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1 Le mardi 15 novembre 2005
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je crois que
6 vous avez -- je crois avoir compris que vous avez une question à soulever
7 en l'absence du témoin suivant. De quoi s'agit-il ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a un rapport médical, Monsieur Robinson.
9 J'espère que vous l'avez également sous les yeux. J'imagine qu'on vous l'a
10 communiqué.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous interromps. Nous n'avons
12 aucun rapport médical. Nous n'avons reçu aucun. Vous entendez par là le
13 rapport du Dr Falke ?
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. C'est bien de quoi je parle. Non, Non. Un
15 rapport de trois experts qui m'ont examiné le 4 novembre, qui m'ont examiné
16 il y a dix jours en d'autres termes. Ce que je voudrais préciser c'est que,
17 dans leur rapport, ils ont émis une opinion conjointe. C'est une sorte de
18 councillium qui dit que : "Son état de santé ne s'est pas stabilisé et que
19 les complications -- que mon état de santé ne n'était pas stabilisé, que
20 les complications étaient possibles. Suite à cela, il faudrait lui
21 attribuer une période de repos, donc, une suspension d'au moins six
22 semaines pour ce qui est des activités physiques et mentales, chose qui
23 permettra probablement de réduire ou du moins de stabiliser les symptômes
24 en question."
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, la Chambre n'a
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1 pas connaissance de ce rapport. Si vous souhaitez qu'il y ait une décision
2 à ce sujet, il faudrait que vous nous le fassiez parvenir et nous
3 pencherons sur le document.
4 M. KAY : [interprétation] Justement, le document en question est en train
5 d'être photocopié par les soins du Pr Rakic, d'après ce que j'ai compris.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Mais, nous ne pouvons pas
7 nous pencher sur cette question en ce moment-ci parce que nous ne l'avons
8 pas du tout, vu le rapport en question, Monsieur Milosevic.
9 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je ne sais pas pourquoi mon
11 micro s'éteint systématiquement.
12 Mais je tiens à dire que le problème est précisément là, à savoir,
13 vous n'avez pas vu ce rapport et le rapport du Dr Falke dit que, vendredi,
14 je ne suis pas venu parce que j'ai été épuisé. Le
15 Dr Falke sait parfaitement bien que, depuis quelques mois déjà, j'ai de
16 graves problèmes de santé. Je n'ai nul besoin de me plaindre de ces
17 problèmes ici. Je n'en ai pas la moindre intention. J'ai été à plusieurs
18 reprises à l'hôpital Bronovo pour des examens et il sait parfaitement bien
19 quels sont les problèmes que j'ai. Les médecins, qui se sont déplacés, se
20 sont déplacés deux mois après -- au bout de deux mois d'absence, de tout
21 traitement approprié. Je tiens à préciser qu'il s'agit d'experts éminents
22 de Russie, de France et de Serbie. Ce qui fait que cette contradiction
23 évidente avec le rapport présenté par le Dr Falke n'est pas une chose qui
24 se trouverait être convenable. C'est pourquoi j'estime qu'il convient de
25 prendre en considération l'avis de ces médecins d'autant plus qu'il s'agit
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1 de problèmes sérieux.
2 Je tiens également à vous rappeler une chose, à savoir que, quand bien même
3 j'aurais été en parfaite santé, ce qui n'est pas le cas dans la décision de
4 la Chambre d'appel concernant la jonction des trois actes d'accusation. Au
5 paragraphe 27, il est dit de façon tout à fait claire: "Comme il s'est
6 avéré être le cas, s'agissant de longs procès devant ce Tribunal, les Juges
7 de la Chambre de première instance se devront de temps en temps faire des
8 pauses dans l'auditions des témoignages pour permettre aux parties en
9 présence de se reposer et, notamment, lorsqu'il s'agit d'un accusé qui
10 représente soi-même -- qui présente soi-même sa défense."
11 Alors, pendant toutes ces années, je n'ai pas reçu de pauses de ce genre et
12 je voudrais également dire que ceci est contraignant pour les Juges de la
13 Chambre de première instance et il faudrait éviter d'en arriver à une
14 situation qui ne saurait être surmontée vu la quantité de documents dont
15 sont surchargés les Juges de la Chambre et de la Défense.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Mais, Monsieur Milosevic, la
17 Chambre n'a pas vu ce rapport, comme je vous l'ai déjà dit. Donc, si vous
18 voulez que nous penchions sur le rapport, il faudrait que vous nous le
19 fassiez parvenir. Si vous avez quelque chose à dire au sujet dudit rapport,
20 vous pourrez le faire, à ce moment-là, mais il n'est point nécessaire de
21 continuer à débattre d'un rapport qui n'a pas été communiqué aux Juges de
22 la Chambre.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai soulevé la question. Je
24 vous ai cité les opinions du médecin. Il vous appartiendra à vous de
25 trancher et de prendre une décision. Je ne vais plus soulever la question.
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1 Le fait que vous n'ayez pas été mis au courant, je dirais à ce sujet que
2 vous aurez dû l'être parce que le Greffe est chargé de veiller à la santé
3 des accusés et chargé de vous communiquer ces informations.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est à vous
5 qu'il appartient de veiller à ce que ce rapport nous soit communiqué. C'est
6 vous qui constituez une partie prenante ici au procès. Une fois que nous
7 aurons ce rapport --
8 M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Kay.
10 M. KAY : [interprétation] J'ai des copies ici, elles viennent d'être
11 faites. J'ai les classeurs ici. J'ai la version dans les langues
12 originales. Je pense que les Juges devraient donc être saisis desdits
13 rapports à l'instant.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic,
16 M. Kay a eu la bonté de nous fournir ce qui semble être le rapport auquel
17 vous vous êtes référé. Nous le voyons pour notre part la première fois.
18 Nous allons nous pencher nous dessus, mais il vous appartient à vous de
19 dire clairement à la Chambre ce que vous souhaitez voir la Chambre faire
20 partant de ce rapport-ci.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Rien d'autre si ce n'est la nécessité de voir
22 la Chambre ne pas ignorer ce qui est dit dans ce rapport. En d'autres
23 termes, ces médecins ont dit, de façon tout à fait expresse, qu'il s'agit
24 de faire mettre un terme à tous les efforts physiques et mentaux pendant au
25 moins six semaines.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, Monsieur Milosevic. La
2 Chambre a le rapport à présent. Nous allons nous pencher sur celui-ci et
3 nous allons prendre en considération la requête que vous venez de
4 présenter.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais laisser entendre de façon
7 claire que je n'ai pas compris que vous ayez présenté une requête formelle,
8 mis à part la requête adressée à la Chambre s'agissant de voir celle-ci se
9 pencher sur ces rapports. Alors, s'il découle de ceci la nécessité
10 d'ajourner le procès, à ce sujet, il conviendrait de présenter une requête
11 par écrit. Je ne pense pas que ce soit là une question qu'il conviendrait
12 d'examiner suite à une présentation orale. Ce n'est pas l'avis de mes
13 collègues, mais je vous ai laissé entendre ma position.
14 M. NICE (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 Donc, j'attire votre attention sur le paragraphe 6 dudit rapport.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous avons ce rapport. Nous
22 l'avons celui-là.
23 M. NICE : [interprétation] Avant que les Juges de la Chambre ne rendent une
24 décision au cas où cette décision serait prise partant du dernier rapport,
25 il conviendrait peut-être de tenir compte du paragraphe que je viens
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1 d'indiquer.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, il ne fait point de doute le
3 fait que les Juges de la Chambre vont se pencher sur ce point-là ainsi que
4 sur les éléments présentés par l'accusé.
5 Vous pouvez citer votre témoin suivant.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je suis très reconnaissant à
7 M. Nice d'avoir soulevé la question parce que ce qui est écrit ici n'est
8 pas exact. Il s'agit probablement d'un malentendu.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas débattre de cette
10 question à présent. Veuillez citer votre témoin suivant.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, je veux juste vous dire une
12 phrase.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne souhaite en discuter
14 maintenant. Etes-vous sourd ? Citez votre témoin suivant.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis probablement sourd, en effet.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si c'est le cas, nous allons nous
17 pencher sur la question. Veuillez citer votre témoin suivant.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais le fait d'être sourd ne m'empêche pas
19 de travailler.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela ne fait pas l'ombre d'un doute.
21 C'est tout à fait à votre avantage.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin suivant est le capitaine Husein
23 Sarvanovic.
24 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin fasse la déclaration
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1 solennelle.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
3 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
4 LE TÉMOIN: HUSEIN SARVANOVIC [Assermenté]
5 [Le témoin répond par l'interprète]
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.
7 Monsieur Milosevic, veuillez commencer votre interrogatoire
8 principal.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
10 Interrogatoire principal par M. Milosevic :
11 Q. [interprétation] Bonjour, mon Capitaine.
12 R. Bonjour, Monsieur Milosevic.
13 Q. Mon Capitaine, veuillez vous présenter, je vous prie.
14 R. Husein Sarvanovic, capitaine de l'armée de Serbie-et-Monténégro, à la
15 retraite. Né en 14 février 1961 à la municipalité de Modrica. Je suis
16 ressortissant de la Serbie-et-Monténégro.
17 J'ai terminé mes études secondaires à l'école militaire de Sarajevo.
18 Ensuite, j'ai fait mon service à Pirot, en tant que sous-officier. En 1991,
19 j'ai terminé une école supérieure de l'armée et j'ai commencé à travailler
20 à Pirot. Puis, j'ai continué à travailler à Surdulica, Prizren et Leskovac;
21 c'est là que j'ai été mis à la retraite.
22 Q. Quand est-ce que vous avez servi au Kosovo-Metohija ?
23 R. Au Kosovo-Metohija j'y ai été du 11 mai 1998, jusqu'à la fin de la
24 guerre.
25 Q. Quelle est votre appartenance ethnique ?
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1 R. Je suis Musulman.
2 Q. Qu'avez-vous été pendant la guerre au Kosovo-Metohija ?
3 R. Pendant la guerre au Kosovo-Metohija, j'étais commandant d'une
4 compagnie mécanisée au sein du 1er Bataillon de la Brigade de Prizren.
5 Q. Est-ce que la carte qui se trouve à vos côtés --
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est une carte qui a déjà été versée au
7 dossier. Il s'agit d'une carte que nous avons fait verser au dossier à
8 l'occasion du témoignage du général Djosan.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. J'aimerais que là-dessus vous nous indiquiez vos déplacements sur le
11 territoire du Kosovo-Metohija ?
12 R. Mon unité a effectué ces missions dans le secteur du village Zur, zone
13 de responsabilité du village de Zur à l'est, de ce village de Zur, vers la
14 droite, donc, vers l'ouest, il y a ce site de Ceja [phon] et, avec un
15 Peloton de mortier de 82 millimètres, nous étions près du passage frontière
16 avec la République d'Albanie. C'est là que j'ai effectué ma mission avec
17 l'unité dont je faisais partie.
18 Q. Merci, mon Capitaine. Vous avez mentionné le fait que, dans vos rangs,
19 il y avait un Peloton de Mortier.
20 R. Oui.
21 Q. Je ne peux pas vous citer le tout, mais, à bon nombre d'endroits, on
22 dit que notre armée a pilonné des villages et des villes. Alors, j'aimerais
23 vous demander de nous dire si, avec votre Peloton de Mortier, cette Unité
24 de Tireurs de mortier, avez-vous tiré des obus.
25 R. Oui.
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1 Q. Pouvez-vous nous expliquer comment, dans quelle situation et ce que
2 vous avez ciblé ?
3 R. Etant donné que ce peloton faisait partie de mon unité et c'était moi
4 qui avais commandé ledit peloton, et je l'ai fait parce que nous n'en
5 avions pas suffisamment d'officiers, la façon dont on se sert de mortier de
6 82 millimètres est la suivante : étant donné que j'étais au poste
7 d'observation du commandement, les missions étaient réalisées suite aux
8 ordres donnés par le commandant. Donc, il y a des préparatifs d'abord, il y
9 a des éléments de départ, ensuite, on cible un point de tir. Nous n'avons
10 jamais ciblé d'autre objectif, à savoir, des cibles qui n'auraient pas été
11 des cibles militaires.
12 Q. Mon Capitaine, partant de ce que vous venez de dire, il découle ce qui
13 suit : vous étiez aux côtés du commandant.
14 R. Oui, j'étais aux côtés du commandant au poste d'observation.
15 Q. Au poste d'observation. Est-ce que vous avez pu constater vous-même
16 quels sont les points à partir desquels on avait tiré sur votre unité ?
17 R. Oui, j'avais deux éclaireurs qui avaient pour mission d'observer le
18 terrain et de veiller à repérer les endroits à partir desquels on tirait
19 dessus.
20 Q. Est-ce qu'il est arrivé que vous tiriez sur des cibles à partir
21 desquelles il n'aurait pas été tiré vers vous ?
22 R. Jamais je le ferais et jamais mon unité n'a reçu des ordres pour ce qui
23 était de tirer en direction de cibles qui avaient servi de point de tir en
24 direction de nos unités.
25 Q. Vous est-il arrivé de rater et de toucher une cible civile ?
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1 R. Cela ne nous est jamais arrivé.
2 Q. Merci, mon Capitaine. Capitaine, nous avons versé ici au dossier un
3 document dont a témoigné le général Delic, puis, il a été mentionné par le
4 colonel Vukovic. Je précise qu'il s'agit d'un document qui : "Demande
5 assistance aux forces du MUP pour ce qui est de briser les forces
6 terroristes Siptar dans le secteur d'Orahovac et Velika Krusa." Avez-vous
7 connaissance dudit document ? Cela figure à l'intercalaire numéro 2 du
8 classeur que vous avez, le classeur des documents à vous.
9 R. Pour ce qui me concerne ce document n'avait aucune valeur parce que le
10 document en question, je l'ai vu pour la première fois lors de mes
11 préparatifs avec les avocats, et il s'agit ici d'un ordre émanant du corps
12 d'armée à l'intention du commandant de la brigade.
13 Q. Cela, je le sais. Mais, avez-vous pu retrouver dans cet ordre une fois
14 que vous l'avez étudié, l'emplacement de votre unité, et les activités qui
15 étaient les vôtres ?
16 R. Non, je n'ai pas pu retrouver cela dans cet ordre-ci.
17 Q. Comme nous venons de le constater, j'aimerais que vous expliquiez si,
18 au cours desdits événements, donc, au cours des événements relatifs à cet
19 ordre, il vous a été donné de participer aux activités de combat ?
20 R. J'ai participé à des activités de combat, mais suite aux ordres donnés
21 par mon commandant du Groupe de combat.
22 Q. Fort bien. Indiquez, je vous prie, si vous avez reçu des ordres émanant
23 de qui que ce soit, mis à part les ordres reçus par votre commandant du
24 Groupe de combat.
25 R. Non.
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1 Q. Est-ce que, chaque fois que vous interveniez, vous interveniez
2 uniquement suite à des ordres de votre commandant du Groupe de combat ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce qu'il y avait -- dans votre compagnie, notamment, est-ce qu'il
5 s'agit de ces pièces d'artillerie, de mortiers, et des tirs de votre propre
6 gré ?
7 R. Jamais nous n'avons pu et nous n'avons eu le droit de tirer comme bon,
8 il nous semblait.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la cote de ce document,
10 Monsieur Milosevic ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le D300, intercalaire 356. C'est un
12 document qui a été utilisé, le 30 juin, versé au dossier, le 1er juillet.
13 M. KAY : [interprétation] C'est le D300, et non pas le D30.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, merci. D300.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Une fois de plus, mes micros sont éteints.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Capitaine, pouvez-vous nous dire au sujet de ces activités, ce qui a
18 été fait par votre unité ?
19 R. Mon unité, une fois qu'elle s'est vue confier la mission, qui nous a
20 été confiée par le commandant du Groupe de combat a eu pour tâche
21 d'apporter son soutien aux effectifs du MUP et de l'armée de Yougoslave
22 pour ce qui est de briser et de détruire les forces terroristes Siptar sur
23 l'axe d'Orahovac, Suva Reka.
24 Q. Bela Crkva fait partie de la municipalité d'Orahovac, connaissez-vous
25 la localité ?
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1 R. Oui. Je connais cette localité.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande à ce que l'Huissière place sur le
3 rétroprojecteur cette carte de Bela Crkva. L'échelle est assez grande et on
4 peut voir convenablement. Merci.
5 M. MILOSEVIC : [interprétation]
6 Q. Pouvez-vous nous expliquer ce que représente cette carte et nous
7 apporter des éclaircissements relatifs ?
8 R. On voit Bela Crkva et on y voit le déploiement de départ, oui, on voit
9 le déploiement au départ des effectifs du Groupe de combat numéro 2 pour ce
10 qui est de l'accomplissement de sa mission. On voit aussi l'axe suivant
11 lequel l'unité est arrivée pour accomplir sa mission. On voit également que
12 les lignes de départ pour la réalisation de la mission se trouve à
13 l'extérieur du village à quelque 700 mètres ou 1 000 mètres à l'est du
14 village.
15 Q. Mon Capitaine, l'acte d'accusation, au paragraphe 66(b), affirme qu'à
16 la date du 25 mars 1999 ou plutôt vers cette date-là, les forces de la
17 Serbie et de la RSFY ont encerclé et attaqué le village de Bela Crkva,
18 municipalité d'Orahovac. Vous trouviez-vous là-bas, à l'époque ?
19 R. C'est exact. Le 24 mars, entre 19 heures et 20 heures, je suis passé
20 aux environs du village de Bela Crkva pour organiser le déploiement des
21 unités qui devaient passer la nuit dans cet endroit, 700 mètres ou un
22 kilomètre du village. En traversant le village, je n'ai eu absolument aucun
23 problème. Tout était calme.
24 J'ai passé la nuit à Brnjaca et nous n'avons pas pu dormir
25 tranquillement à cause d'attaques de l'aviation de l'OTAN qui venaient du
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1 territoire albanais vers le territoire de la Yougoslavie.
2 J'ai quitté le village de Brnjaca, le matin, aux environs de 5 heures pour
3 suivre le déplacement vers Orahovac et Velika Hoca, selon les ordres qui
4 m'avaient été donnés par le chef du Groupe de combat.
5 Je répète que, dans le village de Bela Crkva, lorsque je l'ai traversé, je
6 n'ai eu aucun problème pas plus que pendant la nuit.
7 Q. Y a-t-il eu des opérations menées par une quelconque autre unité à Bela
8 Crkva ?
9 R. Non.
10 Q. Dans le texte, on dit que de nombreux habitants de Bela Crkva ont fui
11 le long de la rivière Belaja, en commençant par se diriger vers le pont et
12 que les forces serbes ont ouvert le feu et tué 12 personnes. Est-ce que
13 vous avez la moindre information au sujet de tels événements ?
14 R. Ces affirmations ne sont pas exactes car il n'y a aucune action.
15 J'affirme que mon unité n'a rien fait de ce genre et je ne suis au courant
16 d'aucune autre unité qui aurait agi de cette façon ou fait quelque chose de
17 ce genre.
18 Q. Un peu plus loin dans le texte, on affirme que les forces serbes ont
19 ordonné aux hommes jeunes et plus âgés de se déshabiller et qu'ils leur ont
20 volé tous leurs biens et que les femmes et les enfants ont alors reçu
21 l'ordre de partir pour un village voisin du nom de Zoge [phon] et que 65
22 Albanais du Kosovo ont été tués lorsque le feu a été ouvert. Est-ce que
23 vous avez des informations au sujet de telles allégations ?
24 R. Ces allégations ne sont pas exactes, comme je l'ai déjà dit au début de
25 ma déposition, lorsque nous examinions la carte de Bela Crkva, nos unités
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1 se trouvaient hors du village, c'est-à-dire que nous avons traversé le
2 village sans le moindre problème et personne n'a fait quoi que ce soit de
3 ce genre. Il n'y avait pas un seul soldat, pas une seule unité militaire
4 dans le village.
5 Q. Pendant l'agression de l'OTAN, sur le Kosovo-Metohija ou plutôt sur la
6 République fédérale de Yougoslavie, est-ce que vous avez eu connaissance
7 d'un incident, à savoir que notre armée ou notre police aurait attaqué des
8 civils ou commis des crimes contre des civils ?
9 R. Non. Je ne suis pas au courant de telles choses et je n'ai jamais
10 entendu parler de tels crimes.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vous demande
12 un instant.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. MILOSEVIC : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez
15 poursuivre.
16 M. MILOSEVIC : [interprétation]
17 Q. Capitaine, vous avez montré quel était le sens de vos déplacements dans
18 cette partie du territoire du Kosovo-Metohija. Au paragraphe 55 du document
19 établi ici, il est affirmé que nos forces ont délibérément et
20 systématiquement, par recours à la force, expulsé de milliers d'Albanais,
21 hors de leurs domiciles, en créant un climat de peur et d'oppression et
22 cetera.
23 Vous commandiez une compagnie qui a opéré sur un territoire assez
24 vaste. Je vous demande si l'armée a utilisé la force ou la menace contre
25 des habitants de nationalité albanaise ?
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1 R. Non. Je suis certain que mon unité n'a jamais rien fait de tel et je
2 n'ai pas non plus entendu parler d'une quelconque autre unité placée sous
3 le commandement du général Delic qui aurait agi de la sorte.
4 Q. Avez-vous expulsé quiconque ?
5 R. Non, jamais.
6 Q. Il y a quelques instants, vous avez dit avoir tiré sur un certain
7 nombre de points précis et vous avez ajouté que vous ne tiriez sur les
8 points qui vous étaient désignés sur ordre. Puisqu'il est dit ici que les
9 forces de la Serbie et de la République fédérale yougoslave ont participé
10 délibérément et systématiquement à une campagne de destruction des biens en
11 pilonnant des villages, incendiant des maisons, des commerces, des
12 monuments, des lieux de culte, et cetera.
13 Je vous demande si vous avez, à quelque moment que ce soit, pilonné des
14 villes et des villages et détruit des cibles civiles ?
15 R. Non. Je n'ai participé à un pilonnage de cette nature. Je n'ai jamais
16 reçu l'ordre de prendre pour cible des biens civils ou des habitants du
17 Kosovo-Metohija.
18 Q. Je vous remercie, Capitaine. Est-ce que vous avez la moindre
19 information au sujet d'Unités de l'armée yougoslave qui aurait escorté des
20 civils vers la frontière ? Vous étiez non loin de la frontière, est-ce que
21 vous avez eu de telles informations ?
22 R. Non, l'unité que je commandais n'a jamais escorté des habitants, des
23 civils qui se seraient dirigés vers la frontière albanaise et je n'ai pas
24 reçu cet ordre non plus. Quant aux ordres qui m'étaient donnés, ils ne
25 correspondent pas à ce qui est dit ici. Ils consistaient à se défendre
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1 contre les opérations de l'aviation de l'OTAN et à protéger les êtres
2 humains habitant sur le territoire menacé par ces attaques.
3 Q. Capitaine, comment mainteniez-vous le contact avec votre hiérarchie
4 supérieure ? Aviez-vous des réunions avec vos officiers supérieurs ?
5 R. Tous les jours, j'avais une rencontre avec mon supérieur hiérarchique
6 direct, le commandant du bataillon. Cela se passait le soir et pour le
7 reste, je maintenais ces contacts par radio.
8 Q. Lors de ces réunions que vous venez d'évoquer, vous est-il arrivé à
9 quelque moment que ce soit d'entendre le moindre renseignement quant au
10 fait que des violences seraient commises contre des civils ou que des biens
11 appartenant à quelqu'un seraient détruits ou qu'un village serait attaqué ?
12 R. Non. Lors de ces réunions d'informations, je n'ai jamais été mis au
13 courant d'un tel renseignement.
14 Q. Aviez-vous une connaissance précise de ce qui se passait sur le terrain
15 dans toute la zone où vous vous déplaciez ?
16 R. Dans la zone où je me déplaçais, j'avais ces renseignements et j'en
17 informais mes supérieurs hiérarchiques.
18 Q. Pourriez-vous décrire en quelques mots ce qui se passait sur le
19 terrain ?
20 R. Sur le terrain sur lequel nous nous déplacions, nous menions pour
21 l'essentiel une lutte contre les terroristes extrémistes Siptar. Nous
22 protégions la zone frontière et nous protégions le territoire de la
23 République fédérale yougoslave. Nous étions des Unités chargées de Protéger
24 la population contre les opérations de l'aviation de l'OTAN, telle était
25 notre mission.
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1 Q. Vous-même et votre unité, aviez-vous des contacts quelconques avec les
2 civils ?
3 R. Mon unité n'avait aucun contact avec les civils puisque, comme je l'ai
4 dit, elle était déployée hors du village.
5 Q. Vos soldats pouvaient-ils, parce qu'ils le décidaient d'eux-mêmes,
6 s'éloigner et commettre un acte qui n'était pas autorisé sans que vous le
7 sachiez ?
8 R. Ils ne pouvaient pas le faire et ne l'ont pas fait.
9 Q. Un tel incident est-il jamais survenu ?
10 R. Au sein de mon unité, jamais.
11 Q. Je voudrais encore vous poser la question suivante : ici, on évoque
12 souvent le fait que leurs papiers d'identité auraient été confisqués aux
13 Albanais. Vous vous trouviez non loin de la frontière. Est-ce que vous
14 n'avez jamais été mis au courant du fait que des habitants du Kosovo-
15 Metohija, des habitants albanais se seraient vus privés de leurs papiers
16 d'identité ?
17 R. Je sais avec certitude que mon unité n'a jamais confisqué des papiers
18 d'identité à des civils et je n'ai pas non plus été informé du fait qu'une
19 autre unité l'aurait fait. Je répète que je me trouvais tout près de la
20 frontière.
21 Q. Vous rappelez-vous, éventuellement, quel est le nombre d'obus que vous
22 avez lancés pendant toutes ces opérations pendant la guerre, à peu près ?
23 R. Je ne m'en souviens pas parce que six ans se sont écoulés depuis la fin
24 de la guerre, mais ces chiffres exacts figurent dans les archives car à la
25 fin des opérations nous avons remis tous nos documents au commandement
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1 supérieur.
2 Q. Avez-vous une idée approximative du nombre d'obus que vous auriez pu
3 tirer ?
4 R. Pour la destruction d'un certain nombre de cibles, qui nous étaient
5 désignées au cours des opérations de guerre, nous avons tiré un ou deux
6 obus de calibre 82.
7 Q. A quelle fréquence avez-vous mené de telles actions ?
8 R. Dans le secteur d'Orahovac-Suva Reka, je combattais les forces
9 terroristes Siptar à Opterusa, et deux ou trois fois des points fortifiés
10 nous ont été donnés comme cibles, des points à partir desquels on tirait
11 sur nos positions. Cela fait quatre ou cinq fois au total. J'ai ouvert le
12 feu quatre ou cinq fois.
13 Q. Est-ce que vous tiriez toujours sur des points déterminés à partir
14 desquels on tirait sur vous ?
15 R. Uniquement sur de telles cibles.
16 Q. Merci, Capitaine. Je n'ai pas d'autres questions.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Capitaine, puis-je vous demander à
19 quel moment vous avez pris votre retraite de l'armée ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 3 mars 2004.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
22 Contre-interrogatoire par M. Nice :
23 Q. [interprétation] Qui était votre commandant ?
24 R. Le commandant de mon bataillon était le lieutenant-colonel Uros
25 Nikolic.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je demanderais que l'on prenne soin
2 d'allumer le micro du témoin.
3 M. NICE : [interprétation]
4 Q. Le soir du 24 mars, vous vous êtes mis en marche dans le cadre de votre
5 plan de déploiement, n'est-ce pas ?
6 R. J'ai quitté Prizren dans la direction d'Orahovac, et avec mon unité,
7 nous nous sommes installés à Brnjaca.
8 Q. Nous voyons Brnjaca sur une carte que je vous soumettrai dans une
9 seconde, mais je vous demanderais de nous dire la chose suivante, je vous
10 prie : en tant que commandant de compagnie, quels sont les documents que
11 vous avez rédigés au sujet de ce qui a pu se passer ce soir-là ou cette
12 nuit-là ?
13 R. En tant que commandant de compagnie, je ne suis pas chargé de maintenir
14 le moindre document écrit au sujet de l'activité de l'unité, car j'étais
15 commandant de peloton.
16 Q. Vous n'êtes pas chargé de rédiger des rapports. Vous rendez compte à
17 votre commandant de ce que vous faites, n'est-ce pas, vous avez bien rendu
18 compte au commandant Nikolic ?
19 R. C'est le lieutenant-colonel Zoran Djokic que j'ai informé de l'action
20 précise dont il est question ici. Au sein de mon unité, je rendais compte à
21 Uros Nikolic.
22 Q. De sorte que Djokic ou Nikolic ont peut-être des rapports, des
23 documents écrits datant de l'époque dans lesquels figure la description de
24 ce que vous avez fait ce soir-là ou cette nuit-là; c'est bien cela ?
25 R. D'abord, c'était oral. Je ne sais pas si le commandant, à qui je
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1 parlais, prenait des notes de ce que je disais, mais, si tel est le cas, il
2 a sans doute des notes écrites au sujet des rapports que je lui faisais
3 oralement.
4 Q. Est-ce que vous avez rendu compte, devant la commission de l'armée
5 yougoslave chargée de la coopération avec le TPIY, avez-vous fait une
6 déposition devant cette commission ?
7 R. Non.
8 Q. Ou devant ce qu'il est convenu d'appeler un comité ou une commission
9 d'expert ?
10 R. Non.
11 Q. En tant que commandant de peloton ou de compagnie, est-ce que vous avez
12 utilisé le terme de peloton et le terme de compagnie, je ne sais pas ce
13 qu'il faut comprendre, est-ce que dans le cadre de vos fonctions vous aviez
14 une carte qui indiquait quelle était la mission que vous deviez accomplir,
15 et où figure la trace de ce que vous avez fait ?
16 R. J'avais entre les mains la carte du commandant du bataillon, c'est sur
17 la base de cette carte que je rédigeais mes rapports.
18 Q. Est-ce que vous aviez sur vous une carte sur laquelle vous indiquiez
19 des annotations relatives à ce que vous faisiez et à quel endroit vous
20 l'aviez fait ?
21 R. Je n'avais de carte que lorsque j'étais commandant de compagnie et
22 cette carte portait sur le déploiement des forces sur le terrain.
23 Q. Votre remarque s'applique-t-elle à ce que vous avez dit s'être passé
24 lorsque vous vous êtes trouvé à Brnjaca en dehors de Bela Crkva ? Y avait-
25 il à ce moment-là une carte qui indiquait, noir sur blanc, l'emplacement de
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1 vos positions ?
2 R. D'abord, je n'avais pas de position à Brnjaca. Mon unité est arrivée
3 sous le commandement du lieutenant-colonel Djokic, pour accomplir la
4 mission qu'elle était chargée de mener à bien le 25, donc ultérieurement et
5 ce, sur la base des ordres de mon supérieur.
6 Q. Y a-t-il une carte qui le montre ? Oui ou non ?
7 R. Sur cette carte de Bela Crkva, on voit où se trouve Brnjaca. C'est là
8 que j'ai déployé mon unité, dans une cave. Mon unité était stationnée dans
9 une cave. Quant à la suite de la mission, on voit les positions des jours
10 suivants et on voit les positions des mortiers. On voit Velika Hoca et
11 Opterusa, en particulier.
12 Q. La seule chose qui m'intéresse pour l'instant, c'est Bela Crkva.
13 M. NICE : [interprétation] La carte que vous avez examinée n'a pas été
14 identifiée correctement pour le compte rendu d'audience. J'indique qu'il
15 s'agit de la pièce à conviction 300, intercalaire 360.
16 Q. Quand avez-vous vu cette carte pour la première fois ?
17 R. J'ai vu cette carte chez le commandant de mon Groupe de combat, et
18 figurait cette carte le déploiement complet des forces.
19 Q. Oui. Très utile. Plaçons cette carte sur le rétroprojecteur et prenez
20 votre temps. Dites-moi, encore une fois : vous l'avez vue chez le
21 commandant de votre Groupe de combat ? Dites-nous : à quelle opération,
22 pendant l'opération ou après l'opération ?
23 R. Cette carte avec Bela Crkva, c'est bien cela ?
24 Q. Oui.
25 R. Je l'ai eue sous les yeux pour la première fois au moment où je
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1 préparais ma déposition, mais j'ai dit que lors -- au moment où il fallait
2 que nous accomplissions notre mission, je l'ai vue chez mon commandant.
3 Q. Concentrons-nous sur cette carte. La première fois que vous avez vu
4 cette carte, c'était durant la préparation de quoi ?
5 R. De ma déposition. De mon témoignage.
6 Q. Très bien. Qu'avez-vous découvert quant à celui qui avait dessiné ou
7 établi cette carte ?
8 R. J'ai reçu cette carte et je ne me suis pas renseigné pour savoir qui
9 était l'auteur de cette carte. Je savais comment les choses se passaient.
10 Les commandants prenaient les décisions, les mettaient noir sur blanc sur
11 des cartes.
12 Q. Est-ce que vous avez compris que cette carte correspondait à
13 l'opération que vous avez menée ou d'ailleurs je vais vous poser une autre
14 question. D'après ce que vous avez compris, à quoi correspondait cette
15 carte je vous prie ?
16 R. Je l'ai déjà dit. Cette carte, où on voit Bela Crkva le déploiement du
17 Groupe de combat numéro 2, elle était faite pour montrer le déploiement de
18 ce Groupe de combat numéro 2 sur la ligne de début de la mission. Ensuite,
19 on y voit le déplacement vers Orahovac et la ligne de fin de mission.
20 Q. Mais, d'après ce que vous avez compris, à quoi servait cette carte ?
21 Qui l'avait établie, à quel moment ? Il n'y a pas de date sur cette carte.
22 D'après ce que vous avez compris, à quoi servait cette carte ?
23 R. Ces documents -- ces cartes correspondent au texte d'un document écrit
24 et constitue l'illustration graphique ce texte, qui concerne l'exécution de
25 la mission.
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1 Q. Mais le texte est préparé au moment des faits ou par la suite ? C'est
2 sur ce point que je vous demande votre aide je vous prie.
3 R. La carte est établie avant l'accomplissement de la mission.
4 Q. Je vois. Cette carte-ci, aussi ?
5 R. Oui.
6 Q. C'est bien le genre de carte qui est utilisé par un commandant de
7 compagnie ou de peloton ou en tout cas que vous avez vu chez votre
8 supérieur hiérarchique, c'est bien cela ?
9 R. Le commandant du Groupe de combat, oui.
10 Q. Oui, parce qu'elles ont un format très pratique, ces cartes. Elles
11 peuvent peut-être être emportées compte tenu de leur format par les
12 commandants d'unité réduite. Est-ce que c'est le genre de carte que vous
13 portiez avec vous éventuellement ?
14 R. Monsieur, ce n'est pas le genre de carte que je portais sur moi. Vous
15 avez entre les mains une photocopie dont la taille a été réduite.
16 Q. Mais est-ce bien le genre de carte, d'ailleurs vous venez de dire que
17 c'était le cas que vous aviez l'habitude de voir avant une opération ?
18 R. Oui.
19 Q. Regardons-la de plus près plutôt que de regarder un document qui
20 n'aurait aucune pertinence.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Nice, je ne comprends plus
22 très bien. Je crois avoir entendu le témoin dit qu'il l'avait vue pour la
23 première fois lorsqu'il préparait sa déposition ici.
24 M. NICE : [interprétation] Oui, mais il a aussi dit à moins que j'ai mal
25 compris, il a dit également --
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il y a deux cartes.
2 M. NICE : [interprétation] Ces cartes étaient établies avant
3 l'accomplissement des missions. Je lui ai demandé si c'était le cas de
4 cette carte-ci ? Page 21 du compte rendu d'audience, lignes 4
5 et 5.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc c'est une carte correspondant à
7 l'opération en question.
8 M. NICE : [interprétation] Cette carte-ci, oui.
9 Q. Dites-moi Capitaine, je vous prie, si vous pouvez nous aider sur ce
10 point. Quelle est la distance qui sépare Brnjaca de Bela Crkva ?
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous voulez
12 prendre la parole.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, M. Nice essaie de créer la
14 confusion dans l'esprit du témoin. Le témoin a dit qu'il avait eu, pour la
15 première fois, cette carte sous les yeux au moment de la préparation du
16 témoin. Lorsqu'il lui a demandé s'il s'agissait de la carte en question, le
17 témoin a compris qu'on lui demandait s'il s'agissait d'une carte du terrain
18 en question, mais pas si c'était la carte qu'on lui a montrée pendant la
19 préparation de sa déposition. C'est tout à fait évident.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout ceci n'est pas très clair à mes
21 yeux. Cela c'est certain. Ce ne sont pas les questions qui créent la
22 confusion mais les réponses.
23 M. NICE : [interprétation] Je dois avancer rapidement compte tenu du temps
24 limité du contre-interrogatoire. Je devrais être bref.
25 Q. Alors, Capitaine, donnez-nous une idée je vous prie, de la distance qui
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1 sépare Brnjaca le centre de Brnjaca de Bela Crkva. Vous connaissez la
2 région, n'est-ce pas ? Alors, quelle est cette distance ?
3 R. A peu près 1 000 mètres à vol d'oiseau.
4 Q. Donc, chacun des carrés que l'on voit sur la carte correspond à une
5 distance de 500 mètres dans ces conditions. C'est bien cela. Nous pouvons
6 vérifier à partir d'autres documents, bien sûr, mais cela nous aiderait que
7 vous nous le disiez.
8 R. Sur cette carte, un centimètre correspond à 250 mètres dans la nature.
9 La distance dont nous parlons est de trois ou quatre centimètres, donc, au
10 maximum 1 000 mètres.
11 Q. Très bien. Veuillez examiner cette photographie qui vient de la pièce à
12 conviction 157, intercalaire 2, je vous prie. Vous reconnaissez ce qu'on
13 voit sur cette photographie. C'est Bela Crkva. Pour vous aider à vous y
14 retrouver, je vous indique la mosquée qui se trouve à peu près au milieu,
15 légèrement sur la droite. Reconnaissez-vous cette photographie comme étant
16 celle de Bela Crkva ? Vous reconnaissez peut-être parce que vous êtes un
17 soldat de métier.
18 R. Non, je ne reconnais pas.
19 Q. Très bien. Si vous pouvez, j'aimerais que vous nous disiez; si vous ne
20 pouviez pas, tant pis. Mais, si vous le pouvez, pouvez-vous nous dire dans
21 quelle direction par rapport à cette photographie vous étiez stationné la
22 nuit du 24 au 25 ?
23 On voit sur cette photographie le centre de Bela Crkva, donc, c'est
24 sans doute à une distance d'un kilomètre, un kilomètre et demi de l'endroit
25 où vous étiez stationné, n'est-ce pas ?
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1 R. J'ai dit que je ne pouvais rien indiquer sur cette photographie. Sur la
2 carte, je peux vous montrer où se trouvait notre stationnement où j'étais
3 stationné en même temps que mon unité.
4 Q. Vous nous l'avez montré. Vous nous avez montré sur la carte qu'on vous
5 a soumise où se trouvait Brnjaca.
6 M. NICE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous garder la
7 photographie en arrière sur le rétroprojecteur. Je n'en ai pas terminé.
8 Q. Reconnaissez-vous le cours d'eau qui a fait l'objet de questions qui
9 vous ont été posées par l'accusé. Il vous a interrogé au sujet du cours
10 d'eau, est-ce que vous le voyiez sur cette photographie ?
11 R. Non. Je ne le vois pas ici. Est-ce que cela se trouve dans le village ?
12 Q. Nous avons besoin de votre aide. Peut-être que je peux vous aider. Si
13 vous regarder la carte à droite, vous verrez qu'il y a toute une série de
14 cartes -- d'arbres et de buissons jusqu'en haut de la photographie. Est-ce
15 que vous admettez qu'il s'agit là du cours d'eau ou du lit du cours d'eau ?
16 Est-ce que vous acceptez que cela peut être le cas ?
17 Il pourrait s'agir d'une rangée de buissons et d'une route couverte --
18 d'une route, d'une haie ou d'une route avec des arbres qui sinuent le long
19 du terrain --
20 R. Écoutez, je suis un officier d'infanterie. Je suis à la retraite
21 actuellement et, en général, je n'analyse pas des photographies aériennes.
22 En général, je suis sur le terrain, donc, il peut s'agir effectivement du
23 lit d'un cours d'eau - c'est possible - alors que le fleuve Belaja prend sa
24 source dans le village. Il est vrai.
25 Q. En haut du village - simplement pour vous aider à vous y retrouver - en
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1 direction de Rogova, vous verrez qu'il y a une ligne qui traverse ici. Il
2 s'agit là du chemin de fer et le chemin de fer est entre la ligne de chemin
3 de fer et ce cours d'eau, il y a un pont. Connaissez-vous ce pont ?
4 R. Non.
5 Q. C'est sur ce pont là, d'après la déposition de bon nombre de témoins et
6 de témoins oculaires, que bon nombre de personnes ont été massacrés le 25.
7 Vous n'étiez absolument pas loin de là. Vous étiez à un ou deux kilomètres
8 de là, ce jour-là, n'est-ce pas ?
9 R. Un peu plus tôt, je vous ai dit que mon unité ne devait pas accomplir
10 de telles tâches. J'étais à Brnjaca et là c'était très calme, mais je n'ai
11 jamais entendu parler de telles choses ni d'une unité qui aurait fait cela.
12 Q. Donc, le matin du 25, qu'est-ce qui vous a réveillé ? Qu'est-ce qui
13 vous a -- qui est-ce qui a troublé votre quiétude ? Car, d'après les
14 différents témoignages que nous avons entendus, la Crkva a été occupée déjà
15 entre 3 heures et 4 heures du matin. Est-ce l'occupation de Bela Crkva qui
16 a troublé votre quiétude ?
17 R. Monsieur Nice, je vous dis que, dans le courant de la nuit vers minuit,
18 nous avons été troublés par l'aviation de l'OTAN. Rien d'autres ne nous a
19 troublé.
20 Le 25, au matin, j'ai levé mes hommes et mon unité et nous nous sommes
21 dirigés vers Velika Hoca.
22 Q. Encore quelques questions pour le temps qui me reste. Il s'agit d'une
23 photographie aérienne quelque peu plus détaillée. Je souhaite que vous la
24 regardiez. Il s'agit du mois de juin de l'année 1999. Est-ce que vous voyez
25 les maisons endommagées sur cette photographie ? Pourriez-vous nous
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1 expliquer cela, s'il vous plaît ?
2 R. Cela est sans doute dû aux frappes aériennes sur le village. Vous
3 pensez qu'il s'agit ici d'une sélection de maisons. Il s'agissait de
4 sélectionner les maisons qui devaient être incendiées et de façon à ce
5 qu'on ne puisse plus voir les toits. C'est ce que vous dites ?
6 R. Non. Je ne dis pas que c'est l'OTAN qui ait brûlé ces maisons, j'ai dit
7 que l'OTAN a bombardé et tiré sur ces endroits. Je pouvais dire -- je peux
8 vous citer les noms des endroits qui ont fait l'objet des frappes aériennes
9 de l'OTAN.
10 Q. Une autre photographie, et je souhaite que vous la regardiez puisque
11 vous êtes officier d'infanterie. Il s'agit ici de la même pièce et on voit
12 ceci encore plus clairement. Est-ce que voyez ces maisons endommagées ?
13 Vous voyez qu'il y a encore des murs, mais qu'il n'y a plus de toits et on
14 ne voit pas de cratères, de bombes ou de dommages dus à des éclats. C'est
15 le genre de dégâts que l'on constate après qu'une bombe ait été lancée. De
16 quoi s'agit-il, en fait, ou que cela a été causé par des tirs
17 d'artillerie ? Il s'agit plutôt de ce dernier -- n'est-ce pas, de ce
18 dernier cas ?
19 R. Ce que vous faites actuellement, Monsieur Nice, c'est de faire -- vous
20 faites -- vous émettez des hypothèses.
21 Q. Est-ce que vous dites que ceci correspond à des dommages provoqués par
22 un bombardement ou plutôt par des tirs d'artillerie ?
23 R. Il s'agit sans doute de dommages provoqués par les frappes aériennes de
24 l'OTAN.
25 Q. Le lendemain, qu'avez-vous fait, le 25 ? Est-ce que vous étiez là pour
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1 nettoyer des villages ?
2 R. Écoutez, je devais apporter mon soutien aux autres forces afin de
3 briser, de détruire les forces terroristes Siptar dans la direction de
4 Velika Hoca, Opterusa, Samodreza et Trljiste, à savoir, apporter mon aide
5 aux autres forces. Il s'agissait d'une Unité de Mortier.
6 Q. Avez-vous pris part aux nettoyages de village ? Oui ou non ?
7 R. Non. Il n'y a pas eu de nettoyage de villages, mais nous avons combattu
8 les forces terroristes Siptar.
9 Q. Il n'est pas exact de dire que l'activité à laquelle vous vous étiez
10 livré, c'était une activité de nettoyage, n'est-ce pas ?
11 R. Le ratissage de villages existe. Il s'agit là d'une opération tactique
12 dans une zone très peuplée mais assurer un renfort à d'autres unités afin
13 de combattre les terroristes Siptar, telle était notre mission et la
14 mienne. C'est la raison pour laquelle j'étais à Opterusa, et cetera.
15 Q. Donc, vous dites que le nettoyage ne correspond pas à l'activité qui la
16 vôtre, le 25; c'est exact ?
17 R. Je vous ai dit il y a quelques instants que le ratissage existe. Il
18 s'agit d'une opération tactique menée par des forces d'infanterie lorsqu'il
19 s'agit de rompre et de détruire les forces ennemies. Ce qui était le cas.
20 Il s'agissait de combattre les forces terroristes Siptar dans une zone très
21 peuplée.
22 Q. Vous avez été le témoin dans un procès qui impliquait un certain
23 Mancic ?
24 R. Oui.
25 Q. C'est un Albanais Kosovar qui a été tué par qui ? Par un membre de
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1 votre unité ?
2 R. Non. Je n'avais rien à voir avec cela et je ne suis pas au courant.
3 Q. Le procès de Mancic, de quoi s'agissait-il alors ?
4 R. Effectivement, c'était le procès de Mancic, mais je n'ai pas été cité à
5 la barre par rapport à ce que vous venez de dire.
6 Q. Mancic a été accusé car il aurait dit à certains de ces soldats qu'il
7 fallait tirer sur des Albanais; est-ce exact ? Oui ou non ?
8 R. Écoutez, je ne peux rien vous dire à propos de quelqu'un qui n'était
9 pas mon supérieur hiérarchique.
10 Q. Réponse très générale sur ce qui s'est passé au Kosovo, la dernière
11 fois. Mancic a-t-il été accusé, oui ou non, pour avoir ordonné ou demandé à
12 ses soldats de tirer sur des Albanais ? Oui ou non ? Je vous laisse une
13 dernière chance.
14 R. Il a été condamné.
15 M. NICE : [interprétation] Merci.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, avez-vous des
17 questions supplémentaires ?
18 Nouvel interrogatoire par M. Milosevic :
19 Q. [interprétation] J'ai une seule question à vous poser, mon Capitaine,
20 si vous êtes en mesure de répondre à cette question, à la lumière de votre
21 expérience et de vos connaissances. Si nous parlons des conséquences d'un
22 obus qui est lancé à partir d'un char aéroporté par rapport à des
23 conséquences d'un obus qui est tiré à partir d'un équipement militaire au
24 sol, qu'on peut établir la différence entre les deux ?
25 R. Effectivement, l'impact de ces deux obus est différent. On ne peut pas
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1 le déterminer sur la base de ce document.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Capitaine, vous avez
3 terminé votre déposition. Je vous remercie d'être venu à ce Tribunal. Vous
4 pouvez disposer.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
6 [Le témoin se retire]
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin suivant, Monsieur
8 Milosevic.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin suivant est le lieutenant-colonel
10 Zlatko Odak.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, c'est Janos Sel
12 qui attend dehors. Je crois qu'il y a un malentendu. Il ne s'agit pas du
13 lieutenant-colonel Zlatko Odak. Faisons simplement entrer M. Janos Sel.
14 Faites entrer M. Janos Sel, s'il vous plaît. Ce M. Sel, quel est son
15 état civil, s'il vous plaît ? Est-ce un officier de l'armée ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'est un lieutenant-colonel.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant entendre M.
18 Odak, et revenir à notre liste de témoins initiale. Faites entrer M. Odak,
19 s'il vous plaît.
20 Il serait peut-être important de dire que les témoins qui seront entendus
21 sont des témoins qui vont être entendus pendant un court laps de temps
22 aujourd'hui, et je crois qu'il faut également le signaler.
23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Demandez au témoin de faire la
25 déclaration solennelle, s'il vous plaît.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
3 LE TÉMOIN: ZLATKO ODAK [Assermenté]
4 [Le témoin répond par l'interprète]
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous asseoir.
6 Monsieur Milosevic, vous pouvez commencer.
7 Interrogatoire principal par M. Milosevic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, mon Lieutenant-colonel.
9 R. Bonjour, Monsieur Milosevic.
10 Q. Veuillez vous présenter, s'il vous plaît, le plus rapidement possible.
11 R. Je m'appelle Zlatko Odak. Je suis né le 8 mai 1971 à Belgrade. Je suis
12 Serbe d'origine ethnique. J'ai obtenu mon diplôme à l'Académie militaire de
13 l'armée de terre. Je suis également allé à une école de formations
14 complémentaires pour les états-majors des quartiers généraux. J'ai occupé
15 différents postes. J'étais commandant d'un peloton de fusillés. J'étais
16 chef d'état-major d'une brigade, en bref.
17 Q. Où et quand avez-vous servi dans l'armée ?
18 R. A partir de 1986, au moment où j'ai obtenu mon diplôme de l'académie
19 militaire, j'ai servi dans la garnison de Djakovica jusqu'en 1999, date à
20 laquelle nous sommes retirés du Kosovo. Plus tard --
21 Q. Oui, poursuivez.
22 R. Plus tard dans des garnisons à Belgrade et Kragujevac où j'ai été
23 détaché.
24 Q. Ce qui signifie que vous êtes un de ces rares officiers ayant servi au
25 sein de l'armée yougoslave, de l'armée populaire yougoslave qui ait passé
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1 plus de 15 ans dans la garnison de Djakovica, à savoir, quelque 15 années ?
2 R. Pour être tout à fait honnête, 13 et demi.
3 Q. Vous connaissez très bien les circonstances et les conditions de vie à
4 Djakovica ?
5 R. Oui, je sais cela.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous êtes toujours un
7 officier en exercice ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mon grade actuel
9 est celui de lieutenant-colonel.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Où étiez-vous pendant la guerre au Kosovo ?
12 R. Pendant la guerre au Kosovo, j'ai eu deux postes quasiment. J'ai
13 commandé le Bataillon logistique et je faisais partie de la Brigade de la
14 Défense aérienne au début de la guerre. Il s'agit de la
15 2e Brigade PVO. Ensuite, j'ai demandé à être transféré au
16 2e Bataillon de la 549e Brigade. C'est là où j'ai passé la deuxième partie
17 de la guerre. J'étais commandant adjoint.
18 Q. Lorsque vous dites jusqu'au milieu de la guerre, cela correspond à
19 quelle date exactement ?
20 R. Je ne me souviens pas de date exacte, mais cela devrait être vers le 20
21 mai environ. Jusqu'à cette date-là, je faisais partie de la 52e Brigade.
22 Ensuite, je suis passé à la 549e Brigade.
23 Q. Jusqu'au 20 mai vous étiez commandant de la Brigade d'artillerie de la
24 52e Brigade de la Défense antiaérienne à Djakovica ?
25 R. C'est exact.
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1 Q. C'est jusqu'au 20 mai environ. Pourriez-vous me dire, mon Lieutenant-
2 colonel, votre bataillon était cantonné à Djakovica pendant tout ce temps ?
3 R. Oui.
4 Q. Y avait-il d'autres unités cantonnées à Djakovica en même temps que la
5 vôtre ?
6 R. Dans la ville de Djakovica, il n'y avait que le bataillon d'artillerie
7 et son commandement. Il n'y avait pas d'autres unités.
8 Q. Hormis le commandement de votre brigade, il n'y avait pas d'autres
9 unités à Djakovica; c'est exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Nous avons entendu parler ici de différents crimes commis à Djakovica.
12 Crimes, semble-t-il, commis aux mains des forces de la RSFY. C'est pour
13 cela que je vous repose la question. Il n'y avait que votre unité, qui
14 était déployée à Djakovica, à ce moment-là ?
15 R. Oui. Il y avait également le bataillon de commandement qui est là pour
16 répondre aux besoins du commandement de la brigade.
17 Q. Dites-moi, en quelques mots, s'il vous plaît : quelle était la
18 situation à Djakovica, étant donné que vous y avez passé 14 ans ? Quelle
19 était la situation pendant tout le temps que vous y avez passé ? Est-ce que
20 vous aviez des liens avec des personnes qui vivaient dans ce village ? Est-
21 ce que vous aviez des amis ? Est-ce qu'il y a beaucoup d'Albanais dans ce
22 village, dans cette ville ? Autrement dit, comment vivait-on à Djakovica ?
23 R. Je me suis même marié à Djakovica. Mon beau-père et la famille de ma
24 femme ont vécu avec des Albanais et ont été élevés ensemble. Par ce biais-
25 là, j'ai appris à connaître bon nombre d'Albanais que je voyais en dehors
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1 de mon travail. De même que je voyais des Serbes et des membres d'autres
2 groupes ethniques.
3 Q. Des problèmes ont-ils surgi dus à ces différences ethniques ?
4 R. Non.
5 Q. Quand les premiers problèmes ont-ils commencé à surgir car comme vous
6 avez vécu pendant une décennie et demie à cet endroit-là, vous pourriez
7 peut-être nous en parler.
8 R. Les premières difficultés ont commencé à se manifester ailleurs au
9 Kosovo, non pas à Djakovica précisément mais en 1979, il y avait des
10 troubles déjà. Jusqu'en 1997, 1998 il n'y a pas eu de troubles notables.
11 Q. Que s'est-il passé exactement en 1998 et 1999, qu'y a-t-il eu avant le
12 début de la guerre ?
13 R. En 1998, j'étais le commandant d'un Groupe de combat numéro 2, de la
14 549e Brigade. J'avais pour mission d'assurer la protection des zones
15 frontalières dans une région assez étendue de Mitar Vojinovic. Il y a cette
16 zone qui surplombe le village de Popovac et un autre village, Babaj Boks,
17 entre cette tour de contrôle et la zone frontalière.
18 On nous a donné cette mission car il y avait une contrebande d'armes le
19 long de la frontière. C'était quelque chose qui se produisait de plus en
20 plus souvent. Notre Groupe de combat devait assurer la protection de cette
21 région et ce, jusqu'au mois de septembre 1998. A cette époque-là, depuis le
22 village de Smonica et Popovac, il y avait plusieurs attaques pour jour,
23 attaques lancées contre les véhicules, qui ravitaillaient le personnel dans
24 la tour de contrôle. J'étais chargé d'assurer la sécurité le long de ces
25 routes empruntées par notre personnel pour parvenir à Kosare, Molina et
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1 cette tour de contrôle.
2 Dans l'accomplissement de cette tâche et également de capturer six
3 terroristes au-dessus du village de Popovac, je crois que c'était au début
4 du mois de mai.
5 Q. Vous entendez par là, le mois de mai 1998 ?
6 R. Il s'agit en réalité de la fin du mois de mai. J'ai capturé six
7 terroristes qui se sont rendus aux autorités. A ce moment-là, il y avait
8 des attaques incessantes menées par les terroristes de Smonica, Bezanic, et
9 d'autres villages, le village de Kvetz également. Ces attaques blessaient
10 bon nombre de soldats.
11 Au début du mois d'août, j'ai reçu un ordre me demandant d'attaquer
12 les terroristes à Kvetz et à Smonica, ce que j'ai fait. Lors d'une de nos
13 opérations, ces terroristes ont été repoussés et ont dû se replier sur le
14 village de Racaj.
15 Quelques jours plus tard, j'ai préparé une attaque -- ou
16 plutôt, j'ai poursuivi les terroristes, mais ils se sont cachés dans les
17 bois dans cette région qui est un terrain assez difficile. Ceci était
18 important pour eux car ceci était très proche de la zone frontalière. A
19 Sheremet, Koc [phon], Racaj, dans ces régions-là, ils se cachaient. Ils
20 souhaitaient ainsi pouvoir faire transiter des armes à la zone frontalière
21 et de façon à fournir en armes le Kosovo-Metohija et l'intérieur des
22 terres.
23 Q. En même temps, pourquoi deviez-vous assurer la sécurité de cette
24 route ?
25 R. Oui. Djakovica-Ponosevac.
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1 Q. Pourquoi cette voie de communication ou cette route était-elle
2 importante car il s'agissait pour vous d'assurer la sécurité de cela et de
3 vous protéger des terroristes Siptar ?
4 R. Bien. C'était important parce qu'il s'agissait de la route qui nous
5 permettait de ravitailler les hommes à Morina, Kosare et les tours de
6 contrôle.
7 Q. Ces tours de contrôle étaient réapprovisionnées par le moyen de cette
8 route ?
9 R. Oui. A un moment donné les terroristes ont bloqué cette voie de
10 communication, alors, c'était simplement bloqué, et pour les terroristes,
11 c'était une voie de communication importante car elle se trouvait proche de
12 la frontière. En réalité, nous avons, en 1998 et 1999, essayé de faire
13 rejoindre nos forces sur le territoire -- ils souhaitaient que les forces
14 se rejoignent sur le territoire albanais, et de façon à faire entrer les
15 armes plus rapidement, ce qui aurait été le plus simple pour eux.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause, et
17 reprendre dans 20 minutes.
18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.
19 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, continuez.
21 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.
22 M. MILOSEVIC : [interprétation] [hors micro]
23 Q. Alors, vous avez dit qu'en mai 1998, lorsque vous avez eu ces activités
24 antiterroristes, vous avez fait prisonniers six terroristes ?
25 R. Oui.
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1 Q. Dans quelle circonstances cela s'est-il fait et où exactement ?
2 R. A l'époque, les terroristes avaient bloqué la route en direction des
3 passages frontières, Morina et Kosare, pour empêcher l'approvisionnement
4 des unités. Alors, j'ai eu pour mission d'assurer le déplacement latéral de
5 l'unité qui s'est dirigée dans ce sens-là
6 -- dans ces directions-là pour ainsi dire rompre ce blocus. C'était la
7 seule possibilité d'approvisionner les unités au niveau de ces postes
8 frontaliers ou sur les hauteurs du village de Popovac. J'ai trouvé de
9 terroristes qui nous tombaient dessus et ils avaient tendu une embuscade.
10 Ils s'étaient apprêtés à attaquer la colonne. C'est une partie seulement
11 des terroristes qui se trouvaient à Popovac. Je les ai emprisonnés. Puis,
12 la colonne qui se déplaçait a été attaquée et lorsque nous avons commencé à
13 les poursuivre, ils se sont échappés vers le village de Smonica.
14 Q. Bien. Quelle a été la procédure que vous avez suivie avec ceux que vous
15 avez capturés ?
16 R. Les personnes capturées ont été envoyées au campement et on les a
17 confiées aux instances du MUP.
18 Q. Est-ce que quiconque les a malmenées ?
19 R. Non.
20 Q. Vous nous avez dit, tout à l'heure, ce qui s'est passé au niveau de la
21 route -- enfin, la voie de communication entre Djakovica et Ponosevac et
22 dans les villages que vous avez énumérés où il y avait des groupes de
23 terroristes auxquels vous avez eu à faire. Comment les choses se sont-elles
24 produites à la ville de Djakovica ? Y a-t-il eu des violences ou des
25 incidents quelconques ?
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1 R. Pendant la guerre, vous voulez dire ?
2 Q. Non. Je parle de l'année 1998 et la période qui a précédé la guerre.
3 R. Non. Dans la ville même, il n'y a pas eu d'incidents. La population
4 vivait de façon normale. Il n'y avait pas eu d'événements particuliers. Les
5 terroristes évitaient les grandes villes parce qu'ils ne trouvaient que des
6 appuis au niveau des villages. Ils contraignaient les villageois à
7 s'approcher d'eux et c'est là qu'ils se sentaient le plus en sécurité.
8 Q. Nous avons, bon nombre de fois, vu ici cela, et je ne vais pas vous
9 demander de montrer sur la carte où se trouve la ville de Djakovica, mais
10 votre zone de responsabilité était Djakovica et ses environs, n'est-ce pas
11 ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que ce secteur de Djakovica avait de l'importance, en sa qualité
14 de secteur, pour ce qui est de ces forces terroristes ?
15 R. J'ai déjà dit, tout à l'heure, que c'était là l'un des secteurs les
16 plus importants. On l'a vu même après la guerre, parce que suite à toutes
17 ces attaques contre nos instances officielles et sur les postes de
18 frontière, et suite aux attaques en provenance de l'Albanie, ils ont essayé
19 d'établir la jonction avec la République d'Albanie pour se créer une base
20 qui permettrait de faire passer des effectifs terroristes de la République
21 d'Albanie vers le Kosovo-Metohija.
22 Q. Où se trouvait la concentration la plus forte, les places fortes, les
23 plus grandes, dans le secteur de Djakovica, dans quels villages ?
24 R. Les villages que j'ai déjà mentionnés; Nec, Smonica, Bezanici, Racaj,
25 Pacaj, Dorisaj, Seremete, Meja. Il s'agit d'une espèce de forme d'ellipse,
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1 qui est entrecoupée de forêts, de bois, et cela crée bon nombre de
2 possibilités de se dissimuler. C'est donc la raison pour laquelle ils se
3 sont servis de ce secteur, en 1998 et 1999.
4 Q. Nous allons passer à l'année 1999 maintenant. Au paragraphe 63(h), il
5 est dit que jusqu'au mois de mars, donc jusqu'au mois de mars 1999, le
6 nombre des habitants de Djakovica a grandement accru en raison de ces
7 personnes déplacées qui ont fui leurs villages suite à des pilonnages
8 délibérés de la part des forces de la Serbie et la RSFY pendant 1998, et
9 les conflits armés entre ces forces-là et ce qu'il est convenu d'appeler
10 l'Armée de libération du Kosovo.
11 Alors que vous avez été là-bas, que pouvez-vous nous dire au sujet de ces
12 allégations ?
13 R. Pour reprendre le terme utilisé de pilonnage, je dirais qu'il n'y en a
14 pas eu du tout. D'ailleurs, en terminologie militaire, ce terme-là n'est
15 pas le terme utilisé. L'armée a visé des cibles qui ont été, enfin, des
16 emplacements qui ont été utilisés par les terroristes, des places fortes,
17 des bunkers, donc, les sites qui ont été utilisés par les terroristes. Il
18 n'y a pas eu de pilonnage délibéré.
19 Q. Pour ce qui est de cette forte concentration de la population à
20 Djakovica jusqu'à 1999, vous avez habité Djakovica pendant 15 ans; que
21 savez-vous nous dire à ce sujet ?
22 R. Je ne puis expliquer que cela qu'en parlant de la façon dont
23 procédaient les terroristes, si vous le permettez. Les modalités
24 d'intervention étaient les suivantes : ils venaient dans les villages et
25 ils procédaient à des mobilisations forcées. Ils contraignaient la
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1 population à acheter des armes. Les fusils étaient vendus de 200 à 300
2 deutschemarks, d'habitude, ensuite, ils donnaient ordre à la population de
3 fortifier des endroits, à creuser des tranchées autour des villages, et
4 cela donnait l'impression du village qui cherchait à se défendre.
5 Lorsque l'armée ne s'attaquait pas à eux, la population, elle, se trouvait
6 au village, puis ce qu'il faisait ensuite, c'est que les terroristes
7 s'attaquaient l'armée ou alors, aux instances de la police, aux effectifs
8 de la police. Lorsque l'armée ripostait, les terroristes donnaient l'ordre
9 à la population de s'en aller, ce qui créait une image suivant laquelle la
10 population, elle, déménageait, s'en allait suite à des pressions exercées
11 par l'armée. Or, en réalité, c'était le contraire. C'est ce qui a fait et
12 j'en suis témoin moi-même, à chaque fois qu'ils s'attaquaient à nous, la
13 population fuyait les secteurs concernés puisque les terroristes les
14 obligeaient à s'enfuir.
15 Q. On indique ensuite que le déplacement de ces personnes déplacées a été
16 renforcé après le 24 mars 1999, date à laquelle il y a eu des expulsions
17 forcées, expulsions forcées, dis-je bien, dans la ville de Djakovica. Il y
18 a eu, suite à cela, bon nombre de personnes déplacées qui ont regagné les
19 villages environnants, et les forces de la Serbie et de la RSFY les ont
20 chassées de là-bas, une fois de plus.
21 Vous avez été à Djakovica. Quel type d'expulsion forcée y a-t-il eu à
22 Djakovica ?
23 R. Il n'y a pas eu d'expulsion forcée, non seulement pour ce qui est de la
24 ville de Djakovica mais non plus pour ce qui est des secteurs où j'ai été.
25 Je n'ai jamais entendu parler d'expulsion forcée. J'ai parlé de la façon
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1 dont les terroristes intervenaient. J'ai dit pourquoi ils avaient forcé la
2 population à se déplacer, à s'en aller. Ce que je voudrais dire pour sûr,
3 c'est que la population a fui les bombardements de l'OTAN. Cela est une
4 chose que j'ai personnellement appris en m'entretenant avec la population,
5 avec les réfugiés. Ils allaient en profondeur du territoire; ils allaient
6 chez des membres de leurs familles, enfin, ils allaient là où ils
7 estimaient qu'ils seraient plus en sécurité.
8 Q. On dit, ensuite, que les forces serbes ont contrôlé et coordonné le
9 déplacement des personnes internement déplacées dans le secteur de la ville
10 de Djakovica et ailleurs et pour finir, jusqu'à la frontière, la frontière
11 séparant le Kosovo et la République d'Albanie. Ceux qui sont allés à pied
12 ont été envoyés de Djakovica directement vers l'un des passages frontière
13 concernés. Ceux qui se sont servis de véhicules ont été dirigés vers la
14 ville de Prizren avant que d'aller vers la frontière.
15 Dites-moi : est-ce que l'armée a contrôlé le déplacement des réfugiés et
16 qu'est-il de vrai dans ces allégations ?
17 R. Tout d'abord, l'armée n'a pas contrôlé le déplacement des réfugiés,
18 elle n'a pas eu cela pour mission. La mission première de l'armée était
19 celle de défendre le pays de cette agression de l'OTAN.
20 Comme je me trouvais dans la ville de Djakovica, j'ai eu l'occasion de voir
21 cette population. Hélas, j'ai eu également l'occasion de m'entretenir avec
22 des gens qui venaient même de Mitrovica. Il y avait un grand nombre
23 d'enfants parmi eux, ce sont des images terribles. J'ai pu m'entretenir
24 avec ces gens, et ils avaient en premier lieu peur des bombardements.
25 Deuxièmement, bon nombre d'entre eux ont affirmé qu'ils ont été menacés par
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1 les terroristes et les terroristes leur auraient dit qu'ils ne devaient pas
2 rentrer chez eux, mais qu'ils devaient partir en Albanie, probablement pour
3 donner l'image d'une prétendue catastrophe humanitaire.
4 Q. Au 63(i), on dit que cela a commencé le 24 mars, la première journée de
5 la guerre, et que cela a duré jusqu'au 12 mai, vous, vous êtes resté à
6 Djakovica jusqu'au 20 mai ?
7 R. Oui.
8 Q. Cela couvre la période où vous avez été là-bas vous-même, tout le
9 temps. Entre le 24 mars et le 11 mai, les forces de la Serbie et de la RSFY
10 ont commencé à forcer la population de Djakovica à s'en aller. Elles se
11 sont déployées dans la ville en allant, d'une maison à l'autre, pour donner
12 l'ordre aux Albanais du Kosovo de s'en aller et de quitter leurs maisons.
13 R. Cela est absolument faux. Je me trouvais avec mon unité à Djakovica et
14 je communiquais tout le temps avec la population de Djakovica. Ce qui fait
15 que ces renseignements-là sont tout à fait erronés. Je ne sais pas quoi
16 vous dire encore.
17 Là, où il y avait mon unité, il y avait des gens de Djakovica qui vivaient
18 autour, et ils ont vécu d'une façon tout à fait normale. Ceux qui n'ont pas
19 redouté les bombardements sont restés là où ils se trouvaient ou alors
20 peut-être n'avaient-ils pas un endroit où aller ?
21 Q. Bien. Savez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet des forces à nous
22 qui seraient allées d'une maison à l'autre pour forcer la population à s'en
23 aller ?
24 R. Je vous répète que mon unité se trouvait là-bas et ce bataillon avait
25 pour mission d'approvisionner le bataillon en munitions, en vivres et ainsi
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1 de suite. Il n'est pas exact d'affirmer que quiconque aurait commis ce type
2 de choses, qui aurait fait quoi que ce soit de ce genre.
3 Q. On dit que des gens ont été tués et que d'autres ont été menacés de
4 mort et que bon nombre de maisons et de magasins auraient été incendiés
5 alors qu'ils appartenaient aux Albanais du Kosovo alors que les magasins
6 des Serbes avaient été protégés. C'est ici l'image qu'on veut présenter
7 ici. Est-ce que cela correspond à la réalité ?
8 R. Ce n'est pas exact. On n'a menacé personne. On n'a chassé personne. On
9 n'a pas non plus incendié les magasins des Albanais. Ce qui a brûlé, dans
10 la ville de Djakovica, a brûlé suite uniquement aux bombes de l'OTAN. Je
11 vais dire que mon bataillon se trouvait au nord de Djakovica, dans la
12 direction de Pec. Là, il y avait cette population et au moment où je m'y
13 suis trouvé, la population de Djakovica s'y est trouvée aussi. A plusieurs
14 reprises, il y a eu des frappes sur mon unité. Bon nombre de sites civils
15 ont été touchés aussi.
16 Q. Etant donné que vous vous trouviez là-bas, est-ce que vous avez
17 inspecté en personne les endroits bombardés ? Dites-nous ce que vous avez
18 vu ?
19 R. J'y étais. Étant donné que mon unité avait des missions au niveau de la
20 ville entière, j'ai inspecté la ville à bon nombre de reprises. En
21 particulier, je dirais que ce qui a été le plus terrible c'est un secteur
22 vers la sortie de Djakovica, il y avait une colonne de réfugiés qui a été
23 touchée. Il me semble que c'est à la date du 24 avril. Enfin, je ne suis
24 pas tout à fait certain de la date, mais il y a cette colonne de réfugiés
25 qui a été touchée par les bombes de l'OTAN et la cité de Maja, où se
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1 trouvaient des réfugiés serbes, originaires de la Krajina. On a également
2 touché l'usine Erenik Sokara. C'est une partie de la ville avec une
3 majorité serbe et là, bon nombre de civils ont péri à l'occasion du
4 bombardement de l'usine.
5 Q. Sokara. "Sokora" ici, mais c'est Sokara. Vous voulez dire que c'est là
6 l'usine où l'on fabrique des jus de fruit ?
7 R. Oui. C'est ainsi qu'on l'appelle dans notre parlé local.
8 Q. Oui. Dans le parlé local.
9 R. En particulier, ils ont ciblé la partie qui se trouve vers la colline
10 de Cabrat. Ils ont ciblé cette partie de la ville. Je sais qu'une mosquée y
11 a été détruite. C'est à Cabrat que se trouvaient les positions de tirs des
12 batteries de missiles auparavant, avant que d'avoir été déménagées
13 ailleurs. Ces batteries ont souvent changé de positions. Nous avions placé
14 sur cette colline des maquettes. L'aviation n'a eu cesse de les cibler. Ils
15 ont souvent raté leurs cibles et ils ont ainsi frappé des constructions
16 civiles.
17 Q. Etant donné que vous avez commandé cette Unité de Djakovica, dites-
18 nous si l'un quelconque de vos soldats aurait mis le feu à une maison
19 quelle qu'elle soit ?
20 R. Ce que je peux vous dire c'est que ce n'est certainement pas le cas.
21 D'après ce que j'ai appris et je vais vous dire que j'ai été jugé comme
22 étant un officier des plus strict, des plus sévère. Mon commandant de la
23 brigade, M. Djosan était un homme exceptionnel, un colonel très sévère.
24 Tous les cas où des crimes auraient été commis ont fini par être
25 sanctionnés comme il se doit.
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1 Q. On dit ici dans ce paragraphe 63 (i) : qu'à partir du 24 mars 1999, la
2 vieille mosquée de Rogovo et ensuite le bazar, puis la mosquée de Hadun et
3 la bibliothèque islamique à côté ont été au nombre des sites culturels
4 partiellement ou totalement détruits. Que savez-vous nous dire à ce sujet
5 puisque vous étiez sur place ?
6 R. Pour ce qui est de la mosquée de Rogovo, je ne peux pas vous le dire
7 puisque je n'ai pas été là-bas à l'époque. Je vous l'ai dit tout à l'heure.
8 J'ai indiqué, tout à l'heure, que cette mosquée se trouvait vers le site de
9 Cabrat.
10 Q. Vous parlez de la mosquée de Hadun maintenant ?
11 R. Oui. De la mosquée de Hadun. Cette partie de la ville qui se trouve non
12 loin de cette colline de Cabrat a souvent été ciblée par l'OTAN. Je ne vais
13 même pas dire souvent. Je vais dire quotidiennement. C'est alors que cette
14 mosquée et cette bibliothèque ont été frappées.
15 Q. Je ne vous pose pas de questions au sujet des endroits où vous ne vous
16 trouviez pas. Je vous pose des questions au sujet des endroits où vous
17 étiez, à savoir, cette mosquée de Hadun, cette bibliothèque islamique et le
18 vieux bazar. C'est quoi le vieux bazar, c'est le marché ?
19 R. Oui. C'est le marché. Si nous parlons de la même mosquée.
20 Q. Oui. Attendez. La mosquée, c'est une chose. Elle s'appelle Hadun mais
21 le bazar de Djakovica, cela se trouve au centre ou quoi ?
22 R. Oui. Le bazar, cela se trouve non loin du centre-ville.
23 Q. Qu'est-ce qui a occasionné la destruction de ce bazar ?
24 R. C'est non loin de là que se trouvait une partie de mon unité. C'est
25 nous qu'on a ciblés. Je ne peux pas vous donner la date où cela s'est
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1 produit mais c'est l'endroit qui a été touché par les bombes de l'OTAN.
2 Q. Merci. Entre le 2 et le 4 avril, dit-on ici : ensuite, des milliers
3 d'Albanais du Kosovo, qui résidaient dans la ville de Djakovica et dans les
4 villages voisins, ont rejoint un important convoi et à pied ou en voiture,
5 camions, tracteurs.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je vais demander
7 au lieutenant-colonel : vous avez dit que c'est une bombe de l'OTAN qui a
8 détruit le bazar, n'est-ce pas ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais comment le savez-vous ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai dit, tout à l'heure, que mon unité
12 changeait souvent de place. On changeait de secteurs de déploiement et une
13 fois nous nous sommes trouvés à proximité de cette mosquée du bazar et ils
14 ont ciblé les endroits où se trouvaient mes hommes.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez été témoin du bombardement
16 de ce bazar par les avions de l'OTAN, n'est-ce pas ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas à ce moment même sur les lieux,
18 mais après avoir entendu les témoignages de mes soldats et de ceux qui se
19 trouvaient là, à ce moment-là, je le sais. Je suis arrivé quelque peu plus
20 tard. Je suis arrivé peut-être une demi-heure ou une heure après. A chaque
21 fois que mon unité était prise pour cible, je venais au bout d'un moment
22 sur les lieux, une fois informé de la chose.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous nous dites que vous ne vous
24 souvenez pas de la date mais vous souvenez-vous de la journée, du jour de
25 la semaine quand cela s'est produit ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je regrette beaucoup, Monsieur Robinson, mais
2 il s'est passé six ans depuis et je ne saurais m'en souvenir. Je ne m'en
3 souviens pas.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'a-t-on détruit en sus par
5 bombardement de l'OTAN si tant est qu'autre chose a été détruit ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai indiqué qu'il s'agissait notamment
7 de la partie de Djakovica, qui se trouvait du côté de la colline de Cabrat,
8 sur les hauteurs de Djakovica. Cette partie-là a pratiquement été détruite
9 par ces bombardements. Je vous ai dit qu'auparavant, nous avions des
10 positions de tirs là-bas. On avait placé des maquettes et tous les jours,
11 l'aviation a procédé à des frappes aériennes. Ils ont complètement détruit
12 les installations -- les constructions civiles non loin de la caserne.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais dans le secteur du bazar, y
14 avait-il autre chose de détruit par les bombes de l'OTAN ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Les maisons environnantes ont été endommagées.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, continuez.
17 M. MILOSEVIC : [interprétation]
18 Q. Je vous ai posé des questions au sujet des allégations, qui disent
19 qu'entre le 2 et le 4 avril 1999, des milliers d'Albanais du Kosovo, qui
20 vivaient à Djakovica et dans les villages voisins, ont rejoint un important
21 convoi, disais-je, et à pied ou en voiture, camion ou tracteur, se sont
22 dirigés vers la frontière albanaise. Alors, que savez-vous nous en dire ?
23 Dites-nous aussi pourquoi ces gens s'en allaient. Y a-t-il des départs en
24 masse de la population de Djakovica ?
25 R. Les habitants des villages voisins comme je l'ai dit tout à l'heure,
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1 les uns par peur des bombardements de l'OTAN, les autres, suite et par peur
2 des menaces de la part des terroristes, se sont dirigés vers l'Albanie. Ils
3 se sont dirigés vers les endroits où ils pensaient être sûrs. Les uns sont
4 partis vers l'Albanie. D'autres sont allés chez des membres de leurs
5 familles à Djakovica, puis vers Raca, Moglica, Petrusa, et ailleurs, mais
6 il n'y a pas eu d'expulsion. Ils sont allés là où ils ont pensé qu'ils
7 seraient plus en sécurité.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Lieutenant-colonel, quel est le
9 fondement qui vous permet de tirer cette conclusion qui est celle de dire
10 que les habitants sont allés suite ou par peur des bombardements de l'OTAN.
11 Quelle est l'information précise que vous avez à ce sujet ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà dit, en répondant à la question
13 précédente, que je me suis entretenu avec des gens dans cette colonne de
14 réfugiés, avec un groupe de réfugiés. Ils étaient au nombre d'une centaine.
15 Il y avait des femmes, des enfants, des vieillards. Etant donné qu'ils
16 passaient à côté de cette usine, Emin Duraku, ils venaient de Kosovska
17 Mitrovica et de Pec. J'avais mon commandement de positionner, d'installer
18 dans cette usine. A un moment donné, il y a eu bombardement de cette
19 colline de Cabrat. Cela se trouve à 300 ou 400 mètres de là où se trouvait
20 la colonne.
21 Alors, je les ai reçus dans l'enceinte de l'usine. On leur a donné à manger
22 autant qu'on pouvait et de l'eau à boire. Là, les gens se sont plaints à
23 nous de toute cette situation. Ces individus nous ont dit qu'ils avaient
24 peur des bombardements. Qu'ils devaient forcément aller vers l'Albanie.
25 D'autres disaient autre chose. Mais ils avaient aussi peur de ne pas être
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1 entendu -- ils avaient peur d'être entendu.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Monsieur Milosevic, continuez.
3 M. MILOSEVIC : [interprétation]
4 Q. Un petit détail. Est-ce qu'ils, les habitants de la ville partaient en
5 masse. Vous avez dit tout à l'heure que certains s'abritaient dans la ville
6 de Djakovica, chez des membres de leurs familles. Est-ce que les habitants
7 de Djakovica s'en allaient en masse ?
8 R. Non. Vers la fin de la guerre, Djakovica avait deux fois plus
9 d'habitants qu'avant.
10 Q. Donc, la ville de Djakovica n'a pas été abandonnée par ses habitants ?
11 R. Non.
12 Q. On dit que les forces de la RSFY et de la Serbie ont fait passer les
13 fugitifs par des itinéraires fixés à l'avance. Ensuite, au point de
14 contrôle la plupart des Albanais du Kosovo se sont vus confisquer leur
15 papier d'identité ainsi que les plaques d'immatriculation de leurs
16 véhicules. Des camions de l'armée yougoslave ont parfois été utilisés pour
17 transporter les personnes à la frontière albanaise. Que savez-vous nous en
18 dire, je vous prie.
19 R. Comme je l'ai déjà indiqué, l'armée elle n'a pas procédé au contrôle
20 des déplacements de civils. Les unités se trouvaient toutes à la frontière
21 de l'Etat dans leur secteur de déploiement pour organiser la défense du
22 pays. Ce qui fait que je n'ai pas appris qu'il y ait eu des contrôles, une
23 confiscation de documents ou des transports d'organisés. Ce que ces pauvres
24 gens avaient, était utilisé pour le transport. Ceux qui n'avaient pas de
25 moyen de transport allaient à pied depuis Mitrovica encore. J'aurais
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1 certainement appris si telle chose se serait produite, parce que je me
2 trouvais dans la ville même de Djakovica.
3 Q. Merci. A l'acte d'accusation au 63(ii), on dit que, le 27 avril à
4 l'aube --
5 M. NICE : [interprétation] L'accusé est en train de faire la même erreur
6 que celle où il y a citation des paragraphes de l'acte d'accusation. Il
7 convient de procéder à une rectification pour les besoins du compte rendu
8 d'audience. Il s'agit du 63(h)(i) ou (ii) et il faudrait que cela soit
9 indiqué comme il se doit au compte rendu d'audience.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Gardez cela à l'esprit, Monsieur
11 Milosevic, 63(h)(i).
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.
13 M. MILOSEVIC : [interprétation]
14 Q. Donc, le 27 avril à l'aube, ou vers ces dates, les forces de la RSFY et
15 de la Serbie ont lancé une attaque massive contre les vallées de Carragojs,
16 Erenik, et Trava, municipalités de Djakovica, afin de chasser la population
17 du secteur.
18 Alors, que savez-vous nous dire à ce sujet ?
19 R. J'ai déjà dit, en répondant aux questions précédentes, que ce secteur
20 était très important pour les terroristes. Leur concentration dans le
21 secteur a toujours varié du point de vue du nombre.
22 A un moment donné, suivant les informations dont je disposais, ils
23 ont même mis en péril les arrières de nos unités. Les tous premiers
24 échelons au niveau du déploiement au combat des unités. Ce qui fait qu'il
25 fallait forcément procéder à une fouille du terrain aux fins d'interdire à
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1 ces terroristes toute possibilité de mettre en péril nos propres unités.
2 Pour autant que je le sache, cette action a eu pour seul objectif la
3 nécessité de chasser les terroristes du secteur concerné.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai cité avec précision ce
5 que j'ai cité. Djakovica se trouve au (h) et le sous alinéa que j'ai cité
6 est celui qui porte les deux (ii) au début.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela ressemble au chiffre romain --
8 au chiffre II en caractère romain. Mais continuons.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Cela ressemble, à mon avis, à un petit (i),
10 deux petits (ii). Mais bon.
11 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à ce que les micros de M.
12 Milosevic placés plus près de l'accusé parce qu'ils ont du mal à
13 l'entendre.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez continuer, je vous prie.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Dans le paragraphe que j'ai évoqué tout à l'heure, il est question de
17 Korenica et de Meja Orize, et il est dit qu'un nombre de villageois en ont
18 été expulsés en étant séparés de la masse des autres villageois en fuite;
19 qu'ensuite, ils ont été enlevés et exécutés; que, toute la journée, ils ont
20 subi les menaces directes des forces de la République de Serbie et de la
21 République fédérale yougoslave; qu'ils ont quitté leurs maisons à bord de
22 tracteur, d'automobile et d'autres véhicules motorisés et qu'ils se sont
23 dirigées vers la -- en franchissant la frontière -- dans ce paragraphe, il
24 est dit, une nouvelle fois, que leurs documents -- leurs papiers d'identité
25 leur étaient enlevés au passage de la frontière.
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1 Qu'y a-t-il de vrai dans tout cela ?
2 R. Vous parlez du 27 avril ?
3 Q. Oui. Le 27 avril c'est ce dont il est question dans tout ce sous-
4 paragraphe. J'ai dit qu'il s'agissait du 27 avril, date de ce qui est
5 appelé ici : "Une grande offensive." Ensuite vient le passage que je vous
6 ai cité où il est dit que, dans ces endroits, un grand nombre d'Albanais du
7 Kosovo de sexe masculin, dont le nombre n'est pas encore déterminé, ont
8 subi ce qui est indiqué ici, alors qu'ils fuyaient vers la frontière
9 albanaise.
10 R. Je n'ai pas d'informations que quelque chose de ce genre ait eu lieu et
11 j'aurais dû le savoir. C'est certain puisqu'une partie de mon unité a
12 contribué à encercler ce secteur. A Djakovica, il n'y avait pas d'autres
13 unités et il n'y avait pas d'unités susceptibles d'intervenir au cas où les
14 terroristes intervenaient dans le village.
15 J'ai donc reçu l'ordre de créer une compagnie d'une centaine d'hommes, donc
16 trois pelotons à peu près qui auraient pu intervenir en cas d'attaques de
17 la part des terroristes ou qui auraient pu accomplir une mission que lui
18 aurait ordonné le commandement du corps d'armée éventuellement.
19 Q. Donc, en tant que commandant du Bataillon de la Logistique qui, en
20 fait, vous n'êtes pas censé avoir un rôle de combattant ?
21 R. En effet. Une Unité de Logistique n'est pas une Unité de Combat, mais,
22 compte tenu des circonstances puisque aucune autre unité n'était présente,
23 j'ai constitué un groupe à partir de mon unité -- sous groupe donc de mon
24 unité, pour créer cette formation. J'ai participé --
25 Q. Allez-y. Allez-y. Non, allez-y. Terminez.
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1 R. J'ai participé à cette action et je n'ai pas d'informations que quelque
2 chose de ce genre se soit passée alors que j'en aurais certainement été
3 informé si cela avait eu lieu.
4 Q. En quelle qualité avez-vous participé à cette action ?
5 R. Puisque je suis soldat de métier, je commandais cette compagnie. Je
6 suis officier d'infanterie et j'ai été chargé de m'occuper de la ligne qui
7 surplombait le village, Osek Hilja.
8 Q. J'aimerais maintenant que vous nous montriez cet endroit sur le
9 rétroprojecteur. J'espère qu'à l'intercalaire 2 de votre documentation,
10 vous avez la carte en question dont je ne dispose malheureusement. Est-ce
11 que vous l'avez dans vos pièces à conviction ? C'est une carte
12 géographique.
13 Il s'agit de la pièce D321, intercalaire 29.1.
14 R. Mon unité se trouvait sur la ligne à la cote 348 -- 378 ainsi
15 qu'à la cote 378 et -- 360.
16 Q. Quelle était la longueur de cette ligne que vous teniez avec votre
17 unité ?
18 R. Elle s'étendait sur un kilomètre, un kilomètre et demi à peu près.
19 Q. Donc, vous teniez une ligne qui mesurait au moins un kilomètre, n'est-
20 ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. En tenant cette ligne, avez-vous vu quoique ce soit de ce qui est
23 affirmé dans ce document ici ?
24 R. Avec mon unité, j'étais dans un secteur très forestier, très boisé et
25 qui était un peu en hauteur. Donc, il est très difficile de le voir d'un
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1 autre endroit. La partie droite du secteur que je couvrais a effectué un
2 déplacement avant et s'est retrouvé dans le village de Racaj. Les hommes en
3 question ont d'ailleurs découvert une cache des terroristes qui s'étaient
4 enfuis au préalable lorsqu'ils ont vu mes soldats arriver dans le village.
5 J'ai ensuite rappelé mon unité car notre mission consistait à empêcher que
6 certains franchissent la ligne que nous tenions.
7 Q. Donc, vous n'êtes pas entrer dans le village pour effectuer des
8 fouilles, rechercher des terroristes ?
9 R. Non, non. Vraiment. Depuis Ratimje [phon], nous ne voyons pas ce qui se
10 passait. C'était impossible. D'ailleurs dans les journées de 27 et 28, nous
11 avons entendu le bruit de tirs. Donc, il y a eu des combats contre les
12 terroristes.
13 Q. Très bien. Dites-moi, je vous prie. Lorsque vous êtes parti pour mener
14 cette mission. Je suppose que vous aviez au préalable reçu un ordre quant à
15 la nature de votre mission ?
16 R. Oui.
17 Q. Au paragraphe 66 de l'acte d'accusation, au petit (i), on retrouve
18 mention de qui est également évoqué au paragraphe 63: Il est question d'une
19 attaque massive contre les Albanais du Kosovo dans le but d'expulser la
20 population de cette région au niveau des localités de Carragojs, Trava et
21 Erenik en particulier. Alors, en tant que commandant d'un Groupe de combat
22 ou en tout cas de cette compagnie que vous avez créée et qui avait été
23 chargée de bloquer cette ligne d'un kilomètre, d'un kilomètre et demi selon
24 ce que vous avez dit. Pouvez-vous nous dire quelle était la nature exacte
25 de votre mission ? Quels étaient les objectifs, les buts à atteindre ?
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1 R. Les objectifs assignés à cette compagnie qui a été créée consistait
2 exclusivement à tenir cette ligne et empêcher que les terroristes puissent
3 se diriger vers les villages der Racaj, Osek Hilja ainsi que de Racaj-
4 Skivjane en franchissant cette ligne. Au cas où des civils auraient cherché
5 à franchir la ligne, cette compagnie avait pour mission de les faire
6 rentrer dans le village. Pourquoi ? Pour une raison unique. J'ai déjà
7 expliqué quel était le monde d'action des terroristes. Les terroristes
8 lorsqu'ils attaquaient interdisaient aux civils de quitter les villages --
9 contraignaient les civils à quitter les villages, ai-je dit ? Mais à
10 l'endroit où je me suis trouvé il n'y a pas de départs de civils et
11 d'ailleurs je n'ai pas eu de contacts avec quelques combats que ce soit.
12 J'ai déjà dit comment les terroristes agissaient. Ils contraignaient la
13 population à partir, en quittant leurs villages pour créer une situation
14 donnant à penser que c'était l'armée qui nuisait à la population.
15 Or, le seul objectif de tout cela était de permettre le déploiement de
16 terroristes dans le secteur où ils ne cessaient de revenir comme je l'ai
17 déjà dit au cours des années -- à partir de 1998, ils ne cessaient de
18 revenir dans ce secteur et menaçaient constamment nos unités.
19 Q. Donc, à l'endroit où vous vous trouviez, vous occupiez les fonctions de
20 commandant de bataillon et vos ordres venaient du commandant de brigade,
21 n'est-ce pas ? Est-ce exact ?
22 R. Oui.
23 Q. S'est-il trouvé à cet endroit où y a-t-il eu expression d'une idée ou
24 émission d'un ordre laissant à penser que des actes hostiles pouvaient être
25 accomplis contre les civils ?
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1 R. Certainement pas. Lorsque j'étais au sein de la 52e Brigade, de même
2 lorsque je me suis trouvé dans la 549e Brigade mécanisée, rien de tout cela
3 n'a jamais été indiqué. Il est certain que de tels actes n'auraient jamais
4 été commis contre la population civile par le passé et nous ne l'avons pas
5 fait non plus. Le seul objectif était de contrer les terroristes dans ce
6 secteur.
7 Q. Il est dit dans le document ici, que plusieurs postes de contrôle ont
8 été créés, qu'un grand nombre de représentants des forces de la RFY et de
9 la Serbie étaient présent sur les lieux, que les villageois ne cessaient de
10 quitter le secteur sous la menace directe des forces de la République
11 fédérale yougoslave et de la Serbie pour rejoindre des convois.
12 Qu'y a-t-il de vrai dans tout cela ?
13 R. La population ne partait que sur ordre des terroristes, exclusivement
14 sur ordre des terroristes. Des forces importantes, qu'est-ce que l'on
15 entend par ces termes ? Ces forces n'étaient pas absolument pas importantes
16 lorsque vous occupez un territoire d'un kilomètre et demi avec 90 hommes.
17 Il ne s'agit pas de forces importantes.
18 C'était la même chose pour les autres unités. Le nombre d'hommes
19 minimum qu'elles pouvaient écarter des Groupes de combat, elles les
20 organisaient en groupes chargés de ces Missions particulières.
21 Q. Une autre allégation, dans le même paragraphe, consiste à dire
22 qu'à Meja Korenica, Meja Orize, un grand nombre encore indéterminé
23 d'Albanais du Kosovo, des hommes civils ont été séparés de la masse de
24 civils en fuite, qu'ils ont été enlevés et ensuite exécutés sommairement et
25 que 300 personnes sont encore portées disparues. Que savez-vous de tout
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1 cela ?
2 R. Ceci ne peut être exact car si cela avait eu lieu, je l'aurais
3 su. Il est certain qu'il y avait des terroristes. D'ailleurs tout s'est
4 fait à cause de cela mais que des habitants ont été tués ou qu'ils ont
5 trouvé la mort, cela ce n'est pas exact.
6 Q. Bien. Je vais maintenant vous poser une question qui n'a plus de
7 rapport avec Meja.
8 Au paragraphe 66(e), on mentionne la date du 26 mars 1999. Où vous
9 vous trouviez-vous à ce moment-là ?
10 R. A Djakovica.
11 Q. Vous étiez à Djakovica, ce jour-là. Je cite ce que dit le paragraphe :
12 "Dans la soirée du 28 mars 1999 ou vers cette date, dans la ville de
13 Djakovica, les forces de la RFY et de la Serbie ont fait irruption dans une
14 maison sise au 634A, rue Ymer Grezda. Les femmes et les enfants ont été
15 séparés des hommes et ont dû monter à l'étage. Les forces de la RFY et de
16 la Serbie ont alors tiré tuant les six hommes albanais du Kosovo qui se
17 trouvaient dans la maison."
18 Le 26 mars, tout cela est censé s'être passé.
19 R. Je ne sais pas où se trouve cette rue, mais puisque j'étais à Djakovica
20 à l'époque, j'en aurais certainement entendu parler, si une telle chose
21 avait eu lieu. Or, je n'ai eu connaissance de rien de ce genre. Je ne pense
22 pas que cela ait eu lieu.
23 Q. Dites-moi à Djakovica à ce moment-là, y avait-il une autre unité que la
24 vôtre ?
25 R. Non.
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1 Q. Si ce qui est dit était exact, cela devrait être imputé aux membres de
2 votre unité ?
3 R. Selon ce qui est dit ici, oui.
4 Q. Selon ce qui est écrit ici.
5 R. Oui, selon ce qui est écrit.
6 Q. Dites-moi : aurait-il été possible que des membres de votre unité aient
7 fait ce qui est écrit ici, sans que vous le sachiez ?
8 R. Non, c'est impossible. Je redis une nouvelle fois que dans notre armée,
9 comme dans toute autre armée, il y a un certain nombre de principes que
10 nous respectons. Il est certain que quelqu'un m'aurait informé, un de mes
11 subordonnés, par exemple, si une telle chose avait eu lieu ou même un
12 supérieur.
13 Q. La plus petite unité sous vos ordres, comment se situe la hiérarchie.
14 Il y a d'abord la compagnie et en dessous le peloton, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce qu'un de vos pelotons ou un de vos escadrons aurait pu agir de
17 sa propre initiative sans que vous en soyez informé ?
18 R. Non. C'était impossible à l'époque. Les soldats étaient constamment
19 sous le contrôle des officiers. Les officiers étaient en grand nombre. Si
20 cela s'est passé la nuit comme c'est indiqué ici, il est certain qu'aucun
21 soldat ne circulait dans la ville, la nuit. Qu'aucun soldat n'a fait ce
22 genre de choses, car il y avait des interdictions très strictes destinées à
23 assurer la sécurité de la population. Les soldats avaient interdiction de
24 se déplacer hors d'un secteur déterminé.
25 Q. Y avait-il des soldats qui quittaient, de leur propre initiative, le
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1 secteur où ils étaient stationnés ?
2 R. Non, il n'y a pas eu de tels cas dans mon unité.
3 Q. Au paragraphe 66(h), il est dit : "Que le 1er avril, tard dans la
4 soirée, ou aux premières heures de la journée du 2 avril 1999, les forces
5 de la République de Serbie et de la RFY ont lancé une opération contre le
6 quartier de Qerim. Que pendant plusieurs heures, elles sont entrées de
7 force dans les maisons appartenant aux Albanais du Kosovo du quartier
8 Qerim, ont tué leurs occupants, puis ont mis le feu au bâtiment."
9 Il est question ici d'une action qui se serait menée dans la nuit du 1er au
10 2 avril 1999. Où vous trouviez-vous durant la nuit du 1er au 2 avril 1999 ?
11 R. J'étais sans doute à mon poste de commandement dans l'usine. Mon unité
12 est passée par le quartier de Qerim, ce soir-là, par un concours de
13 circonstances. En effet, le quartier a été bombardé par l'aviation de
14 l'OTAN et j'ai reçu l'ordre d'envoyer rapidement une ambulance et un
15 véhicule de pompier dans le secteur. J'ai envoyé le chef de la sécurité
16 parce que j'envoyais toujours les hommes chargés de la sécurité en cas
17 d'envoi de ces véhicules. J'ai envoyé le chef de la sécurité, à qui j'ai
18 donné l'ordre d'attendre l'ambulance et de positionner le camion citerne, à
19 la sortie du village, près du pont sur la route menant à Pristina.
20 Ces hommes sont partis. Ils ont accompli leur mission. Ils ont aidé les
21 blessés, ramassé les corps des soldats tués et ils sont rentrés. Le chef de
22 la sécurité m'a dit, parce que chaque fois qu'il revenait d'une mission il
23 me rendait compte de la façon dont la mission s'était effectuée, pour me
24 dire s'il avait rencontré le moindre problème. A son retour, il m'a dit
25 qu'il n'avait pas trouvé de morts, puisque c'était la nuit il n'avait
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1 rencontré personne dans les villages qu'il avait traversés. Ces hommes
2 n'ont rien remarqué de particulier dans le secteur où ils s'étaient rendus.
3 Par conséquent, je ne crois pas qu'une telle chose ait eu lieu.
4 Q. Vous rappelez-vous à quel moment, le radar dont vous avez parlé, a été
5 touché, après quoi vous avez envoyé l'ambulance et la voiture de pompier
6 ainsi que ces hommes pour ramasser les corps et les cadavres des soldats
7 touchés ?
8 R. Je ne me souviens pas exactement de l'heure mais après minuit, je
9 pense, mais je n'en suis pas certain.
10 Q. En tout cas, en plein dans la période évoquée comme étant celle où
11 cette action aurait eu lieu. En plein dans la période où les forces de la
12 République de Serbie et de la République fédérale yougoslave seraient
13 entrées dans des maisons d'Albanais du Kosovo, auraient tué des habitants,
14 et cetera.
15 R. Ils sont passés dans le secteur en question. Si cela avait eu lieu, ils
16 l'auraient sans doute vu. Je répète que le commandant, à son retour, m'a
17 fait rapport qu'aucun événement particulier ne s'était produit.
18 Q. Si un événement avait eu lieu qui aurait pu être à l'origine à cet
19 événement à Qerim ?
20 R. Il n'y avait aucune force stationnée à Qerim, à Ljug Bunar, il y avait
21 cette équipe d'artilleurs, cette division de roquettes --
22 Q. Une division de roquette a sa propre mission à accomplir, n'est-ce pas,
23 elle comporte un certain nombre d'hommes ?
24 R. Oui, ce sont des hommes qui sont en alerte permanente et qui ne
25 quittent pas des yeux leurs armes.
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1 Q. Il est dit également dans ce paragraphe que des dizaines de maisons ont
2 été détruites. Donc vous, vous parlez de ce qui s'est passé, de l'heure à
3 laquelle vous avez envoyé cette équipe sur place, à minuit ou après alors
4 que dans ce texte il est dit : "Qu'à cette heure-là à peu près, des
5 dizaines de maisons ont été détruites et plus de 50 personnes tuées. Nous
6 lisons par exemple, un peu plus loin dans le texte, que les forces de la
7 RFY et de la Serbie ont tué les occupants du 157, rue Milos Gilic, puis ont
8 mis feu à la maison. Vingt Albanais du Kosovo dont 19 femmes et enfants ont
9 ainsi trouvé la mort."
10 R. Non, ceci n'est pas exact. Je l'aurais très certainement su si cela
11 avait eu lieu, car je répète une nouvelle fois que mon unité est passée à
12 cet endroit à peu près à ce moment-là. Je ne saurais le dire avec une
13 précision totale, s'agissant du temps, mais --
14 Q. C'est bien dans cette nuit du 1er au 2 avril, en tout cas ?
15 R. Il est faux de dire que quelque chose de ce genre s'est produite.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Lieutenant-colonel, au cours de
17 l'opération menée par vous y a-t-il eu des civils tués, ne serait-ce qu'un
18 civil tué ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Robinson, au cours des opérations
20 auxquelles j'ai participé, je n'ai pas eu l'occasion de voir un seul civil
21 tué, pas plus d'ailleurs qu'un seul terroriste tué. Par conséquent, il est
22 possible qu'il y ait eu des tirs, mais je n'ai pas vu de tirs et nous
23 n'avons pas retrouvé de cadavres, pas plus de cadavres de civils que même
24 de cadavres de terroristes.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez
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1 poursuivre.
2 M. MILOSEVIC : [interprétation]
3 Q. Lieutenant-colonel, vous avez à plusieurs reprises -- ou, non,
4 j'enlève "plusieurs reprises". En tout cas, vous avez fait des dépositions
5 au sujet des événements de Djakovica ?
6 R. Oui.
7 Q. Ces dépositions ont été présentées ici pendant la déposition du général
8 Djosan, qui était le command de votre brigade, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Dans ces dépositions que vous avez faites, avez-vous expliqué
11 exactement ce que vous saviez ? Avez-vous répondu à ce qu'on attendait de
12 vous ?
13 R. Oui, j'ai dit ce dont je me souvenais.
14 Q. A l'intercalaire 8, des documents que nous avons ici, et j'espère que
15 vous avez cet intercalaire 8 devant vous --
16 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, il serait bon que
17 l'accusé donne le référence de cette pièce, présentée pendant la déposition
18 de Djosan, pour que nous puissions retrouver le document.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Numéro de pièce à conviction,
20 Monsieur Milosevic, s'il vous plaît.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais vous le donner tout de suite, un
22 instant, je vous prie.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D321, intercalaire 8. En tout cas, c'est
24 ce qui figure sur la liste.
25 M. MILOSEVIC : [interprétation]
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1 Q. Chez vous, Monsieur le Témoin, cela sera l'intercalaire 3. J'aimerais
2 d'abord que nous vérifiions que nous avons bien le même texte. J'ai ici sur
3 les yeux votre déposition au sujet des activités de l'unité, pendant la
4 journée du 1er avril. Puis pendant les activités de l'unité, pendant les
5 journées des 27 et 28 avril ainsi que la déposition au sujet des activités
6 de votre unité dans la journée du 28 précisément. Trois dépositions que
7 vous avez faites. Je lis : Commission pour la coopération avec le TPIY,
8 équipe d'experts. Vous avez ce même texte sous les yeux ?
9 R. Oui.
10 Q. Le 1er avril, c'est la date à laquelle nos forces sont censées avoir
11 commis certains crimes là-bas. Vous décrivez ce que vous avez fait à ce
12 moment-là. Vous dites quelle était la nature da la mission qui vous avait
13 été confiée. Vous étiez commandant du Bataillon de Logistique, à ce moment-
14 là, et vous expliquez, dès le deuxième paragraphe de votre déposition, où
15 était stationné le bataillon.
16 R. Oui.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Milosevic. Tout ce
18 que les Juges de la Chambre ont reçu, c'est un tableau où on trouve les
19 cotes des documents qui sont utilisés pour l'audition de ce témoin. Au
20 regard de la mention D321, intercalaire 8, nous lisons : Déposition au
21 sujet des activités de l'unité, le 24 mars. Est-ce que vous pourriez vous
22 expliquer sur ce point.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Kwon, je lis ce qui figure dans les
24 documents que j'ai moi-même dans ma documentation, une déposition de M.
25 Odak. Je lis ce qui figure sa déposition. Je lis les mots : "Activités de
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1 l'unité, le 1er avril 1999."
2 M. KAY : [interprétation] L'index crée la confusion, en effet. C'est un
3 tableau des dépositions destiné à la commission, au sujet des incidents en
4 1999.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La date est bien celle du 1er avril ?
6 M. KAY : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le 1er avril et pas le 24 mars,
9 n'est-ce pas ?
10 M. KAY : [interprétation] Les incidents concernent la journée du 24 mars.
11 L'intercalaire 8 est un document écrit le 26 décembre 2002. L'intercalaire
12 3, c'est le tableau d'indexation des documents de Djosan, et on y trouve
13 l'intercalaire 8 dans ces documents de Djosan.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic a laissé entendre
15 qu'il y avait trois dépositions de la main du témoin dont l'une porterait
16 sur le 1er avril, l'autre sur les journées des 27 et 28. La seule qu'il est
17 en train de produire est celle qui porte sur la journée du 24, ce qu'il a
18 dit. Il produira peut-être éventuellement celle qui porte sur les journées
19 des 27 et 28.
20 M. KAY : [interprétation] Il semble que le document D321, intercalaire 11
21 ne figure pas dans l'index. C'est une déposition datant du 26 décembre
22 2002, qui concerne la journée du 1er avril 1999. Un document qui n'a pas été
23 traduit dans la documentation de Djosan.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci pour cet éclaircissement,
25 Maître Kay.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce une déposition qui figure à
2 l'intercalaire 11, dans les documents de Djosan ?
3 M. KAY : [interprétation] C'est une déposition d'Odak, qui figure dans les
4 documents de Djosan.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Maître Kay.
6 M. KAY : [interprétation] Il y a trois dépositions Odak dans les documents
7 de Djosan.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Kay.
9 Monsieur Milosevic, veuillez poursuivre.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que M. Bonomy a dit est exact. J'ai évoqué
11 trois dépositions qui figurent dans ma documentation et par les bons soins
12 de l'officier de liaison, j'ai reçu le document qui porte sur la journée du
13 24 mars dont je dispose désormais. Elles ne figuraient pas à l'origine,
14 dans ma documentation, mais nous pouvons maintenant l'examiner également.
15 M. MILOSEVIC : [interprétation]
16 Q. Est-ce que vous avez sous les yeux la déposition du 1er avril
17 maintenant ?
18 R. Oui, oui.
19 Q. J'espère que vous avez encore l'esprit ce que je viens de citer, à
20 savoir que ce jour-là des crimes auraient été commis dans le quartier de
21 Qerim.
22 M. NICE : [interprétation] Ce document n'est pas traduit. L'examen de ce
23 document va poser des problèmes puisque je suppose que l'accusé s'apprête à
24 en demander le versement au dossier. C'est un document qui fait à peine un
25 page. Plutôt que de résumer le contenu de ce document, nous aimerions
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1 savoir exactement quel est l'extrait qui a fait l'objet de la citation.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document est déjà sur
3 rétroprojecteur ? Monsieur Milosevic, y a-t-il un paragraphe ou un passage
4 particulier auquel vous aimeriez vous référer, et n'oubliez pas que ce
5 document n'est pas traduit.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ce document a été déposé au
7 moment de la déposition de Djosan. Comme vous le savez, cette déposition a
8 eu lieu, il y a déjà pas mal de temps. Il est certain qu'il aurait déjà pu
9 être traduit.
10 M. MILOSEVIC : [interprétation]
11 Q. Lieutenant-colonel, troisième paragraphe, je vous prie où nous lisons
12 ce qui suit, je cite : "Le 1er avril 1999 --
13 R. Oui.
14 Q. C'est très important en raison du temps. Je poursuis la lecture, je
15 cite : "Un peu avant minuit, j'ai été chargé d'envoyer en urgent des hommes
16 à Ljug Bunar, où étaient positionné le Bataillon d'Artillerie et le P15, on
17 m'a demandé d'y envoyer un véhicule de lutte contre l'incendie." Donc, le
18 radar avait été touché. Il y avait des incendies et vous avez reçu pour
19 mission d'envoyer un véhicule de pompier un peu avant minuit; c'est bien
20 cela ?
21 R. Oui.
22 Q. Votre camion ambulance ainsi que le camion de pompier, tout cela, vous
23 les avez envoyés sur place; combien de temps vous a-t-il fallu pour le
24 faire ?
25 R. Ils ont dû y arriver 30 à 45 minutes après. Ils ont démarré en l'espace
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1 de 30 à 45 minutes.
2 Q. Je vois, démarrés. Mais combien de temps leur a-t-il fallu pour
3 atteindre le secteur ?
4 R. Cela leur a pris 30 minutes. La distance n'est pas très grande mais
5 c'était la nuit.
6 Q. Très bien. Vous ne savez pas combien de temps ils ont passé sur place,
7 mais est-ce que vous savez quand ils sont rentrés après avoir éteint
8 l'incendie et quand l'ambulance et le personnel médical sont rentrés ?
9 R. Puisque je me souviens à peu près du moment où ils sont partis, je
10 dirais qu'ils sont rentrés deux heures après, environ.
11 Q. Très bien. Si nous devions reconstituer les événements, ils sont partis
12 un peu après minuit et rentrés un peu après 2 heures du matin; c'est bien
13 cela ?
14 R. Oui. À peu près.
15 Q. Donc, tous ces hommes ont dû traverser le quartier de Qerim à l'allée
16 et au retour, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Ils l'ont traversé dans les deux sens.
18 Q. Qui constituait cette équipe ?
19 R. L'équipe était constituée d'un escadron, un officier accompagné de sept
20 soldats chargés de la sécurité. Également, il y avait une ambulance avec un
21 médecin, une infirmière, un technique médical et un camion de sapeur
22 pompier.
23 Q. Très bien. Donc, voilà les renforts que vous avez envoyés ?
24 R. Oui.
25 Q. Y avait-il une autre unité que la vôtre dans ce secteur de façon
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1 générale et sur cet itinéraire ?
2 R. Non.
3 Q. Regardez l'avant dernier paragraphe, au milieu de ce paragraphe à la
4 page 1.
5 R. Oui.
6 Q. Celui qui commence : "Je me suis rapidement occupé des préparatifs…" et
7 au milieu, on peut lire : "A mon retours de cette mission…"
8 R. "Le commandant chargé de la sécurité m'a indiqué que la route qui
9 menait à Qerim était vide. A mon retour de cette mission, on m'a rapporté -
10 et c'est le commandant chargé de la sécurité qui me l'a transmis - que la
11 route jusqu'au village de Ljug Bunar, qui traverse la localité de Qerim,
12 était complètement vide. Il faisait sombre et on n'a rencontré personne en
13 route. Il m'a également signalé que les soldats, qui avaient été tués, ont
14 été transférés à la clinique de la garnison et qu'Aleksandar Gajic, un
15 sergent et un simple soldat, qui l'accompagnait à l'endroit où se trouvait
16 le radar, a été transféré à la clinique également. Mais que le radar
17 --" - P15, puisqu'il s'agit de ce radar - "-- qu'il n'était pas en mesure
18 d'éteindre le feu sur le radar P15."
19 Q. Que peut-on lire au niveau du dernier paragraphe -- ou plutôt, est-ce,
20 dans les grandes lignes, ce que vous nous avez dit lorsque je vous ai posé
21 une question de cet événement qui s'est déroulé le 1er et le 2 avril ?
22 R. J'ai déjà répondu à cette question-là.
23 Q. Très bien. Que peut-on lire au niveau du dernier paragraphe pour ce qui
24 est des crimes qui, semble-t-il, auraient été commis dans le village de
25 Qerim ? J'en ai entendu parler pour la première fois à la fin de l'année
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1 2001.
2 R. Oui.
3 Q. Merci, Lieutenant-colonel.
4 Regardons maintenant cette deuxième déclaration qui porte sur les
5 dates du 27 et du 28 avril.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que cette déclaration a été
7 traduite et, si nécessaire, nous pouvons placer cette déclaration sur le
8 rétroprojecteur.
9 M. MILOSEVIC : [interprétation]
10 Q. Nous allons mettre -- passer outre le premier paragraphe, ce que vous
11 avez fait. On parle de ce que vous venez d'évoquer; autrement dit, que vous
12 avez créé une compagnie à l'intérieur de votre bataillon. Que peut-on lire
13 par la suite que les raisons pour lesquelles vous avez créé une unité de ce
14 type étaient la situation qui l'exigeait, à savoir que, dans la ville de
15 Djakovica, il n'y avait pas une seule Unité de Combat ?
16 R. Oui.
17 Q. C'est que vous venez de dire, il y a quelques instants. Que peut-on
18 lire au niveau de la dernière phrase de ce paragraphe ? Cela incombait à
19 l'unité d'intervenir où ?
20 R. A l'endroit où les forces terroristes compromettaient nos unités dans
21 la ville. Le poste de commandement du Corps de Pristina, le poste de
22 commandement de la brigade, la garnison, l'infirmerie, la population
23 locale. Il s'agissait d'opérer conjointement avec les autres unités pour
24 protéger ou empêcher toute attaque de la part des terroristes, des forces
25 terroristes Siptar.
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1 Q. Telle était, dans l'ensemble, votre mission ?
2 R. Oui.
3 Q. On peut lire ici que l'on vous a donné une mission : "Le 25 avril, on
4 m'a donné une mission et on peut lire pour que l'unité intervienne, dans
5 les premières heures du 27 avril 1999, car il s'agissait de tenir une ligne
6 pour mener rondement l'opération…" Qu'est-ce que l'on peut lire au niveau
7 de la dernière ligne ?
8 Les commandants et les soldats, qu'est-ce qu'on peut y lire ? "J'ai fait
9 des préparatifs nécessaires pour cette opération de combat et j'ai mis en
10 place différentes procédures au niveau de nos différentes unités et des
11 individus qui pouvaient rencontrer des forces terroristes Siptar. Il
12 s'agissait d'évacuer éventuellement la population civile dans des zones qui
13 avaient été bouclées."
14 Or, dans tous les ordres qui sont cités, il s'agissait de réglementer
15 certains points, sur le type de comportement ou le traitement accordé aux
16 terroristes, à la population civile.
17 Q. Très bien. Donc, à la page 2, nous avons pris position le long de cette
18 ligne à 6 heures 30 du matin et jusqu'il y ait un regroupement avec le
19 peloton de la compagnie qui se trouvait sur la droite et sur la gauche.
20 R. Oui. Sur l'aile droite, nous avons avancé quasiment jusqu'au village et
21 je les ai renvoyé le long de la ligne. C'est pour cela qu'il y a eu ce
22 délai.
23 Q. Nous répétons quelque chose ici et c'est ce que vous nous avez déjà dit
24 : "Au cours de la journée, l'unité ne s'est engagée à aucun combat avec les
25 forces terroristes Siptar et nous n'avons rencontré aucun civil."
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1 R. Oui. C'est exact.
2 Q. Ensuite, on parle de l'événement qui s'est déroulé. Le commandant du
3 peloton sur l'aile droite vous a rapporté qu'il y avait un cache et que le
4 groupe s'était enfui près de Racaj.
5 R. Oui.
6 Q. Vous les avez vus devant les premières maisons du village. Vous les
7 avez vus disparaître -- que vous dites, vous, par la suite, vous dites
8 qu'au cours de cette journée-là, vous avez vu les avions de l'OTAN voler
9 au-dessus de ce secteur où se trouvait votre unité, les frappes et les
10 frappes aériennes pouvaient entendues de différentes directions.
11 R. Oui. L'OTAN, effectivement, a survolé cette région-là, a frappé la
12 région de Kosare, mais, de l'endroit où j'étais, je ne pouvais rien voir.
13 Q. Bien. Cette dernière déclaration, celle du 24 avril, très courte
14 déclaration qui est en rapport avec le deuxième jour de cette opération.
15 Sur quoi cela porte-t-il ?
16 R. Cette déclaration porte sur le fait que le blocus se poursuivait. Les
17 unités ont passé la nuit et sont restées à leur poste. Ce blocus s'est
18 poursuivi jusqu'au lendemain, jusqu'à l'après-midi du lendemain, car les
19 soldats ont déjeuné à cet endroit-là. Ils avaient des rations de vivres
20 lyophilisées. C'était vers 16 heures je crois.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice ?
22 M. NICE : [interprétation] Est-ce que le témoin regarde ici une autre
23 déclaration.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il doit s'agir de l'intercalaire numéro
25 8, de la pièce 321.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, de quel document
2 s'agit-il ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Opération de l'unité, le 28 avril.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le numéro de l'intercalaire de
5 cette pièce, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il doit s'agir du document 4A et ce document a
7 été versé au dossier. Ce document a été présenté au cours du témoignage du
8 général Djosan.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il doit s'agir d'un ordre qui a été
10 versé au dossier. S'il s'agit effectivement d'un ordre.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que cela se trouve sous le
12 rétroprojecteur ?
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 4A, il va apparaître.
15 M. KAY : [interprétation] Intercalaire numéro 30.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous devriez
17 mieux organiser vos documents.
18 L'INTERPRÈTE : Microphone s'il vous plaît.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Kay, l'intercalaire numéro 30
20 comporte plusieurs déclarations de M. Odak et il semble qu'il n'y ait
21 qu'une seule déclaration.
22 M. KAY : [interprétation] Effectivement. Il n'y a qu'une seule déclaration.
23 Je crois qu'il s'agit peut-être de la seule que nous évoquons ici,
24 intercalaire numéro 30A.
25 M. NICE : [interprétation] Je me souviens de la difficulté qui s'était
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1 présentée à cet égard. Je ne sais pas si je peux proposer une solution
2 aujourd'hui. A l'origine, il y avait l'intercalaire numéro 30 et non pas
3 30A. Il y avait deux déclarations qui venaient de ce témoin-ci, une qui
4 était datée du 26 décembre. Elle portait sur les dates du 27 et du 28
5 avril. Ensuite, une déclaration plus courte je crois qui n'a pu être -- pas
6 été traduite qui est également datée du 26 décembre et qui porte sur la
7 date du 28 avril. D'après les éléments dont je dispose ici, c'est un
8 original, en tout cas, c'est la version en B/C/S que j'ai ici.
9 Ceci n'a peut-être pas encore été traduit -- fait encore partie de
10 l'intercalaire numéro 30. Je ne me souviens pas exactement mais peut-être
11 que ceci figure sous un autre numéro d'intercalaire.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le Greffe lorsqu'il -- dans l'index du
13 Greffe, cela ne se voit pas. Merci, Monsieur Nice.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je viens de -- oui, c'est exact. C'est la
15 courte déclaration que M. Nice avait entre les mains qui portait sur la
16 date du 28 avril 1999. C'est l'exemplaire que j'ai. Il est indiqué : "Qu'il
17 n'y a pas d'exemplaire en anglais." Cela signifie que cela n'a pas été
18 traduit.
19 Donc, c'est une déclaration très courte. Est-ce que nous le voyons --
20 nous pouvons le voir maintenant sur le rétroprojecteur ?
21 M. MILOSEVIC : [interprétation]
22 Q. Donc, la date est celle du 28 avril. C'est le deuxième jour de
23 l'opération menée par l'unité. L'unité a continué à encercler le
24 territoire. Il n'y a pas eu d'altercations avec les forces terroristes
25 Siptar aujourd'hui. Ils n'ont pas rencontré de civils non plus le long de
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1 cette ligne. Vous poursuivez en parlant de ce qui s'était passé. Que dit
2 cette déclaration ?
3 R. Cette déclaration indique que l'unité a poursuivi les opérations de la
4 veille. Que l'on entendait des bruits de fusillade depuis le village de
5 Racaj, Ramoca, et cetera, de cette région-là. Que l'action -- ou plutôt,
6 qu'on m'avait donné pour tâche vers 16 heures, si je me souviens bien, car
7 je sais que les soldats avaient déjà déjeuné que je devais rassembler mes
8 hommes, et retourné à l'endroit où le bataillon devait être déployé. Il n'y
9 a pas eu d'altercation avec les terroristes et les civils n'ont pas
10 traversé cette ligne de démarcation non plus.
11 L'INTERPRÈTE : Il n'y a pas eu d'accrochage.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Mon Lieutenant-colonel, au point 105 de l'acte d'accusation, on parle
14 non seulement de fait que les Albanais kosovars ont été chassés par la
15 force le 24 mars 1991, un peu plus loin les forces du RFY et la Serbie ont
16 pris part à des massacres d'Albanais Kosovo qui ont eu lieu à de nombreux
17 endroits. Je ne vais pas citer le nom de lieu où vous ne vous trouviez pas.
18 Je vais simplement parler de Djakovica. Djakovica étant un de ces
19 endroits-là. Donc dans cette description, lorsqu'il s'agit de vous,
20 entendez par là que nous n'allons parler que de Djakovica.
21 Donc, à partir du 24 mars, nos forces, dit-on ici, assuraient le
22 commandement à Djakovica, ont pris part à de nombreux massacres d'Albanais
23 kosovars.
24 R. Ceci est absolument incorrect. Il n'y a pas eu de massacre dans
25 la ville de Djakovica. J'en aurais certainement entendu parler puisque
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1 j'étais à Djakovica, à ce moment-là.
2 Q. Le témoin, Beqe Beqaj, a dit qu'au mois d'août 1998, les
3 habitants de Racaj ont quitté le village la première fois que la police et
4 l'armée sont entrées dans ce village, et dans les villages de la vallée.
5 Étiez-vous là, à ce moment-là ?
6 R. Oui, j'en parle lorsque vous m'avez parlé de l'année 1998.
7 Q. Je vous parle du témoin -- de la déclaration du témoin. Vous étiez
8 personnellement sur les lieux ?
9 R. Les terroristes du village de Smonica se sont retranchés à Racaj.
10 Quelques jours plus tard, lorsque j'ai fouillé le terrain pour essayer de
11 chasser les terroristes de cette région, nous étions dans la région du
12 village de Racaj, mais il ne restait plus un seul habitant dans ce village
13 de Racaj. J'ai expliqué comment les terroristes étaient débarrassés de la
14 population. Le village était complètement désert. Je ne rencontrais aucun
15 terroriste non plus. Les terroristes s'étaient retirés. Etaient partis en
16 direction de la forêt. Ils s'étaient cachés dans la forêt et dans les zones
17 boisées autour du village de Qerim, et cetera.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20
19 minutes.
20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.
21 --- L'audience est reprise à 12 heures 43.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, veuillez
23 continuer.
24 M. MILOSEVIC : [interprétation]
25 Q. Monsieur Odak, un témoin, Hani Hoxha, a déclaré que, le 27 mars 1999 --
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1 mais, avant de vous poser la question, dites-nous : où est-ce que vous avez
2 été le 27 mars 1999 ? C'est la troisième journée de la guerre.
3 R. A Djakovica, Monsieur Milosevic.
4 Q. Donc, vers minuit, le 27, elle a entendu des tirs. Elle a vu la maison
5 du voisin brûlée. A la rue Milos Gilic 157, où ils se cachaient 24
6 personnes, elle a vu le corps de Husein Gashi qui a brûlé et ainsi que
7 d'autres cadavres. Alors, savez-vous nous dire ce qui s'est passé là-bas ?
8 Savez-vous nous dire quoique ce soit à ce sujet ?
9 R. Je n'ai pas d'informations sur un événement de cette nature. Il se peut
10 que, dans la même rue, au même numéro, dans la même maison, je ne pense pas
11 qu'il soit position que des gens soient tués deux fois de suite parce que
12 la même chose est citée pour la date du premier. Alors, je n'ai pas
13 d'informations du tout à ce sujet et je ne crois que cela ait pu se
14 produire.
15 Q. Comme je vous ai posé la première des questions. Je me suis référé à un
16 paragraphe de l'acte d'accusation. Ici, nous référons au témoignage du
17 témoin, Hani Hoxha, mais ce qui importe ici, c'est de dire que vous n'avez
18 pas d'informations concernant la survenue de cet événement ?
19 R. Non.
20 Q. Au paragraphe 53 de l'acte d'accusation, on dit que moi, de concert
21 avec d'autres, à partir du 1er janvier 1999 jusqu'au 20 juin 1999, j'ai
22 planifié, encouragé, ordonné, commis ou, de toute autre façon, aidé à
23 commettre -- à poursuivre une campagne systématique et délibérée contre la
24 population civile résidant au Kosovo et cette campagne aurait été réalisée
25 avec l'aide des forces de la RFY et de la Serbie dont l'objectif d'expulser
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1 un grand nombre d'Albanais du Kosovo, de cette province, pour assurer le
2 contrôle à l'égard de cette province.
3 Alors, vous avez été commandant du bataillon. Vous étiez l'officier le plus
4 haut gradé à Djakovica. Pour ce qui est du commandement de ces unités,
5 aviez-vous connaissance de quoique ce soit à ce sujet ? Avez-vous entendu
6 parler qu'il y avait des intentions, des plans, des objectifs de cette
7 nature ou quoique ce soit d'autres d'attribuables à l'armée de
8 Yougoslavie ?
9 R. Tout ce que faisaient mon unité et le commandement de la brigade était
10 réglementé par la brigade -- le commandement de la brigade, donc, tout
11 avait été donné comme ordre à l'intention des unités subordonnées et aucun
12 document -- aucun ordre ne fait mention d'une campagne, d'expulsions, de
13 meurtres ou quoique ce soit. C'est absolument faux. Je suis certain que
14 telles choses ne se sont pas produites. Je n'ai pas vu un seul document qui
15 prévoirait une chose pareille.
16 Q. Au paragraphe 55, on dit que les forces de la RFY et de Serbie ont
17 délibérément, par le recours à la force, chassé des milliers d'albanais du
18 Kosovo en créant une ambiance de peur, en ne recourant à la violence ou à
19 la menace de l'usage -- d'user de la force.
20 Alors, dites-nous si votre unité ou vous-même avait ouïe-dire qu'il y
21 aurait eu des menaces de recours à la force -- des menaces de violence pour
22 expulser les Albanais du Kosovo ?
23 R. Oui. Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai vécu pendant 13 ans au Kosovo.
24 J'avais des relations tout à fait correctes avec ces gens-là comme avec
25 toutes les autres personnes. Alors, peut-on s'attendre de ma part à ce que
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1 mes concitoyens soient -- enfin, que je sois amené à chasser des
2 concitoyens à moi de là où nous vivions.
3 J'affirme que la population albanaise n'a fui que par peur des frappes
4 aériennes de l'OTAN et suite aussi aux menaces proférées par les
5 terroristes.
6 Q. Au 56, on dit que, partout au Kosovo, les forces de la RFY et de Serbie
7 ont conduit une campagne visant à détruire les biens de civils albanais et
8 on dit que les villages ont été brûlés -- qu'on a incendiés les villes, des
9 villages, qu'on a détruit les biens de ces gens-là, leurs fermes, leurs
10 commerces, leurs monuments culturels et les monuments religieux.
11 Alors, savez-vous quoique ce soit ?
12 R. Tout d'abord, pour ce qui est de ces pilonnages qui sont cités, je n'en
13 ai pas connaissance pour ce qui est de notre terminologie militaire.
14 Mais je vais dire que les villes ont été placées sous notre contrôle, donc,
15 il serait stupide de nous bombarder soi-même ou de nous pilonner soi-même.
16 Alors, ce qui s'est produit c'est que l'armée de Yougoslavie était déployée
17 sur tout le secteur du Kosovo-Metohija et l'aviation de l'OTAN poursuivait
18 partout ses cibles militaires et ce faisant, elle a détruit bon nombre
19 d'agglomérations, de villages et elle a touché des cibles civils. Dire que
20 c'est nous qui avons pilonné est faux. Je répète, une fois de plus, que
21 nous n'avons ciblé nous, que les installations à partir desquelles les
22 terroristes nous tiraient dessus, ils n'ont pas hésité à se servir de
23 bâtiments religieux pour nous tirer dessus. Au village de Nec, ils ont tiré
24 à partir de l'église catholique qui s'y trouvait, donc, nous n'avons
25 riposté qu'en direction des bâtiments à partir desquels les terroristes
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1 albanais nous tiraient dessus.
2 Q. Bien. Le paragraphe 60 dit qu'on parle des efforts de la RFY et de la
3 Serbie, et de faire renoncer à ces gens le tout retour
4 -- du retour vers leur domicile en pillant les biens individuels, les
5 commerces et il y aurait eu des fouilles, des menaces à leur égard, des
6 expulsions, des vols y compris des confiscations de véhicules.
7 Avez-vous connaissance de cela ?
8 R. Non. Ce n'est pas exact. Il se peut qu'il y ait eu des cas particuliers
9 qui ont été sanctionnés. Je ne peux pas dire qu'il n'y en pas eu du tout,
10 mais cela devrait être forcément des cas particuliers et je sais qu'à
11 chaque fois que nous avons constatée chose pareille, les agissements de
12 cette nature ont été sanctionnés, ils ont été signalés aux instances de la
13 police et ceci a pris des mesures à leur encontre.
14 Q. Savez-vous quelque chose au sujet de la confiscation des pièces
15 d'identité ?
16 R. Ceux qui leurs confisquaient leurs pièces d'identité c'étaient des
17 terroristes. J'ai retrouvé personnellement au village de Nec, quelque 300,
18 peut-être plus même, 300 pièces d'identité. A Smonica également, j'ai
19 trouvé un grand nombre de cartes d'identité appartenant à des Albanais.
20 C'est ce que j'ai dit au sujet des activités terroristes. Ils venaient là
21 et ils confisquaient les documents des villageois. Je vous ai déjà parlé de
22 cela; je ne pense pas qu'il soit nécessaire de répéter. C'est eux qui
23 confisquaient ces documents, ces pièces d'identité.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Lieutenant-colonel, ce que vous nous
25 avez dit, est-ce que vous ne nous avez -- ce que vous ne nous avez pas dit,
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1 c'est la source de votre information pour ce qui est de la confiscation de
2 pièces d'identité effectuer par les terroristes. Est-ce qu'on vous l'a dit
3 ou est-ce que vous en avez été le témoin ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Robinson, je vous ai -- je pense,
5 j'ai dit que j'ai personnellement dirigé une action antiterroriste au
6 village de Nec et de Smonica. C'est personnellement, que dans la maison où
7 était installé le commandant de cette unité terroriste, que j'ai retrouvé
8 des documents, des pièces d'identité en grand nombre appartenant à des
9 citoyens de Nécessaire. Il en a été de même à Smonica. Ces pièces
10 d'identité, je les ai rassemblées et je les ai confiées au commandement
11 supérieur.
12 M. MILOSEVIC : [interprétation]
13 Q. Quand vous dites "ces pièces," vous parlez de cartes d'identité ?
14 R. Oui, je parle de cartes d'identité.
15 Q. Dites-moi, je vous prie, en votre qualité d'officier de l'armée : avez-
16 vous, à quelques moment que ce soit, reçu des ordres concernant la
17 déportation de personnes du Kosovo pour assurer, comme on le dit ici : "Un
18 contrôle serbe durable vis-à-vis du territoire de cette province" ? Avez-
19 vous -- ou peu importe les intentions impliquées, avez-vous reçu des ordres
20 de cette nature ?
21 R. Je vous ai déjà dit, il y a quelques minutes, que jamais un ordre
22 émanant du commandement supérieur ne nous ait parvenu, et nous avons encore
23 moins procédé à des choses de ce genre.
24 Q. Avez-vous reçu des informations qui diraient que quelqu'un aurait fait
25 quoi que ce soit de ce genre ?
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1 R. Non.
2 Q. En votre qualité d'officier et de commandant du bataillon, aviez-vous
3 des informations concernant ce qui se passait sur le terrain au niveau
4 concret ? Alors que vous vous trouviez à Djakovica, avez-vous eu
5 connaissance de ce qui se passait à Djakovica ?
6 R. Oui, absolument. On nous présentait des rapports tous les jours, et
7 nous rapportions nous-mêmes ce qui se passait au commandant de la brigade.
8 Il cherchait à savoir ce qui se passait sur le terrain. Aussi, l'avons-nous
9 informé de ce que nous avons observé sur le terrain, ce qui fait que tout
10 un chacun savait ce qui se passait ?
11 Q. S'agissant des événements survenus sur le terrain, vous en informiez
12 les instances supérieures, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Vos supérieurs, eux, ont-ils disposé d'informations concernant ce qui
15 se passait au Kosovo tout entier ?
16 R. Oui, en passant par moi. C'est le principe de fonctionnement. J'avais
17 des subordonnés qui me présentaient leurs rapports, et j'informais de ce
18 qui s'était produit dans la zone de responsabilité de cette municipalité de
19 Djakovica. Ils me disaient ce qui s'était passé dans les secteurs où ils se
20 trouvaient eux-mêmes, par exemple, là où étaient déployés les compagnies,
21 les pelotons, et ainsi de suite.
22 Q. Dans les rapports que vous présentiez, avez-vous eu, à quelques moments
23 que ce soit, l'occasion de voir que des problèmes seraient survenus en
24 corrélation avec la population civile ?
25 R. Il n'y a absolument pas eu de problèmes. Nous étions des voisins avec
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1 ces gens. Il n'y a pas eu d'incidents, pas un seul incident. Il y a eu dans
2 la brigade, pour autant que je le sache, deux cas de tentative de viol,
3 mais ces personnes-là ont été appréhendées par la police militaire.
4 Q. Vous avez mentionné tout à l'heure que vous y avez résidé pendant 13
5 ans et demi, et vous avez dit qu'à la fin de la guerre, Djakovica était
6 pleine d'habitants. Est-ce que cela signifie que la population n'a pas
7 quitté Djakovica ?
8 R. Non. Il est venu à Djakovica les habitants des villages où d'où --
9 enfin, des villages dont ils ont été chassés par les terroristes dans
10 l'intention de faire -- de donner l'impression qu'il y avait une
11 catastrophe humanitaire.
12 Q. Donc, à la fin de la guerre, Djakovica était pleine ?
13 R. Oui, c'était plein de gens. Nous ne pouvions pas passer en raison de
14 toute cette population. Si les soldats italiens n'étaient pas venus assurer
15 notre sécurité, je dois dire que la ville était archi pleine.
16 Q. Monsieur lieutenant-colonel, je n'ai plus de questions pour vous. Je
17 vous remercie. A la partie adverse à présent de vous poser des questions.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, vous avez la parole.
19 Contre-interrogatoire par M. Nice :
20 Q. [interprétation] J'ai cru comprendre que vous avez dit n'avoir jamais
21 vu de terroristes tués pendant toute la durée de ce conflit ?
22 R. De quel conflit voulez-vous parler, Monsieur Nice ?
23 Q. Avec l'OTAN, quelque soit la description que vous en empruntez ici.
24 Est-ce que j'ai cru comprendre que vous avez dit n'avoir jamais vu de
25 terroristes tués au cours de cette période ?
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1 R. Non. Je n'ai pas vu un seul terroriste de tué. C'est tout à fait
2 compréhensible, car dans toute armée du monde, après tout, les terroristes
3 agissent de cette façon-là aussi.
4 Q. Vous n'avez jamais vu de civils tués ?
5 R. Non.
6 Q. Vous n'avez aucune explication à nous fournir quant à la mort de civils
7 à Djakovica ou le fait que des civils aient été tués à Djakovica au cours
8 de ces événements ?
9 R. Les seuls civils que j'ai vu tués étaient la colonne de civils qui
10 allait de Djakovica à Prizren au mois d'avril. Ils ont été touchés par
11 l'armée de l'air de l'OTAN.
12 Q. Nous avons beaucoup entendu parler de cela. Je vais répéter ma
13 question. Pour ce qui est des autres civils, ceux qui ont été tués dans les
14 rues de Djakovica ici et là, vous n'avez aucune explication à fournir aux
15 Juges de cette Chambre à propos des conditions dans lesquelles ces civils
16 ont été tués ?
17 R. Monsieur Nice, il n'y a as eu de massacre de civils, et je n'ai jamais
18 vu un seul civil tué en ville. Ce sont -- c'est peut-être des suppositions
19 que vous faites, mais c'est un fait que ceci ne s'est pas produit.
20 Q. Nous allons y revenir dans quelques instants. Je suis un peu perplexe
21 quant à la position qui est la vôtre. A un moment donné, vous dites avoir
22 été responsable d'une partie des systèmes de Défense antiaérienne; d'une
23 Unité de la Défense antiaérienne. A un moment donné, vous ne -- vous dites
24 également ne pas avoir pris part à ces travaux de la Défense antiaérienne.
25 A quel moment faisiez-vous partie de l'Unité de la Défense antiaérienne ?
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1 R. Monsieur Nice, c'est quelque chose qui figure dans une de mes
2 déclarations. J'en parle. A cause des mouvements des troupes, au mois de
3 septembre 1998, j'ai été réaffecté, et on m'a demandé d'être le commandant
4 d'un bataillon de la 52e Brigade d'Artillerie de roquette. Je suis resté à
5 cet endroit-là jusqu'à la mi-mai, à savoir, le 20 mai environ. Je ne me
6 souviens pas de la date exacte. Je me suis opposé à cet ordre qui m'a été
7 donné. Je me suis imposé, et j'ai envoyé une demande par écrit. J'ai
8 demandé à ne pas quitter mon bataillon dans lequel j'avais passé 13 ans, et
9 j'ai demandé à ne pas être transféré à cet autre bataillon. J'ai retrouvé
10 mon bataillon à ma propre demande vers la mi-mai, le 2e Bataillon de la 549e
11 Brigade.
12 Q. Pendant toute la période où vous avez -- vous vous êtes occupé de
13 système antiaérien avec votre brigade, qui était votre supérieur
14 hiérarchique ?
15 R. Colonel Milos Djosan.
16 Q. En tant que commandant de bataillon, en somme, vous aviez le même grade
17 que le témoin Vukovic que nous avons entendu récemment ? Vous aviez le même
18 grade que lui, n'est-ce pas ? Vous étiez commandant de bataillon; est-ce
19 exact ?
20 R. Oui, hormis le fait qu'il s'agit de bataillons affectés à des tâches
21 différentes.
22 Q. D'après ce que nous a dit Vukovic, les commandants de bataillon gardent
23 des journaux de guerre. Pouvons-nous voir le
24 vôtre ?
25 R. Je n'ai pas ce journal de guerre, car encore une fois, je vous ai dit
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1 que j'ai quitté ce bataillon.
2 Q. Où se trouve votre journal de guerre ?
3 R. Sans doute dans les archives car je n'ai pas remis de document. J'ai
4 quitté mon unité. J'ai déjà dit que je l'avais quittée vers la mi-mai.
5 Celui qui m'a succédé était le commandant Ramiz Pejcinovic.
6 Q. Il n'y a aucune raison de croire que ce journal de guerre n'existe pas.
7 Vous n'avez fait aucun effort pour mettre la main dessus et l'apporter ici;
8 est-ce exact ?
9 R. Monsieur Nice, il ne s'agit pas de savoir si j'ai fait un effort ou
10 non. Tout d'abord, je suis un officier en exercice, et je n'ai tout
11 simplement pas eu le temps de rassembler des documents. Comme vous pouvez
12 le constater, je n'ai fait que trois déclarations.
13 Deuxièmement, je suis tout à fait certain que ce journal de guerre existe
14 mais qu'il se trouve dans les archives. Je n'ai pas eu le temps de m'en
15 occuper. Mais je peux faire l'effort --
16 Q. Cela fait combien de temps que vous êtes ici pour préparer votre
17 déposition ?
18 R. 20 jours.
19 Q. Bien, 20 jours. Au cours de ces 20 jours, est-ce que personne, suite à
20 des questions posées par -- des questions posées à d'autres témoins,
21 personne n'a laissé entendre qu'il était important que vous soyez en
22 possession de documents d'époque ?
23 R. Monsieur Nice, je répète encore une fois qu'on m'a demandé, ou plutôt
24 le général Djosan, mon supérieur hiérarchique, a rassemblé un certain
25 nombre de documents, et à sa demande, j'ai rédigé ma déclaration. Je
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1 pensais que c'était à lui de rassembler ces différents documents, car il a
2 eu l'occasion de le faire étant donné qu'il est à la retraite; il a le
3 temps. Comme je vous l'ai dit, je suis un officier en exercice et je n'ai
4 pas le temps.
5 Q. Demandez simplement. En tant que colonel, il vous suffit à dire votre
6 adjudant : Mettez la main sur mon journal de guerre, s'il vous plaît. J'en
7 ai besoin la semaine prochaine. Cela n'est pas très difficile de faire ce
8 genre de demande dans une structure -- dans un type d'organisation
9 militaire. Est-ce que vraiment vous essayez de nous convaincre que vous
10 n'étiez absolument pas en mesure, par manque de temps, de vous procurer ce
11 document qui est très important et qui serait très utile pour les Juges de
12 la Chambre ?
13 R. Non, Monsieur Nice. Je ne suis pas en train de vous convaincre de quoi
14 que ce soit. Je répète encore une fois, que mon commandant, mon supérieur,
15 le colonel Djosan, m'a demandé de rédiger une déclaration -- plusieurs
16 déclarations. Pour ce qui est des autres documents - et je répète - Djosan
17 a eu le temps -- avait le temps, et c'était à lui de rassembler ces
18 différents documents. Mais il n'a pas jugé utile de rechercher ce journal
19 de guerre. Je ne sais pas pourquoi. Quoiqu'il en soit, je n'ai pas --
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je souhaite simplement que les choses
21 soient bien claires. En fait, nous parlons des journaux de guerre se
22 rapportant à la 549e Brigade; c'est exact ?
23 M. NICE : [interprétation] Non, il s'agit du bataillon dont il était le
24 commandant pendant la durée du conflit.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous parlons - je crois que c'est un
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1 malentendu peut-être - sur la situation. Il était commandant du bataillon
2 ou commandant de deux bataillons ?
3 M. NICE : [interprétation] Dans la période qui nous intéresse, je crois
4 qu'il va falloir préciser cela avec le témoin.
5 Q. Monsieur Odak, ce qui m'intéresse à l'époque, c'est que vous étiez
6 commandant du bataillon, entre le mois de septembre 1998, et le mois de mai
7 1999, à Djakovica. Je vous soumets l'idée qu'un journal de guerre a
8 certainement été rédigé à ce moment-là; est-ce exact ?
9 R. Oui.
10 M. NICE : [interprétation] Il s'agit d'un journal de guerre.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que Djosan faisait -- le
12 général Djosan faisait partie de la 549e Brigade, et donc responsable d'un
13 autre bataillon ? Nous obtenons des réponses par rapport à cette question
14 du journal de guerre à propos d'un autre bataillon ou d'une brigade. Je
15 souhaite que ceci soit clair.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi. Je vais essayer de vous fournir
17 des explications là-dessus si vous me le permettez.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie, allez-y.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1998, j'ai été affecté à un bataillon
20 différent - ce n'était pas la 549e - jusqu'au mois de septembre. -- J'ai
21 été affecté à un autre bataillon, la 549e Brigade, jusqu'au mois de
22 septembre. Au sein de ce bataillon-là, le lieutenant-colonel, Vukovic était
23 mon supérieur. Ensuite, au mois de septembre 1998, je suis passé à la 52e
24 Brigade de roquette. Mon supérieur hiérarchique était alors le général
25 Djosan. Ensuite, vers la mi-1999, je suis revenu à mon bataillon initial,
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1 où mon supérieur hiérarchique était à nouveau Vlatko Vukovic. Je ne sais
2 pas si j'ai pu faire la clarté là-dessus.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Effectivement, c'est clair maintenant.
4 Les questions et les réponses portaient sur le même journal de guerre.
5 Merci, Monsieur Nice.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Ojak, nous allons essayer
7 de faire la clarté là-dessus. En rédigeant vos déclarations, vous êtes vous
8 reposé sur ce journal de guerre ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
10 M. NICE : [interprétation]
11 Q. Nous devons mettre la main sur ce journal. Vous comprendrez, Monsieur
12 Ojak, que les documents de l'époque sont particulièrement précieux pour
13 nous, et plus précieux que des souvenirs qui sont consignés quelques années
14 plus tard ? Est-ce que vous êtes d'accord avec cette idée-là ?
15 R. Oui, je suis d'accord avec cette idée-là. Mais je me souviens des
16 éléments importants.
17 Q. Pouvez-vous en parler à la Chambre, s'il vous plaît. Vous avez affirmé
18 un certain nombre de choses, et par rapport à toutes ces informations que
19 vous avez faites, je vais vous reposer la question et vous demander si vous
20 avez des documents d'époque à l'appui de ce que vous avez dit aujourd'hui.
21 La destruction du bazar ou de la place du marché due à une bombe, une bombe
22 de l'OTAN, avez-vous des documents d'époque qui parlent de cela ?
23 R. Non, aucun. Non.
24 Q. Eu égard au bombardement de l'OTAN, avez-vous des documents d'époque
25 qui parlent de ce bombardement ?
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1 R. Non, Monsieur Nice.
2 Q. Je vous en prie, continuez.
3 R. Mais il est tout à fait certain que dans les journaux de guerre des
4 principales unités, vous n'entendrez pas. Rien n'est consigné par rapport
5 aux cibles civiles, car c'est quelque chose qui n'est, en général, pas
6 mentionné dans les journaux de guerre. Ce qu'on consigne dans ces journaux
7 de guerre, c'est en général les pertes subies et les différentes activités
8 de l'unité.
9 Q. Il y a d'autres documents d'époque ou comptes rendus d'époque, comme
10 les rapports de combats et d'autres documents.
11 Y a-t-il eu des rapports de combats quotidiens rédigés par des membres de
12 votre bataillon ?
13 R. Oui, tout à fait.
14 Q. Il se peut qu'eux aient relaté les différents événements. Je vais
15 poursuivre.
16 Vous avez affirmé que les Albanais du Kosovo ont enlevé des documents
17 d'autres Albanais pour les détruire. Est-ce que vous avez des documents à
18 l'appui de ce que vous venez de dire à cet effet ?
19 R. Monsieur Nice, je n'ai pas dit qu'ils les ont détruit, ces documents.
20 Les terroristes se sont emparés des papiers d'identité des civils dans
21 différents villages, en particulier les pièces d'identité des hommes en âge
22 de porter les armes. Car il s'agissait de les obliger à quitter le village
23 pour rejoindre les terroristes. Donc, ils n'ont pas détruit les papiers
24 d'identité. Ce que j'ai dit, c'est qu'à Smonica et ces villages-là, j'ai
25 trouvé un nombre très important de pièces d'identité, et que ces pièces
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1 d'identité, je les ai remises à mon commandant.
2 Q. Il y a beaucoup de témoins qui ont parlé devant cette Chambre, des gens
3 qui disaient qu'on leur avait enlever leurs papiers d'identité lorsqu'ils
4 faisaient partie de convois, et qu'ils traversaient la frontière, en plus
5 particulier la frontière avec l'Albanie. Pourriez-vous nous parler de
6 cela ? Est-ce que vous dites que tout ce qui nous a été rapporté à cet
7 effet est infondé ?
8 R. Je n'ai jamais entendu parler de tel cas. Il se peut qu'il y ait des
9 cas particuliers de ce genre mais je ne pense pas que c'était quelque chose
10 de très répandu.
11 Q. Est-ce que j'ai bien compris que vous et votre Unité de la Défense
12 antiaérienne étiez la seule force militaire présente dans la ville de
13 Djakovica, à cette époque, qui est essentielle ? C'est exact ?
14 R. Djakovica hébergeait, à ce moment-là, le commandement de la 52e
15 Bataillon d'Artillerie de roquette, de Bataillon de combat -- ou plutôt,
16 Compagnie de Transmission, qui était celle de mon bataillon, si vous voulez
17 parler de Djakovica.
18 Q. Vous dites que le Bataillon d'Artillerie ou de roquette est un
19 Bataillon antiaérien; c'est exact ?
20 R. Oui.
21 Q. Car vous faisiez partie d'un Bataillon antiaérien, vous étiez un
22 Bataillon antiaérien qui faisait partie de la brigade; c'est exact ?
23 R. Non. Cela n'est pas exact. Mon bataillon était un Bataillon chargé des
24 Questions logistiques. Nous étions censés ravitailler en armes, en
25 médicaments, en vivres, en combustibles, et cetera, différentes choses dont
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1 avaient besoin les hommes. Il ne s'agit pas d'une unité de combat mais
2 d'une unité de logistique. Cela n'a rien à voir avec un système de Défense
3 antiaérienne.
4 Q. Pour ce qui est de 1998, et c'est la seule question que je souhaite
5 vous poser à propos de cette année-là, le colonel Crosland, qui était
6 attaché militaire auprès de l'ambassade britannique, nous a dit que les
7 Bataillons antiaériens disposaient de canons de 130 millimètres; est-ce
8 exact ?
9 R. Oui. Il a raison.
10 Q. Ce canon est censé être utilisé à bord d'avions; c'est exact ?
11 R. Oui. C'est en partie vrai car ces canons étaient utilisés pour tirer
12 sur des cibles au sol et des cibles en l'air également.
13 Q. C'est ce qu'il a dit. Peut-être qu'il avait raison parce qu'il dit
14 avoir vu des canons antiaériens être utilisés contre des maisons au Kosovo
15 par des Unités antiaériennes, et ceci était en dehors de toutes les
16 proportions raisonnables; a-t-il raison en cela ?
17 R. Non. Il n'a pas raison. Je ne sais pas ce qu'il entend
18 par : "Une utilisation un peu abusive." Je crois que ceux-ci ont été
19 utilisés pour détruire les terroristes.
20 Q. Comment pouvez-vous détruire des terroristes sur le terrain en
21 utilisant des armes canons, en général, utilisées à bord d'avions. Comment
22 procédez-vous ? Est-ce que simplement vous prenez la maison pour cible et
23 vous faites exploser la maison ? C'est comme cela que cela marche.
24 R. Monsieur Nice, nous ne tirons pas sur une maison. Nous tirons sur un
25 bâtiment à partir duquel tirent des terroristes.
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1 Q. Je souhaite simplement vérifier. Vous vérifiez, évidemment, qu'il n'y a
2 pas de terroristes dans la maison avant de tirer sur la maison, ce qui
3 correspond à détruire un avion en vol; c'est cela que vous avez fait ?
4 R. Monsieur Nice, je ne sais pas si quelqu'un peut savoir cela mais
5 personne ne sait ce qui se trouve dans un bâtiment ou derrière des
6 positions ennemies. Je ne sais pas si l'OTAN savait ce qu'il y avait dans
7 le bâtiment lorsque l'OTAN a tué une petite fille qui s'appelait Milica.
8 Q. Si vous souhaitez parler d'enfants, vous pouvez m'aider avec ce qui va
9 suivre. J'allais y venir, plus tard, mais je vais en parler tout de suite.
10 Nous avons entendu un témoin devant cette Chambre, le Témoin K13. La
11 déclaration de ce témoin a été lue à voix haute devant cette Chambre. A
12 l'époque, ce témoin avait 11 ans lorsqu'elle a évoqué les événements et
13 elle était hébergée avec d'autres personnes dans l'enceinte d'une piscine,
14 je crois, pour assurer sa sécurité. La police est venue et a demandé à ce
15 que les occupants soient délogés et cette enfant, qui avait 11 ans à
16 l'époque. On n'a posé des questions à personne. On les a simplement
17 transférés dans une autre maison. Toutes ces personnes, y compris la
18 famille de cette enfant, tout le monde a été exécuté et tué.
19 Savez-vous quelque chose à propos de cela ?
20 R. Non. Je ne sais pas rien à propos de cela. Je ne sais pas où cela s'est
21 produit ou si cela s'est produit.
22 Q. Je voudrais que vous vous penchiez sur une possibilité avant que de
23 quitter le présent prétoire. Demandez-vous si, peut-être à l'occasion de
24 votre défense, l'armée n'aurait pas défendu les positions de la police.
25 Pensez-y.
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1 Il y a des choses qui se sont produites à Djakovica et qu'on dit avoir été
2 faites par la police non pas par l'armée.
3 R. Monsieur Nice, je ne suis pas venu attaquer ou défendre qui que ce
4 soit. Je vous parle des choses que j'ai vues ou dont j'ai entendu parler.
5 J'ai prêté serment ici et je me comporte en conséquence.
6 Par conséquent, ceux qui ont commis des crimes doivent certainement en
7 répondre et doivent être punis, mais me mettre du côté de quelqu'un,
8 défendre quelqu'un, non certainement pas.
9 Q. Je vous ai laissé l'opportunité de dire que cela a peut-être été fait
10 par la police et que vous n'en aviez pas connaissance mais je viens de
11 recevoir votre réponse. Avant que d'aller de l'avant, j'ai une autre
12 question au sujet des documents. Vous nous avez montré ici une carte et
13 j'en viendrai à sa référence dans quelques instants. Dites-nous qui a
14 dressé cette carte ?
15 R. C'est moi qui ai donné les éléments nécessaires et c'est partant des
16 éléments que j'ai fournis que le général Djosan a tracé la carte. Il me
17 semble que lui a dressé sa partie et le colonel Vukovic a tracé sa partie à
18 lui.
19 Q. Je vois. C'est Djosan et Vukovic qui ensemble, avec vous, ont fait
20 cela ?
21 R. Non. Ils ne l'ont pas fait avec moi. Je vous répète que le général
22 Djosan m'a demandé des renseignements et de rédiger une déclaration. C'est
23 ce que j'ai fait. Maintenant, de là, à savoir qui est-ce qui a dessiné la
24 carte, je ne le sais pas. Il me semble que c'est le général Djosan.
25 Q. Comment lui avez-vous donné ces renseignements; par écrit, ou comment ?
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1 Ou plutôt, je vais me reprendre. Est-ce que vous vous êtes entretenu avec
2 lui ? Est-ce que vous avez procédé à des recherches vous-même ? Est-ce que
3 vous l'avez fourni par écrit ? Dites-nous.
4 R. Le général Djosan, puisque contacté par l'équipe d'experts, il m'a
5 demandé de rédiger ces dépositions. Tout y a été dit. Partant de ma
6 déclaration, il a aisément pu tracer cette carte. Il y est dit exactement
7 quelles sont les cotes trigonométriques en question. Ce sont les cotes
8 prédominantes dans le secteur. C'est la raison pour laquelle je m'en suis
9 souvenu.
10 Q. Je suppose qu'il aurait faire n'importe quoi avec vos informations mais
11 dites-nous puisque nous avons parlé de ces équipes d'experts, à votre avis
12 quel a été son rôle dans tout ceci ? Pourquoi a-t-il fallu avoir une équipe
13 d'experts pour fournir des informations à un tribunal de ce genre ? Que
14 devait faire cette équipe d'experts ?
15 R. Je n'ai pas d'informations au sujet de cette équipe d'experts. Le
16 général Djosan m'a dit que c'était une équipe qui a été mise sur pied pour
17 - comment dire - pour aboutir à des informations déterminées sur certaines
18 choses mais je n'ai pas d'autres informations. Je n'ai pas eu moi-même de
19 contacts avec eux.
20 Q. Vous, vous avez fourni votre déclaration à vous et moi ce qui
21 m'intéresse c'est qui est-ce qui a tracé cette carte ? Peut-être ne le
22 savez-vous pas ?
23 R. Je vous l'ai dit, je crois que c'est le général Djosan.
24 Q. L'a-t-il fait tout seul ou avait-il un cartographe ou a-t-il fait cela
25 avec un collègue ? Pouvez-vous nous le dire ?
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1 R. Je ne le sais vraiment pas.
2 Q. Peut-être y reviendrai-je. J'aimerais que nous voyions un extrait
3 vidéo. Il s'agit de la pièce à conviction numéro 11 et peut-être n'avons-
4 nous pas tout vu. Nous allons voir quelques extraits parce que
5 l'enregistrement est assez long. Il dure plus d'une heure.
6 Ce que nous voyons ici, c'est Djakovica, n'est-ce pas ?
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 M. NICE : [interprétation]
9 Q. L'enregistrement vidéo a été pris en août 1999. Est-ce que c'est bien
10 Djakovica ici ?
11 R. Oui.
12 Q. Cela, c'est Djakovica aussi ?
13 R. Cela, je n'en suis pas sûr.
14 Q. Que dites-vous des dégâts ? Est-ce que c'est des dégâts dus à des tirs
15 d'artillerie ou des dégâts dus à autre chose ?
16 R. D'après le niveau de destruction, je dirais que les pièces d'artillerie
17 ne peuvent pas occasionner des dégâts de cette nature. Cela doit être
18 l'effet de bombes plus grandes. Probablement des bombes de l'OTAN parce que
19 les dégâts sont très importants.
20 Q. Dites-nous, Monsieur Odak, vous, vous étiez là-bas, vous nous avez dit
21 que vous étiez pratiquement le seul officier de l'armée là-bas. Alors,
22 dites-nous : est-ce que cela est occasionné par des bombes ou par
23 l'artillerie ?
24 R. Je vous l'ai dit, je me trouvais à Djakovica. Il n'aurait pas été
25 normal que de me faire pilonner par ma propre armée. Cela n'a pu être
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1 occasionné que par des bombes de l'OTAN.
2 Q. [en anglais] Press on, please.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, ici, au compte rendu
4 d'audience, on dit : "Press on, please," mais je n'ai pas entendu la
5 question interprétée à l'intention du témoin.
6 M. NICE : [interprétation] Je me suis servi des mots "Press on" à
7 l'intention de Mme Dicklich pour qu'elle continue à garder le doigt sur le
8 bouton pour faire passer la vidéo.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce n'était pas adressé au témoin.
10 M. NICE : [interprétation]
11 Q. Etes-vous en train de nous dire qu'en aucun cas, il n'y a eu des
12 maisons de Djakovica mises à feu ?
13 R. Je n'affirme pas qu'il n'y a pas eu des cas individuels, mais parler
14 d'un phénomène où il aurait été procédé à des incendies systématiques et à
15 des meurtres, non, ce n'est pas exact. Je suis certain qu'il y a des cas
16 qui n'ont pas été décelés, mais là où nous avons appris qui en a été
17 l'auteur, ce sont des gens qui ont été poursuivis en justice, j'en suis
18 certain.
19 Q. Je vous prie maintenant de vous pencher sur une pièce à conviction de
20 la Défense qui a été versée par le biais du témoignage de M. Stevanovic. Je
21 me réfère notamment à l'intercalaire 72 et je vous demande de vous pencher
22 sur le paragraphe 12 de ce PV, PV d'une réunion du ministère de
23 l'Intérieur, qui s'est tenue à la date du
24 11 mai 1999. Il s'agit du MUP, de la police et je vais demander à
25 l'Huissière de placer la page 12 de la version anglaise sur le
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1 rétroprojecteur.
2 Est-ce que vous pouvez voir la fin du paragraphe 12 ? Il est question là-
3 bas du rapport du commandant de la brigade, M. Colic.
4 M. NICE : [interprétation] Je ne vois pas cela sur mon écran. Est-ce que
5 les Juges le voient ? Toujours est-il que je vais vous donner lecture.
6 Voilà le texte.
7 Q. Au bas de la page, on dit : "Que le commandant Colic a dit ce qui suit
8 : s'agissant des citoyens et des réfugiés de la ville de Djakovica, ils ont
9 été traités de façon correcte. Toutefois, après toutes les actions, les
10 réservistes de l'armée de Yougoslavie ont incendié des maisons et sont
11 entrés dans celles-ci; nous avons informé les commandants de l'armée de
12 Yougoslavie pour empêcher de tels incidents."
13 Dites-nous, est-ce qu'au bas mot, ce sont des réservistes de l'armée de
14 Yougoslavie qui auraient incendié des maisons, comme la police en a pris
15 note ici ?
16 R. La coopération entre l'armée et la police se déroulait au quotidien.
17 Ces échanges de correspondance entre le commandant de la brigade et le
18 responsable du MUP de Djakovica, cela se faisait au quotidien. Comme ils
19 nous aidaient, pour ce qui est de découvrir des auteurs de crimes, nous en
20 avons fait de même. Je vous donne, par exemple, le cas de ces deux soldats
21 qui ont tenté de violer des femmes dans notre brigade. Nous avons été
22 informés de cela par des instances du MUP.
23 Pour ce qui est de ces cas-ci, je dis que cela est possible, ce sont des
24 cas particuliers. Nous avons été informés dans la meilleure des intentions
25 afin de nous en occuper nous-mêmes mais ce ne sont certainement pas des
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1 soldats de mon unité qui ont fait cela.
2 Q. Où sont les documents relatifs à la poursuite en justice de ces gens-
3 là ?
4 R. Je crois que c'est le commandement de la brigade qui a transféré cela à
5 qui de droit. C'est au niveau du commandement de la brigade que cela se
6 passe.
7 Q. Où sont les documents dont pourrait se servir ce Tribunal, où l'on
8 enregistrerait le fait qu'il y a eu des poursuites en justice des personnes
9 qui ont incendié des maisons à Djakovica ? Mais ces documents n'existent
10 pas.
11 R. Nous n'avons pas eu de cas de cette nature où il y aurait eu des
12 incendies de maisons. Je vous ai dit quels sont les deux cas dont j'ai eu
13 vent au sein de la brigade et ces deux hommes ont fait l'objet de plaintes
14 au pénal et ils ont été appréhendés. Pour ce qui est d'incendies de maisons
15 dans mon unité, il n'y en a certainement pas eus.
16 Q. Nous avons déjà entendu parler de ces viols. Nous ne savons pas ce
17 qu'il est advenu de ces auteurs de viols. Nous savons, il ne leur est rien
18 arrivé du tout. Nous avons mentionné, au cours du procès, le nom d'un
19 témoin précédent, un dénommé Mancic. Vous souvenez-vous du dénommé Mancic ?
20 R. Non.
21 Q. Avez-vous entendu parler d'un procès de cette nature ? Savez-vous que
22 c'est quelqu'un qui a été --
23 R. Oui.
24 Q. Pardon ?
25 R. Oui.
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1 Q. Savez-vous qu'il a fait l'objet d'un procès et cela est dû parce qu'il
2 a donné l'ordre à un soldat de tuer un Albanais et il s'est présenté lui-
3 même pour être jugé; vous en souvenez-vous ?
4 R. Oui, je me souviens.
5 Q. Bien.
6 R. J'ai mon opinion, mais je ne pense pas qu'il soit utile d'en parler ici
7 parce que c'est là un officier de chez moi. Je crois que les avocats ont
8 reçu une information de la KFOR disant que de telles personnes n'existaient
9 pas, que ces personnes n'existaient pas du tout. Je crois donc que le
10 procès a été monté de toutes pièces.
11 Q. Revenons à ce que vous venez de confirmer tout à l'heure : le procès
12 Mancic est un procès où il a fallu qu'il y ait procès parce que l'un des
13 hommes à qui il a donné l'ordre de commettre un crime s'est présenté lui-
14 même à la justice. C'est là une circonstance tout à fait particulière, pour
15 ce qui est des procès en justice relatifs aux crimes commis au Kosovo
16 pendant cette période. Ai-je raison ou pas ?
17 R. Je vais vous dire. Je n'ai pas très bien suivi ce procès parce que je
18 n'en ai pas compris l'objectif. Je puis vous parler de ce qui s'est passé
19 au niveau de mon unité à moi.
20 Q. Avant que de passer au sujet suivant, j'aimerais que nous visionnions
21 un autre ensemble d'extraits vidéo. Etes-vous en train de nous dire qu'il
22 n'y a pas eu d'hostilité d'exprimée à l'égard des Albanais ? Personne n'a
23 exprimé le souhait de les expulser ou de faire quoi que ce soit à leur
24 détriment dans cette période, courant du mois de mars au mois de mai 1999,
25 ou mars à juin ?
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1 R. Non.
2 Q. Penchons-nous sur quelques inscriptions au niveau des murs que nous
3 pouvons voir dans ces extraits vidéo. Donc, vous acceptez qu'il y ait des
4 hostilités ?
5 R. Non. J'ai dit qu'il n'y en avait pas eu. J'ai dit qu'il y a peut-être
6 eu des cas, à part des cas particuliers à titre individuel, mais je ne
7 pense pas que cela ait pu être un sentiment répandu et généralisé. Cela ce
8 ne serait pas vrai.
9 Q. Pouvez-vous nous donner lecture de ce qui est dit ici. R. "Lepa sela
10 lepo gore." C'est ce que vous voulez que je vous lise.
11 Q. "Les beaux villages brûlent en beauté." C'est bien ce qui est dit.
12 R. Oui, mais c'est le titre d'un film, un film qui a été tourné. C'est un
13 acteur qui dit cela dans un film.
14 Q. Je comprends. Passons à l'inscription suivante. Est-ce que ceci exprime
15 le souhait : "De voir la Serbie s'étirer jusqu'à Tirane et ce qui signifie
16 baiser l'OTAN."
17 R. Oui, c'est bien ce qui est écrit.
18 Q. "Que s'est-il passé avec cette maison ? Je vais la brûler." C'est bien
19 ce qui est marqué dessus ?
20 R. Oui, c'est ce qui est marqué dessus.
21 Q. Donc, Djakovica était une ville imprégnée de haine.
22 R. Non, Monsieur Nice, ce n'est pas vrai. Je vous ai déjà dit que j'ai
23 vécu pendant 13 ans et demi avec eux et il ne serait pas normal d'haïr
24 quelqu'un et de vivre parmi eux pendant 13 ans et demi. Donc, ces
25 inscriptions, mis à part ce fait, ne veulent rien dire parce que l'état de
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1 guerre est un état particulier où les gens expriment des sentiments qui ne
2 sont peut-être pas, ou très certainement pas, les leurs. Ceci ne veut rien
3 dire du tout.
4 Q. Vous comprendrez, n'est-ce pas, le fait que, mis à part les témoins qui
5 sont venus pour témoigner ici s'agissant des événements de Djakovica, il y
6 a eu d'autres organisations, y compris Human Rights Watch et l'OSCE, qui
7 ont relaté les événements qui se sont produits à Djakovica devant ce
8 Tribunal ?
9 R. C'est possible.
10 Q. J'aimerais que vous m'aidiez au sujet du document suivant. En votre
11 qualité de personne qui connaît bien Djakovica, y avait-il à Djakovica un
12 médecin, Dr Izet Hima, qui était très respecté ? Vous souvenez-vous de
13 cette personne ?
14 R. Non.
15 Q. Est-ce que vous vous souvenez de Qamil Zherka, une personne âgée de 70
16 ans, et de son fils, Nexhdet, qui avait 41 ans ?
17 R. Monsieur Nice, Djakovica compte 60 000 habitants; la municipalité, plus
18 de 100 000 habitants.
19 Q. Oui, mais, indépendamment de ce fait, je vous pose la question de
20 savoir si vous connaissiez ces gens-là. Est-ce que vous vous souvenez d'un
21 avocat éminent appelé Urim Rexha ?
22 R. Non.
23 Q. Enfin, vous rappelez-vous un homme qui s'appelait Mark Malota, qui a
24 loué sa maison à l'association de mère Térésa. Vous rappelez-vous de cet
25 homme ?
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1 R. Non. Je ne connais pas cette personne.
2 Q. Venons en maintenant à deux extraits d'un ouvrage
3 intitulé : "Aux Ordres" ? Je ne pourrais vous en soumettre davantage. Ce
4 livre est écrit en anglais. Je vais vous lire cet extrait rapidement. Une
5 organisation, dénommée Human Rights Watch, il s'agit de la pièce à
6 conviction -- j'oublie toujours le numéro de la pièce. Enfin, on reviendra
7 sur ce numéro de pièce un peu plus tard.
8 Donc, cet ouvrage s'appuie sur de nombreuses interviews dont les références
9 figurent en bas de page. Il s'agit de la pièce à conviction 154 qui résume
10 la situation à Djakovica dans les termes suivants, je cite : "Djakovica
11 subit des violences les plus intenses contre les civils parmi toutes les
12 grandes villes du Kosovo. Si les 100 000 habitants, chiffre estimé de la
13 population de Djakovica n'ont pas tous été expulsés, la menace d'expulsion
14 et les assassinats ont fait fuir une grande partie de la population de la
15 ville. La police et les paramilitaires serbes ainsi que les soldats
16 yougoslaves ont tué environ 200 personnes du 24 mars au 12 juin uniquement
17 à l'intérieur de la ville. Un grand nombre d'autres habitants ont été tués
18 dans les villages voisins, tels que Meja et Korenica. A peu près 1 200
19 autres habitants de la municipalité de Djakovica sont toujours portés
20 disparus depuis février 2000. Au moins 150 personnes ont été arrêtées
21 pendant la guerre et emmenées en Serbie où ces personnes ont été condamnées
22 par des tribunaux serbes pour des actes de terrorisme, alors que la
23 majorité d'entre eux plus tard ont été remis en liberté."
24 Donc, c'est un résumé. Est-ce que vous affirmez qu'il y a quelque vérité
25 dans ce passage ou que pas un mot de cet extrait n'est vrai ?
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1 R. Monsieur Nice, si l'origine de cet ouvrage est M. Oker [phon], un
2 ancien combattant de l'UCK, alors, il est certain que rien de tout cela
3 n'est vrai.
4 Q. Monsieur qui ?
5 R. Je ne suis pas au courant de ce livre. J'ai parlé de
6 M. Walker. Si c'est son organisation qui est à l'origine de cet ouvrage,
7 alors, il est certain rien de tout cela n'est exact, mais je ne suis pas au
8 courant.
9 Q. Voyons un peu votre attitude. D'abord, cette organisation n'a
10 absolument rien à voir avec M. Walker. Mais puisque vous prononcez le nom
11 de M. Walker, je vous demande si vous adoptez la position consistant à
12 déclarer que dès lors que nous examinerons un document qui a un quelconque
13 rapport avec M. Walker, que ce rapport avec M. Walker soit très étroit ou
14 très éloigné, vous affirmerez que ce qui est dit ne correspond pas à la
15 vérité. C'est bien la position que vous adoptez ?
16 R. Monsieur Nice, celui que les terroristes appellent un ancien combattant
17 parmi leur rang, cela me suffit pour que je doute du moindre mot venant de
18 lui.
19 Q. Revenons à cet ouvrage qui n'a rien à voir avec M. Walker. Il vient de
20 Human Rights Watch, qui envoyait des rapports régulièrement dans toutes les
21 années 90 à l'accusé. Donc, cet ouvrage traite de Djakovica en détail.
22 M. NICE : [interprétation] Je vous demanderais, Madame l'Huissière, de vous
23 rendre en page 216, si vous voulez bien.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, nous devons lever
25 l'audience à 13 heures 43.
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1 M. NICE : [interprétation]
2 Q. Un certain nombre d'éléments de preuve sont analysés par cette
3 organisation à Djakovica en plusieurs étapes, c'est la raison pour laquelle
4 d'ailleurs je vous ai soumis le nom que je vous ai soumis. Il est dit ici :
5 "Que la première vague de violence a commencé le 24 mars au moment où
6 l'OTAN a commencé son attaque contre la Yougoslavie et qu'elle s'est
7 poursuivie jusqu'au 2 avril. Il est question également de la mosquée qui
8 dit on ici a été incendiée. Il est question de meurtre sporadique. Un peu
9 plus loin, nous lisons ce qui suit, je cite : "Le 25 mars des forces de
10 Sécurité inconnues ont fait irruption dans la maison d'un médecin respecté
11 et l'ont abattu devant son épouse." Il s'agit du Dr Hima. Je poursuis la
12 citation, je cite : "Selon le Washington Post, Faton Poloshka a ramassé le
13 corps sans vie du Hima à 17 heures, ainsi que celui de trois autres
14 Albanais du Kosovo et de son fils."
15 Plus loin il est dit : "Des habitants bien connus de Djakovica,
16 notamment, un avocat, Mark Malota, dirigeant du LDK, qui a fait cadeau de
17 sa maison à l'association de mère Térésa, ont également été tués."
18 Il est question, ensuite, de ce qui s'est passé le 26 mars.
19 Vous étiez présent ce jour-là sur place. Sous couverture de l'attaque
20 de l'OTAN l'occasion a été saisie pour viser des habitants albanais du
21 Kosovo bien connus et les tuer, n'est-ce pas ?
22 R. C'est votre interprétation.
23 Q. C'est la raison pour laquelle je vous demande si vous n'aviez
24 absolument aucune idée du fait, que ce groupe de citoyens respectés ou en
25 tout cas bien connus des citoyens ayant une certaine importance dans la
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1 ville, vous n'avez pas la moindre idée du fait qu'ils ont été tués ce jour-
2 là ?
3 R. Monsieur Nice, je commandais un bataillon à cette époque. J'avais toute
4 sorte de soucis, notamment, un souci particulier, à savoir, d'un côté, 40
5 tonnes d'explosifs qui auraient pu faire sauter toute la ville de
6 Djakovica. Donc, je ne me suis pas occupé de ce que vous êtes en train de
7 me soumettre.
8 Q. Très bien, très bien. Mais, dans la minute qui me reste, j'aimerais que
9 nous revenions aux deux choses que vous avez dites et nous allons voir si
10 vous maintenez. Répondant à l'accusé, vous avez dit que vous saviez tout ce
11 qui s'était passé à Djakovica et qu'en réalité, rien ne s'y était passé et,
12 en me répondant, vous faites porter la responsabilité sur la police ou
13 d'autres forces. Alors, est-ce que la réalité ne correspond pas à votre
14 première idée, à savoir que vous n'aviez pas la moindre idée de ce qui se
15 passait à Djakovica ou dans les alentours de Djakovica, le 24 mars 1999,
16 parce que vous vous trouviez ailleurs ?
17 R. Mais, non, j'étais à Djakovica. Je répète que je n'ai pas la moindre
18 raison de protéger qui que ce soit, mais je dis une nouvelle fois qu'il
19 n'est pas question d'admettre qu'il y a eu une activité organisée. Il est
20 possible qu'il y ait eu des cas isolés, mais des unités destinées à faire
21 ce genre de chose, il n'y en avait pas. Toutes les unités, qui se
22 trouvaient là, n'avaient rien à voir avec les unités paramilitaires. Elles
23 étaient en uniforme comme il se doit et elles avaient pour unique mission
24 de protéger la population et d'empêcher de nuire les criminels de la ville.
25 M. NICE : [interprétation] Avec l'aide de Mme l'Huissière et l'indulgence
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1 de la Chambre, j'aimerais vous poser encore une question.
2 Q. Veuillez tourner la page, je vous prie, et passer à la page suivante.
3 On y voit une photographie des 20 personnes qui ont été tuées et dont les
4 cadavres ont été incendiés dans la maison sise au 163, rue Milos Gilic, et
5 on voit sur cette photographie le nombre de ces personnes qui étaient de
6 jeunes enfants. Vous étiez présent sur les lieux. Vous étiez un soldat de
7 métier très expérimenté. Comment expliquez-vous cela, je vous prie ?
8 R. Ceci est vraiment affreux et il est certain que tout crime de ce genre
9 doit être puni, comme le crime --
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. -- commis contre la colonne de personnes qui se déplaçaient --
12 Q. Non, non, Monsieur Odak. Vous n'allez pas vous en sortir en parlant de
13 l'OTAN. Vous étiez sur place et vous nous dites que vous auriez dû savoir à
14 peu près tout ce qui se passait. Vous affirmez que rien ne s'être passé.
15 Alors, dites-nous, je vous prie : s'agissant des enfants dont vous voyez la
16 photographie ici, qu'est-ce qui a été fait pour les traduire en justice ?
17 R. Monsieur Nice, j'ai dit que mes subordonnés, dans la période mentionnée
18 dans l'acte d'accusation, sont passés dans ce secteur et qu'ils n'ont rien
19 vu. Par conséquent, je ne peux rien vous donner d'autre que vous rapportez
20 ce dont m'a rendu compte mon subordonné à son retour. Je ne crois pas qu'il
21 ait menti. S'il avait vu quelque chose en chemin, je ne vois pas quelle
22 raison aurait pu le pousser à me mentir.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous devons maintenant suspendre,
24 mais Monsieur le Juge Bonomy a une question à poser à l'accusé.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, un éclaircissement
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1 sur un point évoqué un peu plus tôt ce matin. Vous nous avez soumis un
2 certain nombre de rapports médicaux provenant d'experts. L'un de ces
3 rapports est dû à un certain Pour Vukasin, Andric. Un peu plus tôt de cette
4 année, nous avons entendu une déposition d'un Pr Vukasin, Andric. Est-ce
5 qu'il s'agit de la même personne ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, il s'agit de la même personne, c'est
7 quelqu'un de très connu dans sa profession, c'est un oto-rhino-
8 laryngologiste et la spécialité médicale qu'est l'oto-rhino-laryngologie
9 n'a rien à voir avec une quelconque déposition.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
11 Suspension jusqu'à demain 9 heures.
12 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mercredi 16
13 novembre 2005, à 9 heures 00.
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