Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 29 avril 2008

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé Simatovic est introduit dans le prétoire]

  4   [L'accusé Stanisic est absent]

  5   --- L'audience est ouverte à 13 heures 16.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, vous allez

  7   poursuivre vos déclarations liminaires.

  8   M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Lorsque nous avons levé l'audience hier en fin de journée, j'avais

 10   commencé à parler de l'entreprise criminelle commune. J'avais présenté un

 11   diagramme, et sur ce diagramme, M. Stanisic était à la fois dans la case

 12   représentant le MUP de Serbie, ainsi que la case représentant les hommes

 13   politiques serbes. Pour comprendre comment il a participé à la réalisation

 14   et la mise en œuvre de cette entreprise criminelle commune et son activité

 15   politique, je vous montre ici une conversation où ils ont échangé leurs

 16   points de vue, à savoir que M. Babic n'a pas grande connaissance des

 17   affaires politiques.

 18   Stanisic informe Karadzic dans une conversation sérieuse avec Babic

 19   comment ils doivent agir au plan politique.

 20   Ici, du côté gauche sur le diagramme, on voit Marijan [comme

 21   interprété] Martic, non seulement au sein du ministère des Affaires

 22   intérieures dans la RSK, la Republika Srpska, mais également dans la case

 23   représentant les hommes politiques. Ceci représente le rôle double qu'il a

 24   joué.

 25   Mes collègues et moi-même, nous allons revenir sur ce diagramme à plusieurs

 26   reprises pendant la présentation de notre déclaration liminaire.

 27   L'Accusation, pendant ce procès, va parler d'établir l'intention partagée

 28   de ces membres essentiels, et ce qui était l'élément sur lequel se

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  1   concentraient ces accusés; leurs intentions d'agir et leurs contributions à

  2   ce plan criminel.

  3   Il est difficile en fait de retracer les origines de ce plan criminel

  4   occulte, en particulier comme la surprise et l'élément secret était

  5   considéré comme un élément essentiel à sa réussite. Nous voyons comment ce

  6   plan criminel a vu le jour dans la bouche de son principal architecte,

  7   Slobodan Milosevic.

  8   La diapositive numéro 18 montre les propos tenus par Milosevic le 16 mars

  9   1991. Il s'adressait à un groupe restreint de parlementaires après des

 10   tensions croissantes récentes.

 11   Dans ce contexte, il rencontre les présidents des municipalités serbes, et

 12   Milosevic a dit, je cite : "Le gouvernement a eu pour tâche de mettre en

 13   place des unités adaptées qui devront nous placer en sûreté à tout moment,

 14   à savoir capables de défendre les intérêts de notre république, mais

 15   également à même de défendre les intérêts des Serbes à l'extérieur de la

 16   Serbie."

 17   C'est la thèse de l'Accusation de dire qu'environ six semaines après que

 18   Milosevic ait donné cet ordre pour la mise en place d'unités spéciales qui

 19   avaient pour tâche de protéger les intérêts serbes à l'extérieur de la

 20   Serbie, Jovica Stanisic a établi ces unités au sein des Services de la

 21   Sûreté d'Etat du ministère serbe des Affaires intérieures.

 22   Je vais maintenant encore une fois vous demander de vous reporter à la

 23   cérémonie de remise de distinctions à Kula en mai 1997, au cours de

 24   laquelle Franko Simatovic a donné une rétrospective de l'histoire des

 25   unités spéciales, une histoire assez objective dans un cadre privé, et un

 26   groupe restreint de personnes qui soutenaient ses objectifs, les objectifs

 27   de cette unité.

 28   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que n'ayant pas le texte en anglais,

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  1   elle ne peut pas traduire ces commentaires.

  2   [Diffusion de la cassette vidéo]

  3   M. GROOME : [interprétation] Ici sur la diapositive numéro 20, on voit les

  4   deux déclarations côte à côte, et compte tenu du fait qu'il n'y a pas

  5   d'autre unité à notre connaissance, que Milosevic ait créé, il est clair

  6   que nous parlons d'une seule et même unité.

  7   M. Simatovic poursuit dans son allocution. Je cite : "La contribution de

  8   l'Unité des opérations spéciales est énorme. Quarante sept soldats ont été

  9   tués et 250 blessés au cours d'opérations de combat dans 50 endroits

 10   différents."

 11   Dans ses propres termes, Simatovic nous dit que les unités spéciales de la

 12   DB serbe ont opéré dans 50 endroits différents en Croatie et en Bosnie-

 13   Herzégovine. Il dit également, je cite : "26 camps d'entraînement pour les

 14   unités de la police spéciale de la Republika Srpska et la République de la

 15   Krajina serbe ont également été créés à ce moment-là."

 16   Vingt six camps d'entraînement, la plupart en Bosnie et en Croatie.

 17   La genèse de ces unités spéciales correspond au jour où Milosevic a demandé

 18   à Stanisic de mettre en place une force de combat occulte qui ne serait pas

 19   contrainte par une quelconque loi, mais répondrait aux dictats de

 20   Milosevic.

 21   A ce jour, nous pouvons simplement dire avec le plus de précision possible

 22   que ceci a été créé au printemps de l'année 1991. Stanisic devait rejoindre

 23   Milosevic dans son plan pour s'assurer que lors du démantèlement de la

 24   Yougoslavie, démantèlement devenu semble-t-il inévitable, que dans ce

 25   démantèlement, on s'assurait que les Serbes arriveraient en haut, et que la

 26   république s'en sortirait, quel que soit le coût ou le mal que l'on

 27   pourrait infliger à d'autres populations ethniques en Yougoslavie.

 28   Stanisic, à son tour, devait s'occuper de l'administration quotidienne de

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  1   l'unité spéciale qu'on lui avait confiée, Franko Simatovic.

  2   Dès le départ, l'élément secret était le principe prépondérant de cette

  3   unité.

  4   D'anciens membres de l'unité spéciale ont décrit comment ils ont appris

  5   comment ceci fonctionnait, comment la DB serbe fonctionnait, longtemps

  6   après avoir rejoint les unités spéciales en question. Très souvent, les

  7   hommes connaissaient leurs camarades simplement sous le nom d'alias ou de

  8   prénoms, ils n'avaient pas le droit de révéler les noms des uns et des

  9   autres. Et comme tout ceci était secret, ceci semait la confusion, et on ne

 10   savait pas qui étaient les hommes qui faisaient partie de cette unité.

 11   L'opinion publique serbe savait que la DB serbe avait été créée pour mettre

 12   en place une unité supra juridique et que ceci aurait eu des conséquences

 13   négatives pour Milosevic.

 14   Ceci était important, ce caractère inculte, pour Milosevic, Stanisic,

 15   Simatovic, et d'autres membres de l'élément du groupe principal savaient

 16   que le travail en Croatie et en Bosnie serait un travail criminel, car ceci

 17   nécessiterait la perpétration de commission de crimes graves contre les

 18   populations non-serbes qui s'y trouvaient. Ils se sont rendu compte dès le

 19   départ que le monde entier comprendrait qu'il s'agirait qu'une tragédie

 20   était en train de se dérouler. On ne peut pas déplacer par la force des

 21   populations importantes et les faire sortir de leurs maisons sans commettre

 22   de graves crimes contre eux.

 23   Je souhaite maintenant vous faire entendre une conversation

 24   téléphonique interceptée au cours de laquelle M. Stanisic parle justement

 25   de sa préoccupation eu égard au caractère secret de tout ceci.

 26   [Diffusion de la cassette audio]

 27   M. GROOME : [interprétation] La diapositive numéro 21, Stanisic rappelle à

 28   Karadzic qu'ils doivent faire particulièrement attention à ce qu'ils disent

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  1   au téléphone.

  2   Dans une autre conversation interceptée, Stanisic dit à Karadzic : "Peux-tu

  3   peut-être le faire de façon à ce que moi on ne voit pas que je fais partie

  4   de cette initiative ?"

  5   Dans d'autres conversations téléphoniques interceptées que va présenter

  6   l'Accusation, vous entendrez Franko Simatovic parler de façon -- faisant

  7   particulièrement attention aux phrases qu'il utilise et c'est difficile à

  8   déchiffrer lorsqu'il s'adresse à d'autres membres-clés de l'entreprise

  9   criminelle commune.

 10   La carte que Stanisic montre à Milosevic figure dans une séquence vidéo qui

 11   est sur le mur que nous avons vu au centre d'entraînement de Kostic à Kula.

 12   C'est une carte de la Yougoslavie qui comporte certains marqueurs qui

 13   identifient les endroits en Croatie et en Bosnie où ont été établis les

 14   corps d'entraînement des unités spéciales. M. Simatovic énumère ces

 15   endroits dans son allocution.

 16   Ici en bas à gauche sur la diapositive numéro 22, il y a un arrêt sur image

 17   de cette carte. A droite se trouvent les endroits qui figuraient sur la

 18   carte de la Yougoslavie. Ces endroits sont indiqués par des cases en vert

 19   en Croatie. Ceux qui sont en jaune représentent la Bosnie-Herzégovine. Ceux

 20   qui sont en rose représentent la Serbie.

 21   Lorsqu'ils ont mis ceci en place et lorsque ceci s'est développé, les

 22   unités de la DB avaient différentes appellations.

 23   La diapositive numéro 23 comprend une liste de ces noms ainsi que les

 24   écussons que les membres des unités spéciales arboraient sur leurs

 25   uniformes.

 26   Certains de ces noms comme JATD et JSO sont des noms officiels qui étaient

 27   utilisés par les services de Sûreté de l'Etat. Certaines de ces unités

 28   avaient été nommées d'après le nom des personnes qui dirigeaient l'unité,

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  1   par exemple, les hommes d'Arkan, les Tigres d'Arkan, les hommes de Martic,

  2   les hommes du capitaine Dragan.

  3   Et un terme qu'ils utilisaient souvent était le terme du couvre-chef qu'ils

  4   portaient souvent, à savoir les Bérets rouges.

  5   Les unités spéciales étaient une organisation importante. Et pendant ces

  6   déclarations liminaires, nous allons vous présenter les membres les plus

  7   importants, ceux que nous allons citer souvent au cours de ce procès.

  8   La diapositive numéro 24 montre Milorad Ulemek, plus connu sous le nom de

  9   Legija à cause du temps passé dans la légion étrangère française. Son

 10   oncle, Mihajlo Ulemek, était un membre de la Garde volontaire serbe

 11   d'Arkan, et Legija, après avoir rejoint son oncle, est devenu un de ses

 12   membres les plus respectés et les plus craints.Parce que Legija avait les

 13   qualités de chef, il est rapidement devenu un des instructeurs les plus

 14   importants et un des commandants les plus importants de la Garde de

 15   volontaires serbes d'Arkan. C'est un membre de l'unité spéciale que l'on

 16   voit le plus souvent sur la vidéo de Kula parce qu'il est toujours au côté

 17   de Stanisic et ils montrent également Milosevic.

 18   La diapositive numéro 25 montre Zika Crnogorac, ou Zika le Monténégrin.

 19   C'est un autre membre important des Bérets.

 20   Et je vais vous montrer quelle était sa participation lorsque

 21   Milosevic le présente aux unités spéciales de la DB.

 22   A la lumière du temps qui a été un petit peu diminué pour

 23   l'Accusation, je vais omettre la diapositive numéro 26 et passer

 24   directement à la diapositive numéro 27.

 25   Pendant la cérémonie de remise des distinctions à Kula au mois de mai

 26   1997, M. Stanisic a montré à M. Milosevic quel était l'équipement dont

 27   disposait l'unité spéciale de la DB serbe. Sur cette séquence vidéo dans la

 28   diapositive numéro 27, Milosevic montre sa salle d'opération mobile, des

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  1   véhicules blindés des transports de troupes, des camions avec des lance-

  2   roquettes et des fusils anti-défenses équipés à l'arrière.

  3   Compte tenu du mandat légal qui avait été confié à M. Stanisic et M.

  4   Simatovic, il s'agissait pour eux de s'occuper de la collecte de données et

  5   d'information, et ces images sont très claires car on voit cette unité qui

  6   s'est équipée pour une tâche bien différente.

  7   L'idée de l'unité spéciale est née à Belgrade, cette unité devait

  8   voir le jour à Krajina pendant le printemps 1991. L'idée de la création de

  9   cette unité spéciale est née à Belgrade, mais cette unité a vu le jour en

 10   Krajina pendant le printemps de l'année 1991. La Krajina fait partie de la

 11   Croatie et va jusqu'à la côte dalmate. La Krajina était composée d'une

 12   majorité de Serbes qui s'y sentaient de plus en plus vulnérables et qui

 13   écoutaient la rhétorique nationaliste croate diffusée à Zagreb. Dans ce

 14   contexte de peur et de méfiance, plusieurs Serbes ou l'homme de la rue, le

 15   Serbe croate devenait de plus en plus important et devenait un acteur

 16   majeur dans les événements qui s'y déroulaient. Je souhaite maintenant vous

 17   en présenter quelques-uns.

 18   Milan Babic était le premier ministre président du gouvernement de la

 19   Serbie autonome de la Krajina, la région auto-déclarée plus communément

 20   appelée la SAO de Krajina.

 21   Il a témoigné dans plusieurs procès devant ce Tribunal et il a plaidé

 22   coupable au crime de persécution. Il a été condamné à un terme

 23   d'emprisonnement de 13 ans. Il y a un peu plus de deux ans, il s'est

 24   suicidé au quartier pénitentiaire des Nations Unies. Sa déposition devant

 25   un Tribunal explique les événements de la Krajina du point de vue de

 26   quelqu'un qui était à l'intérieur. Sa déposition a été admise et c'est

 27   maintenant une question en souffrance devant la Chambre et je ne vais pas

 28   maintenant pendant les déclarations liminaires évoquer sa déposition.

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  1   Un autre Serbe de Croatie, qui est devenu un membre important faisait

  2   partie de la police locale, répondait au nom de Milan Martic. Petit à

  3   petit, il devait occuper des postes de dirigeants de plus en plus

  4   importants au sein de la SAO de Krajina et plus tard ce qui a été appelé la

  5   République serbe de Krajina.

  6   Le 12 juin de l'année dernière, la Chambre de première instance l'a

  7   condamné pour meurtre, persécutions, expulsions, et autres crimes et l'a

  8   condamné à 35 ans d'emprisonnement. Il a fait appel de ce jugement et ceci

  9   est pour l'instant en souffrance.

 10   Dans la diapositive numéro 29, on peut considérer qu'il s'agit de

 11   chauffeur qui décrit comment Milan Martic et lui se retrouvaient

 12   régulièrement.

 13   Les liens étroits qui les unissaient deviennent apparents en

 14   septembre 1991 après que Milan Martic a été arrêté dans la ville bosniaque

 15   de Bosanska Krupa. Sa remise en liberté a été organisée après une série de

 16   coups de téléphone, l'un d'entre eux va être diffusé maintenant,

 17   diapositive numéro 30. Il s'agit d'un appel qui date du 9 septembre 1991.

 18   [Diffusion de la cassette audio]

 19   M. GROOME : [interprétation] Dans cette conversation interceptée, on voit

 20   Milosevic et Karadzic qui évoquent la manière dont Martic peut être libéré

 21   après qu'il a été arrêté, mais également comment Jovica Stanisic est la

 22   personne qui va exécuter les directives de Milosevic et qui va les

 23   communiquer à un autre membre essentiel de l'entreprise criminelle commune.

 24   Les unités spéciales serbes de la DB ont commencé par soutenir, entraîner,

 25   faciliter les crimes commis contre la population non-serbe de Krajina.

 26   Franko Simatovic a personnellement surveillé tout ceci.

 27   Il s'est d'abord rendu en Krajina à ce moment-là, il emmenait avec

 28   lui un homme répondant au nom de Dragan Vasiljkovic, qui mettait en place

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  1   ce programme d'entraînement.

  2   Dragan Vasiljkovic, également connu sous le nom de capitaine Dragan,

  3   est né en Serbie. Dragan Vasiljkovic est ensuite allé vivre en Australie

  4   avec un membre de sa famille et est revenu en Yougoslavie au début des

  5   années 1990. C'était un vétéran, un soldat de la DB, qui a utilisé son

  6   expérience. On l'a envoyé en Krajina afin d'agir ou de servir d'instructeur

  7   pour les nouvelles forces de la police établies en Krajina.

  8   A la diapositive numéro 31, comme l'indique le rapport de l'armée

  9   yougoslave, il est clair que le capitaine Dragan travaillait avec et pour

 10   les Serbes, et il était placé sous le contrôle de Jovica Stanisic.

 11   Je souhaite vous montrer les diapositives 32 et 33, une lettre rédigée par

 12   le capitaine Dragan le 8 novembre 1991. Vous verrez que sa signature se

 13   trouve en bas de la diapositive numéro 32.

 14   A ce moment-là, Vasiljkovic ne comprenait pas vraiment les exigences de

 15   Stanisic en matière de caractère secret de tout ceci, et a révélé tout à

 16   fait objectivement qu'il avait des liens avec la DB, et on voit ici à la

 17   diapositive numéro 33 qu'il a déclaré : "Il y a une obligation envers les

 18   services de Sûreté de la République de Serbie." Il parle des activités, et

 19   "ceux-ci doivent être conformes aux services susmentionnés."

 20   Dans cet extrait de la remise des distinctions à la diapositive numéro 34,

 21   on voit Jovica Stanisic embrasser le capitaine Dragan lorsqu'il lui remet

 22   son prix.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   M. GROOME : [interprétation] Au début du mois d'avril, quand Milan Martic a

 25   commencé à mettre en place une force de police composée principalement

 26   d'hommes qui n'étaient pas armés et qui n'étaient pas entraînés, Simatovic

 27   et le capitaine Dragan sont arrivés avec l'appui de Jovica Stanisic et de

 28   Slobodan Milosevic.

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  1   Martic a emmené cette délégation de la Sûreté de l'Etat, Simatovic et le

  2   capitaine Dragan, à Golubic, à 9 kilomètres au nord de Knin, et là ils ont

  3   mis en place un centre d'entraînement de la DB serbe afin de reprendre les

  4   territoires serbes en Croatie.

  5   Cet entraînement qui allait se dérouler a créé une force de combat ou de

  6   frappe formidable et bien équipée qui empêchait non seulement le

  7   gouvernement croate d'imposer sa volonté en Krajina, mais qui serait

  8   utilisée par la suite pour nettoyer ethniquement la Krajina de non-Serbes.

  9   Six ans plus tard à Kula, M. Simatovic parlait de Gobulic comme étant une

 10   des réalisations de son unité.

 11   Plus de 3 000 hommes ont été entraînés à Golubic en tout. Certains ont reçu

 12   cet entraînement et mettaient en place ensuite 25 autres camps

 13   d'entraînement et se rendaient dans ces 25 autres camps d'entraînement mis

 14   en place par Stanisic et Simatovic. Les premiers membres des unités

 15   spéciales étaient surnommés Knindzas, à cause de la proximité du camp de

 16   Golubic à Knin.

 17   Une des premières batailles dans lesquelles ont combattu les Knindzas était

 18   à Glina. Après le combat, le capitaine Dragan distribuait des bérets

 19   rouges; et ceci était devenu un des emblèmes de l'unité, et c'est la raison

 20   pour laquelle ce terme était communément utilisé, les Bérets rouges. Ici

 21   sur la diapositive numéro 35, on voit quelques images de membres

 22   importants. Ceci était la vitrine en quelque sorte du centre d'entraînement

 23   de Kostic à Kula, et on voit les bérets ici représentés et entourés

 24   d'armes.

 25   Cette unité a été appelée de différentes façons au cours de son histoire,

 26   mais le terme de "Bérets rouges" est resté un terme utilisé de façon

 27   constante. Les unités militaires qui n'étaient pas directement affiliées à

 28   la DB mettaient quand même ces bérets et cette couleur. Le béret rouge est

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  1   devenu l'emblème des unités de la DB.

  2   Ce que nous savons sur la naissance des unités spéciales est corroboré par

  3   le document du bureau du Procureur que nous avons pu obtenir. Je vais

  4   saisir cette occasion pour montrer aux Juges de la Chambre quelle est

  5   l'importance et la signification de ces documents.

  6   Je ne vais pas vous parler de la diapositive numéro 36, mais essayer de

  7   réduire nos déclarations liminaires, et passer directement à la diapositive

  8   numéro 37.

  9   Comme nous le voyons d'après ce document numéro 37, le 14 juin, quelques

 10   semaines après que le capitaine Dragan ait fait sa proposition, le

 11   capitaine Dragan et Frenki avaient prévu une réunion à laquelle auraient

 12   assisté plusieurs officiers de l'armée yougoslave. Ce document confirme que

 13   l'armée yougoslave, elle n'était pas une présence neutre en Krajina.

 14   Deux jours plus tard, M. Simatovic lui-même a donné un ordre. La

 15   diapositive numéro 33 [comme interprété] est une photo du document

 16   original. C'est un ordre signé par Franko Simatovic, donnant l'ordre de

 17   retirer toutes les armes et armements de la forteresse de Knin et de les

 18   transporter dans le camp de Golubic.

 19   Cet ordre nous permet de comprendre comment Simatovic voyait l'autorité en

 20   Krajina. C'est lui, et ce n'est pas l'armée yougoslave, ce n'est pas Milan

 21   Babic, ce n'est pas Milan Babic qui donne l'ordre de retirer et de faire

 22   retirer les armes sur une question aussi importante. Vous aurez constaté

 23   quel est l'en-tête de cette lettre : "République de Serbie, centre de

 24   Krajina, SAO Golubic."

 25   Il signait cet ordre non pas avec son nom complet, mais il le signait avec

 26   son surnom, Frenki, et on le connaissait par la suite beaucoup sous ce nom-

 27   là, surtout sous ce nom-là.

 28   L'Accusation va également présenter des documents tels que celui que vous

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  1   avez sur vos écrans maintenant qui fait référence à des ordres donnés par

  2   Frenki. D'après l'auteur de ce rapport que l'on peut voir à la diapositive

  3   numéro 40, le ministère serbe des Affaires intérieures avait précédemment

  4   fourni quatre véhicules. Deux mois après avoir reçu ce matériel, l'auteur

  5   de ce document fait rapport et dit qu'il a reçu un ordre "Frenk" qui est le

  6   principal représentant du MUP de Serbie, afin d'enlever des équipements

  7   radio de deux de ces véhicules.

  8   A ce moment environ, le capitaine Dragan a préparé un rapport, et ceci se

  9   fonde à la lumière des succès du capitaine Dragan. Il propos maintenant

 10   comment faire grandir ces unités spéciales de la DB serbe. Il pense que

 11   leurs objectifs peuvent aller au-delà du simple entraînement de quelques

 12   individus. Il a une vision plus grande, il souhaite entraîner ces hommes

 13   pour qu'ils puissent se rendre dans d'autres régions de la Croatie et de la

 14   Bosnie-Herzégovine et met en place de nouveaux centres de formation ainsi

 15   que de nouvelles antennes des unités spéciales.

 16   A la diapositive numéro 41, on voit ici trois hommes qui sont directement

 17   responsables de ce succès initial sur le terrain. Il fait ceci pour

 18   augmenter le moral de ces hommes. Parmi ces hommes il y a Milan Martic,

 19   Frenki, et le capitaine Dragan lui-même.

 20   Il suggère à ces trois hommes qui sont des hommes importants à ces unités

 21   spéciales, il fait ici allusion aux membres de ces unités spéciales et il

 22   propose de leur rendre visite dans ces endroits où ces nouvelles formations

 23   ont été mises en place afin d'accroître leur moral et "pour leur donner des

 24   conseils et d'autres informations sur ces unités sur le terrain."

 25   L'Accusation va vous présenter d'autres rapports qui montrent que Frenki ou

 26   M. Simatovic, ainsi que d'autres dirigeants locaux serbes ont fourni des

 27   informations très détaillées sur ce qui se passait à Krajina.

 28   A la diapositive numéro 42, on voit le rapport du 19 juillet. Ce document

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  1   est intitulé "unités spéciales," peut-être que c'est la première fois que

  2   ce terme est utilisé pour décrire ces unités de la DB serbe.

  3   L'importance de l'entraînement qu'ils ont reçu est très important, ceci

  4   peut se voir au niveau de la dernière phrase : "Nos forces sont déployées

  5   d'après le plan d'entraînement."

  6   La diapositive 43 vous présente un rapport du 6 août 1991, qui annonce un

  7   cessez-le-feu, une fois de plus nous y voyons le surnom de M. Simatovic, à

  8   savoir Frenki.

  9   Et sur votre écran, vous verrez deux extraits de rapports datant du mois de

 10   juillet 1991. Un peu plus tard toujours ce même été, le 19 juillet, le

 11   capitaine Dragan a établi et présenté un rapport détaillé destiné à ses

 12   supérieurs, Frenki, Milan Martic et le commandant Fica qui, d'après le

 13   service du renseignement de la JNA était un inspecteur du MUP de la Serbie.

 14   Depuis le début, il est évident que les personnes qu'ils ont formées et

 15   équipées étaient auteurs de crimes de guerre. Il faut dire à la faveur du

 16   capitaine Dragan que la façon dont il voyait son comportement était que

 17   c'était quelque chose qu'il fallait corriger. Et la Chambre verra au cours

 18   de ce procès que les trois crimes ne sont pas arrivés de façon fortuite

 19   dans ce plan mais en font partie intégrante.

 20   Dans le deuxième rapport de la diapositive 44, un extrait du rapport du 23

 21   juillet, nous pouvons voir que dès le début, dès les premiers jours des

 22   activités de cette unité, à savoir moins de trois mois après sa création il

 23   avait été établi un système très organisé permettant de présenter des

 24   rapports.

 25   Et nous pouvons voir dans ce document que l'une des tâches essentielles du

 26   capitaine Dragan en Krajina consistait à organiser un système de

 27   commandement et à présenter des rapports qui incluent la République de la

 28   Serbie.

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  1   Est-ce que Stanisic et Simatovic recevaient ces rapports relatifs aux

  2   activités des unités qu'ils avaient créées ? Est-ce que Milosevic savait ce

  3   que faisait cette unité ?

  4   J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 45, et une fois de

  5   plus sur la vidéo de Kula. Dans cette partie, Stanisic amène Milosevic

  6   auprès des commandants supérieurs de l'unité, il les lui présente. Après

  7   avoir été salué par Crnogorac, Milosevic lui serre la main puis ensuite se

  8   dirige vers le colonel Rajo Bozovic. Et je présenterai une observation à

  9   propos de cet échange lorsque vous aurez terminé de visionner cet extrait

 10   vidéo.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   M. GROOME : [interprétation] Les commandements supérieurs étaient habillés

 13   en tenue officielle lors de cet événement.

 14   Le Procureur avance que par le truchement de Simatovic et Stanisic,

 15   Milosevic était régulièrement informé du lieu où se trouvait leur unité et

 16   de ce quelle faisait. Lors de cet échange, Milosevic semble rencontrer

 17   Bozovic en personne apparemment pour la première fois. Mais en entendant ce

 18   nom, Milosevic le reconnaît immédiatement car il l'a lu dans ses rapports,

 19   et ce sont des rapports, avance l'Accusation, qui avaient dû passer entre

 20   les mains de Simatovic et Stanisic. Ce sont des rapports qui étaient

 21   présentés avec suffisamment de fréquence pour que Milosevic puisse

 22   reconnaître le nom en question rapidement.

 23   J'aimerais maintenant donner la parole à Mme Brehmeier-Metz afin quelle

 24   nous parle du rôle joué par MM. Stanisic et Simatovic pour ce qui est des

 25   crimes commis en Croatie.

 26   Mme BREHMEIER-METZ : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le

 27   Juge.

 28   Alors que les frontières de la Yougoslavie semblaient se fragmenter, de

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  1   fortes concentrations de minorités serbes résidant et vivant en Croatie ont

  2   commencé à se déclarer région autonome, une région en fait qui se trouvait

  3   à l'intérieur des frontières géographiques de la Croatie, mais qui n'était

  4   pas régie par le droit croate ou l'administration gouvernementale.

  5   Ces régions qui se sont autoproclamées étaient appelées les Régions

  6   autonomes serbes ou encore SAO, qui correspond au cigle en langue B/C/S.

  7   En août 1991, Milan Martic a décidé d'assumer le contrôle du village croate

  8   de Kijevo qui se trouve au sud-est de Knin. Martic a émis un ultimatum à

  9   l'intention de la police de Kijevo dans lequel il menaçait d'attaquer la

 10   population civile du village. A ce moment précis, l'armée yougoslave est

 11   officiellement entrée dans le conflit du côté serbe. Avec l'expiration de

 12   l'ultimatum, une force combinée des hommes de Martic de l'armée yougoslave

 13   et des réservistes serbes locaux ou des membres de la Défense territoriale

 14   ont attaqué Kijevo, en ont pris le contrôle et en ont chassé toute la

 15   population croate.

 16   A partir de ce moment précis, l'armée yougoslave et les forces armées de la

 17   Krajina serbe locale, à savoir les forces de police, les unités de la

 18   Défense territoriale ainsi que les unités volontaires serbes dont

 19   nombreuses étaient formées, équipées, financées et soutenues par la DB

 20   serbe sous le contrôle de Jovica Stanisic et Franko Simatovic, ont commencé

 21   à attaquer les villages croates qui se trouvaient dans la SAO Krajina.

 22   La Défense territoriale, à savoir la TO de l'ancienne Yougoslavie était

 23   composée d'anciens membres de l'armée populaire yougoslave qui avaient

 24   conservé leurs uniformes ainsi qu'une arme et qui étaient restés en tant

 25   que réservistes sous le commandement de la république en temps de paix et

 26   était intégrés à l'armée yougoslave en temps de guerre.

 27   En août 1991, Slobodan Milosevic allait régler une dispute ou un litige

 28   entre Babic et Martic à propos du contrôle des forces de la Défense

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  1   territoriale en forçant Babic à nommer Milan Martic commandant adjoint des

  2   Défenses territoriales.

  3   Cette nomination conjuguait au fait que nombreux parmi les membres des

  4   Défense territoriales en SAO Krajina n'étaient loyaux qu'à Martic ont

  5   finalement abouti au contrôle de Martic sur ces Défenses territoriales. Le

  6   1er août 1991, le gouvernement de la SAO de Krajina a décidé que les unités

  7   des objectifs spéciaux de la police ainsi que les Défense territoriales se

  8   rallieraient conjointement aux forces armées de la SAO de la Krajina. 

  9   La diapositive numéro 46 qui est maintenant à l'écran nous donne une idée

 10   des lieux en Croatie ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine et notamment des

 11   municipalités et villages qui sont pertinents pour l'acte d'accusation

 12   dressé à l'encontre de Jovica Stanisic et Franko Simatovic. Les villages de

 13   la SAO de la Krajina dont je vais parler se trouvent entourer de cercles

 14   rouges. Dans le cercle qui se trouve en bas de la carte, vous pouvez

 15   également voir la ville de Knin et de Golubic.

 16   Dubica, Bacin et Cerovljani sont des villages qui se trouvent à la

 17   frontière entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. En 1991, environ la

 18   moitié des habitants vivant à Dubica étaient d'appartenance ethnique

 19   croate, avec une petite minorité musulmane, alors que dans les villages de

 20   Bacin et Cerovljani la population était essentiellement croate.

 21   Jusqu'à l'année 1991, les relations entre les groupes ethniques avaient été

 22   cordiales et harmonieuses. Pendant l'été de 1991 toutefois, ces relations

 23   ont commencé à se détériorer.

 24   Des affrontements armés se sont produits entre les forces armées serbes et

 25   croates, et en septembre 1991, l'armée croate s'est retirée, les forces

 26   serbes, et notamment la police de Martic et sa Défense territoriale, se

 27   sont emparées des villages dont ils ont pris le contrôle. Les forces serbes

 28   ont à plusieurs reprises incendié les maisons des habitants croates, et les

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  1   ont utilisées comme autant de boucliers humains, et ont tué des personnes.

  2   Par exemple, ils ne se sont pas gênés pour lancer un lance-roquettes à

  3   partir du beffroi de l'église catholique de Dubica, à la suite de quoi les

  4   Croates ont décidé de quitter leur village. Seul y sont restées quelques

  5   personnes malades, ainsi que des vieillards.

  6   Le 20 octobre 1991, les membres de la police de Martic et de la Milicija de

  7   Krajina sont passés dans Dubica avec un camion, y ont récupéré un nombre de

  8   53 personnes, il s'agissait des civils qui étaient restés et les ont

  9   conduits au poste de pompiers à Bacin. Ils ont avancé qu'une réunion devait

 10   être convoquée à cet endroit. En fait, c'est à la caserne des pompiers que

 11   ces personnes ont été détenues. L'une de ces personnes détenues à la

 12   caserne des pompiers était Slavko Kocuc [phon], il a vu comment dix civils

 13   ont par la suite été libérés apparemment du fait de liens qu'ils avaient

 14   avec des Serbes. Lui-même a pu partir grâce à un des gardiens qui se

 15   trouvait être un de ses anciens étudiants. Slavko Kocuc a par la suite

 16   compilé une liste des personnes qui avaient été détenues avec lui à la

 17   caserne des pompiers.

 18   Si vous voyez les âges des civils qui figurent sur cette liste qui figurent

 19   à la diapositive 47, vous remarquerez que la grande majorité de ces

 20   personnes avaient plus de 60 ans. Le lendemain, les civils qui se

 21   trouvaient encore à la caserne des pompiers ont été exécutés par les forces

 22   serbes, ainsi qu'un certain nombre de personnes âgées de Bacin et de

 23   Cerovljani. L'une de ces personnes tuées était une femme âgée de 90 ans.

 24   Le village de Saborsko se trouve dans la municipalité d'Ogulin, près de

 25   Plitvice. En août 1991, sa population était quasiment entièrement croate,

 26   tout comme cela était le cas dans les villages avoisinants de Poljanak,

 27   Lipovaca et Vukovici.

 28   Ces villages étaient entourés par des villages dont la population

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  1   était essentiellement serbe. En août 1991, les forces serbes ont commencé à

  2   pilonner Saborsko, leur but étant en fait d'établir le lien entre les

  3   territoires serbes qui étaient séparés par Saborsko. Au cours des mois

  4   suivants, des membres de la police de Martic et d'autres forces serbes ont

  5   commencé à se lancer dans une campagne d'harcèlement, d'arrestation

  6   arbitraire, de détention et dans de nombreux cas, ont également roué de

  7   coups très gravement des civils croates. La plupart des Croates ont quitté

  8   les villages à la suite de ces opérations.

  9   A la fin du mois d'octobre et au début du mois de novembre 1991, Poljanak,

 10   Lipovaca, Vukovici, et finalement Saborsko ont dû essuyer les attaques des

 11   forces serbes. Au cours de ces attaques, les civils croates ont

 12   délibérément et intentionnellement été assassinés. A Vukovici par exemple,

 13   les forces serbes ont fait sortir huit civils croates d'une maison. Parmi

 14   ces personnes se trouvaient des vieillards et des femmes. Ils les ont

 15   alignés contre un mur et les ont tout simplement exécutés. Un autre homme,

 16   qui était trop malade pour quitter la maison, a essuyé des tirs de la part

 17   des forces serbes alors qu'il se trouvait alité.

 18   Le 12 novembre 1991, les forces serbes ont commencé à se lancer dans une

 19   attaque lourde contre Saborsko. Le village a dans un premier temps été

 20   attaqué par les avions de la JNA, qui larguaient des bombes, puis ensuite a

 21   essuyé des feux d'artillerie lourde, à la suite de quoi des unités

 22   d'infanterie sont arrivées à Saborsko.

 23   La diapositive numéro 48 fait référence à cette attaque. Il s'agit d'une

 24   lettre de la part du représentant du village de Plaski qui explique cette

 25   attaque comme étant une attaque ciblant des personnes maléfiques.

 26   L'église catholique de Saborsko a été pilonnée et endommagée, puis

 27   l'artillerie s'est retirée et a laissé dans le village des soldats serbes

 28   et des policiers. Ces forces serbes ont commencé par piller le hameau, se

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  1   sont emparées des voitures de particuliers, ont volé des biens

  2   électroménagers et le bétail, et ont incendié les maisons. Les civils ont

  3   été sortis de leurs sous-sols, les hommes ont été séparés des femmes et une

  4   vingtaine d'hommes ont été exécutés. La plupart des habitants de Saborsko

  5   se sont enfuis ou ont été conduits dans des bus et libérés en plein

  6   territoire croate.

  7   Au cours de ce procès, nous allons présenter des témoins qui parleront de

  8   cette attaque contre Saborsko. La diapositive numéro 49 vous présente des

  9   citations de la déposition de l'une de ces personnes lors du procès contre

 10   Milan Martic. Vous remarquerez, et cela a été souligné en rouge, que

 11   lorsqu'on lui a demandé qui avait participé à l'attaque contre Saborsko, le

 12   témoin a répondu qu'il s'agissait des hommes formés à Golubic, à savoir les

 13   Bérets rouges.

 14   A titre de dernier exemple, je parlerai de Skabrnja. Skabrnja, ainsi que

 15   les villages avoisinants, se trouvait près de Zadar dans la partie sud-

 16   ouest de la Croatie. En 1991, le village a été quasiment entièrement

 17   croate. Nous retrouvons ce que je vous ai déjà décrit. Cette zone fut

 18   d'abord pilonnée, bombardée par les forces serbes à partir du mois de

 19   septembre 1991. L'attaque finale s'est déroulée le 18 novembre 1991.

 20   Il y avait trois églises catholiques dans et autour du village de Skabrnja.

 21   L'une de ces églises était l'église de l'Assomption de la Vierge. Les

 22   photos suivantes de la diapositive 50 vont vous montrer l'église avant

 23   l'attaque et après. L'église a été pilonnée et endommagée par un char de la

 24   JNA. Les forces serbes ont fait sortir les civils du village, les ont

 25   transportés contre leur gré vers des territoires contrôlés par le

 26   gouvernement croate. Les forces serbes se sont ensuite déplacées de maison

 27   en maison, et recherchaient les personnes qui étaient restées, tout en

 28   pillant et incendiant les maisons en question.

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  1   En tout, quelque 38 civils ont été tués à Skabrnja. Le 21 décembre

  2   1991, la police de Martic, dans le cadre d'opérations conjointes avec

  3   d'autres forces serbes, ont forcé la voie dans des maisons du petit village

  4   de Bruska, qui se trouve entre Skabrnja et Benkovac. Ils ont fait sortir

  5   les hommes, les ont alignés et leur ont tiré dessus. Ils ont également tiré

  6   sur les femmes qui s'enfuyaient. En tout et pour tout, neuf personnes ont

  7   été tuées.

  8   Tout cela montre qu'il y avait en quelque sorte une structure répétée et

  9   que l'on pouvait finir par prévoir et qui était en fait prévisible pour ce

 10   qui était des villages croates de la Krajina, et ce, pendant l'automne et

 11   l'hiver de l'année 1991. Les villages dont la population était croate ont

 12   d'abord dû subir le siège de la JNA, le blocus, et très souvent ils étaient

 13   pilonnés. Après cela, les forces serbes, notamment la police de Martic,

 14   entraient dans les villages.

 15   Les bâtiments qui étaient non-serbes étaient détruits. Les propriétés qui

 16   étaient non-serbes étaient pillées. Très souvent, des Croates étaient

 17   arrêtés, détenus, certains étaient chassés. Ceux qui restaient,

 18   essentiellement la population des personnes très âgées, étaient

 19   assassinées, ce qui nous donnait un nettoyage ethnique des villages.

 20   Une fois de plus, j'aimerais faire référence à ce qu'un témoin qui sera

 21   convoqué par l'Accusation a dit dans le procès ou l'affaire contre Milan

 22   Martic. Il s'agit d'un extrait de son témoignage, qui figure à la

 23   diapositive 52. Ce témoin était personnellement présent lorsque Franko

 24   Simatovic, agissant au nom de Jovica Stanisic, a amené des armes et de

 25   l'argent à Milan Martic à Knin.

 26   Pour des raisons qui ne sont pas très claires, il y a eu un refroidissement

 27   des relations avec le capitaine Dragan après l'été 1991, il a été rappelé à

 28   Belgrade et Stanisic l'a empêché de revenir en Krajina. Lorsqu'une unité

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  1   des Knindzas du capitaine Dragan s'est désintégrée, Franko Simatovic a

  2   choisi sur le volet les meilleurs de ces éléments pour créer un groupe

  3   sélectionné qui allait finir par devenir une force de combat dissimulée

  4   mais toutefois professionnelle et particulièrement bien structurée. Cela

  5   s'est passé au mont Fruska Gora en Serbie.

  6   Messieurs les Juges, je voudrais vous rappeler la diapositive 22, il s'agit

  7   de la sixième carte du jeu de collection de cartes. Vous la verrez encore

  8   un peu plus tard lors de ces déclarations liminaires, vous verrez Fruska

  9   Gora qui se trouve sur la droite de la carte juste à l'extérieur de la

 10   Slavonie orientale en territoire serbe. Il s'agit du quatrième encadré à

 11   partir du haut où il est indiqué Lezimir, Fruska Gora.

 12   Et là, sur le mont Fruska Gora, la force d'élite qui se trouvait à une

 13   distance de frappe de la Slavonie orientale où une paix très provisoire

 14   avait été établie ou à une distance de frappe de la Bosnie qui atteignait

 15   très rapidement le point d'ébullition. Dragan Vasiljkovic a été rappelé

 16   pour aider à l'entraînement de ces hommes sur le mont Fruska Gora. Zika,

 17   que l'on connaît également comme Crnogorac, a été nommé chef de l'unité. Il

 18   souhaitait que les autres reçoivent un béret rouge, un numéro

 19   d'immatriculation de la Sûreté d'Etat ainsi qu'un surnom.

 20   Stanisic a tenu à l'écart du regard public cette unité qui était en pleine

 21   évolution en les gardant à part et en faisant en sorte qu'ils fassent

 22   partie de la Sûreté d'Etat mais ils n'en faisaient pas partie comme les

 23   unités de police ordinaire ou comme les unités militaires de la Serbie ou

 24   de la RSFY.

 25   L'Accusation -- cela est résumé à la diapositive numéro 53. L'Accusation

 26   avance que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont joué un rôle dans

 27   l'organisation, la formation des auteurs directs de ces crimes et que cela

 28   a été l'une des contributions qu'ils ont apportées à l'entreprise

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  1   criminelle commune dont le but était de chasser par la force les Croates et

  2   les autres non-Serbes de certaines terres qui avaient été ciblées, et ce,

  3   par les crimes de persécution, de meurtre et d'assassinat, qui fait qu'ils

  4   sont directement responsables individuellement de ces crimes.

  5   La seconde région en Croatie qui est englobée par cet acte d'accusation est

  6   la Slavonie orientale. Le Parti démocrate serbe ou le SDS a été créé en

  7   Slavonie en 1990. Comme dans les autres régions en Croatie, il y a eu

  8   exacerbation des tensions en Slavonie pendant l'année 1990 et en janvier

  9   1991, le Conseil national serbe de la Slavonie, du Baranja et du Srem

 10   occidental, auquel nous faisons référence par son sigle SBWS en anglais et

 11   SBSO en français, a été établi. Le Conseil national serbe proclamait que

 12   les Serbes en Croatie étaient un peuple souverain avec le droit à

 13   l'autonomie en février 1991. Cela fait l'objet de la diapositive 54.

 14   Lors d'une réunion convoquée à Backa Palanka juste de l'autre côté du

 15   Danube en Serbie, des représentants de tous les villages serbes de la SBSO

 16   ont formé la grande assemblée nationale de la SBSO. Le 25 juin 1991, le

 17   même jour de la déclaration de l'indépendance respective de la Croatie et

 18   de la Slovanie, cette grande assemblée nationale a déclaré la sécession de

 19   la Croatie et a établi la région autonome serbe de la SBSO.

 20   Goran Hadzic qui avait été le président de Conseil national serbe a été élu

 21   premier ministre désigné.

 22   La SAO de la Slavonie orientale a été créée en août 1991. Cette entité,

 23   toutefois, ne jouera pas un rôle important ici dans cette affaire. Il me

 24   suffit de dire qu'en février 1992, la SAO de la Slavonie orientale, ainsi

 25   que les SAO de la SBSO se sont ralliées à la SAO de la Krajina et ont créé

 26   la République de la Krajina serbe.

 27   Goran Hadzic qui fait l'objet de la diapositive 55 est devenu la

 28   personnalité politique la plus importante dans la SAO de la SBSO qui avait

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  1   été autoproclamée. Il en avait été l'un des membres fondateurs, il était

  2   président du conseil national serbe et a été élu premier premier ministre,

  3   et le 25 septembre 1991, premier ministre de la SAO de la SBSO.

  4   Lorsque les trois SAO en Croatie ont fusionné en RSK en février 1992, il

  5   est devenu président de cette nouvelle entité qui venait d'être créée et

  6   est resté à cette fonction jusqu'en décembre 1993, date à laquelle Milan

  7   Martic a assumé cette fonction.

  8   A l'instar des personnalités politiques de la Krajina, les dirigeants de

  9   cette nouvelle SAO de la SBSO nouvellement créée ont évité de faire quoi

 10   que ce soit avant de consulter dans un premier temps Belgrade. Hadzic se

 11   rendait régulièrement à Belgrade pour y rencontrer à la fois Slobodan

 12   Milosevic et Jovica Stanisic. Il recevait des instructions sur la façon de

 13   procéder. Lorsqu'il revenait à Dalj, il convoquait la police et les

 14   commandants de la Défense territoriale et fréquemment il relayait des

 15   informations qui lui étaient données par Milosevic.

 16   Lors d'une conversation de téléphone interceptée avec Karadzic le 14

 17   décembre 1991, Stanisic a dit, entre autres choses : "J'ai à peine pu

 18   convaincre Hadzic de ne pas y aller," ce qui indique une fois de plus qu'il

 19   avait des liens très étroits avec la direction politique de la SAO de la

 20   SBSO.

 21   Tout comme la Krajina, la SAO de la SBSO n'avait pas d'argent et n'avait

 22   pas de ressource et le gouvernement de la Serbie fournissait à cette région

 23   toutes les ressources dont ils avaient besoin. Lors de réunions régulières

 24   avec Jovica Stanisic, Hadzic parlait constamment du problème du matériel et

 25   de l'équipement de sa force de police et Stanisic faisait en sorte que cela

 26   lui soit fourni.

 27   Jovica Stanisic, toutefois, n'a pas seulement exercé son influence lors de

 28   réunions avec Hadzic à Belgrade ou dans d'autres lieux en Serbie, il est

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  1   venu personnellement également en Slavonie orientale. Vers le 19 ou le 20

  2   septembre 1991, il est arrivé à Dalj. Nous allons présenter des éléments de

  3   preuve indiquant que Stanisic vociférait à l'attention de certaines

  4   personnes et les a mises en garde parce que Vukovar, la ville qui était

  5   assiégée par la JNA, ne s'était toujours pas rendue.

  6   Le témoin se souviendra comment Stanisic a indiqué qu'ils avaient tout le

  7   matériel nécessaire pour pouvoir s'emparer de la ville. Stanisic a donné

  8   l'ordre à Hadzic de venir à une réunion à Dalj -- je m'excuse -- Stanisic a

  9   donné l'ordre à Hadzic de venir à une réunion à Dalj avec tous les

 10   commandants de la Défense territoriale. Et cette réunion a bel et bien eu

 11   lieu avec Stanisic, Hadzic, et d'autres personnes. Et en octobre 1991,

 12   comme cela peut être constaté sur la diapositive 56, Stanisic est venu

 13   trouver le général Arandjelovic accompagné de deux membres des Bérets

 14   rouges, Bozovic, et Ivanovic, Crnogorac.

 15   La personne qui devait tout organiser était Radovan Stojicic, également

 16   connu sous le nom de Badza, un membre du MUP serbe qui plus tard est devenu

 17   le ministre adjoint de l'Intérieur de la République de Serbie. La

 18   diapositive 57 résume ce que nous savons déjà sur cette personne. Stojicic

 19   était à la tête de l'unité antiterroriste de la SAJ, dans la MUP serbe

 20   depuis la fin des années 1980.

 21   Il est venu à la SAO de la SBSO vers la fin du mois de septembre 1991,

 22   après que Jovica Stanisic était venu à Dalj pour se plaindre de Vukovar.

 23   Nous aimerions vous inviter, Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

 24   Madame le Juge, à comprendre par vous-mêmes que conformément à la structure

 25   d'organisation du ministère serbe des Affaires intérieures, Stojicic

 26   n'était pas le subordonné de Stanisic, il a été envoyé simplement par

 27   Stanisic pour s'assurer que les forces locales fonctionneraient

 28   conformément aux désirs du plan commun de l'entreprise criminelle commune

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  1   qui portait sur la chute de Vukovar.

  2   Conséquemment, Stojicic, un membre du ministère des Affaires intérieures de

  3   Serbie, le MUP, a été nommé en tant que commandant de la TO de la SAO de la

  4   SBSO au début de l'automne 1991.

  5   Et nous pouvons voir ici à la diapositive 88 [comme interprété], certaines

  6   photos qui ont été prises lors des funérailles de Stojicic. Nous pouvons

  7   voir Milosevic et Arkan qui sont là tout près.

  8   Une autre personne qui était très importante dans la SAO de la SBSO

  9   est Radoslav Kostic, également connu sous le nom de Kola ou Ante. Kostic

 10   avait été un agent pour la DB depuis le début de 1991.

 11   Sur la diapo numéro 58 [comme interprété], vous verrez un autre

 12   extrait de la vidéo qui a été prise à Kula en 1997 au centre de formation

 13   qui avait été nommé d'après Radoslav Kostic. Jovica Stanisic porte ses

 14   respects pour son camarade et dépose une gerbe sur le tombeau de Kostic.

 15   La DB Serbe avait été impliquée pour ce qui est du transport des

 16   armes depuis les casernes de la JNA à Bubanj Potok au sud de Belgrade au

 17   Borovo Selo déjà en avril 1991.

 18   Kostic s'occupait de la supervision du transport des armes. Nous vous

 19   démontrerons qu'un très grand nombre d'armes arrivaient depuis la Serbie

 20   dans la région en juin 1991. Les armes appartenaient à la JNA et les

 21   livraisons avaient été organisées par la DB de Novi Sad avec à la tête

 22   Kostic.

 23   Kostic était également impliqué pour ce qui est de la formation de la

 24   milice de la SAO de la SBSO et supervisait l'équipement et les armes qui

 25   arrivaient à la DB de Novi Sad. En septembre 1991, il a accompagné Jovica

 26   Stanisic à Dalj.

 27   La diapositive numéro 60 montre le montant du support financier qui

 28   venait de Serbie. Il est intéressant de dire que tout ceci n'était pas

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  1   légal mais on a néanmoins planifié à continuer cette aide.

  2   Une autre personne qui était intermédiaire entre les dirigeants

  3   politiques de la SAO de la SBSO et Belgrade était peut-être le

  4   paramilitaire le plus connu au cours de toute la guerre : c'était Zeljko

  5   Raznjatovic, également connu sous le nom d'Arkan.

  6   Il avait commencé sa "carrière" en 1980 en commettant des crimes

  7   graves un peu partout en Europe. Arkan avait été un fervent supporter du

  8   club de soccer de Belgrade, la Croix Rouge, et s'était entouré d'hooligans.

  9   En 1990, en se servant des membres de ce groupe, il a organisé une unité

 10   paramilitaire appelée la Garde des volontaires serbes ou plus connu sous le

 11   nom des hommes d'Arkan avec une sous-unité d'élite, les Tigres d'Arkan.

 12   C'était ce groupe qui allait par la suite terroriser la population non-

 13   serbe de la SAO de la SBSO, et puis en Bosnie. Arkan a encouragé

 14   ouvertement ces crimes commis par les hommes qu'il a formés.

 15   La deuxième personne qui était placée directement sous lui c'était Milorad

 16   Ulemek, Legija.

 17   Ils étaient une force de choc de la JNA et ils ont permis que des crimes

 18   ouvertement commis contre la population soient commis par les hommes

 19   d'Arkan.

 20   Arkan collaborait très étroitement avec le MUP serbe. Son unité avait été

 21   ravitaillée par le MUP, et il disait qu'il ne faisait absolument rien sans

 22   la connaissance et sans les ordres reçus par Jovica Stanisic. Quelques

 23   jours après la prise de Dalj, Arkan s'est rendu à Borovo Selo avec quelques

 24   hommes à lui. Il les a présentés comme étant des hommes de la DB serbe et

 25   il a montré sa carte d'identité qui était une carte d'identité de la DB

 26   serbe.

 27   La diapositive numéro 63, au bas, nous montre un extrait d'un rapport

 28   parlant du type de formation qui était faite dans les centres de formation

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  1   des unités spéciales de la DB serbe. Je souhaiterais également vous montrer

  2   un extrait assez court dans lequel Arkan, qui parle anglais, décrit les

  3   politiques de son unité relatives aux soldats capturés.

  4   [Diffusion de la cassette vidéo]

  5   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  6   "Je ne vais pas prendre d'autres prisonniers. Nous allons tuer tous les

  7   soldats que nous allons prendre."

  8   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  9   Mme BREHMEIER-METZ : [interprétation] Il y a d'autres rapports, tel le

 10   rapport à la diapositive numéro 64, qui démontrera quelle était la

 11   brutalité d'Arkan et le comportement criminel qui n'était pas seulement

 12   connus par les non-Serbes qui couraient en terreur lorsqu'ils entendaient

 13   son nom, mais également par la JNA, les hommes politiques serbes, et plus

 14   particulièrement pour l'affaire qui nous occupe, Jovica Stanisic et Franko

 15   Simatovic.

 16   En tout, la SAO de la SBSO n'a jamais été une entité indépendante. Nous

 17   allons entendre des éléments de preuve selon lesquels Slobodan Milosevic

 18   contrôlait Hadzic par le truchement d'Arkan et Stojicic, et que Jovica

 19   Stanisic était le lien entre eux et Belgrade.

 20   Depuis la fin de 1990, un très grand nombre d'anciens hommes de la milice,

 21   c'est-à-dire les forces de la police, avaient quitté leur poste et avaient

 22   établi leurs propres groupes de police qui opéraient de façon indépendante

 23   et sans légalité absolue. En juillet 1991, Goran Hadzic a convié une

 24   réunion avec Radoslav Kostic, et Kostic restait l'homme contact avec la

 25   milice et les ravitaillait avec ce dont ils avaient besoin.

 26   Au fil du temps, il était devenu clair qu'Arkan était devenu tellement

 27   puissant que ces hommes qui faisaient partie de la milice et qui ne se

 28   joignaient pas à lui couraient un danger sérieux. Un très grand nombre

Page 1023

  1   d'entre eux ont rejoint Arkan pour ce qui est des crimes qui avaient été

  2   commis plus tard dans la région.

  3   Au cours de l'été 1991, Hadzic avait établi une unité spéciale qui au début

  4   devait assurer sa sécurité. Mais plus tard cette unité a été rebaptisée et

  5   s'appelait maintenant la SNB, unité de sécurité nationale serbe. C'était

  6   devenu une unité spéciale avec des pouvoirs spéciaux. L'idée était que ceci

  7   deviendrait une unité équivalente à l'unité spéciale de la DB serbe. Goran

  8   Hadzic avait le contrôle de cette unité.

  9   Parmi les personnes qui étaient importantes, c'était Mihajlo Ulemek,

 10   l'oncle de Legija. Lui, en tant que membre des Tigres d'Arkan, était le

 11   chef de la sécurité au sein de la SNB. La SNB, toutefois, n'a pas seulement

 12   fourni des gardes de sécurité pour le gouvernement, et au cours de ce

 13   procès, nous allons vous présenter des éléments de preuve qui vous

 14   démontreront de quelle façon la SNB avec les TO locales, avec la milice, et

 15   d'abord et avant tout, les hommes d'Arkan, avaient été impliqués dans les

 16   crimes graves et atrocités commis dans la région au cours de la fin de 1991

 17   [comme interprété] début 1992.

 18   Au mois d'août 1991, Arkan a organisé un centre de formation à Erdut qui

 19   était utilisé non seulement pour former les membres de son groupe

 20   paramilitaire mais également pour former les volontaires et les membres de

 21   la Défense territoriale. Le centre de formation était très bien équipé. Un

 22   rapport datant de la fin d'octobre 1991 mentionne "de grandes quantités de

 23   différentes armes d'infanterie, des lance-grenades, des lance-grenades à

 24   Zolja, et cetera, qu'Arkan pouvait donner à qui il le souhaitait."

 25   Monsieur le Président, Madame le Juge, les diapositives 65 à 68 est un

 26   document qui démontre de quelle façon Arkan soumettait des factures pour le

 27   paiement en question des mécanismes qui étaient utilisées pour soutenir

 28   financièrement ses hommes et pour les rémunérer.

Page 1024

  1   Je ne vais pas maintenant m'attarder trop longtemps sur ces factures eu

  2   égard au temps de cette déclaration liminaire qui nous est imparti. En

  3   décembre 1991, la DB avait également créé son propre centre de formation

  4   tout près d'Ilok, tout près de la frontière de Backa Palanka.

  5   Donc le centre de formation d'Arkan n'était pas le seul dans la région,

  6   mais au fil du temps, ce centre de formation était également appelé Pajzos,

  7   qui servait de camp d'entraînement pour les membres de la DB et les Bérets

  8   rouges, ainsi que pour les volontaires, et Franko Simatovic dans son

  9   allocution prononcée à Kula en 1997 en parle.

 10   Crnogorac était en charge du camp, et Franko Simatovic se rendait

 11   régulièrement à cet endroit-là.

 12   Messieurs les Juges, l'Accusation sous-tend que Jovica Stanisic et Franko

 13   Simatovic sont responsables directement pour la commission de cet incident

 14   d'Erdut et Dalj entre le mois de septembre 1991 et le mois de juillet 1992.

 15   A la suite de ces incidents, la population non-serbe avait été chassée par

 16   la force de leurs maisons légitimes, et un total de 107 personnes avaient

 17   été tuées, ça seulement parce qu'ils n'étaient pas d'appartenance ethnique

 18   serbe.

 19   Les hommes d'Arkan et la police locale avaient organisé des centres de

 20   détention de fortune où ils plaçaient des civils non-serbes et les tenaient

 21   dans des circonstances inhumaines pour la simple raison qu'ils n'étaient

 22   pas Serbes. Ils brutalisaient sans cesse les détenus et les menaçaient de

 23   les tuer pendant qu'ils les interrogeaient.

 24   Dans le cours de ces déclarations liminaires, l'Accusation ne va pas parler

 25   séparément de ces sept incidents, mais deux de ces incidents pourraient

 26   agir d'exemples, à savoir de quelle façon les événements de la SAO SBSO se

 27   sont déroulés.

 28   Le premier incident reproché aux accusés a eu lieu vers la mi-septembre

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  1   1991. Goran Hadzic lui-même a emmené un certain nombre de civils croates au

  2   quartier général de la police de Dalj.

  3   Pour ce qui est des détenus, la vie est devenue un enfer. Chaque nuit, et

  4   également pendant la journée, certaines de ces personnes se faisaient

  5   sortir de leurs cellules et se faisaient brutaliser. Vous entendrez un des

  6   détenus vous parler, vous décrire et vous dire qu'à un certain moment

  7   donné, un homme a enfoncé une porte, a détruit la serrure, est entré et il

  8   a dit aux détenus : "Je veux que vous sachiez que je suis Arkan." Ensuite,

  9   ce détenu a pu observer trois hommes qui l'ont accompagné, alors que les

 10   détenus avaient été battus avec des chaises de fer qui se désintégraient.

 11   Autour du 23 décembre [comme interprété] 1991, Hadzic et Arkan sont venus

 12   au centre de détention de Dalj. Il y avait 20 détenus, ils ont choisi deux

 13   détenus, et les détenus qui sont restés se sont fait sortir du centre de

 14   détention et ont été tués par Arkan et ses hommes. Tout de suite après, le

 15   commandant du poste de police de Dalj, un Serbe, a informé le ministère de

 16   cet incident, tout comme il est montré à la diapositive 70. Il a été démis

 17   de ses fonctions le 1er octobre 1991 à la suite de ceci.

 18   Le 9 novembre 1991, les membres de la TO locale de la SAO SBSO et les

 19   forces du MUP, ainsi que les membres des hommes d'Arkan ont arrêté au moins

 20   neuf civils non-serbes dans Erdut et autour de cette ville. Ils les ont

 21   emmenés au centre de formation de la TO, où ils ont été fusillés le

 22   lendemain. Plusieurs jours plus tard, la veuve de l'un des hommes a

 23   commencé à s'enquérir sur le sort de son mari. Mihajlo Ulemek est intervenu

 24   et a ordonné l'exécution du reste de la famille, où les membres de la SNB

 25   et les hommes d'Arkan ont arrêté et tué la veuve, le fils et sa femme.

 26   Une autre femme qui avait perdu son mari alors qu'il a été tué le 10

 27   novembre s'était renseignée ou essayait de savoir ce qui était arrivé à son

 28   mari, et vers le 3 juin 1992 elle a été arrêtée par des membres de la SNB.

Page 1026

  1   Ils l'ont emmenée à Erdut, ils l'ont tuée et ont jeté son corps dans un

  2   puits abandonné à Dalj Planina.

  3   L'Accusation sous-tend, tout comme il est résumé ici à la diapositive

  4   numéro 71, que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont pris part à

  5   l'entreprise criminelle commune dans le but de chasser par la force les

  6   Croates et d'autres non-Serbes de certaines régions de la SAO SBSO par le

  7   biais d'une organisation, de formation et financement d'antenne et qui

  8   avaient par la suite commis des crimes dans la Slavonie orientale. Ils ont

  9   également contribué au plan commun, et influençaient et dirigeaient le SAO

 10   SBSO, et plus particulièrement Goran Hadzic, qui à ce moment-là ordonnait

 11   et dirigeait la commission de crimes et dirigeait ces derniers.

 12   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, comme nous avons vu, ce

 13   plan visait à balayer toute la population non-serbe du sud de la Croatie de

 14   la Krajina. Ensuite, ils se sont dirigés vers la Slavonie orientale, mais

 15   il était devenu apparent que maintenant ils s'étaient tournés vers la

 16   Bosnie orientale, et les premières municipalités qui ont souffert de ceci,

 17   c'étaient Bijeljina et Zvornik.

 18   Je souhaiterais maintenant donner micro à mon collègue, M. Docherty, qui

 19   vous parlera de Bosnie-Herzégovine. En fait, je souhaiterais vous proposer

 20   aussi de prendre peut-être la pause à ce moment-ci.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Alors, nous allons suivre

 23   votre conseil et prendre une pause de 20 minutes à partir de maintenant.

 24   --- L'audience est suspendue à 14 heures 36.

 25   --- L'audience est reprise à 15 heures 01.

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, c'est vous qui

 27   allez faire le coup de lancement.

 28   L'INTERPRÈTE : Analogie au football l'interprète ne la connaît pas.

Page 1027

  1   M. DOCHERTY : [interprétation] [aucune interprétation] 

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais simplement dire qu'en

  3   l'absence du Juge Picard, le Juge David et moi-même siégerons conformément

  4   aux dispositions de l'article 15 bis.

  5   Je vous remercie. Monsieur Docherty, c'est à vous. Je vous écoute.

  6   M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

  7   avec votre permission.

  8   Je souhaiterais vous parler de l'entreprise criminelle commune pour

  9   comprendre de quelle façon l'entreprise criminelle commune appliquait son

 10   programme en Bosnie, la Chambre doit reconnaître la Bosnie a été une

 11   spécificité parmi les six républiques de Yougoslavie, alors qu'elle

 12   présentait des --

 13   Pourquoi est-ce que ces difficultés étaient fondamentalement

 14   différentes pour mettre en place l'entreprise criminelle commune et

 15   pourquoi est-ce que la Bosnie a fait l'objet des pires crimes qui avaient

 16   été commis pendant la guerre ?

 17   Pour simplifier, ce qui rend la Bosnie si unique et ce qu'il faut

 18   comprendre c'est que contrairement aux autres républiques, d'anciennes

 19   républiques qui avaient des populations minoritaires qui étaient

 20   relativement rapprochées, la Bosnie était plutôt composée de larges poches

 21   ethniques de populations qui étaient isolées, et qui étaient éparpillées

 22   sur tout le territoire comme des pois d'un tissu, certaines communautés

 23   ressemblaient à des îlots ethniques dans une mer dominée par un autre

 24   groupe ethnique.

 25   Ce que les historiens et d'autres observateurs brandissaient à juste

 26   titre comme la preuve d'une intégration pacifique de différentes ethnicités

 27   et cultures présentait un problème particulier pour les membres de

 28   l'entreprise criminelle commune.

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  1   Quel était ce plan qu'ils avaient décidé d'employer pour créer une

  2   région qui serait dominée par les Serbes pour démanteler cet ensemble de

  3   poches ethniques ? La définition la plus claire peut être trouvée dans un

  4   document.

  5   Mais avant de décrire ce document et avant de décrire les événements

  6   en Bosnie, je souhaiterais prendre quelques instants pour vous parler de

  7   certaines personnes qui se trouvaient au cœur des crimes qui avaient été

  8   commis en Bosnie.

  9   Radovan Karadzic était le premier président du gouvernement serbe de

 10   Bosnie qui plus tard a été appelé la Republika Srpska. A ce titre, il

 11   exerçait une autorité de droit sur l'armée serbe de Bosnie et sur la police

 12   serbe de Bosnie.

 13   Il a été accusé par ce Tribunal et est en fuite. Il a prononcé un

 14   discours dans lequel il explique clairement ses intentions le 15 octobre

 15   1991, et vous entendrez ce discours à la suite de la présentation de la

 16   diapositive numéro 73.

 17   [Diffusion de la cassette audio]

 18   M. DOCHERTY : [interprétation] L'Accusation établira à l'aide de

 19   conversations interceptées, de documents, et de témoignage les rapports

 20   entre Jovica Stanisic et le Dr Karadzic qui a joué un rôle crucial en tant

 21   que membre principal de l'entreprise criminelle commune. L'Accusation vous

 22   présentera un très grand nombre de conversations interceptées qui ont eu

 23   lieu entre M. Stanisic et le Dr Karadzic, la plupart datant de la période

 24   cruciale à partir du mois d'août 1991 jusqu'au mois de février 1992. Dans

 25   ces conversations, vous entendrez ces personnes parler des questions

 26   pratiques et politiques qui ont trait à la mise en œuvre du plan de

 27   l'entreprise criminelle commune et vous comprendrez que les deux hommes ont

 28   compris que ceux dont ils parlaient étaient secrets et devaient le rester

Page 1029

  1   car vous les entendrez parler dans ces conversations interceptées à mots

  2   couverts, de temps en temps rappelant l'un l'autre de l'importance de ne

  3   pas trop dire de choses au téléphone.

  4   Dans une conversation interceptée du 14 décembre 1991, Jovica Stanisic dit

  5   à Radovan Karadzic qu'il enverra ses hommes en Bosnie pour traiter d'un

  6   problème précis. Stanisic également fait référence à "ses gars" pour

  7   lesquels il dit qu'il les avait déjà envoyés précédemment. Et en dernier

  8   lieu, Stanisic dit à Karadzic qu'il ordonnera à Goran Hadzic, un dirigeant

  9   serbe de Croatie de la Slavonie orientale, de faire quelque chose.

 10   Momcilo Krajisnik ici, montré au côté de Biljana Plavsic sur la diapositive

 11   64 [comme interprété] était un membre des dirigeants serbes de Bosnie

 12   pendant la guerre. Il a tenu un très grand nombre de postes de haut rang, y

 13   compris -- il a été membre du Conseil de sécurité national, et de la

 14   présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine élargie. Il a été

 15   également trouvé coupable de crimes contre l'humanité et est en attente

 16   d'un procès en appel.

 17   Biljana Plavsic était une des principales femmes politiques, l'une des

 18   principales politiciennes des Serbes de Bosnie à partir de la période

 19   précédent la guerre et jusqu'à la fin de la guerre. Elle représentait

 20   l'idéologie serbe. Elle était un membre de la présidence collective de

 21   Bosnie, un membre d'une présidence composée de trois personnes, une

 22   présidence tripartite de la République serbe, et elle était également

 23   membre du commandement suprême de l'armée serbe de Bosnie. Après avoir

 24   plaidé coupable au crime de persécution en tant que crime contre

 25   l'humanité, elle a reçu une peine de 11 années d'emprisonnement.

 26   Ratko Mladic, qui était un officier de carrière de la JNA, était devenu

 27   chef de l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska. Il a été

 28   mis en accusation par ce Tribunal et est en fuite.

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  1   Sur la diapositive 76 [comme interprété], vous verrez les objectifs

  2   stratégiques, "Les personnes et les personnes ne sont pas des pions, ils ne

  3   sont pas non plus des pions qui peuvent être déplacés d'un endroit à

  4   l'autre. Nous ne pouvons pas prendre un filtre pour filtrer seulement les

  5   Serbes qui pourraient rester, et non pas les autres. Je ne sais pas de

  6   quelle façon M. Krajisnik et M. Karadzic expliqueront ceci au monde. Car

  7   ceci constitue un génocide."

  8   Le document qui établit clairement les objectifs de l'entreprise criminelle

  9   commune, le document dont j'ai fait référence il y a quelques instants,

 10   était un document qui a été présenté de façon officielle à la 16e Séance de

 11   l'assemblée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine le 12 mai 1992.

 12   Dans ces objectifs, ils ont exposés six objectifs stratégiques pour le

 13   peuple serbe de Bosnie. Dans l'allocution prononcée par M. Simatovic à

 14   Kula, ce dernier avait établi un lien entre les activités des unités

 15   spéciales et de la DB serbe avec ces six objectifs.

 16   Le premier objectif, que l'on peut voir ici sur la diapositive numéro 6

 17   [comme interprété], constitue en une séparation du peuple serbe des deux

 18   autres communautés nationales.

 19   Deuxièmement, un établissement d'un corridor entre Semberija et la Krajina.

 20   M. Simatovic a dit à Kula que ses unités avaient été impliquées dans

 21   "corridor à Brcko" et que ceci fait une référence au deuxième objectif

 22   stratégique relatif ou qui constitue à créer un lien entre les terres

 23   convoitées par les Serbes dans les parties orientales et occidentales de la

 24   Bosnie.

 25   Le troisième objectif parle de l'établissement d'un corridor dans la vallée

 26   de la Drina éliminant la rivière Drina en tant qu'une frontière entre les

 27   Serbes.

 28   Ce "corridor" était en fait une partie très vaste du territoire qui

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  1   englobait une grande partie de la partie orientale de Bosnie. M. Simatovic

  2   fait référence à la présence de ses unités en parlant de ce territoire "à

  3   la Drina."

  4   L'objectif numéro 4 parle du quatrième objectif stratégique, c'est-à-dire

  5   l'établissement d'une frontière entre les rivières Una et Neretva. 

  6   Le cinquième objectif stratégique porte sur la division de Sarajevo.

  7   Lorsque M. Simatovic parle de ces opérations de Sarajevo, il fait allusion

  8   à cet objectif.

  9   Et sixièmement, le sixième objectif stratégique était de garantir aux

 10   Serbes un accès à la mer.

 11   Alors que je décrirais les crimes commis dans les six municipalités de

 12   Bosnie qui font l'objet de cet acte d'accusation, je vais demander aux

 13   Juges de la Chambre de tenir compte du fait qu'il y a plusieurs endroits

 14   qui vont être cités dans ce présent discours, et qui font l'objet ou qui

 15   sont couverts par l'acte d'accusation et qui parlent des crimes qui ont été

 16   commis et qui ont servi pour les objectifs décrits dans les six objectifs.

 17   Pour ce qui est de l'entreprise criminelle commune, tel qu'englobé par la

 18   géographie et la démographie de la Bosnie, ces objectifs sont tout à fait

 19   clairs et ils sont très clairement articulés; l'intention des membres de

 20   l'entreprise criminelle y est aussi.

 21   En décembre 1991, un document ayant pour titre "Instructions relatives à

 22   l'organisation des activités des organes du peuple serbe en Bosnie-

 23   Herzégovine en circonstances extraordinaires" a été promulgué par les plus

 24   hauts représentants du Parti démocratique serbe, les initiales SDS

 25   représentaient ce parti en Bosnie-Herzégovine.

 26   Le document est devenu très populaire et a été connu sous le nom des

 27   Variantes A et B car ce document contenait ces deux variantes. Lorsque l'on

 28   parlait d'actions qui devaient être prises par le SDS et ses plus hauts

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  1   représentants, ce document faisait état et faisait une différence entre les

  2   municipalités dans lesquelles vivaient les Serbes et y étaient

  3   majoritaires, il s'agissait de la Variante A. Et des municipalités dont les

  4   Serbes étaient minoritaires, il s'agit en l'occurrence de la Variante B.

  5   Essentiellement, ce document contenait précisément des instructions

  6   concernant la façon dont les Serbes du cru allaient se réunir pour déclarer

  7   une assemblée locale du peuple serbe dans les ou la municipalité qui allait

  8   prendre le pouvoir et le gouvernement, y compris la fonction de police et

  9   des structures de sûreté.

 10   Les prises de pouvoir des municipalités se sont poursuivies en quatre

 11   étapes. La première étape était la construction d'un système de gouvernance

 12   qui était parallèle au gouvernement officiel, mais qui n'était que serbe,

 13   exclusivement serbe. Le deuxième, c'était l'armement de la population

 14   serbe. En troisième lieu, une prise de pouvoir armée et violente des

 15   municipalités non-serbes. Et quatrièmement, le nettoyage ethnique soit par

 16   le meurtre et/ou l'expulsion de la population non-serbe.

 17   A la diapositive 82, vous verrez une carte représentant les installations

 18   de formation des unités spéciales. Les 13 installations indiquées en jaune

 19   représentent des camps que les accusés ont établis et créés en Bosnie-

 20   Herzégovine. Comme vous pouvez le voir, ces camps se trouvent des les zones

 21   qui sont indiqués pour les Serbes relatifs aux deuxième, troisième et

 22   quatrième objectifs stratégiques. La Bosnie orientale, le long de la Drina,

 23   la Bosnie du nord, la terre qui se trouve entre la Semberija et la Krajina,

 24   et ce territoire, la Bosnie du sud, le long de la rivière Una et Neretva.

 25   Dans ce procès, l'Accusation va se pencher sur six municipalités qui ont

 26   fait l'objet d'une prise pour illustrer l'acte d'accusation. Ces

 27   municipalités sont : Bijeljina au nord-ouest de Bosnie. Notre preuve

 28   portera sur le transfert forcé de la population de cette municipalité.

Page 1033

  1   Nous parlerons également de Zvornik. Zvornik est indiqué ici dans la

  2   colonne de droite. Le numéro qui lui correspond est le numéro 6 à partir du

  3   bas et à partir du haut.

  4   Nous parlerons de Bosanski Samac. Bosanski Samac est indiqué dans la partie

  5   supérieure droite.

  6   Nous parlerons de Sanski Most également, au nord de la Bosnie centrale.

  7   Plus tard, M. Groome vous exposera des faits qui se sont déroulés à Sanski

  8   Most en 1995.

  9   Mais pour l'instant, je souhaiterais vous rappeler que nous parlerons

 10   également de Doboj, et l'allégation pour Doboj se trouve dans la colonne du

 11   haut, et il est en deuxième à partir de la gauche.

 12   Il y a Trnovo, tout près de Sarajevo. Les unités spéciales n'ont pas été

 13   impliquées dans la prise de cette région mais en juin et juillet de 1995,

 14   dans les jours qui ont suivi Srebenica, l'une de ces unités paramilitaires,

 15   les Skorpions, ont pris part aux exécutions qui ont suivi la chute de

 16   Srebenica en exécutant sommairement six Musulmans.

 17   Les unités spéciales de la DB serbe ont directement participé dans la prise

 18   de chacune de ces cinq municipalités. Après une prise violente de ces

 19   villes, les non-Serbes, principalement Musulmans, ont été chassés par la

 20   force de leurs demeures et de leurs terres par le biais de crimes de

 21   meurtre et de persécutions commis avec l'intention de s'approprier les

 22   terres et les zones leur appartenant et des les approprier aux Serbes. Un

 23   très grand nombre de personnes qui n'ont pas été tuées ont été contraintes

 24   sous la menace des armes de céder leurs terres et de partir. Ils ont été

 25   placés à bord d'autocars qui les ont emmenés à l'extérieur de la région.

 26   D'autres ont fait l'objet d'harcèlements implacables et d'actes de

 27   persécution qui ont pris la forme d'arrestations sommaires, de détentions

 28   illégales, de conditions inhumaines, de passages à tabac, de couvre-feux et

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  1   de fouilles agressives menées de façon fréquente dans les demeures et les

  2   maisons des non-Serbes.

  3   Il est difficile d'imaginer que l'on ait voulu créer une communauté

  4   purement serbe dans une municipalité qui était multiethnique où tout le

  5   monde s'entendait de façon harmonieuse. Il est vraiment difficile

  6   d'imaginer ce qu'une telle entreprise supposait lorsque l'on tient compte

  7   du fait, par exemple, d'une municipalité comme Zvornik, qui était

  8   multiethnique. Avant la guerre en 1991, elle était composée de 54,8 % de

  9   Musulmans. Après la guerre, en 1997-1998, que 0,6 % de la population de

 10   Zvornik était musulmane. Je vais parler des cinq villes dans l'ordre

 11   chronologique en m'appuyant sur les dates auxquelles des crimes ont été

 12   commis.

 13   Le 24 mars 1992, environ huit jours avant la prise de Bijeljina, Radovan

 14   Karadzic a déclaré, comme on peut le voir ici à la diapositive 83, que très

 15   bientôt les municipalités serbes commenceront le processus de la prise du

 16   pouvoir.

 17   La prise du pouvoir de Bijeljina et de Zvornik ont fait l'objet d'une

 18   campagne bien exécutée, bien planifiée, de façon précise et extrêmement

 19   rapide, c'est-à-dire elle n'a duré que quelques jours. Les unités spéciales

 20   de la DB serbe, dans ce cas-ci il s'agissait des hommes d'Arkan, ont établi

 21   un camp en Serbie de l'autre côté des frontières de Bijeljina, prêts à

 22   lancer une attaque en attendant le signal à l'aube du 1er avril 1992.

 23   Les deux villes, Bijeljina et Zvornik, ont été englobées par le premier, le

 24   plus important objectif; la séparation des communautés ethniques. Mais ces

 25   villes ont également été englobées par le deuxième et le troisième

 26   objectifs stratégiques, c'est-à-dire l'établissement d'un corridor vers les

 27   régions ciblées par les Serbes se trouvant en Bosnie centrale et

 28   occidentale, afin d'établir un corridor serbe dans la vallée de la Drina.

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  1   Dans un souci d'avoir un procès rapide et équitable, l'Accusation ne va pas

  2   tenter de prouver que des meurtres et des persécutions avaient été commis à

  3   Bijeljina. Nous n'allons nous pencher que sur les crimes contre l'humanité

  4   où la déportation et le transfert forcé pour ce qui est de Bijeljina, car

  5   il est essentiel de comprendre qu'afin que la Chambre de première instance

  6   puisse trouver les accusés coupables, elle doit comprendre qui était Arkan

  7   et ce que savait M. Stanisic et M. Simatovic de lui.

  8   La brutalité d'Arkan à Bijeljina a fait l'objet de rapports rédigés par les

  9   officiers haut gradés de l'armée yougoslave à l'époque, l'un d'entre eux a

 10   vu un énorme potentiel et a exprimé ce qu'il pensait sur la diapositive 85.

 11   Sur ce rapport rédigé à l'époque contemporain des événements, le général de

 12   division en question de l'armée yougoslave se plaint que les mouvements de

 13   son unité de blindés avaient été restreints par les hommes d'Arkan.

 14   Arkan et ses 50 hommes ont pu présenter une barrière et créer une colonne

 15   et s'opposer à l'armée yougoslave serbe, à la JNA, et à leurs blindés parce

 16   qu'Arkan était un membre-clé du groupe de personnes qui se trouvait

 17   derrière ces crimes. Peu de temps après la prise de Bijeljina, nous voyons

 18   Arkan et Plavsic se féliciter et se donner une accolade sur cette

 19   diapositive.

 20   C'est à Bijeljina où Arkan a clairement établi sa réputation de brutalité

 21   inégalée.

 22   Dans la diapositive numéro 87, on voit deux photographies qui ont été

 23   prises par Ron Haviv, un photographe de guerre qui a montré au reste du

 24   monde la brutalité dont on fait preuve les hommes d'Arkan. Peu de temps

 25   après, ces images ont choqué le monde entier, on reconnaissait Arkan sur

 26   ces images qui ont été montrées par un correspondant de la BBC.

 27   Comme conséquence des efforts de cette entreprise criminelle commune et par

 28   rapport à l'acte d'accusation, bon nombre de non-Serbes de Bijeljina ont dû

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  1   quitter par la force ou fuir, en raison de la terreur qui régnait.

  2   Zvornik. Si on pouvait dire que les accusés ne savaient pas ce que

  3   faisaient les hommes d'Arkan et quel penchant il avait pour une violence

  4   extrême avant Bijeljina, on ne peut pas maintenant échapper à la

  5   connaissance qu'on avait de lui après Bijeljina, parce qu'il en avait fait

  6   une cible. C'était Zvornik.

  7   Zvornik est une des villes qui se trouvent à la frontière orientale de la

  8   Bosnie, séparée de la Serbie par la Drina. Il y a plusieurs ponts de la

  9   ville qui relient la ville à Mali Zvornik, qui est une ville-sœur en

 10   Serbie. Vous entendrez des témoins décrire comment pendant les semaines

 11   avant la prise de contrôle, l'artillerie de la JNA depuis ses positions

 12   qu'elle avait établies à Mali Zvornik, avait les fusils pointés en

 13   direction de la Bosnie.

 14   La prise de Bijeljina et de Zvorvik était due à une opération extrêmement

 15   bien planifiée. Nous allons présenter tout ceci avec des transcriptions de

 16   conversations téléphoniques interceptées, au cours desquelles Mme Plavsic

 17   parle avec un des assistants d'Arkan et lui pose un certain nombre de

 18   questions, lui demande comment les choses se sont passées à Zvornik, et lui

 19   demande en fait de transmettre sa demande à Arkan pour que ceci soit

 20   appliqué à une autre municipalité.

 21   Un groupe de dirigeants serbes et musulmans de la région qui étaient des

 22   hommes responsables à Zvornik ont essayé de maintenir la paix à Zvornik, au

 23   cours d'une réunion au terme duquel ils avaient conclu un accord qui,

 24   espéraient-ils, devait empêcher la violence. Arkan est entré en trombe dans

 25   la pièce et a frappé des représentants serbes, les accusant en fait de

 26   donner les terres serbes. On fait référence à ceci à la diapositive numéro

 27   91, où "deux représentants avaient été passés à tabac avant cela."

 28   Arkan s'est tourné vers le négociateur musulman et lui a donné un

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  1   ultimatum. Ceci se trouve en rouge en bas de la diapositive. Izet Mehinagic

  2   racontera ces événements dans un télégramme désespéré qu'il envoie à

  3   l'armée yougoslave, qui est le texte qui se trouve au-dessus du texte de

  4   l'ultimatum sur cette diapositive.

  5   Dans la soirée du 8 avril, la prise de contrôle avait déjà commencé. Les

  6   hommes adultes ont été séparés, et au moins 20 civils ont été tués. Après

  7   la prise de contrôle, les Musulmans de Zvornik qui avaient survécu ont été

  8   soumis au règne de la terreur.

  9   Des rapports comme celui que nous voyons à la diapositive numéro 92 ainsi

 10   que d'autres que nous avons déjà vus, montrent l'efficacité dont faisait

 11   preuve Arkan lorsqu'il s'agissait de réaliser les objectifs de l'entreprise

 12   criminelle commune. Ceci indique également comment ils étaient les membres

 13   essentiels de l'entreprise criminelle commune, et les hommes d'Arkan

 14   étaient capables d'alimenter cette ferveur nationaliste serbe.

 15   Kozluk est une petite ville qui se trouve dans les environs de Zvornik.

 16   Après une prise de contrôle initiale, la population majoritairement

 17   musulmane a essayé de trouver un accord à l'amiable avec les Serbes qui

 18   étaient arrivés au pouvoir. Mais le 26 juin 1992, les Musulmans de Kozluc

 19   ont dû partir, et c'est le maire serbe qui leur a demandé de partir. Voici

 20   une liste de ceux qui ont dû partir que vous trouverez à la diapositive

 21   numéro 93.

 22   Le maire a dit aux Musulmans que s'ils ne partaient pas, il y aurait, et je

 23   cite, "une attaque généralisée" qui serait lancée et qui tuerait tous les

 24   Musulmans. Les Musulmans sont partis, mais pas avant que les autorités

 25   serbes leur aient fait signer des papiers par le biais desquels ils

 26   remettaient leurs maisons, leurs terres et tous leurs biens au nouveau

 27   gouvernement serbe de Zvornik.

 28   Les déportés ont ensuite été emmenés le long d'une route que l'on voit ici

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  1   en bleu sur cette diapositive, en direction de la Hongrie. Lorsque les

  2   autorités hongroises ne leur ont pas permis d'entrer parce qu'ils ne

  3   disposaient pas de passeports, on a remis aux déportés à ce moment-là des

  4   passeports serbes, à savoir c'étaient des citoyens bosniaques à qui on a

  5   remis des passeports serbes. Vous vous souviendrez que parmi une des

  6   fonctions d'un ministère ou des fonctions du ministère des Affaires

  7   intérieures, c'est justement le contrôle des passeports.

  8   Vojislav Seselj était un membre essentiel de l'entreprise criminelle

  9   commune, président du Parti radical serbe, qui avait créé le Mouvement

 10   chetnik-serbe et qui avait envoyé ses volontaires dans des zones de conflit

 11   en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.

 12   Dans une interview qui a été filmée par la BBC, Vojislav Seselj décrit

 13   l'implication de Simatovic dans la planification de la prise de contrôle de

 14   Zvornik. Je vais maintenant demander à ce que l'on montre la vidéo de la

 15   diapositive numéro 96, s'il vous plaît.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   M. DOCHERTY : [interprétation] Une des raisons pour laquelle Zvornik était

 18   une des municipalités qui a été choisie par l'Accusation, c'est que cette

 19   dernière démontre très clairement l'intention des principaux membres de ce

 20   groupe, ce groupe d'auteurs et ils partageaient cette même intention. Les

 21   excès commis contre la population musulmane de Zvornik s'étaient

 22   transformés en un véritable chaos. Même les Serbes n'étaient pas à l'abri

 23   de ces criminels lorsqu'on les lâchait en toute impunité dans les

 24   municipalités, comme on peut le voir dans le rapport qui se trouve à la

 25   diapositive numéro 97.

 26   Dans un rapport rédigé par le colonel Zdravko Tolimir à propos de tous les

 27   événements qui se sont déroulés sur l'ensemble de la Bosnie le 28 juillet

 28   1992, il a soulevé la question devant ses supérieurs hiérarchiques et a

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  1   évoqué les hommes qui avaient commis des crimes aussi graves à Zvornik.

  2   Ici dans la diapositive numéro 98, il identifie les hommes d'Arkan, les

  3   hommes de Dragan et les hommes de Seselj, qu'il cite au mémo.

  4   Il décrit ces trois groupes. Il indique qu'ils se composaient d'un grand

  5   nombre de criminels, certains d'entre eux à caractère pathologique.

  6   Il déclare que ces formations "font preuve de haine contre les peuples non-

  7   serbes et on peut en conclure sans autre réserve qu'ils constituaient un

  8   élément génocidaire parmi la population serbe."

  9   Il continue en disant : "Le butin de guerre et le pilage sont les

 10   principaux motifs pour une grande majorité de ces paramilitaires."

 11   Il énumère un butin dont la valeur correspond à quelque 30 à 40 million de

 12   marks allemands qui ont été volés dans la zone de Srebrenica et Skelani.

 13   A la fin du mois de juillet 1992, il y a eu des représailles contre les

 14   forces paramilitaires de Zvornik. En réalité, la DB serbe allait participer

 15   à une enquête sur ces unités paramilitaires. Deux dirigeants

 16   paramilitaires, les frères Vukovic à la tête des Guêpes jaunes, feraient à

 17   terme l'objet d'une enquête et seront arrêtés par le MUP serbe.

 18   Les deux accusés ont contribué aux objectifs de l'entreprise criminelle

 19   commune à la façon dont c'est décrit dans la case qui se trouve en haut à

 20   droite de cette diapositive, et ce faisant, se sont rendus pénalement

 21   responsables individuellement pour les crimes commis à Zvornik.

 22   Tous les éléments de l'entreprise criminelle commune, à l'exception

 23   de ceux de la République de la Krajina serbe qui se trouve complètement à

 24   gauche de ce diagramme, ont participé d'une manière ou d'une autre à la

 25   prise de contrôle et au nettoyage ethnique de Bijeljina et de Zvornik.

 26   Bosanski Samac. Bosanski Samac, que l'on voit ici sur la diapositive 101 se

 27   trouve le long de la Save au nord-est de la Bosnie, a eu le malheur de

 28   figurer parmi ces terres prises pour cible par les Serbes et se trouvait

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  1   pris entre cette partie orientale à la Bosnie et la région de la Krajina.

  2   Un nettoyage ethnique couronné de succès de Bosanski Samac permettait de

  3   réaliser les premier et deuxième objectifs, à savoir la séparation des

  4   communautés ethniques et la mise en place d'un corridor, le corridor de la

  5   Posavina comme cela a été connu sous son nom plus tard.

  6   Au début de l'année 1992, la cellule de Crise serbe de la municipalité de

  7   Bosanski Samac a envoyé 20 hommes de la région pour qu'ils soient formés

  8   dans le camp d'entraînement des Bérets rouges à Ilok. Ces hommes venaient

  9   de terminer leur entraînement au camp des Bérets rouges à Ilok lorsque la

 10   prise de contrôle de Bijeljina et Zvornik a commencé. Ils ont été

 11   aéroportés jusqu'à Bosanski Samac à bord d'hélicoptères de la JNA sur

 12   lesquels se trouvaient 30 hommes de Seselj. Avant de quitter cet endroit,

 13   ils ont été briefés par M. Simatovic.

 14   Le lendemain après l'annonce d'Arkan qui indiquait qu'il avait terminé avec

 15   sa tâche à Zvornik, ils ont commencé leur attaque contre Bosanski Samac.

 16   Parmi ces 50, il y en avait d'autres qui avaient été formés par la DB serbe

 17   qui travaillaient avec eux pour prendre le contrôle de la ville. Slobodan

 18   Miljkovic, alias Lugar, était là également; il y avait aussi Dragan

 19   Djordjevic, alias Crni, et Srecko Radovanovic, alias Debeli, et un groupe

 20   d'hommes de Serbie.

 21   Comme ce rapport sur la diapositive 102 l'indique, Crni un des dirigeants

 22   et auteurs des crimes commis à Samac en réalité a été arrêté et ce qui est

 23   arrivé après son arrestation indique clairement quels rôles ont joué

 24   Simatovic et Stanisic après la prise de contrôle de Samac.

 25   Un autre rapport ici sur la diapositive numéro 103 résume le type de

 26   crimes, disons, dont on a pensé que Crni et ses hommes ont été les auteurs.

 27   Ici, des allégations plus particulières comprennent le meurtre et le

 28   pillage de voitures chères.

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  1   Un dirigeant serbe de la région, en constatant que Crni ne pouvait plus

  2   participer à des efforts pour nettoyer de façon ethnique Samac, s'est rendu

  3   dans le bâtiment du MUP serbe à Belgrade à la recherche de Franko

  4   Simatovic. Il avait l'intention de demander à voir M. Simatovic pour

  5   essayer de faire libérer Crni par la police militaire. Il n'a pas pu

  6   trouver M. Simatovic et dans le parking il a vu par hasard Jovica Stanisic

  7   et il s'est approché de lui et lui a expliqué quel était son problème. M.

  8   Stanisic lui a dit qu'il s'en occuperait et lui enverrait un télex par le

  9   biais de l'armée. Peu de temps après, Crni a été remis en liberté et a

 10   continué à commettre ses crimes.

 11   Pour essayer de comprendre comment Crni, un homme dont les excès ont

 12   conduit à son arrestation par l'armée serbe de Bosnie puisqu'il combattait

 13   le long de ces derniers, comment pouvait-il être aussi rapidement remis en

 14   liberté, je crois que le mieux c'est de regarder un rapport établi par les

 15   autorités militaires de la région. C'est ainsi qu'on arrive à bien

 16   comprendre pourquoi ceci est arrivé.

 17   Dans ce document sur la diapositive numéro 104, l'auteur fait quelques

 18   observations sur les crimes qui ont été commis au nom des Serbes et qu'il

 19   compare aux crimes commis contre les Serbes pendant la Deuxième Guerre

 20   mondiale.

 21   Les faits relatifs à la remise en liberté de Crni se trouvent dans le

 22   rapport de la police de Bosnie à la diapositive numéro 105.

 23   L'Accusation accuse ces deux accusés pour avoir contribué à la réalisation

 24   des objectifs de l'entreprise criminelle commune à la façon dont c'est

 25   indiqué dans les cases ici en haut à droite de la diapositive du numéro

 26   106. Ce faisant, ils se sont rendus pénalement responsables des crimes

 27   commis à Bosanski Samac.

 28   Comme à Bijeljina et à Zvornik, tous les éléments de l'entreprise

Page 1042

  1   criminelle commune sont réunis hormis les crimes commis de la République

  2   serbe de Krajina.

  3   Avant la guerre, la population de Bosanski Samac correspondait à 29,8 % de

  4   la population était croate, 8,7 % était musulmane. Après la guerre, ces

  5   chiffres sont tombés à 1,9 % pour les Croates et 1,3 % pour les Musulmans.

  6   Doboj. Comme Samac et Brcko, ces municipalités avaient non seulement des

  7   populations non-serbes importantes que l'on devait déplacer mais ces

  8   endroits se trouvaient également dans le corridor ou le pont terrestre qui

  9   devait être créé entre les territoires pris pour cible à l'ouest de la

 10   Bosnie et ceux qui avaient été visés à l'est.

 11   Plus de 15 000 Musulmans ont fui Doboj pendant la prise de contrôle. Quand

 12   la guerre a commencé, la municipalité de Doboj comptait 30 % de Musulmans,

 13   11,5 % de Croates et 50 % de Serbes. A la fin de la guerre, il y avait 0,6

 14   % de la population qui était musulmane, 1,5 % qui était croate, et 92,5 %

 15   de la population qui était serbe.

 16   Avant la prise de contrôle de Doboj, des hommes qui figuraient sur une

 17   longue liste des paramilitaires de Doboj ont commencé à converger en

 18   direction de Doboj, y compris les hommes de Martic qui venaient de Krajina.

 19   Tandis qu'Arkan commandait ses propres hommes, les hommes de Seselj avaient

 20   leur propre commandant, les hommes restant étaient appelés les Bérets

 21   rouges et étaient commandés par Rajo Bozovic, un colonel des unités

 22   spéciales de la DB serbe. 

 23   La prise de contrôle de Doboj s'est terminée le 3 mai 1992. Cette force

 24   puissante, bon nombre d'entre eux ont été formés et équipés par MM.

 25   Stanisic et Simatovic, a pu rapidement prendre le contrôle de la

 26   municipalité dont la population de 102 549 personnes couvrait quelque 684

 27   kilomètres carrés.

 28   Lorsque la ville était définitivement entre les mains des Serbes, la

Page 1043

  1   campagne de persécutions contre les Musulmans de Doboj a commencé à l'image

  2   de ce qui à l'époque était connu comme étant la signature de ces unités :

  3   les passages à tabac, des arrestations arbitraires, des interrogations et

  4   des meurtres. Des maisons non-serbes ont été fouillées de façon agressive

  5   et endommagées, et il était très clair que les familles non-serbes qui

  6   avaient vécu à Doboj depuis des générations avaient plutôt intérêt à

  7   partir.

  8   Les civils non-serbes de Doboj ont été emmenés en détention et logés dans

  9   différents centres de facilité de fortune à Doboj et dans ces environs. Par

 10   exemple, quelque 200 personnes ont été emprisonnées dans une discothèque.

 11   Dans ces centres, des détenus ont été passés à tabac et certains

 12   prisonniers devaient sortir et certains d'entre eux étaient exécutés de

 13   façon sommaire. Des prisonniers musulmans ont été contraints à manger du

 14   porc, ce qui était contraire à leur religion. Des actes d'une vulgarité

 15   exemplaire, les prisonniers ont dû faire des actes sexuels les uns sur les

 16   autres.

 17   Le 12 juillet 1992, environ 50 détenus ont été emmenés de la discothèque et

 18   utilisés comme boucliers humains. Ces détenus ont été placés à l'avant des

 19   lignes de front serbes, on les a fait marcher en direction de la ligne de

 20   front de l'ABiH. Lorsque les détenus hésitaient, un Serbe tirait sur un des

 21   détenus à la tête pour encourager les autres à avancer. Lorsque les soldats

 22   bosniaques ont commencé à demander aux détenus de les faire avancer pour

 23   qu'ils se dirigent vers la ligne de front bosniaque, les détenus ont

 24   commencé à courir. Les Serbes ont alors tiré sur eux, en tuant 27 de ces

 25   boucliers humains.

 26   La campagne des Bérets rouges fut si décisive et si absolue à Doboj que les

 27   personnes qui se trouvaient dans la municipalité avoisinante de Teslic l'a

 28   considérée comme une campagne exemplaire, tel que cela est indiqué dans le

Page 1044

  1   rapport qui figure à la diapositive 108.

  2   Il s'agit de seulement quatre des zones municipales parmi les nombreuses

  3   zones municipales qui furent capturées par les Serbes de Bosnie lors du

  4   printemps et de l'été de l'année 1992. Ces captures ont été caractérisées

  5   par la précision de leur exécution et la brutalité des événements.

  6   L'Accusation avance que les deux accusés ont apporté leur contribution pour

  7   que les objectifs de l'entreprise criminelle commune soient couronnés de

  8   succès, et ce, tel que cela est indiqué dans l'encadré qui se trouve à la

  9   droite de la diapositive 109, et de ce fait, ont une responsabilité

 10   criminelle personnelles individuelle pour les crimes qui ont été commis à

 11   Doboj.

 12   Et cela est différent des municipalités précédentes, l'Accusation avance

 13   que les hommes de Martic ont une participation directe dans ces actes et

 14   que cela implique également la responsabilité pénale individuelle des

 15   accusés.

 16   J'en ai terminé. Je vais redonner la parole à mon collègue, Monsieur

 17   Groome.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur

 19   Groome.

 20   M. GROOME : [interprétation] Le plan criminel global fut un succès et

 21   nombreuses sont les municipalités qui furent placées sous le contrôle serbe

 22   lors du printemps de l'année 1992. Alors pour inscrire les crimes commis

 23   dans ces quatre municipalités dans le contexte du plan global de

 24   l'entreprise criminelle commune, il est utile de consulter une série de

 25   cartes qui se trouvent sur les diapositives 110 à 107, et qui montrent

 26   suivant un ordre chronologique la prise de territoire ainsi que le rôle

 27   jouée par les deux accusés dans cette prise de territoire. Le contrôle

 28   serbe s'est effectué de façon rapide et exhaustive et organisée sur le

Page 1045

  1   territoire en Bosnie-Herzégovine, et cela est la preuve de l'existence et

  2   de l'efficacité de l'entreprise criminelle commune.

  3   Ce processus de capture a commencé lorsque Arkan est entré dans Bijeljina

  4   la nuit entre le 31 mars et le 1er avril. Lors de cette première semaine,

  5   plus d'une douzaine de municipalités ont été conquises et placées sous le

  6   contrôle serbe. Alors que certaines de ces municipalités telle que Tito

  7   Drvar étaient essentiellement serbes et que le contrôle s'est

  8   essentiellement fait lorsqu'il y a eu changement d'allégeance vis-à-vis de

  9   Sarajevo pour faire en sorte que cela soit fait à Pale, dans d'autres

 10   municipalités, telle que Bijeljina, ces municipalités ont été conquises par

 11   la force armée et après que des crimes particulièrement odieux ont été

 12   commis à l'encontre de la population civile.

 13   Lors de la deuxième semaine, il faut savoir que ces prises se sont

 14   concentrées sur la vallée de la Drina et dans ces endroits en Bosnie

 15   orientale, tels que Visegrad, Foca, et Sekovici. Comme vous l'avez déjà

 16   entendu, MM. Stanisic et Simatovic ont joué un rôle direct dans la prise de

 17   Zvornik et dans l'expulsion de la population musulmane qui était assez

 18   nombreuse.

 19   En Bosnie centrale, la municipalité de Teslic est tombée durant la deuxième

 20   semaine du mois d'avril.

 21   Ici, sur la diapositive 113, nous voyons que lors de la troisième semaine,

 22   après qu'Arkan ait indiqué que son travail serait terminé à Zvornik, les

 23   unités spéciales de la DB serbe ont commencé à porter leur attention vers

 24   la municipalité de Bosanski Samac.

 25   Ces prises se sont poursuivies le long de la Drina avec Bratunac, et avec

 26   sa voisine Foca vers l'ouest, vers Kalinovik occidentale. Vogosca, qui

 27   faisait partie de la grande région de Sarajevo, devait tomber, passer sous

 28   le contrôle serbe cette semaine.

Page 1046

  1   Pour ce qui est de la partie nord-ouest de la Bosnie en Krajina de la

  2   Bosnie, le contrôle serbe s'est fait avec force et contrainte et nous y

  3   retrouvons les crimes caractéristiques à Bosanski Novi et à Sanski Most.

  4   Les Serbes ont continué à conquérir des territoires en Krajina au cours des

  5   derniers jours du mois d'avril lorsque Prijedor, là où certains des crimes

  6   les plus odieux ont été commis, est tombée. Le contrôle serbe a également

  7   été assuré sur Mrkonjic Grad et sur de grandes parties de Bosanska Krupa,

  8   ce qui fait que la frontière entre les territoires contrôlés par les Serbes

  9   et les rives du fleuve Una étaient reliées, ce qui vous en souviendrez

 10   correspondait au quatrième objectif stratégique. La campagne au sein de la

 11   vallée de la Drina s'est poursuivie avec la prise de Vlasenica et le siège

 12   de Sarajevo. Et en préparation de ce siège, la campagne s'est rapprochée

 13   avec la prise d'Ilijas [phon].

 14   A la fin du mois d'avril au cours de cette période de 30 jours, 35

 15   municipalités étaient tombées, avaient été conquises, ce qui représentait

 16   une moyenne de plus d'une municipalité par jour.

 17   Avec la cadence de ces prises, il faut savoir qu'il y a eu un

 18   ralentissement au cours des mois suivants. L'accusé a envoyé le colonel

 19   Bozovic avec d'autres membres des unités spéciales pour opérer une percée

 20   au niveau de Doboj, une municipalité essentielle pour le couloir de la

 21   Posavina, et ce, afin justement de forger un pont entre la Serbie et les

 22   territoires détenus par les Serbes dans les zones de la Krajina en Bosnie-

 23   Herzégovine occidentale et en Croatie. Le siège autour de Sarajevo sera

 24   complet avec la prise de Hadzici, Trnovo et Ilidza en mai.

 25   Avec la chute de Rogatica et de Rudo, la prise de ces municipalités le long

 26   de la frontière orientale en Bosnie se termine à l'exception de Srebrenica.

 27   En mai, trois municipalités supplémentaires de la Krajina de la Bosnie sont

 28   également tombées.

Page 1047

  1   Au mois de juin, l'essentiel des captures s'est déplacé vers les parties

  2   sur de la Bosnie où Nevesinje, Bileca, et Ljubinje, sont tombées sous le

  3   contrôle serbe ainsi que Trebinje à l'exception de la partie sud de Ravno,

  4   qui était placée à l'époque sous le contrôle des forces croates. A la fin

  5   de l'été avec la prise de Derventa et Odzak, plus de 50 municipalités ont

  6   été placées sous contrôle serbe, et ce, afin de faire en sorte que puisse

  7   fonctionner le corridor de la Posavina.

  8   Les deux cartes que vous avez à l'écran, la diapositive 118, sont des

  9   cartes démographiques, l'une datant d'avant 1991 avant la campagne de

 10   nettoyage ethnique de 1992, et l'une de 1997 après la campagne.

 11   La carte 119 vous permet -- alors vous pouvez observer les succès de

 12   l'entreprise criminelle commune tel que cela est indiqué par les

 13   modifications démographiques importantes.

 14   Si vous regardez le long du corridor de la Posavina vous avez l'ovale

 15   horizontal qui se trouve en haut de la carte, qui représente la cible du

 16   deuxième objectif stratégique, et vous verrez qu'il y a eu une déplacement

 17   important des populations tel que cela est indiqué par le changement de

 18   couleur en rouge.

 19   L'ovale vertical qui se trouve sur la droite de la carte représente la

 20   vallée de la Drina, et une fois de plus, vous verrez qu'il y aurait eu

 21   déplacement important, vous avez les couleurs qui représentent la

 22   restructuration du paysage démographique passant de municipalités à

 23   majorité musulmane ou municipalités mixtes en rouge vers des municipalités

 24   serbes.

 25   Ces prises et des crimes qui ont suivi ont provoqué des déplacements de

 26   population de centaines de milliers de personnes. Presque 400 000 personnes

 27   ont dû quitter sous la contrainte leurs foyers.

 28   La carte de la diapositive 119 montre ce qui s'est passé après l'été de

Page 1048

  1   1992. Certaines prises ont continué. Les municipalités en bleu clair

  2   montrent les endroits où il y a eu preuve de la participation des unités

  3   spéciales de la DB serbe. Les municipalités en bleu foncé indiquent les

  4   municipalités où les deux accusés, on reproche aux deux accusés la

  5   commission de crimes.

  6   Vous avez ensuite un autre chef d'inculpation dans l'acte d'accusation qui

  7   vise les crimes graves qui ont été commis vers la fin du conflit en 1995.

  8   Il serait inexact que la Chambre en conclut que la participation de MM.

  9   Stanisic et Simatovic en Bosnie est passé par un creux de la vague, bien

 10   que lors de cette période, ils aient participé à des opérations conjointes

 11   conçues afin de conserver les terres ciblées qu'ils avaient saisies en

 12   1992, et afin de résister aux tentatives déployées par le gouvernement de

 13   la Bosnie pour recapturer ses territoires.

 14   Vous entendrez des éléments de preuve de la participation des accusés

 15   en Bosnie entre 1992 et 1995, essentiellement à partir d'un QG qu'ils

 16   avaient établi à Banja Basta en Serbie, juste de l'autre côté de la

 17   frontière avec la Bosnie.

 18   J'aimerais maintenant attirer l'attention de la Chambre sur les crimes

 19   reprochés dans l'acte d'accusation, crimes portant sur Trnovo. Certains

 20   faits se sont déroulés à Srebrenica en juillet 1995 et ont fait l'objet de

 21   différents procès dans ces mêmes prétoires. Je ne reviendrai pas là-dessus.

 22   Ils sont de notoriété publique.

 23   Nous savons quel a été le massacre des hommes musulmans, et les deux

 24   accusés, ils sont religieux, je ne vais pas donc les répéter.

 25   Les deux accusés ici sont inculpés du décès ou de la mort de trois garçons

 26   et de trois hommes dont le meurtre a été filmé. Afin que vous compreniez

 27   pourquoi l'Accusation avance que MM. Stanisic et Simatovic sont

 28   responsables de la mort de ces six personnes, nous devons examiner ce qui

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  1   s'est passé dans une autre région du pays avant Srebrenica.

  2   J'aimerais attirer votre attention sur le coin nord-ouest de la Bosnie, qui

  3   figure à la diapositive 121, un endroit appelé la poche de Bihac, qui en

  4   1993 avait une population d'environ 300 000 personnes, essentiellement

  5   composée de Musulmans.

  6   Son chef local, un homme musulman répondant au nom de Fikret Abdic, a

  7   essayé de s'extirper de la guerre en Bosnie en voulant se dissocier du

  8   gouvernement de la Bosnie et en concluant une alliance assez malencontreuse

  9   avec Milosevic à Belgrade.

 10   Donc en octobre 1993, Abdic a troqué sa guerre avec la Croatie et la

 11   Serbie contre une guerre avec ses frères bosniens à Sarajevo, et peu de

 12   temps, l'armée de la Bosnie a engagé ou s'est engagé dans des combats

 13   contre les hommes mal équipés et mal entraînés d'Abdic.

 14   Abdic s'est tourné vers Milosevic pour lui demander de l'aide, et très

 15   rapidement Milosevic a réagi en envoyant MM. Stanisic et Simatovic en la

 16   poche Bihac pour commander une opération appelée Pauk ou araignée.

 17   Milosevic a envoyé les deux hommes sur lesquels il pouvait compter pour

 18   cette mission. Stanisic a amené avec lui les hommes dont il était devenu

 19   tributaire lors de ses opérations dissimulées dans le reste de la Bosnie,

 20   les unités spéciales de la DB serbe dirigées par le colonel Bozovic,

 21   Legija, le capitaine Dragan, Arkan. Ils ont établi leur QG sur le mont

 22   Petrova Gora dans la Krajina.

 23   Le journal de bord décrit ici à la diapositive 122 l'un des commandants de

 24   l'opération Pauk qui montre un certain nombre de références à M. Simatovic,

 25   et une parmi plusieurs références, faisant référence à M. Stanisic.

 26   Les unités spéciales de la DB serbe devaient rejoindre l'armée de la

 27   Krajina serbe, ainsi que les hommes d'Abdic. Deux sur trois de ces groupes

 28   tactiques ont formé avec ces forces conjointes et ont été placés sous le

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  1   commandant direct des unités spéciales de la DB serbe. Le second groupe

  2   tactique a été placé sous le commandement de Legija, et le troisième groupe

  3   tactique a été placé sous le commandement du colonel Rajo Bozovic, les

  4   Skorpions, faisant partie du groupe tactique de Legija.

  5   Les Skorpions ont dans un premier temps été formés après la chute de

  6   Vukovar, à la suite d'une demande présentée par la compagnie pétrolière

  7   Djeletovci, demande présentée à Milan Milanovic, un ministre de la SAO de

  8   la SBSO. Son commandant, Slobodan Medic, était aussi connu sous le nom de

  9   Boca. La mission de cette unité consistait à protéger les champs

 10   pétrolifères à Djeletovci; une tâche qui parfois était partagée avec les

 11   hommes d'Arkan. Cette unité a rapidement crû pour inclure plusieurs

 12   centaines d'hommes. La DB serbe a fourni aux Skorpions un matériel

 13   important et a rémunéré les soldes de ses membres, et ce, en argent

 14   comptant. Environ 30 % de ses membres avaient été formés dans l'un des

 15   camps d'entraînement de la DB serbe à Kula, au Mont Tara, à Lipovaca et

 16   Golubic. Ces membres ont également reçu des papiers d'identification les

 17   identifiant comme des membres de la DB serbe. Milanovic était

 18   l'intermédiaire entre Medic et Simatovic et Stanisic. En 1996, après la

 19   guerre, certains membres de cette unité sont restées aux services de la DB

 20   serbe et ont rallié la JSO.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   M. GROOME : [interprétation] Les deux hommes que vous voyez sur la vidéo de

 23   la diapos 123 sont Legija, dont vous avez déjà beaucoup entendu parler, et

 24   Slobodan Medic, l'homme qui a donné l'ordre direct pour que soit tué les

 25   six captifs de Trnovo.

 26   Cette vidéo est très longue, et je ne vais pas demander à la Chambre

 27   d'étudier toutes ses parties pertinentes maintenant, mais vous entendrez

 28   Legija décider de ce qu'il allait faire des Musulmans capturés, et sa

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  1   décision, comme vous pouvez vous y attendre, est tout à fait conforme au

  2   traitement qu'il a imposé aux non-Serbes dans d'autres zones du conflit.

  3   M. Simatovic a mentionné cette participation à l'opération Pauk lors de son

  4   discours prononcé en mai 1997 à Kula, lorsqu'il a dit : "En Bosnie

  5   occidentale, l'unité a été l'épine dorsale de l'armée de Fikret Abdic."

  6   L'opération Pauk devait se terminer en août 1995.

  7   J'aimerais maintenant que l'on revienne à la Bosnie orientale. En juillet

  8   1995, à l'époque où les Serbes de Bosnie ont décidé de reprendre la zone

  9   protégée des Nations Unies de Srebrenica. A la fin du mois de juillet,

 10   environ 8 000 hommes et garçons musulmans devaient être exécutés

 11   sommairement. Il faut savoir que tous les meurtres n'ont pas été commis

 12   dans les environs immédiats de Srebrenica.

 13   En sus de leur présence dans la poche de Bihac, les unités spéciales de la

 14   DB serbe étaient également présentes en Bosnie centrale. La participation

 15   de la DB serbe est montrée en fait dans ce qui s'est passé à Srebrenica, et

 16   cela a commencé un mois avant le massacre. A la fin du mois de juin, le MUP

 17   serbe était actif et rassemblait les hommes serbes dont on croyait qu'ils

 18   essayaient d'éviter le service militaire. La diapositive 24 [comme

 19   interprété] est un document qui le montre, il s'agit du moral des soldats

 20   serbes, moral qui était extrêmement battu en brèche à cette époque-là, et

 21   il y avait une forte prévalence de désertion. Beaucoup parmi ces hommes

 22   étaient passés en Serbie pour rester près de leurs familles ou pour se

 23   cacher dans la foule des villes serbes.

 24   Dans ce document particulier, Tomislav Kovac, qui était à l'époque ministre

 25   adjoint, indique que le 23 juin il a donné à la VRS plus de 1 500 hommes

 26   qui ont été placés en détention en Serbie et qui ont été remis au MUP de la

 27   RS.

 28   Même avec cette opération, dans le cadre de cette opération qui était

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  1   destinée à forcer des hommes en âge de combattre de se rendre sur les

  2   lignes de front en Bosnie, Mladic et Karadzic en dépit de cette opération

  3   avaient un besoin constant de soldats supplémentaires. A la fin du mois de

  4   juin en 1995, une réunion a eu lieu au MUP de Serbie pour décider de la

  5   réponse à apporter à une demande d'assistance qui avait été présentée par

  6   le gouvernement de la Republika Srpska. Lors d'une réunion à laquelle ont

  7   participé Arkan et Slobodan Medic, la décision fut prise que le nombre des

  8   unités spéciales de la DB serbe, placées sous le commandement de Vaso

  9   Mijovic, un commandant supérieur des unités spéciales de la DB serbe,

 10   devraient se rendre en Bosnie pour aider à combattre contre l'armée de

 11   Bosnie.

 12   J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 125. Il s'agit en

 13   fait d'un extrait de la vidéo des Skorpions, qui montre leur arrivée à Pale

 14   le 26 juin. Après la cérémonie religieuse, je vous montre le début de cette

 15   cérémonie qui s'est déroulée à Djeletovci. Il y a un grand groupe qui s'est

 16   déplacé à Pale dans la zone contrôlée par les Serbes juste en dehors de

 17   Sarajevo.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. GROOME : [interprétation] Comme vous le voyez dans l'extrait de ce

 20   rapport en bas de la diapositive 125, un rapport du MUP de la RS répertorie

 21   leur arrivée et le déploiement planifié sur le champ de batille de Trnovo

 22   le lendemain.

 23   La carte de la diapositive 126 montre les relations entre Pale, Trnovo,

 24   Sarajevo et Jahorina. La station de ski de Jahorina a été utilisée comme

 25   poste de commandement. Lors de ce procès, vous comprendrez l'ampleur de

 26   cette opération en voyant des vidéos de Jahorina, et vous verrez la

 27   présence de nombreux paramilitaires rassemblés à Jahorina.

 28   L'une des méthodes qui nous permet de remonter, de tracer la présence des

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  1   unités spéciales de la DB serbe, consiste à voir qu'ils ont été très

  2   souvent victimes, et qu'il y ait des pertes parmi leurs rangs dans la zone

  3   de Trnovo. La diapositive numéro 127 montre une charte, un résumé de

  4   certains des documents que l'Accusation présentera pour établir la présence

  5   pendant cette période des unités spéciales de la DB serbe.

  6   J'aimerais également vous présenter un autre membre des unités spéciales de

  7   la DB serbe. Il s'agit de Vaso Mijovic. C'est lui qui commandait les unités

  8   spéciales de la DB serbe alors qu'elles étaient en opération à Trnovo et à

  9   l'extérieur de Trnovo.

 10   Alors que Srebrenica devait tomber le 11 juin [comme interprété], une

 11   colonne de 10 000 à 15 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie s'est

 12   enfuit. La colonne fut frappée par l'artillerie serbe de Bosnie le 12, et

 13   parmi les survivants à ces salves d'artillerie, plusieurs milliers ont été

 14   capturés. Ces prisonniers ont été systématiquement exécutés en un certain

 15   nombre de lieux entre le 13 et le 17 juillet 1995. Certaines des personnes

 16   capturées ont été réparties pour être exécutées à l'extérieur de la zone de

 17   Srebrenica. Environ 15 captifs ont été donnés aux Skorpions pour qu'ils

 18   aient davantage de personnes à tuer. Certains de ces prisonniers ont été

 19   livrés aux Skorpions à leur base à Trnovo.

 20   La diapositive 129 montre un rapport de Mijovic, vous voyez sur l'en-tête

 21   qu'il est question des unités spéciales de la DB serbe, à cette époque,

 22   officiellement appelée l'unité pour les opérations antiterroristes ou la

 23   JATD. Et le 19 juillet, Mijovic a indiqué à ses homologues du ministère de

 24   la Republika Srpska des Affaires intérieures qu'il avait reçu l'ordre de se

 25   retirer de la zone de combat "pour exécuter d'autres missions." Alors le

 26   rapport n'indique pas quelles étaient ces autres missions, mais nous savons

 27   que cela s'est passé pendant la période où ces six personnes capturées ont

 28   été tuées.

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  1   Slobodan Medic et un groupe de Skorpions ont placé six de ces personnes

  2   capturées dans un camion, et ils les ont conduits vers un endroit isolé

  3   près de Trnovo pour les tuer.

  4   Medic a donné l'ordre que cela soit filmé. La diapositive 130

  5   contient un extrait assez bref de cette vidéo qui n'inclut pas d'ailleurs

  6   les exécutions.

  7   [Diffusion de la cassette vidéo]

  8   M. GROOME : [interprétation] Les Skorpions ont insulté les prisonniers,

  9   leur ont donné des coups de pied, ont persiflé le plus jeune en disant

 10   qu'il mourrait puceau. Les six qui savaient très certainement qu'ils

 11   étaient sur le point de mourir ont dû attendre pendant que le chauffeur de

 12   camion s'est rendu en ville pour acheter ou pour se procurer une nouvelle

 13   pile pour le caméscope.

 14   Une fois que le caméscope a été prêt, quatre des prisonniers ont dû

 15   s'aligner debout alors que les deux autres ont dû rester par terre dans

 16   l'herbe. Ils ont ensuite tiré sur ces quatre personnes qui étaient debout

 17   l'un après l'autre. Après qu'ils ont tiré dans le dos de la première

 18   personne, les autres ont dû marcher jusqu'à l'endroit où la victime

 19   précédente venait de tomber et ils devaient attendre.

 20   Pendant que certaines des victimes agonisaient dans l'herbe, des tirs

 21   supplémentaires ont été tirés dans leurs têtes pour s'assurer qu'ils ne

 22   survivraient pas.

 23   Les deux personnes qui étaient par terre dans l'herbe ont dû transporter

 24   les cadavres dans une maison se trouvant très près. Les Skorpions ont

 25   ensuite tué ces deux personnes.

 26   Dans ce rapport du 24 juillet 1995 qui figure sur la diapositive 131, nous

 27   voyons en fait qu'il s'agit d'un rapport de rotation une fois que les

 28   Skorpions sont revenus, ont repris leurs fonctions régulières.

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  1   Et là nous avons le commandant d'état-major qui remarque que la rotation

  2   des troupes entre la police spéciale de Banja Luka et les Skorpions s'est

  3   bien passé.

  4   L'Accusation avance, tel que cela est indiqué dans la diapositive 132, que

  5   les Skorpions étaient l'une des unités de la DB serbe et que les accusés

  6   sont pénalement responsables du meurtre de ces trois hommes et de ces trois

  7   garçons à Trnovo. En l'espèce, ces membres des unités de la DB étaient

  8   placés sous le commandement d'un officier supérieur de la DB, Vaso Mijovic

  9   qui les ont mis à la disposition de Karadzic, Mladic et d'autres membres

 10   essentiels de l'entreprise criminelle commune pour qu'ils commettent des

 11   crimes afin de promouvoir leur entreprise criminelle commune.

 12   A la même période, Arkan se trouvait dans la municipalité de Sanski Most.

 13   Il était là essentiellement pour faire peur aux déserteurs de l'armée serbe

 14   de Bosnie, il fallait donc que les lignes de front soient assurées contre

 15   les forces croates qui étaient en train de reconquérir certains des

 16   territoires perdus aux Serbes en 1992. Et nous pouvons voir dans ce rapport

 17   de la diapositive 134 que M. Stanisic était en contact direct avec Arkan à

 18   ce sujet.

 19   Alors que dans la municipalité de Sanski Most, un endroit qui après 1992 où

 20   il restait très peu de Musulmans, et lorsqu'il se trouvait dans cette

 21   municipalité une fois de plus il s'est caractérisé par ses crimes

 22   particulièrement brutaux. Sa présence s'inscrivait dans le cadre d'une

 23   opération plus importante de la DB serbe et qui englobait non seulement

 24   Sanski Most mais également Kljuc, Prijedor et Mrkonjic Grad. A cette

 25   mission coordonnée ont participé les unités spéciales de la DB serbe

 26   commandées par Bozovic et les Tigres d'Arkan se trouvaient sous son

 27   commandement.

 28   A la mi-1995, il y a eu des progrès effectués par l'armée de la Bosnie-

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  1   Herzégovine qui menaçait de reprendre Sanski Most aux Serbes. Pour empêcher

  2   cela, les Tigres d'Arkan ont été envoyés à Sanski Most.

  3   Le 19 septembre, les Tigres d'Arkan sont arrivés en grand nombre et ont

  4   rassemblé les quelques Musulmans qu'ils pouvaient trouver. Ils les ont

  5   emprisonnés dans l'hôtel Sanus dans des conditions absolument abominables.

  6   Une trentaine d'entre eux se trouvaient dans la pièce où se trouvait la

  7   chaudière de l'hôtel; une pièce dont on les faisait sortir de temps à autre

  8   afin de les rouer de coups; deux détenus sont morts à la suite de ces

  9   brutalités.

 10   Le 20 septembre 1995, les Tigres d'Arkan ont pris au moins 12 hommes dans

 11   l'hôtel Sanus, les ont emmenés dans une maison qui se trouvait dans un

 12   village avoisinant. Là les hommes ont tiré, ont abattu deux de ces hommes

 13   d'une balle à la tête. Les deux dernières victimes ont eu leurs gorges

 14   tranchées lorsque les hommes d'Arkan n'ont plus eu de balles.

 15   Le 21 septembre, les Tigres d'Arkan ont pris un autre groupe d'environ 65

 16   Musulmans qu'ils ont exécutés de la même façon. Plusieurs jours plus tard,

 17   plusieurs centaines de détenus musulmans ont été placés dans un bus et

 18   expulsés de Sanski Most.

 19   Un mois plus tard, le 23 octobre 1995, à la suite des événements de Sanski

 20   Most, Radovan Karadzic allait remettre publiquement une récompense à Arkan

 21   qui quittait officiellement la Bosnie puisque son travail s'était achevé.

 22   Il est ironique de constater que sa présence en Bosnie devait se terminer

 23   en face du même hôtel de ville à Bijeljina où elle avait commencé cette

 24   prison. J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 135 pendant

 25   que vous allez regarder cet extrait vidéo.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   M. GROOME : [interprétation] L'Accusation sous-tend que les accusés ont une

 28   responsabilité pénale pour les crimes commis à Sanski Most car Arkan était

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  1   un co-membre dans l'entreprise criminelle commune et un membre des unités

  2   de la DB serbe. L'accusé a donné à Arkan un soutien et des fournitures

  3   militaires dont il avait besoin pour perpétrer ces crimes.

  4   L'Accusation sous-tend également qu'ils sont responsables car ils ont fait

  5   en sorte que les membres des unités spéciales de la DB serbe placés à la

  6   disponibilité des autres membres de l'entreprise criminelle commune et dans

  7   ce cas-ci Radovan Karadzic qui les a dirigés, il les a instruits à

  8   commettre des crimes.

  9   Après l'attaque de l'OTAN, les troupes de Mladic ont tenu des

 10   "peacekeepers" des Nations Unies et les ont gardés en otage. Milosevic a

 11   immédiatement, reconnaissant le problème dans lequel se trouvait la Serbie,

 12   a envoyé Stanisic pour intervenir, il l'a instruit d'aller avec Simatovic

 13   sous l'autorité de Milosevic et de revenir avec les otages sans les avoir

 14   touchés.

 15   L'Accusation ne nie pas que Simatovic et Stanisic ont libéré certains

 16   otages, ils les ont ramenés et peut-être sauvés leurs vies. Si la Chambre

 17   de première instance les trouve responsables pour les crimes commis,

 18   l'Accusation devra tenir compte des éléments atténuants.

 19   Mais l'Accusation sous-tend, et il ne faut pas se tromper que

 20   l'autorité qu'avait M. Stanisic et M. Simatovic ce jour-là, le jour où ils

 21   ont décidé d'avoir cette autorité lorsqu'ils ont sauvé des vies, c'est

 22   tragiquement la même autorité dont ils se sont servis au cours des quatre

 23   années précédentes pour prendre les vies, de persécuter les innocents, et

 24   de chasser les personnes de leurs demeures.

 25   La raison pour laquelle M. Milosevic les a envoyés à cet endroit-là

 26   au cours de cette crise d'otage, qui était un des événements le plus

 27   explosif au cours de la guerre, alors que tous les yeux du monde étaient

 28   rivés sur ce qui allait se passer sur ces forces de maintien de la paix des

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  1   Nations Unies, c'était parce qu'ils étaient en mesure de rentrer et de

  2   sortir avec les otages auxquels on n'a pas fait de tort.

  3   Maintenant je souhaiterais parler de la théorie de l'Accusation

  4   concernant cette affaire.

  5   L'acte d'accusation charge les deux accusés de crimes contre

  6   l'humanité sanctionnés par la violation de l'article 5 du Statut du

  7   Tribunal et de violations des droits et des coutumes de la guerre en

  8   violation de l'article 3 du Statut.

  9   La diapositive 137 est un résumé des allégations portées contre M.

 10   Simatovic et M. Stanisic.

 11   Les crimes contre l'humanité sont décrits dans les chefs 1, 2, 4, et 5 de

 12   l'acte d'accusation et ils sont : crime 1, crime de persécution de

 13   violation de l'article 5(h). Chef 2, assassinat en violation de l'article

 14   5(a). Chef 4, déportation, crime sanctionné par l'article 5(d). En dernier

 15   lieu, transfert forcé, l'un des actes inhumains sanctionné par l'article

 16   5(i) du Statut du Tribunal.

 17   Le crime de meurtre ou d'assassinat se trouve également englobé par le chef

 18   d'accusation numéro 3 qui parle de meurtre en tant que reconnu par

 19   l'article commun 3(1)(a) des conventions de Genève de 1949 et sanctionné en

 20   vertu de l'article 3 du Statut du Tribunal.

 21   L'Accusation sous-tend que les accusés sont individuellement et pénalement

 22   responsables pour les crimes sanctionnés par l'article 7(1) du Statut et

 23   qu'ils ont participé aux crimes de la façon suivante : 

 24   D'abord ils ont commis ces crimes en tant que membres et ont pris part à

 25   une entreprise criminelle commune dont l'objectif et le but était de mener

 26   à bien ces crimes.

 27   Deuxièmement, ils ont pris part à la planification de ces crimes.

 28   Troisièmement, ils ont ordonné que certains de ces crimes allégués dans

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  1   l'acte d'accusation soient commis.

  2   Et quatrièmement, ils ont aidé et encouragé à la planification, à la

  3   préparation, à l'exécution des crimes reprochés dans cet acte d'accusation.

  4   Le Procureur sous-tend que les deux accusés ont fait partie de et ont aidé

  5   à créer une entreprise criminelle commune, une entreprise criminelle

  6   commune qui a été conçue au niveau le plus élevé du gouvernement de la

  7   République de Serbie de concert avec les membres les plus importants des

  8   régions affectées en Croatie et Bosnie-Herzégovine, une entreprise qui a

  9   été faite et qui a mis en œuvre un plan criminel conçu pour sécuriser pour

 10   les Serbes des terres qui se trouvaient en Croatie et en Bosnie-

 11   Herzégovine.

 12   Pour s'approprier ces territoires ciblés, cette entreprise criminelle

 13   commune envisageait un déplacement de la population non-serbe de façon

 14   rapide en commettant des crimes et en persécutant cette population.

 15   L'Accusation sous-tend que ces membres importants de l'entreprise ont

 16   partagé leur même objectif ce qui les a gardés ensemble, ce qui a harmonisé

 17   leur contribution individuelle, ce qui a permis qu'ils travaillent ensemble

 18   vers un but commun était l'intention criminelle partagée.

 19   La jurisprudence reconnaît l'entreprise criminelle commune pour dire que

 20   plusieurs formes peuvent exister de cette entreprise criminelle commune tel

 21   que montré à la diapositive 103 [comme interprété].

 22   Ces différentes formes reflètent les nuances qui existent entre les façons

 23   diverses pour lesquelles les coauteurs peuvent concevoir et mettre en œuvre

 24   leurs plans criminels.

 25   Alors que l'actus reus de chacune de ces formes est essentiellement

 26   identique, ils sont différents, ils peuvent se différer par la mens rea,

 27   l'élément moral.

 28   Les éléments de preuve que vous entendrez dans cette affaire correspondent

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  1   à deux formes d'entreprise criminelle commune.

  2   L'entreprise criminelle commune I, dont on fait référence des fois en

  3   l'appelant une forme de base, et un fait de responsabilité pénal pour ce

  4   qui est des membres d'une entreprise criminelle commune qui s'adonnent à un

  5   accord ou qui font partie d'un accord commun pour commettre ces crimes.

  6   Alors que chacun de ces membres peuvent jouer un rôle différent lorsqu'il

  7   s'agit de la commission de ces crimes, ils avaient néanmoins l'intention de

  8   commettre ces crimes et ont contribué à la commission de ces crimes.

  9   Ceci bien sûr est en contraste avec l'entreprise criminelle commune III,

 10   qui est des fois appelée forme étendue, les crimes qui sont reprochés,

 11   alors qu'ils ne font pas partie de l'intention du crime original nonobstant

 12   le fait sont une conséquence de ce crime.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, vous devriez vous

 14   approcher de la fin maintenant pour ce qui est de vos déclarations

 15   liminaires. Je crois que votre temps s'écoulera à 16 heures 30.

 16   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais que j'avais

 17   encore 15 minutes après la pause et ce qu'il me reste encore c'est une

 18   partie très importante de mes déclarations liminaires.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons prendre une pause à 16

 20   heures 30.

 21   M. GROOME : [interprétation] Pour ce qui est de cette affaire en l'espèce,

 22   d'abord il faut dire, et l'Accusation a une théorie principale, c'est que

 23   Jovica Stanisic et Franko Simatovic étaient membres d'un groupe de

 24   coauteurs principaux qui ont conçu les crimes qui sont reprochés à l'acte

 25   d'accusation. En tout temps, ils avaient une intention partagée d'expulser

 26   les non-Serbes par la force des régions désignées dans un effort

 27   d'effectuer un changement démographique important pour la population.

 28   L'intention qu'ils ont partagée n'est pas simplement l'intention de

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  1   déplacer ces groupes de non-Serbes ciblés par la force mais ils ont

  2   également partagé l'intention de les tuer et de les persécuter comme moyen

  3   de mettre en œuvre leurs objectifs.

  4   Comment nous savons qu'ils ont partagé cette intention criminelle ? Nous

  5   entendrons un très grand nombre d'éléments de preuve qui permettront à la

  6   Chambre de conclure que les deux accusés ont partagé l'intention criminelle

  7   de d'autres membres principaux tels Martic, Karadzic, Hadzic, Mladic. Je

  8   vais vous donner un seul exemple.

  9   A Zvornik, les combattants qui appartenaient à Seselj et à Arkan et un

 10   groupe appelé les Guêpes jaunes faisaient tous partie ou étaient tous

 11   engagés dans la commission de crimes graves. A cet endroit-là vous

 12   entendrez des éléments de preuve vous permettant de comprendre que les

 13   Guêpes jaunes étaient organisées par M. Stanisic et le service de sécurité

 14   d'Etat serbe et que plus tard ces derniers avaient été arrêtés. Ils ont été

 15   également jugés dans des tribunaux serbes pour les crimes qui avaient été

 16   commis en Bosnie et ils ont été jugés. Alors qu'il était également adéquat

 17   de mener une enquête contre les frères Vukovic, on se pose la question

 18   pourquoi est-ce que les hommes de Seselj et les hommes d'Arkan n'ont pas

 19   subi le même sort ? Non seulement des actions n'ont pas été prises, mais

 20   vous verrez également que des crimes qui avaient été commis après Bijeljina

 21   et Zvornik ont été organisés et soutenus par les deux accusés.

 22   L'Accusation sous-tend que la seule conclusion raisonnable qui puisse être

 23   tirée de ceci, c'est qu'Arkan et Seselj faisaient partie des membres

 24   principaux de l'entreprise criminelle commune et que Stanisic et Simatovic

 25   partageaient leur intention, à savoir de faire les crimes qui ont été

 26   commis à Zvornik.

 27   Monsieur le Président, est-ce que le moment est opportun pour prendre la

 28   pause ?

Page 1063

  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, certainement. Nous allons

  2   prendre une pause de 20 minutes.

  3   --- L'audience est suspendue à 16 heures 27.

  4   --- L'audience est reprise à 16 heures 58.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Knoops.

  6   M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, avant que l'on ne

  7   poursuive, je voudrais demander à l'Accusation s'ils se basent dans la

  8   prononciation de leur ouverture liminaire, s'ils se basent sur le deuxième

  9   acte d'accusation modifié et s'ils ont tenu compte ou s'ils ont anticipé en

 10   fait le troisième acte d'accusation modifié. Je crois qu'il est important

 11   pour la Défense de savoir ceci. 

 12   Comme vous le savez, Monsieur le Président, il y a une requête

 13   pendante de la part de la Défense contre la proposition d'un acte

 14   d'accusation modifié, le troisième acte d'accusation modifié. Maintenant

 15   l'Accusation nous présente une théorie juridique outre le fait que selon

 16   moi, une déclaration liminaire ne devrait pas parler de l'acte

 17   d'accusation. Mais outre ceci, je voudrais demander à l'Accusation s'ils

 18   pourraient nous dire si leur déclaration liminaire est basée sur le

 19   deuxième acte d'accusation modifié et si dans la préparation de leur

 20   discours liminaire ils ont anticipé les changements.

 21   M. GROOME : [interprétation] Non, Monsieur le Président, tout ce que j'ai

 22   dit est basé sur l'acte d'accusation qui est actuel dans cette affaire. Je

 23   ne me suis pas basé sur un troisième acte d'accusation. Je voulais

 24   simplement expliquer la théorie juridique de culpabilité et l'Accusation

 25   s'est basée sur le deuxième acte d'accusation.

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.

 27   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui correspond

 28   également et ce que l'on parle ici réellement c'est de l'entreprise

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  1   criminelle commune III. Les deux accusés ainsi que les deux autres membres-

  2   clés de l'entreprise criminelle commune ont partagé une intention de

  3   déplacer par la force des non-Serbes des régions désignées.

  4   Sous cette théorie, même si la Chambre ne devait pas conclure que les

  5   accusés ont partagé l'intention d'assassiner, de persécuter les Musulmans

  6   et les Croates, ils doivent rester tenus responsables s'ils ont partagé

  7   l'intention de déplacer ces non-Serbes par la force des régions ciblées et

  8   s'ils ont accepté le risque que ceci pouvait entraîner, c'est-à-dire que ce

  9   déplacement forcé de la population pouvait entraîner les meurtres et les

 10   persécutions.

 11   Dans ce contexte de cette affaire-ci les accusés se sont joints à

 12   d'autres personnes ayant l'intention partagée de déplacer par la force les

 13   personnes de leurs demeures et partagent la responsabilité pénale et

 14   individuelle pour les crimes de persécution et de meurtre qui sont commis.

 15   Tout comme j'ai dit un peu plus tôt, l'actus reus pour l'entreprise

 16   criminelle commune I et pour l'entreprise criminelle commune III sont les

 17   mêmes, il n'y a que quelques nuances différentes.

 18   D'abord, il faut avoir une pluralité de personnes, et même si ces crimes

 19   ont été commis par un très grand nombre de personnes, nous pouvons à toutes

 20   fins pratiques seulement vous présenter des éléments de preuve concernant

 21   les membres qui selon nous sont les membres-clés de l'entreprise criminelle

 22   commune. Ce sont les personnes qui figurent dans le tableau que nous avons

 23   montré très souvent dans le cadre de cette déclaration liminaire.

 24   Troisièmement, c'est l'existence d'un but commun qui comprend la commission

 25   d'un crime conformément au Statut. L'Accusation sous-tend que chacun des

 26   crimes reprochés dans cet acte d'accusation avait été réalisé en tant

 27   qu'objectif de l'entreprise criminelle commune.

 28   Et le troisième élément de l'actus reus c'était que les accusés ont

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  1   participé ou ont pris part pour que cette entreprise criminelle commune

  2   soit menée, pour que sa création aide de façon matérielle dans ses

  3   exécutions.

  4   Je vais maintenant vous présenter la diapositive numéro 143, qui peut vous

  5   identifier quels étaient les actes de participation pour lesquels

  6   l'Accusation, traitant que M. Simatovic et M. Stanisic étaient pénalement

  7   responsables.

  8   Pour ce qui est de la Krajina, l'Accusation sous-tend que leurs efforts

  9   conjoints étaient d'organiser, de financer et d'équiper les hommes de

 10   Martic et l'armée leur permettant de commettre les crimes sérieux qu'ils

 11   ont commis contre la population non-serbe de la Krajina et que ceci faisait

 12   partie d'une participation de l'entreprise criminelle commune globale.

 13   Pour ce qui est de la SAO SBSO, l'Accusation prétend que les accusés ont

 14   participé dans l'entreprise criminelle commune et qu'ils ont pu financer et

 15   équiper les hommes d'Arkan et que ceci a permis la commission de ces crimes

 16   directs.

 17   Pour ce qui est de la Krajina et de la SAO SBSO, M. Stanisic ainsi que M.

 18   Simatovic ont donné des directives aux dirigeants locaux politiques tout

 19   comme Martic, Babic et Hadzic pour s'assurer que leurs activités politiques

 20   également correspondaient aux objectifs communs.

 21   En dernier lieu, même si à la fin de cette affaire, si la Chambre a

 22   toujours un doute, à savoir si M. Simatovic et M. Stanisic auraient

 23   directement financé et équipé Arkan, ils seraient quand même responsables

 24   pour les crimes qui ont été commis, les crimes pour un autre co-membre de

 25   l'entreprise criminelle commune. Si les Juges de la Chambre étaient

 26   satisfaits au-delà de tout doute raisonnable, étaient convaincus au-delà de

 27   tout doute raisonnable que ces derniers effectivement faisaient partie de

 28   la même entreprise criminelle commune.

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  1   Pour ce qui est maintenant des municipalités bosniennes, M. Stanisic et M.

  2   Simatovic ont joué un rôle pour ce qui est de la prise de ces municipalités

  3   en 1992. L'Accusation sous-tend que leur acte de participation, qu'ils sont

  4   coupables pour ce qui est de la participation dans cette entreprise

  5   criminelle commune, donc planifier les attaques, de fournir la formation,

  6   les armes, l'équipement et le financement. Dans certains cas, ils ont

  7   également organisé un transport militaire pour les auteurs directs des

  8   crimes.

  9   Si la Chambre estime qu'elle ne peut pas conclure par les éléments de

 10   preuve reçus qu'ils ont aidé directement et que c'étaient les dirigeants

 11   des Serbes de Bosnie seuls qui les ont dirigés à commettre ces crimes,

 12   l'Accusation prétend qu'en plaçant ces hommes et cet équipement à la

 13   disposition d'un autre membre de l'entreprise criminelle commune pour qu'il

 14   puisse s'en servir pour mettre à bien l'objectif commun de l'entreprise

 15   criminelle commune comprend également une responsabilité.

 16   Dernièrement, lorsqu'il s'agit d'un crime commis par un si grand

 17   nombre de personnes, la jurisprudence de ce Tribunal dans le jugement dans

 18   l'appel Brdjanin reconnaît que les personnes les plus responsables pour les

 19   crimes sérieux sont très souvent les personnes qui sont très éloignées des

 20   crimes et estiment que les membres les plus élevés de l'entreprise peuvent

 21   et se servent d'autres personnes pour commettre directement les crimes

 22   qu'ils entendent commettre, et ainsi ils sont responsables criminellement

 23   finalement.

 24   Sous cette théorie, les membres-clés d'une entreprise criminelle

 25   commune partageant une intention commune de déplacer les non-Serbes se sont

 26   servis d'autres personnes pour mettre à bien cet objectif pénal. Ceux dont

 27   ils se sont servis n'ont peut-être pas partagé leur intention mais selon

 28   cette théorie même l'absence d'une preuve d'intention partagée par ces

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  1   auteurs, ces inculpés sont pénalement responsables, car ils se sont servis

  2   de ces personnes en tant qu'instruments de leur plan criminel.

  3   Pour vous donner un exemple dans cette affaire, je souhaiterais vous

  4   rappeler de ce que nous avons déjà dit concernant Bosanski Samac. Lorsqu'il

  5   était devenu nécessaire, Jovica Stanisic est personnellement intervenu pour

  6   avoir l'un des auteurs principaux libérer un homme qui s'appelait Crni, et

  7   a été libéré afin qu'il puisse retourner à Samac pour continuer la

  8   commission de ses crimes.

  9   Est-ce que Crni et Stanisic partageaient la même intention ?

 10   Probablement. Mais même en l'absence de preuve qu'ils ont partagé la même

 11   intention, M. Stanisic et M. Simatovic partagent la responsabilité pour les

 12   crimes qu'ils ont commis si la Chambre conclut que Crni avait servi comme

 13   un instrument dans une entreprise criminelle commune, dans le but de

 14   commettre, de mettre à bien son objectif.

 15   L'Accusation sous-tend que M. Stanisic et M. Simatovic sont

 16   responsables pour les crimes qui sont décrits de plusieurs façons dans

 17   l'acte d'accusation et dans les déclarations liminaires. Nous ne soutenons

 18   pas que chaque crime se base seulement sur un mode de participation eu

 19   égard à la taille des unités spéciales et à l'éventail des activités de

 20   Stanisic et de Simatovic. Il arrive très souvent que leur implication dans

 21   ces crimes puisse être envisagée de plus d'une façon.

 22   L'acte d'accusation allègue également que les deux accusés ont

 23   planifié des crimes reprochés. La planification d'un crime sous-estime que

 24   l'une ou plusieurs personnes doivent envisager la commission de crime

 25   lorsqu'il s'agit de deux phases, la préparation et l'exécution.

 26   Mais l'Accusation sous-tend que Stanisic et Simatovic avaient établi

 27   26 camps de formation, ils avaient fourni les instructeurs, et ils avaient

 28   donné les armes et ils avaient fourni également l'équipement logistique aux

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  1   auteurs directs des crimes commis. Ceci est une preuve grâce à laquelle la

  2   Chambre pourrait conclure qu'ils ont participé à la planification de ces

  3   actes, tels qu'ils existent dans la jurisprudence de ce Tribunal.

  4   Vous vous rappelez à la diapositive numéro 4 [comme interprété] de la

  5   Krajina, un homme qui s'appelle Miljovic parle de certaines choses qui se

  6   déroulent "conformément au plan."

  7   Vous vous rappelez également ce qu'a dit Vojislav Seselj lorsqu'il

  8   identifiait M. Simatovic comme étant l'éminence grise derrière le plan de

  9   la prise de Zvornik.

 10   Ordonner. Le fait d'ordonner. Conformément à la jurisprudence de ce

 11   Tribunal, ceci concerne une personne ayant une position d'autorité se

 12   servant de cette position pour persuader une autre personne pour commettre

 13   un crime conformément au statut. L'ordre peut être donné de façon explicite

 14   ou implicite, mais peut être prouvé grâce aux éléments de preuve

 15   circonstanciels.

 16   L'Accusation sous-tend que les éléments de preuve permettront à la Chambre

 17   de conclure que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont envoyé Arkan dans

 18   plusieurs municipalités figurant dans l'acte d'accusation où il avait

 19   commis des crimes. Même s'ils ne lui ont pas dit directement de commettre

 20   ces crimes de meurtre et de persécution dans le contexte de leurs

 21   connaissances, sachant que partout où il allait il commettait ces crimes,

 22   la seule conclusion que nous pouvons tirer est qu'ils l'ont dirigé vers un

 23   endroit particulier où vivait une population non-serbe et que ceci en fait

 24   présentait un ordre implicite visant à commettre des crimes à cet endroit-

 25   là, des persécution à cet endroit-là.

 26   Je ne vais pas parler d'aider et encourager à commettre tout ce que

 27   l'Accusation attribue à Stanisic et à Simatovic, et qu'ils pourraient avoir

 28   participé dans ce que l'on appelle aider à commettre. A la fin de la

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  1   présentation des éléments à charge il deviendra très clair qu'ils sont

  2   responsables des crimes, des charges allégués contre eux.

  3   Dans l'acte d'accusation, l'Accusation sous-tend que les accusés ont

  4   commis ces crimes par leurs actes et leurs omissions. Je souhaiterais

  5   maintenant vous parler, prendre quelques minutes pour parler de ceci.

  6   Le mot "omission" en fait a deux mots distincts conformément à la

  7   jurisprudence du Tribunal. L'un des emplois du terme "omission" est une

  8   forme de responsabilité pénale, et l'autre, c'est une description qui

  9   décrit une situation factuelle de laquelle des conclusions peuvent être

 10   tirées. L'omission en tant que terme juridique de responsabilité pénale

 11   implique une situation selon laquelle un accusé a une obligation légale

 12   envers une victime, par exemple une obligation légale de protéger.

 13   L'Accusation ne sous-tend pas que Stanisic ou Simatovic avaient une

 14   obligation concrète, légale de s'assurer du bien-être des victimes de

 15   crimes en Croatie et en Bosnie.

 16   L'omission, si l'on parle de l'omission en tant que détermination factuelle

 17   de laquelle les conclusions peuvent être tirées, c'est de la façon dont

 18   l'Accusation se sert de ce mot. Par exemple, si tout au long de cette

 19   affaire en l'espèce, la Chambre estime que si malgré que le fait d'avoir

 20   reçu des informations sur les crimes qui avaient été commis en tant que

 21   résultat de leur contribution à l'entreprise criminelle commune, et que si

 22   sachant ceci ils n'ont pas pris les mesures nécessaires telles que donner

 23   l'instruction aux membres des unités de la DB de s'abstenir de commettre

 24   des actes pénales, ceci veut dire que c'est un encouragement. Ils ont donné

 25   un soutien matériel aux auteurs directs du crime, car les auteurs de ces

 26   crimes ont été encouragés par l'absence de toutes mesures correctionnelles

 27   prises par Simatovic ou Stanisic.

 28   Vous avez vu Arkan déclarer ouvertement à Belgrade qu'il tue les

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  1   prisonniers. Vous entendrez d'autres éléments de preuve selon lesquels il

  2   dira que lui et ses hommes étaient des réguliers de Belgrade, ils se

  3   déplaçaient de façon très ouvertement, ils avaient un uniforme, ils

  4   portaient des armes militaires, très souvent à bord de véhicules sur

  5   lesquels des Tigres avaient été dessinés.

  6   C'est leur capacité de se déplacer librement à Belgrade sous le nez

  7   de Stanisic, qui avait une responsabilité juridique, si vous vous rappelez

  8   dans la diapositive numéro 7, sa responsabilité était également de

  9   contrôler les groupes extrémistes. Le fait que Stanisic a omis de prendre

 10   des actions contre lui a permis à Arkan de commettre ces crimes, l'a

 11   encouragé à commettre ces crimes, outre le fait de l'avoir soutenu de façon

 12   concrète.

 13   Monsieur le Président, ceci met fin au résumé des éléments de preuve que

 14   présentera l'Accusation, et ceci vous donne un survol des crimes qui sont

 15   reprochés à M. Jovica Stanisic et Franko Simatovic, et selon lesquels nous

 16   estimons qu'ils sont pénalement responsables pour les crimes commis. Je

 17   suis tout à fait persuadé que cette Chambre pourra, à la présentation des

 18   moyens à charge, nous sommes persuadés que vous allez pouvoir en arriver à

 19   un jugement juste.

 20   Donc ayant dit ceci, l'Accusation est prête à présenter ses éléments à

 21   charge.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Groome. La Chambre

 23   vous a écouté. Nous allons maintenant commencer la phase selon laquelle

 24   nous entendons les témoins. Nous pouvons maintenant entendre notre premier

 25   témoin.

 26   M. GROOME : [interprétation] Avant que le premier témoin ne soit appelé, je

 27   souhaiterais soulever quelques questions administratives. 

 28   Dans le cours des déclarations liminaires, nous avons fait référence

Page 1071

  1   aux diapositives, mais si l'on examine le compte rendu d'audience, on ne

  2   saura pas ce qui a été sur les diapositives, et si on n'a pas lu le tout,

  3   donc je demanderais que les exemplaires de ces diapositives -- qu'une copie

  4   soit présentée, je ne demande pas que l'on accepte au dossier ces

  5   diapositives, mais simplement qu'ils soient marqués pour identification.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

  7   M. GROOME : [interprétation] Je pense qu'il est également important que

  8   nous consignions au compte rendu que M. Stanisic --

  9   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 10   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, M. Stanisic n'est pas

 11   présent. Je crois qu'il n'était pas non plus dans la salle de

 12   visioconférence, et en général les Juges de la Chambre consignent ainsi

 13   l'absence du quartier pénitentiaire, peut-être qu'il serait prudent en fait

 14   d'enquêter là-dessus et de savoir s'il est trop malade ou pas, ou en tout

 15   cas peut-être pour les besoins du compte rendu clairement indiquer qu'il

 16   n'était pas présent pendant les déclarations liminaires de l'Accusation.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Knoops.

 18   M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, maintenant que la

 19   position de la Défense de M. Stanisic -- en fait, puisque nous sommes les

 20   gardiens de sa position au plan juridique mais que cette position est

 21   quelque peu diminuée, je souhaite évoquer le droit de M. Stanisic

 22   conformément à l'article 84 bis, et qu'à la lumière des éléments médicaux

 23   présentés et de la notification d'aujourd'hui au quartier pénitentiaire, je

 24   crois que sans vérifier cette information il serait contraire aux droits de

 25   l'accusé d'entendre le premier témoin aujourd'hui, et j'invoque l'article

 26   84 bis.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous êtes son avocat. Est-ce

 28   qu'il souhaite faire une déclaration, oui ou non ?

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  1   M. KNOOPS : [interprétation] Nous n'avons pas d'instructions à cet égard.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi n'avez-vous pas

  3   d'instruction ? Ne faites pas perdre mon temps.

  4   Si vous pensez que je vais accepter ceci, vous vous trompez. Pourquoi

  5   dites-vous que vous êtes le gardien des intérêts de l'accusé ?

  6   M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, écoutez. Si vous lisez

  7   les requêtes que nous avons déposées et dont la Chambre d'appel est saisie,

  8   je peux vous dire que notre fonction actuelle est quelque peu diminuée.

  9   Nous sommes les gardiens de ses droits. Nous n'avons pas d'instructions de

 10   notre client. Il est juste de dire --

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En ce qui me concerne, vous êtes

 12   encore conseil jusqu'à ce que cette question que vous avez soulevée soit

 13   tranchée, à moins que vous ne puissiez me dire que l'accusé souhaite faire

 14   une déclaration, je vais poursuivre en me fondant sur le fait qu'il ne

 15   souhaite pas faire de déclaration. Car c'est quelque chose dont vous auriez

 16   dû vous enquérir avant de venir ici aujourd'hui.

 17   Si vous n'avez pas d'autres arguments à présenter nous allons

 18   poursuivre.

 19   M. KNOOPS : [interprétation] Mon argument consiste à dire que l'accusé

 20   n'est pas en mesure de savoir s'il peut faire une déclaration ou pas.

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons déjà parlé de tout cela,

 22   et je ne vais pas reparler de tout cela maintenant.

 23   Monsieur Groome.

 24   M. GROOME : [interprétation] Pour ce qui est du B-299, nous avons soumis

 25   une demande. Nous n'avons pas de décision encore, et nous avons préparé ce

 26   témoin pour sa déposition.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, nous nous sommes

 28   penchés sur cela. Je vais rendre une décision. Tout d'abord, je vais

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  1   m'enquêter auprès de représentant de la greffe, je souhaite savoir quelle

  2   est la position de l'accusé, est-ce qu'il suit la procédure par le biais

  3   d'une visioconférence au quartier pénitentiaire ?

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, l'accusé n'est

  5   pas présent. Il n'est pas dans cette salle de visioconférence.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre rend donc sa décision sur

  7   la demande faite par l'Accusation s'agissant du Témoin B-299.

  8   Le 18 juin, la Chambre a été saisie d'une requête aux fins d'admettre

  9   conformément à l'article 92 ter du compte rendu de la déposition du Témoin

 10   B-299 dans l'affaire Martic et les pièces qui ont été admises au cours de

 11   sa déposition. Le Témoin B-299 a travaillé au sein de la DB. La Chambre a

 12   analysé sa déposition avec beaucoup de soin et les éléments qui ont été

 13   présentés par le Témoin B-299 dans l'affaire Martic et estime que la valeur

 14   probante est suffisamment pertinente pour l'affaire qui nous concerne

 15   aujourd'hui. Le cumul de déclaration de culpabilité et des autres témoins

 16   viva voce, la déposition du Témoin 92 ter, l'Accusation a indiqué qu'elle

 17   allait présenter tout ceci au cours du procès.

 18   Après avoir analysé les arguments présentés par les parties, la Chambre

 19   admet la requête et fait droit à la requête de l'Accusation. La Chambre est

 20   également saisie d'une requête de l'Accusation aux fins de continuer à

 21   bénéficier de mesures de protection qui ont été accordées dans d'autres

 22   procès au Témoin B-299. L'Accusation dans sa requête a demandé que ces

 23   mesures de protection soient encore accordées à ce témoin, mesures qui ont

 24   été accordées dans d'autres procès.

 25   La Défense n'a pas répondu à cette requête.

 26   En vertu de l'article 75(f)(i), qui stipule que les mesures de protection

 27   qui ont été accordées dans des procès précédents devant ce Tribunal peuvent

 28   encore être accordées et avoir un effet mutatis mutandis dans d'autres

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  1   procès devant le Tribunal à moins qu'il n'y ait eu annulation, modification

  2   conformément à des procédures citées dans ce règlement.

  3   Aucune demande n'a été faite aux fins d'annuler ces dernières, de les

  4   amender ou de les modifier de quelque manière que ce soit, donc les mesures

  5   de protection, ces mesures continueront à s'appliquer. Les mesures en

  6   question sont un pseudonyme, distorsion des traits du visage et de la voix.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Jovanovic.

  8   M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A ce stade,

  9   je ne souhaite pas contester la décision que vous avez prise, mais si la

 10   décision que prend la Chambre se fonde sur la croyance (expurgé)

 11   (expurgé)

 12   (expurgé)

 13   (expurgé)

 14   (expurgé)

 15   (expurgé)

 16   (expurgé)

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois Me Docherty, il souhaite

 18   prendre la parole.

 19   M. DOCHERTY : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, je

 20   souhaite entendre ce témoin, et c'est un témoin protégé et si nous allons

 21   passer du temps sur le travail de ce témoin, et ce, de façon détaillée, je

 22   demande à passer à huis clos partiel. Je ne veux pas empêcher Me Jovanovic

 23   de présenter son argument, c'est simplement le cadre dans lequel il

 24   présente cet argument. Et je demande également l'expurgation des lignes 19

 25   à 25 à la page 78 du compte rendu qui se trouve sur nos écrans.

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait, nous allons

 27   procéder à cette expurgation.

 28   Maître Jovanovic.

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  1   M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'avais

  2   pas l'intention de divulguer l'identité du témoin qui est sur le point de

  3   venir témoigner. Je pensais simplement que je devrais signaler que si c'est

  4   sur les raisons pour lesquelles la déposition pouvait être admise en vertu

  5   de l'article 92 ter, qu'il y a une erreur d'interprétation dans ce cas.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Nous avons entendu vos

  7   arguments.

  8   M. GROOME : [interprétation] Merci. Une dernière question eu égard au

  9   Témoin B-299, hier la Chambre a rendu une ordonnance et a indiqué que

 10   l'interrogatoire des témoins 92 ter ne devait pas durer plus de 30 minutes.

 11   Nous n'avons donc pas entendu la décision de la Chambre concernant le 92

 12   ter, M. Docherty a préparé ce témoin et ne savait pas que ce temps était

 13   limité en vertu du 92 ter. Je demande à ce que l'on puisse l'interroger

 14   pendant deux heures pendant l'interrogatoire principal parce que ceci avait

 15   été décidé avant que la Chambre ne rende sa décision. Je vais essayer de

 16   rattraper le temps et peut-être de réduire le temps d'autres témoins qui

 17   vont témoigner sur des questions similaires et pour essayer de réduire le

 18   temps de la déposition de façon à pouvoir rattraper le temps d'aujourd'hui.

 19   Je vous remercie de pouvoir procéder avec ce témoin-ci aujourd'hui avec le

 20   temps qui nous a été imparti dès le départ, et nous avons compris hier ce

 21   que vous avez dit et en fait ce qui nous a été proposé au départ ce sont

 22   ces deux heures pour l'interrogatoire principal.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que je souhaiterais vraiment dire

 25   c'est que deux heures pour un témoin 92 ter, c'est vraiment beaucoup trop,

 26   beaucoup trop long. Et donc, je tiens compte de la question que vous avez

 27   soulevée, à savoir que vous n'étiez pas au courant de la décision que nous

 28   étions sur le point de rendre et qu'il faut que vous puissiez faire tout

Page 1076

  1   votre possible pour contenir l'interrogatoire principal de ces témoins,

  2   cela ne devrait pas durer plus d'une demi-heure.

  3   Et compte tenu des circonstances, je vais vous autoriser à dépasser la

  4   limite des 30 minutes, et peut-être que vous pouvez l'entendre jusqu'à la

  5   fin de la journée d'audience d'aujourd'hui.

  6   Je vais me renseigner auprès de la greffière d'audience, je vais voir si

  7   nous pouvons siéger sans pause. Nous avons maintenant une heure et demie.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il faudra faire une pause de 15 minutes

  9   pour des raisons techniques.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous faudra faire une pause de 15

 11   minutes pour permettre à la régie de mettre en place l'équipement

 12   nécessaire. Donc nous allons faire cette pause maintenant.

 13   --- L'audience est suspendue à 17 heures 25.

 14   --- L'audience est reprise à 17 heures 45.

 15    [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez demander au témoin de faire

 17   la déclaration.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 19   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 20   LE TÉMOIN: TÉMOIN B-299 [Assermenté]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Monsieur

 23   Docherty.

 24   Interrogatoire principal par M. Docherty :

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 26   R.  Bonjour.

 27   M. DOCHERTY : [interprétation] Puis-je demander à Mme l'Huissière de

 28   prendre cette feuille sur laquelle se trouve le pseudonyme du témoin, s'il

Page 1077

  1   vous plaît.

  2   Q.  Monsieur le Témoin, Mme l'Huissière vient de vous remettre ce qui est

  3   communément appelé une feuille sur laquelle se trouve votre pseudonyme.

  4   Est-ce que vos nom, prénom et date de naissance sont consignés de façon

  5   correcte sur cette feuille de papier ?

  6   R.  Oui.

  7   M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que Mme l'Huissière peut montrer

  8   cette feuille au conseil de la Défense ainsi qu'aux Juges de la Chambre,

  9   après quoi je demande le versement au dossier de cette feuille sur laquelle

 10   se trouve le pseudonyme, et ce, sous pli scellé.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document est admis.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce numéro P2, sous pli

 13   scellé.

 14   M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous demande de bien vouloir passer à

 15   huis clos partiel pendant quelques minutes, je souhaite en fait parler des

 16   éléments détaillés et personnels concernant le témoin.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 19   Messieurs les Juges.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 1078 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  8  (expurgé)

  9   [Audience publique]

 10   M. DOCHERTY : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur le Témoin, en avril de l'année 1991, avez-vous été envoyé en

 12   Krajina, est-ce que vos services vous ont envoyé là-bas ?

 13   R.  Cela s'est passé en mai 1991 et cela est vrai. Mais cela est arrivé au

 14   mois de mai 1991.

 15   M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander à Mme l'Huissière

 16   d'afficher à l'écran la carte numéro 10 qui se trouve dans le carnet de

 17   cartes. Ce sont des fichiers assez importants et il faut un certain temps

 18   pour les télécharger.

 19   Q.  En attendant, pourriez-vous nous expliquer quelle était votre mission

 20   en Krajina, que faisiez-vous à cet endroit-là ?

 21   R.  Puisqu'il y avait des troubles en Croatie entre les Serbes et les

 22   Croates qui habitaient dans cette région-là, le gouvernement de la RSFY et

 23   le gouvernement de Croatie ont signé une trêve pour que les conditions de

 24   vie normale reviennent. Donc il fallait nommer quelqu'un qui puisse

 25   s'assurer qu'on respecte la trêve, il fallait maintenir le cessez-le-feu

 26   sur le terrain. C'est la raison sans doute pour laquelle le gouvernement et

 27   la présidence de la RSFY ont décidé que le ministère de l'Intérieur, le

 28   ministère fédéral, nous étions les mieux placés pour faire respecter la

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  1   paix sur le terrain et pour surveiller et contrôler tout ceci.

  2   Q.  Vous aviez combien de personnes dans votre équipe ?

  3   R.  D'après la décision prise par le gouvernement, il y avait trois équipes

  4   qui ont été envoyées dans les zones de crise dans la République de Croatie.

  5   Le premier groupe a été envoyé à Sibenik, le second à Gospic et le

  6   troisième à Plitvice. On a jugé qu'il s'agissait de régions en crise et il

  7   y avait une forte concentration de personnes serbes. C'étaient des régions

  8   majoritairement serbes et de l'autre côté il y avait des Croates dont

  9   c'était l'Etat.

 10   Le premier groupe qui est parti à Sibenik était un groupe composé de sept à

 11   huit personnes, de membres auxiliaires et de spécialistes qui étaient à

 12   notre disposition pour assurer notre protection et notre sécurité.

 13   Est-ce que vous souhaitez que je nomme ces personnes ? Avec votre

 14   autorisation, je peux vous donner leurs noms ainsi que leurs fonctions

 15   respectives puisqu'ils avaient pour but de faire respecter le cessez-le-

 16   feu.

 17   Q.  Non, je n'ai pas besoin que vous me donnez leurs noms. Mais d'après

 18   votre réponse, je dois comprendre, n'est-ce pas, que vous faisiez partie de

 19   l'équipe qui s'est rendue à Sibenik, c'est cela ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  La carte se trouve maintenant affichée à l'écran que vous avez devant

 22   vous. Est-ce que vous voyez la carte ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Avec l'aide de quelqu'un dans le prétoire, je vais vous demander

 25   d'apporter certaines annotations sur cette carte. Je souhaite tout d'abord

 26   que vous inscriviez votre numéro en tant que témoin. Je souhaite que vous

 27   mettiez cela en bas à droite de la carte, B-299 et la date.

 28   R.  Ici, vous voulez dire ?

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  1   Q.  Ça, c'est parfait. Est-ce que vous pourriez dater la carte ?

  2   R.  Quelle est la date d'aujourd'hui ?

  3   Q.  Aujourd'hui nous sommes le 29 avril.

  4   Sur cette carte, voyez-vous l'endroit que vous avez appelé à Krajina, qui

  5   se trouve en Croatie ?

  6   R.  Oui, tout à fait.

  7   Q.  Pourriez-vous entourer la Krajina d'un cercle et y apposer la lettre K

  8   pour Krajina ?

  9   R.  Oui, tout à fait. C'est à peu près à cet endroit-là. Je ne peux pas

 10   vraiment dessiner une carte à proprement parler, mais ça couvrirait cette

 11   région.

 12   Q.  Pouvez-vous apposer la lettre K, s'il vous plaît, à côté, comme ça nous

 13   savons de quoi nous parlons.

 14   R.  Oui, bien sûr.

 15   M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, cette carte annotée

 16   peut-elle être versée au dossier, s'il vous plaît ?

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P3.

 19   M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander maintenant que l'on affiche

 20   la deuxième carte qui se trouve dans cet ensemble de cartes.

 21   Q.  En attendant le téléchargement de cette deuxième carte, je vais vous

 22   demander si vous vous êtes rendu de Sibenik à Knin, et si oui, comment vous

 23   êtes-vous rendu de Sibenik à Knin, par quel moyen ?

 24   R.  Je me suis rendu de Sibenik à Knin parce que nous logions à l'hôtel

 25   Solaris à Sibenik. De temps en temps, nous nous rendions à Knin, nous

 26   prenions la voiture qui était à notre disposition, et nous empruntions la

 27   route Sibenik-Drnis-Knin.

 28   Q.  Voyez-vous la carte maintenant devant vous ?

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  1   R.  Oui, tout à fait, mais j'ai du mal à distinguer ce qui est écrit ici.

  2   Les caractères sont assez petits.

  3   M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que l'on peut agrandir la côte

  4   adriatique de la Croatie sur cette carte, à l'ouest de la Bosnie-

  5   Herzégovine, s'il vous plaît ?

  6   Q.  Est-ce que vous voyez mieux maintenant, Monsieur le Témoin ?

  7   R.  Je dois me rapprocher. Maintenant, je le vois.

  8   Q.  Comme sur la carte précédente, pourriez-vous marquer votre numéro de

  9   témoin B-299, ainsi que la date d'aujourd'hui en bas à droite de cette

 10   carte ?

 11   R.  Est-ce que vous souhaitez avoir la date aussi ?

 12   Q.  Oui, s'il vous plaît.

 13   R.  Pardonnez-moi, ça devait être un 4 ici, 4-08.

 14   Q.  Vous avez cité deux villes, Sibenik et Knin. Est-ce que nous les voyons

 15   sur la carte ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez entourer Sibenik et Knin d'un cercle, s'il vous

 18   plaît ?

 19   R.  [Le témoin s'exécute]

 20   Q.  Est-ce que vous pouvez apposer la lettre S à côté de Sibenik, et un K à

 21   côté de Knin ?

 22   R.  [Le témoin s'exécute]

 23   M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que cette

 24   carte annotée peut être versée au dossier, s'il vous plaît ?

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P4, Messieurs les

 27   Juges.

 28   M. DOCHERTY : [interprétation] 

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  1   Q.  Avant que la carte ne soit affichée à l'écran, nous avons parlé d'un

  2   voyage que vous faisiez de Sibenik à Knin. Est-ce qu'à aucun moment lorsque

  3   vous avez fait ce trajet entre Sibenik et Knin, vous avez voyagé à bord

  4   d'un hélicoptère ? Je pense que vous savez à quel incident je fais

  5   référence ici.

  6   R.  Oui, je suis au courant de cet incident. C'était lors de ma première

  7   visite, la première fois que je me suis rendu de Sibenik à Knin.

  8   Q.  Y avait-il un officier de la navale avec vous à bord de l'hélicoptère ?

  9   M. KNOOPS : [interprétation] Je pense qu'il s'agit d'une question

 10   directrice.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait. Veuillez reformuler

 12   votre phrase, s'il vous plaît.

 13   M. DOCHERTY : [interprétation] 

 14   Q.  Qui était avec vous à bord de l'hélicoptère, pour autant qu'il y ait eu

 15   quelqu'un d'autre avec vous ?

 16   R.  En fait, c'était un hélicoptère militaire et sur l'insistance de

 17   l'amiral Zec, qui s'est présenté comme étant un officier chargé des

 18   questions de sécurité dans la marine, il a proposé que nous prenions cet

 19   hélicoptère pour des raisons de sécurité parce que prétendument sur le

 20   terrain il y avait beaucoup de tireurs embusqués, donc il a recommandé de

 21   prendre cet hélicoptère pour des raisons de sécurité, il a dit que nous

 22   devions nous rendre avec lui à bord de cet hélicoptère pour nous rendre à

 23   Knin.

 24   Q.  Lorsque vous êtes arrivés à Knin, est-ce qu'on vous a signalé quelque

 25   chose ?

 26   R.  Près de Knin même, et ça c'est quelque chose que j'ai vu plus tard, il

 27   y a une forteresse. Sans doute suite à un ordre donné par l'amiral,

 28   l'hélicoptère a survolé la forteresse à deux reprises, ensuite l'amiral a

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  1   tiré notre attention sur le fait qu'il y avait des unités à Knin qui

  2   s'appelaient les Knindzas, et ces unités étaient entraînées par le

  3   capitaine Dragan, c'est lui qui formait ces Knindzas.

  4   Nous n'avons pas pu poursuivre la conversation, nous souhaitions

  5   apprendre davantage sur la question. L'hélicoptère n'était pas tout jeune

  6   et on entendait du bruit dans le ciel. Il y avait beaucoup de bruit. Donc

  7   nous n'avons pas pu vraiment converser parce qu'on avait du mal à

  8   s'entendre.

  9   Q.  Savez-vous lorsque le terme de "capitaine Dragan" a été utilisé, savez-

 10   vous qui cela représentait ? On utilisait ce terme-là pour parler de qui ?

 11   Savez-vous de qu'il s'agissait ?

 12   R.  Non, pas à ce moment-là, mais plus tard nous avons appris davantage sur

 13   lui lorsque nous avons rencontré différentes personnes sur le terrain et

 14   également en privé plus tard, lorsque je suis rentré. Mais à l'époque, il a

 15   dit que c'était un expert en matière de combat, qu'il avait suivi des cours

 16   d'entraînement en occident, et qu'il était particulièrement spécialisé dans

 17   les actions terroristes, antiterroristes et qu'il s'occupait de la

 18   formation des Knindzas ou plutôt des forces serbes de la région.

 19   Q.  Comment avez-vous réagi lorsque vous avez entendu qu'il y avait des

 20   forces serbes dans la région étant donné qu'il s'agissait de la Croatie ?

 21   R.  Lorsque nous avons été envoyés depuis Belgrade, on nous avait expliqué

 22   que là-bas sur le terrain il y avait des unités paramilitaires ou quelque

 23   chose comme ça, et c'est ce qu'a dit le général Granicin -- et le ministre,

 24   c'est ce qu'il nous a dit. Il nous a dit qu'il y avait des problèmes avec

 25   la police de Martic et qu'ils n'étaient pas contrôlés par les forces armées

 26   croates et ne reconnaissaient pas le droit croate et qu'ils agissaient en

 27   dehors de la loi. Et c'est quelque chose qui, on peut dire, n'était pas

 28   convenable parce que ce n'était pas conforme à la législation de l'Etat

Page 1085

  1   croate alors que la législation par ailleurs était en vigueur.

  2   M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir maintenant le

  3   document 65 ter numéro 1269, s'il vous plaît ?

  4   Q.  Monsieur le Témoin, je vous demande de bien vouloir lire le titre de ce

  5   document, s'il vous plaît.

  6   M. KNOOPS : [interprétation] Je soulève une objection, Monsieur le

  7   Président, à ce stade parce qu'aucun fondement n'a été posé qui permettrait

  8   de présenter ce document et nous ne savons pas si le témoin est l'auteur de

  9   ce document. On ne sait pas si ceci fait partie des connaissances

 10   personnelles qu'il a et on ne sait pas si le document a une quelconque

 11   pertinence eu égard à cette affaire.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez nous dire quel est le

 13   fondement de tout ceci ?

 14   M. DOCHERTY : [interprétation] Ce document vient de s'afficher à l'écran et

 15   j'étais sur le point de poser la première question sur ce point.

 16   Q.  Monsieur le Témoin, de quel type de document s'agit-il ? D'après vous

 17   de quel type de document s'agit-il ?

 18   M. KNOOPS : [interprétation] Est-ce que cette question est une question qui

 19   inciterait le témoin à se livrer à des conjectures ?  Est-ce que

 20   l'Accusation --

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendons d'abord ce que le témoin a

 22   à dire, ensuite on va vous dire si c'est une question de conjecture.

 23   Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît, Témoin ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce document, nous constatons, comme

 25   nous le dit le titre, que c'est une proposition qui vise à mettre en place

 26   un centre de formation et d'entraînement et de transférer l'état-major de

 27   la Défense territoriale à la forteresse de Knin.

 28   M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, s'il vous plaît,

Page 1086

  1   faire descendre le texte.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je dois comparer avec ce que j'ai vu sur le

  3   terrain lorsque l'hélicoptère a survolé la forteresse et ce document, c'est

  4   vrai qu'il y a concordance. Il y avait effectivement des camps

  5   d'entraînement dans la forteresse de Knin.

  6   Un policier et des volontaires et ceux qui faisaient partie des forces de

  7   réserve de la police ont été emmenés là-bas pour être formés.

  8   M. DOCHERTY : [interprétation] Veuillez regarder, s'il vous plaît, le cadre

  9   réservé à la signature, je crois qu'il se trouve sur la deuxième page.

 10   Q.  Est-ce que vous voyez ce cadre réservé à la signature sur ce document ?

 11   R.  Je ne vois pas de signature ici. Je vois le nom et le prénom du

 12   capitaine Dragan.

 13   Q.  Non. Je ne vous demande pas la signature. Je vous demande de me dire

 14   quel est le nom qui se trouve dans le cadre réservé à la signature.

 15   R.  Oui, ça je le vois, on peut lire le capitaine Dragan Vasiljkovic.

 16   Maintenant nous revenons au moment où nous étions sur place, notre groupe

 17   cherchait à connaître le vrai nom de famille --

 18   Q.  Je crois que vous avez anticipé sur ma question suivante. Y a-t-il un

 19   quelconque lien entre ce capitaine Dragan et cet homme qui vous a été

 20   décrit lorsque vous étiez à bord de l'hélicoptère en train de surveiller la

 21   forteresse ce jour-là ?

 22   R.  C'est précisément ce sur quoi j'allais parler, ce lien. On nous a dit

 23   que c'était le capitaine Dragan, nous avons insisté pour en savoir plus et

 24   nous voulions en savoir plus sur la part de l'amiral Zec mais plus tard sur

 25   le terrain nous n'avons pas pu connaître son véritable nom de famille, et

 26   nous avons appris que personne ne pouvait connaître son véritable nom de

 27   famille. 

 28   A un moment donné, nous avons obtenu des éléments d'information et nous

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  1   avons appris que ce capitaine Dragan est en vérité un surnom et que son

  2   vrai nom était Vasiljkovic; mais lorsque nous étions à Knin, nous n'avons

  3   jamais pu connaître son véritable nom de famille.

  4   Q.  Maintenant vous savez que c'est Vasiljkovic, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui, tout à fait.

  6   M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, je demande, s'il vous

  7   plaît, le versement au dossier de cette pièce 65 ter numéro 1269, ensuite

  8   j'aurais des questions à poser sur la teneur de ce document, s'il vous

  9   plaît.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sera admis.

 11   M. KNOOPS : [interprétation] Nous nous opposons à cette admission, que ce

 12   document soit admis.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je l'ai déjà admis, mais je vais

 14   entendre votre objection.

 15   M. KNOOPS : [interprétation] Tout d'abord, nous n'avons pas

 16   d'authentification, nous ne savons pas si ce document émane véritablement

 17   de la personne qui répond au nom de capitaine Dragan. Deuxièmement, on ne

 18   peut pas au plan juridique admettre que ce document n'a pas d'auteur; on ne

 19   sait pas si c'est le témoin qui en est l'auteur et on le fait néanmoins, on

 20   présente ce document par le truchement de ce témoin.

 21   On fait référence à ce document, on constate qu'il l'a vu depuis

 22   l'hélicoptère et c'est ce qui est indiqué dans ce document. On ne sait pas

 23   si ça relève des connaissances personnelles qu'il avait.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Entendons, Maître Jovanovic.

 25   M. JOVANOVIC : [interprétation] Même objection. Le document n'est pas

 26   signé, premier point. Il n'a pas été signé de la main du capitaine Dragan

 27   et si on veut établir que c'est l'auteur de ce document.

 28   Et sur la partie gauche, on voit, on n'a pas besoin d'être un expert en

Page 1088

  1   matière graphologique pour comprendre que le nom de famille que l'on voie

  2   ici qui a été inscrit ici, eh bien, les lettres sont tout à fait

  3   différentes, ce qui nous porte à croire que le document n'est pas un

  4   document authentique. Le témoin fait référence au capitaine Dragan et à son

  5   nom de famille, et on voit ici que les lettres ont été taponnées à la

  6   machine Vasiljkovic, c'est très différent des lettres qui ont été tapées

  7   dans le document où on peut lire capitaine Dragan, ceci dans la version en

  8   B/C/S. Ceci se voit à l'œil nu.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez répéter ce dernier point,

 10   s'il vous plaît.

 11   M. JOVANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le témoin a dit

 12   que le document n'était pas signé et qu'au bas de la page, nous voyons le

 13   nom du capitaine Dragan Vasiljkovic. Alors ce témoin a fait référence au

 14   nom de famille du capitaine Vasiljkovic qu'il a appris par la suite. Mais

 15   si vous regardez la version B/C/S il est absolument évident que ce nom de

 16   famille "Vasiljkovic" a été écrit avec une machine à écrire différente,

 17   vous voyez que les lettres ne sont pas les mêmes, "capitaine Dragan" c'est

 18   en caractère gras alors que le nom de famille "Vasiljkovic" c'est écrit

 19   dans des lettres différentes. Ça a été tapé à la machine de façon

 20   différente. Et on a l'impression que le nom de famille Vasiljkovic a été

 21   ajouté en fait à la suite des deux mots, capitaine Dragan, parce que les

 22   lettres sont différentes. En plus, elles sont différentes des autres

 23   lettres du texte.

 24   Etant donné que nous n'avons pas de signature nous ne pouvons pas

 25   considérer que ce document est authentique parce qu'il est évident que le

 26   nom de famille a été ajouté après au document.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Docherty.

 28   M. DOCHERTY : [interprétation] L'objection qui a été avancée, à savoir le

Page 1089

  1   témoin n'a pas lui-même signé le document n'est pas très importante. Ce qui

  2   est important c'est que le témoin a été en mesure d'identifier le document,

  3   ce qui nous a permis de jeter le fondement pour ce document.

  4   Dans ce cas, le témoin, je dirais, a témoigné et a indiqué qu'il

  5   connaissait la personne dont le nom se trouve dans l'encadré correspondant

  6   à la signature et il a remarqué que le nom qui se trouve au bas du document

  7   est le même que le nom, dont il a appris par la suite qu'il était le nom de

  8   famille du capitaine Dragan.

  9   Qui plus est - et peut-être que nous pourrions le demander au

 10   Témoin - mais je pense qu'il est tout à fait usuel que les ordres

 11   militaires ne soient pas signés avec un stylo à encre. Il y a tout

 12   simplement le nom de la personne qui a donné l'ordre qui se trouve en bas

 13   du document.

 14   Je pense que toutes ces objections pourraient peut-être être prises

 15   en considération pour ce qui est du poids à accorder au document, ce ne

 16   sont pas des objections qui portent sur la recevabilité du document.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que vous nous dites, Monsieur

 18   Docherty, c'est que le nom que nous voyons ici, le nom de Vasiljkovic a été

 19   écrit avec une machine différente ou, en tout cas, est écrit avec des

 20   lettres qui sont différentes de celles utilisées pour écrire le capitaine

 21   Dragan, alors cela pose un problème d'authenticité ?

 22   M. DOCHERTY : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord. C'est un

 23   document qui semble avoir été tapé à la machine par opposition à une

 24   machine de traitement de texte à laquelle nous sommes tous habitués

 25   maintenant. Il faut savoir que très souvent, par exemple, il faut changer

 26   le ruban d'une machine à écrire.

 27   Moi, je dirais en fait que les caractères, la taille des caractères

 28   sont identiques, les caractères eux-mêmes sont identiques. Donc il n'y a

Page 1090

  1   pas de modification de taille de caractère et je dirais que c'est le genre

  2   de chose qui est très commun lorsqu'il s'agit d'un document tapé à la

  3   machine par opposition à un document préparé sur ordinateur et machine de

  4   traitement de texte.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si nous devions admettre et recevoir

  6   ce document, Monsieur Docherty, quel usage pourrait-on envisager pour ce

  7   document ?

  8   M. DOCHERTY : [interprétation] La pertinence de ce document est telle qu'il

  9   montre qu'il s'agit du capitaine Dragan Vasiljkovic, le témoin a indiqué

 10   qu'il était informé qu'il se trouvait dans la zone de la Krajina, et

 11   d'ailleurs dans la forteresse de Knin et, en fait, il a rédigé une

 12   proposition permettant de porter création d'un centre d'entraînement

 13   militaire dans la forteresse de Knin. Ce document est daté du 27 mai 1991.

 14   Donc cela corrobore ce que le témoin nous a dit, ce que le témoin a entendu

 15   de la part de l'amiral Zec, à savoir lorsqu'il survolait dans l'hélicoptère

 16   depuis Sibenik vers Knin la zone au début de sa mission de trêve en mai

 17   1991.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Knoops, qu'avez-vous à nous

 19   dire à ce sujet ?

 20   M. KNOOPS : [interprétation] Le fait est que lorsque l'on se penche sur la

 21   teneur générale du document, ce n'est pas quelque chose qui correspond à la

 22   connaissance personnelle du témoin. Certes, le témoin a dit qu'il avait

 23   observé quelque chose à bord d'un hélicoptère, mais il ne peut pas

 24   témoigner à propos de l'exactitude de la teneur du document parce qu'il n'a

 25   pas rédigé le document lui-même.

 26   Je pense qu'il s'agit d'élément de preuve présenté par le Procureur, c'est

 27   le Procureur qui nous dit que cela est courant dans un contexte militaire.

 28   Parce que de toute façon nous ne savons même pas s'il s'agit d'un document

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  1   militaire. Donc je pense que sur la base de ce qu'a dit le témoin, il n'y a

  2   absolument aucun fondement, ou très peu de fondement qui nous permettrait

  3   d'admettre et de recevoir le document parce qu'outre le problème

  4   d'authenticité, les renseignements transmis par le témoin à la Chambre de

  5   première instance sont si peu importants qu'ils ne nous permettent pas

  6   d'accepter ce document comme représentant ou comme étant le miroir de ce

  7   qu'il sait lui personnellement.

  8   Si l'Accusation souhaite déterminer que ce que le témoin dit, à savoir

  9   qu'il y avait des camps d'entraînement militaires à ce moment-là à Knin, on

 10   ne peut pas utiliser le document, car le document ne se fonde pas sur la

 11   connaissance personnelle du témoin, et le témoin a tout simplement indiqué

 12   qu'il avait vu un camp d'entraînement militaire ou des unités militaires

 13   qui subissaient ou suivaient un entraînement.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Au Tribunal, nous avons admis à

 15   moult reprises des documents par le truchement de témoins qui n'avaient pas

 16   été les signataires des documents en question, n'est-ce pas ?

 17   M. KNOOPS : [interprétation] Oui, c'est exact, mais le témoin n'est pas un

 18   témoin militaire et pourtant l'Accusation avance qu'il s'agit d'un document

 19   qui est rédigé par un militaire, à savoir la personne répondant au nom de

 20   capitaine Dragan. Ce qui déjà contredit le concept de recevabilité.

 21   Je serais d'accord avec vous s'il s'agissait certes d'un expert militaire

 22   ou de quelqu'un qui travaillait dans un contexte militaire.

 23   Mais là nous avons quelqu'un qui travaillait pour un service civil.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Jovanovic.

 26   M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Alors, une

 27   légère objection. Car le Procureur a dit à propos du document, que les

 28   documents où figurent un ordre militaire ne sont pas habituellement signés.

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  1   Alors que ce document ici est tout simplement une proposition. Donc il ne

  2   s'agit pas d'un document qui correspond à un ordre militaire.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas l'admettre et le

  4   recevoir. Nous allons l'enregistrer aux fins d'identification et si vous

  5   avez plus tard un autre témoin qui pourra parler plus directement de la

  6   teneur de cette page, nous envisagerons de recevoir le document et de

  7   l'admettre.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation]

  9   M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions repasser à huis

 10   clos partiel.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à nouveau à huis clos

 13   partiel.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 28  (expurgé)

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 13  Pages 1093-1100 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaiterais aborder quelques

 10   questions concernant l'accusé Stanisic. On nous a dit qu'il ne suit pas les

 11   procédures par vidéoconférence.

 12   J'aimerais demander à Madame la Greffière de nous confirmer cela.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons également reçu le

 15   formulaire intitulé "Absence du prétoire due à une maladie," c'est un

 16   formulaire pour aujourd'hui, il n'a pas encore été signé par l'accusé. A la

 17   page 2 sous l'intitulé "Services médicaux du quartier pénitentiaire des

 18   Nations Unies," l'officier adjoint médical a coché la case 2A, confirmant

 19   que l'accusé présente des symptômes que l'on peut observer, que l'on peut

 20   remarquer, ce sont des symptômes qui ne lui permettent pas de suivre la

 21   procédure.

 22   A la lumière de la décision rendue par la Chambre de première instance, il

 23   apparaît qu'on devrait revoir et modifier la partie de la déclaration de

 24   l'officier et maintenant la question qui se pose c'est de savoir s'il se

 25   sent trop malade pour suivre et pour prendre part aux procédures par

 26   vidéoconférence, nous avons déjà rendu une décision selon laquelle le

 27   procès se poursuivra par vidéoconférence.

 28   J'aimerais maintenant recueillir des commentaires des parties concernant

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  1   cette question.

  2   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord et je

  3   demanderais qu'une modification supplémentaire soit apportée au formulaire.

  4   Comme vous l'avez entendu hier au cours du témoignage du Dr Falke, nous

  5   avons également un formulaire semblable où on peut également cocher la case

  6   qui dit qu'il a des signes que l'on peut observer selon lesquels l'accusé

  7   ne peut pas venir dans la salle de vidéoconférence. Quand je lui ai demandé

  8   s'il avait vu des signes clairs d'un état de santé malade, il nous avait

  9   dit qu'en fait il n'en avait pas vu quand il l'avait examiné.

 10   Donc j'aimerais vous proposer qu'un nouveau formulaire soit fait selon

 11   lequel on dit qu'on ne peut pas vraiment voir de signes clairs --

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain

 13   que j'irais jusque-là car, après tout, ce sont peut-être des questions

 14   d'interprétation si un officier médical nous dit qu'il a vu des symptômes

 15   apparents et qu'un autre officier médical nous dit qu'il ne les a pas vus,

 16   ceci peut porter à confusion.

 17   Ce que je propose de faire c'est de demander à la Greffière d'audience

 18   d'attirer l'attention du Greffier qui à son tour attirera l'attention du

 19   quartier pénitentiaire des Nations Unies sur le fait que la question qui se

 20   pose maintenant est de savoir si l'accusé est suffisamment bien, se sent

 21   bien, ou est trop malade pour suivre et pour prendre part à la procédure le

 22   concernant par le truchement de lien par visioconférence.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaiterais maintenant entendre

 25   Me Knoops. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter ?

 26   M. KNOOPS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 27   n'ai pas de commentaires à faire.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci.

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  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre a examiné vos arguments,

  3   Monsieur Groome, et croit qu'il y a quelques mérites à apporter à votre

  4   proposition, je vais demander donc à Mme la Greffière d'informer le greffe

  5   qui à son tour informera le quartier pénitentiaire des Nations Unies que la

  6   Chambre souhaite obtenir la chose suivante : lorsqu'il y a une confirmation

  7   de symptômes clairs, à ce moment-là ces symptômes devraient être indiqués,

  8   les symptômes clairs que l'on peut observer, les symptômes visibles d'un

  9   malaise doivent être identifiés sur le formulaire.

 10   Dans la case 4A, on peut lire : "J'évalue que le patient a besoin …" Je ne

 11   sais pas si c'est un deux, ou un point d'interrogation. Est-ce que

 12   quelqu'un pourrait jeter quelque lumière sur la question ?

 13   M. GROOME : [interprétation] Lorsque j'ai consulté les formulaires que nous

 14   avait donnés le Dr Falke, je crois que c'est un formulaire que l'on utilise

 15   depuis la deuxième semaine du mois d'avril. Donc je crois que c'est un

 16   point d'interrogation.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, il semble qu'il

 18   s'agit d'un point d'interrogation. Oui, effectivement. Voilà. Tous les

 19   formulaires sont dotés de ce point d'interrogation.

 20   La Chambre de première instance donne l'ordonnance que l'accusé soit suivi

 21   pendant qu'il suit les procédures par vidéoconférence, et vous allez le

 22   recevoir si vous ne l'avez pas reçu encore, c'est-à-dire vous allez

 23   recevoir cette ordonnance si vous n'avez pas encore reçu sur un suivi à

 24   l'accusé pendant qu'il est en train de suivre les débats à la salle de

 25   vidéoconférence.

 26   Avant de lever la séance, je souhaiterais dire que mardi le 6 mai nous

 27   siégerons dans la matinée à 9 heures du matin, et également nous siégerons

 28   dans la matinée du 7 et du 8 mai.

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  1   La séance est donc levée, et nous reprendrons nos travaux mardi le 6 --

  2   excusez-moi, juste un instant.

  3   M. GROOME : [interprétation] Excusez-moi, une question très rapide. Les

  4   déclarations que vous nous avez demandé de vous fournir, aimeriez-vous les

  5   avoir en version électronique ou sur papier ? Les déclarations de témoins

  6   pour la semaine pour les déclarations préalables ?

  7   Nous pourrions vous les communiquer soit électroniquement ou sur papier.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Sur papier.

  9   Donc, la séance est levée et nous reprendrons nos travaux mardi le 6 mai, 9

 10   heures du matin.

 11   --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 6 mai

 12   2008, à 9 heures 00.

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