Page 996
1 Le mardi 29 avril 2008
2 [Audience publique]
3 [L'accusé Simatovic est introduit dans le prétoire]
4 [L'accusé Stanisic est absent]
5 --- L'audience est ouverte à 13 heures 16.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, vous allez
7 poursuivre vos déclarations liminaires.
8 M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Lorsque nous avons levé l'audience hier en fin de journée, j'avais
10 commencé à parler de l'entreprise criminelle commune. J'avais présenté un
11 diagramme, et sur ce diagramme, M. Stanisic était à la fois dans la case
12 représentant le MUP de Serbie, ainsi que la case représentant les hommes
13 politiques serbes. Pour comprendre comment il a participé à la réalisation
14 et la mise en œuvre de cette entreprise criminelle commune et son activité
15 politique, je vous montre ici une conversation où ils ont échangé leurs
16 points de vue, à savoir que M. Babic n'a pas grande connaissance des
17 affaires politiques.
18 Stanisic informe Karadzic dans une conversation sérieuse avec Babic
19 comment ils doivent agir au plan politique.
20 Ici, du côté gauche sur le diagramme, on voit Marijan [comme
21 interprété] Martic, non seulement au sein du ministère des Affaires
22 intérieures dans la RSK, la Republika Srpska, mais également dans la case
23 représentant les hommes politiques. Ceci représente le rôle double qu'il a
24 joué.
25 Mes collègues et moi-même, nous allons revenir sur ce diagramme à plusieurs
26 reprises pendant la présentation de notre déclaration liminaire.
27 L'Accusation, pendant ce procès, va parler d'établir l'intention partagée
28 de ces membres essentiels, et ce qui était l'élément sur lequel se
Page 997
1 concentraient ces accusés; leurs intentions d'agir et leurs contributions à
2 ce plan criminel.
3 Il est difficile en fait de retracer les origines de ce plan criminel
4 occulte, en particulier comme la surprise et l'élément secret était
5 considéré comme un élément essentiel à sa réussite. Nous voyons comment ce
6 plan criminel a vu le jour dans la bouche de son principal architecte,
7 Slobodan Milosevic.
8 La diapositive numéro 18 montre les propos tenus par Milosevic le 16 mars
9 1991. Il s'adressait à un groupe restreint de parlementaires après des
10 tensions croissantes récentes.
11 Dans ce contexte, il rencontre les présidents des municipalités serbes, et
12 Milosevic a dit, je cite : "Le gouvernement a eu pour tâche de mettre en
13 place des unités adaptées qui devront nous placer en sûreté à tout moment,
14 à savoir capables de défendre les intérêts de notre république, mais
15 également à même de défendre les intérêts des Serbes à l'extérieur de la
16 Serbie."
17 C'est la thèse de l'Accusation de dire qu'environ six semaines après que
18 Milosevic ait donné cet ordre pour la mise en place d'unités spéciales qui
19 avaient pour tâche de protéger les intérêts serbes à l'extérieur de la
20 Serbie, Jovica Stanisic a établi ces unités au sein des Services de la
21 Sûreté d'Etat du ministère serbe des Affaires intérieures.
22 Je vais maintenant encore une fois vous demander de vous reporter à la
23 cérémonie de remise de distinctions à Kula en mai 1997, au cours de
24 laquelle Franko Simatovic a donné une rétrospective de l'histoire des
25 unités spéciales, une histoire assez objective dans un cadre privé, et un
26 groupe restreint de personnes qui soutenaient ses objectifs, les objectifs
27 de cette unité.
28 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que n'ayant pas le texte en anglais,
Page 998
1 elle ne peut pas traduire ces commentaires.
2 [Diffusion de la cassette vidéo]
3 M. GROOME : [interprétation] Ici sur la diapositive numéro 20, on voit les
4 deux déclarations côte à côte, et compte tenu du fait qu'il n'y a pas
5 d'autre unité à notre connaissance, que Milosevic ait créé, il est clair
6 que nous parlons d'une seule et même unité.
7 M. Simatovic poursuit dans son allocution. Je cite : "La contribution de
8 l'Unité des opérations spéciales est énorme. Quarante sept soldats ont été
9 tués et 250 blessés au cours d'opérations de combat dans 50 endroits
10 différents."
11 Dans ses propres termes, Simatovic nous dit que les unités spéciales de la
12 DB serbe ont opéré dans 50 endroits différents en Croatie et en Bosnie-
13 Herzégovine. Il dit également, je cite : "26 camps d'entraînement pour les
14 unités de la police spéciale de la Republika Srpska et la République de la
15 Krajina serbe ont également été créés à ce moment-là."
16 Vingt six camps d'entraînement, la plupart en Bosnie et en Croatie.
17 La genèse de ces unités spéciales correspond au jour où Milosevic a demandé
18 à Stanisic de mettre en place une force de combat occulte qui ne serait pas
19 contrainte par une quelconque loi, mais répondrait aux dictats de
20 Milosevic.
21 A ce jour, nous pouvons simplement dire avec le plus de précision possible
22 que ceci a été créé au printemps de l'année 1991. Stanisic devait rejoindre
23 Milosevic dans son plan pour s'assurer que lors du démantèlement de la
24 Yougoslavie, démantèlement devenu semble-t-il inévitable, que dans ce
25 démantèlement, on s'assurait que les Serbes arriveraient en haut, et que la
26 république s'en sortirait, quel que soit le coût ou le mal que l'on
27 pourrait infliger à d'autres populations ethniques en Yougoslavie.
28 Stanisic, à son tour, devait s'occuper de l'administration quotidienne de
Page 999
1 l'unité spéciale qu'on lui avait confiée, Franko Simatovic.
2 Dès le départ, l'élément secret était le principe prépondérant de cette
3 unité.
4 D'anciens membres de l'unité spéciale ont décrit comment ils ont appris
5 comment ceci fonctionnait, comment la DB serbe fonctionnait, longtemps
6 après avoir rejoint les unités spéciales en question. Très souvent, les
7 hommes connaissaient leurs camarades simplement sous le nom d'alias ou de
8 prénoms, ils n'avaient pas le droit de révéler les noms des uns et des
9 autres. Et comme tout ceci était secret, ceci semait la confusion, et on ne
10 savait pas qui étaient les hommes qui faisaient partie de cette unité.
11 L'opinion publique serbe savait que la DB serbe avait été créée pour mettre
12 en place une unité supra juridique et que ceci aurait eu des conséquences
13 négatives pour Milosevic.
14 Ceci était important, ce caractère inculte, pour Milosevic, Stanisic,
15 Simatovic, et d'autres membres de l'élément du groupe principal savaient
16 que le travail en Croatie et en Bosnie serait un travail criminel, car ceci
17 nécessiterait la perpétration de commission de crimes graves contre les
18 populations non-serbes qui s'y trouvaient. Ils se sont rendu compte dès le
19 départ que le monde entier comprendrait qu'il s'agirait qu'une tragédie
20 était en train de se dérouler. On ne peut pas déplacer par la force des
21 populations importantes et les faire sortir de leurs maisons sans commettre
22 de graves crimes contre eux.
23 Je souhaite maintenant vous faire entendre une conversation
24 téléphonique interceptée au cours de laquelle M. Stanisic parle justement
25 de sa préoccupation eu égard au caractère secret de tout ceci.
26 [Diffusion de la cassette audio]
27 M. GROOME : [interprétation] La diapositive numéro 21, Stanisic rappelle à
28 Karadzic qu'ils doivent faire particulièrement attention à ce qu'ils disent
Page 1000
1 au téléphone.
2 Dans une autre conversation interceptée, Stanisic dit à Karadzic : "Peux-tu
3 peut-être le faire de façon à ce que moi on ne voit pas que je fais partie
4 de cette initiative ?"
5 Dans d'autres conversations téléphoniques interceptées que va présenter
6 l'Accusation, vous entendrez Franko Simatovic parler de façon -- faisant
7 particulièrement attention aux phrases qu'il utilise et c'est difficile à
8 déchiffrer lorsqu'il s'adresse à d'autres membres-clés de l'entreprise
9 criminelle commune.
10 La carte que Stanisic montre à Milosevic figure dans une séquence vidéo qui
11 est sur le mur que nous avons vu au centre d'entraînement de Kostic à Kula.
12 C'est une carte de la Yougoslavie qui comporte certains marqueurs qui
13 identifient les endroits en Croatie et en Bosnie où ont été établis les
14 corps d'entraînement des unités spéciales. M. Simatovic énumère ces
15 endroits dans son allocution.
16 Ici en bas à gauche sur la diapositive numéro 22, il y a un arrêt sur image
17 de cette carte. A droite se trouvent les endroits qui figuraient sur la
18 carte de la Yougoslavie. Ces endroits sont indiqués par des cases en vert
19 en Croatie. Ceux qui sont en jaune représentent la Bosnie-Herzégovine. Ceux
20 qui sont en rose représentent la Serbie.
21 Lorsqu'ils ont mis ceci en place et lorsque ceci s'est développé, les
22 unités de la DB avaient différentes appellations.
23 La diapositive numéro 23 comprend une liste de ces noms ainsi que les
24 écussons que les membres des unités spéciales arboraient sur leurs
25 uniformes.
26 Certains de ces noms comme JATD et JSO sont des noms officiels qui étaient
27 utilisés par les services de Sûreté de l'Etat. Certaines de ces unités
28 avaient été nommées d'après le nom des personnes qui dirigeaient l'unité,
Page 1001
1 par exemple, les hommes d'Arkan, les Tigres d'Arkan, les hommes de Martic,
2 les hommes du capitaine Dragan.
3 Et un terme qu'ils utilisaient souvent était le terme du couvre-chef qu'ils
4 portaient souvent, à savoir les Bérets rouges.
5 Les unités spéciales étaient une organisation importante. Et pendant ces
6 déclarations liminaires, nous allons vous présenter les membres les plus
7 importants, ceux que nous allons citer souvent au cours de ce procès.
8 La diapositive numéro 24 montre Milorad Ulemek, plus connu sous le nom de
9 Legija à cause du temps passé dans la légion étrangère française. Son
10 oncle, Mihajlo Ulemek, était un membre de la Garde volontaire serbe
11 d'Arkan, et Legija, après avoir rejoint son oncle, est devenu un de ses
12 membres les plus respectés et les plus craints.Parce que Legija avait les
13 qualités de chef, il est rapidement devenu un des instructeurs les plus
14 importants et un des commandants les plus importants de la Garde de
15 volontaires serbes d'Arkan. C'est un membre de l'unité spéciale que l'on
16 voit le plus souvent sur la vidéo de Kula parce qu'il est toujours au côté
17 de Stanisic et ils montrent également Milosevic.
18 La diapositive numéro 25 montre Zika Crnogorac, ou Zika le Monténégrin.
19 C'est un autre membre important des Bérets.
20 Et je vais vous montrer quelle était sa participation lorsque
21 Milosevic le présente aux unités spéciales de la DB.
22 A la lumière du temps qui a été un petit peu diminué pour
23 l'Accusation, je vais omettre la diapositive numéro 26 et passer
24 directement à la diapositive numéro 27.
25 Pendant la cérémonie de remise des distinctions à Kula au mois de mai
26 1997, M. Stanisic a montré à M. Milosevic quel était l'équipement dont
27 disposait l'unité spéciale de la DB serbe. Sur cette séquence vidéo dans la
28 diapositive numéro 27, Milosevic montre sa salle d'opération mobile, des
Page 1002
1 véhicules blindés des transports de troupes, des camions avec des lance-
2 roquettes et des fusils anti-défenses équipés à l'arrière.
3 Compte tenu du mandat légal qui avait été confié à M. Stanisic et M.
4 Simatovic, il s'agissait pour eux de s'occuper de la collecte de données et
5 d'information, et ces images sont très claires car on voit cette unité qui
6 s'est équipée pour une tâche bien différente.
7 L'idée de l'unité spéciale est née à Belgrade, cette unité devait
8 voir le jour à Krajina pendant le printemps 1991. L'idée de la création de
9 cette unité spéciale est née à Belgrade, mais cette unité a vu le jour en
10 Krajina pendant le printemps de l'année 1991. La Krajina fait partie de la
11 Croatie et va jusqu'à la côte dalmate. La Krajina était composée d'une
12 majorité de Serbes qui s'y sentaient de plus en plus vulnérables et qui
13 écoutaient la rhétorique nationaliste croate diffusée à Zagreb. Dans ce
14 contexte de peur et de méfiance, plusieurs Serbes ou l'homme de la rue, le
15 Serbe croate devenait de plus en plus important et devenait un acteur
16 majeur dans les événements qui s'y déroulaient. Je souhaite maintenant vous
17 en présenter quelques-uns.
18 Milan Babic était le premier ministre président du gouvernement de la
19 Serbie autonome de la Krajina, la région auto-déclarée plus communément
20 appelée la SAO de Krajina.
21 Il a témoigné dans plusieurs procès devant ce Tribunal et il a plaidé
22 coupable au crime de persécution. Il a été condamné à un terme
23 d'emprisonnement de 13 ans. Il y a un peu plus de deux ans, il s'est
24 suicidé au quartier pénitentiaire des Nations Unies. Sa déposition devant
25 un Tribunal explique les événements de la Krajina du point de vue de
26 quelqu'un qui était à l'intérieur. Sa déposition a été admise et c'est
27 maintenant une question en souffrance devant la Chambre et je ne vais pas
28 maintenant pendant les déclarations liminaires évoquer sa déposition.
Page 1003
1 Un autre Serbe de Croatie, qui est devenu un membre important faisait
2 partie de la police locale, répondait au nom de Milan Martic. Petit à
3 petit, il devait occuper des postes de dirigeants de plus en plus
4 importants au sein de la SAO de Krajina et plus tard ce qui a été appelé la
5 République serbe de Krajina.
6 Le 12 juin de l'année dernière, la Chambre de première instance l'a
7 condamné pour meurtre, persécutions, expulsions, et autres crimes et l'a
8 condamné à 35 ans d'emprisonnement. Il a fait appel de ce jugement et ceci
9 est pour l'instant en souffrance.
10 Dans la diapositive numéro 29, on peut considérer qu'il s'agit de
11 chauffeur qui décrit comment Milan Martic et lui se retrouvaient
12 régulièrement.
13 Les liens étroits qui les unissaient deviennent apparents en
14 septembre 1991 après que Milan Martic a été arrêté dans la ville bosniaque
15 de Bosanska Krupa. Sa remise en liberté a été organisée après une série de
16 coups de téléphone, l'un d'entre eux va être diffusé maintenant,
17 diapositive numéro 30. Il s'agit d'un appel qui date du 9 septembre 1991.
18 [Diffusion de la cassette audio]
19 M. GROOME : [interprétation] Dans cette conversation interceptée, on voit
20 Milosevic et Karadzic qui évoquent la manière dont Martic peut être libéré
21 après qu'il a été arrêté, mais également comment Jovica Stanisic est la
22 personne qui va exécuter les directives de Milosevic et qui va les
23 communiquer à un autre membre essentiel de l'entreprise criminelle commune.
24 Les unités spéciales serbes de la DB ont commencé par soutenir, entraîner,
25 faciliter les crimes commis contre la population non-serbe de Krajina.
26 Franko Simatovic a personnellement surveillé tout ceci.
27 Il s'est d'abord rendu en Krajina à ce moment-là, il emmenait avec
28 lui un homme répondant au nom de Dragan Vasiljkovic, qui mettait en place
Page 1004
1 ce programme d'entraînement.
2 Dragan Vasiljkovic, également connu sous le nom de capitaine Dragan,
3 est né en Serbie. Dragan Vasiljkovic est ensuite allé vivre en Australie
4 avec un membre de sa famille et est revenu en Yougoslavie au début des
5 années 1990. C'était un vétéran, un soldat de la DB, qui a utilisé son
6 expérience. On l'a envoyé en Krajina afin d'agir ou de servir d'instructeur
7 pour les nouvelles forces de la police établies en Krajina.
8 A la diapositive numéro 31, comme l'indique le rapport de l'armée
9 yougoslave, il est clair que le capitaine Dragan travaillait avec et pour
10 les Serbes, et il était placé sous le contrôle de Jovica Stanisic.
11 Je souhaite vous montrer les diapositives 32 et 33, une lettre rédigée par
12 le capitaine Dragan le 8 novembre 1991. Vous verrez que sa signature se
13 trouve en bas de la diapositive numéro 32.
14 A ce moment-là, Vasiljkovic ne comprenait pas vraiment les exigences de
15 Stanisic en matière de caractère secret de tout ceci, et a révélé tout à
16 fait objectivement qu'il avait des liens avec la DB, et on voit ici à la
17 diapositive numéro 33 qu'il a déclaré : "Il y a une obligation envers les
18 services de Sûreté de la République de Serbie." Il parle des activités, et
19 "ceux-ci doivent être conformes aux services susmentionnés."
20 Dans cet extrait de la remise des distinctions à la diapositive numéro 34,
21 on voit Jovica Stanisic embrasser le capitaine Dragan lorsqu'il lui remet
22 son prix.
23 [Diffusion de la cassette vidéo]
24 M. GROOME : [interprétation] Au début du mois d'avril, quand Milan Martic a
25 commencé à mettre en place une force de police composée principalement
26 d'hommes qui n'étaient pas armés et qui n'étaient pas entraînés, Simatovic
27 et le capitaine Dragan sont arrivés avec l'appui de Jovica Stanisic et de
28 Slobodan Milosevic.
Page 1005
1 Martic a emmené cette délégation de la Sûreté de l'Etat, Simatovic et le
2 capitaine Dragan, à Golubic, à 9 kilomètres au nord de Knin, et là ils ont
3 mis en place un centre d'entraînement de la DB serbe afin de reprendre les
4 territoires serbes en Croatie.
5 Cet entraînement qui allait se dérouler a créé une force de combat ou de
6 frappe formidable et bien équipée qui empêchait non seulement le
7 gouvernement croate d'imposer sa volonté en Krajina, mais qui serait
8 utilisée par la suite pour nettoyer ethniquement la Krajina de non-Serbes.
9 Six ans plus tard à Kula, M. Simatovic parlait de Gobulic comme étant une
10 des réalisations de son unité.
11 Plus de 3 000 hommes ont été entraînés à Golubic en tout. Certains ont reçu
12 cet entraînement et mettaient en place ensuite 25 autres camps
13 d'entraînement et se rendaient dans ces 25 autres camps d'entraînement mis
14 en place par Stanisic et Simatovic. Les premiers membres des unités
15 spéciales étaient surnommés Knindzas, à cause de la proximité du camp de
16 Golubic à Knin.
17 Une des premières batailles dans lesquelles ont combattu les Knindzas était
18 à Glina. Après le combat, le capitaine Dragan distribuait des bérets
19 rouges; et ceci était devenu un des emblèmes de l'unité, et c'est la raison
20 pour laquelle ce terme était communément utilisé, les Bérets rouges. Ici
21 sur la diapositive numéro 35, on voit quelques images de membres
22 importants. Ceci était la vitrine en quelque sorte du centre d'entraînement
23 de Kostic à Kula, et on voit les bérets ici représentés et entourés
24 d'armes.
25 Cette unité a été appelée de différentes façons au cours de son histoire,
26 mais le terme de "Bérets rouges" est resté un terme utilisé de façon
27 constante. Les unités militaires qui n'étaient pas directement affiliées à
28 la DB mettaient quand même ces bérets et cette couleur. Le béret rouge est
Page 1006
1 devenu l'emblème des unités de la DB.
2 Ce que nous savons sur la naissance des unités spéciales est corroboré par
3 le document du bureau du Procureur que nous avons pu obtenir. Je vais
4 saisir cette occasion pour montrer aux Juges de la Chambre quelle est
5 l'importance et la signification de ces documents.
6 Je ne vais pas vous parler de la diapositive numéro 36, mais essayer de
7 réduire nos déclarations liminaires, et passer directement à la diapositive
8 numéro 37.
9 Comme nous le voyons d'après ce document numéro 37, le 14 juin, quelques
10 semaines après que le capitaine Dragan ait fait sa proposition, le
11 capitaine Dragan et Frenki avaient prévu une réunion à laquelle auraient
12 assisté plusieurs officiers de l'armée yougoslave. Ce document confirme que
13 l'armée yougoslave, elle n'était pas une présence neutre en Krajina.
14 Deux jours plus tard, M. Simatovic lui-même a donné un ordre. La
15 diapositive numéro 33 [comme interprété] est une photo du document
16 original. C'est un ordre signé par Franko Simatovic, donnant l'ordre de
17 retirer toutes les armes et armements de la forteresse de Knin et de les
18 transporter dans le camp de Golubic.
19 Cet ordre nous permet de comprendre comment Simatovic voyait l'autorité en
20 Krajina. C'est lui, et ce n'est pas l'armée yougoslave, ce n'est pas Milan
21 Babic, ce n'est pas Milan Babic qui donne l'ordre de retirer et de faire
22 retirer les armes sur une question aussi importante. Vous aurez constaté
23 quel est l'en-tête de cette lettre : "République de Serbie, centre de
24 Krajina, SAO Golubic."
25 Il signait cet ordre non pas avec son nom complet, mais il le signait avec
26 son surnom, Frenki, et on le connaissait par la suite beaucoup sous ce nom-
27 là, surtout sous ce nom-là.
28 L'Accusation va également présenter des documents tels que celui que vous
Page 1007
1 avez sur vos écrans maintenant qui fait référence à des ordres donnés par
2 Frenki. D'après l'auteur de ce rapport que l'on peut voir à la diapositive
3 numéro 40, le ministère serbe des Affaires intérieures avait précédemment
4 fourni quatre véhicules. Deux mois après avoir reçu ce matériel, l'auteur
5 de ce document fait rapport et dit qu'il a reçu un ordre "Frenk" qui est le
6 principal représentant du MUP de Serbie, afin d'enlever des équipements
7 radio de deux de ces véhicules.
8 A ce moment environ, le capitaine Dragan a préparé un rapport, et ceci se
9 fonde à la lumière des succès du capitaine Dragan. Il propos maintenant
10 comment faire grandir ces unités spéciales de la DB serbe. Il pense que
11 leurs objectifs peuvent aller au-delà du simple entraînement de quelques
12 individus. Il a une vision plus grande, il souhaite entraîner ces hommes
13 pour qu'ils puissent se rendre dans d'autres régions de la Croatie et de la
14 Bosnie-Herzégovine et met en place de nouveaux centres de formation ainsi
15 que de nouvelles antennes des unités spéciales.
16 A la diapositive numéro 41, on voit ici trois hommes qui sont directement
17 responsables de ce succès initial sur le terrain. Il fait ceci pour
18 augmenter le moral de ces hommes. Parmi ces hommes il y a Milan Martic,
19 Frenki, et le capitaine Dragan lui-même.
20 Il suggère à ces trois hommes qui sont des hommes importants à ces unités
21 spéciales, il fait ici allusion aux membres de ces unités spéciales et il
22 propose de leur rendre visite dans ces endroits où ces nouvelles formations
23 ont été mises en place afin d'accroître leur moral et "pour leur donner des
24 conseils et d'autres informations sur ces unités sur le terrain."
25 L'Accusation va vous présenter d'autres rapports qui montrent que Frenki ou
26 M. Simatovic, ainsi que d'autres dirigeants locaux serbes ont fourni des
27 informations très détaillées sur ce qui se passait à Krajina.
28 A la diapositive numéro 42, on voit le rapport du 19 juillet. Ce document
Page 1008
1 est intitulé "unités spéciales," peut-être que c'est la première fois que
2 ce terme est utilisé pour décrire ces unités de la DB serbe.
3 L'importance de l'entraînement qu'ils ont reçu est très important, ceci
4 peut se voir au niveau de la dernière phrase : "Nos forces sont déployées
5 d'après le plan d'entraînement."
6 La diapositive 43 vous présente un rapport du 6 août 1991, qui annonce un
7 cessez-le-feu, une fois de plus nous y voyons le surnom de M. Simatovic, à
8 savoir Frenki.
9 Et sur votre écran, vous verrez deux extraits de rapports datant du mois de
10 juillet 1991. Un peu plus tard toujours ce même été, le 19 juillet, le
11 capitaine Dragan a établi et présenté un rapport détaillé destiné à ses
12 supérieurs, Frenki, Milan Martic et le commandant Fica qui, d'après le
13 service du renseignement de la JNA était un inspecteur du MUP de la Serbie.
14 Depuis le début, il est évident que les personnes qu'ils ont formées et
15 équipées étaient auteurs de crimes de guerre. Il faut dire à la faveur du
16 capitaine Dragan que la façon dont il voyait son comportement était que
17 c'était quelque chose qu'il fallait corriger. Et la Chambre verra au cours
18 de ce procès que les trois crimes ne sont pas arrivés de façon fortuite
19 dans ce plan mais en font partie intégrante.
20 Dans le deuxième rapport de la diapositive 44, un extrait du rapport du 23
21 juillet, nous pouvons voir que dès le début, dès les premiers jours des
22 activités de cette unité, à savoir moins de trois mois après sa création il
23 avait été établi un système très organisé permettant de présenter des
24 rapports.
25 Et nous pouvons voir dans ce document que l'une des tâches essentielles du
26 capitaine Dragan en Krajina consistait à organiser un système de
27 commandement et à présenter des rapports qui incluent la République de la
28 Serbie.
Page 1009
1 Est-ce que Stanisic et Simatovic recevaient ces rapports relatifs aux
2 activités des unités qu'ils avaient créées ? Est-ce que Milosevic savait ce
3 que faisait cette unité ?
4 J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 45, et une fois de
5 plus sur la vidéo de Kula. Dans cette partie, Stanisic amène Milosevic
6 auprès des commandants supérieurs de l'unité, il les lui présente. Après
7 avoir été salué par Crnogorac, Milosevic lui serre la main puis ensuite se
8 dirige vers le colonel Rajo Bozovic. Et je présenterai une observation à
9 propos de cet échange lorsque vous aurez terminé de visionner cet extrait
10 vidéo.
11 [Diffusion de la cassette vidéo]
12 M. GROOME : [interprétation] Les commandements supérieurs étaient habillés
13 en tenue officielle lors de cet événement.
14 Le Procureur avance que par le truchement de Simatovic et Stanisic,
15 Milosevic était régulièrement informé du lieu où se trouvait leur unité et
16 de ce quelle faisait. Lors de cet échange, Milosevic semble rencontrer
17 Bozovic en personne apparemment pour la première fois. Mais en entendant ce
18 nom, Milosevic le reconnaît immédiatement car il l'a lu dans ses rapports,
19 et ce sont des rapports, avance l'Accusation, qui avaient dû passer entre
20 les mains de Simatovic et Stanisic. Ce sont des rapports qui étaient
21 présentés avec suffisamment de fréquence pour que Milosevic puisse
22 reconnaître le nom en question rapidement.
23 J'aimerais maintenant donner la parole à Mme Brehmeier-Metz afin quelle
24 nous parle du rôle joué par MM. Stanisic et Simatovic pour ce qui est des
25 crimes commis en Croatie.
26 Mme BREHMEIER-METZ : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le
27 Juge.
28 Alors que les frontières de la Yougoslavie semblaient se fragmenter, de
Page 1010
1 fortes concentrations de minorités serbes résidant et vivant en Croatie ont
2 commencé à se déclarer région autonome, une région en fait qui se trouvait
3 à l'intérieur des frontières géographiques de la Croatie, mais qui n'était
4 pas régie par le droit croate ou l'administration gouvernementale.
5 Ces régions qui se sont autoproclamées étaient appelées les Régions
6 autonomes serbes ou encore SAO, qui correspond au cigle en langue B/C/S.
7 En août 1991, Milan Martic a décidé d'assumer le contrôle du village croate
8 de Kijevo qui se trouve au sud-est de Knin. Martic a émis un ultimatum à
9 l'intention de la police de Kijevo dans lequel il menaçait d'attaquer la
10 population civile du village. A ce moment précis, l'armée yougoslave est
11 officiellement entrée dans le conflit du côté serbe. Avec l'expiration de
12 l'ultimatum, une force combinée des hommes de Martic de l'armée yougoslave
13 et des réservistes serbes locaux ou des membres de la Défense territoriale
14 ont attaqué Kijevo, en ont pris le contrôle et en ont chassé toute la
15 population croate.
16 A partir de ce moment précis, l'armée yougoslave et les forces armées de la
17 Krajina serbe locale, à savoir les forces de police, les unités de la
18 Défense territoriale ainsi que les unités volontaires serbes dont
19 nombreuses étaient formées, équipées, financées et soutenues par la DB
20 serbe sous le contrôle de Jovica Stanisic et Franko Simatovic, ont commencé
21 à attaquer les villages croates qui se trouvaient dans la SAO Krajina.
22 La Défense territoriale, à savoir la TO de l'ancienne Yougoslavie était
23 composée d'anciens membres de l'armée populaire yougoslave qui avaient
24 conservé leurs uniformes ainsi qu'une arme et qui étaient restés en tant
25 que réservistes sous le commandement de la république en temps de paix et
26 était intégrés à l'armée yougoslave en temps de guerre.
27 En août 1991, Slobodan Milosevic allait régler une dispute ou un litige
28 entre Babic et Martic à propos du contrôle des forces de la Défense
Page 1011
1 territoriale en forçant Babic à nommer Milan Martic commandant adjoint des
2 Défenses territoriales.
3 Cette nomination conjuguait au fait que nombreux parmi les membres des
4 Défense territoriales en SAO Krajina n'étaient loyaux qu'à Martic ont
5 finalement abouti au contrôle de Martic sur ces Défenses territoriales. Le
6 1er août 1991, le gouvernement de la SAO de Krajina a décidé que les unités
7 des objectifs spéciaux de la police ainsi que les Défense territoriales se
8 rallieraient conjointement aux forces armées de la SAO de la Krajina.
9 La diapositive numéro 46 qui est maintenant à l'écran nous donne une idée
10 des lieux en Croatie ainsi qu'en Bosnie-Herzégovine et notamment des
11 municipalités et villages qui sont pertinents pour l'acte d'accusation
12 dressé à l'encontre de Jovica Stanisic et Franko Simatovic. Les villages de
13 la SAO de la Krajina dont je vais parler se trouvent entourer de cercles
14 rouges. Dans le cercle qui se trouve en bas de la carte, vous pouvez
15 également voir la ville de Knin et de Golubic.
16 Dubica, Bacin et Cerovljani sont des villages qui se trouvent à la
17 frontière entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. En 1991, environ la
18 moitié des habitants vivant à Dubica étaient d'appartenance ethnique
19 croate, avec une petite minorité musulmane, alors que dans les villages de
20 Bacin et Cerovljani la population était essentiellement croate.
21 Jusqu'à l'année 1991, les relations entre les groupes ethniques avaient été
22 cordiales et harmonieuses. Pendant l'été de 1991 toutefois, ces relations
23 ont commencé à se détériorer.
24 Des affrontements armés se sont produits entre les forces armées serbes et
25 croates, et en septembre 1991, l'armée croate s'est retirée, les forces
26 serbes, et notamment la police de Martic et sa Défense territoriale, se
27 sont emparées des villages dont ils ont pris le contrôle. Les forces serbes
28 ont à plusieurs reprises incendié les maisons des habitants croates, et les
Page 1012
1 ont utilisées comme autant de boucliers humains, et ont tué des personnes.
2 Par exemple, ils ne se sont pas gênés pour lancer un lance-roquettes à
3 partir du beffroi de l'église catholique de Dubica, à la suite de quoi les
4 Croates ont décidé de quitter leur village. Seul y sont restées quelques
5 personnes malades, ainsi que des vieillards.
6 Le 20 octobre 1991, les membres de la police de Martic et de la Milicija de
7 Krajina sont passés dans Dubica avec un camion, y ont récupéré un nombre de
8 53 personnes, il s'agissait des civils qui étaient restés et les ont
9 conduits au poste de pompiers à Bacin. Ils ont avancé qu'une réunion devait
10 être convoquée à cet endroit. En fait, c'est à la caserne des pompiers que
11 ces personnes ont été détenues. L'une de ces personnes détenues à la
12 caserne des pompiers était Slavko Kocuc [phon], il a vu comment dix civils
13 ont par la suite été libérés apparemment du fait de liens qu'ils avaient
14 avec des Serbes. Lui-même a pu partir grâce à un des gardiens qui se
15 trouvait être un de ses anciens étudiants. Slavko Kocuc a par la suite
16 compilé une liste des personnes qui avaient été détenues avec lui à la
17 caserne des pompiers.
18 Si vous voyez les âges des civils qui figurent sur cette liste qui figurent
19 à la diapositive 47, vous remarquerez que la grande majorité de ces
20 personnes avaient plus de 60 ans. Le lendemain, les civils qui se
21 trouvaient encore à la caserne des pompiers ont été exécutés par les forces
22 serbes, ainsi qu'un certain nombre de personnes âgées de Bacin et de
23 Cerovljani. L'une de ces personnes tuées était une femme âgée de 90 ans.
24 Le village de Saborsko se trouve dans la municipalité d'Ogulin, près de
25 Plitvice. En août 1991, sa population était quasiment entièrement croate,
26 tout comme cela était le cas dans les villages avoisinants de Poljanak,
27 Lipovaca et Vukovici.
28 Ces villages étaient entourés par des villages dont la population
Page 1013
1 était essentiellement serbe. En août 1991, les forces serbes ont commencé à
2 pilonner Saborsko, leur but étant en fait d'établir le lien entre les
3 territoires serbes qui étaient séparés par Saborsko. Au cours des mois
4 suivants, des membres de la police de Martic et d'autres forces serbes ont
5 commencé à se lancer dans une campagne d'harcèlement, d'arrestation
6 arbitraire, de détention et dans de nombreux cas, ont également roué de
7 coups très gravement des civils croates. La plupart des Croates ont quitté
8 les villages à la suite de ces opérations.
9 A la fin du mois d'octobre et au début du mois de novembre 1991, Poljanak,
10 Lipovaca, Vukovici, et finalement Saborsko ont dû essuyer les attaques des
11 forces serbes. Au cours de ces attaques, les civils croates ont
12 délibérément et intentionnellement été assassinés. A Vukovici par exemple,
13 les forces serbes ont fait sortir huit civils croates d'une maison. Parmi
14 ces personnes se trouvaient des vieillards et des femmes. Ils les ont
15 alignés contre un mur et les ont tout simplement exécutés. Un autre homme,
16 qui était trop malade pour quitter la maison, a essuyé des tirs de la part
17 des forces serbes alors qu'il se trouvait alité.
18 Le 12 novembre 1991, les forces serbes ont commencé à se lancer dans une
19 attaque lourde contre Saborsko. Le village a dans un premier temps été
20 attaqué par les avions de la JNA, qui larguaient des bombes, puis ensuite a
21 essuyé des feux d'artillerie lourde, à la suite de quoi des unités
22 d'infanterie sont arrivées à Saborsko.
23 La diapositive numéro 48 fait référence à cette attaque. Il s'agit d'une
24 lettre de la part du représentant du village de Plaski qui explique cette
25 attaque comme étant une attaque ciblant des personnes maléfiques.
26 L'église catholique de Saborsko a été pilonnée et endommagée, puis
27 l'artillerie s'est retirée et a laissé dans le village des soldats serbes
28 et des policiers. Ces forces serbes ont commencé par piller le hameau, se
Page 1014
1 sont emparées des voitures de particuliers, ont volé des biens
2 électroménagers et le bétail, et ont incendié les maisons. Les civils ont
3 été sortis de leurs sous-sols, les hommes ont été séparés des femmes et une
4 vingtaine d'hommes ont été exécutés. La plupart des habitants de Saborsko
5 se sont enfuis ou ont été conduits dans des bus et libérés en plein
6 territoire croate.
7 Au cours de ce procès, nous allons présenter des témoins qui parleront de
8 cette attaque contre Saborsko. La diapositive numéro 49 vous présente des
9 citations de la déposition de l'une de ces personnes lors du procès contre
10 Milan Martic. Vous remarquerez, et cela a été souligné en rouge, que
11 lorsqu'on lui a demandé qui avait participé à l'attaque contre Saborsko, le
12 témoin a répondu qu'il s'agissait des hommes formés à Golubic, à savoir les
13 Bérets rouges.
14 A titre de dernier exemple, je parlerai de Skabrnja. Skabrnja, ainsi que
15 les villages avoisinants, se trouvait près de Zadar dans la partie sud-
16 ouest de la Croatie. En 1991, le village a été quasiment entièrement
17 croate. Nous retrouvons ce que je vous ai déjà décrit. Cette zone fut
18 d'abord pilonnée, bombardée par les forces serbes à partir du mois de
19 septembre 1991. L'attaque finale s'est déroulée le 18 novembre 1991.
20 Il y avait trois églises catholiques dans et autour du village de Skabrnja.
21 L'une de ces églises était l'église de l'Assomption de la Vierge. Les
22 photos suivantes de la diapositive 50 vont vous montrer l'église avant
23 l'attaque et après. L'église a été pilonnée et endommagée par un char de la
24 JNA. Les forces serbes ont fait sortir les civils du village, les ont
25 transportés contre leur gré vers des territoires contrôlés par le
26 gouvernement croate. Les forces serbes se sont ensuite déplacées de maison
27 en maison, et recherchaient les personnes qui étaient restées, tout en
28 pillant et incendiant les maisons en question.
Page 1015
1 En tout, quelque 38 civils ont été tués à Skabrnja. Le 21 décembre
2 1991, la police de Martic, dans le cadre d'opérations conjointes avec
3 d'autres forces serbes, ont forcé la voie dans des maisons du petit village
4 de Bruska, qui se trouve entre Skabrnja et Benkovac. Ils ont fait sortir
5 les hommes, les ont alignés et leur ont tiré dessus. Ils ont également tiré
6 sur les femmes qui s'enfuyaient. En tout et pour tout, neuf personnes ont
7 été tuées.
8 Tout cela montre qu'il y avait en quelque sorte une structure répétée et
9 que l'on pouvait finir par prévoir et qui était en fait prévisible pour ce
10 qui était des villages croates de la Krajina, et ce, pendant l'automne et
11 l'hiver de l'année 1991. Les villages dont la population était croate ont
12 d'abord dû subir le siège de la JNA, le blocus, et très souvent ils étaient
13 pilonnés. Après cela, les forces serbes, notamment la police de Martic,
14 entraient dans les villages.
15 Les bâtiments qui étaient non-serbes étaient détruits. Les propriétés qui
16 étaient non-serbes étaient pillées. Très souvent, des Croates étaient
17 arrêtés, détenus, certains étaient chassés. Ceux qui restaient,
18 essentiellement la population des personnes très âgées, étaient
19 assassinées, ce qui nous donnait un nettoyage ethnique des villages.
20 Une fois de plus, j'aimerais faire référence à ce qu'un témoin qui sera
21 convoqué par l'Accusation a dit dans le procès ou l'affaire contre Milan
22 Martic. Il s'agit d'un extrait de son témoignage, qui figure à la
23 diapositive 52. Ce témoin était personnellement présent lorsque Franko
24 Simatovic, agissant au nom de Jovica Stanisic, a amené des armes et de
25 l'argent à Milan Martic à Knin.
26 Pour des raisons qui ne sont pas très claires, il y a eu un refroidissement
27 des relations avec le capitaine Dragan après l'été 1991, il a été rappelé à
28 Belgrade et Stanisic l'a empêché de revenir en Krajina. Lorsqu'une unité
Page 1016
1 des Knindzas du capitaine Dragan s'est désintégrée, Franko Simatovic a
2 choisi sur le volet les meilleurs de ces éléments pour créer un groupe
3 sélectionné qui allait finir par devenir une force de combat dissimulée
4 mais toutefois professionnelle et particulièrement bien structurée. Cela
5 s'est passé au mont Fruska Gora en Serbie.
6 Messieurs les Juges, je voudrais vous rappeler la diapositive 22, il s'agit
7 de la sixième carte du jeu de collection de cartes. Vous la verrez encore
8 un peu plus tard lors de ces déclarations liminaires, vous verrez Fruska
9 Gora qui se trouve sur la droite de la carte juste à l'extérieur de la
10 Slavonie orientale en territoire serbe. Il s'agit du quatrième encadré à
11 partir du haut où il est indiqué Lezimir, Fruska Gora.
12 Et là, sur le mont Fruska Gora, la force d'élite qui se trouvait à une
13 distance de frappe de la Slavonie orientale où une paix très provisoire
14 avait été établie ou à une distance de frappe de la Bosnie qui atteignait
15 très rapidement le point d'ébullition. Dragan Vasiljkovic a été rappelé
16 pour aider à l'entraînement de ces hommes sur le mont Fruska Gora. Zika,
17 que l'on connaît également comme Crnogorac, a été nommé chef de l'unité. Il
18 souhaitait que les autres reçoivent un béret rouge, un numéro
19 d'immatriculation de la Sûreté d'Etat ainsi qu'un surnom.
20 Stanisic a tenu à l'écart du regard public cette unité qui était en pleine
21 évolution en les gardant à part et en faisant en sorte qu'ils fassent
22 partie de la Sûreté d'Etat mais ils n'en faisaient pas partie comme les
23 unités de police ordinaire ou comme les unités militaires de la Serbie ou
24 de la RSFY.
25 L'Accusation -- cela est résumé à la diapositive numéro 53. L'Accusation
26 avance que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont joué un rôle dans
27 l'organisation, la formation des auteurs directs de ces crimes et que cela
28 a été l'une des contributions qu'ils ont apportées à l'entreprise
Page 1017
1 criminelle commune dont le but était de chasser par la force les Croates et
2 les autres non-Serbes de certaines terres qui avaient été ciblées, et ce,
3 par les crimes de persécution, de meurtre et d'assassinat, qui fait qu'ils
4 sont directement responsables individuellement de ces crimes.
5 La seconde région en Croatie qui est englobée par cet acte d'accusation est
6 la Slavonie orientale. Le Parti démocrate serbe ou le SDS a été créé en
7 Slavonie en 1990. Comme dans les autres régions en Croatie, il y a eu
8 exacerbation des tensions en Slavonie pendant l'année 1990 et en janvier
9 1991, le Conseil national serbe de la Slavonie, du Baranja et du Srem
10 occidental, auquel nous faisons référence par son sigle SBWS en anglais et
11 SBSO en français, a été établi. Le Conseil national serbe proclamait que
12 les Serbes en Croatie étaient un peuple souverain avec le droit à
13 l'autonomie en février 1991. Cela fait l'objet de la diapositive 54.
14 Lors d'une réunion convoquée à Backa Palanka juste de l'autre côté du
15 Danube en Serbie, des représentants de tous les villages serbes de la SBSO
16 ont formé la grande assemblée nationale de la SBSO. Le 25 juin 1991, le
17 même jour de la déclaration de l'indépendance respective de la Croatie et
18 de la Slovanie, cette grande assemblée nationale a déclaré la sécession de
19 la Croatie et a établi la région autonome serbe de la SBSO.
20 Goran Hadzic qui avait été le président de Conseil national serbe a été élu
21 premier ministre désigné.
22 La SAO de la Slavonie orientale a été créée en août 1991. Cette entité,
23 toutefois, ne jouera pas un rôle important ici dans cette affaire. Il me
24 suffit de dire qu'en février 1992, la SAO de la Slavonie orientale, ainsi
25 que les SAO de la SBSO se sont ralliées à la SAO de la Krajina et ont créé
26 la République de la Krajina serbe.
27 Goran Hadzic qui fait l'objet de la diapositive 55 est devenu la
28 personnalité politique la plus importante dans la SAO de la SBSO qui avait
Page 1018
1 été autoproclamée. Il en avait été l'un des membres fondateurs, il était
2 président du conseil national serbe et a été élu premier premier ministre,
3 et le 25 septembre 1991, premier ministre de la SAO de la SBSO.
4 Lorsque les trois SAO en Croatie ont fusionné en RSK en février 1992, il
5 est devenu président de cette nouvelle entité qui venait d'être créée et
6 est resté à cette fonction jusqu'en décembre 1993, date à laquelle Milan
7 Martic a assumé cette fonction.
8 A l'instar des personnalités politiques de la Krajina, les dirigeants de
9 cette nouvelle SAO de la SBSO nouvellement créée ont évité de faire quoi
10 que ce soit avant de consulter dans un premier temps Belgrade. Hadzic se
11 rendait régulièrement à Belgrade pour y rencontrer à la fois Slobodan
12 Milosevic et Jovica Stanisic. Il recevait des instructions sur la façon de
13 procéder. Lorsqu'il revenait à Dalj, il convoquait la police et les
14 commandants de la Défense territoriale et fréquemment il relayait des
15 informations qui lui étaient données par Milosevic.
16 Lors d'une conversation de téléphone interceptée avec Karadzic le 14
17 décembre 1991, Stanisic a dit, entre autres choses : "J'ai à peine pu
18 convaincre Hadzic de ne pas y aller," ce qui indique une fois de plus qu'il
19 avait des liens très étroits avec la direction politique de la SAO de la
20 SBSO.
21 Tout comme la Krajina, la SAO de la SBSO n'avait pas d'argent et n'avait
22 pas de ressource et le gouvernement de la Serbie fournissait à cette région
23 toutes les ressources dont ils avaient besoin. Lors de réunions régulières
24 avec Jovica Stanisic, Hadzic parlait constamment du problème du matériel et
25 de l'équipement de sa force de police et Stanisic faisait en sorte que cela
26 lui soit fourni.
27 Jovica Stanisic, toutefois, n'a pas seulement exercé son influence lors de
28 réunions avec Hadzic à Belgrade ou dans d'autres lieux en Serbie, il est
Page 1019
1 venu personnellement également en Slavonie orientale. Vers le 19 ou le 20
2 septembre 1991, il est arrivé à Dalj. Nous allons présenter des éléments de
3 preuve indiquant que Stanisic vociférait à l'attention de certaines
4 personnes et les a mises en garde parce que Vukovar, la ville qui était
5 assiégée par la JNA, ne s'était toujours pas rendue.
6 Le témoin se souviendra comment Stanisic a indiqué qu'ils avaient tout le
7 matériel nécessaire pour pouvoir s'emparer de la ville. Stanisic a donné
8 l'ordre à Hadzic de venir à une réunion à Dalj -- je m'excuse -- Stanisic a
9 donné l'ordre à Hadzic de venir à une réunion à Dalj avec tous les
10 commandants de la Défense territoriale. Et cette réunion a bel et bien eu
11 lieu avec Stanisic, Hadzic, et d'autres personnes. Et en octobre 1991,
12 comme cela peut être constaté sur la diapositive 56, Stanisic est venu
13 trouver le général Arandjelovic accompagné de deux membres des Bérets
14 rouges, Bozovic, et Ivanovic, Crnogorac.
15 La personne qui devait tout organiser était Radovan Stojicic, également
16 connu sous le nom de Badza, un membre du MUP serbe qui plus tard est devenu
17 le ministre adjoint de l'Intérieur de la République de Serbie. La
18 diapositive 57 résume ce que nous savons déjà sur cette personne. Stojicic
19 était à la tête de l'unité antiterroriste de la SAJ, dans la MUP serbe
20 depuis la fin des années 1980.
21 Il est venu à la SAO de la SBSO vers la fin du mois de septembre 1991,
22 après que Jovica Stanisic était venu à Dalj pour se plaindre de Vukovar.
23 Nous aimerions vous inviter, Monsieur le Président, Monsieur le Juge,
24 Madame le Juge, à comprendre par vous-mêmes que conformément à la structure
25 d'organisation du ministère serbe des Affaires intérieures, Stojicic
26 n'était pas le subordonné de Stanisic, il a été envoyé simplement par
27 Stanisic pour s'assurer que les forces locales fonctionneraient
28 conformément aux désirs du plan commun de l'entreprise criminelle commune
Page 1020
1 qui portait sur la chute de Vukovar.
2 Conséquemment, Stojicic, un membre du ministère des Affaires intérieures de
3 Serbie, le MUP, a été nommé en tant que commandant de la TO de la SAO de la
4 SBSO au début de l'automne 1991.
5 Et nous pouvons voir ici à la diapositive 88 [comme interprété], certaines
6 photos qui ont été prises lors des funérailles de Stojicic. Nous pouvons
7 voir Milosevic et Arkan qui sont là tout près.
8 Une autre personne qui était très importante dans la SAO de la SBSO
9 est Radoslav Kostic, également connu sous le nom de Kola ou Ante. Kostic
10 avait été un agent pour la DB depuis le début de 1991.
11 Sur la diapo numéro 58 [comme interprété], vous verrez un autre
12 extrait de la vidéo qui a été prise à Kula en 1997 au centre de formation
13 qui avait été nommé d'après Radoslav Kostic. Jovica Stanisic porte ses
14 respects pour son camarade et dépose une gerbe sur le tombeau de Kostic.
15 La DB Serbe avait été impliquée pour ce qui est du transport des
16 armes depuis les casernes de la JNA à Bubanj Potok au sud de Belgrade au
17 Borovo Selo déjà en avril 1991.
18 Kostic s'occupait de la supervision du transport des armes. Nous vous
19 démontrerons qu'un très grand nombre d'armes arrivaient depuis la Serbie
20 dans la région en juin 1991. Les armes appartenaient à la JNA et les
21 livraisons avaient été organisées par la DB de Novi Sad avec à la tête
22 Kostic.
23 Kostic était également impliqué pour ce qui est de la formation de la
24 milice de la SAO de la SBSO et supervisait l'équipement et les armes qui
25 arrivaient à la DB de Novi Sad. En septembre 1991, il a accompagné Jovica
26 Stanisic à Dalj.
27 La diapositive numéro 60 montre le montant du support financier qui
28 venait de Serbie. Il est intéressant de dire que tout ceci n'était pas
Page 1021
1 légal mais on a néanmoins planifié à continuer cette aide.
2 Une autre personne qui était intermédiaire entre les dirigeants
3 politiques de la SAO de la SBSO et Belgrade était peut-être le
4 paramilitaire le plus connu au cours de toute la guerre : c'était Zeljko
5 Raznjatovic, également connu sous le nom d'Arkan.
6 Il avait commencé sa "carrière" en 1980 en commettant des crimes
7 graves un peu partout en Europe. Arkan avait été un fervent supporter du
8 club de soccer de Belgrade, la Croix Rouge, et s'était entouré d'hooligans.
9 En 1990, en se servant des membres de ce groupe, il a organisé une unité
10 paramilitaire appelée la Garde des volontaires serbes ou plus connu sous le
11 nom des hommes d'Arkan avec une sous-unité d'élite, les Tigres d'Arkan.
12 C'était ce groupe qui allait par la suite terroriser la population non-
13 serbe de la SAO de la SBSO, et puis en Bosnie. Arkan a encouragé
14 ouvertement ces crimes commis par les hommes qu'il a formés.
15 La deuxième personne qui était placée directement sous lui c'était Milorad
16 Ulemek, Legija.
17 Ils étaient une force de choc de la JNA et ils ont permis que des crimes
18 ouvertement commis contre la population soient commis par les hommes
19 d'Arkan.
20 Arkan collaborait très étroitement avec le MUP serbe. Son unité avait été
21 ravitaillée par le MUP, et il disait qu'il ne faisait absolument rien sans
22 la connaissance et sans les ordres reçus par Jovica Stanisic. Quelques
23 jours après la prise de Dalj, Arkan s'est rendu à Borovo Selo avec quelques
24 hommes à lui. Il les a présentés comme étant des hommes de la DB serbe et
25 il a montré sa carte d'identité qui était une carte d'identité de la DB
26 serbe.
27 La diapositive numéro 63, au bas, nous montre un extrait d'un rapport
28 parlant du type de formation qui était faite dans les centres de formation
Page 1022
1 des unités spéciales de la DB serbe. Je souhaiterais également vous montrer
2 un extrait assez court dans lequel Arkan, qui parle anglais, décrit les
3 politiques de son unité relatives aux soldats capturés.
4 [Diffusion de la cassette vidéo]
5 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
6 "Je ne vais pas prendre d'autres prisonniers. Nous allons tuer tous les
7 soldats que nous allons prendre."
8 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
9 Mme BREHMEIER-METZ : [interprétation] Il y a d'autres rapports, tel le
10 rapport à la diapositive numéro 64, qui démontrera quelle était la
11 brutalité d'Arkan et le comportement criminel qui n'était pas seulement
12 connus par les non-Serbes qui couraient en terreur lorsqu'ils entendaient
13 son nom, mais également par la JNA, les hommes politiques serbes, et plus
14 particulièrement pour l'affaire qui nous occupe, Jovica Stanisic et Franko
15 Simatovic.
16 En tout, la SAO de la SBSO n'a jamais été une entité indépendante. Nous
17 allons entendre des éléments de preuve selon lesquels Slobodan Milosevic
18 contrôlait Hadzic par le truchement d'Arkan et Stojicic, et que Jovica
19 Stanisic était le lien entre eux et Belgrade.
20 Depuis la fin de 1990, un très grand nombre d'anciens hommes de la milice,
21 c'est-à-dire les forces de la police, avaient quitté leur poste et avaient
22 établi leurs propres groupes de police qui opéraient de façon indépendante
23 et sans légalité absolue. En juillet 1991, Goran Hadzic a convié une
24 réunion avec Radoslav Kostic, et Kostic restait l'homme contact avec la
25 milice et les ravitaillait avec ce dont ils avaient besoin.
26 Au fil du temps, il était devenu clair qu'Arkan était devenu tellement
27 puissant que ces hommes qui faisaient partie de la milice et qui ne se
28 joignaient pas à lui couraient un danger sérieux. Un très grand nombre
Page 1023
1 d'entre eux ont rejoint Arkan pour ce qui est des crimes qui avaient été
2 commis plus tard dans la région.
3 Au cours de l'été 1991, Hadzic avait établi une unité spéciale qui au début
4 devait assurer sa sécurité. Mais plus tard cette unité a été rebaptisée et
5 s'appelait maintenant la SNB, unité de sécurité nationale serbe. C'était
6 devenu une unité spéciale avec des pouvoirs spéciaux. L'idée était que ceci
7 deviendrait une unité équivalente à l'unité spéciale de la DB serbe. Goran
8 Hadzic avait le contrôle de cette unité.
9 Parmi les personnes qui étaient importantes, c'était Mihajlo Ulemek,
10 l'oncle de Legija. Lui, en tant que membre des Tigres d'Arkan, était le
11 chef de la sécurité au sein de la SNB. La SNB, toutefois, n'a pas seulement
12 fourni des gardes de sécurité pour le gouvernement, et au cours de ce
13 procès, nous allons vous présenter des éléments de preuve qui vous
14 démontreront de quelle façon la SNB avec les TO locales, avec la milice, et
15 d'abord et avant tout, les hommes d'Arkan, avaient été impliqués dans les
16 crimes graves et atrocités commis dans la région au cours de la fin de 1991
17 [comme interprété] début 1992.
18 Au mois d'août 1991, Arkan a organisé un centre de formation à Erdut qui
19 était utilisé non seulement pour former les membres de son groupe
20 paramilitaire mais également pour former les volontaires et les membres de
21 la Défense territoriale. Le centre de formation était très bien équipé. Un
22 rapport datant de la fin d'octobre 1991 mentionne "de grandes quantités de
23 différentes armes d'infanterie, des lance-grenades, des lance-grenades à
24 Zolja, et cetera, qu'Arkan pouvait donner à qui il le souhaitait."
25 Monsieur le Président, Madame le Juge, les diapositives 65 à 68 est un
26 document qui démontre de quelle façon Arkan soumettait des factures pour le
27 paiement en question des mécanismes qui étaient utilisées pour soutenir
28 financièrement ses hommes et pour les rémunérer.
Page 1024
1 Je ne vais pas maintenant m'attarder trop longtemps sur ces factures eu
2 égard au temps de cette déclaration liminaire qui nous est imparti. En
3 décembre 1991, la DB avait également créé son propre centre de formation
4 tout près d'Ilok, tout près de la frontière de Backa Palanka.
5 Donc le centre de formation d'Arkan n'était pas le seul dans la région,
6 mais au fil du temps, ce centre de formation était également appelé Pajzos,
7 qui servait de camp d'entraînement pour les membres de la DB et les Bérets
8 rouges, ainsi que pour les volontaires, et Franko Simatovic dans son
9 allocution prononcée à Kula en 1997 en parle.
10 Crnogorac était en charge du camp, et Franko Simatovic se rendait
11 régulièrement à cet endroit-là.
12 Messieurs les Juges, l'Accusation sous-tend que Jovica Stanisic et Franko
13 Simatovic sont responsables directement pour la commission de cet incident
14 d'Erdut et Dalj entre le mois de septembre 1991 et le mois de juillet 1992.
15 A la suite de ces incidents, la population non-serbe avait été chassée par
16 la force de leurs maisons légitimes, et un total de 107 personnes avaient
17 été tuées, ça seulement parce qu'ils n'étaient pas d'appartenance ethnique
18 serbe.
19 Les hommes d'Arkan et la police locale avaient organisé des centres de
20 détention de fortune où ils plaçaient des civils non-serbes et les tenaient
21 dans des circonstances inhumaines pour la simple raison qu'ils n'étaient
22 pas Serbes. Ils brutalisaient sans cesse les détenus et les menaçaient de
23 les tuer pendant qu'ils les interrogeaient.
24 Dans le cours de ces déclarations liminaires, l'Accusation ne va pas parler
25 séparément de ces sept incidents, mais deux de ces incidents pourraient
26 agir d'exemples, à savoir de quelle façon les événements de la SAO SBSO se
27 sont déroulés.
28 Le premier incident reproché aux accusés a eu lieu vers la mi-septembre
Page 1025
1 1991. Goran Hadzic lui-même a emmené un certain nombre de civils croates au
2 quartier général de la police de Dalj.
3 Pour ce qui est des détenus, la vie est devenue un enfer. Chaque nuit, et
4 également pendant la journée, certaines de ces personnes se faisaient
5 sortir de leurs cellules et se faisaient brutaliser. Vous entendrez un des
6 détenus vous parler, vous décrire et vous dire qu'à un certain moment
7 donné, un homme a enfoncé une porte, a détruit la serrure, est entré et il
8 a dit aux détenus : "Je veux que vous sachiez que je suis Arkan." Ensuite,
9 ce détenu a pu observer trois hommes qui l'ont accompagné, alors que les
10 détenus avaient été battus avec des chaises de fer qui se désintégraient.
11 Autour du 23 décembre [comme interprété] 1991, Hadzic et Arkan sont venus
12 au centre de détention de Dalj. Il y avait 20 détenus, ils ont choisi deux
13 détenus, et les détenus qui sont restés se sont fait sortir du centre de
14 détention et ont été tués par Arkan et ses hommes. Tout de suite après, le
15 commandant du poste de police de Dalj, un Serbe, a informé le ministère de
16 cet incident, tout comme il est montré à la diapositive 70. Il a été démis
17 de ses fonctions le 1er octobre 1991 à la suite de ceci.
18 Le 9 novembre 1991, les membres de la TO locale de la SAO SBSO et les
19 forces du MUP, ainsi que les membres des hommes d'Arkan ont arrêté au moins
20 neuf civils non-serbes dans Erdut et autour de cette ville. Ils les ont
21 emmenés au centre de formation de la TO, où ils ont été fusillés le
22 lendemain. Plusieurs jours plus tard, la veuve de l'un des hommes a
23 commencé à s'enquérir sur le sort de son mari. Mihajlo Ulemek est intervenu
24 et a ordonné l'exécution du reste de la famille, où les membres de la SNB
25 et les hommes d'Arkan ont arrêté et tué la veuve, le fils et sa femme.
26 Une autre femme qui avait perdu son mari alors qu'il a été tué le 10
27 novembre s'était renseignée ou essayait de savoir ce qui était arrivé à son
28 mari, et vers le 3 juin 1992 elle a été arrêtée par des membres de la SNB.
Page 1026
1 Ils l'ont emmenée à Erdut, ils l'ont tuée et ont jeté son corps dans un
2 puits abandonné à Dalj Planina.
3 L'Accusation sous-tend, tout comme il est résumé ici à la diapositive
4 numéro 71, que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont pris part à
5 l'entreprise criminelle commune dans le but de chasser par la force les
6 Croates et d'autres non-Serbes de certaines régions de la SAO SBSO par le
7 biais d'une organisation, de formation et financement d'antenne et qui
8 avaient par la suite commis des crimes dans la Slavonie orientale. Ils ont
9 également contribué au plan commun, et influençaient et dirigeaient le SAO
10 SBSO, et plus particulièrement Goran Hadzic, qui à ce moment-là ordonnait
11 et dirigeait la commission de crimes et dirigeait ces derniers.
12 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, comme nous avons vu, ce
13 plan visait à balayer toute la population non-serbe du sud de la Croatie de
14 la Krajina. Ensuite, ils se sont dirigés vers la Slavonie orientale, mais
15 il était devenu apparent que maintenant ils s'étaient tournés vers la
16 Bosnie orientale, et les premières municipalités qui ont souffert de ceci,
17 c'étaient Bijeljina et Zvornik.
18 Je souhaiterais maintenant donner micro à mon collègue, M. Docherty, qui
19 vous parlera de Bosnie-Herzégovine. En fait, je souhaiterais vous proposer
20 aussi de prendre peut-être la pause à ce moment-ci.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Alors, nous allons suivre
23 votre conseil et prendre une pause de 20 minutes à partir de maintenant.
24 --- L'audience est suspendue à 14 heures 36.
25 --- L'audience est reprise à 15 heures 01.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, c'est vous qui
27 allez faire le coup de lancement.
28 L'INTERPRÈTE : Analogie au football l'interprète ne la connaît pas.
Page 1027
1 M. DOCHERTY : [interprétation] [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais simplement dire qu'en
3 l'absence du Juge Picard, le Juge David et moi-même siégerons conformément
4 aux dispositions de l'article 15 bis.
5 Je vous remercie. Monsieur Docherty, c'est à vous. Je vous écoute.
6 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,
7 avec votre permission.
8 Je souhaiterais vous parler de l'entreprise criminelle commune pour
9 comprendre de quelle façon l'entreprise criminelle commune appliquait son
10 programme en Bosnie, la Chambre doit reconnaître la Bosnie a été une
11 spécificité parmi les six républiques de Yougoslavie, alors qu'elle
12 présentait des --
13 Pourquoi est-ce que ces difficultés étaient fondamentalement
14 différentes pour mettre en place l'entreprise criminelle commune et
15 pourquoi est-ce que la Bosnie a fait l'objet des pires crimes qui avaient
16 été commis pendant la guerre ?
17 Pour simplifier, ce qui rend la Bosnie si unique et ce qu'il faut
18 comprendre c'est que contrairement aux autres républiques, d'anciennes
19 républiques qui avaient des populations minoritaires qui étaient
20 relativement rapprochées, la Bosnie était plutôt composée de larges poches
21 ethniques de populations qui étaient isolées, et qui étaient éparpillées
22 sur tout le territoire comme des pois d'un tissu, certaines communautés
23 ressemblaient à des îlots ethniques dans une mer dominée par un autre
24 groupe ethnique.
25 Ce que les historiens et d'autres observateurs brandissaient à juste
26 titre comme la preuve d'une intégration pacifique de différentes ethnicités
27 et cultures présentait un problème particulier pour les membres de
28 l'entreprise criminelle commune.
Page 1028
1 Quel était ce plan qu'ils avaient décidé d'employer pour créer une
2 région qui serait dominée par les Serbes pour démanteler cet ensemble de
3 poches ethniques ? La définition la plus claire peut être trouvée dans un
4 document.
5 Mais avant de décrire ce document et avant de décrire les événements
6 en Bosnie, je souhaiterais prendre quelques instants pour vous parler de
7 certaines personnes qui se trouvaient au cœur des crimes qui avaient été
8 commis en Bosnie.
9 Radovan Karadzic était le premier président du gouvernement serbe de
10 Bosnie qui plus tard a été appelé la Republika Srpska. A ce titre, il
11 exerçait une autorité de droit sur l'armée serbe de Bosnie et sur la police
12 serbe de Bosnie.
13 Il a été accusé par ce Tribunal et est en fuite. Il a prononcé un
14 discours dans lequel il explique clairement ses intentions le 15 octobre
15 1991, et vous entendrez ce discours à la suite de la présentation de la
16 diapositive numéro 73.
17 [Diffusion de la cassette audio]
18 M. DOCHERTY : [interprétation] L'Accusation établira à l'aide de
19 conversations interceptées, de documents, et de témoignage les rapports
20 entre Jovica Stanisic et le Dr Karadzic qui a joué un rôle crucial en tant
21 que membre principal de l'entreprise criminelle commune. L'Accusation vous
22 présentera un très grand nombre de conversations interceptées qui ont eu
23 lieu entre M. Stanisic et le Dr Karadzic, la plupart datant de la période
24 cruciale à partir du mois d'août 1991 jusqu'au mois de février 1992. Dans
25 ces conversations, vous entendrez ces personnes parler des questions
26 pratiques et politiques qui ont trait à la mise en œuvre du plan de
27 l'entreprise criminelle commune et vous comprendrez que les deux hommes ont
28 compris que ceux dont ils parlaient étaient secrets et devaient le rester
Page 1029
1 car vous les entendrez parler dans ces conversations interceptées à mots
2 couverts, de temps en temps rappelant l'un l'autre de l'importance de ne
3 pas trop dire de choses au téléphone.
4 Dans une conversation interceptée du 14 décembre 1991, Jovica Stanisic dit
5 à Radovan Karadzic qu'il enverra ses hommes en Bosnie pour traiter d'un
6 problème précis. Stanisic également fait référence à "ses gars" pour
7 lesquels il dit qu'il les avait déjà envoyés précédemment. Et en dernier
8 lieu, Stanisic dit à Karadzic qu'il ordonnera à Goran Hadzic, un dirigeant
9 serbe de Croatie de la Slavonie orientale, de faire quelque chose.
10 Momcilo Krajisnik ici, montré au côté de Biljana Plavsic sur la diapositive
11 64 [comme interprété] était un membre des dirigeants serbes de Bosnie
12 pendant la guerre. Il a tenu un très grand nombre de postes de haut rang, y
13 compris -- il a été membre du Conseil de sécurité national, et de la
14 présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine élargie. Il a été
15 également trouvé coupable de crimes contre l'humanité et est en attente
16 d'un procès en appel.
17 Biljana Plavsic était une des principales femmes politiques, l'une des
18 principales politiciennes des Serbes de Bosnie à partir de la période
19 précédent la guerre et jusqu'à la fin de la guerre. Elle représentait
20 l'idéologie serbe. Elle était un membre de la présidence collective de
21 Bosnie, un membre d'une présidence composée de trois personnes, une
22 présidence tripartite de la République serbe, et elle était également
23 membre du commandement suprême de l'armée serbe de Bosnie. Après avoir
24 plaidé coupable au crime de persécution en tant que crime contre
25 l'humanité, elle a reçu une peine de 11 années d'emprisonnement.
26 Ratko Mladic, qui était un officier de carrière de la JNA, était devenu
27 chef de l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska. Il a été
28 mis en accusation par ce Tribunal et est en fuite.
Page 1030
1 Sur la diapositive 76 [comme interprété], vous verrez les objectifs
2 stratégiques, "Les personnes et les personnes ne sont pas des pions, ils ne
3 sont pas non plus des pions qui peuvent être déplacés d'un endroit à
4 l'autre. Nous ne pouvons pas prendre un filtre pour filtrer seulement les
5 Serbes qui pourraient rester, et non pas les autres. Je ne sais pas de
6 quelle façon M. Krajisnik et M. Karadzic expliqueront ceci au monde. Car
7 ceci constitue un génocide."
8 Le document qui établit clairement les objectifs de l'entreprise criminelle
9 commune, le document dont j'ai fait référence il y a quelques instants,
10 était un document qui a été présenté de façon officielle à la 16e Séance de
11 l'assemblée de la République serbe de Bosnie-Herzégovine le 12 mai 1992.
12 Dans ces objectifs, ils ont exposés six objectifs stratégiques pour le
13 peuple serbe de Bosnie. Dans l'allocution prononcée par M. Simatovic à
14 Kula, ce dernier avait établi un lien entre les activités des unités
15 spéciales et de la DB serbe avec ces six objectifs.
16 Le premier objectif, que l'on peut voir ici sur la diapositive numéro 6
17 [comme interprété], constitue en une séparation du peuple serbe des deux
18 autres communautés nationales.
19 Deuxièmement, un établissement d'un corridor entre Semberija et la Krajina.
20 M. Simatovic a dit à Kula que ses unités avaient été impliquées dans
21 "corridor à Brcko" et que ceci fait une référence au deuxième objectif
22 stratégique relatif ou qui constitue à créer un lien entre les terres
23 convoitées par les Serbes dans les parties orientales et occidentales de la
24 Bosnie.
25 Le troisième objectif parle de l'établissement d'un corridor dans la vallée
26 de la Drina éliminant la rivière Drina en tant qu'une frontière entre les
27 Serbes.
28 Ce "corridor" était en fait une partie très vaste du territoire qui
Page 1031
1 englobait une grande partie de la partie orientale de Bosnie. M. Simatovic
2 fait référence à la présence de ses unités en parlant de ce territoire "à
3 la Drina."
4 L'objectif numéro 4 parle du quatrième objectif stratégique, c'est-à-dire
5 l'établissement d'une frontière entre les rivières Una et Neretva.
6 Le cinquième objectif stratégique porte sur la division de Sarajevo.
7 Lorsque M. Simatovic parle de ces opérations de Sarajevo, il fait allusion
8 à cet objectif.
9 Et sixièmement, le sixième objectif stratégique était de garantir aux
10 Serbes un accès à la mer.
11 Alors que je décrirais les crimes commis dans les six municipalités de
12 Bosnie qui font l'objet de cet acte d'accusation, je vais demander aux
13 Juges de la Chambre de tenir compte du fait qu'il y a plusieurs endroits
14 qui vont être cités dans ce présent discours, et qui font l'objet ou qui
15 sont couverts par l'acte d'accusation et qui parlent des crimes qui ont été
16 commis et qui ont servi pour les objectifs décrits dans les six objectifs.
17 Pour ce qui est de l'entreprise criminelle commune, tel qu'englobé par la
18 géographie et la démographie de la Bosnie, ces objectifs sont tout à fait
19 clairs et ils sont très clairement articulés; l'intention des membres de
20 l'entreprise criminelle y est aussi.
21 En décembre 1991, un document ayant pour titre "Instructions relatives à
22 l'organisation des activités des organes du peuple serbe en Bosnie-
23 Herzégovine en circonstances extraordinaires" a été promulgué par les plus
24 hauts représentants du Parti démocratique serbe, les initiales SDS
25 représentaient ce parti en Bosnie-Herzégovine.
26 Le document est devenu très populaire et a été connu sous le nom des
27 Variantes A et B car ce document contenait ces deux variantes. Lorsque l'on
28 parlait d'actions qui devaient être prises par le SDS et ses plus hauts
Page 1032
1 représentants, ce document faisait état et faisait une différence entre les
2 municipalités dans lesquelles vivaient les Serbes et y étaient
3 majoritaires, il s'agissait de la Variante A. Et des municipalités dont les
4 Serbes étaient minoritaires, il s'agit en l'occurrence de la Variante B.
5 Essentiellement, ce document contenait précisément des instructions
6 concernant la façon dont les Serbes du cru allaient se réunir pour déclarer
7 une assemblée locale du peuple serbe dans les ou la municipalité qui allait
8 prendre le pouvoir et le gouvernement, y compris la fonction de police et
9 des structures de sûreté.
10 Les prises de pouvoir des municipalités se sont poursuivies en quatre
11 étapes. La première étape était la construction d'un système de gouvernance
12 qui était parallèle au gouvernement officiel, mais qui n'était que serbe,
13 exclusivement serbe. Le deuxième, c'était l'armement de la population
14 serbe. En troisième lieu, une prise de pouvoir armée et violente des
15 municipalités non-serbes. Et quatrièmement, le nettoyage ethnique soit par
16 le meurtre et/ou l'expulsion de la population non-serbe.
17 A la diapositive 82, vous verrez une carte représentant les installations
18 de formation des unités spéciales. Les 13 installations indiquées en jaune
19 représentent des camps que les accusés ont établis et créés en Bosnie-
20 Herzégovine. Comme vous pouvez le voir, ces camps se trouvent des les zones
21 qui sont indiqués pour les Serbes relatifs aux deuxième, troisième et
22 quatrième objectifs stratégiques. La Bosnie orientale, le long de la Drina,
23 la Bosnie du nord, la terre qui se trouve entre la Semberija et la Krajina,
24 et ce territoire, la Bosnie du sud, le long de la rivière Una et Neretva.
25 Dans ce procès, l'Accusation va se pencher sur six municipalités qui ont
26 fait l'objet d'une prise pour illustrer l'acte d'accusation. Ces
27 municipalités sont : Bijeljina au nord-ouest de Bosnie. Notre preuve
28 portera sur le transfert forcé de la population de cette municipalité.
Page 1033
1 Nous parlerons également de Zvornik. Zvornik est indiqué ici dans la
2 colonne de droite. Le numéro qui lui correspond est le numéro 6 à partir du
3 bas et à partir du haut.
4 Nous parlerons de Bosanski Samac. Bosanski Samac est indiqué dans la partie
5 supérieure droite.
6 Nous parlerons de Sanski Most également, au nord de la Bosnie centrale.
7 Plus tard, M. Groome vous exposera des faits qui se sont déroulés à Sanski
8 Most en 1995.
9 Mais pour l'instant, je souhaiterais vous rappeler que nous parlerons
10 également de Doboj, et l'allégation pour Doboj se trouve dans la colonne du
11 haut, et il est en deuxième à partir de la gauche.
12 Il y a Trnovo, tout près de Sarajevo. Les unités spéciales n'ont pas été
13 impliquées dans la prise de cette région mais en juin et juillet de 1995,
14 dans les jours qui ont suivi Srebenica, l'une de ces unités paramilitaires,
15 les Skorpions, ont pris part aux exécutions qui ont suivi la chute de
16 Srebenica en exécutant sommairement six Musulmans.
17 Les unités spéciales de la DB serbe ont directement participé dans la prise
18 de chacune de ces cinq municipalités. Après une prise violente de ces
19 villes, les non-Serbes, principalement Musulmans, ont été chassés par la
20 force de leurs demeures et de leurs terres par le biais de crimes de
21 meurtre et de persécutions commis avec l'intention de s'approprier les
22 terres et les zones leur appartenant et des les approprier aux Serbes. Un
23 très grand nombre de personnes qui n'ont pas été tuées ont été contraintes
24 sous la menace des armes de céder leurs terres et de partir. Ils ont été
25 placés à bord d'autocars qui les ont emmenés à l'extérieur de la région.
26 D'autres ont fait l'objet d'harcèlements implacables et d'actes de
27 persécution qui ont pris la forme d'arrestations sommaires, de détentions
28 illégales, de conditions inhumaines, de passages à tabac, de couvre-feux et
Page 1034
1 de fouilles agressives menées de façon fréquente dans les demeures et les
2 maisons des non-Serbes.
3 Il est difficile d'imaginer que l'on ait voulu créer une communauté
4 purement serbe dans une municipalité qui était multiethnique où tout le
5 monde s'entendait de façon harmonieuse. Il est vraiment difficile
6 d'imaginer ce qu'une telle entreprise supposait lorsque l'on tient compte
7 du fait, par exemple, d'une municipalité comme Zvornik, qui était
8 multiethnique. Avant la guerre en 1991, elle était composée de 54,8 % de
9 Musulmans. Après la guerre, en 1997-1998, que 0,6 % de la population de
10 Zvornik était musulmane. Je vais parler des cinq villes dans l'ordre
11 chronologique en m'appuyant sur les dates auxquelles des crimes ont été
12 commis.
13 Le 24 mars 1992, environ huit jours avant la prise de Bijeljina, Radovan
14 Karadzic a déclaré, comme on peut le voir ici à la diapositive 83, que très
15 bientôt les municipalités serbes commenceront le processus de la prise du
16 pouvoir.
17 La prise du pouvoir de Bijeljina et de Zvornik ont fait l'objet d'une
18 campagne bien exécutée, bien planifiée, de façon précise et extrêmement
19 rapide, c'est-à-dire elle n'a duré que quelques jours. Les unités spéciales
20 de la DB serbe, dans ce cas-ci il s'agissait des hommes d'Arkan, ont établi
21 un camp en Serbie de l'autre côté des frontières de Bijeljina, prêts à
22 lancer une attaque en attendant le signal à l'aube du 1er avril 1992.
23 Les deux villes, Bijeljina et Zvornik, ont été englobées par le premier, le
24 plus important objectif; la séparation des communautés ethniques. Mais ces
25 villes ont également été englobées par le deuxième et le troisième
26 objectifs stratégiques, c'est-à-dire l'établissement d'un corridor vers les
27 régions ciblées par les Serbes se trouvant en Bosnie centrale et
28 occidentale, afin d'établir un corridor serbe dans la vallée de la Drina.
Page 1035
1 Dans un souci d'avoir un procès rapide et équitable, l'Accusation ne va pas
2 tenter de prouver que des meurtres et des persécutions avaient été commis à
3 Bijeljina. Nous n'allons nous pencher que sur les crimes contre l'humanité
4 où la déportation et le transfert forcé pour ce qui est de Bijeljina, car
5 il est essentiel de comprendre qu'afin que la Chambre de première instance
6 puisse trouver les accusés coupables, elle doit comprendre qui était Arkan
7 et ce que savait M. Stanisic et M. Simatovic de lui.
8 La brutalité d'Arkan à Bijeljina a fait l'objet de rapports rédigés par les
9 officiers haut gradés de l'armée yougoslave à l'époque, l'un d'entre eux a
10 vu un énorme potentiel et a exprimé ce qu'il pensait sur la diapositive 85.
11 Sur ce rapport rédigé à l'époque contemporain des événements, le général de
12 division en question de l'armée yougoslave se plaint que les mouvements de
13 son unité de blindés avaient été restreints par les hommes d'Arkan.
14 Arkan et ses 50 hommes ont pu présenter une barrière et créer une colonne
15 et s'opposer à l'armée yougoslave serbe, à la JNA, et à leurs blindés parce
16 qu'Arkan était un membre-clé du groupe de personnes qui se trouvait
17 derrière ces crimes. Peu de temps après la prise de Bijeljina, nous voyons
18 Arkan et Plavsic se féliciter et se donner une accolade sur cette
19 diapositive.
20 C'est à Bijeljina où Arkan a clairement établi sa réputation de brutalité
21 inégalée.
22 Dans la diapositive numéro 87, on voit deux photographies qui ont été
23 prises par Ron Haviv, un photographe de guerre qui a montré au reste du
24 monde la brutalité dont on fait preuve les hommes d'Arkan. Peu de temps
25 après, ces images ont choqué le monde entier, on reconnaissait Arkan sur
26 ces images qui ont été montrées par un correspondant de la BBC.
27 Comme conséquence des efforts de cette entreprise criminelle commune et par
28 rapport à l'acte d'accusation, bon nombre de non-Serbes de Bijeljina ont dû
Page 1036
1 quitter par la force ou fuir, en raison de la terreur qui régnait.
2 Zvornik. Si on pouvait dire que les accusés ne savaient pas ce que
3 faisaient les hommes d'Arkan et quel penchant il avait pour une violence
4 extrême avant Bijeljina, on ne peut pas maintenant échapper à la
5 connaissance qu'on avait de lui après Bijeljina, parce qu'il en avait fait
6 une cible. C'était Zvornik.
7 Zvornik est une des villes qui se trouvent à la frontière orientale de la
8 Bosnie, séparée de la Serbie par la Drina. Il y a plusieurs ponts de la
9 ville qui relient la ville à Mali Zvornik, qui est une ville-sœur en
10 Serbie. Vous entendrez des témoins décrire comment pendant les semaines
11 avant la prise de contrôle, l'artillerie de la JNA depuis ses positions
12 qu'elle avait établies à Mali Zvornik, avait les fusils pointés en
13 direction de la Bosnie.
14 La prise de Bijeljina et de Zvorvik était due à une opération extrêmement
15 bien planifiée. Nous allons présenter tout ceci avec des transcriptions de
16 conversations téléphoniques interceptées, au cours desquelles Mme Plavsic
17 parle avec un des assistants d'Arkan et lui pose un certain nombre de
18 questions, lui demande comment les choses se sont passées à Zvornik, et lui
19 demande en fait de transmettre sa demande à Arkan pour que ceci soit
20 appliqué à une autre municipalité.
21 Un groupe de dirigeants serbes et musulmans de la région qui étaient des
22 hommes responsables à Zvornik ont essayé de maintenir la paix à Zvornik, au
23 cours d'une réunion au terme duquel ils avaient conclu un accord qui,
24 espéraient-ils, devait empêcher la violence. Arkan est entré en trombe dans
25 la pièce et a frappé des représentants serbes, les accusant en fait de
26 donner les terres serbes. On fait référence à ceci à la diapositive numéro
27 91, où "deux représentants avaient été passés à tabac avant cela."
28 Arkan s'est tourné vers le négociateur musulman et lui a donné un
Page 1037
1 ultimatum. Ceci se trouve en rouge en bas de la diapositive. Izet Mehinagic
2 racontera ces événements dans un télégramme désespéré qu'il envoie à
3 l'armée yougoslave, qui est le texte qui se trouve au-dessus du texte de
4 l'ultimatum sur cette diapositive.
5 Dans la soirée du 8 avril, la prise de contrôle avait déjà commencé. Les
6 hommes adultes ont été séparés, et au moins 20 civils ont été tués. Après
7 la prise de contrôle, les Musulmans de Zvornik qui avaient survécu ont été
8 soumis au règne de la terreur.
9 Des rapports comme celui que nous voyons à la diapositive numéro 92 ainsi
10 que d'autres que nous avons déjà vus, montrent l'efficacité dont faisait
11 preuve Arkan lorsqu'il s'agissait de réaliser les objectifs de l'entreprise
12 criminelle commune. Ceci indique également comment ils étaient les membres
13 essentiels de l'entreprise criminelle commune, et les hommes d'Arkan
14 étaient capables d'alimenter cette ferveur nationaliste serbe.
15 Kozluk est une petite ville qui se trouve dans les environs de Zvornik.
16 Après une prise de contrôle initiale, la population majoritairement
17 musulmane a essayé de trouver un accord à l'amiable avec les Serbes qui
18 étaient arrivés au pouvoir. Mais le 26 juin 1992, les Musulmans de Kozluc
19 ont dû partir, et c'est le maire serbe qui leur a demandé de partir. Voici
20 une liste de ceux qui ont dû partir que vous trouverez à la diapositive
21 numéro 93.
22 Le maire a dit aux Musulmans que s'ils ne partaient pas, il y aurait, et je
23 cite, "une attaque généralisée" qui serait lancée et qui tuerait tous les
24 Musulmans. Les Musulmans sont partis, mais pas avant que les autorités
25 serbes leur aient fait signer des papiers par le biais desquels ils
26 remettaient leurs maisons, leurs terres et tous leurs biens au nouveau
27 gouvernement serbe de Zvornik.
28 Les déportés ont ensuite été emmenés le long d'une route que l'on voit ici
Page 1038
1 en bleu sur cette diapositive, en direction de la Hongrie. Lorsque les
2 autorités hongroises ne leur ont pas permis d'entrer parce qu'ils ne
3 disposaient pas de passeports, on a remis aux déportés à ce moment-là des
4 passeports serbes, à savoir c'étaient des citoyens bosniaques à qui on a
5 remis des passeports serbes. Vous vous souviendrez que parmi une des
6 fonctions d'un ministère ou des fonctions du ministère des Affaires
7 intérieures, c'est justement le contrôle des passeports.
8 Vojislav Seselj était un membre essentiel de l'entreprise criminelle
9 commune, président du Parti radical serbe, qui avait créé le Mouvement
10 chetnik-serbe et qui avait envoyé ses volontaires dans des zones de conflit
11 en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.
12 Dans une interview qui a été filmée par la BBC, Vojislav Seselj décrit
13 l'implication de Simatovic dans la planification de la prise de contrôle de
14 Zvornik. Je vais maintenant demander à ce que l'on montre la vidéo de la
15 diapositive numéro 96, s'il vous plaît.
16 [Diffusion de la cassette vidéo]
17 M. DOCHERTY : [interprétation] Une des raisons pour laquelle Zvornik était
18 une des municipalités qui a été choisie par l'Accusation, c'est que cette
19 dernière démontre très clairement l'intention des principaux membres de ce
20 groupe, ce groupe d'auteurs et ils partageaient cette même intention. Les
21 excès commis contre la population musulmane de Zvornik s'étaient
22 transformés en un véritable chaos. Même les Serbes n'étaient pas à l'abri
23 de ces criminels lorsqu'on les lâchait en toute impunité dans les
24 municipalités, comme on peut le voir dans le rapport qui se trouve à la
25 diapositive numéro 97.
26 Dans un rapport rédigé par le colonel Zdravko Tolimir à propos de tous les
27 événements qui se sont déroulés sur l'ensemble de la Bosnie le 28 juillet
28 1992, il a soulevé la question devant ses supérieurs hiérarchiques et a
Page 1039
1 évoqué les hommes qui avaient commis des crimes aussi graves à Zvornik.
2 Ici dans la diapositive numéro 98, il identifie les hommes d'Arkan, les
3 hommes de Dragan et les hommes de Seselj, qu'il cite au mémo.
4 Il décrit ces trois groupes. Il indique qu'ils se composaient d'un grand
5 nombre de criminels, certains d'entre eux à caractère pathologique.
6 Il déclare que ces formations "font preuve de haine contre les peuples non-
7 serbes et on peut en conclure sans autre réserve qu'ils constituaient un
8 élément génocidaire parmi la population serbe."
9 Il continue en disant : "Le butin de guerre et le pilage sont les
10 principaux motifs pour une grande majorité de ces paramilitaires."
11 Il énumère un butin dont la valeur correspond à quelque 30 à 40 million de
12 marks allemands qui ont été volés dans la zone de Srebrenica et Skelani.
13 A la fin du mois de juillet 1992, il y a eu des représailles contre les
14 forces paramilitaires de Zvornik. En réalité, la DB serbe allait participer
15 à une enquête sur ces unités paramilitaires. Deux dirigeants
16 paramilitaires, les frères Vukovic à la tête des Guêpes jaunes, feraient à
17 terme l'objet d'une enquête et seront arrêtés par le MUP serbe.
18 Les deux accusés ont contribué aux objectifs de l'entreprise criminelle
19 commune à la façon dont c'est décrit dans la case qui se trouve en haut à
20 droite de cette diapositive, et ce faisant, se sont rendus pénalement
21 responsables individuellement pour les crimes commis à Zvornik.
22 Tous les éléments de l'entreprise criminelle commune, à l'exception
23 de ceux de la République de la Krajina serbe qui se trouve complètement à
24 gauche de ce diagramme, ont participé d'une manière ou d'une autre à la
25 prise de contrôle et au nettoyage ethnique de Bijeljina et de Zvornik.
26 Bosanski Samac. Bosanski Samac, que l'on voit ici sur la diapositive 101 se
27 trouve le long de la Save au nord-est de la Bosnie, a eu le malheur de
28 figurer parmi ces terres prises pour cible par les Serbes et se trouvait
Page 1040
1 pris entre cette partie orientale à la Bosnie et la région de la Krajina.
2 Un nettoyage ethnique couronné de succès de Bosanski Samac permettait de
3 réaliser les premier et deuxième objectifs, à savoir la séparation des
4 communautés ethniques et la mise en place d'un corridor, le corridor de la
5 Posavina comme cela a été connu sous son nom plus tard.
6 Au début de l'année 1992, la cellule de Crise serbe de la municipalité de
7 Bosanski Samac a envoyé 20 hommes de la région pour qu'ils soient formés
8 dans le camp d'entraînement des Bérets rouges à Ilok. Ces hommes venaient
9 de terminer leur entraînement au camp des Bérets rouges à Ilok lorsque la
10 prise de contrôle de Bijeljina et Zvornik a commencé. Ils ont été
11 aéroportés jusqu'à Bosanski Samac à bord d'hélicoptères de la JNA sur
12 lesquels se trouvaient 30 hommes de Seselj. Avant de quitter cet endroit,
13 ils ont été briefés par M. Simatovic.
14 Le lendemain après l'annonce d'Arkan qui indiquait qu'il avait terminé avec
15 sa tâche à Zvornik, ils ont commencé leur attaque contre Bosanski Samac.
16 Parmi ces 50, il y en avait d'autres qui avaient été formés par la DB serbe
17 qui travaillaient avec eux pour prendre le contrôle de la ville. Slobodan
18 Miljkovic, alias Lugar, était là également; il y avait aussi Dragan
19 Djordjevic, alias Crni, et Srecko Radovanovic, alias Debeli, et un groupe
20 d'hommes de Serbie.
21 Comme ce rapport sur la diapositive 102 l'indique, Crni un des dirigeants
22 et auteurs des crimes commis à Samac en réalité a été arrêté et ce qui est
23 arrivé après son arrestation indique clairement quels rôles ont joué
24 Simatovic et Stanisic après la prise de contrôle de Samac.
25 Un autre rapport ici sur la diapositive numéro 103 résume le type de
26 crimes, disons, dont on a pensé que Crni et ses hommes ont été les auteurs.
27 Ici, des allégations plus particulières comprennent le meurtre et le
28 pillage de voitures chères.
Page 1041
1 Un dirigeant serbe de la région, en constatant que Crni ne pouvait plus
2 participer à des efforts pour nettoyer de façon ethnique Samac, s'est rendu
3 dans le bâtiment du MUP serbe à Belgrade à la recherche de Franko
4 Simatovic. Il avait l'intention de demander à voir M. Simatovic pour
5 essayer de faire libérer Crni par la police militaire. Il n'a pas pu
6 trouver M. Simatovic et dans le parking il a vu par hasard Jovica Stanisic
7 et il s'est approché de lui et lui a expliqué quel était son problème. M.
8 Stanisic lui a dit qu'il s'en occuperait et lui enverrait un télex par le
9 biais de l'armée. Peu de temps après, Crni a été remis en liberté et a
10 continué à commettre ses crimes.
11 Pour essayer de comprendre comment Crni, un homme dont les excès ont
12 conduit à son arrestation par l'armée serbe de Bosnie puisqu'il combattait
13 le long de ces derniers, comment pouvait-il être aussi rapidement remis en
14 liberté, je crois que le mieux c'est de regarder un rapport établi par les
15 autorités militaires de la région. C'est ainsi qu'on arrive à bien
16 comprendre pourquoi ceci est arrivé.
17 Dans ce document sur la diapositive numéro 104, l'auteur fait quelques
18 observations sur les crimes qui ont été commis au nom des Serbes et qu'il
19 compare aux crimes commis contre les Serbes pendant la Deuxième Guerre
20 mondiale.
21 Les faits relatifs à la remise en liberté de Crni se trouvent dans le
22 rapport de la police de Bosnie à la diapositive numéro 105.
23 L'Accusation accuse ces deux accusés pour avoir contribué à la réalisation
24 des objectifs de l'entreprise criminelle commune à la façon dont c'est
25 indiqué dans les cases ici en haut à droite de la diapositive du numéro
26 106. Ce faisant, ils se sont rendus pénalement responsables des crimes
27 commis à Bosanski Samac.
28 Comme à Bijeljina et à Zvornik, tous les éléments de l'entreprise
Page 1042
1 criminelle commune sont réunis hormis les crimes commis de la République
2 serbe de Krajina.
3 Avant la guerre, la population de Bosanski Samac correspondait à 29,8 % de
4 la population était croate, 8,7 % était musulmane. Après la guerre, ces
5 chiffres sont tombés à 1,9 % pour les Croates et 1,3 % pour les Musulmans.
6 Doboj. Comme Samac et Brcko, ces municipalités avaient non seulement des
7 populations non-serbes importantes que l'on devait déplacer mais ces
8 endroits se trouvaient également dans le corridor ou le pont terrestre qui
9 devait être créé entre les territoires pris pour cible à l'ouest de la
10 Bosnie et ceux qui avaient été visés à l'est.
11 Plus de 15 000 Musulmans ont fui Doboj pendant la prise de contrôle. Quand
12 la guerre a commencé, la municipalité de Doboj comptait 30 % de Musulmans,
13 11,5 % de Croates et 50 % de Serbes. A la fin de la guerre, il y avait 0,6
14 % de la population qui était musulmane, 1,5 % qui était croate, et 92,5 %
15 de la population qui était serbe.
16 Avant la prise de contrôle de Doboj, des hommes qui figuraient sur une
17 longue liste des paramilitaires de Doboj ont commencé à converger en
18 direction de Doboj, y compris les hommes de Martic qui venaient de Krajina.
19 Tandis qu'Arkan commandait ses propres hommes, les hommes de Seselj avaient
20 leur propre commandant, les hommes restant étaient appelés les Bérets
21 rouges et étaient commandés par Rajo Bozovic, un colonel des unités
22 spéciales de la DB serbe.
23 La prise de contrôle de Doboj s'est terminée le 3 mai 1992. Cette force
24 puissante, bon nombre d'entre eux ont été formés et équipés par MM.
25 Stanisic et Simatovic, a pu rapidement prendre le contrôle de la
26 municipalité dont la population de 102 549 personnes couvrait quelque 684
27 kilomètres carrés.
28 Lorsque la ville était définitivement entre les mains des Serbes, la
Page 1043
1 campagne de persécutions contre les Musulmans de Doboj a commencé à l'image
2 de ce qui à l'époque était connu comme étant la signature de ces unités :
3 les passages à tabac, des arrestations arbitraires, des interrogations et
4 des meurtres. Des maisons non-serbes ont été fouillées de façon agressive
5 et endommagées, et il était très clair que les familles non-serbes qui
6 avaient vécu à Doboj depuis des générations avaient plutôt intérêt à
7 partir.
8 Les civils non-serbes de Doboj ont été emmenés en détention et logés dans
9 différents centres de facilité de fortune à Doboj et dans ces environs. Par
10 exemple, quelque 200 personnes ont été emprisonnées dans une discothèque.
11 Dans ces centres, des détenus ont été passés à tabac et certains
12 prisonniers devaient sortir et certains d'entre eux étaient exécutés de
13 façon sommaire. Des prisonniers musulmans ont été contraints à manger du
14 porc, ce qui était contraire à leur religion. Des actes d'une vulgarité
15 exemplaire, les prisonniers ont dû faire des actes sexuels les uns sur les
16 autres.
17 Le 12 juillet 1992, environ 50 détenus ont été emmenés de la discothèque et
18 utilisés comme boucliers humains. Ces détenus ont été placés à l'avant des
19 lignes de front serbes, on les a fait marcher en direction de la ligne de
20 front de l'ABiH. Lorsque les détenus hésitaient, un Serbe tirait sur un des
21 détenus à la tête pour encourager les autres à avancer. Lorsque les soldats
22 bosniaques ont commencé à demander aux détenus de les faire avancer pour
23 qu'ils se dirigent vers la ligne de front bosniaque, les détenus ont
24 commencé à courir. Les Serbes ont alors tiré sur eux, en tuant 27 de ces
25 boucliers humains.
26 La campagne des Bérets rouges fut si décisive et si absolue à Doboj que les
27 personnes qui se trouvaient dans la municipalité avoisinante de Teslic l'a
28 considérée comme une campagne exemplaire, tel que cela est indiqué dans le
Page 1044
1 rapport qui figure à la diapositive 108.
2 Il s'agit de seulement quatre des zones municipales parmi les nombreuses
3 zones municipales qui furent capturées par les Serbes de Bosnie lors du
4 printemps et de l'été de l'année 1992. Ces captures ont été caractérisées
5 par la précision de leur exécution et la brutalité des événements.
6 L'Accusation avance que les deux accusés ont apporté leur contribution pour
7 que les objectifs de l'entreprise criminelle commune soient couronnés de
8 succès, et ce, tel que cela est indiqué dans l'encadré qui se trouve à la
9 droite de la diapositive 109, et de ce fait, ont une responsabilité
10 criminelle personnelles individuelle pour les crimes qui ont été commis à
11 Doboj.
12 Et cela est différent des municipalités précédentes, l'Accusation avance
13 que les hommes de Martic ont une participation directe dans ces actes et
14 que cela implique également la responsabilité pénale individuelle des
15 accusés.
16 J'en ai terminé. Je vais redonner la parole à mon collègue, Monsieur
17 Groome.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous en prie, Monsieur
19 Groome.
20 M. GROOME : [interprétation] Le plan criminel global fut un succès et
21 nombreuses sont les municipalités qui furent placées sous le contrôle serbe
22 lors du printemps de l'année 1992. Alors pour inscrire les crimes commis
23 dans ces quatre municipalités dans le contexte du plan global de
24 l'entreprise criminelle commune, il est utile de consulter une série de
25 cartes qui se trouvent sur les diapositives 110 à 107, et qui montrent
26 suivant un ordre chronologique la prise de territoire ainsi que le rôle
27 jouée par les deux accusés dans cette prise de territoire. Le contrôle
28 serbe s'est effectué de façon rapide et exhaustive et organisée sur le
Page 1045
1 territoire en Bosnie-Herzégovine, et cela est la preuve de l'existence et
2 de l'efficacité de l'entreprise criminelle commune.
3 Ce processus de capture a commencé lorsque Arkan est entré dans Bijeljina
4 la nuit entre le 31 mars et le 1er avril. Lors de cette première semaine,
5 plus d'une douzaine de municipalités ont été conquises et placées sous le
6 contrôle serbe. Alors que certaines de ces municipalités telle que Tito
7 Drvar étaient essentiellement serbes et que le contrôle s'est
8 essentiellement fait lorsqu'il y a eu changement d'allégeance vis-à-vis de
9 Sarajevo pour faire en sorte que cela soit fait à Pale, dans d'autres
10 municipalités, telle que Bijeljina, ces municipalités ont été conquises par
11 la force armée et après que des crimes particulièrement odieux ont été
12 commis à l'encontre de la population civile.
13 Lors de la deuxième semaine, il faut savoir que ces prises se sont
14 concentrées sur la vallée de la Drina et dans ces endroits en Bosnie
15 orientale, tels que Visegrad, Foca, et Sekovici. Comme vous l'avez déjà
16 entendu, MM. Stanisic et Simatovic ont joué un rôle direct dans la prise de
17 Zvornik et dans l'expulsion de la population musulmane qui était assez
18 nombreuse.
19 En Bosnie centrale, la municipalité de Teslic est tombée durant la deuxième
20 semaine du mois d'avril.
21 Ici, sur la diapositive 113, nous voyons que lors de la troisième semaine,
22 après qu'Arkan ait indiqué que son travail serait terminé à Zvornik, les
23 unités spéciales de la DB serbe ont commencé à porter leur attention vers
24 la municipalité de Bosanski Samac.
25 Ces prises se sont poursuivies le long de la Drina avec Bratunac, et avec
26 sa voisine Foca vers l'ouest, vers Kalinovik occidentale. Vogosca, qui
27 faisait partie de la grande région de Sarajevo, devait tomber, passer sous
28 le contrôle serbe cette semaine.
Page 1046
1 Pour ce qui est de la partie nord-ouest de la Bosnie en Krajina de la
2 Bosnie, le contrôle serbe s'est fait avec force et contrainte et nous y
3 retrouvons les crimes caractéristiques à Bosanski Novi et à Sanski Most.
4 Les Serbes ont continué à conquérir des territoires en Krajina au cours des
5 derniers jours du mois d'avril lorsque Prijedor, là où certains des crimes
6 les plus odieux ont été commis, est tombée. Le contrôle serbe a également
7 été assuré sur Mrkonjic Grad et sur de grandes parties de Bosanska Krupa,
8 ce qui fait que la frontière entre les territoires contrôlés par les Serbes
9 et les rives du fleuve Una étaient reliées, ce qui vous en souviendrez
10 correspondait au quatrième objectif stratégique. La campagne au sein de la
11 vallée de la Drina s'est poursuivie avec la prise de Vlasenica et le siège
12 de Sarajevo. Et en préparation de ce siège, la campagne s'est rapprochée
13 avec la prise d'Ilijas [phon].
14 A la fin du mois d'avril au cours de cette période de 30 jours, 35
15 municipalités étaient tombées, avaient été conquises, ce qui représentait
16 une moyenne de plus d'une municipalité par jour.
17 Avec la cadence de ces prises, il faut savoir qu'il y a eu un
18 ralentissement au cours des mois suivants. L'accusé a envoyé le colonel
19 Bozovic avec d'autres membres des unités spéciales pour opérer une percée
20 au niveau de Doboj, une municipalité essentielle pour le couloir de la
21 Posavina, et ce, afin justement de forger un pont entre la Serbie et les
22 territoires détenus par les Serbes dans les zones de la Krajina en Bosnie-
23 Herzégovine occidentale et en Croatie. Le siège autour de Sarajevo sera
24 complet avec la prise de Hadzici, Trnovo et Ilidza en mai.
25 Avec la chute de Rogatica et de Rudo, la prise de ces municipalités le long
26 de la frontière orientale en Bosnie se termine à l'exception de Srebrenica.
27 En mai, trois municipalités supplémentaires de la Krajina de la Bosnie sont
28 également tombées.
Page 1047
1 Au mois de juin, l'essentiel des captures s'est déplacé vers les parties
2 sur de la Bosnie où Nevesinje, Bileca, et Ljubinje, sont tombées sous le
3 contrôle serbe ainsi que Trebinje à l'exception de la partie sud de Ravno,
4 qui était placée à l'époque sous le contrôle des forces croates. A la fin
5 de l'été avec la prise de Derventa et Odzak, plus de 50 municipalités ont
6 été placées sous contrôle serbe, et ce, afin de faire en sorte que puisse
7 fonctionner le corridor de la Posavina.
8 Les deux cartes que vous avez à l'écran, la diapositive 118, sont des
9 cartes démographiques, l'une datant d'avant 1991 avant la campagne de
10 nettoyage ethnique de 1992, et l'une de 1997 après la campagne.
11 La carte 119 vous permet -- alors vous pouvez observer les succès de
12 l'entreprise criminelle commune tel que cela est indiqué par les
13 modifications démographiques importantes.
14 Si vous regardez le long du corridor de la Posavina vous avez l'ovale
15 horizontal qui se trouve en haut de la carte, qui représente la cible du
16 deuxième objectif stratégique, et vous verrez qu'il y a eu une déplacement
17 important des populations tel que cela est indiqué par le changement de
18 couleur en rouge.
19 L'ovale vertical qui se trouve sur la droite de la carte représente la
20 vallée de la Drina, et une fois de plus, vous verrez qu'il y aurait eu
21 déplacement important, vous avez les couleurs qui représentent la
22 restructuration du paysage démographique passant de municipalités à
23 majorité musulmane ou municipalités mixtes en rouge vers des municipalités
24 serbes.
25 Ces prises et des crimes qui ont suivi ont provoqué des déplacements de
26 population de centaines de milliers de personnes. Presque 400 000 personnes
27 ont dû quitter sous la contrainte leurs foyers.
28 La carte de la diapositive 119 montre ce qui s'est passé après l'été de
Page 1048
1 1992. Certaines prises ont continué. Les municipalités en bleu clair
2 montrent les endroits où il y a eu preuve de la participation des unités
3 spéciales de la DB serbe. Les municipalités en bleu foncé indiquent les
4 municipalités où les deux accusés, on reproche aux deux accusés la
5 commission de crimes.
6 Vous avez ensuite un autre chef d'inculpation dans l'acte d'accusation qui
7 vise les crimes graves qui ont été commis vers la fin du conflit en 1995.
8 Il serait inexact que la Chambre en conclut que la participation de MM.
9 Stanisic et Simatovic en Bosnie est passé par un creux de la vague, bien
10 que lors de cette période, ils aient participé à des opérations conjointes
11 conçues afin de conserver les terres ciblées qu'ils avaient saisies en
12 1992, et afin de résister aux tentatives déployées par le gouvernement de
13 la Bosnie pour recapturer ses territoires.
14 Vous entendrez des éléments de preuve de la participation des accusés
15 en Bosnie entre 1992 et 1995, essentiellement à partir d'un QG qu'ils
16 avaient établi à Banja Basta en Serbie, juste de l'autre côté de la
17 frontière avec la Bosnie.
18 J'aimerais maintenant attirer l'attention de la Chambre sur les crimes
19 reprochés dans l'acte d'accusation, crimes portant sur Trnovo. Certains
20 faits se sont déroulés à Srebrenica en juillet 1995 et ont fait l'objet de
21 différents procès dans ces mêmes prétoires. Je ne reviendrai pas là-dessus.
22 Ils sont de notoriété publique.
23 Nous savons quel a été le massacre des hommes musulmans, et les deux
24 accusés, ils sont religieux, je ne vais pas donc les répéter.
25 Les deux accusés ici sont inculpés du décès ou de la mort de trois garçons
26 et de trois hommes dont le meurtre a été filmé. Afin que vous compreniez
27 pourquoi l'Accusation avance que MM. Stanisic et Simatovic sont
28 responsables de la mort de ces six personnes, nous devons examiner ce qui
Page 1049
1 s'est passé dans une autre région du pays avant Srebrenica.
2 J'aimerais attirer votre attention sur le coin nord-ouest de la Bosnie, qui
3 figure à la diapositive 121, un endroit appelé la poche de Bihac, qui en
4 1993 avait une population d'environ 300 000 personnes, essentiellement
5 composée de Musulmans.
6 Son chef local, un homme musulman répondant au nom de Fikret Abdic, a
7 essayé de s'extirper de la guerre en Bosnie en voulant se dissocier du
8 gouvernement de la Bosnie et en concluant une alliance assez malencontreuse
9 avec Milosevic à Belgrade.
10 Donc en octobre 1993, Abdic a troqué sa guerre avec la Croatie et la
11 Serbie contre une guerre avec ses frères bosniens à Sarajevo, et peu de
12 temps, l'armée de la Bosnie a engagé ou s'est engagé dans des combats
13 contre les hommes mal équipés et mal entraînés d'Abdic.
14 Abdic s'est tourné vers Milosevic pour lui demander de l'aide, et très
15 rapidement Milosevic a réagi en envoyant MM. Stanisic et Simatovic en la
16 poche Bihac pour commander une opération appelée Pauk ou araignée.
17 Milosevic a envoyé les deux hommes sur lesquels il pouvait compter pour
18 cette mission. Stanisic a amené avec lui les hommes dont il était devenu
19 tributaire lors de ses opérations dissimulées dans le reste de la Bosnie,
20 les unités spéciales de la DB serbe dirigées par le colonel Bozovic,
21 Legija, le capitaine Dragan, Arkan. Ils ont établi leur QG sur le mont
22 Petrova Gora dans la Krajina.
23 Le journal de bord décrit ici à la diapositive 122 l'un des commandants de
24 l'opération Pauk qui montre un certain nombre de références à M. Simatovic,
25 et une parmi plusieurs références, faisant référence à M. Stanisic.
26 Les unités spéciales de la DB serbe devaient rejoindre l'armée de la
27 Krajina serbe, ainsi que les hommes d'Abdic. Deux sur trois de ces groupes
28 tactiques ont formé avec ces forces conjointes et ont été placés sous le
Page 1050
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 1051
1 commandant direct des unités spéciales de la DB serbe. Le second groupe
2 tactique a été placé sous le commandement de Legija, et le troisième groupe
3 tactique a été placé sous le commandement du colonel Rajo Bozovic, les
4 Skorpions, faisant partie du groupe tactique de Legija.
5 Les Skorpions ont dans un premier temps été formés après la chute de
6 Vukovar, à la suite d'une demande présentée par la compagnie pétrolière
7 Djeletovci, demande présentée à Milan Milanovic, un ministre de la SAO de
8 la SBSO. Son commandant, Slobodan Medic, était aussi connu sous le nom de
9 Boca. La mission de cette unité consistait à protéger les champs
10 pétrolifères à Djeletovci; une tâche qui parfois était partagée avec les
11 hommes d'Arkan. Cette unité a rapidement crû pour inclure plusieurs
12 centaines d'hommes. La DB serbe a fourni aux Skorpions un matériel
13 important et a rémunéré les soldes de ses membres, et ce, en argent
14 comptant. Environ 30 % de ses membres avaient été formés dans l'un des
15 camps d'entraînement de la DB serbe à Kula, au Mont Tara, à Lipovaca et
16 Golubic. Ces membres ont également reçu des papiers d'identification les
17 identifiant comme des membres de la DB serbe. Milanovic était
18 l'intermédiaire entre Medic et Simatovic et Stanisic. En 1996, après la
19 guerre, certains membres de cette unité sont restées aux services de la DB
20 serbe et ont rallié la JSO.
21 [Diffusion de la cassette vidéo]
22 M. GROOME : [interprétation] Les deux hommes que vous voyez sur la vidéo de
23 la diapos 123 sont Legija, dont vous avez déjà beaucoup entendu parler, et
24 Slobodan Medic, l'homme qui a donné l'ordre direct pour que soit tué les
25 six captifs de Trnovo.
26 Cette vidéo est très longue, et je ne vais pas demander à la Chambre
27 d'étudier toutes ses parties pertinentes maintenant, mais vous entendrez
28 Legija décider de ce qu'il allait faire des Musulmans capturés, et sa
Page 1052
1 décision, comme vous pouvez vous y attendre, est tout à fait conforme au
2 traitement qu'il a imposé aux non-Serbes dans d'autres zones du conflit.
3 M. Simatovic a mentionné cette participation à l'opération Pauk lors de son
4 discours prononcé en mai 1997 à Kula, lorsqu'il a dit : "En Bosnie
5 occidentale, l'unité a été l'épine dorsale de l'armée de Fikret Abdic."
6 L'opération Pauk devait se terminer en août 1995.
7 J'aimerais maintenant que l'on revienne à la Bosnie orientale. En juillet
8 1995, à l'époque où les Serbes de Bosnie ont décidé de reprendre la zone
9 protégée des Nations Unies de Srebrenica. A la fin du mois de juillet,
10 environ 8 000 hommes et garçons musulmans devaient être exécutés
11 sommairement. Il faut savoir que tous les meurtres n'ont pas été commis
12 dans les environs immédiats de Srebrenica.
13 En sus de leur présence dans la poche de Bihac, les unités spéciales de la
14 DB serbe étaient également présentes en Bosnie centrale. La participation
15 de la DB serbe est montrée en fait dans ce qui s'est passé à Srebrenica, et
16 cela a commencé un mois avant le massacre. A la fin du mois de juin, le MUP
17 serbe était actif et rassemblait les hommes serbes dont on croyait qu'ils
18 essayaient d'éviter le service militaire. La diapositive 24 [comme
19 interprété] est un document qui le montre, il s'agit du moral des soldats
20 serbes, moral qui était extrêmement battu en brèche à cette époque-là, et
21 il y avait une forte prévalence de désertion. Beaucoup parmi ces hommes
22 étaient passés en Serbie pour rester près de leurs familles ou pour se
23 cacher dans la foule des villes serbes.
24 Dans ce document particulier, Tomislav Kovac, qui était à l'époque ministre
25 adjoint, indique que le 23 juin il a donné à la VRS plus de 1 500 hommes
26 qui ont été placés en détention en Serbie et qui ont été remis au MUP de la
27 RS.
28 Même avec cette opération, dans le cadre de cette opération qui était
Page 1053
1 destinée à forcer des hommes en âge de combattre de se rendre sur les
2 lignes de front en Bosnie, Mladic et Karadzic en dépit de cette opération
3 avaient un besoin constant de soldats supplémentaires. A la fin du mois de
4 juin en 1995, une réunion a eu lieu au MUP de Serbie pour décider de la
5 réponse à apporter à une demande d'assistance qui avait été présentée par
6 le gouvernement de la Republika Srpska. Lors d'une réunion à laquelle ont
7 participé Arkan et Slobodan Medic, la décision fut prise que le nombre des
8 unités spéciales de la DB serbe, placées sous le commandement de Vaso
9 Mijovic, un commandant supérieur des unités spéciales de la DB serbe,
10 devraient se rendre en Bosnie pour aider à combattre contre l'armée de
11 Bosnie.
12 J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 125. Il s'agit en
13 fait d'un extrait de la vidéo des Skorpions, qui montre leur arrivée à Pale
14 le 26 juin. Après la cérémonie religieuse, je vous montre le début de cette
15 cérémonie qui s'est déroulée à Djeletovci. Il y a un grand groupe qui s'est
16 déplacé à Pale dans la zone contrôlée par les Serbes juste en dehors de
17 Sarajevo.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 M. GROOME : [interprétation] Comme vous le voyez dans l'extrait de ce
20 rapport en bas de la diapositive 125, un rapport du MUP de la RS répertorie
21 leur arrivée et le déploiement planifié sur le champ de batille de Trnovo
22 le lendemain.
23 La carte de la diapositive 126 montre les relations entre Pale, Trnovo,
24 Sarajevo et Jahorina. La station de ski de Jahorina a été utilisée comme
25 poste de commandement. Lors de ce procès, vous comprendrez l'ampleur de
26 cette opération en voyant des vidéos de Jahorina, et vous verrez la
27 présence de nombreux paramilitaires rassemblés à Jahorina.
28 L'une des méthodes qui nous permet de remonter, de tracer la présence des
Page 1054
1 unités spéciales de la DB serbe, consiste à voir qu'ils ont été très
2 souvent victimes, et qu'il y ait des pertes parmi leurs rangs dans la zone
3 de Trnovo. La diapositive numéro 127 montre une charte, un résumé de
4 certains des documents que l'Accusation présentera pour établir la présence
5 pendant cette période des unités spéciales de la DB serbe.
6 J'aimerais également vous présenter un autre membre des unités spéciales de
7 la DB serbe. Il s'agit de Vaso Mijovic. C'est lui qui commandait les unités
8 spéciales de la DB serbe alors qu'elles étaient en opération à Trnovo et à
9 l'extérieur de Trnovo.
10 Alors que Srebrenica devait tomber le 11 juin [comme interprété], une
11 colonne de 10 000 à 15 000 hommes et garçons musulmans de Bosnie s'est
12 enfuit. La colonne fut frappée par l'artillerie serbe de Bosnie le 12, et
13 parmi les survivants à ces salves d'artillerie, plusieurs milliers ont été
14 capturés. Ces prisonniers ont été systématiquement exécutés en un certain
15 nombre de lieux entre le 13 et le 17 juillet 1995. Certaines des personnes
16 capturées ont été réparties pour être exécutées à l'extérieur de la zone de
17 Srebrenica. Environ 15 captifs ont été donnés aux Skorpions pour qu'ils
18 aient davantage de personnes à tuer. Certains de ces prisonniers ont été
19 livrés aux Skorpions à leur base à Trnovo.
20 La diapositive 129 montre un rapport de Mijovic, vous voyez sur l'en-tête
21 qu'il est question des unités spéciales de la DB serbe, à cette époque,
22 officiellement appelée l'unité pour les opérations antiterroristes ou la
23 JATD. Et le 19 juillet, Mijovic a indiqué à ses homologues du ministère de
24 la Republika Srpska des Affaires intérieures qu'il avait reçu l'ordre de se
25 retirer de la zone de combat "pour exécuter d'autres missions." Alors le
26 rapport n'indique pas quelles étaient ces autres missions, mais nous savons
27 que cela s'est passé pendant la période où ces six personnes capturées ont
28 été tuées.
Page 1055
1 Slobodan Medic et un groupe de Skorpions ont placé six de ces personnes
2 capturées dans un camion, et ils les ont conduits vers un endroit isolé
3 près de Trnovo pour les tuer.
4 Medic a donné l'ordre que cela soit filmé. La diapositive 130
5 contient un extrait assez bref de cette vidéo qui n'inclut pas d'ailleurs
6 les exécutions.
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 M. GROOME : [interprétation] Les Skorpions ont insulté les prisonniers,
9 leur ont donné des coups de pied, ont persiflé le plus jeune en disant
10 qu'il mourrait puceau. Les six qui savaient très certainement qu'ils
11 étaient sur le point de mourir ont dû attendre pendant que le chauffeur de
12 camion s'est rendu en ville pour acheter ou pour se procurer une nouvelle
13 pile pour le caméscope.
14 Une fois que le caméscope a été prêt, quatre des prisonniers ont dû
15 s'aligner debout alors que les deux autres ont dû rester par terre dans
16 l'herbe. Ils ont ensuite tiré sur ces quatre personnes qui étaient debout
17 l'un après l'autre. Après qu'ils ont tiré dans le dos de la première
18 personne, les autres ont dû marcher jusqu'à l'endroit où la victime
19 précédente venait de tomber et ils devaient attendre.
20 Pendant que certaines des victimes agonisaient dans l'herbe, des tirs
21 supplémentaires ont été tirés dans leurs têtes pour s'assurer qu'ils ne
22 survivraient pas.
23 Les deux personnes qui étaient par terre dans l'herbe ont dû transporter
24 les cadavres dans une maison se trouvant très près. Les Skorpions ont
25 ensuite tué ces deux personnes.
26 Dans ce rapport du 24 juillet 1995 qui figure sur la diapositive 131, nous
27 voyons en fait qu'il s'agit d'un rapport de rotation une fois que les
28 Skorpions sont revenus, ont repris leurs fonctions régulières.
Page 1056
1 Et là nous avons le commandant d'état-major qui remarque que la rotation
2 des troupes entre la police spéciale de Banja Luka et les Skorpions s'est
3 bien passé.
4 L'Accusation avance, tel que cela est indiqué dans la diapositive 132, que
5 les Skorpions étaient l'une des unités de la DB serbe et que les accusés
6 sont pénalement responsables du meurtre de ces trois hommes et de ces trois
7 garçons à Trnovo. En l'espèce, ces membres des unités de la DB étaient
8 placés sous le commandement d'un officier supérieur de la DB, Vaso Mijovic
9 qui les ont mis à la disposition de Karadzic, Mladic et d'autres membres
10 essentiels de l'entreprise criminelle commune pour qu'ils commettent des
11 crimes afin de promouvoir leur entreprise criminelle commune.
12 A la même période, Arkan se trouvait dans la municipalité de Sanski Most.
13 Il était là essentiellement pour faire peur aux déserteurs de l'armée serbe
14 de Bosnie, il fallait donc que les lignes de front soient assurées contre
15 les forces croates qui étaient en train de reconquérir certains des
16 territoires perdus aux Serbes en 1992. Et nous pouvons voir dans ce rapport
17 de la diapositive 134 que M. Stanisic était en contact direct avec Arkan à
18 ce sujet.
19 Alors que dans la municipalité de Sanski Most, un endroit qui après 1992 où
20 il restait très peu de Musulmans, et lorsqu'il se trouvait dans cette
21 municipalité une fois de plus il s'est caractérisé par ses crimes
22 particulièrement brutaux. Sa présence s'inscrivait dans le cadre d'une
23 opération plus importante de la DB serbe et qui englobait non seulement
24 Sanski Most mais également Kljuc, Prijedor et Mrkonjic Grad. A cette
25 mission coordonnée ont participé les unités spéciales de la DB serbe
26 commandées par Bozovic et les Tigres d'Arkan se trouvaient sous son
27 commandement.
28 A la mi-1995, il y a eu des progrès effectués par l'armée de la Bosnie-
Page 1057
1 Herzégovine qui menaçait de reprendre Sanski Most aux Serbes. Pour empêcher
2 cela, les Tigres d'Arkan ont été envoyés à Sanski Most.
3 Le 19 septembre, les Tigres d'Arkan sont arrivés en grand nombre et ont
4 rassemblé les quelques Musulmans qu'ils pouvaient trouver. Ils les ont
5 emprisonnés dans l'hôtel Sanus dans des conditions absolument abominables.
6 Une trentaine d'entre eux se trouvaient dans la pièce où se trouvait la
7 chaudière de l'hôtel; une pièce dont on les faisait sortir de temps à autre
8 afin de les rouer de coups; deux détenus sont morts à la suite de ces
9 brutalités.
10 Le 20 septembre 1995, les Tigres d'Arkan ont pris au moins 12 hommes dans
11 l'hôtel Sanus, les ont emmenés dans une maison qui se trouvait dans un
12 village avoisinant. Là les hommes ont tiré, ont abattu deux de ces hommes
13 d'une balle à la tête. Les deux dernières victimes ont eu leurs gorges
14 tranchées lorsque les hommes d'Arkan n'ont plus eu de balles.
15 Le 21 septembre, les Tigres d'Arkan ont pris un autre groupe d'environ 65
16 Musulmans qu'ils ont exécutés de la même façon. Plusieurs jours plus tard,
17 plusieurs centaines de détenus musulmans ont été placés dans un bus et
18 expulsés de Sanski Most.
19 Un mois plus tard, le 23 octobre 1995, à la suite des événements de Sanski
20 Most, Radovan Karadzic allait remettre publiquement une récompense à Arkan
21 qui quittait officiellement la Bosnie puisque son travail s'était achevé.
22 Il est ironique de constater que sa présence en Bosnie devait se terminer
23 en face du même hôtel de ville à Bijeljina où elle avait commencé cette
24 prison. J'aimerais attirer votre attention sur la diapositive 135 pendant
25 que vous allez regarder cet extrait vidéo.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 M. GROOME : [interprétation] L'Accusation sous-tend que les accusés ont une
28 responsabilité pénale pour les crimes commis à Sanski Most car Arkan était
Page 1058
1 un co-membre dans l'entreprise criminelle commune et un membre des unités
2 de la DB serbe. L'accusé a donné à Arkan un soutien et des fournitures
3 militaires dont il avait besoin pour perpétrer ces crimes.
4 L'Accusation sous-tend également qu'ils sont responsables car ils ont fait
5 en sorte que les membres des unités spéciales de la DB serbe placés à la
6 disponibilité des autres membres de l'entreprise criminelle commune et dans
7 ce cas-ci Radovan Karadzic qui les a dirigés, il les a instruits à
8 commettre des crimes.
9 Après l'attaque de l'OTAN, les troupes de Mladic ont tenu des
10 "peacekeepers" des Nations Unies et les ont gardés en otage. Milosevic a
11 immédiatement, reconnaissant le problème dans lequel se trouvait la Serbie,
12 a envoyé Stanisic pour intervenir, il l'a instruit d'aller avec Simatovic
13 sous l'autorité de Milosevic et de revenir avec les otages sans les avoir
14 touchés.
15 L'Accusation ne nie pas que Simatovic et Stanisic ont libéré certains
16 otages, ils les ont ramenés et peut-être sauvés leurs vies. Si la Chambre
17 de première instance les trouve responsables pour les crimes commis,
18 l'Accusation devra tenir compte des éléments atténuants.
19 Mais l'Accusation sous-tend, et il ne faut pas se tromper que
20 l'autorité qu'avait M. Stanisic et M. Simatovic ce jour-là, le jour où ils
21 ont décidé d'avoir cette autorité lorsqu'ils ont sauvé des vies, c'est
22 tragiquement la même autorité dont ils se sont servis au cours des quatre
23 années précédentes pour prendre les vies, de persécuter les innocents, et
24 de chasser les personnes de leurs demeures.
25 La raison pour laquelle M. Milosevic les a envoyés à cet endroit-là
26 au cours de cette crise d'otage, qui était un des événements le plus
27 explosif au cours de la guerre, alors que tous les yeux du monde étaient
28 rivés sur ce qui allait se passer sur ces forces de maintien de la paix des
Page 1059
1 Nations Unies, c'était parce qu'ils étaient en mesure de rentrer et de
2 sortir avec les otages auxquels on n'a pas fait de tort.
3 Maintenant je souhaiterais parler de la théorie de l'Accusation
4 concernant cette affaire.
5 L'acte d'accusation charge les deux accusés de crimes contre
6 l'humanité sanctionnés par la violation de l'article 5 du Statut du
7 Tribunal et de violations des droits et des coutumes de la guerre en
8 violation de l'article 3 du Statut.
9 La diapositive 137 est un résumé des allégations portées contre M.
10 Simatovic et M. Stanisic.
11 Les crimes contre l'humanité sont décrits dans les chefs 1, 2, 4, et 5 de
12 l'acte d'accusation et ils sont : crime 1, crime de persécution de
13 violation de l'article 5(h). Chef 2, assassinat en violation de l'article
14 5(a). Chef 4, déportation, crime sanctionné par l'article 5(d). En dernier
15 lieu, transfert forcé, l'un des actes inhumains sanctionné par l'article
16 5(i) du Statut du Tribunal.
17 Le crime de meurtre ou d'assassinat se trouve également englobé par le chef
18 d'accusation numéro 3 qui parle de meurtre en tant que reconnu par
19 l'article commun 3(1)(a) des conventions de Genève de 1949 et sanctionné en
20 vertu de l'article 3 du Statut du Tribunal.
21 L'Accusation sous-tend que les accusés sont individuellement et pénalement
22 responsables pour les crimes sanctionnés par l'article 7(1) du Statut et
23 qu'ils ont participé aux crimes de la façon suivante :
24 D'abord ils ont commis ces crimes en tant que membres et ont pris part à
25 une entreprise criminelle commune dont l'objectif et le but était de mener
26 à bien ces crimes.
27 Deuxièmement, ils ont pris part à la planification de ces crimes.
28 Troisièmement, ils ont ordonné que certains de ces crimes allégués dans
Page 1060
1 l'acte d'accusation soient commis.
2 Et quatrièmement, ils ont aidé et encouragé à la planification, à la
3 préparation, à l'exécution des crimes reprochés dans cet acte d'accusation.
4 Le Procureur sous-tend que les deux accusés ont fait partie de et ont aidé
5 à créer une entreprise criminelle commune, une entreprise criminelle
6 commune qui a été conçue au niveau le plus élevé du gouvernement de la
7 République de Serbie de concert avec les membres les plus importants des
8 régions affectées en Croatie et Bosnie-Herzégovine, une entreprise qui a
9 été faite et qui a mis en œuvre un plan criminel conçu pour sécuriser pour
10 les Serbes des terres qui se trouvaient en Croatie et en Bosnie-
11 Herzégovine.
12 Pour s'approprier ces territoires ciblés, cette entreprise criminelle
13 commune envisageait un déplacement de la population non-serbe de façon
14 rapide en commettant des crimes et en persécutant cette population.
15 L'Accusation sous-tend que ces membres importants de l'entreprise ont
16 partagé leur même objectif ce qui les a gardés ensemble, ce qui a harmonisé
17 leur contribution individuelle, ce qui a permis qu'ils travaillent ensemble
18 vers un but commun était l'intention criminelle partagée.
19 La jurisprudence reconnaît l'entreprise criminelle commune pour dire que
20 plusieurs formes peuvent exister de cette entreprise criminelle commune tel
21 que montré à la diapositive 103 [comme interprété].
22 Ces différentes formes reflètent les nuances qui existent entre les façons
23 diverses pour lesquelles les coauteurs peuvent concevoir et mettre en œuvre
24 leurs plans criminels.
25 Alors que l'actus reus de chacune de ces formes est essentiellement
26 identique, ils sont différents, ils peuvent se différer par la mens rea,
27 l'élément moral.
28 Les éléments de preuve que vous entendrez dans cette affaire correspondent
Page 1061
1 à deux formes d'entreprise criminelle commune.
2 L'entreprise criminelle commune I, dont on fait référence des fois en
3 l'appelant une forme de base, et un fait de responsabilité pénal pour ce
4 qui est des membres d'une entreprise criminelle commune qui s'adonnent à un
5 accord ou qui font partie d'un accord commun pour commettre ces crimes.
6 Alors que chacun de ces membres peuvent jouer un rôle différent lorsqu'il
7 s'agit de la commission de ces crimes, ils avaient néanmoins l'intention de
8 commettre ces crimes et ont contribué à la commission de ces crimes.
9 Ceci bien sûr est en contraste avec l'entreprise criminelle commune III,
10 qui est des fois appelée forme étendue, les crimes qui sont reprochés,
11 alors qu'ils ne font pas partie de l'intention du crime original nonobstant
12 le fait sont une conséquence de ce crime.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, vous devriez vous
14 approcher de la fin maintenant pour ce qui est de vos déclarations
15 liminaires. Je crois que votre temps s'écoulera à 16 heures 30.
16 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je pensais que j'avais
17 encore 15 minutes après la pause et ce qu'il me reste encore c'est une
18 partie très importante de mes déclarations liminaires.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons prendre une pause à 16
20 heures 30.
21 M. GROOME : [interprétation] Pour ce qui est de cette affaire en l'espèce,
22 d'abord il faut dire, et l'Accusation a une théorie principale, c'est que
23 Jovica Stanisic et Franko Simatovic étaient membres d'un groupe de
24 coauteurs principaux qui ont conçu les crimes qui sont reprochés à l'acte
25 d'accusation. En tout temps, ils avaient une intention partagée d'expulser
26 les non-Serbes par la force des régions désignées dans un effort
27 d'effectuer un changement démographique important pour la population.
28 L'intention qu'ils ont partagée n'est pas simplement l'intention de
Page 1062
1 déplacer ces groupes de non-Serbes ciblés par la force mais ils ont
2 également partagé l'intention de les tuer et de les persécuter comme moyen
3 de mettre en œuvre leurs objectifs.
4 Comment nous savons qu'ils ont partagé cette intention criminelle ? Nous
5 entendrons un très grand nombre d'éléments de preuve qui permettront à la
6 Chambre de conclure que les deux accusés ont partagé l'intention criminelle
7 de d'autres membres principaux tels Martic, Karadzic, Hadzic, Mladic. Je
8 vais vous donner un seul exemple.
9 A Zvornik, les combattants qui appartenaient à Seselj et à Arkan et un
10 groupe appelé les Guêpes jaunes faisaient tous partie ou étaient tous
11 engagés dans la commission de crimes graves. A cet endroit-là vous
12 entendrez des éléments de preuve vous permettant de comprendre que les
13 Guêpes jaunes étaient organisées par M. Stanisic et le service de sécurité
14 d'Etat serbe et que plus tard ces derniers avaient été arrêtés. Ils ont été
15 également jugés dans des tribunaux serbes pour les crimes qui avaient été
16 commis en Bosnie et ils ont été jugés. Alors qu'il était également adéquat
17 de mener une enquête contre les frères Vukovic, on se pose la question
18 pourquoi est-ce que les hommes de Seselj et les hommes d'Arkan n'ont pas
19 subi le même sort ? Non seulement des actions n'ont pas été prises, mais
20 vous verrez également que des crimes qui avaient été commis après Bijeljina
21 et Zvornik ont été organisés et soutenus par les deux accusés.
22 L'Accusation sous-tend que la seule conclusion raisonnable qui puisse être
23 tirée de ceci, c'est qu'Arkan et Seselj faisaient partie des membres
24 principaux de l'entreprise criminelle commune et que Stanisic et Simatovic
25 partageaient leur intention, à savoir de faire les crimes qui ont été
26 commis à Zvornik.
27 Monsieur le Président, est-ce que le moment est opportun pour prendre la
28 pause ?
Page 1063
1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, certainement. Nous allons
2 prendre une pause de 20 minutes.
3 --- L'audience est suspendue à 16 heures 27.
4 --- L'audience est reprise à 16 heures 58.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Knoops.
6 M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, avant que l'on ne
7 poursuive, je voudrais demander à l'Accusation s'ils se basent dans la
8 prononciation de leur ouverture liminaire, s'ils se basent sur le deuxième
9 acte d'accusation modifié et s'ils ont tenu compte ou s'ils ont anticipé en
10 fait le troisième acte d'accusation modifié. Je crois qu'il est important
11 pour la Défense de savoir ceci.
12 Comme vous le savez, Monsieur le Président, il y a une requête
13 pendante de la part de la Défense contre la proposition d'un acte
14 d'accusation modifié, le troisième acte d'accusation modifié. Maintenant
15 l'Accusation nous présente une théorie juridique outre le fait que selon
16 moi, une déclaration liminaire ne devrait pas parler de l'acte
17 d'accusation. Mais outre ceci, je voudrais demander à l'Accusation s'ils
18 pourraient nous dire si leur déclaration liminaire est basée sur le
19 deuxième acte d'accusation modifié et si dans la préparation de leur
20 discours liminaire ils ont anticipé les changements.
21 M. GROOME : [interprétation] Non, Monsieur le Président, tout ce que j'ai
22 dit est basé sur l'acte d'accusation qui est actuel dans cette affaire. Je
23 ne me suis pas basé sur un troisième acte d'accusation. Je voulais
24 simplement expliquer la théorie juridique de culpabilité et l'Accusation
25 s'est basée sur le deuxième acte d'accusation.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.
27 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui correspond
28 également et ce que l'on parle ici réellement c'est de l'entreprise
Page 1064
1 criminelle commune III. Les deux accusés ainsi que les deux autres membres-
2 clés de l'entreprise criminelle commune ont partagé une intention de
3 déplacer par la force des non-Serbes des régions désignées.
4 Sous cette théorie, même si la Chambre ne devait pas conclure que les
5 accusés ont partagé l'intention d'assassiner, de persécuter les Musulmans
6 et les Croates, ils doivent rester tenus responsables s'ils ont partagé
7 l'intention de déplacer ces non-Serbes par la force des régions ciblées et
8 s'ils ont accepté le risque que ceci pouvait entraîner, c'est-à-dire que ce
9 déplacement forcé de la population pouvait entraîner les meurtres et les
10 persécutions.
11 Dans ce contexte de cette affaire-ci les accusés se sont joints à
12 d'autres personnes ayant l'intention partagée de déplacer par la force les
13 personnes de leurs demeures et partagent la responsabilité pénale et
14 individuelle pour les crimes de persécution et de meurtre qui sont commis.
15 Tout comme j'ai dit un peu plus tôt, l'actus reus pour l'entreprise
16 criminelle commune I et pour l'entreprise criminelle commune III sont les
17 mêmes, il n'y a que quelques nuances différentes.
18 D'abord, il faut avoir une pluralité de personnes, et même si ces crimes
19 ont été commis par un très grand nombre de personnes, nous pouvons à toutes
20 fins pratiques seulement vous présenter des éléments de preuve concernant
21 les membres qui selon nous sont les membres-clés de l'entreprise criminelle
22 commune. Ce sont les personnes qui figurent dans le tableau que nous avons
23 montré très souvent dans le cadre de cette déclaration liminaire.
24 Troisièmement, c'est l'existence d'un but commun qui comprend la commission
25 d'un crime conformément au Statut. L'Accusation sous-tend que chacun des
26 crimes reprochés dans cet acte d'accusation avait été réalisé en tant
27 qu'objectif de l'entreprise criminelle commune.
28 Et le troisième élément de l'actus reus c'était que les accusés ont
Page 1065
1 participé ou ont pris part pour que cette entreprise criminelle commune
2 soit menée, pour que sa création aide de façon matérielle dans ses
3 exécutions.
4 Je vais maintenant vous présenter la diapositive numéro 143, qui peut vous
5 identifier quels étaient les actes de participation pour lesquels
6 l'Accusation, traitant que M. Simatovic et M. Stanisic étaient pénalement
7 responsables.
8 Pour ce qui est de la Krajina, l'Accusation sous-tend que leurs efforts
9 conjoints étaient d'organiser, de financer et d'équiper les hommes de
10 Martic et l'armée leur permettant de commettre les crimes sérieux qu'ils
11 ont commis contre la population non-serbe de la Krajina et que ceci faisait
12 partie d'une participation de l'entreprise criminelle commune globale.
13 Pour ce qui est de la SAO SBSO, l'Accusation prétend que les accusés ont
14 participé dans l'entreprise criminelle commune et qu'ils ont pu financer et
15 équiper les hommes d'Arkan et que ceci a permis la commission de ces crimes
16 directs.
17 Pour ce qui est de la Krajina et de la SAO SBSO, M. Stanisic ainsi que M.
18 Simatovic ont donné des directives aux dirigeants locaux politiques tout
19 comme Martic, Babic et Hadzic pour s'assurer que leurs activités politiques
20 également correspondaient aux objectifs communs.
21 En dernier lieu, même si à la fin de cette affaire, si la Chambre a
22 toujours un doute, à savoir si M. Simatovic et M. Stanisic auraient
23 directement financé et équipé Arkan, ils seraient quand même responsables
24 pour les crimes qui ont été commis, les crimes pour un autre co-membre de
25 l'entreprise criminelle commune. Si les Juges de la Chambre étaient
26 satisfaits au-delà de tout doute raisonnable, étaient convaincus au-delà de
27 tout doute raisonnable que ces derniers effectivement faisaient partie de
28 la même entreprise criminelle commune.
Page 1066
1 Pour ce qui est maintenant des municipalités bosniennes, M. Stanisic et M.
2 Simatovic ont joué un rôle pour ce qui est de la prise de ces municipalités
3 en 1992. L'Accusation sous-tend que leur acte de participation, qu'ils sont
4 coupables pour ce qui est de la participation dans cette entreprise
5 criminelle commune, donc planifier les attaques, de fournir la formation,
6 les armes, l'équipement et le financement. Dans certains cas, ils ont
7 également organisé un transport militaire pour les auteurs directs des
8 crimes.
9 Si la Chambre estime qu'elle ne peut pas conclure par les éléments de
10 preuve reçus qu'ils ont aidé directement et que c'étaient les dirigeants
11 des Serbes de Bosnie seuls qui les ont dirigés à commettre ces crimes,
12 l'Accusation prétend qu'en plaçant ces hommes et cet équipement à la
13 disposition d'un autre membre de l'entreprise criminelle commune pour qu'il
14 puisse s'en servir pour mettre à bien l'objectif commun de l'entreprise
15 criminelle commune comprend également une responsabilité.
16 Dernièrement, lorsqu'il s'agit d'un crime commis par un si grand
17 nombre de personnes, la jurisprudence de ce Tribunal dans le jugement dans
18 l'appel Brdjanin reconnaît que les personnes les plus responsables pour les
19 crimes sérieux sont très souvent les personnes qui sont très éloignées des
20 crimes et estiment que les membres les plus élevés de l'entreprise peuvent
21 et se servent d'autres personnes pour commettre directement les crimes
22 qu'ils entendent commettre, et ainsi ils sont responsables criminellement
23 finalement.
24 Sous cette théorie, les membres-clés d'une entreprise criminelle
25 commune partageant une intention commune de déplacer les non-Serbes se sont
26 servis d'autres personnes pour mettre à bien cet objectif pénal. Ceux dont
27 ils se sont servis n'ont peut-être pas partagé leur intention mais selon
28 cette théorie même l'absence d'une preuve d'intention partagée par ces
Page 1067
1 auteurs, ces inculpés sont pénalement responsables, car ils se sont servis
2 de ces personnes en tant qu'instruments de leur plan criminel.
3 Pour vous donner un exemple dans cette affaire, je souhaiterais vous
4 rappeler de ce que nous avons déjà dit concernant Bosanski Samac. Lorsqu'il
5 était devenu nécessaire, Jovica Stanisic est personnellement intervenu pour
6 avoir l'un des auteurs principaux libérer un homme qui s'appelait Crni, et
7 a été libéré afin qu'il puisse retourner à Samac pour continuer la
8 commission de ses crimes.
9 Est-ce que Crni et Stanisic partageaient la même intention ?
10 Probablement. Mais même en l'absence de preuve qu'ils ont partagé la même
11 intention, M. Stanisic et M. Simatovic partagent la responsabilité pour les
12 crimes qu'ils ont commis si la Chambre conclut que Crni avait servi comme
13 un instrument dans une entreprise criminelle commune, dans le but de
14 commettre, de mettre à bien son objectif.
15 L'Accusation sous-tend que M. Stanisic et M. Simatovic sont
16 responsables pour les crimes qui sont décrits de plusieurs façons dans
17 l'acte d'accusation et dans les déclarations liminaires. Nous ne soutenons
18 pas que chaque crime se base seulement sur un mode de participation eu
19 égard à la taille des unités spéciales et à l'éventail des activités de
20 Stanisic et de Simatovic. Il arrive très souvent que leur implication dans
21 ces crimes puisse être envisagée de plus d'une façon.
22 L'acte d'accusation allègue également que les deux accusés ont
23 planifié des crimes reprochés. La planification d'un crime sous-estime que
24 l'une ou plusieurs personnes doivent envisager la commission de crime
25 lorsqu'il s'agit de deux phases, la préparation et l'exécution.
26 Mais l'Accusation sous-tend que Stanisic et Simatovic avaient établi
27 26 camps de formation, ils avaient fourni les instructeurs, et ils avaient
28 donné les armes et ils avaient fourni également l'équipement logistique aux
Page 1068
1 auteurs directs des crimes commis. Ceci est une preuve grâce à laquelle la
2 Chambre pourrait conclure qu'ils ont participé à la planification de ces
3 actes, tels qu'ils existent dans la jurisprudence de ce Tribunal.
4 Vous vous rappelez à la diapositive numéro 4 [comme interprété] de la
5 Krajina, un homme qui s'appelle Miljovic parle de certaines choses qui se
6 déroulent "conformément au plan."
7 Vous vous rappelez également ce qu'a dit Vojislav Seselj lorsqu'il
8 identifiait M. Simatovic comme étant l'éminence grise derrière le plan de
9 la prise de Zvornik.
10 Ordonner. Le fait d'ordonner. Conformément à la jurisprudence de ce
11 Tribunal, ceci concerne une personne ayant une position d'autorité se
12 servant de cette position pour persuader une autre personne pour commettre
13 un crime conformément au statut. L'ordre peut être donné de façon explicite
14 ou implicite, mais peut être prouvé grâce aux éléments de preuve
15 circonstanciels.
16 L'Accusation sous-tend que les éléments de preuve permettront à la Chambre
17 de conclure que Jovica Stanisic et Franko Simatovic ont envoyé Arkan dans
18 plusieurs municipalités figurant dans l'acte d'accusation où il avait
19 commis des crimes. Même s'ils ne lui ont pas dit directement de commettre
20 ces crimes de meurtre et de persécution dans le contexte de leurs
21 connaissances, sachant que partout où il allait il commettait ces crimes,
22 la seule conclusion que nous pouvons tirer est qu'ils l'ont dirigé vers un
23 endroit particulier où vivait une population non-serbe et que ceci en fait
24 présentait un ordre implicite visant à commettre des crimes à cet endroit-
25 là, des persécution à cet endroit-là.
26 Je ne vais pas parler d'aider et encourager à commettre tout ce que
27 l'Accusation attribue à Stanisic et à Simatovic, et qu'ils pourraient avoir
28 participé dans ce que l'on appelle aider à commettre. A la fin de la
Page 1069
1 présentation des éléments à charge il deviendra très clair qu'ils sont
2 responsables des crimes, des charges allégués contre eux.
3 Dans l'acte d'accusation, l'Accusation sous-tend que les accusés ont
4 commis ces crimes par leurs actes et leurs omissions. Je souhaiterais
5 maintenant vous parler, prendre quelques minutes pour parler de ceci.
6 Le mot "omission" en fait a deux mots distincts conformément à la
7 jurisprudence du Tribunal. L'un des emplois du terme "omission" est une
8 forme de responsabilité pénale, et l'autre, c'est une description qui
9 décrit une situation factuelle de laquelle des conclusions peuvent être
10 tirées. L'omission en tant que terme juridique de responsabilité pénale
11 implique une situation selon laquelle un accusé a une obligation légale
12 envers une victime, par exemple une obligation légale de protéger.
13 L'Accusation ne sous-tend pas que Stanisic ou Simatovic avaient une
14 obligation concrète, légale de s'assurer du bien-être des victimes de
15 crimes en Croatie et en Bosnie.
16 L'omission, si l'on parle de l'omission en tant que détermination factuelle
17 de laquelle les conclusions peuvent être tirées, c'est de la façon dont
18 l'Accusation se sert de ce mot. Par exemple, si tout au long de cette
19 affaire en l'espèce, la Chambre estime que si malgré que le fait d'avoir
20 reçu des informations sur les crimes qui avaient été commis en tant que
21 résultat de leur contribution à l'entreprise criminelle commune, et que si
22 sachant ceci ils n'ont pas pris les mesures nécessaires telles que donner
23 l'instruction aux membres des unités de la DB de s'abstenir de commettre
24 des actes pénales, ceci veut dire que c'est un encouragement. Ils ont donné
25 un soutien matériel aux auteurs directs du crime, car les auteurs de ces
26 crimes ont été encouragés par l'absence de toutes mesures correctionnelles
27 prises par Simatovic ou Stanisic.
28 Vous avez vu Arkan déclarer ouvertement à Belgrade qu'il tue les
Page 1070
1 prisonniers. Vous entendrez d'autres éléments de preuve selon lesquels il
2 dira que lui et ses hommes étaient des réguliers de Belgrade, ils se
3 déplaçaient de façon très ouvertement, ils avaient un uniforme, ils
4 portaient des armes militaires, très souvent à bord de véhicules sur
5 lesquels des Tigres avaient été dessinés.
6 C'est leur capacité de se déplacer librement à Belgrade sous le nez
7 de Stanisic, qui avait une responsabilité juridique, si vous vous rappelez
8 dans la diapositive numéro 7, sa responsabilité était également de
9 contrôler les groupes extrémistes. Le fait que Stanisic a omis de prendre
10 des actions contre lui a permis à Arkan de commettre ces crimes, l'a
11 encouragé à commettre ces crimes, outre le fait de l'avoir soutenu de façon
12 concrète.
13 Monsieur le Président, ceci met fin au résumé des éléments de preuve que
14 présentera l'Accusation, et ceci vous donne un survol des crimes qui sont
15 reprochés à M. Jovica Stanisic et Franko Simatovic, et selon lesquels nous
16 estimons qu'ils sont pénalement responsables pour les crimes commis. Je
17 suis tout à fait persuadé que cette Chambre pourra, à la présentation des
18 moyens à charge, nous sommes persuadés que vous allez pouvoir en arriver à
19 un jugement juste.
20 Donc ayant dit ceci, l'Accusation est prête à présenter ses éléments à
21 charge.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Groome. La Chambre
23 vous a écouté. Nous allons maintenant commencer la phase selon laquelle
24 nous entendons les témoins. Nous pouvons maintenant entendre notre premier
25 témoin.
26 M. GROOME : [interprétation] Avant que le premier témoin ne soit appelé, je
27 souhaiterais soulever quelques questions administratives.
28 Dans le cours des déclarations liminaires, nous avons fait référence
Page 1071
1 aux diapositives, mais si l'on examine le compte rendu d'audience, on ne
2 saura pas ce qui a été sur les diapositives, et si on n'a pas lu le tout,
3 donc je demanderais que les exemplaires de ces diapositives -- qu'une copie
4 soit présentée, je ne demande pas que l'on accepte au dossier ces
5 diapositives, mais simplement qu'ils soient marqués pour identification.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
7 M. GROOME : [interprétation] Je pense qu'il est également important que
8 nous consignions au compte rendu que M. Stanisic --
9 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
10 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, M. Stanisic n'est pas
11 présent. Je crois qu'il n'était pas non plus dans la salle de
12 visioconférence, et en général les Juges de la Chambre consignent ainsi
13 l'absence du quartier pénitentiaire, peut-être qu'il serait prudent en fait
14 d'enquêter là-dessus et de savoir s'il est trop malade ou pas, ou en tout
15 cas peut-être pour les besoins du compte rendu clairement indiquer qu'il
16 n'était pas présent pendant les déclarations liminaires de l'Accusation.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Knoops.
18 M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, maintenant que la
19 position de la Défense de M. Stanisic -- en fait, puisque nous sommes les
20 gardiens de sa position au plan juridique mais que cette position est
21 quelque peu diminuée, je souhaite évoquer le droit de M. Stanisic
22 conformément à l'article 84 bis, et qu'à la lumière des éléments médicaux
23 présentés et de la notification d'aujourd'hui au quartier pénitentiaire, je
24 crois que sans vérifier cette information il serait contraire aux droits de
25 l'accusé d'entendre le premier témoin aujourd'hui, et j'invoque l'article
26 84 bis.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous êtes son avocat. Est-ce
28 qu'il souhaite faire une déclaration, oui ou non ?
Page 1072
1 M. KNOOPS : [interprétation] Nous n'avons pas d'instructions à cet égard.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourquoi n'avez-vous pas
3 d'instruction ? Ne faites pas perdre mon temps.
4 Si vous pensez que je vais accepter ceci, vous vous trompez. Pourquoi
5 dites-vous que vous êtes le gardien des intérêts de l'accusé ?
6 M. KNOOPS : [interprétation] Monsieur le Président, écoutez. Si vous lisez
7 les requêtes que nous avons déposées et dont la Chambre d'appel est saisie,
8 je peux vous dire que notre fonction actuelle est quelque peu diminuée.
9 Nous sommes les gardiens de ses droits. Nous n'avons pas d'instructions de
10 notre client. Il est juste de dire --
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En ce qui me concerne, vous êtes
12 encore conseil jusqu'à ce que cette question que vous avez soulevée soit
13 tranchée, à moins que vous ne puissiez me dire que l'accusé souhaite faire
14 une déclaration, je vais poursuivre en me fondant sur le fait qu'il ne
15 souhaite pas faire de déclaration. Car c'est quelque chose dont vous auriez
16 dû vous enquérir avant de venir ici aujourd'hui.
17 Si vous n'avez pas d'autres arguments à présenter nous allons
18 poursuivre.
19 M. KNOOPS : [interprétation] Mon argument consiste à dire que l'accusé
20 n'est pas en mesure de savoir s'il peut faire une déclaration ou pas.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons déjà parlé de tout cela,
22 et je ne vais pas reparler de tout cela maintenant.
23 Monsieur Groome.
24 M. GROOME : [interprétation] Pour ce qui est du B-299, nous avons soumis
25 une demande. Nous n'avons pas de décision encore, et nous avons préparé ce
26 témoin pour sa déposition.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, nous nous sommes
28 penchés sur cela. Je vais rendre une décision. Tout d'abord, je vais
Page 1073
1 m'enquêter auprès de représentant de la greffe, je souhaite savoir quelle
2 est la position de l'accusé, est-ce qu'il suit la procédure par le biais
3 d'une visioconférence au quartier pénitentiaire ?
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, l'accusé n'est
5 pas présent. Il n'est pas dans cette salle de visioconférence.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre rend donc sa décision sur
7 la demande faite par l'Accusation s'agissant du Témoin B-299.
8 Le 18 juin, la Chambre a été saisie d'une requête aux fins d'admettre
9 conformément à l'article 92 ter du compte rendu de la déposition du Témoin
10 B-299 dans l'affaire Martic et les pièces qui ont été admises au cours de
11 sa déposition. Le Témoin B-299 a travaillé au sein de la DB. La Chambre a
12 analysé sa déposition avec beaucoup de soin et les éléments qui ont été
13 présentés par le Témoin B-299 dans l'affaire Martic et estime que la valeur
14 probante est suffisamment pertinente pour l'affaire qui nous concerne
15 aujourd'hui. Le cumul de déclaration de culpabilité et des autres témoins
16 viva voce, la déposition du Témoin 92 ter, l'Accusation a indiqué qu'elle
17 allait présenter tout ceci au cours du procès.
18 Après avoir analysé les arguments présentés par les parties, la Chambre
19 admet la requête et fait droit à la requête de l'Accusation. La Chambre est
20 également saisie d'une requête de l'Accusation aux fins de continuer à
21 bénéficier de mesures de protection qui ont été accordées dans d'autres
22 procès au Témoin B-299. L'Accusation dans sa requête a demandé que ces
23 mesures de protection soient encore accordées à ce témoin, mesures qui ont
24 été accordées dans d'autres procès.
25 La Défense n'a pas répondu à cette requête.
26 En vertu de l'article 75(f)(i), qui stipule que les mesures de protection
27 qui ont été accordées dans des procès précédents devant ce Tribunal peuvent
28 encore être accordées et avoir un effet mutatis mutandis dans d'autres
Page 1074
1 procès devant le Tribunal à moins qu'il n'y ait eu annulation, modification
2 conformément à des procédures citées dans ce règlement.
3 Aucune demande n'a été faite aux fins d'annuler ces dernières, de les
4 amender ou de les modifier de quelque manière que ce soit, donc les mesures
5 de protection, ces mesures continueront à s'appliquer. Les mesures en
6 question sont un pseudonyme, distorsion des traits du visage et de la voix.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Jovanovic.
8 M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A ce stade,
9 je ne souhaite pas contester la décision que vous avez prise, mais si la
10 décision que prend la Chambre se fonde sur la croyance (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vois Me Docherty, il souhaite
18 prendre la parole.
19 M. DOCHERTY : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, je
20 souhaite entendre ce témoin, et c'est un témoin protégé et si nous allons
21 passer du temps sur le travail de ce témoin, et ce, de façon détaillée, je
22 demande à passer à huis clos partiel. Je ne veux pas empêcher Me Jovanovic
23 de présenter son argument, c'est simplement le cadre dans lequel il
24 présente cet argument. Et je demande également l'expurgation des lignes 19
25 à 25 à la page 78 du compte rendu qui se trouve sur nos écrans.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait, nous allons
27 procéder à cette expurgation.
28 Maître Jovanovic.
Page 1075
1 M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'avais
2 pas l'intention de divulguer l'identité du témoin qui est sur le point de
3 venir témoigner. Je pensais simplement que je devrais signaler que si c'est
4 sur les raisons pour lesquelles la déposition pouvait être admise en vertu
5 de l'article 92 ter, qu'il y a une erreur d'interprétation dans ce cas.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Nous avons entendu vos
7 arguments.
8 M. GROOME : [interprétation] Merci. Une dernière question eu égard au
9 Témoin B-299, hier la Chambre a rendu une ordonnance et a indiqué que
10 l'interrogatoire des témoins 92 ter ne devait pas durer plus de 30 minutes.
11 Nous n'avons donc pas entendu la décision de la Chambre concernant le 92
12 ter, M. Docherty a préparé ce témoin et ne savait pas que ce temps était
13 limité en vertu du 92 ter. Je demande à ce que l'on puisse l'interroger
14 pendant deux heures pendant l'interrogatoire principal parce que ceci avait
15 été décidé avant que la Chambre ne rende sa décision. Je vais essayer de
16 rattraper le temps et peut-être de réduire le temps d'autres témoins qui
17 vont témoigner sur des questions similaires et pour essayer de réduire le
18 temps de la déposition de façon à pouvoir rattraper le temps d'aujourd'hui.
19 Je vous remercie de pouvoir procéder avec ce témoin-ci aujourd'hui avec le
20 temps qui nous a été imparti dès le départ, et nous avons compris hier ce
21 que vous avez dit et en fait ce qui nous a été proposé au départ ce sont
22 ces deux heures pour l'interrogatoire principal.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que je souhaiterais vraiment dire
25 c'est que deux heures pour un témoin 92 ter, c'est vraiment beaucoup trop,
26 beaucoup trop long. Et donc, je tiens compte de la question que vous avez
27 soulevée, à savoir que vous n'étiez pas au courant de la décision que nous
28 étions sur le point de rendre et qu'il faut que vous puissiez faire tout
Page 1076
1 votre possible pour contenir l'interrogatoire principal de ces témoins,
2 cela ne devrait pas durer plus d'une demi-heure.
3 Et compte tenu des circonstances, je vais vous autoriser à dépasser la
4 limite des 30 minutes, et peut-être que vous pouvez l'entendre jusqu'à la
5 fin de la journée d'audience d'aujourd'hui.
6 Je vais me renseigner auprès de la greffière d'audience, je vais voir si
7 nous pouvons siéger sans pause. Nous avons maintenant une heure et demie.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il faudra faire une pause de 15 minutes
9 pour des raisons techniques.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il nous faudra faire une pause de 15
11 minutes pour permettre à la régie de mettre en place l'équipement
12 nécessaire. Donc nous allons faire cette pause maintenant.
13 --- L'audience est suspendue à 17 heures 25.
14 --- L'audience est reprise à 17 heures 45.
15 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez demander au témoin de faire
17 la déclaration.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
19 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
20 LE TÉMOIN: TÉMOIN B-299 [Assermenté]
21 [Le témoin répond par l'interprète]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Monsieur
23 Docherty.
24 Interrogatoire principal par M. Docherty :
25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
26 R. Bonjour.
27 M. DOCHERTY : [interprétation] Puis-je demander à Mme l'Huissière de
28 prendre cette feuille sur laquelle se trouve le pseudonyme du témoin, s'il
Page 1077
1 vous plaît.
2 Q. Monsieur le Témoin, Mme l'Huissière vient de vous remettre ce qui est
3 communément appelé une feuille sur laquelle se trouve votre pseudonyme.
4 Est-ce que vos nom, prénom et date de naissance sont consignés de façon
5 correcte sur cette feuille de papier ?
6 R. Oui.
7 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que Mme l'Huissière peut montrer
8 cette feuille au conseil de la Défense ainsi qu'aux Juges de la Chambre,
9 après quoi je demande le versement au dossier de cette feuille sur laquelle
10 se trouve le pseudonyme, et ce, sous pli scellé.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document est admis.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce numéro P2, sous pli
13 scellé.
14 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vous demande de bien vouloir passer à
15 huis clos partiel pendant quelques minutes, je souhaite en fait parler des
16 éléments détaillés et personnels concernant le témoin.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
19 Messieurs les Juges.
20 [Audience à huis clos partiel]
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 1078
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Page 1078 expurgée. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 1079
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 [Audience publique]
10 M. DOCHERTY : [interprétation]
11 Q. Monsieur le Témoin, en avril de l'année 1991, avez-vous été envoyé en
12 Krajina, est-ce que vos services vous ont envoyé là-bas ?
13 R. Cela s'est passé en mai 1991 et cela est vrai. Mais cela est arrivé au
14 mois de mai 1991.
15 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander à Mme l'Huissière
16 d'afficher à l'écran la carte numéro 10 qui se trouve dans le carnet de
17 cartes. Ce sont des fichiers assez importants et il faut un certain temps
18 pour les télécharger.
19 Q. En attendant, pourriez-vous nous expliquer quelle était votre mission
20 en Krajina, que faisiez-vous à cet endroit-là ?
21 R. Puisqu'il y avait des troubles en Croatie entre les Serbes et les
22 Croates qui habitaient dans cette région-là, le gouvernement de la RSFY et
23 le gouvernement de Croatie ont signé une trêve pour que les conditions de
24 vie normale reviennent. Donc il fallait nommer quelqu'un qui puisse
25 s'assurer qu'on respecte la trêve, il fallait maintenir le cessez-le-feu
26 sur le terrain. C'est la raison sans doute pour laquelle le gouvernement et
27 la présidence de la RSFY ont décidé que le ministère de l'Intérieur, le
28 ministère fédéral, nous étions les mieux placés pour faire respecter la
Page 1080
1 paix sur le terrain et pour surveiller et contrôler tout ceci.
2 Q. Vous aviez combien de personnes dans votre équipe ?
3 R. D'après la décision prise par le gouvernement, il y avait trois équipes
4 qui ont été envoyées dans les zones de crise dans la République de Croatie.
5 Le premier groupe a été envoyé à Sibenik, le second à Gospic et le
6 troisième à Plitvice. On a jugé qu'il s'agissait de régions en crise et il
7 y avait une forte concentration de personnes serbes. C'étaient des régions
8 majoritairement serbes et de l'autre côté il y avait des Croates dont
9 c'était l'Etat.
10 Le premier groupe qui est parti à Sibenik était un groupe composé de sept à
11 huit personnes, de membres auxiliaires et de spécialistes qui étaient à
12 notre disposition pour assurer notre protection et notre sécurité.
13 Est-ce que vous souhaitez que je nomme ces personnes ? Avec votre
14 autorisation, je peux vous donner leurs noms ainsi que leurs fonctions
15 respectives puisqu'ils avaient pour but de faire respecter le cessez-le-
16 feu.
17 Q. Non, je n'ai pas besoin que vous me donnez leurs noms. Mais d'après
18 votre réponse, je dois comprendre, n'est-ce pas, que vous faisiez partie de
19 l'équipe qui s'est rendue à Sibenik, c'est cela ?
20 R. Oui.
21 Q. La carte se trouve maintenant affichée à l'écran que vous avez devant
22 vous. Est-ce que vous voyez la carte ?
23 R. Oui.
24 Q. Avec l'aide de quelqu'un dans le prétoire, je vais vous demander
25 d'apporter certaines annotations sur cette carte. Je souhaite tout d'abord
26 que vous inscriviez votre numéro en tant que témoin. Je souhaite que vous
27 mettiez cela en bas à droite de la carte, B-299 et la date.
28 R. Ici, vous voulez dire ?
Page 1081
1 Q. Ça, c'est parfait. Est-ce que vous pourriez dater la carte ?
2 R. Quelle est la date d'aujourd'hui ?
3 Q. Aujourd'hui nous sommes le 29 avril.
4 Sur cette carte, voyez-vous l'endroit que vous avez appelé à Krajina, qui
5 se trouve en Croatie ?
6 R. Oui, tout à fait.
7 Q. Pourriez-vous entourer la Krajina d'un cercle et y apposer la lettre K
8 pour Krajina ?
9 R. Oui, tout à fait. C'est à peu près à cet endroit-là. Je ne peux pas
10 vraiment dessiner une carte à proprement parler, mais ça couvrirait cette
11 région.
12 Q. Pouvez-vous apposer la lettre K, s'il vous plaît, à côté, comme ça nous
13 savons de quoi nous parlons.
14 R. Oui, bien sûr.
15 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, cette carte annotée
16 peut-elle être versée au dossier, s'il vous plaît ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P3.
19 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander maintenant que l'on affiche
20 la deuxième carte qui se trouve dans cet ensemble de cartes.
21 Q. En attendant le téléchargement de cette deuxième carte, je vais vous
22 demander si vous vous êtes rendu de Sibenik à Knin, et si oui, comment vous
23 êtes-vous rendu de Sibenik à Knin, par quel moyen ?
24 R. Je me suis rendu de Sibenik à Knin parce que nous logions à l'hôtel
25 Solaris à Sibenik. De temps en temps, nous nous rendions à Knin, nous
26 prenions la voiture qui était à notre disposition, et nous empruntions la
27 route Sibenik-Drnis-Knin.
28 Q. Voyez-vous la carte maintenant devant vous ?
Page 1082
1 R. Oui, tout à fait, mais j'ai du mal à distinguer ce qui est écrit ici.
2 Les caractères sont assez petits.
3 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que l'on peut agrandir la côte
4 adriatique de la Croatie sur cette carte, à l'ouest de la Bosnie-
5 Herzégovine, s'il vous plaît ?
6 Q. Est-ce que vous voyez mieux maintenant, Monsieur le Témoin ?
7 R. Je dois me rapprocher. Maintenant, je le vois.
8 Q. Comme sur la carte précédente, pourriez-vous marquer votre numéro de
9 témoin B-299, ainsi que la date d'aujourd'hui en bas à droite de cette
10 carte ?
11 R. Est-ce que vous souhaitez avoir la date aussi ?
12 Q. Oui, s'il vous plaît.
13 R. Pardonnez-moi, ça devait être un 4 ici, 4-08.
14 Q. Vous avez cité deux villes, Sibenik et Knin. Est-ce que nous les voyons
15 sur la carte ?
16 R. Oui, tout à fait.
17 Q. Est-ce que vous pouvez entourer Sibenik et Knin d'un cercle, s'il vous
18 plaît ?
19 R. [Le témoin s'exécute]
20 Q. Est-ce que vous pouvez apposer la lettre S à côté de Sibenik, et un K à
21 côté de Knin ?
22 R. [Le témoin s'exécute]
23 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que cette
24 carte annotée peut être versée au dossier, s'il vous plaît ?
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.
26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P4, Messieurs les
27 Juges.
28 M. DOCHERTY : [interprétation]
Page 1083
1 Q. Avant que la carte ne soit affichée à l'écran, nous avons parlé d'un
2 voyage que vous faisiez de Sibenik à Knin. Est-ce qu'à aucun moment lorsque
3 vous avez fait ce trajet entre Sibenik et Knin, vous avez voyagé à bord
4 d'un hélicoptère ? Je pense que vous savez à quel incident je fais
5 référence ici.
6 R. Oui, je suis au courant de cet incident. C'était lors de ma première
7 visite, la première fois que je me suis rendu de Sibenik à Knin.
8 Q. Y avait-il un officier de la navale avec vous à bord de l'hélicoptère ?
9 M. KNOOPS : [interprétation] Je pense qu'il s'agit d'une question
10 directrice.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait. Veuillez reformuler
12 votre phrase, s'il vous plaît.
13 M. DOCHERTY : [interprétation]
14 Q. Qui était avec vous à bord de l'hélicoptère, pour autant qu'il y ait eu
15 quelqu'un d'autre avec vous ?
16 R. En fait, c'était un hélicoptère militaire et sur l'insistance de
17 l'amiral Zec, qui s'est présenté comme étant un officier chargé des
18 questions de sécurité dans la marine, il a proposé que nous prenions cet
19 hélicoptère pour des raisons de sécurité parce que prétendument sur le
20 terrain il y avait beaucoup de tireurs embusqués, donc il a recommandé de
21 prendre cet hélicoptère pour des raisons de sécurité, il a dit que nous
22 devions nous rendre avec lui à bord de cet hélicoptère pour nous rendre à
23 Knin.
24 Q. Lorsque vous êtes arrivés à Knin, est-ce qu'on vous a signalé quelque
25 chose ?
26 R. Près de Knin même, et ça c'est quelque chose que j'ai vu plus tard, il
27 y a une forteresse. Sans doute suite à un ordre donné par l'amiral,
28 l'hélicoptère a survolé la forteresse à deux reprises, ensuite l'amiral a
Page 1084
1 tiré notre attention sur le fait qu'il y avait des unités à Knin qui
2 s'appelaient les Knindzas, et ces unités étaient entraînées par le
3 capitaine Dragan, c'est lui qui formait ces Knindzas.
4 Nous n'avons pas pu poursuivre la conversation, nous souhaitions
5 apprendre davantage sur la question. L'hélicoptère n'était pas tout jeune
6 et on entendait du bruit dans le ciel. Il y avait beaucoup de bruit. Donc
7 nous n'avons pas pu vraiment converser parce qu'on avait du mal à
8 s'entendre.
9 Q. Savez-vous lorsque le terme de "capitaine Dragan" a été utilisé, savez-
10 vous qui cela représentait ? On utilisait ce terme-là pour parler de qui ?
11 Savez-vous de qu'il s'agissait ?
12 R. Non, pas à ce moment-là, mais plus tard nous avons appris davantage sur
13 lui lorsque nous avons rencontré différentes personnes sur le terrain et
14 également en privé plus tard, lorsque je suis rentré. Mais à l'époque, il a
15 dit que c'était un expert en matière de combat, qu'il avait suivi des cours
16 d'entraînement en occident, et qu'il était particulièrement spécialisé dans
17 les actions terroristes, antiterroristes et qu'il s'occupait de la
18 formation des Knindzas ou plutôt des forces serbes de la région.
19 Q. Comment avez-vous réagi lorsque vous avez entendu qu'il y avait des
20 forces serbes dans la région étant donné qu'il s'agissait de la Croatie ?
21 R. Lorsque nous avons été envoyés depuis Belgrade, on nous avait expliqué
22 que là-bas sur le terrain il y avait des unités paramilitaires ou quelque
23 chose comme ça, et c'est ce qu'a dit le général Granicin -- et le ministre,
24 c'est ce qu'il nous a dit. Il nous a dit qu'il y avait des problèmes avec
25 la police de Martic et qu'ils n'étaient pas contrôlés par les forces armées
26 croates et ne reconnaissaient pas le droit croate et qu'ils agissaient en
27 dehors de la loi. Et c'est quelque chose qui, on peut dire, n'était pas
28 convenable parce que ce n'était pas conforme à la législation de l'Etat
Page 1085
1 croate alors que la législation par ailleurs était en vigueur.
2 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir maintenant le
3 document 65 ter numéro 1269, s'il vous plaît ?
4 Q. Monsieur le Témoin, je vous demande de bien vouloir lire le titre de ce
5 document, s'il vous plaît.
6 M. KNOOPS : [interprétation] Je soulève une objection, Monsieur le
7 Président, à ce stade parce qu'aucun fondement n'a été posé qui permettrait
8 de présenter ce document et nous ne savons pas si le témoin est l'auteur de
9 ce document. On ne sait pas si ceci fait partie des connaissances
10 personnelles qu'il a et on ne sait pas si le document a une quelconque
11 pertinence eu égard à cette affaire.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez nous dire quel est le
13 fondement de tout ceci ?
14 M. DOCHERTY : [interprétation] Ce document vient de s'afficher à l'écran et
15 j'étais sur le point de poser la première question sur ce point.
16 Q. Monsieur le Témoin, de quel type de document s'agit-il ? D'après vous
17 de quel type de document s'agit-il ?
18 M. KNOOPS : [interprétation] Est-ce que cette question est une question qui
19 inciterait le témoin à se livrer à des conjectures ? Est-ce que
20 l'Accusation --
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Attendons d'abord ce que le témoin a
22 à dire, ensuite on va vous dire si c'est une question de conjecture.
23 Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît, Témoin ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce document, nous constatons, comme
25 nous le dit le titre, que c'est une proposition qui vise à mettre en place
26 un centre de formation et d'entraînement et de transférer l'état-major de
27 la Défense territoriale à la forteresse de Knin.
28 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pouvons, s'il vous plaît,
Page 1086
1 faire descendre le texte.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Si je dois comparer avec ce que j'ai vu sur le
3 terrain lorsque l'hélicoptère a survolé la forteresse et ce document, c'est
4 vrai qu'il y a concordance. Il y avait effectivement des camps
5 d'entraînement dans la forteresse de Knin.
6 Un policier et des volontaires et ceux qui faisaient partie des forces de
7 réserve de la police ont été emmenés là-bas pour être formés.
8 M. DOCHERTY : [interprétation] Veuillez regarder, s'il vous plaît, le cadre
9 réservé à la signature, je crois qu'il se trouve sur la deuxième page.
10 Q. Est-ce que vous voyez ce cadre réservé à la signature sur ce document ?
11 R. Je ne vois pas de signature ici. Je vois le nom et le prénom du
12 capitaine Dragan.
13 Q. Non. Je ne vous demande pas la signature. Je vous demande de me dire
14 quel est le nom qui se trouve dans le cadre réservé à la signature.
15 R. Oui, ça je le vois, on peut lire le capitaine Dragan Vasiljkovic.
16 Maintenant nous revenons au moment où nous étions sur place, notre groupe
17 cherchait à connaître le vrai nom de famille --
18 Q. Je crois que vous avez anticipé sur ma question suivante. Y a-t-il un
19 quelconque lien entre ce capitaine Dragan et cet homme qui vous a été
20 décrit lorsque vous étiez à bord de l'hélicoptère en train de surveiller la
21 forteresse ce jour-là ?
22 R. C'est précisément ce sur quoi j'allais parler, ce lien. On nous a dit
23 que c'était le capitaine Dragan, nous avons insisté pour en savoir plus et
24 nous voulions en savoir plus sur la part de l'amiral Zec mais plus tard sur
25 le terrain nous n'avons pas pu connaître son véritable nom de famille, et
26 nous avons appris que personne ne pouvait connaître son véritable nom de
27 famille.
28 A un moment donné, nous avons obtenu des éléments d'information et nous
Page 1087
1 avons appris que ce capitaine Dragan est en vérité un surnom et que son
2 vrai nom était Vasiljkovic; mais lorsque nous étions à Knin, nous n'avons
3 jamais pu connaître son véritable nom de famille.
4 Q. Maintenant vous savez que c'est Vasiljkovic, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, tout à fait.
6 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Président, je demande, s'il vous
7 plaît, le versement au dossier de cette pièce 65 ter numéro 1269, ensuite
8 j'aurais des questions à poser sur la teneur de ce document, s'il vous
9 plaît.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sera admis.
11 M. KNOOPS : [interprétation] Nous nous opposons à cette admission, que ce
12 document soit admis.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je l'ai déjà admis, mais je vais
14 entendre votre objection.
15 M. KNOOPS : [interprétation] Tout d'abord, nous n'avons pas
16 d'authentification, nous ne savons pas si ce document émane véritablement
17 de la personne qui répond au nom de capitaine Dragan. Deuxièmement, on ne
18 peut pas au plan juridique admettre que ce document n'a pas d'auteur; on ne
19 sait pas si c'est le témoin qui en est l'auteur et on le fait néanmoins, on
20 présente ce document par le truchement de ce témoin.
21 On fait référence à ce document, on constate qu'il l'a vu depuis
22 l'hélicoptère et c'est ce qui est indiqué dans ce document. On ne sait pas
23 si ça relève des connaissances personnelles qu'il avait.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Entendons, Maître Jovanovic.
25 M. JOVANOVIC : [interprétation] Même objection. Le document n'est pas
26 signé, premier point. Il n'a pas été signé de la main du capitaine Dragan
27 et si on veut établir que c'est l'auteur de ce document.
28 Et sur la partie gauche, on voit, on n'a pas besoin d'être un expert en
Page 1088
1 matière graphologique pour comprendre que le nom de famille que l'on voie
2 ici qui a été inscrit ici, eh bien, les lettres sont tout à fait
3 différentes, ce qui nous porte à croire que le document n'est pas un
4 document authentique. Le témoin fait référence au capitaine Dragan et à son
5 nom de famille, et on voit ici que les lettres ont été taponnées à la
6 machine Vasiljkovic, c'est très différent des lettres qui ont été tapées
7 dans le document où on peut lire capitaine Dragan, ceci dans la version en
8 B/C/S. Ceci se voit à l'œil nu.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez répéter ce dernier point,
10 s'il vous plaît.
11 M. JOVANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le témoin a dit
12 que le document n'était pas signé et qu'au bas de la page, nous voyons le
13 nom du capitaine Dragan Vasiljkovic. Alors ce témoin a fait référence au
14 nom de famille du capitaine Vasiljkovic qu'il a appris par la suite. Mais
15 si vous regardez la version B/C/S il est absolument évident que ce nom de
16 famille "Vasiljkovic" a été écrit avec une machine à écrire différente,
17 vous voyez que les lettres ne sont pas les mêmes, "capitaine Dragan" c'est
18 en caractère gras alors que le nom de famille "Vasiljkovic" c'est écrit
19 dans des lettres différentes. Ça a été tapé à la machine de façon
20 différente. Et on a l'impression que le nom de famille Vasiljkovic a été
21 ajouté en fait à la suite des deux mots, capitaine Dragan, parce que les
22 lettres sont différentes. En plus, elles sont différentes des autres
23 lettres du texte.
24 Etant donné que nous n'avons pas de signature nous ne pouvons pas
25 considérer que ce document est authentique parce qu'il est évident que le
26 nom de famille a été ajouté après au document.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Docherty.
28 M. DOCHERTY : [interprétation] L'objection qui a été avancée, à savoir le
Page 1089
1 témoin n'a pas lui-même signé le document n'est pas très importante. Ce qui
2 est important c'est que le témoin a été en mesure d'identifier le document,
3 ce qui nous a permis de jeter le fondement pour ce document.
4 Dans ce cas, le témoin, je dirais, a témoigné et a indiqué qu'il
5 connaissait la personne dont le nom se trouve dans l'encadré correspondant
6 à la signature et il a remarqué que le nom qui se trouve au bas du document
7 est le même que le nom, dont il a appris par la suite qu'il était le nom de
8 famille du capitaine Dragan.
9 Qui plus est - et peut-être que nous pourrions le demander au
10 Témoin - mais je pense qu'il est tout à fait usuel que les ordres
11 militaires ne soient pas signés avec un stylo à encre. Il y a tout
12 simplement le nom de la personne qui a donné l'ordre qui se trouve en bas
13 du document.
14 Je pense que toutes ces objections pourraient peut-être être prises
15 en considération pour ce qui est du poids à accorder au document, ce ne
16 sont pas des objections qui portent sur la recevabilité du document.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce que vous nous dites, Monsieur
18 Docherty, c'est que le nom que nous voyons ici, le nom de Vasiljkovic a été
19 écrit avec une machine différente ou, en tout cas, est écrit avec des
20 lettres qui sont différentes de celles utilisées pour écrire le capitaine
21 Dragan, alors cela pose un problème d'authenticité ?
22 M. DOCHERTY : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord. C'est un
23 document qui semble avoir été tapé à la machine par opposition à une
24 machine de traitement de texte à laquelle nous sommes tous habitués
25 maintenant. Il faut savoir que très souvent, par exemple, il faut changer
26 le ruban d'une machine à écrire.
27 Moi, je dirais en fait que les caractères, la taille des caractères
28 sont identiques, les caractères eux-mêmes sont identiques. Donc il n'y a
Page 1090
1 pas de modification de taille de caractère et je dirais que c'est le genre
2 de chose qui est très commun lorsqu'il s'agit d'un document tapé à la
3 machine par opposition à un document préparé sur ordinateur et machine de
4 traitement de texte.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si nous devions admettre et recevoir
6 ce document, Monsieur Docherty, quel usage pourrait-on envisager pour ce
7 document ?
8 M. DOCHERTY : [interprétation] La pertinence de ce document est telle qu'il
9 montre qu'il s'agit du capitaine Dragan Vasiljkovic, le témoin a indiqué
10 qu'il était informé qu'il se trouvait dans la zone de la Krajina, et
11 d'ailleurs dans la forteresse de Knin et, en fait, il a rédigé une
12 proposition permettant de porter création d'un centre d'entraînement
13 militaire dans la forteresse de Knin. Ce document est daté du 27 mai 1991.
14 Donc cela corrobore ce que le témoin nous a dit, ce que le témoin a entendu
15 de la part de l'amiral Zec, à savoir lorsqu'il survolait dans l'hélicoptère
16 depuis Sibenik vers Knin la zone au début de sa mission de trêve en mai
17 1991.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Knoops, qu'avez-vous à nous
19 dire à ce sujet ?
20 M. KNOOPS : [interprétation] Le fait est que lorsque l'on se penche sur la
21 teneur générale du document, ce n'est pas quelque chose qui correspond à la
22 connaissance personnelle du témoin. Certes, le témoin a dit qu'il avait
23 observé quelque chose à bord d'un hélicoptère, mais il ne peut pas
24 témoigner à propos de l'exactitude de la teneur du document parce qu'il n'a
25 pas rédigé le document lui-même.
26 Je pense qu'il s'agit d'élément de preuve présenté par le Procureur, c'est
27 le Procureur qui nous dit que cela est courant dans un contexte militaire.
28 Parce que de toute façon nous ne savons même pas s'il s'agit d'un document
Page 1091
1 militaire. Donc je pense que sur la base de ce qu'a dit le témoin, il n'y a
2 absolument aucun fondement, ou très peu de fondement qui nous permettrait
3 d'admettre et de recevoir le document parce qu'outre le problème
4 d'authenticité, les renseignements transmis par le témoin à la Chambre de
5 première instance sont si peu importants qu'ils ne nous permettent pas
6 d'accepter ce document comme représentant ou comme étant le miroir de ce
7 qu'il sait lui personnellement.
8 Si l'Accusation souhaite déterminer que ce que le témoin dit, à savoir
9 qu'il y avait des camps d'entraînement militaires à ce moment-là à Knin, on
10 ne peut pas utiliser le document, car le document ne se fonde pas sur la
11 connaissance personnelle du témoin, et le témoin a tout simplement indiqué
12 qu'il avait vu un camp d'entraînement militaire ou des unités militaires
13 qui subissaient ou suivaient un entraînement.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Au Tribunal, nous avons admis à
15 moult reprises des documents par le truchement de témoins qui n'avaient pas
16 été les signataires des documents en question, n'est-ce pas ?
17 M. KNOOPS : [interprétation] Oui, c'est exact, mais le témoin n'est pas un
18 témoin militaire et pourtant l'Accusation avance qu'il s'agit d'un document
19 qui est rédigé par un militaire, à savoir la personne répondant au nom de
20 capitaine Dragan. Ce qui déjà contredit le concept de recevabilité.
21 Je serais d'accord avec vous s'il s'agissait certes d'un expert militaire
22 ou de quelqu'un qui travaillait dans un contexte militaire.
23 Mais là nous avons quelqu'un qui travaillait pour un service civil.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Jovanovic.
26 M. JOVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Alors, une
27 légère objection. Car le Procureur a dit à propos du document, que les
28 documents où figurent un ordre militaire ne sont pas habituellement signés.
Page 1092
1 Alors que ce document ici est tout simplement une proposition. Donc il ne
2 s'agit pas d'un document qui correspond à un ordre militaire.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas l'admettre et le
4 recevoir. Nous allons l'enregistrer aux fins d'identification et si vous
5 avez plus tard un autre témoin qui pourra parler plus directement de la
6 teneur de cette page, nous envisagerons de recevoir le document et de
7 l'admettre.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation]
9 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que nous pourrions repasser à huis
10 clos partiel.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à nouveau à huis clos
13 partiel.
14 [Audience à huis clos partiel]
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 1093
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 1093-1100 expurgées. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 1101
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaiterais aborder quelques
10 questions concernant l'accusé Stanisic. On nous a dit qu'il ne suit pas les
11 procédures par vidéoconférence.
12 J'aimerais demander à Madame la Greffière de nous confirmer cela.
13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons également reçu le
15 formulaire intitulé "Absence du prétoire due à une maladie," c'est un
16 formulaire pour aujourd'hui, il n'a pas encore été signé par l'accusé. A la
17 page 2 sous l'intitulé "Services médicaux du quartier pénitentiaire des
18 Nations Unies," l'officier adjoint médical a coché la case 2A, confirmant
19 que l'accusé présente des symptômes que l'on peut observer, que l'on peut
20 remarquer, ce sont des symptômes qui ne lui permettent pas de suivre la
21 procédure.
22 A la lumière de la décision rendue par la Chambre de première instance, il
23 apparaît qu'on devrait revoir et modifier la partie de la déclaration de
24 l'officier et maintenant la question qui se pose c'est de savoir s'il se
25 sent trop malade pour suivre et pour prendre part aux procédures par
26 vidéoconférence, nous avons déjà rendu une décision selon laquelle le
27 procès se poursuivra par vidéoconférence.
28 J'aimerais maintenant recueillir des commentaires des parties concernant
Page 1102
1 cette question.
2 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord et je
3 demanderais qu'une modification supplémentaire soit apportée au formulaire.
4 Comme vous l'avez entendu hier au cours du témoignage du Dr Falke, nous
5 avons également un formulaire semblable où on peut également cocher la case
6 qui dit qu'il a des signes que l'on peut observer selon lesquels l'accusé
7 ne peut pas venir dans la salle de vidéoconférence. Quand je lui ai demandé
8 s'il avait vu des signes clairs d'un état de santé malade, il nous avait
9 dit qu'en fait il n'en avait pas vu quand il l'avait examiné.
10 Donc j'aimerais vous proposer qu'un nouveau formulaire soit fait selon
11 lequel on dit qu'on ne peut pas vraiment voir de signes clairs --
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain
13 que j'irais jusque-là car, après tout, ce sont peut-être des questions
14 d'interprétation si un officier médical nous dit qu'il a vu des symptômes
15 apparents et qu'un autre officier médical nous dit qu'il ne les a pas vus,
16 ceci peut porter à confusion.
17 Ce que je propose de faire c'est de demander à la Greffière d'audience
18 d'attirer l'attention du Greffier qui à son tour attirera l'attention du
19 quartier pénitentiaire des Nations Unies sur le fait que la question qui se
20 pose maintenant est de savoir si l'accusé est suffisamment bien, se sent
21 bien, ou est trop malade pour suivre et pour prendre part à la procédure le
22 concernant par le truchement de lien par visioconférence.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je souhaiterais maintenant entendre
25 Me Knoops. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter ?
26 M. KNOOPS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je
27 n'ai pas de commentaires à faire.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci.
Page 1103
1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La Chambre a examiné vos arguments,
3 Monsieur Groome, et croit qu'il y a quelques mérites à apporter à votre
4 proposition, je vais demander donc à Mme la Greffière d'informer le greffe
5 qui à son tour informera le quartier pénitentiaire des Nations Unies que la
6 Chambre souhaite obtenir la chose suivante : lorsqu'il y a une confirmation
7 de symptômes clairs, à ce moment-là ces symptômes devraient être indiqués,
8 les symptômes clairs que l'on peut observer, les symptômes visibles d'un
9 malaise doivent être identifiés sur le formulaire.
10 Dans la case 4A, on peut lire : "J'évalue que le patient a besoin …" Je ne
11 sais pas si c'est un deux, ou un point d'interrogation. Est-ce que
12 quelqu'un pourrait jeter quelque lumière sur la question ?
13 M. GROOME : [interprétation] Lorsque j'ai consulté les formulaires que nous
14 avait donnés le Dr Falke, je crois que c'est un formulaire que l'on utilise
15 depuis la deuxième semaine du mois d'avril. Donc je crois que c'est un
16 point d'interrogation.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, il semble qu'il
18 s'agit d'un point d'interrogation. Oui, effectivement. Voilà. Tous les
19 formulaires sont dotés de ce point d'interrogation.
20 La Chambre de première instance donne l'ordonnance que l'accusé soit suivi
21 pendant qu'il suit les procédures par vidéoconférence, et vous allez le
22 recevoir si vous ne l'avez pas reçu encore, c'est-à-dire vous allez
23 recevoir cette ordonnance si vous n'avez pas encore reçu sur un suivi à
24 l'accusé pendant qu'il est en train de suivre les débats à la salle de
25 vidéoconférence.
26 Avant de lever la séance, je souhaiterais dire que mardi le 6 mai nous
27 siégerons dans la matinée à 9 heures du matin, et également nous siégerons
28 dans la matinée du 7 et du 8 mai.
Page 1104
1 La séance est donc levée, et nous reprendrons nos travaux mardi le 6 --
2 excusez-moi, juste un instant.
3 M. GROOME : [interprétation] Excusez-moi, une question très rapide. Les
4 déclarations que vous nous avez demandé de vous fournir, aimeriez-vous les
5 avoir en version électronique ou sur papier ? Les déclarations de témoins
6 pour la semaine pour les déclarations préalables ?
7 Nous pourrions vous les communiquer soit électroniquement ou sur papier.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Sur papier.
9 Donc, la séance est levée et nous reprendrons nos travaux mardi le 6 mai, 9
10 heures du matin.
11 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 6 mai
12 2008, à 9 heures 00.
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28