Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 28197

1 Le mercredi 29 octobre 2003

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vais demander au témoin de prononcer

6 la déclaration solennelle.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirais la

8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Madame. Veuillez vous

10 asseoir.

11 LE TÉMOIN: JASNA DENONA [Assermenté]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Substitut, vous avez la

14 parole.

15 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Interrogatoire principal par M. Whiting :

17 Q. [interprétation] Madame, veuillez décliner votre identité.

18 R. Je m'appelle Jasna Denona.

19 Q. Madame Denona, est-ce qu'en novembre 2000, vous avez fourni une

20 déclaration préalable au bureau du Procureur? Avez-vous signé la dite

21 déclaration pour attester de son exactitude? Il y a deux jours de cela.

22 Est-ce que vous avez pu relire cette déclaration pour en vérifier

23 l'authenticité d'exactitude ?

24 R. Oui.

25 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

Page 28198

1 je demande le versement de la déclaration préalable du témoin en

2 application de l'Article 89(F) du règlement.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est pas une déclaration, qui relève

4 des procédures du 92 bis, est-ce bien cela ?

5 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avions

6 demandé l'application du 92 bis. Nous ne devons pas appliquer cette

7 procédure.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vois. Pour que tout soit clair, la

9 procédure en application du 92 bis, ou plutôt l'ordonnance avait été

10 accordée, mais il n'y a pas eu application de la procédure. Fort bien, nous

11 allons étudier la question.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, vous êtes autorisé à le faire.

14 M. WHITING : [interprétation]

15 Je vous remercie, Monsieur le Président. Je n'ai pas de questions à poser à

16 ce témoin. Je vais uniquement lire un très bref résumé de sa déclaration.

17 Le témoin a passé toute sa vie à Bruska à l'est de Skabrnja. Vous trouverez

18 cet endroit à la page 30 de l'atlas. Elle avait 15 ans à l'époque des

19 événements. Bruska était surtout un village croate et il y avait à peine

20 quelques maisons serbes. Ce village était entouré surtout de villages

21 serbes. Elle ne se souvient pas qu'il y ait eu des problèmes entre les

22 Croates et les Serbes de son village avant les événements.

23 Le 21 décembre 1991, le soir, on a frappé à la porte du témoin. Ces hommes

24 se sont présentés comme étant la police de Krajina. Le témoin et sa mère,

25 ainsi que deux autres femmes, ont pris la fuite par l'arrière de la maison.

Page 28199

1 Les hommes ont commencé à tirer sur les femmes. Le témoin a été blessé à la

2 hanche et au bras. Plus tard, elle a vu, dans la maison d'un voisin, quatre

3 hommes de son village qui avaient été tués: Petar, Roko et Dusko Marinovic,

4 et Sveto Draca. Plus tard dans la soirée, le témoin a appris que d'autres

5 personnes avaient été tués dans ce village : Dragan et Ika Marinovic, ainsi

6 que Krste Draca, Stana et Masa Marinovic. Il y avait Sveto Draca, qui était

7 un réserviste serbe de la JNA, mais mis à part lui, tous ceux qui ont été

8 tués cette nuit-là étaient des civils croates.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut une cote pour la déclaration de

10 l'application du 89(F).

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 575.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous redonner la cote, Madame

15 la Greffière.

16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 575.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et qu'en est-il des documents versés par

18 le truchement du Témoin B-1345, en application du 92 bis (D) ? Quelle était

19 cette cote ?

20 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Kwon.

22 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

23 Q. [Interprétation] Mademoiselle Denona, vous êtes en train de témoigner

24 au sujet d'un événement ou d'événements de la fin de l'année 1991, période

25 à laquelle plusieurs citoyens de Bruska, tant Croates que Serbes, ont

Page 28200

1 péril, n'est-ce pas ?

2 R. C'est exact. Un monsieur qui était Serbe a péril et les autres étaient

3 des Croates.

4 Q. Serait-il exact de dire que le jour où ces gens ont péril, ils

5 vaquaient à des occupations privées. Ils étaient en train de préparer de la

6 viande ?

7 R. Non. Pas de la viande. Ils vaquaient à des activités normales qui

8 étaient les leurs. C'était une vie des plus normale.

9 Q. Oui. Et ensuite il y a eu cette attaque armée où l'on a tué neuf ou dix

10 personnes, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, au soir.

12 Q. L'une des personnes attaquées a survécu, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Serait-il exact de dire que les organes de la police de la -- des

15 instances judiciaires sont venues juste après les événements ?

16 R. Ils sont venus 22 heures après.

17 Q. Donc ils sont venus sur les lieux seulement au bout de 22 heures ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-il exact de dire que les premiers arrivés sur le site ont tout de

20 suite transférés les survivants vers l'hôpital ?

21 R. Non.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Pourriez-vous répéter votre réponse,

23 Madame, les interprètes ne vous ont pas entendu.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils n'ont transféré personne à l'hôpital,

25 à l'exception faite de moi-même, lorsque la police de Benkovac est arrivée.

Page 28201

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Donc c'est vous qui avez été transférée vers l'hôpital ?

3 R. Oui.

4 Q. Partant des renseignements recueillis par mes collaborateurs, il y

5 figure le fait qu'une personne a été transférée vers l'hôpital de Knin,

6 qu'elle a été soignée, guérie et que cette personne est partie à Zadar pour

7 y résider.

8 R. Ce monsieur a quitté le site des événements pour se diriger vers les

9 maisons les plus proches, mais il l'a fait lui-même.

10 Q. S'agit-il de Ante Marinovic ?

11 R. Oui.

12 Q. Il est parti vers le village voisin qui est un village serbe et qui

13 s'appelle Kalanje ?

14 R. Oui.

15 Q. Et de là, il est parti à l'hôpital ?

16 R. Oui.

17 Q. Et, à ce moment-ci, on a tué Sveto Draca, un Serbe. C'est ce qui figure

18 au deuxième paragraphe de votre déclaration ?

19 R. Et ce soir on a tué également Sveto Marinovic, entre autres, un Croate.

20 Q. Mais celui qui est allé vers le village serbe de Kalanje, Ante

21 Marinovic, c'était un Croate et lui, il a été transféré vers l'hôpital de

22 Knin ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous avez décrit des scènes très émouvantes en page 3, dernier

25 paragraphe, vous avez vu deux voisins, un Serbe et un Croate, pleurés sur

Page 28202

1 leurs fils morts; c'est bien ce que vous y décrivez ?

2 R. Je n'ai pas très bien saisi votre question.

3 Q. Je vais vous apporter des éclaircissements immédiatement.

4 Vous dites que, vers minuit, je me réfère à votre déclaration, page 3 --

5 vers minuit, Josa Marinovic, le père de Dragan Marinovic, est arrivé à

6 pieds. Il pleurait, il a dit qu'il a retrouvé sa femme, Ika, et son fils,

7 Dragan, tués devant sa maison. Aussitôt après, il est arrivé à la maison,

8 un dénommé Dejan Draca, le père de Sveto Draca, et il a dit qu'il avait vu

9 Sveto tué -- et Dragan, le fils, est un Croate, Sveto est un Serbe -- ils

10 se sont rencontrés ces deux hommes-là à cet endroit ?

11 R. Oui, c'est exact. Ils se sont rencontrés et ils nous ont dit qu'ils

12 avaient été tués. Et, bien sûr, ils ont été complètement sous le choc.

13 Q. C'est bien de cela que je parlais.

14 R. C'est bien ce qui est arrivé.

15 Q. Partant de ce qui est arrivé, étant donné qu'il y a un Serbe et un

16 Croate qui ont été tués, il semble évident que cela a été fait -- je vais

17 me servir d'un terme assez cru -- un fou qui a dû tuer non pas pour des

18 raisons d'appartenance ethnique, mais pour des raisons de perturbation

19 mentale ?

20 R. Ce n'est pas l'opinion que je me suis faite. Il se peut que ce Serbe se

21 soit trouvé là tout à fait par hasard.

22 Q. Bien. Mais vous avez été immédiatement transférée vers l'hôpital de

23 Knin ?

24 R. Non, pas tout de suite, 22 heures après avoir été blessé.

25 Q. Vous dites que : "L'ambulance vous a emmené vers l'hôpital de Benkovac,

Page 28203

1 et puis ensuite à Knin. Et vous dites que vous êtes restée environ une

2 semaine à l'hôpital après quoi vous avez été relâchée et il y avait avec

3 vous à l'hôpital, Ante Marinovic, et les médecins serbes se sont comportés

4 de façon tout à fait professionnels et correct à notre égard. Ils m'ont dit

5 de revenir par la suite pour le soin ultérieur. En date du 10 janvier, je

6 suis retournée, mais il n'y avait pas de lits disponibles, et je suis allé

7 chez mon institutrice où je suis restée jusqu'au moment où l'hôpital a pu

8 me recevoir. J'ai été relâchée de l'hôpital, et je suis rentrée chez moi à

9 Bruska." C'est bien ce qui s'est passé ?

10 R. Oui. C'est exact. J'ai été transférée à l'hôpital de Knin, et

11 l'événement en question est survenu le 21 décembre. Or, je suis arrivée à

12 l'hôpital le 22 seulement.

13 Q. Donc, le lendemain ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Bien. Et la police est venue là-bas également ?

16 R. Oui. La police est arrivée avant que j'aie été emmené par une

17 ambulance.

18 Q. Oui, avant. Vous dites que : "Vous avez passé la nuit chez vous, et

19 avec votre mère, et que l'ambulance est arrivée de Benkovac, juste avant la

20 tombée de la nuit."

21 R. C'est exact.

22 Q. "Il y avait avec eux une femme qui a dit qu'elle faisait partie de la

23 police, et qui a demandé ce qui était arrivé."

24 R. C'est exact.

25 Q. Mais, en tout état de cause, la police est arrivée. C'était la police

Page 28204

1 de la Krajina, n'est-ce pas ?

2 R. C'est exact.

3 Q. Bon. Savez-vous me dire si à ce sujet-là, dans la police et dans les

4 instances judiciaires, une enquête a été diligentée pour permettre de

5 déterminer qui a été l'auteur de ce crime ?

6 R. Non. Je ne suis pas au courant de cela.

7 Q. Et l'enquête a déterminé qu'une seule personne avait tiré. C'est la

8 raison pour laquelle je me permis de supposer qu'il s'agissait d'une

9 personne perturbée sur le plan mental. Et savez-vous qu'une personne

10 perturbée -- mentalement perturbée, effectivement, du groupe ethnique serbe

11 et venant du village voisin, a été appréhendée par la suite ?

12 R. Non. Je ne suis pas au courant, mais, à mon avis, il y avait là

13 plusieurs auteurs.

14 Q. Mais vous n'avez pas vu les personnes qui ont ouvert le feu, et vous

15 affirmez qu'ils étaient plusieurs.

16 R. Je ne les ai pas vues, mais, d'après ce que j'ai entendu, et je me suis

17 entretenue avec eux au travers d'une porte fermée, j'en ai déduit qu'ils

18 étaient plusieurs.

19 Q. Bien. Savez-vous que, tout simplement, il n'y avait aucune raison pour

20 que cela soit fait par des soldats serbes parce qu'un groupe de Croates a

21 été tué à cette occasion-là. Mais il a été également tué, deux Serbes ?

22 R. C'est un Serbe qui a été tué. Pour ce qui est des motifs ou des

23 mobiles, je n'en sais rien. Je ne peux pas en parler. Je ne le sais pas.

24 Q. Mais vous vous souvenez, j'imagine, que l'événement avait grandement

25 troublé la population locale, tant Croates que Serbes ?

Page 28205

1 R. En effet, mais il n'y avait qu'une famille serbe où le trouble a été

2 semé.

3 Q. Mais vous souvenez-vous du fait qu'il y a eu des représentants

4 politiques, des représentants militaires de la Krajina qui, dans le public,

5 ont condamné le crime commis ? Et il y a eu une ambiance de condamnation

6 générale de ces événements parmi les instances officielles et la

7 population, tant serbe que croate. Or, dans la région, la population était

8 majoritairement serbe ?

9 R. Je n'ai pas pu le conclure, mais je n'ai pas pu du tout me faire

10 l'impression que les gens étaient dégoûtés par ce qui était arrivé.

11 Q. Mais, pour ce qui est de l'auteur de ce crime, ceux qui ont procédé à

12 l'enquête et les voisins les plus proches n'en savent rien, savez-vous nous

13 dire quoi que ce soit ? Etant donné qu'il y a eu enquête, je n'ai pas pu me

14 procurer moi-même ou plutôt mes collaborateurs n'ont pas pu se procurer des

15 renseignements pour ce qui est de l'issue de l'enquête.

16 R. Ils n'ont pas pu retrouver les résultats de l'enquête parce que

17 probablement cette enquête n'a pas eu lieu du tout.

18 Q. Mais savez-vous qu'il y a des gens originaires de Benkovac qui

19 souhaitent venir témoigner ici parce qu'ils tiennent énormément à laver --

20 se laver de toute responsabilité eux-mêmes, et laver les autres personnes

21 qu'ils connaissent pour ce qui est de suspicion éventuelle concernant ce

22 crime ?

23 R. Je ne suis pas au courant.

24 Q. Vous dites que quelqu'un a tiré sur la porte, et vous dites aussi qu'il

25 vous a semblé reconnaître la voix. Vous avez de prime abord pensé que

Page 28206

1 quelqu'un était en train de plaisanter.

2 R. En effet, c'est ce que j'ai pensé. J'étais enfant et je ne m'attendais

3 pas du tout à ce qu'une chose aussi terrible arrive.

4 Q. Mais du fait d'avoir trouvé cette voix familière, avez-vous pu conclure

5 qui est-ce qui frappait à la porte ? Qui est-ce qui se trouvait devant

6 cette porte ?

7 R. Non.

8 Q. Mais n'apparaît-il pas clairement que l'assassin est un villageois ?

9 Parce que quelqu'un a dû en parler.

10 R. Il n'est pas évident du tout que l'auteur de ce crime doive forcément

11 être originaire de Bruska. En outre, les villageois des autres villages

12 nous connaissaient. Nous étions des voisins. C'étaient des gens du groupe

13 ethnique serbe, et ils nous connaissaient et ils nous parlaient.

14 Q. Je n'ai pas du tout compris ce que vous voulez dire. Vous avez

15 interrompu votre phrase.

16 R. J'ai dit de même. Les villageois des villages voisins connaissaient la

17 disposition des maisons, et ils savaient très bien que nous étions des

18 habitants de Bruska.

19 Q. Oui. Mais, attendez, étant donné que vous avez reconnu une voix --

20 quelqu'un a frappé à la porte et vous avez pensé que c'était une voix qui

21 vous était connue, avez-vous pu en déduire que cet assassin était seul ?

22 R. Je ne peux pas déduire cela.

23 Q. Bien. Vous dites que les Serbes de Nadin et de Skabrnja ont tué des

24 villageois. Savez-vous nous dire ce qui s'est passé à Skabrnja et à Nadin ?

25 R. Je n'en sais trop rien. J'étais enfant. Je ne m'intéressais guère à la

Page 28207

1 politique. Je ne prêtais pas attention à ce type de chose et je n'ai pas

2 suivi du tout ce qui se passait. Je n'ai pas prêté intérêt.

3 Q. Mais savez-vous que c'est précisément dans cette région-là qu'il y a

4 lieu des combats ?

5 R. Oui. Il y a eu des combats. Je sais que des civils ont même péri. C'est

6 tout ce que je sais à ce sujet.

7 Q. Bon. Je tiens compte du fait que vous étiez à l'époque très jeune.

8 Avez-vous entendu parler de Marko Miljanic, qui était commandant d'un

9 bataillon autonome de Skabrnja et des villages Galovac, Gornica, Donja

10 Zemunik, Nadin et autres ?

11 R. Non.

12 Q. Indépendamment du fait que vous ne sachiez pas -- ne connaissiez pas

13 son nom, savez-vous que les unités qui se trouvaient dans la région,

14 comptaient quelque 800 personnes en armes ?

15 R. Non.

16 Q. Savez-vous quoi que ce soit au sujet des conflits survenus entre ces

17 unités et la JNA qui passaient à proximité de Donja Zemunik ? Je vois qu'il

18 y avait une base militaire -- aéroport militaire de la JNA à l'époque, là-

19 bas ?

20 R. Non. Je ne suis pas du tout au courant. Je n'ai pas suivi ce type

21 d'événements.

22 Q. Et savez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet du fait qu'avant les

23 combats en novembre 1991, les membres de ce bataillon ont emprisonnés plus

24 de 50 soldats de la JNA et trois officiers ?

25 R. Non. C'est la première fois que j'entends parler de cela.

Page 28208

1 Q. Mais avez-vous pu apprendre même à titre ultérieur que le commandant de

2 Zadar et Josip Tulicic [phon] avaient donné l'ordre au commandant de

3 Skabrnja, Marko Miljanic d'organiser dans ce village une attaque sur la JNA

4 et ceci indépendamment du site ou de l'emplacement où se trouvait ces

5 unités de la JNA. Et savez-vous que les combats ont duré pendant plusieurs

6 jours ?

7 R. Non.

8 Q. L'événement survenu et que vous décrivez, quand est-ce qu'il est

9 survenu au juste ?

10 R. Le 21 décembre 1991.

11 Q. Et les combats ont eu lieu le 18 novembre. Vous souvenez-vous de cela

12 tout enfant que vous étiez ?

13 R. Je me souviens de la date mais je ne me souviens pas des combats.

14 Q. Vous ne vous en souvenez pas de ces combats ?

15 R. Non.

16 Q. Mais savez-vous à Skabrnja ont avait creusé des tranchées ?

17 R. Je ne les ai pas vues. Qui fait que je sais qu'il y a eu crime de

18 commis là-bas mais je ne sais pas ce que vous avez à l'esprit.

19 Q. Je n'ai rien à l'esprit du tout. Vous avez dit dans votre déclaration

20 que dans les villages, il y a des civils de tuer, et ainsi de suite.

21 R. Oui. Cela a été repris ou diffusés par toutes les télévisions et on a

22 vu les victimes tuées.

23 Q. Oui.

24 R. Et je n'ai pas eu à me déplacer personnellement.

25 Q. Mais savez-vous qu'aux côtés des membres du Corps de la Garde

Page 28209

1 nationale, il y a eu des civils qui ont pris part à ces combats, y compris

2 des personnes âgées ?

3 R. Je ne suis pas du tout au courant.

4 Q. Mais j'ai sous mes yeux le compte rendu de cet interrogatoire du

5 témoin, de Marko Miljanic. Je suppose que c'est de Zadar que cela provient.

6 Ceci n'a pas été donné aux organes de la JNA. Il dit : "Parmi les soldats

7 mobilisés dans mon bataillon, 15 ont perdu la vie et il y a eu aussi des

8 personnes âgées qui ont perdu la vie qui n'avaient pas été formellement

9 mobilisées mais qui portaient des armes et un certain nombre d'entre eux

10 ont pris part à la défense de la localité, du village."

11 R. Je ne comprends pas pourquoi ce serait véridique cette déclaration et

12 je ne vois pas, non plus, pourquoi quelqu'un l'aurait donnée.

13 Q. Mais c'est Marko Miljanic qui a donné cette déclaration et il a été

14 commandant de ces unités, sur place, d'après ce qu'on lit dans le document

15 et il a donné cette déclaration au Procureur à Zadar, Procureur municipal.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons entendu cela déjà à plusieurs

17 reprises. Il n'y a pas lieu de poser des questions à ce témoin au sujet des

18 déclarations qu'aurait fait un autre témoin. Tout ce que ce témoin peut

19 faire c'est donner des commentaires au sujet de la question que vous lui

20 posez. Et c'est ce que le témoin vous a dit.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je vois bien cela mais si je

22 parle du contexte, de ces circonstances, c'est parce que le témoin nous

23 raconte comment un certain nombre de personnes se sont fait tuées dans le

24 village et il en ressort de manière très claire de cette déclaration, qui

25 d'ailleurs n'a pas été donné à des organes de la Krajina mais qui a été

Page 28210

1 donnée aux autorités croates. Et donc, il en ressort comment ces combats se

2 sont déroulés, où il se sont -- 0202773 est le numéro de cette pièce. C'est

3 ça que j'ai.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Tout simplement, le témoin ne peut pas

5 vous aider là-dessus. C'est tout.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. Donc, le témoin ne sait pas que des

7 civils, y compris des personnes âgées, avaient pris part à ces combats.

8 Donc, c'est ce que dit ce commandant.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Mais indépendamment du fait que vous étiez très jeune à ce moment-là,

11 est-ce que vous saviez que ces forces avaient employé également de

12 l'artillerie lourde, des mortiers, que ça était une unité importante qui a

13 été stationnée à cet endroit ?

14 R. Non.

15 Q. Vous ne connaissez aucun des noms de ces personnes qui ont commandés à

16 ce moment-là ces unités ?

17 R. Vous faites référence à laquelle des parties ?

18 Q. Du côté du Corps de la garde nationale. Vous ne connaissez pas ces

19 gens-là ?

20 R. Non.

21 Q. Très bien. Mais Mate Drazen, savez-vous où se trouve sa maison ?

22 R. Je ne le sais pas.

23 Q. Savez-vous qu'avant ces combats, il y a eu pilonnage de l'aéroport de

24 Zemunik, de l'aéroport militaire où étaient cantonnés des soldats, des

25 soldats de la JNA ?

Page 28211

1 R. Je ne le sais pas. Et comme je vous l'ai déjà dit, tout simplement, je

2 n'étais pas au courant. Je ne m'intéressais pas à ces événements, à tout ce

3 qui avait lieu, tous ces combats.

4 Q. Savez-vous que c'est précisément les soldats de la JNA en passant par

5 Gornji Zemunik, un village croate qui, en fait, rejoint Skabrnja. Et là,

6 nous avons des déclarations d'un grand nombre de témoins qu'ils ne se sont

7 pas servis de leurs armes. Ils n'ont pas tiré une seule balle. Et c'est

8 uniquement en arrivant à Skabrnja qu'ils ont rencontré cette unité et c'est

9 là que le conflit a éclaté.

10 R. Ça non plus, je ne le sais pas. Je ne peux vous en parler puisque je ne

11 me suis pas trouvé sur la place et je ne suis pas passé par là.

12 Q. Ils étaient de passage. C'est là qu'il y a eu un conflit. Un véhicule

13 de transport de la JNA a été détruit et cela a fait partie de ces

14 nombreuses attaques qui ont lieu sur tout le territoire de la Croatie

15 contre la JNA. Etes-vous au courant de cela ?

16 R. Ecoutez. Si je m'étais trouvé sur les lieux, j'aurais été au courant et

17 si j'avais suivi ces événements.

18 Q. Avez-vous entendu parler des officiers de la JNA tués ainsi que des

19 soldats de la JNA tués pendant ces combats ?

20 R. Non. Non.

21 Q. Plus tard, pour revenir à l'événement qui vous concerne, plus tard

22 donc, est-ce qu'il y a eu une enquête qui a été menée ? Est-ce que les

23 instances juridiques de Zadar, la police de Zadar et toutes les personnes

24 compétences, les organes compétents, et bien, est-ce qu'ils ont pu établir

25 les circonstances de cet événement et ainsi que l'auteur éventuel de ce

Page 28212

1 meurtre ? Est-ce qu'ils ont pu l'identifier ?

2 R. Comme je vous l'ai dit, cet événement s'est produit en 1991, vers la

3 fin de cette année. La police de Zadar n'a pu agir qu'en 1995, n'a pu --

4 son enquête. Autrement dit, ils n'ont pas pu enquêter au sujet de cet

5 événement-là.

6 Q. Mais il y a eu beaucoup de choses qu'on essaie de constater plus tard,

7 donc j'aimerais savoir s'il y a eu une enquête diligentée puisque il y a eu

8 plusieurs victimes. Plusieurs personnes ont perdu leur vie. Il ne fait

9 aucun doute que là il ne s'est pas agi d'opération de guerre, ça a été un

10 crime ordinaire.

11 R. Tout à fait. Un grand crime. Un crime grave.

12 Q. Mais ce crime n'a rien à voir avec ces opérations militaires, n'est-ce

13 pas ?

14 R. Ecoutez, les opérations militaires, ou les malades, ou -- des malades

15 portés sur le nationalisme, je ne sais pas comment les qualifier, mais on

16 sait ce qui s'est passé.

17 Q. Mais puisque les victimes étaient d'appartenance ethnique mixte, il me

18 semble que la conclusion qui s'impose c'est que ce crime n'a pas été

19 commis. Cet assassinat n'a pas été commis pour des raisons d'appartenance

20 ethnique. Etes-vous d'accord ?

21 R. Mais comme je vous l'ai dit, il n'y a eu qu'une seule victime serbe.

22 Toutes les autres victimes étaient des Croates. Et cela s'est passé dans un

23 hameau croate et non pas dans un hameau serbe.

24 Q. Très bien, Mademoiselle Denona, je n'ai pas d'autres questions pour

25 vous.

Page 28213

1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

2 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :

3 Q. [interprétation] Madame le Témoin, je n'ai que quelques questions à

4 vous poser au sujet de cet événement que vous avez décrit dans le dernier

5 paragraphe, deuxième page de votre déclaration. Version anglaise,

6 également deuxième page. Lorsque vous parlez du 21 décembre 1991, vous

7 dites ici, "Vous êtes partie vers la porte lorsque vous avez entendu

8 quelqu'un frappé à la porte."

9 R. Oui, c'est cela.

10 Q. Pour voir qui c'est ?

11 R. Oui.

12 Q. Et vous avez demandé, "Qui est là ?" Et j'ai entendu une voix d'homme

13 dire, "La milice de la Krajina."

14 R. C'est cela.

15 Q. "J'ai eu l'impression que quelqu'un était en train de faire une

16 blague."

17 R. C'est cela.

18 Q. Vous n'avez pas vu la personne qui a ouvert la porte, et vous ne savez

19 si c'était vraiment les membres de la milice, ou non.

20 R. Je ne sais pas. La porte a été ouverte.

21 Q. Donc ça, vous l'avez déjà expliqué, mais vous ne savez pas qui se

22 trouvait devant la porte. Vous ne savez pas qui était cet homme qui a eu

23 une conversation avec Dragan ?

24 R. Non je ne sais pas.

25 Q. Et une question pour terminer : Vous dites qu'un seul Serbe a été tué

Page 28214

1 et que toutes les autres victimes étaient des Croates ?

2 R. Oui.

3 Q. Mais dans ce village au paragraphe 3, vous dites il n'y a que deux

4 maisons où vivaient des Serbes, la famille Draca et une autre famille. Il

5 n'y avait pas d'autres familles serbes.

6 R. Draca et Dobre.

7 Q. En tout, il y a eu combien de familles serbes ?

8 R. Vous voulez savoir combien de membres de ces familles ?

9 Q. Oui.

10 R. Peut-être 20 à 25.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres

12 questions.

13 M. WHITING : [interprétation] Très brièvement, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

15 Nouvel interrogatoire par M. Whiting :

16 Q. [interprétation] On vous a posé des questions au sujet de ce Draca. A-

17 t-il été mobilisé pour faire partie des soldats de la réserve de la JNA ?

18 R. Oui.

19 Q. Savez-vous si c'est de son plein gré qu'il a fait l'objet de cette

20 mobilisation ?

21 R. Non, ce n'était pas de son plein gré.

22 Q. Savez-vous ce qu'il faisait dans la maison de Roko Marinovic la nuit où

23 il a été tué ?

24 R. Tout simplement, ils se sont rencontrés en tant qu'amis. Il est venu

25 jouer aux cartes.

Page 28215

1 Q. Etait-il là-bas avec ses enfants ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous avez dit que vous avez pensé qu'il y avait plus d'une seule

4 personne, plus qu'un seul homme devant la porte lorsqu'on a frappé la

5 porte. Pouvez-vous nous l'expliquer ?

6 R. Oui, je peux. La voix qui m'a répondu lorsque j'ai posé la question,

7 lorsque j'ai demandé qui est-ce, et bien cette voix provenait de ma gauche.

8 D'après le son, j'en ai conclu que la personne était sur ma gauche. A

9 travers la vitre de la porte d'entrée, cependant, je pouvais deviner la

10 silhouette d'un deuxième homme. Et d'après ce que j'en ai pensé, la

11 troisième personne qui a tiré une rafale se trouvait peut-être à un mètre

12 ou deux de la porte d'entrée au moment où elle a tiré, où elle a tiré cette

13 rafale. Donc d'après moi, ils étaient plus que deux devant la porte.

14 Q. Lorsque vous êtes sortie en courant de la maison dans la cour, vous

15 rappelez-vous avoir entendu des paroles prononcées par qui que ce soit ?

16 R. Oui, une voix d'homme a dit, "Les voilà qui s'enfuient. On va les

17 perdre." Et c'est là qui se sont mis à tirer derrière nous, et c'est là

18 aussi que j'ai été touchée.

19 M. WHITING : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

20 Président.

21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il faut apporter

22 une correction pour le compte rendu d'audience. Au sujet des pièces, donc

23 575 est la transcription, et les pièces pour le témoin B-1345 seront

24 versées sous pli scellé, mis à part l'intercalaire 1A, il s'agit de la

25 version expurgée de la transcription. Et la déclaration de la Mlle Denona

Page 28216

1 en vertu de l'Article 89(F) portera la cote 576.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Mademoiselle Denona

3 d'être venue déposer devant ce Tribunal. Vous êtes libre de repartir.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

5 [Le témoin se retire]

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Whiting.

7 M. WHITING : [interprétation] Nous avons un point qui concerne la procédure

8 à aborder en attendant le témoin.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, je vous en prie.

10 M. WHITING : [interprétation] S'agissant du témoin C-1153 [sic], nous avons

11 une déclaration à proposer au versement en application de 92 bis. Nous

12 souhaitons verser au dossier la déclaration. Il y a des mesures de

13 protection qui ont été accordées pour ce témoin. Donc je me réfère à cette

14 personne en utilisant le pseudonyme, et cette pièce doit être versée sous

15 pli scellé.

16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 577, versée sous

17 pli scellé.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous pouvons faire entrer le témoin

19 suivant.

20 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, des mesures de protection

21 ont été accordées à ce témoin.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très bien.

23 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

24 n'arrive, je me retrouve dans la même position que mon collègue, M.

25 Whiting, au sujet du témoin B-1780, donc des mesures de protection lui ont

Page 28217

1 été accordées la possibilité de déposer par la voie de 92 bis, mais avec

2 l'autorisation de la Chambre, je souhaite proposer au versement sa

3 déclaration en application de l'Article 89(F).

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Nous acceptons. En attendant, je

5 demande à la Greffière d'audience d'attribuer une cote à ces documents, les

6 nouveaux documents.

7 M. AGHA : [interprétation] Je vous en remercie.

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce

9 578, donc pour l'ensemble des documents contenus dans cette pièce à

10 conviction.

11 M. AGHA : [interprétation] Afin de gagner du temps, Monsieur le Président,

12 puis-je proposer à présent que les pièces qui seront proposées au versement

13 par le truchement de ce témoin soient versées sous pli scellé.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

15 M. AGHA : [interprétation] Je vous remercie.

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin peut-il prononcer la

18 déclaration solennelle.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous prie de prendre place.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

23 LE TÉMOIN: TEMOIN B-1780 [Assermenté]

24 [Le témoin répond par l'interprète]

25 M. AGHA : [interprétation] Avec l'autorisation de la Chambre, je souhaite

Page 28218

1 montrer au témoin la feuille qui contient le pseudonyme et vous pouvez

2 trouver cette pièce à l'intercalaire 2.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez. Attendez que les stores soient

4 relevés.

5 Oui, je vous en prie.

6 M. AGHA : [interprétation] Avec l'autorisation de la Chambre, je souhaite

7 présenter au témoin la feuille qui porte la mention du pseudonyme à

8 l'intercalaire numéro 2.

9 Interrogatoire principal par M. Agha :

10 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous prie d'examiner la feuille

11 où figure votre pseudonyme, le pseudonyme B-1780, et je vous prie de nous

12 dire s'il s'agit bien de votre nom qui figure également sur cette feuille

13 et si se sont bien des choses que vous avez signées.

14 R. C'est bien mon nom.

15 Q. Je vous remercie. Avez-vous donné une déclaration au bureau du

16 Procureur le 25 septembre 1996 ?

17 R. Oui, je l'ai fait.

18 M. AGHA : [interprétation] C'est à l'intercalaire 2, Monsieur le Président,

19 que l'on peut voir cette déclaration et je demanderais qu'un exemplaire en

20 soit communiqué au témoin.

21 Q. Monsieur le Témoin, en dernière page de votre déclaration, pourriez-

22 vous, s'il vous plaît, s'il s'agit bien de votre signature qui y est

23 apposée.

24 R. C'est ma signature.

25 Q. Monsieur le Témoin, afin que l'on soit tout à fait certain et bien,

Page 28219

1 vous verrez à côté de votre signature la date dactylographiée qui est celle

2 du 25 septembre 1966. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous confirmer qu'il

3 s'agit de l'année 1996 ? Donc que c'est bien 1996 et non 1966.

4 R. 1996.

5 Q. Lorsque vous êtes arrivé à La Haye, avez-vous apporté quelques

6 modifications à cette déclaration qui figure ici et les corrections sont-

7 elles apportées en annexe ?

8 R. Oui, je l'ai fait.

9 Q. Je vous remercie, Monsieur le Témoin.

10 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'en donnez

11 l'autorisation, je souhaite donner lecture du résumé, très bref, à

12 l'intention de la Chambre.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous en prie.

14 M. AGHA : [interprétation] Au moment des incidents qui sont mentionnés dans

15 le résumé, le témoin vivait à Zvornik avec sa famille. Branko Grujic dont

16 le surnom était Brano, était le président du SDS de Zvornik.

17 Au cours de l'hiver avant la guerre, trois ou quatre personnes non

18 identifiées ont commencé à travailler dans une cabane près de la

19 boulangerie de Grujic qui se trouve près des bois. Le témoin a vu ces

20 personnes en train de s'exercer à tirer dans la clairière à côté. Lorsque

21 le témoin a été détenu à Ekonomija, plus tard, il a reconnu ces hommes

22 parmi les hommes d'Arkan. Le 12 mai 1992, Niska, qui a été pris par l'un

23 des hommes d'Arkan, l'a emmené à Ekonomija pour lui faire subir un

24 interrogatoire.

25 Le témoin a été emmené dans ce bâtiment où il y avait plein d'hommes qui

Page 28220

1 avaient été passés à tabac. Tous ces hommes étaient nus. L'un des hommes

2 étaient mort et les autres étaient en train de gémir ou de pleurer. Il y

3 avait 18 à 20 hommes dans cette pièce qui avait à peu près 30 mètres carré.

4 Le témoin a reconnu un certain nombre d'hommes qui se trouvaient dans cette

5 pièce.

6 L'homme dont le nom était Jasikovac, qui avait un accent serbe, après avoir

7 parlé à Niski, a apporté des bâtons qu'il a utilisés et qui avaient

8 constitué une partie d'une clôture. Le témoin a été battu par ces pieux

9 jusqu'à -- repris connaissance après avoir été arrosé d'eau, et il a été

10 traîné en dehors du bâtiment où il a vu, à une certaine distance de lui,

11 son voisin, Softic, qui a été battu, lui aussi, avec des pieux, des mains

12 et des pieds. L'un des Serbes, qui étaient en train de passer à tabac à

13 Softic, lui a dit : "Mort aux Musulmans", et lui a dit que c'était ça qui

14 était écrit là-bas. Près du témoin, il y avait un autre homme qui gisait

15 mort. Sa main avait été coupée et les Serbes étaient en train de la pousser

16 avec leurs pieds par terre.

17 Les Serbes ont essayé de redresser Softic, et de lui donner instruction de

18 courir, mais Softic était trop faible, à cause de ce passage à tabac. A une

19 occasion, Softic a réussi à se redresser et il a heurté de son pied quelque

20 chose par hasard. En fait, cet objet a roulé par terre à quelques mètres du

21 témoin, et c'était la main -- la tête d'un homme.

22 Softic a finalement pu se remettre debout. Il s'est mis à courir comme on

23 lui en a donné l'ordre. Il a couru peut-être sur une trentaine de mètres.

24 Le témoin a vu un homme qui Hadjukovic lui a tiré dans le dos. Niski est

25 allé -- s'est approché de Softic, a commencé à pousser de son pied sa tête,

Page 28221

1 paraît-il pour voir s'il était réellement mort. Niski s'est approché du

2 témoin. Il lui a montré du témoin -- lui a montré les morceaux de la

3 cervelle et le sang sur son pied, et il a dit au témoin que son cerveau à

4 lui se retrouvait sur l'autre pied.

5 Les Serbes, par la suite, ont commencé à battre le témoin avec des câbles,

6 avec un tuyau de conduite d'eau, et avec un bâton qui avait un clou enfoncé

7 dedans. Le témoin porte encore des traces de ce passage à tabac. Le témoin

8 n'a pas voulu courir, lorsqu'on lui a donné l'ordre de le faire, parce

9 qu'il ne voulait pas qu'on le tue comme Softic et, finalement, le témoin a

10 perdu connaissance.

11 Pendant quatre jours et quatre nuits durant, plusieurs groupes sont venus

12 dans le bâtiment pour frapper tous les détenus. Il y avait les hommes

13 d'Arkan, les hommes de Seselj, les Guêpes jaunes, les Aigles blancs, et

14 d'autres. On faisait sortir les détenus de la pièce. On les forçait à

15 courir, et puis on entendait des rafales de mitraillettes. Le témoin a

16 supposé qu'ils étaient abattus, comme l'avait été Softic.

17 Chaque jour, à 1 heure de l'après-midi, les détenus étaient autorisés à

18 aller à la toilette, un par un. Celle-ci se trouvait à peu près à 30 mètres

19 de distance. La plupart devaient ramper parce qu'ils avaient été tellement

20 de coups, qu'ils ne pouvaient plus se dépasser. Le témoin, alors qu'il

21 rampait vers la toilette, a vu le détenu, qui était parti avant lui, mort

22 par terre.

23 Le témoin était tellement en mauvais état à cause des passages à tabac,

24 qu'il a demandé au garde, qui l'escortait, de le tuer. Le garde, cependant,

25 a dit au témoin qu'il ne pouvait pas le faire parce que le témoin avait été

Page 28222

1 condamné à mort par torture et non pas par arme à feu.

2 Au cours des quatre jours que le témoin a passé à Ekonomija, sept hommes

3 ont été tués sur la terrasse, alors qu'ils se rendaient à la toilette. Le

4 témoin était content à l'idée que ceci lui arriverait aussi car il pensait

5 le suivant à être abattu. Quatre ou cinq hommes d'Arkan, dont Jasikovac, un

6 Serbe de Loznica, sont venus avec un long pieu de bois qui avait été taillé

7 au bout. Abdulah Buljubasic a reçu l'ordre de se mettre à genou avec la

8 tête conte le mur. Deux des hommes d'Arkan ont alors poussé ce pieu à 40

9 centimètres dans l'anus de Buljubasic qui a crié un cri d'horreur avant de

10 s'évanouir. Le témoin a vu du sang qui sortait de l'anus de Buljubasic puis

11 le témoin a entendu qu'il avait été enterré par son père.

12 Quatre ou cinq hommes de Seselj sont venus dans le bâtiment et ont fait

13 sortir Bego Bukvic. Le témoin a entendu qu'on donnait l'ordre à Bukvic de

14 se mettre à courir puis des coups de feu ont été entendus. Bukvic, quelques

15 minutes plus tard, a été traîné dans la pièce. Il avait une croix taillée

16 dans le dos, une blessure par balles dans chaque jambe, et le bras cassé,

17 puis on lui a donné un coup de poignard dans la main et on a tiré dans sa

18 nuque sous les yeux du témoin.

19 Il est arrivé qu'un cadavre soit dynamité touché par les Chetniks qui l'ont

20 fait -- qui l'ont amené dans la pièce. On a donné l'ordre aux détenus, et

21 ce sont quatre ou cinq hommes d'Arkan qui l'ont fait. Les détenus ont reçu

22 l'ordre de se mettre à quatre pattes et à lécher le sang de ce cadavre. Le

23 témoin a refusé, et on l'a brûlé à coups de cigarettes. Et on lui a coupé

24 la gorge en guise de punition. Un autre détenu qui avait refusé de lécher

25 le sang de ce cadavre s'est vu couper l'oreille, et on l'a forcé à manger

Page 28223

1 son oreille. Cet homme avait 20 ans.

2 Un Chetnik local plus jeune, qui était plus gentil envers les détenus, leur

3 a dit que les hommes d'Arkan allaient quitter l'endroit le lendemain, ce

4 qui voulait dire que les choses allaient s'améliorer pour eux. On lui a

5 aussi dit comment ils avaient été condamnés. Au fond, il y avait ce soi-

6 disant juge Ilic qui prenait la liste de leur nom et, sans lire la liste, a

7 décidé qu'à la page 1, les noms qui s'y trouvaient seraient abattus par

8 balles. Alors, qu'à la page 2, ils seraient torturés et, qu'à la page 3,

9 ils seraient torturés à mort.

10 Vers 11 heures ou 12 heures de la matinée, un camion de la JNA s'est arrivé

11 devant le bâtiment. Dix soldats, en tenue de camouflage, avec à leur tête

12 un capitaine, sont entrés dans le bâtiment. Ces soldats avaient tous le

13 drapeau serbe à la casquette. Les hommes ont reçu l'ordre de monter dans le

14 camion. Les trois premiers hommes étaient si faibles, on a dit les jeter,

15 que les soldats ont dû les traîner dans le camion, et puis les autres ont

16 été empilés sur eux. Le témoin était le dernier à être jeté dans le camion.

17 Ceux qui étaient au bas de la pile criaient tellement qu'ils avaient mal,

18 et ils essayaient de sortir du camion, mais les soldats les en ont

19 empêchés, en les frappant à coups de crosse de fusil.

20 Le camion est parti en direction de Zvornik. Les hommes, qui se trouvaient

21 en dessous du témoin, se sont arrêtés de bouger et de crier parce qu'ils

22 étaient morts. Le témoin s'est vu sortir du camion à la caserne de la JNA,

23 et le camion a poursuivi sa route vers Divic.

24 Au QG, Sekanic et Pavlovic ont vu le témoin. Ils l'ont envoyé à l'hôpital

25 pour qu'il y soit soigné. Pavlovic l'a vu à l'hôpital, où il a été traité

Page 28224

1 par deux médecins qui parlaient serbe. On a pris des radios, et il a été

2 constaté qu'il avait quatre côtes cassées. Le bras était cassé aussi, et de

3 graves blessures à la tête. Il est resté à l'hôpital quatre jours.

4 Le troisième jour, une infirmière musulmane a dit au témoin qu'il devait

5 s'en aller parce qu'on tuait tous les Musulmans de l'hôpital, et qu'on les

6 reconnaissait à leur pyjama. C'est alors que le témoin s'est rendu compte

7 que tous les Chetniks portaient des pyjamas bleus, alors que lui avait un

8 pyjama rayé.

9 Un peu plus tard, deux groupes de Serbes sont venus dans le service. Il y

10 avait un groupe où il y avait le capitaine Dragan et certains de ses

11 hommes, alors que les autres étaient des Chetniks. Le témoin a poussé -- a

12 pris le drap pour cacher son pyjama. Il a pu échapper ainsi.

13 Le témoin a quitté l'hôpital de Zvornik le 19 mai 1992, et il est rentré

14 dans son village à Zvornik, le 15 juin. Tous les habitants ont été

15 contraints de signer un document assurant le transfert de leurs biens aux

16 autorités serbes, comme si c'était de leur propre gré. Un jour plus tard,

17 ils ont été déportés par des Chetniks vers Vienne, en passant par Subotica.

18 Fin mai, début juin, le témoin a vu que des Serbes déchargeaient des corps,

19 à partir de camions, dans une fosse commune se trouvant à Ramin Grob, tout

20 près de sa maison.

21 Voilà, en quelques mots, la déclaration de ce témoin.

22 Je n'ai pas l'intention de demander le versement de pièces par le

23 truchement de ce témoin, mais, avec l'autorisation de la Chambre,

24 j'aimerais lui poser quelques questions.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

Page 28225

1 M. AGHA : [interprétation]

2 Q. Monsieur le Témoin, je vais maintenant vous poser quelques questions.

3 Dans votre déclaration préalable, vous dites avoir été condamné par un

4 certain Juge Ilic. Pourriez-vous nous dire où se trouvait le Tribunal de ce

5 Juge Ilic à Zvornik ?

6 R. Je ne le savais pas.

7 Q. Est-ce qu'ils auraient pu être au courant des activités du Juge Ilic ?

8 Et, si c'est le cas, comment auraient-ils pu le savoir ?

9 R. Lui était président du SDS au sein de sa communauté locale.

10 Q. Donc, selon vous, les dirigeants du SDS à Zvornik et ce Juge avaient

11 des moyens de communication ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Dernière question, Monsieur le Témoin B-1780. Vous parlez d'un certain

14 Marko Pavlovic dans votre déclaration préalable, avait-il une fonction de

15 responsabilité. Quel était son degré de pouvoir à Zvornik ?

16 R. Marko Pavlovic était commandant de la Brigade de Zvornik.

17 Q. Je vous remercie, Monsieur le Témoin, je n'ai pas d'autres questions à

18 vous poser.

19 M. AGHA : [interprétation] Ceci termine l'interrogatoire principal,

20 Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

22 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, avant de passer au contre

24 interrogatoire, je souhaite faire une objection. Je pense qu'il est tout à

25 fait inadmissible d'entendre la façon dont M. Khan est en train de se

Page 28226

1 servir du terme "Serbes". Il vient de décrire des tortures qui ont

2 prétendument été effectuées ou ont eu lieues. Il peut parler de formations

3 paramilitaires ou de bandes de criminels mais à chaque fois au lieu de le

4 faire, il se sert du terme de "Serbes." Je crois qu'il est de votre devoir

5 de le prévenir que cela est tout à fait inapproprié.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le substitut s'appelle, en fait, M. Agha.

7 S'il avait quoi que ce soit de répréhensible, il aurait été mis en garde.

8 On lui a déjà dit précédemment qu'il ne devait pas guider le témoin par ces

9 questions. S'il s'est permis d'utiliser des termes péjoratifs, il aurait

10 été mis en garde aussi. Ça aurait été le cas, s'il l'avait fait, mais, de

11 tout de façon, ça ne fait aucune différence pour la présente Chambre de

12 première instance. Nous sommes en mesure d'ignorer ce genre de choses.

13 Avançons.

14 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à préciser

15 qu'ici je ne voulais vexer personne. Ce sont uniquement les termes

16 recueillis dans la déclaration au préalable du témoin. Je n'utilise pas mes

17 propres termes, j'utilise ceux utilisés par le témoin.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien.

19 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

20 Q. [Interprétation] Monsieur 1780 --

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai crû comprendre qu'étant donné que le

22 témoin était protégé, je ne saurais lui poser en audience publique des

23 questions concernant ses occupations ou sa fonction parce que cela

24 risquerait de révéler son identité, n'est-ce pas ?

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] C'est exact. Si vous avez l'intention de

Page 28227

1 lui poser ce genre de questions, vous demandez le passage à huis clos

2 partiel.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très brièvement, oui, s'il vous plaît.

4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

5 [Audience à huis clos partiel]

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 28228

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 [Audience publique]

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Monsieur 1780, dans votre déclaration au préalable, vous parlez

23 d'échanges et vous mentionnez Branko Grujic, le président de l'assemblée

24 municipale de Zvornik, Ljubko Ilic, Petar Radukovic [phon], Dragan Tanic,

25 et ainsi de suite. Ils sont ceux-là des gens qui sont originaires de

Page 28229

1 Zvornik ?

2 R. Oui.

3 Q. Et tout au début -- ou alors peut-être est-ce M. Agha qui l'a lu ainsi

4 dans son résumé, mais au tout début il a dit qu'il y avait trois ou quatre

5 hommes qui s'étaient entraînés à des tirs dans une carrière. C'était bien

6 ce qu'il a dit ?

7 R. Oui.

8 Q. Eux étaient de Zvornik aussi, n'est-ce pas ?

9 R. Non.

10 Q. Et ils sont revenus à Zvornik pour s'exercer aux tirs ?

11 R. Ils ont travaillé chez Grujic. Ils ont coupé du bois dans sa

12 boulangerie.

13 Q. Donc c'était des ouvriers de la boulangerie à Grujic, n'est-ce pas ?

14 R. Oui. Et je les ai vus par la suite avec des hommes à Arkan.

15 Q. Je n'entre pas dans les détails concernant le fait que vous les ayez

16 vus avec ou des hommes à Arkan ou pas ? Ça je n'en parle pas pour le

17 moment. Ce qui est évident c'est que vous ne pouvez pas les désigner comme

18 étant des hommes à Arkan si c'était des ouvriers qui coupaient le bois dans

19 une boulangerie; en est-il été ainsi ou pas ?

20 R. Ils sont venus là un mois avant. Ils ne se trouvaient pas là avant.

21 Q. Vous les avez remarqués un mois avant; ils ont coupé le bois; ils ont

22 travaillé là où ils ont travaillé, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Bien, par la suite, vous les avez désignés comme étant des hommes à

25 Arkan ? Alors que vous n'avez aucun fondement pour l'affirmer ?

Page 28230

1 R. Ils portaient les mêmes uniformes. Ils faisaient la même chose qu'eux.

2 Ils parlaient le dialecte Ekavien.

3 Q. Ces gens de Zvornik travaillaient en Serbie et ils parlaient l'Ekavien,

4 mais cela ne signifie rien du tout. Ils ont coupé du bois et, du fait

5 d'avoir coupé du bois en tant qu'ouvriers, ils n'étaient forcément pas des

6 combattants, mais des ouvriers. Quand quelqu'un coupe du bois, c'est un

7 ouvrier, ce n'est pas un --

8 R. C'est une astuce à Grujic. Ils les a fait venir avant pour qu'ils

9 connaissent mieux Zvornik pour qu'ils puissent déambuler dans Zvornik.

10 Q. Ah, ça c'était une magouille à Grujic ?

11 R. Mais on l'a vu toutes personnes vivantes pouvaient le voir.

12 Q. [Inaudible] Vous avez dit que vous connaissiez le dénommé Ljubko Ilic.

13 Vous le connaissiez très bien ?

14 R. Oui.

15 Q. Et vous dites qu'il vous avait menacé ?

16 R. Oui.

17 Q. Vous affirmez ici qu'il avait affirmé qu'il détestait sa mère parce

18 qu'elle était Chetnik, vous l'avez rédigé ici ?

19 R. Il l'a dit, il l'a dit. Il devait être saoul pour avoir dit cela et il

20 s'est mis à pleurer par la suite. Il était complètement saoul.

21 Q. Mais attendez cette réaction de sa part faisait telle partie d'une

22 ambiance générale, qui était caractéristique pour la guerre civile qui

23 avait cours, qui battait son plein.

24 R. Ça je ne le sais pas.

25 Q. Dites-moi, je vous prie, étiez-vous vous-même dans des formations

Page 28231

1 paramilitaires musulmanes ? Parce que, d'après les renseignements dont je

2 dispose, vous avez été accusé d'avoir tué quelqu'un à Kula Grad ?

3 R. C'était un acte d'accusation. On a dit que j'ai tué quelqu'un à Kula

4 Grad, alors que je ne suis jamais allé à Kula Grad, je ne pouvais pas y

5 arriver.

6 Q. Mais le fait est que vous avez été accusé d'avoir tué quelqu'un à Kula

7 Grad, n'est-ce pas ?

8 R. On m'a demandé combien de Serbes j'avais tué à Kula Grad. Or j'ai dit

9 que je n'étais pas du tout allé là-bas, je ne suis pas allé là-bas du tout.

10 Je n'ai pas bougé de ma maison, je suis resté tout le temps chez moi.

11 Q. Et vous avez vaqué à des activités politiques, comme nous l'avons

12 constaté. Je suppose que vous n'avez vaqué à des activités politiques chez

13 vous à la maison, mais que vous avez vaqué à des activités politiques

14 ailleurs.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons passer à huis clos partiel.

16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

17 [Audience à huis clos partiel]

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 (expurgée)

Page 28232

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12 Page 28232 –expurgée– audience à huis clos partiel.

13

14

15

16

17

18

19

20

21

22

23

24

25

Page 28233

1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 (expurgée)

16 (expurgée)

17 (expurgée)

18 (expurgée)

19 (expurgée)

20 (expurgée)

21 (expurgée)

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 [Audience publique]

Page 28234

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Connaissez-vous le propriétaire du restaurant Royal, Sead Hadziabdic ?

3 R. Non, je ne connais pas.

4 Q. Vous n'avez pas entendu parler de lui ?

5 R. Non.

6 Q. Avez-vous entendu parler de Saban Redzic, et Esad Haskic ?

7 R. Saban Redzic, j'ai entendu parler de lui; pour l'autre, non.

8 Q. L'un est propriétaire du restaurant Royal. Connaissez-vous ce

9 restaurant ?

10 R. Non, je connais très mal les restaurants.

11 Q. Mais, au moins, pour ce qui est de celui dont vous avez entendu parler,

12 savez-vous qu'il avait vaqué à des armements clandestins à l'intention des

13 membres du SDA ?

14 R. Avant la guerre, il avait travaillé en tant qu'inspecteur du génie

15 civil dans l'assemblée municipale; pour ce qui du reste, je n'en sais rien.

16 Q. Bien, vous souvenez-vous du nom de Samir Nisovic, qui avait pour

17 surnom, capitaine Almir ? Est-ce que vous souvenez de ce Samir Nisovic ?

18 R. J'ai entendu parler d'un certain capitaine Almir.

19 Q. Est-ce qu'il était l'organisateur de la Ligue patriotique dans la

20 région, avec pour siège Kula Grad ?

21 R. Je ne sais pas.

22 Q. Ça ne vous savez pas non plus ?

23 R. Je ne sais pas.

24 Q. Vous souvenez-vous de Midhat Grahic ? Est-ce que ce nom vous dit

25 quelque chose ?

Page 28235

1 R. Il y a plusieurs Grahic à Zvornik. Alors, j'en ai entendu parler, mais

2 pour celui-là, je ne sais pas trop.

3 Q. Il avait été à la tête d'une unité qui s'appelait Dzamijski Golubovi,

4 ou les Pigeons de la mosquée, et c'était les soi-disant combattants de la

5 religion. Vous êtes au courant de cela ?

6 R. Quand est-ce que -- ?

7 Q. Jusqu'à la période au sujet de laquelle vous témoignez, à savoir, en

8 automne 1991 et début 1992.

9 R. Je n'ai pas connaissance.

10 Q. Avez-vous entendu parler de ces Pigeons masquées, combattants de la

11 foi? Avez-vous -- vous n'avez entendu parler que de Grahic ?

12 R. J'ai entendu parler de ces Pigeons de la mosquée pendant la guerre.

13 Q. Qu'avez-vous entendu dire au sujet de ces Pigeons de la mosquée ?

14 R. J'ai entendu parler d'eux. Je ne sais du tout ce qu'ils ont fait.

15 Q. Bon, mais je suppose que vous avez supposé qu'il s'agissait pas de

16 pigeons véritables, mais d'une unité militaire, vous devez forcément avoir

17 une idée de ce qu'ils constituaient.

18 R. C'était une unité militaire, mais je n'étais pas là-bas, je ne sais pas

19 du tout de quoi il en retournait.

20 Q. Vous ne savez plus rien nous dire au sujet de cette unité militaire et

21 de ses activités.

22 R. Je ne me trouvais pas à ce moment-là en Bosnie.

23 Q. Et avez-vous connaissance de d'une autre compagnie qui s'appelait les

24 Kobras, qui étaient commandés par un certain Suljo qui a été avant la

25 guerre enseignant à Sapna ? Est-ce que vous connaissez le nom de Sulejman

Page 28236

1 Terzic ?

2 R. J'ai entendu parler de ce nom de famille Terzic. Pour ce qui est de

3 Sulejman en question je n'ai jamais entendu parler de lui.

4 Q. Mais avez-vous appris qu'il avait commandé cette compagnie, mais

5 paramilitaire, qui s'était surnommée "les Kobras" ?

6 R. Je ne sais pas. Pendant la guerre, je ne me trouvais pas en Bosnie.

7 Q. Bon, mais dans cette ambiance générale, telle qu'elle se présentait

8 avec tous ces brandissements d'armes et avec toutes les informations que

9 j'ai mentionnées, il y a eu des appréhensions de la haine qui

10 s'installaient, et est-ce que c'est précisément pour cette raison-là, que

11 votre voisin vous avez menacé ?

12 R. Il n'avait -- il ne m'avait pas menacé moi seul. Il avait menacé

13 d'autres personnes encore.

14 Q. Comment vous a-t-il menacé ?

15 R. Il a dit : "Celui-là il sera à moi, il est pour moi," ou "Je me le

16 réserve."

17 Q. Comment a-t-il été dit de réponse ?

18 R. Il l'a dit à mes voisins.

19 Q. Mais vous a-t-il menacé vous-même ?

20 R. Non, il ne l'a pas dit à moi-même, il le disait aux autres, il le

21 faisait clandestinement.

22 Q. Donc il ne vous a pas menacé, mais il l'a dit dans le secret à des

23 voisins à vous qu'il allait vous liquider.

24 R. Il avait un magasin. Il avait travaillé comme commerçant et, lorsque

25 les voisins venaient dans son magasin, il avait pour coutume de parler

Page 28237

1 politique. Et quand je passais par hasard par là, il disait : "Ah, celui-

2 là, je me le réserve." Et il est venu par la suite pour m'emmener.

3 Q. Bon, le dites-vous au sujet de ce Ljubko Ilic ?

4 R. Oui. Je parle de Ljubko Ilic.

5 Q. Nous avons déjà tiré au clair ce qu'il en était. M. Agha vous a posé

6 des questions à son sujet, pour savoir où est-ce qu'il était juge. Savez-

7 vous nous dire s'il avait été juge ou pas en réalité ?

8 R. Cela m'a été dit par un soldat serbe au camp. Il m'a dit que Ljubko

9 Ilic, juge, m'avait condamné à mort par torture.

10 Q. Attendez, vous avez décrit qu'un juge avait jugé les gens en suivant

11 une liste en disant : "La première page, ils doivent être tués; la deuxième

12 page, ils doivent être égorgés; ceux de la troisième page doivent être

13 torturés." Donc il ne regardait pas les noms, mais il procédait de la

14 sorte. Il décidait de la sorte et vous l'avez décrit dans votre témoignage,

15 n'est-ce pas ?

16 R. C'est exactement ainsi que ça s'est passé.

17 Q. Bien. Mais, tout à l'heure, en répondant à l'une des questions posées

18 par M. Agha, et vous avez dit que vous n'avez jamais été présenté -- vous

19 ne vous êtes jamais présenté devant ce juge et vous ne l'avez jamais vu,

20 vous-même. Si vous n'avez pas été devant ce juge, comment avez-vous pu

21 savoir qu'il jugeait par des listes de pages ?

22 R. Je viens de vous le dire que c'est un soldat serbe qui me l'a dit au

23 camp. Il m'a dit que je figurais sur cette liste de personnes qui devaient

24 être torturées. Et il a dit : "Ljubko Ilic -- le juge, Ljubko Ilic, t'a

25 condamné à cette peine." C'est ainsi que je le sais.

Page 28238

1 Q. Vous avez décrit avec beaucoup de précision la façon dont ce juge

2 jugeait les gens en tournant les pages d'une liste et il disait ceux de la

3 première page doivent être tués, les autres doivent être torturés ?

4 R. Oui.

5 Q. Et c'est ce même soldat qui vous a raconté cela, ce soldat serbe qui

6 vous aurait raconté comment le juge en question jugeait les gens ?

7 R. Il m'a dit que je figurais sur une liste de personnes devant être

8 torturées.

9 Q. Et qui vous a alors dit que ce juge jugeait par les listes qu'il avait

10 sous les yeux ?

11 R. Je vous l'ai dit tout à l'heure. C'est ce soldat qui m'a dit qu'il en

12 était ainsi. C'était un jeune et il n'était pas encore majeur. Il me l'a

13 raconté.

14 Q. Et il vous a non seulement dit que vous étiez sur la liste de personnes

15 qui devaient être torturées, mais il vous a aussi la technologie ou les

16 modalités de fonctionnement de ce juge ?

17 R. Oui. Oui. C'est ainsi qu'il l'a décrit. C'est ce que nous a dit ce

18 Serbe et c'est lui qui nous apportait du pain.

19 Q. Mais il était gardien de cette prison ?

20 R. Oui.

21 Q. Mais son devoir était de vous apporter à manger ?

22 R. Non. Les autres ne nous apportait rien à manger. Lui nous apportait de

23 chez lui à manger. Il jetait parmi nous des vivres et il disait de ne pas

24 le dire aux autres de ne pas dire aux autres ce qu'il faisait.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le moment se prête bien à la pause.

Page 28239

1 Monsieur le Témoin B-1780, nous allons maintenant faire une pause de 20

2 minutes. Au cours de cette pause, rappelez-vous que vous n'êtes censé

3 parler à personne de votre déposition tant que celle-ci n'est pas terminée.

4 Nous reprendrons l'audience dans 20 minutes.

5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

6 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Vous avez mentionné un soldat. Vous avez dit qu'il vous avait apporté

10 du pain tous les jours ?

11 R. Non.

12 Q. Quelque fois ?

13 R. Il ne me l'a pas apporté à moi mais il a apporté du pain à tous ceux

14 qui se trouvaient là. Ça représentait peut-être un demi kilo, 500 grammes

15 de pain qu'il nous jetait.

16 Q. Il vous a apporté du pain à combien de reprises ?

17 R. Quelque fois.

18 Q. Deux fois ? Trois fois ?

19 R. Je ne sais pas. Deux ou trois fois. Mais c'était du pain rassis, vieux

20 de plusieurs jours.

21 Q. Fort bien. Vous dites qu'il vous a jeté le pain ?

22 R. C'est vrai.

23 Q. Mais quand avez-vous eu le temps de lui parler ? Quand lui a-t-il eu le

24 temps de vous parler de ces jugements ?

25 R. Mais il se tenait debout à la porte.

Page 28240

1 Q. Il ne vous a parlé qu'à vous ?

2 R. A nous, à nous parce qu'il n'avait personne d'autre à qui parler.

3 Q. Est-ce qu'il a été là avec vous tout le temps ?

4 R. Non.

5 Q. Combien de jours a-t-il passé avec vous ?

6 R. Parfois, il était là pendant quelques heures. Il repartait et puis il

7 revenait pour la pause suivante.

8 Q. Et vous l'avez vu, en fait, combien de jours à cet endroit ?

9 R. Je n'ai pas fait le décompte.

10 Q. Savez-vous comment s'appelait ce soldat ?

11 R. Non. Tout ce que je sais, c'était que c'était un mineur. C'est

12 l'apparence qu'il avait.

13 Q. Est-il vrai de dire que c'est le 8 avril qu'a commencé le conflit à

14 Zvornik ?

15 R. Oui, le 8 avril.

16 Q. Est-ce que c'est ce jour-là que la république et la présidence de

17 Bosnie-Herzégovine ont promulgué un décret à propos du QG de la Défense

18 territoriale ?

19 R. Je ne suis pas au courant.

20 Q. Mais savez-vous qu'il y a eu mobilisation de la police musulmane,

21 Abdulah Pasic et Sabic étaient commandants de la TO, du QG de la TO et

22 c'est eux qui avaient pris une décision ?

23 R. Je n'étais pas au courant de l'existence de cette mobilisation. Je n'en

24 ai pas entendu parler de toute façon.

25 Q. Mais est-ce que du côté musulman, à l'époque, à ce moment-là, le 8

Page 28241

1 avril, il y avait une forme d'organisation quelle qu'elle soit ?

2 R. Non. Parce que les Musulmans ne pensaient pas du tout qu'il y aurait

3 une agression.

4 Q. Alors, s'il n'y a pas eu mobilisation dans le village de Celopek, à

5 plusieurs kilomètres en aval de Zvornik, pourquoi est-ce que les Serbes ont

6 constitué une unité propre si rien ne se passait à Zvornik ? S'il n'y avait

7 pas d'activités de la part des forces musulmanes ?

8 R. Je ne sais pas ce qu'il en est de Celopek. Je ne m'y suis pas trouvé

9 mais c'était loin de l'endroit où moi je me trouvais. C'est la première

10 fois que j'en entends parler, dans votre bouche.

11 Q. Est-ce que c'était une réponse, une réaction à ce qui se passait du

12 côté musulman à Zvornik ?

13 R. Mais il ne se passait rien à Zvornik du côté musulman.

14 Q. Vous relatez ce que vous avez vécu, enduré, lorsque vous étiez entre

15 les mains de vos voisins. Est-ce que c'était de leur part une sorte de

16 vengeance ? Est-ce que vous connaissez le fait que le 5 avril 1992, un

17 soldat a été tué à Sapna ?

18 R. J'en avais entendu parler à la radio. Est-ce que c'étaient de

19 représailles ou pas, je ne le sais pas. Moi, je ne pense pas que c'était un

20 acte de revanche.

21 Q. Bon. Vous dites que vos voisins vous ont emmené à Karakaj dans un vieux

22 corps de ferme appelée Stara Ekonomija.

23 R. Exact.

24 Q. Et ils vous ont dit de dire combien de Serbes vous aviez tués à Kula

25 Grad.

Page 28242

1 R. Exact.

2 Q. Est-ce qu'ils ont demandé à quelqu'un d'autre de faire pareil ?

3 R. Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est qu'ils m'ont dit à moi et à

4 Softic, mon voisin, de le faire, de décrire tout cela.

5 Q. Donc c'est vous et votre voisin qui avez été chargés de le faire. Est-

6 ce que vous vous souvenez de la date à laquelle ceci s'est passé ?

7 R. Le 12 mai 1992.

8 Q. Etes-vous au courant de l'attaque déclenchée le 17 avril 1992, au cours

9 de laquelle les forces armées du SDA ont déclenché une attaque sur le

10 village serbe de Lasocina [sic] dans la municipalité de Zvornik où Zoran

11 Bogdanovic, un Serbe, a été tué. Il était né en 1971. Vous vous en

12 souvenez ?

13 R. Non. C'est assez loin de chez moi et c'est la première fois que j'en

14 entends parler.

15 Q. Mais qu'en est-il de l'attaque déclenchée sur le village serbe de

16 Boskovici, le 5 mai 1992, neuf civils ont été tués. J'ai leurs noms. Vous

17 êtes au courant de cela ?

18 R. Non. C'est la première que j'en entends parler.

19 Q. Etes-vous au courant de ce qui s'est passé le 9 mai 1992, attaque

20 lancée sur le village de Gornja Boljkovica et 16 Serbes ont été tués. Tout

21 ceci s'est passé après la mobilisation des Musulmans organisé par le SDA.

22 R. C'est la première fois que j'entends parler de tout ceci. C'est neuf

23 pour moi.

24 Q. Mais savez-vous que cette fois-là, ces forces du SDA ont détruit, ont

25 brûlé le village tout entier ?

Page 28243

1 R. Je n'ai jamais entendu parler de ça.

2 Q. Pas entendu parler ?

3 R. Non.

4 Q. Ecoutez. J'ai ici un exemple sous les yeux. C'est un document émanent

5 du comité chargé de recueillir des données à propos des crimes et des

6 infractions aux droits humanitaires. Un document de 2001 concernant la

7 municipalité de Zvornik, 127 victimes sont mentionnées, 127 personnes qui

8 ont été tuées.

9 M. AGHA : [interprétation] Je ne pense pas que le témoin ait vu un

10 exemplaire de ce document. Je ne sais même pas si ce document a été versé

11 au dossier. Je ne vois pas comment il pourrait y apporter un commentaire.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Et bien, une question lui a été posée,

13 s'il n'est pas en mesure de commenter ce document, il le dira.

14 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Fort bien. Nous avons ici les victimes de cette période. Donc, vous

17 parlez fin 1992, début 1993, figurant sur cette liste, 127 noms. Certains

18 de ces noms sont annotés afin d'établir des comparaisons avec d'autres

19 listes. C'est sans signification mais je vous demande quand même d'examiner

20 cette liste, Monsieur le Témoin, et je vous demande si vous reconnaissez le

21 nom des victimes énumérées ici.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander l'aide de l'huissière pour que

24 soit remise cette liste au témoin.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

Page 28244

1 Q. A commencer par les événements que j'ai déjà mentionnés, un grand

2 nombre de personnes ont été tuées. Ici, vous avez 127 noms repris sur cette

3 liste, personnes tuées précisément au cours de la période sur laquelle

4 porte votre témoignage d'aujourd'hui.

5 R. Le témoin Simo Savic de Gornja Boljkovica, municipalité de Zvornik;

6 numéro 99. Il ne vivait pas Boljkovica, il vivait à Zvornik. Je sais qu'il

7 était retraité. Il avait mis à la retraite avant la guerre. Mais je ne sais

8 vraiment pas où il a été tué. Je reconnais ce nom-là. Mais je ne connais

9 aucun autre nom.

10 Q. Donc, c'est le seul homme que vous connaissiez ?

11 R. Oui. Simo Savic, numéro 99.

12 Q. Fort bien.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, auriez-vous l'obligeance de

14 verser cette liste au dossier.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin n'est pas du tout au courant de

16 l'existence de cette liste. Il me semblerait plus correct que ce soit

17 produit par le truchement d'une personne qui connaît la question et qui

18 peut attester de l'authenticité de cette liste. Le témoin n'a pas du tout

19 de connaissance, n'est vraiment sans rapport aucun avec cette liste. Il ne

20 peut pas en parler.

21 Vous pourrez présenter cette pièce au moment de la présentation de moyens à

22 décharge, Monsieur Milosevic.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais il a reconnu un des noms de cette liste.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, c'est vrai. Mais il n'est pas en

25 mesure d'apporter d'autres commentaires.

Page 28245

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Le 12 mai, vos voisins vous ont emmené. Vous dites qu'ils vous ont roué

4 de coups. C'est cela ?

5 R. Le 12 mai, Ljubko Ilic m'a emmené. L'autre homme, s'appelait Petko

6 Hajdukovic. Quant au troisième homme, il était surnommé Niski. Ce n'était

7 pas mon voisin. Il venait de Serbie. Il y avait aussi un certain Tanic, qui

8 lui, était de Zvornik. Ce sont donc, les hommes qui m'ont emmené.

9 Q. Fort bien. Ce qui veut dire qu'il y en avait trois de Zvornik ?

10 R. Oui.

11 Q. Ils vous ont roué de coups. Ils vous ont torturé. Et vous mentionnez

12 des choses absolument monstrueuses qui se passaient, d'après vos dires.

13 Mais ne pensez-vous pas que si ceci s'était véritablement produit, le pays

14 tout entier l'aurait su. Il y aurait eu des nouvelles qui auraient été

15 propagées à ce propos, n'est-ce

16 pas ?

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Là, c'est un commentaire que vous

18 formulez. Il nous faut comprendre.

19 Est-ce que vous voulez laisser entendre, Monsieur Milosevic, à ce témoin,

20 que ce qui d'après lui s'est passé dans ce corps de ferme et ce qui a été

21 infligé à ces détenus ne s'est pas passé, n'a pas eu lieu ? C'est ce que

22 vous voulez lui laisser comprendre ?

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, ce sont des choses si incroyables

24 que je doute absolument que de telles choses aient pu se produire à l'insu

25 de tous.

Page 28246

1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Un instant. Je pense, sans nul

2 doute, qu'il faut donner le temps et l'occasion au témoin de répondre.

3 Monsieur le Témoin B-1780, vous venez d'entendre ce qu'a dit l'accusé. Il

4 laisse entendre qu'il s'agit ici d'atteintes et d'exactions que vous avez

5 décrites, de choses infligées aux détenus qui ne se seraient pas du tout

6 produites. Avez-vous quoi que ce soit à dire en guise de réponse et de

7 commentaire ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai vu. J'ai tout vu. J'ai vécu les mêmes

9 choses. J'en ai la preuve. J'ai des cicatrices sur mon corps.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Bon, Monsieur 1780. Ce que vous avez décrit se serait passé à cette

12 ferme d'Ekonomija, dans un lieu qui n'était pas inconnu. C'était un lieu

13 bien connu de la région ?

14 R. Connu de qui ?

15 Q. De tous ceux qui habitaient là. C'était une ferme locale, une

16 coopérative du coin. Je suis sûr que les gens savaient ce qui s'était

17 passé.

18 R. Ça se trouvait entre deux villages serbes, et personne ne pouvait

19 s'approcher de ce lieu.

20 Q. Vous l'affirmez ceci était l'œuvre de personnes de la localité et de

21 certains groupes, de certains individus que vous n'avez pas reconnus, et

22 dont vous ne connaissez pas l'origine.

23 R. Je sais qu'ils parlaient avec -- qu'ils utilisaient le dialecte

24 ékavien.

25 Q. Vous dites qu'un de ces jours-là, vous me direz quand un groupe de

Page 28247

1 soldats de la JNA est venu ?

2 R. Exact. Il y en avait dix dans le groupe. Ils avaient un capitaine avec

3 eux.

4 Q. Ça s'est passé quand ?

5 R. Puisqu'il y a un instant, vous avez dit qu'ils avaient un écusson

6 présentant le drapeau serbe --

7 R. Au lieu d'avoir l'étoile à cinq branches, ils avaient ce drapeau

8 tricolore.

9 Q. Vous savez que les soldats de la JNA n'auraient pas pu arborer le

10 drapeau serbe. Ils ne pouvaient arborer que le drapeau yougoslave. De deux

11 choses l'une, soit qu'ils n'étaient pas de Yougoslavie, ou que ce n'étaient

12 pas des soldats de la JNA.

13 R. Ils n'avaient pas l'étoile à cinq branches. Ils portaient ce drapeau

14 tricolore.

15 Q. Vous avez dit qu'ils portaient le drapeau, qu'ils arboraient le drapeau

16 serbe.

17 R. J'ai dit que c'était un drapeau tricolore et non pas cette étoile à

18 cinq branches.

19 Q. Nous n'allons polémiquer là-dessus pour préciser ce que vous avez dit,

20 mais je vais vous demander de faire une comparaison. Je reprends pour ce

21 faire votre déclaration au préalable. Vous avez dit avoir été emmené le 12

22 mai ?

23 R. Oui.

24 Q. Paragraphe 81, vous dites ceci : "Le 15 mai, j'ai été emmené à

25 l'hôpital de Zvornik."

Page 28248

1 R. C'était le quatrième jour.

2 Q. Vous pouvez compter à partir du 12 au 15 mai, ça fait trois jours. Donc

3 vous n'auriez pas pu passer ces quatre jours parce que --

4 R. Le 12, 13, 14, 15, ça fait quatre jours.

5 Q. Et tous ces événements sont intervenus au cours de ce bref laps de

6 temps ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous dites vous souvenir qu'un de ces hommes s'est présenté comme étant

9 un homme d'Arkan, il s'appelait Rambo, et vous dites nous savions tous que

10 Rambo avait été tué au cours de l'attaque menée sur Kula Grad ?

11 R. C'est exact.

12 Q. Donc ici, ce monsieur se présentait sous une fausse identité, n'est-ce

13 pas ?

14 R. A la radio serbe de Zvornik, j'ai entendu qu'un certain Rambo avait été

15 tué à Kula Grad. Plus tard un homme s'es présenté comme étant Rambo. C'est

16 tout ce que je sais, rien de plus.

17 Q. Ici je lis simplement ce que vous dite au paragraphe 39. "Un des hommes

18 d'Arkan s'est présenté comme étant Rambo, alors que nous savions tous que

19 le vrai Rambo avait été tué au cours de l'attaque de Kula Grad."

20 R. Exact. C'est ce que la radio serbe de Zvornik a dit. Plus tard, cet

21 homme a dit être Rambo mais je ne sais pas combien il en avait de Rambo.

22 Q. Fort bien. Il vous a été impossible de déterminer l'identité de tous

23 ces hommes. Paragraphe 38, vous dites : "Que plusieurs groupes sont venus,

24 qu'ils nous ont passé à tabac." Puis vous donnez ; "Les hommes d'Arkan, de

25 Seselj, les Aigles blancs, les Fourmis jaunes, les hommes de Pejic. Je ne

Page 28249

1 pouvais pas faire la différence, mais certains portaient la barbe, une

2 barbe longue, d'autre part."

3 R. Oui.

4 Q. Il est clair qu'il ne s'agissait pas ici de la JNA ou de l'armée de la

5 Republika Srpska. Est-ce que ceci tout du moins a été établi clairement,

6 Monsieur le Témoin 1780 ?

7 R. Les hommes qui nous ont frappés, au moment où ils l'ont fait disaient :

8 "Voyez comment frappent les hommes de Seselj ?" Puis on n'avait le groupe

9 suivant qui commençait à nous rouer de coups, et ils nous disaient : "Est-

10 ce que tu sais qui étaient les Aigles blancs ou qui sont les Aigles

11 blancs ?" C'est de cette façon que j'ai su qui ils étaient ? Ce sont ces

12 hommes-là mêmes qui l'ont dit.

13 Q. Fort bien. Puisque vous parlez d'un certain Sekanic, qui est cet

14 homme ?

15 R. C'est un lieutenant de la JNA.

16 Q. Il se trouvait à Zvornik ?

17 R. Mais il est venu à Zvornik à ce moment-là.

18 Q. Apparemment vous avez dit que vous lui avez remis votre fusil ?

19 R. Oui.

20 Q. Mais quand l'avez-vous fait ?

21 R. En avril, il est venu accompagner de soldats. Il est venu dans notre

22 village et ceux d'entre nous qui avaient des armes, les ont remises. Il y

23 avait parmi nous des chasseurs et nous avions d'ailleurs un permis de ports

24 d'armes pour ces fusils et nous les avons remise ces armes.

25 Q. Expliquez-moi ceci. Dans votre déclaration au préalable, vous dites que

Page 28250

1 quelques jours plus tard, il est apparu un camion militaire. Vous dites que

2 des membres de l'armée vous ont emmené à la caserne, est-ce exact ?

3 R. Quel camion ? Quelle caserne ?

4 Q. Je lis le paragraphe 61 de votre déclaration au préalable. "Vers 11

5 heures 00 ou 12 heures 00, un camion de la JNA s'est arrêté devant le

6 bâtiment. Dix soldats sont entrés dans la pièce avec, à leur tête, un

7 capitaine -- "

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-ce que le témoin dispose d'un

9 exemplaire de sa déclaration au préalable ? Si ce n'est pas le cas, il faut

10 qu'il en dispose, Monsieur Milosevic. Monsieur le Témoin, veuillez examiner

11 le paragraphe 61, vous verrez là ce à quoi fait référence l'accusé.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Il est dit ceci au paragraphe 61, je ne vais pas répéter ce que j'ai

14 déjà dit. Je poursuis, "Donc le camion de la JNA s'est arrêté, des soldats

15 sont entrés avec, à leur tête, un capitaine armé d'un fusil automatique.

16 Ils portaient tous la tenue de camouflage. Et tous avaient à la casquette

17 un badge arborant le drapeau serbe."

18 Vous avez ici consigné par écrit ce que vous avez répété ici dans le

19 prétoire. Il est donc exclut que c'était des hommes de la JNA s'ils

20 portaient à la casquette le drapeau serbe.

21 Vers la fin du paragraphe, vous parlez d'un certain colonel Sekanic; or ici

22 vous venez de dire que c'était un lieutenant.

23 R. Non, non. Ici il y a une erreur dans le texte. C'était un lieutenant,

24 ce Sekanic.

25 Q. Fort bien. C'est une erreur. Vous ajoutez ensuite ceci, puisque vous

Page 28251

1 dites que ce lieutenant faisait partie de la JNA, vous dites : "Aleksandar

2 Sekanic, surnommé Aco, était né à Bijeljina."

3 R. Exact.

4 Q. Donc il est de votre région.

5 R. Oui.

6 Q. "Il était avec le capitaine Cale de Sabac. Ça c'est passé fin avril

7 1992 quand j'ai remis mon fusil de chasse à Aleksandar." Donc cet homme, ce

8 Sekanic, était de votre coin ?

9 R. Non, non. Il était de Bijeljina. Il l'a dit lui-même. Il a dit être

10 originaire de Bijeljina. Mais il m'a dit je suis officier de la JNA, avant

11 la guerre donc.

12 Q. Mais y avaient beaucoup de gens qui se trouvaient dans la JNA avant la

13 guerre, même ceux qui plus tard ont intégré les rangs de l'armée de la

14 Republika Srpska, de l'armée de la Bosnie-Herzégovine et du HVO. Vous le

15 savez aussi bien que moi, Monsieur le Témoin 1780.

16 R. Il m'a dit être soldat de la JNA d'avant, d'avant la guerre -- qu'avant

17 il était dans la JNA.

18 Q. Fort bien. Puis vous dites que quelques jours plus tard, ou plutôt, au

19 moment où ils vous ont fait sortir de cette coopérative Ekonomija, qu'ils

20 vous ont fait subir un interrogatoire ordinaire, normal, et des personnes

21 vous ont posé des questions à propos de certains meurtres.

22 R. Quels gens ?

23 Q. Paragraphe 69 de votre déclaration au préalable, ou plutôt 68. Vous

24 dites ceci : "Il m'a traité d'Oustachi, il m'a dit de mettre les mains sur

25 la table. Il a dirigé son fusil contre moi, sur moi et il m'a demandé

Page 28252

1 combien de Serbes j'avais tués."

2 Paragraphe 69, vous dites : "Je lui ai dit n'avoir jamais tué personne. A

3 ce moment-là, Sekanic est entré dans le bureau et m'a demandé ce que j'y

4 faisais, qui m'avait emmené et pourquoi j'avais été à ce point roué de

5 coups. Je n'ai rien osé lui dire. Je me suis contenté de dire que je ne

6 savais pas."

7 Est-ce bien ce que vous avez déclaré dans votre déclaration au préalable ?

8 R. Je n'ai pas osé dire qu'on m'avait passé à tabac. Je devais dire que

9 j'étais tombé, que je m'étais blessé, parce que je savais que si quelqu'un

10 avait dit qu'il avait été battu, il aurait été tué sur le champ. C'est pour

11 ça que j'ai dit que personne ne m'avait battu.

12 Q. Donc aucune des horreurs que vous relatez et qui auraient eus lieu à

13 Ekonomija, vous n'avez rien dit de tout cela ?

14 R. Non, je n'ai rien dit.

15 Q. Puis vous ajoutez ceci, je cite : "A ce moment-là, un autre officier de

16 la JNA est entré dans la pièce, m'a donné la main et m'a dit qu'il

17 s'appelait Marko Pavlovic, commandant."

18 R. Exact. Il a dit : "Je suis le commandant du lieu."

19 Q. Mais lui n'était pas non plus officier de la JNA. C'était un commandant

20 de la brigade de Zvornik, n'est-ce pas ?

21 R. Il était originaire de Serbie. Il venait de Zrenjanin.

22 Q. Et bien. Ne parlons pas d'où il était. Il n'était membre de la JNA,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Il a dit qu'il était le commandant de lieu. Et je sais qu'il venait de

25 Serbie, de Zrenjanin.

Page 28253

1 Q. Paragraphe 71, vous dites ceci : (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 (expurgée)

6 (expurgée)

7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 (expurgée)

10 (expurgée)

11 (expurgée)

12 (expurgée)

13 (expurgée)

14 (expurgée)

15 R. Oui.

16 Q. Donc, ils vous ont emmené à l'hôpital et le commandant Pavlovic se

17 tenait debout devant l'hôpital, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Puis, vous ajoutez ceci : Ils vous ont placé dans un lit. Ils vous ont

20 fait des piqûres, vous ont donné des comprimés. Et vous avez passé quatre

21 jours dans l'hôpital de la prison, au dispensaire ?

22 R. Exact.

23 Q. Puis vous ajoutez que là, dans ce dispensaire, ils voulaient vous

24 tuer ?

25 R. C'est vrai.

Page 28254

1 Q. Alors expliquez-moi. Ils vous emmènent à l'hôpital. Ils vous y

2 soignent. Ils savent qui vous êtes. Pourquoi est-ce qu'ils vous

3 soigneraient, prendre des radios pour voir si vous avez des lésions

4 quelconque. Pourquoi est-ce qu'ils vous garderaient à l'hôpital pour

5 essayer de vous y tuer ?

6 R. Ils avaient l'intention de me renvoyer au camp. C'était un stratagème

7 de leur part. Ils faisaient semblant de vous aider et puis ils vous

8 tuaient. C'est comme ça que ça se passait.

9 Q. Mais d'après ces atrocités que vous avez décrits, de toute façon, s'ils

10 avaient souhaité vous tuer, ils vous auraient tué. En revanche, ce qu'ils

11 ont fait, c'est de vous hospitaliser et de vous soigner. Ils vous ont

12 permis de repartir.

13 R. Comme je vous ai dit, ça était un stratagème. Sous prétexte de vous

14 aider, en fait, ils vous envoyaient à la mort. Donc, d'après les mots de ma

15 femme, ils ont fait semblant, en fait, de vouloir me sauver la vie.

16 Q. Mais dites-moi, comment alors êtes-vous encore en vie s'ils avaient

17 l'intention de vous tuer ? En fait, ils vous ont fait hospitalisé et ils

18 vous ont permis d'avoir des soins.

19 R. Mais en fait, ils m'ont fait des piqûres qui ne m'ont pas permis de me

20 sentir mieux.

21 Q. Ils vous ont donné des comprimés. Ils vous ont fait des piqûres.

22 R. C'étaient des comprimés jaunes. Je ne sais pas ce que c'était et ça ne

23 m'a pas permis de me sentir mieux. Ça n'a été qu'un stratagème sous

24 prétexte de m'aider, de me soigner. En fait, ils m'ont envoyé à la mort.

25 Ils m'ont envoyé là pour que je sois tué.

Page 28255

1 Q. Je ne vous comprends pas. Expliquez-moi.

2 R. Mais je comprends, moi.

3 Q. Qui a été tué à l'hôpital ?

4 R. Une infirmière, une Musulmane. Et bien, elle n'a pas pu repartir chez

5 elle. C'était là qu'elle a travaillé avant la guerre et c'est là qu'elle a

6 dû continuer à travailler. Et bien donc, elle était employée là-bas. Elle

7 est venue me souffler mot de l'arrivée d'un groupe qui est arrivé à

8 l'hôpital afin de tuer les Musulmans. Et ce qu'elle m'a dit, elle m'a dit :

9 "Mets-toi dans ta chambre et cache ton pyjama car le pyjama permet de te

10 distinguer des autres." Et c'est ce que j'ai fait. Donc, j'ai recouvert mon

11 pyjama et je me suis camouflé. Ils sont arrivés plus tard mais ils ne m'ont

12 pas reconnu. Je sais qu'à ce moment-là, ils ont tué un chauffeur, le

13 chauffeur de l'hôpital. Il avait été blessé. C'était un père de trois

14 enfants.

15 Q. Fort bien. Vous affirmez que puisque vous êtes resté quatre jours à

16 l'hôpital. Mais ce n'est pas quatre jours ou plutôt pendant ces quatre

17 jours, ils n'ont pas essayé de vous tuer. Ils vous ont relâché.

18 R. Ils ne m'ont pas relâché.

19 Q. Vous vous êtes enfui de l'hôpital ?

20 R. Cette infirmière m'a dit qu'il fallait que je m'enfui. Donc, dès qu'ils

21 sont ressortis, plus tard, lors de la visite des médecins, je leur ai dit :

22 "Ecoutez. Je me sens mieux. Est-ce que je peux repartir ?" Ils m'ont dit de

23 me mettre debout. Je me suis mis debout. Je suis sorti du lit. Je suis

24 sorti dehors dans le couloir et un autre homme est venu occuper mon lit.

25 Q. Est-ce que cela veut dire que vous avez été relâché, libre de repartir

Page 28256

1 ou bien vous vous êtes enfui ?

2 R. Le médecin m'a dit : "Mets-toi debout." Je me suis mis debout et je

3 suis sorti dans le couloir.

4 Q. En pyjama ? Vous étiez en pyjama lorsque vous êtes reparti chez vous ?

5 R. Non. J'ai vu une autre femme là-bas et celle-ci, elle faisait le

6 ménage. C'était une femme musulmane. Elle, elle m'a trouvé des vêtements et

7 c'est elle qui m'a aidé à me changer parce que je n'aurais pas pu le faire

8 tout seul. Et c'est comme cela que je suis sorti.

9 Q. Donc, l'infirmière vous a aidé puisque vous étiez blessé. Ça c'est

10 logique, c'est normal. Mais vous ne vous êtes pas enfui de l'hôpital. Ils

11 vous ont laissé repartir parce que vous avez dit que vous vous sentiez. Ils

12 vous ont laissé repartir chez vous.

13 R. Oui. C'est ce que j'ai dit pour pouvoir partir.

14 Q. Fort bien. Mais ils avaient toutes les occasions du monde pour vous

15 tuer s'ils l'avaient souhaité. En revanche, ils vous ont laissé repartir,

16 rentrer chez vous.

17 R. Je suis en train de te dire, ça n'a été qu'un stratagème sous prétexte

18 de vouloir nous aider par les uns, en fait, ils envoyaient d'autres pour

19 nous tuer.

20 Q. Mais vous n'avez aucun exemple à citer, aucun exemple concret où

21 quelqu'un aurait été soigné, ça n'aurait été qu'un stratagème et après, en

22 fait, on allait cherché à le tuer.

23 R. Mais moi je n'étais pas un cas isolé, j'étais l'un des Musulmans de

24 l'hôpital. Je sais que trois enfants et un chauffeur blessé ont été tués.

25 Q. Ecoutez. Au point 80, vous dites : "Plus tard, au cours de la même

Page 28257

1 après-midi, la même infirmière, Najfa Delibajic, m'a dit que j'avais la

2 chance d'être toujours en vie parce que le chauffeur de l'ambulance, un

3 père de trois enfants, a été tué."

4 R. Oui. Comme je vous l'ai dit, c'était le chauffeur de l'hôpital.

5 Q. "Ramo, le technicien de la radio qui travaillait à l'hôpital de Zvornik

6 m'a parlé de ces assassinats, de ces meurtres."

7 R. Oui. Lui aussi, il m'en a parlé. Ça c'est exact.

8 Q. Donc, le chauffeur de l'ambulance n'a absolument pas été à l'hôpital au

9 moment où il a été blessé.

10 R. Ecoutez. Il était blessé lorsqu'il s'est trouvé à l'hôpital mais je ne

11 sais pas où il avait été blessé initialement.

12 Q. Donc, vous êtes rentré chez vous et personne n'a cherché à vous

13 empêcher de le faire, n'est-ce pas ?

14 R. J'ai emprunté l'itinéraire qui était sûr pour pouvoir rentrer chez moi.

15 Donc, je n'ai pas emprunté le chemin habituel.

16 Q. Et alors, après le 16 juin, vous vous êtes retrouvé à Subotica en

17 Serbie ?

18 R. C'est cela. Le 16 juin, je suis arrivé à Subotica.

19 Q. Et en fait, vous vous êtes mis à l'abri en Serbie.

20 R. Je ne l'ai pas cherché.

21 Q. Ce n'était pas votre désir à vous, votre souhait à vous, de vous rendre

22 en Serbie et puis par l'intermédiaire de la Serbie, à Vienne ?

23 R. Le 15 juin 1992, nous avons signé que nous faisions cadeau, de notre

24 plein gré, de l'ensemble de nos biens aux autorités serbes. Nous avons été

25 déportés à ce moment-là en passant par Mali Zvornik, Sabac, à Subotica. Ils

Page 28258

1 nous ont mis à bord de deux autocars.

2 Q. Donc, vous vous êtes retrouvé dans un camp de réfugiés à Subotica,

3 n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. On vous a délivré des passeports yougoslaves ?

6 R. Non. Je n'ai reçu aucun passeport parce que j'en avais un déjà.

7 Q. Bien. Je veux savoir si vous avez vous-même pris la décision de vous

8 rendre à Vienne ou vous avez été déporté là-bas ?

9 R. Plus tard, ils nous ont mis à bord d'un train et ils nous ont laissé

10 repartir. Mais nous, nous ne savions pas quelle était notre destination,

11 enfin, où aller ? Donc, nous nous sommes retrouvés à Viennes.

12 Q. Donc, en tant que réfugié, vous êtes retrouvé en Serbie, vous étiez

13 homme libre en Serbie, et vous êtes parti à Viennes ?

14 R. Ce n'est pas de mon plein gré que je me suis retrouvé en Uza [phon],

15 déporté de Subotica pour qu'on reparte de là-bas.

16 Q. Est-ce que il y a eu qui que ce soit qui vous aurait limité vos

17 libertés en Serbie ?

18 R. Oui.

19 Q. Comment ?

20 R. On n'était absolument pas libre de sortir de Palic, du camp de réfugiés

21 de Subotica.

22 Q. Mais comment êtes-vous reparti à Viennes, alors si vous n'avez pas le

23 droit de circuler ?

24 R. Mais c'est l'armée et la police qui nous ont escortés.

25 Q. Ils vous ont escorté à Viennes ?

Page 28259

1 R. Non, ils nous ont escortés jusqu'au train.

2 Q. En d'autres termes, ils vous ont transféré du camp de réfugiés à la

3 gare pour pouvoir vous mettre à bord du train.

4 R. C'est un train qui allait en Hongrie et à Viennes, mais personne ne

5 nous a posé la question. Si nous voulions y aller, on nous a dit de monter

6 à bord, et de partir.

7 Q. Très bien, y a-t-il eu qui que ce soit qui vous aurait fait à tort une

8 injustice, qui ce serait -- écoutez, qui aurait été coupable de quoique que

9 ce soit à votre encontre ?

10 R. Il y avait Dzuro dans ce camp, il y a eu des menaces.

11 Q. Mais, dans ce camp de réfugiés, il n'y avait pas de gardes -- de gardes

12 qui surveillaient les réfugiés ? Vous étiez simplement pris en charge dans

13 ce camp, et ce camp a été contrôlé par la Croix rouge internationale.

14 R. Ce n'était pas un camp de réfugiés.

15 Q. Mais ce n'était pas un camp de concentration ?

16 R. Écoutez, je ne sais pas ce que c'était, mais on n'était pas libre de

17 sortir. Dzuro nous a dit : "Je suis en droit de tuer tout un chacun qui

18 tenterait de sortir."

19 Q. Monsieur 1780, personne n'a été tué en Serbie. Aucun réfugié n'a été

20 tué par un membre du personnel, quel qu'il soit, d'un camp de rassemblement

21 ou camp de réfugiés.

22 R. Mais je vous ai dit qu'on n'était pas venu là-bas de notre plein gré.

23 On nous a forcés de nous placer là-bas pour repartir.

24 Q. Et vous êtes reparti de votre plein gré ?

25 R. Non.

Page 28260

1 Q. Vous n'êtes pas parti à Viennes librement.

2 R. Non, on nous a ordonnés d'aller -- monter à bord de ce train, et de

3 repartir.

4 Q. Mais vous avez traversé la frontière, vous êtes retrouvé en Hongrie.

5 Etiez-vous libre d'aller où que ce soit? Vous n'étiez pas forcés d'aller à

6 Viennes.

7 R. On est monté dans ce train, c'était déjà la nuit, et nous y avons passé

8 toute la nuit. Nous sommes arrivés à Budapest. On ne voulait pas sortir là

9 descendre, et donc on a continué jusqu'en Autriche car on a entendu dire

10 que c'était peut-être mieux pour les réfugiés de se rendre en Autriche, que

11 d'aller en Hongrie.

12 Q. Vous êtes sorti, le 19 mai 1992, de cet hôpital où vous êtes-vous rendu

13 par la suite. Et donc comment se fait-il que vous dites, dans votre

14 déposition, que vous étiez témoin d'enfouissement, vous étiez chez vous ?

15 R. J'étais chez moi.

16 Q. Mais, si je vous ai bien compris, c'est à quelques kilomètres de

17 Zvornik et -- d'après ce que je vois ici dans les informations.

18 R. Oui, ma maison est à quelques kilomètres de Zvornik, alors.

19 Q. Vous dites que ce sont des Musulmans qui ont été enfuis, et c'était en

20 fait des Serbes. Comment avez-vous pu conclure ?

21 R. Mais c'était notre cimetière à coté de notre localité. On le voit bien

22 de chez moi -- de ma maison.

23 Q. C'est vous qui avez fait cette esquisse, où l'on voit l'emplacement

24 d'une fosse commune à l'endroit du cimetière musulman ?

25 R. Oui, je l'ai fait. Il y a des membres de ma famille, des témoins, qui

Page 28261

1 ont des tombes ici. Je le connais par cœur.

2 Q. Vous l'avez vu -- vous avez vu ces enfouissements ?

3 R. Oui, oui, je l'ai vu de mes propres yeux.

4 Q. Dites-moi, puisque vous avez fait des commentaires au sujet de la carte

5 de la répartition ethnique dans la municipalité de Zvornik, de Himzo Tulic,

6 quel lien est-ce que cela avait avec votre déposition ?

7 R. Quel lien ?

8 Q. Oui.

9 R. Mais c'était juste pour fournir une donnée -- des données pour voir

10 combien il y avait de membres de quel groupe.

11 Q. On voit 80 111 [sic], 30 839 [sic] de Musulmans, 48 120 de Croates

12 [sic], 225 [sic] de Slovènes, 819 [sic] autres ?

13 R. Oui, c'est ce qui est écrit.

14 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûr des chiffres qui vient d'être

15 cités.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Mais quel est le rapport entre ces chiffres et les événements que vous

18 avez décrits ?

19 R. Comme je vous l'ai déjà dit, ce n'est qu'une donnée pour voir combien

20 il y avait de membres de chaque groupe à Zvornik.

21 Q. Puisque vous m'avez répondu par la négative à ma question, au sujet des

22 passeports, je vous cite ce que vous avez dit au point 82 : "On a été mis à

23 bord d'autocar, on nous a emmenés à Subotica, nous sommes restés pendant

24 deux jours à Subotica." Et puis vous poursuivez en disant : "Nous avons

25 reçu des passeports yougoslaves, et, dans la matinée du 19 juin, nous

Page 28262

1 sommes repartis par train à Viennes."

2 R. Mais celui, qui n'avait pas de passeport, avait besoin d'en avoir un.

3 Q. Mais vous dites à la première personne de pluriel : "Nous avons reçu

4 des passeports yougoslaves."

5 R. Mais moi je n'avais déjà un.

6 Q. En tant que réfugié : "Vous avez reçu des passeports," et l'ensemble de

7 cette procédure a duré deux jours et après vous êtes repartis où vous

8 vouliez.

9 R. Mais qu'y a-t-il d'étrange-là ? On ne pouvait pas traverser la

10 frontière si on n'avait pas de passeport.

11 Q. Je suis en train de dire une seule chose. Il n'y a aucun doute que vous

12 vous êtes fait aider en Serbie.

13 R. Mais on a payé ces passeports, ce n'était pas de l'aide. Nous avons été

14 déportés et expulsés. Nous ne sommes pas venus ici de notre plein gré, nous

15 ne l'avons pas choisi.

16 Q. Je ne parle pas de votre arrivée en Serbie, mais vous avez été traités

17 de manière tout à fait normale -- régulière en Serbie ?

18 R. Ce n'était pas normal.

19 Q. Mais on vous a pris en charge, on vous a nourri, on vous a donné des

20 passeports et on vous a donné la possibilité de partir où vous vouliez. Ce

21 n'était pas normal ?

22 R. Ce n'était pas normal.

23 Q. Qu'est-ce qui n'était pas normal là-dedans ?

24 R. Mais on nous a menacés, on ne nous a pas autorisés à circuler

25 librement. Il nous a dit qu'il pouvait nous tuer si on cherchait à sortir -

Page 28263

1 - si on tentait de sortir.

2 Q. Très bien. Je ne vais pas vous poser d'autres questions là-dessus. Cela

3 n'a aucun sens.

4 Vous dites, au point 34, qu'il y avait là quelqu'un qui portait un uniforme

5 belge ou marron clair et, au sujet de lui, vous avez

6 dit : "Qu'il portait des insignes de la police," et vous dites, je vous

7 cite : "Je sais que ce n'était pas un uniforme de police yougoslave

8 typique."

9 R. C'est exact.

10 Q. Donc celui, qui portait des insignes de la police, ne faisait pas

11 partie de la police yougoslave.

12 R. Mais il portait des insignes de la police.

13 Q. Mais ce n'était pas un uniforme de police ? Cet homme ne pouvait pas

14 être membre de la police.

15 R. Mais il portait des insignes de la police, c'est tout. Alors, quant à

16 savoir s'il était policier ou non je ne peux pas le savoir.

17 Q. Vous dites que ce n'était pas l'uniforme de police yougoslave habituel.

18 R. Ce n'était pas l'uniforme habituel.

19 Q. Très bien. Et, à présent, je voudrais entendre votre commentaire au

20 sujet d'un autre point. Vous dites, au point 36 : "Je ne sais pas combien

21 il y en a eu qui se sont mis à -- qui sont tombés dessus. Ils étaient peut-

22 être 10, 15 ou plus." Mais comment est-il possible que qui que ce soit

23 survivre à ce genre de situation, ou 10, 15 voire plus d'hommes se mettent

24 à le piétiner ?

25 R. Il n'y avait pas que moi. On était tous là et plusieurs là, ils étaient

Page 28264

1 10, 15 peut-être. Je ne sais combien d'entre eux m'ont effectivement

2 frappé, et j'ai des cicatrices -- j'ai des conséquences, on peut encore

3 voir les cicatrices.

4 Q. Je ne conteste pas que vous soyez blessé, mais vous nous avez dit qu'au

5 moment de l'interrogatoire, il y avait un officier qu'il vous a emmené à

6 l'hôpital par la suite, que vous ne vouliez pas dire ce que vous aviez subi

7 parce que vous aviez peur et vous avez dit que vous avez prétendu que

8 c'était dû à une chute, mais ça doit être donné des conséquences terribles,

9 des blessures terribles s'il y a eu 10 à 15 hommes qui vous ont piétiné, et

10 vous avez dit que vous étiez tombé.

11 R. Mais on n'osait pas dire qu'on fait roué de coups. On disait qu'on --

12 on nous a donné l'ordre de dire que c'était suite à une chute. On nous a

13 menacé de mort, si on le disait.

14 Q. Avez-vous un exemple ? Donc qu a été tué, parce que a dit qu'on l'avait

15 roué de coups ?

16 R. Bego Bukvic. On voit son nom cité ici.

17 Q. Il a été tué parce qu'il a dit que quelqu'un l'a passé à tabac ?

18 R. Quand il a dit qui l'avait battu, et bien, on l'a fait sortir et il a

19 été tué.

20 Q. Mais cela ne figure pas là-dedans. Donnez-moi lecture de ce passage.

21 R. Je sais que cela s'est passé ainsi.

22 Q. Mais vous ne l'avez pas déclaré ici.

23 R. J'ai dit qu'on l'a fait sortir, qu'on l'a tué, et je sais pour quelle

24 raison.

25 Q. Mais pourquoi ne l'avez-vous pas cité dans votre déclaration ?

Page 28265

1 R. Mais cela, je l'ai dit.

2 Q. Je ne vois pas comment ce serait clair. Comment ça pourrait être clair

3 à qui que ce soit qui lit votre déclaration si cela ne figure pas dans le

4 texte de celle-ci ?

5 Monsieur 1780, vous êtes resté pendant quatre jours dans ce camp. Et par la

6 suite, quatre jours à l'hôpital.

7 R. Oui.

8 Q. Le 12, vous êtes parti au camp. Et le 19, vous avez été libéré de

9 l'hôpital. Entre le 12 et le 19, il n'y a pas huit jours. Ce n'est pas

10 possible. Et vous avez décrit toute une série d'événements qui ne peuvent

11 pas être --

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il me semble que nous arrivons à un point

13 où vous ne faites pas bien le calcul. De toute manière, il ne s'agit pas

14 d'un point pertinent. Vous avez eu à votre disposition plus de temps que

15 d'habitude parce que l'Accusation n'a pas suffisamment de témoins pour

16 pouvoir les citer à la barre, donc nous ne subissons pas les pressions du

17 temps comme d'habitude, mais il va bien falloir terminer ce contre-

18 interrogatoire à un moment ou à un autre. Et il me semble que nous tournons

19 en rond, donc vous aurez dix minutes de plus à votre disposition, et il

20 vous faudra mener ce contre-interrogatoire à son terme.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Au point 38, vers la fin de ce paragraphe, vous dites que des membres

24 d'un certain nombre de groupes se rendaient dans cette pièce et que,

25 lorsqu'ils s'y rendaient, je vous cite : "Il nous fallait leur chanter des

Page 28266

1 chanson chetnik pour leur souhaiter la bienvenue."

2 R. Oui. Je l'ai dit, et je les ai chantées.

3 Q. Vous connaissez les chansons chetnik ?

4 R. Oui.

5 Q. De quel genre de chants s'agit-il ?

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais quelle est vraiment la pertinence de

7 cela ? Le témoin a expliqué, en termes généraux, la situation.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] [Inaudible] Monsieur May, de toute évidence,

9 ceci n'est pas la vérité. C'est la raison pour laquelle cela est important

10 car, puisqu'il y a beaucoup de points ici qui ne peuvent pas être

11 véridiques, donc la question qui se pose est de savoir s'il y a là-dedans

12 quelque chose qui est vrai. Et quoi ?

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Témoin, l'accusé est en train

14 d'avancer que votre affirmation, que vous avez dû chanter des chansons

15 chetnik, n'est pas vraie.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai, je les ai chantées. Il a fallu

17 qu'on fasse le signe de la croix et qu'on dresse trois doigts d'une main.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Quelles sont ces chansons chetnik que vous avez chantées ?

20 R. Duc Sindjelic, c'était un chant. Et l'autre chant c'était : "Qui

21 l'affirme, qu'il prétend qu'il ment, que la Serbie soit petite," et il a

22 bien fallu faire des prières orthodoxes.

23 Q. Donc tout ça pendant ces quatre jours, on vous a torturés, battus, et

24 cetera. Vous avez chanté en même temps le chant à Duc Sindjelic. Mais c'est

25 une chanson populaire, traditionnelle que l'on chante depuis le temps du

Page 28267

1 Duc Sindjelic, du fils serbe qui a combattu les turcs, le fils serbe de la

2 rivière Nisava [phon].

3 R. Il a bien fallu que l'on chante. C'était la radio serbe de Zvornik qui

4 diffusait ces chansons, et les Serbes l'ont chanté. Il nous a bien fallu

5 les accompagner.

6 Q. Pourquoi vous dites que c'est un chant chetnik ?

7 R. Parce que ce sont des Chetniks qui l'ont chanté.

8 Q. Et les gens qui ont chanté cette chanson sont des Chetniks ?

9 R. Oui.

10 Q. Vous les qualifiez de Chetniks ?

11 R. Oui.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Un instant.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Vous dites ici, au point 45, que quatre ou cinq hommes d'Arkan sont

15 arrivés. Comment savez-vous que c'étaient des hommes d'Arkan ? Et comment

16 peut-on savoir s'il y a eu un seul homme d'Arkan là-bas ?

17 R. Je sais parce qu'il ne portait pas les mêmes uniformes, pas les mêmes

18 couvre-chefs.

19 Q. Vous avez énuméré des hommes d'Arkan, les Aigles blancs, des hommes de

20 Seselj, de Pejic, des Guêpes jaunes, et cetera, et cetera. Mais il y a eu

21 combien d'hommes en tout qui se sont rendus à Ekonomija ?

22 R. Mais tous ceux qui pouvaient le faire, toutes ces formations s'y sont

23 rendues.

24 Q. Mais vous, vous avez vu combien d'hommes en tout, toutes les formations

25 confondues ?

Page 28268

1 R. Et bien, je ne les ai pas comptés. Ils arrivaient par groupe de quatre,

2 cinq, dix. Ça dépendait.

3 Q. Donc, lorsqu'il y en a eu 15 à 20 qui vous ont piétiné ?

4 R. Mais je n'étais pas le seul qui a été piétiné. On a tous été piétinés.

5 Q. Une seule chose, s'il vous plaît, encore. Vous dites que le capitaine

6 Dragan s'est rendu sur place pour vous rendre visite.

7 R. Mais il n'est pas venu me rendre visite. Il est venu dans ce village où

8 je me trouvais.

9 Q. Il est venu voir les blessés de l'hôpital ?

10 R. Je ne sais pas quel a été l'objectif de sa visite.

11 Q. Mais pour quelle autre raison se serait-il rendu là-bas, si ce n'est

12 pour rendre visite aux blessés de l'hôpital ?

13 R. Vous n'avez qu'à lui -- poser la question à lui. Moi, je ne le sais

14 pas.

15 Q. Mais vous savez que c'était le capitaine Dragan ?

16 R. Ça, je le sais.

17 Q. Mais qu'est-ce qui vous permet de le savoir ?

18 R. Quand il est sorti, un blessé a demandé à un autre : "Sais-tu qui est

19 cet homme ?" Et l'autre a dit : "Je sais, c'est le capitaine Dragan." Et il

20 a injurié sa mère.

21 Q. Il a injurié sa mère ?

22 R. C'est ce qu'il a dit, mais je ne sais pas à qui il apprend à proférer

23 ces injures.

24 Q. C'était un Serbe ?

25 R. Oui. Il a dit la chose suivante : "C'est le capitaine Dragan, nique sa

Page 28269

1 mère." C'est le terme qu'il a employé.

2 Q. Mais dites-moi ce que le capitaine Dragan a fait ? Qu'est-ce qu'il a

3 fait si ce n'est de venir voir les blessés à l'hôpital ?

4 R. Il leur a demandé comment ils se sentaient.

5 Q. Donc il est venu rendre visite aux blessés pour voir comment ils se

6 sentaient. Et il est reparti ?

7 R. Ecoutez, je ne sais pas quel a été l'objectif de sa visite à l'hôpital,

8 je sais ce qu'il a fait.

9 Q. Mais a-t-il enfoncé qui que ce soit ? A-t-il fait la moindre chose, le

10 moindre geste qui ne correspondrait pas à une visite régulière à

11 l'hôpital ?

12 R. Mais je ne vois pas pourquoi il aurait enfoncé qui que ce soit.

13 Q. Mais vous étiez sur place ?

14 R. Mais il ne s'est pas adressé à moi.

15 Q. Se serait-il adressé à qui que ce soit, en particulier ?

16 R. Non.

17 Q. Donc il a simplement un tour de l'hôpital ?

18 R. Il a eu. Oui, il a fait un tour avec des soldats. C'est tout.

19 Q. Mais un événement -- le moindre événement se serait-il produit à cette

20 occasion que vous pourriez qualifier d'anormal ? Enfin, qui vous

21 permettrait de qualifier -- qui vous permettrait de critiquer ce qui s'est

22 passé pendant sa visite ?

23 R. Mais il n'est pas venu me voir.

24 Q. Il est venu rendre visite aux blessés de l'hôpital, et pas pour voir

25 quelqu'un en particulier ?

Page 28270

1 R. Il est venu dans la pièce. Il s'est adressé à plusieurs personnes pour

2 demander comment elles se sentaient. Je ne sais pas pourquoi il est venu.

3 Q. Et puis, il est reparti ?

4 R. Il est reparti.

5 Q. Mais pourquoi serait-il venu si ce n'est pas de vous rendre visite ?

6 R. Ecoutez, je ne sais pas ce qu'il est venu faire là-bas.

7 Q. Fort bien. Je vous remercie.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'estime que le

9 témoin, que vous avez eu l'occasion d'entendre aujourd'hui, est le cas

10 typique que je qualifierais en vertu de votre ordonnance du 6 octobre -- du

11 5 octobre [sic], et je pense que je pourrais vous aider là-dessus.

12 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :

13 Q. [Interprétation] Reportez-vous au paragraphe 65, s'il vous plaît,

14 Monsieur le Témoin, vous avez ce texte devant vous. L'avez-vous trouvé ?

15 R. Oui, je l'ai trouvé.

16 Q. Alors, dans cette dernière phrase du paragraphe en question, vous

17 parlez d'un camion qui vous a véhiculé avec neuf autres personnes dont vous

18 avez parlé. Vous avez été d'ailleurs interrogé par le Procureur, vous

19 l'avez redit ici. Vous avez dit, en effet, que les gens qui se trouvaient

20 au fond ont cessé de pleurer, de gémir, mais ils ont cessé de bouger. Ils

21 étaient morts. C'est ce que vous dites ?

22 R. Oui.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le 10 juillet de

24 cette année, avec la déclaration qui figure devant le témoin, on m'a

25 communiqué une autre déclaration qui a été celle du témoin, adressé aux

Page 28271

1 autorités de Bosnie-Herzégovine juste après ces événements en date du 27

2 décembre 1992. Je dispose de cette photocopie. J'ai une traduction en

3 anglais en trois exemplaires, vu que cela a été traduit en anglais. Je

4 voudrais donc que cette déclaration-là soit placée devant lui.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, qu'on l'a montre au témoin

6 justement, et qu'on nous donne les copies.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

8 Q. Monsieur le Témoin, c'est bien votre déclaration ? C'est bien votre

9 signature à la fin, et c'est la daté du 27 décembre 1992 ? Vous avez donné

10 ces déclarations devant des autorités de la Bosnie-Herzégovine ?

11 R. Oui, c'est ma signature.

12 Q. C'est votre déclaration ?

13 R. Ça je ne le sais pas, laissez-moi lire.

14 Q. Je vous demanderais de prêter notamment attention --

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Laissez au témoin le temps de se pencher

16 sur ces déclarations et peut-être pourrions-nous obtenir les copies en

17 langue anglaise, que vous avez -- avoir -- en votre possession.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai trois copies en anglais en effet.

19 Q. Vous avez signé la déclaration au bas de toutes les trois pages. Donc,

20 au bout de chaque page, il y a votre signature, c'est bien cela ?

21 R. Oui.

22 Q. Donc c'est forcément la déclaration que vous avez faite ?

23 R. Il faut que je lise la totalité pour vérifier si c'est effectivement ma

24 déclaration.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Peut-être pourriez-vous l'examiner

Page 28272

1 rapidement, Monsieur 1780, pour l'utilité que nous saurions en avoir. Vous

2 souvenez-vous avoir fait cette déclaration ?

3 Monsieur le Témoin 1780, avez-vous souvenance d'avoir fait cette

4 déclaration ou pas ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai fait cette déclaration.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le conseil va vous poser des questions.

7 Entendons ces questions. Bien entendu, vous avez l'opportunité de lire

8 avant de répondre, mais il se référera aux passages concernés pour vous les

9 indiquer.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, pour ce qui est de la

11 version anglaise, je parle du troisième paragraphe à partir du bas.

12 S'agissant de la version en B/C/S, c'est le deuxième paragraphe de la page

13 3, que vous avez sous les yeux. Alors, en version anglaise c'est le

14 troisième paragraphe à compter du bas.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Première page ?

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Dernière page. Et j'indique qu'il s'agit

17 du troisième paragraphe à compter du bas de la page.

18 Q. Je n'insisterai pas forcément beaucoup là-dessus, Monsieur le Témoin,

19 mais ici il est question du 16 mai, comme date de votre départ à l'hôpital.

20 Il se peut que ce soit une erreur, je n'insiste pas là-dessus. Ce qui

21 m'intéresse c'est ce que vous avez dit au sujet des membres des unités

22 spéciales. Vous n'avez pas parlé de JNA. Pouvez-vous nous dire qui sont les

23 membres de ces unités spéciales ?

24 R. Et bien, c'est précisément ce groupe de soldats qui sont venus avez le

25 capitaine.

Page 28273

1 Q. Mais oui, mais vous n'avez pas mentionné l'armée populaire yougoslave.

2 Vous avez dit "les membres des unités spéciales", mais là ce n'est pas

3 l'essentiel. Vous dites qu'une fois monter sur le

4 camion : "Les détenus ont reçu l'ordre de se coucher sur le plancher du

5 camion. D'abord trois, puis trois par-dessus, et encore trois par-dessus,

6 et moi j'étais le dixième et on m'a dit de m'asseoir sur l'ensemble des

7 trois. Et ils m'ont dit qu'ils allaient venir chercher les huit autres."

8 C'est bien ce que vous dites ?

9 R. Les huit, ils ont dit les autres, les huit, je ne sais pas.

10 Q. Et vous continuez, je ne sais pas ce qu'il est advenu d'eux, ni des

11 neuf autres, donc vous dites là que vous ne savez pas du tout ce qu'il est

12 advenu de ces neuf hommes parce que, lorsque vous continuez : "Lorsque nous

13 sommes arrivés à Zvornik, on m'a fait descendre et le camion a continué son

14 chemin."

15 R. Oui.

16 Q. Donc ici vous dites que vous ne savez pas du tout ce qu'il est advenu

17 de ces neuf hommes. Or aujourd'hui vous dites que ceux qui étaient en

18 dessous de vous sont morts tous. Où est la vérité ?

19 R. La vérité c'est l'un et l'autre. On les a emmenés. Je ne sais pas où on

20 les a emmenés.

21 Q. La vérité, l'un et l'autre sont vrais. Bon. Combien -- quelle est la

22 distance entre votre maison et l'hôpital ?

23 R. Quelques kilomètres.

24 Q. Combien de temps vous fallait-il pour arriver de l'hôpital jusqu'à

25 chez-vous ?

Page 28274

1 R. Normalement, une demi-heure suffisait.

2 Q. Et vous dites ici que physiquement que vous avez -- vous vous êtes

3 enfui de l'hôpital. Vous ne l'avez pas mentionné ici. Mais peu importe, je

4 pense que vous devrez expliquer à la Chambre deux choses qui figurent dans

5 cette déclaration, et je ne voudrais pas m'attarder outre mesure là-dessus.

6 Dans deux paragraphes plus haut, pour ce qui est de la version anglaise, et

7 je me réfère à la dernière -- au dernier paragraphe de la version, qui se

8 trouve sous vos yeux, et vous dites : "Ils m'ont gravé une croix sur la

9 joue." Et vous avez précisé, dans votre déposition au préalable, que cette

10 croix avait été gravée sur la joue d'un autre homme. Vous n'avez pas dit

11 que c'était sur la vôtre. Alors, est-ce que cette croix avait été gravée

12 sur votre joue et est-ce qu'on a vu cela à l'hôpital ?

13 R. C'était plus comme une égratignure. Ce n'était pas profond.

14 Q. Vous dites que c'était une croix, même si c'était en forme

15 d'égratignure, c'était la forme d'une croix ?

16 R. Oui. Et ils l'ont fait aussi à Bego Bukvic, celui qui a été tué. Ils

17 l'ont fait dans le dos.

18 Q. Vous indiquez ici, par exemple, aussi -- et je ne tiens pas à

19 m'attarder plus que cela là-dessus -- je me réfère au paragraphe 55 de

20 votre déclaration : "En même temps, pendant qu'ils nous punissaient, les

21 autres devaient lécher le sang du cadavre de ce jeune homme," et vous avez

22 précisé qu'on voulait vous contraindre à le faire et que vous n'avez pas

23 voulu.

24 Or, dans la déclaration que vous avez fait en 1992, après l'histoire de la

25 croix sur la joue, vous dites : "Ils léchaient notre sang qui se trouvait

Page 28275

1 sur leurs poignards." Donc, comment expliquez-vous les divergences et vous

2 n'avez pas indiqué qu'on vous avait obligé de faire quoi que ce soit.

3 R. Celui qui avait le grade de commandant et qu'on appelait Niski, c'est

4 lui qui m'a fait cette croix sur la joue et par la suite, il a léché le

5 sang de son couteau et il m'a regardé droit dans les yeux. C'est ainsi que

6 ça s'est passé.

7 Q. Je vous demande, pour cela, que nous revenions sur les choses dont vous

8 avez parlé aujourd'hui, ici, et je me réfère notamment au paragraphe 27.

9 Paragraphe 27, vous parlez de la main qui a été coupée. Vous le maintenez ?

10 R. Je le maintiens.

11 Q. Puis, au paragraphe 29, vous parlez de coups de pied qu'on a donnés à

12 quelqu'un.

13 R. Oui.

14 Q. Puis, au paragraphe 44, vous parlez de sept personnes tuées. C'est bien

15 cela ?

16 R. Au total, sept.

17 Q. Puis, au paragraphe 52, vous n'en avez pas parlé ici mais vous indiquez

18 qu'il y a eu des cas où l'on découpait la peau entre les doigts, au

19 couteau.

20 R. C'était la punition pour ceux qui ne voulait pas lécher le sang des

21 morts.

22 Q. Bien. Au paragraphe 54, vous dites qu'un homme a été scalpé. C'est bien

23 ce que vous nous dites ?

24 R. Scalpé ?

25 Q. Oui. C'est le terme que vous avez utilisé au paragraphe 54, il me

Page 28276

1 semble, enfin.

2 Expliquez à la Chambre, je vous prie, si vous avez oui ou non, les noms et

3 prénoms de l'une quelconque de ces personnes ?

4 R. De qui ?

5 Q. Des victimes, exception faite de Bego et de Ramiz Softic. Est-ce que

6 vous avez le nom de l'une des victimes que vous mentionnez et des auteurs ?

7 Et est-ce qu'il y a un autre témoin éventuel de ces atrocités ?

8 R. Buljubasic, Abdulah Buljubasic a été tué.

9 Q. Justement. Je voulais vous poser une question à son sujet. C'est, selon

10 vous, une personne qui est morte d'un mort atroce. Cet homme a été enterré

11 par son père. Et lui, à Zvornik ?

12 R. C'est le père de cet homme qui a été enterré.

13 Q. Oui. Et sa tombe est connue ?

14 R. Je ne sais pas cela mais le père doit le savoir. Le père doit forcément

15 le savoir.

16 Q. Vous avez fait une déclaration en 1996 et il a pu être déterminé la

17 cause du décès de cette personne. Je crois que la Chambre peut décider

18 d'écarter tout doute à ce sujet et cela peut être vérifié par le bureau du

19 Procureur. D'ailleurs, le bureau du Procureur aurait dû le vérifier.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais cela n'est pas une question à poser

21 au témoin.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'estime que toute

23 personne doit répondre de ce qu'elle a fait et je suis certain que pour les

24 gens qui ont commis ce type d'atrocités, il faut prononcer des sanctions

25 appropriées. Mais je suis profondément, pour ma part, convaincu que le rôle

Page 28277

1 de ce Tribunal, le rôle premier de ce Tribunal, c'est de faire en sorte que

2 nous, là-bas, dans ces territoires, je ne parle pas en mon nom seulement,

3 mais qu'il y ait réconciliation. Et si de tels récits sont présentés ici

4 sans qu'il y ait quelque élément de preuve que ce sera à l'appui, je me

5 demande à quoi cela sert.

6 S'il y a des preuves, si l'on savait où ces gens étaient, où ces gens sont

7 enterrés, s'il savait où se trouve cimetière, pourquoi la chose n'a pas été

8 vérifiée. Pourquoi n'a-t-on pas procédé à des exhumations pour ce qui est

9 des fosses où il affirme que l'on a jeté des gens.

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Mais ce n'est pas le moment de faire

11 ce type de requêtes. De toute façon, vous avez précisé les éléments que

12 vous vouliez préciser. Quelle est votre dernière question ?

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

14 Q. Ma dernière question est celle de savoir si se sont, oui ou non, des

15 récits qui ont des rumeurs qui ont circulées en Bosnie-Herzégovine et vous

16 placez ces rumeurs dans votre récit en affirmant que vous avez tout vu et

17 que se sont là des événements que vous avez vécus vous-même.

18 R. J'ai vu cela et j'ai vécu cela moi-même.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Procureur.

21 M. AGHA : [interprétation] Je me propose de poser quelques questions

22 seulement aux fins de tirer les choses au clair.

23 Nouvel interrogatoire par M. Agha :

24 Q. [interprétation] Monsieur 1780, quand vous a-t-on accusé pour la

25 première fois pour les meurtres à Kula Grad, et où ?

Page 28278

1 R. La première fois où cela s'est fait lorsqu'on m'a emmené au camp. C'est

2 là que, j'ai pour la première fois, entendu parler de cela.

3 Q. Et dans quelle langue cet acte d'accusation a-t-il été rédigé ?

4 R. Ce n'était pas un acte d'accusation par écrit. Et on m'a demandé

5 d'écrire combien de Serbes j'avais tué à Kula Grad.

6 Q. Merci. Je vais passer à un autre sujet. Il s'agit de ce qui a été dit

7 au sujet de M. Ilic. Et il a beaucoup été question de lui. Je vous demande

8 de vous pencher sur le paragraphe 5 de votre déclaration. Je pense qu'il y

9 est précisé que : "A l'époque, M. Ilic se trouvait être président de la

10 Cour martiale serbe qui a été mise en place dans cette communauté de

11 Zvornik." C'est bien ce que vous avez dit ?

12 R. C'est un soldat mineur qui me l'a dit. C'était un jeune soldat.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois qu'il a été question de "Cour

15 martiale," et cela a été traduit comme étant un Tribunal de guerre. Donc,

16 j'aurais une objection à formuler pour ce qui est de l'utilisation du

17 terme. Il a bien reproduit ou repris le terme utilisé mais ceci est une

18 mauvaise traduction. C'est une traduction erronée du terme utilisé par le

19 témoin.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons procéder à des vérifications.

21 Cela est très faisable. Continuez, je vous prie.

22 M. AGHA: [interprétation]

23 Q. Un autre sujet qui m'intéresserait serait le suivant : L'accusé estime

24 qu'il semblerait peu probable que les événements décrits dans la

25 déclaration se trouvent être peu probable. Et que si cela était vrai, tout

Page 28279

1 à chacun devrait forcément être au courant. Je ne vous poserai plus de

2 questions à ce sujet mais je voudrais savoir si Marko Pavlovic pouvait le

3 savoir, et si c'était le cas, comment pouvait-il avoir eu vent des

4 événements qui se sont produits à la ferme Ekonomija ?

5 R. C'est à moi que vous posez la question ?

6 Q. Oui, c'est à vous que je pose la question.

7 R. Il s'était présenté comme commandant, comme étant commandant, donc, il

8 devait forcément le savoir.

9 Q. Vous avez, toutefois, mentionné le fait que vous aviez été sauvé par

10 votre épouse. Que voulez-vous dire par là ? Est-ce qu'elle a fait quelque

11 chose pour faire en sorte que l'on prenne bien soin de vous au camp ?

12 R. Voilà comment ça s'est passé : Lorsque le lieutenant Sekanic est venu

13 ramassé des armes, récupéré des armes dans le village, il a dit, "Vous êtes

14 en sécurité à présent, et vous n'avez rien à craindre." Plus tard, mon

15 épouse lui a dit : "Tu as affirmé que nous allions être en sécurité mais

16 quel type d'officiers es-tu donc, si tu as pu mentir, vu qu'on a emmené les

17 gens." Et c'est la raison pour laquelle on m'a sorti du camp pour m'emmener

18 à l'hôpital.

19 Q. Merci. Monsieur B-1780, l'accusé a contesté le temps que vous avez

20 passé au camp, mais vous êtes également allé à l'hôpital. Alors, dites-

21 nous, à combien -- à quelle fréquence les gens de l'hôpital venaient-ils

22 soigner les gens qui se trouvaient à la ferme d'Ekonomija ?

23 R. Ils ne venaient pas les soigner. Si quelqu'un saignait beaucoup, on

24 l'emmenait à l'hôpital, et on le ramenait avec des pansements.

25 Q. Où se trouvait l'hôpital à partir duquel ces gens étaient ramenés ?

Page 28280

1 R. Mais c'est à Zvornik. C'est à Zvornik que ça ce passait.

2 Q. Et qui avait géré cet hôpital ? Qui a versé les salaires du personnel

3 de l'hôpital ? Quelles étaient les autorités qui s'en étaient chargés ?

4 R. Et bien, comme le parti du SDS était au pouvoir, le tout se passait par

5 leur intermédiaire. Du moins, c'est ce que je pense.

6 Q. Merci. Et juste une dernière question. Lorsque vous avez été relâché de

7 l'hôpital, lorsque vous êtes rentré chez vous, combien de fois vous êtes-

8 vous adressé aux autorités pour qu'on vous permette de quitter la région et

9 d'aller là où vous êtes allé ?

10 R. Nous ne l'avons pas demandé. Je n'ai pas demandé d'être relâché. J'ai

11 dû signer que j'offrais tout ce que j'avais aux autorités serbes, et

12 ensuite, c'est eux qui ont organisé le transport pour qu'on s'en aille de

13 là.

14 M. AGHA : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons verser au dossier la

16 déclaration présentée par Me Tapuskovic.

17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C-15, Monsieur le Président. Et je

18 demanderais une copie pour le Greffe.

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous pouvez prendre l'une de nos copies.

20 M. AGHA : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné que cette

21 déclaration vient d'être présentée par l'un des amis de la Chambre, je

22 voudrais que cette déclaration soit versée au dossier sous pli scellé.

23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui. Le C-15 sera versé sous pli

24 scellé.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Certainement, oui.

Page 28281

1 M. AGHA : [interprétation] Merci.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur 1780, ceci met un terme à votre

3 témoignage. Je vous remercie d'être témoigné devant ce Tribunal

4 international.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous êtes libre de vous en aller. Mais

7 patienter quelques instants, pour qu'on baisse les stores de ce prétoire.

8 Le témoin peut à présent quitter le prétoire.

9 [Le témoin se retire]

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Nice, je ne sais pas s'il est

11 plus pratique de le faire maintenant ou plus tard.

12 M. NICE : [interprétation] Et bien, il s'agit du reste de cette journée. Le

13 témoin suivant ne risque pas de durer très longtemps, d'après ce que j'en

14 sais. Je crois que vous avez déjà été informé de nos difficultés avec le

15 quatrième témoin.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

17 M. NICE : [interprétation] Et bien.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Attendez, attendez, Monsieur Nice. On

19 nous a dit la chose en termes généraux, et je crois qu'il faudrait parler

20 de ces questions de façon tout à fait ouverte.

21 M. NICE : [interprétation] Oui, certainement. Je ne demande pas à ce que

22 l'on en parle à huis clos partiel ou à huis clos.

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, certainement. Alors, de quoi s'agit-

24 il ?

25 M. NICE : [interprétation] Le quatrième témoin que nous espérions avoir à

Page 28282

1 notre disposition aujourd'hui, s'est avéré très coopératif, auparavant. Il

2 s'agit du témoin 1524, mais ce témoin, en raison de changements survenus

3 dans sa situation familiale n'a pas pu venir aujourd'hui. Et comme je vous

4 l'ai dit, le témoin de demain est un témoin qui a eu des problèmes au

5 niveau de son passeport, donc, c'est une chose qui échappe à notre

6 contrôle. Et je pense que vos collaborateurs ont déjà entendu vent de la

7 chose de la part du Service chargé des témoins et des victimes. Et il se

8 peut que nous n'ayons non seulement pas de témoins pour la journée de

9 demain, mais pas assez de témoins pour la journée d'aujourd'hui. Nous

10 pouvons commencer avec M. Blewitt, mais lui aussi doit se libérer de

11 certaines de ses obligations. Et nous ne voudrions pas qu'il nous arrive de

12 voir cette journée comptée, alors qu'elle n'a pas été mise à profit.

13 Pour ce qui est des questions de procédures, je voudrais attirer votre

14 attention sur une requête que nous avons présentée. J'espère que cela vous

15 parviendra d'ici 14 heures. Et je vous demanderais d'avoir l'amabilité de

16 vous pencher au plus vite sur celle-ci. Il s'agit d'une demande de citation

17 à la barre, de témoins complémentaires.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Entendons d'abord le témoin suivant,

19 ensuite, nous allons entendre M. Blewitt, puis nous allons parler des

20 questions administratives. Il serait vraiment dommage de ne pas utiliser le

21 temps que nous avons à notre disposition.

22 Une des questions que je voudrais soulevée demain, c'est celle qui concerne

23 la finalisation des pièces à convictions. Nous avons l'intention d'émettre

24 une ordonnance à cet effet, mais nous devrions en parler en général demain.

25 Bien entendu, nous allons également discuter des témoins. Et nous allons

Page 28283

1 voir combien, ou quelle partie de cette journée-là devrait être comptée

2 comme étant dépensée par vos soins. Et je crois qu'il nous faut maintenant

3 une pause.

4 M. NICE : [interprétation] Je vous remercie.

5 --- L'audience est suspendue à 12 heures 26.

6 --- L'audience est reprise à 12 heures 51.

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

8 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, je vais prendre le

9 prochain témoin, Témoin B-1448.

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 [Le témoin se retire]

13 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est

14 l'explication, je pense qu'on a introduit dans le prétoire le mauvais

15 témoin.

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous demander

18 de prononcer la déclaration solennelle.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirais la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez vous

22 asseoir.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

24 LE TÉMOIN: TÉMOIN B-1448 [Assermenté]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

Page 28284

1 Mme PACK : [interprétation] Je vais demander que soit remis au témoin la

2 liasse de documents en application du 92 bis.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Premièrement, il faudra relever les

4 stores. C'est seulement après cela que nous aborderons d'autres questions.

5 Madame Pack, vous avez la parole.

6 Mme PACK : [interprétation] Je voudrais que le témoin puisse examiner la

7 première page de sa déclaration en B/C/S, page 3, de l'intercalaire 1.

8 Interrogatoire principal par Mme Pack :

9 Q. Monsieur le Témoin, contentez-vous d'examiner cette page que vous avez

10 sous les yeux. Est-ce qu'on y trouve de façon exacte vos coordonnés, votre

11 nom ainsi que les détails vous concernant ?

12 R. Oui. Oui.

13 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous signé deux déclarations au préalable

14 recueillies par des enquêteurs du bureau du Procureur, 30 mars et 18

15 novembre 2001 ?

16 R. En effet.

17 Q. Avez-vous également signé une déclaration rédigée le 18 novembre 2001,

18 par laquelle vous attestiez de l'exactitude de la teneur de vos

19 déclarations préalables ?

20 R. Oui.

21 Mme PACK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

22 voudrais que les documents en application du 92 bis, ainsi que les pièces

23 jointes reçoivent une cote.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 579, intercalaire 1,

25 étant sous pli scellé.

Page 28285

1 Mme PACK : [interprétation] Je vais dire très rapidement un bref résumé.

2 Le Témoin B-1448 dépose à propos du fait qu'il a participé à un des groupes

3 de la communauté locale de Brcko constitué pour assurer la défense de leurs

4 foyers et de leurs familles. Ce groupe a été attaqué par des forces serbes

5 les 16 et 17 mai 1992. Au cours des combats, un soldat serbe a été abattu -

6 - tué par balles.

7 Le témoin a participé à la récupération du corps de ce soldat serbe. Il a

8 trouvé une carte d'identité portant le nom de Branko Filipovic et, dans un

9 sac militaire, se trouvait plusieurs documents reprenant le nom de

10 Filipovic. Il a remis cet homme à un homme chargé du renseignement au QG de

11 la brigade.

12 D'après le témoin, six documents, qui lui ont été montrés par la suite par

13 le bureau du Procureur sont des copies de ces documents qu'il a trouvés sur

14 le corps de cet homme.

15 Je n'ai que quelques questions supplémentaires à poser à ce témoin,

16 Monsieur le Président.

17 Q. Vous avez ôté certains documents de ce sac militaire que vous et

18 d'autres avez trouvés sur cet homme. Est-ce que chacun d'entre vous -- ou

19 plutôt est-ce que vous avez examiné chacun de ces documents ?

20 R. Oui.

21 Q. Monsieur le Témoin, est-ce qu'un de ces documents vous a frappé en

22 particulier ?

23 R. Oui.

24 Q. Pourriez-vous nous faire une description générale de ce document qui

25 vous a particulièrement frappé ?

Page 28286

1 R. L'un de ces documents ressemble à un ordre de mission que j'utilisais

2 avant la guerre parce que, dans la société où je travaillais, j'étais

3 chauffeur. Vous savez tous que, quand vous êtes au volant d'un véhicule,

4 dans une société, vous avez des bordereaux vous confiant certains biens. Et

5 c'était le deuxième document. Le troisième document était une sorte

6 d'information. Ces trois documents-là, donc après les avoir portés aux

7 officiers chargés du renseignement au niveau du commandement de la brigade,

8 je me suis penché dessus avec un peu plus d'attention.

9 Q. Je vous arrête un instant.

10 Mme PACK : [interprétation] Peut-on montrer au témoin l'intercalaire 2.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est cela.

12 Mme PACK : [interprétation]

13 Q. Est-ce qu'il s'agit ici de ce bordereau ayant pour titre "Poste

14 militaire 9840 Brcko", y voit-on un nom Branislav Filipovic, le nom du

15 chauffeur, valable du 8 mai au 31 mai 1992 ?

16 R. Oui. Comme je l'ai déjà dit tout à l'heure, c'est l'un de ces

17 documents. Chez-nous ça s'appelait ordre de mission -- ou ordre de

18 déplacements. Pour nous chauffeur, ça s'appelait ordre de déplacements.

19 Q. Examinez maintenant la deuxième page de ce document, s'il vous plaît.

20 Montre-t-elle les déplacements effectués par ce véhicule concerné par ce

21 bordereau. La date est celle du 13 mai 1992 de Brcko à Belgrade, puis on

22 voit la date du 14 mai -- on dit 1990, mais c'est sans doute 1992,

23 notamment de Bijelina à Belgrade ?

24 R. Oui, c'est cela.

25 Mme PACK : [interprétation] Je voudrais maintenant qu'on montre au témoin

Page 28287

1 l'intercalaire 3.

2 Q. Vous souvenez-vous d'avoir trouvé ce document sur le corps de ce soldat

3 serbe ?

4 R. Oui, tout à fait.

5 Q. Est-ce qu'il s'agit d'un accusé de réception indiquant

6 ceci : reçu temporaire de biens militaires. On voit ici une indication

7 manuscrite : poste militaire 5055 Belgrade. Et on voit, en bas de page, un

8 cachet pour le poste militaire 5055 de Belgrade. Ça a été reçu en mains

9 propres par B. Filipovic. Est-ce exact ?

10 R. C'est exact.

11 Q. On parle donc dans ce document de munitions, donc des cartouches de

12 M57, chargées ainsi que des grenades à mains qui auraient été reçues en

13 personne par M. Filipovic ?

14 R. C'est bien ce qui est dit.

15 Mme PACK : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au témoin

16 l'intercalaire 6.

17 Q. S'agit-il ici d'une autorisation donnée à Branislav Filipovic, lui

18 permettant d'amener des munitions de Belgrade à la garnison de Brcko pour

19 les besoins de cette garnison et pour le besoin de Bosanski Samac

20 également ?

21 R. Oui, c'est cela.

22 Q. Est-il dit que ceci vaut pour divers types de munitions, dont des

23 munitions pour des canons anti-aériens et était-ce un document signé au nom

24 du commandant de la garnison de Brcko, le lieutenant Predrag Manojlovic ?

25 R. C'est exact.

Page 28288

1 Mme PACK : [interprétation] je n'ai pas d'autres questions posées à ce

2 témoin, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Cependant --

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, il nous faut avoir cette ordonnance

4 qui limite la portée du contre-interrogatoire. Nous ne l'avons pas sous la

5 main pour le moment. Il nous le faut. Y a-t-il d'autres questions, Madame

6 Pack ?

7 Mme PACK : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Si ce n'est que

8 j'appelle votre attention sur le paragraphe 2 du résumé, et je précise le

9 type d'élément qu'il faudrait peut-être éventuellement aborder à huis clos

10 partiel.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie.

12 Maintenant l'ordonnance du 10 octobre sous les yeux, vous y avez fait

13 référence.

14 Mme PACK : [interprétation] Paragraphe 1, de l'ordre ou ordonnance, je

15 pense que c'est le paragraphe pertinent.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous devez maintenant procéder au

17 contre-interrogatoire du témoin, Monsieur Milosevic. En espèce, le contre-

18 interrogatoire a été limité par voie d'ordonnance aux éléments de preuve

19 concernant la découverte des documents sur le cadavre du soldat ceci

20 incorporé, là va de soi les documents eux-mêmes. Si vous avez des questions

21 à poser sur ces documents, vous pouvez le faire, mais voici un cas de

22 figure où vous avez un contre-interrogatoire qui sera limité, quant à sa

23 portée.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, c'est bien la première fois que

25 j'entends parler d'une limitation quelconque du contre-interrogatoire. Et

Page 28289

1 bien, si l'on définit cela comme étant limité déjà par le 92 bis, on en

2 vient à avoir à un temps limité qui devient une fois de plus limité a

3 posteriori, c'est bien ce que je dois comprendre, n'est-ce pas ?

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est préférable à une situation où l'on

5 reçoit au dossier, on déclare recevable une déclaration préalable, sans

6 qu'il y ait contre-interrogatoire.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela est très certainement vrai, mais je ne

8 vois vraiment pas pourquoi le témoin viendrait ici, si on ne peut pas le

9 contre-interroger. Mais, bon, vous attirez mon attention sur le fait de ne

10 pas devoir lui poser telle ou telle autre question parce que je n'ai pas du

11 tout tenu compte de limitation quelle qu'elle soit dans le cadre de l'heure

12 ou des heures qui me sont habituellement imparties.

13 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

14 Q. Monsieur le Témoin 1448, dans le premier paragraphe, vous avez indiqué,

15 d'ailleurs (expurgée)

16 (expurgée) ?

17 R. Oui.

18 Q. Ce groupe faisait partie de l'armée de la Bosnie-Herzégovine, et était-

19 ce là une unité paramilitaire ?

20 R. Au début -- au tout début des combats à Brcko, le groupe n'était pas

21 armé. C'est par un concours de circonstances que dans la période qui a

22 suivi, vers le mois de mai il y a une forme d'armement avec ce qu'on a pu

23 se procurer. Mais je ne voudrais pas m'attarder là-dessus, outre mesure.

24 Q. Mais vous dites que, lorsque la guerre a commencé à

25 Brcko : "Je rejoins un groupe pour défendre nos foyers, nos familles,"

Page 28290

1 comme l'a dit d'ailleurs Mme Pack. C'est bien ce que vous avez déclaré ?

2 R. Oui.

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce groupe a été constitué en effet, mais ce

5 groupe au début de la guerre a œuvré notamment à l'évacuation de cette

6 population épuisée, hors de Brcko, mais sur le territoire du district de

7 Brcko.

8 Q. Donc, si c'était seulement un groupe qui était destiné à protéger les

9 personnes âgées -- les personnes âgées, infirmes, comment se fait-il que

10 vous ayez eu un QG de brigade, auquel vous vous référez au paragraphe 7 ?

11 Cela serait trop important pour défendre les quelques maisons et familles.

12 R. La Brigade a été constituée par la suite, vers le mois de mai.

13 Q. Mais, oui, vous témoignez justement au sujet du mois de mai.

14 R. Oui, mais je parle notamment ici de la deuxième quinzaine du mois de

15 mai.

16 Q. Vous avez indiqué vous-même qu'au paragraphe 3, qu'à la fin vous aviez

17 un émetteur récepteur de marque Motorola.

18 R. Oui.

19 Q. Mais cela semble t-il pas peu habituel pour un groupe de citoyens qui

20 ne fait que défendre le palier de sa porte.

21 R. Je ne suis pas de votre avis.

22 (expurgée)

23 (expurgée)

24 (expurgée)

25 Là nous nous écartons -- nous outrepassons les limites imposées. Je ne vous

Page 28291

1 ai pas empêché de poser une question à propos de ce groupe puisqu'il a

2 participé à la fouille, mais vous n'êtes autorisé à rien faire d'autre.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bon, le témoin a mentionné une chose, à savoir,

4 l'armement.

5 Q. Savez-vous, Monsieur, que, vers la mi 1991, le parti de l'Action

6 démocratique et le HDZ ont procédé à des entraînements conjoints et à un

7 armement conjoint de leurs affiliés, l'armement s'effectuant par le biais

8 de Savski Most, en provenance de Croatie, en passant par Boujn [phon] et

9 Brcko. Est-ce qu'ainsi cela s'est fait ou pas ?

10 R. Non, je ne suis pas au courant.

11 Q. Savez-vous que c'est précisément à cette fin-là qu'au point de contrôle

12 de la Savski Most à Brcko, il a été placé des policiers qui étaient membres

13 du SDA et du HDZ. Et ils avaient obtenu des instructions détaillées de la

14 part du commandant du poste de sécurité publique à Brcko, ainsi que de la

15 part d'autres responsables municipaux pour assurer la sécurité --

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci dépasse les bornes, imposées par

17 rapport à ce j'ai autorisé en matière de contre-interrogatoire.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Avez-vous connaissance du fait que dans l'approvisionnement en armes,

20 du moins pour ce qui est du financement de celles-ci, ce sont notamment les

21 entrepreneurs privés de Brcko, Uso Bakor, Ramiz Vilic, Fikret Husic,

22 surnommé Sok, Nesad Omerhodzic, appelé Bedor [phon] , Meho Bendedadovic

23 [phon], Rak [phon] Murhatovic [phon], Sefket Lubinovic, surnommé Lubin, et

24 ainsi de suite, et certains directeurs d'entreprise publique ont pris part

25 au financement. Le saviez-vous ?

Page 28292

1 R. Non, je ne le savais pas. Je suis plutôt un homme de famille et je

2 n'avais pas à tenir compte de quelle que partie que ce soit.

3 Q. Puisque vous faisiez partie des formations armées, et que vous alliez

4 vers le QG de la Brigade, à l'occasion des événements au sujet desquels

5 vous témoignez, je vais vous demander si pour ce qui est de l'armement du

6 personnel, Uzeir Hajdanovic, Badi Hajdanovic [phon], Sijos Kineskovic

7 [phon], Ramiz Pljakic, Kemal Hindic, et autre ex-membres de la JNA ont eu

8 le mot principal à dire. Vous les connaissiez ces gens ?

9 R. Oui.

10 Q. Serait-il exact de dire qu'ils ont non seulement veiller à

11 l'approvisionnement en armes, mais aussi aux entraînements nécessaires ?

12 R. Je ne suis pas au courant de tout ce que vous dites, Monsieur

13 Milosevic, parce que comme je vous l'ai déjà indiqué, dès le début, je me

14 suis trouvé sur la première ligne de ce que l'on pourrait désigner de

15 front. Pour de ce que faisaient les autres, je n'en sais rien.

16 Q. Mais ne savez-vous pas que la distribution des armes dans les autres

17 communautés locales --

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] D'abord vous dépassez, de nouveau, les

19 limites imposées et puis impossible pour le témoin de répondre. Ne perdons

20 pas de temps. Posez-lui des questions auxquelles il est en mesure de

21 répondre, s'il vous plaît.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Avez-vous connaissance de quoique ce soit au sujet de l'entraînement

24 des groupes de sabotage, exécutés par Damil Suljic, surnommé Makija, Feto

25 Mensur [phon], Suljevic Nermin, appelé Guminito [phon], Tursic Muhamed,

Page 28293

1 appelé Hare. Est-ce que vous avez connaissance de cela ? Est-ce que vous

2 connaissiez ces gens-là ?

3 R. Les gens, je les connaissais, mais ce que vous indiquez, Monsieur

4 Milosevic, n'est tout simplement pas exact. Il n'y a pas eu d'entraînement.

5 Du moins, moi, je n'en ai pas vu.

6 Q. Bon. Mais avez-vous connaissance des provocations fréquentes survenues

7 lorsque les Serbes ont quitté les sites de Stari Rasadnik ?

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non, non, non. Là, c'est une pure perte

9 de temps. Vous connaissez les limites imposées. Si vous souhaitez poser des

10 questions à ce témoin à propos du combat, des documents, libre à vous de le

11 faire. Sinon, nous passerons à autre chose.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je me propose de poser des questions au

13 sujet des documents-ci. (expurgée)

14 (expurgée)

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais vous connaissez les limites

16 imposées.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Bon. Savez-vous que le 1er mai 1992, il y a eu escalade à l'égard des

19 Serbes et de la JNA, date à laquelle il y a eu attaque armée sur la caserne

20 de Brcko et on s'est attaqué à la cité serbe ?

21 R. C'est inexact. Ce que je sais pour ce qui est du 1er mai, c'est la JNA

22 et les unités paramilitaires, ceux qui se sont attaqués à Dizdarusa et à

23 une autre communauté locale, Brodusa, et ce, par pilonnage.

24 Q. Donc, il n'y a pas eu attaque des casernes dans la Srpska Varos, dans

25 la cité serbe. C'est ce que vous affirmez ?

Page 28294

1 R. Je l'affirme en connaissance de cause et en toute responsabilité.

2 Q. Vous dites que la guerre à Brcko a éclaté début mai 1992 lorsque, je

3 vous cite : "L'on a fait sauté les ponts sur la rivière Sava." Qui est-ce

4 qui a fait sauté le pont sur la Sava et pourquoi ?

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Est-ce que je vais l'arrêter carrément ?

6 Vous ne prêtez aucune attention à ce je dis. Je vais mettre un terme à ce

7 contre-interrogatoire. Vous êtes au courant maintenant des limites

8 imposées. Il vous revient à vous de décider des questions que vous voulez

9 poser ou pas ?

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Bien. Très bien, Monsieur May. Si ce que

11 je viens de faire était inapproprié et si les limites que vous m'avez

12 imposées ne concernent que ce soldat tué, et bien, je vais poser la

13 question suivante.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur le Témoin, vous avez trouvé une carte d'identité au nom de

16 Branko Filipovic dans la poche de ce soldat et la photo correspondait au

17 visage de la personne décédée ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous avez trouvé d'autres pièces d'identité montrant qu'il s'agissait

20 de Marko Filipovic et que son surnom était Sumar ?

21 R. Oui.

22 Q. D'après votre déclaration, à en juger d'après la carte d'identité, car

23 je n'ai pas reçu de copie. Je ne sais pas si les autres l'ont reçu. Et

24 bien, Marko Filipovic était le nom qui figurait sur l'ensemble des

25 documents dont j'ai reçu des copies. Je vois un autre nom, à savoir,

Page 28295

1 Branislav Filipovic. Est-ce que je dois en conclure que les copies ne sont

2 pas authentiques ou bien que vous étiez tellement proche de ce soldat tombé

3 que vous l'avez appelé Branko ?

4 R. Non. Je n'étais pas l'un de ses proches, ni un proche ami et je ne sais

5 pas si Branko Branislav change quoi que ce soit. Le sens est le même. C'est

6 le même nom.

7 Q. Un nom n'a pas de sens. Mais il doit être écrit d'une seule et même

8 façon. S'agissant de cette pièce d'identité et des autres documents que

9 vous avez retrouvés, vous les avez remis au chargé du renseignement à

10 l'état major de la brigade ou vous avez gardé la carte d'identité sur

11 vous ?

12 R. Non. Je ne l'ai pas gardé. Elle a disparu. Quelqu'un d'autre l'a

13 conservé. Et quand au reste des documents, je les ai bien remis.

14 Q. Mais pouvez-vous m'expliquer la raison pour laquelle cette pièce

15 d'identité, la carte d'identité est, à savoir, le seul document qui porte

16 une photo et le seul document qui ne figure pas dans ce jeu de pièces ?

17 R. Non.

18 Q. Fort bien. Vous avez décrit les vêtements du soldat mort et vous avez

19 décrit tous les objets qu'il avait sur lui. Vous dites qu'il n'avait un

20 pistolet, qu'il n'y avait pas de munitions qui mériterait qu'on les

21 mentionne, qu'on en parle.

22 R. Je n'ai pas dit qu'il mériterait qu'on les mentionne. Il y avait deux

23 ou trois chargeurs, un chargeur plein dans le pistolet.

24 Q. Dans votre déclaration, vous dites : "Il avait un fusil et un pistolet

25 mais il n'avait pas de pistolet qui soit digne de ce nom, qui mériterait

Page 28296

1 que l'on en parle." C'est bien ce que lis dans votre déclaration alors que

2 tel n'a pas été le cas ?

3 R. Un instant.

4 Q. C'est le paragraphe 5 ou plutôt le cinquième paragraphe à commencer par

5 le début de la déclaration : "Il avait un fusil et un pistolet mais il n'y

6 avait pas de munitions digne --". C'est la deuxième phrase du paragraphe.

7 R. Je tiens à dire là qu'il n'y avait pas beaucoup de munitions, comme

8 vous le savez parfaitement, combien il y a de munitions dans un chargeur.

9 Q. Oui. C'est justement ce que je viens de vous demander. C'est la raison

10 pour laquelle je vous ai posé la question et je vous ai donné lecture de ce

11 texte.

12 R. Je vous présente mes excuses.

13 Q. Alors, le fusil et le pistolet, les munitions, vous avez remis cela à

14 l'état major de la brigade ou non ?

15 R. Je ne peux pas me souvenir à présent de cela.

16 Q. Vous ne savez pas ce que vous en avez fait de ces armements ?

17 R. Je vous ai dit non mais je ne sais pas pour les autres.

18 Q. Est-ce qu'il y avait de l'argent et avez-vous gardé cet argent pour

19 vous ?

20 R. Non.

21 Q. Est-ce qu'il y avait un émetteur récepteur ou un appareil comparable ?

22 R. Non.

23 Q. Il n'y en avait pas ?

24 R. Non.

25 Q. Donc, vous n'avez retrouvé sur ce soldat que les objets que vous avez

Page 28297

1 énumérés ?

2 R. C'est cela.

3 Q. Au troisième paragraphe à commencer par la fin de la déclaration, vous

4 dites qu'en utilisant votre appareil Motorola, vous avez entendu les Serbes

5 échanger des propos sur leur canal et que leurs camarades ont essayé de

6 prendre contact avec lui après sa mort en l'appelant "Sumar, Sumar". Mais

7 pour quelle raison essaieraient-ils de le joindre par cette Motorola s'il

8 n'en avait pas comme vous venez de le déclarer ?

9 R. Ecoutez. Je n'étais pas en sa compagnie. Il l'a peut-être perdu ou

10 l'appareil est tombé. De toute façon, on ne l'a pas retrouvé sur lui. Je ne

11 l'ai pas vu.

12 Q. Fort bien. Vous parlez des négociations au sujet de l'échange du corps

13 de Filipovic, vous dites qu'au cours des 48 heures à venir, il y a eu des

14 négociations avec Mauzer et c'est avec Mauzer que je me suis entretenu par

15 cette Motorola. J'en conclu qu'il s'agissait de Mauzer puisque c'est lui

16 qui a répondu lorsque je l'ai appelé par ce nom.

17 R. L'homme, la personne qui s'est entretenu avec nous au sujet de cette

18 échange s'est présenté comme étant Mauzer.

19 Q. Donc, c'est d'abord lui qui s'est présenté. Par la suite, vous avez

20 continué à employer ce nom ?

21 R. Nous, on l'appelait Mauzer, et lui, il nous appelait TO.

22 Q. Donc, lui, il vous appelait Défense territoriale ?

23 R. C'est cela.

24 Q. S'agissait des documents qui ont été retrouvés dans le sac de ce soldat

25 serbe qui est tombé, au paragraphe 7, vous dites : "Compte tenu des

Page 28298

1 circonstances du moment, je n'ai pas prêté attention en particulier à ces

2 documents." Et puis, deux lignes plus loin, vous dites au sujet de ces

3 documents dont je vois les photocopies, vous dites : "Je connais ces

4 documents et comme je l'ai dit en 1992, lorsque j'ai retrouvé ces

5 documents, je n'y ai pas prêté attention. Cependant, je crois qu'il s'agit

6 bien ici de copies de documents que j'ai trouvés dans la poche de Filipovic

7 et que j'ai remis à l'état major de la brigade plus tard, dans la même

8 journée."

9 R. Oui. Mais là, je fais référence à ce premier moment après l'instant où

10 j'ai trouvé les documents. Cependant, lorsque j'ai porté ces documents à la

11 brigade, ces deux ou trois documents, je les ai examinés un petit plus en

12 détail.

13 Q. Mais encore une fois, où avez-vous trouvé ces documents ? Je vous cite

14 : "Dans le sac militaire, un sac du type militaire," comme vous le dites au

15 paragraphe 7, ou bien les avez-vous retrouvés "dans la poche" comme vous

16 dites dans la dernière citation ?

17 R. Non pas dans sa poche. Dans un petit sac militaire qu'il avait sur lui.

18 Q. Mais ici aussi nous avons la citation de vos paroles lorsque vous dites

19 que vous avez retrouvé des documents dans la poche de Filipovic, que ce

20 sont des copies de ces documents, des documents que vous avez remis plus

21 tard à la personne compétente, à l'état major de la brigade.

22 R. Non. Ce que je dis c'est que l'ensemble des documents mis à part la

23 pièce d'identité, la carte d'identité, et bien, que tous ces documents ont

24 été retrouvés, je les ai retrouvés dans le sac militaire.

25 Q. Je vous pose la question parce qu'il y a une différence entre le sac

Page 28299

1 militaire et la poche. Je voulais savoir si c'était le premier ou le

2 deuxième de ces deux endroits. Maintenant, vous me dites le sac militaire.

3 Fort bien. Il en ressort de ce que vous dites, que les documents qui vous

4 ont été montrés par Mlle Pack, sont bien les mêmes que ceux que vous avez

5 retrouvés sur le soldat mort. Est-ce que cela veut dire que vous le croyez

6 sans en avoir la certitude ?

7 R. Non. J'en suis tout à fait certain.

8 Q. Vous êtes tout à fait certain. Mais ces documents, en 1992, comme vous

9 venez de le dire vous-même, vous n'y avez pas particulièrement prêté

10 attention. Et jusqu'au moment où vous avez eu cet entretien ici, il s'est

11 passé neuf ans, voir 11, aujourd'hui, et en plus, vous n'avez vu que des

12 photocopies. Alors, est-ce que vous n'estimez pas que ceci limite un petit

13 peu votre possibilité de l'affirmer avec certitude, à savoir qu'il s'agit

14 bien des photocopies fidèles aux documents que vous avez retrouvés dans le

15 sac militaire de ce soldat mort ?

16 R. Monsieur Milosevic, il y a des choses qui se gravent dans notre

17 mémoire, et bien là, c'est un exemple de cela. Ceci est resté gravé dans ma

18 mémoire. Lorsque j'ai revu cela, j'étais à 100 % sûr qu'il s'agissait bien

19 de ces documents-là.

20 Q. Très bien. Dans le laissez-passer que les organes locaux, le 7 mai

21 1992, lui ont délivré, il est dit que : "Il s'agit d'un volontaire de

22 Bijeljina." Que Branislav Filipovic était un vendeur de Bijeljina, n'est-ce

23 pas ?

24 R. Oui.

25 Q. N'avez-vous jamais quoi que ce soit de plus au sujet de Branislav

Page 28300

1 Filipovic ?

2 R. Non.

3 Q. Aurait-il été membre de la JNA ?

4 R. Je ne le sais pas.

5 Q. Mais si les Serbes ont procédé à l'échange de son corps contre 21

6 Musulmans, et bien, je suis en train de supposer que ça était très

7 important pour eux ?

8 R. Oui. Je suppose la même chose.

9 Q. Et si on parvenait à établir un lien entre cet homme et Belgrade, ce

10 serait vraiment un exemple idéal, n'est-ce pas ?

11 R. Il ne m'appartient pas d'en juger.

12 Q. Monsieur 1448, nous avons six documents ici. Nous avons reçu six

13 documents, deux seuls de ces documents portent une date, n'est-ce pas ?

14 R. Excusez-moi, Monsieur Milosevic. Vous voulez me convaincre que je n'ai

15 pas retrouvé ces documents, or, vous les voyez ici.

16 Q. Je les ai reçus de la partie adverse. Et il n'y en a que deux qui

17 portent des dates. Vous les avez examiné vous-même. Vous avez pu arriver à

18 la même constatation, n'est-ce pas ?

19 R. Avez-vous remarqué les cachets et les dates ?

20 Q. Mais je suis en train de vous dire qu'il n'y a que deux documents qui

21 portent des dates. Et pour le reste, dans ce jeu de documents que j'ai

22 reçu, vous le voyez en anglais, Monsieur, et bien, il est dit date

23 inconnue, puis inconnue, inconnue, inconnue, puis, 7 mai. Donc, vous n'avez

24 que deux dates; le 13 et le 7 mai, n'est-ce pas ?

25 R. C'est à moi que vous posez la question.

Page 28301

1 Q. Mais c'est bien à vous que je m'adresse. Il n'y a que deux documents

2 qui portent une date.

3 R. Ecoutez, je n'ai pas à examiner les dates. Et je ne voudrais pas parler

4 de cela.

5 Q. Très bien. Alors, nous avons un document qui donne l'autorisation à

6 Blagojevic et à Filipovic, d'apporter des munitions à Brcko, à la caserne

7 de Brcko, sont signés par le lieutenant Predrag Manojlovic. Mais il n'y a

8 pas ici de date. Donc, on ne sait pas si cela date d'avant la sécession de

9 la Bosnie-Herzégovine, donc du moment où la JNA fonctionnait encore

10 normalement sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ou bien s'il s'agit

11 du moment où la JNA s'était déjà retiré de Bosnie-Herzégovine.

12 R. Ça vraiment, je ne le sais pas. Ce que je sais, c'est que la JNA, me

13 semble-t-il, n'a pas été JNA avant la guerre, mais JA seulement.

14 Q. Monsieur 1448, la JA a été la JNA, or la JA, c'est uniquement pendant

15 une période très brève qu'elle a été après la Deuxième guerre mondiale.

16 Donc, la JNA existait pendant plusieurs décennies. Mais peu importe, nous

17 ne devons pas nous attarder là-dessus. Cela fait partie des choses que tout

18 le monde connaît. Puis, un point suivant. L'ordre de déplacement de la

19 voiture Yugo; et bien, cela n'est pas très important. C'est la période du 8

20 mai [sic] jusqu'au 31 mai [sic]. C'est la poste militaire de Brcko, son

21 cachet qui figure là-dessus. Et l'on voit que Filipovic a dû effectuer deux

22 déplacements pour Belgrade pendant cette période-là. Donc, c'est la période

23 qui suit le repli, le retrait de la JNA de Bosnie-Herzégovine.

24 R. Vous venez de faire une constatation seulement, n'est-ce pas ?

25 Q. Ecoutez, est-ce bien la période où l'armée de la Republika Srpska était

Page 28302

1 en train de se constituer. On ne peut pas avoir la certitude quant à la

2 personne qui se sert de cette voiture. En plus, il s'agit d'un petit --

3 d'une petite Yugo, une petite voiture de tourisme, n'est-ce pas ?

4 R. Ecoutez, je ne suis pas d'accord avec vous, parce qu'une voiture peut

5 être employée à des fins que vous venez de citer. Or, il s'agit là des

6 équipements et des munitions qui sont apportés par camion. Donc, ce que

7 vous venez de citer.

8 Q. Très bien. Alors, nous nous pencherons là-dessus uniquement. Nous avons

9 un récépissé s'agissant de la réception d'une grande quantité d'armements

10 et de munitions, suite à une décision du commandement de la ville de

11 Belgrade. Il me semble qu'il s'agit du document le plus important de cette

12 série.

13 R. Il appartient à la Chambre d'en juger.

14 Q. Il est accusé réception à des fins d'utilisation provisoire ou

15 temporaire, n'est-ce pas ? Mais cela ne réduit pas son importance ?

16 R. Oui, temporairement. C'est ce que j'ai lu.

17 Q. Donc, il faudra retourner l'équipement. Mais dites-moi comment les

18 grenades à mains, ou les mines, ou les roquettes pourraient être rendues ?

19 R. Non, non, non. Ces mines ne peuvent pas être remboursées. Elles ont été

20 données afin d'être utilisées. Il s'agit des armements qui ont été accordés

21 de manière temporaire, cédés temporairement.

22 Q. Très bien, Monsieur le Témoin. Mais l'importance du document se trouve

23 réduite peut-être un petit peu du moment que l'on ne voie pas qui est

24 l'unité qui accuse réception de cela. On voit ici, qu'il est question de la

25 Défense territoriale de Brcko. C'est elle qui reçoit du commandement de

Page 28303

1 Belgrade, cela.

2 R. Mais je ne vois pas de quelle Défense territoriale vous parlez.

3 Q. Il est dit ici, Défense territoriale de Brcko.

4 R. Probablement du côté serbe, pas du côté bosnien.

5 Q. Monsieur 1448, oui, mais vous le verrez vous-même. Ce document est un

6 faux, ou du moins c'est un autre Branislav Filipovic qui l'a signé. Ce

7 n'est pas un document que vous avez pu retrouver sur le corps du soldat

8 mort. Au paragraphe, nom de l'unité, qui a ordonné que soit mis à la

9 disposition, l'équipement suivant, que figure ici, sur ordre du

10 commandement de la ville de Belgrade, numéro 3-132/2 du 2 juin 1992.

11 Autrement dit, Monsieur 1448, --

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, vous n'avez qu'à vous reporter à

13 la traduction anglaise.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] L'intercalaire, s'il vous plaît.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'intercalaire 3.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. "Sur ordre du KOGB, la Défense municipale de Belgrade, son QG", et ça

18 c'est entre parenthèses. Par la suite, nous voyons le numéro en date du 20

19 juin 1992.

20 Monsieur 1448, --

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin a-t-il la pièce ? Je voudrais

22 qu'on lui communique la pièce, sinon, il ne peut pas suivre.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Dites-moi à présent, s'il vous plaît, si ce témoin dont vous avez

25 échangé le corps a été tué le 16 ou le 17 mai 1992, est-il possible qu'il

Page 28304

1 porte sur lui un document qui est la confirmation qu'un ordre émis le 20

2 juin a été exécuté ? Il s'agit d'une date qui est postérieure d'un mois au

3 moment de sa mort.

4 R. Monsieur Milosevic, vous n'allez pas me convaincre de quelque chose qui

5 n'est pas exact. Tous ces documents que vous avez sur vous, que la Chambre

6 a sous les yeux, se sont les documents que j'ai retrouvés sur cet homme

7 mort. Donc, vous cherchez à me convaincre de quelque chose qui n'est pas

8 exact. Excusez-moi, mais vous n'y arriverai pas.

9 Q. Monsieur 1448, vous êtes en train de dire que vous avez échangé, les

10 16, 17 mai, le corps de soldat tué ?

11 R. Oui.

12 Q. Mais ne voit-on pas noir sur blanc que ceci suit l'ordre émis le 20

13 juin 1992 ? Ce sont des faits, n'est-ce pas ?

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez posé votre question.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je vous remercie d'avoir limité

16 mon interrogatoire à ces documents. Je n'ai pas d'autres questions. Je vous

17 en remercie.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

19 Juges, à l'intercalaire 3, ce que je vois, c'est une photocopie de cet

20 accusé de réception et je vois que le témoin a sous les yeux l'original de

21 ce document.

22 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :

23 Q. [interprétation] Est-ce que bien cela ?

24 R. Oui.

25 Q. L'accusé de réception que j'ai ne nous permet absolument pas de lire la

Page 28305

1 date du 13 mai en haut à droite et on ne voit pas, non plus, la date du

2 mois de juin. Le voyez-vous ?

3 R. Si. On voit les deux dates. On les voit bien.

4 Q. Et vous pensez que de lors, cela coïncide, la date qui figure en haut à

5 droite et la date qui est liée à cet ordre ?

6 R. Je ne pense pas. Je vois.

7 Q. Très bien. Je vous remercie. Alors la chose suivante. Est-ce que vous

8 pouvez expliquer à la Chambre quelque chose qui concerne ce qu'on a

9 retrouvé sur le soldat mort, le soldat serbe qui a été tué derrière la

10 ligne de front où vous vous trouviez ? Donc, en face du côté ou étaient

11 déployées les unités de la deuxième armée ?

12 R. Je ne vous comprends pas.

13 Q. Au paragraphe 3, vous dites : "Nous avons sorti le corps de l'endroit

14 où il a été touché et tué vers le café Elvis du côté où nous nous

15 trouvions."

16 R. Oui.

17 Q. Donc, vous avez été obligé de traverser de l'autre côté de la ligne de

18 front ?

19 R. Non. On ne se comprend pas. Derrière, en profondeur, cela veut dire

20 derrière notre ligne de front, à l'intérieur, à l'arrière.

21 Q. Mais pouvez-vous expliquer à la Chambre pourquoi vous êtes-vous exposé

22 aux tirs adverses pour sortir le corps d'un soldat mort ?

23 R. La raison. La raison est simple. Au début, nous ne savions pas si

24 c'était un soldat serbe ou l'un des nôtres parce que c'était entre les

25 maisons, entre l'usine et les maisons.

Page 28306

1 Q. Mais portait-il un uniforme ou non ?

2 R. Monsieur, il faut bien que je vous explique. Là où cela s'est passé, il

3 y a des maisons, il y a la végétation. Et quand nous nous sommes approchés,

4 nous avons vu que c'était un soldat serbe en uniforme.

5 Q. Vous pensiez dans un premier temps que c'était l'un des vôtres ? L'un

6 de vos hommes ?

7 R. Oui.

8 Mme PACK : [interprétation] Je souhaite poser quelques questions

9 supplémentaires.

10 Je souhaite que l'on fournisse au témoin l'intercalaire 3, s'il vous plaît.

11 Nouvel interrogatoire par Mme Pack :

12 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, vous venez de recevoir l'original

13 des documents dont vous avez examiné des photocopies lorsque vous avez

14 rédigé votre déclaration. Je vous prie de vous reporter à la date qui

15 figure en haut du document et qui est écrite à la main. S'agit-il bien de

16 la date du 13 mai 1992 ?

17 R. Oui.

18 Q. Monsieur le Témoin, vous rappelez-vous dans quel état étaient ces

19 documents lorsque vous les avez retrouvés dans le sac du soldat mort ?

20 R. Que voulez-vous dire par là ?

21 Q. Lorsque vous avez retrouvé ces documents sur le corps du soldat mort,

22 étaient-ce des documents qui étaient en bon état, lisible, propre ?

23 R. Pas tout à fait propre.

24 Q. Et bien, pouvez-vous nous décrire ces documents ? Dans quel état

25 étaient-ils ?

Page 28307

1 R. Des années se sont écoulées mais, en gros, c'était comme ça.

2 Q. Monsieur le Témoin, est-ce bien là des documents qui se sont gravés

3 dans votre mémoire ? Donc, les documents que vous avez retirés de ce sac ?

4 R. Oui.

5 Q. Pouvez-vous expliquer à la Chambre la raison de cela ?

6 R. Je vais essayer d'être bref. Lorsque je suis parti de la ligne de front

7 vers le siège, le QG de la brigade, j'ai vu des chiffres, des chiffres de

8 ces accusés de réception et par rapport à ce que nous avions entre nos

9 mains, à l'époque, et bien, c'était quelque chose de très, très important

10 et c'est la raison pour laquelle je m'en suis souvenu.

11 Q. Lorsque vous parlez de ces accusés de réception, en fait, vous vous

12 référez à l'équipement dans la liste dressée ici ?

13 R. Oui.

14 Mme PACK : [interprétation] Je souhaite que l'on présente au témoin

15 l'intercalaire 6.

16 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous prie d'examiner une partie

17 de ce document, de cette autorisation où l'on voit de quel type de

18 munitions il s'agit. Donc, lorsque Branislav Filipovic reçoit

19 l'autorisation de transporter ces munitions de Belgrade à Brcko, il s'agit

20 de munitions destinées aux armes antiaériennes de 30 et de 20 millimètres,

21 n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous aider, s'il vous plaît, sur ce

24 point et dites-nous si vous ne le pouvez pas. Dites-nous s'il s'agit bien

25 de munitions qui correspondent aux munitions que nous avons vues dans

Page 28308

1 l'accusé de réception que nous avons examiné à l'intercalaire 3 ?

2 R. C'est parce que pendant ces combats, nous nous sommes emparés d'un

3 canon antiaérien de 30 millimètres à trois tubes.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il nous faudra lever la séance. Excusez-

5 moi. Si vous avez d'autres questions, il faudrait que cela se passe très

6 vite, très rapidement.

7 Mme PACK : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie.

9 Oui, très rapidement, Monsieur Milosevic.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très rapidement, en quelques mots. Il n'y a pas

11 de canons antiaériens de 30 millimètres à trois tubes. Ceci n'existe pas.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous pourrons peut-être entendre des

13 éléments de preuve à cet effet en temps voulu.

14 Monsieur le Témoin 1448, je vous remercie d'être venu déposer devant ce

15 Tribunal. Votre déposition est terminée. Vous êtes libre de repartir mais

16 je vous demande seulement d'attendre que les stores soient baissés.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie pour ma part.

18 [Le témoin se retire]

19 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le jeudi 30 octobre

20 2003, à 9 heures.

21

22

23

24

25