Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 19 février 2003.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 05.)

3 (Audience publique.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Bonjour à tous. Veuillez vous asseoir.

6 Madame la Greffière d'audience, voudriez-vous, s'il vous plaît, appeler la

7 cause.

8 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. C'est

9 l'Affaire IT-97-24-T, le Procureur contre Milomir Stakic.

10 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

11 Présentations du côté de l'accusation.

12 M. Koumjian (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Nicholas

13 Koumjian, assisté par Ruth Karper.

14 M. le Président (interprétation): Et pour la défense, s'il vous plaît.

15 M. Lukic (interprétation): Branko Lukic, Monsieur le Président, et John

16 Ostojic.

17 M. le Président (interprétation): Avant que nous commencions, je sais que,

18 comme vous l'aviez promis, vous m'avez donné un coup de téléphone hier, un

19 peu plus tard dans la soirée. Alors qu'en est-il du prochain témoin qui

20 doit venir déposer? Quelles sont les dernières prévisions à ce sujet?

21 M. Ostojic (interprétation): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à la

22 Chambre hier soir, nous sommes encore en train d'essayer d'obtenir que ce

23 témoin puisse venir. Il n'y a aucune possibilité que ce témoin puisse

24 déposer demain parce que nous ne sommes même pas sûrs que ce témoin sera

25 en mesure de voyager jusqu'à vendredi.

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1 Nous n'avons pas été en mesure de contacter le service de protection des

2 victimes et des témoins pour ce voyage parce que, hier, après des heures

3 et des heures, à l'évidence, il n'était pas disponible. Nous sommes

4 arrivés quelques instants avant 9 heures ce matin. Nous nous efforcerons

5 de les appeler pendant la prochaine suspension et nous verrons quels sont

6 les arrangements qui peuvent être faits avec ce témoin en particulier,

7 dans la mesure où la Chambre saura, bien sûr, que nous avons deux témoins

8 ensuite qui pourraient être entendus en plus des cinq qui doivent être

9 entendus avec un lien vidéo et qui viendront déposer.

10 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Bien entendu, je ne

11 peux que vous encourager à prendre les mesures nécessaires pour que ce

12 témoin soit là vendredi, et en tous les cas pas plus tard que lundi.

13 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, pourrai-je demander

14 le numéro du témoin afin que nous puissions commencer les préparatifs au

15 cas où ce témoin viendrait effectivement.

16 M. Ostojic (interprétation): Bien sûr. Je croyais l'avoir mentionné hier.

17 Je présente mes excuses au Bureau du Procureur. Nous pensons qu'il s'agit

18 du témoin 001 sur la liste des témoins au titre de l'Article 65ter.

19 M. le Président (interprétation): Y a-t-il autre chose avant que nous

20 commencions avec ce témoin.

21 Je crois savoir de l'accusation que Mme Korner veut simplement s'adresser

22 à la Chambre après que le témoin aura terminé.

23 M. Koumjian (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

24 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Alors je voudrais

25 demander à l'huissier que le témoin soit introduit dans la salle

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1 d'audience.

2 En attendant, nous avons reçu hier la carte de Prijedor portant la cote

3 S3-1. Le témoin a marqué certains points sur cette carte. Y a-t-il des

4 objections à ce sujet? Et y a-t-il des objections en particulier à ce que

5 cette pièce soit versée au dossier en tant que S3-1?

6 M. Ostojic (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.

7 M. Koumjian (interprétation): Pas d'objection.

8 M. le Président (interprétation): Bien. Donc elle est versée au dossier

9 sous la cote S3-1.

10 (Le témoin, M. Zoran Prastalo, est introduit dans le prétoire.)

11 (Questions au témoin, M. Zoran Prastalo, de M. le Président.)

12 M. le Président (interprétation): Bonjour, Monsieur Zoran Prastalo.

13 J'espère que vous allez enfin pouvoir terminer votre déposition

14 aujourd'hui. J'espère que vous avez pu vous reposer suffisamment.

15 Et comme il s'agit de votre déposition, peut-être voudriez-vous revenir

16 sur l'un ou l'autre aspect de ce que vous avez dit hier. Et peut-être

17 voulez-vous ajouter quelque chose à votre déposition?

18 M. Prastalo (interprétation): Non, Monsieur le Président.

19 Question: De mon côté, je n'ai que deux points à évoquer. Lorsque j'ai

20 relu le compte rendu d'hier, je me suis arrêté de lire, une fois encore, à

21 la page 85, ligne 20, au moment où vous nous avez dit que vous aviez été

22 invité à la maison du père du docteur Stakic parce qu'on célébrait la fête

23 de son saint patron et que différentes personnes étaient invitées. Et vous

24 avez spontanément mentionné le fait que les membres de la famille étaient

25 présents. Vous avez donné les noms de ces personnes et vous nous avez dit:

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1 "Malheureusement, je le connais bien, mais je ne me souviens pas de son

2 nom".

3 Est-ce que, par chance, par hasard, vous pourriez maintenant vous

4 remémorer son nom?

5 Réponse: Je dois dire que je n'y ai pas réfléchi. Je connais bien son

6 surnom, mais je n'ai pas réfléchi à ce qu'était son nom; je ne me souviens

7 pas.

8 Question: Mais lorsque je lis ce que vous avez dit, je dois vous faire

9 comparer, je dois vous confronter aux questions qui ont été posées par les

10 Juges lorsqu'ils lisent le compte rendu. Il est un peu surprenant que vous

11 ayez mentionné spontanément -je cite-: "Son père, sa mère, son frère, sa

12 belle-sœur et M. Stakic lui-même."

13 Puis vous avez poursuivi: "Le nom de son père est Milan, de sa femme

14 Bozana. Et ses enfants étaient là.". Spontanément donc vous avez ajouté le

15 nom des autres. Comment se fait-il que c'est de la même manière spontanée

16 que vous avez ajouté le nom du frère?

17 M. Prastalo (interprétation): Honnêtement, je ne sais toujours pas quel

18 était son nom. Je ne connais que son surnom, que je vous ai dit, mais en

19 fait ça n'avait pas d'importance pour moi. Je ne sais pas également

20 comment s'appelle sa mère. Parce que ce n'était pas nécessaire pour moi de

21 le savoir. Peut-être que je l'ai su et que je l'ai oublié. C'était il y a

22 longtemps et ça n'est vraiment pas important.

23 M. le Président (interprétation): Nous devons accepter cela à l'évidence.

24 Vous avez mentionné les enfants, et vous avez dit que plusieurs fois vous

25 aviez rencontré le docteur Stakic lorsque vous jouiez au billard, et vous

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1 avez mentionné le fait que son fils était présent.

2 Quel était l'âge de son fils à l'époque, approximativement? Bien entendu,

3 on ne demande pas immédiatement... Est-ce que vous pourriez dire

4 approximativement s'il avait 10 ou 20 ans?

5 Réponse: 5 ou 6 ans, 7 peut-être. 5 ou 6.

6 Question: A quelle fréquence est-ce que vous jouiez au billard ensemble,

7 vous et le docteur Stakic et son fils? Approximativement? Il y a 10 ans,

8 11 ans bien sûr, nous comprenons que vous ne pouvez pas donner une

9 estimation exacte.

10 Réponse: Deux ou trois fois en présence de son fils.

11 Question: Dernier point, dernier domaine. J'ai vérifié une nouvelle fois

12 ce qui, du point de vue de la défense, aurait été attendu comme déposition

13 de votre part, et ça se lit comme ceci... Enfin je ne sais pas la pratique

14 concernant le fait qu'il faut informer l'autre partie de ce à quoi on

15 s'attend, et les Juges, pour ce qu'ils doivent attendre.

16 Donc dans ce que nous appelons le résumé de déclaration, on lit: "Le

17 témoin déposera quant à la personnalité et au caractère du docteur Stakic,

18 basé sur le fait que le témoin a connu le docteur Stakic pendant plusieurs

19 années.".

20 Et puis, je suis revenu sur le compte rendu de ces deux derniers jours et

21 j'ai trouvé que pendant la période qui nous importe, c'est-à-dire en

22 commençant au mois de mai, et ce, jusqu'en septembre 1992, vous avez

23 mentionné le fait que vous ayez rendu visite deux ou trois fois au docteur

24 Stakic dans le bâtiment de l'assemblée municipale.

25 Mais, nous ne savons pas vraiment encore quelles étaient les raisons

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1 professionnelles pour lesquelles vous avez rendu visite au docteur Stakic

2 à la suite d'un rendez-vous pris par sa secrétaire, pour aller le voir

3 dans son bureau dans le bâtiment municipal. Qu'avez-vous donc discuté avec

4 lui sur le plan professionnel au cours de ces rendez-vous?

5 Réponse: Eh bien, nous avons parlé, je lui ai parlé de ma société, de son

6 développement. J'ai demandé un avis. Naturellement, j'ai eu des réunions,

7 des réunions directes -je l'avais déjà dit- avec le conseil exécutif, soit

8 à leur invitation, soit à ma demande.

9 J'ai dit que M. Stakic en tant que maire de la municipalité ou comme

10 président de l'assemblée ne pouvait rien résoudre, mais il pouvait me

11 conseiller, me donner son avis, m'appuyer personnellement, ou d'autres

12 hommes d'affaires. Et nous avons évoqué des questions concrètes. Comme je

13 l'ai dit, je pouvais obtenir la solution par le truchement du conseil

14 exécutif de l'assemblée municipale de Prijedor.

15 Au cours de ces deux jours de ma déposition, je vous ai dit que j'avais

16 rendu visite au docteur Stakic parce que je pouvais voir qu'il était celui

17 qui soutenait les initiatives privées, alors que d'autres voulaient

18 détruire, ruiner ces entreprises que ce soit pour des raisons de jalousie

19 ou autre ou parce que nous étions si petits, de si peu d'importance que

20 nous aurions pu réussir. Les hommes sont de drôles d'animaux, vous savez,

21 et le docteur Stakic était en faveur de l'initiative privée.

22 Alors, maintenant, que je vous en parle? Peut-être qu'il était plus

23 important pour moi de le rencontrer que lorsque je devais aller discuter

24 et ergoter avec des personnes d'autres branches du pouvoir, de sorte que

25 c'était un homme intègre, il soutenait l'initiative privée. Il pensait que

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1 la propriété privée était sacro-sainte. Et c'est pour ça que j'allais voir

2 le docteur. Et peut-être que je suis allé le voir trois ou quatre fois.

3 Mais c'est il y a longtemps, parce que je suis allé plus d'une fois dans

4 le bâtiment municipal. Peut-être 20 ou 30 fois.

5 Mais maintenant je vous parle du conseil exécutif de façon à ce que tout

6 malentendu soit évité. Lorsque je dis que je suis allé au bâtiment

7 municipal, j'allais dans ce bâtiment où il y a évidemment différents

8 services, différents bureaux, de sorte que parfois, bon, je me faisais

9 annoncer et à certain moment je rendais visite aussi au président de

10 l'assemblée des municipalités.

11 Question: Mais veuillez comprendre que, d'après ce que nous pouvons lire

12 de votre déposition, à l'origine, vous avez commencé par dire que vous

13 aviez un grave problème et que vous l'aviez discuté de façon détaillée.

14 Vous vouliez vous adresser au président de l'assemblée municipale à

15 l'époque qui était le professeur Cehajic. Vous n'aviez pas réussi à

16 obtenir un rendez-vous et c'est lorsque le député de l'autre côté du

17 bureau du secrétaire… de la secrétaire qui prenait les rendez-vous, que

18 vous avez obtenu l'aide du docteur Stakic.

19 Ma question, donc, serait: est-ce qu'il y avait des problèmes analogues

20 pour lesquels vous avez estimé nécessaire de vous adresser docteur Stakic

21 et à personne d'autre, parce que vous estimiez, comme vous le faisiez

22 précédemment avec le professeur Stakic, qu'il était celui qui pouvait vous

23 aider à l'assemblée municipale?

24 Réponse: Je n'allais pas au bâtiment municipal uniquement pour obtenir de

25 l'aide. Il y avait également différents types de réunion. Parfois j'étais

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1 invité à venir discuter à un point ou un autre. Je vous disais à un moment

2 donné que, par exemple, on s'est entretenu de la question de la

3 distribution du carburant, du pétrole. Je n'allais pas seulement pour m'y

4 plaindre. Ce n'était pas la seule raison pour laquelle je m'y rendais,

5 pour me plaindre. J'y allais parce que… pour certaines de mes demandes.

6 Il faut que vous me compreniez. Je ne cherchais pas à obtenir une

7 protection du docteur Stakic. J'avais une conversation avec lui parce que

8 je pense que nous étions deux personnes qui suivaient la même ligne, qui

9 partageaient les mêmes idées. J'espère que vous comprenez cela.

10 A l'époque, j'étais à la tête d'une entreprise privée et, à l'époque,

11 c'était très très difficile d'être un homme d'affaires parce qu'on pouvait

12 être traité de profiteur, de spéculateur. On vous traitait de tous les

13 noms, on pouvait vous mettre une étiquette à tout moment. De sorte que,

14 très souvent, je suis allé là pour voir comment se présentait la situation

15 en ce qui concerne les sociétés, le travail.

16 Je n'avais pas de problème particulier, comme je vous l'ai dit. Et si

17 j'avais de grands problèmes, peut-être que je serais allé lui demander à

18 lui seul son avis. Mais cela ne veut pas dire que j'aurais accepté cet

19 avis.

20 J'étais heureux de pouvoir parler avec lui parce que je pensais qu'il me

21 comprenait à la différence d'autres personnes. C'était un homme qui était

22 obsédé par les questions économiques. Il voulait vraiment travailler du

23 mieux possible et parfois les choses allaient mieux, parfois moins bien.

24 Mais il se battait pour cela. Et j'ai beaucoup de respect pour cela parce

25 que je l'ai fait aussi, j'ai fait cela aussi pendant ces deux jours où

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1 vous avez pu voir de quel type de problème il s'agissait. Peut-être que je

2 ne me suis pas suffisamment bien expliqué. Peut-être que je n'ai pas

3 présenté les choses avec suffisamment d'éloquence, mais telle était la

4 vérité.

5 Question: Vous avez mentionné dans la déposition d'aujourd'hui, à la page

6 6, lignes 21-22, -je cite-: "Je vous ai dit au moment où nous discutions

7 de la question de la distribution de pétrole que je n'allais pas là

8 seulement pour me plaindre."

9 Pourriez-vous, s'il vous plaît, entrer davantage dans les détails? De quoi

10 parliez-vous en ce qui concerne la distribution du pétrole avec M. Stakic?

11 Réponse: Eh bien, je vous dirai qu'il voulait savoir comment les choses se

12 passaient et j'étais l'un des cadres qui pouvaient le renseigner. Je lui

13 disais que des bons d'essence étaient délivrés, que les gens du voisinage

14 ou des communautés voisines venaient, comme cela avait été convenu, à la

15 suite d'une décision différente du conseil exécutif pour obtenir ce

16 carburant avec ces bons ou coupons ou certificats ou ce que vous voulez

17 les appeler. Alors il voulait savoir si les gens venaient, s'ils

18 emportaient du pétrole, quelle quantité était fournie parce que ceci

19 intéressait le conseil exécutif.

20 Je veux dire que c'était une conversation dans laquelle il voulait

21 simplement obtenir des renseignements exacts à ce sujet. Donc c'était

22 purement une conversation à caractère professionnel. Et comme je l'ai déjà

23 dit, ce type de conversation ne durait guère plus de deux minutes. Je ne

24 voudrais pas appeler cela des conférences, c'étaient simplement des

25 réunions.

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1 Question: Monsieur Prastalo, n'est-il pas vrai que vous avez parlé avec le

2 docteur Stakic du problème de la nécessité d'avoir davantage de pétrole et

3 de produits dérivés du pétrole d'autres pays comme vous nous l'avez… Vous

4 nous avez dit hier à quel point c'était difficile, compte tenu de

5 l'embargo, premièrement, de faire venir du pétrole jusqu'à la municipalité

6 de Prijedor et, ensuite, de le distribuer de la manière jugée nécessaire,

7 comme cela serait le cas en temps de guerre. Est-ce que vous avez discuté

8 de ces questions avec le docteur Stakic?

9 Réponse: Monsieur Stakic, pour autant que je sache -et nous le savons

10 tous-, était un médecin.

11 En ce qui concerne le pétrole, je vous dirai qu'il ne sait pas où

12 j'obtenais ce pétrole. C'est-à-dire qu'il savait que j'avais un permis

13 pour me rendre en Serbie; alors je suppose qu'il se rendait compte que

14 cela venait de Serbie ou de Bulgarie. Je le répète, je ne sais pas s'il le

15 savait. Mais dans la mesure où il s'agit de tout cela, nous n'avons jamais

16 discuté des questions de pétrole ou de carburant que j'obtenais du marché

17 libre.

18 Donc les conversations entre le docteur Stakic et moi se ramenaient au

19 carburant de diesel nécessaire pour l'agriculture, tout comme il ne me

20 disait pas s'il avait lui-même des problèmes là où il travaillait, dont je

21 pouvais être conscient.

22 Et je voudrais répéter cela, il n'est jamais intervenu dans mon travail.

23 Mon domaine de travail était spécifique, je travaillais comme un

24 professionnel. Et j'ai seulement discuté de la question de la fourniture

25 pour les citoyens et c'était obtenu par les réserves de denrées. C'était

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1 quelque chose dont j'ai parlé hier et qui devait être organisé. Et le

2 docteur Stakic n'était pas directement chargé de cela. Je répète, c'était

3 le conseil exécutif qui le faisait.

4 Mais comme je l'ai dit, il demandait si tout le monde dans la municipalité

5 s'était vu délivrer des certificats ou des bons sur la base du cadastre ou

6 du registre cadastral et si on allait chercher ce pétrole, si on

7 l'obtenait. Simplement, il était intéressé par l'agriculture. C'est-à-dire

8 le fait pour les gens de survivre dans cette municipalité.

9 Mon travail était mon travail. Je le répète encore une fois, M. Stakic

10 était un homme qui luttait. Remportait-il des succès, je ne le sais pas,

11 mais je sais qu'il luttait et qu'il trouvait ça difficile. Je le répète

12 pour la nième fois: cet homme avait ses propres idées concernant la vie à

13 l'époque, et c'était une époque difficile et il appréciait les hommes

14 d'affaires. Et je dirai que c'était assez dangereux à cette époque.

15 Malheureusement, nous n'avions pas un grand nombre de personnes comme lui.

16 Il y avait d'autres personnes qui n'avaient rien à voir avec l'assemblée

17 municipale, il y avait également des gens qui se trouvaient dans le

18 secteur économique, dans le secteur qui était le secteur de propriété

19 sociale qui appréciait également les efforts que nous déployions. Nous

20 n'étions pas en mesure d'aider davantage parce qu'à l'époque en question,

21 pour faire de l'argent, il fallait aider ces entreprises à survivre, mais

22 à tout moment nous avons employé constamment 10 à 15 personnes qui

23 obtenaient régulièrement leur salaire. Ce seul salaire pouvait, en fait,

24 permettre d'aider sept ou huit membres d'une famille, ce qui n'était pas

25 un mince succès. A d'autres moments, on aidait les autres. Les choses

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1 étaient ainsi.

2 Question: Vous avez souligné le rôle du docteur Stakic pour ce qui est

3 d'apporter son soutien aux entreprises privées. Est-ce que cela, donc, a

4 été une grande surprise lorsque, quelque mois plus tard, vous avez dû

5 protester par écrit au nom de la société "Hidraflex Prijedor" à propos

6 d'une décision signée par le docteur Stakic, décision prise le 27 août

7 1992, décision qui déclarait comme propriété d'Etat les biens qui avaient

8 été abandonnés; ceci, dans le Journal officiel du 31 août 1992, n°3 de

9 1992, qui est mentionné dans votre lettre à laquelle nous avons

10 provisoirement attribué la cote S399B à la page 2, deuxième paragraphe.

11 Je ne parviens pas à comprendre cela dans ce contexte.

12 Réponse: Je vais essayer de vous expliquer que je n'ai rien contre le

13 Journal officiel ni contre la signature de cette chose, de cette décision

14 concernant les biens abandonnés qui deviennent propriété de l'Etat. Je

15 n'ai rien contre cette décision publiée dans le Journal officiel, mais je

16 suis contre les gens qui essaient de transformer cette entreprise en bien

17 abandonné. Parce que cette entreprise, qui a son directeur et ses

18 responsables, ne peut pas être déclarée "bien abandonné".

19 Il fallait protéger des biens qui étaient vraiment abandonnés. Mais les

20 protéger des actions de la population serbe ou non serbe. Je n'ai rien

21 contre cette décision, mais je devais prouver qu'il ne s'agissait pas de

22 bien abandonné. Je me suis plaint de la décision concernant "Hidraflex",

23 notre entreprise, parce que notre entreprise n'a jamais été abandonnée;

24 donc le Journal officiel et "Hidraflex", il faut séparer ces deux choses.

25 Je devais donc lutter pour que cet article ne figure pas dans le Journal

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1 officiel, c'est-à-dire cette décision concernant notre entreprise, parce

2 que je considérais qu'il fallait protéger tous les biens abandonnés pour

3 que des vols ne se produisent pas, ni d'autres choses nuisibles. Mais je

4 sais que quelqu'un, sur la base de cette décision, a réussi à déclarer

5 notre entreprise abandonnée. Et moi je luttais contre cela.

6 Je pense que j'étais clair à ce sujet. Le Journal officiel n'a pas été

7 rédigé pour "Hidraflex" mais pour le territoire de la municipalité de

8 Prijedor, c'est-à-dire cette décision concernait les biens abandonnés sur

9 le territoire de la municipalité de Prijedor et pas "Hidraflex".

10 Question: Vous comprenez que je dois vous poser cette question parce que,

11 dans cette lettre, vous vous êtes plaint de la décision qui a été publiée

12 au Journal officiel. Et il est écrit dans le Journal officiel que cette

13 décision a été signée par le docteur Stakic au mois d'août 1992.

14 Comme vous avez déjà dit avant, est-ce que cela aurait été une occasion de

15 demander au docteur Stakic et d'essayer donc de comprendre comment cela

16 était possible, c'est-à-dire que cela a été signé par le docteur Stakic et

17 qu'en même temps le docteur Stakic soutenait les initiatives privées et

18 que cela n'était pas du tout en liaison avec l'expropriation? Est-ce que

19 vous auriez pu lui demander d'éviter l'incidence négative de cette

20 décision par rapport à votre entreprise?

21 Réponse: Je pense qu'il y a une faute par rapport à la période où le

22 Journal officiel a été publié. Cela ne concernait pas mon entreprise. Je

23 répète encore une fois: ce Journal officiel ne concernait pas mon

24 entreprise. Mais les autres personnes qui faisaient partie du conseil

25 exécutif ont signé cette décision. M. Indzic, je répète encore, qui était

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1 soit président soit vice-président du conseil exécutif, a signé cette

2 décision. Je n'avais donc pas besoin de me plaindre. C'était au mois

3 d'octobre ou au mois de novembre, je ne sais plus.

4 Je ne sais pas si vous pouvez me comprendre. Lorsque la décision a été

5 prise, je n'avais pas besoin de parler à qui que ce soit de la

6 municipalité parce que cela ne concernait pas notre entreprise, parce que

7 tout cela a été donc provoqué par les gens qui prenaient le pouvoir, et

8 cela ne concernait pas notre entreprise. Je ne sais pas ce qui s'était

9 passé avec d'autres compagnies, mais moi je devais lutter pour mon

10 entreprise. Je n'avais donc aucun besoin de parler aux représentants de

11 l'assemblée municipale, parce que cette décision ne devait pas être

12 appliquée à notre entreprise.

13 Question: Donc la décision a été publiée en tant que telle à la date du 27

14 août 1992 et, bien sûr, cela entre dans la période couverte par l'Acte

15 d'accusation. Mais plus tard, lorsqu'il est dit que cela aurait pu

16 influencer "Hidraflex", nous avons une lettre datée du 4 décembre 1992

17 dans laquelle il y a une mention d'une décision concrète du 26 novembre

18 1992.

19 Pendant cette période, le docteur Stakic occupait toujours la fonction de

20 président de l'assemblée municipale, n'est-ce pas?

21 Réponse: Je ne connais pas la date exacte, donc, lorsqu'il y avait les

22 changements dans les autorités municipales, mais je vous répète, je ne me

23 suis pas adressé au docteur Stakic pour lui demander quoi que ce soit.

24 C'était au cours de l'hiver et, moi, j'ai décidé à l'époque de lutter à

25 travers les médias. Donc, je n'ai rien demandé, je ne me suis pas adressé,

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1 à qui que ce soit, parce que j'ai rencontré des problèmes avec des

2 personnes que j'ai déjà évoquées; donc j'ai décidé moi-même de lutter seul

3 à travers les médias.

4 Et je répète encore une fois que j'ai contacté beaucoup de journalistes à

5 l'époque parce qu'on a reçu des menaces aussi. On a eu beaucoup de

6 situations désagréables.

7 Peut-être que c'est un peu… que ça pourrait être un peu bizarre, mais j'ai

8 vu qu'il fallait que je mène ma lutte autrement. Ce qui s'est avéré

9 ultérieurement correct.

10 Question: Monsieur Prastalo, est-ce que vous vous considérez comme une

11 personne qui était d'abord responsable pour approvisionner la municipalité

12 de Prijedor en pétrole d'autres pays, et la personne qui s'occupait de la

13 distribution des produits pétroliers?

14 Réponse: Non, le responsable pour cela à Prijedor, sur le territoire de la

15 municipalité était l'entreprise de l'Etat qui s'appelait "Energopetrol".

16 "Energopetrol" possédait ses stations d'essence à Kozarac, à Prijedor, à

17 Novi Grad; donc sur le territoire de la municipalité de Prijedor, cette

18 entreprise possédait entre quatre et cinq stations d'essence. A Ljubija

19 aussi. "Energopetrol", donc, s'occupait de toutes les activités ayant

20 trait aux produits pétroliers.

21 Nous avons travaillé exclusivement pour le compte de notre entreprise

22 parce que, normalement, nous avons eu besoin de l'entreprise

23 "Autotransport". Par exemple, nous devions quelquefois attendre une

24 dizaine ou une quinzaine de jours, mais nous n'étions pas propriétaires ni

25 responsables pour ces activités en général. Nous avions notre entreprise

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1 qui était une entreprise privée.

2 Donc je ne me considère pas comme une personne qui était responsable

3 d'organiser la distribution de produits pétroliers. Je pouvais être à

4 Prijedor et ne pas m'occuper de cela. Je pouvais aller au front aussi ou

5 me promener tout simplement. Je pouvais ne pas travailler, ne pas

6 m'occuper de ces activités.

7 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus de

8 question à vous poser.

9 Le Juge Vassylenko a quelques questions à vous poser.

10 (Questions au témoin, M. Zoran Prastalo, de M. le Juge Vassylenko.)

11 M. Vassylenko (interprétation): Monsieur Prastalo, hier, vous avez lu les

12 extraits du document, les extraits à en-tête du document sur l'entreprise

13 "Hidraflex". Ce document vous l'avez signé vous-même le 4 décembre 1992.

14 En quelle qualité avez-vous signé ce document?

15 M. Prastalo (interprétation): J'étais, donc, adjoint du propriétaire de

16 cette entreprise privée, comme je l'avais déjà dit.

17 Question: Et qui était le propriétaire de "Hidraflex" et depuis quel

18 moment? Pendant quelle période?

19 Réponse: Je peux vous expliquer cela. Quant au document, le propriétaire

20 était Mme Marija Popovic, épouse de Dragan Popovic. Le propriétaire était

21 Dragan Popovic avec qui j'ai travaillé tout le temps et nous avons

22 construit notre entreprise. Mais, du point de vue formel, le propriétaire

23 était son épouse, mais le vrai propriétaire était Dragan Popovic.

24 Question: A quel groupe ethnique appartenaient Maria Popovic et Dragan

25 Popovic?

Page 12318

1 Réponse: Maria et Dragan Popovic sont Croates. Maria est née à Stara

2 Rijeka, près de Ljubija, et Dragan Popovic est né à Kreka. Il est né là-

3 bas. Par la suite, il habitait Ljubija, il possédait une maison familiale

4 à Ljubija. Il est né à Kreka parce que son père était cheminot, et il

5 devait déménager à plusieurs reprises.

6 Question: Je vous remercie, c'est clair. Qui a décidé que l'entreprise

7 "Hidraflex" soit donc "bien abandonné", quel organe a décidé cela?

8 Réponse: Je vous ai dit, c'étaient les gens qui voulaient spolier les

9 autres de leurs biens. Et j'ai dit cela à huis clos partiel. Tout cela a

10 été enregistré, je pense: c'était le conseil exécutif de l'assemblée

11 municipale de Prijedor.

12 Mais c'étaient en fait les gens qui étaient derrière le conseil exécutif

13 et qui à la fois étaient membres du conseil exécutif, mais en même temps

14 il y avait les gens qui n'étaient pas membres du conseil exécutif mais

15 qui, enfin, dirigeaient tout cela. C'était Simo Miskovic par exemple,

16 président du SDS, qui a embauché son neveu au poste de conseiller de M.

17 Dusan Kurnoga.

18 Mais là je peux vous dire maintenant en audience publique. Il ne faut pas

19 passer à huis clos partiel pour que je dise cela.

20 Question: Vous avez évoqué que cette décision, concernant les biens

21 abandonnés qui se transforment en biens de l'Etat, a été appliquée et

22 qu'il y avait beaucoup de biens mobiliers et immobiliers qui ont été

23 expropriés, n'est-ce pas?

24 Réponse: Je dis que la décision a été appliquée, selon les dates que vous

25 avez. Vous savez pendant quelle période ces biens ont été expropriés. Il y

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1 avait beaucoup de biens. Nous avons construit une usine selon les normes

2 européennes. C'était une petite usine qui disposait de tous les éléments

3 tout à fait nouveaux: nouvelles machines, nouveaux meubles, etc.

4 Question: Ça c'est assez clair, mais je ne vous demande pas de me parler

5 de l'équipement et des machines de l'usine. Je vous pose la question

6 suivante: en général, les gens, dont les biens ont été déclarés

7 "abandonnés", appartenaient à quel groupe ethnique?

8 Réponse: Vous me demandez pour les gens qui travaillaient à "Hidraflex"?

9 Je ne peux vous dire que pour les gens qui travaillaient à "Hidraflex".

10 J'ai déjà dit qu'il s'agissait de gens qui étaient Croates, mais il y

11 avait certaines personnes qui ne les appelaient pas comme ça. Ils ont

12 profité de ce fait pour pouvoir spolier ces gens de leurs biens.

13 Je vous ai donc dit qu'il s'agissait de temps difficiles, même pour nous

14 qui sommes restés là-bas, parce que le propriétaire et son épouse se

15 trouvaient à Rijeka, et c'était nous qui sommes restés là-bas et aurions

16 pu être menacés.

17 Question: Je vais reformuler ma question: est-ce que vous avez quelques

18 exemples de biens abandonnés qui appartenaient aux Serbes et qui, par la

19 suite, ces biens ont été transformés en propriété de l'Etat?

20 Réponse: Non, je ne connais pas de tels exemples.

21 Question: Je vais poser une dernière question. Vous avez dit que le

22 docteur Stakic était membre du Parti radical populaire Nikola Pasic. Qui

23 est Nikola Pasic?

24 Réponse: C'était un écrivain serbe et un homme politique serbe.

25 Question: Est-ce que c'est un écrivain contemporain ou un écrivain du

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1 passé?

2 Réponse: Nous pouvons dire qu'il est un personnage historique, un écrivain

3 contemporain. Cela dépend comment nous comprenons cela.

4 Question: Il est toujours en vie? Est-ce qu'il est toujours en vie?

5 Réponse: Il n'est pas en vie physiquement.

6 Question: Savez-vous la date de sa mort?

7 M. Prastalo (interprétation): Non.

8 M. Vassylenko (interprétation): Je n'ai plus de questions à vous poser.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

10 La Juge Argibay a quelques questions à vous poser.

11 (Questions au témoin, M. Zoran Prastalo, de Mme la Juge Argibay.)

12 Mme Argibay (interprétation): Bonjour Monsieur Prastalo. J'ai un autre

13 type de questions à vous poser. Est-ce que vous n'avez jamais été mobilisé

14 entre 1991 et 1995, par exemple?

15 M. Prastalo (interprétation): En 1995 ou 1996, j'ai été mobilisé, j'ai

16 passé une dizaine de jours à Gradacac, et j'ai été soumis à une obligation

17 de travail. Cela n'a même pas duré une dizaine de jours. Mais à Prijedor,

18 non.

19 Question: Est-ce que, au cours des mois allant de mai à septembre 1992,

20 est-ce que vous étiez soumis à une obligation de travail?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Quelle était cette obligation de travail à laquelle vous étiez

23 soumis?

24 Réponse: Il s'agissait de tâches dont j'ai déjà parlé, c'est-à-dire

25 c'était l'entreprise "Hidraflex" dans laquelle je travaillais. Ensuite, la

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1 distribution de produits pétroliers. J'ai tout dit parce que, vous savez,

2 j'étais assez habile.

3 Question: Donc, j'ai compris ce que vous vouliez dire.

4 Ma deuxième question allait suivante: le 30 avril 1992, où étiez-vous?

5 Réponse: A Prijedor, je l'ai déjà dit.

6 Question: Et vous avez habité Cirkin Polje, n'est-ce pas?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Est-ce que vous avez obtenu une nouvelle carte d'identité

9 approximativement vers cette date?

10 Réponse: Je ne peux pas m'en souvenir. Vous pensez à la carte d'identité

11 ordinaire? La carte d'identité?

12 Question: Oui.

13 Réponse: Je ne peux pas m'en souvenir. C'est quelque chose dont disposent

14 tous les citoyens. Mais je ne peux pas me souvenir quand cette carte

15 d'identité, cette nouvelle carte d'identité m'a été délivrée.

16 Question: Et vous ne vous souvenez pas non plus qu'il y avait des

17 modifications de cartes d'identité à peu près pendant cette période?

18 Réponse: Je ne suis pas allé demander une nouvelle carte d'identité. Pour

19 moi, ce n'était pas très important. Pour moi, c'était le passeport qui

20 était le document le plus important.

21 Question: Je le sais et je ne vous demande pas de m'expliquer cela, mais

22 je voudrais tout simplement savoir si une nouvelle carte d'identité vous a

23 été délivrée, même si vous n'aviez pas besoin de cela. Je vous demande

24 s'il y avait des nouvelles cartes d'identité qui ont été délivrées pendant

25 cette période?

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1 Réponse: Je vous ai déjà dit que, pour moi, ce n'était pas important et je

2 ne m'occupais pas de cela. C'était seulement le passeport qui avait une

3 importance pour moi.

4 Question: Bien.

5 Encore une question: hier, vous nous avez dit que pendant que vous avez

6 parlé des centres d'enquête, des centres de rassemblement -je pense que

7 cela est à la page 77, à la ligne 17 du compte rendu de votre témoignage

8 d'hier-, vous avez dit que, dans ces centres d'enquête, il y avait des

9 interrogatoires ayant trait aux activités militaires.

10 Comment avez-vous appris cela?

11 Réponse: Je vous avais dit que j'allais dans la ville, dans les

12 restaurants, aux stations-services. Notre peuple dit: "si tu veux

13 apprendre tout ce qui se passe dans la ville, il faut que tu ailles chez

14 ton coiffeur ou chez ton cordonnier et tu peux apprendre tout cela."

15 Tout simplement, j'ai entendu parler de la bouche des autres qu'il y avait

16 des personnes qui attaquaient la police, l'armée, et que ces gens-là ont

17 été interceptés et interrogés; que ces gens ont été amenés dans un centre

18 d'enquête.

19 Moi, je ne suis jamais allé à aucun centre d'enquête et d'interrogatoire.

20 Je peux confirmer cela.

21 Mais les gens s'intéressaient aussi comment ils pouvaient atteindre ces

22 centres de rassemblement parce qu'ils savaient que, de ces centres de

23 rassemblement, ils pouvaient partir ailleurs. Je savais qu'il y avait des

24 gens qui revenaient de ces centres d'enquête. Je vous ai dit que j'aidais

25 beaucoup de gens, mais je ne suis pas obligé maintenant de me vanter de

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1 mes actions.

2 Question: Bien. Il y a une dernière question que je vais vous poser.

3 Comment avez-vous appris et, après avoir appris l'existence de ces centres

4 de rassemblement et d'enquête, est-ce que vous avez appris qu'il y avait

5 des gens qui, dans ces centres, ont été passés à tabac ou même tués?

6

7 (parce que je dis: je ne me suis pas intéressé à cela. Je suis une

8 personne qui a souffert à cause de tout cela

9 Réponse: Non, je n'ai pas appris qu'il y avait des personnes qui ont été

10 tuées ou battues. Je n'ai rien entendu à ce sujet parce que je dis, je ne

11 me suis pas intéressé à cela. Je suis une personne qui a souffert à cause

12 de tout cela. Et quand j'ai dit, hier, où je vivais et où je vis

13 aujourd'hui et avec qui, j'ai dit que je fréquente pas mal de gens, tout

14 ce qui s'est passé pour moi, c'était inimaginable.

15 Je ne m'intéressais jamais à la politique, mais, à travers toutes vos

16 questions, je vois que vous pensez que j'étais une personne importante.

17 Mais, moi, tout simplement, je luttais pour ma cause et j'aidais beaucoup

18 de personnes. Et j'aurais aimé ne jamais avoir vu tout ce qui s'est passé,

19 mais c'est avec le temps que nous aurons une réponse à tout cela.

20 Nous savons bien qui a provoqué ce désordre sur le territoire de notre

21 municipalité et qui a commis tous ces meurtres.

22 Question: Est-ce que je pourrais vous poser la question suivante: qui

23 était, d'ailleurs, celui qui a commis tous ces meurtres? Parce que vous

24 avez dit: "Tout le monde le sait".

25 M. Prastalo (interprétation): Oui, Prijedor… Je vais dire quelques phrases

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1 seulement. Prijedor était une ville tranquille. Peut-être que dans

2 d'autres parties de la République, il y avait des événements qui sont

3 survenus, des événements désagréables. Mais à Prijedor, nous avons parlé

4 de la cohabitation. Mais vous savez que ce qui s'était passé à Prijedor,

5 qu'il y avait des gens aux points de contrôle à qui il était demandé de se

6 rendre. C'était le 22 mai à Prijedor.

7 Je vous dis que j'ai beaucoup voyagé et, dans tous les pays, un ordre

8 public est imposé à tout nouveau venu. L'armée a réagi après quelques

9 jours. Sur la route de Kozarac, il y avait un certain "Djapo" qui a été

10 tué. C'était à Kozarac. Tout ce qui s'est passé à Kozarac, tout le monde

11 était au courant. Et il y avait ces autres, c'est-à-dire les Croates et

12 les Serbes à la municipalité de Prijedor qui auraient tué certaines

13 personnes aux points de contrôle; je ne sais pas.

14 Enfin, je veux dire, je connais personnellement ces gens qui auraient

15 commis ces crimes. Il y avait deux entrepreneurs privés. Ensuite, il y

16 avait un policier d'active. Donc il s'occupait de… il travaillait à

17 Ljubija pendant une quinzaine d'années, et je croyais en la justice. Mais

18 je ne suis pas un orateur. Peut-être que je suis très émotif lorsque je

19 parle de cela, mais...

20 Donc je vous affirme qu'il s'agissait des soldats qui revenaient du front

21 de Slavonie orientale et ces soldats ont été tués. C'était une embuscade.

22 On a demandé à la commune locale de Hambarine, on a demandé à des gens qui

23 ont fait cela de se rendre et on leur a promis que rien ne se produirait

24 de mal. Par exemple, à Ravska, il y avait des Croates et il y avait, donc,

25 des maisons qui sont restées intactes parce que personne de ce village n'a

Page 12325

1 attaqué l'armée. Il y a des gens qui sont partis aussi de ce village, il y

2 en a qui sont retournés, mais toutes ces maisons sont restées intactes

3 dans ce village.

4 Lorsqu'on parle de Kozarac, je ne suis pas allé à Kozarac. Je ne passais

5 par Kozarac que pour aller à Banja Luka. A Hambarine, j'ai pu voir

6 seulement les maisons mais de la route. Mais dans tous les villages où

7 l'armée a été attaquée, il y avait des dégâts. Mais je pense que n'importe

8 où, si l'armée attaquait, l'armée réagirait.

9 Mme Argibay (interprétation): Merci, je n'ai plus d'autre question.

10 M. le Président (interprétation): Bien. C'est maintenant au tour de la

11 défense de procéder ou plutôt de vous poser des questions supplémentaires

12 qui découlent du contre-interrogatoire et des questions posées par la

13 Chambre.

14 Je vous prie de commencer, Maître Lukic.

15 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Zoran Prastalo, par

16 Me Lukic.)

17 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas

18 beaucoup de questions, mais j'ai simplement quelques points de précision à

19 faire.

20 Monsieur Prastalo, de nouveau, je vous souhaite le bonjour.

21 M. Prastalo (interprétation): Bonjour.

22 Question: Je vais vous évoquer certains passages, chiffres et ainsi de

23 suite; je vous prie de ne pas porter attention à ces pages, c'est

24 simplement pour le compte rendu d'audience.

25 Hier, à la page 41, ligne 9 du compte rendu d'audience, vous aviez

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1 commencé à parler de l'influence qu'avait le président de l'assemblée

2 municipale sur le comité exécutif à l'époque où M. Cehajic était le

3 président de la municipalité. Vous nous avez dit que le comité exécutif

4 était composé de deux… et vous n'avez pas terminé la phrase, car le

5 Procureur vous a interrompu à ce moment-là.

6 Voulez-vous nous dire de quoi il s'agit? Lorsque vous avez parlé de

7 "deux", c'était deux quoi? Et pourquoi est-ce que M. Cehajic avait une

8 influence sur le comité exécutif?

9 Réponse: Eh bien, hier, j'ai essayé d'expliquer, puisque cela

10 m'intéressait énormément, je voulais expliquer de quelle façon et comment

11 le comité exécutif était formé. J'étais beaucoup intéressé par les

12 questions économiques. Je crois qu'il y avait huit membres: quatre Serbes

13 et quatre Musulmans. Et chaque fois qu'il fallait rendre une décision, on

14 procédait à un vote, et sur toutes les questions il fallait procéder à un

15 vote.

16 Le parti à l'assemblée municipale était un peu chaotique et certaines

17 personnes avaient été démises de leurs fonctions. Car il arrivait souvent

18 que les personnes procèdent à des votes mais ne savaient pas sur quoi

19 elles votaient. Comme j'ai dit, il y avait des points de 41 à 45.

20 Et ce que je voulais expliquer hier, c'est la chose suivante: nous n'avons

21 pas reçu… enfin M. Cehajic plutôt n'a pas pu signer la décision pendant

22 dix jours, de sept à dix jours. Ce qui veut dire que le comité exécutif de

23 l'assemblée municipale fonctionnait pour ainsi dire seulement pour

24 procéder à un nouveau vote et il n'était pas au service du peuple. Ils ne

25 s'intéressaient qu'à leurs propres intérêts.

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1 Question: Est-ce que, selon vous, M. Cehajic pouvait contrôler de façon

2 officielle les activités du comité exécutif ou est-ce que son influence

3 sur ces quatre membres du SDA était de nature plutôt personnelle?

4 Réponse: Pour ainsi dire, il pouvait contrôler ou exercer certains

5 contrôles sur ces députés, sur les membres de son comité exécutif. Ce qui

6 veut donc dire qu'il avait une politique qui était assez néfaste pour la

7 municipalité. Nous savions très bien comment les choses se déroulaient

8 dans mon entreprise par exemple. Mais il avait une influence directe sur

9 ses propres membres.

10 Il prenait les décisions qui avaient été prises lors d'autres réunions. Et

11 je répète, il n'était pas en faveur de nous accorder nos droits, car il

12 était persuadé que M. Popovic était Serbe. Mais plus tard, lorsqu'ils ont

13 appris de quoi il s'agissait, nous avions trouvé cela plutôt comique et

14 même triste quant à la façon dont les choses se sont déroulées par la

15 suite.

16 Question: Merci. A la page 64, ligne 4, paragraphe 18 et ainsi de suite,

17 du compte rendu d'audience d'hier, vous avez dit que la police avait un

18 rôle actif lorsqu'il s'agissait de vous déloger de la compagnie

19 "Hidraflex"?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Je vais maintenant vous poser une question qui est assez

22 importante, car il faudra expliquer à cette Chambre de quelle façon on

23 procède à l'expulsion chez nous.

24 Dans une entreprise, si quelqu'un obtient un appartement, par exemple, cet

25 appartement est la propriété de l'entreprise qui lui accorde cet

Page 12328

1 appartement, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui, c'est exact.

3 Question: Mais il est arrivé que dans cet appartement en question, un

4 autre ouvrier de l'entreprise pouvait emménager, une personne qui n'avait

5 donc pas reçu les droits d'habitation de l'appartement en question, est-ce

6 que c'est exact?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Pouvez-vous répéter? Cela n'a pas été consigné au compte rendu

9 d'audience.

10 Réponse: Oui.

11 Question: L'entreprise demande d'abord à l'ouvrier, qui est entré de façon

12 illégale dans l'appartement, de sortir, de quitter l'appartement, est-ce

13 exact?

14 Réponse: Oui, c'est exact.

15 Question: Mais si l'ouvrier en question, qui est entré dans un appartement

16 de façon illégale, si cet ouvrier ne quitte pas, ne déménage pas,

17 l'entreprise demande l'aide de la police afin d'expulser l'ouvrier en

18 question, est-ce que c'est exact?

19 Réponse: Oui, c'est exact.

20 Question: Pouvez-vous nous dire si la police avait participé lors de

21 l'expulsion dans tous les cas, expulsion forcée, à chaque fois que

22 l'organe de direction rendait une décision qu'une personne devait quitter

23 une certaine installation?

24 Réponse: Oui, certainement. Je peux vous citer un exemple qui s'est

25 manifesté dans les quelques années précédentes.

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1 La population serbe qui était entrée vivre dans des appartements de ma

2 ville, par exemple. Pour ce qui est de ces derniers, la police allait

3 accompagner des personnes qui procédaient à l'éviction de ces locataires

4 et on expulsait ces personnes afin que les propriétaires des maisons en

5 question puissent regagner leurs demeures. Pour moi, c'était une activité

6 tout à fait normale.

7 Question: Dans ce cas-là, la police prête main-forte au ministère chargé

8 des personnes, des réfugiés, des personnes déplacées?

9 Réponse: Oui, c'est cela.

10 Question: Donc, selon notre système juridique, la police vient toujours

11 prêter main-forte lors des expulsions forcées et c'est ce qui vous est

12 arrivé, n'est-ce pas, également lorsqu'on a demandé que vous soyez

13 expulsés de vos locaux?

14 Réponse: Oui, à l'exception du fait que, chez nous, le problème était le

15 suivant: c'est que la propriété n'avait pas été abandonnée.

16 Question: A la page 69, ligne 11, le Procureur vous demande s'il est vrai

17 que les policiers de nationalités croate et musulmane avaient été emmenés

18 au camp tout de suite après la prise du pouvoir.

19 Réponse: Non, j'ai cité un exemple. Il y avait un policier, un certain

20 policier -je peux vous donner son nom, si vous désirez-, il m'a interpellé

21 le 10 mai. Il portait un uniforme de la police. Et lorsqu'il y a eu

22 l'excès en question à Hambarine, cet homme était un policier d'active.

23 Donc, ce n'est pas vrai que les policiers se faisaient emmener quelque

24 part. Je ne sais pas ce qui se passait dans les bois.

25 Je ne sais pas si ces policiers avaient remplacé ou avaient enlevé leurs

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1 uniformes pour prendre l'uniforme de la guérilla qui fonctionnait depuis

2 les forêts, je ne le sais pas, mais il est vrai qu'ils ont essayé, peut-

3 être dans mon cas à moi, néanmoins, d'utiliser leur force. Et pour ajouter

4 quelque chose, eh bien, le commandant de la police, dans ma ville à moi,

5 était un Croate, Branko Bijekic.

6 Question: Est-ce que vous savez jusqu'à quand est-ce que M. Bijekic était

7 le commandant de la police?

8 Réponse: Je ne le sais pas, mais il était le chef de police pendant assez

9 longtemps.

10 Question: Au cours de toute l'année 1992?

11 Réponse: Je ne connais pas la date exacte. Je ne voudrais pas induire la

12 Cour en erreur.

13 M. Lukic (interprétation): Est-ce que vous savez si un groupe de policiers

14 avait pris le poste de police de Ljubija, avait pris le pouvoir?

15 M. Koumjian (interprétation): Je suis navré d'interrompre, mais la

16 question du conseil de la défense ne reflète pas exactement la question

17 que j'avais posée au témoin hier. Le conseiller a dit que j'avais dit que

18 la police avait été emmenée immédiatement après la prise du pouvoir. Mais

19 cela ne faisait pas partie du tout de ma question d'hier.

20 M. le Président (interprétation): Est-ce que le conseil de la défense

21 pourrait nous donner la référence précise? A quelle page et à quelle ligne

22 du compte rendu d'audience d'hier peut-on lire les propos cités?

23 M. Lukic (interprétation): Oui, je l'ai dit. Il s'agissait de la page 69,

24 ligne 11. Cela faisait partie de la question. On a évoqué le sort des

25 officiers de police. Mais le compte rendu d'audience parle lui-même, mais

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1 on peut le lire.

2 M. le Président (interprétation): Je vous prie d'avoir la gentillesse de

3 citer littéralement les propos qui figurent au compte rendu d'audience.

4 Cela pourrait éviter tout malentendu et faciliter certainement notre

5 tâche.

6 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

7 M. le Président (interprétation): Il ne faut pas oublier que vous avez

8 peut-être une autre pagination. Ce qui paraît à la page 69 chez vous et à

9 la ligne 11 n'est pas exactement la même chose que nous retrouvons chez

10 nous, sur notre moniteur.

11 M. Lukic (interprétation): Malheureusement, c'est toujours le même

12 problème quant à la pagination.

13 M. Koumjian (interprétation): Oui, effectivement la pagination n'est pas

14 la même. Mais je me souviens très bien de la question que j'avais posée au

15 témoin hier. Vous dites: "Vous avez déposé que les polices qui n'étaient

16 pas… que les policiers non serbes qui étaient Croates et Bosniens avaient

17 été emmenés dans des camps après la prise du pouvoir".

18 M. le Président (interprétation): A la ligne 3, 4, on peut lire, à la page

19 141756 jusqu'à 141824, cela, ces propos. Donc il n'y a absolument aucun

20 doute quant aux propos cités.

21 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur le Président, de votre aide.

22 Monsieur Prastalo,…

23 M. Prastalo (interprétation): Oui.

24 Question: A la page 99, il a été question de la compagnie "Autotransport"

25 de Prijedor. Est-ce que vous savez si la compagnie "Autotransport"

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1 Prijedor disposait de stations-service pour leur usage interne?

2 Réponse: L'entreprise "Autotransport", dans leur flotte de véhicules,

3 disposait d'une station-service qui leur était tout à fait propre.

4 Question: Donc ils ne s'approvisionnaient pas chez vous, mais ils venaient

5 chercher l'essence auprès de votre station-service seulement lorsqu'ils

6 n'avaient pas d'essence chez eux?

7 Réponse: Oui, c'est exact. Ce n'est que lorsqu'il n'y avait plus d'essence

8 chez eux qu'ils venaient prendre l'essence chez moi.

9 Question: Est-ce que les mines de Ljubija, ou la mine de Ljubija avait une

10 station-service dans l'enceinte, dans son enceinte?

11 Réponse: Oui, je crois qu'à Omarska, à Tomasica, à Ljubija, il y avait des

12 stations-service internes, mais ils se servaient également, ils faisaient

13 appel à nos services de temps en temps. C'est la raison pour laquelle nous

14 existions en tant qu'entreprise. Nous pouvions leur venir en aide si

15 jamais il y avait une pénurie ou si jamais ils manquaient d'essence. Il

16 n'arrivait pas toujours qu'ils paient immédiatement, mais ils pouvaient

17 payer dans un délai de 10 à 15 jours. Toujours est-il que leur facture a

18 toujours été payée.

19 Question: En date d'hier, on vous a montré la pièce S180. On vous a

20 demandé de parler du point 28.

21 Je demanderai à Mme l'huissière de montrer cette pièce au témoin.

22 (Intervention de l'huissière.)

23 (Le témoin s'exécute.)

24 Micro, s'il vous plaît!

25 Au point 28, nous pouvons lire une abréviation: "AP Krajina". Est-ce que

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1 vous savez ce que représente cette abréviation?

2 Réponse: Non, j'ai déjà dit hier que c'est quelque chose qui m'est

3 complètement lointain. Je ne comprends pas du tout de quoi il s'agit.

4 C'est peut-être "entreprise automobile Krajina", je ne sais pas, car nous

5 pouvons lire "AP Krajina". J'ai réagi immédiatement hier en disant que je

6 ne savais pas de quelle abréviation il s'agissait. Je n'ai jamais vu ce

7 document auparavant. Je ne sais donc pas de quoi il s'agit précisément.

8 Question: A cette époque, pour une Région autonome de Krajina, on aurait

9 pu lire "Région autonome", n'est-ce pas? Ce serait "AR" en BCS pour

10 "Région autonome de Krajina"?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Bien. Maintenant, est-ce que vous aviez un prix fixe pour le

13 carburant?

14 Réponse: Oui, oui, bien sûr, nous avions des tarifs fixes. Nos tarifs

15 étaient toujours plus bas de 5 à 10 pfennigs que l'essence chez

16 "Energopetrol". On pouvait donc descendre, on pouvait baisser les prix -le

17 tarif fixe-, mais nous ne pouvions pas aller au-dessus, nous ne pouvions

18 pas augmenter nos prix. Je veux dire que nous avions de l'essence de

19 qualité.

20 Question: Qui établissait ces tarifs?

21 M. Prastalo (interprétation): C'était au niveau de la République. Nous

22 avions des contrôles réguliers, nous étions soumis à des contrôles

23 réguliers de la part des inspecteurs financiers. Nous n'avions pas le

24 droit d'augmenter nos tarifs, mais il était possible de baisser légèrement

25 les prix pour pouvoir être en compétition… établir une compétition légale.

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1 M. Lukic (interprétation): Merci, Monsieur Prastalo. Je n'ai plus de

2 question pour vous.

3 M. le Président (interprétation): Merci.

4 De combien de temps aurez-vous encore besoin, Monsieur Koumjian?

5 M. Koumjian (interprétation): Il y a quelques documents que je voudrais

6 vérifier, si vous le permettez, Monsieur le Président. Je demanderais

7 qu'on fasse une pause maintenant.

8 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous reprendrons nos travaux

9 à 11 heures.

10 (L'audience, suspendue à 10 heures 25, est reprise à 11 heures 11.)

11 M. le Président (interprétation): Monsieur Koumjian, vous avez la parole.

12 (Contre-interrogatoire supplémentaire du témoin, M. Zoran Prastalo, par M.

13 Koumjian.)

14 M. Koumjian (interprétation): Merci, Monsieur le Président. J'aurai juste

15 quelques éclaircissements à demander.

16 Lorsque vous avez parlé, Monsieur Prastalo, d'"Autotransport", de Ljubija

17 et des mines de minerai de fer qui avaient leur propre carburant, est-il

18 exact de dire que nulle part ailleurs, dans la municipalité de Prijedor,

19 on ne tirait du pétrole du sol ou il n'y avait pas de raffinerie, et que

20 tous les produits pétroliers venaient de l'extérieur de Prijedor et, en

21 l'occurrence, en dehors de la Republika Srpska et en dehors de l'ex-

22 Yougoslavie?

23 M. Prastalo (interprétation): Oui.

24 Question: Vous avez parlé, vous dites que vous êtes allé voir le

25 professeur Cehajic dans l'espoir qu'il aurait de l'influence sur les

Page 12335

1 quatre membres du conseil exécutif qui étaient d'origine ethnique

2 bosnienne. Lorsque le docteur Stakic était président de la cellule de

3 crise et président de l'assemblée municipale, de la municipalité serbe de

4 Prijedor, n'est-il pas exact que tous les huit membres du conseil exécutif

5 étaient d'origine ethnique serbe et choisis par le parti SDS?

6 Réponse: Je voudrais essayer d'expliquer quelque chose. Je ne peux pas

7 répondre oui, ni répondre non. Je crois qu'il faut donner des explications

8 complémentaires. Je n'ai jamais supplié quiconque pour obtenir quoi que ce

9 soit. Je ne demandais que ce que j'avais le droit d'obtenir et je faisais

10 une demande officielle -et c'était la procédure habituelle.

11 Question: Je vais vous arrêter parce que ma question avait trait à la

12 composition du conseil exécutif au moment où le docteur Stakic était

13 président de l'assemblée municipale et président de la cellule de crise.

14 Je vais répartir ma question: n'est-il pas exact qu'il y avait huit

15 membres du conseil exécutif, oui ou non, le savez-vous?

16 Réponse: Pendant la période où le docteur Stakic était président de

17 l'assemblée, c'est cela votre question?

18 Question: Oui, exactement.

19 Réponse: Oui, ils avaient sept ou huit membres, je ne me souviens pas

20 exactement. Je sais combien ils étaient lorsque je luttais pour mes

21 propres intérêts. Je sais qu'ils étaient sept ou huit membres et je sais

22 qu'il fallait qu'ils votent et qu'en fait, ils constituaient des majorités

23 sur tel ou tel point qui faisaient que cela bloquait les votes ou… C'était

24 tout le problème, en fait.

25 Question: Est-il exact que lorsque le docteur Stakic était président de

Page 12336

1 l'assemblée municipale et de la cellule de crise, tous les autres membres

2 étaient choisis par le SDS? Connaissez-vous la réponse à cela? Pouvez-vous

3 répondre oui ou non?

4 Réponse: Je ne sais pas s'ils étaient nommés par le SDS. Il y avait

5 d'autres partis serbes -c'est une façon de parler- au parlement. Je ne

6 suis pas sûr que tous étaient membres du SDS. Est-ce que c'est cela que

7 vous me demandez? Je ne sais pas.

8 Question: Je vous remercie. C'est une réponse acceptable. Est-ce que tous

9 étaient des Serbes?

10 Réponse: Je ne sais pas. Je pense que oui. Toutefois, je n'en suis pas

11 certain.

12 Question: Je vous remercie. Vous avez parlé, dans une réponse à des

13 questions de Me Lukic ce matin, à propos des expulsions des appartements

14 qui appartenaient à la société. Est-il exact qu'en 1992, un très grand

15 nombre d'appartements, de résidences appartenant à des personnes, étaient

16 liés à leur travail? Ils avaient le droit d'y habiter, à cet endroit-là, à

17 cause du travail qui était le leur, leur emploi?

18 Réponse: Oui, la plupart des gens avaient le droit d'utiliser leur

19 appartement de part leur société. A ma connaissance, il n'y avait pas de

20 privatisation à l'époque. On ne pouvait pas acheter son appartement à sa

21 société, donc, c'était la société qui était propriétaire des appartements.

22 Et ces appartements seraient mis à la disposition des employés de la

23 société, donc ils avaient le droit d'y vivre. Ils avaient un droit de

24 locataires par rapport à ces appartements.

25 Question: Est-ce que ceci était lié à leur emploi avec cette société?

Page 12337

1 C'est bien cela, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui. Il y avait aussi des personnes qui avaient des appartements

3 qui appartenaient à des sociétés ou à la société. Donc, ce n'était pas

4 seulement les personnes qui travaillaient pour une société déterminée,

5 mais il y avait de nombreuses personnes qui travaillaient pour une

6 société, mais qui habitaient des appartements sociaux, qui appartenaient à

7 l'Etat?

8 Question: Je vous remercie. Vous avez mentionné aujourd'hui le nom d'un

9 policier de Ljubija, Branko Bijekic. Est-ce que vous savez que M. Bijekic

10 a été arrêté et emmené au camp d'Omarska et transféré au camp de Manjaca

11 le 6 août 1992?

12 Réponse: Non, je sais qu'il était dans ma ville. J'ai expliqué qu'il était

13 un commandant ou un chef de police, une sorte de chef dans la police. Je

14 le connaissais bien. Nous nous voyions beaucoup, nous jouions au football

15 ensemble très souvent. A plusieurs reprises, je rentrais chez moi.

16 Interprète: Est-ce qu'on pourrait demander au témoin de répéter la

17 dernière partie de sa réponse?

18 Question: Témoin, excusez-moi, mais l'interprète n'a pas bien compris la

19 dernière partie de votre réponse. Je vais vous permettre de répéter, mais

20 simplement pour votre information, je ne vous posais pas de question

21 concernant vos relations avec M. Bijekic. Si vous pouviez finir votre

22 réponse, mais garder à l'esprit que nous ne sommes pas intéressés par vos

23 relations avec M. Bijekic et de la façon dont vous le connaissiez. Mais

24 veuillez compléter votre réponse.

25 Réponse: Comme je l'ai dit, c'était un commandant ou chef de police. Je ne

Page 12338

1 savais pas qu'il avait été emmené. Je n'ai pas entendu dire non plus qu'il

2 avait pris part à l'incident qui avait eu lieu avec l'armée, je n'ai

3 jamais rien entendu à ce sujet. S'il a donc été arrêté, je ne sais pas

4 pourquoi il a été arrêté, je n'ai aucun renseignement personnel à ce sujet

5 et je n'ai rien entendu à ce sujet.

6 Question: Vous nous avez dit que vos renseignements concernant ces centres

7 d'investigation et autres événements à Prijedor provenaient du fait que

8 Prijedor était une petite ville où les gens parlent entre eux, et vous

9 pouviez même apprendre d'un coiffeur ce qui se passait.

10 Avez-vous jamais demandé au président de la municipalité, au président de

11 l'assemblée municipale ce qui se passait à Prijedor lorsque vous parliez

12 au docteur Stakic en 1992 et par la suite? Lui avez-vous posé des

13 questions au sujet de ce qu'on appelait les centres dits d'investigation?

14 Réponse: Non, je n'ai pas parlé de ces questions et ce n'était pas

15 nécessaire, tout simplement. Je pense qu'il en savait autant en ce qui

16 concerne les centres d'enquête que moi-même, parce que ceci était du

17 ressort… ceci relevait du travail de l'armée et de la police. Ça ne

18 relevait pas du gouvernement parce qu'il n'était pas de ceux qui avaient

19 mis sur pied les centres d'interrogation ou de collecte des

20 renseignements. C'était la police et l'armée, pour autant que j'aie

21 compris la situation.

22 Question: Et le docteur Stakic connaissait mieux que vous quel était son

23 rôle ou qui s'était occupé de ces centres de collecte des renseignements.

24 Exact?

25 Réponse: Je ne le sais pas. Comme je l'ai dit, je sais que ces centres de

Page 12339

1 rassemblement et d'interrogatoire étaient tenus par l'armée. Et pour

2 autant que je sache, le gouvernement de Prijedor, tout au moins de la

3 manière dont j'ai compris les choses, la situation -ne vous méprenez pas,

4 c'est la façon dont j'ai compris les choses-, le gouvernement de Prijedor

5 n'avait aucune influence sur l'armée et la police, en particulier le

6 président de l'assemblée municipale n'aurait eu aucun poids auprès de la

7 police et l'armée, en particulier en temps de guerre.

8 Question: Je vous remercie.

9 M. Prastalo (interprétation): C'était la situation, elle était comme ça.

10 L'armée et la police étaient là.

11 (Questions relatives aux éléments de preuve.)

12 M. Koumjian (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres

13 questions à poser au témoin, mais avant qu'il ne soit autorisé à partir,

14 j'ai fait référence au cours du contre-interrogatoire, et vous vous êtes

15 référé, Monsieur le Président, dans l'une de vos questions à l'embargo des

16 Nations Unies ou à une résolution à ce sujet.

17 Pour que le compte rendu soit parfaitement clair à ce sujet, je voudrais

18 demander que ceci soit versé comme élément de preuve au dossier et il

19 s'agit de la résolution de la communauté européenne qui s'y réfère.

20 M. le Président (interprétation): Commençons d'abord, avant de conclure

21 avec ce témoin, nous avons pour le moment une pièce à conviction

22 provisoire qui porte la cote S399B en BCS.

23 Y a-t-il des objections?

24 M. Ostojic (interprétation): Non, Monsieur le Président. Mais nous

25 voudrions simplement demander que le Tribunal facilite les choses pour que

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1 la traduction puisse être faite aussitôt que possible.

2 M. Koumjian (interprétation): Nous allons demander cela. Je vous remercie.

3 M. le Président (interprétation): Ce document daté du 4 décembre 1992,

4 lettre d'"Hidraflex Prijedor" signée par Prastalo Zoran est versée au

5 dossier comme élément de preuve sous la cote S399B. Et nous attendons d'en

6 obtenir la traduction qui devra porter la cote S399A comme numéro de pièce

7 à conviction.

8 Poursuivons. Alors, continuons avec la résolution du Conseil de sécurité

9 qui porte le numéro 757 dans le livre, dans le recueil intitulé "La

10 Yougoslavie en document", numéro 200… pages 593 à 599.

11 Y a-t-il des objections?

12 M. Ostojic (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.

13 M. le Président (interprétation): Donc ceci est versé au dossier sous la

14 cote S400A.

15 (Questions supplémentaires au témoin, M. Zoran Prastalo, par M. le

16 Président.)

17 Enfin, il faut que je revienne sur une question sur laquelle je n'avais en

18 fait pas compris les réponses. Je peux suivre le compte rendu fait

19 aujourd'hui à la page 28, où le conseil de la défense vous a demandé:

20 "-Q: Est-ce que vous savez si "'Autotransport Prijedor' avait son propre

21 poste de carburant à usage interne?

22 -R: "Autotransport avait ses propres dépôts, c'est-à-dire dans leur

23 enceinte, avait ses propres postes d'essence. Je l'ai expliqué hier."

24 Alors, ceci est absolument conforme avec votre déposition d'hier, mais

25 vous avez dit à la page 99, ligne 10 du compte rendu d'hier: "Parfois,

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1 deux ou trois pleins de réservoir.".

2 Et puis, vous avez ajouté que "déjà par le passé, des autobus venaient à

3 votre poste d'essence où ils prenaient du carburant."

4 Aujourd'hui, vous avez ajouté à la page 28, ligne 11: "J'ai expliqué cela

5 hier. Ils prenaient du carburant chez nous seulement lorsqu'ils n'en

6 avaient plus, c'est-à-dire lorsqu'il y en avait pénurie."

7 Alors, est-ce que cette pénurie... Quelle était la raison pour laquelle

8 "Autotransport Prijedor" avait à ce moment-là une insuffisance de

9 carburant et comment se faisait-il, comment était-il possible que vous

10 ayez pour eux du carburant en plus?

11 Réponse: Bien. Il y avait différents types de situations. Parfois, c'était

12 leur poste d'essence interne, dans leur enceinte, qui était vide ou bien

13 ils n'avaient tout simplement pas d'argent pour acheter davantage de

14 carburant. Alors ils venaient me trouver pour avoir du carburant, dès

15 qu'il y avait pénurie ou dès qu'ils n'avaient pas assez d'argent pour

16 acheter de nouveaux carburants. Parfois, ils réussissaient à avoir

17 l'argent en 10 ou 15 jours et, d'habitude, on attendait qu'ils puissent

18 nous rembourser, mais il n'y avait pas de problème particulier avec cela.

19 Mais il y a eu deux ou trois cas, les deux cas auxquels je me suis référé.

20 C'étaient les raisons essentielles pour lesquelles ils venaient nous

21 trouver pour prendre du carburant: ou bien parce qu'ils n'avaient pas

22 d'argent parfois, ou bien parce qu'eux-mêmes n'avaient plus de carburant.

23 Ce qui, là encore, d'ailleurs, se passait lorsqu'ils n'avaient plus

24 d'argent pour en acheter: 30.000 litres de carburant, ce n'est pas

25 beaucoup parce qu'ils avaient de nombreux véhicules.

Page 12342

1 Question: Ma question était: connaissez-vous les raisons pour lesquelles

2 on manquait de carburant à cette époque-là?

3 Réponse: J'ai essayé d'expliquer cela. La société "Energopetrol" avait

4 également du carburant, mais peut-être qu'à l'époque, ils n'avaient pas

5 d'argent pour en acheter. Le poste d'essence était ouvert à toutes les

6 sociétés, comme je l'ai déjà dit.

7 Question: Donc votre déposition est que vous fournissiez de meilleures

8 conditions pour "Autotransport Prijedor" que d'autres l'auraient fait, et

9 donc vous accordiez une ligne de crédits à "Autotransport Prijedor"; est-

10 ce exact?

11 Réponse: Oui, c'est exact. Comme je l'ai déjà mentionné dans ma

12 déposition, parfois, nous avions des prix inférieurs pour le carburant par

13 rapport aux prix pratiqués par les postes d'"Energopetrol" qui étaient

14 plus élevés. Donc ceux qui avaient la société… Ceux qui géraient la

15 société "Autotransport" devaient économiser leur argent et faire

16 attention.

17 C'est pour cela qu'ils s'adressaient à nous pour avoir du carburant à un

18 prix inférieur et, même quand ils n'avaient pas d'argent pour nous payer,

19 ils nous remboursaient d'habitude en 15 ou 20 jours et nous attendions

20 qu'ils aient l'argent pour nous rembourser. Cela ne se passait pas tout le

21 temps, mais ceci s'est produit au moins à deux reprises.

22 Question: Ce matin, dans le compte rendu à la page 28, ligne 15, on vous a

23 posé la question: "Et la mine de minerai de fer de Ljubija, est-ce qu'elle

24 avait également sa pompe à carburant à l'intérieur de son enceinte?".

25 Vous avez répondu: "Oui, je crois qu'il y en avait à Omarska, Tomasica, à

Page 12343

1 Ljubija et qu'ils avaient leur propre pompe… leur propre station de

2 carburant."

3 Comment êtes-vous au courant? Est-ce que vous y êtes allé? Est-ce que vous

4 l'avez vue?

5 M. Prastalo (interprétation): Oui, oui. J'y suis allé, mon père a

6 travaillé à la mine pendant 40 ans… dans les mines à 40 ans.

7 Avant 1990, j'ai travaillé aux mines lorsque je travaillais pour le

8 secteur public. Je suis ensuite passé à l'exportation, mais je suis allé

9 dans tous ces endroits. J'ai visité pas très loin de chez moi, à Ljubija,

10 les mines de minerai de fer. Il y avait un autre poste de carburant

11 interne qui appartenait aux mines.

12 A Omarska, ils avaient également une station de carburant. Et à Tomasica,

13 je crois aussi mais qui a été fermée par la suite et je crois qu'il y en

14 avait une à Tomasica aussi… je ne peux pas être absolument certain en ce

15 qui concerne Tomasica, mais je crois que, oui, il y en avait une. Les

16 mines de Tomasica avaient cessé de fonctionner il y avait un certain temps

17 et ils avaient des problèmes pour extraire le minerai, de sorte que je ne

18 suis pas absolument sûr qu'ils aient encore eu un poste d'essence; je

19 crois qu'ils avaient fermé il y avait assez longtemps. Mais celui

20 d'Omarska, j'en suis sûr, toutefois.

21 Question: Je vous remercie de cette explication. Vous avez poursuivi ce

22 matin en disant à la ligne 18: "Mais ils avaient parfois aussi recours à

23 nos services. Et c'est pour cela que nous existions en tant que société.

24 En cas de pénurie ou de manque, nous serions là pour les aider."

25 Est-ce que vous les avez aidés à s'en sortir en 1992?

Page 12344

1 Réponse: Oui, je l'ai fait. Ils avaient également besoin de pétrole pour

2 faire fonctionner leurs machines. Ils avaient beaucoup d'équipement

3 mécanique, et pour les faire fonctionner -ils avaient également des

4 véhicules-, ils avaient besoin de démarrer certains moteurs. Et si la mine

5 ne fonctionnait pas, il fallait quand même qu'ils fassent fonctionner

6 leurs machines; ils avaient besoin de pétrole pour cela.

7 Et comme ils n'avaient pas d'argent pour acheter de grandes quantités de

8 pétrole, c'est-à-dire un réservoir ou deux ou trois, ils venaient prendre

9 chez nous de temps en temps 1.000 litres, de temps en temps 1.500. Nous

10 attendions aussi qu'ils nous paient et on continuait à les approvisionner.

11 De sorte qu'il y avait des sommes d'argent assez faibles. Comme ils

12 avaient un peu d'argent… au fur et à mesure qu'ils avaient un peu

13 d'argent, ils pouvaient à ce moment-là nous payer, mais nous ne parlions

14 pas de grands montants. Nous coopérions. Je coopérais parce que je faisais

15 confiance à ces gens, en particulier à ceux qui géraient la mine de

16 minerai de fer lorsqu'ils avaient des problèmes. Donc, on pouvait leur

17 donner ce pétrole.

18 Question: En fait, vous saviez que la mine ne fonctionnait plus en tant

19 que telle en particulier à Omarska, c'est exact, en 1992 et à la fin de

20 mai 1992?

21 Réponse: Non, je n'étais pas au courant du fait qu'elle ne fonctionnait

22 pas. Je savais simplement qu'elle ne marchait pas très bien. Et nous

23 avions tous grandi et vécu de cette mine, en particulier à Ljubija, la

24 mine de fer à côté de laquelle je suis né. Et à l'époque, il y avait

25 constamment de l'essence, elle était en plein fonctionnement, en pleine

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1 extraction. Et ils étaient sur le point d'ouvrir un nouveau puits appelé

2 "Vukuljia" (phon.), mais à cause du développement de notre municipalité,

3 finalement cela s'est arrêté net.

4 Question: Je regrette de vous interrompre mais ma question était centrée

5 sur Omarska.

6 Réponse: Mais rien ne fonctionnait. Pas seulement Omarska,. Mais Omarska

7 ne fonctionnait pas non plus. Les gens qui travaillaient; je viens

8 d'expliquer pourquoi ils prenaient du carburant chez moi, c'était pour

9 entretenir leurs machines, les faire marcher. C'était pour l'entretien. Et

10 les personnes responsables de leur entretien allaient au travail. Les

11 mineurs, ceux qui étaient chargés de l'extraction du minerai, ne

12 travaillaient pas.

13 Question: Lorsque vous répondiez aux questions qui vous ont été posées par

14 Mme la Juge Argibay ce matin, vous avez expliqué que de votre point de vue

15 il y avait des raisons suffisantes pour arrêter et enquêter en ce qui

16 concerne Hambarine, Kozarac, et la tentative pour reprendre Prijedor, que

17 ce serait une des raisons suffisantes pour prendre l'initiative de

18 procéder aux investigations nécessaires -tel était votre point de vue.

19 Nous avons déjà discuté de Keraterm. Vous étiez conscient du fait

20 qu'Omarska à l'époque ne fonctionnait pas de façon opérationnelle en tant

21 que tel, et était utilisé comme centre d'investigation. C'est exact?

22 Réponse: J'ai entendu parler de cela, mais je ne suis jamais allé là-bas.

23 Je savais que Trnopolje était un centre de rassemblement et Omarska et

24 Keraterm des centres d'enquête, mais même aujourd'hui je ne comprends pas

25 cette notion, ce que veut dire exactement un centre de rassemblement.

Page 12346

1 Je sais qu'il y avait des gens qui venaient de leur propre gré et qui

2 partaient aussi de leur propre gré de ce centre de rassemblement surtout à

3 l'étranger. Et à propos de la mine, vous m'avez demandé si je savais si la

4 mine ne fonctionnait plus? Oui, je sais parce que mon père n'allait pas

5 travailler.

6 Question: Hier, à la page 102 du compte rendu d'audience d'hier, lignes 18

7 et 19, je vous ai posé la question suivante -je cite-: "Est-ce que vous

8 avez jamais vendu du carburant au centre d'enquête d'Omarska?" Votre

9 réponse était non.

10 Réponse: Non, je n'ai jamais vendu de carburant au centre d'enquête

11 d'Omarska.

12 Question: Et à qui avez-vous vendu votre carburant?

13 M. Prastalo (interprétation): J'ai déjà dit, j'ai énuméré les entreprises

14 auxquelles j'avais vendu mon carburant, aux citoyens aussi. Il y avait

15 beaucoup d'entreprises privées aussi. Il s'agissait donc d'une station-

16 service publique, et je vendais à des citoyens appartenant à tous les

17 groupes ethniques. Personne ne pouvait donc se plaindre de ne pas avoir eu

18 du carburant s'il y en avait.

19 J'ai eu quelques... Je peux vous citer quelques cas dans lesquels il y

20 avait... je suis intervenu moi-même pour qu'une certaine personne obtienne

21 du carburant, parce qu'il s'agissait des malades.

22 M. le Président (interprétation): Je pense que c'est le compte rendu qui

23 parle de lui-même. Je n'ai plus de question à poser. Est-ce qu'il y a

24 d'autres questions de la part des parties? C'est par là que votre

25 témoignage est fini. Je prie, Madame l'Huissière, de faire sortir le

Page 12347

1 témoin du prétoire.

2 M. Prastalo (interprétation): Je vous remercie.

3 (Le témoin, M. Zoran Prastalo, est reconduit hors du prétoire.)

4 (Questions relatives à la procédure.)

5 M. le Président (interprétation): Avant de continuer à parler d'autres

6 sujets, est-ce que je pourrai demander à la défense au sujet du témoin

7 001, quand, pour la première fois, avez-vous contacté le secteur d'aide

8 aux victimes et aux témoins pour qu'il vous donne une sorte d'aide pour

9 que ce témoin puisse venir témoigner au cours de cette semaine?

10 M. Ostojic (interprétation): Pour que ce soit clair pour le compte rendu,

11 moi personnellement, je n'ai pas contacté ce secteur. C'était notre

12 référant pour l'affaire. Je dois rajouter que, quand il s'agit du

13 passeport nécessaire pour que ce témoin puisse venir ici, nous voudrions

14 dire à la Chambre et à l'accusation que nous avons contacté le secteur

15 d'aide aux témoins et aux victimes et que nous sommes en train de faire le

16 nécessaire pour que le témoin 006 puisse venir aussi à La Haye. C'est pour

17 l'accusation que je dis cela.

18 Si j'ai bien compris, donc, ils ne peuvent venir que vendredi après-midi.

19 C'est selon l'information qui nous a été offerte par le secteur d'aide aux

20 victimes et aux témoins. Donc, c'est ce que je pouvais vous dire à propos

21 de ce témoin.

22 M. le Président (interprétation): Je suis vraiment désolé, mais je dois

23 maintenant entrer dans des détails, et je devrais demander à la défense de

24 nous dire le nom de la personne avec laquelle la défense a parlé la

25 semaine dernière, pour que ce témoin puisse venir ici, témoigner au cours

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1 de cette semaine, comme cela a été ordonné déjà oralement et comme par

2 écrit, vous avez été prévenu de cela.

3 M. Ostojic (interprétation): Je devrais vous dire cela un peu plus tard,

4 parce que maintenant je ne connais pas le nom de cette personne par cœur.

5 Je ne connais que des prénoms de certaines personnes, je ne connais pas

6 leurs noms. Donc je pourrais vous dire cela après la pause déjeuner.

7 M. le Président (interprétation): Mais nous devons connaître avant de

8 prononcer des sanctions, parce que l'ordonnance de cette Chambre de

9 première instance n'a pas été observée.

10 Aux fins du compte rendu, il faut rajouter que l'accusation est maintenant

11 représentée par Mme Joanna Korner.

12 Madame Korner, Procureur principal, si vous voulez, vous pouvez-vous

13 adresser à la Chambre.

14 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, je voulais dire, soi-

15 disant le Procureur principal, je voudrais dire à la Chambre, mais la

16 Chambre a déjà eu ce message je crois, le Procureur, Mme la Procureure

17 aurait dû venir. Elle aurait dû venir ici pour les remarques de la Chambre

18 prononcées mercredi 5 février 2003.

19 A la lumière des propos de la Chambre dits lundi, peut-être que c'est

20 notre impression tout simplement, mais nous avons pris cela au sérieux et

21 c'est pour cela que Mme la Procureure voudrait venir en personne ici,

22 parce qu'il y avait peut-être un malentendu.

23 Ce que la Chambre, donc, voulait dire et maintenant j'utilise le compte

24 rendu qui n'est pas révisé -c'est à la page 11751-, la Chambre a commencé

25 par les mots suivant -je cite-: "Nous sommes vraiment désolés parce que

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1 l'accusation a pris une telle position, parce qu'à notre avis il n'est pas

2 possible de procéder comme cela a été le cas jusqu'ici. Et moi, je sais

3 que la personne à la laquelle mes mots sont adressés n'est pas présente au

4 prétoire".

5 Je m'arrête pour un instant ici, à cet endroit, Monsieur le Président.

6 Il est possible que les mots du Juge étaient adressés à moi-même, mais

7 cela n'est pas très clair. Le représentant du Bureau du Procureur a

8 compris cela comme une remarque très sérieuse, mais aucun Procureur dans

9 le monde entier n'a le droit de poursuivre les poursuites pénales et de

10 savoir que pour la personne qui est présumée innocente, il n'y aurait pas

11 de preuve pour prouver certains faits, certains événements, et pour que

12 certaines allégations restent.

13 Donc, les poursuites pénales continuent à l'encontre d'une personne et

14 savoir que, selon le Règlement, il n'est pas possible de procéder de telle

15 façon et de prouver ces arguments, pourrait représenter, donc, un procès

16 qui n'est pas équitable.

17 Monsieur le Président, nous avons compris vos propos de façon à comprendre

18 que moi et tous les représentants du Bureau du Procureur poursuivent les

19 poursuites pénales contre une personne pour laquelle nous savons qu'elle

20 est présumée innocente. Cela pourrait calomnier le Bureau du Procureur en

21 entier et souiller la réputation de moi-même et de tous les représentants

22 du Bureau du Procureur.

23 Après avoir lu et après avoir entendu ce que vous avez dit lundi, nous

24 avons en fait compris que ce n'était pas là l'intention de la Chambre,

25 mais si j'ai tort et si tout le monde à tort, je vous serais

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1 reconnaissante de me corriger tout au début.

2 Si vous voulez suggérer que nous avançons les allégations contre l'accusé

3 d'une manière consciente et que ces allégations ne pourront pas être

4 prouvées, je pense que, dans ce cas-là, le Bureau du Procureur doit

5 s'occuper de cela. Mais, après avoir entendu ce que vous avez dit lundi,

6 je sais qu'il y a des faits que nous ne pouvons pas prouver, mais je vous

7 serais reconnaissante de nous dire si nous avons mal compris votre

8 intention, c'est-à-dire si vous voulez vraiment prouver un comportement

9 incorrect de la part du Procureur.

10 M. le Président (interprétation): Je dois me référer au même compte rendu

11 que vous; c'est à la page 11749. J'ai dit à cet endroit: "Il faut donner

12 une nette déclaration de la part des deux parties au procès. La Chambre de

13 première instance n'acceptera plus ces obstructions venant des deux

14 parties à partir du début de ce procès."

15 C'étaient mes propos et c'est toujours mon point de vue.

16 Ensuite, vous devriez lire avec un peu plus d'attention parce que vous

17 connaissez mieux les mots anglais que moi-même. C'est-à-dire que je n'ai

18 jamais dit que vous vous comportez de façon à nuire aux intérêts de la

19 justice, c'est-à-dire justement cette expression "nuire à l'intérêt de la

20 justice" signifie quelque chose qui peut entraîner la responsabilité

21 pénale.

22 J'ai dit qu'ici, il ne s'agit pas d'un comportement équitable, c'est-à-

23 dire lorsque le Procureur procède... c'est-à-dire de manière… pour

24 supporter… pour soutenir les allégations à l'encontre d'une personne,

25 lorsqu'il sait que quelques allégations ne pourront pas être prouvées. Et

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1 la semaine dernière, j'ai cité un exemple pour cela et, pas seulement la

2 semaine dernière, j'ai donné de tels exemples à partir du début de ce

3 procès; j'ai dit qu'il s'agissait d'un problème fondamental qui apparaît

4 devant ce Tribunal.

5 Et ce problème consiste au fait que le Procureur, donc, avance des

6 allégations à l'encontre de certaines personnes, de façon à pouvoir

7 appeler tout cela "copie de tout le Statut". Et le problème majeur, c'est

8 qu'on copie toutes les façons dont cela a été commis… et elles ne sont pas

9 compatibles. Vous ne pouvez pas en même temps être la personne qui incite,

10 planifie et encourage un crime et, à la fois, qui aide et qui soutient

11 celui qui aurait commis ce crime. Donc ce n'est pas compatible, ces deux

12 situations.

13 Cela ne facilite pas le travail de tout le monde qui travaille ici. Cela

14 ne facilite pas non plus le travail de la défense, parce qu'elle doit

15 s'occuper de tout cela, de toutes ces formes de la responsabilité… de la

16 soi-disant responsabilité pénale. Il est de notre devoir de s'occuper du

17 procès et de l'affaire, c'est-à-dire que ce soit équitable et qu'il faut

18 diligenter le procès.

19 C'est la tâche qui nous a été confiée par le Conseil de sécurité et par le

20 Statut de ce Tribunal. Il n'y a aucun doute que l'un des obstacles pour le

21 faire, c'est que l'accusation ne tient pas compte du fait qu'un principe

22 fondamental et une obligation fondamentale -et je connais la signification

23 de ces mots-, donc le principe et l'obligation fondamentaux de

24 l'accusation, c'est de se concentrer, pendant la procédure, sur les

25 éléments les plus importants de l'Acte d'accusation et sur les allégations

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1 avancées dans l'Acte d'accusation. C'est-à-dire que donner une certaine

2 compétence à un organe de s'occuper de procès, c'est très important, et

3 nous devons utiliser ce droit de la meilleure manière.

4 Depuis le début, j'ai souligné que l'accusation ne pouvait pas présenter

5 ses moyens de preuve, et notre réaction se trouve dans la décision datée

6 du 22 mars 2002. Mais cette approche a continué à être utilisée, et je

7 dois avouer que nous sommes conscients qu'il y a toute une série de

8 personnes qui attendent que leur procès équitable commence.

9 L'accusation doit se concentrer sur les éléments qui peuvent être prouvés

10 de façon la plus expéditive. Et il faut que l'accusation évite de se

11 trouver dans la situation dans laquelle la défense serait obligée de

12 couvrir des domaines très étendus.

13 Ce qui ne facilite pas le travail de la Chambre de s'occuper des détails,

14 comme par exemple la question si le docteur Stakic avait le droit de se

15 déplacer où il voulait. Nous avons l'obligation de nous concentrer et de

16 dire que certaines questions ne sont plus pertinentes pour le procès,

17 qu'une déclaration de témoin n'est plus pertinente, et c'est pour cela

18 qu'il ne faut plus citer ce témoin à comparaître ici.

19 Parce qu'il n'est pas possible qu'une affaire comme celle-là dure plus

20 d'un an. Cela ne se serait produit dans aucun système judiciaire dans le

21 monde entier. Pour protéger l'intégrité de ce Tribunal international et

22 pour protéger l'intégrité de la juridiction pénale internationale, nous

23 devons donc nous occuper de ce procès, de diligenter ce procès, sans

24 porter le préjudice à l'accusé parce qu'il a le droit d'avoir un procès

25 équitable. Mais avec cela, il y a aussi de l'autre côté le devoir de

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1 l'accusation de se concentrer sur cette affaire.

2 Nous avons déjà invité l'accusation à plusieurs reprises à se comporter de

3 cette façon. Et au mois de juin l'année dernière, j'ai reçu un document de

4 Mme la Procureure dans lequel elle s'est mise d'accord qu'il serait

5 préférable de réduire l'affaire aux questions essentielles et de parvenir

6 à une solution commune; et le document était presque prêt à être signé par

7 les deux parties, mais par la suite, le document a été retiré par le

8 Bureau du Procureur.

9 C'est-à-dire qu'ils ont retiré la déclaration donnée auparavant par

10 rapport aux entretiens dans lesquels il serait préférable de déterminer

11 des questions essentielles et même de parvenir à une solution commune par

12 consensus dans cette affaire.

13 Je pourrais vous donner encore beaucoup d'autres exemples.

14 Ce qui est notre intention à ce moment-là, c'est, à travers nos

15 délibérations, donner des instructions au Bureau du Procureur parce que

16 nous sommes conscients du fait que le Bureau du Procureur n'est pas prêt à

17 opérer de sa propre initiative, et, à mon avis, c'était le devoir du

18 Bureau du Procureur de se comporter de telle façon en tenant compte du

19 volume de travail de ce Tribunal international.

20 Comme je l'ai déjà dit, l'accusation aurait dû se concentrer sur des

21 questions essentielles et souligner des questions qui posent certains

22 problèmes liés au fait et qu'il n'était pas possible de surmonter, pour

23 éviter les discussions académiques qui ne sont pas nécessaires.

24 Il s'agit d'un Tribunal pénal et je sais que, lorsqu'il y a une question

25 de fait ou juridique qu'il faut résoudre et qui n'a aucune influence sur

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1 l'issue de l'affaire, à ce moment-là, c'est à la Chambre, et d'abord à

2 l'accusation, d'éviter que de tels problèmes apparaissent.

3 Maintenant, je vais finir avec mes commentaires, et je veux vous dire que

4 ces commentaires sont fondés sur ma propre expérience. J'en étais

5 conscient lorsque j'ai posé ma candidature pour devenir Juge et quand j'ai

6 posé ma candidature au Conseil de sécurité des Nations Unies.

7 Je me suis toujours demandé ce que nous pouvions faire pour diligenter le

8 procès, pour éviter les discussions, les débats académiques devant ce

9 Tribunal et j'ai donné quelques réponses à cette question. J'ai dit de

10 faire de mon mieux pour éviter ces débats académiques et pour diligenter

11 le procès. Et c'est pour cela que je suis obligé, parce que j'ai donné ces

12 promesses devant les représentants de 118 nations qui m'ont élu Juge ici.

13 Mme Korner (interprétation): Est-ce que je peux avancer quelques questions

14 évoquées par la Chambre? D'abord, il est clair que ce que la Chambre de

15 première instance a dit est ce que la Chambre de première instance disait

16 au début de cette affaire, c'est-à-dire qu'il est clair qu'il faut choisir

17 le type de responsabilité et que l'accusation devrait, en fait, retirer

18 certaines allégations de l'Acte d'accusation, même s'il y a certaines

19 preuves pour cela.

20 Est-ce que j'ai bien interprété ce que vous avez appelé "réduire l'affaire

21 aux questions essentielles"?

22 M. le Président (interprétation): Il n'y a aucun doute qu'il existe

23 différentes interprétations et approches de cela.

24 Au premier niveau, d'abord, au cas où il n'y aurait plus de preuves ou au

25 cas où les preuves ne deviendraient pas fiables, où il y a un doute, ce

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1 que… Donc il faut tenir compte des problèmes de cette affaire qui

2 proviennent du fait que les Juges… que la composition de la Chambre de

3 première instance a changé à plusieurs reprises au cours de ce procès et

4 ensuite, dans les cas où il n'y aurait peut-être pas assez de preuves, il

5 faudrait donc… il faudrait rejeter certains faits, certains événements.

6 C'est ce que j'ai moi-même appris il y a une trentaine d'années lorsque

7 j'étais Procureur.

8 Même s'il y a assez de preuves pour certains faits, mais s'il y a des

9 raisons juridiques, s'il y a des difficultés liées à cela et qui

10 pourraient entraîner un procès assez long, dans ce cas-là, il est

11 convenable de rejeter certaines allégations pour arriver à une solution

12 équitable et dans le plus court délai; ce qui peut-être montre que

13 l'accusé est coupable. Et c'est pour cela que nous pouvons essayer de

14 convaincre l'accusation que cela pourrait être convenable, c'est-à-dire,

15 de rejeter certaines allégations.

16 Je connais différents contextes dans lesquels c'est possible, mais si

17 l'accusation n'est pas nécessaire (sic) pour la solution de l'affaire,

18 quand il s'agit de la procédure pénale, dans ce cas-là, il est convenable

19 de rejeter certaines allégations.

20 Lorsque j'ai dit tout à l'heure que nous allons commencer à délibérer,

21 j'ai pensé à cet objectif et à nos efforts communs quand il s'agit des

22 questions essentielles.

23 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, d'abord, je devrais

24 parler de plusieurs aspects.

25 D'abord, il y a une différence lorsque vous demandez à l'accusation de

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1 rejeter les allégations pour lesquelles vous considérez qu'elles ne sont

2 pas nécessaires pour la solution de l'affaire et que l'accusation… que le

3 Procureur procède selon les allégations pour lesquelles il sait qu'il n'y

4 a pas de preuves pour les soutenir.

5 Dans ce cas-là, M. le Président a entendu les arguments juridiques à

6 travers les débats, avant la prise de décision selon l'Article 8 ainsi que

7 dans les requêtes écrites de la défense et de l'accusation. C'est alors

8 que la Chambre de première instance, dans la composition d'alors a pris

9 une décision qui disait qu'il y avait assez de preuves pour que les

10 allégations restent dans la forme originelle.

11 L'Article 8 est très concret. Cet article dit, si je peux le rappeler à la

12 Chambre de première instance, parce que je suis sûre que la Chambre de

13 première instance connaît cet article, l'Article 98bis:

14 "Un accusé peut déposer requête aux fins d'acquittement pour une ou

15 plusieurs infractions figurant dans l'Acte d'accusation dans les sept

16 jours suivant la fin de la présentation des moyens à charge et, dans tous

17 les cas, avant la présentation des moyens à décharge en application de

18 l'Article 85)A)ii).

19 Deuxièmement, la Chambre de première instance, si la Chambre estime que

20 les éléments de preuve présentés ne suffisent pas à justifier une

21 condamnation pour cette ou ces accusations, prononce l'acquittement à la

22 demande de l'accusé ou d'office."

23 Monsieur le Président, pour que vous puissiez faire ou rendre ce genre de

24 décision, il faut attendre la fin de la présentation des moyens à charge

25 et avant que la défense commence à présenter les moyens à décharge. Nous

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1 sommes maintenant en plein milieu de la présentation des moyens à décharge

2 de la défense. Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour que

3 vous puissiez, à cette étape-ci, procéder si vous décidez de le faire, de

4 rejeter le ou plusieurs chefs d'accusation, vous feriez exactement ce que

5 vous ne vouliez pas faire auparavant, avant d'entendre tous les éléments

6 de preuve présentés par la défense.

7 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous vous soumettons

8 respectueusement qu'en réalité, le moment n'est pas propice pour que nous

9 menions quelque discussion que ce soit. A savoir si vous trouvez, Monsieur

10 le Président, Messieurs les Juges, si à cette étape-ci, des procédures, il

11 existe un tel doute que vous ne trouveriez jamais l'accusé coupable -mais

12 cela serait tout à fait...- de cette façon-là, vous rejetteriez tous les

13 éléments de preuve à cette étape-ci; l'étape dans laquelle vous auriez pu

14 faire cela a été dépassée à ce moment-ci. Vous devriez attendre d'entendre

15 tous les éléments de preuve de part et d'autre, avant de prendre votre

16 décision.

17 Quant au deuxième point, à savoir si l'accusation devrait raccourcir et

18 abréger les présentations des moyens de preuve, c'est-à-dire rejeter

19 certains chefs d'accusation, car… Mais, Monsieur le Président, en fait,

20 les résultats de ces chefs d'accusation pourraient affecter notre affaire.

21 Il faut pouvoir assurer un procès juste et équitable de l'accusé, mais

22 également il faut savoir qu'il y a des victimes, des actes, des

23 agissements qui ont été faits par l'accusé. Ce qui pour vous, Monsieur le

24 Président, représente peut-être un raccourcissement, une façon abrégée de

25 procéder au monde extérieur est tout à fait autre. Cela, en réalité,

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1 n'ajoute absolument rien…

2 Si vous dites que cela n'ajoute absolument rien à cette affaire au fait

3 que des personnes ont été persécutées en se faisant renvoyer de leur

4 travail, simplement sur la base de leur appartenance ethnique, qui a

5 entraîné par la suite le fait que ces gens n'avaient plus de moyens pour

6 subvenir à leurs propres besoins et ne pouvaient plus demeurer dans leur

7 propre demeure, si vous ne nous permettez pas de présenter ces éléments de

8 preuve, Monsieur le Président, qui pour nous, sont des preuves tout à fait

9 pertinentes, à ce moment-là, nous manquons à notre tâche. D'après vous,

10 vous dites que cela n'ajoute pas, ni ne soustrait rien de la longueur de

11 cette affaire que d'entendre ces éléments de preuve.

12 Il est certain qu'il est vrai qu'il y a eu une question et qu'il y a un

13 débat dans ce Tribunal. On essaie de raccourcir et d'abréger tous les

14 procès. Notre procès dure depuis le début: 117 jours; ce qui veut dire que

15 cela représente environ six mois. Mais il y a plusieurs cas, même dans nos

16 juridictions nationales, qui durent aussi longtemps. Je vous assure que

17 nous n'avons fait perdre le temps de personne et que cette affaire

18 progresse de façon remarquable. Nous sommes en train… Et je crois que de

19 cette façon-là, vous n'enlevez rien à l'estime que les personnes qui ont

20 voté pour vous portent envers vous.

21 Il est tout à fait vrai que depuis le tout début, Monsieur le Président,

22 vous avez soulevé la question quant à la fiabilité et M. Koumjian a parlé

23 de ceci l'autre jour, mais c'est à vous de décider. Après que vous avez

24 entendu les éléments de part et d'autre, vous allez pouvoir rendre la

25 décision. Nous avons contre-interrogé les témoins le plus efficacement

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1 possible, mais le motif de fiabilité (interprète: responsabilité) est

2 quelque chose que vous devez choisir vous-même.

3 Et comme j'ai dit, il y a quelques instants, Monsieur le Président, si

4 nous disons qu'il s'agit d'une planification, que nous avons planifié la

5 présentation de nos éléments de preuve et la défense doit se plier à cela,

6 de cette façon-là, oui, nous sommes des complices. Et effectivement,

7 Monsieur le Président, vous allez donc devoir établir s'il s'agit d'une

8 responsabilité qui nous incombe.

9 Mais s'agissant de la longueur de la cause, nous avons fait des

10 allégations factuelles, présenté des allégations factuelles contre le

11 docteur Stakic, et la défense doit rencontrer ce genre d'allégation et

12 répondre à ce genre d'allégation.

13 Donc, Monsieur le Président, nous vous soumettons respectueusement que le

14 moment n'est pas propice pour que vous puissiez, Monsieur le Président,

15 avoir ce genre de délibération que vous étiez en train d'envisager à ce

16 moment-ci. Et eu égard à toutes ces difficultés dont nous avons déjà

17 débattu, il s'agit de difficultés légales, effectivement, juridiques, je

18 crois que vous parlez plutôt des difficultés qui figurent aux chefs

19 d'accusation 7 et 8. Je crois qu'il s'agit de déportations et d'expulsions

20 forcées.

21 M. le Président (interprétation): Oui, mais il y a également bon nombre

22 d'autres questions. Par exemple, des questions liées à l'Article 5, en

23 parlant de la dépravation des droits fondamentaux qui peut occasionner un

24 certain nombre de problèmes et ne permet pas, ne nous permet pas de croire

25 que les questions supplémentaires sont beaucoup plus pertinentes. Mais

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1 est-il vraiment important d'entrer dans les détails que l'on retrouve dans

2 l'Acte d'accusation, chef d'accusation par chef d'accusation?

3 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, bien, lorsqu'on parle

4 de la dépravation des droits de l'homme comme vous avez mentionné, vous-

5 même, bien, ce que j'ai à dire sur les chefs 7 et 8, eh bien, c'est ceci:

6 il y a deux lignes d'autorité conflictuelle à présent, pour ce qui est du

7 Tribunal.

8 Dans l'affaire Blaskic, il était question que la déportation couvre le

9 chef de transfert forcé. Cela est pour cette affaire-ci, mais pour ce qui

10 est de Krstic et Krnojelac, le point opposé a été adopté par la Chambre de

11 première instance ou par les Chambres.

12 Ils ont interjeté appel dans l'affaire Krnojelac, et le bureau du

13 Procureur estime ou a pris la position, que vous avez, qu'il n'est pas

14 nécessaire d'avoir les deux chefs d'accusation et que la déportation

15 comprend en soi les deux chefs.

16 Je ne sais pas si je vais trop rapidement? Bien. Je regarde, je me tourne

17 vers les interprètes? Très bien.

18 Monsieur le Président, la difficulté est donc la suivante: c'est qu'à

19 cette étape-ci, nous ne pouvons pas dire quelle ligne d'autorité la

20 Chambre d'appel suivra, quelle est la décision que la Chambre d'appel

21 prendra. C'est la raison pour laquelle nous voulions donc garder les deux

22 chefs d'accusation et, comme M. Koumjian l'a mentionné lundi dernier, je

23 crois que vous avez entendu beaucoup d'éléments de preuve concernant les

24 transferts de personnes dans les circonstances les plus abominables, mais

25 pas à l'extérieur bien sûr de l'Etat.

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1 Monsieur le Président, il s'agit d'un point tout à fait mineur, mais je

2 souhaiterais néanmoins l'aborder, M. Koumjian l'a abordé également, c'est

3 que vous avez… vous vous êtes penché sur la question, à savoir pourquoi le

4 docteur Stakic s'est rendu à Belgrade. Je souhaiterais vous dire qu'il

5 s'agit d'un contre-interrogatoire tout à fait standard, non seulement dans

6 le système du common law mais également dans des systèmes du droit civil

7 -nous en avons parlé bien sûr en Chambre.

8 Quand quelqu'un est donc accusé d'une offense criminelle pénale, à ce

9 moment-là, il n'est pas nécessaire de voir pourquoi à cette étape-ci la

10 personne est disparue.

11 Nonobstant votre ordonnance, je voudrais donc dire, Monsieur le Président,

12 qu'il s'agit de contre-interrogatoire tout à fait régulier qui existe dans

13 plusieurs juridictions, et inclus les juridictions du droit civil.

14 Monsieur le Président, voici les points que je voulais exposer, mais je

15 vois que le point principal que je voulais dire, c'est que si, Monsieur le

16 Président, vous commencez maintenant à examiner les éléments de preuve et

17 à prendre une décision avant la présentation des moyens à décharge, nous

18 voudrions vous soumettre respectivement que vous, les Juges, en tant que

19 preneurs de décision, feriez en sorte que vous éviteriez d'entendre un

20 certain nombre d'éléments de preuve très importants.

21 L'une des difficultés de l'Article 98, c'est que vous ne saviez pas ce qui

22 allait arriver, et vous le savez encore moins maintenant.

23 Et en vue des témoins, Monsieur le Président, notre position serait la

24 suivante. C'est que la présentation des moyens à charge n'a pas perdu de

25 sa force, et nous voudrions vous soumettre, ayant entendu les moyens de

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1 preuve de la défense, que la nature persuasive de la présentation des

2 moyens à charge est encore plus apparente maintenant.

3 C'est ce que nous avions à vous dire. S'il y a quelque chose de plus

4 précis sur lequel vous aimeriez qu'on débatte, nous le ferons. Mais c'est

5 ce que nous avions… ce sont les représentations que nous avions à vous

6 faire de la part du bureau du Procureur.

7 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il est nécessaire d'entrer

8 dans le détail et d'aborder certains points plus en détail, car je trouve

9 certains de vos commentaires non appropriés. Je trouve qu'ils ne sont pas

10 conformes à notre décision en vertu de l'Article 98bis. Je pense plutôt à

11 la décision du 31 octobre 2002.

12 Je voudrais entrer plus en détail bien sûr et, bien sûr, je ferai en sorte

13 de donner la parole à la défense pour entendre leur représentation

14 également. Je crois qu'il s'agit là d'une discussion bien importante qu'il

15 faut continuer à 13 heures 30, si je ne m'abuse.

16 Bien. En ce moment-ci, nous allons donc lever la séance et nous

17 reprendrons nos travaux à 13 heures 30.

18 (L'audience, suspendue à 12 heures 13, est reprise à 13 heures 37.)

19 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.

20 Avant de donner la parole à la défense pour entendre sa réponse, je

21 voudrais faire les remarques suivantes sur un point mineur mais important

22 et qui ne sert qu'à titre d'exemple. Pour la question de la pertinence ou

23 la non-pertinence, il serait question de savoir si nous pouvons ou non

24 considérer la question de savoir pourquoi… et si le docteur Stakic a pris

25 la décision de se rendre à Belgrade, savoir si elle est pertinente aux

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1 fins de la présente affaire.

2 Premièrement, il est incontesté qu'il n'y a aucun crime à s'enfuir. Ce

3 n'est pas un crime du tout de s'enfuir. Ça ne pourrait être, si nous

4 arrivons au stade du prononcé d'une sentence, qu'un facteur à titre de

5 circonstances atténuantes ou de circonstances aggravantes. Mais il existe

6 un principe juridique de base selon lequel l'absence de circonstances

7 atténuantes ne peut jamais être considérée comme une circonstance

8 aggravante. Une circonstance atténuante pourrait et serait, par exemple,

9 le fait de s'être volontairement rendu… si le docteur Stakic s'était

10 volontairement rendu pour venir à La Haye, et nous n'avons aucun élément

11 de preuve d'une intention en ce sens. Ceci, c'est pour la défense.

12 De la perspective du docteur Stakic, le pire des cas serait s'il avait eu

13 connaissance de l'Acte d'accusation et, en fait, s'il avait essayé de se

14 cacher. Mais même si c'était le cas, aucune déduction ne pourrait être

15 tirée et ne saurait être tirée de cela contre le docteur Stakic, car il

16 n'a aucune obligation du tout de coopérer ni même de se rendre.

17 L'Article 29 du Statut dispose qu'il n'y a d'obligation de coopérer que

18 pour ce qui est des Etats. Ce qui veut dire que, en tant qu'individu,

19 aucun système juridique au monde ne prévoit l'obligation de voir… ou une

20 obligation de se rendre volontairement. Par conséquent, en l'absence d'une

21 telle obligation, aucune conclusion négative ou aggravante ne saurait être

22 tirée de sa propre décision, quel que fût l'endroit où il voulait se

23 rendre au cas où nous arriverions au stade du prononcé de la sentence.

24 Par conséquent, et à cette fin, il est absolument dénué de pertinence de

25 savoir quelle décision le docteur Stakic a prise en dehors du cadre

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1 temporel fixé par le quatrième Acte d'accusation modifié.

2 Si aucune conclusion ne peut être tirée en ce qui concerne l'un des chefs

3 d'accusation concrets, il est suffisamment difficile pour la présente

4 Chambre de première instance de voir si le Bureau du Procureur a choisi le

5 cadre temporel, alors qu'il apparaît de plus en plus clairement que la

6 thèse de l'accusation est que le docteur Stakic aurait commencé ses

7 préparatifs concernant les crimes allégués déjà en janvier 1992 et aurait

8 continué au-delà de ce cadre qui a été choisi par le Bureau du Procureur

9 pour l'accusation.

10 Mais, comme on l'a promis, je ne veux pas rouvrir ce débat de savoir

11 pourquoi et dans quelle mesure le Bureau du Procureur a retardé ou essayé

12 de retarder ce procès.

13 Nous demeurons confrontés à une requête relative à trois documents qui ne

14 sont pas visés par l'Article 65ter du Règlement et, d'office, nous avons

15 posé la question de savoir pourquoi un certain document n'avait pas été

16 présenté à temps, n'avait pas été présenté au titre de l'Article 65ter,

17 n'avait pas été compris dans le lot de documents lorsque nous avions

18 demandé tous les documents qui devaient être remis à l'expert en écriture,

19 M. ten Camp, à savoir le document du 22 janvier.

20 Nous avons encore à subir les conséquences de la communication, tout à

21 fait en retard, de six déclarations importantes et je ne veux plus

22 continuer à déplorer les problèmes qui appartiennent au passé, je voudrais

23 revenir à l'essentiel.

24 Comment est-il possible de rationaliser les choses dans ce procès? De mon

25 point de vue, ou de notre point de vue, les membres de la Chambre -nous

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1 avons discuté de ceci pendant la suspension-, il n'est pas utile de

2 renvoyer toute décision de la Chambre parce que l'accusation a absolument

3 raison: il n'y a aucune décision possible au titre de l'Article 98bis.

4 La Chambre ne peut pas d'office, en vertu du Règlement qui s'applique

5 actuellement, clore une partie de l'affaire. Par conséquent, ce que je

6 vais dire, ou plutôt ce que cette Chambre de première instance a à dire ne

7 peut avoir qu'une fonction en vue d'un appel.

8 En vertu du Règlement, seul le Bureau du Procureur a la possibilité de

9 rationaliser la présentation de ces thèses dans une affaire concrète.

10 C'est pourquoi, comme on l'a déjà dit depuis le mois de janvier de l'année

11 dernière, la présente Chambre de première instance a essayé de convaincre

12 les parties du fait qu'il serait utile d'avoir des délibérations

13 supplémentaires pour parvenir à une issue consensuelle de cette affaire.

14 Et si on ne pouvait parvenir à une issue consensuelle, tout au moins à un

15 procès ayant davantage de célérité, comme ceci est prévu de façon

16 obligatoire par notre Statut.

17 Maintenant, venons-en à notre décision, au titre de l'Article 98bis. Pour

18 des raisons qui découlent des conditions particulières de la composition

19 de cette Chambre, nous n'avons pas adopté ou appliqué le critère qui est

20 décrit par le Juge Pocar dans une opinion dissidente. Parce que de notre

21 point de vue -et en l'occurrence notre point de vue veut dire le point de

22 vue des Juges qui sont saisis de la présente affaire-, avant le 31

23 octobre, nous étions en fait d'avis que cette disposition du Règlement n'a

24 de sens et d'utilité que lorsque le critère n'est pas celui qui se

25 rapporte à la conclusion d'un Juge raisonnable du fait. Conclusion à

Page 12366

1 laquelle un Juge raisonnable du fait pourrait parvenir mais pour des

2 raisons d'économie judiciaire, aux conclusions auxquelles la présente

3 Chambre de première instance pourrait parvenir.

4 Et il n'y a aucun doute que tout le monde pourrait interpréter de la

5 décision de l'Article 98bis ce qu'aurait été l'issue si cet autre critère

6 avait été appliqué. Maintenant, la thèse de l'accusation est qu'il ne

7 serait pas utile d'avoir des délibérations sur la manière dont on pourrait

8 simplifier ou rationaliser la présente affaire à ce stade.

9 Je ne suis pas d'accord. Je ne suis pas d'accord parce qu'il est possible,

10 si les parties le veulent bien, de discuter des questions juridiques et de

11 voir où se situent les problèmes, ce qui faciliterait les travaux. Si ce

12 n'est l'obligation d'exercer, l'obligation pour le Bureau du Procureur de

13 rationaliser ses thèses et, en définitive, de permettre qu'au sein de ce

14 Tribunal -ce qui est également un problème essentiel pour la plupart des

15 juridictions du monde-, de faire un usage judicieux et économique de façon

16 à ne pas perdre de temps avec des questions théoriques et d'entrer dans

17 les faits et dans les problèmes très difficiles de faits qui nous

18 prendraient encore des mois et des mois de plus, que ce qui avait été

19 estimé. Parce qu'une chose doit être parfaitement claire, une question est

20 de savoir si le conseil de la défense essaie ou n'essaie pas de créer des

21 obstacles.

22 L'autre question est le droit pour le docteur Stakic d'avoir un procès

23 équitable et ceci n'a rien à voir avec des mesures concrètes menées par le

24 conseil de la défense. Nous devrions procéder, aller de l'avant, même si

25 le conseil de la défense estimait que l'affaire pourrait être close. Et

Page 12367

1 par la suite, peut-être nous pourrions réexaminer… cette question pourrait

2 être réexaminée par d'autres conseils de la défense et le rythme de cette

3 affaire rendrait ce procès inéquitable.

4 Je pense que nous devrions tous être conscients du fait que ceci n'est pas

5 un tribunal de common law, ce n'est pas un tribunal de droit romano-

6 germanique ou de droit civil. Nous avons un système hybride, et c'est pour

7 cette raison que nous avons tous une obligation qui nous incombe: non pas

8 de trouver le plus petit commun dénominateur aux deux systèmes juridiques,

9 mais nous devons trouver quels sont les moyens d'accélérer l'examen de ce

10 procès.

11 C'est pour cette raison que je souhaite distribuer, uniquement à titre

12 d'exemple… Je sais que les mêmes dispositions réglementaires sont plus ou

13 moins applicables dans la plupart des tribunaux pénaux ou de procédure

14 pénale des Etats membres du conseil de l'Europe.

15 Pour vous donner seulement un exemple, les articles 154 et 154A) du code

16 de procédures pénales allemands contiennent des règles relatives à des

17 éléments secondaires et rédigées de la façon suivante -c'est le stade

18 auquel nous nous trouvons maintenant-: "Si des charges au pénal ont été

19 publiquement… en audience publique, ont été préférées, le Tribunal peut,

20 sur la requête du Bureau du Procureur, mettre provisoirement fin à la

21 procédure à tout moment".

22 Certes, on ne saurait traduire cette disposition mot à mot dans notre

23 Règlement de procédure et de preuve, mais cela donne une direction, une

24 idée. En outre, l'Article 154A) concernant les limites des poursuites se

25 lit de la façon suivante: "Si certains éléments séparables d'un délit ou

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1 d'un ensemble de plusieurs délits qui ont été commis à la suite de la même

2 infraction n'ont pas d'importance particulière pour la peine ou les

3 mesures de réparation ou de prévention à attendre et, deuxièmement, en

4 outre, les mesures pertinentes ou de réforme auxquelles on devrait

5 s'attendre pour un ou une autre infraction, ici ce serait alternatif."

6 Dans ces cas, il est possible de limiter l'accusation aux autres parties

7 de l'infraction ou aux autres violations du droit qui sont constatées et

8 ceci, je pense, est clairement une indication, en fait, de la façon dont

9 nous pourrions procéder si le Bureau du Procureur le souhaite, le désire.

10 En vertu de notre Règlement de procédure et de preuve, le rôle de

11 l'accusation est sans aucun doute un rôle plus dominant. Par conséquent,

12 nous pouvons seulement l'inviter et nous ne pouvons rien faire de plus que

13 de l'inviter, en fait, à participer à ces délibérations dans le cadre

14 desquelles il y aurait la possibilité de rationaliser les éléments de

15 cette affaire, comme on en parle dans ce qui est intitulé "Limites à

16 l'accusation".

17 Je voudrais demander que ces articles du code pénal allemand soient

18 distribués aux parties ainsi qu'au Greffe et constituent la prochaine

19 pièce J.

20 Mme Dahuron (interprétation): J28A, Monsieur le Président.

21 (Intervention de l'huissière.)

22 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

23 J'espère que le docteur Stakic, grâce à l'aide de la cabine, a été en

24 mesure de suivre ce qui peut être lu dans ce code de procédure pénal

25 allemand, mais je dois souligner qu'il ne s'agit que d'un seul exemple de

Page 12369

1 la manière dont il est possible de procéder et dont on est peut-être

2 obligé de procéder.

3 Mais ce sont des remarques préliminaires de ma part. Il appartient

4 maintenant à la défense de répondre, quelles sont ses conclusions à

5 l'égard de cette question?

6 M. Ostojic (interprétation): Monsieur le Président, la défense a plusieurs

7 observations, si vous le permettez. Nous voulons également répondre à

8 certaines déclarations faites par le Bureau du Procureur.

9 Malheureusement, nous ne sommes d'accord avec le Bureau du Procureur qu'en

10 partie et nous sommes en désaccord sur un grand nombre d'autres aspects.

11 De même, avec tout le respect dû au Tribunal, nous ne sommes pas d'accord

12 avec l'idée que le moment ou le stade de réexamen des éléments de preuve

13 est passé parce que nous sommes au beau milieu de la présentation des

14 moyens de défense.

15 Le conseil du Bureau du Procureur a dit et nous a lu l'Article 98bis, et

16 il est clair que nous estimons que ceci donne au Tribunal le droit

17 d'office de revenir sur ces questions et de prendre les décisions qu'elle

18 estime justifiées à tout moment. Il n'existe aucune disposition du

19 Règlement qui interdise, aucune autorité de décision qui interdise la

20 possibilité pour une Chambre de rejeter d'office certains chefs

21 d'accusation ou allégations dans un certain délai lorsqu'elle estime que

22 les éléments de preuve sont insuffisants.

23 Nous souhaiterions plus particulièrement qu'au cours de la phase de

24 délibération de la présente affaire, avant que les conclusions écrites et

25 orales ne soient déposées, la Chambre puisse revenir sur cette question.

Page 12370

1 Nous pensions, et nous en avons été fortement déçus, que certains des

2 problèmes qui se posaient pourraient être résolus. Tous les chefs

3 d'accusation qui demeuraient ont été maintenus, toutes les allégations à

4 la fois de fait et de droit ont été maintenues à l'exception de celles qui

5 ont été mentionnées par la Chambre, à son instigation, et les questions

6 dans lesquelles il n'y avait aucune preuve et sur lesquelles le Bureau du

7 Procureur a reconnu que c'était le cas en ce qui concerne l'attaque, la

8 destruction ou les meurtres.

9 Respectueusement, nous invitons la Chambre à réexaminer ces problèmes et

10 encore une fois à examiner ce que nous avons évoqué l'an dernier avant la

11 présentation de nos requêtes au titre de l'Article 98bis.

12 Nous pensons que, lorsque vous appliquez le Règlement, plus

13 particulièrement la Chambre a le droit, en utilisant les mots

14 obligatoirement, devra d'office prendre une décision sur ces questions.

15 Nulle part dans cet article ou dans cet alinéa n'est-il dit que la Chambre

16 de première instance a l'impossibilité d'examiner ceci dans un cadre

17 temporel donné, lorsque la Chambre de première instance parvient à sa

18 décision sur ce point.

19 Pour passer à la question suivante, la Chambre a abordé aujourd'hui, sur

20 la question de la page 44 du compte rendu, en citant la page 11749 du

21 compte rendu précédent -je pense, je crois qu'il s'agit du 5 février- elle

22 a évoqué une politique d'obstruction.

23 La défense certainement est d'avis qu'il n'y a jamais eu de politique

24 d'obstruction de la part des conseils de la défense ni par le docteur

25 Stakic ni par aucun membre de notre équipe à aucun moment. Notre intention

Page 12371

1 n'a jamais été de faire obstruction à la procédure ou de retarder la

2 procédure afin qu'elle puisse parvenir à une décision finale pour obtenir

3 un procès équitable pour le docteur Stakic.

4 De même, j'ajouterai que bien que nous n'ayons pas été d'accord sur de

5 très nombreux points évoqués avec le Bureau du Procureur, nous n'avons

6 jamais allégué qu'il y ait eu une obstruction délibérée ou intentionnelle,

7 ou des difficultés particulières en ce qui concerne le docteur Stakic.

8 Nous continuons d'insister sur les conclusions qui ont été déposées par

9 écrit et qui ont été présentées verbalement. Et bien qu'elles aient été

10 rejetées, nous disons que le Bureau du Procureur a en sa possession des

11 documents qui -nous continuons de le dire- sont des documents à décharge.

12 Par mes observations, nous ne renonçons pas à notre position en ce qui

13 concerne ces écritures antérieures, ces requêtes et ces conclusions ou

14 moyens présentés oralement. Néanmoins sur le plan professionnel et

15 personnel, nous sommes troublés, à savoir qu'il y aurait l'idée même de

16 cette politique d'obstruction.

17 Nous voudrions examiner avec la Chambre, à tout moment qui vous

18 conviendrait, l'historique des efforts déployés par le Bureau du

19 Procureur, et nous voudrions avoir l'occasion de pouvoir présenter des

20 conclusions par écrit si nécessaire.

21 Si je peux passer à la question suivante maintenant. La Chambre a raison

22 lorsqu'elle mentionne les mots "coupé" et "collé" en ce qui concerne

23 l'Acte d'accusation. Il est intéressant, à mon avis, que le Bureau du

24 Procureur a une politique et une pratique qui a été précisément cela, de

25 couper et de coller.

Page 12372

1 Est-ce que… Peu importe qui est le défendeur, qui est l'accusé et où en

2 ex-Yougoslavie se trouvait l'accusé, quelles étaient les actions ou la

3 conduite de l'accusé telle qu'elle est alléguée.

4 Bien que je n'aie pas lu toutes les conclusions du Bureau du Procureur

5 présentées à ce Tribunal, je dirais que le même argument offert

6 aujourd'hui par Mme Joanna Korner -qu'en fait c'est le résultat de ce qui

7 a été dit par des témoins de la défense; leurs thèses sont en quelque

8 sorte renforcées-, ceci est la même opération de couper et de coller, le

9 même argument qu'ils utilisent pour chaque affaire qu'ils présentent à ce

10 Tribunal.

11 Nous voudrions penser que chacun des procès est distinct, que chacune de

12 ces affaires est séparée, que chaque affaire est distincte l'une de

13 l'autre. Le Bureau du Procureur toutefois maintient cette politique de

14 coupé-collé.

15 Et si nous regardons simplement l'Acte d'accusation de Mme Biljana

16 Plavsic, il y a simplement un changement de nom et nous retrouvons les

17 mêmes chefs d'accusation, les mêmes allégations de fait –la planification,

18 le fait d'ordonner, d'inciter et autrement d'aider et d'encourager. Pour

19 chacun des accusés, pour chacun des défendeurs, ces allégations ont été

20 formulées.

21 Je suis d'accord avec la Chambre et je suis d'accord avec le Bureau du

22 Procureur que la Chambre leur a demandé au début de l'affaire, si ce n'est

23 avant, de choisir chacun des modes de responsabilité par lequel ils

24 veulent accuser notre client. Mais ils ne l'ont pas fait au début de

25 l'affaire, ils ne l'ont pas fait au stade de l'Article 98bis de l'affaire

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1 et ils ne le feront pas à la fin de l'affaire pour une raison simple à

2 notre avis –et je reconnais que ceci n'est pas un accord verbal concernant

3 nos conclusions finales-, mais les raisons pour lesquelles qu'ils ne

4 peuvent pas choisir le mode de responsabilité ou de culpabilité, c'est

5 parce qu'ils ne savent pas eux-mêmes et n'ont aucune confiance dans la

6 manière dont ils pourraient convaincre trois Juges professionnels.

7 Nous estimons que ces délibérations à cette étape-ci des procédures

8 seraient efficaces et pourraient être aussi importantes qu'elles ne l'ont

9 été lors de la présentation de l'étape conformément au 98bis. Mais ayant

10 lu la décision en vertu du 98bis, avec tout le respect que je dois à la

11 Chambre, je dois dire que nous avons quelques difficultés à comprendre

12 quelques représentations ou des arguments présentés à l'époque.

13 Maintenant, je souhaiterais que l'on parle d'une question soulevée par la

14 Chambre. Il s'agissait à ce moment-là d'un point mineur, mais il me semble

15 que cela devient un point important. Même si la défense ne fait aucune

16 objection à la question si le docteur Stakic avait fui ou n'avait pas fui,

17 la question qui est juste -car le Bureau du Procureur et les membres du

18 Bureau du Procureur sont des officiers de la Chambre, ils sont les

19 protecteurs des gens, du peuple-, la question qui serait juste de se

20 poser, c'était -au lieu de se poser la question si le docteur Stakic avait

21 été un homme honorable-, est-ce qu'il aurait fui l'Acte d'accusation?

22 Nous pourrions tous regarder notre ordinateur même aujourd'hui et trouver

23 que l'Acte d'accusation qui a été émis contre le docteur Stakic était un

24 Acte d'accusation secret, confidentiel, qu'il n'avait pas été divulgué à

25 qui que ce soit, y compris le docteur Stakic, et que cet Acte d'accusation

Page 12374

1 secret n'avait été publié que quelques jours avant son arrestation et son

2 incarcération.

3 Je crois que cette question est assez juste: qui pourrait fuir… Comment

4 peut-on fuir si on ne sait pas que l'on est accusé de quelque chose? C'est

5 pertinent et c'est la vérité. C'est notre obligation et notre devoir de

6 faire valoir cette vérité devant la Chambre. La Chambre a rendu une

7 ordonnance. Nous allons nous plier à cette ordonnance, mais je souhaitais

8 simplement le prendre comme exemple.

9 Et le Bureau du Procureur a fait également d'autres allégations mineures,

10 à savoir si quelqu'un a fait donner un éloge lors de funérailles. Et je

11 crois que les documents qu'ils ont soumis, même s'il s'agit de niveau

12 secondaire et du ouï-dire, il ne s'agit pas d'un Acte d'accusation. Ce

13 n'est pas un crime de prononcer un éloge lors de funérailles.

14 Par contre, je dois dire que les membres du Bureau du Procureur ont décidé

15 de présenter les moyens de preuve les plus forts pour essayer de brouiller

16 les pistes, si vous voulez, avec des éléments de preuve qui sont non

17 pertinents, qui ne sont pas matériels et qui n'ont pas de bases factuelles

18 selon le droit.

19 La question suivante qui se pose, selon le point de vue des membres du

20 Bureau du Procureur: il faudrait savoir pourquoi est-ce qu'ils ne peuvent

21 pas choisir un mode de responsabilité ou de culpabilité et quelle est la

22 raison pour laquelle ils ne peuvent pas retirer certains éléments de

23 preuve, retirer certaines allégations, certains chefs d'accusation.

24 Les personnes de la Bosnie-Herzégovine, plus précisément les personnes qui

25 habitent Prijedor, aimeraient bien entendre les témoignages de certains

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1 témoins qui, comme Mme le docteur Minka Cehajic, ont décrit le docteur

2 Stakic en parlant de sa personnalité, de sa réputation et des

3 caractéristiques de sa personnalité.

4 Les témoins qui sont emmenés par la défense peuvent former, peuvent

5 projeter l'opinion que nous avons du docteur Stakic, conformément au

6 quatrième Acte d'accusation modifié. Mais nous estimons que le Bureau du

7 Procureur doit revoir dans leur cœur et sur papier les déclarations qui

8 ont été faites par des personnes qui étaient également les dirigeants du

9 parti du SDS, à savoir si ces personnes elles-mêmes ont jamais dit que le

10 docteur Stakic avait des intentions discriminatoires à quelque moment que

11 ce soit.

12 Contrairement à cela, nous vous soumettons, et nous l'avons également

13 indiqué dans la requête en vertu du 98bis, nous avons indiqué que la

14 Chambre avait l'obligation conformément au Règlement et nous avons

15 également inclus des notes en bas de page dans l'ordonnance de l'Article

16 98bis. La Chambre a souligné certains de ces comportements et agissements

17 qui pourront décrire le docteur Stakic.

18 La bonne nouvelle pour le Bureau du Procureur, c'est que je suis tout à

19 fait d'accord avec les commentaires qu'ils ont apporté à la page 50. Ils

20 disent à la ligne 29 -je cite-: "Il s'agit d'une affaire dans laquelle

21 nous n'avons pas perdu de temps et c'est une affaire qui a été conduite de

22 façon expéditive."

23 Je soumets à la Chambre que malgré… d'autres procès, les pratiques dans

24 d'autres procès, dans d'autres Chambres, qui ont comparu devant d'autres

25 Chambres de première instance, n'ont pas été retardés et je crois

Page 12376

1 qu'aucune des deux parties n'a essayé de retarder délibérément les

2 procédures.

3 Il y a eu quelques petits problèmes de temps en temps, mais la défense ne

4 désire pas dire que les problèmes que nous avons eus dernièrement avec

5 certains témoins et j'ai dit également que le Bureau du Procureur a eu

6 certains problèmes semblables. Nous voulons simplement dire à la Chambre

7 et nous soumettons à la Chambre pour que… lorsqu'elle jettera un coup

8 d'œil sur la totalité de l'ensemble des éléments de preuve présentés, je

9 crois que la Chambre trouvera que la défense a agi de façon rapide et de

10 bonne foi à tout moment.

11 Nous regrettons énormément, tel que le regrette la Chambre, j'en suis

12 persuadé, et toutes les personnes qui sont ici, nous regrettons qu'il y

13 ait eu certains délais. Il est malheureux que cela ait dû survenir. Nous

14 le regrettons, non seulement pour la Chambre de première instance, le

15 Bureau du Procureur ainsi que tous les membres participants dans cette

16 affaire, mais nous le regrettons également pour le docteur Stakic.

17 Il a été parfois difficile pour le docteur Stakic de passer de longues

18 heures assis, ici, devant ce Tribunal. Il m'a dit cette semaine que lundi,

19 il a été emmené au Tribunal à 8 heures moins 20, et ensuite il a quitté le

20 Tribunal vers 17 heures 30 pour, bien sûr, arriver au centre de détention

21 pénitentiaire vers 18 heures 15. Il poursuit et dit… il insiste pour que

22 la décision dans cette affaire soit rendue le plus tôt possible.

23 Par contre, nous ne pouvons pas et nous n'allons pas, nous, en tant

24 qu'officiers du Tribunal, nous n'allons pas essayer d'expédier une chose

25 et présenter des éléments de preuve, à moins que les conseils de la

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1 défense soient tout à fait satisfaits qu'en faisant entendre certains

2 éléments de preuve et qu'en emmenant un témoin à la barre, il dira des

3 choses pertinentes et que le témoignage dudit témoin nous aidera à

4 comprendre l'Acte d'accusation.

5 Nous devons rencontrer ces demandes sur une base quotidienne. Nous avons

6 l'impression et nous croyons que nous sommes en train d'accomplir ce but,

7 cette tâche, comme nous l'avons dit à maintes reprises, tel que la Chambre

8 l'a ordonné le 21 mars. Nous reconnaissons qu'il y a eu une ordonnance

9 faite par la Chambre, mais nous croyons également et nous insistons sur le

10 fait que cette affaire doit se terminer à la date en question.

11 Maintenant, pour parler d'un troisième point, point soulevé par les

12 membres du Bureau du Procureur à la page 51 du compte rendu d'audience

13 d'aujourd'hui, en commençant par la page 14, ils disent: "Nous avons

14 apporté des allégations de fait contre le docteur Stakic. Ce sont des

15 allégations que la défense doit rencontrer et auxquelles elle doit

16 répliquer et répondre. Ces allégations de fait sont les allégations que la

17 Chambre a présentées, nous en avons parlé à maintes reprises."

18 Est-ce que nous pouvons accuser une personne, un individu? Même si nous

19 prenons cette question de façon hypothétique, théorique ou plus

20 spécifiquement dans chaque cas, pour nous, avoir des théories telles que

21 le fait d'avoir influencé, d'avoir aidé, d'avoir encouragé une entreprise

22 criminelle. Pouvons-nous prendre une décision, pouvons-nous dire que la

23 défense présentera ses témoins en se basant sur cette décision?

24 Nous allons présenter les témoins en nous basant sur cette décision, mais

25 c'est notre obligation de remplir chacune de ces allégations de fait, non

Page 12378

1 pas des allégations juridiques légales, mais bien des allégations qui sont

2 faites sans mérite et sans aucune base factuelle.

3 Je voudrais dire que nous pouvons anticiper, nous savons très bien que les

4 membres du Bureau du Procureur nous présenteront leur argument lors de la

5 présentation… lors de leur mémoire de fin de présentation des éléments,

6 mais nous aimerions dire qu'il faut abréger conformément à l'Article

7 92bis. Dans notre affaire, ils n'ont pas d'allégations spécifiques de fait

8 nouvelles, autres que des questions… ils ont soulevé des questions d’ouï-

9 dire doubles et triples. C'est bien sûr dans le but d'essayer de faire en

10 sorte que toutes les allégations contre le docteur Stakic soient

11 présentées. La Chambre a cité le statut allemand.

12 Nous aimerions inviter la Chambre à examiner les décisions et la loi

13 d'autres pays et à revoir quel est le poids qui est accordé aux éléments

14 de preuve présentés d’ouï-dire.

15 La Chambre a particulièrement parlé d’ouï-dire lorsqu'un témoin de la

16 défense a pris la barre et lorsqu'on a demandé au témoin de parler de sa

17 connaissance personnelle. Et la Chambre lui a demandé de ne pas relater ce

18 qu'il a entendu dire de la bouche d'autres personnes. Nous sommes tout à

19 fait d'accord, nous espérons que ce principe sera appliqué non seulement

20 lors de la présentation des moyens à décharge mais également lors de la

21 présentation des moyens à charge présentés par les membres du Bureau du

22 Procureur.

23 Pour terminer, je souhaiterais dire qu'il nous faudrait parler de question

24 de circonstances atténuantes, de circonstances aggravantes, et je dois

25 dire que nous ne voulons pas émettre des conjectures sur les éléments de

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1 preuve qui devraient ou auraient dû être produits. Nous essayerons, avec

2 tous les moyens que nous avons, de présenter tous les éléments de preuve

3 qui pourraient fournir quelque inclination que ce soit pour alléger les

4 questions de responsabilité et de culpabilité ainsi que les questions de

5 sentence. C'est notre devoir et c'est ce que nous essayons de réaliser.

6 Je vous remercie, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

7 M. le Président (interprétation): Merci.

8 Avant d'entendre les commentaires finaux en réponse et avant de donner des

9 commentaires sur les questions, à savoir si le point de vue du Bureau du

10 Procureur peut nous aider dans cette phase des délibérations, je veux

11 simplement exprimer mon désaccord avec le point de vue qui a été pris par

12 les membres du Bureau du Procureur concernant ce fait.

13 C'était l'accusation qui, dans la requête en vertu du 98bis, disait que la

14 Chambre de première instance peut seulement procéder avec des chefs

15 d'accusation concrets sur la base des éléments produits jusqu'à

16 aujourd'hui.

17 Nous appuyons ce point de vue et nous avons dit, pour conclure, que les

18 choses ne peuvent que s'aggraver pour l'accusé et que le degré de

19 responsabilité, lorsqu'il s'agit des chefs d'accusation qui sont plutôt

20 concrets, ne peut représenter qu'un facteur soit atténuant soit aggravant.

21 Et de nouveau, il s'agit d'un caractère hybride du Règlement de procédure

22 et de preuve. Il n'y a aucune raison d'attendre que les témoins

23 supplémentaires soient appelés par la défense et je ne voudrais pas donner

24 des éléments de preuve supplémentaires en faveur des membres du Bureau du

25 Procureur.

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1 Nous nous attendons à obtenir une décision. Nous allons devoir rendre une

2 décision et nous devons travailler sur le principe, nous devons nous

3 appuyer sur le Règlement dont les dispositions nous parlent des moyens de

4 preuve à charge et à décharge de façon séparée. Il y a également les Juges

5 qui doivent statuer sur la décision. Lorsque nous aurons entendu le tout

6 et lorsque nous nous serons mis d'accord sur le tout, les Juges doivent

7 balancer les éléments, statuer et décider. Je crois que c'est ainsi dans

8 tous les systèmes juridictionnels.

9 Je crois que vous allez pouvoir décider ce qui devra être fait afin de

10 pouvoir être plus expéditifs, plus rapides. Je crois qu'il ne faut pas

11 abandonner tout espoir. Nous sommes dans l'obligation, chaque jour, de

12 voir si… en fait, en ce moment-ci, il ne s'agit pas d'une question

13 concrète mais il s'agit de voir si le fait de priver quelqu'un de liberté

14 est encore justifié.

15 Mais pour être bien précis, en ce moment-ci, la question qui se pose

16 devant nous, la question qui se trouve devant nous, c'est: que pouvons-

17 nous faire pour ne pas arriver au plus petit commun dénominateur, mais

18 pour mettre ensemble les avantages des deux systèmes juridiques pour

19 pouvoir en arriver à une meilleure solution, pour ce qui est de l'audition

20 de cette affaire et d'autres affaires dans l'avenir?

21 Je me tourne maintenant vers l'accusation.

22 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, puis-je d'abord

23 répliquer à ce dernier aspect? Il ne s'agit ni d'un système de common law

24 ni d'un système de droit civil, comme vous l'avez remarqué, à maintes

25 reprises. Il s'agit d'un système hybride qui a son propre statut et ses

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1 propres règles, ses propres règles de procédure et de preuve.

2 Avec tout le respect que je dois à Me Ostojic, le fait d'avoir un

3 Règlement de preuve est très clair: les soumissions doivent être faites

4 dans les sept jours après la fin de la présentation des moyens à charge.

5 Comme vous l'avez dit, Monsieur le Président, nous ne pouvons pas rouvrir

6 la présentation des éléments.

7 Monsieur le Président, bien sûr, vous nous avez dit que vous aimeriez que

8 nous retirions certains chefs d'accusation, et selon le Statut, il est

9 tout à fait clair que c'est le Procureur qui doit décider quels sont les

10 chefs d'accusation qu'il présentera et quelles sont les charges ou les

11 chefs d'accusation qui figureront à l'Acte d'accusation.

12 Monsieur le Président, il y a deux points principaux. Vous avez dit, ou la

13 Chambre a dit, qu'il y a assez d'éléments de preuve présentés en vertu du

14 98bis, à cette étape-ci, et je dois dire que nous avons fait, nous avons

15 commis une erreur pour ce qui est de la forme des délibérations.

16 Nous aimerions demander un certain délai pour faire des représentations

17 supplémentaires; sinon, si ce délai ne nous est pas accordé, vous pourriez

18 peut-être nous dire, Monsieur le Président, Messieurs les Juges -si nous

19 parlons de façon académique-, s'il est du point de vue de la Chambre de

20 première instance que l'accusation pourrait envisager de retirer certains

21 chefs d'accusation ou certaines allégations de fait qui se trouveraient à

22 l'intérieur de certains chefs d'accusation.

23 Car avec tout le respect que je vous dois, s'il ne s'agit pas d'un point

24 académique, Monsieur le Président, vous êtes en train de nous dire que

25 vous êtes arrivé à une décision à cette étape, qui n'est pas terminée, de

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1 la présentation des moyens de part et d'autre. Cela n'est pas suffisant.

2 Vous n'avez pas entendu assez d'éléments de preuve pour que vous puissiez

3 accuser quelqu'un.

4 Monsieur le Président, faire ceci -je vous remets, bien sûr, ceci

5 respectueusement-, cela veut dire que vous n'êtes pas préparé à écouter et

6 à entendre ce qui reste des éléments de preuve de façon ouverte.

7 M. le Président (interprétation): Je dois immédiatement répliquer à ceci.

8 Ce que j'ai dit, c'est simplement que la présentation des moyens de preuve

9 de la défense ne peut pas empirer. Elle ne peut que s'améliorer. Et il est

10 certain que le tout se tournera… ira plutôt dans le sens de l'avantage du

11 docteur Stakic.

12 Mme Korner (interprétation): Oui, mais, Monsieur le Président, cela n'est

13 pas exact puisque pendant la présentation des moyens à décharge, il est

14 vrai que les choses empirent souvent pour eux. En réalité, je dirais que

15 dans 80% des cas, cela est ainsi. C'est à la fin des présentations des

16 moyens à charge… la présentation des moyens à décharge que, très souvent,

17 les choses empirent. Ce n'est pas l'intention mais c'est ce qui arrive

18 très souvent.

19 M. le Président (interprétation): Je crois que j'ai été très clair lorsque

20 j'ai parlé de ceci. J'ai fait référence -et peut-être d'une façon, j'ai

21 parlé de coupé-collé-, j'ai pris vos arguments en vertu du 98bis, et j'ai

22 dit que la Chambre de première instance ne peut procéder que sur la base

23 de chefs d'accusation concrets, que sur la base d'éléments qui ont été

24 présentés jusqu'à ce jour.

25 Il est tout à fait clair que nous ne sommes plus… nous ne faisons plus

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1 face à la décision du 98bis. Vous pouvez lire notre décision à la page 4,

2 vous pouvez lire la dernière phrase de la décision en vertu du 98bis,

3 c'est la décision rendue par la Chambre et elle a été également appuyée

4 par les Juges qui sont assis ici, à côté de moi, dans cette Chambre.

5 Mme Korner (interprétation): Je crois qu'il y a un malentendu, alors,

6 Monsieur le Président. Nous voulions simplement nous assurer que tout soit

7 bien compris. Nous voulions nous assurer qu'à cette étape-là, Monsieur le

8 Président, vous avez tenu compte des éléments seulement entendus par le

9 Bureau du Procureur. Vous ne pouvez pas prendre en compte, comme nous vous

10 l'avons soumis -et vous serez d'accord avec moi pour le dire-, les

11 éléments de preuve qui pourraient affecter votre décision ou influencer

12 votre décision plutôt.

13 Mais lorsque… Vous êtes en train de nous présenter un autre scénario,

14 c'est-à-dire se trouvant maintenant au bout de cette étape, les éléments

15 de preuve ont été présentés. Vous n'êtes pas en train de diviser les

16 éléments de preuve en éléments présentés par l'accusation et éléments

17 présentés par la défense, mais vous prenez le tout comme des éléments

18 présentés, des éléments globaux, entendus. Et si vous dites que l'accusé

19 est coupable d'une allégation particulière ou alternativement, vous pouvez

20 nous dire "nous ne sommes pas satisfaits ayant entendu tous les éléments

21 de preuve, que le test de vérité a été établi".

22 Et bien sûr, il s'agit d'un autre test (interprète: critère), ici, dans ce

23 cas-ci. Mais vous devez absolument être convaincu que vous pouvez rendre

24 une décision juste et équitable. Et je répète de nouveau, Monsieur le

25 Président, selon nous, vous pouvez faire, bien sûr, tout ce que vous

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1 désirez, mais il faut dire aux membres du Bureau du Procureur de façon

2 académique qu'il nous faut peut-être réfléchir à certaines choses.

3 Le problème qui se pose ici, c'est que je crois que ce que vous avez

4 l'intention de faire aura un effet opposé ou contraire. C'est que nous

5 allons examiner les éléments de preuve et nous allons reparler de ceci.

6 Nous allons vous présenter d'autres arguments. Ce que j'essaie de dire,

7 c'est que je ne crois pas que vous puissiez arriver ou statuer sur une

8 décision quelle qu'elle soit à ce moment-ci concernant les chefs

9 d'accusation. Bien sûr, il est tout à fait normal que vous arriviez à nous

10 présenter vos idées, mais je crois que tout ce que vous êtes en train de

11 nous dire à cette étape-ci ou une autre manière de procéder ne serait pas

12 appropriée à cette étape, ici.

13 M. le Président (interprétation): Désirez-vous répliquer?

14 M. Ostojic (interprétation): Oui, Monsieur le Président brièvement.

15 Je crois, avec tout le respect que je dois à mon éminente consœur, je

16 crois que, selon l'obligation du Bureau du Procureur -et les Règlements

17 sont très clairs là-dessus-, les membres du Bureau du Procureur savent

18 très bien et le Bureau du Procureur ne croit pas au principe fondamental

19 de la présomption de l'innocence.

20 Ils ont dit à la page 61, ligne 1 et -je cite-: "Les éléments dans cette

21 affaire, quels sont-ils? Soit que nous -et je ne veux pas essayer

22 d'émettre des conjectures lorsqu'elle parle de nous- donc si nous sommes

23 satisfaits pour savoir si l'accusé est coupable d'un crime pertinent".

24 Mais je soumets à la Chambre qu'il ne s'agit pas là d'une chose standard.

25 Nous ne pouvons pas procéder à cette étape-ci de cette façon-là. On

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1 procède de la sorte soit au tout début soit à la fin de la présentation

2 des moyens de preuve.

3 Cette Chambre de première instance ne doit pas déterminer ou être certaine

4 si un accusé est coupable ou non. Même si j'hésite à cette étape-ci, en

5 fait, je suis tout à fait certain que la Chambre de première instance

6 connaît son travail et connaît le fardeau de la preuve, connaît le

7 principe du fardeau de la preuve et sur qui le fardeau de la preuve tombe.

8 Mais il est tout à fait certain, il faut s'assurer qu'il y a assez

9 d'éléments de preuve pour que l'accusé soit trouvé coupable. Il faut être

10 certain que vos éléments de preuve… Et votre tâche est d'examiner les

11 éléments de preuve entendus d'une façon objective et de mesurer les

12 témoignages entendus par les témoins, de revoir les témoignages qui sont

13 présentés par le biais de certains documents, d'examiner tous les éléments

14 de preuve reçus de façon individuelle pour ce qui est de chacun des chefs

15 d'accusation.

16 Le Bureau du Procureur a peut-être raison de dire que, lorsqu'il s'agit de

17 décisions, des décisions ont été faites, on a prédéterminé certaines

18 décisions. Mais comme nous le savons, nous tous présents dans cette

19 Chambre, devant cette Chambre et ce Tribunal -nous sommes des

20 professionnels- et nous avons certainement des points prédéterminés. Nous

21 avons tous nos opinions personnelles. Nous pouvons également changer

22 d'opinion de temps en temps pendant le processus du procès, pendant la

23 procédure et nous sommes tout à fait conscients que chacun d'entre vous

24 n'a pas encore pris une décision sur chacun des chefs d'accusation

25 figurant au quatrième Acte d'accusation modifié.

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1 La décision de culpabilité à cette étape-ci serait prématurée et elle

2 serait, selon nous, une violation du mandat et du Règlement de ce

3 Tribunal.

4 Par contre, la Chambre de première instance a reçu dans son ensemble les

5 éléments de preuve présentés par le Bureau du Procureur et nous soumettons

6 avec tout le respect que nous vous devons… Bien sûr, il est certain que

7 vous pouvez, par le pourvoir qui vous a été donné à travers le Règlement,

8 vous pouvez effectivement essayer d'abréger un chef d'accusation, de

9 retirer un chef d'accusation, plusieurs chefs d'accusation afin d'en

10 arriver à un procès plus rapide. Nous invitons, bien sûr, la Chambre à le

11 faire. Nous espérons que la Chambre le fera, procédera ainsi.

12 Et le dernier point, si je puis. J'avais espéré que le Bureau du Procureur

13 nous donne un souffle de fraîcheur au lieu de nous présenter les mêmes

14 éléments coupés et collés. Nous voulons voir la réalité et non pas la même

15 rengaine. Mais je crois que le Bureau du Procureur a une façon très

16 étroite de voir les choses et de voir les faits. Et je crois qu'ils ne

17 creuseront jamais assez profondément dans leur conscience et dans leur

18 cœur pour dire qu'un chef d'accusation ou quelque chef d'accusation ou un

19 fait devrait être retiré.

20 La vérité est que cette Chambre a donné des avis judiciaires élaborés, et

21 si nous prenons ces commentaires prononcés par la Chambre et si nous les

22 appliquons à quelque chose, si nous les appliquons au chef d'accusation

23 que le Bureau du Procureur peut retirer ou non, nous ne croyons pas qu'ils

24 examineront le point de vue de la Chambre, qu'ils reconsidéreront et que,

25 possiblement, ils décideront de retirer certains chefs d'accusation de

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1 fait.

2 Cela n'arrivera jamais. Cela n'est jamais arrivé dans le passé. Car leur

3 façon de procéder, leur mandat est de lancer tout ce qu'ils peuvent contre

4 l'accusé, en essayant, à travers le déluge de documents, que quelque chose

5 finalement finira par toucher. Nous avons peut-être de l'espoir, nous

6 espérons que cette position du Bureau du Procureur changera un jour.

7 Merci, Monsieur le Président.

8 M. le Président (interprétation): Je ne vois pas que l'accusation demande

9 la parole.

10 M. Koumjian (interprétation): Quand même! Une réponse toute courte. Nous

11 avons essayé de réduire nos documents dans cette affaire. Il y avait ici…

12 Par exemple, il s'agit du massacre dans le village de Jaskici, qui a été

13 mentionné dans la décision dans l'affaire Tadic; il y avait des témoins

14 qui avaient déposé parce que nous avons eu l'ordonnance de la Chambre

15 selon laquelle assez de crimes ont été déjà prouvés.

16 Maintenant, je voudrais parler brièvement des raisons pour lesquelles nous

17 avons donc mentionné la preuve par rapport au départ de M. Stakic à

18 Belgrade. Nous avons accepté la décision de la Chambre à ce point, mais

19 nous voulons soulever cette question parce qu'il y a peut-être des

20 différences entre les systèmes judiciaires. Je suppose que Me Ostojic

21 vient du même système judiciaire que moi. Personne ne dit qu'une fouille

22 comme ça représente un crime.

23 Et nous avançons -et ici je pense au système judiciaire d'où je viens-,

24 c'est que, selon ce système, il s'agit d'une preuve indirecte, d'une

25 conscience de la culpabilité de la personne qui a fait cela. Il semble que

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1 cette personne ne connaît pas l'Acte d'accusation officiel. Cela ne peut

2 qu'augmenter la pertinence de ce fait, c'est-à-dire de cette fuite pour

3 éviter d'être déclarée coupable de ce crime.

4 Je pense que l'exemple le plus célèbre de cela était l'exemple d'une

5 fillette violée qui avait 3 ans et qui, par la suite, a été assassinée.

6 L'accusé s'est enfui de Los Angeles et est parti pour un autre pays dans

7 lequel il ne pouvait pas être arrêté.

8 Dans le système judiciaire d'où nous venons, Me Ostojic et moi-même, et en

9 s'entretenant avec un autre avocat qui vient d'un autre système

10 judiciaire, nous savons que, dans le système romano-germanique, cette

11 trêve aurait pu être acceptée. Je ne voulais que vous présenter mon point

12 de vue.

13 M. le Président (interprétation): Je vous remercie de votre commentaire.

14 Je pense que cela nous sera utile et nous devons accepter les approches

15 différentes dont nous disposons ici. Mais, comme vous l'avez déjà dit, le

16 droit continental européen -et je sais de quoi je parle parce que j'ai

17 enseigné cela dans plusieurs pays, surtout quand il s'agit de l'Europe

18 centrale et orientale-, selon ce système, il n'est pas possible de

19 donner... de conclure dans le pire des cas: si une personne a décidé de ne

20 pas se rendre, c'est-à-dire de fuir, cela serait la preuve suffisante,

21 d'un point de vue des droits de l'homme, cela serait une preuve suffisante

22 pour conclure quelque chose qui concerne l'accusé.

23 Nous devons donc harmoniser quand même ces deux systèmes différents dont

24 nous venons. D'ailleurs, c'est notre mission ici. C'est pour cela que je

25 dis que notre obligation ici, c'est de nous entretenir ouvertement et

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1 clairement sur les obstacles pour avoir un procès plus rapide et c'est...

2 Nous nous sommes adressés expressément à deux parties, parce que lorsque

3 nous parlons de cette affaire -et nous le faisons quotidiennement-, nous

4 avons pu conclure qu'il y avait quelque chose de mauvais et qu'il n'y a

5 pas de doute que la Chambre de première instance ait peut-être contribué à

6 cela parce que la Chambre n'était pas assez stricte quand il s'agissait de

7 certains témoins qui ont déposé jusqu'ici et parce que la Chambre a permis

8 les questions non pertinentes. Nous devons donc trouver une solution à

9 cette situation.

10 Si j'ai bien compris, l'accusation préférerait, à ce moment-là, ne pas

11 avoir, ne pas procéder à la délibération. Non, vous pouvez être sûrs que

12 la retenue imposée par le Statut limite nos possibilités et c'est pour

13 cela que les deux parties pourront conclure... pourront avoir des

14 conclusions incorrectes de ce que nous anticipons et les parties pourront

15 conclure peut-être qu'une décision négative serait prise pour… au

16 détriment des intérêts de l'accusé. C'est plus facile pour l'accusation de

17 procéder proprio motu que pour la Chambre de première instance.

18 Et ici, je suis d'accord tout à fait avec Mme Korner, il n'est pas

19 possible de prendre une autre décision selon l'Article 98bis, parce que le

20 délai c'est sept jours après la présentation des moyens de preuve de

21 l'accusation.

22 Maintenant, il n'y a pas d'autre possibilité et je peux vous dire qu'au

23 bureau du Tribunal, il y avait beaucoup de discussions sur cette question

24 et nous avons continué à faire changer les articles qui sont en question

25 pour que, vraiment, les questions soulevées dans une affaire soient

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1 réduites à des questions essentielles nécessaires pour que ces procès se

2 déroulent bien.

3 Nous pouvons procéder de la façon suivante et, maintenant, j'adresse cela

4 aux deux parties.

5 Nous ne pouvons pas continuer comme cela, c'est-à-dire d'avoir tous les

6 jours des problèmes liés aux documents, aux résumés qui nous sont

7 communiqués très tard ou au dernier moment. Nous disposons de règles très

8 strictes quand il s'agit de résumés. Il y a des règles qui doivent être

9 respectées quand il s'agit des préparations de témoins et j'espère que, au

10 cours des semaines à venir, nous pourrons surmonter ces problèmes.

11 Il n'y a aucun doute que cette affaire ne sera pas finie avant que le

12 docteur Stakic n'ait la possibilité d'entendre lui-même les témoins qui

13 sont pertinents et importants pour son affaire. Nous avons déterminé le

14 délai, c'est le 21 mars, mais au cas où -c'est le 21 mars-, au cas où un

15 retard arriverait, provoqué par l'une ou l'autre partie, il serait

16 nécessaire de continuer quand même ce procès, mais cela aurait une

17 influence négative sur d'autres affaires devant ce Tribunal. Maintenant,

18 je ne veux pas parler là-dessus plus longuement avec des parties parce que

19 les parties savent de quoi je parle.

20 Cela me mène à une autre question. J'ai demandé à la défense pour savoir

21 comment la Chambre pourrait vous aider. Qui avez-vous contacté dans le

22 secteur d'aide aux témoins et aux victimes? Et quand, pour la première

23 fois, est-ce que vous vous êtes adressés au secteur d'aide pour le témoin

24 001?

25 M. Ostojic (interprétation): Nous avons pris le contact avec… par e-mail,

Page 12391

1 avec Isabel Skukan.

2 Je m'excuse, mais je dois souligner une chose. Il semble... La défense

3 voudrait que la Chambre de première instance examine en détail cette

4 question. Le secteur d'aide aux victimes et aux témoins nous a beaucoup

5 aidés et, avec tous nos témoins, ce secteur les a aidés. Et nos témoins

6 nous ont dit que les gens travaillant dans ce secteur sont très agréables

7 et les ont beaucoup aidés quant au logement, au transport, ici et à

8 l'étranger.

9 Nos complications ont été provoquées par un temps réduit dont les témoins

10 disposent pour obtenir les passeports et les visas. Si je comprends, les

11 gouvernements ne leur permettent pas de voyager quand ils veulent et de

12 rester dans un pays étranger le temps voulu. Le secteur d'aide aux témoins

13 et aux victimes ne s'occupe pas de la délivrance de passeports et de

14 visas.

15 Cela se fait au pays d'où viennent les témoins. Et la semaine dernière,

16 malheureusement, à cause des jours fériés, jeudi et vendredi, nous étions

17 confrontés à ces problèmes parce que les services pour délivrer ces

18 documents ont été fermés. Le témoin numéro 006, notre témoin, a déposé une

19 demande pour obtenir un visa et, ce témoin, le secteur d'aide aux victimes

20 et aux témoins l'a beaucoup aidé à pouvoir venir vendredi.

21 Cela représente un problème pour la défense parce que nous voudrions

22 préalablement parler à ce témoin, mais nous attendons toujours qu'il

23 obtienne un visa. Pour le moment, il a son passeport, parce que tout cela

24 exige beaucoup de temps.

25 Le problème pour l'accusation et pour la Chambre de première instance,

Page 12392

1 c'est parce que la défense ne peut pas vous donner les résumés de

2 déclarations de témoins en avance.

3 Nous allons énumérer les numéros de témoins: c'est 001 et 006. Ce sont les

4 témoins pour la semaine prochaine, plus cinq témoins qui vont témoigner

5 par la vidéoconférence. Et, avec le respect que je vous dois, permettez-

6 moi de répéter encore une fois. Nous avons demandé cela à plusieurs

7 reprises et, chaque fois, la Chambre nous a fait droit.

8 Comme nous nous rapprochons de la fin de la présentation des moyens de

9 preuve de la défense, nous demandons plus d'occasions pour rencontrer

10 notre client, M. Stakic. C'est-à-dire, parce que ce qui nous intéresse,

11 c'est son évaluation des témoignages et des moyens de preuve pour que nous

12 puissions intégrer cela dans nos requêtes écrites et orales, parce que les

13 deux témoins experts qui vont témoigner au cours des 10 derniers jours de

14 la présentation des moyens de preuve à décharge, pour ces témoins experts,

15 nous avons besoin de l'aide de notre client. Et c'est pour cela que nous

16 voudrions l'informer de ce qui figure dans des documents concrets, dans

17 des rapports concrets qui vont être présentés.

18 Nous nous excusons auprès de la Chambre, auprès du Bureau du Procureur,

19 auprès des interprètes, pour ce retard imprévu quand il s'agit des témoins

20 qui doivent venir cette semaine, parce que nous avons été induits en

21 erreur et nous n'avons pas compris l'information de la Chambre quand il

22 s'agit de deux témoins de la Chambre. Nous avions l'impression, parce que

23 la Chambre a le pouvoir de citer à comparaître des témoins et que la

24 Chambre, probablement, peut influencer donc la délivrance de passeports et

25 de visas, c'est pour cela que nous avons compris que ces deux témoins

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1 déposeront cette semaine, ces deux témoins de la Chambre.

2 Mais nous avons estimé que si, pour un témoin qui va parler de la moralité

3 de l'accusé, il faut une journée et demie pour qu'il finisse son

4 témoignage, nous avons estimé qu'il faudrait une journée et demie pour

5 chacun de ces deux témoins de la Chambre. Mais nous avons fait une erreur

6 et nous nous excusons pour cela.

7 Et nous tenons à convaincre la Chambre de première instance, si d'autres

8 spéculations se produisent de la part de la défense ou les erreurs de

9 l'interprétation par rapport à l'ordonnance de la Chambre, nous

10 contacterons… nous prendrons contact tout de suite avec la Chambre et

11 demanderons l'explication.

12 M. le Président (interprétation): Pour que nous soyons tout à fait clairs

13 par rapport à cette question, comme vous l'avez déjà dit, je pense que

14 l'ordonnance était extrêmement claire dans ce sens, mais c'était à la

15 défense de s'expliquer sur l'impossibilité de citer à comparaître ces deux

16 témoins à La Haye, c'est-à-dire de les faire venir à La Haye. Et il est

17 incontestable, compte tenu du temps nécessaire, que dans l'ordonnance de

18 la Chambre, il n'est pas écrit que les témoins qui devront déposer

19 témoigneront dans un délai fixe. Nous avons parlé de cela et cela figure

20 dans le compte rendu.

21 Je pense que, jusqu'ici, nous ne savons toujours pas si ces témoins sont

22 prêts à venir témoigner devant ce Tribunal. C'est pour cela que nous ne

23 pouvons donner aucune indication à ce sujet. Mais, comme vous l'avez déjà

24 dit et vous vous êtes excusé pour cela -et nous acceptons vos excuses-,

25 cela incombe à la défense de faire venir les témoins prévus pour cette

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1 semaine.

2 Mais je dois souligner que, déjà la semaine dernière, mercredi, nous avons

3 parlé de cela et nous avons informé le Bureau du Procureur à ce sujet. Et

4 nous avons demandé au conseil de la défense de s'occuper de cela, c'est-à-

5 dire que les témoins soient présents jeudi et vendredi ici et qu'ils

6 prennent tout de suite le contact avec le secteur d'aide aux témoins et

7 aux victimes. Cela s'est passé la semaine dernière, mercredi, la semaine

8 dernière, lorsqu'il n'y avait pas de jour férié, ce n'était pas un jour

9 férié. Et la défense a eu la possibilité de prendre le contact avec ce

10 secteur, mais le secteur d'aide aux témoins aux victimes m'a,

11 malheureusement, informé que la défense, pour la première fois, ce matin,

12 a pris contact avec eux, lorsqu'il s'agit du témoin n°001.

13 C'est pour cela que je vous demande des clarifications pour éviter que les

14 rumeurs circulent là-dessus. Je dois avoir des clarifications pour que la

15 situation ne s'aggrave encore plus dans le prétoire. S'il vous plaît, il

16 faut que vous vous occupiez de cela. Je pense que, ici, cela incombe à la

17 défense aussi de reprendre le contact avec ce secteur avec lequel vous

18 avez pris contact la semaine dernière.

19 Il ne faut pas que je souligne qu'il s'agit ici de quelques milliers de

20 dollars qui sont dépensés quotidiennement et qui sont dépensés

21 indépendamment du fait s'il y a une audience ou pas. C'est pour cela,

22 c'est l'obligation de nous tous et c'est notre responsabilité à nous tous

23 de penser à cela.

24 Après la pause, je vais demander à l'accusation de nous présenter leurs

25 commentaires et leurs questions concernant la présentation tardive d'un

Page 12395

1 document du mois de janvier 1992. Avant de prendre notre décision, selon

2 la demande de la défense, qui concerne trois autres documents dans

3 lesquels la défense se plaint du non-versement au dossier de ces trois

4 documents en application de l'Article 65ter, nous espérons donc avoir la

5 réponse de la part de la défense. Je pense que c'est le droit des parties

6 de présenter leur point de vue.

7 Est-ce que la défense au cours de ces derniers jours a déposé des requêtes

8 adéquates ou bien l'accusation considère qu'il faudrait prononcer des

9 sanctions? Ce que nous considérerons comme une façon inadéquate de

10 procéder dans cette affaire. Vous êtes au courant de la requête dont je

11 parle, il s'agit surtout de la requête dont nous avons parlé hier. Nous

12 avons continué l'audience après la pause et nous avons continué à lire les

13 documents présentés par la défense vendredi dernier. Jusqu'ici, nous

14 n'avions pas eu le temps de le faire.

15 Le témoin ne pouvait pas les lire et la défense a dit, a considéré qu'il

16 n'était pas nécessaire que le témoin vienne de nouveau à La Haye et nous

17 en sommes reconnaissants. Nous devons voir de quoi il s'agit dans ces

18 documents qui sont pour le moment uniquement en BCS.

19 Je demande à Mme la greffière de décider la façon qui est la meilleure

20 pour présenter ces documents au prétoire. Il faut les lire peut-être dans

21 le prétoire, que les interprètes les lisent dans les cabines, lentement.

22 Ou bien les documents seront lus en audience publique dans le prétoire, ou

23 bien pour ménager un peu les interprètes, il vaut mieux peut-être que ces

24 documents soient lus à huis clos partiel.

25 Ce sont les trois possibilités, mais nous devons le faire aujourd'hui.

Page 12396

1 Pendant la pause, la Chambre de première instance va décider là-dessus

2 selon les points de vue des deux parties.

3 Mme Korner (interprétation): Avant de faire la pause, je voudrais encore

4 rajouter quelque chose et continuer d'en parler après la pause aussi. Est-

5 ce que vous avez vu la copie de la requête de l'accusation qui a été

6 adressée à la Chambre I quand il s'agit de Mme Plavsic?

7 M. le Président (interprétation): Est-ce que je peux vous poser la

8 question suivante? Est-ce que vous avez reçu le document qui a été adressé

9 à notre Chambre de première instance et adressé par le conseil de la

10 défense de Mme Plavsic, dans lequel il a été dit qu'il n'accepterait pas

11 le témoignage de Mme Plavsic dans cette affaire avant qu'une peine ne lui

12 soit prononcée?

13 Mme Korner (interprétation): Non, nous n'avons pas reçu ce document, cette

14 requête. Non. Enfin, oui, nous l'avons reçue, mais il y a quelque chose

15 qui provient de ce scénario et je voudrais parler de cela après la pause.

16 M. le Président (interprétation): Je pense que cela est nécessaire parce

17 que cette affaire, en tout cas, ne finira pas le 21 mars: il y aura donc

18 les répliques et les dupliques après, ensuite les mémoires de clôture. Il

19 est probable que la sentence sur la peine dans l'autre affaire sera

20 prononcée avant la présentation des arguments finaux dans cette affaire.

21 Mme Korner (interprétation): Mais ce n'est pas le sujet dont je voudrais

22 parler. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si vous avez vu ce que

23 l'accusation a dit dans l'affaire concernant Mme Plavsic. Cela pourrait

24 nous aider pour résoudre et pour déterminer les mesures à prendre dans

25 cette affaire.

Page 12397

1 M. le Président (interprétation): Nous allons parler de cela après la

2 pause.

3 M. Ostojic (interprétation): Je veux dire que nous n'avons pas reçu la

4 copie de la requête de la salle d'audience I. Nous vous serions

5 reconnaissants de nous communiquer cela.

6 M. le Président (interprétation): Nous allons communiquer cela à la

7 défense, mais nous suspendons l'audience et nous allons continuer et

8 reprendre à 15 heures 30.

9 (L'audience, suspendue à 15 heures 01, est reprise à 15 heures 39.)

10 M. le Président (interprétation): Avant que nous ne commencions, j'ai

11 l'impression que le système de climatisation ne fonctionne pas comme

12 d'habitude aujourd'hui. Il fait extrêmement chaud dans ce prétoire. Peut-

13 être que les services techniques pourraient vérifier que tout fonctionne

14 bien. Je vous remercie.

15 A la suite de nos délibérations pendant la suspension d'audience, la

16 Chambre de première instance a décidé que, sur la base des conclusions

17 présentées par l'accusation, il est inutile d'entrer dans une nouvelle

18 délibération ou de nouvelles délibérations ou de discuter de questions

19 juridiques. Ceci n'aurait de sens que si les deux parties étaient

20 disposées dans le même sens à vraiment discuter de ces questions

21 juridiques à l'audience.

22 Pour les mêmes raisons, la Chambre de première instance s'abstiendra de

23 donner une quelconque allusion ou incitation à caractère judiciaire à

24 l'avenir. Je pense que, si elles n'étaient pas judiciaires, c'étaient tout

25 au moins des allusions suffisantes par rapport aux conclusions des

Page 12398

1 parties, pour prévenir la présente Chambre de première instance que nous

2 devons faire preuve de davantage de retenue encore que par le passé, de

3 façon à ne pas mettre en danger la procédure en l'espèce. Nous déplorons

4 cette évolution parce que nous ne voyons pas d'autre possibilité.

5 Passons maintenant au point suivant. Au cours de la suspension, nous avons

6 appris qu'il faudrait davantage de temps et qu'il ne serait pas possible

7 avant 16 heures 30 de donner lecture des documents. Il est aisé de

8 comprendre que les interprètes ont besoin de temps pour se préparer pour

9 que ces documents puissent être lus. Par conséquent, ils ne seront prêts

10 dans une lecture à haute voix que demain matin en commençant à 9 heures.

11 La question suivante qui se pose est là encore de savoir ce qu'il en est

12 en ce qui concerne les témoins, quels témoins vont venir. Nous avons

13 appris aujourd'hui, aujourd'hui même, que les deux témoins qui étaient

14 envisagés n'avaient pas de visa. Par conséquent, il semble douteux même

15 qu'ils puissent arriver vendredi ou lundi. Et si vous êtes en mesure de

16 nous donner des renseignements meilleurs, ceci serait utile.

17 M. Ostojic (interprétation): C'est la première fois, Monsieur le

18 Président, que nous entendons dire qu'il est douteux qu'ils pourraient

19 arriver vendredi ou lundi. Nous avions l'impression que tout au moins le

20 témoin 006 serait en mesure d'arriver tard vendredi ou vendredi après-midi

21 selon le cas. De sorte que nous les attendons. Nous pensons qu'ils seront

22 là sinon vendredi au moins samedi et qu'on pourra à ce moment-là, selon

23 les ordonnances de la Chambre, poursuivre la semaine prochaine. Nous

24 vérifierons doublement ceci et nous informerons demain matin la Chambre

25 sur cette question.

Page 12399

1 M. le Président (interprétation): Nous avons pris en considération le fait

2 que, pour obtenir un visa, il faudrait cinq jours ouvrables. Veuillez

3 donc, s'il vous plaît, nous faire savoir, pas plus tard que demain matin,

4 ce qu'il va se passer vendredi et lundi prochain.

5 En plus,…

6 M. Ostojic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

7 M. le Président (interprétation): Indépendamment des vidéoconférences -et

8 nous nous rendons compte que le conseil de la défense et que Mme Dahuron

9 sont prêts à la fois à travailler les week-ends prochains et les semaines

10 qui suivent pour recueillir des déclarations au titre de l'Article 92bis

11 sur place-, la question finale est de savoir comment il y a lieu de

12 réagir, la défense ayant déjà présenté des excuses de ne pas s'être

13 acquittée de ses obligations en faisant comparaître ses témoins cette

14 semaine.

15 Nous avons eu ce problème avec également le dépôt, qui n'était en règle,

16 d'une demande visant à désigner un officier instrumentaire pour recueillir

17 les déclarations au titre de l'Article 92bis. Ceci n'a rien à voir avec ce

18 que contiennent les directives visant à recueillir les déclarations au

19 titre de l'Article 92bis du Règlement.

20 Et, en outre, en dépit de notre ordonnance sur la manière de procéder,

21 nous n'avons même reçu de requête demandant que soient admis des témoins

22 supplémentaires au titre des dispositions de l'Article 73ter)D). Là

23 encore, il a fallu du temps afin que l'on puisse procéder en se basant sur

24 un examen de la liste des victimes et de l'appendice 1 à la requête

25 présentée par la défense. Ayant à répondre à la question de savoir si, oui

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1 ou non, le moment était venu de prendre des sanctions, je dois donner le

2 droit… accorder le droit d'être entendue à l'accusation sur cette

3 question.

4 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, nous n'avons aucune

5 observation du tout à faire sur ce sujet. Nous considérons que c'est une

6 question qui relève entièrement de la Chambre de première instance et non

7 pas de nous.

8 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

9 Alors, comme je l'ai dit, c'est un droit et non pas une obligation de

10 faire des commentaires sur cette question. Nous en avons discuté au cours

11 de la suspension et je crois que nous estimons que nous allons tenir la

12 défense à ce qu'elle a dit et, comme nous l'avons fait dans l'autre sens

13 dans le passé, nous laissons les choses à ce stade à l'avenir en donnant

14 un avertissement très grave, afin qu'elle s'acquitte de ses obligations en

15 vertu du Règlement à l'avenir et nous n'accepterons pas de nouveau retard,

16 à moins qu'un tel retard puisse être pleinement justifié. Nous savons

17 tous, évidemment, que des choses peuvent se passer qui ne sont pas

18 prévisibles. Mais en principe, nous avons déjà des délais pour les résumés

19 des déclarations.

20 Nous avons ordonné quel était le nombre de témoins qui devaient être cités

21 au cours des quatre semaines à venir et nous nous attendons à ce que vous

22 vous acquittiez pleinement de ce qui a été indiqué dans ces ordonnances.

23 Dans la négative, alors, malheureusement, il sera nécessaire de revenir et

24 de réexaminer cette question.

25 Un point supplémentaire, ceci a été évoqué par l'accusation. Je voudrais

Page 12401

1 savoir s'il y a des observations complémentaires de votre côté, lorsque

2 que nous commencerons la discussion relative à l'audition de Mme Biljana

3 Plavsic.

4 Mme Korner (interprétation): Monsieur le Président, puis-je demander à ce

5 que nous allions à huis clos partiel?

6 M. le Président (interprétation): Veuillez, s'il vous plaît, entrer en

7 audience à huis clos partiel.

8 (Audience à huis clos partiel à 15 heures 48.)

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7 (Audience publique à 16 heures 23.)

8 M. le Président (interprétation): Pourrais-je entendre les

9 commentaires de la défense concernant cette question? Nous pourrons

10 décider et statuer sur les quatre documents dans la même décision.

11 M. Ostojic (interprétation): La défense n'a rien à ajouter relativement

12 aux documents qui "supposément" portent la signature du docteur Stakic,

13 outre le fait que nous avons déjà exprimé nos opinions à la Chambre

14 préalablement.

15 Concernant les trois documents qui restent, nous maintenons la même

16 position qui a expliqué notre requête. Ce document devrait être exclu du

17 dossier, car nous avons déjà évoqué une raison dans nos écrits. Comme vous

18 le savez au paragraphe 1, je crois, point 27 du quatrième Acte

19 d'accusations modifié, on parle de "co-conspirateur, coauteur de crime de

20 cette entreprise criminelle conjointe".

21 Maintenant un document qui nous a été produit et qui n'a pas fait l'objet

22 d'une fouille scannée, que ce n'est qu'un document qui a été produit de

23 façon manuelle, nous estimons qu'il y a d'autres documents qui sont des

24 "coauteurs" dans la théorie du dessein criminel conjoint.

25 Maintenant lorsque ces documents nous ont été remis, c'était pour des

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1 raisons stratégiques. Nous estimons que le fait que ces documents aient

2 été présentés a causé un préjudice important à la défense, et nous

3 estimons que ces documents continuent à créer un préjudice à la défense.

4 Nous vous soumettons donc respectueusement de façon verbale de biffer ce

5 témoignage et toute référence à ces documents et de rejeter ou de ne pas

6 approuver que l'on verse ces documents au dossier.

7 M. le Président (interprétation): Je vais vous donner un avis judiciaire,

8 si vous voulez, si vous le permettez, quant à cette question de procédure,

9 car il ne s'agit que d'une question de procédure pour vous, bien sûr.

10 Conformément au Règlement de procédure et de preuve, il se pourrait que

11 seul l'Article 95 présente une justification pour l'inclusion de certains

12 éléments de preuve, et nous n'avons plus rien dans votre requête qui

13 entrait sous le pli de 95… de l'Article 95. Maintenant quant à savoir si

14 le document a été admis en application de l'Article 65ter, c'est

15 complètement autre chose.

16 M. Ostojic (interprétation): Monsieur le Président, je crois que cela nous

17 cause préjudice. Il s'agit de documents critiques, je ne veux pas que cela

18 devienne une pratique plutôt que de retirer ou de ne pas verser au dossier

19 des documents critiques, mais il me semble que ces documents allèguent le

20 fait qu'il y a un dessein criminel conjoint. Ils identifient les coauteurs

21 par nom et par titre. Et ce faisant, l'accusation n'a pas emmené d'autres

22 éléments de preuve sur la théorie des coauteurs et leur recherche… leurs

23 enquêteurs ont produit des documents. Et ces documents auraient été signés

24 "supposément" par un coauteur. C'est très important.

25 La défense a demandé que ce document ne soit pas produit. Nous maintenons

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1 que ces documents auraient dû être produits. Ils n'ont pas été produits,

2 mais ils ont causé un préjudice important à la défense et nous disons

3 ouvertement que nous avons bien hâte d'entendre nos experts et que plus de

4 documents seront trouvés et leur seront présentés lors du contre-

5 interrogatoire.

6 S'agissant de tous les documents, est-ce que nous les avons sur la base de

7 leur plainte et de l'Acte d'accusation ou n'avons-nous pas tous les

8 documents? Nous estimons que si tous les autres documents sont produits,

9 outre les documents dont nous avons déjà parlé, j'ai l'impression qu'il

10 faudrait ou je vous demande plutôt s'il ne faudrait pas verser ces

11 documents au dossier en tant qu'éléments de preuve.

12 Nous comprenons la pratique de produire des documents qui pourraient soit

13 récuser le témoin soit tester la crédibilité du témoin, mais produire un

14 document émanant d'une tierce partie sur une question que nous sommes en

15 train de débattre lors de la présentation des moyens, lors d'audition de

16 cette affaire depuis des mois, nous estimons que c'est une pratique qui ne

17 devrait pas être adoptée et permise… je veux dire adoptée et permise. Et

18 sous l'Article 95, notre demande va au-delà de l'Article 95. Et nous

19 voulons, bien sûr, nous assurer qu'il n'y a aucun préjudice causé au

20 client et que l'on procède à un procès juste et équitable.

21 J'ai l'impression qu'il s'agit ici de tactique de surprises, d'embuscades

22 qui nous sont tendues à tous les recoins. Et on ne veut pas dire à ces

23 adversaires quels sont les éléments de preuve et lesquels ne le sont pas.

24 Et nous avons l'impression que ce document tombe justement dans le cadre

25 de ces embuscades et de ces pièges qui nous sont tendus à tout bout de

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1 champ.

2 Si une partie présente des éléments de preuve qui, d'une certaine façon,

3 permettent à l'adversaire de réfuter leur existence ou s'il s'agit de

4 documents de fraude ou de documents qui ont été… qui sont semblables, dans

5 ce cas-ci, nous avons un document qui a été produit dans d'autres affaires

6 sous la théorie que le Bureau du Procureur appuie depuis bien longtemps,

7 c'est qu'ils ont produit des documents deux mois avant la fin de la

8 présentation des éléments.

9 Nous estimons que si ces documents sont admis, cela pourrait causer un

10 préjudice pour la conduite d'un procès juste et équitable pour le docteur

11 Stakic.

12 Mme Korner (interprétation): Il y a deux questions que je souhaite

13 soulever. Monsieur le Président, nous avons tout à fait bien compris que

14 nous avons toujours en notre possession un document signé par le docteur

15 Stakic. Et clairement, il est certain que nous souhaiterions présenter ce

16 document afin de faire une analyse d'écriture.

17 Maître Ostojic, deuxièmement, se plaint que nous ne montrons pas tous les

18 documents. Nous avons permis à Me Lukic et à Me Ostojic d'examiner tous

19 les documents. Il y a des centaines et des centaines de documents et ils

20 ont pu les examiner en vertu de l'Article 66B). Ils ont refusé. Ils n'ont

21 pas accepté de le faire. Et quand il s'agit de documents qui ont trait à

22 cette chose particulière, le Procureur doit faire une sélection des

23 documents qu'il considère appropriés, pertinents.

24 Maintenant, si la défense appelle des témoins qui soulèvent des questions

25 qui n'ont pas été abordées ou, par exemple, pour lesquelles on ne

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1 s'attendait pas que le témoin était démis de ses fonctions dans l'armée,

2 etc., eh bien, à ce moment-là, j'ai l'impression qu'il ne s'agit pas

3 d'embuscade. Une embuscade, c'est lorsque quelqu'un ne présente pas de

4 façon délibérée des documents pour lesquels, par exemple, nous saurions

5 que cela pourrait impliquer l'accusé dans les infractions.

6 Nous ne savions pas quel témoin serait appelé. Nous ne savions pas sur

7 quoi allaient témoigner les témoins juste avant d'ouvrir la bouche. Donc,

8 Monsieur le Président, il est tout à fait inexact de dire que nous sommes

9 en train de tendre des pièges à la défense.

10 M. le Président (interprétation): Nous statuerons là-dessus le plus tôt

11 possible.

12 Avant de clore la session d'aujourd'hui, il faut se poser une dernière

13 question: c'est de savoir si nous avons besoin de deux journées

14 supplémentaires. Est-ce qu'il y aurait un problème pour changer l'horaire?

15 Est-ce que l'on pourrait se rencontrer, pourrait-on avoir une session, une

16 audience le 7 mars, vendredi le 7 mars? Il ne faut pas oublier qu'il nous

17 reste encore 15 témoins de vive voix.

18 Mme Korner (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.

19 M. Ostojic (interprétation): Pas d'objection, Monsieur le Président.

20 M. le Président (interprétation): Eh bien, je demanderai à Mme la

21 greffière s'il est possible de poursuivre les auditions vendredi, le 7

22 mars.

23 Et en dernier lieu, il m'incombe à vérifier la chose suivante: suite aux

24 plaintes formulées par le conseil de la défense, je souhaiterais

25 m'adresser au docteur Stakic personnellement.

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1 Y a-t-il quelque plainte que vous souhaitiez formuler concernant le centre

2 de détention pénitentiaire? Y a-t-il des problèmes que vous souhaiteriez

3 évoquer devant le Tribunal? Avez-vous des problèmes de dos?

4 A chaque fois que vous revenez tard au centre pénitentiaire, j'avais fait

5 une l'ordonnance pour que l'on puisse vous permettre de respirer l'air

6 frais et d'avoir un repas chaud. Y a-t-il eu des problèmes là-dessus? Est-

7 ce qu'on ne respecte pas cette ordonnance?

8 M. Stakic (interprétation): Monsieur le Président, la semaine dernière, il

9 n'y avait pas d'audience. J'étais bien heureux, car j'ai pu en profiter

10 pour me reposer. Cela a confirmé mes affirmations qu'il ne s'agit que d'un

11 épuisement. Et c'est l'épuisement qui s'avère être un problème. Quinze

12 jours plus tard, un médecin est venu me voir, il s'agit du médecin du

13 centre pénitentiaire... ou plutôt cinq à six jours plus tard, un médecin

14 est venu. Et l'un des employés du centre pénitentiaire m'a informé que

15 j'avais le droit de demander que je puisse sortir et respirer l'air frais

16 à l'extérieur des heures habituelles. Je n'aurai donc pas d'autre plainte

17 à formuler pour l'instant.

18 En fait, pour ce qui est de transport et du transfert, j'estime que c'est

19 arrivé ce jour-là et que ça ne se reproduira plus.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie de nous avoir apporté

21 ces commentaires, Docteur Stakic.

22 S'il n'y a pas d'autres questions sur lesquelles nous devrions parler

23 aujourd'hui, l'audience est levée et nous allons continuer demain à 9

24 heures.

25 (L'audience est levée à 16 heures 36.)