Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 29 juin 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, la Chambre s'est

7 penchée sur la meilleure des façons de traiter de la présentation des

8 éléments de preuve pour ce qui concerne l'année 1998 et, comme vous avez

9 dit que c'était important pour votre cause, la Chambre a pour mission en

10 application du 90(F) d'exercer un contrôle sur la présentation des éléments

11 de preuve pour éviter tout gaspillage de temps.

12 Il y a plusieurs possibilités qui s'offrent à nous. Etant donné que

13 la présentation des éléments de preuve en corrélation avec 1998 semble se

14 rapporter sur la question des conflits entre l'UCK et les forces de l'armée

15 de la Yougoslavie, il est une approche dont nous souhaiterions parler et, à

16 ce sujet, j'aimerais entendre les arguments présentés par M. Kay et M.

17 Nice, à savoir que le reste des éléments de preuve de cette sorte qui

18 constituent des éléments répétitifs soient versés au dossier avec, bien

19 entendu, le droit de l'Accusation de procéder à un contre-interrogatoire

20 sur ce point.

21 J'aimerais entendre d'abord ce que M. Kay a à dire à ce sujet.

22 M. KAY : [interprétation] Sur la base des éléments de preuve cumulatifs,

23 cumulatifs dans le sens où il y un témoignage antérieur présenté par la

24 Défense, cela ne me pose aucun problème et c'est quelque chose que

25 j'appuierais et je demanderais même au Tribunal d'adopter cette solution

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1 car, à ce moment-là, je pourrais recueillir davantage d'éléments du témoin

2 à décharge, des éléments qui portent davantage sur la période que recouvre

3 l'acte d'accusation. C'est une mesure que j'adopterais personnellement. Je

4 ne sais pas si c'est la position de l'accusé, mais telle est ma position

5 quoi qu'il en soit.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On me rappelle que eu égard à la

7 présentation des moyens à charge, nous avons reçu des éléments de preuve

8 semblables, je crois qu'il y avait des documents portant sur l'OSCE, peut-

9 être d'autres cas également.

10 M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait. Nous avons effectivement

11 préparé le terrain par l'intermédiaire du général Drewienkiewicz, les

12 documents relatifs à l'OSCE. Si on regarde son témoignage, il y a quelques

13 extraits qui étaient cumulatifs et que M. Nice n'a pas pris en compte.

14 Lorsque d'autres témoins sont venus témoigner par la suite, cette procédure

15 a été adoptée à nouveau. C'est parce que ceux-ci avaient déjà été évoqués,

16 les questions ont déjà été posées à la Chambre et nous pouvons passer à

17 d'autres questions. C'était une stratégie que l'Accusation avait tendance à

18 adopter aux fins d'utiliser au mieux le temps dont ils disposaient.

19 Ceci n'est pas une stratégie nouvelle eu égard au témoignage de ce

20 témoin. Au fur et à mesure que le procès se déroulait, nous avons parlé des

21 éléments en Croatie et en Bosnie, le même processus a été utilisé. M. le

22 Juge May a souvent rendu une décision à cet égard en disant : "Ces

23 documents ont déjà été admis, passons à la suite." M. Nice, disait cela

24 lui-même : "Ce sont des éléments dont vous avez déjà entendu parler, il

25 s'agit d'un instrument qui permet de vous présenter quelque chose qui vous

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1 a déjà été présenté."

2 M. Harland a fourni toutes les résolutions du conseil de Sécurité des

3 Nations Unies. Comme M. Nice a dit à l'époque, ceci avait très peu de

4 rapport avec la question soulevée, mais c'était un moyen commode.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il l'a fait sans traiter de chaque

6 élément en particulier.

7 M. KAY : [interprétation] Oui, tout à fait. En réalité, pour ce qui est des

8 pièces à conviction dans le système électronique, je crois qu'elles n'ont

9 pas toutes été saisies dans le système, car elles étaient très nombreuses.

10 C'était simplement un moyen commode d'aborder le problème sans que des

11 objections ne soient soulevées par la Défense. M. Milosevic ne s'est pas

12 opposé à cela, car cela était censé être tout à fait rationnel.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, cela porte effectivement

14 sur le temps utilisé ici dans le prétoire. Nous sommes actuellement à

15 l'intercalaire numéro 25 et il y a jusqu'à 250 intercalaires. Si nous

16 adoptons cette même méthode, nous allons y consacrer beaucoup de temps,

17 toute la journée, en tout cas pour ce qui est de ces éléments de preuve.

18 J'estime que cela n'est pas le moyen le plus approprié d'utiliser le temps

19 de la Chambre.

20 M. KAY : [interprétation] Ce qui me préoccupe, c'est que l'accusé puisse

21 présenter les éléments qui sont importants pour sa défense et portent sur

22 l'acte d'accusation. Ce témoin-ci peut évoquer certains éléments, peut

23 porter sur certains moyens avancés par l'Accusation. Je crois que j'ai

24 évoqué deux témoins la semaine dernière. Un autre témoin que j'ai eu

25 l'occasion de voir hier, John Crosland, le colonel Delic, ainsi que

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1 l'ensemble de sa brigade, était un témoin supplémentaire. Je crois que tout

2 ceci est très pertinent et ce témoin peut apporter des éléments très

3 pertinents. En ce qui me concerne, je ne m'y opposerai pas si l'accusé

4 devait présenter des dépositions cumulatives, nous ne serions pas en train

5 de nous écarter de procédures antérieures si l'objet était, bien

6 évidemment, de mettre l'accent sur les moyens de preuve avancés que

7 souhaite faire la Défense.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons déjà vu ces 25

9 intercalaires qui semblent déjà illustrer le contenu de cet élément de

10 preuve et les autres éléments jusqu'à l'intercalaire numéro 250 portent sur

11 la même chose.

12 M. KAY : [interprétation] Oui, je crois qu'ici il n'y a pas d'aveux sur les

13 agissements ou la conduite de l'accusé. Il s'agit de témoignages cumulatifs

14 comme l'a souvent dit la Chambre de première instance qui est tout à fait

15 au courant de ce genre de questions.

16 Il s'agit d'éléments de preuve qui sont le reflet de moyens présentés par

17 l'Accusation à bon nombre d'égards bien que l'Accusation n'est peut-être

18 pas disposée à reconnaître qu'il s'agit de documents qui viennent de la

19 Défense. Nous sommes à deux extrémités ici l'un de l'autre. Cela illustre

20 ou permet de clairement indiquer la manière dont sont présentés les moyens

21 de l'Accusation, en tout cas en présentant l'UCK par l'intermédiaire de

22 leurs propres témoins. Nous avons entendu le témoignage de John Crosland et

23 des aides et d'autres témoins en 1998.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Kay.

25 Monsieur Nice.

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1 M. NICE : [interprétation] Je crois qu'il ne s'agit pas de la même

2 déposition que M. Harland, mais ceci n'a pas d'importance en l'occurrence

3 ici. Si ces documents avaient été présentés par écrit, alors nous aurions

4 eu une déclaration de témoin qui aurait pu être utilisée à cette fin. A ce

5 moment-là, nous aurions pu présenter des pièces à ce témoin. Peut-être à ce

6 moment-là, nous aurions pu également procéder à l'identification de la

7 valeur apportée par ces pièces et nous les aurions versées au dossier. Ceci

8 aurait été une façon idéale de procéder.

9 Cette remarque ayant été faite, je ne m'oppose absolument pas en cette

10 occasion à ce que ces différents documents soient présentés les uns après

11 les autres, pour autant que nous en soyons avisés à l'avance. Nous avons

12 également été avertis de cela que c'est la raison pour laquelle ces pièces

13 ont été présentées. Peut-être que ceci a déjà été couvert par les

14 observations générales de l'accusé lorsqu'il a présenté ce témoin, mais la

15 Chambre veut s'assurer que tous les sujets ont été couverts par ces 250

16 intercalaires.

17 J'ai deux autres remarques à faire : peut-être que la manière détaillée

18 dont l'accusé procède à l'interrogatoire de ce témoin, peut-être qu'un

19 équivalent de la déclaration par écrit existe quelque part, ce qui permet

20 de voir si l'accusé se repose sur ces déclarations alors qu'il présente

21 tous ses moyens par l'intermédiaire de ces 250 intercalaires, de façon à

22 prouver qu'en présentant ces 250 intercalaires, nous puissions également

23 voir ce qu'ils contiennent.

24 Deuxièmement : si des documents sont admis en entier, en vrac, ceci

25 pourrait avoir une incidence sur le temps utilisé pour le contre-

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1 interrogatoire, j'espère que non.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez

5 entendu ce que propose la Chambre de première instance, eu égard au reste

6 de ce témoignage. Vous avez entendu les arguments présentés par Me Kay.

7 Vous avez entendu les arguments très nuancés de l'Accusation. La Chambre va

8 aborder la question de cette manière, à moins que vous ne puissiez nous

9 convaincre du contraire.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] [Hors micro]

11 Que se passe-t-il ? Il marche maintenant.

12 Monsieur Robinson, je me suis, une fois de plus, penché pour ma part

13 également sur la totalité de ce que vous avez en main comme documents, je

14 voudrais vous proposer une solution immédiate. Pour gagner du temps, pour

15 gagner le plus possible de temps et pour ne pas omettre de présenter les

16 événements les plus importants de ce qui fait l'objet du témoignage de ce

17 témoin-ci. Parce que nous avons ici le premier commandant de l'armée de

18 Yougoslavie qui a eu pour zone de responsabilité une région assez grande et

19 une grande partie de la frontière de l'Etat. Dans sa zone de

20 responsabilité, il s'est produit bons nombres d'événements dont nous avons

21 déjà parlé. Ce qui importe ici, c'est de voir comment l'armée s'est

22 comportée pendant toute cette période-là. Le comportement de l'armée peut

23 être suivi puisque tout se donne sous forme d'ordres et d'analyses. Pendant

24 toute la période du déroulement de ces événements, il y a des cartes de

25 travail, il y a des ordres, des analyses des différentes actions à chaque

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1 fois que celles-ci ont eu lieu.

2 Par voie de conséquence, tout ceci vient contredire complètement le

3 schéma présenté ici par M. Nice disant que les effectifs de la RY et de

4 Serbie vont là-bas pour tirer sur les Albanais et pour tirer sur, comme ils

5 le disent, des civils innocents. Nous avons ici un témoignage venant du

6 terrain. Ce ne sont pas des résolutions des Nations Unies ni des documents

7 publics, mais le témoignage du commandant qui avait 14 000 hommes sous ses

8 ordres pendant la guerre. S'agissant des activités de ces hommes, il peut

9 être vu partant de ces documents qu'elle a été le fonctionnement de l'armée

10 de Yougoslavie. Tout ceci vient nous dire qu'elle a fonctionné comme une

11 force sérieuse, organisée, disciplinée et des plus efficace. Toute cette

12 dynamique vient contredire ce qui a été dit ici.

13 Je comprends les contingences de temps. Ce que je vous proposerais,

14 c'est de procéder par groupe. Nous venons de parcourir l'intercalaire 29.

15 Vous avez dit 25, mais 29 ou 25 cela importe peu en ce moment-ci.

16 Pour ne pas perdre des éléments qui sont très importants et si nous nous

17 penchons, par exemple, sur le fait qu'au mois de mai il y a eu plusieurs

18 décisions importantes de prises, nous pouvons parcourir, à ce moment-là, en

19 quelques minutes. Il en va de même pour ce qui est du mois de juin. Au mois

20 de juin, il convient de s'arrêter sur certains segments. J'ai ici la

21 transcription ou le compte rendu d'audience du témoin de l'Accusation, M.

22 Paddy Ashdown, et pour ce qui est de la même période, nous avons des

23 documents en la possession de ce document. Alors, je ne peux pas dire :

24 "Nous allons remettre ces documents sous forme écrite." Mais je veux donner

25 lecture à ce témoin de ce qu'a dit M. Paddy Ashdown au sujet de sa zone de

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1 responsabilité, au sujet de ses unités à lui. Je prends cela juste en guise

2 d'illustration.

3 Tout en me conformant à votre intention de faire accélérer les

4 choses, ce qui m'arrange, d'ailleurs, je crois qu'il pourrait être proposé

5 par groupes d'éléments de preuve, qui sont ici, pour permettre au témoin de

6 les parcourir pour nous signaler les points les plus importants.

7 Parmi ces documents, par exemple, vous avez un ordre du chef d'état-

8 major du corps d'armée qui date du 26 juin 1998, alors qu'il n'y a pas eu

9 de combats, mais il y a eu des conflits avec les terroristes et où on

10 ordonne le recours, l'application de la réglementation découlant du droit

11 de guerre international. C'est un élément très important.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vous

13 interromps. Je vous ai écouté très attentivement. Vous avez dit que vous

14 aviez une approche médiane qui s'agirait d'aborder les éléments de preuve

15 par groupes et j'aimerais savoir quand est-ce que vous allez en finir avec

16 ces éléments de preuve datant de 1998. Parce que l'idée entière ne vise pas

17 à faire dépenser le temps de la Chambre sur des éléments de preuve qu'on

18 pourrait traiter d'une autre façon, d'une façon plus courte, vous le savez,

19 comme moi. Quand pensez-vous en terminer avec ces éléments de preuve

20 portant sur l'année 1998 ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que je pourrais en finir d'ici

22 la moitié de la semaine d'après. Je n'ai pas fait de calcul précis, mais je

23 crois pouvoir être en mesure de le faire.

24 Il y a des éléments de preuve de type varié à présenter.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, la Chambre

2 respecte votre droit à la présentation de votre cause, comme vous le savez,

3 et il est de notre devoir d'exercer un contrôle sur la façon dont la

4 procédure se déroule. Pour cette raison, nous allons vous permettre de

5 présenter les éléments de preuve conformément à la suggestion que vous

6 venez de présenter, mais vous devez en terminer avec la présentation des

7 éléments de preuve relatifs avec 1998 d'ici la fin de cette première

8 audience de ce matin.

9 LE TÉMOIN: BOZIDAR DELIC [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

12 Q. [interprétation] Bonjour, Général. Nous avons parlé de l'ordre

13 émanant du général Pavkovic et vous l'avez expliqué.

14 Pour ce qui est du mois de mai, il y a toute une série d'événements

15 qui sont englobés par les documents qui se trouvent à l'intercalaire numéro

16 30 et ceux-ci s'étirent jusqu'au 36. Ce que je vous demanderais de faire,

17 c'est de parcourir rapidement ce groupe de documents, les intercalaires 30

18 à 36, pour nous indiquer ce qu'il y a eu de plus important à ce niveau-là.

19 R. J'essaierais de le faire le plus rapidement possible.

20 Q. Je tiens à vous rappeler également qu'il y a, là, des documents qui se

21 rapportent au conflit à Gorozup, à l'arrestation de cinq personnes portant

22 uniforme; vous avez l'incident sur la route Djakovica-Prizren, et ainsi de

23 suite. Vous avez plusieurs incidents et j'espère que vous réussirez à

24 expliquer de quoi il s'agit.

25 R. S'agissant de l'intercalaire numéro 30, il s'agit d'une décision

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1 émanant du chef d'état-major du corps d'armée pour ce qui est de débloquer

2 une voie de communication Ponosevac, Morina, Junik et Ponosevac, Morina,

3 Potok pour permettre l'approvisionnement des casernes frontalières.

4 L'intercalaire 31 nous parle de la continuation de ce blocus des

5 voies de communication et en même temps, on demande d'assurer au maximum la

6 sécurité de la frontière de l'Etat et on demande à l'armée de ne pas entrer

7 dans les agglomérations.

8 L'intercalaire 32 parle d'un incident au poste frontalier de Gorozup,

9 et il s'agissait d'une tentative de quelques personnes de passer

10 clandestinement des armes sur notre territoire. Il s'agissait, notamment,

11 de grenades à main, de munitions qui, en cette occasion-là, après la fuite

12 de ces contrebandiers, sont restées sur notre territoire.

13 Au numéro 34, on parle de Popovac, sur le territoire de Djakovica où

14 il a été arrêté cinq membres de l'UCK armés et ils sont identifiés ici. On

15 voit également la liste des armes qu'ils avaient sur eux.

16 Le numéro 35 parle d'une attaque sur deux officiers de la garnison de

17 Djakovica sur la route menant à Pristina, au niveau du village de Lapusnik.

18 L'un des officiers a été blessé. Ils se déplaçaient à bord d'un véhicule

19 civil; les terroristes ont essayé de les stopper et lorsqu'ils ne se sont

20 pas arrêtés, ils ont tiré sur le véhicule et ils ont grièvement blessé l'un

21 des officiers dans le véhicule.

22 Pour ce qui est de l'intercalaire 36, il est question du secteur de

23 Djakovica. Il est question de Ponosevac et Popovac où on a ouvert le feu

24 aux mortiers et à l'arme d'infanterie où on a blessé deux policiers.

25 Q. Général, pour ce qui est de tout ce mois de mai, vous venez de nous

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1 expliquer qu'il s'agissait de débloquer une route, une voie de

2 communication et qu'il s'agissait, là, d'activités régulières. S'agissant

3 maintenant des conflits, il en découle le fait qu'il s'est agi notamment

4 pour l'unité de se défendre. Il n'y a pas eu d'attitude active,

5 d'opérations actives vis-à-vis des groupes terroristes, à l'époque.

6 R. Non, la disposition des unités l'illustre suffisamment. Ce déblocage

7 des voies de communication signifiait un déblocage au niveau local; cela

8 n'avait d'importance que pour les villages et les instances frontalières.

9 Cela devait se faire puisque les autorités frontalières étaient coupées de

10 leurs arrières, du commandement et de la logistique.

11 Q. Merci, Général. Passons maintenant brièvement au mois de juin. Les

12 documents se rapportant au mois de juin figurent dans les intercalaires 37

13 à 63.

14 R. A l'intercalaire 31 ?

15 Q. Non, l'intercalaire 31, on l'a passé. 37.

16 R. Oui, 37. On dit que les terroristes, en dépit de la mobilisation des

17 effectifs, sont en train de collecter les moyens pour l'achat d'armes. Il

18 est également question, partant des connaissances opérationnelles, du fait

19 d'avoir appris qu'ils s'apprêtaient à couper la route Djakovica-Prizren et

20 Djakovica-Pec.

21 A l'intercalaire 38, il s'agit là d'un ordre émanant de moi-même qui

22 découle d'un ordre venu du Corps de Pristina. Il est question ici

23 d'interdire l'utilisation des véhicules, des canons et des pièces

24 d'artillerie de haut calibre, alors qu'il n'y a pas de raison justifiée de

25 s'en servir. Lorsque les unités sont attaquées par les terroristes, il

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1 s'agissait d'ouvrir le feu sur les cibles remarquées jusqu'à leur

2 destruction, mais ne pas ouvrir le feu, lorsque l'unité n'est pas mise en

3 péril.

4 Q. Général, arrêtons-nous un petit moment sur ce qui figure à

5 l'intercalaire 40. Il y a, ici, un aide-mémoire pour ce qui est du

6 fonctionnement des membres de l'armée de Yougoslavie qui est fourni en

7 annexe et il s'agit d'un aide-mémoire pour ce qui est de la façon

8 d'intervenir des membres de l'armée de Yougoslavie sur le territoire où il

9 y a des activités terroristes de sabotage.

10 R. Oui. Il s'agit d'un ordre émanant du commandement supérieur, M.

11 Milosevic. D'après cet ordre, pour un soldat ordinaire, il s'agissait d'un

12 petit manuel qu'on pouvait mettre dans sa poche et à l'intention des

13 officiers, il y a eu une version un peu plus élaborée. Mais en substance,

14 cet aide-mémoire visait à réglementer le comportement des membres de

15 l'armée au cas où ils seraient enlevés, kidnappés par les terroristes ou de

16 la façon de traiter les membres de ces groupes terroristes en cas

17 d'arrestation et il est question de leurs droits; on dit quels sont les

18 droits des officiers dirigeant les unités, les droits des instances

19 chargées de la sécurité et la façon de se comporter à l'égard de ces

20 personnes.

21 Q. Bien.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avez-vous cet aide-mémoire sur vous ?

23 L'aide-mémoire en tant que tel, l'avez-vous ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai sous cette forme-ci. Mais je l'ai

25 autrement.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela ne figure pas parmi les

2 documents qui nous ont été remis. C'est la raison pour laquelle je vous

3 pose cette question. Nous avons juste ce document qui en parle, mais nous

4 n'avons pas l'aide-mémoire en tant que tel, du moins, je ne l'ai pas.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il se peut qu'il n'ait pas été traduit, mais

6 l'aide-mémoire a été fourni à l'intercalaire 40 dans son intégralité.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ces documents ne sont pas du tout cumulatifs et

11 l'aide-mémoire en question, d'après ce qu'on peut voir dans cette lettre

12 d'accompagnement, a été fourni le 22 juin 1998. Je vais le sortir de mes

13 documents. Nous pouvons le placer ou le faire placer sur le rétroprojecteur

14 et je vais juste vous signaler les différents titres pour ce qui est du

15 comportement à l'égard des membres des groupes terroristes.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela, c'est une lettre

17 d'accompagnement pour un autre document.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le Juge Bonomy signale que l'aide-

19 mémoire n'est pas joint parce que le courrier dit : "Veuillez trouver, ci-

20 joint, l'aide-mémoire." Or, l'aide-mémoire n'est pas joint. Le Juge Bonomy

21 est préoccupé de savoir ce qui est advenu de l'aide-mémoire.

22 Avez-vous une information ?

23 Monsieur Milosevic, laissez le Général répondre.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout de suite, dans la continuation de ce

25 document, il figure le texte de l'aide-mémoire.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas cela au 41, non plus,

2 et nous ne l'avons pas dans nos intercalaires.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est à l'intercalaire 40. A l'intercalaire 40,

4 il y a la lettre d'accompagnement et l'aide-mémoire.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela ne figure pas dans nos classeurs.

6 C'est tout ce que je voulais dire. Veuillez nous fournir une copie, je vous

7 prie. Nous pouvons le lire nous-mêmes, mais fournissez-nous la copie. Nous

8 pouvons lire touts seuls. C'est une perte de temps; même les enfants de

9 cinq ans sont à même de lire touts seuls.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas le texte de l'aide-

11 mémoire, Monsieur Milosevic. Vous devez vous débrouiller pour le trouver et

12 le faire fournir. En attendant, continuez.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais à Monsieur le Témoin de le

14 placer sur le rétroprojecteur. Ma copie, je viens de la donner à l'officier

15 de liaison pour qu'il fasse des copies. J'étais convaincu, non seulement du

16 fait que cet aide-mémoire se trouvait dans mon classeur, mais dans votre

17 classeur aussi et je croyais que c'était traduit. Je ne sais pas, peut-être

18 quelqu'un l'aurait-il enlevé de là pour le faire traduire, mais cela fait

19 partie des documents qui ont été donnés avec.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maintenant, cela se trouve sur le

21 rétroprojecteur ou pas ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la page 2. Il s'agit de la façon

23 dont il convient de se comporter à l'égard des membres des groupes

24 terroristes et des groupes de sabotage à l'occasion de leur arrestation.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Général, il n'est pas nécessaire de lire l'ensemble du texte, mais

2 simplement, les éléments importants, essentiels. Je ne les ai pas sous les

3 yeux car je les ai faits photocopier.

4 R. "Pour autant que des membres des unités de sabotage terroristes

5 proposent des armes ou résistent, ils doivent être traités conformément aux

6 règles de combat. Après avoir déposé les armes et cesser cette résistance,

7 il faut les traiter de la manière suivante : il faut les regrouper, les

8 désarmer, confisquer toute forme d'arme; les séparer et les diviser selon

9 le sexe, âge, grade, les identifier et comprendre le rôle joué par chacun,

10 chaque membre de ces unités terroristes et leurs complices doivent être

11 privés de liberté. Les circonstances de leurs activités doivent être

12 établies ainsi que leur participation à cette unité de sabotage terroriste.

13 Ils peuvent être privés de liberté car on les a trouvés coupables d'avoir

14 agi et commis des actes de terrorisme. Il faut faire des fouilles

15 détaillées et tout document écrit et objet doit être confisqué. Un dossier

16 doit être ouvert pour chaque personne, cette personne doit être privée de

17 liberté. Des commandants peuvent poser des questions sur des questions

18 militaires. Les organes de sécurité sont en droit de les détenir pendant

19 trois jours, mise en garde de trois jours."

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela suffit, Général. Cela suffit.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. A la page 3 : "Quelqu'un qui est privé de sa liberté doit être examiné

23 par un médecin aux fins de comprendre l'état de santé de la personne en

24 question. La personne doit être traitée de façon humaine, conformément aux

25 règles de la police militaire. Leurs familles doivent tenues informées

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1 qu'ils ont été privés de liberté." Qu'est-ce qu'on peut lire ici ? Qu'est-

2 ce qui ne doit pas être fait ? Qu'est-ce qui est interdit ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne pense pas que l'Accusation

4 conteste que l'armée de la VJ n'avait pas de règles de combat, à proprement

5 parler. Je crois que la question ne porte pas là-dessus. Avançons, s'il

6 vous plaît.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'essaie simplement de montrer, non seulement

8 qu'il disposait de règles, mais par l'intermédiaire de ces documents et de

9 ce témoignage, je souhaite clairement montrer que l'armée se conformait à

10 ces règles.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Général, je crois qu'il s'agit, ici, de l'intercalaire numéro 42, votre

13 ordre sur le retour de la population dans le village abandonné, ordre donné

14 par vous.

15 R. Oui, conformément à un ordre donné par moi-même et conformément à un

16 ordre émanant du commandement de Pristina sur le territoire où il y avait

17 eu des combats, un accord est donné pour le retour de la population, pour

18 que les personnes puissent rentrer chez eux. Les unités et commandants

19 doivent prendre les mesures nécessaires, contacter les chefs de villages

20 pour obtenir des informations sur les familles, leurs biens, leurs terres,

21 ces personnes doivent être bien traitées, s'assurer qu'aucun dommage ou que

22 leurs biens ne soient pas endommagés, qu'il n'y ait pas de vols ou de

23 pillages.

24 Q. Très bien, Général. Vous avez un ordre ici sous les yeux qui a été

25 donné par le général Lazarevic en rapport avec les mesures qui doivent être

Page 41416

1 prises aux fins de se conformer aux règles.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, il ne s'agit pas simplement

3 des règles, mais s'il s'agit d'un ordre donné par le commandant sur la

4 manière dont les membres des unités des terroristes de sabotage doivent

5 être traités. Cela se trouve à l'intercalaire numéro 43, c'est un document

6 qui a été signé de la main du chef d'état-major, le général Lazarevic.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Au début, il est dit qui que : "L'ordre donné par le commandant du

9 Corps de Pristina conformément au droit international." Et poursuit en

10 disant et ordonne qu'ils doivent se conformer à cela.

11 R. Oui, c'est effectivement ce qu'indique cet ordre. Il parle également du

12 rappel, autrement dit chaque membre de chaque unité doit connaître cela.

13 A l'intercalaire numéro 44.

14 Q. Il faut regarder cet intercalaire car on parle ici du mois de

15 juin. Général, je voulais recueillir votre commentaire là-dessus puisque

16 nous parlons du mois de juin, le témoin de M. Nice, Paddy Ashdown parle

17 ici.

18 A la page 2 366 du compte rendu d'audience, en réponse à une question

19 posée à Paddy Ashdown, il est dit et je cite ces propos pour indiquer qu'il

20 s'agit d'une période allant : "…entre le 20 et le 28 juin 1998, avez-vous

21 rencontrer le premier ministre macédonien ?" Il s'agissait d'une visite qui

22 a eu lieu entre le 20 et le 25 juin. Ceci est simplement pour indiquer au

23 témoin de la période dont il s'agit ici qui m'intéresse.

24 En rapport avec cette visite du mois de juin, on lui a demandé s'il

25 se souvenait de la date exacte, il ne se souvenait pas de la date exacte.

Page 41417

1 Ceci n'est pas pertinent maintenant. C'est la question que la partie

2 adverse lui a posée.

3 Ici, la période est très clairement indiquée. Il a dit qu'au cours de

4 cette visite en Macédoine, il s'est également rendu en Albanie du nord. Je

5 ne vais pas lire l'ensemble du compte rendu d'audience maintenant, mais la

6 question que je souhaite vous poser porte sur la page 2 343 : "En Albanie,

7 au cours de votre visite, vous avez été en mesure d'observer quelque chose

8 avec vos jumelles sur la zone couverte par l'unité, peut-être que vous

9 pourriez nous l'indiquer."

10 Ensuite, Ashdown poursuit en disant : --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est votre question, Monsieur

12 Milosevic ? Quelle est la question que vous souhaitez poser ?

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. La question que je souhaite poser au général est comme

15 suit : au mois de juin 1998, Général, vos unités se trouvaient-elles

16 cantonnées dans la région évoquée par Ashdown ?

17 R. Mes unités étaient à Batusa et Molic. Il s'agit là de villages voisins.

18 Nous avons contacté les unités qui étaient à Junik. Il s'agit d'une région

19 et non pas d'un seul village.

20 Q. Il s'agit d'une région, mais pas d'un seul village. Je crois que la

21 région en question s'appelait Gegaj, n'est-ce pas ? Y a-t-il un village qui

22 s'appelle Gegaj à cet endroit-là ?

23 R. On ne le voit pas sur cette carte, mais effectivement oui. Il s'agit de

24 Junik ici, cela se trouve de l'autre côté.

25 Q. Quel autre côté, qu'entendez-vous par là ?

Page 41418

1 R. L'autre côté de la frontière. Il ne pouvait que se trouver en Albanie.

2 Q. Très bien. Après il dit qu'il pouvait "voir l'ensemble de la région au

3 sud de Junik, il avait une très bonne vision de l'ensemble de la région au

4 sud de Junik. Il y a quelques petits villages ici." Ici, il parle de ce

5 qu'il pouvait voir au sud de Junik. "Effectivement, je pouvais voir au loin

6 et je pouvais voir le Kosovo."

7 Pourriez-vous nous dire quelque chose à ce sujet, s'il vous plaît,

8 Général.

9 R. J'ai enseigné la topographie à un moment donné de ma vie. Tout à fait

10 depuis l'Albanie, l'ensemble de cette région peut être vu. De nos casernes,

11 on ne voit pas Junik qui se trouve dans une vallée, ni Batusa, ni Molic, ni

12 Ponosevac.

13 Q. Ashdown dit qu'à partir de ce village de Gegaj, il pouvait voir au loin

14 jusqu'au Kosovo. Il pouvait voir Junik, les villages qui se trouvent au sud

15 de Junik et l'ensemble de la région.

16 R. De l'endroit où il se trouvait, il ne pouvait rien voir pour ce qui est

17 de la ligne de communication de Decani-Djakovica. Il ne pouvait voir qu'à

18 une vingtaine de kilomètres. A savoir depuis la frontière, le poste de

19 contrôle de Kamenica en Albanie, il ne pouvait voir que le village albanais

20 de Morina qui se trouve du côté du poste-frontière de Morina, mais il ne

21 pouvait absolument pas voir Junik ou le sud de Junik ou Ponosevac. On ne

22 peut pas voir jusque-là parce que cela se situe dans un angle qu'il ne

23 pouvait pas voir.

24 Q. Il y a des montagnes élevées ?

25 R. Oui, tout à fait, à cause des montagnes élevées c'est impossible

Page 41419

1 d'avoir une visibilité à ce niveau-là, car la frontière longe la crête,

2 cela se trouve à côté de la montagne et Junik se trouve dans une vallée. On

3 ne peut pas voir Junik d'un côté ou d'un autre sauf si on se trouve à

4 l'est.

5 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, nous pouvons avancer, je

6 suis tout à fait satisfait de parler des cartes, mais je souhaite parler de

7 l'aspect particulier de tout ceci. Peut-être que nous pourrions préparer

8 une copie papier pour que les positions soient indiquées sur la carte pour

9 des questions de visibilité ou d'invisibilité, ceci m'aiderait beaucoup

10 dans mon contre-interrogatoire si on pouvait le faire. Au lieu de le faire

11 comme cela sur le pouce, si cela pouvait être indiqué sur la carte et qu'il

12 puisse indiquer sur la carte les endroits où Ashdown se trouvait et d'où il

13 pouvait voir le Kosovo, et cetera. Je serais très reconnaissant s'il

14 pouvait faire cela.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Etes-vous en mesure de faire cela

17 Général, puisque vous avez enseigné la topographie ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, cela ne me pose aucun problème dans

19 la mesure où il y a des cartes sur lesquelles je puisse voir le territoire

20 en question, car sur la carte que j'ai sous les yeux je ne peux voir que

21 notre territoire, mais on ne voit pas en profondeur le territoire Albanais.

22 Si je dois utiliser ces cartes-ci, je ne pourrais pas le faire maintenant,

23 mais de façon générale cela ne pose aucun problème. Je vais regarder les

24 cartes que j'ai.

25 M. NICE : [interprétation] Si je puis vous indiquer une carte appropriée

Page 41420

1 qui semble couvrir ces territoires du Kosovo et de l'Albanie qui nous

2 concerne ici, à ce moment-là vous pourriez peut-être marquer cette carte au

3 cours de votre déposition, je serais très reconnaissant.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez bien faire cela,

5 Monsieur Nice, au cours de la pause.

6 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Je vais répéter ma question, Général, étant donné que vous avez accepté

9 d'inscrire différents éléments sur la carte. Je vais répéter ce qui a déjà

10 été dit : "Au niveau de la frontière du Kosovo, en Albanie s'appelle

11 Gegaj," c'est ce qu'a dit Ashdown. "Nous avions une très bonne visibilité

12 de l'ensemble de la région au sud de Junik. Il y a quelques petits villages

13 ici en contrebas et je pouvais voir effectivement au loin et voir le

14 Kosovo, car il s'agit d'une région de plaines." En Serbe, cela signifie une

15 plaine et non pas une vallée. Cela s'étend quasiment jusqu'à Pristina,

16 autrement dit, il pouvait voir jusqu'à Pristina.

17 Ensuite, question suivante posée par la partie adverse : "Qu'avez-vous

18 remarqué au cours de cette période de quatre heures ?" Je me trouve à la

19 page 2 344. Ecoutez, attentivement, Général. "Dans cette région, j'ai vu un

20 certain nombre de membres de la VJ, des chars et différentes positions de

21 la VJ, en particulier des positions d'obusiers, positions qui ont été

22 prises de façon classique comme on le fait en temps de guerre conformément

23 au pacte de Varsovie. Sur l'ensemble de cette région se trouvaient

24 déployées différentes unités, sans doute des pelotons" - un peloton devrait

25 être 'vod' dans notre langue - "dans des véhicules blindés de transport de

Page 41421

1 troupes, ils pilonnaient et utilisaient des mortiers de 82 millimètres et

2 pilonnaient toutes les maisons alentour."

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poser votre question, s'il

4 vous plaît. Avec l'aide de M. le Juge Kwon, je suis en train de suivre

5 l'extrait du compte rendu que vous nous citez. Quelle est votre question,

6 Monsieur Milosevic ? Quelle question souhaitez-vous poser au général ?

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] La page du transcript est la page

8 2 344.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question que je vous pose

10 est : quelle question souhaitez-vous poser au général à propos du

11 témoignage de M. Ashdown ?

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Vous avez entendu ce qu'a dit Paddy Ashdown à propos de ce qu'il avait

14 vu au mois de juin lorsqu'il était en visite dans cette région-là, à ces

15 dates-là, ce qu'il pouvait voir depuis l'Albanie. Je viens de vous le lire,

16 n'est-ce pas, cela s'est-il passé ainsi ?

17 R. Je ne sais pas quel type de formation militaire Paddy Ashdown avait.

18 Q. C'est un homme qui a fait sa réputation après le dimanche sanglant en

19 Irlande. Il a effectivement une formation militaire.

20 R. Regardez, depuis le territoire de l'Albanie, la première chose qui est

21 indiquée ici, c'est la position des obusiers. C'est impossible à voir parce

22 qu'ils se situent de l'autre côté. Ces positions, d'après notre règle,

23 doivent toujours être abritées, ne peuvent même pas être vues à une

24 distance de 200 à 300 mètres encore moins à un kilomètre.

25 Q. Il a dit qu'il était deux kilomètres.

Page 41422

1 R. J'ai déjà répondu à cette question. Il y a un couloir étroit près de la

2 tour de Morina. Il s'agit là d'un village albanais, de Karaula-Morina,

3 c'est un poste-frontière. Il s'agit du seul endroit que l'on peut voir dans

4 un village albanais. Il n'y a rien entre Junik et le sud de Junik, Batusa,

5 Morina, Ponosevac, rien d'autre n'est visible. Mon unité se trouvait à cet

6 endroit-là à la fin de la journée. Pour ce qui est du matériel de combat,

7 mon unité ne disposait que de trois chars.

8 Q. La question que je vous pose : que faisait ces unités-là à ce moment-

9 là ? M. Ashdown dit que ces unités tiraient sur les maisons albanaises,

10 qu'il n'y avait pas de tirs en riposte et que vous tiriez sans cesse sur

11 des maisons albanaises.

12 R. Il y a un bon nombre d'intercalaires que nous n'aurons pas le temps de

13 voir ici. Dans ces intercalaires, on sait exactement où se trouvait

14 l'armée, de quelles maisons on leur tirait dessus et comment l'armée a

15 riposté. J'ai déjà dit lorsque la route a été débloquée les habitants du

16 village de Junik depuis le poste-frontière de Kosare ont quitté l'armée.

17 Ces habitants ont été filmés par la radio télévision serbe. Ceci est bien

18 connu. La route entre le poste de contrôle de Kosare a été débloquée. Ceci

19 n'a rien à voir avec les civils. La deuxième route, il y avait des

20 embuscades sans arrêt, mais ceci n'a rien à voir avec les unités ou le

21 village.

22 Cette seconde, cette autre route traverse le village de Morina, elle

23 part du poste de contrôle de Morina et traverse Ponosevac et traverse le

24 village de Morina. Lorsque celle-ci a été débloquée, il y a eu des

25 affrontements entre les terroristes, ce qui mettait en danger les unités.

Page 41423

1 Après le village de Morina tout était calme.

2 Q. Bien, il dit que l'armée se déplaçait en véhicules blindés transport de

3 troupes et qu'elle tirait sur des maisons. Je vous pose la question de

4 façon très précise, étant donné que vous faites référence à des

5 intercalaires que nous n'allons pas utiliser, sentez-vous libre de trouver

6 ce document qui nous indique ce qui est arrivé ?

7 R. J'essaie de retrouver la note officielle qui m'intéresse. Oui, voilà,

8 j'en ai trouvé une. "A l'occasion du déblocage de la route pour

9 approvisionner Karaula-Morina, du côté droit de la route, à partir des

10 maisons qui se trouvent le long de la route, des tirs ont commencé en même

11 temps à l'aide de diverses armes sur les membres de l'armée. Il y a eu

12 riposte." Ensuite, on lit : "A partir de la première maison à deux étages

13 de couleur blanche qui se trouve à l'entrée du village sur le côté gauche"

14 --

15 Q. Excusez-moi, Général, quel est l'intercalaire ?

16 R. L'intercalaire 49. "A partir de la première maison blanche quand on

17 vient de Djakovica, un lance-roquette portable a été utilisé ainsi que des

18 armes légères à partir du premier étage de la maison."

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas traduit. Il n'est pas

20 traduit ce document. Par ailleurs, il ne nous aide pas parce que nous

21 parlons ici d'une période très précise, Monsieur Milosevic, la période qui

22 va du 25 au 28 juin. Ce sont ces trois jours qui font l'objet des questions

23 posées par M. Milosevic.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je viens de citer un intercalaire qui

25 montre bien quelles ont été les actions de l'armée. Quant à cet

Page 41424

1 intercalaire, il résume les constatations faites par la police militaire,

2 eu égard aux dégâts subis par les maisons de l'endroit où les combats ont

3 eu lieu.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la période couverte dans

5 ce document, Général ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document porte sur une journée

7 particulière, le 28 mai.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

9 Milosevic.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Ayez l'amabilité, Général, de nous dire la chose suivante : dans la

12 période dont parle M. Paddy Ashdown, y a-t-il eu attaques de la part de

13 l'armée yougoslave visant les villages et donc, la population de la

14 région ?

15 R. En toute responsabilité, je vous réponds que les villages habités par

16 la population albanaise n'ont jamais été la cible de l'armée. Dans tous les

17 intercalaires que nous venons d'examiner - et il y en a encore bien

18 d'autres - on peut constater qu'au cours de cette période, toute la

19 frontière était la cible de divers attentats. Du côté de la Serbie et sur

20 tout le territoire qui mène à la République d'Albanie, et plus

21 particulièrement dans cette région qui va de Jonjic [phon] jusqu'à Dedaj, y

22 compris dans la partie de la frontière avec le Monténégro. On a ici dans

23 ces documents, toute une série de constatations établies par la police

24 militaire et par les juges d'instruction suite aux tentatives de

25 franchissement illégal de la frontière pour contrebande d'armes. Ce que je

Page 41425

1 tiens à souligner, c'est que des combats ont effectivement eu lieu, mais

2 ces combats étaient limités à des territoires très peu importants, à

3 savoir, aux zones frontières.

4 Q. Est-ce que l'armée n'ouvrait le feu que lorsqu'on tirait à partir d'un

5 endroit particulier ou est-ce qu'elle tirait un peu au hasard sur les

6 maisons ?

7 R. Nous avons vu un ordre qui date du mois de mai qui stipule qu'il est

8 interdit d'ouvrir le feu si la cible n'est pas précisément déterminée.

9 C'est un ordre permanent qui doit être appliqué par tous les membres de

10 l'armée.

11 Q. Etait-il possible de tirer sur une maison à partir de laquelle personne

12 ne tirait sur l'armée ? Parce que Paddy Ashdown dit que parfois, il n'y

13 avait pas de tirs entrants.

14 R. D'abord, il existe un ordre selon lequel les munitions ne doivent pas

15 être utilisées de façon inconsidérée, qu'il est également interdit de

16 gaspiller les munitions de grand calibre. Il y avait un ordre selon lequel

17 seul le commandant de corps d'armée avait le droit d'ordonner l'utilisation

18 de ces calibres importants. Il existait également des ordres donnés par les

19 commandants de corps d'armée, ainsi que par moi-même, pour mes subordonnés,

20 selon lesquels le feu ne devait être ouvert que sur des cibles bien

21 déterminées.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, la question

23 n'est pas de savoir ce qui est écrit dans ces ordres. La question est de

24 savoir ce qui s'est passé sur le terrain.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

Page 41426

1 Q. Général, je vous demande précisément ce qui s'est passé sur le terrain.

2 Ce qu'affirme Ashdown est-il exact ?

3 R. Je réponds, en toute responsabilité, que jamais l'armée, pas plus que

4 mon unité, n'a opéré en visant un bâtiment à partir duquel des tirs

5 n'avaient pas été tirés. Il n'y avait ouverture du feu que sur des cibles à

6 partir desquelles des tirs étaient venus.M. LE JUGE ROBINSON :

7 [interprétation] Général, vous dites, par ailleurs, que la déposition de M.

8 Ashdown n'est pas digne de confiance, car à partir de l'endroit où il se

9 trouvait, il lui était impossible de voir les mortiers étant donné que vos

10 mortiers étaient à l'abri ? Est-ce bien ce que vous dites ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais où se trouvaient les mortiers, je sais

12 où se trouvait également M. Ashdown. Il était absolument impossible qu'il

13 les voit et si on me remet une carte appropriée, je pourrais utiliser un

14 feutre pour montrer exactement les parties du territoire qu'il pouvait voir

15 à partir de l'endroit où il était et les parties du territoire qu'il lui

16 était absolument impossible de voir, compte tenu des reliefs.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me souviens que c'est la pièce à

18 conviction 74 qui a été utilisée par Lord Ashdown. Peut-être pourrait-on

19 reprendre cette pièce à conviction.

20 Veuillez poursuivre, Monsieur Milosevic.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Ashdown fait encore d'autres affirmations. Vous connaissez la situation

23 qui régnait dans le secteur de Suva Reka, Général ? Etait-ce bien une

24 partie de la zone placée sous votre responsabilité ?

25 R. Oui.

Page 41427

1 Q. Ashdown déclare et ceci figure à la page 2 358 du compte rendu

2 d'audience de son audition, je cite : "Hier, nous avons entendu vos

3 observations au sujet des collines dans la région de Suva Reka. Nous vous

4 avons entendu dire que vous avez passé une heure à examiner, à observer des

5 villages qui avaient été détruits. Vous nous avez parlé des armes qui,

6 selon vous, ont été utilisées."

7 D'après ce que je peux constater dans ce passage du compte rendu

8 d'audience, il a parlé, dans le secteur de Suva Reka, de feux. Je vous

9 demande ce que vous savez de ce qui s'est passé dans la vallée de Suva Reka

10 qui fait l'objet de l'audition de M. Ashdown dans cette période ?

11 R. S'il est question du mont Birac qui se trouve ici, sur la route où

12 était stationnée une unité de l'armée, à partir du mont Birac, il pouvait

13 voir Suva Reka et les environs de Suva Reka.

14 Q. Mais je ne vous demandais pas ce qu'il pouvait voir. Il est en train

15 d'observer Suva Reka et toute la région. Mais je vous demande ce qui s'est

16 passé à ce moment-là dans le secteur de Suva Reka ? Qu'est-ce qui

17 flambait ? Qui avait mis le feu à ce qui flambait ? Est-ce que vous savez

18 ce qui s'est passé là-bas, à ce moment-là ?

19 R. Nous sommes au mois de septembre 1998.

20 Q. Je suppose. C'est le moment où il est allé au Kosovo. Je ne retrouve

21 pas exactement la date dans l'immédiat, dans le compte rendu d'audience,

22 mais je suppose que c'est bien cela.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais c'est très important, Monsieur

24 Milosevic, si vous voulez que le témoin fasse une déposition d'une

25 quelconque valeur sur le sujet.

Page 41428

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin sait tout ce qui s'est passé dans ce

2 secteur, je suppose.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre but est de contredire

4 l'élément de preuve fourni par l'Accusation. Il vous faut être

5 particulièrement précis.

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis très précis. J'ai cité les propos de M.

7 Ashdown, à l'instant.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais sur quelle période de temps

9 s'applique ce commentaire ?

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai un peu de mal, à l'instant, à retrouver la

11 date dans le compte rendu d'audience de son audition.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, peut-être vous

13 souvenez-vous du laps de temps que concernait cette partie de l'audition de

14 lord Ashdown.

15 M. NICE : [interprétation] Je vais faire de mon mieux pour le retrouver.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne peut être que la fin du mois de

17 septembre.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi cela ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que même si, avant cette date, il y

20 avait déjà eu quelques tentatives des groupes terroristes sur cette route

21 et sur d'autres routes autour de Suva Reka, la cinquième phase de

22 l'opération menée contre les terroristes à la fin du mois de septembre

23 s'est déroulée dans cette région qui va de la route Suva Reka-Stimlje

24 jusqu'au Mont Sara [phon]. On y trouve les villages qui se situent à l'est

25 de Suva Reka, Vranic, Musutiste, Dvorane [phon], Budakavo, Macicevo [phon],

Page 41429

1 et cetera.

2 Parce qu'une fois que les groupes terroristes ont été démantelés sur

3 tout le territoire du Kosovo-Metohija, c'est dans ce secteur que le dernier

4 groupe existant opérait encore. Si je me souviens bien, l'opération menée a

5 été la cinquième phase de la lutte anti-terroriste, selon le plan établi au

6 commandement du Corps de Pristina qui a été approuvé par le Grand quartier

7 général et par l'armée, de façon générale.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Pouvez-vous expliquer ce qui s'est passé dans ce secteur de Suva Reka ?

10 R. A Suva Reka, il ne s'est rien passé car le village était sous le

11 contrôle des forces régulières de la police. Mais les villages situés à

12 l'est de Suva Reka dont je viens de parler - il y en a beaucoup -

13 Musutiste, Popovjane [phon], Vranic, Dvorane, et il y en a qui sont

14 particulièrement connus, un peu plus grand, comme, par exemple, Budakovo

15 qui, pendant toute la guerre et même encore, par la suite, a été le siège

16 du commandement d'une brigade. Il y avait Maticevo et Budakovo qui étaient

17 des villages plus importants où étaient concentrées, à cette époque en

18 particulier, des forces terroristes nombreuses et les combats, dans ce

19 secteur, ont duré trois jours jusqu'au démantèlement des groupes

20 terroristes. La population qui vivait dans ces villages a vécu un véritable

21 exode dans la vallée située près de Vranic. A la fin des combats, la

22 population est revenue dans ces villages. Je parle de plusieurs milliers de

23 personnes. Personnellement, je me suis trouvé dans le village de Maticevo,

24 à ce moment-là.

25 Q. Bien, Général, nous pouvons avancer. Nous avons dit que le mois de juin

Page 41430

1 se terminait avec l'intercalaire 63 et je vous demande, maintenant,

2 d'étudier les autres documents relatifs à cette période.

3 R. Ce qui est caractéristique ici, c'est que dans les notes officielles -

4 qui se sont multipliées au mois de juin - et qui parlent de la situation

5 quotidienne au niveau de la frontière, nous constatons qu'à bien des

6 reprises, il est question de citoyens albanais qui sont placés en état

7 d'arrestation; il est même question, parfois, d'Albanais qui ont trouvé la

8 mort parce qu'ils transportaient des armes. Dans un cas, c'était pour les

9 vendre dans la République du Monténégro et dans tous les autres cas,

10 c'était pour les vendre sur le territoire du Kosovo-Metohija. On trouve pas

11 mal de notes officielles qui portent sur le fait que ces contrebandiers ont

12 été blessés en franchissant la frontière ou dans des embuscades.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avançons, Monsieur Milosevic. Nous

14 aimerions en terminer avec l'année 1998 avant 10 heures 30.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce sera très difficile, Monsieur Robinson.

16 M. NICE : [interprétation] Je crois pouvoir annoncer que la carte qui a été

17 demandée tout à l'heure vient d'arriver. S'agissant de ce que Lord Ashdown

18 a dit dans sa déposition de la visite qu'il avait faite dans la région, la

19 seule période qui nous intéressait, était la fin septembre 1998. Mais nous

20 retrouverons la carte qui peut vous aider au mieux.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est ce dont parle le témoin également, le

22 mois de septembre.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout s'est terminé le 28 septembre.

24 M. NICE : [interprétation] Voici la carte dont Monsieur le Juge Kwon a

25 parlé, si je ne m'abuse, en tout cas, la version disponible. Je ne sais pas

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1 si elle pourra être d'une quelconque utilité au témoin, mais nous la lui

2 soumettrons.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Général, est-ce que vous connaissez la liste des soldats et officiers

6 tués ou blessés que vous trouvez à l'intercalaire 57 ?

7 R. Oui, c'est un document qui a été établi par ma compagnie, la compagnie

8 de la police militaire placée sous mes ordres.

9 M. NICE : [interprétation] Pas de traduction de ce document.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de l'intercalaire 57 où on trouve la

11 liste des soldats placés sous mes ordres qui ont été tués.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Est-ce que vous avez quelque chose d'autre qui serait particulièrement

14 caractéristique pour cette période, à savoir, le mois de juin qui s'achève

15 avec l'intercalaire 63 ?

16 R. J'ai déjà dit que des attentats avaient lieu tous les jours sur les

17 gardes frontières et que c'est l'élément principal qui caractérise cette

18 période.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, est-ce que vous allez

20 admettre les éléments de preuve en groupe comme vous l'avez annoncé tout à

21 l'heure ?

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous admettons ces documents au

Page 41432

1 dossier à l'exception des documents qui ne sont pas assortis d'une

2 traduction. Ces documents ne seront qu'enregistrés à des fins

3 d'identification et devront faire l'objet d'une demande de versement

4 ultérieur.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Général, je vais, maintenant, vous demander de commencer le récit du

8 mois de juillet. Tous les documents relatifs au mois de juillet se trouvent

9 dans les intercalaires qui vont de l'intercalaire 64 à l'intercalaire 92.

10 Est-ce que vous avez le classeur en question sous les yeux ?

11 R. Oui.

12 Q. Connaissez-vous les événements survenus au début du mois de juillet

13 dans la région de Karaula Kosare, à savoir, ce moment où un groupe venu

14 d'Albanie a fait irruption ? Ce qui a donné lieu à l'établissement d'un

15 document.

16 R. Oui. Il y a eu tentative de contrebande à partir de l'Albanie, dans la

17 région de Karaula Kosare. Ce qui est caractéristique est que de nombreuses

18 mines ont été placées sur la route; des obus de mortier également ont été

19 utilisés.

20 Q. Je vous prie maintenant de nous signaler simplement ce qui est le plus

21 important dans ces documents. On y trouve votre ordre du 7 juillet, votre

22 ordre du 8 juillet et toute une série de rapports au sujet de

23 franchissements illégaux de la frontière. Vous avez, également, un document

24 du 9 juillet au sujet d'un incident survenu dans le secteur de Cafa Prusa;

25 pas mal d'incidents au cours du mois de juillet. Mais je vous demanderais

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1 de ne nous signaler que les moments les plus importants du mois de juillet.

2 R. Nous voyons ici qu'une série d'actes ont été commis, alors que des

3 interdictions avaient été émises par mon commandement. Tout regroupement de

4 forces est interdit sans ordre émanant du commandement. Toute opération

5 doit être préparée à l'avance, soigneusement avec une cible bien

6 déterminée, une description détaillée des opérations et un temps

7 d'exécution définie. Toutes les actions menées par l'armée doivent avoir

8 l'autorisation de l'armée; quant aux opérations menées par la police, elles

9 dépendent du commandement du MUP; et pour toute opération, il faut qu'il y

10 ait des documents correspondants agréés : une carte, un ordre écrit, un

11 plan d'action en particulier sauf lorsque l'unité visée a été attaquée.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je crois que

13 nous avons entendu suffisamment d'éléments de preuve de ce genre.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Général, je vous demanderais simplement de passer rapidement en revue

17 les documents relatifs au mois de juillet.

18 R. Le document 64 vient du commandement du Corps de Pristina.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il concerne quoi ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce dont il est question ici, ce sont des

21 informations disponibles parce que, comme des observateurs vont venir, il

22 existe des éléments de preuve démontrant que les membres de l'UCK vont

23 essayer de se montrer sous un jour aussi favorable que possible pour

24 bénéficier d'une plus grande popularité auprès de la communauté

25 internationale en tant que force militaire en particulier. Point 2, je cite

Page 41434

1 : "A chaque attaque de l'armée, des terroristes de la police ripostaient

2 par le feu et par toutes les armes disponibles."

3 Point 5 : "En cas d'attaque siptar sur les unités, avant le début de

4 l'attaque, lançaient des sommations pour demander que les attaquants

5 cessent leurs actions, exigeaient qu'ils s'éloignent de l'endroit où ils se

6 trouvent et éloignaient la population civile de la zone."

7 Ensuite, il est question de l'incident survenu à Cafa Prusa. Ce sont

8 des ressortissants d'Albanie qui sont les auteurs de cet incident, donc des

9 citoyens albanais qui tentaient d'introduire des armes sur notre

10 territoire.

11 Ensuite, vous avez un rapport général au sujet du même incident,

12 c'était l'intercalaire 70.

13 Ensuite l'intercalaire 71, qui est un document écrit sur la base d'un

14 ordre venant du commandement, il est interdit d'utiliser des armes de

15 calibre 122 destinées aux canons sans ordre du commandement supérieur. Il

16 n'est autorisé d'ouvrir le feu que sur commandement de la brigade au niveau

17 minimum. Il est question de "n'ouvrir le feu que sur des cibles où les

18 civils ne peuvent pas être atteints à savoir des casemates et ce genre de

19 bâtiments --"

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons entendu suffisamment

21 d'éléments de ce genre. Cela ne nous mène pas plus loin.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] L'ordre suivant concerne également

23 l'interdiction d'utiliser certains moyens --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il faut que vous

25 contrôliez un peu mieux votre témoin. Ne lui posez des questions qu'au

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1 sujet des éléments les plus importants. Nous n'avons pas besoin d'entendre

2 parler de tous les ordres qui ont été émis dans cette période.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout ce que font les militaires, ils le font

4 sur ordre, Monsieur Robinson. Ce sont des ordres qui ont été donnés par le

5 témoin que vous avez en face de vous. Il montre bien quelles ont été les

6 actions de l'armée. Après chaque action, il y avait analyse de la façon

7 dont l'ordre avait été exécuté. C'est le mode de fonctionnement de l'armée.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Général, à l'intercalaire 73, on trouve un ordre dont vous êtes

10 l'auteur et qui porte sur le séjour des observateurs diplomatiques et des

11 observateurs de la Mission internationale. Nous n'allons pas revenir dans

12 le détail. Vous avez également fait mention de Lazarevic et autres dans ce

13 document. Mais je vous demande quel a été le rapport de l'armée aux

14 diplomates qui venaient faire une visite diplomatique pour mieux connaître

15 la situation sur le terrain. Selon votre expérience, quelle a été la nature

16 des relations entre les deux groupes ?

17 R. Cette délégation de représentants diplomatiques et de représentants

18 d'organisations humanitaires a séjournée sur le territoire du

19 Kosovo-Metohija. Les organisations humanitaires fournissaient de l'aide et

20 n'avaient aucune limitation de leurs actions due à l'armée.

21 Quant aux représentants de la délégation diplomatique, ils ont eu la

22 possibilité d'aller voir toutes les unités et de visiter toutes les

23 positions qui les intéressaient sauf au niveau de la zone frontalière où

24 ils ne pouvaient aller qu'avec escorte.

25 Q. Pour tous les autres secteurs, ils pouvaient y aller seul ?

Page 41436

1 R. Oui.

2 Q. Pour la zone frontière, il fallait qu'ils l'annoncent à l'avance pour

3 être escortés par quelqu'un ?

4 R. Oui, par quelqu'un que j'appellerais un officier de liaison.

5 Q. Bien.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Delic, votre attention a été

7 appelée sur l'intercalaire 73 où des ordres particuliers sont émis eu égard

8 à la Mission des observateurs internationaux qui viennent en visite.

9 Pourquoi ces ordres ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est indiqué dans le préambule. Parce qu'il

11 est fort possible que les terroristes tirent profit de l'occasion qui leur

12 est donnée par la visite diplomatique pour ouvrir le feu et créer des

13 incidents afin de montrer au monde qu'ils sont persécutés par l'armée

14 yougoslave.

15 Afin d'éviter des tirs inutiles de ce genre, de façon d'éviter ces

16 manipulations, il est donné l'ordre aux commandants d'unités que de

17 n'ouvrir le feu que dans des conditions déterminées. Par exemple, si des

18 représentants diplomatiques se trouvent à portée de tirs des terroristes

19 siptar, il ne faut absolument pas ouvrir le feu, d'une part pour éviter

20 toute mort parmi les observateurs diplomatiques, donc pour protéger leur

21 vie et deuxièmement, parce que ce serait répondre manifestement à une

22 provocation ouverte."

23 Ensuite, il est dit au paragraphe 2 que : "S'il y a obligation de

24 riposter aux tirs pour défendre les membres de l'unité, des armes

25 similaires doivent être utilisées, des armes similaires à celles qui ont

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1 été utilisées avant cela par les terroristes."

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que ce sont des ordres

3 différents, des instructions de combat normales provenant de l'armée ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, les règlements de combat ne prévoient

5 pas la visite d'observateurs internationaux sur le territoire tenu par

6 l'ennemi. Or ici, c'est précisément ce dont il est question. Un certain

7 nombre de diplomates sont en visite et l'armée, en tant qu'institution de

8 l'Etat, est responsable de leur sécurité. Même si les terroristes

9 interviennent, autrement dit : dès lors que l'on est informé de la présence

10 des diplomates internationaux sur place, l'ordre est donné à l'armée de ne

11 pas ouvrir le feu, même si les terroristes opèrent. Dans ce document, il

12 est bien stipulé que c'est en raison de la présence de la délégation

13 diplomatique que ces ordres sont donnés.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Le capitaine de première classe Mikicevic a été tué à ce moment-là. Vous

16 avez une note à cet effet, n'est-ce pas ?

17 R. Oui, le capitaine Mikicevic a été tué au mois de juillet. C'était mon

18 assistant chargé de la sécurité.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, à ce rythme

20 quand est-ce que vous en allez en finir avec l'année 1998.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'avance le plus rapidement possible, Monsieur

22 Robinson. Comme vous pouvez le constater, je prends les documents dans

23 l'ordre.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'est pas assez rapide, voyez-

25 vous. Vous devez atteindre l'intercalaire 250 ?

Page 41438

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, écoutez, le mois d'août qui vient juste

2 après se termine avec l'intercalaire 177. Quant aux rapports au sujet de la

3 Mission de vérification et autres rapports, je pense que nous pourrons les

4 examiner encore plus rapidement.

5 M. NICE : [interprétation] Les cartes, je ne suis pas sûr que les cartes

6 que nous avons retrouvées jusqu'à présent seraient susceptibles d'aider le

7 témoin pour la zone qui l'intéresse, mais je lui demanderais tout de même

8 de jeter un coup d'œil sur les cartes que j'ai ici en main pendant la pause

9 pour nous dire s'il y en a une parmi celles-ci qui lui permettrait

10 d'annoter les positions qui sont, d'après le témoin, celles où se trouvait

11 Lord Ashdown et d'annoter également le degré de visibilité où de non

12 visibilité à partir de telles ou telles positions. Cela m'aidera à préparer

13 mon contre-interrogatoire. Si ces cartes-ci ne suffisent pas nous

14 continuerons à essayer d'en trouver d'autres.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que ces cartes soient remises au

16 témoin.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

19 faire la pause et, à notre retour, il faudra que vous commenciez à

20 interroger le témoin au sujet de l'année 1999. Ceci sans préjugés, du fait

21 que le cas échéant, en cas de nécessité, nous pourrons revenir à l'année

22 1998.

23 Vingt minutes de suspension.

24 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

25 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

Page 41439

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez

2 continuer, je vous prie.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai cru comprendre qu'il ne fallait plus

4 s'attarder sur l'année 1998, n'est-ce pas, Monsieur Robinson ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact. C'est justement la

6 décision rendue par les Juges de la Chambre.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Je vous demanderais de m'accorder une

8 petite exception concernant un événement étant donné que cela se rapporte

9 au témoignage d'un témoin de M. Nice. Mais j'y viendrai.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. En commençant avec l'année 1999, Général, j'aimerais que vous nous

12 expliquiez quelle a été la carte de fonctionnement qui se rapporte --

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je précise, Monsieur Robinson, qu'il s'agit,

14 non pas du 1er janvier 1998, mais du 1er décembre 1998 et cela va jusqu'au

15 1er avril 1999. Ce planning de fonctionnement englobe un mois dans l'année

16 1998 et plus de trois mois dans le courant de 1999. Je crois que cela fait

17 partie de ce que vous avez autorisé à présenter ici.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Monsieur le Témoin, je vous signale qu'il s'agit de ce qui figure à

20 l'intercalaire 204. Je vous demande de nous l'expliquer brièvement. Nous

21 avons eu un planning de fonctionnement relatif à octobre et novembre 1998,

22 mais je crois que c'est ce qu'on n'a pas voulu prendre en considération.

23 Maintenant, je ne vais pas m'y référer.

24 Général, je vous demande de vous référer au numéro 204.

25 R. Voilà la carte qui constitue le planning du commandant; c'est le

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1 quatrième des plannings.

2 Q. Général, excusez-moi de vous interrompre. Quand vous dites "carte de

3 fonctionnement du commandant," c'est votre carte à vous; c'est vous, le

4 commandant ?

5 R. Oui. Il figure ma signature, dessus et cette carte de fonctionnement

6 était tenue à jour par mon service, par mon commandant chargé du service de

7 renseignements. Il y a, là, les incidents allant du 1er décembre 1998

8 jusqu'au 9 avril 1999. Ici, vous voyez une légende où apparaissent les

9 différents symboles qui indiquent quelles sont les activités déployées vis-

10 à-vis de l'armée, vis-à-vis de la police et vis-à-vis des civils. Cette

11 carte nous permet de voir, également, la représentation des incidents les

12 plus importants. On voit où sont survenus ces incidents, à quelle date ces

13 incidents sont survenus et on peut voir quelles en ont été les

14 conséquences. Cet aperçu nous permet de tirer comme conclusion le nombre

15 d'incidents survenus, s'agissant de l'armée, des policiers et des civils.

16 Un certain nombre d'incidents où il n'y a pas eu de séquelles, pour

17 des raisons de visibilité de la carte, n'a pas été apposé dessus. Mais ce

18 qui est caractéristique, c'est que sur ce territoire au sud, vers la

19 Macédoine, qui est le territoire habité par des Goranci, les incidents ne

20 sont pas survenus du tout.

21 S'agissant, maintenant, d'un grand nombre d'incidents survenus sur le

22 territoire de la municipalité de Suva Reka, je dirais qu'ils se sont

23 produits, notamment, en direction de cette ceinture frontalière.

24 Q. Général, quand vous dites "qu'il n'y a pas eu d'incidents sur le

25 territoire habité par des Goranci", veuillez nous indiquez qui sont les

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1 Goranci pour que tout un chacun sache de qui il s'agit.

2 R. Les Goranci, nous les appelons les Gorani, ce sont --

3 Q. C'est une population musulmane, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, c'est une population musulmane qui s'est convertie à l'islam, il y

5 a deux siècles, mais qui parle la langue serbo-croate. Ce qui a été

6 caractéristique pour eux, c'est qu'ils ont, de tout temps, appuyé, soutenu

7 la Serbie. Ils ont estimé que c'était leur état à eux et ils ont approuvé

8 toutes les mesures émanant des autorités, des organes de l'Etat. Ils ont

9 toujours eu une attitude extrêmement correcte vis-à-vis des membres de

10 l'armée, des militaires.

11 Q. Cette carte nous montre tous les incidents. S'agissant

12 desdits incidents, je dirais que l'armée a disposé d'organes chargés de la

13 coopération avec la Mission de vérification.

14 R. Oui.

15 Q. Etant donné qu'il y a ici bon nombre d'éléments de preuve pour ce qui

16 est des relations avec la Mission de vérification, veuillez nous indiquer

17 quelle a été la substance pour ce qui est des relations avec la Mission de

18 vérification, puisque cela figure dans les documents qui sont présentés

19 ici.

20 R. Nous avons sauté une partie où j'avais envisagé de parler de la période

21 de temps qui a suivi l'arrivée de la Mission de vérification et des

22 événements qui se sont produits. Si on parle du mois de janvier 1999, ce

23 qui est caractéristique dans ces relations, c'est de dire que la Mission de

24 vérification n'a jamais été présente dans le nombre qui a été prévu dans le

25 texte de l'accord.

Page 41442

1 Deuxièmement, il n'a pas été mis en œuvre les différents centres

2 auxiliaires tels que prévus à l'occasion de l'arrivée de la mission pour

3 exercer son rôle, tels qu'envisagés.

4 Autre chose, l'accord prévoyait, de la part de l'armée de

5 Yougoslavie, de déclarer tout déplacement d'unité de la taille d'une

6 compagnie et toute colonne de véhicules à moteur; cela s'est fait à partir

7 du premier jour. Il n'y a pas eu de problème du tout.

8 L'accord avec la mission prévoyait la nécessité pour l'armée

9 d'abandonner tous les sites qu'elles détenaient avant le

10 13 octobre 1999. Il s'agissait de faire laisser une compagnie de la

11 composition mixte dans le secteur frontalier. Pour cette carte-ci, on voit

12 cela; s'agissant de mon unité, il y a quatre sites, trois au nord, vers

13 Decani et Pec. Sur le reste du territoire, il s'agissait de faire rester

14 une unité seulement dans le secteur de Djula, sur l'axe routier entre

15 Prizren et Stimlje et Pristina et une unité dans le secteur de Lapusnik qui

16 constitue l'axe routier Orahovac-Malisevo-Pristina et une unité dans le

17 secteur de Voljak [phon], sur l'axe routier Djakovica-Klina-Pristina.

18 En sus de cela, il s'agissait de faire rester 25 postes de contrôle

19 du MUP, de la police. Tous les autres postes qui devaient assurer le

20 contrôle du territoire, après avoir brisé les forces terroristes, tous les

21 autres postes ont été abandonnés en application de l'accord. La partie

22 adverse, à savoir, les terroristes devaient également, quoique constituant,

23 à l'époque, comme on a pu le voir vendredi, des effectifs de l'ordre de 5

24 000, ils étaient censés rester sur leur position.

25 Mais au fur et à mesure que l'armée abandonnait ces postes, ces

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1 positions étaient occupées par les terroristes.

2 Q. Est-ce que cela a été constaté par la Mission de vérification ?

3 R. Cela a été constaté également par la Mission de vérification. Mais

4 suite à nos demandes de résoudre la question, il nous a été répondu, à

5 chaque fois, qu'il y avait deux courants au niveau des terroristes; un

6 courant qui était favorable à l'application de l'accord, et l'autre qui ne

7 l'était pas. On disait que c'était l'autre courant qui faisait cela.

8 Mais ce qui est caractéristique, une fois de plus, c'est que les

9 terroristes coupaient les voies de communication. Le groupe qui se trouvait

10 à Dulje, cette compagnie à composition mixte devait assurer l'utilisation

11 de cette route. Il y a eu, à plus d'une occasion, des attaques des colonnes

12 qui passaient et la route allant d'Orahovac à Suva Reka était censée être

13 contrôlée par le MUP, mais une fois de plus, il n'y avait aucun contrôle.

14 Entre Orahovac et Dragobilje, il s'agissait d'un point qui a été exempté du

15 contrôle du MUP en raison d'une grande concentration de population civile,

16 a-t-on dit. Mais je vous affirme en toute responsabilité que cela n'était

17 pas vrai du tout. A Dragobilje, il se trouvait, à l'époque, un QG de cet

18 UCK terroriste; c'est là que se trouvait le QG principal et c'est la raison

19 pour laquelle ce point-là a constitué une exception et il ne nous a pas été

20 rendu possible d'exercer un contrôle là-dessus.

21 Entre Orahovac et Malisevo, la police allait jusqu'au

22 col de Troja et Ostrozub en étant accompagnée seulement de véhicules de la

23 Mission de l'observation.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Général, dans votre réponse

25 précédente, il était prévu aux termes de l'accord que l'armée se retire des

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1 positions qu'elle a occupées jusqu'à une certaine date. Pouvez-vous nous

2 dire quelle date aviez-vous à l'esprit ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] L'accord a été signé le

4 13 octobre à Belgrade. Je sais que --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous parlez de 1998 ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, 1998.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] On a sauté cette partie-là; on n'en a pas

9 parlé du tout.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans votre réponse précédente, vous

11 étiez en train de parler de 1999. Je voulais être sûr que vous vous

12 référiez, cette fois-ci, à l'année 1998.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

14 S'agissant de tous ces mois, j'ai dit ce qu'il y avait de caractéristique.

15 Nous avons déclaré toutes les activités des militaires, nous avons déclaré

16 tous les incidents survenus sur le territoire, nous avons parlé des sorties

17 de la Mission de vérification le même jour ou deux ou trois jours plus tard

18 aux fins de vérifier l'incident survenu et ce qui est caractéristique, ce

19 que j'ai mentionné, c'était la prise de ces postes par la partie adverse.

20 Ce qui est caractéristique aussi, je vais l'indiquer, c'est qu'il y a eu un

21 grand nombre de meurtres vis-à-vis de ces villes, notamment, de civils du

22 groupe ethnique albanais de la part des terroristes, tant dans les villes

23 que dans les autres localités habitées, surtout, dans les villages où la

24 population restituait les armes qu'elle avait en septembre et octobre 1998.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Bien, Général. Sur cette carte de fonctionnement, nous avons pu voir où

2 tout ceci s'est produit. Je me propose, maintenant, de vous poser des

3 questions au sujet du témoignage du général Drewienkiewicz au sujet d'un

4 incident très concret.

5 M. NICE : [interprétation] Avant de passer à cela et au sujet des cartes,

6 ce que je voudrais dire, ce sont ces deux choses : tout d'abord, au sujet

7 de cette carte - et je crois que cela concerne les cartes précédentes - le

8 témoin nous a parlé de ce qui s'est produit et c'est ce que nous dit la

9 légende de la carte, mais c'est en cyrillique et je pense que nous n'avons

10 pas de traduction, étant donné que la légende n'est que rarement traduite

11 parce que très souvent, on ne les traduit pas. Si cette carte doit servir à

12 la finalité qui est celle avancée par l'accusé, il conviendrait de savoir

13 ce qui est écrit sur cette carte, y compris, ce qui est écrit en petites

14 lettres et il faudrait que nous nous organisions pour que certains termes

15 soient traduits au niveau de la carte ou qu'on traduise la légende.

16 Deuxièmement, toujours au sujet de cette carte, je tiens à préciser que

17 pendant la pause, nous avons fourni au témoin deux cartes détaillées. Nous

18 en avons une troisième qui n'est pas si détaillée que les deux précédentes,

19 mais elle montre le relief et pendant la pause suivante, je lui demanderais

20 de se pencher sur ces cartes avec l'autorisation des Juges de la Chambre.

21 Peut-être le témoin pourrait-il s'entretenir avec

22 Mlle Dicklich, l'accusé pourrait même être présent pour nous dire quelle

23 est la carte qui lui conviendrait le plus pour faire ce que nous lui avons

24 demandé de faire.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, cela peut être fait

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1 pendant la pause suivante.

2 [La Chambre de première instance se concerte]

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, en effet, il est

4 vrai de dire que cette carte n'a pas de légende traduite. Si cela peut nous

5 être d'une certaine utilité, il faudrait que nous disposions d'une

6 traduction.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai cru comprendre que le

8 témoin avait donné lecture de ce qui était dit en légende. Cela se rapporte

9 à ce qui figure sur la carte, à savoir, la cadence des événements entre

10 décembre 1998 et avril 1999, incidents concernant l'armée, la police et les

11 citoyens, les civils. Les quelques mots d'explication qu'il a prononcés se

12 rapportaient aux insignes ou aux symboles, qui disaient quels étaient les

13 incidents survenus vis-à-vis de la police, de l'armée et des civils.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Peut-être, Général, pourriez-vous nous dire quelles sont les couleurs

16 utilisées s'agissant de l'armée, des militaires, des policiers et des

17 citoyens ?

18 R. La couleur rouge dit qu'il s'agit d'un incident à l'égard de la police,

19 la couleur verte parle d'incidents avec la police et la couleur marron veut

20 dire qu'il s'agissait d'incidents à l'égard de civils.

21 Q. Il y a les couleurs qui diffèrent pour savoir s'il s'agissait de

22 militaires, de policiers ou de civils. Les incidents se trouvent être

23 exactement apposés sur les différentes parties du territoire concernant la

24 période dont nous parlons.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Les choses sont-elles claires, Monsieur

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1 Robinson ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, cela nous sera utile, en effet.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On ne peut pas lire sur cette carte les

4 séquelles des incidents qui sont indiqués en bas de la carte.

5 M. NICE : [interprétation] Pour gagner du temps, pourrions-nous demander à

6 l'accusé de consulter M. Kay au sujet de la traduction du texte en légende

7 et des explications de symboles afin que nous puissions nous servir de ces

8 cartes. Si nous le faisons dans le prétoire, cela nous prendra trop de

9 temps mais si cela n'est pas fait les cartes seront complètement

10 inutilisables.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, je n'ai pas

13 tout à fait compris. Mis à part l'explication apportée par le général

14 concernant les différentes couleurs utilisées, vous voudriez que l'on fasse

15 autre chose encore ?

16 M. NICE : [interprétation] Si c'est ce que vous avez compris, vous

17 comprenez plus vite que moi. En tout état de cause, nous aurions besoin de

18 ce bloc figurant en bas à gauche, la légende qui y est apposée. Mme

19 Dicklich peut nous donner lecture de ce qui est dit. Je puis moi-même

20 comprendre certains passages. On voit des triangles, on voit des cercles.

21 Toujours est-il qu'il nous faut une traduction de ce qui est dit, une

22 traduction orale ou une traduction écrite. Maintenant si les autres

23 références ne se rapportent qu'à des noms, il n'est point nécessaire de le

24 faire traduire. Toujours est-il que ces renseignements nous sont utiles

25 pour ce qui est de toutes les cartes utilisées afin que les personnes qui

Page 41448

1 se pencheront ultérieurement sur celles-ci puissent comprendre tout ce que

2 cela a voulu dire.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, cela me semble tout à fait

5 raisonnable.

6 Bien, Monsieur Milosevic, pourrions-nous vous demander de passer par le

7 biais de l'officier de liaison pour faire assurer une traduction pleine et

8 entière de ce qui figure en légende et de ce qui figure dans les autres

9 parties mentionnées par M. Nice ?

10 Continuons, je vous prie.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'attire votre attention, Monsieur Robinson,

12 sur le fait que la totalité des cartes utilisent les mêmes symboles et le

13 témoin les a déjà expliqués à l'occasion de l'utilisation de la première

14 carte. Il n'y a que les couleurs qui diffèrent s'agissant de la police, des

15 militaires et des civils mais ce sont les mêmes couleurs sur les cartes.

16 M. MILOSEVIC :

17 Q. C'est bien cela, Général ?

18 R. Oui. On s'est servi de la couleur verte pour ce qui est de la police

19 et, pour ce qui est des militaires, du rouge.

20 Q. Et les citoyens, les civils ?

21 R. On a décidé d'utiliser cette couleur brunâtre.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez

23 continuer.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Général, ici, en guise de témoin de la partie adverse, le 11 avril

Page 41449

1 2002, nous avons entendu le témoignage du général Drewienkiewicz, il a

2 témoigné au sujet de l'incident survenu en date du 14 décembre 1998. Il a,

3 ce faisant, déclaré qu'il a vu à l'époque neuf membres de l'UCK morts, y

4 compris une femme, mais il n'a pas vu de prisonniers. Je me propose de vous

5 donner lecture de la page

6 2 851 du compte rendu d'audience qui dit ce qui suit :

7 "L'UCK a fait l'objet de tirs et s'est retirée, 34 membres de l'UCK

8 ont été tués dans cette embuscade. On nous a informé que neuf membres de

9 l'UCK auraient été emprisonnés, y compris une femme, une personne du sexe

10 féminin. Les patrouilles ont photographié des cadavres que l'on a retrouvés

11 à trois sites mais il n'a pas été possible de voir les prisonniers."

12 C'est ce que le général Drewienkiewicz a déclaré. S'agissant de cet

13 événement, je crois, que vous avez apporté un enregistrement vidéo qui

14 reprend l'incident dont il est question sur le mont Pastrik en date du 14

15 décembre. Puis, vous avez filmé les armes que vous avez saisies. J'aimerais

16 que nous visionnions cette vidéo, s'agissant de l'incident du 14 décembre

17 1998. La cabine technique dispose du clip vidéo depuis le tout début.

18 [Diffusion de cassette vidéo]

19 LE TÉMOIN : [interprétation] On voit arriver deux équipes de la

20 Mission de vérification à quelques kilomètres du lieu des événements.

21 C'est sur la carte qu'on leur montre l'emplacement du site des événements.

22 Ici il s'agit de la matinée du 15 décembre.

23 A présent, ils ne pouvaient plus continuer à bord de véhicules et on

24 a continué à pied sur le versant de la montagne Pastrik. Puis, il y a eu un

25 affrontement avec un groupe de terroristes. Vous voyez qu'il y a du

Page 41450

1 brouillard et que des restes de ce groupe de terroristes se sont confrontés

2 à la colonne dont faisait partie cette équipe de vérificateurs.

3 C'est ici que sont morts trois terroristes et une femme terroriste.

4 Cela se situe à quelque deux kilomètres de l'endroit où est survenu

5 l'incident du 14 décembre dans la matinée.

6 On voit un fusil à lunettes six-power, le fusil, le plus moderne

7 qu'il y ait à lunettes, qu'il y ait eu, à l'époque.

8 Ici, on voit les neuf prisonniers qui ont bénéficié d'une assistance

9 et qui sont en train de se chauffer à proximité du feu.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. On peut voir une femme parmi eux ?

12 R. Oui, une femme.

13 Q. Qui c'est qui a fait le feu ?

14 R. Ce sont les soldats.

15 Q. Ce sont les prisonniers au sujet desquels Drewienkiewicz a dit qu'il

16 n'avait pas vu de prisonniers du tout ?

17 R. Ils se sont entretenus avec eux de façon tout à fait normale. Ici, on

18 voit l'argent que portait l'un des fondateurs de l'UCK, Muji Kapici

19 Krasniqi qui a été tué dans cette opération. Il avait 255 000 marks dans un

20 sac.

21 Ici, on voit un fusil américain spécial 9,17 millimètres mis à la

22 disposition uniquement de l'armée américaine. On voit 22 terroristes tués

23 ainsi que les neufs prisonniers.

24 Q. On voit les membres de la Mission de vérification ?

25 R. Ici, on a montré des amorces spéciales pour faire sauter des

Page 41451

1 explosifs à distance, à télécommande.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais que vous nous

3 indiquiez combien fait l'équivalent de 255 000 marks en euros.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] La moitié.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une quantité d'argent

6 impressionnante.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai peut-être omis cela au

8 niveau du clip vidéo, mais avons-nous vu quelque contact que ce soit entre

9 les soldats et les forces de l'UCK ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Que voulez-vous dire ? Entre les

11 prisonniers et les membres de l'UCK ?

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais savoir si les

13 membres de l'OSCE ont pu contacter les prisonniers de l'UCK ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ils se sont entretenus avec eux.

15 Ils étaient à proximité. A proximité, ils se sont entretenus avec les

16 prisonniers.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce qu'on le voit ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais la dernière des séquences du clip

19 est prise en la présence des membres de la Mission de vérification. Ils

20 venaient du centre numéro 1 qui est situé à Prizren.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Du centre régional de cette Mission

23 d'observation numéro 1, à Prizren.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une fois de plus, serait-il

25 possible de revoir ce passage ?

Page 41452

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous pourrions peut-être

2 revoir cette dernière partie du clip.

3 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, l'accusé a

4 identifié la page du compte rendu d'audience. Il a dit 2 851. Il se peut

5 que je me trompe. Je crois qu'il s'agit d'une autre numérotation sur la

6 version électronique.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. La version électronique dit 2

8 849.

9 M. NICE : [interprétation] Oui. Vous êtes très aimable. Merci

10 beaucoup.

11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est daté du 11 avril.

12 M. NICE : [interprétation] En effet.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le clip vidéo qui montre ces

14 prisonniers de l'UCK, la toute dernière partie du clip est à nous faire

15 visionner.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On pourrait commencer à cet

18 endroit-ci, en effet.

19 [Diffusion de cassette vidéo]

20 LE TÉMOIN : [interprétation] On voit que l'un des terroristes a reçu

21 des soins médicaux puisqu'il avait été blessé. Ils sont en train de dire de

22 quelles municipalités ils sont originaires.

23 Les observateurs sont en train de travailler et de faire leur travail

24 quoi, c'est-à-dire de filmer ce qui les intéressait. La voix du journaliste

25 : "Voilà ce qui était retrouvé chez certains terroristes." Voici les

Page 41453

1 amorces spéciales.

2 Voilà, voilà, c'est là que se trouvent les terroristes prisonniers. A

3 deux ou trois mètres, à gauche de l'écran et je suis présent également sur

4 les lieux.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne les vois pas. Vous

6 dites qu'on pouvait les voir sur l'écran.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient à deux ou trois mètres du

8 groupe puisque la conversation qui a été filmée s'est tenue à leur

9 proximité. Cet entretien a été filmé juste avant notre départ parce qu'il

10 fallait compter sur quelques heures de route pour revenir. Les deux équipes

11 devaient reprendre le même chemin --

12 M. LE JUGE BONOMY : [inaudible]

13 LE TÉMOIN : [interprétation] On nous a demandé ce que nous allions

14 faire avec les prisonniers et les morts. Oui, vous vouliez me demander

15 quelque chose ?

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question a été celle de

17 savoir si les gens de la Mission d'observation du Kosovo ont pu

18 s'entretenir avec les terroristes ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont toujours pu s'entretenir avec

20 eux. Cela leur a été rendu possible parce que l'incident est survenu à un

21 endroit, à un segment à 400 mètres de la route. L'endroit où ils étaient

22 debout, c'est à deux ou trois mètres à peine du groupe de terroristes qui a

23 été emprisonné que l'on a vu assis à proximité du feu. Ils étaient en train

24 de se concerter pour ce qui est du chemin du retour, donc, les équipes qui

25 devaient s'en aller et nous qui étions censés transporter les cadavres et

Page 41454

1 emmener les prisonniers vers un autre axe où des véhicules nous

2 attendaient. C'était juste avant la tombée de la nuit et nous, nous avons

3 fini notre travail seulement à une heure du matin. Ce n'est qu'à une heure

4 du matin que nous sommes arrivés jusqu'à nos véhicules. C'est à ce moment-

5 là que nous sommes arrivés aux véhicules.

6 M. NICE : [interprétation] Je crois que nous n'avons pas de numéro

7 d'intercalaire pour cette vidéo. Les éléments présentés ici semblent

8 indiquer que ceci vient d'une seule source et que le caméraman fournissait

9 deux sources. Néanmoins, il serait utile de voir à quel numéro correspond

10 ce document ?

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, quel est le

12 numéro d'intercalaire de cette vidéo, s'il vous plaît ?

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela doit correspondre au

14 numéro 216, Monsieur Robinson.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout ceci a été filmé le 15 décembre;

16 c'est exact ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact. Le 15 décembre, une équipe

18 de la télévision de Prizren - je connais, à la fois, la personne qui parle

19 et la personne qui a produit ce film - ceci a été diffusé à la télévision

20 nationale. C'est, en réalité, un film beaucoup plus long qui a été diffusé

21 et le réalisateur de ce film était Boris Ugrinovic et le caméraman était

22 Sanjevic.

23 M. NICE : [interprétation] S'il s'agit simplement d'une version plus courte

24 de la version diffusée à la télévision, peut-être que ceci répondra à la

25 question de M. le Juge Bonomy; néanmoins, le film dans son intégralité dont

Page 41455

1 doit pouvoir se procurer l'accusé et le témoin, la version plus longue

2 pourra peut-être traiter de cette question.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Existe-t-il une version plus longue

4 de ce film ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] A la télévision de Belgrade, effectivement, je

6 pense qu'on doit trouver ce film. Certainement. J'y étais, moi-même,

7 j'étais présent. Je suis arrivé à la tête d'une colonne de 10 soldats, 20

8 minutes plus tôt et nous sommes arrivés

9 20 minutes avant cette colonne qu'on pouvait voir dans le film. J'étais là

10 pendant toute la durée de tout ceci.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit, ici, de quelque chose qui a

12 été réalisé par la télévision de Prizren et ensuite, vous parlez de la

13 télévision de Belgrade. Est-ce que les deux étaient en cheville ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit, là, des studios de radio et de

15 télévision serbes. Il s'agissait d'un studio de la télévision qui se

16 trouvait à Prizren.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Général, tout ce que nous venons de voir dans ce film, tout ceci a-t-il

19 été filmé en même temps, au même endroit, ce jour-là, lorsque les

20 prisonniers étaient autour du feu et que les vérificateurs étaient

21 présents ? Est-ce que tout ceci a été filmé au même endroit ?

22 R. Oui, tout ceci. Vous avez vu la colonne en train d'arriver. Vous avez

23 vu les combats en direct. Ceci se trouvait à deux kilomètres de cet

24 endroit-là et les vérificateurs étaient présents. A deux kilomètres de là,

25 se trouve l'endroit où a été filmé par la suite et toujours le même jour,

Page 41456

1 le 15 décembre.

2 Q. Autrement dit, c'est l'endroit où se trouvaient les vérificateurs ?

3 R. Oui, c'est effectivement l'endroit où se trouvaient les vérificateurs.

4 Q. C'est à cet endroit-là que se trouvaient les prisonniers terroristes ?

5 R. C'est exact.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que les prisonniers ont été

7 capturés le 14; c'est exact, lorsque 34 personnes ont été tuées ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Trente six personnes ont été tuées et neuf ont

9 été faites prisonnières. J'ai, également, parlé --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'agit-il du 14 ? Je souhaite

11 simplement avoir une date exacte.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai besoin davantage de temps, si vous voulez

13 savoir comment les événements se sont enchaînés, précisément.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons vu un affrontement dans ce

15 film qui a eu lieu le 15, où trois terroristes ont été tués. Mais

16 l'incident principal au cours duquel les prisonniers ont été emmenés, cet

17 incident a eu lieu le 14 ou me suis-je trompé ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, peut-être que je me suis mal exprimé.

19 L'incident a eu lieu dans la matinée du 14 et ce film a, également, été

20 tourné le 14, mais ce film a été tourné l'après-midi. Néanmoins, il s'agit

21 toujours du même jour. Il y a eu trois incidents. Le premier incident a eu

22 lieu le 14, à 14 heures 30; le deuxième incident a eu lieu vers 16 heures

23 et le dernier incident a eu lieu ici, à cet endroit-là, à 17 heures 30.

24 Entre 20 heures et

25 21 heures, nous en avons informé les membres de la mission. Nous les avons

Page 41457

1 attendus et nous sommes partis vers 23 heures. Il nous fallait du temps,

2 peut-être quelques deux heures pour arriver à l'endroit en question.

3 Ensuite, ces activités se sont déroulées, nos activités --ou celles des

4 vérificateurs et ceci a duré une heure trente, environ. Une heure avant la

5 tombée de la nuit, ce jour-là, le 14, tout était terminé. Je me suis

6 trompé, je me suis mal exprimé; tout s'est passé le même jour.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment vous-même ainsi que l'équipe

8 de tournage êtes-vous arrivé sur les lieux ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit que nous sommes partis à 11

10 heures et nous sommes arrivés -- je ne peux pas être très précis ici, je ne

11 peux pas vous donner les minutes exactes, mais nous étions là entre 13

12 heures et 14 heures.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous étiez là avant ces événements

14 importants qui ont conduit à la mort de 36 personnes ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] L'incident le plus important a eu lieu à 5

16 heures 30 du matin, ce jour-là. Je suis arrivé quelques heures après cela.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qu'on peut lire dans le compte

18 rendu d'audience est ceci : "Il y a eu trois incidents : le premier a eu

19 lieu le 14, à 14 heures 30; le deuxième incident a eu lieu vers 16 heures

20 et le dernier incident a eu lieu vers

21 17 heures 30." Il s'agit, là, des premières heures du matin ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'accord.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ceci a eu lieu dans les premières heures

25 du matin.

Page 41458

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quel moment ces neuf prisonniers,

2 ces neuf personnes ont-elles été faites prisonnières ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] A 5 heures 30 du matin.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les corps que nous avons vus dans le

5 film, ces personnes étaient déjà mortes à 5 heures 30 du matin; c'est

6 exact ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] A 5 heures 30. Environ,

8 5 heures 30 car les combats faisaient rage à ce moment-là et c'est à ce

9 moment-là que l'incident a eu lieu et les combats se déroulaient toujours.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup parce que ceci n'était

11 pas très clair.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Général, pourriez-vous nous décrire en quelques lignes, s'il vous

14 plaît, le détail de ces incidents; nous avons vu le film et tout ce qui a

15 été filmé ce jour-là, immédiatement après les incidents. Pourriez-vous nous

16 dire exactement où se trouve cet endroit, d'où venaient ces groupes

17 d'hommes, ce qu'ils ont rencontré et comment cet affrontement a eu lieu ?

18 R. Ce groupe d'hommes venait d'Albanie. Pastrik, du mont Pastrik. Ils

19 étaient près de Liken. Ils ont traversé la frontière, ils ont pénétré dans

20 notre territoire. Ils sont entrés et ont parcouru trois kilomètres,

21 environ. A 2 heures 30 -- entre

22 2 heures et 2 heures 30, il y a eu le premier affrontement avec l'armée.

23 L'armée ne savait pas, à ce moment-là, de quel type d'hommes il s'agissait

24 car ils n'ont vu que quatre hommes et c'étaient leurs éclaireurs qui les

25 ont vus. Lorsqu'on leur a demandé de s'arrêter, ils ont tiré et l'armée a

Page 41459

1 riposté et l'officier de permanence a été informé immédiatement ainsi que

2 moi-même. Mais à ce moment-là, nous ne savions pas à qui appartenait ces

3 hommes, à quelle force ils appartenaient.

4 Le groupe terroriste est reparti en Albanie à ce moment-là. Ils ont

5 rencontré d'autres personnes chargées de la sécurité à la frontière qui se

6 trouvaient là, mais il n'y a pas eu d'affrontements directs. Il y a

7 quelques mètres entre eux, si on regarde le sentier.

8 Etant donné que ce groupe était en état d'alerte -- il faut savoir

9 qu'il s'agit là d'une montagne et qu'il y avait de la brume -- ils ont

10 demandé qui va là; ils pensaient peut-être qu'il s'agissait de nos propres

11 forces. On a commencé à tirer. Ces personnes au poste-frontière ont riposté

12 et on a utilisé des mines

13 parce qu'il s'agissait d'éléments utilisés pour protéger la frontière;

14 néanmoins, les terroristes n'ont pas encore subi de pertes en hommes

15 encore, à ce moment-là. Ce n'est que lors du premier affrontement.

16 Plus tard, nous avons vu que les terroristes se sont débarrassés de

17 140 sacs à dos comportant des munitions et différents types de matériel

18 spécial. Après quoi, rien ne s'est produit avant

19 5 heures 30. Les terroristes sont retournés à la frontière. Il y avait 40

20 centimètres de neige et ils se sont déplacés le long de la vallée et ont

21 rencontré, à ce moment-là, les hommes qui gardaient la frontière. Ils

22 étaient en état d'alerte, ils ont demandé, qui va là et les terroristes ont

23 commencé à tirer. L'armée qui avait pris position a tiré et a utilisé les

24 mines dont elle disposait. Les combats se sont poursuivis entre une demi-

25 heure et 40 minutes. J'ai donné des ordres pour que les unités militaires

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1 qui se trouvaient à deux kilomètres de là puissent venir en renfort.

2 Les terroristes que nous avons vus ici, qui ont été tués ici ainsi

3 que ceux qui ont été blessés ici se trouvaient dans une zone de quelques

4 200 à 300 mètres, ils sont restés dans ce secteur. Certains terroristes

5 sont retournés en Albanie. Un autre groupe de terroristes tirait et se

6 retirait dans les villages, surtout dans le village de Kusni; alors qu'un

7 autre groupe de terroristes - parce qu'il y a eu des combats, par la suite,

8 ici - mais certains groupes sont arrivés au village de Planeja où le

9 commandant d'une de nos compagnies mixtes se trouvait; il y a eu des

10 combats à cet endroit-là et deux hommes ont été tués, deux terroristes.

11 Q. Ce groupe comportait combien d'hommes ? Ce groupe qui venait d'Albanie,

12 était-il important et d'après ce que vous avez appris de la bouche des

13 prisonniers et d'après ce que vous avez pu constater, vous-même ou vos

14 unités, quelle taille faisait ce groupe ?

15 R. D'après les sacs à dos et c'est ce qu'on dit les prisonniers, le groupe

16 avait quelques 145 hommes.

17 Q. Combien de nos soldats se trouvaient là qui protégeaient la frontière ?

18 R. Là où l'incident essentiel a eu lieu, c'est ici, vers

19 5 heures, il y avait six soldats et un sous-officier; sept hommes, au

20 total. Egalement, dans les autres endroits, il y avait six soldats

21 respectivement et un sous-officier ou un officier.

22 Q. Il s'agissait là des hommes qui assuraient la sécurité le long de la

23 frontière, ce qui correspond, à peu près, à un escadron, voire peut-être

24 même moins.

25 R. Moins qu'un escadron.

Page 41461

1 Q. Je dois dire --

2 R. Je dois dire que cette colonne était composée d'une unité spéciale; il

3 y avait 40 officiers qui rentraient d'Albanie et qui avaient été à un camp

4 d'entraînement en Albanie. Ils avaient du matériel très spécialisé.

5 Q. Merci, Général. Nous allons, maintenant, passer à ce qui s'est passé en

6 1999. Mais simplement une question préliminaire avant de vous parler de

7 cela : il y a énormément de cartes qui nous servent de documents de travail

8 ici, un certain nombre de documents qui indiquent ce que faisait l'armée au

9 jour le jour ainsi que bon nombre de documents et de cartes qui indiquent

10 quels étaient les déplacements de l'armée au cours de cette période. Est-ce

11 exact ou non ?

12 R. Oui. Comme en 1998, l'armée avait ses propres missions.

13 Q. Général, toutes ces activités de l'armée se trouvent consignées dans

14 des documents en matière de positions, d'endroits et l'objet des

15 déplacements de ces hommes. Si vous tenez compte de tout ce qui s'est passé

16 en 1998 et au début de l'année 1999, tous ces déplacements de l'armée, est-

17 ce que c'est quelque chose qu'on peut résumer ? Peut-on dire succinctement

18 pourquoi l'armée s'est déplacée ainsi, quels étaient ses objectifs, quels

19 étaient les objectifs militaires et pourquoi les hommes étaient déplacés

20 d'un endroit à un autre et pourquoi ils se sont livrés à certaines

21 activités ?

22 R. Après l'accord et après cette mission, l'armée est retournée à la

23 caserne, à l'exception de sept localités qui se trouvaient le long de la

24 frontière; le long de la frontière, il fallait assurer la sécurité. Sur la

25 frontière elle-même, il y avait certaines unités qui avaient été déployées

Page 41462

1 à cet endroit-là. Mais toutes les autres activités de l'armée étaient des

2 activités purement régulières. Il s'agissait d'assurer la sécurité autour

3 de la frontière entre les états et il s'agissait d'approvisionner en armes

4 ces unités, dans ce secteur et il s'agissait, également, de protéger leurs

5 propres installations. Il s'agissait, également, de se livrer à des

6 entraînements.

7 Q. Merci, Général. Telles étaient les tâches de l'armée. C'est

8 effectivement ce que faisait l'armée.

9 R. Oui, tout à fait.

10 Q. Merci, Général. Nous allons, maintenant, parler en détail des

11 événements de l'année 1999. Vous avez adopté un ordre qui a été donné le 3

12 janvier 1999 que vous avez envoyé à vos compagnies mixtes. Ceci se trouve à

13 l'intercalaire 251.

14 R. Oui, oui, j'ai trouvé cet intercalaire.

15 Q. Vous avez envoyé cet ordre à toutes les compagnies mixtes ?

16 R. Oui.

17 Est-ce qu'on peut retirer cette carte maintenant pour que je puisse

18 montrer ce dont il est question maintenant ?

19 R. Vous avez besoin dans la carte qui se trouve en dessous ?

20 R. Oui.

21 L'INTERPRÈTE : Est-ce que l'accusé veut bien se rapprocher du microphone,

22 s'il vous plait.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez parler dans

24 le microphone, s'il vous plaît, de façon à ce que les interprètes puissent

25 vous entendre.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Kwon.

2 M. MILOSEVIC : [interprétation]

3 Q. Général, avons-nous toujours besoin de cette carte qui nous sert

4 de document de travail et qui parle de la période qui va jusqu'au mois

5 d'avril ?

6 R. Pendant la pause, je vais retrouver cette carte qui est à plus grande

7 échelle et je la placerai à cet endroit-là. Néanmoins, j'ai besoin de

8 celle-ci pour montrer où se trouve ces quatre sur sept, ces quatre

9 compagnies mixtes qui, d'après l'accord, ont eu l'autorisation d'être

10 stationnées à cet endroit-là. L'ordre qui se trouve dans l'intercalaire

11 numéro 251, cet ordre leur a également été envoyé.

12 Q. Quoi qu'il en soit, il est dit, ici, qu'il s'agit de renforcer la

13 surveillance sur ce qui semble être les points d'attaque des Siptar et des

14 forces terroristes. Ceci est ce que vous avez expliqué un peu plus tôt sur

15 la manière dont le contrôle le long de la frontière était effectué.

16 R. Oui.

17 Q. Bien.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Général, pourriez-vous nous dire ce

19 qu'est une compagnie mixte, s'il vous plaît ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après l'accord, une compagnie n'est pas une

21 unité, à proprement parler. Elle était composée, à la fois, de membres de

22 l'infanterie, d'éclaireurs et des membres de l'artillerie et au niveau du

23 bataillon, il y avait surtout des mortiers. C'est pour cela que cette

24 compagnie s'appelle une compagnie mixte, car elle regroupe différentes

25 unités. Mais elle représente ou a le même effectif qu'une compagnie, entre

Page 41464

1 quelque 120 et 150 hommes. Cela dépend de la situation.

2 Ici sur la carte, on voit la composition exacte de celles-ci, de ces

3 compagnies, j'entends.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Général, parmi les documents que vous nous avez présentés se trouve un

6 extrait également qui est extrait du rapport fourni par les services de

7 Renseignement de façon hebdomadaire sur la surveillance électronique entre

8 la mi-décembre et la mi-janvier 1999. Des incidents en particulier sont

9 relatés au jour le jour, par exemple, le 12 janvier à midi 50, sur la

10 fréquence utilisée par la Croix Rouge, les communications ont été

11 remarquées entre les participants des personnes parlant Siptar sur l'envoi

12 de véhicules, s'agissant sans doute d'un convoi humanitaire.

13 Qu'est-ce que vous pouvez en déduire d'après ce que vous lisez ici eu

14 égard au début de l'année 1999 ? Il s'agit ici d'un extrait du rapport

15 fourni par les services de Renseignement sur la surveillance électronique.

16 M. NICE : [interprétation] Quel numéro d'intercalaire, s'il vous plaît ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] 252.

18 M. NICE : [interprétation] Merci beaucoup.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] "Le 12 janvier, sur la fréquence autorisée

20 pour la Croix Rouge des informations ont été échangées en langue

21 albanaise." Ce que nous savons, c'est que des terroristes suivaient ces

22 convois humanitaires et s'arrogeaient une partie de cette aide humanitaire.

23 Certains convois humanitaires se dirigeaient directement vers les

24 terroristes.

25 Il est indiqué ici également que : "L'UCK -- que la radio illégale de

Page 41465

1 l'UCK a rapporté que l'état-major de l'UCK a adopté une conclusion en

2 déclarant que les soldats qui refusaient de se retirer du Kosovo le 1er mars

3 de cette année perdront le droit d'être mis en liberté." Il s'agit de

4 soldats de l'armée yougoslave.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Sur cette même page, on peut lire que : "Le 11 janvier, il y a eu des

7 affrontements avec l'armée yougoslave," et qu'ils parlent des pertes subies

8 par l'ennemi. Il s'agit de soldats et ils disent que l'opération a réussi.

9 R. Ils ont déclaré : "Au cours des deux derniers mois, ils ont

10 infligé des pertes à l'ennemi," à savoir nos forces, "28 personnes blessées

11 et neuf tuées," et qu'eux-mêmes n'avaient qu'une personne de tuée et

12 quelques personnes blessées. Dragobilje, c'est là que se trouvait le QG de

13 l'UCK, des terroristes à l'époque. Je ne peux pas vous dire avec exactitude

14 si oui ou non nous avons subi des pertes. Ici, on compte les membres de

15 l'armée et les membres du MUP ensemble. Cela est fort possible. Nous avons

16 pu subir des pertes car il y avait beaucoup d'embuscades à ce moment-là, et

17 nous avons peut-être perdu des hommes.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quand ces affrontements ont-t-il

19 commencé, le 11 janvier ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'est pas précisé ici. Ce qui est

21 indiqué, c'est que le 11 janvier ils surveillaient l'arrivée du MUP et de

22 l'armée dans la région. Il dit également qu'au cours des deux derniers

23 mois, au cours d'affrontements des pertes ont été infligées à l'armée et

24 qu'il y a eu 28 personnes blessées et neuf personnes tuées. Cela ne se

25 rapporte pas à ce jour-là.

Page 41466

1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je continuer, Monsieur Robinson ?

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais il eut été utile

3 d'entendre comment cet affrontement a commencé, qui est à l'origine de cet

4 affrontement et des questions de ce type ?

5 Poursuivez.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Bien. Général, des affrontements comme ceux qui font l'objet de ce

8 rapport ici, qui est à l'origine de ces affrontements ?

9 R. En général, au cours de cette période ce qui se passait généralement,

10 c'est que ces affrontements avaient lieu sur la route. Il y avait des

11 embuscades, des colonnes de l'armée ou de la police ont été prises en

12 embuscades. Il y avait des mines et des attaques provenant de points

13 particuliers. On entend ici qu'ils ont infligé un nombre important de

14 pertes à nos forces et que les pertes subies par eux étaient minimes.

15 R. Oui. Ils ont dit qu'il n'avait qu'un seul qui ait été tué et plusieurs

16 personnes blessées.

17 Q. Parlons maintenant de cette partie-ci du rapport qui se trouve à la

18 page suivante et qui parle du nombre d'Albanais qui ne savaient ce qu'ils

19 devaient faire, s'ils devaient rejoindre l'UCK puisqu'on les envoyait dans

20 les endroits les plus difficiles, les plus risqués sans doute pour

21 augmenter les effectifs de leur armée et que bons nombres de familles

22 cachaient leurs fils car elles estimaient qu'il valait mieux que leurs fils

23 restent en vie plutôt que de se préoccuper de ce qu'en pensaient les

24 voisins. Ils espéraient qu'avec l'aide de l'OTAN, ils pourraient mettre en

25 place un Kosovo ethniquement pur cette année-là. C'est en tout cas ce qui

Page 41467

1 avait été diffusé dans les médias albanais.

2 R. Oui et il est indiqué qu'ils ne cesseraient jamais leurs attaques

3 armées et ne cesseraient jamais avant que le Kosovo soit entièrement libéré

4 et entièrement Siptar.

5 Q. Mais ils ont parlé de l'appui de l'OTAN.

6 R. Oui.

7 Q. A la page suivante, il est précisé qu'au mois de janvier : "Le 6

8 janvier, des informations ont été fournies en vertu de quoi les Siptar

9 allaient accueillir le directeur de la Mission de vérification au Kosovo et

10 que les Siptar de la région de Podujevo surveillaient de très près tout

11 mouvement de la VJ et du MUP et qu'ils les empêchaient d'attaquer et

12 surveillaient toutes les municipalités, aucune information directe pour les

13 représentants de l'UCK et le mouvement de nos forces."

14 Est-ce ce que vous avez vécu vous-même au moment des événements

15 auxquels vous avez pris part ?

16 R. Tous les mouvements de mon unité, chaque véhicule qui quittait les

17 casernes était escorté par les vérificateurs. Il y avait deux entrées et

18 deux sorties des casernes et il y avait des véhicules qui appartenaient aux

19 vérificateurs qui étaient à l'opposé de ces points d'entrées et de sorties.

20 Toutes les fois qu'un véhicule ou une colonne de véhicules partait pour

21 aller s'approvisionner, un véhicule escortait la colonne à l'avant et un

22 autre en arrière.

23 Q. Vous nous avez expliqué de quelles façons nos unités se sont déployées.

24 Vous avez dit que le Grand quartier général se trouvait dans les environs

25 de Dragobilje. Sur la dernière page de ce document, il est question des

Page 41468

1 Siptar et nous lisons : "Nous avons appris que le Grand quartier général se

2 trouvait toujours dans les environs de Dragobilje, non loin de Malisevo."

3 R. Oui.

4 Q. "Nous avons appris également que c'est là que se trouvait le centre

5 principal d'entraînement qui abrite un grand nombre de soldats et des

6 quantités d'armes importantes." Est-ce que ce dont il est question ici ce

7 sont bien des préparatifs ? Puis, un peu plus loin, nous lisons : "Il a été

8 vérifié, le 13 janvier, que des opérations militaires importantes sont en

9 cours de préparation de la part de l'UCK. Là-bas se trouvent des armes

10 importantes, des préparatifs sont en cours avec l'aide d'avions qui

11 transitent par l'Italie et portent l'inscription 'militaire OTAN'. Ces

12 avions amènent des instructeurs qui participent aux entraînements. Les

13 renforts viennent par voie aérienne, contrairement à ce qui se passait au

14 cours de l'été où ils venaient par voie terrestre ou à partir de l'Albanie

15 par voie maritime." Il est dit que : "La guerre ne dépend pas des Siptar ou

16 des Serbes mais bien de l'Amérique." Ensuite, il est dit que : "Les Siptar

17 vont remporter finalement la victoire."

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question, Monsieur Milosevic, le

19 temps de la question est arrivé.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Que savez-vous à ce sujet ? Nous avons reçu ces rapports. Que disent-

22 ils, s'agissant des commandants de bridage ?

23 R. Nous savons que le Grand quartier général se trouvait à Dragobilje

24 parce qu'en raison de l'accord conclu, l'armée ne pouvait pas s'y rendre.

25 C'était également une zone interdite pour les forces de la police du MUP.

Page 41469

1 Quant aux centres d'entraînement en Albanie, nous en avions déjà identifié

2 un certain nombre précédemment. Cela n'avait rien de nouveau à nos yeux.

3 Nous savions aussi que l'armée albanaise avait fourni des armes lourdes à

4 ces terroristes à des fins d'entraînement.

5 Q. En bas de page, on lit mal la date qui est noircie, mais on voit qu'il

6 s'agit tout de même de janvier. On ne peut pas préciser le jour. Il est

7 dit, je cite : "Ils ont appris que le directeur de Maljoku, directeur du

8 centre d'information du Kosovo avait été tué par les terroristes parce

9 qu'il soutenait et fréquentait des gens qui ont disparu de la même façon

10 que lui, l'été dernier. Ce sont des rumeurs et selon ces rumeurs, le

11 responsable principal serait Siptar." Que savez-vous de cela, Général ?

12 R. Nous savions que des gens du parti d'Ibrahim Rugova durant l'année 1998

13 et plus précisément au cours de 1999, s'étaient ajoutés à des civils

14 albanais pour trouver une solution aux négociations sur le Kosovo. Tous ces

15 gens-là étaient des cibles potentielles pour l'UCK et pour les groupes

16 chargés des liquidations qui avaient des listes de noms et parmi ces noms,

17 on trouve un certain nombre des membres du parti d'Ibrahim Rugova.

18 Q. Merci, Général. Dans le rapport quotidien du 8 janvier, il est dit qu'à

19 Rznic et à Saptej dans la municipalité de Decani, des provocations ont été

20 faites à l'égard de membres du MUP sans victimes du côté du MUP. Que nous

21 apprend, par ailleurs, ce rapport ?

22 R. Ce rapport ?

23 Q. Il vient du commandant de votre brigade ?

24 R. Oui, oui. Au début --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quel est l'intercalaire, Monsieur

Page 41470

1 Milosevic ? 253 ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est l'intercalaire 253.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est dit que dans les jours qui viennent, au

4 mois de janvier, à partir de Prizren, on s'attend à voir arriver un grand

5 nombre de membres des formations albanaises terroristes par le passage

6 frontière de Vrbnica, et que le cas échant, cela se fera grâce à des

7 attaques combinées contre l'armée et la police yougoslave. Voilà, je vous

8 montre Vrbnica sur la carte. Il est dit que s'il faut une attaque en

9 provenance du territoire albanais, il sera organisé une attaque en

10 provenance du territoire yougoslave pour assurer le passage de la frontière

11 par ce groupe important.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Que veut dire "groupe important ?" Est-ce que c'est un groupe similaire

14 à ce qu'on avait vu sur les images vidéo, il y a peu, à savoir 150 hommes à

15 peu près ?

16 R. Il s'agissait d'hommes qui rentraient de leur période d'entraînement et

17 qui se comptaient en "plusieurs centaines."

18 Q. C'est encore plus important que le groupe précédent.

19 Bien, le document suivant est en rapport ou traite des organes de

20 sécurité qui mettent en garde contre des opérations des forces Siptar. Ce

21 document est adressé au commandement de votre brigade, n'est-ce pas ?

22 R. C'est mon nouvel assistant chargé de la sécurité qui a succédé au

23 capitaine Mikicevic. Il met en garde personnellement l'unité immédiatement

24 subordonnée qui se trouvait sur le mont Pastrik en lui annonçant que dans

25 le secteur de Krajk [phon], un groupe de soldats de l'UCK portant

Page 41471

1 l'uniforme des soldats yougoslaves a été vu.

2 Nos hommes sont avertis qu'il faut qu'ils tiennent compte de cela pour ne

3 pas être surpris.

4 Q. Vous êtes l'auteur du rapport relatif aux opérations des forces

5 terroristes Siptar en date du 15 janvier 1999. Dans ce rapport, vous dites

6 que : "Vous disposez d'informations selon lesquelles sur ordre du Grand

7 quartier général terroriste des groupes plus importants ont été créés." Que

8 contient votre rapport en dehors de cela ? Intercalaire 255.

9 R. Mon rapport était adressé à la direction d'un groupe qui se trouvait

10 dans le secteur du mont Planeja. Il est dit dans ce rapport qu'aux environs

11 du 15 janvier, on s'attend à ce que ce même groupe passant par le village

12 de Samodraze, Velika Krusa, Rogovo et allant vers la frontière, va sans

13 doute franchir la frontière entre Karaula Gorozup et Karaula Liken.

14 Autrement dit, dans cette direction que je vous indique sur la carte ici.

15 Q. Est-ce que ces prévisions se sont avérés juste, les renseignements que

16 vous aviez reçus se sont-ils avérés exacts ?

17 R. Il est dit dans ce texte que : "Tout devait commencer le 15." Or, dans

18 la réalité, cela s'est passé quelques jours plus tard.

19 Q. Merci, Général. Nous avons à l'intercalaire 256, un document qui émane

20 de Vladimir Stojiljkovic, votre supérieur ?

21 R. Oui.

22 Q. De quoi est-il question dans ce document ?

23 R. Il y est dit qu'un groupe de terroristes, juste à côté du lac en

24 contrebas de Karaula Gorozup, à 200 ou 300 mètres en contrebas, juste à

25 côté du l'accusé, étant donné que l'eau s'était un peu retirée ou asséchée,

Page 41472

1 a fait une tentative d'entrer sur notre territoire et a rencontré une mine.

2 La mine a sauté. Un terroriste a sans doute été blessé. Donc, ils ont

3 rebroussé chemin pour retourner d'où ils venaient.

4 Q. Général, vous faites une analyse des actions qui ont eu lieu en

5 profondeur sur le territoire en date du 17 janvier 1999. Cette analyse,

6 vous la faites passer au commandement du Corps d'armée. De quoi traite

7 cette analyse ? On la trouve à l'intercalaire 258.

8 R. Oui, ceci est en rapport direct avec l'avertissement que l'on trouvait

9 à l'intercalaire 255. Ici, le Corps d'armée est informé du fait qu'au cours

10 des derniers jours, dans la nuit du 15 au 16 et dans la nuit du 16 au 17,

11 puisqu'on s'attend à l'arrivée de forces terroristes nombreuses sur notre

12 territoire dans cette période, il est décidé de renforcer les forces qui

13 assurent la sécurité de la frontière de l'Etat en profondeur, le nombre des

14 gardes frontières est passé de cinq à huit. Du 15 au 16, il n'y a pas

15 tentatives de franchissement illégal de la frontière, mais du 16 au 17, aux

16 environs de 21 heures, un groupe terroriste d'environ 15 hommes a fait une

17 tentative d'incursion sur notre territoire.

18 Q. Vous envoyez un autre rapport au commandement de la brigade,

19 intercalaire 259, où il est question d'un groupe d'une centaine de

20 terroristes. Vous y parlez d'armes modernes à la disposition de ces

21 terroristes. Qui vous fournissaient les renseignements que vous

22 transmettiez ? Ces renseignements, pouviez-vous les considérer comme dignes

23 de foi ?

24 R. Avant de transmettre les renseignements reçus, ils étaient toujours

25 vérifiés. Quand une brigade transmet des renseignements au niveau inférieur

Page 41473

1 de la hiérarchie, cela signifiait avec une totale certitude que le

2 commandant de la brigade a vérifié l'exactitude de ces renseignements. Nous

3 avons déjà vu des rapports émanant de la surveillance électronique et du

4 MUP qui étaient nos deux sources d'information.

5 Q. Quelques jours plus tard, vous faites une nouvelle analyse. On peut

6 conclure de tout cela que vos analyses se faisaient pratiquement toutes les

7 semaines ou tous les dix jours. Quelle était la régularité de vos analyses,

8 Général ?

9 R. Ces analyses étaient réalisées après tout déplacement de l'unité, si

10 elle sortait de la caserne pour aller apporter son aide aux unités qui se

11 trouvaient sur le terrain en profondeur de la frontière.

12 Q. Chaque fois qu'il y avait un déplacement, il y avait un rapport, une

13 analyse ?

14 R. Oui, chaque fois.

15 Q. Très bien. Il est question, dans tous ces documents, des opérations

16 menées en profondeur à partir de la frontière; vous envoyiez ces documents

17 au commandement du corps d'armée. Prenons l'intercalaire 260 qui est un

18 document assez long; que contient-il ?

19 R. Il dit qu'un groupe de terroristes, comptant, environ, une trentaine de

20 membres, a fait incursion sur le territoire de notre pays, qu'il a franchi

21 la ligne gardée par les gardes frontières et est entré, un peu plus loin,

22 en conflit avec d'autres gardes frontières qui étaient placés plus à

23 l'intérieur du territoire; trois terroristes ont été tués, de nombreux

24 équipements abandonnés et les traces nombreuses parlent de la qualité des

25 équipements dont disposaient ces hommes. Ce qui est caractéristique ici,

Page 41474

1 c'est que l'unité, qui a quitté la caserne pour apporter son aide aux

2 gardes frontières, s'est trouvée non loin du village de Dedaj et a trouvé,

3 dans ce village deux véhicules; une camionnette Volkswagen sans plaque

4 d'immatriculation et le deuxième était un camion Zastava avec des bancs en

5 bois prêts à transporter des êtres humains. Ces deux véhicules attendaient

6 dans le secteur du village de Ljubizda. C'était dans ce secteur de Ljubizda

7 et ces véhicules attendaient les terroristes pour les transporter plus

8 loin.

9 Q. Ce document est très complet, très détaillé, l'analyse est très

10 fouillée. On voit tout le détail des équipements abandonnés. Ensuite, on a

11 l'intercalaire 261 où on voit quelles sont les mesures supplémentaires qui

12 sont prises en urgence pour assurer la sécurité. Est-ce que ce document est

13 la conséquence de la constatation faite antérieurement, que la situation se

14 dégrade ?

15 R. Pour le document précédent, j'aimerais encore ajouter quelques mots. Il

16 est question, dans ce document, d'un incident survenu le 28, à Rogovo. Le

17 document du 27 est lié à cet autre incident car les hommes qui ont été

18 blessés et les terroristes qui ont réussi à s'enfuir de cette zone ont,

19 ensuite, été transportés jusqu'à Rogovo. Il y a eu, à ce moment-là, une

20 opération antiterroriste des forces du MUP qui a causé la mort de

21 24 terroristes, si je ne m'abuse. Plus tard, on a constaté qu'il y avait,

22 parmi eux, des blessés de l'incident du 27, donc, de l'incident précédent.

23 Ce qui est caractéristique, s'agissant de cette embuscade du 27, c'est que

24 Drago Rama, commandant de la

25 134e Brigade de l'UCK a été tué. Il a, d'abord, été blessé et il a,

Page 41475

1 ensuite, succombé à ses blessures.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, l'heure de la

3 pause est arrivée. Vingt minutes de suspension.

4 --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

5 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous

7 pouvez continuer.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Général, les questions récentes concernent l'année 1999 que nous

11 traitons en détail, mais je vais, tout de même, essayer de gagner du temps

12 en vous posant une question globale au sujet des documents où il est

13 question de la Mission de vérification et de la collaboration avec elle.

14 Dans les intercalaires qui vont de l'intercalaire 262 à l'intercalaire 291,

15 vous avez regroupé les documents afférant au travail de la Mission de

16 vérification -- autrement dit, afférant à la collaboration entre l'armée et

17 la Mission de vérification. Si cela vous était possible, j'aimerais vous

18 demander de passer en revue, assez rapidement, ces intercalaires 262 à 291.

19 Je vous demanderais de ne signaler que les éléments les plus importants.

20 A l'intercalaire 262 d'ailleurs, nous voyons déjà qu'il s'agit d'une

21 dépêche adressée à l'état-major et à l'équipe chargée de la liaison avec

22 l'OSCE et l'OTAN.

23 R. Oui, des rapports de ce genre ont commencé à être envoyés au mois

24 d'octobre.

25 J'aimerais revenir sur une caractéristique de ce qui se passait au

Page 41476

1 mois de janvier parce que dans ces rapports il y a des points déterminés :

2 la mission dans tous les cas était informée des déplacements de l'armée.

3 On le voit ici dans ce rapport. Il est indiqué le jour tel et tel, une

4 colonne a pris la direction de tel et tel endroit. Ceci était fourni à la

5 Mission de vérification pour qu'elle puisse suivre les déplacements des

6 colonnes militaires. Tous les déplacements de l'armée étaient annoncés à la

7 mission.

8 Ce qui caractérise tous les intercalaires relatifs au mois de

9 janvier, c'est qu'on assiste à une intensification des opérations

10 terroristes. Dès la veille du 1er janvier, on constate qu'un incident de ce

11 genre est rapporté entre le 31 décembre et le 1er janvier.

12 Par la suite, au cours du mois de janvier, on constate une

13 multiplication des incidents, le 17, deux fois le 15, le 17, le 25, le 26,

14 le 28 également deux incidents. Ces incidents sont annoncés à la mission.

15 Selon les circonstances, des représentants de la mission venaient ou ne

16 venaient pas procéder à des constations sur place. Si les circonstances ne

17 permettaient pas qu'il le fasse le jour même, il arrivait qu'ils le fassent

18 quelques jours après l'incident en question.

19 Ici, nous lisons que le 28 janvier, et nous en avons déjà parlé au

20 niveau de Liken, on trouve cela dans l'intercalaire qui concerne cette date

21 et, si je ne m'abuse, il s'agit de l'intercalaire -- on en trouve mention à

22 l'intercalaire 290, incident de Goden qui a causé la mort d'un terroriste

23 et incident de Liken qui a provoqué la mort de trois terroristes. Donc, les

24 incidents graves s'intensifient.

25 Deuxième caractéristique : aucun incident important dû à l'armée selon la

Page 41477

1 mission. Troisième caractéristique : tous les jours des groupes plus ou

2 moins importants s'efforcent de faire incursion dans la zone frontière. Une

3 fois le 1er, deux fois le 3, trois fois le 6, trois fois le 7, deux fois le

4 9, deux fois le 10 janvier, deux fois le 16, et deux fois le 18.

5 Dans tous les entretiens avec les dirigeants de la mission : dès lors

6 que la zone frontière était concernée, l'armée demandait à être informée du

7 déplacement prévu par la mission à l'avance et la mission devait se rendre

8 dans la zone frontière sous escorte. Ceci parce qu'on s'attendait à des

9 incidents à tout moment et également parce que selon l'accord conclu, il

10 n'était pas prévu que n'importe qui puisse rentrer dans la zone frontière

11 chaque fois qu'il le souhaitait.

12 Q. En tout état de cause, Général, dans tous ces documents, intercalaires

13 262 à 291, donc dans tous ces intercalaires où il est question de la

14 Mission de vérification, je vous demande si, dans l'un quelconque de ces

15 intercalaires, il est question d'un incident ayant opposé des représentants

16 de l'armée et des représentants de la mission qui seraient susceptibles de

17 démontrer des heurts vis-à-vis de ce qui avait été prévu au départ dans

18 l'accord conclu avec la mission.

19 R. Il n'est pas permis de parler d'incidents, mais je parlerais d'un

20 événement qui est évoqué dans un intercalaire. Non loin du poste-frontière

21 de Karaula, plusieurs tentatives ont été faites par la mission pour se

22 rendre sur place et au niveau de la rampe qui mène au poste contrôle de

23 Karaula, il y avait un garde. Un jour, ce garde appelle les officiers de la

24 mission, et leur dit qu'ils n'ont pas prévenu de leur arrivée et qu'ils ne

25 pourront pas passer. A ce moment-là, les représentants de la mission

Page 41478

1 essayent de supprimer les barrières. Le garde a fait ce qu'on lui avait

2 appris de faire. Il a posé son fusil. Il s'est approché des représentants

3 de la mission pour leur intimer l'ordre de ne pas faire ce qu'ils étaient

4 en train de faire. Voilà c'est la seule chose qui s'est passée.

5 Puis, il y a eu aussi en 1998, paraît-il, un incident au moment où

6 une équipe américaine a fait savoir que l'armée avait tiré sur un de ses

7 membres et après reconstitution des faits, il s'est avéré que cela n'était

8 pas exact.

9 Q. De quoi était-il question ? Est-ce qu'il y a eu reconstitution de

10 l'événement en présence des représentants de la Mission de vérification ou

11 les représentants de la mission étaient-ils absents ?

12 R. Cela concerne ce qui s'est passé un jour de novembre 1998. En présence

13 de membres de la Mission de vérification, il a été démontré qu'un véhicule

14 de guerre, un BRDM de fabrication russe, était en train de grimper une

15 pente et au moment où il a éteint son moteur il y a eu un bruit qui

16 ressemblait au bruit d'une rafale. Lorsque cet incident a été évoqué, nous

17 avons tout vérifié. Le lendemain, la reconstitution a été effectuée et ce

18 en présence des vérificateurs et il s'est avéré que ce n'était pas du tout

19 une rafale. Il n'était pas question de tirs mais de quelque chose de très

20 différent.

21 Q. Les vérificateurs ont dit avoir entendu un bruit de rafale et, en

22 fait, c'était le bruit de moteur qui avait provoqué ce son.

23 R. Oui.

24 Q. Cela a convaincu la Mission de vérification.

25 Y a-t-il eu le moindre exemple de blessures d'un représentant de la

Page 41479

1 Mission de vérification ?

2 R. En raison d'un acte commis par l'armée ou par la police, non, pour

3 autant que je le sache. J'étais présent pendant toute cette période sur les

4 lieux, il n'y a pas eu de tel incident.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que vous avez

6 des éléments de preuve démontrant un défaut de coopération entre l'armée et

7 la Mission de vérification ?

8 M. NICE : [interprétation] Je suis incapable de retrouver un tel élément à

9 l'instant. L'accusé pourrait nous indiquer quel est l'élément auquel il est

10 en train de faire référence et j'y reviendrai. Pour le moment, je ne vois

11 pas très bien.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je me posais la

13 question de savoir pourquoi vous posez ces questions.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, parce que dans un grand nombre de

15 documents, vous avez souhaité que nous ne passions pas en revue en détail

16 l'année 1998 mais pour 1998 date de création de la Mission de vérification,

17 pour chaque mois, il y a un certain nombre de documents qui traitent des

18 contacts avec les représentants de la mission, donc des contacts entre des

19 soldats et des représentants de la Mission de vérification. Maintenant,

20 nous parlons de 1999. Ce que j'essaie de mettre en lumière ce sont des

21 éléments de preuve qui démontrent les très bons rapports entre l'armée et

22 la Mission de vérification à tout moment. Documents qui montrent que

23 l'armée a toujours réagi comme c'était son devoir dans tous les cas. Les

24 membres de la Mission de vérification ont toujours été protégés comme il se

25 doit. Il n'y a pas eu un seul blessé suite à quelque incident que ce soit

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1 dans leurs rangs. Ils ont pu aller chaque fois qu'ils le voulaient où ils

2 voulaient. Autrement dit, l'armée a accompli tous les devoirs que notre

3 Etat avait accepté vis-à-vis de la Mission de vérification pleinement et

4 entièrement. C'est ce qui ressort de la lecture de ces documents.

5 M. NICE : [interprétation] Il y a évidemment un tout petit problème qui

6 pourrait être posé et qui a un lien direct avec Racak. Selon la thèse de

7 l'Accusation, cette opération menée à Racak était une opération commune

8 entre l'armée et la police, et il est question du fait que la mission en

9 aurait été informée à l'avance, ce qui, bien sûr, n'est pas nécessairement

10 admis par ce témoin d'après ce que nous avons entendu. Enfin, c'est une

11 question tout à fait distincte.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice et Monsieur

13 Milosevic. Je me demandais simplement si vous n'alliez pas trop loin dans

14 votre démonstration de la bonne conduite de l'armée, si les efforts que

15 vous faites dans ce sens ne sont pas un peu superflus et ne risquent pas de

16 vous nuire finalement. Je pensais que vous alliez parler des chefs

17 d'accusation qui figurent dans l'acte d'accusation en rapport avec 1999.

18 M. KAY : [interprétation] Ceci a été évoqué dans la thèse de l'Accusation

19 bar le biais des témoins Vollebaek et Walker s'agissant de la Mission de

20 vérification, de tel défaut de coopération.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, très bien. Monsieur Milosevic,

22 reprenez.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il vient d'être question de Racak. Racak ne se

24 trouve pas dans la zone de responsabilité de M. Delic, mais je peux poser

25 la question à M. Delic. Je peux lui demander s'il dispose de la moindre

Page 41481

1 information, s'il a reçu le moindre renseignement quant au fait que l'armée

2 aurait participé peu ou prou aux événements de Racak.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Est-ce que vous avez de tels éléments d'information ?

5 R. Le premier renseignement que j'ai reçu au sujet des événements de

6 Racak, je l'ai obtenu d'un collègue du MUP, le chef du secrétariat à

7 l'Intérieur de Prizren. Il m'a dit que le MUP avait réalisé une opération à

8 Racak. Le 17 janvier, l'équipe de la Mission de vérification a demandé un

9 rendez-vous avez moi pour me demander d'expliquer ce qui s'était passé à

10 Racak. Je leur ai dit que Racak ne figurait pas dans ma zone de

11 responsabilité et je leur ai dit que si l'armée était en cause, il serait

12 bon qu'ils s'adressent au commandement de l'unité concernée, à savoir au

13 commandant de la 243e Brigade.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, merci. Donc, Racak n'était

15 pas dans la zone de responsabilité du témoin.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avançons, Monsieur Milosevic.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Général --

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] En fait, Monsieur Robinson, je suppose que

21 cette série de documents que nous avons examinés assez rapidement il y a un

22 instant, je parle des documents relatifs au travail de la Mission de

23 vérification, je suppose que ces documents sont admis au dossier ?

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, oui.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

Page 41482

1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. Général, le général Vladimir Lazarevic a informé au sujet du

3 commandement des différentes unités au début de l'année 1999. Ce document a

4 été établi le 4 février 1999. Dans ce document, il est dit entre autres que

5 : "Durant le mois de janvier, plusieurs événements extraordinaires graves

6 ont eu lieu, vols de munitions, vols d'armes au sein de la 105e Brigade

7 Motorisée, assassinats de soldats, incendies volontaires, et cetera." Dans

8 diverses unités. Alors de quoi est-il question exactement dans cet

9 intercalaire 292 ?

10 R. Il s'agit de l'ordre du commandant du Corps de Pristina.

11 Q. Mais à l'intercalaire 292, nous lisons : "Informations au sujet des

12 activités du commandement et des unités en janvier 1999."

13 R. Oui. C'est en partie un document qui émane de moi sur la base

14 d'informations reçues du commandant du corps et y figure également l'ordre

15 donné par moi, un ordre en six points adressé à toutes les unités qui ont

16 le rang de brigade. Aux premiers paragraphes, on recense les incidents

17 survenus en janvier, le 2, le 3, le 9, le 11, le 14, et cela se termine le

18 28. Il est question également des conséquences que tous ces incidents ont

19 pu avoir. Ensuite, il est dit que pratiquement tous les jours des combats

20 ont eu lieu entre des gens qui essayaient de franchir illégalement la

21 frontière et des gardes frontières, dans la zone frontière.

22 Plus loin dans le texte, il est dit que : "Les unités

23 particulièrement bien prêtes au combat ont bien résolu tous ces problèmes."

24 Il est dit également que : "En dehors de cela plusieurs incidents

25 extraordinaires sont survenus au niveau des unités. Par exemple, huit

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1 membres de la 105e Brigade ont fait différentes choses. Il y a eu des

2 incendies volontaires, des vols, et cetera, contre les ordres du

3 commandant" et ensuite il est rappelé que : "A tous les niveaux de

4 responsabilité, il faut imposer le plein respect des règlements et des

5 ordres émis jusqu'à cette date pour faire régner l'ordre et la discipline

6 au sein des unités."

7 Q. Général, j'espère que cela suffira comme explication. Donc on insiste

8 sur la nécessité d'un strict respect du règlement ou des règlements de

9 service pour le respect de la légalité et de l'ordre.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, avant que vous

11 ne continuiez, je voudrais que nous tirions au clair un sujet, au sujet du

12 dernier set de documents. Ils ont été versés au dossier, mis à part ceux

13 qui n'ont pas encore été traduits qui recevront une cote provisoire en

14 attendant la traduction.

15 Veuillez continuer, je vous prie.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Général, vous avez pris des mesures pour empêcher toute surprise et

19 pour maintenir le niveau d'aptitude au combat nécessaire en date du 4

20 février 1999 ?

21 R. Oui.

22 Q. Ce document figure à l'intercalaire 293. De quoi s'agit-il au juste ?

23 R. Il s'agit d'un ordre à caractère durable ici. Aux fins d'éviter toute

24 surprise, pour renforcer l'aptitude au combat et maintenir le moral au

25 combat des unités, j'ai donné l'ordre à toutes les unités classées "A", "de

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1 sortir dans différents secteurs et de se conformer aux ordres particuliers,

2 aux termes desquels il convient de prendre toutes les mesures nécessaires à

3 protéger le personnel et les moyens techniques de toutes activités

4 aériennes."

5 Il s'agit de se déployer en quinconce sur les positions et de

6 procéder au blocage des différentes villes. Il s'agit de sécuriser les

7 casernes une fois celles-ci abandonnées. Il s'agit de préciser à quel

8 endroit telle ou telle autre unité trouvera son affectation. Il s'agit de

9 déterminer au moins un deuxième degré de protection sur le plan du génie.

10 Q. Général, je vous demande de parler plus lentement parce que je remarque

11 que des bonnes parties de phrase sont sautées, puisque les interprètes ont

12 probablement du mal à vous suivre.

13 R. L'essentiel, s'agissant de cet ordre est ce qui suit : de procéder à un

14 deuxième degré de protection; il s'agit d'assurer la sécurité vis-à-vis de

15 la frontière en direction de l'Albanie, sécuriser cette frontière; il

16 s'agit de renforcer les forces chargées de sécuriser en profondeur pour ce

17 qui est de la frontière entre l'Albanie et le Kosovo-Metohija; on parle de

18 forces d'intervention vis-à-vis d'installations distinctes - j'en avais

19 deux à surveiller - il s'agissait d'élaborer un plan qui consisterait à

20 masquer, à camoufler la totalité de ces installations et entre Vrbnica et

21 Prizren, il s'agissait de prendre des mesures particulières.

22 La logistique, également, devait se préparer pour passer d'un

23 fonctionnement en temps de paix pour un fonctionnement en temps de guerre.

24 Il s'agit d'informer la composition de la brigade de la situation militaire

25 et politique - je me réfère au point 12 - il s'agissait de s'opposer aux

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1 intentions de l'OTAN et des terroristes siptar et d'empêcher tout effet des

2 activités de propagande psychologique de la part de l'ennemi. Le travail

3 psychologique devait mettre l'accent sur la motivation et la mobilisation

4 de tous les membres de la brigade aux fins d'un accomplissement discipliné,

5 professionnel et précis de toutes les missions imparties.

6 Le dernier point dit que les effectifs entiers doivent prendre

7 connaissance des dispositions des Conventions de Genève s'agissant du

8 comportement adopté vis-à-vis des ennemis emprisonnés ou blessés. Il s'est

9 adressé aux commandants des unités subordonnées. Il s'agit également

10 d'assurer la confidentialité de toutes les informations. Ce serait, en

11 bref, la teneur de l'ordre que j'ai donné.

12 Q. Bien, Général. C'est lorsqu'on s'attendait à une attaque de l'OTAN,

13 vous parlez de la nécessité de s'opposer "aux forces de l'OTAN et aux

14 terroristes siptar" comme s'il s'agissait d'un seul et même ennemi ?

15 R. Il s'agit du mois de février. Il y avait une menace sérieuse et grave

16 de bombardements. La situation au niveau de la sécurité dans le pays même

17 était des plus complexes, des plus graves et l'ordre donné, ici, envisage

18 la prise de mesures visant à se préparer à l'égard d'attaques aériennes et

19 à l'égard des forces terroristes, des forces de l'OTAN et des forces

20 terroristes.

21 Q. Bien. Pratiquement en même temps, dès le 15 février, vous avez rédigé

22 un document qui porte l'intitulé, "Situation politique en matière de

23 sécurité dans ma zone de responsabilité." J'entends là qu'il s'agit de la

24 zone de responsabilité de votre brigade à vous. Cela se rapporte,

25 notamment, à la prise de mesures similaires. Qu'importe-t-il de souligner,

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1 ici, dans ce document que vous avez rédigé, que vous avez présenté ?

2 R. J'informe mon commandement, quoiqu'elle ait disposé de ces

3 informations, il savait, d'ores et déjà, que tous les axes routiers me

4 conduisant jusqu'à ma brigade se trouvaient être coupés. Par exemple,

5 Orahovac-Malisevo-Pristina ne pouvait pas être utilisé puisque utilisé par

6 les forces terroristes des Siptar. Prizren-Dulje-Stimlje était praticable,

7 mais rien que pour des convois organisés et il y avait souvent des

8 embuscades entre Suva Reka et Stimlje. Entre Brezovica et Urosevac, la

9 route était sûre, mais une partie, à un segment, un tronçon n'était pas

10 sous le contrôle du MUP et de l'armée et des embuscades étaient possibles.

11 Q. Sans vous l'énumérez -- mais je vous réfère, je vous ramène à la page

12 2, pour ce qui est de la situation sur le terrain. Vous dites qu'il y a bon

13 nombre de chantages parmi les Siptar et que bon nombre d'entre eux étaient

14 liquidés parce que loyaux à l'égard de la République de Serbie. Alors, soit

15 ils étaient mobilisés, soit ils devaient donner de grosses sommes d'argent.

16 Etait-ce là des phénomènes dont vous avez connaissance et qui étaient très

17 largement répandus ?

18 R. Nous avons parlé de ce type de comportement dès 1998; or, au début de

19 1999, les agissements des terroristes étaient encore plus brutaux vis-à-vis

20 de la population siptar, ce qui fait que le nombre des personnes liquidées,

21 selon nos renseignements et je précise que nos renseignements ne sont pas

22 très fiables puisque le nombre des personnes liquidées doit être forcément

23 plus grand. Alors, soit ces gens étaient mobilisés ou alors ils étaient

24 riches, aisés et ils pouvaient payer de fortes sommes d'argent.

25 Q. Au point 3, vous parlez de Serbes et je vais citer : "Tous les Serbes

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1 originaires des villages où ils étaient minoritaires ont déménagé vers

2 Prizren, Djakovica, Orahovac et Suva Reka. Ils restent des Serbes seulement

3 dans les villages de Velika Hoca, Zociste, Mala Krusa, Novake, Smac, Zojic,

4 Rastane, Musutiste, et les villages de la Sredacka Zula." Ils ont tous

5 déménagés; pourquoi ?

6 R. Tous ces Serbes sont partis des villages où ils étaient minoritaires

7 parce qu'ils ont fait l'objet d'attaques lancées par les terroristes et ces

8 villages qui sont cités, par exemple, Velika Hoca, c'était un village

9 purement serbe. Novake était serbe aussi. Musutiste, c'est un village où le

10 rapport des forces est de

11 50 % pour 50 %. Alors que Smac, Zojic, Rastane, Mala Krusa, le pourcentage

12 des Serbes est plus faible, mais ils sont restés quand même. S'agissant des

13 autres localités, les Serbes ont carrément quitté les lieux.

14 Q. Vous dites que dans le courant du mois de janvier, notamment, en

15 février, la plupart des officiers de l'armée de Yougoslavie ont envoyé

16 leurs familles respectives en

17 Serbie-et-Monténégro. Il y en a trois qui ont envoyé leurs familles en

18 Macédoine chez de la famille et trois officiers ont envoyé les leurs dans

19 la Republika Srpska et cela s'était traduit de façon positive sur leur

20 fonctionnement puisqu'ils passaient tout le reste de leur temps au sein de

21 l'unité.

22 R. C'est exact. Ces officiers sont restés suite à approbation. Ceux qui

23 n'ont pas pu envoyer leurs familles ont été autorisés à s'en aller, mais

24 cela s'est répercuté de façon négative sur la population serbe qui se

25 trouvait encore là. Ce qui fait qu'en dépit de l'effet positif de voir ces

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1 officiers se consacrer pleinement à leurs obligations, il y a eu une

2 réaction négative de la part de la population serbe disant que les

3 officiers étaient en train de mettre leurs familles, les leurs à l'abri.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je dois, une

5 fois de plus, poser la question d'éléments de preuve de ce type. Est-ce que

6 le général ne serait nous apporter quelque témoignage que ce soit au sujet

7 des incidents mentionnés à l'acte d'accusation ? Nous ne pouvons pas rester

8 ici à écouter tout le temps un témoignage au sujet du comportement

9 approprié des forces de la VJ, disant qu'ils se sont comportés conformément

10 aux ordres et qu'ils ont été sensibilisés au comportement à adopter vis-à-

11 vis des prisonniers. Nous sommes en train de parler d'un acte d'accusation.

12 Est-ce qu'il y a des chefs d'accusation très précis ? Est-ce que le général

13 n'est pas à même de nous fournir des éléments de preuve au sujet de ces

14 chefs d'accusation ? Si ce n'est pas le cas, je dois consulter et je

15 devrais consulter mes collègues pour ce qui est de déterminer la pertinence

16 de son témoignage.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il est tout à fait certain qu'il dispose

18 d'éléments de preuve au sujet de différents chefs de ce qu'il est convenu

19 d'appeler acte d'accusation, ici. Mais tout ce que le général est en train

20 de nous dire se trouve être en corrélation directe avec l'affirmation au

21 terme de laquelle l'armée se serait comportée de façon criminelle en 1998

22 et 1999. Or, ici, il nous est permis de voir comment l'armée s'est

23 comportée dans la réalité.

24 Il peut nous être donné de voir, dans les informations et remarques

25 présentées par le général, qu'il y a coopération directe entre l'UCK et la

Page 41489

1 Mission de vérification au Kosovo et entre l'UCK et l'OTAN. Vous avez pu

2 voir sur l'enregistrement vidéo quel est l'équipement, quelles sont les

3 armes les plus modernes qui ont été saisies, lorsqu'il y en a eu 30 de tués

4 et je ne sais combien d'arrêtés et d'emprisonnés.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le comportement

6 illégal avancé par l'acte d'accusation se réfère, notamment, à des

7 incidents particuliers et cela se trouve revêtir une importance tout à fait

8 marginale, pour ce qui est de parler, maintenant, de la culture du

9 comportement approprié qu'avait l'armée, mais c'est important, ce n'est que

10 marginal. Vous devez vous pencher sur les incidents cités à l'acte

11 d'accusation plutôt que de tourner autour du pot.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne tourne pas autour du pot. Je suis l'ordre

13 chronologique et je parle de la façon dont l'armée s'est comportée et

14 lorsque, chronologiquement parlant, nous en viendrons à ces segments-là,

15 nous en parlerons dans le détail. Nous sommes en train de parler de l'année

16 1999 au sujet de laquelle vous avez, vous-même, dit qu'elle était

17 entièrement pertinente parce qu'il est question de parler du comportement

18 de l'armée sur une grande partie du territoire qui est constitué par cette

19 zone de responsabilité des unités sous le commandement du général Delic, et

20 cela se trouve être pertinent vis-à-vis de ce qui s'est produit. Cela

21 concerne

22 l'année 1999 et c'est ce qui est considéré faire partie de "mon

23 comportement", à moi.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites qu'on arrivera à ces

25 incidents au moment voulu. Quand cela viendra-t-il ?

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit que nous allions procéder

2 chronologiquement. Je n'ai pas dit au moment voulu. S'agissant des

3 incidents qui figurent dans les allégations avancées par M. Nice, il en est

4 question dans les mois qui viendront tout à l'heure, mais aucun des

5 incidents mentionnés ici de la part de M. Nice et faisant partie de la zone

6 de responsabilité des troupes placées sous le commandement du général

7 Delic, aucun de ces chefs ne sera contourné. Quand je parle du temps, je

8 parle de la chronologie des événements. Je n'ai pas dit que nous y

9 viendrons au moment voulu.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Delic,

11 M. Milosevic a, entre autres, mentionné le fait qu'il y avait une

12 coopération évidente entre l'UCK et la Mission d'observation au Kosovo.

13 Est-ce que c'est là une question qui vous avait préoccupée ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] En tout état de cause, j'ai été préoccupé par

15 le fait que la mission n'ait pas joué son rôle.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Votre réponse peut se solder par un

17 oui ou par un non; c'est tout ce qu'il faut comme réponse. Quelles ont été

18 les mesures prises aux fins d'expliquer à la Mission d'observation au

19 Kosovo que vous étiez préoccupé par ce fait ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous vous penchez plus en détail sur les

21 intercalaires parlant des rapports vis-à-vis de l'état-major - et il est

22 question de réunions au quotidien - je dirais qu'au quotidien, il a été

23 fait état des problèmes auxquels on faisait face auprès de la mission et il

24 ne s'agissait pas, pour la mission, de constater le nombre de personnes

25 tuées et de les compter parmi les membres de la police de l'armée ou les

Page 41491

1 civils. Ils étaient là pour suivre les activités de la police et de l'armée

2 et les activités des terroristes aussi bien.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais allons-nous, alors, finir par

4 voir un document émanant de vous ou dont vous auriez connaissance qui vous

5 aurait été adressé ou que vous auriez adressé à la Mission d'observation au

6 Kosovo expliquant cette préoccupation qui est la vôtre ou alors, dites-vous

7 que tout ce que nous saurions trouver à ce sujet, c'est votre inquiétude

8 interne qui fait état de cette préoccupation ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la documentation au plus haut niveau.

10 Après les réunions avec les dirigeants de la mission, indépendamment du

11 fait de savoir s'il s'agissait de M. Walker ou du général Drewienkiewicz,

12 les rapports étaient envoyés vers l'équipe de l'état-major, juste après les

13 réunions en question. Dans ces rapports, il est fait état des questions

14 soulevées.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais qu'entendez-vous par "équipe à

16 l'état-major ?"

17 LE TÉMOIN : [interprétation] L'équipe à l'état-major qui était chargée des

18 contacts avec la Mission de vérification.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce au sujet de quoi je vous pose

20 la question est ce qui suit : la Mission de vérification a-t-elle reçu un

21 document quelconque émanant de l'armée de Yougoslavie ou l'armée de

22 Yougoslavie ferait part de sa préoccupation aux termes de laquelle il y

23 aurait, somme toute, collaboration ou coopération entre la Mission

24 d'observation et l'UCK ? Parce que c'est une chose que de voir votre

25 documentation interne et c'est autre chose que de savoir si vous avez

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1 couché sur le papier quelque chose pour leur dire que vous étiez préoccupé

2 par la chose.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'occasion de nos entretiens, ces questions

4 ont bel et bien été soulevées. Pas de façon aussi directe que cela, pour

5 affirmer que la mission était là pour aider les terroristes, mais nous

6 avons indiqué que la mission ne réalisait pas ce qui était convenu vis-à-

7 vis de l'attitude adoptée s'agissant de terroristes.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

9 Pourquoi cela n'a-t-il pas été dit de façon directe, puisque vous étiez

10 préoccupé par ce fait ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous ne pourrions pas le dire pour la mission

12 entière et pour tous les individus et affirmer qu'ils ont tous coopéré avec

13 des terroristes. Mais il est certain qu'il y a eu coopération et je puis

14 vous donner des exemples pour illustrer cette affirmation.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Continuez, Monsieur Milosevic.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Général, au sujet de la question posée tout à l'heure par M. Bonomy, je

19 voulais dire que nous étions à l'intercalaire 294 dont vous avez en partie

20 donné lecture. Au paragraphe 4 de ce document et je vous rappelle ici,

21 puisqu'il y a eu interruption, vous étiez en train de parler de la

22 situation dans votre zone de responsabilité. Ce paragraphe 4 dit : "La

23 mission de l'OSCE continue à suivre tous nos mouvements et activités, tous

24 les mouvements de colonnes d'approvisionnement et de différents véhicules

25 de combat sont suivis par des équipes de l'OSCE."

Page 41493

1 Vous dites également qu'il y a des "demandes" - je suppose, de la

2 part des "citoyens" - "qui portent sur l'inspection des villages dans notre

3 zone de responsabilité ou dans la zone frontalière." Vous dites : "Là où il

4 y a eu des conflits avec l'UCK, les équipes se sont trouvées là ou se

5 trouvaient déjà sur le territoire et on avait souvent l'impression qu'ils

6 coopéraient étroitement avec l'UCK qui les informait des déplacements de

7 nos troupes. Ils n'ont extériorisé ou manifesté aucune influence vis-à-vis

8 de l'UCK pour les empêcher de s'emparer de nouvelles positions. D'après les

9 connaissances qui sont les nôtres, les Siptar, par le biais de la mission

10 de l'OSCE, sont en train de conduire une espèce de guerre psychologique et

11 de propagande. Au quotidien, ils déclarent à la mission un grand nombre

12 d'incidents de violation de droits de l'homme et ainsi de suite, de la part

13 du MUP et de l'armée. Dans la plupart des cas, il est s'est avéré que cela

14 était faux ou qu'il s'agissait d'opérations tout à fait légitimes. D'autre

15 part, notre travail et notre comportement vis-à-vis d'eux était bon, n'a

16 pas été agressif. Nous ne leur avons pas parlé et imposé les problèmes qui

17 étaient les nôtres et nous n'avons pas insisté sur la nécessité d'accomplir

18 la mission qui est celle de la mission."

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais votre question, c'est quoi,

20 Monsieur Milosevic ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Justement j'allais demander.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Est-ce que c'est bien là ce que vous aviez comme information au sujet

24 du comportement de la mission dans votre zone de responsabilité ?

25 R. Oui. Ce qui est dit, ici, dans ce rapport ne fait qu'exprimer ce

Page 41494

1 comportement.

2 Je voudrais, également, ajouter, mais laissez-moi retrouver l'intercalaire

3 en question, je vous prie. Pour ce qui est de cette question qui concerne

4 une réunion du 27 février, le colonel Kotur, chef de l'équipe, a eu avec M.

5 Luigi Osrini [phon] et Guy Senza [phon], les responsables de l'équipe de la

6 Mission d'observation à Pristina. Ils leur ont demandé une réaction de la

7 part de la mission pour rendre praticable la route entre Suva Reka et

8 Orahovac, et on leur a dit qu'ils s'étaient entretenus avec le commandant

9 des terroristes appelés Soko. L'intéressé aurait donné l'ordre d'enlever

10 les barricades et aux terroristes de se retirer des routes. On dit ensuite

11 que M. Walker avait jugé qu'il y avait deux courants parmi les terroristes

12 : un courant qui avait souhaité la signature de l'accord - on parle de

13 l'accord de Rambouillet - et l'autre courant, l'autre faction qui n'était

14 pas d'accord et qui était susceptible de donner naissance ou de donner lieu

15 à des conflits avec l'armée à une grande échelle. Ils ont proposé des

16 contacts au quotidien.

17 Ils ont assuré Walker que l'armée ne serait pas la première à

18 provoquer.

19 Il dit, cela est certain, mais les Siptar ont des téléphones

20 portables. Il ne s'agit pas de téléphones portables que nous utilisons,

21 vous et moi. Ce sont des téléphones cellulaires où l'émetteur est à la

22 maison et on a l'écouteur, le combiné qu'on porte sur soi et la portée est

23 de 20 ou 40 kilomètres. Ce sont ces téléphones-là qui étaient utilisés par

24 les terroristes. "Ils ont des téléphones portables et les Siptar sont

25 toujours les premiers à appeler les représentants de la mission et ils

Page 41495

1 disent, oui, nous, on s'est fait décimés par la police et l'armée. Comme je

2 ne sais pas qui est-ce qui a ouvert le feu, on fait confiance, on prête foi

3 à ceux qui ont téléphoné en premier pour informer la mission." Ce sont là

4 les propos du colonel Orsini.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

6 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si nous allons passer de ce

7 sujet-ci à un autre, mais deux questions d'ordre administratif, une qui n'a

8 rien avoir avec le témoin, à savoir, c'était le jour où vous avez annoncé

9 votre intention de parler, même brièvement, des pièces de Jasovic. Vous

10 avez eu notre dépôt. Il y a cinq phrases que je souhaite ajouter à ce dépôt

11 d'écriture. Cela ne me prendrait pas beaucoup de temps.

12 L'autre question d'ordre administratif porte sur les questions posées

13 à l'accusé et le temps qu'il allait consacrer à ce témoin. Le témoin a été

14 prévu pour 12 heures et aujourd'hui, nous sommes, à l'heure actuelle, à 10

15 heures. Je suppose, à la manière dont les choses évoluent, je pense que je

16 ne vais pas pouvoir le contre-interroger demain. Il serait utile de savoir

17 combien de temps l'accusé a l'intention d'entendre ce témoin en nombre

18 d'heures ou de jours de façon à ce que nous puissions nous préparer.

19 Troisièmement, le témoin n'a pas pu parler de la question des cartes

20 et de Paddy Ashdown concernant les questions posées au cours de la dernière

21 pause. Je crois qu'il est disposé à en parler à la fin de la session

22 d'aujourd'hui.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, quand

24 allez-vous terminer l'interrogatoire de ce témoin, compte tenu du fait que

25 vous aviez prévu 12 heures ? Dix se sont déjà écoulées à la fin de

Page 41496

1 l'audience d'aujourd'hui.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je comprends fort bien, Monsieur

3 Robinson. Mais j'aurais besoin davantage de temps pour ce témoin. Sachez

4 que je suis interrompu sans cesse et qu'il y a des questions de procédure

5 qui sont évoquées sans cesse. Aujourd'hui, nous n'avons même pas commencé

6 tout de suite. Nous avons commencé à parler de questions de procédure,

7 avant même que je ne puisse commencer l'interrogatoire. Ensuite, nous avons

8 parlé des cartes, ce que le témoin devait faire pour aider les Juges de la

9 Chambre et on m'interrompt sans cesse. Je tente d'être aussi rapide que

10 possible, mais je ne peux pas prévoir la durée de mon interrogatoire avec

11 exactitude. J'ai estimé mon temps au mieux, mais bien évidemment, ce temps

12 ne suffira pas.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Néanmoins, pourriez-vous nous

14 donner une estimation, s'il vous plaît ? C'était une estimation, néanmoins,

15 car il faut que nous puissions nous organiser. Je dois vous rappeler que

16 lorsqu'un Juge intervient, cela ne doit pas être qualifié comme une

17 interruption. Je suppose que c'est une interprétation erronée. Un Juge est

18 en droit d'intervenir; cela ne signifie pas qu'il interrompt la procédure.

19 Quelle est votre estimation pour le reste de votre interrogatoire

20 concernant ce témoin, s'il vous plaît ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Au moins, deux jours de plus.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Au moins deux jours de plus ?

23 Ce qui nous amène à vendredi.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Veuillez ne pas prendre ceci au pied de

25 la lettre. Je vais essayer de faire avancer les choses le plus rapidement

Page 41497

1 possible. Mais honnêtement, je ne peux pas vous donner de réponse très

2 précise. Si je pouvais le faire, je le ferais. Je ne peux pas vous dire

3 combien de temps un témoin va consacrer à une de ses réponses.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Concernant M. Jasovic, nous allons

6 consacrer à cela les dix dernières minutes de cette audience, l'audience

7 d'aujourd'hui.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous avons dit

10 que nous allions entendre les parties sur la question du versement des

11 pièces concernant M. Jasovic. Je crois qu'il est opportun de le faire

12 maintenant; nous allons consacrer les dernières 12, 13 minutes de cette

13 audience à cela et nous reprendrons votre interrogatoire principal demain.

14 Nous tiendrons compte du fait que ces 13 dernières minutes seront

15 consacrées à cette question-ci.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je comprends cela, Monsieur Robinson. Il est

17 tout à fait normal que ces documents soient finalement pris en compte, et à

18 la manière dont j'ai compris les choses, il me semblait que toute la

19 question des documents concernant le général Stevanovic serait également

20 prise en compte.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, ils sont pris

22 en compte, mais nous n'allons pas entendre les arguments sur ce point. Oui,

23 la Chambre a tenu compte de cela, tout à fait. Maintenant, nous allons

24 simplement entendre un argument très court sur les pièces relatives au

25 témoignage de Jasovic, non pas Stevanovic. C'est cela.

Page 41498

1 Maître Kay.

2 M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, ici, nous avons deux

3 catégories de documents que je vais traiter séparément.

4 Tout d'abord --

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, si vous avez décidé de

6 parler des documents en rapport avec Jasovic, je crois qu'il serait normal

7 de laisser partir ce témoin, étant donné que l'audience sera terminée d'ici

8 15 minutes. Inutile que le témoin entende les arguments à propos de

9 Jasovic.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.

11 Général, vous pouvez disposer et revenir demain matin, à

12 9 heures. Je dois vous rappeler que vous ne devez absolument parler de

13 votre témoignage à quelqu'un.

14 M. NICE : [interprétation] Mme Dicklich va le raccompagner de façon à

15 pouvoir lui présenter quelques cartes.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Absolument.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La page 9, demandez-lui de voir la page

18 9.

19 [Le témoin se retire]

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay.

21 M. KAY : [interprétation] Ce document peut être divisé en deux

22 catégories. Il s'agit, d'une part, de pièces à charge et d'autre part, de

23 pièces à décharge. Je vais, d'abord, parler des pièces à décharge. Il

24 s'agit de documents qui découlent de l'année 1998, 1989 de documents

25 officiels, dans les registres officiels de déclaration, service de

Page 41499

1 renseignements, rapport de renseignements et d'autres formes de "memoranda"

2 qui viennent des postes de police. Pour ce qui est de la présentation des

3 moyens à décharge, il s'agit, ici, de comprendre quel était le pouvoir de

4 l'UCK à Racak ainsi que des renseignements qui auraient été reçus au cours

5 d'une période donnée par les forces de police locale à propos de l'effectif

6 que constituait l'UCK dans cette région-là.

7 La Chambre de première instance a toujours adopté la position suivante :

8 les documents qui découlent de cela n'ont pas été préparés pour ce procès,

9 mais qui découlent d'une compilation ou d'archives officiels qui sont

10 recevables dans la mesure où ces documents n'ont pas été préparés pour ce

11 procès. Ils pourraient, par conséquent, être pris en compte et pourraient

12 être considérés comme des documents indépendants de cette procédure.

13 Evidemment, eu égard à leur contenu, l'Accusation a fait l'objet

14 d'une décision à cet égard, eu égard à un témoin qu'ils ont cité à la

15 barre; il s'agissait d'éléments d'enquête, un homme qui s'appelait Dragan

16 Karleusa et qui a témoigné le 22 juillet 2002, compte rendu d'audience,

17 page numéro 8 663 [comme interprété]. Il a fourni des éléments portant sur

18 les corps dans le véhicule, dans le fleuve. La Défense s'y est opposée,

19 mais une décision a été rendue par la Chambre de première instance qui a

20 constaté que c'était recevable car il s'agissait de documents qui émanaient

21 d'enquêtes officielles qui n'avaient pas été préparés pour ce procès. Il

22 s'agit de documents tout à fait semblables dans ce cas-ci à ceux qu'a

23 présentés l'accusé par l'intermédiaire du témoin Jasovic.

24 Si nous passons maintenant aux documents fournis par l'Accusation, nous

25 avançons que ceci est conforme à d'autres décisions rendues par le passé

Page 41500

1 par la Chambre de première instance sur ce point, concernant certaines

2 questions de témoins qui ont été présentées par l'intermédiaire de pièces.

3 Il s'agit, là, de munitions pour le contre-interrogatoire. Ce qu'ils ont

4 tenté de faire est de fournir des déclarations de témoins sous-estimant

5 ainsi la crédibilité du témoin en alléguant des exemples de cas de torture

6 ou d'abus des droits de l'homme. Nous avons eu exactement les mêmes

7 questions qui ont été soulevées lors de la présentation des moyens à

8 charge, lorsque le Dr Bosanac, à l'hôpital de Vukovar, a été appelé; cela

9 s'est passé le 5 février 2003, numéro 15 663 du compte rendu d'audience.

10 L'accusé souhaitait utiliser deux déclarations, l'un d'un soldat qui

11 s'appelait Sasa Jovic; l'autre, d'un médecin qui avait travaillé avec le

12 médecin Bosanac; il s'appelait Djuranec. Ces deux déclarations ont allégué

13 des tortures, abus des droits de l'homme par le témoin contre des patients

14 dans l'hôpital et eux-mêmes. Les éléments présentés par Djuranec se

15 trouvent dans le compte rendu d'audience qui a été versé au dossier, dans

16 un procès devant la République fédérale de Yougoslavie.

17 Encore une fois, ceci a été utilisé au contre-interrogatoire. Ces

18 documents-là ont servi de moyens. Mais la Chambre de première instance a

19 décidé qu'il n'était pas possible de verser ces éléments-là à l'appui des

20 allégations présentées. Il a dû se servir de ses propres éléments de preuve

21 pour traiter de cette question-là. Je crois qu'il s'agit d'une position

22 tout à fait similaire. L'Accusation fait face à une position tout à fait

23 semblable et M. Nice nous a fourni une explication très claire sur la

24 décision qui a été rendue. Vous trouverez ceci au compte rendu d'audience

25 et la raison pour laquelle la Chambre de première instance a statué après

Page 41501

1 avoir entendu ces arguments.

2 L'attitude adoptée de façon cohérente par la Chambre de première instance,

3 eu égard aux éléments présentés pendant le contre-interrogatoire, devraient

4 s'appliquer, également, de la même manière, de façon à ce que les deux

5 parties soient traitées de façon égale.

6 Deux autres questions portant sur le calendrier de

7 l'Accusation : j'ai pu remarquer que nous avons effectivement un calendrier

8 très précis, mais il manque un certain nombre d'intercalaires, je ne sais

9 pas pourquoi cela a dû se produire. Au moment de la préparation, nous

10 passons de l'intercalaire 135 à 138, et 145 à 149, 138 à 140 et ce, tout au

11 long des documents, sans autre explication.

12 Nous constatons également qu'eu égard aux déclarations des témoins,

13 on réfute la manière dont ces déclarations ont été recueillies par le

14 policier Jasovic, les déclarations sur lesquelles se reposent l'Accusation

15 ne semblent pas traiter du colonel, ni de la question des trois

16 déclarations; Afrim Mustafa qui a été interrogé le 26 janvier, déclaration

17 de l'Accusation qui a été versée au mois d'avril de cette année décrit la

18 façon dont cette déclaration a été recueillie. Mais cette déclaration a été

19 signée le 17 janvier, alors que l'entretien a eu lieu le 6 janvier.

20 L'Accusation n'a pas répondu à cela; elle ne nous a pas fourni d'éléments

21 de réponse. Il semble s'être écoulé deux jours entre la déclaration et la

22 signature et on ne parle absolument pas de l'authentification de ce

23 document.

24 On peut dire la même chose concernant Saban Rama,

25 intercalaire 1.44. Encore une fois, la déclaration est datée du

Page 41502

1 16 janvier. Aucune explication n'est fournie sur la raison pour laquelle il

2 l'a signée le 17 et ce qui se passait à ce moment-là.

3 Même remarque concernant Saban Rexhaj, intercalaire 2.3, interrogé le

4 2 août, déclaration signée le 3 août, aucune explication n'est fournie

5 quant à la raison pour laquelle ceci a été signé le 3.

6 Il semble s'agir, ici, de déclarations qui adoptent tous des

7 déclarations semblables qui font des allégations contre le témoin à charge,

8 mais qui sont, en réalité, sans fondement, si on fait attention aux

9 domaines auxquels ils se rapportent. C'est la raison pour laquelle une

10 déclaration a été signée un autre jour, des allégations de torture ont été

11 faites un autre jour et dans votre déclaration, raisons classiques pour

12 lesquelles un document ne devrait pas être versé au dossier, en tout cas,

13 dans cette procédure.

14 Très brièvement --

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Kay.

16 M. NICE : [interprétation] Je regarde simplement les deux points évoqués

17 par Me Kay, puisque nous n'avons pas été prévenus de cela, ceci n'a pas été

18 traité au cours des questions supplémentaires et malheureusement, je suis

19 dans une position assez désavantageuse. Je vais voir ce que je peux faire,

20 néanmoins, pour répondre à ces deux questions qui viennent d'être

21 soulevées.

22 Je regarde le point 1.43. Il est clairement indiqué qu'il n'avait pas

23 signé la déclaration, ce qu'il dit. Il parle des circonstances dans

24 laquelle ceci a pu se produire, du degré d'inexactitude. Il parle,

25 également, des circonstances dans lesquelles il a été emmené en prison où

Page 41503

1 il a été passé à tabac et on l'a obligé de se comporter de la manière dont

2 il s'est comporté. Je ne sais pas si cela est, pour l'essentiel, incomplet

3 et peut-être que cela aurait dû être abordé plus haut.

4 En tout cas, ce qui est assez préoccupant, c'est le numéro 144. Il

5 s'agit de notes, semble-t-il, rédigées par Jasovic, lui-même et il dit que

6 le contenu de ceci n'est pas exact et ne se souvient pas d'avoir parlé ou

7 d'avoir cité certains noms. Voilà.

8 Cela étant dit -- je crois que ceci est inutile.

9 Pour ce qui est des chiffres ou de la numérotation, je crois que Me

10 Kay n'a peut-être pas compris comment ce dossier a été préparé. Ce dossier

11 n'était pas un dossier complet comportant toutes les pièces de la Défense;

12 il s'agissait simplement d'y inclure les pièces pertinentes. Le calendrier,

13 effectivement, recouvre toutes les déclarations, y compris celles pour

14 lesquelles les documents n'ont pas été rendus, mais le dossier de

15 l'Accusation ne tient compte que des éléments pertinents.

16 Pour ce qui est de notre dépôt d'écritures, il y avait cinq phrases à

17 ajouter, il n'y en a que cinq, et que je vais aborder dans quelques

18 instants après avoir répondu aux deux autres questions de Me Kay.

19 On ne se repose pas uniquement sur ces éléments-là pour comprendre

20 quels étaient les effectifs de l'UCK, mais sur le rôle et la fonction joués

21 par ceux qui sont morts, s'il s'agit-là d'une question plus importante et

22 différente.

23 Il dit qu'il s'agit ici d'une question tout à fait pratique que les

24 documents officiels sont recevables. Il est vrai que de tels documents

25 officiels ont été reçus, mais cela ne suffit pas pour autant que la Chambre

Page 41504

1 a un pouvoir discrétionnaire quant à l'exclusion ou l'acceptation de

2 certains documents. Ceci doit être traité cas par cas. Je ne peux pas,

3 malheureusement, vous citer la page exacte quand il a parlé de Bosanac, car

4 la version électronique ne peut pas la présenter de cette manière.

5 Néanmoins, il s'agit ici d'une décision prise cas par cas par la Chambre de

6 première instance et il s'agit effectivement d'un cas similaire où il y a

7 deux témoins. Il s'agit-là d'une position complètement différente. La

8 Chambre de première instance, dans ce cas-ci, a reçu un nombre très

9 important de documents qui indique que ce témoin n'est absolument pas

10 fiable. Les sources sont multiples et diverses et indépendantes, mais tout

11 à fait cohérentes.

12 Si vous regardez le dépôt d'écritures que nous avons remis, la

13 première raison, qui n'est pas évoquée dans le détail au paragraphe 8, le

14 critère de la preuve pour la recevabilité porte sur la base des preuves les

15 plus concluantes, mais la charge de la preuve qui n'a pas été abordée

16 repose sur la partie qui cherche à faire verser ce document.

17 Ce qui est tout à fait indépendant des documents que nous avons

18 présentés, ce qui semble indiquer qu'aucun de ces documents ne devrait être

19 versé. Je souhaite insister sur deux points : Tout d'abord, un point assez

20 superficiel, quand l'utilisation de la phrase "prétendument l'UCK"

21 permettrait à elle seule comme raison d'exclure l'ensemble de ces

22 documents. Le témoin --

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous dites

24 qu'en soit cela suffirait, en soit cela permettrait d'exclure tous les

25 documents ?

Page 41505

1 M. NICE : [interprétation] Oui. Si la Chambre en conclut que cette phrase

2 n'a pas été utilisée ou n'a été utilisée par aucun des adversaires

3 présumés, c'est une réponse qui n'a pas de sens. Mais si la Chambre fait

4 très attention à la manière dont j'ai donné au témoin la possibilité de

5 fournir une autre explication -- souvenez-vous, je lui ai dit : "Ne soyez

6 pas tenté de répondre d'une certaine manière. Réfléchissez." Il est tout à

7 fait clair qu'il n'a pas mis sur le papier les mots ou des paroles des

8 personnes qui se trouvaient devant lui. Il est ridicule de laisser entendre

9 cela. Autrement dit, eu égard à chaque déclaration, indépendamment une

10 partie de ce qu'il a dit est inexacte et ne correspond pas à la vérité. Par

11 conséquent, tout cela, et simplement pour ce point tout à fait superficiel

12 et trivial, est une raison suffisante.

13 De même, les réponses à 2.23 sont différentes par rapport à

14 l'informateur anonyme et autres personnes sans nom, que nous avons pu

15 retracer d'après les coordonnées qui ont été données. Ce qui indique que

16 sur cette source d'information importante s'avère absolument peu fiable, ce

17 qui a tendance à polluer le reste de ce document.

18 Au paragraphe 23, se trouve une erreur ici qui s'est glissée dans le

19 document lorsque le témoin était moins qu'honnête. Notre position est tout

20 à fait claire : Ce n'est pas que le témoin était moins honnête; c'est qu'il

21 était malhonnête. Concernant ce point-là au point 2.23, il a clairement

22 indiqué qu'il était malhonnête sans avoir été mis sous pression pendant le

23 contre-interrogatoire. C'est simplement parce qu'il y avait tellement

24 d'incohérence ou de changements au cours de son récit.

25 Pour finir, au paragraphe 28 nous signalons que nous n'avons pas été

Page 41506

1 en mesure de répondre à tous ceux qui faisaient des déclarations. Je dois

2 rappeler à la Chambre que lorsque Jasovic a terminé son interrogatoire

3 principal pour la première fois, il collaborait avec l'Accusation par

4 l'intermédiaire du Greffe. Je puis rappeler à la Chambre que nous avons

5 fait tout ce qui était possible pour qu'il puisse contacter toutes les

6 personnes avec lesquelles nous ne pouvions pas entrer en contact. Ce sont

7 des éléments d'information qu'il nous a fournis à la fin de la période

8 entre sa déposition et son retour pour le contre-interrogatoire. Il n'est

9 pas revenu avec les documents que nous lui avions demandés ou que la

10 Chambre en lui posant des questions très précises. Monsieur le Juge

11 Robinson, vous avez très clairement mis le doigt sur ces questions-là. Il

12 n'est pas revenu avec ces autres documents. L'absence de ces documents

13 constitue évidemment un élément essentiel de notre opposition, à savoir, il

14 s'agit d'un témoin qui n'est absolument pas fiable.

15 Il s'agit ici d'un point tout à fait différent qui ne s'est pas

16 produit dans d'autres cas. Dans la jurisprudence du Tribunal, il y a un

17 autre cas par le biais d'un certain mécanisme ces documents peuvent être

18 versés au dossier sur la base de la crédibilité, si on décide qu'il s'agit

19 d'un cas particulier. Avec un tel corpus de documents présentés à la

20 Chambre de première instance, nous estimons, avec tout le respect que nous

21 vous devons, qu'il serait tout à fait inapproprié d'accepter des éléments

22 par ouï-dire, éléments de troisième main, et ensuite de deuxième main, si

23 cela serait autorisé par l'intermédiaire de Stevanovic, et premièrement par

24 l'intermédiaire de ce témoin. Avec tous ces documents à sa disposition, en

25 adoptant un mécanisme ou un autre, ces documents doivent être exclus et il

Page 41507

1 ne faut pas les accepter. La Chambre de première instance devra statuer une

2 idée claire que ces documents ne peuvent pas répondre aux critères de

3 fiabilité. Il faut répondre à ce critère si on veut que ces documents

4 soient acceptés.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Nice. Monsieur

6 Milosevic.

7 L'INTERPRÈTE : Micro, s'il vous plait.

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je considère que tout ce que

9 vient de dire M. Nice est dépourvu d'un quelconque sens commun, parce que

10 tous les documents qui ont été soumis durant l'audience du témoin Jasovic

11 sont des documents officiels émanant du ministère de l'Intérieur et de ses

12 divers échelons hiérarchiques, et tous ces documents portent sur la période

13 concernée. Pas un seul de ces documents n'a été établi dans la période

14 actuelle. Ils datent tous de l'époque des faits.

15 Le témoin en question était employé au ministère de l'Intérieur où il

16 a travaillé pendant plusieurs décennies. Il est encore aujourd'hui.

17 Par ailleurs, nous avons démontré et établi que pas une seule

18 protestation, pas une seule plainte n'avaient été formulées à l'égard de sa

19 façon de travailler.

20 Danica Marinkovic, le juge d'instruction qui est qualifiée de

21 criminelle par M. Nice, est l'auteur d'un certain nombre de ces documents

22 qui sont tous du domaine public. D'autres documents ont été soumis par le

23 biais du général Stevanovic et dans l'audition de Jasovic d'autres

24 documents ont été présentés. Or, Jasovic est venu témoigner à la demande de

25 M. Nice. Quand M. Nice a proposé qu'il vienne témoigner, en nous informant

Page 41508

1 de la présence de M. Jasovic, qui avait déjà témoigné dans l'affaire Limaj,

2 je ne connaissais même pas son existence.

3 Tous les documents dont nous parlons sont apparus à ce moment-là.

4 Les documents soumis par M. Nice sont tous établis dans les derniers

5 jours, dans la période récente. M. Jasovic a expliqué d'une façon très

6 claire pourquoi les Albanais disent aujourd'hui le contraire de ce qu'ils

7 ont dit à l'époque. Il importe que vous soyez au courant si vous vous

8 intéressez au Kosovo. Ils changent ainsi de positions parce que leur vie

9 est en danger.

10 Cela a été dit très clairement. M. Nice pourrait recueillir des

11 centaines de dépositions disant Dieu sait quoi contre, Dieu sait contre

12 quel témoin qui aujourd'hui parle contre la partie albanaise. Cela ne pose

13 absolument aucun problème. Monsieur Kwon, vous avez pu constater que

14 lorsque l'assistant de Rugova a été auditionné. Je lui ai soumis un texte

15 reprenant les propos qu'il avait eu lors de son entretien. C'était un homme

16 politique. Il n'a pas pu répondre sur-le-champ, mais deux ou trois ans plus

17 tard. Il a dit qu'il avait consenti cette interview parce qu'il avait des

18 Kalachnikovs pointées sur sa poitrine. Ecoutez, je vous en prie, racontez

19 autant de choses insensées deux ou trois ans plus tard, des choses qu'il

20 n'avait jamais dites avant. Ces gens-là sont en danger de mort s'ils

21 admettent qu'ils ont donné le moindre renseignement à la police ou aux

22 instances officielles de la Serbie.

23 M. Nice a essayé de procéder à une expertise graphologique qui a

24 démontré qu'il était impossible de prouver qu'il s'agissait d'un faux,

25 qu'il était impossible de démontrer que l'écriture sur ce manuscrit n'était

Page 41509

1 pas celle du témoin interrogé. Pas un seul des documents qui est à la base

2 des objections de M. Nice à l'égard de ces documents officiels ne peut

3 tenir. Il parle également de ouï-dire. Nous avons eu en face de nous un

4 inspecteur de la police judiciaire qui a recueilli les témoignages -- les

5 dépositions des personnes concernées. Si vous lisez attentivement ces

6 dépositions, vous verrez qu'il y figure un très grand nombre de noms, un

7 très grand nombre de description d'événements, un très grand nombre de

8 dates, et cela dépasserait l'imagination de l'homo sapiens d'imaginer que

9 de tels documents pourraient être créés de toute pièce par un inspecteur de

10 la police judiciaire parce que les gens qui sont à l'origine de ces

11 dépositions ne sont pas mentionnées dans ces documents. Il s'agit de

12 renseignements relatifs à d'autres personnes. Jasovic a bien expliqué qu'il

13 avait pour mission de recueillir des renseignements, des données sur les

14 membres de l'UCK, sur les armes dont ils disposaient, et cetera. Il

15 regroupait tous ces renseignements en fonction des besoins de la police

16 pour satisfaire au besoin de la police, pas pour simplement plaire aux

17 organes de la hiérarchie. C'étaient des éléments qui devaient être utilisés

18 par la suite, concrètement.

19 N'importe qui, qui lit ces documents voit tout de suite qu'il s'agit

20 de documents authentiques. Aucun de ces documents ne peut être contesté en

21 s'appuyant sur les explications fournies par M. Nice. D'ailleurs, vous avez

22 vu que M. Nice a fait un tableau où tout figure. Ils ont découvert trois

23 hommes, et ces trois hommes se retrouvent dans le tableau relatif à Racak.

24 J'ai passé en revue l'ouvrage dont les membres de l'UCK sont les auteurs,

25 et en le lisant, j'ai retrouvé 20 noms qui figurent sur la liste des

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1 victimes de Racak.

2 Cela vous donne une idée de la validité à accorder au tableau de M.

3 Nice. Cela vous montre à quel point dans ce travail d'établissement du

4 tableau il n'est question que de déformation des faits. Il n'est question

5 que de présentation sous un jour totalement déformé de la réalité des

6 événements. Une déposition de témoin réalisée au mois de juin de cette

7 année n'a aucune valeur. Cet homme disant : Ah, il est bien vrai, n'est-ce

8 pas, que ces hommes t'ont torturé si tu n'acceptais pas de faire cette

9 déposition contre nous. Lui il répond : Mais non. De toute façon, j'avais

10 peur de me faire tuer, donc j'aurais dit n'importe quoi. M. Nice considère

11 que les documents recueillis par M. Jasovic qui exerçait des fonctions

12 officielles au sein de la police officielle, M. Nice est en train de dire

13 que ces documents doivent être rejetés. Or, ce sont des documents de

14 notoriété publique émanant d'un organe officiel qui, à mon avis, doivent

15 être admis.

16 Quant aux documents présentés par M. Nice pour mettre en cause la

17 crédibilité du témoin, à mon avis, ils devraient être rejetés, car ils ne

18 remplissent pas un seul des critères de fiabilité requis.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

20 M. NICE : [interprétation] J'aurais quelque chose à dire, Monsieur le

21 Président, si vous m'y autorisez. Ceci n'a rien à voir avec les propos

22 tenus à l'instant par M. Milosevic. Le fait que je n'ai pas été informé à

23 l'avance de ce qui allait se passer aujourd'hui m'amène à ajouter deux

24 phrases au sujet des documents 1.44 et 1.45.

25 Le document 1.44, si nous nous en souvenons, nous rappellerons que le

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1 témoin a eu beaucoup de mal à expliquer comment des gens ont pu être

2 arrêtés pendant une nuit sans qu'il n'y ait aucun enregistrement de leur

3 arrestation et de leur garde à vue - là, il répondait aux questions posées

4 par les Juges - les Juges se souviendront certainement de ce passage de son

5 audition où il explique que tous ces gens étaient là, semble-t-il, de leur

6 plein gré. C'est lui qui aurait dû expliciter ce document 1.44 où

7 apparemment il y a un entretien mené le 16 avec celui qui semble être le

8 signataire responsable de la signature apposée le 17. Il ne s'est pas

9 expliqué là-dessus.

10 Le document 1.45, si vous regardez l'intégralité de ce document, y compris

11 ce qui vient de l'Accusation, la personne concernée a reconnu sa signature

12 mais n'a pas reconnu la date de la signature, n'a pas dit qu'elle était

13 exacte. Là, encore, il s'agit de se demander ce qu'on trouve dans les

14 documents Jasovic. Ceci montre bien que les éléments évoqués par Me Kay

15 n'ont pas de sens s'agissant des pièces à conviction de l'Accusation.

16 Merci de m'avoir autorisé à faire ces deux remarques.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Nous allons suspendre jusqu'à

18 lundi [comme interprété] 9 heures.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais évoquer un problème technique et

22 vous demandez une ordonnance à cet égard. Très souvent je trouve des

23 divergences importantes entre ce qui a effectivement été dit et

24 l'interprétation qui est reprise par écrit dans le compte rendu d'audience.

25 Je ne vais pas m'appesantir sur cette question, mais par le biais du

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1 responsable de liaison, cela fait plus d'un an que j'évoque ce problème, et

2 je le répète à peu près tous les mois, ne demandant que ce à quoi j'ai

3 droit, à savoir, les cassettes vidéo de toute la procédure. Je reçois

4 toujours la même réponse par le biais du responsable de la liaison avec moi

5 : vous recevrez cela lorsque nous aurons le temps.

6 Cela dure déjà depuis trop longtemps. Je demande ces vidéos depuis

7 très longtemps et je ne les obtiens pas depuis très longtemps également. Je

8 vous demande une ordonnance pour que ces vidéos me soient remises, les

9 vidéos de tout le procès depuis le début.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ni M. le Juge

12 Kwon ni moi-même ne se rappelle avoir déjà entendu une évocation de ce

13 problème. Vous venez de l'évoquer donc nous allons y réfléchir et nous

14 ferons ce qui est le plus adapté, vu les circonstances.

15 Suspension d'audience jusqu'à lundi [comme interprété]

16 9 heures.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Encore une phrase, Monsieur Robinson, si vous

18 me le permettez : Vous avez raison. Ce n'est pas à vous que j'ai dit cela.

19 C'est par le biais du responsable chargé des liaisons avec moi, par le

20 service responsable que j'ai demandé qu'on me remette ces cassettes vidéo.

21 Je pensais que c'était mon droit. Mais aujourd'hui j'en parle devant vous

22 parce que mon droit n'est pas respecté. Je vous demande d'intervenir pour

23 donner l'ordre que ces vidéo me soient remises.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci de cet éclaircissement. Nous

25 occupons du problème.

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1 --- L'audience est levée à 14 heures 01 et reprendra le jeudi 30 juin

2 2005, à 9 heures 00.

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