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1 (Vendredi 11 avril 2003.)
2 (L'audience est ouverte à 9 heures 33.)
3 (Audience publique.)
4 (Matières relatives aux éléments de preuve.)
5 M. le Président (interprétation): Bonjour à tous. Veuillez vous asseoir.
6 Madame la Greffière d'audience, voulez-vous appeler la cause.
7 Mme Dahuron (interprétation): Bonjour. C'est l'affaire IT-97-24-T, le
8 Procureur contre Milomir Stakic.
9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
10 Qui représentent les parties pour l'accusation?
11 M. Koumjian (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Monsieur
12 Koumjian avec Ruth Karper, assistés par Ann Sutherland.
13 M. le Président (interprétation): Bonjour. Pour la défense?
14 M. Lukic (interprétation): Branko Lukic et Me Ostojic, pour la défense.
15 M. le Président (interprétation): Bonjour. Tout le monde peut voir que Me
16 Ostojic a travaillé dur pendant les dernières semaines.
17 Avant que nous n'entrions dans les détails de l'appréciation finale de ce
18 que nous avons entendu au cours de l'année écoulée, suivant les règles de
19 la logique, malheureusement, il faut que l'on revienne brièvement à des
20 questions de preuve. Sinon, comment pourrions-nous apprécier des preuves
21 si nous ne savons pas ce qui est présenté comme preuve.
22 Je suis extrêmement reconnaissant que Mme la Greffière ait préparé tous
23 les documents nécessaires pour nous permettre de voir ce qui nous manque,
24 et pour parler des pièces d'abord voulues par la Chambre.
25 Nous sommes conscients du fait que la Constitution de la République
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1 socialiste de Bosnie-Herzégovine du 25/1974 n'a pas encore été versée au
2 dossier. La suggestion est de la verser au dossier comme pièce J34.
3 Y a-t-il d'objection?
4 Pas d'objection.
5 Le document est versé au dossier.
6 M. Lukic (interprétation): Pas d'objection.
7 M. le Président (interprétation): Donc c'est versé au dossier.
8 Ensuite des éléments de preuve présentés par l'accusation: le document SA,
9 c'est une vidéo. Je mentionne le nom: c'est la vidéo Muharem -j'ai vu ce
10 film 4 ou 5 fois à la télévision ou au cinéma-, Muharem Reza.
11 Je voulais demander si l'accusation est d'accord pour que le mot
12 "confidentiel" soit expurgé, soit supprimé.
13 M. Koumjian (interprétation): Pourrais-je répondre en séance privée.
14 M. le Président (interprétation): Oui, passons en séance privée.
15 (Audience à huis clos partiel à 9 heures 36.)
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24 (Audience publique à 9 heures 42.)
25 M. le Président (interprétation): Madame la Greffière, est-ce que vous
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1 pourriez m'aider avec cela? Il s'agit donc du S-15, pardon S15-18. Je
2 crois que vous m'avez dit que c'était le 142-8. Est-ce exact?
3 (La Greffière d'audience s'entretient avec le Président.)
4 Le document S15-18 doit recevoir une nouvelle cote: la cote 162/8.
5 Alors, en ce qui concerne le document S430, nous attendons le texte
6 définitif de la traduction qui doit nous être fourni par le Bureau du
7 Procureur.
8 M. Koumjian (interprétation): Nous avons dit qu'elle serait disponible
9 aujourd'hui ou lundi.
10 M. le Président (interprétation): En tout état de cause, il faut que ce
11 soit avant jeudi, c'est la date butoir, parce qu'à ce moment-là nous
12 pourrons conclure si nous avons tous les documents nécessaires.
13 Maintenant, passons aux pièces présentées par la défense.
14 Les documents D114 D115 font encore défaut. Ni l'accusation ni la Chambre
15 n'ont pu se les procurer. Si la défense avait un autre exemplaire de ces
16 documents, nous serions reconnaissants.
17 M. Lukic (interprétation): Est-ce que nous pourrions fournir les documents
18 à la Chambre et au Bureau du Procureur au cours de la suspension
19 d'audience?
20 M. le Président (interprétation): Vous avez jusqu'à lundi. Simplement, il
21 est précisé que nous n'avons pas encore ces documents, n'est-ce pas?
22 M. Lukic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.
23 M. le Président (interprétation): Question maintenant plus grave. Nous
24 avons les documents qui vont de D264 jusqu'à D276, même 277. Ce sont des
25 documents qui concernent des casiers judiciaires concernant les personnes
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1 concrètes ou des rapports médicaux concernant des personnes déterminées.
2 Pour des raisons de protection des données, je voudrais demander aux
3 parties si elles peuvent être d'accord que ces documents soient traités
4 comme étant déposés sous scellés.
5 M. Lukic (interprétation): Oui, Monsieur le Président, nous sommes
6 d'accord.
7 M. Koumjian (interprétation): Oui, Monsieur le Président, nous sommes
8 d'accord.
9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
10 Le document n°305: il devrait y avoir une traduction qui serait fournie
11 par le Bureau du Procureur.
12 Le numéro du document au titre de l'Article 65ter du Règlement serait le
13 543.
14 M. Koumjian (interprétation): La traduction est faite, et nous nous
15 efforcerons de vous la fournir aujourd'hui ou lundi, Monsieur le
16 Président.
17 M. le Président (interprétation): Si l'on suit ce qui a été dit par la
18 Greffière d'audience, le document D309 n'a pas encore été versé au
19 dossier; c'est l'un des nombreux documents présentés le 1er avril 2003.
20 Mme Dahuron (interprétation): C'est le numéro 309, au titre de l'Article
21 65ter, Monsieur le Président.
22 M. Koumjian (interprétation): Nous n'avons pas d'objection.
23 M. le Président (interprétation): Donc le document est versé au dossier.
24 Et la cote sera?
25 Mme Dahuron (interprétation): Ce sera le document D318, A et B.
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1 M. le Président (interprétation): En ce qui concerne le document D314, la
2 défense a promis de nous fournir une traduction.
3 (Le Président reçoit un document.)
4 Celui-ci serait le document D14-A.
5 Alors ceux qui n'ont pas été versés au titre de l'Article 65ter, c'est le
6 numéro 527. Voyons de quoi il s'agit.
7 M. Koumjian (interprétation): Nous n'avons pas d'objection à l'encontre de
8 ce document. J'ai devant moi une brève description de ce document.
9 M. le Président (interprétation): La même chose est vrai pour nous. Dans
10 le compte rendu, on peut voir que Me Lukic a déclaré que "nous l'avons
11 reçu du Bureau du Procureur, nous ne savons pas quelle en est la source,
12 l'origine".
13 Alors nous avons une description, nous savons ce dont il parle. Par
14 conséquent, le document est versé au dossier selon la cote disponible qui
15 serait…?
16 Mme Dahuron (interprétation): D319 A et B, Monsieur le Président.
17 M. le Président (interprétation): Et finalement le numéro 565, au titre de
18 l'Article 65ter; on peut voir la discussion, le débat concernant cette
19 transcription, ce compte rendu à la page 14982.
20 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai pas ce
21 document. J'adopterai la position que nous avons adoptée précédemment. Je
22 n'ai pas de description de ce document à portée de la main; je ne suis pas
23 sûr de la date de ce document ou ce dont il traite. Apparemment, il est
24 question de prisonniers de guerre et de déserteur, mais, d'une façon
25 générale, ce n'est pas pertinent. Je ne pense pas que cela puisse être
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1 dommageable, donc il n'y a pas d'objection très vigoureuse.
2 M. le Président (interprétation): Cela fait partie d'un mémorandum, le
3 manuel de la JNA.
4 M. Koumjian (interprétation): Il n'y a aucune objection.
5 M. le Président (interprétation): Donc ceci est versé au dossier et la
6 cote sera?
7 Mme Dahuron (interprétation): D320, Monsieur le Président.
8 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
9 Y a-t-il d'autres documents que vous pouvez repérer d'après la liste et
10 qui, selon vous, seraient manquants?
11 Mme Dahuron (interprétation): Non, Monsieur le Président.
12 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Donc ceci conclut
13 l'examen des pièces présentées et l'intention est donc que, s'il n'y a pas
14 d'objection, nous entendrons aujourd'hui le réquisitoire final de
15 l'accusation.
16 Il a été convenu entre les parties précédemment que nous intervertirions
17 la séquence qui est prévue par le Règlement et que nous entendrions
18 d'abord les plaidoiries et les conclusions. Ensuite que les mémoires en
19 clôture seraient déposés et finalement, après la date à laquelle les
20 mémoires en clôture sont prévus, les parties auraient le droit de répondre
21 brièvement mais en se limitant uniquement aux arguments, aux moyens
22 juridiques comme ceci est envisagé dans l'ordonnance portant calendrier.
23 Pourrais-je demander à la défense, est-ce que mon appréciation est juste?
24 Vous avez besoin seulement d'une journée pour présenter votre plaidoirie
25 finale. Ce serait lundi?
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1 M. Ostojic (interprétation): C'est bien cela, Monsieur le Président.
2 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Maintenant une
3 question que j'adresse aux deux parties.
4 Est-ce qu'il est exact de considérer que, selon toute probabilité, on peut
5 s'attendre à la réplique et la duplique et peut-être des questions
6 supplémentaires pour les témoins pendant une journée de plus ou est-ce que
7 vous pensez que nous aurons besoin de davantage de temps, non seulement
8 pour se préparer mais pour une meilleure planification?
9 M. Koumjian (interprétation): Je suppose que ça pourrait prendre une
10 journée, mais je vois que la Chambre pense réserver davantage et ceci
11 pourrait être une bonne précaution puisque je m'attends à une journée
12 nécessaire pour la réplique et la duplique.
13 M. Ostojic (interprétation): Ceci semble raisonnable, Monsieur le
14 Président.
15 M. le Président (interprétation): D'accord. Et donc ceci dépend bien
16 entendu de savoir combien de questions suivront, qui seront posées par les
17 membres de la Chambre.
18 Mais, comme on l'a dit précédemment, avant que l'on puisse clôturer
19 l'audience, l'accusé jouit du droit d'avoir le dernier mot, ce qui, bien
20 entendu, n'a rien à voir avec les éléments de preuve, mais ceci à trait au
21 fait que, si le docteur Stakic le désire, il peut s'adresser à la Chambre
22 et ce qu'il veut déclarer, faire connaître ses appréciations de la période
23 qui s'est écoulée depuis son arrestation en mars 2001. Et plus
24 particulièrement s'il veut nous dire ses commentaires en ce qui concerne
25 le déroulement de cette affaire qui se déroule maintenant depuis une
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1 année, il a la possibilité de le faire, il lui est loisible de le faire.
2 Il aura la possibilité de s'adresser à nous.
3 Donc ceci clôt la phase de planification et le moment est venu maintenant
4 d'entendre les arguments en clôture de l'accusation. Donc je crois que
5 c'est à vous, Monsieur Koumjian.
6 (Réquisitoire de l'accusation.)
7 M. Koumjian (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président. Je
8 crois que l'on prévoit une suspension de l'audience à midi et demi pour le
9 déjeuner, donc peut-être pourrais-je avoir une suspension à un moment
10 donné entre les deux?
11 M. le Président (interprétation): Aujourd'hui, cette journée vous est tout
12 à fait consacrée, c'est donc vous qui déciderez, mais tenez compte du fait
13 que les enregistrements ont besoin de 90 minutes.
14 M. Koumjian (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.
15 Lorsque nous avons commencé ce procès il y a un an, vous vous rappellerez,
16 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, le premier témoin qui
17 a déposé. Et le dernier jour de sa déposition, on lui a demandé ce qu'il
18 avait à dire. C'était le premier témoin de Prijedor.
19 Il nous a dit: "Lorsque je parlais vendredi en mentionnant les noms de mes
20 amis, en mentionnant chacun des noms, je voyais dans mon esprit la
21 personne en question et après cela j'ai passé une nuit blanche. C'est
22 tellement épuisant et tellement douloureux que seule une personne qui a
23 traversé une épreuve pareille peut le comprendre. Si quelqu'un me
24 demandait si je retournerais là-bas, je dirai que ce sont les gens qui
25 constituent, les habitants qui constituent une ville et ces gens ne sont
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1 plus là. Je ne peux plus aller et venir dans Prijedor sans rencontrer
2 Nedzad Seric qui me salue en enlevant son chapeau, Osman Mahmuldin, M.
3 Sadikovic, Esad. Vous ne savez pas ce qu'il m'en coûte de ne pas pleurer
4 ici, ce que cela me coûte."
5 Monsieur le Président, ce procès -je tiens ici à la main l'un de nos
6 documents, l'une de nos pièces à conviction-, ce procès concerne ces gens
7 qui ne sont plus à Prijedor.
8 Nous avons entendu les noms d'un nombre pas très étendu de ces personnes
9 qui ont été mentionnées au procès et je pourrais probablement ne me
10 rappeler moi-même qu'un certain nombre de ces noms. Mais ce procès
11 concerne chacun d'entre eux. Il s'agit des victimes d'une campagne dont
12 nous pouvons voir d'après son ampleur qu'elle a été organisée, préméditée,
13 et qu'elle avait pour objectif de changer pour toujours les données
14 démographiques de Prijedor.
15 En seulement quelques mois, cette campagne a réussi à mener à bien son
16 travail. Dans cette affaire, il s'agit du rôle du docteur Stakic dans
17 cette campagne criminelle organisée; une campagne dont les éléments de
18 preuve ont démontré qu'il s'agissait d'une coordination qui impliquait
19 plusieurs personnes. Il y avait, ici, une coordination entre l'armée, la
20 police, le gouvernement civil, les autorités civiles de Prijedor. Le tout,
21 bien sûr, présidé par le docteur Stakic.
22 L'objectif de cette campagne était de changer à jamais la composition
23 ethnique de Prijedor.
24 Cette campagne deviendra un génocide, car cette campagne visait à détruire
25 la communauté croate et, plus particulièrement, la communauté musulmane
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1 qui était majoritaire à Prijedor.
2 Lors de cette campagne, vous le savez, Monsieur le Président, Madame et
3 Monsieur les Juges, outre des milliers de personnes -et dans ce livre, que
4 je tiens entre les mains, nous pouvons trouver le nom de ces personnes-;
5 des milliers de personnes ont été tuées et sont portées disparues.
6 La campagne s'est manifestée dans le fait que ces crimes ont été commis
7 pour s'assurer que cette communauté n'existait plus à Prijedor, en
8 détruisant systématiquement les demeures, les lieux religieux de ces
9 personnes. Cette campagne s'est manifestée en détruisant des parties
10 entières de municipalités qui, traditionnellement, étaient habitées par
11 ces groupes ethniques qui avaient une importance historique, telle Kozarac
12 et la vieille ville de Kozarac -le Stari Grad.
13 On a même tenté de dissimuler les corps des victimes, essayant de
14 s'assurer qu'il n'y aura aucune raison de retourner dans les demeures,
15 qu'il n'y aura même plus de lieux religieux, et qu'il n'y aura même pas de
16 cimetières ou de tombes pour ces personnes.
17 Mais, dans cette affaire-ci, il ne s'agit pas d'autre chose que de
18 comprendre qu'il ne s'agit pas d'une affaire ou d'une campagne menée
19 contre… ou cette affaire-ci ne vise pas à mettre la culpabilité sur les
20 Serbes de Bosnie. Nous avons entendu les témoignages de plusieurs Serbes
21 qui étaient de vrais héros, qui n'ont pas fait partie de cette campagne
22 systématique; qui ont même aidé leurs voisins, qui ont essayé de prêter
23 main forte aux Musulmans.
24 Nous avons entendu parler d'un Serbe, le docteur Mardanic, qui se trouvait
25 dans un hôpital et qui essayait d'aider tout le monde. Vous vous
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1 souviendrez de l'histoire du "témoin X" qui a souffert de façon terrible.
2 Cette personne a été trouvée par deux soldats serbes, ils ont agi en tant
3 que soldats. Mais nous n'avons jamais essayé de dire que chaque membre de
4 l'armée serbe était un criminel. Absolument pas! Nous avons entendu et
5 nous savons qu'il y avait des Serbes qui ont été animés par des motifs
6 nobles et qui ont agi en tant que vrais héros.
7 Nusret Sivac, lorsque la défense lui a posé la question de savoir ce qu'il
8 pensait de ces derniers, comment est-ce qu'il pouvait être ami encore avec
9 ces derniers, il a dit qu'il y avait énormément de Serbes qui sont très
10 bons; il y a des noms dont on ne peut même pas parler car c'est un peu
11 trop dangereux, même à ce jour. Des Serbes étaient tout à fait contre la
12 campagne de génocide et ont aidé leurs voisins de façon humaine.
13 Nous n'avons jamais essayé de dire que le docteur Stakic a agi seul. Une
14 campagne de cette étendue n'est pas menée à bien par un individu seul. Une
15 campagne de génocide exige une organisation, une coordination militaire et
16 politique, une coopération de ces instances. Nul besoin de dire qu'une
17 seule personne ne peut-être responsable de tout cela.
18 Nous ne voyons pas cela comme des éléments qui peuvent alléger la
19 culpabilité de l'accusé. Nous estimons que l'entreprise pénale commune est
20 très dangereuse. Dans plusieurs systèmes judiciaires, lorsque des
21 personnes ont agi de concert avec un groupe, les crimes sont sanctionnés
22 de façon encore plus forte, car la société reconnaît qu'un groupe qui agit
23 ensemble représente un danger beaucoup plus énorme que lorsqu'une personne
24 agit seule. Et, dans ce cas-ci, on peut arriver à des résultats bien plus
25 désastreux.
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1 Nous ne voulons pas prouver que cette entreprise criminelle commune
2 existait seulement à Prijedor. Il est tout à fait clair qu'il y a eu des
3 ordres et des instructions qui ont été transmis à Prijedor par le biais du
4 docteur Stakic la plupart du temps. Et ces ordres provenaient des
5 autorités militaires supérieures. Ces ordres ont été menés par des
6 personnes, des individus de Prijedor. Et lors de la présentation de nos
7 moyens à charge, nous nous sommes concentrés sur les événements qui se
8 sont déroulés dans cette municipalité.
9 Ce que notre affaire a pu démontrer, c'est qu'il y a eu une concertation
10 très proche entre les autorités civiles présidées par le docteur Stakic,
11 l'armée, s'agissant de la 43e Brigade et de la Brigade légère de Kozara,
12 dont le colonel Arsic se trouvait à la tête et plus tard le commandant
13 Zeljaja, et le poste de police ou le SUP à la tête de duquel se trouvait
14 Simo Drljaca.
15 Il ne s'agit pas ici de parler de frontière de la politique et de la
16 dissolution de la Yougoslavie. Cela n'a fait que dépeindre une toile de
17 fond sur une toile de fond qui nous explique ce qui est arrivé. Nous ne
18 sommes pas ici pour donner des explications aux questions politiques. Il
19 s'agit, ici, d'un Tribunal pénal qui ne doit pas décider sur la structure
20 constitutionnelle de la Bosnie-Herzégovine ni des frontières de ce pays.
21 Nous sommes ici parce que le Conseil de sécurité reconnaît que des crimes
22 affreux se sont déroulés en Bosnie, en 1993. Le Conseil de sécurité a
23 procédé à une résolution, la Résolution 827, et a été particulièrement
24 alarmé des infractions graves aux Conventions de Genève et du droit
25 humanitaire international. Il y a eu des preuves concernant le nettoyage
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1 ethnique qui consistait à violer des femmes, à tuer des personnes de façon
2 massive et de détenir ces personnes de façon systématique.
3 Le Conseil de sécurité a reconnu qu'il était absolument nécessaire de
4 mettre fin à ce genre de crime pour le bien de l'humanité, de la paix, et
5 de juger les responsables, les auteurs de ces crimes.
6 Ce Tribunal a été créé non pas pour des raisons politiques, mais pour
7 sanctionner les criminels; non pas parce que certains individus désiraient
8 vivre dans un Etat ou dans un autre, mais parce que la façon dont le tout
9 s'est déroulé à Prijedor, la façon dont on a procédé à Prijedor était une
10 entreprise criminelle.
11 On ne peut pas changer les frontières d'un pays en expulsant des personnes
12 qui vivaient dans leurs demeures depuis des générations. On ne peut pas
13 pousser les frontières en tuant de façon massive des personnes et en
14 détruisant toute une communauté qui, jusqu'à il n'y a pas longtemps,
15 vivait à cet endroit-là.
16 Nous savons que lors de la convention du SDS -je crois qu'il s'agissait de
17 la convention du 12 au 16 mai-, une conférence menée par l'assemblée serbe
18 de Bosnie Bosnie-Herzégovine, le docteur Karadzic a énuméré les 6
19 objectifs stratégiques.
20 Le premier objectif était la séparation des nationalités, des ethnies.
21 Nous voulons démontrer, nous avons essayé de démontrer de quelle façon cet
22 objectif a été mené à Prijedor et la façon criminelle, l'entreprise
23 criminelle par laquelle on a essayé d'arriver à ce but.
24 Je suis tout à fait certain, Monsieur le Président, que vous avez dû vous
25 poser la question suivante, et je me suis moi-même posé la question:
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1 pourquoi Prijedor représente le pire exemple de la campagne de nettoyage
2 ethnique de Bosnie-Herzégovine? Pourquoi Prijedor? Quelle est la
3 particularité de Prijedor?
4 Dans cette affaire, nous avons rencontré environ 90 personnes de Prijedor
5 et nous savons qu'il n'y a rien de non civilisé à Prijedor; il ne s'agit
6 pas de barbares à Prijedor. Nous savons très bien qu'il y a des gens
7 sophistiqués, des gens hautement humains. Pourquoi tant de cruautés ont eu
8 lieu dans cette ville? Pourquoi a-t-on procédé à tant de meurtres?
9 Pourquoi Prijedor a fait l'objet d'une campagne aussi brutale?
10 Je crois que la raison se trouve peut-être dans le fait que Prijedor était
11 un endroit où les gens, depuis si longtemps, depuis des années
12 s'entendaient et vivaient côte à côte et s'entendaient si bien.
13 Ceux qui voulaient séparer les nationalités, ceux qui voulaient créer la
14 haine et la division ont pu trouver un défi bien particulier s'agissant de
15 Prijedor. Car une tradition longue existait dans cette ville de bonne
16 entente et de mariage interethnique, d'amitié entre les groupes ethniques.
17 Les gens vivaient ensemble.
18 Prijedor était une ville bien connue dans l'ex-Yougoslavie pour cela,
19 s'agissant particulièrement… Elle a été très connue pour ce qui est de la
20 résistance durant la Deuxième Guerre mondiale. Nous avons déjà vu des
21 films sur Kozara. Nous savons que, lorsqu’Ante Markovic a lancé sa
22 campagne pour le Parti réformiste dans le but de préserver la Yougoslavie,
23 ce n'est pas tout à fait par hasard qu'il a choisi la ville de Prijedor
24 pour lancer cette campagne. Car Prijedor était vue, était perçue comme
25 l'un des modèles de fraternité, de l'unité et d'une existence paisible de
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1 personnes appartenant à divers groupes ethniques vivant ensemble et en
2 harmonie.
3 Et pour les individus qui avaient des idées nationalistes, Prijedor posait
4 un problème particulier, car, dans la région de la Krajina, nous savons
5 qu'en 1990, lors des élections, ce n'est que la ville de Prijedor, donc ce
6 n'est que dans la ville de Prijedor que les Musulmans avaient gagné assez
7 de sièges pour contrôler la ville et cela représentait un coup pour les
8 Serbes. Car, à travers tous les recensements qui avaient été menés, le
9 recensement de 1980 par exemple, les Musulmans avaient remporté le nombre
10 de sièges majoritaires à Prijedor.
11 Ensuite, en 1991, lors du recensement, il a été révélé que les Musulmans
12 avaient remporté le plus grand nombre de sièges et que 44% de la
13 population de la municipalité qui étaient serbes sont venus en deuxième
14 place, et que 5,6% étaient des Croates.
15 Prijedor s'est distinguée en Bosnie, et plus particulièrement en Krajina,
16 pour le fait que les partis non-nationaux avaient remporté le tiers des
17 sièges alors que, sur une base nationale, ces partis non-nationaux
18 n'avaient remporté que 10% de sièges.
19 Pour se débarrasser de cette communauté à Prijedor, il fallait détruire
20 non seulement les individus et les personnes qui pouvaient défendre et qui
21 pouvaient donner une résistance, mais il était également nécessaire de
22 cibler les personnes qui représentaient cette longue tradition de co-
23 existence où l'on s'entendait bien entre les ethnies, où l'on vivait en
24 harmonie et en paix.
25 Nous soutenons que, dans cette affaire, nous avons pu voir de façon
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1 tragique et ironique -mais je crois que c'était bien intentionnel- que les
2 personnes qui étaient les plus désireuses de promouvoir l'harmonie
3 interethnique étaient les personnes les plus visées.
4 Le docteur Stakic a joué un rôle crucial dans ces événements. Il était à
5 une position, il occupait la position la plus élevée. Le docteur Stakic
6 n'est pas… comme la défense a essayé de le démontrer très souvent, qu'il
7 s'agissait d'un jeune homme naïf et innocent à l'époque. Je trouve que
8 cela est ironique.
9 Il avait 29 ans, il était médecin. Et au même moment, le docteur Stakic
10 -d'après la défense- était un homme naïf, jeune.
11 La défense soutient que c'est le docteur Mirza Mujadzic qui a coordonné
12 tous ces actes haineux, ces actes abominables, alors qu'il avait 29 ans,
13 un an de plus le docteur Stakic. Le docteur Stakic n'a pas été emmené de
14 force dans la vie politique. Il a saisi l'occasion. Il a été très
15 ambitieux et il voulait avoir une carrière politique.
16 Nous savons qu'il a commencé sa carrière politique à Omarska-Maricka, qui
17 était son lieu de résidence. Il a été fondateur du Parti radical populaire
18 de Nikola Pasic, et à l'époque, au cours de l'année 1999, il est devenu le
19 premier président de ce parti.
20 Il était devenu assez clair lors des élections, ou au moment des élections
21 de 1990, que la force dirigeante des nationalistes serbes serait le parti
22 SDS. C'est à ce moment-là que le docteur Stakic, individuellement, et
23 s'agissant de son parti, a fusionné avec ce parti. Et, de cette façon-là,
24 il a pu se retrouver sur les feuilles de vote, les bulletins de vote du
25 parti SDS.
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1 Depuis 1990, depuis les élections qui ont eu lieu en 1990 jusqu'au moment
2 où il a été arrêté, il était bien clair ou il est bien clair qu'il était
3 membre du SDS. Son nom figure sur le bulletin de vote en 1990 pour le SDS.
4 Suite à l'élection et la division des postes, il a été élu vice-président
5 de l'assemblée municipale de la part du SDS.
6 Il a été élu le 11 septembre 1991 vice-président du parti du SDS et il a
7 reçu un certificat, une attestation que l'on peut lire au document S 94.
8 Il a remporté le plus grand nombre de votes lors de cette élection et il a
9 été élu vice-président.
10 Nous savons très bien qu'il a représenté le SDS auprès des autorités au
11 niveau de la République, les autorités les plus importantes. Il
12 participait aux réunions du conseil exécutif du SDS. Et, en 1996, il est
13 revenu dans le domaine politique. De nouveau, il a été élu président de
14 l'assemblée municipale de Prijedor avec l'appui du docteur Karadzic. De
15 nouveau il était membre du SDS.
16 Monsieur Kuruzovic lui-même était membre du SDS, et lui-même a bien été
17 étonné lorsque le conseil de la défense, Me Lukic, voulait savoir si le
18 docteur Stakic était dans le Parti radical; il en avait oublié les
19 détails.
20 Et pour ce qui est de toute la période couverte par l'Acte d'accusation,
21 depuis les élections de 1990, le docteur Stakic a fait partie du SDS. Il y
22 a un bon nombre de documents qui font état de ce fait. Et le docteur
23 Stakic, lorsqu'il a été arrêté, lors de la perquisition on a trouvé deux
24 documents: l'un des documents qui attestait qu'il était membre du SDS,
25 c'est un document qui a été trouvé sur lui lors de la fouille, lors de son
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1 arrestation. Il s'agit d'une carte de membre d'appartenance au SDS; il
2 s'agit de la pièce S235-12. Il y avait également d'autres cartes, tel le
3 document S235-21, tous ces documents d'identité qui ont été trouvés sur la
4 personne du docteur Stakic lors de son arrestation… nous avons trouvé des
5 cartes, une carte plus particulièrement qui atteste le fait qu'il était
6 encore membre du parti du SDS.
7 Dans le document S101, ce document nous démontre que le docteur Stakic est
8 élu pour représenter la ville de Prijedor auprès de l'assemblée de la
9 Région autonome de Krajina.
10 Le document S100 est un document qui nous montre que le docteur Stakic se
11 reportait au parti SDS de Prijedor. Et nous avons des éléments de preuve
12 attestant qu'il participait aux réunions au niveau du comité exécutif de
13 la République.
14 Le document S94 nous démontre que le docteur Stakic a été sélectionné pour
15 participer à la convention, au niveau de la République du SDS.
16 Madame Sutherland me dit qu'il s'agit du document S93; je ne suis pas tout
17 à fait certain, Monsieur le Président, de quel document précisément il
18 s'agit.
19 Plusieurs personnes ont décrit le docteur Stakic, ont décrit son
20 caractère. Nous savons, de par ces témoignages, que c'était un homme qui
21 ne parlait pas très fort, c'était un homme mesuré. Sa carrière, son
22 parcours était ambitieux. Et tous ces éléments nous permettent de croire
23 qu'il était très veillant (sic) lorsqu'il menait à bien les tâches, qu'il
24 participait aux réunions. Il voyageait énormément en direction de Banja
25 Luka. Et nous savons très bien qu'il y avait des personnes qu'il
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1 rencontrait dans son bureau tel M. Travar, par exemple, qui s'était
2 dirigée vers lui pour le rencontrer.
3 Il y a plusieurs éléments de preuve qui nous mènent à croire que le
4 docteur Stakic savait très bien de quoi il s'agissait, avait bien
5 connaissance des déroulements et de ce qui se passait, qu'il était
6 indépendant et qu'il détenait un vrai pouvoir s'agissant de sa position.
7 Je souhaiterais dire brièvement que nous avons beaucoup parlé dans cette
8 affaire du pouvoir juridique. Nous avons examiné des statuts émanant de la
9 municipalité, nous avons également consulté les décisions concernant la
10 formation de la cellule de crise. Mais, Monsieur le Président, Monsieur et
11 Madame les Juges, je vous demanderai de vous rappeler qu'il ne s'agit pas
12 d'un régime de droit. Nous parlons d'une époque qui était truffée de
13 conflits où les violations, les pires, survenaient. Et la loi n'était pas
14 du tout respectée. On se servait par moment de la loi pour légitimiser les
15 abuseurs de la loi. Chaque personne qui connaît les régimes totalitaires
16 sait très bien que les lois peuvent être changées. On change les lois, on
17 abuse de ces lois, et les autorités procédaient ainsi. Prijedor n'était
18 pas un endroit où l'on respectait la loi, le pouvoir provenait du pouvoir
19 politique et de fusils, et non pas par les mots qui se trouvent dans un
20 statut.
21 C'est surtout avec les canons des armes à feu qu'on assurait l'autorité,
22 non pas par les paroles des statuts. Nous savons tous que le docteur
23 Stakic était le président de la municipalité serbe, de l'assemblée
24 municipale serbe créée en janvier 1991; en témoignent les documents S6 et
25 S47 des pièces à conviction.
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1 Nous savons également qu'il a été le président d'une instance importante
2 en cette matière. Il était devenu également du président du conseil de la
3 défense nationale de Prijedor grâce, notamment, à la position qui était la
4 sienne. Nous savons également qu'il était à la tête d'une cellule de
5 crise, plus tard rebaptisée "présidence de guerre". De toute évidence, il
6 s'agit d'une même instance, d'un même corps composé des mêmes membres.
7 La majeure partie des crimes évoqués dans l'Acte d'accusation ont été
8 perpétrés lors de l'existence de cette cellule de crise, c'est-à-dire de
9 cette présidence de guerre. L'autorité de cette instance est le mieux
10 exprimé par le document S109, soit une décision portant formation d'une
11 cellule de crise de la Région autonome de Krajina, où il a été dit que "la
12 cellule de crise représente l'autorité la plus élevée de la municipalité".
13 Aux termes des statuts, et en vertu de la décision portant formation de la
14 cellule de crise, a-t-on pu lire dans le document S307, il s'agit
15 notamment d'une première décision qui a été publiée par le Journal
16 Officiel, soit pièce à conviction S180.
17 Cette cellule de crise, donc, a été formée -je cite-: "Pour défendre le
18 territoire de la commune, pour sécuriser la population et les biens, pour
19 établir l'autorité et permettre tout autre aspect de vie et de travail."
20 (Fin de citation.)
21 Il s'agit d'un mandat assez large qui, de toute évidence, présente des
22 autorités et responsabilités assez importantes. Or cette instance est
23 notamment responsable des crimes qui ont été commis.
24 L'article 5 de cette décision, tel que nous lisons, dit que "la cellule de
25 crise doit oeuvrer en accord avec l'estimation faite de la situation
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1 politique et de sécurité." (Fin de citation.)
2 L'article 6 souligne le rôle de la cellule de crise dans le domaine de la
3 défense de la commune.
4 Si nous nous penchons sur l'aspect légal statutaire de la décision portant
5 l'autorité dont bénéficiait le docteur Stakic en son pouvoir en tant que
6 président de l'assemblée municipale, en tant que président de la cellule
7 de crise, en tant que président du conseil national de la défense, nous
8 pouvons constater combien important fut son rôle.
9 Au début même de l'interview que le docteur Stakic avait accordée à Canal
10 4 fin décembre ou début janvier, probablement fin décembre 1992, on parle
11 longuement. Or, au cours de cette interview, le reporter se réfère à des
12 événements du début du mois de décembre, alors que le docteur Stakic
13 disait, lui, qu'il y avait plus de six mois depuis qu'il avait pris le
14 pouvoir.
15 Il s'agit, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, d'une
16 séquence que vous avez pu voir à plusieurs reprises, qui dure plus de 45
17 minutes. Au début même de l'interview il lui a été posé une question de
18 savoir si lui était le maire. Lui a dit oui. Il s'agit notamment de cela.
19 Nous savons que la cellule de crise de l'assemblée municipale, le conseil
20 national de la défense ne se seraient jamais réunis s'ils n'avaient pas
21 été convoqués par le président. En quoi consistait le rôle du docteur
22 Milomir Stakic qui en était le président? A savoir convier des gens à des
23 réunions.
24 Or les témoins qui étaient venus ici et qui étaient dans cette cellule de
25 crise ou dans le conseil national de défense, croyaient, eux, que le
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1 sentiment qui était le leur était le fait que toute convocation venait du
2 secrétaire, chose sous-entendue que la convocation n'était que l'acte du
3 président de façon indirecte. Et le rôle critique, je dirais, à cette
4 occasion-là, était notamment de mettre au point un ordre du jour,
5 déterminer les matières dont il a fallu discuter, etc.
6 Mais ceci n'a pas été discuté, c'était le docteur Stakic qui était
7 responsable de la mise en place de tel ou tel ordre du jour. C'est lui qui
8 les a déterminés pour de telles réunions.
9 A plusieurs reprises avons-nous demandé au témoin: pourquoi n'avez-vous
10 pas discuté des crimes? Pourquoi n'avez-vous pas traité des camps?
11 Pourquoi n'avez-vous pas parlé de disparitions de gens? Pourquoi n'a-t-on
12 pas parlé de cela à l'ordre du jour?
13 Et il a toujours été dit en réponse: "Ceci ne figurait pas à l'ordre du
14 jour. C'était le docteur Stakic qui en décidait pour parler de l'ordre du
15 jour".
16 Or, si vous regardez de plus près l'ordre du jour, tout ce qui était à
17 l'ordre du jour devait servir d'appui à la campagne dont nous parlions.
18 Très brièvement, vous allez voir dans quelle mesure on a pu parler, pour
19 parler de l'ordre de jour, de désarmement. Il s'agissait notamment de
20 parler de population visée qu'il a fallu déplacer ou détruire.
21 Nous allons voir donc comment se présentaient les ordres du jour de ces
22 différentes réunions présidées par le docteur Stakic.
23 Dans le document S187, soit séquence vidéo, le docteur Stakic disait qu'il
24 avait pour tâche de signer des décisions, ce que nous avons pu voir.
25 En effet, nous avons pu voir qu'il a signé lui-même la grande partie, la
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1 majeure partie des décisions émises par la cellule de crise. Or, pour ce
2 qui est des décisions publiées par le Journal Officiel, c'est-à-dire
3 décisions prises par la cellule de crise, nous pouvons voir qu'il
4 s'agissait là de décisions prises et signées par le docteur Stakic en main
5 propre.
6 Le docteur Stakic a présidé les travaux de ces réunions, comme il l'a dit
7 aux journalistes lors de sa réunion. En réponse à la question des
8 honorables Juges, M. Budimir a dit, page 12919 du compte rendu d'audience,
9 comme suit -je cite; je tâche de parler lentement pour que l'interprète
10 qui parle en français, qui me traduit, puisse me suivre-: "Monsieur Stakic
11 a présidé les travaux des réunions de la cellule de crise. C'était lui qui
12 a présidé les réunions, c'était lui qui canalisait les débats portant sur
13 ces différentes questions à l'ordre du jour des réunions." (Fin de
14 citation.)
15 Chacun des témoins présents à de telles réunions, venus pour déposer, nous
16 a dit cette même et unique chose.
17 Les témoins nous ont dit également, en déposant, comment les décisions
18 étaient prises. Il nous a été dit qu'il y a eu très peu d'aspect formel,
19 pas de mise aux voix; les décisions ont été formulées généralement par le
20 président, le docteur Stakic, lesquelles décisions ont été adoptées par
21 acclamations rares, étaient mises aux voix.
22 Monsieur Travar nous en a parlé, M. Budimir également. Je crois que M.
23 Kuruzovic nous en a parlé également.
24 Dans l'interview évoquée, le docteur Stakic a dit que sa tâche à lui
25 consistait à mettre en oeuvre les décisions prises par la cellule de
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1 crise. Nous savons bien que le rôle du président de la commune, de
2 l'assemblée municipale, devait être une fonction et consistait en une
3 fonction à temps plein. Certes, sans faire d'estimation quelconque, nous
4 pouvons présumer que l'assemblée municipale ne se réunissait pas
5 quotidiennement; peut-être une fois par semaine et plus rarement encore.
6 En tout cas, quelques rares qu'elles soient, les décisions des assemblées
7 municipales devaient être mises en œuvre, quelqu'un devait exister là pour
8 coordonner l'ensemble des activités; par conséquent quelqu'un qui devait
9 avoir une fonction à remplir à temps plein.
10 Nous savons très bien où les gens venaient le joindre. Nous savons très
11 bien que lui avait des réunions régulières. Les gens, à l'instar de M.
12 Travar –qui, lui, était à la tête d'un important échelon s'occupant de
13 l'économie de budget-, disaient que souvent ils allaient voir M. Stakic.
14 Pourtant, il est un autre rôle clé joué par le président de l'assemblée
15 municipale. Le président de la commune est donc quelqu'un qui est
16 considéré par l'opinion publique comme étant le représentant de l'autorité
17 civile.
18 La séquence vidéo, soit pièce à conviction S11, Zivko Ecim, avant de
19 présenter le docteur Stakic dit -je cite-: "Ce soir, nous avons parmi nous
20 le premier homme de la municipalité de Prijedor." (Fin de citation.)
21 Dans sa déposition, M. Beglerbegovic, docteur Beglerbegovic, soit page du
22 transcript 4084, a été demandé de dire s'il avait entendu parler beaucoup
23 de la cellule de crise. En ligne 11, nous lisons –citation-: "Oui, la
24 majeure partie des choses qui se sont produites, pour parler des positions
25 occupées par telle ou telle autorité, c'est toujours la cellule de crise
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1 qui en a été saisie. Pour toute proclamation, je dirais que les
2 proclamations étaient faites par la cellule de crise. Si jamais une
3 réunion politique devait être organisée, s'il devait être lancé un
4 avertissement public à des citoyens, la majeure partie des décisions
5 prises, à cette époque-là, une fois que la cellule de crise fut formée,
6 ont été notamment adoptées par la cellule de crise ou au nom de la cellule
7 de crise." (Fin de citation.)
8 Après quoi, une autre question lui a été posée –citation-: "Au cours de
9 l'année 1992, avez-vous jamais pu vous rendre compte que le nom du docteur
10 Stakic a été mentionné par les médias?"
11 Et le docteur a répondu –citation-: "Oui, à plusieurs reprises, et cela
12 par la radio, par la télévision. Toutes les fois où il y a eu des
13 événements importants, des réunions politiques, lui était partout présent
14 parce que c'était l'homme fort de Prijedor. Il était tout à fait logique
15 de le voir apparaître partout où de telles réunions devaient être
16 couvertes par les médias, par la presse, par la radio et la télévision.
17 Bien entendu, il s'y trouvait toujours en règle générale". (Fin de
18 citation.)
19 Monsieur Murselovic -nous devons nous en souvenir- a été le député du
20 Parti de l'initiative privée. Sa déposition figure à la page du compte
21 rendu d'audience 2693, ligne 7.
22 Lui dit –citation-: "Après la prise de contrôle, la cellule de crise, très
23 fréquemment, faisait publier des avertissements de la cellule de crise. Il
24 a été demandé aux Bosniens de remettre des armes. Il a été demandé
25 également de céder les positions de la TO prise par les Musulmans bosniens
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1 dans des villages. Tout simplement, moyennant de telles proclamations par
2 les médias locaux, la presse locale et la radio, de tels avertissements
3 devaient être publiés". (Fin de citation.)
4 Nous allons nous rappeler également la déposition de Ivo Atlija, de
5 Brisevo, qui a dit avoir rencontré une fois leur évêque catholique qui,
6 lui, était en voyage accompagné par M. Kupresanin. Or M. Kupresanin était
7 le président de l'assemblée de la Région autonome de Krajina. Brdjanin
8 était président de la cellule de crise, or Kurpesanin lui était président
9 de l'assemblée.
10 Monsieur Atlija, quant à lui, leur a demandé de l'aide. Il a demandé,
11 lisons-nous à la page 5647 du compte rendu d'audience -citation-: "Je leur
12 ai redemandé de nous aider pour que nous puissions quitter les lieux pour
13 aller n'importe où".
14 Or, page 5648 du compte rendu d'audience, M. Kupresanin lui aurait dit –
15 citation-: "Il nous a demandé de s'adresser à M. Stakic, président de
16 l'assemblée municipale de la commune de Prijedor." (Fin de citation.)
17 De même, savons-nous sous quel contrôle se trouvait -contrôle de
18 l'autorité civile-, se trouvait la presse de Prijedor. Nous nous sommes
19 rendus compte des réunions tenues par la cellule de crise et le conseil de
20 la défense national. Nous avons pu nous rendre compte du fait que tant de
21 gens de la presse locale de "Kozarski Vjesnik" et d'autres étaient
22 présents à de telles réunions.
23 Je me souviens, Monsieur le Président, que vous avez posé une question à
24 M. Kuruzovic au sujet des décisions prises par la cellule de crise quant
25 aux horaires de travail des gens employés par "Kozarski Vjesnik". Et la
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1 défense a dit: "Oui, mais est-ce que ce ne sont pas les autorités civiles
2 qui, dans le monde entier, ne s'occupent pas de fixer les horaires de
3 restaurants et d'autres établissements? Et ainsi n'en a-t-il pas été fait
4 à Prijedor." (Fin de citation.)
5 Bien entendu, partout dans le monde, les autorités sont censées fixer des
6 horaires de travail des établissements, entre autre des restaurants,
7 discothèques, disco-clubs, mais elles ne le font pas pour autant pour
8 fixer les horaires de travail de sociétés ou d'entreprises. Il est une
9 grande distinction à faire entre fixation des heures de travail d'un
10 établissement publique, qui lui pourrait ouvrir les portes grandes
11 ouvertes à ses clients pour dire, par exemple: "Voilà! Dans notre société,
12 les employés peuvent travailler pendant tant et tant d'heures."
13 Les gens employés dans le journal "Kozarski Vjesnik" voulaient aboutir à
14 un changement d'horaires de travail. Or, moi qui devrais le faire par
15 exemple et qui souhaiterais le faire, je devrais plutôt aller voir mon
16 chef. Eux, ils ont fait la même chose. Ils se sont rendus à la cellule de
17 crise pour demander la permission de modifier les horaires de travail qui
18 étaient les leurs.
19 Je pense qu'il est un autre aspect témoignant de la contribution faite par
20 le docteur Stakic à cette brutale et cruelle campagne. Serait-ce un peu
21 subtil d'en parler ainsi, mais il ne s'agit pas seulement de parler du
22 seul et unique rôle joué par quelqu'un pour contribuer à une telle
23 campagne.
24 Lui, à la différence de tous les autres qui ont été enrôlés, a été élu
25 lors des élections de 1990. Oui, c'est lui qui a été élu par l'assemblée
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1 municipale à la fonction de vice-président. Personne n'a élu président, or
2 il sera président une fois que le SDS prendra le contrôle de la ville.
3 Qui plus est, parmi la population serbe -chose importante pour la campagne
4 brutale menée à l'encontre des Musulmans et des Croates à leurs voisins-,
5 il a fallu convaincre les Serbes de Prijedor qui, eux, avaient déjà pris
6 l'habitude de vivre en cohabitation avec les Musulmans et les Croates, de
7 la nécessité de mener une telle campagne, c'est-à-dire que cette campagne
8 était correcte.
9 Il était donc nécessaire de convaincre ces gens-là de la légitimité de
10 l'autorité mise en place. En réalité, il ne s'agissait que d'une dictature
11 d'un seul parti, c'est-à-dire de la dictature du parti SDS. En la personne
12 du docteur Stakic, ont-ils trouvé la personne qui pouvait servir de
13 symbole, qui a été un élu, élu par l'assemblée municipale, et cette fois-
14 ci pour remplir la fonction de vice-président.
15 En outre, nous savons que le docteur Stakic, assumant le rôle du premier
16 homme de l'assemblée de Prijedor, de cette autorité civile, a joué un rôle
17 important pour représenter cette autorité auprès des organisations
18 internationales. Qui dit organisations internationales parle de
19 reporteurs, parle de ceux qui ont contribué à ce qu'on appelait "l'aide
20 humanitaire". Ils ne voulaient pas… ces derniers ne voulaient pas aller
21 voir Simo Drljaca ou Vladimir Arsic, ils voulaient voir le président de
22 l'assemblée municipale.
23 Nous avons pu apprendre tant sur la mission d'observation de la communauté
24 européenne à Prijedor. Ces gens-là également sont allés rencontrer le
25 docteur Stakic. Nous n'ignorons pas que ce dernier accordait des
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1 interviews -soit pièce à conviction S187-, interviews accordées à la
2 chaîne de télévision britannique 4. Ensuite une interview accordée à
3 Monika Gras, d'une chaîne de télévision allemande.
4 Je suis en train de parler maintenant d'interviews accordées par le
5 docteur Stakic à des mass médias étrangers. Nous savons très bien que lui
6 était notamment au beau milieu des événements. Il a pu rencontrer des
7 délégations à Prijedor. Le 5 août, il a pu rencontrer Penny Marshall ou
8 peut-être Ian Williams.
9 Nous savons très bien qu'il y a un document intéressant qui semble sortir
10 de l'ordre chronologique de l'Acte d'accusation. Il s'agit d'un document
11 qui prouve l'intérêt de tout cela, en relation avec les milieux
12 internationaux. Il s'agit du document S9.
13 Pourrait-on en obtenir un effet agrandi? Il s'agit notamment d'un élément
14 de cette pièce à conviction, soit un article, nous y reviendrons
15 -citation-: "Les prisonniers de Manjaca devraient être relâchés le 28
16 octobre". Il s'agit de l'Article de "Kozarski Vjesnik", soit pièce à
17 conviction S9.
18 Comme nous pouvons le lire dans ce paragraphe, ceci a été arrêté après que
19 les représentants de la Croix-Rouge internationale ont pu voir le docteur
20 Stakic et ses collaborateurs. Nous savons très bien que la majeure partie
21 de ces détenus prisonniers de Manjaca étaient venus de Prijedor.
22 La question était de savoir si ces derniers allaient êtres relâchés pour
23 être autorisés à rentrer dans Prijedor. Nous savons très bien, d'après les
24 dépositions de certaines gens qui s'y trouvaient, que l'accord auquel ils
25 étaient parvenus prévoyait que ces gens-là étaient autorisés à quitter la
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1 Bosnie par le truchement du territoire croate et sans plus jamais y
2 revenir. Manjaca, encore que prison militaire de la municipalité de Banja
3 Luka… D'après le docteur Stakic, représentant de la municipalité, je crois
4 que le terme de "maire" que le docteur Stakic avait admis pour en être
5 traité comme tel, devait être celui qui, et à partir de qui devait émaner
6 cette autorisation suivant laquelle ces gens-là pouvaient être mis en
7 liberté à condition de ne jamais plus retourner dans Prijedor.
8 Le docteur Stakic a joué un rôle clé en vue d'établir une liaison entre
9 les autorités locales et les autorités au niveau de la République ou au
10 niveau régional. La pièce à conviction S93 en témoigne. En effet, il a été
11 élu en qualité de représentant de la municipalité de Prijedor à la
12 conférence constituante convention du SDS au niveau de la République et
13 cela en date du 9 juillet 1991.
14 Le document S99 constitue une lettre de Karadzic aux présidents de
15 municipalités, dans laquelle il a été donné un avis portant sur la
16 création de centres d'information qui devaient fonctionner non-stop, 24
17 sur 24 -si je me souviens bien encore de la teneur de ce document.
18 Le document, pièce à conviction S100, nous pouvons voir que le docteur
19 Stakic rapportait à l'assemblée municipale de Prijedor sur la teneur de la
20 réunion qu'il a pu avoir au sein de son parti au niveau de la République.
21 Le document S139 représente une lettre datée du mois de mai 1992 à
22 l'intention des présidents des assemblées municipales chargés cette fois-
23 ci de la défense nationale à Prijedor. Il s'agissait du docteur Stakic. Et
24 dans cette lettre, il a été traité de permis à délivrer concernant les
25 missions et les obligations de travail.
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1 Dans le document S140, nous pouvons voir qu'il s'agit de conclusions
2 arrêtées par la cellule de crise de la RAK, portant sur la collecte
3 d'armes illégales et sur les restrictions en matière d'emploi à
4 l'intention des personnes qui sont absolument loyales à la République
5 serbe. Il a été dit en manuscrit entre autres, sous forme d'une mention,
6 que ce mémo a été adressé au président de l'assemblée municipale en
7 personne, en main propre.
8 De même y a-t-il d'autres documents où les responsabilités particulières
9 et concrètes ont été données aux présidents. Dans le document S109, il y a
10 une décision publiée par le Journal officiel n°17, page 29. Nous citons:
11 "Les Présidents des municipalités devraient tout de suite recommander
12 l'élection, nomination des juges à l'échelle locale à des tribunaux
13 locaux." (Fin de citation.)
14 Décision n°6 traite du conseil de la défense nationale à l'échelle
15 municipale. Il s'agit dans Prijedor du docteur Stakic où des mesures et
16 des démarches immédiates devraient être faites en vue de désarmer des
17 formations paramilitaires.
18 Monsieur le Président, Monsieur et Madame les Juges, ce dont traitent les
19 moyens de preuve -dont je parlerai après la suspension d'audience-, c'est
20 que cette campagne a été coordonnée par trois instances différentes dans
21 Prijedor, à savoir les militaires -l'armée donc- la police et les
22 autorités civiles.
23 Le centre de cette coordination a été assuré par les autorités civiles.
24 Cette coordination a eu lieu au sein d'instances telles la cellule de
25 crise et le conseil de la défense nationale présidés, donc ayant à leur
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1 tête le docteur Stakic. Les ordres du jour et les calendriers furent fixés
2 également par le docteur Stakic.
3 Toute explication à l'intention de l'opinion publique, tout prétexte de
4 crime, toute tentative d'exhorter de gens à appuyer l'armée, la police
5 dans la perpétration de ces crimes et l'ensemble de la campagne politique
6 qui avait un intérêt crucial pour la police et l'armée, dans ces
7 opérations-là étaient guidées notamment par le docteur Stakic.
8 Lui, de concert avec d'autres hommes engagés dans de telles entreprises
9 dont les gens nous sont connus -nous en avons tant entendu parler, il
10 s'agit de M. Drljaca, M. Zeljaja, M. Arsic-, eh bien, le docteur Stakic de
11 concert avec ces gens-là a été engagé à mettre en œuvre ce plan-là.
12 Certes, M. Kovacevic y a contribué là-dessus.
13 Je voudrais faire un bref commentaire au sujet du conseil exécutif.
14 Avant tout, nous savons que le conseil exécutif constituait un corps
15 chargé de mettre en œuvre les décisions adoptées par l'assemblée
16 municipale. Or, il est tout à fait clair, que le conseil exécutif a été
17 soumis à l'assemblée municipale et à la cellule de crise tant que cette
18 dernière existait. Sans aucun doute le président de l'assemblée municipale
19 de fait est supérieur au président du conseil exécutif municipal.
20 L'exemple le plus éclatant en est cet accord inter-partis dans Prijedor de
21 même qu'à l'échelle de la République, dans l'ensemble de la Bosnie. Le
22 parti qui a remporté le plus de sièges de députés, qui était capable de
23 contrôler le travail de l'assemblée, se voyait obtenir le plus de sièges
24 possibles, le plus de positions, de voix possibles; entre autres, celle de
25 président de l'assemblée municipale.
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1 De même en savons-nous quelque chose grâce à la déposition de M. Travar et
2 grâce à l'existence d'autres documents, à savoir que le docteur Stakic lui
3 a assisté à des réunions du conseil exécutif lorsque celles-ci étaient
4 tenues, c'est-à-dire lorsque ce conseil exécutif existait.
5 De même, il est important de se rappeler que de toute évidence pendant
6 l'existence de la cellule de crise tout le long de cette période,
7 lorsqu'il y avait l'attaque sur Kozarac, lorsqu'il y a ces opérations de
8 nettoyage, lorsque des camps ont été mis en place, le conseil exécutif ne
9 se réunissait pas. Il y avait beaucoup de gens qui étaient membres de la
10 cellule de crise.
11 La pièce à conviction S11 -soit l'interview télévisée accordée par le
12 docteur Stakic-, nous pouvons voir entre autres que parlant avec M. Ecim,
13 il dit -je cite-: "Pendant les combats, les opérations de combat, la
14 cellule de crise existait, mais, suite à une décision prise par la
15 présidence de la République serbe, ce corps a été rebaptisé pour devenir
16 une présidence de guerre." (Fin de citation.)
17 "Pourtant, au moment où la vraie guerre a commencé ou autrement lorsque
18 les opérations de guerre se sont calmées un petit peu, nous avons réactivé
19 le travail du conseil exécutif". Ce qui de toute évidence prouve le
20 conseil exécutif n'était pas actif du tout pendant les opérations du
21 combat; c'est à sa place que siégeait la cellule de crise.
22 Cela vient corroborer la déposition de M. Travar qui lui a dit avoir
23 soulevé une objection quant au travail de la cellule de crise faisant
24 suggestion à M. Kovacevic de reposer la question de l'existence et du
25 travail du conseil exécutif.
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1 Mais, pour que notre position soit claire, notre position consiste à dire
2 que le docteur Stakic a été supérieur au conseil exécutif municipal. Et
3 que pendant cette période où la majeure partie des crimes ont été
4 perpétrés, il n'y avait pas du tout de réunion du conseil exécutif
5 municipal, et que presque toutes les décisions importantes adoptées et qui
6 avaient leur incidence sur la perpétration de crime, tout devait être fait
7 au nom de la cellule de crise.
8 Je crois que le moment est bon pour suspendre l'audience, Monsieur le
9 Président?
10 M. le Président (interprétation): Oui, en effet, j'ordonne une suspension
11 d'audience jusqu'à 11 heures 30.
12 (L'audience, suspendue à 11 heures 02, est reprise à 11 heures 34.)
13 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.
14 Simplement, comme vous le savez, nous pouvons maintenant poursuivre
15 jusqu'à 13 heures et puis, ensuite, nous irons en salle d'audience n°1
16 parce qu'il y a eu certaines plaintes du fait qu'il n'y avait aucune
17 galerie du public disponible pour les plaidoiries finales. Donc, si
18 possible, nous ferons également cela lundi.
19 Monsieur Koumjian, vous pouvez poursuivre.
20 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, Madame, et Monsieur
21 les Juges, les éléments de preuve dans cette affaire montrent une
22 coopération très étroite entre les organes civils avec, à leur tête, le
23 docteur Stakic et l'armée; l'armée qui est passée de la JNA à l'armée de
24 la Republika Srpska vers la mi-mai 1992.
25 Je suis sûr que vous vous rappelez la vidéo S11 dans laquelle le colonel
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1 Arsic est interviewé, et la personne qui l'interview dit: "Voici que nous
2 sommes avec l'homme le mieux informé de ce qui s'est passé, des événements
3 de Prijedor."
4 Le colonel Arsic répond: "Ce n'est pas seulement moi qui suis le mieux
5 informé des événements à Prijedor. Toutes les autorités et leurs organes
6 sont tout à fait familiarisés avec les événements de Prijedor; et comme
7 moi, peut-être davantage que d'autres, nous coopérons avec eux et je suis
8 très au courant de cela."
9 Nous savons qu'il y a eu de nombreuses réunions entre les organes présidés
10 par le docteur Stakic et des militaires. Si vous vous le rappelez, il y
11 avait eu la déposition de M. Kuruzovic avant la prise de contrôle. Et
12 c'était le docteur Stakic qui avait demandé qu'il y ait une réunion à la
13 caserne avec le colonel Arsic qui y assistait pour planifier la prise de
14 pouvoir.
15 Nous avons les comptes rendus du conseil de la défense nationale. Nous en
16 avons trois: le S28, le S60 et je crois le S90.
17 Le S28 correspond au 5 mai; je crois que c'est la deuxième réunion. Et le
18 S60 correspond au 15 mai et la quatrième réunion, je crois, indique qu'il
19 y en a eu au moins une entre les deux.
20 Et lors de ces réunions, le colonel Arsic était présent. Vladimir Zeljaja
21 était présent, Pero Colic. Nous savons aussi qu'il y avait eu une demande
22 pour qu'un membre de la garnison soit également membre de la cellule de
23 crise. Des témoins tels que M. Baltic nous ont dit que des membres des
24 forces armées participaient régulièrement à des réunions de la cellule de
25 la crise.
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1 Monsieur Zeljaja a été interviewé. On le voit dans le document S274, une
2 interview rapportée dans un journal. Il a dit: "Le commandement de la
3 brigade était à cause de cela immédiatement lié au chef du SDS en leur
4 apportant un appui, comme ils le font pour tous les bons Serbes, pour
5 s'organiser en vue d'une défense dans le cas où il y aurait une attaque
6 des forces musulmanes."
7 Il parlait de la période qui était antérieure à la prise de contrôle
8 lorsque le gouvernement était élu, un gouvernement multiethnique du
9 professeur Cehajic qui était encore installé, qui était encore au pouvoir.
10 Il a poursuivi en disant sur la page suivante qui se termine par le n°ERN
11 2749: "Je dois souligner qu'ici dans cette région, et la plupart des gens
12 le savent ici, qu'il y avait une coopération très étroite entre l'armée et
13 la police. Cette coopération a été également établie avec les dirigeants
14 du parti, la cellule de crise et tous les bons Serbes qui étaient et ont
15 encore une importance pour cette ville."
16 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, nous savons que dans
17 l'ex-Yougoslavie il y avait une philosophie particulière de la défense
18 populaire généralisée qu'on appelait la défense de l'ensemble du peuple,
19 la défense de tout le peuple. Dans lequel à la fois les civils et les
20 militaires étaient organisés de façon à coopérer au maximum.
21 Et nous savons qu'en ex-Yougoslavie, on craignait une invasion par des
22 forces supérieures, et l'idée était d'avoir des unités qui pourraient agir
23 au niveau local et qui pourraient le faire de façon autonome en
24 coopération avec les civils, avec la Défense territoriale et les
25 militaires; l'ensemble coopérant.
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1 Toutes les décisions que nous voyons prises par la cellule de crise et
2 l'assemblée municipale pour tous les événements qui se sont produits, nous
3 voyons une coopération très étroite entre les politiques et les militaires
4 à Prijedor. Par exemple, il y avait la cellule de crise qui formulait les
5 exigences et les menaces: si les armes n'étaient pas rendues, il y aurait
6 attaque. Et en fait, lorsque cela ne se produisait pas, les attaques
7 avaient lieu.
8 Les éléments de preuve montrent, je crois, qu'il y avait par exemple une
9 échéance à midi un jour particulier pour rendre les armes à Kozarac et je
10 crois que, d'après les documents militaires, il est indiqué que vers 12h10
11 ou 12h20, je ne suis pas exactement sûr de l'heure, l'attaque a commencé.
12 Je crois que l'un des exemples de la coopération entre les civils et les
13 militaires en temps de conflit est bien décrit dans le document S432.
14 C'est un document, vous vous en souvenez, relativement récent qui indique
15 que, le 3 mai, il y a eu une commande d'uniformes présentée par la cellule
16 de crise pour les chefs politiques les plus importants, y compris le
17 docteur Stakic. Et vous savez que lorsque ces uniformes sont arrivés, les
18 membres de la cellule de crise, y compris le docteur Stakic, ont porté ces
19 uniformes.
20 La déposition de nombreux témoins était que ceci était obligatoire. Ils
21 ont dit, je crois, à partir de juin, mais nous avons également des images
22 du mois d'août lorsque les journalistes se sont rendus en visite sur
23 place. Et vous vous souviendrez que vous avez vu la vidéo représentant la
24 visite du 5 août par les journalistes étrangers à Prijedor. Nous pouvons
25 vous la montrer à nouveau dans un moment pour vous le rappeler, je
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1 l'espère: cette photographie du docteur Stakic portant un uniforme qui
2 devrait maintenant apparaître sur votre écran.
3 Vous le voyez qui est un peu penché en avant dans un uniforme de
4 camouflage, avec un pistolet à sa droite, à sa hanche droite. Et rappelez-
5 vous que j'ai demandé au colonel, au général Wilmot, l'expert en matière
6 de défense: "Comment est-ce que vous distinguez les militaires des
7 civils?" Et il a répondu: "L'uniforme est la première chose pour le
8 faire."
9 Et ici, nous voyons que la cellule de crise, les membres de la cellule de
10 crise étaient en uniforme parce que, conformément à cette doctrine de la
11 défense populaire généralisée, la cellule de crise faisait partie de
12 l'effort militaire et était un élément de coordination clé appuyée par les
13 militaires sur le plan politique et logistique et pour ce qui est de la
14 planification des opérations.
15 Ce n'était pas un cas dans lequel la 43e Brigade était en train de
16 combattre dans un autre pays ou sur un front situé à des centaines de
17 kilomètres. Dans le cas présent, la 43e Brigade était engagée à attaquer
18 Prijedor. Et les gens qui faisaient l'objet de cette attaque étaient des
19 citoyens de Prijedor que le docteur Stakic prétendait représenter. Donc il
20 est clair qu'il était informé et les éléments de preuve montrent qu'il a
21 coopéré avec ces militaires pour ce qui est de cette campagne militaire.
22 (La Greffière d'audience s'entretient avec le Président.)
23 Je ne vais pas évoquer chacun des documents pertinents, parce que vous les
24 connaissez, mais nous savons d'après les éléments de preuve et les
25 documents à quel point un appui logistique était essentiel pour la cellule
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1 de crise et l'assemblée municipale, tant de la part des militaires que de
2 la police.
3 Au stade actuel, nous savons à quel point les carburants étaient
4 importants. L'un des témoins de la défense a dit que c'était plus précieux
5 que l'or. Il y avait un blocus international, un blocus de tous les
6 échanges commerciaux contre la Yougoslavie, et le carburant qui venait en
7 Yougoslavie était passé en fraude.
8 Et la cellule de crise contrôlait la distribution des carburants et
9 s'assurait que les destinataires tels que l'armée ou la police ainsi que
10 ceux qui se trouvaient dans les camps -tel qu'Omarska- recevaient le
11 carburant dont ils avaient besoin pour des opérations militaires ou du
12 carburant pour transporter les prisonniers à des camps ou entre des camps.
13 Du carburant qui était utilisé aussi pour des autobus ou des cars pour
14 transporter les autobus de "Autotransport" de Prijedor qui étaient
15 utilisés, pas seulement pour porter des personnes jusqu'aux camps, mais
16 pour transporter des dizaines de milliers de personnes hors de Prijedor,
17 qui étaient expulsées par la force à l'extérieur des frontières
18 internationales et des lignes de front dans des secteurs contrôlés par le
19 gouvernement à Sarajevo.
20 Nous avons des décisions qui montrent que la cellule de crise et
21 l'assemblée municipale ont joué un rôle pour ce qui est de la solde des
22 militaires, pour les membres de la réserve de la police. Il y a également
23 des décisions concernant l'utilisation, la confiscation et l'utilisation
24 de matériels acquis de façon illégale. Et vous vous rappellerez les
25 décisions, si vous vous souvenez plus particulièrement du document S433
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1 concernant les éléments logistiques basés à Cirkin Polje, dont on a
2 récemment entendu parler avec le major Kuruzovic.
3 Nous savons que ce document qui était intitulé "Rapport sur la
4 mobilisation, la réquisition des véhicules", nous avons vu que ce document
5 à la page 5 indique: "Nous avons également fourni des armes et des
6 munitions aux états-majors de secteurs et nous avons réussi à faire servir
7 environ 100.000 repas aux membres de la police et de l'armée serbe pour
8 les unités de la Défense territoriale."
9 Ce document montre que des aliments pour les gardes étaient donnés pour
10 les gardes qui se rendaient au point de contrôle, ainsi que les gardes qui
11 se rendaient aux camps. Un appui logistique pour ceux qui, en fait,
12 étaient en train de perpétrer les crimes dont nous avons entendu parler
13 dans ce procès.
14 Notre position n'a jamais été que le docteur Stakic se trouvait dans la
15 chaîne de commandement officielle de l'armée. Mais nous voyons les
16 éléments de preuve qui montrent comment l'autorité s'exerçait de façon
17 diffuse, et qu'il y avait une très grande influence de la cellule de crise
18 et des autorités civiles sur l'armée.
19 Je n'ai pas l'intention de répéter ce que vous pouvez lire dans le mémoire
20 qui vous a été remis, mais même dans notre réponse au titre de l'Article
21 98bis du Règlement, aux pages 18 et 19, nous donnons la liste des 18
22 décisions qui s'adressaient à l'armée, des décisions telles que de
23 remplacer le commandant chargé des questions logistiques, le commandant
24 chargé de la mobilisation, le fait de confisquer du matériel illégalement
25 acquis, la poursuite du blocus de la ville, le fait de constituer des
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1 sections d'intervention commune et la décision selon laquelle la brigade
2 pourvoirait à la sécurité à Trnopolje. Toutes ces décisions ont été
3 appliquées.
4 Mais je pense que, peut-être, un des exemples les plus parlants de la
5 coopération et de la coordination était les exigences de la cellule de
6 crise pour qu'il y ait réédition, les menaces d'attaque. Et, en fait, ces
7 menaces ont été exécutées par l'armée selon le calendrier qui avait été
8 annoncé par la cellule de crise.
9 Il y a eu une coopération équivalente ou même accrue entre les autorités
10 civiles et la police. Comme on pouvait s'y attendre, là encore, très
11 officiellement, très, très officiellement, le chef de la police est
12 désigné par le ministre à Pale, au niveau de la République, et c'est son
13 supérieur. Mais, dans la réalité de la situation, même avant ces
14 événements, nous savons que c'était un homme politique local qui était
15 normalement nommé à cette position.
16 Et tous les témoins ont dit que l'ensemble des chefs de la police était
17 nommé parmi les chefs politiques locaux, par l'assemblée locale.
18 Personne n'a pu donner d'exemples en Bosnie du fait qu'un chef de la
19 police locale aurait été choisi par les dirigeants locaux et qu'il ait été
20 rejeté par le ministre. C'était une formalité. J'imagine que ceci a pu se
21 passer parfois si une personne n'avait pas les qualifications, les
22 compétences voulues, ou avait un casier judiciaire, c'est possible, mais
23 la pratique voulait que cette personne soit désignée par les hommes
24 politiques locaux et était acceptée par le ministre.
25 Monsieur Talundzic n'était pas un policier de carrière. Il a obtenu ce
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1 poste parce que ceci faisait partie d'un accord entre les partis. Le parti
2 gagnant, le SDA, avait obtenu le droit de nommer quelqu'un et ils ont donc
3 nommé M. Talundzic.
4 Monsieur Drljaca également n'était pas un policier de carrière. Mais j'y
5 reviendrai dans un moment.
6 Nous savons qu'il y avait une ligne téléphonique directe -l'un des témoins
7 de la défense nous l'a dit- entre le bureau du président de l'assemblée
8 municipale et le chef de la police, le chef du SUP. Et là encore, nous
9 avons de nombreux exemples de décisions prises par les autorités civiles,
10 par la cellule de crise en particulier, et par l'assemblée municipale pour
11 la police, qui ont été exécutées.
12 Nous avons même un rapport de M. Drljaca qui montre très nettement à quel
13 point il s'était subordonné aux autorités civiles et à la cellule de
14 crise. Nous avons son rapport, celui qu'il a adressé à M. Baltic, qui rend
15 compte de l'application des décisions prises par la police -la SJB-, sur
16 les décisions prises par la cellule de crise et le conseil exécutif, sur
17 la manière dont ces décisions avaient été mises en œuvre par la police
18 conformément aux instructions reçues.
19 La cellule de crise, par exemple, a décrété un couvre-feu; la police a
20 fait appliquer ce couvre-feu. L'un des témoins de la défense -je crois que
21 c'était M. Prastolo, mais c'était une personne qui s'occupait de la
22 société "Hydroflex"- est venu, et je crois qu'il a dit que les autorités
23 civiles n'avaient absolument aucun pouvoir sur la police; elles ne
24 pouvaient rien dire à la police.
25 Et, selon sa propre déposition, il nous a dit que sa société avait été
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1 réquisitionnée à la suite d'une décision prise par les autorités civiles,
2 indiquant que ses biens avaient été abandonnés -apparemment, le
3 propriétaire était un Croate-, de sorte que les autorités civiles avaient
4 décidé de s'en saisir et la police était simplement allée sur les lieux et
5 a appliqué cette décision.
6 Dans l'ensemble de Prijedor, nous avons de très très nombreux exemples. Il
7 était clair que la décision de la cellule de crise n'était pas simplement
8 des bouts de papier sans valeur. Ces décisions ont été appliquées par la
9 police. Et lorsque les instructions étaient adressées à l'armée, elles
10 étaient appliquées par l'armée.
11 La défense a soulevé à de nombreuses reprises les questions concernant le
12 docteur Drljaca. Ils ont parlé de M. Drljaca et de sa personnalité. Les
13 éléments que nous avons reçus en l'espèce montrent très clairement que M.
14 Drljaca, Simo Drljaca était un tueur, un tueur sans pitié, sans scrupule.
15 Tout le monde savait cela à Prijedor, c'était un bandit. Assurément, le
16 président de l'assemblée municipale et de la cellule de crise le savait.
17 Il est clair que Simo Drljaca était un tueur et un bandit, mais il était
18 le bandit qui aidait le docteur Stakic. Ils travaillaient ensemble, ils se
19 complétaient l'un l'autre, ils partageaient les mêmes objectifs; chacun
20 jouait son propre rôle en coordination dans cette campagne de génocides,
21 qui a eu lieu à Prijedor.
22 Nous avons des décisions concernant l'élection de Simo Drljaca le 16
23 avril. Cette décision n'a pas été prise par le ministère de l'Intérieur,
24 elle venait du parti SDS local ou de l'assemblée contrôlée par le parti
25 SDS. Ils avaient admis un certain nombre d'autres députés serbes d'autres
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1 partis, mais c'était une assemblée SDS.
2 Simo Drljaca avait besoin du docteur Stakic. Ce n'était pas un
3 professionnel, il n'a pas été élu, il a fait l'objet d'une nomination
4 politique. Et lorsque le docteur Stakic a perdu le pouvoir, il n'est pas
5 surprenant que Simo Drljaca ait perdu le pouvoir. Lorsque le docteur
6 Stakic est revenu au pouvoir en 1996, Simo Drljaca est revenu au pouvoir.
7 Nous avons entendu les entrevues qui ont eu lieu avec le docteur Stakic,
8 interviews qu'il a données à "Kozarski Vjesnik", à la télévision et à la
9 presse locale.
10 Nous avons entendu des personnes qui étaient présentes lors des réunions
11 avec lui, nous n'avons jamais entendu le docteur Stakic critiquait Simo
12 Drljaca. Le docteur Stakic n'a rien fait pour remplacer M. Drljaca ni de
13 l'arrêter dans la façon dont il procédait de tuer les gens sans pitié,
14 sans scrupule.
15 La seule conclusion que nous pouvons en tirer, c'est que le docteur Stakic
16 avait besoin de lui et qu'il approuvait ces agissements.
17 Dans l'entrevue qui a eu lieu en janvier 1993, entrevue avec Monika Gras
18 de la télévision allemande, nous pouvons voir dans un extrait assez bref
19 -que je souhaiterais vous faire diffuser- que le docteur Stakic parle du
20 chef du SUP. Il s'agit d'un moment qui a suivi le massacre de la pièce
21 n°3, après la période couverte par l'Acte d'accusation et vous pouvez
22 entendre de quelle façon le docteur Stakic décrit le travail de Simo
23 Drljaca.
24 (Diffusion de la vidéo.)
25 "-J: Ces personnes, ces Musulmans sont à présent des réfugiés et se
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1 trouvent dans des camps en Allemagne. S'ils le voulaient, pourraient-ils
2 revenir?
3 -MS: J'allais justement ajouter que dans cette guerre, même si elle n'est
4 pas encore terminée et nous ne savons pas quand elle se terminera, le
5 Djihad est celui qui gagne le plus, car leur but était de créer un Etat
6 musulman en...
7 -MK: Europe.
8 -MS: …En Europe. Et les Balkans, que l'Europe veuille bien l'admettre ou
9 non, font partie de l'Europe. Nous verrons qui y vivra.
10 L'Islam, c'est-à-dire le Djihad a gagné parce qu'un très grand nombre de
11 Musulmans provenant de cette région a émigré en Allemagne et partout en
12 Europe.
13 Pourquoi dis-je cela? Parce que tous les Musulmans originaires de cette
14 région auraient pu choisir d'aller à Zenica, Sarajevo, Travnik ou en
15 Europe de l'Ouest. Ils ont choisi l'Europe de l'ouest. Ils n'ont pas voulu
16 quitter cette région. Ils ne voulaient même pas entendre parler de Zenica,
17 Travnik, et ils ne voulaient surtout pas aller en Croatie, car ils
18 savaient qu'ils n'étaient pas bienvenus. Au contraire, ils ont choisi
19 l'Europe pour des raisons économiques que leur prêche le Djihad.
20 Mais, pour revenir à votre question, indépendamment du résultat final, ici
21 à Prijedor, et vous avez entendu le chef du SUP vous le dire, les choses
22 se sont déroulées de façon si nette et précise que certains pays nous
23 envieraient même en temps de paix.
24 Nous avons traité un si grand nombre de personnes que 50 experts
25 enquêteurs criminels sont venus enquêter sur place pour constater le tout.
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1 Nous avons à notre disposition tellement de matériel que ceux dont les
2 mains sont tâchées de sang ne pourront plus jamais revenir. Pour ce qui
3 est des autres, s'ils le souhaitaient, s'ils le voulaient, mais seulement
4 lorsque la guerre sera terminée, ils pourront revenir."
5 (Fin de la diffusion de la vidéo.)
6 Monsieur le Président, la plupart des personnes qui ne voulaient pas
7 revenir, comme le dit l'enregistrement, c'est parce que ces personnes ont
8 été tuées. On parle de Simo Drljaca, le docteur Stakic parle de lui comme
9 étant une personne qui a mené à bien les choses de façon très bien, de
10 façon très nette.
11 Je veux simplement vous dire que dans ces commentaires assez brefs
12 prononcés par le docteur Stakic, lorsqu'il parle de l'islam, il s'agit de
13 commentaires qui me rappellent le témoignage du témoin expert de la
14 défense, qui a parlé de façon assez paranoïaque s'agissant de la religion
15 et de l'islam. Et c'est ce que nous voyons également ressortir de cette
16 interview donnée par le docteur Stakic.
17 Dans cette interview, ce qui est intéressant, c'est qu'il s'adresse à un
18 journaliste allemand, et je crois qu'il essaie de provoquer le préjudice
19 visant à savoir que les Musulmans qui partent vivre en Allemagne sont des
20 représentants de la Djihad.
21 Le docteur Stakic s'est adressé à un reporteur sophistiqué de l'Allemagne.
22 J'imagine de quelle façon il a dû parler aux Serbes. Je crois qu'il a fait
23 des références historiques s'agissant du génocide qui s'est déroulé
24 pendant la Deuxième Guerre mondiale. Son discours est teinté de paranoïa.
25 En réalité, en Bosnie, peu de Musulmans pratiquaient la religion musulmane
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1 et le docteur Stakic les décrit comme étant des radicaux, des gens qui
2 menacent les Serbes comme étant des membres de la Djihad, etc.
3 Le docteur Stakic a passé beaucoup de temps avec Drljaca. Drljaca était
4 membre de la cellule de crise et il était membre du conseil de la défense
5 nationale. Les personnes nous ont raconté les avoir vus ensemble, avoir vu
6 Drljaca et Stakic ensemble, les avoir vus ensemble au restaurant. Ils
7 n'étaient peut-être pas de proches amis, mais il est certain qu'ils
8 étaient des associés très proches. Ils ont travaillé ensemble dans cette
9 campagne criminelle qui a eu lieu à Prijedor.
10 Monsieur le Président, je souhaiterais revenir en arrière et vous parlez
11 de la chronologie des événements. Les événements qui ont eu lieu, les
12 crimes qui se sont déroulés et vous parlez de la chronologie de ces
13 derniers.
14 Nous savons qu'il y avait un plan de prendre le contrôle des municipalités
15 afin de les rendre municipalités serbes. Ce plan a commencé en 1991.
16 Il y a ce document très célèbre, il y a la variante A et B. C'est un
17 document du 19 décembre 1999, et on en a parlé. Dans ce document, on fait
18 état du fait que l'on discutait de ces choses-là, pour ce qui est de la
19 localité de aPrijedor. Et Monsieur Miskovic en a parlé. Nous savons très
20 bien que le docteur Karadzic a dit que le 12 mai, à l'assemblée du 12 mai,
21 il a parlé de la séparation des communautés nationales.
22 S'agissant du document S430, je crois que ce document est intitulé
23 "Mémoire des événements d'avril". Nous en avons parlé avec M. Kuruzovic,
24 et M. Kuruzovic a été interviewé. Il parle, dans ce document, du fait que
25 l'on a établi plusieurs polices serbes déjà en novembre 1991. Et c'est M.
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1 Jankovic qui a procédé à l'établissement de ces dernières.
2 Nous savons très bien que la prise de pouvoir, elle-même, a été planifiée
3 en détail et en coordination entre la police et l'armée.
4 Je crois qu'il n'est pas nécessaire de vous passer de nouveau les extraits
5 d'interview diffusés à la radio entre Simo Miskovic, Slobodan Kuruzovic et
6 le docteur Kovacevic, lorsqu'on parle d'une planification précise que l'on
7 a faite afin de mener à bien la prise de pouvoir.
8 Monsieur Kuruzovic, dans le document S430, dans l'article intitulé
9 "Mémoire d'avril", on nous a dit que l'on avait planifié la date du 1er
10 mai comme étant la date originale, mais, à cause de ce télégramme, le
11 docteur Stakic a convoqué une réunion à la caserne, et une décision a été
12 prise pour reporter la prise de pouvoir entre le 29 et le 30. Et,
13 effectivement, aux premières heures du matin, le 30, on a procédé à la
14 prise de pouvoir de la ville.
15 Immédiatement après la réussite de cette prise de pouvoir, qui a été
16 rapportée à M. Kupresanin, président de l'assemblée de la Région autonome
17 de Krajina… Monsieur le Président, la prise de pouvoir est assez
18 intéressante. C'est intéressant de voir de quelle façon on a procédé à la
19 prise de pouvoir.
20 Eh bien, le 30 avril, il ne s'agissait bien sûr que d'une première étape
21 de ce plan, car on a pris le pouvoir de la ville. Il s'agit d'une zone où
22 les Musulmans n'étaient pas majoritaires.
23 Il est certain que l'on voulait s'emparer des institutions principales: la
24 police et l'assemblée municipale; c'était le but principal.
25 La première personne dont font état les témoins, la première personne à
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1 qui on a empêché l'entrée, c'est Muhamed Cehajic. Selon la défense, il
2 n'avait pas beaucoup de pouvoir, mais ce n'était tout à fait pas juste.
3 Nous avons vu que, pendant la prise de poux vils, c'était la première
4 personne qui était le président de l'assemblée municipale à laquelle on
5 avait refusé l'entrée.
6 A cause de la supériorité des gens qui ont procédé à la prise de pouvoir,
7 il n'y a eu aucune résistance et la ville de Prijedor a été occupée. Mais
8 s'agissant des zones, qui étaient de façon prédominante musulmanes et
9 croates, ces zones sont restées entre les mains des dirigeants locaux de
10 ces communautés et des hommes qui ont résisté, qui ont donné résistance à
11 la prise de pouvoir. Des gens qui faisaient partie de l'assemblée
12 multiethnique et des autorités qui représentaient un parti singulier. Et
13 la vie a changé immédiatement.
14 Comme le témoin P nous le dit à la page 3322 du transcript, lorsqu'on lui
15 pose la question: que s'est-il passé? Comment la vie a-t-elle changé
16 immédiatement, pour vous et vos voisins dans la ville de Kozarac, après la
17 prise de pouvoir du 30 avril?
18 Il répond -je cite-: "Nous sommes devenus prisonniers. c'est devenu un
19 ghetto. Les lignes téléphoniques étaient coupées du reste du monde.
20 Physiquement parlant, nous étions également coupés du monde car les routes
21 étaient bloquées. Nous, nous ne sentions pas en sécurité. Nous avions
22 l'impression d'être dans une sorte de prison".
23 Les hommes, les personnes de la ville parlent de licenciements. D'abord,
24 on a licencié les dirigeants politiques, ensuite les directeurs, et
25 ensuite les gens comme le directeur du SDK; les licenciements de médecins
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1 dans les hôpitaux à une époque où le conflit faisait rage, où l'on avait
2 besoin d'aide médicale plus qu'autre chose. Même à ce moment-là on a
3 licencié les médecins.
4 Même s'il n'y a pas eu d'attaque en tant que telle menée dans la ville de
5 Prijedor, Kozarac, Stari Grad et dans les zones de Brdo Brisevo, Ljubija,
6 la vie dans la ville de Prijedor elle-même est devenue -comme le dit le
7 témoin E à la page 7556-, la ville de Prijedor ressemblait à un camp.
8 D'autres témoins -tel le docteur Beglerbegovic, le premier témoin qui a
9 témoigné dans cette affaire-, nous parlent de l'époque à laquelle où il
10 fallait attendre. Ils attendaient de voir ce qui allait être entrepris
11 contre eux.
12 Ces deux personnes ont été arrêtées, toutes les deux, et aucune de ces
13 personnes n'était des hommes politiques. Ils n'étaient pas impliqués dans
14 la vie politique, ils n'étaient pas non plus impliqués dans les activités
15 militaires; activités militaires qui ont résulté à faire arrêter des
16 personnes et à les faire amener dans des camps. Il y avait des juges parmi
17 eux, des avocats, des notables de la ville, membres de profession
18 libérale.
19 Plusieurs d'entre eux étaient également des femmes, qui n'avaient
20 absolument rien à voir dans la politique. Certaines d'entre elles étaient
21 également mariées aux Serbes et étaient amenées aux camps, tel Omarska.
22 Monsieur le Président, après la prise de pouvoir et après que l'on a créé
23 ces zones, ces ghettos qui se trouvaient à l'extérieur de leur contrôle,
24 il était clair que le plan n'était jamais de vivre ainsi. Les Serbes
25 n'allaient pas permettre aux Musulmans de rester à Kozarac au sein de leur
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1 propre communauté, ni à Ljubija ni à Brdo.
2 Immédiatement après, on a préparé les décisions et le conflit. Et, comme
3 dans la plupart des génocides, la première chose qu'on a demandé de faire,
4 c'est, comme dans tout génocide, on demande aux témoins de se désarmer.
5 Nous avons des décisions de la cellule de crise de la République autonome
6 de la Krajina, de l'ARK, en date du 4 mai, qui font état de l'ordre qui a
7 été émis à l'encontre de la population afin de se désarmer. Le docteur
8 Stakic a commencé par contre-armer ses propres citoyens dans les villages.
9 Et il l'a dit dans une interview.
10 Lors d'une réunion du conseil national de la défense, réunion qui s'est
11 tenue le 5 mai… Monsieur le Président, je crois que nous pouvons le voir
12 sur le rétroprojecteur, il s'agit de la pièce S28. Vous verrez à l'écran
13 que le point 7 de cette réunion fait état et on parle des actions et des
14 activités concernant les paramilitaires, des unités paramilitaires et des
15 individus qui possèdent les armes leur ordonnant de rendre leurs armes à
16 la police.
17 Dans le document S67, nous pouvons lire que l'on fait état de nouveau du
18 fait que le président de Prijedor envoie un ordre à la présidence de
19 guerre de l'ARK de désarmer…
20 De nouveau, S60, une autre réunion de la défense nationale parle de la
21 présence de l'armée et de la police.
22 Au point 4, de nouveau, on parle de désarmement et de formations
23 paramilitaires. Et les préparations de la prise de pouvoir avaient déjà
24 commencé.
25 Au document S345, on fait état du 1er Corps militaire de la Krajina. Et
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1 nous pouvons voir que dans le paragraphe en question, en date du 2 et 3
2 mai, on relocalise une artillerie de mortiers de 105 millimètres et une
3 artillerie antiblindés, de relocaliser ces dernières du front de la
4 Croatie. Il y a eu donc un échange de tirs, mais il fallait absolument
5 appuyer le soutien de Prijedor-Ljubija-Kozarac de cette zone-ci. Les
6 unités avaient pris les positions; c'étaient les unités qui attaquaient la
7 population civile de Hambarine et de Kozarac, quelques semaines plus tard.
8 La défense voudrait bien sûr soutenir la thèse que tout a commencé avec
9 l'incident de Hambarine. Bien sûr, c'est une excuse utilisée par des gens
10 comme le docteur Stakic, essayant de trouver une raison pour la mort des
11 centaines de milliers de personnes.
12 Si vous vous souvenez de l'incident de Hambarine… D'abord, laissez-moi
13 vous dire que je n'ai pas tout à fait bien compris de quoi il s'agissait.
14 Il y avait certainement une tension assez forte. Un groupe de soldats
15 serbes est passé par là, il y a eu un échange de tirs: un Musulman a été
16 blessé, deux Serbes ont été tués, d'autres personnes ont été blessées.
17 Le témoin oculaire, qui n'était pas présent lors de l'échange de tirs,
18 était le docteur Mujadzic; il était témoin de la scène, mais pas témoin
19 oculaire, il ne se trouvait pas immédiatement là. Il nous a dit qu'un
20 Musulman a été blessé à la hanche et au dos; cela ressemblait à quelqu'un
21 qui se sauve, qui essaye de s'enfuir.
22 J'ai l'impression, Monsieur le Président, qu'il s'agit d'une planification
23 qui a déjà été planifiée à l'avance. Et il semblerait qu'il s'agirait
24 d'une excuse utilisée par les autorités pour justifier les actions qui se
25 sont déroulées plus tard.
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1 Vous vous souviendrez que même l'un des témoins de la défense a témoigné,
2 avoir dit qu'il était passé par ce point de contrôle ce jour-là. Il a dit
3 que lui-même avait parlé avec Aziz Aliskovic; ce dernier, cette personne
4 portait un uniforme, elle avait un revolver dans sa voiture et on lui a
5 permis de passer.
6 Alors qu'ont fait ces autres soldats: est-ce qu'ils ont tiré sur le
7 Musulman d'abord? Ont-ils pointé leur arme en direction de ce dernier?
8 Comme l'a dit le docteur Mujadzic, il aurait fallu enquêter sur la
9 situation, mais il ne fallait pas répondre ceci en attaquant. La zone de
10 Hambarine a attaqué les personnes qui n'avaient rien à voir avec
11 l'incident qui s'était déroulé au point de contrôle. D'après le Témoin DD
12 qui passait par là, il y avait deux ou trois personnes qui tenaient ce
13 point de contrôle.
14 La cellule de crise s'est servie de cet incident, et si nous examinons le
15 document S389-1, l'article extrait de "Kozarski Vjesnik"; il s'agit d'un
16 article qui a été signé au nom de la cellule de crise, daté du 23 mai.
17 La cellule de crise écrit: "Par ceci, la cellule de crise désire avertir
18 qu'il n'y aura pas d'opérations de précaution dans l'avenir, mais que,
19 s'agissant des auteurs de ce crime sur le territoire, les membres des
20 formations paramilitaires qui se cachent seront visés directement, ciblés
21 directement".
22 Ensuite, nous pouvons voir l'ordre dans lequel on demande que Aziz
23 Aliskovic se rende, On lui donne une date butoir qui est midi, le 23 mai.
24 Nous savons, de par les témoins, que, 15 à 30 minutes plus tard, on a
25 ouvert un feu d'artillerie de char en direction de plusieurs endroits à
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1 Hambarine. La cellule de crise dit que ce crime a exacerbé toutes les
2 promesses et que la cellule de crise ne pouvait plus garantir la sécurité
3 de la population habitant dans les villages sus mentionnés.
4 Monsieur le Président, on ne cible pas une population simplement parce
5 qu'un crime aurait pu se passer dans une zone en particulier. On ne cible
6 pas, on ne vise pas tous les résidents, les habitants d'une ville
7 simplement parce qu'un incident est survenu.
8 Le témoin de la défense qui est venu déposer -il s'agissait du Témoin DD-
9 ou, avant de citer ce témoin, je vais vous parler de quelques documents
10 d'abord.
11 Le document S152, à la page 2, c'est un document qui représente le rapport
12 de Simo Drljaca envoyé au CSB de Banja Luka. Il parle des événements de
13 Prijedor. Il a dit que les résidents des villages de Hambarine ne se sont
14 pas pliés à la décision du ministère de la Défense de la République serbe
15 et dit que ces derniers n'ont pas voulu rendre les armes.
16 La cellule de crise de Prijedor a décidé d'intervenir de façon militaire
17 sur les villages ou sur le village.
18 Et si nous nous rapportons au document S240, nous pouvons lire ce texte à
19 l'écran. Il s'agit du document S240, le compte rendu d'audience à la page
20 1A, lignes 1 à 26. Il s'agit d'une émission télévisée.
21 Cela fait partie des cassettes qu'a amenées M. Sivac. Et on dit: "La
22 cellule de crise de Prijedor demande que les personnes de Hambarine se
23 rendent. L'ancien policier, Aziz Aliskovic, et son groupe ont mené une
24 attaque sur des soldats. La date butoir de midi n'a pas été observée et
25 une demi-heure après l'expiration de cette date butoir, l'armée de la
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1 Republika Srpska a lancé une attaque sur Hambarine et a nettoyé la zone."
2 (Fin de citation.)
3 De quelle façon ont-ils nettoyé la zone? Le Témoin DD était un témoin de
4 la défense, et il nous a dit de quelle façon cet incident a été provoqué
5 au point de contrôle par les Bosniens, les Musulmans.
6 Ensuite, il dit "y avoir conduit à travers ce point de contrôle quelques
7 jours."
8 Après, à la page 9558, on lui a demandé ce qu'il a vu et il a répondu -je
9 cite- "Eh bien, d'abord, les maisons étaient détruites. Comme je l'ai dit
10 hier, depuis les champs de Prijedor jusqu'au point le plus élevé de
11 Hambarine, tout a été détruit. Entre 30 à 40 maisons avaient été détruites
12 et, quelques jours plus tard, j'ai entendu dire que ces maisons ont fait
13 l'objet d'attaques de chars. Il s'agit d'une personne qui passait par la
14 route principale. Cette personne, depuis la route principale -elle n'a
15 même pas emprunté les routes secondaires- a pu voir qu'on avait pilonné et
16 on a détruit environ 50 maisons.
17 Il est absolument clair que ces familles qui habitaient dans ces maisons
18 n'avaient absolument rien à voir avec ce qui s'était passé au point de
19 contrôle de Hambarine."
20 Selon le rapport de l'armée et dans le rapport du général Vulliamy, nous
21 pouvons lire que le pilonnage de Hambarine s'est poursuivi pendant six à
22 sept heures. Et les témoins -tel que le docteur Mujadzic- ont raconté de
23 quelle façon ces obus tombaient de façon aléatoire sur des maisons de
24 civils. Il n'y avait pas de cible, d'objectif militaire à cet endroit-là.
25 On a simplement procédé à l'attaque. On a attaqué des résidents de
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1 Hambarine menacés par la cellule de crise auparavant. C'était la
2 population bosnienne de cette zone.
3 Et ensuite, pour essayer de créer leur propre histoire, le docteur Stakic
4 (inaudible) aimerait bien dire que Kozarac est le résultat d'un incident
5 lors duquel on a embusqué un convoi et qu'un soldat serbe a été tué. Eh
6 bien, lorsque l'on prend un peu de recul et que l'on regarde cet incident,
7 on s'aperçoit à quel point il s'agit de quelque chose de ridicule. C'est
8 arrivé le 23 mai, ce pilonnage de Hambarine. Les négociations avaient pris
9 place, M. Kuruzovic avait pris place lors de ces négociations, et nous
10 savons également que M. Simjanovic était présent également. Et les
11 autorités serbes demandaient que les habitants de Kozarac se rendent et se
12 livrent aux autorités qui avaient illégalement pris le pouvoir au SDS, à
13 l'armée serbe qui venait juste d'être créée.
14 C'était une situation atroce pour ces personnes. Ils étaient bien
15 inférieurs à tous ces hommes armés et la majorité de la population n'avait
16 pas voulu se rendre. Ils voulaient ériger des barricades. Ils avaient
17 creusé des tranchées afin de pouvoir se défendre. Ils se sont armés du peu
18 d'armes qu'ils pouvaient trouver et ils n'avaient pas énormément de
19 munitions à la portée de leur main.
20 Nous avons vu également un rapport 1KK où le policier a dit: "Nous avons
21 assez de munitions pour tirer pendant 5 minutes."
22 Je ne doute pas qu'un soldat serbe a été tué lorsqu'il a essayé
23 d'approcher Jakupovici, mais il ne s'agissait pas d'un convoi embusqué, il
24 s'agissait d'une attaque.
25 Le témoin P en a parlé. Il a dit avoir vu les chars avec de l'infanterie,
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1 accompagnés d'infanterie éparpillée, et c'est ce qu'il a appelé une
2 attaque militaire tout à fait classique.
3 Monsieur Poljak habitait non loin de ce point de contrôle, et son cousin
4 qui se trouvait au point de contrôle était là. Sa famille s'était enfuie.
5 Et avant qu'il soit capturé, il a vu son cousin, son cousin lui a dit, lui
6 a raconté l'attaque. Il lui a dit que les chars ont tiré. Nous savons très
7 bien que les personnes qui ont essayé de fournir une résistance ont pu
8 endommager deux chars. Selon le rapport militaire serbe, les rapports
9 appelés 1KK, nous pouvons voir que deux chars ont été endommagés et
10 réparés.
11 Je ne sais pas si cela avait été fait avec une Zolja ou avec un lance-
12 roquette manuel. On ne sait pas s'ils ont heurté simplement un arbre ou
13 une tranchée. On ne le sait pas.
14 Nous n'essayons pas de soutenir qu'il n'y a pas eu de conflit armé en
15 Bosnie à Prijedor, mais cela fait partie d'un élément de notre thèse. Il y
16 a eu un conflit. Les gens ont résisté et, le 30 mai, un groupe de
17 personnes à la tête desquelles se trouvait Slavko Ecimovic a même essayé
18 de contre-attaquer. Ils disposaient de 80 à 100 hommes selon le rapport du
19 (inaudible).
20 Il y avait un conflit armé; cela fait partie des éléments de notre thèse.
21 Le cousin de Samir Poljak n'a pas pu témoigner, car il a été amené au camp
22 d'Omarska et il a été tué. Mais il a raconté à Samir Poljak que les Serbes
23 avaient ouvert le feu d'abord.
24 Et nous savons qu'après, lorsque les chars se sont approchés de
25 Jakupovici, immédiatement après, un feu d'artillerie a été ouvert sur
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1 toutes les zones qui se trouvaient autour de cet endroit depuis plusieurs
2 directions: depuis le mont Kozarac, depuis les zones où habitaient les
3 habitants serbes, on tirait avec l'artillerie, on lançait des grenades à
4 main, on se servait également d'obusiers. Et M. Poljak dit que des obus
5 tombés un peu partout, les obus provenaient de toutes directions, et il
6 n'y avait absolument pas d'objectif militaire à cet endroit. Il s'agissait
7 d'un pilonnage aléatoire de la population civile.
8 Il s'agit de ces fragments où Samir Poljak parlait des obus qui tombaient
9 un peu partout dans les champs, sur les maisons, en toutes directions. Il
10 n'y avait pas d'objet militaire ciblé. Tout simplement, tout se faisait au
11 hasard, à l'aveuglette, de façon aléatoire à l'encontre de la population.
12 Le docteur Merdzanic se trouvait à l'hôpital lorsque ceci a eu lieu.
13 Lorsqu'on lui a posé la question de savoir ce qu'il avait pu voir quand il
14 fallait savoir s'il était en contact avec les autorités serbes, pour
15 évacuer des blessés, je voudrais vous rappeler sa déposition. Nous allons
16 voir une séquence de sa déposition. Voilà comment se présente la
17 déposition du docteur Merdzanic:
18 "-Q: Avez-vous donné des soins aux enfants qui ont été blessés lors de
19 cette attaque?
20 -R: Nous avons eu des enfants blessés.
21 -Q: Certains enfants ont été blessés lors de ces attaques, mais les avons-
22 nous reçus seulement quelques jours plus tard, une fois que l'hôpital a
23 été transféré?
24 -Q: Et quant aux femmes?
25 -R: Nous avons eu également des femmes blessées. Pendant que nous étions
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1 là-bas encore à la clinique, nous avons eu un autre civil qui a été amené
2 mais déjà mort.
3 -Q: Vous nous dites que vous aller ailleurs à une autre localité le jour
4 suivant. Comment avez-vous pu le faire?
5 -R: Des gens qui ont réussi à venir nous joindre nous ont dit qu'il était
6 vraiment difficile de se faire amener à l'hôpital et se faire admettre à
7 l'hôpital. Nous avons entendu dire que la majeure partie de la population
8 civile avait peur, que la majeure partie d'entre eux avait quitté Kozarac
9 et qu'ils ont gagné, pris de panique, la forêt voisine. Voilà pourquoi
10 nous aussi nous avons essayé de quitter la région. Et c'est ainsi que nous
11 nous sommes acheminés vers le mont Kozara.
12 -Q: Et où est-ce que vous avez mis en place votre second centre clinique?
13 Où se trouvait localiser votre second centre clinique?
14 -R: Pour ce qui est de la seconde localisation du centre médical, je
15 dirais qu'il s'agissait des bords, à l'orée de la montagne Kozara, à
16 gauche par rapport à la route principale. Le tout se trouvait à l'abri
17 d'une forêt ou d'une crête, tout prêt d'un ruisseau. Le bâtiment, pour
18 parler du bâtiment même, était sans fenêtre ni porte, mais d'une façon
19 naturelle le bâtiment se trouvait protéger. Ainsi, les obus en provenance
20 de Kozarac et de Prijedor ne pouvaient pas toucher le bâtiment.
21 -Q: Très bien. Est-ce que vous-même vous avez essayé devenir en contact
22 avec des autorités pour leur parler de personnes blessées?
23 -R: Eh bien, à cette époque-là, nous avons eu deux enfants admis au centre
24 clinique. Ils étaient en train de mourir. Pratiquement, nous n'étions pas
25 en mesure de leur porter de soins médicaux. Moi, j'ai été personnellement
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1 perdu et profondément préoccupé. A tel point… du fait que nous avons eu
2 d'autres gens blessés parmi nous.
3 Au premier étage, il y avait un véhicule da police et plusieurs policiers.
4 Ces gens-là, par radio, étaient en contact avec l'armée et, quant à moi,
5 je leur ai demandé s'il me serait possible de négocier le passage des
6 personnes blessées et leur sortie. Je leur ai demandé si je pouvais y être
7 autorisé par eux.
8 -Q: Et ces policiers, ces officiers de police étaient-ils Musulmans?
9 -R: Pour autant que je sache, oui.
10 -Q: Très bien. Vous y avez été autorisé. Vous avez tenté de négocier le
11 passage et la sortie de ces personnes blessées.
12 Savez-vous avec qui vous avez parlé?
13 -R: Je ne sais pas avec qui très précisément nous avons pu entrer en
14 contact à cette fin-là. Mais sur cette même longueur d'ondes de la radio
15 utilisée, on était toujours pour cette fin-là, de même que lorsqu'on a dû
16 négocier la remise de Prijedor et le départ de la population de Kozarac.
17 Je crois qu'un contact avait été établi avec le commandement militaire qui
18 lui, en fait, pratiquement avait attaqué Kozarac.
19 -Q: Et qu'avez-vous dit à la personne avec qui vous étiez été en contact
20 et avec qui vous avez parlé? Que lui avez-vous dit des souhaits qui
21 étaient les vôtres, pour que l'on vous aide?
22 -R: Je me suis présenté en disant que nous avions deux enfants parmi nous.
23 Il y avait une petite fillette dont les deux jambes étaient complètement
24 déchiquetées, pulvérisées presque; elle était en train de décéder. Et il y
25 avait un autre enfant encore à côté.
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1 (Le témoin pleure sur l'écran.)
2 M. le Président (interprétation): L'audience est suspendue jusqu'à 11
3 heures 20.
4 -Q: Docteur, je sais qu'il est fort émouvant et de façon à vous troubler
5 lorsqu'on évoque de tels événements, mais il fallait réagir vite.
6 sait que morts nerfs avec perruque qui pose les questions.
7 Avez-vous été en mesure, avez-vous définitivement été autorisé à évacuer
8 ces enfants de Kozarac?
9 -R: Non, non, je n'y étais pas autorisé: je ne pouvais pas évacuer ni les
10 enfants ni les autres personnes blessées qui s'y trouvaient. La réponse
11 que nous avons reçue n'a pas été tout à fait précise. On nous a dit tout
12 simplement que "Dieu le veuille, que vous tous, "balija" -qui un terme
13 injurieux pour les Musulmans- puissiez venir là-bas. De toute façon, on va
14 finir par vous achever".
15 Voilà en quoi consistait cette conversation."
16 (Fin de la diffusion vidéo.)
17 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, je voudrais vous
18 montrer maintenant une séquence vidéo qui nous permet de voir comment le
19 docteur Stakic traitait et parlait de cette même vidéo. Il s'agit de la
20 pièce à conviction S240.
21 (Diffusion de la vidéo.)
22 (Inaudible.)
23 "L'opinion publique a-t-elle informé que, du côté musulman un bon nombre
24 de mercenaires ont pris part aux opérations de combat, de même qu'un
25 certain nombre des forces du HOS, du HDZ?
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1 De même, dans un communiqué, a-t-il été dit que d'autres moyens ont été
2 utilisés pour me chasser la population".
3 (Inaudible.)
4 Nous sommes en train de parler avec Milomir Stakic, président de la
5 cellule de crise de Prijedor. Il s'agit d'une situation de votre
6 territoire qui se trouve sous votre contrôle.
7 -M. Stakic: Je peux vous dire que l'ensemble du territoire de la
8 municipalité de Prijedor se trouve sous notre contrôle. Après la
9 libération de Kozarac, je peux le constater, la ville, les (inaudible)
10 serbes, les petites enclaves peuplées par des Musulmans ont été sous notre
11 contrôle depuis la prise de pouvoir en date du 30 avril.
12 Maintenant, après la chute de Kozarac, l'ensemble du territoire municipal
13 se trouve sous notre contrôle. Dans Kozarac même, l'opération de -comme le
14 disent les soldats-, de nettoyage est en cours. Et il s'agit de dire que
15 des éléments extrémistes dits "professionnels" ou de "métier" résistent
16 encore".
17 (Fin de la diffusion vidéo.)
18 M. Koumjian (interprétation): Je crois que, lorsque nous avons pour la
19 première fois fait diffuser cette cassette vidéo, lorsqu'il s'agissait de
20 paroles prononcées par le docteur Stakic, il s'agissait notamment de
21 termes de "nettoyage". Cette séquence vidéo nous permet de voir qu'il
22 s'agit d'une attaque contre la population de Kozarac. Nous avons pu voir
23 dans cette cassette vidéo des maisons en flamme au grand nombre. Nous
24 avons pu nous rendre compte comment se faisait cette opération de
25 nettoyage. La majeure partie de ces maisons n'a pas été touchée
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1 directement par un feu d'artillerie, mais les maisons ont été plutôt
2 directement incendiées après que les militaires y avaient pénétré.
3 La population n'a pas été utilisée comme un bouclier vivant comme ceci a
4 été dit dans le rapport, mais ceux qui étaient partie intégrante de cette
5 population ont reçu l'ordre de se rendre, après quoi les autorités serbes
6 les ont divisés, femmes et enfants d'un côté, des hommes ayant été emmenés
7 dans le camp de Trnopolje, passant par Prijedor par la salle de gym. Ainsi
8 donc, les hommes ont été séparés pour être emmenés à Keraterm et à
9 Omarska.
10 On peut voir cette corrélation, qu'il y avait des actions serrées entre la
11 cellule de crise du docteur Stakic et des militaires. Il a dit à Prijedor,
12 en date du 30: "Nous avons pris contrôle de l'ensemble de la municipalité.
13 L'opération était bien coordonnée." Et, dans les médias et pour les
14 médias, il a été publié une bonne justification et prétexte de cette
15 action par des politiciens, tel le docteur Stakic.
16 Cet aspect politique nous permet de voir que des gens de Prijedor, les
17 Serbes de Prijedor n'étaient pas différents des autres gens de Bosnie, de
18 Herzégovine ou d'Europe.
19 Il n'a jamais été dit par le procureur que des gens communs auraient eu
20 des intentions "génocidaires" (sic). Ils ont été trompés par le docteur
21 Stakic et par cette campagne politique, médiatique, il les a présentés
22 plutôt comme des gens ayant été menacés et en proie au génocide. Cette
23 propagande, cette campagne politique menée à l'encontre du peuple serbe
24 définitivement qui a été trompé, ainsi, a pu jouer un rôle clé lors des
25 crimes qui seront perpétrés par la suite.
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1 Je voudrais dire très brièvement également que les crimes perpétrés, ces
2 attaques dans cette région n'ont pas été arrêtées à Kozarac. Il y avait
3 plusieurs autres opérations menées. L'une de plus vaste envergure
4 consistait à nettoyer la localité de Brdo fin juillet. Nous en avons
5 entendu parler.
6 Nous avons pu lire également des titres dans la presse où il a été dit
7 qu'un soldat serbe a été tué et que, pour cette raison-là, une opération
8 de nettoyage devait être engagée par l'armée. On en parlait, car un soldat
9 serbe a été tué à Brdo non loin de Hambarine.
10 Le témoin de la défense DD en a parlé, témoin de la défense. D'après les
11 souvenirs qui étaient les siens, il a dit que des soldats serbes avaient
12 été invités à prendre un café et qu'ils se sont fait tuer. Il ne sait pas
13 par qui. Il a dit simplement qu'en réaction, Brdo a été nettoyée par
14 l'armée. Il y avait environ 7 villages dans la région de Brdo. Les noms
15 m'échappent, mais on peut parler de Hambarine, Risvanovici, Rakovcani,
16 Carakovo... Par conséquent, toutes ces localités ont été nettoyées.
17 Le Témoin DD nous a dit qu'on lui avait demandé à lui aussi d'y prendre
18 part dans une mesure limitée, c'est-à-dire qu'il a fallu qu'il monte la
19 garde près d'un bus. Il a dit que rien de mauvais ne s'était passé près
20 des bus où il avait monté la garde, mais il a dit qu'il se trouvait dans
21 l'avant-dernier bus dans cette région où Brdo avait été nettoyée.
22 D'autres témoins, dont le nom m'échappe maintenant, ont parlé de meurtres
23 qui ont été commis lors de cette opération de nettoyage. Le témoin DD a
24 notamment prouvé l'existence de tout cela, de tant de cadavres. Il a dit
25 que lorsqu'ils sont allés à Omarska, il y avait des soldats qui ont été
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1 tués lorsqu'ils étaient allés prendre un thé ou un café.
2 Et lorsque vous avez demandé, Monsieur le Juge Schomburg: "Comment savez-
3 vous que c'était le dernier bus?" Il a dit: "Parce que tout simplement,
4 tous de Brdo avaient été amenés déjà préalablement. Nous étions dans les
5 deux derniers bus."
6 Le témoignage des témoins à charge, tel M. Sivac par exemple, corrobore
7 tout cela. Lorsque nous parlons de la date du 1er juillet, lorsque nous
8 savons qu'environ 20 bus étaient venus à Omarska en juillet, fin juillet,
9 des gens de Brdo étaient parvenus à Keraterm et le témoin, pour le moins,
10 se trouvait là-bas.
11 Nous nous rappelons fort bien comment il nous a présenté les conditions
12 cruelles dans lesquelles se trouvaient ces jeunes gens de Brdo, notamment
13 lorsqu'ils se sont trouvés dans la salle n°3, lorsqu'ils ont été
14 sélectionnés le même jour, lorsqu'il leur a été donné l'ordre de se
15 dévêtir et de s'adonner à des actes sexuels respectivement, à tel point
16 ils étaient humiliés.
17 Ensuite nous savons très bien qu'il y avait une mitrailleuse plantée
18 devant la salle de n°3 et qu'au cours de la nuit qui a suivi, plusieurs
19 heures on a fait feu avec cette mitrailleuse à l'encontre de cette salle-
20 là où on se sait plus combien de gens se sont fait tuer. Plus de 100.
21 En tout cas, devant les soldats, gardes de Keraterm, tout ce que ceci a
22 été fait, perpétré par des membres de l'unité militaire.
23 Cet incident a été suffisamment bruyant parce que Keraterm se trouve à
24 l'orée de la ville, les gens de Prijedor devaient l'entendre et tous
25 devaient avoir l'idée de cet incident qui s'était produit dans la salle de
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1 n°3. Monsieur Travar en a témoigné lorsqu'il a dit que ce bruit-là a duré
2 pendant plusieurs heures.
3 Une fois de plus, les dirigeants politiques voulaient induire en erreur
4 les gens pour essayer de camoufler et occulter ces crimes, tout simplement
5 en disant qu'il avait été tiré sur un Serbe.
6 Nos n'avons pas dit que la partie adverse n'avait pas perpétré de crime.
7 Tout le long des hostilités, il est tout à fait clair que des crimes
8 avaient été perpétrés de part et d'autre.
9 Pour l'ensemble de la région de Prijedor, nous ne saurions dire qu'il n'y
10 avait pas de Serbe qui n'aurait pas été victime d'un crime. Ceci n'est pas
11 exact. Mais il ne s'agit pas là de la vérité, il ne s'agit pas seulement
12 et tu quo que, en tant que principe de droit international qui existe,
13 mais il s'agit de parler d'un principe d'humanité. Vous ne devez pas tuer
14 des gens tout à fait sans culpabilité aucune et qui ont été tous des
15 innocents et toujours parler d'un crime.
16 Et ce qui semble clair, tout ce qui a été dit et fait ne servait que de
17 prétexte de quelque chose et pour quelque chose qui a été planifié au
18 préalable, à savoir modifier le tableau démographique de Prijedor.
19 On voit où se présentait la fin de ces crimes? On le voit d'après la
20 destruction des foyers, des maisons, mais également des institutions
21 religieuses.
22 L'un des aspects clés de ce plan de génocide, bien entendu, se traduit par
23 l'existence de camps qui ont été mis en place.
24 Monsieur le Président, répondant à l'une des questions qui a été adressée
25 à nous lorsqu'il fallait se mettre d'accord si nous mettions un trait
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1 d'égalité entre tous les camps, nous avons dit que tous les camps
2 n'avaient pas été les mêmes; il n'y avait pas toujours le même nombre de
3 gens dans les camps, et ces gens ne passaient pas toujours la même période
4 de temps. Il y a une différence plus qu'évidente entre le camp de
5 Trnopolje, Omarska et Keraterm.
6 Le camp de Keraterm, généralement parlant, était un lieu tel le lieu où
7 l'on emmène le bétail avant de le déplacer ailleurs. Ce lieu se trouvait à
8 une distance de quelques centaines de mètres de la gare ferroviaire.
9 Les gens devaient avoir l'idée de quitter Prijedor, et cela, une fois pour
10 toutes. Ils devaient tout simplement signer comme ayant remis toutes leurs
11 propriétés et biens. Et ils devaient le faire, autrement dit ils auraient
12 dû faire face à la mise à mort qui serait la leur.
13 Je ne dirai pas qu'il s'agissait d'un départ volontaire. Nombreuses de
14 leurs maisons ont été détruites. Tous ces gens-là ont été sans travail,
15 tous ont dû subir une campagne de terreur et de tuerie. Et lorsqu'ils ont
16 quitté Prijedor, ils l'ont fait assister par la cellule de crise.
17 Cette même cellule de crise qui avait à sa tête le docteur Stakic et qui
18 -cette cellule de crise- organisait des bus, des trains, des camions qui
19 devaient entre autres transférer du bétail. Mais Trnopolje, en tant que
20 ville, n'était pas vraiment un lieu agréable.
21 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges vous en avez entendu
22 parler.
23 Je voudrais tout simplement vous rappeler un petit peu les photographies
24 remises par le docteur Mujadzic à des journalistes étrangers, en date du 5
25 août.
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1 On peut voir quel était le traitement réservé à un jeune homme, cette
2 fois-ci dans un centre clinique de Trnopolje.
3 (Diffusion de photographies.)
4 Je parle maintenant du camp Trnopolje avant que les gens de la Croix-Rouge
5 y viennent. Il y avait très peu de nourriture, l'hygiène était nulle, des
6 gens devaient travailler ailleurs pour creuser des tranchées. McCleod et
7 d'autres journalistes étrangers qui se sont rendus dans ces camps ont
8 témoigné de ces risques de maladies qui pouvaient se répandre là-bas,
9 étant donné les mauvaises conditions hygiéniques. Mais les gens y ont été
10 maltraités, violés, tués, mais pas dans l'exacte mesure et aux mêmes
11 proportions qu'ils l'ont été à Omarska et Keraterm. Il s'agit donc de
12 l'une des salles présentées sur cette photographie, grâce au docteur
13 Mujadzic.
14 Un expert militaire de la défense nous a dit que c'était l'armée qui avait
15 pris en charge tous ces camps-là. D'autres témoignaient pour dire que
16 c'était la police qui était responsable des camps. Mais il y a pas mal
17 d'éléments de preuve qui prouvent que le contrôle a été pris en charge par
18 la cellule de crise. La cellule de crise administrait le camp moyennant la
19 police et l'armée, l'armée qui devait sécuriser Trnopolje, sécuriser dans
20 un anneau extérieur Omarska. Les gardes policiers se trouvaient à Keraterm
21 et Omarska. Somme toute, ils se trouvaient sous le contrôle de la cellule
22 de crise.
23 Pourquoi est-ce que j'en parle? Parce que nous avons d'abord des
24 photographies à l'appui.
25 D'abord, concernant M. Drljaca, nous avons une décision de ce dernier
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1 portant mise en place du camp d'Omarska. Je crois qu'il s'agit de la pièce
2 à conviction S107.
3 Nous savons bien que le camp a été formé une fois que Kozarac a été
4 nettoyée. Aussitôt après on a pu se rendre compte de l'affluence de la
5 population de Kozarac.
6 En date du 31 mai, M. Drljaca parle de l'administration du camp et il dit
7 comme suit: "Ce camp a été formé suite à une décision prise par la cellule
8 de crise."
9 De même, le conseil de la défense nous a communiqué un document qui nous
10 permet de voir qu'une fois que les journalistes étaient venus, M. Drljaca
11 faisait rapport au CSB de Banja Luka pour dire qu'Omarska et Keraterm
12 étaient mis en place, suite à une décision prise par la cellule de crise.
13 Le conseil de la défense soutiendrait que M. Drljaca voulait faire
14 endosser à quelqu'un d'autre cette même décision, mais les documents
15 prouvent que, notamment, il ne pouvait pas se faire disculper par ces
16 documents.
17 Le premier document que j'ai mentionné, celui du 31 mai, portant
18 établissement de ce camp, ne présente aucune raison pour lesquelles on
19 pourrait peut-être occulter le rôle de ce premier. En date du 31 mai, il
20 ne parle pas à ses supérieurs d'autre chose, mais que de la façon dont le
21 camp devait être administré. Et il a dit que ceci devait être en accord
22 avec la décision de la cellule de crise.
23 Ensuite nous avons le document S151. Il s'agit d'une cassette vidéo.
24 Excusez-moi. Cette cassette vidéo nous permet de voir que le reporteur a
25 dit que le colonel Arsic a dit à la presse que l'armée -à savoir le centre
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1 de rétention et de rassemblement de Trnopolje-, que ce camp, ces lieux
2 sont sous contrôle exclusif des autorités civiles, et que l'armée n'avait
3 rien à y voir.
4 Ensuite nous nous rappelons les visites rendues par un journaliste
5 étranger aux bâtiments de l'assemblée municipale, en date du 5 août. Si
6 vous vous le rappelez, vous allez voir qu'il y avait une réunion où le
7 colonel Arsic et d'autres, notamment le colonel Arsic, voulaient
8 encourager les journalistes pour aller à Manjaca.
9 Pourquoi? Parce que nous avons entendu parler de témoins là-dedans et de
10 cela. Il s'agit de témoins qui ont été transférés d'Omarska à Manjaca. Et
11 comme Manjaca présentait de très mauvaises conditions -il s'agissait
12 d'étables pour chevaux-, mais Omarska, comparaison faite avec Manjaca,
13 était un véritable hôtel.
14 Parmi les militaires et d'autres gens, il y avait le docteur Stakic, le
15 docteur Kovacevic, Drljaca et Arsic. Ils voulaient encourager les
16 journalistes étrangers pour qu'ils se rendent à Manjaca. Ils ont voulu
17 voir Omarska.
18 A la fin, M. Vulliamy a témoigné pour dire que le colonel Arsic s'est
19 désisté. En page du transcript, 7923, il a dit: "Si vous voulez vous
20 rendre à Omarska, voilà les gens que vous devez contacter." Après, M.
21 Vulliamy a fait un geste avec sa main droite, et c'est ainsi que le
22 colonel Arsic a montré Stakic et Kovacevic. Après quoi, la conversation a
23 été poursuivie sur Kovacevic et Stakic.
24 Voilà les gens qui devaient donner la permission pour qu'il y ait une
25 visite quelconque au camp d'Omarska. En fin de compte, il n'y a pas
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1 seulement que M. Drljaca qui parlait de Omarska comme étant administré par
2 la cellule de crise; M. Arsic en parle, il dit que la cellule de crise
3 tenait sous son pouvoir les camps.
4 Messieurs les Juges, vous avez déjà vu cet élément de preuve: il s'agit de
5 l'élément S187.
6 Voilà ce qui est écrit. Le journalise a dit: "Dans les journaux
7 britanniques, nous avons pu lire des écrits sur les centres d'Omarska, de
8 Trnopolje et sur d'autres camps. Les autorités de Prijedor exercent-elles
9 un contrôle quelconque ou ont-elles exercé un quelconque contrôle dans de
10 tels camps?"
11 Or, voilà, à deux reprises le journaliste fait mention du terme
12 "contrôle". Il ne s'agit pas seulement de mettre en place une cantine pour
13 l'armée ou de mettre en place un objet militaire quelconque.
14 Le docteur Stakic, en réponse, a dit: "Les lieux, tels Omarska, Keraterm
15 et Trnopolje, étaient nécessaires à un moment donné et ont été formés en
16 vertu d'une décision prise par les autorités civiles de Prijedor".
17 Après quoi, le journaliste a dit: "Donc ces trois camps, n'est-ce pas…"
18 Le docteur Stakic ajoute: "Il s'agit de centres de réception".
19 Le reporteur poursuit: "Les centres de réception ont été formés suivants
20 une décision prise par les autorités civiles qui sont les vôtres?"
21 Le docteur Stakic répond: "Oui. Et, comme je vous l'ai déjà dit, ceci
22 s'est avéré nécessaire à un moment donné".
23 Donc il paraît tout à fait clair que le docteur Stakic dit à deux
24 reprises, une fois qu'on lui a posé la question là-dessus, que les camps
25 se trouvaient sous le contrôle des autorités civiles qui étaient les
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1 siennes.
2 Il continue en parlant de Trnopolje, en disant que Trnopolje était quelque
3 chose de tout à fait différent. Ces gens avaient fui les ravages de la
4 guerre. Vu la vision de ces extrémistes qui poussaient leurs propres
5 enfants, les femmes et les enfants, devant des armes… et essayaient de
6 passer, de traverser vers Kozara.
7 On les recevait simplement à Trnopolje de façon à leur fournir des
8 aliments, afin qu'ils puissent avoir de l'aide internationale, que les
9 transports puissent être organisés aux lieux où ils souhaitaient se
10 rendre, pour les protéger à la fois contre les Musulmans extrémistes et
11 contre les revanchards, les membres des autres peuples qui avaient perdu
12 leurs plus proches parents; pour empêcher que ceux qui voulaient leur
13 revanche ne puissent causer d'autres effusions de sang.
14 Plusieurs choses, ici, sont à l'évidence des tromperies, des tromperies de
15 la part du docteur Stakic.
16 Nous savons que la communauté internationale n'a pu avoir accès à
17 Trnopolje jusqu'au moment de la visite des journalistes étrangers –à
18 laquelle je reviendrai brièvement, parce qu'il y a d'abord la question des
19 événements à Prijedor.
20 Il dit aussi qu'il s'occupait de fournir une aide internationale, mais
21 l'aide internationale n'a pas pu avoir accès. Il dit que les gens
22 circulaient librement, mais en fait nous avons une décision de la cellule
23 de crise, à savoir qu'aucun individu ne pouvait être relâché de Trnopolje
24 sans sa permission.
25 Je vous remercie de votre patience.
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1 M. le Président (interprétation): Nous vous remercions.
2 Avant de lever la séance, je voudrais annoncer que lundi prochain il y
3 aura une légère modification de l'horaire. On commencera seulement à 9
4 heures et demie et on continuera jusqu'à 13 heures dans la salle
5 d'audience n°2. Puis on reprendra à 2 heures et demie toujours mais dans
6 la salle d'audience n°1. Et la même procédure aura lieu aujourd'hui. Nous
7 allons reprendre à 2 heures et demie dans la salle d'audience n°1.
8 Je lève la séance.
9 (L'audience, suspendue à 13 heures 05, est reprise à 14 heures 32.)
10 M. le Président (interprétation): Bonjour. Veuillez vous asseoir.
11 Nous allons maintenant entendre la troisième partie des réquisitions de
12 l'accusation.
13 Monsieur Koumjian, vous avez la parole.
14 M. Koumjian (interprétation): Je vous remercie.
15 Nous parlions ce matin des camps de prisonniers à Prijedor et du fait que
16 ces camps étaient contrôlés par la cellule de crise, par les organes
17 d'autorité qui avaient à leur tête l'accusé, Milomir Stakic. L'élément de
18 preuve que nous avons présenté montre que toute la logistique de ces camps
19 avait été prévue par la cellule de crise, montre que leur création avait
20 été faite par la cellule de crise.
21 S84 -si nous pouvions avoir ce document à l'écran- est encore une preuve
22 supplémentaire de la connaissance et de l'intention qu'avait la cellule de
23 crise et le docteur Stakic constituant ces camps. C'est une décision
24 signée par le docteur Stakic de la cellule de crise, et il indique que
25 toutes les entreprises, sociétés et communautés doivent mettre fin à
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1 l'emploi de ceux qui sont actuellement à Omarska et Keraterm.
2 Un document, que vous connaissez bien, est celui qui porte la cote S110 ou
3 316. Je crois qu'il apparaît deux fois. Ce document confirme que la
4 conclusion du 2 juillet qui a interdit de relâcher des personnes de
5 Trnopolje, d'Omarska et de Keraterm... Excusez-moi. C'est un document qui
6 concerne la mise en œuvre de la décision de la cellule de crise et des
7 ordres donnés à la police. Et l'une des conclusions qui est donnée est la
8 conclusion concernant l'interdiction de relâcher des personnes de
9 Trnopolje, Omarska à Keraterm.
10 Donc, là encore, ceci montre que la police obéissait aux ordres de la
11 cellule de crise, et que c'était la cellule de crise qui avait en fait les
12 clefs de ces prisons.
13 Nous avons entendu les dépositions de certains des témoins, du type de
14 personnes qui étaient emmenées dans ces camps; pas seulement ceux qui se
15 trouvaient vivre dans les régions en question, essentiellement Musulmans
16 bosniaques ou les communautés croates, des endroits comme Brdo ou Kozarac.
17 Nous savons que les personnes de la ville, les professionnels ont été
18 emmenés, des personnes qui n'avaient aucun lien avec les paramilitaires,
19 des personnes qui n'avaient aucun lien avec les partis nationaux comme M.
20 Murselovic qui était à la tête d'un parti indépendant multiethnique, le
21 Parti de l'initiative privée. Des juges, des femmes. Nous avons entendu
22 également des personnes handicapées, des personnes qui ne pouvaient pas
23 prendre part au combat.
24 Nous avons entendu parler d'un Procureur qui était pratiquement aveugle et
25 qu'il fallait conduire, qui avait mis sa main sur l'épaule d'une autre
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1 personne pour pouvoir aller prendre son repas et trouver son chemin. Nous
2 avons entendu parler de personnes telles que des médecins, des dentistes,
3 des juges et des femmes, et qui étaient retenus au camp.
4 Nous avons demandé à l'un des témoins, le témoin B, ce qu'il avait à dire
5 sur la présence de personnes âgées au temps de Keraterm. Et je voudrais
6 vous rappeler sa déposition, qui a été faite il y a assez longtemps. Je
7 pense qu'on pourrait juste montrer une brève séquence vidéo de ce qui nous
8 a dit le témoin B.
9 Là encore, pour la cabine d'interprètes, nous attendons la séquence vidéo
10 concernant le témoin B. S'il y a un problème, ils pourront le signaler.
11 Nous n'obtenons pas le son, alors je ne sais pas si l'on peut réessayer…
12 mais on n'entend pas la bande sonore. Est-ce que l'on pourrait revenir en
13 arrière, recommencer et voir ce que nous pouvons obtenir la bande sonore
14 en même temps que la bande vidéo.
15 (Diffusion et traduction de la vidéo.)
16 "-M. Koumjian: J'essaie d'aller rapidement, de façon à ce que l'on puisse
17 finir votre déposition.
18 Je voulais vous demander: dans le camp, est-ce qu'il y avait des femmes?
19 Est-ce que vous en avez vu au camp de Keraterm?
20 -Témoin B: Il n'y avait pas de femmes, sauf… eh bien, des femmes sont
21 venues; ils laissaient des femmes au camp, celles qui attendaient un moyen
22 de transport, un véhicule pour les transférer ensuite à Omarska. Deux
23 femmes ont même passé la nuit dans notre cellule. Mais, en règle générale,
24 elles ne restaient pas longtemps.
25 -Q: Est-ce qu'il y avait des mineurs, des personnes de moins de 18 ans
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1 dans le camp?
2 -R: Oui, il y en avait. J'ai même vu un jeune garçon, il s'est présenté à
3 nous et, au cours de notre conversation, il a dit, dans cette
4 conversation, qu'il avait 14 ans; on pouvait voir que c'était un enfant,
5 mais nous étions vraiment stupéfaits lorsque nous avons entendu qu'il
6 était si jeune.
7 -Q: Est-ce que vous avez vu des personnes qui étaient plus âgées, par
8 exemple qui étaient au-delà de l'âge de la retraite?
9 -R: Oui. Il y avait des personnes âgées, des personnes bien plus âgées que
10 des personnes parties à la retraite, parce que je crois qu'on pouvait
11 partir à la retraite dès 60 ans, mais il y avait des personnes qui étaient
12 beaucoup plus avancées en âge que cela.
13 Il y avait même une personne qui, pensons-nous, avait probablement plus de
14 70 ans. C'était un vieillard qui venait de Kozarac. Il n'était pas très
15 grand, mais il était en bonne forme physique et l'on pouvait voir qu'il
16 était sain, qu'il était alerte. Et, tous les matins lorsqu'on se levait,
17 il faisait certains exercices, ce que nous trouvions un peu bête à
18 l'époque parce qu'il était le seul d'entre nous à le faire. Mais il se
19 trouve que c'était le plus vieux d'entre nous, de sorte que, lorsque nous
20 lui parlions, au moment où nous lui parlions, il nous a même dit qu'il
21 avait été dans un des camps de Hitler. C'est ça qu'il nous a dit. Il nous
22 a dit: 'J'ai été dans un camp de Hitler pendant la Deuxième Guerre
23 mondiale.' Alors nous lui avons demandé: 'Qu'est-ce qui est le pire?' Et
24 il a ri et il a dit: 'Celui-ci est 100 fois pire.' C'est parce qu'en
25 Allemagne il était dans un camp de travail et il a dit: 'Personne ne me
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1 battait, j'avais à manger, j'avais mon propre lit.' Donc il a dit que ce
2 camp-ci était bien, bien pire."
3 (Fin de la vidéo.)
4 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, nous avons entendu de
5 nombreux témoin des camps parler d'événements horribles qui se sont
6 produits. On a entendu parler de tortures, des mauvais traitements, des
7 sévices sexuels, des meurtres qui ont eu lieu, mais je pense qu'il est
8 important parfois de réfléchir et de voir sous l'angle d'un individu ce
9 que cela représentait et rappeler, pendant que nous sommes dans ce
10 prétoire, le témoignage de Samir Poljak.
11 Et c'est pour cela que nous avons demandé cette brève séquence vidéo que
12 je souhaiterais vous représenter en ce qui concerne les 10 premiers jours
13 du camp d'Omarska alors qu'il était détenu dans un garage cet été-là à
14 Omarska. Donc ceci est la déposition, une brève séquence vidéo de Samir
15 Poljak qui parle de ces premières journées.
16 Je voudrais aussi vous rappeler que Samir Poljak venait de Kevljani et
17 c'était un des témoins qui a parlé du docteur Stakic qui avait travaillé
18 comme médecin à Kevljani et qui avait dit comment le docteur Stakic était
19 bien traité. D'après ce témoin, il était aimé par la population, la
20 communauté musulmane du village de Kevljani. Cela ne va pas se trouver sur
21 cet enregistrement, mais nous savons par sa déposition, par la suite, que
22 le père de M. Poljak a été tué dans ce camp, que ses cousins ont été tués
23 et qu'il a perdu, je crois, ses oncles de Kevljani. Ils étaient tous de
24 Kevljani. Ceci décrit simplement les 10 premiers passés dans ce garage.
25 (Diffusion de la cassette.)
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1 "-Q: Pourriez-vous dire aux Juges quelles étaient les conditions dans ce
2 garage dans lequel vous avez été détenu à Omarska?
3 -R: C'était tout simplement un garage ordinaire, pour autant que je puisse
4 remarquer, pour des voitures. Et c'est là qu'ils nous ont mis, qu'ils nous
5 ont tous mis et on devait être environ 150 à 160, de sorte qu'il n'y avait
6 pas assez de place à l'intérieur de ce garage pour qu'on puisse s'asseoir.
7 Nous étions tous debout, nous sommes tous restés debout à partir de ce
8 moment-là comme des sardines, serrés comme des sardines.
9 Question: Combien de jours avez-vous passé dans ce garage avec ce groupe
10 d'environ 150 hommes?
11 Réponse: J'y ai passé environ 10 jours.
12 Question: Et comment est-ce que c'était?
13 Réponse: C'était épouvantable. Quand ils nous ont enfermés là-dedans, il
14 faisait très chaud, il n'y avait pas assez d'air. Je me rappelle qu'en une
15 demi-heure ou une heure j'étais trempé de sueur. Tout ce que je portais,
16 ma chemise, mes pantalons, tout était trempé de sueur; c'était
17 insupportable.
18 Je me rappelle que j'ai appuyé ma main contre la paroi et j'ai vu que la
19 peinture sur la cloison commençait à fondre. Le plafond était teint de
20 gouttes de sueur; la sueur dégoulinait du plafond. Et puis, à un moment
21 donné, quelqu'un a demandé qu'on ouvre la fenêtre. Je crois que quelqu'un
22 l'a fait. Je n'ai aucune idée, mais je me rappelle que quelqu'un a sauté
23 et a cassé une fenêtre de façon à faire entrer de l'air à l'intérieur,
24 mais ceci n'a pas amélioré la situation parce que, même après cela,
25 c'était extrêmement chaud et étouffant.
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1 Nous avons demandé de l'eau parce que nous étions désaltérés et ils ont
2 dit: "Bien. Nous allons vous donner de l'eau, mais d'abord il faut chanter
3 une chanson.
4 Alors nous avons chanté du plus fort de nos voix et un bidon rempli d'eau
5 nous a été apporté, et les gens ont commencé à se battre autour du bidon;
6 c'était épouvantable. C'était une lutte pour survivre tout simplement.
7 Personne ne se souciait vraiment de son voisin. On se battait comme des
8 animaux pour l'eau qu'ils nous avaient apportée. C'était vraiment
9 épouvantable!
10 Je me rappelle le premier soir, deux jeunes hommes ont étouffé, ont
11 suffoqué. Je me les rappelle très bien. Ils étaient là, gisant sur le sol.
12 Ils étaient morts. Personne ne battait d'un cil, personne ne faisait
13 attention; c'était l'état dans lequel nous nous trouvions, chacun ne
14 s'occupait que de soi-même. Personne n'avait la moindre sympathie pour le
15 cadavre qui se trouvait là.
16 Jusqu'à il y a un jour on se parlait encore, les uns aux autres. Et
17 maintenant, cette personne était morte, mais cela ne faisait aucune
18 différence. C'était vraiment épouvantable.
19 -Q: Est-ce que, au cours de ces 10 jours, vous avez été nourris?
20 -R: Nous sommes arrivés le vendredi et ils ne nous ont rien donné jusqu'au
21 dimanche, ils ont simplement jeté des bidons d'eau dans la pièce. Ensuite,
22 le dimanche, je me souviens clairement qu'ils ont ouvert la porte et
23 qu'ils ont jeté du pain. Et, là encore, ça a été un véritable chaos parce
24 que les hommes ont commencé à se battre pour obtenir du pain; chacun
25 essayait d'en prendre.
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1 -Q: Qu'est-ce qui est arrivé aux deux corps de ceux qui étaient morts au
2 cours des deux premières journées?
3 -R: Leurs cadavres ont été sortis et mis sur l'herbe. Je me rappelle que
4 le jour suivant ou peut-être deux jours plus tard, ils ont donné la
5 permission de sortir vers cet espace herbeux un par un, de façon à pouvoir
6 aller se soulager. Et quand je suis sorti, j'ai vu l'un de ces deux gars
7 qui étaient morts qui gisait là sur l'herbe. Combien de jours s'était-il
8 passé dans l'intervalle, deux ou trois jours peut-être, je ne parviens pas
9 à m'en souvenir. Mais j'ai vu son corps, là, sur l'herbe, sur la pelouse.
10 Je me rappelle clairement son apparence. Il était plus grand que moi, il
11 était très grand et avait des cheveux bouclés.
12 -Q: Vous avez dit que vous étiez arrivé le vendredi soir. Quand est-ce
13 que, pour la première fois, vous a-t-on laissé sortir de ce garage pour
14 pouvoir uriner sur la pelouse?
15 -R: Je ne sais pas si c'était le lendemain matin, mais c'était soit le
16 samedi matin soit le dimanche matin. Je ne me rappelle pas.
17 -Q: Est-ce que vous vous rappelez comment vous vous sentiez lorsque vous
18 étiez sortie là et que vous avez vu l'herbe?
19 -R: Il était peut-être 9 ou 10 heures du matin. C'était une journée
20 ensoleillée, j'ai eu une impression merveilleuse. Je me sentais très bien.
21 L'odeur de l'air était agréable, ainsi que le soleil. C'était agréable. Je
22 ne trouve pas les mots pour le dire, c'était un sentiment merveilleux.
23 C'était quelque chose qui est resté fixé dans ma mémoire: ce matin et
24 cette herbe, l'odeur de l'air frais.
25 -Q: Et comment votre vie avait-elle changé par rapport à une semaine plus
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1 tôt?
2 -R: Elle avait changé de façon inimaginable".
3 (Fin de la diffusion vidéo.)
4 M. Koumjian (interprétation): Poljak était à l'école lorsque le
5 bombardement a commencé dans le secteur de Kozarac, et son père a été
6 emmené du camp et il n'a jamais pu apprendre ce qui était arrivé à son
7 père.
8 Monsieur le Président, nous ne pouvons pas comprendre ce qui s'est passé à
9 Prijedor sans connaître les événements du 5 août et la visite des
10 journalistes, des journalistes étrangers à Prijedor. Les événements dont
11 nous avons parlé concernant les meurtres dans la plupart de ces camps,
12 tout ce que j'ai mentionné jusqu'à maintenant, et la visite des
13 journalistes. Tout ce qui s'est passé.
14 L'attaque militaire de Hambarine a commencé le 23 mai, et la visite des
15 journalistes a eu lieu le 5 août. Les camps d'Omarska et de Keraterm ont
16 été constitués après l'attaque de Kozarac à la fin de mai. Donc nous
17 parlons d'une très brève période, fondamentalement juin, juillet, et
18 quelques jours en mai et en août, les milliers de personnes qui avaient
19 été tuées, qui ont été tuées pendant cette période, et le monde n'en avait
20 pas connaissance.
21 La Croix-Rouge internationale s'était vue refuser l'accès à Omarska,
22 Trnopolje et à tous ces camps. Et, dans une petite ville de Bosnie
23 certainement, les gens n'avaient pratiquement pas entendu parler de
24 Prijedor.
25 Il y avait une impunité parce que les gens qui étaient au pouvoir, le
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1 docteur Stakic et les autres, contrôlaient la presse et mentaient à leur
2 propre peuple. Et les gens ne savaient pas ce qui se passait. Mais, d'une
3 façon quelconque, un peu par hasard, fortuitement, nous savons que ces
4 événements avec cette visite incroyable ont commencé par une interview du
5 docteur Karadzic à Londres et quelques jours avant son interview. Tout
6 ceci est contenu dans la déposition de M. Vulliamy.
7 Quelques jours avant que le docteur Karadzic ne donne son interview, des
8 articles ont été publiés de seconde main selon lesquels les atrocités et
9 des choses épouvantables se passaient probablement à Trnopolje et à
10 Omarska, publié par Roy Gutman et un autre journaliste.
11 Pendant l'interview avec la télévision britannique, le docteur Karadzic
12 s'est vu demander ce qu'il en était, il a réfuté les accusations et a dit:
13 "Bien sûr, ceci n'a pas lieu. Si vous voulez voir comment nous traitons
14 nos prisonniers, vous pouvez venir voir. Nous ne les traitons pas de la
15 façon dont les Musulmans traitent les Serbes. Les Serbes sont traités de
16 façon inhumaine. Vous devriez venir visiter ces prisons."
17 D'une certaine façon, pendant que le docteur Karadzic était en route de
18 vers l'aéroport ce jour-là, ITN, la chaîne de télévision a contacté le
19 docteur Karadzic et a dit: "Nous acceptons votre invitation. Nous avons
20 des journalistes qui voudraient aller à Prijedor et voir ces camps." Pris
21 sur le moment, il a dit: "Bien sûr, ceci sera arrangé."
22 Et, à l'époque, on ne pouvait pas se rendre directement à la Republika
23 Srpska. Donc les journalistes ont dû prendre un avion et je crois qu'ils
24 sont passés par Budapest et, de Budapest, sont allés en voiture jusqu'à
25 Belgrade. Et une fois qu'ils sont arrivés à Belgrade, je crois que c'était
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1 au début du mois d'août, les deux premiers jours d'août, l'un des membres
2 de la présidence de la Republika Srpska les a rencontrés, c'était Nikola
3 Koljevic, le professeur de littérature shakespearienne.
4 Nikola Koljevic leur a parlé et a encouragé à nouveau ces journalistes à
5 visiter les camps où des Serbes étaient détenus par les Musulmans, par les
6 forces croates.
7 Et là encore, je voudrais répéter, Monsieur le Président, ces prétentions
8 selon lesquelles les Serbes étaient maltraités dans des camps de Musulmans
9 et de Croates ne sont certainement pas contestées par le Bureau du
10 Procureur. Nous avons même présenté des cas où cela était vrai.
11 En fait, Monsieur Vulliamy et d'autres journalistes ont accepté l'offre de
12 visiter certains camps en Serbie où il y avait des villages et ils ont
13 visité des camps et ils ont dit que ce n'étaient pas des endroits
14 agréables.
15 Mais ils n'étaient pas inhumains. Vous savez, ce n'étaient pas des
16 violations du droit international. Ces camps n'étaient pas choquants, mais
17 ils continuaient à dire: "Nous voulons voir Omarska, nous vouloir voir
18 Trnopolje." Les journalistes n'avaient jamais entendu parler de Keraterm.
19 Il n'y avait pas d'article publié concernant Keraterm, et ceci n'a donc
20 pas été mentionné.
21 Finalement, je crois que ce serait probablement vers le 3 août, le 2 ou le
22 3, les journalistes sont allés à Pale où ils ont rencontré directement le
23 docteur Karadzic. Et le docteur Karadzic les a à nouveau encouragés en
24 leur disant: "S'il vous plaît, allez à Sarajevo, allez voir les endroits
25 où les Serbes sont maltraités par le gouvernement d'Alija Izetbegovic et
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1 ses forces."
2 Les journalistes ont expliqué que le monde voulait savoir ce qui se
3 passait à Omarska et Trnopolje et ils ont dit: "Permettez-nous d'aller à
4 Prijedor. Nous allons envoyer nos collègues à Sarajevo, mais nous
5 pourrions vous aider de cette façon-là." Le docteur Karadzic dit: "Vous
6 pourriez être en danger. On tue souvent les journalistes et les Musulmans
7 jettent le blâme sur les Serbes. Il serait bien fort dangereux pour vous
8 de vous y rendre." Le journaliste a quand même insisté. Il a dit: "Nous
9 voulons voir à Prijedor." Et il a dit: "Y a-t-il des camps ici que nous
10 pouvons voir?"
11 Ils ont été emmenés au camp de Pale. C'est à cet endroit-là qu'il y avait
12 également des Bosniens, des Musulmans de détenus.
13 De nouveau, il n'y avait rien de choquant. C'était une installation de
14 détention. On y détenait des personnes, mais il n'y avait absolument rien
15 qui ressemblait à des camps de concentration. Cela ne ressemblait pas à ce
16 que, finalement, on a su qu'Omarska et Keraterm étaient.
17 En dernier lieu, on leur a permis d'y aller et ils ont été envoyés à Banja
18 Luka. Ils ont passé la nuit du 4 août à Banja Luka et, par la suite, on
19 leur a fourni une escorte. Si je ne m'abuse, c'était un commandant qui
20 travaillait pour le général Talic et il les a escortés jusqu'à Prijedor.
21 C'était le 5 août et cette journée est une journée assez incroyable pour
22 l'histoire de Prijedor car ces journalistes ne savaient pas que le
23 massacre de la pièce n°3 venait juste de se dérouler il y a environ 10
24 jours auparavant. On n'avait pas posé de questions sur Keraterm, mais tout
25 le monde à Prijedor connaissait ou avait entendu de l'histoire du massacre
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1 de Keraterm.
2 Malgré le fait qu'on ait essayé de retarder l'arrivée des journalistes,
3 malgré qu'on ait essayé de les dissuader de se rendre à cet endroit, les
4 journalistes ont insisté pour dire qu'ils voulaient absolument voir le
5 camp.
6 Et, en réalité, on leur a donné une version assez épurée d'Omarska et de
7 Trnopolje. Ce qui est assez intéressant, c'est que les préparatifs de
8 Prijedor avaient commencé avant que les journalistes n'arrivent. Nous
9 avons un ordre émis par le général Talic à l'endroit de l'armée disant
10 qu'il avait reçu un ordre oral disant qu'il permettait à la délégation de
11 se rendre à Prijedor, une délégation d'étrangers, et dans cet ordre, il
12 dit: "Assurez-vous que tout soit correcte, que les conditions soient
13 bonnes."
14 Nous avons entendu un témoin témoigner devant cette Chambre. J'oublie son
15 nom, je crois qu'il s'agissait d'un témoin protégé. Il s'agit(expurgé)
16 (expurgé)
17 Simo Drljaca l'avait contactée environ une semaine avant la visite des
18 journalistes et lui avait dit qu'une équipe de journalistes étrangers
19 allait venir sur place et il lui a dit: "J'aurai besoin de ton aide pour
20 interpréter. Je t'appellerai." Maintenant quels sont les préparatifs qui
21 ont été faits? D'abord, le camp de Keraterm avait été fermé le 5 août. Ce
22 matin-là, l'endroit où le massacre le plus important, qui était connu de
23 tous de Prijedor, venait juste d'arriver. Les journalistes n'avaient pas
24 entendu parler de cela et le plan était de ne pas les en informer.
25 Nous savons également que le voyage entrepris par les journalistes, durant
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1 ce voyage… ou surtout, lorsqu'ils sont arrivés sur les lieux, on ne leur a
2 pas permis de voir l'ensemble d'Omarska; on ne leur a permis de voir
3 qu'une certaine partie de ce camp. Les autorités savaient qu'elles avaient
4 beaucoup à cacher à Omarska, et on a permis aux journalistes que de voir
5 une partie de la cafétéria où les gens entraient, mangeaient la soupe.
6 C'était, selon les dires de certains témoins, une des meilleures soupes
7 qu'ils avaient mangées à ce jour.
8 Et lorsqu'ils ont demandé de voir les endroits où les détenus étaient
9 gardés, ils ont essayé au moins d'interviewer un prisonnier qui avait été
10 choisi et qui comprenait très bien les choses; il était très intelligent
11 et il savait très bien ce qu'il fallait dire. Il savait très bien que s'il
12 ne disait pas les bonnes choses, il serait tué. Mais ils n'ont pas accepté
13 d'interviewer ce prisonnier, qui est venu témoigner devant cette Chambre.
14 Ce n'est que la télévision serbe, qui les accompagnait, qui a procédé à
15 l'interview de ce prisonnier en question.
16 Il faut également dire que, lors de la présentation de cette visite et des
17 préparatifs entrepris, ce n'est pas une coïncidence que ce matin même l'un
18 des prisonniers du camp d'Omarska s'est fait sortir du camp.
19 Maintenant, je souhaiterais que l'on examine le document S378, je vous
20 prie. Nous avons beaucoup entendu parler, dans cette affaire, d'une
21 personne en particulier; il s'agissait d'un médecin, le médecin qui
22 s'appelle le docteur Esad Sadikovic.
23 Si je ne m'abuse, Monsieur le Président, je crois qu'il est toujours
24 important de voir le visage de quelqu'un. Nous avons examiné et tous vu ce
25 livre qui fait état de centaines de morts. Mais le caractère du docteur
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1 Sadikovic dépasse l'exemple d'une simple personne qui s'est fait tuer. Je
2 crois que c'est très important, dans l'affaire qui nous occupe, de savoir
3 ce qu'il est arrivé Sadikovic et les incidents qui ont entouré sa mort.
4 Le jour en question, nous savons qu'il a été emmené au poste de police
5 d'Omarska. Il y a un registre au poste de police d'Omarska qui a été
6 trouvé et qui corrobore les dires d'un témoin, et qui dit que cette
7 personne, ce médecin s'est fait sortir du camp.
8 Pourquoi était-il si important de garder le docteur Sadikovic à l'écart
9 des journalistes étrangers? D'abord, disons que le docteur Sadikovic avait
10 travaillé pour les Nations Unies, dans plusieurs pays du monde. C'était
11 une personne qui n'était membre d'aucun parti national. Il était marié
12 avec une Serbe. Il était bosnien, d'appartenance ethnique, de nationalité,
13 mais marié avec une Serbe.
14 Il était le leader d'un mouvement de paix. Madame Marinovic, qui était un
15 témoin de la défense, nous a dit que le docteur Sadikovic essayait de
16 propager la paix. Il se déplaçait dans la ville. Il disait qu'il fallait
17 essayer d'éviter le conflit. Il essayait de parler à toutes les parties
18 qui avaient pris part aux confrontations. Il parlait l'anglais également.
19 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, nous savons, après
20 les photographies qui ont été publiées dans le monde, M. Merdzanic a été
21 très brave; il a parlé aux journalistes et il a parlé des corps qui
22 avaient été passés à tabac. Il a également donné une pellicule aux
23 journalistes étrangers, afin que ces derniers puissent développer ces
24 photographies et voir ces corps.
25 Pouvez-vous imaginer quel en serait l'effet si le docteur Sadikovic avait
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1 eu le droit de parler aux journalistes? Imaginez-vous ce qu'il leur aurait
2 dit?
3 C'est très difficile d'essayer de spéculer, mais je me demande: qu'est-ce
4 qui se serait passé, s'agissant du conflit en Bosnie, si l'on avait permis
5 au docteur Esad Sadikovic de parler -qui, selon tous les dires des témoins
6 qui sont venus témoigner, est un homme avec énormément de charme,
7 charismatique, un homme neutre, un homme humanitaire, qui avait travaillé
8 également et avait pris part aux missions humanitaires des Nations Unies?
9 Il était marié avec une Serbe. S'il avait parlé sur la chaîne CNN ou s'il
10 avait pu s'exprimer à travers les médias, vous pouvez vous imaginer
11 l'image que l'on aurait eue du camp d'Omarska. L'attention du monde aurait
12 été concentrée sur Prijedor.
13 Cela a pris quelques années de plus –et après le massacre de Srebrenica-
14 pour que le monde puisse finalement avoir les yeux rivés sur la guerre en
15 Bosnie, et comprendre qu'il y avait une guerre importante en Bosnie.
16 Le peu de choses qui ont été publiées, le peu d'articles publiés ont eu un
17 article très important; pas pour leur contenu, mais pour ce qui,
18 justement, n'a pas été dit.
19 Je souhaiterais que l'on montre un extrait assez bref. Il s'agit, en fait,
20 de diffuser la pièce S329. J'ai un extrait assez bref, il s'agit de deux
21 différentes pièces.
22 (Diffusion et traduction de la vidéo.)
23 "-Q: Y a-t-il quelque chose que vous pourriez me dire sur les conditions
24 dans lesquelles vous êtes gardé?
25 -R: Je ne suis pas certain si je peux vous en parler, je n'ai pas le
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1 droit.
2 -Q: Est-ce que vous pouvez me comprendre?
3 -R: Avant, c'était une fois par jour dans l'ancien camp. Mais je ne sais
4 pas, je viens d'arriver, nous venons d'arriver aujourd'hui.
5 -Q: Est-ce que vous avez entendu dire si les gens se faisaient passer à
6 tabac, ici?
7 -R: Ici, non. Je préfère ne pas en parler".
8 (Fin de la vidéo.)
9 M. Koumjian (interprétation): Veuillez arrêter la cassette ici, je vous
10 prie.
11 Eh bien, ce jeune homme, je ne sais pas du tout qui il est. Il vient de
12 Keraterm. Je ne sais pas si c'est l'un des hommes qui, le 21 août ou 16
13 jours plus tard, se trouvaient dans le convoi en direction de Vlasic. Mais
14 ce qu'il n'a pas dit a eu un effet absolument fracassant. Il a dit: "Non,
15 il n'y a pas de passages à tabac. Ici, il n'y en a pas".
16 Et ensuite, nous avons entendu le docteur Merdzanic, alors qu'on lui a
17 posé des questions semblables; il s'agit de la pièce 323. Veuillez
18 poursuivre.
19 (Diffusion de la vidéo.)
20 "-Q: Y a-t-il plusieurs personnes qui se sont fait passer à tabac, dans ce
21 camp?
22 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)
23 Plusieurs personnes?
24 (Le visage du témoin nous montre qu'il est mal à l'aise.)"
25 (Fin de la vidéo.)
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1 M. Koumjian (interprétation): Le monde a vu peu. Ce que nous savons
2 maintenant, c'est que cette diffusion n'a pu démontrer les atrocités qui
3 se sont passées au camp en question.
4 Mais ce voyage ne s'est pas simplement terminé et soldé par la fermeture
5 du camp de Keraterm. Puisque le camp a été fermé, les prisonniers ont été
6 divisés en trois groupes. L'un des groupes a été envoyé à Trnopolje. Ce
7 jeune homme, qui est venu parler à la clôture, a été envoyé à cet endroit-
8 là. Un autre groupe a été envoyé à Manjaca.
9 Et ce jour-là, le 5 août, le commandant du camp a lu une liste comportant
10 120 noms. Ces personnes, selon le témoin B, ont été entassées et ont été
11 placées à bord d'un autobus de la compagnie "Autotransport". Ils ont été
12 escortés d'une escouade d'intervention, celle qui avait déjà été au camp
13 auparavant, qui avait passé à tabac les prisonniers. Ils ont emmené les
14 prisonniers qui ne sont plus jamais retournés.
15 L'un des témoins a reconnu en fait Dado Mrdja qui donnait des ordres alors
16 que les prisonniers étaient alignés; 120 de ces prisonniers ont été placés
17 à bord des autobus ce jour-là.
18 Nous savons que ces autobus se sont dirigés à Omarska. Les prisonniers ont
19 passé la nuit soit dans les autobus ou dans le camp. Et très tard cette
20 nuit ou tôt le lendemain matin, le 6 août, un ordre est venu d'un membre
21 de la cellule de crise, de Simo Drljaca, avec une liste de 125 noms, y
22 compris 120 noms de prisonniers qui étaient à Keraterm. Le nom du docteur
23 Esad Sadikovic se trouvait parmi les noms de la liste. Il s'agissait d'un
24 ordre ordonnant à ces gens de les tuer. Ils ont été emmenés.
25 Et tout près de la municipalité de Prijedor, à Sanski Most, un endroit qui
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1 s'appelle Hrastovo Glavica, on a exhumé 126 corps. Et si je m'abuse, on a
2 également déterré une personne qui était là depuis la Deuxième Guerre
3 mondiale. Toutes les personnes qui ont été identifiées comme étant des
4 gens de Keraterm qui se trouvaient, ce jour-là, à bord de ces deux
5 autobus. Il y a eu quelques identifications positives qui ont pu être
6 faites et elles provenaient de ces gens-là.
7 Et de nouveau, pourquoi était-il nécessaire de tuer le docteur Esad
8 Sadikovic? Je souhaiterais que l'on passe un extrait vidéo assez bref.
9 Nous allons entendre trois témoins parler du docteur Sadikovic; deux
10 témoins sont des témoins de la défense. En fait, les deux premiers sont
11 des témoins de la défense.
12 Avant de commencer, je souhaiterais vous rappeler que la première fois que
13 nous avons entendu ce nom, c'était le témoin A; c'est lui qui a parlé du
14 docteur Sadikovic. Il a dit que c'était un homme absolument incroyable qui
15 essayait de remonter le moral des autres prisonniers. Il a dit qu'il les
16 avait traités, même s'ils avaient des blessures si graves qu'il n'y avait
17 absolument aucun moyen de les traiter. Lorsqu'il fallait appliquer des
18 points de suture, le docteur Sadikovic improvisait des moyens pour faire
19 des points de suture.
20 Il y avait un fils et un père au camp, selon les dires d'un autre témoin.
21 Il nous a dit que, tous les jours, le docteur Sadikovic -qui était
22 populaire également parmi les gardes- avait le droit de se déplacer d'une
23 pièce à l'autre. Ce père en question a remis au docteur Sadikovic un
24 morceau de pain. Il avait donc remis ce morceau de pain au docteur
25 Sadikovic pour qu'il puisse le remettre à son fils, car il était malade.
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1 Le témoin A nous a dit qu'un jour le docteur Sadikovic était
2 particulièrement triste. Il lui a demandé ce qu'il se passait, pourquoi il
3 était si triste; il a dit que son fils était mort. Le père de ce fils, le
4 père de cet enfant qui s'est fait tuer lui avait remis un morceau de pain,
5 et le docteur Sadikovic ne savait pas quoi faire avec ce morceau de pain.
6 Et le docteur Sadikovic a offert ce bout de pain aux autres hommes qui
7 avaient faim, mais il ne l'a pas mangé lui-même.
8 De nouveau, je souhaiterais que l'on passe un extrait vidéo; il s'agit de
9 deux témoins de la défense et d'un témoin de l'accusation. Ils parlent
10 tous du docteur Sadikovic, dans ces brefs extraits.
11 (Diffusion de la vidéo.)
12 "-Q: Vous dites à la page 36, ligne 5, que le docteur Esad Sadikovic n'est
13 plus parmi nous. Du moins, vous dites ne pas savoir si le docteur
14 Sadikovic a été soupçonné de crime. La question qui se pose est donc la
15 suivante: pourquoi le docteur Esad Sadikovic est-il disparu? Pourquoi il
16 n'est plus parmi nous? Vous avez dû y réfléchir. Après tout, c'était votre
17 collègue.
18 -R: Oui, certainement. Je peux vous l'expliquer.
19 - Q: Allez-y, je vous prie.
20 - R: Le docteur Sadikovic était un collègue, c'était également un ami.
21 Nous nous rendions visite. Il était un ami, il aimait bien rire, et
22 c'était un médecin extraordinaire. Je ne veux même pas penser qu'il aurait
23 pu commettre des crimes.
24 Pour ce qui est de sa disparition et de son destin tragique, je peux dire
25 que ceci a eu une incidence bien grave sur moi. Je sens encore la
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1 tristesse de ne plus le voir. Il ne sera plus mon ami, je ne pourrais plus
2 le fréquenter comme ami. Je n'étais pas en mesure de l'aider d'aucune
3 façon que ce soit. Je ne pouvais même pas savoir où il était au moment où
4 il a disparu. Je ne sais même pas… je ne pouvais pas savoir ce qui lui
5 était arrivé. La seule information que j'avais concernant son sort m'est
6 parvenue après la guerre.
7 Le docteur Sadikovic a disparu. Je ne sais pas quand. Je peux simplement
8 présumer que c'était au début de la guerre. Mais, jusqu'à ce jour, il
9 m'arrive de voir quelqu'un qui lui ressemble dans la rue. J'espère
10 toujours que c'est lui, car nous n'étions pas seulement des collègues,
11 nous étions vraiment de très bons amis. Donc je prends toujours d'autres
12 personnes pour lui espérant toujours que c'est lui.
13 Je me souviens très bien. Nous étions revenus du village. Nous étions
14 devant le village après la prise de pouvoir. Esad Sadikovic est arrivé et
15 "Miso" l'aimait beaucoup. Ils étaient semblables. C'était des gens qui
16 avaient beaucoup de choses en commun. Donc Sadikovic est venu voir "Miso"
17 et il lui a dit, je vais essayer de le citer:
18 'Vous savez, ces idiots qui appartiennent de l'autre côté au village là-
19 bas, ces imbéciles, je ne connais pas le nom du village, eh bien, ils sont
20 en train d'ériger des barricades. Parlons à ces gens-là."
21 "Miso", sans dire un seul mot, est allé joindre "Eso" et ils sont montés
22 dans une Jeep, ils sont partis à bord d'une Jeep. Ils sont restés à cet
23 endroit pendant assez longtemps. C'était presque minuit et "Miso" n'était
24 pas encore revenu. J'avais bien peur parce que j'ai entendu dire beaucoup
25 de choses sur "Eso", un bon nombre de choses avaient été dites sur lui. Je
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1 n'étais pas tout à fait certain, mais je l'avais vu déjà auparavant avec
2 d'autres Musulmans qui étaient pour la division ethnique à l'époque.
3 Et "Miso", pour ce qui est de "Miso" et pour ce qui est de ce qu'il
4 croyait que Esad Sadikovic était, je me suis dit: "Eh bien, si "Miso" a
5 confiance en lui, il doit être un homme correct.'
6 Et juste avant minuit il est revenu à la maison. Je lui ai dit: 'Qu'est-ce
7 que vous avez dit?' Et il m'a dit: 'Eh bien, nous sommes assis avec ces
8 gens-là. Nous avons bu un peu d'eau de vie ensemble et c'est comme ça que
9 cette réunion s'est terminée.'
10 - Q: A plusieurs reprises dans votre témoignage, vous avez dit que le
11 docteur Esad Sadikovic a traité vos plaies ainsi que M. Smail Duratovic.
12 Il a administré des soins donc à vous-même et à M. Smai Duratovic. Vous
13 souvenez-vous quand vous avez vu pour la dernière fois le docteur
14 Sadikovic? Ou d'abord, dites-nous quel genre de personne était le docteur
15 Sadikovic?
16 - R: Vous parlez de Prijedor, vous parlez de la ville, vous parlez de ces
17 camps, des tragédies. Et ne pas parler du nom d'Esad Sadikovic serait une
18 très grave erreur. C'était un homme très humain et il a aidé chaque
19 personne indépendamment de la couleur de sa peau et de son appartenance
20 ethnique.
21 Il était un expert qui avait travaillé pour les Nations-Unies, le Haut
22 Commissariat des Nations-Unies. Il avait parlé qu'il avait travaillé déjà
23 en Libye et dans un bon nombre de pays africains et également quelque part
24 dans le Pacifique. Il aidait les gens. C'était une personne charismatique
25 Dans la ville de Prijedor, il connaissait la ville, il savait qu'il était
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1 apprécié, il en était fier.
2 Au camp d'Omarska il a essayé de faire de son mieux pour aider toutes les
3 personnes, pour venir en aide à toutes les personnes à chaque fois qu'il
4 le pouvait. Et, quand il n'y avait personne pour aider, il était toujours
5 là. Il aidait même les gardes serbes, des fois prenaient leur relève alors
6 qu'ils étaient complètement ivres. Des fois ils étaient blessés. Il leur
7 arrivait également de se disputer entre eux l'argent et c'était l'argent
8 qu'ils avaient pillé. Ils ne savaient pas comment distribuer cet argent
9 parmi eux. Et il leur venait en aide même à eux.
10 Et, après que la plupart des médecins de Prijedor ont été tués, je peux
11 vous dire que les autorités de Prijedor le savaient très bien qu'il
12 fallait terminer la besogne. Je n'oublierai jamais cette nuit parce que
13 c'était la dernière nuit au camp d'Omarska.
14 Il semblait que la nuit était calme au tout début, mais, juste avant
15 l'aube, un gardien s'est présenté à la porte et il a dit: "Docteur
16 Sadikovic, sortez et prenez vos affaires avec vous."
17 Nous étions surpris, car nous savions que son nom avait été appelé très
18 souvent. Mais cette fois-ci, on lui a dit d'apporter ses affaires avec
19 lui. Donc nous savions où ils l'emmenaient. Le docteur "Eso" s'est levé,
20 il a pris son sac de nylon dans lequel il avait quelques cigarettes que
21 des prisonniers avaient pu ramasser pour lui. Il a pris sa chemise sale
22 qui était avec lui et nous étions tous à la porte, nous étions tous
23 silencieux.
24 Et ensuite, nous tous, nous avons commencé à parler à haute voix et nous
25 avons dit: 'Docteur Eso, merci. Merci pour tout.' Et il s'est simplement
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1 tourné vers nous et a dit 'merci amis'. Il a dit également 'au revoir'.
2 Nous ne pouvions pas imaginer qu'il pourrait y avoir un tel criminel dans
3 ce monde qui serait en mesure de tuer le docteur "Eso", un homme comme le
4 docteur "Eso"."
5 (Fin de la vidéo.)
6 M. Koumjian (interprétation): Lorsque j'ai demandé à M. Ibric pourquoi
7 quelqu'un tuerait le docteur Sadikovic -j'avais posé cette question au
8 docteur Ibric-, il m'a dit que c'était le Bosnien le plus dangereux pour
9 ce qui était des autorités de Prijedor: il n'avait pas d'arme, il n'avait
10 pas de pouvoir militaire, mais il avait une autorité ou un pouvoir moral.
11 Il avait été marié avec une Serbe et il pouvait donc parler aux Serbes de
12 Prijedor. Il était aimé de tous et il aurait pu faire pencher l'opinion de
13 la communauté internationale de son côté à cause, justement, de cette
14 autorité morale qu'il avait. Ancien médecin des Nations Unies, un vrai
15 professionnel, collègue de l'accusé -qui est le docteur Stakic.
16 L'idée d'un Prijedor multiethnique était ce qui a menacé les autorités et
17 le SDS. Personne ne représentait mieux ce que représentait Prijedor que le
18 docteur Esad Sadikovic.
19 Lorsque le journaliste étranger s'est présenté à Prijedor, a permis au
20 monde de voir ce qui se passait, on a fermé les portes de Prijedor.
21 Keraterm a été fermé immédiatement après que l'on ait publié les
22 photographies. Le camp d'Omarska a été fermé également. Au tout début, on
23 a déporté les prisonniers qui se trouvaient à cet endroit et on a
24 transformé le camp d'Omarska en "Motel Omarska", et on y a emmené des
25 lits. On a essayé de créer une fausse image d'un petit village mignon.
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1 Les meurtres se sont arrêtés lorsqu'on a parlé de la possibilité d'arrêter
2 ces meurtres. Cela démontre plus que tout quelle est l'autorité et le
3 pouvoir qu'ils pouvaient exercer: ils ont fermé les camps.
4 Pour ce qui est de Prijedor, les meurtres s'étaient arrêtés avec une seule
5 exception bien sûr, l'exception étant le plus grand massacre du conflit:
6 le massacre sur le Mont Vlasic, près de Koricanske Stijene, qui s'est
7 déroulé le 21 août. Mais ce n'est pas une coïncidence. Cela ne s'est pas
8 passé sur le territoire de Prijedor. L'intention de tuer à Prijedor
9 existait encore, mais les yeux étaient rivés sur Prijedor à ce moment-là.
10 Un meurtre de plus a été planifié, et ce meurtre allait avoir lieu loin
11 des yeux de la presse internationale et du monde entier. Les meurtres
12 devaient être commis loin de la presse mondiale et loin de l'opinion
13 publique du monde entier.
14 Devant le Tribunal avait pu déposer une personne qui a survécu; il y en
15 avait deux en fait. D'abord, une personne a déposé au titre de l'Article
16 92bis.
17 Je voudrais que l'on nous présente la pièce à conviction S246. Nous avons
18 en effet une série de photographies. Je ne me propose pas de descendre
19 dans le détail pour présenter toutes ces photographies, je crois que cette
20 Chambre de première instance en a été informée.
21 Dans ce convoi, il y avait plus d'un millier d'hommes. Ils étaient loin de
22 Prijedor, très près de la ligne de front, très près de la toute première
23 ligne de front. A peine ont-ils traversé Skender Vakuf, le peloton
24 d'intervention qui les escortait a séparé d'abord les hommes.
25 La majeure partie d'entre eux était originaire de Trnopolje; la majorité
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1 d'entre eux était des anciens détenus du camp de Keraterm. On les a fait
2 monter tant bien que mal, en grande hâte, dans deux bus bondés de gens
3 -ils étaient plus de 200 en tout- pour être emmenés sur un côté d'une
4 petite route, en biais de la route. L'ordre leur a été donné de marcher la
5 tête baissée pour se diriger vers l'orée d'un précipice.
6 Une fois arrivés là-bas, un feu a été ouvert moyennant des armes
7 automatiques. Tous ces gens-là se sont précipités, ainsi exécutés, dans le
8 précipice. Seuls, quelques-uns ont pu survivre.
9 S'agit-il de dire que les autorités de Prijedor avaient planifié ces
10 massacres? Quant au massacre de la pièce 3, a-t-il été planifié? Nous
11 savons que le meurtre du docteur Sadikovic, et d'autres 120 hommes, a été
12 planifié. En témoigne d'ailleurs, l'ordre émanant de Simo Drljaca. Les
13 éléments de preuve sont clairs. En effet, rien n'a été fait pour établir
14 l'identité des auteurs. De toute évidence, si vous êtes celui qui donne
15 l'ordre, vous ne voulez absolument rien permettre pour que l'on puisse de
16 la sorte identifier.
17 Il y avait tant de massacres dans la pièce 3, il y avait tant de gardes,
18 personne n'a été emmené, personne n'a été arrêté, personne n'a fait
19 l'objet d'investigation quelconque.
20 A Vlasic, le Mont Vlasic, nous savions qu'il y avait de la police, un
21 peloton d'intervention qui devait escorter ces gens-là, qui étaient une
22 dizaine de gens de Trnopolje, et qui devaient aller à Tukovi. Il
23 s'agissait d'ailleurs, étant donné les congères, beaucoup de problèmes, le
24 voyage devait durer une journée. Le convoi a démarré le matin.
25 Evidemment, il y a eu des enregistrements concernant tout cela. Mais des
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1 individuels en savaient long. Si le docteur Stakic voulait demander pour
2 savoir, il aurait pu avoir l'enregistrement concernant les personnes qui
3 escortaient le convoi. Il ne s'agit pas seulement d'une omission commise.
4 Lorsque vous n'avez pas puni quelqu'un ou lorsque vous n'avez pas prévu de
5 commettre un crime, il est absolument clair que cette lacune était
6 intentionnelle. La chose a été ordonnée, les crimes ont été intentionnels.
7 Et cette fois-ci, il s'agissait de l'intention des autorités.
8 Le conseil de la défense a présenté à la barre un témoin, nous ne voulons
9 pas le citer pour protéger son identité. Il s'agit d'un document, d'un
10 enregistrement, c'est-à-dire une note portant déploiement des officiers de
11 police.
12 Il s'agissait évidemment d'un document qui a été saisi par le Bureau de
13 l'OTP en 1997. De tels éléments de preuve existaient. Tout un chacun qui
14 allait à Vlasic. Il s'agissait en effet de ce peloton de police de
15 Prijedor qui escortait le convoi.
16 De toute évidence; il devait y avoir des éléments de preuve pour voir
17 quelle était l'unité militaire à Keraterm pour surveiller la pièce n°3.
18 Vous vous rappelez que Radio Sarajevo a diffusé des faits sur le massacre.
19 En effet, des gens ont fait apparition à Travnik, qui devaient avoir de
20 200 à 250 des leurs qui avaient disparu.
21 Le docteur Merdzanic a parlé qu'à Trnopolje il a pu entendre la radio.
22 Penny Marshall leur a donné, leur a passé la radio lors de sa visite.
23 Et puis, après pour d'autres événements, Slobodan Kurozovic voulait
24 assurer le commandant du camp que tout allait pour le mieux et que ce qui
25 s'était passé ce n'était autre chose que le bombardement par les Musulmans
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1 du convoi qui s'acheminait vers Vlasic. Mais aucun effort n'a été fait,
2 absolument aucun pour voir qui était l'auteur des crimes. Parce que tout
3 simplement, tous ces gens-là ont simplement répondu à la volonté des
4 autorités.
5 Nous avons un crime après l'autre, des dizaines, des centaines, des
6 milliers. Et rien n'a été fait pour arrêter tout cela, bien entendu parce
7 qu'il n'y a eu personne; à moins que ceux-ci aient pu être les hommes des
8 autorités qui auraient pu le faire pour que les crimes ne soient pas
9 commis.
10 Maintenant, je voudrais vous demander que l'on présente à l'écran la pièce
11 à conviction S281-3.
12 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, il s'agit d'une
13 liste. Je crois que ceci a été versé par le truchement de Nicolas Sebire.
14 Il s'agit d'une liste de personnes, de noms des personnes pour lesquelles
15 il a été constaté que ces personnes étaient portées disparues. Il s'agit
16 d'environ de 900 entrées.
17 Nous savons que les crimes étaient à leur apogée en juillet, mai et juin,
18 mais les toutes dernières données concernent la période du mois d'août.
19 La raison en est qu'il y a eu en effet une visite des journalistes. Et
20 lorsque le monde entier a jeté un regard sur tout cela, le génocide ne
21 pouvait plus être perpétré. Ceci n'était plus dans l'intérêt de la
22 Republika Srpska non plus que dans l'intérêt de tous les calendriers
23 échéanciers politiques, pour que le monde sache quoi que ce soit sur cette
24 détention brutale et cruelle dans des camps et sur ces tueries.
25 Je crois qu'en effet, ainsi faisant, les journalistes ont pu sauver des
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1 milliers de vies de ceux qui étaient détenus dans les camps et que ces
2 gens-là, grâce à cela, ont été mis en liberté après la visite des
3 journalistes.
4 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, pour ce qui est des
5 proportions des crimes évoqués dans le cadre de cette affaire écartent
6 tout doute que l'accusé devrait avoir une connaissance de tout cela.
7 Permettez de présenter, moyennant les équipements vidéo, la pièce à
8 conviction S326. Il s'agit d'ailleurs d'une section concernant Prijedor.
9 Il s'agissait de cette interview de docteur Stakic dans cette maison au-
10 dessus de Kozarac.
11 Il s'agit de cette séquence de ABC Nightline. Je crois qu'il s'agit de
12 cette séquence qui présente le docteur Stakic Stakic lorsqu'il emprunte
13 cette route de Omarska, je crois, en allant à Prijedor.
14 (Diffusion de la vidéo.)
15 " Nous avons visité Kozarac nettoyée, ethniquement nettoyée. Nous sommes
16 en Bosnie du Nord, et cela au cours de la semaine dernière. Jadis, ce fut
17 un lieu où se trouvaient 15.000 Musulmans, hommes, femmes et enfants.
18 Maintenant il n'y a plus de Musulmans ici. D'autres maisons de Kozarac ont
19 été marquées pour pouvoir survivre. Ici, par exemple, c'est écrit : C'est
20 la Serbie. Ces maisons ne sont pas endommagées."
21 (Fin de la vidéo.)
22 M. Koumjian (interprétation): Je crois que ceci se passait en ville, mais
23 nous avons d'autres photographies prises par M. McLeod au beau milieu de
24 la route qui mène de Banja Luka à Prijedor. Il s'agit de la route qu'on
25 emprunte pour aller de Omarska à Prijedor.
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1 Je voudrais que l'on présente également ces photographies en les plaçant
2 sur le rétroprojecteur. C'est Charles McLeod qui les a prises, ces
3 photographies, qui était un des observateurs de cette mission
4 d'observation de l'Union européenne.
5 Les photographies traitent des destructions en 1992. Il s'agit de la pièce
6 à conviction 186-2. Je ne sais pas combien de photographies nous avons à
7 présenter, peut-être cinq photographies. Il s'agit de S186-2.
8 Ensuite nous avons 186-2, 168-3, ensuite 168-4, 168-5 et 168-6.
9 Nous savons que Stari Grad, c'est-à-dire cette partie ancienne, historique
10 de la ville, a été rasée: deux mosquées ont été démolies, presque toutes
11 les maisons ont été détruites et démolies, sauf une où, par hasard, il y
12 avait des Serbes.
13 Nous savons que toutes les mosquées ont été détruites dans la municipalité
14 de Prijedor ou de Kozarac, la principale église de Prijedor également, de
15 même que la mosquée principale de Prijedor.
16 Nous savons très bien que, d'après l'enregistrement de la Croix-Rouge
17 serbe, ce qui a été versé au dossier par le biais de M. Kuruzovic, que
18 23.000 personnes, d'après la Croix-Rouge serbe, sont passées par
19 Trnopolje, 23.000 hommes; et cela avant les conflits.
20 Nous savons très bien que le tableau démographique a changé si
21 dramatiquement que la population musulmane est en décroissance. De 49.000
22 personnes approximativement, d'après le recensement de 1991, voilà que ce
23 chiffre descend à 6.000 personnes d'après l'article publié par le
24 "Kozarski Vjesnik" en 1993.
25 Des femmes désespérées faisant la queue pour attendre leur départ de
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1 Prijedor pouvaient être observées devant le bâtiment du SUP, juste en face
2 du bureau du docteur Stakic.
3 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, nous avons pu prouver
4 clairement que l'accusé a pu effectuer un contrôle évident sur les auteurs
5 de ces crimes, qu'ils soient de la police ou de l'armée. C'était l'homme
6 n°1 de Prijedor. Souvent, il apparaissait autour et avec des médias. Il
7 avait des contacts directs avec les sommités au pouvoir, y compris avec le
8 Président; il communiquait avec lui. Depuis le Président de la Republika
9 Srpska, il pouvait avoir un contact direct avec Vladimir Arsic, commandant
10 de la 43e Brigade.
11 Pourtant il n'a jamais dénoncé quoi que ce soit, il n'a jamais fait aucun
12 effort pour essayer d'arrêter ces crimes. La police et l'armée dépendaient
13 de lui, du docteur Stakic et de la cellule de crise, tant du point de vue
14 logistique que politique.
15 Lui pouvait exercer un contrôle sur eux. Il a pu faire démanteler ce
16 peloton d'intervention. Il a pu obtenir l'arrestation des gens, tels Dado
17 Mrdja et d'autres criminels notoires. Il a pu démanteler le peloton
18 d'intervention. Il a pu d'ailleurs obtenir la clôture des camps d'Omarska
19 et de Keraterm, pour lesquels il a dit lui-même qu'il avait été formé en
20 vertu des décisions prises par les autorités civiles qu'il a présidées
21 lui-même.
22 On ne peut pas dire que le docteur Stakic devait savoir tout un chacun de
23 ces crimes qui se sont produits, mais l'impunité dans Prijedor battait son
24 plein et facilitait ces crimes. Personne n'a été puni, or Musulmans,
25 Croates et Bosniens étaient les victimes.
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1 Et, pour un tout premier début, il était tout à fait sûr et certain que
2 les auteurs de crime ne devaient pas et être punis. Il y avait là le
3 docteur Stakic qui, en vertu du mandat qui lui était conféré, devait
4 s'occuper de la sécurité de ses concitoyens et de ses citoyens. Mais il ne
5 l'a pas fait, surtout pas à l'intention des Bosniens et des Croates.
6 Nous avons entendu parler, ici, une seule victime de viol. Le conseil de
7 la défense a pu constater que le docteur Stakic ne devait pas savoir quoi
8 que ce soit, et le conseil de la défense a insisté. Je ne dis pas que ceci
9 devait être le cas, mais j'avais posé la question à la victime, si elle
10 avait fait rapport de cela, de ce crime devant les autorités de Prijedor;
11 elle a dit que non.
12 Lorsque nous lui avons demandé pourquoi, alors elle a répondu, et il
13 s'agit de parler d'une femme qui a perdu presque tous les membres de sa
14 famille, lesquels ont été cruellement et brutalement tués dans les
15 villages environnants. Alors, cette femme-là a dit: "A qui voulez-vous que
16 je fasse rapport? De quelle autorité s'agissait-il? Je vous en prie,
17 voulez-vous que j'aille en rapporter pour que l'homme me coupe la tête?"
18 Pourquoi le docteur Stakic serait responsable de cet acte de viol, entre
19 autres choses? Eh bien, c'est parce qu'il s'agit d'atmosphère, il s'agit
20 d'une atmosphère qui a été créée, atmosphère d'impunité complète et
21 totale, où les Musulmans et les Croates pouvaient et devaient être des
22 victimes, car il a toujours été prôné que ces derniers étaient le bras
23 prolongé du djihad et qu'ils devaient avoir un plan à mettre en œuvre.
24 Dans ces interviews, le docteur Stakic disait qu'il y avait une liste
25 auprès des Serbes, la liste des non-Serbes qui devaient être tués par
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1 leurs voisins. Cette vision paranoïaque régnait et prévalait en ville.
2 Alors qu'on devait faire autre chose pour prévenir tout crime contre les
3 non-Serbes.
4 L'accusé a été habilité de pouvoir… pour traduire en justice de tels
5 actes. Que se serait-il passé si l'on avait parlé à la presse à laquelle
6 il avait accès? Lorsqu'on lui a posé la question de savoir ce qui s'était
7 passé dans ces camps, il a dit: "Eh bien, dans le camp d'Omarska, tous ces
8 individus innocents, comme Esad Sadikovic, auraient-ils pu connaître un
9 autre destin?"
10 Il y avait parmi ces victimes des professionnels, juges, etc. Est-ce que,
11 à mon sens, les citoyens de Prijedor, s'ils le savaient, auraient réagi et
12 est-ce que tout cela devait avoir lieu? Si nous regardons ce qui s'est
13 passé à Prijedor, et particulièrement en Krajina, alors nous allons voir
14 le document… soit la pièce à conviction S281-3; il s'agit d'un fragment du
15 rapport d'Ewa Tabeau.
16 Lorsqu'elle parle de ces tueries dans la Krajina de Bosnie, il s'agit de
17 19 municipalités différentes, 60% de ces tueries ont eu lieu dans
18 Prijedor; encore que Prijedor était inférieure par son importance à Banja
19 Luka. En Krajina, il y avait un demi-million d'habitants. Donc 20%
20 seulement du total de la population y habitait. Or 60% du total
21 d'assassinats et de meurtres y ont été perpétrés, notamment à Prijedor.
22 Pourquoi le docteur Stakic n'a-t-il pas destitué Simo Drljaca? Pourquoi
23 n'a-t-il pas demandé au ministre de l'Intérieur de le révoquer de ses
24 fonctions? Ce Simo Drljaca qui a signé l'ordre de mise à mort de 125
25 hommes, le 5 août; c'est parce qu'ils étaient des collaborateurs, ils
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1 coopéraient dans cette action criminelle conjointe.
2 Le docteur Stakic non seulement n'a rien fait dans ce sens-là, mais une
3 fois qu'il était devenu président, Simo Drljaca, lui, a été nommé chef de
4 la police; Simo Drljaca qui, pour le compte de Stakic, a administré le
5 camp d'Omarska.
6 Et lorsqu'en 1997 Simo Drljaca, lorsqu'il a voulu résister à son
7 arrestation, a été tué, malgré le fait que de nombreux crimes perpétrés
8 par lui étaient déjà connus par la vaste opinion publique, le docteur
9 Stakic, lors d'une séance commémorative, a tenu un discours en sa mémoire.
10 Les paroles que celui-ci a prononcées ont été reprises par Ranko Travar;
11 il s'agit de la pièce à conviction S375. Et qu'a-t-il dit le docteur
12 Stakic, en parlant de Simo Drljaca, ce tueur en série? Il a dit: "Même si
13 Simo Drljaca a été tué, sa grande oeuvre continuera de vivre pour le grand
14 bénéfice des générations à venir".
15 Je crois que le moment est peut-être bon, Monsieur le Président, Madame et
16 Monsieur les Juges, que l'on suspende l'audience. Je n'aurais pas pour
17 beaucoup, j'aurais pendant une demi-heure à exposer.
18 M. le Président (interprétation): Nous suspendons l'audience jusqu'à 4
19 heures 10.
20 (L'audience, suspendue à 15 heures 50, est reprise à 16 heures 13.)
21 M. le Président (interprétation): Alors, entendons maintenant la fin du
22 réquisitoire par l'accusation.
23 Monsieur Koumjian, vous avez la parole.
24 M. Koumjian (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.
25 Est-ce que le document S64 pourrait être placé sur le rétroprojecteur?
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1 Les autorités civiles du docteur Stakic ont exercé leur autorité pour
2 arrêter, retenir et détenir des personnes de façon régulière lorsque
3 c'était des Musulmans et des Croates.
4 Ce document S64 montre également que les autorités… C'est un document qui
5 est signé "S. Milomir" avec un tampon dessus. Il est adressé à Simo
6 Drljaca et il indique: "Les noms de tous les Serbes qui ont été
7 emprisonnés par erreur sont par la présente relâchés de prison". Et je
8 pense que plus loin dans ce document il est indiqué que Simo Drljaca a
9 délégation d'autorité pour décider qui doit être relâché.
10 Donc au lieu d'exercer son autorité, le docteur Stakic encourage l'auteur,
11 les tueries… au lieu d'encourager pour que ces tueurs soient traduits en
12 justice, il donne à l'infâme Simo Drljaca le pouvoir de relâcher les
13 Serbes emprisonnés par erreur. A l'évidence, l'intention est là encore de
14 prévoir l'impunité pour ceux qui commettent ces crimes contre des non-
15 Serbes, contre les Musulmans et contre les Croates.
16 La cellule de crise, les autorités du SDS et le docteur Stakic pouvaient
17 voir qu'une personne aussi importante que Muhamed Cehajic, le président
18 élu, le président de l'assemblée multiethnique… Assurément, ils auraient
19 pu faire en sorte qu'il y ait au minimum le renvoi des agents de police ou
20 des membres de l'armée qui commettaient ces tortures et ces meurtres, tels
21 que Zoran Babic et Dado Mrdja de la section d'intervention et tant
22 d'autres, y compris Simo Drljaca lui-même.
23 Ce qui se passait à Prijedor dans les quelques mois qui ont précédé la
24 visite des journalistes s'est passé sur une échelle telle que même le
25 docteur Stakic, dans une brève référence, se réfère au mot "génocide". Et
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1 je voudrais vous dire que ceci fait partie de l'interview qu'il a donnée
2 et qui porte la cote S187.
3 Et quand il en parle, il explique pourquoi on prévoit un transport afin
4 que des Musulmans puissent quitter Prijedor. Et si nous pouvions écouter
5 cette partie du compte rendu, du document qui a la cote S187, une toute
6 petite partie, il y a quelque chose que nous avons peut-être manqué au
7 cours de l'interview de 45 minutes, mais on peut centrer là-dessus et voir
8 quand il parle de génocide.
9 (Diffusion de la vidéo.)
10 "Quand nous sommes arrivés, nous avons passé la ville de Kozarac. Je
11 comprends qu'il y a eu une grande bataille à Kozarac.
12 -Q: Qu'est-ce qui s'est passé à Kozarac?
13 -R: C'est précisément l'endroit où cet extrémiste musulman… parce que
14 Kozarac et ses alentours avaient environ 20.000 Musulmans. Et Kozarac
15 proprement dit a environ 10.000 à 12.000 Musulmans. Nous avons trouvé des
16 listes originales comportant 3.000 et quelques, 3000 et demi, ou, pour
17 être plus précis, 3.791 membres de la Défense territoriale musulmane
18 illégale, avec le numéro de chaque arme à feu et la date à laquelle elle
19 avait été délivrée, ainsi que d'autres armes légères ou moyennes.
20 Nous avions des indications que ceci existait, avait existé précédemment.
21 Toutefois, ce fait est le moment où ils sont venus sur la route de
22 Prijedor à Banja Luka et ont bloqué environ 8 kilomètres de la route à
23 l'entrée et à la sortie de leur territoire, et toutes les routes locales
24 d'accès. L'armée en fait… c'est-à-dire nous avons pris la décision que
25 l'armée et la police aillent là-bas et enlèvent ce barrage de la route et
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1 qu'ils se retirent à au moins 100 mètres de la route vers l'intérieur de
2 leur territoire, afin que personne ne puisse entrer plus profondément dans
3 le territoire. Mais cette route non seulement relie les deux villes mais
4 davantage ces régions. A l'approche du premier véhicule de police ou de
5 véhicule militaire, ils ont ouvert le feu sans sommation. Après cela, des
6 affrontements ont suivi et tout ceci s'est passé ensuite.
7 Vous avez vu également un très grand nombre de maisons détruites, et ainsi
8 de suite. Petit à petit, la vie retourne à la normale ici, à cet endroit-
9 là aussi.
10 Nous avons certaines personnes qui s'y trouvaient, qui ont à peine pu
11 survivre, qui s'étaient réfugiées à un endroit et qui sont maintenant
12 revenues.
13 Nous avons un nombre moins important de personnes, des réfugiés du reste
14 de la Bosnie-Herzégovine, qui s'enfuyaient; et donc nous les avons
15 hébergées. Il y a des Croates, il y a des Ukrainiens et des Ruthènes qui
16 ne s'occupaient ni des autorités nouvelles ni de la politique, et qui
17 étaient restés là pour vivre dans leurs maisons.
18 Un très grand nombre ont vu que leurs maisons familiales ont été
19 détruites. Et moi, en tant que maire, et avec mes pouvoirs de maire, nous
20 essayons de trouver une compensation pour eux; soit par une autre maison
21 ou un appartement pour leur donner un toit. Nous avons réussi à réparer
22 l'électricité et l'adduction d'eau, de telle sorte qu'ils puissent avoir
23 de l'électricité avec, bien entendu, les coupures d'électricité que
24 subissent tous les autres habitants de la municipalité de Prijedor.
25 Trnopolje était essentiellement remplie de Musulmans de Kozarac. Une bonne
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1 partie de ces extrémistes étaient de Kozarac et, ensuite, ils sont allés à
2 Trnopolje. Quelque 1.500 hommes ont été déplacés avec l'aide de la Croix-
3 Rouge internationale à Karlovac; ils provenaient pour la plupart de
4 Kozarac.
5 Il y a eu ensuite la réunion des familles, conformément aux Conventions de
6 Genève, et leurs familles les ont suivis. Le reste, parce que leur
7 domicile avait été détruit, ont été logés soit dans le territoire de la
8 municipalité de Prijedor ou certains sont allés en Bosnie centrale, ceux
9 qui en avaient exprimé les vœux. Nous avons organisé des bus ou un train
10 pour eux gratuitement afin qu'ils puissent partir, afin qu'il n'y ait pas
11 de victimes et que le génocide, pour lequel on nous a déjà blâmés en
12 Europe, ne se reproduise pas. Il vaut mieux qu'ils partent.
13 Demain, lorsque la guerre sera finie et dépendant des accords au niveau
14 des Etats nouvellement formés, ceux qui voudront revenir ici seront en
15 mesure de le faire dans le nouveau territoire".
16 (Fin de la diffusion.)
17 M. Koumjian (interprétation): Le génocide dont parle le docteur Stakic, de
18 ce qui s'est passé sous les yeux du monde, a commencé à attirer
19 l'attention à Prijedor. Il y a un certain nombre d'autres choses
20 intéressantes -si je pouvais revenir en arrière à un moment-, une partie
21 intéressante de cet enregistrement que l'on pourrait rejouer. Là encore,
22 pour montrer la coopération étroite qui existait entre le docteur Stakic,
23 l'armée et la police.
24 Lorsqu'il parle de l'attaque sur Kozarac, il dit, commençant tout en haut
25 de la page 8485, la page qui se termine par ERN, "l'armée"; ensuite il
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1 ajoute: "En fait, nous avons pris une décision pour que l'armée, elle-
2 même, aille là-bas enlever le barrage".
3 Et ce qui est intéressant de voir, c'est qu'il se réfère là aussi à lui-
4 même en tant que maire, et il dit: "Pour ma part, en qualité de maire,
5 avec l'autorité dont je disposais, l'autorité exécutive", il parle
6 d'utiliser son autorité pour donner une compensation aux personnes;
7 apparemment des Ukrainiens, des Ruthènes, et des réfugiés d'autres parties
8 de la Bosnie-Herzégovine, vraisemblablement des Serbes, et pour en prendre
9 soin.
10 En même temps, la seule chose qu'il fait pour les Musulmans est de
11 s'assurer qu'ils vont partir. Et comme il le dit: "Il vaut mieux qu'ils
12 partent". Et il continue en disant: "Et demain, lorsque la guerre sera
13 finie, ceci dépendra des accords qui seront faits, ils pourraient être
14 utilisés à revenir." Mais, clairement, sa politique était de procéder au
15 nettoyage du territoire de Prijedor.
16 Monsieur le Président, au cours de ces quelques mois, ce que nous avons
17 observé, c'est ce que nous appelons un "génocide". Nous avons vu que des
18 dizaines de milliers des personnes ont perdu leurs maisons qui ont été
19 détruites, et elles ont été détruites par les combats ou par des
20 incendies; en tous les cas des destructions intentionnelles. Plusieurs
21 milliers de personnes ont été détenues dans des conditions épouvantables
22 dans des camps. Vous savez les corps sont très difficiles à compter.
23 Il y a eu un très, très grand nombre de personnes qui sont mortes. Plus de
24 100 personnes sont mortes dans la pièce n°3 où il y a eu un massacre, 125
25 dans le convoi du 5 août pour les autobus qui ont quitté Omarska et qui
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1 sont allés à l'origine à Keraterm.
2 Les chiffres ne veulent pas dire grand-chose pour nous, ceci pour le
3 moment où les journalistes sont venus, ont appelé l'attention du monde sur
4 Prijedor.
5 Pour les personnes qui ont déposé, la plupart ont perdu des membres de
6 leur famille. Mirza Mujadzic a perdu ses oncles et ses frères, (expurgée)
7 emporté le corps de son père dans le stade "Ivo Atlija", nous a parlé
8 également du fait qu'il portait le corps de son père et d'un grand nombre
9 de membres de son petit village, le village d'où il venait, Brisevo; un
10 grand nombre de ses voisins et membres de sa famille, y compris des
11 femmes, des enfants et des invalides.
12 La société bosnienne était telle, nous savons que plusieurs personnes,
13 plusieurs femmes ont été violées à cause de la composition ethnique en
14 Bosnie.
15 Les gens étaient forcés de quitter leur demeure et on a essayé de faire du
16 mieux que l'on pouvait pour s'assurer que la communauté soit complètement
17 détruite, que les maisons soient détruites, les biens étaient confisqués.
18 A un certain moment donné, les autorités avaient compris qu'il leur
19 vaudrait mieux confisquer une maison et la donner à des réfugiés serbes
20 plutôt que de détruire les maisons. C'était la raison justement pour
21 laquelle ils ont confisqué les véhicules, les biens publics. Ils ont
22 détruit les lieux de culte, presque toutes les mosquées, les églises à
23 Prijedor ont été détruites. Des églises catholiques et les mosquées.
24 La façon de procéder était particulièrement cruelle. Il y a un bon nombre
25 de personnes pour lesquelles on ne sait pas ce qui leur est arrivé. On a
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1 découvert des fosses communes, mais on n'a pas nécessairement trouvé
2 l'identité de toutes les personnes s'y trouvant.
3 Nous avons entendu des témoins témoigner, tel le témoin X qui a eu un
4 dernier contact avec son père, lorsque son père l'a poussé pour qu'il
5 tombe en bas de la montagne de Vlasic. Il présume que son père est mort
6 lors de ce massacre. Son père, en le poussant en bas de la montagne, lui a
7 sauvé la vie de cette façon-là.
8 Samir Poljak n'a plus jamais revu son père après qu'il a été emmené au
9 camp d'Omarska. Et que dire du docteur Minka Cahajic? Elle n'a jamais su
10 ce qui est arrivé à son mari avec certitude. Elle ne le sait toujours pas.
11 Après son départ au camp d'Omarska, il a disparu.
12 Des centaines de personnes d'Omarska sont pour la plupart des personnes
13 d'Omarska, c'est le sort qui leur a été réservé. Il n'y a pas de tombeaux,
14 de cimetières où l'on peut aller. Et un bon nombre de personnes ne savent
15 pas ce qui est arrivé à leurs proches, même si toutes les indications
16 portent à croire qu'ils ont été tués, car ils sont portés disparus.
17 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, la présentation des
18 moyens à décharge a débuté au mois de novembre. Ils ont présenté et appelé
19 à la barre plus de 45 témoins.
20 Les conseils de la défense -si je peux dire- ont travaillé de façon
21 acharnée. Même si je n'ai pas toujours été d'accord avec eux, je dois vous
22 dire que je respecte leur professionnalisme et je crois qu'ils ont défendu
23 leur client de façon très professionnelle.
24 Ils ont cité à la barre un bon nombre de témoins. Parmi tous ces témoins
25 qui sont venus témoigner dans le cadre de la présentation des moyens à
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1 charge, nous n'avons pas entendu un seul Musulman ou Croate disant que le
2 docteur Stakic -président de la municipalité- ait aidé qui que ce soit à
3 Prijedor. Il n'a semé que la terreur, il n'a jamais fait une bonne œuvre,
4 et il n'a jamais essayé d'arrêter ou d'empêcher la commission des crimes.
5 Nous avons vu plusieurs interviews menées par l'accusé soit à la
6 télévision ou dans les médias. L'accusé parle d'événements, mais nous ne
7 l'avons jamais entendu dire un seul mot qui porterait à croire qu'il
8 regrette les crimes qui se sont déroulés alors qu'il était président.
9 Pour des centaines de milliers de personnes de Prijedor, des co-citoyens
10 de sa municipalité, il n'a jamais exprimé des regrets concernant leur
11 disparition. Tout ce que nous avons pu entendre, c'étaient des excuses qui
12 jettent un blâme sur les victimes.
13 Et au cours des 11 années qui se sont passées entre la commission de ces
14 crimes, nous nous sommes entretenus avec un grand nombre de témoins de la
15 défense qui connaissaient le docteur Stakic. Nous avons parlé aux parents,
16 aux amis de ce dernier, et nous avons simplement entendu un élément de
17 preuve une fois -il s'agissait d'une déclaration fournie en vertu du
18 92bis-, que le docteur Stakic aurait pu indiquer que le docteur Stakic
19 exprimait un regret. C'était en fait ses beaux-parents qui, dans cette
20 déclaration, disaient que le docteur Stakic avait des yeux remplis de
21 larmes.
22 Et il s'agissait… Une fois c'était en 1991 et, pour une autre fois,
23 c'était un individu qui se trouvait à l'extérieur de Prijedor et le
24 docteur Stakic n'a jamais rien pu faire pour ses beaux-parents et n'a pas
25 pu empêcher ces derniers de faire leur service militaire (sic). Ce n'est
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1 qu'à ce moment-là que ses yeux s'étaient remplis de larmes, mais c'est la
2 seule fois.
3 Nous n'avons pas entendu un seul mot de compassion de la part de l'accusé
4 au cours des 11 années qui se sont écoulées depuis que ces crimes se sont
5 déroulés. Même au cours des derniers mois, lors de la présentation des
6 moyens de la défense, ses amis et ses associés ont témoigné, mais nous
7 n'avons jamais exprimé ou entendu par leur biais que le docteur Stakic
8 regrettait quoi que ce soit.
9 Le docteur Stakic, nous le soutenons, ne regrette absolument rien. Il a
10 planifié ces crimes, il les a coordonnés, il a coordonné les crimes avec
11 les auteurs des crimes, ceux qui ont mené à bien ses ordres.
12 Il y a un homme, le docteur Stakic l'a remplacé, c'était le professeur
13 Muhamed Cehajic. Nous avons posé la question à plusieurs témoins, à savoir
14 que ce dernier, le docteur Stakic n'a jamais parlé de lui et n'a jamais
15 exprimé un seul regret concernant le sort qui lui a été réservé.
16 Tous les témoins disent que le professeur Cehajic était un homme que l'on
17 admirait énormément. Vous vous souviendrez de la secrétaire qui essayait
18 de témoigner favorablement pour le docteur Stakic, mais elle a dit
19 également que M. Cehajic était très poli, était un homme bien.
20 Tous les témoins nous ont dit qu'il s'agissait d'un homme généreux, d'un
21 homme poli et nous avons même entendu une interview qui s'est déroulée
22 avec le docteur Stakic dans laquelle il parle de la planification de la
23 prise de pouvoir. Il s'agit du document S47.
24 Et dans cet article tiré du "Kozarski Vjesnik", article de 1994, il parle
25 de M. Cehajic; M. Cehajic le félicite après qu'il soit devenu le président
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1 de la nouvelle assemblée serbe en janvier.
2 Le professeur Cehajic dit: "Je vous félicite de tout mon cœur. Nous sommes
3 tous les deux maintenant présidents." Et le docteur Stakic a dit lors de
4 cette interview: "Mais je savais ce qui se cachait derrière ce sourire: le
5 plan, ce terrible plan que les Musulmans avaient derrière la tête pour ce
6 qui nous concerne."
7 Pour ce qui est de "Kozarski Vjesnik" et par le biais de plusieurs autres
8 témoins, nous avons pu entendre que la seule chose que le docteur Cehajic
9 a dit après la prise de pouvoir forcé et le gouvernement élu, c'était un
10 Gandhi en résistance, c'était la figure du professeur Cehajic. Et, en
11 1994, "Kozarski Vjesnik" indique et parle du professeur Cehajic comme
12 étant un résistant "gandhien".
13 Le professeur Cehajic était un professeur d'école secondaire. C'était un
14 homme simple. Il aimait passer du temps avec sa femme et son fils. Nous
15 n'avons jamais entendu d'éléments de preuve nous indiquant qu'il
16 s'agissait d'un homme violent qui essayait de propager la haine ou la
17 violence.
18 Et il était élu, c'était un homme qui a été choisi pour parler, il était
19 le porte-parole des hommes de Prijedor et il a souffert comme un grand
20 nombre de personnes. Ceci est tiré d'une lettre que ce dernier a écrite à
21 sa femme alors qu'il se trouvait au camp d'Omarska.
22 (Diffusion de la vidéo.)
23 "Depuis mon départ, depuis le 23 mai lorsqu'ils sont venus me chercher, je
24 vis dans un autre monde. Il me semble que tout ce qui m'arrive n'est qu'un
25 très mauvais rêve, un cauchemar.
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1 Je ne peux simplement pas comprendre comment quelque chose comme ceci est
2 possible. Ma chère Minka, Almira et mon fils, vous savez combien je vous
3 aime, vous savez combien je vous aime tous. Et justement, à cause de cet
4 amour je n'ai rien fait et je n'aurais rien fait qui aurait pu vous causer
5 de la peine.
6 Je sais que vous savez que les choses pour lesquelles ils sont en train de
7 m'inculper n'ont rien à voir avec moi. Je me demande seulement à qui et à
8 quel point ai-je pu faire du mal à qui que ce soit pour que je vive ceci,
9 pour que je doive passer par là. Mais je crois en la justice et je crois
10 en la vérité et je crois que tout cela sera éclairci très bientôt, se
11 réglera très bientôt."
12 (Fin de la vidéo.)
13 M. Koumjian (interprétation): Monsieur le Président, les éléments de
14 preuve dans cette affaire montrent que l'accusé a joué un rôle clé dans
15 les crimes qui ont été commis envers des centaines de milliers de
16 personnes. Des centaines de milliers de personnes ont été déportées et je
17 crois, Monsieur le Président, que le Tribunal a été créé justement pour
18 traduire devant la justice ce genre d'hommes qui ont commis ce genre de
19 crimes et qui sont d'un tel ordre de grandeur.
20 Nous estimons que le docteur Stakic a commis des crimes graves et qu'une
21 peine de prison à vie serait appropriée pour ce genre de crimes qu'il a
22 commis. Merci.
23 (Note de l'interprète: "Pour terminer, étant donné l'énormité du crime que
24 le docteur Stakic et du rôle qu'il a tenu dans la commission de ces
25 crimes, la justice exige une peine de prison à vie pour les crimes commis.
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1 Merci.)
2 M. le Président (interprétation): Cela met fin à l'audience d'aujourd'hui.
3 Nous allons entendre lundi matin à 9 heures 30 les arguments, la
4 plaidoirie de la défense. Nous tiendrons notre audience dans la salle 2
5 et, plus tard dans l'après midi, nous nous retrouverons dans la salle
6 d'audience n°1.
7 La séance est levée jusqu'à 9 heures 30 lundi matin, merci.
8 (L'audience est levée à 16 heures 39.)
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