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1 Le mercredi 4 mai 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
6 M. NICE : [interprétation] Avant que l'accusé ne cite le témoin suivant,
7 permettez-moi de présenter quelques arguments en matière de procédure. Ceci
8 est stimulé par la lecture de l'écriture déposée par les associés
9 juridiques de l'accusé à propos de Henning Hensch, un témoin qu'il propose.
10 En plus du résumé 65 ter qui explique à peine pourquoi il est nécessaire
11 d'appeler ce témoin et les arguments supplémentaires apportés à ce résumé
12 au 7(B), où il est dit qu'il va présenter des éléments intéressants pour ce
13 qui est des volets Bosnie et Croatie de l'acte d'accusation, il n'y a pas
14 d'autres renseignements.
15 Nous l'avons dit clairement, nous n'avons pas d'avis particuliers
16 quant à la façon dont l'accusé consacre les 150 journées qui lui ont été
17 accordées. Nous laissons, bien sûr, le soin aux Juges de traiter de cette
18 requête. Cependant, nos inquiétudes proviennent du temps qui passe et de
19 l'intérêt tout à fait secondaire - c'est le moins qu'on puisse dire - que
20 représente ce témoin. Il serait peut-être utile de faire la chose suivante
21 : est-ce que la Chambre, aujourd'hui ou sous peu, pourrait inviter l'accusé
22 à préciser, s'agissant des trois volets de l'acte d'accusation, quels sont
23 les témoins qui, à son avis, sont absolument essentiels.
24 Je ne vais pas m'empêcher de remarquer que ce témoin qui va bientôt
25 commencer sa déposition devrait prendre cinq heures en interrogatoire
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1 principal, le dernier en a pris 12, et nous ne sommes toujours pas sortis
2 du Kosovo. Il y a des témoins que l'accusé compte citer comme manifestement
3 essentiels et qui vont nécessiter beaucoup de temps. Il y aura peut-être
4 des témoins internationaux dont il a demandé la comparution et qui vont,
5 eux aussi, nécessiter beaucoup de temps. Pourquoi sommes-nous inquiets ?
6 C'est parce que si nous avons des témoins d'intérêt secondaire,
7 périphériques comme celui-ci et s'ils sont appelés dans une partie ultime
8 du temps consacré aux témoins, à ce moment-là, il va peut-être vouloir
9 aussi appeler à la barre des témoins importants essentiels pour lui et la
10 Chambre aura peut-être du mal à dire non à une demande de prolongation de
11 temps.
12 Nous connaissions nos contraintes en matière de temps, nous avons
13 informé la Chambre de ce que nous considérions comme étant les témoins
14 obligatoires. Nous avons révisé cette liste; au fil du temps, nous avions
15 la catégorie A, priorité numéro 1 et nous avons déplacé des témoins, les
16 amis de la Chambre, l'accusé et les Juges étaient informés parce que nous
17 avions, bien sûr, l'intention de respecter l'ordonnance que vous aviez
18 rendue.
19 Est-ce qu'il ne serait pas utile, tôt ou tard, d'obtenir une telle liste de
20 la part de l'accusé précisant les témoins qu'il considère comme absolument
21 essentiels, car peut-être vont-ils nécessiter le reste du temps qui lui est
22 accordé.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons étudier la question.
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1 Monsieur Milosevic, est-ce que vous voudriez répondre ?
2 Si ce n'est pas le cas, nous allons faire venir le témoin suivant.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais être bref. Je n'ai pas sous les yeux
4 les écritures auxquelles s'est référé M. Nice. Mais je sais que Henning
5 Hensch, un policier allemand qui a fait partie de la Mission de
6 vérification au Kosovo et qui a fait partie de missions différentes en
7 Bosnie et en Croatie, ne signifie pas qu'il va témoigner de cela. C'est un
8 témoin qui est prévu pour un témoignage assez bref. Il a fait partie de la
9 Mission de vérification au Kosovo et vous avez eu l'occasion d'entendre
10 Hartwig qui, lui, a été chef des observateurs européens. Ici, nous avons un
11 membre de la Mission de vérification, c'est également un allemand - mais
12 c'est une coïncidence pure et simple - j'ai estimé qu'il était utile de le
13 citer à comparaître.
14 S'agissant, maintenant, de la remarque faite par M. Nice, s'agissant des
15 témoins qui vont témoigner assez longtemps et cela est fait justement pour
16 gagner du temps, plutôt que d'en citer plusieurs de ces témoins pour
17 témoigner de choses qui nous concernent, j'en cite à comparaître moins,
18 mais qui témoigneront bien plus longtemps pour qu'on comprenne les
19 différents éléments.
20 Par exemple, ce témoin, à présent, est le chef du ministère de
21 l'Intérieur de Pec, qui couvre un certain nombre de municipalités. Je n'ai
22 pas le temps de citer sept chefs du ministère de l'Intérieur du Kosovo,
23 mais j'en cite un pour qu'on voie comment cela s'est passé au niveau d'un
24 secrétariat.
25 Le témoin suivant, le général Stevanovic, lui, va témoigner du
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1 Kosovo-Metohija tout entier. Ce qui fait qu'on prend un secteur pour ce qui
2 est du ministère de l'Intérieur, puis la totalité du ministère du Kosovo-
3 Metohija, pour ne pas perdre de temps à citer plusieurs témoins. C'est la
4 raison pour laquelle les témoins vont témoigner plus longtemps en
5 présentant un bon nombre de documents. Le tout est fait pour gagner du
6 temps, en effet.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Nous avons
8 été saisis de votre requête concernant le témoin Hensch, nous allons
9 l'examiner. Pour ce qui est du général Stevanovic, la Chambre constate
10 qu'il serait utile d'obtenir un complément d'information de votre part.
11 Dans votre résumé, en vertu du 65 ter, vous avez les références habituelles
12 aux connaissances personnelles qu'aurait ce témoin. Par exemple, les
13 parties de l'acte d'accusation dont va parler le témoin, ce serait utile de
14 le savoir. Vous prévoyez 12 heures, c'est beaucoup. Il serait utile d'avoir
15 une gestion plus rationnelle de la présentation des éléments de preuve. Il
16 faudrait pour cela davantage d'information.
17 Votre témoin suivant est le général Stevanovic -- excusez-moi, est Radovan
18 Paponjak.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin nous fasse sa
22 déclaration solennelle.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 LE TÉMOIN: RADOVAN PAPONJAK [Assermenté]
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1 [Le témoin répond par l'interprète]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir. Monsieur
5 Milosevic, vous pouvez commencer.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Robinson.
7 Interrogatoire principal par M. Milosevic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Colonel.
9 R. Bonjour, Monsieur le Président.
10 Q. Veuillez nous indiquer, très brièvement, vos dates de naissance, lieu
11 de naissance, quelles classes vous avez faites.
12 R. Je suis né le 1er mai 1948, à Rudo. J'ai fait mes classes primaires, une
13 école secondaire pour instituteurs à Foca et à Uzice; à Belgrade, une
14 faculté où on étudie la prévention et le comportement des personnes aux
15 fins d'une resocialisation de personnes dans un contexte social.
16 Q. Qu'avez-vous fait ?
17 R. J'ai travaillé au secrétariat de l'Intérieur de la République de
18 Serbie. J'ai été à Iloti [phon] et j'ai été chef du poste de police. J'ai
19 occupé des fonctions variées, j'ai eu des grades variés.
20 Q. Nous allons gagner du temps et passer outre tout ceci. Vous avez été
21 chef du secrétariat à l'Intérieur et vous avez eu un grade de colonel, à ce
22 poste-là ?
23 R. Oui, c'est exact.
24 Q. Nous allons immédiatement passer à vos activités professionnelles et au
25 témoignage qui se rapporte au Kosovo-Metohija. Je vous demande de nous
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1 indiquer, à cette fin, quelles ont été les tâches que vous avez réalisées
2 au sein du secrétariat à l'Intérieur à Pec, à compter de 1992, date à
3 laquelle vous avez été affecté à ce poste ?
4 R. J'ai été chef du département de la police chargé de la circulation
5 routière à Pec. Puis, de part l'organisation et le contrôle de la
6 circulation, il s'agissait, là, également, de tâches réalisées par la
7 police; il s'agissait de la sécurité en matière de circulation routière,
8 cela est également une tâche de la police routière. J'ai organisé les
9 tâches administratives, ce qui sous-entend les tâches relatives à
10 l'immatriculation des véhicules, délivrances des permis de conduire; puis,
11 il y avait les tâches administratives relatives à la surveillance et à
12 l'inspection des routes, formation des candidats à la circulation routière,
13 à savoir, passage des examens pour le permis de conduire et autres.
14 Q. Dans ces tâches, avez-vous été chargé de l'organisation de ces tâches-
15 là, s'agissant de la municipalité de Pec seule ou alors l'avez-vous fait
16 pour les municipalités autres ?
17 R. Mon siège se trouvait à Pec, mais les compétences s'étiraient à Pec,
18 Djakovica, Decani, Istok et Klina.
19 Q. Le secrétariat à l'Intérieur de Pec a couvert, en plus de Pec,
20 Djakovica, Decani, Istok et Klina ?
21 R. C'est exact.
22 Q. Savez-vous nous parler de la structure des employés au secrétariat à
23 l'Intérieur de Pec ?
24 R. Si vous entendez par là la structure ethnique, je dirais que nous
25 avions, parmi les employés, des membres de groupes ethniques différents :
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1 des Serbes, des Albanais, des Musulmans, des Rom.
2 Q. Vous souvenez-vous des noms d'albanais ? Prenons, par exemple, ceux qui
3 ont exercé des fonctions de responsabilité au sein de ce secrétariat à
4 l'Intérieur de Pec.
5 R. L'adjoint du chef de la Sûreté de l'Etat, c'était un albanais, Dem
6 Mulaj. Il y avait plusieurs agents opérationnels au sein de la sécurité de
7 l'Etat. Le chef du département des transmissions au SUP de Pec, un
8 département très important, était Ahmetaj Skender, un albanais. Il y avait
9 plusieurs agents opérationnels dans la police judiciaire. Je me souviens de
10 Hamdi Ram, de Kelmendi Enver. Le commandant du département de police à
11 Kijevo était un albanais, Becir Gashi. L'adjoint du commandant de la
12 compagnie des sapeurs pompiers était Nikaj Barlo, un albanais. Il y avait
13 bon nombre de policiers --
14 Q. Cela suffit, s'agissant des exemples que vous avez avancés de mémoire.
15 Colonel Paponjak, je me propose à présent de vous donner lecture du
16 paragraphe 87. Il dit - je ne vais pas tout lire : "Fin 1991 et 1992, il y
17 a des milliers d'Albanais, de professeurs, de médecins, de policiers
18 albanais -- " Je souligne policier parce que je vais vous interroger au
19 sujet de policiers et employés de l'Etat
20 -- "qui ont été licenciés."
21 Alors, veuillez m'indiquer, je vous prie, si les Albanais ont été
22 licenciés de leurs postes de travail en raison de leur appartenance
23 ethnique. Je vous parle non pas de réponses de principe, mais je vous
24 demande de parler des policiers puisque vous avez travaillé là-bas.
25 R. Tout simplement, cela n'est pas exact. J'ai travaillé, j'ai été aussi
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1 président du conseil de discipline, conseil qui décidait de la cessation de
2 ce rapport de travail, pour ce qui est des policiers. L'appartenance
3 ethnique n'a jamais constitué une condition pour l'embauche; elle n'a pas
4 constitué, non plus, une condition pour le licenciement. Tout ceci se passe
5 suivant une procédure bien déterminée.
6 Q. Je comprends et j'espère que cela est notoirement connu. Mais soyons
7 concrets, vous avez dit que vous avez été président de ce conseil de
8 discipline chargé du licenciement des policiers, licenciement de leurs
9 postes de travail, s'ils ont enfreint leurs obligations et tâches. Pendant
10 combien de temps avez-vous effectué cette fonction ?
11 R. De tout temps où j'étais là-bas.
12 Q. Dans votre pratique, pouvez-vous nous dire combien d'Albanais ont été
13 licenciés suite à une décision adoptée par votre conseil disciplinaire ?
14 R. Aucun.
15 Q. Merci, Colonel. Veuillez nous indiquer quelle a été la structure
16 ethnique des employés dans les centres ?
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je clarifier les choses; combien
18 de temps avez-vous passé à Pec ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Après mon arrivée là-bas.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que vous aviez parlé de 1992
21 et je voulais être tout à fait au clair pour ce qui est des dates.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous donner la date exacte de
23 ma nomination aux fonctions de président du conseil de discipline. Mais
24 cela s'est fait rapidement après mon arrivée là-bas. La période électorale
25 est une période de quatre ans.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que cela s'est produit
2 après 1991 ou étiez-vous là-bas en 1991, déjà ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Après 1992.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Colonel, c'est là, la période où je vous ai demandé de nous énumérer
7 les Albanais qui ont occupé des fonctions importantes. Cela couvre la
8 période où vous avez été là bas, vous-même ?
9 R. Absolument; je ne les aurais pas connus, si ce n'était pas toujours la
10 même période.
11 Q. Bien. Vous nous avez parlé des centres techniques chargés de la
12 circulation routière et de la mission qui était la vôtre pour ce qui est
13 des cinq municipalités couvertes par vos soins. Quelle a été la structure
14 ethnique des employés dans ces différents centres ?
15 R. La structure ethnique était semblable à celle du SUP de Pec; il y avait
16 des Serbes, il y avait des Albanais, des Musulmans. Il va, sans dire, que
17 ces centres étaient au nombre de cinq. Trois d'entre eux étaient en
18 propriété sociale et mixte et deux se trouvaient en propriété privée. Le
19 propriétaire de l'un des centres techniques à Istok était un Serbe et sur
20 le territoire de la municipalité de Klina, c'était un Albanais Latif
21 Kryeziu. Je me souviens de son nom et prénom puisque je le connaissais en
22 personne. Il y avait des Albanais employés dans le centre en propriété
23 publique appelé Formula [phon] à Pec. C'était un Albanais qui y
24 travaillait, Biluci Fatmir.
25 Q. Mais y avait-il une discrimination quelconque des Albanais dans le
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1 secteur de la formation des candidats aux permis de conduire, dans toute
2 cette procédure dont vous aviez la charge ?
3 R. Non, non. S'agissant de ces centres de formation de conducteurs, ils
4 étaient au nombre de 18, dans mon secteur. Deux d'entre eux étaient en
5 propriété publique, l'un était en propriété mixte et 15 se trouvaient être
6 en propriété privée. Les propriétaires de bon nombre de ces centres étaient
7 des Albanais. D'autres propriétaires se trouvaient être des Serbes, des
8 Musulmans, des Rom. Les autorisations professionnelles, pour ce qui est du
9 fonctionnement de ces centres, ne se délivraient pas en suivant des
10 critères ethniques, mais suivant le fait d'avoir satisfait aux conditions
11 requises. Ceux qui avaient satisfait aux conditions requises pouvaient
12 ouvrir des centres, embaucher les gens comme ils l'entendaient. Ils
13 embauchaient des personnes qui répondaient aux critères de fonctionnement.
14 Mon travail était celui de surveiller, de veiller à la légalité du
15 fonctionnement, de savoir si tout un chacun se conformait à la loi.
16 Personne ne se mêlait de la politique des cadres, de l'appartenance
17 ethnique de ceux qui allaient être employés. Il suffisait de satisfaire aux
18 conditions et critères.
19 Q. Les instructeurs ?
20 R. Les instructeurs, c'étaient aussi des personnes qui avaient des
21 autorisations de former des conducteurs. Il y avait des Serbes, des
22 Albanais, des Rom. Enfin, je peux vous énumérer, de mémoire, certains
23 centres de formations de conducteurs qui étaient en propriété d'Albanais.
24 Par exemple, à Lloxha Loxhe, Qazim Shala était le propriétaire de ce
25 centre; à Marlboro, Faik Raci; à Orion, c'étaient les frères Haskaj. Le
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1 centre Vem, c'était la propriété de Lukaj Xhafer.
2 Q. Bon, vous n'avez pas à nous les citer tous.
3 R. Je peux pratiquement vous les citer tous puisque j'ai travaillé avec
4 eux.
5 Q. Merci, Colonel. Dites-nous s'il y a eu une discrimination à l'égard des
6 Albanais, pour ce qui est de la délivrance de cartes d'indenté ou la
7 solution de leurs requêtes présentées au ministère de l'Intérieur de Pec.
8 R. Non, il n'y a pas eu de discrimination du tout. Dans l'exercice de mes
9 fonctions, je me suis efforcé de faire en sorte que tous les citoyens
10 soient sur un pied d'égalité devant la loi. Je veillais à l'application des
11 dispositions jusqu'au bout. Tous ceux qui avaient satisfait à certains
12 critères se voyaient délivrés les documents ou les papiers qu'ils avaient
13 demandés. Ceux qui n'avaient pas satisfait aux critères ou aux conditions
14 ne pouvaient pas les obtenir, qu'ils soient Serbes ou Albanais, peu
15 importe.
16 Dans une phase ultérieure de mon intervention, l'organisation était
17 de nature à permettre aux citoyens de présenter leurs demandes au centre
18 chargé des contrôles techniques, sans pour autant venir au SUP pour que
19 leurs demandes soient étudiées. Ils présentaient leurs requêtes, ils
20 s'adressaient aux personnes qui en étaient chargés et ils recevaient en
21 retour le document demandé, par la suite.
22 En réfléchissant à la chose, je me souviens qu'il y a eu, parmi les
23 Serbes, des opinions disant que les Albanais étaient favorisés. L'un des
24 ces Serbes s'était même plaint au ministère de l'Intérieur de la République
25 de Serbie à Belgrade puisque c'était l'instance ayant compétence en appel.
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1 Dans sa plainte, il a indiqué que nous ne lui avions pas autorisé le
2 fonctionnement d'un centre de contrôle technique et que l'Albanais, Latif
3 Kryeziu, s'est vu autorisé la chose dès qu'il a présenté une requête. Bien
4 entendu, sa demande n'a pas été justifiée puisqu'il ne satisfaisait pas aux
5 critères requis. On a bien précisé quels sont les critères requis. On le
6 lui a donné sous forme écrite et Latif Kryeziu, lui, avait satisfait à tous
7 les critères et il s'est vu délivré une autorisation d'ouvrir un centre dès
8 qu'il a satisfait aux critères prévus.
9 Je n'ai connaissance d'aucun cas de discrimination et je n'ai pas eu,
10 non plus, de complaintes de la part des citoyens. A chaque guichet, il y
11 avait une information s'agissant des documents nécessaires, des documents
12 requis pour ce qui est de la procédure administrative dans tel ou tel cas,
13 et juste après, on indiquait quels étaient les délais dans lesquels la
14 demande devait être étudiée. On indiquait également à qui il fallait
15 s'adresser en personne ou par téléphone, ils pouvaient s'adresser à moi, il
16 y avait mon numéro de téléphone direct.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Paponjak.
18 Question suivante, je vous prie.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. De quelle manière décririez-vous et qualifieriez-vous la situation en
21 matière de sécurité au Kosovo-Metohija quand vous avez commencé à
22 travailler à Pec ?
23 R. Quand je suis allé travailler à Pec, la situation était relativement
24 calme. Je crois pouvoir dire que la situation était plus calme que dans
25 d'autres régions de la RSFY.
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1 Q. Aviez-vous des amis, ou des collègues albanais ? Parce que vous êtes
2 arrivé là pour occuper les fonctions de chef, est-ce que vous vous êtes
3 fait des amis parmi vos collègues albanais ?
4 R. J'ai constaté qu'il y avait des liens d'amitié, des liens familiaux
5 entre des familles serbes et des familles albanaises. Je me suis rapidement
6 fait moi-même des amis aussi, peut-être à cause de la nature de mon travail
7 qui était perçu de manière très positive par mes supérieurs, par les
8 autorités compétentes.
9 Je rencontrais très fréquemment les Albanais, je les fréquentais en
10 dehors du travail, j'allais manger, boire avec aussi bien les Serbes que
11 les Albanais, dans des établissements aussi bien albanais que serbes. A ce
12 jour, j'ai toujours gardé beaucoup d'amis parmi les Albanais, je leur parle
13 au téléphone, je les vois encore. Malheureusement, uniquement sur le
14 territoire de la Serbie et pas au Kosovo-Metohija parce que je ne suis plus
15 en mesure de me rendre sur ce territoire, comme c'est le cas d'ailleurs
16 pour de nombreux Serbes.
17 Q. Est-ce que quand vous vous rencontriez vous parliez uniquement travail
18 ou d'autres choses ?
19 R. Non, on abordait tous les sujets de conversation possibles, on parlait
20 de la vie. La situation était très problématique. C'était au moment du
21 démantèlement de la Yougoslavie. Il y avait des combats dans certaines
22 régions du pays. Cela pesait beaucoup sur les gens. Ils se demandaient
23 comment cela allait se traduire au Kosovo-Metohija, ce qui allait se
24 passer. C'était quelque chose auquel tout le monde pensait constamment
25 aussi bien les Serbes que les Albanais.
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1 Q. Que vous disaient ces personnes au sujet de la situation politique
2 quand vous en parliez avec elles ?
3 R. Les gens étaient inquiets. Certains qui étaient proches me disaient
4 que, selon eux, l'avenir ne paraissait pas très brillant. Ils me disaient
5 qu'il y avait des forces au Kosovo-Metohija qui avaient décidé que le
6 moment était venu d'arriver à certaines de leurs aspirations relatives à
7 l'indépendance du Kosovo. Ces gens me disaient que les Serbes
8 interprétaient mal la mise en place d'une grande Albanie. Ils m'ont dit que
9 l'idée c'était, d'abord, de créer une République du Kosovo et ensuite
10 d'annexer certaines régions du Monténégro, de la Macédoine, certaines
11 parties de ce qu'ils appelaient le Kosovo oriental, c'est-à-dire certaines
12 parties de la Serbie, de la partie méridionale de la Serbie et que ce n'est
13 que plus tard que cette entité, que cette république serait rattachée à
14 l'Albanie, que l'Albanie n'annexe pas le Kosovo pour eux. Le Kosovo c'était
15 le point central, le pivot.
16 Q. Merci, Colonel. Y avait-il des activités terroristes dans votre zone de
17 compétence dans la période précédent 1996 ?
18 R. Oui. Il y avait des actes terroristes, des activités terroristes avant
19 1996. Je crois que cela a commencé en 1995, peut-être même avant, mais je
20 me souviens, en tous cas, qu'en 1995 il y avait des activités terroristes.
21 Q. Pouvez-vous vous souvenir d'un incident en particulier ?
22 R. La raison pour laquelle je me souviens de l'année 1995, c'est que je me
23 souviens de Predrag Ivanovic, un policier. Cela s'est passé, me semble-t-
24 il, au début de l'année 1995, au cours du mois de mars je crois, il
25 rentrait chez lui, il revenait de travailler, et on lui a tiré dans le dos.
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1 Il a été touché à la colonne vertébrale ainsi qu'à la tête. Il a été très
2 grièvement blessé. Ses assaillants ont pris la fuite. Aujourd'hui, il est
3 handicapé, il est cloué dans une chaise roulante. Je le vois encore de
4 temps à autre.
5 Deux mois plus tard, en mai me semble-t-il, deux engins explosifs ont
6 explosé à Junik. Junik, c'était une localité qui accueillait des réfugiés
7 serbes et albanais.
8 Plus tard au cours de l'été, en août me semble-t-il, un poste de
9 police de Rznic près de Decani a été attaqué. Agim Hadrija et Ljubomir
10 Ristic ont tous deux été blessés.
11 Q. Fort bien, Colonel. Deux policiers ont été blessés, et d'après ce
12 que je vois, suivant leurs noms, il y avait un Albanais et un Serbe.
13 R. Oui.
14 Q. Il s'agissait d'attaques qui se sont produites sans aucune raison. Le
15 premier dont vous nous avez parlé rentrait chez lui, après son travail et
16 il a été abattu et le poste de police a été l'objet d'une attaque, des
17 bombes ont explosé dans un camp de réfugiés, et ceci n'était le résultat
18 d'aucune provocation. C'était des attaques sans aucun motif.
19 R. Oui, il s'agissait-là d'attaques extrêmement perfides, sans aucune
20 raison.
21 Q. Selon vous, est-ce que c'étaient les policiers ou les réfugiés qui
22 étaient l'objet de cette attaque ?
23 R. Un des volets des nos activités, c'est d'assurer la sécurité des biens
24 et des personnes. Il va de soi, c'est bien compréhensible que la première
25 cible ce soit les policiers. Dans le cas des réfugiés venant d'Albanie,
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1 l'objectif c'était de montrer à ces gens qu'ils n'étaient les bienvenus et
2 c'était d'empêcher des Serbes, d'autres Serbes de venir les rejoindre.
3 Q. Vous-mêmes et vos collègues, comment avez-vous évalué ces attaques ?
4 Avez-vous pu mettre en évidence des points communs entre ces attaques ?
5 R. Il était manifeste d'emblée que c'étaient des incidents qui sortaient
6 de l'ordinaire, sortaient des activités criminelles habituelles. Il n'y
7 avait pas eu de provocations directes, il n'y avait pas de motifs. Il
8 s'agissait d'attaques perfides et cela allait augmenter encore dans
9 l'avenir. C'était des attaques qui se déroulaient le plus souvent au moyen
10 d'explosifs en particulier dans la région de Pec il y a eu beaucoup de
11 lancers de grenades à main, des engins explosifs étaient placés à des
12 endroits pendant la nuit alors que les victimes ciblées ne se doutaient de
13 rien. Une autre caractéristique de ces attaques, de ces attentats, c'est
14 qu'ils présentaient toutes les caractéristiques d'activités organisées
15 visant des cibles précises.
16 Q. Vous avez mentionné toute une série d'incidents et je voudrais savoir
17 comment vous avez appris que ces incidents s'étaient produits. Est-ce que
18 vous avez appris qu'ils s'étaient produits immédiatement ou un peu plus
19 tard ?
20 R. Dans la grande majorité des cas, j'étais mis au courant immédiatement,
21 parce que dans la grande majorité des cas les cibles étaient des policiers.
22 Nous étions donc en état d'alerte d'une certaine manière. L'une de nos
23 missions consistait à assurer la sécurité de certains bâtiments, de
24 certaines installations contre une attaque plus généralisée.
25 Q. Si j'ai bien compris maintenant, vous étiez mis au courant
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1 immédiatement de tous les incidents.
2 Avez-vous connaissance d'attentats terroristes à Pec et dans la zone
3 de Pec en 1996 ?
4 R. Oui, je pense. Par exemple, au mois de février 1996, au tout début de
5 l'année, il y a eu un attentat qui a visé un bâtiment où étaient installés
6 des réfugiés qui venaient de la République de Serbie de la Krajina. Cet
7 attentat a eu lieu dans la soirée, et là aussi, il a mis en jeu un engin
8 explosif. Nous nous sommes mis en état d'alerte.
9 Nous avons appris qu'il y avait eu un attentat au même moment à
10 Pristina, ainsi qu'à Kosovska Mitrovica, des attentats qui avaient visé des
11 bâtiments qui étaient utilisés à des fins similaires. C'est-à-dire des
12 bâtiments où étaient hébergés des réfugiés. Si bien que par la suite, nous
13 avons dû assurer la sécurité de tous les bâtiments qui pouvaient
14 éventuellement faire l'objet d'un attentat.
15 Q. Merci, Colonel. Avez-vous connaissance de l'attentat qui a visé le café
16 Cakor à Decani ?
17 R. Ceci s'est produit au cours du printemps 1996, au cours du mois
18 d'avril.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, les éléments qui
20 nous sont donnés en ce moment sont en relation avec quelle partie de l'acte
21 d'accusation, s'il vous plaît ?
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ceci est pertinent parce que
23 ceci a trait à la situation de manière générale au Kosovo-Metohija, à
24 l'évolution des activités terroristes et des crimes visant aussi bien la
25 population civile que les policiers. Ceci est en rapport avec tout ce qui a
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1 suivi. Ceci nous permet de brosser le tableau de la situation au Kosovo.
2 Nous parlons ici d'un secrétariat de l'Intérieur qui était compétent pour
3 cinq municipalités. Ces éléments présentent donc une pertinence en rapport
4 avec tous les événements concernés.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La pertinence s'il y en a une, est
6 une pertinence de nature extrêmement générale. Vous n'avez pas donné de
7 paragraphes de l'acte de l'accusation qui soient en rapport avec ce que le
8 témoin est en train de nous dire. Nous dire simplement qu'il s'agit de
9 dresser le contexte ne suffit pas. Si vous ne parvenez pas à nous donner de
10 paragraphes précis de l'acte de l'accusation qui sont en rapport avec ce
11 que le témoin est en train de dire.
12 Je ne vais pas vous permettre de poser des questions supplémentaires
13 de ce type, parce que nous avons eu suffisamment d'éléments de contexte au
14 sujet du Kosovo. Je voudrais donc que vous fassiez en sorte que ce témoin
15 nous parle d'éléments qui sont en relation directe avec les charges qui
16 pèsent contre vous.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, dans ce que vous appelez
18 l'acte d'accusation, dans ces charges qui pèsent sur moi, on trouve toute
19 une liste de victimes et dans tous les cas chaque fois qu'il y a eu décès
20 d'un Albanais, on attribue ce décès aux forces serbes. On utilise le terme
21 "de forces de la RSFY et de la Serbie." Ceci se retrouve dans la totalité
22 du texte. Or moi, par le truchement de ce témoin, j'essaie de faire la
23 preuve notamment de la façon dont les groupes terroristes ont traité les
24 Albanais qui s'efforçaient de mener une vie normale. J'essaie de montrer
25 les victimes et le nombre de victimes qu'il y a eu parmi cette partie de la
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1 population.
2 Le témoin va nous parler de la municipalité d'Istok. Il va nous
3 parler du bombardement du centre correctionnel de Dubrava. Dans l'acte
4 d'accusation, on m'accuse notamment du meurtre de prisonniers dans ce
5 centre de Dubrava. Il va falloir que nous passions ces éléments en revue de
6 manière détaillée pour voir ce qui s'est effectivement passé.
7 Il y a là un grand nombre d'éléments qui ont un rapport avec la
8 réalité des faits, la réalité de ce qui s'est passé, contrairement aux
9 accusations totalement fausses qui sont portées contre les autorités de
10 Serbie.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais comme je l'ai déjà dit,
12 Monsieur Milosevic, je vous demande de faire en sorte que le témoin nous
13 parle des éléments de preuve concrets. Ne vous contentez pas de nous donner
14 les réponses toutes faites dont vous avez l'habitude.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'espère que sur la base de
16 ce que le témoin nous a dit, vous avez été en mesure de constater que ces
17 attaques étaient des attaques qui n'étaient provoquées par absolument rien
18 du tout, qu'il s'agissait d'attaques sournoises menées contre la police,
19 menées contre les civils pour une raison unique, c'est que ces gens étaient
20 Serbes. Des réfugiés d'Albanie ont été attaqués, un policier a été visé, un
21 café a été plastiqué. Il s'agissait d'attentats terroristes qui avaient les
22 objectifs que j'ai déjà décrits et vous pouvez voir que le témoin peut le
23 confirmer.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais les attentats terroristes
25 en tant que tel n'ont pas de pertinence à moins qu'ils ne soient en
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1 relation directe avec les accusations qui figurent dans l'acte. C'est un
2 sujet que nous avons déjà souvent abordé.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux continuer, Monsieur Robinson
4 ?
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, vous pouvez continuer, mais il
6 faut que les éléments de preuves qui nous sont fournis soient des éléments
7 de preuve pertinents.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. Colonel, quelles étaient les relations entre les terroristes et les
10 Albanais qui étaient des hommes de la rue, des citoyens, ce que l'on
11 qualifie souvent "de citoyens loyaux," c'est-à-dire de gens qui vivaient
12 une vie normale dans cette région. Quelle était l'attitude des terroristes
13 par rapport à eux ?
14 R. Les terroristes aussi les prenaient pour cible. Ils faisaient tout ce
15 qu'ils pouvaient pour leur faire changer de comportement, pour les
16 sanctionner, pour essayer de leur faire changer d'attitude, pour les
17 inciter à rejoindre leur camp et à les soutenir. A de très nombreuses
18 reprises, on a vu que des Albanais ont été tués parce qu'ils travaillaient
19 dans des administrations publiques ou parce qu'ils fréquentaient de manière
20 ouverte des Serbes. Ceci on l'a vu se produire au cours de l'année 1997, au
21 cours de l'année 1998, et on a vu ce genre d'incidents se produire. Je peux
22 donner des exemples si la Chambre me le permet.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ceci
24 présenterait une pertinence si dans l'acte d'accusation ont trouvait des
25 charges, on trouvait des chefs d'accusation, ou des éléments alléguant que
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1 les forces Serbes avaient attaqué et tué des Albanais et que vous répondiez
2 que les Albanais en question n'avaient pas été tués par les forces Serbes,
3 mais par les terroristes de l'UCK. Dans ces conditions ceci serait
4 pertinent. Mais ce n'est pas pertinent si on se contente de présenter des
5 allégations de manière générale, parce qu'un acte d'accusation, c'est un
6 instrument juridique extrêmement précis.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'entends bien, Monsieur Robinson. Mais comme
8 vous le voyez, il y a une sorte de plan qui existe. On voit que cette
9 organisation terroriste que vous appelez l'UCK, on a pu le voir,
10 d'ailleurs, pendant la déposition de M. Hartwig, chef d'une Mission de
11 l'observation de l'Union européenne, on a vu ces gens-là terroriser la
12 population albanaise, les villages d'albanais; ils tuaient, ils enlevaient
13 les gens et faisaient tout ce qui était possible pour contrôler la
14 population albanaise, pour la terroriser. Tous ceux qui se trouvaient au
15 Kosovo-Metohija, toutes les victimes sont présentées comme des victimes de
16 la terreur serbe et d'un comportement arbitraire. Or, la situation est
17 exactement contraire.
18 Nous ne sommes pas en train de parler d'accusations précises avec des
19 noms, des prénoms. Bien entendu, cela figure dans l'acte d'accusation. Mais
20 je parle, ici, d'une situation générale, d'une situation continue et il y a
21 eu plus d'Albanais tués en 1998 que de Serbes par l'UCK. Les statistiques
22 existent, les chiffres existent qui permettent de le démontrer.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons à 1998.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Précisons un point avant de passer à 1998. Colonel, à votre
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1 connaissance et autant que vous puissiez vous en souvenir, à partir de quel
2 moment l'UCK, cette organisation terroriste, a agi de manière publique ? Je
3 ne veux pas dire qu'elle soit entrée ouvertement en conflit, mais je veux
4 parler de ces revendications, des revendications publiques, de certaines
5 activités. A quel moment donné ont-ils commencé à se comporter de la
6 sorte ?
7 R. J'ai été au courant à partir de 1997, la fin 1997, dans la zone où je
8 me trouvais. C'est à partir de ce moment-là qu'ils ont commencé à se
9 montrer en public.
10 Q. Que voulez-vous dire par là, exactement, "en public" ?
11 R. C'est-à-dire qu'on les voyait, on les voyait en uniformes, ils
12 circulaient armés. Ils prétendaient être l'armée populaire du Kosovo, c'est
13 ainsi qu'ils se présentaient. Ils exerçaient leur contrôle dans les
14 villages où il n'y avait que des albanais, loin des villes et ils se sont
15 rapprochés de plus en plus des villes. Au bout du compte, à la fin de 1997,
16 dans l'après-midi et dans la soirée, ils prenaient le contrôle des routes.
17 Ils interceptaient les véhicules qui circulaient sur ces routes. Ils se
18 sont mis à maltraiter les Serbes, ils disaient aux Serbes qu'il ne fallait
19 pas qu'ils empruntent ces routes, qu'il ne fallait plus qu'ils les
20 empruntent. Dans la soirée, ils prenaient le contrôle de ces voies de
21 communication. Les Serbes venaient nous voir, ensuite, pour se plaindre,
22 nous dire qu'ils avaient été victimes de mauvais traitements, qu'on les
23 avait interceptés, que les hommes en question disposaient de grenades à
24 main, d'autres armes. Les familles d'Asanin et Bakic, notamment, ont été
25 concernées. Il y avait 16 membres de ces familles qui revenaient d'un
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1 monastère, dans la nuit, en décembre et leur véhicule a été criblé de
2 balles. Il y avait
3 10 enfants dans le véhicule, on a gardé ces gens sur place pendant toute la
4 nuit et ensuite, on les a laissés partir, mais en leur disant qu'il ne
5 fallait plus qu'ils empruntent cette route qui était soi-disant sous le
6 contrôle de l'armée populaire du Kosovo. C'est ainsi qu'ils se
7 présentaient.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a toujours des malentendus au niveau de la
9 traduction quand on utilise le terme "rucni baca," dans notre langue, en
10 B/C/S, c'est un lance-roquettes portable. Parce que dans la traduction, on
11 a parlé de grenades à mains et le colonel nous a dit que les personnes en
12 question étaient armés de lance-roquettes portables ainsi que de fusils
13 automatiques.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il s'agit d'un tube qu'on place sur son
15 épaule, c'est un lance-roquettes portable.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Ou un "mortier à main," c'est ce qu'on pourrait dire littéralement.
18 Enfin, c'est difficile à traduire. On peut dire, cependant, qu'il s'agit
19 d'un lance-roquettes portable; c'est la meilleure façon de faire comprendre
20 ce dont il s'agit.
21 Vous venez de nous dire que ces individus avaient des activités publiques,
22 mais ils se montraient dans les endroits où il n'y avait pas de présence
23 policière, c'est-à-dire, dans les villages albanais les plus éloignés, les
24 plus isolés.
25 Est-ce que, dans zone de Pec, au cours de 1997, on a assisté à des
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1 attaques menées contre la police ?
2 R. Oui, à plusieurs reprises. Je vais, maintenant, vous parler de trois
3 attaques parce qu'il s'agissait de postes de police, par exemple, la Rznic,
4 qui avait déjà été attaqué précédemment. Le poste de Rznic a été attaqué en
5 août et en septembre 1997, le poste de Rznic. En août, cette attaqué a été
6 repoussée, mais en septembre, ils ont lancé une attaque très vigoureuse,
7 les combats ont duré longtemps. Dragic Davidovic, un policier, a été tué au
8 cours de cette attaque. Deux autres policiers ont été blessés, à ce moment-
9 là. Ils ont été grièvement blessés au cours des combats. Un des
10 terroristes, Jocaj, me semble-t-il, a également été tué. Un autre poste de
11 police, celui de Klincina, également, a été l'objet d'une offensive à la
12 mi-octobre 1997, dans la soirée, dans la nuit plutôt, et c'est d'une
13 attaque qui était sous le commandant de Krasniqi, Cerim Krasniqi -- Adrian
14 Krasniqi et Cerim Kelmendi, ce sont là les individus qui dirigeaient la
15 plupart des attaques menées dans la zone de Pec. En repoussant cette
16 attaque, le chef du groupe Krasniqi a été tué. Krasniqi était un proche de
17 Ramush Haradinaj. Les obsèques ont été des obsèques en grande pompe,
18 plusieurs milliers d'albanais ont participé à ces obsèques. Ils ont
19 prononcé des déclarations de loyauté, il y a eu recrutement de nouveaux
20 membres et la 133e Brigade de l'UCK a été rebaptisée Adem Krasniqi. Il y a
21 une partie du corps de protection du Kosovo qui porte le même nom,
22 maintenant. Ramush Haradinaj a décrit la chose de manière extrêmement
23 positive, il a glorifié ce groupe alors qu'il n'était qu'un simple
24 terroriste qui s'en prenait à des citoyens respectueux de la loi. Il a été
25 tué pendant l'attaque contre le poste de police du SUP de Pec.
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1 Q. Le poste de police était celui de Klincina ?
2 R. Oui.
3 Q. Ils ont attaqué le poste de police et au cours de l'attaque, certains
4 policiers ont été tués alors qu'ils défendaient le poste de police ?
5 R. Exactement.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous arrête car nous allons
7 délibérer sur le siège de la pertinence de ces éléments de preuve.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay ?
10 M. KAY : [interprétation] Oui. Paragraphe 93 de l'acte d'accusation, il est
11 question du milieu de l'année 1996, apparemment, il y aurait eu des
12 attaques lancées à ce moment-là par l'UCK, prenant pour cible surtout les
13 forces de police serbe. Nous avons entendu ce témoin-ci en parler.
14 Il a bien été allégué par l'Accusation que : "Par la suite, il y a
15 une réponse des forces de police serbes par des opérations musclées,
16 dirigées contre des bases supposées être celles de l'UCK et de leurs
17 partisans au Kosovo."
18 L'Accusation utilise souvent ces termes lorsqu'elle parle de la
19 question.
20 Ce que nous venons d'entendre par la bouche de ce témoin, c'est que
21 les hommes défendaient le poste de police, que certains policiers ont été
22 tués alors qu'ils défendaient leur poste de police, puis, vous avez
23 interrompu la déposition. La question de la réponse qui aurait été
24 proportionnelle à l'attaque, vu ce qui se passait dans la vie publique et
25 dans la vie privée des gens au Kosovo, ceci peut constituer des éléments
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1 pertinents, si on s'attache à évoquer cette question de la proportionnalité
2 de la réponse à des attaques.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui est certain, c'est que
4 l'interrogatoire principal n'a pas été menée dans ce sens-là puisque
5 l'interrogatoire principal est revenu sur ce que l'Accusation a déjà dit et
6 souvent, cela semble tellement inutile de s'attarder sur de telles choses
7 alors qu'apparemment, comme le dit l'accusé, le témoin peut parler de
8 choses qui sont vraiment pertinentes au regard de l'acte d'accusation
9 plutôt que de parler de questions politiques, questions que l'accusé a
10 peut-être à l'esprit.
11 M. KAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il faut aussi parler des événements
13 d'Istok.
14 M. KAY : [interprétation] Oui, j'en suis conscient, Messieurs les Juges.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic,
17 Me Kay est venu, une fois de plus, à votre rescousse. Il n'en demeure pas
18 moins que les éléments présentés jusqu'à présent sont des éléments de
19 contexte, comme le dit le Juge Bonomy, il faut arriver au cœur du sujet. Il
20 y a des chefs d'accusation, des charges pesant contre vous au paragraphe
21 (F) qui concernent Istok, page 29, en anglais. Vous avez d'autres éléments
22 concernant la prison de Dubrava, le témoin peut en parler. Or, ce sont des
23 éléments qui sont beaucoup plus essentiels dans le cadre de l'acte
24 d'accusation que les éléments qui se sont produits en 1997, vous le savez.
25 Vous prévoyez cinq heures d'interrogatoire principal. Or, on pourrait
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1 terminer l'audition de ce témoin dès aujourd'hui, si vous parveniez à mieux
2 gérer, de façon plus efficace, l'interrogatoire. Allez au cœur du sujet,
3 prenez les questions essentielles.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais essayer de me concentrer sur les
5 éléments d'information apportés par le témoin et sur les documents qu'il
6 présente.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Mais on a dit : "Vers le milieu de l'année 1996, l'UCK a organisé des
9 attaques dirigées surtout contre les forces de police de Serbie" puis on
10 dit, Colonel, qu'à partir de ce moment-là, jusqu'en 1997, il y a eu riposte
11 des forces de police serbes et ce, de façon musclée, vers les lieux où la
12 police pensait que l'UCK avait ses bases et ses partisans. Il s'agit du
13 paragraphe 93.
14 Savez-vous s'il y a eu de telles actions avec réplique de la police
15 contre les bases de l'UCK et ses partisans au Kosovo ?
16 R. Non, non, pas du tout, il n'y a pas eu de telles opérations.
17 Q. Fort bien. Nous gagnons ainsi du temps, il n'y a pas eu d'actions de ce
18 genre. Ce qui est dit dans l'acte d'accusation n'est pas exact, n'est-ce
19 pas ?
20 R. Non.
21 Q. Merci. Le SUP de Pec a rédigé toute une série de rapports concernant la
22 zone sous sa tutelle ?
23 R. Oui.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, gardez ceci à l'esprit, ces
25 informations, ces rapports concernent la période qui va du 1er janvier 1998
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1 au 1er juin 2001, période couverte par l'acte d'accusation.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Colonel, ces rapports, ces renseignements, les trouve-t-on dans ces
4 classeurs, sous ces intercalaires ?
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas si vous avez déjà reçu ces
6 classeurs, vous les avez sans doute à côté de votre chaise.
7 Veuillez les prendre, ces classeurs. Commençons par le premier. Il
8 s'agit des intercalaires 1, 2, 3, 4, 6, 7 et 9.
9 M. NICE : [interprétation] Je dois préciser notre position en ce qui
10 concerne ces documents. Nous avons reçu tout un recueil d'originaux la
11 semaine dernière, plus exactement le 26. Il n'était pas réparti en
12 intercalaires, du tout. Je pense qu'à ce moment-là, nous n'avons pas reçu
13 de traduction. Nous avons fait de notre mieux pour étudier les documents
14 avec l'aide des personnes qui parlent le B/C/S, mais nos résultats n'ont
15 pas été vraiment très importants; nous n'avons pas, non plus, pu déterminer
16 l'ordre qui allait être retenu.
17 Nous avons reçu les éléments avec intercalaires, hier soir;
18 apparemment, 17 ou 18 de ces intercalaires ont été traduits en anglais,
19 mais sur -- attendez, combien y a-t-il d'intercalaires en tout ? Plus de
20 170 intercalaires.
21 Il est manifestement difficile, voire impossible, d'en traiter de
22 façon exhaustive, aujourd'hui. Nous ne voulons pas rejeter des éléments
23 qui, d'une part, seraient de nature à aider l'accusé ou d'autre part,
24 pourraient nous aider à vous assister en vous présentant un tableau complet
25 des événements. Mais c'est un exercice tout à fait difficile.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.
2 Monsieur Milosevic, parlons rapidement de ces intercalaires, de ces
3 questions de procédure. On a 175 intercalaires, un dixième seulement de ces
4 documents a été traduit. Pourquoi ? Avez-vous une explication ? Parce que
5 ceci relève d'une bonne gestion, une gestion efficace de votre dossier.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mon explication sera très simple. Cependant,
7 auparavant, je vais vous demander de regarder ceci. J'espère que vous aurez
8 l'aperçu de tous ces intercalaires, leur description, vous avez plusieurs
9 intitulés. Vous avez une colonne concernant les "commentaires", et on
10 précise à quel moment on a demandé la traduction de ces documents.
11 Est-ce que cela a été traduit ou pas ? Là, c'est une question de
12 temps, tout simplement, Monsieur Robinson. Je le sais. Vous ne tenez pas
13 compte du temps quand cela me concerne. Or, il faudrait le faire quant il
14 s'agit des traducteurs.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vraiment, c'est tout à fait
16 injustifié. C'est tout à fait inacceptable ce que vous dites, dire que la
17 Chambre ne tient pas compte du temps quand vous êtes concerné.
18 Alors qu'il suffit de jeter un coup d'œil rapide à ces commentaires, pour
19 voir que la plupart de ces documents ont été soumis le 21 avril. Nous
20 sommes aujourd'hui le 4 mai. Cela fait deux semaines. Vous savez que cela
21 ne suffit pas, Monsieur Milosevic.
22 Je me suis enquis, et j'ai appris que vous bénéficiez d'un traitement
23 privilégié, des plus privilégiés dans le service de traduction du Tribunal.
24 Aucun autre accusé n'est aussi bien traité que vous. Mais si vous envoyez
25 pour traduction autant de documents, deux semaines seulement avant la date
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1 prévue pour l'audition d'un témoin, ce n'est là pas de la bonne gestion. Il
2 faudrait les envoyer au moins un mois en avance, nous en avons déjà
3 discuté.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, nous avons fait de notre
5 mieux. Nous avons pris toutes les mesures possibles afin que le témoin
6 reçoive ces documents dans les temps. J'ai même ici un certificat du
7 ministère de l'Intérieur du SUP de Pec, en date du 18 avril. Ceci nous
8 montre que c'est seulement dès le 18 avril que ces documents ont été
9 présentés au témoin. On mentionne les documents pertinents, les tableaux,
10 des résumés des listes de documents. Tout ceci a été remis au témoin. Tout
11 ce qui était en rapport avec le secrétariat de Pec.
12 La dernière fois, je vous ai fait placer sur le rétroprojecteur un
13 certificat, une attestation, disant que certains documents avaient été
14 demandés en janvier 2004, or ils n'ont été mis à ma disposition qu'à la fin
15 du mois de mars 2005, 14 mois de retard, dès lors. Manifestement, il y a
16 des problèmes de ce genre qui surgissent. Toute personne raisonnable doit
17 en tenir compte.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous nous dites maintenant en guise
19 d'explication que vous avez demandé ces documents aux ministères concernés,
20 mais que cette demande n'a pas été respectée dans les temps. En tout cas,
21 pas suffisamment tôt pour que vous fournissiez ces documents au service de
22 traduction pour traduction. On me dit dans une note que 68 documents ont
23 été fournis au service de traduction le 21 avril, d'autres le 2 mai. Ils
24 ont été acceptés pour être traduits, les dates de remise de documents et
25 les traductions étant les 2, 3 et 29 mai [comme interprété].
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1 Nous allons devoir décider vu le grand nombre de documents non traduits.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous nous
4 inondez de documents. C'est une avalanche. Nous allons envisager le
5 versement des documents en fonction de leur pertinence. Si les documents
6 sont considérés comme étant pertinents, et qu'ils ne sont pas traduits, ils
7 recevront une cote provisoire. Je tiens compte du fait que l'Accusation ne
8 manifeste pas d'objections, et je relève également que s'agissant d'un bon
9 nombre des documents, on vous a dit de ne pas les soumettre parce qu'il
10 n'était pas possible de les traduire à temps.
11 Avançons. Prenons les documents un à un. Quelle sera la cote donnée au
12 classeur ?
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] D297.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois. Il faudra que vous montriez
15 la pertinence de ces documents, bien évidemment, notamment en ce qui
16 concerne les années 2000, 2001 et 2002. Poursuivons en gardant à l'esprit
17 ces prémisses.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson. J'espère que nous
19 allons nous en sortir. Mais j'espère que vous gardez à l'esprit que moi
20 aussi, je suis inondé de documents.
21 Si vous voyez les informations disponibles, vous allez constater que je
22 n'ai pas perdu un seul jour de travail. J'ai reçu des témoins ou j'ai reçu
23 des documents. Vous le savez. En fait, je travaille en parallèle. Je reçois
24 des documents, et je parle à des témoins. Mais avant d'examiner un document
25 pertinent, je ne peux pas parler à un témoin pour savoir si le document est
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1 pertinent ou volumineux.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout simplement parce que vous ne
3 faites pas bon usage de vos ressources.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord, Monsieur Bonomy. Mes ressources,
5 c'est un certain nombre donné d'heures par jour. Il n'y a que 24 heures
6 dans une journée après tout. J'ai les ressources que j'ai.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Colonel, est-ce qu'on a ici des informations à partir du 1er janvier
9 1998, jusqu'au 1er juin 2001 ?
10 R. Oui.
11 Q. Qui a donné l'ordre de dresser ce rapport ?
12 R. Le ministère de l'Intérieur. C'est ce que la méthode de travail en
13 place exige.
14 Q. Pourquoi a-t-on écrit ces rapports ?
15 R. Après le retrait du Kosovo-Metohija, des documents ont été emportés
16 dans des conditions assez difficiles. Il était difficile des les
17 transporter vu les contraintes, et aussi il y avait un problème de
18 personnel. Les documents de Pec ont été emmenés à Kragujevac et entreposés,
19 mais dans le désordre. On les a simplement empilés au fur et à mesure qu'on
20 les sortait des véhicules. Puis, il a fallu ordonner ces documents, les
21 classer.
22 Les documents qui avaient été établis pendant que nous vivions à
23 Pec, on a dû les retrouver, les classer, les mettre dans les bons classeurs
24 et, en absence de classeurs, il a fallu en créer de nouveaux. Tout ceci
25 devait être en rapport avec un cas particulier, une affaire particulière,
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1 c'est seulement à ce moment-là qu'on pouvait travailler.
2 On voulait avoir une base de données pour avoir une bonne saisie de
3 toutes les affaires, pour terminer aussi toutes les affaires, pour prendre
4 des mesures, pour tirer au clair les événements ou les infractions qui
5 avaient été commises, et pour découvrir les auteurs de ces infractions et
6 pour présenter les requêtes nécessaires au Procureur.
7 Q. Fort bien. Prenons d'abord ce rapport relatif au conflit armé sur le
8 territoire du SUP de Pec à partir du 1er janvier 1998 jusqu'au 1er juin 2001.
9 Ceci se trouve à l'intercalaire 1, cela va du 1.1 au 1.6.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs, je voudrais vous expliquer quelque
11 chose. Vous avez ce premier intercalaire. C'est une compilation
12 d'informations venant du MUP de Pec. Mes associés me disent cependant qu'à
13 la demande des services de traduction, on a dû ventiler ceci en plusieurs
14 parties. C'est pour cela que vous avez sous l'intercalaire 1 plusieurs
15 parties qui vont de 1.1 à 1.6, mais c'est un seul est même document. J'ai
16 ici l'original, c'est le témoin qui m'a remis l'original. Ici le document a
17 été ventilé en 6 sous intercalaires.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Encore une question Monsieur le Témoin. Est-ce vous qui avez signé ce
20 rapport ?
21 R. Oui.
22 Q. Vous l'avez signé ce rapport en tant que chef du SUP de Pec, mais est-
23 ce que vous avez aussi participé à son élaboration ?
24 R. Oui, de A à Z. J'avais la responsabilité de ce rapport au secrétariat
25 de Pec, et j'ai participé à ce travail. J'ai eu entre les mains bon nombre
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1 de ces documents dont j'ai traité.
2 Q. Est-ce que vous avez une connaissance personnelle des événements
3 mentionnés dans ce rapport ?
4 R. J'ai une connaissance directe et personnelle de certain de ces
5 événements parce que j'ai été soit observateur, soit participant.
6 Q. Vous dites "quelques événements". Qu'en est-il des événements dont vous
7 n'avez pas une connaissance directe ? Est-ce que c'est par des rapports
8 officiels que vous avez reçus, vu votre fonction, que vous avez appris ce
9 qu'il en était ?
10 R. Oui. Cela relève des réglementations régissant le travail du MUP. Tous
11 les matins, il y avait des réunions de travail, les chefs de service y
12 participent à ces réunions quotidiennes. Des questions relatives à la
13 sécurité y sont abordées, on examine les événements de la période
14 précédente, et on précise qui participent à la réunion, et on désigne les
15 tâches.
16 Q. Pendant la séance de récolement, vous m'avez dit qu'on a pour en-tête,
17 "Information sur des événements liés à la sécurité, ayant donné des
18 conséquences mortelles à la suite des conflits armés sur le territoire du
19 SUP de Pec à partir du 1er janvier 1998, jusqu'au 1er juin 2001." Vous dites
20 que ce n'est pas très précis.
21 R. Oui, ce n'est pas très bien dit. Quand on dit événements sécuritaires
22 ayant eu des conséquences mortelles, cela peut varier. On peut avoir des
23 conséquences mortelles de diverses façons. Ce serait mieux de dire
24 "Renseignements à propos d'événements relatifs à la sécurité ayant eu des
25 conséquences mortelles au moment des conflits armés sur le territoire du
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1 SUP de Pec au cours de la période allant du 1er janvier 1998 au 1er juin
2 2001," parce que ceci inclut tous les événements ayant entraîné des morts
3 au cours de cette période, que ce soit des événements liés à un conflit
4 armé ou non.
5 Par exemple, il y a des décès de mort naturelle dans des hôpitaux. Il
6 y a des noyades, il y a des suicides établis au-delà de tout doute
7 raisonnable. Mais on les a quand même inclus dans ce rapport afin d'avoir
8 un chiffre définitif. On a essayé d'arriver à un chiffre définitif de
9 toutes les morts encourues à l'époque, pour avoir une idée du nombre de
10 cadavres et du lieu où ces personnes avaient été enterrées.
11 Q. Fort bien. Il serait exact de dire dans les événements ayant entraîné
12 la mort au cours de la période allant du 1er janvier 1998 au 1er juin 2001 ?
13 R. Tout à fait.
14 Q. Ce sont tous les événements qui ont entraîné la mort, que ce soit en
15 rapport avec un conflit armé ou pas?
16 R. Tout à fait.
17 Q. Dites-moi une chose, qu'est-ce que cela signifie ici, cette
18 indication ? On voit A/3, cela se voit à la première page, et plus loin
19 aussi ?
20 R. Les documents que nous avons sont, d'une part, le dossier concernant le
21 Kosovo-Metohija établi au SUP. On y trouve des documents aussi venant
22 d'autres SUP du territoire de Kosovo. Ce dossier contient plusieurs
23 sections ou chapitres consacrés à divers sujets. Le A que vous voyez dans
24 cette inscription veut dire incidents ayant entraîné la mort. Le III en
25 chiffres romains veut dire que cela vient du SUP de Pec.
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1 Q. Je vous remercie. Ceci est maintenant clair. Je voulais que nous soyons
2 parfaitement précis parce que M. Kwon, il y a quelques jours, a demandé ce
3 que signifiait cette inscription sur certains documents. A, cela veut dire
4 incidents ayant entraînée la mort ou perte de vie et le III en chiffres
5 romains cela veux dire que cela vient du SUP de Pec. Quelquefois, on voit
6 que c'est un Serbe qui a perdu la vie, et le chiffre III montre aussi que
7 cela vient du SUP de Pec.
8 Q. Alors qu'est-ce qu'on trouve ici dans ce rapport ?
9 R. En fait, c'est un mémoire. On y trouve un aperçu général destiné à
10 informer un lecteur éventuel, quelqu'un qui prend ce document pour la
11 première fois entre ses mains, l'informer de la tendance générale de la
12 situation générale qui prévaut à l'époque.
13 Q. Quelle est la relation entre la partie de texte et les autres parties
14 de ce dossier ?
15 R. Le texte est inspiré par les autres parties. Il se constitue de listes,
16 de tableaux. Quelquefois, il y a des discordances entre les deux parties,
17 en fonction du temps ou de l'époque à laquelle ces autres parties auraient
18 été rédigées. Mais ce sont des différences mineures, sans importance.
19 Les questions de sécurité sont telles qu'on peut apprendre quelque
20 chose après la survenue de l'événement. A ce moment-là, on va mettre à jour
21 la liste ou le tableau sans mettre à jour le texte.
22 Q. Mais comment ventilez-vous ces actes terroristes et les pertes de vie,
23 les morts encourus dans ce rapport ?
24 R. Les activités terroristes doivent être classées en plusieurs périodes.
25 Il y a une première période, activité terroriste, c'est avant 1998; à
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1 partir du début des années 1990, jusqu'à, a peu près, vers 1998.
2 La deuxième période, c'est celle de l'escalade du terrorisme. Elle
3 commence au courant de l'année 1998, c'est un fait souvent négligé.
4 La période suivante, c'est celle de la présence de la MVK au Kosovo.
5 Celle qui suit, c'est la période de la pression de l'OTAN contre le Kosovo
6 en 1999, la dernière période étant la période consécutive à la pression de
7 l'OTAN.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Nous allons maintenant
9 faire une première pause qui durera 20 minutes. L'audience est suspendue.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.
11 --- L'audience est reprise à 10 heures 59.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez
13 continuer.
14 M. MILOSEVIC : [interprétation]
15 Q. Colonel, je me propose de vous poser plusieurs questions, à présent, au
16 sujet des constatations qui figurent dans le texte de ce document; je me
17 réfère, notamment, à l'intercalaire 1.1.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'attire votre attention Messieurs les Juges,
19 sur le fait que le témoin est venu témoigner à ce sujet et le document ne
20 fait qu'appuyer son témoignage. Vous l'avez déjà eue, cette situation,
21 lorsque le général Ivasov est venu témoigner et vous avez demandé s'il y
22 avait un document. Les questions que je vais poser, à présent, au témoin se
23 rapportent à la teneur de ce document qui figure à l'intercalaire 1.1.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Il est question, ici, de formes d'activité de guerre psychologique
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1 déployée par les séparatistes albanais de toute la durée de ces années
2 1990, activité que vous avez pu constater sur le territoire du SUP de Pec.
3 Vous avez pu constater de quel type d'activité de propagande psychologique
4 il s'est agi ?
5 R. Pendant cette période initiale, leur intention était de montrer au
6 reste du monde qu'il y avait violation de la loi de l'homme au Kosovo. Ils
7 ont quitté leurs postes de travail de façon dirigée en expliquant qu'ils
8 étaient chassés de ces postes de travail. Un certain nombre de policiers
9 albanais ont quitté leur travail et on a présenté la chose en disant que
10 cela était une expulsion pour raison d'appartenance ethnique.
11 Ils ont également organisé un système scolaire parallèle à l'extérieur des
12 institutions scolaires existantes, en disant que quelqu'un avait limité
13 leur possibilité de se scolariser. Ils ont organisé, également, des
14 effectifs de police en parallèle. Ceux qui ont quitté leur travail ont
15 travaillé au MUP clandestin de la République du Kosovo, de ce qu'il est
16 convenu d'appeler la République de Kosovo.
17 Avant d'organiser ces écoles parallèles, ils ont mis en scène des
18 empoisonnements massifs d'écoliers dans les écoles. La chose a été tirée au
19 clair, il a été clairement déterminé qu'il n'y a pas eu ni empoisonnement,
20 ni empoisonnement sur des bases ethniques, et que cela avait été organisé
21 par ce mouvement séparatiste et irrédentiste tel que nous le qualifions à
22 l'époque.
23 Q. Que dit cette information ? De quelle importance étaient les groupes
24 qui avaient commencé à se créer dans le courant desdites années ?
25 R. Il s'agissait de petits groupes terroristes. C'était des systèmes de
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1 troïkas. C'est ainsi que s'étaient créées leurs patrouilles de police en
2 civil en se déplaçant sur le terrain. Ils se déplaçaient et procédaient à
3 des constats sur les lieux après les événements.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur Milosevic, je
5 n'arrive pas à suivre le document dont vous êtes en train de parler. De
6 quel document ?
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que nous parlons de
8 l'intercalaire 1 ?
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je suis en train de poser à présent des
10 questions qui relèvent encore de la partie textuelle de l'intercalaire
11 numéro 1. Nous allons passer ensuite au 1.1, et aux intercalaires suivants,
12 avec les listes --
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si l'on plaçait la première page de
14 l'intercalaire numéro 1 sur le rétroprojecteur afin que nous puissions
15 obtenir une traduction de ce qui figure à l'intitulé.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai l'impression que c'est la mauvaise page de
17 cet intercalaire 1.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. Ce qu'il faudrait, c'est
19 celle-ci.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le rétroprojecteur ne fonctionne pas
21 pour le moment. L'index que nous avons ici devrait faire état des personnes
22 identifiées qui ont péri mortes de faim.L'ACCUSÉ : [interprétation] Il
23 s'agit de l'intercalaire 1, qui porte sur une information relative aux
24 événements liés à la situation relative à la sécurité avec conséquences
25 mortelles survenues suite à des conflits armés sur le territoire du SUP de
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1 Pec dans la période du 1er janvier 1998, au 1er juin 2001. C'est ce que dit
2 ce texte.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, en effet.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est de cette façon que c'est rangé.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit 1.1. Essayez de citer le
6 bon numéro de l'intercalaire.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'ai dit d'abord, intercalaire 1.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allons de l'avant.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est intercalaire 1, et non pas
10 1.1.
11 Oui, Monsieur Nice.
12 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de cette
13 liste, nous l'avons reçu en langue anglaise il n'y a qu'une demi-heure. Je
14 n'ai pas de copie, et je serais reconnaissant à toute personne me
15 fournissant une copie supplémentaire, si tant est qu'il y en ait une.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais nous avons cette liste
17 depuis pas mal de temps déjà.
18 M. NICE : [interprétation] En langue anglaise, la liste des pièces, nous ne
19 l'avons reçu qu'il n'y a qu'une demi-heure.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Pourquoi y a-t-il cette
21 discrimination à l'encontre de l'Accusation, Monsieur Milosevic ?
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pendant que nous sommes en train
23 d'attendre, je voudrais faire remarquer que le numéro de cette pièce à
24 conviction devrait être D298.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une copie vient d'être rendue
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1 disponible pour l'Accusation.
2 Est-ce que le rétroprojecteur fonctionne à présent ?
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Rien du tout.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez placer l'intercalaire
5 numéro 1 sur le rétroprojecteur. Cela n'a pas l'air de marcher.
6 Continuons, M. Milosevic. Le rétroprojecteur ne marche pas.
7 M. MILOSEVIC : [interprétation]
8 Q. Je vais enchaîner avec mes questions relatives à l'intercalaire numéro
9 1. Cette information dont on parlait, qu'en dernière page, vous avez signé
10 vous-même. Est-ce que c'est bien votre signature, M. Paponjak ? Votre
11 signature, votre cachet, tout le reste.
12 R. Oui, en effet.
13 Q. Qu'est-ce que dit cette information concernant l'emplacement où l'on a
14 organisé l'entraînement des terroristes ?
15 R. Il a été organisé en Albanie et dans certains d'autres pays.
16 Q. Qui est-ce qui a procédé à l'entraînement des terroristes ?
17 R. Cela a été fait par des terroristes, des mercenaires d'autres pays,
18 venus de l'étranger, en général, il s'agissait de Moudjahiddines, de
19 Musulmans.
20 Q. Veuillez nous indiquer comment ils se sont procurés ces armes et ces
21 munitions.
22 R. Par le biais de contrebande en provenance de l'étranger, et cela,
23 notamment, a été fait en provenance d'Albanie, après la dissolution de
24 l'armée albanaise et cette capitulation. A ce moment-là, il y a eu pillage
25 des arsenaux en Albanie, et une grande partie des armes est venue de là.
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1 Mais il en est venu de pays autres également. Ils se sont armés, en
2 général, avec des armes de fabrication chinoise, armes qui faisaient partie
3 de l'armement de l'armée albanaise. Ils avaient donc des armes et des
4 munitions, notamment de fabrication chinoise. C'est de part ce fait que
5 l'on savait que c'est eux qui tiraient, puisque ces munitions faisaient un
6 autre bruit, un bruit différent.
7 Q. Bien. Je ne vais plus vous poser de questions au sujet des premières
8 attaques terroristes, et de l'intensification de ces attaques, vous en avez
9 déjà parlé de cela. Je ne vais pas parler non plus des cibles visées par
10 ces attaques, parce que tout ceci figure d'ores et déjà dans l'information
11 dont nous parlons. Il est question d'Adrian Krasniqi que vous avez
12 mentionné vous-même.
13 Il y a eu des préparatifs autres qui ont été réalisés en vue d'activités
14 terroristes à compter de 1997, et par la suite, lesquels ?
15 R. Ils ont déployé toutes les mesures qu'il fallait pour avoir des combats
16 sur une période prolongée. Ils se sont procurés tout le matériel nécessaire
17 pour une période prolongée, tout ce qui est équipement sanitaire, tout ce
18 qui relève de la logistique, qu'ils se sont armés et ils ont entreposé tout
19 cela à des emplacements appropriés. Il s'agissait d'emplacements notamment
20 éloignés des cités ou des fortifications. Ils ont dissimulé les armes à ces
21 sites-là.
22 Q. Dans l'information, il est question des mesures prises par les
23 terroristes à l'égard d'Albanais pour que ceux-ci les rejoignent ou leur
24 fournissent des armes. Avez-vous eu l'occasion de prendre connaissance de
25 ces mesures ?
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1 R. Oui. Il y a eu des informations qui ont circulé. La population l'a
2 raconté. On la forçait à rejoindre les rangs de ces unités, notamment les
3 jeunes hommes, cette population de jeunes, cela était fait par menaces, par
4 des chantages. Les parents qui ne voulaient pas que leurs enfants soient
5 recrutés dans la soi-disant UCK devaient payer pour que cela ne soit pas
6 fait. Ils payaient une espèce d'indemnité s'ils ne voulaient pas que leurs
7 enfants aillent là-bas. Ceux qui ne payaient pas et qui ne rejoignaient pas
8 les rangs de ces unités étaient exposés à des sanctions. Il y avait des
9 avertissements, des mauvais traitements, des vitrines de brisées, des
10 fenêtres de cassées, des mises à feu au blé, et cela allait jusqu'aux
11 liquidations pures et simples.
12 Q. Veuillez m'indiquer si les terroristes de façon variée avaient une
13 attitude différente vis-à-vis des Albanais musulmans et des Albanais
14 catholiques, ou le traitement était-il le même ?
15 R. Le traitement était généralement le même, à la différence près que ces
16 Albanais catholiques étaient beaucoup plus réticents pour ce qui était de
17 rejoindre leur mouvement. Les Musulmans le faisaient plus aisément. Les
18 Catholiques eux, sur notre territoire occupaient des villages où ils
19 étaient majoritaires et pour les terroristes, il était difficile de les
20 inciter à rejoindre leurs rangs. On a eu l'impression que les mesures à
21 l'égard des Albanais catholiques étaient plus graves, mais je ne pense pas
22 que cela soit effectivement le cas. Je crois que les Albanais catholiques
23 ont résisté davantage que les autres.
24 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire de quelle façon ces centres terroristes
25 ont-ils été formés et que constituaient ces centres terroristes ?
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1 R. Au fur et à mesure de la croissance de ce mouvement terroriste, il a
2 été créé des centres, à savoir des unités de plus grande envergure. Ces
3 centres terroristes ont été créés dans des localités qui étaient
4 ethniquement pures, où il n'y avait pas de Serbes. Ils s'efforçaient là de
5 découvrir des sites où il n'y avait pas de département de la police afin de
6 pouvoir, sur des périodes prolongées, être tout à fait sûrs d'être à l'abri
7 au niveau de ces centres dans les régions ethniquement pures.
8 Sur le territoire de Pec, il y a eu plusieurs centres terroristes,
9 sur le terrain de Rugova, un terrain accidenté.
10 Q. Dites-nous quels étaient les centres les plus forts sur le territoire,
11 par exemple, des attributions du SUP de Pec ?
12 R. Rugova, ce canyon de la Rugova. Ensuite Baranski Lug, le territoire de
13 Mala et Velika Jablanica, dans le village de Radovac et le village de
14 Lloxha, qui est, en fait, une banlieue de Pec. Tous ces centres se
15 trouvaient sous le commandement de Ramush Haradinaj, dans cette zone de
16 Metohija, mais ils avaient aussi des responsables au niveau des villages.
17 Q. Quelle avait été la structure de commandement de l'UCK ?
18 R. Le territoire du Kosovo-Metohija était divisé en plusieurs secteurs. Le
19 secteur de Pec faisait partie de la zone opérationnelle Dukagjini, telle
20 qu'il l'appelait. La zone opérationnelle de la Metohija. Le commandant de
21 cette zone opérationnelle était Ramush Haradinaj. Il avait placé sous ses
22 ordres des commandements des soi-disant brigades de l'UCK, de ce qui est
23 convenu appeler brigades de l'UCK, déployées sur le territoire dont je
24 viens de parler. Dans le cadre de ces brigades, il y avait des unités
25 subalternes. Ils avaient leur police à eux, ils avaient leurs unités
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1 spéciales, ce qu'ils appelaient les unités de la Main noire. Le commandant
2 de la Main noire était Meto Krasniqi, qui a pris un surnom Meto Vranovci,
3 de par sa localité de naissance. Un très grand nombre de crimes a été
4 perpétré sous son commandement. Il en a commis, en personne, bon nombre.
5 Q. Cette notion de "Main noire" a été placée en corrélation avec un groupe
6 serbe équivalent. Vous avez des renseignements au sujet de l'existence de
7 cette Main noire, en tant que fragment ou fraction terroriste d'une
8 organisation ?
9 R. C'était une unité qui était commandée par Meto Krasniqi. Nous avons des
10 déclarations le confirmant.
11 Q. Merci, Colonel. Veuillez nous indiquer où est-ce que la situation
12 sécuritaire était la plus grave sur le territoire de votre secrétariat à
13 l'Intérieur de Pec.
14 R. La situation la plus grave au niveau de la sécurité dans le courant de
15 1998, était sur le territoire du département de Baranski Baran [phon],
16 Celopek, Vlasic, afin je n'arrive pas à me souvenir de tous ces noms de
17 petites localités. Puis, sur le territoire de Klina, c'est le segment
18 Drenica, le village Kijevo. Un village qui était complètement coupé du
19 reste, avec une population majoritairement Serbe qui s'est trouvée isolée
20 pendant plusieurs mois. Sur le territoire du canyon de Rugova, et sur le
21 territoire d'Istok, en direction de Rakos et de Suwogolo [phon]. Puis à
22 Vrelo, sur le territoire d'Istok, avec un centre extrêmement fort, pour ce
23 qui est des forces terroristes.
24 Si l'on se penche sur la totalité de ce que je viens de dire, on peut
25 voir que Pec était encerclé de toutes parts par des centres terroristes
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1 très forts. Les terroristes pendant une certaine période ont coupé Pec du
2 reste du Kosovo-Metohija. Quand je dis "coupé du reste", j'entends par là
3 qu'un habitant de Pec ne pouvait pas en toute sécurité aller jusqu'à
4 Pristina, ou Djakovica ou Decani ou Kosovska Mitrovica en empruntant les
5 voies de communications les plus courtes. Il pouvait aller à Pristina en
6 passant par le Monténégro, en transitant par Kula, Rozaje, Kosovska
7 Mitrovica pour arriver à Pristina. Le même itinéraire devait être parcouru
8 si l'on voulait aller à Djakovica, Djakovica se trouve à 35 kilomètres à
9 peine de Pec. Mais, à l'époque, pour arriver jusqu'à Djakovica, il fallait
10 passer par le Monténégro et contourner la totalité de ce territoire, ce qui
11 faisait à peu près plus de 200 kilomètres.
12 Je suis allé de Pec à Belgrade pour les réunions et j'ai traversé le
13 territoire du Monténégro parce qu'aucun des itinéraires n'était
14 suffisamment sûr et aucun véhicule ne pouvait passer en toute sécurité, à
15 moins d'être blindé, donc, un grand nombre d'attaques, et un grand nombre
16 de personnes ont été tuées sur ces voies de communications. C'est
17 précisément ce qui a provoqué cette coupure de Pec vis-à-vis du reste du
18 territoire.
19 Un grand nombre de familles serbes du Baranski Lug a quitté ses
20 logis, pour passer chez de la famille, des amis à Pec, ou encore plus loin
21 vers la Sumadija et le Monténégro. Un grand nombre d'Albanais également a
22 dû quitter sa maison parce qu'ils ont dû se déplacer vers des milieux
23 autres, venir à Pec, quitter le Kosovo-Metohija, voire même aller à
24 l'étranger pour éviter que leurs enfants ne soient recrutés dans ce qu'il
25 est convenu d'appeler l'Armée de libération du Kosovo.
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1 Q. Je vous arrête là, Colonel. Quand vous parlez du fait d'avoir quitté
2 leurs maisons en grand nombre, et quand vous parlez d'Albanais en grand
3 nombre, dites-nous si dans ces localités d'où les Albanais s'en allaient,
4 il y avait des forces de police ou de l'armée nous appartenant.
5 R. Non, c'était des régions placées sous contrôle de ce qu'il est convenu
6 d'appeler l'Armée de libération du Kosovo. Dans le cadre de nos activités
7 régulières, nous avions des postes de contrôle, des points de contrôle. Par
8 exemple, en direction du Monténégro, à ces postes de contrôle, nous avons
9 enregistré des entrées et sorties des personnes qui faisaient partie du
10 secteur couvert par notre SUP. C'est au quotidien que j'ai consulté ces
11 renseignements. J'ai constaté qu'il y avait plus de personnes s'en allant
12 que de personnes arrivant dans cette région. Nous avions des renseignements
13 tout à fait fiables disant que le territoire de Pec était quitté, abandonné
14 par la population. Nous ne savions pas quand est-ce que ces gens-là
15 allaient revenir, mais il en était ainsi.
16 Q. Vous nous avez dit qu'ils s'étaient attaqués aux civils, tant albanais
17 que serbes.
18 R. Oui.
19 Q. Pourquoi s'attaquaient-ils aux Serbes ? Tout le monde le comprend. Mais
20 pourquoi s'attaquaient-ils alors aux Albanais ?
21 R. Ils s'attaquaient aux Albanais, pour les contraindre à rejoindre les
22 rangs de ce mouvement et dans une deuxième variante pour montrer au reste
23 du monde que c'était nous qui le faisions. Ainsi, il s'est créé une
24 psychose de peur, il s'est installé une psychose de peur. Les Serbes
25 avaient peur des Albanais, les Albanais avaient peur des Serbes et, dans
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1 cette situation, il y a des meurtres, des assassinats, il y a des passages
2 à tabac, des coups de feu tirés en direction de véhicules qui roulaient. On
3 ne savait pas qui est-ce qui tirait. Les uns disaient que c'était les
4 Serbes, les autres disaient que c'était les Albanais. Les deux populations
5 ont pris peur l'une de l'autre.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, si ce témoignage
7 est en corrélation avec une quelconque des parties de l'acte d'accusation
8 disant que des forces serbes s'étaient attaquées à des Albanais qui ont
9 fuis, il serait dans votre intérêt d'identifier les villages, les régions
10 où cela s'est produit plutôt que d'avoir un témoignage fourni en termes
11 aussi généraux.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, dans l'acte
13 d'Accusation, ici, à bon nombre d'endroits, il est question de forces
14 serbes chassant les Albanais et s'attaquant à des Albanais dans leur propre
15 village. Par exemple, si on prend un secrétariat englobant cinq
16 municipalités, je voulais présenter de quelle façon la situation se
17 présentait, ce qui est arrivé. C'est un schéma qui a été mis en place pour
18 ce qui est des attaques qui auraient été lancées à l'encontre d'albanais,
19 des soi-disant attaques de la part des Serbes contre les Albanais. Or, la
20 situation de fait était tout à fait différente et le colonel témoigne au
21 sujet de sa zone de responsabilité, il nous parle des cinq municipalités
22 qui étaient passées sous la responsabilité de Pec.
23 M. NICE : [interprétation] Monsieur le président, pendant cette
24 interruption du témoignage, je voudrais dire que le témoin est en train de
25 se servir de termes généraux, quoique je sache que ce témoignage est en
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1 corrélation avec l'intercalaire numéro 1, mais si nous nous penchons sur
2 cette dernière réponse sur les questions de "psychose," peut-être il serait
3 utile, pour nous, de nous indiquer si une conclusion quelconque de cette
4 nature pourrait être retrouvée dans l'intercalaire 1 ou s'il s'agit là
5 d'une référence de nature tout à fait générale, avant de passer à quoi que
6 ce soit de plus concret.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est une chose
8 qui m'est venu également à l'esprit. Est-ce que tout ceci -- enfin ce
9 témoignage que nous sommes en train d'entendre, se trouve être couvert par
10 des documents figurant à des intercalaires déterminés ici ? Je présume que
11 cela est bien le cas et je m'attends à ce que vous attiriez notre attention
12 sur ce fait, à savoir, à ce que vous attiriez notre attention sur les
13 documents qui accompagneraient le témoignage.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Certainement. Pour ce qui est maintenant de
15 l'intercalaire numéro 1, s'agissant ce que le colonel vient de nous dire
16 tout à l'heure, en page 2, il est dit : "Suite à des assassinats et
17 d'enlèvements des Serbes à Baranski Lug Klina, les populations ont quitté
18 leur village pour aller vers la ville. Ils ont été pillés. Par la suite,
19 leurs biens ont été pillés." On parle de voies de communication, par la
20 suite, et on parle d'autres citoyens qui ont souffert.
21 Je vais être tout à fait concret, je ne vais pas énumérer de ces cas
22 caractéristiques d'attaques terroristes sur le territoire du SUP de Pec.
23 M. MILOSEVIC : [interprétation]
24 Q. Colonel, vous souvenez-vous de l'assassinat de six Albanais ?
25 R. Très certainement. C'est un exemple typique d'exécution d'albanais
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1 désobéissants et cela s'est produit en avril 1998.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que cela se trouve dans l'un
3 quelconque des intercalaires, à savoir, les documents que vous avez devant
4 vous ? Si vous ne pouvez pas nous le dire, allons de l'avant. Peut-être
5 pourrions-nous y revenir, par la suite. Si vous n'êtes pas en mesure de
6 nous indiquer l'intercalaire qu'on fait, dans lequel nous serions à même de
7 retrouver cette information, nous pourrions aller de l'avant.
8 M. MILOSEVIC : [interprétation]
9 Q. Colonel, ce renseignement concernant l'assassinat de ces six Albanais
10 figure t-il dans les documents que vous avez ici ou pas ?
11 R. Pas dans celui-ci.
12 Q. Mais est-ce que cela figure dans l'un quelconque de vos documents ?
13 R. Non. Je peux vous expliquer de quoi il en retourne. Sur le territoire
14 de notre zone de responsabilité, il a été procédé à l'enlèvement de ces six
15 Albanais. L'exécution a été effectuée sur le territoire du SUP de Prizren,
16 ce qui fait que le dossier se trouve au niveau du SUP de Prizren, à ce
17 sujet-là; mais j'ai des informations à ce sujet puisque l'enlèvement a eu
18 lieu dans notre zone territoire et a été enregistré dans nos registres.
19 Nous avons eu des contacts, à ce sujet, ultérieurement avec le SUP de
20 Prizren.
21 Q. Bien. Mais ce fait relatif à l'enlèvement fait-il partie de l'un
22 quelconque de ces documents ?
23 R. Non, pas ici. Mais au registre des événements du SUP de Pec, oui, cela
24 est dit. Je n'ai pas pu apporter tous les dossiers que j'avais là-bas. Si
25 j'avais su qu'on en parlerait, je me serais efforcé de l'apporter,
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1 également.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allons de l'avant, Monsieur
3 Milosevic.
4 M. MILOSEVIC : [interprétation]
5 Q. Je vous remercie, Colonel.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant d'aller de l'avant, je voudrais
7 tirer au clair, avec le témoin, ce dont nous parle ce document.
8 Il me semble que tous ces documents ont été élaborés et signés par
9 vos soins; est-ce bien exact ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci, en mai 2002, à l'occasion de quoi
12 et à quelle fin avez-vous établi ce document ? Pouvez-vous nous le préciser
13 avant d'aller de l'avant ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] En répondant à l'une des questions posées lors
15 de l'audience précédente, j'ai expliqué que nous avons mis de l'ordre dans
16 les documents qui ont été transportés du SUP de Pec, nous les avons placés
17 dans les dossiers correspondants. Ces documents-ci font partie du dossier
18 KM. J'ai été chef du secrétariat.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, j'ai cru comprendre cela. Mais
20 pourquoi en mai 2002 ? C'est cela la question que je vous ai posée.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que nous nous n'avons pas pu le faire
22 avant. Nous nous sommes retirés, nous nous sommes repliés, nous avons dû
23 nous organiser, nous avons dû attendre que toute cette documentation nous
24 parvienne.
25 Je devrais vous parler du chaos qui s'est créé déjà dans cette
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1 situation de guerre. Nous avons dû transporter, d'abord, la documentation
2 vers d'autres sites pour éviter les destructions à l'occasion des
3 bombardements parce qu'une partie a effectivement été détruite et par la
4 suite, il a fallu retrouver tout cela. Nous avons retrouvé des documents
5 qui ont été rédigé à l'époque où cela était normal, en 1998, en 1999; puis,
6 nous les avons retrouvés, nous les avons entreposés; puis, nous les avons
7 classés, nous les avons retrouvés feuille par feuille. Nous avons finalisé
8 cette tâche au mois de mai et nous l'avons fait en mai 2002 et certains
9 documents ont été finalisés avant cette date-là. C'est la raison pour
10 laquelle c'est à ce moment-là que cela a été signé. Il n'y a pas d'autres
11 raisons de le faire au mois de mai, mis à part cette situation objective
12 qui a découlé de ces déménagements et de ce chaos qui s'était installé.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
14 Vous pouvez continuer, Monsieur Milosevic.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Colonel, ces documents ont tous été établis suite à des ordres donnés
17 par les autorités de la Serbie de l'époque ?
18 R. Oui, nous les avons classés de la sorte sans qu'il nous en soit donné
19 l'ordre précis. Mais cette méthodologie, la classification a été
20 effectivement réalisée suite à un ordre qui a été donné dans ce sens.
21 Q. Qui était Sali Berisha et pourquoi a-t-il été tué ?
22 R. Sali Berisha était le propriétaire d'une station-service dans la zone
23 de Klina; il était bien connu. Il était connu parce qu'il vendait du
24 carburant aussi bien aux Serbes qu'aux Albanais. Les membres de ce qu'on
25 appelle l'UCK le critiquaient parce qu'il vendait du carburant aux Serbes,
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1 qu'il les fréquentait. On l'a critiqué, mais il a continué à fréquenter les
2 Serbes, à leur vendre de l'essence et à ce moment-là, ils ont dit qu'il
3 était un traître ainsi que ses employés, les membres de sa famille. Un soir
4 d'avril 1998, ils les ont tous enlevés, ils sont allés chez eux, ils les
5 ont enlevés, je parle de cet homme, des membres de sa famille, de ses
6 voisins, en tout, il y avait six Albanais aussi qui travaillaient avec lui.
7 On est venu les chercher, des hommes en uniforme de l'UCK sont venus, les
8 ont enlevés et les ont exécutés au bord de la route Malisevo-Orahovac.
9 Q. On peut dire que Sali Berisha a été tué parce qu'il vendait de
10 l'essence dans sa station-service, il vendait de l'essence aux Serbes ?
11 R. C'est exact.
12 Q. Vous parlez de Lloxha. Où cela se situe ?
13 R. Lloxha, c'est un village qui est dans les faubourgs de Pec.
14 Q. Que savez-vous du conflit opposant l'UCK et la police à Lloxha ?
15 R. A Lloxah, les terroristes ont mis en place des fortifications
16 extrêmement solides, extrêmement développées. Ils ont creusé des tranchées,
17 tout un réseau de tranchées. Ils étaient puissamment armés et tout ceci,
18 dans le cadre de leurs efforts destinés à prendre le contrôle de Pec et à,
19 voire, tester notre réaction.
20 Au début de juillet 1998, ils ont attaqué la famille Vujosevic, il
21 s'agissait d'une famille serbe qui résidait à Lloxha, une unité envoyée du
22 QG du SUP de Pec pour protéger cette famille. L'unité de la police en
23 question est arrivée sur place, elle est allée dans la maison de ces gens,
24 ils ont protégé la famille en question, mais quand ils sont retournés à Pec
25 ou plutôt en route, en chemin, ils sont tombés dans une embuscade. Les
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1 terroristes ont attaqué l'unité de police -- je ne sais pas comment cela va
2 être traduit, mais ils ont utilisé des lance-roquettes portables, des
3 fusils automatiques. Lors de cette embuscade, deux policiers ont été tués
4 parce que le véhicule de type Pinzgauer a été touché. Perovic a été enlevé,
5 c'était un capitaine -- enfin, il y a un deuxième qui a été kidnappé, deux
6 policiers ont été tués. On ignorait, au départ, ce qui était advenu d'eux.
7 Puis, au bout d'un très long temps, on a trouvé leurs cadavres, il
8 s'agissait du capitaine Perovic et du policier Rajkovic, et on a pu
9 établir, grâce à l'autopsie, qu'ils étaient morts dans des souffrances très
10 grandes.
11 Quand on est parvenu à chasser les terroristes de la région, on a découvert
12 des caches d'armes importantes, fusils automatiques, mitrailleuses,
13 mitraillettes, et cetera ainsi que tout un réseau de tranchées.
14 Q. Ceci, on peut le retrouver dans les documents qui ont été fournis ?
15 R. Oui. Une rue située à Pec, à 300 mètres de la caserne de la JNA a été
16 le théâtre de combats à l'entrée de la ville de Pec parce que les
17 terroristes avaient lancé une attaque et tentaient de prendre le contrôle
18 de la ville de Pec pour y établir leur propre gouvernement, si l'on peut
19 dire.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs, j'aimerais attirer votre attention
21 sur la chose suivante : M. Nice a cité un ou deux témoins, je ne me
22 souviens plus exactement du nombre, qui ont dit que c'étaient les policiers
23 qui avaient attaqué les Albanais à Lloxha. Or, maintenant, vous avez la
24 possibilité de savoir ce qui s'est effectivement et véritablement passé à
25 Lloxha.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, mais ce n'est pas uniquement à
2 Lloxha que cela s'est passé. Ils ont, également, lancé une attaque contre
3 Pec même. A l'entrée de Pec, Brezanicko-Litsa [phon], c'est-à-dire, la rue
4 Bresanicko, c'est là que cela s'est passé; la caserne de la VJ de l'armée
5 de la Yougoslavie a également été visée, mais l'armée n'a pas quitté les
6 casernes.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous souvenez-vous
8 des témoins auxquels il est fait référence ? Maître Kay, vous en souvenez-
9 vous ?
10 M. NICE : [interprétation] Non. Je remarque que l'accusé en a parlé, j'ai
11 bien entendu, mais je ne me souviens pas de ces témoins. Je vais essayer de
12 voir ce qu'il en est pour voir si cela représente un intérêt quelconque.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que vous
14 savez de quels témoins il s'agit, de quels témoins à charge il s'agit ?
15 Parce que j'aimerais bien pouvoir revoir leurs propos, leurs dépositions.
16 Est-ce que vous avez des noms ?
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, malheureusement, non. Je me suis souvenu
18 qu'on en avait parlé au moment même où le témoin nous a parlé de Lloxha et
19 ce qui s'était passé, mais je vais faire des recherches.
20 M. NICE : [interprétation] Je vais faire en sorte que nous obtenions cette
21 information pendant la pause.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le nom de la ville de Lloxha a été
24 mentionné dans le compte rendu d'audience du 25 avril. Cela pourra peut-
25 être vous aider.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, d'intervenir encore, il
3 s'agit du 25 avril 2002. Poursuivez, Monsieur Milosevic.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce qui nous permet entre parenthèses
5 de nous rappeler de la très longue durée de notre affaire.
6 M. MILOSEVIC : [interprétation]
7 Q. Colonel, que pouvez-vous nous dire des activités des frères Salihaj
8 dans une zone qui faisait partie de votre zone de responsabilité, la zone
9 d'Istok ?
10 R. Il y avait huit frères Salihaj. Je crois qu'ils étaient huit; cela
11 figure dans les documents. Ils se sont rendus coupables d'un très grand
12 nombre d'attentats. Ils étaient membres de l'armée de libération du Kosovo.
13 Gajic Rajko a été tué ainsi que d'autres personnes. Dans le village de
14 Rakos, quelqu'un a été tué au moment où on a lancé une grenade chez lui et
15 sa femme a été blessée.
16 Q. Que savez-vous des crimes à Velika Krusevo et Budisavci ?
17 R. Les terroristes ont mené une attaque contre les habitants du village de
18 Budisavci. Ils ont fait sortir Dalibor Lazarevic de sa maison. Il avait 16
19 ans, c'était à Krusevo et ils l'ont exécuté. Sommairement, c'était un jeune
20 homme de 16 ans.
21 Q. Rifat Ajdinaj, savez-vous ce qui lui est arrivé, en juin 1998 ?
22 R. Tout le monde, pratiquement, sait ce qui s'est passé, tous ceux qui
23 habitaient dans la zone, à l'époque. On en a parlé. On en a beaucoup parlé
24 et c'est exact. Ajdinaj Rifat ne voulait pas devenir membre du mouvement de
25 ce qu'on appelle l'UCK et il a tué son propre fils Malj. Il l'a abattu. Il
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1 ne l'a pas laissé partir et il a utilisé son propre fusil pour le tuer.
2 Ensuite, il s'est constitué prisonnier auprès de la police et il a expliqué
3 quelles étaient ses raisons.
4 Q. Dans la période dont vous nous parlez, de 1998 à 1999, y a-t-il y eu
5 des enlèvements ?
6 R. Oui. Plusieurs enlèvements de Serbes et d'Albanais. Plus de 15 Serbes
7 ont été enlevés ainsi que dix Albanais, environ, cette année et ceci,
8 uniquement, pour les mois de juin et juillet. Voilà les chiffres qui
9 concernent ces mois. Nous avons un chiffre total pour 1998 et 1999, mais
10 là, je suis en train de vous parler de ces deux mois, uniquement, du nombre
11 de Serbes et d'Albanais enlevés en juin et juillet 1998, des mois qui ont
12 été vraiment très problématiques pour ce qui était de la sécurité parce que
13 ce sont les mois pendant lesquels la situation a été la plus problématique
14 sans même tenir compte de l'agression de l'OTAN.
15 Q. Est-ce que ces routes ont été prises à ce moment-là ?
16 R. Oui. C'est une période pendant laquelle Pec a été littéralement coupé
17 du reste de la Serbie et la seule manière de quitter Pec, c'était de passer
18 par le Monténégro.
19 Q. Bien. En 1998, c'est-à-dire, la période précédant l'arrivée de la
20 Mission de vérification, je voudrais savoir quand les forces de police ont
21 mis en place des mesures anti-terroristes ?
22 R. La police a pris des mesures anti-terroristes en juillet et en août.
23 Q. Après cette période qui a connu un paroxysme ?
24 R. Oui. Ils ont été contraints de prendre des mesures parce que la
25 situation était intenable. La population était dans une situation très
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1 difficile; je parle aussi bien des Albanais que des Serbes. Il était
2 impossible de se déplacer où que ce soit. Il était de plus en plus
3 difficile d'assurer le ravitaillement.
4 Q. Vous l'avez déjà expliqué. Quel était l'objectif des activités anti-
5 terroristes et qui visaient-elles?
6 R. Les activités anti-terroristes visaient uniquement les terroristes,
7 ceci d'une manière organisée et planifiée. La police n'est pas intervenue
8 de manière individuelle. Elle n'est pas intervenue de manière exagérée. Les
9 activités ont été planifiées et organisées parce que l'objectif c'était
10 d'éviter toutes victimes civiles. Ces mesures visaient uniquement les
11 terroristes dans l'objectif de débloquer les routes et de permettre à la
12 population de rentrer chez elle pour chasser les terroristes.
13 Nous avons dans les autres chapitres des autres documents des
14 éléments qui permettent de montrer que des familles entières ont quitté
15 certains villages.
16 Q. Comment les policiers traitaient-ils les civils pendant ces missions ou
17 ces mesures anti-terroristes ?
18 R. Les policiers avaient pour mission de protéger tout le monde et la vie
19 de tout le monde aussi bien les civils que les terroristes. C'est-à-dire
20 qu'il ne fallait tuer personne sauf si c'était absolument nécessaire. Pour
21 les civils, c'était complètement hors de question et, pour les terroristes,
22 c'était une solution de dernier recours s'ils n'étaient pas en mesure de
23 repousser les terroristes de les arrêter ou si la police faisait l'objet
24 d'une attaque terroriste en progressant. S'il n'y avait pas d'autres
25 recours, on pouvait tirer sur les terroristes, mais il fallait l'éviter si
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1 cela risquait de mettre en cause la vie des civils.
2 Q. Quels ont été les résultats de ces activités anti-terroristes menées
3 par la police.
4 R. Cela a eu pour conséquence de débloquer la zone. Les terroristes ont
5 été repoussés, les axes routiers ont pu être débloqués. On a pu dégager
6 tout ce qu'ils avaient mis à coté de la route. Par exemple, à Iglarevo, où
7 ils avaient mis en place leurs propres frontières, ils empêchaient les gens
8 de passer. J'y suis allé en personne, il a fallu prendre des mesures pour
9 dégager tout ce qui avait été placé à cet endroit. Les gens sont rentrés
10 chez eux.
11 Jusqu'à un certain point, les terroristes sont partis avec les civils, les
12 groupes terroristes ont été démantelés. Certains sont retournés en Albanie,
13 mais il y en a d'autres qui sont restés parmi la population civile. Ils se
14 sont cachés. Ils ont amenés des armes dans certains villages. Une situation
15 paradoxale finalement.
16 Parce que 15 jours avant la police ne pouvait pas y aller, les civils
17 ne pouvaient pas rentrer chez eux. Puis ensuite, deux policiers venaient
18 récupérer toutes les armes que les terroristes avaient laissées sur place.
19 On a fait en sorte qu'autant de terroristes que possible donnent leurs
20 armes, sans prendre ensuite de mesures contre eux, sans aucune mesure
21 contre eux.
22 Q. Quelles sont les unités qui ont participé aux activités à Pec ?
23 R. Des unités spéciales de la police ont participé. Il y avait une unité
24 spéciale, une unité anti-terroriste, ainsi également que des forces de la
25 police régulière.
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1 Q. Sur la zone de compétence de Pec, est-ce qu'il y avait de la sécurité
2 locale ?
3 R. Oui.
4 Q. Qu'est-ce que cela veut dire exactement ce terme ?
5 R. C'est un concept. La sécurité locale, c'est un concept qui a été mis en
6 œuvre pour essayer d'apaiser les tensions, de les minimiser. A savoir que,
7 dans un village donné, les villageois choisissaient quelqu'un pour les
8 représenter. Un représentant qui recevait un uniforme qui se distinguait
9 des autres uniformes. L'individu concerné recevait un insigne, un document
10 d'identité particulier et il était habilité à procéder à des contrôles
11 d'identité et même à procéder à des arrestations pour emmener les gens
12 jusqu'au SUP.
13 La sécurité locale était organisée et financée par la municipalité et
14 pas par le SUP.
15 L'idée sous-jacente, c'était de réduire la présence policière dans
16 les villages. S'il n'y avait pas de problèmes graves, la police n'avait pas
17 à intervenir, c'était la sécurité locale qui s'en chargeait. L'idée c'était
18 que cela permettrait de réduire le nombre de provocations des deux côtés
19 parce que certains Albanais considéraient que c'était une provocation de
20 voir des policiers dans les villages. Pour eux, c'était déjà un acte de
21 provocation. On a pensé qu'il y aurait moins d'actes terroristes et que les
22 tensions s'apaiseraient peu à peu.
23 Q. Puisque vous ne l'avez pas dit vous-même, je dois vous demander si ces
24 membres de la sécurité locale disposaient d'armes ?
25 R. Oui, des pistolets, des armes à canon court.
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1 Q. Ils avaient des papiers d'identité, des badges, des armes ainsi que des
2 matraques, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Ils avaient l'équipement de n'importe quel policier ?
5 R. Oui, mais ils avaient des armes différentes.
6 Q. Bien. Dans certains villages, c'est les habitants eux-mêmes qui
7 choisissaient ce représentant ?
8 R. Oui.
9 Q. Dans les villages albanais, est-ce que ces représentants étaient
10 toujours albanais ?
11 R. Oui.
12 Q. Les Albanais dans ces conditions décidaient eux-mêmes qui devaient être
13 leur policier ?
14 R. Oui.
15 Q. C'était là l'idée sous-jacente, l'idée maîtresse ?
16 R. Oui.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'entends, Monsieur Milosevic, que
18 les interprètes ont un peu de mal à vous suivre parce que vous parlez
19 extrêmement vite, faites donc une pause je vous prie avant de poser vos
20 questions.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Colonel, parlez-nous de l'attitude de l'UCK envers la population locale
23 ou plutôt envers la sécurité locale.
24 R. J'essaie de faire une pause.
25 Q. Oui, mais n'exagérez pas, ne faites pas de trop longues pauses, faites
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1 une toute petite pause.
2 R. Mais ils étaient complètement opposés à cela parce que c'était
3 totalement opposé à leurs propres intérêts. Ils ont essayé de gagner les
4 faveurs de la sécurité locale et s'ils n'y parvenaient pas, à ce moment-là,
5 ils leur faisaient des difficultés, les maltraitaient ou même les tuaient,
6 eux-mêmes ou les membres de leurs familles.
7 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples de ce type
8 d'incidents concernant les membres de la sécurité locale ?
9 R. Oui.
10 Q. Il y a quelques instants on a dit qu'ils étaient tous Albanais.
11 R. Oui. Je connais le cas de la famille Klimenta. Il y avait, dans cette
12 famille, un membre de la sécurité locale et à cause de cela la famille a eu
13 des problèmes considérables. Ils ont dû quitter le Kosovo-Metohija à cause
14 de cela.
15 Q. J'aimerais que vous vous reportiez à l'intercalaire 10.1 et 10.2. Est-
16 ce que là on trouve une plainte déposée contre ces personnes qui avaient
17 procédé à cette attaque ? Il s'agit de la déclaration de Klimenta Idriz et
18 la déclaration de Klimenta Malj; 10.1 et 10.2.
19 R. C'est exact. Je reconnais les documents. Je ne connais pas
20 l'intégralité du contenu de ces documents, mais je sais ce dont il s'agit.
21 Il s'agit de déclarations d'Idriz Klimenta et Malj Klimenta qui sont
22 membres de la famille Klimenta. L'un des deux était membre de la sécurité
23 locale.
24 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de documents
25 pour lesquels se pose la question de la recevabilité. Recevabilité dont
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1 nous avons déjà débattue précédemment vu la nature des documents. Le témoin
2 nous dit lui-même qu'il ne connaît pas la totalité de la teneur de la
3 déclaration du témoin. Je me demande si de telles déclarations du même type
4 produites par ce témoin doivent véritablement être versées au dossier
5 puisque, dans ce cas-là, il s'agit véritablement d'éléments de preuve par
6 ouï-dire, même si, a priori, il s'agit de déclarations de témoins.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Essayons d'en savoir un petit peu
8 plus, Monsieur Milosevic.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] L'intercalaire 10, le témoin vient de nous
10 parler de la manière dont L'UCK traitait les membres de la sécurité locale.
11 L'un des membres de cette famille avait été choisi, élu par la population
12 de son village. Ce que vous avez sous les yeux c'est une plainte, un
13 rapport qui est accompagné par les déclarations de ces deux hommes qui
14 corroborent cette plainte au pénal, qui est un document officiel du
15 secrétariat de l'Intérieur de Pec qui a trait à des actes criminels
16 perpétrés contre Idriz Klimenta dont on trouve la déclaration à
17 l'intercalaire 10.1, ainsi que Malj Klimenta dont on trouve la déclaration
18 au 10.2.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais quel est le rapport avec la
20 déclaration ? Qu'est-ce que le témoin a à voir avec tout cela ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais beaucoup, parce qu'il était à la tête du
22 SUP de Pec, donc il a un rapport direct avec Pec. Cela relevait, à
23 l'époque, de ses compétences directes puisque automatiquement du fait des
24 fonctions qu'il occupait, il était en charge de tout ce qui se passait dans
25 la zone de Pec. Il nous dit qu'il ne connaît pas par coeur tout ce qui
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1 figure dans sa déclaration, mais cela ne signifie pas pour autant qu'il
2 n'ait pas connaissance de ces déclarations ou de ces événements. Bien au
3 contraire, puisqu'il nous a parlé de ces événements eux-mêmes sans entrer
4 en détail dans tout ce qui figure dans la déclaration.
5 Ces déclarations ont été fournies pour corroborer l'affirmation du
6 témoin selon laquelle la population albanaise locale faisait l'objet des
7 attaques de l'UCK.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A qui cette déclaration a-t-elle
9 été faite ?
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Je vous demande d'examiner ces documents, Colonel, et de nous
12 fournir des explications.
13 R. Ces déclarations ont été recueillies par le chef du service des
14 enquêtes criminelles au sein de la police de Pec, Danilo Bulatovic, dans
15 l'antenne de Kragujevac, une antenne du SUP.
16 J'ai eu en main ces déclarations et on s'est concerté pour savoir quelles
17 mesures devaient être prises. Une plainte pénale a été transmise au bureau
18 du procureur de district. Je ne peux pas vous dire verbatim de quoi il
19 s'agit parce que je ne connais pas cette affaire par cœur, mais je connais
20 le sujet. Je sais de quoi il s'agit et je sais quand ces déclarations ont
21 été recueillies.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.
23 Monsieur Paponjak, savez-vous à quel moment ces déclarations ont été
24 recueillies ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne peux pas vous donner la date
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1 précise.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais si vous vous reportez à la première
3 page de l'intercalaire 10, pas 10.1 mais 10. Je vois ici la date du 28 juin
4 2002. Est-ce que cette date est la date à laquelle cette déclaration a été
5 recueillie ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible que la déclaration a été
7 recueillie ce jour-là ou quelques jours avant.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les événements dont il est question dans
9 cette déclaration, à quel moment se sont-ils produits, est-ce qu'ils se
10 sont produits en 1998 ou en 1999 ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Malgré cela, on voit que la déclaration
13 a été recueillie en 2002 ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela n'a aucune importance, ce n'est pas
15 du tout inhabituel vu la situation dans laquelle on travaillait, car la
16 famille Klimenta avait pris la fuite, avait quitté le Kosovo, et c'était la
17 première fois qu'ils sont allés à un poste du SUP pour y percevoir de
18 nouveaux papiers d'identité, c'est à ce moment-là qu'on a été en mesure de
19 recueillir leurs déclarations à Kragujevac, parce qu'à l'époque, ils
20 vivaient au Monténégro.
21 Ce n'est pas la seule déclaration ayant trait aux événements de 1998 qui a
22 été recueillie par nos soins beaucoup plus tard, en 2002, par exemple.
23 Certaines déclarations n'existent pas et n'ont pas été recueillies parce
24 qu'on n'a pas été en mesure d'entrer en contact avec toutes les personnes
25 concernées, toutes les personnes lésées.
Page 38994
1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous
3 allons entendre ce que ce témoin a à nous dire à propos de cette
4 déclaration. Je suppose qu'au bout du compte, vous allez demander le
5 versement de ces documents provisoirement, en attendant la traduction. Mais
6 nous ne savons même pas ce que contient cette déclaration. Est-ce que le
7 témoin est à même de nous dire ce que cette déclaration contient ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai fait une sélection dans
9 les documents, c'est clair à mes yeux, il n'est pas possible de verser au
10 dossier, même la majorité des documents, à fortiori, pas la totalité. Par
11 exemple, pour Obradovic, il y a eu des dizaines de milliers de pages de
12 documents et mes associés les ont réduit à quelques centaines. C'était un
13 commandant militaire d'une région donnée qui présentait des documents
14 importants à l'appui de sa déposition.
15 Mais ici, ce document est tout à fait caractéristique et tout le
16 monde, tout lecteur pourra voir, en le lisant, de quelle façon l'UCK a
17 instauré la terreur qui règne encore aujourd'hui au Kosovo. Je vous demande
18 gentiment de nous permettre d'examiner la teneur de cette déclaration-ci
19 parce que le monsieur qui a donné cette déclaration n'a pas été arrêté. Il
20 s'est présenté à un centre de police qui avait été démantelé, à Pec et
21 installé ailleurs et cet homme veut que ses droits soient rétablis.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pourriez citer cet homme
23 en tant que témoin.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est très difficile. Permettez-moi
25 d'attirer votre attention sur une chose. Je demanderais au témoin de suivre
Page 38995
1 ce que je dis. Dernière page, en matière d'authenticité, il est dit : "Mon
2 épouse a fait une déclaration, à plusieurs reprises, à la MINUK et à la
3 KFOR, à Pec, à propos de toutes les circonstances que je décris ici, en
4 personne. Je demande que toutes les mesures judiciaires soient prises à
5 l'encontre des criminels de l'UCK afin de me permettre de réintégrer ma
6 propriété."
7 Mes associés ont essayé de contacter cet homme. Il n'est plus là où
8 il était. Il a changé d'adresse. J'espère que nous finirons par le trouver,
9 lui et d'autres. Mais comme c'est le cas pour tous les Albanais qui sont
10 dans cette situation, ils ont besoin d'une certaine protection. Nous ne
11 parlons pas ici d'exactions. Nous parlons d'une question de vie ou de mort.
12 Alors, si c'est une question de vie ou de mort, c'est vrai pour lui, mais
13 toute sa famille aussi.
14 Voyons ce que dit sa déclaration. Cela ne va pas prendre beaucoup de
15 temps.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ce sera encore mieux
17 d'avoir un résumé et ceci pourra, bien sûr, considérablement conforter
18 votre position, Monsieur Milosevic, s'il vous est possible de faire venir à
19 la barre cet homme, dans la mesure où c'est pertinent.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une déclaration des plus
21 pertinentes, Monsieur Robinson. Ecoutez ce qu'il dit au début : "Je suis né
22 et j'ai toujours vécu près de Pec, dans le village de Kosuric. J'avais une
23 maison qui a été détruite, démolie par l'UCK. J'avais aussi huit hectares
24 de terre."
25 Il est dit aussi : "Je vivais paisiblement avec tous mes voisins,
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1 Albanais comme Serbes. Jamais je n'ai eu des problèmes avec la loi. Je
2 vivais bien, j'étais content parce que je pouvais nourrir mes enfants et je
3 pouvais nous procurer tout ce dont nous avions besoin pour vivre
4 normalement. Jusqu'en 1998, jamais je n'ai eu de problèmes avec l'UCK. En
5 janvier 1998, je ne me souviens pas de la date exacte, sans aucune raison,
6 vers minuit, des membres de l'UCK ont tiré sur ma maison à l'arme
7 automatique et ont lancé des grenades à main."
8 Puis, il dit qu'au mois de mai de la même année, Selim Met Kelmendi,
9 qui était commandant de l'UCK de Kosuric, et Redj Ajdar Kelmendi, qui était
10 son adjoint, sont venus et l'ont fait sortir dans la cour. Ils étaient tous
11 les deux en uniforme et avaient des armes automatiques. Il poursuit en
12 disant : "Selim et Redj m'ont dit de tuer les Serbes de mon village et de
13 tuer ceux qu'ils me donnaient l'ordre de tuer, y compris des membres de ma
14 famille. Ils m'ont même dit que je devais tuer mon propre oncle, Saliju
15 Klimenta et d'autres membres de ma famille. Ils m'ont dit que si je le
16 faisais, si je remplissais cette mission, je pourrais rejoindre leurs
17 rangs. Si ce n'était pas le cas, ils allaient me tuer et mon fils. Puis,
18 ils sont partis. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais c'était vers
19 midi. La conversation a duré, à peu près, 30 minutes."
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce n'est pas
21 vous qui êtes à la barre des témoins. C'est le témoin qui doit déposer. Il
22 faut que vous posiez une question à ce témoin, s'agissant des éléments
23 contenus dans la déclaration.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Mais j'ai un message du
25 Pr Rakic, s'agissant de la déposition et j'aimerais qu'on passe à huis clos
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1 partiel car je vais donner un nom, un seul. Un petit instant.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît,
3 Madame la Greffière d'audience.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, le Pr --
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous sommes, maintenant, à huis clos
6 partiel.
7 [Audience à huis clos partiel]
8 (expurgée)
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1 (expurgée)
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14 (expurgée)
15 (expurgée)
16 [Audience publique]
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Un peu plus loin, on dit
18 qu'après cette conversation et après l'expression de ces menaces, il a
19 passé un certain temps dans les bois et il revenait une heure ou une demi-
20 heure chez lui de temps en temps. Il dit : "J'ai fait rapport de l'incident
21 à la police de Celopek. Mais les policiers n'avaient pas la possibilité
22 d'empêcher ce qui se passait parce que l'UCK avait déjà occupé une grande
23 partie du territoire."
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Est-ce qu'il parle du territoire entourant son village ?
Page 38999
1 R. Oui.
2 Q. Etiez-vous au courant de ceci, même si vous avez dit n'être pas au
3 courant de tous les détails dans cette déclaration ?
4 R. Oui, je sais parfaitement ce qu'il en est. Je ne connais pas tous les
5 détails, toutes les dates contenues dans cette déclaration, mais je sais à
6 quel moment ces déclarations ont été recueillies et je sais à quel moment
7 la plainte à été déposée, la plainte au pénal et j'ai personnellement signé
8 la lettre qui accompagnait la plainte destinée au procureur public; ce
9 document ne se trouve pas ici, mais il s'agit d'un formulaire habituel.
10 Cette déclaration, alors, était recueillie à Kragujevac où il y avait
11 très peu de travail. C'est le chef de la police judiciaire qui a recueilli
12 ceci parce que c'était une affaire complexe et c'est la raison pour
13 laquelle le chef s'est chargé, lui-même, de recueillir cette déclaration.
14 Cette déclaration a été signée, chaque page a été signée par la
15 personne faisant la déclaration. C'est, sans aucun doute, une pièce
16 authentique. Elle décrit jusqu'aux moindres détails ce qu'a vécu sa
17 famille, comment ses fils ont été tués, les mesures prises par la MINUK et
18 les mesures qui n'ont pas été prises, non plus. C'est la raison pour
19 laquelle nous avons envoyé cette plainte au procureur public régional de
20 Pec dans l'espoir de pouvoir prendre des mesures supplémentaires.
21 Q. Vous mentionnez un certain Meto Krasniqi Vranovci. Le nom revient ici,
22 n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Ses cousins, Havnija et Meto Mehmeti qui sont de Pozara près de Decani;
25 vous voyez ceci à la page 2 ?
Page 39000
1 R. Oui.
2 Q. On dit que Meto Krasniqi Vranovci était le commandant des Mains noires
3 et c'est lui qui disait qu'il fallait tuer. Sa base se trouvait à Vranovac.
4 Dans ses unités, il avait plus de 1000 hommes venant de 19 villages. Il
5 avait des gens partout. Il a tué beaucoup de gens et il a violé des
6 Albanaises. Je sais qu'il a amené une Albanaise d'Istinic, l'a violée et
7 l'a tuée. Le village entier le savait. En 1998, Meto et son groupe sont
8 venus chez Zenun Gashi, un policier de Kosuric, manifestement, c'était un
9 Albanais, il l'a kidnappé et il l'a massacré. Il a torturé Gashi pendant
10 trois heures. Après avoir été enlevé, Gashi a été emmené dans le village de
11 Dasinovac, près de Decani, au QG et c'est là qu'il a été très brutalement
12 tué.
13 R. Oui. C'était un policier dont l'épouse a, plus tard, engagé une action
14 en justice et sa mort a été confirmée cinq ans plus tard. Ces informations,
15 nous les avons obtenues seulement lorsque ces personnes sont venues nous
16 voir à Kragujevac.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps, j'en suis
18 désolé, mais l'heure est venue de faire la pause. Elle sera de 20 minutes.
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 43.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice.
22 M. NICE : [interprétation] Il y avait une demande en ce qui concerne les
23 éléments de preuve se rapportant à Lloxha. Une fois, Karleusa a mentionné
24 une ville en passant, mais sinon ceci a surtout fait l'objet de la
25 déposition comme l'a dit le Juge Kwon au moment du témoin Ndrec Konaj.
Page 39001
1 C'est dans le cadre du contre-interrogatoire de ce témoin, ainsi que la
2 pièce 112 versée en vertu du 92 bis, donc c'est à ce propos que ces termes
3 sont évoqués, c'est tout ce que notre recherche a donné.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela concerne des événements du mois
5 de juillet 1998 ?
6 M. NICE : [interprétation] Je pense que oui, mais il faudrait que j'y
7 regarde de plus près pour le savoir.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.
9 M. KAY : [interprétation] Il s'agit de l'attaque dirigée contre ce quartier
10 de Pec, mais ce n'est pas mentionné avec beaucoup de détails.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En 1998 ?
12 M. KAY : [interprétation] Oui, apparemment, mais cela n'est pas tout à fait
13 clair.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Milosevic vous avez
15 la parole.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Colonel, nous nous étions arrêtés au moment où nous discutions de cette
18 déclaration dont j'ai cité certains passages. On parlait du commandant des
19 Mains noires, Metonovci Krasniqi. Il dit qu'il y avait plus de 1 000 hommes
20 venant de 19 villages, page 3, il dit que : "Meto était un proche associé
21 de Ramush Haradinaj, et qu'il était au QG près de Dasinovac. Je sais qu'il
22 a commis beaucoup de crimes contre les Serbes et les Rom. Il les a égorgés.
23 C'est comme cela qu'il les tuait. Sinon, il était de Kline et c'est au QG
24 de Kline qu'il y eu un événement vraiment horrible où toutes les victimes
25 ont été massacrées."
Page 39002
1 Vous avez trouvé ce passage, vous êtes au courant de ces événements ?
2 R. Oui.
3 Q. Je vous ai demandé si vous étiez au courant de ces événements ?
4 R. Oui. Maintenant je vous entends, oui, le micro est branché. Je suis au
5 courant de ces événements. Idriz Balaj a été condamné à Kosmet, par le
6 tribunal de Kosmet pour avoir tué des Albanais, c'était lui l'auteur de ces
7 meurtres. Il ne s'est pas contenté de tuer des Serbes, il a aussi tué des
8 Albanais. Il a été condamné lors d'un procès de 2002, et il a été condamné
9 à une peine d'emprisonnement. Maintenant, il comparaît devant ce Tribunal
10 avec Ramush Haradinaj. Puis, il dit que vers la fin du mois de mars, car il
11 y avait eu des menaces proférées par l'UCK contre sa famille, il a dû
12 quitter le village avec sa famille. Cinquante quatre membres de sa famille
13 ont quitté Kosuric en passant par Celopek pour aller à Klincina et pour se
14 présenter à la police, pour demander la protection de la police.
15 C'était le poste de police le plus proche où il pouvait aller pour
16 chercher de l'aide.
17 Ce matin là, son fils Gzim Klimenta, âgé de 15 ans, a été enlevé. Il
18 était devant sa maison lorsqu'il a été enlevé. Là, on a le nom des
19 personnes qui l'ont enlevé : Fljorim Alickaj, Astrit Thaci, Ram Kelmendi
20 également, et il y a une autre personne dont il ne connais pas le nom. Il a
21 été emmené au QG, et il dit que Ramush Haradinaj était au QG où il a été
22 détenu pendant trois semaines, après quoi il a été tué. Etes-vous au
23 courant de cet événement ?
24 R. Oui.
25 Q. Auparavant, ils l'ont tiré, ils l'ont blessé à la jambe, ils l'ont
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1 torturé, ils lui ont passé une corde autour du cou, et ils l'ont gardé dans
2 cet état pendant toute sa détention. Il ajoute que son fils a été enterré
3 seulement après l'arrivée de la KFOR.
4 R. Oui, il n'aurait pas pu le faire avant.
5 Q. Page 4, il dit aussi que le même jour, le jour où ils ont enlevé son
6 fils, il est allé avec sa famille à Klincina. Je cite, je vais vous poser
7 une question après : "Nous avons été emmenés par la police, et nous avons
8 été installés à l'école élémentaire près du bâtiment de la police. La
9 police nous a protégés et a rendu impossible toute attaque de l'UCK. La
10 police nous a même donné de la nourriture et des cigarettes aussi quand
11 nous en avions besoin."
12 R. Oui, et ce n'est pas la seule famille albanaise que nous avons protégée
13 ou logée afin de les protéger de l'UCK et de ses attaques.
14 Q. Après, il dit qu'il a dû partir, déménager, lorsqu'il y a eu le retrait
15 de l'armée de Kosovo et retrait de la police aussi, il est parti avec eux,
16 et maintenant ils ont des cartes d'identité en tant que personnes
17 déplacées.
18 R. Oui.
19 Q. Il ajoute qu'en août 1999, son frère Muharem Klimenta, âgé de 30 ans,
20 de Rozaje du Monténégro et son oncle Dzafo Klimenta, âgé de 21 ans, sont
21 allés au village afin de voir dans quel état se trouvaient leurs maisons,
22 leurs propriétés. L'UCK l'a appris et est arrivé sur le champ. Cela c'était
23 en août 1999, lorsque, apparemment, l'UCK fonctionnait normalement. Vous
24 êtes au courant ?
25 R. Oui. Je m'excuse, mais si vous donnez des noms, est-ce qu'on pourrait
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1 donner ces noms à huis clos partiel ?
2 Q. Fort bien. Je ne vais pas mentionner de noms, mais je suppose --
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Savez-vous pourquoi la famille
4 Klimenta n'a pas fait de déclaration à la police lorsque cette famille est
5 allée en premier lieu à la police, après l'enlèvement du fils ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible qu'ils aient fait une
7 déclaration à ce moment là, mais nous n'avons pas ce document en notre
8 possession. Ils ont fait rapport à la police, ils se sont présentés à la
9 police de Klincina, mais pas au SUP de Pec, et les documents de ce poste de
10 police n'ont pas été emmenés.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. Je ne vais pas donner de noms, je ne suppose pas que vous pensiez à des
13 noms de l'UCK.
14 R. Non. Ce serait catastrophique si vous donniez le nom de ces personnes.
15 Je ne sais pas s'ils resteraient en sécurité si vous donniez leurs noms.
16 Leur sécurité serait compromise.
17 Q. Oui. J'en suis tout à fait certain, vous avez raison.
18 Le déclarant poursuit en disant que les membres de l'UCK ont été
19 identifiés, je parle ici des auteurs de ces agissements en août 1999,
20 s'agissant de cet enlèvement. Là, on parle de Bajrush et Muharem, ils
21 étaient en uniformes et ils étaient armés, c'était en août 1999.
22 R. Exact.
23 Q. Ces personnes ont été détenues trois semaines à proximité du poste de
24 police au QG de Pec. Après ces trois semaines, ces personnes ont été
25 emmenées à Demov Most, près du village de Strejoz [phon] Decani. Là, ces
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1 personnes ont été tuées par armes à feu. On les a couvertes d'essence et on
2 les a tuées par le feu. Il donne le nom des auteurs, il dit aussi que c'est
3 Bajrush Berisha et Muharem Gashi le chef des Mains noires qui ont tué son
4 frère.
5 Après cela, il dit que Klimenta essayait de savoir ce qui s'était
6 passé. Bajrush Berisha est venu aussitôt, l'a appelé. Dès qu'il est sorti
7 de la maison, cet homme a été tué par une rafale sur le champ.
8 R. Oui, c'est le deuxième fils de cet homme qui a été ainsi tué.
9 Q. Puis, à la page suivante, il dit que la MINUK et la KFOR ont été
10 informées de cet événement par l'hôpital. La MINUK et la KFOR ont arrêté
11 Bajrush Berisha pour ce meurtre. Il a été condamné à 15 ans de prison. Il
12 se trouve aujourd'hui à Istok, à la prison de Dubrava. Pour l'assassinat du
13 fils, du frère et du fils de l'oncle, aucune mesure n'a été prise.
14 R. Exact. Mais il y a quelque chose tout à fait caractéristique ici
15 que j'aimerais relever. C'est un prêtre catholique qui l'a transporté à
16 l'hôpital. Donc, pas un seul Musulman, pas un seul voisin ne s'est offert.
17 C'est un prêtre catholique qui a emmené le blessé à l'hôpital. Les autres
18 n'ont peut-être pas voulu le faire, ou n'ont pas osé le faire.
19 Q. Ne nous hasardons pas à présenter des hypothèses. Mais vu la peur
20 qui régnait sans doute, ces personnes n'ont-elles pas osé le faire.
21 Il poursuit en disant : "J'affirme que les violences perpétrées
22 contre ma famille et ma famille élargie sont le fait de l'UCK, parce que
23 nous ne voulions pas rejoindre l'UCK et exécuter les ordres de l'UCK,
24 ordres qui étaient de se tuer entre nous, et de tuer des Serbes aussi. Ils
25 nous ont aussi demandé de tuer des policiers. C'était là une condition pour
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1 que nous restions en vie, et que nous rejoignions leurs rangs."
2 R. Oui, et ce n'est pas le seul cas. Il y a toute une série de cas que
3 nous avons dans nos documents ici présentant des circonstances analogues.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que je vous ai bien entendu,
5 Monsieur Milosevic ? La condition, c'était que ces gens devaient
6 s'entretuer, se tuer entre eux ? Est-ce que le témoin pourrait nous donner
7 une explication ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, dans la déclaration au début
9 de ce passage que j'ai cité, vous verrez, lorsqu'ils sont arrivés, il leur
10 a été dit qu'ils devaient tuer des Serbes. Ils ont reçu pour mission de
11 tuer un oncle qu'ils n'aimaient pas pour une raison ou une autre. C'est
12 pour cela qu'on parle de s'entretuer, parce qu'on avait dit à cet homme
13 qu'il devait tuer son oncle.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ah, son oncle. Je comprends, merci.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Son oncle, c'était un monsieur très
16 respecté, il devait être tué en tant qu'étant le membre le plus connu de la
17 famille.
18 M. MILOSEVIC : [interprétation]
19 Q. Ils devaient tuer des Serbes, des policiers serbes et l'oncle ?
20 R. L'oncle, c'est le père d'un membre de la sécurité locale.
21 Q. Il poursuit en disant ceci : "Nous ne voulions pas exécuter leur ordre.
22 Nous ne voulions pas non plus rejoindre leurs rangs, parce que c'étaient
23 eux les auteurs de tous ces crimes."
24 On me demande de ralentir ma lecture.
25 Il dit ensuite : "J'affirme que la police s'est bien comportée envers
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1 les Albanais. Jamais elle n'a commis des crimes contre les Albanais, au
2 contraire, les policiers ont même donné à manger aux Albanais au village,
3 ils les ont protégés contre l'UCK. Redj Kelmendi, qui était un des
4 commandants à Kosuric, a laissé sa mère invalide dans sa maison, c'est la
5 police qui l'a nourrie et s'est occupée de ses besoins. Ceci a été fait par
6 le commandant de la police, alors qu'un des fils de cette dame était un
7 criminel. Vous êtes au courant de cela ?
8 R. Oui, et je connais d'autres exemples. Personnellement, c'est ce que je
9 ferais. C'est ce que je demanderais à un voisin serbe de faire pour
10 s'occuper d'eux.
11 Q. Il dit : "Je suis prêt à témoigner devant un tribunal, notamment à La
12 Haye, pour en parler." Puis, il dit qu'il peut confirmer que : "Les
13 soussignés" - je parle ici des soussignés qui ont confirmé sa déclaration -
14 "pourraient confirmer ces faits, mais qu'ils n'auraient pas l'autorisation
15 de rentrer."
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère, Monsieur Robinson, qu'il sera
17 possible qu'un témoin important, dont le nom n'est pas mentionné ici, mais
18 dont j'ai mentionné le nom à huis clos partiel, j'espère, disais-je, que
19 cet homme pourra témoigner ici. Il ne demande même pas à témoigner à huis
20 clos. Il est prêt à le faire en audience publique, tout simplement avec la
21 déformation des traits du visage.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons voir si c'est possible.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Robinson.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Colonel, nous avons eu ici des exemples afférents à une famille qui,
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1 effectivement, a connu un sort tragique. On voit combien de membres elle a
2 perdus. On voit dans cette déclaration dans quelle mesure la terreur était
3 répandue, notamment sur le terrain occupé par l'UCK.
4 M. NICE : [interprétation] L'accusé se permet une grande liberté de
5 commentaires, je n'ai pas interrompu auparavant, mais je convie la Chambre
6 à lui faire respecter les règles.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. Posez vos
8 questions et passez-vous des commentaires.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. D'ailleurs, tout commentaire est
10 superflu à ce niveau-ci.
11 M. MILOSEVIC : [interprétation]
12 Q. On a vu l'exemple de comportements à l'égard des Albanais, des paysans,
13 des villageois, qui n'avaient rien avoir avec l'Etat en tant que tel.
14 R. Oui.
15 Q. Dites-moi maintenant comment les membres de l'UCK se sont-ils comportés
16 à l'égard des Albanais qui ont travaillé dans quelque service de l'Etat que
17 ce soit, ou qui ont travaillé pour le compte de quelque institution que ce
18 soit ? Cela ne doit pas être un service de l'Etat, cela peut être une
19 entreprise, un domaine, les PTT, enfin, un service quelconque qui pourrait
20 être qualifié de service public.
21 R. Ces Albanais étaient proclamés traîtres, et ils étaient menacés en
22 public. On exigeait d'eux de quitter leurs postes de travail. Ceux qui ne
23 voulaient pas le faire, ils faisaient l'objet de mesures très variées,
24 allant de l'attaque jusqu'à la liquidation pure et simple. Cela se
25 rapportait notamment à ceux qui étaient dans les entreprises publiques, et
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1 dans les instances de l'Etat de la République de Serbie, mais aussi dans
2 les entreprises dont les propriétaires étaient des Serbes, des entreprises
3 privées. Donc, tout Albanais fréquentant des Serbes avait été déclaré
4 Albanais désobéissant. Nous nous servons du terme "Albanais loyal," mais du
5 point de vue de l'UCK, c'était un "Albanais désobéissant." Un "Albanais
6 loyal" est une notion qui sous-entend que l'intéressé travaille pour le
7 compte d'une institution de l'Etat. Même s'il ne le fait pas, c'est
8 quelqu'un qui se comporte en application et en conformité avec les lois,
9 fréquentait toutes les personnes et celles des groupes ethniques autres
10 également, mais ceux-là sont considérés comme étant des Albanais
11 désobéissants qu'il faut discipliner, et qu'il convient d'amener à apporter
12 leur soutien à ce qu'il convenait d'appeler l'UCK.
13 Nous avons des exemples --
14 Q. Je vais vous demander justement -- je comprends parfaitement bien le
15 fait que vous seriez à même d'apporter bon nombre d'exemples individuels,
16 mais je voudrais me référer, moi, à certains autres exemples qui sont
17 documentés ici. Je vous demande de vous pencher sur l'intercalaire 27. Ici,
18 il s'agit d'une plainte au pénal.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quel classeur êtes-vous en train
20 de parler ?
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous le dire. C'est le classeur numéro
22 5. Je vous ai dit le numéro 27.
23 M. MILOSEVIC : [interprétation]
24 Q. Que voit-on partant de cette plainte au pénal datée du mois
25 d'avril 1998 ? En page 2, ce qu'on peut voir, c'est que la partie
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1 endommagée est Baljaj Ramadan, originaire du village d'Iglarevo,
2 municipalité de Klin, né en 1939, il était agent forestier. Il avait
3 travaillé pour le compte de l'entreprise Sumar, exploitation de forêts.
4 R. Oui. C'est un document qui a été rapporté du secteur qui est indiqué en
5 page 1 et il y a une petite mention manuscrite, Iglarevo, 16 avril 1998.
6 Lorsque j'ai rangé la documentation, j'ai inscrit cela pour qu'on sache à
7 quoi cela se rapporte parce que la page 1 ne montre pas de quel événement
8 il s'agit au juste. Ici, je parle de la première page où il y a une date,
9 un numéro d'enregistrement au registre des plaintes au pénal.
10 Q. Voit-on, ici, que 15 terroristes armés se sont attaqués à la maison de
11 Baljaj Ramadan ?
12 R. En effet, Baljaj Ramadan était un agent forestier que je connaissais
13 personnellement et que bon nombre de gens dans la région connaissent
14 personnellement. C'est quelqu'un qui a été agressé, à plusieurs reprises,
15 par les terroristes. Sa maison a été attaquée, il a perdu un œil en se
16 battant contre les terroristes. Pour finir, il a dû quitter la région parce
17 qu'il ne pouvait pas subsister là-bas après l'arrivée du corps de
18 protection au Kosovo.
19 Ce jour-là, il y a eu une attaque terroriste lancée contre sa maison.
20 Q. Attendez, attendez. On dit attaque terroriste et on dit : "Les
21 terroristes ont ouvert le feu par rafales en direction de sa maison. Ils
22 ont tiré plusieurs roquettes. Ils ont jeté quelques grenades à main sur sa
23 maison. Depuis sa maison, Ramadan a riposté au fusil de chasse de marque
24 Nosbeg [phon], calibre 12 millimètres et il a riposté au pistolet calibre
25 7.65 qu'il avait en sa possession." Mais continuez.
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1 R. En effet, oui. En cette occasion-là, il a touché certains terroristes
2 avec son pistolet et d'autres ont été touchés par ses tirs au fusil au
3 moment où ils s'apprêtaient à entrer dans sa maison. A l'occasion de cette
4 attaque, suite aux explosions d'obus de mortiers ou de lance-roquettes, il
5 a eu des éclats d'obus et il a été blessé à l'œil et au bras. Il ne voit
6 plus, depuis ce jour-là, il ne voit que d'un œil puisque l'autre œil est un
7 œil artificiel.
8 Q. Il est dit, ici, dans la description --
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, avez-vous
10 présenté des éléments de preuve concernant l'origine de ce document. Qui
11 est-ce qui a recueilli cette déclaration ? Parce qu'on n'a pas l'impression
12 que cela a été recueilli par le témoin.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non. Je ne perds pas de vue le fait que le
14 témoin n'a pas recueilli de déclaration. Lui est chef du secrétariat. La
15 déclaration que nous venons de voir a été recueillie par le chef de la
16 police judiciaire, Bulatovic, qui l'a signée.
17 La plainte au pénal, elle, a été rédigée par le capitaine Music Hamdija et
18 le capitaine Aleksic Zoran et le sergent chef Radulovic Predrag. C'est le
19 secteur de la police scientifique.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, continuez, je vous prie.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Connaissez-vous les personnes qui ont recueilli ces déclarations ?
23 R. Oui, ce sont les membres de la police scientifique du secrétariat à
24 l'Intérieur de la municipalité de Pec. Ils sont dans le département des
25 homicides et moeurs.
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1 Q. Colonel, dites-nous si cette Mission de vérification de la OSCE, une
2 fois arrivée, que s'est-il passé sur le territoire couvert par votre
3 secrétariat à Pec ?
4 R. Pour ce qui est du secrétariat à l'Intérieur de Pec, il a reçu la
5 visite de plusieurs missions différentes. En 1998, il y a eu quatre membres
6 de la Mission de l'Union européenne.
7 Puis, une Mission de vérification au Kosovo-Metohija qui est arrivée
8 sur le territoire de Pec vers la fin du mois de novembre et début du mois
9 de décembre. Mais avant cela, il y avait une autre mission, la KDOM
10 américaine et il y avait des observateurs européens tels que nous les
11 qualifiions, à l'époque, parmi la population.
12 Q. Alors, dites-nous, ces membres de la mission, quelles étaient leurs
13 possibilités de déplacement sur le territoire du Kosovo-Metohija ? Je ne
14 parle pas du territoire entier, je parle des cinq municipalités dont vous
15 aviez la charge.
16 R. Les membres de la mission avaient un contrôle plein et entier, personne
17 ne limitait leurs déplacements à moins qu'ils n'aient été limités par les
18 membres de l'UCK, eux-mêmes. Cela je ne le sais pas. Mais s'agissant de
19 notre territoire à nous, ils ont pu procéder à un plein contrôle, à des
20 déplacements a part entière. La police était toujours disposée à les aider,
21 à aller de l'avant pour ce qui est des souhaits qu'ils présenteraient. Je
22 dirais même que le secrétariat à l'Intérieur a élaboré une sorte de manuel
23 d'instruction, pour ce qui est du comportement à adopter à l'égard des
24 membres de cette mission. Ces instructions ont été distribuées à tous les
25 policiers et ces policiers étaient censés se conformer à ces instructions.
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1 Ils pouvaient, eux, se déplacer sur le territoire entier.
2 Q. Sans limitation aucune ?
3 R. Sans limitation aucune.
4 Q. Est-ce que la police avait coutume d'informer à l'avance les membres de
5 la Mission de vérification de ses activités à elle ?
6 R. Suivant les instructions, la police avait pour obligation de les
7 informer de ces activités bien à l'avance et cela a été fait dans tous les
8 cas.
9 Q. Mais les membres de cette Mission de vérification ont-ils été présents
10 à l'occasion des activités déployées par le secrétariat à l'Intérieur ?
11 R. Oui. Cela dépendait de leur propre volonté, de leur bon gré et en
12 général, ils le faisaient.
13 Q. Mais les membres de la Mission de vérification procédaient-ils à des
14 inspections des installations du secrétariat à l'Intérieur ?
15 R. Oui. Ils avaient le droit d'entrer dans toute installation suivant leur
16 bon vouloir et de procéder à des inspections de ces installations du
17 secrétariat à l'Intérieur, du poste de police ou de quelque poste de police
18 que ce soit. Ils n'avaient pas à s'annoncer, ils pouvaient le faire sans
19 s'annoncer du tout et ils sont même venus chez moi.
20 Q. Bien. Veuillez m'indiquer qui étaient surtout les victimes des attaques
21 de l'UCK lors du séjour de la Mission de vérification sur le territoire à
22 vous.
23 R. La police et les civils. Il y a eu des attaques contre la police, il y
24 a eu des attaques contres des civils. Il a
25 été tué plus d'albanais, pendant cette période. Je dirais que les membres
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1 de ce qu'il est convenu d'appeler l'UCK ont procédé à des violations du
2 cessez-le-feu - je vais me servir de ce terme - et il l'ont fait à plus de
3 50 reprises.
4 Q. Vous parlez de Pec, toujours ?
5 R. Oui, oui. Ils se sont attaqués à la police et aux civils. Ils ont
6 procédé à des violations du cessez-le-feu, en présence de cette Mission de
7 vérification et de contrôle.
8 A l'occasion des constats réalisés par la suite, les membres de la
9 mission qui étaient présents ont pu se rendre compte, par eux-mêmes, que
10 cela a été fait par ce qu'il est convenu d'appeler l'UCK. Par exemple, en
11 termes simples, je dirais que sur le territoire qu'ils avaient sous leur
12 contrôle, ils tiraient des rafales sur des véhicules et on déterminait sans
13 doute aucun que ces attaques où on avait, par exemple, tué des Albanais,
14 étaient perpétrées par des Albanais de l'UCK. Ils portaient même des
15 uniformes. Il n'y a eu aucune sanction à leur encontre. Nous avons, en même
16 temps, été critiqués par la mission, nous-mêmes.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce qui me
18 préoccupe, c'est que vous avez peut-être d'autres éléments de preuve que ce
19 témoin pourrait vous procurer et qui pourraient être très pertinents pour
20 certains des paragraphes de l'acte d'accusation et vous ne les présentez
21 toujours pas. Voilà.
22 Le témoin, en répondant justement à votre question de savoir qui
23 étaient les principales victimes de ces attaques de l'UCK, il a dit que
24 c'étaient des attaques lancées contres des civils. Il a été tué des
25 albanais en ces occasions et dans l'acte d'accusation et bon nombre de
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1 paragraphes, où il est affirmé que les forces serbes s'étaient attaqués à
2 des Albanais, à des civils. Il s'agit là de chefs d'accusation qui sont
3 portés à votre charge. Si lui dispose d'éléments de preuve concernant l'une
4 quelconque de ces attaques citées à l'acte d'accusation, il faudrait que
5 vous présentiez ces éléments de preuve parce que si vous le faites
6 témoigner d'une façon aussi généralisée, cela n'aidera pas grandement les
7 thèses de la Défense que vous êtes en train de représenter. Du moins, c'est
8 mon avis. Il faudrait que vous vous concentriez sur les municipalités et
9 les villages cités à l'acte d'accusation.
10 Tout à l'heure, par exemple, le témoin a aussi indiqué que les
11 autorités serbes au Kosovo ont conduit des opérations anti-terroristes et
12 il se pourrait qu'à l'occasion de ces actions, il y ait eu des conflits. Il
13 se pourrait qu'en ces occasions-là, des Albanais et des civils aient été
14 tués. Cela se trouve être pertinent si tant est que vous pouvez établir la
15 corrélation avec certains paragraphes de l'acte d'accusation.
16 Je ne dis pas que vous devez forcément le faire. Le système que nous
17 appliquons ici ou que nous mettons en œuvre ici vous permet, également, de
18 garder le silence, de ne rien dire. Mais je sais que vous aimez parler et
19 que ceci vous tomberait mal à propos. Mais vous pouvez rester silencieux et
20 vous pouvez quand même être libéré ou être déclaré innocent parce que
21 l'Accusation a la charge de la preuve, elle. Je suis préoccupé parce que
22 vous devez établir la corrélation précise des paragraphes de l'acte
23 d'accusation et des éléments de preuve. Il vous suffit de faire installer
24 un doute raisonnable au niveau de la réalité des faits cités à l'acte
25 d'accusation. Il faut qu'au-delà de tout doute raisonnable, nous soyons
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1 convaincus de ce qui est dit à l'acte d'accusation. Si vous avez des
2 éléments de preuve le contredisant et si vous pouvez les présenter ici et
3 réfuter le fait qu'il y ait eu ce qui est dit à l'acte d'accusation en
4 disant qu'il y eut un conflit en riposte à des attaques contre des villages
5 particuliers ou qu'ils ont lancé des activités anti-terroristes dans la
6 réalisation de leurs devoirs en application de la loi et qu'il y ait eu, à
7 l'occasion de telles opérations, des victimes parmi les Albanais ou des
8 civils, cela peut élever des doutes pour ce qui est de la véracité des
9 allégations avancées à l'acte d'accusation. Mais il faut que cela soit fait
10 d'une façon précise, plus précise et il faut qu'il y ait établissement
11 d'une corrélation entre les éléments de preuve qui sont cités ici et ceux
12 qui figurent à l'acte d'accusation.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère, Monsieur Robinson, que tout ce que le
14 témoin dit ici montre clairement dans quelle mesure et à quel point ces
15 modalités de perpétration efficace de crimes par les terroristes de l'UCK
16 étaient installées et bien établies, pour ce qui est du secteur à propos
17 duquel le témoin, ici présent, est venu témoigner.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela peut, en effet, être le cas.
19 Mais est-ce que le témoignage de ce témoin le montre et le démontre en
20 corrélation avec les différents villages qui sont cités à l'acte
21 d'accusation, c'est là une toute autre question.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Certains villages sont mentionnés, certains ne
23 le sont pas. Mais je vais vous rappeler, Monsieur Robinson, une chose, à
24 savoir qu'à l'occasion de l'interrogatoire du témoin précédent qui est
25 originaire de Pec et qui est une victime, dont le fils a été tué dans la
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1 cafétéria Panda, M. Gvozdenovic, M. Saxon a affirmé que dans le secteur de
2 Pec, il a été commis, et pour ce faire, il a cité un document où telle
3 allégation est faite, il aurait été commis une grande déportation ou un
4 nettoyage ethnique d'Albanais dans ce secteur.
5 Or, comme le témoin, ici présent, pendant cette période critique, se
6 trouvait sur les lieux, je suppose que ceci est pertinent que d'entendre ce
7 que lui a à nous dire à ce sujet. Je ne vais pas lui poser de questions au
8 sujet des crimes individuels perpétrés à l'époque, là où il y a eu un
9 constat établi par la Mission de vérification, mais je me dois de lui poser
10 des questions au sujet des expulsions, des déportations parce que vous
11 n'ignorez pas, vous savez pertinemment bien que dans le prétendu acte
12 d'accusation, on parle de persécutions et de déportations qui auraient été
13 l'œuvre des autorités, à savoir, l'armée et la police.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Veuillez continuer,
15 Monsieur Milosevic.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai essayé de retrouver, sur le plan concret,
17 s'agissant de déportations. La ville de Pec, quoique M. Saxon ait dit la
18 fois passée que c'est à Pec qu'on avait procédé à la déportation la plus
19 massive et la plus réussie, mais à l'acte d'accusation, on ne parle pas de
20 Pec.
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Mais Decani, c'est également sur votre territoire, Monsieur le Témoin ?
23 R. Oui. Au début cela a été le cas; puis, maintenant, ce n'est plus le
24 cas.
25 Q. A ce moment-là, ce n'était plus le cas. Et Djakovica, sur votre
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1 territoire ?
2 R. Cela non plus. Il reste Pec, Istok et Klina.
3 Q. Bien. Je crois que s'agissant de l'allégation faite par Monsieur Saxon,
4 à l'occasion de l'audience précédente, disant que c'est là que le nettoyage
5 ethnique a été le plus réussi, s'agissant de Pec, se trouve être
6 suffisamment pertinent pour que nous entendions ce témoin nous dire ce
7 qu'il en sait, lui-même.
8 Veuillez nous indiquer, Colonel, quand est-ce que les citoyens du groupe
9 ethnique albanais se sont-ils mis à quitter le Kosovo-Metohija.
10 R. Il est difficile de fournir une date précise. Ils ont commencé à
11 quitter le Kosovo-Metohija dès 1998, en nombre considérable. J'en ai déjà
12 parlé de cela, notamment étaient présents en printemps et été 1998, chose
13 qui a été enregistrée à ces postes de contrôle de la police. Cela a
14 constitué un processus qui a duré en 1998, et qui s'est prolongé en 1999.
15 Q. Etablissons une différence. Vous avez expliqué tout à l'heure en
16 parlant de ces départs que vous avez constatés aux points de contrôle,
17 qu'il s'agissait là essentiellement de motifs qui visaient à leur faire
18 éviter un recrutement ou des paiements pour l'UCK.
19 R. C'est exact. Ils étaient aussi très inquiets pour leurs vies.
20 Q. Les Serbes et autres non-Albanais quittaient-ils aussi le Kosovo-
21 Metohija en 1998 ? J'entends 1998, époque où il y a une cette vague de
22 départ d'Albanais suite à la mise à ces menaces de la part de l'UCK.
23 R. Oui, un grand nombre de Serbes quittaient Pec également. Certains de la
24 région de Pec ont emmené leurs femmes et enfants, les ont laissés chez de
25 la famille en Serbie, en Sumadija, au Monténégro, et sont revenus dans la
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1 région parce qu'ils avaient peur pour la vie de leurs femmes et enfants.
2 Je vous ai dit que le 6 juillet 1998, nous avons eu des combats dans
3 la banlieue de Pec. Ils avaient peur de voir les terroristes s'emparer de
4 la ville. Les Serbes et les Albanais quittaient le territoire autant les
5 uns que les autres.
6 Q. Sur le territoire de Pec en 1998, quand je dis territoire de Pec, je
7 parle du secteur couvert par le SUP de Pec; je ne parle pas seulement de la
8 municipalité de Pec. Est-ce qu'il y a eu des personnes déplacées sur le
9 plan interne ?
10 R. Oui, oui. Il y a eu des personnes déplacées parmi les Serbes et parmi
11 les Albanais.
12 Q. Pourquoi ces personnes ont-elles quitté leurs villages, leurs maisons ?
13 R. Par peur pour leurs vies. Ils avaient peur d'être tués, d'être blessés.
14 Q. Vous nous avez dit que ces personnes déplacées étaient tant albanaises
15 que serbes. Où se trouvaient les personnes déplacées sur le territoire
16 couvert par le SUP de Pec ?
17 R. Pour l'essentiel, c'était suivant les possibilités de s'installer que
18 chacun avait. Certains étaient chez de la famille à Pec, et d'autres chez
19 des parents autour de Pec, dans les villages où il n'y avait pas autant de
20 problèmes, où l'on pensait, où l'on estimait que le danger n'était pas tel.
21 On parle de Pec et du Kosovo-Metohija. Un certain nombre d'entre eux sont
22 partis vers l'étranger, qui avaient de la famille à l'étranger.
23 Q. Dites-moi, les instances de l'Etat aidaient-elles les personnes
24 déplacées ?
25 R. Oui. Nous avons vu tout à l'heure la déclaration de l'une de ces
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1 personnes déplacées, qui dit que la police l'a aidée. Non seulement la
2 police, non pas seulement la police, mais aussi les centres sociaux, la
3 Croix Rouge, les différentes organisations qui étaient là pour apporter des
4 vivres, apporter de l'aide médicale à tous ces gens. Il n'y avait pas
5 seulement là un travail pour la police, mais du travail pour
6 l'administration de l'Etat tout entière.
7 Q. Colonel, a-t-on pris des mesures pour que ces personnes déplacées
8 retournent chez elles ?
9 R. Oui.
10 Q. Quel type de mesures ?
11 R. Pour qu'ils rentrent chez eux, il fallait d'abord débloquer le
12 territoire. Ils ne pouvaient pas rentrer chez eux sur le territoire qui
13 était placé sous le contrôle de ce qu'il était convenu d'appeler l'UCK. Il
14 y a eu conduite d'opérations antiterroristes visant à débloquer lesdits
15 territoires. L'on visait à mettre en place des conditions de sécurité qui
16 permettraient le retour de ces personnes à leur domicile. Il y a eu une
17 action de conduite pour le retour des personnes, notamment de retour de
18 personnes qui s'étaient abritées dans la nature. Certaines personnes
19 étaient dans les montagnes, à ciel ouvert. C'était déjà la fin de l'été; on
20 arrivait à l'automne. Les conditions climatiques allaient s'aggraver pour
21 ce qui est des conditions de vie à ciel ouvert.
22 Q. Avez-vous pris part à l'une quelconque de ces activités visant à faire
23 revenir ces personnes déplacées chez elles ?
24 R. Oui, oui. Il n'y avait pas que moi; il y a eu bon nombre
25 d'intervenants. J'ai été l'un des intervenants dans l'un des cas.
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1 Il y en avait qui venaient du territoire de la municipalité de
2 Decani. Ces personnes déplacées étaient parties du territoire de la
3 municipalité de Pec vers le territoire de la municipalité de Decani. Ils
4 étaient nombreux ces gens-là.
5 J'ai reçu l'ordre d'aller dans ce village appelé Istinic, et de me
6 présenter au général Stevanovic, aux fins de prendre part à une mission.
7 Je suis allé le voir. Il m'a dit qu'il avait de terribles problèmes, qu'il
8 n'arrivait pas à réaliser le retour de ces personnes chez elles, parce
9 qu'il n'y avait pas suffisamment de moyens de transport. Ils ont essayé de
10 trouver des autocars. Les chauffeurs d'autocars ont fait un voyage, puis
11 ils se sont enfuis. Les routes étaient mauvaises. Pour ne pas endommager
12 leurs autocars, ils s'en allaient. J'ai compris la situation. J'ai dit au
13 général Stevanovic qu'il fallait procéder au préalable à des préparatifs de
14 nature organisationnelle.
15 Je suis revenu à Pec, je suis retourné à Pec. J'ai fait appel à ces
16 entreprises de transport pour qu'elles nous mettent à disposition des
17 autocars. Elles l'ont fait. Par mesure de sécurité et de précaution, comme
18 cela a été le cas auparavant, j'ai dû placer un policier dans chaque
19 autocar pour que le chauffeur ne prenne la poudre d'escampette.
20 Je leur ai donné cela comme mission, jusqu'à ce que les gens ne
21 soient ramenés chez eux. De retour à Istinic, je suis allé voir le général
22 Stevanovic qui était encore debout. Il veillait à ce que la réalisation se
23 fasse de façon contrôlée. Il veillait aux modalités de ce retour des gens.
24 Il y avait des hommes, des femmes, des enfants. Probablement, y avait-il
25 parmi eux des membres de l'UCK également, parce que nous avons vu du fait
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1 de la présence d'armes qu'ils ont laissées derrière eux.
2 Il y a des convois qui se sont dirigés là bas. Des gens sont partis à
3 pied ou à bord de tracteurs.
4 En direction de Pec, j'ai dépassé bon nombre de convois constitués de
5 personnes déplacées. A la tête de la colonne, on avait, par exemple, une
6 tête de la colonne à Pec, alors que d'autres étaient encore en train de
7 sortir du secteur d'Istinic. Cela vous constitue une distance de quelque 18
8 kilomètres. La colonne était longue d'une vingtaine de kilomètres pour sûr.
9 Q. Où sont allées alors ces gens ?
10 R. Ils sont allés chez eux. Certaines des maisons étaient sans doute
11 endommagées ou détruites. En tout cas, ils sont rentrés là où ils
12 habitaient avant, avant d'être partis.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand cela s'est-il passé ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'était en septembre 1998.
15 Pourquoi ?
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cette réponse me suffit. Je
17 souhaiterais exprimer une préoccupation qui m'est personnelle. Cela fait
18 quatre heures que nous entendons le témoin, mais on n'a pratiquement pas
19 parlé de 1999. C'est la période qui est concernée par l'acte d'accusation.
20 Je fais cette observation uniquement pour exprimer la préoccupation qui est
21 la mienne, et dans l'espoir que
22 M. Milosevic en tiendra compte.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Bonomy, mais je pense que ces
24 éléments sont indissociables.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Pourquoi les Albanais quittaient-ils le Kosovo avant le bombardement ?
2 R. Par crainte des bombardements. Ce n'était pas seulement le cas des
3 Albanais; nous avions tous peur.
4 Q. Maintenant, je parle uniquement des Albanais. Où les Albanais qui se
5 trouvaient dans la zone de responsabilité du SUP de Pec se sont-ils
6 rendus ?
7 R. Ils sont allés au Monténégro. J'essaie de visualiser cela sur une
8 carte. Ils sont allés dans la zone de Sumadija en Serbie. Ils se sont
9 rendus en Macédoine. Cela dépendait des régions où ils avaient de la
10 famille.
11 Q. Est-ce que certains sont allés en Albanie ?
12 R. Oui, il y en a aussi qui sont allés en Albanie. Ils sont partis dans
13 des directions différentes.
14 Q. Je viens de trouver ce que je n'avais pas parvenu à trouver
15 précédemment quand j'ai passé en revue ce document. Paragraphe 63(A).
16 Colonel, je vais vous donner lecture d'un élément qui me semble avoir
17 un lien direct avec ce dont nous parlons.
18 Le paragraphe (e) où il est écrit Pec.
19 "Les 27 et 28 mars 1999 ou vers ces dates, dans la ville de Pec, les
20 forces de la RFY et de la Serbie sont passées de maison en maison forçant
21 les Albanais du Kosovo à partir. Certaines maisons ont été incendiées, et
22 un certain nombre de personnes ont été abattues. Des soldats et des
23 policiers étaient postés le long des rues, et orientaient les Albanais du
24 Kosovo vers le centre-ville. Là, ceux qui n'avaient pas de voitures ou
25 d'autres véhicules, ont dû monter dans des autocars ou des camions pour
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1 être conduits à la ville de Prizren. A la sortie de Prizren, les Albanais
2 du Kosovo ont été obligés de descendre des autocars et des camions, et de
3 parcourir à pied les quelque 15 kilomètres qui les séparaient de la
4 frontière albanaise, qu'ils n'ont pu franchir qu'après avoir remis leurs
5 papiers d'identité aux forces de la RFY et de la Serbie."
6 Nous avons ici d'éléments qui sont en rapport avec la zone de
7 responsabilité qui était la vôtre. Des allégations semblables sont
8 formulées dans tous les cas de ce qu'on nous présente comme des cas
9 d'expulsion. Ce qui est allégué, c'est que l'armée, la police, ont expulsé
10 les Albanais. Une autre allégation qui a été formulée ici dans le cadre de
11 ce procès et à de très nombreuses reprises, c'est que les Albanais étaient
12 contraints de s'enfuir, et qu'ils se sont enfuis en Serbie et au
13 Monténégro.
14 Quelle était l'armée de la Serbie et du Monténégro ? Est-ce que
15 c'était la même armée, qui soi-disant, les contraignait à quitter le
16 Kosovo ?
17 R. Je ne comprends vraiment pas.
18 Q. Etant donné que vous étiez sur place, que vous étiez à Pec, je
19 souhaiterais vous demander de nous expliquer ce qui s'est véritablement
20 passé. Pour ce qui est des Serbes, il n'est pas avancé ici que l'armée et
21 la police les aient contraints à fuir. Ce qu'il semble être allégué, c'est
22 que les Serbes sont partis de leur propre chef alors que les Albanais, eux,
23 ont été expulsés. Pourquoi les Albanais autant que les Serbes sont-ils
24 partis ?
25 R. Quand l'état de guerre a été proclamé, et quand le 24 mars les
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1 bombardements ont commencé, le chaos s'est installé ainsi que la panique.
2 Les gens, le même soir, ont pu voir ce qui se passait à la télévision. Je
3 l'ai vu moi-même, ce 24 avril. Les gens ont pu constater que des bâtiments
4 entiers, des installations étaient la proie des flammes, et tout le monde
5 était très inquiet. Les gens pensaient que la même chose risquait de leur
6 arriver. Les gens étaient inquiets pour leurs familles. C'était notre cas
7 aussi. Nous, les policiers, nous nous faisions du souci pour nos enfants.
8 Les gens ont essayé -- tous les gens ont essayé au moins de mettre les
9 enfants à l'abri, s'ils n'étaient pas en mesure de partir. Ils les ont
10 emmenés au Monténégro, parce que selon certaines rumeurs, le Monténégro
11 n'allait pas être bombardé alors que ce serait le cas de la Serbie. C'est
12 pourquoi les gens ont essayé d'emmener leurs femmes, leurs enfants au
13 Monténégro même s'ils n'avaient aucune famille au Monténégro.
14 Les policiers ont été contraints de travailler plus longtemps. Parce qu'on
15 sait très bien ce qui se passe quand une guerre éclate; on voit augmenter
16 les cas de pillage, de cambriolage. Nous étions surchargés de travail. De
17 nombreuses plaintes étaient déposées. Les policiers voulaient prendre des
18 congés pour faire sortir leurs familles du Kosovo. Nous étions dans des
19 grandes difficultés. Il nous était difficile de permettre à tout le monde
20 de prendre des congés. Cependant, tous les gens sont parvenus à faire
21 sortir leurs familles.
22 A Pec, la situation était plus difficile que précédemment. On a vu une
23 augmentation des déplacements d'hommes en uniforme. Le mouvement de
24 mobilisation était intensifié. Les gens avaient des uniformes à la maison.
25 Ils se sont mis à porter ces uniformes. Quiconque a une connaissance de la
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1 chose militaire, c'est qu'une mobilisation, ce n'est pas quelque chose qui
2 se passe partout, nulle part, mais c'est une activité au cours de laquelle
3 les personnes concernées doivent se rassembler à certains points de
4 rassemblement.
5 Il y avait tellement de monde partout, qu'il était impossible de dire où
6 allait qui. Un observateur qui aurait été sur place pour essayer de se
7 rendre compte de ce qui se passait, aurait eu beaucoup de difficulté à le
8 faire. Nous, nous devions réglementer les déplacements de tout ce monde
9 tout en protégeant certains bâtiments d'éventuels attentats terroristes.
10 Le 24 mars au soir, moi-même, j'ai dit à des civils qui étaient venus nous
11 voir, nous les hommes de la police, je leur ai dit de ne pas s'approcher de
12 nous, parce que non seulement nous serions la cible des bombardements, mais
13 nous serions également la cible de prédilection des terroristes.
14 Nous avons pris nos positions habituelles. Nous ne nous sommes pas rendus
15 sur des positions nouvelles; des positions qui étaient déterminées par nos
16 analyses de la situation quant aux lieux où la présence de la police était
17 nécessaire. La police de la route devait procéder à des vérifications de
18 véhicules, vérifications d'identités, voir si les personnes avaient les
19 permis appropriés. Le rôle de la police régulière, c'était de procéder à
20 des fouilles, et cetera.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le moment est
22 venu de poser une question.
23 M. MILOSEVIC : [interprétation]
24 Q. Colonel, pendant cette période, si j'ai compris ce que vous venez de
25 nous dire, est-il exact de dire, qu'aussi bien les Serbes que les Albanais
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1 ont pris la fuite à l'approche des bombardements ?
2 R. C'est exact.
3 Q. Je vous ai donné lecture du paragraphe 63(e) de l'acte d'accusation. Il
4 nous faut procéder par ordre. Il est dit ici que certaines maisons ont été
5 incendiées, et qu'un certain nombre de personnes ont été abattues, c'est-à-
6 dire qu'à Pec, pendant ces journées cruciales, des maisons ont été
7 incendiées ainsi qu'un certain nombre de personnes abattues.
8 R. Abattues par qui ?
9 Q. Un instant, je vous prie. Attendez que j'en termine de ma question. A
10 l'intercalaire numéro 1, au point 1.4, est-ce que nous trouvons la liste de
11 tous les incidents ayant un rapport avec la situation en matière de
12 sécurité, incidents au cours desquels des personnes ont perdu la vie dans
13 votre zone de responsabilité, la zone de votre secrétariat de l'Intérieur -
14 -
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. -- nous avons une liste chronologique de tous les incidents ?
18 M. NICE : [interprétation] J'interviens pour poser une question d'ordre
19 administrative. Je ne sais pas de combien de temps l'accusé aura besoin
20 pour interroger son témoin. Je sais, cependant, que lorsqu'il en aura
21 terminé, il faudra que je décide si je le contre-interroge sur ce qui a été
22 abordé ici ou sur autre chose. Je n'ai pas encore pris de décision. Il est
23 tout à fait possible que le contre-interrogatoire sur certains des éléments
24 abordés aujourd'hui ne soit pas quelque chose que je puisse faire demain,
25 que je ne sois pas prêt. Il est donc possible que je demande à ce qu'une
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1 partie du contre-interrogatoire soit reportée à une autre date. J'espère
2 que ce ne sera pas nécessaire, mais c'est possible. Si l'accusé prévoit
3 d'en terminer, dès demain, avec son témoin, il faudrait peut-être qu'il
4 prévoie un autre témoin.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais il y a une autre question,
6 une autre affaire que nous devons traiter demain.
7 M. NICE : [interprétation] J'avais oublié.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que dans tout ce que nous
9 avons entendu aujourd'hui, il y a des éléments qui nécessitent
10 véritablement un contre-interrogatoire ?
11 M. NICE : [interprétation] Peut-être pas, mais je préfère prendre les
12 précautions nécessaires parce qu'il ne faut pas que ce soit une raison pour
13 que l'accusé n'ait pas de témoin disponible. Je souhaite, cependant, vous
14 rappeler que la semaine dernière, nous avons perdu une séance de travail
15 entière parce qu'il n'y avait pas de témoin disponible ou pas de témoin
16 prêt à venir. Je ne sais pas sur le temps de qui on va prélever ces temps
17 perdus, mais il serait très regrettable que ceci se reproduise encore
18 demain.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous allons garder cela à
20 l'esprit, Monsieur Nice.
21 Le moment est venu de suspendre l'audience, mais nous avons encore cinq
22 minutes, qui sont les vôtres, Monsieur Milosevic.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Un exemple, Monsieur Robinson, un point clé :
24 au paragraphe 63 (e), il est dit qu'un certain nombre de personnes ont été
25 abattues.
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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]
2 Q. Colonel, est-il exact qu'à cet intercalaire 1.4, nous trouvons une
3 liste chronologique de tous les incidents au cours desquels des personnes
4 ont trouvé la mort, même si ces personnes sont décédées à l'hôpital ?
5 R. Oui, effectivement. C'est le document que nous trouvons à cet
6 intercalaire.
7 Q. Reportons-nous au numéro 113, cela n'a pas été traduit, mais cependant,
8 on peut reconnaître facilement la date, le numéro du paragraphe, c'est-à-
9 dire, une période qui commence avec le 24 mars et qui se poursuit. Nous
10 avons les dates du 27, du 28, nous pouvons voir que le 27, un membre de
11 l'armée de la Yougoslavie a été tué, Srdjan, fils de Radmilo Milosevic. Il
12 est dit que le 29 mars 1999, un soldat a été tué. L'incident précédent que
13 j'ai mentionné avait lieu à Klina et non pas à Pec.
14 A Istok, le 28, un autre Serbe a été tué, Bratislav Radnic. A
15 Celopek, près de Pec, le 30 mars, Milos Otovic, Veljko Petrovic, un membre
16 de l'armée a été tué à Kapusnica [phon]. Le 31 mars, ensuite, deux
17 personnes ont été tuées, Dragan Makic et Sladjan Stosic, un lieutenant.
18 D'autres personnes ont été blessées, moins grièvement, des serbes.
19 Le premier albanais, la première victime albanaise, on la trouve
20 mentionnée à la date du 1er avril. Adem Seljmaj a été tué par une arme de
21 petit calibre. Sa femme, Rahima Gashi est une civile. On mentionne,
22 ensuite, les plaintes qui ont été déposées, et cetera. On parle d'un
23 concubinage qui était mentionné dans ce contexte.
24 Igor Urosevic, le 1er avril, a été tué. Une autre victime serbe, le 2
25 avril -- une victime serbe, et cetera, et cetera. Ce n'est que le 2 avril,
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1 à Pec, dans la zone de Kakaric, qu'Ahmet Hasani de Pec a été tué. Il s'agit
2 du premier qui a été tué --
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il faut poser
4 une question, maintenant.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. S'il est dit, dans l'acte d'accusation, que le 27 et le
7 28 mars 1999, un certain nombre de personnes ont été abattues par l'armée
8 et par la police, est-ce que quelqu'un aurait été tué à Pec, pendant ces
9 journées, si l'armée et la police avaient tiré ?
10 R. Oui, c'est sûr.
11 Q. Est-ce que pendant ces journées, quelqu'un a été tué à
12 Pec ? Nous avons les documents.
13 R. Non.
14 Q. Avez-vous connaissance que quelqu'un ait tiré, ait ouvert le feu à Pec,
15 pendant ces premières journées de bombardements, journées pendant
16 lesquelles on fuyait Pec ?
17 R. Je ne dispose d'aucune information dans ce sens. Il est possible qu'il
18 y ait eu des tirs sporadiques, mais pas des tirs ciblés, pas des tirs qui
19 visaient des personnes en particulier.
20 Q. Nous voyons bien, dans ces documents, que personne n'a été tué. Est-ce
21 que vous vous souvenez de tirs, de fusillades ?
22 R. C'est difficile à dire s'il y a eu des tirs en particulier parce qu'il
23 y avait tout le temps des tirs. Ici, on parle d'un avion. Quand un avion
24 procède à des tirs, ce sont des tirs qu'on entend à plusieurs kilomètres de
25 distance.
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1 Q. Mais pendant les journées qui sont citées ici, pouvez-vous nous dire
2 que personne n'a été blessé ?
3 R. C'est exact, en effet.
4 Q. Il est dit, ici, qu'un certain nombre de personnes ont été abattues.
5 C'est ce qui est dit dans l'acte d'accusation; or, on peut établir si c'est
6 effectivement le cas ou pas. Il est, également, précisé et dit que des
7 maisons ont été incendiées. Je voudrais savoir s'il y a un membre de la
8 police ou de l'armée qui ait mis le feu à des maisons à Pec.
9 R. Non. Ni au sein de la police, ni au sein de l'armée, personne n'a
10 jamais fait quoi que ce soit de semblable.
11 Q. Est-ce qu'il y a eu des incendies à Pec, pendant cette période ? Soyons
12 bien précis, nous sommes en train de parler du 27 et du 28 mars, des
13 journées au cours desquelles on a vu se rassembler des foules nombreuses,
14 au centre de Pec. Est-ce qu'il y a eu des incendies ?
15 R. Oui, il y a eu des incendies.
16 Q. Où ?
17 R. Aux abords de la ville. On pouvait les voir.
18 Q. Est-ce que les pompiers sont intervenus ?
19 R. Non.
20 Q. Pourquoi ?
21 R. Ils n'étaient pas en mesure de se rendre sur les lieux.
22 Q. Pourquoi n'étaient-ils pas en mesure de se rendre sur
23 place ? Pour des raisons relatives à la sécurité ?
24 R. Comment cela pourquoi ? Dès qu'on sortait, dès qu'on voulait aller où
25 que ce soit, on se faisait tirer dessus; alors, comment aurions-nous pu
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1 envoyer des pompiers sur place ? Les pompiers ne sont pas des membres du
2 SUP.
3 Q. Mais vous savez que toutes les brigades de sapeurs-pompiers relèvent du
4 ministère de l'Intérieur. Si les pompiers n'étaient pas en mesure de se
5 rendre sur les lieux où il y avait des incendies parce qu'ils essuyaient
6 des tirs dès qu'ils essayaient de le faire, est-ce que quelqu'un a été en
7 mesure de mettre le feu à des bâtiments dans les zones contrôlées par
8 l'UCK ?
9 R. Personne d'autre, personne de notre côté n'aurait pu le faire.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il y a cinq
11 autres allégations qui figurent au paragraphe 65(e). Vous pourriez les
12 passer en revue dans les cinq minutes qui nous restent jusqu'à 14h parce
13 que ce serait une façon tout a fait productive d'utiliser le temps qui vous
14 est imparti. Le témoin est de Pec, il peut nous parler des allégations qui
15 sont formulé à cet endroit.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Examinons toutes les allégations qui sont
17 faites. Nous avons parlé des tirs. On a vu qu'il n'y eu aucune victime
18 parmi la population Albanaise, pas de blessés, pas de morts. Nous avons
19 parlé des incendies criminels.
20 M. MILOSEVIC : [interprétation]
21 Q. Je regarde tout ce qui est dit ici. Savez-vous si, effectivement, des
22 soldats et des policiers étaient postés le long des rues et forçaient les
23 Albanais du Kosovo à partir ?
24 R. Aucun soldat n'était déployé. Il y avait des policiers dans les rues,
25 mais ils n'étaient pas dans toutes les rues. Ils se trouvaient sur certains
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1 carrefours où ils vaquaient à leurs occupations habituelles, mais il n'y
2 avait pas de soldats de l'armée régulière.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais il est fait, ici, une
4 allégation relative à l'expulsion des populations contraintes de se rendre
5 au centre-ville, puis, de monter à bord d'autocars qui les emmenaient,
6 ensuite, à Prizren. Pouvez-vous faire des commentaires sur ce point ?
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est justement ce que j'allais lui
8 demander.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Pour ce qui est du déploiement de la police, nous avons pu déterminer
11 que les soldats n'étaient pas déployés dans la ville et quant aux
12 policiers, ils se trouvaient à leurs postes de travail habituels afin de
13 faire la circulation dans les rues.
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Combien y avait-il, au total, de policiers dans les rues du centre de
16 Pec, des policiers qui faisaient leur travail habituel ?
17 R. Je ne peux pas vous dire pour cette journée-là, mais je peux vous
18 donner le nombre total --
19 Q. Donnez-nous le nombre maximum de policiers qu'on aurait pu trouver dans
20 le centre de Pec ?
21 R. Cinquante, au total et au maximum, dans le centre ou dans le centre
22 élargi -- cela dépend comment on définit le centre de la ville. Il y avait
23 des positions occupées régulièrement et systématiquement par la police. Des
24 endroits où se tenaient systématiquement des policiers pour procéder au
25 contrôle des déplacements des véhicules et des personnes. Mais nous
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1 faisions face à certaines restrictions, nous travaillions en 4 ou 5
2 équipes. Nous n'avions pas toujours suffisamment d'hommes pour occuper
3 toutes les positions. On avait un certain nombre de policiers qu'on
4 divisait en quatre ou cinq équipes et c'était tout ce qu'on pouvait faire.
5 Q. Ces policiers étaient à leurs postes habituels.
6 R. Oui.
7 Q. Ceci, nous l'avons établi, nous l'avons précisé. Maintenant, j'aimerais
8 que vous nous disiez si vous savez si quelqu'un, qui que ce soit a
9 contraint les Albanais du Kosovo à monter à bord d'autocars pour quitter le
10 Kosovo-Metohija, monter à bord de camions ou d'autocars ?
11 R. Non. Pourquoi des camions, pourquoi des autocars ? Les gens pouvaient
12 se déplacer comme ils le souhaitaient dans leurs propres véhicules, dans
13 leurs tracteurs, leurs charrettes tirées par des bœufs. Pourquoi est-ce
14 qu'on les aurait contraints à monter à bord d'autocars ?
15 Q. Mais je me réfère à la phrase qu'on trouve au paragraphe 63 de l'acte
16 d'accusation où il est dit que : "Au centre-ville, ceux qui n'avaient pas
17 de voitures, ni d'autres véhicules ont dû monter dans des autocars ou des
18 camions pour être conduits à la ville de Prizren." Je viens de vous citer
19 cette phrase et veuillez me dire si elle est conforme à la réalité ou pas.
20 R. Premièrement, cela ne me paraît pas du tout logique. On semble dire,
21 ici, que ces gens sont d'abord arrivés au centre-ville et qu'ensuite, ceux
22 qui n'avaient pas de voitures ont été contraints à monter dans des
23 autocars.
24 Q. Est-ce que vous faites référence à la phrase que je viens de vous
25 citer ? Est-ce que c'est vrai ou pas vrai ?
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1 R. Je ne comprends même pas vraiment ce que cette allégation signifie. Si
2 cela devait être le cas, si cela devait être conforme à la réalité, il
3 faudrait que quelqu'un soit là, au centre-ville, pour déterminer qui avait
4 une voiture et qui n'en avait pas et ceux qui n'avaient pas de voiture, à
5 ce moment-là, devaient monter dans l'autocar.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais à votre connaissance, est-ce
7 que des Albanais sont montés à bord d'autocars ou de camions pour sortir de
8 la ville ? Est-ce que vous avez entendu parlé de ce genre de choses -- des
9 gens qui sont montés à bord de ces autocars ou des ces autobus pour aller à
10 Prizren ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai rien vu de tel, je n'ai rien entendu
12 dire de tel. Je n'ai pas entendu dire que quiconque soit monté à bord
13 d'autobus. Mais effectivement, j'ai entendu dire que des gens étaient
14 partis en autocars. Il y a des gens qui sont partis dans leurs voitures
15 personnelles, dans leurs charrettes, dans leurs tracteurs, dans des
16 autocars aussi. Mais je n'ai jamais entendu que quiconque soit parti en
17 tracteur -- enfin, c'est possible aussi parce que je n'aurais pas pu
18 repérer les gens qui, éventuellement, auraient été cachés sous une bâche.
19 M. MILOSEVIC : [interprétation]
20 Q. Excusez-moi, il y a une question qui est vraiment cruciale ici. Est-ce
21 que quiconque a contraint un Albanais à monter à bord d'un autocar et l'a
22 forcé à partir ?
23 R. Je n'ai jamais entendu rien de tel. Je n'ai jamais rien vu de tel, non.
24 Q. Vous nous dites qu'il n'y avait aucun soldat. Est-ce que des policiers
25 ont contraint des Albanais à monter à bord d'autocars pour partir ?
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1 R. Les policiers étaient là pour faire la circulation et pour faire leur
2 travail habituel de police qui consiste à protéger la vie, à protéger les
3 personnes et les biens. Mais cela n'incluait pas le fait de monter des
4 personnes à bord des autocars.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le 27 et le 28 mars, où étiez-vous
6 exactement ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Sans doute, probablement, c'était le jour où
8 le centre de Pec était tellement rempli de monde, ce jour-là, j'étais au
9 centre, à Pec. Je passais par d'autres routes parce qu'il y avait des
10 embouteillages. Ce jour-là, j'ai été même à Kula, c'est un col qui mène au
11 Montenegro et les routes étaient remplies de gens, encombrées.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que faisiez-vous, ce jour-là ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je donnais des instructions aux agents chargés
14 de la circulation afin qu'ils s'installent à certains endroits pour
15 accélérer le mouvement, le déplacement des véhicules. Par exemple, au poste
16 de contrôle de Savine Vode, j'ai dit à l'agent de police de simplifier les
17 procédures de contrôle afin que le plus grand nombre possible de véhicules
18 puissent passer en direction de Kula, parce que c'est une pente et en
19 général, la circulation est lente. Si on arrête un véhicule --
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voudrais que vous terminiez votre
21 interrogatoire principal et demain ou après-demain, la prochaine fois que
22 nous allons reprendre notre audience, nous nous occuperons des pièces à
23 conviction.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai encore pas mal de questions à poser à
25 ce témoin.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous n'aurez le droit de poser
2 d'autres questions que si elles sont pertinentes.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux continuer ?
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez encore trois minutes, oui.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Fort bien. Pour que tout soit parfaitement clair, vous étiez le chef
7 responsable de la police de circulation ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous vous êtes occupé de la circulation comme d'habitude ?
10 R. Oui.
11 Q. A la différence près que lorsque certaines routes étaient plus ou moins
12 encombrées --
13 R. Nous avons essayé de détourner la circulation vers des voies moins
14 encombrées.
15 Q. Est-ce que vous êtes au courant de ces départs ?
16 R. J'essaie de me souvenir de la date, mais je vous ai dit que c'était
17 très encombré.
18 Q. Vous étiez à un certain endroit, vous-même. Les gens, où ce sont-ils
19 rassemblés ?
20 R. Au centre, sur la place du centre de Pec.
21 Q. D'où venaient ces gens ?
22 R. De divers quartiers de la ville, mais aussi des villages. En tout cas,
23 c'est ce que mes agents en patrouille m'ont rapporté.
24 Q. Il y avait combien de civils dans le centre ?
25 R. La place était pleine. Je crois qu'il y avait, environ,
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1 10 000 personnes.
2 Q. Est-ce que quelqu'un s'est adressé à ces gens ?
3 R. Je ne parle pas l'albanais. Certains discours ont été faits, mais je ne
4 sais pas ce que ces gens ont dit. Je ne sais même pas qui ces gens étaient.
5 Ce n'était pas un meeting organisé, ce qui nous aurait permis de savoir par
6 annonce faite au préalable qui allait prendre la parole. Il y a eu des
7 cris, il y a eu des discours, mais je ne sais pas exactement ce qui s'est
8 dit.
9 Q. C'était des discours qui n'étaient pas officiels, mais est-ce qu'il y
10 avait présence d'autorités ?
11 R. Non.
12 Q. Est-ce qu'un citoyen s'est adressé à vous, en particulier ?
13 R. Oui.
14 Q. Ces citoyens, que vous ont-ils demandé ?
15 R. Il y a des questions que je n'ai pas comprises à l'époque, mais plus
16 tard, j'ai compris ce qu'ils voulaient dire. Ils m'ont demandé s'ils
17 pouvaient aller au Monténégro en utilisant leurs propres voitures. Je ne
18 comprenais pas pourquoi ils me posaient cette question. J'ai simplement
19 répondu qu'ils pouvaient aller où ils voulaient, où bon leur semblait, avec
20 le véhicule qu'ils voulaient prendre.
21 Q. Ils vous ont demandé s'ils pouvaient aller en voiture au Monténégro et
22 vous avez dit qu'ils pouvaient aller où ils voulaient.
23 R. Oui. Ils demandaient si la police ou l'armée allait les empêcher de
24 partir. J'ai dit, pas du tout, qu'il n'y aura aucune restriction, même
25 s'ils voulaient aller au Monténégro ou ailleurs, dans le pays.
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1 Q. Très bien.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous faut nous arrêter. Nous
3 avons déjà travaillé 20 minutes de plus que d'habitude. Cependant, la
4 Chambre va être saisie d'une autre question demain. Mais les parties
5 devraient être prêtes à reprendre cette audience, si c'était possible, de
6 poursuivre les débats demain. J'espère que tout est clair.
7 L'audience est levée.
8 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
10 --- L'audience est levée à 14 heures 06, sine die.
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