Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 30 octobre 2003

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.

6 M. NICE : [interprétation] Je voudrais qu'on fasse entrer dans la prétoire

7 M. Blewitt. Je suppose que vous avez reçu, Messieurs les Juges, une version

8 mise à jour de la pièce 315. Ceci a été mis à jour avec l'aval de votre

9 juriste afin que ceci devienne un document plus utile pour vous.

10 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, je vous remercie. Nous l'avons reçu.

12 Je vais demander au témoin de prononcer la déclaration solennelle.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirais la

14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

15 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez vous

16 asseoir.

17 LE TÉMOIN: GRAHAM BLEWITT [Assermenté]

18 [Le témoin répond par l'interprète]

19 M. NICE : [interprétation] Nous avons la déclaration au préalable du

20 témoin, M. Blewitt, tant en anglais qu'en B/C/S. La version anglaise avait

21 été signée en octobre 2002 déjà et puis il va parler de correspondance --

22 de courrier. Je vais demander que sa déclaration signée devienne l'examen

23 principal. Mais, en fait, rien ne va se passer si ce n'est que je

24 demanderais le versement au dossier de ce courrier -- de ces échanges, et

25 puis cela --

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Parcourez ces documents avant de demander

2 le versement, s'il vous plaît.

3 M. NICE : [interprétation] Fort bien.

4 Interrogatoire principal par M. Nice :

5 Q. [interprétation] Monsieur Blewitt, je pense qu'il y a longtemps de

6 cela. Vous avez déjà fait une déclaration au préalable à propos de cet

7 échange épistolaire qui fera l'objet de votre déposition ?

8 R. Oui.

9 Q. Et cette déclaration est conforme à la vérité ?

10 R. Oui.

11 M. NICE : [interprétation] Je vais demander une cote.

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce 580.

13 M. NICE : [interprétation]

14 Q. Monsieur Blewitt, parlons de ce qui est déjà une pièce, c'était la

15 pièce 315 produite par le truchement du témoin John Zdrilic. Au moment où

16 la pièce a été versée, il n'y avait pas beaucoup d'ordre. Il a fallu

17 ajouter un courrier, ce qui fait que maintenant nous avons un sommaire mis

18 à jour et réorganisé qui porte la pièce 315. Vous avez examiné cette

19 pièce ?

20 R. Oui.

21 Q. Hier ? [sic]

22 R. Oui.

23 L'INTERPRÈTE : Micro, s'il vous plaît.

24 M. NICE : [interprétation]

25 Oui, je l'ai en parlé dans un instant.

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1 Vous êtes ici à la demande de l'accusé, Monsieur Blewitt, et sur suggestion

2 de la Chambre qui voulait aborder cette question du courrier. Votre

3 fonction est celle de Procureur adjoint au TPY, n'est-ce pas, depuis le

4 début de l'existence du Tribunal, février 1994 ?

5 R. Exact.

6 Q. Vous avez eu trois Procureurs, M. Goldstone, Mme Louise Arbour et Mme

7 Carla Del Ponte ?

8 R. Exact.

9 Q. En votre qualité de Procureur adjoint, vous êtes au courant des

10 échanges épistolaires, des courriers qui partent et du courrier qui

11 arrive ?

12 R. Quotidiennement.

13 Q. Pour ce qui est de cet échange qui fera l'objet plus précis de votre

14 déposition, vous avez écrit une des lettres, et l'autre vous la

15 connaissez ?

16 R. Exact.

17 Q. Nous pourrons les examiner très sommairement puisque ceci a été déjà

18 examiné afin de dresser le contexte de ce qui suivre ce débat. Et je vous

19 demanderais d'avoir l'obligeance de Mme l'Huissière de placer les pages

20 concernées au fur et à mesure.

21 Intercalaire 1, de la pièce mise à jour 315, il s'agit d'une lettre en date

22 du 17 mars 1998. Elle émane de Mme Arbour qui était alors Procureur, elle

23 est adressée à l'accusé. Ce sera une des deux lettres pour lesquelles je

24 vais vous demander quelques détails supplémentaires. Nous allons la voir

25 apparaître sur le rétroprojecteur dans quelques instants.

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1 Nous verrons comment elle est structurée. Page 1, adressée à l'accusé date

2 du 17 mars, il est dit que Mme le Procureur recueille des informations --

3 des renseignements relatifs à l'évolution de la situation au Kosovo, pour

4 voir s'il y a des motifs de croire que des crimes relevant de la compétence

5 de ce Tribunal ont été commis ou sont en voie d'être commis. Deuxième

6 paragraphe, il apparaît très clairement que Mme le Procureur s'adresse

7 directement à l'accusé pour lui demander son aide, même si elle transmet ce

8 courrier par la filière habituelle.

9 R. Exact.

10 Q. A l'avant dernier -- et puis elle dit qu'elle demande des informations

11 depuis plusieurs sources, à propos d'événements récents. Au paragraphe

12 suivant, Mme le Procureur demande de sa part un rapport dans lequel sont

13 consignés les noms des personnes tuées au Kosovo, en mars 1998, les noms

14 des personnes arrêtées, interpellées ou privées de leur liberté au cours de

15 ce même mois, et qu'on donne des détails sur les personnes qui sont

16 accusées par l'appareil judiciaire, les noms des personnes blessées au

17 Kosovo en mars 1998, à la suite d'acte commis par tout membre de

18 paramilitaire, de militaire, d'effectif policier, ou d'organisme civil en

19 République fédérale de Yougoslavie, ou République de Serbie.

20 Puis nous passons à la page suivante, le Procureur demande aussi à l'accusé

21 de lui fournir les noms des personnes ayant subi des violences sexuelles et

22 puis de personnes ayant fait l'objet de transfert forcé. Point suivant, le

23 nom de -- des détails concernant des biens ayant été expropriés ou détruits

24 au Kosovo. Elle poursuit en disant que tout ceci a pour vocation de

25 déterminer s'il y a eu ou pas un conflit armé et pour ce faire, elle

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1 demande aussi au gouvernement de lui fournir des informations à propos de

2 composition, les effectifs, les structures de commandement, des

3 organisations qui s'opposent aux forces gouvernementales au Kosovo, des

4 détails à propos des armes, du matériel se trouvant sur le territoire et

5 tout ce qui serait preuve de conformité au droit humanitaire international,

6 à propos des forces aussi en opposition. On demande donc des informations

7 quant aux deux parties éventuelles du conflit.

8 R. Oui, Mme Louise Arbour avait signé cette lettre le 17 mars 1998.

9 Q. Vous ne pouvez pas en parler. C'est repris ici parce que ça faisait

10 partie initiale, c'est une déclaration faite par le gouvernement fédéral.

11 Intercalaire 3, vous avez une lettre, émanant de l'ancien Procureur

12 adressée à l'accusé. La date est celle du 15 octobre 1998. Mme Arbour

13 explique qu'elle veut reprendre les enquêtes au Kosovo le plus vite

14 possible. Elle se propose d'être à la tête d'une mission -- d'une

15 délégation dont vous faisiez partie également. Elle dit ensuite, au

16 paragraphe suivant, qu'elle a l'intention de se rendre sur les lieux où

17 apparemment des crimes auraient été commis, afin de rencontrer des

18 fonctionnaires -- d'autres représentants du gouvernement.

19 Et puis au paragraphe suivant, elle demande l'obtention de visa, lettre du

20 15 octobre, n'est-ce pas ?

21 R. Exact.

22 Q. Intercalaire 4, s'il vous plaît. Il s'agit ici d'une lettre venant de

23 Zoran Knezevic, qui est ministre fédéral de la Justice, date celle du 4

24 novembre. Il fait état de la lettre du 15 octobre. Effectivement, au

25 paragraphe suivant, il présente sa version des faits. Il dit que la

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1 République est confrontée à des actions terroristes de bandes organisées,

2 de voyous. On dit, au paragraphe suivant : "les activités ont été réalisées

3 avec succès en septembre, le 29 septembre au moment où la paix était

4 rétablie. Il n'y pas de guerre au Kosovo et Metohija." Dit-il, au

5 paragraphe suivant : "Il y a des groupes terroristes composés de criminels

6 et de fanatiques religieux, qui n'ont jamais été organisés sous un

7 commandement conjoint."

8 Au bas de ce paragraphe, il dit : "Nous accueillons donc l'idée de la

9 coopération avec le Tribunal, sans acceptation sa compétence en ce qui

10 concerne un événement du Kosovo et de Metohija, puisqu'il n'y a pas eu de

11 guerre dans ces régions."

12 Page suivante, haut de la page, il affirme que les organes étatiques

13 compétents mènent des enquêtes sur tous les crimes commis à l'occasion

14 d'attaque terroriste. Il cite les chapitres pertinents du code pénal

15 fédéral, en affirmant que chaque cas, sans aucune exception, fera l'objet

16 d'une enquête circonstancier. Il dit qu'il y a une exigence visant à voir

17 la plus grande transparence pour ce qui est des procédures judiciaires et

18 qu'il y aura accès garanti au CICR.

19 Paragraphe suivant, il dit qu'il y a des experts d'autres pays, notamment,

20 la Ferland qui ont accepté l'invitation consistant à prêter assistance à

21 des actes médicaux légaux. Paragraphe suivant, il est affirmé que la

22 république fédérale s'acquitte de ses obligations internationales et montre

23 qu'elle est prête à poursuivre cette coopération réussie établie par des

24 accords mutuels envers le TPY.

25 R. Exact.

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1 Q. C'est un document qui est arrivé au bureau du Procureur, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Intercalaire 5, déclaration du gouvernement fédéral, c'est juste là

4 parce que cela se trouvait déjà dans la pièce. Vous ne pourrez pas en

5 parler.

6 Nous arrivons ainsi à l'intercalaire 6, document qui a été celui-ci ajouté

7 à la pièce qui existait déjà, la pièce 315, et dont la Chambre ne disposait

8 pas. Elle s'est envoyée par Milan Grubic. Il fait office d'ambassadeur ici

9 à la Haye. Premier paragraphe, il est dit qu'il a le plaisir d'informer Mme

10 le Juge Arbour puisque il sait qu'elle a l'intention de participer à la

11 conférence sur le Droit pénal international, du fait qu'il y aura

12 délivrance d'un visa unique pour sept jours à sa disposition et à celle de

13 la délégation.

14 Et avant dernier paragraphe, il rappelle que la République fédérale de

15 Yougoslavie est toujours prête à collaborer avec le TPY, ceci qui s'est

16 exprimé et réalisé en pratique.

17 Dernier paragraphe, il dit que la sécurité de la délégation sera garantie

18 et que les gardes -- les responsables de sécurité du TPY n'auront pas le

19 droit de porter des armes, donc, manifestement, ici il y avait eu des

20 dépenses de visas, mais pour une chose limitée ?

21 R. Et puis on dit aussi que la République fédérale de Yougoslavie

22 n'accepte pas les enquêtes menées par ce Tribunal au Kosovo, et sûrement

23 pas pendant le séjour du Procureur en République fédérale de Yougoslavie.

24 Q. Je vous remercie. Merci d'avoir ajouter ceci dans le résumé que j'ai

25 fait du document. Maintenant nous arrivons à l'intercalaire 7. Il s'agit

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1 d'une lettre envoyée par la personnalité à leur président de ce Tribunal,

2 Mme Gabrielle Kirk McDonald. La date est celle du 6 novembre 1998.

3 Pourriez-vous nous résumer la teneur de ce document ?

4 R. Tout à fait. Cette lettre a été envoyée par le président de l'époque de

5 ce Tribunal au président du conseil de Sécurité, à la demande du Procureur.

6 Et c'est une résultante de la lettre précédente. La République fédérale de

7 Yougoslavie avait refusé d'accorder des visas à son procureur et à son

8 équipe pour ce qui est de l'enquête à mener au Kosovo. Par conséquent, le

9 président du Tribunal avisait le président du conseil de Sécurité du fait

10 que la République fédérale ne s'était pas acquittée de ses obligations

11 qu'il avait envers le Tribunal, à savoir, la collaboration.

12 Q. Deuxième page de la lettre, exemple des choses mentionnées par le

13 président du Tribunal, haut de la page : "Ne serait-ce que, le mois

14 dernier, je me suis adressé au conseil en ce qui concerne le manquement

15 accusé par la République fédérale de Yougoslavie, qui n'a pas arrêté d'y

16 transférer, sous la garde du Tribunal, trois personnes mises en accusation

17 par le Tribunal, le 7 novembre 1995."

18 Est-ce que ce sont là des personnalités que l'on a appelées "les trois de

19 Vukovar" ?

20 R. Exact.

21 Q. Je vous remercie. Passons maintenant à l'intercalaire 8, lettre envoyée

22 par Mme le Procureur Louise Arbour, le 6 novembre 1998, à M. Knezevic,

23 ministre fédéral de la Justice. Elle accuse réception de sa lettre.

24 Deuxième paragraphe, elle prend note de la déclaration qu'il a fait, à

25 savoir, que je cite : "Nous acceptons la collaboration, mais pas la

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1 compétence du Tribunal." Elle appelle son intention sur le fait que ceci ne

2 cadre pas et n'est pas conforme avec le droit international. Paragraphe

3 suivant, elle mentionne le mandat qu'elle a, en tant que Procureur, et elle

4 attire l'attention de M. Knezevic sur les exigences précises imposées par

5 les conventions de Genève, et l'importance que revêt un conflit interne

6 pour d'autres juges. Elle dit, à la fin de ce paragraphe, qu'il faut

7 manifestement des enquêtes. Paragraphe suivant, elle rappelle ce qu'avait

8 réaffirmé le conseil de Sécurité s'agissant la compétence du Tribunal et,

9 au paragraphe suivant, elle dit : "Quant à savoir si le Procureur a

10 compétence pour mener ces enquêtes et dresser des actes d'accusation, là où

11 les preuves l'exige, ce n'est pas quelque chose qui peut être décidé par

12 l'autorité d'un état quelconque qui agit alors de façon unilatéral. Une

13 telle décision ne peut être faite que par prise que par le Tribunal, après

14 avoir entendu les parties présentes dans un prétoire." La lettre du 6

15 novembre ?

16 R. Exact. Lettre à M. Knezevic, à Belgrade.

17 Q. Intercalaire 9, lettre en date du 2 février 1999, lettre que vous,

18 personnellement vous avez envoyé à M. Knezevic. Puisque le Procureur était

19 absent, la lettre est en fait envoyée à l'ambassadeur à La Haye, qui dit :

20 "Nous serions gré de recevoir l'aide de l'ambassade afin que soit transmis

21 sur cette lettre puisqu'il y a dans cette lettre aussi la demande visée par

22 l'Article 7 bis (B)." Et la lettre est adressée à M. Knezevic.

23 Et puis vous avez une lettre du 2 février. La voici :

24 "M. Knezevic, je fais référence à des conversations que vous avez eues déjà

25 avec le Procureur, à propos des enquêtes qu'elle fait mener sur les

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1 événements au Kosovo. Au nom du Procureur, vu son absence à l'étranger, je

2 vous transmets, à titre d'information une demande visée par l'Article 7 bis

3 (B), vous avisant du fait que le président a informé le conseil de Sécurité

4 que la RFY n'avait pas respecté ses obligations imposées par l'Article 29

5 du Statut du Tribunal."

6 Paragraphe suivant : "Le Procureur dans ses conversations avec vous, vous a

7 dit qu'elle était prête à participer à une question -- à un débat juridique

8 quant à la compétence du Tribunal, à propos du Kosovo. Si vous voulez en

9 discuter en audience publique devant le président, le Procureur ne s'y

10 opposerait pas."

11 R. Oui.

12 Q. Suivant --

13 R. Mais je pense que l'article concerné, c'était l'Article 7 bis (B). Je

14 pense que vous avez dit 70.

15 Q. Oui. Excusez-moi, j'avais mal lu.

16 Nous avons un rapport assez complet dans cet intercalaire, inutile de

17 l'examiner dans le détail, mais peut-être que sa structure générale aidera

18 la Chambre et les personnes qui suivent ce débat.

19 Première page, vous avez sa numérotation, numéro 2, en bas de page. On y

20 expose la nature de la requête formulée. Deuxième page, numéro D, page 3,

21 elle apparaît à l'écran. Non, non, c'est très bien, tout à fait à la fin.

22 Après avoir évaluer les motifs reçus, le Procureur montre que ces

23 affirmations sont tout à fait plausibles. Elle a l'intention de montrer que

24 des crimes ont été commis au Kosovo. Le Procureur n'a pas à déterminer

25 davantage s'il est nécessaire de diligenter une enquête. Nous avons

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1 maintenant des pages qui vont du numéro 3 au numéro 8. On dresse le

2 contexte de cette requête. Vous avez relu ceci hier soir, je pense. Vous

3 vous êtes remémorer tout ceci. On parle notamment des événements de Racak ?

4 R. Exact.

5 Q. Est-ce qu'on parle aussi de la conformité ou du non-respect de certains

6 types de questions ?

7 R. Oui.

8 Q. Et est-ce qu'on peut voir aussi des sources des griefs alléguant le

9 non-respect ?

10 R. Oui.

11 Q. Page 8, bas de page, résumé de la décision, on estime qu'il y a

12 suffisamment de motifs pour diligenter une enquête ?

13 R. Oui.

14 Q. Inutile d'appeler l'attention des Juges sur quoi que ce soit à ce

15 propos.

16 Passage suivant, nous avons la page 11, paragraphe 13. Il s'agit

17 d'infractions. C'est cela intitulé "Infractions relevant de la compétence

18 du Tribunal." Il y est dit -- nous le voyons vers le milieu de l'écran :

19 "Deuxièmement, des informations tout à fait dignes de foi tendent à montrer

20 que les événements, qui se sont produits au Kosovo, se poursuivent et

21 risquent de représenter des infractions graves du droit humanitaire

22 international."

23 Page suivante, bas de la page, paragraphe 15 : "Alors que le Procureur a pu

24 déterminer que les renseignements recueillis ont tendance à montrer que les

25 crimes relèvent de la compétence du Tribunal -- ou plutôt des crimes

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1 relevant de la compétence du Tribunal, risquent d'avoir été commis au

2 Kosovo. Elle n'est pas en mesure maintenant de savoir quel est l'article du

3 Statut, qui a été violé. Il faut maintenant déterminer avec suffisamment de

4 certitude s'il y a preuves de commission d'infractions à l'un ou à

5 plusieurs articles du Statut du Tribunal et il faut déterminer si le

6 Procureur doit engager des enquêtes à propos de ces événements brutaux qui

7 se sont produits au Kosovo."

8 R. Exact.

9 Q. Nous avons ensuite un autre passage qui porte sur l'existence d'un

10 conflit armé. Ceci se poursuit jusqu'à la page 16 -- de la page 13 à la

11 page 16. Inutile de vous poser des questions à ce propos; cependant,

12 prenons la page 16 -- bas de la page 16. On y trouve une synthèse des

13 preuves fondant l'affirmation. Page 17, en guise d'exemple, simplement

14 paragraphe 24. On dit ceci : "Comme les paragraphes suivants le montrent,

15 il y a eu des affrontements violents entre les forces armées." On précise

16 quelles sont ces forces et ceci "a trouvé son apogée seulement en 1998.

17 Cependant, des renseignements venant notamment d'organisation

18 intergouvernementale et non gouvernementale font état d'une longue histoire

19 de violations graves des droits de l'homme."

20 Paragraphe suivant : "L'assemblée générale des Nations Unies, en décembre

21 1996, condamne toutes ces violations aux droits de l'homme au Kosovo."

22 R. Exact.

23 Q. Et puis, au paragraphe suivant, on parle de la visite effectuée par Mme

24 Rehn, rapporteur spécial au Kosovo en octobre 1997. On y trouve ses

25 conclusions ainsi que d'autres renseignements.

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1 Je passe à la page suivante. Paragraphe 27 : "A survenu de ces événements

2 violents et comme le montre la plupart des sources disponibles qui trouve

3 leur origine pas seulement du côté serbe. Tout ceci est confirmé par la

4 RFY. Son ministre de la Justice dans sa lettre du 24 mars 1998 adressée au

5 bureau du Procureur reconnaît qu'au cours des dernières années dans la

6 province de Kosovo et Metohija, au sud de la Serbie, il y a beaucoup

7 d'attaques terroristes."

8 R. Exact.

9 Q. Le rapport montre les deux côtés, n'est-ce pas, et par les événements

10 qui se sont produits de part et d'autres.

11 Paragraphe 28, on parle du rapport complet préparé par l'organisation Human

12 Rights Watch. On y trouve une partie de ce rapport à la page 18 ainsi qu'à

13 la page suivante.

14 R. Exact.

15 Q. Passons maintenant à la page 20. Il y a un rapport du secrétaire

16 général en application des résolutions 1160 et 1199 du 3 octobre 1998. On y

17 voit les conclusions tirées. Je prends un exemple à la page 21, au bas de

18 la page : "Je suis indigné par ce que j'entends dire de massacres de civils

19 au Kosovo qui rappelle les atrocités commises en Bosnie-Herzégovine. A la

20 suite de rapports portant sur l'assassinat de 20 Albanais du Kosovo qui

21 avaient été déplacés à l'intérieur de la région à Gornje Obrinje dans la

22 région centrale de Drenica, le 28 septembre, une mission d'observateurs

23 diplomatiques au Kosovo a été le témoin de la présence d'au moins 14

24 cadavres, certains étant très gravement mutilés. La plupart étant des

25 femmes et des enfants de 18 mois à 95 ans. Les autorités serbes nient toute

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1 participation des forces policières à ces atrocités."

2 Page suivante, on trouve toujours ce même rapport. Là, on voit, si vous

3 voulez, l'autre version des faits : "Alors que si la plupart des victimes

4 sont des Albanais du Kosovo, il y a des souffrances subies également par

5 les Serbes du Kosovo."

6 R. Exact.

7 Q. Donc vous, vous envoyez un rapport au nom du bureau du Procureur et

8 vous avez essayé d'être équitable, n'est-ce pas ?

9 R. C'est ce que je dirais.

10 Q. Page 23 du rapport, paragraphe 31, référence à Racak et de la position

11 adoptée par l'ambassadeur William Walker.

12 R. Exact.

13 Q. Page 24, paragraphe 32, réactions de la communauté internationale qui

14 fournisse d'autres indices de l'existence d'un conflit armé.

15 R. Exact.

16 Q. Pour bien garder les deux aspects du problème en tête, paragraphe 33 :

17 "Les informations publiques tentent à montrer que l'armée de libération du

18 Kosovo peut être considéré comme le groupe armé principal et suffisamment

19 organisé et qui a une responsabilité dans l'opposition violente apportée

20 aux forces militaires et policières de la RFY et la République de Serbie."

21 R. Exact.

22 Q. A la page suivante, nous voyons les conclusions tirées par le

23 Procureur. Paragraphe 36, le Procureur conclut que les informations sont

24 dignes de foi et que des crimes relevant de la compétence du Tribunal

25 peuvent avoir été commis au Kosovo. Elle conclut que les informations tout

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1 à fait dignes de foi tendent à montrer qu'il y a peut-être existence d'un

2 conflit armé au Kosovo et que des combats se sont produits et se

3 poursuivent entre deux parties. Les forces militaires et policières en

4 rapport avec ou liées à la République fédérale de Yougoslavie et la

5 République de Serbie d'une part et des unités et groupes armés et organisés

6 dont l'armée de libération du Kosovo associée à la communauté albanaise du

7 Kosovo, d'autre part. Le niveau d'intensité de la violence à laquelle les

8 groupes armés ont recours peut être utilisé par l'appel aux forces armées

9 fait par la République fédérale de Yougoslavie mais aussi par l'incidence

10 dévastatrice ce que ceci a sur la population civile. Et ceci se montre

11 aussi par l'implication, la participation de la communauté internationale.

12 R. Exact.

13 Q. C'est un rapport que vous avez envoyé à un moment où le Procureur était

14 absent ?

15 R. Oui.

16 Q. Vous ne pouvez pas parler de l'intercalaire 10 puisque ceci se trouvait

17 déjà dans la pièce initiale.

18 Intercalaire 11, nous avons le 26 mars 1999, lettre envoyée par le

19 Procureur à l'ambassadeur à La Haye, M. Milan Grubic. Elle lui demande

20 qu'il transmette la lettre versée en annexe de façon urgente à l'accusé en

21 l'espèce et à d'autres hauts fonctionnaires qui sont aussi censés être les

22 destinataires de cette lettre ?

23 R. Exact.

24 Q. Elle y précise qu'elle va rendre public l'envoi de ces lettres ?

25 R. Oui.

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1 Q. Et nous arrivons à la toute dernière lettre de la pièce qui nous

2 intéresse et qui se trouve à l'intercalaire 12, lettre en date du 26 mars

3 adressée au présent accusé.

4 Premier paragraphe : "Vous le savez, le fait que la République fédérale de

5 Yougoslavie n'a pas collaboré avec mon bureau en ce qui concerne les

6 enquêtes amenées sur les crimes de guerre au Kosovo, a été rapporté par le

7 président de ce Tribunal au conseil de Sécurité des Nations Unies. Non

8 seulement les enquêteurs n'ont pas pu aller au Kosovo pour y mener leurs

9 propres enquêtes sur les lieux mais le débat du personnel de la mission de

10 vérification au Kosovo de l'OSCE signifie que maintenant il n'y a vraiment

11 plus présence d'observateurs indépendants."

12 "Dans ce contexte et la lumière de rapports récents à propos de l'escalade

13 de la violence au Kosovo, je suis vraiment préoccupée par les infractions

14 graves au droit international humanitaire qui se poursuivent. Si vous avez

15 le moindre doute quant à la législation pertinente, nous vous envoyons

16 copie des parties les plus importantes du Statut du Tribunal pénal

17 international, y sont énoncés les paragraphes montrant la compétence."

18 Dernier paragraphe, elle dit : "J'ai pour intention d'enquêter sur toutes

19 les violations graves au droit international humanitaire qui méritent

20 poursuite dans l'enceinte internationale, surtout lorsqu'il y a attaque sur

21 la population civile. Dans l'intervalle, je crois qu'il faut tout faire

22 pour empêcher que d'autres crimes soient commis à l'avenir. Je m'adresse

23 donc à vous afin que vous fassiez utilisation de votre autorité sur vos

24 subordonnés, que vous soyez un chef et que vous empêchiez, à ce titre, la

25 commission d'autres crimes et de prendre toutes les mesures nécessaires

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1 afin d'empêcher que vos subordonnés commettent d'autres infractions graves

2 au droit international humanitaire au Kosovo."

3 Donc, entre mars 1998 et mars 1999, le bureau du Procureur a fait tout ce

4 qui était en son pouvoir pour mener des enquêtes sur des renseignements

5 qu'elle recevait de plusieurs sources ?

6 R. Oui.

7 Q. Et à votre sens, l'accusé a-t-il été informé directement par les

8 premières et les dernières lettres mais aussi par l'ensemble de lettres qui

9 ont été adressées à des responsables de l'état. A-t-il été informé de ce

10 qu'on savait, le bureau du Procureur à l'époque ?

11 R. C'est tout à fait exact.

12 Q. Je vous remercie. On vous posera d'autres questions au sujet des

13 lettres.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Alors, nous allons maintenant préciser ce

15 qui en est de la pièce 315. Donc, c'est la nouvelle pièce à conviction 315.

16 Je demande au Greffe de remplacer le sommaire et d'y placer donc le

17 sommaire tel qu'il apparaît à présent sur la nouvelle pièce.

18 Monsieur Milosevic, vous avez la possibilité de poser des questions au

19 témoin dans le cadre du contre-interrogatoire à présent.

20 Le contre-interrogatoire de ce témoin se limite aux questions qui ont été

21 abordées pendant l'interrogatoire principal, ainsi donc son champ sera

22 limité. Et la raison en est que ce témoin a été cité à la barre

23 exclusivement afin de présenter ces documents et cet échange épistolaire.

24 Ceci a été fait, vous vous en rappellerez, parce que nous avons eu ici un

25 enquêteur précédemment et un témoin et il a été considéré qu'il ne pouvait

Page 28326

1 pas servir au versement de ces pièces. C'est la raison pour laquelle la

2 Chambre a pensé qu'un représentant plus haut placé du bureau du Procureur

3 devait être présent pour que vous puissiez le contre-interroger là-dessus.

4 Vous avez donc la possibilité de le faire, mais je vous préviens que le

5 champ de ce contre-interrogatoire est limité comme je viens de le préciser.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, puisque M. Nice vient de

7 constater à l'instant et ce sur la base des commentaires se fondant sur des

8 lettres échangées entre M. Blewitt, Madame Arbour et le gouvernement

9 yougoslave au sujet de la conduite de ma partie qui s'est comportée de

10 manière objective et impartiale, vous ne pouvez pas limiter mon droit

11 d'interroger l'objectivité et l'impartialité de la partie qui est

12 représentée ici en l'espèce par Messieurs Blewitt et Nice --

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous pouvez limiter le champ de mon contre-

15 interrogatoire mais non ce dernier point.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous venez de m'entendre. Votre contre-

17 interrogatoire se limite aux questions qui ont été abordées pendant

18 l'interrogatoire principal.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Précisément c'est de cela que je suis en train

20 de parler, à savoir, pendant l'interrogatoire principal, M. Nice a constaté

21 l'objectivité et l'impartialité de ce que représente ou ce qu'avance M.

22 Blewitt.

23 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il a constaté -- il n'a pas soulevé des

24 questions au sujet de l'objectivité. Il s'est contenté d'exprimer des

25 commentaires au sujet des lettres.

Page 28327

1 A présent vous avez la possibilité de le faire vous aussi. Et les questions

2 qui concernent l'objectivité ne sont pas pertinentes.

3 M. Tapuskovic, je ne pense vraiment pas que vous puissiez intervenir à ce

4 stade.

5 Je vous en prie, Monsieur Milosevic.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, êtes-vous en train de m'interdire

7 la possibilité de mettre en cause la crédibilité de ce témoin ?

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, c'est ce que je suis en train de

9 faire. Je vous prie d'avancer.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, nous avons ici un document, ou

11 plutôt votre document, le document qui porte toutes les

12 -- tous les éléments d'identification prouvant qu'il s'agit de votre

13 document, il s'agit d'un document final qui a été soumis par le Procureur à

14 une commission qui a été constitué afin d'examiner la campagne de

15 bombardements de la Yougoslavie par l'OTAN --

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Très précisément, c'est ce que je suis en

17 train d'essayer de vous préciser. Ceci n'a aucune pertinence. Vos questions

18 se limitent au champ de l'interrogatoire principal. Vous n'avez pas la

19 possibilité ici de rentrer dans toutes les questions concernant la bonne

20 foi du Procureur.

21 Si vous avez des questions à poser au sujet de ces points-là, vous êtes

22 libre de le faire, sinon je considérerai que vous n'avez pas de questions.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au contraire, Monsieur May. J'ai bien des

24 questions à poser mais vous ne contesterez pas le fait que ceci peut être

25 mis en relation avec la lettre émanent de Mme Arbour.

Page 28328

1 Contre-interrogatoire par M. Milosevic :

2 Q. [interprétation] En se fondant sur vos critères, Monsieur May, et

3 compte tenu de la lettre envoyée par Mme Arbour le 26 mars 1999 à moi-même

4 - donc Monsieur May, je me réfère là à une lettre -

5 il est dit ici qu'il y a des responsabilités qui sont engagées de la part

6 des fonctionnaires haut placés. Et bien je vous prie de m'expliquer la

7 chose suivante, puisqu'on dit que des responsabilités sont engagées des

8 personnes haut placées --

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] A l'intercalaire -- laissez -- laissez

10 le témoin consulter l'intercalaire 12 de ce document. Le témoin doit avoir

11 le document sous les yeux --

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Je suis en train de dire qu'il y a là des responsables les plus hauts

14 placés. Alors ma question est la suivante : J'ai ici votre rapport et dans

15 ce rapport --

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous vous référez à quel rapport ?

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me réfère au rapport qui a été soumis par la

18 commission chargée d'étudier la campagne de bombardements aériens de l'OTAN

19 contre la Yougoslavie. C'est le contraire que l'on voit ici.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci n'a aucune pertinence. Quelle est la

21 question que vous souhaitez poser au sujet de cela. Tout simplement, s'il

22 vous plaît, reportez-nous au document, à l'intercalaire 12, au sujet du

23 quel paragraphe souhaitez-vous poser des questions ? Je n'ai pas retrouvé

24 cela.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, Mme Arbour dit qu'il y a des

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1 personnes hauts placés qui sont responsables -- et ceci figure dans la

2 lettre. Vous pouvez le retrouver. Or dans ce document, dans le document que

3 je suis en train de citer, il est dit --

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je vous prie de vous occuper de ce

5 document. Où est-ce que l'on peut voir cette mention à savoir qu'il y a des

6 responsables hauts placés ? A quel paragraphe vous référez-vous ?

7 M. NICE : [interprétation] C'est le dernier paragraphe, Monsieur le

8 Président, j'en ai donné lecture.

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Que voit-on ici ? "Cependant par

10 conséquence, je m'intéresse à vous afin d'exercer votre autorité sur vos

11 subordonnés ainsi que votre qualité de dirigeant," et cetera.

12 Monsieur Milosevic, quelle est votre question ?

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Monsieur Blewitt, dans cette lettre ou plutôt dans la lettre signée par

15 Mme Arbour, vous constatez que les responsabilités sont engagées les

16 responsabilités des personnes les plus hautes placées. Alors comment est-il

17 possible que lorsque vous examinez la question, la responsabilité de l'OTAN

18 dans son agression contre la Yougoslavie, vous dites en page 40 --

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais ceci manque de pertinence. Nous

20 n'allons pas rentrer dans une polémique ici au sujet du bureau du Procureur

21 disant que le bureau du Procureur n'a pas employé les mêmes termes que les

22 autres. Que ce soit vrai ou non, ceci n'est pas pertinent. Ce témoin, M.

23 Blewitt, est venu ici pour déposer au sujet uniquement de cet échange

24 épistolaire. Il n'est pas ici pour rentrer dans une polémique au sujet

25 d'autres lettres.

Page 28330

1 A présent, c'est à vous de voir si vous voulez présenter des moyens de

2 preuve au sujet de ce document. Vous serez libre de le faire en temps voulu

3 mais à présent, je vous prie de poser des questions pertinentes, et votre

4 polémique au sujet d'autres lettres manque de pertinence.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ce sont des arguments qui émanent

6 précisément de la lettre qui émane de la même source, et qui contredisent

7 ce que l'on lit dans cette lettre. Ce que je ne comprends pas --

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Avez-vous d'autres questions ? Avez-vous

9 la moindre question d'autre nature ? Si vous ne posez pas des questions

10 comme l'a décidé cette Chambre, vous n'aurez pas la possibilité de les

11 poser.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, il y a un instant Monsieur Nice a

13 cité la lettre du 26 mars --

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons déjà entendu cette

15 affirmation. A présent, je vous prie de passer à autre chose. Avancez.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Dans cette lettre, est-il clair, Monsieur Blewitt, que cette lettre a

18 été envoyée deux jours après le début de l'agression menée par l'OTAN

19 contre la Yougoslavie, l'agression qui a débuté le 24 mars?

20 R. Je ne me rappelle pas la date du début des bombardements de l'OTAN. Je

21 suppose que la date que vous citez est exacte. Et en effet cette lettre-ci

22 aurait été envoyée deux jours après le début de ce bombardement.

23 Q. Et dans cette lettre, comme vous pouvez le voir vous-même, il est dit

24 que les violences s'accroissent au Kosovo, n'est-ce pas, Monsieur Blewitt ?

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Dans quelle lettre ? Deuxième paragraphe

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1 à l'intercalaire 12 ?

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. C'est ce qui figure dans la lettre du 26 mars. Et bien n'y voit-on pas

4 clairement que les violences deviennent de plus en plus intenses suite au

5 début de l'agression menée par l'OTAN contre la Yougoslavie ?

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Ce témoin ne rentrera pas là-dedans.

7 Si vous souhaitez poser des questions au sujet de ces documents, vous êtes

8 libre de le faire, mais nous n'allons pas pouvoir continuer ainsi puisque

9 ceci n'est pas utile du tout. Le témoin n'est pas ici pour subir une

10 attaque toute azimute adressée au bureau du Procureur, que vous semblez

11 prêt à lancer. Il est ici pour vous répondre au sujet de ces lettres.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, moi aussi je parle au sujet de cette

13 lettre, Monsieur May. Je me réfère à ces lettres aussi. Et si vous ne me

14 permettez pas de présenter des arguments afin de questionner la crédibilité

15 de ces lettres par cette même personne, la personne qui envoie les lettres.

16 M. LE JUGE MAY : [interprétation] J'ai pris la décision. Je viens de vous

17 la communiquer. Au lieu de rentrer dans un débat au sujet de cette

18 discussion, il voudrait mieux que vous commenciez votre contre-

19 interrogatoire sur des questions pertinentes.

20 Et comme vous le savez, toute question au sujet de l'OTAN manquerait de

21 pertinence pour ce qui est de ce témoin-ci.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je comprends que vous -- que

23 toute mention de crimes commis par l'OTAN en Yougoslavie est une question

24 très délicate pour vous.

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci est une remarque qui est tout à fait

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1 inappropriée, comme vous le savez parfaitement. Nous n'allons pas continuer

2 de cette manière. Soit vous allez poser des questions pertinentes, soit

3 nous allons suspendre l'audience.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je considère qu'il s'agit de question

5 pertinente, et je les mets en relation --

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] L'on vous a dit que la Chambre ne partage

7 pas votre avis, et je vous prie de vous conformer à la décision de la

8 Chambre.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, je reviendrai à cela à un autre

10 moment.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Vous avez cité par exemple la lettre émanant de M. Knezevic, le

13 ministre de la Justice. Je suppose que je suis en droit au moins de me

14 référer à cela. Et dans cette lettre, il dit que la Yougoslavie n'accepte

15 pas la compétence du Tribunal pénal, pour ce qui est des événements qui se

16 sont produits au Kosovo.

17 Monsieur Blewitt --

18 M. NICE : [interprétation] Il me semble que c'est

19 intercalaire 4.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Vous êtes un juriste compétent dans le droit international, n'est-ce

22 pas ? C'est cela votre domaine de travail.

23 R. C'est en Australie que je me suis qualifié dans le domaine du droit,

24 avant tout dans le domaine du droit pénal. Je ne pense pas pouvoir affirmer

25 que je suis un expert en la matière du droit international.

Page 28333

1 Q. Et aujourd'hui, le poste que vous occuper, et bien c'est le poste où

2 vous avez été désigné sur la base de la décision prise pour le conseil de

3 Sécurité. Le conseil de sécurité à décider de créer ce Tribunal, comme il

4 l'appelle.

5 R. J'ai été nommé par le secrétaire général de l'organisation des Nations

6 Unies, après la création de cette institution par le conseil de Sécurité.

7 Q. Très bien. Vous venez de dire que c'est le conseil de Sécurité qui a

8 créé ce Tribunal ? Vous en tant que juriste, savez-vous que le conseil de

9 Sécurité n'a pas la compétence de créer le moindre Tribunal ?

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez. Il ne s'agit pas d'une question

11 qu'il convient de poser à ce témoin. Nous avons déjà pris notre décision

12 là-dessus. Il s'agit d'une question juridique.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, si vous vous souvenez bien, je

14 vous ai demandé de consulter la Cour internationale de justice de trancher

15 là-dessus puisque c'est de sa compétence qu'il relève en question de droit

16 international. Et vous ne l'avez pas fait puisque vous savez pertinemment

17 que cette instance aurait tranché que votre Tribunal n'est pas légal.

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous avez évoqué ce point à de nombreuses

19 reprises, et nous l'avons entendu. Je vous prie à présent de trouver une

20 question que vous pourriez poser à ce témoin afin qu'il puisse y répondre.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il semblerait que les seules questions

22 auxquelles peut répondre ce témoin, c'est des questions quant à savoir si

23 ces lettres ont été envoyées ou non.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Monsieur Blewitt, ne voit-on pas clairement dans cette lettre émanant

Page 28334

1 du ministre Knezevic, par laquelle il vous répond que vous n'avez pas

2 compétence pour pouvoir rentrer dans la question des événements qui se

3 produisent au Kosovo ? Et je cite cette lettre : "Au cours de cette année,

4 la République de Serbie a dû faire face à l'activité terroriste des groupes

5 de bandits dans une partie du Kosovo et Metohija où il y a eu un grand

6 nombre d'attaques terroristes, commis à l'encontre des citoyens de toute

7 nationalité. Or donc, ces groupes ont commis des crimes graves à l'encontre

8 des citoyens membres de toutes les communautés nationales. Grâce à une

9 action décisive entreprise par la police, ces activités ont été maîtrisées

10 et les groupes clé ont été détruits. Les activités de la police ont été

11 menées à leur terme avec succès le 29 septembre, depuis que ce moment-là la

12 paix a été rétablie sur l'ensemble du territoire du Kosovo et Metohija. Les

13 citoyens qui avaient été forcés temporairement à quitter leur foyer à cause

14 des attaques terroristes sont en train de revenir chez eux. L'activité

15 économique sociale et publique au Kosovo et Metohija est en train d'être

16 normalisée rapidement."

17 Et par la suite, il est dit que : "Ceci n'a pas été une guerre au Kosovo et

18 Metohija. Les groupes terroristes constituaient de criminels et des

19 fanatiques religieux n'ont jamais été organisés ou placés sous un

20 commandement conjoint, et non plus n'ont-ils pu contrôler le territoire.

21 Ils n'ont pas respecté les lois d'humanité fondamentales. Ils ne peuvent

22 pas être considérés comme étant une armée. Rien ne peut les permettre de

23 les considérer comme telle. La communauté internationale a clairement

24 défini ses actions, les actions de ces groupes en tant que terroristes.

25 Le savez-vous, Monsieur Blewitt, que la communauté internationale les a

Page 28335

1 qualifiés de terroristes ?

2 R. Tout d'abord, le ministre Knezevic a fait rapport de ces choses dans sa

3 lettre adressée à l'ex-Procureur, Mme Louise Arbour. C'est un premier point

4 que je tiens à préciser. Je ne me rappelle pas précisément qu'elles ont été

5 les propos de la communauté internationale au sujet des événements qui

6 étaient en train de se produire au Kosovo. Pour ce qui est donc de ces

7 crimes allégués qui auraient été commis par des Albanais de souche, quant à

8 savoir s'ils avaient été décrits comme terroristes ou pas, je n'arrive pas

9 à me le rappeler sur le champ.

10 Q. 1160, c'est la résolution que je cite de l'année 1998. Il est dit ici le

11 conseil de Sécurité lors de sa réunion, numéro x qui s'est tenue le 31

12 mars, il est dit explicitement : "Des actes de terroristes commis par

13 l'armée de libération du Kosovo, ou tout autre groupe ou individu, ainsi

14 que tout appui extérieur afin de soutenir les activités terroristes au

15 Kosovo, y compris l'entraînement et le recours aux armes," et par la suite,

16 l'on voit ici que : "L'on invite les dirigeants des Albanais kosovars à

17 condamner toute action terroriste et qu'ils insistent sur le fait que tous

18 les protagonistes de la communauté albanaise du Kosovo devraient rechercher

19 une solution exclusivement pacifique ou à recourir uniquement à des moyens

20 spécifiques afin d'achever ces objectifs."

21 Et puis au point 3, il est souligné également qu'il faut combatte la

22 violence et le terrorisme.

23 Et puis plusieurs fois, dans le texte de la Résolution 1160, il est fait

24 référence à cela et puis, encore une fois, la Résolution 1199 du

25 23 septembre 1998, il est fait condamnation de tous les actes de violence

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1 par quelque partie que ce soit, aussi bien du recours au terrorisme dans la

2 poursuite des objectifs politiques par tout groupe ou individu.

3 Puis au point 6 de cette résolution, il est dit encore une fois qu'on

4 insiste sur le fait que l'assassinat -- et là je vous donne lecture : "On

5 insiste sur le fait que les dirigeants des Kosovars condamnent toute action

6 terroriste." Et ceci est réitéré encore une fois, donc les positions sont

7 réitérées à ce sujet.

8 Puis vous avez aussi la résolution puisque vous n'arrivez pas à vous

9 rappeler. Il faut bien que je vous rafraîchisse la mémoire. Vous avez la

10 Résolution 1203 qui, encore une fois, fait mention du terrorisme dans la

11 poursuite de la réalisation des objectifs politiques et insiste auprès des

12 dirigeants albanais de condamner les actes de terrorisme.

13 En d'autres termes, bien, vous savez que ce qui est écrit ici par le

14 ministre de la Justice et le moment où il évoque le fait que la communauté

15 internationale a, elle aussi, de manière très claire, qualifié ces actes

16 d'actes terroristes. Donc vous savez qu'il s'agit ici de terrorisme, n'est-

17 ce pas ? Un point clair, Monsieur Blewitt.

18 R. Oui. J'admets ce que vous êtes en train de dire, à savoir qu'il s'agit

19 des points qui ont été contenus -- qui ont été dits dans des résolutions de

20 conseil de Sécurité.

21 Q. N'est-il pas clair, Monsieur Blewitt, que vous, vous-même, précisément

22 par ces actions que vous avez menées, vous avez attisé le terrorisme au

23 Kosovo et vous avez protégé le terrorisme au Kosovo, et c'est le seul

24 endroit de la planète où le terrorisme a bénéficié de la protection ?

25 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble qu'il s'agit

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1 là d'une affirmation inappropriée ou d'une question inappropriée, à moins

2 que l'on soit en train de suggérer que ce sont ces lettres qui ont mené à

3 ça, mais je ne suis pas sûr si l'accusé est en train de le dire.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Je suppose que c'est cela la question. Le

5 témoin peut répondre.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'admets pas du tout qu'il s'agit ici de

7 protéger le terrorisme d'une manière quelle qu'elle soit. La position du

8 Procureur a été claire. Nous devions mener des enquêtes sur toutes les

9 violations du droit humanitaire international au Kosovo.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur Blewitt, dans sa lettre, Mme Arbour apporte un argument

12 supplémentaire en disant que la commission de Vérification n'a pas pu se

13 rendre au Kosovo, et ce qui est dit dans sa lettre du 26 mars, mais ce

14 déplacement a été retardé pour qu'on rendre possible le bombardement de

15 l'OTAN afin d'apporter son appui au terrorisme au Kosovo. Ce n'est pas

16 clair ?

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il s'agit là d'une question inappropriée.

18 Passez à autre chose.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur May, on dirait que toutes les

20 questions que je pose sont inappropriées.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Oui. Essayez de faire en sorte de

22 trouver une question appropriée.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, nous avons ici une situation au

24 terme de laquelle vous êtes, soit disant accusation, témoigne en faveur de

25 ses propres allégations et c'est encore à moins qu'il convient de préciser

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1 quelles sont les questions que je puis leur poser pour qu'ils puissent

2 témoigner au sujet de ce qu'ils font eux-mêmes. C'est véritablement une

3 farce qui ne mène vraiment à rien.

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Monsieur Blewitt, apparemment

5 l'accusé n'a plus d'autres questions à vous poser.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'ai beaucoup de questions à poser à M.

7 Blewitt.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Donc des questions correctes, Monsieur

9 Milosevic. Pour expliquer la situation, parce que, manifestement, vous ne

10 comprenez pas ce qui se passe, le présent témoin est ici à cette fin-là

11 seule. Ce que l'Accusation essaie de prouver, en versant ces documents,

12 c'est que ces questions ont été portées à votre connaissance, à savoir,

13 l'existence de crimes qui auraient été commis, d'autres infractions du

14 droit international humanitaire que tout ceci avait été porté, à l'époque,

15 à votre connaissance, et c'est pour ça qu'on parle de ces lettres. Le

16 témoin ne dépose pas de façon générale au nom de l'Accusation, de façon --

17 ça c'est certain. Ceci, aucun procureur ne saurait le faire; cependant, ce

18 qu'un procureur peut faire, c'est produire des éléments de preuve sur des

19 points précis. Or ici il s'agit d'un point précis.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, si vous souhaitez de la sorte prouver que

21 le bureau du Procureur -- ou le soi-disant bureau du Procureur était tenu

22 de m'informer de ce qui se passait au Kosovo, et bien, partant des échanges

23 de lettres que vous avez montrées, vous-même, ici.

24 Il y a une lettre du ministre de la Justice au tout début de la page 2, de

25 l'original, où il dit : "Les instances compétentes de l'état, suivant une

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1 procédure prescrite, se penche sur tous les délits pénaux perpétrés pendant

2 l'attaque." Et vous savez pertinemment bien, partant des témoignages que

3 vous avez entendus ici, que la position de la direction et de moi-même

4 avait été celle de poursuivre en justice tous les crimes de guerre au

5 Kosovo et, d'une manière générale, tout crime de guerre.

6 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Oui. Nous avons ces lettres. Il est

7 certain que nous allons en tenir compte et vous pourrez les évoquer en

8 temps utile.

9 Est-ce que vous avez beaucoup d'autres questions à poser à ce témoin ?

10 Avez-vous d'autres documents sur lesquels vous souhaitez appeler votre

11 attention, comme vous l'avez fait avec le dernier document ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur May, vous avez limité mon droit

13 pour ce qui est d'attirer l'attention du témoin sur quelque document que ce

14 soit si ce n'est les lettres qui sont citées ici. Je voulais attirer son

15 attention sur un document ici, qui démontre clairement qu'il s'agit ici

16 d'un écran de fumée destiné à dissimuler les crimes perpétrés par l'OTAN.

17 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Fort bien. Fort bien. Avançons. Trouvez

18 une question qui soit correcte.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Monsieur Blewitt, aviez-vous connaissance à l'époque de la rédaction de

21 ces lettres-ci ? Aviez-vous donc connaissance des renseignements disant

22 qu'au mois de mars 1998, au Kosovo, il y avait intervention de groupes

23 terroristes divers, en corrélation avec Osama bin Laden qui a séjourné,

24 précisément pour ces raisons-là, en Albanie et non pas pour développer des

25 relations diplomatiques entre l'Afghanistan et l'Albanie. Est-ce que vous

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1 avez connaissance --

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Tenons-nous en aux faits ? Quelle est la

3 question que vous voulez poser ?

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Ma question est la suivante : compte tenu du travail que vous

6 effectuez, Monsieur Blewitt, et en corrélation avec cette lettre du mois de

7 mars 1998, y a-t-il une obligation de l'état à l'égard du terrorisme et des

8 activités terroristes ? Est-ce qu'à votre avis, le terrorisme doit pouvoir

9 bénéficier de la protection de ce que l'on désigne par droit pénal

10 international ?

11 R. Manifestement, pas; cependant, ce Tribunal est chargé de poursuivre des

12 infractions graves au droit international humanitaire, comme le dit le

13 Statut de ce Tribunal.

14 Q. Mais c'est précisément de ces événements du mois de mars 1998 que

15 l'émissaire spécial du président américain, M. Gelbard, avait décrit

16 officiellement en se servant du terme de terrorisme au Kosovo et Metohija.

17 Et vous vous intervenez pour écrire des lettres aux fins de protéger ce

18 terrorisme au Kosovo et Metohija. Je crois que les choses sont claires, ou

19 ne le sont-elles pas ? Avez-vous, ou que ce soit, vérifié ces

20 renseignements-là ? Avez-vous procédé, ou que ce soit, à des enquêtes de

21 quelque nature que ce soit pour constater le volume du terrorisme --

22 l'envergure du terrorisme, les modalités de financement et les objectifs de

23 ce terrorisme et la façon dont ce terrorisme a établi des corrélations et

24 des relations avec l'administration de Clinton qui a procédé à une

25 agression contre la Yougoslavie ?

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous nous écartons considérablement de ce

2 que pourrait vous dire le témoin en guise de réponses.

3 Le témoin a déjà répondu à ce que vous disiez pour ce qui est de la

4 protection du terrorisme. Il l'a montré clairement. Il a dit qu'il était

5 exclu que ce genre de chose se produise.

6 Je vais vous dire ceci. Vous disposez d'une heure pour le contre-

7 interrogatoire de ce témoin. C'est notre décision. Vous avez déjà bénéficié

8 de la moitié de ce temps. Pensez-y lorsque vous façonnez vos questions.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, c'est dénué de sens que de

10 limiter le temps qui m'est imparti si vous ne me permettez pas de poser des

11 questions -- les questions que j'ai l'intention de poser. Je ne comprends

12 pas l'objectif de la farce que vous êtes en train de mettre sur scène.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Etant donné que vous parlez de violations des droits de l'homme,

15 Monsieur Blewitt, violations des droits de l'homme dont traiteraient les

16 organes judiciaires de la Yougoslavie, chose qui n'est d'ailleurs pas

17 contestée, avez-vous demandé des renseignements de la part des instances

18 compétentes pour ce qui est de l'intervention des groupes terroristes au

19 Kosovo de nature variée -- à objectif varié ? Je ne vais pas donner tous

20 leurs noms à présent.

21 R. Oui, je crois que, dans la lettre du Procureur, Mme Arbour, qui vous a

22 adressé personnellement le 17 mars 1990, le demande expressément formule

23 ce genre de requête.

24 Q. Avez-vous demandé des renseignements de la part des autres institutions

25 pertinentes de la part de l'Interpol et autres, qui disposent certainement

Page 28342

1 de renseignements concernant le terrorisme international et les relations,

2 les liaisons terroristes qui sont déployées et qui ont été placées au

3 service de la confection de ce prétendu acte d'accusation à mon encontre

4 pour ce qui est du Kosovo ? Ou alors, avez-vous centré votre attention

5 exclusivement sur ce que l'on disait au sujet du gouvernement yougoslave

6 qui se défendait du terrorisme ?

7 R. Je n'accepte pas ce que vous affirmez dans votre question. Ce que je

8 peux vous dire c'est que le Procureur a essayé d'obtenir toutes les

9 informations possibles de toutes les sources pertinentes possibles. Je ne

10 peux pas vous dévoiler ici les sources auprès desquelles nous avons

11 recherchées ces renseignements.

12 Q. Bien. Vous voulez me dire par là que vous disposez de ces

13 renseignements-là et qu'ils existent des services qui vous auraient fourni

14 des informations de cette nature, n'est-ce pas ? Mais vous affirmez ne pas

15 pouvoir les communiquer ?

16 R. Ce que je dis c'est qu'effectivement, que nous avons cherché à obtenir

17 des renseignements solides d'une grande quantité de sources. Nous avons,

18 effectivement, reçu des renseignements -- des documents qui étaient tout à

19 fait pertinents aux enquêtes que nous menions.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, je voudrais vous rappeler une

21 chose, à savoir que je vous avais demandé une ordonnance pour ce qui est de

22 la mise à disposition ou divulgation des renseignements dont disposent les

23 services des plus importants des pays des membres de l'OTAN pour ce qui est

24 des événements en Yougoslavie, qui ont donné lieu à l'agression à la

25 Yougoslavie et au sujet du terrorisme en Yougoslavie.

Page 28343

1 L'INTERPRÈTE : Le reste est hors micro.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] J'ai coupé votre micro, Monsieur

3 Milosevic --

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourquoi ?

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Parce que le moment ne se prête pas à

6 l'examen de ces questions générales. Vous êtes ici maintenant en train

7 d'interroger ce témoin-ci.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Est-ce que vous vous souvenez que, pour ce qui est de toutes ces

10 informations au sujet desquelles vous dites que vous voulez les êtes

11 procurées, il y a eu une unité de Moudjahiddines, appelée Abu Bekir Sadik,

12 qui intervenait sur le territoire du Kosovo à l'époque, je le dis à titre

13 d'exemple, sans parler des autres pour ne pas donc mentionner les autres ?

14 C'est là une chose qui s'était trouvée au centre de l'attention de la

15 communauté internationale. Disposiez-vous au moins de cela ?

16 R. Je ne me souviens pas de l'existence de ce type d'information.

17 Q. Vous souvenez-vous des informations quelles quels soient pour ce qui

18 est des terroristes albanais et leurs corrélations avec Osama bin Laden ?

19 Vous ne disposez pas d'informations de cette nature non plus, j'imagine ?

20 R. Je ne me souviens en tout cas pas de choses qui auraient concerné bin

21 Laden et de façon plus précise, je ne me souviens pas de renseignements

22 précis que nous aurions reçus à la suite de nos demandes d'enquêtes, nous

23 avons reçu des éléments de preuves venant d'une source très diverse et ceci

24 était quotidien. Et ce n'est pas moi qui me suis occupé de ces

25 renseignements, ça était fait par le personnel du bureau du Procureur. Mais

Page 28344

1 ici vous posez une question précise, et à ce propos, je n'ai aucun souvenir

2 de tels renseignements.

3 Q. Mais vous souvenez-vous du fait que précisément à l'époque vous rédigez

4 ces lettres-là et c'est la première moitié de l'année 1998, vous souvenez-

5 vous d'un renseignement disant que 33 Albanais, pour être précis, qui ne

6 voulaient pas entrer dans les rangs de cette organisation terroriste ont

7 été tués par ces mêmes terroristes et qu'à cette période-là, ces

8 terroristes ont tués plus d'Albanais que de Serbes à l'époque. Ils avaient

9 terrorisé leur propre population et bien entendu l'objectif de leurs

10 attaques avait été les instances de la police, les représentants des

11 autorités et à l'époque ils avaient exécuté plus d'Albanais que de Serbes.

12 Et l'Etat était en train de protéger ses propres citoyens indépendamment de

13 leur appartenance ethnique contre ces activités terroristes ?

14 R. Je suis au courant de la teneur générale, d'allégations telles que vous

15 les présentez dans votre question. Ce que je peux vous dire c'est que le

16 bureau du Procureur était résolu à établir la vérité des faits qui s'était

17 produit au Kosovo. Vous avez cette lettre qui vous est envoyée le 17 mars

18 1998 et à mon avis ce sont là les raisons, c'est là une des raisons pour

19 laquelle cette lettre vous a été envoyée.

20 Q. Par votre conséquence, vous admettez que vous aviez connaissance des

21 activités terroristes déployées au Kosovo n'est-ce pas Monsieur Blewitt ?

22 R. J'admets que nous savions qu'il y avait de graves infractions au droit

23 international humanitaire qui était en train d'être commises, qu'on les

24 qualifie ou non d'actes terroristes.

25 Q. Je ne comprends pas pourquoi vous évitez de dire ou de prononcer

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1 indépendamment des délits terroristes. Ma question était toutefois du même

2 directe, aviez-vous connaissance de l'envergure des activités terroristes

3 déployées au Kosovo et Metohija dans le courant de l'année 1998 ? Aviez-

4 vous connaissance de l'envergure de ces activités terroristes en 1998 et

5 aviez-vous connaissance des victimes qu'ils y avaient eues parmi la

6 population civile et qui ont été victimes, victimes de ce terrorisme-là

7 précisément ? Et il y en a eu également parmi les membre de la police où

8 les représentants des autorités. Donc aviez-vous connaissance de ces

9 activités terroristes ? Je vous prie de me répondre par un oui ou par un

10 non ?

11 R. Je n'essaie pas d'éviter votre question. Ce que je dis, c'est que nous

12 étions au courant du fait qu'il y avait des crimes qui se commettaient et

13 que dans certains milieux ont les qualifiaient d'actes de terrorisme. Ce

14 que je dis c'est que sous l'angle du Procureur, les crimes qui étaient

15 commis et surtout commis à l'encontre de la population civile, c'était des

16 crimes qui relevaient de la compétence de ce Tribunal et que nous avions

17 pour responsabilité de mener des enquêtes, suite à ces allégations. C'est

18 ce que nous avons fait indépendamment du fait de savoir si on pourrait

19 aussi qualifier ces infractions d'actes terroristes.

20 Q. Bon. Si vous aviez conscience du fait qu'au Kosovo c'était du

21 terrorisme, avez-vous estimé que vous étiez compétent pour contester le

22 droit d'un état à savoir les instances compétentes de la république de

23 Serbie, de la république fédérale de Yougoslavie pour ce qui est de

24 protéger leur propre population contre le terrorisme en place ?

25 R. Pas du tout.

Page 28346

1 Q. Mais où, dans vos lettres, parle-t-on de terrorisme ? Vous ne posez --

2 vous ne faites que poser des questions pour ce qui est de savoir s'il y a

3 eu des victimes, pour ce qui est des instances du pouvoir ? Dites-moi, où

4 dans vos lettres, il est question de terrorisme ? Et je viens de vous

5 montrer trois ou quatre résolutions des Nations Unies où il est question

6 précisément de terrorisme au Kosovo. Alors, l'une quelconque des lettres

7 qui émane de votre part reprennent ou reprend le terme de "terrorisme".

8 R. Le terme "terrorisme" ne figure pas dans cette lettre; cependant, il est

9 très clair que le Procureur avait reçu des renseignements selon lesquels

10 les indications relevant de la compétence de ce Tribunal, qui étaient en

11 train d'être commises, et que le Procureur voulait mener des enquêtes sur

12 ces crimes.

13 Q. Mais parmi ces crimes que vous évoquez et dont vous dites que cela fait

14 partie des attributions de ce Tribunal, qui est d'ailleurs illégal, mais, à

15 vos yeux, il est légal, alors, le terrorisme fait-il partie oui ou non de

16 violation de cette nature ?

17 R. Le crime de terrorisme, en tant que tel, de façon intrinsèque, ne

18 relève pas des compétences de ce Tribunal, seulement les crimes qui

19 constituent le terrorisme, à savoir, meurtres notamment. Entre autres,

20 infractions graves du droit international humanitaire peuvent être

21 qualifiées d'actes de terrorisme, et de crimes relevant de la compétence de

22 ce Tribunal.

23 Q. Bien. Monsieur Blewitt, est-ce qu'il fait partie des compétences de ce

24 que vous désignez par Tribunal ? Donc est-ce qu'il fait partie de vos

25 compétences, à vous, l'acte d'agression perpétré par l'OTAN -- le pacte de

Page 28347

1 l'OTAN contre la Yougoslavie, sans décision du conseil de Sécurité et

2 contre --

3 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous revenons à un vieux sujet là. On l'a

4 déjà abordé. Je dis non.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous n'avons même pas entamé ce sujet-là,

6 Monsieur May, puisque vous ne permettez pas qu'on en parle --

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous avons rendu une décision. Nous avons

8 décidé que c'était quelque chose qui était sans aucune pertinence.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur May, est-ce que vous êtes d'affirmer

10 qu'il n'est pas pertinent de poser des questions à M. Blewitt, qui se

11 trouve être compétent pour des délits pénaux perpétrés sur le territoire de

12 l'ex-République fédérale de Yougoslavie ? Donc, l'agression du pacte de

13 l'OTAN, a-t-elle --

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, oui. On a déjà entendu cet argument.

15 Inutile de le répéter une fois de plus.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Monsieur Blewitt, est-ce que le bombardement des hôpitaux est un acte -

18 - un délit pénal qui relève de vos compétences ?

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Non. Il ne parle de ça. Bien sûr, vous

20 pouvez poser une question à ce témoin à propos du sujet de ces lettres, ce

21 que vous avez fait. Avez-vous d'autres questions à propos de ces lettres,

22 ou pas ? Sinon, on en finira.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Etant donné qu'il est question de violences, de meurtres, est-ce que

25 lorsqu'on tue plusieurs dizaines de civils dans une colonne au Kosovo par

Page 28348

1 l'aviation, quand cela est fait par l'aviation de l'OTAN, et cela constitue

2 qu'il -- oui ou non, un délit pénal en vertu de ce qui relève de vos

3 compétences ? --

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quelle est votre question suivante ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ma question suivante, Monsieur May, est celle-

6 ci.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Constitue-t-il un délit pénal, que de détruire une ville paisible de

9 mineurs qui s'appelle Aleksinac ?

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, oui, oui. On en a déjà parlé.

11 Monsieur Milosevic, apparemment, vous ne faites pas attention. Il faut donc

12 que je me demande s'il n'est pas utile de terminer ce contre-

13 interrogatoire. Si vous avez d'autres questions que vous souhaitez à propos

14 de cette lettre, faites-le. Par exemple, si vous avez à poser à propos du

15 document présenté au président, le 1er février 1999, où figurent bon nombre

16 d'allégations, vous avez le loisir de le faire maintenant. Ce document a

17 été versé au dossier. Si vous voulez contester une partie quelconque,

18 faites-le, plutôt que d'essayer de polémiquer à propos des choses qui ont

19 été décidées interdites.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si c'est pour verser au dossier, je vous

21 demande de verser au dossier le fait que je conteste toutes les allégations

22 figurant dans cette lettre parce qu'il me faudrait des jours et des jours

23 pour poser des questions que vous ne me laissez poser concernant et, au

24 sujet de tout ce qui est dit, Monsieur May. Voilà. Et pour les besoins du

25 compte rendu d'audience, pour que votre conscience soit tout à fait apaisée

Page 28349

1 pour ce qui est du fait de les avoir contestées ou pas, dites que j'ai

2 contesté toutes les allégations faites par ce monsieur parce que cela ne

3 correspond pas à la vérité. C'est tendancieux. Et cela ne correspond pas du

4 tout à la vérité.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ça le témoin peut y répondre. Monsieur

6 Blewitt, vous venez d'entendre ce que laisse entendre l'accusé, à savoir

7 que les allégations mentionnées dans la lettre, et que lui aurait envoyée

8 apparemment à votre bureau du Procureur, et ce qui aurait été envoyé à

9 d'autres haut fonctionnaires de la RFY, ce seraient des allégations

10 inexactes et tendancieuses. C'est là une qualification des faits choisis

11 par l'accusé.

12 Quelles étaient ces sources ? Inutile de nous en donner le détail, mais

13 quelles étaient les sources vous ayant ces allégations ? Et, à votre avis,

14 ces allégations étaient-elles tendancieuses ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas du tout, Monsieur le Président. Le

16 Procureur de l'époque se fondait sur des renseignements fournis par

17 plusieurs sources. Il y avait des rapports établis par des médias, des

18 rapports fournis par des gouvernements, des lettres de groupes concernés,

19 dont des ONG. Ceci venait de toute une gamme de sources de renseignements.

20 Je ne peux pas vous les énumérer toutes, ces sources, mais elles étaient

21 nombreuses, et les renseignements fournis se corroboraient, et aux yeux du

22 Procureur, poser suffisamment d'éléments que pour provoquer des

23 préoccupations et que pour mériter une enquête.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Fort bien, Monsieur Blewitt.

Page 28350

1 Vous avez dressé à mon encontre un acte d'accusation en mai 1999, et ce

2 pour des événements qui ont eu lieu en 1999. Donc, au bout de quelques mois

3 seulement, vous avez collecté tous les éléments de preuve, comme vous le

4 désignez, et vous avez dressé un acte d'accusation, alors que vous n'aviez

5 accès à rien du tout, ce qui est plutôt contradictoire, ne le pensez-vous

6 pas ?

7 R. Ce n'est pas exact. Les enquêtes, elles avaient commencé en 1998. Elles

8 se poursuivaient en dépit du fait que, dans la deuxième partie de 1998 et

9 en 1999, nous n'avons pas eu accès au Kosovo. Nous avons réussi, malgré

10 tout, à recueillir, à rassembler des éléments de preuve. Et c'est seulement

11 en 1999 qu'à notre avis, nous avions suffisamment de preuves, que pour

12 formuler au-delà de tout doute raisonnable les allégations contenues dans

13 l'acte d'accusation, et c'est à ce moment-là que celui-là a été délivré.

14 Q. Très bien, Monsieur Blewitt. Vous dites vous-même, que vous n'étiez pas

15 présent. Vous avez rassemblé ce que vous avez rassemblé pour dresser un

16 acte d'accusation. Mais pourquoi vous a-t-il fallu 11 ans pour décider de

17 dresser un acte d'accusation au sujet de la Bosnie-Herzégovine ?

18 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce n'est pas une question à laquelle le

19 témoin saura répondre.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Bien, Monsieur Blewitt, est-il exact de dire que, s'agissant de la

22 documentation pour ce qui est de dresser le prétendu acte d'accusation,

23 vous a été communiquée par les services de renseignements britanniques ? Et

24 je crois que c'est le seul --

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin ne saurait répondre à cette

Page 28351

1 question.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je ne sais vraiment pas quelle est la

3 question que je pourrais poser à ce témoin. Peut-être pourriez-vous me dire

4 quelles sont les questions que je devrais lui poser, Monsieur May ?

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, oui. Il vous reste quelques minutes.

6 Utilisez ce temps pour poser des questions au témoin à propos de ces

7 lettres. Y a-t-il quoi que ce soit dans ces lettres que vous mettez en

8 doute ou sur quoi vous n'êtes pas d'accord ? Bien sûr que vous pouvez poser

9 ces questions, ou tout ce que vous voulez indiquer qui venait -- ou qui

10 viendrait du côté yougoslave, libre à vous de le faire.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Monsieur Blewitt, est-ce que, étant donné que vous êtes juriste, vous

13 avez envoyé ces courriers-là ? Ne vous suffisait-il pas pour ce qui étaient

14 des appuis -- attributions de celui qui vous a rédigé les réponses pour ce

15 qui est de la teneur de ce qui est dit et savoir ? Le ministre de la

16 Défense vous dit que les instances compétentes des organes fédéraux étaient

17 en train d'enquêter sur tous les délits allégués. Qui a-t-il à contester ?

18 Est-ce que quelqu'un vous aurait affirmé qu'il n'y aurait pas de délits

19 pénaux en provenance de Yougoslavie ? Ou est-ce que les instances

20 compétentes vous ont, au contraire, dit qu'elles allaient se charger

21 d'examiner tous les délits pénaux perpétrés ?

22 Donc ce sont là des questions au sujet desquelles nous estimons que nos

23 organes sont compétents et vous vous estimez compétent. Vous, nous vous

24 estimons illégaux et vous vous estimez comme étant légaux, mais il y a une

25 chose qui n'est pas contesté. S'il y a commission de Délits pénaux --

Page 28352

1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Un instant. Un instant. Vous avez posé

2 une question au témoin. Donnez-lui le temps d'y répondre.

3 Ça revient à dire ceci. Est-ce qu'il ne suffit pas que le ministre de la

4 Justice vous écrive, Monsieur Blewitt, en vous disant que les organes

5 compétents de l'état s'enquéraient de la chose enquêtée sur ces crimes ?

6 C'est au fond la question qui vous est posée.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est certain que le Procureur savait qu'on

8 affirmait que tous ces crimes commis en RFY et aussi au Kosovo faisaient

9 l'objet d'enquêtes. Il est certain que nous n'allons jamais affirmer que la

10 République fédérale de Yougoslavie n'a pas le droit d'enquêter et de

11 poursuivre les personnes responsables de tels crimes.

12 Cependant, nous n'étions pas convaincu que tous les crimes commis par les

13 deux parties au conflit que nous avons vu ont véritablement fait l'objet

14 d'enquêtes. Il est clair que ce Tribunal a compétence concurremment avec

15 les compétences dont disposent les organes de la République fédérale de

16 Yougoslavie. Il est clair que ce pays avait le droit de mener des enquêtes;

17 cependant, je le répète, le Procureur n'était pas convaincu que ces

18 enquêtes soient dûment menées et elle avait, dans ses attributions, le

19 droit d'enquêter elle aussi.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Bien. Mais est-il contesté ou pas le fait que ce que vous désignez par

22 bureau du Procureur et par Procureur pour ce qui est de votre enquête ou de

23 vos enquêtes, elles ont été ramenées uniquement aux questions, où l'on

24 était susceptible d'accuser de quoi que ce soit les membres des instances

25 de la police ou des instances officielles de la Yougoslavie, et a exclu

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1 complètement -- et cela est prouvé par ce document-ci -- a exclu

2 complètement les crimes perpétrés par l'OTAN et Yougoslavie. Est-ce exact

3 ou pas ?

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous en avez déjà parlé. De toute façon,

5 nous allons faire une pause de 20 minutes. Il vous restera après la pause

6 dix minutes pour terminer votre contre-interrogatoire, Monsieur Milosevic.

7 Nous le faisons pour tous les témoins. Monsieur Blewitt, vous devez savoir

8 que vous n'êtes censé parler à personne de votre déposition tant qu'elle

9 n'est pas terminée.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président.

11 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

12 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Blewitt, s'agissant précisément de vos lettres, vous connaissez

16 la charte des Nations Unies, je suppose. Je me permets de vous rappeler le

17 texte de celui-ci, si jamais il était nécessaire de vous rafraîchir la

18 mémoire. Il est que les états sont tenus de respecter les décisions du

19 conseil de Sécurité. Si ces décisions sont conformes à la charte des

20 Nations Unies, est-ce exact ?

21 R. Oui, je crois que c'est exact, tout à fait.

22 Q. Les décisions de la Cour internationale de Justice sont sources de

23 droit -- l'une des sources du droit international. Ceci non plus n'est pas

24 contestable, n'est-ce pas ?

25 R. C'est exact.

Page 28354

1 Q. Un exemple, décision de la Cour internationale de Justice en 1973, il

2 s'agit d'un conseil émis au sujet de la présence de la République sud-

3 africaine en Namibie. Il a été confirmé que les états pouvaient ne pas

4 respecter les décisions du conseil de Sécurité si celles-ci s'inscrivaient

5 en violation de la charte des Nations Unies. Je suppose que vous êtes au

6 courant de cela, n'est-ce pas ?

7 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il ne s'agit pas d'une question --

8 questions appropriées à poser au témoin. Il s'agit de points de droit et

9 c'est à la Chambre de décider là-dessus.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je suppose que le témoin fonde son

11 activité sur des règles de droit et sur les dispositions du droit

12 international, n'est-ce pas ?

13 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Quelle est la question pertinente que

14 vous souhaitez poser ?

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] La question pertinente est la suivante :

16 l'Article 29 de la charte des Nations Unies précise que le conseil de

17 Sécurité peut fonder des commissions -- des comités ou -- chargés des

18 rapporteurs sur des questions précises, ainsi de suite. Il ne peut pas

19 fonder un Tribunal quel qu'il soit.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il semblerait que nous soyons revenus à

21 la même affirmation. Nous n'allons pas nous en occuper

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Hans Kelsen, dans son livre "Le droit des Nations Unies", a écrit dans

24 les années 1950 que le conseil de Sécurité n'avait pas de compétences

25 juridiques. Etes-vous d'accord avec cela ? Elle dit que ces membres ne sont

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1 pas indépendants --

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous sommes en train

3 de perdre notre temps en essayant d'aborder ces questions-là qui, de toute

4 façon, ont déjà été tranchées. Il n'y a pas lieu de rentrer dans ce genre

5 de polémique avec le témoin.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est question ici simplement du fait que

7 l'état n'est pas tenu de respecter une décision prise par le conseil de

8 Sécurité si cette décision n'est pas conforme à la charte des Nations

9 Unies, et ici, de toute évidence, ceci n'est pas conforme à la charte des

10 Nations Unies.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui, nous vous avons entendu. Vous pouvez

12 aborder ceci au moment où ce sera éventuellement pertinent, et ce témoin ne

13 peut pas vous répondre là-dessus.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur May.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Mais ce que je suppose quand même, c'est que je suis en droit de

17 demander à ce témoin si soit disant Procureur, bureau du Procureur, est

18 indépendant et autonome, qu'il puisse être pris isolément, séparément de ce

19 Tribunal.

20 M. LE JUGE MAY : [interprétation] A quoi voulez-vous en venir ? Je ne suis

21 pas sûr d'avoir bien compris votre question.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] En d'autres termes, mettant de côté la question

23 de l'illégalité de ce Tribunal et de ce bureau du Procureur, ce bureau du

24 Procureur donc, ce que représente M. Blewitt, cette instance est-elle

25 indépendante du Tribunal ?

Page 28356

1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il ne s'agit pas là d'une question

2 adéquate à poser à ce témoin. Etes-vous en train de laisser entendre qu'il

3 y a quelque chose dans ces lettres qui sembleraient dire le contraire ? Où

4 voulez-vous en venir ?

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et bien, en substance, je souhaite entendre une

6 réponse de la part du témoin, à savoir si le bureau du Procureur se

7 comporte de manière indépendante et autonome.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le témoin peut vous répondre.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est ce que je pense. A mon sens, le

10 bureau du Procureur est un organe indépendant au sein de ce Tribunal et à

11 l'Article 16 du statut de ce Tribunal. Ceci est précisé.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Dans la suite de cette même question, le

13 Procureur agit-il de manière indépendante et avez-vous agi de manière

14 indépendante pour ce qui est de ces lettres qui nous occupent maintenant ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les enquêtes entreprises par le Procureur

16 étaient conformes à l'indépendance du Procureur conformément au statut de

17 ce Tribunal, et ces lettres ont été envoyées dans le cadre de l'exercice de

18 ses devoirs et de son mandat en application du statut.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Très bien, Monsieur Blewitt. Vous avez dit que vous étiez indépendant.

21 Alors, à présent, j'aimerais savoir -- j'aimerais savoir pourquoi, vous-

22 même, vous ne vous adressez pas à la Cour internationale de Justice pour

23 qu'elle se prononce sur la compétence et la légalité de vos activités.

24 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ceci n'a aucune pertinence.

25 Maître Tapuskovic, est-ce qu'il y a des questions que vous souhaitiez poser

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1 à ce témoin ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous ne m'autorisez plus à lui poser de

3 questions ?

4 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais vous vous obstinez à poser des

5 questions qui n'ont pas de pertinence. Si vous avez une question

6 pertinente, je vous l'accorderai. Il vous reste quelques minutes.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Monsieur Blewitt --

10 L'ACCUSÉ : Mais vous ne me laissez poser aucune des questions que j'estime

11 pertinente.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Monsieur Blewitt, dites-moi, s'il vous plaît, en application de votre

14 Article 68, n'êtes-vous pas tenu de me communiquer l'ensemble des documents

15 à décharge ?

16 R. Oui. Ceci est conforme à l'Article 68, du règlement de procédures et de

17 preuves de ce Tribunal.

18 Q. Très bien. Alors, répondez-moi, de manière tout à fait précise, m'avez-

19 vous communiqué l'ensemble des documents, des informations et des faits,

20 dont vous avez pris connaissance, au cours de la rédaction de ce document

21 portant sur les crimes commis par l'OTAN en Yougoslavie et au sujet donc

22 dans le rapport préparé par votre commission au sujet de la campagne de

23 bombardements menée par l'OTAN contre la République fédérale de

24 Yougoslavie ?

25 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ecoutez un instant. Ceci n'est pas une

Page 28358

1 question que vous puissiez poser à ce témoin. Ceci sort largement du champ

2 qui vous a été accordé. Mais, pour que ce soit clair, nous sommes conscient

3 du devoir de communiquer l'ensemble des documents à décharge, tous les

4 documents pertinents de cette catégorie-là. La Chambre dois s'assurer que

5 cet article a bien été appliqué, donc l'ensemble des éléments à décharge

6 vous seront communiqués.

7 Il vous reste du temps pour une question de plus.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Ma question était la suivante : Ces documents, dont vous êtes entrés en

10 possession en travaillant sur des enquêtes portant sur les crimes commis

11 par l'OTAN, lors de leur campagne de bombardements contre la Yougoslavie --

12 ces documents-là donc m'ont-ils tout été communiqués -- ou bien tout

13 contenus dans ce rapport-ci ?

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous ne nous intéressons pas à présent à

15 ce rapport, mais, bien entendu, le témoin peut savoir quels sont les

16 documents qui ont été trouvés au cours de l'enquête, donc ces lettres en

17 font partie.

18 Est-ce qu'il y a eu communication de documents, Monsieur Blewitt ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Tous les éléments, que le Procureur étaient

20 tenus de communiquer à l'accusé, lui ont été communiqués.

21 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Maître Tapuskovic.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

23 Juges, d'emblée ce que je souhaite vous dire c'est qu'avant de me rendre

24 aujourd'hui dans ce prétoire, j'étais tout à fait conscient du fait que

25 l'on ne pouvait pas aborder des questions juridiques liées à ces documents

Page 28359

1 et vraiment je ne voulais pas rentrer dans des questions juridiques liées à

2 tout cela. Et lorsque j'ai essayé de prendre la parole il y a un instant,

3 et bien, je voulais simplement souligner le fait que M. Nice a réellement

4 dit à un moment que le Procureur a été impartial parce qu'à l'intercalaire

5 9, dans ce document, il est question aussi des victimes serbes, et M. Nice

6 l'a dit -- il a prononcé ces paroles.

7 Donc c'est la seule chose que je voulais vous rappeler et je n'aurai que

8 quelques questions très brèves. En fait, la chose qui m'intéressera, ce

9 sera l'intercalaire 11, de ce document.

10 Questions de l'Amicus Curiae, M. Tapuskovic :

11 Q. [interprétation] Il s'agit ici d'une lettre qui a été adressée à M.

12 Slobodan Milosevic le 26 mars 1999.

13 Monsieur Blewitt, le 26 mars on a envoyé cette lettre. N'était-ce pas deux

14 jours après le début des bombardements menés par l'OTAN au Kosovo, donc

15 suite deux jours après le début de la guerre qui a duré plusieurs mois ?

16 C'était deux jours, n'est-ce pas, après le début de la guerre car la guerre

17 a commencé le 24 ?

18 R. Il me semble que j'ai déjà répondu à l'une des questions à cet effet.

19 Je pense que j'ai dit que je ne me rappelais plus très bien la date du

20 début des bombardements de l'OTAN. Mais j'étais prêt à admettre que cette

21 date-là était bien celle du 24 mars. Donc, je maintiens ce que j'ai dit.

22 Q. Mme Arbour n'est pas présente aujourd'hui, ici. Elle pourrait peut-être

23 mieux répondre à cette question. Nous avons entendu M. Nice citer cette

24 lettre. Et il y est dit que l'on demande qu'on enquête sur l'ensemble des

25 violations graves qui ont été commises. Donc toutes les violations du droit

Page 28360

1 international humanitaire, au 26 mars.

2 Alors ma question est la suivante : Compte tenu des bombardements, compte

3 tenu des circonstances, aurait-il été possible d'enquêter là-dessus

4 puisqu'il y avait ces bombardements ? Comment aurait-on pu se conformer, ou

5 aurait-on pu se conformer à cette requête ?

6 R. Je ne suis pas sûr d'être bien placé pour vous répondre à cette

7 question. En fait, cette lettre était une combinaison --

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Laissez le témoin répondre.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] La date sur cette lettre est la date du 26

10 mars 1999. Donc, c'était à l'apogée de toute une série de tentatives

11 entreprises par le Procureur et le bureau du Procureur afin de diligenter

12 des enquêtes au sujet des crimes qui auraient été commis au Kosovo, depuis

13 début 1998.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

15 Q. Et à présent, tout simplement le 1er paragraphe de cette lettre. Il est

16 question du départ de la mission de l'OSCE. Et l'on dit que la présence des

17 observateurs impartiaux se voit sérieusement limitée. M. Milosevic ne se

18 voit pas accusé d'aucun crime commis en 1998. Mais pour la plupart pour des

19 actes commis en 1999. Racak par exemple, il a fait l'objet des enquêtes

20 menées par la mission de vérification. Cette mission-là était présente au

21 Kosovo. Elle était tout à fait capable de travailler. On ne l'a pas empêché

22 d'enquêter sur ces événements dont nous parlons maintenant.

23 R. Oui, je suis bien de votre avis.

24 Q. Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions.

25 R. Cependant, le bureau du Procureur a bel et bien été empêché

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1 d'entreprendre des enquêtes sur le terrain in situ au Kosovo, à partir de

2 la deuxième partie de l'année 1998. Et le Procureur a reçu le mandat du

3 conseil de Sécurité d'enquêter sur ces affaires qui relèvent de la

4 compétence de ce Tribunal. Donc, il a mandaté la mission de vérification du

5 Kosovo, pour le faire.

6 Q. Oui. Mais cette mission s'est rendue sur le territoire de cet état, de

7 l'état sur le territoire duquel les événements se sont produits. Et ceci a

8 été fait avec l'aval des autorités yougoslaves n'est-ce pas, dans certains

9 cas où il y a eu des enquêtes ?

10 R. Oui, très certainement. Je ne conteste pas cela.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

12 M. NICE : [interprétation] Juste quelques questions, s'il vous plaît.

13 Nouvel interrogatoire par M. Nice :

14 Q. [interprétation] Monsieur Blewitt, je vous prie d'examiner

15 l'intercalaire 9 de ce rapport. Et je me reporte à la page 26, paragraphe

16 36. Il s'agit d'un passage que nous avons déjà examiné.

17 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, je vous demanderais s'il

18 vous plaît, de le placer sur le rétroprojecteur.

19 Q. Alors le paragraphe qui m'intéresse, compte tenu des questions qui vous

20 ont été posées au sujet du terme "terrorisme"; et il vous a été suggéré

21 qu'une approche partiale aurait été pratiquée ne prenant pas en compte les

22 crimes commis par les Albanais de souche.

23 Alors je rappelle le texte de ce passage : "Le Procureur en est arrivé à la

24 conclusion que l'information était digne de foi, et avait tendance à

25 montrer que des crimes relevant de la compétence du Tribunal auraient pu

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1 être commis au Kosovo. En particulier, le Procureur est arrivé à la

2 conclusion que des informations dignes de foi semblent montrer qu'un

3 conflit armé pourrait être en cours en Kosovo. Et qu'il y a eu des combats,

4 qu'il y a toujours des combats opposant les deux parties. La police, les

5 forces de la police et les forces militaires liées à la République fédérale

6 de Yougoslavie ou à la République de Serbie d'une part et des unités et des

7 groupes armés, y compris l'armée de libération du Kosovo, en relation avec

8 la communauté albanaise du Kosovo, d'autre part."

9 Alors à présent, j'aimerais savoir si c'est bien la phrase qui reflète

10 l'approche qui était pratiquée à l'époque où cette lettre a été envoyée. A

11 savoir, on a estimé qu'il s'agissait d'un conflit interne ?

12 R. C'est tout à fait cela.

13 Q. L'accusé cherchait à vous faire accepter le terme "terrorisme," et vous

14 n'avez pas accepté de le faire. Alors des groupes et des unités armées et

15 organisées en association avec l'armée de libération du Kosovo et la

16 communauté albanaise de Kosovo, est-ce que cela reflète l'approche qui a

17 été celle du bureau envers les Albanais du Kosovo à l'époque ?

18 R. Oui, tout à fait.

19 Q. Et par la suite on dit : "Le niveau et l'intensité des actes de

20 violence pratiqués par des groupes armés qui participent à cela, pourraient

21 être illustrés par le recours aux forces armées de la part de la République

22 fédérale de Yougoslavie, mais aussi par l'impact tout à fait dévastateur

23 sur la population civile. Et des éléments qui le prouvent sont aussi

24 l'implication -- est aussi l'implication de la communauté internationale.

25 Tout cela semblerait indiquer qu'il y a un conflit qui est en cours au

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1 Kosovo, qui donne lieu à des actes de violence, qui pourraient constituer

2 des crimes relevant de la compétence du Tribunal." Est-ce que cela montre

3 qu'il y a des actes inacceptables des deux côtés, que les deux cotés se

4 rendent coupables ?

5 R. Je pense qu'il semblerait qu'il s'agit d'un conflit armé qui oppose

6 deux parties.

7 Q. Vous avez parlé des limitations, des restrictions imposées à l'accès

8 aux membres du bureau du Procureur en 1998 et 1999 au Kosovo. Alors ces

9 restrictions, ont-elles empêché les enquêtes, ont-elles empêché d'enquêter

10 sur les actes illégaux des deux côtés ?

11 R. De toute évidence, ceci a empêché des enquêtes, donc sur les deux

12 parties en conflit, des deux parties belligérantes.

13 Q. Et enfin, s'agissant de ce même point, ma dernière question. Le bureau

14 du Procureur, a-t-il mené des enquêtes sur des crimes qui auraient été

15 commis par l'autre partie, par l'armée de libération du Kosovo, par les

16 Albanais du Kosovo ?

17 R. Oui, tout à fait. Et nous sommes toujours en train de mener des

18 enquêtes sur les crimes qui auraient été commis par l'armée de libération

19 du Kosovo.

20 Q. Et il y a eu déjà un processus mis en cours dans le cadre d'un autre

21 acte d'accusation ?

22 R. C'est tout à fait cela.

23 Q. L'accusé vous a posé une question au sujet de l'indépendance du

24 Procureur par rapport au reste du Tribunal. Alors je vous prie de vous

25 rappeler la teneur de l'intercalaire 7. Il s'agit là d'une lettre qui a été

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1 envoyée par la présidence de l'époque du Tribunal, Mme Gabrielle Kirk

2 McDonald au président du conseil de Sécurité. Et il est clair qu'il y a là

3 des plaintes qui proviennent du bureau du Procureur. Pouvez-vous nous

4 expliquer de quoi il s'agit dans ces circonstances ?

5 R. S'il n'y a pas de collaboration de la part d'un état, ou si un état ne

6 remplit pas ses obligations juridiques à l'égard du Tribunal comme ceci lui

7 est demandé dans la résolution du conseil de Sécurité, le seul mécanisme

8 que le Tribunal a à sa disposition, est de faire rapport au conseil de

9 Sécurité conformément au règlement de procédure et de preuve de ce

10 Tribunal. Seul le président de ce Tribunal a le pouvoir de présenter ce

11 genre de rapport au conseil de Sécurité.

12 Q. Donc, le bureau du Procureur doit s'adresser au président pour quoi le

13 président, lui, a, pour sa part, présenté ce rapport au conseil de

14 Sécurité ?

15 R. Oui. C'est cela.

16 M. NICE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour ce témoin,

17 mais, avant cela, deux points au sujet de la question qui a été posée en

18 application de l'Article 68 et au sujet des bombardements de l'OTAN.

19 Premièrement, une quantité considérable de documents, qui ont été estimés

20 relever potentiellement de l'Article 68, ont été communiqués à l'accusé. Et

21 ceci lui a été précisé cela qu'il s'agissait de l'affaire au Kosovo dans

22 l'affaire qui nous intéresse.

23 Un deuxième point est qu'à tout moment, nous avons cherché à communiquer ou

24 à repérer des éléments à décharge et à communiquer cela à l'accusé. Nous

25 l'avons invité lui, ainsi que ces associés, à prendre part aux discussions

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1 au sujet des accords, des dispositions nécessaires afin de pouvoir lui

2 communiquer exactement ce dont qu'il devait recevoir et il a toujours

3 refusé de s'engager dans ce genre de réunions -- d'accords.

4 Je n'ai pas d'autres questions.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Vous êtes libre de repartir, Monsieur

6 Blewitt.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

8 [Le témoin se retire]

9 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Alors, nous avons des points

10 administratifs à aborder, M. Nice. D'après ce que j'ai compris et en

11 particulier, il faudra finaliser la liste des témoins. Aussi cela concerne

12 également la liste des pièces à conviction.

13 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est de la liste des témoins dans sa

14 mouture définitive, vous l'avez reçue le 21 octobre 2003, on s'entend, la

15 journée de Trafalgar. Un nom a été omis par omission dans cette liste, Vous

16 le recevrez en temps utile; sinon, la liste est complète.

17 Si nous voulons citer les témoins, figurant sur cette liste, nous devrions

18 vous demander l'autorisation d'ajouter quelques témoins. C'est un document

19 progressif, "omnibus", comme nous l'appelons pour ce qui est de la demande

20 à formuler dans ce sens. Vous l'avez reçue hier, en l'occurrence. Il y a eu

21 quelques questions à propos de mesures de protection. Ces questions n'ont

22 pas été terminées hier. Je pense que nous pourrons terminer ce document,

23 aujourd'hui. Vous devriez donc le recevoir aujourd'hui. Nous expliquons et

24 nous présentons ces raisons dans ce document. Il est impossible d'aborder

25 le cas de tous les témoins pour lesquels nous demandons leur adjonction,

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1 mais c'est pratiquement tout sur la question concernée.

2 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Ce qui nous préoccupe, c'est que ça fait

3 près de deux ans que nous recevons la présentation des éléments à charge,

4 or la liste n'est toujours pas définitive. Il se peut qu'il y ait des

5 raisons que ne sauraient maîtriser le bureau du Procureur, mais, tôt ou

6 tard, l'accusé aura quand même le droit de savoir quels sont les témoins

7 qui vont déposer contre lui, et c'est vrai aussi pour la Chambre de

8 première instance. Alors, maintenant, on nous dit qu'on va encore avoir des

9 demandes qui vont nous être soumises. Ceci est source de préoccupations.

10 M. NICE : [interprétation] Vous aurez cette requête aujourd'hui, mais il

11 était nécessaire pour tenir compte des noms figurant de cette liste

12 signifiée le 21 octobre. Dans cette liste du 21 octobre, vous avez surtout

13 des noms dont les Chambres, de l'accusé, ainsi que les amis connaissent

14 l'identité depuis plusieurs mois. Nous avions pour intention de citer des

15 personnes nommées ou pas et vous devriez avoir une requête collective

16 plutôt qu'une requête trop individuelle. Pourquoi est-ce un envoi tardif ?

17 Pourquoi recevez-vous cette requête à l'encontre de bon nombre de témoins ?

18 Vous savez que nous avons plusieurs catégories de témoins et, notamment,

19 une catégorie de témoins qui fait l'objet de restrictions visées par

20 l'Article 70. Ils nécessitent énormément de temps, ces témoins. Ceci n'est

21 pas maîtrisable par nous. Il y a aussi des témoins qui ne sont apparus que

22 tout récemment, or ils sont en mesure de présenter des éléments précieux.

23 Si c'est le cas, nous avons pour devoir de les ajouter à la liste. Je pense

24 que ce sont là les deux catégories les plus saillantes.

25 Sinon, pour le reste, toutes les parties sont au courant de l'existence de

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1 la plupart de ces témoins. Vous aurez bientôt une requête, mais je pense

2 que l'accusé n'est pas lésé par le fait que cette liste a été fournie le

3 21, avec un addendum cet après-midi. Mais, à l'évidence, la Chambre devra

4 se saisir de cette requête au cas par cas.

5 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Suis-je en droit de supposer que cette

6 requête collective sera la dernière à recevoir sur le sujet ?

7 M. NICE : [interprétation] Il y a encore quelques témoins qu'il est

8 impossible de nommer pour des raisons que nous ne maîtrisons pas. Je vous

9 l'ai expliqué. Il faudra les mentionner plus tard, mais voilà ce qu'il en

10 est, mis à part, cette réserve.

11 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Mais quand, quand vous dites "plus

12 tard" ?

13 M. NICE : [interprétation] C'est une question de jours, pas plus.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Bon. Si c'est une question de jours, nous

15 pourrons examiner la question, mais, si ça va plus loin, c'est difficile

16 parce que nous arrivons à la fin de la présentation de vos moyens.

17 M. NICE : [interprétation] Je comprends.

18 Puis-je relever ceci ? Nous avons maintenant une liste finalement

19 définitive mis à part quelques amendements et, depuis qu'elle est publiée,

20 nous avons essayé de faire preuve de la grande transparence possible

21 s'agissant de la démarche retenue à l'encontre des témoins. La Chambre le

22 sait que c'est de façon régulière que nous abandonnons des témoins pour

23 tenir les délais et pour tenir compte de l'avis exprimé par la Chambre,

24 s'agissant du nombre d'éléments factuels à présenter. Permettez-moi de vous

25 dire que ce document est transparent. J'espère que la Chambre et ses

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1 juristes verront facilement comment on retire certains témoins pour gagner

2 du temps, comment on résout les difficultés rencontrées par tel ou tel

3 témoin, et j'espère que ceci servira de modèles dans d'autres procès car

4 ceci vous donne la transparence nécessaire à ce type de procédures. Ici

5 nous avons affaire à un procès qui, à mon avis, ne nécessite pas que

6 l'Accusation cache son jeu. Je pense qu'il faut faire preuve de la plus

7 grande ouverture possible, ce que nous avons fait.

8 Il est certain qu'il y a un autre avantage à cette liste. Il est facile à

9 voir. Nous vous donnons une estimation du temps nécessaire et nous essayons

10 d'ajuster le tir pour tenir compte du temps effectif nécessité par une

11 audition et voir dans quelles mesures nous pourrons caser les témoins que

12 nous avons encore dans le temps imparti. Et il faudra apporter d'autres

13 modifications, mais je crois que ce document est très utile, en effet.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] S'agissant des pièces, nous avons

15 l'intention de délivrer une ordonnance pour que ce soit mis à la dernière

16 main, à la liste des pièces, de cette façon que, non seulement l'accusé,

17 mais aussi les Juges de la Chambre pourront se convaincre que nous avons

18 une liste définitive. Nous allons le faire dans 21 jours ou plutôt nous

19 vous accorderons 21 jours pour que vous produisiez cette liste définitive.

20 C'est possible ?

21 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas, mais ça me semble une démarche

22 raisonnable. Si je constate qu'il se trouve des raisons pour m'y opposer,

23 je me permettrai de m'adresser à vous. Mais ce qui me préoccupe, c'est que

24 d'abord il faudra éclaircir tels ou tels points de la liste dans sa forme

25 provisoire, mais il faudra contacter le Greffe pour nous assurer du statut

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1 des pièces versées à ce jour et ce n'est pas une mince affaire. Je peux

2 vous le dire que ce soit la fin de la présentation des moyens à charge à la

3 fin du procès. Je suis conscient du fait qu'il y a plusieurs pièces versées

4 sans être produites. S'agissant de certaines de ces pièces, il faudra

5 régler leur sort. Il faudra peut-être, pour se faire, présenter des

6 arguments au cours débats. Mais dans d'autres cas, il se peut que la pièce

7 soit retirée ou qu'elle ne soit pas produite sauf si nous produisons des

8 moyens supplémentaires. Par exemple, pour les écoutes téléphoniques. Et

9 peut-être pourrons-nous réunir les parties pour veiller à ce que ce volet-

10 là des documents soit bien traité avant la fin de la présentation de nos

11 moyens.

12 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Il faut que chaque pièce voit son statut

13 précisé. Il nous faudra bien surveiller s'agissant des pièces ayant reçu

14 une cote provisoire qu'elles soient versées ou rejetées du dossier, ne

15 serait-ce que cela. Et il faudra faire cela de préférence d'ici à la fin de

16 la présentation des moyens à charge. A ce moment-là, tout ceci devrait être

17 tiré au clair. Je le répète, il faudrait des cotes à ces pièces de façon à

18 savoir combien de pièces il y a.

19 Il ne s'agit de renuméroter. Nous avons des cotes mais plutôt de savoir

20 combien de pièces il y a.

21 M. NICE : [interprétation] Je vois. Donc il s'agira de faire le décompte.

22 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Précisément.

23 Puisque nous parlons de questions administratives, Monsieur Milosevic, est-

24 ce qu'il y en a que vous, vous voulez soulever à ce stade ?

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur May.

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1 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Le bureau du Procureur nous demande un

2 jour supplémentaire pour aujourd'hui. Il vous restait, vous aviez en

3 rabiot, une heure et demie avant les vacances. Nous allons peut-être

4 ajouter une heure et demie aujourd'hui ce qui vous fera une journée

5 entière. Mais nous allons voir ce qu'il en est.

6 M. NICE : [interprétation] Moi, j'essaie par tous les moyens de ne pas

7 insister jusqu'à la dernière minute. Mais je vous sais gré de cet avis.

8 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons délibérer sur le siège.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui. Vous bénéficierez d'une journée

11 supplémentaire.

12 M. NICE : [interprétation] Si vous me le permettez, je dois soulever une

13 autre question.

14 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Oui.

15 M. NICE : [interprétation] Il s'agit du témoin qui va comparaître lundi et

16 mardi de la semaine prochaine. Par excès de prudence, puis-je vous en

17 parler à huis clos partiel ?

18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

19 [Audience à huis clos partiel]

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18 [Audience publique]

19 M. LE JUGE MAY : [interprétation] Nous allons maintenant lever l'audience.

20 Elle reprendra lundi matin.

21 --- L'audience est levée à 11 heures 32 et reprendra le lundi 3 novembre

22 2003, à 9 heures.

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