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1 Le mercredi 17 novembre 2004
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, avez-vous des questions
7 à poser au témoin.
8 M. KAY : [interprétation] Non, merci, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si vous avez des questions à poser
10 au témoin à l'avenir, je suppose que vous nous le ferez savoir.
11 M. KAY : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
13 M. NICE : [interprétation] Avant de poser les questions à ce témoin-ci,
14 juste une observation générale que j'aimerais faire. Les témoins de la
15 Défense, jusqu'au jour d'aujourd'hui et en vertu du système appliqué
16 jusqu'alors concernant les conseils commis d'office, nous n'avons jamais
17 exercé de pression au niveau du temps, car en général, on entendait un
18 témoin pendant plusieurs jours et nous ne savions pas combien de témoins
19 allaient venir à la barre.
20 La situation actuelle est néanmoins quelque peu différente. Je suis
21 tout à fait conscient du fait qu'il y a un niveau d'attente élevé par
22 rapport à mon contre-interrogatoire, que mon contre-interrogatoire, par
23 conséquent, devra être beaucoup plus court que l'interrogatoire principal
24 de l'accusé. Un témoin comme celui-ci est un témoin que je pourrais sans
25 aucun problème interroger pendant un certain nombre de jours voire même
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1 semaines, car il est en mesure d'aborder et de couvrir un nombre très
2 important de sujets.
3 Néanmoins, j'ai décidé de réduire ceci, ce qui a deux conséquences
4 inévitables. La première, c'est que je ne procéderai pas, je ne pourrai pas
5 couvrir tous les sujets avec tous les témoins, et tous les sujets qui
6 pourraient être abordés. Deuxièmement, si un témoin a tendance à répondre
7 ou à fournir des réponses assez longues, plus que de besoin, je ne suis pas
8 du tout, je serai obligé de faire quelque chose que je n'ai pas fait
9 jusqu'à présent. Je n'ai pas l'intention d'être désagréable vis-à-vis du
10 témoin, mais il va falloir que j'explique que j'ai besoin d'entendre des
11 réponses courtes.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que vous avez tout à fait
13 le droit d'arrêter le témoin lorsque vous avez obtenu la réponse que vous
14 souhaitiez.
15 LE TÉMOIN : MIHAILO MARKOVIC [Reprise]
16 [Le témoin répond par l'interprète]
17 Contre-interrogatoire par M. Nice :
18 Q. [interprétation] Monsieur Professeur Markovic, en tant qu'intellectuel
19 et homme politique, vous saviez et vous savez que des mots prononcés en
20 public peuvent avoir une portée politique certaine et peuvent également
21 engendrer un état d'esprit qui peut avoir des conséquences que l'on n'a pas
22 prévues; est-ce exact ?
23 R. La différence près que je ne suis pas un homme politique; je suis un
24 homme de sciences, je vaque à des occupations politiques parfois.
25 Q. Praksis, dont vous étiez membre, est arrivé à une conclusion en 1990 à
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1 cause d'un article que vous aviez vous-même rédigé; c'est exact ?
2 R. Je n'ai pas conscience du fait que cela ait pris fin pour cette raison-
3 là. Je ne sais pas d'ailleurs à quel article vous vous référez. Tout
4 simplement, les circonstances ont évolué et les gens qui ont continué à
5 diriger Praksis, parce que j'ai été rédacteur en chef de 1981 à 1986. J'ai
6 été remplacé par un jeune collègue qui s'appelle Svetozar Stojanovic et une
7 personne venue des Etats-Unis, qui ont exercé le rôle de rédacteur en chef.
8 Dans les circonstances de 1990, ils ont jugé que Praksis n'avait plus sa
9 raison d'être.
10 Q. En 1990, vous avez écrit un article qui décrivait la situation des
11 Albanais au Kosovo. Vous avez dit que c'était des gens arriérés, qui
12 vivaient en clan et qu'ils n'étaient pas en mesure de s'extirper de la
13 pauvreté; est-ce exact ?
14 R. Non, je n'ai pas connaissance de cet article. De quel article êtes-vous
15 en train de parler ?
16 Q. Je vais vous rappeler certains autres extraits. Si vous ne vous en
17 souvenez pas, nous devrons traiter ce problème différemment. Vous souvenez-
18 vous avoir décrit ces personnes dans un article de Praksis ? Vous souvenez-
19 vous d'avoir décrit les Albanais nationalistes comme étant un peuple qui
20 avait un taux démographique très élevé, qui était une arme qu'ils avaient
21 utilisée, un taux de natalité très élevé comme étant une arme démographique
22 qu'ils avaient utilisé contre les Serbes.
23 R. Il convient de dire non pas des Albanais, mais des nationalistes
24 albanais. Je ne sais pas de quel article il s'agit, vous ne m'avez toujours
25 pas dit quel est l'intitulé de ce titre, parce que je pense qu'en 1990 déjà
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1 Praksis n'était plus publié.
2 Q. Je vais vous poser un certain nombre d'autres questions sur l'article
3 que je viens d'évoquer. Je suppose que c'est vous qui l'avez écrit, et je
4 présenterai cet article en temps voulu.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui,
6 Monsieur Milosevic.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'estime que M. Nice aurait l'obligation de
8 placer l'article sous les yeux du témoin. S'il affirme déjà que c'est le
9 sien, ce qui se peut, je pense qu'il faudrait le donner au témoin afin
10 qu'il puisse répondre aux questions.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois qu'il va y venir.
12 M. NICE : [interprétation] Malheureusement, je n'ai pas l'article ici
13 aujourd'hui, mais je vais lire un article de Laura Secor dans un article
14 publié sous la bannière, -- sous l'étiquette du Cercle de Belgrade.
15 Malheureusement, je ne pourrai pas obtenir l'article en question avant la
16 fin de la semaine.
17 Q. Monsieur le Professeur, étiez-vous d'avis qu'il y avait eu des
18 malversations par des dirigeants albanais ?
19 R. S'agissant d'abus fiscaux, je n'en ai jamais parlé. Je n'ai jamais rien
20 écrit à ce sujet; je n'étais pas au courant de cela.
21 Q. Pour finir concernant ce sujet, vous souvenez-vous d'avoir écrit un
22 article --
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons au niveau du compte rendu
24 de l'audience, nous devrions avoir malversations fiscales et non pas
25 physiques comme cela est indiqué au compte rendu d'audience. Veuillez
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1 procéder.
2 M. NICE : [interprétation]
3 Q. Etes-vous d'avis, et avez-vous rédigé quelque chose à cet effet, qu'au
4 cours de l'histoire, les Albanais avaient eu les grandes puissances de leur
5 côté alors que la Serbie s'était arrangée bon an mal an toute seule ?
6 R. Je ne l'ai jamais écrit parce que cela n'est pas exact. Les Albanais se
7 trouvaient du mauvais côté à l'occasion de ces guerres, par exemple, à
8 l'occasion de la Deuxième guerre mondiale, ils se sont trouvés du côté de
9 l'Allemagne fasciste et de l'Italie, alors que les autres grands pays
10 démocratiques et développés de l'occident étaient de l'autre côté. Nous ne
11 nous sommes pas trouvés donc du même côté qu'eux.
12 Q. Pour finir, avez-vous suggéré, ou plutôt avez-vous proposé comme thème
13 de débat la possibilité de diviser le Kosovo de façon à ce que le nord soit
14 rattaché à la Serbie, et la partie du sud, plus pauvre, aurait été
15 rattachée à l'Albanie ?
16 R. Je ne sais vraiment pas, M. Nice, d'où est-ce que vous tirez ce type
17 d'information. J'ai été précisément contre cette opinion-là. C'est une
18 opinion qui a été représentée par un collègue de l'Académie Dobrica Cosic.
19 C'est son idée à lui la partition du Kosovo. Je n'ai jamais été favorable à
20 cela, j'ai même critiqué le président de l'académie serbe des sciences et
21 des armes, M. Despic, lorsqu'il a prêté une oreille attentive à ce que
22 disait Cosic lorsqu'il a écrit un article où il a présenté cette idée de
23 partition. Je n'ai moi-même jamais représenté cette idée de partition du
24 Kosovo.
25 Q. Monsieur le Professeur, si ces questions vont dépasser la première
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1 pause, je m'organiserai pour vous remettre un exemplaire de l'article que
2 je viens de citer en anglais, en B/S/C et en serbe, et je vous demanderais
3 de bien vouloir parcourir ce document au cours de la pause.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je dois dire que je
5 m'attends à avoir le document sous les yeux aujourd'hui.
6 M. NICE : [interprétation] Si cela avait été possible, je l'aurais fait.
7 Mais il va falloir malheureusement attendre la deuxième étape. Je vais
8 essayer de retrouver ce document par messagerie électronique ou par
9 télécopie, mais je ne suis pas très optimiste. Je ne suis pas sûr de
10 pouvoir l'obtenir aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, cet article est un
11 document que je demanderai, de toute façon, au témoin de lire.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Malheureusement, vous venez de perdre
13 votre temps, Monsieur Nice. En n'ayant pas le document sous les yeux,
14 n'ayant pas pu éclaircir ce point, je crois que les éléments de preuve,
15 ici, sont vitaux étant donné les circonstances.
16 M. NICE : [interprétation] Je comprends fort bien. C'est malheureusement la
17 situation dans laquelle je me trouve.
18 Q. Je souhaite maintenant me tourner vers le mémorandum. La question qui a
19 été posée par M. le Juge Kwon, hier, à propos de la toute première édition,
20 et le prêtre Mihajlo Mikic et le rôle qu'il a joué à cet égard. Savez-vous
21 quelque chose à propos de la première publication de "St. Savo library", en
22 anglais, d'une version de ce mémorandum par le prêtre Mikic ?
23 R. Je n'ai jamais entendu parler d'un prêtre appelé Mikic. Ce que je sais,
24 c'est que le mémorandum a d'abord été publié en Croatie dans deux revues.
25 Pour ce qui est du dénommé Mikic, j'en ai jamais entendu parler, et je ne
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1 pense pas qu'il puisse revêtir une importance quelconque.
2 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas pu obtenir
3 davantage de détails au cours de la nuit. Mais au-delà de ce qui est
4 contenu dans le rapport de M. de la Brosse.
5 Q. Monsieur le Professeur, il y a différentes versions qui existent de ce
6 mémorandum. Nous avons un certain nombre ici, et je ne souhaite pas
7 surcharger le compte rendu avec les différentes versions dont nous
8 disposons, ou en tout cas, voir même d'autres versions qui n'ont pas été
9 cités ici. Pouvez-vous confirmer qu'en septembre 1986, une version du
10 mémorandum a été envoyée par le comité de l'Académie serbe des arts et des
11 sciences au secrétaire fédéral de l'intérieur, Dobrislav Culafic.
12 R. Quand pensez-vous que cela ait été envoyé ?
13 Q. Septembre.
14 R. Parce que l'Académie des sciences et des arts n'a jamais reconnu ce
15 mémorandum comme étant achevé et comme étant le sien. L'Académie serbe des
16 sciences dans ses premières années, à savoir en 1986 jusqu'au début des
17 années 1990 a estimé que ceci constituait un document inachevé, et que cela
18 n'a pas été agréé et approuvé par la commission dans son ensemble qui a
19 travaillé dessus pas plus que la présidence de ces académies serbes des
20 sciences. Par conséquent --
21 Q. Je vous montre un document que nous allons mettre sur le
22 rétroprojecteur, si nécessaire, et que nous pouvons photocopier, si
23 nécessaire, qui semble être une version envoyée au secrétaire fédéral de
24 l'intérieur d'après les ordres de Mile Puzovic. Ceci est daté du 26
25 septembre 1986.
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1 Est-ce que cela vous aide à retrouver le document ?
2 R. Je vois, mais cela n'a rien à voir avec l'académie. Ceci signifie que
3 le manuscrit en question, le manuscrit du mémorandum qui était inachevé et
4 qui a été publié par la presse, le ministère de l'Intérieur se l'est
5 procuré, et le dénommé Puzovic n'a rien à voir avec l'académie, lui. Il
6 s'agit du secrétariat de la République chargée de l'Intérieur. Il s'agit de
7 services de renseignements qui se sont procurés le document en question et
8 l'ont transmis au secrétaire fédéral. L'académie, elle, n'a jamais transmis
9 de documents quelconque au ministère de l'Intérieur.
10 Q. Des rumeurs circulaient à l'époque, n'est-ce pas, en vertu de quoi le
11 mémorandum avait été diffusé non pas de façon accidentelle mais
12 intentionnelle. Est-ce que vous acceptez cela ?
13 R. Je ne peux pas l'accepter, parce que l'académie, à savoir nous, qui
14 avons travaillé sur ce texte suite à de longues discussions et
15 modifications, nous avions souhaité l'achever. Il n'était pas dans
16 l'intérêt de l'académie de le faire partir dans sa version inachevée vers
17 les journaux. D'autant plus que cela a engendré des conséquences graves
18 vis-à-vis de l'académie. Cette publication inachevée dans la presse a eu
19 pour conséquence d'une chasse à l'homme contre les gens de l'académie. Ivan
20 Stambolic et le président de la République de l'époque a vigoureusement
21 attaqué l'académie en disant que l'on poignardait dans le dos la
22 Yougoslavie, et il avait réclamé des responsabilités. Il avait demandé que
23 les gens qui ont rédigé ce document répondent de ce fait. On a demandé la
24 démission du vice-président de l'académie M. Antonije Isakovic.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Professeur,
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1 M. NICE : [interprétation] J'ai obtenu la réponse. Merci.
2 Q. Ce qui a été suggéré et répété souvent que ce document n'était qu'un
3 avant-projet et doit être pris en compte, n'est-ce pas, Monsieur le
4 Professeur ? Hormis le fait que l'académie a publié la version que nous
5 avons comme pièce à conviction en 1995, n'est-ce pas, en même temps qu'une
6 réponse à certaines critiques à cet égard. Oui, une réponse à des
7 critiques.
8 R. Neuf ans plus tard --
9 Q. Oui.
10 R. -- l'académie a publié, oui. En 1986, cela n'a pas été publié. Elle n'a
11 pas pu le publier. C'était inachevé. Cela n'a pas été accepté par
12 l'académie, mais par la suite, après tous les abus de ce document, et suite
13 --
14 Q. Professeur, s'il vous plaît
15 R. -- on a décidé de le publier. Il faut bien que je termine ma réponse si
16 elle est plus longue.
17 Q. Oui. Mais la question qui vous est posée est celle-ci. Après en avoir
18 fait une analyse, les différences entre la première diffusion ou les
19 premières versions diffusées en 1986 et la version finale diffusée par
20 l'académie en 1995, il y avait très peu de différences entre les deux,
21 n'est-ce pas ?
22 R. Ce texte a connu plusieurs versions parce que pendant plus d'un an il y
23 a eu des débats aux fins de le corriger. Il y a eu même plusieurs versions
24 de celui-ci. Il y a eu cette version qui a été publiée par les journaux.
25 Cela a été l'une des dernières versions. C'est la version qui a été
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1 diffusée par la suite en 1995.
2 Q. Je vais proposer, mais je ne vais pas consacrer trop de temps à des
3 détails ici qu'il y avait environ six différences en tout. Deux parties qui
4 ont été enlevées, et quatre éléments qui ont été ajoutés. Quatre ajouts
5 entres ces deux versions. J'ai une analyse à vous proposer un peu plus tard
6 si cela peut nous aider. Est-ce que vous pensez qu'au total le nombre de
7 corrections s'élève à six, êtes-vous d'accord avec cette estimation-là ?
8 R. Non. Je ne sais pas du tout quelle avait été la quantité des
9 modifications apportées parce qu'en termes simples ce qui a été publié par
10 la presse n'a pas été accepté par l'académie en tant que version à elle.
11 Lorsqu'elle a décidé de le faire, elle a publié sa version à elle. Par
12 conséquent, la version qui a été volée ou qui a fait l'objet d'une fuite
13 n'a jamais été reconnue par l'académie comme sienne.
14 Q. Si vous voulez bien regardez maintenant la version qui a été présentée
15 hier et qui porte la cote D250, dans sa version reliée. Monsieur le
16 Professeur, je sais que vous parlez l'anglais. Je sais que vous avez donné
17 des conférences en Amérique du Nord, et que vous avez obtenu des diplômes à
18 Londres, mais nous allons essayer de parcourir la version anglaise.
19 Q. A la page -- et je vais analyser ceci en détail. Nous commençons à la
20 page 10. En haut, il est indiqué : "Que bien que la plus grande République
21 yougoslave en terme de territoire et de population, la Serbie a été
22 dépossédée de ses attributs, ce n'est plus un état par la nouvelle
23 constitution qui a été promulguée en 1974."
24 Il s'agissait là du principal souci de la Serbie et des intellectuels
25 dont vous faisiez partie, n'est-ce pas ?
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1 R. La constitution de 1974 a fait que la Serbie ait obtenu le statut d'un
2 état souverain. La différence des autres républiques, parce que la Serbie
3 s'est vue partagée en trois parties. La Serbie au sens restreint, le Kosovo
4 et la Vojvodine. C'est de ceci que l'on parle ici, et c'est ce qui a
5 provoqué --
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Professeur. Nous allons
7 regarder la question qui était assez simple. La question qui vous a été
8 posée, à savoir si le principal souci de vous-même et de vos co-
9 intellectuels, qui est cité à la page 10 ici, l'extrait qui commence à la
10 page 10 : "Que la République yougoslave la plus importance en termes de
11 territoire et de population, la Serbie avait été dépossédée de ses atouts
12 en matière d'état par la nouvelle constitution promulguée en 1974." Que
13 répondez-vous à cela ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela a été l'une des préoccupations, pas la
15 préoccupation principale. Comme je vous l'ai dit, la proposition de
16 travailler sur le mémorandum a été formulée par un économiste, Maksimovic.
17 M. Mihajlovic a travaillé dessus. La raison en a été une crise économique
18 des plus grave. Le fait est que la Yougoslavie s'est vue subdivisée en six
19 états, je dirais même huit états. Tout s'est vu désintégré, comme on le dit
20 dans autres ouvrages. Ceci a constitué effectivement l'une des raisons pour
21 lesquelles il avait été question de la nécessité d'une égalité en droit,
22 étant donné que la Serbie ne s'est pas vu attribuer, comme les autres, un
23 statut de république à part entière.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que la question posée par M. Nice
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1 jette la confusion, parce que partant de ce livre que je possède ici, en
2 langue anglaise, ne cite pas le texte du mémorandum. Le texte du mémorandum
3 n'est repris qu'à la page 93 de ce texte. Devant, on trouve toutes sortes
4 d'articles qui sont des ouvrages de Pr Mihailovic et de Vasilje Krestic,
5 qui donnent des explications, qui formulent un aperçu historique. La raison
6 en est précisément le fait que ce que nous cite M. Nice ce n'est pas le
7 texte du mémorandum, ce sont des articles des professeurs qui ont écrit à
8 ce sujet. Ce n'est pas le texte du mémorandum qui a été rectifié pendant
9 neuf ans pour être publié, mais pour mystifier les choses ou démystifier
10 les choses. Ces gens-là ont fini par décider de publier le mémorandum pour
11 expliquer de quoi il s'agit. Ce que M. Nice est en train de citer à la page
12 10 n'est pas le texte du mémorandum, mais un article qui est intitulé
13 "Pourquoi le mémorandum a été rédigé." Cela a été écrit 10 ans plus tard.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je comprends.
15 M. NICE : [interprétation] Je crois que nous le savons tous. Ceci a été
16 clairement expliqué hier, lorsque nous avons expliqué ce qu'était le
17 document, néanmoins.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Néanmoins, vous posez la question.
19 M. NICE : [interprétation] Oui, je pose la question.
20 Q. Monsieur le Professeur, il s'agit d'un document qui a été publié avec
21 l'approbation de l'académie, n'est-ce pas, cette version que nous
22 regardons ?
23 R. Monsieur Nice, je suis vraiment surpris de vous voir ne pas faire la
24 différence entre le mémorandum et des commentaires qui l'accompagnent. Ceci
25 a été publié par l'académie, mais ce sont des commentaires à son sujet. Le
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1 mémorandum en tant que tel ne commence qu'à page 93. Je vais vous répondre
2 à toutes les questions que vous me poserez, bien entendu.
3 Q. La constitution de 1974 était le droit appliqué en Yougoslavie jusqu'au
4 moment où ceci a été modifié au plan juridique, n'est-ce pas ?
5 R. A l'époque, la constitution de 1974 était appliquée, était valide, et
6 c'est la raison pour laquelle on a formulé au sein du mémorandum des
7 observations à ce sujet parce qu'autrement, il n'y aurait aucune raison
8 historique d'en parler.
9 Q. Nous allons avancer, passer à la page 13, pour gagner du temps. Nous
10 constatons que l'académie, vos collègues, Mihailovic et Krestic donnent la
11 genèse de ce mémorandum au deuxième paragraphe. Ils mettent ici en exergue
12 la résolution prise par l'assemblée. Ils parlent de l'avant-dernier
13 paragraphe, où on reconnaît qu'il s'agit des travaux d'un groupe de
14 travail.
15 On passe ensuite à la page 14 où ceci est présenté. Ceci illustre en
16 partie votre témoignage. Le comité s'est réuni le 19 septembre. On prépare
17 la publication de cet ouvrage, et votre ouvrage a été publié dans Vecernje
18 Novosti, c'est exact, lorsque les travaux se sont arrêtés un certain
19 mercredi ?
20 R. Oui. Il y a eu publication d'un article dans le journal Vecernje
21 Novosti. Il y a eu des attaques de lancées contre l'académie. Cela a duré
22 pendant des semaines. Bien entendu, le travail là-dessus a été interrompu.
23 Q. A la page 15 en bas, à droite, "Les procès-verbal qui ont été fait de
24 ces réunions." La première partie du texte jusqu'à la page 30 peut être
25 considérée comme étant approuvée par le comité, et traite des autres
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1 problèmes de publication. A première vue, les 30 premières pages ont été
2 approuvées, c'est exact. Il s'agit d'une version ici qui est la version
3 comportant 74 pages.
4 Pour aider les Juges, on voit ici quel est l'historique qui a précédé
5 à la naissance de cet ouvrage.
6 R. Oui. Les 30 premières pages portaient uniquement sur la situation
7 économique dans laquelle se trouvait la Yougoslavie. C'est la partie sur
8 laquelle avait travaillé l'académicien Kosta Mihailovic, ainsi que ses
9 autres confrères, qui intervenaient dans le domaine des sciences
10 économiques. En d'autres termes, cette partie-là a été la moins contestée.
11 C'est la partie qui a été terminée en premier. Cela n'a concerné que des
12 questions purement économiques.
13 Q. A la page 16, si vous voulez bien passer à cette page sous le titre
14 L'Académie serbe, la mise en place de l'Académie serbe et politique entre -
15 - à couteaux tirés, Antonije Isakovic, Dusan Kanazir, est-ce que vous
16 reconnaissez ces différents éléments ?
17 Est-ce qu'il s'agit des personnes qui sont devenues membres du comité
18 central du parti SPS ? Je parle ici de ces académiciens ?
19 R. Ils ont en 1990, donc six ans plus tard. Ils sont devenus membres de ce
20 comité. Dusan Kanazir, qui était président de l'Académie serbe, et Antonije
21 Isakovic, qui lui était vice-président de cette académie. A l'époque, on
22 avait surtout réclamé la responsabilité d'Isakovic, qui se trouvait à
23 présider ce groupe de travail. On a demandé à ce qu'il démissionne en sa
24 qualité de responsable pour la rédaction du mémorandum.
25 Q. A la page 18, si vous voulez bien, Monsieur le Professeur, en bas de la
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1 page, une référence est faite ici, 12 lignes plus haut. Le président
2 Stambolic réagit au mémorandum et il précise que ceci a bouleversé les bons
3 rapports qui existaient précédemment. L'attitude du président Stambolic par
4 rapport à ce mémorandum a été décrite dans un ouvrage qu'il a rédigé lui-
5 même avant sa mort, avant qu'il n'ait été tué. C'est exact ?
6 R. Je ne sais pas. Je n'ai jamais vu ce livre rédigé par le président
7 Stambolic.
8 Q. Vous ne savez pas qu'il avait donné son opinion et réaction par rapport
9 à ce mémorandum, et que cela avait été rédigé in memoriam ? Vous souvenez-
10 vous de cela ? Il s'agissait d'un ouvrage rédigé in memoriam par rapport à
11 la Yougoslavie ?
12 R. Il se trouvait à la tête de cette campagne très virulente, qu'on
13 lançait contre l'Académie des sciences. Il l'a attaquée dans la presse. Il
14 a demandé à ce que des responsabilités soient assumées. Il est même arrivé
15 l'année d'après, lorsque l'académie était censée célébrer son centenaire,
16 l'état a privé l'académie de toute aide pour cette célébration. Ce qui fait
17 que nous avons dû nous adresser à toutes les académies étrangères pour leur
18 dire que nous n'étions pas en mesure de couvrir leurs frais de déplacement
19 ni leur frais d'hébergement, étant donné que les fonds nécessaires ne nous
20 ont pas été attribués par l'Etat. Stambolic avait la position telle que
21 vous l'avez décrite; une position et une attitude des plus négative. Je
22 peux ajouter si on a le temps --
23 Q. Nous pouvons passer à la page 39, s'il vous plaît. Une partie de ce
24 document, avant d'en venir au mémorandum en tant que tel, ceci expose un
25 récit de la participation de l'accusé.
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1 A la page 39, on peut lire comme suit, au 2e paragraphe : "La fin de
2 la campagne de critique et de normalisation des relations avec l'académie
3 serbe s'est produite après qu'Ivan Stambolic soit parti et que d'autres
4 représentants officiels de la Ligue des communistes qui avaient été parmi
5 les principaux dirigeants responsables de l'attaque. Le changement au
6 niveau des hommes politiques a marqué un changement dans l'attitude des
7 intellectuels serbes, eu égard à la liberté de la presse, la responsabilité
8 pour les déclarations faites en public."
9 Ce nouveau climat a maintenu une tension forte entre le représentant
10 de la vie politique et de l'académie serbe.
11 R. Il n'a plus été question du mémorandum. Ce qui s'est modifié, c'est
12 l'attitude vis-à-vis de l'académie. Il n'y a plus eu d'attaques, il n'y a
13 plus eu de critiques permanentes. On a cessé de réclamer la responsabilité
14 des uns ou des autres. La direction de la Ligue des communistes a rétabli
15 des relations normales avec l'académie telle qu'elle aurait dû l'être
16 auparavant en respectant, bien entendu, la liberté d'opinion et la liberté
17 de publier son opinion.
18 Il n'y pas de raisons d'avoir vu cela une fois que l'accusé est
19 devenu président des Affaires publiques, et le soutien qui s'est fait --
20 qu'il a obtenu de la part de tous les intellectuels. Nous avons vu
21 s'entamer une aire nouvelle. Il n'y a plus eu de prisonniers politiques, on
22 a pu présenter son opinion, écrire ce que l'on pensait. Les relations avec
23 l'académie sont redevenues normales.
24 Q. L'accusé n'avait fait que des critiques voilées de ce mémorandum. Cela
25 correspond à dire -- cela revient à dire que sous la direction de l'accusé,
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1 le mémorandum et l'académie étaient mieux traités.
2 R. L'accusé n'a pas formulé de critiques explicites vis-à-vis du
3 mémorandum. Mais le parti à la tête duquel il se trouvait, avait créé une
4 commission pour examiner tout ce qui s'était passé au sujet du mémorandum.
5 Il y avait un certain Milenko Markovic qui avait présidé les travaux à
6 cette commission. Cette commission n'a jamais terminé ses activités; elle a
7 été démantelée avant l'achèvement de ses activités.
8 L'accusé n'a nulle part parlé du mémorandum. Il ne l'a pas soutenu,
9 mais il ne l'a pas condamné non plus.
10 Q. A la page 41, on voit ici une illustration de la position publique de
11 l'accusé, où en 1990, il est censé avoir dit : "Pour ce qui est de
12 l'Académie des Sciences, je ne vois pas pourquoi cette académie n'aurait
13 pas son mot à dire dans la vie politique serbe." Vous souvenez-vous de
14 cela ?
15 R. Oui, bien entendu. L'accusé a établi, rétabli cette liberté
16 d'expression et le droit de l'académie a donné ses opinions, sans la
17 limiter et sans la sanctionner pour cela. La chose a été fort bien perçue.
18 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant passer à la page 80. Car en toute
19 équité, vis-à-vis du document, je crois qu'il nous faut voir quelle était
20 la position dans son ensemble.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour être tout à fait équitable, cet article
23 qui vient d'être cité par M. Nice s'intitule "La chasse aux sorcières a
24 pris fin".
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous aurez la
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1 possibilité de poser des questions supplémentaires. A ce moment-là, vous
2 pouvez soulever des questions qui émanent directement du contre-
3 interrogatoire.
4 M. NICE : [interprétation]
5 Q. A la page 80, il y a un titre où on peut lire "Mémorandum et Slobodan
6 Milosevic". Je vais lire une moitié de ce texte avec le témoin. Je pense
7 lui rendre service, à moins que la Chambre de première instance ou les
8 Juges aient eu l'occasion de le lire précédemment. Ceci est son point de
9 vue qui a été publié. En bas de la page 80, j'espère que vais pouvoir lire
10 suffisamment lentement pour les interprètes :
11 "Les insinuations en vertu de quoi Slobodan Milosevic menait une -- avait
12 lui-même un programme national contenu dans la fabrication et ont été
13 fabriqués de toute pièce. Ceci a été inspiré par le déroulement des
14 événements et le besoin de la propagande anti-serbe de maintenir les
15 organes officiels et officieux de la Serbie sous une salve d'accusations.
16 Cette vue de l'esprit est insoutenable, car le mémorandum n'est en aucune
17 manière un programme national. Je crois qu'il faut répéter ceci à plusieurs
18 reprises étant donné que la propagande anti-serbe, sans qu'elle soit fondée
19 en quelque manière que ce soit, tente en permanence de convaincre le reste
20 du monde de son contraire.
21 "Une autre accusation contre le mémorandum, c'est que cela sert de
22 point de départ pour la politique de Slobodan Milosevic. Cela n'est pas
23 curieux de constater qu'il ait pu voir des problèmes ou des solutions à la
24 manière dont cela a été présenté dans le document en question. Il est
25 plutôt plus probable qu'il n'a pas eu connaissance de ces problèmes avant
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1 de lire ce mémorandum, mais qu'en le lisant, a été conforté dans ses
2 propres observations.
3 "La crise yougoslave était tellement aiguë qu'une telle coïncidence
4 est fort probable. Il est tout à fait certain que sans ce mémorandum, il
5 aurait dû mettre un terme à l'abus de l'autonomie au Kosovo et de
6 l'autonomisme en Vojvodine. Différents éléments qui faisaient obstacle à la
7 mise en place de prérogative liée à un état dans la République de Serbie."
8 Phrase suivante.
9 "Milosevic était en faveur du maintien de la Yougoslavie comme cela a
10 pu être constaté lors du dernier 14e congrès de la Ligue des communistes de
11 Yougoslavie, entre autres, parce que le peuple serbe vivait à ce moment-là
12 en un seul état."
13 Je vais faire une pause ici. Ce document est en faveur de l'indépendance du
14 mémorandum, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, certainement. Milosevic n'avait rien à voir avec le mémorandum.
16 Les gens ne le connaissaient pas, donc ils n'avaient pas de contacts avec
17 lui. Il était si notoire -- ces opinions étaient si notoires; il y avait
18 des problèmes. Je vous ai déjà dit hier que les Slovènes ont décidé de ne
19 plus vivre dans un tel état en raison de ce chaos, de ce désordre général,
20 où il n'y avait plus d'égalité en droit, et où il n'y avait plus de
21 politique économique réelle.
22 Q. Cela nous suffit. Je vais maintenant me concentrer sur la dernière
23 phrase. Etiez-vous, vous-même, présent lors du 14e congrès de la Ligue des
24 communistes.
25 R. Non. Je n'ai pas été membre de la Ligue des communistes entre 1906. En
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1 1968, j'ai été expulsé avec toute l'organisation de cette cellule du parti
2 des rangs du parti avec le reste des membres de la Faculté de philosophie.
3 Q. Etes-vous au courant que ce congrès au cours duquel les Slovènes, par
4 l'intermédiaire de Kucan ont essayé de faire adopter un certain nombre
5 d'amendements constitutionnels proposés à la Ligue des communistes. Tous
6 ceux-ci a été rejetés par l'accusé, et qu'à cause de Kucan c'est ce qui a
7 fait qu'il a demandé à sa délégation de quitter la session.
8 R. Je ne peux pas vous répondre par un oui ou par un non. Il faut bien que
9 je vous donne une phrase en guise de réponse. Il était indispensable de
10 faire en sorte que cette association très relaxe, très souple des
11 différents -- entre les différentes républiques soient renforcées et non
12 pas qu'elles soient affaiblies davantage. Parce que Kucan et les Slovènes
13 avaient déjà décidé de quitter la Yougoslavie. Ils avaient besoin d'abord
14 de quitter la Ligue des communistes de Yougoslavie. C'est la raison pour
15 laquelle ils ont formulé des amendements pour rendre ces liens encore plus
16 faibles et pratiquement inexistants. Personne de raisonnable ne saurait
17 accepter telle chose.
18 Q. Nous allons repartir à la page 81, paragraphe suivant, s'il vous plaît.
19 La troisième phrase.
20 "Néanmoins, certains faits ont tendance à suggérer qu'il critiquait les
21 auteurs du mémorandum plutôt pour se conformer à la discipline du parti que
22 par conviction personnelle. Au cours de la chasse aux sorcières politiques
23 en Serbie, on a remarqué qu'il faisait rarement des critiques, et que ses
24 critiques étaient en général peu soutenues. Après avoir occupé le poste-clé
25 en Serbie, se trouvant en mesure ou capable d'orienter l'activité
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1 politique, il a cessé la campagne lancée contre le mémorandum."
2 Cela se rapporte à une de mes questions précédentes, autrement dit, le
3 point de vue de M. Mihailovic et Krestic. Leurs points de vue, d'après
4 vous, sont-ils les mêmes que le vôtre, Monsieur le Professeur, à cet
5 égard ?
6 R. Ils coïncident. Seulement, ce que je puis dire, c'est que je ne sais
7 pas si M. Milosevic a exprimé où que ce soit une critique quelconque à
8 l'égard du mémorandum. Je dirais qu'il a envoyé une commission du parti
9 pour examiner les circonstances de sa création, de sa rédaction. Il est
10 exact de dire qu'il a mis un terme à cette campagne parce que c'était la
11 seule chose démocratique à faire. Parce que cela avait constitué le dernier
12 des résidus de cette intolérance communiste que Stambolic avait mis en
13 œuvre en diligentant une véritable guerre à l'encontre de l'Académie des
14 Sciences. La chose a été très impopulaire, et aucun intellectuel n'était à
15 même d'accepter chose pareille. C'est une grande chance que d'avoir vu M.
16 Milosevic de mettre un terme à cette campagne, ou à cette chasse aux
17 sorcières, si vous préférez.
18 Q. Simplement pour aider les Juges de la Chambre, une petite question à la
19 page 85. Cette partie du document couvre en une seule page la thèse de la
20 Grande Serbie, à propos duquel je vais peut-être vous poser des questions
21 si j'ai le temps. Ici, on voit décrite la notion de la Grande Serbie qui
22 remontre au 19e Siècle, n'est-ce pas, Monsieur le Professeur ?
23 R. Oui, mais cela a pris ses origines en Autriche-Hongrie qui voulait, à
24 l'époque, disqualifier de la sorte les aspirations des Slaves du sud à se
25 libérer et à s'unifier.
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1 Q. Après ces observations préliminaires contenues dans ce document, je
2 souhaite maintenant aborder certains extraits du mémorandum. En tant que
3 tel et pour gagner du temps, je souhaite aborder deux questions en même
4 temps.
5 A la page 104, nous pouvons voir en haut de la page -- lire en haut de la
6 page quatre lignes à partir du haut, après avoir parler de la question du
7 démantèlement de façon générale : "Les premières décennies de développement
8 après la guerre, s'est organisé en une forme de confédération qui est
9 devenue institutionnalisée et inscrite dans la récente constitution de
10 1974. Il y a eu bon nombre de cas au cours de l'histoire lorsqu'une
11 confédération a été transformée en fédération. Il n'y a pas un seul exemple
12 du contraire."
13 Ensuite, à la fin de ce même paragraphe : "Onze ans ont été suffisants pour
14 surmonter toutes les difficultés et toutes les difficultés provoquées par
15 les conséquences du confédéralisme lorsque l'ordre social s'est défini de
16 façon plus claire. Même la constitution elle-même qui a été mise en place,
17 représentait une critique du système politique. Les éléments les plus
18 importants du confédéralisme consistent à demander à ce que les assemblées
19 de toutes les républiques de toutes les provinces devaient donner leur
20 accord avant que tout amendement ne soit adopté."
21 Si on s'oppose à cet accord tel que c'est écrit ici, la confédération
22 émanait des Serbes. La confédération n'a pas fait l'objet de critiques des
23 autres républiques, n'est-ce pas ?
24 R. Les républiques qui visaient à faire sécession ont suivi la voie qui
25 visait à transformer d'abord la fédération en confédération qui
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1 reconnaîtrait des républiques souveraines ainsi que leurs frontières.
2 Ensuite, le pas suivant serait très aisé pour ce qui est de la sécession à
3 partir de la confédération mise en place.
4 Il est vrai de dire que les confédérations, en général, se transforment en
5 fédérations. Par exemple, la confédération suisse n'est plus en aucune
6 façon une confédération, voire aux Etats-Unis --
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Professeur, il faut
8 absolument répondre à la question qui vous a été posée, et faire montre
9 d'une certaine discipline à cet égard. La question qui vous a été posée
10 était très simple.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que je fais.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question qui vous a été posée
13 était celle-ci, à savoir, s'il y avait des objections au confédéralisme
14 venaient d'autres sources hormis la Serbie. Vous auriez pu répondre de
15 façon beaucoup plus simple.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aurais pu le faire, mais cela n'aurait pas
17 été clair. On n'aurait pas compris pourquoi les autres républiques n'en
18 voulaient pas, ou plutôt voulaient d'une confédération. Je viens de vous
19 expliquer pourquoi.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir donné ce
21 cours.
22 M. NICE : [interprétation] Je ne peux pas reprendre cette question pour
23 l'instant. Cela ne signifie pas pour autant que je l'accepte.
24 Q. A la page 104, dernier paragraphe : "Les différentes attributs au
25 niveau de la république et des provinces correspondant à un état ont été
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1 remarqués -- ont apparu en même temps que la disparition des différents
2 organes de coordination exercés par le gouvernement fédéral. Ceci a ouvert
3 des portes et à mener à la promotion des intérêts locaux aux dépens des
4 intérêts nationaux."
5 Quels intérêts locaux sont cités ici, ou sur quoi mettait le doigt le
6 mémorandum à cet égard ?
7 R. Les intérêts locaux sont très nombreux. Si je devais en parler, il
8 faudrait beaucoup plus de temps. Mais les choses sont claires. Quand on dit
9 que les intérêts locaux sont placés au-dessus des intérêts nationaux en
10 général, les choses sont claires.
11 Q. Ces intérêts régionaux locaux ont-ils trouvé leur expression dans les
12 provinces autonomes; c'est cela ?
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ceci ne mène à rien. Il
15 s'agit ici d'un texte intellectuel qui parle de désintégration d'un texte
16 sur la vie économique et sociale de la Yougoslavie, notamment sur le plan
17 économique à une période où le monde entier s'intégrait. Cela n'avait rien
18 à voir avec la question nationale. Je crois que M. Nice ne comprend pas le
19 texte du mémorandum, ou il ne l'a pas lu convenablement, parce qu'il pose
20 des questions qui jettent le témoin dans la confusion. Le témoin est à même
21 de vous expliquer chacune de ce qui est rédigé ici mais c'est une façon si
22 terre à terre d'interroger que cela ne nous mène à rien. Ce sont des textes
23 rédigés par des académiciens. Je vous prie de ne pas perdre ce fait-là de
24 vue.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que vous avez raison. Le
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1 témoin peut répondre à la question.
2 M. NICE : [interprétation] Les différentes interruptions de l'accusé ne
3 vont pas nous aider dans notre calendrier. Je crois que la question que
4 j'ai posée était une question que le témoin était tout à fait capable d'y
5 répondre. Je demande simplement au témoin d'y répondre.
6 Q. Ces intérêts locaux ont-ils un lien avec les régions autonomes ?
7 R. Non. Les intérêts locaux sont des intérêts plus fragmentés encore. Cela
8 ne se rapporte pas seulement aux provinces autonomes. Par exemple, il y
9 avait un intérêt local en Slovénie qui visait à faire en sorte que les
10 citoyens de Slovénie puissent voyager sans passeport et sans avis vers
11 l'Italie pour ramener des produits sans payer des droits de douane. C'était
12 là un intérêt local de la Slovénie ou plutôt des territoires limitrophes de
13 la Slovénie avec l'Italie. C'est un exemple d'intérêt limitrophe qui n'a
14 rien à voir.
15 Que se passerait-il si l'Amérique autorisait chacune de ces régions à
16 commercer directement avec le reste du monde ? Là on achetait et on vendait
17 sans visa, sans paiement de droits de douane.
18 Voici un exemple, cela n'avait rien à voir avec les provinces autonomes.
19 Cela concernait toutes les municipalités qui étaient au nombre de centaines
20 et centaines en Yougoslavie.
21 Q. Nous passons maintenant, s'il vous plaît, à la page 117. En haut de la
22 page, on peut lire : "A moins qu'il y ait un changement au niveau de cette
23 constitution et au niveau du système politique et économique qui est basé
24 là-dessus, il sera impossible de résoudre le problème fondamental de notre
25 société."
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1 On ne peut écarter l'idée que l'objet de ce mémorandum, ou en tout cas
2 cette conclusion était qu'il fallait absolument qu'il y ait un changement
3 dans la constitution, n'est-ce pas ?
4 R. Il convenait de procéder au changement de la constitution parce que
5 cette constitution a en réalité enterré la Yougoslavie. Je l'ai dit. Aucun
6 état ne saurait survivre à une constitution qui dirait que des lois
7 particulières auraient plus d'importance que des lois générales, et qui
8 dirait que chaque partie pouvait opposer un veto aux décisions. Avec une
9 constitution de la sorte, la vie ne pouvait plus se poursuivre. On ne
10 pouvait pas continuer de la sorte. Je vous ai dis que la Slovénie avait
11 d'ores et déjà décidé de faire sécession. Donc il fallait forcément
12 procéder à des modifications de cette constitution.
13 Q. Monsieur le Professeur, je crois que vous avez été d'accord pour dire
14 que les autres républiques étaient satisfaites de la constitution. La
15 constitution représentait le droit appliqué dans ce pays à l'époque et
16 cette demande, aux fins d'apporter une modification à la constitution, ne
17 venait que de la Serbie, n'est-ce pas ?
18 R. Non. C'est tout à fait le contraire. Toutes les républiques étaient
19 mécontentes de la constitution, à la différence près comme suit : la Serbie
20 a proposé de faire un pas en avant vers le fédéralisme, vers la
21 fédéralisation. Les autres républiques, la Croatie et la Slovénie et autres
22 proposaient d'aller dans la direction contraire, à savoir de procéder à une
23 désintégration plus grande encore de ce que l'on avait appelé la fédération
24 et qui était en réalité une confédération. Toutes les républiques étaient
25 mécontentes, mais les changements réclamés allaient dans des directions
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1 différentes.
2 Q. La constitution de 1974, d'après vous, était-elle le reflet de la
3 croyance si célèbre de Tito, que pour avoir une Yougoslavie forte, il
4 fallait une Serbie affaiblie ?
5 R. Il y avait des opinions, à l'époque, qui disaient que Tito ainsi que
6 d'autres personnalités des autres républiques estimaient qu'il fallait que
7 cette république-là soit affaiblie.
8 Mais j'ai une autre explication pour ce qui est de cette constitution. Tito
9 estimait que de son vivant, de par la force de son autorité et de par le
10 contrôle qu'il exerçait à l'égard de l'armée et des services de
11 renseignements, il réussirait à maintenir la Yougoslavie en tant qu'entité.
12 D'autre part, pour être le plus populaire possible dans le pays, il ne
13 s'est pas opposé à ces revendications visant à faire de la Yougoslavie une
14 confédération plus grande encore, mais ceci en provenance des Slovènes et
15 des Croates. De son vivant, il a estimé qu'il pouvait garder le pays
16 ensemble. Une fois qu'il est décédé, cela n'a plus été possible parce que
17 le pays s'est désintégré, ou je dirais mieux, il a été démantelé.
18 Q. Les premiers pas, pour ce qui est des réformes et dont est au courant
19 la Chambre de première instance, sont les pas qui conduisaient au
20 renforcement de la Serbie en supprimant l'autonomie du Kosovo et de la
21 Vojvodine, n'est-ce pas ?
22 R. J'ai répondu hier en parlant des réformes du système économique et
23 politique. Il a été question d'autres choses également. Ceci s'est rapporté
24 à des changements de la constitution de la Serbie en 1990 qui ont renforcé
25 les facteurs intégratifs et ont fait de la Serbie un état à l'image des
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1 autres républiques qui étaient d'ores et déjà des états.
2 Cela a fait en sorte que la Serbie, les autorités de la Serbie, les
3 institutions de la Serbie puissent décider et adopter des lois en vigueur
4 pour la totalité de la Serbie. C'est le changement que vous avez décrit en
5 le qualifiant de réduction.
6 Q. Je me permets de vous interrompre, Professeur, parce que la question
7 que je vous ai posée est très simple : ces réformes qui ont abrogé les
8 autonomies ont-elles débouché sur une Serbie plus forte ? Oui ou non ?
9 R. Par le fait même de supprimer les éléments de la souveraineté, pas de
10 l'autonomie mais de la souveraineté parce que l'autonomie a été conservée,
11 par ce simple fait, l'entité serbe en tant que telle s'est trouvée
12 renforcée.
13 Q. Indépendamment de l'implication de l'accusé dans les travaux de
14 l'académie et dans le mémorandum, par les réformes qu'il a réalisées, il a
15 satisfait aux exigences ou au demandes formulées dans le mémorandum en page
16 17 [comme interprété], la page que nous avons lue où une modification de la
17 constitution a été demandée ?
18 R. C'était la conviction de tous les intellectuels, de tous les
19 représentants politiques de la République de Serbie. Il ne s'agit pas ici
20 uniquement de l'interprétation du mémorandum par l'accusé.
21 Q. Maintenant, si nous prenons le discours de Gazimestan, admettez-vous
22 que d'une façon ou d'une autre l'abrogation de l'autonomie du Kosovo est
23 bien traitée dans ce discours et que la réforme de la constitution est
24 également abordée dans ce discours, peut-être de façon un peu indirect,
25 mais tout de même ?
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1 R. Il n'était pas question de cela dans ce discours. Mais un an plus tard,
2 à la demande générale, la constitution a bel et bien été modifiée. Je
3 répète que l'autonomie n'a pas été abrogée car vous ne cessez de parler
4 d'abrogation de l'autonomie. L'autonomie n'a pas été supprimée, mais des
5 éléments de souveraineté ont disparu. Cela dit, l'autonomie du Kosovo est
6 restée en vigueur, y compris dans la nouvelle Yougoslavie à partir de 1990.
7 Q. Voyons ce discours de Gazimestan d'un peu plus près. Il s'agit de la
8 pièce à conviction 3251 [comme interprété]. L'accusé dit en 1989 que la
9 Serbie a, après de nombreuses années, après en fait plusieurs décennies,
10 retrouvé son intégrité nationale et spirituelle. Dans le même paragraphe un
11 peu plus loin, nous voyons qu'il est dit que par le jeu de l'histoire et de
12 la vie, il semble qu'en cette année-là, 1989, la Serbie avait retrouvé son
13 statut, son dignité, et que par conséquent, elle célébrait le passé en
14 raison de sa signification historique et symbolique importante, vis-à-vis
15 de l'avenir.
16 Professeur, l'accusé parle-t-il effectivement à cet endroit de la
17 réintégration du Kosovo dans l'état de Serbie en tant que tel ?
18 R. On ne peut pas parler de réintégration du Kosovo, parce que le Kosovo
19 faisait déjà partie de la Serbie, y compris dans le cadre de la
20 constitution de 1974. Puisque le Kosovo est bel et bien un élément
21 constitutif de la Serbie, et de la fédération, il est question ici de
22 certains éléments de souveraineté. Le Kosovo n'est pas réintégré au sein de
23 la Serbie. Le Kosovo continue à faire partie de la Serbie, mais simplement
24 il perd certains éléments de souveraineté. Les institutions serbes, les
25 institutions de la Serbie dans son intégralité, peuvent désormais
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1 s'appliquer sur la totalité du territoire de la Serbie, et pas seulement
2 sur le territoire de la République de Serbie en tant que tel.
3 Q. C'est peut-être une erreur de ma part, je n'ai peut-être pas été
4 suffisamment clair. Mais je vous demande si l'accusé, dans son discours à
5 Kosovo Polje, devant un million ou un million et demi de personnes, parle
6 bien des amendements à la constitution ?
7 R. Non, non.
8 Q. Mais alors, de quoi parlait-il ?
9 R. Non, non, il ne parle pas de cela.
10 Q. Mais de quoi parle-t-il ?
11 R. Nous en avons parlé hier. Il parle de la nécessité de l'unité, car
12 c'est la disparition de cette unité qui, 600 ans auparavant, a entraîné la
13 défaite de la Serbie à Kosovo Polje. Il parle également de la nécessité
14 d'une égalité entre les nationalités. Il parle de la nécessité de la
15 tolérance, et il ne dit pas un mot direct au sujet du Kosovo, de l'Albanie
16 ou des Albanais.
17 Q. Est-ce que vous avez le texte de son discours sous les yeux ?
18 R. Oui, oui. Ah, non. Excusez moi, non.
19 Q. Vous pouvez le suivre en serbe et en anglais, je pense.
20 R. Oui, les deux me conviennent.
21 Q. Lisez ce qui est écrit à la deuxième ligne, je cite : "Par la force des
22 circonstances sociales, ce grand 600e anniversaire de la Bataille du Kosovo
23 se déroule une année durant laquelle la Serbie, après de nombreuses années,
24 après de nombreuses décennies, a retrouvé son statut national et son
25 intégrité spirituelle."
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1 De quoi parle-t-il ici ? Personne n'est mieux placé qu'un
2 intellectuel, membre de l'académie, pour interpréter les propos de M.
3 Milosevic ici.
4 R. On sait bien ce qui veut dire le mot "intégrité." Il s'agit d'une
5 unité, d'une application égale partout des droits de l'homme, d'une
6 application sur tout le territoire de toutes les lois, et d'une égalité
7 sociopolitique entre tous. Il n'est pas question ici d'une partie d'un
8 tout, mais il est question du tout.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, pouvez-vous me rappeler
10 la date à laquelle ont eu lieu ces amendements constitutionnels ?
11 M. NICE : [interprétation] Mars de cette même année, 1989. Le discours date
12 du juin.
13 Q. Professeur, pouvez-vous nous aider sur le point suivant : nous avons
14 entendu quelques témoins nous parler des amendements à la constitution qui
15 ont eu lieu en deux étapes au mois de mars au Kosovo en tant que tel. Vous
16 souvenez-vous de ces chars qui étaient regroupés autour du bâtiment de
17 l'assemblée au moment du vote de ces amendements constitutionnels au
18 Kosovo ? Vous souvenez-vous de cela ?
19 R. Non, non.
20 Q. Pouvez-vous expliquer pourquoi il s'avérait nécessaire de manifester la
21 présence de la force au Kosovo pour aboutir à des amendements
22 constitutionnels ?
23 R. Si je vous dis que je ne me souviens pas que cela a eu lieu, je ne
24 saurais vous expliquer pour quelle raison cela est censé avoir eu lieu.
25 Q. Pouvez-vous nous aider sur le point suivant à présent ? Vous vous
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1 souviendrez qu'hier, M. le Juge Bonomy vous a interrogé, vous a posé
2 quelques questions au sujet d'articles de presse. Nous y reviendrons plus
3 en détail un peu plus tard. Mais à présent, veuillez m'apporter votre aide
4 sur le point suivant : ce discours prononcé au Kosovo par l'accusé ne
5 comporte aucune référence aux Albanais du Kosovo, n'est-ce pas ? Est-ce que
6 vous pouvez nous expliquer cela ?
7 R. Je peux. L'attente générale dans la population était qu'à ce moment de
8 son discours, s'il était question des Albanais kosovars, il critique ce qui
9 s'était passé au cours des années précédentes. Chacun sait ce qui s'était
10 passé au cours des années précédentes. Hors, il s'est abstenu de formuler
11 la moindre critique. Il s'est contenté de parler du tout. Il n'a jamais
12 parlé d'un groupe ethnique, en particulier. Pas une seule fois il n'a parlé
13 précisément de tel ou tel groupe ethnique résidant au Kosovo. Il a
14 simplement fait référence aux Serbes quelquefois dans le discours.
15 Q. Le discours de Gazimestan était destiné aux Serbes, et c'étaient des
16 Serbes qui l'ont écouté. Il n'était pas du tout destiné aux Albanais
17 kosovars, n'est-ce pas ?
18 R. Au contraire. Il a dit pendant cette allocution, et ceci a été cité
19 hier, que les Serbes n'étaient pas les seuls à habiter au Kosovo, et qu'il
20 parlait bien de tous. Pas seulement des Serbes.
21 Q. Est-il exact, si vous vous en souvenez, qu'au moment même de cette
22 rencontre organisée à l'intention des Serbes, l'état d'urgence prévalait au
23 Kosovo, et que dans le cadre de cette état d'urgence, les Albanais du
24 Kosovo avaient interdiction de se réunir ?
25 R. Il n'y avait aucun état d'urgence en vigueur à ce moment-là.
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1 D'ailleurs, jusqu'aux années 90, je ne me suis pas occupé de politique, et
2 j'étais très souvent absent du pays, à l'étranger. Je n'ai pas souvenir
3 qu'à l'époque, il y ait eu l'état d'urgence.
4 J'ai dit hier qu'on peut parler d'état d'urgence au Kosovo au moment où
5 Tito y a amené deux divisions en 1968 et, en 1981, il y a également eu une
6 situation critique avec soulèvement des Albanais du Kosovo. A l'époque dont
7 nous parlons, en 1989 et en 1990, il n'y avait pas d'état d'urgence au
8 Kosovo. D'ailleurs, l'assemblée s'est réunie et a pris démocratiquement des
9 décisions visant à modifier la constitution de la Serbie. Nous en avons vu
10 les conséquences de ces amendements à la constitution.
11 Q. Revenons au mémorandum, si vous le voulez bien. Page 118, en haut de la
12 page. Nous lisons ce qui suit : "Nous les groupes nationaux n'étaient pas
13 égaux. La nation serbe, par exemple, n'avait pas obtenu le droit de
14 posséder son propre état. Des portions importantes du peuple serbe, qui
15 vivent dans d'autres républiques, contrairement aux minorités nationales,
16 ne jouissent pas du droit de parler leur langue et d'écrire dans leur
17 alphabet. Elles n'ont pas le droit de créer leurs propres organisations
18 politiques ou culturelles, ou de pratiquer leurs traditions culturelles
19 qu'elles partagent avec leurs concitoyens. Les persécutions et expulsions
20 incessantes de Serbes du Kosovo sont un exemple flagrant qui montre que les
21 principes qui protègent l'autonomie d'une minorité, les Albanais de souche,
22 ne s'appliquent pas à la minorité au sein de la minorité, à savoir, les
23 Serbes, les Monténégrins, les Turcs, les Romes du Kosovo."
24 Est-ce bien la position que vous aviez tous à l'époque ?
25 R. C'est la position que je n'étais pas le seul à avoir. J'avais
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1 effectivement cette position, mais elle était partagée par tous ceux qui
2 ont participé à la rédaction de ce texte. D'ailleurs, je peux m'expliquer
3 de façon plus détaillée, et prouver que c'était la bonne façon de penser.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas une opinion, n'est-ce
5 pas, Monsieur Nice ? C'est une question de fait.
6 M. NICE : [interprétation] Oui.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux m'expliquer. Je peux ? Il y avait une
8 différence importante entre les droits dont jouissaient les minorités et
9 les droits dont jouissaient les peuples constitutifs. En Yougoslavie, on
10 considérait que les peuples constitutifs étaient ceux qui avaient une
11 république; les Serbes, Les Macédoniens, les Croates et les autres, alors
12 que les parties de la nation qui avaient une mère patrie ailleurs, comme
13 les Hongrois ou les Albanais, entraient dans une autre catégorie.
14 Notre constitution traitait précisément des droits des minorités, alors que
15 les peuples constitutifs, par exemple, les Serbes qui habitaient en
16 Croatie, ne jouissaient pas des droits explicitement accordés aux Albanais
17 du Kosovo. Ceci était absurde, mais c'était la situation de fait. Les
18 Serbes de Croatie ne jouissaient pas de tous les droits que j'ai déjà
19 évoqués; droits dont jouissaient les Albanais du Kosovo, comme le droit
20 d'avoir leur université, le droit d'avoir leur maison d'édition, le droit
21 de publier librement leurs revues dans leur propre langue, et cetera.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je vous interrompre, Professeur ?
23 Est-ce que ceci s'appliquait également aux Croates qui habitaient en
24 Serbie ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. Leurs droits n'étaient pas stipulés de
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1 façon explicite. Tous les peuples constitutifs étaient dans la même
2 situation s'agissant de leurs représentants minoritaires résidant dans
3 d'autres républiques. Les droits minoritaires des peuples constitutifs
4 n'étaient régis par aucune loi. C'était une grande lacune dans la
5 constitution.
6 M. NICE : [interprétation]
7 Q. Je pense qu'hier vous avez défini la Serbie comme un état de citoyens.
8 A partir de la constitution en 1974 et jusqu'à la suppression de
9 l'autonomie du Kosovo en 1989, la constitution serbe parlait bien d'un état
10 des Serbes et des autres nationalités ou des Serbes et des autres groupes;
11 c'est bien cela ? La Serbie n'est devenue un Etat de citoyens que plus tard
12 à partir de 1990 ?
13 R. Exact. En 1990, la constitution a stipulé que la Serbie était l'Etat de
14 tous les citoyens qui y habitaient, alors que par le passé jusqu'à la
15 constitution de 1974, la constitution faisait valoir que les républiques
16 étaient les états de premier plan, et qu'elles appartenaient avant tout à
17 la nation qui était attachée, ensuite, aux autres citoyens.
18 Q. J'ai parlé de cela, car je pense qu'hier il a été dit que le changement
19 est intervenu en 1989. Or, c'est en 1990 que ce changement est intervenu.
20 Nous reviendrons sur la question de l'expulsion des Serbes du Kosovo plus
21 tard.
22 Vous avez donné un chiffre hier. Je pense que c'était un chiffre
23 correspondant à celui qui a été donné par un autre témoin entendu avant
24 vous, le professeur Avramov. J'aimerais que nous revenions sur ce point en
25 détail. Combien avez-vous dit qu'il y avait eu de Serbes expulsés du
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1 Kosovo ?
2 R. Le nombre de Serbes expulsés du Kosovo, qui figurent quelque part dans
3 le mémorandum, est de 200 000 pour la période allant de la fin des années
4 1960 aux années 1990. Donc,
5 200 000 Serbes expulsés en 20 ans.
6 Q. Avez-vous vérifié ce chiffre en le comparant aux données qui figurent
7 dans le recensement, dans les statistiques yougoslaves ?
8 R. Un des auteurs du mémorandum est le professeur Milos Macura un grand
9 démographe de notre pays. Il est au courant de cela. Il est responsable des
10 chiffres cités dans le mémorandum.
11 Q. L'étude statistique yougoslave cite des chiffres bien inférieurs. Il
12 est question jusqu'en 1989, de 40 000 et de
13 20 000 supplémentaires par la suite, ce qui fait un total de 60 000. Est-ce
14 que vous admettriez que ce chiffre est peut-être plus juste que le chiffre
15 de 200 000, ou n'êtes pas au courant ?
16 R. C'est une question que les experts discutent ardemment. Quand je dis
17 experts, je pense aux démographes. Ici, nous pouvons établir qu'il s'agit
18 en tout état de cause d'un nombre important. Un nombre très important de
19 Serbes a été expulsé, un nombre qui se chiffre à plusieurs dizaines de
20 milliers. Quant au chiffre précis, nous pouvons prévoir de le vérifier plus
21 en détail en d'autres occasions. En tout cas, il s'agit de plusieurs
22 dizaines de milliers, ce qui est déjà beaucoup.
23 Q. Lorsque vous dites expulsion, est-ce que vous intégrez dans ce terme
24 d'expulsion les migrations économiques, à savoir, le fait que certaines
25 personnes aient été attirées par des prix plus intéressants pour la vente
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1 de leurs résidences à des Albanais kosovars, et qu'ils jugeaient préférable
2 de déménager en Serbie. Est-ce que vous incluez cette motivation lorsque
3 vous parlez d'expulsion ?
4 R. Ceci est peut-être arrivé de temps en temps pour certaines personnes
5 compte tenu de l'insécurité qui prévalait au niveau des conditions de vie.
6 Certains ont obtenu un certain prix pour leur maison et ont accepté de
7 quitter leur maison. Mais ce n'est de toute façon pas quelque chose qui se
8 passe dans des conditions normales; en tout cas, cela ne devrait pas se
9 passer.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que ces personnes sont
11 incluses au nombre des 200 000 ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce nombre inclut tous ceux qui ont quitté le
13 Kosovo pour aller habiter en Serbie. Il existe peut-être différentes
14 appréciations à ce sujet. Le chiffre de 200 00 inclut peut-être ceux qui
15 sont partis volontairement après avoir vendu leur maison. Quant au chiffre
16 de 40 000, il n'inclut peut-être que ceux qui sont partis après expulsion
17 par la force. C'est peut-être là que réside la différence.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
19 M. NICE : [interprétation] Je ne vais pas poursuivre dans le même ordre
20 d'idée, mais je n'accepte en aucun cas la réponse fournie.
21 Q. J'aimerais maintenant que nous passions à la page 122 du mémorandum. Au
22 tiers de la page, nous trouvons un paragraphe qui commence par les mots "La
23 Soumission économique de la Serbie", et la phrase suivante se lit comme
24 suit, je cite : "Ce programme idéologique a donné lieu à des opinions et à
25 un comportement qui devaient avoir une influence cruciale sur les
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1 événements politiques ultérieurs et sur les rapports entre les communautés.
2 Avant la Seconde guerre mondiale, les Slovènes et les Croates avaient créé
3 leur propre parti communiste, et avaient obtenu une influence décisive au
4 sein du comité central de la Ligue des communistes yougoslaves. Leurs
5 dirigeants politiques étaient devenus des arbitres sur les questions
6 politiques pendant et après la guerre. Les deux républiques voisines
7 partageaient une même histoire. Elles avaient la même religion, des
8 aspirations et une plus grande indépendance. En tant que républiques les
9 plus développées, elles partageaient également des intérêts économiques
10 communs, qui ont été le terreau d'une coalition permanente destinée à
11 tenter de se doter d'une domination politique. Cette coalition a été
12 cimentée par de nombreuses années de collaboration entre Tito et Kardelj;
13 les deux personnalités politiques les plus importantes de la Yougoslavie
14 d'après-guerre, qui jouissaient d'un pouvoir inviolable dans les centres du
15 pouvoir."
16 Est-ce une description qui permet de parler de la situation de la Serbie
17 comme étant une victime de la suprématie des autres; c'est bien cela ?
18 R. Nous pouvons parler d'inégalité. J'ai déjà dit hier que c'était l'avis
19 de Kardelj qu'en Serbie, pour des raisons que j'ai évoquées, l'hégémonie
20 serbe prévalait. C'est la raison pour laquelle d'autres républiques ont
21 cherché à se séparer de la Yougoslavie.
22 Tito, cependant, qui était Croate, et Kardelja qui était Slovène, ont
23 estimé depuis le début qu'il fallait favoriser un développement plus rapide
24 des autres républiques. D'après le plan quinquennal de la Serbie, il était
25 prévu un niveau de développement inférieur à celui des autres républiques
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1 pour la Serbie, alors que la Croatie et la Slovénie étaient, à ce moment-
2 là, les régions les plus développées économiquement du pays, donc plus
3 développées que la Serbie. C'est dans cette situation que Tito a décidé dès
4 1940, que les partis communistes distincts de la Slovénie et de la Croatie
5 devaient être créés, tout en déniant, tout en refusant ce droit à la
6 Serbie.
7 Nous avions le Parti communiste de la Slovénie, le Parti communiste
8 de la Croatie et la Ligue des communistes yougoslaves, mais il n'existait
9 pas de parti communiste de Serbie. De même, Tito n'a pas autorisé, à
10 l'époque de la libération nationale, lorsque le rôle des assemblées a été
11 déterminé, il n'a pas autorisé que celles-ci soient créées en Serbie, mais
12 il y en avait en Slovénie, par exemple. En Serbie en 1940, ces assemblées
13 étaient interdites. C'est seulement à partir de 1945 qu'un parti communiste
14 dirigeant a été créé.
15 Entre-temps, des décisions importantes ont été prises en dehors de
16 toute participation des représentants serbes, qui ne pouvaient que
17 préconiser telle ou telle opinion au nom du peuple serbe. C'est à ce
18 moment-là qu'ont été décidées les frontières, par exemple, qui ont été
19 tellement discutées par la suite.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Professeur.
21 M. NICE : [interprétation]
22 Q. J'essaie de vous interrompre le moins possible, mais je dois néanmoins
23 vous ramener à ma question que je vais élargir. La question que je vous
24 posais, consistait à vous demander si ce passage du mémorandum présente
25 bien la Serbie comme victime de la suprématie des autres, et j'aimerais que
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1 vous répondiez à cette question. C'est un terme récurant dans les arguments
2 politiques développés par la Serbie, n'est-ce pas, qui se présente comme
3 une victime ? Pouvez-vous nous aider sur ce point ?
4 R. Je n'utiliserai pas le terme de victime, parce que si la Serbie se
5 sentait victime, il y aurait eu des insurrections importantes. Simplement,
6 elle jouissait de moins de droit que la Croatie et la Slovénie.Comme je
7 l'ai déjà dit, le premier plan quinquennal de 1946 à 1950, a déterminé que
8 les autres républiques devaient se développer plus rapidement que la
9 Serbie. D'ailleurs, des usines ont été déménagées, ont été délocalisées
10 vers les républiques, par exemple, de Slovénie et de Croatie qui, de ce
11 fait, ont été plus développées.
12 Q. L'académie s'est-elle rendue compte que le fait de publier cette
13 interprétation de la Serbie comme étant opposée aux autres, risquait
14 d'avoir un effet assez négatif sur les relations entre les républiques ?
15 D'ailleurs, on en a vu les conséquences par la suite.
16 R. Il faut bien que la vérité soit dite. La vérité, c'est que la Serbie
17 s'est développée moins rapidement que la Croatie et la Slovénie, que la
18 Croatie et la Slovénie avaient leurs propres partis communistes alors que
19 la Serbie n'en avait pas. Tout cela, ce sont des vérités. C'est sur la base
20 de ces vérités qu'une normalisation des relations était nécessaire.
21 Q. Passons maintenant au haut de la page 123. A la deuxième ligne, nous
22 lisons la phrase qui suit, je cite : "La politique vindicative contre les
23 Serbes a commencé avant la Seconde guerre mondiale, dans le sens où un
24 parti communiste était considéré comme n'étant pas une nécessité pour une
25 nation d'oppresseurs."
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1 Au paragraphe suivant, nous trouvons la phrase suivante, je cite : "Ces
2 réalités historiques montrent que durant la guerre, la Serbie n'était pas
3 officiellement et n'était certainement pas véritablement sur un pied
4 d'égalité alors que des décisions d'une très grande importance pour
5 l'avenir du point de vue de l'organisation de l'état étaient prises."
6 Je me rends compte que vous n'appréciez pas d'utiliser le mot "victime".
7 Est-ce que tout cela ne montre pas que dans le mémorandum la Serbie est
8 tout de même présentée comme une victime ?
9 R. C'est une situation de fait. C'est une réalité qui est décrite, et elle
10 peut être décrite avec des mots plus ou moins forts. Le mot "victime" est
11 un mot trop fort, à mon avis, pour décrire la situation. Il y avait très
12 certainement une situation d'inégalité. Cela oui, c'était une réalité. Bien
13 sûr, lorsqu'une vérité est dite, elle ne doit blesser personne, notamment
14 pas les populations qui fondent tout leur engagement sur cette vérité.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous préférez le terme "d'inégalité"
16 au terme de "victime" ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, inégalité.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, l'heure de la pause
19 est arrivée.
20 M. NICE : [interprétation] J'aimerais inviter le témoin à relire l'article
21 dont j'ai parlé avec lui au début du contre-interrogatoire. J'aimerais
22 qu'il relise cet article s'il peut le faire pendant la pause.
23 J'apprécierais beaucoup qu'il le fasse.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'il a ce texte, Monsieur
25 Nice.
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1 M. NICE : [interprétation] Non, mais on peut le lui faire parvenir.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Que ce texte lui soit
3 distribué.
4 Suspension pendant 20 minutes.
5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.
6 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Nice.
8 M. NICE : [interprétation]
9 Q. Monsieur le Professeur, je suis heureux de pouvoir vous dire que
10 l'article dont je vous ai demandé de lire un résumé a maintenant été
11 trouvé. Je pense pouvoir le présenter aux membres de la Chambre d'ici une
12 demi-heure. Je vais reparler de ce document que vous avez lu pendant la
13 pause dans quelques instants.
14 R. Je n'aurais donc pas à vous dire quoi que ce soit à ce sujet ?
15 Q. Oui, bien sûr, mais un peu plus tard.
16 Je souhaite revenir maintenant au mémorandum. Si vous voulez bien, nous
17 étions à la page 123, et je crois qu'il est utile d'examiner ce document
18 dans le détail, mais néanmoins je vais aller un peu plus vite au cours des
19 dernières pages. Je vais essayer de citer certains passages ensemble. Je
20 souhaite maintenant passer à la page 125 où, trois lignes en haut de la
21 page, on peut lire que : "Les hommes politiques serbes ont clairement
22 prouvé qu'ils n'étaient pas préparés à la grande tâche historique qui s'est
23 posée à eux, étant donné les relations internes extrêmement difficiles au
24 sein de l'État yougoslave."
25 Ensuite au paragraphe 7 : "L'attitude adoptée à l'égard de la stagnation
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1 économique en Serbie montre clairement qu'une politique vindicative à
2 l'égard de cette république n'a, en aucune manière, diminuée avec le temps.
3 Au contraire, encouragé par son propre succès, cela s'est développé de
4 façon encore plus importante, au point d'en arriver au génocide."
5 Ensuite, six lignes plus bas, une mention est faite à la politique de Tito
6 : "Et ici non plus la Serbie n'est pas sur un pied d'égalité, à cause de
7 son statut particulier au plan juridique et politique, qui est une façon
8 d'avoir la mainmise sur le peuple serbe. Le mot clé de cette politique a
9 été une Serbie affaiblie pour s'assurer que la Yougoslavie était forte."
10 Est-ce que cela vous a effleuré l'esprit, Monsieur le Professeur, que ce
11 mémorandum, au niveau des termes utilisés, et à la manière dont la position
12 de la Serbie a été décrite, ainsi que la manière dont d'autres régions de
13 l'ex-Yougoslavie ont été qualifiées comme génocidaires en termes
14 d'intentions et d'actions, est quelque chose qui devait certainement avoir
15 des conséquences néfastes ?
16 R. Il me semble également que le terme de "génocide" serait trop fort. On
17 parle ici de ce qui se passait notamment au Kosovo, à savoir l'expulsion
18 forcée des gens, ces mauvais traitements, ces destructions de monuments
19 culturels.
20 Pour ce qui est du reste, si l'on fait abstraction du terme que je viens de
21 mentionner, je pense que le reste se trouve être assez exact comme
22 description. En effet, la Serbie dès le début a été soumise à un traitement
23 spécial, Comintern l'avait expliqué, elle avait exercé une hégémonie, elle
24 avait opprimé les autres entre les deux guerres, et maintenant il
25 s'agissait d'empêcher de telles possibilités.
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1 Prenez par exemple ceci : rien qu'en Serbie, il n'y avait une supervision
2 de cette nature pour ce qui est de ce que pensaient et écrivaient les
3 intellectuels. Il n'y a qu'en Serbie que l'on pouvait voir des gens,
4 publier une revue comme Praksis, qui s'exposaient à des risques
5 d'emprisonnement, de dépossession de leurs passeports, et des libertés de
6 mouvement.
7 Ceci se trouve être exact. Les termes "Une forte Yougoslavie nécessite une
8 Serbie faible," cela a été prononcé par deux Macédoniens, Kolisevski et
9 Tupurkovski, qui étaient des dirigeants de la Macédoine et qui
10 représentaient la Macédoine au sein de la Présidence yougoslave. C'est ce
11 qu'ils ont constaté, et ils ont dit que c'était la politique qui avait été
12 conduite au fil des dernières années.
13 Q. A la page 127, au paragraphe numéro 8. Je parle toujours des termes et
14 du langage utilisés ici pour décrire les évènements.
15 "L'expulsion du peuple serbe du Kosovo est un témoignage assez extrême de
16 leur défaite sur le plan historique. Au printemps de l'année 1981, une
17 guerre ouverte et totale a été déclarée envers le peuple serbe, qui s'était
18 préparée un petit peu à l'avance en introduisant différents changements sur
19 le plan administratif, politique et constitutionnel. Une réforme avait été
20 lancée. Cette guerre ouverte existait déjà depuis cinq ans. Elle avait été
21 orchestrée de façon habile en appliquant différentes méthodes, différentes
22 tactiques, et cela avait été mené de façon active et non pas avec le simple
23 soutien tacite de différents centres politiques."
24 Vous avez décrit la guerre ici -- menée par qui, Monsieur le Professeur ?
25 R. Il est question ici de la guerre au Kosovo. La guerre est conduite par
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1 des organisations clandestines qui existaient au Kosovo. J'ai mentionné de
2 l'une d'entre elle, Balli Kombitar, une autre s'appelait "Prizren League,"
3 la ligue de Prizren, et en effet, il y avait expulsion forcée de gens. Il y
4 avait destructions de monuments culturels. Tout le reste de ce qui est
5 mentionné ici, c'est bien de cela qu'il s'agit.
6 Q. Si nous allons à la page 128, premier paragraphe : "Le génocide
7 physique et politique, juridique et culturel du peuple serbe au Kosovo et
8 Metohija est la pire défaite jamais vécue pendant la guerre de libération
9 menée par la Serbie et depuis le premier soulèvement serbe en 1804 et
10 jusqu'au soulèvement de 1941."
11 Simplement pour rester sur le terme du génocide, nous pouvons maintenant
12 passer à la page 139, huit lignes plus bas : "Il est vrai que le premier
13 article de la constitution de la République socialiste de Serbie contient
14 une clause déclarant que la Serbie est un état. Mais la question doit être
15 posée à savoir à quel état refuse-t-on une compétence sur son propre
16 territoire ou que cet état n'a pas les moyens à sa disposition pour mettre
17 en place l'ordre public ou d'assurer la sécurité des personnes et des biens
18 ou d'empêcher le génocide au Kosovo, et stopper ou empêcher l'exode des
19 Serbes de leurs foyers ancestraux."
20 Le langage qui est utilisé, les termes qui sont réitérés ici devaient
21 forcément produire un certain effet, n'est-ce pas ?
22 R. Cela a produit un effet, mais ce langage traduisait une réalité de
23 fait. Vous devez tenir compte d'une chose, à savoir que le Kosovo
24 auparavant a été un territoire purement serbe du temps de l'Etat serbe
25 médiéval. Les Turcs ont peuplé ce Kosovo avec une population loyale ou à
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1 l'empire ottoman. Il y a des livres qui décrivent les recensements. Il n'y
2 a pas d'Albanais au 14e et 15e siècle au Kosovo. Ils venaient de plus en
3 plus, et à un moment, il s'est établi un équilibre.
4 Q. Monsieur le Professeur, pardonnez-moi. Vous, en tant qu'académicien,
5 vous, les académiciens, vous avez certainement dû vous rendre compte qu'il
6 s'agissait là du 20e siècle de la répartition démographique et que vous
7 étiez en train d'accuser les citoyens de vos pays d'accomplir un génocide
8 contre les Serbes. Ne pensez-vous pas que ceci aurait eu l'effet de mettre
9 ces gens à l'écart ?
10 R. Ce n'est pas ce qui a conduit à leur aliénation. Ils ont été organisés
11 depuis 1988, pour ce qui est de la création d'un Grande Albanie. Il
12 s'agissait de prendre possession du Kosovo et de l'adjoindre à l'Albanie.
13 On sait qui le faisait, comment il le faisait. Les faits sont là. Cela se
14 passait pendant un siècle et demi devant nous, sous nos yeux, sans la
15 possibilité de faire quoi que ce soit parce que la constitution yougoslave
16 de 1974 avait privé les institutions serbes de toute possibilité de
17 s'ingérer dans ce qui se passait au Kosovo. Il y avait un processus qui
18 allait de mal en pis. Cela évoluait ainsi et personne ne pouvait rien
19 faire. C'est une chose dont il fallait tenir compte.
20 Q. Vous, en tant qu'intellectuel et les membres de l'académie, Monsieur le
21 Professeur, vous savez que si vous mettez en place une culture ou qu'un
22 segment de la société reçoit une appellation émise dans une catégorie,
23 quelqu'un qui est à l'extérieur ou un paria sera en mesure plus facilement
24 de commettre des crimes s'il fait partie de ces groupe de paria. Savez-vous
25 cela ?
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1 R. J'ose même pas me faire des cours maintenant si j'ai connaissance d'une
2 chose ou pas. Ce n'étaient pas des gens qui étaient des parias. Ils avaient
3 été reconnus. Ils avaient tous les droits de l'homme qui étaient dus aux
4 minorités, plus même que dans les autres états. On n'a rien fait de mal à
5 leur égard. Ils voulaient, eux, réaliser leur objectif à savoir faire
6 sécession au Kosovo pour l'adjoindre ou l'annexer à l'Albanie. C'était le
7 contexte.
8 Q. Au moment où vous publiez cette opinion serbe sur les Albanais du
9 Kosovo, le problème du Kosovo était un problème qui relevait de la
10 fédération, car la constitution était intacte, et les autorités fédérales
11 traitaient ce problème de manière assez dure.
12 R. Cela était également le problème de la République de Serbie et c'était
13 aussi le problème de la fédération et de l'Yougoslavie. Je l'ai déjà
14 mentionné, à chaque fois qu'il y avait ce type d'insurrection, Tito
15 envoyait l'armée pour qu'elle remette de l'ordre. La première insurrection
16 a eu lieu en 1945, la deuxième a eu lien en 1968, et une troisième a eu
17 lieu en 1981, si l'on ne compte pas ce qui s'est produit dans le courant
18 des années 90. Il y a eu trois insurrections du vivant de Tito, et très
19 énergiquement, il est intervenu pour empêcher tout désordre. Il avait
20 laissé le statut tel quel, parce qu'il y avait un accord avec la direction
21 albanaise qui datait de la guerre, à savoir que l'Albanie devait entrer
22 dans la fédération yougoslave et faire annexer le Kosovo par l'Albanie.
23 Enver Hodza rappelait à Tito cet accord. Tito attendait de voir si
24 l'Albanie voulait accéder à la Yougoslavie avec le Kosovo, lorsqu'il y a eu
25 interruption des relations et infusions de sang --
Page 33522
1 Q. Je crois que vous avez sans doute répondu à la question. Je souhaite
2 maintenant regarder un autre extrait à la page 138. En consacrant du temps
3 à ce document, cela va nous permettre de gagner du temps par rapport à
4 toutes autres questions posées à propos de ce mémorandum.
5 A la page 138, au milieu de la page : "L'acquisition de droits égaux et le
6 développement indépendant de l'Etat serbe a une très grande signification
7 au plan historique. En moins de 50 ans, pendant deux générations, les
8 Serbes ont été soumis à une annihilation physique, une assimilation forcée.
9 Ils ont été obligés de se convertir à une autre religion, le génocide
10 culturel, l'endoctrinement idéologique, le dénigrement, et l'obligation de
11 renoncer à leurs propres traditions à cause d'un complexe de culpabilité.
12 Sans contrôle intellectuel et politique, la nation serbe a dû subir toutes
13 ces tribulations sans pour autant que cela laisse des cicatrices
14 importantes. Celles-ci sont tellement sévères et il était important de ne
15 pas laisser des cicatrices au niveau de leur état psychique. A la fin de ce
16 siècle, les grandes avancées technologiques mises en œuvre par l'esprit
17 humain ne doivent pas être ignorées."
18 Nous passons ensuite au paragraphe suivant : "L'état actuel de dépression
19 dans laquelle se trouve le peuple serbe par rapport à ce chauvinisme et la
20 phobie serbe qui se sont intensifiés dans certains milieux, à votre avis,
21 ne s'agit-il pas d'une manifestation ici des réactions de la nation serbe
22 qui pourraient sembler enflammées voire dangereuses."
23 Si on regarde ici les termes utilisés et si on analyse le contexte, cela ne
24 vous était pas venu à l'esprit, vous, académiciens, que ce document
25 pourrait constituer un document inflammatoire et qui provoquerait une
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1 réaction forte et des effets néfastes puisque les Serbes pourraient voir
2 dans lequel dilemme ils se trouveraient eux-mêmes.
3 R. Il ne me reste plus qu'à répéter ce que j'ai déjà dit, à savoir qu'il
4 fallait dire la vérité une bonne fois pour toute. Des faits que vous citez
5 ne sont pas dus au mémorandum. Le mémorandum n'a fait que prendre
6 conscience de ce qui se passait en réalité et de ce qui a été dissimulé
7 dans l'intérêt du maintien de cette entité. Sous Tito, par exemple, le
8 soulèvement de 1968 a été passé sous silence par les médias. Il a envoyé
9 là-bas -- Tito a envoyé là-bas deux divisions de l'armée sans que les
10 médias n'en disent un mot. Pendant très longtemps, cette patience a été
11 mise à profit, elle a été consommée et dépensée outre mesure, et il a fallu
12 une bonne fois pour toute le dire.
13 Q. Quelque chose qui apparaît néanmoins, bien que les organes fédéraux
14 avaient traité la question du Kosovo et étaient en train de gérer la
15 question du Kosovo, après l'arrivée au pouvoir de l'accusé et les
16 modifications de la constitution, ce problème est devenu, à ce moment-là,
17 un problème uniquement serbe, autrement dit, le problème du Kosovo est
18 devenu un problème entièrement serbe ?
19 R. Le problème du Kosovo est devenu un problème serbe. Etant donnée qu'en
20 1991, la Slovénie et la Croatie ont déclaré et ont proclamé leur
21 indépendance vis-à-vis de la Yougoslavie. Jusque-là, cela avait constitué
22 un problème yougoslave en effet.
23 Q. Ceci, inévitablement, a intensifié la crise qui a mené aux problèmes du
24 Kosovo qui sont évoqués dans le troisième acte d'accusation, n'est-ce pas ?
25 R. Cela conduit à une chose, à savoir qu'en 1998, à Drenica, il y a eu un
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1 nouveau soulèvement, une nouvelle insurrection. De toutes parts au Kosovo,
2 il s'est créé des entrepôts d'armes, des arsenaux d'armes, on a creusé des
3 passages souterrains. Les forces de police ont été incessamment attaquées
4 au quotidien. Ces gens se faisaient tuer au quotidien. Cela s'est accentué
5 en 1998 en particulier. Il y a eu des conflits armés de part et d'autre à
6 ce moment-là.
7 Q. Avant de laisser côté le mémorandum, je souhaite présenter sur le
8 rétroprojecteur une page extraite du rapport de M. de la Brosse, rapport
9 d'expert, pièce 446, intercalaire numéro 2. Je souhaite recueillir les
10 commentaires du témoin à propos de deux citations. Note en bas de page de
11 ce document.
12 Monsieur le Professeur, j'espère que vous serez en mesure de lire ceci sur
13 le rétroprojecteur, ou peut-être que M. l'Huissier peut vous montrer ce
14 document. Il s'agit de la page 40 d'un rapport d'expert préparé par un
15 expert en matière de propagande politique. Je pense que vous pourrez lire
16 ceci à l'écran, la note en bas de page numéro 75, qui -- si cela marche.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, cela ne marche pas.
18 M. NICE : [interprétation]
19 Q. Je vais vous lire la citation, Monsieur le Témoin. J'espère que vous
20 serez en mesure de lire ceci à l'écran dans quelques instants. J'espère que
21 cela -- la régie technique fera marcher ce système.
22 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez montrer cette page
23 au témoin, s'il vous plaît.
24 Pardonnez-moi, Messieurs les Juges, de ne pas vous avoir remis ce
25 document. J'aurais souhaité pouvoir le montrer à l'écran.
Page 33525
1 Q. Cette note en bas de page, numéro 75, précise : "Que quand bien même
2 l'accusé n'a pas adopté une position -- "
3 R. Quelle des notes de bas de page ?
4 Q. Note en bas de page, numéro 75.
5 R. Vous avez dit 75, on me montre la 85.
6 M. NICE : [interprétation] Veuillez me redonner le document pendant
7 quelques instants, s'il vous plaît. La pagination est différente. Page 37.
8 Pardonnez-moi.
9 Q. "Bien que Slobodan Milosevic, lui-même, n'a adopté aucune position eu
10 égard aux extraits du mémorandum publié et a réussi à ne pas être condamné
11 par le comité central de la ligue, néanmoins, il a reconnu quelques années
12 plus tard que l'académie avait agi de façon tout à fait légitime en
13 intervenant en ainsi dans la vie politique serbe." Ensuite, la citation que
14 nous avons lue du document de 1995.
15 Poursuit en disant : "Cette complicité avec l'académie était réciproque.
16 Lors de son assemblée générale tenue au mois de mai 1989, l'académie avait
17 déclaré : 'Après cette lutte digne de louanges et l'unité de son peuple qui
18 nécessitaient des décisions hardies et téméraires, et en raison de l'unité
19 des partis, des états et des nouveaux dirigeants à la tête desquels se
20 trouvaient M. Slobodan Milosevic, la Serbie a retrouvé sa souveraineté, son
21 statut d'état, est devenue un membre sur un pied d'égalité de notre
22 communauté socialiste, fédérative et multinationale. L'académie a soutenu
23 et soutient toujours nos efforts, notre programme et le programme des
24 nouveaux dirigeants serbes.'"
25 Est-ce une opinion que vous partagez ?
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1 R. C'est exact. A l'époque, l'académie toute entière et la totalité des
2 intellectuels, ont soutenu les efforts déployés par la nouvelle direction
3 du point de vue de la liberté d'expression de l'opinion de tout un chacun,
4 de la liberté de la presse et des réformes réalisées. Ce n'est qu'après,
5 vers les années 1990, qu'il y a eu une scission au niveau de
6 l'intelligentsia serbe que je puis vous expliquer également.
7 Q. Un peu plus bas vers le milieu de la page. "Au mois de janvier 1992,
8 les académiciens et les parlementaires du parti de
9 M. Milosevic, du Parti socialiste, Antonije Isakovic, a déclaré :
10 'L'élément essentiel, c'est que ce mémorandum a eu un effet particulier.
11 Certains l'ont accepté alors que la plupart des anti-serbes étaient
12 contre.'"
13 L'auteur de ce rapport précise qu'il y aura une autre illustration de la
14 collusion entre les groupes de Milosevic et les personnes qui étaient à
15 l'origine de ce mémorandum, lorsque certains académiciens ont eu le malheur
16 de demander quelle était la recommandation de M. Milosevic." Il donne une
17 citation de Mira Markovic, la femme de l'accusé en disant : "Les membres de
18 l'académie n'ont pas le droit de porter atteinte à cette honorable
19 institution en signant une pétition et en demandant au président de
20 démissionner. Les académiciens ne peuvent pas demander quelque chose dans
21 le mémorandum et demander quelque chose et son contraire maintenant."
22 Ces extraits, Monsieur le Professeur, illustrent-ils l'idée qu'il y avait
23 un lieu entre le mémorandum et la montée au pouvoir de l'accusé, même si à
24 un stade ultérieur, il y eu un changement de position de la part de
25 certains académiciens ?
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1 R. Non. A l'époque, où Milosevic est arrivé au pouvoir et ceci jusqu'en
2 1991, l'académie a soutenu les changements intervenus dans le pays. Il y a
3 eu démocratisation, il y a eu liberté d'expression, il y a eu suppression
4 du délit d'opinion. Je l'ai mentionné tout à l'heure. En 1991 toutefois, il
5 y a eu des changements d'intervenus au niveau de l'académie au moment où
6 une partie des intellectuels, une partie des membres de l'académie ont
7 compris que nous étions dans un danger grave, parce qu'à l'époque déjà, on
8 a prévenu la Serbie de la possibilité d'introduction de sanctions et de la
9 possibilité d'un bombardement. Cela s'est passé en 1991. Cela a été
10 explicitement dit par Lord Carrington.
11 A ce moment-là, une partie des membres de l'académie a pris position en
12 disant qu'il fallait sauver le pays mère, à savoir, la Serbie elle-même. Il
13 fallait renoncer à aider les Serbes de l'autre côté de la Drina. Il y a eu
14 conflit interne à ce moment-là entre ces deux groupes de membres de
15 l'académie. C'est à ce moment-là que certains membres de l'académie ont
16 demandé la résignation de Milosevic. Je parle maintenant de l'année 1992.
17 C'est à ce moment-là qu'il est formulé des revendications portant sur sa
18 démission. Certains membres ont signé la pétition, d'autres non. L'académie
19 n'a pas pris position officiellement étant donné qu'il y avait des opinions
20 divergentes en son sein.
21 Q. Des mentions sont faites de l'accusé à trois reprises, en vertu de quoi
22 l'accusé n'était pas une personnalité de premier plan où le mémorandum a
23 été rédigé, et qu'il n'est devenu important que plus tard. Est-il exact de
24 présenter des choses de cette manière, que le mémorandum a clairement pu
25 mettre en avant une stratégie politique, et que Milosevic a été le
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1 dirigeant qui a été trouvé par la suite, qui pouvait mettre en œuvre ce
2 mémorandum, que Milosevic était tout à fait disposé à diriger son pays sur
3 la base des politiques ou de la politique qui avait été inscrite dans ce
4 mémorandum ?
5 R. J'ai remarqué à plusieurs reprises que vous insistiez notamment là-
6 dessus. J'ai déjà dit à plusieurs reprises ce qui s'est passé en réalité.
7 Le mémorandum, la population n'en avait pas connaissance. Ce qui s'est
8 passé, c'est qu'il y a eu des changements démocratiques d'intervenus au
9 niveau de la société. Il y a eu deux commissions qui se sont faites fort de
10 garantir la liberté de l'expression, la suppression du délit d'opinion. Il
11 s'est créé une sorte d'unité au niveau de la population. c'est ce qui a
12 attribué ou conféré un prestige des plus grands au président Milosevic à
13 l'époque. Dans ses discours, il a parlé de façon assez fraîche et de façon
14 assez agréable, sans les clichés des périodes précédentes. Il a attiré les
15 masses vers lui. Là, à ce niveau-là, le mémorandum n'a joué aucun rôle pour
16 ce qui est du soutien des masses dont il a bénéficié.
17 Q. Les changements que vous évoquez ne sont pas produits au moment où le
18 mémorandum a été rédigé. Si cela s'est produit, à quel moment, s'il vous
19 plaît ?
20 R. Bien sûr, c'est la raison pour laquelle le mémorandum n'a pas eu d'écho
21 du tout. Il n'a pas contribué du tout à la popularité du président
22 Milosevic. Au final, on ne savait pas quelle était leur attitude à l'égard
23 de Milosevic. On a vu qu'il y avait une commission du parti qui procédait à
24 des enquêtes, qui diligentait des enquêtes au sein de l'académie pour
25 déterminer qui en a été l'auteur. Les démarches en faveur de la
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1 démocratisation du pays en faveur de la création d'une économie du marché
2 moderne au sein de la Serbie, c'est précisément ce qui a fait sa
3 réputation. C'est ce qui a amené la population et l'intelligentsia à se
4 joindre à lui jusqu'à la fin 1991, 1992, où il y a eu les divergences dont
5 j'ai parlé.
6 Q. Je ne vais pas parler de vos observations concernant une économie de
7 marché, ou de l'économie de marché. Nous allons entendre un économiste,
8 sans doute l'autre auteur du document portant sur le mémorandum. Je lui
9 poserai la question. Néanmoins, j'apprécie les observations que vous avez
10 faites à cet égard.
11 Je souhaite maintenant reparler du document portant sur Gazimestan parce
12 que nous l'avons traité en profondeur.
13 Vous dites que pour ce qui est de ce dernier et célèbre commentaire -
14 - peut-être que nous pourrions le mettre sur le rétroprojecteur.
15 Q. Le paragraphe que j'ai : "Six siècles plus tard, nous sommes toujours
16 en train de nous battre. Il ne s'agit pas de combats armés, quoi que ceci
17 ne puisse pas être complètement exclu encore. Quelque soit le type de
18 batailles, celles-ci ne peuvent pas être menées sans une certaine
19 détermination," et cetera.
20 Vous nous avez fourni une explication à cet égard hier. Si je vous ai bien
21 compris, vous avez parlé de batailles menées par des forces à l'extérieur
22 de l'ex-Yougoslavie. Est-ce la manière dont vous interprétez ce passage ?
23 R. En premier lieu, il s'agit ici d'une célébration du
24 600e anniversaire de la bataille de Kosovo. La bataille du Kosovo s'est
25 déroulée contre des forces venant de l'extérieur de la Serbie, à savoir,
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1 des forces de l'Empire ottoman, de l'Empire turc.
2 Il y a eu là une bataille où a été tuée pratiquement toute
3 l'aristocratie de la Serbie de l'époque. Cela a été déterminant pour notre
4 histoire. Nous avons passé des siècles en esclavage par la suite. Lorsque
5 vous parlez de cette bataille-là, il est normal d'avoir à l'esprit la
6 possibilité de se défendre à l'égard d'un ennemi extérieur.
7 D'autre part, vous avez des tensions au sein du pays lui-même. Vous
8 avez des forces qui veulent procéder à la sécession, qui réclament
9 l'indépendance. Vous ne savez pas du tout ce qui va se passer. Vous ne
10 devez pas exclure les possibilités liées à la défense. L'accent n'a pas du
11 tout été mis là-dessus. Il s'agissait de batailles économiques, de
12 batailles politiques et culturelles. Je crois que cette moitié de phrase a
13 été mise à profit de façon abusive pour tirer des conséquences à longue
14 portée, disant que Milosevic s'apprêtait à conduire une guerre. Je crois
15 que là, il s'agit vraiment d'une utilisation abusive.
16 Q. Vous souvenez-vous de la question posée par M. le Juge Bonomy et
17 différents rapportages dans la presse contemporaine publiée en même temps
18 que l'allocution de Gazimestan. Pourriez-vous nous rappeler, s'il vous
19 plaît, cela n'est pas trop clair dans mon esprit. Pourriez-vous nous le
20 rappeler ? Souvenez-vous que ceci a conduit à une forme d'inquiétude parmi
21 les contemporains.
22 R. Hier, j'ai dit, qu'à l'époque ce discours a été hautement
23 apprécié dans les médias occidentaux, y compris ceux qui ne se sont pas
24 servis des rapports des agences, mais qui avaient disposé des journalistes
25 sur place. Il en était ainsi pour ce qui est du journal Independent de
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1 Londres. A l'époque, l'on a jugé qu'il s'agissait là d'un discours
2 paisible, pacifique, raisonnable et tolérant. Le journal Independent a dit
3 que Milosevic avait pris figure d'un grand homme d'état et de leader du
4 peuple serbe.
5 Dix ans plus tard, et hier j'avais ici les fragments que je vous ai
6 proposés pour les présenter, mais je ne les ai pas sur moi à présent. Il
7 s'avère que dix ans plus tard, que l'Independent, le Times, le Independent,
8 le Washington Post, la BBC également, tous de concert, ont parlé de la même
9 chose pour dire que c'était un discours enflammé, passionné, qui n'a fait
10 que galvaniser les Serbes, et qui les a amenés à une situation de
11 disponibilité aux combats. Tout ceci a été monté de toute pièce par la
12 suite. J'aurais pu vous citer hier ces fragments de presse --
13 M. NICE : [interprétation] D'autres études ont été menées. Je n'ai pas tous
14 les documents sous la main. Certains documents ont été préparés. Néanmoins,
15 ce qui n'est pas disponible, pourra être mis à votre disposition dans peu
16 de temps; malheureusement, pas aujourd'hui.
17 Q. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, Monsieur le Professeur,
18 connaissez-vous un journal slovène appelé Delo ?
19 R. Oui, il existe un journal slovène appelé Delo, en effet.
20 Q. Envisagez-vous la possibilité que c'est ce journal qui aurait pu
21 interpréter cet article de cette façon, autrement dit, semant l'inquiétude
22 parmi vos contemporains ?
23 R. Il y a une autre portion de la presse slovène qui nous parle de la
24 façon dont on a remporté la bataille pour les esprits, les âmes des gens,
25 parce que l'on a sans cesse fait que nourrir cette peur, cette appréhension
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1 en développant l'hostilité à l'égard des Serbes, à l'égard de la
2 Yougoslavie, à l'égard de l'Armée populaire yougoslave. J'ai ce texte-là,
3 c'est ce qui prévalait en Slovénie. La Slovénie s'apprêtait à faire
4 sécession.
5 Q. Borba était à l'époque un journal indépendant publié à Belgrade; c'est
6 exact ?
7 R. Borba a de tout temps été le journal officiel du Parti communiste de la
8 Yougoslavie.
9 Q. Par la suite, est-ce que c'est exact que ceci est passé sous le
10 contrôle de l'accusé et a été remplacé par un journal appelé Nova Borba ?
11 R. Je ne sais pas comment Borba est tombé sous l'influence de l'accusé. Il
12 y avait des médias de chez nous qui soutenaient le pouvoir en place, et
13 d'autres médias qui étaient dans l'opposition, et il y avait une liberté de
14 critiquer dans la presse. Quand j'ai dit, hier, au sujet d'affirmations au
15 terme desquelles Milosevic s'était promu dictateur, j'ai pu dire que jamais
16 aucun homme d'état n'a été offensé, attaqué et critiqué dans la presse que
17 cela n'a été son cas à lui à l'époque.
18 Q. Cet échantillon, ce morceau d'article que vous avez évoqué hier, vous
19 dites que c'était Borba qui avait rédigé un article sur ce que le journal
20 Delo avait dit à Gazimestan. Le reportage parlait beaucoup des termes qui
21 avaient été utilisés, autrement dit, les termes batailles, ceci avait
22 suscité une certaine inquiétude. Quels que soient les propos de la presse
23 indépendante, la perception des gens était celle-là, n'est-ce pas ? Cela
24 avait suscité une certaine inquiétude ?
25 R. Je ne sais pas. Comme je n'ai pas lu le journal Delo, ni moi ni la
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1 plupart des gens ne lisaient plus Borba. Borba n'avait plus le rôle qui
2 avait été le sien auparavant. Son tirage est devenu à ce moment-là très
3 faible. Je ne sais pas ce que Borba a pu rédiger.
4 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que la solution la
5 plus appropriée en partie en réponse aux questions posées par les Juges de
6 la Chambre et en partie parce que c'est quelque chose que j'allais de toute
7 façon faire, j'ai préparé un extrait de ces articles de journaux
8 correspondant à l'époque qui nous concerne en anglais et avec les
9 traductions. Je puis dire qu'à la lumière de sa dernière réponse, le témoin
10 n'a pas lu le journal Delo et ses articles. Il y a des articles datés du 29
11 et du 30 juin de Delo et de Borba.
12 Q. Vjesnik, qui est le journal de Zagreb, reconnaissez-vous, Monsieur le
13 Professeur, que ce journal avait publié des articles faisant montre ou
14 étalant une certaine inquétude ?
15 R. Voyez-vous. Nous parlons de 1989, ou d'une année ultérieure d'abord ?
16 Q. 1989. Le 1er juillet 1989, Vjesnik à Zagreb.
17 R. Je pense que Vjesnik à Zagreb, tout comme Delo, s'apprêtait grandement
18 à faire sécession. Il était dans leur intérêt à s'attaquer à tout ce qui se
19 passait en Serbie, et c'est ce qu'ils ont fait. C'est du jamais vu pour ce
20 qui est du degré de chauvinisme exprimé dans la presse à l'époque.
21 Q. Voyez-vous, Monsieur le Professeur, dans la réalité quelle qu'était la
22 perception internationale, ou en tout cas, les inquiétudes sur la scène
23 internationale, la perception nationale ou des journaux locaux ou dans les
24 autres républiques relatait une grande inquiétude sur les propos de
25 l'accusé. C'est quelque chose que vous savez, n'est-ce pas ?
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1 R. Mais nous n'avons toujours pas le texte, et nous pouvons toujours
2 l'étudier. Nous avons entendu les réactions des journalistes étrangers qui
3 n'étaient pas intéressés du tout, ou qui étaient désintéressés. Maintenant,
4 pour ce qui est des réactions, pourquoi se pencher, de façon plus précise,
5 sur les réactions des journaux, de Croatie et de Slovénie, parce qu'eux
6 sont une partie intéressée. Vous aviez constamment ces textes serbophobes
7 en Croatie, en Slovénie, en 1989 et 1990. On en était arrivé aux dernières
8 journées de cette vie commune. Cela se trouve être tout à fait dénué de
9 pertinence.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, avez-vous essayé de
11 retrouver une découpure de presse de la presse albanaise ?
12 M. NICE : [interprétation] Nous n'avons pas encore de coupure de presse de
13 la presse albanaise. Nous avons quelques articles des journaux occidentaux
14 où une observation d'Ibrahim Rugova, le jour précédant l'allocution de
15 Gazimestan, faisant état de cet état d'inquiétude. Il décrit les événements
16 à venir comme une fête serbe et chauvine les décrivant comme une
17 provocation. C'est un article de journal. Il y a un article de journal là-
18 dessus. Je vais poser une question au témoin à ce sujet.
19 Q. Vous avez entendu, Monsieur le Professeur, qu'il y avait un
20 rassemblement très important, quelque chose de très coûteux qui a eu lieu
21 hors de la présence des Albanais du Kosovo, en tout cas, tel cela a été vu
22 par Ibrahim Rugova, et cet article de journal est précis, n'est-ce pas ? Il
23 s'agit bien d'une provocation. C'était une provocation, et d'après vous ?
24 R. Comment pouvez-vous qualifier cela de provocation ? Les Serbes se sont
25 rassemblés pour célébrer un grand événement historique, tout comme d'autres
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1 peuples se réunissent lorsqu'ils célèbrent eux-mêmes leurs événements à
2 eux. Nous allons prochainement avoir la célébration d'un anniversaire de la
3 libération.
4 Les Français fêtent chaque 14 juillet, et ils se réunissent pour célébrer
5 la révolution française.
6 Je viens de retrouver maintenant ce que la BBC a dit en 1989, et je vais
7 vous le lire en anglais : "A la foule Milosevic a dit que toutes les fois
8 qu'ils étaient en mesure de le faire, les Serbes avaient aidé les autres à
9 retrouver leur liberté. Ils n'avaient jamais mis à profit leur avantage,
10 autrement dit, c'était une grande nation par rapport à d'autres plus
11 petites. Ils n'ont jamais utilisé ceci à leur profit. Il a ajouté que la
12 Yougoslavie était une communauté multinationale qui pouvait survivre pour
13 autant que toutes les nations étaient égales, toutes les nations faisant
14 partie de cette entité."
15 Cela a lieu le 29 juin, dans la partie 2, en Europe de l'est. Maintenant,
16 je vais parler d'une citation du Independent du 29 juin 1999. M. Edward
17 Stein et M. Tanner au Kosovo ont écrit : "Hier, ils ont pris le rôle d'un
18 chef d'état et le dirigeant neutre de la Yougoslavie [comme interprété]. Il
19 a prononcé un discours conciliant inattendu sans agressivité aucune, en
20 faisant référence à la contre-révolution albanaise et la province du
21 Kosovo. Au lieu de faire preuve d'agressivité, il a parlé de tolérance
22 mutuelle, il a parlé de la construction d'une société riche et
23 démocratique, et ce qui mettrait un terme à la discorde, a-t-il dit. Ce qui
24 a conduit à la défaite serbe contre les Turcs, il y a six ans." Il a
25 poursuivi, en disant : "Je crois que les gens étaient déçus. Tout est
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1 devenu très calme. Une femme qui avait l'air instruite de Belgrade a dit,
2 tout le monde avait l'air un peu surpris."
3 Voilà c'est ce qui date de 1989 et les commentaires de 1999 sont tout
4 à fait autres.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit du journal anglais
6 Independant, n'est-ce pas ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est l'Independant anglais, et après j'ai la
8 BBC, le New York Times, le Times de Londres. Si vous voulez, je peux vous
9 donner lecture de cela aussi.
10 M. NICE : [interprétation] Ce que je propose, je ne veux en aucun cas
11 interrompre le témoin, mais ce que je propose c'est que si je rassemble
12 quelques extraits de cette époque, peut-être que je pourrais les obtenir
13 des archives de ces journaux. Evidemment, ce qui nous intéresse, plus
14 particulièrement ici, sont les archives des journaux locaux, ce qui nous
15 permettra de mieux comprendre le texte que nous avons abordé.
16 Q. Monsieur le Professeur, en ce qui vous concerne, vous avez été publié
17 par différentes maisons d'édition. Vous avez donné un certain nombre
18 d'interviews. Je voulais vous poser un certain nombre de questions sur
19 certaines positions que vous avez peut-être prises.
20 Vous-même, avez-vous jamais mentionné le terme de génocide en parlant de la
21 libération des Serbes de la terreur et de la crainte du génocide ?
22 R. Il se peut que dans ce sens j'en aie parlé; qu'il y a eu expulsions
23 forcées, meurtres et destruction de monuments culturels. Mais à quel
24 interview ? A quel texte êtes-vous en train de vous référer ?
25 Q. Il s'agit d'une diffusion de la BBC, au mois de septembre 1991, le 2
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1 septembre, mais je me repose sur votre souvenir. Je crois que vous avez
2 peut-être dit cela. Cela vous préoccupait-il à l'époque, qu'avec
3 l'indépendance de la Croatie, il y aurait des Serbes en Croatie et en
4 Bosnie qui seraient encerclés par des non-Serbes, et qui ne pourraient
5 ainsi ne pas être en contact avec la Serbie, elle-même ? Etait-ce un de vos
6 sujets de préoccupation ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'est pas du correct du tout de poser au
10 témoin des questions au sujet de quelque chose qu'il aurait dit il y a 15
11 ans. On parle maintenant de 1990, 1991. La moindre des choses serait de
12 placer le texte sous les yeux du témoin afin que celui-ci puisse le lire et
13 voir si quelque chose a été arraché de son contexte. Il ne peut absolument
14 pas le faire. Moi, qui suis bien plus jeune que lui, et je pense que vous,
15 non plus, qui êtes plus jeune que moi-même, ne sauriez vous souvenir de vos
16 propos d'il y a 15 ans. Si M. Nice souhaite voir le témoin confirmer ou
17 affirmer quelque chose, qu'il lui montre le texte pour qu'il le voie. Je
18 crois que c'est la chose la plus élémentaire à faire.
19 M. NICE : [interprétation] Si je peux, cela effectivement me serait utile,
20 surtout si je parle de discours indirect ou d'articles qui ont été
21 rapportés.
22 Je souhaite ne pas perdre trop de temps. Je souhaite --
23 Q. Je n'ai pas encore l'article que je vous ai demandé de relire avant la
24 pause. J'espère l'obtenir bientôt et je souhaite maintenant conclure mon
25 interrogatoire sous peu.
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1 Si vous avez quelques observations à faire à propos de cet article
2 immédiatement, à ce moment-là, nous pouvons obtenir l'article et le
3 comparer. Cela vous permettra de le regarder.
4 R. Monsieur Nice, vous m'avez interrogé au sujet de positions que j'ai
5 publiées dans une revue appelée Praksis. Je vous ai dit que je n'ai jamais
6 dit chose pareille et que jamais chose pareille n'a été publiée. Vous
7 m'avez fait parvenir ceci, ce texte ici. Je n'en crois pas du tout mes
8 yeux. Ce n'est pas mon texte à moi. Pensez-vous que cette Laura Secor
9 serait un pseudonyme sur lequel, il y aurait moi-même, dans un article
10 publié par Laura Secor, mais non pas dans Praksis mais une revue appelée
11 Lingua Franca, qui parle de Testaments Trahis par les Serbes conduisant à
12 la guerre. Cela ressemble à mes yeux à du matériel de propagande rédigé par
13 des services de renseignements.
14 Q. Si vous ne reconnaissez pas que cet article --
15 R. Vous avez bien des raisons de m'interrompre, là en effet.
16 Q. Non. Si vous n'acceptez pas qu'il s'agisse bien de votre position, nous
17 n'allons pas poursuivre. Je ne veux pas m'étendre sur la question et
18 attendre que l'article vous soit présenté.
19 R. Oui, mais ceci n'est pas mon article. C'est un article de Laura Secor.
20 Q. Par l'intermédiaire de cet article, on précise que c'est vous qui étiez
21 l'auteur de cet article. Je crois que nous ne parlons pas de la même chose
22 et je souhaite que vous concentriez votre attention là-dessus.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a des écouteurs sur les oreilles et
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1 il est en train d'écouter la version serbe. Maintenant dans la traduction
2 on dit : si vous acceptez que cela est votre article, mais dans la
3 transcription on dit : si vous n'acceptez pas ceci comme étant votre
4 article. Donc, on dit le contraire. Si vous n'acceptez pas ceci comme étant
5 votre article. Or, dans mes oreilles, j'ai entendu : si vous acceptez le
6 fait que ceci est votre article, c'est peut-être cela qui a prêté à
7 confusion.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il est tout à fait clair que le
9 témoin ne l'accepte pas. M. Nice a même indiqué peut-être qu'il ne parlait
10 pas de la même chose. M. Nice a proposé --
11 LE TÉMOIN : [aucune interprétation] Cet article appartient à quelqu'un
12 d'autre. Ce n'est pas mon article.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Nice a dit qu'il allait présenter
14 le point de vue de Mme Secor dans cet article, mais je crois que, je ne
15 pense pas M. Nice insiste là-dessus pour l'instant, nous pouvons
16 poursuivre.
17 M. NICE : [interprétation] Non, pas pour le moment. Merci beaucoup.
18 Q. Je souhaite aborder un autre thème. En termes généraux uniquement, si
19 cela est possible. L'idée d'une Grande Serbie découlait du 19e siècle et
20 remonte à l'Autriche-Hongrie. C'est une idée et il y a encore certaines
21 personnes qui épousent cette idée, n'est-ce pas ? Cette idée de la Grande
22 Serbie.
23 R. Au 19e siècle, cette idée vient des efforts déployés par l'Autriche-
24 Hongrie visant à montrer que toute aspiration à la libération des Serbes.
25 Or, ils se trouvaient présents en Bosnie, réduits à l'esclavage, et
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1 visaient à la création d'une Grande Serbie. C'est là qu'on a inventé le
2 terme de Grande Serbie. Aucun état, aucun gouvernement, de tout ce temps
3 jusqu'à nos jours, n'a jamais défendu un projet de Grande Serbie, quoique
4 tous les autres pays voisins avaient des projets de cette nature Grande
5 Slovénie, Grande Croatie, Grande Roumanie, Grande Hongrie, et cetera. Ici
6 certains particuliers, voire des groupuscules ont continué à parler de la
7 Grande Serbie pendant la Deuxième guerre mondiale. Par exemple, les
8 Chetniks de Draza Mihailovic avaient même une carte présentant les limites
9 de la Grande Serbie, mais jamais aucun gouvernement, jamais aucune autorité
10 n'en a fait un projet officiel.
11 Si l'on parle de l'idée de la Grande Serbie, je dirais que cela existe de
12 temps précédent, du temps d'Ilija Garasanin, mais si l'on parle du
13 Nacertanije, je dirais que cela n'a jamais été écrit par Ilija Galasanin,
14 mais par Czartorysky et un autre polonais, des polonais.
15 Q. Il y avait et cette idée de Grande Serbie existe toujours, c'est
16 quelque chose de possible. Est-ce une idée qu'a repris le parti de M.
17 Seselj ?
18 R. C'est ce que j'ai dit : des particuliers et des groupes déterminés en
19 ont parlé. Il faut que nous revenions à autre chose. Je tiens à vous
20 rappeler des propos d'un homme qui a créé l'idée du socialisme en Serbie.
21 Il s'agit de Svetozar Markovic. Il a, de façon très explicite, critiqué
22 l'idée de la Grande Serbie et l'idée de la création d'un état de Serbes
23 uniquement. Il a été favorable à la création d'une fédération balkanique.
24 Aucun idéaliste ne s'est employé en faveur de la Grande Serbie et aucun
25 gouvernement ne l'a fait non plus.
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1 Q. Le parti de Seselj a-t-il été associé à la Grande Serbie; oui ou non ?
2 Le parti de Seselj a-t-il été associé à celui de la Grande Serbie ? Oui ou
3 non. --
4 R. Le parti à Seselj est un parti de l'opposition, et c'est un parti qui
5 croit à la réunification de toutes les terres serbes, de tous les
6 territoires serbes, c'est ce qu'ils appellent la Grande Serbie. Le parti de
7 Seselj, oui.
8 Q. Vous-même, récemment, avez-vous été associé d'une manière ou d'une
9 autre au parti de Seselj ?
10 R. En aucun cas, je n'ai eu de corrélation quelconque avec le parti à
11 Seselj.
12 Q. Vous alliez montrer comme pièce à conviction un ouvrage -- pardonnez-
13 moi, un article que vous avez rédigé, vous-même, comportant un certain
14 nombre de cartes qui nous ont été fournies à l'avance par l'accusé,
15 comportant un certain nombre de cartes contenues dans un article que vous
16 avez rédigé vous-même.
17 Brièvement, si je puis, une de ces cartes était une carte de l'accord de
18 Londres signé en 1914. Connaissez-vous cette carte de 1915 ?
19 R. Ecoutez. Jamais je n'ai publié aucune carte. Je ne me suis pas servi de
20 cartes. Je ne suis ni historien, ni géographe.
21 Pour ce qui est des accords de Londres, il s'agit d'un traité qui s'est
22 signé avec les représentants de l'Italie, et à qui on a proposé en échange
23 d'une rentrée en guerre contre l'Autriche-Hongrie, de leur attribuer des
24 parties de la Dalmatie. L'Italie était censée recevoir la Dalmatie du nord
25 toute entière. Cela n'a rien avoir avec l'idée de la Grande Serbie.
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1 M. NICE : [interprétation] Très bien. Messieurs les Juges, il s'agit de la
2 pièce qui pourrait comporter le numéro 8A. Je ne sais pas si vous avez une
3 liasse de documents comme moi.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, il ne semble pas.
5 M. NICE : [interprétation] Je souhaite que nous mettions cette carte sur le
6 rétroprojecteur. Peut-être que l'accusé aurait l'obligeance de bien vouloir
7 nous remettre cet article, l'article en question, puisque j'ai l'intention
8 d'en parler.
9 Q. Prenez le temps nécessaire. Je souhaite savoir si c'est un article que
10 vous avez déjà vu.
11 R. Mais ici, il n'y a ni début de cette article, ni -- écoutez. Ceci
12 constitue probablement une publication du Parti radical serbe. Une fois,
13 ils ont organisé une conférence scientifique, et j'ai pris la parole, mais
14 ceci n'est ni ma carte, est je n'ai pas du tout parlé à l'occasion de cette
15 rencontre d'une Grande Serbie. Ceci est une publication --
16 Q. J'ai besoin de votre aide, Monsieur le Professeur.
17 R. C'est une publication du Parti radical serbe. Ici, on ne voit pas très
18 bien, d'ailleurs, de qui cela émane. Vous voyez qu'il n'y a pas de début du
19 tout.
20 M. NICE : [interprétation] On ne parle que du document qui vient de nous
21 être remis. Si Monsieur l'Huissier aurait l'obligeance de bien vouloir
22 mettre sur le rétroprojecteur la première carte qui ne comporte pas de
23 numéro.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous ne savons pas de qui émanent ces cartes.
25 Q. Reconnaissez-vous cette carte ? Il s'agit de la carte qui est celle de
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1 l'accord de Londres. Il s'agit d'une carte de 1915 qui montre une Grande
2 Serbie, une Serbie agrandie qui comprend la Macédoine. Serait-il exact de
3 le dire ?
4 R. Non. La carte de ce traité de Londres ne peut qu'inclure que ce qu'il a
5 été prévu de donner à l'Italie, et rien d'autre.
6 Q. Mais en fait, on y voit une Yougoslavie qui est bien agrandie au nord
7 et à l'ouest, n'est-ce pas ?
8 R. On ne peut pas savoir ce qui est agrandie ici, mais en tout état de
9 cause, l'accord de Londres ne s'est absolument pas occupé de la Serbie.
10 Cela étant, des offres ont été faites par l'Angleterre en prévision du fait
11 que l'Autriche-Hongrie allait perdre la guerre. Donc, au cas où elle
12 perdait la guerre, toutes les nations impliquées pourraient dès lors faire
13 usage de leur droit à l'autodétermination, et dans ce cas-là, les Slaves du
14 sud auraient la possibilité de s'unir. Ces terres montrées ici sont des
15 terres habitées par des Slaves du sud. En fait, il s'agit bien des alliés
16 qui se sont réunis pour créer la Yougoslavie en 1918, l'état des Serbes,
17 des Croates et des Slovènes. Par conséquent, ici, il n'est pas question des
18 Serbes, il est question des Serbes, des Croates, et des Slovènes.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, oui.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour éviter toute confusion, je souligne que
21 ceci est une série de cartes historiques. Aucune de ces cartes n'est censée
22 illustrer la proposition de qui que ce soit. Vous voyez ici que ces cartes
23 datent du 11e, du 14e siècles, ce sont des cartes qui montrent l'état de la
24 Yougoslavie entre les deux guerres. Mais si vous lisez les légendes, vous
25 vous rendrez compte qu'il s'agit d'une série de cartes historiques, et
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1 c'est la raison pour laquelle, sans doute, le professeur a intégré ces
2 cartes dans les pièces à conviction.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai intégré rien du tout. Je n'ai pas la
4 moindre idée de ce dont il s'agit.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation] Je croyais que ces cartes venaient de vous.
6 En tout cas, ce sont des cartes qui montrent l'étendue du territoire occupé
7 par le peuple serbe au 10e siècle, ensuite, sous l'empire de Dusan au 14e
8 siècle. Ensuite, sous Dukja [phon] dans le district de Bosnie où les Serbes
9 se sont établis au 11e siècle, et cetera.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] La Serbie, l'Autriche-Hongrie, et on voit que
11 l'Autriche-Hongrie s'étend jusqu'à la Drina.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez replacer ces cartes dans
13 leur contexte. Ceci est indispensable si elles doivent servir à quelque
14 chose.
15 M. NICE : [interprétation] Oui, je vais les resituer.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nice, il y a aussi des
17 légendes, mais il est très difficile de suivre dans les conditions
18 actuelles.
19 M. NICE : [interprétation] J'admets tout à fait, Monsieur le Juge.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie.
21 Professeur, si vous regardez les cartes en B/C/S, vous voyez en page
22 4, qui porte en fait le numéro 13, une image. C'est peut-être une
23 photographie de vous.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est une photographie de moi, qui est
25 publié dans ce journal. Je pense que c'était en rapport avec une réunion à
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1 laquelle j'ai assisté. Il y a une question qui est écrite ici. Je la lis,
2 je cite : "Un autre élément du programme national est selon vous le concept
3 de rapport avec les pays voisins ou pays tiers," et ensuite, on trouve ma
4 réponse. Mais rien n'est dit de la Serbie ici. Je parle des rapports avec
5 des états limitrophes, tels que la Grèce et la Hongrie.
6 M. NICE : [interprétation] Merci de votre réponse, mais moi, ce qui
7 m'intéresse simplement, et je crois qu'une meilleure version des cartes
8 existent un peu plus loin, en tout cas, une version dans laquelle la
9 légende est lisible, mais c'est la même légende que celle que vous venez de
10 citer.
11 Q. Professeur, les choses sont simples. Nous avons une pièce à conviction
12 dans ce procès qui est la pièce 613, intercalaire 103. Il y en a une autre
13 qui est la pièce 613, intercalaire 101. La première de ces deux pièces est
14 une transcription d'écoute téléphonique d'une conversation entre Radovan
15 Karadzic et l'accusé suite à la rupture, ou en tout cas, à la conclusion
16 des pourparlers menés ici à La Haye.
17 Dans cette conversation, Karadzic dit, je cite :
18 "Nous devrions peut-être nous engager dans des actions internationales
19 avant le 5, avant l'application de l'accord de Londres."
20 L'accusé répond qu'il n'en sait pas. Ensuite, on demande si on peut appeler
21 un certain Vladan.
22 Slobodan MILOSEVIC : "Je pense que l'accord de Londres inclut la Macédoine.
23 Radovan KARADZIC : Très bien, mais l'accord de Londres peut être révisé."
24 L'accusé dit quelques mots au sujet du fait que ceci serait interprété
25 comme des prétentions de notre part à l'égard de la Macédoine.
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1 Radovan KARADZIC : "Nous pouvons réviser l'accord de Londres."
2 L'autre pièce à conviction est également une écoute téléphonique qui date
3 du 26 octobre, donc, un peu plus tard, conversation entre Karadzic et
4 l'accusé dans laquelle Karadzic dit : "Avez-vous envisagé la possibilité
5 avec Avramov"
6 Il s'agit de Smilja Avramov.
7 Radovan KARADZIC : "-- s'il n'y a pas de Yougoslavie, ne devrions-nous pas
8 accepter l'accord de Londres ?
9 Slobodan MILOSEVIC : Je n'ai pas envisagé cette possibilité.
10 Radovan KARADZIC : Ce serait une grande chose parce qu'il y a les
11 signatures de la France, de l'Angleterre et de tout le monde.
12 Slobodan MILOSEVIC : Oui, Il faudra que nous voyons ce qu'il en est."
13 Karadzic poursuit et il continue à discuter de la même idée un peu plus
14 longtemps avant que l'accusé ne dise qu'il est sur le point de rencontrer
15 les Américains.
16 Nous voyons en examinant la carte illustrant l'accord de Londres, quelque
17 soit le contexte historique de l'époque, que la Serbie devait être
18 considérablement agrandie. Ce qui m'intéresse c'est la chose suivante : en
19 tant qu'intellectuel qui vous déplaciez dans ces milieux, un tel
20 agrandissement de la Serbie faisait bien l'objet couramment des
21 conversations entre vous, et c'était bien une ambition commune parmi
22 certains Serbes durant tout le 20e siècle, n'est-ce pas ?
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que le témoin
24 a admis le fait que la carte représente une Serbie agrandie, élargie ?
25 M. NICE : [interprétation] Il a dit, qu'en fait, il était question de
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1 l'Italie -- vous avez raison, Monsieur le Président de me demandez de
2 vérifier cela, mais en tout cas, à l'intérieur des frontières, on trouve la
3 Serbie en tant que territoire intégré.
4 Q. Professeur, vous avez entendu la question posée par le Président. Est-
5 ce que vous admettez que l'accord de Londres prévoyait une Serbie élargie ?
6 R. D'abord, je ne suis pas la personne à qui cette question doit être
7 posée. Pourquoi est-ce que je commenterais des écoutes téléphoniques entre
8 Karadzic et M. Milosevic ? Ce que je peux dire s'agissant de l'accord de
9 Londres, c'est qu'en 1915 l'Autriche-Hongrie était un état ennemi, et une
10 offre a été faite à l'Italie en l'absence de tout représentant serbe. Il y
11 a des pourparlers entre les Britanniques et les Italiens qui font un
12 certain nombre de projets dans le cadre de la guerre. L'Autriche-Hongrie
13 était même censée payer des indemnités après la guerre, des réparations.
14 Les Britanniques concluent un accord avec l'Italie, un accord qui porte sur
15 l'octroi de leurs territoires en Autriche-Hongrie aux Italiens, alors que
16 le reste devait aller soit à la Serbie, soit à l'état des Serbes, des
17 Croates et des Slovènes. Mais les Serbes en tant que tel n'avaient rien à
18 voir avec cela. Ils ne participaient pas à ces pourparlers. Moi, en tout
19 cas, je n'y ai pas participé.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, même ces écoutes
21 téléphoniques qui viennent d'être citées sont utilisées à tort. Le
22 professeur Avramov a déjà parlé de cela dans sa déposition. C'était une
23 époque où tous nos experts internationaux regroupaient toutes sortes de
24 documents relatifs à la Conférence de La Haye. Toute trace à cette époque
25 de l'histoire de plans de ce genre devait faire l'objet de présentations.
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1 Ici, nous avons entendu le professeur Avramov et d'autres professeurs
2 éminents qui ont étayé notre position à la Conférence de La Haye. Il
3 n'était pas question de divisions territoriales à l'époque.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic --
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces pièces sont utilisées de façon
6 inacceptable.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais vous expliquer encore une
8 fois : vous aurez la possibilité de poser des questions supplémentaires.
9 Bien sûr, l'exercice est un peu nouveau pour vous, mais une des fonctions
10 classiques des questions supplémentaires consistent à réhabiliter le témoin
11 si vous estimez que votre témoin a été indûment attaqué ou que sa position
12 a été affaiblie. Vous pourrez durant les questions supplémentaires
13 réhabiliter le témoin. Les commentaires que vous venez de faire entrent
14 dans les questions supplémentaires.
15 M. NICE : [interprétation] Merci.
16 Q. Professeur, une autre carte est la carte Moljevic de la Seconde guerre
17 mondiale. Est-ce que vous connaissez cette carte ? Je peux sans doute la
18 retrouver ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous pensez --
21 R. Oui. J'ai dit hier que c'était une carte établie par les Chetniks de
22 Draza Mihailovic. Moljevic était l'idéologue des Chetniks et la réalité est
23 indubitable que le mouvement de Draza Mihailovic, qui a été appuyé pendant
24 un certain temps par les pays occidentaux, s'est vu ensuite retirer ce
25 soutien, et que les Chetniks s'intéressaient à la création d'une Grande
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1 Serbie et Moljevic a établie cette carte. C'est ce dont j'ai parlé lorsque
2 j'ai dit que la Grande Serbie était un projet entretenu par certains
3 individus isolés, par certains groupes isolés, mais qu'il ne s'est jamais
4 agi d'un plan défendu au niveau de l'état. Moljevic n'était pas un
5 représentant officiel de l'état.
6 M. NICE : [interprétation] Veuillez utiliser le rétroprojecteur pour
7 montrer cette carte aux Juges. C'est cette carte-ci. Si vous m'apportez la
8 série de cartes, je ferai le tri.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Si ceci est un procès de Draza Mihailovic,
10 tout va bien.
11 Q. Alors, le point important qui m'intéresse est le suivant : nous voyons
12 ici une Serbie considérablement élargie, encore une fois, mais comme nous
13 le lisons dans la légende, c'est la carte de Koljevic, n'est-ce pas ?
14 Cette carte qui date de la Seconde guerre mondiale illustre les ambitions
15 des personnes dont vous avez parlées, ambitions qui consistaient à ce qu'il
16 existe un territoire au nord, au nord-ouest qui s'étende le long de la
17 ligne Karlobag-Karlovac-Virovitica dont il a beaucoup été question dans ce
18 procès. C'est bien la carte Koljevic, n'est-ce pas ?
19 R. Exact.
20 Q. La carte Koljevic --
21 R. Moljevic.
22 Q. Oui. Moljevic, excusez-moi. Je vous remercie de m'avoir corriger.
23 Cette carte Moljevic a été établie avant qu'il soit question d'achever le
24 génocide dont les Serbes ont été victimes au cours de la Seconde guerre
25 mondiale. C'était avant cet événement et indépendant de cet événement
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1 terrible et très grave, je parle du génocide des Serbes, n'est-ce pas ?
2 R. Bien sûr. Cette carte a été établie au cours de la Seconde guerre
3 mondiale, mais très certainement après le génocide commis contre les Serbes
4 de Croatie. Cette carte a été établie après, parce que le génocide a eu
5 lieu en 1941 et durant le début de 1942, alors que la carte a été établie
6 un peu plus tard. Il existe de nombreuses cartes du même genre, je peux
7 vous en parler. Le roi Alexandre avait fait établir une carte montrant ce
8 qu'il resterait de la Yougoslavie en cas de sécession de la Croatie.
9 Q. Je vous interromps. Vous connaissez une revue intitulée Epoha, je
10 pense, n'est-ce pas ?
11 R. Epoha.
12 Q. Oui.
13 R. Si c'est la revue qui a été publiée pendant un certain temps par le
14 Parti socialiste de Serbie, je la connais. Je ne sais pas si c'est bien de
15 cette revue que vous parlez.
16 Q. Il s'agit du parti de l'accusé. J'aimerais que nous examinions d'abord
17 un exemplaire, un numéro d'Epoha paru le
18 22 octobre 1991 soit juste après le rejet des propositions de la conférence
19 de La Haye. J'aimerais que soit mise sur le rétroprojecteur la première
20 page de la revue. Malheureusement, je ne l'ai que sous forme de photocopie.
21 Qu'on montre la carte également.
22 Nous constatons qu'il s'agit bien de cette revue. Ensuite, nous passons à
23 la page qui montre la carte.
24 M. NICE : [interprétation] Nous avons la légende en anglais, Monsieur le
25 Président. Il s'agit d'une pièce à conviction.
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1 Q. Alors --
2 R. Qui a établi cette carte ?
3 Q. Je parle de la carte que vous avez sous les yeux.
4 R. Qui en est l'auteur ?
5 Q. Elle est parue dans la revue Epoha, n'est-ce pas ? Si nous lisons la
6 version en B/C/S, Monsieur le Témoin, vous pouvez lire la légende en B/C/S.
7 Vous l'avez sous les yeux ? Très bien.
8 La légende se lit comme suit : Nous avons une traduction anglaise. Ce qu'on
9 voit ici, ce sont bien des frontières de la République; de nouvelles
10 frontières entre la République de Serbie et la République de Croatie. Je
11 parle de cette ligne en caractère gras que l'on trouve en haut à gauche,
12 donc les frontières occidentales des territoires serbes.
13 Si vous regardez cette carte, Professeur, il s'agit bien de la ligne
14 Karlobag-Virovitica, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, mais je ne sais pas qui est l'auteur de cette carte. En tout état
16 de cause, je ne suis pas au courant que ceci n'ait jamais été accepté en
17 tant que carte officielle. Elle reflète l'opinion de certains individus. De
18 quel individu, je n'en ai pas la moindre idée. Qui est l'auteur de cette
19 carte ?
20 Voyez-vous, une revue peut publier des cartes dont les auteurs ont une
21 attitude négative par rapport à quelque chose. Ces cartes ont été publiées
22 dans le but d'être soumises à la critique. Qui est l'auteur de cela ?
23 Q. Je fais faire distribuer la traduction.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je pense que ce que
25 vient de dire le témoin est assez valable. Si ces cartes doivent nous être
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1 d'une quelconque utilité, il faudrait --
2 M. NICE : [interprétation] Certainement.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Savoir qui --
4 M. NICE : [interprétation]
5 Q. Zoran Rakic est l'auteur de l'article. Vous le connaissez, Monsieur le
6 Témoin ?
7 R. Je n'ai pas la moindre idée de qui est Zoran Rakic.
8 Q. J'aimerais, Monsieur le Président, vous référer à la page 2 de la
9 version anglaise où la carte n'est pas reproduite. Nous trouvons le texte
10 dans la revue du Parti socialiste de Serbie. Oui, c'est en haut de la page,
11 en haut de la page que le professeur peut lire sur le rétroprojecteur en ce
12 moment. La traduction en anglais se lit comme suit, Professeur, je cite :
13 "Comment allons-nous dessiner les nouvelles frontières ? Une possibilité de
14 démarcation territoriale entre la 3e Yougoslavie et la Croatie est
15 souhaitable." Ensuite, nous voyons un certain nombre de secteurs qui sont
16 identifiés sur la carte par un numéro. Numéro 1, la Région autonome serbe
17 de Krajina; numéro 2, la Slavonie occidentale; numéro 3, la région de la
18 Slavonie serbe, région de la Slavonie, de Baranja et du Srem occidental;
19 numéro 4, Herzégovine occidentale; numéro 5, Samac et la Posavina; numéro
20 6, la République de Dubrovnik et numéro 7, frontières occidentales des
21 territoires serbes.
22 C'est ce point sur lequel je souhaite vous demander votre aide. Vous
23 rappelez-vous, suite à la conclusion, en fait, à l'échec de la conférence
24 de La Haye, que ce plan a été proposé et discuté par le parti de l'accusé,
25 plan qui prévoyait notamment des frontières s'étendant le long de la ligne
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1 qui va de Karlobag à Virovitica ?
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez parler du plan que l'on
3 voit ici sur la carte ?
4 M. NICE : [interprétation] Oui, tout à fait.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci n'a pas été discuté par le Parti
6 socialiste de Serbie. Comme vous l'avez dit à juste titre, c'est quelque
7 chose qui a été publié dans une revue où un certain nombre de personnes
8 avaient tout à fait le droit de faire paraître leurs opinions.
9 Deuxièmement, ce n'est pas un plan préconisant la démarcation entre la
10 Serbie et la Croatie; c'est une image de ce que serait la Yougoslavie sans
11 la Croatie qui avait fait sécession. Le problème venait du fait que la
12 Croatie avait fait sécession. Donc, il fallait déterminer où se trouvait la
13 frontière. Cela n'a rien à voir avec la Grande Serbie. Voyez-vous, la
14 Macédoine figure ici ainsi que la Bosnie et le Monténégro. Cela signifie
15 que la Yougoslavie a continué à exister après la sécession de la Slovénie
16 et de la Croatie.
17 L'année 1991. La question désormais consistait à définir la frontière entre
18 la Croatie et la Yougoslavie.
19 Q. Vous admettez qu'au sein de votre groupe, au sein de ce parti politique
20 et parmi les dirigeants politiques, l'intention existait d'étendre la
21 Serbie jusqu'à la ligne menant de Karlobag à Virovitica ?
22 R. Il n'en a jamais été mention, absolument pas; pas un mot à ce sujet. La
23 question qui se posait, c'était de savoir où l'armée allait se déployer en
24 cas de sécession de la Croatie, par exemple. C'est le premier point.
25 Deuxièmement, la question discutée a été celle de ces territoires, à
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1 savoir, la Krajina serbe où les forces de maintien de la paix des Nations
2 Unies étaient arrivées en vertu de l'accord conclu en 1991 à la conférence
3 de La Haye.
4 Les forces de maintien de la paix sont arrivées, et on prévoyait qu'une
5 fois la guerre terminée, ces hommes pourraient user de leurs droits à
6 l'autodétermination, pourraient continuer à exister. Donc, il était
7 question de cette région dans laquelle les forces des Nations Unies étaient
8 déployées.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, c'est l'heure de la
10 pause. Nous suspendons pendant 20 minutes.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pendant la pause, pourriez-vous vérifier
12 le titre exact de la revue. Est-ce Epoka ou Epoha.
13 M. NICE : [interprétation] C'est Epoha.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans une autre transcription, nous avons
15 lu le titre Epoka. Est-ce que vous pourriez vérifier.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est Epoha avec un H, en serbe en tout cas.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Suspension pendant
18 20 minutes.
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 23.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 47.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Nice.
22 M. NICE : [interprétation] J'aimerais que l'on enregistre les deux
23 documents que nous étions en train d'examiner. On peut choisir de
24 s'intéresser aux deux cartes qui ont été fournies par l'accusé ou à
25 l'ensemble de la série de cartes pour versement au dossier.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une cote pour les cartes, s'il vous
2 plaît.
3 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation] Monsieur Robinson.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est sans doute une erreur, car je n'ai remis
6 aucune de ces cartes. Des cartes de ce genre, il y en avait à l'époque des
7 milliers et des milliers qui étaient publiées dans toutes sortes de
8 journaux. On pouvait lire toutes sortes d'articles de presse au sujet de
9 toutes sortes de cartes de la Yougoslavie, et cetera. Ceci n'a absolument
10 aucune valeur en vue de prouver ce que M. Nice s'efforce de prouver. Ceci
11 n'a absolument aucun rapport avec la politique officielle. Ceci n'a
12 absolument aucun rapport avec le Parti socialiste. Ceci n'a absolument
13 aucun rapport avec le centre de l'affaire dont il est question ici.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si j'ai bien compris, la demande de
15 versement au dossier n'a rien à voir avec le fait qu'elles auraient été
16 présentées par vous.
17 M. NICE : [interprétation] En effet.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Elles seront versées au dossier.
19 Quelles sont les cotes ?
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sont des pièces à conviction de
21 l'Accusation.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien sûr, pièces à conviction de
23 l'Accusation.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 785.
25 M. NICE : [interprétation] La revue Epoha, j'en demande également le
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1 versement au dossier, je vous prie.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce 786.
3 M. NICE : [interprétation] Merci.
4 Q. Professeur, j'en arrive à la fin de mes questions. J'indique que nous
5 ne disposons pas de l'original de l'article. Je ne vous ennuierais plus
6 avec cela à moins que nous devions y revenir. Je parle de l'article dont
7 nous avons parlé au début de la matinée. Puisque nous en sommes réglés des
8 problèmes de détail, je vous pose la question suivante : Le problème pour
9 la Serbie était qu'il y avait des Serbes qui habitaient dans d'autres
10 états, n'est-ce pas ? En Croatie et en Bosnie.
11 R. Oui. Le problème résidait dans le fait que les Serbes, contrairement à
12 d'autres peuples, ont souvent fui face aux conquérants. Ils sont allés
13 vivre dans d'autres territoires. C'est la raison pour laquelle il était si
14 difficile de créer un état. Les Serbes qui souhaitaient disposer d'une
15 Yougoslavie, le souhaitaient parce que cela leur permettait de vivre au
16 côté de leurs frères. C'est la raison pour laquelle la Yougoslavie avait
17 une telle importance à leurs yeux. Cela leur permettait de vivre dans le
18 même pays, de rester les uns aux côtés des autres, comme des frères.
19 Q. La Slovénie étant parti et une partie de la Croatie ayant obtenu
20 l'indépendance, la partie de la Croatie pour laquelle la Serbie a autorisé
21 ce fait, le reste des Serbes aurait pu demeurer dans un territoire intégré
22 qui aurait pu s'appeler Yougoslavie ou porter un autre nom. C'était la
23 seule façon pour les Serbes de continuer à vivre dans une seule entité.
24 R. C'est exact. C'est la raison pour laquelle on pensait qu'une fois que
25 les forces de maintien de la paix, les forces des Nations Unies seraient
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1 parties, dans la Krajina serbe les gens pourraient participer à un
2 référendum pour exprimer leur opposition et dire où ils souhaitaient
3 continuer à vivre. Dans ces conditions, un certain nombre de Serbes
4 auraient continué à vivre en Croatie, et les autres auraient vécu en
5 Yougoslavie. Personne ne savait ce qui allait se passer avec la Bosnie et
6 la Macédoine à l'époque parce que nous parlons de 1991.
7 Q. Tout cela a déjà été présenté abondamment aux Juges de cette Chambre.
8 Cela dit, pour mettre un point final à cette question, le plan général,
9 pour employer un mot neutre, et l'intention générale, c'était d'établir une
10 relation entre les territoires occupés par les Serbes, la Serbie en tant
11 que telle, de façon à ce que l'ensemble constitue un territoire continu,
12 n'est-ce pas ?
13 R. Si la population était favorable à une vie en Serbie, et si le problème
14 des différents corridors était réglé, parce que la difficulté à disposer
15 d'un territoire intégré, c'était que la population était mixte dans
16 certaines régions. Il y avait des Croates en Bosnie, par exemple. Il y
17 avait des Musulmans en Bosnie également. Nous ne savions pas comment la
18 Bosnie-Herzégovine allait voter, si les votes seraient favorables à une
19 poursuite de la vie en Yougoslavie ou si les votes seraient favorables à
20 une scission.
21 Q. J'aimerais que nous nous penchions sur votre interview par la BBC, à
22 l'extrait où vous présentez vos positions à la fin de la conférence de La
23 Haye.
24 M. NICE : [interprétation] Que l'on place cet extrait sur le
25 rétroprojecteur, et qu'on en remette des exemplaires aux Juges.
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1 Q. Nous sommes à la date du 6 novembre 1991, époque où on s'intéressait
2 aux cartes, et cetera.
3 M. NICE : [interprétation] Le bas de la page, je vous prie, Monsieur
4 l'Huissier.
5 Q. "Voilà ce qui a été dit à la conférence de presse aujourd'hui par le Dr
6 Mihailo Markovic, vice-président du comité central du Parti socialiste de
7 Serbie, parti dirigeant de Milosevic. Dans une explication des positions
8 adoptées aujourd'hui par le comité central du Parti socialiste de Serbie,
9 au cours d'une séance qui a duré plusieurs heures, Markovic a déclaré que
10 le parti avait discuté des trois points suivants comme étant le minimum
11 accepté par la Serbie aux négociations.
12 "Premièrement, la Serbie peut accepter que les régions existantes de
13 Krajina serbe en Croatie soient placées sous tutelle internationale, que
14 l'armée yougoslave se retire de la région une fois que les forces
15 internationales s'y seront installées, et que la population soit autorisée
16 à décider dans quel était elles souhaitent vivre, à l'issu d'un référendum
17 contrôlé par des représentants internationaux.
18 "Deuxièmement, le Parti socialiste de Serbie insiste sur le fait que la
19 population qui le souhaite doit pouvoir continuer à vivre dans un état
20 yougoslave commun, et que cet état soit autorisé à continuer à exister.
21 "Troisièmement, le Parti socialiste de Serbie ne peut accepter que les
22 minorités nationales telles que les Albanais et les Hongrois, jouissent des
23 mêmes droits au sein de la communauté future que les droits accordés au
24 peuple serbe de Croatie, parce que ces derniers ne sont pas une minorité
25 nationale. Les minorités nationales ne se voient garanties que les droits
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1 dont jouissent les minorités dans les autres pays européens."
2 De cette façon, vous-même et ceux qui travaillaient avec vous établissiez
3 une distinction entre les droits octroyés aux Albanais du Kosovo qui, en
4 dépit de leur majorité numérique, ne devaient jamais pouvoir accéder à
5 l'indépendance, et les droits des Serbes qui devaient être autorisés à se
6 rattacher à la Serbie au cas où la région où ils résidaient se détachait de
7 la Yougoslavie, n'est-ce pas ?
8 R. Il y avait une distinction entre les Serbes et les Albanais. Cette
9 distinction existait entre les minorités et peuples constitutifs. Les
10 Albanais avaient déjà leur propre pays, ils avaient leur état d'Albanie. En
11 Yougoslavie, ils constituaient une minorité. Alors que les Serbes de
12 Yougoslavie étaient dans un état qui était le leur en tant que peuple
13 constitutif. Comme je l'ai dit il y a quelques instants, cette erreur date
14 de l'époque de Tito, le fait que les deux nations constitutives ne puissent
15 pas jouir des mêmes droits que les minorités. Aujourd'hui, si les Serbes
16 devaient choisir de vivre en Serbie, et s'il était décidé de créer un
17 territoire unifié, leurs droits seraient plus importants en tant que
18 nations constitutives que les droits octroyés aux minorités nationales.
19 Nous avons déjà parlé de cela. Nous avons énuméré ces droits. Car les
20 peuples constitutifs et leurs voisins font partie d'un tout, ils font
21 partie d'une même entité, autrement dit, d'une nation. Ce sont des peuples
22 qui constituent la nation d'un état particulier.
23 Q. J'aimerais maintenant que nous examinions les programmes du Parti
24 socialiste de Serbie dont nous avons déjà parlé hier. Ceci se trouve en
25 partie dans la pièce à conviction 469, intercalaire 3, le programme décidé
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1 le 16 juillet 1990. J'aimerais que le texte soit placé sur le
2 rétroprojecteur pour gagner du temps. Je vais en faire lecture.
3 La philosophie politique qui sous-tend le mémorandum et les idées du Parti
4 socialiste de Serbie de l'accusé peuvent être constatées ici.
5 L'extrait du haut d'abord, surligné en rouge. Un peu plus bas, je vous
6 prie, Monsieur l'Huissier. Je cite :
7 "Diaspora serbe.
8 "Le Parti socialiste de Serbie vérifiera régulièrement les conditions de
9 vie et de développement des Serbes qui habitent dans les autres républiques
10 et à l'étranger, et entretiendra des relations étroites avec leurs
11 organisations politiques culturelles et autres, convaincu qu'il est tout à
12 fait naturel pour d'autres nations de maintenir de telles relations avec
13 leurs concitoyens résidant en Serbie. Il fournira une aide matérielle et
14 morale à ces Serbes résidant dans d'autres pays, il les aidera à améliorer
15 leurs conditions de vie, à défendre leur identité nationale et leurs
16 traditions culturelles et veillera à leur développement culturel intensif."
17 En bas de page, maintenant, je cite :
18 "La nouvelle constitution yougoslave devrait permettre la création de
19 provinces autonomes en Yougoslavie sur la base de la volonté exprimée par
20 la population et de ces spécificités nationales, historiques, culturelles,
21 et autres."
22 Ceci s'applique, n'est-ce pas, aux Serbes de Croatie et de Bosnie, aux
23 provinces autonomes ? C'est bien cela l'intention du texte ?
24 R. L'intention du texte consiste à faire en sorte qu'un état original soit
25 capable de maintenir des liens culturels et autres avec la portion de ce
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1 peuple qui est séparée d'elle et vit ailleurs, comme il était possible pour
2 l'état d'Albanie, par exemple, d'envoyer ses professeurs et d'autres
3 représentants au Kosovo dans le domaine culturel pour maintenir ses
4 traditions culturelles albanaises au Kosovo dans les années 1970 et 1980,
5 et cela n'était pas possible pour les Serbes de Croatie, par exemple. Ceci
6 était destiné à faciliter la chose, et à permettre à la mère patrie, ou en
7 tout cas, au pays d'origine de maintenir des liens avec cette partie de sa
8 population résidant ailleurs.
9 Q. Les provinces autonomes de Yougoslavie, est-ce que l'intention, ici,
10 était de justifier la création de territoires serbes en Croatie et en
11 Bosnie ? Est-ce que vous avez rédigé, d'ailleurs, ce texte ?
12 R. Que voulez-vous dire par territoires croates en Croatie ? Qu'entendez-
13 vous par là ?
14 Q. Territoires serbes en Croatie, c'est cela que je voulais dire.
15 R. Oui. C'est de cela qu'il est question, du fait que les Serbes de
16 Croatie qui vivaient dans la région qui constitue la Lika d'aujourd'hui, la
17 Lika, la Banija et Kordun, dans cette région-là, y habitaient depuis de
18 nombreuses années. Historiquement, ils constituaient une Krajina distincte
19 qui avait des droits particuliers sous l'Autriche-Hongrie, droits qu'ils
20 leur permettaient d'échapper au contrôle des Croates. Ces droits ont
21 ensuite été abolis, et ils souhaitaient les réinstaurer. Ils souhaitaient
22 retrouver ces droits pour les Serbes qui vivaient dans l'état de Croatie,
23 en effet.
24 Q. Par le biais de votre Parti socialiste de Serbie, vous souhaitiez
25 modifier les droits établis par la constitution de 1974 en Croatie, en
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1 particulier pour les Serbes de la Croatie. C'était bien votre intention ?
2 R. Oui. Les Serbes de Croatie n'avaient aucuns droits, et ils étaient
3 censés retrouver ces droits.
4 M. NICE : [interprétation] Page suivante, Monsieur l'Huissier.
5 Q. Professeur, êtes-vous l'auteur de ce texte ? Est-ce que c'est vous qui
6 l'avez rédigé ? Est-ce que c'est vous qui avez écrit cela ?
7 R. Les fondements du programme, oui. J'ai écrit le projet de texte
8 initial, ensuite, il y a eu des débats, et le texte a été accepté, corrigé,
9 mais le projet de texte initial, j'en ai été l'auteur, effectivement.
10 Q. Nous voyons un autre passage surligné où il est question du fait que le
11 Kosovo doit faire partie de la Serbie, je cite : "Le Parti socialiste
12 déploiera des efforts déterminés en vu d'empêcher les Serbes et les
13 Monténégrins de quitter la province et de garantir leur retour dans la
14 province tout en autorisant les citoyens qui souhaitent partir à partir
15 pour travailler au Kosovo et Methohija. Nous ferons de notre mieux pour
16 dire toute la vérité au sujet du Kosovo et de la Metohija au monde, pour
17 leur parler des causes et des graves conséquences des actes commis par les
18 chauvinistes albanais et les irrédentistes albanais."
19 Ici, nous voyons l'expression de l'intension d'abroger les changements
20 démographiques et de repeupler le Kosovo, n'est-ce pas, repeupler le Kosovo
21 avec des Serbes ?
22 R. Non. Soyons très précis. Les Albanais du Kosovo avaient un taux de
23 développement démographique très important, et on ne pouvait pas, bien sûr,
24 les empêcher d'assurer ainsi l'augmentation de la population. Mais ce qu'on
25 souhaitait, c'était veiller à ce que les personnes expulsées du Kosovo
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1 puissent avoir le droit de retourner à leurs domiciles et de rentrer dans
2 leurs maisons.
3 S'agissant du développement démographique, le taux de natalité était si
4 élevé que le taux de natalité des Albanais n'était comparable avec le taux
5 de natalité nulle part ailleurs, et sûrement pas en Serbie ou dans d'autres
6 communautés ethniques.
7 Q. Ceci précède la conclusion de la Conférence de La Haye. Si nous lisons
8 le passage du document de 1992, pièce à conviction 469, intercalaire 4,
9 nous y trouvons une description tout à fait claire de l'ambition de votre
10 parti qui est surligné en rouge. Je cite :
11 "L'option offerte à la Yougoslavie repose sur plusieurs fondements. Elle
12 rend possible la création d'une communauté avec la nation monténégrine. En
13 maintenant l'existence de la Yougoslavie, la nation serbe préserve sa mère
14 patrie, ce qui est une garantie fondamentale de la protection des autres
15 parties de la nation serbe. Elle autorise une préoccupation légitime de la
16 république fédérale yougoslave qui devrait être rejointe à l'avenir par la
17 Krajina et la république serbe de Bosnie-Herzégovine."
18 Je m'arrête ici. Cette phrase dit très clairement ce que vous vous avez
19 indiqué il y a quelques instants, à savoir que, très manifestement, il
20 existait l'intention que les régions contiguës rejoignent le territoire
21 serbe qui serait détaché de la Bosnie et de la Croatie, n'est-ce pas ?
22 R. Non.
23 Q. Bien, alors qu'est-ce que --
24 R. Ceci n'est pas exact, c'est contraire à la vérité.
25 Q. Que veut dire cette phrase ?
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1 R. Ceci est inexact. Le problème ici est le suivant : tous les êtres
2 humains ont des droits fondamentaux, et l'un des droits humains
3 fondamentaux consiste à jouir d'une liberté de circulation, d'une liberté
4 de vivre là où on veut vivre et d'une liberté de pratiquer des droits
5 culturels et des libertés culturelles. Voilà de quoi il est question ici.
6 Le fait que les territoires peuplés par les Serbes étaient peuplés
7 majoritairement par les Serbes, devaient être des états dans lesquels les
8 Serbes pouvaient jouir du droit à habiter là où ils voulaient comme les
9 Croates l'avaient fait en optant pour une existence séparée de la
10 Yougoslavie. Les Slovènes, eux-mêmes, avaient déclaré vouloir vivre dans un
11 état distinct. C'est très simple, il s'agissait d'assurer aux Serbes les
12 mêmes droits que ceux dont jouissaient ces deux peuples. Aucune intention
13 particulière s'agissant des Serbes ici.
14 Q. Pardonnez-moi. Mais la phrase que nous avons lue porte sur les Serbes
15 qui vivent en dehors de la Serbie et il est question de créer
16 institutionnellement la possibilité pour la république fédérale yougoslave
17 d'être rejointe.
18 R. Je ne vois pas cela.
19 Q. C'est sur l'écran.
20 Je n'en ai pas d'autres exemplaires, alors il serait peut-être bon de
21 placer le texte sur le rétroprojecteur.
22 R. Ce n'est pas ce que je vois. J'ai du mal à lire, c'est très flou.
23 Q. Très bien. Très bien, désolé.
24 R. Surligné en rouge, je ne vois pas ce passage.
25 Q. Un autre exemplaire va vous être remis.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, c'est vous qui êtes
2 responsable du texte surligné.
3 M. NICE : [interprétation] Je le crains, en effet.
4 Q. La version que je vais présenter est une version serbe, car je ne
5 souhaite pas courir le risque d'une erreur de traduction. Vous avez le
6 paragraphe qui commence comme suit : "L'alternative pour la Yougoslavie
7 est," et un peu plus bas, on peut lire : "Une possibilité pour la
8 République fédérale de Yougoslavie d'être rattachée à l'avenir à la Krajina
9 et à la République Serbe de Bosnie-Herzégovine." C'est bien ce qu'il est
10 écrit ici, n'est-ce pas ?
11 R. Oui. Partant de l'autodétermination des peuples, étant donnée que tous
12 les peuples se doivent d'être égaux en droit, et partant du droit à
13 l'autodétermination des peuples où les Slovènes et les Croates, les
14 Musulmans de Bosnie, les Macédoniens ont décidé de faire sécession vis-à-
15 vis de la Yougoslavie, le peuple serbe sur le territoire où il est
16 majoritaire peut décider de rester, du droit de rester dans la Yougoslavie.
17 On ne peut avoir un droit à la sécession sans avoir le droit des autres de
18 rester dans un état qui leur est commun.
19 Q. Professeur, vous avez dit hier -- et je souhaite maintenant aborder un
20 sujet complètement différent. Vous avez dit hier qu'il n'y avait pas eu
21 d'expulsion de gens de Serbie. Est-ce à proprement parler exact ? Peut-être
22 que vous souhaiteriez réfléchir un petit peu à ce qui s'est passé en
23 Vojvodine ?
24 R. C'est absolument exact. La structure ethnique des populations est
25 restée rien qu'en Serbie, sans modification aucune. En Vojvodine, vous avez
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1 toujours les populations qui y vivaient auparavant, à savoir, les Hongrois,
2 les Roumains, les Slovaques, les Croates. Il y a eu des cas où des
3 individus croates et des individus serbes aient procédé à un échange de
4 maisons. C'est la seule chose qui s'est produite. Ce sont des individus qui
5 ont échangé leurs maisons. Les uns sont partis vivre là-bas, les autres
6 sont venus vivre chez nous. Mais la structure ethnique de la Vojvodine et
7 de la Serbie toute entière a été maintenue en place. Personne n'a été
8 expulsé, je vous l'affirme catégoriquement.
9 Q. De C47 et C48, nous avons eu certains éléments de preuve présentés sur
10 ce qui s'est passé à Hrtkovci, faisant l'objet d'un rapport officiel et
11 géré par le fonds de droit humanitaire. Est-ce que vous êtes en train de
12 nous dire que vous n'avez aucune connaissance de mouvements de la
13 population obligatoire des non-Serbes de la Vojvodine ?
14 R. Il n'y a eu aucun départ forcé de non-Serbes de la Vojvodine. Je vous
15 ai déjà dit que certaines personnes, y compris la localité de Hrtkovci, ont
16 procédé à des échanges de maisons avec les Serbes qui vivaient en Croatie
17 et ceux-ci ont pris leurs maisons. Le fait est que seulement à Hrtkovci, en
18 effet, il y a eu un incident de la part du président de l'époque du Parti
19 radical serbe qui avait proféré des menaces. Mais c'était un groupe
20 d'opposition mineur, et ils n'avaient pas l'autorité de l'état derrière
21 eux. L'autorité de l'état n'a jamais chassé personne, ni de Hrtkovci, ni
22 d'autres parties de la Vojvodine, non plus. On peut étudier la chose et
23 déterminer tout ce qui s'est passé, notamment, pour ce qui est du cas de
24 Hrtkovci. Ce que je vous affirme, c'est qu'il n'y a eu que des échanges
25 individuels de maisons, et cela n'a même pas été organisé.
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1 Q. Pardonnez-moi un instant. Je sais que vous êtes là pour aider les
2 Juges. Avez-vous été là, étiez-vous présent, avez-vous surveillé cet
3 échange de maisons ? Est-ce que vous vous reposez simplement sur votre
4 conviction que de telles choses n'ont pas existé. Nous avons entendu cela
5 lors de différents témoignages ?
6 R. Je n'ai jamais été à Hrtkovci et je l'affirme par ouï-dire. Tout ce que
7 j'ai oui dire a été de cette nature. Je changerai d'avis si l'on me prouve
8 qu'il en a été autrement. Mais, on pourra ne parler que de Hrtkovci. Cela
9 n'a pas été une politique conduite pour ce qui est de la Vojvodine toute
10 entière ou de la Serbie toute entière. Vous ne parlez que Hrtkovci. Il y a
11 Seselj qui est allé, qui a menacé les Croates. C'est un incident qui a été
12 d'ailleurs condamné par les autorités de la Serbie.
13 Q. Vous aviez connaissance des menaces qui ont été proférées ?
14 R. Cela, il y en a eu, je sais. Je sais aussi que l'état n'a rien fait
15 contre les Croates, au contraire.
16 Q. Je ne m'en tiens pas seulement à Hrtkovci, mais Golubvci également.
17 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la seule question
18 que je vais encore poser au témoin, et là encore, deux questions portant
19 sur le numéro des pièces, extraits de la BBC je crois. On n'a pas reçu de
20 cote encore ?
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 787.
23 M. NICE : [interprétation] Nous souhaitons produire une séquence ou une
24 série de mémorandums à moins que ceci n'ait déjà été versé au dossier. Nous
25 sommes en mesure de le faire à ce stade.
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1 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
2 M. NICE : [interprétation] Je vais peut-être reprendre, si vous voulez
3 bien. Je vais vous donner les numéros des pièces correspondant à ces
4 mémorandums, 446.28, qui est celui que nous avons évoqué un peu plus tôt en
5 relation avec le prêtre Mikic.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela n'a rien à voir avec ce témoin-ci. Ni lui,
9 ni quelqu'un d'autre ne saurait dire, d'ailleurs, lui a dit qu'il n'a
10 aucune idée de la publication d'un mémorandum quelconque par un prêtre.
11 Cela aurait été repris par un journal, mais cela n'a rien à voir avec ce
12 témoin-ci.
13 Je vous ai donné le texte du mémorandum en tant qu'éléments de preuve tel
14 que publié. Je crois que cela est tout à fait suffisant. Le témoin a dit
15 qu'il n'avait aucunement entendu parler de l'autre, comme je n'ai pas
16 entendu parler de ce prêtre, non plus.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez peut-être raison, Monsieur
18 Milosevic, mais la manière dont ceci doit être rattaché en revient à la
19 Chambre.
20 M. NICE : [interprétation] Maintenant, nous avons celui qui a été --
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense ce que vous êtes en train de
22 faire, Monsieur Nice, c'est de répondre à la question posée à propos des
23 numéros de cote.
24 M. NICE : [interprétation] Oui.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Différentes versions de ce mémorandum
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1 ont été présentées. Il s'agit vraiment d'une question purement technique.
2 M. NICE : [interprétation] Oui, absolument d'un exercice purement
3 technique. Je crois que nous avons, jusqu'à présent, présenté le 446.28.
4 Nous n'avons pas encore la version qui a été présentée, le numéro 350, qui
5 contient les réponses et les critiques. Il y a une autre version que j'ai
6 montrée au témoin un peu plus tôt aujourd'hui, datée du 26 septembre 1986,
7 envoyée à un ministre, et il dit obtenu suite à ce document qui a fait
8 l'objet d'une fuite. A moins que quelqu'un ne souhaite produire ce
9 document, lorsque quelqu'un le souhaite, nous pouvons le produire.
10 J'ai affirmé au témoin, et je ne souhaitais pas consacrer trop de
11 temps à l'acceptation de cela, qu'il y avait un nombre limité de
12 changements apportés à la version 1986 par rapport à la version 1995. Je
13 suis en mesure de fournir une liste de ces variantes, et si je suis en
14 mesure de les fournir, et si les conseils commis d'office et l'accusé
15 pourraient en vérifier l'exactitude et, à savoir là, on pourrait
16 effectivement établir les changements historiques qui ont été apportés.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] 446.28, s'agit-il de la version
18 de 1985 ?
19 M. NICE : [interprétation] Pour autant que je sache, c'est le 1986.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est celui à ce moment-là que l'on
21 pourrait comparer avec la version 1995.
22 M. NICE : [interprétation] Oui, c'est exact. Hormis cela, je n'ai pas
23 d'autres questions à poser à ce témoin.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Professeur, je souhaite poser une
25 question au témoin.
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1 Questions de la Cour :
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin,
3 M. Nice vous a posé un certain nombre de questions à propos du mémorandum
4 qui visait à montrer que le contenu de ce mémorandum, et surtout la langue
5 utilisée, aurait pu influencer les gens, en particulier en Serbie. Ce que
6 je souhaite savoir est ce qui suit : De façon générale, quel est le type
7 d'influence que d'autres mémorandums, sans tenir compte de celui-ci, que
8 les autres mémorandums préparés par les académiciens pourraient avoir en
9 Serbie ? Lorsque vous rédigez un mémorandum, lorsque vous rédigez des
10 documents, que vous distribuez ce document, quelle est l'influence que peut
11 avoir ce type de document ?
12 R. Il s'agit du dernier document publié dans son intégralité par
13 l'Académie serbe des arts et des sciences. L'académie a été divisée par la
14 suite, et il n'a jamais été possible de préparer un autre ensemble de
15 textes. Il y a un certain nombre d'académiciens qui ont exprimés leurs
16 points de vue. Ensuite, ceci était contredit par un autre groupe. Donc,
17 c'était la dernière fois que cette académie constituait un corpus ou une
18 institution regroupant des intellectuels qui étaient unifiés.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je comprends fort bien, mais
20 avant ce mémorandum, l'académie a-t-elle publié d'autres ouvrages, d'autres
21 documents sur d'autres sujets ?
22 R. Non, ce n'était pas habituel. Je ne me souviens pas qu'un document
23 semblable fût publié. Mais à ce moment-là, nous sentions que la dépression
24 était tellement forte, que les choses allaient de mal en pis à Yougoslavie,
25 et donc l'heure était venue pour les intellectuels de s'exprimer et de
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1 faire entendre leurs critiques.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je comprends.
3 R. Nous avons évoqué ceci la dernière fois, nous avons parlé des Slovènes
4 qui, constatant ce qui se passait en Yougoslavie, ont décidé de faire
5 sécession. C'était une des raisons derrière cela.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Je souhaite savoir
7 quel âge vous avez.
8 R. J'ai 82 ans.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur
10 Professeur.
11 Monsieur Milosevic, c'est à vous maintenant de poser des questions
12 supplémentaires. Vous n'êtes absolument pas tenu par une obligation à cet
13 égard, et parfois il est mieux de laisser les choses en état.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense, Monsieur Robinson, que dans ce cas-
15 ci, vous avez tout à fait raison, parce que le témoin n'a en aucune façon
16 été remise en question à l'occasion de son témoignage par le contre-
17 interrogatoire effectué de la part de M. Nice. Je n'ai pas à le réhabilité
18 en quoi que ce soit, étant donné qu'on a réussi à contester aucun point de
19 ce qu'il a soulevé et présenté dans son témoignage, ce qui fait que je
20 n'aurais pas de questions complémentaires à lui poser.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur
22 Milosevic.
23 Je vous remercie, Monsieur le Professeur, pour le témoignage que vous avez
24 bien voulu faire. Vous pouvez maintenant disposer.
25 [Le témoin se retire]
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je tiens
3 simplement à vous rappeler que nous reprendrons lundi après-midi à 14
4 heures 15, et vous avez l'obligation, comme il se doit chaque semaine, de
5 produire votre liste d'ici jeudi. Je suppose que vous allez faire cela
6 demain.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je l'ai déjà fait.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tant mieux.
9 Nous suspendons l'audience, et reprendrons lundi prochain à
10 14 heures 15.
11 --- L'audience est levée à 13 heures 22 et reprendra le lundi 22
12 novembre 2004, à 14 heures 15.
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