Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 1er décembre 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

6 M. NICE : [interprétation] En l'absence du témoin pendant quelques

7 instants, s'il vous plaît, car avant d'ouvrir un message électronique, je

8 n'avais aucune information sur le document dont nous avons fait la demande

9 hier; demande ou une ordonnance qui a été communiquée par la Chambre et

10 immédiatement le conseil national de la Coopération a reçu cette demande,

11 et doit rentrer en contact avec des représentants de l'armée. Nous avons

12 attendu cette réponse quasiment toute la nuit. Ce sont des heures en

13 général où les gens dorment, mais nous nous sommes organisés pour qu'il y

14 ait toujours quelqu'un près à recevoir cette réponse au cours de la nuit.

15 Quoi qu'il en soit, le bureau du Procureur sur le terrain à Belgrade à 8 h

16 50 ce matin nous a indiqué que les représentants de l'armée ont retrouvé ce

17 document et vont l'envoyer à Belgrade. Le conseil national de la

18 Coopération espère avoir ce document en sa possession vers 10 h 30 et en

19 avertira l'officier sur le terrain qui ira le chercher.

20 Donc, dans l'état actuel des choses, je ne pourrai pas poser des questions

21 sur ce document-là aujourd'hui. Il est fort probable que je souhaite poser

22 des questions là-dessus car ce témoin a couvert un champ très important. Il

23 y a des questions que je souhaite lui poser à cet égard et je dois essayer

24 de garder ce contre-interrogatoire dans un délai raisonnable.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faudra peut-être le rappeler.

26 M. NICE : [interprétation] Oui, avec l'autorisation de la Chambre, je pense

27 que ce sera effectivement le cas. Nous allons être obligés de le faire

28 venir.

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Écoutez, nous pouvons essayer de

3 voir s'il est possible de le faire revenir demain.

4 M. NICE : [interprétation] Ecoutez, demain, je ne pourrais pas rester dans

5 le prétoire après 13 heures [comme interprété].

6 [La Chambre de première instance se concerte]

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Essayons de savoir s'il serait

8 commode de procéder comme suite, si après avoir analysé ce document, vous

9 estimez qu'il est nécessaire de contre-interroger le témoin, nous essayons

10 de voir si demain fait partie du champ du possible.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaite informer les

13 parties de ceci. Nous avons envisagé plusieurs possibilités. Au lieu de

14 siéger mardi, nous siégerons demain, de sorte que nous n'aurions que deux

15 journées d'audience la semaine prochaine. Cela semble être une éventualité

16 ou quelque chose que nous pourrions envisager. Nous sommes en train de nous

17 pencher sur la question.

18 Peut-être que dans ces circonstances-là, vous pourriez terminer votre

19 contre-interrogatoire.

20 M. NICE : [interprétation] Oui. A supposer que le document arrive à l'heure

21 prévue, ce document comporte quelque 400 pages. La seule façon dont je

22 pourrais travailler c'est de parcourir ce document et voir quels sont les

23 documents qui m'intéressent de façon à ce que puisse les lire, peut-être

24 qu'on me pourrait me faxe les pages -- m'envoyer par télécopie les pages

25 importantes. Il faudrait que cela arrive suffisamment tôt, même si cela

26 arrive à minuit ce soir; à ce moment-là, je travaillais pendant la nuit

27 avec une équipe d'interprètes. Cela va être difficile, mais je vais

28 certainement -- je saurais d'ici la fin de la matinée comment ce document

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1 va nous parvenir ou comment sur le plan logistique ceci a l'air de

2 s'organiser.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, combien de temps vous

6 faut-il encore pour votre contre-interrogatoire ?

7 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que M. Nice est hors micro.

8 M. NICE : [interprétation] Bon. Hormis, ce qui sera contenu dans ces

9 carnets qui vont être envoyés par avion -- arriveront à minuit, je crois

10 que je devrais avoir besoin de la session de ce matin, et il y a certains

11 éléments que je souhaite aborder, mais que j'ai déjà abordés, mais pas

12 davantage. Je crois qu'il y a un autre témoin qui est déjà prêt à venir

13 témoigner à la barre.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il ne serait pas mieux dans

15 ce cas de vous retenir ? Je crois que vous avez déjà utilisé votre temps,

16 si on considère qu'il y a un certain temps qui est octroyé à chaque témoin.

17 M. NICE : [interprétation] Je pense qu'effectivement, ce serait préférable.

18 A ce moment-là, nous pourrions commencer tout de suite avec le témoin

19 suivant. Je suis tout à fait disposé à le faire.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dans ce cas, Monsieur Milosevic,

21 nous allons entendre maintenant votre témoin suivant. Qui est ce témoin ?

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le général Krsman Jelic.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le lieutenant-colonel Sel doit être

24 informé que demain il devra se rendre disponible.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

27 L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour ne pas perdre de temps, j'aimerais qu'on

2 apporte ici le tréteau parce que le général Jelic va apporter des cartes.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez-vous un instant. Je

4 n'entends pas la traduction.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je disais qu'il fallait faire rapporter le

6 chevalet parce que le général va apporter des cartes et je le dis pour ne

7 pas perdre de temps.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. L'Huissier vous veiller à ce

9 que le chevalet soit apporté.

10 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Laissez prononcer au témoin la

12 déclaration solennelle.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

15 LE TÉMOIN: KRSMAN JELIC [Assermenté]

16 [Le témoin répond par l'interprète]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

18 Monsieur Milosevic, vous pouvez commencer, je vous prie.

19 Interrogatoire principal par M. Milosevic :

20 Q. [interprétation] Bonjour, mon Général.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez vous

22 assurer ou essayer de nous assurer l'acheminement d'un chevalet dans le

23 prétoire.

24 Vous pouvez commencer Monsieur Milosevic.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Mon Général, veuillez vous présenter d'abord et nous décrire brièvement

27 votre carrière, l'éducation que vous avez.

28 R. Je m'appelle Jelic, Krsman. Je suis général de brigade en retraite. Je

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1 suis né, le 1er avril 1947, à Pudujevo, sur le territoire du Kosovo-

2 Metohija, République de Serbie. Je vis en ce moment-ci à Nis. Je suis

3 marié. J'ai trois enfants et je n'ai pas de casier judiciaire.

4 Après la fin de mes études secondaires en 1966, je me suis inscrit à

5 l'académie militaire. Au fil de ma carrière, j'ai terminé toutes les études

6 existantes au sein de la JNA et de l'armée de Yougoslavie, y compris

7 l'école de la Défense nationale qui est l'école la plus cotée et je l'ai

8 terminé en 1996.

9 J'ai assuré des fonctions de commandement. J'étais commandant de

10 compagnie, puis de bataillon, puis de détachement, puis d'une brigade

11 légère, puis d'une brigade blindée. Puis, j'ai été chef d'état-major du

12 Corps de Pristina. J'ai été commandant du Groupe opérationnel sud pour la

13 solution de la crise au sud de la Serbie. J'ai été chef de l'académie

14 militaire et j'ai été mis à la retraite anticipée en 2002. C'est là que

15 prend fin ma période militaire. Les garnisons où j'ai accompli mes

16 fonctions ont été celles de Nis, Urosevac, Leskovac, Vranje, Belgrade.

17 Q. Merci, mon Général. Veuillez nous dire ce que vous avez fait

18 pendant la guerre au Kosovo ?

19 R. Pendant la guerre, à savoir, en 1994, déjà, j'ai été transféré de Nis à

20 Urosevac. J'ai été nommé là-bas, commandant de la 243e Brigade blindée et

21 j'étais commandant de la garnison. Ma zone de responsabilité s'étendait sur

22 plusieurs municipalités au Kosovo-Metohija, à savoir, Urosevac, Strpce,

23 Stimlje, Kacanik et une partie de Vitina.

24 Q. Mon Général --

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu

26 d'audience, je signale qu'au compte rendu d'audience, on devrait voir

27 apparaître Urosevac, et non pas Orahovac.

28 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Mon Général, dans les documents -- ou plutôt, dans les pièces à

2 conviction que nous avons ici, intercalaire numéro 1, il y a une carte.

3 Alors, je vous saurai gré de placer cette carte sur le rétroprojecteur --

4 ou plutôt, c'est l'Huissier qui s'en occupera. J'aimerais que vous nous

5 indiquiez dessus votre zone de responsabilité. Je précise une fois de plus

6 qu'il s'agit de l'intercalaire 1.

7 Alors, pendant qu'on place la carte sur le rétroprojecteur, dites-nous ce

8 que vous avez fait au Kosovo jusqu'en 1999 pour que les choses soient, tout

9 à fait, précises.

10 R. L'armée, au Kosovo, jusqu'en 1999, a eu trois missions principales.

11 Tout d'abord, il y a eu informations au combat. Il y a eu la nécessité de

12 sécuriser la frontière de l'État et assurer la praticabilité des routes

13 dans cette zone responsabilité. Dans la zone d'Urosevac, c'est une garnison

14 qui existe depuis la Première guerre mondiale. Toutes les Unités au Kosovo

15 Metohija sont des garnisons qui datent depuis longtemps et il y avait des

16 soldats qui se relayaient deux fois, l'an, avec un entraînement régulier.

17 Nous assurions la sécurité de la frontière de l'État. Ma brigade a

18 sécurisé la frontière sur une longueur de 88 kilomètres en direction de

19 l'ex-République yougoslave de la Macédoine. La sécurité de la frontière se

20 faisait sur la ligne de la frontière et en profondeur.

21 Il s'agissait d'assurer la présence de l'armée sur différents

22 carrefours, carrefours principaux, notamment. Cela se rapporte, notamment,

23 à Stimlje, carrefour Lipjan, Pristina, Urosevac et Suva Reka, à savoir,

24 Prizren, puis le secteur de Kacanik où il y a les voies de communication en

25 direction de Vitina, Djeneral Jankovic, la Macédoine et en direction de

26 Strpce, pour enchaîner sur Prizren.

27 Q. Mon Général, étant donné que la carte se trouve être placée sur

28 le rétroprojecteur et plutôt sur le chevalet, j'aimerais que vous nous

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1 montrez votre zone de responsabilité et dites-nous avant que de se faire,

2 de quel type de carte il s'agit ?

3 R. Ici, il s'agit d'un extrait d'une décision du commandant du Corps de

4 Pristina que nous avons sous les yeux. C'est une décision qui a été rendue

5 ou prise à la veille de l'agression. La zone de responsabilité est décidée

6 par le commandant du Corps d'armée et sa zone de responsabilité se situe au

7 niveau de la rivière Debeldelska, et Mala Reka --

8 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils ont du mal à entendre.

9 R. -- alors, ici, se trouve la frontière en direction de la République de

10 Macédoine sur une longueur de 88 kilomètres. Ensuite, il y a Prevalac, le

11 mont Sar Planina, les monts Jezero [phon] --

12 Q. Attendez, quand vous parlez de frontière, vous parlez de limites de

13 vote zone de responsabilité ?

14 R. Oui.

15 Q. C'est la 430e Brigade mécanisée, c'est votre brigade, qui est la 243e

16 et, à l'ouest, il y a 549e --

17 R. A l'est, il y a la 185e.

18 Q. Je vais vous poser plusieurs questions difficiles, mon Général, mais il

19 faut apporter des précisions pour plus tard. Alors, j'aimerais que vous

20 nous indiquiez certains endroits dans cette zone de responsabilité si cela

21 ne vous constitue pas de difficultés, du moins pour ce qui est de la carte

22 que nous avons ici.

23 Ici, au paragraphe 63, il est avancé bon nombre d'allégations à l'encontre

24 de nos forces à nous et je précise qu'au paragraphe 63(j), (k), avec les

25 sous paragraphes (k). Il est fait état de bon nombre de localités et c'est

26 à cette fin que je vous demanderais de nous expliquer lesquelles de ces

27 localités font partie de votre zone de responsabilité. Alors, je donnerais

28 lecture de celle qui, à mon avis, font parties de votre zone de

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1 responsabilité si l'on se penche sur la carte. Mais je vous demanderais au

2 demeurant de nous les montrer sur la carte et, en même temps, je vous

3 demanderais d'expliquer si ces localités se trouvent non seulement au sein

4 de votre zone de responsabilité au niveau de la zone de déploiement au

5 combat de votre brigade.

6 Alors au 63(j), il est question des villages de Biba, Muhadzer Prelez, Raka

7 et Staro Selo.

8 Ensuite, je vous poserai des questions au sujet des événements.

9 Alors, il y a Papaz, Sojevo, Varos Selo, Mirosavlje. Je ne vais pas vous

10 faire mémoriser tout cela. Dites-nous, est-ce que dans le déploiement au

11 combat de votre brigade, il y avait ce village de Biba, de Muhadzer Prelez.

12 Est-ce que vous pouvez d'abord nous le montrer ?

13 R. Oui, Monsieur le président. Cela se trouvait dans mon secteur, dans la

14 zone de responsabilité de ma brigade. Vous avez énuméré des villages qui se

15 trouvent au nord et à l'est d'Urosevac.

16 Q. Est-ce que vous pouvez les montrer sur la carte ?

17 R. Oui, certainement.

18 Q. Je vais donner lecture des noms pour que vous n'ayez pas à mémoriser :

19 Biba, Muhadzer Prelez, Raka, Staro Selo, puis Papaz, Varos Selo,

20 Mirosavlje. Tout cela se trouve dans la zone de déploiement au combat de

21 votre brigade.

22 Ensuite, on enchaîne avec la municipalité de Kacanik, où il est

23 mentionné les localités de Kotlina, d'Ivaja. Est-ce que vous pouvez les

24 montrer ?

25 R. Oui, les voilà.

26 Q. Bien. Je les vois, merci. Ensuite, on fait état du village de Stogova,

27 Slatina, Vata, Dubrava, Lisnaje [phon], dans la municipalité de Kacanik.

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Alors tous les villages dont je viens de citer les noms qui sont

2 énumérés au paragraphe 63, sous les petites lettres (j) et (k), cela

3 faisait partie de la zone de responsabilité et de la zone de déploiement de

4 votre brigade ?

5 R. Oui. C'est ma brigade.

6 Q. Bien. Mon Général, vous avez dit tout à l'heure quelles ont été vos

7 missions au Kosovo-Metohija jusqu'en 1999 ? Je ne vais pas remonter loin

8 dans le passé, mais parlons de 1998 et 1999 et dites-nous ce que nous avons

9 eu au Kosovo pendant cette période-là ?

10 R. L'année 1998 est caractéristique pour ce qui est du territoire de ma

11 zone de responsabilité. Cela se rapporte notamment à tout le territoire du

12 Kosovo-Metohija. En effet, au début février, il a commencé à y avoir une

13 présence de groupes terroristes. Il s'agissait de groupes de trois à cinq

14 hommes organisés d'une certaine façon. Ils ont d'abord fait leur apparition

15 dans certaines parties de la Metohija. Par échange de renseignements entre

16 les unités et le commandement supérieur, nous recevions des informations au

17 sujet de ces groupes. Dès fin février, donc, un mois plus tard, ou à la

18 première moitié du mois de mars, ils ont fait leur apparition sur le

19 territoire du Kosovo, dans la zone de responsabilité de ma brigade en

20 d'autres termes. Ces groupes là ont notamment contrôlé ou essayé de

21 contrôler des voies de communication. Ils ont pillés sur les routes. Ils

22 ont arrêté les gens indépendamment de leur appartenance ethnique et leur

23 ont confisqué, en premier lieu, leur argent et dans certains cas même leur

24 véhicule. Il y a des exemples caractéristiques. Par exemple, il y avait un

25 autocar allant de Prizren vers la Bulgarie pour du shopping, ils ont été

26 arrêtés à Crnoljevo et ils ont été pillés. Dans l'autocar, il n'y avait que

27 des Albanais et des Turcs pratiquement.

28 Ces groupes-là très probablement après certains succès au niveau des

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1 pillages, cela indique qu'au départ c'était de simples criminels, et ces

2 groupes ont encouragé d'autres groupes ailleurs. Ce qui fait que de plus en

3 plus souvent, il y a eu des attaques sur les voies de communication,

4 notamment, sur celles reliant le Kosovo et la Metohija. J'entends par là

5 l'axe Stimlje-Suva Reka pour aller à Prizren, d'Urosevac sur les routes

6 allant vers Globocica et Djeneral Jankovic.

7 Q. Mon Général, je vois que vous expliquez cela en regardant la carte que

8 vous avez devant vous, mais j'aimerais que vous le montriez sur la carte

9 qui se trouve derrière. C'est la même bien sûr, mais il faut que les autres

10 puissent voir également de quoi vous parlez.

11 R. Alors la voie de communication Stimlje, Dulje, Prizren et la voie de

12 communication allant d'Urosevac en direction de Djeneral Jankovic et de

13 Globocica. C'était là les axes principaux d'approvisionnement qui

14 traversaient la partie sud du Kosovo.

15 Ces groupes, tout d'abord, sont intervenus à des endroits accidentés

16 où il y avait des forêts, ce qui faisait qu'ils étaient difficiles à

17 capturer. Il y avait des difficultés pour le ministère de l'Intérieur. Mais

18 les effectifs du ministère de l'Intérieur ont immédiatement pris des

19 mesures appropriées pour protéger la population. Il y a eu des règlements

20 de compte ça et là, des combats. Dès la première moitié de 1998, nous avons

21 eu au MUP d'Urosevac plus de 20 policiers de blessés et quelques policiers

22 tués.

23 L'armée de Yougoslavie ou plutôt le commandement du Corps de Pristina, pour

24 protéger ses propres unités et pour assurer la praticabilité des routes -

25 ceci faisait partie de la mission de l'armée - a attribué des unités pour

26 les positionner à certains endroits aux fins d'exercer un contrôle de ces

27 voies de communication. L'une de ces unités faisant partie de ma brigade se

28 trouvait dans le secteur de Dulje, ici. Sa mission était celle de contrôler

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1 la voie de communication allant de Stimlje à Suva Reka et de sécuriser le

2 passage des véhicules militaires et les transports militaires.

3 Le deuxième groupe se trouvait au sud d'Urosevac. Cela se trouvait

4 dans le secteur de Doganovic. Ils étaient là-bas pour assurer la sécurité

5 de la voie de communication conduisant vers Kacanik, Djeneral Jankovic et

6 l'autre route conduisant jusqu'à Globocica.

7 En déployant ainsi nos unités, nous avons assuré les déplacements de

8 nos effectifs, à savoir les déplacements de l'armée de Yougoslavie. Le MUP,

9 le ministère de l'Intérieur, travaillait et intervenait en parallèle pour

10 sécuriser les citoyens, les véhicules civils et, à gauche et à droite de

11 ces voies de communication, ils assuraient la sécurité des voies routières

12 que je viens d'indiquer.

13 Q. Mon Général, nous avons ici, à l'intercalaire numéro 2, une note de

14 service qui se rapporte aux circonstances dans lesquelles six membres de

15 l'armée Yougoslavie ont été blessés suite à une attaque des terroristes

16 Siptar sur une colonne de véhicules militaires qui allaient de Pristina à

17 Prizren. Cela s'est passé vers la mi-1998 dans -- à proximité du village de

18 Crnoljevo. Que pouvez-vous nous dire au sujet de ce document-ci ?

19 R. En effet. Je dirais d'abord d'où vient ce document. Nous avons indiqué

20 déjà que cette voie de communication était très spécifique pour ce qui

21 était de la sécurité. Pour nous, cela avait une importance vitale, puisque

22 cela assurait la circulation entre Pristina et Pec, elle était déjà

23 interrompue. Les terroristes s'étaient emparés de 40 % des voies de

24 communication, des voies routières.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, cet incident

26 s'est produit à la mi-1998. Pourquoi n'en venez-vous pas avec le témoin à

27 des événements qui se trouveraient plus rapprochés des points cruciaux qui

28 sont énoncés dans l'acte d'accusation.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai voulu seulement que certaines notions

2 fondamentales nous soient communiquées par le général Krsman Jelic pour

3 indiquer de quelle façon il y a eu escalade du terrorisme au Kosovo-

4 Metohija. Ceci est un document qui nous le montre.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais nous avons déjà reçu une

6 grande quantité d'informations au sujet de la période qui a débouché sur

7 les événements de 1999. Allons, Monsieur Milosevic, directement vers les

8 événements qui sont énoncés à l'acte d'accusation.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons y venir, Monsieur Robinson.

10 Auparavant, j'aimerais que nous tirions au clair --

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne veux plus écouter de

12 témoignage au sujet de l'année 1998. Vous êtes en train de gaspiller notre

13 temps.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je voulais c'est que cette pièce à

15 conviction soit versée au dossier, Monsieur Robinson. C'est tout ce que je

16 demande.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay.

19 M. KAY : [interprétation] Nous avons eu l'occasion de nous pencher sur ces

20 documents de 1998. Il s'agit de documents militairement pertinents montrant

21 la situation à laquelle devait faire face le gouvernement en 1998. Aussi

22 suggérerions-nous que ces documents 1998 soient versés au dossier en tant

23 que tout, concernant les sujets dont il traite notamment pour ce qui est du

24 fait que l'Accusation s'est servie des mêmes documents dans la présentation

25 de ses éléments à charge.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous allons nous pencher sur la

27 chose.

28 Monsieur Nice.

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1 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas dans quelle mesure -- à quel

2 point les documents liés à 1998 sont nombreux, et je ne suis pas d'accord

3 pour que ces documents soient versés en tant que tout, au dossier. Nous en

4 avons déjà parlé. En réalité, il n'y a pas eu d'exemple de ce type où il y

5 aurait eu versement collectif de notre côté.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'ils étaient seulement au

7 nombre de sept.

8 M. NICE : [interprétation] J'accepte le fait qu'il y est une pertinence

9 certaine pour ce qui est de 1998. Les Juges de la Chambre se souviendront

10 du degré dans lequel le témoignage de Lord Ashdown des mois de mai et

11 septembre 1998 ont été contestés. Bien entendu, dans le cadre de la

12 présentation des éléments de preuve de l'Accusation, il a déjà été question

13 des contestations concernant les activités illégales dont l'accusé a eu

14 vent. Ce qui fait que ce sont là des éléments qui pourraient être admis,

15 mais j'estime que les Juges de la Chambre devraient en décider auquel cas.

16 M. KAY : [interprétation] J'aimerais que l'on en revienne au Témoin C37. Il

17 s'agit du premier témoin croate que l'Accusation a cité à comparaître. Il a

18 présenté un grand nombre de documents qui ont été fournis concernant la TO

19 dans certaines parties de la Croatie occidentale. S'agissant de ces

20 documents, ils se rapportent notamment aux activités et à l'organisation

21 des TO locales, documents qui ont été retrouvés par le MUP croate et qui

22 ont été confiés à l'Accusation et qui ont été versés au dossier en tant que

23 tout.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay.

26 M. KAY : [interprétation] Je voudrais juste venir en aide aux Juges de la

27 Chambre, parce que j'ai fait une assertion et je tiens à la conforter. Il

28 s'agit de la pièce à conviction 334 qui émane des documents de la police

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1 croate. Il s'agit là de documents qui ont été collectivement versés au

2 dossier au travers du témoignage du Témoin C37.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre va verser au dossier ces

4 documents, à savoir les sept documents qui vont jusqu'à l'intercalaire

5 numéro 7 en tant que tout. J'aimerais que l'on fournisse une cote à ce

6 classeur.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] D329, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Ce sera le D329.

9 Continuez, Monsieur Milosevic.

10 L'INTERPRÈTE : M. Milosevic est hors micro.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je disais que : cela est tout à fait bien, mais

12 je voulais poser certaines questions au sujet de certains desdits

13 documents, parce que quand on donne des ordres en 1998 déjà pour ce qui est

14 de la façon procédée à l'égard de la partie adverse, de l'ennemi, c'est un

15 ordre du commandement supérieur qui n'est pas supprimé à un certain moment,

16 mais qui reste en vigueur et qui est en vigueur pendant toute la période

17 qui a suivie. Il faut que vous puissiez voir quelle a été la teneur de ces

18 ordres. S'il est question des événements tel que celui qui est cité à

19 l'intercalaire numéro 2, je suis tout à fait d'accord; il n'est pas

20 nécessaire de le parcourir. Mais, à l'intercalaire numéro 3, il y a l'ordre

21 du commandant du Corps d'armée qui a l'avantage d'être donné en 1998 lui,

22 et non pas post factum.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, je pense

24 que vous avez soulevé un bon point. Vous pouvez poser des questions au

25 sujet de l'intercalaire 3. Vous pouvez aller de l'avant.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Certainement.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Mon Général, veuillez prendre cet intercalaire numéro 3, vous l'avez

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1 sous les yeux. Il s'agit d'un ordre que vous avez reçu, n'est-ce pas ?

2 R. Oui, c'est cela.

3 Q. Cet ordre émane du commandement du Corps de Pristina, c'est-à-dire

4 votre hiérarchie directement supérieure.

5 R. Oui, du Corps de Pristina.

6 Q. Dites-nous, ce qu'il en était des actions contre les forces terroristes

7 Siptar ? Qu'est-ce qui était ordonné contre ces forces terroristes dans ce

8 document ? Regardez le point 1, le paragraphe 1.

9 R. Oui. Au paragraphe 1, il est dit que : "Durant les actions menées

10 contre les terroristes Siptar, il fallait utiliser des moyens de combat de

11 façon extrêmement rationnelle, c'est-à-dire à l'aide de ces moyens,

12 neutraliser uniquement les places bien fortifiées des terroristes Siptar et

13 des groupes cibles, en prenant le plus grand soin de ne pas nuire, de ne

14 pas endommager les bâtiments d'habitations."

15 Q. Donc cela c'est l'ordre que contient le paragraphe 1, qu'en est-il du

16 paragraphe 2 qui interdit quelque chose me semble-t-il ?

17 R. Oui. Il stipule, je cite : "Il est interdit d'endommager les

18 installations ou bâtiments d'où les terroristes Siptar ont été expulsés,

19 même s'ils y ont habité précédemment et s'ils ont organisé une résistance à

20 partir de ces installations et bâtiments," il est question de résistance

21 armée, bien entendu.

22 Q. Qu'est-ce que cela signifie ? On vous dit de tirer sur une installation

23 si une résistance est opposée à partir de cette installation, mais il est

24 interdit d'endommager la moindre installation.

25 R. Oui, c'est exact. Il est interdit précisément de mettre le feu à des

26 maisons ou à quelques autres bâtiments.

27 Q. Au paragraphe 3, nous lisons, je cite : "J'avertis encore une fois…" ce

28 qui signifie que cet avertissement avait déjà été donné précédemment.

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1 R. Oui. C'est un des ordres que j'ai reçu : "J'avertis une nouvelle fois

2 les commandants d'unité, les commandants de brigade, qu'il importe

3 d'interdire de s'emparer de biens appartenant à des particuliers et trouvés

4 dans des maisons abandonnées ou appartenant à des citoyens ainsi qu'au sein

5 des unités."

6 Q. Mais je lis : "J'avertis encore une fois les commandants d'unités à qui

7 j'ai interdit -- qu'il est interdit de s'emparer de biens personnels." Ceux

8 qui ne se rapportent pas -- ceux qui vont "des maisons abandonnées," parce

9 que même si une maison est abandonnée, autrement dit, il est interdit d'y

10 toucher. Un peu plus loin, nous lisons : "Comme cela a été le cas au sein

11 de la 125e Brigade mécanisée, de la 549e Brigade mécanisée," et cetera. Le

12 texte se poursuit en disant : "Que tous les biens qui auraient été saisis

13 de façon inopportune doivent être restitués, là où ils ont été pris et un

14 délai est fixé. Alors, des mesures disciplinaires auraient dû être prises

15 contre tout individu qui aurait désobéi à ces ordres." C'est bien ce qui

16 est écrit ici ?

17 R. Oui. "Des mesures disciplinaires seront prises contre tout individu

18 désobéissant aux ordres."

19 Q. À la fin, il est dit à tous les membres des unités. Je

20 cite : "Informer tous les membres des unités de l'existence de cet ordre."

21 Donc, votre tâche consistait à informer chaque soldat, n'est-ce pas ?

22 R. Les soldats et les Groupes de combat, également, les groupes qui

23 étaient sur le terrain. Tous les soldats jusqu'au dernier devaient être au

24 courant de cela.

25 Q. Merci, mon Général.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je suppose que je n'ai

27 pas besoin de demander le versement au dossier de ce document maintenant,

28 puisque vous avez dit qu'il serait versé au dossier, qu'il serait admis.

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1 Donc, nous n'avons peut-être besoin de poser la question pour chaque

2 document, séparément.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Précisément.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais que Me Kay ou

5 M. Nice vérifie si c'est bien une pièce identique à la pièce D300, 104. Si

6 oui, nous perdons notre temps en ce moment.

7 Veuillez poursuivre Monsieur Milosevic.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. C'est un document que le général Krsman Jelic a obtenu -- a reçu. On le

10 constate à la lecture de ce document. On voit le sceau de sa brigade qui

11 figure sur la page. Il est mentionné également le commandement de la 243e

12 Brigade mécanisée. Il a reçu ce document, le 7 août 1998. Donc, c'est un

13 document qui lui est personnel.

14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que le général Jelic avait reçu

15 le même ordre du général Pavkovic.

16 Veuillez poursuivre, Monsieur Milosevic.

17 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est tout à fait certain, Monsieur Kwon. Tous

18 les commandants de brigade obtiennent les mêmes ordres du Corps d'armée

19 dont ils dépendent. Cependant, nous avons ici un document dans lequel il

20 est dit que la -- dans lequel il est dit qu'il est adressé à la 243e

21 Brigade et c'est en cela qu'il se distingue du document émanant de

22 Pavkovic, tout en allant dans le même sens, bien entendu, du point de vue

23 du contenu.

24 M. MILOSEVIC : [interprétation]

25 Q. Mon Général, à l'intercalaire 4, nous voyons qu'un ordre est donné par

26 le Corps de Pristina. Nous sommes déjà en septembre 1998. Que lit-on dans

27 le premier paragraphe, je cite : "Depuis quelques jours, la situation au

28 Kosovo-Metohija s'est considérablement compliquée en raison de pressions

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1 constantes de la part des terroristes Siptar sur la population civile qui

2 empêche celle-ci de retourner dans les zones habitées. C'est pourquoi un

3 grand nombre de civils continue à s'abriter dans les bois."

4 Est-ce que c'était bien la situation qui régnait, à ce moment-là ?

5 R. Oui.

6 Q. Vous avez pu le constater personnellement ?

7 R. Oui. C'est exact. Une grande partie de la population avait fui ces

8 foyers en raison des actions menées par les territoires Siptar et, compte

9 tenu de l'appréciation de la situation faite sur le terrain, le commandant

10 du Corps d'armée dit ce qui est écrit ici, à savoir : "Que la population

11 civile semble être utilisée à des fins de protection par les terroristes

12 Siptar et que tout est fait pour l'empêcher de quitter les zones de combat

13 à temps. Les terroristes Siptar se changent -- changent de vêtements et

14 fuient la région en même temps que la population civile ou sous sa

15 protection se rendent au MUP. Les médias et quelques journalistes évoquent

16 une théorie qui concerneraient la population Siptar et essayent de lever

17 l'opinion publique mondiale afin qu'elle fasse pression sur la République

18 fédérale pour que celle-ci mette un terme à ses actions antiterroristes

19 contre les bastions du terrorisme, et ce, prétendument pour empêcher une

20 catastrophe humanitaire. L'armée yougoslave et la police s'efforcent

21 d'apporter toute l'aide nécessaire à la population réfugiée pour lui

22 permettre de rentrer dans ces foyers. Dans certains villages, la population

23 est déjà largement revenue avec l'aide du MUP et des forces de l'armée

24 yougoslave."

25 Compte tenu de ce qui précède, le commandant du Corps d'armée ordonne, je

26 cite : "À tous les commandants, de prendre les mesures nécessaires pour

27 empêcher tout endommagement dans les secteurs où vit la population civile

28 jusqu'au départ de celle-ci et jusqu'à qu'elle ait trouvée une solution à

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1 son problème. Tout en poursuivant la mise en œuvre des mesures ordonnées

2 précédemment par le commandement du Corps de Pristina."

3 Un peu plus loin, nous lisons : "Prendre toutes les mesures pour découvrir

4 à temps les secteurs où la population civile se regroupe avant de quitter

5 la région et veiller à ce qu'elle reçoive toute l'aide nécessaire pour

6 aller vers des secteurs sûrs et lorsque les problèmes ont cessé, organiser

7 le retour de ces populations dans ses foyers."

8 Q. Oui.

9 R. Paragraphe 3 --

10 Q. Donc, il faut assurer l'alimentation et les soins médicaux. C'est ce

11 qui est dit, n'est-ce pas, dans ce paragraphe ?

12 R. Oui. Au paragraphe 5, nous lisons, je cite : "Tous les commandements

13 prendront les mesures nécessaires et donneront les ordres nécessaires pour

14 organiser la population civile, protéger ses biens et empêcher tout vol,

15 tout pillage. Au cas où l'ordre ci-dessus serait violé, prendre toutes les

16 mesures nécessaires contre les personnes en infraction et les envoyer

17 immédiatement au commandant supérieur."

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que ce

19 document n'est pas déjà une pièce à conviction dans ce procès ?

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour vous dire la vérité, je ne sais pas parce

21 que le général Delic a produit certains documents relatifs au Corps

22 d'armée, mais ce document constitue le lien avec le général Krsman Jelic,

23 compte tenu de ce qui figure à l'intercalaire 5. Il n'a, en tant que tel,

24 jamais été versé au dossier jusqu'à présent. Il n'a pas encore été admis --

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais si ce document est déjà une pièce

26 à conviction, quelle utilité y a-t-il à faire perdre le temps du témoin à

27 lire ce document. Il contient exactement les mêmes informations que celui

28 du général Delic. Donc, ce n'est pas simplement une perte de temps, c'est

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1 un gaspillage du temps de la Chambre.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passez directement au paragraphe 5. Le

3 paragraphe 4, me semble identique à celui que l'on trouve à l'intercalaire

4 136 de la pièce D300.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Qu'est-ce que nous lisons à l'intercalaire 5, mon Général ? Est-ce un

8 ordre que vous avez signé ? Que trouvons-nous à l'intercalaire 5 ?

9 R. C'est un document émanant de moi. C'est un ordre que je donne qui porte

10 sur l'interdiction de l'emploi d'équipements de combat. C'est un ordre. Je

11 l'ai écrit et adressé au commandement du Groupes de combat 1 et 2, et du

12 Bataillon de Police militaire qui m'étaient subordonnés. Il se lit comme

13 suit, je cite : "Compte tenu de la complication actuelle de la situation

14 sur le plan politique, du point de la sécurité, la présence constante des

15 Nations Unies --

16 Q. Vous ne devez pas citer l'intégralité du paragraphe, mais vous dites

17 ici, au paragraphe 2, au début, je cite : "En vertu de l'ordre strictement

18 confidentiel du Corps de Pristina…" et cetera, le numéro n'a guère

19 d'importance.

20 R. En effet.

21 Q. Du 3 octobre 1998 et d'un ordre d'application de la mesure de rentrer

22 dans les casernes des troupes de la République de Serbie et sur la base de

23 l'ordre du président de la RFY, j'émets l'ordre suivant, les unités doivent

24 donc quitter -- rentrer dans leurs casernes.

25 R. Oui.

26 Q. Que dites-vous ensuite ?

27 R. Je dis : "J'ordonne : J'interdis strictement, dans le village, de chars

28 et de canons autopropulsés hormis en cas d'attaque directe sur les

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1 installations militaires."

2 Au paragraphe 2, je cite : "Enquêter de façon approfondie sur toute

3 infraction à cet ordre et sur les circonstances qui ont conduit à l'usage

4 des armes ci-dessus mentionnées et demander des comptes aux personnes en

5 infraction."

6 Q. Merci, mon Général. J'aimerais vous demander une explication. A la

7 lecture de cet ordre, il semble qu'il s'appliquer surtout le territoire du

8 Kosovo-Metohija, les troupes rentrent dans leurs casernes, et en fonction

9 de cet accord, quelques Groupes de combat demeurent à l'extérieur mais où ?

10 R. Dans le secteur de Kosovo-Metohija, trois Groupes de combat sont

11 demeurés sur place : Lapusnik, Dulje, et un troisième. Dans ma brigade, le

12 Groupe de combat concerné était celui de Dulje.

13 Q. C'est le Groupe de combat qui se trouvait dans la région, conformément

14 à l'accord conclu, lorsque l'armée est rentrée dans ces casernes. Donc, en

15 1998 et 1999, ces Groupes de combat étaient toujours sur place.

16 R. Ils y sont restés jusqu'au 15 juin 1999.

17 Q. La présence de ce groupe a été établie sur base d'un accord avec

18 l'OSCE, n'est-ce pas ?

19 R. Oui, et approuvé par celle-ci, du point de vue de son importance

20 numérique. La mission fondamentale consistait, comme je l'ai déjà dit, à

21 défendre les routes et à escorter les convois militaires de Stimlje à Dulje

22 -- ou plutôt, en direction de Dulje vers Suva Reka, et d'assurer

23 l'ouverture de la route. Une route sûre jusqu'à Prizren, parce que le 14

24 juin et jusqu'à la fin du mois de juillet, cette route avait été coupée

25 pendant un mois et demi, en raison de l'action des forces terroristes

26 Siptar. Pour empêcher que ceci ne se reproduise à l'avenir, le Groupe de

27 combat est demeuré sur place et c'était sa mission fondamentale.

28 Q. Très bien, mon Général. Pendant toute cette période, en 1998 et 1999,

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1 jusqu'au début de la guerre, et je ne parle pas de la période qui a suivi,

2 quelle a été la composition qui est restée stable sur le plan numérique,

3 quels ont été les effectifs de cette unité ? Combien d'hommes comptait-

4 elle ? Montrez-nous où elle était stationnée ?

5 R. Ce Groupe de combat était stationné --

6 Q. Ce Groupe de combat de Dulje, quels étaient ses effectifs numériques ?

7 R. Les trois Groupes de combat avaient chacun les effectifs d'une

8 compagnie, c'est-à-dire, 150 hommes.

9 Q. C'était un nombre fixe, n'est-ce pas ?

10 R. Ces effectifs ont été fixés -- le nombre d'hommes était fixé, ainsi que

11 le nombre d'équipement de combat. Le nombre de blindés transport de

12 troupes, de char était établi de la façon la plus stricte qui soit, mais,

13 sa localisation, son endroit, son lieu de stationnement n'était pas

14 toujours fixe. Ce groupe était basé à Dulje, mais avait pour mission de se

15 déplacer en fonction de la nécessité d'assurer la sécurité sur la route,

16 donc, les véhicules se déplaçaient sur la route de Dulje, Suva Reka et à

17 Prizren.

18 Q. Ce qui veut dire que les membres du Groupe de combat escortaient les

19 convois pour passer par les gorges, et revenaient à leur base, ensuite.

20 R. Ce Groupe de combat était divisé en deux sous groupes. L'un se trouvait

21 à Stimlje, où il avait un certain nombre de véhicules. Ces véhicules

22 motorisés escortaient de temps en temps les véhicules autopropulsés, les

23 Praga, et autres, mais nous étions entraînés, comme toutes autres unités,

24 dans ces Groupes de combat. Nous utilisions des véhicules de combat et des

25 équipements lourds également. Il y avait un sous groupe qui était stationné

26 à Stimlje et un autre au sud de Dulje, à deux kilomètres environ, dans le

27 secteur de Birac, entre Dulje et Suva Reka.

28 Q. Mon Général, pendant que nous traitons de cette carte, j'ai oublié de

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1 demander le versement au dossier de cette carte, intercalaire 1. Je vous

2 demande quelle est la date de cette carte ?

3 R. Mars 1999.

4 Q. C'est une carte de l'époque qui porte sur votre zone de responsabilité

5 et montre la disposition au combat de vos forces.

6 R. Exactement. C'est un extrait d'un ordre du commandant du Corps de

7 Pristina.

8 Q. Merci, mon Général.

9 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai oublié de demander le versement au dossier

10 de cet intercalaire 1, cette carte, Monsieur Robinson. Nous avons commencé

11 l'interrogatoire ce matin avec cette carte. Le témoin a dit qu'il y a

12 toutes sortes d'emplacements sur cette carte, donc, j'en demande le

13 versement.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, elle est admise.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. A l'intercalaire 6, on trouve l'ordre du chef d'état-major du Corps de

17 Pristina qui concerne quoi, exactement ? Veuillez lire ce texte, je vous

18 prie.

19 R. Nous sommes déjà au mois d'octobre. Certaines unités utilisent certains

20 bâtiments. Notre état-major dans cet ordre, interdit l'utilisation de

21 bâtiments appartenant à des personnes privées, et ordonne --

22 Q. Bien. Cela c'est ce que l'on trouve dans l'ordre du Corps d'armée à

23 l'intercalaire 7; cependant, on trouve un ordre émanant de vous.

24 R. Oui.

25 Q. Ne perdons pas notre temps avec l'ordre du commandement du Corps

26 d'armée, et veuillez nous dire ce que contient l'ordre émanant de vous.

27 R. Sur la base de l'ordre de l'état-major du Corps d'armée, j'ai émis un

28 ordre signé par moi, qui était adressé au groupe relevant de mon autorité

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1 sur le terrain, donc, le 1er Bataillon mécanisée qui se trouvait à Dulje, et

2 la police militaire.

3 Paragraphe 1, je cite : "Abandonner immédiatement les maisons meublées au

4 cas où elles auraient été utilisées."

5 Q. Au cas où elles auraient été utilisées, par conséquent, il fallait que

6 les hommes les quittent, n'est-ce pas ?

7 R. Oui. Au paragraphe 2, je cite : "Laisser sur place tous les biens

8 privés trouvés dans les maisons. Il est interdit de les sortir de ces

9 maisons."

10 Paragraphe 3, je cite : "Affecter les unités à des lieux d'habitats, à des

11 lieux de logements, situés dans des bâtiments qui sont la propriété de

12 l'Etat. Les installations privées non meublées peuvent être également

13 utilisées en cas de nécessité."

14 Ensuite, j'ordonne aux commandants du 1er et de 3e Bataillons de me rendre

15 compte directement de l'application de cet ordre.

16 Je dois dire que mes Unités de Dulje et le Bataillon de la Police militaire

17 étaient logés dans des installations militaires, donc propriétés de l'Etat.

18 En fait, à Dulje, nous avions déjà un bâtiment dont la construction était

19 presque terminée, et c'est là que stationnait le 1er Bataillon, quant au 3e,

20 il était stationné dans une usine propriété de l'Etat.

21 Q. Merci, mon Général. Donc, vous avez rapidement parlé de ces documents

22 relatifs à 1998.

23 Maintenant, nous abordons 1999 dans votre déposition, à la fin de 19989, je

24 vous demande ce que vous saviez de l'UCK et les informations dont disposait

25 l'armée au sujet de l'UCK ? Quelle était la nature de l'organisation en

26 Unités de l'UCK, à cette époque-là ? Pouvez-vous nous le dire assez

27 rapidement ?

28 R. J'ai déjà parlé de l'organisation de l'UCK : jusqu'au mois de juin,

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1 l'UCK était organisée en petits groupes de trois à cinq, et éventuellement,

2 dix hommes. Elle s'occupait de pillage, éventuellement enlèvement de

3 personnes, de viol, et meurtre, et cetera. Au cours du deuxième semestre

4 1998, malheureusement, les effectifs de l'UCK ont augmenté, l'UCK s'est

5 dotée de toutes sortes d'armes en provenance d'Albanie et fait partie de

6 Macédoine. Je peux vous dire, que sur notre frontière, et ce, uniquement

7 jusqu'au mois de juin, nous avons saisi à peu près 70 fusils automatiques,

8 la plupart de fabrication chinoise; 90 pistolets environ; plusieurs

9 dizaines de milliers de munition de divers calibres; plusieurs kilos de

10 drogues narcotique; de nombreux articles médicaux; et plusieurs tonnes, une

11 cinquantaine, en fait, de divers produits qui étaient passés en fraude par

12 la frontière en provenance principalement de la Macédoine occidentale pour

13 entrer au Kosovo-Metohija. Ceci nous a indiqué que ces groupes étaient en

14 train de s'armer de mieux en mieux, de s'organiser de mieux en mieux. Mon

15 commandement supérieur m'a apporté également des informations à ce sujet,

16 comme l'on fait les unités sur le terrain, les services de Sécurité de

17 l'Etat et le MUP. Nous avons appris que ces groupes se constituaient en

18 garde villageoise avant tout avec des effectifs variables d'un village à

19 l'autre et de l'endroit où se trouvaient ces villages. Cette disposition

20 concernait principalement les villages de montagne où l'UCK a créé des

21 brigades.

22 Dans ma zone de responsabilité se trouvait ce que l'UCK appelait la

23 zone opérationnelle de Nerodimlje et il s'y trouvait trois brigades, la

24 161e qui était stationnée au sud de Stimlje à Rance, Vranje, Racak, dans

25 ces villages. La 2e Brigade de l'UCK était la 162e qui se trouvait dans le

26 secteur de Kacanik, qui tenait la route allant de Kacanik à Djeneral

27 Jankovic, de Kacanik à Globocica. La 3e Brigade de l'UCK était la 163e qui

28 était mobilisée partiellement, donc, partiellement organisée, et qui était

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1 stationnée dans le sud de Vitina. Ces brigades comptaient au total

2 1 000 à 1 500 hommes. Au fil du temps, les effectifs n'ont cessé de

3 croître, dès lors nos soldats sont entrés dans leur caserne et que s'est

4 modifié un petit peu l'étendue du terrain tenu par nous.

5 Donc, au fur et à mesure de ces changements chez nous, leur rang

6 grossissait. Les rangs de l'UCK. L'action de l'UCK prenait principalement

7 pour cible les autorités de l'Etat, l'armée et la police. Compte tenu du

8 fait que la majorité de la population de la région se composait de

9 personnes d'appartenance ethnique albanaise, l'UCK a fait pression y

10 compris sur ces Albanais en mobilisant la population de force. Elle a fait

11 entre autres en distribuant des armes à cette population. Nous avons appris

12 que plusieurs centaines de personnes ont été tuées dans cette période. Que

13 la majorité de ces personnes était des Albanais qui avaient refusé de

14 répondre aux ordres de mobilisation venant de l'UCK.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, votre explication

16 était suffisamment longue. Il est temps pour M. Milosevic de vous poser une

17 question.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation] Très bien.

19 Q. Mon Général, il y a un instant vous avez indiqué où était

20 stationné votre Groupe de combat. Ce Groupe de combat qui avait des

21 effectifs égaux à ceux d'une compagnie. En fait, je parle du Groupe de

22 combat de Dulje. Vous, vous le dénommez, autrement, dans votre jargon

23 militaire, mais je l'appellerais Groupe de combat de Dulje. Vous avez

24 montré où se situent les localités où ce Groupe de combat était stationné

25 successivement depuis octobre 1998, d'ailleurs vous avez dit qu'il s'y

26 trouvait déjà avant octobre 1998. Mais est-ce que ce Groupe de combat se

27 trouvait physiquement loin de Racak qui fait partie des villages que vous

28 venez d'énumérer à l'instant ?

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1 R. Le commandement du Groupe de combat se trouvait à une quinzaine

2 de kilomètres de Racak. Son sous groupe se trouvait comme je l'ai dit tout

3 à l'heure à Bihac, c'est-à-dire, au sud de Dulje à deux ou trois kilomètres

4 au sud, ici, voyez-vous. L'autre sous groupe dans le secteur de Stimlje,

5 plus précisément dans celui de Canovica. C'est juste au-dessus de Stimlje à

6 une hauteur de 500 mètres environ, sur la route menant de Stimlje à Trnjevo

7 et à Dulje.

8 Q. A vol d'oiseau, quelle distance de Racak ?

9 R. A vol d'oiseau à peu près un kilomètre.

10 Q. Puisque ceci se trouvait dans la zone de responsabilité de votre

11 brigade, je vous demande si en dehors du groupe qui était stationné à cet

12 endroit il y avait d'autres groupes, d'autres unités militaires à ce même

13 endroit, c'est-à-dire, à Racak ?

14 R. Non. Mais j'aimerais bien m'expliquer. Il peut arriver de temps en

15 temps que ces effectifs grossissent ou diminuent compte tenu du passage, et

16 donc, du séjour temporaire d'un certain nombre de véhicules qui passaient

17 sur la route et qui s'arrêtaient à cet endroit pour effectuer un certain

18 nombre de contrôle.

19 Q. Oui, mais enfin, ce n'était pas des hommes qui restaient sans place de

20 façon permanente.

21 R. Non, je l'ai déjà dit; c'était des effectifs, des soldats qui passaient

22 pour effectuer un certain nombre de contrôle sur ordre d'ailleurs pour voir

23 si tout se passait bien. Lorsqu'ils étaient satisfaits et cela a toujours

24 été le cas, ils se retiraient. Le nombre de ces hommes venus inspecter

25 variait et donc grossissait les effectifs sur place.

26 Q. Nous avons entendu un certain nombre d'allégations qui figurent dans ce

27 qu'ils appellent ici l'acte d'accusation, au paragraphe 63(a) -- ou plutôt,

28 66(a), où il est question d'événement survenu à Racak, municipalité de

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1 Stimlje. Puisque vous êtes le seul qui aviez sous vos ordres une unité qui

2 se trouvait au voisinage de cet endroit, que pouvez-vous dire des

3 événements survenus à Racak le 15 janvier ?

4 R. Le 14 janvier, enfin le chef du MUP, Bogoljub Janicevic qui est venu

5 témoigner déjà ici, m'a informé ce qu'il était advenu de ces forces qui

6 effectuaient, qui régularisaient qui réglaient la circulation sur la route

7 menant d'Urosevac à Stimlje. Trois jours auparavant trois policiers avaient

8 été tués sur cette route. Donc les forces du MUP ne cessaient de s'activer

9 pour découvrir les auteurs de ces meurtres. Les sources d'information, les

10 personnes qui travaillaient pour le service de Sécurité de l'Etat avaient

11 appris au chef du MUP que dans la région de Racak au sens large du terme,

12 c'est-à-dire, depuis Racak jusqu'à Malapoljce, donc, secteur au sens large,

13 il y avait un groupe terroriste qui était en action, à savoir certains

14 éléments de l'une des brigades dont j'ai parlé tout à l'heure, de ces

15 brigades dont j'ai parlé tout à l'heure.

16 Le 14 janvier, le chef du MUP m'a appelé à venir dans son bureau pour

17 m'apprendre le plan qui avait été mis en place sur la base des informations

18 recueillies au sujet de l'ennemi. Il m'a également dit qu'il avait reçu

19 l'autorisation de mettre en œuvre ce plan destiné à écraser les groupes

20 terroristes. S'il m'a invité dans son bureau c'était pour me faire savoir

21 qu'au voisinage proche de l'endroit où se trouvait l'Unité du MUP, à 500

22 mètres à peine de cette unité se trouvait une partie de mes forces sur la

23 route dont j'ai parlé tout à l'heure. Il m'a dit donc que la police allait

24 commencer son action aux premières heures de la matinée le lendemain, de

25 façon à ce que je puis en informer mes hommes.

26 Le lendemain, tôt dans la matinée, aux premières heures du matin, je

27 pense que c'était aux environs de 3 heures 00 du matin, la police a dressé

28 ses première barricades et aux environs de 7 heures 00 du matin la route

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1 était totalement bouclée et la recherche des terroristes a commencé. A

2 partir du moment où ont été tirés les premiers coups de feu, c'est-à-dire,

3 aux environs de 8 heures 00 du matin, ma brigade a ouvert le feu également

4 enfin ce n'était pas ma brigade c'était le Groupe de combat dépendant de

5 moi.

6 Q. Très bien. Mon Général, j'aimerais maintenant vous demander de jeter un

7 coup d'œil à ce document qui peut être placé sous le rétroprojecteur. C'est

8 une carte mais elle n'a pas une taille trop importante. C'est une carte au

9 1 : 12 500.

10 On y voit Racak, n'est-ce pas ? Est-ce que vous pouvez montrer ce que vous

11 voyez en haut de la carte ?

12 R. Oui, c'est bien la carte où on voit Racak et allait bien au 1 : 12 500.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Laissez la carte sur le rétroprojecteur,

14 Monsieur l'Huissier. Le témoin vous nous apporter un certain nombre

15 d'explications.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Mon Général, avant de regarder la carte, je l'ai placé à cet

18 endroit de façon à ce que vous puissiez nous fournir une explication à

19 propos de ces événements. Auparavant, vous avez apporté un document qui est

20 daté du 9 janvier 1999. Il se trouve à l'intercalaire numéro 8. Il s'agit

21 d'un ordre qui a été donné par vous et je crois qu'il faut que vous gardiez

22 par devant vous le document précédent. Donc, ce document-ci est daté du 9

23 janvier 1999, à savoir six jours avant Racak.

24 R. Très bien. C'est bien mon document et la date est exacte.

25 Q. Il y a votre signature. C'est donc votre ordre. À quoi cet ordre fait-

26 il référence ? On parle de surveillance des activités.

27 L'INTERPRÈTE : Pourrions-nous avoir un numéro de référence, s'il vous

28 plaît ?

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous faut une référence, Monsieur

2 Milosevic.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Intercalaire numéro 8. Je l'ai déjà dit,

4 Monsieur Robinson.

5 M. NICE : [interprétation] Le paragraphe 5.

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] 5.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'intercalaire 8,

8 point 5.

9 M. LE JUGE KWON : Point numéro 5, la deuxième page en anglais.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Effectivement, nous l'avons

11 retrouvé. C'est au point numéro 5, intercalaire numéro 8.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Que dit cet ordre, très brièvement ?

14 R. Il s'agit de maintenance et d'assurer la préparation au combat. Je

15 donnais sans cesse des ordres. Je donnais au moins un ordre par mois pour

16 m'assurer que la préparation au combat soit tout à fait efficace, étant

17 donné la situation, étant donné les tâches qui étaient les nôtres et étant

18 donné les tâches qui allaient nous être données à l'avenir. Vous avez dit :

19 "Qu'il s'agissait de surveiller les activités des forces qui devaient

20 assurer le contrôle de la frontière et qu'il s'agissait de contrôler les

21 secteurs et la région de votre zone de responsabilité et clairement

22 surveiller les activités des forces terroristes Siptar."

23 Il est vrai qu'une partie de notre unité devait s'assurer du contrôle de la

24 frontière. Il fallait, à ce moment-là, prêter maintes fortes aux unités qui

25 se trouvaient sur la frontière et qui étaient stationnées ou cantonnées

26 tout le long de la frontière. Il fallait, évidemment, que la préparation au

27 combat soit forte car nous avions des Unités d'Intervention qui faisaient

28 parties de nos troupes et ces Unités d'Intervention devaient toujours être

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1 prêtes.

2 Q. Autrement dit, vous aviez l'obligation d'être sur le qui-vive sans

3 arrêt. Il vous fallait surveiller sans cesse la conduite et les actes de

4 sabotage éventuel des forces terroristes. Il fallait répondre promptement.

5 R. Oui.

6 Q. Il fallait assurer la sécurité tout le long de la frontière et il

7 fallait que tous nos hommes soient prêts à combattre comme les unités qui

8 se trouvaient à Dulje. Ceci s'appliquait à toutes les unités de la brigade,

9 toutes les unités qui étaient investies d'une mission.

10 R. Oui, toutes les unités de la brigade qui se trouvaient dans la région

11 en question.

12 Q. Le 11 janvier, il y a un autre ordre ici qui est donné par vous et qui

13 parle de quoi ?

14 R. Il s'agit d'assurer la sécurité le long de la frontière de l'État et

15 cette frontière était une frontière que l'on pouvait traverser facilement.

16 Il fallait véritablement que cette frontière soit une frontière que l'on ne

17 puisse pas traverser. Il fallait donc que la préparation au combat soit

18 renforcée. Il fallait que les gens, les hommes soient prêts à intervenir

19 étant donné que les unités se trouvaient engagées ici : "Dans la

20 planification, l'application et la mise en œuvre de systèmes tactiques. Il

21 fallait surveiller différents organes, qu'il fallait que la responsabilité

22 de tout à chacun soit augmentée de temps et il fallait répondre à toutes

23 les menaces éventuelles."

24 Un peu plus tard : "Il fallait augmenter le service. Il fallait renforcer

25 le système de renseignements ainsi que tout appui logistique car sans appui

26 approprié, nous ne pourrions pas remplir ou mener à bien notre tâche.

27 Ensuite, il fallait que la préparation au combat ainsi que soit augmentée

28 de temps. Il fallait organiser des opérations coordonnées. Il fallait que

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1 la frontière soit tenue et surveillée."

2 J'ai moi-même, au paragraphe 2, je me suis assigné une tâche qui

3 consistait à considérer que la sécurité le long de la frontière était une

4 tâche prioritaire et je devais m'assurer que les commandants des Groupes de

5 combat, ainsi que tous les commandants des différentes unités, consacrent

6 deux tiers de leur temps aux questions de sécurité. Il fallait organiser

7 différents -- il fallait répondre aux besoins des différents groupes. Il

8 fallait véritablement assurer la sécurité le long de la frontière et il

9 fallait que ceci soit conforme aux différentes missions --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que nous en avons

11 entendu parler suffisamment. Nous avons suffisamment entendu parler de la

12 préparation au combat.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson.

14 M. MILOSEVIC : [interprétation]

15 Q. Donc, à l'intercalaire numéro 10, on constate qu'il s'agit de votre

16 ordre, qui parle de la maintenance et du renforcement. Ceci est daté du 15

17 janvier 1999. Il fait état de préparatifs, de plans, afin de déceler les

18 activités de l'ennemi et des activités criminelles. Il s'agit d'améliorer

19 la performance des unités en temps de paix.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, puis-je verser les

21 intercalaires numéros 8, 9, 10, au dossier, s'il vous plaît ? Car ces

22 intercalaires portent sur les activités de l'époque.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Ceux-ci seront versés au

24 dossier.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Cette série d'ordres comprend-elle également l'intercalaire numéro

27 11 ?

28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milosevic, allez-vous revenir

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1 sur Racak ou non ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. Tout à fait. Je souhaitais simplement

3 suivre l'ordre chronologique ici.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

5 M. MILOSEVIC : [interprétation]

6 Q. Est-ce que cette série d'ordres portant sur la sécurité et la sécurité

7 le long de la frontière ? Est-ce que ceci est inclus dans l'intercalaire

8 numéro 11 ?

9 R. Oui. Nous devions également poser des obstacles dans cette zone

10 frontalière de façon à assurer la sécurité le long de cette frontière. J'ai

11 posé des obstacles aux endroits critiques comme cela m'avait été demandé

12 car une frontière ne peut jamais être physiquement, complètement

13 imperméable. Donc, il était important de poser des obstacles.

14 "2. Il faut mettre en place des barrières en posant des mines et des champs

15 de mines, en préparant des champs de mines.

16 "3. Les obstacles doivent être posés le long de routes caractéristiques,

17 par exemple, des vallées, des gorges, des ruisseaux et cetera. Ceux-ci

18 doivent être posés en mettant des barrières antichars, des obstacles

19 antichars, et cetera, des grillages en barbelés…" et cetera.

20 Q. Pourrions-nous revenir là-dessus. Pourrions revenir maintenant à la

21 séquence chronologique. Je souhaite parler de votre connaissance des

22 événements de Racak. Vous nous avez déjà dit que le chef du MUP avait prévu

23 une opération dans la région proche de l'endroit où se trouvaient vos

24 unités.

25 Q. C'est exact.

26 Q. A quel endroit précisément se trouvait votre unité ? Pour savoir

27 exactement quelle était la proximité de la région en question, pourriez-

28 vous nous l'indiquer sur la carte, s'il vous plaît ? Tout d'abord,

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1 pourriez-vous nous l'indiquer sur une première carte et ensuite sur une

2 carte plus détaillée ?

3 R. Une partie du Groupe de combat se trouvait ici. Ici, nous avons

4 Stimlje. Voyez-vous la route qui part de Stilmje à Dulje, ou plutôt,

5 Stimlje-Crnoljevo-Dulje. A la sortie de Stimlje, il y a le bois de Borovo

6 en direction des collines de Canovica.

7 Q. Je vais vous montrer la même chose maintenant sur une carte plus

8 détaillée qui se trouve sur le rétroprojecteur.

9 R. Nous avons ici la petite ville de Stimlje, la route qui traverse à la

10 gorge de Crnoljeva, en direction de Dulja et ensuite qui va jusqu'à

11 Prizren. Canovica, la colline se trouve ici, au point trigonométrique 671.

12 Ici, nous voyons une forêt, une forêt et une partie des -- à Globocica,

13 ici, vous avez le Groupe de combat qui se trouvait à l'intérieur de la

14 forêt.

15 Q. Veuillez prendre un stylo, s'il vous plaît, pour indiquer l'endroit où

16 se trouvait votre Groupe de combat.

17 R. Voyez-vous cette petite route --

18 Q. Pourriez-vous simplement faire un cercle ?

19 R. A droite de cette route --

20 Q. La seule unité qui se trouvait près de Racak.

21 R. C'était la seule Unité de combat qui se trouvait dans la région, une

22 partie du Groupe de combat, j'entends. C'était le seul endroit où il se

23 trouvait.

24 Q. Comment était composé ce Groupe de combat ?

25 R. Ce Groupe de combat était composé comme suit : il possédait trois

26 chars, trois véhicules blindés transport de troupes, trois Praga, et trois

27 BRDM.

28 Q. Ce qui représente au total 12 véhicules ?

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1 R. Douze véhicules, il est vrai, mais certains devaient se déplacer et

2 rejoindre la colonne. Evidemment, à ce moment-là il y en avait moins, mais

3 en venant de Dulja, il y avait peut-être deux ou trois véhicules

4 supplémentaires. Mais le Groupe de combat, dans sa totalité était composé

5 comme cela, il y avait des -- mais bon an mal an, ceci n'a pas changé.

6 Q. Merci.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle distance se trouvait votre

8 Unité de Racak ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] De Racak, il doit y avoir un kilomètre à vol

10 d'oiseau.

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Pourrions-nous maintenant regarder le rétroprojecteur, et regarder

13 Racak. Racak ici. On voit le Groupe de combat sur les collines de Canovica

14 et Racak se trouve ici. Pourriez-vous nous dire, mon Général, s'il vous

15 plaît, cette unité, celle que vous avez signalée avec votre stylo, cette

16 unité se trouvait là depuis le mois d'octobre.

17 R. Cette unité conformément à un accord qui avait été signé, était

18 cantonnée à cet endroit-là depuis le mois d'octobre et elle est venue en

19 avril également.

20 Q. En avril 1998, cette unité avait été placée là afin d'assurer la

21 sécurité le long des lignes de communication; c'est exact ?

22 R. Oui.

23 Q. Vous avez décrit sa composition, vous avez dit qu'on vous a dit que

24 ceci avait été organisé par Janicevic et qu'une opération à Racak se

25 préparait.

26 R. Oui.

27 Q. Vous a-t-il demandé de prendre part à cette opération ?

28 R. Non, parce que je ne me trouvais pas à cet endroit-là, on ne peut pas

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1 déployer l'armée rapidement s'il n'y a pas de plan ou d'ordre à cet effet.

2 Il y a des traces écrites envoyées par un commandant et il faut, de toute

3 façon, qu'une décision soit prise par le supérieur hiérarchique si nous

4 devions participer à une quelconque opération.

5 Q. Mais vous a-t-il demandé de lui fournir votre appui, ou d'apporter des

6 renforts si cela s'avérait nécessaire ?

7 R. Non, il ne nous a pas demandé de fournir des renforts, car il nous a

8 dit qu'il avait suffisamment d'hommes. Il y avait un groupe qui se trouvait

9 sur place et il y avait un groupe de terroristes sur place qui avaient

10 attaqué trois policiers qui allaient de Stimlje à Urosevac.

11 Q. Très bien. Ce jour-là, êtes-vous intervenu à aucun moment ? Avez-vous

12 eu l'occasion d'intervenir à Racak ?

13 R. Non, pas du tout, à aucun moment, car cela n'était pas nécessaire. On

14 ne nous a pas demandé d'envoyer du renfort ni d'apporter notre appui, car

15 bien même, nous aurions souhaité le faire, cela n'était pas possible, même

16 s'il y avait des gens qui ratissaient le terrain pour essayer de capturer

17 les terroristes --

18 Q. Mon Général, gardez ceci à l'esprit : la partie adverse prétend que

19 l'armée a pris part, ensemble avec la police, aux événements de Racak, et

20 qu'il s'agit ici d'une tentative de cacher tout ceci. Etant donné, que

21 c'était le seul Groupe de combat qui était sur place, l'emplacement duquel

22 vous avez indiqué sur la carte, puis-je vous poser cette question ? L'armée

23 est-elle intervenue de manière ou d'une autre à Racak ?

24 R. Non. Absolument pas. Ni ce jour-là, ni les jours suivants non plus. Il

25 n'y avait aucune activité à Racak depuis le mois d'avril. Il y a eu un seul

26 incident où le Groupe de combat est intervenu lorsqu'il y a eu une

27 fusillade près de Belince, dans ce village qui se trouve à 800 mètres de

28 Racak, ou à 300 à 400 mètres de cette région forestière. Il y avait une

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1 fusillade dans cette région.

2 Q. Pourriez-vous nous l'expliquer davantage ?

3 R. D'après nos travaux de reconnaissance, là ils se trouvaient ici. Ils

4 ont ouvert le feu à partir d'un canon antiaérien et on nous a tiré dessus,

5 et deux ou trois obus de mortier ont été tirés sur nous.

6 Q. Oui, on vous a tiré dessus ?

7 R. Oui.

8 Q. Mais non pas à partir de Racak.

9 R. Non, à partir de la région qui se trouve au sud de Belince. Nous avons

10 riposté en ripostant de façon sporadique. Nous attendions dix, 15 minutes

11 pour voir si on nous tirait dessus, et à ce moment-là, nous tirions à

12 partir des Praga et des mitraillettes, après quoi, tout est devenu

13 silencieux.

14 Q. Le seul moment où votre Groupe de combat a tiré, c'est lorsque ce

15 Groupe de combat a riposté aux tirs qui venaient du village de Belince --

16 ou plutôt, du sud du village de Belince.

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Mais il n'y a pas eu de coups de feu échangés à Racak; parce que Racak

19 n'a pas été pris pour cible du tout.

20 R. Non, pas du tout, car on ne le voit même pas de la région.

21 Q. Pourriez-vous nous l'indiquer sur la carte, s'il vous plaît ? Nous

22 l'indiquer précisément sur la carte.

23 R. Cela se trouve au point 637, comme vous pouvez le constater ici. Cette

24 région se trouve à une plus grande altitude que l'endroit où se trouvait

25 l'unité. Ils ont pris positions ici, les chars se trouvaient ici, j'ai

26 envoyé un ordre au commandant du corps, l'obusier se trouvait déjà ici,

27 donc ils ne pouvaient pas tirer à cette courte distance. Car ils étaient à

28 1 000 mètres.

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1 Q. Quand bien même vous auriez souhaité le faire, vous ne pouviez

2 absolument pas tirer sur Racak de l'endroit où vous vous trouviez.

3 R. Oui, oui, absolument. La seule chose que nous pouvions faire, c'était

4 entrer dans Racak.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez posée

6 une question directrice --

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur Robinson.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire la pause

9 maintenant.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de faire la pause, mon Général,

11 je souhaite vous poser une question : quelle était la date du jour où on a

12 tiré sur vos troupes ? Vous dites que c'était le 15 janvier, ou est-ce à

13 une autre occasion qu'on a tiré sur vos hommes ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'était effectivement le 15 janvier,

15 entre 8 heures et 9 heures.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque l'accusé vous pose la question

18 et vous demande de raconter brièvement les événements de Racak, vous avez

19 répondu ceci : "Le lendemain qui est le 15, je crois que c'était vers 3

20 heures du matin, dans les premières heures du matin, ils ont commencé à

21 installer les barrages, et vers 7 heures les barrages étaient terminés et

22 nous avons commencé à poursuivre les terroristes. A partir du moment où les

23 premiers coups ont été tirés, lorsque les combats ont commencé vers 8

24 heures du matin, on a tiré sur les hommes de ma brigade -- ou plutôt, mon

25 Groupe de combat."

26 Est-ce que vous entendiez par là et vous vouliez parler des tirs en

27 direction de Belince, et non pas Racak ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était des échanges de feu vers entre le

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1 village de Belince et de Racak, plus près du village de Belince.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez indiqué un point sur la

4 carte au numéro 637 --

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il ne s'agit pas ici du point de tir,

7 mais simplement un point d'élévation, c'est cela ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, c'est un point

9 d'élévation, c'est une colline qui sépare la région. Vous avez la route qui

10 se trouve en bas, vous avez la vallée et vous avez la forêt qui démarre

11 ici.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Votre unité était la seule Unité de

13 l'armée qui se trouvait dans la région de Racak, c'est exact ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, de l'armée yougoslave, c'était la seule

15 unité. Il y avait une seule unité.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20

17 minutes.

18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 39.

19 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, continuez.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Mon Général, éliminons certains points obscurs. M. Bonomy a posé la

23 question de savoir pourquoi vous aviez marqué cette cote 697 qui se trouve

24 face aux positions qui étaient les vôtres. Alors, pour ne pas que je pose

25 des questions directrices, vous avez expliqué la topographie à cet endroit.

26 Alors, pourquoi avez-vous marqué à part cet endroit ?

27 R. Il s'agit du point 637.

28 Q. Oui.

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1 R. Il s'agit d'une pente qui suit en parallèle la route et à partir de

2 quoi on ne peut voir -- partant de là, on ne peut pas voir le village de

3 Racak, mis à part le côté sud, sud-ouest. On ne peut pas le voir d'ici.

4 Étant donné que la route descend à partir de cette cote-là et que le

5 terrain ici est en contrebas, on ne peut pas voir le village de Racak.

6 Q. Bien. Mais, vous nous avez montré là, cette cote. Pourquoi ? Pour

7 montrer qu'entre les positions qui étaient les vôtres et le village de

8 Racak qu'il y avait une colline. C'est cela la raison ?

9 R. Oui. C'est cela la raison.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, vous avez dit que c'était

11 une question directrice et j'ai essayé de tirer au clair ce que le témoin a

12 déjà dit. Donc, entre les positions occupées par son unité et le village de

13 Racak, il y a cette colline-ci. Or, étant --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, laissez-le témoigner. Laissez-

15 le témoigner à ce sujet.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Mon Général, vous avez énuméré les armes qui étaient mises à la

19 disposition de l'unité à l'endroit que vous avez marqué, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que des pièces qui auraient été mises à la disposition de cette

22 unité pouvaient permettre de tirer sur Racak ?

23 R. Aucune pièce d'artillerie à partir d'ici ne saurait le cibler parce

24 qu'on a été mis en état d'alerte lorsqu'il y a eu des tirs. Le seul à

25 pouvoir tirer, vous voyez ce carrefour avec l'élargissement de la route,

26 c'était un point de contrôle permanent qui accueillait les colonnes

27 arrivant de Pristina ou d'Urosevac ou de Gnijlani pour les escorter le long

28 de la rivière Debeldelska. Alors, on pouvait tirer à partir d'ici seulement

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1 en direction de Belince et une partie vers Vrana. Donc, c'est à peu près

2 cet angle-ci qui fait quelque 15 à 20 degrés.

3 Q. Bien.

4 R. Parce que le reste ne peut pas être vu. On ne peut pas voir Belince non

5 plus. On peut voir juste les immeubles du bout.

6 Q. Oui. On peut le voir d'après la carte topographique. On peut voir les

7 écarts en altitude. Alors, le seul événement de ce jour où il y a eu des

8 tirs d'effectués, c'est comme vous l'avez expliqué en riposte à des tirs

9 vers votre unité à partir de cette colline qui se trouve à côté du 781, du

10 point 781 ou pas ?

11 R. Au sud de Belince.

12 Q. Oui. Au sud de Belince. Donc, ce n'est que là qu'on a ouvert le feu ?

13 R. Oui. Ce n'est que là qu'on a ouvert le feu et ceci moyennant quelques

14 rafales en attendant que ne cessent les tirs en direction de nos positions

15 à nous.

16 Q. Bien. Alors, est-ce que votre unité pendant cette journée-là a été

17 déplacée, du tout ?

18 R. Alors, mis à part la prise des positions en vue de la défense, chose

19 que fait toute armée lorsqu'on lui tire dessus, il n'y a pas eu déplacement

20 en dehors de ce secteur.

21 Q. Bien.

22 R. C'est ce point de contrôle resté jusqu'au bout, c'est-à-dire, les jours

23 d'après, ce point de contrôle est toujours resté là, là où il y a cet

24 élargissement de la route.

25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que ceci signifie en fait un

26 "point de contrôle," un poste de contrôle ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est un poste de contrôle. C'était

28 plutôt une patrouille qui l'a stationné là pour contrôler les déplacements

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1 des véhicules -- les véhicules militaires et escortés des véhicules

2 militaires, c'est-à-dire, assurer la sécurité militaire de ces convois

3 militaires le long de ce canyon qui a quelque 15 kilomètres de long.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais y avait-il un char à ce poste de

5 contrôle ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, pour l'essentiel, il y avait des

7 véhicules qui peuvent se déplacer rapidement, parce qu'ils sont censés

8 escorter des colonnes de véhicules. Parce qu'un char ne peut pas escorter

9 une colonne puisqu'il est plus lent que la colonne, notamment en raison des

10 caractéristiques de la route à emprunter. Alors, c'étaient des RDM et des

11 Praga qui d'habitude escortaient les convois, des BRDM.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous vouliez dire que les

13 tirs en direction de votre Groupe de combat venaient des cotes 781 et

14 autres telles qu'indiquées par le compte rendu ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cette forêt qui n'a pas de nom et c'est à

16 partir d'ici qu'on a ouvert le feu en direction des positions de mon unité

17 ou plutôt du Groupe de combat qui se trouvait dans ce secteur. On leur

18 tirait dessus à l'arme d'infanterie et au mortier.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Est-ce que dans le courant de la journée à partir des positions qui

22 étaient les vôtres, il y a des ouvertures de tirs ?

23 R. Mis les tirs en riposte de ce jour, il n'y a pas eu de tirs du tout le

24 jour d'après. Pas plus que le jour d'avant. Donc on n'a pas tiré à partir

25 d'ici. Il n'a pas été nécessaire de ce faire.

26 Q. Où étiez-vous à la date du 15 janvier ?

27 R. J'étais au QG de la brigade comme d'habitude, au commandement et je

28 m'occupais de commander les unités, à la garnison d'Urosevac.

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1 Q. Bien. Pouvons-nous, à présent, nous pencher -- mais laissez-moi

2 retrouver d'abord ce que je cherche.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

4 verser au dossier cette carte telle qu'annotée par le témoin.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien. Si vous allez la verser au dossier,

6 j'estime que c'est là une fort bonne chose.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Je vais vous dire. Général d'inscrire --

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Laissez-nous d'abord avoir une cote.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La D330, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Ce cercle, ou ce marquage que vous avez apposé pour indiquer

14 l'emplacement de votre unité, c'est une espèce de forme ellipsoïde, est-ce

15 que vous pouvez inscrire là qu'il s'agit de la position de l'unité pour

16 qu'on sache de quoi il s'agit. La position de l'unité, voilà.

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 Q. Alors, une petite flèche, maintenant dans la bonne direction. Ce que

19 vous avez annoté maintenant c'est la colline, oui, là où se trouve

20 maintenant votre feutre, c'est le secteur à partir duquel on a tiré en

21 direction de votre unité. Il faut l'inscrire, secteur de tir suite à quoi

22 vous avez riposté.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais que le Général nous indique

24 également l'emplacement du poste de contrôle.

25 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Oui, je crois que c'est tout.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Ce que vous venez d'annoter au 637, c'est la colline entre la position

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1 qui était la vôtre et le village de Racak. Je vous prie d'inscrire :

2 "Colline entre vos positions et le village de Racak" pour qu'on ne pense

3 pas que cela ait été la position occupée par votre unité, non c'est la

4 colline.

5 R. [Le témoin s'exécute]

6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Général Jelic, puis-je vous demander

7 comment avez-vous appris tout ceci. Vous avez précisé que vous étiez à

8 Urosevac, comment avez-vous été informé de ce qui s'est produit ? Comment

9 avez-vous été informé des tirs à Belince ou depuis Belince ? Comment

10 l'avez-vous su ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'armée c'est très simple. Le système de

12 commandement et d'information est très défini, très bien défini. Dès qu'il

13 y a eu des tirs, le commandant de l'unité a pris des mesures pour protéger

14 son personnel et son matériel. Cela, c'est la première des choses qu'il a

15 faite. La deuxième des choses qu'il a faite, c'est m'informer. C'est la

16 façon élémentaire de procéder.

17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous avez reçu un rapport sous

18 forme écrite ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, au téléphone.

20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui est-ce qui vous a rapporté la

21 chose ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandant du Groupe de combat numéro 1.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Savez-vous nous dire son nom ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Le colonel, à l'époque il était lieutenant-

25 colonel Djordjevic.

26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Mon Général, j'aimerais vous poser plusieurs questions maintenant au

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1 sujet d'un document qui a déjà été présenté ici par la partie adverse.

2 Etant donné que je souhaiterais en parler brièvement, j'ai, à cet effet,

3 prévu un nombre de copies suffisant pour toutes les parties présentes.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Voilà, Monsieur l'Huissier. Il s'agit d'un

5 procès verbal concernant des conversations à l'occasion d'une visite à la

6 243e Brigade. PV rédigé par le général Maisonneuve ou par l'un de ses

7 collaborateurs. D'abord, il y a son texte en version originale en anglais.

8 Ensuite, il y a une version en langue serbe.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Vous l'avez sous les yeux ?

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

12 M. NICE : [interprétation] Je ne sais pas si les Juges de la Chambre se

13 servent des dossiers liés à Racak, bien entendu, ceci est l'un d'entre eux

14 et cela figure à l'intercalaire 9 si vous êtes à la recherche de la pièce.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Nous en arriverons à cette pièce-là dans un instant. J'avance là une

18 question pour vous. Le général Maisonneuve, c'était l'un des membres de la

19 Mission de vérification. Il a été entendu ici en qualité de témoin. Il a

20 déclaré qu'après l'incident de Racak, le commandant de la Brigade à

21 Urosevac, à savoir vous-même, n'avez pas voulu le rencontrer, et il n'a

22 réussi à vous rencontrer que trois semaines plus tard, quand il a réussi à

23 obliger le colonel Kotur à vous persuader de le voir. C'est ce qu'il a

24 raconté ici le 29 mai 2005, page 5 821 du compte rendu d'audience. Est-ce

25 que ces dires sont exacts ou pas ?

26 R. A la date du 16, je n'étais pas là. J'étais absent pour des raisons de

27 service. Je n'ai pas pu rencontrer le général Maisonneuve. Il n'a pas fixé

28 un rendez-vous, et j'étais absent. Au rendez-vous suivant qu'il a demandé,

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1 j'étais sur le terrain. Pour des raisons objectives, je lui ai fait savoir

2 que je ne pouvais pas arriver à l'heure. Ce qui fait que c'est pour le

3 lendemain qu'il m'a donné rendez-vous et j'ai été présent. Lorsqu'il a fixé

4 un rendez-vous, ce rendez-vous a eu lieu, mis à part l'un des rendez-vous

5 qu'il avait demandé parce que j'étais en direction de Javor en contrebas de

6 Dulje à visiter une unité. Lorsqu'on vous donne rendez-vous dans une heure,

7 vous ne pouvez pas, avec la meilleure volonté du monde, y arriver parce que

8 c'est l'hiver, c'est le mois de janvier, ce sont des montagnes. Ce sont les

9 flancs de la montagne Sara. La neige peut y atteindre un mètre de haut, et

10 c'est la raison par laquelle on lui a fait savoir que je ne pourrais pas

11 venir.

12 Q. Il a déclaré, et Messieurs les Juges, je précise qu'il s'agit de la

13 page 5 790, il a d'abord obligé Kotur à vous persuader de la nécessité de

14 le rencontrer, et à l'occasion de cette réunion avec lui, vous n'avez pas

15 voulu confirmer que vous aviez collaboré avec le MUP à l'occasion de

16 l'opération de Racak, et vous auriez déclaré que vos effectifs n'auraient

17 pas tiré sur ce village, mais sur deux autres villages environnants. C'est

18 ce que dit le compte rendu d'audience. Vous n'avez pas voulu confirmer que

19 l'armée et le MUP était intervenu ensemble, de concert s'agissant des

20 événements de Racak. C'est ce qu'il a dit.

21 R. Je ne peux pas confirmer ce que quelque souhaiterait me voir confirmer.

22 Je ne puis confirmer que des faits. L'armée n'a pas pris part à cela. J'ai

23 confirmé qu'elle n'a pas pris part. Je ne pouvais pas confirmer qu'elle y

24 avait pris part. Il s'attendait à ce que, de ce côté-là, je dise quelque

25 chose, mais il n'y avait aucune raison, ni aucune nécessité de le faire.

26 Là, où l'armée a pris part et il y a eu, en effet, des actions conjointes,

27 là, où il y a eu des plans à cet effet et des ordres à cet effet, je n'ai

28 pas évité de dire la vérité. Mais lui, il a voulu le contraire. Il faut

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1 prouver la chose par des arguments. Les arguments disent que l'armée n'est

2 pas intervenue ici, elle n'avait pas de planning à cet effet, elle n'a pas

3 reçu d'ordre, donc, elle n'a pas pu être utilisée à cet effet. Vous

4 n'ignorez pas le fait que l'armée ne pouvait intervenir que si elle était

5 directement attaquée et si sa sécurité était mise en péril. C'est là

6 qu'elle prend des mesures et qu'elle entreprend des actions, pas autrement.

7 Pour ce qui est maintenant de M. Kotur, je vais dire que

8 M. Kotur ne pouvait ni me donner des ordres ni me convaincre.

9 M. Kotur était l'adjoint du président de la Mission de vérification qui se

10 trouvait entre notre Corps de Pristina et les vérificateurs. Il n'avait pas

11 le droit de donner des ordres. Son rôle consistait à procéder à des

12 échanges d'expérience, à présenter les requêtes de la part de l'armée. Mais

13 tout ce passait par le biais de nos officiers de liaison et non pas par le

14 biais des commandants, mais par des officiers de liaison, disais-je, et

15 ensuite par le biais du général Loncar auprès des vérificateurs, parce que

16 dans l'armée il n'y a pas un double commandement, il y a un commandement

17 unique.

18 Q. Bien. Il a également dit que les patrouilles de la Mission de

19 vérification se trouvaient sur les collines aux alentours de Racak, et que,

20 de là, ils ont observé les opérations. Ils ont vu, ont-ils dit, des chars

21 de l'armée de Yougoslavie qui auraient ouvert le feu en direction des

22 maisons. Il précise qu'on habitait dans ces maisons parce qu'on voyait une

23 fumée s'échapper des cheminées.

24 R. Si l'on voit la position où ils se trouvaient, je dirais que les chars

25 ne sont pas entrés dans Racak, ils ne sont sortis du campement. Un tir de

26 char cela s'entend très bien, et on ne peut pas s'y tromper et on ne peut

27 pas le camoufler non plus. S'agissant de ce secteur-là, là où les chars se

28 trouvaient, il n'y avait aucune chance, pas la moindre des chances ne

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1 serait-ce que théorique, de tirer. On pourrait tirer à moins 5 degrés

2 jusqu'à plus 32, donc, on ne peut pas tirer sur une colline qui se trouve à

3 500 ou 600 mètres au-delà, pour atteindre une agglomération. Donc l'armée

4 n'a pas ouvert le feu à partir des chars qu'elle avait.

5 Q. Tirons aussi autre chose au clair toujours à ce sujet.

6 M. Maisonneuve, après les événements de Racak, a parlé de cela, page

7 5 778, et il dit qu'il est venu vous parler et vous a demandé si vos

8 troupes étaient impliquées. "Le colonel Petrovic lui aurait confirmé que le

9 MUP avait participé à cela, ou plutôt, que c'est lui qui a réalisé l'action

10 de Racak, mais qu'il y a eu un soutien de la part des chars de l'armée de

11 Yougoslavie."

12 Pouvez-vous dire quelque chose au sujet de cette déclaration de M.

13 Maisonneuve ? S'est-il entretenu avec vous, et est-ce qu'il est exact de

14 dire que le colonel Petrovic a déclaré ce qu'il a dit ?

15 R. A cette réunion, le lieutenant-colonel Petrovic n'a pas dit les choses

16 ainsi. Il n'a fait que confirmer ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir

17 que l'armée n'est pas entrée là-bas et qu'elle n'a pas ouvert le feu. Elle

18 n'a pas eu la nécessité d'ouvrir le feu et elle n'a pas reçu des ordres

19 dans ce sens. Je précise une fois de plus, que la distance était trop

20 grande, parce que là où les forces du MUP sont entrées, il s'agissait d'un

21 secteur habité et quand bien même vous vous voudriez le faire, que par

22 volontarisme vous auriez souhaité le faire, vous n'oseriez pas ouvrir le

23 feu parce que vos unités, à savoir le MUP, se trouvaient déjà au village.

24 Ce serait donc tiré sur les effectifs qui étaient là-bas à se battre contre

25 les terroristes.

26 Q. Il a également déclaré qu'il s'est entretenu avec un officier de

27 liaison et qu'il n'a pas été content parce qu'il n'a pas pu s'entretenir

28 avec vous, et que celui-ci lui aurait dit que : "Stimlje a été traité à la

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1 Praga et couvert avec des véhicules militaires et un char, et il a compris

2 partant de là qu'il s'agissait là d'un soutien de la part de l'armée de

3 Yougoslavie." Savez-vous nous dire quoi que ce soit au sujet de cette

4 conversation ? Avec qui Maisonneuve s'est entretenu à ce moment-là et ces

5 dires sont-ils exacts ou pas ?

6 R. Je ne veux offenser personne, mais ces dires sont dénués de sens.

7 Comment peut-on traiter à la Praga et aux chars Stimlje alors que Stimlje

8 est le siège des instances du pouvoir. C'est le siège de la municipalité.

9 Le MUP s'y trouve, toutes les autorités de la municipalité s'y trouvaient.

10 Vous ne voulez tout de même pas que les chars tirent sur des installations

11 où il y a les autorités, des citoyens. Stimlje n'a jamais été entre les

12 mains des terroristes à aucun moment. C'est à partir de là que le MUP

13 commandait tout ce qui se faisait au niveau des unités situées à Racak.

14 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne suis pas tout à fait

15 certain du fait qu'il y ait ou pas une confusion au niveau des documents

16 qui ont été distribués. Je suis dans la confusion, parce que l'accusé a

17 parlé du document qui vous a été distribué et qui est un procès-verbal de

18 la conversation entre ce témoin-ci et le général Maisonneuve. Le document

19 que vous avez eu tout à l'heure, c'est le PV d'une conversation avec

20 d'autres personnes, y compris Petrovic. Or, le PV de leur conversation avec

21 ce témoin-ci se trouve à l'intercalaire numéro 28 des documents Racak, si

22 vous voulez le retrouver.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, est-ce que vous

24 avez le bon document ici ?

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est l'intercalaire

27 numéro 28 ? Parce que M. Nice dit que ce témoin n'a pas pris part à la

28 conversation en question.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je souhaite à présent c'est parcourir

2 avec le témoin le document que j'ai fait distribuer.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez parler de ce document en

4 tout état de cause.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, vous voulez --

6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, parce que c'est un document très

7 important. La conversation a eu lieu avec un officier de liaison du général

8 Jelic, parce que le lieutenant-colonel Petrovic, c'est l'officier de

9 liaison de sa brigade dont il est le commandant, lui ?

10 R. Oui. C'est cela.

11 Q. Donc, peu importe s'il a participé à la conversation ou pas. Lui, la

12 conversation a eu lieu avec l'officier de liaison.

13 Général --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, vous avez probablement laissé

15 entendre que ce témoin-ci a été impliqué dans la conversation.

16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne comprends pas. Est-ce que vous

17 voulez dire que l'officier de liaison -- est-ce que vous voulez d'un

18 officier de liaison qui ne serait pas le lieutenant-colonel Petrovic ?

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'était pas le lieutenant-colonel Petrovic.

20 J'ai dit qu'il s'agissait d'un PV de la conversation avec le lieutenant-

21 colonel Petrovic qui est l'officier de liaison de Petrovic -- du général

22 Jelic et qui fait partie de la brigade placée sous le commandement du

23 général Jelic.

24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Mon Général, avez-vous sous les yeux le PV dont nous parlons ?

27 R. Oui.

28 Q. Est-ce que le lieutenant-colonel Petrovic vous a informé de sa

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1 conversation avec le général Maisonneuve et son équipe ?

2 R. Oui. Il m'a informé de la teneur de cette conversation.

3 Q. Bien. Les événements de Racak sont datés du 15 janvier. Je suppose

4 qu'on n'a pas à le confirmer. C'est notoirement connu.

5 R. Oui.

6 Q. La conversation, elle, s'est déroulée le 16. C'est ce que dit le PV ?

7 R. À 10 heures 37.

8 Q. Donc, au matin du 16 janvier, à 10 heures 37, heure locale, il y a eu

9 la conversation en question. Au PV tel que rédigé par eux, "P," c'est

10 Petrovic, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Il dit : "Le MUP a tiré sur Stimlje avec une Praga et un blindé. Je ne

13 sais pas comment ils s'en sont sortis." Est-ce que vous comprenez ce que

14 dit ici, le PV, au sujet des dires du lieutenant-colonel Petrovic ? Est-ce

15 que cela vous semble être vrai ?

16 M. NICE : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit là d'une série de

17 trois questions. Ce qui fait pour le témoin qu'il est impossible de

18 répondre. Si nous voulons savoir ce que Petrovic a dit, c'est lui qu'il

19 faut citer, parce que nous n'avons pas entendu de la bouche de l'accusé

20 partant de quoi il affirme que ce témoin-ci aurait pris part à la

21 conversation. Peut-être, y a-t-il une trace écrite ? C'est dans l'armée et

22 peut-être devrions-nous voir le rapport sur ce que Petrovic a dit à son

23 commandant ? Mais cela n'a pas été présenté ici. En réalité, la dernière

24 des questions est complètement, à mon avis, inacceptable -- irrecevable.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je ne vois

27 pas comment ce témoin peut apporter un commentaire utile au sujet de la

28 conversation entre le général Maisonneuve et le lieutenant-colonel

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1 Petrovic. Si le lieutenant-colonel Petrovic lui avait dit quelque chose de

2 particulier, le problème serait différent, voyez-vous ? Il est possible que

3 vous souhaitiez aller dans ce sens, peut-être.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est dans ce sens que je me suis engagé,

5 Monsieur Robinson, en fait. Car le lieutenant-colonel Petrovic était son

6 officier de liaison, son officier chargé des transmissions et il lui était

7 subordonné. Je parle de Maisonneuve.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Dans la mesure ou le

9 lieutenant-colonel Petrovic lui rendait compte et je crois que ce serait là

10 un domaine où vous pourriez, tout à fait, légitimement, interrogé le

11 témoin.

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Je vous demande si le lieutenant-colonel vous a informé ou pas -- si le

15 lieutenant-colonel vous a informé ou pas de la visite de Maisonneuve et de

16 la conversation qu'il avait eu avec lui ?

17 R. Oui. Il l'a fait.

18 Q. Essayons d'établir la chose suivante. Vous en a-t-il informé dans le

19 détail et à quelle heure l'a-t-il fait ? Est-ce que cela s'est passé le

20 matin du 16 comme ledit le général Maisonneuve dans ces notes.

21 R. Oui. Aux premières heures de la matinée, tôt, en tout cas, 10 heures

22 37. Comme c'est écrit dans le texte que j'ai sous les yeux, à ce moment-là.

23 Q. Très bien. Donc, dans ce PV de réunions, il est dit que ceci a commencé

24 à 10 heures 37, et --

25 M. NICE : [interprétation] Puis-je demander que l'accusé essaie de procéder

26 comme il se doit ? La bonne façon de procéder consisterait à fermer ce

27 registre et à poser une série de questions qui ne seraient pas directrices

28 au témoin de façon à établir ce qu'il en est et sur quoi se fondent les

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1 souvenirs du témoin. Si nous ne pouvons pas procéder de cette façon, aucune

2 réponse n'aura la moindre chance d'être autre chose qu'une perte de temps.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, ce qui vient

4 d'être dit est assez fondé. Il importe que vous vous efforciez de demander

5 au témoin ce que son subordonné lui a di exactement. Je pense que s'appuyer

6 sur la conversation dont vous parlez n'est pas d'une très grande utilité.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Demandez au général Jelic ce que le

8 lieutenant-colonel Petrovic lui a dit.

9 M. NICE : [interprétation] Le témoin dispose du document qui est en B/C/S.

10 Je vous le rappelle. Il l'a sous les yeux.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je demander au général Jelic si

12 le lieutenant-colonel a pris des notes lors de cette réunion.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis sûr qu'il l'a fait. Très certainement.

14 Il gardait des notes de toutes les réunions.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il vous les a transmises ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Les documents jusqu'à 1998, documents établis

17 sous la base des ordres provenant du commandement supérieur devaient tous

18 être soumis aux commandants situés plus bas dans la hiérarchie ainsi qu'au

19 Corps de Pristina. Donc, au QG du commandement à Pristina.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous répondre à la question,

21 je vous prie ?

22 Est-ce qu'il vous l'a transmis ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il ne me l'a pas transmis parce que le

24 commandant de brigade n'est pas celui qui tient ce genre de documents.

25 C'est l'administration qui garde ces documents.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, lorsqu'il vous a parlé de cette

27 réunion, il ne vous a pas transmis un exemplaire des notes prises par lui

28 durant cette réunion. Vous avez simplement entendu de sa bouche un récit

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1 oral à ce sujet.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il m'a transmis un rapport du PV dont il

3 a été donné lecture, une lecture enregistrée avant que ce PV ne soit

4 archivé.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, il aurait été, tout à fait,

6 utile que ce document soit apporté ici, n'est-ce pas ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai reçu ce document de l'accusé, Monsieur

8 Milosevic.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Merci.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'ai pas apporté --

11 M. MILOSEVIC : [interprétation]

12 Q. Je suppose que vous ne contestez pas que cette réunion avec votre

13 officier de liaison, s'est déroulée le 16 dans la matinée ?

14 R. En effet, c'est ce qui s'est passé.

15 Q. Alors, veuillez jeter un coup d'œil à la page 2 de ce document.

16 M. NICE : [interprétation] C'est exactement ce que je pensais qu'il ne

17 fallait pas -- que le témoin soit autorisé à faire.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Apparemment, vous ne comprenez pas.

19 M. NICE : [interprétation] Le témoin a le document sous les yeux devant

20 lui. Peut-être, pourrait-on l'inviter à ne pas regarder ce document. Donc à

21 le supprimer de son esprit. Mais si l'accusé n'est pas capable de poser des

22 questions, peut-être Me Kay pourrait-il se mettre debout et poser les

23 questions à sa place. Il est temps que la procédure se déroule comme il se

24 doit. Nous avons déjà perdu à peu près dix minutes.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, il importe que

26 vous demandiez au témoin s'il a eu cette conversation avec le général de

27 brigade Maisonneuve. Quel était le thème de cette conversation. Est-ce que

28 la conversation a porté sur Racak, des questions de ce genre.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, tout ce que je souhaite

2 faire c'est établir un certain nombre de faits matériels. Ce PV établi par

3 Maisonneuve est un élément factuel -- un élément matériel.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre a déjà rendu sa décision.

5 Elle ne vous autorise pas à utiliser le document en question de cette

6 façon. Donc, vous devez aborder ce document d'une autre façon.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Je vous demande si Petrovic vous a informé de la requête que lui a

10 présentée le général Maisonneuve le matin du 16 janvier ?

11 R. M. Petrovic, lieutenant-colonel m'a informé de la tenue de cette

12 rencontre. Il m'a lu le PV, le rapport établi à la suite de cette réunion.

13 Il m'en a remis un exemplaire qui a été archivé. Au cœur de cette

14 conversation se trouvait le sujet suivant, le colonel Petrovic devait

15 confirmer que l'armée avait participé à l'opération de Racak, c'est un

16 point. Deuxièmement, on lui demandait le nom des commandants pour mise en

17 accusation pour crimes de guerre à 10 h 35 ce matin-là.

18 Q. Très bien. C'est que je souhaitais entendre.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez entendu cela, Monsieur Robinson. Vous

20 avez entendu ce que le témoin a dit au sujet du document qui a été discuté.

21 Donc, maintenant, je suppose que le témoin peut utiliser ce document qu'il

22 a sous les yeux.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, nous avons déjà rendu notre

24 décision sur ce point, mais il peut vous dire ce que Petrovic lui a dit.

25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson. Mais il y a un

26 instant le témoin a déclaré que Petrovic lui avait appris que Maisonneuve

27 lui avait demandé de confirmer que l'armée avait pris part à l'incident et

28 lui avait demandé le nom des commandants pour traduction devant le tribunal

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1 de crimes de guerre.

2 J'aimerais appeler votre attention sur ce que vous avez dit au moment

3 où vous avez rendu votre décision, à savoir, puisque cela figure au compte

4 rendu d'audience, c'est vérifiable, à savoir que le témoignage de

5 Maisonneuve une fois établi permet l'utilisation du document. C'est à

6 l'avant dernier paragraphe du compte rendu d'audience.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Kay, la Chambre aimerait vous

10 confier l'interrogatoire sur ce sujet.

11 Questions de M. Kay :

12 M. KAY : [interprétation] Très bien.

13 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce que le colonel Petrovic

14 vous a dit quant au thème abordé au cours de cette réunion ? Je vous

15 demande d'aborder ces thèmes un par un. Que vous a-t-il dit au sujet de sa

16 rencontre avec Maisonneuve ?

17 R. Sur le fond, la réunion s'est déroulée chronologiquement. C'est ce qui

18 figure d'ailleurs au PV et c'est ce qu'il m'a dit. Les questions abordées

19 ont été avant tout les emplacements, les positions prises par l'armée.

20 Pourquoi est-ce que l'armée se trouvait là. L'armée était là déjà depuis

21 tout l'été, depuis l'été 1998 même avril. Que l'armée avait quitté Stimlje

22 illégalement et qu'avant cela au mois de janvier un contrôle avait été

23 effectué le 4 ou le 5 janvier. C'était le dernier contrôle établi par

24 Maisonneuve qui était venu à Stimlje vérifier la situation et c'était -- et

25 avait été satisfait des effectifs présents sur place.

26 Pourquoi l'armée se trouvait donc à Stimlje. Il a dit que l'armée était

27 arrivée illégalement. Je me souviens qu'une des grandes questions, une des

28 importantes questions était le fait de savoir si l'armée était allée à

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1 Racak. S'il y avait là une ligne de front. Donc si les hommes étaient

2 entrés à Racak et si pendant la période en question, c'était comme lui il

3 affirmait produire un crime de guerre important à cet endroit. Il a demandé

4 le nom des commandants pour savoir qui était les officiers supérieurs et

5 sous-officiers présents dans le village, censés avoir commis ce crime.

6 C'est ce que je me rappelle avoir vu par écrit dans cette aide

7 mémoire, parce que tout de même cela fait six ans que cela s'est passé.

8 Q. Je ne souhaite aucune explication, mais je vous demanderais de nous

9 dire ce que Petrovic vous a dit quant au rapport de Maisonneuve vous a fait

10 cette réunion. Sans aucune explication complémentaire. Simplement dites-

11 nous ce que Maisonneuve -- ce qu'il vous a dit de sa rencontre avec

12 Maisonneuve ?

13 R. Je ne peux pas reprendre les mots qu'il a prononcés parce que cela fait

14 longtemps qu'il l'a fait. Je ne peux pas vous dire ce qu'il m'a dit mot

15 pour mot, mais il m'a présenté les thèmes abordés qui sont ce que je viens

16 d'évoquer, donc, un certain nombre de questions auxquelles il souhaite

17 obtenir une réponse. Il a dit que l'armée n'était pas allée dans la région,

18 n'avait pas à se trouver dans la région, que l'armée était à Stimlje

19 illégalement. Que l'armée n'avait pas pénétré dans le village de Racak. Il

20 a répondu qu'il ne pouvait pas donner de nom individuel, mais qu'il ne

21 savait pas qui exactement se trouvait sur place et à quel moment. Qu'il

22 n'était pas le commandant responsable, qu'il n'était que quelqu'un qu'on

23 avait informé des faits. Qu'il n'avait vu personne se rendre sur place de

24 ses yeux et que donc il ne pouvait pas répondre et fournir d'information

25 sur ce point.

26 Voilà ce qu'a répondu Petrovic aux questions de Maisonneuve.

27 Q. Merci.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous pouvez

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1 poursuivre. Nous avons obtenu les renseignements souhaités.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, j'indique

3 qu'il convient de mettre l'accent sur un point. A l'avant dernière ligne de

4 l'original du PV de Maisonneuve en anglais, je lis, je cite : "S'agissant

5 de Petrovic, les noms des commandants sont nécessaires pour traduction

6 devant le Tribunal chargé des crimes de guerre."

7 J'aimerais appeler votre attention, Messieurs, sur le fait que Walker,

8 depuis la réunion de 10 h 37 mentionnée dans le PV de Maisonneuve, ce

9 Walker c'est seulement dans l'après-midi du 16 qu'il est arrivé à Racak et

10 a été surpris de ce qu'il prétend avoir vu, c'est-à-dire, les traces d'un

11 massacre qui aurait été commis à cet endroit. Donc, Maisonneuve, avant que

12 Walker prétend avoir découvert ce massacre et les cadavres dans le ravin --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'en sommes pas encore aux

14 plaidoiries, Monsieur Milosevic; veuillez passer à votre question suivante.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien. C'était pourtant un document très

16 utile.

17 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

18 Q. Votre unité se trouvait là-bas, mon Général. Maisonneuve a dit et cela

19 figure à la page 5 843 du compte rendu d'audience que l'armée déclarait que

20 la police était impliquée à Racak. Ce qui était évident pour l'armée car

21 les soldats pouvaient voir les policiers depuis le sommet de la colline.

22 Que durant une rencontre avec Petrovic, un officier de liaison de la 243e

23 Brigade avait déclaré que le MUP avait mené une opération avec l'aide de

24 l'armée et le déploiement au moins d'un char et de plusieurs Praga. Alors,

25 est-ce que Petrovic lui a dit que le MUP avait agi de concert ou avec le

26 soutien de l'armée.

27 R. Le lieutenant-colonel Petrovic ne m'a jamais informé de quoi que ce

28 soit de ce genre. Il n'a pas parlé de l'entrée de l'armée à cet endroit. Il

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1 n'a pas parlé d'action menée par l'armée avec le MUP à cet endroit. L'armée

2 n'avait d'ailleurs pas l'autorisation d'agir ainsi. Il n'y avait pas de

3 plan, pas d'ordre écrit à cet effet. L'armée aurait eu la possibilité de

4 voir en partie l'arrivée du MUP à Racak, parce que cela se passait juste à

5 côté de la zone de déploiement de l'armée.

6 Q. Le témoin de la partie adverse, Barney Kelly, a témoigné au sujet des

7 événements de Racak ici en disant qu'en janvier, les forces serbes ont

8 commis un massacre. Alors, votre unité était au voisinage immédiat de ce

9 secteur. Est-ce que vous avez la moindre information indiquant que ce qui

10 est dit ici est exact, à savoir que les forces serbes auraient commis un

11 massacre ?

12 R. Aucune information indiquant qu'un massacre aurait été commis. Le

13 commandant du Groupe de combat ainsi que moi-même, sur la base des rapports

14 que j'ai eus sous les yeux, n'avions qu'une sorte d'information, à savoir

15 que les forces du MUP participaient à des opérations antiterroristes et à

16 des combats avec les terroristes dans le village. Combien de blessés et de

17 morts y a-t-il eu suite à cette opération des deux côtés, nous ne le

18 savions pas, parce que nous ne disposions pas de ce genre de

19 renseignements. C'est seulement plus tard que nous avons appris des médias

20 avant tout, un certain nombre d'autres informations au sujet de pertes

21 humaines. Un certain nombre de chiffres ont été avancés dans les médias

22 dont je ne peux confirmer l'exactitude.

23 Q. Merci, mon Général. Alors, Nasret Shabani, témoin qui a été entendu

24 ici, a parlé de l'été 1998 en disant que la police et l'armée étaient sur

25 les collines surplombant Racak. Je vous demande de nous dire pourquoi la

26 police se trouvait-là. Que se passait-il à Racak ? Y avait-il eu un

27 événement particulier dans cette zone boisée ?

28 R. J'ai dit qu'une voie de circulation, une route importante menant de

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1 Stimlje à Dulje était largement utilisée pour des déplacements de matériel

2 militaire. Compte tenu de l'importance de cette route, j'en ai déjà parlé

3 d'ailleurs, pour le territoire du Kosovo, 40 % de cette route avait été

4 coupée. Tout était fait pour couper la liaison Stimlje-Dulje. Elle a été

5 coupée au cours d'une opération où six de mes hommes ont été blessés le 6

6 juin dans une colonne qui était à l'arrière de la colonne logistique censée

7 approvisionner les unités sur le terrain. A ce moment-là, la route a été

8 coupée. Un mois plus tard, grâce à une action conjointe menée par l'armée

9 et le MUP et à l'autorisation fournie par le commandement supérieur, c'est-

10 à-dire le commandement du Corps d'armée en fait, la route a été rouverte et

11 des deux côtés de la route, du côté gauche et du côté droit, des hommes du

12 MUP ont pris positions à 500 ou 700 mètres de la route à peu près, sur les

13 collines entourant la route, et des patrouilles ont eu lieu de façon

14 permanente dans ce ravin. L'armée a pris également le contrôle de ce ravin.

15 A Racak, selon les informations reçues par nous, la 161e Brigade de l'UCK

16 se trouvait-là et une partie de son commandement, c'est-à-dire 80 à 120

17 hommes --

18 Q. Vous voulez parler de Racak en tant que tel ?

19 R. Oui, à Racak précisément. Ce n'étaient pas des unités de l'UCK.

20 C'étaient des habitants à qui des armes avaient été distribuées. Ils ne

21 constituaient pas une armée en bonne et due forme qui aurait respecté les

22 règlements d'une armée. Ils agissaient simplement en tant qu'organisation

23 villageoise selon des principes tribaux. Des attaques constantes étaient

24 lancées, à partir de ce lieu, sur la route et les grandes routes du

25 secteur. L'armée et la police occupaient les collines entourant Racak, mais

26 pas Racak en tant que tel, qui se trouve plus bas dans la vallée. L'armée

27 et la police se trouvaient autour du village de Crnoljevo. C'est le seul

28 village qui se trouve dans le ravin en question, et l'armée et la police

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1 contrôlaient le ravin. Toutes les attaques étaient lancées à partir de

2 Racak, Belince, et Zborci qui se trouve plus au nord sur la route.

3 Q. Ce même témoin, Nasret Shabani, a déclaré que trois ou quatre

4 affrontements ont opposé l'armée serbe à ces hommes, et que quatre attaques

5 avaient déjà eu lieu avant les événements du 15 janvier. Ceci, est-il

6 vrai ? Est-ce que vous avez des renseignements à ce sujet ?

7 R. Je n'ai jamais entendu parler de cela et j'aurais été informé s'il y

8 avait eu des attaques à Racak de la part de la police ou de l'armée. Il est

9 possible que la police, qui travaille indépendamment de nous, bien entendu,

10 ait été à la recherche de délinquants ou de criminels et que ce soit la

11 cause de cela, mais l'armée n'a jamais pénétré à cet endroit, ni avant la

12 guerre, ni en 1998 et pas plus pendant l'année 1999.

13 Q. Y compris le 15 janvier ?

14 R. En effet. L'armée n'est jamais entrée là-bas.

15 Q. Vous dites : "J'aurais dû savoir," il y a un instant, répondant à la

16 question de M. Bonomy, que votre unité se trouvait à un kilomètre de Racak.

17 R. Oui, à peu près.

18 Q. Que cette unité se trouvait-là depuis avril 1998 jusqu'au début de la

19 guerre ?

20 R. Oui.

21 Q. Merci. Le témoin, Shukri Buja a parlé de Racak. Il a déclaré qu'en

22 décembre 1998, l'UCK a commencé à creuser et à construire des bunkers. A

23 Racak, les fortifications n'existaient pas au moment dont nous parlons.

24 Elles n'ont pas été utilisées avant le 15 janvier. Est-ce que vous avez des

25 renseignements au sujet de fortifications, où elles auraient été situées et

26 à quoi elles auraient servi ?

27 R. Nous, membres de l'armée, savions que chaque fois que les terroristes

28 se trouvaient quelque part, ils construisaient des fortifications. Mais

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1 nous n'avions pas de renseignements précis au sujet de l'emplacement de

2 celles-ci. Quand je dis "nous," je parle de l'armée. Nous ne savions pas si

3 elles avaient été utilisées auparavant, ou si elles n'ont été utilisées

4 qu'après le 15 janvier. Il est peu probable que ces hommes aient pu creuser

5 la veille du 15 janvier, compte tenu de l'altitude, du fait que c'était

6 l'hiver et que la terre était gelée. Ils ont certainement creusé durant

7 l'été, avec renforcement ultérieur de ces fortifications.

8 Q. Le même témoin a déclaré que le 15 janvier, au début de l'attaque,

9 l'UCK comptait 47 hommes à Racak.

10 R. Oui.

11 Q. Selon les informations à votre disposition, les effectifs de l'UCK --

12 R. Entre 80 et 120.

13 Q. Il a parlé de 47 hommes. Le témoin, Agron Mehmeti, a déclaré que, le 25

14 juillet 1998, une offensive a été menée contre Racak. Votre unité se

15 trouvait dans le village voisin dont vous avez montré l'emplacement sur la

16 carte. Est-ce qu'il y a la moindre vérité dans cette affirmation ?

17 R. Non, il n'y a pas eu d'action, pas d'offensive. Mais la date citée est

18 exacte. La route a été rouverte le 25 juillet. Les terroristes ont été

19 expulsés du secteur, dès lors que la route était rouverte après avoir été

20 fermée pendant un mois et demi. C'est bien, en effet, le 25 juillet que

21 nous sommes parvenus à rouvrir la route. Il est vrai qu'une opération a eu

22 lieu à cette fin, mais elle s'est déroulée à un kilomètre et demi, ou deux

23 kilomètres de Racak.

24 Q. Très bien. Nous avons ici un document émanant de vous. Général Jelic,

25 je vous demande quelle est la teneur du document qui est un rapport dont

26 vous êtes l'auteur et qui figure à l'intercalaire 17 ? Jetons un coup d'œil

27 à ce document qui constitue l'intercalaire 17. Vous êtes à l'origine de ce

28 document, n'est-ce pas ? Est-ce que vous le reconnaissez ?

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1 R. Je suis l'auteur de ce document. C'est ma signature.

2 Q. Très bien. Vous y faites état d'un certain nombre d'événements et il

3 est dit entre autres que ce rapport concerne la réalisation de NP & P.

4 R. Du plan préalable et du programme.

5 Q. Bien. Du plan préalable et du programme. Il est dit

6 que : "Le 14 janvier, dans le secteur de Dulje, une unité a réalisé…"

7 qu'est-ce que cela veut dire, TO ?

8 R. Entraînement tactique, manœuvre numéro 13.

9 Q. C'est bien cela.

10 R. Oui.

11 Q. Maintenant, je vous demande de regarder attentivement ce document.

12 C'est un rapport dont vous êtes l'auteur qui date bien du 17 janvier,

13 n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. C'est un document adressé au Corps de Pristina, au commandement du

16 Corps de Pristina ?

17 R. Oui, adressé au commandement du Corps de Pristina. C'est un document

18 original.

19 Q. Un document original qui date de l'époque, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Cette compagnie de chars a procédé à un entraînement, le 14. Nous

22 n'allons pas lire l'intégralité du document.

23 Voyons ce qui concerne la journée du 15, cette fameuse journée du 15.

24 Vous pouvez lire le texte.

25 R. Oui. "Le 15 janvier 1999, l'unité de Dulje a procédé à des

26 manœuvres régulières sur le thème peloton mécanisé en déplacement le long

27 de l'axe, cote 915, village de Levuce; cote 988, Garamela, village de

28 Rance, et retour.

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1 "Alors que les manœuvres régulières étaient en cours sur l'axe décrit

2 ci-dessus, des tirs nourris d'infanterie et de mortier ont été ouverts à

3 partir du village de Rance, (700 mètres à l'ouest Dara Glava) et à partir

4 du village de Rance en tant que tel. Nous avons riposté à l'aide d'armes

5 d'infanterie et d'un PAM de calibre 12,7 millimètres en tirant sur Dara

6 Glava et nous avons écrasé le groupe terroriste. L'unité est arrivée à 500

7 mètres du village de Rance, (cote 1 027) sans autre combat et sans autre

8 fusillade et elle est retournée sur le terrain du campement. Il a été

9 impossible d'atteindre le village de Rance en raison de la profondeur de la

10 neige (à peu près un mètre). Nous ne sommes entrés dans aucune zone

11 habitée.

12 "Nos forces n'ont subi aucune perte."

13 Q. C'est le rapport que vous avez fait pour les journées du 14 et du

14 15.

15 R. Exact.

16 Q. Où est décrite l'activité de votre unité pendant ces deux jours ?

17 R. Oui, les activités sur le terrain.

18 Q. Y compris ces manœuvres qui n'avaient rien à voir avec Racak.

19 R. Ces manœuvres correspondaient à un plan et à un horaire qui avaient été

20 approuvés, au préalable, et c'était l'application de ce plan.

21 Q. Un peu plus loin, vous parlez du MUP.

22 R. "Aux premières heures de la matinée du 15 janvier --"

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de lire ce passage, à quelle

24 heure ont eu lieu ces manoeuvres ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 14 et le 15, le rapport suit l'ordre

26 chronologique.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais à quelle heure de la journée du

28 15, tout cela s'est-il passé ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela a commencé aux environs de 8 heures du

2 matin et s'est achevé vers 3 ou 4 heures de l'après-midi.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les hommes qui ont participé à cela

4 faisaient-ils partie du Groupe de combat qui avait essuyé des tirs à

5 Belince, ou plus précisément au sud de Belince ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas tout à fait compris

7 votre question. Les hommes étaient là dans le cadre de leur service

8 militaire régulier. Nous avions quelques sous-officiers comme c'est

9 l'habitude dans ce genre de circonstances. Donc, ces hommes étaient des

10 conscrits qui faisaient leur service militaire.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Soyons tout à fait clair pour éviter tout malentendu. Les premier et

14 deuxième paragraphes concernent la journée du 14 et les manœuvres menées au

15 sein de cette unité, c'est-à-dire, le Groupe de combat de Dulje.

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que tout cela est très clair à la lecture de ce texte ?

18 R. Il est clair qu'il s'agit de manœuvres destinées à entraîner les hommes

19 au combat. L'unité n'est pas en train de participer à des combats

20 effectifs.

21 Q. Vous dites également quels sont les thèmes de ces manœuvres qui étaient

22 prévues à l'avance. Vous décrivez les différentes actions auxquelles

23 l'unité a dû participer dans le cadre de ces manœuvres, le 14 ?

24 R. Exact.

25 Q. Ensuite, vous parlez de la journée du 15. Vous dites que l'unité de

26 Dulje a participé à des manœuvres tactiques sur l'axe menant de telle à

27 telle localité. Vous citez un certain nombre de localités et la localité de

28 Dara Glava figure au nombre de ces localités qui sont mentionnées dans

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1 cette énumération. Aucune de ces localités ne se trouvant au voisinage de

2 Racak.

3 R. Elles se trouvent toutes au moins à six kilomètres de distance de

4 Racak.

5 Q. Vous décrivez la nature exacte des manœuvres auxquelles participent ces

6 hommes.

7 R. Oui.

8 Q. Qu'est-ce qui est écrit au dernier paragraphe relatif à la journée du

9 15 ?

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui m'intéresse ou ce qui

11 m'inquiète un petit peu, c'est où se trouvaient les hommes ? C'est la seule

12 chose qui m'intéresse. La réponse à ma question à consister à dire qu'il

13 s'agissait de conscrits, mais à la lecture du rapport, ceci ne semble pas

14 évident à première vue. C'est tout. C'était la seule raison pour laquelle

15 j'ai posé ma question.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Bonomy, nous lisons dans le texte. Je

17 cite : "Une Unité de Dulje." Donc, il s'agit de l'unité qui venait du

18 secteur de Dulje. Comme toute unité militaire, elle avait ses effectifs

19 d'active normaux, auxquels s'ajoutait un certain nombre de conscrits. Cette

20 unité avait les effectifs d'une compagnie. L'unité toute entière à Dulje

21 avait les effectifs d'une compagnie. Les hommes impliqués ici ne

22 constituent qu'une partie de cette unité.

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Général Jelic, Dulje se trouve à Suva

24 Reka, n'est-ce pas ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Au nord de Suva Reka, à 15 ou 20

26 kilomètres au nord.

27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais dans la municipalité de Suva Reka.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, au sujet de ce village de Dulje,

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1 nous, nous nous trouvions au col de Dulje où la route fait un coude et où

2 on surplombe le village de Dulje à un kilomètre environ, un kilomètre et

3 demi, peut-être.

4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le secteur qui était couvert par -

5 -

6 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le territoire de Suva Reka, la

7 municipalité de Suva Reka.

8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que votre zone de responsabilité

9 se trouvait sur cette zone également ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai décrit au début de ma déposition la zone

11 de responsabilité de ma brigade qui allait de Prevalac, ici, en passant par

12 Jezerske Sapje [phon], Jezerske Planina jusqu'à l'endroit que je vous

13 indique ici, la cote que je vous montre ici, où se trouve le col de Dulje.

14 Ici, exactement.

15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle se trouvait là depuis avril 1998 et

17 jusqu'à la fin de la guerre.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le document que nous avons sous les

19 yeux évoque un programme d'entraînement et des manœuvres de combat pour le

20 Groupe de combat. Dans votre déposition, vous avez dit que le Groupe de

21 combat se divisait en deux sous groupes, dont l'un était stationné à

22 Stimlje et l'autre au sud de Dulje, dans le secteur de Birac.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] De Birac, oui.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce que j'aimerais savoir c'est où les

25 hommes qui participaient à ces manœuvres dans le secteur de Rance -- ou

26 plutôt, ces hommes venaient, c'est-à-dire, auxquels de ces deux sous

27 groupes ils appartenaient ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandant de l'unité, il s'agissait d'un

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1 bataillon mécanisé, comme je l'ai déjà dit, avait ce Groupe de combat qui

2 était placé sous commandement. Le Groupe de combat se trouvait à Dulje, et

3 tout se rapportait à Dulje. Pour mettre en place le programme de formation,

4 un certain nombre d'unités ont pris part à ces programmes d'entraînement et

5 ils ont reçu une mission. On leur envoie le programme, on prépare les

6 officiers, et l'entraînement se poursuit, comme dans tous les pays du

7 monde. Cet entraînement est quelquefois un entraînement théorique, et ou

8 pratique, mais, en général, pratique car ils doivent aller sur le terrain.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pardonnez-moi, vous n'avez peut-être

10 pas compris ma question, ou alors, je suis complètement perdu. Est-ce que

11 je vous ai mal compris lorsque vous nous avez dit que votre Groupe de

12 combat était divisé en deux sous groupes ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il y avait deux sous groupes en

14 permanence, et vous l'avez exprimé tout à fait correctement, il y avait une

15 région où se trouvait l'unité qui surplombait Stimlje et l'autre qui était

16 la région de Birac.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ma question suivante est celle-ci : la

18 partie du groupe qui était entraîné près de Rance faisait partie de quel

19 sous groupe ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, il n'y a pas eu d'entraînement dans la

21 région de Rance mais à Dulje. Ceci est indiqué très clairement, à la cote

22 915, Dulje; c'est Lubovce, à la cote trigonométrique 988, je peux vous

23 l'indique sur la carte. Cela se trouve ici.

24 [Le témoin s'exécute].

25 C'est là qu'il y a eu cet entraînement. A partir de Dulje, et sans

26 aller dans les régions habitées pour ne pas gêner la population, pour ne

27 provoquer personne et pour n'obliger personne à quitter les lieux et ni à

28 ouvrir le feu, il fallait néanmoins que l'entraînement se poursuive tout au

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1 long de l'hiver.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous ne semblez vraiment pas

3 comprendre la question. Cela doit être la manière dont je vous la pose.

4 Mais j'avais compris que le Groupe de combat était basé à Dulje, nous

5 parlons en termes généraux, mais était divisé en deux sous groupes, un de

6 ces groupes se trouvaient à Stimlje et l'autre se trouvait au sud de Dulje,

7 près de Birac. Comment se fait-il que vous ne puissiez pas me dire d'où

8 venaient ces hommes qui ont pris part à ces manœuvres et qui ont été

9 attaqués depuis le village de Rance ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci n'est absolument pas contesté. Leur base

11 était le Groupe de combat de Dulje, et ils quittaient la base, et pour

12 suivre cet entraînement, ils revenaient. Le lendemain, ils se sont rendus

13 dans la direction opposée, ils sont allés vers le nord, et un jour, ils

14 sont allés vers l'est. Tout ceci se trouve consigner dans le rapport.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, je ne peux pas vous poser

16 d'autre question, mais ceci n'est pas clair.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Cet entraînement qui a eu lieu le 14 et le 15 ait été un entraînement

20 qui n'a pas eu lieu près de Racak. A quelle distance ce centre

21 d'entraînement se trouvait-il ? Quel est le point le plus proche de Racak à

22 lequel ils sont parvenus ?

23 R. Seize kilomètres.

24 Q. C'est le point le plus proche de leur entraînement par rapport à Racak.

25 R. Oui.

26 Q. Regardons l'avant-dernier paragraphe de votre rapport, maintenant, si

27 vous voulez bien, le dernier paragraphe. Que peut-on lire ici à propos de

28 la date du 15 janvier ?

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1 R. "Aux premières heures du matin du 15 janvier 1999, les forces du

2 ministère de l'Intérieur de la République de Serbie a mis en place un

3 barrage dans le village de Racak et dans les environs et dans le quartier

4 de Hadovic à un kilomètre environ à l'ouest de Stimlje, et qui avait pour

5 objectif de rechercher les terroristes qui avaient tiré sur les forces le

6 jour précédent. L'effectif et la composition des forces de combat était

7 inconnu."

8 Q. Je croyais qu'il y avait quelque chose d'autre écrit ici,

9 effectivement, le terme de "composition," figure ici.

10 R. "Vers 7 heures du matin le 15 janvier, l'infanterie a ouvert le feu sur

11 les forces du MUP à partir des collines voisines, les villes et les

12 villages. Une partie du Groupe de combat numéro 1 dans la région générale

13 de Stimlje, et la colline de Canovica."

14 Q. C'est ce que vous avez indiqué sur la carte ?

15 R. "Lorsqu'ils était engagés dans des activités de combat, c'est ce que

16 l'on voit ici, on voit ici au cours de la journée, les activités au cours

17 de la journée au cours de la nuit. Opérations de reconnaissance à bord d'un

18 véhicule de combat.

19 "Après les opérations de combat et l'attaque des sabotages par les forces

20 terroristes Siptar, l'unité a investi les secteurs et a pris les positions

21 suivantes pour assurer une défense appropriée : un obusier, une Batterie

22 d'Artillerie d'un obusier de 122 millimètres se trouvait à un kilomètre au

23 sud-ouest de Canovica Brdo --" Je peux vous l'indiquer sur la carte.

24 Q. Cela se trouve près de la colline de Canovica, là, où ils étaient

25 stationnés.

26 R. C'est exact, et un peloton de char à un kilomètre au sud-ouest ici. "Il

27 y avait un peloton de défense antiaérien au niveau de la cote 671, il y

28 avait un peloton de reconnaissance renforcé au numéro, au point

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1 trigonométrique 637 à côté de la route." C'est ce que j'ai indiqué sur la

2 carte, cela se trouvait près de la route, une unité qui devait surveiller

3 la circulation.

4 Q. Que peut-on lire plus bas ?

5 R. "Au sud du village de Belince, le feu a été ouvert à partir d'armes

6 d'infanterie, utilisant des mitrailleuses antiaériennes, de 12.7

7 millimètres, des mortiers de 82 millimètres. Le feu a été ouvert sur le

8 Groupe de combat qui était déployé dans le secteur. Riposte à partir d'un

9 Praga et 12.7 une mitrailleuse Browning de 12.7 millimètres. Après avoir

10 entendu des coups de feu dans -- après avoir riposté et tiré sur le village

11 de Belince la fusillade s'est arrêtée. Nos forces n'ont subi aucune perte,

12 nos unités sont tout à fait prêtes à combattre et nous n'avons pas utilisé

13 nos pièces d'artillerie. Les pièces d'artillerie n'ont pas été utilisées.

14 Nous avons fouillé la région de Racak et les villages voisins et aucun de

15 nos véhicules n'est entré dans le village de Racak, ni dans aucun autre

16 village voisin. Les forces du MUP ont mis en place un barrage et ont

17 fouillé le village de Racak ainsi que les villages voisins et les hommes

18 sont retournés sur la base à 16 heures." Le Témoin Sukri Buja prétend que

19 les choses se sont passées tout à fait autrement.

20 Q. Oui, cela se trouve au niveau du compte rendu, effectivement.

21 R. Oui, Sukri Buja a déclaré qu'il y avait des forces de l'UCK qui se

22 trouvaient dans la région et c'est pour cela que l'armée a pris positions.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 20

24 minutes.

25 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

26 --- L'audience est reprise à 12 heures 41.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice.

28 M. NICE : [interprétation] Pour ce qui est de la production de document,

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1 j'ai de plus amples informations. J'en aurai sans doute davantage avant la

2 levée de l'audience, de l'audience de ce matin. Pourriez-vous m'accorder

3 quelques instants après le départ du témoin ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Tout à fait.

5 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Nous avons ici devant nous un ordre donné par le commandant Lazarevic.

8 Il est daté du 17 janvier 1999. Cet ordre vous a été envoyé. On peut y lire

9 : "Envoyé au commandant de la 243e Brigade." Cela se trouve à

10 l'intercalaire numéro 18. J'espère que vous l'avez sous les yeux.

11 R. Oui, tout à fait.

12 Q. On peut lire qu'une partie des forces du Groupe de combat, bien je ne

13 souhaite pas relater ce qu'on peut y lire et donnez mon point de vue. Mais

14 que peut-on y lire, que peut-on lire dans cet ordre qui est daté du 17

15 janvier ?

16 R. Oui. Il s'agit d'un ordre qui est envoyé par le commandant du Corps de

17 Pristina. Il m'envoie cet ordre afin que je permette au MUP d'entrer dans

18 le village de Racak et Rance. Que les conditions soient bonnes pour

19 permettre à ces hommes d'enquêter, de planifier et de vérifier les

20 allégations de meurtre de la population civile. "Je donne cet ordre pour

21 des raisons suivantes : une partie des forces du Groupe de combat numéro 1

22 doivent venir renforcer les Pelotons du MUP sur la voie de communication

23 des villages de Dulje, Lubovce et Rance. Il s'agit de mettre en déroute les

24 forces terroristes de sabotage DTS, et sur l'axe d'attaque des forces du

25 MUP et de parvenir au village de Rance dans ce secteur. Le commandant des

26 forces du MUP, Veljko Radenovic, devra rendre compte de cette opération au

27 commandant de la BG 243/1 --"

28 Q. Il s'agit du Groupe de combat ?

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1 R. Oui, c'est le Groupe de combat, effectivement.

2 Q. De votre brigade ?

3 R. C'est exact. "Au poste de commandement à 7 heures du matin, dans le

4 secteur de Dulje. Le 18 janvier, l'attaque commencera à 8 heures du matin,

5 le 18 janvier 1999.

6 "Au point 2. Une partie des forces de la 243e Brigade mécanisée doivent

7 apporter leur appui à une attaque qui est destinée à créer diversion.

8 Donneur leur appui à un peloton du MUP dans la région où -- doivent

9 apporter leur appui à la première compagnie de la PGP dans la région de

10 Pristina. Il s'agit d'encercler dans le secteur les forces terroristes. Au

11 point 657 (Bajrak) qui est le village de Malopoljce et empêcher toute

12 incursion dans la direction du village de Racak.

13 "Le commandant du peloton du MUP, Zoran Vukadinovic doit rendre des comptes

14 de ceci au commandant de la VJ de l'Unité de l'armée yougoslave à 7 h 30 le

15 18 janvier 1999 à la sortie du village de Stimlje en direction d'Urosevac,

16 l'attaque commencera à 8 h 30 du matin le 18 janvier 1999.

17 "Au point 3. Les forces du moyens de preuve doivent être soutenues par deux

18 Praga du secteur comme suit :

19 "A la cote 637, au sud de Canovica Brdo pour apporter leur soutien aux

20 forces de la 6e CPJP," étant des Unités d'Intervention spéciale de la

21 police ainsi que les autres Praga qui doivent venir à l'appui des forces de

22 la 7e CPJP à la cote 688 au sud-est à 500,

23 7 000 mètres derrière.

24 "Le commandant du Peloton antiaérien (-1) devra rendre des comptes au

25 commandant de la compagnie qui se trouve sur la route à l'endroit où il y a

26 un embranchement en direction d'une forêt de pins à 7 h 30 du matin le 18

27 janvier 1999."

28 Q. Mon Général, cette forêt de pins est désigne la position des unités,

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1 c'est exact.

2 R. Oui, c'est exact; sinon, c'est une forêt qui a une trentaine d'année,

3 les arbres sont protégés. Ce sont des pins qui sont très grands et c'était

4 parfait pour monter un camp et mettre en place un camp militaire. Cet ordre

5 parlait d'enquête à ce sujet. Autrement dit, il fallait vérifier ou mener

6 une enquête dans le village de Racak. Le commandant c'est sans doute une

7 demande émanant du MUP. Le commandant du corps a décidé comme suit.

8 Q. Nous allons passer sur le 6 : "Comme les forces du MUP reçoivent le

9 soutien d'eux, puisque les forces du MUP donnent le soutien pour protéger

10 la population civile et les écarter des zones de combat --"

11 R. Oui. Cela signifie qu'il faut prêter une attention toute particulière

12 pour empêcher toute perte en vie humaine de civils, population civile qui

13 pourrait se trouver pris entre deux feux dans la zone de combat. Tout ceci

14 doit être fait de façon tout à fait organisée et au cas par cas.

15 Q. Penchons-nous maintenant sur l'intercalaire 12, qui est un ordre

16 émanant de vous, et qui date du 18 janvier, ordre rendu pour assurer la

17 sécurité des forces du MUP au moment de leur arrivée. A l'intercalaire 12,

18 il est question du commandant de la 243e Brigade mécanisée; c'est donc vous

19 qui êtes l'auteur de ce texte ?

20 R. Oui, c'est un ordre émanant de moi.

21 Q. Est-ce que c'est un ordre qui a été établi sur la base d'un ordre du

22 commandement du Corps d'armée ?

23 R. Oui. C'est un ordre que j'ai rédigé moi-même sur la base d'un ordre

24 émanant du commandant du Corps d'armée, et qui énumère un certain nombre de

25 tâches définies plus en détail que dans le texte du Corps d'armée en vue

26 d'assurer la sécurité dans le cadre de l'opération prévu. Ce texte a été

27 rédigé le 18 janvier 1999, il a pour but : "D'assurer la sécurité des

28 forces du MUP au moment de leur entrée dans le village de Racak, Rance,

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1 pour mener à bien leurs missions. J'ordonne," un certain nombre de choses

2 au paragraphe 1, en mettant l'accent de façon très détaillée sur la nature

3 des tâches dont la mise en œuvre est prévue, et je souligne le concours de

4 l'opération, il importe, je cite : "De protéger les civils contre les

5 tirs." Voilà ce que je dis. Ce texte est envoyé au commandant du Groupe de

6 combat numéro 1, puisque c'est lui qui était responsable de l'opération sur

7 place, et nous voyons que les sous groupes sont mentionnés également, les

8 sous groupes qui composent cette unité.

9 Q. Donc, le Groupe de combat numéro 1 stationné à Dulje et divisé en deux

10 sous groupes et évoqué de façon expresse. C'est bien dont a parlé le Juge

11 Bonomy, si j'ai bien compris.

12 R. Le texte signifie que nous n'avons pas fait venir de nouvelles forces

13 de la caserne, de la garnison. Nous n'avons pas eu besoin de ce genre de

14 renforts.

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, j'ai déjà examiné un certain

16 nombre de pièces à conviction, intercalaires 17, 18, et 12. Je pense que le

17 moment est venu pour moi d'en demander le versement au dossier.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous admettons ces documents en

19 tant que pièce à conviction.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Mon Général, je vous demanderais maintenant de vous pencher sur

22 l'intercalaire 13. C'est un rapport en date du 19 janvier établi par vous.

23 Sur quoi porte ce rapport ?

24 R. Oui, c'est un rapport ultérieur à l'achèvement de la mission. Dans ces

25 cas-là un rapport a toujours réalisé avec d'abord une brève analyse au sein

26 de l'unité, et ensuite, un rapport complet après l'achèvement de la

27 mission. Ici, le rapport est adressé au commandement du Corps d'armée, en

28 date du 19 janvier, il parle du soutien aux Unités du MUP pour neutraliser

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1 et mettre en déroute les forces terroristes dans les villages de Rance et

2 Racak. Nous lisons ce qui suit au paragraphe 1 de ce rapport, je cite :

3 "Le 19 janvier 1999, entre 8 heures du matin et 17 heures 30 l'après-midi,

4 dans le cadre de la neutralisation des forces de sabotage et des forces

5 terroristes, les forces du MUP ont obtenu l'appui suivant," et suit une

6 liste.

7 Q. Ensuite, suit la liste des appuis qui ont été fournis.

8 R. Oui. Ce rapport repose sur l'ordre donné au préalable.

9 Q. Après une série de faits et de chiffres, nous lisons, je cite : "Aucune

10 résistance importante n'a été opposée par les forces terroristes de

11 sabotage." C'est bien cela, n'est-ce pas ?

12 R. Oui. Lorsque la fouille du terrain a eu lieu, un nombre infime

13 d'équipement a été trouvé; 30 miches de pain, en particulier, ce qui dénote

14 la présence sur la place avant cela d'un groupe assez important, et une

15 calculette.

16 Q. Merci, mon Général. Passons maintenant à un autre document,

17 l'intercalaire 14. Nous reviendrons sur la discussion sur la frontière de

18 l'Etat dans une question ultérieure. Que dit ce document qui date du 26

19 janvier 1999, n'est-ce pas ?

20 R. Oui. C'est un ordre émanant de moi, en date du 26 janvier, destiné à

21 obtenir la pose de mines en tant qu'obstacles le long de la frontière de

22 l'Etat. Je cite :

23 "Ordre : en vertu de l'ordre du commandement du Corps de Pristina, il est

24 ordonné d'interdire tout passage illégal de la frontière de l'Etat, et à

25 cette fin j'ordonne ce qui suit :

26 "Premièrement, l'officier chargé temporairement des affaires de la

27 frontière au sein de la 243e Brigade mécanisée, en collaboration avec le

28 commandement du 57e Bataillon chargé de la Protection de la frontière,

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1 établira un plan de patrouille de la frontière de l'Etat et posera des

2 obstacles le long de cette frontière conformément à l'ordre du commandement

3 du PRK numéro strictement confidentiel 85-1, en date du 14 janvier 1999."

4 Q. A quelles actions étiez-vous en train de réagir ? Ceci se faisait en

5 réaction à quoi ?

6 R. Comme je l'ai déjà dit, la frontière de l'Etat était une frontière

7 nouvelle, qui n'avait que quatre ou cinq ans d'ancienneté. C'était une

8 frontière assez peu définie qui séparait l'Etat de la Macédoine. De façon

9 générale, cette frontière était définie, mais pas dans le détail précis. Il

10 y avait des gens qui possédaient de la terre à cet endroit, qui ont obtenu

11 des permis provisoires. Ces permis de déplacement ont été utilisés

12 abusivement pour franchir cette frontière illégalement. Il y avait abus des

13 franchissements de frontière et pas mal de marché noir le long de cette

14 frontière. La contrebande ne cessait d'augmenter, des armes passaient

15 illégalement d'un pays dans l'autre, notamment depuis la région occidentale

16 de la Macédoine et depuis Tetovo. Des unités assuraient la sécurité de la

17 frontière de l'Etat --

18 Q. Ceux qui ne le savent pas pourraient trouver utile, d'apprendre que la

19 population albanaise était assez concentrée à cet endroit de la Macédoine.

20 Q. Puisque nous avons créé une ligne sécurisée au niveau de cette

21 frontière parce que c'est de cette façon que nous possédions, les unités

22 qui se trouvaient stationner en profondeur de la frontière, assuraient la

23 sécurité, avec les moyens technologiques nécessaires, et les hommes chargés

24 de la sécurité avaient obtenu des renforts. Mais, toutefois, il y avait des

25 endroits qu'il était impossible de sécuriser suffisamment 24 heures sur 24.

26 Compte tenu de la configuration du terrain, sur le mont Sara, qui est un

27 point assez haut en altitude, puisqu'il culmine à 2 000 mètres d'altitude,

28 en tout cas, à plusieurs de 1 500 mètres, et qu'au mois de mai, il y avait

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1 encore de la neige sur ce sommet, de la neige en importance, les routes de

2 contrebande n'ont jamais été parfaitement bien définie, et d'ailleurs,

3 elles changeaient constamment. Ce qui avait pour conséquence qu'en

4 collaboration avec les responsables de la frontière de l'Etat, les unités

5 qui étaient stationnées en profondeur de cette frontière ont été appelées à

6 assurer la sécurité de la frontière, et le bataillon informait donc les

7 soldats patrouilleurs dans la zone frontalière de l'emplacement des mines

8 pour empêcher que des hommes ne soient blessés.

9 Q. Merci, mon Général. Dites-nous, maintenant, ce que contient le document

10 suivant, intercalaire 15. Encore un ordre émanant de vous. Est-ce qu'il

11 décrit la situation et les problèmes que vous avez rencontrés à l'époque ?

12 R. Oui, c'est un ordre émanant de moi. L'unité, qui était donc une

13 brigade, comptant plusieurs milliers d'hommes, est un organisme vivant, et

14 il y a toujours des problèmes qui se passent au sein d'une unité de cette

15 taille. Bien entendu, il est normal qu'un commandant de brigade analyse la

16 situation et prenne les mesures nécessaires pour prévenir et empêcher tous

17 événements négatifs et, notamment, s'agissant -- lorsqu'il s'agit d'une

18 Unité qui est chargée de la Sécurité d'une frontière en profondeur.

19 J'aimerais vous donner lecture d'un certain nombre de passages dans cet

20 ordre.

21 Q. Nous lisons les lettres "V/D"; est-ce que cela signifie qu'il est

22 question d'événements extraordinaires ?

23 R. Oui, je cite : "Evénements ayant des conséquences négatives sur les

24 diverses unités composant la brigade ou risquant de mettre en cause le

25 moral des hommes et de créer des dommages irréparables à la réputation de

26 l'armée yougoslave en ternissant l'image l'unité."

27 Q. Il est dit qu'il s'est passé quoi ce texte ?

28 R. En janvier, il y a eu deux incendies. Plusieurs armes ont brûlé, ainsi

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1 qu'un certain nombre de parties d'équipement personnel et d'équipement de

2 protection. On était en janvier, les températures étaient basses. Sur la

3 base d'un ordre émis précédemment, nous nous rappellerons que des ordres

4 avaient été émis en direction des unités pour leur interdire d'endommager

5 des bâtiments appartenant à des particuliers, des bâtiments privés donc.

6 Des tentes avaient été dressées dans lesquelles les soldats étaient logés

7 et des feux ont été faits dans ces tentes qui ont provoqués quelques

8 dégâts.

9 Q. Il y a eu des victimes parmi les soldats comme nous le voyons.

10 R. Oui. La cause la plus fréquente de tout cela, parce que l'unité était

11 sur place depuis plusieurs mois, elle était épuisée et certains hommes qui

12 avaient participé à des combats étaient très fatigués, donc certains ont

13 dénoté un comportement un peu anormal. Cela a réduit leur capacité à mener

14 à bien les missions qui leur étaient confiées. Un jeune homme de 18 ans,

15 par exemple, avait passé plusieurs mois dans les tranchées et pas dans un

16 bâtiment en dur, dans ces conditions, il était tout à fait normal qu'il

17 soit épuisé. Donc il y avait une certaine baisse de l'efficacité de ces

18 hommes à ce moment-là et des incendies ont éclaté accidentellement et il y

19 a eu d'ailleurs d'autres accidents. C'est la cause de cet ordre rédigé à ce

20 moment-là.

21 Q. Très bien. Merci, mon Général. Voyons maintenant le paragraphe 63(k) de

22 l'acte d'accusation, dans lequel on allègue de déportations. Il est

23 prétendu, dans ce texte, que dans la municipalité de Kacanik -- je vais me

24 concentrer sur ce point. La municipalité de Kacanik, comme vous l'avez dit

25 se trouvait dans votre zone de responsabilité, n'est-ce pas ?

26 R. Oui.

27 Q. Dans la municipalité de Kacanik, de mars à mai 1999, il est dit : "Que

28 des forces de la RFY et de la Serbie auraient attaqué les villages de la

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1 municipalité de Kacanik et la ville de Kacanik en tant que telle. Cette

2 attaque a eu pour résultat la destruction d'un certain nombre de maisons et

3 de bâtiments de culte y compris les mosquées de Kotlina et d'Ivaja entre

4 autres."

5 Vous commandiez les hommes cantonnés dans le secteur. Pouvez-vous nous

6 parler de ces allégations ? Pouvez-vous les commenter ?

7 R. Kacanik est le siège d'une municipalité. Les forces du MUP ont toujours

8 été présentes à Kacanik. Après la mobilisation et après un certain nombre

9 de décisions officielles, l'armée de Yougoslavie a pris le contrôle de

10 cette ville. À l'époque à laquelle vous faites référence, le MUP étant

11 présent dans la ville ainsi que d'autres structures comme des hôpitaux,

12 l'assemblée municipale, et cetera, qui fonctionnaient normalement et un

13 certain nombre d'autorités légales et légitimes qui étaient également

14 présentes dans cette ville. Il serait tout à fait illogique que l'armée ait

15 attaquée la ville de Kacanik parce que si elle l'avait fait, elle se serait

16 en quelque sorte attaquée elle-même. Kacanik n'a jamais été sous le

17 contrôle de qui ce soit d'autre que des autorités officielles de l'Etat.

18 Q. Donc, ceci n'a pas de sens, n'est-ce pas, l'attaque de Kacanik qui est

19 invoquée dans ce texte ? Mais que diriez-vous de la phrase suivante, je

20 cite : "Les villages composant la municipalité ont été attaquées," ne

21 parlons plus de la ville de Kacanik en tant que telle. Des maisons auraient

22 été détruites ainsi que des bâtiments du culte y compris les mosquées de

23 Kotlina et d'Ivaja entre autres ?

24 R. S'agissant des mosquées de ces deux villes, je n'ai jamais entendu

25 quiconque parler de destruction de ces deux bâtiments du culte. D'ailleurs,

26 il n'y avait aucun besoin de pénétrer dans ces villages. Je parle

27 simplement de l'aspect militaire à cette époque précise. L'armée n'a jamais

28 pénétré dans ces villages à ce moment-là. Elle participait à des actions

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1 antiterroristes à partir du début de l'agression de l'OTAN, le 24 mars,

2 puisque la zone de responsabilité de la brigade avait été directement

3 attaquée au cours des raids aériens, et que la 162e Brigade de ce qu'il est

4 convenu d'appeler l'UCK se trouvait sur place et ne cessait d'attaquer les

5 unités de l'armée dans ce secteur et attaquait un certain nombre de

6 secteurs de défense définis par nous à partir du 24, car à partir de cette

7 date, nous avons établie des zones de défense très précises correspondant à

8 chaque unité. Donc, l'unité d'intervention, dont il est question ici,

9 défendait une zone de défense précise sur la base d'un ordre transmis au

10 bataillon.

11 L'objectif de cette unité était de permettre que les pièces d'artillerie,

12 les chars et les blindés transport de troupes ne se déplacent pas. Il

13 convenait de les cacher, de les dissimuler aux forces de l'OTAN afin

14 d'empêcher leur destruction par celle-ci.

15 Q. Dans ce même paragraphe, il est question de déportations de

16 population. Au paragraphe 63(i) où nous lisons ce qui suit, je cite : "Le 8

17 mars 1999" où à peu près ce jour-là, "les forces de la République fédérale

18 de Yougoslavie," c'est-à-dire, vous qui étiez sur le terrain, "ont attaqué

19 et incendié en partie le village de Kotlina. Le 24 mars 1999, elles ont

20 attaqué Kotlina, une nouvelle fois, à l'aide d'équipement lourd. Ce qui a

21 provoqué la fuite d'un certain nombre d'hommes dans les bois ainsi que de

22 femmes et d'enfants sur l'ordre des forces de la RFY et de la Serbie qui

23 ont dû monter à bord de véhicules qui les ont amenés à Kacanik. Ceux qui

24 n'ont pas réussi à bord de ces camions ont dû marcher jusqu'à Kacanik. Un

25 certain nombre d'habitants masculins de Kotlina ont été tués au cours de

26 l'attaque, notamment, 17 hommes dont les cadavres ont été jetés dans des

27 puits. Avant de partir, les forces de la RFY et de la Serbie ont rasé ce

28 qui restait du village."

Page 46924

1 Voilà ce qui est écrit dans ce texte. Est-ce que ces allégations sont

2 conformes à la réalité ? Ceux-ci se trouvaient dans votre zone de

3 responsabilité. Que pouvez-vous dire de cela ? Est-ce que vous avez quelque

4 chose à ajouter ?

5 R. Ces allégations sont inexactes. Le 8 mars, l'armée n'a pénétré

6 dans aucun village, elle n'a participé à aucun combat. Le 28 février et le

7 8 mars, les forces du MUP ont eu des accrochages avec les terroristes

8 membres de la 161e Brigade de l'UCK. C'est ce qu'a dit le capitaine

9 Staletovic. Je crois savoir que c'était son nom.

10 Lorsque ces forces ont pénétré dans le village à la recherche de

11 terroristes sur la base de renseignements reçus des services de

12 Renseignement, elles ont eu des accrochages. Ce sont les renseignements que

13 j'ai reçus lorsque mon unité a échangé des renseignements avec le MUP qui

14 se trouvait sur le terrain. Après tout, il y avait aussi des vérificateurs

15 qui étaient chargés de confirmer tout cela.

16 A partir du 24 mars, ce qui caractérise le secteur, c'est que des

17 attaques ont été lancées en permanence dans cette région contre les unités

18 qui s'y trouvaient et qui tenaient les positions sur la base de la

19 définition de leur zone de défense.

20 Q. Qui était responsable de ces attaques ?

21 R. Les forces terroristes Siptar de la 162e Brigade qui étaient

22 stationnées dans le secteur et sans doute également de la 163e Brigade qui,

23 plus tard, a grandi en effectif pour devenir la brigade de Nerodimlje

24 chargée de cette zone opérationnelle. À partir de ce moment, mes unités

25 n'ont plus eu la possibilité de pénétrer dans un seul village, en tout cas,

26 en altitude. Je vous demande de regarder la carte et vous verrez que

27 l'altitude est supérieure à

28 1 000 mètres dans le secteur et que donc il était impossible de pénétrer.

Page 46925

1 Il s'agit du mont Sara. Les routes et les voies d'accès sont très

2 mauvaises. Il y avait de la neige. Les unités ne pouvaient pas se déplacer

3 avec de l'équipement lourd, car elles craignaient d'être découvertes,

4 d'être exposées, donc seules les unités d'intervention pouvaient riposter

5 en cas d'attaque.

6 Il nous semble un peu bizarre de voir qu'il est question ici de

7 transport de civils, car tout cela aurait été totalement absurde, au niveau

8 d'une compagnie, on ne dispose que d'un véhicule mécanisé qui en général

9 est plein de munitions. Alors comment est-ce qu'on aurait pu décharger les

10 munitions pour mettre à bord de ce véhicule 18 personnes, sans parler de

11 les entasser à raison de 30 personnes dans ce véhicule. Cela aurait été un

12 acte absolument insensé de la part d'un commandant de prendre une décision

13 de ce genre, en laissant les munitions à l'air libre.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En dehors de vos forces dont vous

15 dites qu'elles n'ont pas participé à une quelconque attaque sur Kotlina,

16 est-ce qu'il y avait d'autres forces de la République fédérale yougoslave

17 ou de la Serbie dans la région, d'après ce que vous savez ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette région mes forces étaient les

19 seules forces de la République fédérale de Yougoslavie présentes sur place,

20 si nous parlons de l'armée. Toutes ces forces étaient sous mon

21 commandement. Il y avait également les forces de la République de Serbie, à

22 savoir le MUP, dépendant de la République de Serbie. J'ai déjà dit que

23 l'armée n'a jamais attaqué Kacanik et que le MUP n'aurait pas pu attaquer

24 Kacanik non plus. Quant aux villages qui longeaient la route où étaient

25 stationnés les groupes de combat qui subissaient constamment des attaques,

26 nous ripostions en cas d'attaque à partir des unités composant ces groupes.

27 Il s'agit d'un bataillon qui possédait une compagnie de déploiement rapide

28 apte à prévenir l'action des groupes de sabotage, pour empêcher que cette

Page 46926

1 action ne nuise au déploiement du Groupe de combat. Nous ne voulions pas

2 déplacer nos équipements de combat en raison de la surveillance exercée à

3 partir de la zone aérienne. C'était notre premier objectif. Car si le

4 déplacement d'équipement lourd avait été visible ou détecté depuis le ciel,

5 nous serions devenus des cibles très faciles et aurions risqué d'être

6 neutralisés.

7 M. NICE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

8 remarque dans la dernière partie de la déposition, il est question d'un

9 rapport. Le témoin semble faire un rapport en synthétisant tout ce que

10 d'autres personnes lui ont dit sans expliquer du tout quelle est la source

11 de ses informations. Cela nous aiderait évidemment d'avoir quelques détails

12 quant à la source de ses renseignements, au cas où j'aurais à revenir sur

13 ces éléments de la déposition plus tard.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Était-ce une réponse à ma question,

15 Monsieur Nice ?

16 M. NICE : [interprétation] Non, non. Cela est lié à quelque chose qui s'est

17 passé plus tôt. C'était une réponse générale à une question au sujet d'un

18 paragraphe de l'acte d'accusation, mais je demande quelle est la source des

19 renseignements du témoin.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, pouvez-vous nous donner

21 la source des renseignements que vous venez d'évoquer.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] La source de ces informations est avant tout

23 les dires de mes subordonnés et des hommes que j'avais sous mes ordres,

24 donc des hommes de mon unité. Mon unité n'était pas en dehors de la zone de

25 responsabilité. Elle avait son cantonnement à Urosevac et mon poste de

26 commandement avancé se déplaçait continuellement, mais en général suivait

27 la direction de l'axe de défense au sud de Kacanik, Djeneral Jankovic, là

28 où la situation était la plus dure à l'époque.

Page 46927

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Milosevic, vous

2 pouvez poursuivre.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Mon Général, au paragraphe 63 de l'acte d'accusation, on trouve ces

5 allégations au sujet de déportations. Il est dit : "Que dans les journées

6 des 27 et 28 mars --"

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] 63(k)(ii).

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] D'accord 63(k)(ii).

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Il est dit dans ce paragraphe, je cite : "Que le 27 et le 28 mars 1999

11 ou aux environs de ces jours-là, les forces de la RFY et de la Serbie ont

12 attaqué la ville de Kacanik. Elles ont harcelé, emprisonné, battu et abattu

13 nombre d'Albanais du Kosovo qui habitaient à Kacanik."

14 Cela serait passé les 27 et 28 mars 1999. C'est l'allégation qui est

15 présentée ici, à savoir que vous vous trouviez aux environs de Kacanik; que

16 vous avez procédé à l'arrestation d'un certain nombre de personnes; que

17 vous les avez frappées; que vous avez tiré sur ces personnes qui étaient

18 toutes des habitants albanais du Kosovo. Je poursuis la lecture.

19 "Des milliers de personnes ont fui dans les forêts avoisinantes et ont

20 franchi à pied la frontière de Macédoine. D'autres personnes déplacées de

21 la ville de Kacanik et des villages voisins ont marché jusqu'au village de

22 Stagovo où elles sont montées dans des trains qui les ont emmenées à la

23 frontière macédonienne."

24 Ces trains qui les ont emmenées -- ces personnes apparemment ne sont pas

25 montées de leur plein gré à bord de ces trains. Elles y sont montées sous

26 la contrainte d'après ce qui y est dit ici. Voilà le contexte qui est

27 dressé. Je vous ai donné lecture de ce texte. Je vous ai dit ce qui est

28 contenu dans ce passage, dans ce paragraphe qui concerne les 27 et 28 mars

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1 à Kacanik. Qu'avez-vous à dire au sujet de ces allégations ?

2 R. Je pense que ces allégations sont inexactes. Kacanik n'a jamais été

3 attaquée. Je répète qu'il n'y avait aucune nécessité d'attaquer Kacanik

4 parce que les forces du MUP s'y trouvaient en permanence à l'intérieur de

5 la ville.

6 Q. Vous avez déjà dit cela.

7 R. Toutes les institutions de l'Etat fonctionnaient dans la ville de

8 Kacanik donc il n'était pas nécessaire d'attaquer la ville en tant que

9 telle. Je sais que j'ai reçu des rapports dans cette période selon

10 lesquels, vers la fin du mois de février ou plutôt non, la fin du mois de

11 mars, une patrouille de la police a été attaquée dans cette ville. Cette

12 patrouille a subi des pertes de quatre ou cinq blessés et un mort. Le MUP a

13 pris des mesures destinées à découvrir les auteurs des actes qui ont causé

14 ces pertes et destinées à détruire le groupe terroriste responsable.

15 Puisque c'est la ville qui était concernée, les fuites hors de la ville se

16 passaient pendant la nuit, après minuit en direction de l'est, c'est-à-dire

17 en direction des forêts. J'ai simplement connaissance de cet incident

18 survenu dans la ville de Kacanik, mais il n'y a eu aucune mesure de

19 harcèlement. L'armée avait ses positions devant la ville de Kacanik pendant

20 toute la guerre, depuis le 24 donc. Nous avons établi des zones de défense

21 avant le début de l'agression et nous étions présents dans le secteur. Nous

22 ne pouvions pas attaquer les forces du MUP parce que si nous l'avions fait,

23 cela aurait équivalu à nous détruire nous-mêmes. S'il y avait eu attaque

24 sur Kacanik, une partie de nos forces aurait été impliquée dans cette

25 attaque. Donc une partie de l'armée aurait attaqué Kacanik où se trouvait

26 le MUP, ce qui aurait été absurde.

27 Q. Qu'avez-vous à dire par rapport à ce qui suit : "Que des milliers de

28 personnes auraient fui vers les forêts voisines et finalement franchi à

Page 46929

1 pied la frontière de Macédoine" ?

2 R. Un grand nombre de personnes ont fui ce qui n'est que normal lorsque

3 l'armée approche et que la frontière, d'autre part, est assez proche. On

4 peut s'attendre que cela se passe lorsque les forces de l'OTAN arrivent à

5 partir de la Macédoine. Nous étions tout près de la frontière où s'était

6 regroupé à peu près 20 000 hommes de l'OTAN, deux Brigades mécanisées, une

7 Brigade de blindés, toutes des unités d'élite, qui aurait pu s'attendre à

8 ce que les gens s'enfuient par la route dans ces conditions. La plupart des

9 gens ont voulu quitter les lieux, mais avant tout, ils craignaient

10 l'agression de l'OTAN parce que les positions visées étaient principalement

11 les emplacements qui se trouvaient le long de la route. Il était prévisible

12 que l'agression de l'OTAN ait lieu et que l'attaque soit lancée. Donc, les

13 gens avaient peur et quittaient, pas seulement Kacanik d'ailleurs, il y

14 avait aussi des villages serbes dans la région, des villages purement

15 serbes et la population de ces villages a pris la fuite vers la Serbie et

16 la Macédoine, par exemple. Personne n'est resté dans les villages. Il est

17 malheureux d'ailleurs que la population locale ait eu à fuir. Les médias

18 ont rendu compte de la présence des troupes de l'OTAN en Macédoine à la

19 veille de l'agression. On a dit que les troupes de l'OTAN avaient été

20 regroupées là. Donc, les gens savaient que la mobilisation était en cours,

21 et que les positions militaires étaient en train de se définir. Que

22 pouvait-on entendre d'autre des gens qui avaient peur que de les voir

23 quitter la région ? Je pense que ces personnes avaient simplement peur.

24 Elles avaient peur, et c'est pourquoi elles sont parties. Mais Kacanik n'a

25 jamais été déserté complètement; 30 à 40 % des habitants sont tout de même

26 restés dans la ville.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, une seconde.

28 Quelle était la composition ethnique de la population de Kacanik à

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1 l'époque ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Kacanik était peuplé majoritairement

3 d'Albanais. Je parle de leur appartenance ethnique. Il y avait également

4 quelque Rom, des Egyptiens, et un petit pourcentage de Serbes. Je ne sais

5 pas ce qu'il en est des Monténégrins, mais il y en avait quelques-uns

6 également.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. S'agissant de leur départ vers Stagovo, et du fait que ces personnes

10 seraient montées à bord de train qui les auraient conduit à la frontière de

11 Macédoine, que dites-vous de cela ?

12 R. Conduit ? Cela veut dire que ces personnes seraient à bord de

13 véhicules. A Stagovo, il y a une gare ferroviaire. Deux trains par jour y

14 passent, qui fonctionnaient en reliant Kosovo à Djeneral Jankovic, donc, il

15 doit s'agir d'une faute de frappe parce que le terme "conduit" me semble

16 erroné. Les gens pouvaient arriver jusqu'à Stagovo et monter à bord d'un

17 train à cet endroit, mais il fallait qu'elles a -- que ces gens arrivent à

18 Stagovo, qui se trouve à quatre ou cinq kilomètres de distance, pour monter

19 à bord d'un train à ce moment-là. Personne n'empêchait la population de

20 partir, et je répète que les Unités de l'armée n'ont transporté personne à

21 bord d'un quelconque véhicule. Je dis, encore une fois, qu'aucune -- que

22 l'armée n'avait pas les moyens matériels pour ce faire. Elle n'avait pas

23 les véhicules suffisants pour transporter la population. Ces véhicules,

24 elle l'utilisait à d'autres fins.

25 Q. Donc, il se serait agi de train régulier ?

26 R. Qui passait deux fois par jour. C'est à peu près deux fois par jour.

27 Des trains composaient éventuellement de quatre wagons et d'une locomotive.

28 Q. Mais la circulation des trains était régulière ?

Page 46931

1 R. Oui, régulière. Ces trains allait à Djeneral Jankovic, où se trouvait

2 le passage frontière, et revenait de là.

3 Q. Pas de train -- aucun train ne franchissait la frontière de la

4 Macédoine ?

5 R. Non.

6 Q. Donc, la dernière gare était Djeneral Jankovic ?

7 R. A une centaine de mètres à peu près de la frontière. Oui.

8 Q. Mais c'était une -- un arrêt régulier des trains ? N'est-ce pas une

9 gare ferroviaire ?

10 R. Oui. Le passage frontière était juste à côté.

11 Q. Très bien. Au même paragraphe, K63(k)(iii), il est dit, je cite que :

12 "Le 13 avril 1999 ou à peu près ce jour-là, les forces de la RFY et de la

13 Serbie ont encerclé le village de Slatina, et le hameau de Vata, et

14 qu'après le pilonnage du village, les troupes d'infanterie et la police ont

15 pénétré dans la village et pillé et incendié les maisons. Pendant cette

16 opération, 13 civils ont été tués par balles. Après cette attaque, la

17 majorité de la population de Slatina a fui vers la Macédoine."

18 Alors, au début, lorsque vous avez énuméré les villages sur la carte et

19 montrer leurs emplacements, vous avez indiqué où se trouvait le village de

20 Slatina, ainsi que le hameau de Vata. On voit bien ces deux lieux sur la

21 carte, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, dans ce secteur.

23 [Le témoin s'exécute]

24 Q. Il est question dans ce texte de la date du 13 avril, ou d'une date

25 proche de ce jour-là. Pouvez-vous expliquer quel était le déploiement de

26 vos unités à ce moment-là par rapport au hameau de Vata et au village de

27 Slatina ?

28 R. C'est ici, le village -- que se trouve le village de Slatina, et

Page 46932

1 l'autre village se trouvait à côté. Ceci, c'est la position de combat d'une

2 unité qui s'est déployée sur ces lignes de combat, et qui se trouvait là à

3 la veille du 24 mars. Donc, c'est là que s'est trouvée une unité qui n'est

4 pas entrée dans le village. Je tiens à tirer cela bien au clair, le

5 déploiement au combat d'une unité, et assigner avec trois ou quatre points

6 quand il s'agit d'unité plus grande.

7 Alors, si l'on dit qu'une unité s'en -- se déploie au niveau de la village

8 Bicevac, Slatina, Banjica, cela ne veut pas dire que l'armée rentre dans

9 Bicevac, Slatina, et Banjica. Mais s'agissant des installations des sites

10 et -- les plus intéressants, tactiquement les plus intéressants, sont

11 choisis par le commandant des différentes unités, et il s'y installe et il

12 construit des fortifications.

13 Donc, cela signifie que l'armée ne soit pas entrée dans ces villages et ces

14 hameaux, mais elle a pris des positions pour organiser la Défense. Alors,

15 ce qui est caractéristique ici, c'est le fait que cette voie de

16 communication allant de Globocica, et je précise que c'est cette route-ci

17 avait donc une route en dur, avec bon nombre de virages où il y a des

18 forêts. C'est à la fois la route qui carrefour -- qui permet de se rendre à

19 Strpce, et d'aller plus loin sur Prizren. C'est là qu'il y a eu très

20 souvent des attaques contre nos véhicules, qui se déplaçaient notamment les

21 véhicules de

22 -- chargés de la logistique, donc, chargé de l'approvisionnement des

23 unités.

24 Ce qui est caractéristique ici, c'est de dire qu'il y a eu un commandement

25 de ma brigade ici, de la 243e. Vous avez un petit symbole ici qui montre

26 qu'il s'agissait ici de la 243e.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais s'il y a eu pilonnage de

28 quelques unités que ce soit de l'armée de Slatina; est-ce que cela aurait

Page 46933

1 été le faite de votre unité, en ce cas ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, si pilonnage il y avait eu. Mais nous ne

3 pouvions pas pilonner, puisque nous étions sur place. Nous n'allons quand

4 même pas nous pilonner nous-mêmes parce que cela se trouve à 200, 300,

5 voire même 100 mètres. Voyez ces positions. Elles sont assez raréfiées.

6 Alors, avec et du point de vue du génie, il y a tous les abris prévus pour

7 des combats de longue haleine. Vous allez voir les ordres reçus. C'est la

8 défense décisive.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous été attaqué depuis

10 Slatina ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais. Nous n'avons été attaqué à partir de

12 quelque village que ce soit de la zone de responsabilité de ma brigade.

13 Cela ne venait pas des villages. Les groupes terroristes attaquaient en

14 principe à partir de places à l'extérieur, de sites à l'extérieur des

15 villages. Ils ne nous attendaient, ils tendaient des embuscades, ils

16 tiraient quelques rafales, et s'en fuyaient. Donc, ce qu'on peut supposer,

17 c'est que s'il y a eu des attaques sur ces parties-là, sur ces voies de

18 communication, et là, effectivement, nous avons été des victimes, c'était

19 probablement des habitants de Slatina, Vata, Dubicevac et autres villages.

20 Vous ne savez pas c'est. Vous ne les avez pas capturé. Donc, si quelqu'un

21 s'est fait tué, et s'il a des documents, vous pouvez savoir de qu'il

22 s'agit. Mais s'il n'a pas de pièce d'identité, vous ne savez pas, parce que

23 sur ce territoire-là, je vous l'ai déjà dit, il y a eu leur 162e Brigade

24 qui opérait sur le site, ce qui fait qu'il se pouvait que ceux qui

25 attaquaient à cet endroit-là étaient en réalité des gens originaires d'un

26 autre village.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Mon Général --

Page 46934

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, est-ce que vous avez

2 fait présenter des éléments de preuve par le biais d'une personne qui

3 serait originaire de Slatina ?

4 M. NICE : [interprétation] Je n'arrive pas à m'en souvenir du tout. Je m'en

5 -- je le crains. Si vous me donnez une minute, je vais essayer de

6 rechercher, et je vous le dirais.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que, si vous le faisiez, M.

8 Milosevic pourra poser la question au témoin.

9 Oui, veuillez continuer, Monsieur Milosevic.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Alors, l'événement tel que je l'ai cité se trouve être décrit au

12 paragraphe 63(k)(iii). Donc, ce sont-là les chefs d'accusation portés à mon

13 encontre.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je vais vous poser toute

15 -- maintenant, la question qui a été posée tout à l'heure par le président

16 de la Chambre, Monsieur Robinson, pour un autre endroit.

17 M. MILOSEVIC : [interprétation]

18 Q. Donc, à l'époque, à savoir, le 13 avril ou vers cette date-là, y a-t-il

19 eu dans le secteur Slatina et Vata, donc, des forces autres que les

20 vôtres ?

21 R. Aucune autre force ne se trouvait-là, si ce n'est mes soldats à moi.

22 Q. Y avait-il des policiers ?

23 R. La police n'était pas là. La police pouvait passer seulement à l'époque

24 parce qu'il se trouvait à Strbac, Kacanik, Urosevac, il ne pouvait

25 qu'emprunter les routes, mais la police ne séjournait pas là.

26 Q. Sur ce territoire-là, couvert par votre déploiement au combat, il n'y a

27 pas eu de policier du tout ?

28 R. Non, jamais. D'une manière, enfin, conformément au principe adopté,

Page 46935

1 quand il s'agit d'un déploiement au combat d'une unité, il ne pouvait avoir

2 personne d'autre, il ne peut qu'y avoir que des soldats, parce que toute

3 interférence au niveau du déploiement au combat des soldats, il peut y

4 avoir des pertes fatales en raison d'erreurs. Je ne dis pas délibérément.

5 Q. Il n'y avait pas de policier dans le déploiement au combat de vos

6 unités ?

7 R. Non.

8 Q. Alors, on parle du 13 avril ou vers la date du 13 avril, au niveau du

9 territoire ou de déploiement de votre unité mentionné par le 63(k)(iii),

10 mis à part les unités déployées au combat par vous, il n'y avait pas

11 d'autre unité, d'autre effectif ?

12 R. Aucun autre effectif, aucune troupe irrégulière, toutes les unités qui

13 se trouvaient là étaient placées sous mon commandement.

14 Q. Bien. On dit que vers le 14 avril, vous auriez pilonné le village --

15 que vous seriez entré dans le village avec la police pour mettre le feu et

16 piller les maisons, et on dit qu'on a, ce faisant, tué 13 civils. Puis,

17 ensuite, les habitants de Slatina et Vata, auraient fui vers la Macédoine.

18 R. Il se peut que les leurs, enfin, les habitants qui ont été tués,

19 c'étaient les personnes qui n'ont cessé d'attaquer les positions de combat.

20 Il se peut qu'il y en ait eu et qu'il y ait eu ce chiffre-là dans un

21 rapport, parce qu'on dit à peu près. J'estime que personne n'est censé

22 savoir exactement quand l'un des leurs est tombé.

23 Q. On a l'habitude, on a la coutume de dire le 13 ou à peu près vers cette

24 date-là. C'est ainsi qu'ils définissent la date. Ils donnent la date ou les

25 quelques journées autour. Ce n'est pas seulement dans ce paragraphe-ci

26 c'est d'une manière générale la façon dont on est défini ici les périodes

27 de temps concernées.

28 R. Les soldats ne sont pas entrés dans les villages pour réaliser des

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1 activités de combat au niveau des villages. Chaque unité lorsqu'elle est

2 acheminée, quand j'ai dit, par exemple, en passant par Stimlje et Dulje,

3 quand il y a eu un déplacement, chaque unité a une unité qui est chargée de

4 la sécuriser, et chaque attaque sur une colonne a vu cette attaque -- pour

5 connaître une riposte. Donc il ne se peut pas qu'il y est au niveau d'un

6 véhicule plus de deux ou trois personnes. C'est pour cela qu'à l'avant et à

7 l'arrière, il y a d'autres véhicules pour sécuriser. Ce sont des blindés de

8 transport de troupes ou des Praga. Si nécessaire et si besoin est, ces

9 véhicules-là interviennent là pour riposter en direction de l'endroit à

10 partir duquel on nous a tirés dessus. Il se peut qu'il y ait eu ce chiffre,

11 ce nombre de victimes pendant les quelque trois ou quatre mois de la durée

12 des frappes de l'OTAN avant cela même. Je ne vois personne mentionner ici

13 Desa Kodza -- les enfants de la famille Hodza -- Kodza.

14 Q. Je n'ai pas compris.

15 R. On ne mentionne pas les enfants de la famille Kodza parce que c'est

16 l'endroit où il y avait le commandement de la brigade. Cinq enfants ont été

17 tués suite aux frappes aériennes de l'OTAN. Ils sont morts du fait de

18 l'utilisation de bombes à fragmentation. C'étaient des civils. C'étaient

19 des jeunes de 20 à 30 ans qui sont morts, et il y a eu des enfants de tuer

20 dont le plus âgé avait 12 ans. Vous pouvez vérifier cela au niveau du MUP

21 d'Urosevac. Personne ne les mentionne malheureusement.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mon Général, j'essaie de déterminer

23 si vous avez reçu une explication au sujet du paragraphe (iii), en chiffre

24 romain, où il est dit, ou plutôt, quand vous dites, qu'il s'agissait d'un

25 transport logistique et qu'il a bien pu y avoir une attaque suite à quoi

26 votre unité aurait riposté. Il se pouvait, avez-vous dit, que dans cette

27 circonstance-là, au fil de cette période de trois ou quatre mois, des gens

28 aient effectivement été tués. Est-ce que vous dites que cela a pu se

Page 46937

1 produire au sujet de l'allégation figurant au 63(k)(iii) où il est affirmé

2 que 13 civils ont été tués dans le secteur de Slatina vers la date du 13

3 avril 1999 ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément l'explication que je vous ai

5 apportée, et je pense avoir compris ce que vous m'avez demandé. Parce qu'il

6 n'y a pas eu d'opération de réaliser, étant donné qu'il n'en était nul

7 besoin, puisque les unités étaient déjà déployées et se trouvaient sur leur

8 position. Je souligne, une fois de plus, que nous ne sommes pas allés dans

9 les villages pour procéder à des opérations de combat ou pour rechercher

10 les terroristes. Les terroristes n'ont pas tiré à partir de ces maisons

11 parce qu'ils auraient vite été décelés. Ils sont lancés leur attaque à

12 partir d'endroit qui se trouvait à l'extérieur du village et qui n'était

13 pas reconnaissable. On tirait à partir d'endroit et on partait, on le

14 quittait cet endroit. A chaque fois, que possible, les unités ripostaient.

15 Maintenant, si à un moment donné, quelqu'un s'était trouvé à proximité de

16 l'unité chargée des interventions, il est certain que cette unité a

17 forcément, en tirant, dû liquider ces agresseurs. Je parle, là, d'unité

18 chargée d'intervenir, des Unités d'Intervention.

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Juste une petite précision qui s'avère être indispensable. Monsieur

21 Robinson a parlé de civils. Or, quand vous dites, vous, que dans ces

22 attaques contre vous, quelqu'un avait pu être tué parce que vous avez

23 riposté, est-ce qu'il est question de civils, ou est-ce qu'il est question

24 de membres de l'UCK ?

25 R. Je suis un professionnel. Quand je parle de Groupe de sabotages et de

26 terroristes, j'estime que ce sont là des gens qui sont formés e qui ont du

27 moins reçu un entraînement, qui ont des armes, des explosifs, et qui ont

28 des objectifs déshonorables, qui consistent à tuer des gens, d'autres gens.

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1 Les civils ne tirent pas sur d'autres gens. Je ne pense pas donc que

2 quiconque ait pu, de façon organisée, tirer sur des civils. Je n'exclus la

3 possibilité d'avoir un cas sur plusieurs milliers de cas où il y aurait eu

4 délit au pénal, mais ce sont des gens qui ont été poursuivis en justice,

5 c'est certain.

6 Q. Vous n'avez pas sous les yeux l'annexe L où l'on donne la liste des

7 personnes tuées à Kacanik, entre mars et mai 1999. Si quelqu'un voulait

8 bien fournir au général Jelic cette liste, je pense, moi, en avoir encore

9 un exemplaire chez moi. Le voilà. Au bas de la page, disais-je, on dit, que

10 ce sont là des personnes tuées à Kacanik et à Slatina, le 13 avril 1999; le

11 voyez-vous ?

12 R. Oui, je le vois.

13 Q. On dit là qu'il s'agit de 13 civils. Est-ce que vous admettez qu'il y a

14 possibilité que vos effectifs aient vraiment tué ces 13 personnes et que

15 c'étaient vraiment des civils ?

16 R. Très probablement, ce n'était pas des civils. Parce que si j'examine

17 ici les noms et les données, je ne vois qu'un seul mineur. Les autres sont

18 en âge moyen, et que c'était probablement des gens qui étaient armés. Ils

19 peuvent parler du 24 mars ou du 13 avril.

20 Q. le 13 avril ?

21 R. C'est probablement les membres de la brigade dont j'ai déjà parlés. Il

22 se peut qu'ils aient été tués là. Je dois souligner autre chose ici. Peut-

23 être quelqu'un d'autre l'a-t-il déjà dit ? Nous n'avions pas face à nous un

24 ennemi portant uniforme. Ce n'était pas un ennemi officiellement désigné en

25 tant que tel. C'étaient des gens qui portaient des armes, et une fois

26 encerclées, et lorsqu'ils se sentaient menacés de destruction, ils jetaient

27 leurs armes, ils enlevaient les parties d'uniforme qu'ils avaient, et ils

28 se mettaient à déambuler en compagnie de femmes et d'enfants. C'était

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1 pratiquement des civils.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Nice, avec l'aide de M. le

3 Juge Kwon, nous avons constaté que vous avez découvert qu'il s'appelait --

4 M. NICE : [interprétation] Oui. Cela, c'est le premier principe. Je crois

5 que vous constaterez qu'un des témoins a parlé de cela dans une certaine

6 mesure. Cela peut être le Témoin K5.

7 M. le Juge regarde l'heure. Est-ce qu'aujourd'hui, je me lève car je

8 demande à ce que le témoin attende à l'extérieur du prétoire pour que nous

9 puissions parler de ce que nous allons faire demain.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, nous allons

11 maintenant débattre des questions logistiques par rapport au déroulement de

12 ce procès.

13 Mon Général, vous pouvez disposer.

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais finir avec ce que le général à sous

15 les yeux. Puis-je lui poser encore une seule question à ce sujet, au sujet

16 de la liste ?

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic, allez-y.

18 M. MILOSEVIC : [interprétation]

19 Q. Bien. Est-ce que vous voyez sur cette liste ? Vous avez dit vous-même

20 que c'étaient des hommes d'âges moyens. Alors, quel est le sexe ? Ce sont

21 tous des hommes, n'est-ce pas ?

22 R. Oui. Justement, ce sont tous des hommes, du moins pour ce qui est de la

23 liste que j'ai ici. Ce qui est assez symptomatique. C'est le meilleur des

24 âges possibles. Ce sont des hommes et des civils. Donc, très probablement,

25 c'étaient des membres de la brigade dont j'ai parlé.

26 Q. Merci, mon Général.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi avez-vous dit qu'il est

28 fort probable qu'il ne s'agisse pas de civils ? Pourquoi avez-vous dit

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1 cela ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président de la Chambre, je le

3 dis, parce que nous n'avons pas trouvé de soldats. Nous n'avons trouvé

4 aucun, ni en 1998, ni en 1999 sur les territoires où était déployée ma

5 brigade. Tous ceux qui avaient des armes sur eux, c'étaient des civils. Ils

6 portaient des armes mais ils étaient vêtus comme des civils. En application

7 du droit international, dès qu'il a pris un fusil en main, c'est un soldat.

8 Une fois qu'il l'a jeté dans les buissons, il redevient civil. On ne sait

9 pas si c'est un civil ou un militaire, mais il vous tire dessus. Alors, à

10 partir du moment où il vous tire dessus, c'est un ennemi et c'est un

11 soldat, probablement organisé d'une certaine façon et organisé par une

12 institution quelconque parce que ce n'était pas une ligne de front, nous

13 n'avions pas des combats de front. Nous n'avions pas de lignes de

14 démarcation au niveau des territoires. C'étaient des bandes qui

15 surgissaient en ouvrant le feu et en se qualifiant d'armée.

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Bien. Ici, il n'est dit ici dans ces listes qu'il n'y a pas un seul

18 membre de l'UCK tué. D'après ces listes, c'étaient tous, des civils qui ont

19 été tués. Ce sont tous des hommes --

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons nous arrêter là pour

21 aujourd'hui, Monsieur Milosevic.

22 Général, vous pouvez vous retirer.

23 [Le témoin se retire]

24 M. NICE : [interprétation] Il me semble que la question est de savoir s'il

25 faut ou non continuer à attendre ce témoin-ci ou non. Puisque nous

26 échangeons des informations avec Belgrade et le bureau qui s'y trouve

27 d'après les derniers éléments que nous avons reçus, il y a une demie heure,

28 ils ont promis que le document et que les photocopies seraient remis à

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1 notre bureau à Belgrade d'ici, une demie heure. Mais les demi-heures sont

2 plutôt longues. Si ces documents nous parviennent dans ce laps de temps, à

3 ce moment-là, ces documents pourront être acheminés jusqu'ici par un

4 coursier. Je crois qu'il n'y a pas d'autres moyens de le faire, et personne

5 ne voyage ou ne vient ici pour d'autres raisons. Il y a quelque 200 pages

6 d'après ce que j'ai compris. Donc, la première fois où je pourrais les

7 avoir en ma possession, je crois, à un moment donné, ce sera ce soir. Je

8 pense que ce serait assez tard dans la soirée, au mieux. Evidemment, les

9 personnes qui sont en mesure de parler cette langue devront les parcourir.

10 Il y a évidemment au niveau du bureau du Procureur des gens qui ne

11 comprennent le B/C/S.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous pensez qu'il faut

13 rappeler ce témoin ?

14 M. NICE : [interprétation] C'est toujours très difficile. C'est la

15 difficulté qui se pose lorsque nous n'avons pas des documents aussi

16 importants qui ne sont pas remis à l'avance. Pour ce qui est de coûts que

17 cela fait porter à ce Tribunal, de toute façon, ces documents devront être

18 acheminés par coursier. Donc, c'est quelque chose à prendre en compte et

19 j'ai quelque chose qu'il va falloir que j'obtienne, l'affectation de ce

20 montant. Je crois qu'il serait logique d'en terminer avec ce témoin. S'il

21 est fait en sorte que ce document puisse être préparé pour la semaine

22 prochaine.

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je tiens à ce que vous ne perdez pas de vue le

27 fait que je travaille avec de gros efforts toute la semaine. Donc, s'il n'a

28 pas l'intention de citer le témoin à comparaître pour un contre-

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1 interrogatoire demain, il n'y a aucune utilité à me faire travailler

2 demain. Du reste, vous avez décidé de travailler demain seulement au cas où

3 le témoin que nous avons laissé de côté pourrait recomparaître. Mais si ce

4 n'est pas possible, il ne serait pas logique de travailler demain.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que cela me parait, tout à

6 fait, convenable. Dans lequel cas, nous suspendons l'audience et nous

7 allons reprendre mardi prochain.

8 M. NICE : [interprétation] La bonne nouvelle, évidemment, c'est que

9 lorsqu'il y a une ordonnance qui est rendue par la Chambre aux fins de

10 production des documents peut être appliqué sans qu'une commission ou qu'un

11 comité ne soit obligé d'intervenir.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suis heureux de constater que la

13 Chambre peut exercer son influence, Monsieur Nice.

14 M. NICE : [interprétation] Effectivement, ce sont les pouvoirs qui sont les

15 vôtres.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous suspendons l'audience jusqu'à

17 mardi matin, 9 heures.

18 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mardi 6 décembre

19 2005, à 9 heures 00.

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