départ, est-ce que vous pouviez, lorsqu'il mettait le doigt sur
4 telle ou telle localité, la voir d'une façon très claire ?
5 R. Oui. Tout ce qui a de plus clairement.
6 Q. Et pourriez-vous, je vous prie, énumérer les localités non loin de
7 Visegrad sur lesquelles il a placé le doigt ?
8 R. Oui. Lorsqu'il disait, par exemple, "Cet endroit ici est propre et
9 telle et telle unité y est stationnée." Et bien, il avait le doigt sur un
10 lieu qui se trouve juste au-dessus de la caserne, sur la rive droite de la
11 Drina, Velin Luk, Babin Potuk, dans la direction de Dobrun. Et puis, pour
12 le deuxième lieu que j'ai cité, il a mis le doigt sur Musici et d'autres
13 petits villages en indiquant donc un axe de déplacement allant jusqu'à
14 Gostilja, et il a donné le nom de l'unité qui se trouvait à cet endroit. Et
15 puis ce qu'il a dit : "C'est ici aussi tout est propre," et il montrait une
16 série de villages correspondant -- une série d'hameaux correspondant au nom
17 de Drinski.
18 Q. Je vous demanderais de vous fonder sur ce que vous savez personnellement
19 ainsi que sur ce qui a pu être entendu dans Visegrad à l'époque pour nous
20 dire ce qu'il ce passait dans le village qui permettait à cet officier de
21 la JNA de parler, d'utiliser le qualificatif propre ?
22 R. L'utilisation de ce qualificatif signifiait qu'il n'y avait plus
23 d'habitants musulmans à ces endroits et qu'une unité y avait été stationnée
24 après le départ de la population musulmane. Donc ce qu'il voulait dire par
25 là, c'est que les habitants musulmans étaient partis lorsqu'ils avaient vu
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1 arriver la JNA et que le village était propre.
2 Q. Mais je vous demande de vous fonder sur ce que vous savez
3 personnellement pour nous dire si vous savez que ce fait est vrai, donc
4 qu'il s'agit d'une réalité effective ? Les Musulmans s'étaient-ils enfui de
5 ces différents lieux qui étaient qualifiés de propres ?
6 R. Oui, oui. Je savais cela. Ça va sans dire parce que moi j'y avais de la
7 famille dans toutes ces localités. Il y avait des parents à moi qui étaient
8 partis donc et j'avais été informé par téléphone de ce qui s'était passé et
9 du fait que l'armée arrivait.
10 Q. Au moment où vous étiez penché sur cette carte, vous est-il semblé
11 qu'ils se rendaient compte, que vous étiez Musulman et membre de la
12 communauté musulmane de Visegrad, ces autres officiers ?
13 R. Non. Je pense qu'ils ne le savaient pas et ils n'ont même pas pu
14 supposer que dans un bureau de ce genre, à savoir, le bureau d'un
15 commandant, il aurait pu se trouver quelqu'un qui n'était pas proche de
16 l'armée et surtout pas Musulman.
17 Q. Les localités -- les lieux qui étaient indiqués comme "à nettoyer le
18 lendemain" ou "ayant besoin d'être -- devant encore être nettoyées", les
19 avez-vous reconnus ?
20 R. Oui, très facilement, parce qu'il y a l'endroit dont ils estimaient
21 qu'il fallait les nettoyer j'en suis originaire. Donc, pour moi, j'y suis
22 né, ma famille habite, je reconnais cet endroit sans la moindre difficulté.
23 C'est celui pour lequel ils parlaient de nettoyage à venir et je savais
24 qu'il y habitait trois à quatre mille musulmans.
25 Q. Pourriez-vous nous décrire ce qui s'est passé après que vous avez
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1 regardé cette carte ? Qu'avez-vous fait en réaction à ce que vous avez vu
2 et entendu ?
3 R. Sur le moment, je me suis figé. J'étais paralysé parce que je voyais
4 tout à fait clairement sur la carte ce qui était en train de se planifier.
5 Et toute ma famille, donc je veux dire mon épouse, mes enfants, mes
6 parents, ils habitaient tous en ce lieu, donc, au départ, j'ai passé
7 quelques instants complètement paralysés, je ne pouvais plus prononcer un
8 mot. Et puis y a des gens du coin qui étaient là, qui m'ont apporté leur
9 aide. Pendant à peu près une heure, on m'a donné un café, un verre d'eau,
10 je me suis senti un peu mieux.
11 Q. Avez-vous parlé aux représentants de la JNA et avez-vous demandé ou
12 exigé que les personnes qui habitaient dans ce village qui devait être
13 nettoyé obtiennent des -- obtiennent une protection ?
14 R. Oui. Immédiatement après, j'ai insisté pour m'entretenir avec le
15 colonel Ojdanic, en fait, il aurait dû venir à la réunion, mais certains
16 disaient qu'il ne viendrait peut-être pas parce que des participants, à la
17 réunion qui était prévue, dont la présence était prévue, n'avaient pas pu
18 arriver et donc peut-être personne ne viendrait-il. Moi, j'ai insisté pour
19 que le colonel vienne et que nous nous rencontrions et pour que l'armée
20 protège les civils.
21 Q. Le colonel Ojdanic vous a-t-il donné des assurances quant au fait que
22 les civils habitant dans la région seraient protégés par l'armée ?
23 R. Oui, le colonel a fini par arriver avec un certain retard à la réunion
24 et il s'est engagé à ce que l'armée protège cette population civile. Il en
25 a donné la parole tout à fait explicitement.
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1 Q. Que s'est-il passé le lendemain ? Qu'est-il arrivé à ces Musulmans qui
2 habitaient dans la localité indiquée sur la carte et dont vous avez parlé ?
3 R. Le lendemain, le colonel donc s'était engagé à prendre -- à prendre le
4 contrôle de la situation d'ici au lendemain et à défendre la population
5 civile. Et donc, ce jour-là, le colonel a parlé au capitaine Vukosavljevic,
6 qui était le commandant de la caserne, et il lui a donné l'ordre d'envoyer
7 un certain nombre de soldats à un endroit qui se trouve à cinq ou six
8 kilomètres du centre-ville et d'y organiser une colonne pour escorter
9 toutes ces personnes hors de la ville et c'est ce qui a été fait.
10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Groome
11 --
12 M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] -- mais il va nous falloir lever
14 l'audience dans quelques courts instants. Nous reviendrons sur tous ces
15 points lundi matin.
16 M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Témoin B-1505, je suis en
18 train de devoir vous dire que votre déposition ne peut pas se terminer
19 aujourd'hui. Je vous demanderais donc de revenir dans ce prétoire lundi
20 matin pour la fin de votre déposition, et de veiller entre temps à ne
21 parler à personne de ce que vous direz dans cette déposition. Lorsque je ne
22 dis personne, cela concerne également les représentants du bureau du
23 Procureur, et je vous demande de revenir ici lundi matin, à 9 heures.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Suspension d'audience jusqu'à lundi.
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1 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le lundi 1er septembre
2 2003, à 9 heures.
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