Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 9 mai 2005

2 [Audience publique]

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez peut-

7 être de quelques minutes à peine pour terminer votre interrogatoire

8 principal.

9 LE TÉMOIN: RADOVAN PAPONJAK [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

12 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Colonel.

13 R. Bonjour.

14 Q. Il nous reste une partie de cet l'enregistrement vidéo, j'aimerais que

15 nous le passions rapidement. C'est le tout dernier clip qui se rapporte au

16 25 mai, date à laquelle il a été fourni une description de tous ceux qui

17 ont péri et qui ont été enterrés.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous voulez cette

19 diffusion ?

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, le tout dernier clip que nous n'avons pas

21 eu l'opportunité de voir.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons le faire en diffusion

23 rapide comme la semaine dernière ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut le passer en accéléré, oui. On n'a même

25 pas besoin de le voir intégralement, il suffira de voir quelle a été la

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1 procédure mise en œuvre.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Apparemment, aucune cassette vidéo

3 n'a été remise à la régie.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais cela leur a été donné l'autre jour, je ne

5 sais pas ce qu'il a pu lui arriver.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pendant qu'on essaie de tirer ceci

7 au clair, poursuivez, Monsieur Milosevic. Nous pourrons revenir à l'examen

8 de cette cassette plus tard.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Fort bien. Mon Colonel, nous avons vu plusieurs enregistrements vidéo

11 avec des événements, des événements du KP Dom Dubrava entre le 19, et

12 lorsque nous avons visionné la dernière vidéo ce sera avec la date du 25

13 mai compris. Compte tenu de tout ce que nous avons vu, et compte tenu de ce

14 que vous avez personnellement pu constater sur les lieux, puisque vous avez

15 été là-bas à plusieurs reprises, dites-nous quand est-ce que vous avez là-

16 bas.

17 R. J'étais sur place le 19 mai après le premier bombardement et j'y étais

18 le 25 mai. Entre-temps, je suis retourné le 21 mai après que cette équipe

19 chargée du constat ait survécu aux bombardements.

20 Q. Le 21 mai, c'est la journée où vous avez trouvé cette équipe chargée du

21 constat au département du ministère de l'Intérieur à Istok, elle venait de

22 survivre aux bombardements cette équipe ?

23 R. Justement, je les ai trouvés là-bas juste après leur arrivée aux locaux

24 du ministère de l'intérieur, ils étaient dans un piteux état.

25 Q. Compte tenu de ce que vous avez vu et de ce que nous avons vu sur les

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1 vidéos relatives à l'instruction, je me propose de vous donner lecture de

2 ce paragraphe tout entier du 66(k) qui s'énonce comme suit : "A l'aube du

3 22 mai 1999, ou vers cette date" - nous parlons du 22 mai 1999 et nous

4 sommes dans l'intervalle qui se situe entre le 19 et le 25 mai - "une

5 personne en uniforme au complexe pénitentiaire de Dubrava a annoncé d'un

6 mirador que tous les prisonniers devaient rassembler leurs effets

7 personnels et se mettre en rangs sur le terrain de sport de l'établissement

8 afin d'être transférés dans la prison de Nis en Serbie. Très vite, des

9 centaines de prisonniers se sont rassemblés sur le terrain de sport avec

10 leurs sacs remplis d'effets personnels et se sont mis en rangs dans

11 l'attente de leurs transports. Sans prévenir, des personnes en uniforme ont

12 ouvert le feu sur les prisonniers à partir du mirador, de trous pratiqués

13 dans le mur d'enceinte et de niches de mitrailleuses aménagées au-delà du

14 mur. De nombreux prisonniers ont été tués sur le coup et d'autres blessés."

15 En dessous, au petit (i), on dit : "Dans l'après-midi du 23 mai 1999, ou

16 vers cette date, les forces de la RFY et de la Serbie ont jeté des grenades

17 et tiré dans les canalisations, les égouts et les bâtiments et les caves

18 tuant et blessant de nombreux autres prisonniers qui s'y étaient réfugiés

19 après les événements de la veille. Au total, environ 50 prisonniers ont été

20 tués." Puis, on dit --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vais vous

22 dire une chose, il ne convient pas de poser une seule question générale à

23 propos de ces allégations multiples, car elles sont nombreuses aux

24 paragraphes (k) et (i). Il ne suffit pas de poser une seule question de

25 nature générale. Vous devez répondre à ces allégations précises et obtenir

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1 une réponse.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Mon Colonel, vous avez été là-bas le 19 et le 21, puis le 25.

5 R. C'est exact.

6 Q. Ce jour-là ou l'une quelconque de ces journées, il a été vu des

7 journalistes de présents à l'occasion de l'instruction ?

8 R. Oui, les journalistes étaient présents le 21 mai. Sur les fois où j'ai

9 été, mais les rapports disent qu'ils ont été présents le 24 également. Cela

10 est dit dans le rapport du Juge d'instruction.

11 Q. Veuillez m'indiquer si vous avez été à même de remarquer des ouvertures

12 dans le mur ou les murs à partir de quoi, à partir desquelles ouvertures

13 quelqu'un aurait pu tirer ?

14 R. Non. Je n'ai pas vu cela.

15 Q. Avez-vous ouï dire quoi que ce soit au sujet d'exécutions organisées au

16 sein de la prison ?

17 R. Non. Il n'a pas été question de cela du tout.

18 Q. Dites-moi, ces jours-là, y a-t-il eu une unité quelconque, autre que

19 l'unité des gardes ?

20 R. Non.

21 Q. A l'intercalaire 8, il est donné un descriptif de la façon dont les

22 événements se sont produits. Vous avez vu sur l'enregistrement et vous

23 l'avez constaté vous-même le jour d'avant qu'on pouvait voir bon nombre de

24 matelas et de couvertures sur le gazon ?

25 R. Oui. La vidéo nous le montre. Si l'on avait vu, non pas en accéléré

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1 mais de façon normale, on aurait vu mieux encore.

2 Q. Se pouvait-il que quelqu'un fasse venir les prisonniers pour les

3 aligner et qu'ils viennent avec des couvertures et les matelas ?

4 R. Ce ne serait pas logique et ce ne serait pas du tout approprié.

5 Q. Pouvez-vous nous fournir une explication au sujet de ces couvertures et

6 matelas ?

7 R. En raison de la peur qu'ils avaient de ces espaces clos et des

8 bombardements, ils ont sorti les matelas et les couvertures pour se

9 couvrir. Ils ont placés cela sur le gazon parce que c'était plus

10 confortable et cela s'y prêtait le plus. Il faisait chaud et même si cela

11 n'avait pas été une situation de danger éminent, ils auraient préféré

12 dormir dehors qu'à l'intérieur.

13 Q. Dans la transcription qui est fournie au côté de cet enregistrement

14 puisqu'on n'entend pas la voix en accéléré, mais ceci existe sur

15 l'enregistrement qui fait partie de cette documentation relative à

16 l'instruction. On peut entendre une voix qui décrit ce qui se passe pendant

17 que l'on tourne la vidéo. Je vais vous citer ce qui est dit. On dit : "Les

18 traces sur la porte --"

19 M. NICE : [interprétation] Ceci n'a pas été traduit. Nous n'avons pas

20 entendu la bande-son à un débit audible. Je ne sais pas comment vous voulez

21 traiter ceci, une fois de plus. C'est l'accusé qui dépose lui-même et qui

22 interprète ce qui se trouve sur la cassette qui est en Serbe.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, nous n'avons reçu la transcription

24 en B/C/S, qui effectivement n'a pas été traduit. C'est le problème.

25 M. NICE : [interprétation] Effectivement.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que vous

2 comprenez la nature du problème. Nous n'avons pas entendu ce commentaire

3 qui accompagnait les images de l'enregistrement. Maintenant, vous essayez

4 d'y faire référence. Pourriez-vous indiquer en B/C/S, l'endroit où cela se

5 trouve. Nous pourrions demander la traduction. On pourrait placer le

6 document sur le rétroprojecteur.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, étant donné que

8 l'enregistrement tout entier a été remis en tant qu'élément de preuve, tout

9 un chacun sera à même de vérifier si les commentaires se trouvent

10 effectivement sur l'enregistrement. Cela a été tiré de l'enregistrement.

11 L'enregistrement vous a été, quant à lui, donné. Je ne peux pas vous dire

12 maintenant à quel endroit ces citations se trouvent précisément, mais tout

13 ceci peut être vérifié a posteriori.

14 On ne pourra que vérifier que techniquement, il a été procédé à la

15 transcription du texte ou plutôt de ce que dit la voix qui se trouve

16 enregistrée sur la vidéo. Je n'essaie pas d'apporter des commentaires.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Donc, tous ceux qui ont vu la vidéo et le témoin ici présent, l'a fait.

19 Il peut nous confirmer si cela s'y trouve.

20 R. Les techniciens en police scientifique ont commenté la façon dont les

21 portes ont été retirées de leurs gons et comment les personnes qui se

22 trouvaient dans la cellule ont quitté cette pièce. Lorsqu'on a vu cela sur

23 la version accélérée, j'ai commenté et j'ai dit que nous allions omettre

24 bon nombre de détails importants. Mais si on avait visionné cela

25 normalement, on aurait pu l'entendre et le comprendre.

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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que ceci veut

2 dire qu'il ne vous est pas possible de situer le passage qui vous intéresse

3 ici dans cette transcription qui se trouve être en B/C/S.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous devriez pouvoir le faire.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux le localiser au niveau de la

6 transcription. Bien sûr que je peux le faire, mais je ne peux pas dire

7 maintenant à la cabine technique à quelle minute exactement cela peut être

8 entendu sur l'enregistrement. Maintenant pour ce qui est de la

9 transcription, vous l'avez.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Dernier paragraphe.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut toujours comparer. Par exemple, au

12 niveau de la transcription, je peux le faire. Au tout dernier paragraphe de

13 la première page, on dit : "Les traces sur la porte de la pièce montre de

14 quelle façon les détenus ont enfoncé la porte pour sortir de cette pièce et

15 cela est valable pour la pièce d'en face. D'une manière générale, tout

16 dortoir dans l'installation qui a été touchée," - on parle de

17 l'installation qui a été touchée par une bombe - "les portes des dortoirs

18 ont été enfoncées de l'intérieur par les détenus et devant le dortoir 35D

19 où il y avait quatre détenus, il y avait une serrure de sécurité qui a

20 cette apparence-ci après le défoncement de la porte par le soin des détenus

21 qui voulaient se sauver. A l'étage, le dortoir 33D, on a également enfoncé

22 la porte et on voit l'endroit où se trouvait cette serrure de sécurité. La

23 caméra doit montrer l'apparence de cette serrure." On dit, ensuite : "Il

24 s'agit ici de tiges en métal ou plutôt de pieds de lits qui ont été

25 utilisés comme levier pour sortir les portes et les enfoncer. Voilà

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1 l'apparence des portes du côté intérieur.

2 "Nous nous trouvons devant le dortoir 54 où il y avait des détenus.

3 Après l'intervention des agresseurs de l'OTAN, ils n'ont pas pu enfoncer la

4 porte mais ils ont trouvé une façon pour enfoncer le mur."

5 Ils ont enfoncé le mur pour se créer un passage vers le corridor.

6 Voici un passage utilisé par six détenus ou plutôt six personnes

7 condamnées. Puis, on nous montre de quelle façon se présente le dortoir

8 numéro 54 sur la vidéo. Puis, on dit : "On voit des tiges cassées au niveau

9 du lit, tiges qui ont été utilisées pour enfoncer la porte." Le désordre et

10 les matelas placés un peu partout peuvent être vus sur la vidéo et on voit

11 à l'étage que la porte est sortie de ses gons et on voit que les détenus

12 l'ont enfoncé de l'intérieur. Sur la porte, on voit des traces de pieds et

13 on voit un désordre très grand dans la pièce.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez, maintenant, poser

15 une question à ce propos.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Mon Colonel, est-ce qu'après l'intervention des frappes aériennes, les

18 détenus qui se trouvaient dans les pavillons détruits dans ces journées-là

19 auraient sorti des éléments de leur ameublement pour s'installer dans

20 l'enceinte et sur le gazon ?

21 R. C'est incontestable. Ils ont quitté les pièces. Ils ont sorti le

22 matériel dont ils avaient besoin pour survivre à ciel ouvert, y compris,

23 leurs effets personnels. Ils ont eu tout le temps qu'il leur fallait pour

24 ce faire parce que la situation, après le bombardement dans ce KPD, était

25 plutôt désordonnée --

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1 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

3 M. NICE : [interprétation] -- mais est-ce que c'est une conclusion, une

4 déduction ? Est-ce que c'est quelqu'un qui l'a rapporté ou est-ce que

5 c'est, ici, une conclusion que tire le témoin ? Je m'interroge.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Colonel, d'où vous vient cette

7 information ? Quelle en est la source ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] La source de l'information, c'est

9 l'enregistrement vidéo. Les constats et les remarques personnelles faites

10 par des personnes qui se sont trouvées là-bas, au moment donné.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Mon Colonel, à cet intercalaire 8, qui constitue l'information relative

14 à tous ces événements au KPD de Dubrava, y a-t-il une contestation disant

15 qu'un certain nombre de prisonniers a tenté de s'enfuir ?

16 R. Oui, cette contestation s'y trouve, cette contestation relative à la

17 tentative de fuite et ils ont été empêchés de le faire.

18 Q. Il y a eu une tentative, mais ils ont été empêchés ?

19 R. Exact.

20 Q. Avez-vous reçu des informations pour ce qui est de savoir si quelqu'un

21 aurait ouvert le feu sur les détenus ?

22 R. Je n'ai pas eu d'informations à ce sujet. Cela n'a pas fait du tout

23 l'objet de mon attention, à l'époque.

24 Q. Est-ce qu'il a pu se produire qu'on ouvre le feu à l'occasion de cette

25 tentative d'évasion ?

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1 R. Cela aurait pu se passer, oui.

2 M. NICE : [interprétation] L'accusé essaie de contourner le règlement, de

3 le déformer. Il pose des questions directrices. Il présente des éléments de

4 preuve par l'intermédiaire de ce témoin. A mon humble avis, il faudrait

5 qu'on l'arrête.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, cette question

7 n'est pas de propos; c'est une question directrice.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez placer sur le

9 rétroprojecteur la deuxième page de l'intercalaire 8 ? Je pense que c'est

10 aussi le premier paragraphe en version B/C/S. Est-ce que vous pourriez

11 examiner ceci ?

12 On est en train de poser ce document sur le rétroprojecteur, mais je vais

13 vous lire le passage.

14 Dans ce paragraphe, vous avez dit, je le cite : "Au cours de cette attaque,

15 le périmètre de la prison, le mur de clôture a été démoli à plusieurs

16 endroits, ce qui a permis aux détenus de s'échapper du complexe

17 pénitentiaire." Puis, un peu plus loin, voici ce qui est dit : "Un groupe

18 de personnes emprisonnées, condamnées a essayé de s'échapper. Le service de

19 sécurité dont les membres avaient été déployées autour des murs du complexe

20 pénitentiaire a pris des mesures pour empêcher l'évasion de ces

21 prisonniers."

22 Je vous pose la question suivante : quelles sont les mesures qui ont été

23 prises pour empêcher l'évasion de ces prisonniers ? Est-ce que, notamment,

24 on a tiré sur eux ? Est-ce qu'il y a eu des blessés ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas rédigé, moi-même, cette

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1 information. Cela a été fait par les soins de cette équipe qui a été

2 désignée par le SUP de Pec.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais c'est vous qui avez signé. Alors,

4 je ne comprends pas votre réponse. C'est un document que vous avez signé.

5 Vous devriez en connaître le contenu et les circonstances.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. C'est ce que je voulais

7 justement dire.

8 L'équipe a enquêté et c'est la procédure normale chez nous, c'est la

9 procédure habituelle. Il y a une équipe qui établit la situation et j'en

10 prends lecture et c'est tout à fait normal, je l'ai signée. Mais ce n'est

11 pas moi qui ai interrogé toutes ces personnes au sujet de la totalité des

12 circonstances. S'il y a eu tentative d'évasion de la part des détenus, les

13 gardiens de la prison ont dû l'empêcher. Ils empêchent cela suivant les

14 modalités prévues par le règlement et il est normal d'utiliser leurs armes,

15 pour eux, s'ils ne peuvent pas empêcher l'évasion autrement. Nous ne sommes

16 pas entrés dans les détails pour savoir de quelle façon on a empêché cette

17 évasion parce que cela relève des compétences du ministère de la Justice et

18 non pas du ministère de l'Intérieur. C'est la raison pour laquelle, dans

19 cette information, il n'a pas été fourni tous les détails puisque nous ne

20 les avons pas interrogés.

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Paponjak, c'est quelque chose

22 de différent, mais est-ce que vous étiez présent à l'endroit où a été

23 effectué l'autopsie ? Il s'agit du cimetière de Rakosi, apparemment; cela a

24 dû se passer au mois d'août 1999, s'agissant des victimes de l'autopsie des

25 victimes de la prison de Dubrava.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été présent sur les lieux, le 25 ou le 26

2 mai, mais pas en août 1999. J'ai été présent à cet endroit-là, au moment où

3 les corps ont été enterrés.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Je parle de l'autopsie effectuée

5 par l'équipe médico-légale espagnole. Est-ce que vous êtes au courant du

6 fait qu'il y a eu cette autopsie ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais qu'il y a eu une autopsie de faite,

8 mais je n'étais pas présent.

9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez eu connaissance des

10 résultats de cette autopsie ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne sais pas quels ont été les

12 résultats de cette autopsie effectuée par les Espagnols.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'avez pas entendu dire qu'une

14 trentaine de corps présentaient des blessures par balle ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne suis pas au courant de ces éléments

16 parce qu'ils ne nous ont communiqué aucun constat et ne nous ont demandé

17 aucune espèce de coopération.

18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Poursuivez, Monsieur

19 Milosevic.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, on voit une

21 certaine systématique dans votre interrogatoire principal; nous le

22 constatons aujourd'hui. En général, quand vous arrivez vers la fin, vous

23 essayez de terminer en étant très disert et, sinon, vous faites des

24 commentaires qu'on s'attendrait à entendre au moment de vos plaidoiries. Ce

25 qui veut dire que, finalement, cela ne donne pas beaucoup de résultats.

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1 Cela commence à se décéner [phon] comme systématique.

2 Si vous n'avez pas d'autres questions pertinentes à poser à ce

3 témoin, je vais vous dire de terminer votre interrogatoire principal. Vous

4 pourrez nous présenter des arguments lors de votre plaidoirie, mais le

5 témoin ne saurait vous aider sur ces sujets.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je n'ai fait que poser des questions pour

7 lesquelles j'ai supposé que le témoin était à même de répondre. Je lui ai

8 demandé s'il avait ouï-dire que quiconque aurait fusillé, exécuté des

9 détenus dans la prison de Dubrava et le témoin a répondu que, non.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Posez votre question et voyons

11 maintenant si votre question va être pertinente.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Mon Colonel, si quelqu'un avait été exécuté dans la prison de Dubrava,

14 auriez-vous été forcément mis au courant de la chose ?

15 R. Tout à fait, certain. Cette information nous serait forcément parvenue.

16 Q. On a vu sur ces vidéos qu'il y avait plusieurs personnes tuées qui ont

17 été identifiées. On a vu des bouts de papier placés sur eux. Est-ce qu'on

18 peut supposer qu'il s'agissait de personnes qu'on a identifiées sur place

19 et reconnues sur place ?

20 R. Tout à fait exact.

21 Q. S'agissant de ces papiers au niveau des minutes de l'enregistrement

22 1.19.10, on voit Januz Krasniqi, originaire de Prizren ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que ce nom coïncide avec la liste que vous avez dans l'avenant J

25 qui parle d'une liste des personnes qui auraient péri de la main de nos

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1 effectifs, à nous, à Dubrava ?

2 R. Je ne sais pas, je n'ai pas cette liste sous la main.

3 Q. Bien. Mais on peut retrouver ce nom au milieu de la liste annexe J.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je ne comprends pas une

5 chose : s'agissant du commentaire que vous avez fait lors de la journée

6 précédente, il découlerait que je devrais prouver que tout ceux qui se

7 trouvent à l'annexe J ont péri à l'occasion du bombardement. Or, il me

8 semble, à moi, que c'est à M. Nice qu'il reviendrait de prouver qu'ils ont

9 été tués, comme on le dit --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous ai coupé le micro parce que

11 c'est tout à fait hors de propos comme commentaire. Jamais je n'ai laissé

12 entendre que c'est vous qui avez la charge de la preuve pour quoi que ce

13 soit qui se trouve dans cet acte d'accusation. Mais dans la mesure où vous

14 présentez des éléments de preuve, je vous ai donné quelques idées sur la

15 façon de vous en tirer au mieux. Je vous ai dit, vous pourrez rester là

16 assis, ne rien dire par rapport aux allégations et pour être finalement

17 acquitté, pour sortir sans problème parce que c'est toujours l'Accusation

18 qui a la charge de la preuve. C'est vraiment mal intentionné de votre part

19 de dire que qui que ce soit parmi les Juges de la Chambre aurait dit autre

20 chose. Poursuivez, s'il vous plaît.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Nous allons essayer de ranger les témoins au sujet desquels ce témoin a

24 témoigné. Colonel, combien de détenus y avait-il dans cette prison ?

25 R. Ils étaient 1004.

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1 Q. Bien. Partant du descriptif au (k) et au (i), on peut dire qu'ils ont

2 été rassemblés à un endroit, qu'ils ont été exécutés et quels sont, là, les

3 faits qui ne sauraient être déniés ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais ce n'est pas une question que

5 vous posez, là, vous le savez.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Alors, combien de centaines de prisonniers, après cette attaque sur la

8 prison de Dubrava, ont été évacués vers d'autres prisons, pour être

9 concret, vers la prison de Lipjan ?

10 R. Après tous ces événements, il a été évacué, environ,

11 750 prisonniers, vers le KPZ de Lipjan.

12 Q. Combien de détenus ont été tués à l'occasion des bombardements de

13 l'OTAN ?

14 R. Une centaine.

15 Q. Bien. Combien de prisonniers a-t-on hospitalisé en les envoyant vers

16 les hôpitaux variés, y compris, l'hôpital de Pec, l'hôpital de Lipjan et

17 autres, s'agissant des blessés, j'entends ?

18 R. Cela, je ne sais pas vous le dire par cœur. Je sais que tous ceux qui

19 ont été blessés et que nous avons retrouvés là-bas ont été transportés,

20 d'abord, au dispensaire d'Istok, puis, à l'hôpital de Pec, pour y être

21 hospitalisés. Je ne sais pas combien on en a hospitalisé à Lipjan.

22 Q. Bien.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs, d'après ce qui est donné dans la

24 descriptif de ces événements, dans l'acte d'accusation, il découlerait de

25 ce qui est dit que les autorités ont exécuté les détenus, le millier qu'il

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1 y avait. Ceux qui n'ont pas été tués ou blessés ont été transportés vers

2 les hôpitaux et ceux qui n'auraient été, ni blessés, ni tués ont été

3 évacués vers d'autres prisons. Or, on en a évacué, vers d'autres prisons,

4 quelques huit cents; est-ce qu'on peut supposer que tel événement tel que

5 décrit pourrait être vraisemblable ?

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faudra que cela soit reformulé.

7 On arrive à la fin de votre interrogatoire principal. Encore une question

8 de ce genre et je vous arrête.

9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas suivi, Monsieur Milosevic.

10 Au moment où vous avez fait référence à l'enregistrement, 1.10, lorsqu'on

11 parle d'une des victimes, Januz Krasniqi, en l'occurrence, qu'est-ce que

12 cela voulait dire 1.10 ? Qu'est-ce que vous vouliez dire par là ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être cela n'a-t-il pas été bien dit. On

14 dit 1.19.10, ce sont les minutes et les secondes qui apparaissent sur

15 l'enregistrement vidéo où on peut voir cette personne tuée avec son nom qui

16 est inscrit sur un bout de papier qui est placé sur le corps et sur

17 l'enregistrement vidéo, le minutage de la vidéo dit 1.19.10. C'est la même

18 personne qui se retrouve --

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais si c'est le cas, je pense qu'il

20 faudrait le voir, si c'est une des victimes citées dans l'annexe.

21 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si ceci peut vous aider, mais je

22 suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur le Juge Kwon. Il est possible

23 que lors du contre-interrogatoire, je vous demande d'examiner l'un ou

24 l'autre passage de cet enregistrement vidéo pour mes raisons personnelles.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

Page 39184

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tiens à signaler --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je reprends la suggestion de M. le

3 Juge Kwon, je demande qu'on diffuse la cassette au minutage, 1 heure, 19

4 minutes et 10 secondes.

5 Mais il faudra peut-être un certain temps pour retrouver ce passage. Dans

6 l'intervalle, est-ce que vous auriez une autre question à poser, Monsieur

7 Milosevic ?

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Je me propose -- mais avant cela, je vais vous dire que, sur

10 l'enregistrement vidéo, on peut voir plusieurs personnes qui ont été

11 identifiées et sur plusieurs de ces personnes, il a été placé des bouts de

12 papier et j'ai les minutes exactes de l'enregistrement où cela se voit.

13 L'une des ces personne est Januz Krasniqi, l'une des personnes qui se

14 trouve à l'annexe J. Les autres ne coïncident pas avec les noms -- enfin,

15 ne se retrouvent pas sur les noms, mais ont été quand même identifiés.

16 M. NICE : [interprétation] S'agissant de Krasniqi, je pense que le minutage

17 donné par l'accusé n'est peut-être pas exact. Il devrait être 1.17.49, une

18 heure 17 minutes 49 secondes.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je m'adresse à la régie, est-ce

20 qu'elle peut prendre le dernier minutage mentionné à 1.17.49 ?

21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela figure sur votre logiciel

22 Sanction ?

23 M. NICE : [interprétation] Oui. Je pense que c'est Mme Dicklich qui la

24 diffuse. Je suis prêt à me servir de notre logiciel si cela vous convient,

25 Messieurs les Juges.

Page 39185

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Oui.

2 [Diffusion de cassette vidéo]

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que l'on peut revenir en arrière

4 pour voir le nom ?

5 [Diffusion de cassette vidéo]

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord. J'ai vu.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Januz Krasniqi, c'est ce qu'on peut lire.

8 M. NICE : [interprétation] C'est là que nous avons commencé la diffusion de

9 cette séquence. Vous n'avez peut-être pas vu cette image-ci ou ces quelques

10 phrases. C'est peut-être un autre corps, mais en tout cas c'est que nous

11 avons essayé de montrer. Ce cartron avec le nom.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Etant donné que je vois que l'enregistrement

13 est disponible au niveau de la cabine technique, je voudrais qu'on nous

14 passe maintenant les enregistrements du 25 et 26 mai en accéléré pour que

15 nous puissions voir tout ce qui a été fait sur les lieux avec les personnes

16 tuées dans la prison de Dubrava.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui, faisons cela.

18 [Diffusion de cassette vidéo]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Normalement, on devrait diffuser

20 ceci en accéléré. Non.

21 [Diffusion de cassette vidéo]

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, on entend des voix. L'enquêteur dit ce

23 qu'il faut essayer de trouver sur les corps pour les identifier. On précise

24 les habits, pantalon bleu, chemise noire, chaussures. C'est important pour

25 permettre d'identifier les personnes.

Page 39186

1 [Diffusion de cassette vidéo]

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ici, on donne des numéros sur les corps. On les

3 numérote tous.

4 [Diffusion de cassette vidéo]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Diffusez en accéléré, s'il vous

6 plaît.

7 [Diffusion de cassette vidéo]

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous pouvons passer tout de suite à l'autre

9 séquence où ils sont enterrés, parce qu'ici on va jusqu'au numéro 93, donc

10 cela va prendre un certain temps.

11 [Diffusion de cassette vidéo]

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Colonel, à partir du numéro 1 au 93, vous avez regardé cette cassette ?

14 R. Oui.

15 Q. Il y a combien de numéros apposés à ces corps ?

16 R. Sur ordre du Juge d'instruction, nous avons commencé l'examen des corps

17 sous l'angle médico-légal au village de Rakos, les 25 et 26. Cela a pris

18 deux jours. Il y avait en tout 93 corps. On les a photographiés, on a fait

19 un enregistrement vidéo, d'autres éléments d'identification ont été décrits

20 et relevés, il y a eu prise d'empreintes digitales pour permettre

21 l'identification. Après quoi, on a enterré les corps. Les tombes ont été

22 numérotées de la même façon qu'on a numéroté les corps quand on les a

23 photographiés. Cela a pris deux jours, je vous l'ai déjà dit, en réponse

24 aux questions posées par M. le Juge Kwon. J'étais là.

25 Donc, les 25 et les 26, j'étais présent et je sais parfaitement ce

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1 qui s'est passé.

2 Q. Fort bien. Intercalaire 46.4, est-ce qu'on trouve des photographies de

3 toutes les personnes qui ont été tuées ou blessées ? Est-ce qu'il y a aussi

4 des empreintes digitales de ces personnes ?

5 R. Tout à fait. Oui. C'est le dossier médico-légal de ce que le SUP de Pec

6 a fait ce jour-là.

7 Q. Fort bien. Je vais simplement lire autre chose.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, le Pr Rakic a examiné les

9 documents de M. Nice et on a sorti un feuillet, le numéro ERN 03030807. Il

10 s'agissait là d'une conclusion. On dit : "[le tampon], c'est celui du

11 ministère de la Justice - et puisqu'on dit ici : "Que c'est signé par

12 Emilio Perez Pujol," un médecin, je suppose dès lors que ce sont là les

13 conclusions des experts espagnols.

14 J'appelle votre attention sur la chose suivante. La date est celle du

15 3 juin 2000, donc treize mois plus tard. Dans le document, il est dit ceci

16 : "Les éléments inspectés correspondaient aux caractéristiques suivantes :

17 c'étaient tous des hommes. Puis, ils étaient dans la fourchette d'âge de 16

18 à 60 ans. Apparemment, les morts ont été causées par des armes ou munitions

19 utilisées dans les bombardements aériens. Ceci concernait 45 causes de

20 mort, et 53 morts ont eu lieu suite à l'utilisation d'armes ou de munitions

21 utilisées pour empêcher des tentatives d'évasions."

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Suite à cette analyse ainsi effectuée, est-ce qu'il aurait pu être

24 établi si c'étaient là des prisonniers de Dubrava et si ces personnes ont

25 été tuées au cours, s'agissant de certains, de leurs tentatives d'évasions

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1 ou si ces personnes ont trouvé la mort au cours des bombardements aériens

2 puisque cela s'est passé quelques mois après leur enterrement.

3 R. Je ne sais pas sur quoi on se base --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Autre question à laquelle le témoin

5 ne saurait répondre, Monsieur Milosevic.

6 M. NICE : [interprétation] Merci, Madame Dicklich d'avoir retrouvé aussi

7 rapidement le document. Je pense que l'accusé fait référence à un document

8 qui est peut-être la pièce 165, intercalaire 7. Ceci vient de nos archives

9 électroniques manifestement, du moins pour le moment.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Colonel, vu ce que vous avez vu vous-même et vu ce que vous avez vu sur

12 ces séquences vidéo, est-ce qu'on a trouvé un seul cadavre à ce point de

13 rassemblement, là sur la piste en béton où avaient été alignés les

14 prisonniers ?

15 R. Non, non. On les a tous trouvés sur la pelouse ou dans les dortoirs ou

16 encore dans les bâtiments, les installations.

17 Q. Merci, je n'ai pas d'autres questions à vous poser en ce qui concerne

18 Dubrava. Mais il reste un autre incident qui a provoqué des morts et qui

19 n'est pas mentionné ici dans votre rapport. Cependant, cet incident est

20 relevé dans l'acte d'accusation, plus précisément au paragraphe 66(f).

21 Voici ce qui est dit : "Le 26 mars 1999 ou vers cette date, les forces de

22 la RFY et de Serbie ont attaqué le village de Padaliste (municipalité

23 d'Istok). A leur arrivée dans le village, elles ont tiré sur les maisons et

24 sur les villageois qui tentaient de fuir. Huit membres de la famille de

25 Beke Imeraj ont été contraints à sortir de leur maison et ont été abattus

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1 devant chez eux. D'autres habitants de Padaliste ont été tués chez eux ou

2 dans le lit d'un cours d'eau près du village. Au total, les forces de la

3 RFY et de la Serbie ont tué une vingtaine d'Albanais du Kosovo, de

4 Padaliste. (Le nom des victimes qui ont été identifiées figurent à l'annexe

5 E, du présent acte d'accusation.)"

6 J'essaie de trouver cette annexe E. Effectivement. Padaliste se trouve dans

7 la municipalité d'Istok, par conséquent, cela relevait de vos compétences

8 territoriales en tant que SUP de Pec. Vous êtes au courant de ces

9 événements ?

10 R. Non. D'abord, je dois dire que Padaliste n'existe pas dans la

11 municipalité d'Istok. Cette localité n'existe tout simplement pas. En tout

12 cas, dans la zone de responsabilité de mon SUP.

13 Q. Il est dit ici que c'était le village de Padaliste, dans la

14 municipalité d'Istok qui était attaquée. Vous êtes sûr que ce village

15 n'existe pas ?

16 R. J'en suis certain. Je sais qu'il existe une localité qui s'appelle

17 Padaliste, mais elle est de la municipalité de Srbica, pas d'Istok. Il est

18 possible qu'ici on ait un effet de répercussion, l'effet -- tout ce qui est

19 mauvais doit se trouver ici.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle serait la distance entre ces

21 deux Padaliste, entre celui de la municipalité de Srbica et celui d'Istok ?

22 Est-ce que c'est tout près ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait. C'est une municipalité voisine

24 par rapport à Istok, mais c'est une autre région. C'est la région de

25 Kosovska Mitrovica. Si nous avions eu ces informations, nous les aurions

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1 envoyées au SUP de Kosovska Mitrovica, mais nous n'avons aucun

2 renseignement à propos de cet événement.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais Padaliste se trouve au milieu,

4 entre Srbica et Istok, n'est-ce pas ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à peu près. Cela se trouve près de la

6 route entre Pec et Kosovska Mitrovica.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Puisque vous n'avez aucune connaissance à propos de cet événement qui

9 serait survenu à Padaliste -- si je comprends bien, vous ne savez rien de

10 ce qui se serait passé à Padaliste.

11 R. Oui.

12 Q. Je ne vais vous poser aucune question à propos du village de Padaliste

13 même si j'avais quelques questions importantes à poser. J'espère cependant

14 pouvoir les poser à un autre témoin.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, est-ce que je peux demander

16 le versement de ces éléments de preuve ? Ceux que je voudrais déposer par

17 le truchement de ce témoin, car nous avons fait une analyse assez détaillée

18 de certains de ces classeurs et je suppose que vous garderez à l'esprit

19 qu'il s'agit de documents officiels, uniquement provenant des autorités

20 compétentes. Or, vous avez ici un témoin qui en raison de sa fonction avait

21 une connaissance avérée de ces éléments.

22 M. NICE : [interprétation] Non, je demanderais de toute façon qu'on attende

23 la fin du contre-interrogatoire. C'est une objection de principe qui est

24 l'absence de traduction. J'aurais, peut-être, d'autres raisons pour

25 demander que ne soit pas verser au dossier ces documents, mais je le ferai

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1 en temps utile.

2 [La Chambre de première instance se concerte]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous allons reporter notre

4 décision. Nous attendrons pour la rendre, la fin du contre-interrogatoire.

5 Monsieur Nice --

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, Monsieur Robinson.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Merci Colonel, je n'ai plus de questions à vous poser.

9 Contre-interrogatoire par M. Nice :

10 Q. [interprétation] Puisque nous regardons les données géographiques,

11 c'est utile d'avoir ces éléments à l'esprit comme nous l'a dit M. le Juge

12 Kwon, Padaliste se trouve à peu près à mi-chemin entre Istok et Srbica.

13 Dubrava se trouve environ à mi-chemin entre Istok et Padaliste, n'est-ce

14 pas ?

15 R. Dubrava ne se trouve pas le long de la route.

16 Q. Cela se trouve à mi-chemin environ entre --

17 M. NICE : [interprétation] Voulez-vous bien regarder le rétroprojecteur,

18 s'il vous plaît.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la page 5. Un peu plus haut, s'il vous

20 plaît.

21 M. NICE : [interprétation] Plus haut.

22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On voit ici la partie gauche. C'est

23 celle-ci qu'il faut voir.

24 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez me redonner la

25 carte, s'il vous plaît.

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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que c'est une photographie trop

2 agrandie.

3 M. NICE : [interprétation] Si les Juges de la Chambre ont les cartes. Je ne

4 vais pas vous prendre votre temps. Merci beaucoup.

5 Q. Si vous regardez cette carte, on voit Srbica, à droite; Istok, à

6 gauche; Padaliste, à la droite du centre et à gauche du centre, quelque

7 chose ayant la forme d'un diamant, on voit quelque chose qui recouvre la

8 prison de Dubrava, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. -- Susica, quelque chose sur lequel nous reviendrons peut-être plus

11 tard.

12 La raison pour laquelle je dis que la prison de Dubrava se trouve à

13 mi-chemin entre Istok et Padaliste est celle-ci : c'est quelque chose que

14 vous n'avez pas évoquée et je vais parler de Dubrava un peu plus tard,

15 aujourd'hui ou demain, mais le témoin qui a décrit le massacre de sa

16 famille qui s'est déroulé sous ses yeux, quelqu'un qui venait de Padaliste,

17 Lirij Imeraj a également pu nous parler de la base aérienne qui se trouvait

18 dans les locaux de la prison de Dubrava; comme vous constatez sur cette

19 carte, cela n'est pas très loin. C'est exact, n'est-ce pas ? Vous n'avez

20 pas parlé du tout de cette base militaire qui se trouvait tout près de la

21 prison de Dubrava, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, je comprends fort bien. En réalité, cela doit être un malentendu,

23 l'OTAN a mal compris ceci. Je crois que les terroristes ont fourni des

24 éléments erronés sur cette base militaire dans la prison de Dubrava et

25 c'est l'OTAN qui a dû accomplir le sal travail à leur place.

Page 39193

1 Q. Je vais demander à la Chambre de première instance de vous arrêter

2 toutes les fois que vous commencez à nous donner vos commentaires. Répondez

3 simplement par oui ou non et nous y reviendrons un peu plus tard. Y avait-

4 il ou non des opérations militaires effectuées à partir de la prison de

5 Dubrava ou la région de la prison de Dubrava dans la période qui précède le

6 bombardement ? Il s'agit, ici, de Mme Imeraj qui venait de Padaliste et qui

7 a vu tout ceci de ses propres yeux parce qu'elle a perdu toute sa famille.

8 M. KAY : [interprétation] C'est un commentaire. Est-ce que nous allons

9 établir le fait que la prison était, en réalité, prise pour cible, au sens

10 militaire du terme par l'OTAN ou s'il s'agit d'un endroit qui était

11 véritablement une base militaire ? Je crois que c'est important de préciser

12 la question.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, évitez des

14 commentaires, s'il vous plaît.

15 M. NICE : [interprétation]

16 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, Monsieur Paponjak : était-ce près de la

17 prison ou à la prison même que se trouvait cette base militaire ?

18 R. Je ne sais pas de quelle installation militaire vous voulez parler.

19 Q. Est-ce que vous dites, dans votre témoignage, qu'il n'y avait aucune

20 installation militaire près de la prison ou à la prison même ?

21 R. C'est ce que j'affirme, c'est ce que j'affirme, que dans le centre

22 correctionnel de Dubrava, il n'y avait aucune installation militaire quelle

23 qu'elle soit. Il n'y en avait pas, non plus, dans la région qui se trouvait

24 tout près de la prison de Dubrava. Néanmoins, au cours des bombardements,

25 il y a des positions militaires qui ont été mises en place à quelques

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1 kilomètres de la prison de Dubrava, autrement dit, des tranchées, des

2 positions occupées par des membres de l'armée, des abris, mais il n'y avait

3 pas d'installation militaire, d'opération militaire dans le voisinage

4 proche de la prison.

5 Q. Avant cette date du 21 mai 1999, quand aviez-vous visité la prison pour

6 la dernière fois ?

7 R. Avant le 21 mai 1999, je ne m'étais jamais rendu dans la prison.

8 Q. Le 21 mai 1999, c'est la première fois que vous vous rendiez dans la

9 région ?

10 R. Non, pardonnez-moi. La première fois que je me suis rendu à cet

11 endroit, c'était le 19 mai.

12 Q. C'était votre première visite --

13 R. Le 21 mai, je ne m'y trouvais pas du tout.

14 Q. Le 19 mai, c'est la première fois que vous vous êtes rendu dans cette

15 région ?

16 R. C'est exact. Oui, au centre de correction de Dubrava, oui, c'était la

17 première fois que je me suis rendu à cet endroit. J'ai visité des endroits

18 qui se trouvaient proches de la prison, avant cela.

19 Q. Hormis la présence militaire dans cette région, y avait-il une présence

20 particulière du MUP dans la région de Dubrava, d'après vous ?

21 R. Dans la région de Dubrava, il y avait des patrouilles, des patrouilles

22 de police qui accomplissaient leurs tâches habituelles.

23 Q. Je vais essayer d'aborder toutes ces questions dans un ordre

24 chronologique, mais je souhaite que vous m'aidiez un petit peu, eu égard

25 aux documents que vous nous avez fournis. C'est là que nous devons

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1 reprendre tout ceci.

2 Qui a donné les ordres pour que ces documents soient fournis ? Vous dites

3 que des instructions ont été données. Qui a donné ces instructions ?

4 R. Le ministère de l'Intérieur de la République de Serbie.

5 Q. Avez-vous une copie de ces instructions ?

6 R. Non.

7 Q. Pouvez-vous nous en parler ? D'après les éléments dont vous vous

8 souvenez.

9 R. Il s'agissait de la méthodologie ou des méthodes à appliquer dans la

10 rédaction de ces documents et il s'agissait de préciser la procédure

11 adoptée pour rédiger ces documents en question. Q. Puisqu'il s'agit de

12 méthodes ici, il s'agissait de la préparation des documents. Bien sûr avant

13 de préparer ces documents, il vous fallait des instructions pour ce faire,

14 n'est-ce pas ? Pourquoi ces documents devaient-ils être rédigés, préparés ?

15 R. Je n'ai jamais analysé les raisons pour lesquelles mes supérieurs

16 hiérarchiques prenaient un certain nombre de décisions.

17 Q. Alors --

18 R. J'exécutais ou je me conformais à ce qu'on me demandait de faire, c'est

19 tout.

20 Q. Quelles étaient ces instructions que vous avez reçues ? Quelle portée

21 avaient-elles ? S'agissait-il de fournir une analyse complète de toutes les

22 activités criminelles commises à certaines dates ou entre certaines dates,

23 par exemple ?

24 R. Cela portait sur les années 1998 et 1999. Les documents relatifs aux

25 travaux de la police au Kosovo-Metohija portaient sur ces deux années-là.

Page 39196

1 Q. C'était tout ?

2 R. Je ne me souviens pas précisément de la teneur de ce document. C'était

3 un document très complet; les chapitres étaient nombreux, les chapitres

4 avaient des titres différents. Les chapitres portaient sur un certain

5 nombre de périodes et tous les chapitres n'ont pas été intégrés au

6 document; néanmoins, il n'est pas très difficile de se procurer ce

7 document.

8 Q. Quel était, semble-t-il, le but de tout ceci ?

9 R. Voyez-vous, nous avons recueilli ce document, nous l'avons sauvé, en

10 quelque sorte. Nous l'avons transporté. Etant donné la situation chaotique

11 qui régnait alors, nous avons placé ces documents dans une voiture

12 particulière, dans des camionnettes et à Kragujevac et Sumadija et les

13 équipes qui ont déchargé ces documents les ont placés dans des dépôts, dans

14 des entrepôts et toutes sortes d'endroits sans avoir reçu aucune

15 instruction. Il faut se rappeler que nous étions en guerre. Maintenant, il

16 nous faut trier tous ces documents, rassembler tous ces documents pour

17 essayer de retrouver tous les éléments de toutes les affaires pour pouvoir

18 remettre tout ceci dans des enveloppes, aux fins de préparer les dossiers.

19 Les dossiers devaient, ensuite, être mis dans un certain ordre et traités.

20 Il fallait traiter tous ces dossiers les uns après les autres.

21 Tout ce que nous avons pu retrouver concernant une affaire, en particulier

22 -- à quelle fin, dites-vous ? Il s'agissait de compléter ou de rassembler

23 le plus d'éléments possibles sur chaque dossier, il nous fallait terminer

24 notre travail. Il y avait un certain nombre de crimes pour lesquels nous

25 n'avions pas lancé de poursuites judiciaires. Nous ne pouvions absolument

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1 pas mener notre tâche à bien pendant la guerre et nous voulions poursuivre

2 notre travail pour essayer de poursuivre les auteurs de ces crimes, pour

3 pouvoir clore les dossiers. Nous avons commencé à trier ces dossiers, avant

4 même d'avoir reçu les instructions.

5 Q. Combien d'officiers de police et de personnel auxiliaire travaillaient,

6 à ce moment-là, dans le SUP de Pec, disons, au mois de décembre 1998 ?

7 Grosso modo.

8 R. Je n'ai pas cet élément d'information à ma disposition car en décembre

9 1998 --

10 Q. Dites-nous simplement une idée; une centaine ou des milliers, combien

11 d'officiers de police et de personnel auxiliaire y avait-il ?

12 R. Peut-être des centaines d'hommes, peut-être mille.

13 Q. Au mois de juin 1999, toutes ces personnes ont quitté le territoire --

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous en prie. L'interprète a parlé du mois

15 de juin. C'est une erreur, c'est un lapsus. 1998. Le témoin ne serait pas

16 en mesure de répondre.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] En juin 1999, nous avons quitté la région.

18 M. NICE : [interprétation]

19 Q. Pendant que vous avez quitté ce territoire et vous êtes devenu, en

20 quelque sorte, un exilé du SUP à Kragujevac. Parmi ces mille hommes, si tel

21 était le chiffre, combien d'hommes étaient devenus des exilés [inaudible]

22 du SUP en exil ?

23 R. Oui. En termes d'organisation, oui, mais en termes opérationnels, non.

24 Q. Je suppose que Kragujevac a son propre MUP et SUP. Il n'a pas besoin

25 d'un renfort de mille hommes, environ. Qu'est-il advenu de ces membres du

Page 39198

1 SUP en exil ?

2 R. C'est la raison pour laquelle j'ai dit qu'en termes opérationnels, ces

3 gens-là sont restés dans le SUP de Pec, mais pas en réalité car en réalité,

4 ils ont été recrutés par d'autres secrétariats dépendants du ministère de

5 l'Intérieur à l'intérieur de la république et un certain nombre travaillait

6 au secrétariat de Kragujevac pour les travaux que nous avons continués à

7 mener à bien.

8 Q. Vous avez parlé de chefs de département qui vous ont aidé à préparer ce

9 document. Les policiers d'active ont-ils été répartis ailleurs de façon que

10 nous puissions avoir une vision d'ensemble; entre le mois de juin 1999 et

11 jusqu'à l'année 2002, combien de gens travaillaient au sein de ce

12 secrétariat du SUP en exil en même temps que vous ?

13 R. Ce chiffre était variable. Cela dépendait de nos besoins. A tout

14 moment, je pouvais recruter un des mes hommes qui se trouvaient dans un

15 autre secrétariat rattaché au ministère de l'Intérieur et le transférer ou

16 le muter à Kragujevac avant de le renvoyer au secrétariat d'où je l'avais

17 recruté.

18 Q. Combien d'hommes ou de personnes travaillaient dans votre bureau entre

19 l'année 1999 et l'an 2002 ?

20 R. Entre 30 et 100 personnes, cela dépendait de nos besoins. Cela était en

21 fonction de nos besoins.

22 Q. Certaines personnes pouvaient-elles entrer dans vos bureaux et parler

23 ou déposer des plaintes, eu égard à des crimes relevant de la

24 responsabilité du SUP de Pec et ces 30 à 100 hommes avaient-ils autre chose

25 à faire que de trier tous ces documents ?

Page 39199

1 R. Oui.

2 Q. Sur quelles enquêtes menaient-ils les crimes puisqu'ils ne pouvaient

3 pas retourner sur le territoire en question ?

4 R. En ce qui concerne tous les dossiers que nous avions archivés à

5 Kragujevac qui était une antenne du ministère de l'Intérieur, du

6 secrétariat de l'Intérieur, nous accueillions des personnes qui venaient de

7 Kragujevac ou des personnes qui se trouvaient à Pec, mais ils habitaient en

8 Serbie ou au Monténégro. On leur remettait des passeports, des permis de

9 conduire et d'autres documents officiels qui relèvent de la compétence du

10 secrétariat de l'Intérieur.

11 Q. [aucune interprétation]

12 R. Mes hommes organisaient des entretiens avec eux et recueillaient des

13 éléments d'information.

14 Q. Quelles possibilités aviez-vous pour mener des enquêtes policières

15 puisque vous saviez qu'à partir de juin 1999, vous ne pouviez pas retourner

16 sur les lieux, vous ne pouviez pas mener à bien des enquêtes de police,

17 n'est-ce pas, des enquêtes prospectives ?

18 R. Nous ne savions pas, pour sûr, que nous ne pouvions pas retourner sur

19 les lieux et je ne suis pas sûr, non plus, au jour d'aujourd'hui, de ne pas

20 pouvoir retourner -- nous n'étions pas sûrs de ne pas pouvoir retourner.

21 Nous avons interrogé toutes les personnes qui sont venues à

22 Kragujevac sur toutes sortes de sujets et c'était effectivement le rôle qui

23 incombait à mes policiers.

24 Q. J'ai des questions plus détaillées à vous poser sur cette question plus

25 générale. Voici mes questions : nous ne pouvons pas comprendre les

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1 documents puisqu'ils n'ont pas été traduits; à l'intercalaire 1.4 -- je

2 vais permettre aux Juges de la Chambre de retrouver ces documents.

3 Nous allons commencer au point 2 -- 1.4, vers la fin, au numéro 262, on

4 constate, ici, où on peut lire, au premier paragraphe, après le mois de

5 juin 1999, on parle du mois d'août, au numéro 262. On peut lire -- si on

6 poursuit et que l'on regarde le dernier élément de cette collection numéro

7 285, septembre 2001, comment faut-il comprendre ceci ? S'agit-il simplement

8 de personnes qui font état de leurs griefs ou est-ce vous qui avez mené les

9 enquêtes à propos de ce que vous entendu dire des événements qui s'étaient

10 passé sur le territoire de Pec ?

11 R. Je ne comprends pas dans quelle mesure ceci vous pose problème. Il

12 s'agissait pour nous de mener à bien notre mission telle qu'elle nous avait

13 été donnée par les autorités serbes. Nous ne faisons rien d'illégal. Nous

14 avons consigné dans nos archives tous les incidents qui avaient eu lieu sur

15 le territoire même si ceux-ci s'étaient passés après. Ces incidents

16 concernaient des actes criminels et des crimes. Si quelque chose s'était

17 produit en 2001, est-ce que cela signifie que nous n'avions pas le droit de

18 le mettre dans nos archives ?

19 Q. D'après votre réponse, dois-je comprendre - ce qui est du reste la

20 teneur de mes trois questions suivantes à ce stade - est-ce que je dois

21 comprendre d'après votre réponse que compte tenu de tous les éléments qui

22 vous a été fournis, si ces éléments semblaient indiquer qu'un crime avait

23 été commis dans la région, c'était à vous de commencer à mener l'enquête ?

24 R. Nous consignions dans nos archives tout élément d'information, quelle

25 soit exacte ou non. C'est notre rôle. Nous devons rassembler tous ces

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1 éléments.

2 Q. Une information peut être présentée de façon différente, n'est-ce pas ?

3 Cela peut être un individu qui fait état de ses griefs ou cela peut être

4 une information publique qui semble indiquer qu'un crime a été commis et

5 qui requiert une enquête, n'est-ce pas ?

6 R. Vous savez très bien comment nous travaillons. Nous travaillons de

7 différentes façons. Vous me demandez quelles sont les méthodes appliquées

8 par la police. En tant que Procureur c'est quelque chose que vous devriez

9 savoir. Il y a plusieurs moyens que nous avons à notre disposition pour

10 obtenir des renseignements.

11 Q. Très bien. Je crois que vous confirmez en réalité que cela n'a pas

12 d'importance, que la source de vos informations n'a pas d'importance. C'est

13 votre devoir simplement, avant ou après le mois de juin 1999, de mener une

14 enquête si vous le pouvez.

15 R. Oui. Ce n'est pas l'enquête à proprement parler. Ce sont les enquêtes

16 préliminaires qui sont importantes.

17 Q. Bien. Ces documents, qui ont été préparés à Kragujevac au mois de mai

18 ou à cette date-là en 2002, avaient-ils un autre objet ? Par exemple,

19 avaient-ils pour objet d'être présenté au public ?

20 R. Cela, je ne le sais pas. De toute façon, ceci n'a pas été rendu public.

21 Je ne m'attendais jamais à ce que ceci soit rendu public. J'estime que cela

22 n'était pas nécessaire.

23 Dans la mesure du possible, on tente toujours de ne pas rendre ce

24 type de documents public. Il y a un certain nombre de choses que nous ne

25 souhaitons pas être rendues publiques car certains éléments concernent des

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1 personnes qui font l'objet de notre enquête. C'est la raison pour laquelle,

2 je souhaite que cette audience se tienne à huis clos partiel.

3 Q. Très bien. Le MUP avait son propre site Internet sur lequel on pouvait

4 trouver tous ces différents rapports ?

5 R. Oui, sans doute.

6 Q. Ces rapports ont-ils été publiés sur leur site Internet depuis qu'ils

7 ont été rédigés en mai 2002 ?

8 R. Cela, je ne le sais pas. Je travaillais en exil, c'est ainsi que vous

9 l'appelez et j'avais des conditions de travail très modestes, et je n'avais

10 pas accès à Internet.

11 Q. N'êtes-vous pas d'accord avec moi pour dire que le format de tous ces

12 documents est un format assez identique, que ce soit le rapport ou les

13 annexes, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Ces rapports, d'une manière ou d'une autre auraient pu être conçus,

16 plus précisément, pour aider l'accusé dans ce procès parce qu'ils ont été

17 préparés en mai 2002. Bien après le début du procès.

18 R. Comme vous l'avez dit à plusieurs reprises, je ne peux que faire des

19 spéculations à cet égard. En réalité non, cela n'aurait pas pu être l'objet

20 de ces documents car ces documents n'ont pas été rédigés pour ce Tribunal

21 et ils seraient très peu appropriés. Ces documents ont été faits pour nous

22 et servaient les intérêts du ministère de l'Intérieur.

23 Q. D'après vous, ceci n'avait rien à voir avec ce procès ?

24 R. D'après moi, cela n'a rien à voir. C'est entièrement indépendant. Vous

25 pouvez le constater d'après les documents eux-mêmes. Ces documents n'ont

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1 pas été rédigés pour ce Tribunal car la méthode utilisée ne correspond pas.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je simplement poser une question,

3 s'il vous plaît ? Monsieur Paponjak, j'ai du mal à comprendre quel était

4 l'objet de ce document. J'aimerais que ceci soit bien clair. Ai-je raison

5 de penser que derrière chacune, ou pour chaque dossier auxquels vous avez

6 fait référence au point 1.4, il y aura donc un dossier et que chaque

7 élément détaillé de ces dossiers ont été consignés dans ce document.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement, c'est ce que j'ai essayé

9 d'indiquer à plusieurs reprises car chaque dossier comporte un numéro.

10 C'est, en fait, un dossier, c'est quelque chose que nous appelons comme

11 cela. Chaque dossier à sa propre couverture.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais quel est l'intérêt de tout ceci ?

13 Si vous vous êtes donné du mal -- si vous avez retrouvé tous les dossiers

14 qui avaient été éparpillés. Lorsque vous avez dû quitter la région,

15 pourquoi, comment se fait-il que ce document ait été préparé ? Je crois

16 qu'au début de votre témoignage, vous avez dit que vous ne le saviez pas,

17 car vous ne saviez pas quel était l'objet de ce document; c'est exact ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était pratique et commode pour moi que cela

19 a été fait de cette façon-ci, parce qu'en général, nous avons, si vous

20 voulez, une main courante dans notre service où on inscrit chaque incident,

21 chaque élément d'information que nous recevons. Nous le faisons dans cette

22 main courante. Certains de ces registres ont été perdus, d'autres détruits.

23 C'est de cette façon que nous avons tenu, si vous voulez, un registre

24 d'incidents en fonction de certaines catégories et, de cette façon, nous

25 avons pu travailler.

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1 Si quelque chose de neuf est portée à notre connaissance, vous l'aurez,

2 peut-être, constaté, peut-être pas, mais nous avons un ordre alphabétique

3 qui nous permet de récupérer des listes plus facilement, parce que tous les

4 SUP travaillaient dans des circonstances très difficiles, très modestes,

5 avec très peu d'employés, des locaux en très faible nombre. Il aurait été,

6 ceci étant, très difficile, de retrouver en peu de temps, un dossier précis

7 que l'on aurait cherché. De cette façon, nous avons des documents ordonnés

8 de façon systématique, classés de façon systématique. Donc, on peut

9 retrouver en une minute un dossier pour une infraction. Si vous avez une

10 infraction où la personne lésée est une personne albanaise, c'est facile à

11 trouver parce que nous avons une liste alphabétique des victimes. Si nous

12 n'avions pas ce genre de système, il nous faudrait des jours pour le

13 retrouver.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

15 M. NICE : [interprétation] J'aimerais poser deux autres questions.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

17 M. NICE : [interprétation]

18 Q. Reprenez, si vous voulez bien, votre intercalaire 2.4. Nous avons là un

19 de ces nombreux rapports d'information que vous avez signé. Je veux

20 simplement vous demander de prendre la première page. Enfin, oui, oui. On

21 voit un intitulé ou plutôt une rubrique qui est soulignée. Est-ce que vous

22 pourriez nous en donner lecture ?

23 R. "Les informations ne sont pas exactes."

24 Q. Qu'est-ce qui n'est pas exact s'agissant de ces informations ?

25 R. Les informations en ce qui concerne les transferts forcés.

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1 Q. Quels sont les éléments concernant les transferts forcés, parce que

2 vous n'avez pas précisé ? Nous allons devoir examiner ce document avec vous

3 de façon plus détaillée plus tard, mais pourriez-vous dire quelles sont,

4 dans ces informations, celles qui ne sont pas exactes ? Est-ce que vous

5 voulez revenir sur votre réponse lorsque vous avez dit que ce document --

6 quand je vous ai demandé si ce document avait été préparé en vue de ce

7 procès ? Est-ce que vous pourriez nous le dire ? Parce qu'ici, vous voyez,

8 vous répondez des charges alléguées dans ce procès. Est-ce que vous

9 pourriez nous aider sur ce point ?

10 R. Quand j'ai parlé de la méthode de travail utilisée pour réunir tous ces

11 éléments et ces rapports, j'ai dit que nous avions plusieurs sections ou

12 chapitres que prévoie cette méthode de travail. On a la classe A qui

13 concerne les événements ayant entraîné la mort; puis le volet B -- si vous

14 voulez m'interrompre, vous ne saurez pas de quoi cela retourne, parce que

15 j'essaie de vous expliquer et j'ai essayé plusieurs fois de vous expliquer

16 de quoi cela retournait mais, à chaque fois, on m'a interrompu. Le chapitre

17 B concerne les crimes commis contre les Albanais. Vous avez B avec un

18 astérisque, cela, ce sont les victimes serbes. Voilà la méthode utilisée.

19 Puis, vous avez DJ, c'est le transfert forcé. C'est comme cela que nous

20 avons utilisé cette méthode pour établir ce genre de documents, parce que

21 sinon, nous n'avions aucune connaissance à propos de transferts forcés,

22 mais nous avions pour obligation de consigner les informations que nous

23 avions pour les présenter. C'est une mission que nous a confiée le

24 ministère de l'Intérieur. On se servait de cette méthode de travail pour

25 présenter des éléments en ce qui concerne le transfert forcé. Nous avons

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1 rempli notre mission. Je vous précise que je n'ai pas moi-même rédigé ce

2 rapport d'ailleurs.

3 Q. Avant que la Chambre ne décide de faire une pause --

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que la réponse a été donnée ?

5 M. NICE : [interprétation] Oui, nous n'avons pas eu de réponse.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 M. NICE : [interprétation] Non. Quelquefois, il faut lire plus vite que

8 nous le ferions dans d'autres circonstances ou dans un autre environnement

9 judiciaire.

10 Q. Prenez la dernière page, s'il vous plaît. Nous allons voir quelle était

11 l'annexe mentionnée dans ce document.

12 R. Oui. On dit : "Réponse au point, ou au chef 7 de l'acte d'accusation de

13 La Haye."

14 Q. Vous voyez ce document. A mon avis, tous ces documents ont été conçus

15 en vue de défendre le présent accusé, parce qu'ici, vous répondiez, vous ne

16 l'avez pas dit, vous répondiez à des allégations reprises dans l'acte

17 d'accusation délivré à La Haye, en tout cas, vous essayez de le faire ici

18 dans ce document qui se trouve à l'intercalaire 2.4.

19 R. Qu'est-ce qu'on dit au chef 7 ?

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause. Nous

21 reviendrons à la question dans 20 minutes.

22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 38.

23 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.

25 M. NICE : [interprétation]

Page 39207

1 Q. Monsieur Paponjak, quelle était cette annexe, à l'intercalaire 2.4 ?

2 R. Oui, c'était sans doute une annexe d'une sorte ou d'une autre, mais je

3 ne sais pas exactement.

4 Q. Mais qu'est-ce que c'était ? Je vous explique pourquoi c'est important

5 : parce que l'accusé vous a fait parcourir de nombreux passages de ce

6 document afin de prouver que les éléments qui se trouvaient dans ce

7 document étaient conformes à la vérité. Maintenant, vous nous dites que

8 vous n'avez pas, en personne, adressé ce rapport, ni préparé cet élément

9 d'information; mais je veux que vous nous disiez quelle annexe devrait se

10 trouver avec ce rapport.

11 R. Il ne devrait pas être difficile de trouver cette annexe. Comme cela, à

12 brûle-pourpoint, il m'est impossible de vous dire quelle était sa teneur.

13 Sans doute que l'annexe comprend des éléments pertinents, mais on devrait

14 devoir les trouver dans la documentation, cela doit se trouver.

15 Q. Est-ce que vous avez ces documents, cette documentation avec vous ?

16 R. Ce que j'ai reçu, ce que j'ai amené avec moi se trouve ici, j'espère.

17 Je vous le répète, je ne connais pas par cœur tous les documents que

18 j'avais.

19 Q. Si un rapport contient des annexes, on a vu d'autres exemples, on

20 s'attend à trouver, avec le rapport, cette annexe. Or, celle-ci,

21 apparemment, renvoie au chef 7 de l'acte d'accusation de

22 La Haye. Nous savons qu'il concerne le Kosovo, mais que c'est un élément

23 sans grande importance, question d'histoire. C'est un document qui était

24 versé en annexe. On aimerait savoir, effectivement, parce que cette annexe

25 devrait expliquer ce que l'auteur a écrit et ce qu'il a fait et nous

Page 39208

1 aimerions savoir ce que c'est. Vous n'êtes pas en mesure de nous le dire,

2 n'est-ce pas ?

3 R. Non. Je ne peux pas vous le dire parce que je ne sais pas. Il est

4 probable que cette annexe existe, comme existent toutes les autres annexes

5 qui n'ont pas été fournies en même temps que les autres documents.

6 Toute information, tout rapport contient une liste d'annexes que nous

7 n'avons pas ici, mais qui se trouve au SUP de Pec ou qui existait là-bas.

8 Je suppose, je suis même sûr qu'il est possible de trouver cette annexe là-

9 bas, mais pas ici puisqu'ici, on parle d'une annexe, mais je ne veux pas

10 vous dire quelque chose à propos de quelque chose que je ne vois pas.

11 Q. Mais en traduction, vous avez dit que ce n'était pas vous qui aviez

12 rédigé cet élément d'information, vous avez insisté là-dessus. Est-ce que

13 vous voulez, maintenant, dire que vous rejetez ce rapport ?

14 R. Non.

15 Q. Alors, comment pouvez-vous --

16 R. Ce n'est pas moi qui ai, en personne, rédigé un quelconque de ces

17 rapports. J'ai dit quelque chose qui revenait à dire que le SUP ou le

18 secrétaire du SUP est comme un gestionnaire, si vous voulez, ce n'est pas

19 lui qui interroge les personnes concernées, ce n'est pas son travail. Il

20 n'étudie pas les documents; tout ce qu'il fait, c'est signer des documents,

21 vue sa fonction officielle. Bien sûr, il a d'autres fonctions également ou

22 d'autres attributions.

23 Q. Qui a rédigé les informations qu'on trouve au point 2.4 ?

24 R. Je vous l'ai déjà expliqué, toutes les informations --

25 Q. Qui a préparé le 2.4 ?

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1 R. Cela a été fait en 2000 et quelque. En 2002, n'est-ce pas ? Je ne me

2 souviens pas de la personne qui a été chargée de cela. Ce n'était pas très

3 important, pour moi, à l'époque et ce n'est pas, aujourd'hui, important,

4 non plus. C'étaient de proches associés, des experts respectifs.

5 Q. Vous, vous ne pouvez pas parler de la teneur de ce document, puisque ce

6 ne sont pas les connaissances que vous avez, puisque cela été préparé par

7 quelqu'un d'autre, n'est-ce pas ?

8 R. Pour ce qui est de la teneur de ce document que j'ai sous les yeux,

9 oui, je peux vous en parler et je peux vous parler de la teneure des autres

10 documents pour autant qu'on me les présente.

11 Q. Mais comment pouvez-vous vous exprimer sur la teneur d'un document qui

12 a été préparé par quelqu'un d'autre ? Vous ne pouvez pas nous donner son

13 nom, dire de quelles sources il s'est servi. Comment pourriez-vous parler

14 de la teneur de ce document, Monsieur Paponjak ?

15 R. Si vous prenez cela ainsi, je ne pourrais parler de rien du tout ici,

16 puisqu'il n'y a pas un seul de ces rapports n'a été préparé ou quelque

17 chose que j'ai fait. Je ne peux pas parler du travail du SUP puisque si on

18 prend votre logique, je n'ai pas été partie prenante à la préparation de

19 ces documents.

20 Q. Mais je pense que vous parlez de quelque chose parce qu'aucune de ces

21 informations, aucun de ces rapports n'a été préparé par vous.

22 Mais pour le moment, je m'attarde uniquement à certains des

23 documents.

24 R. Oui.

25 Q. Vous n'êtes pas en mesure de donner le nom des auteurs de ces rapports

Page 39210

1 quel qu'ils soient ?

2 R. Je pourrais vous dire quelle est l'équipe qui a travaillé, vous donner

3 la totalité d'équipe. C'est un travail d'équipe; c'est le fruit d'un

4 travail d'équipe, pas d'un travail individuel.

5 Q. Mais même s'agissant de ce document-ci, il ne traduit pas les

6 observations, les connaissances d'une seule personne, c'est un travail

7 collectif; c'est une compilation, un recueil d'avis, d'expériences qui sont

8 les expériences de plusieurs personnes, n'est-ce pas ?

9 R. Pas seulement en fonction de l'expérience, mais à partir d'entretiens,

10 de discussions d'autres documents, d'autres moyens qu'on utilise pour

11 recueillir des informations; mais c'est vrai, ce sont plusieurs personnes

12 qui l'ont fait.

13 Q. Quelle était cette équipe ?

14 R. Tous les chefs de services, de secteurs, les commandants de postes de

15 police, et cetera. C'était une équipe qui, en fonction de l'affaire,

16 représentait dix ou quinze personnes.

17 Q. Ces personnes travaillaient avec vous dans le SUP en exil ou est-ce

18 qu'ils étaient répartis sur le territoire de

19 Serbie-et-Monténégro, est-ce qu'ils vous envoyaient les informations par

20 lettre, par téléphone, par e-mail ? Comment est-ce que cela s'est passé

21 exactement ?

22 R. Ces gens venaient au poste de commandement avancé, si vous voulez. Ils

23 étaient détachés du SUP pendant un certain temps pour faire ce qu'ils

24 avaient à faire; une fois le travail terminé, ces personnes réintégraient

25 leur SUP d'origine.

Page 39211

1 Q. Est-ce qu'il y a des procès-verbaux de ces réunions ?

2 R. Il y a des procès-verbaux et des archives. On n'a pas, bien sûr, de

3 procès-verbaux en tant que tel, mais on a gardé des notes.

4 Q. Nous pourrions les voir ?

5 R. Il s'agit de notes de travail. Chacun prend de telles notes dans

6 l'exercice de ses fonctions et si vous les voulez, vous pourrez les avoir.

7 Q. Vous dites pouvoir nous dire quelles sont les équipes. Je ne veux pas,

8 pour le moment, avoir de noms parce que prendrait trop de temps, mais vous

9 seriez en mesure de nommer tous les membres de ces équipes ?

10 R. Oui.

11 Q. Je vais vous demander, avec l'autorisation des Juges, de d'écrire tous

12 ces noms, pour gagner du temps.

13 Mais remontons dans le temps, si vous voulez bien. Vous êtes un agent

14 de la circulation, c'est bien cela ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Bien sûr, sous réserve de ce qui s'est passé au Kosovo, après y être

17 arrivé, vous avez toujours été agent de la circulation. Le plus récemment,

18 c'était à Uzice, en Serbie; c'est bien cela ?

19 R. Non. Ce n'est pas exact.

20 Q. Est-ce que vous n'avez jamais travaillé à Uzice en Serbie ?

21 R. Non.

22 Q. Quel a été le poste que vous avez occupé en dernier lieu, en Serbie,

23 avant d'aller au Kosovo ?

24 R. J'étais à Cacak.

25 Q. Quel était votre grade et quelle était votre fonction précise ?

Page 39212

1 R. Mon dernier poste était celui de chef de service pour la sécurité

2 routière, pour la circulation. Je ne pense pas qu'il y avait un grade

3 particulier. J'étais un inspecteur ou un chef inspecteur ou inspecteur de

4 première classe. C'était mon dernier poste, ce sont mes dernières

5 fonctions. Je n'ai pas toujours été agent de la circulation. J'ai été aussi

6 au service du SUP, à Cacak, en tant qu'inspecteur de police.

7 Q. Dans quel domaine ?

8 R. Questions opérationnelles, préventives, formation professionnelle et le

9 bon fonctionnement légitime et légale des forces de police.

10 Q. Quand vous dites questions opérationnelles et préventives. Est-ce que

11 cela veut dire que vous faisiez un travail de détective, d'activités anti-

12 terroristes ou pas ?

13 R. Cela comprend toutes les procédures opérationnelles et préventives,

14 dans le cadre du fonctionnement des forces de police. En d'autres termes,

15 si les activités de prévention de crimes -- si vous appelez cela du travail

16 de détective, oui. J'étais inspecteur au SUP et le SUP comprend tous ces

17 secteurs d'activités.

18 Q. Soyons plus précis : est-ce qu'on ne vous a jamais vu sur les lieux

19 d'une enquête criminelle judiciaire, par exemple, lorsqu'un crime a été

20 commis ?

21 R. Non.

22 Q. Est-ce que vous avez été un policier responsable d'une enquête sur des

23 infractions graves pour pratique de stupéfiants en Serbie ?

24 R. Non.

25 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé d'être l'inspecteur responsable dans un

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1 cas de cambriolage, en Serbie, j'entends ?

2 R. Non, tout ceci relève de la police judiciaire. Je ne m'occupais pas de

3 ces choses-là.

4 Q. Il y avait peut-être une certaine incertitude au début de votre

5 déposition, s'agissant de la date à laquelle vous êtes arrivé à Pec. On a

6 parlé d'une certaine année, mais pourriez-vous nous dire quand, en quelle

7 année, précisément, vous êtes arrivé à Pec ?

8 R. En 1992, en août 1992. J'ai été muté de Cacak pour faire le même genre

9 de choses que ce que je faisais à Cacak.

10 Q. Est-ce que vous avez peut-être été muté plus tôt, en 1990, à Pec ?

11 R. Non, non. Je n'ai pas été muté plus tôt, mais je me trouvais à Pec

12 avant cette date, mais pas longtemps.

13 Q. Pour faire quoi ?

14 R. J'ai eu plusieurs activités dans le cadre de l'Unité de Détachement de

15 Police.

16 Q. Ce n'est pas très utile. Est-ce que c'était un travail dans le cadre

17 des services de circulation routière ou est-ce que c'était autre chose ?

18 R. Non, non, ce n'était pas dans le cadre des services de la circulation.

19 C'était dans le cadre des forces générales de la police. J'étais commandant

20 d'une unité ou de plusieurs unités.

21 Q. Quand exactement ?

22 R. C'était avant 1990.

23 Q. Est-ce que c'était en rapport, par hasard, avec la lutte anti-

24 terroriste ?

25 R. A l'époque, ce n'est pas comme cela qu'on voyait les choses, mais il y

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1 avait des manifestations violentes; c'était en rapport avec ce genre de

2 choses.

3 Q. Même si vous n'êtes arrivé qu'en 1992, vous saviez et vous savez que

4 pratiquement, tous les policiers qui étaient Albanais du Kosovo, ils

5 avaient été limogés, licenciés du poste de police de Pec, n'est-ce pas ?

6 R. Non, ils n'avaient pas été licenciés. Ils sont partis de leur plein

7 gré.

8 Q. Lorsque vous êtes arrivé en 1992, était-ce, pour ainsi dire, pour

9 remplacer un Albanais du Kosovo ?

10 R. Non, je n'étais pas là pour le remplacer. C'était un service qui se

11 créait.

12 Q. Cela veut dire qu'il n'y avait pas de service de la Circulation

13 routière avant ?

14 R. Non.

15 Q. Vous êtes arrivé à Pec au début des années 1990; est-ce que vous avez

16 subi une formation, si pas dans un autre pays, du moins, dans un autre

17 état ?

18 R. Non.

19 Q. Avec un détachement d'effectifs ?

20 R. Non.

21 Q. Il y avait trois adjoints et vous en étiez un, je parle d'adjoint de

22 Vlahovic ?

23 R. Non, non, ce n'est pas exact.

24 Q. Qui était le chef du SUP ?

25 R. Quand je suis arrivé, vous voulez dire ?

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1 Q. Oui.

2 R. C'était M. Ljubomir Mikulovic.

3 Q. Est-ce qu'après, cela a été remplacé par Vlahovic ?

4 R. Oui, mais c'est plus tard.

5 Q. Est-ce que Vlahovic avait trois personnes de votre niveau dont il était

6 responsable ?

7 R. Il n'y avait pas que trois personnes, à mon niveau, qui lui étaient

8 subordonnés et qui lui faisaient rapport.

9 Q. Les hommes qui se trouvaient à votre niveau, même si cela n'a pas été

10 votre cas, est-ce qu'ils ont suivi une formation en Bosnie ?

11 R. Vous voulez dire, à mon niveau ?

12 Q. Oui.

13 R. Non. Non, non.

14 Q. Est-ce que des personnes à moindre niveau ont suivi une formation en

15 Bosnie ?

16 R. Je peux vous dire ce qu'il en est de mon service, je peux vous parler

17 des choses que je sais et personne dans mon service n'est allé suivre une

18 formation pour ce qui est des autres services, impossible de dire.

19 Q. Vous avez parlé, de façon tout à fait générale, des activités du SUP,

20 au vu de toutes les enquêtes menées par vous et votre équipe. Réfléchissez

21 un instant. Est-ce qu'il y a des gens du SUP de Pec qui ont suivi une

22 formation en Bosnie ? Essayez de nous aider.

23 R. Je pourrais vous parler des activités générales où j'ai pu le faire, vu

24 ce que mon équipe a fait par la suite. Je tenais beaucoup à savoir ce que

25 mes équipes faisaient, mais ce qui s'est passé au cours de cette période,

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1 cela je ne sais pas parce que cela ne m'intéressait pas. Je voulais faire

2 mon travail. C'est pour cela que je ne peux vraiment pas répondre à votre

3 question et vous dire si, oui ou non, les gens suivaient une formation. Ce

4 qui m'intéressais surtout c'est ce que faisait mon service et j'essayais

5 d'organiser mon service du mieux que je pouvais.

6 Q. Est-ce que vous avez entendu dire qu'Arkan, ou ses hommes peut-être,

7 aurait assuré la formation d'hommes à Pec. Est-ce que, peut-être, cela

8 s'est passé à Amajlije, en Bosnie, au sud de Bijeljina ? Est-ce que vous en

9 auriez entendu parler ?

10 R. Jamais.

11 Q. Vous avez, s'agissant de la période des années 1990, dit, je me suis,

12 peut-être, trompé, mais vous avez dit que les mauvais étaient toujours les

13 Albanais du Kosovo et que les Serbes ont pratiquement toujours été les

14 bons. Je parle ici de la période qui a précédé le conflit.

15 R. Ce n'est pas ce que j'ai dit.

16 Q. Dites-nous si ce n'est pas ce que vous avez dit. Les Serbes, qu'est-ce

17 qu'ils ont fait aux Albanais du Kosovo. Commençons au cours de cette

18 période par les enseignants. Est-ce qu'ils ont été licenciés parce qu'ils

19 n'ont pas prêté ce serment de loyauté ? Est-ce qu'ils ont été limogés ?

20 R. Jamais, je n'ai parlé en termes de catégories; de bons et de mauvais,

21 de Serbes et d'Albanais. Je vois les gens en fonction de leur travail, de

22 leur comportement. Si vous essayez de me faire dire des choses, de dire que

23 j'aurais dit, notamment, que les Albanais, c'étaient les mauvais, les

24 méchants. Ce n'est pas vrai.

25 Pourquoi des enseignants ont été licenciés, pour autant qu'ils l'aient été,

Page 39217

1 je ne sais pas. Ma femme est enseignante, elle a travaillé au Kosovo-

2 Metohija. Elle travaillait avec des Albanais et des Serbes sans

3 distinction.

4 Q. Est-ce que nous pourrons examiner la pièce 205. Malheureusement, elle

5 n'existe qu'en anglais. Nous allons placer le document sur le

6 rétroprojecteur et je vais vous donner lecture de brefs extraits qui

7 m'intéressent. Dans l'intervalle, je vous donne une dernière chance pour

8 voir si, de façon générale, vous pouvez nous dire ce que les Serbes ont

9 fait aux Albanais ou contre les Albanais du Kosovo, dans les années 1990,

10 au cours des années qui ont précédé le conflit. Des choses que vous auriez

11 considérées comme étant mauvaises, répréhensibles, inacceptables. Qu'est-ce

12 qu'ils ont fait les Serbes, à votre avis ? Monsieur Paponjak, qu'est-ce

13 qu'ils ont fait ?

14 R. Oui.

15 Q. J'avais compris que vous alliez me montrer quelque chose avant. Je peux

16 vous dire ce que certains agents de la circulation ont fait, s'ils ont fait

17 quelque chose de répréhensible parce que cela s'était quelque chose qui

18 m'intéressait, mais je ne peux pas vous parler d'autres secteurs pour vous

19 dire s'il y a eu -- de toute façon, il y a eu du bon et du mauvais des deux

20 côtés.

21 Si vous avez des informations selon lesquelles des agents de la

22 circulation auraient fait quelque chose ?

23 Q. Vous nous dites vraiment en tant que témoin que vous n'aviez aucune

24 connaissance d'activités qui auraient été celles d'autres policiers, que

25 d'autres d'agents que ceux des agents de la circulation ?

Page 39218

1 R. Non. On ne peut pas dire que je ne connaissais rien d'autre à propos

2 d'autres secteurs, mais même si j'avais des connaissances, je ne m'en

3 souviens pas nécessairement ou je ne peux pas nécessairement en parler en

4 tant qu'expert.

5 Q. Vous n'avez aucune connaissance d'activités répréhensibles commises,

6 éventuellement, par des civils serbes, parce que vous étiez un agent de la

7 circulation, tout simplement. Vous ne vous occupiez pas d'infractions

8 pénales ?

9 R. Exact.

10 Q. Vous n'aviez aucune connaissance d'activités menées par des

11 paramilitaires qui opéraient dans le secteur de Pec ?

12 R. Je n'ai pas connaissance d'activités quelles qu'elles soient de ces

13 paramilitaires.

14 Q. Je vais y revenir lorsque j'aborderai les pièces. Si c'est cela ce que

15 vous connaissez, lorsque vous avez signé tous ces documents en 2002, mis à

16 part, peut-être, ceux qui portaient sur les agents de la circulation, vous

17 n'étiez pas en mesure de garantir que ces documents-là que vous signiez

18 étaient exacts, pas le moins du monde, n'est-ce pas ?

19 R. Ce n'est pas vrai. Je n'aurais pas pu travailler avec mes hommes si je

20 n'avais pas été certain, et garantir le travail qu'ils faisaient, tant

21 qu'il n'aurait pas été établi qu'ils travaillaient en infraction de la loi.

22 En ce qui me concerne, je pense que ces gens faisaient bien leur travail.

23 Q. Oui. Je vais répéter ma question en y ajoutant une autre idée. Lorsque

24 vous avez signé tous ces documents en 2002, mis à part les documents

25 relatifs à la police de la circulation, vous n'étiez aucunement à même, à

Page 39219

1 partir de vos connaissances personnelles, vous n'étiez pas à même, disais-

2 je, de garantir que ces documents étaient exacts. Pas du tout, n'est-ce pas

3 ?

4 R. Vu mes connaissances personnelles, je ne pouvais pas le faire.

5 Cependant, en tant que chef du SUP, d'après vous, pour trouver quelque

6 chose, un chef de SUP devrait aller à la recherche, lui-même, de tous les

7 incidents, interroger tous les témoins. C'est ce qui apparaît en tant que

8 votre question. J'ai dit, j'avais signé ce que le chef de la police

9 judiciaire avait préparé comme document.

10 Q. Ici, nous avons sous les yeux, un document qui vient de "Human Rights

11 Watch". C'est un rapport établi par cette ONG et ce rapport porte la date

12 de mars 1993. Je vais demander à l'Huissier de nous montrer le bas de la

13 page 25. Puis, nous allons examiner la page 26.

14 Pendant qu'il cherche ce document, il s'agit d'une question qui porte sur

15 des connaissances générales, à l'époque. Vous savez en 1990 que des

16 organisations humanitaires avaient fortement critiqué les activités de la

17 police et autres, au Kosovo, n'est-ce pas ?

18 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.

19 Q. Aidez-moi un petit peu, s'il vous plaît. Personne n'a attiré votre

20 attention, vous qui étiez policier, voire même, en 2002, lorsque vous avez

21 examiné les travaux d'autres policiers. Personne n'a attiré votre attention

22 sur des malversations commises par la police sur votre territoire ?

23 R. En 2002, personne n'a attiré mon attention là-dessus. Il y a différents

24 types d'organisations sur place mais je ne suivais pas leurs travaux. Je ne

25 sais pas ce qu'ils ont écrit et sur ce qui les concernait.

Page 39220

1 Q. Je vais lire un extrait qui n'est pas très long, sous le titre : "Abus

2 par la police de civils en réponse à une violence supposée aux mains des

3 Albanais. Par exemple, le 4 juillet 1993, un policier a été tué au poste de

4 contrôle de la police en entrant à Pec. Personne n'a été arrêté en rapport

5 avec cet incident. Les autorités serbes ont prétendu qu'il s'agissait là de

6 quelque chose qui avait commis par des terroristes albanais."

7 Vous souvenez-vous de cet incident ?

8 R. Je ne me souviens pas que le 4 juillet 1993, un policier ait été tué à

9 Pec.

10 Q. Voyez-vous ce rapport, qui se fonde sur des entretiens menés avec un

11 certain nombre de personnes à l'époque, poursuit en disant que le président

12 du conseil des Droits de l'homme de Pec ne savait rien à ce propos, mais

13 décrit ce qui s'est passé par la suite à savoir les policiers ont fait des

14 fouilles dans les maisons, ont interrogé un certain nombre de personnes et

15 ont passé à tabac un certain nombre de chefs de villages représentant au

16 total quelques 148 personnes qui auraient été passées à tabac.

17 Il s'agit ici de vos hommes, n'est-ce pas ? Est-il exact ? Page

18 suivante. Ceci est-il exact ? Page suivante, s'il vous plaît.

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

20 M. NICE : [interprétation] Page 26.

21 Q. Ceci est-il exact, peut-on comprendre ce qui s'est passé à Pec ? Ce qui

22 s'y est passé, il y a une dizaine d'année environ ? Est-ce exact de dire

23 qu'en réponse à ce qui avait été perçu par des actes terroristes des

24 Albanais ou autres, la force de police dont vous faisiez partie s'est

25 livrée à des actes de violence à l'égard de civils; oui ou non ?

Page 39221

1 R. C'est la première fois que j'entends parler de tout ceci. Je ne savais

2 pas qu'un policier avait perdu la vie à Pec le 4 juillet 1993, encore moins

3 tous les autres éléments dont vous venez de faire état.

4 Q. Très bien. Passons maintenant, s'il vous plaît, à la page 33.

5 Je souhaite que vous compreniez bien ceci et je souhaite recueillir

6 vos commentaires. Il s'agit ici d'une description de la vie au quotidien

7 dans votre ville.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose que ce policier n'a pas de

9 nom ?

10 M. NICE : [interprétation] C'est le policier, non je ne crois pas pouvoir

11 vous donner de nom. En tout cas, avec ce que j'ai sous les yeux ceci a eu

12 lieu début du mois d'octobre 1993, j'ai peut-être le nom ailleurs. Cela se

13 trouve ici peut-être.

14 Q. Si vous voulez bien regarder maintenant, s'il vous plaît, la page 33.

15 Vers le bas de la page, s'il vous plaît, Monsieur l'Huissier. On parle ici

16 de raids effectués dans des magasins albanais et des places de marché.

17 Maintenant, la police ou les agents de la sécurité sont dans la

18 ville, n'est-ce pas ? Que se passe-t-il, Monsieur Paponjak ?

19 R. Oui, oui, ils sont dans les rues.

20 Q. Nous avons ceci : "Un grand le nombre d'Albanais dans l'ensemble du

21 Kosovo ont rapporté que la police était intervenue au niveau de leurs

22 commerces. Typiquement, la police opérait des raids sur les commerces

23 albanais et demandait à ce que leur soit remis l'ensemble ou tout l'argent

24 en liquide qui s'y trouvait comme l'a expliqué un employé albanais à Pec."

25 Ensuite, un autre passage à la page suivante : "Le 6 septembre des agents

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1 de la Sûreté lui ont demandé de lui remettre son argent, l'ont passé à

2 tabac et l'ont frappé au visage et ont menacé de le tuer s'ils n'arrivaient

3 à leur fin."

4 Est-ce des choses de ce genre qui se sont passées dans votre poste de

5 police ?

6 R. Pec n'est pas une très grande ville, les citoyens se connaissaient

7 bien. On connaissait les noms et les prénoms. Un citoyen qui faisait ce

8 genre de déclaration devait clairement indiquer qui s'était livré à ce

9 genre de passage à tabac. Je ne suis pas au courant de ce genre de choses.

10 Si de telles choses étaient arrivées effectivement pourquoi aurais-je dû en

11 être informé ?

12 Q. Monsieur Paponjak, il faut comprendre ceci, vous êtes venu ici convié

13 par l'accusé. On vous demande de parler de tous les événements de Pec, tout

14 ce qui s'y est passé et de tous les éléments d'information à cet égard. Je

15 vous demande simplement maintenant et ainsi que d'autres documents qui ont

16 été publiés ailleurs.

17 Je vous demande de bien vous reporter à la page 86 sous le titre :

18 "Procès de quatre Albanais à Pec" où il est dit que le

19 1er octobre 1991, ou peu de temps avant votre arrivée :

20 "Un groupe de 50 Albanais se sont retrouvés dans la maison de Sadri

21 Shala, dans le village Dobri Voda. Un certain nombre d'entre eux étaient

22 membres du mouvement national pour la République du Kosovo. Ils ont dîné

23 ensemble et ont évoqué la situation politique au Kosovo.

24 "Deux ans plus tard la police a arrêté quatre de ces hommes et les

25 ont torturés pendant plusieurs jours jusqu'à ce qu'ils signent des aveux."

Page 39223

1 C'est ainsi que cela a été relaté. Nous n'allons pas rentrer dans

2 tous les détails ici, cela n'est pas nécessaire pour les besoins de ce

3 procès puisque le document est disponible pour tout un chacun. Est-ce le

4 genre de choses qui se sont produites au poste de police dans lequel vous

5 étiez et qui ont été rapportées publiquement par des organisations comme

6 celle-ci ?

7 R. Non, je n'ai pas lu de tels rapports. Ils n'ont pas été mis à ma

8 disposition, c'est la première fois que je vois ce genre de choses.

9 Q. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si de telles choses s'étaient

10 produites comment celles-ci n'auraient pu ne pas être portées à la

11 connaissance de quelqu'un qui occupait un poste assez important ?

12 R. Non, je ne dis pas que ceci n'a pas été porté à ma connaissance, que

13 ceci m'a été caché. Il reste à savoir si ceci s'est passé en réalité ou

14 non, si ceci a été enregistré ou non. S'il s'agit d'un incident ou non. Il

15 se peut que ceci ne se soit jamais passé, ou il se peut qu'il s'agisse là

16 de quelque chose nous n'avions pas connaissance.

17 Q. Page 97, s'il vous plaît.

18 Je souhaite être bien clair à cet égard. Il y a un nombre assez limité de

19 paragraphes ici. La situation à Pec dans les années 1990 après le limogeage

20 d'un certain nombre d'officiers de police dans les rangs de la police

21 albanaise, autrement dit, il s'agissait d'un Etat policier et vous en

22 faisiez partie, n'est-ce pas ? Vous étiez un des membres de cet Etat

23 policier, n'est-ce pas ? Est-ce que vous me comprenez ?

24 R. Oui, j'entends bien, je comprends ce que vous êtes en train de dire.

25 Q. Merci, passons maintenant, s'il vous plaît, à la page 97. Vous seriez

Page 39224

1 d'accord avec moi pour dire, n'est-ce pas, que la présence, dans n'importe

2 quel Etat, de paramilitaires a un effet déstabilisateur, car la population

3 n'est pas certaine de pouvoir être protégée par les autres organes de la

4 police et l'armée qui usent de la violence. Etes-vous d'accord avec cela ?

5 R. Je ne peux être d'accord avec vous que parce que c'est une opinion que

6 vous émettez, c'est votre façon de voir les choses.

7 Q. Dans ce passage, rapport page 97, on parle ici dans le détail des

8 paramilitaires, un peu plus tard davantage en détail. Ici on parle : "Des

9 organisations humanitaires albanaises ont dit que la ville de Pec qui se

10 trouve au nord-ouest sert de base aux groupes paramilitaires. D'après le

11 LDK de Pec et du conseil des Droits de l'homme de Peja, il y avait trois

12 casernes de l'armée : une pour la police régulière, une pour l'armée

13 régulière et une pour les troupes paramilitaires."

14 Un Albanais que l'on a interviewé a décrété : "Il y a tellement de

15 Serbes en uniforme et armés ici, certains ne portent pas d'uniforme, il y a

16 des paramilitaires et il y a des hommes qui ne sont pas des paramilitaires,

17 que c'est impossible de faire la distinction ici."

18 S'agit-il là d'une description plus exacte de la situation qui

19 prévalait dans votre ville que celle que vous nous avez donnée au cours des

20 derniers jours ?

21 R. Non, ceci n'est pas exact. Il est fort possible qu'ils aient fait de

22 telles déclarations aux fins de justifier la présence de leurs unités qui

23 avaient déjà été mises en place ou que l'on entraînait déjà dans les bois

24 autour de la ville. Mais ceci n'est pas exact qu'il y avait la présence de

25 polices paramilitaires ou de groupes paramilitaires parce que nous nous

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1 connaissions tous. Je connaissais chaque policier, chaque policier me

2 connaissait. Cela n'aurait pas pu être un policier portant l'uniforme sans

3 que nous le sachions sans que nous le remarquions. Ces policiers

4 paramilitaires ont dû être remarqués par, je ne sais pas, ces organisations

5 humanitaires, ce "Human Rights Watch".

6 Q. En 1994, il y a eu un bon nombre de procès à l'encontre de policiers,

7 n'est-ce pas ? Des centaines ou plus.

8 R. On en parlait en ville et on disait que des membres du MUP illégal de

9 la République de Kosovo ont été placés en détention ou en garde à vue. Il

10 s'agissait, ici, d'une police parallèle qui avait été mise en place. Mais

11 il s'agit d'une police parallèle albanaise et non-serbe. Il est fort

12 possible que les déclarations fassent état de cela.

13 Q. Ils ont été jugés -- savez-vous qui était le Juge d'instruction ? Vous

14 en souvenez-vous ?

15 R. Non. Non, je n'étais pas au courant de ce genre de choses.

16 Q. Le nom de Danica Marinkovic vous évoque quelque chose ?

17 R. Le nom de Danica Marinkovic évoque quelque chose, mais ceci n'a rien à

18 voir avec Pec. J'ai entendu son nom, pour la première fois, en 1999, je

19 crois.

20 Q. Ces policiers ont été condamnés à des peines d'emprisonnement très

21 longues, n'est-ce pas, parce qu'ils ont fait partie de ces forces

22 militaires parallèles ?

23 R. Je ne sais pas à quelle peine ils ont été condamnés.

24 Q. Ils ont purgé leur peine dans la prison de Dubrava, n'est-ce pas ?

25 R. Je ne sais pas. Cela, je ne le sais pas non plus.

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1 Q. Avant d'aller plus loin et de faire un bond dans la chronologie, je

2 souhaite parler, maintenant, du bombardement de la prison de Dubrava : à ce

3 moment-là, la prison était surtout occupée par des prisonniers politiques,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Je ne sais pas ce qu'est "un prisonnier politique," je ne sais pas ce

6 qui signifie le terme pour vous. Il s'agissait, là, de personnes qui

7 avaient été condamnées pour crimes et il y avait des accusés ou des

8 personnes qui avaient été placées en détention car on les suspectait

9 d'avoir commis de graves crimes.

10 Q. Des crimes comme se rassembler pour parler politique, ce genre de

11 choses ?

12 R. A ma connaissance, personne n'a été condamné pour cela.

13 Q. Je vous demande de bien vouloir regarder maintenant la pièce 188, s'il

14 vous plaît; je vais essayer de remettre tout ceci dans un ordre

15 chronologique.

16 Il s'agit, ici, d'un autre rapport, encore une fois, qui émane de "Human

17 Rights Watch", qui est daté du mois de décembre 1996. Je vous demande de

18 bien vouloir vous reporter à la page 60; au milieu de la page, l'année,

19 c'est l'année 1996, autrement dit, après le procès des policiers; y êtes-

20 vous ? "Le 28 août, trois grenades ont été lancées sur le poste de police à

21 Lolopak, près de Pec, ne provoquant aucune victime, mais provoquant de

22 graves dégâts matériels. Le même jour, un inspecteur de police, du nom

23 d'Ejup Bajgora, a été tué par une arme automatique près de chez lui, à

24 Lupc, près de Podujevo. Pour finir, l'officier de police et inspecteur

25 serbe, Milos Nikic, et un employé, Dragan Rakic, ont été pris dans une

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1 embuscade et tués par des hommes armés inconnus dans le village de Surkis,

2 près de Podujevo.

3 "Les dirigeants albanais et les représentants officiels serbes ont nié

4 toute implication dans ces actes de violence et ont accusé l'autre partie

5 d'avoir provoqué ce conflit. Entre-temps, une organisation précédemment

6 inconnue a revendiqué ces attaques. Cette organisation s'appelait l'armée

7 de libération du Kosovo."

8 Je vais m'arrêter là. Vous souvenez-vous de ces grenades qui ont été

9 lancées sur le poste de police qui se trouvait près de là ?

10 R. Je ne sais pas. Il n'y a pas un tel poste de police.

11 Q. Vous souvenez-vous de la mort de collègues serbes à cette date-là,

12 environ, en 1996 ?

13 R. Je me souviens que des policiers ont été tués en 1996 et en 1997 aussi,

14 mais je ne peux pas vous donner la date exacte ou l'heure exacte de la mort

15 de mes collègues; cela ne relevait pas de ma responsabilité.

16 Q. Ce rapport précise que c'est en 1996, que pour la première fois, le

17 terme d'"armée de libération du Kosovo" a été utilisé et il s'agit, là, de

18 reconnaître que des actes brutaux ont été commis ainsi que des assassinats;

19 est-ce que cela correspond à vos souvenirs, à cette époque-là ?

20 R. A ce moment-là, je ne m'occupais pas de ce genre de choses. Je sais

21 qu'il y avait différents groupes qui s'appelaient l'armée du peuple,

22 l'armée de libération. Ils avaient leur QG à Cicavica et ainsi que dans les

23 hauteurs, là où ils avaient leur camp d'entraînement. Je ne sais pas à quel

24 moment ce terme a été utilisé pour la première fois, l'armée de libération

25 du Kosovo, parce que je ne m'occupais pas de ce genre de choses.

Page 39228

1 Q. Quand bien même vous n'avez pas lu ces rapports, à ce moment-là ou

2 qu'ils n'ont pas été portés à votre attention, à ce moment-là, vous

3 remarquerez que ce rapport parle de violences commises par les Albanais du

4 Kosovo contre les Serbes, je vous suggère que ce rapport, si vous avez eu

5 l'occasion de le lire, permettrait de bien comprendre la situation et de

6 rééquilibrer les choses.

7 Bien, tournez-vous à la page 18, s'il vous plaît, au bas de la page 19.

8 Référence aux violations --

9 R. En me fondant sur cette seule affaire, je dois dire qu'il s'agit, ici,

10 d'un document impartial.

11 Q. Bien sûr, vous aurez tout loisir pour le lire, si vous le souhaitez,

12 mais je souhaite simplement préciser le point qui m'intéresse ici, sur

13 lequel je souhaite attirer votre attention.

14 On parle, ici, de la violation du respect du contradictoire. Vous savez,

15 bien sûr, vous étiez un agent de la circulation. Si nous tournons la page

16 19, on parle, ici, d'Adem Bajri, au troisième paragraphe. C'était un

17 subordonné à Pec, un de vos subordonnés. Vous dites que vous connaissiez

18 tout le monde à Pec car c'était une petite ville. Adem Bajri était un

19 avocat de Pec, n'est-ce pas ?

20 R. Je suppose qu'il l'était.

21 Q. Vous ne le connaissiez pas ? Car il assurait la défense de ceux qui

22 étaient placés en détention à cause de leurs convictions politiques.

23 R. Pourquoi devrais-je le connaître ?

24 Q. Si vous ne le connaissiez pas et si vous ne pouvez pas nous aider ici,

25 je vais poursuivre. Je souhaite simplement comprendre, en lisant votre

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1 document et on va jusqu'à dire : Aucune connaissance d'enquêtes criminelles

2 et aucune connaissance sur les procédures appliquées par les tribunaux;

3 c'est exact ?

4 R. Quelle connaissance pourrais-je avoir de ce type de choses ? Si vous me

5 demandez des questions sur des jugements rendus ou des arrêts, je sais que

6 les tribunaux appliquent la loi et cela me suffit.

7 Mais pour ce qui est des affaires en particulier et de l'avocat Adem Bajri,

8 franchement, je menais ma propre vie et j'avais mon travail à accomplir. Je

9 ne sais pas si "Human Rights Watch" veut essayer d'expliciter ce qui s'est

10 passé.

11 Q. Vous ne le connaissez pas, même de nom ?

12 R. Non. Je l'ai lu ici. Je viens de le lire en haut de ce paragraphe.

13 Q. Page 20, s'il vous plaît. Nous avons, ici, un rapport portant sur le

14 procès de ces policiers. Vous vous souvenez certainement de cela -- vers le

15 bas de la page.

16 "Au mois de novembre, au mois de décembre 1994, 136 Albanais ont été

17 arrêtés pour avoir constitué une force de police albanaise parallèle. Ils

18 faisaient tous partie des forces de police de l'ex-Yougoslavie et étaient

19 tous délégués syndicaux." Je crois que vous avez fait état de ce syndicat

20 des policiers, un peu plus tôt, lorsque vous avez répondu aux questions de

21 l'accusé; vous en souvenez-vous ?

22 R. C'est ce qu'ils s'intitulaient, le syndicat, mais il ne s'agissait pas

23 d'un syndicat. Il s'agissait d'une force de police illégale.

24 Q. Le rapport poursuit en disant : "A ce moment-là, en 1995, 117 d'entre

25 eux ont été condamnés à des peines d'emprisonnement allant d'un à huit ans.

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1 A partir du mois d'octobre 1996, certains d'entre eux ont été libérés."

2 Vous en souvenez-vous ? Puisqu'il s'agissait d'anciens collègues des

3 Albanais, vous devriez certainement vous en souvenir s'ils ont été jugés et

4 condamnés et ensuite, libérés.

5 R. Non. Je n'ai pas connaissance de ces personnes, s'ils ont été jugés,

6 condamnés ou remis en libertés.

7 Q. Le document poursuit en disant qu'eu égard à ces accusés, ces

8 policiers, que "Human Rights Watch" s'est entretenu avec les avocats des

9 accusés et a laissé entendre que la torture avait été pratiquée aux fins

10 d'extraire des aveux. C'est ainsi que les choses se déroulaient dans votre

11 poste de police ?

12 R. Non.

13 Q. Comment le savez-vous ?

14 R. Je sais ce qui se passait dans mon poste de police ou dans les postes

15 de police, en général, car j'étais responsable de plusieurs postes de

16 police et je sais que cela ne s'y passait pas.

17 Q. Si vous n'étiez pas enquêteur, si vous n'étiez pas présent lors de tous

18 ces entretiens, si vous n'avez même participé à des enquêtes menées pour

19 des cambriolages, comment saviez-vous que ces actes ou ces violences n'ont

20 pas été commis ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Que quelque chose s'est passée dans le

23 bâtiment où je travaillais ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'hésitais à interrompre car je pensais qu'une

25 question serait posée au témoin. Mais étant donné qu'il n'y a pas de

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1 questions, je dois intervenir maintenant.

2 M. Nice sait très bien parce que le Juge d'instruction est venu témoigner

3 ici ainsi que d'autres témoins; ils ont parlé de la loi. Il doit savoir que

4 les enquêtes ne sont pas menées par des policiers. Ces enquêtes sont menées

5 par des Juges d'instruction et c'est ce que M. Paponjak a indiqué à

6 plusieurs reprises, également et d'après notre loi, c'est le Juge

7 d'instruction qui doit mener l'enquête.

8 Mme Marinkovic a expliqué ici comment elle a interviewé les suspects en

9 présence du Procureur, de l'avocat de la Défense et on essaie simplement

10 d'ennuyer le témoin, ici.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Je ne trouve pas que la

12 question soit inappropriée : "Si vous n'étiez pas enquêteur, si vous

13 n'étiez pas Procureur et si vous n'avez pas pris part à ces entretiens,

14 comment savez-vous que ces choses ne se sont pas produites ?" C'est le

15 témoin qui doit répondre.

16 M. KAY : [interprétation] Si je puis soulever un point ici car simplement,

17 c'est un représentant du groupe "Human Rights Watch" qui s'est entretenu

18 avec les avocats de la Défense et qui a dit que la torture avait été

19 pratiquée dans le poste de police de Pec. Si toutes les affaires étaient

20 menées en se reposant sur les paroles des avocats de la Défense et

21 simplement sans parler ou de faire intervenir une affirmation sous serment,

22 à ce moment-là, je crois que nous saurions dans une piètre situation. Je ne

23 suis pas tout à fait certain d'arriver quelque part avec ceci, mais d'autre

24 part, le Procureur, lui-même, est tout simplement en train d'asseoir son

25 point de vue et déclarations faites par des gens, tout ceci ayant été tiré

Page 39232

1 d'un livre. Il s'agit de gens, ici, qui étaient, en réalité, les avocats de

2 la Défense et le témoin a dit : "Je ne sais rien à ce sujet," et vraiment,

3 le procès a simplement eu lieu.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois qu'il essaie d'établir si,

5 oui ou non, le témoin avait suffisamment d'éléments factuels lorsqu'il a

6 fait sa déposition.

7 M. KAY : [interprétation] Très bien. Le Procureur ne le fait pas, non plus.

8 Il rapporte simplement ce qui a été dit par les avocats de la Défense et

9 ceci se trouve simplement dans un livre.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vois pas en quoi la question

11 ne serait pas bonne. Laissez le témoin répondre.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] La question n'est pas de savoir si la torture

13 a été commise dans mon poste de police, la réponse était non, ce n'était

14 pas le cas. La question suivante est comment je pourrais prétendre cela ?

15 Je ne peux rien prétendre parce que je n'ai jamais reçu de tels rapports.

16 Ceci ne s'est pas passé; si quelque chose de la sorte s'était passée, je le

17 saurais.

18 M. NICE : [interprétation]

19 Q. Monsieur Paponjak, je vais maintenant parler de l'intervention de

20 l'accusé, lorsqu'il dit que dans votre système juridique, c'est le Juge

21 d'instruction qui doit mener l'enquête. Il a tout à fait raison. Mais nous

22 avons des témoignages portant sur d'autres régions près de Racak où un

23 officier a été chargé de recueillir des déclarations faites par d'éventuels

24 témoins. Savez-vous que les enquêteurs ont le droit de recueillir des

25 déclarations d'éventuels témoins ou si c'est quelque chose qu'ils font de

Page 39233

1 leur propre initiative ou s'ils le font à la demande d'un Juge

2 d'instruction; est-ce que vous savez cela ?

3 R. Il est vrai que nous recueillons des déclarations et ce, pour un

4 certain nombre de raisons. La première, c'est lorsque le Procureur nous le

5 demande ou lorsque le Juge d'instruction nous le demande ou peut-être

6 lorsque le citoyen, lui-même, a quelque chose à dire. Mais nous ne sommes

7 pas des enquêteurs; nous recueillons des déclarations parce que nous sommes

8 habilités à le faire en tant que représentant du ministère de l'Intérieur.

9 Q. Autrement dit, savez-vous si, oui ou non, des gens qui sont interviewés

10 ont le droit d'être défendus par un témoin, ont droit à la présence d'un

11 avocat ou subsidiairement, si c'est simplement une pratique qui ne change

12 pas et si la police souhaite interviewer quelqu'un, cela peut être en

13 présence ou non d'un avocat ou les deux ? Est-ce que vous le savez ?

14 R. Un entretien peut avoir lieu hors la présence ou en présence d'un

15 avocat. Si le citoyen en question le demande, il peut avoir un avocat. S'il

16 demande un avocat, il aura un avocat.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je veux m'assurer que tout ceci soit bien

20 compris. M. Nice a clairement compris que ce témoin n'était pas un chef

21 policier qui faisait partie d'une équipe d'enquêteurs. Il ne menait pas des

22 enquêtes sur des meurtres. Il s'agit, ici, en l'occurrence, de dire - et

23 c'est important de le dire - que c'est le Juge d'instruction qui est la

24 tête d'une équipe d'enquêteurs. Ce qui ne signifie pas, pour autant, qu'un

25 policier ne peut pas prendre part à une mission d'enquête, mais il n'est

Page 39234

1 pas vrai de dire qu'un policier peut mener une enquête et le fait qu'il

2 n'ait pas mené une enquête semble indiquer clairement que cela ne suffit

3 pas pour dire qu'il a une connaissance sur quoi que ce soit, y compris, sur

4 les enquêtes.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

6 entendre les témoignages, nous allons par la suite déterminer quelle est la

7 valeur à accorder à certains éléments ou à ne pas accorder à d'autres.

8 M. NICE : [interprétation]

9 Q. Monsieur Paponjak, je vous pose ces questions parce que lorsque nous

10 arrivons en 1999 et à ce qui est arrivé à ces Albanais du Kosovo qui sont

11 restés, vous allez être d'accord avec moi pour dire qu'il est nécessaire de

12 connaître l'environnement, les circonstances dans lesquelles ont vécu les

13 Albanais du Kosovo. C'est nécessaire parce qu'il faut que nous comprenions,

14 nous, quel est l'environnement dans lequel ils ont vécu. Vous serez

15 d'accord avec moi pour le dire.

16 R. Je le sais parce que j'ai vécu avec eux, j'y ai vécu avec eux.

17 Q. Ce que je veux laisser entendre, à regarder cette documentation est une

18 image qui nous conduit délibérément vers une mauvaise interprétation de la

19 situation parce que vous savez parfaitement bien que dans les années 1990,

20 c'était un Etat de police -- un Etat policier. Cela en était ainsi parce

21 que c'est ce qu'a donné comme instruction et ce qu'a permis l'accusé.

22 R. Est-ce que c'est une question ?

23 Q. Oui, c'est une question. Je veux laisser entendre que cela est une

24 chose que vous saviez.

25 R. Non, seulement que je ne le savais pas, mais ce n'est pas exact du

Page 39235

1 tout. Je voudrais que vous me trouviez un seul, ne serait-ce qu'un seul

2 Albanais qui serait à même de fournir des remarques au sujet de mon travail

3 et qui affirmerait qu'il aurait été discriminé rien que parce qu'il était

4 Albanais.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Paponjak, aviez-vous

6 connaissance de tentatives de la part d'Albanais pour ce qui est de la mise

7 en place d'une force de police parallèle.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils n'ont pas seulement essayé, ils ont réussi

9 à le faire. Nous avons appris --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon, cela suffit, c'est une réponse

11 tout à fait simple. Mais vous n'aviez pas connaissance du fait qu'un

12 certain nombre d'entre eux ont été arrêtés, poursuivis en justice,

13 condamnés, alors que d'autres ont été acquittés ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai su, je le savais. J'ai dit que je le

15 savais. Je n'ai pas connu les sentences prononcées. Le Procureur m'a

16 demandé si je savais que certains de mes collègues avaient été poursuivis

17 en justice et condamnés ? Cela je le sais. Je sais qu'ils ont été arrêtés

18 et je l'ai déjà dit en répondant au Procureur à la question qu'il m'a

19 posée. Peut-être vous a-t-on mal traduit.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, il y a peut-être une petite

21 confusion qui s'est installée.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, je vous prie. Peut-

23 être ai-je mal compris moi-même. Vous saviez que des poursuites ont été

24 lancées à l'encontre d'un bon nombre de policiers, je crois qu'on a parlé

25 de 176 personnes.

Page 39236

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas exactement de combien de

2 personnes il s'est agi, mais il y a eu un MUP clandestin de la République

3 de Kosovo qui a été créé. Je sais qu'un certain nombre de personnes ont été

4 arrêtées. Je ne savais pas leurs noms. Je ne sais qui a été le Juge

5 d'instruction. Je ne sais pas qui a conduit les procès et je ne sais pas

6 les sentences qui ont été prononcées. Je sais que cela s'est passé, je

7 savais que cela existait.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le témoin a répondu à la question,

11 Monsieur Milosevic. Je suis satisfait de sa réponse. Si vous voulez

12 soulever la question une fois de plus, vous pouvez le faire à l'occasion

13 des questions complémentaires.

14 M. NICE : [interprétation]

15 Q. J'aimerais que l'on se penche sur un document de "Human Right Watch",

16 daté de 1998. Je parle ici de la pièce à conviction numéro 191. Je me

17 réfère à la page 54. Il est question ici d'événements survenus en date de

18 1998.

19 En page 54, ce même avocat Adem Bajri, rapporte qu'il y avait 251

20 Albanais de souche dans les prisons de Pec accusés d'activités terroristes.

21 Des plaintes au pénal ont été déposées à l'encontre de 510 autres Albanais.

22 Si votre police a réussi découvrir 251 personnes pour les accuser de

23 terrorisme.

24 Aviez-vous connaissance de ce nombre très important de terroristes ou

25 gens qui ont été accusés de terrorisme qui étaient détenus ?

Page 39237

1 R. Je ne sais pas combien ils ont été à être détenus, mais j'ai des

2 renseignements statistiques pour l'année 1998. J'ai peut-être même une

3 liste nominative.

4 Q. Excusez-moi de ne pas être à même de me pencher sur la totalité des

5 documents étant donné qu'on me les a fournis assez tard et que bon nombre

6 d'entre eux n'ont pas été traduits. Mais pouvez-vous me dire dans quelle

7 partie de vos documents, de votre documentation, il est fait référence de

8 ces 251 Albanais qui se trouvaient en prison ? Quel intercalaire dois-je

9 consulter ou est-ce là le travail de quelqu'un d'autre, que vous ne seriez

10 pas à même de commenter puisque vous ne les avez pas rédigés vous-même ?

11 R. Je crois qu'il y a un intercalaire entier consacré à cela. J'appelle

12 cela le chapitre Z qui comprend les renseignements nominatifs relatifs aux

13 personnes ayant fait l'objet de plaintes au pénal. Maintenant quand vous

14 dites 251, moi cela ne me dit rien, il se peut qu'il y en ait eu plus, il

15 se peut qu'il y en ait eu moins.

16 Q. L'un des choses dont nous parle ce rapport de "Human Right Watch" est

17 ce qui suit : le même avocat dénommé ci-dessus a dit que pratiquement la

18 totalité de ses clients, et il représentait 24 personnes, auraient été

19 battues en prison et qu'ils avaient des ecchymoses sur le corps. Que

20 diriez-vous à ce sujet ?

21 R. Rien.

22 Q. Mais vous seriez à même de nous confirmer ce qui suit n'est-ce pas ?

23 C'est un travail dangereux que d'être -- que c'était un travail dangereux

24 que d'être avocat vaquant à la protection des droits de l'homme au Kosovo

25 dans les années 1990, fin 1990 ?

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1 R. Pourquoi voulez-vous que je puisse être à même de vous le confirmer ?

2 Q. Vous savez ce qui est arrivé à l'avocat le plus connu,

3 M. Kelmendi ? Tout le monde le sait. Lui et ses deux fils. Par conséquent,

4 pour cet homme il y avait des dangers à parler en public de ce qui s'était

5 produit avec ses clients, de ce qui est arrivé à ses clients. Ne pensez-

6 vous pas qu'il était dangereux en fin 1990 de s'employer en faveur des

7 droits de l'homme au Kosovo ?

8 R. Je ne suis pas d'accord avec vous. Je suis l'un des ces hommes qui

9 s'emploie en faveur des droits de l'homme. Il l'a dit en secret, il l'a dit

10 dans la clandestinité ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le colonel vient de dire que cela figurait au

14 chapitre Z. Je vais vous aider. Il s'agit de l'intercalaire 9 et 9.1. C'est

15 là que se trouvent les informations relatives aux organisations terroristes

16 et aux activités terroristes ainsi qu'aux conséquences des activités

17 terroristes de l'UCK sur le territoire du SUP de Pec à compter du 1er

18 janvier 1998 jusqu'à la mi-2001. Vous verrez ici qu'il y a 1 170 événements

19 qui y sont repris. Il faut que l'on ait englobé là toutes les personnes qui

20 ont été arrêtées avec des chefs d'accusation de cette sorte au SUP de Pec.

21 Quand il parle du Zagreb, c'est l'intercalaire 9 et 9.1 où l'on

22 reprend tous les cas, au cas par cas.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Intercalaire 9, dites-vous, et 9.1.

24 Merci de cette information.

25 Monsieur Nice, vous venez de l'entendre, n'est-ce pas ?

Page 39239

1 M. NICE : [interprétation] Si les documents avaient été traduits, j'aurais

2 pu les consulter pendant la pause, mais ce n'est pas le cas. Enfin,

3 l'information en tant que telle m'est fort utile.

4 Q. Je vais vous demander maintenant de consulter un autre document en

5 langue anglaise qui provient d'une autre source. Il s'agit d'un rapport

6 relatif à la situation militaire daté du mois de mai 1998. Il émane de

7 source britannique.

8 J'aimerais que ce document placé sur le rétroprojecteur. Il

9 s'agit, je le précise, de la pièce 255.

10 Pendant que nous attendons que ce soit placé sur le rétroprojecteur,

11 je vous demande si vous seriez d'accord avec moi pour dire que des

12 représentants militaires originaires de pays variés se sont déplacés dans

13 la région pour voir ce qui s'y passait, n'est-ce pas ?

14 R. C'est exact. J'en ai vu certains, en effet.

15 Q. Celui-ci présente le rapport suivant : "En se déplaçant de Pec vers

16 Decani, ils sont tombés dans une embuscade dans l'un des villages un peu au

17 nord d'un point de contrôle. Il y en a un qui a été tué et un autre

18 blessé."

19 Je m'excuse, je vous ai donné une mauvaise référence. Je me suis

20 trompé.

21 M. NICE : [interprétation] Je vous demande juste quelques instants,

22 Messieurs les Juges.

23 Q. Ce que nous pouvons voir dans ce rapport se trouve en bas de page, il y

24 est dit : "Nous avons quitté ce matin Pec à 7 heures 36, et nous nous

25 sommes dirigés vers Decani pour voir si nous pourrions passer. En quittant

Page 39240

1 Pec, la route était complètement désertée. Nous avons trouvé sur la route

2 des douilles de 12,75 millimètres et autres" -- ou plutôt, je vais

3 recommencer ma lecture.

4 "Ce matin, nous avons quitté Pec à 7 heures 46 pour nous diriger vers

5 Decani et voir si on pouvait y arriver. En quittant Pec, la route était

6 complètement désertée. Nous avons trouvé des douilles sur la route, des

7 douilles de 12,75 millimètres et autres calibres. La plupart des bâtiments

8 le long de la route principale en passant par Ljubenic et Gorni Streoc ont

9 été touchés par balles, et les douilles ne dataient pas de plus d'un jour

10 ou plus. Dans une maison, il y avait encore de la fumée. On ne pouvait pas

11 voir à proximité des membres de MUP. Les villages semblaient être désertés.

12 Très rapidement, des Albanais sont venus à nous pour nous raconter ce qui

13 s'est passé. Ils ont dit que les villages ont été attaqués et que 11

14 personnes ont été tuées. Ces attaques auraient eu lieu le 25 mai. Leurs

15 descriptions des auteurs correspondaient aux descriptions que l'on

16 fournissait de cette unité à affectation spéciale plutôt que des unités

17 régulières du MUP."

18 On nous donne des détails. Cet incident doit faire partie de ce dont

19 vous avez eu connaissance. Vous devez forcément vous en connaître parce

20 qu'il y a été tués 11 personnes. Savez-vous nous dire quoi que ce soit à ce

21 sujet ?

22 R. Si cela est effectivement arrivé, si la chose nous a été rapportée,

23 oui, je serais censé le savoir.

24 Q. Bien. Ce à propos de quoi j'aimerais que vous nous veniez en aide,

25 c'est ce qui se suit. Vous nous avez produit tous ces documents. Ici, nous

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1 avons un grand crime, un délit au pénal grave, peut-on nous pencher sur la

2 totalité de ces documents qui traitent de 1998 ? Nous sommes en pleine

3 période qui est englobée par les documents que vous avez rapportés. Est-ce

4 que cela constitue une pièce pertinente ? Je crois que nous pouvons faire

5 le tour de vos documents assez facilement.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] De quelle date parle-t-on en 1998 ?

7 M. NICE : [interprétation] Je crois que la date figure sur la page

8 précédente, c'est celle du lundi 25 mai. Il me semble que c'est bien la

9 date de ce rapport s'agissant de l'année 1998. C'est exactement ce qui

10 figure, sur le document au bas de ce paragraphe comme date, même si le

11 rapport a été rédigé un peu plus tard.

12 Q. Est-ce que dans votre documentation vous pouvez nous indiquer où est-ce

13 qu'il est question de cet incident ?

14 R. Au chapitre A, il a été recensé la totalité des événements avec des cas

15 de décès ou de morts violentes.

16 Q. Est-ce que l'on pourrait retrouver cela immédiatement ? Le chapitre 1

17 ne nous aide pas beaucoup parce que nous avons un marquage différent. Où

18 est-ce que je dois regarder ? Pouvez-vous me donner le sommaire ? Quel doit

19 être l'intitulé du document, afin que je sache ce qu'il convient de

20 rechercher ?

21 R. Il faut rechercher : "L'information relative aux événements avec perte

22 de vie humaine." Il y a une liste de personnes décédées qui suit la

23 chronologie et une autre liste suit l'alphabet. Nous allons aisément

24 retrouver toutes les personnes par leurs noms. Les événements, nous les

25 retrouverons par les dates qui y figurent dans ces listes.

Page 39242

1 Q. Peut-être la façon la plus rapide de procéder serait de vous montrer

2 cette liste en serbe.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, l'heure est venue de

4 faire une pause. Nous allons faire une pause de 20 minutes.

5 M. NICE : [interprétation] J'aimerais que l'on donne au témoin cette liste

6 pour gagner du temps. S'il est à même de le faire, il pourrait nous donner

7 la liste des noms de ceux qui ont préparé ces documents à lui.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Le témoin peut prendre cette

9 liste et s'il est à même de le faire, il pourrait nous coucher sur papier

10 les noms de ceux qui ont rédigé les documents.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais profiter de cette pause pour me

12 reposer un peu, pour prendre une cigarette et un café, si vous le

13 permettez. Si vous ne le permettez pas, je veux bien travailler.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, en effet, profitez de cette

15 pause pour vous reposer si vous le souhaitez. Si vous réussissez à faire ce

16 qu'on vient de vous demander, faites-le. Je ne vais pas m'immiscer dans le

17 droit que vous avez de faire une pause.

18 Nous allons faire la pause.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 22.

21 --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Nice.

23 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai pas encore réussi à

24 trouver le nom du policier qui a été tué, en réponse à la demande faite par

25 le Juge Bonomy.

Page 39243

1 Q. Monsieur Paponjak, nous sommes en train de nous pencher sur la

2 documentation qui fait état de crimes graves à Gorani Stroc. Je n'ai pas

3 été à même de retrouver le document en question et je ne serai pas en

4 mesure d'en terminer avec mon contre-interrogatoire, aujourd'hui. Je vous

5 demanderais de vous pencher sur cette documentation, ce soir et de nous

6 dire, demain matin, à quel endroit, dans la documentation, nous pouvons

7 retrouver la mention de cet incident.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] La question qui se pose, c'est de savoir si on

11 peut demander une chose pareille au témoin parce que le document qui se

12 trouve encore sur le rétroprojecteur dit bien qu'un groupe d'Albanais est

13 arrivé jusqu'à ces représentants étrangers et ont dit qu'il y a eu attaque

14 du village avec 11 morts. Ils leur ont dit cela et entre autres, ont dit

15 que l'un des Albanais portaient des vêtements anciens et qu'il avait une

16 boîte avec des chargeurs d'AK47."

17 M. NICE : [interprétation] Mais cela, c'est pour des questions

18 complémentaires.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Vous pouvez poser ces questions

20 à l'occasion de vos questions complémentaires, Monsieur Milosevic.

21 M. NICE : [interprétation]

22 Q. Que diriez-vous, Monsieur Paponjak, au sujet de la description qu'ils

23 ont faite des maisons endommagées sur la route, en mai 1998 ? Il s'agit,

24 là, d'une description qui est fournie par ceux qui ont rédigé ce rapport.

25 Que diriez-vous au sujet de la façon dont cela est survenu ?

Page 39244

1 R. Je ne sais pas si cela est survenu, effectivement. Si c'est le cas, je

2 ne peux pas vous dire comment.

3 Q. Mais êtes-vous véritablement en train d'affirmer, étant donné que vous

4 étiez un officier de la police chargé de la circulation routière -- quand

5 vous vous penchez sur un rapport d'observateurs militaires internationaux

6 décrivant ce qui s'est produit aux bâtiments sur la route, êtes-vous

7 vraiment en situation de ne pas pouvoir nous l'expliquer ou peut-être ne

8 voulez-vous pas nous aider ?

9 R. Si cela s'est produit, cela existe dans notre documentation, je peux en

10 parler. Mais si cela ne s'est pas produit, nous ne l'avons pas dans la

11 documentation et je ne peux pas commenter une chose qui ne s'est pas

12 produite. C'est ce que je voulais vous dire, c'est tout.

13 Q. Nous sommes en train de parler de 1998. Y a-t-il une raison quelconque

14 dont vous auriez connaissance pour ce qui est d'un instant ou tout un

15 chacun estimait ou espérait une solution pacifique ? Pourquoi des

16 observateurs internationaux prendraient-ils note de choses qui ne seraient

17 pas vraies ?

18 R. Je n'ai pas dit qu'ils auraient noté quelque chose de pas vrai. J'ai

19 dit qu'ils ont noté un récit qui leur a été présenté.

20 Q. Je comprends bien qu'il vous est difficile de vous en souvenir,

21 notamment, si vous ne lisez pas l'anglais. En réalité, ils ont pris note de

22 maisons qui ont été incendiées. Dites-nous : pourquoi ces maisons ont été

23 incendiées, en mai 1998 ?

24 R. N'importe qui aurait pu y mettre le feu. Cela aurait pu être l'œuvre de

25 terroristes, de personnes autres et comme on veut bien le laisser entendre

Page 39245

1 ici, que ce serait des policiers qui l'auraient fait. Mais nous ne savons

2 pas exactement qui l'a fait.

3 Si vous me posez la question de savoir ce que je pense, je dirais que

4 je pense que ce sont les terroristes qui ont mis le feu.

5 Q. Je vois. Comme vous ne savez rien de tout ceci, comme vous l'avez dit

6 au départ, pourquoi pensez-vous que ce soit l'œuvre de terroristes et non

7 pas de policiers ?

8 R. Parce que les policiers ne le font pas. Si quelqu'un met le feu à la

9 maison d'autrui, que peut-on dire de lui si ce n'est qu'il s'agit d'un

10 terroriste ?

11 Q. Monsieur l'Huissier, il s'agit, ici, de la pièce 257 qui concerne une

12 période ultérieure, au mois d'août.

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous un numéro ?

14 M. NICE : [interprétation] Il s'agit du 255 et le suivant est le 257.

15 Q. Je vous demande de vous pencher sur le bas de la première page. On voit

16 bien qu'il s'agit du 5 et du 6 août, dans ce rapport présenté par un

17 observateur militaire et l'observateur nous dit :

18 "La plupart des villages, au nord ou au sud de cette route de Pec-Pristina

19 et Gornji Klina-Rudnik-Rakos, se trouvent être détruits en grande mesure et

20 de façon arbitraire --"

21 Si cette description est exacte et s'il s'agissait de destruction

22 arbitraire, vous deviez forcément en avoir connaissance. En aviez-vous

23 connaissance ?

24 R. Gornji Klina-Rakos, dites-vous, ce n'est pas une route qui relevait de

25 mes compétences. Cela relève des compétences du SUP de Kosovska Mitrovica.

Page 39246

1 Q. L'autre route ?

2 R. Pec-Pristina faisait effectivement partie de mes compétences, mais en

3 partie, pas en totalité. Zenica et Junik, cela ne relevait pas de mes

4 compétences; pour ce qui est de Jablanica, je ne sais même pas à qui cela

5 appartenait.

6 Q. En ce qui concerne les dégâts constatés sur cette route-là, parce que

7 vous comprenez qu'on affirme, ici, que cela a été l'œuvre de forces serbes

8 qui ont terrorisé la population albanaise. A vous de nous dire ce qui s'est

9 produit réellement.

10 R. Je ne le comprends pas ainsi. S'agissant de cette route Pec-Pristina,

11 il n'y a pas eu de dégât, pour ce qui est de la route que nous avions

12 gardée sous notre contrôle. Je me souviens et je ne me souviens pas de la

13 période en question, nous ne pouvions pas contrôler la route au-delà de

14 Klina, pas Gornji-Klina, parce que Gornji-Klina, c'est vers Mitrovica. Nous

15 pouvions contrôler Pec-Pristina jusqu'à Klina et nous avions du mal à le

16 contrôler déjà. Tout le reste avait été gardé sous blocus par les

17 terroristes et ils avaient exercé leur contrôle là-dessus et il y avait

18 beaucoup d'attaques sur ce tronçon. Le village de Kijevo, un village serbe,

19 se trouvait être tout à fait encerclé. C'est ce que je sais au sujet de

20 cette route. Pour ce qui est de ce qui s'est passé au-delà de Klina, je ne

21 sais pas du tout ce qu'il en est advenu.

22 Q. C'est, ici, un incident dont vous avez connaissance puisque vous l'avez

23 déjà mentionné. La famille Salihaj, combien de membres de cette famille ont

24 été tués ?

25 R. Je ne sais pas si nous en avons pris note, comme s'il s'agissait de

Page 39247

1 meurtres.

2 Q. Essayons d'aller au pas à pas. Vous êtes au courant de cet incident

3 puisque vous l'avez mentionné à l'occasion de votre interrogatoire

4 principal.

5 R. Oui, cela existe dans notre documentation.

6 Q. Il s'agit, ici, d'une famille et plusieurs membres de cette famille ont

7 été tués. Qui a tué ces membres de la famille en question ?

8 R. Laissez-moi quelques instants pour que je retrouve le document dont

9 vous parlez. Cela a trait au 9 août 1998, la localité s'appelle Susica.

10 Q. Oui.

11 R. En date du 9 août 1998 --

12 Q. Oui. Nous nous sommes penchés sur la carte, Susica se trouve entre

13 Dubrava -- ou plutôt près de Dubrava.

14 R. Je ne sais pas par cœur, mais nous avons une carte et il n'est pas

15 difficile de l'établir.

16 Q. Vous êtes-vous déplacé là-bas en personne, Monsieur Paponjak ?

17 R. Je ne suis pas allé là-bas en personne, ni au moment de l'attaque

18 terroriste, ni au moment du constat sur les lieux.

19 Q. S'agissait-il d'une attaque terroriste ou s'agissait-il de représailles

20 relatives à une attaque terroriste et où il y a eu meurtres de toutes ces

21 personnes ?

22 R. Il est dit, ici, qu'il y a eu une attaque terroriste sur une patrouille

23 du MUP de la République de Serbie, les policiers ont riposté et ont tué, à

24 ce moment-là, huit membres de l'UCK. On ne dit pas qu'il s'agit de la

25 famille Salihaj.

Page 39248

1 Q. Où sont vos éléments de preuve pour affirmer que les huit étaient

2 membres de l'UCK et non pas seulement un seul d'entre eux ?

3 R. Il y a un constat, un PV dressé par le Juge d'instruction de Pec et il

4 y a une documentation annexée. Il y a un dossier complet.

5 Q. De quel intercalaire parlez-vous ?

6 R. Intercalaire 1.4.

7 Q. Le numéro combien ?

8 R. 1.4, numéro 59, dans la liste des événements.

9 Q. Cela n'a pas été traduit, non plus. Je vais y revenir demain et voir

10 cela ce soir.

11 Nous avons entendu un témoin qui a dit que Frenki Simatovic, le commandant

12 de cette unité chargée des opérations spéciales, a été dans le secteur de

13 Pec, en été 1998. Pouvez-vous nous dire ce qu'il faisait là-bas ?

14 R. Je ne connais pas M. Simatovic. Je ne l'ai pas vu là-bas et je ne peux

15 pas vous dire ce qu'il faisait là-bas si tant est qu'il y était.

16 Q. Nous avons entendu le témoignage de Lord Ashdown qui a dit qu'entre le

17 27 et le 28 septembre 1998, le long de cette route reliant Pristina-Pec, il

18 y a eu pillage de biens à une grande échelle. Pouvez-vous nous expliquer

19 cela ?

20 R. Je ne peux pas vous l'expliquer. Je ne suis pas au courant.

21 Q. Il a témoigné pour dire que les maisons ont été systématiquement

22 incendiées, que le bétail a été abattu. Est-ce que cette route faisait

23 partie de votre zone de responsabilité, pour ce qui est de la circulation

24 routière ?

25 R. Je ne sais pas de quel village il a parlé, Lord Ashdown. Est-ce que

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1 vous pouvez me donner les noms des villages qui se trouvent sur cette

2 route ? Peut-être pourrais-je vous dire si cela était placé sous le

3 contrôle du SUP de Pristina ou pas.

4 Q. Mais les villages du secteur de Klina sont placés sous votre

5 juridiction, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, c'est notre zone de responsabilité, pas sous notre contrôle. Pour

7 certains d'entre eux. Je ne sais pas desquelles vous êtes en train de me

8 parler.

9 Q. Est-ce que, parmi les documents que vous avez apportés, si nous sommes

10 à même d'en prendre lecture, il y a des notes au sujet de maisons

11 incendiées, comme l'a indiqué Lord Ashdown, dans le courant de ces derniers

12 jours du mois de septembre 1998 ?

13 R. Je ne peux pas vous dire par cœur si nous allons retrouver cela ou pas.

14 Ce que je peux essayer, c'est d'essayer de voir s'il y en a pour la période

15 concernée.

16 Q. Peut-être pourrais-je, à nouveau, vous demander, si vous avez le temps

17 de le faire, de le faire d'ici demain. Je ne veux pas que les Juges de la

18 Chambre perdent leur temps à cela.

19 J'aimerais que nous passions, maintenant, à la présence de paramilitaires

20 intervenant dans votre secteur. Avez-vous entendu parler d'un dénommé

21 Srecko Popovic ?

22 R. Non. Ce nom ne me dit rien.

23 Q. Zvonimir Cvetkovic, vous le connaissez ?

24 R. Je connais un homme répondant au nom de Zvonimir Cvetkovic, il est de

25 Pec, parce que c'est le frère d'un de mes employés.

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1 Q. Est-ce que cet homme a trouvé la mort en 1999, ce Zvonimir Cvetkovic ?

2 R. Non, non, je ne pense pas qu'il est mort en 1999.

3 Q. Est-ce que vous voudrez bien regarder ceci, le livre intitulé : "Sous

4 les ordres" - "Under Orders" - est la pièce 145.

5 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez montrer cette page

6 aussi au témoin, puis, placer sur le rétroprojecteur cette autre page,

7 montrez la première page que je vous ai indiquée au témoin, s'il vous

8 plaît.

9 Q. On voit un monument, vous vous en souvenez ? C'est un monument érigé à

10 la mémoire de Cvetkovic, qui est décrit comme

11 étant : "Le dernier salut donné à cet homme par les collègues officiers du

12 OPG et des Unités PJP du service de Police de Pec."

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas ce que je vois.

14 M. NICE : [interprétation] Excusez-moi.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je vois la référence.

16 M. NICE : [interprétation]

17 Q. Vous vous souvenez que ce monument a été érigé à la mémoire de

18 Cvetkovic ? Vous étiez le numéro deux de la police; il y avait plusieurs à

19 votre niveau, mais quand même vous étiez un des adjoints. Vous ne vous

20 souvenez pas de cela ?

21 R. Je n'étais pas le numéro deux, à l'époque, au SUP de Pec et je dirais

22 aussi que je ne comprends pas bien ce que signifie ce document --

23 Q. Prenez la page suivante, s'il vous plaît.

24 R. Parce que --

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'on a une photo du monument ?

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1 M. NICE : [interprétation] Oui.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne la vois pas.

3 M. NICE : [interprétation]

4 Q. Monsieur l'Huissier, prenez la page suivante, oui.

5 R. Mais ici, il s'agit de deux personnes tout à fait différentes.

6 Q. Oui, excusez-moi. Ici, il s'agit de Budimir -- enfin, oui, je ne vois

7 pas. Reprenons la page précédente. Qui est cet homme-ci ?

8 R. C'est Zvonimir Cvetkovic que je connais.

9 Q. Qu'est-ce qu'il faisait ?

10 R. Il a travaillé dans une entreprise qu'on appelait Petrans, une

11 entreprise de transport automobile.

12 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, montrez-nous la page de

13 gauche. Est-ce qu'on peut voir la légende en-dessous de la photo ?

14 Q. Je la lis : cette photo montre un homme portant le nom de

15 Zvonimir Cvetkovic en compagnie d'un groupe d'hommes non identifiés à

16 l'entreprise de transport de Pec, Petrans où il travaillait. On le voit en

17 uniforme avec des forces de sécurité serbe, le 14 mai, à Cuska, lorsque 41

18 Albanais de souche ont été exécutés. Est-ce qu'il a fait objet d'une

19 enquête pour ces faits ?

20 R. Ces gens qu'on voit sur la photo ne sont pas des membres des forces de

21 sécurité; aucun de ces hommes ne fait partie de la police ou de l'armée.

22 Ici, vous voyez Zvonimir Cvetkovic, c'est celui qui se trouve près du

23 camion à l'extrême droite de la photo; pour ce qui est des autres hommes,

24 je ne les connais pas, mais je peux vous dire, à coup sûr, que ce n'étaient

25 pas des membres de la police ou du SUP de Pec parce que je connaissais tous

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1 les hommes en personne.

2 Q. Ma question --

3 R. Aucune de ces personnes ne représentaient ou ne faisaient partie des

4 forces de sécurité. Il est possible que c'étaient des collègues, à lui, de

5 l'entreprise où il travaillait.

6 Q. Cette pièce, à la disposition des Juges, je ne veux pas l'étudier de

7 façon détaillée, mais elle laisse entendre que s'agissant de Pec, il y a

8 plusieurs photographies de personnes identifiées comme étant des auteurs de

9 méfaits graves. En voici un que vous connaissez et vous nous avez montré

10 des constats d'enquête, vous nous avez dit que vous aviez le devoir de

11 mener des enquêtes d'où que vienne l'information. Est-ce que cet homme a

12 fait l'objet d'enquêtes pour les infractions qu'on lui reproche ici ?

13 Répondez par oui ou par non.

14 R. Mais je ne sais pas qui fourni cette information, quelle en est la

15 source, je ne le sais pas. Je n'avais pas ces informations à ma

16 disposition.

17 M. NICE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, merci de me rendre le

18 livre.

19 Q. J'avance. De cette façon, j'espère que je n'aurai que quelques sujets à

20 aborder, demain matin. Revenons, si vous le voulez bien, à la question de

21 la prison de Dubrava, je préfère avoir vos réponses aujourd'hui que demain.

22 J'espère que nous pourrons rapidement aborder la question des

23 enregistrements vidéo.

24 Vous avez effectué des visites. Aujourd'hui, vous nous avez dit qu'elles

25 ont eu lieu le 19, le 25; puis, vous avez dit, après la visite sur les

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1 lieux, du 21. Prenons-les dans l'ordre.

2 Lors de votre première visite, celle du 19, est-ce que, vous même vous,

3 avez pris des notes ?

4 R. Oui, parce que j'ai un carnet de travail dans lequel je prends des

5 notes.

6 Q. Nous pourrions le voir ?

7 R. Non, mes carnets sont assez volumineux, je n'ai pas pu les amener avec

8 moi.

9 Q. Est-ce que vous avez accompagné les personnes qui filmaient ?

10 R. Non. Je suis arrivé avant sur les lieux, le 19, parce que je n'étais

11 pas loin. Dès que nous avons reçu des informations, dès que les

12 bombardements ont cessé, nous nous sommes rendus sur place. J'étais

13 accompagné de plusieurs personnes et lorsque je me suis approché des lieux,

14 une camionnette dans laquelle se trouvaient des blessés allait vers Istok.

15 Q. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire si tant est que vous pouvez nous

16 dire quelque chose s'agissant de l'enregistrement du

17 19 mai ?

18 R. Je peux vous dire ceci : je peux vous dire qui filmait, a été filmé par

19 des membres de l'équipe scientifique, de la police scientifique du SUP de

20 Pec, lorsque ces hommes se sont rendus sur les lieux pour mener l'enquête

21 et ce jour-là, l'enquête est menée, le

22 19 mai, par le Juge d'instruction du tribunal régional d'Istok; était

23 présent, également, le président du tribunal de Pec. C'est tout ce que je

24 peux vous dire, c'est un document officiel du SUP de Pec.

25 Q. Ce jour-là, combien de cadavres a-t-on trouvé dans les décombres ?

Page 39254

1 R. Trois.

2 Q. Je ne contesterai pas ce nombre. Prenons la date qui suit : le 21, à

3 quelle heure êtes-vous arrivé ?

4 R. Je n'ai pas dit que j'étais allé à Dubrava, le 21. J'ai vu l'équipe

5 chargée de l'enquête sur les lieux et j'ai vu l'équipe au MUP d'Istok,

6 après le bombardement de Dubrava.

7 Q. J'ai mal compris votre réponse. Est-ce que vous pouvez nous dire quoi

8 que ce soit à propos d'une séquence assez courte, dans l'enregistrement

9 vidéo, s'agissant des événements du 21 mai ? Est-ce que vous êtes en mesure

10 de nous dire quoi que ce soit ?

11 R. Je ne sais pas combien de temps dure cette séquence puisqu'on l'a

12 montrée en accéléré, mais si je me souviens bien, on voit les destructions,

13 on voit les journalistes qui y vont et d'autres détails, mais je ne me

14 souviens pas de tous ces détails.

15 Q. Mais on ne montre pas d'autres cadavres dans cette séquence-là, n'est-

16 ce pas ? On voit simplement les dégâts provoqués des bâtiments ?

17 R. Mais on pourrait, sans doute, voir les bombardements; si on n'avait pas

18 vu les bombardements, l'enquête aurait pu se terminer, mais

19 malheureusement, les avions commençaient à survoler l'endroit et la prison

20 a été, une fois de plus, bombardée. C'est ce qu'a noté le Juge

21 d'instruction; l'équipe est partie le plus vite possible sans avoir terminé

22 son travail. Si elle avait pu terminer son travail, elle aurait filmé les

23 cadavres aussi.

24 Q. Mais d'après vous, quels sont les documents qui nous montrent le

25 dernier bombardement en date par l'OTAN, bombardement de la prison de

Page 39255

1 Dubrava ? Quels seraient les éléments qui nous montrent ces derniers

2 instants ?

3 R. On ne voit pas le bombardement à quelque moment que ce soit dans les

4 enregistrements vidéo. Ces images ont été filmées après, chaque fois après

5 chaque bombardement.

6 Q. Essayez de nous aider : quand s'est passé le dernier bombardement de

7 Dubrava par l'OTAN ?

8 R. Mais j'essaie de vous aider en vous disant ce que je sais. Je ne

9 pourrais même pas vous donner une date approximative du dernier

10 bombardement par l'OTAN, à Dubrava. Je suis sûr que vous le trouverez dans

11 les rapports d'information qui ont été établis.

12 Q. Vous voyez, l'OTAN reconnaît dans des communiqués de presse mais aussi

13 dans une lettre à la disposition de quiconque voudra la lire, elle

14 reconnaît qu'il y a eu des bombardements les 19 et 21 mai. Pourriez-vous

15 nous signaler quel est le document qui indiquerait qu'il y a eu, peut-être,

16 des bombardements après. Peut-être y en a-t-il eu dans la nuit du 21 mai,

17 mais y en a-t-il eu après ? Avez-vous des documents à cet effet ?

18 R. Il y a le procès verbal du Juge d'instruction. Il y a les notes du Juge

19 et les notes du personnel agréé. Il y aussi mes carnets notes, je sûr qu'on

20 peut le trouver.

21 Q. Donnez-nous une date. Qu'est-ce que ces documents indiquent comme

22 date ?

23 R. Vous parlez de quels documents ?

24 Q. Vous venez d'énumérer toute une série de documents. Est-ce que vous

25 venez ici pour parler ?

Page 39256

1 R. Cela montre --

2 Q. Quelle est la dernière date, la date à laquelle s'est effectué, d'après

3 ces documents, le dernier bombardement.

4 R. Ces documents indiquent les dates mentionnées dans le rapport

5 d'information établi à partir de ces rapports.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, vous voulez

7 intervenir.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais, peut-être, vous aider. Vous avez,

9 notamment, l'intercalaire 46, point 3, note officielle de Vladan Bojic,

10 Juge d'instruction qui dit, dans son dernier paragraphe, ceci : "Le

11 bombardement de l'OTAN s'est poursuivi le même jour, a commencé à 17 heures

12 jusqu'à 23 heures -- non, de 17 heures à 17 heures 05 et puis de 23 heures

13 à 23 heures 10. Le lendemain, le 22, à partir de 6 heures 10 du matin."

14 C'est ce que dit ce document, document que je vous fournis à l'intercalaire

15 46.3.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Milosevic. Avançons.

17 M. NICE : [interprétation] Il faut que je trouve maintenant cet

18 intercalaire 46.3. Vous voyez que c'est difficile de travailler avec des

19 documents qui ne sont pas traduits. En voici la preuve --

20 M. KAY : [interprétation] Celui-ci est traduit.

21 M. NICE : [interprétation] Ah bon ? Merci.

22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le dernier classeur. Je me

23 souviens avoir posé une question à ce propos.

24 M. NICE : [interprétation]

25 Q. Ce passage porte la date du 22 mai --

Page 39257

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne l'ai pas.

2 M. NICE : [interprétation] Voici l'aspect qu'a cette page.

3 Q. Je vous la montre. Si vous reprenez ce document qu'a lu en partie

4 l'accusé, il provient de M. Bojic, le Juge d'instruction. Tout ce qu'il

5 fait, c'est laisser entendre que des bombes ont été larguées à 23 heures 15

6 dans la nuit du 21 au 22 et on dit, dans la matinée du 22, à 6 heures 10.

7 Mis à part ce document, est-ce que vous avez d'autres éléments

8 montrant qu'il y a eu des bombardements après le 21 mai ?

9 R. Je n'ai pas et nous n'avons pas pour habitude de demander aux Juges

10 d'instruction de nous fournir les documents qu'ils avaient obtenus, de ce

11 qu'ils avaient écrit. C'est une première chose.

12 Puis dans nos carnets de notes, nous avons consigné des heures

13 précises et aussi à quelle heure chaque personne a vu ces bombardements. Ce

14 qui veut dire que la plupart des gens a consigné ces dates et heures. Je

15 n'ai pas ces documents ici sur moi parce que je ne me suis pas dit que

16 c'était nécessaire. J'ai estimé qu'il serait suffisant d'avoir les rapports

17 des Juges d'instruction ou du Juge d'instruction. On n'a pas fait ceci pour

18 le Tribunal. On a établi ces documents pour nos propres besoins. C'est pour

19 cela qu'il n'y a peut-être pas les documents que vous, vous vous attendez

20 de trouver. Nous avons établi ceux-ci pour notre service. Cela nous

21 suffisait, nous avions tout ce que nous voulions savoir.

22 Q. Si le rapport du Juge d'instruction est exact, celui qui a préparé un

23 rapport à propos des bombardements à Dubrava, il aurait indiqué qu'il y

24 avait eu des bombardements, le 22 mai ?

25 R. Oui.

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1 Q. Prenez l'intercalaire 8, s'il vous plaît. Qui a préparé ce rapport qui

2 est le récapitulatif concernant la prison de Dubrava ?

3 R. Ce document a été établi par ce même groupe de travail. Celui qui a

4 travaillé à la totalité des documents.

5 Q. Est-ce que vous pourriez me donner le nom d'une personne qui assume la

6 responsabilité de la teneur de ce document, vous, mis à part, bien

7 entendu ?

8 R. Je dirais que cette personne n'est pas responsable et n'assume pas une

9 responsabilité. C'est lui qui a compilé ces documents. Il est dit que :

10 "Les forces aériennes de l'OTAN, vers 6 heures ont déclenché une attaque en

11 larguant plusieurs projectiles, le 22 mai, à 6 heures 10. C'est la page 2,

12 troisième paragraphe à partir du haut.

13 Q. Oui, ceci répercute ce que disait M. le Juge. On voit quels sont les

14 bâtiments qui ont été touchés, le complexe, la chauderie, le motel, le

15 bâtiment administratif, les appareils automobiles et pratiquement toute

16 l'infrastructure. On voit, dans le paragraphe suivant, qu'il n'y a pas eu

17 de bombardement le 23, il y a simplement eu survol d'avions de l'OTAN.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je trouve là, en anglais que c'est un

19 intitulé bombardement.

20 M. NICE : [interprétation] Tout à fait, parce que si vous voyez le corps

21 même du document, on voit clairement qu'on n'affirme pas qu'il y a eu

22 d'autres bombardements après celui de 6 heures 10. Le 23, il y a eu survol.

23 L'intitulé, comme le disait le Juge Bonomy, laisse entendre qu'il y a eu

24 des bombardements ou un bombardement, le 24, mais vous n'avez aucune preuve

25 qu'il y aurait eu des bombardements après celui de 6 heures 10, le 22 mai ?

Page 39259

1 R. C'est exact.

2 Q. C'est intéressant. Pourriez-vous nous dire pourquoi on laisse entendre

3 dans le titre qu'il y a eu des bombardements le 24 ?

4 R. Je n'ai pas d'explication à vous donner. Peut-être qu'on a mal

5 dactylographié la date.

6 Q. Est-ce que vous êtes allé là ce jour-là lorsqu'il y a eu

7 enregistrement, le deuxième enregistrement, le 22 ? Non, vous êtes allé le

8 25, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 Q. A ce moment-là, les corps étaient déjà alignés. Ou est-ce qu'ils

11 étaient alignés ?

12 R. Je ne sais pas. Je n'étais pas sur place.

13 Q. Vous n'êtes pas, du tout, allé à la prison le 25 ?

14 R. Non, non. Je ne suis pas allé à la prison le 25. J'ai été au cimetière

15 le 25, au cimetière. On avait déjà préparé les corps pour qu'ils soient

16 enterrés. C'est là que je suis allé. Je vous ai dit que je me souviens très

17 bien de ces corps parce qu'il y avait beaucoup de cadavres. Il faisait très

18 chaud et les gens vaquaient à leurs occupations. Je suis resté une demi-

19 heure et je suis parti.

20 En d'autres termes, le 25, j'étais au cimetière, mais pendant une

21 partie du temps où tout ce travail a été fait.

22 Q. Ce que nous savons c'est que certains des corps avaient été étiquetés ?

23 R. Oui.

24 Q. On trouvait sur ces étiquettes ou sur ces badges le nom de la

25 personne ?

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1 R. Je sais qu'il y avait en fait des numéros. Les corps avaient été

2 numérotés, c'est ce que j'ai vu ce jour-là. J'ai vu que les corps avaient

3 été numérotés et qu'on avait creusé l'emplacement des tombes. Je suis resté

4 une demi-heure peut-être. Je ne suis pas resté pour la totalité de ce qui

5 s'est passé.

6 Q. L'accusé a attiré notre attention sur le fait que certains des corps

7 portaient outre un numéro, un nom, n'est-ce pas ? Ce fut le cas d'un des

8 corps, notamment ?

9 R. Oui. Oui, c'est ce que nous avons vu.

10 Q. Nous allons en reparler demain, mais apparemment sur certains des

11 corps, on indiquait la date supposée de la mort; vous vous en souvenez ?

12 R. Je n'ai pas fait attention à ce genre de détails.

13 Q. En effet, même si on voit ce qui est indiqué dans l'intercalaire 8 et

14 si on prend cela au mieux des possibilités, rien ne justifie qu'on écrive

15 sur un corps que cette personne a trouvé la mort le 23.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous voulez dire tuer par

17 bombardement ?

18 M. NICE : [interprétation] Ou autrement ? Oui, en tout cas, à cause d'un

19 bombardement.

20 Q. Rien n'explique pourquoi on indiquerait sur un corps que ce corps a

21 trouvé la mort à cause d'un bombardement le 23 puisque votre rapport le

22 montre. Apparemment, le dernier bombardement ce serait passé le 22 à 6

23 heures 10 du matin.

24 R. Je ne sais pas qui a apporté ces inscriptions. Ce que j'ai vu lorsqu'on

25 a fait un arrêt sur l'image tout à l'heure, c'est que cela avait été écrit

Page 39261

1 par quelqu'un d'autre que des membres de la police.

2 Q. Les prisonniers écrivent leur nom, le nom des personnes qu'ils

3 connaissent, n'est-ce pas ? C'est la seule façon d'identifier ces corps ?

4 R. Je ne sais pas exactement, mais en tout cas cela a été écrit par un

5 Albanais. Si nous regardons le film, on peut le voir et je vous expliquerai

6 pourquoi c'est le cas.

7 Q. Vous avez laissé entendre, ou l'accusé a laissé entendre par votre

8 intermédiaire que les victimes de Dubrava qui ont trouvé la mort par balles

9 sont peut-être mortes en essayant de fuir. Rien ne tend à prouver cela.

10 Vous n'avez aucun élément à l'appui, n'est-ce pas ?

11 R. Ce n'est pas comme cela que j'ai décrit les événements. Je n'ai pas

12 prétendu cela. J'ai simplement prétendu que cette éventualité existait.

13 Q. Etant donné que vous dites que c'était une éventualité, pourriez-vous

14 confirmer maintenant, s'il vous plaît, que vous n'avez pas un seul élément

15 de preuve à l'appui d'une telle éventualité ?

16 R. Je n'ai jamais prétendu que les choses s'étaient passées ainsi pour que

17 je sois obligé de vous fournir des preuves à l'appui.

18 Q. Simplement pour conclure, vous-même, ou tout autre policier avez-vous

19 soupçonné que des personnes avaient été tuées en tentant de s'échapper d'un

20 complexe ou d'un quartier pénitentiaire qui avait été bombardé par l'OTAN.

21 Il vous aurait fallu mener une enquête sur le policier qui avait tiré sur

22 la gâchette ou sur le gardien à la prison qui avait tiré sur la gâchette,

23 n'est-ce pas ? Vous l'avez dit en d'autres termes, n'est-ce pas ?

24 R. Non, nous n'aurions pas eu cette obligation, car cela relève de la

25 compétence du ministère de la Justice. C'est à eux que ce genre de choses

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1 incombe.

2 Q. Pourriez-vous m'aider un petit peu, s'il vous plaît. Le ministère de la

3 Justice a-t-il d'une manière ou d'une autre suggéré qu'une enquête serait

4 menée sur les gardiens de la prison, ou les policiers qui avaient tiré sur

5 les prisonniers qui tentaient de s'échapper ?

6 R. Pas à ma connaissance.

7 Q. Nous avons, dans cette affaire, entendu beaucoup d'éléments sur les

8 événements qui se sont déroulés à Dubrava, avez-vous connaissance de tous

9 ces témoignages ?

10 R. Non. Ce que je sais à propos de l'événement en question figure ici.

11 Q. Autrement dit, vous ne savez rien vous-même qui permettrait de

12 contrecarrer les suggestions en vertu de quoi des personnes, des

13 prisonniers après ces premiers incidents et ces premiers bombardements du

14 19 et du 21, que ces prisonniers ont été mis en rangs sur le terrain de

15 sport afin d'être exécutés. Vous n'avez aucun élément pour réfuter cela,

16 n'est-ce pas ?

17 R. J'ai lu un article dans la presse à ce sujet. Pour ce qui est des

18 documents officiels, je n'en ai pas à ma disposition. Je n'ai aucune autre

19 connaissance de cela.

20 Q. Vous n'avez aucune déclaration de témoins, de personnes ou de choses

21 que vous allez nous fournir pour nous dire que toutes ces personnes sont

22 décédées suite aux bombardements ?

23 R. Non. J'ai dû mal comprendre votre question. Il y a quelques instants,

24 j'ai cru comprendre que vous me demandiez si je savais que ces personnes

25 avaient été mises en rangs et exécutées.

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1 Q. La question que je vous pose est celle-ci : vous n'avez aucun élément

2 de preuve pour indiquer que ceci ne s'est pas passé. Vous n'avez aucun

3 élément de preuve dans un sens ou dans un autre sur la manière dont ces

4 personnes sont mortes ?

5 R. Les éléments dont nous disposons vous ont été remis.

6 Q. Je souhaite vous poser cette question. Lorsque vous étiez un membre du

7 SUP en exil votre avant-dernière réponse traduit cela. Vous étiez au

8 courant des allégations faites en public, à savoir que bon nombre de ces

9 hommes étaient morts suite à des actes de violence qui aux mains de

10 policiers ou de gardes de la prison ou d'autres hommes. Est-ce qu'une

11 enquête a été menée par votre SUP concernant cette allégation ? Il ne

12 s'agit pas de tirer sur des personnes pour les empêcher d'échapper. Le

13 ministère de la Justice ne devait-il mener une enquête sur cela ? Il s'agit

14 de fusillade qui équivaut à un crime tout simplement, et aucune enquête a

15 été -- une enquête a-t-elle été menée eu égard à cette allégation ?

16 R. Ce sont des récits qui ne faisaient pas partie du domaine public. J'ai

17 appris ceci en lisant un journal albanais. J'ai obtenu ce journal par un

18 biais professionnel. J'ai fait traduite cet article. C'est comme cela que

19 je savais que cette histoire avait fait ou circulait. Nous n'avons pris

20 aucune mesure. Nous n'avons pas mené d'enquête, car cela ne relève pas de

21 notre compétence. Si les armes à feu avaient été utilisées par les gardes

22 chargées d'assurer la sécurité ou de ce quartier pénitentiaire à ce moment-

23 là ce serait les représentants du ministère de la Justice qui ont pour rôle

24 de mener des enquêtes et de lancer une procédure. Ce n'est pas au ministère

25 de l'Intérieur que cela incombe. Cela ne relevait pas du SUP de Pec.

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1 Q. Les allégations qui ont été faites devant cette Chambre, éléments de

2 preuve à l'appui sur ce qui est advenu de ces personnes puisqu'il s'agit de

3 survivants qui ont parlé -- l'allégation qui correspond à ces meurtres aux

4 mains -- des meurtres dans la cour de la prison qui correspondent à peu

5 près à la période évoquée par les Juges d'instruction correspondent aux

6 documents auxquels vous avez apportés votre signature. A l'intercalaire 8,

7 vous dites, "6 heures 30 du matin." Cela correspond à peu près. S'agit-il

8 de votre allégation à propos du bombardement ? Est-ce que votre allégation

9 lorsque vous -- est-ce que c'est ce que vous alléguez à l'intercalaire

10 numéro 8 à propos du bombardement à 6 heures 30 ? Est-ce qu'il s'agit ici

11 de cacher quelque chose ?

12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 6 heures 10.

13 M. NICE : [interprétation] 6 heures 10. Merci, Monsieur le Juge.

14 Q. Est-ce qu'il s'agit ici de passer cela sous silence de le dissimuler ?

15 R. Non, pas du tout. A l'époque, nous ne savions même pas que ces

16 allégations avaient faites. Le Juge d'instruction a rédigé une note

17 officielle le 22 mai 1999. Ce récit à propos de l'exécution et a été publié

18 en Serbie -- a été rendu public. Le public n'a pas été mis au courant mais

19 moi-même et un certain nombre d'hommes en Serbie, peut-être en 2001 ou

20 2002, nous avons obtenu une copie de ce journal où ceci avait été consigné.

21 Le 22 mai 1999, lorsque les notes officielles ont été rédigées, comment

22 pouvions-nous avoir connaissance de cela ? Ces récits sur les exécutions

23 présumées, ces récits ont commencé à voir le jour par la suite. Il n'y a

24 aucune relation de cause à effet entre les deux.

25 Q. Les corps que vous avez vus le premier jour sur ce film, le premier

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1 jour, ils ont été sortis des décombres, ensuite, on voit trois corps qui

2 visiblement avaient été tués suite au bombardement, n'est-ce pas ? Dans

3 quel état étaient-ils ? D'après, l'état de ces corps, on pouvait constater

4 que c'était le cas.

5 R. Nous n'essayons pas d'établir des liens entre tout ceci. Ceci n'est pas

6 très clair. Quelqu'un aurait pu les tuer avant, et ensuite, les bombes

7 auraient pu tomber dessus. D'un point de vue policier, ceci n'est pas très

8 clair non plus. C'est logique de penser qu'ils ont été tués suite au

9 bombardement.

10 Q. Les corps que vous avez vus aligner dans le cimetière, quelle marque

11 portaient ces corps, donc les corps qui portaient des marques de bombe ou

12 que simplement de personnes qui étaient mortes si nous regardons le film.

13 Nous pouvons le revoir demain si c'est nécessaire.

14 Q. Vous avez tenté d'étouffer l'affaire ?

15 R. Non, nous n'avons pas tenté -- nous avons pas essayé d'établir les

16 causes de leur mort. Je ne peux pas en parler, quoi qu'il en soit, l'odeur

17 était très désagréable, et l'ensemble du site avait une odeur nauséabonde.

18 Je ne suis pas resté sur les lieux. Je ne suis pas resté très longtemps. Ce

19 travail-là est effectué par des gens dont c'est la profession.

20 Q. Une autre question à propos de l'intercalaire numéro 8. Vous avez sous

21 les yeux. Je vais vous lire la phrase en question. Vous pouvez le lire.

22 Vous avez signé --

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Nice.

24 M. NICE : [interprétation] Page 3, dans la version anglaise.

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous nous citer le nom du

2 témoin que vous avez cité à la barre pour parler de question médicolégale ?

3 M. NICE : [interprétation] En fait, il s'agit des blessures par balle de

4 quelques 30 victimes.

5 Q. Dernière page, Monsieur Paponjak, dans votre texte et dans le texte

6 anglais, page 3, vous avez signé comme suit : "Lors de cette attaque, le

7 périmètre de la prison a été entièrement démoli à plusieurs endroits, ce

8 qui a permis aux détenus de s'enfuir. Ceci constituait sans doute l'un des

9 objectifs de l'OTAN. Compte tenu du fait qu'il y avait des terroristes fort

10 connus parmi les accusés et les personnes condamnées qui avaient perpétré

11 un certain nombre de meurtres, y compris ceux de policiers, de civils et de

12 soldats."

13 Vous évoquez ceci comme une explication tout à fait plausible. Vous dites

14 que l'OTAN a démoli les murs de la prison pour permettre aux terroristes de

15 s'échapper.

16 Pourriez-vous nous dire sur quoi vous fondez votre hypothèse ?

17 R. Cette hypothèse se fonde sur les faits. Tout d'abord, il était peu

18 logique que l'OTAN bombarde un quartier pénitentiaire où les gens sont dans

19 défense et où les personnes sont détenues, cela est tout à fait illogique.

20 Deuxièmement, nous ne pourrions pas envisager la possibilité que l'OTAN ait

21 voulu tuer les détenus. La seule possibilité qui nous ait venu à l'esprit

22 c'est de croire qu'il voulait permettre à ces personnes de s'échapper.

23 Dernièrement, nous pensons que les informations remises à l'OTAN étaient

24 différentes. On aurait dit à l'OTAN qu'il ne s'agissait pas de détenus mais

25 plutôt de membres de la police de l'armée qui se trouvaient dans cette

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1 prison. Ceci a été fait à dessin, ceci n'a pas été fait pour ce procès. Il

2 s'agit plutôt de documents qui relèvent de la police. Cela n'était pas

3 notre intention. J'entends par là que nous ne savions jamais que ces

4 documents seraient utilisés par la suite. Peut-être que nous aurions évité

5 d'utiliser cette phraséologie en sachant que ceci serait un jour rendu

6 public. Ceci s'applique à bon nombre d'autres éléments de ces documents.

7 Q. Il s'agit là d'un prétexte pour justifier la connaissance qu vous aviez

8 eue, vous et tous vos collègues, sur ce qui s'est passé à Dubrava, vous

9 saviez parfaitement bien qu'il y avait eu une violence excessive et d'une

10 manière ou d'une autre vous avez essayé de faire porter la culpabilité de

11 ces décès de sur bombardement et simplement ce paragraphe ridicule ici n'a

12 rien pour l'étayer.

13 R. Non, cela n'est pas exact. Je ne comprends pas pourquoi vous présentez

14 les choses ainsi. Nous n'avons pas interprété les événements d'une manière

15 ou d'une autre. Pourquoi est-ce que nous interpréterions les événements de

16 cette façon ?

17 Q. Bien. Vous vous rendez certainement compte que les éléments de preuve

18 présentés devant cette Chambre parlent de massacres systématiques le 22 et,

19 ensuite, de moyens de preuve faisant état le 23. Tout ceci évidemment ne

20 devait pas être apporté à l'attention du public, c'est la raison pour

21 laquelle vous avez rédigé ce document pour essayer de d'étouffer, ou de

22 cacher au public tout ce qui s'était passé.

23 R. Nous tout simplement nous ne savions pas ce qui s'était passé. Mais

24 évidemment je pourrais interpréter ceci en disant qu'il s'agissait de

25 tentatives permettant de justifier les meurtres aux mains de l'OTAN. Ceci a

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1 été fait de la façon suivante. Vous pouvez évidemment retourner la

2 situation et nous accuser d'avoir tué ces personnes.

3 Q. Intercalaire numéro 9, s'il vous plaît.

4 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais faire référence à

5 ces pièces, mais je ne demande pas pour autant qu'ils soient versés au

6 dossier, j'essaie simplement de prendre d'avantage sur la teneur de ce

7 document.

8 Q. L'intercalaire numéro 9, nous avons un rapport d'information qui a été

9 encore une fois signé par vous.

10 R. Oui. Je souhaite vous poser une question s'il vous plaît. Si nous

11 allons utiliser cet élément-là en particulier pourrions-nous utiliser tous

12 ces éléments d'information de façon très sélective ou passer à huis clos

13 partiel car il s'agit ici d'éléments opérationnels c'est ainsi que nous

14 l'appelons dans notre jargon.

15 Q. Intercalaire numéro 9, certains passages portent sur ce que vous

16 appelez des éléments opérationnels les quels ?

17 R. Le passage qui parle de la connaissance des terroristes, leurs noms

18 sont cités, le nom de leur organisation est cité, tout ce qui indique ou

19 fait référence à des noms et qui ne fait pas l'objet d'une enquête

20 criminelle; néanmoins, nous souhaitons que les éléments que nous détenons

21 restent confidentiels. Je pense que j'ai amplement expliqué cela et nous

22 n'aimerions pas que ces noms soient divulgués. Hormis, le cas de ceux pour

23 lequel un casier judiciaire a été ouvert.

24 Q. Regardons maintenant s'il vous plaît les deux premiers paragraphes de

25 ce document en question. Ce n'est pas un document traduit.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je crois qu'il est

2 approprié pour nous de nous poser la question qu'il est normal -- que nous

3 nous posions la question.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons adopter la procédure

6 habituelle. Nous allons -- vous allez nous lire les paragraphes 1 et 2 et

7 nous verrons si des noms sont cités.

8 M. NICE : [interprétation]

9 Q. Ce qui m'intéresse pour l'heure c'est ceci. Regardez le premier

10 paragraphe à titre d'exemple, peut-être qu'une partie de ceci pourra être

11 traduit d'ici demain. Si vous regardez bien on constate qu'on parle ici de

12 la grande Albanie, peut-être que vous voudriez bien nous lire le premier

13 paragraphe ?

14 R. Ce paragraphe parle du séparatisme albanais et de l'extrémisme albanais

15 de la période précédente.

16 Q. Veuillez le lire s'il vous plaît.

17 R. "L'idée de créer une grande Albanie et l'idée de regrouper tous les

18 territoires albanais et représenter un mouvement et le combat des

19 terroristes albanais qui a vu le jour en 1978. Ensuite, un mouvement

20 national, connu sous le nom de la Ligue de Prizren, a été créé, ceci aux

21 fins d'organiser -- ceci a été organisé et mis sur pied lors du concret où

22 étaient présents tous les dirigeants albanais."

23 Q. Je vous demande de bien vouloir faire une pause ici. Qui a écrit ce

24 passage ?

25 R. Ceci a été écrit par le groupe de travail sans doute.

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1 Q. Monsieur Paponjak, de dire que quelque chose a été écrit par un groupe

2 est une façon très -- est un moyen évidemment pour éviter la question.

3 Dites-nous, s'il vous plaît, quel individu a écrit ce premier paragraphe du

4 rapport de police. Un ou d'un raccourci sur X, si vous voulez ?

5 R. Encore une fois, je peux vous citer des noms de toutes les personnes

6 qui ont travaillées à ce rapport; néanmoins, je demanderais de passer à

7 huis clos partiel dans ce cas également car, dans notre pays, nous n'avons

8 pas l'habitude de citer les membres d'équipe qui ont travaillé à certains

9 projets et de le rendre public.

10 Q. Quelle est la Règle, le protocole ou la pratique qui garantie

11 l'anonymat des personnes de cette façon ?

12 R. Je n'ai jamais cité de Règlement, c'est simplement quelque chose qui

13 n'est pas rendu public.

14 Q. Donc, autrement dit, si on vous écoute, le public ne sera jamais qui a

15 été l'auteur de tel document car au mieux tout ceci ne sera cité qu'à huis

16 clos partiel; c'est exact ? C'est ainsi que vous aimeriez que les choses se

17 passent ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. La personne qui a écrit ceci, il s'agit, en fait, d'un document en

20 réalité qui est un document public rendu public qui servira les intérêts

21 publics. Pourquoi cette personne n'aurait-elle pas l'obligation d'assumer

22 sa responsabilité pour avoir écrit cela ? Pourquoi pas ?

23 R. Non, je crois qu'il ne s'agit pas d'une question de responsabilité ici,

24 c'est ne raison de tout ce qui suit. Ce n'est pas ce paragraphe-ci. Ce

25 paragraphe a sans doute été que pied à partir d'un ouvrage, donc ce n'est

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1 pas ce passage-là qui est important c'est la suite du document qui est

2 important.

3 Q. Monsieur Paponjak, pourquoi ce passage figure-t-il dans un rapport de

4 police, un paragraphe qui a été copié d'un autre livre que fait ce

5 paragraphe dans un rapport policier ?

6 R. Cet élément d'information comme je vous l'ai dit à plusieurs reprises

7 n'a pas été préparé aux fins d'être présentés devant ce Tribunal il s'agit

8 là d'une analyse approfondie de la situation comme nous pouvons le

9 constater chaque problèmes a ses antécédents, mais peut-être qu'il s'agit

10 ici d'un document qui est trop complet, mais pour nous cela n'était pas

11 superflu, peut-être que pour vous cela n'est pas intéressant mais pour nous

12 cela correspondait à ce que nous faisions d'habitude.

13 Q. Lorsque vous dites nous pensions, à qui ce document était-il destiné ?

14 R. Moi-même et le groupe de travail qui a préparé ce document.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En quoi ce paragraphe vous aiderait-

16 il, Monsieur Paponjak ? Nous devrons ensuite faire la pause.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne peut pas m'aider beaucoup, mais cela

18 pourrait aider quelqu'un qui n'en avait pas connaissance et qui occuperait

19 mon poste; à ce moment-là, il pourrait se familiariser avec la situation et

20 ne serait pas obligé de lire tous les ouvrages sur la question pour essayer

21 de se familiariser avec le sujet. Ceci serait en guise d'introduction.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup. L'audience est levée

23 pour aujourd'hui nous reprendrons demain matin à 9 heures.

24 --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le mardi 10 mai 2005,

25 à 9 heures 00.