Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 1 février 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 17.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre vous présente ses

7 excuses. Il y avait beaucoup de circulation, ce matin, ce qui fait que le

8 Juge Bonomy a été retardé.

9 LE TÉMOIN: BRANKO KOSTIC [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

12 Milosevic.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Robinson. Mais avant de

14 poursuivre, deux points que je souhaite soulever. Mme Eve-Anne Prentice

15 n'est arrivée qu'hier soir, tard, d'où le fait que je n'ai pas eu

16 l'occasion de la rencontrer. Or, je ne l'avais jamais rencontré auparavant

17 et il est nécessaire que je voie le témoin avant qu'il ne vienne déposer.

18 C'est vraisemblablement vendredi qu'elle viendra déposer. Cela, c'est un

19 premier point.

20 Deuxièmement, au sujet des ordonnances qui ont à voir avec le dossier

21 médical, je vais vous demander une chose. En fin de journée, j'aurais

22 besoin d'une quinzaine de minutes -- j'ai besoin d'un petit de temps pour

23 m'occuper de cela.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. C'est ce que nous allons faire.

25 Nous allons réserver 15 minutes à la fin du dernier volet de l'audience. Je

26 vous prie, vous avez la parole.

27 Interrogatoire principal par M. Milosevic : [Suite]

28 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Professeur Kostic.

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1 R. Bonjour, Monsieur Milosevic.

2 Q. A la fin de la dernière audience, nous parlions des citations qui

3 figurent à l'acte d'accusation, volet croate et volet de Bosnie-

4 Herzégovine, et dans l'acte d'accusation croate, c'était le paragraphe 99

5 qui correspond au paragraphe 56 du volet bosniaque où il est -- où j'aurais

6 dit que c'était terminé avec la Yougoslavie, que la Serbie était toujours -

7 - or, ce que vous savez, c'est que j'ai toujours été favorable à la

8 Yougoslavie, que la Serbie l'a toujours été. C'est avec une grande dignité

9 que je l'affirme aujourd'hui.

10 Dites-moi : quelle a été mon attitude à l'égard de la Yougoslavie pendant

11 toute la crise yougoslave ?

12 R. Mais, dès le début, que la crise yougoslave s'est amorcée et, en

13 pratique, pendant toute sa durée, votre attitude ainsi que l'attitude de

14 tous les dirigeants de Serbie a été, sans aucun doute, favorable en matière

15 de la Yougoslavie.

16 Q. Vous-même, quelle attitude aviez-vous à l'égard de la Yougoslavie ?

17 R. Mais j'ai vécu pour cela. Je peux dire que, même aujourd'hui, je

18 n'arrive pas à accepter qu'on l'ait perdu et j'ai toujours des regrets à ce

19 sujet.

20 Q. Les dirigeants militaires, quelles étaient leur attitude à l'égard de

21 la Yougoslavie ?

22 R. Parmi toutes les institutions de l'ex-République socialiste fédérative

23 de Yougoslavie, ce sont les dirigeants militaires qui, pendant le plus

24 longtemps, ont pu maintenir leur intégrité, leur unité et ils se sont

25 engagés entièrement pour le maintien de la Yougoslavie. Toutes les

26 interventions, toutes les déclarations, toutes les mesures prises par les

27 dirigeants militaires, du point de vue de l'appréciation de la situation,

28 d'une part, et du point de vue de l'anticipation sur les événements qui

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1 allaient s'en suivre, si on ne mettait pas un terme très sérieusement à

2 cela, et un souhait entier que l'on préserve la Yougoslavie, je pense que

3 ce sont les dirigeants militaires qui l'ont prôné avant tout et je pense

4 que c'est M. Veljko Kadijevic qui était le chef de cette file et aussi le

5 M. Blagoje Adzic, qui était à la tête du chef d'état-major, M. Stane Brovet

6 et d'autres dirigeants militaires.

7 Q. Dites-moi : quelle était la composition ethnique de ce sommet militaire

8 en 1991 ?

9 R. Je ne pourrai peut-être pas vous citer tous les noms, mais parmi les

10 généraux, il y avait surtout des Croates; ils étaient majoritaires. Il y

11 avait quelques Serbes, je pense qu'il y avait seulement deux Serbes dont

12 l'un était originaire de Bosnie, et l'un ou deux Macédoniens, si je ne me

13 trompe pas. Je dois dire que cela étonnera un petit peu parce qu'il y avait

14 toujours beaucoup de généraux originaires du Monténégro, or ce n'était pas

15 le cas à ce moment-là.

16 Donc, c'était cela la situation dans un premier temps. Je pense qu'il y

17 avait le général Domazetvic, et ensuite, le général Boskovic.

18 Q. Vous parlez des Monténégrins.

19 R. Oui.

20 Q. Qui sont arrivés plus tard ?

21 R. Oui.

22 Q. En tant que témoin de l'autre partie, nous avons entendu ici l'ex-chef

23 de l'organe de la sécurité, le général Vasiljevic, dans sa déposition, pour

24 autant que je m'en souvienne, il a cité les noms des personnes qui

25 figuraient au plus haut niveau de l'armée, et on y voit qu'il y avait un

26 Yougoslave, deux Serbes - un de Serbie, l'autre de Bosnie - huit Croates,

27 deux Monténégrins, deux Macédoniens et un Musulman. Vous avez dit qu'il y

28 avait huit Croates parmi les plus hauts dirigeants de l'armée, deux

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1 Slovènes, deux Serbes, un Musulman.

2 Est-ce que vous vous souvenez de ces généraux ? Veljko Kadijevic était le

3 secrétaire fédéral, Blagoje Adzic était le chef du Grand état-major, et

4 aussi Josip Greguric était l'adjoint, et le vice-secrétaire, Stane Brovet,

5 suppléant du secrétaire fédéral, et cetera. Vous souvenez-vous de tous ces

6 noms ?

7 R. Le général Vasiljevic a dit des choses qui doivent être entendues comme

8 des données tout à fait certaines puisque le général Vasiljevic lui-même

9 était parmi les plus hauts dirigeants. Il était tout d'abord le suppléant

10 du chef de la 12e Administration du KOS, et par la suite, il a été le chef

11 de la 12e Administration du KOS. Donc, ces données précises qu'il a

12 communiquées. Il faut estimer qu'elles sont tout à fait certaines. Vous

13 avez mentionné des noms dont je me souviens très bien de tous ces noms. Le

14 plus souvent, je communiquais et je coopérais avec M. Veljko Kadijevic,

15 naturellement avec

16 M. Blagoje Adzic et avec M. Stane Brovet.

17 Q. Est-ce que vous saviez à l'époque - et le savez-vous aujourd'hui - de

18 quelle façon les textes de lois, la constitution, d'autres lois, règlent la

19 question qui concerne la composition, l'appartenance ethnique des officiers

20 dans l'armée ?

21 R. L'appartenance ethnique des officiers était prévue par la loi de la

22 même façon que la structure, la composition nationale de l'armée dans son

23 ensemble, des effectifs de l'armée, sans exagération, on pourrait dire que

24 chacune des unités allant jusqu'au plus bas échelon de l'armée représentait

25 la Yougoslavie en petit. Donc, lorsqu'on recrutait les effectifs pour

26 l'instruction dans les Unités de l'armée yougoslave, on était organisé de

27 telle sorte que les conscrits étaient appelés de telle sorte que leur

28 appartenance ethnique correspondait à la composition de la population

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1 yougoslave, et de même pour les officiers. Mais, vous voyez, il y a un

2 écart considérable au niveau le plus haut. Pratiquement, le peuple serbe,

3 compte tenu des Serbes qui ne vivent pas uniquement en Serbie, qui vivent

4 ailleurs dans le reste de la Yougoslavie, les Serbes constituaient la

5 moitié de la population yougoslave, or, il ressort de ces chiffres que

6 seuls deux Serbes étaient placés en haut de la hiérarchie militaire, donc,

7 au Grand état-major.

8 Q. Cette composition militaire, est-ce qu'elle correspondait au principe

9 énoncé ?

10 R. Non, elle ne correspondait pas, et en plus, c'était préjudiciable aux

11 Serbes.

12 Q. Est-ce que c'est une question qui a été posée ? Est-ce que quelqu'un a

13 posé problème -- présenté cela comme un problème, disant qu'il s'agissait

14 de quelque chose qui était préjudiciable aux Serbes ?

15 R. Non.

16 Q. Parmi les Serbes, personne ?

17 R. Non.

18 Q. Dans son ensemble, les effectifs des forces armées, pour ce qui est de

19 leur composition ethnique, quelle devait être cette composition ethnique ?

20 R. Mais je vous l'ai déjà dit en répondant à la question précédente. Dans

21 son ensemble, les effectifs de l'armée populaire yougoslave correspondaient

22 à la composition ethnique et aussi aux tranches d'âge de la population

23 yougoslave. On peut dire que cela a été le cas jusqu'aux premiers mois de

24 l'année 1991. Mais, dès le deuxième trimestre de 1991, la situation est

25 devenue plus tendue et on a commencé à faire des écarts par rapport à cela

26 parce que certaines républiques quant à elles n'envoyaient plus les

27 conscrits dans les rangs de l'armée populaire yougoslave, elles refusaient

28 de verser leur partie dans le budget, dans les douanes, et cetera, donc,

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1 pratiquement, au cours de l'année 1991, on enfreint de manière considérable

2 à cette Règle de composition ethnique dans l'armée populaire yougoslave.

3 Par exemple, il y avait de moins en moins de Slovènes dans l'armée - là, je

4 parle de conscrits avant tout, des soldats. Par la suite, il y avait de

5 moins en moins de Croates, de Musulmans et d'Albanais également. Donc,

6 l'une des remarques très importantes que j'ai à faire à l'adresse de cette

7 acte d'accusation c'est cela : c'est que les auteurs de l'acte d'accusation

8 ne signalent pas ces problèmes-là, c'était des entraves, des violations

9 directes de la constitution dans un état de droit. Ceci n'est pas

10 acceptable, donc, ils n'en parlent pas et il me semble que c'est de

11 mauvaise foi plutôt qu'ils agissent lorsqu'ils nous accusent d'avoir

12 serbiser [phon] délibérément l'armée populaire yougoslave or c'est

13 l'inverse qui s'est produit.

14 Q. Je vous remercie, Professeur Kostic. Très brièvement, pourriez-vous

15 nous dire quelle a été la composition ethnique parmi les dirigeants les

16 plus hauts placés de l'Etat au moment où la sécession a commencé à se

17 produire sur la scène politique de manière intense, donc la première moitié

18 de 1991 ? Très concrètement, qui était le chef du gouvernement à ce moment-

19 là ?

20 R. Le chef du gouvernement était M. Ante Markovic, un Croate, et il était

21 un délégué venu de Croatie.

22 Q. Qui était le Ministre des affaires étrangères, à l'époque ?

23 R. C'était M. Budimir Loncar, qui est d'appartenance nationale croate

24 également lui aussi, et qui était un député de Croatie.

25 Q. Qui était à la tête de la présidence de la RSFY ?

26 R. Le président de la présidence de la RSFY était M. Stjepan Mesic, qui

27 lui aussi est un Croate, il est venu de Croatie et il représentait la

28 Croatie. Je peux ajouter à cela que dès 1991, deux ou trois fonctions les

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1 plus importantes au sein de la RSFY étaient exercées par des Croates de

2 Croatie. Par exemple, M. Branimir Zekan était Ministre fédéral des finances

3 de la RSFY. Ensuite, M. Bozidar Marendic était le Ministre fédéral dans le

4 gouvernement d'Ante Markovic, qui était chargé des sciences, des

5 technologies et du développement. Dans ce groupe, je ne nommerai pas M.

6 Veljko Kadijevic, même si c'était un représentant de la Croatie, mais

7 d'appartenance ethnique de ses parents; il a parmi ses parents un Croate et

8 un Serbe, donc, je ne pense pas qu'il faudrait le citer dans ce premier

9 groupe.

10 Q. Très bien. Mais il se déclarait en tant que Yougoslave, ni comme Serbe,

11 ni comme Croate. Compte tenu de cela, dites-moi, s'il vous plaît : si ces

12 républiques, républiques qui souhaitaient faire sécession; est-ce que je

13 peux les appeler sécessionnistes. Est-ce qu'elles avaient une raison de se

14 sentir placer sur la domination de la Serbie ou des Serbes ?

15 R. Personnellement, je pense qu'elle n'avait aucune raison de se sentir de

16 cette manière-là, d'avoir l'impression d'être placée sous la domination,

17 l'hégémonie des Serbes ou d'avoir des craintes là-dessus. Je suis un

18 économiste et compte tenu du fait que depuis longtemps j'avais enseigné à

19 l'université. J'étais vice chef du gouvernement chargé du développement,

20 donc du gouvernement monténégrin. Je peux affirmer en toute liberté que

21 dans le reste de la RSFY on estimait généralement que la Slovénie et la

22 Croatie de la cadre de la RSFY s'étaient trouvées dans une position plutôt

23 privilégiée parce que ces deux républiques étaient les plus développées.

24 Toute l'industrie de transformation s'est développée pratiquement sur le

25 territoire de la Slovénie ou de la Croatie, et en même temps, ces deux

26 républiques les plus développées, elles pouvaient bénéficier d'un marché

27 immense de 24 millions d'habitants, donc pour y placer leurs produits. Par

28 rapport aux territoires moins développés, par rapport à la Serbie

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1 également, elles avaient des matières premières et des produits

2 alimentaires aux prix moins élevés.

3 Q. Vous venez de nous dire quelle a été la situation au niveau le plus

4 haut de l'armée, de l'Etat, le président de la présidence, le chef du

5 gouvernement, Ministre des affaires étrangères, des finances, Ministre

6 chargé du développement, et cetera. Dites-moi : quelle avait été la

7 situation sur ce plan avant cela, donc, à partir de la fin de la Seconde

8 guerre mondiale jusqu'à ce moment-là ?

9 R. Je ne dirais peut-être pas tout dans l'ordre chronologique exact, mais

10 je peux vous dire l'essentiel. Le maréchal Josip Broz Tito, à partir de

11 1945 jusqu'à sa mort en 1980, a été le chef d'Etat, et il a été l'autorité

12 incontestable, la personnalité incontestable qui, on peut dire sans

13 exagérer, détenait tout le pouvoir, que ce soit en tant que chef d'Etat ou

14 en tant que chef du parti de l'époque, la Ligue des Communistes de

15 Yougoslavie. A partir de 1980

16 -- à partir du décès de Tito jusqu'en 1992, le rôle du chef d'Etat était

17 exercé -- joué par la présidence de la RSFY en tant qu'un organe collectif.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je ne souhaitais

19 pas vous interrompre, mais il me semble que nous sommes en train de répéter

20 ce que nous avons déjà vu. Nous avons entendu des témoignages, des

21 dépositions portant là-dessus.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Fort bien.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Savez-vous si, pendant cette période prolongée, à l'exception de ces

25 quatre années, il y a eu qui que ce soit qui aurait exercé le rôle du chef

26 du gouvernement fédéral et qui soit venu de Serbie ?

27 R. Seul une fois pendant un mandat de quatre ans, il y a eu un

28 représentant serbe, M. Petar Stambolic qui a exercé ces fonctions-là, du

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1 chef du gouvernement fédéral.

2 Q. Je vous ai posé une question portant sur les Règlements, eu égard à la

3 composition ethnique de l'armée.

4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite verser au dossier l'intercalaire

5 85, Monsieur Robinson. Je ne l'ai qu'en anglais, je dois dire. C'est

6 l'article 540 de la constitution qui prévoie quelle est la nomination au

7 poste supérieur au sein de l'armée et qui précise que c'est le principe de

8 la composition ethnique proportionnée qui sera appliquée.

9 M. MILOSEVIC : [interprétation]

10 Q. Je vous ai cité cet article de la constitution. Vous venez d'expliquer

11 à l'instant que cet article n'a pas été respecté et qui n'a pas été

12 respecté au détriment de l'élément serbe, de la partie serbe. Est-ce que

13 c'est bien ce que vous avez dit ?

14 R. Oui, c'est précisément cela.

15 Q. Je vous remercie.

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement de l'intercalaire 85.

17 Il ne s'agit que de cet article de la constitution, et d'ailleurs on l'a

18 qu'en anglais.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait. Ce sera versé au

20 dossier.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Comment êtes-vous devenu membre de la présidence de la RSFY ? Comment

23 avez-vous été élu à ce poste ?

24 R. M. Nenad Bucin qui représentait le Monténégro au sein de la présidence

25 de la RSFY, après cette réunion qui a duré trois jours en mars 1991, bien,

26 il a présenté sa démission irrévocable à ce poste au sein de la présidence.

27 Il a maintenu sa décision, sa démission, et alors comme cela est prévu par

28 la constitution, j'ai été élu au milieu d'avril 1991 à la présidence de la

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1 RSFY. L'assemblée yougoslave comme cela est prévu par la constitution a

2 confirmé mon élection le 16 mai 1991.

3 Q. Dites-nous quel était le nombre des membres de la présidence RSFY ? Qui

4 représentait-il ? Comment était-il élu ? Devant qui répondait-il ?

5 R. Il y avait huit membres de la présidence. Chacune des républiques en

6 fournissaient un, ainsi que les deux provinces autonomes. Le Kosovo et le

7 Metohija qui chacune avait leur représentant au sein de la présidence.

8 Comment se passait l'élection ? Ce sont les assemblées des républiques qui

9 les élisaient, enfin, des républiques ou des provinces. En pratique, ils

10 répondaient aux organes qui les avaient élus, donc les assemblées dans

11 républiques, même si notre mandat en tant que membre de la présidence

12 n'avait pas une nature catégorique ou impérative. En d'autres termes, un

13 membre de la présidence pouvait agir de manière autonome et l'assemblée à

14 son tour pouvait révoquer le membre qu'elle avait élu initialement.

15 Q. Qui était les membres de la présidence au moment où vous y aviez été ?

16 R. La Slovénie était représentée par M. Janez Drnovsek; la Croatie, par M.

17 Stjepan Mesic; la Bosnie-Herzégovine, par Bogic Bogicevic; la Serbie, par

18 Dr Borisav Jovic; la Macédoine, par

19 Dr Vasil Tupurkovski; la Vojvodine, par Jugoslav Kostic; le Kosovo-Metohija

20 par M. Sejdo Bajramovic; et le Monténégro, c'est moi qui le représentais.

21 Q. Comment fonctionnait la présidence ? Comment est-ce que proposait --

22 faisait des propositions ? Comment on prenait des décisions ?

23 R. En plus des compétences précisées par la constitution, bien, il y avait

24 un ordre du jour, un agenda pour et un Règlement interne pour la

25 présidence. La présidence en pratique était composée de huit personnes

26 placées sur un pied d'égalité. Alors, c'était soit la majorité simple qu'on

27 pouvait prendre une décision, donc, pour chaque décision, il fallait au

28 moins cinq voix pour les questions les plus importantes, il était prévu de

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1 voter à une majorité des deux tiers, donc il fallait six voix. Sur les huit

2 membres et le président et le vice-président de la présidence, quant à eux,

3 ils n'avaient pas de droit plus important que les autres membres de la

4 présidence. Si ce n'est qu'au sein de cet organe collectif ils devaient

5 opérationnaliser les décisions prises par l'organe collectif, par la

6 présidence.

7 Q. Très brièvement, pouvez-vous nous dire quelles étaient les attributions

8 de la présidence ?

9 R. La présidence était le chef de l'Etat. La présidence représentait sur

10 le plan interne et extérieur de l'Etat, répondait en la matière de la

11 politique étrangère, nommait les ambassadeurs, recevait les accréditations,

12 la lettre de créance. En plus, de ce qui était prévu par la constitution,

13 il faut savoir aussi que la présidence était le chef suprême des forces

14 armées de la RSFY.

15 Q. Vous avez expliqué quel est le problème qui se posait à la présidence

16 en mars et comment on a surmonté ce programme-là, à savoir, l'assemblée de

17 Serbie a ramené Jovic à la présidence et l'assemblée monténégrine vous a

18 nommé, vous, et un nouveau problème s'est posé avec l'élection de M.

19 Stjepan Mesic à la présidence. Avant lui, qui représentait la Croatie au

20 sein de la présidence ?

21 R. Avant Mesic, c'est M. Stipe Suvar qui a été le représentant croate.

22 Q. De quelle manière et pourquoi c'est M. Stjepan Mesic qui est venu

23 remplacer M. Stipe Suvar ?

24 R. M. Stipe Suvar est venu à la présidence en tant que représentant de la

25 Croatie proposée par la Ligue des Communistes de Croatie. Entre-temps, en

26 Croatie, c'est un système pluripartite qui a été instauré et en 1990, les

27 premières élections pluripartites législatives ont été organisées en

28 Croatie.

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1 A ces élections-là, la Ligue des Communistes, Sanic [phon] a été

2 battu en brèche. La grosse majorité des voix a été remportée lors de ces

3 élections pluripartites, une majorité absolue, dirais-je, si je ne me

4 trompe a l'assemblée croate, a été remportée par la communauté démocratique

5 croate avec, à sa tête, M. Franjo Tudjman. Naturellement, dès qu'il y a eu

6 un changement au pouvoir, le représentant croate à la présidence a été

7 changé. La communauté démocratique croate a décidé de révoquer M. Stipe

8 Suvar et elle a décidé de faire représenter la Croatie par M. Stjepan

9 Mesic.

10 Q. Suvar, quelle attitude avait-il à l'égard de l'Etat yougoslave ?

11 R. De toute évidence, M. Suvar prônait le maintien de la Yougoslavie.

12 Q. L'attitude de Mesic, quelle a été -- telle qu'elle était à l'égard de

13 la Yougoslavie ?

14 R. Je pense que c'est un secret de polichinelle. Tout le monde sait, sur

15 la base de ces déclarations, sur la base de ce qu'il a dit ici, en

16 particulier, sur la base du livre qu'il a publié, à peu près en même temps

17 que j'ai publié le mien, vers 1994, il semblerait que

18 -- il se présente comme ni vu, ni connu, alors qu'il a fait beaucoup de

19 choses pour qu'il y ait le démantèlement de la Yougoslavie.

20 Q. Très bien. Son attitude anti-yougoslave et le démantèlement délibéré de

21 la Yougoslavie, est-ce que Mesic en a parlé publiquement ?

22 R. Oui.

23 Q. Je veux dire, à cette époque-là ?

24 R. Oui. A plusieurs reprises, même peu qu'il était élu représentant de la

25 Croatie à la présidence yougoslave et qu'il est devenu président de la

26 présidence yougoslave. Il a déclaré qu'il allait être le dernier président

27 de la présidence yougoslave même si par la suite, il a essayé d'interpréter

28 différemment et d'expliquer différemment cette déclaration. Ces intentions

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1 étaient claires et il me semble, et je dois le dire là. Il me semble que

2 quelques années après tout cela donc, en 1999, au moment où M. Stjepan

3 Mesic s'est trouvé à la tête d'un parti d'opposition en Croatie donc, un

4 parti d'opposition par rapport à Tudjman et le HDZ, donc, où il était dans

5 l'opposition. A la télévision monténégrine, dans le cadre d'un programme,

6 je pense qu'il s'est exprimé de manière, tout à fait, objective. Je

7 n'aurais rien à corriger à la déclaration qu'il a faite, à ce moment-là.

8 Donc, lorsqu'il a parlé de ces moments-là de l'année 1991.

9 Q. Dans quel sens ? Qu'a-t-il dit exactement ?

10 R. Il a déclaré que ceci faisait partie du programme politique du HDZ, de

11 faire la sécession par rapport à la Yougoslavie, de créer un Etat croate

12 indépendant. Il a dit que toutes ces propositions qui avaient été faites à

13 l'époque, avaient effectivement cette finalité et même l'idée d'une

14 confédération qui avait été proposée à l'époque. Si vous en avez le temps,

15 nous pourrons apporter la preuve ici, que cette idée de la confédération ou

16 d'une confédération n'était qu'une demi-mesure ou un pas vers l'objectif

17 ultime qui était l'indépendance d'un Etat croate, et il l'a dit à la

18 télévision monténégrine. Il a dit : "Votre Etat monténégrin, il a été

19 reconnu, même au congrès de Berlin, en 1878. Par conséquent, vos ambitions

20 étatiques ont été réalisées, ce qui n'a pas été le cas pour la Croatie, ce

21 qu'il faut accomplir même, au prix de la guerre."

22 Q. Nous y reviendrons dans un instant. Vous avez dit que vous aviez

23 quelque chose à ce propos. Vous avez expliqué quelle a été l'attitude qu'il

24 avait en public à l'égard de la Yougoslavie, quelles étaient les

25 obligations incombant à tout membre de la présidence de la RSFY en ce qui

26 concerne l'intégrité territoriale du pays ?

27 R. C'est la constitution qui l'impose à tout membre de la présidence.

28 Cette obligation est de représenter non seulement la république dont on

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1 vient mais de représenter les intérêts de tout citoyen yougoslave.

2 L'obligation, elle est de préserver l'intégrité territoriale de la

3 Yougoslavie. Cet amendement constitutionnel est intégré dans le serment que

4 tout membre de la présidence doit prêter devant le parlement fédéral de la

5 RSFY, lorsqu'il y confirmation de l'élection à la présidence.

6 Q. Un membre de la présidence, comment était-il élu ?

7 R. Ceci était régi par un Règlement intérieur, un Règlement de procédure.

8 Il y avait un vote à une séance de la présidence.

9 Q. Donc, cela c'est un Règlement de procédure ?

10 R. Oui. Cela se faisait simplement à la majorité simple ou 5 sur 8.

11 Q. Qui a voté en faveur et qui s'est prononcé contre l'élection de Mesic

12 lors de cette séance lorsque sa question, la question de la désignation de

13 Mesic a posé problème ?

14 R. Le premier vote s'est fait le 15 mai 1991. C'est

15 M. Drnovsek, de Slovénie qui était en faveur, M. Mesic, de Croatie. Il y

16 avait aussi Bogic de la Bosnie-Herzégovine et il y avait

17 M. Tupurkovski, Vasil de la Macédoine.

18 Q. Cela fait quatre. Qu'en est-il des quatre autres membres ? Est-ce

19 qu'ils ont voté contre ?

20 R. Lors de cette séance de travail, trois membres de Serbie, du Kosovo --

21 Kosovo-Metohija et la Vojvodine se sont prononcés contre son élection.

22 Puisque ma propre élection, la présidence n'avait pas encore été confirmée

23 par le parlement fédéral. Il y avait à cette réunion de travail, le

24 président de la présidence -- venant du Monténégro, M. Momir Bulatovic, qui

25 s'est abstenu. Il a expliqué son abstention en disant que c'était

26 l'indignation qui l'avait poussé à s'abstenir parce que mon élection

27 n'avait pas été confirmée à la présidence fédérale.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment est-ce que vous auriez

Page 47700

1 voté ?

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] En fait, je me suis exprimé là-dessus, deux

3 jours plus tard, et je m'explique. J'aurais voté contre.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Dites-nous maintenant, il nous faut tirer cette question au clair.

6 Cette question soulever par M. Robinson. Combien y a-t-il eu de tentatives

7 pour procéder à l'élection de Mesic ?

8 R. Deux.

9 Q. La deuxième fois, vous étiez déjà confirmé à la présidence de la RSFY

10 et vous participez régulièrement aux réunions ?

11 R. Deuxième tentative, deux jours plus tard, le 17 mai. Mon élection a été

12 confirmée le 16 mai par l'assemblée fédérale, le 17. Mais j'étais déjà

13 légalement membre de la présidence et c'est en tant que tel que j'ai

14 participé à cette séance. Il y a beaucoup de spéculations. On spéculait

15 beaucoup sur le fait de savoir comment j'allais me prononcer si ma voix, ma

16 cinquième voix allait être celle qu'il fallait pour décider de la question.

17 Auparavant, j'avais été à l'assemblée du Monténégro pour y avoir des

18 consultations même si la conclusion de l'assemblée n'allait pas dicter mon

19 attitude mais je voulais quand même vérifier et j'ai dit de façon un peu

20 ironique que, même si je votais pour M. Mesic, mon vote en tant que vote

21 pour le Monténégro ne serait pas la cinquième voix, mais elle sera la

22 première voix. C'était un peu, une boutade; cependant, lors de cette

23 réunion, là, j'aimerais vous lire rapidement une explication, une

24 motivation --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais il faut avancer, Monsieur

26 Milosevic.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, ce ne sera pas long du tout. M. Kostic

28 l'a dit. Cela va être quelque chose de très brève --

Page 47701

1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas une bonne

2 réponse si c'est sans pertinence. Ecoutons-le.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est très pertinent. A

4 l'occasion de cette réunion de travail de la présidence, cela se trouve

5 dans mon livre qui s'intitule : "Pour qu'on n'oublie pas 1991," vous avez

6 ceci à l'onglet 20 dans vos classeurs -- à la page 20.

7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à savoir de quel onglet il

8 s'agit ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai dit. Je vais en faire une lecture

10 lentement.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela se trouve à quel intercalaire,

12 Monsieur Milosevic ?

13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Intercalaire 72.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est 72.

15 L'INTERPRÈTE : L'interprète dit que le président confirme

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Vous citez quelle page ?

18 R. Page 20, début du troisième paragraphe.

19 Q. C'est l'intercalaire 72.

20 R. Puis-je ?

21 Q. En fait, c'est la réponse à la question de savoir pourquoi vous avez

22 voté contre Mesic.

23 R. Je l'ai dit : "C'est un droit inaliénable et souverain de toute

24 république de la Yougoslavie, dont la Croatie, que de confier au président

25 de la RSFY -- de déléguer à la présidence les représentants qui se prêtent

26 le mieux à la tâche. Etre membre de la présidence, en tant que présidence

27 collective de l'Etat signifie que la personne qui représente une république

28 représente celle-ci ou son parti politique mais que cette personne doit

Page 47702

1 tenir compte des intérêts des autres nations, des autres peuples

2 constitutifs, des autres républiques qui sont unies dans l'Etat

3 démocratique de Yougoslavie. C'est la raison pour laquelle en vertu du

4 Règlement, il est prévu que les décisions soient prises en tenant compte de

5 l'avis de tous les membres de la présidence.

6 "Si le contraire se produit, sauf le respect que je dois à

7 M. Mesic qui était le représentant légitime de la Croatie élu par les

8 autorités légitimes de la République de Croatie, je ne soutiendrais pas son

9 élection à la présidence de la RSFY."

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est là quelque chose qui sonne

11 bien, et nous savons maintenant pourquoi vous votez contre.

12 Avancez, Monsieur Milosevic.

13 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons --

15 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] -- je signale simplement que nous

16 n'avons pas la traduction de cet intercalaire 72. Je me demande quand on va

17 obtenir la traduction.

18 M. KAY : [interprétation] Inutile de traduire tout le livre, je suppose.

19 Manifestement, l'accusé aborde la question de la traduction avec beaucoup

20 de soin et d'attention.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous avons la traduction ici,

22 Madame Uertz-Retzlaff. Ce que nous avons à l'écran est fort bien dit, mais

23 je ne sais pas si ceci nous avance vraiment. Ce qui a été lu est traduit à

24 l'audience sera versé au dossier, mais rien de plus.

25 Inutile d'en parler davantage, Professeur.

26 Question suivante, Monsieur Milosevic.

27 M. MILOSEVIC : [interprétation]

28 Q. Dites-nous, revenons sur ce passage dont vous venez de faire la lecture

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1 et sur les passages que vous n'avez pas eu le temps de lire.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faut avancer, Monsieur Milosevic.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'avance. J'avance. Je ne vais pas en arrière.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne revenez pas sur le même passage.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'auparavant vous pourriez

6 nous dire quelle a été la cinquième voix qui s'est exprimée ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Lors de cette réunion de travail, M. Mesic n'a

8 pas été élu parce qu'il n'y a pas eu de cinquième voix. C'est seulement le

9 13 juillet qu'il a été élu, or, là, on était simplement le 17 mai.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. De façon directe ou indirecte, est-ce que vous avez jamais contesté le

14 fait que la présence de Mesic à la présidence aurait été légitime ?

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce que vous avez contesté son droit --

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la pertinence de ceci ?

18 Quelle est la pertinence de savoir si des crimes de guerre ont été commis

19 ou pas ? Quelle est la pertinence entre ceci et le fait de savoir si on a

20 commis des crimes de guerre ?

21 L'ACCUSÉ : [interprétation] La pertinence est de savoir s'il y a eu cette

22 séance qui a provoqué la guerre, et qui a participé. Quels en furent les

23 acteurs ? Parce que de l'avis de tous ceux qui se trouvaient dans le pays à

24 l'extérieur, c'est à cause de sécession qu'il y a eu la guerre --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Nous n'allons pas avancer tant

26 que la question soulevée par le Juge Bonomy n'est pas réglée.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que -- pour mois cela n'a aucun

28 intérêt de savoir si effectivement ici ou si de savoir si le témoin

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1 conteste la légitimité de la présence en tant que membre de la présidence

2 de M. Mesic à cette présidence, pour moi, cela n'a aucun intérêt même en la

3 matière.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Vous n'avez pas de commentaire

7 à offrir. Il ne vous revient pas de faire des commentaires ou d'en

8 proposer. Vous êtes ici pour répondre aux questions posées par M.

9 Milosevic.

10 M. MILOSEVIC : [interprétation]

11 Q. Etant donné que vous n'avez pas contesté la légitimité de son statut de

12 membre de la présidence, au contraire, vous avez insisté là-dessus, alors,

13 pourquoi est-ce que vous n'avez pas voté pour qu'il devienne président de

14 la présidence ?

15 R. Parce que j'avais peur d'une chose c'est qu'en tant que président de la

16 présidence il utilise ses fonctions abusivement afin d'appliquer le

17 programme politique de son parti c'était à cause de son parti qu'il avait

18 été délégué à la présidence. Ceci s'est avéré bien des fois par la suite. A

19 l'époque, nombreux furent ceux qui ont essayé d'établir un lien entre la

20 voix -- ma voix qui s'était prononcée contre Mesic et des motivations

21 idéologiques, mais il n'y avait pas, ce lien n'était pas établi. Un mois et

22 demi s'est écoulé, pendant lequel il n'y avait pas de président élu. Au

23 cours de cette période j'ai proposé notamment--

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je dois aussi ici mettre en doute la

25 pertinence de tout ceci. Nous savons ce qu'ont fait la Croatie et la

26 Slovénie, et c'est le fait que la Slovénie et la Croatie et, en fait, nous

27 connaissons le protagoniste. Alors, à quoi sert-il de revenir une fois de

28 plus sur tout ceci pour avoir la vie personnelle de M. Kostic ? Même si

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1 c'est un avis fort éduqué, fort informé, intéressant pour la vie générale

2 en Yougoslavie, ceci n'a rien à voir avec les questions qui se posent dans

3 le présent procès.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je soutiens ce que vient de dire le

5 Juge Bonomy. Je ne vois pas l'intérêt qu'il y a à poser ce genre de

6 question, quelque part elles me semblent poursuivre un intérêt personnel

7 que -- venir éclairer les questions en cause dans ce procès. Peut-être que

8 des universitaires aimeront parler de ce genre de sujet, mais ceci ne nous

9 intéresse pas. Alors, passez aux questions découlant de l'acte

10 d'accusation.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais l'incidence ici est indirecte parce qu'ici

12 on va faire la lumière sur d'autres questions. Le fait que Mesic n'a pas

13 été élu, cela a été considéré par ses partisans comme étant une violation

14 des droits de la Croatie. Mais cela n'a pas été vrai parce que la

15 République de Croatie avait ses membres dans la présidence. Mais l'élection

16 du président de la présidence, c'était quelque chose que devait décider la

17 présidence. J'ai demandé à

18 M. Kostic si ceci avait battu en brèche l'égalité de la Croatie dans cette

19 présidence. Si ceci ne vous intéresse plus, je vais passer à d'autres

20 questions. Parce que tout ceci fait déjà partie de l'histoire et tout le

21 monde l'accepte sauf la partie adverse ici.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Monsieur Kostic, au sein de la présidence de la RSFY, à l'époque où

24 vous êtes devenu membre, quels étaient les rapports entre les membres, les

25 huit membres de la présidence ?

26 R. Je me dois de dire que pendant le temps au cours duquel nous avons

27 collaboré, coopéré, ce sentiment de tolérance. Lors de plusieurs réunions

28 de travail, la présidence a réussi à aboutir à des décisions, décisions

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1 importantes d'ailleurs; cependant, plus tard, la mise en œuvre de ces

2 décisions a été entravée.

3 A plus d'une reprise, j'ai eu l'occasion de dire que je n'avais rien

4 personnellement contre M. Mesic. Nous avions des rapports tout à fait

5 normaux et c'est tout à fait vrai, quand il n'était pas devant une caméra

6 ou lorsqu'il n'était pas enregistré, M. Mesic, c'était un interlocuteur

7 tout à fait valable, je l'ai souvent dit. Mais dans nos rapports au

8 quotidien, bon cela c'était une chose, mais ses interventions en public,

9 c'était autre chose. Au parlement croate, il a même dû justifier certaines

10 décisions qu'il a prises avec nous en tant que membre de la présidence.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant de passer à une autre question, ici,

12 cette partie du compte rendu d'audience est déjà partie de l'écran, mais je

13 dois corriger quelque chose. J'avais posé une question qui était de savoir

14 s'il lui est arrivé d'être ou si le témoin était opposé à l'idée que la

15 présence de Mesic était légitime. Ici, il a été dit oui en guise de

16 réponse, alors que sa réponse a été négative. Il faudrait corriger le

17 compte rendu d'audience dans ce sens.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci est noté, Monsieur Milosevic.

19 Poursuivez.

20 M. MILOSEVIC : [interprétation]

21 Q. Lorsque vous êtes entré en fonction en tant que membre de la présidence

22 en 1991, la tension montait déjà, n'est-ce pas ? Il y avait déjà des heurts

23 ou les affrontements ?

24 R. Oui.

25 Q. Quelles mesures la présidence de la RSFY a-t-elle prises pour essayer

26 d'empêcher que n'éclate un conflit armé ?

27 R. Il y eu beaucoup de mesures, mais toutes revenaient à dire qu'il

28 fallait mettre un terme aux affrontements armés, qu'il fallait s'abstenir

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1 de toute part de recourir à la force. Que la JNA, qui pendant longtemps

2 avait sans arrêt averti que ceci allait mal tourner, et que ceci allait

3 déboucher sur une guerre civile, et en application de décisions prisent par

4 la présidence. La JNA était avertie qu'il ne fallait pas prendre partie

5 pour une partie ou une autre s'il y avait un conflit, mais qu'elle devait

6 servir de tampon pour empêcher que n'éclate des heurts interethniques.

7 Premier engagement de grande envergure ce fut effectivement lorsque la

8 Slovénie a décidé de faire sécession et a pris l'initiative de le faire en

9 violation de la constitution. A cette époque-là, la Défense territoriale de

10 la Slovénie a enlevé tous les symboles yougoslaves des frontières de l'Etat

11 et des postes frontières vers la Slovénie. L'armée n'a pas été engagée pour

12 s'opposer à la Slovénie, mais pour aider les autorités frontalières, la

13 police frontalière, fédérale afin que ces instances puissent exercer le

14 contrôle qu'elles devaient exercer sur les frontières de la RSFY.

15 Q. Nous n'allons pas aller plus loin, mais puisque vous avez abordé ce

16 sujet, je vais vous demander qui a dépêché l'armée en Slovénie ? Est-ce que

17 c'était une décision prise par la présidence fédérale ?

18 R. Non. C'est le Conseil exécutif fédéral qui a pris cette décision, qui

19 avait à sa tête Ante Markovic, cette décision prise le 26 juin 1991. En

20 prenant cette décision, le Conseil exécutif fédéral a dit au secrétariat

21 fédéral de l'Intérieur et au secrétariat fédéral chargé des frontières,

22 qu'il fallait rétablir la situation sur les frontières de l'Etat pour qu'on

23 revienne dans la zone antérieure; et le secrétariat fédéral de la Défense

24 nationale devait prêter assistance s'il y avait des obstacles qui se

25 posaient dans la mise en œuvre de ces mesures.

26 Q. Donc c'était une décision du Conseil exécutif fédéral qui avait à sa

27 tête Ante Markovic. Fort bien. Mais comment est-ce que la guerre a éclaté

28 en Yougoslavie ? Qu'est-ce qui en était la cause ?

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1 R. La guerre, elle a pratiquement commencé en Slovénie, même si on ne peut

2 pas dire que cela a été une véritable guerre. Mais il y a eu des heurts,

3 des affrontements, et tous autant qu'ils ont été, proviennent de l'acte

4 unilatéral sécessionniste qui était en violation de la constitution de la

5 Yougoslavie. La Slovénie a déclaré son indépendance, s'est emparée des

6 frontières de l'Etat, en a enlevé les symboles yougoslaves, c'est ainsi que

7 le conflit a éclaté. Pareil pour la Croatie lorsque les autorités qui

8 étaient alors en place en Croatie ont essayé de dire que le droit, la loi

9 yougoslave n'était plus de rigueur et ni en vigueur sur son territoire, et

10 lorsque ces autorités ont tenté d'établir leurs propres autorités de police

11 là où il y avait surtout des Serbes qui habitaient, lorsque ces autorités

12 ont essayé d'envoyer des Unités de Police dans ces zones, prenant ainsi le

13 pouvoir des autorités qui existaient à l'époque où habitaient les Serbes,

14 il s'est créé un climat de peur, et il y a eu une rébellion, un soulèvement

15 spontané. Il y a eu des barrages routiers et c'est ainsi qu'on a qualifié

16 ses premiers affrontements de la révolution des troncs ou des bûches qu'on

17 n'a pas utilisés dans des activités offensives pour attaquer, c'était pour

18 empêcher que ne pénètrent sur ce territoire les forces de police croates.

19 Q. Mais est-ce qu'il y a d'autres hommes politiques qui partagent votre

20 avis quant à l'origine de cette guerre ?

21 R. Je dois dire que pour ce qui est de la politique étrangère, si on parle

22 du tout début du conflit en ex-Yougoslavie, c'est

23 M. Baker qui m'a le plus impressionné.

24 Q. Est-ce que nous pourrions voir rapidement ce que pensait

25 M. Baker. Est-ce qu'on peut revenir là-dessus rapidement vu ce que vous

26 venez de dire à propos des causes de la guerre.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande qu'on diffuse une séquence qui

28 montre la déclaration de M. Baker.

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1 [Diffusion de la cassette vidéo]

2 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

3 "Les américains n'avaient pas du tout cet avis. En effet, nous avons

4 dit que si la Yougoslavie ne connaît pas un démantèlement par la paix, ce

5 sera vraiment une guerre difficile, mais il y avait guerre parce que la

6 Slovénie et la Croatie ont proclamé leur indépendance, de façon unilatérale

7 et ces deux pays se sont emparés des postes frontières par la force en

8 violation des principes de Helsinki; cependant, les puissances européennes

9 - et aussi, en dernière instance, les Etats-Unis - ont reconnu la Slovénie,

10 puis la Croatie, puis la Bosnie, en tant qu'Etats indépendants. Ils les ont

11 admis aux Nations Unies. Le problème véritable qu'il y a eu, c'est qu'il y

12 a une proclamation unilatérale d'indépendance et le recours à la force

13 plutôt qu'une négociation pacifique en vue de l'indépendance alors que

14 c'est comme cela que ceci aurait dû se passer."

15 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Je vous remercie. Par vous, nous venons de voir, Baker. Prenons les

18 intercalaires 89 et 90 du volet Kosovo de ce prétendu, acte d'accusation,

19 lorsqu'il n'y avait pas encore un mandat leur permettant de dresser des

20 actes d'accusation pour la Bosnie.

21 Je vais citer une partie du 89 qui dit : "Que le 25 juin 1991, la

22 Slovénie a déclaré son indépendance, ce qui a entraîné la guerre."

23 C'est ce qui est dit dans ce paragraphe de la partie adverse. Partie

24 suivante, on dit, "La Croatie a déclaré son indépendance, le 25 juin 1991,

25 ce qui a conduit à des hostilités," et ainsi de suite. Puis au paragraphe

26 90, voici ce qui est dit : "La Bosnie-Herzégovine a proclamé à son tour son

27 indépendance le 6 mars 1992, ce qui a conduit à un conflit de grande

28 ampleur après le 6 avril 1992."

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1 Donc, même, même l'Accusation, avant de songer à la Croatie et à la

2 Bosnie parce que personne ne pourrait songer à ce genre de chose. Il a

3 établi ici dans cet acte d'accusation que s'il y a eu guerre, c'est à cause

4 de ces actes de sécession.

5 Est-ce que c'est bien cela ce que vous savez ? Ou pensez-vous que

6 cela s'est passé différemment ?

7 R. Je dois dire que c'est une -- un des rares passages de cet acte

8 d'accusation auquel je souscris, à savoir que la déclaration unilatérale de

9 l'indépendance dans toutes les régions de l'ancienne RSFY a entraîné la

10 guerre. C'est exact. Effectivement, ce qui est dit à ce sujet dans l'acte

11 d'accusation mais je dois dire si vous me le permettez de vous faire part

12 ici de mon opinion personnelle qu'il y a dans l'acte d'accusation de

13 nombreux passages qui se contredisent.

14 Q. Merci. Donc, la sécession a entraîné la guerre entre les républiques et

15 il y a eu donc, désintégration, démantèlement comme on a l'habitude de dire

16 aussi.

17 R. J'ai utilisé le terme de démantèlement, pas celui de désintégration.

18 Q. Les dirigeants de certaines de ces républiques sécessionnistes ont-ils

19 reconnu que la sécession, c'était ce qui expliquait la guerre, la cause de

20 la guerre ?

21 R. Les deux dirigeants de ces trois républiques l'ont déclaré publiquement

22 lors d'une audience publique sans d'autres formes de procès. M. Tudman, à

23 Ban Jelacic, sur la place Ban Jelacic, lors d'un meeting devant ses

24 partisans l'a déclaré publiquement. C'était un meeting à l'occasion de sa

25 réélection à la présidence de la Croatie.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on voir ce passage, s'il vous plaît ?

27 C'est le passage suivant où on entend la déclaration de Tudjman.

28 [Diffusion de cassette vidéo]

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1 L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

2 "Certains, en Croatie, en particulier, à l'étranger qui n'étaient pas

3 les amis de la Croatie ont dit qu'il n'y aurait pas dû y avoir de guerre,

4 que nous étions responsables de la guerre. J'ai dit, oui, qu'il n'y aurait

5 pas eu de guerre si nous avions abandonné notre objectif, celui d'une autre

6 Croatie, d'un Etat croate indépendant et autonome."

7 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Dites-moi ce qu'a dit Izetbegovic au sujet de la guerre. Quelle était

10 son attitude à lui ?

11 R. Je me souviens très bien. Ce n'est pas en 1991, mais déjà avant 1990,

12 lorsqu'il y a eu des élections multipartites en Bosnie-Herzégovine, que M.

13 Alija Izetbegovic, à ce moment-là, lors de l'élection, lors de la campagne

14 électorale a déclaré, donc, après la victoire de son parti de l'Action

15 démocratique, lorsque ces partisans l'ont appelé à la mise en place d'une

16 Bosnie indépendante et souveraine, il a dit M. Izetbegovic : "Moi aussi, je

17 voudrais qu'il y ait une Bosnie indépendante et souveraine, mais on ne

18 pourra y arriver sans guerre."

19 En 1991, quand un accord soi-disant historique avait déjà été conclu

20 entre les Musulmans et les Serbes, et que le Dr Adil Zulfikarpasic,

21 d'ailleurs, en a parlé. C'est un Musulmans de Bosnie, le dirigeant des

22 Musulmans de Bosnie de l'époque. Cet accord, qui avait été conclu, a été

23 rejeté par Alija Izetbegovic qui a dit qu'il remettra en cause la paix en

24 faveur de l'indépendance et de l'autonomie.

25 Q. La position des Etats-Unis d'Amérique, est-ce qu'elle a changé cette

26 position ? Peut-être, pourrions-nous regarder l'extrait d'un discours

27 prononcé par Lawrence Eagleburger, qui a été au Ministère des affaires

28 étrangères des Etats-Unis; est-ce que la position des Etats-Unis a changé ?

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1 Si oui, pourquoi ? Voilà la question que je vous posais.

2 [Diffusion de la cassette vidéo]

3 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

4 "Les Etats-Unis, la seule puissance suffisamment forte pour s'opposer

5 à l'Allemagne ont commencé à faiblir. L'adjoint au secrétaire d'Etat,

6 Lawrence Eagleburger qui avait été ambassadeur des Etats-Unis en

7 Yougoslavie et qui parlait serbo-croate connaissait bien les dangers posés

8 par une guerre de grande envergure si la reconnaissance était accordée

9 avant qu'un accord ne soit conclu entre les différents groupes ethniques.

10 "Je pense que la leçon essentielle ici, que lorsqu'on fait face à ce genre

11 de situation, après mille ans d'histoire, il faut bien comprendre qu'une

12 fois que le barrage sera brisé, il pourra y avoir des actes de violences

13 extrêmes, des deux côtés.

14 "Et la paix, à ce moment-là, serait sacrifié au profit de la politique

15 intérieure. Il y avait une élection américaine qui s'annonçait.

16 "Lorsque nous avons finalement reconnu que l'une des raisons que nous avons

17 procédé à la reconnaissance, une des raisons qui nous a poussé à le faire,

18 c'est parce que c'était devenu aussi une question d'ordre politique

19 intérieure très importante pour nous, aussi. Il y a une grande, une

20 communauté importante de Croates aux Etats-Unis et M. Bush en avait --

21 avait perdu le soutien de certains d'entre eux lors des élections qu'il a

22 perdues, parce qu'ils étaient insatisfaits du temps que nous mettions à

23 reconnaître la Croatie."

24 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

25 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je ne vois pas très bien où nous mène

26 le visionnage de ces vidéos parce qu'on est en train de parler des

27 questions internes à certains Etats. Je ne vois pas très bien le rapport

28 avec l'acte d'accusation.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Milosevic va nous l'expliquer.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demandais à M. Kostic quelle était la raison

3 de ces changements. Je ne sais pas si on a passé l'extrait en question

4 jusqu'au bout, parce que je n'ai pas été en mesure de suivre. J'étais en

5 train de suivre la traduction en serbe. Mais il nous explique que c'est à

6 cause des questions de politique intérieure ou de politique politicienne

7 que tout ceci s'est déroulé. Parce qu'il existe une grande communauté

8 américano-croate aux Etats-Unis.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bon. J'estime que cela n'a aucun

10 rapport avec ce qui nous intéresse. Cela ne nous fait nullement avancer.

11 Poursuivez.

12 M. KAY : [interprétation] Permettez-moi d'intervenir surtout vu ce qui a

13 été dit au sujet de Mesic et du passage concernant M. Mesic. Dans la

14 déposition de M. Mesic on a entendu la chose suivante : "Milosevic leur a

15 dit que tous les Serbes vivront ensemble dans un seul Etat et que c'était

16 leur droit parce qu'ils avaient le droit à l'autodétermination. En fait, il

17 était en train de mener tout le monde en bateau parce qu'ils disaient que

18 nous combattions pour la Yougoslavie. Cependant il a tout fait pour la

19 détruire." Il s'agissait de la page du compte rendu d'audience numéro

20 10530.

21 Il a ensuite accusé Martic et un autre d'avoir provoqué le conflit

22 afin que la JNA puisse ensuite intervenir et séparer les parties

23 belligérantes tout en ce faisant -- en créant une frontière. Il a déclaré,

24 je cite : "Milosevic était en train de mettre en œuvre son plan." Ceci

25 figure à la page 10533 du compte rendu d'audience.

26 L'Accusation a cité de nombreux témoins sur ce point et nous sommes

27 actuellement en train de revenir sur cette partie de la thèse de

28 l'Accusation pour rédiger le mémoire en clôture dans lequel la thèse de

Page 47715

1 l'Accusation selon laquelle M. Milosevic ainsi que d'autres dirigeants

2 serbes avaient conspiré depuis 1985 pour mettre en place l'atmosphère

3 permettant de créer une Serbie plus étendue et de contrôler la Yougoslavie

4 et que ceci a entraîné la désintégration de la Yougoslavie. On nous dit que

5 c'est là le plan qui a été mis en œuvre et ceci est manifeste dans l'acte

6 d'accusation relative à la Croatie. Il est dit que la Serbie va étendre ses

7 frontières et que l'idée c'est de s'emparer de vastes régions de la Croatie

8 et de la Bosnie, d'ailleurs aussi.

9 Donc, ce qu'essaie de faire ici l'accusé c'est de répondre à ces

10 allégations, de dire quelles sont fausses. M. Mesic, en fait, c'était un

11 politicien qui essayait de prendre des mesures qui étaient dans son propre

12 intérêt. Il a déposé ici pour justifier ses objectifs politiques. Il a dit

13 qu'il y avait des questions distinctes qui posaient pour chacune des

14 républiques ainsi par exemple en Croatie certaine -- une communauté serbe

15 éprouvait une grande crainte s'agissant de leur avenir, et qu'il y avait

16 des états constitutifs de la République de Yougoslavie qui était préoccupée

17 de leur avenir. Qu'en fait, le plan qui était mis en œuvre c'était celui

18 qui avait pour objectif de s'emparer de vastes territoires et de créer un

19 Etat qui n'aurait aucun souci des intérêts de ces peuples constituants.

20 Si l'Accusation soutient que cette thèse est pertinente, il est

21 important d'analyser tous les éléments de preuve fournis, par exemple, par

22 M. Mesic, par d'autres hommes politiques. Je pense qu'il est forcé, il est

23 contraint de citer des témoins d'allant dans ce sens parce qu'il a fallu de

24 longues -- on a entendu longuement les témoins de l'Accusation présenter

25 ces théories et ces allégations contre lui.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quels sont les éléments de preuve,

27 que selon vous, nous avons admis alors que nous n'aurions pas dû le faire ?

28 M. KAY : [interprétation] Au fait, il est en train de parler de la

Page 47716

1 déposition de M. Mesic, de déclarations qu'il a faites en 1991, et il est

2 en train d'évoquer le programme, les objectifs politiques de M. Mesic en

3 1991. Je vous renvoie à la page 20 de l'ouvrage rédigé en 1994.

4 M. Mesic a déposé à charge. L'accusé ne sait pas si les Juges de la

5 Chambre estime son témoignage crédible ou pas. Mais dans le cadre de sa

6 défense il entreprend de traiter de la crédibilité de certains hommes

7 politiques de haut rang, il essaie de montrer à quel point ces hommes sont

8 venus témoigner de manière intéressée, de manière opportuniste. Il est

9 aussi en train de répondre à des allégations qui sont faites contre lui

10 quand on dit qu'il avait un plan et qu'il a joué le rôle de l'agresseur

11 dans la mise en œuvre de ce plan.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est ce qui vous préoccupe c'est le

14 passage où M. Kostic développe et nous parle de tous ceux qui essaient de

15 faire le lien entre son vote contre Mesic, puis, des motivations

16 politiques, idéologiques, et cetera, sans que ce soit vrai avec toutes

17 sortes de propositions, de compromis qui ont été faits. Je ne vois pas en

18 quoi cela constitue -- cela est préjudiciable au témoin. J'ai déjà dit et

19 j'ai déjà noté que ce qu'il nous dit, le témoin nous permet de faire

20 l'évaluation de la fiabilité des témoignages de Mesic. Cela ne gêne pas, je

21 le reconnais. Mais il n'est pas nécessaire d'entrer dans le détail des

22 négociations pour déterminer l'attitude de l'accusé. Vous reconnaissez ce

23 qu'est en train de faire le témoin. Nous sommes limités par le temps, et il

24 faut vraiment passer au cœur du sujet.

25 M. KAY : [interprétation] Je comprends bien. Mais il est important de

26 comprendre pourquoi on est en train de parler de ce dont on est en train de

27 parler avec le témoin, parce que ce plan est au cœur de la stratégie

28 adoptée par l'Accusation en l'espèce. L'Accusation avance que l'accusé a

Page 47717

1 mis en place un certain nombre de conditions et les exécuter, exécuter des

2 mesures pour mettre en œuvre ce plan.

3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] En tant que membre d'une entreprise

4 criminelle commune.

5 M. KAY : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas autorisé à ce que soit

7 posé des questions au sujet des intérêts des Etats-Unis d'Amérique,

8 cependant je vais accepter les questions relatives aux allégations faites

9 par le bureau du Procureur selon lesquelles l'accusé agissait selon un plan

10 et qu'il était l'agresseur.

11 Monsieur Milosevic.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Professeur Kostic, vous êtes devenu membre de la présidence de la RSFY

14 en mai, vous nous l'avez dit. D'après ce que vous vous souvenez de l'époque

15 et d'après ce que vous savez des événements de Croatie à l'époque, que

16 s'est-il passé ? Quels sont les événements particuliers qui ont intéressé -

17 - premier chef l'opinion publique et les politiques en Yougoslavie ?

18 R. A l'époque, il n'y avait pas encore d'attaque déclarée contre la JNA

19 lorsqu'elle a pris positions entre les parties en présence, mais sur tout

20 le territoire de la Croatie particulièrement dans les zones rurales où il y

21 avait beaucoup de Serbes, on a à de très nombreuses reprises essayer de

22 prendre le contrôle des postes de police qui fonctionnaient tout à fait

23 normalement jusqu'à ce moment-là dans ces zones peuplées par les Serbes.

24 Voilà une chose.

25 Autre chose c'est que Tudjman, en tant que chef de la communauté croate

26 s'est rendu dans un certain nombre de localités, a participé à des meetings

27 organisés par les citoyens croates à Zadar, à Sibenik, par exemple, et lors

28 de ces meetings, il a publiquement évoqué cette question de manière, devant

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1 ces masses excitées, devant tous ces partisans excités, se demandant, par

2 exemple, pourquoi on ne se réunissait pas devant le commandant de la région

3 militaire navale de Split; alors qu'à ce moment-là, il y avait des meurtres

4 contres la JNA, et cetera. Un ou deux jours plus tard, effectivement,

5 qu'est-ce qui arrive ? Manifestation à Split devant le QG de la région

6 militaire, un soldat de la JNA est tué, quelqu'un tente d'étrangler un

7 soldat qui se trouve dans un véhicule de transport de troupes blindé et à

8 Trogir, M. Tudjman a demandé à ce que l'économie soit au service de

9 l'armée, que l'économie devienne une économie de guerre.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, le moment est

11 venu de faire la pause de 20 minutes.

12 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

13 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Professeur Kostic, vous avez parlé des attaques menées par des forces

17 croates contre les Serbes et les biens des Serbes; est-ce qu'il y a eu des

18 agressions physiques contre les Serbes vivant dans des villes plus grandes

19 de Croatie et, si oui, à partir de quel moment cela a eu lieu ?

20 R. C'était déjà le cas en avril, à la fin avril, au début du mois de mai

21 1991. Dans le cadre de ces meetings, des partisans de l'Union croate

22 démocratique, le climat était très fiévreux. Il y a eu non seulement des

23 agressions menées contre des Serbes, mais aussi contre leurs biens. On a

24 détruit des bâtiments, des vitrines, pillé les biens qui appartenaient aux

25 Serbes. Etant donné que les gens se souvenaient et qu'on leur rappelait le

26 passé récent, ces événements qui ont eu lieu à Trogir et à Zadar, on les a

27 baptisés la nuit de cristal.

28 Q. Est-ce que les Serbes ont provoqué ces incidents de quelques manières

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1 que ce soit ?

2 R. On ne peut pas le dire, en particulier des Serbes vivant dans les

3 villes et les agglomérations plus importantes. Ils n'auraient pas été en

4 mesure de provoquer cela de quelque manière que ce soit, ces agressions si

5 violentes, parce qu'à l'époque les Serbes étaient déjà réduits au statut de

6 citoyens de deuxième zone. Ils étaient victimes de licenciement puisqu'on

7 prétextait au nom de la répartition ethnique qu'ils étaient trop nombreux,

8 et cetera.

9 Q. Comment la présidence de la RSFY a-t-elle réagi au conflit à Borovo

10 Selo et à la situation générale en matière de sécurité en Croatie ?

11 R. A l'époque, je n'étais pas encore - enfin, je crois que Borovo Selo

12 cela s'est passé le 1er ou le 2 mai, mais je sais qu'alors que M. Jovic

13 était encore à la présidence et que M. Mesic était vice-président, la

14 présidence a adopté des conclusions et un programme qui faisaient

15 obligation à toutes les parties de mettre un terme au conflit, d'intervenir

16 pour empêcher le déplacement de citoyens armés, d'unités paramilitaires,

17 d'empêcher le déplacement d'unités paramilitaires croates vers des zones

18 peuplées par les Serbes. La présidence a ordonné que l'on retire leurs

19 armes et que l'on interdise tous les mouvements armés en dehors de la JNA

20 et du MUP.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle était la population de

22 Croatie avant les événements de 1991 ? Quelle était la répartition

23 ethnique ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas les chiffres exacts

25 s'agissant de la répartition des communautés, si vous souhaitez savoir où

26 se trouvaient, dans quelle région se trouvaient le plus de Serbes où ils

27 étaient en majorité. Je ne dispose pas de ces informations ici, mais je

28 peux dire avec une grande certitude que la population totale de la Croatie

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1 en 1991 était de 12,2 ou de 12,4 % de Serbes, alors qu'aujourd'hui, le

2 chiffre est de 4 %. Si on pense à cela, quand on lit dans l'acte

3 d'accusation qu'il y a eu un exode massif de Croates, c'est complètement

4 absurde. Il y a effectivement eu exode, mais l'exode a été un exode de

5 Serbes, cela a été le plus grand mouvement de déplacement de population

6 depuis la Deuxième guerre mondiale.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation]

9 Q. Avez-vous eu l'occasion de vous rendre dans certaines de ces régions, à

10 l'époque, en tant que membre de la présidence. Est-ce qu'on vous a envoyé

11 visiter certaines de ces régions ?

12 R. Après les événements de Borovo Selo, nous avons reçu un grand volume

13 d'information à la présidence au sujet d'un très grand nombre de réfugiés

14 et des personnes déplacées dans cette région, et moi-même, en tant que

15 membre de la présidence, je me suis rendu à Borovo Selo, je suis déjà allé

16 à Backa et à Vajska, là, où se trouvaient les centres de regroupements des

17 réfugiés. L'accueil des réfugiés était organisé à cet endroit dans des

18 bâtiments publics ou dans des écoles.

19 Les scènes auxquelles j'ai assisté étaient déchirantes. Il y avait là

20 essentiellement des femmes et des enfants. Sur les murs de ces écoles j'ai

21 vu beaucoup de dessins d'enfants qui fournissaient peut-être la meilleure

22 illustration de la manière dont tout ceci se ressentait sur l'état d'esprit

23 de ces enfants. On ne voyait dans ces dessins aucun petit lapin, aucun

24 ourson ou en peluche. Non, ces dessins c'étaient des dessins de fusil et de

25 chars. Ceci vaut pour toute la population, quelle que soit l'appartenance

26 ethnique.

27 A Backa, il y avait déjà 8 000 réfugiés qui venaient de l'autre rive du

28 Danube. La plupart était des Serbes qui venaient de ces régions, mais on

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1 trouvait également des Croates ainsi que d'autres personnes appartenant à

2 d'autres groupes ethniques.

3 Ce jour-là quand je suis allé à Borovo Selo, je dispose d'ailleurs d'images

4 qui ont été tournées sur place. A ce moment-là, j'ai déclaré qu'apporter

5 une aide à ces réfugiés de Borovo Selo et des environs, c'était non

6 seulement la responsabilité de la Serbie mais la responsabilité de toute la

7 Yougoslavie. J'ai là mis en accusation le Conseil exécutif fédéral et Ante

8 Markovic, je leur ai reproché de ne pas en avoir fait plus pour ces

9 réfugiés.

10 Q. Vous avez dit il y a un instant que le président était Jovic et le

11 vice-président Mesic.

12 R. Oui.

13 Q. Je vais vous donner lecture d'un compte rendu d'audience, page 10537,

14 où Mesic a déclaré que lorsque Jovic est arrivé au poste de président le 15

15 mars, il était censé vice-président le même jour mais que l'assemblée a

16 retardé cette nomination et que cela a duré encore deux mois. Voyons voir

17 ce que dit le compte rendu d'audience.

18 R. C'est tout à fait faux.

19 Q. On lui pose la question suivante :

20 "Q. Il y avait donc un système de roulement au sein de la présidence

21 selon lequel la président de la présidence occupait le poste pendant un an,

22 et en fonction de ce système est-ce que Borisav Jovic est devenu membre de

23 -- a occupé ce poste à partir du 15 mars 1990 alors que vous-même étiez

24 vice-président ?

25 "R. Oui, c'est exact. Effectivement, il est devenu présidence, mais

26 je n'ai pas tout de suite occupé mes fonctions de vice-président parce que

27 l'assemblée fédérale n'a cessé de repousser ma nomination dont plusieurs

28 mois. Elle ne s'est pas réuni pendant plusieurs mois afin que je ne puisse

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1 entrer dans mes fonctions que le plus tardivement possible."

2 Il dit ici que l'assemblée a retardé, a reporté son entrée en

3 fonction, qu'il était censé entrer en fonction le 15 mars et que cela n'a

4 pas été le cas. Est-ce que vous savez quand Mesic a été élu membre de la

5 présidence ? Parce que vous avez dit que le précédent Croate à la

6 présidence c'était Suvar.

7 R. Ce qui est dit là est complètement faux, parce que le roulement avait

8 lieu tous les 15 mai. Après les élections multipartites en Croatie, la mise

9 en place du nouveau cabinet mené par l'Union démocratique croate a duré

10 jusqu'au 15 mai 1990.

11 Q. C'est exact. Tudjman a été élu et, à ce moment-là, Mesic était premier

12 ministre de Croatie; est-ce qu'il était possible pour lui de devenir vice-

13 président le 15 mars ?

14 R. Non.

15 Q. Vous savez que la proclamation de sa nomination à la présidence a eu

16 lieu le 24 août.

17 R. Il a été élu par l'assemblée croate le 24 août, et en septembre

18 l'assemblée de Yougoslavie a confirmé cette nomination.

19 Q. Est-ce que vous savez que l'assemblée de Yougoslavie, tout comme

20 beaucoup d'autres assemblées parlementaires, n'est pas en sessions pendant

21 l'été ?

22 R. Oui.

23 Q. Donc, Mesic est en train de mentir au sujet de faits qui peuvent

24 facilement être vérifiés ?

25 R. Je suis désolé mais les Juges ne m'ont pas permis --

26 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] En fait, ceci est faux. On ne peut

27 pas dire cela, on nous dit : "Mesic est en train de mentir au sujet de

28 faits qui peuvent facilement être vérifiés." Ici, on se livre à des

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1 commentaires sur un témoin, et ce genre de commentaires ne doivent pas être

2 acceptés.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Milosevic. J'abonde

4 dans le sens du Procureur. Evitez de faire des observations de ce genre.

5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien.

6 M. MILOSEVIC : [interprétation]

7 Q. Est-ce qu'il dit la vérité lorsqu'il déclare qu'il était censé entrer

8 en fonction au poste de vice-président au même moment que Jovic a pris les

9 rênes de la présidence le 15 mars 1990 ?

10 R. Non, c'est faux.

11 Q. Très bien.

12 R. Si vous me permettez de dire ce que je voulais dire, malheureusement

13 les Juges n'ont pas voulu que je le dise, mais il est très probable qu'il

14 existait un plan en 1991, mais ce n'était pas un plan qui visait la mise en

15 place de la Grande-Serbie. C'était un plan qui avait pour objectif la

16 sécession de certaines républiques par la force. S'il avait existé un plan

17 aux fins de mise en place d'une Grande-Serbie, je n'aurais pas s'agissant

18 de la désignation de Mesic, je n'aurais pas préconisé que la Serbie et le

19 Monténégro cèdent leurs postes de président et vice-président à la Bosnie-

20 Herzégovine et à la Macédoine, qui à l'époque offraient une solution de

21 compromis pour résoudre la crise yougoslave. La proposition de compromis

22 que j'ai faite a été acceptée par les membres de la présidence de Serbie,

23 de Bosnie-Herzégovine, de Vojvodine, du Kosovo-Metohija, mais cette

24 solution de compromis qui avait pour objectif de trouver une solution

25 pacifique au conflit a été rejetée par Stjepan Mesic et Drnovsek. Cela est

26 important, cela infirme l'allégation selon laquelle comme ledit l'acte

27 d'accusation il existait un plan, un plan ayant pour objectif de mettre en

28 place une Grande-Serbie avec hégémonie serbe. Il y a beaucoup d'autres

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1 éléments qui indiquent -- qui soutiennent ce que je dis. J'espère pouvoir y

2 revenir.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puisqu'on est en train de parler de

4 ces questions, qui était le cinquième président de la présidence avoir voté

5 pour M. Mesic le 25 août, pour qu'il soit nommé présidence de la

6 présidence ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Bonomy, je crois qu'ici on se perd un

8 peu dans les dates. Le 24 août c'est la date à laquelle Mesic a été chassé

9 de la présidence de la RSFY, mais c'est en 1990 qu'il a remplacé Stipe

10 Suvar et que Jovic a été élu président de la présidence.

11 S'agissant de l'élection de Mesic à la présidence de la RSFY, elle a été

12 décidée le 31 juin et le 1er juillet 1991, en présence de la troïka

13 européenne. M. Jacques Poos, Ministre des affaires étrangères du Luxembourg

14 et qui était alors présidence de l'Union européenne --

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui était l'autre personne qui dont le

16 vote a permis à M. Mesic d'accéder à la présidence ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voulez dire, en 1991, pas le 24 août.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le 30 juin, le 1er juillet 1991.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 30 juin et le 1er juillet, c'est Borislav

20 Jovic qui a donné sa voix en premier. Il était représentant de la Serbie.

21 J'étais toujours opposé à cela.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

23 M. MILOSEVIC : [interprétation]

24 Q. Professeur Kostic, comment a réagi la présidence de la RSFY à ce qui

25 s'était passé à Borovo Selo ainsi qu'à la situation en matière de sécurité

26 dans tout le territoire ? Veuillez vous reporter à la l'intercalaire 11,

27 communiqué d'une séance de la présidence de la RSFY, du 4 mai 1991.

28 Est-ce qu'il ressort d'après ce communiqué, notamment, dans son deuxième

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1 paragraphe que le président ou plutôt le chef du gouvernement croate était

2 présent à cette réunion ?

3 R. Oui.

4 Q. Au paragraphe 4, il est question des causes qui entraînent la

5 détérioration de la situation et qu'est-ce qui est dit ici ?

6 R. "La présidence de la RSFY estime que les causes de l'aggravation de la

7 situation entre autres, sont dus au comportement extrémiste et également,

8 au fait, que l'on néglige et que l'on ne respecte ces décisions et ces

9 conclusions précédentes, et en particulier, estime que pour résoudre les

10 problèmes politiques, il ne convient pas d'avoir recours à la force et que

11 ceux-ci ne peuvent être résolus que par des moyens politiques et d'une

12 manière démocratique. La présidence de la RSFY condamne tout comportement

13 violent et recours à la force."

14 Q. Le paragraphe suivant, que lit-on ici au sujet de comportement de

15 l'armée populaire yougoslave ?

16 R. "La présidence de la RSFY a constaté que l'armée populaire yougoslave

17 s'est engagé avec détermination pour mener à bien et pour respecter ses

18 obligations constitutionnelles et cette fois-ci également, dans des

19 circonstances particulièrement difficiles, elle est parvenue à réduire et à

20 arrêter l'extension des conflits interethniques."

21 Q. Très bien. Est-ce qu'il s'agit d'une période où l'armée s'est

22 entreposée entre les parties belligérantes ? C'est cela que vous avez dit.

23 Est-ce que c'est là qu'elle a essayé de mettre fin à l'extension du

24 conflit ?

25 R. Oui. C'est précisément à cette période-là.

26 Q. Je vous invite maintenant à examiner l'intercalaire 12. Il s'agit d'une

27 proposition qui a été adoptée lors des réunions du 7 et 8 mai 1991. C'est

28 un : "Programme qui préconise la fin et une solution permanente au conflit

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1 interethnique en Croatie."

2 R. Oui. A cette réunion était présent, en plus du président de l'assemblée

3 fédérale et en plus du chef du gouvernement fédéral, il y avait les

4 représentants de la Macédoine, de la Serbie, les présidents des présidences

5 de la Slovénie, de Bosnie-Herzégovine et du Monténégro et de la Croatie.

6 Q. Donc, puisque c'est une réunion élargie, tous les présidents sont

7 présents, sauf que pour la Croatie, c'est le chef du gouvernement ?

8 R. Oui.

9 Q. Mais est-ce qu'on peut estimer que toutes les républiques ont été

10 représentées ?

11 R. Oui.

12 Q. Il y a, peut-être, encore des gens qui n'ont pas compris clairement. Je

13 précise, il est que ce sont les présidents des Républiques de Macédoine et

14 de Serbie qui sont là, or que ce sont les présidents des présidences des

15 autres républiques qui sont là, mais la seule différence --

16 R. -- se réside dans les solutions constitutionnelles.

17 Q. Mais ce sont les présidences de ces républiques ?

18 R. Oui. Les présidences des républiques étaient également des chefs

19 collectifs des Etats ou cette solution constitutionnelle était maintenue.

20 Q. La Macédoine et la Serbie avaient déjà des présidents des républiques

21 alors que les autres avaient encore conservé les présidents des

22 présidences.

23 R. C'est exact.

24 Q. Alors, quels sont les points essentiels qui ont été préconisés par la

25 présidence pour résoudre le conflit en République de Croatie ?

26 R. Il est dit ici, tout d'abord :

27 "a) qu'il faut empêcher les conflits armés;

28 b) qu'il faut établir quelles sont les questions contestées a à cause

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1 desquelles ces problèmes interethniques surgissent;

2 c) qu'il faut ouvrir un dialogue démocratique afin de les résoudre."

3 Q. Donc, ce sont les trois domaines principaux où la présidence

4 s'exprime ?

5 R. Oui.

6 Q. Au point 8, que dit-on ici ? Non, au point 6 -- au point 3, s'il vous

7 plaît.

8 R. Au point 3 : "Procéder immédiatement à la démobilisation des

9 réservistes de police, c'est-à-dire, à des forces, des militia, organiser

10 la collecte des armes qui sont entre les mains des citoyens et les placer

11 dans des entrepôts adéquats placées sous le contrôle des organes compétents

12 conformément à la loi."

13 Q. Au point 4, que dit-on ici ?

14 R. "Sur le champ, mettre fin aux attaques menées sur l'armée populaire

15 yougoslave, ces membres, ces installations et les moyens, et les

16 équipements de la JNA.

17 "La présidence de la RSFY estime que l'armée populaire yougoslave exerce

18 ses fonctions conformément à la constitution de la RSFY et conformément aux

19 lois fédérales et qu'elle est en mesure de protéger avec succès les

20 frontières du pays et d'empêcher les conflits entre les républiques et

21 entre les ethnies, en tant que forces armées communes de tous nos peuples."

22 Q. Très bien. Alors, est-ce que c'est la position de la présidence à la

23 date du 8 mai 1991 ? Donc, pleinement représentée, la présidence se réunit,

24 toutes les républiques sont représentées, est-ce que c'est la position

25 qu'elle adopte ?

26 R. C'est exact.

27 Q. Sauf que pour la Croatie, c'est le chef du gouvernement.

28 R. Oui. On voit que c'est à l'unanimité qu'on a adopté ces décisions. Par

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1 cette présidence donc, Borislav Jovic était encore président et vice-

2 président, Stipe Mesic.

3 Q. Attendez. Stipe Mesic, le 8 mai, était-il bien -- non, non, il était le

4 vice-président ?

5 R. Oui.

6 Q. Oui, vous avez raison. Il était vice-président, le représentant de la

7 Croatie et en même temps, vice-président. Donc, lui aussi, il a donné sa

8 voix à ces décisions puisqu'elles ont été adoptées à l'unanimité ?

9 R. Oui.

10 Q. Fort bien. Ici, on juge de manière positive le rôle joué par l'armée

11 populaire yougoslave car il est dit : "La présidence estime que l'armée

12 populaire yougoslave exerce ses fonctions conformément à la

13 constitution."C'était l'attitude adoptée à l'unanimité de la présidence ?

14 R. C'est cela.

15 Q. Mais à quel moment est-ce que les premières attaques ont été menées en

16 Croatie contre la JNA et ses membres, à grande échelle, des attaques à

17 grande échelle ?

18 R. C'est légèrement plus tard que ces attaques plus étendues se sont

19 produites. A partir du moment où il y avait déjà eu des importations

20 clandestines d'armes et les unités paramilitaires, en Croatie, ont atteint

21 de telles proportions qu'elles étaient pratiquement plus nombreuses que ne

22 l'étaient les membres de la JNA. Donc, à ce moment-là, la JNA qui était une

23 zone tampon a commencé à les gêner, à gêner à ce qu'il s'empare du pouvoir,

24 même dans les zones où la population serbe était majoritaire et c'est là

25 qu'ils ont lancé des attaques plus massives sur la JNA.

26 Q. Qu'est-ce qui a été les éléments déclencheurs de ces attaques ? Est-ce

27 que vous pouvez préciser un événement en particulier ou un phénomène en

28 particulier ?

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1 R. Je ne sais pas. Il y a eu plusieurs événements qui se sont produits,

2 mais je pense que le moment déclencheur, cela a été le 5 mai, la prise de

3 parole de Tudjman.

4 Q. Vous voulez dire à Trogir ?

5 R. Oui.

6 Q. Alors, qu'est-ce qui s'est passé là-bas ? Qu'est-ce qui est

7 caractéristique de ce qu'il a dit là-bas ?

8 R. Il y a eu un rassemblement à Trogir, à ce moment-là, où

9 M. Tudjman a dit que l'économie de Trogir et l'économie de Croate, de

10 manière générale, devait s'orienter vers une fabrication des équipements

11 destinés à la guerre.

12 Q. Le lendemain à Split, que s'est-il passé ?

13 R. Le lendemain à Split, je l'ai déjà mentionné, ce qui s'est passé c'est

14 qu'on a bouclé le commandement de la région militaire de la marine, qu'un

15 soldat a perdu la vie, qu'on a essayé d'étouffer ce soldat qui se trouvait

16 à bord d'un transporteur militaire, il y a eu des manifestations très

17 massives, des sympathisants et des membres de l'Union démocratique croate.

18 Q. Les dirigeants militaires, comment ont-ils réagi suite à ces attaques ?

19 Dans des attaques intenses se produisent contre la JNA.

20 R. C'est dès le 7 mai qu'il a réagi le sommet de la hiérarchie militaire.

21 Il a pris la décision d'augmenter l'aptitude de la préparation au combat

22 et, en fait, les médias, en particulier, les médias électroniques ont

23 relayé ces événements qui semblaient pratiquement invraisemblables, voire

24 même dans nos circonstances où il y avait eu une escalade de tensions

25 interethniques, sans parler de l'effet que cela aurait eu dans n'importe

26 quel Etat normalement constitué. Tel était l'impact des informations sur

27 ces attaques menées contre la JNA.

28 Q. Donc, vous dites que les dirigeants militaires ont réagi dès le 7 mai.

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1 A l'intercalaire 66, on voit un communiqué qui a été prononcé par les

2 dirigeants militaires, le secrétariat fédéral à la Défense populaire au

3 sujet d'une campagne débridée menée contre l'armée. C'est l'intercalaire

4 66, c'est la date du 6 mai.

5 R. J'ai trouvé.

6 Q. S'il vous plaît, pourriez-vous nous dire ce qu'on trouve dans ce

7 communiqué des dirigeants militaires ? Est-ce qu'il s'agit là d'une

8 réaction suite aux attaques menées contre la JNA ?

9 R. C'est un communiqué du secrétariat fédéral à la Défense populaire au

10 sujet d'une campagne débridée anti-armée.

11 Q. Nous n'allons pas tout lire, mais commençons à la ligne 6 : "Ces jours-

12 ci où la JNA…" Est-ce que vous pouvez nous lire cela ?

13 R. "Ces jours-ci où l'armée populaire yougoslave déploie des efforts

14 démesurés afin de mettre fin à l'extension des conflits armés

15 interethniques en République de Croatie, la campagne anti-armée et des

16 attaques sur l'armée atteignent leur point culminant précisément sur le

17 territoire de la République. Y participent directement même certaines

18 personnalités qui occupent des postes les plus élevés dans les institutions

19 de l'Etat et leurs intentions évidentes étaient de provoquer une

20 confrontation du peuple avec l'armée, d'empêcher que l'armée exerce ses

21 fonctions et qu'elle créé des conditions permettant de trouver une solution

22 pacifique et démocratique à la crise yougoslave.

23 "D'après les rapports relayés par certains médias, le président de la

24 République de Croatie, Franjo Tudjman, dans un entretien qu'il a eu le 5

25 mai à Trogir, entre autres, a posé la question consistant, à savoir

26 pourquoi on n'est pas venu manifester devant le commandement de la région

27 militaire de la marine pour que le monde entier voit qu'il ne s'agit pas

28 seulement de la lutte opposant les plus hauts dirigeants, mais aussi tout

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1 le peuple de la Croatie, enfin du combat de tout le peuple de la Croatie

2 également. Incités par cet appel, dans une situation politique qui est déjà

3 tendue, des dizaines de milliers de citoyens sont venus encercler le

4 bâtiment du commandement de la région militaire de la marine à Split. Les

5 participants à ces manifestations destructrices ont attaqué des équipages

6 des véhicules de la police militaire qui était chargée d'assurer la

7 sécurité du commandement de l'extérieur et de cette masse de manifestants

8 et du groupe de personnes chargées de la sécurité, on a ouvert le feu,

9 nullement provoqué, feu ouvert sur les membres de la JNA qui étaient

10 stationnés au commandement. A cette occasion, un soldat a été tué et un

11 autre a été blessé.

12 "Un membre de la police militaire a perdu la vie, il s'agit du

13 soldat, Sasko Gesovski…" et cetera.

14 Q. Je vous en prie, vous n'avez plus besoin de continuer la lecture. Est-

15 ce qu'il est dit ici que le président de la présidence en a été informé, le

16 chef du gouvernement fédéral, Ante Markovic ?

17 R. Oui. On a demandé que la présidence se réunisse de toute urgence.

18 Q. Donc il y a une escalade des attaques. C'est le début de l'escalade des

19 attaques menées contre l'armée.

20 Alors, à l'intercalaire 67, que trouve-t-on ici, c'est à la date du 7 mai ?

21 R. On voit ici un communiqué qui relaie les positions prisent par le grand

22 état-major du commandement Suprême où il est dit qu'il convient d'augmenter

23 le niveau de préparation au combat.

24 Q. Que dit-on ici ?

25 R. Il est dit : "Puisque la présidence de la RSFY ainsi que d'autres

26 organes fédéraux n'ont pas tenu compte des applications et des propositions

27 du secrétariat fédéral à la Défense populaire au sujet de la situation qui

28 prévaut dans le pays, la société yougoslave s'est déjà engagée dans une

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1 guerre civile. La manière de laquelle l'armée populaire yougoslave a été

2 utilisée jusqu'à présent afin d'empêcher les conflits interethniques ne

3 saurait plus être efficace. Lors de toutes attaques menées sur des membres

4 des Unités des installations de la JNA, des attaques qui ont déjà commencé,

5 il y a déjà eu des pertes dans les rangs de l'armée, l'armée ripostera

6 conformément aux Règles de l'emploi au combat, ce qui veut dire en ouvrant

7 le feu."

8 Q. Cela veut dire que, jusqu'à ce moment-là, l'armée n'avait pas tiré.

9 R. C'est cela. Je peux le dire en toute responsabilité. Non seulement

10 jusqu'à ce moment-là, l'armée s'est retenue tout au long de la crise

11 yougoslave, voire même pendant la guerre, tout au long de l'année 1991,

12 voire en 1992. Monsieur Alija Izetbegovic, lorsque je l'ai rencontré en

13 1992 à Skopje, m'a dit lui que partout où l'armée populaire yougoslave

14 s'était trouvée, il n'y avait ni conflit ethnique, ni tension, précisément

15 grâce au comportement de l'armée.

16 Q. Nous parlerons de cette réunion que vous avez eue avec Izetbegovic à

17 Skopje. Nous en parlerons plus tard. La présidence de la RSFY, comment a-t-

18 elle réagi suite à l'adoption de ces différentes lois dans les républiques

19 occidentales yougoslaves, donc où il y avait une violation juridique de la

20 constitution et une sécession s'opérait ?

21 R. La présidence a jugé immédiatement qu'il s'agissait d'actes

22 anticonstitutionnels illégaux, qu'il s'agissait de sécession unilatérale et

23 que l'on violait la constitution de la RSFY. Je pense que le gouvernement

24 fédéral ou le Conseil exécutif de l'assemblée fédérale ont réagi, je ne

25 sais plus laquelle des instances a réagi en lançant une initiative auprès

26 de la cour constitutionnelle de la RSFY pour que celle-ci se prononce sur

27 ces actes sécessionnistes. La cour constitutionnelle de la RSFY à son tour,

28 si je ne me trompe pas, a réagi -- je pense que c'était le 20 juillet -- le

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1 20 juillet, me semble-t-il -- a pris une décision, a tranché et a déclaré

2 ces actes anticonstitutionnels et illégaux.

3 Q. Très bien. Saisissons l'occasion qui se présente, vous avez parlé de

4 ces événements qui ont commencé en Slovénie. Nous avons maintenant ici une

5 décision du Conseil exécutif fédéral qui porte sur l'intervention en

6 Slovénie. C'est l'intercalaire 74. Je souhaite que ce soit versé au

7 dossier. Vous pouvez juste lire : "Le Conseil exécutif fédéral lors de sa

8 réunion qui s'est tenue dans la nuit du 25 au 26 juin --"

9 R. "-- présidée par Ante Markovic, à cette réunion, on a pris la décision

10 d'assurer immédiatement que les lois fédérales sont respectées quand la

11 traversée de la frontière de l'Etat en République de Slovénie et le

12 Secrétariat chargé de l'information du Conseil exécutif fédéral informe

13 qu'une décision a été prise. Elle se lit comme suit, au point 1."

14 Q. Non, on ne va pas tout lire. La police fédérale doit s'en charger et

15 que dit-on au point 2 ?

16 R. Au point 2, il est dit : "Les lois fédérales doivent être respectées

17 dans ces dispositions qui portent sur le franchissement de la frontière de

18 l'Etat. Le Conseil fédéral se mettra en communication directe avec le

19 Secrétariat fédéral chargé de la défense pour que les unités déployées le

20 long de la frontière soient engagées au poste frontière et dans les

21 localités frontalières, dans la zone frontalière. De quelle manière cette

22 coopération se résoudra-t-elle ? Ces modalités seront établies de manière

23 concertée entre le secrétariat fédéral chargé de l'intérieur et celui de la

24 Défense."

25 Q. Est-ce que c'est bien la décision suite à laquelle il y a eu des

26 conflits qui ont éclaté en Slovénie et des conflits entraînés des pertes de

27 vie humaine ?

28 R. Oui.

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1 Q. A ce moment-là, l'armée a-t-elle participé à quelque chose qu'on

2 pourrait qualifier de guerre ?

3 R. Non. Non. Si je puis donner mon opinion, je pense même que, sur la base

4 de cette décision du Conseil exécutif fédéral, 1 990 soldats ont été

5 dépêchés là-bas qui devaient fournir de l'aide au Détachement de la police

6 fédérale, donc du Secrétariat fédéral chargé de l'intérieur, et au groupe

7 d'employés des douanes fédérales. Je pense que je l'ai déjà souligné

8 plusieurs fois publiquement la décision de dépêcher là-bas les 1 990

9 soldats je pense a été la plus grosse erreur que les dirigeants militaires

10 aient commise dans le cadre de cette crise yougoslave. Ils ont fait une

11 mauvaise appréciation de la situation. Ils ont pensé qu'un contingent aussi

12 réduit de membres de la JNA, on envoyait simplement un aide aux douanes et

13 à la police. Ils n'ont pas vu qu'ils allaient se trouver dans

14 l'encerclement et qu'ils allaient devoir faire face à un combat les

15 opposant à 35 000 membres slovènes de la Défense territoriale qui était

16 déjà équipée en armes, équipement tout à fait moderne.

17 Certes, une trêve a été établie assez rapidement. Je dois dire que la JNA a

18 fait preuve d'efficacité dans le cadre de cette mission, je pense qu'en 24

19 heures seulement elle a pu faire en sorte que pratiquement tous les postes

20 frontières soient occupés. Pendant cette opération, seul huit membres de la

21 JNA ont perdu la vie, dont cinq étaient les pilotes de deux hélicoptères

22 militaires qui transportaient les vivres à destination des casernes, qui

23 faisaient l'objet de bouclage, donc qui ont en temps de paix, en temps

24 normal étaient situées sur le territoire de la Slovénie.

25 Une fois la trêve proclamée, et une fois le 4 juillet les décisions prises

26 par la présidence jusqu'à ce qu'on décide de replier les unités déployées

27 en Slovénie, on a eu 22 tombés -- donc, 22 pertes dans les rangs de la JNA

28 même s'il y a eu une trêve.

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1 Q. Vous étiez membre de la présidence de la RSFY ?

2 R. Oui, j'étais vice-président de la présidence.

3 Q. A quel moment avez-vous été mis au courant de cette décision qui figure

4 à l'intercalaire 74, la décision du Conseil exécutif fédéral ?

5 R. Bien, je l'ai apprise qu'au moment où elle avait déjà été mise en

6 place.

7 Q. Comment est-ce que la présidence de la RSFY aurait pu ne pas être au

8 courant de cela ?

9 R. Le Conseil exécutif fédéral, lui, à ce moment-là -- en fait, j'ai fait

10 une erreur.

11 Q. C'est le 26 juin.

12 R. La présidence ne s'était pas encore constituée à cette date-là, mais le

13 Conseil exécutif de l'assemblée de la RSFY s'était réuni et à cette

14 occasion il a lancé un appel au Conseil exécutif fédéral. Comme il y avait

15 absence de la présidence, ils l'ont invité à assurer qu'il y est respect de

16 la constitution, donc le Conseil exécutif fédéral a suivi l'appel et la

17 décision lancée par le Conseil exécutif de l'assemblée, et c'est dans ce

18 contexte-là qu'il a pris cette décision.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que je peux vous poser une

20 question, quelle est l'importance du fait que la présidence n'était pas

21 constituée, ne pouvait pas se réunir ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à moi que s'adresse cette question,

23 Monsieur Bonomy ?

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, tout à fait. Qu'est-ce que cela

25 signifie que la présidence ne s'était pas réunie ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] En principe, vu les attributions telles

27 qu'elles sont prévues par la constitution, ce genre de décision, la

28 décision de déployer les unités de la JNA normalement était du ressort de

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1 la présidence de la RSFY, en tant que chef civil des forces armées. Mais la

2 présidence était bloquée, elle ne pouvait pas fonctionner. Donc, c'est le

3 gouvernement fédéral qui s'est trouvé être le chef d'Etat suprême qui donc

4 devait protéger la constitutionnalité des actes.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, c'est suite aux problèmes qui se

6 sont posés en mars, la présidence ne fonctionnait pas comme elle l'aurait

7 due. C'est cela ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est aussi la situation qui s'est présentée

9 après ces changements. En mai, on n'a pas élu Mesic au poste du président

10 de la présidence, par deux fois la présidence s'est trouvée bloquée. Ce

11 n'est que dans 30 juin au 1er juillet qu'on a réussi à constituer la

12 présidence.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pendant qu'on parle de cela, je n'ai

14 toujours pas bien compris ce que vous disiez au sujet de la date à laquelle

15 Mesic est devenu vice-président. Est-ce que vous pourriez me donner, s'il

16 vous plaît, la date à laquelle il est réellement devenu vice-président de

17 la présidence ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas la date exacte à laquelle il

19 est devenu vice-président de la présidence de la RSFY, cependant tenez

20 compte du fait que l'on parle de l'année 1990. C'est à ce moment-là qu'il

21 est venu remplace Stipe Suvar. Je pense que c'était au mois d'octobre 1990.

22 Or, tout le reste lorsque nous disions au sujet des élections

23 --

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. Très bien. Lorsqu'il y a eu ces événements de Slovénie, qu'on appelait

27 la guerre de Slovénie, à ce moment-là, Mesic était vice-président de la

28 présidence yougoslave; c'est cela ?

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1 R. Oui. Il n'avait toujours pas été élu président.

2 Q. Il n'avait toujours pas été élu président. Qui présidait les réunions

3 de la présidence ?

4 R. M. Jovic lui non plus pratiquement ne l'était pas, le 15 mai, il y a eu

5 fin de leur mandat, d'après le Règlement interne de la présidence. Mais

6 pendant ce mois et demi, où la présidence ne pouvait pas fonctionner ou

7 elle était bloquée, on a pris une décision, qui s'est mis d'accord sur la

8 personne qui allait convoquer les réunions, qui allait recevoir les

9 accréditations, qui allait exécuter les obligations qui étaient celles de

10 la présidence. Alors, une fois, c'est Vasil Tupurkovski qui réunissait la

11 présidence, une autre fois, cela a été Jugoslav Kostic, je pense, donc,

12 cela s'est produit deux fois.

13 Q. Mais la présidence, aurait-elle pu se réunir à ce sujet ?

14 R. Même s'il n'y avait -- si elle était bloquée, si, on se réunissait. On

15 discutait des choses.

16 Q. Très bien. Mais vous avez appris vous, membre de la présidence, qu'il y

17 a eu un mouvement, un déploiement des forces uniquement après coup; c'est

18 bien cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Très bien. Au paragraphe 100 de l'acte d'accusation qui porte sur la

21 Croatie, il est écrit : "Le 19 mai 1991, la Croatie a tenu un référendum où

22 par la grande majorité des voix, l'indépendance par rapport à la RSFY a été

23 votée. La Croatie et la Slovénie ont proclamé leur indépendance le 25 juin

24 1991. Le 25 juin 1991, la JNA a entrepris de mettre fin à la sécession de

25 la Slovénie."

26 Donc, c'est ce qui est écrit dans ce paragraphe. Or, nous avons entendu ce

27 qui s'est réellement passé; c'est bien cela ?

28 R. Oui.

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1 Q. La JNA s'est-elle engagée à mettre fin à la sécession de la Slovénie ou

2 est-ce que le Conseil exécutif fédéral, qui a donné le pouvoir tout d'abord

3 à la police et ensuite à la JNA, d'aider la police afin d'empêcher qu'on

4 traverse la frontière ?

5 R. Mais j'ai déjà dit, le Conseil exécutif fédéral, présidé par Ante

6 Markovic, a pris une décision. Par cette décision, le Secrétariat fédéral

7 chargé des affaires intérieures yougoslave, Secrétariat fédéral et les

8 douanes fédérales -- administration fédérale des douanes, donc, les deux

9 instances fédérales devaient, d'après ces décisions, s'assurer de la

10 situation sur la frontière, devaient garder la frontière où la Défense

11 territoriale slovène et le Ministère de l'intérieur slovène précédemment

12 avaient de force enlevé les symboles yougoslaves fédéraux, et cetera. Par

13 cette même décision, le Conseil exécutif fédéral impose au Secrétariat

14 fédéral de la défense, qui lui aussi est une émanation, une antenne du

15 gouvernement fédéral d'aider le Ministère de l'intérieur et

16 l'administration des douanes, si ces deux instances devaient rencontrer des

17 difficultés dans l'exécution de leurs missions.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, normalement, comment est-ce

19 qu'on assure le contrôle des frontières ? Quels sont les effectifs qui s'en

20 chargent ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne les frontières pour toute

22 la zone, c'était la JNA qui se chargeait de la sécurité des frontières avec

23 des miradors, des tours où se trouvaient des effectifs de la JNA. Pour ce

24 qui est de la zone frontalière, c'était la police qui était présente, il y

25 avait aussi des membres de l'administration fédérale des douanes aux postes

26 frontières.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quand vous parlez de la "police",

28 vous parlez de la police locale ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pourrais pas répondre de façon précise à

2 votre question. Quoi qu'il en soit, les forces de police qui étaient là

3 pour assurer la sécurité des postes frontières et ses effectifs relevaient

4 du Ministère de l'intérieur au niveau fédéral. Quant à savoir qui était les

5 hommes qui tenaient ces postes, est-ce qu'ils étaient de la République de

6 Slovénie ou d'ailleurs ? Je ne sais pas. Je suppose que, normalement, la

7 plupart de ces effectifs étaient du territoire slovène.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais, vous voyez, ce n'était pas une

9 responsabilité uniquement fédérale exclusivement fédérale.

10 L'INTERPRÈTE : Signe négatif du témoin.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est ce que j'essaie de tirer au

12 clair. Est-ce que c'était là des compétences exclusivement fédérales ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Exclusivement fédérales.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] La sécurité des frontières, les postes

16 frontières, ainsi que l'administration des douanes, ce sont là des éléments

17 qui relèvent exclusivement du domaine fédéral.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Milosevic.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais demander le versement de

20 l'intercalaire 74 où l'on trouve la décision du Conseil exécutif ou du

21 gouvernement fédéral que nous avons déjà parcouru.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous avez examiné plusieurs

23 intercalaires, Monsieur Milosevic.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, plusieurs.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons les verser tous.

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Elles seront également versées au

28 dossier, les séquences vidéo.

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a aussi l'intercalaire 87;

3 cependant, il contient plusieurs éléments.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si je comprends bien, il y a des

5 documents qui ne sont pas traduits. Ceux-là recevront donc une cote

6 provisoire en attente de traduction.

7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que pour ce qui est de cette

8 séquence vidéo, il s'agissait de l'intercalaire 87. Il faudrait que ce soit

9 mieux structuré, mieux ordonné.

10 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.

12 M. MILOSEVIC : [interprétation]

13 Q. Qu'a fait la présidence pour essayer d'empêcher la guerre, tout

14 d'abord, en Slovénie ?

15 R. Le 4 juillet, la présidence a tenu une réunion des plus importantes, à

16 ce moment-là, elle était constituée cette présidence et elle a adopté

17 plusieurs décisions importantes, qui plus tard sont devenues ce qu'on a

18 appelé l'accord ou la déclaration de Brioni du

19 7 juin, et ceci s'est fait une fois de plus à notre insu lorsque la troïka

20 européenne invitée en cela par M. Ante Markovic et par

21 M. Budimir Loncar et M. Tupurkovski de la présidence sont venus sur l'île

22 de Brioni.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que c'était le

24 7 juin ou le 7 juillet ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 7 juillet. Le 4 juillet, cela c'était la

26 réunion de la présidence, et le 7 juillet, déclaration de Brioni, pas le 8,

27 comme c'est dit dans l'acte d'accusation.

28 M. MILOSEVIC : [interprétation]

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1 Q. Fort bien. Examinons quelques documents, ils ne sont pas nombreux, ils

2 ont été créés vers cette date. Nous avons ainsi l'intercalaire 13, la

3 déclaration du 27 juin d'une réunion de la présidence en 1991. Veuillez

4 examiner ce document. A ce moment-là, vous faisiez partie, n'est-ce pas, de

5 la présidence ?

6 R. Oui. J'en étais membre. Est-ce que vous pourriez me redonner le numéro

7 d'intercalaire ?

8 Q. Intercalaire 13. Il s'agit de la réunion dans le droit fil de ce que

9 vous disiez il y a un instant, qui était présidé par Jugoslav Kostic,

10 membre de la présidence.

11 R. Oui.

12 Q. Y participaient le président du parlement fédéral ainsi que le

13 Secrétaire fédéral à l'intérieur. Mais, sinon, on voit que ceci a eu lieu

14 sur proposition du Conseil fédéral chargé de la protection de l'ordre

15 constitutionnel et c'était, n'est-ce pas, aussi à ce moment-là, le

16 président de ce conseil était Bogicevic qui était le membre de la

17 présidence pour la Bosnie-Herzégovine ?

18 R. Oui.

19 Q. Alors, comment peut-on synthétiser ce document ? Quelles sont les

20 positions adoptées par la présidence de la RSFY suite aux propositions

21 faites par le président de ce conseil, M. Bogicevic, et aussi par le

22 Ministre de l'intérieur ?

23 R. Il y est dit que la présidence de la RSFY estime qu'au cours de ces

24 derniers jours, la crise yougoslave a atteint un point culminant et qu'il y

25 a une aggravation politique et sécuritaire importante dans le pays.

26 Surtout, du fait, de l'adoption des actes passés par l'assemblée de la

27 République de Slovénie et par celle de la République de la Croatie, pour ce

28 qui est de ces déclarations d'indépendance et de quelques jours. Par ces

Page 47743

1 actes, on a mis en péril, de façon directe, l'intégrité territoriale de la

2 Yougoslavie, ces frontières étatiques ainsi que sa souveraineté légale,

3 internationale, dit la Présidence de la RSFY.

4 On précise que ce sont là, des mesures anti-constitutionnelles, des

5 actes unilatéraux sans aucune légitimité, ni légalité, que ce soit au plan

6 interne ou au plan extérieur et qu'en tant que tel, ces décisions, ces

7 déclarations ne sauraient avoir d'effet constitutionnel ou légal.

8 Q. Fort bien. Cette réunion de la Présidence, comptait-elle tous les

9 membres -- la Présidence et la vice-Présidence n'étaient pour autant

10 toujours pas désignées ?

11 R. Je ne sais pas si M. Drnovcek était là, mais je pense que les autres y

12 étaient. Je ne pense pas que Drnovcek y a participé, mais tous les autres -

13 -

14 Q. Mais tous les autres étaient-ils là ?

15 R. Oui.

16 Q. Y compris Mesic ?

17 R. Oui. Il y avait aussi le président de l'assemblée de Yougoslavie. Il y

18 avait le Secrétaire fédéral à l'intérieur.

19 Q. Fort bien.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement de cet intercalaire 13.

21 M. MILOSEVIC : [interprétation]

22 Q. Prenons maintenant l'intercalaire 15, déclaration de la Présidence en

23 date du 1er juillet.

24 R. C'était donc le même jour parce qu'aux premières heures du 1er juillet,

25 Mesic a été élu président et j'ai été élu vice-président. Nous avons

26 organisé cette réunion de la Présidence qui a été présidé par Stjepan

27 Mesic, vous le voyez.

28 Q. Est-ce qu'on le voit ?

Page 47744

1 R. Oui. Ante Markovic qui était le premier ministre yougoslave était

2 présent ainsi que Petar Gracanin qui était le Secrétaire fédéral à

3 l'intérieur et il y avait aussi le vice -- ou le secrétaire adjoint à la

4 Défense nationale au niveau fédéral, amiral Stane Brovet.

5 Q. C'était un Slovène, n'est-ce pas ?

6 R. Oui.

7 Q. Le sujet de la réunion, c'est la Slovénie ?

8 R. Voici les conclusions tirées par la Présidence, première conclusion :

9 "Il faut arrêter aussitôt tous les combats, parvenir à une trêve qu'il faut

10 respecter. Il faut protéger toutes le vies. Il faut faire régner la paix

11 dans tout le pays. Il faut mettre fin à tout siège ou pression exercée, à

12 tout chantage et hostilité."

13 Deuxième conclusion : "Tous les membres de la JNA, leur famille, les

14 membres du Secrétariat fédéral intérieur, des services douaniers et

15 d'autres organes fédéraux, ainsi que ceux des organes de la République de

16 Slovénie, qui ont été arrêtés, doivent être aussi, tous libérés."

17 Q. On dit ici qu'il faudrait relâcher les membres des familles de soldats.

18 Que peut-on dire à propos de la privation de liberté de certaines

19 familles ?

20 R. Au cours de ces journées-là, la Défense territoriale de Slovénie et

21 d'autres formations armées ne s'étaient pas contentées d'arrêter des

22 membres du Secrétariat fédéral à l'intérieur, des membres de

23 l'administration des douanes qui étaient là pour s'inquiéter de certaines

24 fonctions, à savoir, pour établir le calme dans la zone frontalière. En

25 plus de ces personnes, des membres de soldats de la JNA ont été faits

26 prisonniers. En plus, on avait fait le siège de certaines casernes, de

27 celles qui se trouvaient sur le territoire slovène parce que dans toutes

28 ces zones, y compris en Slovénie, en tant de paix, la JNA avait des

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1 casernes sur ce territoire. En Slovénie, dans ces unités, on avait des

2 soldats qui étaient de Slovénie, mais, aussi, d'autres parties de la

3 Yougoslavie. Ils vivaient là avec leur famille. Ils avaient un appartement,

4 ce genre de chose. Lorsqu'il a été décidé de faire le siège, de boucler, de

5 ces casernes, de les boucler, cela veut dire que ces mesures, elles ont

6 touché aussi, les femmes, les enfants des soldats qui étaient cantonnés en

7 temps de paix, en Slovénie, pour y faire leur travail dans la JNA.

8 Q. Là ici, il s'agit de la première réunion que préside Mesic. Toutes ces

9 décisions étaient prises à l'unanimité, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Prenons maintenant le document que vous avez mentionné dans votre

12 réponse précédente qui se trouve à l'intercalaire 16. Il s'agit là du 4

13 juillet. Effectivement, cela, c'est la réunion suivante de la Présidence,

14 présidée elle aussi par le président Stjepan Mesic, y participent, le

15 président de l'assemblée, le premier ministre, le Ministre de la défense.

16 R. A mon avis, ce fût-là une réunion très importante. Malheureusement, les

17 conclusions qu'on trouve ici, elles n'ont jamais été exécutées. Je n'ai pas

18 beaucoup de temps, je le sais, mais je pense qu'il serait fort utile de

19 parcourir ces différents points.

20 Q. Il n'y en pas tellement --

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, juste laissez --

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il n'y en a pas beaucoup.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais autoriser l'accusé à poser

24 des questions.

25 M. MILOSEVIC : [interprétation]

26 Q. On parle ici, de "décisions". Ce n'est pas simplement une déclaration,

27 mais une décision. Mais qu'est-ce qu'elle a décidé, la présidence

28 yougoslave, à cette réunion où étaient présents tous ces membres ?

Page 47746

1 R. Exact. D'abord, on a dit qu'il fallait rétablir la situation qui

2 prévalait auparavant, aux frontières de la RSFY. On ne parle pas des

3 délais.

4 Deuxièmement, il faut lever le siège de toutes les Unités de la JNA

5 et de ses institutions.

6 Troisièmement : Tout le matériel et toutes les institutions de la

7 JNA. Oui, effectivement, il fallait que tout ceci soit rétabli avant midi,

8 le 5 juillet 1991."

9 Quatrième décision : Il fallait effectivement terminer le retrait de

10 toutes ces formations armées de la Défense territoriale et de toutes les

11 forces armées, Unités de la République de la Slovénie avant 24 heures,

12 c'est-à-dire, minuit, 4 juillet 1991.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce entend par siège ou

14 bouclage de l'armée ou des unités ?

15 M. MILOSEVIC : [interprétation]

16 Q. Quand on dit ici : "Qu'il fallait absolument lever le siège,

17 mettre fin au siège," qu'est-ce cela veut dire ?

18 R. Sur le territoire de la Slovénie, toutes les casernes étaient

19 encerclées et assiégées par la Défense territoriale de Slovénie et par

20 d'autres unités armées de Slovénie. Ceci, afin d'empêcher la sortie

21 d'Unités de la JNA de ces casernes -- de ces garnisons, c'était un siège

22 absolu. Les véhicules ne pouvaient pas sortir même si c'était pour aller

23 chercher des vivres ou s'approvisionner en produits médicaux, en

24 médicaments. A ce point, que dans certains cas, on n'a même pas pu sortir

25 les blessés des casernes pour les emmener à l'hôpital. On n'a pas pu

26 enterrer les morts. C'était un siège complet.

27 Pour quitter une caserne, il fallait recevoir une autorisation de la

28 Défense territoriale de Slovénie.

Page 47747

1 Q. Est-ce qu'il faut en conclure que l'armée n'a pas eu du tout

2 recours à la force ?

3 R. Elle s'est bien servie de la force, mais ce recours n'était pas

4 dirigé contre des hommes, lorsqu'on -- des unités armées ont barré des

5 voies d'accès, les voies d'accès aux postes frontières. Par exemple, il y

6 avait des camions remplis de sacs de sable, qui ont été placés en travers

7 de la route ou de camions remorques aussi, les routes ont été barrées.

8 Donc, l'armée s'est servie de la force pour enlever ces obstacles pour

9 pouvoir passer, mais on n'a pas tiré sur des gens.

10 Q. On n'a pas tiré sur les gens ?

11 R. Non.

12 Q. Fort bien.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais tout ceci se passe en Slovénie,

14 c'est bien ce qui s'est passé ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu votre question.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On parlait ici du fait de mettre fin

17 au siège de la JNA, et cette explication que vous venez de fournir, elles

18 ont trait à la Slovénie ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que la même chose se passait

21 en Croatie ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, à l'identique c'était une copie conforme,

23 c'était le même scénario et c'était vrai pour la Croatie, mais aussi pour

24 la Bosnie. A la différence peut-être que la Croatie, cela s'est passé

25 aussitôt après la Slovénie et la Bosnie, c'était un an plus tard.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pose cette question parce que

27 nous sommes intéressés aussi pas la Croatie et par la Bosnie.

28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je comprends, je comprends. Mais, vous savez,

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1 que c'est la même ou le même type d'escalade d'événements, que ce soit en

2 Slovénie ou en Croatie ou un peu plus tard en Bosnie-Herzégovine.

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Ici on dit que les forces armées de la Défense territoriale se replient

5 sur les lieux qu'elle occupe en tant de paix. Est-ce que c'était une

6 décision de la présidence ?

7 R. Oui. Je pense, mais je n'en suis pas tout à fait sûr que Drnovsek

8 n'était pas présent non plus à cette réunion, mais il représentait la

9 Slovénie, alors que le contrôle de la bonne application de ces conclusions

10 a été confié à Vasil Tupurkovski et Bogic Bogicevic par une décision

11 unanime de la présidence.

12 Q. Donc, des représentants de Slovénie et Bosnie ?

13 R. Oui.

14 Q. Est-ce que la JNA appliqué ces décisions ?

15 R. La JNA a parfaitement appliqué les décisions prises par la présidence,

16 mais la Défense territoriale et d'autres formations ou groupes armés en

17 Slovénie n'ont pas appliqué ces décisions, et on le voit parfaitement, dans

18 les comptes rendus scénographiques des réunions de la présidence ou de la

19 réunion du 8 juillet, où Vasil Tupurkovski et Bogic Bogicevic à qui on

20 avait confié cette tâche le contrôle de l'application la fois précédente

21 ici font rapport de la situation. Ces notes sténographiques sont

22 abondantes. Je crois qu'on les trouve quelque part dans ces classeurs, mais

23 la synthèse de ces rapports, lors de la réunion du 8 juillet, revient à

24 dire que la Défense territoriale de la Slovénie n'a pas respecté les

25 conclusions prises par la présidence de la RSFY.

26 Q. S'il ont regarde les dates, est-ce qu'on peut voir d'abord la

27 déclaration du Secrétaire fédérale à la Défense nationale du 6 juillet ?

28 Cela s'était passé le 4 juillet, puis nous avons une déclaration de Veljko

Page 47749

1 Kadijevic du 6juillet. Est-ce que vous pouvez la retrouver. Je pense que

2 c'est à l'intercalaire 16 ?

3 R. J'ai trouvé.

4 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à se voir rappeler le numéro

5 d'intercalaire.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quel est le numéro d'intercalaire ?

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] 69.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Étant donné que nous avons adopté des

9 conclusions parfaitement claires lors de cette réunion de la présidence, et

10 étant donné que la date butoir était le 5 juillet - dans certains cas,

11 c'était le 7 - en fonction du point concerné, il y avait un communiqué de

12 presse à l'intention de l'opinion public. C'est Veljko Kadijevic qui était

13 le chef du Grand état-major des forces armées de la RSFY qui l'a fait ce

14 communiqué. Vous avez le titre de ce communiqué de presse qui dit ceci :

15 "C'est la paix et non la guerre qui est dans l'intérêt de tous."

16 M. MILOSEVIC : [interprétation]

17 Q. Qu'est-ce qu'il dit à propos des revendications respectives de chacun ?

18 Il dit que certains exigent que l'armée soit enfermée dans ces casernes et

19 observer -- observe tranquillement de là comment ont détruit le pays alors

20 que d'autres veulent que l'armée joue une rôle d'arbitre ou prenne le

21 pouvoir dans le pays. Des le départ, nous savions que ces deux options

22 n'allaient pas aboutir au même résultat ?

23 R. Si l'armée s'était enfermée dans ces casernes le pays tout entier

24 aurait été entraîné dans le tourbillon de la guerre déjà. Puis, la prise de

25 pouvoir ce n'est pas une solution non plus. Dans tout pays lorsqu'il y a

26 une crise interne, c'est vrai aussi en Yougoslavie, on ne peut pas trouver

27 de solutions permanentes en ayant recours à l'armée. C'est simplement par

28 des moyens politiques qu'on a une solution permanente.

Page 47750

1 Q. Il dit que : "C'est la raison pour laquelle nous avons décidé qu'il

2 fallait assurer la paix et créer les conditions permettant une transition

3 démocratique de la société et que nous avons pris le choix d'un engagement

4 prudent des unités là où il y a des points chauds, des lieux de crise tout

5 en respectant la constitution, la légalité. Malheureusement, le seul appui

6 que nous avons eu à cet égard est un appui verbal."

7 R. Au troisième paragraphe on dit : "L'armée n'a jamais pris elle-même une

8 initiative qui n'aurait pas été dans le cadre des pouvoirs que lui confère

9 la constitution ou les institutions fédérales pertinentes. Même en

10 Slovénie, il y a un engagement tout à fait constitutionnel des Unités de la

11 JNA pour préserver l'intégrité de la Yougoslavie et pour aussi appliquer

12 les conclusions de la Chambre fédérale de l'assemblée de la RSFY et les

13 décisions du Conseil exécutif fédéral."

14 Q. Ils demandent qu'on trouve une solution par des moyens pacifiques.

15 L'armée s'oppose à toutes ces mesures et ne prend aucun parti; est-ce bien

16 la conclusion ?

17 R. Oui, exact, c'est incontestable.

18 Q. Au cours de ces jours-là, de ces semaines-là, il y a un engagement de

19 front, parallèle de la part aussi de la Communauté européenne comme on

20 l'appelait à l'époque. Quelle était la démarche adoptée par la Communauté

21 européenne pour ce qui est de la préservation ou de la non préservation de

22 l'Etat de Yougoslavie ? Est-ce que cette démarche a évolué ?

23 R. Jusqu'au 17 décembre 1991 la Communauté européenne du moins au niveau

24 des déclarations, de ce quelle a affirmé c'était une position en faveur du

25 maintien de la Yougoslavie de son intégrité territoriale. La Communauté

26 européenne s'est déclarée favorable à une solution pacifique politique et

27 s'opposait à des actes unis latéraux de sécession. Lorsque Mesic a été élu

28 le 30 juin, la troïka de l'Union européenne, la Communauté européenne a

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1 proposé trois points absolument essentiels : Premièrement, sécession

2 immédiate de tout conflit. Deuxième point, la Communauté européenne allait

3 utiliser son autorité, son influence pour forcer les autorités slovènes et

4 croates à abandonner l'idée d'une sécession unilatérale pour renverser la

5 situation pour qu'elle revienne à la situation qui prévalait avant le 30

6 juin et la Communauté européenne disait également qu'elle allait veiller à

7 ce que ces autorités n'entravent pas le travail fait par les instances

8 fédérales en retirant leurs membres. On pense là à l'assemblée et à toutes

9 les institutions fédérales. Le troisième point c'était que nous devions

10 donner le feu vert pour que M. Mesic devienne président de la présidence.

11 Par conséquent, nous, qui nous opposions à l'élection de

12 M. Mesic, nous avons fait un communiqué de presse, la veille de son

13 élection, pour dire que, si la Communauté européenne endossait ces

14 responsabilités -- prenait ses responsabilités sur les deux premiers

15 points, donc, la levée des sièges des institutions fédérales et le fait que

16 les visées sécessionnistes de la Slovénie et de la Croatie prenaient fin,

17 nous allions effectivement soutenir la présidence de Mesic. Mais lors de la

18 réunion de la présidence qui appelait l'élection de Mesic - et c'est pour

19 cela que je suis resté opposer à son élection jusqu'au bout - la Communauté

20 européenne nous a dit que la Slovénie avait bien mis au frigo sa décision

21 de faire sécession, mais ce n'a pas été le cas de l'assemblée croate. C'est

22 la raison pour laquelle j'ai persisté à m'opposer à l'élection de Mesic en

23 disant que la condition préalable sine qua non c'était que la Croatie gèle

24 aussi le processus de sécession.

25 En ce qui concerne l'engagement européen, alors que nous nous avons

26 respecté la partie de l'accord qui nous incombait puisque nous avons donné

27 notre aval à l'élection de Mesic, la Communauté européenne elle n'est pas -

28 - elle ne s'est pas acquittée de sa part, c'est-à-dire qu'elle n'a pas

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1 obtenu de la Slovénie et de la Croatie qu'elle mette fin à ces conflits qui

2 faisaient rage même pendant la période de trêve. En plus de cela, la

3 Communauté européenne n'a pas permis le bon fonctionnement des institutions

4 fédérales, même la présidence de la RSFY s'est vue en partie paralyser.

5 C'était sûrement le cas pour l'assemblée.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Professeur, le moment est venu

7 de faire une pause. Mais je voulais vous dire auparavant. Ce sont des

8 éléments de contexte qui ne sont pas tout à fait dépourvus de pertinence au

9 regard de l'acte d'accusation. Il y a eu, effectivement, une certaine

10 pertinence à tout ceci, mais vous savez que nous avons des contraintes --

11 ou plus est vous avez des contraintes de temps que vous vous êtes imposé en

12 consacrant autant de temps à un seul volet de l'acte d'accusation en

13 laissant de ce fait très peu de temps pour l'examen des deux autres volets

14 de l'acte d'accusation.

15 Vous allez peut-être vous dire qu'il est dans votre intérêt d'avancer assez

16 rapidement pour examiner les allégations retenues contre vous dans l'acte

17 d'accusation. De cette façon, vous pourriez passer moins de temps sur le

18 contexte et plus de temps sur les accusations portées contre vous. A vous

19 de décider bien sûr.

20 Nous allons faire une pause de 20 minutes.

21 Oui, vous vouliez intervenir, Monsieur Milosevic.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, il n'y a pas une seule

23 infraction pénale dans ce que vous appelez l'acte d'accusation qui a un

24 seul rapport -- le moindre rapport avec moi.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

26 Pause de 20 minutes.

27 --- L'audience est suspendue à 12 heures 18.

28 --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic.

2 L'ACCUSÉ : [interprétation] [Hors micro]

3 M. MILOSEVIC : [interprétation]

4 Q. Bien, rapidement, pour revenir à ce que vous étiez en train de nous

5 expliquer au sujet du changement de la position de l'Union européenne. Est-

6 ce que vous vous souvenez du 26 mars ? Date à laquelle les Conseil de

7 Ministre de la Communauté européenne a adopté une déclaration sur la

8 Yougoslavie et je cite : "Une Yougoslavie unie et démocratique a les

9 meilleures chances de véritablement s'intégrer à une nouvelle Europe." Est-

10 ce que vous vous en souvenez ?

11 R. Oui.

12 Q. Le 9 juillet, le parlement européen a adopté une résolution relative à

13 la Yougoslavie dans laquelle explicitement il n'apportait pas son soutien

14 aux actes unilatéraux de sécession de la Croatie et de la Slovénie.

15 R. Oui.

16 Q. Puis, il y a le Conseil du ministre du 8 novembre au cours duquel on a

17 demandé une solution générale aux problèmes de la crise yougoslave et où on

18 a déclaré que toute reconnaissance d'une indépendance qui ferait l'économie

19 de cette solution globale serait inacceptable.

20 R. Oui.

21 Q. Voici toute une série d'intervention de la Communauté européenne, sans

22 oublier le 17 décembre 1991, date à laquelle a été publiée toute une série

23 de Règles à respecter pour la reconnaissance des nouveaux Etats --

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, on vous demande

25 de ralentir du côté des cabines d'interprètes.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. -- nous voyons donc ici une série de prises de positions de l'Union

28 européenne en faveur ou de la Communauté européenne en formalité intégrité

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1 de la Yougoslavie contre des actes de sécession unilatéraux, et ensuite,

2 vous dites qu'à la fin décembre ils ont déclaré que les républiques

3 yougoslaves qui voulaient obtenir une reconnaissance devaient le demander.

4 R. Tout est comme vous venez de le dire.

5 Q. Est-ce que vous avez une explication à tout ce que je viens de citer ?

6 R. Je pense que la raison qui explique tout cela, elle a été donnée par M.

7 Mesic en personne. Ma vision des choses, cela correspond à ce qu'il a dit

8 lui-même dans son ouvrage, dans son livre en 1994. Le mur de Berlin s'était

9 effondré, l'Allemagne était réunifiée, l'équilibre européen avait été

10 perturbé puisque du jour au lendemain, l'Allemagne est devenue une

11 véritable puissance politique et économique dont il fallait tenir compte.

12 M. Mesic déclare lui-même que le chancelier fédéral, Kohl, et le Ministre

13 des affaires étrangères de l'époque, Genscher, étaient favorables à la

14 sécession de la Croatie, à l'indépendance de la Croatie dès le départ, et

15 que Tudjman a très souvent exercé des pressions sur eux pour qu'ils se

16 manifestent publiquement dans ce sens. Alors qu'eux répondaient qu'il

17 fallait laisser le temps au temps, qu'il y aurait d'autres Etats en Europe,

18 alors que les Etats-Unis, tant qu'à eux, se débattaient avec des problèmes,

19 se préoccupaient de problèmes de plus grande envergure sur la planète et

20 ont décidé de laisser la Communauté européenne s'occuper de la crise

21 yougoslave. Grâce à l'influence dont elle bénéficiait, l'Allemagne a réussi

22 à imposer sa position à d'autres pays de l'Union européenne ou de la

23 Communauté européenne. J'ai déjà dit, et je pense que c'est d'ailleurs la

24 réalité, que pendant cette période, lorsque la Communauté européenne a pris

25 la responsabilité de nous aider, la France, le Royaume-Uni aussi, n'étaient

26 plus les pays de Churchill et De Gaulle, c'était les pays de Pétain et de

27 Chamberlain.

28 Q. Est-ce que vous avez participé, au début juillet, à la réunion, ou

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1 début juin plutôt 1991, à la réunion de Brioni ?

2 R. Oui, mais très brièvement, car nous n'étions même pas au courant de

3 cette réunion de Brioni. M. Stjepan Mesic m'a informé pendant la semaine de

4 la réunion -- pendant le week-end de la réunion qui devait avoir lieu le

5 lundi. Il m'a simplement dit qu'il y aurait une réunion, que ce serait une

6 bonne idée que j'y vienne, mais personne ne m'a parlé de l'ordre du jour.

7 J'avais passé le week-end au Monténégro, quand je suis arrivé à Belgrade,

8 j'ai demandé à

9 M. Jovic de quel type de réunion il s'agissait, ce à quoi il a répondu

10 qu'il n'en savait rien. Mais j'ai bien vite découvert que la troïka

11 européenne était en route, nous étions le 7 juillet, alors que le 4

12 juillet, nous avions adopté des conclusions bien précises, c'est-à-dire,

13 trois jours avant. J'ai compris que l'arrivée de la troïka européenne,

14 c'était le signe qu'enfin la Communauté européenne souhaitait faire en

15 sorte que les gouvernements slovènes et croates remplissent leurs

16 obligations. Donc, c'est ce que j'ai compris de la situation, donc nous

17 avons pensé qu'il était inutile pour nous de re assister de nouveau à cette

18 réunion puisque nous avions déjà pris des mesures le 4 juillet. C'est ce

19 que j'ai dit à Jovic, mais il m'a rétorqué que quoi qu'il en soit, c'était

20 une bonne idée que d'aller les rencontrer là-bas pour ne pas donner

21 l'impression de s'opposer à leurs efforts. Donc nous y sommes allés, mais

22 nous ignorions qu'ils allaient publier une déclaration, la déclaration de

23 Brioni. Etant donné que nous avions déjà adopté nos conclusions conjointes,

24 nous, la présidence. Nous estimions donc qu'il était inutile de remettre

25 ces questions sur le tapis. Les représentants de la Croatie et de la

26 Slovénie ont préparé la déclaration de Brioni, ont formulé la déclaration

27 de Brioni au cours de ces discussions avec les représentants de la

28 Communauté européenne et je dois dire qu'après son adoption par le

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1 gouvernement fédéral, nous, au sein de la présidence, nous avons également

2 dû en parler, en discuter, nous avons accepté ce qui figurait parce que

3 tous les points figurant à la décision de la présidence du 4 juillet, y

4 avaient été intégrés avec la seule réserve que les dates butoir avaient été

5 un petit peu modifiées, repoussées.

6 Q. Comment se présentait cette réunion de Brioni ? De quoi a-t-on parlé ?

7 Quels étaient les points de vue des participants ?

8 R. Il n'y a pas eu de Plénière. Il n'y a pas eu de réunions conjointes. M.

9 Jovic et moi-même, nous avons simplement profité de l'occasion pour

10 informer le monsieur qui venait de la Communauté européenne des conclusions

11 rendues par la présidence le 4 juillet. Nous l'avons informé des dates

12 butoir que nous avions fixées, et nous leur avons demandé de remplir les

13 obligations auxquelles ils s'étaient engagés lorsque M. Mesic a été élu

14 président de la présidence. On en est resté là. Les représentants de la

15 Slovénie et de la Croatie sont restés sur place et ils ont poursuivi leurs

16 discussions avec les représentants de la Communauté européenne.

17 Q. La déclaration de Brioni donc n'a pas été adoptée lors d'une séance de

18 travail de la présidence ?

19 R. Non. Plus tard.

20 Q. Je vais maintenant vous donner lecture d'un extrait de l'acte

21 d'accusation qui précise que : "Le 8 juillet un accord a été conclu selon

22 lequel la Croatie et la Slovénie ont convenu que leur indépendance ne

23 deviendrait réalité que 90 jours plus tard, soit le 8 octobre 1991. Le 15

24 janvier 1992, la Communauté européenne a finalement reconnu la Croatie en

25 tant qu'Etat indépendant, et le 22 mai 1992, la Croatie est devenue membre

26 des Nations Unies."

27 Est-ce que ce qui est dit ici correspond à ce qui s'est véritablement passé

28 à Brioni ?

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1 R. Beaucoup d'éléments que vous venez de lire sont incorrects.

2 Premièrement, ce n'est pas le 8, mais le 7 juillet qu'a été adoptée la

3 déclaration de Brioni. Mais ce qui est plus important, c'est que les

4 auteurs de l'acte d'accusation soit n'ont pas compris, soit ont

5 délibérément passer sous silence, mis de côté l'essence même de la

6 déclaration de Brioni et la substance de cette déclaration. Ce n'était pas

7 que les décisions d'indépendance de la Slovénie et de la Croatie soient

8 suspendues pendant trois mois --

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quel paragraphe de l'acte

10 d'accusation s'agit-il ?

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Paragraphe 101.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Poursuivez.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] L'essentiel de la déclaration de Brioni

14 n'était pas que l'on a repoussé la déclaration d'indépendance de trois

15 mois, non, l'essentiel c'était qu'on avait décidé de respecter la paix, le

16 rétablissement de la paix et de s'engager à la recherche d'une solution

17 pacifique pendant une période de trois mois. Il n'y a qu'un point dans la

18 déclaration de Brioni qui ait trait à la situation sur les frontières et à

19 la restauration de la situation dans ces zones. On parle d'une période de

20 90 jours, mais elle a trait uniquement à la Slovénie. Il est question de

21 rétablir l'ordre constitutionnel tel qu'il prévalait avant le 25 juin.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Regardons si le paragraphe 101 dit la vérité ou si c'est vous qui dites

24 la vérité. Examinons le texte de la déclaration de Brioni, intercalaire 63,

25 une déclaration conjointe, on trouvera cet intercalaire, le texte dans son

26 intégralité.

27 Est-ce que vous avez trouvé l'intercalaire 63 ?

28 R. Oui.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est dans l'annexe I.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne trouve pas cela dans le classeur, mais,

3 en tout cas, cela figure dans mon livre.

4 M. MILOSEVIC : [interprétation]

5 Q. Oui, oui. Moi aussi, c'est de votre livre que j'ai extrait le texte de

6 la déclaration.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela se trouve à la page 363 de mon livre.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'intercalaire 1 est suivi d'un

10 document qui est consacré à la déclaration.

11 L'ACCUSÉ : [interprétation] On trouve le texte à l'intercalaire 63.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] L'intercalaire 63.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Veuillez avoir l'amabilité d'examiner ce document puisque vous avez

15 dit ultérieurement que vous avez soutenu la déclaration au sein de la

16 présidence.

17 R. Oui.

18 Q. Est-il possible de dire qu'il s'agit d'une suspension pendant trois

19 mois de décisions relatives à l'indépendance, ou est-ce qu'il s'agit d'un

20 cessez-le-feu ? Est-ce que cela traite de cessez-le-feu des négociations

21 sur tous les aspects de l'avenir de la Yougoslavie ?

22 R. J'ai déjà dit qu'il ne s'agissait pas de suspendre les déclarations

23 d'indépendance pendant trois mois, mais qu'il s'agissait de retrouver la

24 paix de mettre en place un cessez-le-feu, de créer les conditions

25 permettant la recherche de solutions pacifiques à la crise globale que

26 connaissait la Yougoslavie.

27 Q. Nous reviendrons plus tard au début de cette déclaration. Mais en tout

28 premier lieu, j'aimerais que vous trouviez le passage où l'on fait mention

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1 de cette période de trois mois. Est-ce que cela figure uniquement à

2 l'annexe numéro I, ou qui s'intitule : "Modalités supplémentaires pour la

3 mise en place du cessez-le-feu ?"

4 R. Oui.

5 Q. Seulement au point 4 où on parle de la sécurité des frontières ?

6 R. Oui.

7 Q. Il est dit que la situation jusqu'au 25 juin 1991 était que l'on

8 recherchera à rétablir la situation au cours d'une période de trois mois

9 des négociations auront lieu avec l'objectif de garantir le transfert de

10 l'autorité de la JNA pour un régime frontalier basé sur les normes

11 européennes permettra d'orienter les discussions sur ce point.

12 Est-ce qu'on parle d'autres choses, ou est-ce qu'on parle ailleurs de

13 ces trois mois ?

14 R. Non. Je me souviens que lors de l'adoption de la déclaration de Brioni

15 par la présidence nous avons parlé de la signification de cette disposition

16 des normes européennes s'agissant du régime prévalant au niveau des

17 frontières. On n'en parle nulle part ailleurs. Les représentants de la

18 présidence qui étaient à Brioni et qui ont participé à la rédaction de

19 cette résolution, donc, M. Tupurkosvki a alors expliqué que si on cherchait

20 une solution pour les zones frontalières il fallait respecter les normes

21 européennes.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On parle ici de négociations ayan pour

23 objectif le transfert des autorités de la JNA qui ont été conclues. De quoi

24 parle-t-on ici ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, voyez-vous, vous m'avez posé une

26 question à laquelle j'ai répondu que sur le territoire de la Slovénie comme

27 partout ailleurs c'était la JNA qui occupait les postes frontaliers qui

28 étaient chargés de garder les frontières. La logique étant que s'agissant

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1 des frontières il fallait chercher des solutions tel que ce serait la

2 police qui s'occuperait de garder les frontières. Une partie de l'autorité

3 de la JNA, une partie de ses prérogatives a été transférée à la police, au

4 Ministère de l'intérieur. Je crois que c'est ce qui ce fait maintenant dans

5 tous les pays du territoire de l'ex-Yougoslavie.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 M. MILOSEVIC : [interprétation]

8 Q. Revenons au tout début de cette déclaration commune, que l'on a

9 baptisée déclaration de Brioni. Au deuxième paragraphe, il est dit, je cite

10 : "L'objectif de la troïka ministérielle était de mettre en place les

11 négociations adéquates permettant des négociations pacifiques entre toutes

12 les parties. Toutes les parties ont connaissance de la déclaration délivrée

13 le 5 juillet par la Communauté européenne et ses états membres et ont

14 confirmé leur obligation de se conformer pleinement aux propositions de la

15 Communauté européenne du 30 juin 1991."

16 De quoi s'agissait-il ? Est-ce que cela s'est produit au moment où Mesic a

17 été élu ?

18 R. Oui. La Communauté européenne pour ce qui la concernait s'est mise en

19 œuvre ou plutôt s'est engagée à utiliser l'influence qu'elle avait sur la

20 Slovénie et la Croatie et sur les dirigeants de ces pays pour faire en

21 sorte que les décisions relatives au cessez-le-feu soient respectées, et

22 que pour les institutions fédérales yougoslaves ne fassent pas l'objet --

23 ne soient pas complètement paralysées avec le départ des représentants

24 croates et slovènes qui s'y trouvaient. Il s'agit de l'assemblée du

25 gouvernement, et cetera, et cetera. Donc, voilà l'obligation qui était la

26 leur. Mais malheureusement, ils n'ont réussi à rien imposer de tout cela ni

27 à la Slovénie ni à la Croatie.

28 Q. Mais il est dit ici qu'ils doivent remplir ces obligations.

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1 R. Oui. M. Demikalis [phon], qui était le précédent présidence de la

2 troïka ministérielle, ainsi que M. Bot et surtout M. Hans van den Broek,

3 nous ont dit lors de cette séance de travail que ces garanties-là

4 constituaient des obligations très importantes pour la Communauté

5 européenne, mais on n'est resté au stade de mots et des déclarations, c'est

6 tout, malheureusement.

7 Q. Que dit-on au sujet des peuples de Yougoslavie qui peuvent décider eux-

8 mêmes de leur propre future ?

9 R. "Une nouvelle situation s'est dessinée en Yougoslavie qui nécessitait

10 des négociations entre les parties en présence et une évaluation très

11 prudente de la situation. Les négociations doivent commencer au plus tard

12 le 1er août 1991, sur tous les aspects de l'avenir de la Yougoslavie sans

13 aucune condition préalable et s'inspirer des principes figurant dans le

14 document final de Helsinki et de la charte de Paris sur la nouvelle

15 Europe," et cetera, et cetera.

16 Q. "La présidence collective doit avoir les pleins pouvoirs et jouer un

17 rôle politique et constitutionnel vis-à-vis des forces armées fédérales.

18 Toutes les parties doivent s'abstenir de mesures unilatérales, en

19 particulier, de tous actes de violence;" est-ce que c'est ce qu'on lit

20 ici ?

21 R. Oui.

22 Q. Ensuite on parle de l'assistance venant de la Communauté européenne.

23 Puis, on passe maintenant à l'annexe I, modalités supplémentaires relatives

24 à la préparation des négociations.

25 R. Oui.

26 Q. Quel est le premier point de ce régime aux frontières ? Le contrôle des

27 franchissements de frontières sera entre les mains de la police slovène qui

28 agira conformément au Règlement fédéral.

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1 R. Oui.

2 Q. Douanes --

3 R. L'accord signé par les représentants du gouvernement fédéral et le

4 gouvernement de la République de la Slovénie, le 20 juillet 1991, est

5 confirmé par la présente et sera mis en œuvre.

6 Q. Bien. Contrôle du trafic aérien. Un seul système de contrôle de trafic

7 aérien pour la totalité de la Yougoslavie. Point 4, situation aux

8 frontières, sécurité aux frontières. Il est dit que la situation qui

9 prévalait jusqu'en juin doit être réétablie, et c'est uniquement qu'on

10 parle de cette période de trois mois. C'est uniquement en parlant de la

11 sécurité aux frontières, uniquement les frontières avec la Slovénie.

12 R. Oui.

13 Q. Ensuite, on passe de modalités supplémentaires relatives à la mise en

14 œuvre du cessez-le-feu, restitution des équipements de la JNA,

15 désactivation des unités de la Défense territoriale, retour dans leur

16 cantonnement. Est-ce qu'il y a quoi que ce soit là qui ait été mis en

17 oeuvre ?

18 R. Rien de tout cela n'a été mis en œuvre. Le 4 juillet, nous avons pris

19 les mêmes décisions au sein de la présidence, mais nous avons fixé la date

20 butoir au 4 juillet alors qu'ici, c'est le 7 juillet.

21 Q. On parle de prisonniers ?

22 R. Oui.

23 Q. Quand on regarde le texte de cette déclaration et ce à quoi a trait la

24 période de trois mois et puis la situation qui prévalait à la frontière

25 avec la Slovénie, quand on voit tout cela, est-il possible d'adopter

26 l'interprétation que l'on voit au paragraphe 101 de l'acte d'accusation

27 dont je vous ai donné lecture, où il est dit que la Communauté européenne a

28 tenté de jouer un rôle de médiateur dans le conflit, qu'un accord a été

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1 conclu selon lequel la Croatie et la Slovénie ont convenu que leur

2 indépendance ne deviendrait réalité que 90 jours plus tard. Est-ce que ceci

3 est mentionné à quelque endroit que ce soit dans la déclaration de Brioni ?

4 Est-ce qu'on mentionne cette suspension de l'indépendance pendant 90

5 jours ?

6 R. Je ne suis pas juriste. Je suis économiste. Mais le bon sens me fait

7 dire que tout cela n'est nullement mentionné dans la déclaration de Brioni.

8 Ce passage de l'acte d'accusation, on ne le retrouve nulle part dans la

9 déclaration de Brioni. On dit souvent que lorsqu'on a deux avocats, deux

10 juristes, cela donne trois opinions différentes.

11 Q. Les modalités relatives à la préparation des négociations et qui

12 figurent à l'annexe I, est-ce que cela a trait à la Slovénie ? Puisque

13 c'est uniquement là qu'on parle de ces délais de trois mois. Est-ce que

14 cela a trait à la Slovénie uniquement ? Est-ce que cela a trait uniquement

15 à la sécurité aux frontières avant le 25 juin ? Est-ce que c'est cela ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce qu'il est question de la suspension de l'indépendance de la

18 Croatie et de la Slovénie pour une période de trois mois dans cet accord ?

19 R. Non.

20 Q. Très bien. Je pense que c'est est clair. En fin de compte, nous avons

21 aussi le texte.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut le verser au dossier, s'il

23 vous plaît ?

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est versé au dossier, et nous

25 avons les intercalaires 15, 16 et 69 aussi.

26 M. MILOSEVIC : [interprétation]

27 Q. Vous m'avez déjà répondu à une question qui portait sur la question qui

28 est de savoir si l'une quelconque des dispositions qui figuraient à la

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1 déclaration de Brioni a été respectée ?

2 R. Aucune. Plus est, je dois dire la chose suivante. Il y a eu des Etats

3 et M. Mesic l'a déclaré ouvertement et publiquement que la Croatie a

4 bénéficié de leur soutien pour devenir indépendante et souveraine. Ces

5 pays-là, sans arrêt, lançaient des avertissements et disaient qu'il fallait

6 mettre fin aux conflits car sinon, il y aurait reconnaissance et, en fait,

7 ce sont les conflits qui avaient été provoqués par les républiques

8 sécessionnistes, qui ne souhaitaient pas qu'on adopte une solution de paix.

9 D'ailleurs, leurs dirigeants l'ont déclaré que s'ils avaient renoncé à la

10 souveraineté, on aurait pu éviter la guerre, mais comme ils ne l'ont pas

11 fait, la guerre était inévitable.

12 Q. Donc, le message était le suivant. Continuez de tirer, vous serez

13 reconnus.

14 R. Oui. C'est précisément cela.

15 Q. La décision de la présidence du 12 juillet, que dit-elle en substance ?

16 C'est l'intercalaire 17.

17 R. En très peu de temps, il y a eu un grand nombre de décisions, il faut

18 que je rafraîchisse ma mémoire.

19 Q. Je vous invite à examiner l'intercalaire. Nous avons le document ici.

20 Ces documents sont là précisément pour cette raison. R. C'est la décision

21 qui date de quand ?

22 Q. C'est le 12 juillet. C'est une décision prise par la présidence de la

23 RSFY.

24 R. Oui, le 12 juillet. Voyez-vous, lors de la réunion du

25 4 juillet, nous avions adopté toutes ces conclusions qui avaient reprises

26 par la déclaration de Brioni et la date butoir était la date du 7 juillet,

27 enfin, le 8 juillet dans la déclaration de Brioni. Donc, nous avons chargé,

28 comme je l'ai déjà dit, M. Tupurkovski et

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1 M. Bogicevic qui étaient membres de la présidence de Macédoine et de

2 Bosnie-Herzégovine pour qu'ils surveillent la mise en œuvre de ces

3 conclusions, donc sans arrêt, ils nous informaient, ils nous faisaient des

4 rapports et lors de la réunion du 8 juillet et plus tard, lorsque les

5 dirigeants slovènes et les autorités slovènes ont montré qu'ils ne

6 respectaient pas les conclusions de la présidence. Suite à cela, le 12

7 juillet, encore une fois, la présidence a adopté une décision, au point 1,

8 il est dit : "Démobiliser toutes les unités armées sur le territoire de la

9 RSFY, mis à part la JNA et la police régulière et ses effectifs de paix

10 jusqu'au 18 juillet, à 24 heures." Puis, il est dit au point 2 : "Qu'il

11 faut garantir le recomplètement en conscrits de la JNA, conformément à la

12 loi fédérale portant sur la conscription et d'autres actes qui avaient été

13 adoptés," et cetera "lorsqu'il y a des conscrits qui n'ont pas été affectés

14 --"

15 Q. Non, on ne va pas poursuivre. Au point 3 : "Réaliser sur le champ les

16 obligations qui découlent de la déclaration commune en date du 7 juillet

17 1991 qui concernent le régime établi à la frontière de la RSFY et tout

18 cela, au plus tard, le 16 juillet, et créer le conditions pour une vie

19 normale et le fonctionnement des unités."

20 R. Oui. A l'époque, j'ai eu l'occasion de le dire dans mes déclarations,

21 déclarations à la presse, et cetera. Nous avons adopté de nombreuses

22 conclusions au sein de la présidence afin de trouver une solution de paix.

23 Or malheureusement, pratiquement aucune de ces décisions n'a été traduite

24 dans les faits. Depuis janvier 1991, cette présidence dont je n'étais pas

25 membre à ce moment-là, puis en mai, pratiquement sans arrêt, on a exigé la

26 démobilisation, le désarmement des unités paramilitaires, or rien de tout

27 cela pratiquement n'a été réalisé.

28 Q. Cette décision a-t-elle été traduite dans les faits ou non ?

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1 R. Non.

2 Q. Fort bien.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de cette

4 décision. C'est l'intercalaire 17.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est versé.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais elle n'a pas été traduite dans les faits

7 pour la simple raison parce qu'il n'y avait pas de volonté politique au

8 niveau des dirigeants politiques, au niveau des organes de pouvoir dans ces

9 républiques sécessionnistes. Sur le plan politique, ils n'étaient pas

10 déterminés à rechercher une solution de paix. Plus, il y avait d'escalades,

11 plus il y avait de conflits, plus de violations du cessez-le-feu, davantage

12 ils espéraient obtenir une reconnaissance internationale.

13 M. MILOSEVIC : [interprétation]

14 Q. Au point 102 de qu'ils appellent le volet croate de l'acte

15 d'accusation, il est dit : "Le 18 juillet 1992, la présidence fédérale

16 soutenue par les gouvernements serbes et monténégrins et du général Veljko

17 Kadijevic a voté le repli de la JNA de Slovénie, en faisant ceci, elle a

18 accepté la sécession de la Slovénie et le démantèlement de la Yougoslavie."

19 Est-ce que c'est exact ?

20 R. C'est une contrevérité pure et dure. Je peux le dire parce que j'ai été

21 participant direct à la prise de cette décision. Je dois dire que cela a

22 été l'une des décisions les plus difficiles que j'ai eu à prendre en tant

23 que membre de la présidence de la RSFY.

24 Q. Très bien. Mais voyons maintenant quelle est la substance du message

25 que, le 18 juillet, la présidence envoie à la population. C'est à

26 l'intercalaire 18. Le 18 juillet 1991, intercalaire 18.

27 R. Par cette déclaration, ou plutôt par ce message, la présidence informe

28 l'opinion publique, lui disant que vu la situation elle a adopté le message

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1 dans les termes suivants : "La Yougoslavie traverse les moments les plus

2 dramatiques, les conflits interethniques, les confrontations entre les

3 républiques menacent de dégénérer pour devenir une guerre, pour entraîner

4 des conséquences catastrophiques pour tous nos citoyens, tous nos peuples

5 et nos minorités nationales. Nous devons nous opposer au recours à la

6 force. Cette force a déjà emporté et continu d'emporter des vies humaines

7 et nous éloigne tous de la réalisation de nos intérêts vitaux. Ces intérêts

8 sont les suivants : le développement démocratique, le respect des droits et

9 des libertés des citoyens, leur amélioration continue, et le fait de

10 rehausser le niveau de vie. Ces intérêts sont aussi l'égalité totale, le

11 respect mutuel de nos peuples, le respect des droits de tous nos peuples

12 pour qu'ils décident souverainement de leur destin, du destin de la

13 Yougoslavie, de communiquer librement et d'être en contact avec le monde

14 entier et les acquis de la civilisation contemporaine.

15 "Tout ceci peut être atteint uniquement en temps de paix.

16 "Entre la guerre et la paix la présidence de la RSFY se déclare

17 catégoriquement pour la paix et la solution démocratique de la crise

18 yougoslave."

19 Q. C'est dans ce ton-là que s'exprime ce communiqué, ce message ?

20 R. Oui.

21 Q. Il est dit que lors d'une réunion avec les représentants des

22 républiques --

23 R. Oui. "Avec les présidents des présidences des républiques cela

24 commencera le 22 juillet à Ohrid, la présidence demandera que les

25 présidents acceptent et qu'ils s'engagent, au nom de ces républiques, de

26 respecter strictement ces principes, ces approches en tant que premiers pas

27 menant à une solution pacifique de toutes les questions contestées."

28 Je dois dire que le 18 juillet lorsqu'on a adopté ce message, M.

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1 Drnovsek était présent. Il me semble que c'est la première réunion où la

2 présidence était au complet.

3 Q. Examinons maintenant la décision portant repli de la JNA da Slovénie.

4 Cette décision est citée au paragraphe que je vous ai lu. Il est dit que :

5 "Avec l'appui des gouvernements serbes et monténégrins, on a décidé de

6 replier la JNA et que ceci a signifié l'acceptation de la sécession et de

7 la dissolution de la RSFY."

8 Pour quelle raison a-t-on décidé de redéployer les unités ?

9 R. Il est dit dans l'avant-dernier paragraphe avant la décision elle-même

10 : "En se basant sur le message que nous avons adressé à l'opinion et en se

11 basant sur notre détermination à garantir une vie normale aux membres de la

12 JNA qui sont stationnés sur le territoire de la République de la Slovénie,

13 la présidence de la RSFY en se basant sur l'article 313 dans son alinéa 8

14 et de l'article 316 dans son alinéa 2 de la constitution de la RSFY a pris

15 la décision comme suit. Par cette décision la présidence a accepté l'une

16 des deux solutions possibles proposées par le Grand état-major du

17 commandement Suprême."

18 Compte tenu du fait que, pendant toute cette période, on ne s'est pas

19 conformé aux décisions de la présidence de la RSFY sur le territoire de la

20 Slovénie et qu'en dépit de la trêve les membres de la JNA n'arrêtaient pas

21 de perdre la vie, le Grand état-major a proposé à la présidence de la RSFY

22 deux solutions.

23 Premièrement, la première solution proposée par l'état-major du

24 commandement Suprême a été comme suit : la présidence devait habiliter la

25 JNA à avoir recours à la force pour forcer les dirigeants slovènes et la TO

26 slovène à se conformer aux décisions de la présidence.

27 La deuxième solution proposée pas l'état-major du commandement

28 Suprême a été la suivante : la présidence en tant que commandement

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1 Suprême, si jamais celle-ci ne prenait pas cette décision-là, il fallait

2 alors qu'elle décide de redéployer temporairement les unités de la JNA du

3 territoire de la JNA vers des sites sûrs, vers des endroits sûrs où les

4 membres de la JNA ne seraient pas mis en danger et ce redéploiement devait

5 être maintenu tant qu'on aura pas trouvé une solution à la crise yougoslave

6 qui comprendra aussi la question de l'armée.

7 Q. On ne va pas tout citer, mais est-ce que vous pouvez nous lire le point

8 9, s'il vous plaît ? Comment se lit le point 9 ?

9 R. Au point 9, on lit : "Cette décision ne préjuge pas de la structure

10 future de la Yougoslavie et ne remet pas non plus en question son intégrité

11 territoriale."

12 Puisque j'ai été participant à tout cela, j'ai dit que ce que vous

13 avez cité au point 102 de l'acte d'accusation, me semble-t-il, que cette

14 position est totalement contraire à la vérité.

15 Q. Très bien.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay, nous avons besoin

17 d'aide. Que pouvez-vous nous dire au sujet des questions qui portent sur

18 ces points, des questions que pose l'accusé ? Est-ce qu'il s'agit de

19 questions qui avaient été posées par l'Accusation ?

20 M. KAY : [interprétation] Oui, elles l'ont été, mais on a probablement pas

21 besoin de rentrer dans autant de détails.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur

23 Milosevic, les points que vous soulevez ne manquent pas de pertinence, sans

24 doute c'est l'Accusation qui a, en premier lieu, abordé ces questions en

25 présentant ses moyens, mais il ne vous faut pas perdre de temps et ne

26 rentrez pas dans tant de détails.

27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, tout ce que je viens de

28 citer, l'acte d'accusation lui-même, je considère qu'il est pertinent parce

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1 que s'ils ont l'audace de rédiger des contrevérités notoirement fausses

2 disant que c'est la présidence fédérale qui, avec l'appui des gouvernements

3 serbes et monténégrins et du général Veljko Kadijevic, a accepté la

4 sécession et la dissolution de la RSFY, alors que dans la décision elle-

5 même on lit autre chose, on voit donc clairement quelle est la crédibilité

6 de ce paragraphe. Mais ce n'est pas la première citation, c'est la

7 cinquante-cinquième que je fais et qui se révèle être totalement inexacte.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de

9 dire que ceci à avoir avec la crédibilité de la thèse de l'Accusation dans

10 son ensemble, donc les accusations pour des crimes commis ? S'ils

11 commettent une erreur au sujet de M. Kadijevic, est-ce que ceci aura un

12 impact substantiel sur les accusations qui portent contre vous pour des

13 crimes commis ?

14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, à l'époque, la Serbie

15 n'avait aucune attribution, aucune compétence d'aucune manière, elle n'en a

16 jamais eu d'ailleurs, ni à ce moment-là, ni par la suite, sur le territoire

17 de la Croatie. Tous les événements cités à l'acte d'accusation se

18 produisent jusqu'au milieu de l'année 1992. Vous avez ici un ex vice-

19 président de la présidence qui était le commandant suprême collectif de

20 cette armée qui prétendument aurait commis quelque chose. Mais ceci ne

21 signifie pas que les crimes ont bel et bien été commis là-bas, comme

22 l'affirme cet acte d'accusation. Ceci nous montre qui avait quelles

23 attributions, quelles compétences à l'époque et comment on a agi à ce

24 moment-là.

25 S'il vous plaît, tenez compte de la période dont on parle. Jusqu'au

26 milieu de l'année 1992, on a ces allégations pour crimes, qui n'ont

27 absolument pas été prouvées. Pendant ce temps-là, vous avez le commandement

28 Suprême de la JNA, c'est la présidence de la RSFY. Ici vous avez le vice-

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1 président de l'époque de la présidence de la RSFY. Il est en mesure de vous

2 dire ce qu'on a fait, comment a fonctionné cette filière verticale de la

3 hiérarchie civile et militaire et comment cela s'est déroulé.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Essayons d'avancer un peu

5 plus vite.

6 Je souhaiterais que vous, Monsieur le Professeur, répondiez par des

7 réponses plus courtes.

8 M. MILOSEVIC : [interprétation] Professeur Kostic, vous avez accordé

9 un entretien à Vecernje Novosti, le 20 juillet 1991. On peut dire que cela

10 se situe précisément au moment dont on parle. Le titre de l'entretien

11 choisi par la rédaction et non pas par vous est : "Mieux vaut se passer

12 d'armes."

13 R. Oui.

14 Q. Que dites-vous ici au sujet de cette décision ? Vous dites, vous avez

15 la citation dans ce sous-titre : "On a pris des décisions de réduire les

16 tensions sur le territoire de la Slovénie, pour chercher une solution à la

17 crise dans une ambiance plus calme. Je suis certain que les Slovènes ne

18 cherchent pas un conflit avec la JNA, et cetera."

19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le numéro de l'intercalaire ?

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est l'intercalaire 75.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Page 128.

22 M. MILOSEVIC : [interprétation]

23 Q. Samedi, 20 juillet 1991, un entretien que vous accordez au journal

24 Vecrenje Novosti.

25 R. Dans cet entretien, je parle d'abord des deux options possibles

26 qu'exigeaient de notre part le commandement d'état-major, le Grand état-

27 major, mais j'ai bien dit que par cette décision, nous avons posé des

28 jalons pour que la tension diminue. Nous avons montré à la population

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1 croate et à la communauté internationale que personne n'a l'intention

2 d'imposer sa propre volonté sur le peuple croate. En tant que commandement

3 Suprême des forces armées, nous avons la plus haute responsabilité pour ce

4 qui est des membres de la JNA cantonnés sur le territoire de Slovénie et

5 pour veiller à ce qu'ils vivent et travaillent dans de bonnes conditions.

6 Aujourd'hui, ils vivent comme s'ils vivaient dans des camps de

7 concentration. Ils sont soumis à des coupures de courant. Il y a aussi les

8 coupures d'eau. Ils n'ont pas de vivres. Il faut qu'ils nous montrent un

9 laissez-passer chaque fois qu'ils se déplacent et leurs familles subissent

10 des mauvais traitements.

11 La seule façon de préserver la vie des membres de la JNA

12 sur le territoire de Slovénie, c'est d'avoir recours à la force ou de muter

13 ces effectifs pour les cantonner dans d'autres garnisons en attendant la

14 solution définitive. Il faut faire un choix entre la guerre et la paix.

15 Nous, nous avons décidé de résoudre la crise yougoslave de façon pacifique

16 et nous pensons que cette décision est un premier pas dans ce sens.

17 Q. Comment et dans quelle condition cette décision a-t-elle été prise et

18 qu'il l'a signée ?

19 R. L'état-major du commandement Suprême a annoncé la solution qu'elle

20 allait retenir avant même de nous soumettre ce papier parce qu'on avait

21 déjà chargé le commandement Suprême de trouver une solution. On nous avait

22 dit que la solution ce n'était ni la guerre, ni la paix, que ce cessez-le-

23 feu était sans arrêt violé par la Défense territoriale de la Slovénie et

24 qu'il fallait bien prendre des mesures.

25 Ce genre de décisions, nous n'avons pas pu les prendre parce qu'il y avait

26 certains membres de la présidence qui s'opposaient aux deux options ou qui

27 ont décidé de s'abstenir au moment du vote. Ce qui fait que lorsque nous

28 nous sommes retrouvés à Brioni, lorsqu'on était en train d'adopter la

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1 déclaration de Brioni, j'en ai parlé dans mon livre, sans cacher quoi que

2 ce soit, j'ai dit à M. Drnovsek que nous n'avons pas le choix, qu'il

3 fallait avoir recours à la force militaire ou qu'il fallait que les

4 effectifs de l'armée, se trouvant sur le territoire de Slovénie, soient

5 mutés ailleurs. C'était la première réunion de la présidence à laquelle

6 assistait M. Drnovsek.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez

8 demandé 15 minutes pour évoquer certaines questions avant la fin de

9 l'audience.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vais vous

12 demander de quitter le prétoire mais restez à proximité de la salle

13 d'audience. Est-ce que vous avez compris ?

14 Monsieur Milosevic, est-ce que vous demandez le versement des intercalaires

15 18, 19 et 75 ?

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. Ils sont versés au

18 dossier.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Certainement.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

21 [Le témoin se retire]

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, vous avez la

23 parole.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous ai demandé de me donner la possibilité

25 de m'adresser à vous à propos des questions de santé. En effet, il y a dix

26 jours, j'ai subi un examen et j'ai été contrôlé par deux responsables

27 médicaux à l'infirmerie du quartier pénitentiaire. On m'a donné tous les

28 médicaments qui avaient été prescrits mais je n'ai pas pu retourner dans ma

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1 cellule, ni même aller aux toilettes --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic --

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] -- et quatre heures plus tard --

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il semblerait que vous répondez

5 d'une façon ou d'une autre --

6 [La Chambre de première instance se concerte]

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Je disais que vous me donniez

8 l'impression de répondre quelque part à l'ordonnance rendue par la Chambre

9 de première instance. Vous l'aurez vue, j'en suis sûr. Si vous voulez

10 répondre, il faut le faire par écrit. En d'autres termes, la Chambre ne

11 sera pas saisie de vos conclusions orales. Vous devez faire cette réponse

12 par écrit avant le 2 février, jeudi. Demain.

13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, si j'interviens c'est pour

14 dire ceci : j'exige que vous cessiez de m'imposer des mauvais traitements

15 en m'empêchant un traitement médical. Qu'est-ce qu'on fait ici. On affirme

16 que je ne prends pas mes médicaments. Or, les examens montrent que lorsque

17 je prends les médicaments sous contrôle, l'effet de ces médicaments dans

18 mon sang est loin d'être celui escompté.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous arrête parce que c'est en

20 violation flagrante de l'ordonnance que nous avons rendue qui disait que

21 vous deviez répondre par écrit. Je refuse de vous entendre ici à

22 l'audience.

23 Il nous reste huit minutes d'audience. Faisons rentrer le témoin.

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, Monsieur Robinson. Est-ce que je

25 peux vous dire une dernière chose avant le retour du témoin ?

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si c'est en rapport avec le sujet

27 abordé, non.

28 M. KAY : [interprétation] Permettez-moi de soulever une question. Je

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1 voudrais une prorogation du temps consacré parce qu'on a apporté à ma

2 connaissance un certain élément et je pense que c'est ce qui a poussé

3 l'accusé à faire sa demande. A mon avis, sa demande est fondée sur quelque

4 chose de tout à fait précis et concret. Je pense que vous devez en être

5 informé. Ceci ne fait pas partie des informations qui vous ont été, à ce

6 jour, remises. J'ai dû passer beaucoup de coups de fil à cet égard, et je

7 n'ai pas pu faire avancer les choses. Je voudrais que, lorsque vous allez

8 examiner ce dossier, vous le fassiez en ayant pleinement connaissance de

9 toutes les facettes concernant le traitement thérapeutique donné à

10 l'accusé, ce qui n'a pas encore été révélé.

11 Ce ne sera peut-être pas possible d'ici à vendredi. Je le crains. Votre

12 ordonnance nous est parvenue lundi. Des mesures ont été prises par nous

13 pour faire avancer les choses parce qu'il y a certains aspects très

14 techniques, des aspects médicaux qu'il faut tirer au clair, mais ceci nous

15 préoccupe. Je pense que la Chambre en tirera partie, si nous pouvons vous

16 transmettre ces informations.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Kay, vous demandez un délai

19 supplémentaire ?

20 M. KAY : [interprétation] Oui. Je pense que la date butoir c'était le 2

21 février, demain. J'espère que d'ici vendredi ce sera fait, mais je suis

22 inquiet parce qu'il y a eu quelques échecs dans nos tentatives pour

23 communiquer avec une partie en particulier.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Fort bien. En réponse à la demande

25 de Me Kay, la date butoir est reportée au lundi 6.

26 M. KAY : [interprétation] Je vous remercie infiniment.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous reste cinq minutes. Il nous

28 faut nous arrêter à une heure 43 puisqu'il y a une audience prévue après la

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1 nôtre, qui doit commencer à 14 heures 15.

2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur Robinson, on commence à 8 heures

4 demain, c'est cela ?

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. J'allais vous le rappeler à la

6 fin de l'audience. Demain, nous allons commencer à 8 heures pour une partie

7 en application du 54 bis et nous allons poursuivre.

8 Il nous reste encore quatre ou cinq minutes aujourd'hui. Essayez d'en

9 tirer la meilleure partie possible.

10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'au moins on pourrait commencer à 8

11 heures et demie parce que vous savez le matin, il faut que je me douche,

12 que je me rase, avant d'être amené ici. Normalement, cette opération de

13 transport, elle commence à 8 heures. Demain, elle devrait commencer à 7

14 heures du matin, au moment où on déverrouille la porte de ma cellule, je

15 voudrais être prêt. C'est impossible demain.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendez, effectivement nous

17 commencerons à 8 heures 30 --

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. MILOSEVIC : [interprétation]

20 Q. Professeur, pourquoi est-ce que la sécession de la Slovénie a posé

21 moins de problèmes que pour celle de la Croatie et puis celle de la

22 Bosnie ?

23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, attendez.

24 [La Chambre de première instance se concerte]

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les Juges préfèrent 7 heures,

26 Monsieur Milosevic. Il incombera aux autorités pénitentiaires de veiller à

27 ce que vous soyez présent à 8 heures.

28 Vous avez le temps de poser deux questions.

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1 M. MILOSEVIC : [interprétation]

2 Q. J'en ai posé une. J'ai demandé pourquoi la sécession de la Slovénie,

3 comme vous l'avez dit dans cet entretien, avait posé moins de problème que

4 celle de la Croatie et puis celle de la Bosnie-Herzégovine ?

5 R. C'est parce que la composition ethnique de la population en Croatie

6 était homogène.

7 Q. Vous voulez dire en Slovénie ?

8 R. Oui, en Slovénie. Oui, la structure ethnique était homogène. C'étaient

9 surtout des Slovènes qui habitaient en Slovénie. La volonté déclarée

10 librement du peuple slovène de se séparer de l'ex-Yougoslavie pour former

11 un Etat indépendant, aux yeux de ceux qui étudiaient la situation et

12 prenaient des décisions à l'époque, cela n'a pas posé de problèmes parce

13 que nous occupions les postes les plus élevés dans cet organe suprême, nous

14 avons pensé que pas une seule nation ne devait être privée de son droit à

15 l'autodétermination, y compris à la sécession.

16 Q. Fort bien. Vous avez répondu. La composition ethnique de la Slovénie

17 était homogène et il n'y avait pas de conflits ethniques en Slovénie; c'est

18 bien cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce qu'il est possible de voir une brève séquence dans la série

21 télévisée dont s'est souvent servi, M. Nice, "Vie et Mort de la

22 Yougoslavie," où Borisav Jovic parle précisément de cette question. Cela

23 fait une vingtaine de secondes, pas plus.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce qui se passe ? L'heure est

25 pratiquement venue de lever l'audience.

26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si cela ne fait que 20 secondes.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Milosevic, je suis navré,

28 mais nous devons lever l'audience parce qu'il faut être sûr que l'audience

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1 suivante puisque commencer à temps.

2 Nous reprendrons nos travaux demain matin à 8 heures. Vous pourrez

3 demain matin nous montrer cette séquence.

4 Nous aurons l'audience en application de l'article 54 bis du Règlement,

5 puis on commencera l'audience à proprement parlée -- vous devriez être ici

6 vers 9 heures, Monsieur le Témoin.

7 L'audience est levée.

8 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le jeudi 2 février

9 2005, à 8 heures 00.

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